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Robert Tremblay “LE POIDS DES MOTS, LE CHOC DES PHOTOS”: TROIS ESSAIS SUR L’HISTOIRE RÉCENTE DE LA PHOTOGRAPHIE

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Robert Tremblay

“LE POIDS DES MOTS, LE CHOC DES PHOTOS”:TROIS ESSAIS SUR L’HISTOIRE RÉCENTE DE LA PHOTOGRAPHIE

Musée des sciences et de la technologie du CanadaOttawa, 2009

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TABLE DES MATIÈRES

pages

INTRODUCTION .......................................................................................................... 1

ESSAI 1: BRÈVE HISTOIRE DE LA PHOTOGRAPHIE NUMÉRIQUE .................. 6

1.1 Éléments techniques ...................................................................................... 7

1.1.1 Proto-histoire de la photographie numérique, 1950-1990 ............... 71.1.2 Déblocage et progrès de la photographie numérique, 1990-2008 .....

101.1.3 Mode de fonctionnement des appareils numériques .......................... 131.1.4 Internet et multimédia ...................................................................... 15

1.2 Impacts socio-culturels de la photographie numérique ................................. 18

1.2.1 Nouvelle concurrence et fermeture d’usines ................................... 181.2.2 Le coût environnemental de la photographie numérique ................ 211.2.3 La croissance du soupçon à l’endroit de l’authenticité des images ...

231.2.4 La question de la propriété intellectuelle des images .......................

261.2.5 La mémoire en péril? ...................................................................... 281.2.6 Les usages illicites du numérique ................................................... 301.2.7 Les conséquences esthétiques du numérique .................................. 33

ESSAI 2: DISCOURS THÉORIQUES AUTOUR DE LA PHOTOGRAPHIE ............ 35

2.1 Les premières tentatives de réflexion théorique sur la photographie ............ 36

2.2 Les penseurs issus du milieu des études culturelles après 1960 .................... 41

2.3 Le mariage de raison entre l’histoire et la photographie ............................... 53

ESSAI 3: PROFIL DE VINGT PHOTOGRAPHES ILLUSTRES AYANT FAIT LEUR MARQUE AU CANADA AU COURS DU XXe SIÈCLE ......................... 60

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BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................ 103

INTRODUCTION

Cet exercice de mise à jour de connaissances vise d’abord et avant tout à renouer avec la

recherche sur l’histoire de la photographie, là où je l’avais laissée lors du dépôt de l’évaluation

historique, plus de dix ans auparavant1. Si l’on se souvient bien, j’avais alors terminé mon

enquête sur les premiers balbutiements de la photographie numérique tels qu’ils

m’apparaissaient au tournant des années 1990. Il est bien évident, à sa relecture, que ce constat

n’est plus valable, compte tenu de l’ampleur du virage technique et esthétique ayant gagné le

monde de la photographie depuis cette date. Faut-il rappeler qu’en 1990, l’infrastructure

électronique des ordinateurs était encore incapable de relayer convenablement les images

numériques et que l’Internet accessible à tous les foyers n’était encore qu’un rêve flou. L’autre

objectif visé par le présent exercice est de mettre en valeur certains aspects qui avaient été

négligés, ou carrément passés sous silence, au moment de la rédaction de l’évaluation historique

mentionnée ci-haut. Tel est le cas entre autres de la réflexion philosophique mené ces dernières

années par un petit groupe d’intellectuels français et américains, autour des tenants et

aboutissants de la photographie dans nos sociétés modernes. Tel est le cas également du petit lot

de photographes canadiens ayant marqué, par leurs oeuvres artistiques ou commerciales, le

monde de l’image au XXe siècle. Compte tenu de la diversité des sujets abordés, il a été convenu

1 Voir: R. Tremblay, Du daguerréotype à l’image digitale: regard technique et anthropo-gique sur l’histoire de la photographie au Canada, XIX-XXe siècles (Ottawa, MSTC, 1998).

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que chacun des chapitres (photographie numérique / réflexion théorique / photographes

canadiens) constitueraient autant d’entités séparées, pas nécessairement liées les uns par rapport

aux autres.

Démarche méthodologique

Dans un article écrit en 2004, le chroniqueur scientifique américain Justin Mullins se

demandait pourquoi l’histoire de la photographie numérique était si méconnue2. Réticence des

histo-riens de la technologie à traiter de sujets contemporains? Sources documentaires volatiles

parce provenant en grande partie de l’Internet? Sans doute y-a-t-il du vrai dans ces affirmations,

mais il faut savoir que faire l’histoire des changements technologiques récents est une entreprise

complexe puisque le succès commercial d’une invention est rarement fonction de sa qualité, mais

plus de sa capacité à survivre dans un environnement économique hostile. Alors, comment

distinguer les idées porteuses d’avenir, de celles vouées à l’échec, à plus forte raison lorsqu’on

ne dispose pas du recul nécessaire pour séparer le bon grain de l’ivraie. En outre, la mémoire des

changements techno-logiques d’une époque est généralement sélective. On connaît bien, par

exemple, les progrès techni-ques de l’aviation durant les années 1930, mais très peu les avancées

en matière de carbure de silicone qui ont bouleversé le monde des outils industriels à la même

époque. On pourait dire la même chose de la révolution numérique de la fin du XXe siècle. On

connaît relativement bien l’histoire des ordinateurs et de l’Internet, mais très peu celle de la

photographie numérique.

C’est pourquoi, sans prétendre à l’exhaustivité ou à l’objectivité absolue, nous tenterons

le plus honnêtement possible de cibler (parmi le magma d’informations techniques) les points

tour-nants et les inventions marquantes qui ont rendu possible l’essor phénoménal de la

photographie numérique des dernières années. D’emblée, nous pouvons dire qu’il existe une

2 J. Mullins, “History in the Making”, New Scientist, 184 (13-19 nov 2004): p.22.

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proto-histoire de ce nouveau médium qui se situe en gros, de 1950 à 1990, période durant

laquelle apparaissent les premières caméras électroniques et le dispositif à couplage de charge

(système CCD), à la base de

la photographie numérique. Toutefois, plusieurs éléments faisaient encore obstacle à la diffusion

de cette nouvelle technologie, ce à quoi on parvint à remédier avec les progrès accomplis dans

les domaines de la mémoire virtuelle et de la résolution de l’image, durant les années 1990. Est-

ce qu’on peut qualifier du même coup le passage à la photographie numérique de véritable

révolution technologique, comme le fait si souvent la publicité? Plusieurs spécialistes de la

question sentent aujourd’hui le besoin de nuancer ce propos, d’autant plus que nous réagissons

de la même façon à la photographie numérique que lors de la découverte du daguerréotype, 170

ans auparavant, c’est-à-dire par l’exhaltation des possibilités multiples du nouveau médium et

par la méfiance face à son potentiel de manipulation. En outre, les mêmes conventions

esthétiques semblent guider jusqu’à ce jour la photographie numérique et la photographie

argentique3.

Il est bien évident que ce regard technique sur la photographie numérique ne peut être

dissocié de son contexte historique et surtout de l’onde de choc qu’un tel médium a pu susciter

au plan socio-culturel. Qu’il suffise de mentionner tout d’abord les retombées matérielles que le

numérique a pu avoir auprès des industries productrices d’équipement photographique (nouvelle

concurrence, fermetures d’usines, licenciements, etc.), ou encore son coût environnemental.

Dans un autre ordre d’idées, nous nous demanderons à quel point cette nouvelle technologie a

3 Voir: E. Handy, “Fixing the Art of Digital Photography: Electronic Shadows”, Historyof Photography, 22.1 (printemps 1998): p.12, et R.Bélanger, Feintes,doutes et fictions: réflexionssur la photographie numérique (Québec, 2005), p.5.

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accru le soupçon à l’endroit de la photographie, compte tenu de la facilité avec laquelle il est

désormais possible de trafiquer ou de falsifier une image numérique. Nous verrons également

qu’il existe depuis peu de nouveaux logiciels qui permettent de débusquer quelques-unes des

manipulations apportées à l’image photographique4. Nous profiterons de l’occasion pour montrer

comment, à l’instar de bien d’autres moyens de communication, la photographie numérique a

entraîné son lot pratiques illicites (pornographie infantile, stéganographie, intrusion dans la vie

privée, etc.), en vertu desquelles les autorités politiques et judiciaires ne semblent pas disposer de

l’outillage nécessaire pour réagir efficacement. D’autres questions d’ordre esthétique ou de type

iconoclaste viendront par ailleurs compléter l’argumentation de cette première partie consacrée à

la photographie numérique.

Dans le deuxième volet de cette mise à jour, nous tenterons, sous forme d’essai

analytique, de faire dialoguer entre eux les quelques théoriciens qui se sont intéressés à

comprendre et à définir le sens profond de l’acte photographique dans nos sociétés modernes.

En partant des écrits d’une demi-douzaine de philosophes, de sociologues et d’essayistes, nous

essaierons de voir l’originalité de leur pensée respective, les élément discursifs communs, de

même que les zones de friction qui les séparent. Cette démarche nous permettra du même coup

d’aborder des thèmes aussi importants que la polysémie de l’image photographique (Sontag), le

pouvoir de persuasion du médium photo (Freund vs Bourdieu), son mariage de raison avec le

monde des beaux-arts (Freund), son rôle dans la solennisation des événements marquants de la

vie familiale (Barthes; Bourdieu), son langage, ses codes (Barthes), et bien d’autres sujets

encore. Nous réserverons, par ailleurs, une section spéciale pour y aborder, sous forme de

discussion ouverte, le problème de la relation ambiguë qui prévaut entre la discipline historique

et la photographie. Une photographie vaut-elle vraiment mille mots pour un historien(ne)

4 H. Farid, “Digital Image Forensics”, Scientific American, 298.6 (juin 2008): pp.66-71.

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professionnel(le)? Comment expliquer la réticence de la communauté historienne à utiliser la

photographie comme un artefact évocateur ou à tout le moins comme un témoignage fiable du

passé? Quels sont les possibilités et les limites explicatives des images photographiques? Voilà

autant de questions qui serviront à orienter notre réflexion sur le sujet et à faire partager

l’expérience de divers historiens(nes) en la matière5.

La dernière partie de cette mise à jour sera vouée exclusivement aux grands photographes

canadiens du XXe siècle. Pour ce faire, nous élaborerons un répertoire constitué d’une vingtaine

de noms parmi lesquels se retrouveront ceux qui se sont notamment illustrés dans les domaines

de l’art (ex. Lynne Cohen et Edward Burtynski), du photo-reportage (ex. David Heath, Gabor

Szilasi et Conrad Poirier), du portrait de studio (ex. Yousuf Karsh et Gabriel Desmarais, dit

Gaby) et de la publicité (ex. Ken Bell). Loin de nous, la prétention de vouloir créer un “hit-

parade” des meilleurs photographes au Canada. Certes, la notoriété jouera un rôle dans notre

choix, mais ce ne sera pas le seul critère, étant donné notre souci de représentativité aux plans

chronologique, régional et professionnel.Pour chacun de ces photographes, nous avons prévu de

construire une grille qui incluerait diverses rubriques tels qu’un profil biographique, une brève

description de l’oeuvre, une orientation bibliographique et, le cas échéant, un examen

préliminaire de leur fonds d’archives.

Une bibliographie commentée des ouvrages marquants des quinze dernières années, dans

le domaine de photographie, viendra coiffer cette mise à jour, le but de l’exercice étant d’aider

les con-servateurs et les bibliothécaires à faire des choix judicieux dans l’acquisition de livres

pour la bibliothèque du Musée.

5 Rappelons que l’idée de traiter de ces questions est née d’une conférence que j’avais donnée dans le cadre du congrès annuel de l’Institut d’histoire de l’Amérique française, en 2003, intitulée: “Une photographie vaut-elle mille mots? Aperçu des problèmes méthodologiques liés à l’utilisation des sources photographiques en histoire”.

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ESSAI 1

BRÈVE HISTOIRE DE LA PHOTOGRAPHIE NUMÉRIQUE

S’il fallait définir l’essence de la photographie numérique, on pourrait dire qu’il s’agit

d’un médium qui recouvre l’ensemble des techniques permettant l’obtention d’une photographie

via l’utilisation d’un capteur électronique comme surface photosensible, ainsi que les techniques

de traitement et de diffusion qui en découlent. En d’autres mots, nous aurions affaire avec la

photographie numérique à une nouvelle interface qui interprète la lumière comme de simples

signaux électriques, pour ensuite la codifier en language binaire et l’emmagasiner sur la base de

divers algo-rithmes dans l’univers virtuel de l’informatique. Par rapport à l’ancien procédé

argentique, il y aurait donc une sorte de “rupture du lien de matière”, comme l’a si bien saisi

l’historien André Rouillé1.

À la manière du daguerréotype, l’avènement de la photo numérique a été précédé d’une longue

période d’incubation constituée non seulement d’essais et d’erreurs, mais aussi d’attentes d’une

11 A. Rouillé, La photographie: entre document et art contemporain (Paris, 2005).

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infrastructure technologique capable de garantir de la viabilité de cette nouvelle invention.

1.1 Éléments techniques

1.1.1 Proto-histoire de la photographie numérique, 1950-1990

Plusieurs spécialistes de la question n’hésitent pas à faire remonter les origines de la

photo-graphie numérique aux années 1920, alors que les agences de presse anglo-américaines

échangeaient leurs photos au moyen d’un cable transatlantique reliant Londres et New York. En

effet, ces agences employaient un système de conversion numérique de leurs images qui

s’apparentait au système que l’on connaît aujourd’hui, sauf qu’il fallait plus de trois heures pour

transmettre une seule photo et que le résultat était loin d’être à la hauteur des attentes.

L’avènement des ordinateurs et des premiers vidéo-enregistreurs magnétiques au lendemain de la

Seconde Guerre mondiale allaient toutefois changer la donne. C’est ainsi qu’en 1951 on

commença dans les grands studios américains à con-vertir les images en direct provenant de

caméras de télévision en impulsions numériques et à les enregistrer sur des bandes magnétiques.

Six ans plus tard, Russell A. Kirsch, un ingénieur du National Bureau of Standards, aux États-

Unis, parvenait pour la première fois à scanner une photo-graphie sur un ordinateur, ouvrant

ainsi la porte au traitement de l’image et à son visionnement au moyen d’un écran témoin. C’est

toutefois à l’Agence spatiale américaine (NASA) que l’on doit une des percées majeures en

matière d’imagerie électronique. C’est ainsi qu’en 1964, lorsque cette dernière entreprit de

cartographier la surface de la lune au moyen d’une sonde spatiale, elle recourut à une caméra

vidéo qui transmettait des signaux électriques grâce à des capteurs à lampe chargés d’orthicon.

Ces caméras étaient extrêmement lourdes et requéraient énormément d’energie. En outre,

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l’image, qui était transmise en signaux analogiques, était constamment sujette à la distorsion.

Seul, l’emploi de caméras vidéo dotées de capteurs vidicom permit de résoudre ce problème. Il

en reste pas moins que ces expériences en matière d’imagerie électronique eurent des retombées

dans d’autres domaines scientifiques comme la médecine, la sismographie et l’exploration sous-

marine2.

En 1972, la Texas Instruments Corp. fut probablement la première compagnie à faire

breveter un appareil photo électronique destiné à un usage autre que scientifique et conçu pour

un plus large public. Faute d’intérêt, cet appareil ne fut jamais commercialisé. Il fallut attendre

en 1981 pour qu’un équipementier ne se décide à mettre en marché un prototype semblable. Nul

doute que l’arrivée de la Sony Mavica créa une onde de choc dans le milieu de la photographie.

Premier appareil photo électronique à vocation commerciale, la Sony Mavica était en fait une

caméra vidéo à image fixe. L’originalité de cet appareil résidait dans la recours à une puce

électronique transistorisée pour capter l’image. Celle-ci était ensuite enregistrée sur une disquette

magnétique de deux pouces carrés, capable d’accueillir une cinquantaine de photos, et pouvait

être visionnée sur n’importe quel écran de télévision ou moniteur vidéo. Bien que la Mavica

avait été façonnée selon le modèle d’une caméra réflex à objectifs interchangeables, elle ne

trouva que peu de preneur jusqu’en 1988, année où elle commença à être acceptée dans les

milieux du photojournalisme. Il faut dire que cet appareil était coûteux et que l’image produite

avait une résolution bien inférieure à celle en provenance de caméras conventionnelles. En outre,

la Mavica était un appareil électronique ne fonctionnant qu’en mode analogue. On reprocha

d’ailleurs à la compagnie Sony de ne pas avoir prévu, dès les premières années, la mise en

marché d’une imprimante couleur capable de s’adapter aux caractéristiques de son appareil. En

22 A. Aaland, Digital Photography (New York, 1992), pp.9-10; et P. Hook, Photographienumérique (St-Constant, Qué., 2006), pp. 9-10.

