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Connaissance et Protection des Oiseaux Précautions Sylvicoles La Chouette de Tengmalm Philippe BUSSERT Aegolius funereus

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PREFACE

Inconnue en Auvergne jusqu’au début des années quatre-vingt (même si elle était probablementdéjà présente), la chouette de Tengmalm accède avec ce fascicule à la célébrité !Un statut de « star » justifié par de nombreuses qualités :

Elle est un bio-indicateur pertinent des forêts d’altitude naturelles avec une forte biodiversitéd’espèces d’oiseaux (et par conséquent de plantes, insectes etc …). Quand la Tengmalm estprésente, le pic noir, le pigeon colombin, et beaucoup de passereaux peu fréquents ne sont pasloin !

Ensuite, le forestier peut agir directement, par des procédures assez simples, pour favoriserl’espèce, notamment par une gestion adaptée des vieux arbres et des vieux peuplements,pouvant accueillir les cavités du pic noir.

Enfin, elle est très belle ! Difficile à observer, mais quelle récompense de voir deux grands yeuxen or vous regarder curieusement depuis sa loge !

La Chouette de Tengmalm est donc une excellente « clef d’entrée » pour mieux appréhender lanotion de forêt « diversifiée ». Cette collaboration entre l’ONF et la LPO doit ouvrir desperspectives de gestion nouvelles, susciter des initiatives locales de sauvegarde des espèces et dela biodiversité, continuer le long travail de mise en valeur de notre patrimoine forestier auvergnatqui reste encore préservé. Cet objectif est en totale harmonie avec la politique environnementalede l’ONF et ses engagements pris dans le cadre de l’écocertification forestière ISO 14001 etPEFC

Le Président de la LPO-Auvergne Le Directeur Territorial de L’ONF

François GUELIN Dominique BOUTHIER

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L'OISEAU

Petit rapace nocturne (taille d'environ 25 cm et envergure de 55-62 cm) au dessus brun-gris tacheté de blanc et dessous blanc tacheté de brun-gris. La tête est large et ronde, d'autant plus que les disques faciaux blanchâtres augmentent cette impression de " grosse tête ". Deux yeux jaune d'or au regard confiant et curieux complètent le portrait . Les pattes sont emplumées jusqu'aux serres, comme chez les chouettes nordiques. La queue est courte, et les ailes sont larges et arrondies favorisant les déplacements en sous-bois..Elle est cependant difficile à voir si on ne connaît pas son nid, la chouette de Tengmalm n'ayant qu'une activité exclusivement nocturne. C'est pourquoi la recherche de la petite chouette aux yeux d'or se fait en suivant une démarche bien spécifique, dans le temps et l'espace.

Présentation

VOL

Le vol souple et agile, l ' observer ca r l e s dép lacements son t essentiellement nocturnes, convient bien à cette espèce forestière. Il est rectiligne, contrairement à celui de la chevêche. Les oiseaux sont surtout observés posés.

si on a la chance de

HABITAT

En Auvergne, cette chouette habite des forêts mixtes ou résineuses âgées et froides, possédant des cavités propices à la nidification, des clairières et des secteurs au sol accessible donc dépourvus de sous-bois dense. L'habitat se caractérise par des altitudes relativement é l e v é e s , p a r d e s e s s e n c e s montagnardes et des formations forestières vieillies et étendues.

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DES ESSENCES PRIVILEGIEES : HÊTRE ET SAPIN

C’est le pic noir, espèce étroitement associée à la chouette de Tengmalm, qui " choisit " son milieu de vie. Comme ce grand pic adore les arbres en futaie, hauts, au tronc lisse et sans branches basses, c'est sur les hêtres essentiellement qu'il creuse ses loges où l'on trouvera la chouette de Tengmalm lors de la reproduction. De tels hêtres ont au minimum une centaine d'années.

Quand le pic noir, en montagne, s'attaque à un beau tronc de sapin blanc, bien élagué naturellement sur une grande hauteur, la chouette de Tengmalm peut profiter de l'opportunité (c'est le cas dans de nombreux sites de Margeride et du Livradois).

