Zibeline 43

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Du 13/07/11 au 14/09/11 | un gratuit qui se lit 43 Rêves d’été

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Toute l'actualité culturelle juillet/aout 2011 en région Paca

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Du 13/07/11 au 14/09/11 | un gratuit qui se lit43

Rêves d’été

RetrouveZ nos éditions précédentes sur www.journalzibeline.fr

Politique culturelleChâteau de la Buzine 4, 5Théâtre Liberté à Toulon 6, 7Festivals à venirMusique, danse 8, 9Musique 10 à 16

Théâtre Avignon 18,19Avignon off 20 à 22Villeneuve, Vaucluse en scène 22DanseChâteauvallon, Marseille, Vaison 23Marseille 24, 25MusiqueAix, Orange 26, 27Marseille, Pays d’Aix 28, 29Toulon, Lambesc, Marseille 30Aix, Le Tholonet, Forcalquier 31Jazz, actuelles 32, 33

Disques 34LivresMusique, arts, histoire 35,36 jeunesse 37 à 40cinéma 40littérature, histoire 41 à 44Rencontres 45PhilosophieVictor Stenger, Rencontres numériques 46HistoireMucem : la révolution tunisienne 47CinémaLe FID, Cinéma Israélien, Les Variétés 48, 49Lussas, Les rendez-vous d’Annie 50

Arts visuelsAu programme 52 à 55Cabriès, Arles 56Avignon, Marseille 57Photo : Arles, Marseille, Avignon 58, 59Aix, festival Apart 60Animonuments : Château d’Avignon, Montmajour 61PatrimoineArles antique, Le buisson ardent 62La Celle, L’ocre 63Adhérents 64

Les Ateliers de l’EuroMéditerranée 5,6

Élitisme, le mot a une sale histoire. Accusation favorite deStaline à l’égard des intellectuels, il est aujourd’hui em-ployé en France pour dénoncer le conservatisme de classe,mais également, à nouveau, pour conspuer les œuvres del’esprit. Sarkozy n’est pas le seul à avouer son désintérêtpour la Princesse de Clèves : son attitude a déverrouillé destabous, et dédouané d’effort intellectuel tous ceux qui n’yprenaient aucun plaisir.Partout les politiques exigent que l’enseignement, la re-cherche, les arts rabotent concrètement leurs programmeset leurs ambitions. Pour cela ils déplacent sciemment versla sphère intellectuelle le reproche d’élitisme, qui défendaitl’égalité sociale entre les hommes, et jouent avec le doublesens du mot populaire. Qui désigne à la fois les arts nés despratiques du peuple, comme le hip hop, la BD, le graph oule flamenco, et les œuvres que le public, soumis au matra-quage médiatique, aime «spontanément». Ainsi on demande aujourd’hui aux artistes, sans détour, deproduire des œuvres accessibles. Or une œuvre complexen’est pas immédiatement appréciable de tous. La Tour Eiffela été violemment dénigrée en son temps, et seule une poi-gnée de privilégiés a entendu Mozart ou admiré Molière. Lamécanique quantique, les Écrits de Lacan, la musique deVarèse, la danse de Cunningham ou le théâtre de Koltèsnécessitent, pour accéder au plaisir qu’ils procurent, desconnaissances, et le désir parfois douloureux d’y plonger enabandonnant le flux du divertissement médiatique.Vouloir rendre l’art populaire, accessible à tous, est évi-demment une ambition louable, que seuls combattent lesvéritables privilégiés -ceux qui possèdent des œuvres d’artet peuvent s’offrir des places de première catégorie auFestival d’Aix. Mais il faut travailler à en ouvrir l’accès, etnon transformer l’offre culturelle pour qu’elle correspondeà une demande souvent peu éclairée.L’exigence esthétique et intellectuelle est absolumentnécessaire à l’humanité. Elle s’épanouit aux antipodes dela culture fast-food, celle qui veut nourrir en satisfaisantl’appétit immédiat mais qui, à force de ne jamais étonnerles neurones, laisse l’esprit aussi flasque qu’un milk-shakeaux édulcorants.AGNÈS FRESCHEL

Les plaisirs de l’esprit

C’est en grande pompe que la Cité duCinéma a été inaugurée le 17 juin :le ministre de la Culture, FrédéricMitterrand, était là, venu assister àla première du Cid le soir même (voirp 28), et affirmer son soutien à cetteville où vivait sa grand-mère, et pourlaquelle il éprouve un attachementparticulier. Un discours émotionnelun peu creux qui, malgré les marquesd’amitiés véritablement émues échan-gées avec Jean-Claude Gaudin, nesaurait faire oublier le peu d’inves-tissement de l’État à Marseille, horsles grands travaux de construction deces dernières années, dans les Mu-sées, l’Opéra, et le fonctionnementdes compagnies installées dans lacité dite phocéenne. En effet, si leMaire de Marseille prit le temps deremercier le ministre pour son impli-cation dans les grands travaux de2013, en particulier ceux du MuCEM,le Château de la Buzine est un in-vestissement de la Ville seule, commebon nombre d’équipements ou derestaurations. C’est souvent avec laRégion et le Département, et en dé-pit du concours défaillant de l’État,que la vie culturelle marseillaise s’im-pose dans son bouillonnement. Ceque M. Gaudin souligna à sa façon sidésarmante : «Si Marseille a obtenu letitre de Capitale Culturelle, ça n’est paspar l’opération du Saint Esprit. Même sichacun sait que je n’ai rien contre…»Après ces deux discours politiques,difficile de savoir ce qu’il en serait duChâteau de ma mère ! Le cadre estmagnifique, accueillant jusque dansses jardins, ouvrant sur des points devue exceptionnels sur les collines tantaimées de Pagnol. L’exposition per-manente, attractive, devrait concourirà attirer dans ce lieu célèbre les tou-ristes qui, avant la restauration déjà,étaient nombreux à visiter les ruines,essentiellement au départ d’Aubagne. Mais l’ambition culturelle du lieu estpour lors mal définie : la collection Pa-gnol n’a pas pu être acquise par laVille, les projections de la Cinéma-thèque n’iront pas s’exiler dans celieu trop loin du centre-ville pour sonpublic. Que projettera la magnifiquesalle de cinéma ? Quelles expositionstemporaires dans cet espace si propi-ce ? Seront-elles tournées vers uncinéma d’auteur international, commele titre de Maison des Cinématogra-phies de la Méditerranée le prévoit,ou centrées sur une image touristiquede Marseille, comme la program-mation Pagnol de cet été semble lepréfigurer ?

L’exposition de 50 portraits d’acteursde Roger Corbeau, photographe deplateau, veut concilier les deux ambi-tions : partant d’Orane Demazis dansle cinéma de Pagnol des années 30,ses portraits redessinent le parcoursdu cinéma français jusque dans lesannées 80, en suivant Gabin, Jean Ma-rais, Arletty ou Simone Signoret avecl’œil expert de ceux qui savent capterla lumière propre à chaque acteur.Une ambition muséale de conserva-tion et exposition du patrimoine toutà fait logique, puisque la délégationde service public est allouée à lacinémathèque, mais qui rencontrera,on l’espère, le désir de soutenir etpromouvoir le cinéma d’aujourd’hui,ceux d’ailleurs, et les festivals duterritoire : il serait dommage que les11,4M€ dépensés pour la magnifiquerestauration du Château (architecteAndré Stern) se contentent de con-forter les ambitions touristiques de laville, sans penser à ses nourrituresculturelles.AGNÈS FRESCHEL

Maison des Cinématographies de la méditerranéeChâteau de la Buzine, Marseille 11e

04 91 45 27 60www.châteaudelabuzine.com

POLITIQUE CULTURELLE04

Résolument optimistes

Le Château de méméLE CHÂTEAU DE LA BUZINE

© A.G

Nous avons rencontré le Directeur du Château, Serge Necker,et le Président de la cinémathèque et de la délégation deservice public, Daniel Armogathe, pour connaître leursprojets et leur programmation. Ils ont choisi de nousrépondre séparément !Zibeline : Comment conduirez-vous cette Maison desCinématographies de la Méditerranée ?Serge Necker : J’ai travaillé avec Daniel sur le projet en tantque conseiller technique et culturel, et en juillet 2010 ilm’a proposé la direction. J’ai une équipe d’une douzainede personnes. La mairie me donne une subvention pour lesobjectifs de service public, soit 1/3 du budget prévision-nel. À moi de trouver le reste.

Comment ?Nous allons louer les espaces aux entreprises, aux asso-ciations, pour leurs manifestations, leurs colloques… LaBuzine ne sera pas un Palais des Congrès : c’est avant toutun lieu culturel, mais si nous voulons proposer des expo-sitions intéressantes, des projections avec des invités, ilnous faut trouver les fonds, tout cela coûte cher ! Il y aaussi un aspect touristique : plus de 40 000 personnesvenaient chaque année visiter les ruines du Château dema mère. C’est pour cela que nous proposons, par exempleune exposition permanente ludique avec une scénographiequi peut plaire au grand public.Travaillerez-vous avec les scolaires ?Les lieux ont été conçus pour accueillir des groupes d’élèvesen collaboration avec leurs enseignants.La programmation tournera-t-elle toujours autour dePagnol ?Vous avez pu voir le programme Un été à la Buzine. On acommencé avec des films variés comme Marie-Jo et sesdeux amours. En juillet et août, l’hommage à Pagnol, avecune projection tous les mardis, à 16h et à 19h, nous sem-blait naturel. Du 28 juin au 28 sept, il ne faut pas raterl’expo des clichés du grand photographe de plateau RogerCorbeau.

Chateau de la Buzine ©

Ange Lorente

Et à la rentrée ?Nous avons des pistes. Nous allons établir des partenariats au coup par coupou au coût par coût (rires) avec des festivals. Il est primordial de les rencontrertous. On a déjà pris des contacts avec le FID, Ciné mémoire, Cinémed de Mont-pellier, Horizontes del Sur, Aflam. Nous avons la volonté de nous intégrer àce qui existe déjà.Et la Cinémathèque de Marseille ? Les projections du mardi soir auront-elles lieu ici ?Non ! Elles vont continuer au CRDP. Pourquoi ?Vous demanderez à son directeur.La salle n’est pas équipée en numérique, alors que seulement 33% des filmssont tournés en 35mm aujourd’hui ; n’est-ce pas un handicap ?Quand le projet a été conçu, c’était les débuts du numérique ; cela évolue très vite.Mais ce n’est pas un handicap car les films du patrimoine sont en copie 16 et 35.Et pour les films actuels, on équipera plus tard, quand on aura le label CNC.L’éloignement du centre et le manque de transports en commun dans le quartierne vous semblent-ils pas un obstacle ?Les choses évolueront avec la demande. Je suis résolument optimiste.

Départ de Serge Necker et arrivée de Daniel Armogathe…Zibeline : Quel est votre rôle ici ?Daniel Armogathe : Je suis président de la Délégation de Service Public etconseiller culturel. Je fais partie du groupe de programmation avec d’autresmembres de la Cinémathèque.La cinémathèque ne fera pas ses projections hebdomadaires dans cette sallede projection ; pourquoi ?Pour nous, il est important de garder un écran en centre-ville, dans un lieu gra-tuit. Notre public, hebdomadaire, entre 60 et 80 personnes, jusqu’à 120 pourles cinéconcerts, y est habitué. De plus La Buzine est très mal desservie: les der-niers bus sont à 18h30 ! Impossible de venir le soir si on n’a pas de voiture ! Il yaura des projections communes et d’autres différentes. Ainsi les deux structuresindépendantes devront se concerter pour le projet autour de la mer au cinéma.Quels autres thèmes aborderez-vous ?Deux ou trois fois par an, nous allons proposer des cartes blanches aux cinéma-tographies de la Méditerranée : par exemple, des films égyptiens avec AFLAM.Il est important d’établir des collaborations internationales : en 2012, Marseille-Hambourg, made in Marseille, des films sur la ville de Hambourg, jumelée avecMarseille ; en 2013, un déplacement à Hambourg et un colloque sur les deuxvilles-ports en miroir. Plus proche, fin octobre, un premier cycle de cinémaukrainien, un hommage à Fernandel, des expositions… Je vais vous montrer lessalles où vont être classées, pour y être conservées dans les meilleures condi-tions possibles, toutes les copies de films que la Cinémathèque a apportéesainsi que les salles de travail avec des livres et des revues sur le cinéma.Pour les étudiants et les chercheurs ?Pas uniquement ! Pour tous les amateurs de cinéma : ils y trouveront revuesou livres rares… D’abord, il nous faut tout classer et inventorier : un grostravail, mais passionnant ! On y va ?PROPOS RECUEILLIS PAR ANNIE GAVA ET ELISE PADOVANI

© A.G

TOULONPOLITIQUE CULTURELLE06

Le Théâtre Liberté est construit. Le magnifiqueéquipement en plein centre de Toulon propose dèsla première saison une programmation esthétique-ment ambitieuse, propre à satisfaire tous lespublics, et les désirs contradictoires des tutelles.Car l’installation de cet équipement au cœur de lamétropole varoise, si elle est actuellement souten-ue ardemment par Toulon Provence Méditerranéeet le Conseil Général 83 (3.5M d’€ de budget defonctionnement en 2011), ne pourra déployer sa plei-ne puissance qu’avec l’obtention des deux labelsen cours : celui de Scène nationale territoriale (avecl’actuel CNCDC Châteauvallon), et celui de Pôlerégional de développement culturel, qui permet-tront de prétendre à des subsides conséquents dela Région PACA et de l’État, et donc d’atteindre en2013 un budget de 5Md’€ : un minimum pour fairefonctionner d’un tel équipement (3 salles, sanscompter Châteauvallon), qui deviendrait de fait lethéâtre le plus subventionné de la région.

Première saison !L’offre du Théâtre Liberté est d’ores et déjà plusque conséquente : 88 représentations de 49 spec-tacles sont prévus en 2011/2012, soit 47 600places mises à la vente (149 représentations soit82 000 places à La Criée, mais pour 29 spectacles seu-lement), sans compter les représentations scolaires,les projections et les conférences. Et les frères Berlingestiment qu’il s’agit d’une saison «de démarrage» !Pour satisfaire chacun la programmation fait appelà quelques valeurs sûres de la chanson, de la télé oude l’humour (qu’on trouve d’ailleurs dans plusieursautres établissements subventionnés !) : ThomasDutronc, Alain Chamfort, Michel Boujenah ouplus pertinemment Christophe Alévèque et Jean-François Zygel rempliront sans doute la grandesalle Albert Camus, de même que les «amis» de Char-les Berling qui, il le promet, passeront dorénavant

par Toulon : Eric Cantona incarnera Ubu, le Romand’un tradermis en scène par Benoin passera par là(CDN de Nice, avec Tcheky Karyo, Christiane Cohen-dy et Lorànt Deutsch), Zabou Breitman mettraen scène Lydie Salvayre, Emmanuelle Beart joueradu Pirandello mis en scène par Nordey, et JulietteBinoche et Nicolas Bouchaud poursuivront la ba-taille amoureuse commencée à Avignon (voir p18).Car une grande qualité de cette programmation estde faire confiance, avec ou sans «star», au réper-toire dramatique européen (Eduardo di Filippo parPhilippe Berling, Jarry, Botho Strauss par Marti-nelli avec Charles Berling, Pirandello, Tchekhov,Jon Fosse, Shakespeare par Olivier Py puis les26000 couverts, Strindberg, Dimitris Dimitria-dis…) tout en montrant une grande curiosité pourles «écritures de plateau» plus collectives (cie Mo-tus, Emma Dante, Nasser Djemaï, le projet Métiersde nuit, les Vanités du Groupe incognito, la Raclettedu collectif Les Chiens de Navarre…), les textes encréation (Olivier Cadiot, Spiro Scimone, RafaelSpelgeburg mis en scène par Di Fonzo Bo) et lesadaptations d’écritures non dramatiques (BleuConrad, Lydie Salvayre…).Cette programmation digne d’un Centre Dramatiquen’oublie pas pour autant la pluridisciplinarité quiincombe aux Scènes nationales, avec du cinéma grecet un peu de danse méditerranéenne (le très beauDunas où Maria Pagès et Sidi Larbi Cherkaoui in-ventent un flamenco graphique fascinant, et deuxsolos sur la transe de Taoufiq Izeddiou et ZiyaAzazi) toujours accompagnée de musiciens en direct.Beaucoup de musique extrêmement diverse d’ail-leurs, depuis du jazz orchestral en ciné concertjusqu’à des Canzoni napolitaines renaissantes, enpassant par le programme féministe des Bijouxindiscrets (Barbara Strozzi aux côtés de son des-cendant esthétique Haendel), Giovanni Mirabassiau piano ou Goran Bregovic en orchestre, et en

avouant un goût pour la musique dite légère (PhiPhi par les Brigands, L’opéra manouche et La filleà marins de Savary) et pour le théâtre visuel fééri-que (Sindbad le marin par Laurent Pelly, Murmuresdes murs par Victoria Thierrée-Chaplin).

Service publicUne programmation d’autant plus louable qu’ellen’hésite pas à faire confiance à des structures va-roises (Festival Fimé, les Bijoux indiscrets, Festivalde musique de Toulon, le CNRR…), à prendre encharge des créations et de coproductions, à orienternettement son projet, dans une ville marquée parle Front National et les garnisons, vers une Méditer-ranée des deux rives, créatrice au présent, politique,littéraire, féminine.Reste à savoir comment réagiront les Toulonnais :lors de la conférence de presse officielle un specta-teur (journaliste ?) déclara aux trois codirecteursqui présentaient chacun la partie de la saison qu’ilsavaient concoctée : «C’est à vous que je parle, et àvous seul, Charles Berling. Moi j’ai soif de vous… eton ne vous voit qu’une fois.» Outre la goujaterie enversPascale Boeglin et Philippe Berling, la remarquesouligne un certain décalage entre un grand projetde service public, et l’attente d’un théâtre plus con-sensuel en vogue dans les établissements municipauxet les circuits privés. Le Théâtre Liberté devra, pourprendre le large, naviguer entre les demandes con-tradictoires du public et des différentes tutelles…Le lot actuel de toutes les maisons de culturesubventionnées !AGNÈS FRESCHEL

Théâtre LibertéToulonSaison 2011 201204 98 00 56 76www.theatreliberté.fr

Toulon prend

l’air dularge

Les trois salles vont s’ouvrir dès septembre : un souffle

culturel nouveau pour une agglomération qui a soif

de théâtre et d’art…Ithaque © Pascal Victor

FESTIVALS08 MUSIQUE | DANSE

En Camargue, la recette experte des Envies Rhône-ments d’Ilotopie enchante un public attiré par lecroisement des genres : art, science, culture etnature. La manifestation -dont le principe est larencontre entre une œuvre, un public, un espace-mêle temps forts festifs, propositions insolites etrendez-vous bucoliques, d’une rive à l’autre duRhône… le temps de s’amuser, marcher, regarder,découvrir la création contemporaine et la diversitépaysagère, réfléchir à la question de l’incertitude(thème 2011), converser encore et encore. Le choixà opérer entre les propositions est d’ailleurs dignede l’imprévisibilité d’Heisenberg ! On retiendranéanmoins les créations in situ : la Cie Monik Lé-zart et ses visites guidées nooptiques des berges duRhône, Tricyclique dol et son parcours installationContre nature dont il faudra démêler le vrai du faux,le Phun et ses Pheuillus en Camargue qu’il faut bienobserver pour en comprendre la mystérieuse natu-re… (Zib’ 42). Entre deux, on expérimentera lesbalades et performances avec un cheval de la CieSalam Toto, on s’essayera à l’art de l’échange pen-

dant les Guinguettes des paroles de Jacques Maigne,on écoutera Ioanes Trio ou Les chanteurs d’ois-eaux, on tentera une expérience surréaliste avecKurt Demey et Rode Boom (L’homme cornu), on secachera les yeux à moitié quand Kumulus joueraaux Pendus (théâtre de rue), on dansera avec le DJBlockman et Geneviève Mazin (Petites formesgéographiques déambulatoires)… tandis que leGroupe F enflammera nos nuits.M.G.-G.

Les Envies RhônementsDu 28 juillet au 9 aoûtLa Tour du Valat, le Sambuc, ArlesMusée départemental Arles Antique, ArlesDomaine du Château d’Avignon, Saintes-Maries-de-la-MerMarais du Vigueirat, Mas ThibertDomaine de la Palissade, Salin de GiraudBois François, Port-St-Louiswww.lecitronjaune.com

Le monde en musiqueVoilà 23 ans que le Festival de Marti-gues, devenue une scène artistiquede référence, conjugue dans toutesles langues et tous les styles lesdanses, musiques et voix du monde,rassemblant des artistes de toutesnationalités. Sous le parrainage duMaestro Rafael Zamarripa, directeurdu Ballet Folklórico de la Universidadde Colima (qui se produira sur la scènedu canal Saint Sébastien), peintre,sculpteur et scénographe, les groupesde la République d’Altaï, du Togo,d’Espagne, du Mexique, de Chypre, dePologne, d’Ukraine, de Provence (avecLa Capouliero, association fondatricedu Festival), entre autres, côtoierontle mythique Gilberto Gil, l’égérie

mexicaine Lila Downs… Comme cha-que année le canal Saint Sébastienaccueillera de grands spectacles, àl’image des étoiles du Ballet Royal duCambodge, tandis que l’église de laMadeleine programme des rendez-vous plus intimistes, que la placeMirabeau permet de découvrir autre-ment musiques et cultures du mondelors de Siestes du Bout du Monde, etque le Village propose une FréquenceFolk, interlude actuel pour ceux queles propositions traditionnelles duFestival ne sauraient satisfaire : avecle ska rock occitan de Goulamas’k, lereggae malgache d’Abdou Day, lamusique alternative entre occitanieet terres nord-africaines de Mosaïca,

le blues-Folk du Berry de Blackberryand Mr Boo Hoo, le savant mélangejazz/hip hop des Gars Dans L’Coin…

Le Festival de MartiguesDu 18 au 26 juilletDivers lieux04 42 49 48 48www.festival-martigues.fr

Les Envies utopiques

Lila Downs © Fernando Aceves

SalamToto ©

Alex-LaChartreuse

10 ans ça se fête, et les organisateurs de Festi-môme le clament haut et fort ! À Aubagne (où laVille l’a labellisé dans le cadre de «Aubagne à l’heu-re du monde») et Auriol, depuis 10 ans le Festivalessaime ses propositions artistiques dans l’ensem-ble de l’espace public, programmant les spectaclesde compagnies venues d’Europe et d’ailleurs. Cetteannée sont invitées des cies du Burkina et duCambodge, avec du théâtre de rue, du cirque, de lamusique, de la danse… L’association Art’Euro faitles choses en grand avec plus de 40 représentationsgratuites réparties sur 9 lieux entre les deux villes.Les minots pourront donc prendre la direction duCambodge avec la cie Phare Ponleu Selpak Cirket son Putho !, et du Burkina avec le conteur Fran-çois Moïse Bamba et ses histoires inspirées de sa

famille, de son village, de ses expériences. Et cen’est pas tout : du cirque aérien, acrobatique etpoétique avec la cie Kaoukafela et sa Chroniqued’un voyage acrobatique, la proposition intrigantedu Théâtre du Vide-Poches par la cie Arnica avecla famille Zygote et le Rififi à Cagette City, de la

danse avec les acrobates du CCF Crew, spécialistesdu saut à la corde extrême et les sportifs de la cieAcid Kostik qui maîtrisent le step comme person-ne… Sans oublier les «locaux» que sont la cie LesTréteaux du Charrel et l’émouvant Journal deGrosse Patate, petite fille ronde et douce qui se ra-conte à travers tristesse, bonheur et interrogations,et l’association de conteurs et conteuses Au boutdu conte qui s’adresse au plus petits.DO.M.

FestimômeDu 18 au 20 juillet à AuriolDu 27 au 29 juillet à Aubagnewww.arteuro.fr

Le compte est rond

Rifif

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Proximité

Belle danse

Pour la 4e année la cie Campo se pro-pose d’amener la danse contemporaine,mais aussi la musique et le théâtre,au plus près des habitants et des va-canciers, avec des pièces simples, quijouent sur le regard partagé et la pro-ximité des peaux. La Cie le Soufflereprend son Malade Imaginaire le 15juillet à Peyrolles et le 22 à Pertuis,la cie la Rumeur joue à la Sirène au pland’eau de Plantain le 16 juillet, Ex Ni-

hilo se produit à Pertuis le 19, tandisque la cie Campo elle-même danserases Histoire(s) d’être(s) suspendus àPertuis le 20 juillet, et à Saint-Paul-les-Durance le 1er août. (voirégalement p 20)

Danse dans le CantonJusqu’au 1er aoûtPays d’Aix09 51 18 05 66http://cie.campo.free.fr

Entre le festival de Mougins, et Letemps d’aimer à Biarritz, le Balletd’Europe se produit trois fois dans larégion en reprenant trois pièces de sonrépertoire : Folavi, Comme un soufflede femme dans une nouvelle version,de Jean-Charles Gil, et le duo de Chris-tophe Garcia Un peu plus loin. Trois

pièces écrites pour que l’on lise surles corps le plaisir de la danse, qui leshabite et les traverse.

Folavi. Udor PolimatésLe 16 juilletChâteau des templiers, Gréoux-les-Bains04 92 78 09 85

Folavi. Un peu plus loinLe 20 juilletThéâtre de nature,Allauch04 91 10 49 20

Folavi. Comme un soufflede femmeLe 20 aoûtÉtang des Aulnes, Saint-Martin-de-Crau04 90 47 88 99www.balletdeurope.org

Folavi © JC

Verche�re

Pour sa 14e édition, le Festival Zik Zacinstalle ses chapiteaux pour la 2e

année consécutive sur le site du via-duc de l’Arc de Meyran. Au programmemusical an choix très éclectique : le1er soir, le oaï occitan des bouillonnants«fadas» du Massilia Sound System semêlera, entre autres, au rock atmosphé-rique des «locaux» Poum Tchack, auxbarcelonnais Cafeteria Roja, au Nu-Dubde Flox… tandis que, le lendemain,

Maxxo, le prince du reggae dance-hallà la française précèdera le blues saha-rien de Toumast, le Nu-Soul de Senaou le rock garage de Dissonant Na-tion. Côté arts visuels la jeune créationlocale propose des installations oùpeinture, sculpture, graff et vidéo sedisputent l’espace : avec les portraitsde Deuz, Spin et Onirik, les toilesmonumentales de Toufik Medjamia,les droïdes de Xavier «Bibzart»…

Festival Zik ZacLes 16 et 17 septembreAix-en-Provence04 42 63 10 11www.zikzac.fr

Une rentrée artistique

Poum Tchack ©

X-D.R.

FESTIVALS10 MUSIQUE

Face à un piano de concert planté dans un écrinintime, temple, cloître abbatial, musée, un artistesculpte, avec un sens halluciné du chant, le corpssonore d’un joyau classique. Ailleurs, dans un espa-ce plus imposant, sous la conque acoustique duparc du Château de Florans, à l’étang des Aulnesou au Grand Théâtre de Provence, un virtuoseexalte l’effervescence rapsodique d’une foliedigitale…Un mois durant, au Festival de La Roque d’Anthé-ron, on entend une foule de forçats des claviersenfiler gammes et arpèges, des notes perlées,échappées de l’imagination de génies de l’histoiremusicale, des plasticiens du son qui vous embar-quent dans leur univers poétique… À l’heure où lescigales s’arrêtent de chanter, les maîtres vous pren-nent par l’oreille et déroulent quelque épopée auchant royal, mâtinée d’accents nostalgiques, em-portée par la fougue… On est plus de 80 000 aficionados à courir, l’été du-rant, les quelques 90 programmes agencés par RenéMartin, à s’en retourner aux ténèbres (les fans in-somniaques y passent la «Nuit»), dans la foulée debis haletants, tout ébaubis, en longeant les colon-nes de platanes centenaires, les yeux brillants, latête pleine de luxueuses harmonies…Les fidèles retrouvent le doyen Aldo Ciccolini (86ans !), le Walhalla pianistique de Grigory Sokolov

et la crème des pianistes. Le cartel russe NicolaïLugansky, Boris Berezovsky, Arcadi Volodos etles grands habitués Brigitte Engerer, Anne Quef-felec, Nicholas Angelich, Alexandre Tharaud,Abdel Rahman El Bacha, Jean-Claude Pennetier,Philippe Giusiano, Christian Zacharias, ZhuXiao-Mei, Claire Désert… sont au rendez-vous,tout comme une pléiade de talents dont les âmesn’attendent plus le nombre des années : Shani Di-luka, Iddo Bar-Shaï, Bertrand Chamayou, DavidKadouch, Andreï Korobeinikov, Adam Laloum,Kathia Buniatishvili, Vanessa Wagner…Une manifestation qui n’oublie pas le jazz (BradMehldau), la musique de chambre (Café Zimmer-mann, Trio Wanderer) ou le clavecin (PierreHantaï)…JACQUES FRESCHEL

31e Festival International de PianoLa Roque d’AntheronDu 22 juillet au 21 août04 42 50 51 15www.festival-piano.com

Walhalla pianistique

Kathia Buniatishvili © Julien M

ignotAdam

Laloum ©

Carole Bellaiche

Dix-neuf saisons déjà que le trio initial Paul Meyer (clarinette), EmmanuelPahud (flûte) et Eric Le Sage (piano) investit la Cour Renaissance du châteaude l’Empéri ! Depuis, ces musiciens ont fait leur chemin, et leur festival aussi.C’est une des plus belles manifestations de musique de chambre du Sud-est dela France ! La programmation 2011 affiche dix concerts, pour une Saison MittelEuropa. On entend donc des opus qui puisent leur origine dans le vivierroumain, hongrois, tchèque… territoire que d’aucuns qualifiaient autrefois de«Conservatoire de l’Europe».Les programmes mixent savamment de grands classiques, des opus moins con-nus ou modernes. Ainsi, à côté de Trios, Sonates ou Quatuors de Dvořák, Smetana,Bartók, Martinú, Janácek, on (re)découvre Schulhoff… ou Django Reinhardt.Toute une Europe dite «centrale», élargie à des austro-allemand (Mozart, Hin-demith, Schubert, Brahms, Schoenberg, Korngold…), tant les distances sontréduites entre ces régions limitrophes, et aux influences foisonnantes, en parti-culier parmi les contemporains hexagonaux : Jocelyn Mienniel ou Philippe Hersant.Une pléiade d’artistes se relaye autour des fondateurs : la mezzo-sopranoAndrea Hill, le pianiste Frank Braley, Tim Park au violoncelle, AlexanderSitkovetsky au violon… voire le guitariste Christian Rivet et l’accordéonisteVincent Peirani.J.F.

Musique à l’EmpériDu 28 juillet au 7 aoûtSalon-de-Provence04 90 56 00 82www.festival-salon.fr

Chambre sur courDepuis vingt saisons, du Guil à la Du-rance, les musiciens et leur publics’oxygènent au pied de sommetsalpins. L’association Arts et Musiquesen Montagne promeut l’art musicalau profit des communes des cantonsde Guillestre et de l’Argentière-la-

Bessée. Elle invite de formidablesartistes et formations, comme en2011 le pianiste Abdel Rahman elBacha, le Fine Arts Quartet, les Qua-tuors Elysée, Arpeggione… Pas moinsde quatorze concerts sont affichés àSaint-Crépin, Réotier, Vars, Risoul,Saint-Clément, Mont-Dauphin, Ey-gliers, Ceillac. Beaucoup de musiquede chambre, mais aussi des voix (En-semble Sharomov, le chœur suédoisSvanholm Singers), de la musiquemédiévale (Ensemble Obsidienne),baroque (Ensemble Aramis), sym-phonique (Orchestre de la nouvelleEurope), de la harpe (Duo Nefeli) etdu jazz (Intermed) pour la soirée du20e anniversaire. Et toujours desbalades et visites pour partir à ladécouverte de territoires etpatrimoines locaux !J.F.

Musicales Guil DuranceDu 21 juillet au 11 août04 92 45 03 71www.musicales.guil.net

20e étés en montagne

Frank Braley © Alvaro Yanez

Fine Arts Quartet © X-D.R

Fort du succès de la première éditionqu’il organisait, le Grand Théâtre deProvence a proposé à la ville d’Aix dereconduire le festival Musique dansla rue. Pendant dix jours, du 25 août au3 septembre, plus de 80 concerts gra-tuits. L’Hôtel Maynier d’Oppède, laPlace de l’Hôtel de Ville, le CoursMirabeau ou encore la Place d’Alber-tas pour ne citer qu’eux, accueilleront,au rythme effréné de 8 à 9 concerts parjour (format d’une trentaine de minu-tes environ), des artistes locaux ouvenus du monde entier. Mixité des cul-tures et métissage seront au rendez-vousavec de la musique «classique», dujazz, de la chanson… Le TravellingQuartet, le Quatuor Raphaël, ensem-

ble Caudalia, DJ Benoît de Gentile…permettront à chacun de construirele programme de son choix. De plus,grâce à l’opération Pianos libres, lespromeneurs pourront se mettre en finde journée face à un piano et devenirl’espace d’un moment l’artiste d’unjour ! Pour clore ce festival d’envergu-re, un grand bal tango aura lieu le 2septembre sur le parvis du GTP de21h à 1h, histoire d’attaquer la ren-trée du bon pied !CHRISTOPHE FLOQUET

Musique dans la rue08 2013 2013Du 25 août au 3 septembrewww.legrandtheatre.net

Les Musicales du Luberon, en collaboration avec le Festival de Lacoste,proposent un programme de qualité, divers, surprenant, dans des lieuxmagiques. Le 24 juillet l’Orchestre d’Avignon et celui de Toulon s’allient pourjouer la Symphonie Fantastique de Berlioz et l’Apprenti sorcier de Dukas, (dirCyril Diederich) dans les gradins à ciel ouvert des Carrières de Lacoste. Le 28les Arts Florissants, voix rompues aux joutes baroques, instruments ancienssous la direction de Paul Agnew, feront vibrer les voûtes de la chapelle SaintLuc de Ménerbes dans une lecture passionnante du 1er Livre de Madrigaux deMonteverdi. Dans ce même lieu, le 31, le médiatique Jean-François Zygeloffrira un moment d’improvisations pianistiques. Le 5 août, les Carrièresaccueilleront, en clôture, The Fairy Queen de Purcell en version de concert.Adaptée du Songe d’une Nuit d’été de Shakespeare, cette Reine de Fées, dirigéepar Mark Deller, enchantera les festivaliers. De la nature sauvage des Carrièresau recueillement de la Chapelle, quatre concerts à ne pas rater.YVES BERGÉ

Musicales du LuberonDu 24 juillet au 5 août04 90 72 68 53 www.musicalesluberon.com

Entrer dans la CarrièreEnvahir la cité

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gnès Mellon

Les Arts Florissants © Bre�tel

FESTIVALS 11

Les carrières de Lacoste, tout près du Château de Sade, ne retentira pas de nou-veaux cris de souffrances mais accueillera comme chaque année un festival plu-ridisciplinaire et très parisien, à la fois par ses prix et sa programmation, initiépar Pierre Cardin. Visiblement destiné aux touristes plutôt upper qui résidentl’été dans le coin (places jusqu’à 160 €), on y croisera Marie Claude Pietra-galla, les Gipsy Kings, on y évoquera Guitry et Maxim’s, Sarah Bernhardt,

Serge Gainsbourg, Voltaire(et Zadig ?). Jean MarieBesset viendra y faire jouerune de ses pièces, Eve Rug-gieri s’essaiera à la choré-graphie contée des CarminaBurana avec un orchestreukrainien (voir p29). La pro-grammation musicale, inté-ressante et élaborée pourpartie avec les Musicales duLuberon, proposera égale-ment La symphonie fantas-tique et The Fairy Queen(voir ci-contre). A.F.

Festival de LacosteCarrières du Château du Marquis de SadeDu 15 juillet au 5 août 04 90 75 93 12www.festivaldelacoste.com

Y siégerTous aussi parachutées, mais nette-ment moins chères (jusqu’à 50 €), lesNuits de La Citadelle animent Siste-ron d’une vie culturelle qui lui manquedurant l’année… La si belle cité quigarde la voie haut alpine accueille enses murs quelques têtes d’affichesplendides et décalées : les sœursLabèque, Michel Legrand et Nathalie

Dessay, le Dom Juan de Francis Hus-ter avec Francis Perrin; DamienGuillon, contre-ténor, pour un concertd’aria de Vivaldi (avec les chœurs etorchestre du Concert Spirituel, dirHervé Niquet) ; la Camerata duPhilharmonique de Berlin (harpe etorchestre à cordes) pour un program-me de tubes du genre (Boccherini,Debussy, Rossini, Tchaïkovski) ; et leRoyal New Zeland Ballet, qui vient àSisteron donner son unique repré-sentation française ! Il faut dire queces Nuits de la citadelle sont en faitle premier festival français. En date(1928) ! Il est d’autant plus regret-table qu’il ne prenne pas un peu plusde risques artistiques…A.F.

Les Nuits de La CitadelleSisteronDu 22 juillet au 12 août04 92 61 06 00www.nuitsdelacitadelle.fr

ou conquérir la citadelle

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X-D.R.

FESTIVALS MUSIQUE 12

Le projet de Michaël Dian, qui a créé et dirige leFestival de Chaillol, est singulier dans ses objectifset ses moyens. À l’inverse de la plupart des festivalsd’été qui proposent une programmation dans unterritoire, quitte à travailler ensuite sur le publicqui l’accueille, ce sont les vallées, les hameaux etleurs églises, et l’attention particulière du publichaut alpin, qui sont à l’origine de son projet. Qu’ildéveloppe, depuis ans, dans le Champsaur, le parcdes Ecrins, le pays gapençais. En l’assortissant d’unstage, indépendant, qui regroupe plus d’unecentaine d’apprentis musiciens ; en proposantdésormais toute l’année des week-ends deconcerts ; en croisant les musiques du monde, lejazz et le répertoire classique et romantique ; enfaisant appel à des très bons interprètes, sanstabler sur des têtes d’affiche ; et en convaincantpeu à peu les collectivités locales et territorialesde la pertinence d’un projet qu’ils n’ont pas initié,mais regardent désormais avec intérêt.

La Scène nationale de Gap intègre la saisonprochaine le Festival de Chaillol à ses Excentrés :rien d’étonnant, leurs démarches devaient un jourou l’autre se rejoindre.A.F.

