7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
1/105
LE CHAMP
THIQUE
. ,
Mci
-
r Denis Mllier, avec la collaboration
" " " " " T R I I Alberto Bondolfi,
Jean-Daniel
Causre,
*
B
"
, a
S l t o we i et Florence Quinche.
, JM,etla
tendresse
E
?acl
^lia-BiKb
d.,
Science sans conscience
7
U^^^/Xu/hetewc on,des histoires
pliera
et
socialistes avant Mon
\
t^^S^JSmasexuel: unplaldoyer
,
hMjthique
et sanctification
\ \ ^ M ^ transferts
d'armements: une question morale
?
E S
P-A
Son*
Ai**
''**
C Boni
U-L'nergie
au quotidien
1
Triischl ni taorerar
la
personne
du vieillard
N,v/btenton,Jwfcelits'embrassent
D.
Bonhotfftr,
a%
iM.Tbtnz, Entrenosmains ienwrjfon
EDcbtay,
B.
Barrct-Kriegel d., Gatre/
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
2/105
, (.(wfcw,,fcest( * V K C aeflrct
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L A JUSTE MMOIRE
TROISIME PARTIE
. . E M T A T
ES DE LA
MEMOIRE
ET DE ^ p r n o N
HISTORIQUE
-
to
prmes de Paul Ricur
169
Jeanne-Marie
G A
. ^
fondame
ntal comme
don.
Ha.s-Chris.oph ASKAN'
R i c w r
:
U
mmoire,
1
histoire,
A propos "
v r e
" 182
l'oubli
207
Listedes
auteurs
Prsentation
du
Fonds Ricur
#
INTRODUCTION
Olivier
Abel
et Sabina Loriga
L'entre thique en histoire :
en excs du politique, par l'inachvement
La conversation entre l'histoire et la philosophie n'a pas toujours t
des plus aises. Aussi bien, les sujets mcomprhension
rciproque
sont nombreux, d'autant que l'histoire comme la philosophie vient au
dbat en ordre dispers, sous des figures et des dmarches diffrentes.
Dans une uvre o Paul Ricur a rencontr l'histoire plusieurs
reprises, et tout particulirement dans
La mmoire, l'histoire, l'oubli',
nous avons finalement adopt une entre en matire d'ordre thique,
par l'ide ou la question d'une juste mmoire, qui nous touche
autant comme historiens que comme philosophes.
Ricur en effet cherchait dsigner cette juste mmoire par excs et
dfaut, entre un trop de mmoire et un trop peu de mmoire. Malheu
reusement, son diagnostic sur les abus de la mmoireat confirm par
le rcent dbat politique, marqu par une lourdeinstrumentlisadon
politique, mdiatique et judiciaire du pass (pour ne citer que le dernier
cas franais, il suffit de penser la discussion sur la colonisation). La
difficult de trouver une juste mmoire (quantitative et qualitative) est
peut-tre l'un des symptmes de la monte rapide de la catgorie de
prsent, mise en lumire par Franois Hartog : comme si, derrire la
frnsie d'histoire qui agite les socits europennes, il n'y avait plus
que du
prsent,
sorte de vaste tendue d'eau qu'agite un incessant
clapot
2
. Mais,
au-del
du contexte historiographique et politique
actuel, la rflexion de Ricur nous
encourage
aussi
nous interroger
1.Paul RICXEUR,
La
mmo*.l'histoire.
W J *
"-
* l S f i f .
2.
Franois HARTOG.
Rgimes d'historicit.
Prsenta* et
expnences
temps.
Fsris,
Le
Seuil,
2003.
http://ha.s-chris.oph/http://ha.s-chris.oph/http://ha.s-chris.oph/7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
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LA JUSTE MMOIRE
10
, i'ufgencedesortirdud lire d une rflexion totale et
sur lanecess"
de |a ml
Castelli-Qattinara,Hans-Christoph
ul UIV1 d
'"n dbat de Paul Ricur avec Giovanni
INTRODUCTION U
certain nombre d es textes ici ru nis avaient fait l'objetdecommu nica
tions ce mom ent-l.
Dans les quatre annes qui ont suivi, avec Enrico Castelli-Gauinara
et Isabelle Ullem-W eit, nousavonspou rsuivi en sminaire
collectif,
l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, la recherche alors
amorce:en explorant des points d'appui dans d'au tres uvres - les
rflexions de Hannah Arendt sur le temps, la culture et l'histoire, par
exemple, ou celles de Siegfried Kracauer sur le temps, l'histoire et les
avant-d ernires ch ose s' -, et en largissant galement ce questionne
ment au moyen d 'au tres su pports, comme le traitement
de
la m moire
de
l'histoire
dans les grands procs politiques :Nuremberg,Eichmann,
Papon.
Dans ces pages, on trouvera galement la trace
remanie
de certains
des exposs donn s d ans le cadre de ces sminaires successifs, jusqu '
ceux qu e nou s faisons actuellement sur l'exprience d e la contempora-
nit et d e l'anachronisme d ans l'tud e d u pass. Car cette exprience
mle en core la question historiographiquedesavoir commentserendre
contemporains des tres du pass ainsi que la question thique de la
comprhension d'autrui.
Ce n'est sans doute pas un hasard si ces tudes croises nous ont
encore conduits dans les parages du rcent Parcoursde la reconnais
sance de Paul
Ricur
6
.C'est
ainsi que le travail de rception et de
relectu re assez libre de La mmoire,l'histoire,
l'oubli
se pou rsuit dans
notre petit groupe. Il ne nous semble pas inutile de rappeler ici les
grandes lignes de cet ouvrage, nos yeux significatives, avant d'en
prsenter notre travail de lecture.
Quelques l ignes d 'appui pour nos questions
Dans u n livre prc dent, au fond galement compos comme un trip
tyque,Temps etrcif,aprs avoir pos le problme de la ralit du
5.
H.
ARENDT,
Between
Pas,
and Future(1954-1968) New
York.
Penguin.19
tr.
ft.
La crise de la culture,Paris, Gallimard, 1972.
S ^ * * " S
before the Lasl(posth.),NewYork, OxfordVttotWj^J:**-
L l
"
s
"""
i
Des avant-dernireschoses,prsentationdeJ.RBVEL,Pans, Sto*2006.
6.PaulRICUR,Parcours de lareconnaissance.Pans, Mwas, ^
7.
PaulRICUR,Tempsetrcit,tome1.
Pans,
U Seuil.{:
T
'
m
g ? J * * ^ ,
configun,thnduten\psdanslercitdefic,ion,PmsM Seml,m4.Tempsetrec,,
tome3.Le temps
racont,Paris,
Le
Seuil,
1985.
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12
L A J U STE M M O I R E
pass
historique (qui n 'est plus mais qu i a t) , et avant d e
ren
He-el
( toute narration totalisante), Pau l
Ricur
avait traitl'h
tke et
la
littrature comme rcits susceptibles de reprsenter
conjoint
ornent
le pass.
D
s'agissait que la fiction (l'imagination) se mette
au
rvicedel'inoubliable
(dans l'horrible ou l' ad mirable) et libre rtros-
-ctivement
certaines possibilits non effectues du pass historique
our que l'historiographie s'gale la mmoire. La littrature tait
ainsi
pour l'histoire une rserve de refigurations possibles du temps.
Jj
faut rappeler
cela,
car l'objection qui a t faite La mmoire,
l'hi
s
.
loirel'oubli de prsenter une vision trop positiviste de la vrit histo
rique comme exactitude factuelle, manque l'articulation avec ce travail
antrieur sur lequel Ricu r ne revient p as : le travail historiographique
s'effectue au travers d'une mise en intrigue narrative qui suppose la
mise
enjeu
de points de vu e narratifs eu x-m mes situ s d ans le temps
et l'histoire. Sans doute
s'achve-t-il,
en cela, dans la tche de l 'cri
ture, savoir l'historiographie proprement dite.
Revenant sur un sujet dj trs travaill, Paul Ricur semblait dans
La
mm oire, l'histoire, l'oubli prendre un malin plaisir montrer la
discontinuit des problmes, les reprendre rebours. Il cherchait
dsormaisdcoupler mthodiquement l 'ima gination et la m moire, la
fiction de ce qui aurait pu tre et la ralit de ce qui a t . A
dcoupler mthodiquement la mmoire, capable de reconnaissance
(c'est bien lui, c'est bien elle ), et l 'histoire qu i ne s au rait trou ver d e
reprsentation heureuse. Ces dissociations s'accomplissaient sur les
trois plans d'une sorte de phnomnologie pluraliste de la mmoire,
d'une pistmologie discontinue d e l 'histoire et d 'u ne herm neu tique
dela condition historique qui cu lmine d ans u ne r flexion d e sty le berg-
soniensu r
l'oubli,
nfaut remarquer cet gard qu e, s i Ricu r avoue
Plus de complicit avec Bergson qu'avec Heidegger, ce n'est pas seu-
cr i tT '
T *
^ '
U rcpr0Cbe
*
d e m i e r d e
l iquider les problmes de
mnrii
n q U e
'
C,< St au COM raii
e
q ue ,
trop aristotlicien pour
s i t t e f i l
P
H
S
*
V u l 8 a i r c
*'
a
Perche prendre appui sur la diver-
tempscosmi^e
temporalit
'
eMre l e
P temps vcu et le simple
quels
K c S r e c h e h ' ? '
1
? "
m o n t r l a
d iversi t d es p lans sur les-
rendue aux tres pas
&
^ ' "
m m o i i e e t d e
l 'histoire, la vrit
Capituler
les autres
et^
T ? "
d e CeS p l a n s n e
P
e u t
r sum e r o u
tension teUe que jamais
ell"
h i s t o r i
1
u e
e ainsi
place dans une
9
u e
k
reproche R i ,? "/
8
'
a c h e v e
-
On peut signaler au passage
_ de
vouloir faire
passer
le
pass
est
INTRODUCTION
13
d'autant plus malvenu qu'il n'en parle, lui, que pour le reprocher
Ernst Nolte, et que tout son livre est d'abord un plaidoyer pour la
mmoire.