L'ALTITUDE

Espèce boréale, la chouette de Tengmalm (du nom du naturaliste suédois qui l'a décrite le premier) est une relicte glaciaire : elle se reproduit en France dans les massifs montagneux (Vosges, Jura, Massif central, Pyrénées, Alpes …). En Europe, ses bastions sont scandinaves et montagnards.En Auvergne, les données obtenues depuis vingt-cinq ans montrent une présence entre 800 et 1300 mètres d'altitude. Hors de cette fourchette, peu d'espoir ! En dessous de 800 m, le climat ne lui convient probablement pas, et au-delà de 1300 m, il n'y a plus beaucoup d'arbres à loges, ni de surfaces forestières appréciables.

Cette recherche de conditions thermiques froides témoigne d'une bonne adaptation de la chouette de Tengmalm à un milieu un peu différent, car plus contraignant au niveau climatique que celui de ses concurrents : hibou moyen-duc et chouette hulotte. Les massifs boisés où elle vit possèdent un climat froid et rude.Sera-t-elle victime du réchauffement climatique ? Rendez-vous en 2050 pour faire le point !L'Auvergne se situe sur la limite ouest de répartition : quelques couples vivent en Limousin, et le Massif du Cantal ne semble pas héberger de population de cette espèce.

Présentation

HABITAT

Parfois aussi, le pic creuse des bouleaux, des trembles, que la chouette peut utiliser, mais on ne constate ce fait que plus rarement.

La préservation des hêtraies et sapinières d'altitude, et l'assurance d'un âge d'exploitabilité élevé (supérieur à 120 ans) sont donc des garanties de préserver à la fois les populations de pic noirs et de chouettes de Tengmalm.

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Présentation

Enfin, il semble que la chouette aux yeux d'or ne se sente pas à l'aise dans les grandes hêtraies pures sur de grandes surfaces : dans toutes les observations de reproduction ou presque, il a été constaté la présence de conifères touffus à proximité immédiate des loges occupées (quelques dizaines de mètres) où le mâle , apparemment, trouve son gîte diurne (pas de place pour deux dans les loges !). La forêt mixte est donc idéale pour cette espèce.

HABITAT

DES FORETS AGEES ET ETENDUES

Dernier critère important, les massifs auvergnats où niche la chouette de Tengmalm sont tous de grande étendue : Bois noirs, Forez, Livradois, Chaîne des Puys, Margeride … Ce sont des milliers d'hectares qui semblent nécessaires pour assurer le maintien de petites populations.

Les boisements isolés (inférieurs à quelques centaines d’hectares) ne permettent pas le maintien de cette espèce. C'est un plaidoyer pour une gestion cohérente des massifs forestiers, avec par exemple la mise en place de corridors forestiers (profitables à toute la faune et même à la flore).

Ces grands massifs boisés doivent, évidemment, comporter des peuplements âgés, pour offrir au pic noir des hêtres ou sapins centenaires, au moins sur certaines parcelles.

Pour terminer, signalons que la présence annuelle de la chouette de Tengmalm dépend aussi d'autres facteurs : - les déplacements d'individus (immigration d'oiseaux alpins ou autres, en fonction des pics de reproduction) doivent jouer un rôle primordial quoique mal connu. - la présence automnale abondante de faines pourrait aussi, selon certains scientifiques, jouer un rôle positif au printemps suivant, par l'intermédiaire des populations de rongeurs.

Les loges sont creusées dans des arbres apparemment sains, et bien souvent de bonne qualité marchande. Il ne faut pas les confondre avec les forages effectués par le pic pour s'alimenter en larves sur les souches et les troncs morts.

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Présentation

ACTIVITES - ALIMENTATION

EFFECTIFS et REPARTITION

La chouette de Tengmalm est réputée sédentaire, cependant des opérations de baguage, dans d'autres pays ont mis en évidence des déplacements, sur des distances parfois importantes, impliquant les femelles et les jeunes surtout. De véritables " invasions " se produisent certaines années, après une bonne reproduction notamment, à partir des populations du nord de l'Europe jusqu'au Danemark et en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas. Les mâles sont plus fidèles à leurs sites de nidification.