Flor De Lino, tango traditionnelHélène Tysman, récital de pianoLa Derive Du Quintette, musique argentine d’aujourd’huiManuel Rocheman, jazz, Tribute to Bill EvansLe Souffle Des Marquises roman musicalWagschal/Dieudegard, Intégrale violon piano BeethovenSabil, En Route, musique d’orientQuatuor Ardeo, musique de chambreDu 17 juillet au 12 aoûtChaillol, Veynes, Bénévent, Gap…04 92 50 48 19www.festivaldechaillol.com

Des montagnes de musique

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Perchée à quasiment 4000 mètres d’al-titude, La Meije, reine des Alpes,accueille à ses pieds la 14e édition duFestival Messiaen sous l’intitulé Musi-que des couleurs. Du 23 au 31 juillet,et avec le compositeur coloriste spectralTristan Murail comme invité d’hon-neur, 13 concerts illustreront la relationson/couleur si chère à Olivier Messiaenà La Grave, Monêtier-les-Bains etBriançon. Des interprètes de grandequalité dans un cadre grandiose don-neront des programmes singuliers etrecherchés. Les récitals d’Alain Dabon-court à la flûte (23/7 à 17h), deFlorent Boffard (24/7 à 11h) et deVanessa Wagner au piano (26/7 à20h30) ou la présence de l’Ensembledes Temps Modernes (28/7 à 20h30)

en sont l’illustration, comme les œuvresà ne pas rater : Stimmung de Stock-hausen, les Treize couleurs du soleilcouchant de Murail ou encore des opusde Hersant, Jolivet, Varèse, Takemitsu,Canat de Chizy, Ravel, Debussy, Beffa,Scriabine, Hervé (création mondiale)et bien sûr Messiaen avec les XXregards sur l’enfant Jésus par PaavaliJumppanen (30/7 à 21h) et le Qua-tuor pour la fin du temps (24/7 à21h) par M. Kodama, P. Meyer, H.Demarquette et T. Papavrami.FRÉDÉRIC ISOLETTA

Festival Messiaen, La MeijeDu 23 au 31 juillet04 76 79 90 05www.festival-messiaen.com

Contemporaine en couleurs

Vanessa Wagner ©

Balazs Borocz - Pilvax Studio

L’édition 2011 du Festival Durance Luberon veut«donner de la musique à voir et faire entendre deshistoires en musique» à un public familial, dansdes lieux enchanteurs et souvent inaccessibles,hormis ces spectacles de grande qualité.Tout commence en fanfare le 12 août à 19h, sur la

place de Lourmarin, avec Jaipur Maharaja brassband, (Rajasthan), prélude à Dhoad (Cabarettzigane) le 13 avec musique indienne, danseuse etfakir. À noter que les spectateurs costumés enhindou se verront offrir l’entrée ! Le 14 août àMérindol et le 15 au Château Paradis, Les Gossesde Tokyo : film muet accompagné d’une musiquejouée en direct de Makoto Yabuki, le fondateur duBamboo Orchestra de Marseille. Le 16 août à Lauriset le 24 à Puget-sur-Durance ApérOpéra, duos deMozart autour d’un verre avec la superbe sopranocoloratur Monique Bonelli, le baryton Ulrich Studeret Franck Villard au piano.Le 17 à Lauris et le 19 au Château d’ArnajonApéroJazz avec le quintet BéAttitude autour de lachanteuse Béatrice Bini qui reprend et revisite lesthèmes les plus bop...Les 21 et 22 août, dans le cadre somptueux du

Château de Mirabeau, Les Contes de Mirabeau : à18h, l’histoire de Pierre de Provence et de la BelleMaguelonne de Brahms, suivie d’un buffet offert surles terrasses et à 21h : Ma Mère l’Oye de Ravel etPetrouchka de Stravinsky, version ballet avec lesmarionnettes de Loïc Bettini auxquelles lacomédienne Agnès Audiffren prête sa voix.Le 25 août au château de La Tour d’Aigues, sousla direction de Jan Heiting, Carmina Burana de KarlOrff, cantate scénique par la centaine de choristesd’Ad Fontes canticorum dans une mise en scènecolorée et vivante.JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Festival Durance LuberonDu 12 au 25 août06 42 46 02 50http://festivduranceluberon.free.fr

Le son des histoires

Jaipur Maharaja Brass Band ©

X-D.R

FESTIVALS14 MUSIQUE

Non, le Festival d’Avignon ne laisse pas la ville exsangue jusqu’àla fin de l’été ! Gare aux Oreilles s’installe à la Manutention finaoût, pour une édition allégée. Ses dix ans d’existence se fêtentpar un renouveau : déménagement du Thor à la rue des EscaliersSainte Anne, installation du collectif Inouï dans la salle desHivernales... Trois dates particulièrement pointues : le 26, Jonas Zugzwang(ou l’alliance improbable de la mandoline... et du mélodica). Le27, un duo anglo-américain pour batterie et voix : Chris Cutleret David Thomas. Et en conclusion le 28 août, Gunkanjima :trois japonaises qui se sont acoquinées avec trois français pourjouer au sampler avec des instruments classiques. Stridences etexotisme déroutant assurés !G.C.

Gare aux oreillesLes 26, 27, 28 aoûtLa Manutention, Avignon09 51 52 27 48 http://gareauxoreilles.free.fr/

Cargo NocturneL’humour ouvre le bal cette année au Cargo ! JamelDebbouze tiendra seul la scène le 19 juillet, maisles jours suivants feront place à la musique, et àune programmation plutôt variée. Pas mal de trèsjeunes artistes : vingt-deux ans au compteur pourFlorrie (le 21/7) face au dandy des seventies BryanFerry, vingt-deux ans également pour Selah Suela veille, qui partage la soirée avec Pigeon John(pop/hip-hop sur toutes les ondes en ce débutd’été) et Mademoiselle K.En contrepoint, Catherine Ringer qui revisite dansune nouvelle formation, et avec un nouvel album,l’univers qu’elle partageait avec Fred Chinchin (le22/7). Et puis une exclusivité le 23, pour lesamateurs de down-tempo, le duo Kruder & Dorf-meister offre une performance spéciale au théâtreantique, avec invités surprises, deux MC et un video-jockey. Enfin à ne pas manquer en clôture le 24juillet, Hindi Zahra (voix sensuelle et percussion)dont l’album Handmade est cousu main.Au final, une programmation qui maintient le capdes années précédentes, et anime les nuits d’étédu côté d’Arles, après les Suds, pendant les RAP(voir p52).GAËLLE CLOAREC

Les Escales du CargoDu 19 au 24 juilletThéâtre Antique, Arles04 90 49 55 99www.escales-cargo.com

Treille et trilles

Avis aux amateurs de vins du Paradis : ce festival estfait pour vous. Trois jours de concerts en plein airsur un domaine vinicole de toute beauté, aux por-tes du Lubéron, avec possibilité de dégustations etde restauration sur place... de quoi satisfaire tousles sens, d’autant que le vin est bon ! Le 20 juillet,hommage sera rendu au répertoire de Pink Floydpar les musiciens de The DarkSide Tribute : unspectacle son et lumière, comme il se doit. Le lende-main, Ilene Barnes-la-magnifique cueillera sonpublic à 20h30 (attention, la jauge est de 600 per-sonnes seulement par soirée, pensez à réserver). Etpour conclure, le 23 juillet, Electro Deluxe : cinq mu-siciens mêlant habilement le jazz et le funk, dansune ambiance qui groove et qui claque !G.C.

Music en VignesLes 20, 21 et 22 juilletChâteau Paradis04 42 54 09 43www.musicenvignes.com

Ça chaloupe sur la CèzeRimbaud aurait-il aimé le reggae s’ilavait vécu de nos jours ? Si son fan-tôme hante les lieux qui portent sonnom, il a intérêt à apprécier : unevague sous influence jamaïquaine vadéferler cette année sur le parc Rim-baud à Bagnols-sur-Cèze. Du 27 au 30juillet, et sous toutes ses formes, duplus roots au dub électronique enpassant par le rock steady et les soundsystems les plus pointus du moment.Quatre jours, quarante artistes : Bur-ning Spear, Tiken Jah Fakoli, HoraceAndy, Jimmy Cliff... Fort peu defemmes, hélas, dans cette sélection,hormis Queen Ifrica.Un effort notable est fourni par contrepour accueillir les festivaliers de ma-nière éco-responsable sur les bergesde la Cèze : 6000 emplacements detentes sont prévus, avec toilettessèches, tri sélectif et co-voiturage.G.C.

Garance-Reggae-FestivalDu 27 au 30 juilletwww.GaranceReggaeFestival.com

Sur le pont, après Avignon

Ilene Barnes © X-D.R

Catherine Ringer ©

Benoit Defleurac

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Le village de La Tour d’Aigues va célébrer la 2e édition d’un Festival qui a déjàdu talent ! Avec une fanfare itinérante qui habite les lieux, la dégustation desproductions viticoles sur place, on peut dire que Jazz à la tour invite à la fête.Avec une programmation de choix, concoctée par l’Ajmi1.Ainsi Laure Donnat au chant et Lilian Bencini à la contrebasse rendronthommage à Billie Holiday le 11 août lors d’un prélude à Beaumont de Pertuis.Puis dès le 12 août les murs du Château commenceront à vibrer dès 18h30 avecle 4tet au violoncelle d’Éric Longsworth. Une belle surprise ! La soirée prendraensuite une autre tournure à 21h30 avec le 4tet du grand batteur et peintreDaniel Humair en compagnie du génial saxophoniste Emile Parisien, ducontrebassiste Jean-Paul Céléa et Vincent Peirani à l’accordéon.Le 13 août à 18h30 ce sera au tour des chouchous de l’Ajmi avec le TrioGuillaume Séguron. Et à 21h30 l’ensemble Ursus Minor proposera une musiqueinclassable puisée dans le hip hop, la soul music, le blues et le jazz.Le 14 août pas moins de trois concerts vous seront proposés : Lionel Garcinen duo avec Laurent Charles à 16h30, Samuel Sylvant 4tet à 18h30 et enfinl’Orchestre National de Jazz dans son projet Shut up and Dance à 21h30.Prévoyez d’acquérir leur dernier CD, qui est un trésor de sensations !DAN WARZY

1 Association pour le Jazz et les Musiques Innovantes d’Avignon

Jazz à la Tour0490 860 873www.jazzalajmi.com

Tour en jazz

Ursus Minor © A. Blithikiotis

Fort Napoléon : Nicola Folmer 4tetavec Daniel Humair (27/7), les incon-tournables Cecile McBee, Billy Hart,Billy Harper dans une formation TheCookers (28/7), le très beau concertdu Christian Brazier Quartet «Cir-cumnavigation» (29/7), Roger KellawayTrio avec en invité Dmitry Baevsky(30/7)

www.la-seyne.frBeaupré : Gonzalo Rubalcaba trio(15/7), Kenny Barron trio (16/7)

www.art-expression.netJazz sous les étoiles à Saint-Rémy :Marguerite and the Naked Boys puisPiero Iannetti 6tet pour un hom-

mage à Art Blakey et les Jazz Messen-gers (15/7)

http://jazzasaintremy.free.fr 04 90 946 835

La Roque d’Anthéron : Tord Gustav-sen Quartet (27/7), Tigran Hamasyansolo suivi du Yaron Herman Trio(28/7), le duo incontournable JoshuaRedman & Brad Mehldau (29/7),Eric Legnini Trio suivi de Hymne ausoleil par l‘Ensemble de LionelBelmondo (30/7), et le trio Aufgang(31/7)

www.festival-piano.com 0442 505 115

Quelques dates, entre Jazz des 5 continents et Jazz à Toulon (voir Zib’42…)

FESTIVALS 16 MUSIQUE

La «musique du monde» est un conceptfourre-tout, mais il faut bien collerune appellation générique sur ce qu’ellerecèle de richesse et de nuances…Car de la diversité, c’est ce qu’on trou-vera dans le foisonnement musicalproposé par le Festival de Robion :l’Afrique de l’Ouest sera présente avecdanses et percussions (Sokan, le 16juillet), les Balkans (concert de clô-ture de Fatum Fatras en premièrepartie d’Idir et son folk kabyle le 23),l’Inde avec Raghunath Manet le 21,de la salsa et de la rumba feront dan-ser aux sons de l’Amérique Latine (MuraPeringa et Kontigo, le 15), et puis dujazz (Trio Tentik), de l’afro-funk (Ko-kolo), et un bal «orientalo-tzigane-festif» (Santa Macairo Orkestar) pour

le 14 juillet... ce qui dépoussièreraavantageusement les festivités pré-vues à cette occasion.À noter l’intervention en ouverture dela compagnie de danse-escalade d’An-toine Le Ménestrel, les Lézards bleus,qui s’accrochera poétiquement auxmurs de la place Jules Ferry. Ainsiqu’une mystérieuse fable écolo-hu-manitaire programmée le 20 juillet,suivie d’un buffet en présence desartistes. Le Petit Lubéron va enentendre de toutes les couleurs !G.C.

Festival de RobionDu 14 au 23 juillet04 90 05 84 31 www.myspace.com/festivalderobion

Tout un monde coloré

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Primal Scream dans un hippodrome, pour unconcert unique en France... 3000 personnes sontattendues pour cette soirée du 24 juillet. Le MidiFestival ou comment rendre hommage aux grandes

années du psychédélique en utilisant les armes desDJs d’aujourd’hui ! Trois soirs, trois lieux : la VillaNoailles, la Plage de l’Almanarre sur la Route duSel, et l’Hippodrome de la Plage, donc,

accueilleront uneprogrammationpléthorique. Des groupesvenus pour la plupartd’Angleterre et des USA,quelques français, un duobelge (The Glimmers),et c’est parti pour undépaysement musicalassuré sous la pinède oules pieds dans l’eau.G.C.

Midi Festival, HyèresDu 22 au 24 juillet09 53 01 55 04 http://midi-festival.com

Une île va perdre son calme et fêter le sang chauddu sud, pendant dix jours ! Parce que la lagune duBrusc est un espace naturel protégé, des mesuresconséquentes sont prises pour limiter l’impact des35 000 visiteurs attendus, attirés par toujours plusde têtes d’affiches. Au menu, donc : Catherine Rin-ger, bête de scène, en ouverture le 16, le duo kitschCocoon prenant la suite, puis Jack Johnson etCharles Pasi, le beau gosse du blues dépoussiéré.Grosse soirée prévue le 21 juillet : Texas revientdes années 80, de même que Louis Bertignac. Le22, jour de reggae ! Jimmy Cliff, Dub Inc, AndrewTosh et John Holt envahiront la grande scène. Lelendemain, deux duos pour le prix d’un : Lily Woodand the Prick, et les australiens Angus et JuliaStone.

Le 24, ce sera au tour de Yannick Noah de sortir legrand jeu, accompagné d’une jolie blonde : Mar-gaux Simone. Les trois derniers jours verront sesuccéder Ben l’Oncle Soul (adeptes du 1er degrés’abstenir), l’omniprésente Selah Sue, ChineseMan (qui fait la course avec le soleil dans son nou-vel album), et pour finir un come back décoiffant,celui de Jamiroquai. Bon courage aux bénévolesqui vont œuvrer pour laisser place nette après ça.G.C.

Les Voix du Gaou, Six-FoursDu 16 au 29 juillet0 892 683 622www.voixdugaou.fr

Sors de chez toi !Difficile de résister à une telle invitation, surtoutquand elle est lancée par une équipe chaleureuse,qui se met en quatre depuis cinq ans pour concoc-ter un joli programme festif. L’an passé le tempsfrisquet n’avait pas refroidi les enthousiasmes,gageons que cette année encore le Dévoluy sauramettre en jambes ses festivaliers. Rien de tel qu’uneambiance de guinguette alternative pour cela, ettant As de Trèfle que Les dessous de la vie ou PPFCsavent faire danser sous les tilleuls. Quant au cloudu spectacle, il sera assuré par Marcel et son orchestre,«groupe d’appellation et d’origine incontrôlable»,qui se situe musicalement «exactement entreBourvil et Métallica» !

Sors de chez toiDu 12 au 14 aoûtDévoluy04 92 58 91 91 www.sorsdecheztoi.com

Gaou de fortes têtes

Hyères by night

Selah Sue © C

e�dric Viollet

Primal Scream © X-D.R.

THÉÂTRE18 AVIGNON

Le programme 2011 ne manque pas de propositionsdramatiques. C’est-à-dire, au sens en vogue depuis2500 ans, de spectacles reposant sur des dialogues,plus ou moins réalistes, échangés entre des acteurs,agrémentés de soliloques plus ou moins poétiques,et d’adresses plus ou moins directes au public.Toutes les révolutions esthétiques du théâtre résidantdans ces plus ou moins… À côté de performanceslittéraires ou plastiques, des pièces de théâtre, derépertoire ou en création ont donc occupé les cloitreset les salles durant les premiers jours du festival.Toutes hantées par la mort.Patrice Chéreau revient à Avignon après plus de 20ans d’absence… et bouleverse un public frissonnant.Le théâtre de Jon Fosse, virtuose dans ses variationsinfimes et ses changements de plans, lui va commeun gant, plus encore dans I am the Wind que dans lesRêves d’automne. Il y retrouve les non-dits d’unerelation entre hommes dont on ne sait exactement cequ’ils cherchent ni où ils sont : L’un et L’autre fontpenser au duo de Dans la solitude des champs decoton, même si l’écriture volontairement appauvrieest aux antipodes de celle de Koltès. À Vladimir etEstragon aussi, par leur allure de marginaux et leurquête métaphysique privée d’objet, et à tous lescouples masculins dominant/dominé du théâtre. Lesdeux acteurs anglais sont magistraux, si précis,physiquement impressionnants, n’hésitant pas àfoncer dans l’émotion sans hurler, juste en équilibrantles silences… Et la scénographie limpide et surpre-nante de Peduzzi, l’attention au rythme des gestesde Thieû Niang, font vibrer l’air d’une émotionparfaitement maîtrisée.Ce qui n’est pas le cas, pour l’heure, avec Mademoi-selle Julie. Il semble que Fisbach accorde plusd’importance à la dramaturgie et la scénographiequ’à la direction d’acteurs, auxquels il fait confiance.Avec Strindberg c’est un tort, et doublement quandil s’agit de Nicolas Bouchaud et Juliette Binoche :l’actualisation de l’intrigue, l’esthétique hyper-léchéedu décor, les écrans sonores et spatiaux qu’il placeentre les acteurs et le public, les apparitions fantas-tiques qui font penser au bal de Judex, tout cela estjuste, intelligent, intéressant. Mais à la premièreChristine, Jean et Julie jouaient chacun leur pièce :l’une juste et théâtrale, l’autre cabot et excessif, etnotre star naturelle et un brin fade. Mais l’on sait àquel point Bouchaud peut-être un démesuré splen-dide, et Binoche un éclat pur de beauté (pourquoi simal l’habiller, la coiffer, l’éclairer ?), et on espère quele temps bonifiera rapidement l’affaire !Avec le Suicidé, c’est hélas moins probable. La piècede Nicolaï Erdman, fondée sur quiproquo initial,écrite sans morceau de bravoure, est une comédiealerte contre une société soviétique qui interdit l’am-bition individuelle. Sans avenir, de petits personnagesdésorientés tablent sur le sacrifice du plus faible pourrehausser leurs causes mesquines. Mais PatrickPineau dans le rôle principal se comporte en showman, et le décor volontairement étriqué oblige lescomédiens à restreindre leurs gestes, ou à parcourir,

perdus, l’espace démesuré de la carrière Boulbon :le rythme ne prend pas, sauf lorsqu’enfin, dans lesscènes de groupe finales, ils sortent de leurs boîteset étalent le vaudeville loin des portes qui claquent,dans l’espace…Jan Karski n’est pas une pièce de théâtre, mais lamise en jeu du roman de Yannick Haenel qui a faitpolémique à sa sortie. Parce qu’il fictionnalise l’his-toire la plus douloureuse de l’humanité, celle de laShoah, introduisant une confusion entre le témoi-gnage et la fable. Pourtant la mise en scène d’ArthurNauzyciel reprend les trois plans distincts du roman,différenciant très nettement le témoignage durésistant polonais filmé par Claude Lanzmann dansShoah, le résumé du livre du Story of a secret state endeuxième partie, puis la fiction, extrapolation à partirde la vie de Karski aux États-Unis de ce qu’a pu pen-ser cet homme, témoin du génocide, de la passivité

des Alliés en 1943 et1944. Nauzyciel à lasuite de Haenel expé-rimente comment lerécit, et le théâtre, réac-tivent l’histoire, pensantqu’il faut combattre lesilence, quitte à extra-poler. Les frontières étantclaires il n’est là, sem-ble-t-il, aucune trahisonde mémoire… mais par-fois des incongruités.Comme la deuxièmeséquence, vidéo beau-coup trop longue deMiroslaw Balka, oul’évocation inutile de la

danseuse juive que Karski épousa. Laurent Poi-trenaux en revanche, incarnant Karski dans lescouloirs d’un opéra désert, est comme toujoursépoustouflant.AGNÈS FRESCHEL

I am the Wind s’est joué jusqu’au 12 juillet,Mademoiselle Julie se joue jusqu’au 26 juilletau Gymnase Aubanel, Jan Karski jusqu’au 16 juilletà l’Opéra-Théâtre, Le Suicidé jusqu’au 15 juilletdans la carrière Boulbonwww.festival-avignon.com

À la vie à la mortLe Festival d’Avignon a commencé, et avec lui un cortège de plaisirs et d’interrogations

Le suicidé� © Agnès Mellon

I am the wind © Simon Annand

De mémoire de Festival, jamais autant d’enfantsn’avaient foulé les planches… Ce sont les écoliers deMonclar, quartier de résidence de la future salle derépétitions du Festival, qui ont donné le coup d’envoide la 65e édition avec une reprise du Petit Projet dela matière d’Odile Duboc par une danseuse du projetinitial, Anne-Karine Lescop.Cyril Teste et le Collectif MxM ont ensuite proposéavec Sun un fantastique poème visuel en noir et blancautour de l’histoire vraie d’une paire d’enfants partissur les routes du soleil pour se marier en Afrique. Trèspeu de textes illustrent ce «voyage amoureux» : unevoix off de l’adulte devenu qui interroge un territoirepersonnel secret, le souvenir d’enfance. Hallucinantsde cette pureté des enfants acteurs qui ne jouent pasmais vivent, les deux personnages «comprennentmieux le silence que la voix des hommes», gravissentdes boites de Pandore pour s’aimer et grandir, tra-versent le temps de tous les possibles, des merveillesou de l’impuissance, du mystère des sentiments, etpar le prisme de la vidéo en direct, nous renvoient aumiroir démultiplié de notre intimité. La force spé-cifique de l’enfance est ici restituée dans une poésievisuelle saisissante, très technique mais pas envahis-sante. Ce qui confirme le talent de ce collectif pourintégrer les nouvelles technologies.

Plus conceptuelle, la présentation à la Cour d’Hon-neur de la création Enfant de Boris Charmatz, artisteassocié de l’édition, aura eu son lot d’applaudis-sements contrastés propres au lieu mythique. Il fautdire que le spectacle démarre lentement, jouantd’inertie : une grue arrache un par un, adagio dans lesilence des cliquetis, les liens d’une corde où descorps adultes seront suspendus et baladés sur unegigantesque piste de skate-board, puis neuf danseursmanipulent les enfants endormis, malléables, instru-mentalisés… La vraie jubilation arrive quand la smalaenfantine «se réveille et prend le pouvoir» en inversantla situation. Prévisible mais néanmoins désopilant !C’est avant tout l’utilisation savante de l’espace, etcette confiance totale accordée par les 24 enfantssur un plateau, qui sont irrésistibles : la danse à pro-prement parler relève plutôt d’une chorégraphierécréative que d’une partition précise. Mais la Courrésonnera sans doute longtemps de la libertéenfantine…DELPHNE MICHELANGELI

Sun de Cyril Teste est joué jusqu’au 13 juilletSalle Benoît XII, Enfant de Boris Charmatz a été joué du 7 au 12 juilletdans la Cour d’Honneur

Sa Majesté des Enfants

THÉÂTRE 19

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La madrilène Angelica Liddell, grandedécouverte du Festival 2010, perfor-meuse qui écrit et joue ses spectaclessans tabou ni retenue, revient à Avi-gnon avec Maudit soit l’homme qui seconfie en l’homme, un projet d’alpha-bétisation écrit après son séjour enFrance. Alors qu’elle apprend le b.a-bade la langue pour communiquer -du pains’il vous plait, c’est combien, merci-,elle vit parallèlement au succès avignon-nais des meurtrissures personnelles, etdécide de mettre à bas la relationhumaine. «Je travaille avec ce qu’il y ade pire en moi pour aider le spectateurà comprendre l’âme humaine et l’ame-ner à un exercice de compassion.» Avecun traitement qu’elle infléchit depuis 3ans, passant de la douleur à une ana-lyse plus intime et psychologique. Elleconçoit ici un abécédaire désespéré,basé sur la méfiance absolue. Entouréepar l’innocence symbolique de 9 enfantset des acrobates chinois (pourquoi ?),elle crée en deux parties, en haine dela famille, un éloge de la solitude d’unepoésie sombre et torturée. Elle fouilledans la mythologie, revisite Cria Cuer-

vos et redéfinit un monde de mons-truosité pour mieux approcher de labeauté de l’âme. Un Eden paradoxalhanté par Schubert, Porque te vas etdes loups confidents : moins violentphysiquement, moins construit aussi

que la Maison de la force présentée l’anpassé, mais tout aussi dérangeant.

Une nuit de RoisVincent Macaigne délivre une visiontrès personnelle de Hamlet. Dans Au

moins j’aurai laissé un beau cadavre, lemetteur en scène et sa bande d’ac-teurs géniaux interprètent le mythed’une manière si moderne, brutale etsonore que le cloître des Carmes en atremblé longtemps. Ils mettent le théâ-tre en fête, à sang et à cris, pour explorerla barbarie humaine et le poids de lafiliation. Sous ses airs de bazar féliniendestroy, la dramaturgie est absolumentlimpide et le théâtre de Shakespeareinfiniment respecté, même si l’histoiresonne des mots de Macaigne. Entrefolie et métaphysique, tourbillons d’ima-ges fortes et cruelles, de châteaugonflable et d’aquarium géants, lesacteurs nous exhortent à vivre. Hors denos gonds. Dans ce théâtre de chair,de rires et de hurlements, passent dessilences qui délivrent une émotionpure. Quatre heures d’intelligence decréation.DELPHINE MICHELANGELI

Maudit soit l’homme…est joué jusqu’au 13 juillet à 12 h et 17 h dans la Salle de Montfavet.Au moins j’aurai laissé un beaucadavre est joué jusqu’au 19 juillet à 21h30, relâche le 14, au Cloître des Carmes

Il est des artistes qui transforment le plateauen champ de bataille et mêlent leur vie à la scène

Radicaux libres

Maudit soit l'homme... © Delphine Michelangeli

THÉÂTRE20 AVIGNON OFF

Si vous annoncez que vous vous rendez au théâtrepour y voir Rhinocéros de Ionesco en… Coréen, vousrisquez de passer pour snob. Pourtant cette repré-sentation au théâtre des Halles, en Coréen (surtitré,le snobisme ne poussera pas à prétendre suivre danscette belle langue les syllogismes Ionesciens !) estun vrai bonheur. Tant pis pour le snobisme ! La miseen scène d’Alain Timar est d’une très éléganteépure : un jeu de miroirs et de panneaux blancs,translucides ou opaques, module l’espace, des cubesblancs deviennent bureaux, lits, chaises…. Légèretransposition : dans les bureaux où les uni-cornusapparaitront règnent des portables. Les personnagessont en tailleur et costume cravate, première unifor-misation que l’aspect négligé de Bérenger souligne.L’épidémie de Rhinocérite se fonde dans ce confor-misme vestimentaire qui n’épargne personne : lepublic se reflète dans les miroirs… Les percussions

de Youg Suk Choi rythment avec subtilité le mouve-ment dramatique, les évolutions des personnages

dessinent une véritable chorégraphie, efficace, avecdes arrêts sur image, des décalages, des accélé-rations, des ralentis… on passe du burlesque autragique, de la banalité au drame, du rire à la prise deconscience, et ce avec le même bonheur. Et le Coréen dans tout ça ? Une saveur supplémen-taire, une musique expressive et dense qui devientun élément de dramaturgie. Par trois fois le motbonheur se répète, ce n’est pas du à un absurde ha-sard mais une conjugaison jubilatoire metteur enscène, musicien, comédien et public. Une sorte d’hu-manisme universel pour résister aux rhinocérites !MARYVONNE COLOMBANI

Rhinocéros est joué jusqu’au 29 juillet à 11hau théâtre des Halles© Manuel Pascual

Atypique que le spectacle qu’offrent les cies Campoet Le Souffle, unies sur une envie de travail commundepuis quelques années : un solo émouvant et tendreà la limite des genres, entre danse et théâtre. Unesilhouette au sol, dessinée à la craie ; un personnageà côté se souvient. Sorte de veillée funèbre où l’on seremémore les souvenirs de l’enfance, où la perte duparent, ici du père, renvoie non seulement à l’imageque l’on en avait mais surtout à soi-même. Le passés’esquisse sur le sol, coups de craie rapides, pourfaire renaître des personnages, des pensées, il y aLuca, Maxime, les lettres inachevées, les jeux d’en-fant… Il y a la Nonna, fantasque, ancienne danseusepuis chanteuse lyrique, délicieuse de folie. Les spec-tateurs sont enrôlés dans cette quête du passé,deviennent des personnages, des animaux de com-pagnie… et le monde devient signe. Les traces sur le

sol s’effacent, marbrent les vêtements, dont la blan-cheur originelle, se nourrit. Fragmentation volontaire,désordre à l’image de la vie, bribes d’Histoire. La mortde Pasolini, Armstrong qui pose le pied sur la lune,constituent des points d’ancrage, où s’attache lamémoire. La partition musicale de Paolo Santis jouesur ces multiples strates. On sourit, on rit, on s’émeutà ce spectacle qui gagnerait en intensité à resserrerun peu son propos. Une belle qualité cependant avecl’interprétation humoristique et sensible de MarcoBecherini qui se glisse dans tous les rôles, sur labelle mise en scène de Bruno Deleu.M.C.

Le storie di Italo est joué au Laurette Théâtrejusqu’au 31 juillet à 19h

À corps et à coupsEtrange duo que celui de cette mère etsa fille Lily, écrit par Adeline Picault enun court roman chez Actes Sud. Ecri-ture juste et incisive, même si l’on a dumal à croire à la violence quasi amou-reuse de cette mère qui se venge desa vie, de ses ratés, de ses déceptionssur sa fille à coups de chaussures deluxe. Rouge, bleu, violet, jaune, cou-leurs de fête, mais aussi de la marquedes coups, de la chair meurtrie. Em-manuelle Brunschwig, avec sonphysique de môme Piaf, joue de cettecruauté innocente, s’affirme «bonnemère», désarmante dans l’aveu. «Je teprépare à la cruauté du monde»affirme-t-elle en justification de soncomportement de bourreau. PaulineJambet campe une Lily déchirée,primesautière, désabusée, éblouie,

éclatante enfin, au départ définitif dela maison. En contrepoint subtil, lacontrebasse d’Eugenio Romano joueune partition complexe, à l’instar d’unchœur antique parfois, mais surtout,suscitant des sens nouveaux. Le thèmemozartien de Ah vous dirais-je maman,en majeur ou mineur, apporte une tou-che délicatement ironique, alors queles passages composés par le musicienourlent le jeu des actrices de sourdeset tendres irisations. La mise en scènede Serge Barbuscia, rigoureuse, ef-ficace, joue sur la simplicité d’un décoren pente, sur lequel les lumières de Sé-bastien Lebert tracent de superbesvolutes. Un spectacle en train deprendre ses marques, mais déjà nourride passion.M.C.

Bats l’enfance se joue au Balconjusqu’au 30 juillet à 15h45

À la recherche du temps perdu

Unicornes d’Asie

© Djouadou Amar

© X-D

.R.

THÉÂTRE 21

À l’invitation de l’Académie de Théâtrede Shanghai, Gérard Gélas revisite ungrand classique de la culture chinoisedu 14e siècle. Mettre en scène les 16actes de l’opéra Si Siang Ki ouL’histoirede la chambre de l’Ouest de WangChe-Fou est un pari un peu fou pourle directeur du Chêne Noir. Après avoirmené une master class, il s’est engagéà travailler avec les jeunes acteurs,conquis par leur gestuelle et leurs con-naissances théoriques, notamment duthéâtre russe et la méthode Stanislavskiqu’il pratique lui-même. Les premièresrépétitions se sont faites à Shanghai etles 10 acteurs sélectionnés finalisentdepuis le mois de juin la création à Avi-gnon. Après une traduction en chinoismoderne, Gérard Gélas adapte cettepièce en respectant scrupuleusementla trame littéraire universelle, à savoirl’histoire d’amour contrariée entre deux

jeunes gens qui n’appartiennent pas àla même classe sociale : une mère veuveet ambiguë, des servantes entremet-

teuses et désobéissantes, des officesreligieux au goût d’encens, un généralabusif, des volte-face et trahison, et des

amoureux fous de désir… On s’attacheà ces Roméo et Juliette, superbes etc’est peu dire, subtils et pudiques, heu-reux de partager à Avignon leur cultureplurimillénaire. Décors minimalistes etéclairages travaillés, costumes somptueux,l’esprit de la pièce est scrupuleusementconservé même si sont ôtées toutesles parties chantées. Rien de fonda-mentalement contestataire mais pourGérard Gélas «monter aujourd’hui destextes aux valeurs subtiles, ça c’estrévolutionnaire».DE.M.

Si Siang KiEn chinois surtitré est jouéJusqu’au 29 juillet à 11hau Chêne Noir,

© M

anuel Pascual

À tous ceux qui avaient aimé le spectacle La vie deGalilée par la Compagnie du grand soir l’andernier, la représentation de cette saison a un goût

délicieux de revenez-y, et ce n’est pas seulement àcause du vin rosé frais servi avant et après lareprésentation. Comme le bon vin, le spectacle ad’ailleurs gagné en saveurs, avec un rythme plussoutenu, plus enlevé, un découpage plus clair, uneconstruction d’une joyeuse rigueur. La mise en scènejongle entre commedia dell’arte, mime, chants,dialogues. Une touche poétique aussi  : Galiléeportant le globe lumineux du monde, c’est le rêved’une humanité qui cherche à comprendre, à savoir,exigeante et imaginative. La gageure de condenserla pièce de Brecht en 1h30 est tenue avec brio, et lerire est d’autant plus franc qu’il libère, et enseigne.Comment faire comprendre que le soleil ne tournepas autour de la terre, par le simple biais duraisonnement  ? Les scènes sont délicieusesd’humour et de vérité ! Certains passages restent

d’une brûlante actualité, exposant les relations entrela science et les pouvoirs politiques et religieux… onpense aux créationnistes.Pas de culte héroïque non plus : Brecht nous met engarde contre tous les fanatismes, celui qui sanctifieles héros du peuple aussi. Galilée y prend unedimension humaine d’autant plus touchante, avecune morale assez voltairienne lorsqu’on le voitvieillissant cultiver son jardin… Un plaisir intelligent,bel acte de résistance à tous les obscurantismes.MARYVONNE COLOMBANI

La vie de Galilée par la Cie du grand soirse joue à l’Espace Roseau jusqu’au 29 juillet

À poil …… mais pas au poil le Feydeau de Gé-rard Gelas créé cet hiver au ChêneNoir et repris pour le festival ! Il fautdire que la pièce qui tient tout entièredans son titre n’est pas de celles quiont fait de l’auteur le roi de la méca-nique du rire ; écrit en 1911, quelquesannées à peine avant l’internement etla mort (la syphilis... mal du siècle) ce«divertissement» en un acte délaiedans la répétition une situation conju-gale piquante qui fait office d’élémentdéclencheur, d’intrigue et de dénoue-ment : la fesse endolorie de Clarisse,victime d’une guêpe fatale et pro-menée sous le nez de tout un chacun-«Sucez-moi ! Sucez-moi !»- aura raison

de la carrière ascendante de sonministrable de mari. Gérard Gelas en rajoute, et sert surson plateau à moquette rouge de quoidonner un peu plus de consistance à lasatire : un Ventroux nerveux, tape-à-l’œil, député concupiscent affairé à sesplaisirs en galante compagnie et necessant de répéter «c’est dans sonpropre parti que l’on trouve le plus d’en-nemis», est victime des indiscrétionsd’un valet «infiltré» ici transformé enjournaliste ; l’épouse, ingénue ou per-verse selon les lectures, est clairementici vêtue d’une noire guêpière, affirmesa quête de liberté et quitte la scèneavec une valise bien émancipatrice,

indice de sa participation au complot.La jeune actrice (Olivia Forest) à laplastique impeccable verse ses mala-dresses au compte du rôle, le politicienvulgaire (Guillaume Lanson) emprunteà Jerry Lewis ou à Louis de Funès : lerythme mime l’allégresse et l’horloge-rie mais ne fait pas illusion. Le meilleur ?Clémenceau en ombre chinoise,voyeur et commandeur, témoin de lachute d’un monde...MARIE JO DHÔ

Mais n’ te promène donc pas toute nueest joué au donné au Chêne Noirjusqu’au 29 juillet à 17h

Et pourtant ils résistent !

L’autre Roméo

© Xavier Torres

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22 THÉÂTRE AVIGNON OFF | VAUCLUSE EN SCÈNE | VILLENEUVE

Le Conseil général 84, par le biais de d’Arts Vivantsen Vaucluse, organise depuis quatre ans un festivalgratuit mettant à l’honneur ses artistes. Vaucluseen scène a commencé le 1er juillet dans la Cour dela Chapelle Saint-Charles, un lieu chargé d’histoire enretrait de la liesse avignonnaise, pour vagabonderensuite dans les villes et villages alentour. Apt etCargas ont ainsi accueilli Et il me mangea… par la ciedu Vélo théâtre, un théâtre d’images et d’émotionshabilement conté, et Françoise Murcia, une choré-graphe qui bat la bonne mesure dans le Vaucluse. Les rendez-vous orchestrés ont offert des belles(re)découvertes : le bal guinguette de Manu & Co adémarré en musette et en chanson réaliste saucemanouche ; le slam a eu le champ libre avec une scèneouverte et le double concert de R.A.P.H et Dizzylezet Skub. Ce duo alterne avec délicatesse slam/pianoet laisse éclater les mots d’un poète bien engagé.Dizzylez a d’ailleurs ouvert le débat de StéphaneHessel à la Maison Jean Vilar le 9, avec un très sensi-ble texte sur la liberté. Les Onstap ont réaffirméParce qu’on va pas lâcher : un duo de percussionscorporelles tirées à quatre épingles, des anecdotesuniverselles du quotidien, des souvenirs d’enfancesensibles dans un quartier qui ne l’est pas moins.Autre rendez-vous récurrent avec un ciné-concertd’ArchiPass (Nicolas Chatenoud et GuillaumeSaurel) qui a fait découvrir le 1er épisode de la sériedes Maciste, après une commande du Festival ducinéma italien d’Annecy. Si le film est un nanarmythique, il confirme le savoir-faire du duo dansl’accompagnement de film muet. Ils sont à la hauteurdes muscles du héros !Le théâtre, plus difficile à déplacer dans une courpour une représentation, aura été l’objet d’unelecture musicale de Jean-Yves Picq accompagnépar les baguettes magiques de Guigou Chenevierdu Collectif Inouï.DELPHINE MICHELANGELI

La création vauclusienne

Duo ArchiPass pour Maciste © Delphine Michelangeli

Création collective de la compagnie Artefact, inspiréepar la catastrophe pétrolière de 2006 touchant l’Alas-ka par négligence volontaire de la firme BP, AlaskaForever est mis en scène par Philippe Boronad.Soutenu par Greenpeace France, le collectif recréele chemin mental d’une journée particulière de l’Hom-me en blanc, un grand patron de l’industrie pétrolière,confronté à une catastrophe écologique sans pré-cédent. Quelle sera sa décision ? A-t-il vraiment lechoix ? Prendra-t-il ses responsabilités ? Au centred’un plateau télé, assis sur un fauteuil ressemblantétrangement à celui d’un dentiste, il se confessera àAngel Stellavision, incarnation fantasque -et très dé-

guisée- de sa conscience. Pour refaire le film à l’en-vers, déjouer les mécanismes du pouvoir, retrouverl’enfance, la relation humaine, la poésie du froid : unepensée positive, ouvertement utopique ou volontai-rement naïve, qui veut croire aux possibles. Pour se confronter au monde virtuel, la compagniedispose d’outils technologiques : vidéo en direct oupréenregistrée, simulation de «reality show», écrangéant en fils blancs, qui ne visent cependant pas laprouesse technologique ou l’effet novateur. L’essen-tiel reste théâtral, et croise les arts voisins, leurempruntant des éléments de vocabulaire malheu-reusement pauvres : projections des photos du ciel

de Yann Arthus-Bertrand,lutherie visuelle censéedéclencher des séquen-ces sonores qui resteinvisible au spectateur, etdanseuse qui agite desfoulards blancs pour con-ter l’histoire de la Baleineet du Corbeau… En celala forme pêche, même sile message reste essen-tiel.DELPHINE MICHELANGELI

Alaska Forever est joué à la Manufacture jusqu’au 28 juillet à 16h15(relâche le 18)

Good-bye Alaska

© Delphine Michelangeli

Marivaux a toujours su associer «a-mour» et «surprise» en prenant acteque, le cœur étant placé à une certainedistance de la tête, le parcours del’allumage du sentiment à sa prise deconscience pouvait constituer unressort dramatique essentiel. CetteSeconde Surprise… ne montre riend’autre que le retard, l’infirmité de laraison et du langage face à l’implacableavancée de l’amour, qui est d’abord niéostensiblement par une veuve Mar-quise et un Chevalier plaqué, charmants inconsolables. C’est à cet endroit du délai nécessaire pour passer dela douleur, qui n’est pas sans attrait, à l’acceptationde l’évidence violente d’une vie déjà revenue, que sefaufile l’intelligente référence au travail de SophieCalle, dont la scénographie témoigne avec son empi-lement de boîtes ouvertes au regard, multiplicationde mini-théâtres intérieurs où se passe au vu desspectateurs le temps de la coulisse. Intelligente, quali-ficatif absolu de toute la mise en scène d’AlexandraTobelaim : naturel délié des acteurs tous si plaisantsdans la pleine intensité du mot, parfois finement sur-jouant et la comédie emporte le rire aux éclats ;fraîcheur, verdeur des gestes et de l’élocution pro-saïque ; les costumes aussi qui sont de la partie avecleur turquoise ou leur gris tourterelle, leur transpa-

rence coquine ou leur faux air passe-partout. Les corpsparlent de souffrance ou de désir, font lever la pous-sière de la piste (cendres ? sable noir ? terreau ?),bondissent ou rampent, inquiètent même parfois : etsi ça ratait, comme au cirque le saut périlleux ? Lajeunesse éternelle du sensible est portée par un jeurigoureux et maîtrisé dans son apparente légèreté.Marivaux, moderne parmi les Modernes, auraitreconnu les siens !MARIE-JO DHÔ

La Seconde Surprise de l’Amour est jouée par la compagnie Tandaïm jusqu’au 27 juilletà 21h15 dans le cadre de Villeneuve en Scènesur la colline des Mourgues

Seconde joie !