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fait, la Mavica était une caméra prématurée pour son temps, compte tenu que les avancées en

matière de périphériques (microprocesseurs, logiciels, imprimantes, etc.) n’en n’étaient qu’à leur

tout premier balbutiement3.

Les années 1980 peuvent être décrites comme une décennie durant laquelle on mit en

place le fondements nécessaires à l’épanouissement de la photographie numérique. Parmi eux, il

convient de mentionner le numériseur MacVision de Macintosh qui permettait d’importer les

images de la caméra électronique Mavica sur des ordinateurs personnels, dès 1985. Vinrent

ensuite les premiers scanners de pellicules négatives mis au point par la firme californienne Leaf

System Inc., qui pouvaient analyser l’information contenue sur un négatif d’appareil photo

conventionnel, puis la convertir en données numériques sur un fichier d’ordinateur. Ces deux

avancées permirent à des agences comme PhotoUnique et Uniphoto de constituer les premières

banques d’images sur disque laser video, et d’accomplir un pas essentiel dans le storage

électronique des images. Une autre étape fut franchie en 1987, lorsque la compagnie britannique

Letraset introduisit Image Studio, le premier logiciel capable de retravailler les images à niveau

de gris. L’année suivante, la firme Macintosh s’empressa de mettre en oeuvre son système de

traitement d’images en couleur PhotoMac, lequel ne requérait qu’une carte d’affichage de 8 bits.

Celui-ci fut toutefois surpassé trois ans plus tard par le système Photoshop de la compagnie

Adobe. Entre-temps, le ingénieurs de la firme Kodak étaient parvenus à mettre au point la

première imprimante couleur en mode continu, pouvant imprimer une image 4 X 5 à partir d’un

fichier d’ordinateur. Toutefois, l’un des plus grands acquis de cette époque fut l’adoption du

standard JPEG pour la compression des images numériques, lequel en réduisant le format des

fichiers augmentait du même coup leur portabilité, pavant ainsi la voie à l’entrée des images

33 R. Graham, Digital Imaging (Caithness, Écosse, 1998), pp. 77-78 ; et site web: www.digicamhistory.com/1980.html.

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virtuelles dans le monde des télécommunications. Tout porte à croire que les caméras

numériques n’auraient jamais pu connaître l’ascendant qu’elles ont eu durant les années 1990,

sans l’implantation de cette infrastructure technologique4.

1.1.2 Déblocages et progrès de la photographie numérique, 1990-2008

Chroniqueurs et spécialistes s’entendent généralement pour dire que le Dycam Model 1

fut le premier appareil photo entièrement numérique destiné au marché de consommation de

masse. Introduit en 1990 par la firme californienne Logitech, l’appareil qui se détaillait en

dessous de $1000 pouvait emmagasiner plus de 32 images noir et blanc sur une puce

électronique de 1 méga-octet de mémoire vive incorporée dans le boîtier. Seul inconvénient, la

résolution obtenue (une fois l’image transférée sur un ordinateur personnel) était encore bien

inférieure à celle que l’on pouvait avoir avec une caméra conventionnelle. Peu de temps après le

Dycam, la firme japonaise Toshiba lançait le Memory Card Camera qui était capable de prendre

et d’entreposer 12 photographies couleur de 400000 pixels chacune, grâce à une carte-mémoire

spéciale. Pour ne pas être en reste avec le virage numérique, la firme Kodak mit au point dès

1992 un dos de caméra , le DCS-200, qui pouvait se rattacher à un appareil réflex conventionnel

(en l’occurrence, le Nikon 801S), pour capter et conserver plus de 50 images couleur sur un

disque dur de 80 méga-octets. Doté d’un port de connexion permettant de transférer les données

sur n’importe quel ordinateur personnel, l’appareil était toutefois hors de portée de la bourse du

commun des mortels à cause de son prix exhorbitant. Le premier appareil numérique qui sut

combiner une bonne résolution et un prix accessible fut en fin de compte le QuickTake 100 de la

compagnie Apple. Sa mise en marché dès 1994 amorça un engouement réel chez les

44 Aaland, op. cit., pp.11-12; et “Innovations, 1980-2000”, Photo District News, 20.5 (mai 2000): s.p.

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photographes amateurs, qui n’allait jamais plus se démentir par la suite5.

La fin des années 1990 fut particulièrement faste en matière d’innovations techniques,

certains modèles de caméras numériques allant même jusqu’à tomber en désuétude quelques

mois à peine après leur lancement. Il est vrai que, durant ce court intervalle, plusieurs des

améliorations se trouvant déjà dans les prototypes expérimentaux commencèrent à migrer vers le

marché de consommation de masse. En voici quelques exemples6:

- le Richoh RDC 1 (1995): premier appareil numérique pouvant capter à la fois des images fixes et des images en animation, tout en incorporant le son- le Sony MVC-FD5 (1997): premier appareil numérique pouvant accueillir des dis- quettes de 3.5 po.- le Kodak DC 20 (1998): premier appareil numérique compact se détaillant au dessous de $500- le Sony MVC-CD1000 (2000): premier appareil numérique muni d’un graveur de CD- le Casio WOV-1 (2000): premier appareil numérique miniature, dont le mécanisme était intégré à une montre-bracelet.

Quant aux appareils hauts de gamme utilisés principalement dans les studios

professionnels, leur passage au numérique s’effectua avec un léger décalage par rapport à la

photographie amateure. L’avènement en 1997 du dos numérique Leaf DCB II qui pouvait

s’adapter aux caméras tradition-nelles de studio de type Hasselblad, Mamiya et Sinar constitue

un point tournant en ce domaine. Conçu selon un système multiplex d’exposition en trois temps

et équipé d’un filtre rotatif pour la séparation des couleurs primaires, ce boîtier numérique était

parfait pour les longues expositions que nécessitaient les photos publicitaires; cela permettait de

conserver la même qualité de grain dans l’éventualité où de telles photos devaient être

reproduites en plusieurs exemplaires ou sur des encarts de grand format7.

55 Graham, op. cit., pp.82-84; “Innovations ...”, loc. cit., s.p.; “The History of Digital Camera”, in http://www.snapjunky.com

66 J. C. W. Waghorn, “Digital Antiques of the Future”, Photographica World, 105 (2003): p.3.

77 Graham, op. cit., pp.99s.

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Les années 2000 à 2008 sont jalonnées, quant à elles, de nombreuses améliorations

apportées aux composantes des caméras numériques, sans compter l’effort de miniaturisation

résultant de l’intégration des nouveaux prototypes aux téléphones portables (sujet sur lequel nous

reviendrons un peu plus loin). Parmi les progrès significatifs, il faut compter le rendement accru

des récents capteurs électroniques qui a fait en sorte que la résolution des appareils numériques

est passée de

1 million de pixels au début de la décennie à 12 millions de pixels aujourd’hui8. Le stabilisateur

d’image constitue une autre innovation ayant contribué à rendre plus conviviale la photographie

numérique. Introduit pour la première fois en 2005 par la compagnie Sony, ce dispositif

permettait de corriger le flou des images occasionné par les vibrations mécaniques de l’appareil

ou les tremble-ments de la main. Ce stabilisateur était particulièrement utile lorsqu’on recourait à

un téléobjectif ou lorsqu’on devait effectuer de longues expositions sans trépied. Il était

également apprécié sur les caméras numériques qui étaient dépourvues de viseur et qu’on devait

tenir à bout de bras. On peut en dire autant des logiciels intelligents qui ont fait leur apparition

dans les appareils à la même époque, et qui pouvaient discriminer les expressions faciales de

manière à ne retenir que celles qui correspondent aux standards esthétiques de la photographie

(sourire, yeux ouverts, etc.)9.

De nouveaux espoirs sont fondés actuellement sur la mise au point de systèmes optiques

liquides, lesquels permettraient de construire des téléobjectifs statiques et plus compacts qui, une

88 Il ne faut toufois pas s’y méprendre, car la publicité utilise trop souvent à tort le nombre de pixels pour mousser la vente de certains appareils photos. Or, un grand nombre de pixels sur un petit capteur n’entraîne pas automatiquement une meilleure qualité de l’image, mais plutôt un effet de “bruit numérique”, ou de distorsion. Voir: http:fr.wikipedia.org/wiki/photographie numérique.

99 D. Pogue, “Pixel Counting Joins Film in Obsolete Bin”, New York Times, 2 févr. 2006.

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fois adaptés aux caméras numériques de poche, rendraient leur tirage de qualité égale à celui des

appareils réflex. Il existe deux façons de fabriquer de tels objectifs: l’une en introduisant des

cristaux liquides entre les couches de verre de l’objectif, de manière à modifier l’indice de

réfraction de la lumière en variant la force des champs électriques, l’autre consistant à insérer

une goutte d’eau dans une membrane flexible et transparente, elle-même scellée dans le verre de

l’objectif, de telle sorte qu’un servomoteur puisse commander à la membrane une forme convexe

ou concave, selon les besoins de distance focale requise lors de la prise de vue10.

1.1.3 Mode de fonctionnement des appareils numériques

De prime abord, le mode de fonctionnement des appareils numériques n’est pas si

différent de celui des appareils conventionnels, les deux utilisant le même système optique et la

même sorte d’obturateur, sauf que le premier fait appel à des capteurs transistorisés pour mesurer

et enregistrer électroniquement la lumière, plutôt que de recourir à un procédé chimique. Ainsi,

lorsqu’une photo numérique est prise, “un réseau de capteurs saisit l’image et la convertit en une

série de pulsions électroniques qui sont [dès lors] enregistrées sous forme numérique”11. Au

cours de ce processus de conversion numérique, l’image analogue est fractionnée en plusieurs

milliers de pixels, chacune d’elles étant assignée d’un nombre indiquant sa localisation à

l’intérieur de la grille et son degré de luminosité. Dans le cas de clichés en couleur, chaque pixel

est identifié par trois nombres ayant pour fonction d’établir la valeur de luminosité de chacune

des trois couleurs primaires à un point précis de l’image; un microprocesseur situé à même la

caméra traite alors l’ensemble des données fournies par chaque pixel, selon diverses formules

010 S. Ashley, “Liquid Zoom”, Scientific American, 297.4 (oct. 2007): p.30.

111 Hook, op. cit., p.11.

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mathématiques que l’on surnomme algorithmes12.

On aura compris que les capteurs transistorisés constituent la clé de voute de la

photographie numérique. Inventés dans les années 1970 puis expérimentés par la suite sur les

caméras numériques, les capteurs ne sont ni plus ni moins que des puces électroniques dotées de

milliers de diodes, dont la dimension ne dépasse guère les 40 mm carrés. On en retrouve

plusieurs sortes, mais les plus fré-quemment utilisés sont les dispositifs à couplage de charge

(CCD) et les semi-conducteurs d’oxyde de métal (MOS). Le capteur CCD se distingue par sa

façon de communiquer l’information sur la lumière: c’est ainsi, que par son intermédiaire, le

signal est relayé horizontalement ou verticalement d’une diode à l’autre, selon une méthode de

prélèvement par zone (de manière à faire une moyenne de l’intensité lumineuse), alors que le

capteur MOS s’adresse à chaque diode individuellement13.

Malgré un degré de sensibilité ISO limité et une certaine propension au décalage linéaire,

les capteurs MOS semblent promus à un avenir radieux, compte tenu de leur faible coût de

revient et de leur basse consommation d’énergie. En outre, la technologie MOS permet d’obtenir

un niveau de trame supérieur à tout autre procédé lors du processus de captation de la lumière.

Toutefois, les récentes recherches menées sur les capteurs CCD laissent présager une

amélioration du niveau de trame des images, surtout depuis l’introduction des dispositifs de

transfert plein-cadre14.

212 Cette dernière procédure permet alors de mélanger de diverses façons les trois couleurs primaires (rouge, bleu et vert) du spectre lumineux, de manière à en créer d’autres lorsque l’ima-ge le requiert. Voir: Aaland, op. cit., pp.7, 24-25.

313 R. Lenman (éd.), Oxford Companion to the Photograph (Oxford, Angleterre, 2005), pp.168-171.

414 Graham, op. cit., 104; Lenman, op. cit., pp.169-170.

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1.1.4 Internet et multimédia

L’adoption du protocole international de compression JPEG et les progrès accomplis

dans le domaine de la fibre optique ont énormément facilité la transmission des photos

numériques par cablodiffusion. Les premières expériences menées en 1987 par le magazine USA

Today, sur la transmission de photos via un ordinateur15, laissaient entrevoir un avenir prometteur

pour ce genre d’échange, à l’aube du développement de la messagerie électronique. D’autres

possiblilités s’ou-vraient également pour le téléchargement de photos sur le cyber-espace. C’est

ainsi qu’en 1993, les principales entreprises américaines de presse avaient déjà commencé à

publier une version virtuelle du contenu éditorial et pictural de leurs journaux, sur America

Online, avant de souscrire au réseau Internet. Le Raleigh News & Observer (Raleigh, Virginia)

fut d’ailleurs le premier journal à envoyer sur le terrain un photographe en connexion directe

avec l’Internet16.

Étant donné l’énorme quantité de mémoire vive que requérait alors le téléchargement de

photos sur un ordinateur personnel, il devint impérieux de trouver rapidement de nouveaux

supports périphériques capables de stocker une grande quantité d’images à la fois. Le CD parut

d’abord comme la solution idéale pour remédier au problème de surcharge occasionné par la

présence de fichiers renfermant des images numériques17. Vinrent ensuite les lecteurs ZIP, les

DVD et plus récemment les clés USB. De nouvelles visionneuses portatives offraient

515 Cette essai fut réalisé lors des Séries Mondiales de baseball s’étant tenues à Minneapo-lis, Min., cette année-là. Il ne fallut pas moins de 12 minutes pour que la photo prise durant l’un des matchs n’atterrisse sur un écran d’ordinateur du bureau éditorial du USA Today à New York, un exploit pour l’époque. Voir: “Innovations, 1980-2000”, loc. cit., s.p.

616 “Innovations, 1980-2000”, loc. cit., s.p.

717 En 1992, la firme de ruban adhésif 3M fut la première à utiliser le CD comme outil de transfert et de diffusion des photos en provenance de son catalogue commercial. Voir: Ibid., s.p.

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parallèlement des capacités de storage souvent supérieures aux CD et aux DVD. Apparues

d’abord sur les baladeurs à disque dur iPod en 2004, ces visionneuses devinrent rapidement des

entités autonomes.Après plusieurs années de recherches sur les écran tactiles, les compagnies

Epson, Nikon et Archos mirent au point les premières visionneuses indépendantes, avec écran de

3.5 pouces, qui pouvaient télécharger une centaine de photos sur une carte-mémoire de 250

méga-octets. Il va sans dire que les progrès en ce domaine furent tout aussi rapides que

spectaculaires. Pour s’en convaincre, qu’il suffise de dire qu’à l’heure actuelle, la visionneuse de

poche Nixvue Vista possède une capacité de 30 giga-octets qui lui permet d’emmagasiner plus

de 60 000 photos numériques, sans compter que déjà certains modèles proposent en option des

systèmes sophistiqués de gestion de fichiers ou même des possibilités de traitement des images

en format RAW18.

L’une des technologies ayant le plus contribué à développer la vocation multimédia de la

photographie, ces dernières années, est sans aucun doute le téléphone-appareil photo. La

compagnie Nokia fut d’ailleurs la première à mettre en marché dès 2003 des téléphones mobiles

équipés de capteurs électronique pouvant saisir une image avec une définition presque

équivalente aux appareils numériques compacts19.L’avantage de telles caméras réside dans le fait

qu’elles permettent d’envoyer des photos d’un appareil à l’autre, en autant que le destinaire soit

connecté au même réseau télé-phonique, à défaut de quoi il est toujours possible d’envoyer par

818 D. Pogue, “Vaults that let you Store your Photos, and Keep Shooting”, New York Times, 14 avril 2005; et Hook, op. cit., pp.126-127.

919 À la même époque, des chercheurs du département de génie électrique de l’Universitéde Tokyo mirent au point un mini-scanner plastique de 7 cm carrés qui pouvait s’adapter à un télé-phone portable. Il semble toutefois que cette technologie n’ait pas trouvé acquéreur parmi les grands équipementiers japonais, probablement à cause de la faible résolution de cet appareil. Voir: C. Biever, “The Scanner you can Take Everywhere”, New Scientist, 182 (25 déc. 2004): p.11.

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courriel un lien par lequel le destinataire peut visualiser ces mêmes photos sur un site Internet

fourni par la compagnie de télé-phone20. Pas étonnant, dans de telles circonstances, que les

téléphones-caméras aient connus immé-diatement une grande popularité auprès des agents

immobiliers, des vendeurs de voitures, des marchands d’art et finalement du public en général.

Dans les pays pauvres du tiers-monde, où les hôpitaux ne peuvent se permettre le luxe d’acquérir

des appareils conventionnnels d’imagerie par résonance magnétique, le téléphone doublé d’une

caméra numérique offre maintenant la possibilité d’acquérir à peu de frais une telle technologie.