La plupart des proies sont des rongeurs, campagnols et mulots, et des musaraignes ou autres micrommamifères, rarement quelques passereaux. Les fluctuations de ses proies favorites (campagnols et mulots), liées à la fructification du hêtre notamment, semblent d'ailleurs influencer le succès de la reproduction. Ainsi, les années d'abondance, les chanteurs sont plus nombreux, plus de loges sont occupées et le succès des nichées est plus grand. Les années " maigres ", il y a moins de chanteurs, peu assidus, certains territoires paraissent abandonnés, très peu de nichées sont entreprises et leur succès est moindre.

L'analyse de pelotes et débris de fonds de nids récoltés sur plusieurs années dans le Livradois a permis d'identifier 204 proies consommées par des chouettes de Tengmalm. Le résultat cumulé des déterminations fait apparaître un spectre alimentaire assez large, composé de micromammifères pour plus de 90% : campagnols (près de 33%), mulots (28%), musaraignes (27%), lérots (2,5%), complété par quelques oiseaux, du roitelet au merle (6,5%), insectes (bousiers) (2,5%) et grenouilles (0,5%).

Sa vie strictement nocturne ne permet pas facilement de l'observer sauf au moment crucial de la nidification, période pendant laquelle elle est facilement repérable.

Il y a en France 2000 à 4000 couples, soit 4-5 % de la population européenne (excepté la Russie). Les populations sont stables en Europe, en augmentation en France. Elle habite l'ensemble du massif alpin, le Jura et les Vosges, la Bourgogne et les Pyrénées, ainsi que le Massif Central.

Haute-Loire (40-50), les deux autres départements étant peu connus et pouvant donc réserver des surprises. Dans le Limousin il y aurait 10-20 couples dans la zone du plateau de Millevaches, estimation 1997, peut-être à revoir (information de la SEPOL). Ces fourchettes estimatives sur l'ensemble des deux régions, peu précises, militent pour une prospection accrue.

En Auvergne, la découverte de la chouette de Tengmalm et de sa reproduction date de 1977 en Haute-Loire et de 1979 dans le Puy-de-Dôme, puis dans les années 1980 dans le Cantal (Margeride) et l'Allier (Bois Noirs et Monts de la Madeleine). Ces données ne signifient cependant pas que l'espèce était absente les années antérieures. En effet, les forêts d'altitude favorables à cette espèce sont reculées, froides, régulièrement enneigées en hiver et étaient alors peu fréquentées par les observateurs.

Les effectifs sont estimés à 62-120 couples, principalement dans le Puy-de-Dôme (30-60) et la

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Nidification

C'est souvent dans le courant du mois de janvier que les mâles commencent à chanter et cette activité se prolonge jusqu'en avril et au-delà, pour les oiseaux célibataires, qui n'ont pas encore commencé leur reproduction. Le site de chant est différent de celui du nid. Il est souvent dans de jeunes peuplements voisins (tout comme le gîte de repos diurne), et peut être distant de 100-200 m de la loge (voire plus loin). Le mâle cesse de chanter lorsque la ponte est déposée, soit parfois dès la fin de février, plus souvent en mars. La période de chant maximale en mars correspond d'ailleurs peu ou prou à l'époque de la ponte.

La fidélité au site, si ce n'est à la loge, est forte. On peut rapporter l'exemple de certains sites de la chaîne des Puys où l'espèce a été notée 11 années sur 13.

Les nichées interrompues peuvent donner lieu à des pontes de remplacement, précédées d'une reprise du chant que l'on peut alors entendre jusqu'en juin.

La taille des pontes, n'ayant pas fait l'objet de contrôles, n'est pas connue pour l'Auvergne, excepté pour un cas. La seule donnée disponible provient de la chaîne des Puys, où une loge, dans un hêtre abattu en avril 1996, contenait 5 œufs et deux jeunes poussins, soit une ponte de 7 œufs. La date de la ponte était estimée aux alentours du 8 mars, compte tenu de la durée d'incubation de 28 jours.