La Seconde surprise... © X-D.R

DANSE23VAISON | CHÂTEAUVALLON | MARSEILLE

C’est le ballet Alwin Ailey qui ouvrait cetteannée à la fois le Festival de Mar-seille les 16 et 17 juin, et Vaison Dansesles 8 et 9 juillet, pour un hommage à lamodern jazz américaine, si peu pré-sente sur les scènes françaises, et sipratiquée dans les écoles… Les jeunesdanseurs ont fait une démonstrationépoustouflante de leur technique, etont su, par leur enthousiasme et leurgénérosité visibles, susciter l’adhésionemportée des publics divers qui bigar-raient avantageusement les gradins.Pourtant cette danse suscite quelquechose d’étrange : calquée sur les techni-ques classiques qu’elle chaloupe,

déhanche et décoordonne, mais dontelle respecte les stricts placements, ladanse jazz est comme un descendantdésasservi de la danse blanche : lesextraits de répertoire (1958.1983), etsurtout Revelations (1960) montrent àquel point l’art d’Alwin Ailey ressortitd’une revendication noire marquée dechristianisme, d’une vision conformistedu corps, du couple, des rôles, rappe-lant au mieux Porgy and Bess, au pirel’oncle Tom… The Huntde Robert Battle,énergique, urbain, percussif, en est, 40ans plus tard, naturellement débar-rassé.A.F

Mémoire d’un peuple ?

© A

gnès

Mel

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© A

gnès Mellon

Thierry Malandain a choisi d’écrireun libre commentaire de Roméo et Ju-liette confronté à la partition de Berlioz.Si l’exercice de style est irréprochable,la technique parfaite et les danseursincontestablement au sommet de leurart de l’étirement et de la tension ex-trêmes, on s’ennuie aussi ferme queleurs corps : la pièce est monotone,parfois dépouillée à l’extrême, parfoisampoulée, les étreintes y sont descombats corps à corps et manquentsacrément de sensualité. Pourtant le

chorégraphe conjugue la pièce au plu-riel et imagine un chapelet de Roméoet de Juliette (22 danseurs) en lieu etplace du couple mythique ; sans comp-

ter les 16 malles gris acier qui jonchentle plateau, sans cesse déplacées, ouver-tes, refermées, abaissées, dressées…Un parti pris qui offre de beaux momentsde groupes -dont certains ne sont passans évoquer West Side Story- maisaffadit le récit jusqu’à en faire disparaî-tre sa tension dramatique. Les amoursmalheureuses des deux amants,même démultipliées, ne parviennentpas à nous tirer une larme…M.G.-G.

Roméo et Juliette a été dansé le 8 juillet à Châteauvallon

À venirRoméo et JulietteLe 19 juilletVaison-la-romaine04 90 28 74 74www.vaison-danses.com

Shakespeare in love

Pour se préparer à 2013 et donner d’oreset déjà aux habitants une «meilleurevisibilité de ce que sera la capitale cul-turelle européenne», la Ville de Marseillea organisé un festival au carré sur leVieux Port piétonnisé pour l’occasion.Il s’agit pour Daniel Hermann, adjointà la Culture, de «mettre en perspectivece que fait la ville pour dynamiser sa vieculturelle, pas seulement au niveau desinvestissements et des bâtiments, maisdans le fonctionnement quotidien. Ainsile territoire marseillais compte au longde l’année près de 100 festivals, qui n’ontpas une visibilité assez importante.Nous avons voulu souligner le dynamis-me de certains d’entre eux par cettejournée de fête gratuite et populaire.»Le pari est relevé : on peut s’interrogersur le peu de pertinence de certains,qui confondent visiblement culture etdivertissement (Festifemmes pour re-présenter le théâtre marseillais ? Salsatongues comme manifestation cultu-relle  ?). Sur la prédominance de ladanse aussi (Festival de Marseille,BNM…) et des musiques actuelles

surtout, de tout genre (Jazz des 5continents, Marsatac, Fiesta desSuds, Salsa Tongues, Mimi..). Bref,l’absence de théâtre, de rue ou non, etmusiques savantes «classiques» oucontemporaines, font craindre que laprogrammation spectaculaire de 2013par la Ville ne s’oriente vers une cultureque l’on croit populaire, alors que rienn’est plus populaire à Marseille qu’une

retransmission d’opéra… Mais l’or-chestre de l’opéra de Marseille sera làl’an prochain, Jeanine Imbert, adjoin-te à l’opéra, le promet !Pour ce qui est du succès de la fête,l’excellent jazz rock fusion du groupeNamasté s’est taillé la part du lion, lesublime duo de Forsythe interprétépar le BNM aussi, ainsi que l’incroyabledémonstration des Rappeurs HipHop-

pers, et le cours gratuit de salsa. LeVincent Strazzieri trio a offert à unpublic bon enfant de bons vieux stan-dards de jazz. Le but avoué de «créerdes synergies qui entrainent à sortirchaque festival de sa coquille, perti-nente, mais trop souvent confidentielle»est tenu ! Comme lors des dernièresmanifestations organisées à Barge-mon par le Festival de Marseille(Dolores de Jomar Mesquita), l’Opéra(retransmission du Cid) ou la mairie(Fête Bleue), le public est là. S’il s’agitde faire venir à la culture un public quis’en tient habituellement éloigné, onne peut qu’applaudir à deux mains. Enveillant à ce que ce festival au carré,qui «préfigure 2013», n’amène pas lesacteurs culturels à revoir à la baisseleurs exigences esthétiques, et lesorganisateurs à confondre fête etculture. AGNÈS FRESCHEL

Le Festival des festivals s’est tenu le9 juillet de 15h à 1h

Concentré de festivals

Vincent Strazzieri trio © D

an Warzy

24 DANSE FESTIVAL DE MARSEILLE

Le Festival de Marseille a su cette année composerune programmation très cohérente, centrée sur laquestion noire si absente de nos scènes, remplissantles salles, et métissant son public de jeunes, deprimo-spectateurs qui côtoyaient les professionnelset les habitués dans une belle convivialité. À Barge-mon, pour le spectacle mambo/salsa du brésilienJomar Mesquita, les spectateurs se sont chiffrésen milliers, mettant définitivement hors jeu lereproche d’élitisme que certains font parfois au Fes-tival. Affirmant encore son soutien aux compagniesrégionales, offrant aux marseillais le plaisir de voir desgrands ballets internationaux très rares, accompa-gnant ses spectacles d’expositions, de conférencespertinentes et pointues, le festival de Marseille, quichaque année clôt les saisons et ouvre l’été, s’imposedésormais comme indispensable à la vie culturellede la région. Quant à la réussite esthétique des propositions, elleest forcément diverse ! À la Salle Vallier Alvin AileyBallet montre les limites de la danse jazz (voir p23),mais la démonstration de la Cie Cunningham estd’une exemplarité qui laisse pantois. Nearly 90° estune pièce d’une abstraction sans concession, d’unevirtuosité contemporaine sans effets : les techniquesde corps mises au point par le chorégraphe semblentlibérer toutes les énergies et permettre les décoor-dinations, les dynamiques, les vitesses les plus folles.Le plaisir pur de contempler le mouvement inouïsuffit, et comble sans thème, ni histoire, ni message…Southern Bound Comfort ne sait s’en contenter : lapièce de Gregory Maqoma, qui tranforme ShanellWinlock en insupportable harpie chorégraphe, estd’une drôlerie évidente et laisse échapper des éclatsde danse bouleversants. Mais dans BoundSidi LarbiCherkaoui dilue la pertinence habituelle de sonpropos dans des allégories démonstratives autour decordes qui lient, tracent et enchaînent, mais nelaissent que peu d’espace aux corps, pourtant sisplendides, de ses deux interprètes.

Crépue et re-belleAux Bernardines le spectacle de Chantal Loïal agitexactement à l’inverse  : revenant sur l’histoiretragique de la Vénus hottentote, la danseuse l’incarneavec une émotion qu’elle puise essentiellement dansla musique, et dans les quelques mots qui racontentl’histoire de cette femme noire et callipyge. Sa miseà nu, ses convulsions disent la douleur de son exhi-bition forcée qui l’animalise, mais le solo se construitdans un renoncement volontaire à la sensualité (vuecomme un asservissement ?) qui laisse un peu àdistance…«Derrière nos histoires de cheveux se cachent toujoursd’autres histoires.» Des histoires d’aliénation, d’escla-vage, de colonisation et d’exils. Avec Moi et mon

cheveu, Eva Doumbia met une nouvelle fois enscène les questions qui parcourent le travail de sacompagnie La part du pauvre. À sa manière habi-tuelle, qui mêle musique traditionnelle et électronique,vidéo, danse, chant et jeu, dans une forme métissequ’elle nomme «théâtre documentaire». Eva Doumbiaavait déjà présenté son Cabaret capillaire en avant-première aux Bernardines (voir Zib’ 38) et la sincéritéde ce spectacle hybride, qui tissait les supports etentremêlait les voix narratives, y éclatait dans uneénergie festive : son caractère désordonné, parfoisbrouillon, ajoutait à son charme, à l’image de cheveuxdifficiles à démêler, à défriser ou de coiffurescomplexes. Au Gymnase, malgré les artificescensés rendre l’ambiance d’un cabaret, l’atmosphèrea perdu de sa magie. L’originalité fondamentale duspectacle, qui faisait concrètement pénétrer lespectateur dans l’intimité d’une loge en premièrepartie, s’est diluée, et l’adhésion est moinsimmédiate. Les excellents musiciens et danseurs, lestrois magnifiques chanteuses sont là ; les documentsvidéo n’ont rien perdu de leur force ; les textes deBibish Mumbu parlent toujours aussi juste. Pourtanton reste un peu en retrait, à regret…AGNÈS FRESCHEL ET FRED ROBERT

La belle édition !

Nearly 90 © Agne�s Mellon

Moi et mon cheveu © Agne�s Mellon

L’excellent cru 2011 du Festival deMarseille nous fait regretter l’absenced’une Maison de la danse permanente,où le répertoire croiserait les écrituresnovatrices. Le public, venu massive-ment plébisciter Alvin Ailey, MerceCunningham, Olivier Dubois ou AkramKhan, témoigne d’une appétence queles programmations, sporadiques pourl’heure, ne comblent visiblement pas. Du coup le festival répond à 100% àl’ouverture au monde et au métissagedes formes, des sensibilités, des idées :danse chamanique et corps sacréd’Akram Khan dans Vertical Road,danse mécanique et corps éprouvéd’Olivier Dubois dans Révolution, corpsdématérialisé par N + N Corsino dansl’installation Mues, expressionnisme etcorps mis à nu dans Amour, acide etnoix de Daniel Léveillé.Le Belge Raven Ruëll se taille une pla-ce à part et offre une performanceintense, Mission, un soliloque de 2 heu-res qui marque l’incursion réussie dufestival dans la création théâtrale.Malhabile, hésitant, le front perlant desueur, claudiquant, l’exceptionnel Bru-no Vanden Broeckeévoque sa missionévangélique au Congo par petitesdécoupes impressionnistes et imagesréalistes : on rit beaucoup au récit deDavid van Reybrouck1, à ses remar-ques piquantes sur les Blancs et lesNoirs, à l’incompréhension occidentaledu fatalisme africain ; on s’abandonneaux larmes quand il avoue, visiblementému, avoir laissé son cœur en Afrique. Émotion tout aussi palpable à VerticalRoad, quand le Britannique AkramKhan entraine sa «tribu» sur le cheminde la spiritualité jusqu’à la transevertigineuse : dans un espace-temps

immémorial chacun des 8 interprètesfait entendre les pulsations du monde,sa force tellurique et sa propre voixdans ce chorus : la danse est fluide,sismique, spasmodique, trop narrativeparfois. Mais on sent leur âme voler au-dessus de leur corps…Le Français Olivier Dubois «inflige» àses danseuses un rythme infernal,éprouve leur endurance autant que larésistance du public en prise à leurstournoiements immobiles et à leursmouvements métronomiques imposéspar une réinterprétation du Boléro deRavel singulièrement étirée. Inspiréepar le mouvement des mères argen-tines réunies à Buenos Aires en 1977,Révolution est une danse de combat,de prise de parole, qui contraint l’inter-prète au déséquilibre, à l’impuissance :toutes atteindront la note finale maisdans quel état d’être !

Sans acidité mais avec amour, DanielLéveillé sculpte les corps dans l’espa-ce comme Rodin taillait le marbre, parà coups d’abord, avant de longuementle polir  ; le Canadien opère des cé-sures silencieuses entre deux portés,deux sauts, deux déplace-ments dansune posture radicale : tandis que «lerock entrechoque les Quatre saisons

de Vivaldi», le corps se mesure à l’autreet s’affranchit de l’autre. Une définitionde l’amour ?MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

1texte à lire absolument chez Actes-sud Papiers

Pieds dans le sable et tête dans lesétoiles, une foule d’adultes et d’enfantsdéambule dans les différents espacesdu Théâtre du Centaure. Des guidesmuets et mystérieux indiquent les dé-placements et l’on suit, dociles, bercéspar le bruit des vagues, les poèmes enitalien ou une musique lancinante,diffusés par des écouteurs. Ce Flux,vaste projet initié en 2006, se présentecomme un parcours nocturne, mix defilms, de poèmes, de performances àcheval. Plusieurs formes courtes appe-lées Poèmes, données durant l’année,sont réunies sans fil conducteur précis,avec la même consistance trop fluideque l’on avait constatée aux Salins (voirZib’ 38). De Marseille à Istambul, lesimages de ports, avec grues zoomor-phes et conteneurs rouillés défilent. Legalop de la centauresse en noir sur sonfrison noir, valise blanche à la main,

résonne en échos, mélangeant imagesdu film sur la Digue du large et réalité.Une scène de séduction qui laisse du-bitatif touche à l’interdit zoophile, maisla scène d’amour qui suit atteint lemythique : sur un immense lit blancs’étend voluptueusement un couple decentaures, étalons frisons de jais -Graalet Darwin, Camille et Manolo. Cesmasses de muscles soudain abandon-nées et frémissantes qui se fondentdans la tendresse coupent le souffle.Au-delà de la perfection du dressage,c’est la force brute d’un imaginairearchaïque qui bouleverse.CHRIS BOURGUE

Flux s’est donné du 19 au 26 juin au Centre équestre Pastré dans le cadre du Festival de Marseille

25 DANSE

Mythes etchuchotements

Toutes fenêtresouvertes Ré�volution,

Olivier Dubois © Agnès Mellon

Vertical Road, Akram Khan ©

Agnè�s M

ellon

26 OPÉRA AIX | ORANGE

On l’a vu mille fois ! Des acteurs, sur le plateau vide,considèrent le public avant le lever de rideau ; onentre côté salle… Doit-on toujours souligner cequatrième mur ? On apprécie cependant que La Tra-viata aixoise, mise scène par Jean-François Sivadier,se développe en harmonie avec les chanteurs, leursouffle, leur corps… On sent qu’elle doit à Pina Bauschune émotion intense de la solitude. S’il manque quelques respirations lumineuses, lascénographie a l’avantage d’être légère : des pan-neaux de tissus découpent de belles profondeurs,détachent des espaces intimes. Le plateau nu sechange en salle de fête populaire, se quadrille dechaises où prend place le carnavalesque EstonianPhilharmonic Chamber Choir. Mais on regrette quela direction ciselée de Louis Langrée (il abordeVerdi avec un scalpel mozartien) se plie à l’enjeuscénique : à l’opéra on préfère le contraire ! SonOuverture, à l’image du spectacle qui tarde sciem-

ment à démarrer, manque de mordant. On attendrale Prélude du dernier acte afin que s’épanche, auxpupitres de London Symphony Orchestra, lelyrisme nécessaire. Le talent de Natalie Dessay, émouvante d’épuredans l’addio del passato, son courage à lancer lescolorature qui la firent triompher à Aix il y a 17ans, son sens travaillé du bel canto, son incarna-tion profonde du personnage de la dévoyée, ne fontpas d’elle une grande Violetta : son ampleur vocaleatteint parfois ses limites, et son bas médium a eutendance à craquer. Le jeune ténor Charles Catro-novo est à sa mesure : il possède un timbre chatoyant,homogène, vibrant, mais on l’entendrait davantagedans L’Elixir d’amour qu’incarnant Alfredo. Ludovic Tézier est à sa place, et Andrea Mastronimérite davantage qu’un Marquis d’Obigny. Dit-onassez qu’il est l’un des plus grands barytons ac-tuels? Sa technique d’émission «ouverte-couverte»

est léchée, le timbre somptueux, sa présence noble !Chapeau-bas !JACQUES FRESCHEL

La Traviata est jouée jusqu’au 24 juillet et sera retransmise au Théâtre Silvain le 16 juillet

Adieu au passé

© Pascal Victor - Artcomart

Noir absolu. Des sons électroniques se croisent,peuplent l’opacité d’incertitudes. La pièce com-mence. Nous sommes plongés dans un monde horsdu temps, un monde de frontières, de limbes oùseul émerge le rouge pailleté du costume de scènepaternel -lumineux et faux comme un mythe.

Univers minéral qui joue sur une palette subtile degris dans lequel le personnage principal se cherche,entre des figures féminines énigmatiques, un hom-me étrange qui porte des lettres et un père qui vitdans le souvenir d’un passé glorieux. Succession deplans, comme une construction de pierres sèchesqui mène à la révélation finale, impitoyable, tragi-que et humaine. Comme toujours Joël Pommeratmet en scène son texte, profond, avec uneconcentration minimale, en l’éclairant comme ensurface. Et c’est à son histoire, avec sa dimension psycha-nalytique, que l’on s’attache, plus qu’à la musiqued’Oscar Bianchi. Les quatre voix sont superbes (undes six personnages est muet l’autre parlé) : deuxsopranos, l’une nocturne, l’autre plus lumineuse,avec des élans lyriques, des volutes verdiennes quitranchent ; et deux basses, le père et le fils, à la

fois baryton et contre-ténor, d’une délicate fragi-lité : son traitement vocal, toujours sur un fil ténuressemble au costume paternel trop large qu’il nepeut endosser. Ces contrastes créent une stratesensible, décolorée cependant par la répétition àl’infini de certaines cellules mélodiques, comme uninlassable ressassement. Est-ce pour souligner lecaractère limbique de l’argument ? Le cheminementde l’œuvre s’enlise parfois dans une subtile palettede gris, que l’Ensemble Modern, qui reste en retraitsous la direction analytique de Franck Ollu, necherche pas à colorer. Un choix fort défendable,cependant !MARYVONNE COLOMBANI

Thanks to my eyes a été créé le 5 juillet au Jeu de Paume

Entre amours et pouvoirComposer en 6 semaines un opérapour le couronnement de Léopold IIfut le défi inouï que dut releverMozart, qui choisit pour héros un Em-pereur éclairé par la sagesse : Titusrenonçant trois fois à épouser cellequ’il aime. Qui d’autre aurait pu entirer une musique si variée ? La pro-duction aixoise rend grâce à cet opéramis à l’écart pendant des décennies :Sir Colin Davis, octogénaire passion-né qui dirige le London SymphonyOrchestra et l’Estonian PhilarmonicChamber Choir, détaille sans charger,imprimant une belle musicalité. Lamise en scène de David Mac Vicaréclaire les tourments, les conflits :colonnes, grilles, décors coulissants,escalier impérial. Mais Gregory Kun-de, ténor, est un Titus emprunté : sa

voix solide manque de souplesse, sabonté excessive est surjouée, et saphrase Mais combien êtes vous à metrahir ? déclenche même l’hilaritégênée de la salle : gênant pour unopera seria ! En revanche, CarmenGiannattasio est une superbe Vitellia,voix pleine et chaude, Sarah Connoly(Sextus), mezzo-soprano (castrat àl’époque) est magnifique dans son airredoutable Parto, avec un accompa-gnement aérien de clarinette. AnnaStephany, mezzo-soprano, campe unémouvant Annius, Amel Brahim-Djel-loul, soprano, une Servilia amoureuseet sensible. Publius, Darren Jeffery,basse, est un solide serviteur à la raidegestuelle. L’apport de huit comédiensdonne du poids, et les arias sont mi-ses en valeur par un jeu de lumières

subtil. Le traitement des masses cho-ristes, mêlées aux solistes aprèsl’incendie du Capitole (fin du premieracte) et le final (clémence de l’em-pereur sur contrechants des solistes)est réussi.L’accueil fut triomphal à l’Arche-vêché, bien différent de celui queréserva l’impératrice Marie-Louise à lacréation à Prague : Una porcheriatedesca! Le public d’aujourd’hui futplus clément pour cette productionde qualité !YVES BERGÉ

La Clémence de Titusse joue jusqu’au 21 juillet et sera retransmise en direct sur France Musique le 19 juillet et sur Mezzo le 21 juillet

Nuances de gris

© P

asca

l Vic

tor

© Elisabeth C

arrechio

27MUSIQUE

«N’êtes-vous pas mon propre nez, Mon-sieur ?» Le court dialogue entre leMajor Kovaliov, dépouillé de son ap-pendice nasal, et son propre Nez,déguisé en conseiller d’État, est àl’image de la nouvelle de Gogol : ab-surde, fantasque. Cette parabole nasale,sujette à bien des exégèses, inspiraau jeune Chostakovitch de 1927 unopéra en rupture avec les codes lyri-ques dominants de l’époque, découpéen trois actes et dix tableaux enchaînésselon une logique cinématographi-que. Le compositeur, alors au cœurde l’avant-garde russe, métamorpho-sa les lignes mélodiques encore envogue en éructations vocales, usantde toute la palette de sons possible,faisant éclater les registres, multipliant les rôles(près de 70 !), immergeant le spectateur dans unchaos sonore invraisemblable. Avec une science de

l’orchestration insensée ! à 21 ans ! Il superpose lespupitres, mélange les timbres, découpe l’espace demélodies aux cordes teintées d’ironie. Inouï !

Donner corps à cet univers musicalet narratif si singulier, sacré défilancé au metteur en scène WilliamKentridge (voir p55) et à KazushiOno, à la tête de l’orchestre de Lyon !Le résultat est à la hauteur del’opéra. C’est un Pic, un Cap, unePéninsule ! La mise en scène flam-boyante transporta le public pendantprès de deux heures dans un mondeburlesque, grinçant, à l’image de lanouvelle de Gogol. Les chanteurs,excellents, firent un triomphe à cetouvrage au parfum de scandale.Décidemment, Bernard Foccroule aun sacré flair !CHRISTOPHE FLOQUET

Le Nez de Chostakovitch est programmé au GTPjusqu’au 14 juillet, il sera retransmis en direct surRadio Classique le 14 juillet à 17h

Chacun cherche son nez !

© Pascal Victor - Artcomart

Difficile de trouver cadre plus appro-prié que celui du Grand Saint Jeanpour donner Acis et Galatée de Haen-del ! Nymphes et bergers déambulentdans un décor idyllique, prolonge-ment naturel de la scène couverte depelouse et branchages. Les protagonistesde cette fable, remarquablement in-terprétée par de jeunes chanteurs àla voix fraîche, sonore et tendre (Ju-lie Fuchs et Julien Behr), exprimentleur passion dans des chœurs pétil-lants tel que Happy we sous le regardde Damon, Rupert Charlesworth,ténor plein de finesse et de musi-calité et, Coridon, Zachary Wilder,ténor très agréable mais dont le côtéprécieux finit par agacer. Remarqua-blement soutenue par le chœur desolistes et le petit, mais non moinsexcellent, Orchestre baroque del’Académie, cette histoire d’amourchampêtre se déroule une premièrepartie parfois languissante, la conci-sion n’étant pas ce qui caractérise lemieux le compositeur saxon, et dansune mise en scène stylisée -Saburo

Teshigawara- insistant sur les mou-vements des corps des chanteurs , quifinirent par parasiter le chant.L’arrivée de Polyphème, Joseph Bar-ron, superbe basse, fit entrer l’ouvragedans une autre dimension. Le chœurmagistral qui ouvrit la seconde partie,pétri de dissonances, amorça la fin dubonheur et la mort proche d’Acis.Grâce à un beau jeu d’ombres et àune très efficace occupation de l’es-pace, l’action se resserra et gagna enintensité jusqu’à la métamorphosefinale d’Acis en rivière. Le chef d’or-chestre, Léonardo Garcia-Alarcon,avec sa gestique superbe, magnifia lafin de l’œuvre. La mort commesublimation de l’amour ?C.F.

Acis et Galatée est donné au Grand Saint Jean jusqu’au 23juillet, il sera retransmis en directsur Radio Classique le 13 juilletà 21h30 et sur Arte Live Weble 17 juillet à 21h30

L’amour est dans le préAcis et G

alate�e © Patrick Berger

Quand on se rend àOrange pour assister àune énième Aïda, on sedit que, quoiqu’il arrive,dans la majesté du Théâ-tre Antique, on assisteraà un spectacle grandiose.De fait on n’est pas déçu !Les voix sont larges, lesscènes de foules pharao-niques et la premièrepartie se conclut par unsommet monumental : le «Triomphe» et ses fameuses «trompettes» ! Avec laquarantaine de danseurs de Jean-Charles Gil qui se taillent un beau succès,les quatre Chœurs d’Opéras réunis de Nice, Avignon, Tours et Angers-Nantes,les figurants, les solistes et l’Orchestre du Capitole de Toulouse, on a, aupied du mur, plus de 300 artistes qui jouent, virevoltent et donnent du coffre :on en prend plein les yeux et les oreilles !Reste à chanter Aïda… et en particulier toutes les scènes intimes qui fontl’essentiel de l’ouvrage. Sur le plateau vide, dans la lumière bleutée de discrètesprojections vidéos et au regard de la démesure du lieu, l’entreprise reste plusque risquée. Dans le rôle-titre, Indra Thomas en rajoute dans l’emphase : savoix s’est altérée depuis 2006. Très ample, elle domine miraculeusement lamasse chorale, mais part dans tous les sens, les aigus ouverts sont poussés, lespianissimi inabordables… Carlo Ventre (Radames) possède des aigus clairon-nants, mais le reste du timbre est plus falot, ou un peu fatigué. Les autres rôlesmasculins sont remarquablement distribués : les deux basses Giacomo Prestia,somptueux Ramfis, et Mikhail Kolelishvili, profond Roi d’Egypte, comme l’ex-cellent baryton verdien Andrezj Dobber (Amonasro). La révélation de la soiréeest une jeune mezzo-soprano de grande classe qui rayonne dans Amneris :Ekaterina Gubanova possède une homogénéité rare dans l’émission, puissanteet jamais appuyée dans le grave. Cependant, la star est dans la fosse ! Tugan Sokhiev, impérial, domine son sujet,suit les chanteurs sans jamais les couvrir, sobre, clair, sans esbroufe... Quellechance a la Ville Rose de posséder un tel maestro à la tête de son OrchestreNational !JACQUES FRESCHEL

Aïda de Verdi est joué aux Chorégies d’Orange jusqu’au 2 août

Pharaonique Aïda !

© Christian Bernateau - Orange

On attendait l’événement ! Plus uneplace pour le retour de Rodrigue àMarseille après 74 ans d’absence ! Onn’avait même plus joué Le Cid àGarnier depuis 1919 ! Du coup lapresse capitale avait pris son billetpour La Canebière, avec le ministrede la Culture (voir p 4). Cerise sur legâteau, à l’affiche posait depuis dessemaines une star vêtue de pourpre :Roberto Alagna chantait le rôle-titreaux côtés de Béatrice Uria Monzon. Qui pouvait, mieux que ces deux-là,assumer en français les rôles écra-sants de Rodrigue et Chimène ? L’unn’est pas Thill, ni l’autre Crespin !Mais le ténor a gagné en noblesse, engénérosité et largeur ce qu’il a perduen couleurs vocales… Et quelle dé-clamation exemplaire ! La diva futravissante, déchirante, l’articulationun peu cotonneuse dans le grave, maisl’émotion qu’elle dégagea fit mouche,comme dans l’air «inhumain» «Pleu-rez mes yeux !».Massenet est un maître qui n’écrit pasune amusette. Sa partition épique auchant continu ponctué de motifs ré-currents n’est pas facile. Elle doit àGluck autant qu’à Wagner et Saint-

Saëns. Et si l’ouvrage souffre du peude crédit qu’on accorde au Grand-Opéra français, à sa «pompe», il n’yavait pas de raison de le ranger auxoubliettes. Que dirait-on d’un muséeoù l’on exposerait toujours les dixmêmes tableaux ? Au demeurant, onne bouda pas son plaisir de retrouverles vers (chantés !) de Corneille : «ORage O désespoir… Rodrigue as-tu ducœur ?»... Témoin les milliers de per-sonnes venues à Bargemon écouterjusqu’au bout la retransmission !Car c’était simple et beau, populaireet exigeant : les bronzes glorieuxd’Emmanuelle Favre, les gradins ver-ticaux où siégeait le Chœur de l’Opéra,une chambre à coucher sobre etsensuelle aux contours mi déco, mimoderne : toute une esthétique jon-glant avec l’amour passion et le nobledevoir, le conflit des générations etson arrière plan politico-militaire…JACQUES FRESCHEL

Le Cid s’est joué à guichet fermé àl’opéra de Marseille du 17 au 26 juin

La grande salle du Théâtre de la Criéeest pleine le 15 juin, les micros deRené Gambini suspendus au dessusdu Steinway. On immortalise, entre deplaisantes loquacités d’Alain Duault,le jeu d’esthète (dans Clementi !)d’une des dernières trouvailles de lamaison Lyrinx : le pianiste italien Vit-torio Forte. Depuis 1976 et l’œuvred’artisan des premiers enregistrementsde Pierre Barbizet, la maison de dis-ques en a vu défiler des doigts sur lestouches noires et blanches ! Ceux quijouent sont de fidèles piliers : MûzaRubackyté livre des Scarlatti flam-boyants, Marie-Josèphe Jude unBrahms puissant et sans pesanteur.Le programme va crescendo : CarolineSageman distille deux Liszt notoiresau souffle rare, avant quelques Debus-sy enluminés par Philippe Bianconiet une Isle Joyeuse ponctuée de bra-vos. Mais c’est avec Chopin que KatiaSkanavi remporte l’enchère ! Dans laSonate funèbre l’artiste pèse sur leclavier telle une bête fourbue, libère

le temps de suspensions nostalgi-ques… Une merveille !Deux jours plus tard Caroline Sagemanrevient en compagnie du violonisteDavid Galoustov pour conclure leurenregistrement de l’intégrale des so-nates violon piano de Beethoven.Après une interprétation un peu fadede la romance de Fauré, le public estprié de ne pas tousser, de laisser le sonfinir avant d’applaudir… L’instant estsolennel : la 10e sonate prend ses ai-ses, se développe, inattendue, les deuxmusiciens s’envoyant la parole dansune entente rare, un toucher nuancé àla note près, un archet d’une absoluemaîtrise… les sons semblent des mots,articulés dans une langue inconnuemais compréhensible. Pour finir, la célèbre sonate de Franck,déchirante, où les musiciens épan-chent un lyrisme jusqu’alors retenu !Quelle intelligence…JACQUES ET AGNÈS FRESCHEL

Du 21 juin au 6 juillet,l’Orchestre Philharmo-nique du Pays d’Aix aretrouvé son humeur va-gabonde et s’est produità Aix, Jouques, Mimet,La Roque d’Anthéron,Bouc-Bel-Air, Le Tho-lonet, Coudoux, Tretsavec un nouveau pro-gramme intitulé Mozartfor ever. Présentationdidactique et enjouée du chef d’orchestre, Jacques Chalmeau, un joli sens del’anecdote, le ton léger … La cour du château de Trets est comble ! À l’instardes grands vins, l’orchestre se bonifie d’année en année : belle maîtrise,équilibre des pupitres, une palette subtile et colorée. Au charme du plein airs’ajoute la remarquable qualité du son, qui a su garder un rendu naturel. À lasymphonie n° 41, «Jupiter», et son équilibre de cathédrale, succédaient lesvariations sur un thème Rococo op.33 de Tchaïkovski. Le violoncelle de XavierChatillon, aux traits virtuoses, faisait entendre ses graves profonds, ses aiguséthérés, aériens, un son sculpté au service d’une belle intensité dramatique.Le public resta comme suspendu… Puis la suite Tchèque de Dvořák, d’inspi-ration populaire, permettait à l’orchestre de se laisser emporter par decharmants élans lyriques, un esprit de fête auquel chacun fut sensible. Preuveune fois de plus que grâce à la gratuité et un programme à la fois facile etexigeant, la musique dite savante reste très populaire…M.C.

Concert vu à Trets le 6 juillet dans la cour du château

MUSIQUE MARSEILLE | PAYS D’AIX28

El Campeador !

La passion selon Lyrinx

Sous le signe d’Amadeus

Orchestre philharmonique du Pays d'Aix © X-D.R

© Christian Dresse 2011

29MUSIQUE

On les retrouve au détour de salles prestigieuses, maisaussi dans des cadres champêtres, des cours dechâteau : à Trets, le 17 juin, Télémaque joue unprogramme d’Inclassables, par l’union sur scèned’instruments qui ne se rencontrent pas, par lacomposition surprenante de leur programme, deHersant à Haendel, de Charpy à Piazzolla… Lé-gèreté de Récréation, de Pierre-Adrien Charpy, quilivrait aux spectateurs les clés de son œuvre et deson inspiration -on en profite, un compositeur vivant !-avec l’alto (Benjamin Clasen), qui bourdonne com-me une basse continue, le basson (Frédéric Baron)qui rêve repris par l’accordéon (Jean-Marc Fabiano),et le jeu des «tchack, tchouck…» qui détourne lesmusiciens de leur instrument. En réponse à cettedrôlerie sérieuse, véritable écho d’enfance, un artdes limites s’orchestre dans les Huit duos pour bas-son et alto de Philippe Hersant, où les instrumentssont exploités jusque dans la matérialité de leurscordes, de leur bois, souffle nu, grincements, puis lessons s’épanchent ronds et lyriques. Jeu des extrê-mes encore, avec la sonate pour Alto solo de Ligeti,à la fragilité subtile. Théâtral et burlesque, Surexpo-sition de Alain Mabit où le bassoniste qui s’emparedu solo de hautbois du Sacre sans parvenir à lejouer ! Volupté du tango de Piazzolla interrogé enphrases suspendues par Charpy dans son énergiqueCapuccino. Délicieusement anachronique enfin, laSonate en sol mineur de Haendel réorchestrée pouraccordéon, alto et basson… avec un rendu baroqueépoustouflant ! L’été débute en grâce.MARYVONNE COLOMBANI

Musiques au cœurLes Carrières de Rognes, à l’occasion des NuitsMusicales Sainte Victoire, ouvrirent leurs portespour résonner aux accents du lyrisme italien dansL’Elixir d’amour de Donizetti le 29 juin et vibrer auxenvolées mélodiques de Tchaïkovski le 30 juin.Deux concerts d’exception avec l’Orchestre Nationalde l’Opéra d’Ukraine-Lviv dirigé respectivement parGrigori Penteleïtchouck et Douttchak Mykhaylo.Le public venu en nombre écouter l’opéra de Do-nizzetti gardera longtemps en mémoire ce qui s’estpassé cette soirée. Le sort voulut que cet ouvragebelcantiste, dont l’histoire repose sur un philtremagique qui s’avère être en fait un bon vin deBordeaux, soit interrompu par les caprices du cielqui versa quelques larmes juste avant l’air célèbrefinal «una furtiva lagrima» ! Le ténor DoménicoMenini proposa au public de s’approcher de lascène avant de chanter a cappella le fameux air !Moment unique d’émotion qui arracha quelqueslarmes aux gens regroupés autour de ce jeune ténorà la voix ambrée et boisée qui pendant tout l’ou-vrage chercha l’amour en vain ! Quelques minutesde bonheur qui firent oublier cette fin en queue depoisson, pour ne plus conserver en mémoire que lesuperbe timbre d’Adina, Sonya Yoncheva, de Belcore,Alexandre Duhamel baryton à la voix chaleureuseet épaisse et des deux autres chanteurs J.-F. Vinci-guerra et Yuree Jang. Ce n’est plus la pluie mais le mistral qui fût aurendez-vous le lendemain ! Mais, incontestable-ment, les plus belles bourrasques sortirent du

violon de Vadim Tsibulevski déchaîné dans le Con-certo pour violon en ré M. Les nombreuses difficultéstechniques de ce concerto à la fois virevoltant etcyclothymique furent englouties avec une facilitédéconcertante par ce virtuose ukrainien au sonépais et à la musicalité exceptionnelle. L’orchestre,à l’image de son compatriote fût excellent dans lesdeux ouvertures Roméo et Juliette et Hamlet quiouvraient ce programme. Deux soirées splendidescontre les éléments où la musique, pour para-phraser une émission d’Eve Ruggieri qui présentechaque année les spectacles, alla droit au cœur,pour des tarifs tellement plus digestes que ceux duFestival d’Aix !CHRISTOPHE FLOQUET

Les Nuits Musicales de Sainte Victoireont eu lieu le du 23 au 30 juin à Peynier, Rognes,Mimet et Vauvenargues

Vive l’inattendu !