L'enchev trement de toutes ces problmatiques n'empche
pas
deux
d 'entre elles de s'imposer, d ans un ordre syntaxique qui reste celui du
livre : Qu'est-ce que la reprsentation du pass ?Et y
a-t-il
une juste
m moire ? Ces deu x lignes, entre un ple pistmologique et un ple
thique, d oivent tre distingues;mais
l'apprentissage
mme deladis
tinction mthodique entre s'informer et juger n'est pas sans horizon
politique et moral. Il ne faut d onc pas non plus que cette question quasi
politique d e
l'abus
d e mmoire ou de
l'abus d'oubli
soit traitespar
ment d e la qu estion primord iale de la reprsentance. Contrairement
ce que des discussions htives et parfois malveillantes ont laiss
entendre, l 'id e d 'u n devoir de mmoire est pour Ricur tout fait
lgitime dans u ne perspectivedejustice*,m ais ce devoir
s'adosse
un
travail dercognitioninaccessible
l'impratif.
Si l'on peut discerner ces deux lignes de lectures dansLa mmoire,
l'histoire, l'oubli, la majeure portant sur le problme de la reprsenta
tion du pass, la mineure portant sur la politique de la juste mmoire,
les travau x rassembl s pou r le prsent ouvrage prennent donc ces deux
lignes en d iagonale : ils tracent une ample variation non tant autour du
livre de Paul Ricur, dont
us
s'cartent parfois beaucoup, qu'autour
des qu estions mmes qu e ce livre indique et
offre
en partage.
O r g a n i sa t i o n de l ' o u v r a g e
Nous avons finalement dcid d'ouvrir ce
volume
J *
conversation de nos d eux textes, qui resserrent a
question
a u t o * d e *
dimension thique, au sens large, du rapporthistorique la m t o o u e .
D'u n ct , la question d e la juste mmoire
rencontre ceUe de
la
ctdto
litdu tmoignage, et de la mise en uvre d'u n
%"?%
civique sur le fond d 'u n horizon de pardonquine sera*m une fusion m
r^onciliation,
mais qui soit une o n ant ipo^u ^ u e U e
la liaison ne peu tse faire :la
" T ? ? * ^ *
m a
X e un
dans le d tail du mtier et de la tche de1historien que
un autre que soi ,Paul
RICUR,La
mmoire,
l
>"*
p.
107et
108.
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6/105
LA JUSTE MMOIRE
14
.j
1afo
i
S
critiqu eet thique vis--visde la vu lnrabilitmme det,
*T r ce qui obUge largir la notion de vrit historique .,
H nouveau inquite et politiquement inquitante.
nTsecondensemble, plus pistmologique, ici encore au senslarge
=mche de manire contraste l'approchepistm ologiquede Ricur
Lue histoire et philosophie, ce sont trois textes qui se dmarqu
em
alement
de la rception
franco-franaise
d eLa mmoire, l'histoire,
/W>/i etde
l'temel
procspistmologiqu e en heid eggerianismeque
les cricistes
des tudes allemandes font
l'hermneutique
franaise,
dans laquelle on a tent d'enfermer Ricur. La configuration que
Giovanni Levidonne cette qu estion de laventhistorique est origi
nale en ce qu'elle tente nouveaux frais de d esserrerl'alternativecom
pliceentre le dogmatisme et le scepticisme rgnants. Enrico Castelli-
Gatdnarareconstruit trs solidementl'arrire-plan bergsonien qui est
un des apports essentiels de La mmoire, l'histoire, l'oubli, et qui
devraitpermettred'ouvrir, ct des chemins heideggeriens, des pas
sages plus
deleuziens. Il marque ainsi une v ritable ou verture
cognitive
entre histoire et philosophieet fait cho aux qu estions antrieu res sur le
rapport
la
mmoire comme tranget. Isabelle
Ul lem-W eit ,
faisant
jouer le dcalage insurmontable de la discussion, cherche lire le
contemporain de ce dbat et de ses enjeux en prenant la rflexion
immanente de Ricur commecelle d 'u n au teur pris en interaction dans
unesituation,entreles gnrations, dans u n travail inc essantd'attesta
tionthico-poUtiqueetdedplacement philosophique.
Le volume setermine par une troisime c onversation, sur les figures
fondamentales de la mmoire et de l'oubli, avec Nietzsche en arrire-
fondJeanne-MarieGagnebin,
spcialiste de W alter B enjamin,
relance le
fonds philosophique moderne du rapport entre histoire et philosophie,
mecu nesensibilitlittraire, voire esthtiqu e, qu i p ermet
d'viter
cer
t e s impasses pistmologiques;elle propose ainsi une vraie potique
mmpesve dela m moire.Hans-ChristophAskani, quant lui grand
non de
i-onH?
6
8
'
mvite
me
approche hermneu tique de la ques-
' ^
l
>dion historique quinous est donn e, avec, en
"faMe. rhistoire. iJ^'T f
0
?
1
?
3
-- "Mmoires du xr sicle.Autour de La
K-panier,p.Nora aKPomi
"
r
*
dans
lequeldes historiens comme
"Ptapardc iremeM
\S^Sf^
la
P * "&lire etcommenterce livre,
fejkf*"* P- K-23,
a i rT iS
i j ^
1
" ^ *
Entre
pistmologieet ontologie
=tscua,ei
>p
.45-51). P-t'-ot (et le paragraphe Rponse
INTRODUCTION
15
contrepoint, une mditation thologique
d'une
particulire densit
interrogative.
Nous tenons
remercier tout particulirement
Isabelle
Ullem-W eit
nour le travail minutieux qu'elle
a
fait su r
ces
textes et
surl'ensemble
nour en prparer la publication, ainsi
que le Fonds
Ricur
etl'Ecole
des Hau tes Etud es en Sciences Sociales pour
l'accueil
offert
nos
tra
vaux.
Paul Ricu r, qui avait accept le principe de rdiger une prface
cet ensemble, est mort en 2005 :
c'est
en reconnaissance de ce qu'il
nou s a offert qu e nou s laissons ce recueil inachev.
" = -
cre pour * ^ & 3 ^ ^ J ^ H
theaue de travail
et
des~**X* F ^ T S t S U
donner,
deson
vivant,
la
.
U
c o lloque
de dcembre2000.bn
naissance de ce
K . *
aura
d
c
fi
7"
vo U
V
deprsentation,reproduite lafinde ce vot
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
7/105
Premire partie
LA D IMENSION THIQUE
DU R A PPO R T LA MMO IR E
EN PHILOSOPHIE ET EN HISTOIRE
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
8/105
L ' I N D P A S S A B L E D E S E N S U S
OlivierAbel
Mon propos dans ces lignes est de dsigner brivement quelques-
unes d es interrogations que La mmoire, l'histoire, l'oublim'a sugg
res,
comme en bordu re de l 'ouvrage
'.
Mon p ropos est cependant aussi
d'en approfondir brivement deux. La premire touchela question de
la crdibilit, qui me semble tre l 'un des thmes les plus profonds du
livre, avec l 'ide que notre poque se caractrise davantage par un
excs d ' incrdul i t et de mfiance que par un excs de crdul i t,
notamment dans le tmoignage de la mmoire. La seconde touche
l ' pilogu e su r le pardon, o certains ont voulu voir le fin mot d'u n sens
ou d 'un sujet chrt ien de l 'histoire
2
. Avant d'en venir cette place
du pardon dans l 'conomie du l ivre, je voudrais mobil iser dans le
thme central de la reprsentation du pass tout ce qui touche au pro
blme d es poli t iques d e la m moire et de l 'oub li , et qui culmine dans
la question de la crdibil i t du tmoin. Au passage j 'essaierai de
replacer La mmoire, l'histoire, l'oubli dans l 'horizon plus large des
aut res t ravaux d e Paul
Ricceur.
L e pa s s r e p r s e n t
Je dirais tout de suite qu'en distinguant le problme cognitif (on se
souvient de quoi, comment ?) du problme pragmatique (qui se sou
vient et pourqu oi ?),
Ricur
reprend un geste ancien chez lui, celui de
la sparation-articulation des registres (smiotique, smantique, her
mneut ique dans La mtaphore vive ; ou smantique, pragmatique,
l.Paul
RICUR,
La mmoire,
l'histoire,
l'oubli,
Paris, Le Seuil, 2000,
p .I(cit
2.
Comme silechrtienconnaissaitle sens de
l'histoire,
et
< ^
*%"*'
chrtien ou
pas,
pouvait se placer enpositionde dire ce qu est lesujet cnreuen.
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
9/105
LA
JUSTE MMOIRE
. . dansSoi-mme comme un autre '). Au pou voi r
n
arwiologiq
e
.
u
r,,Lter
des ac t ons, s 'a joute
ici
c e l u i d e
faire
,_. A'aatr.de s __ ip i n i r i
depar'
e
mmoire
7 , v Hes'imP
uter u
" . . " ""r e
er, d
agir.
^ ^
D a n s
ce t te gigantesque varia t ion e idque
r
u d e S e
. t i tue l 'u vre d e
Ricur,
nou s d e vons a ve c l u i
sur le sujetque
renoncerachte,
constitue
u vre d e R i c u r , nou s d e vons a ve c l u i
idem-invariant , et nous intresser aux varia-
- '"s dont l es cart s d s ignent un e ips i t j amai s ent ire -
lions
elles
-
mera
s,:ntr0duit
par l le thme toujours dj la fois pist-
" " " L de la reconnaissance , reconnaissance d 'u n vi sage par
rlvteurd'un t re ou d 'un moment : exp rience ord ina i re ,
exemple,oe * ~
miqueei
lthique4
,t miracle de la rminiscence. Ricur parle significari -
" T
la fin du l ivre d ' un e odysse d e l ' e s pr i t d u pa rd on , e t d e s
Itognitos d u pa rd on
5
, pou r d s i gne r j u s t e m e nt j u s qu e d a ns l e
Ldon ce grand thme de la reconna issance - par ad ox ale ici et n ga
tive, non par liaison d'un sujet son histoire, ses actes, mais par
dliaison.
Dansla reprsentationdu pass, Ricur privi l giera donc les varia
tions
d'chelle,
de points de vue , de genres d e repr s entan ce (au sens
quasi littraire
4
) . D'une part parce que la varia t ion m me fa i t voi r
ce que sinon l 'on ne percevrait pas, dans une vision en quelque sorte
stroscopique qui donne souda in re l ie f une forme j usque - l inaper
ue. D'autre part parce que c 'est l ' cart lu i - m me qu i est reprsentatif
et l 'anomalie langagire normale, comme Ricur l 'avait dj montr
dansLamtaphoreviveet comme i l l e raff i rme san s cess e :
11
faut
revenir
a la mthode bergsonienne de division qui invite se
porter aux extrmes d'un spectre d e ph nom nes avant d e reconstru ire
comme un mixte l 'exprience quotidienne, dont la complexit et la
confusion font obstacle la description
7
.