En temps normal, l'envol des jeunes se produit en mai ou en juin. Cependant les échecs étant fréquents, on trouve parfois des jeunes, issus de pontes de remplacement, encore au nid en juillet et en août. Les nichées réussies produisent de 1 à 3 jeunes à l'envol. Ceux-ci restent dépendants des adultes et peuvent être entendus pendant les six semaines qui suivent leur sortie, période où ils s'éloignent plus ou moins du site de nidification.

Dans le Livradois, sur 62 nichées suivies entre 1992 et 2004 : 40 ont échoué (64,5%), 22 ont réussi (35,5%), produisant au moins 44 jeunes à l'envol, soit au moins 0,7 jeune par nichée éclose et 2 jeunes par nichée réussie.

Si des cas de prédation par la Martre sont parfois évidents, la raison de nombreux échecs reste inconnue, mais on peut supposer q u e d e s p r o b l è m e s d e disponibilité alimentaire en sont la cause dans bien des cas.

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Menaces éventuelles

L'altération des habitats forestiers constitue le principal risque pouvant, à terme, mettre en péril les petits noyaux de population auvergnats. Leur survie est liée aux vieilles sapinières-hêtraies montagnardes et aux arbres à cavités.

L e s v i e i l l e s h ê t r a i e s montagnardes tendent à disparaître suite à des tempêtes et autres accidents climatiques, ou par des transformations pour laisser la place à de jeunes peuplements résineux, parfois d'essences exotiques à courte rotation, défavorables à l'oiseau.

La tempête de décembre 1999 a provoqué la disparition de plusieurs sites dans le Livradois, sur lesquels aucune chouette n'a été contactée depuis. Ce bouleversement n'aurait pas de conséquences graves à long terme, si les secteurs dévastés n'étaient replantés en Douglas, d'un plus grand intérêt économique. Cette essence en progression sur ce territoire, jusque dans les belles sapinières reculées d'altitude, n'offre malheureusement pas au Pic noir la possibilité d'y creuser ses loges.

Il est satisfaisant de constater que les documents-cadre de gestion de la forêt publique préconisent le maintien des vieilles sapinières dans les montagnes d'Auvergne !

La conservation des arbres à loges doit être la règle, mais pose souvent problème car la tradition reste de les abattre.

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Précautions

Les arbres occupés par la chouette font parfois l'objet de coupes, la présence d'attaques dues au Pic noir occasionnant leur marquage par le forestier non informé de l'intérêt de garder ces arbres. Si on coupe ces arbres, le pic en creuse ailleurs, il est donc préférable de les garder.

L'objectif est de favoriser la reproduction de la chouette en gardant les arbres porteurs de loges et en permettant la présence de bouquets de hêtres et de sapins (assez âgés pour avoir un diamètre suffisant) un peu partout dans les massifs forestiers.

Dans le temps :

Envoldesjeunes

Risques

Incubation

Ponte

Chant

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bleu : pas de risques jaune : risques moindres rouge : risques importants

La période à risque va de fin janvier à juin. Il est impératif pendant cette période de respecter les sites dans lesquels se trouvent des arbres porteurs de loges. -Pas de risques : entre septembre et décembre. Les oiseaux sont présents mais peuvent changer de site en cas de travaux forestiers.-Risques légers : de juillet à septembre (la nidification est normalement terminée mais, en cas de ponte de remplacement, on a vu des jeunes s'envoler en août dans le Livradois). -Risque moindre : période de chant : fin janvier-février. Les mâles cherchent à attirer l'attention d'une femelle, et si un couple se forme, il choisit une loge dans les environs. Des travaux forestiers à cette période peuvent amener la délocalisation ou l'abandon du couple.-Risques forts : à partir de mars, c'est-à-dire la période de ponte, jusqu'en juin, à l'envol des jeunes. Des travaux forestiers à cette époque peuvent aller de la perte de la nichée (abandon des œufs ou des jeunes par les adultes) voire de l'adulte couveur (coupe de l'arbre).