© Pixe�o Me�dia

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Cette Liberté qui hantait Paul Eluard en 1942pourrait s’inscrire sur la façade éclairée du châteauPastré ; ce lieu niché au cœur d’un écrin verdoyantfut l’antichambre de la résistance culturelle aunazisme. C’est naturellement dans ce lieu chargéd’humanité que la 6e édition du festival des Musi-ques Interdites s’est déroulée du 7 au 9 juilletsous la direction de Michel Pastore, ardent défen-

seur de partitions, inédites ou pas, mais longtempsentourées de barbelés. Pour le centenaire de ladisparition du compositeur, les Kindertotenlieder deMahler donnés dans les versions pour mezzo etbaryton ont offert à un public submergé parl’émotion un grand moment d’intensité. La voixposée d’Abd Al Malik et les timbres de M.-A.Todorovitch et M. Haussmann suffisamment largesnourrissant l’obscurité de l’œuvre sous la baguettede Johan Farjot dirigeant l’Orchestre Philharmo-nique de Marseille. Changement d’atmosphère lelendemain avec la présence du fils de Glanzberg,compositeur entre autres de Piaf, injustementméconnu et caché par la comtesse Lily Pastré : sesHolocaust songs et lieder, comme les œuvres de sonami Weill, furent magistralement servis par la spé-cialiste du genre U. Gfrerer. La voix émouvante dela comédienne Anouk Grinberg et celle, plus légè-re, de la soprano Emilie Pictet complétèrent untableau singulier sous la direction millimétréed’Antoine Marguier. Pour que l’esprit vive…, comme si le nom de l’asso-ciation fondée en 1932 par L. Pastré résonnaitencore et encore, entre mer et calanques, commeun rempart aux barbaries.FRÉDÉRIC ISOLETTA

Au dessus du silence j’écris ton nom…

Marie-Ange Todorovitch ©

X-D.R.

MUSIQUE30 TOULON | LAMBESC | MARSEILLE

Une 21e édition renouvelée ! Le Festival de guitarede Lambesc découvre de nouveaux talents, etentraîne sous ses doigts habiles le public mélomanede l’Inde à l’Espagne, de l’Asie centrale aux Balkans,du monde Arabe à l’Italie ou à l’Amérique latine.Un choix éclectique d’une belle qualité, sous ladirection artistique de Jorge Cardoso. On pouvait ainsi entendre le 5 juillet, dans le cadredélicieux du Château Pontet Bagatelle, au momentoù les cigales s’assoupissent, le travail précis etsensible d’Eugenio Becherucci dans un répertoirequi mêle les hommages à Federico Garcia Lorca auxchansons populaires, traditionnelles, qui devinrentdes chants de résistance. Le Chant des Partisans estmagnifiquement remanié sous la forme d’un poème

symphonique. Subtiles, les compositions person-nelles de l’artiste s’arpègent, complexes et raffinées.Une chanson populaire de Catalogne en bis laisseune note vive et enjouée. À ce jeu tout en déli-catesse répond la belle interprétation de classiquesde la guitare, Weiss, Albeniz, Granados, par MariaEsther Guzman. Jeu précis, délié, musicalité, pro-fondeur du son, joli phrasé, qui sait apporter autexte musical sa respiration. Episode papillonesquesuicidaire sur la musique du bis, de Scott Joplin,The entertainer… Privilège d’écouter de telsconcerts, qui semblent les seuls à défendre un artqui n’a pas cours sur les ondes populaires, malgréses très accessibles beautés !MARYVONNE COLOMBANI

Cordes sensibles

Maria Esther G

uzman ©

X-D.R

Fidèle à son habitude, le Festival de Toulon a reprisses quartiers d’été dans des lieux emblématiquesdu littoral varois : cette année encore, la program-mation était de haute volée.Ainsi, en guise d’ouverture, Pieter Wispelwey etPaolo Giacometti se produisaient en duo dans le su-blime écrin de la Tour Royale autour d’un programmeromantique assez convenu (Schubert, Mendelssohn,Chopin), mais interprété avec une virtuosité quilaissait béat. La force des grands interprètes neréside t’elle pas justement dans l’art de faire duneuf en nous faisant redécouvrir les chefs-d’œuvre ?Coups d’archet virils pour l’un, toucher félin pourl’autre, interprètes à la forte personnalité unis parune belle complicité, ils ont apporté un vent defraîcheur bienvenu sur ce répertoire. Dans un espritsimilaire, on pouvait également s’extasier sur le duoformé par Renaud Capuçon et Khatia Bunia-

tishvili qui alliait lui aussi justesse, technicité,simplicité et musicalité : l’évidence en somme.Dommage que le vent qui s’était invité ait contraintles interprètes à remplacer Prokofiev par Beethoven.Un peu plus tard, sur les hauteurs de Six-Fours-les-plages, la Collégiale Saint-Pierre fit vibrer la

musique avec des interprètes tout aussi pres-tigieux. À commencer par l’ensemble Florilegiumde Londres sous la direction d’Ashley Solomonaccompagnés pour l’occasion par la soprano ElinManahan Thomas au timbre pur et lumineux. Trèscomplices, ils ont su rendre grâce aux œuvres deVivaldi et Telemann tout en laissant la part belleà la virtuosité des différents solistes ; l’ensembleétait d’une remarquable cohésion. C’est avec unmême souci du détail que se sont produits les musi-ciens de l’ensemble Constantinople accompagnésde Françoise Atlan, impériale au chant, et EnriqueSolinis totalement habité à la guitare baroque. Auxconfins de la musique improvisée, flirtant parfoisavec la liberté du jazz, une belle invitation auvoyage dans un répertoire baroque mexicaininjustement.ÉMILIEN MOREAU

Plein les oreilles !

Ensemble Constantinople © Jean-Marc Bouque

Pour son 8e rendez-vous, Caressez lePotager a rassemblé familles desbords de l’Huveaune et visiteurs ducentre-ville autour de propositionsartistiques et ludiques. L’atelier dephotographie (sans appareil photo !)de Sylvie Frémiot a attiré petits etgrands en proposant la réalisation decyanotypes, empreintes monochro-mes d’objets divers grâce à l’actiondu soleil qui «bronze» le papier, au-paravant enduit de produits chimiques.Magique ! La plasticienne BéatriceBonhomme composait un potagerimaginaire à base de ficelles, boutonset autres objets. Puis deux films égyp-tiens avec la collaboration d’AFLAM,celle de l’AFM13 (familles musulma-nes), et la pépinière d’images avec letrès remarqué La Saint Festin, film

d’animation d’Anne Daffis et LéoMarchand. Un des moments forts : lespectacle sensible d’Amélie Duval,qui a dirigé la superbe danseuse orien-tale Sonia Nemer, dédié aux petitesfilles qui dansent devant les miroirset aux femmes qui rêvent de célébritéen passant le balai ! Sonia Nemer estune interprète exception-nelle dedanses traditionnelles égyptiennes,telle celle des «ailes d’Isis», maisencore comédienne au visageexpressionniste... Le tout sur le belécrin d’arrangements vidéo d’AntoineAubin.CHRIS BOURGUE

Caressez le Potager a eu lieu dans le Parc de la Mirabelle,Marseille 11e, du 7 au 9 juillet

L’Orient en gloireSo

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MUSIQUE31AIX | LE THOLONET | FORCALQUIER

Rapprocher et proposer dans un même concert desœuvres polyphoniques vocales du Moyen Âge et duXXe siècle pourrait paraître incongru. Lucien Bass,à la tête de son ensemble vocal de chambre, réussitpourtant avec habileté cette confrontation, joux-tant par exemple les Trois chansons sur des textes deCharles d’Orléans de Debussy et des Rondeaux deAdam de la Halle pour montrer la filiation entredes compositeurs que six siècles séparent. Intéres-sant également d’apprécier les éclairages harmoniquesonctueux d’un Poulenc et d’un Ravel au regard dela douce âpreté mâtinée de quartes et de quintes

d’un Dufay. Les dix chanteurs, en osmose, rendirentune interprétation pleine de sensibilité, s’illustrantplus particulièrement dans des Strophes sur le VeniCreator du trop méconnu Pierre Villette et sur deuxœuvres de Darius Milhaud. Un programme intelli-gemment construit et intégré au Festival deMusiques Patrimoniales dirigé par Guy Laurent.CHRISTOPHE FLOQUET

Concert donné le 3 juillet à la Chapelle du Sacré-Cœur à Aix

Un pont entre deux rives

Le festival Autour des claviers offre chaque annéede superbes découvertes. Les grands noms dedemain se dessinent lors de ces manifestationséprises de qualité, même lorsqu’elles gardent desproportions intimes. L’église du Tholonet accueil-lait ainsi le jeune et talentueux Julien Brocal,(formé au CNR de Marseille) dans un programme depiano romantique. Jeu délié, efficace, sans superfé-tatoire, avec un bel empâtement dans le mouvementlent de la sonate en ré majeur de Haydn, une verveenjouée dans l’allegro de la sonate en la majeur deSchubert, phrasé brillant… L’Andante Spianato etla Grande Polonaise de Chopin semblaient tailléssur mesure avec leurs jaillissements, leurs éclatscolorés, la finesse des traits. Bonheur encore dansl’interprétation du Carnaval de Schumann, où lespersonnages contrastés, burlesques ou délicatss’animent avec fougue. Aux ovations méritées dupublic, répondaient en bis la 10e étude transcen-dantale de Liszt et une délicate composition del’artiste, Souvenir, où les notes laissaient transpa-raître sous leur légèreté une gravité sensible. Une semaine plus tard Clara Kastler et HubertWoringer, le duo KW, enchantaient le public malgrél’acoustique un peu sèche de la salle Pezet de Pa-lette, avec, entre autres, la virtuose sonate de Liszttranscrite par Saint Saëns. Délicatesse et précisiondu jeu, complicité des nuances, riches envolées,tout se conjuguait pour une rencontre d’exception,avec en bis le désormais rituel troisième mouve-

ment de la Symphonie n° 3 de Brahms. Un festivalqui s’achève sur un lyrisme à la fois précieux etemporté, répondant aux belles exigences d’unromantisme toujours vivant et renouvelé. Inac-cessible le bonheur ? Une magistrale démonstrationdu contraire !MARYVONNE COLOMBANI

Concerts donnés les 12 et 19 juin

Julien Brocal © Patrice Moracchini

Pour célébrer ses trente années de titulaire des orguesde la cathédrale de Forcalquier, Jean-JacquesTournebise-Cerruti proposait un concert d’excep-tion consacré à Bach. Tout d’abord une œuvre dejeunesse, simple et populaire, la célébrissime Toc-cata et fugue en ré mineur que l’on a longtempscrue apocryphe tant l’influence de son maître Bux-tehude s’y ressent. Le Concerto en la mineur d’aprèsVivaldi, résultant de la transcription du concertopour 2 violons concertants et un orchestre, est unevéritable performance car la dynamique et la génér-osité du style italien y sont restituées, et conserverl’épaisseur harmonique requiert une extrêmedextérité… des pieds ! Le choral O mensch, beweindein Sünde gross (O homme, pleure sur tes doux

péchés) est l’œuvre d’un compositeur plus grave,inscrit dans sa foi : l’interprétation traduisit magni-fiquement la forte charge émotive de la pièce.Mais c’est surtout la Passacaille et Thème fugué enut mineur, véritable cathédrale musicale, chef-d’œuvre dans lequel Bach joue avec la symboliquedes nombres, combinant les aspects théologiqueset ésotériques du mystère de la Trinité, qui permità l’organiste de révéler les multiples facettes de sonart virtuose.JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Ce concert a été donné le19 juin en la co-cathédrale de Forcalquier

Bach en mineur

L’étoffe et les grands

MUSIQUE32 JAZZ | ACTUELLES

Une assemblade ? Vous pouvez chercherdans un dictionnaire franco-proven-çal sans trouver trace de ce mot. Mais

le néologisme dit bien ce qu’il veutdire : une assemblée, avec un petitcôté folklorique approprié à la situa-

tion. La Région a fait du beau boulot,les pelouses du Palais Longchampont accueilli deux jours de musiqueet de culture occitane, il y en a eu pourtous les goûts et on peut parler desuccès. Populaire, et musical. La pro-grammation est variée, les artistesgénéreux, la Régie Culturelle appor-tant une qualité sonore indéniable àce un cadre privilégié. Et puis desjournées qui démarrent en douceur à18h, permettant aux familles de s’ins-taller, aux enfants de s’ébattre entrouvant spontanément le rythmesautillant des danses d’antan... Àl’heure de l’apéro, «c’est bon de se re-trouver là... ou de se trouver, va savoir»comme le dit Guylaine Renaud, tro-

baïritz (femme troubadour, en occitan).Le soir venu, la foule devient plusdense, la musique se fait festive, sesuccèdent sur scène des groupes pluschaleureux les uns que les autres...Un vrai bon moment ! Mention spécialeà Fora Bandit, la nouvelle formationde Sam Karpienia, pour les frissonsofferts par son acolyte chanteur, UlasÖzdemir, et le percussionniste du feude dieu, Bijan Chemirani.GAËLLE CLOAREC

L’Assemblade, musique d’Oc en Provence, s’est tenue les 25 et 26 juin au Palais Longchamp, Marseille 5e

Le Choeur de La Roquette © Gae� lle Cloarec

L’équipe de Vitrolles a magnifiquementœuvré, une fois encore, pour organi-ser ce 14e Charlie Jazz Festival. Lafête démarre en fanfare avec l’ensem-ble Haïdouti Orkestar aux accentsbalkaniques très ouverts qui déam-bule dans l’espace verdoyant où NuriaRovila Salat, la danseuse tzigane,affriole de ses charmes vibrants. Legroupe Méandres, en sextet, avecpour guest musicien le trompettistebelge Bart Maris, a proposé une mu-sique à la fois très innovante dans sessonorités et ses compositions et trèsen phase avec son temps. Puis unegrande pointure du jazz de 73 prin-temps entre en scène, le saxophonisteCharles Lloyd, accompagné d’un pia-niste singulier, Jason Moran, au styledépouillé et à la présence redoutable…La seconde soirée s’ouvre avec lequartet Rétroviseur au jazz tout enénergie. Le vent est tombé et faitplace au trio tant attendu : Joachim

Kühn-Majid Bekkas-Ramon Lopez.Chalaba, titre de leur dernier CD, estoffert in vivo. Moment magique où secôtoient des instruments peu com-muns sur les scènes occidentales : leguembri, apporté par les esclaves deGuinée, et le oud, avec le piano et lesaxophone alto. Puis l’apothéose avecMajid Bekkas, guide d’une musiquede transe imprégnée des culturessub-sahariennes et de traditionGnawa. Le maître de cérémonie aréuni Louis Sclavis, Minino Garay etle souriant Aly Keita au balafon qui,par son talent d’improvisateur, a lit-téralement mis le public sous lecharme. Deux musiciens vêtus d’uncostume flamboyant accompagnaientcette musique de castagnettes enmétal (qraqeb) et de leur voix.Troisième et dernier jour, déjà…Sidony Box en trio, lauréat 2011 deJazz Migration puis la fanfare Bandadu Dock. Le duo italien Musica Nuda

a su apporter une note d’humour avantde laisser la scène à l’OrchestreNational de Jazz dirigé par DanielYvinec qui joue leur création Shut upand dance. Des mini-concertos àl’écriture très élaborée de John Hol-lenbeck sont donnés dans une énergie

rythmique hypnotisante ; le batteurYoann Serra y a été pour beaucoup.DAN WARZY

Le concert du trio Bekkas a étéretransmis en direct sur FranceMusique

Une fête penta...tonic !

Joachim Khün et Majid Bekkas © Simon Lück

La chose est entendue : depuis sa création, lefestival marseillais réserve une place de choix à laCompagnie Rassegna. Pour cette 8e édition,l’ensemble a présenté sa dernière création, BuenaSombra. Chanteurs et musiciens se sont appropriéquelques perles du patrimoine méditerranéen desannées 50 et 60. Des chansons populaires quiconfirment, grâce aux orchestrations de BrunoAllary, leur saisissante beauté. Le travail derecherche, de réécriture, fait le pari de la modernitésans dénaturer les influences d’origine : chantshispaniques, napolitains, siciliens, corses, turcs,Buena Sombra se déroule comme un spectacle decabaret qui évite de tomber dans la nostalgie.En ouverture de la soirée, le quatuor polyphonique

Enco de botte a chanté l’amour en Méditerranée,fidèles à leurs affinités corses et occitanes. Onreconnaît la touche de Manu Théron, leader du Corde la Plana, qui les a formés, et avec lequel Encode botte partage la pratique du collectage dans lerépertoire méditerranéen.La Méditerranée est certes loin de l’Argentine deLas Hermanas Caronni. Mais la douceur des voix deces jumelles semblent pourtant très familièresquand, l’une au violoncelle, l’autre à la clarinette,relatent de manière intimiste le quotidien sur lesrives du fleuve Paranà, les milonga de Buenos-Airesou Paris, qu’ils soient issus de leurs souvenirs ou deleur imagination.THOMAS DALICANTE

Vives musiquesLa soirée d’ouverture du festival De vives voix invitait le 4 juillet au voyage dans les culturespopulaires et la latinité

Woodst’Oc

Rassegna © X-D

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C’était à la fin du siècle dernier. Après plusieursannées consacrées au punk rock avec Ludwig Von88, Bruno Garcia se mit au pli de la vague latino.Emboitant le pas à un autre leader de la scènealternative, l’ex Mano Negra Manu Chao, le dénom-mé Sergent Garcia fut proclamé «inventeur de lasalsamuffin». Un cocktail à base de rumba, reggae,salsa, dancehall, raggamuffin qui a donné sonwagon de tubes. Une recette à succès largementexploitée devant le public de Miramas, avec la

reprise de titres comme Amor pa’mi, Llevale mi canto,Medecine man ou encore Acabar mal.Mais le latino-parigot n’a pas retrouvé les ingrédientsqui ont rendu culte l’album Un poquito quema’o.Son dernier opus, le cinquième, Una y otra vez, àtravers les titres présentés en cette soirée de Fêtede la musique, met la pédale douce sur le métissagedes rythmes pour se concentrer sur les musiquesactuelles colombiennes, de la cumbia à l’électro,en passant par le boléro et les percussions afro-caribéennes.Sur scène, El sargento a perdu de sa superbe, es-quissant encore quelques pas de salsa. Mais la

tournée, débutée en mars, est partie pour durer deuxans. De quoi lui laisser le temps de retrouver unson et une énergie...THOMAS DALICANTE

Sergent Garcia a chanté le 21 juin lors du Festival Nuits Métis à Miramas

La 26e édition du festival insulaire arassemblé sans compter autour d’unepluralité disciplinaire, loin du con-sensualisme de chapelles qui hanteune palanquée de manifestations mu-sicales. Cette disparité militante n’aaucunement besoin de décors : le sitenaturel du Frioul où se dressent lesvestiges de l’hôpital Caroline, superbe-ment éclairés la nuit tombée, offrentpourtant le premier spectacle, commeun cadeau de plus… La Nuit rouge etnoire a offert sur un plateau un métis-sage saisissant autour du violoncellistecompositeur Jean-Paul Dessy. LeSarangy Strings Sound System offrede superbes montées psychédéli-ques : la Belgique, l’Allemagne maissurtout l’Inde avec Dhruba Ghosh ausarangi pour un son unique où l’en-semble à cordes installe autour duviéliste une atmosphère contempla-

tive et suspendue se déplaçant sur leshauteurs de manière massique et épais-se. Après cette ambiance oniriquemais bridée, sans doute par l’effectifde cordes trop conséquent, place aubeat system revival de Chris & Cosey.Très sonore, après la contemplation !Si les autochtones ont trouvé le som-meil, c’est sans doute après le passagedu duo, hypnotique et répétitif !

Chou rave partyLe céleri, ça vous branche ? The Ve-getable Orchestra était l’invité de laNuit des belles plantes. Curiosité commesavent en réserver les programmateurs,les Autrichiens du Vegetable Orches-tra ont offert un formidable showécolo-techno. Froissement de peluresd’oignon, frottement d’ail, percus-sions de cucurbitacées, éboulementde pommes de terre, dépeçage de chouxverts, scratch de haricot vert… le menude ce potager philharmonique auraitconverti les plus carnivores des mélo-manes.

Point de flutes, trompettes, clarinettes,xylophones, contrebasse ou maracas,mais des légumes percés, assemblés,vidés, ciselés avec la précision d’unluthier. Hommage au rock trash alle-mand des années 70, clins d’œil àl’électro, ode à la pluie, le public viteconquis du Frioul en a pris plein lesfeuilles. La première partie de soirée propo-sait, en première mondiale, le projet

Single Room, fruit de la résidence decréation des Marseillaises EmilieLesbros (chant, basse acoustique) etRafaëlle Rinaudo (harpe) et de leurinvitée Julia Kent, violoncelliste dugroupe Anthony and the Johnsons.Une musique transcendée par lesenvolées vocales d’Emilie Lesbros.FRED ISOLETTA ET THOMAS DALICANTE

33MUSIQUE

Il se dégage une forme de douceur apaisée dans lamusique de Métigane. Sa voix est située entre ledit et le chant dans une expression langoureuse et

chaude. À l’initiative du projet musical, LionelMalka est aux claviers et arrange, coordonne labande de musiciens. Pierre Mullot apporte toutesles couleurs de l’accordéon aux lignes mélodiquesdes chansons, tout comme la voix de Julia Ben-chettrit. Flavien Porcu à la batterie et EmmanuelLuciani à la basse forment la section rythmique.Tout au long du spectacle, un monde se met à vivre! Un brin décalés ou parfois graves, les textes sontdes moments pêchés au hasard de la vie. Lesarrangements musicaux sont attachants, et mêmesi le sens des textes n’est pas toujours sensible àl’écoute, il devient plus clair in situ. Un beaumoment d’émotion.DAN WARZY

Ce concert a eu lieu le 30 juin à L’Espace Julien, Marseille

Tendresse et dérision

Metigane ©

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Mimi ange gardienMilitants de la diversitéculturelle : à vos marques,Mimi veille sur vous

Le Sergent perd du galonLe festival Nuit Métis accueillait en clôture l’inventeur de la salsamuffin

Festival Mimi © Agnè�s Mellon

DISQUES34

Grattant indifféremment sur son banjo, sa guitare,soufflant dans sa trompette ou impulsant une rythmi-que aux percussions, Kate Stables alias This is the Kitne se contente pas de chanter. Sa voix suave et légèreporte pourtant à merveille l’univers onirique créé dansl’album Wriggle out the restless, très attendu deuxièmeopus de celle qui ne cesse d’attirer les regards bien-veillants, que ce soit avec ses passages sur les petitesscènes ou au festival de Glastonbury. L’univers folknourri de pop planante est soutenu entre autres parune basse, un orgue, un violon, une clarinette et même

un piano. Cet effectif pléthorique mais utilisé avecparcimonie et subtilité dénote les multiples influences«amies» de la musicienne, comme l’apport de Jim Barrdes Portishead. La reconnaissance n’est certainementplus très loin !F.I.

Wriggle out the restless This is the KitDreamboat records – La Baleine

Is this the ?

Avec des compositions originales complètement dé-jantées et furieusement rythmées, Les voleurs deswing ont mijoté un cocktail explosif baptisé HôtelMolotov. Ce nouvel album plein d’humour atteint detziganite aigüe est un petit bijou qui donne la bou-geotte à qui s’y frotte. Nos trois musiciens syldavesseraient pensionnaires d’un mini état qui prendfacilement l’accent des pays de l’est, et le virus musicaltzigane. Multi-instrumentistes allumés, les voicitouchant violon, guitare, contrebasse et chants maisaussi clarinette, flûte, piano et batterie. Sous unerythmique endiablée qui triture les pompes tradition-

nelles, la virtuosité violonistique assure un sacré effetfestif et entrainant. Parfois proche de la Bregovicattitude, les 18 titres alternent entre instru-mentauxsurvoltés et chansons aux textes décalés à l’énergiepunk surprenante. Complètement à l’est cetteSyldavie ! F.I.

Hôtel MolotovLes voleurs de swing Mosaïc Music Distribution

Bienvenue en Syldavie

Bach solaireNicholas Angelich est aujourd’hui l’un des plusgrands interprètes du piano romantique de Brahms. Ilrévèle dans ce répertoire des palettes sonores rares,radieuses… Autant de qualités que l’on retrouve dansun monument de la musique baroque pour clavier :les Variations Goldberg, pinacle de la forme «thèmeavec variations» composé à l’origine pour un clavecin.Le piano d’Angelich en souligne les richesses formelles,harmoniques, son foisonnement rythmique, en vertud’une expression raffinée et d’un sens éminent du

contrepoint. Virtuose puissant, le pianiste cisèle lesmotifs thématiques, au gré de fines nuances, les libèrede la texture avec une hauteur de vue d’architecte.J.F.

CD Virgin Classics 50999 0706642 9Nicholas Angelich, outre une «Nuit du Piano»consacrée aux Années de Pèlerinages de Liszt joue les Variations Goldberg dans le cadre du Festival de La Roque d’Anthéron (voir p.10)

Composé de cinq musiciens et un vidéaste, Fantas-ticus est un tout jeune groupe basé à Aix-en-Provence.Leur premier EP 4 titres vaut largement qu’on s’inté-resse de près à ces nouveaux venus dans le rockexpérimental. Cette bande de musiciens improvi-sateurs à l’énergie décuplée a su sculpter un bon «grosson» animal et cru. Dans la langue de Shakespeare oude Baudelaire, ces premiers pas enregistrés laissentimaginer une prestation scénique agitée et exigeante.

Aux tendances psychédéliques (Assis en face de Toi) ouà la puissance rock’n roll sauvage (Not Afraid), lesFantasticus, alias petites grenouilles venimeusesd’Amérique du Sud, montrent un visage sans chichi niartifice dans une formation classique aux bases plusque solides. F.I.

Fantasticus / Les disques Brûlants

De l’ouest à l’estVenu de l’ouest de la France, Angers précisément, leSanta Macairo Orkestar est un drôle d’oiseau quitouche à tout à l’est de l’Europe : Klezmer et Balkanset tout autre folklore tzigane… Le SMO picoreégalement aux sources orientales, New-Orleans etmême Caraïbes ! Cette joyeuse bande ethno-alterna-tive est une affaire de famille, précisément celle de sixfrères d’âme et de musique : les Godillo. Une fratrieatypique qui partage tout ce qui fait swinger : banjo,clarinette, mélodica, trombone, tuba, trompette,piano, violon, accordéon, flûte, basse, contrebasse etbien sûr la voix qui explore un melting-pot coloré

(français, anglais, créole, turc, allemand et mêmelangues inventées…), sans parler des «invités» issus deLo’Jo, Mardi Gras Brass Band, Ma Valise et le sou-bassophone du Révérend Krug. Festif et bien agité, cequatrième album brasse les cultures musicales avec uneénergie sans bornes.FRÉDÉRIC ISOLETTA

MagnetikoSanta Macairo Orkestar Musique Caméléon

Rock’n roll Aix

Journées européennes du patrimoine, les 17 et 18 septembre 2011

«Le voyage du patrimoine»«À l’occasion de la 28e édition des Journéeseuropéennes du patrimoine, le thème choisi«Le voyage du patrimoine» a pour objectifde révéler une dimension souventmésestimée : l’extraordinaire vitalité d’un patrimoine national qui s’est toujoursconstitué grâce aux circulations des oeuvreset des artistes, aux contacts entre des courants et des cultures esthétiquesdifférentes, aux influences qui ont permis de faire se croiser les regards et d’inventer de nouvelles formes.Reflet de mutations, de métissages et d’emprunts successifs, support decréation, le patrimoine a toujours été «en mouvement». Parler du voyage dupatrimoine, c’est aussi faire état de sa modernité en (dé)montrant qu’il est en perpétuelle actualisation, dans un mouvement continu d’ouverture et d’échange.

Le Voyage du patrimoine nous invite à un périple dans le temps comme dansl’espace. Le patrimoine, nourri d’influencesdiverses à échelle européenne ou mondiale,évolue dans le temps. Il est le fruit d’unecomposition mêlant les influences del’architecte, des courants artistiques et destechniques de l’époque, des savoir-faire issusdes régions voisines ou des pays frontaliers.Les créateurs (architectes, artistes, artisans,conservateurs, etc.) sont souvent eux-mêmesde grands voyageurs Léonard de Vinci,Prosper Mérimée, etc.).

Ce voyage est aussi celui de l’histoire des régions françaises, qui ont chacunedéveloppé des savoir-faire propres, desexpressions originales selon les lieux (choix des matériaux, traditionsarchitecturales, contextes religieux ou politiques, etc.). Il évoque aussi lacirculation de principes architecturaux «officiels » qui, entre enjeux politiques,nécessités pratiques et effets de mode, ont trouvé leur place dans chaque villefrançaise et ont diffusé une certaine image du pouvoir. Il fait appel aussi aux voies, réseaux et carrefours culturelsmajeurs qui ont favorisé la mobilité deshommes et des courants artistiques.

L’un des objectifs de cette édition 2011 des Journées européennes du patrimoine est aussi d’apprendre à regarder autrementnotre patrimoine quotidien pour y déceler et y comprendre les influences de l’«ailleurs»

ou les signes d’un dialogue permanent ausein et au-delà des frontières françaises. À cette occasion, l’intérêt et la cohérence du patrimoine européen est réaffirmé et valorisé, à travers notamment le «Label du patrimoine européen».

Les musées tiennent une place essentielledans le voyage du patrimoine puisqu’ilsreprésentent des étapes ou des destinationsfinales dans le cadre d’échanges ou de prêtd’oeuvres. Leur connaissance et leurvalorisation sont de nos jours entièrementrenouvelées par la révolution informatique et numérique (outils multimédia, bases dedonnées) qui a permis la multiplication et la massification des échanges sur le patrimoine. Et, grâce à ces nouvellestechnologies, nous pouvons voyager aussibien dans le passé que dans le futur.

Comme l’an passé plus de 400 sites de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur sont ouverts au public lors de ces journées.Ces lieux variés et divers sont pour certainsouverts exceptionnellement ou pour la première fois, d’autres sont de hauts lieuxincontournables ou parfois des sites plusinsolites à découvrir. Ils offrent denombreuses animations sur le thème du voyage du patrimoine : visites libres ou guidées, circuits et balades,démonstrations de savoir-faire, conférences, lectures, expositions,spectacles divers, concerts, jeux/concourspour les enfants, nocturnes, etc.

Les Journées européennes du patrimoine sont organisées depuis 1983 par le ministèrede la Culture et de la Communication et coordonnés en Région par la Directionrégionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur, avec le concours denombreux partenaires et mécènes.

Renseignements : www.paca.culture.gouv.fr

Le programme est consultable à partir du 15 août 2011

sur www.paca.culture.gouv.fr et

journeesdupatrimoine.culture.fr.

CONTACTS :

HÉLÈNE BARGE, COORDONNATRICE RÉGIONALE

[email protected] – TÉL. 04 42 16 19 62.

ANNE DUFOURG, CHARGÉE DE COMMUNICATION

[email protected] – TÉL 04 42 16 19 16.

Notre sélection :

13. Aix-en-Provence – Cité du LivreAncienne manufacture d’allumettes, transformée encomplexe culturel en 1989. � Conférence «L’imprimerie àla Renaissance : l’invention du livre moderne», atelier«Des livres de caractères : trésors de l’Imprimerie natio-nale, de François 1er à Butor», exposition «L’ImprimerieNationale, histoire de caractères», Visite «L’Imprimerie Nationale, histoire de caractères».

Aix-en-Provence – Cathédrale Saint-SauveurClassé MH. Ouverture exceptionnelle � Concert d’orgue,visite guidée de La Cène par Jean Daret ami de PierrePavillon, des restaurations récentes de la Cathédrale etdu Retable du Buisson Ardent.

© Jean Bernard.

Aix-en-Provence – Hôtel Maynier d’OppèdeCélèbre hôtel particulier du XVIIIe s. � Conférences : «DePierre Pavillon à nos jours», «Le quartier Mazarin d’Aix-en-Provence», «Sextius-Mirabeau à travers les âges», «lesordres classiques dans l’architecture à Aix et en FranceXVIe-XVIIe s.», «Louis-Félix Chabaud, sculpteur Venellois.Emission exceptionnelle d’une vignette postale, expo-sition sur Pierre Pavillon, architectes et sculpteurs aixois.

La Ciotat – Cinéma l’EdenRenaissance de l’Eden à l’occasion de la rénovation duplus vieux Cinéma, présentation du projet et préfigura-tion d’un programme d’animations. Inscrit MH. Conférence«Autour du cinéma à La Ciotat», visite libre, expositionsur les Frères Lumière, présentation du projet de réno-vation de l’Eden.

Marseille 1er - Palais de la Bourse/Chambre de Commerce et d’Industrie

Lieu emblématique du patrimoine économique, muséede la Marine et de l’Economie de Marseille. Classé MH.Dans le cadre de l’année des Outre Mers : conférence«Cacaos des Caraïbes et Chocolats à Marseille au XVIIIes.», exposition sur Marseille et le développement écono-mique des «Iles françaises de l’Amérique».

Marseille 3e - Site universitaire Saint-CharlesPatrimoine XXe, Première participation, ouverture excep-tionnelle pour le centenaire de la faculté des Sciences.� Exposition «Objets et Histoires de sciences», visite « Lafac dans tous ses étages !».

© Fac St-Charles, Université de Provence.

Marseille 2/3e - Patrimoine intégré des2e-3e arrondissements de MarseilleA la découverte de divers monuments et sites connus ouméconnus. Première participation.Circuits : balade patrimoniale : les dessous de Mazenod,balade rue de la République, balade surprise dans le 2earrt de Marseille, spectacle de rue, projection et visiteguidée au Parvis des arts, à la Friche et dans le quartierde la Belle de Mai.

Marseille 8e - GMEM, Centre national decréation musicale Lieu de création et d’écriture des langages musicaux.Ouverture exceptionnelle. Visite libre, atelier «Performan-ces musicales».

© GMEM, Mathieu Chamagne.

Marseille 14e - La savonnerie le Fer à ChevalCette usine perpétue la tradition du véritable Savon deMarseille depuis plus de 155 ans. Ouverture exception-nelle. Visite des coulisses du Vrai savon de Marseille.

Marseille 16e - L’Estaque «le chemin de lasardine»Cette balade permet d’évoquer l’évolution d’une activitéartisanale liée à la pêche, de mettre en lumière la nais-sance d’une peinture novatrice qui donnera à ce site unerenommée internationale. La gare, avec des élémentsarchitecturaux du XIXe s. et «Art Déco», a vu transiterdes milliers de tonnes de matériaux, des milliers d’ou-vriers et de nombreuses célébrités. � Circuit «le chemin de la sardine» et exposition.

Martigues – Musée Ziem

Important fonds de l’artiste Félix Ziem (1824-1911). �Visite guidée, conférence «les voyages de Félix Ziem»,conférence « Emprunts et prêts d’œuvres, commentvoyage le patrimoine ».

06. Cannes – Musée de La CastreSitué sur les hauteurs du vieux Cannes, le château mé-diéval domine la Croisette, la baie et les îles de Lérins. Ildate de la fin du XIe siècle et a été construit pour assurerla défense de la ville. Classé MH. � Un voyage à traversles collections du musée. Visites guidée « Du Tibet àTahiti, voyager au Musée de la Castre », « La peinturecomme une carte postale, invitation au voyage », LeSuquet, un voyage au coeur du Patrimoine cannois ».

Mouans-Sartoux - Musée International de la ParfumerieVille d’art et d’histoire, classée MH. Histoire du parfumsous tous ses aspects (matières premières, fabrication,industrie, innovation, négoce, design, marketing) avecde fabuleux objets venus des cinq continents. � Visiteguidée «Le patrimoine en voyage», conférence «Un jour,une plante : l’immortelle et le ciste».

© Cistes. MIP Mouans Sartoux.

Nice - Villa Arson, Ecole/centre nationald’art contemporain Classé MH, patrimoine historique et architectural du XXe s.Visites guidées, découverte de la médiathèque et descollections patrimoniales, expositions du Centre nationald’art contemporain et de l’Ecole nationale supérieured’art, projection «La Villa Arson en 3d» maquette inter-active, une expérience de cinéma à la Villa Arson.

Nice - Parc et château Valrose

L‘une des plus belles propriétés de la Riviera créée en1860. Visite guidée, portes ouvertes, atelier (à la décou-verte des techniques d’arts), circuit Art et mécénat,débat sur le mécénat d’art, exposition d’artistes niçoiset provençaux, spectacles (les arts de la rue à côté desarts traditionnels, les spectacles vivants), projection surles nouvelles technologies au service des arts et dupatrimoine.

84. Bonnieux – Musée de la boulangerieIl retrace l’histoire des différentes technologies du blé, dela meunerie, minoterie et panification à travers la présen-tation d’outils et de matériel tant agricole qu’artisanal.Une très riche iconographie, du XVIIe s. à nos jours. �Visite, atelier « Tour du monde des céréales », confé-rence « Couscous, boulgour et polenta, les céréales àtravers le monde ».

Fontaine-de-Vaucluse –Musée/bibliothèque François PétrarqueCe lieu consacré à Pétrarque, à l’humanisme renaissantet à l’italianité, propose, depuis sa réouverture en 1986,des activités artistiques et culturelles relatives à laFontaine-de-Vaucluse et à son territoire littéraire dans lacontinuité du lieu inspiré et d’une tradition créatricequ’illustrent, à cinq siècles d’écart, les deux grandesfigures poétiques : François Pétrarque et René Char. �Visite du lieu, atelier «Voyage au centre de soi-même… ».

© Musée Pétrarque.

© Drac, Sylvie D

enante.

© F. Ziem, le coup de canon - Musée ziem

© Drac, Jean Marx.

Grillon – Le Vialle

Centre historique du village de Grillon restauré, inscritMH. � Visite exceptionnelle des fresques papales del’immeuble Chapuis-Tourville, exposition «l’eau, sourced’énergie en Vaucluse au XIXe s., jeux de pistes pourenfants «Voyage dans notre patrimoine».

La Tour d’Aigues - Musée des Faïences

Situé dans le château de La Tour d’Aigues qui fut uncentre de production de faïences grâce à Jean-BaptisteJérôme Bruny (1724-1795). � Visite guidée du château etdes jardins, atelier de poterie pour enfants, concert/lec-tures « le voyage au XVIIIe s. », conférence « Des Faïences,des pavements et des images : les voyages du patri-moine au château »,

Valréas - Musée du Cartonnage et de l’ImprimerieUnique en France, il retrace l’histoire des modes defabrication et d’impression de la boîte en carton àValréas, capitale historique du cartonnage français, desorigines (milieu du XIXe siècle) à nos jours. � Visites,concert, exposition «Impressions de carton 1991-2011»,présentation de lampes en carton.

© Musée du Cartonnage.

04. Embrun – Maison des ChanongesLa Maison des Chanonges est un élément phare du pa-trimoine embrunais et un rare spécimen d’architecturecivile médiévale encore conservé. � Visite, expositions«Compostelle, pèlerins d’hier et d’aujourd’hui» et «Eclatsde lumière, les vitraux de la cathédrale ND d’Embrun»,atelier «Démonstration du travail de vitraillerie», récitald’orgue.