Parlant
de la reprsentation du pass par l 'histoire, i l cri t :
reprntat"
enCea
f
Sertived e l a
reprsentation historienne en tant que
l'avoirM *?
aut
riserait
de r ien d 'au t re que de la
positivit
d e
_______
*
Vlse
" * * la ngativit du n'tre plus
' .
3-
ftul
RICUE j
^
" Paul RICBJ, MHO"*."S*'">"Mre,Paris, Le Seu il, 1990 (cit S A).
&
6 3 7
^
4 S
e t P
-
6 8
-
-* ,
p.257p .369
8
- " " - . p . 367 .
L'INDPASSABLED1SSENSUS
2
1
De manire t rs vois ine , dans La mtaphore vive,i lpariaitd u
paradoxe indpassable qui s'attache une conception mtaphorique de
vent. Le paradoxe consiste en ceci qu'il n'est pas d'autre faon de
rendre justice la notion d e vrit mtaphorique que d 'inclure la pointe
critique du n'est pas (littralement) dans la vhmence ontologique
du est (mtaphoriquement)
9
.
On touche ici la proximit et la distance entre reprsentation
his torique e t f i c t ion po t iqu e : j us tement parce qu ' i l ne
s'agit
pas de la
mm e absence , il ne peuts'agirexactement d e la mme affirmation, d e
la mme vhmence, de la mme a t tes ta t ion. Nous y reviendrons en
parlant de la co nfiance e t de s formes de la c rd ibi l it .
Pour nous rapprocher maintenant d 'un pas vers not re su je t , nous
devons remarquer que le geste cri t ique de dist inction des registres n'est
pas spar chez Ricur, comme on vient de le voir, de leur rart i
cu la t ion d ans u ne d ia lec tique en qu e lque sorte brise ou plu tt dans un
zigzag sans fin assignable. En ce sens, le problme historique de la
reprsentation est toujours dj aussi un problme polit ique, pragma
t ique e t pra t ique . Pui squ ' i l s'agit de rendre intell igibles les interac
t ions humaines
l 0
, i l ne suffi t pas de mixer l 'ordre externe de leurs
causes e t l 'ord re interne de leu rs ra i sons, i l fau t comprendre comment
leurs l iens et leur histoire sont t isss de discordances autant que de
concordances " , de confl i t s au tant que d 'accords :
Au tant lamacro-histoireest attentive au poids d es contraintes structu
relles exerces sur la longue dure, autant la
micro-histoire
l'est l'ini
tiative et la capacit de ngociation des agents historiques dans les
situations
d'incertitude
13
.
R i c u r r e f u s e c e pe nd a n t qu e rincertitudedevienne son tour une
cat gorie tout expl iquer
13
. C'est pourquoi, aprs avoir reconnu
l'imprvisibilit dans laquelle se meut l 'acteur historique , fidle la
9.Paul
RICUR,Lamtaphorevive,
Paris,Le Seuil,1975, p. 321 (cit MV).
il.ES.aumcuR.Temps
e ,
rcit,
tome 1. Paris, Le Seu il, %**
premire partie sur la mise en intrigue. Cet ouvrage en trois tomes (Pans,LeMUU,
1984-1985), sera cit TR (suivi du numrodetome).
12. MHO.p.237.
des voeux, d es promesses(voirles travauxdeArendtetNietzsche sur lapromesse).
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10/105
LA
JUSTE MMOIRE
. ,. romesse et du pardon,il q u i l i b re l'in
Cer
.
polaritarendtienne* V
r i r r e
parable
et
l ' i r r versibi l i t .
A cet
I
vi
,e sur le diffrend et le conflit , irr-
itionnelle entre des choix, au tra
ductibleune:
* * " " * e u ^ r e un peu)
endroit il passe " "
m p
t ion ratio
f
s
^ ? '
a c t e
u ra d se dbattre, interprter sa situ ation et
sduquelcejnem ^ historiographique d es interprta tionset
icit est ainsi fond sur les diffrend s historiques
i Ricur fait , me semble-t-il , de l 'irrparable
verso
diffrerdes autres.
des rgimes
d'hisH
eux-mmes,c
s e u l e m e n
t pour la reprsentat ion histor ique
"
n e
r a comprhension des acteurs de l 'h isto i re , dont on oubl ie
m
rfl;Vm,'ilsportaient avec eux leurs propres d eu ils, leu rs p ropres irr-
-e ^ p r o p r e s
diffrends surl'irrparable.
C'est un des centres de gravit de La mmoire, l'histoire, l'oubli,
que de tenir avec Michel de Certeau l 'crit historiqu e com me ce qu i
fait place lamort,l'irrvocable
,s
,ce sur qu oi on ne peu t agi r , au
non-maniable selon Heidegger. Face
la
per te ,
la
m m o i r e , i n d i v i
duelle ou collective, fait des embardes,etosci lle en t re let rop d ela
mlancolie qui perd le sens du prsen t, ou le tro p peu del 'exorcisme
facile. Ce n'est pas qu'i l y ait un juste milieu, ma is en se s paran t peu
peu de lammoire, l 'histoire doit trouver pou r les m orts ces gestes de
spulture, de mise au tombeau, qui accom plissent e n d tail l e trav ail d e
mmoire, lequel est aussi un travail de de uil, d 'ac cep tatio n d 'u ne pr
sence purement intrieure de ce qu i n e revien d ra j a m a i s
1 6
.
Si la essemblance, a reconnaissance ou la rminiscence portent sur
une sorte deprsence de l 'absent, l ' abse nce dud e u i l n ' e s tpas
Fabsence de fiction. C'estla grande diffrence deperspec t ive ent re
TempsetrcitetLammoire, l'histoire, l'oubli : ce dernier exerce un
vritable dcouplage de l'imagination
et de la
m m o i r e . R i c u r
ne
S
a
"
f
Va te v a r i a t i o n s
imaginatives par lesquel les, e t
r i e t l lT r
* * *
,
'
his,orien se
figwe le Pass et cherche
M ^ X *
d>
--"figurer l'intrigue,
reprenant
de
absene au'T
?^
q U 1 f o n t l e m i e u
" voir la r al i t passe
qU
"
C h e r c h e
** R ic ur c r it d ' a i l l e u r s delafiction:
V
v
ritablemimsis
moinssoucie
15.MHO,
16-/tat,
|
7
TR3,p.l98ss
18
-MHO.p.2
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
11/105
LA JUSTE MMOIRE
24
l-hisioire.
l'oobli
prsenMtjondupass
I.
d e
classerla narration parmi d 'au tres procd s de
t lanarrativitdela faonqu'ondira,jeveux mettrer,
enreclassaiua' ^
t e n a n l s d e
l'colenarrauviste, et assum
malentendu
selon lequel
l'acte
configurant
qui
carac-
unrrffllente
"~Jim. ifiirs tnalentenou - ' - i - = ;
i->
>~U-JC-
par sesd tracteurs. ^tueraiten tant que tel une alternative
^ n T p r i n c i p a l e r n e n .
causale-
, l 'explication causale historiqu e soit u n bloc d e posi-
LSS e toute intrigue. C'est au contraire qu'el le comporte
uwtirrducuniearoui
1
f
mMim
Kirm
v i s e a i n s i
,__
autant d'interprtation que
la narration. Ricur vise ainsi montrer
.erprtationjoue, mais sur d es registres cri t iques diffrents,
tous lesplans de la recherche des documents jusqula reprsentation
MsKirio^phique. en passant par les d iverseshypothses qui permet
tent de rendre intelligibles les interactions h u main es. E t q u elanarra
tion estu nefigureparmid 'autres de la reprsentation d e l 'absen t .C'est
peut-treque l 'pope, que d'autres racontentden o u s latroisime
personne, doit parfois laisser place
la
t ragdie ,
o le
t moin
et
l'acteurmmes'avancent en personne, qui peuvent dire:j ' y ta i s ,
mmes'ilsn'y sont plus,etpartagerla responsabilitderendre au
pass cequi lui est d.
La justemmoire
Nous avanceronsmaintenant encore d 'u n pas d ans n otre su jet , mme
si
depuis
le dbut nous ne le quittons pas des yeu x. J 'a i pa rl d u pro
blme politique dela juste mmoire, comme d e la l igne non secondaire
mais seconde qu i traverse La mmoire, l'histoire, l'oubli. C'est sur
cette ligne que Ricu r
s'est
jusqu' prsent att ir
le
plus d e lec tures
ennques, propos dela notion de devoir d e m mo ire . Non qu 'i l la
rejette
catgonquement
comme
Todorov. Le devoi r d e m moire a pour
lu. m|Mportance. etrelved 'u n proje t de j us t ice ,impratif s ' i l
s'agit
n o S r
a U t
*
s o i S
- remarquera d'ailleurs qu'il n'ya
K S T
7
6
T"
triee M r e l am m
^
l'oubli,
et
qu' U rcuse
mais mme d a n l k l ^ H
n
"F?*" '
p r 0 p 0 S d e
?***&*
p r
J
e t
Polit ique d e rtablissement d e la paix civile.
22
-MHO,p.236.
a
- M l .p.105-111
2-.t,p.650-656
L'INDPASSABLE DISSENSUS
Pour ma
part,
je remarqueraiau passage qu'il existe pourtant
quelque chose commeundevoir d 'oublier, mentionn au dbut du
texte d e
l'Edit
d e Nantes, qui sort la France
des
gu erres
de
religions ou
dans le serm ent d e ne p as rappeler les malheurs, qui sort Athnesdela
guerre civile . C e sont d eux temps diffrents qui sont dans un ordre
inverse d e ce que l 'on croit : i l y a d 'abord u ntempspour oublier pour
sortir de la logiqu e d e gu erre et de reprsailles ; il y a ensuiteuntemps
pour rouvrirlam moireetformu ler le plu s entirement possible les
malheurs passs pour qu '
ils
ne se
reproduisentpas.
Ceci dit
il
n'y a pas
de socit politique sans prescription, et l'imprescriptible est une
notion mo ins juridiqu e qu ' thiqu e, la tche infinie de nous
rendre
sans
cesse contemporain d e ce qui n'est plus
-
u n
imprescriptible
juridicis
est un leurreou unmensonge.C'est pourquoi, dans une conception
proprement poli t ique, queje distinguerais
d'une
conception mta-
polit ique ou mme antipolit ique propre autragique,jeproposerais
volontiers un plaidoyer modr de l 'amnistie, en dpit de la cri t ique
que l u i adresse Paul Ricur .