Par travaux forestiers, on entend une fréquentation prolongée et constante directement à côté du site, ou des coupes importantes à proximité immédiate (ou pire, de l'arbre support de la loge). Si des travaux sont inévitables pendant les périodes de risque fort et risque moindre, il faut bien entendu préserver les arbres portant des loges (surtout si on n'a pas pu vérifier la présence de la chouette, ce qui est souvent le cas, certains oiseaux ne réagissant pas du tout aux sollicitations lors des recherches) et laisser intact l'environnement immédiat dans un rayon d'une dizaine de mètres.

La chouette de Tengmalm est dans l'ensemble assez peu sensible aux perturbations sonores et visuelles pendant la journée en période de ponte et élevage des jeunes. Ses habitudes nocturnes et le fait que le gîte diurne soit souvent distant de la loge sont des explications. Le contrôle des loges en début de cycle reproducteur ne semble pas gêner outre mesure le déroulement de celui-ci. Il en est sans doute de même pour les déplacements et travaux légers à cette période. Par contre, il vaut mieux éviter les dérangements lourds et portant sur une longue période tout près du site de reproduction à partir de mars-avril.

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Préconisations forestières

Des principes de gestion doivent être appliqués dans la plupart des massifs de l'aire de répartition :

- Respect des arbres à loges : dans les zones potentielles propices à la chouette de Tengmalm.

- Conserver les arbres à cavités : trous d'un diamètre supérieur à 3 cm.

- Mettre en place lors de la révision des aménagements les îlots de vieillissement et les îlots de sénescences conformément aux instructions en vigueur (politique environnementale de l'ONF).

- Favoriser les mélanges d'essences.

- La présence de bouquets de hêtres ou vieux sapins est indispensable : une dizaine de tiges par bouquets suffit.

- Dans les peuplements résineux autres que le sapin, il convient de maintenir les bouquets de hêtre existants, seuls aptes à accueillir les loges de pics noirs et autres cavités naturelles.

A plus long terme, il est évident qu'une gestion associant la présence de plusieurs essences (hêtre, sapin, épicéa) et l'irrégularité des peuplements, avec une partie de la surface conservée au-delà de l'âge d'exploitabilité, est favorable non seulement à la chouette, mais aussi à l'ensemble de la biodiversité. Il en est de même pour la conservation des arbres morts , à cavités et surannés.

Dans le Jura, le maintien d'îlots de hêtres âgés sur 1 à 3 ha, et d'un nombre d'arbres à cavités au moins égal à 10 pour 100 ha est préconisé pour la conservation de cette chouette (JOVENIAUX in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999 ).

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Espèces associées

Le Pigeon colombin Columba oenas.

Le colombin est un pigeon nettement plus rare que le pigeon ramier, et il est tributaire des cavités, surtout celles du pic noir. Le colombin croise donc souvent la chouette de Tengmalm, dans les forêts de montagne – mais en tout bien tout honneur ! Et l'ornithologue ou le forestier qui cherche la petite chouette trouvera du colombin.

C'est une espèce fragile, pour laquelle la gestion forestière peut jouer un grand rôle, par exemple grâce à des îlots de hêtres laissés en vieillissement.

Que se passe-t-il quand colombin et Tengmalm se croisent ? Nous ne savons pas ! Mais la Tengmalm n'est pas un prédateur de ce pigeon.

Le Pic noir Dryocopus martius

Voilà l'indispensable compagnon de la chouette de Tengmalm. Grâce à ses forages, la forêt peut héberger, outre la chouette, le pigeon colombin, l’écureuil roux, la sittelle torchepot, la chouette hulotte, la martre des pins, les abeilles.

Le pic noir est une espèce courante en Auvergne dans tous les boisements de surface suffisante et surtout d'âge respectable, à toutes altitudes, des gorges de l'Allier ou de la Sioule, en passant par les chênaies de plaine, les forêts de montagne, les pentes boisées de bordure de Limagne , et même depuis quelques années, les ripisylves du val d'Allier, signe d'une dynamique de population énergique.