Ainsi, pour détecter une tumeur ou toute autre anomalie, il suffit de placer des électrodes

(jusqu’à concurrence de 256) sur le corps du patient, de mesurer le courant électrique entre elles,

puis d’envoyer l’information à un téléphone cellulaire, au moyen d’un cable USB, qui, lui, le

transmet à un laboratoire éloigné capable de reconstituer une image à partir des informations

reçues. La dite image est alors retournée au téléphone cellulaire du médecin traitant qui peut

alors la visualiser puis l’analyser à même son appareil21. Le téléphone-caméra a aussi donné lieu

au développement, ces dernières années, d’une nouvelle forme de couver-ture médiatique: le

journalisme civique. Ainsi, lorsque l’ouragan Katrina s’est abattu sur les États-Unis en 2005, le

réseau de télévision CNN a demandé aux personnes qui se trouvaient sur les lieux de leur

envoyer des photos ou des images vidéo du drame via Internet, ce à quoi ont répondu aussitôt des

milliers d’amateurs22.

Quel avenir attend à court-terme la photographie numérique? Chose certaine, le système

020 L’avènement, dès l’année suivante, du système de transmission sans fil Bluetooth auto-risant l’échange de photos d’un téléphone-caméra à n’importe quel ordinateur ou imprimante fa-cilite encore davantage les transactions d’une personne à l’autre. Voir: Hook, op.cit., pp.129-130.

121 “The Phone Will See you Now”, New Scientist, 198 (3 mai 2008): p.23.

222 Hook, op. cit., p.130.

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de transmission sans fil des photographies risque de s’étendre non plus aux seuls téléphones-

caméras, mais à tous les types d’appareils numériques (réflex, compact, studio, etc.). Tout porte à

croire égale-ment que les systèmes GPS intégrés aux appareils photos serviront de plus en plus à

cataloguer automatiquement les images numériques. On peut s’attendre en outre à voir des

microprocesseurs 3D faire leur apparition sur les caméras. Finalement, les nouveaux appareils

risquent d’être équipés à l’avenir de logiciels pouvant effectuer le traitement de l’image in situ,

sans compter les scanners faciaux intelligents et les dispositifs de reconnaissance biométrique

qui ne vont pas sans poser certains problèmes en matière de protection de la vie privée.

1.2 Impacts socio-culturels de la photographie numérique

L’onde de choc créée par l’avènement de la photographie numérique est avant tout

protéi-forme, mais on mesure encore mal l’étendue et la profondeur de ces répercussions au plan

socio-culturel, tant le phénomène est nouveau, transitoire et historiquement indéterminé. La

présente section tente de poser provisoirement quelques balises en examinant les impacts de la

photo numé-rique sous l’angle des enjeux économiques, de l’environnement, du droit, de

l’éthique documentaire, de l’art et des pratiques amateures.

1.2.1 Nouvelle concurrence et fermetures d’usines dans le domaine de l’équipement photographique

L’arrivée du numérique fut pour la plupart des grands manufacturiers de caméras à

pellicule synonyme de bouleversement, de réalignement majeur et même parfois, tout

simplement, de ferme-ture d’usines. Insignifiantes au milieu des années 1990, les ventes de

caméras numériques aux États-Unis sont soudainement passées à 12.5 millions d’appareils en

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2003, devançant pour la première fois celles des caméras argentiques23. Au Canada, les ventes

d’appareils photos ont presque doublé entre 2000 et 2004, pour s’établir à $800 millions, une

augmentation attribuable en majeure partie à la popularité grandissante du numérique auprès des

consommateurs24. À l’heure actuelle, on estime que 92% de toutes les caméras vendues à travers

le monde appartiennent au domaine du numérique. Inutile de dire qu’un tel virage fut

accompagné d’importants soubresauts parmi les grands noms du secteur de l’équipement

photographique, comme Kodak qui dut suspendre sa production de pellicule, ou encore comme

la firme japonaise Konica Minolta qui vendit en 2006 sa division d’appareils photos pour mieux

se concentrer dans les domaines de l’équipement optique et médical, au prix d’une coupure de

plus de 3 700 postes dans sa force de travail évaluée à 33 000 emplois25. Pendant ce temps,

quantité de petites companies nouvellement apparues sur le marché commencèrent à construire

des appareils numériques à bon marché. D’autres, comme par exemple Epson, Sony et

Panasonic, qui n’avaient jamais été liées au monde de la photographie auparavant, se trouvèrent

soudainement promues à des sommets commerciaux. Juste aux États-Unis, on ne compte plus les

nouvelles compagnies, telles que Adobe, Apple, Hewlett-Packard, Scitex ou autres, qui se sont

lancées ces dernières années dans la fabrication de matériel photographique26.

Le soudain affaissement des actions de la firme Kodak à partir de 2001, et les

licenciements massifs qui s’ensuivirent, montrent de façon éloquente combien il en coûte de faire

323 J. Mullins, “Picture This”, New Scientist, 184 (16-22 oct. 2004): p.25.

424 O. Moore, “Canadians Buy Into Digital Age”, Globe and Mail (Toronto), 13 déc. 2004.

525 D. Pogue “Pixel Counting ...”, loc. cit.; et “Konika Minolta Shutters Camera Opera-tions”, Globe and Mail (Toronto), 19 janv. 2006.

626 J.-F. Nadeau, “La pellicule hors foyer”, Le Devoir (Montréal), 5 janv. 2006; et Aaland, op. cit., pp.194-196.

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les mauvais choix en matière de gestion administrative. Pour avoir négligé si longtemps

l’importance de la révolution numérique, la société Kodak dut se résoudre à couper plus de 25

000 postes entre 2003 et 2006, de telle sorte que l’entreprise ne disposât plus que de 50 000

employés au lendemain de ce remue-ménage27. À l’origine de cette débâcle, il faut remonter en

1996, lorsque les dirigeants de la firme Kodak choisirent de se lancer dans la promotion de

l’Advanced Photo System, un appareil offert en version solide ou jetable, qui pouvait prendre des

photos de différents formats sur un même rouleau de pellicule de 24 mm, alors que l’avenir

semblait beaucoup plus prometteur du côté des caméras numériques28. Autre décision

controversée, le choix de se concentrer à partir de 2003 dans la haute technologie numérique (re.

imagerie médicale, imprimerie commerciale, etc.), afin de com-penser les pertes subies dans le

domaine de la photographie argentique. Peu aguerrie à ce genre de production, la société Kodak

dut engloutir plus de $3 milliards en acquisitions de toutes sortes, pour une aventure qui s’avéra,

au demeurant, très peu profitable29. Une lueur d’espoir semble pourtant poindre à l’horizon et ce,

malgré la situation précaire de l’entreprise au plan financier30. C’est ainsi qu’en 2006, la

compagnie Kodak annonçait que ses ventes de matériel numérique surpassaient pour la première

fois celles associées aux produits traditionnels. Qui plus est, de nouveaux dividendes

727 En 1988, au plus fort de ses activités, la firme Kodak comptait 145 300 employés un peu partout à travers le monde. Voir: B. Dobbin, “Kodak Digital Sales Outspace Film for First Time”, Globe and Mail (Toronto), 30 janvier 2006.

828 Comme cela était prévisible, les ventes d’appareils APS se mirent rapidement à stagner,puis à décliner, tant et si bien que la compagnie dut interrompre leur production en 2004. B. Dobbin, “Kodak Drops APS Cameras”, Ottawa Citizen, 4 janv. 2004.

929 Dobbin, “Kodak Digital Sales ...”, loc. cit. ; et “Kodak to Stop Selling Traditional Ca-meras in U.S.”, New York Times, 13 janv. 2004.

030 En 2006, Kodak prévoyait enregistrer un déficit de l’ordre de $1.1 milliards. Voir: Dobbin, “Kodak Digital Sales ...”, loc. cit.

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commençaient déjà à regarnir les coffres de la société, depuis que cette dernière eût pris la

décision d’élargir la gamme de ses produits numériques aux caméras bas de gamme, au papier

d’imprimante, à la finition des photos en ligne et aux mini-stations de “développement”

instantané31.

C’est au prix de deux faillites, l’une en 2001, l’autre en 2008, que la firme Polaroid a

appris de son côté ce qu’il en coûtait de ne pas investir suffisamment dans la recherche et

développement à l’âge du numérique. Mais les choses devraient changer d’ici peu, d’autant que

la compagnie, vieille de 60 ans, vient d’annoncer le lancement prochain d’un appareil photo

numérique doté d’une mini-imprimante pouvant tirer instantanément des épreuves de 2" x 3".

Son prix: $199 (US). Outre le fait qu’il soit accessible à toutes les bourses, l’appareil permet

d’éditer in situ les photographies avant de les imprimer. Les seules choses qui pourraient nuire

éventuellement à la vente de ce nouvel appareil sont, d’abord le volume de l’imprimante qui lui

est incorporée, puis le fait que cette dernière doit constamment être rechargée avec un type de

papier qui finit par être onéreux à la longue32. L’avenir nous dira sans doute quel sort il réservera

à cet appareil.

1.2.2 Le coût environnemental de la photographie numérique

Un des plus grands mythes entretenu par les fabricants de caméras numériques est de dire

que la disparition éventuelle de la pellicule et des produits chimiques entraînera nécessairement

moins de pollution. Cela n’est pas si sûr quand on pense à la grande quantité d’énergie (sous

forme de piles ou d’adapteurs électriques) que requiert le fonctionnement des microprocesseurs

131 “Kodak Beats Estimate”, Globe and Mail, 26 janv. 2005.

232 E. Benderoff, “Next-Gen Polaroid Makes Flashy Entrance”, Ottawa Citizen,3 févr. 2009.

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de chaque appareil de photo numérique. Comme le nombre de transistors sur les puces

électroniques doublent à tous les deux ans selon la loi de Moore, il se pourrait bien que les

batteries actuelles (même les plus performantes au lithium-ion) ne suffisent plus à la tâche.

Certains affirment qu’avec l’augmentation récente des capacités opérationnelles (vidéo, GPS,

logiciels de traitement, systèmes de classi-fication, etc.) des appareils photos, les usagers doivent

déjà recharger plusieurs fois par jour leurs batteries, ce qui a pour effet de raccourcir la durée de

vie de ces dernières et de créer davantage de déchets toxiques. Pour pouvoir accroître le pouvoir

des piles rechargeables, il faudrait en fabriquer de plus grosses; inutile de dire que cela va

évidemment dans le sens inverse de la miniaturisation des appareils de poche ou des caméras-

téléphones33. Autre sujet de préoccupation en matière envi-ronnementale: la désuétude rapide

des caméras numériques et la diminution croissante de leur cycle de vie. Comme le rappelait si

bien le journaliste Jean-François Nadeau:

Les nouveaux appareils numériques [...] deviennent désuets à une vitesse effarante. Pour suivre le rythme technologique imposé par les fabricants, il convient désormais de changer de caméra, c’est-à-dire de consommer et de jeter.La consommation photo-graphique et les déchets liés à cette production n’ont jamais été aussi grands34.

Il faut dire que les composantes électroniques des nouveaux appareils de photographie ne sont

pas aussi propres et inoffensives que les manufacturiers voudraient nous le faire croire. Plusieurs

de ces appareils contiennent des substance toxiques (silicium, plomb, mercure, cadmium, etc.)

qui posent de graves problèmes de contamination sur leur site de production ou encore dans les

sites d’en-fouissement, après que les consommateurs s’en soient débarassés. Par ailleurs, tout est

mis en oeuvre pour occulter les effets dommageables (cancer, désordre hormonaux,

333 C.Biever, “Phones Face Power Failure”, New Scientist,181 (28 févr.-7 mars 2004):p.21.

434 Nadeau, loc. cit.

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malformation des feotus, etc.), d’une longue exposition aux champs de radiation

électromagnétiques émis non seulement par les ordinateurs, mais aussi par les caméras-

téléphones. Bien que reconnus médicalement depuis plusieurs années, ces effets ont donné lieu à

bien peu d’interventions réglementaires de la part des gouvernements auprès des grands

équipementiers de matériel électronique35.

1.2.3 La croissance du soupçon à l’endroit de l’authenticité des images

Contrairement à une croyance répandue, la falsification des images en photographie n’est

pas un phénomène nouveau. On a qu’à penser aux photogravures parues dans le Harper’s

Weekly à l’époque de la Guerre de Sécession aux États-Unis, où l’on avait pris soin de modifier

l’uniforme des victimes afin de les faire passer pour des soldats sudistes, ou encore à la

disparition de Léon Trotski et d’Alexandre Zinoviev des manuels d’histoire en URSS, à la suite

de manipulations photographiques ordonnées par Staline lors des purges de 1929 au sein du parti

communiste. On ne peut pas ignorer non plus que, depuis sa naissance, la photographie a

toujours été un acte de decons-truction visuelle, en vertu duquel la réalité se trouve altérée par

divers niveaux de sensibilité humaine. Neutre qu’en apparence, la photographie a toujours été et

sera toujours une interprétation du monde par l’image, qui engage les valeurs de la personne

maniant la caméra, tout en participant à la symbolique d’une époque ou d’un groupe social36.

Ce qui diffère avec la photographie numérique, c’est d’abord la vitesse avec laquelle il

est désormais possible à un opérateur, sans qualification préalable, de produire des images

truquées sans que personne ne s’en aperçoive. Mais, au delà de ces considérations techniques,

535 Aaland, op. cit., p.166.

636 R.Tremblay, Du daguerréotype à l’image digitale:regard technique et anthropologique sur l’histoire de la photographie au Canada, XIXe et XXe siècles (Ottawa: Musée des sciences et de la technologie du Canada, 1998), p.2.

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c’est toute la con-ception du réel attachée traditionnellement à la photographie qui se trouve

bouleversée:

Avec le numérique, l’idée qu’une image doive forcément être modifiée est en effet devenue courante, voire banale. La plupart des nouveaux appareils sont fournis avec des indications quant aux techniques les plus commodes pour retoucher une image. Toutes les grandes revues de photographie indiquent elles aussi, à chaque nouvelle parution, des trucs pratiques pour supprimer ou ajouter ceci ou cela à ses photos37.

Pour plusieurs, cette généralisation de la pratique du faux constitue une manifestation éloquente

de l’esprit de notre temps, où le désir de reproduire mécaniquement le monde a fait place au désir

de refaire le monde en vertu de valeurs morales et esthétiques empruntées au monde du spectacle

(ex. le sensationnalisme) et à celui de la mode (ex. l’exaltation du paraître). Serions-nous alors au

beau milieu d’une crise existentielle de la photographie ou encore à l’aube d’un nouveau régime

de vérité qui serait en train de s’installer insidieusement38? Chose certaine, il existe actuellement

un soupçon à l’endroit de la photographie de reportage comme jamais auparavant dans l’histoire.

Les exemples de trucage récent à l’aide de la technologie du numérique ne manquent

d’ailleurs pas. Parmi les cas les plus célèbres, mentionnons celui du magazine Time qui, lors de

l’arrestation du joueur-étoile de football O. J. Simpson, en 1996, s’arrangea pour noircir

davantage la photographie qui avait été prise à ce moment-là, laissant ainsi planer une

impression de culpabilité, avant même qu’un procès ait été ouvert. Brian Walski, photographe au

Los Angeles Times, a quant à lui payé de son poste, pour avoir produit en 2003 une photographie

constituée d’éléments composites provenant de deux images différentes de la guerre en Irak.

L’auteur de cet habile montage, qui fut d’ailleurs publié à la une du journal, cherchait alors à

accentuer l’effet dramatique des bombardements américains sur Bagdad. Tout le monde se

737 Nadeau, loc. cit.

838 Rouillé, op. cit., pp.185, 201-203.

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souvient également de la supercherie à propos d’une soi-disant découverte majeure effectuée par

le professeur Woo Suk Hwang de l’Université de Séoul, sur les cellules souches. Or, après

vérification, une enquête révéla que neuf des onze colonies de cellules-souches présentées sous

forme d’image, comme preuve à l’appui des théories de clonage du professeur Hwang, étaient

alors des reproductions réalisées avec un logiciel de traitement de photos39.

Réalisant l’importance sociale de disposer d’outils de validation des images, une équipe

de chercheurs sous la direction du professeur Hany Farid du Dartmouth College (Hanover, N.

H.) a mis au point un modèle mathématique informatisé permettant de débusquer lestrucages

photographiques:

Our approach in creating each tool starts with understanding what statistical or geometric properties of an image are disturbed by a particular kind of tampering. Then we develop a mathematical algorithm to uncover those irregularities40.