Mais ce dernier prfre ici mettre en avant l 'acceptation de la cit
divise, sinon mm e le d issensus civique, un d issensus gnralis . On
y reviendra. D 'o alors cette polmique au sujet du d evoir de mmoire,
au-d el du fait q ue la plup art des d tracteurs n'ont pas lu le l ivre et se
sont borns des allusions?C'estque Ricur exprime une rserve
l 'gard du devoir d e mm oire, lorsqu 'i l est abusivement tendu au-d el
de la sph re qu e nou s venons de d signer : cette rserve tient ladif
ficult de comm and er la mmoire, et au danger
de
mettre en uvre une
politique de la m m oire (au sens o certains rgimes onttentdes poli
t iques d e la langu e) qu i l ' inscrive en termes d 'obligations, de droits et
d ' interd i t s .C'estpou rquo i i l n'y a pas seulement des abus d 'ou bli mais
des abus de mmoire , n
y a
des fausses mmoires, des mmoires en
carton-pte. Et c'est pou rqu o i il prfre parler d'untravailde
m moire , o la mmo ire du malheur, loin d 'assourdir au malheur des
aut res , nousy ou vre
26
. C'est ainsi quelammoire indispensableet
vitale ne court-circuite pas l 'histoire et la distanciation critique, mais
au contraire rouvre son contact des mmoires refoules.
25.
Voir le livre de NicoleLORAUX,
La citi
divise.Paris,
Pavot,1997,p.
256
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
12/105
L A
JUSTE MMOIRE
26
C'est
ici onthme
L'INDPASSABLE DISSENSUS
27
fhrneancienen ^
t e m p S )
contre une hermneutiq
Ue
T-^HuqSe
g
.< l
ueded,r
^autonomie de l'histoire par rapport
l
a
a n t iq u e
ou
" " ' ^ S v i s m e
critique, la dpendance irrductible
mmoire, et
contre
unP-J"
d o u b l e
foyer d'appartenance et dedis-
de
l'histoire
la mmoire
_
s
.
o n
^ ^
m
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
13/105
LA JUSTE MMOIKE
28
unse
Are
aoDui la fois sur
l ' i r r vocabi l i t
d e sfaits
et
Set lesautresP
n
^ ^
se lo
n laquelle l'histoire n est pas finie ;
sur cette
*>**?*.
Et il n 'y a pas d e tiers absolu qui
p e r
.
maisUs le fi'
mettede trancher .
d s s e B S U S
q u
i forme d e sc i toyens capablesd e
Orc'estjustement
e n t d e r n
i e r ,
capables d eteni rl atension
se tenir enrabsence"
m
e n t r
e l ' imputa t ion s ingul i re de la
dans le partage de
T j ,
l e s > e t s o n
imputa t ion pol i t ique
une corn-
faute aux individus v^
c i t o y e n
a p p
a r a t d a n s l er e f us q u e l a culpabi-
munaut consentan ^ ^
q u e t o u s
les au t r es pu issent s e dcharger
l soittellementsiig ^
m i s s a i r e s
. Mais U appara t au ss i dans le
sur quelques P
& s o i e n t
cepoint dilu es, expliques, compa-
rete9
w-Ss nuepersonne ne soit plus responsable de rien". Le
r e S e t
E r e nour prendre sur lui et partager la responsabilit .
c ' X i o i
U me semble important de noter qu' ladiffrence d e
M A
Osiel Ricurne rdu it pas la fonction d u dissensus l'action
X o r u e 'crmoniale
et
d'une
certaine ma nire excep tionnelle des
ands procs
mdiatiss : ce qui l 'intresse, me semble-t-il ,c'est le
dissensus gnralis, un dissensu s ord inaire etqui se d iffuse tous les
plans de la
conflictualit
dmocratique . J ' i ra i j us qu ' di re qu e le poli
tique est ici bord par un plan tragique, ventuellement antipolitique,
qui autorise la plainte, et mme la ve ngean ce et le pard on qu e le poli
tique ne saurait comprend re.
Crdibilit et discordance de s tm oins
Nousallons revenir ce point en repartant de tout fait ailleurs, et ce
sera notre premire longue digression. L'un des problmes principaux
que
rencontre Paul Ricur dans ce livre, et qu e l 'on retrou ve autant sur
leversant majeurdela reprsentation du pass qu e su r celu i, mineur, de
lajuste mmoire(ni trop ni troppeu), est celui d e la cr dibi l i t .U rejoint
36.MHO,
p.
413ss.
37.
Ibii, p.
433.
O owi m f n
am6
,
professeur The University ofIowa College ofLaw
,"?
"."*
a
? notamment publi
un
livre
internationalement trs
remarqu dans le
Colleah, w
ques
"
ons
"P" par
Ricur
dans
MHO : M ark
OSIEL,
Mass
Atrocity,
C ^ S , ^ *
I
~ -
N e w
' y (USA), Transaction Publishers, 1999
& L
.7-C"?
T .
-515 ' publiM ass Atrocity,
Ordmary Evil,
a nd
Hamah
epuis,
^ ^ ^ ^ ^ ^
T O i S ' ' , S f ^
^g'ntim'sDrry'war,
New fav en (USA), Yale
'ymss. 2002 (ote de
l'diteur,
I .U.-W.) .
L'INDP AS S ABLE DIS S ENS US
2 9
pa r
l
l'alternative qui effraye Giovanni Levi, que les hommes croient
pouvoir tout connatre, tout reprsenter , tout dire,
e t
basculent alors
d a n s lescepticisme g nral, soit par impossibili t ,soit,ce qui est Dire
avec le sentimen t qu e n' impo rte qu elle hypothse, si
elle
est assez puis
s a m m e n t q u i p e , p e u t sevr if ier. R icur crit:
Ce
qu i
finalement fait
la
crise
d u
tmoignage,
c'est
que son irruption
jure avec
la
conqute inaugure par Lorenzo Valla dansLa
donation
de
Constantin :ilsag issait alors d e lutter contre la crdu lit et l'imposture-
ils'agitmaintenant de lutter contre l'incrdulit et la volont d'oublier'.
C ' e s t cette remarque que je voudrais mditer dans les l ignes qui sui
vent, parce q u eR i c u r y touche u n point sensible de l a condition
contempora ine , non seu lement la condition historique, mais langagire
e t pol i t ique e n gn ra l . E t j e c rois important d epointer tout ce quis'y
r appor te dans l e l ivre , pa rce qu ej e crois que c 'est une des principales
ques t ions que l e livre nous laisse, une question commune qu' i l ouvre.
D a n s l e passage c i t Ricur par la i t d e s archives. Mais plus large
m e n t
il
s ' a g i t
bien
s r d e la
c r d ibi l it
d e s
tmoignages,
q u i
deman
dent , pa r - de l l a confrontation crit ique, u n minimum d'approbation
mutue l le , l ' accepta t ion qu ' i l pu isse y avoir pour chacun quelque chose
d ' i n d u b i t a b l e : N o u s n ' a v o n s p a sm i e u x q u e l etmoignage,e nder
ni re ana lyse , pour nous assure r q u e que lque chose s 'est p a s s
40
.
C ' e s t l at h s e d efond d u livre.
J e d i sd ' a b o r d a p p r o b a ti o n m u t u e l le ,c ar le tissu d e confiance dans
cette institution
d e s
ins t i t u t ions qu ' es t
la
parole, dans
la
possibilit
d e
parler
e t
d 'agir , est comme nourr i par une confiance mutuelle et fonda
menta le dans l a simple existence les uns des autres.
L'approbation mutuelle exprime
le
partage
d e
l'assertion que chacun
faitd e se spouvoirset de sesnon-pouvoirs,c eque j'appelleattestation
dans Soi-mme comme unautre. Ceque j'attend s de mes proches,
c'est
qu' i ls approuvent
c e q ue
j 'atteste
: qu e je
puis parler, agir, raconter,
m'imputermoi-m me la responsabilit de m es actions [...]A mon tour
j ' inclus parmi m e s proches ceux qu i dsapprouvent mes actions, mais
non mon existence
41
.
39. MHO,p.223.
40.
Ibid.,
p. 182.
4 1 .
OU , p. 162-163.
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
14/105
30
L A
JUSTE MMOIRE
L'INDPASSABLE D1SSENSUS
, .
C
ette attestation mutuelle. Cette confi
anc
J
Le tmoignage suppo ^
c o n t r a i r e
elle1 autorise : on
e
nedsarmepas
I J J P ^
s u r
^
fo
d de confiance. Cettece
peut critiquer
31
e u . ,
q u e
sur u ,.
;
nfiance
peutcritiquervraunenu
j M a i s v ra
imentrem plis : le premier est
est alimente par de u x.
g e s l e
second est leur pluralisme,
i
e
la cohrence
^ *
lais
se r place d 'au t res t m oins " :
fait qu'ilsse poussentpo
i w r les oppositions les plus manifestes qu i distinguent
Avantdesouligner ^
e
,
s o n
^ge
aux archives,ilest permis
l'usage
du tmoignage eommuns
aux deux usages : le souci de
u
^ X a m e f c r i t i q u e
de la crdibilit d es tmoins ".
ii
iuee et l'historien,c'est donc bien sr leur
Ce qui est com mu n^
j ^
^
m a n i e m e n t
r gl du soupon, mais
pratique
de " " rh tor ique commu n, mme si les rgles
aussi1'mstallationdun espa ^ ^
m m e
^ ^
^ " ^ T n
0
^ n
"
e S c t e / l a vrit historique, et l 'histoire,
X r e s X - d r e c h a c u c e
q
u i l u i e s
t
d , n ' e s t p a s u n
tribunal oblig de trancher. _>' v, .'- ,
En ce qui concerne lacrdibitdu t moin, faut porterled oute au
curdutmoin et dutmoignage lui-mm e, si l 'on veu t toucher lesen
timent de certitude indubitable que porte avec eUe
1
exprience de la
reconnaissance du pass :
Cest
sur cet acte queconverge le faisceau de prsomptions de fiabilit
ou de non-fiabilit point sur le souvenir. Peut-tre avons-nous misle
pied sur la mauvaise empreinte, ou avons-nous saisi le mau vais ramier
dans lavolire. Peut-tre avons-nous t victime
d'une
fauss e reconnais
sance, tel celui qui de loin prend u n arbre pour un personna ge connu. Et
pourtant qui pourrait branler, par des soupons adresss du dehors, la
certitude attache aubonheur
d'une
tellereconnaissance, que nous tenons
en notre cur pour indubitable ? Qui peut prtendre n'avoir jamais
fait
confiance
de telles
retrouvailles de la m m oire" ?