Les secteurs de hêtraie, à toutes altitudes, pourvus de loges, sont très importants pour l'espèce : par exemple en 2007 en Chaîne des Puys, sur une hêtraie d 'à peine dix hectares comportant quatre arbres à loges, trois arbres hébergeaient des colombins, et le quatrième arbre le pic noir ! Forte demande donc pour les cavités.R

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Espèces associées

Les densités peuvent être localement fortes : par exemple en Chaîne des Puys (au-dessus de 800 m, uniquement sur substrat volcanique, soit environ 15 000 hectares ou 150 km²), on peut estimer la population à 25 – 30 couples nicheurs, sans compter tous ceux limitrophes des Combrailles ou de la faille de la Limagne.

Dans certaines forêts occupées depuis des décennies, le nombre d'arbres à loges est impressionnant : dans le Parc d'Allagnat à Ceyssat (63), vieille hêtraie plus que centenaire sur 1 km², on a recensé une trentaine d'arbres à loges. Certaines loges sont utilisées depuis au moins 25 ans.

La loge du pic noir est très caractéristique: elle est très grande (12 x 8 cm environ), ovale, assez aplatie dans sa partie basse, avec souvent des rainures correspondant au passage des ongles du grand pic.

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Comment trouver la petite chouette

En dehors de la période de reproduction, cette chouette est extrêmement discrète. Une forêt vous paraît favorable à la chouette de Tengmalm ? Alors cherchons-la !

Première étape : Situer les arbres à loges.

Répertorier sur carte les zones à hêtres ou sapin favorables au pic noir (rappelons qu’il s’agit des boisements renfermant des arbres d’au moins une centaine d’années). C'est l'occasion de rencontrer ce grand pic si vous ne le connaissez pas.

Le parcours des secteurs cartographiés permet de situer les arbres à loges, pour la chouette, mais aussi pour le pigeon colombin, la chouette hulotte…

Les parcelles doivent être parcourues en hiver, de décembre à février – en l'absence des feuilles – en recherchant les beaux arbres au tronc lisse et sans branches. Évidemment, à cette période, les loges seront vides.

L'idéal, en présence d'un arbre à loges, est évidemment de le marquer (avec un numéro par exemple) : cela permet d'éviter de le compter deux fois, d'affiner la cartographie, et enfin, quand les feuilles sont présentes, de le retrouver plus facilement. Le marquage doit se faire pour être repérable à distance.

L'utilisation d'un GPS précis est également envisageable pour situer ces fameux arbres.

En quelques années, le travail est complet, les nouvelles loges n’étant pas si fréquentes (surtout si on a sauvegardé les arbres porteurs de loges).

Deuxième étape : la prospection nocturne.

Le mois de mars est le plus favorable, même si la chouette de Tengmalm chante déjà dès janvier, et jusqu'en mai pour les mâles célibataires. Elle peut commencer de vocaliser dès la fin de l'après-midi, surtout les belles journées ensoleillées et calmes, sans vent. Mais c'est surtout en début de nuit que le chant retentit (en milieu de nuit certainement aussi, mais nous manquons de données, les ornithologues dorment …).

Le " doudoudoudoudoudoudoudou " flûté s'entend jusqu'à 500 m par temps calme (en fonction des obstacles topographiques ou de la végétation). On peut l'imiter en sifflant (mais la chouette ne " répond " pas toujours).

Attention : un chant particulier de la hulotte, le “chevrottement”, peut parfois induire des confusions

Il convient donc de parcourir la forêt de place en place, avec des arrêts de 15 minutes par exemple tous les 500 m. Un double passage est nécessaire en cas d'absence de contact, car la recherche des chanteurs n'est pas toujours fructueuse.

Les mâles chanteurs repérés sont notés sur un plan. S'ils chantent en fin de journée, on peut tenter d'approcher doucement leur site de repos diurne, en général des conifères bien denses (voir photo), ce site étant situé souvent à moins de 100 m de l'arbre à cavité.

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Comment trouver la petite chouette

Troisième étape : Trouver la chouette !