Mane – Salagon, musée et jardinsMusée départemental ethnologique, installé au sein d’unancien prieuré du XIIe s., chargé de recueillir, étudier,conserver et présenter les usages, savoir faire, témoigna-ges de la société et des hommes en Haute-Provence.Jardin remarquable, classé MH. Visite guidée, confé-rences, rencontres, ateliers d’art ambulants «D’un arbreà l’autre», exposition de photographies.

Sisteron - Musée Terre et TempsSitué dans l’ancienne chapelle du couvent des Visi-tandines, XVIIe s., ayant abrité le suaire deSaint-François de Sales. � Conférence «La Naissance del’écriture et l’invention de l’Alphabet», exposition «LaNaissance des Alphabets sur les rives de la Méditer-ranée».

Sisteron – La Citadelle

Henri IV disait d’elle «C’est la plus puissante forteressede mon royaume». Classé MH. � Un parcours sonoriséen six langues conte sa prestigieuse histoire. Un film«Citadelle ! Navire des hommes…» avec la voix de Jean-Claude Brialy, la met en scène. Un musée la fait vivre,dont une salle évoque le passage de Napoléon au retourde l’île d’Elbe. Le donjon garde encore le cachot qu’oc-cupa le prince Jean Casimir de Pologne en 1639. Uneexposition de voitures hippomobiles agrémente la visite.La chapelle Notre-Dame du Château (XVe s.) se paredes vitraux du maître-verrier Claude Courageux etaccueille l’exposition «Vauban et ses prédécesseurs».Exposition de peintures et sculptures de l’artiste mexi-caine Agueda Lozano (juillet-sept 2011). La tabled’orientation offre un point de vue saisissant.

05. Champoléon – Maison du bergerLe Centre d’interprétation et de recherche sur lescultures pastorales alpines est un outil pour découvrir,comprendre, transmettre, valoriser les métiers du pas-toralisme, leurs savoir-faire et leurs productions. Visite«Tant qu’il y aura des bergers», exposition «l’Odysséepastorale» (un voyage dans la Méditerranée des bergers).

Crots – Abbaye de Boscodon La plus grande abbaye de la région et la principalemaison de l’Ordre monastique de Chalais (XIIe s.).Classé MH. � Conférences « l’ordre de Chalais » et « VersSaint-Jacques de Compostelle par 4 chemins », baladesur les sentiers de la transhumance, spectacle théâtre«Etty Hillesun : l’espace intime du monde».

L’Argentière-la-Bessée - Musée des mines d’argent du Fournel

Demeure seigneuriale avec parc du XVIIIe s. réhabilitée.Inscrit MH. � Visites guidées  : les fresques XVIIe s.nouvellement restaurées de la Chapelle Saint-Roch, ladécouverte du patrimoine industriel de la commune,histoire et fouilles médiévales, de la vie paysanne àl’industrie de l’aluminium, présentation des archivesmunicipales et du fonds Gilbert Planche et Brunet.Visites des mines d’argent, du patrimoine religieux et dupatrimoine industriel.

83. Brignoles – Palais des Comtes de ProvenceSecond palais des Comtes de Provence de 1264 jusqu’en 1470. Ce bâtiment a été maintes fois réutilisé depuisle XIIe s. (palais de justice, prison, lieu de réunion duParlement de Provence entre 1416 et 1631, école auXVIe s, préfecture 1795 à 1798 et au XIXe s., sous-pré-fecture de 1840 à 1920, dispensaire de la Croix-Rougede 1927 à 1945, musée depuis 1945). Classé MH. Villed’art et d’histoire. Ouverture exceptionnelle. � Visite gui-dée, atelier d’argile, conférence sur la construction d’unevoûte gothique, exposition « L’évolution d’un bâtiment »et « La carte postale témoin de nos voyages ».

Draguignan – Musée de l’artillerieA travers l’histoire de l’évolution des techniques del’Artillerie, le musée déroule l’histoire de la France. Lieud’apprentissage de la citoyenneté. Ouverture exception-nelle � Visite guidée, exposition «Soldats de plomb,modèles réduits et figurines».

Hyères – Les SalinsHistoire des espaces lagunaires. Première participation, ouverture exceptionnelleVisite guidée, randonnées historiques et ethnologiques.

Le Rayol-Canadel-sur-Mer - Domaine du Rayol, le Jardin des MéditerranéesCe jardin remarquable est une invitation au voyage àtravers les paysages méditerranéens du monde et despaysages à climat plus aride ou subtropical. � Visite dujardin « Invitation au voyage ».

© Drac, Françoise Thurel.

© Drac, Martine Audibert.

© Ville de Sisteron.

© Mairie, L’Argentière-la-Bessée

35LIVRES/DVD

Oc cantanMême si elle n’a pas de frontières administratives et siles troubadours ont fait leur temps, l’Occitanie conti-nue de nourrir un espace culturel commun prolifiquesur le plan artistique. Dans La vie en Oc. Musique !Augustin Le Gall pour les superbes photos et Elisa-beth Cestor pour les textes s’attachent à cet universtrès dense de création en Oc. Une musique empreintede poésie et d’inventions, qui déjoue souvent les fron-tières parfois passéistes des musiques «trads» : lesAssemblades ont récemment donné la preuve de leurvariété de ton (voir p.32). L’enregistrement, lesconcerts, les échanges, les ateliers, les fêtes populaires

sont ici contés avec passion de Nice aux Baux de Pro-vence en passant par Arles ou Marseille. Les portraitsde quelques artisans majeurs de cette culture ancestralecomme André Gabriel, Sam Karpénia ou Jan-MariCarlotti complètent ce panorama aux mille couleursqui défie le temps.FRÉDERIC ISOLETTA

La vie en Oc. Musique !Augustin Le Gall, Elisabeth Cestor Carnets Méditerranéens, 25 €

Le film-documentaire Pianomania ou la recherche duson parfait a été réalisé en 2009 pour sortir sur lesécrans en janvier 2011. Peu de salles l’ont distribué enFrance, cependant ceux qui ont eu la chance de le voir(également sur Arte) ont manifesté leur enthousiasmepour le travail du maître accordeur de pianos StefanKnüpfer, sa collaboration pointilleuse avec les pia-nistes Pierre-Laurent Aimard, Lang Lang ou AlfredBrendel. Succès critique, cette exploration cherchantà percer le secret du son, primée un peu partout, estdésormais disponible en DVD. Les curieux, fans de piano, y découvrent un monded’exigences technique, artistique, mais aussi humaine.La ferveur filmée est captivante. Stefan Knüpfer (di-recteur technique de Steinway & Sons) est le véritablehéros, métronome du documentaire qui commence

un an avant l’enregistrement de L’Art de la fugue parPierre Laurent Aimard. Que d’obstacles vont ren-contrer les deux hommes dans leur quête de laperfection, au prix de l’examen d’instruments del’époque de Bach et de bricolages minutieux dans lacaisse du piano n° 109 ! On suit également l’accordeurdans la préparation d’un des derniers concerts deBrendel ou à l’écoute de Lang Lang qui, épuisé parle décalage horaire, se soucie davantage de la solidité deson tabouret (quel jeu «physique» !) que du choix dupiano pour la Konzerthaus de Vienne…JACQUES FRESCHEL

DVD Pianomania Lilian Franck et Robert CibisJour2fête EDV2087

Passion(nant)La Passion du Christ a inspiré de nombreux compo-siteurs : l’histoire de l’arrestation, du procès, du calvaireet de la crucifixion, sont au cœur du cycle liturgiqueet de la culture européenne. Les représentations qu’ellea suscitées constituent un message essentiel de pers-uasion (souvent anti-juif) envers les foules. Frans C.Lemaire prend appui sur les textes, leur interprétation,depuis l’apparition des premières Passions à Jérusalemau IVe siècle, ses versions grégoriennes, réformées…sans oublier les fresques de Bach, des versions plus

modernes, cinématographiques (Mel Gibson), ou lesrepentances qu’elle a générées chez les chrétiens aprèsAuschwitz…J.F.

La Passion dans l’histoire et la musiqueFrans C. Lemaire Fayard, coll. Musique, 29 €

Toujours jeune ?Ce livre retrace le parcours, à travers le rock, de l’affir-mation de la jeunesse (identité, codes, mythes…) desannées 1950 à nos jours. L’ouvrage richement rensei-gné avait déjà été publié chez Hachette en 2007 sousle titre : Nous sommes jeunes, nous sommes fiers : laculture jeune d’Elvis à Myspace. Cette réédition est augmentée d’une préface inéditedans laquelle Benoît Sabatier prend en compte ledernier phénomène Lady Gaga qui prône un «sex &drugs» fonctionnarisé, un fantasme «people porno

glam» foncièrement «routinier». Selon l’auteur cettenouvelle norme (dont il situe le point de bascule en1984) prend à contre-pied les revendications rebelleset sulfureuses du rock des années 50… mortes vingtans après. À lire !J.F.

Culture jeune, L’épopée du rockBenoît SabatierArthème Fayard, coll. Pluriel, 12 €

L’accord parfait

36 LIVRES/ARTS

La tour est un symbole fort. Signe de puissance écono-mique ou religieuse, elle est une alliée des villessoucieuses de compacité et de mixité fonctionnelle,jusqu’à caractériser la ghettoïsation verticale. Le super-be ouvrage La Tour et la ville, manuel de la grandehauteur explore remarquablement cette thématique sirarement abordée. L’historienne «verticale» de l’artJulie Gimbal et l’architecte urbaniste Eric Firley ontédifié un véritable guide analytique, bien au-delà d’uncatalogue. À travers les tours solitaires, les groupe-ments de tours et les villes verticales, 50 grandesmétropoles mondiales, agrémentés d’un vaste réper-toire iconographique, sont analysés et questionnent ladualité tour/ville au cœur d’un tissu urbain. Les

réglementations de 7 grandes villes et le rapport de latour au développement durable complètent cettepublication. De la Cité Radieuse phocéenne à la TorreAgbar barcelonaise, de la Marina City de Chicago auKingdom Centre de Riyad en passant par Monaco,Sao Paulo, Shanghai, Frankfort ou les immeubles«choux» de Créteil, les exemples richement détailléspermettent une analyse intelligente et intelligible. FRÉDÉRIC ISOLETTA

La tour et la ville, manuel de la grande hauteurEric Firley, Julie Gimbal Parenthèses, 58 €

Tour en stock

Ce que font les aléas climatiques, les plans de dévelop-pement et surtout la culture intensive de la crevettedans l’extrême sud-ouest du Bangladesh à son écosys-tème et ses six millions d’habitants ? Bangladaislui-même, photographe né en 1983 et reconnu pourses reportages humanistes (membre de l’agence VU,nombreux prix dont Pictet) Munen Wasif a rapportéde cette région en immense détresse des imagesparadoxalement retenues. Il n’y aurait l’édifiante pré-face du scientifique Pavel Partha puis l’analyse deFrancis Hodgson, nous ne saurions pas cette catas-trophe cynique. Toutes en noir et blanc, sans pathos,les images de Wasif disent cependant la pauvreté,l’humilité en évitant la surcharge dramatique bien quechacune de ses approches, comme par empathie, senimbe de tons assombris et contrastés où transpa-raissent finement nuances et matières des peaux, deboue luisante ou craquelante, d’airs moites… parfai-tement servies par l’impression. Pour ne pas troublerle lecteur les légendes sont reportées en fin d’ouvrage

avec la reprise des photos en vignette. On apprend quecette femme endormie son bébé dans les bras pleureen fait sa lente agonie, que ce visage s’hallucine dansla mutilation due à l’attaque d’un tigre près d’un canal,qu’après avoir réussi à trouver un peu d’eau potablecette femme tente d’abreuver son mari atteint d’uncancer du foie. Eugen Smith comme Sebastiao Salga-do ne sont pas loin. Une question se pose en écho à la discussion dans lecadre des Rencontres d’Arles : «la beauté d’unephotographie historique supplante-t-elle sa valeurdocumentaire ?». Ou autrement : quel en serait lepoint d’équilibre ?CLAUDE LORIN

Larmes saléesMunem WasifÉd. Images Plurielles, 25 €en français et anglais

Du sublime pour chacunLes empêchés du Grand Palais où l’artiste avait installéson Léviathan, gigantesque baudruche gonflable,pénétrable, translucide en pvc rouge, se rattraperontavec cette monographie filmée sur l’œuvre de l’anglo-indien Anish Kapoor. Orienté vers le grand public(dégrossi), ce DVD de plus d’une heure avec bonus selaisse découvrir avec un réel bonheur, si on ferme lesyeux sur certains effets visuels à la mode. Dans le cadrede son atelier londonien ressemblant une PME artisa-nale - assistants affairés à peaufiner soigneusement lespièces en cours - l’artiste se prête volontiers au jeudidactique en exposant sa démarche, ses principesesthétiques comme ses exigences dans la réalisation deses oeuvres. «Pour créer un art qui est nouveau, il fauttrouver de nouvelles formes, de nouveaux espaces, de nou-velles temporalités». Le film fait un tour du monde deses productions permanentes ou temporaires commele fascinant Cloud Gate de Chicago définitivementapproprié par les habitants et visiteurs. Ou Léviathanpour lequel on assiste à la fabrication puis l’élévation

sous les vingt mètres du Grand Palais, avec complé-ment de programme en compagnie du commissairede l’exposition Jean de Loisy. Cinq autres œuvresbénéficient in situ d’une présentation de quelquesminutes en accéléré (captation des nuages). On aurait attendu aussi la parole d’autres spécialistespour situer cette œuvre singulière dans le contexte plusgénéral de l’art contemporain, celle des commandi-taires privés ou publics, des publics selon les pays, lescultures. Car pour Anish Kapoor «… un art réussi a aumoins le mérite d’atteindre un large public et peut êtreappréhendé à tous niveaux par toutes sortes de personneséduquées ou non». Une de ses dernières recherchesutilise une imprimante trois dimensions et du ciment«entre la merde et l’architecture». Universel et sublime.C.L.

Le monde selon Anish KapoorHeinz Peter SchwerfelDVD, Arte Editions, 20 €

Excès de sel

LIVRES JEUNESSE37

Comme chaque jour, Angèle s’est levée très tôt ;comme chaque jour, elle a bu son café au lait (beau-coup de lait, une goutte de café) ; comme chaque jour,elle s’est faite belle ; puis comme chaque jour, elleattend. La vieille dame solitaire attend la visite quoti-dienne de l’autre Angèle, la petite, pour qui elle a cuitdes sablés, ses pâtisseries préférées, et avec laquelle elleira au jardin en quête de cerises bien mûres et d’escar-gots cornus. Le cœur usé de la vieille Angèle ne batplus que pour ces retrouvailles avec la fillette qu’elleétait. Et tant pis s’il s’emballe ! Et tant mieux si les

aiguilles du temps s’emmêlent ! Comment évoquer lasolitude et les petits déraillements du grand âge ?Raphaële Frier le fait avec beaucoup de pudeur etd’amour, dans un récit sensible, poétique, qu’elle adédié à ses deux grands-mères. Les illustrations àl’huile de Teresa Lima, aux tons pastel et aux rondeursfleuries, s’harmonisent parfaitement à la tendressenostalgique dont cet album charmant est empreint. Àlire toutes générations confondues.FRED ROBERT

Angèle et le cerisierRaphaële Frier(texte) et TeresaLima (illustrations)L’atelier du poissonsoluble, 15 €

Sablés, cerises et escargots

Conte d’aujourd’huiUne petite maison d’édition de Montpellier a la par-ticularité de publier des livres-CD pour enfantsvoyants et déficients visuels de 2 à 12 ans. Son but :développer leur perception d’un monde sonore. Lepapa-maman raconte l’histoire de Mireille et son papa,qui tient aussi le rôle de la maman, de Beautiful, unetrès belle femme - normal puisque c’est la belle-mère-, d’une demi-soeur, qui forcémént n’a «qu’un bras,qu’une jambe, un oeil, une oreille et une toute petitebouche» ! Mireille a aussi les yeux de sa grand-mèrequi lui apprennent à voir un monde pas toujours rose

qui réserve parfois des surprises désagréables. Maistout rentrera dans l’ordre, et au bord de la mer !Merveilleusement illustré par la jeune libanaise ZeinaAbirached, qui signe là son premier livre couleurs,superbement mis en voix par l’auteure elle-même,Angelina Galvani, sur une bande-son de RémiAuclair. Un album coloré entre la vie et le conte.CHRIS BOURGUE

Le papa-mamanLivre-CD benjaminsmedia, 22 €

Coup de coeur de l’AcadémieCharles Cros Existe aussi en brailleet en gros caractères,24 €

Certains qui n’y voient pas plus loin que le bout deleur nez ont parfois envie de s’évader pour suivre leshirondelles... C’est le cas de Mr D’Issy qui, l’oeil colléaux magazines de voyages, ne s’aperçoit pas de l’atten-tion toute particulière que lui accorde Mme D’Laba.Ainsi il parcourt le monde, tandis qu’elle garde sonchat et arrose ses plantes. Il envoie aussi des cartespostales des pyramides et de la Muraille de Chine...Mme D’Laba est une belle africaine qui rêvait aussi demirages et qui, attirée par l’Occident, a quitté soncontinent. Tous deux trouveront un terrain d’ententeamoureux. Le récit d’Annie Agopian est très jolimentillustré par les peintures de Magali Bardos, avec sespersonnages bien campés, ses aplats très colorés, et unsens précis de la mise en espace.Après les histoires, le jeu et l’invention, avec l’albumastucieux de Christian Voltz. Vous connaissez peut-

être ses petits bonhommes au gros nez et à l’air ahuri,fabriqués avec du fil de fer, de la ficelle des boulons, desrondelles et des objets hétéroclites recyclés ! Le créateurlivre ici des recettes pour faire décoller l’imaginaire deses jeunes lecteurs - et celui parfois un peu rouillé deleurs parents ! On rentre dans un univers plein d’hu-mour et de tendresse pour ces petits êtres malhabilesmais généreux. Les enfants sont invités à créer leurspropres personnages avec ce qu’ils ont sous la main.Une belle façon de participer au développementdurable !...C.B.

Plus loin que le bec des hirondellesLe Rouergue, 13,50 €Dans l’atelier de Christian VoltzLe Rouergue (nouvelle collection), 9,90 €

Pour voyager et jouer....

Qu’est-ce qu’aimer ?Il n’y a rien de pire que de tomber amoureux, des’engager dans la voie des sentiments. On peut s’y fairemal et éviter d’aimer permet d’atteindre une certainesérénité… Mais l’ataraxie rend-elle vraiment heureux ?Comment différencier l’amour et l’amitié, commentassumer ce que l’on aime, se l’avouer, puis le dire ?Affronter le jugement de ses pairs a quelque chose deparalysant pour Will Grayson. En fait, il y a deux WillGrayson dans ce roman à deux voix, écrit à deuxmains par John Green et David Levithan : les deuxpersonnages vivent aux deux bouts de Chicago, et serencontrent par hasard. Au-delà de l’homonymie, ils

se retrouvent dans le sillage fascinant de Timy Cooper,immense, excessif en tout, qui compose une comédiemusicale dans laquelle il met en scène sa propre vie.Homosexualité et hétérosexualité sont évoquées dansce roman magnifiquement écrit, orchestré comme unopéra, sans de langue de bois ni de faux fuyants. Unroman qui parle d’amour, du vrai, et se soucie peu dusexe finalement. C’est très beau et profondémenthumain. M.C.

Will & WillJohn Green et DavidLévithanGallimard, Scripto,13 €

38 LIVRES JEUNESSE

Il était une fois les filles… Bien que son titre puisse lelaisser imaginer, cet essai tout récemment paru n’a riend’un conte de fées. «Ignorance, peur et préjugés : cetrio infernal a donné naissance à de terribles stéréo-types concernant les particularités entre garçons etfilles. Toujours faux ces stéréotypes […] ont véhiculéplus de dix millénaires d’idées saugrenues portées pardes mythes et des légendes avant d’être réinterprétéespar l’ensemble des religions à travers le monde».Partant de ce constat sans ambages, Patrick Banonmontre comment une mythologie de la différence s’estmise en place depuis la nuit des temps, afin d’assignerà chaque sexe un rôle bien défini, toujours discrimi-nant pour les femmes, et dont les filles pâtissent encorelargement aujourd’hui. En 21 brefs chapitres, ce

spécialiste des religions mène la guerre aux idéesreçues. Tout est fait pour faciliter la lecture : les titres,souvent interrogatifs et volontiers provocateurs, titil-lent ; les intertitres, nombreux, balisent les pages,tandis que des encarts rouge sang précisent un mythe,un rituel, une coutume ; en fin d’ouvrage un lexiquerésume les principaux personnages et concepts ren-contrés. Quant aux magnifiques illustrations d’Anne-LiseBoutin, aplats contrastés, collages surréalistes etpapiers découpés, elles revisitent avec un onirismetrash et décalé l’imagerie traditionnelle des contes. Unbel ouvrage, engagé et documenté, qui passionnera lesadolescents auxquels il s’adresse. FRED ROBERT

Il était une fois les filles…Patrick Banon(texte) et Anne-LiseBoutin (illustrations)Actes Sud Junior,14,80 euros

Haro sur l’inégalité !

P’tit tour dans l’au-delàDyssëry est désespérée. Sa famille a décidé de la marieravec le riche Phorée, bien contente que celui-ci accepted’épouser une fille à la réputation plus que douteuse :elle a osé se lancer dans le théâtre, un art réservé auxhommes ! Pour la belle indépendante, il n’y a d’autreissue que la mort, le soir même de ses noces… La voicidonc au Val des Ombres. Là, parmi les créatures lesplus incroyables, succubes, vampires et autres démonsfacétieux, l’intrépide Dyssëry vivrait bien une mortbien remplie (surtout qu’elle y trouve enfin l’occasionde révéler ses talents de comédienne) si son Phorée demari ne venait l’y débusquer afin de la ramener sur

Terre… Arleston et Alwett proposent une relecturedécalée du mythe d’Orphée et Eurydice. Humour,fantasy…et féminisme sont au rendez-vous dans cetteBD que le dessin japonisant de Virginie Augustinrend encore plus séduisante. À conseiller aux adosamateurs de Lanfeust et de Troy.F. R.

Voyage aux OmbresArleston et Alwett (scénario), Virginie Augustin (dessin)Soleil, coll. One Shot, 13,50 €

Chemins initiatiquesC’est avec délectation que les jeunes lecteurs retrou-veront la trilogie Le Livre des étoiles d’Erik L’Homme,sous la forme compacte, mais maniable, d’un volumeunique (avec des bonus !). La relecture n’épuise pas lamagie des aventures de Guillemot de Troïl, l’apprentide Maître Qadehar, le Sorcier. Les trois mondes ou-vrent leurs portes aux incantations, et les personnagessont dotés d’une épaisseur psychologique rare dans cegenre qui souvent s’abandonne aux stéréotypes. Lesfigures sont sympathiques, terribles, énigmatiques,comme celle du Seigneur Sha, les intrigues complexeset fouillées, et les jeunes héros y acquièrent expérienceet personnalité. Qui pourrait résister à la mise en abîmede l’écriture avec la quête d’un ouvrage qui renferme lessecrets primordiaux du monde, et se déchiffre grâce àl’art subtil des Graphèmes !

Cette fascination pour les mots sert de fil conducteurà l’œuvre d’Erik L’Homme qui accorde à son hérosJasper de la série A comme Association le pouvoir deles animer et d’en extraire la puissance. Le jeune sorcierpoursuit ses aventures dans ce cinquième volume, Làoù les mots n’existent pas. La vie réelle s’immisce dansl’intrigue, le personnage de Pierre Bottero meurt, àl’instar de son auteur. Son comparse lui rend homma-ge, reprenant les caractéristiques de son style : formuleslapidaires, dramaturgie jusque dans la disposition desmots… Une suite forte, nourrie d’un imaginaire quisait se renouveler, et d’une appréhension sensible ethumoristique du monde.MARYVONNE COLOMBANI

Là où les mots n’existent pas(A comme Association)Le livre des étoiles Deux ouvrages d’Erik L’HommeGallimard Jeunesse, 9,90 € et 23 €

B.D. et ukuléléPipo est un petit bichon en quête de liberté qui veutdevenir sauvage. Il s’évade de chez miss Smith, ren-contre le chat Attila, et fuit en sa compagnie la ville etses dangers pour découvrir la forêt. Mais la nature, lanuit venue est peu engageante, alors… Pipo retourneau logis ! Cette histoire chantée (CD joint) se lit ets’écoute au fil d’une bande dessinée grand format(texte et dessins de Dorothée de Monfreid). La musi-que (13 chansons) est composée par Tony Truant,l’ex-guitariste des Dogs (et actuel des Wampas). Le

rockeur privilégie les cordes pincées des guitares, dubanjo et du… ukulélé ! Les musiciens assument lesvoix des personnages et semblent s’être amusés àréaliser ce conte sonore qui risque de devenir unclassique pour enfants...J.F.

Super sauvage, Histoire d’un bichon libreDorothée de Monfreid (texte et dessins),Tony Truant (musique)Gallimard jeunesse musique, 22 €

LIVRES JEUNESSE 39

Le carnet du vadrouilleur – Provence-Alpes-Côte d’Azurinaugure une collection qui, dès 2012, s’enrichirad’autres destinations en France et en Europe. Une idéede livre créatif que l’on doit à Yaël Vent des Hove(institutrice, auteure et illustratrice) et à VéroniqueMassard (éditrice), toutes deux mères de famillesnombreuses ! Du coup les activités sont réalisables,attractives et diversifiées pour répondre à tous lesesprits curieux de la vie quotidienne (gastronomie,marchés, pétanque, folklore…) à l’architecture et aupatrimoine, de la faune à la flore et aux lieux insolites.Avec Vadrouille le hérisson pour compagnon d’aven-

tures, l’enfant explore sa région en expérimentant à saguise les visites et les activités grâce à de courts textesludiques et pédagogiques, de nombreuses photogra-phies légendées : à lui ensuite de dessiner, annoter lespages de ses observations, colorier, jouer, apprendreproverbes et dictons. Et quand les visites sont plus«risquées», la mention «défi famille» avertit les parents.Car un vadrouilleur averti vaut mieux que deuxvadrouilleurs ignorants !M.G.-G.

Le carnet du vadrouilleur – Provence-Alpes-Côte d’AzurYaël Vent des Hovedès 7 ans Les éditions du Vadrouilleur, 18 €

Quel destin !Tout ici est imprévisible. La boulangerie de la rue desdimanches de Alexis Galmot et Till Charlier com-mence de manière fort alléchante avec «la délicieuserecette du Lu au chocolat chaud» pour se terminer en«414 barres d’or fin». Entre-temps, un petit Jack auxcheveux dorés naîtra de Louis et Adèle qui «ont le sensde la rythmique, un peu moins celui de l’arithmé-tique» au point qu’ils le confient à un orphelinat. Là,il apprend vaguement à confectionner des baguettespas trop cuites et des religieuses au chocolat qui, plustard, feront sa fortune ! Entre-temps, il se contenterade manger des mouches fraîches l’été, des mouchessèches l’hiver tant la malchance et la pauvreté lui

collent à la peau… Dans un style alerte, fleuri ettendre, des dessins rétro, les auteurs racontent unehistoire à la Tati, où les personnages sont décalés, enéquilibre instable entre la dureté quotidienne et larêverie du dormeur éveillé. Le récit parfois flirte avecle fantastique parfois s’ancre dans la modernité. De cedécalage inattendu naît son charme singulier.M.G.-G.

La boulangerie de la rue des dimanchesAlexis Galmot (texte) et Till Charlier (illustrations)Grasset-Jeunesse, coll. Lecteurs en herbe, 12,50 €

Un cahier de vacances rigolo

Entre deux rafales croise deux voix. Celle d’Emma quia perdu la mémoire après un accident de scooter etcelle d’Arthur qui le conduisait alors qu’ils avaientdécidé une fugue. Emma est très jolie, c’est uneexcellente élève tandis qu’Arthur est allé de foyer enfamille d’accueil. Leur rencontre fortuite à la média-thèque les a entraînés peu à peu à s’aimer. Pendantque les parents d’Emma essaient de ranimer les souve-nirs de leur fille, Arthur, rongé de culpabilité, tented’aborder la jeune fille. Plusieurs destins se croisentautour de l’hôpital, personnages attachants avec leurfêlure. Le récit très bien ficelé réserve des surprises,celles de la vie quand elle se décide à devenir plussympa...La fille sur la rive présente un univers fermé, l’Enclave,

où les habitants sont hyper-protégés par un régimeautoritaire. Monde sans livres aux distractions régle-mentées et obligatoires. Nour peut profiter del’autonomie consentie aux «immatures» de moins de15 ans. Mais le travail obligatoire l’attend bientôt.Solitaire et observatrice, elle se pose des questions surce monde inhospitalier au bord d’un fleuve infecté etinfranchissable. Et s’il y avait un monde différent etmeilleur sur l’autre rive que l’on n’aperçoit qu’à traversun brouillard permanent ? En intensifiant son regardNour effectue un parcours initiatique et apprend legoût de la liberté.CHRIS BOURGUE

Entre deux rafalesArnaus TiercelinLe Rouergue, coll.doAdo, 9,50 €

La fille sur la riveHélène VignalLe Rouergue, coll.doAdo noir, 8 €

Deux livres pour adolescents, ancrés dans la réalité de notre époque et celle d’un avenir inquiétant

Choisir sa vie

Quelle bonne idée que cette collection d’Actes Sud,Ceux qui ont dit non. On y retrouve des grandesfigures de l’histoire : Jaurès, Gandhi, Victor Jara, LucieAubrac, Simone Veil, Nelson Mandela… qui se sontbattus contre les dictatures, l’oppression. Chaque volu-me se divise en une partie romanesque et un dossierillustré qui apporte un éclairage de dates, de faits,replaçant dans une perspective plus large les problèmesposés. Ainsi, Olympe de Gouges revit dans un courtroman, alerte, sensible, écrit à la première personne.Passionnée, amoureuse, mère affectueuse, écrivain,dramaturge, elle a porté sur scène une pièce qui dé-

nonçait l’esclavage des Noirs. Elle rédigera une superbeDéclaration des droits de la femme et de la citoyenneen 1791. La Terreur l’exécutera. Préfiguration desgrands mouvements des femmes, des suffragettes auGang des Saris roses… Le dossier rappelle l’évolutiondes droits des femmes, considérées par le code napo-léon comme d’éternelles mineures, dépourvues dedroits civiques… Une lecture à la fois aisée etintéressante, qui sait poser avec pertinence desproblèmes toujours d’actualité. M.C.

Olympe de Gouges :«Non à la discriminationdes femmes»Elsa SolalActes Sud junior, coll.Ceux qui ont dit non,7,80 €

Non

40 JEUNESSE | CINÉMALIVRES

Une nouvelle collection est lancée par les ÉditionsCommune et Film flamme : Cinéma Hors Capital(e).Le numéro 1 est un ouvrage collectif consacré aucinéma du fondateur de Film Flamme, La Remontéedu temps de Jean-François Neplaz. Frédéric Valabrèguey aborde le rapport au corps du cinéaste dans trois deses courts métrages ; Paul-Emmanuel Odin, la «com-munauté des arbres» et Rodolphe Olcèse «le cinémaen clair obscur». La partie centrale, actes d’ignorant,d’improvisations en accidents est constituée de textes ducinéaste au moment où il travaillait sur son film, avecet sur l’écrivain Mario Rigoni Stern et de réflexionssur le geste cinématographique à partir d’écrits deJacques Rancière ou de films de Godard.Le numéro 2 comprend des textes divers autour dudernier film d’Aaron Sievers, Flacky & camarades,monté à partir des 30 heures d’images et des 200 heu-res de sons enregistrés par Pierre Gurgand, lors destages cinéma et photo dans les corons, à la fin desannées 70, au moment du démantèlement de l’indus-trie lourde. «La parole des mineurs est la source, lesaffluents, le chemin du film…» précise Aaron Sievers.

Un acte de mémoire collective, à la manière de Misèreau Borinage de Storck et Ivens, souligne Jean Duflot.Marc-Henri Piault y traite la question du rapportfilmeur/filmé. Paroles d’anciens mineurs, poème ducinéaste, Kiyé Simon Luang, parcours de l’atelier decréation cinématographique en pays minier aux ate-liers cinématographiques Film Flamme… les textessont variés, les illustrations nombreuses et soignées.Les deux numéros sont accompagnés de DVD : les 4courts-métrages de JF Neplaz et Flacky & camaradesou le cheval de fer.A.G.

La remontée du temps de Jean-François NeplazLivre et DVD Cinéma hors capital(e) 1, 20 €

Flacky et camarades ou le cheval de fer, le cinéma tiré du noir d’Aaron SieversLivre et DVD Cinéma hors capital(e) 2, 25 €http://editionscommune.over-blog.com

Regards excentrés

30 portraits d’enfants-spectateurs associés à quelquesbelles citations de cinéastes ou de critiques sontrassemblés dans ce livre, format 23 x 16,5. Un petitrectangle blanc sur la pupille, reflet du gigantesqueécran auquel ils font face, traversés par des images quele photomontage révèle, ces enfants transfigurés parl’émotion, incarnent le mystère de la réception d’unfilm. Meyer, membre du collectif Tendance Floue enrésidence à l’Alhambra courant 2010, a photographié

des CM2 du 15ème arrondissement dans le cadre del’opération École au cinéma. Après une expo et uncourt métrage (Voir Zib’ 36) ce recueil comme unpoint d’orgue prolonge et clôt le projet en beauté. ELISE PADOVANI

Dans le cinéma, l’enfant spectateur L’Alhambra Cinémarseille/ Tendance Floue, 10 €

La mémoire des regards

Londres, fin XIXe. Dans un quartier peu recomman-dable se tient un club très fermé qui réunit desadhérents candidats au suicide. Le club, au moyend’un gigantesque jeu de hasard, leur permet de s’exé-cuter mutuellement après un tirage de cartes. Leprince Florizel, en quête d’aventures extravagantes,apprend par hasard l’existence de ce club et, aidé deson fidèle homme de confiance le colonel Géraldine,décide d’y mettre fin en neutralisant son diaboliqueprésident…La jeune collection Noctambule, qui s’attache àpublier des romans graphiques en adaptant de grandstitres de la littérature, édite cette libre adaptation duroman de Stevenson - en fait 3 nouvelles parues sousforme de roman feuilleton. La bande dessinée de

Baloup & Vaccaro déroule fidèlement les actions deces 3 histoires. C’est là d’ailleurs que le bât blesse : làoù la force du style de Stevenson suffit à faire briller despersonnages pour happer l’attention du lecteur et letransporter au fil de la quête de justice de son héros,la BD reste en dehors : Clément Baloup n’a pas optépour une relecture débridée, moins linéaire et le dessind’Eddy Vaccaro, réalisé à l’aquarelle, joue d’une unitéchromatique louable, mais à la longue anesthésiante.DO.M.

Le Club du suicideBaloup & VaccaroSoleil Productions, coll. Noctambule, 17,95 €

As de pique ou de trèfle…

LITTÉRATURE LIVRES 41

Le XXe siècle, nous y sommes nés et pourtant nous leconnaissons si mal ! Combien de pans historiques surlesquels un pudique et parfois insupportable consen-sus jette une ombre opaque ? Maurice Gouiran seplaît à explorer ces zones obscures, à leur accorder denouveaux éclairages, accomplissant ainsi un travaild’historien et de citoyen. Sur nos cadavres ils dansent letango s’attache par son titre et a priori aux heures noiresde la dictature argentine, et l’on s’attend à un romansur les disparus, les exactions du régime de Videla…Mais bizarrement cela démarre par un crime àMarseille, des pistes qui entraînent vers les guerresd’Algérie ou d’Indochine, des règlements de compteinternes à la vie phocéenne… Les relations entre les

continents, les gouvernements se dessinent, grâce àl’acharnement du jeune lieutenant de police, Emma.Construction rigoureuse, tranches de vie et d’Histoirequi s’enchâssent avec une précision de métronome,mécanique impitoyable d’une descente aux enfers…le roman est bâti sur le modèle de la tragédie, personnene peut en réchapper. Là-dessus, il y a le cadre deMarseille, peint du centre ville aux collines avec unetouche amoureuse et clairvoyante. Un style rapide,mêlant narration et dialogues avec une belle efficacité.Un polar fort, qui dépasse par son propos le simplelivre d’été, et laisse une marque profonde. MARYVONNE COLOMBANI

Sur nos cadavres, ils dansent le tangoMaurice GouiranJigal polar,18 €

D’une guerre l’autre

Tranche de vie saignante ! Deux adolescentes de 14ans dans une cité ouvrière de Piombino, Toscane,2001. Francesca la blonde et Anna la brune, deuxsirènes sur une plage pourrie au pied des hauts-four-neaux de la Lucchini, l’usine qui crache l’acier à1.538°. Éveil des corps, de la sensualité, envies d’ail-leurs. Vie sordide des femmes qui se font tabasser, desjeunes qui se droguent et sautent sur tout ce qui bougepour oublier l’usine, des filles prêtes à tout pour s’ensortir… Pas gai ? Détrompez-vous ! Le roman est toni-que, animé d’une énergie décapante, d’un souffle àvous le couper ! On circule dans la vie de tous les jours,celle des trafics douteux, mais aussi celle des fous-rires,des émois de l’adolescence comme des premièrestrahisons. Un monde pour lequel l’écroulement destours jumelles du 11 septembre n’est qu’un film, tan-

dis qu’un terrible accident précipite la communautédans la stupeur et le chaos. L’auteure, la jeune Silvia Avallone, sait de quoi elleparle : elle a vécu dans cette ville et avait l’âge de seshéroïnes à ce moment. Le lecteur est plongé dans unmonde à la Zola, le monde des hauts-fourneaux rap-pelant celui de la mine, avec l’amitié, le syndicalisme,l’accident, le sexe... L’écriture est haletante, avec despassages écrits à la deuxième personne soulignant lespensées en désordre du personnage, un style parmoments très cinématographique avec des montagesalternés : une adaptation est déjà en cours.CHRIS BOURGUE

D’acierSilvia AvalloneLiana Levi, 22 €

Vie à vif

À l’œilLes poètes trouvent parfois le gîte loin de chez eux,invités à vivre un moment entre parenthèses, en Rési-dence, joli mot. Les deux derniers ouvrages de lacollection Le Refuge en Méditerranée publiés par leCentre international de Poésie de Marseille entémoignent. Emmanuel Hocquard et Jean-CharlesDepaule ont séjourné le premier à Tanger, dont il estun spectre familier, le second à Saïda au cœur de ceterritoire de langue arabe qu’il connaît bien. Nul exo-tisme donc mais plutôt pour les deux une immersion[«dans est le nœud de l’intrigue» dit Emmanuel Hoc-quard] et une récolte d’intensité variable. S’en tenir et se tenir aux mots semble être la règlepartagée de l’objectiviste et de l’anthropologue : JeanCharles Depaule intitule froidement Sur Place soncompte-rendu à la mitraillette de minuscules scènesquotidiennes et répétitives sur quelques mètres carréslibanais ; télégraphique et pointilliste, chaque vers(libre mais au bord du gouffre) porte une image brève,un fragment kaléidoscopique qui rêve d’exhaustivité,tout un monde en métonymies et synecdoques d’oùémergent des noms qui claquent (Captain) ou dessi-nent de l’humain (Toutaise). Ici on vérifie combienl’extrême concret vire à l’abstraction, et combien labiscotte sans beurre est difficile à avaler !