À ce jour, il existe au moins cinq façons d’analyser l’authenticité d’une photographie: 1. en

vérifiant la concordance des angles de diffraction de la lumière, 2. en comparant la forme de

l’iris d’une personne à l’autre, 3. en enregistrant le spectre lumineux émis par les yeux des sujets,

4. en effectuant un séquençage informatique de petits blocs de pixels afin de les confronter à

d’autres parties de l’image et s’assurer ainsi de la correspondance mathématique de toutes les

composantes de l’épreuve photographique, 5. en développant un algorithme permettant de

retracer l’empreinte laissée par chaque caméra numérique sur l’image, de manière à détecter les

anomalies lorqu’une photographie falsifiée est soumise à un processus d’enquête41. Si ces

nouveaux outils de détection facilitent grandement la tâche des enquêteurs, il ont le défaut en

939 H. Farid, “A Picture Tells a Thousand Lies”, New Scientist, 179 (6-12 sept. 2003):p.39; et H. Farid, “Digital Image Forensics”, Scientific American, 298.6 (juin 2008): p.69.

040 Farid, “Digital Image Forensics”, loc. cit., p.67.

141 Ibid., pp.67-70.

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revanche de ne pas pouvoir distinguer les actes intentionnellement frauduleux (ex. modifier le

contenu éditorial d’une photo) des actes inoffensifs (ex. accentuer le contraste d’une photo à des

fins d’exactitude).

Déjà, depuis plusieurs années, des photographes militent ardemment en faveur de l’élabo-

ration d’un nouveau contrat social en vue de restaurer la confiance du public à l’endroit des

images, sans quoi, disent-ils, la photographie ne deviendra qu’une source de divertissement

populaire et ce, au détriment du droit à l’information et du droit au libre exercice de la pensée

critique42. Aux États-Unis, plusieurs photo-reporters soucieux de préserver l’authenticité des

images d’actualité pour les générations futures se sont engagés à respecter un code d’éthique

dans l’exercice de leur profession. D’autres ont proposé que l’on identifie sur chaque photo

retravaillée, le type de technique utilisé à cette fin ou, à défaut de tels renseignements, le nombre

de fois qu’un même cliché aura fait l’objet de manipulations43. L’avenir nous dira sans doute

dans quelle mesure ces initiatives auront réussi à neutraliser la culture du faux dans les photo-

reportages.

1.2.4 La question de la propriété intellectuelle des images

Durant les années 1970, la photographe Gisèle Freund alertait la presse écrite française

sur les dangers que cette dernière faisait courir au droit d’auteur en publiant des photographies de

reporters à la pige sans mentionner leurs noms. En plus de constituer un préjudice au plan

personnel, cette omission ouvrait la porte, selon elle, à toutes les contrefaçons possibles. Elle

pressentait déjà à son époque l’évolution future des techniques de reproduction, et les abus qui

242 E. Handy, “Fixing the Art of Digital Photography: Electronic Shadows”, History of Photography, 22.1 (print.1998): p.11.

343 Aaland, op. cit., pp.160-161.

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en découleraient si rien n’était fait pour mieux protéger les auteurs d’oeuvres photographiques

originales44. Le même son de cloche se fit retentir aux États-Unis, lorsque la photographie

numérique prit son envol dans les années 1990. Compte tenu de la facilité avec laquelle il était

désormais possible de trafiquer les images originales et de les rendre méconnaissables, on

commençait à émettre des doutes sur l’effi-cacité des lois existantes destinées à protéger la

propriété intellectuelle. C’est pourquoi plusieurs en appelaient auprès des autorités législatives

du pays pour qu’elles définissent qu’est-ce qu’un produit dérivé en photographie et à partir de

quand une photographie retravaillée devient un nouvel original. D’autres proposèrent que

l’industrie de la photographie s’aligne sur le modèle mis en place par l’industrie de la musique en

ce qui a trait à la protection des droits d’auteur. Ainsi, un photographe pourrait vendre en bloc

ses droits à une agence collective, comme ASCAP ou BMI pour la musique, qui veillerait à

établir une grille de prix et à redistribuer des redevances à chaque fois qu’une photo-graphie

d’auteur serait reproduite dans un livre, un magazine ou sur Internet45.

C’est en 1998 qu’on adopta aux États-Unis la première loi visant à prévenir la violation

des droits d’auteur sur Internet: le Digital Millennium Copyright Act (DMCA). En vertu de ce

règlement, un photographe s’apercevant que son matériel était téléchargé ou vendu sur le web,

sans son con-sentement, pouvait exiger de la part du fournisseur de services Internet qu’il retire

ledit matériel jusqu’à ce qu’une entente soit conclue entre les parties. L’année suivante, une

décision de la cour de circuit de New York stipulait par ailleurs qu’une reproduction numérique

d’oeuvre originale ne constituait pas un nouveau produit, mais plutôt un nouveau collectif

requérant la permission de l’auteur original pour fins de diffusion électronique46. Plus près de

444 G. Freund, Photographie et société (Paris: Seuil: 1974), p.172.

545 Aaland, op. cit., pp.162-165.

646 “Innovations, 1980-2000”, loc. cit., s.p.

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nous, les pays membres du G8 se sont réunis au Japon, en 2008, pour jeter les bases d’un traité

international contre le piratage des marques de commerce et des droits d’auteur: le Anti-

Counterfeiting Trade Agreement (ACTA). Il fut proposé à cette occasion d’intenter des

poursuites au criminel à tout individu ou à tout propriétai-re de sites Internet qui téléchargerait

ou encouragerait le téléchargement illégal de fichiers contenant du matériel (musique, films,

livres, photos, etc.) assujetti aux droits d’auteur. Ce qui veut dire qu’en cas d’infraction, un

individu pourrait être débranché du web et qu’un fournisseur de services Internet pourrait

s’exposer à de lourdes amendes47. Des développements en ce domaine sont à prévoir au cours

des prochains mois.

1.2.5 La mémoire en péril?

On ne peut ignorer aujourd’hui à quel point la prise de photographies a augmenté avec la

révolution numérique48. Le seul problème est que plus du tiers des photographes n’impriment

aucune de leurs photos et que seulement 10% des utilisateurs du numérique impriment toutes les

photos qu’ils ont préalablement sélectionnées. Évidemment, toute prise numérique ne mérite pas

(qualitativement parlant) d’être transposée sur un support matériel, d’autant plus que

l’impression d’épreuves peut s’avérer coûteuse à la longue, compte tenu du prix élevé des

cartouches d’encre et du papier photo. Or, si de moins en moins d’amateurs impriment leurs

photos, cela ne risque-t-il pas d’entraîner à long-terme la disparition des traditionnels albums de

747 P. Marks, “Copyright Crimes and Misdemeanours”, New Scientist, 199 (5-12 juill. 2008): pp.24-25.

848 Selon une étude récente, il se serait pris 620 milliards de photos à l’échelle planétaire en 2008, contre 120 milliards en 2003. Chaque mois, le nombre total de clichés saisis à travers le monde augmenterait de 18%. Voir: Nadeau, loc. cit.

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photos, gardiens de la mémoire familiale et remèdes contre l’érosion du temps49? Comment faire

pour s’y reconnaître et pour donner un sens à l’accumulation vertigineuse de photos personnelles

sur le cyberespace? Certaines solutions à ce problème semblent poindre à l’horizon. C’est ainsi

que des chercheurs de la compagnie Hewlett-Packard et de l’Université de Berkeley en

Californie sont à mettre au point une méthode de classi-fication des photos numériques par

traitement de la voix, et une autre par repérage optique, dans le but de faciliter tant la

préservation des souvenirs personnels que la reconstitution d’épisodes de vie50.

Au plan historique et archivistique, l’immatérialisation des photos pose un réel problème

de conservation. En cette période de numérisation tous azimuts, qui peut nous garantir que les

supports actuels des photos d’archives seront encore là dans dix, cinq ou même un an.

Paradise is still not in the cards; for one thing, nobody has yet figured out how to store all those digital photos for future generations. It’s not clear how long hard drives and [...] CD’s can last, and the software question is even more frightening. Will the under-skin nanocomputers of 2100 still recognize JPEG files?51

La difficulté, comme le soulignait récemment la journaliste montréalaise Caroline Montpetit,

provient du fait que la révolution numérique s’est beaucoup plus préoccupée de la diffusion que

de la conservation des informations52. N’oublions pas que le support papier, avec le microfilm,

demeu-re encore le medium le plus durable au passage du temps. Nul ne saurait ignorer la

fragilité de la mémoire artificielle et la vulnérabilité de l’espace virtuel. En fait, chaque nouvelle

949 Dans un ouvrage récent, le philosophe québécois Hervé Fischer rappelait que le temps accéléré instauré par la révolution numérique détruisait non seulement la valeur de la mémoire, mais suscitait aussi une anxiété à l’endroit du futur. Voir. H. Fischer, Le choc du numérique: essai (Montréal, 2001), p.84.

050 A. Ananthaswamy “Too Many Photos, too Little Time ...”, New Scientist, 181 (3-10 avril 2004): p.21.

151 Pogue “Pixel Counting ...”, loc. cit.

252 C. Montpetit, “25 ans d’archivage derrière nous”, Le Devoir (Montréal), 20 déc. 2008.

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génération d’ordinateurs, chaque virus informatique et n’importe quel crash d’équipement

présente un risque pour tout matériel d’archives numérisé. Or, faute d’espace, les centres

d’archives ne peuvent con-server une copie des millions de photographies d’actualité, récentes

ou anciennes, qui existent seulement en format numérique. Cela en laisse certains sceptiques,

d’autres optimistes, quant aux possibilités de préserver la mémoire collective pour les

générations futures.

1.2.6 Les usages illicites du numérique

Aujourd’hui, n’importe qui, équipé d’une caméra-téléphone, peut capter des images dans

un lieu public et aussitôt les disséminer un peu partout à travers le monde. Cela en amène

plusieurs à se demander comment protéger les individus contre ces intrusions dans la vie privée

et quelles sont les attentes du public en ce domaine? Tous ont déjà entendu parler de ces photos

prises inopinément au dessus d’un décolleté féminin ou en dessous d’une jupe, et ayant fait le

tour du monde53. Même chose pour les photos de célébrités prises à leur insu. Par ailleurs, l’essor

prodigieux de sites de réseautage personnel tels que Facebook et My Space, mis en place par

Google, a amené beaucoup de jeunes54 à échanger des détails salaces sur leur vie privée ou

encore sur celle de leurs camarades de classe.Que dire, par exemple, d’un site de clavardage

intitulé Don’t Date Him Girl, qui invite des jeunes femmes à livrer des commentaires intimes sur

353 Dans plusieurs villes américaines, on a déjà commencé à bannir les caméras-téléphonesdes vestiaires et des toilettes publiques. En Corée du Sud, une loi requiert qu’un bruit distinctif se fasse entendre lorsqu’une image est prise avec un appareil-photo de poche. Voir: Mullins “Picture This”, loc. cit., pp.26s.

454 En 2006, My Space comptait déjà à son actif plus de 100 millions de profils, la plupartdu temps initiés et visités par des jeunes en bas de 19 ans. Voir: D. Solove, “The End of Privacy?”, Scientific American, 299.3 (sept. 2008): p.102.

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les hommes avec qui elles ont eu une relation, avec noms et photos à l’appui 55? Cette

transformation des moeurs constitue une profonde menace à l’intégrité des personnes et au droit

à la vie privée. Nous ne sommes pas sans ignorer que la répu-tation joue une rôle capital dans

toute société qui se respecte.Quoi faire, alors, face à cette exposition outrancière d’informations

personnelles? Les ingénieurs de la compagnie Hewlett-Packard ont inventé récemment une sorte

de macaron électronique à l’usage des individus qui veulent se protéger contre les intrusions dans

leur vie privée. Dès qu’une caméra est détectée, le macaron lui transmet alors un signal

infrarouge, lequel signal a pour effet de brouiller le visage de toute personne dotée de cet outil

préventif. Mais cela risque d’être insuffisant, compte tenu que ce dispositif n’est com-patible

qu’avec un nombre limité de caméras56. En outre, il s’avère impérieux de revoir le concept légal

de confidentialité en fonction de la nouvelle réalité du cybermonde. Aux États-Unis comme au

Canada, les législateurs devront tôt ou tard se pencher sur ce concept et tenter de définir qu’est-

ce qui représente un sujet d’intérêt publique sur Internet et qu’est-ce qui constitue un préjudice

au droit à la vie privée des individus57. Le peu que l’on puisse dire est que la frontière demeure

encore floue.

Autre usage illicite de la photographie à l’ère du numérique: la pornographie. Loin de

moi l’idée de vider la question ou oser une thèse sur un tel sujet, qui me semble beaucoup plus

complexe que ce que les apparences ne laissent entrevoir. Loin de moi aussi l’idée d’associer la

pornographie à la seule période contemporaine. Ce travers de la condition humaine existait déjà

555 Ibid., p.104.

656 B. Fox, “Evading the Secret Snappers”, New Scientist, 181 (13-20 nov. 2004): p.27.

757 Solove, “The End of Privacy”, loc. cit., pp.104-106.

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avant même que la photographie ne fût inventée, et sans doute remonte-t-il à la nuit des temps58.

Ce qui est nouveau avec le numérique, c’est le volume et la vitesse avec laquelle les images

pornographiques peuvent voyager sur la toile. Pas étonnant d’ailleurs qu’en 2001, la

pornographie en ligne représentait déjà une industrie rapportant plus de $1.5 milliard aux États-

Unis59. Cette recrudescence a certainement à voir avec la crainte du SIDA, comme le prétendent

plusieurs penseurs, mais s’en tenir qu’à cela équivaut à passer à côté d’un phénomène

civilisationnel beaucoup plus profond et surlequel je n’ai malheureusement pas le temps de

m’attarder dans le cadre de cet exposé. La facilité également avec laquelle il est possible de

travestir les images grâce à des logiciels comme Adobe n’est pas sans compliquer la tâche des

tribunaux, notamment dans les cas de poursuite pour possession de porno-graphie infantile.

D’ailleurs, la décision de 2002 de la Cour Suprême des États-Unis de ne pas consi-dérer les

images de ce type entièrement conçues par ordinateur, comme pouvant pouvant faire l’objet de

sanctions, n’a certes pas arrangé les choses. Cependant, des organisations comme le Child

Victim Identification Program (Alexandria, Pa.) travaillent actuellement à identifier les enfants

victimes d’abus et à détecter la part d’authenticité des images pornographiques à l’aide de

logiciel sophisti-qués, cela dans le but de faciliter les recours en justice60. Dossier à suivre ...61.

858 Voir à ce sujet: Freund, op. cit., pp.84-85, 179-182.

959 Fischer, op. cit., p.344.

060 Il est à noter que plusieurs promoteurs des sites pornos utilisent des visages d’enfants empruntés à des photos d’écoles pour les greffer à des corps d’adultes, cela en vue de brouiller les pistes. Voir: A. Jesdanun, “Kiddie Porn Cases Made More Difficult by Photoshop”, Globe and Mail (Toronto), 25 févr. 2008.

161 La stéganographie constitue une autre formed’usage illicite de la photo numérique.Cet-te pratique consiste à encoder les pixels d’une image, de manière à faire passer un message haineux, incognito, sur Internet. Cette façon de faire aurait été passablement utilisée par les organisations terroristes, ces dernières années. Voir: Farid, “A Picture Tells a Thousand Lies”, loc. cit., p.41.

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1.2.7 Les conséquences esthétiques du numérique

Comment mesurer l’impact de la photographie numérique en art. D’abord, il convient de

préciser que la photographie n’est pas un art à proprement parler, au même titre que la peinture

ou la poésie. Comme le rappelait l’essayiste new-yorkaise Susan Sontag, la photographie est

avant tout un médium, voire un langage à vocation multiple, au moyen duquel il est possible

entre autres choses de créer des oeuvres d’art62. Cette réflexion demeure toute aussi valable,

sinon plus, aujourd’hui, à l’ère du numérique et du multimédia en art. Ce qui a changé avec

l’image post-photographique en art, c’est le contexte de production, de telle sorte qu’il est

difficile aujourd’hui d’inscrire une oeuvre d’art dans la durée, tout autant d’ailleurs que de cibler

les grands artistes et de faire de leurs travaux un critère de validité esthétique. Il est vrai qu’avec

les possibilités immenses qu’offrent les médias électroniques à quiconque voulant exploiter ses

talents artistiques, l’anonymat a fini par s’installer au détriment de la personnification des

grandes oeuvres. La quantité et la vitesse avec laquelle les nouvelles oeuvres d’art voyagent sur

la toile, de même que leur relatif nivellement au plan esthé-tique, font en sorte que tout devient

facilement éphémère. En fait, c’est tout le système de l’art classique et moderne qui est remis en

question, avec sa valorisation de l’objet et sa signature unique des oeuvres, impliquant un

marché, des collectionneurs et des musées63. Est-ce que cela est une bonne chose? Les points de

vue sont encore partagés à ce sujet. Certains applaudissent l’explosion de créations artistiques

suscitée par le numérique en photographie. Selon eux, il s’agirait là d’une victoire sur l’élitisme

et l’académisme, propice à reconcilier l’art et la société comme cela était d’usage dans les

262 S. Sontag, On Photography (New York, 1978), p.148.

363 Voir à ce sujet: Fischer, op. cit., pp.166-167, 394.

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sociétés primitives64. D’autres comme le photographe américain Lawrence Gartel vont même

jusqu’à dire qu’en fusionnant l’art et la science, le numérique annoncerait une renaissance de la

photographie puisque, ce faisant, on libèrerait un imaginaire impensable dans le cadre de la

photographie argentique65. Ceux qui éprouvent un scepticisme à l’endroit du numérique parlent

généralement d’une désacralisation de l’art, ou encore d’une perte de repères, dans la mesure où

l’oeuvre photographique deviendrait un “simulacre”, c’est-à-dire une copie (même un double

d’une copie) pour laquelle il n’existerait aucun original66. D’autres évoquent la disparition de la

photographie noir et blanc, étant donné que les gammes d’expositions des capteurs de noir et de

blanc sur les appareils numériques sont limitées, exposant les usagers aux effets d’aberration.