Dans les secteurs à loges de pics, où des chouettes ont été entendues, pour les visualiser il faut les localiser avec précision. Pour ce faire, il faut aller gratter ou “tapoter” les arbres à loges à partir du mois de mars, jusqu'en mai.

Commencez à gratter à l'ongle, çà peut suffire, puis avec un bâton. Parfois la chouette, curieuse, va se montrer, mais parfois non. Dans certaines loges occupées (où des poussins seront observés) aucune chouette n'a été entendue chantant, ni vue au grattage !

La " rentabilité " du grattage est donc très aléatoire.

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Les mâles célibataires sont parfois nombreux, et peuvent donc continuer à chanter – sans que rien d'autre ne se produise – pendant des semaines, parfois en pleine journée au soleil.

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prospection : en rouge, pour le chanten vert pour les loges

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Comment trouver la petite chouette

Regardez-là, admirez-là, mais éloignez-vous ensuite discrètement, elle redescendra dans son nid au bout de quelques minutes.

N'hésitez pas à contacter la LPO pour toute aide technique pour la recherche et le suivi de la chouette de Tengmalm. Vos observations l'intéressent pour mieux comprendre la dynamique de population de l'espèce.(CF. coordonnées en fin d'ouvrage)

Au plan national, un réseau “petites chouettes de montagnes” a pour mission d’étudier leur distribution, leur reproduction et leur protection.Contacts : [email protected]@onf.fr

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Si une chouette se présente à la loge ( p h o t o ) , c ' e s t p r o b a b l e m e n t u n e femelle en couvaison (ou avec des poussins très jeunes).

Il faut rester discret et ne pas répéter l'opération pour éviter le dérangement La couvaison dure un mois, et l'élevage des jeunes sensiblement la même durée. L'envol se produit donc, en moyenne, courant mai. Les derniers jours avant cet événement, les jeunes chouettes au plumage couleur chocolat se montrent à la fenêtre, bien serrées dans l'ouverture de la loge !

Page 16: x La Chouette de Tengmalmrapaces.lpo.fr/sites/default/files/petites-chouettes/1/...chouettes nordiques. La queue est courte, et les ailes sont larges et arrondies favorisant les déplacements

ADRESSES UTILES

- LPO Auvergne2 Bis rue du Clos Perret63100 Clermont-FerrandTél : 04 73 36 39 79

- SEPOL (Société d'études pour la protection des oiseaux en Limousin)11, rue Jauvion87000 Limoges

- Centre de Soins pour Oiseaux Sauvages2, rue de la Gantière63000 Clermont-FerrandTél : 04 73 27 06 09

- ONFDirection territoriale Auvergne-LimousinSite de Marmilhat-SudBP 10663370 LEMPDESTél : 04 73 42 01 21

BIBLIOGRAPHIE

- P. JOUBERT - (2006-2007) - “Comment concilier production sylvicole et protection de la Chouette de Tengmalm, dans la forêt domaniale du Mont Mouchet ?”, rapport de stage ONF - B. GILARD - Novembre 1995 - “La Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus) dans le Haut Bassin de l'Allier” - M. BONNEMAISON - 2006 - “La Nyctale de Tengmalm en Haut-Vivarais : réactualisation de la répartition locale et recherches d'habitats favorables”

REMERCIEMENTS

Pour les photographies : Philippe BUSSER, Eric DEPRAETERE, François GUELIN, Pierre JOUBERT, Romain RIOLS, Christophe BRETTON

CONCEPTION – REALISATION

Rédaction, conception : Pierre TOURRET, François GUELIN et Dominique VIGIER (LPO), avec l'assistance de Thomas DARNIS (ONF), Stanislas CARLET (ONF)Les données et renseignements qui ont permis l’élaboration de cette plaquette sont issues pour l’essentiel de toutes les observations des ornithologues bénévoles de la LPO Auvergne.

Mise en page : Jean-Pierre ROCHE, dessinateur ONFAgence du Puy-de-Dôme

Coordination : Stanislas CARLET, responsable " environnement "ONF Direction Territoriale Auvergne-Limousin Octobre 2008