Emmanuel Hocquard, lui, vagabonde entre les signes,tombe en arrêt au coin d’un fait de langue, d’unesensation oubliée, d’un champ de coquelicots persis-tant sur la rétine du souvenir. Il interroge sans cesse, lenez en l’air, la fabrique du langage et l’absence du moi.Tanger est là, en creux, par son bleu qui pourrait n’êtrepas une couleur, ses terrains vagues étymologiques etses chiens jaunes dont l’évidence reste une énigme. Lelecteur avale tout, ne tranche pas et comme le go-beur d’horizon sur le détroit de Gibraltar se sent luiaussi témoin du monde. De ces grammaires-là, on nese lasse pas !MARIE-JO DHÔ

Sur Place,Jean-Charles Depaule, 12 €Les Coquelicots / une grammaire de Tanger III,Emmanuel Hocquard, 10 €

Le Cipm présente jusqu’au 17 sept Thomas Möbius :Un privé à Tanger, une exposition consacrée àEmmanuel Hocquard www.cipmarseille.com

LITTÉRATURE42 LIVRES

Raconter autrement la TunisieSophie Bessis est historienne, journaliste, militantedes droits de l’homme. Avec Dedans, Dehors, elles’éloigne pourtant de l’analyse objective des événe-ments pour dire autrement l’histoire de son pays, oude ses pays, depuis le «dedans» de sa propre vie et deson propre parcours, entre Tunisie et France. Sorted’essai historique à la première personne, le «je»pourtant est moins le sujet du livre qu’une zone depassage entre les lieux familiers des deux rives, et entredes personnages, anonymes ou publics, qui traversentcette histoire minuscule et majuscule à la fois. Le livreconfère aux échos bouillonnants de la Tunisie d’au-jourd’hui la profondeur dans le temps - à traversl’évocation de ce qui a préparé l’avènement démo-cratique - et la profondeur humaine que l’actualité nedit pas. C’est aussi «un conte vrai» , distancé etpoétique, qui transforme le récit personnel en fable

politique : l’expérience intime de ceux qui vivent entreles frontières, ni tout à fait «dedans», ni tout à fait«dehors», et l’histoire universelle du pouvoir et dutemps qui passe : les visionnaires devenant despotes,les despotes réduits à rien, la ferveur militante rattrapéepar son institutionnalisation ou par la mort, la forced’attraction de la lumière et du pays natal «aux mursblancs», aux «soleils clairs», aux vrais et faux dromadaires. Et comme tous les contes, on espère avec l’auteur quela révolution tunisienne (voir p.47) donne une bellefin, ouverte, à cette histoire !AUDE FANLO

Dedans, DehorsSophie BessisÉd. Elyzad, 14 €

Poor lonesome killerLorsqu’on rencontre la romancière et dramaturgebrésilienne Patricia Melo - qui était invitée dans lecadre de CoLibris au printemps - et qu’on écoute sesinterventions posées, on n’imagine pas une secondel’atmosphère de son dernier roman traduit en français.Alors, quand on entame la lecture de Monde perdu,c’est le choc. La plongée sans bouteille dans la tête deMàiquel, «comme Màiquel Jackson l’artiste». Un artis-te lui aussi, à sa manière : doué pour échapper à lapolice (10 ans qu’il est en cavale), à l’aise avec les filles(surtout quand il s’agit de rencontres sans lende-mains), habile au maniement des armes (ancien tueurà gages, il n’hésite pas à se débarrasser des gêneurs).Philosophe à ses heures, il pourrait s’en tenir à la devisequ’il a tatouée sur le bras : «rien à foutre». Le livre serésumerait alors à la narration dans un langage souventcru du périple minable de ce minable bandit, en quête

de sa fille enlevée par des évangélistes. Ce road novelhyper réaliste touche par ce qu’il dit des modernessolitudes et des combats perdus d’avance. Contre lestrafiquants, de bois, de drogue ou d’âmes, contre lalaideur qui gangrène les paysages. Le pays que par-court Màiquel ressemble au chien qu’il a adopté :boiteux, puant, hirsute… et pourtant prénommé Tigre !Une vision sans concession du Brésil actuel dontPatricia Melo passe au crible les dérives et l’hypocrisie,bien loin de Copacabana et des écoles de samba.FRED ROBERT

Monde perduPatricia MeloActes Sud, 18,80 €

Les affr(eux) de la création«… à cause de ce roman à écrire, je passe par une salepériode de ma vie. […] il m’arrive même de déchirerles pages du cahier pour en faire de fines boulettes depapier que je mastique consciencieusement avant deles avaler. C’est un des symptômes les plus visibles.Car il y en a d’autres […]. La liste est longue». En plusd’être affligé d’un prénom qu’il considère comme unemalédiction en soi, Ernest, le narrateur du dernieropus de Jean-Luc Luciani, se trouve aux prises avecune panne d’inspiration monumentale que rien, ni sesséances d’observation dans son bar préféré, ni l’amourde sa belle, ne parviennent à réparer. Finis les chèquesd’avance de son éditeur. Toute proche l’échéancefatale. Pris au piège Ernest. Pas étonnant qu’il en vien-

ne à des solutions pour le moins radicales… Placé sousle double signe de Palahniuk et de Houellebecq, lecourt roman de Luciani n’a ni le rythme déjanté dupremier, ni le cynisme désespéré du second. Il n’em-pêche ; cette fable caustique, dotée d’une autodérisionsalutaire, évoque l’air de rien les chausse-trapes dumétier d’écrivain et les dangers du succès. Un récitmoins léger qu’il n’y paraît… À lire afin de garder latête froide.FRED ROBERT

La tyrannie des mouchesJean-Luc LucianiÉd. Mutine, 12 €

Au compte gouttes les discrètes éditionsMonsieur Toussaint Louverturedistil-ent des œuvres rares, à la marge, oubliées.Tel Le Dernier stade de la soif de Fre-derick Earl Exley qu’elles sauvent dequarante années d’indifférence : «unroman-autobiographie-fictive-quel-que-soit-le-nom-qu’on-lui-donne» commel’écrit son préfacier Nick Hornby, fanavoué d’Exley et auteur d’autobiogra-phies romancées. Le Dernier stade de lasoif est un ovni littéraire à ranger au côtéde Bukowski (même penchant pourl’alcool et la défonce) ou Hunter S.Thompson (même lucidité suicidaire etsentiments exacerbés) ; un livre confes-sion horrifiant et fascinant par safranchise, débarrassé des faux-semblantset des subterfuges de «cette Amériqueobsédée par sa beauté» qu’il abhorre.Cet american way of life dont il s’estdélibérément exclu malgré ses petitsboulots (son rêve de conquête est à lahauteur de son déclin professionnel), lanaissance de ses fils (qu’il dit aimer tar-divement), ses rencontres avec d’autresdestins fracassés (Mister Blue - sondouble ? - offre des pages cocasses truf-fées de dialogues invraisemblables et desituations désespérées), sa passion pourson alter ego le footballeur Franck Giff-ord… Cruel, malodorant, dérangeant,le livre mixe sur un ton cynique et drôleconfessions intimes d’un homme à la

dérive, procès de la normalité et dubien-pensant, fantasmes éveillés, petitsarrangements avec la vérité et le réel.L’acuité de son regard l’empêche cepen-dant de se morfondre sur sa déchéance,son manque d’héroïsme, son aliénationqui l’ont conduit tant de fois en HP.Comme dans les nouvelles d’HubertSelby Jr, la neige silencieuse crisse dumal de vivre d’un écrivain magnifique,et marginal.MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Le dernier stade de la soifFrederick Earl Exley, préface de Nick HornbyÉd. Monsieur Toussaint Louverture,23,50 €

Jusqu’à la lie

Clovis Nzila est un sans-papiers, uneâme errante sur les trottoirs de Paris,dans un Occident que tout favorise, etqui ne veut pas de lui. Quand Chris-telle le rencontre, elle le prend en pitiéet lui propose l’hospitalité. Entre eux,une histoire d’amour commence, cellede deux êtres écorchés par la vie : elle,violentée par les hommes, menant uneexistence lasse ; lui, fuyant son passé etles atrocités de la guerre civile.Ce livre parle d’abandon familial, de sé-paration, de la tragédie quotidienne dela lutte pour la survie, des choix ultimesque font les personnages qui tentent envain de composer avec une réalité quine leur épargne rien. Dans une Afriqueaux plaies béantes, dans un pays dontl’auteur ne précise pas le nom pourdonner à son récit une dimension plusuniverselle, Clovis devient un enfant-soldat pour ne pas mourir, un bourreaupour ne pas devenir une victime. Il n’ya dans ce roman, ni condamnation nimanichéisme : les êtres ne sont pas bonsou mauvais, mais les deux à la fois, ap-préhendés dans leur complexité, et danscelle du monde. Le récit se compose de

retours dans le passé, au gré des confes-sions que Clovis fait à Christelle sur sadouloureuse destinée. Le Silence des es-prits, c’est celui des ancêtres, de la Terremère et du ciel qui se sont tus et ontlaissé les hommes s’entretuer. Dans unelangue simple et poétique, point desalut excepté celui de l’amour, de la ten-dresse, de la rencontre sensuelle de deuxêtres dans le temps suspendu. MARION CORDIER

Le Silence des espritsWilfried N’SondéActes Sud, 17 €

Volcan de détresse

LIVRES44 LITTÉRATURE | HISTOIRE

Le petit livre d’un grand hommeLes Histoires d’ici et d’ailleurs de Luis Sepúlveda,récemment traduites chez Métailié, reposent sur unprojet éditorial relâché : a priori rassembler en unrecueil des écrits disparates, contes, portraits, nou-velles, hommages, des textes écrits pour la circonstanceou publiés précédemment dans des journaux, ne faitpas un «livre». Mais c’est justement par ses facettesmultiples de militant, d’exilé, de guérillero, de ro-mancier, d’écologiste, de communiste, d’essayiste, dejournaliste, de conférencier, que Sepúlveda s’imposeen littérature. Ces récits ancrés dans le réel, d’essenceanecdotique pour la plupart, dessinent le portrait plusqu’attachant d’un homme exceptionnel, qui n’ajamais baissé les bras, et se caractérise par un refuspolymorphe de tout renoncement. Un résistant, quipose un regard effrayé sur la bêtise des médias, chaleu-reux sur les gens modestes croisés ici ou ailleurs,lyrique sur les amis artistes intellectuels ou politiques

qui furent ses frères et sœurs de combat. Personnel-lement impliqué dans chacune des anecdotes l’écrivainne parle jamais directement de lui, pourtant, sauf pourévoquer comme des décors de sa vie ses combatspassés, la Moneda et Allende, les Brigades internatio-nales au Nicaragua, l’Amazonie et son Vieux qui lisaitdes romans d’amour ; mais il raconte aussi bien l’histoi-re d’un chien berlinois, de son éditrice française, d’unfootballeur à Palerme ! Ce recueil, qui n’a pas la consistance de ses romans, oula force de témoignage de La Folie de Pinochet, les com-plète pourtant : son humour unique, son sens piquantdu détail, de l’anecdote, sa façon de plonger sansretenue dans l’émotion et le lyrisme, et de haïr(Berlusconi, Pinochet…) avec presque autant degrandeur qu’il aime, y apparaissent sous un journouveau.AGNÈS FRESCHEL

Histoires d’ici et d’ailleursLuis Sepúlveda,traductionBertilleHausbergMétailié, 17 €

Luis Sepúlveda était l’invité principal des EscapadesLittéraires de Draguignan en mai

Dans le troisième tome de Midi Rouge, Résistance etOccupation (1940-1944) - assorti d’une préface d’unentretien avec Stéphane Hessel et d’une postface deRaymond Aubrac - Robert Mencherini brosse unpanorama de l’histoire de Marseille et des Bouches-du-Rhône de 1940 à juin 1944. La difficultéd’appréhender cette période dans sa complexité estrésolue par un découpage fin : 13 chapitres répartis entrois grandes parties, Résister au royaume du Maréchal ;Occupants, Vichy et vichystes (nov. 1942-avril 1944) ;La résistance sous la botte (nov. 1942-juin 1944).Ouvrage d’historien, il est une somme fourmillanted’informations, de témoignages, le tout dans uneperspective sociale et politique… et contient une mined’anecdotes, de noms, qui redonnent aux photos sépiala chair de l’humain. Conjonction de destins parti-culiers, de volontés individuelles, l’Histoire se fondesur toutes ces histoires, qui l’infléchissent. Commecelle du réseau Carte, fondé par André Girard, peintreet décorateur de théâtre, et qui enrôla artistes et hom-mes de lettres, comme Joseph Kessel et son neveu,

Maurice Druon, qui écrivirent à Londres en 1942 lesparoles du Chant des Partisans. Mencherini rappelle lerôle des associations caritatives nord-américaines et desconsulats latino-américains, des quakers, de l’œuvrede secours aux enfants, de la «noria des antifascistes detoute l’Europe», qui se retrouvent à Marseille dès 1940.Et cette manifestation hostile aux Allemands en mars1941, en l’honneur de Pierre II de Yougoslavie quivient de défier les Allemands en chassant les régentsfavorables à l’Axe. Il y a les journaux, les œuvres inter-dites, l’organisation des différents réseaux de résistance,les heures sombres, le refus du STO, la fondation desmaquis… Robert Mencherini s’attache à montrerque la résistance a été précoce à Marseille, qui apparaît«bien avant Lyon», comme «la première capitale de laRésistance», avec le repli stratégique de nombreuxorganismes de l’État. Un énorme travail qui peut selire d’une traite ou en flânant, passionnant à toutes lespages.MARYVONNE COLOMBANI

Résistance et occupation (1940-1944)Robert MencheriniÉd. Syllepse, Histoire : enjeux et débats, 25 €

Somme toute

Liberté à qui de droitL’affaire de l’esclave Furcy retrace le destin d’un esclavequi a assigné son maître en justice pour obtenir sa li-berté. Ce procès, qui débute sur l’île Bourbon trenteans avant l’abolition de l’esclavage, est un cas unique.D’abord, parce qu’un esclave était considéré commeun meuble, et ne pouvait faire appel à la justice. En-suite parce que l’esclavage est souvent une Histoiresans archives où l’on se confronte au problème dessources. Enfin, parce que Furcy fit preuve d’une téna-cité remarquable dans cette interminable procédurejudiciaire - vingt-sept ans ! - dont l’enjeu ne se résu-mait pas à sa personne : s’il gagnait, il serait pour lesautres un exemple à suivre, un symbole, et seize milleesclaves s’empresseraient de réclamer leur affranchis-sement devant les tribunaux… Cela représentait pourles esclavagistes une menace bien plus inquiétantequ’une rébellion ou une fuite.

Cet essai résulte de quatre années de recherche entrela BNF, Aix et l’île Bourbon. Il comprend de précieuxdocuments d’époque comme des legs, des annoncesde vente, des plaidoiries et surtout, de magnifiques let-tres rédigées par Furcy lui-même. Il présente une so-ciété complexe où il existe une multiplicité decatégories d’esclaves et où l’élite défend ses intérêtsdans un réseau de relations qui verrouille le systèmepolitique, économique et judiciaire. Mohammed Aïssaoui est journaliste : il a obtenu leprix Renaudot pour ce remarquable travail d’investi-gation.MARION CORDIER

L’affaire de l’esclave FurcyMohammed AïssaouiGallimard, 16,90 €

RENCONTRES 45LITTÉRATURE

Pour sa première rencontre littéraire, lalibrairie Apostille (cours Julien, Marseille)a frappé un grand coup en invitantEugène Nicole. Originaire de Saint-Pierre et Miquelon, ce professeur àl’université de New-York, spécialisted’onomastique et fin connaisseur deProust, n’est pas vraiment connu dugrand public. L’œuvre des mers, cycle im-posant de 5 volumes, tout récemmentréédité dans son intégralité, vient pour-tant de recevoir le Prix Joseph Kessel.Pendant une heure passée trop vite,l’écrivain a évoqué ce grand œuvre «quis’est bouclé», guidé par les remarques dePascal Jourdana et pressé de questions parles lecteurs enthousiastes du club de lalibrairie. Il dit avoir écrit cette somme

romanesque en partie autobiographiqueafin de «donner une place littéraire à cettemicroscopique partie du monde» que

constitue son archipel natal. Construiretout un univers romanesque à partir d’unmicrocosme, tel est le point de départd’une écriture que les «ruminations» del’exil (Nicole est parti pour la France afind’y poursuivre des études de lettres, il s’estensuite installé aux États-Unis) ont faitgermer. Comme celle de Proust, auquelon ne peut s’empêcher de penser tout aulong de l’entretien, l’œuvre prend appuisur des noms, sur des lieux fondateurs etsur les liens qui s’établissent (ou non)entre eux. La géographie, le climat sisouvent baigné de brouillard, d’ombresfantomatiques, les maisons même devien-nent les personnages d’une fictionrétrospective qui vise à «fêter une enfan-ce», selon une expression que Nicole

emprunte à Saint-John Perse. À fairerenaître un monde passé aussi, au fil d’unenarration où le «je» côtoie le «nous», dansune recherche des îles perdues dontl’extrait lu par l’auteur a permis d’enten-dre la musique particulière. Un beau textedont on reparlera puisque Eugène Nicoleparticipera aux Littorales en octobreprochain.FRED ROBERT

Eugène Nicole était invité le 18 juindans le cadre des Escales en librairies

À lireL’œuvre des mers, Ed. de l’Olivier, 26 €

Eugene Nicole © Patrick Box

Libraires du sud /Libraires à Marseille - 04 96 12 43 42Rencontres : avec Audrey Houlès pour Gentil petitcoquelicot (Equinoxe) le 23 juillet dès 15h30 à la librairieLa Carline (Forcalquier), avec François Arango pour sonroman Le Jaguar sur les toits (Métailié) le 24 août à 19h àla librairie Aux vents des mots (Gardanne).

AIXVoyons Voir – [email protected] pliages : Présentation des travaux d’ateliers réalisés parles stagiaires en formation au Centre de rééducationprofessionnelle Richebois sous la conduite de l’artisteArnaud Vasseux, jusqu’au 30 juillet au Centre Richebois(Marseille) ; En ce lieu ou presque # 1 : exposition de S. LeMercier, Y. Oulab, D. Petit, R. Rivoire, jusqu’au 2 octobreau domaine de Saint Ser (Puyloubier) ; En ce lieu ou presque# 2 : exposition de L. De Leersnyder, S. Lagarde, P.Navarro, V. Rizzo et J. Setton, jusqu’au 2 octobre auChâteau de Grand Boise (Trets) ; En ce lieu ou presque # 3 :exposition de G. Mao, jusqu’au 2 octobre au Jardin des 5Sens (St-Marc Jaumegarde).Galerie La Non-Maison – 06 29 46 33 98Exposition inédite du photographe John Cohen, jusqu’au24 septembre.Galerie d’art du conseil général – 04 42 93 03 67Exposition Voyages à Rome, la Provence et l’Académie deFrance du XVIIIe siècle à nos jours. Jusqu’au 18 septembre.

AVIGNONPrésence Pasteur – 06 86 83 72 42Pendant le Festival Off, Danielle Vioux propose un cyclede lectures, Voyages de mots en Méditerranée, à 10h30 : RoadMovie Alzheimer en présence de l’auteure et metteure enscène Jalie Barcilon, le 14 juillet ; carte blanche à MoniGrego, le 19 ; Maroc, long extrait de Il de Driss Sikses, le20 ; carte blanche à Jean-Yves Picq, le 21 ; extraits de textesd’Aïdée Bernard, Gilles Desnots, Marcel Moratal, DenisCressens, Armel Marin, Habib Ayyoub… - Respirerencore de Danielle Vioux, le 26 ; textes d’Alain Gibaud etJean-Claude Grosse – Liban, long extrait de Translationde Gabriel Boustany, le 27 ; Algérie, texte de HabibAyyoub et Keltoum Staali – long extrait de Requiem pourune île de Mohammed Zaoui, le 28.

BARJOLSEditions Plaine Page – 04 94 72 54 81Les Eauditives : Poésie au fil de l’eau, ondes et flux :lectures, performances, installations, du 1er au 31 août.

FORCALQUIERAssociation Rentrée Nouvelles – 04 92 75 17 364e édition du festival Rentrée Nouvelles avec les éditionsQuadrature, Quiero / Marginale, Atelier du Gué, D’unnoir si bleu, Chemin de fer, Le mot fou, La Chambred’échos, Nykta, du 19 au 22 août place du palais.

LE LAVANDOUVille – 04 94 00 41 72Prix de la création peinture contemporaine : expositionjusqu’au 31 août dans la salle d’honneur de l’Hôtel deVille.

MANOSQUEAssociation Blues & Polar – 06 71 78 05 129e Festival Blues et polar sur le thème Le polar et l’amourfou sous le parrainage de S. Giono-Durbet, F.-O. Giesbert,R. Frégni, P. Carrese, G. Collard : lectures, rencontres,dédicaces, spectacles… Du 22 au 27 août.

MARSEILLEBMVR Alcazar – 04 91 55 90 00Exposition de photos de jazz de Jean-Pierre Leloir, ObjectifLeloir. Jusqu’au 26 août.Exposition de vinyles Les Métamorphoses de Miles,jusqu’au 12 août.Conférences musicales de François Billard : le jazz, uncouple à trois ? suivie d’une rencontre avec Ahmad Jamal,le 19 juillet à 17h et Klezmer in !, suivie d’une rencontreavec David Krakauer, le 22 juillet à 17h.Institut Culturel Italien – 04 91 48 51 94 Cours d’italien intensifs d’été : du 16 au 29 août de9h30 à 12h30 (pour débutants et personnes ayant acquisles bases élémentaires de l’italien) ; spécial enfant : stage de5 à 10 ans du 4 au 8 juillet de 10h à 12h ; stage de remiseà niveau lycéens et étudiants, du 22 au 26 août de 10h à12h.Librairie Apostille – 09 51 83 15 27Exposition des photos de natKa, Red. Vernissage le20 juillet à partir de 19h, exposition du 20 juillet au 3septembre.Centre Design – 04 88 90 03 12Bibliothèques de plage : bibliothèque de Simon Krol surla plage du Prado (Marseille) ; bib. de Pierre Charmoy surla plage Romaniquette (Istres). Jusqu’à fin août.[mac] – 04 91 25 01 07Exposition L’énigme du portrait, œuvres de la CollectionNeuflize Vie, jusqu’au 18 septembre.

Galerie Fabrik 89 – 04 91 55 58 29Exposition collective Bulles temporelles : sélection deplanches originales d’auteurs du 9e art à l’occasion del’ouverture de La Gallery Marseille. Jusqu’au 23 juillet.CCI Marseille Provence – 0810 113 113Exposition Sur tous les océans… Pour tous les continents.Publicités des Messageries Maritimes, jusqu’au 31 août auPalais de la Bourse.

OUEST PROVENCEIntercommunalité Ouest Provence – 04 76 44 33 26Colloque sur l’intercommunalité culturelle : Quels projetspour quelle gouvernance à l’heure de la réforma territoriale ?Organisé par l’Intercommunalité avec l’Assemblée desCommunes de France (ADCF), la Fédération nationaledes Collectivités territoriales pour la Culture (FNCC) etl’Observatoire des politiques culturelles (www.observatoire-culture.net), il réunira près de 300 élus et professionnelspendant deux jours à Istres au théâtre de l’Olivier et aucinéma Le Coluche. Les 20 et 21 octobre.

VAUVENARGUESChâteau – 04 42 38 11 91Dans l’arène de Picasso : lectures à 3 personnages autour depropos de Pablo Picasso (réflexions, études raisonnées,biographies, analyses critiques…) avec, selon les soirs, N.Arestrup, A. Alvaro, M. Boyer, L. Corbery, A. Charrin, X.Gallais, F. Huster, D. Pinon, D. Podalydes, sur desmusiques de E. Truffaz, M. Beacco… Du 25 juillet au 10août dans la pinède du château.

VERS-PONT-DU-GARDPont du Gard – 0 820 903 330Mémoires de garrigue : atelier familial Des plantes pourécrire et teindre à l’époque romaine, les 19 juillet et 2 aoûtà 14h30 ; Visites théâtralisées du Musée, à 18h les 13 juilletet 10 août ; atelier Bricol’eau avec réalisation d’un petitmoulin, le 26 juillet à 14h30.

Appel à candidatureBibliothèque de théâtre Armand Gatti – 04 94 28 50 30L’association Orphéon, en partenariat avec la Drac PACA,propose une résidence d’écriture à un auteur de théâtre àLa Seyne-sur-Mer du 15 octobre au 17 décembre 2011. Ledossier de candidature (lettre de candidature, noted’intention précise, bio-bibliographie, quelques pages surun éventuel projet d’édition ou de création) doit parvenirau plus tard le 31 août à [email protected].

Du côté de chez Nicole

46

Le département Références de l’Alcazar,en partenariat avec l’ADBS1, a ouvertun cycle de conférences portant surnotre rapport au temps. La questionposée à Alexandre Coutant, venu del’université de Franche-Comté, portaitsur l’identité à l’ère numérique. Vastesujet ! Ayant défini l’identité comme cequi nous caractérise de manière indi-viduelle, et établit une stabilité du moialors même que nous sommes diffé-rents d’un moment à un autre, l’orateura évoqué les spécificités liées au mondedit «virtuel». Sur Internet, notre iden-tité nous échappe de plusieurs manières :sans même nous en douter, nous sommessuivis à la trace par d’énormes conglo-mérats (Google, Facebook, Apple pour neciter qu’eux) dont le but est de cen-traliser l’ensemble de notre navigation àdes fins lucratives. Encouragés à ali-menter en permanence notre «présenceen ligne», par des contenus «archivés pré-cisément, pérennes, inaltérables», nousallons à l’encontre du processus identi-taire qui réclame une contextualisationtemporelle. Or, si les données du passé

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Dans le dernier Zibeline, on s’inquiétait de la banalisation del’idée de Dieu dans l’enseignement scolaire. Comment peut-on encore supporter, sous prétexte de tolérance et de laïcité,de laisser perdurer l’ignorance ? N’y-a t’il pas un manueld’athéologie qui permettrait d’en finir avec cette superstition ?Comme par miracle un souvenir lumineux s’empara denous ! Un livre intitulé Dieu l’hypothèse erronée, Comment lascience prouve que Dieu n’existe pas de Victor Stenger existait !L’universitaire étasunien, scientifique et philosophe, s’y ap-puie sur les ressources de la science pour invalider l’idée de Dieu.Nous sommes au XXIe siècle et les avancées de la science sonttrop complexes : c’est une banalité que de le constater. Maisce qui l’est moins est de faire la synthèse des travaux récentspour montrer en quoi les questions qui permettaient encorede supposer un Créateur sont définitivement balayées. Au VIe

siècle avant l’ère commune, chacun s’affolait des éclipses desoleil, alors que Thalès pouvait les calculer et mettre à bas lessuperstitions. Aujourd’hui encore chacun croit que la matière(l’univers) doit avoir un commencement, alors que la physi-que montre que c’est une manière puérile de poser le problème :depuis Einstein on peut comprendre le rapport entre matièreet énergie, qui dépasse une stricte causalité créatrice, et depuisla physique quantique comprendre (avec bac plus six en phy-sique évidemment) que des changements ne sont pas régléspar la seule causalité.

Dieu inutileStenger fait la synthèse de l’état actuel de la science pour dé-montrer que l’hypothèse de Dieu se fonde sur des problèmesqui ne sont plus d’actualité depuis au moins un siècle pourcertains. Et ce n’est pas tant la «bêtise créationniste» qui est vio-lentée, que plus gravement l’argument du «dessein intelligent»ou du «réglage fin» : c’est l’idée que les processus naturels nepeuvent expliquer des systèmes complexes qui semblent avoirété pensés par un grand architecte. Certes Hume avant dé-ruit cet argument, mais philosophiquement : «mais pourquoivoulez vous prendre ce petit point de votre cerveau pour le modèleentier de tout l’univers ?» ; question succulente de Philon dansles Dialogues sur la religion naturelle. Stenger en philosopherappelle ces arguments mais se concentre sur la science. Unchapitre par exemple a pour titre : «Peut-on parler de réglagefin dans le cas des molécules de carbone et des moléculesorganiques ?». Au travers d’expériences chimiques et physiques,il est montré que le carbone, élément constitutif fondamentalde la vie, est certes d’une grande complexité mais que l’onpeut résoudre à partir de la simplicité d’expérience. Pointbesoin de dessein intelligent. L’hypothèse d’un dieu est rigou-reusement inutile.Car l’auteur passe en revue de manière scientifique et dé-monstrative tous les arguments du «réglage fin» qui laissentsupposer un organisateur : aucun ne tient la route ! Il est pas-sionnant de lire ainsi que la science invalide totalement l’idéede dieu comme organisateur de la matière -puisque pour levivant on a Darwin, plus populaire que la physique ! Mais ladémarche et les avancées scientifiques sont trop complexes

pour rendre des comptes à l’opinion au sens où l’entendaitBachelard («elle pense mal, elle ne pense pas, elle traduit ses besoinsen connaissances»), et l’opinion continue à s’appuyer parexemple sur l’idée d’un commencement, qui scientifiqumentest aujourd’hui une hérésie.

Dieu dépasséSpinoza par exemple avait déjà par les seules ressources de laphilosophie démonté en règle l’idée de création et de volontéde dieu «cet asile de l’ignorance». Alors si les sciences sont d’unentendement trop complexe pour démontrer à la populationmondiale que leurs dieux sont des chimères, reste encore lavoie du bon sens. Ce que rappelle dans de belles pages Sten-ger : si Dieu a fait le monde, comment se fait-il que 99% desespèces ayant vécu sur Terre aient disparu ? Pourquoi cegaspillage ? Pourquoi l’espèce humaine a-t-elle failli disparaîtreà plusieurs reprises ? Pourquoi l’évolution ? Pourquoi cetteespérance de vie limitée à 20 ans pendant des milliersd’années ? Pourquoi un être tout puissant se cache-t-il de ceuxqui l’attendent depuis des millénaires ?Une frange grandissante de la population croit en Dieu dansl’indifférence ou la tolérance (paix-des-braves !) générale. Avecles conséquences en termes d’ignorance et d’exclusion que celaentraine. Si l’on veut conserver une cohérence républicaine aminima, et d’autant plus si l’on est animé d’un désir d’éman-cipation réel, il est grand temps que la croyance religieusecapitule. En l’état actuel du savoir, cela paraît une évidence :l’hypothèse de Dieu était un besoin ancestral de l’humanité,elle est désormais scientifiquement dépassée.RÉGIS VLACHOS

Dieu, l’hypothèse erronéeComment la science prouve que Dieu n’existe pasVictor StengerH&O éditions, 19 euroswww.colorado.edu/philosophy/vstenger

Sans dessein, sans cause et sans création :

l’univers

PHILOSOPHIE VICTOR STENGER | RENCONTRES NUMÉRIQUES

HISTOIREALCAZAR 47

sont encore accessibles telles quelles une fois sorties deleur contexte, comment garantir la différenciation entrece qui est public, privé, intime ou assumé ?Alors quoi, faut-il se déconnecter ? Il semble que celane servirait à rien : rien n’empêche autrui de publierquelque chose vous concernant, et tout contenu, mêmesi vous portez plainte pour qu’il soit retiré, peutressurgir facilement. Non, d’après M. Coutant, limiterles dégâts consisterait à reprendre en main ses traces. Ilne s’agit pas «juste de normes techniques à changer, nide simples règles à créer pour faire respecter l’anonymat.»Plutôt d’apprendre à «reconstituer ses facettes» pouréviter le piège de l’interconnexion2, de faire œuvre depédagogie, d’avoir recours à une médiation culturellede l’Internet. De sortir de la «logique d’ingénieur» quireporte tous les enjeux sur l’outil, alors qu’il importeavant tout de se questionner sur sa capacité à êtrehumain, en lien avec les autres.GAËLLE CLOREC

1 Association des professionnels de l’information et de la documentation2 Connexion entre plusieurs réseaux permettant de « cerner » l’internaute dans le but de connaître ou d’influencer ses comportements d’achat

«Non, tu n’as as changé» : l’identité au temps des mémoires numériquesa eu lieu le 23 juin à L’Alcazar, dans le cadre du cycle L’information : une nouvelle culture

À l’heure des surgissements démocratiques dans lespays arabes, le dernier mardi du MuCEM de la saisonproposait : Tunisie, le temps des libertés ? La conférenceétait remodelée par les absences de Sana Ben Achouret de Lina Ben Mehnni, initialement annoncées. Auxcôtés de Thierry Fabre se trouvaient donc Yves-Aubinde la Messuzière et, innovation technologique, AmiraYahyaoui en visioconférence depuis Paris.Yves-Aubin de la Messuzière, ancien ambassadeur enTunisie, commença par rappeler que Ben Ali parvintau pouvoir par un coup d’État, légalisé en 1996.Régime dictatorial qui se singularisa par le culte de lapersonnalité et l’autisme. À partir de 2001-2002, il semua en cleptocratie : les prises de participations dansles grandes affaires contrôlaient l’économie, etdégageaient une rente au profit de la famille Trabelsi.Amara Yahyaoui insista sur les faux-semblants : lesfemmes étaient, par exemple, les égales des hommes :elles avaient, elles aussi, le droit de se taire ! Devant desdémocraties bien peu tatillonnes, Ben Ali avait surtoutréussi à faire croire qu’il était le rempart indispensablecontre l’islamisme radical. Yves-Aubin de la Messuzièreévoqua l’ambiguïté de la politique française : JacquesChirac employa la rhétorique benaliste : «le premier desdroits de l’homme est de manger» ! S’il regretta cettephrase, Nicolas Sarkozy fut plus convaincu : «Leslibertés publiques progressent en Tunisie» affirma-t-il !Pendant ce temps, son ministre, Rama Yade, étaitprivée de rencontres avec les femmes tunisiennes.

Le tournantVint le temps du changement. Pour Amira Yahyaouiles morts qui s’accumulaient scellaient la rupturedéfinitive. Elle fit référence au remarquable travail de

reportage de Lina Mhenni qui matérialisa larépression aux yeux de tous. La télévision française,frileuse, hésita. Par contre, les réseaux sociaux commela chaine Al-Jazira multiplièrent les échos. Et lapopulation mobilisée (les jeunes, les organisationspolitiques et sociales…) obtint le départ de Ben Ali, le14 janvier 2011. Le chômage et la misère, le désir dejustice sociale, le désir de dignité, la revendication dela responsabilité politique conduisirent à ce fameux«dégage !» suivi d’effet libérateur. On sentit alorspoindre chez Amira Yahyaoui, comme dans la salle,une amertume face à l’attitude de la France, avant quecelle-ci ne change de cap. Ces ambiguïtés desdémocraties ont permis aux acteurs tunisiens decomprendre qu’ils ne devaient pas leur liberté àl’occident mais à leur propre volonté et à leur propreconviction. Alors que l’Europe refoulait les migrantstunisiens, le pays accueillait en masse les voisinslibyens. Le futur semble désormais serein et le processusdémocratique bien engagé. Les ministres de Ben Aliont quitté les responsabilités, le parti du président estdissout et ses membres ne peuvent se présenter auxélections. Une constituante est à l’œuvre. Les électionsont été retardées pour assurer une juste représentationdes forces politiques (le scrutin sera proportionnel). Sile péril islamiste a beaucoup fait trembler, il sembleraitque l’homogénéité de la société tunisienne et la libertéd’expression soient un bon antidote !RENÉ DIAZ

Il a dégagé !

et mémorisable

Nuage de tags © X-D.R.

Durant la ré�volution tunisienne, sur la place du gouvernement à Tunis

© X-D.R.