C’est peut-être l’une des raisons pour laquelle l’éminente photographe américaine Mary Ellen

Mark a choisi de ne jamais travailler avec le numérique et de rester fidèle à l’argentique67.

ESSAI 2

DISCOURS THÉORIQUES AUTOUR DE LA PHOTOGRAPHIE

464 S. H. Edwards, “Post-Photographic Anxiety Bit by Bit”, History of Photography, 22.1 (print. 1998): pp.1-3; Fischer, op. cit., p.394.

565 Cité dans: Aaland, op. cit., p.157.

666 V. Burgin, “Photography in the Year 2000”, European Photography, 16 (aut.1995): p.68.

767 J.-F. Nadeau, “Mary Ellen Mark célèbre la chambre noire”, Le Devoir, 14 sept. 2008.

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Lorsqu’on examine les discussions qui entourent les débuts de la photographie au XIXe

siècle, on s’aperçoit qu’elles sont surtout initiées par des journalistes, des artistes et des

scientifiques, mais pas vraiment par des philosophes. En fait, les philosophes et autres penseurs

théoriques ont manifesté un intérêt tardif pour la photographie, comme s’ils ne parvenaient pas à

saisir le sens et les codes de ce nouveau langage visuel. Parmi les premiers à avoir tenté une

explication en ce domaine, il convient de mentionner le philosophe et sémiologue américain

Charles S. Peirce qui, autour des années 1895-1902, percevait l’image photographique comme

un signe ou mieux, comme un objet emblématique doté des valeurs de son époque, mais

entretenant un rapport physique indirect avec la réalité. À la même époque, le philosophe

français Henri Bergson précisait dans un ouvrage que la vue photographique des choses ne

pouvait être considérée comme une perception de la réalité, étant donné que la photographie

opère par prélèvement sur le flux du vécu. En ce sens, elle serait plutôt une pure représentation

de la réalité, voire une atteinte à l’unité du temps de la nature, puisqu’elle supprimerait ce qui

précède et ce qui suit la prise du cliché. Toutefois, on ne saurait parler ici de véritable tentative

d’interprétation philosophique de la photographie, si l’on tient compte du fait que dans les deux

cas les auteurs poursuivaient d’autres fins: élaborer les fondements d’une théorie des signes pour

l’un, comprendre les mécanismes de l’intuition pour l’autre1.

Nous aimerions profiter de ce chapitre pour rassembler les principaux éléments qui ont

ali-menté l’effort de réflexion sur la photographie au XXe siècle, en prenant en considération les

travaux pionniers d’essayistes comme Walter Benjamin et ceux plus contemporains rédigés par

des penseurs, tels que le sociologue Pierre Bourdieu ou l’écrivaine-photographe Susan Sontag.

11 Voir: C. S. Peirce, “Logic as Semiotic: the Theory of Signs” (c.1895) et H. Bergson, Matière et Mémoire (Paris, 1896), cités dans Y. Michaud, “Formes du regard: philosophie et photographie”, in M. Frizot (dir.), Nouvelle histoire de la photographie (Paris, 1994), p. 732.

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Suivra une discussion sur le rapport ambigu qu’entretiennent les historiens avec le document

photographique.

2.1 Les premières tentatives de réflexion théorique sur la photographie

Le philosophe et critique littéraire allemand Walter Benjamin (1892-1940) est

probablement l’un des premiers à avoir consacré un essai complet à la photographie. Intrigué par

l’éclatement récent des pratiques artistiques dans son pays d’origine, il publie dès 1931, une

Petite histoire de la photographie2, dans laquelle il s’interroge sur la place du “nouveau

médium” dans cette efferves-cence artistique et sur la teneur du dialogue engagé depuis plus

d’un siècle entre la peinture et la photographie. Sans pour autant nier l’apport considérable de la

peinture en ce qui a trait au traitement de la perspective et de la lumière, Benjamin se garde

bien, à l’inverse de plusieurs de ses contemporains, de vouloir tout mesurer à l’aune de ce moyen

d’expression. Très vite est-il amené

à percevoir la photographie comme une construction singulière qui transcende l’art

conventionnel.

Pour lui, la photographie se distingue avant tout par son aptitude à révéler la nature seconde,

voire souterraine, des sujets ou des objets représentés. Cela s’expliquerait tout simplement par le

fait que les personnes et les choses ne s’expriment pas dans le même “langage” que celui de la

vie courante, lorsque confrontées à la caméra. N’est-ce pas d’ailleurs ce à quoi Benjamin fait

22 Cet opus fut d’abord publié en Allemand dans la revue Literarische Welt, puis traduit enfrançais pour le compte d’un ouvrage posthume consacré à l’oeuvre du philosophe. Voir: W. Benjamin, Essais, vol.I: 1922-1934 (Paris: Denoël/Gonthier,1983), pp.149-174.

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référence quand il confesse son admiration devant la profondeur et l’intériorité saisissante des

personnes captées selon la technique du daguerréotype au XIXe siècle:

La faible susceptibilité des anciennes plaques exigeait un très long temps d’expo-sition en plein air [...] La synthèse de l’expression obtenue de force par la longue immobilité du modèle est la principale raison pour laquelle ces clichés [...] produisent sur le spectateur une impression plus frappante et plus durable que les photographies actuelles3.

Malheureusement l’auteur ne nous dit pas pourquoi ces empreintes révélatrices de la nature

profonde des êtres se sont effacées avec l’évolution des techniques de photographie. Par contre,

le regard intro-spectif sur les objets se serait renforcé avec les innovations apportées aux caméras

à partir des années 1880. Les progrès réalisés en matière de vitesse d’obturation et

d’agrandissement des épreuves auraient permis, selon lui, de sonder la dimension invisible des

objets. Ce qu’il appelle l’inconscient optique des choses résiderait dans l’infime instant d’un

cliché (ex. la richesse du spectre lumineux produit par l’étincelle d’une décharge électrique) ou

le menu détail d’un article (ex. l’architecture gothique d’un chardon agrandi plusieurs fois). Mais

pour parvenir à cette connaissance morpho-psychologique des objets, encore fallait-il libérer ces

derniers de leur aura symbolique. Pour Benjamin, il reviendrait au photographe français Eugène

Atget (1857-1927) d’avoir fait la transition historique d’une culture iconographique, basée sur la

valeur rituelle des images, à une culture de l’information visuelle, fondée sur le pouvoir à la fois

documentaire et esthétique de ces mêmes images. Dans l’oeuvre d’Atget (notamment ses

représentations de Paris au début du XXe siècle), on ne retrouve ni âme qui vive, ni points de

repère, comme si l’auteur avait voulu éliminer intention-nellement toute référence intime au

paysage pour mieux faire ressortir le raffinement des détails et le pouvoir d’évocation des

éléments négligés. Par cette redécouverte de la nature seconde des choses, Atget aurait non

seulement renoué avec l’esprit originel de l’acte photographique, mais il aurait été également un

33 Ibid., p.155.

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précurseur, selon Benjamin, de la photographie surréaliste4.

Née en Allemagne, mais ayant fait de la France son pays d’adoption, la photographe

Gisèle Freund (1908-2000) compte également parmi le petit nombre d’intellectuels à avoir

alimenté, grâce à leurs écrits, les premiers efforts de réflexion sur la photographie. Ayant étudié

la sociologie avec Theodor Adorno et Norbert Elias, d’abord à Francfort, puis à Paris, elle

accouche en 1936 d’une thèse ayant pour titre, La photographie en France au XIXe siècle. Sa

longue carrière de photo-journaliste l’amènera par la suite à rédiger de nombreux articles sur le

sujet, qu’elle rassemblera dans un recueil intitulé, Photographie et Société, en 1974. À l’instar de

Benjamin, Gisèle Freund s’intéresse aux vertus documentaires de la photographie, mais plutôt

que d’aborder le phénomène par le biais de l’art et de la psychanalyse, elle privilégie un

approche beaucoup plus pratique qui la conduit à s’interroger sur la valeur heuristique des photo-

reportages.

Nul doute pour elle que c’est dans l’Allemagne des années 1920 et des années 1930 que

le photojournalisme prit son envol, avec la venue des premiers magazines illustrés, comme le

Berliner Illustrierte et le Münchner Illustrierte Presse, et également avec le concours de

professionnels aguerris, comme Erich Salomon et Felix H. Man, qui contribuèrent à mettre sur

pied un genre tout à fait inédit pour l’époque: la narration journalistique à partir d’une succession

signifiante d’images.

Profitant du format compact des caméras dernier cri, telles l’Ermanox et la Leica, et de leur

capacité à saisir des prises intérieures sans flash, ces photo-reporters vont se lancer dans une

série d’enquêtes sur la vie quotidienne des masses populaires. Sans être vus ni entendus, ils

parviendront à croquer sur le vif des ouvriers travaillant en usine, des manifestations de rues, des

fêtes populaires, des scènes de restaurant, voire de combats de boxe. Ces pionniers du

44 Ibid., p.160.

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photojournalisme moderne seront cependant bien vite acculés à l’exil, sous le coup des sévères

restrictions imposées à la liberté de presse par les dirigeants de l’Allemagne nazi après 1933.

Bon nombre d’entre eux iront s’installer en France en Angleterre et aux États-Unis, où ils

exerceront une influence décisive sur la l’évolution de la presse illustrée5.

Pour avoir observé les travaux des premiers photo-reporters et pour avoir elle-même

prati-qué le photojournalisme durant une grande partie de sa carrière, Gisèle Freund connaît bien

les aléas du genre. S’il est vrai, selon elle, que les reportages photographiques apportent un

regard nouveau sur l’actualité et que leurs qualités visuelles renforcent la crédulité de lecteur à

l’endroit des faits relatés, rien n’indique qu’ils soient pour autant objectifs:

La lentille, cet oeil prétendu impartial, permet toutes les déformations possibles de la réalité, parce que le caractère de l’image est chaque fois déterminé par la façon de voir de l’opérateur et les exigences de ses commanditaires. L’importance de la photo-graphie ne réside donc pas seulement dans le fait qu’elle est une création, mais dans le fait surtout qu’elle est un des moyens les plus efficaces de façonner nos idées et d’influer sur notre comportement6.

C’est d’ailleurs en vertu de cet immense pouvoir de persuasion que plusieurs photo-reportages

auraient basculé dans le mensonge, la propagande et le détournement de sens, notamment dans

les sociétés soumises au joug de régimes totalitaires et dictatoriaux. Pour Freund, il existerait au

moins quatre manières de manipuler les images d’un portfolio de presse: 1. par l’attribution de

fausses légendes à des photos prise sur le théâtre d’un événement; 2. par juxtaposition de

nouvelles images à celles déjà convenues pour un reportage; 3. par la mise en scène dramatique

d’un acte banal en vue de le faire passer pour un fait notoire d’actualité; 4. par la technique bien

55 G. Freund, Photographie et Société (Paris: Seuil, 1974), pp.107-111, 115-117, 121s.

66 Ibid., pp.6-7.

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connue de falsification des éléments constitutifs de l’image7. Ainsi, à l’ère des communications

de masse, il suffirait de bien peu de choses, selon Freund, pour altérer le message d’une ou de

plusieurs photographies, d’où l’immen-se fragilité du statut documentaire des photo-reportages.

Autre sujet de prédilection de cette éminente sociologue, la photographie amateure.

Consta-tant le nombre grandissant de néophytes et de clubs privés s’adonnant à la photographie

durant les années 1960, elle ne peut s’empêcher d’y voir un désir d’échapper au sentiment

d’aliénation qui prévaut dans nos sociétés modernes. Dans un monde dominé par la

technostructure, où l’homme est réduit à n’être que le simple rouage d’un mécanisme complexe

échappant à sa compréhension, la photographie permettrait de satisfaire son besoin de création et

sa quête identitaire. Ce repli vers l’intime devant un monde en perte de repère aurait toutefois le

désavantage, selon Freund, d’amener de plus en plus de gens à vivre des expériences par

procuration. C’est le cas notamment des touristes qui, faute de ne pouvoir tout absorber en

voyage, se contentent de prendre une somme colossale de photos, sous prétexte que celles-ci

aideront à raviver la mémoire des sites visités et qu’elles se substitueront au savoir émanant de

ces lieux8. Bien que Freund n’ait pas exploré toute la richesse symbolique de la photographie

amateure, son oeuvre a le mérite d’avoir jeté les bases d’une saine réflexion pour les générations

futures d’intellectuels.

2.2 Les penseurs issus du milieu des études culturelles après 1960

Compte tenu de l’originalité de ses travaux et de l’influence décisive qu’il a exercé sur la

vie intellectuelle, le sociologue et philosophe français Pierre Bourdieu (1930-2002) peut être

considéré à juste titre comme l’un des principaux chefs de file de la nouvelle école des études

77 Ibid., pp.154-161.

88 Ibid., pp.7, 195-202.

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culturelles ayant émergé durant les années 1960. Intéressée par l’étude des mécanismes qui

président à la reproduction des hiérarchies sociales, son oeuvre met en lumière l’importance

capitale des facteurs culturels et symboliques dans l’évolution des rapports de domination au sein

des sociétés. Ainsi, pour Bourdieu, l’héritage culturel et les dispositions acquises de façon

inconsciente (l’habitus) constitueraient les principaux ferments de la lutte que se livrent les

agents sociaux pour occuper les positions dominantes à l’intérieur de divers sous-espaces

autonomes (champs de compétition sociale) comme la politique, la famille, l’école et les arts.

Foyer d’une production symbolique majeure et lieu par excellence pour observer un riche

échantillonnage d’interactions sociales, le monde des médias en viendra très vite à occuper une

place importante dans son agenda de recherche. C’est d’ailleurs ce qui l’amènera à publier dès

1965 un essai sur la culture photographique, que les adeptes des études culturelles considèrent

encore aujourd’hui comme un livre culte9.

Pour Bourdieu, la photographie est d’abord et avant tout un acte promotionnel qui

consiste à élever un objet commun en un objet digne d’être photographié. Derrière toute

entreprise de fixer le réel sur pellicule, il y aurait donc une décision volontaire, un choix délibéré,

voire une volonté irréductible de classifier les événements du passé et de leur donner un ordre

d’importance10. Or, ce qui fait l’originalité de la pensée de Bourdieu, c’est d’avoir compris que

les normes organisant la saisie photographique du monde sont indissociables du système de

valeurs propre à une classe, à une profession ou à une quelconque chapelle artistique. Autrement

99 P. Bourdieu et al., Un art moyen: essais sur les usages sociaux de la photographie (Paris: Éditions de Minuit, 1965).

010 Contrairement à la gravure et à la peinture, ces choix délibérés n’interviendraient paspendant l’étape de production, puisque la photographie se dessine par elle-même grâce à l’action des agents chimiques ou électroniques. L’intention photographique se situerait plutôt avant (choix des angles de vue) et après (usage des clichés) l’étape de production Voir: Ibid., p.300.

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dit, la photographie ne serait rien d’autre qu’un acte de déconstruction du réel, une perte de

substance, par lequel l’image retrouverait tout son sens qu’en acquérant une existence

symbolique. La photographie étant une technique capable de fixer instantanément ce qui se

passe, elle met en présence des éléments qui nous parais-sent familiers et authentiques, mais qui

finissent par nous faire oublier que toute image est une représentation du réel ayant pour but de

légitimer les valeurs et les aspirations d’un groupe social.