42.Jai
dpli ce
d ouble trait dans
Les
tmoins de l'histoire
,
dans H.
BOST et
P.
D E ROBERT
(dir.),
fxm
Bayle,
citoyen du
monde,Paris, H. Champion, 1999,
p .343-
362, en le compltant par une au tre oscillation profonde, issu e
d'uneremarque
de
Maurice Halbwachs : Tout tmoignagedevrait satisfaire ces conditions contradic
toires que le tmoin sont en quelquesorte du groupe lorsqu 'il observe d es faits sen-
S lb
? '^ f
PO"
' rapporter U y
entre.
43.MHO,p.416.
44.
Ibid.,
p.
557.
Ce n'e st pas u n hasard si Ricur commence ce chapitre surl'oubli
et la persistance des traces , et sur le petit miracle de la reconnais-
ance" , par un long dveloppement sur la confiance et la mfiance
dans lespossibilits d e la m moire, qui
s'accompagnent
ets'autorisent
mutuellement sans que
l'une
prenne le pas dfinitif sur l'autre. Non,
Rcurne rduit pas la mmoirelabonnemmoire.
Et mme le thme de la reconnaissance est bord par celui de la
mconnaissance, qui suit ce petit miracle de la mmoire heureuse,
1 ce petit bonheur de la perceptioncomme son ombre,la page
ivante" .
C'est
ici que se greffe le futur
Parcours
de la reconnais-
sous la forme
d'une
enco re brve variationproposdela plura-
rt ds types de reconnaissance, prenant appui sur Platon et les tra-
es grecs, su r K ant et Hu sserl insistant plutt sur la rcognition, et
bien videmment sur Hegel qui place la reconnaissance au cur de sa
rf lectique, la lutte contre la mconnaissance ou pour se faire recon-
I re tant ce quifait avancer les
choses.
Ricur
d'abord
insiste surle
r t au ' il
s'agit
av ec la remm oration d 'expriences
d'une
prsence de
absent
Com men tant B ergson , Deleu ze crit que le paradoxe de la
mmoire estduele pass y est contemporain du prsent qu'i l a t . La
mmoire est
un pass
qui
ne passe pas,
qui est encorel dont
nouspou-
S
nou s rendre contemporains. Cet anachronisme
la
reconnais
s e
c^mme rminiscence, galement cher
Walter
Benjamin, dort
superposer les figu res, tirerune ligne d ^ * temps, et
reconnaissance rapproche d es e x p n e n * * e t d e s l p a i s -
p
r o
u v e l a r s i s t
m
c e d e s m s t a n c e s , d e
S
i n t ^ e ^ ,
d o n t R
.
c o r
seurs traverses. Elle opre
ce
all
^^
twsK
desressem-
parlaitpour la
mtaphore, qui
fait voir
l e se m b l a b l e ^
blances inaccessibles et d es dissemblances ind ites.
^ ^ ^
Et puis il y a une vritable inquitude car u
" '
F
m c o n n a i s s a
n c e ,
sance qui n 'ait se frayer la
voie
au
tta
^
re
)e
_
olda t qu i
revient
de
la
jusqu 'au bout . Celui qui devrai t t re reconnu, le .
45. MHO,p .555.
46.
Ibid.,
p .556-557.
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
15/105
L A
JUSTE MMOIRE
32
I
,
Messie,sera-t-il rejet
par
mgarde
laL
rreUlysse ou
le
Mes .
'est-ce
pas justem ent lui
"^. /dont
le retoure s t a c c l a m ,
o u
.
o u r s
^ ^ . ^
L
r ue ?
Ou
usui .
,
U I J
e s t
acclame u - - .-- -
Celui dont le retour
e
t o u j o u r
s sont possibles.Le d o
ote
pateur?
L'usurp^-J".
. . ^
m o i
, l 'usurpateur
? Et si le
me
bien celuia"""--. . mprise, toujuu *
r
- - " w . ^
a o
S u r ?
L ' ^ ^ e t
S
if ta is , moi , l 'usu rpateur
? Et si le
m o
me
peut
fai*
* * * " L
t
letriomphe
d'un
mensonge
que
plus rien *
L ia reconnaissance euu
r u m s s o n
?
R,
en
n 'est
ni.
eut raire , -,i
e
mompne u - = - -
r
ma
delareconnaissance ^ ^
s)nt
l 'un isson
?
Rien n 'est ph,
conteste parce que ^ ^ j U a t i o n , l o r sq u 'o n c ro i t e nf in
s'tre
prilleuxque les ?
i t v e m e n t
reconnus.
La
reconnaissance vritable
compltementet denn..
s a n s
^mbler
un
p e u .
Je
pense
la
r
igan
ne
s'avance
pas sans
_.. .
b d i / l l i e a s s e z a u e
j
a
^raig .,;
~**we
compieiei"- ^
s a n s
tremoier unp e u .Jepense la figu
ne
s'avance
passans
v ^
jajiqae
a s s e z
que lavraie reconnais-
de Cord lia
d a n s
"
s i n c e r e i
peuttremanque
et
m c o n n ue ,n
i
ui
sance,la
M
* f
tmp
et
e
,
et il
n 'est pas sr que
l'on ne
sortepas
fautalors traverseru
^ ^
0
n
ne
peu t d onc forcer la recon,
foud'avon-manqularec ^ ^ ^ ^ ^ ^ ^ ^ ^ ^
" S * comporte
une
part
de
grce,cela arrive :
il
mente.La reconn
e t u
reconnatre
u
S 2 r S S ^
?-
f ?
Td
orteme
S m d e . n n'est jamais certain, mme quandonl e v e u tdepartet
Vautre
que l'on parvienne transgresser ensemble la solitude,
attester
mutuellement nos existences. Mais qu and cela am ve ,
par je n
attester mutuellement nos existences. Mais quand cela amve, par
je ne
sais quel zigzag,
il y a
toujours l 'm otion
de
l 'altrit traverse. Seule
unereconnaissance qui fait voir son manqu e d 'as su ranc e" peut attester
l'autre qu'il
est
vraiment reconnu.
C'esten
por tant
le
t rouble
de la
non-assurance
que la
reconnaissance peut combattre
le
scep ticisme
l'gard du tmoignage
d'autrui,le
scepticisme
de
croi re
la
reconnais
sance soit garantie soit im pos sible ".
Le d issensushistorique
La confiance est insparable du so up o n , et cet te question
de
confiance
4
'estlie la possibilit effrayante mais incontournable,
non seulementdumensonge, maisdel ' i m p u i ssa n c e tmoigner,
se
faire entend re:
47.
L'aptre
Paul,
somm de
prsenter
des
preuves de sa crdibilit, rpond
en
pro
testant mes lettres de
ecommandation,maisc'estvous
(2 Corinthiens 3).
48.
U passage,rdigpouruneconfrence Tu nis en avril 20 02, auraitmente
ample dveloppement aprs
la
parution de Paul
RicuR,Parcours
de la
reconnu
smee.
Pans,
Stock,
2004
49.MHO,
p.
172.
L'INDP AS S ABLE DISS ENSUS
33
Cequelaconfiancedans la parole d'autrui renforce, ce n'estoas
lement
l'interdpendance
mais
la
similitudeen humanit des S
de
la
communaut.Lchange
des
confiances spcifie
le
lieentre
te
tres semblables. Cela dort
ta
dit
in
fine pour compenser fexc
d'accentuation d u thme
de
ladiffrence dans maintes
thories contem
poraines d elaconstitution d uliensocial.La rciprocitcom te l'insubs-
tituabilit
des
acteurs. L'change rciproque consolide le sentiment
d'exister
au
milieu
d
autres hommes
-
inter hommes
esse-
comme
aime
dire Hannah Arendt. Cetentre-deux ouvre lechamp au dissensus
autant qu'au consensus.Cest mmeledissensusque lacritiquedes
tmoignages potentiellement divergentsvaintrodu ire surlechemindu
tmoignage l'archive.
En
conclusion,
c'estde la
fiabilit,donc
de
l'attestation biographiqu e,
de
chaque tmoin pris un par un que dpend
en dernier ressort
le
niveau moyen d e scu rit langagire
d'une
socit.
Cestsu r ce fond de confiance prsume que se d tache tragiquement
la
solitude des tmoins historiques dont l'exprience extraordinaire
prend
en
dfaut
la
capacit de comprhension moyenne, ordinaire,
B.
est
des tmoins qui
ne
rencontrent jamais l'aud ience capable d e les couter
et de les entendre
50
.
Je pense
que
nous tenons
ici le
point proprement d'angoisse,
qui
tient
en
haleine
et
exige
la
riposte courageu se d e l 'attestation : tmoi
gnerend p itdusent imentquecela n 'estpasentendu.Acelail me
semble qu'i l faudrait ajouter que l'attestation exigeet appellenon
moinslec o ur a g e d ' e n t e n dr e , d ' c o u t e r .Et ilfaut aussique lesaudi
teurs soient crdibles, capablesdereconstruire leur cohrence exis
tent iel le d 'audi teurs en tenant vraiment compte de ce qu ' i l sont
entendu,etcapablesdefaireensorte qu e cette exp rience, loin de les
fermer, les o uv r e la possibi l i t d 'aut res expr iences d ' coute .La
rceptiondu t moignageest unl ment critique aussi importantque
sa fiabilit . Toute la quest ionestd ' a ug m e n te r la facult publique
recevoir vraiment le t moignage. Ce point me semble tout fait
important,
et il me
semble l gi t ime d 'est imer
que
Ricur
le
suggre
implicitement.
Dans l 'angoisse solitaire
que
nous venons
de
pointer,
se
glisse
une
question philosophique tout
fait terrible,
la
qu estion
du
scepticisme,
qu i
est
aussi celle
du
solipsisme.
On se
rapproche
ici de
W ittgenstein,
et
de la
question
du
scepticisme, c 'est--dire
du
retrait d echacundans
sa langue pr ive, d ans
le
do u t e
que
quoi
que ce
soit puisse vraiment
tre connu
ou
c o m m u n i q u .