CINÉMA48 LES VARIÉTÉS | FID

Mahmoud Darwich aimait à «sentirl’odeur du café», passion palesti-nienne qui a occasionné une bellesoirée au cinéma Variétés le 21 juin !Yael Perlov nous a présenté le pro-jet qu’elle a initié à l’Université desArts de Tel Aviv : faire travailler en-semble, autour d’un thème quotidien,le café, huit jeunes cinéastes israé-liens et palestiniens. Malgré lesdifficultés liées à la situation politi-que, avec un budget réduit et aprèsune période de méfiance réciproque,au bout d’une année de travail enétroite collaboration le résultat estlà : Coffee beetween reality and ima-gination, un programme de six courtsmétrages de fiction et deux docu-mentaires. Tous très différents, et

vraiment réussis ! On retiendra plusparticulièrement Eva s’en va d’AyaSomech : un cafetier, devenu trèsreligieux veut tout «casheriser» et safemme ne le supporte pas  ! EliteZexer met en scène, dans Tasnim,une jeune bédouine au fort carac-tère. Gazi Abu Baker a adapté unenouvelle de l’écrivaine palestinienneSamira Azzam, The Man and the Clock. Yael Perlov ne va pas en rester là : unnouveau projet est en constructionsur un thème politiquement plusdélicat en Israël : l’eau, sujet desconflits… À suivre !ANNIE GAVA

www.wix.com/coffeeproject/coffeeproject2010

Tasnim d'Elite Zexer

C’est avec Poussières d’Amérique d’Arnaud desPallières que s’est ouvert, le 6 juillet, le 22e FIDMarseille dans son lieu historique, la grande sallede La Criée pleine à craquer. Un film étonnant quia partagé le public, certains ayant cédé à la «dan-gereuse machine à fascination», d’autres s’étantennuyé durant ce film qui, comme toute la sélec-tion opérée par Jean-Pierre Rehm, ne voulait nifaire la leçon, ni donner des réponses. Pour réa-liser Poussières d’Amérique, montage alternéd’images d’archives américaines et de cartonsnoirs à l’ancienne, qui commentent avec ironiel’Histoire des États-Unis et déconstruisent le rêveaméricain, Arnaud des Pallières a visionné desmilliers de films vernaculaires. «Ce film dit-il,parle d’Amérique. Donc de nous. Des morceauxde la vie de chacun. Un enfant, son père, sa mère,le lapin, le chien, les fleurs, votre enfance, lamienne, la nôtre. Les Indiens, Christophe Colomb,Apollo, la Lune. Chaque personnage dit «je». C’estle journal intime de chacun. L’autobiographie detout le monde.» Il faut se laisser emporter par lapuissance hypnotique de ce torrent d’images, troncsabattus et charriés au fil de l’eau et «laisser laporte ouverte» pour aller à la rencontre de l’Autre. Car l’on fait de bien belles rencontres au FID. Her-mes Paralluelo a suivi les pas de cartoneros deCordoba, en Argentine, et nous présente Ricardo,un jeune garçon de dix ans qui fait vivre sa familleen collectant des déchets. Nous le suivons enlongs plans séquences au gré de ses trajets ; il aun rêve, posséder un cheval de course qu’il appelleraYatasto, le titre de ce film «fait sans idée précon-çue pour essayer de décrire des sentiments etdes situations.» Fort réussi !Un rêve, Shahriyar en a un, qui occupe tout sontemps. Il vit à Kermanshah, une petite ville ira-nienne où le réalisateur de Moving up a vécu, etveut devenir écrivain, comme Jack London, Ten-nessee Williams ou Dostoïevski. Il est éboueurmais la littérature et l’écriture le possèdenttotalement. Son entourage se moque de lui et les

seuls à écouter ses textes sont les pigeons. EtLoghman Khaledi, qui a reconnu en lui un peu delui-même. Shahriyar lui a dédié ce poème quiparle de ce film émouvant : «Balayeur, balayeur,ne balaie pas les feuilles jaunes, car j’aime enten-dre le bruissement des feuilles et savoir que jemarche.»Il se peut que la beauté ait renforcé notre résolu-tion - Masao Adachi est le premier d’une série deportraits de cinéastes : Philippe Grandrieux estallé à la rencontre de ce réalisateur undergroundjaponais pro-palestinien. Tout doucement, à l’in-tuition, et c’est un moment magique. Le dialoguepasse par la matière filmique elle-même. Auximages un peu voilées du cinéaste japonais fontécho celles de Grandrieux, pâles, qui découvrenttour à tour une enfant sur une balançoire, desmorceaux de paysage, des cerisiers en fleur, le

visage en très gros plan du cinéaste qui pense, àhaute voix. «La lumière, je l’avais au bout desdoigts, c’était la lumière que je désirais voir. C’estaussi une chose très simple, il suffit de désirer ceque l’on filme.»On pourrait aussi parler de Soad Hosni, une stardu cinéma égyptien dont Rania Stephan évoque lavie à partir d’extraits des cent films qu’elle atournés ; ou de Reda Ibrahim Mohamed Ali, lamatriarche d’un clan de femmes où le métier dedanseuses se transmet de mère en filles, dans lebeau film d’‘Isabelle Lavigne et Stéphane Thi-bault La Nuit elles dansent ; ou de Renée, la mèrede Jonathan Caouette dont le dernier film, Walkaway Renée a clôturé le festival…ANNIE GAVA

Au fil du FID

Le café commun

Yatasto de Hermes Paralluelo

CINÉMA 49CINÉMA ISRAÉLIEN | VARIÉTÉS

Le 9 juin, au cinéma Variétés à Mar-seille a été projeté Hopecity, enprésence de la réalisatrice Léa Jametet de toute l’équipe de cette fablegrinçante, acteurs professionnelscomme Cathy Darietto, Théo Triffardou Christophe Grégoire, et débu-tants, des sans-abri, comme AnnickSylvestre ou Mickaël Rabia ren-contrés à la Boutique Solidarité dela Fondation Abbé Pierre. «Et si onfaisait un film ensemble ?», une af-fichette et tout a commencé ! Uneannée d’écriture dans des ateliersanimés par Léa et Théo, des mois derépétitions, des repérages «rock’n’roll»,14 jours de tournage et 4 mois depost production. Un budget ridicule,des techniciens qui ont travaillépresque bénévolement, convaincusqu’il est très important que les per-sonnes en grande précarité puissent

affirmer leur dignité à travers uneexpression artistique avec des pro-fessionnels et un film de fiction de52 minutes, nourri du quotidien deses auteurs. Hope City est une villeimaginaire gouvernée par un groupequi contrôle tout et où se côtoientdeux classes sociales, les «Nantis»qui souhaitent l’éradication des«Lambdas». À travers ce scénariosimple, sont abordés des thèmesquotidiens et universels : le pouvoir,la liberté, l’amour, l’amitié, la tra-hison… Les scènes tournées dansun tunnel désaffecté et les «rêves»des «Lambdas» sont les plus réus-sies de ce film humain, dédié àJehemi Boumediene, un des sansabri décédé durant l’année 2010,cinq mois après le début du projet.La projection s’est terminée par Tifleur fanée, chantée par Annick

Sylvestre, reprise par toute l’équipe.Un moment très émouvant.ANNIE GAVA

Peut-on faire en Israël un film qui ne soit paspolitique, se demandait Joseph Cedar ? Footnoteson dernier opus, prix cannois du scénario 2011,projeté en ouverture de la 12e édition phocéennedes Regards sur le cinéma israélien, en présencedes autorités diplomatiques, incite à répondre parla négative. À travers la rivalité entre un père évin-cé des honneurs et son fils les cumulant, tousdeux spécialistes du Talmud, s’esquisse uneréflexion sur l’enfermement idéologique, lanécessité du compromis, les forteresses quiprotègent mais écrasent, la difficulté de voir letout quand on ne s’accroche qu’aux détails. Lapureté impitoyable du père -un Alceste aigri etmutique dont la seule trace de trente ans derecherche se réduit à une note de bas de page-s’accommodera d’un mensonge révélé. Histoired’une méprise administrative -occasion d’égrati-gner le bastion étriqué de l’université-, fable sur ladéception paternelle et le cauchemar d’être fils,étude d’un cas de conscience, ce film bavard (trop?), s’il n’est pas totalement réussi et souffrede la comparaison inévitable avec l’homme sé-rieux des frères Coen, offre sur fond de noirceurpsychologique et sociale, des scènes franchementdrôles. Faire abstraction des conflits inextricables dupays devient un luxe qu’Eitan Zur dit avoir voulus’offrir avec Naomi, drame sentimental tiré d’unbest-seller d’Edna Mazia, sur un sujet des plusbanals : un adultère suivi de crime, remords,enquête. Le meurtrier est juif, le policier arabe, lamère allemande et pragmatique : on est à Haïfa,ville jumelle de Marseille où la cohabitation estnormale. C’est là aussi qu’Avi Nesher campe lespersonnages attachants de son film TheMatchmaker : Yankele, marieur professionnel,rescapé de la Shoah, le jeune Arik qu’il embauche

pour l’été 68 et qui découvrira la complexité del’amour. Adaptation d’un roman de Kenaz, Infil-tration de Dover Kosashvli suit un groupe disparatede recrues de l’armée israélienne durant leurstrois mois de classe, durant l’été 1956. Un kib-boutzin, un intello, un caractériel, un homo, undon juan, un épileptique... rétifs sans être rebelles,cimentés malgré leurs différences par cesentiment national qui apparaît également dansl’épopée historique Gei-Oni de Dan Wolman defaçon trop académique et édifiante. La semaine s’est achevée au rythme du cœur deSarah (incarnée par Sarah Adler), dernier êtrehumain à pouvoir rêver dans le décor post-indus-

triel intemporel et sublimé du virtuose Andantede Assaf Tager, une performance cinématogra-phique à la fois plastique et musicale. Et de celuid’Aharon, fragile adolescent du livre de La gram-maire intérieure de Nir Bergman. Film bouleversantoù s’impose le point de vue du héros refusant degrandir pour ne pas ressembler aux adultesbrisés à force de malheurs et de renoncements,s’évadant tel Houdini d’espaces clos et asphy-xiants, s’enfermant dans un présent permanent.Une semaine contrastée qui témoigne de lavitalité et des ambitions du cinéma israélien dansles déchirures de l’Histoire. ÉLISE PADOVANI

La cité de l’espoir

Une semaine Israélienne

Naomi d'Eitan Zur

Hopecity © Patrick Palmyre

CINÉMA50 LUSSAS | RENDEZ-VOUS D’ANNIE

Du 21 au 27 août aura lieu à Lussas, en Ardèche,la 23e édition des États Généraux du Documentaire.Au programme, des projections, des rencontres du

public avec les cinéastes, des rencontres profes-sionnelles, deux ateliers, Donner à entendre et Lecabinet d’amateurs. Histoire de doc nous emmè-nera en Tchécoslovaquie et la Route du Doc enItalie. Fragment d’une œuvre sera consacré à uneréalisatrice américano-suédoise de films expéri-mentaux, Gunvor Nelson. Et comme chaque année,la section Afrique et Expériences du regard, unevingtaine de films des films qui «nous convient àquitter notre position de spectateurs pour devenirdavantage des acteurs du monde et de nospropres vies.»

S’ils tiennent compte, outre ce riche programme,des journées SCAM et SACEM, des projectionschez l’habitant, des écrans sous les étoiles, de lamusique, et de l’atmosphère très conviviale, lesamateurs de documentaires finiront sans nuldoute leurs vacances à Lussas !ANNIE GAVA

États généraux du film documentaire04 75 94 28 06www.lussasdoc.com

Fin d’été en Ardèche

Palazzo delle Aquile de Stefano Savona, Alessia Porto et Ester Sparatore

Depuis le 7 juillet, les cinémas Actes Sud (ex LeMéjan) ont réouvert à Arles : le 13 juillet à 20h,après la projection de Le Moine de Dominik Moll,débat avec Guillaume Pigeard de Gurbert,éditeur du livre ; le 19 à 21h, projection de 8thWonderland, suivie d’une rencontre avec le réali-sateur Jean Mach autour du thème Wikileaks.Dans le cadre du partenariat avec les RAP (voirp58), Le Cinéma de la photographie continuejusqu’au 26 août, tous les jours à 19h30 : La Valisemexicaine et Chevolution de Trisha Ziff, Le Fondde l’air est rouge et Sans Soleil de Chris Marker,Waste land de Lucy Walker…

08 92 68 47 07www.actes-sud.fr

La 16e édition de Ciné plein air concoctée par TILTcontinue: à la tombée de la nuit des projections sousles étoiles, dans différents lieux de Marseille.Au théâtre Silvain le 18 juillet Volver de PedroAlmodóvar, le 25 Se souvenir des belles chosesde Zabou Breitman et le 28 une soirée «Cinémaet Concert» : à 20h 30 le trio à cordes AnPaPié,suivi du film d’Abel Gance Un grand amour deBeethoven. Au Panier, le 15 juillet, Alice au paysdes merveilles de Tim Burton ; le 16 Welcome dePhilippe Lioret, le 22 Un été avec Coo de KeiichiHara et bien d’autres…

TILT04 91 91 07 99http://cinetilt.blogspot.com

Le 19 juillet à 21h45 au Théâtre de Verdure deSaignon, dans le cadre de la 50e édition du Moisdu cinéma en Lubéron, devenu le Festival FrançoisMorenas en hommage à son créateur, projectionde L’Arbre à Fourche de Pascal Privet et de LaSan Aloï de Dominique Lesourd.

http://moisducinema.free.fr

Jusqu’au 24 juillet, en collaboration avec leFestival d’Avignon, Utopia propose Territoirescinématographiques : des projections uniques,suivies de rencontres. Le 13 juillet à 10h30 L’Im-possible - Pages arrachées en présence duréalisateur Sylvain George. Le 14 à 14h, le pre-mier film d’Agnès Jaoui, Le Goût des autres, enprésence de la comédienne Anne Alvaro, et à17h30, en avant-première, Les Bien-aimés,séance unique suivie d’une rencontre avec Chris-tophe Honoré ; les 18 et 19 juillet à 14h deux filmsde Thierry de Mey autour des spectacles de lachorégraphe et danseuse Anne Teresa de Keers-maeker en sa présence, Rosas danst Rosas etFase.

Avignonwww.cinemas-utopia.org

Jusqu’au 28 août, l’Institut de l’image à Aix pro-pose Instants d’été, des projections gratuites enplein air, en collaboration avec l’association Tilt :le 17 juillet Silence, on tourne de Youssef Chahine ;le 24 Certains l’aiment chaud de Billy Wilder ; le31 Latcho drom de Toni Gatlif ; le 14 août Volverd’Almodovar ; le 21 Lost in translation de SofiaCoppola ; le 28 Le Lauréat de Mike Nichols.Séance spéciale sur réservation, le 23 juillet : lecinépianographe, une création cinématographi-que et musicale de la compagnie La Rumeur, uncabaret dans l’atmosphère des années 30. Le 7août, séance de 5 courts métrages proposée par lesRencontres cinématographiques d’Aix-en-Provence.Les projections commencent à la tombée de la nuit.

Institut de l’image04 42 26 81 82www.institut-image.org

Du 12 au 16 juillet, au Théâtre des Chartreux àMarseille se tiendra la 11e édition d’ImagesContre Nature, festival international de vidéoexpérimentale. Avec six programmes, Espace,Temps, Perception, Sens, Mouvement et Identité.

P’Silo - Festival Images Contre Nature04 91 42 21 75www.p-silo.org

Le 17 juillet à 22h, dans le cadre de la 16e éditionde Simiane sous les étoiles, projection de LaGuerre des boutons d’Yves Robert.

04 42 22 62 34www.omcsimiane.com

Du 21 au 24 juillet, André S. Labarthe présente àl’Utopia quatre films de la série Cinéastes denotre temps à 10h30, suivis d’un film de chaqueauteur, à 14h : le 21, Alain Cavalier, 7 chapitres, 5jours, 2 pièces-cuisine de Jean- Pierre Limosinet Pater ; le 22, Nanni Moretti de Labarthe etHabemus papam ; le 23, Carl Th. Dreyer d’ÉricRohmer et La passion de Jeanne d’Arc avec lemetteur en scène Guy Cassiers ; à 17h, en avant-première, Jeanne captive en présence de PhilippeRamos, Labarthe et le comédien Johan Leysen ;le 24, Bresson ni vu ni connu de FrançoisWeyergans et Le Procès de Jeanne d’Arc enprésence d’André S. Labarthe.

Avignonwww.cinemas-utopia.org

Du 9 au 11 septembre se tiendra la 10e édition duBest of Short Films Festival à la Ciotat.L’occasion de découvrir les films déjà primés parun Grand Prix ou un Prix du Public dans les plusimportantes manifestations consacrées au courtmétrage, en France et à l’étranger, durantl’année. Le jury attribuera le Soleil d’Or, le Sabled’Argent et la Mer de Bronze. Le jeune public nesera pas oublié : leur jury, constitué d’élèves desection cinéma, décernera le Cochonnet d’or à undes «mini shorts».Et comme d’habitude, le public pourra rencontrersur la place du cinéma Lumière les réalisateursdans la convivialité.Une bonne rentrée en cinéma !ANNIE GAVA

Best of Short Films Festivalwww.bestoffestival.com

Volver de Pedro Almodovar © Emilio Pereda et Paola Ardizzoni - courtesy of Sony Pictures Classics

Habemus papam de Nanni Moretti

ARTS VISUELS52 AU PROGRAMME

Ici et ailleursLa Fondation Blachère à Apt jette un pont entre la région Paca et le continent africain àtravers un programme de résidences, de manifestations, de rencontres et d’expositions. Insitu avec deux temps forts : Ville et les imaginaires… source inépuisable d’inspirations (villesrêvées, fantasmées, intimes…) et Africa Rythms, épopée musicale racontée en portraitsphotographiques. Et hors les murs aux Chantiers de la lune avec Mixités qui croise le travailde 6 des artistes phares de sa collection (Da, Hazoume, Konafé, Lo, Mpane et N’Diaye).M.G.-G.

Mixitésjusqu’au 30 juilletLes Chantiers de la lune, La Seyne-sur-Mer04 94 06 49 26http://www.facebook.com/leschantiersdelalune

Hymne à la ProvenceL’un peint : Eugène Fidler, l’autre sculpte : Jacques Salles, les deux autres photographient : Lucien

Clergue et Brice Toul. Les uns évoquent la terre écarlate du Roussillon, épousent les baigneuses desSaintes-Maries, les autres en dressent le portrait ou chantent l’art d’y vivre. Par amour de leur art,

l’association Artothèque les réunit le temps d’un été et d’un hymne à la Provence…M.G.-G.

Clergue, Fidler, Salles, Touldu 29 juillet au 21 août

Château La Nerthe, Châteauneuf-du-Pape04 90 83 70 11

Ville et les imaginaires…jusqu’au 8 octobreFondation Blachère, Apt04 32 52 06 15www.fondationblachere.org

Créapatrimoine Dans le cadre du Festival Ap’art, le château royal de Provence ouvre ses grandes sallesd’apparat à Jean-Michel Othoniel, mêlant les œuvres de l’artiste aux pages enluminées desmanuscrits du roi René 1er, duc d’Anjou et comte de Provence (1409-1480). L’architecture deslieux s’en trouve magnifiée : les planches de L’herbier merveilleux, dans le «salon du roi»,côtoient des œuvres présentées autour du monde végétal médiéval et contemporain, tandisque, dans la «chambre de retrait», les trois cœurs en verre soufflé de Murano, Les Chœursflottants, font rejaillir la lumière du soleil couchant sur ces murs chargés d’Histoire… C.L.

L’Herbier merveilleux et Les Chœurs flottantsJean-Michel Othonieljusqu’au 30 septembreChâteau royal de Provence, Tarascon04 90 91 01 93www.tarascon.fr

Terre de feuL’exposition Les Mondes céramiques «bouscule» la tradition des arts de

la terre en posant d’emblée la question : comment la créationcontemporaine interroge-t-elle le monde ? D’où une multiplicité d’œuvres,

de techniques, de formes et d’expressions depuis la collection Cocteau etla céramique Futuriste (atelier de Faenza) jusqu’à aujourd’hui : Fanny

Ferre et son Groupe du déjeuner présenté pour la première fois dans leSud, les questionnements de Bertozzi e Casoni sur la société de

consommation, les collaborations de Claude Aiello avec les designersChristian Ghion, Ronan Bouroullec ou Florence Doléac… M.G.-G.

Les mondes céramiquesjusqu’au 18 septembre

Centre d’art contemporain des Pénitents Noirs, Aubagne11e Biennale Argilla

20 et 21 août04 42 03 49 98

www.aubagne.com

© Mamadou Cissé

Sans titre © Jacques Salles

Florence Dole�ac et Claude Aiello, exposition Les Mondes ce�ramiques, Aubagne 2011 © X-D.R

Jean-Michel Othoniel, L'herbier merveilleux, Coeur de Marie, 2008 (papier, aquarelle, photographie) © Jean-Michel Othoniel

Maison de maîtreDe nouveau ouvert au public (il l’était pour la première fois lors del’exposition Picasso/Cézanne en 2009), le château de Vauvenargues, quiabrita quelques années entre 1957 et 1959 l’atelier de Picasso accueilleune exposition d’une soixantaine de gravures de l’artiste, ainsi qu’un choixde ses livres illustrés, des années 1936 à 1972. S’y côtoient les animaux duBuffon, les scènes de corrida de La Tauromaquia, les acrobates du cirque,les filles des maisons closes ou encore le peintre dans son atelier. C.L.

Pablo Picasso, gravuresjusqu’au 18 septembreChâteau de Vauvenargues04 42 38 11 91www.chateau-vauvenargues.com

ARTS VISUELS 53

InclassableHervé di Rosa fait partie de ces artistes qui bivouaquent autour du monde et inventent un nouvel

atelier à chaque rencontre : il a rapporté de ses Détours effectués de 1998 à 2011 une œuvreinclassable aux formes, couleurs, techniques, matières nées du contact avec les artistes, de son

apprentissage de leur art, de leur culture, de leurs pratiques et de leurs règles. À Campredon,bronze, bois, résine, aquarelle, dessin, carnet, sculpture racontent

la curiosité d’un globe-trotter passionné. M.G.-G.

Détours du monde, 1998-2011Hervé Di Rosa

jusqu’au 2 octobreCentre d’art Campredon, L’Isle-sur-la-Sorgue

04 90 38 17 41

Accord parfaitLa Maison de Louis Vouland, ancien hôtel de Villeneuve-Esclapon, se prête tout particulièrement aux œuvres de laCollection Dumon qui trouvent dans les chambres ou la salle à manger une concordance parfaite : Loubon, Ziem,Chabaud, Manguin, Marquet, Lhote et tant d’autres artistes inspirés par la Provence… Une centaine d’œuvres -sur 850 que compte la collection - témoignent d’un certain art de vivre sous le soleil du Midi.M.G.-G.

La Collection Dumon Fondation Regards de Provencejusqu’au 30 octobreMusée Louis Vouland, Avignon04 90 86 03 79www.vouland.com

FigurePionnier de la nouvelle figuration qui contra l’abstraction officielle, acteur essentiel de la figuration

narrative, Gérard Fromanger installe sa rétrospective au Musée Estrine. Trame et sujets s’yconfondent dans un langage à la fois abstrait et figuratif, évoquant notamment des amitiés électivesnouées avec C. Bernard, F. Guattari, M. Onfray, J. Prévert, M. Foucault… La couleur, qui joue un rôle

majeur, exprime les passions et transfigure le réel en introduisant le temps de la narration dansl’espace plastique.

C.L.

L’écharpe d’Iris, rétrospective 1955-2011jusqu’au 4 septembre

Musée Estrine, Saint-Rémy04 90 92 34 72

www.musees-mediterranee.org

Gé�rard Fromanger,Je suis dans l'atelier en train de peindre...à mon seul désir, 1979.

Huile sur toile, Collection particulière

Herve� Di Rosa, Atelier, 2010, acrylique sur toile, 128x173cm-collection prive�e, Paris © Pierre Schwartz

Pablo Picasso, Eau-forte, 394 x 565 mm. Atelier Crommelynck, 1968, Mougins. Photo de Claude Germain, ImageArt © Succession Picasso 2011

Rave J, Les chevrie�res au bord de mer ©

Collection D

umon

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ARTS VISUELS AU PROGRAMME54

Instants volésFace à l’afflux d’images et au télescopage des genres, l’artiste plasticienMichel Alliou s’empare sans hiérarchie ni références explicites d’imagescinématographiques, détourne des images médicales, use de clichéspersonnels, emprunte aux magazines et à la publicité pour fabriquer sonpropre alphabet formel. Et créer un leurre pictural : le regard croit à unephotographie puis, scrutateur, distingue des touches picturales. Autrefoiscadrées, formatées, les images sont mises en perspective selon unscénario critique. M.G.-G.

You just can’t live without meMichel Allioujusqu’au 31 aoûtEspace culturel, Le Lavandou04 94 00 41 72 / 04 94 00 40 40

Le dernier peintreUn an après que la rue «Richard Mandin, peintre-musicien» a été inaugurée dans le 9e

arrondissement de Marseille, l’hommage à l’artiste se poursuit de manière éclatante à travers uneexposition au centre d’art Sébastien de St-Cyr-sur-Mer et la publication du catalogue raisonné de sonœuvre (non exhaustif) Richard Mandin, le dernier peintre réalisé par Annick Masquin et Bernard Plasseaux édition Raisons de catalogue (chronique à venir dans Zib’ 44).M.G.-G.

Visite guidée de l’exposition et dédicace du livre samedi 30 juillet à partir de 16 heures. Mandin, le dernier peintrejusqu’au 18 septembreCentre d’art Sébastien, St-Cyr-sur-Merwww.saintcyrsurmer.fr

Le rêve de SandraLa Fondation Vacances bleues poursuit son partenariat avec le salon international d’art

contemporain de Marseille Art-O-Rama en accompagnant la production d’une œuvrenouvelle de Sandra Lorenzi, Le rêve des gens heureux, invitée au Show-Room avec ColinChampsaur, Caroline Duchatelet et Nicolas Pincemin. Une aide financière et un «coup de

pouce à la jeune génération marseillaise» qui bénéficie, grâce au salon, d’une plus grandevisibilité auprès des galeries internationales (13 cette année), des collectionneurs privés et

des institutions publiques. M.G.-G.

Art-O-Ramaouverture les 2, 3 et 4 septembre

exposition jusqu’au 18 septembre(Journées du patrimoine incluses)

La Cartonnerie, Marseillehttp://art-o-rama.fr

Ziem de ParisEn 1905 alors au sommet de la célébrité, Félix Ziem fait don à la ville de

Paris d’un important choix personnel de ses œuvres. Cette sélection de ladonation du Petit Palais complète à souhait (mais temporairement !) les

collections martégales avec entre autres peintures cinq carnets de voyageset surtout un ensemble remarquable d’aquarelles, comme par les thèmesabordés. L’exposition se prolonge par le catalogue (histoire de la donation,

Ziem à Paris) et les œuvres de Claude-Charles Le Pape en écho à cellesde son aîné.

C.L.

Les Ziem du Petit Palais, Parisjusqu’au 30 octobre

Musée Ziem, Martigues04 42 41 39 60

www.musees-mediterranee.org

© Bad lieutenant n°3, Michel Alliou

Le re�ve des gens heureux, Sandra Lorenzi © S. Lorenzi

© Richard Mandin, L'art et l'amour, 1945© Félix Ziem

Drogu’artQuels rapports peuvent entretenirles arts plastiques et les produitspsychotropes ? Art-Cade s’emparedu sujet, hors de tout jugementmoral, en proposant un ensembled’œuvres qui évoquent lareprésentation plastique deproduits ou de leur usage (Aurèle,E. Barrus, G. Limone, A. Perpère…),ou qui, intentionnellement ou non,produisent des effets approchantceux des psychotropes (R. Hains,B. Gysin, H. Foucault…). Ou desœuvres réalisées avec la prise de ces produits (J.M. Charcot, C. Baudelaire, H. Michaux, J.Cocteau…).C.L.

Arts psychoactifsjusqu’au 27 aoûtGalerie Art-Cade, Marseille04 91 47 87 92www.art-cade.org

DéraisonNEZWilliam Kentridge, en haut de l’affiche du Festival d’Art Lyrique pour LeNez, nouvelle de Gogol adaptée par Chostakovitch pour l’opéra, nous offredeux œuvres plastiques satiriques à la Cité du Livre et à l’Atelier Cézanne.I’m not me, the Horse is not mine interroge le tragique destin des avant-gardes russes à travers une installation vidéo. Chostakovitch est unesculpture combinant représentations d’un chefd’orchestre+danseuse+nez+Staline, qui tourne en rond. Perdre son nez ettout devient déraisonnable, au moins jusqu’au 3 septembre.C.L.

ChostakovitchAtelier Cézanne, Aix-en-Provence04 42 21 06 53www.atelier-cezanne

I am not me, the Horse is not mine, 2008Cité du Livre, Aix-en-Provence04 42 91 98 88www.citedulivre-aix.com

Une proposition d'Antoine Perpère commissaire del'exposition, Galerie Art-Cade, Marseille 2011 © An-toine Perpère

William Kentridge, I am not me, the horse is not mine, 2008 © Jean-Claude Carbonne

L’intention de la jeune artiste était«de faire rentrer le Rhône dans lemusée». Du moins ce qui relève deson énergie. Car cette artiste conçoitdes objets et des dispositifs à la foissimples et savants, convoquant scien-ce, génie du bricolage et champpoétique. Si ses objets évoquent lesrecherches de Takis ou Pol Buri (em-prunts technologiques, mouvement,effets magnétiques, lumière, son)Charlotte Charbonnel se réclameplutôt de l’œuvre d’Olafur Eliasson,les créations de ces artistes ayanten commun de stimuler nos facul-tés perceptives via les sensationsvisuelles ou sonores. Ainsi Écho, quivibre avec la force du mistral, ouStéthosphères - cinq bulles de plexiglastransparentes contenant différentesmatières et capteur de son, mani-pulables, reliées entre-elles par descasques d’écoute - qui invite àexpérimenter le visible par le sonoreet à entendre en temps réel ce queproduit l’autre visiteur. Dans le boyausouterrain tout proche la vidéo De48°34’ à 18’ restitue les puissantespulsations solaires.

Pour le musée, Charlotte Charbon-nel a conçu plusieurs pièces mettanten œuvre limaille de fer et champmagnétique en écho avec les forcesdu lieu. Des dessins sur papier ontfixé les déplacements de la poudremétallique, tandis que Colosse (leprojet devait s’élever à l’échelle de lasalle) et Resonarium en sculptentles mouvements imperceptibles. Auconvergent de l’axe du Rhône et ducardo romain, l’ancien Grand Prieu-ré de l’Ordre de Malte bénéficieraitselon certaines hypothèses de coor-données magnétiques particulières. Bonnes vibrations !C.L.

La revue Semaine éditée par les éditions Analogues consacre un numéro au travail de CharlotteCharbonnel, à paraître fin juilletCharlotte Charbonneljusqu’au 16 octobreMusée Réattu, Arles04 90 49 37 58www.museereattu.arles.fr

ARTS VISUELS56 CABRIÈS | ARLES

Un été délirantFace à l’accélération du temps et à la morositéambiante, face à un esprit de conformisme quisemble prévaloir, le Château-musée Edgar Mélika eu envie «de souffler et de rire sous le regardcritique et amusé de Ben». Danièle Malis, conser-vatrice du musée depuis près de 30 ans etcommissaire de l’exposition Un été singulier ainvité quelques-uns de ses compagnons de route,des artistes d’Aix, de Marseille et de Nice qui fontde leurs singularités une façon de vivre, de penseret de créer. 14 personnalités qui détonnent etdélirent par le choix des matières : incroyablesperformances de Jo Guichou qui, à force de mala-xer son chewing-gum, en a fait le medium detableaux iconoclastes : La Cène, Catherine II. Unton caustique : Loup garou et Grand oiseau debout,Jacky Coville peuple son jardin d’Eden decréatures étranges en céramique, mi-hommemi-animal, car sa «vision de la genèse est plusbiologique que théologique» ! Un humour poé-tique, comme celui inclassable qui habite l’œuvrede Pierre Ledda (Poupées enchâssées dans desboites peintes) dont le musée possède deuxmagnifiques colosses de métal, vigies bienveil-lantes qui accueillent le visiteur dans la cour

pavée du château… Entre les murs de lachapelle peints par Edgar Mélik, ses toileset ses outils dans l’atelier, les totemsd’Alain Peynichou élèvent leursformes irrégulières jusqu’auciel, Ghislaine Teyssier laissedériver ses rêves et ses peursentre les lignes de ses dessins,Anita Singharaj découpe auscalpel les mots des autresdans des livres sculptés qu’elleréinvente, Olivier Bernex offredeux polyptiques récents, Le Squat etLa chute du peintre, explosions decouleurs, jaillissements de lignescomme l’annonce d’un nouveaucycle de vie… Tandis que, dehors, unjeu de trames mobiles flottent auvent sur le toit du château,luminescentes dès la tombéede la nuit  : Pierre Surtelest un magicien.MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Un été singulierjusqu’au 6 novembreChâteau-musée Edgar Mélik,Cabriès04 42 22 42 81

www.musee-melik.fr

Dans le cadre de sur mesures le musée Réattu offre sa première exposition institutionnelle à Charlotte Charbonnel

L’énergénie du lieu

Charlotte Charbonnel, Resonarium, de�tail, 2011, structure aluminium, limaille de fer, aimants, moteur © Fre�de�ric Halna, vue de l'exposition au musée Réattu

Un grand oiseau debout, Jacky Coville, céramique, 2000 © X-D.R

ARTS VISUELS 57AVIGNON | MARSEILLE

Le Conseil général de Vaucluse invite cet été l’ar-tiste britannique Richard Long, dans l’espacefascinant de la Chapelle Saint-Charles. Depuis2008, des expositions d’art visuel gratuites, parti-culièrement pertinentes et lyriques, s’implantentdans et en fonction du lieu historique classé  :Ernest Pignon-Ernest et ses Mystiques extatiquesen 2008, puis Anne et Patrick Poirier et leurs Ver-tiges/vestiges et les jeux de lumière de GeorgesRousse en 2010. Le maître du Land Art, «artistede paysage» rectifie-t-il lors du vernissage del’installation, «anti bling-bling» préférant se cacherderrière son œuvre, a créé un Champ d’ocre quis’accorde de manière saisissante à la nef et lalumière naturelle de la Chapelle. Ce marcheursolitaire, voyageur du monde, qui travaille sansassistant et en adéquation avec la nature, a dé-couvert lors d’un séjour dans le département lesCarrières d’ocre (voir p.63 l’article de Yves Ber-chadsky Ocre’n’Rôle Aptitude). Il tire «un portraitsymbolique du Vaucluse» en utilisant pour lapremière fois ce matériau pour une installation

linéaire et éphémère, dans la lignée de ses Stoneset Coar lines. Un jardin japonisant de 15m sur 5maux couleurs d’ocre rouge qui inspire un sentimentde zen bienfaisant, et redéfinit notre perceptionspatiale par un jeu visuel saisissant. Dans cetespace entre ciel et terre, l’artiste laisse son em-preinte discrète, brute et naturelle. À son image. Pour la première fois, le département ouvre lasacristie attenante à la Chapelle, en diffusant undocumentaire sur le processus de création del’artiste.DE.M.

Champ d’ocreRichard Longjusqu’au 16 octobre Chapelle Saint-Charles, Avignonwww.vaucluse.fr

Entre terre et ciel

Se faire renvoyer pour «immaturitésociopolitique» (nous sommes en1956 en RDA), être inculpé pourdeux œuvres obscènes une foispassé à l’Ouest (1963), en venir augeste définitif de retourner la toilehaut/bas (1968 ou 1969 ?), exécuter àpartir de ce moment toutes ses œu-vres directement comme à l’envers…La radicalité de Georg Baselitz estévidente, lorsqu’il affirme le primatde la figure en pleine époque dudiktat de l’abstraction et du mini-malisme. D’une présentation rigoureuse trèsgermanique voire austère, l’exposi-tion du musée Cantini se consacreuniquement à son œuvre gravé en-treprise dès 1963. Près de deux centœuvres couvrent près d’un demisiècle de production ininterrompuepar lesquelles Baselitz convoque lestechniques traditionnelles pour entirer l’essentiel vers les expérimen-tations les plus audacieuses et

complexes. On remarquera les grandsformats, souvent plus d’un mètresur deux, en linogravure comme ceDreibeiniger Akt (Nu aux troisjambes) ou Kopf (Tête) évoquant unAntonin Artaud halluciné. Le catalo-gue restitue l’ensemble des œuvresexposées. La préface d’Erik Verhagenen particulier permet au visiteur dereplacer cette trajectoire artistiquechargée d’éléments autobiographi-ques complexes et de choix radicauxassumés sans ambages. Une proposition qui renoue les filsdistendus des expositions temporai-res d’art moderne et contemporain,fonction partagée avec le [MAC]mais trop longtemps laissée auhasard des hoquets marseillais. C.L.

À la pointe du traitGeorg Baselitzjusqu’au 25 septembreMusée Cantini, Marseille04 91 54 77 75www.marseille.fr

Retournements et motifs Par cette expositionconsacrée à l’œuvre gravé de Georg Baselitz, le musée Cantini renoue avec sa fonction d’ins-titution consacrée à l’artmoderne : l’artiste bienvivant, et contemporain

Zero fu� r den maler (Ze�ro pour le peintre), 2005, eau forte, aquatinte au sucre sur ve� lin blanc satin de Somerset / collection galerie Catherine Putman, Paris © Georg Baselitz, 2011

Richard Long devant son installation Champ d'Ocre à la Chapelle Saint-Charles, Avignon © Delphine Michelangeli/Zibeline

ARLESPHOTOS58

À Arles la Photo y va d’un mondepas très enchanteur. Bien de bellesimages nous renvoient à des chosesdures, aux quotidiens difficiles, pen-chées vers les affres humaines avecdistance ou amusement parfois.Cette édition, de la grand messe auxplus humbles expos, donne à voirbeaucoup de portraits individuels oude groupes, à tendance documen-taire ou fictionnelle, comme si uneinquiétude planait dans l’air du temps.Toujours beaucoup d’images, troppeut-être, comme en résonanceavec le déversement permanent surle net dont se nourrissent les nou-velles tendances. Retour en zigzagset lacunaires sur quelques chosesvues, à revoir certainement.

Yes !Invitation de Valentin Desjardinschez Kiki Tonnerre : Je vous dé-pose ? en deux séries. Ses voituresvoilées vous amènent dans les hallsimprobables du Caire. Au Magasin de Jouets : dans sesSleep Elevation Maia Flore flotte sus-pendue à ses auto-fictions aériennes. Mise en espace théâtralisée jouis-sive et collective de Tendance Flouemalgré des sujets lourds de sens ;malheureusement reléguée au boutdes ateliers SNCF.Le Coureur à La Vitrine : on a cher-ché ici à retravailler les espaces enfonction d’une narration fabulée enduo par Gilles Gerbaudet Raphaël Chipaultavec de grands tiragesde chez Voies Off, réa-lisés en fonction decette reconfiguration.Pour finalement dansun si petit lieu se perdrecomme dans une ga-lerie des glaces ! La Valise mexicaine esten fait ibérique avec sestémoignages historiquespoignants sur la bruta-lité franquiste mais lamise en espace au MdAA est frus-trante (lumière, accès aux planchescontact) ; nota : pas un cliché sur ladestruction du village de Belchite parles Républicains. Les trois insensés(Robert Capa, Gerda Taro, DavidSeymour) n’étaient probablementpas sur le champ des opérations pource Guernica à l’envers.La programmation mexicaine sau-vée de l’annulation de l’année duMexique fait le grand écart de Da-

niela Rossell à Maya Goded et Dul-ce Pinzon : que sont les super hérosanonymes devenus, parvenus, dé-chus, quidam de la rue ? Des regardsde femmes soulignent que tout n’estpas «dulce» en Amérique. Plus éthé-ré, Fernando Montiel Klint explorel’acte de foi, individuel et inquiétant.Douglas Gordon : du bon usage desmiroirs avec Cy Twombly, en ré-flexion. La javel peut aussi révélerl’intériorité. Voir aussi l’expo de Cy,décédé le 5 juillet, à Lambert enAvignon (ci-contre).Eric Lusito : After the Wall Traces of

the Soviet Empire rend compte d’u-topies déchues. À quand une élégiepour Cuba ?

Hum…Voies Off : au premier regard pas tota-lement emballé par La Bête Aveuglede Michel Le Belhomme. Mais faireconfiance dans les choix d’Emma-nuel Loi, et se promettre d’effectuerun tour supplémentaire ne sera pasinutile.

Monsieur Marker à L’Archevêché :jeté dessus dès le début et puis… undemi-siècle d’images tout de même!De Koreans (1957) à Passengers(2008-2010), toujours un certain trouble. Wang Qingsong : le making-off estquasi indispensable pour apprécierau mieux ce néo-péplum de 42 mè-tres de long.