À l’instar de l’essayiste et sociologue Gisèle Freund, Bourdieu consacre plusieurs pages

de son livre à étudier les mobiles à l’origine de l’engouement pour la photographie amateure en

France, et les fonctions sociales adjacentes à ce type de rituel collectif. Il lui apparaît très vite

que l’attirance pour la photographie amateure prendrait sa source parmi un ensemble de

motivations universelles divisibles en cinq points: 1. recherche d’un substitut magique au

potentiel destructeur du temps; 2. besoin de communiquer ses sentiments avec autrui en faisant

revivre les moments du passé; 3. volonté de réalisation de soi par l’extériorisation de ses

prouesses techniques ou artistiques; 4. quête de la reconnaissance sociale par étalage de ses

réussites personnelles (graduation, promotion, hommage, etc.); 5. inclinaison pour toute activité

ludique capable de fournir un moyen d’évasion aux affres de la vie quotidienne11. Si Bourdieu

semble à ce point intéressé à scruter le côté obscur des pratiques amateures, c’est qu’il y voit un

puissant révélateur des valeurs éthiques et morales des classes moyennes. Rien ne serait plus

réglé et plus conventionnel, selon lui, que les photographies d’amateurs. Par leurs poses

empruntées et empesées, confinant les individus dans des rôles sociaux, celles-ci ne feraient que

se conformer aux règles non écrites d’une étiquette sociale. D’ailleurs, lors de séances de

photographie de groupe, il n’y a qu’à voir la convergence des regards et l’ordonnance des

111 Ibid., pp.32-33.

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individus pour constater la cohésion de l’agrégat représenté (entreprise, association sportive,

cercle littéraire, etc.). La recherche de la frontalité ne serait pas sans rappeler les anciens codes

d’honneur en vertu desquels il importait de donner à autrui l’image la plus honorable de soi afin

d’imposer le respect. Ce conformisme photographique qui célébre la hiérarchie sociale et

l’autodisci-pline du groupe serait en parfaite synchronie, selon Bourdieu, avec les valeurs des

classes moyennes. On pourrait en dire autant des portraits de famille qui constituent le lot

principal des clichés amateurs, sauf que, dans ce cas-ci, le photographie aurait pour fonction

première de solenniser les grands moments de la vie familiale (naissance, première communion,

mariage), de manière à réaffir-mer l’unité du groupe toujours menacé d’éclatement sous l’effet

de la dispersion géographique:

Une société qui se dissout à chaque instant pour se reformer sur d’autres points, mais dans des conditions nouvelles et avec de tout autres éléments, n’a pas assez de conti-nuité pour se faire un physionomie qui lui soit propre et à laquelle puissent s’attacher ses membres12.

On comprend dès lors la nécessité de la photographie comme valeur-refuge dans un monde en

constante mutation13.

Dans un chapitre intitulé “Trompe-l’oeil et faux-semblant”, Gérard Lagneau (à qui

Bourdieu a confié le soin de prolonger son enquête) aborde le thème de la photographie

publicitaire. Son analyse fait ressortir d’entrée de jeu les difficultés à cerner les frontières du

genre. Cela serait dû au fait que la photographie à vocation commerciale engloble un large

éventail de sous-catégories, depuis l’annonce visant à fournir un schéma explicatif d’un produit

technique jusqu’à l’oeuvre d’art où le produit à vendre tend à s’effacer au profit de l’image de

prestige induite par la qualité esthétique de la présentation. Cette ambiguïté serait également

212 E. Durkeim, Le Suicide (Paris, 1897), p.433

313 Sur le conformisme de la photographie, voir: Bourdieu, op. cit., pp.118-120. Quant à sa fonction familiale, voir: Ibid., pp.25, 39-41.

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attribuable au fait que le photographe à l’emploi d’une agence commerciale n’est pas le maître

absolu de son oeuvre, mais plutôt un exécutant livré à toute sorte de compromis, dans la mesure

où il doit servir une intention (celle du publicitaire)14 et dans la mesure où il doit constamment

chercher à concilier des exigences contradictoires (celle de la présentation informative de l’objet,

qui lui confère une authenticité, et celle de sa symbolisation exhaltante, qui lui donne une

puissance suggestive). L’analyse de Lagneau acquiert toutefois sa pleine mesure que lorsqu’il

invalide l’hypothèse psychanalytique de l’imprégna-tion subconsciente des images publicitaires.

Pour lui, l’efficacité d’une photographie commerciale résiderait avant tout dans sa capacité à

faire rêver dans les limites du raisonnable. En d’autres mots, pour que le message puisse

atteindre son but, il faut que la situation offerte reste à la portée d’un groupe de spectateurs

socialement définis. Il serait donc faux de croire que l’on peut faire acheter n’importe quoi à

n’importe qui, par simple matraquage publicitaire. Nul produit ne peut trouver preneur si l’image

publicitaire qui le représente ne fait pas appel à des symboles accessibles, à travers lesquels le

spectateur puisse se reconnaître et se projeter15.

Formée à l’école de la nouvelle critique littéraire lors d’un séjour en France, l’essayiste

amé-ricaine Susan Sontag (1933-2004) est à l’origine de nombreux articles et ouvrages sur l’art,

la littérature et les religions. Après avoir enseigné pendant un certain temps à l’Université de

Columbia (New York), puis collaboré à diverses revues comme le New Yorker, le Partisan et le

Times, elle se consacre totalement à la rédaction d’un essai critique sur la photographie, qu’elle

publiera en 197716. Fruit d’un long travail de réflexion, ce livre examine le réalisme présumé des

414 D’ailleurs, la photographie publicitaire offrirait cette particularité de n’exister que pour se subordonner au texte, ou au slogan, dont elle a la mission d’illustrer. Voir: Ibid., p.216.

515 Ibid., pp.201-203, 213-216.

616 S. Sontag, On Photography (New York: Farrar, Straus & Giroux, 1977).

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images photographi-ques, leurs multiples usages dans nos sociétés et leur signification éthique, à

une époque où l’on célèbre le thriomphe des photo-reportages et de la publicité sur la scène

médiatique. Salué pour la justesse de son propos, l’essai de Susan Sontag exercera une influence

décisive sur toute une géné-ration de jeunes intellectuels, tant en Europe qu’au États-Unis17.

L’un des grands apports de Sontag au plan théorique est d’avoir perçu dans la préséance

de l’image un trait distinctif de la modernité culturelle. Pour elle, une société ne devient

“moderne”qu’à partir du moment où son activité principale consiste à produire et à consommer

des images, qui, en tant que substitut à l’expérience, finisse par se révéler indispensable à la

santé de l’économie, à la stabilité du climat politique et à la quête du bonheur personnel18.Ce

besoin d’images ne s’expli-querait pas nécessairement, selon elle, par une quelconque pathologie

collective issue du progrès technique, mais plutôt par une perte de consistance de la réalité et une

plus grande difficulté à en saisir les contours tout au long du XXe siècle.

Se questionnant sur la nature profonde et l’impact réel des reportages photographiques,

Sontag découvre bientôt à travers eux l’expression de valeurs antinomiques qui ne sont pas sans

rappeler les deux faces de Janus. Ainsi, par son pouvoir d’évocation, la photographie

parviendrait à percer les domaines les plus opaques de la vie courante et à débusquer ces

moments entre deux, où la réalité bascule dans une sorte de déséquilibre, permettant ainsi

717 Voir entre autres choses: K. T. Walton, “Transparent Pictures: on the Nature of Photo-graphic Realism”, Critical Inquiry (déc.1984): pp.91-118; Y. Michaud, “Les photographies: reliques ou vrais-semblants?”, Critique 459/460 (août-sept. 1985): pp.761-780; et J.-M. Schaeffer, L’image précaire du dispositif photographique (Paris, 1987).

818 Alors que dans les sociétés primitives, le fait d’être photographié constitue un outrage àl’intégrité de la personne, voire un sacrilège religieux, le même acte sera interprété par l’homme moderne comme un moyen conférer une existence réelle à son image. Voir: Sontag, op.cit., p.161.

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d’élever la conscience de toute personne croisant son regard19. Mais, en même temps, une trop

fréquente exposition aux images d’actualité risquerait, selon elle, de niveler tous les phénomènes

(exploits sportifs, famines, monda-nités artistiques, guerres, etc.) et de banaliser le spectacle de la

misère humaine. En d’autre mots, le pouvoir émotionnel de n’importe quel photo-reportage sur

la détresse serait inversement proportion-nelle au degré de familiarité que nous avons avec ces

images20. Pire encore, en donnant une valeur esthétique à la tragédie humaine, la photographie

contribuerait à transformer l’histoire en spectacle et à réduire tout individu au simple rang de

“voyeur”, dans un monde où il aurait tendance à se percevoir de plus en plus comme un témoin

impuissant à changer le cours des choses.

Le verdict posé par Sontag sur la photographie s’avère au demeurant assez pessimiste.

Ainsi, lorsqu’un photo-reportage parvient à piquer la curiosité, ce ne serait, selon elle, que par

sentimenta-lisme et non pas dans un esprit didactique, puisque toute image, aussi forte soit-elle,

ne pourrait prétendre donner une connaissance politique ou philosophique de la réalité. En outre,

les sociétés capitalistes auraient un grand besoin d’exercer un contrôle sur les images, non

seulement pour stimuler la vente des produits de consommation ou anasthésier sous forme de

divertissement les blessures découlant des inégalités sociales et raciales, mais aussi pour

collecter des informations afin d’assurer l’ordre, d’augmenter la productivité du travail, de mener

la guerre de façon efficace et d’exploiter le plus rationnellement possible les ressources

919 Pour Sontag, une image comme celle, publiée en 1972,de cette jeune vietnamienne cou-rant dans la rue, après avoir été arrosée de napalm par les bombardiers américains, fit davantage pour la cause de la paix aux États-Unis que des centaines de reportages télévisés sur la guerre au Vietnam. Voir: Ibid., p.18.

020 À cet égard, Sontag montre comment les photographies de la famine survenue au Biafraen 1967 ont eu beaucoup moins d’impact que ce celles décrivant la famine en Inde aux début des années 1950, alors que les Occidentaux visualisaient pour la première fois l’ampleur d’une telle catastrophe humanitaire. Voir: Ibid., p.19.

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naturelles21.

Dans un second ouvrage publié en 2003 22, Sontag nuance ses positions sur la valeur

éthique des photo-reportages et reconsidère la capacité de ces derniers à modifier le cours des

événements historiques, et ce, malgré le fait que notre monde contemporain soit dominé plus que

jamais par la culture du spectacle. Contrairement à ses écrit antérieurs, Sontag attribue à l’image

photographique une force distincte par rapport aux autres formes de communication visuelle

(reportages télévisés, vidéos, films, etc.). Selon elle, la photographie frapperait davantage

l’imagination, dans la mesure où elle offrirait, parmi le lot d’informations visuelles, une coupe

verticale et compacte de la réalité facilitant ainsi son appréhension et sa mémorisation, tel un

proverbe par rapport à un récit descriptif. Qui plus est, les photo-reportages d’atrocités (guerres,

génocides, catastrophes naturelles, etc.) cons-titueraient encore l’un des meilleurs moyens

capable de susciter un sentiment de proximité et d’adhésion à l’endroit de la souffrance humaine.

Mieux que n’importe quel slogan, ceux-ci pave-raient la voie à un système de références

collectif et agiraient comme une sorte de totem permettant de rallier un ensemble de personnes

autour d’une même cause. Sontag ne renie toutefois pas l’idée qu’une exposition trop fréquente

aux images d’atrocités finissent par amoindrir, voire annihiler, leur effet de choc, mais elle

reconnaît en même temps que certaines photos témoignant de graves injusti-ces peuvent laisser

une empreinte indélébile dansla mémoire en raison de leur caractère insoutenable:

Pictures of the ruin of faces that will always testify to a great iniquity survived: the faces of horribly disfigured First World War veterans who survived the inferno of the trenches; the faces melted and thickened with scar tissue of survivors of the American atomic bombs dropped on Hiroshima and Nagasaki; the faces cleft by machete blows of Tutsi survivors of the genocidal rampage launched by the Hutus in Rwanda -- is it correct to say that people get used to

121 Ibid., pp. 23-24, 178-179.

222 S. Sontag, Regarding the Pain of Others (New York: Farrar, Straus & Giroux, 2003).

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these? 23

Ainsi donc, il existerait une catégorie d’images qui, selon elle, seraient moins sujettes à

l’effacement, et plus susceptibles d’éveiller les consciences, que d’autres.

Pour Sontag, il ne fait aucun doute que la Guerre civile espagnole (1936-1939) marque

les débuts de la couverture en direct d’événements tragiques, étant donné que les photographes

professionnels pouvaient se déplacer avec plus d’aisance sur le théâtre des combats, notamment

depuis l’invention de la caméra 35mm Leica, et qu’il leur était plus facile de transmettre leurs

images de façon immédiate dans les journaux du monde entier. Ce n’est toutefois qu’à partir de

1945, lorsque seront présentées pour la première fois les images des camps de concentration

nazis de Bergen-Belgen, Buchenwald et Dachau, que les photo-reportages relatant des drames

humains vont acquérir une certaine notoriété. On réalisera alors que la photo peut dépasser les

mots quand vient le temps de décrire l’impensable, tel que l’horreur vécue par les Juifs durant

l’Holocauste. Mais, pour qu’un conflit armé puis attirer l’attention des caméras, il faut

nécessairement qu’il soit investi d’une signification plus large que les enjeux stratégiques entre

les belligérants24.

Un peu plus loin dans son exposé, Sontag en vient à se demander pourquoi la société

améri-caine, si ouverte normalement à la misère des autres, se referme-t-elle soudainement

lorsque vient le temps d’examiner ses propres blessures au moyen de la photographie. Une des

réponses a beaucoup à voir avec la façon dont les Américains perçoivent la souffrance dans leur

323 Ibid., p.83.

424 Si les photos de la Guerre civile espagnole ont eu une telle résonance auplan internatio-tionale, c’est parce ce conflit symbolisait la résistance au facisme des années 1930 et qu’il repré-sentait, avec le recul du temps, une répétition générale de ce qui allait devenir la Seconde Guerre mondiale. Par contre, les images d’actualité sur la Guerre du Chaco qui opposa la Bolivie et le Paraguay à la même époque, et qui fit plus de 100 000 victimes, n’eurent jamais autant d’impact, faute de connotations dépassant les rivalités locales. Voir: Ibid., pp.35s.

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propre vie. Ainsi, les sociétés qui nourrissent une intolérance maladive à l’endroit de la

souffrance et de la mort, ressentis comme autant d’absurdités cruelles, auraient plus de chance de

développer une curiosité morbide à l’égard de la misère des autres (laquelle serait satisfaite en

partie par la photographie), afin de renforcer un sentiment d’exemption face aux calamités de la

vie. Cette attirance des Américains pour les photo-reportages relatant les atrocités commises à

l’étranger constituerait en même temps un puissant moyen d’occulter leurs propres blessures

historiques25. Cela serait d’autant plus vrai là où il existe déjà dans la psyché collective le

sentiment d’appartenir à un peuple élu, mandaté pour accomplir les idéaux d’une “destinée

manifeste” et ainsi servir de modèle aux autres nations.

Même s’il existe dans chaque photographie une part d’ombre qui ouvre la voie à une libre

interprétation, voire à un détournement de sens26, Sontag reste convaincue que ce medium exerce

encore un fonction vitale dans nos sociétés. Il serait faux de croire que nous vivons dans une

monde dominé exclusivement par les apparences et le spectaculaire, où la réalité aurait abdiqué

au profit de la représentation médiatique. Cela équivaudrait, selon elle, à faire preuve de

provincialisme, alors que des centaines de millions personnes à travers le monde croient encore

en la valeur de mettre en image le témoignage de leur propre souffrance. Il importe donc pour

525 Il y aurait en outre beaucoup moins de pudeur, de la part des photographes américains,à montrer des corps mutilés ou disloqués, lorsqu’il s’agit de couvrir des catastrophes humaines en Afrique ou en Asie, par rapport aux mêmes types de d’enquête journalistique ou historique aux États-Unis. Voir: Ibid., pp.72, 87-88.

626 Cela aurait beaucoup à voir avec ce qu’il est convenu d’appeler la polysémie de l’imagephotographique. En d’autres mots, une photographie pourrait receler plusieurs significations indé-terminées, toutes indépendantes de l’intention initiale de son auteur et sujettes aux caprices des diverses communautés de spectateurs. Ainsi, une photo qui montrerait de façon esthétique un paysa-ge ayant subi la dévastation à la suite d’une guerre risquerait beaucoup plus de susciter de la réprobation que de la sympathie, parce qu’elle serait aussitôt assimilée à un manque de sincérité et à de la manigance intellectuelle. Voir: Ibid., pp.26-27, 39, 75-76.

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Sontag de restaurer la valeur didactique des images de la souffrance et de reconnaître leur

capacité à faire réfléchir, ne serait-ce pour montrer jusqu’où des êtres en apparence normaux

peuvent aller dans la folie meurtrière et le crime haineux, sous le couvert de la bonne

conscience27.