Il ne
faut pas croire que nous puissionssi
facilement partager
nos
expriences,
et
encore moins
les
imposer aux
50.
MHO,
p.208.
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
16/105
LA
JUSTE MMOIRE
,
souvient pas tout seul , et l 'histoire est
Une
jtonocs&
34
a u
w s .Cependan
uvreplusieu"-
,
miers
souvenirs rencontres sur
ce
chemin
son t ]es
A **" " ' * a v e n i r s communs(ceuxque Casey place sousfe
souvenus p arages,
le
R e t t e n td'affirmerqu en raht nous
dB
e Reminiscing
)
* ^ ^ carte d entre
d e
jeu ,mme
esommes janffls : se u u ^^ ^ ^
d u
.npsjsme
[. . . ] . Au trement dit
on
,
H - . ,
i
a
partie sur l 'extriorit d e la m mo ire selon
C
'
K t J
f u^ chnu ' i n t e r v i e
n
t cette formule. Ricur pou r s u i t
pa r
Maance Halbwacn H ^
J a c o h s i o n d u
souvenir chre
rssW SSL*
par
ri
t
quasi
$
t
e n n eque
ctauemmoire individu elle est unpouvtd e v u e s u r la mmoirecol-
wuve et que cepoint de vue change selon la place qu ej y oc c u pe?.
La crdibilit apparat ds lors comme iridissociablement lie
l'preuve et l 'exercice du dissensus, du sentimentd'une discordance
des
voix. Cette discordance peut tre repre au plan des grands procs
historiques:
Osiels'attache
au
dissensussuscitpar la tenue pu blique d esproces-et
la
fonction ducative exerce par ce dissensus mme au plan de l'opi
nion publique
et de
la mmoire collective qui tout la fois s'exprime
et
se
forme
ce
plan.
La
confiance place dans les bienfaits attendusdune
telle culture
de
la controverse se rattache au credomoral et politique de
l'auteur quant l'instauration
d'une
socit librale, au sens politique
que lesAnglo-Saxons
d onnent au terme libral
53
.
Dnes'agitcependant pas que d e la c rd ibi l i t d es t m oignag es d ans
l'espace juridiqu e
du
procs, mais aussi plu s large men t d e la crd ibili t
(et de l' incrduli t) rciproque d e l 'histoire et d e la m mo ire. On
retrouve cet gard l 'oscil lation classique chez Paul Ricur entre un
Dle
^"rneutique d 'appartenance au monde dj l et un ple cri -
hque dedistance et de pluralisme - avec ce d ou ble rapp ort d 'au to
nome delhistoire critique et comparative par rapport la mmoire, et
- * c e
de
l 'histoire l 'gard de la mmoire de l ' incomparable,
51.
MHO,
p.147-148
S'
M*-P-149et
151.
M-'oui,
p.
424.
L ' I N D P A S S A B L E D I SS E N SU S
35
de ce qui a t e t d emand e t re racont
.
La rhabiv,
mmoire
dans l 'hi s toi re suppose d e trouver un
pointd ' a u m K
n
"*
l a
que l 'excs de c rdul i t dansl'uneentrane le total sceoticiZ : " ^
a
l 'au t re . Au passage on comprend, pour
complter
la
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
17/105
LA
JUSTE MMOIRE
,
t e
si tuation incertaine, d ecettei nqu i t a n t e t r a nge *
confiante de cette s u
m & m t a t q u
e
l 'on parvienne s , souvent
de l 'ordinaire, oau ^ ^ ^
& i c e
c o r i
f j a nc e , s a ns j a m a i s DOUV:.
.andmmesente
tobliger. Rappelor
L ' I N D P A S S A B L E D I SS E NS U S
des proccupations chez moi anciennes
5
preuwuy'"-
1
""' ww mu anciennes" etiesuistri
l'ordinaire,
f ^ ' " 7 ^ ' c o n f i a n c e ,
s a ns j a m a i s p o u v ^ rem a rqu a b lequivoqued a n slaquelle
R i c
M
p l t o l f f l
^ Ma
quand mme f ^ ' i o Z l : N ou s n ' a vo ns pa s m i e u x
q u e
situe bien 1 int r ieur desonl ivrecommequelquechose I ' ^
s'y obUger. R a p p e ^
s e
,
p o u r
n o u s a s s u r e r q u e q u
e l
^
le tmoignage,' ,
a n n r 0
cherais volont iers ce la du
m.
f L T Je rapprochera is volont iers ce la du
mo t
C b
S e
T f o h n L Aust in, dans
Quand dire
c'est
faire-
:
N o t r e
* T S engagement . Comm ent fa i re confian ce au i
an
.
S 'ma i s nous n 'avons pas mieux. Comment ne pas fa i re c rd i t
la capacitdesacteurs , locuteurs , narra teurs or d ina i res exprimer
peu prs ce qu'i ls font et prouvent, et comprendre et vouloir ce
qu 'ils disent ? |
D'o, peut-tre, la place du pa rdo n pou r
arrter 1
inflation d e paroles
inutiles,'recommencer
en faisant fond nouveau sur la possibil i t de
parler. Ici le pardon ne prsente aucu ne conn otation religieu se, mais
appartientdedroit,comme le reproche ou la grati tu d e, la pragm atique
de l 'action et d e la parole :
Lepardon pose une question principiellement distincte de celle qui a
motiv notre entreprise entire, celle de la reprsentation du pass [...]
c'est d'une
part l'nigme
d'une
faute qui paralyserait la pu issance
d'agir
de cet hommecapableque nous sommes ; etc'est,en rpliqu e, celle
de l'venmelle leve de cette incapacit existentielle, que dsigne le
terme de
pardon.Cette double nigme traverse de biais celle d e la repr
sentationdupass".
L'horizon du pardon
Pouvons-nous faire un dernier pas vers no tre su jet sa ns q u e celui -ci ,
se retournant brusquement vers nous, nous renvoie au pied du mur,
nous;
obbgeanl: tout recommencer autrem ent ? N ou s a llons rev enir au
yj?
e
"
repartantcette fois encore
>
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18/105
L A JUSTE MMOIRE
38
fficuenifacile, ni imposable.Il met le sceau d e
r i u
^
pardon dltticue.
L ie nt sur l 'cntrepnseenure .
. ^oit nlus
haut qu ' i l fallait placer le pardon
ho I S , e x , e
* ' . , J U
t s
comme tou tes les situation s limites
" T t S ' n c h e n pilogue. On objectera qu e s'il e
s'agi,
su rlesquelles il s P" ^
ptse
ntationd u p ass absent, nous
PlUS
t b ie ^aZd S i s l grande queson,ceUed 'une
S S g m e i r e et del'oubti.MaisRicurrcuse,'ide
d'unVpobtiquedu pardon : les peuples sont incapab les d e pardonner,
de sortir de la relation ami-ennemi. Et puis sans doute y
a-t-il
des
chosesqui ne sedcidentpas ainsi, et sur laquelle la coercition n'a pas
de prise.
Pour bien comprendre ce point, il importe de mesurer 1extrme
mfiance de Ricur l 'gard de l 'amour, et plus exactement
l'gard de toutesynthseprmature entre l ' thique religieuse de la
rconciliation ou mme simplement de
Vagap
compatissante, et
l 'thique d u magistrat
68
. S'i l n'y a pas de polit ique du pardon, c 'est
qu e l 'amour s'avre tranger au mond e et pou r cette raison , non
seulement apolitique mais antipolitique. Ricu r, par un aut re
chemin comme toujours, converge ici avec Hannah Arendt, dans
cette mfiance l 'gard de la compassion qui ne laisse pas de place
audbat, la distance, la pluralit, au co nflit m me - et d onc ses
rgles. Mais d'u n au tre ct il ne
s'agit
pas non plus tou t uniment de
ramener le curseur de la synthse dans l 'his toire ou la ju stic e ;juste
ment il y a diffrentes formes d'impartialit, il n'y a pas de tiers
absolu,commes 'i l tait important justement de laisser pla ce pou r une
b,
r
0 , P
' ?
3
'"J"t""
1
"
P
,u sloin
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
19/105
un*
1
*
M M O I R E
. . S p a r e
rt\'Z&** ***
tj e
c e t t e h i s t o i r e c u l t u r c l i
le .
i
a
^ f
g l e * " "
5
et de r eipro.
.
e u r un
principe d e
justice^
i-*SSS
sS
-
,B
""
r:
citqui,spare j ^
e
n effet, la rgle
d
'
r
_.
t
f
du
comroanoe
.
ut
aitai dont la formule
^ ^ ^ ' " ^ S r g l e :
donne parceg?
le juste peut tantt comprendre l'opposi-
Cest
sans doute P
01
"* ^
o p p o s
aubon qu i pointe rai t alors
liondu M
el d u
^ ? . ' Tour excde alors de tou te part le ju ste . De la
versl-amourinfim .L ,
6t
horizontalement c o m m eune
mmemanireicile.P
2
"
d A les e t d es
condit ions. Tantt
o m i s s e
non seulement
le
commander
m a i s le
faire
- s en
S
capable. Il faut donc
la fois sans ce sse
sed p l a c e r
p o u r
assu
mer
l a responsabilitd e
la demande du pardon, s 'en ren dr e ca pable (ce
q u i e s tsoumis
condition), et dans le mm e t emp ss'en accepter inca
pable, impuissant (il faudrait quelepardon soit enti rem ent dsint
resse t
on
n e
sait jamais s'il l'est
79
).
Comme toujours,et un peu comme dansun d ia logue p latonic ien ,
Ricur
met en scne cette disproportiont ravers lesl ect u res qu ' i l
oppose
e t
conjugue, par lesquelles il se laisse en q u el qu e s or te intrig ue r
avant
d e l e s
mettre
e n
intrigue et d e les plier son montage. C'est ainsi
qu'il
emprunte
certains lments de mon analyse des d ile mm es morau x
du pardon horizontal,etqu'il emprunteaD e r ri d a q u e l q u e s - u n sdes
oractresessentiels delahauteurdu pardon vert ical . Et c 'est ainsi
q u construit son cadre,r ^
:
^^
m
C ' e s t u n e i d e k a n t ie n i'
'
l u i
es t
c o m m e l ' i d e l i m i t e du l i v r e e n t i e r .
c o n c em v , .
n n e
'
e t
^ ^
comme
s'il
prenait
la
d f e n s e d ' u n e
me d i'wsJ .
e de l'histoire
humaine.
TUS
^ f ^^^ ^
" " " - - - ,PUF.