Yes or hum ?From here on (à partir de mainte-nant) à L’Atelier de mécanique : desquestions fondamentales sur lesnouvelles pratiques et usages pho-

tographiques liés au numérique et àInternet ; la mise en espace des 36artistes est un peu compliquée maistrès contemporaine. Le Manifesten’en est pas vraiment un mais unetendance floue à propos du net.Selon le Robert, manifeste : «exposé

théorique lançant un mouvementlittéraire». Sacré Robert, il a oubliéartistique ! Mais ces geeks du netimage qu’ont-ils à déclarer ? Bon,ben… Frank Schallmaier expose unmur de bites… le net surf rendvisiblement heureux. Comme on peut télécharger à l’envisur Internet, Penelope Umbrico n’apas trouvé d’autres solutions que decompiler des images d’écrans enpanne. «Tout ce dont nous avonsbesoin, c’est d’un œil, un cerveau,un appareil photo, un téléphone, unordinateur, un scanner, un point devue» dit le Manifeste. Et la capacitéde mettre tout cela en formes  ?L’accumulation de procédés - surfer,télécharger, copier-coller, scanner,imprimer - n’est assurément passuffisante. À l’instar de la musique,il ne s’agit pas de produire du maté-riau avec de nouvelles technologies.Encore faut-il composer, et perti-nemment. L’aventure photographique continue.CLAUDE LORIN

Rencontres Arles Photographiejusqu’au 18 septembrewww.rencontres-arles.comwww.voies-off.com

Zigzarles

Fernando Montiel-Klint, de la se�rie Actes de Foi, 2009 (Rencontres d'Arles) © F.Montiel-Klint

dans La Vitrine, Le Coureur de Gilles Gerbaud et Raphae�lle Chipault (Voies Off galerie Franc�oise Paviot) © Zibeline

Hall entre�e verte, invite� par Kiki Tonnerre, Valentin Desjardins, de la se�rieHalls du Caire, 2010 © V. Desjardins

MARSEILLE |AVIGNON

Après le succès de l’exposition Blooming en 2007,Cy Twombly avait souhaité renouveler son parte-nariat avec la Collection Lambert en proposantd’en être l’artiste invité. Mais cette fois en tant quephotographe, et commissaire d’exposition asso-cié. «Lors d’une rencontre l’an passé, Cy n’arrêtaitpas de me dire, exalté «Avignone, Avignone, I wantto be a DJ». J’ai mis un moment à comprendre lamétaphore du mixage  : il me proposait toutsimplement d’être le commissaire d’exposition !»explique Éric Mézil, directeur du musée. L’expo-sition rassemble autour de 120 photographiesinédites en France du peintre américain, d’autresgrands noms de l’histoire de l’art du XIXe et XXe dansun montage passionnant : Auguste Rodin, PierreBonnard, Constantin Brancusi, Jacques-HenriLartigue, Hiroshi Sugimoto, Diane Arbus, SolLeWitt, Ed Ruscha, Cindy Sherman, Sally Mann…Cette incursion, discrète, littéraire, poétique, trèsjustement Proustienne, dans l’intimité du travaild’artistes pour la plupart non photographes, invitecomme son titre le laisse entendre, à une décom-pression savoureuse. Cy Tombly avait confié sa«dream list» d’invités à Éric Mezil, occasion d’«unevraie chasse au trésor, jusqu’aux exigences deplanter des bananiers dans le jardin». Leur

laissant la première place l’artiste américain de83 ans - décédé le 5 juillet à Rome - offre un auto-portrait suggéré et se découvre en fin de parcoursau rez-de-chaussée avec 60 années de photo-graphies. Des polaroïds de ses œuvres, oniriqueset abstraits. Des natures mortes, son thème deprédilection. Des autoportraits (flous maiscohérents, l’artiste refusant toute photographieou interview depuis 50 ans), des intérieurs, sonatelier, des clichés très Viscontiens de la plage deMiramare, devant chez lui. Des choix qui donnentune lecture nouvelle à son œuvre foisonnantedans un temps dilaté entre 1951 et 2011. Un voletde l’exposition est également visible aux RAP (voirp52) avec une projection de 24 Hours Psycho deDouglas Gordon et la présentation d’une série destars brûlées (à l’eau de javel) de Miquel Barcelo.DELPHINE MICHELANGELI

Le temps retrouvé, Cy Twombly photographe et artistes invitésjusqu’au 30 octobreCollection Lambert, Avignon04 90 16 56 20www.collectionlambert.com

Le temps de Proust, en clichés

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La présence au [MAC] de la Col-lection Neuflize Vie s’inscrit dans unrapprochement entre art et entre-prise, et une incursion dans lemonde discret de la finance  : unmouvement initié au [MAC] lors del’exposition de la collection de l’édi-teur de mobilier Steiner puis de laFondation HSBC pour la photogra-phie. Neuflize Vie, filiale d’assurancevie de la Banque Neuflize, exposeune petite partie de sa vaste collec-tion d’entreprise, qui n’est «ni unecollection privée ni une collection demusée. Les œuvres sont exposéestoute l’année dans les locaux del’entreprise» précise Aline Pujo,conservateur. La collection créée en1997 dispose pour l’heure de 714numéros d’inventaire et d’un budgetannuel d’acquisition de 80 000 ¤.Une dotation modeste qui amène lecomité artistique à dénicher parfoisdes artistes encore en cours d’é-mergence, et à opérer une véritableréflexion sur un corpus à faire évo-luer autour de la thématique choisie :la mémoire. Vaste sujet photogra-phique, même si une constante sedégage: le portrait. De préférenceceux qui interrogent. Au fil des six travées du [MAC] sixthématiques problématisent intelli-

gemment un parcours pavé d’inatt-endu, et de révélations : la collectionne cède pas à la facilité et proposedes œuvres fortes, et des regardsmajoritairement féminins. De laphotographie à la vidéo, de l’argen-

tique au numérique et au collage, lamultiplicité des techniques et desthématiques couvre un champ trèsvaste, faisant sienne l’oppositionintroduite par Bergson entre«mémoire-souvenir» et «mémoire-con-

traction». Deux modes d’appréhensiondu réel… On y croise des portraitsemblématiques (Désirée Dolron,Xteriors II, «la Joconde des tempsmodernes»), des autoportraits auxmultiples facettes (Sophie Calle dansle texte, Annette Messager ca-mouflée par un filet, Tracey Moffattet ses souvenirs d’enfance), desfigures et séries (les sosies deMichael Jackson de Valérie Belin),des performances prises au vif(Marina Abramovic). Ce sont encoredes vidéos où se croisent identité etsociété, et l’univers urbain habitépar l’homme (Dionisio Gonzalez,militant des favelas, les utopiesarchitecturales de Jordi Colomer).Dans toutes ces images, profon-dément engagées, l’homme est lepoint de mire  : l’école humanistefrançaise a composé, au départ, lenoyau dur de la collection…M.G.-G.

L’énigme du portrait, Œuvres de la collection Neuflize Viejusqu’au 18 septembreMusée d’art contemporain,Marseille04 91 25 01 07www.marseille.fr

Une banque d’images

Yasumasa Morimura, Doublonnage (Portrait B), 1988. Tirage couleur, e�d. de 10, 130 x 130 cm

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ARTS VISUELS AIX | FESTIVAL APART60

Comme leurs aînés, les artistescontemporains font de leur voyage àRome une étape fondatrice et for-matrice. Récemment RaphaëllePaupert-Borne et Caroline Ducha-telet ont résidé à la Villa Médicis,cette prestigieuse institution fondéepar Colbert en 1666 pour servir l’am-bition politique de Louis XIV. Unparcours initiatique et une traditionque l’exposition transhistorique etpluri-disciplinaire Voyage à Romeéclaire à la lumière des artistes et desœuvres.L’introduction, conçue comme uneantichambre au voyage, présente uncorpus d’œuvres représentatif duconcours préliminaire au séjour àl’Académie de France à Rome, etson corollaire, le Prix de Rome tantconvoité par Pinta, Réattu, Dandré-Bardon, Papety ou Fragonard. Moinsdidactique, la suite de l’expositionmet en regard patrimoine et créationet offre d’habiles rapprochements,car c’est toujours «le même cielromain qui chante» commente lacommissaire Véronique Baton. Lespeintures, les dessins et les vidéosattestent de l’incroyable attrait des

paysages et des vues urbaines surces artistes fascinés par la rencontredes mondes classique, renaissanceet baroque. L’ensemble Made inRoma de Raphaëlle Paupert-Borneraconte en quelques toiles la douceurenveloppante des paysages tout au-

tant que les peintures de Bidault oules lavis de Natoire ; la vidéo Éolien-ne de Caroline Duchatelet déclineimperceptiblement les métamor-phoses des cieux tout autant que lesPins maritimes sur la colline / Nua-ges et ciel sur le mont Mario de

François-Marius Granet ; les photo-graphies numériques de Emilie diNunzio Joly captent la résistancefière de l’architecture antique toutautant qu’une vue intérieure duColisée de Jean-Antoine Constantin.Chroniques de la vie à la Villa Mé-dicis, du quotidien du «petit peuplede Rome», de la dolce vita… lespréoccupations rebondissent desiècle en siècle ! En témoigne Vin-cent Bioulès qui ouvre l’expositionavec sa toile inédite Hommage àConstantin, ponctue cet irrésistiblevoyage de nombreux dessins, etavoue se sentir heureux comme unpape dans la ville éternelle…M.G.-G.

Voyage à Rome, Les artistes, la Provence et l’Académie deFrance, du XVIIIe siècle à nos jours(catalogue édité parmare & martin, 22 euros)jusqu’au 18 septembreGalerie d’art du Conseil général,Aix-en-Provence04 42 93 03 67www.culture-13.fr

Le Grand voyage

Vincent Bioules, Hom

mage à� C

onstantin, 2011

Cher visiteur boulimique, à l’instar del’année précédente, il faudra t’ar-mer du copieux programme2 et d’unsens infaillible d’organisateur pourne pas ruiner ton capital temps tantles propositions sont nombreuses etréparties sur le territoire des Alpilleset ses alentours. Les inaugurations,rencontres, visites guidées et per-formances en présence des artisteset des partenaires accueillants sesuccèdent donc jusqu’au 17 août. ÀMaussane où Etienne Bossut a dé-posé/renversé son emblématiquecarcasse/ruine de Porsche rouge,splendeur déchue, et où l’infatigableEmmanuel Régent a déjà dérouléson Roulé-Boulé en film aluminiumqui doit trouver sa chute à Tarasconsous une forme de très grosse bou-boule coruscante évoquant les jeuxde neige enfantins. Au mas de la

Pyramide Roseline Delacour a laredoutable charge de succéder àMiguel Chevalier (œuvre désormaispérenne au domaine de Pierredon)avec une céleste installation vidéo. Al’école de la République de Saint-Rémy bon nombre des artistes del’édition 2010 : la jeune création desécoles d’art d’Avignon et Marseilles’expose, Maître Cornette de Saint-Cyr frappe la vente aux enchères. Ilfaut aussi oser passer le seuil desateliers des créateurs installés surce territoire croqué sous d’autresesthétiques par Albert Gleizes : FrankPoupel, Emmanuelle Winsberg,Marc Nucera, Nadine Fourré... Àl’heure où se découvrent ces lignesles ébats du débat Onfray/Ben/Fro-manger modérés par l’écrivain«agitateur multi casquettes» ArielKyrou se seront dispersés. Il y enaura d’autres3 : Claudio Parmig-giani est sur les rails pour unerésidence en vue du projet 2012. Etpour le moment c’est toujoursgratuit.C.L.

Festival APARTin alpillis locijusqu’au 17 aoûtLes Alpilleswww.festival-apart.com

1 Didier Tallagrand à l’abbaye de Pierredon2 voir le numéro spécial d’Art Absolument3 lire p52/53 J.M. Othoniel, Gérard Fromanger

In alpillis loci1

Coup d’envoi pour la seconde édition du festival d’art contem-porain APART. Il y en aurapour tout le monde, et on en redemande

Pablo Garcia, He�te�rotopie, 2011, Maussane © C.Lorin/Zibeline

© De l’espace et du temps, Roseline Delacourt

ARTS VISUELS 61

Au domaine du Château d’Avignon l’animal rôde,se terre ou parade au gré d’un parcours «où laréciprocité entre les œuvres et les lieux permetune lecture enrichie des unes et des autres». Saufqu’à trop vouloir dialoguer avec le mobilier et ledécor, la scénographie «écrase» parfois les œuvreset le cordon rouge de sécurité impose une dis-tance castratrice : impossible d’admirer le travaild’orfèvre de Joanna Vasconcelos, ses animaux enfaïence habillés d’une résille de crochet de coton ;impossible de contourner le précieux Banquet encéramique de Coline Rosoux où siègent des bêtesaux faciès hilares ; impossible encore de distinguerclairement l’ensemble des pièces de Clara Per-reault disséminées dans le salon en parfaiterésonance avec Les Fables de la Fontaine (tapisen spirales de cartouches, animaux naturalisésprisonniers de globes en verre…).La mise en scène, théâtrale et inventive, ne ris-que-t-elle pas de reléguer au second plan lesinterrogations des 34 artistes conviés à la parade ?Sur les relations de prédation et de sacrifice,comme l’installation monumentale Carcasses,«provocatoire» selon Anne Ferrer qui inscrit ses12 corps-sculptures dans la tradition des écor-chés, ou Le mouton de Maria de Maria LouraEstevao qui éprouve le corps animal jusqu’àmouler les os d’un mouton en pâte d’amande, lesplaçant en offrande au centre d’un dispositif d’ima-ges animées. Sur la sentimentalité animale :délicat tango du lièvre dans El jardin del amor,vidéoprojection et dessin au souffre de DominiqueCastell, bel et bien échappé d’un jardin au feuil-lage touffu. Sur la part animale de l’homme :érotique chez Katia Bourdarel, régressive et iro-nique chez Dominique Angel, surnaturelle chezJulie Faure-Brac qui transforme l’homme enporteur de l’esprit de la baleine échouée dans unimprobable et fragile «accouplement».Le «spectacle» est réussi, et la fable animalièrecontée par les artistes - surtout des femmes - esttour à tour troublante, violente, sensuelle, provo-catrice, effrayante.

Le recueillement des mouchesL’abbaye de Montmajour accueille un secondvolet de l’évènement national Monuments et Ani-maux. Dans le cadre des Rencontres de laPhotographie d’Arles associées pour l’occasion,nous retrouvons un bel ensemble des projetsgraphiques de Michel Bouvet (auteur des visuelsdes rencontres visibles aussi à Arles) tandis queNicolas Guibert expose une série en noir et blanctraquant la présence insolite d’animaux dans lesespaces patrimoniaux, malheureusement un peucoincée entre les murs bénédictins. À quelquespas, l’œuvre la plus marquante consiste en unmonumental fourreau/colonne/sablier de tulle desoie blanche translucide, torsadé en son milieus’élevant au plus haut de la croisée du transept.

Erik Nussbicker a installé cette structure habita-ble et éphémère en résonance avec l’ancien cultedes défunts pratiqué par les moines de l’abbaye.Le Temps des Mouches distille une intense etparadoxalement sereine dialectique du vivant etde la mort. Les matériaux pauvres qui le consti-tuent relèvent de cette double symbolique. Cornesde bœuf, tulle de soie, larves de mouche, miel,feutre sont issus du vivant. Une fois le bovin mortses cornes servent de couveuse aux larves demouches, le miel de nourriture, la soie est issuede l’élevage de vers du bombyx, le feutre de lalaine d’un autre animal, les mouches se repro-duisent et meurent. Objet de contemplation il sertpar moments à l’artiste de chambre de médi-tation. Objet esthétique, Le Temps des Mouchesest-il accessible à l’expérience du visiteur ? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI ET CLAUDE LORIN

Le temps des mouches Erik NussbickerAnimonumentsNicolas GuilbertLes affiches culturellesMichel Bouvetjusqu’au 18 septembreAbbaye de Montmajour, Arleswww.montmajour.monuments-nationaux.fr

Si loin, si proche… bêtes et hommes au château d’Avignonjusqu’au 31 octobreDomaine du château d’Avignon, Les Saintes-Maries-de-la-Mer04 90 97 58 78www.culture-13.fr/domaine-du-chateau-d-avignon + bloc montmajour et rappel expo animos ailleurs

À voirjusqu’au 16 octobreLes ruches de saint Bernard, installation de JohanCreten à l’abbaye du Thoronet (83) dans le cadrede l’opération nationale Monuments et animauxmise en œuvre par le Centre de monumentsnationaux.

www.monuments-nationaux.fr

Convoité, chassé, sacrifié, déifié, consommé, exploité, dépecé, choyé, étudié,asservi, fantasmé : l’animal est un «autre» troublant !

L’animal, miroir de l’homme…

Erik Nussbicker, Le temps des mouches, soie, feutre, rotin, cornes de boeuf, me�tal, miel, larves de mouches,

installation pour l'abbaye de Montmajour, 2011 © E.Nussbicker

Julie Faure-Brac, Le porteur de l'esprit de la baleine échouée, 2009 © Lucie Faure-Brac

Coline Rosoux, Le banquet, 2008, collection de l'artiste © X-D.R

CHÂTEAU D’AVIGNON |MONTMAJOUR

62 PATRIMOINE ARLES ANTIQUE | LE BUISSON ARDENT62

Le triptyque du Buisson ardent (1475) est déso-mais visible à la Cathédrale Saint Sauveur (Aix).Il vient d’être magnifiquement restauré par l’État(pour 142 000 € dont 30 000 € de mécénat du Ro-tary Club) et placé dans la Chapelle Saint Lazare, ellemême mise hors d’eau pour un coût de 700 000 €. Le travail de restauration et d’exposition est remar-quable : l’éclairage est sans reflets, progressif, adaptépar des capteurs à la lumière naturelle ; la restitu-tion du retable est resplendissante, parfaitementfidèle, minimale dans ses retouches… allégeantvisiblement les couches de vernis, retrouvant ainsile glacis originel, les ors des boiseries.Quant à l’œuvre elle regorge de symboles. Fermés,peints en grisaille, les volets représentent une An-nonciation qui semble de pierre, surmontée d’unsuperficiel figurant le Père bénissant entouré d’an-ges. Puis quand le retable s’ouvre, le triptyque sedécouvre : au centre une allégorie du Salut - unange désigne à Moïse le buisson ardent, où trônentla vierge et son fils - et sur les deux panneaux le«bon» Roi René et son épouse, présentés par leursprotecteurs célestes. Les panneaux, dans chacun

de leurs détails, se lisent comme des représen-tations symboliques du pouvoir, de la Provence, dela révélation chrétienne qui renouvelle la révélationbiblique. Le style de Nicolas Froment, dans sonusage des reflets et de la profondeur, est tout entierau service de son message.Cette restauration de la chapelle et du retablecomplète l’intérêt patrimonial de la CathédraleSaint Sauveur, édifiée au dessus du forum antique,qui contient aujourd’hui des œuvres religieusesmajeures, un cloître et un baptistère (VIe siècle)absolument exceptionnels. Un ensemble d’art reli-gieux restauré par l’État laïque, et parfaitementaccessible au visiteur de tout sexe sans qu’il aitbesoin de se couvrir la tête, comme à Istanbul, oules épaules, comme à Rome… Même si les impéra-tifs de conservation imposeront des périodes defermeture au retable : liturgiques, puisqu’il serafermé avant pâques et à la pentecôte, mais aussitouristiques, puisqu’il sera ouvert tout l’été, durantles journées du patrimoine, et pendant la nativité !AGNÈS FRESCHEL

Pour l’amour des symboles

Triptyque du Buisson ardent, cathe�drale Saint Sauveur, Aix-en-Provence © Jean Bernard

À bord de la Mireille, charmant pointu bleu à voilelatine affrété par l’association Siloe, vous glissezsur les eaux opaques du Rhône. L’histoire d’Arless’écrit dans les vestiges encore dressés de pierresqui émergent et pourtant l’essentiel, invisible, dortsous les flots. Les épaves, les poubelles de l’anti-quité attendent patiemment d’être découvertes. Après le médiatique et magnifique buste de Césarun autre élément sort de l’ombre : enseveli sous15m3 de déchets, mélange d’amphores, de sédimentset autres éléments du «dépotoir portuaire» antique(il y aurait probablement plus de 2000 amphores etquelque 10 000 céramiques !), le chaland gallo-romainet sa cargaison de pierres de Beaucaire, destinéesvraisemblablement à la construction de villas enCamargue, livre aux archéologues doublés de plon-geurs professionnels, ses secrets. Fouille délicate ! de nombreuses difficultés ralen-tissent le travail : le courant du fleuve, la météo,une visibilité très réduite dans l’eau : parfois l’onn’y voit pas plus loin que 40 cm ! Quelques mys-

tères aussi : pourquoi ce bateau neuf a-t-il sombré,brusquement, puisque l’on y a retrouvé le posted’équipage et son contenu, un dolium cassé pourservir de brasero, des outils, de la vaisselle. L’ins-cription épigraphique C.L.POSTV correspond-elle àson propriétaire, son commanditaire ?Différents spécialistes s’attachent à décrypter lesdonnées de l’épave, dendrochronologistes, spécia-listes d’architecture navale, de céramiques… Lechantier est énorme : 12m du bateau (la poupe etles 6 premiers mètres d’un caisson central compre-nant la cargaison de pierres) ont été fouillés, sur les30m70 de la totalité de la barge. Le projet prévoitensuite le découpage du bateau en dix tronçonsqui seront extraits du fleuve, opération périlleusedont la première s’effectuera vers la mi-juillet et ladernière en novembre. Ensuite chaque morceausera répertorié, analysé puis fragmenté en troisparties qui seront expédiées à Grenoble, afin d’êtretraitées : trempage dans la résine, pendant 8 à 10mois, puis lyophilisation, afin d’assurer la conser-

vation de l’ensemble. Chaque étape réclame précisionet prudence, le bois maintenu dans l’eau depuis2000 ans (il date du 1er s.) est extrêmement fragile. Une extension du Musée bleu, une salle de 35 m delong, est prévue pour accueillir le navire recons-titué ainsi que les informations qui permettront dele resituer dans le contexte commercial de l’Arelateantique. Une remarquable exposition déjà apportede nombreux éclairages, autour d’objets, depanneaux explicatifs, d’un petit film qui retrace lesprojets archéologiques. Le catalogue de l’exposition,très complet ajoute à la passion de la découverte. À lire dans l’Hortus, d’inspiration antique. Pasd’archéologie expérimentale ici, mais un ensemblesuperbe de jeux, d’animations, accessibles auxpetits et aux grands : une manière de découvrirl’antiquité sur un mode ludique et intéressant. MARYVONNE COLOMBANI

Musée Départemental de l’Arles Antiquewww.arles-antique.cg13.fr

Histoire sous les eaux

Hypothe�se de restitution 3D © M.Cazaux/ F. Conil / D. Schiano / Supinfocom-Arles / MDAA / 2009Hortus, jardin d'inspiration romaine © Marc Ferraud

63PATRIMOINELA CELLE | L’OCRE

Le Lubéron était autrefois autre chose qu’un refuge devedettes du show-biz en mal de vertes tendresses. Ce «paysétait beau, d’une beauté sauvage, et l’homme, le cheval, etle bois et l’outil vivaient en harmonie jusqu’à ce grand sac-cage, personne ne peut plus simplement vivre ici…» chantaitFerrat.

Ocre temps, ocre mœursApt, Rustrel, Roussillon… des noms qui fleurent bon laProvence industrieuse, artisanale et agricole. Le pays oùtravailler de ses mains et bien vivre était encore possibledisparaît, comme l’ombre de la nostalgie, sous l’éclat despoursuites de l’immobilier spectaculaire et du tourisme deluxe. Incomparable beauté où le pastel des strates dekaolinite (argile pure) saignée d’hématite (ocre rouge),pressée de limonite (ocre jaune) et de la veine poétiquede goethite (ocre brune des peintures rupestres de Las-caux) berce le vert foncé des vieilles pommeraies et decerisaies à l’abandon. Mines à ciel ouvert, sur lesquelles,depuis des générations, des travailleurs mi-ouvriers mi-paysans ont extrait, traité et expédié dans le monde entierles couleurs chatoyantes de la Provence minérale etlaborieuse. Petites villes ou plutôt gros bourgs où la véritédes bâtisses superbes des anciennes manufactures provin-ciales de la fin du XVIIIe siècle respire la traditiongallo-romaine. De magnifiques architectures sontaccoutrées de la fausse authenticité d’un urbanisme depacotille contemporain, toutes pavées de mauvaisesintentions piétonnières et factices.

Né du (rous)sillonL’ocre est un mélange de minéraux composé de kaolinite(argile ou silicate d’aluminium hydraté) et de sable (quartzou oxyde de silicium) dans laquelle sont enfermés desgrains très fins de différents pigments qui sont des oxydesde fer (hématite, limonite…) à différents degrés d’oxy-

dation. (On demande instamment au Zibelrésistant à lachimie d’excuser ce chapelet de gros mots chiantifiques).Il est dit que c’est le Roussillonnais Jean-Étienne Astierqui eut l’idée, à la fin du XVIIIe siècle, d’extraire les finesparticules d’ocre des gisements importants de sa région enle faisant passer, par lavage à l’eau des sables «ocreux»,dans des bassins de décantation : c’est le procédé delévigation. Il met au point la cuisson des ocres qui per-met d’en garder et en modifier les propriétés colorantes.L’ocre, du grec ancien �khra, utilisé comme «pigment»depuis la Préhistoire a, dans beaucoup de civilisationsprimitives, une valeur pratique et symbolique forte, parexemple la médecine traditionnelle et le maquillage rituel.Son utilisation recule : depuis le début du XXe siècle il estsubstitué par des colorants de synthèse moins coûteux. Ilreste cependant objet de fascination dans nos civilisationsécolo-centrées pour son aspect «naturel», sa non-toxicité,ses applications en médecine douce (smectite), et, cultu-rellement, pour sa longévité dans un retour à la maçonnerie,décoration et artisanats traditionnels.

Ocreux de nos villesC’est en 1992 que le dernier «ocrier» du site du Coloradoprovençal prend sa retraite de l’exploitation des ocres deRustrel. Cet endroit fabuleux est dès lors relégué au rangde site «semi-naturel». Appellation qui repose sur unedéfinition philosophique de «Nature», en tant que réalitéexempte de la pratique humaine. Le grand N de Nature estopposé à la grande haine du travail humain, dont les sitessont vécus désormais comme une verrue du «paysage». C’estla grande lévigation du «centre urbain» d’Apt «rendu» auxpiétons. Les industries traditionnelles rejetées dans lesZAC, les ZI, les ZUP des élèves de ZEP tandis que le Zozo-touristo se pavane sur le pavé des venelles manufacturièresauthentifiées.C’est dans ce centre hyst…orique que vous trouverez lamémoire de ce que fut le travail des femmes et des hom-mes du cru. Alors, à défaut de continuer à vivre l’épanouissement dulabeur, va, cher lecteur, en ces jours d’été, frotter ta zibel-nostalgie à ce qui fut un travail, une culture, une science,une esthétique. Cette région ne peut plus offrir que lespectacle muséographique de ce passé de vies. L’ocre estremplacé par des colorants de synthèse importés d’Inde,les fruits à confire importés des départements limitrophesou de «différents pays de la CEE», mais de magnifiques…Conservatoires des Traditions Locales s’épanouissent aucreux (ocres ?) des cités redessinées.YVES BERCHADSKY

Musée de l’aventure industrielleMusée d’Histoire et d’Archéologie du Pays d’AptApt04 90 74 95 30www.ot-apt.fr

Conservatoire des OcresRoussillon en Provence04 90 05 66 69www.okhra.com

Ocre’n’rôleAptitude

LibertéenferméeL’Abbaye de la Celle, qui connaît unprogramme salutaire de rénovation,fait également vivre les lieux en ac-cueillant des conférences. Ainsi le 26juin Paulette L’Hermitte-Leclercq,historienne spécialiste du Moyen Age,se jouait des paradoxes en intitulantsa conférence Le monastère commeexpression de la liberté pour la femmeau Moyen Age. Contextualisant lesnotions elle jetait un éclairage sur-prenant… Peut-on dire qu’un moine en pronon-çant ses vœux exerce, au Moyen Age,sa liberté ? La conférencière expose,à la naissance du monachisme, lesystème juridico-social fondé surl’inégalité - un esclave n’a pas le droitde rentrer au monastère, car de cefait, il volerait son maître ! - avec desclausules comme celle de Saint-Jean,«La vérité vous délivrera»… La liber-té, définie non au niveau social maismétaphysique, est transcendance. Cette délivrance métaphysique (parl’enfermement !) rencontre de plus,pour les femmes, l’obsession de lavirginité, illustrée par la parabole dusemeur de Saint-Jérôme, «si une vier-ge rentre au monastère, elle récoltera100 grains pour un»… Mais vont-elles au monastère pour être libres,alors qu’elles renoncent au monde ?Éternelle mineure en droit, la femmeentre au monastère par la volontépaternelle plus souvent que par réellevocation, mais elle échappe ainsi aumariage, viol légal, et aux accouche-ments, souvent mortels. Évoquer les couvents éclaire la visionque l’église a de la femme, sa condi-tion insupportable pour notre XXIesiècle… éclairé ? Vigilance s’impose !M.C.

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Les Ateliers de l’EuroMé Fédérer des artistes, des acteurs culturels et des entreprises autour d’un projet est le fondement des Ateliers de l’EuroMéditerranéemis en place par Marseille Provence 2013. Zibeline poursuit son enquête(voir Zib 42) à travers trois ateliers : l’un porté par l’artiste-plasticienneAnne-Valérie Gasc, les deux autres par le Pays d’Aubagne et de l’Étoile.Des projets exemplaires du soutien apporté par MP13 à la créationcontemporaine.

Conçue comme un outil de travail et de production,GASC DEMOLITION est l’entreprise artistiqued’ingénierie en démolition de bâtiments et ouvragesd’art d’Anne-Valérie Gasc. L’artiste, qui travaille avecl’entreprise GINGER-CEBTP DÉMOLITION depuis 2007 et développe son laboratoire artistique Crash Boxdepuis 2009, ne pouvait passer à côté du programmecar «la manière dont MP13 a structuré les AEM est en résonance totale avec ma manière de travaillerexplique-t-elle. Du coup mon projet, dansson montage même, était cohérent». Crash Box trouve son origine dans les démolitionsspectacles. Anne-Valérie Gasc veut cacher à la vue de l’observateur l’édifice démoli grâce à un dispositifsemblable à une salle de cinéma ou à une chambrephotographique. Une «boîte noire» qui assure une confidentialité atypique : le regard est déplacé de l’extérieur à l’intérieur de la démolition grâce à une caméra ultra rapide, protégée par une boitemétallique qui chute en même temps que le bâtiment.Ce laboratoire se développe sur 3 ans selon

un protocole d’un chantier par an nécessitant la mise en place d’équipes, la préparation des dispositifsin situ : emplacement des capteurs, des caméras… Il revêt des formes artistiques multiples : un film, et un site internet qui diffuse en direct et au fur et à mesureles essais, les vidéos expérimentales : «la plateforme estprimordiale car garante du protocole et du projet». Cet AEM s’inscrit dans une démarche plus large del’artiste sur la disparition éphémère comme avènementde l’art, «le moment où on peut imaginer le plus rienposé comme geste artistique : qu’est-ce qui fait art à sadisparition ?…». Un atelier qui offre le temps nécessaireà la maturation d’un projet dont l’artiste souligne la singularité : «on est sur une construction expérimen-tale : on fait le pari que c’est dans le rien à voir que se loge la possibilité de l’événement artistique commeforme d’œuvre». «C’est un beau projet, conclut-elle,car il s’inscrit dans une utopie conceptuelle et économique… c’est tout le paradoxe des AEM,pragmatiques, que de toucher à l’irréel avec la Crash Box».

CRASH BOX, A GASC DEMOLITION PROJECT

Repères2010

27 novembre, premièrevisite sur le chantier de

démolition par foudroyageintégral des deux tours

Gauguin à Limoges, suiviele 28 novembre 2010 de ladémolition des Blocs 47 et

49 de la rue Pissaro.L’équipe est en phase

d’observation etd’apprentissage : analyse

du projet de démolition,découverte du chantier,

rencontre des acteursd’une démolition à

l’explosif, identification descontraintes techniques,

élaboration deshypothèses d’intervention

vidéo en vue de laproduction d’un court-

métrage2011

24 novembre à Saint-Étienne : chantier qui verra

la modélisation 3D de laCrash Box, l’exploitationdes images, la mise au

point des outils et lavalidation de l’équipe

2012choix d’un nouveau

chantier en fonction de lapremière expérience et

finalisation de laproposition artistique

2013point d’orgue avec unchantier sur le territoire

Paca et la réalisation d’uncourt-métrage : le projet se

dégage du «laboratoire»pour réfléchir notamment

aux modalitésd’exposition…

Partenaires création produite dans le

cadre des AEM parMarseille Provence 2013,

GINGER-CEBTPDémolition, GASC

DEMOLITION, Sextant etplus (producteur délégué),

CNC (aide à la maquetteDICREAM)

www.crash-box.fr

Logée à l’étage supérieurdu bâtiment miné,probablement dans la cage d’ascenseur ou dans l’escalier, la Crash Box subsistera à la surface du tas de décombres une fois la démolition accomplie : la chute n’est pas l’objetdu film mais place le regard au cœur de l’architecture.

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© Gasc De�molition, Crash Box (é� tude de la crash box), Marseille, 2011. Image Fabien Rabat

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Alexandre Perigot et Wael Shawky en résidence À partir du livre d’Amin Maalouf, Les croisades vues

par les Arabes (1986), l’artiste égyptien Wael Shawkyréalise une série vidéo, Cabaret Crusades, dont les personnages sont des marionnettes. Quatre épisodes relateront chronologiquementle temps des croisades : le premier, The Horror ShowFile réalisé en 2010 à la Fondation Pistoletto, met en scène 200 marionnettes issues de la célèbreCollection Lupi de Turin ; le second, tourné prochai-nement à Aubagne, intègrera des santons grâce à la complicité des entreprises aubagnaises. Le film pourrait être présenté en 2012 à Aubagne, avant la Documenta de Kassel, puis les célébrations de Marseille Provence 2013.Partenaires : École de la céramique d’Aubagne,Entreprises de la terre du pays d’Aubagne et de l’étoile,Ateliers Thérèse Neveu, Université de Provence/SATIS,Centre national de la marionnette Charleville-Mézières.Production déléguée : ALCIME.

VERS uN TERRITOIRE DE CRÉATION12 communes et 100 000 habitants : le Pays d’Aubagne et de l’Étoile a la doubleparticularité d’être une agglomération à taille humaine et un territoire en construction. Il mène une véritablepolitique d’appropriation de l’espace public par sonréseau de transports collectifs, ses manifestationsculturelles, et son ouverture au monde : dès 2004 à Barcelone il adoptait «L’Agenda 21 de la culture»…Son implication dans Marseille Provence 2013 a étéimmédiate, rappelle Rudy Vigier, coordonnateur MP13 pour la communauté d’agglomération : «C’est l’opportunité de renforcer le sentimentd’appartenance au territoire, de lier les communes entre elles, favoriser les collaborations tout en s’ouvrantaux autres territoires». Aussi MP13 a-t-il déclenché «un mouvement déterminant et porteur d’avenir» autour de thématiques comme l’eau et l’immigration,fédérant de nombreux projets (Nous serons tous d’icipar le service des bibliothèques et médiathèquespubliques) et permettant la constitution de groupescitoyens (rédaction du manifeste Vers l’an commun).

Certains projets créent des passerelles entre patrimoine et création Exposition Les Mondes céramiques au Centre d’art contemporain des Pénitents noirs (jusqu’au 18 septembre),

Exposition Picasso et la céramique méditerranéenneinscrite dans le programme «Le Grand Atelier du midi»(été 2013), Installation dans le quartier Défonsions du Centre Pompidou Mobile, dispositif conçu par PatrickBouchain, qui offre au public l’accès à une partie des collections du musée (à partir du 15 septembre),Résidence de création de Danièle Jacqui, directrice du Festival d’arts singuliers (fin 2012), en vue del’installation dans l’axe d’entrée de la ville du Colossald’art brut (12m de haut, 4000 pièces de céramique).Évènement qui coïncide avec l’ouverture d’une grandesalle de spectacles et la réalisation du tramway,Création d’un espace patrimonial dédié aux santons au sein des Ateliers Thérèse Neveu, Le(s) regard(s) de Pythéas, espace de transmissionfavorisant l’émergence de nouveaux talents(compositeurs/interprètes et scénaristes/réalisateurs).

D’autres relient le territoire TransHumance (au départ de Cuges-les-Pins) ; le GR2013 (préservation des espaces naturels) ;l’Huveaune (projet de festival sur l’Eau) ; Festival des randonnées (soirées poésie, contes, découverte du territoire) ; Quartiers créatifs (dans le cadre des Actions de participation citoyenne).

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Le pays d’Aubagne et de l’Étoile accompagne Alexandre Perigot pour sa reproduction au 1/12e

de La maison du Fada du Corbusier. La «sculpture» de 13 m de long, 5,60 m de haut et 4m de largesera réalisée en lien avec les entreprises Mota(refroidisseurs de bateaux), Arnoux (métallurgie) etGSM (ingénierie) dont le savoir-faire et la technicitésont réputés. La résidence se déroulera au 1er semestre 2012, précédée d’une étude de faisabilité. La maison du Fada sera présentéeaux aubagnais mi-2012 sur la zone des Paluds,puis dans le cadre des événements de MP13.Production déléguée : Sextant et plus.

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Wael Shawky, The Horror Show File, premier é�pisode de la sé�rie vidé�o Cabaret Crusades © Wael ShawkyAlexandre Perigot © X-D.R

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ADHÉRENTS

Théâtre du Chêne Noir (Avignon)5 invitations dans la limite des placesdisponiblesPour Si Siang Kimes de Gérard GélasJusqu’au 29 juilletAu-delà de ce quota, 10 places autarif réduit04 90 82 40 57

Compagnie Campo (Avignon)1 place offerte pour une achetéedans le cadre du Festival Offpour Le storie di italo au LoretteThéâtreJusqu’au 31 juilletRésas : [email protected]

Jazz à La Tour (La Tour d’Aigues)10 invitations par soirpour la soirée Eric Longsworth4tet/Daniel Humair 4tetle 12 août dès 18h30pour la soirée Guillaume SéguronTrio/Ursus Minorle 13 août dès 18h30pour la soirée Lionel GarcinDuo/Samuel Silvant 4tet/OrchestreNational de jazzle 14 août dès 16h3004 90 860 873

Festival de Martigues6 invitations par soirAu canal Saint Sébastien à 21h30pour le concert de Gilberto Gille 19 juilletpour Les étoiles du Ballet Royal du Cambodgele 21 juilletpour Martigues accueille l’Europe(concert de l’Orchestre des musiciens européens)le 22 juillet

pour México Misterioso (concert de Lila Downs et de l’Orchestre des 20 mariachis de Colima et de México)le 23 juilletpour ¡Viva México ! (Ballet Folklorico de la Universidad de Colima/Compania Nacional de Danza Folklorica de México)le 24 juilletpour Martigues accueille le monde(Provence/Républiqued’Altaï/Mexique/Togo/Ukraine)le 25 juillet04 42 42 12 01

La MinoterieTarif réduit pour toutes les représentations8€ au lieu de 12€04 91 90 07 94

Les Bancs Publics1 place offerte pour 1 place achetéepour tous les spectacles04 91 64 60 00

3bisf (Aix)Entrées et visites gratuites sur réservations04 42 16 17 75

L’institut culturel italien3 adhésions annuellesd’une valeur de 32 €, cette «carte adhérent»vous donnera accès à tous les services de l’Institut,médiathèque et programme culturel.Demande par mail :[email protected] au 04 91 48 51 94

La Pensée de Midivous offre3 exemplaires de Histoires d’un 20janvier,n° des 10 ans de la revuepar mail : [email protected]

Librairie Apostille (Marseille 6e)104 Cours Julien5% de réductionsur l’ensemble du magasin

Librairie Maupetit (Marseille 1er)La Canebière5% de réductionsur tous les livres

Librairie L’écailler (Marseille 1er)2 rue Barbaroux5% de réduction sur tous les livres

Le Greffier de Saint-Yves (Marseille 1er)librairie générale et juridique10 rue Venture5% de réduction sur tous les livres

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L’histoire de l’œil (Marseille 6e)25 rue Fontange5% de réductionsur tous les livres

Librairie Imbernon (Marseille 8e)spécialisée en architectureLa Cité Radieuse280 bd Michelet, 3e étage5% de réductionsur tous les livres

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Librairie Prado Paradis (Marseille 8e)19 avenue de mazargues5% de réductionsur tous les livres10% de réductionSur la papeterie

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Mensuel gratuit paraissant le deuxième mercredi du moisEdité à 30 000 exemplairesimprimés sur papier recyclé

Edité par Zibeline SARL76 avenue de la Panouse | n°1113009 MarseilleDépôt légal : janvier 2008

Directrice de publicationAgnès Freschel

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photo couvertureEnfant, Festival d’Avignon© Agnès Mellon

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Secrétaire de rédaction spectacles et magazineDominique Març[email protected] 23 00 65 42

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LivresFred [email protected] 82 84 88 94

Histoire et patrimoineRené [email protected]

Musique et disquesJacques [email protected] 20 42 40 57

Frédéric [email protected] 03 99 40 07

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CinémaAnnie [email protected] 86 94 70 44

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Philosophie Régis [email protected]

Sciences et techniquesYves [email protected]

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Delphine [email protected] 65 79 81 10

Marie-Jo Dhô[email protected]

MaquettistePhilippe [email protected] 19 62 03 61

Ont également participé à ce numéro : Yves Bergé, Émilien Moreau, GaëlleCloarec,Christophe Floquet, ThomasDalicante, Marion Cordier

Photographe Agnès Mellon095 095 61 70photographe-agnesmellon.blogspot.com

Directrice commercialeVéronique [email protected] 06 63 70 64 18

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