Attiré très tôt par la littérature et le théâtre classique, le sociologue français Roland

Barthes (1915-1980) est considéré par plusieurs comme l’un des principaux artisans de la pensée

structu-raliste et sémiologique dans la France de l’après-guerre. C’est d’ailleurs en 1953 qu’il

publie son fameux livre, Le degré zéro de l’écriture, dans lequel il développe un genre de

critique plus sensible à la logique immanente du texte, établissant ainsi les premisses de sa

théorie des signes, des symbo-les et des représentations collectives. Il s’intéressera par la suite à

décortiquer le registre langagier du vedettariat, de la mode et de la photographie avec la

publication de Mythologies (1957), qui débouchera un peu plus tard sur un inventaire des

systèmes contemporains de signes avec Éléments de sémiologie (1965).Ce n’est que dans les

années 1970, après voir renoncé à un certain formalisme réducteur, présent dans la philosophie

structuraliste, qu’il renouera avec la photographie. Ainsi, dans une série d’articles consacrés au

sujet28, Barthes hésitera à désigner la photo comme un système orga-nique de signes (langage)

pouvant accoucher d’un message univoque. Il y aurait plutôt résistance à la signification. Selon

lui, la véritable génie de la photographie serait son pouvoir d’authentification, mais, rappelle-t-il,

l’image ainsi produite ne saurait dire ce qu’elle donne à voir, d’où le nombre infini

d’interprétations virtuelles. Barthes observe également que la photographie est constituée de

deux éléments complémentaires, sans lesquels aucune existence symbolique ne serait possible:

727 Ibid., pp.104-105, 109-112, 115, 117.

828 Ces articles seront réunis un peu plus tard sous forme de livre. Voir: R. Barthes, La chambre claire: notes sur la photographie (Paris: Seuil, 1980).

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d’abord, la la capacité d’évocation culturelle du sujet (le studium), puis, le détail poignant

capable de créer un hors-champ subtil propice à la divagation de la pensée (le punctum)29.

Au cours de ses travaux, Barthes s’est particulièrement intéressé au contenu sémiologique

de la photographie commerciale. Après avoir décortiqué un certain nombre d’images

publicitaires, il en vient assez vite à distinguer les trois niveaux de langage qui organisent ce

type de locution: 1.celui de l’annotation écrite de l’image, 2.celui de sa représentation littérale, 3.

et celui de sa conno-tation symbolique.Pour lui, le message écrit (vignettes publicitaires, noms de

marques commerciales, etc.) aurait avant tout pour mission de fournir l’ancrage nécessaire au

bon fonctionnement du message iconique. Par sa nature, le langage écrit exercerait un rôle

d’élucidation selective (pour ne pas dire répressive) de l’image, afin que le contenu symbolique

de cette dernière ne puisse proliférer indéfiniment. Il y aurait donc de la part des publicitaires une

volonté de trouver un antidote à la

polysémie des images. De son côté, l’image littérale agirait à la manière d’un message neutre,

sans code, relevant du domaine de l’inventaire descriptif. Ici, le message est unidirectionnel, il

correspond à ce que l’on voit, à ce qui est représenté par la nature morte d’une image.

Dépourvue de toute connotation culturelle, l’image littérale conserverait une sorte d’innocence

que l’on ne retrouve généralement qu’aux premiers stades de perception mentale. C’est d’ailleurs

ce qui lui permettrait de rendre normatif le contenu symbolique extrêmement dense des réclames

publicitaires. Le message symbolique serait constitué quant à lui d’un ensemble de signes

discontinus, dont la cohérence n’apparaîtrait que par association avec un contexte culturel donné.

L’originalité d’un tel langage résiderait dans le fait que chaque individu aurait la possibilité de

929 Ibid., pp.75, 135-136, 156.

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faire une lecture différente de la même unité lexicale, selon son appartenance sociale ou

culturelle. Au fil de ses réflexions sur la photographie publicitaire, Barthes nous met au coeur

d’un système où chaque composante sémiologique de l’images est solidaire de l’autre, où toute

modification apportée à un élément peut provoquer une réaction en chaîne susceptible de

bouleverser la dynamique générale de l’ensemble30.

Roland Barthes comptera de nombreux disciples qui, après sa mort, tenteront de

prolonger sa pensée sur la base du riche héritage conceptuel laissé par son oeuvre. C’est le cas

notamment de l’essayiste Kendall Walton qui élaborera une théorie de l’image transparente en

vertu de laquelle la photographie sera perçue non pas comme un mode d’expression plus exact

que les autres, mais plutôt comme un “aide visuel” pouvant montrer des choses qui ne sont pas

ou qui ne sont plus. Même filiation en ce qui concerne le philosophe Michel Serres, dont

l’ouvrage récent tend à associer l’image publicitaire à une forme de pollution symbolique de

l’environnement et à un désir de coloniser les âmes31.

2.3 Le mariage de raison entre l’histoire et la photographie

Peu de temps après l’invention de la photographie en 1839, de nombreux acadamiciens

perçurent dans ce médium un puissant instrument d’investigation du réel permettant de

reproduire avec exactitude les phénomènes naturels, afin d’en dévoiler les lois scientifiques32.

Nombreux étaient ceux qui entrevoyaient dans le photographie une possibilité de lire l’invisible

030 R. Barthes, “Rhetoric of the Image”, in A. Trachtenberg (éd.), Classic Essays on Photo-graphy (New Haven, Conn., 1980), pp.270-280.

131 Voir: K. T. Walton, “Transparent Pictures: On the Nature of Photographic Realism”, Critical Inquiry (déc. 1984): pp.91-118; et M. Serres, Le mal propre: polluer pour s’approprier? (Paris: Le Pommier, 2008).

232 On sait, par exemple, que la photographie fut à l’origine de nombreuses découvertesdans les domaines de la botanique, de la géologie, de l’astronomie et de la médecine au XIXe siècle.

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et de sonder l’impalpa-ble. Pour les plus fervents de ses protagonistes, le rêve d’une vision

totalisante du monde devenait enfin réalité. Nul doute que se cachait derrière la photographie,

l’espoir d’exercer une emprise sur un monde en transformation, dont la finalité échappait à la

compréhension des contemporains33.

Une des utopies fondatrices à l’origine de la photographie fut sans doute de prétendre

qu’elle constituait une technologie infaillible, capable de refléter fidèlement et impartialement la

réalité. Ne disait-on pas d’ailleurs du daguerréotype, lors de son apparition en 1839, qu’il était un

procédé technique par lequel la nature se peignait d’elle-même, grâce à un jeu de réflexion de la

lumière sur une plaque traitée au mercure. Conforme à l’esprit positiviste se son époque, on

disait également de la photographie qu’elle ouvrirait la voie à la connaissance universelle, en

rendant possible la collecte et la classification minutieuse de faits. Ainsi croyait-on percer les lois

régissant l’ordre naturel des choses. Plus important encore pour notre propos, on attribuait à la

photographie le pouvoir de repro-duire l’expérience historique et de l’analyser in vitro, grâce à sa

capacité de mimétisme de la réalité34.

Ceci dit, sommes-nous en droit d’affirmer que la photographie possède le même pouvoir

explicatif, lorsqu’elle sert de matériau de base aux travaux en sciences humaines? Comment

expliquer le retard des historiens à utiliser la photographie comme document à part entière dans

leurs travaux? Pourquoi la photographie a eu si peu d’impact sur le savoir historique jusqu’à

récemment? Voilà autant de questions ouvertes à la discussion.

Si les archivistes eurent vite fait d’utiliser la photographie comme outil de préservation de

333 R. Tremblay, “Une photographie vaut-elle mille mots?: Aperçu des problèmes métho-dologiques liés à l’utilisation des sources photographiques en histoire”, Communication présen-tée au congrès de l’Institut d’histoire de l’Amérique française, Montréal, 2003, p.1

434 J. M.Schwartz, “Record of Simple Truth and Precision: Photography, Archives, and the Illusion of Control”, Archivaria, 50 (2000): pp.24s, 30s, 35.

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la mémoire et comme moyen de copier des documents ancients en vue de les rendre accessibles,

on ne peut pas en dire autant des historiens qui ont été pendant longtemps à considérer ce

médium comme un corpus inférieur de données, tout juste bon à saisir des réalités partielles. Ce

retard à reconnaître la photographie comme source fiable d’information proviendrait en outre du

fait que cette dernière était devenue depuis longtemps synonyme de mensonge. On a qu’à ce

rappeler le trucages photo-graphiques entrepris dans les années 1840 par le photographe français

Gustave LeGray à l’aide d’un ou plusieurs négatifs superposés à l’original, ou encore les

célèbres montage surréalistes effectués un peu plus tard par la photographe canadienne Hannah

Maynard, grâce à une caméra dotée de quatre objectifs35. Plus grave encore, du point de vue de

l’éthique professionnelle, sont les mises en scène de combats réalisées par le photographe

britannique Roger Fenton lors de la Guerre de Crimée (1854-1856) ou encore l’usage de faux

documents photographiques lors de l’instruction du procès de l’officier francais Alfred Dreyfus

(1894), accusé de crime de haute-trahison36.

Nul doute que la méfiance des historiens à l’endroit de la photographie s’est accentuée,

lorsqu’on découvrit que la photographie pouvait servir à la démonstration de théories erronées.

L’un des projet les plus controversés auquel prit part la photographie fut incontestablement la

collecte de données anthropométriques, en vue d’établir une classification et une hiérarchie des

types raciaux. Initiées entre autres par le physiologiste britannique Francis Galton, au cours des

années 1870, ces études visaient à identifier les caractéristiques raciales et héréditaires d’un

groupe donné, à l’aide de portraits composites illustrant la physionomie faciale et cranienne de

ses membres, le but de l’exercice étant de distinguer les espèces supérieures des espèces

535 C. W. Wilks, The Magic Box: The Eccentric Genius of Hannah Maynard, Photogra-pher, 1834-1918 (Toronto, 1980).

636 Voir: Sontag, Regarding [...], p.48; et A.Goldmith, “Photos Always Lies”, Popular Photography, 98 (nov.1991): pp.69-72.

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inférieures. Ce faisant, Galton espérait “contribuer à l’oeuvre de la nature en veillant à ce que

l’humanité soit représentée par les races les plus aptes”37. Basée sur une méthodologie douteuse,

et servant trop souvent à de prétexte aux grands génocides du XXe siècle (Arméniens, Juifs et

autres), cette théorie de l’eugénisme fut sévèrement critiquée. Il n’est donc pas étonnant, dans de

telles circonstances, que la photographie ait provisoirement perdu de sa crédibilité auprès des

praticiens des sciences humaines et sociales.

Au plan méthodologique, il existerait au moins trois types de problèmes reliés à

l’utilisation des photographies d’archives comme source documentaire en histoire. Le premier

d’entre eux a beaucoup à voir avec le fait que dans bien des cas, nous ne disposons que peu

d’informations pour évaluer la pertinence ou la valeur explicative des corpus photographiques. Il

est souvent difficile d’établir qui sont les commanditaires des reportages photographiques ou

même d’identifier ceux qui en sont les auteurs. Lorsque leurs noms sont connus, quels sont nos

chances de mettre à jour les agendas se dissimulant derrière la production et la diffusion des

images38? Comment s’assurer que les informations contenues dans les vignettes accompagnant

certaines photographies sont véridiques? Bref, poser un jugement critique sur la valeur d’une ou

de plusieurs photos n’est pas une chose facile, étant donné que l’élément subjectif, à partir

duquel s’opère une déconstruction du réel n’est pas toujours apparent. Dans un certain sens, il est

737 F. Galton, “Eugenics: Its Definition, Scope and Aims”, Sociological Papers, I (1904): p.50.Cité dans A.Thomas,Photographie et science: une beauté à découvrir (Ottawa,1997), p.130.

838 Il arrive parfois que l’on parvienne à décrypter les agendas cachés decertains reportagesphotographiques. Tel est le cas du projet initié par le Farm Security Administration aux États-Unis, en vue de documenter les effets de la crise des années 1930. Nous savons, grâce aux témoignages des photographes qui ont participé à cette entreprise, que le projet avait été conçu comme une machine de propagande dans le but de renforcer le soutien au programme du New Deal. D’ailleurs, ces mêmes photographes étaient assujettis à des prescriptions bien précises en ce qui concerne les sujets qu’ils devaient couvrir, de même que la rhétorique qui devait s’en dégager. Voir: A. Solomon-Godeau, Photography at the Dock: Essays on Photographic History, Institutions and Practices (Minneapolis, Minn., 1991), pp.176-178.

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plus facile de poser un jugement critique sur des sources écrites. Règle générale, la politique

éditoriale des journaux anciens que nous consultons est assez bien connue. Il en va de même des

paramètres qui ont présidé l’élaboration des recensements historiques du XIXe ou du XXe

siècle. Mais qu’en est-il de la photographie?

La seconde difficulté réside dans les silences véhiculés par certains clichés

photographiques, lesquels nous empêchent de porter un regard au delà de la surface des choses.

En quoi, par exemple, les splendides vues stéréoscopiques des villes canadiennes au XIXe siècle

nous renseignent-elles sur les inégalités sociales face à la maladie et à la mort au sein de l’espace

urbain? En quoi les photo-graphies réalisées par Oliver Buell, à l’occasion du procès de Louis

Riel en 1885, nous renseignent-elles sur la personnalité complexe du chef de la rébellion Métis?

Dans quelle mesure les photos de William Notman montrant de nobles et valeureux bûcherons

oeuvrant dans des chantiers de coupe forestière nous informent-elles sur leurs conditions de

travail, leurs conflits ethniques et leurs propensions à l’alcoolisme? Ces quelques exemples nous

font mesurer à quel point il est important de jumeler la photographie d’archives à d’autres

sources, afin de profiter au maximum de son potentiel documentaire.

La troisième difficulté découle, en fait, de l’instantanéité du médium photographique, qui

nous confine plus souvent qu’autrement à une histoire descriptive de la vie quotidienne

(costumes, architecture, outillage, loisirs, etc.), sans nécessairement nous faire voir les forces

souterraines acti-ves au niveau de la trame historique. S’il fallait utiliser une métaphore pour

décrire le rôle de la photographie dans la construction du savoir historique, je dirais alors que

nous avons affaires à une sorte d’index lexical de la réalité capable de nous révéler une multitude

d’indices sur le passé, mais rarement les clés essentielles pour une appréhension globale de celui-

ci39. Certains tenants de l’his-toire de la culture matérielle diront que la photographie est un

939 Pour certains auteurs, le document photographique ne saurait être autre chose

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palimpseste qui offre d’immenses possibilités pour décrypter le langage des choses. Sans doute.

Mais encore faut-il disposer d’une méthodologie qui puisse permettre de lire l’intangible au sein

de l’image photographique, sinon l’on s’expose à toutes sortes de spéculations40.

Vu d’un autre angle, il semble que la photographie historique nous renseigne davantage

sur les perceptions que les acteurs sociaux se faisaient de la réalité, que sur la réalité elle-même.

En ce sens, la photographie apparaît comme une source beaucoup plus apte à étudier le discours

élitaire, les représentations mentales, l’univers symbolique et les utopies d’une époque, que les

lois complexes gouvernant la vie en société. Certains historiens ont d’ailleurs reconnu dans le

succès initial remporté par la photographie en Amérique du Nord, l’expression d’une quête

identitaire à travers laquelle de jeunes nations, comme le Canada et les États-Unis, tentaient de

qu’unagrégat de connaissances partielles, sans continuité apparente. Les éléments qui fondent son témoi-gnage ne prendraient tout leur sens que si une fonction est préalablement assignée par le spectateur. Voir: M. Nesbit, “Le photographe et l’histoire”, in Frizot, op. cit., p.403.

040 L’un de ceux qui a poussé le plus loin l’exploitation de l’imagerie comme témoignagehistorique est sans aucun doute Henry Vivian Nelles, dans son étude récente sur les fêtes du Tricentenaire s’étant tenues à Québec en 1908. Utilisant en abondance la photo, les affiches, les peintures et les cartes postales, Nelles montre comment, grâce à la commémoration, on a construit une vision idéalisée du passé, avec évidemment le présent et l’avenir en tête. Voir: H. V. Nelles, The Art of Nation Building: Pageant and Spectacle at Quebec’s Tercentenary (Toronto, 1999). On peut en dire autant de l’analyse qu’a réalisée l’historienne Joan M. Schwartz du daguerréotype remis au capitaine de Belvèze, en guise de cadeau pour l’impératrice française Eugénie, épouse de Napoléon III, lors de la venue au Canada du navire La Capricieuse en 1855. Conçu par le photographe montréalais Thomas Coffin Doane, ce daguerréotype représentait de jeunes enfants déguisés en personnages illustres de la Nouvelle-France, tous drapés des couleurs de l’ancienne mère-patrie, à l’occasion des célébrations des fêtes de la Saint-Jean-Baptiste à Montréal, la même année. Après avoir pris soin de décrire les trois dimensions -- matérielle, contextuelle et symbolique – de cet étrange daguerréotype, l’auteur montre comment celui-ci magnifie de façon analogique l’ancienne présence française dans la vallée du Saint- Laurent, par opposition à la conquête britannique de 1760. Voir: J. M. Schwartz, “Un beau souvenir du Canada: Object, Image, Symbolic Space”, in E. Edward et J. Hart (éd.), Photographs Objects Histories: On Materiality of Images (Londres, 2004), pp.16-31.