, , ,
p
. . . , . _ _
l
/m
"" du politique,Paris, Le
SeuU,
1991.
PSSisS?*-
'^^^
im
L'INDPASSABLE DISSENSUS
i ,
cadre kantien
Derrida avait crit jadis un trs beau
texte
sur le
parerga",
par
.
v ou
drais
faireundernier dtour.Il yanalysaitla
lequel
;l
m t e r e s s
,
dfendant le dsintressement contre N:
notion de
contre Nietzsche et
MHo,
P-607.
plaisir
a e - g
le
plaisir contre Heidegger
;
m a i s
auss i
il
pointai t
la
mfiance d e Kant
pourle
parerga,
ce suppl ment non organiquede l 'uvre, commele
cadre
des t ab leaux ou le vtement des s t a t ues ' , ce supplment
superflu- C e c a d r e , q u i n ' e s tm intrieur ni extrieur, un peu commele
joueur qui n 'estni d a n s s o n j e u ,nihorsde son jeu s ' i l joue vraiment,
Derrida le re t r o u v e d a n s la cons t i t u t ion mme de la Critique de la
facult djuger, oKa nt impo rte d ans l ' analy t ique d u j ugement es th
tiquelat ab le de s j u geme nts i s su ede la
Critique
de la
raison pure.
Le
cadre s 'ajuste mal,
[...]
on transpose
et
fait entrer de force un cadre logique pour l'imposer
une structure non logique,
une structure qui ne concerne plus essen
tiellement
un
rapport
l 'objet comme objet
de
connaissance. Le juge
ment esthtique, Kant y insiste, n'est pas un jugement de
connaissance
82
.
Selon Derrida,
la
seule just ificat ion de cette transposit ion rside dans
une hypotht ique l i a i son ave c l ' en tend ement . F ai sant a l lu s ion
la Cri
tiquede
la
facult
djuger ( 1, p.
49), Derrida commente ainsi
:
Le cadrede cette analytique du beau, avecsesquatre moments, est
donc fourni parl 'analytique transcendantale pour laseuleetmauvaise
raison que l 'imagination, ressource essentielle du rapportla beaut, se
liepeut-tre
l 'entendement '
83
.
Liai son hypotht ique, donc incer ta ine, embarrasse (mme page)
:
Le rapport l 'enten d emen t, qui n 'est ni sr, ni essentiel, fournit donc
le cadretoutced i scours; et enlu ilediscours su r le cadre
[ . . J
tout le
cadre de
l 'analytique
du beau fonctionne, par rapport ce dont
i l
s'agitde
dterminer
le
contenu ou
la
structure interne, comme
u n
parergon.
8 0 . J a c q u e s D E R R I D A ,
La v r i t en p e i n t u r e ,
P a r i s , F l a m m o r i o n -G t o n j B ,
1 9 7 8 -
8 1 .E m m a n u e l K A N T ,
C r i t i q u e de h fa c u l t d j u g e r ,
P a r i s , V r i n , 1 9 7 4 ,
p .
w i s>
i J a cq u e s D E R R I D A ,
L a v r i t . . . , op. cit.,
p . 8 1 .
"
' b u t . ,
p .
8 3 .
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
20/105
LA JUSTEMMOIRE
42
un exempled e c e qu ' i l pe r m e t d e consi-
LeoKfce devient s o n ^ ^
^ . j ,
p e r m e
t d e c ons id r e r
d r e r
c o m m e e x e m p l e . ^
c e t t e
co n
i p o s i t i o n
b a r o q u e d e c a dr e se n
commeparerga.
c
"
%
'
^ ^
lui s
jKant
ne
repousse le cadre sup-
abmc que se V**.^
c a d r e
su pplmentaire, c 'est qu e le juge-
plmentaue qu a
P ^ "
, modle d 'u ne prsence pu re, d l i-
r d f , o ^ p S e ^
T =
sedrobe-,oMed^
fnLinnndans ses pages 92 94, o l 'exprience esth-
mme un travail
du
deuil. Un peu plus lom,
Dernda ,observant que
le
beau nedpendplusd'aucu ne existence empirique(mce l le de1objet,
ni celle du sujet), crit que
[...]leplaisir suppose nonpas ladisparition pure et simple, mais la neu-
ttaiisaiion.
non pas
simplement
la
mise mortmaisla mise en crypte
de
tout cequiexisteenlant
qu'il existe".
On lesait,on vient de le redire,
Ricur
considre
la
notionde
travail de m moire
comme plus ample que celle de devoir de
mmoire .Hla met en rapport avec le travail de d eu il, et no u s avon s
vu combien les notions de deuil
et
de s pulture taient constantes
dansLammoire,l'histoire,l'oubli IIy aura i t a insi , comme dansLa
recherche du temps perdu, une sortedesouveni r qu i revient du
deuil, un orphisme de la mmoire. On ne retrouve dans sa mmoire
que ce
qu'on a vraiment perdu. I l y a cependant u n a u tre versant du
travail de mmoire, un versant plus vif,
incboatif,
un versant de la
mmoire naissante, en quelque sorte.
Et
c 'es t par
l
q u e Ricur
s'carte de Derrida : on pourrait en effet rapprocher
le
travail
de
mmoirede cequ 'il estime dansLa mtaphore vivetre le travail de
la ressemblance-qui ne semble pas treson tour t rs loign de
5 59 ^ oT d w L '^ r " ' ?
q
"
ca
1
n i
rtPO"
au peut-tre
c'est
lata
du
Possbfc
sans m ^ Z i
l^
na
"
,
e
,',
8aieSl
-l
Ie
S
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
21/105
LA JUSTE MMOIRE
44
blanche ".
voit
l a
m ta physique oc c ide nta le
tra.
dans la mymo'ogie
p b U o s o p
h i q u e m o d e rn e p a r l e biais de
vailler 1 ensemble
^
r o d e
s , apparemment abolies, nais
mtaphores uses. ^
d e
matre,
i c i . e s t
d ' e n t r e r da ns
le
q ui
syent s'articule
la
matrise sur
le
temps
et le
nuracledela natalit?
C'est
exactement cette question qui relance toute
S X Z S S s ? '
,odyssede1,espritdu
>
^
w
du nanta, ,. .
? " '
m o n
avis, manquel' interprtation politique
Z ^ ^s* symtrie avec la prome sse au niveau mme de
88.Jacques D E R RI D A L a K
giilosophfc). P B B ,u ' s tn i l m
**.
* * '
d
M s
Potique a
5(Rhtorique
et
m . Minuit, 1572. '>. p. 1 -52;repris dansMarges de la philosophie.
* * S tejelte
TSZ
^logiqaesd e la prsence, de la demeure, du
(cn dja, y.p.3 $
*"
"""um m
les
Heures
de la philosophie depuis Platon
w. MV,
p.362,
L'INDPAS S ABLE DIS S ENS US
45
,,..
n
e rflexion sur
l 'acte
de dlier propos comme condi-
l'change. c.' " .
on de Mi de lier .
u
f a cu l t d e
d l i e r
rdon introduit la fois une lia ison,
u n
lien de dette
e t d e
deuil, e t
^ j ^ ' s o n u n e r u p tu r e ,l a f a c u l t de r e c om m e nc e r * .C ' e s t pour quoii l
"fr irait pas majorer la naissance jusqu ' en faire une sorte de tr iomphe
I1C
1"
.
_
: u i / . n nl n i w a c c i i c
Ao. r o n n t i u o l mn n t fa a u ~
d e l a vie,
c o m m e u n i n c e s s a n t p r o c e s s u s d e r e n o u v e l l e m e n t , c e q u i e n
uer it
c ompl te m e nt le t r a g iqu e " . L e th m e
d e
la naissance appara t
" f " ?
giontaire
et l'involontaire c om m e p lus ra d ic a l e nc or e qu e c e lu i de
ort" et comprenant la fois celui de la joie vive du nouveau, e tcelui
, .
ujj L a naissance aussi est orpheline, e lle est un en d e ncessaire d e
toute
exprience, une limite fondatr ice . Et je dirais volontiers que les der
nires pages d eLa mmoire, l'histoire, l'oubli, q u i mettent e na va nt l e
caractre ihdcidable d elapola r i t q u i di vise l 'ou bli entre l 'entropie
endeuille d e l 'effacement
et
la c onf ia nc e he ur e u se e n c e q u e R ic ur
appelle l'ou bli d er se r ve , por te n t c e t qu ivoqu e
son paroxysme.
Si l ' o n fait cr dit a u x c o m p t e n c e s d e s t r e s or d ina i r e s f a c eau
temps, on n epe nse r a don c pa s l e d e u i l s a n s p e n s e r l ana issa nc e , c ' es t -
-direle dsir d ' t r e
-
c ' e s t i c i q u e l ebe r gso nism e r e c le sa ns dou te u n
spinozisme discret,
u n e
or ie n ta t ion pr of on d m e nt a f f i r m a t ive , a ppr o -
bative d el ap e n s e d e P a u l R i c u r , q u it e r m i n e s o n l iv r e su r l a notion
de v ie , d ' ina c h ve m e nt . Ma i s c e t te c ont in u i t v iva nte qu ' a ve c
l ' i d e
tonnante d 'un oubli d er s e r v e i l o p p o s e l ' o u b l i
d ' e f f a c e m e n t ,
l a
discontinuit des m orts
e t
de s na issa nc e s , c om m e ta n t de m m e f or c e ,
n e d s igne pa s que lqu e c hose qu i se r a i t
not r e d ispos i t ion ( s inon c e
n e
serait pas d el ' o r d r e d e l ' o u b l i ) m a i s q u e l q u e c h o s e q u inou s d ispose .
Plus encore
:
c e t
g a r d ,
il
n ' y
a
p a s d e
r e pr se nta t ion
d u
pa ss
q u i
91.MHO.P.636.
M . Cette dliaison est un thme
mtapolitique
tout fait capital, qui renvoiela
. t, " Puritaine, au droit de rompre l'alliance et le contrat.
C'est
en mme temps un
trat
COmi,,
"
e
'
nn
""eme
de la sagesse :or
Ricur
d veloppe ailleurs des thses plus
de I V i "
p lns
piques, qu i ne permettent pas de penser aussi facilement la d liaison
Samedi "
a c t e
?" e Badiou reproche Ricur comme une conception chr-
gd
"
5n)a
;
De
PUis lors je m'en suis expliqu
:
Le d iscord originaire. Epope, tra-
p . comdie
*
dans
M .R E V A U L T D 'A L L O U E S
e t
F.
Azouvi
(dit) ,
A wf
Ricur,
C e S - ' ' Hem e . 2004,
p .
229-236.
*> P a u l^ ^
U S S 1
nel e c t u r e
errone
d'Hannah
Arendt
Q E U R
-
u
volontairee tl'involontaire, Paris, Aubier, 1963.
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
22/105
L A JUSTE MMOIRE
.
>
a
rsurrection, ce que
v o udra i t
sans doute un travail
de
O Tp K le demiest lpoursparer le pass du pr
se r i t
l 'insouci, l 'oubli dese
puisses
mmoire
accompli .-
^ ^ . ^
y i
pour faire place
au
a
^
f i n a
j
e
.
n es
t
en effet
un
pointo
r
on
Do
la note kerkeg ^ ^
e t
Ricceur cite
alors les
pages
peut parler
d u n
s u r te
lys des chants et les oiseaux du
maptfiquesdeK*
g
c o m p a r e
t pas, s 'oublient eu x-mmes*.
? '
qU
' l h n cette
dliaison du souci de soi, est encore un th
me
d
T
P
X n o ^ u t m e n .comme
place faite soi-mme comme un
1 l i
aussi comme
effacement
d e
soi-mme
devant autre
que
s o i " ' e t
qui vient natre,para tre an mo nd e.
C'est justement parce qu'ily a lamla ncolie , 1 impos sibil it mme
de faire entirement
le
de u i l , qu ' i ly a lana issa nc e ,
qu i
n 'achve ni ne
supple ce travail, mais le d suv r . L a diff icult d u pard on est d e ne
cder ni au vertige de l 'entropie, de l 'oubl i d ' u su re, l ' ha bi tua t ion qu i
relativise tout et par lequel tout retourne l ' ind i f f r e nc e " ;n i de cd er
au prestige de la nguentropie, de cette entropie ngative par laquelle la
mmoire voudrait pouvoir tout reprendre, trier
e t
c o m p u t e r j u s q u ' c e
que rien ne soit jamais perdu, dans une rcollection
e t
u ne r de m pt ion
totales du pass entier". Tel est le point ju squ 'o il m e se mbl e possible
de conduire l ' ide que l ' pilogue
s u r l e
p a r d o n
e n
parergon
d e
La
mmoire, l'histoire, l'oubli
e s t une l im ite , un pa r a d oxe ,
u n
horizon,
le
l ieu de tension, de torsion ou de volte-face de tous les discours.
L'pilogue
de Ricceur place
l e p ard o n
l w
sur une limite qui en fait une
notion justement trs kantienne
-
au sens de
l a
que s t ion
:
Qu e m'est- il
permis d 'esprer ? Pour reprendre l 'approximatio n philo sophiq ue du
vocabulaire thologique
d eLa
religion dans
les
limites
de la
simple
95.MHO,p.649.
9 6 .Ce sontd'ailleurs les pages sur lesquelles, pendant d es an nes , j' ai achev mes
Nuits de
1
thique.
yn
J
p ^ ^
t r
^
: r t W
*
W (
^
3 M a W )
' ^ ^
m
^ '
t e
P
m t a s
^ ^
S S S S t a f f i S . * * g W * j * - g 1 -ti que
du
dtache-
Lecture,
d'enfiuuTtASe
T o m " *
i " I t a
lo Svevo, Franz
r o
f na listep o ^ ^ l f d a n s V
Ulysse
:
l'histoire
est un c a u -
**?
par Stepheo D e W ^
w h
\
c h
1 am tryingtoawake
) .
^
P
o u b U e r ( i s a m g h t n w e ^ ressentie c om me u n e
* *
l a
r ^ m S S o n
profonde d e l 'expr ience
-
e n t r a V
" V ia T d u p a ss , l es d r o it s du p r se n t ' .
humaine
:
e t on < W
sensibles ces reproches, d 'au tant p lus
. . urfnriens ont ete u - m u n m o esorer
^ historiens *
f
d c e n n
i e s ,
i l s ont commenc esprer
labits
de la rflexion
ni
us tincelants, de la
se
jees
de la nature .
Plusi
^ c d e r a u n iv e a u du c o n c e p t1
^justement dans.1
pouvoir
w
P'
05
" " r S f S S c e T X T n ^ t r l
Plusieu rs parmi eu x ont pens
l W
w d e r a u
niveau du concept
et de
la vr i table science,
i l
Cementdansles u
irauitter les habi ts de la r f lexion morale pour endosser ceux,
at nius t incelants, de la science sociale , modele sur
l'en
vue
d'accder auniveau .
r
-
Suit soumettre la mmoire, dissoudre son nergie incontrlable dans
le
champdel 'h istoi re , ou qu ' i l ta i t temps d 'en f in i r avec el le u ne fois
pour
toutes, en brisant toutes sortes de liens.
Cet tat de choses a profond m ent chan g d ans
les
dernires
dcennies. Au cours des ann es 1970, a eu lieu u ne sorte d e rv olte
contre
la soi-disant
histoire officielle, ac cu s ed'tre ar t i f ic ieuse et v io
lente.
et l, on a mme voqu u ne revanche d e la M moire su r
l 'Histoire. Alors que Ralph Samuel, l 'un des principaux fondateurs de
History
W orkshop, a n i la di f f rence ent re la mmoire populai re et
l 'histoire', Philippe Aris a vu d ans la m mo ire (ind ivid u elle et c ollec
tive) le moyen de mettre de c t la chro nolog ie officielle d es
v
nements publics
et,
finalement, de saisi r le mond e d e la v ie qu ot idienne
^P
rof
s>onnaliser
l'histoire
,
Dialectique,
1980.
30
;
Ralph
Tni"*' '"
" ^
Pr
""
a
*"
Comm
P
Tar
?
Culture.
London.
W
k
"
H
^ ^ ^
r t o
*
?
* " * Paris,
Le Seuil.
1982.
Su r
Aris .
cf.
w
E-gland,
199}
"on as an
Art
^
Mtmmy
^
Hamwer.R H , University Press of
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
25/105
L A T
A C H E D E L ' H .
S
T O R . E N
53
S i , , , (iilsmeniM i >ntfMter l 4,.,
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"S v'i'Wi
1*. IV.
I1K OUUmnnl IVlto
w
lUAwtJsmUt Mtl.mkoxi-m,((whi.v(tMv.fwls,Q*IUwi--W
.
)orsqu
.n crivait queUmmoire, le besoin de
d
j > ' . C ^ ^ - P r ^ s ^ ub l i , que"mme l'horreur pmsse se
Ce'I"' f i t t om b er ^
1
^
r e c o u v e r t
les fosses com-
*"t
P
e
ODM*" ^ 1 ^ ' V ^ o r t des Armniens en AnatoUe,
***"li*
' "
C h 8 f f l
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- - - " ' M des Hereros tus en
et le ^
n t
each leTcorps des Hereros tus en
^ HuiTde la
N
a m
j
b ,"
w
"
1
TJ;
?'""","
'"""n*Jeun Moulin le 21 juin
1943.
le journal W '""
. l < , i l ? r *
,
.
, w
* *"" *
over
the University
,The New York
Review ofBooks,
avant ci
M H o " '
U mimoin
-
l'Histoire, l'oubli, Paris, Le Seu il. 2000. p. 223 (dor-
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
27/105
7/25/2019 Abel-la Juste Memoire
28/105
LA JUSTE MMOIRE
58 ...
_
, urologiedes abus possibles. En ce qu i
c o
TL *" "
me< PartCUlere,nent
*
eux de i *Q
/ornire-
e [esaoobia
d'une
mmoire empche,
c
T
h t S e oalVde,examine pa rSigmundFreud,dansfe
fmon-e
blesse.
(
nh/ira&m (m4)
et
dans
Di
et Mil
estI;
^^^ z ^^^ ;:
r-p
j T ^ i s le pass. En premier lieu, la mlancolie
Sllotetd'aniourd-unepersonneou
d'uneide,
telle que ,
apa |n
^
TaStmb
aussi
d'une
image
du
pass)provoqueune mortificatio,
1 ntimert de
soi.
Ensuite,la compulsion de rptition d W efe
rfe
.
) conduit la personne subsfluer le passe
l'acte
au
so.
venir vritable :
e
patient nereprodu it
pas
De fait oubli] sousforme *
venirmais sousforme d'action : il le rptesans videmment savoir
qu'il
le
rpte
".
Dans
les
deuxtextes, Freud ne
se
borne pas prononcer
on
d iagnostic,
il
'interrogeaussi sur
la
possibilit d e favoriser
que le
sujet
dcroche de
ses
mcanismes de rptition, de faon susciter une rcon
ciliation avec
te
e f o u l .
A
cet gard, il sou ligne de u x po ints extrmement
importants, qui seront repris parRicur propos d e la mm oire collec
tive.Dans Remmoruon, rptition, perlaboration,
l'analyste
es tpri
de
montrer
une
grandepatience l'gard des rp titions, car le transfertcre
un
espaceintermdiaire entre
le
malade et la vie r elle, u ne sorte d'arne,
qui garantit l'expression d es cond u itescompulsionnelleset leur perlabo
ration (Diircharbeitung).Mais il y a aussi une d emand e pou r lepatient :
au
lieu
de
considrer
son
malaise commequelqu e chose m priser,
il
doit
le
traiter comme
un
adversaire digne d'e stime, co mm e u ne partie
de lui-
mme dont la prsence est bien motive et o il co nvie nd ra d e puiser
de
prcieuses d onnes pour sa vie u ltrieure
a
. Dans Deuil et Mlancolie,
Freud soulignel'opposition existant entre la m lanc olie e t le d eu il
(au
lieu
du deuil, la mlancolie...), pour insister su r le pou voir (coteusement
)
librateur
du
travail
de
deuil.
Deuximement,en ce qui concerne les manipulations concertes
du
ut.
Ricur pense la mainmise sur la m mo ire op r e par le nga-
tionnisme ainsi qu' l'puration force de la mmoire, exerce sans
K^mm^V^T"-
B
6n
- WcdcrholenundDurcharbeiien(1914),
al f
S Z T L ^ * " ' mis. Arln,1995,p
Convaincu que noire litoio dpend d e notre capacit a intgrerle
pwn dan l eprtent, Rlcotur penie que, dans l'espace public, le travail
de mmoire peut, doit avoir son fondement dans lesens d el'quit.
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