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montrer leurs réussites collectives face à l’ancien monde européen41. Pas étonnant, dans les

circonstances, que tant de photographies du XIXe siècle aient célébré l’achèvement d’un pays.

Tel est le cas, en l’occurrence, des vues stéréoscopiques illustrant les grandes villes canadiennes

à partir de 1860 ou encore des nombreux clichés photographiques témoignant de la construction

du chemin de fer transcontinental durant les années 1880. Parallèlement à ce désir de montrer des

réalisations récentes, l’exercice contribuait en outre à éveiller un sens de l’expérience commune

entre diverses communautés qui étaient autrefois isolées au sein de l’Amérique du Nord

britannique.

Il convient donc d’être prudent quant à l’utilisation de la photographie comme document

historique et d’être conscient des limites d’une telle source dans la construction du savoir

historique. Outre le fait qu’il soit difficile d’établir la valeur heuristique de nombreux corpus

photographiques, il demeure que ce type de document nous met souvent en contact avec un

ensemble de vérités fragmentaires s’avérant difficiles à relier les unes aux autres, en vue de

rendre le passé intelligible. D’où, le danger d’une trop grande surenchère autour de ce type de

document, car si une photo vaut mille mots, il arrive parfois, pour reprendre la boutade de Henry

Vivian Nelles, qu’on ait besoin de mille mots pour rendre une photographie compréhensible42.

141 Voir: G. Freund, Photographie et société (Paris, 1974), pp.30-31; de même que R. Greenhill et A. Birrell, Canadian Photography, 1839-1920 (Toronto, 1979).

242 Nelles, op. cit., p.269.

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ESSAI 3

PROFIL DE VINGT PHOTOGRAPHES ILLUSTRES AYANT FAIT LEUR MARQUEAU CANADA AU COURS DU XXe SIÈCLE

Sélectionner vingt photographes célèbres parmi les centaines de noms connus peut

s’avérer un exercice périlleux, voire arbitraire. Comment mesurer la notoriété de l’un par rapport

à l’autre? Dans l’élaboration de ce répertoire, nous avons tenté de cibler non seulement les

photographes qui ont laissé une empreinte profonde dans la jeune histoire de ce médium au

Canada (ex. Carter, Karsh et Vanderpant), mais aussi ceux, plus contemporains, qui sont en voie

de devenir des sommités res-pectées au plan international (ex. Burtynski, Aquin et James). Il

nous a fallu, en outre, tenir compte d’une certaine représentativité aux plans

chronologique,régional et professionnel.Pour chacun de ces photographes, nous avons construit

une fiche-maîtresse incluant une brève esquisse biographique, une description de l’oeuvre, une

énumération des institutions détentrices de leurs travaux, une biblio-graphie sélective et, le cas

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échéant, une description de leur fonds d’archives. Nous sommes conscient qu’un tel

échantillonnage a pu laisser dans l’ombre de nombreuses personnalités éminentes du monde de

la photographie.À ce répertoire, nous aurions pu ajouter des noms célèbres tels que George

Johnson, ce photographe Tlingit qui, dans les années 1930 a réalisé une série de reportages sur

les communautés du Yukon,ou encore Jeff Wall,ce photographe de Colombie-Britannique qui a

dépeint à l’aide de Cibachromes géants la vie moderne des banlieues nord-américaines, et

combien d’autres. Il incombera donc à d’autres chercheurs d’enrichir cette banque de données

dans les années futures.

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NOM: BENOIT AQUIN (1963- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Documentaire et photojournalisme

LIEU DE PRATIQUE: Montréal

BIOGRAPHIE:

Benoit Aquin a amorcé sa carrière professionnelle de photographe dans les hebdomadaires alternatifs Voir et Hour à Montréal, de 1989 à 2001. À ce titre, il a publié en couverture des centaines de portraits de personnalités publiques, en plus de réaliser une chronique en images de la vie urbaine montréalaise. Devenu photographe indépendant en 2002, il produit de nombreux reportages pour des magazines comme l’Actualité, le Maclean et le Canadian Geographic. Ses photographies sont égale-ment publiées à la une de journaux quotidiens comme La Presse (Montréal), le Globe and Mail (Toronto) et The Gardian (Londres). Les qualités esthétiques et informatives de ses reportages attirent vite l’attention de la critique, tant et si bien qu’il remportera le grand prix du concours Lux pour sa couverture du Sommet des Amériques, tenu à Québec en 2001, de même que le prix Antoine-Désilets de la Fédération des journalistes du Québec, pour ses images du Tsunami ayant dévasté les côtes de l’océan Indien en décembre 2005. Benoit Aquin se fera ensuite connaître pour ses essais photographiques sur de grands problèmes humanitaires et écologiques de la planète, comme les ravages du pesticide Nemagon sur les ouvriers agricoles du Honduras ou la fonte accélérée des glaces dans le Grand Nord canadien. Son reportage sur la désertification des espaces habitables en Chine lui permet de remporter le prix international Pictet de $94 000 (équivalent du Pulitzer), qui récompense les oeuvres traitant de développement durable.

EXPOSITIONS:

- “Oka Blue Print”, Gallery TPW (Toronto): 1991- “Haïti chérie”, Centre interculturel Strathearn (Montréal): 1993- “Carnets de voyage”, Musée Canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 1994- “Présence de la photographie”, Musée du Québec (Québec): 1995- “Ordre public/désordre mondial”, Maison de la culture Marie-Uguay (Montréal): 2003- “Chinese Dust Bowl”, Palais de Tokyo (Tokyo): 2008

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Banque d’oeuvres d’art du Conseil des Arts du Canada (Ottawa)- Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa)- Musée national des beaux-arts du Québec (Québec)

FONDS D’ARCHIVES

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Bibliothèque et Archives Canada est de loin l’institution qui possède la plus importante collection d’images du photographe Benoit Aquin. Regroupé sous la cote R93330-0-2-7, ce fonds est constitué principalement de 1058 négatifs noir et blanc et de quelques photographies en couleur. Ce corpus d’images documente entre autres choses la Crise d’Oka qui opposa à l’été 1990 la Sûreté du Québec aux Mohawks des réserves de Kanesatake et de Kahnawake, de même que le déclin des communau-tés rurales de la Saskatchewan tel qu’observé en 2004.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- P. Alleyn, “Vient voir le photographes: conférence de Benoit Aquin, 19 février 2009”, site web, http://photoservice.ca/benoit_aquin.asp.- S. Baillargeon, “Benoit Aquin remporte le prix Pictet”, Le Devoir (Montréal), 1er nov. 2008.- P. Dessureault, Carnets de voyage (Ottawa: Musée canadien de la photographie contemporaine, 1994) [catalogue d’exposition de Benoit Aquin].

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NOM: KEN BELL (1914-2000)

CHAMP PROFESSIONNEL: Publicité, documentaire et photojournalisme

LIEU DE PRATIQUE: Toronto

BIOGRAPHIE:

Né à Toronto en 1914, Ken Bell débute sa carrière de photographe à l’âge de 17 ans. Dès 1931, il est engagé par les Studios Lane de Toronto en vue de réaliser des catalogues commerciaux pour des entreprises d’ébénisterie. Quatre plus tard, il entre au service du Studio Charles G. Milne, pour passer ensuite à la firme Pringle & Booth, où il deviendra directeur de la photographie commerciale. Durant la Seconde Guerre mondiale, Bell est recruté par l’unité cinématographique de l’Armée canadienne, à titre de de photographe officiel. Ses nombreuses photographies constituent une source documentaire précieuse sur la participation canadienne à ce conflit. Équipé de sa Rolleiflex, il est un des rares photographes, avec Robert Capa, a avoir saisi sur le vif le débarquement allié de la Normandie, le 6 juin 1944. Une fois la guerre terminée, Bell s’associe à Gordon Rice dans une entreprise vouée au photojournalisme et à la photographie de mode. Ayant comme principal client le magazine MacLean, il retourne re-photographier en 1949 les principaux lieux de batailles de la Seconde Guerre mondiale. L’année suivante, il sera nommé photographe officiel des Grands Ballets Canadiens auprès desquels il travaillera pendant plus de trois décennies. Ken Bell fut également fondateur et président du Commercial and Press Photographers’ Association of Canada (CAPPAC). Sa réputation lui valut en outre d’enseigner la photographie au Ontario College of Art à Toronto. Auteur d’une douzaine d’ouvrages et recueils photographiques, Bell fut honoré deux fois du titre de “Photographe de l’année” par le Professional Photographers of Canada Incorporated (PPOC). Il est décédé en l’an 2000 à Gibson, Colombie-Britannique.

EXPOSITIONS:

- “Ken Bell, Forty Years of Photography”, Archives nationales du Canada (Ottawa): 1971- “Ken Bell, Photographer”, PPOC, National Print Show (Toronto): 1979- “Ken Bell, Fifty Years of Photography”, Archives nationales du Canada (Ottawa): 1981

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Ministère de la défense, Division photographique de l’Armée canadienne (Ottawa)- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) - City of Toronto Archives (Toronto)

FONDS D’ARCHIVES:

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Si la plupart des négatifs originaux ayant appartenu à Ken Bell sont déposés aux Archives de la ville de Toronto et à la Division photographique de l’Armée canadienne, il revient à Bibliothèque et Archives Canada de posséder la collection la plus complète de son oeuvre. Classé sous la cote R5529-0-8-E, ce fonds rassemble 27 cm de documents textuels, 42 plaques honorifiques, un film documentaire de 8 min., 25 lithogravures et 120 785 photographies couvrant la période 1931-1996.La partie textuelle du fonds contient non seulement la correspondance privée de Ken Bell, mais aussi les documents d’affaires relatifs à l’administration de ses studios torontois entre 1946 et 1957, quelques notes sur ses voyages à l’étranger et divers articles se rattachant à la promotion de ses livres. Le segment graphique du fonds réunit quant à lui les productions commerciales que Bell a réalisées pour divers organismes (Bureau du tourisme du Canada, Croix-Rouge du Canada, Eaton, Grands Ballets Canadiens, Imperial Oil, International Nickel Ltd., Université de Toronto, etc.) et le matériel de plusieurs reportages photographiques effectués pour le compte de différents magazines sur des sujets aussi variés que l’autohypnose, le vol à l’étalage, le comportement amoureux des adolescents et la vie quotidienne chez les autochtones des Six Nations. On retrouve également dans ce corpus graphique, les portraits de personnalités éminentes tel que le cardinal Paul-Émile Léger, le jazzman Dizzy Gillespie, le conquérant de l’Éverest Edmond Hillary, l’actrice Sophia Loren, le danseur Rudolf Nureyev, le premier-ministre Lester B. Pearson, la reine Élizabeth II d’Angleterre et le roi Olaf de Norvège. De nombreuses découpures de magazines montrant les contributions photographiques de Bell viennent compléter ce dossier.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- K. Bell, Curtain Call (Toronto: Intaglio Gravure Ltd., 1953).- K. Bell et C. P. Stacey, Not in Vain: Photographs (Toronto: University of Toronto Press, 1973).- K. Bell et J. Smith, Collecting Canada’s Past (Scarborough, Ont.: Prentice Hall of Canada, 1974).- K. Bell et H. Major, A Man and his Mission: Cardinal Léger in Africa (Scarborough, Ont.: Prentice-Hall of Canada, 1976).- K. Bell et C. Franca, The National Ballet of Canada: A Celebration (Toronto: University of Toronto Press, 1978).- K. Bell, The Way we Were (Toronto: University of Toronto Press, 1988).- K. Bell et D. Morton, Royal Canadian Military Institute: 100 years, 1890-1900 (Toronto: Royal Canadian Military Institute, 1990).

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NOM: ROLOFF BENY (1924-1984)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photojournalisme, portraits et documentaires

LIEUX DE PRATIQUE: Medecine Hat, Alta., Toronto et Rome

BIOGRAPHIE:

Roloff Beny est né à Medecine Hat, Alberta, en 1924. Après avoir obtenu un baccalauréat de l’École des beaux-arts du Trinity College (Toronto) en 1945, Beny entreprend, sous la gouverne du maître-graveur Mauricio Lasansky, une maîtrise au State University of Iowa, qu’il complètera deux ans plus tard. Une bourse d’étude lui est ensuite accordée pour qu’il puisse parfaire sa formation à l’Institute of Fine Arts de la New York University. De 1948 à 1952, Beny voyage dans plusieurs pays d’Europe, dont la Grèce et l’Italie, sous les auspices de l’American School of Classical Studies. Durant ce séjour, il en profite pour exposer ses peintures dans les plus grandes galeries d’art de Milan, Paris et de Florence. Beny a beau participer à plus d’une vingtaine d’expositions, son oeuvre comme peintre abstrait connaît en contrepartie un succès modeste. C’est plutôt comme photographe qu’il accèdera à une notoriété internationale. Après avoir tâté la photographie de mode pendant quelques temps, il organise une première exposition de ses oeuvres photographiques à Londres en 1956, qui lui vaut immédiatement les louanges de la critique. C’est ce qui l’amènera à publier deux ans plus tard un recueil de photos, The Thrones of Earth and Heaven, voué aux splendeurs artistiques et architecturales des anciennes civilisations de la Méditerranée. Commence alors pour lui une carrière de globe-trotter qui se soldera par la publication de seize albums photographiques de luxe révélant les trésors culturels de divers pays. L’un d’eux, intitulé To Everything There is a Season, sera conçu pour commémorer le centenaire de la Confédération canadienne en 1967. Beny se décri-vait lui-même comme un photographe qui, obsédé par la beauté du monde, regardait les paysages avec les yeux d’un peintre et relatait les choses à la manière d’un poète. Entre la publication de ses livres, Beny réalise des reportages photographiques pour le compte de grands magazines américains et européens. Ayant élu domicile à Rome dans les années 1950, il en profite pour monter une collection de 500 portraits de membres éminents de la colonie artistique, pris notamment lors d’évé-nements culturels comme le Festival de théâtre de Spolete. Ses relations avec la famille du Shah d’Iran, et le patronage qu’il reçut de ce dernier pour la confection d’un recueil sur l’héritage de la Perse antique, lui valut de nombreuses inimitiés tout au long des années 1970. Roloff Beny mourut subitement en 1984 d’une hémorragie cérébrale, dans son appartement de Rome. Il n’avait alors que 60 ans.

EXPOSITIONS:

- “Roloff Beny’s Images”, Institute of Contemporary Art (Londres): 1956- “A Time of Gods”, lieu inconnu: 1962- “Pleasure of Photography”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 1966- “Images of Canada”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 1967- “The Renaissance”, Edward-Johnson Building, University of Toronto (Toronto): 1968EXPOSITIONS (suite):

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- “A Visual Odyssey, 1958-1968”, Dominion Centre Observation Gallery (Toronto): 1971- “Iran by Roloff Beny”, Teheran Museum of Contemporary Art (Téhéran, Iran): 1975- “Roloff Beny in Italy and Canada”, Ambassade du Canada (Rome): 1980- “Odyssey”, Magasin Eaton (Calgary, Alta.): 1981- “Visual Journeys: The Photography of Roloff Beny”, Royal Ontario Museum (Toronto): 1994- “Roloff Beny: Legends in Life and Art”, Archives nationales du Canada (Ottawa): 1995

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Museum of Modern Art (New York)- University of Lethbridge (Lethbridge, Alta.)- Yale University Art Gallery (New Haven, Conn.)

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives Canada est sans aucun doute l’institution qui possède la plus grande partie de l’oeuvre photographique de Roloff Beny. Acquis en 1993, ce fonds d’archives contient 158 475 photographies et plus de 16 mètres linéaires de documents manuscrits, sans compter les nombreux croquis, peintures et affiches de l’artiste, regroupés sous la cote R4724-0-X-E. La partie manuscrite du fonds regorge d’informations sur la façon dont Beny s’y prenait pour réaliser ses divers projets (livres, expositions, photo-reportages, etc.). On y retrouve notamment ses carnets de voyages, ses notes personnelles de travail, son matériel de recherche et sa correspondance d’affaires avec les galeries, les musées et les maisons d’édition. Les journaux intimes et la correspondance privée de Beny nous montrent, quant à eux, un homme tourmenté qui avait déjà affirmé que ses réalisations artistiques n’étaient que des échelons destinés à le faire émerger du fond de son puit de solitude. Le versant photographique du fonds contient pour sa part de nombreuses épreuves sur papier, en plus des négatifs, tirages d’essai et transparents, qui représentent les images captées dans plus de 43 pays. On y retrouve bien entendu les photographies de vestiges de l’Antiquité gréco-romaine et la collec-tion d’image que Beny avait constituée sur les lieux de culte des religions musulmane, hindoue et bouddhiste. Son séjour en Iran durant les années 1970 lui permit en outre de ramener plus de 30 000 photographies témoignant aussi bien de l’ancienne culture persane que de la vie quotidienne dans ce pays. Un partie du fonds renferme également les scènes canadiennes que Beny a prises au début de sa carrière et lors du centenaire de la Confédération. Marquées d’une grande simplicité, celles-ci évoquent les paysages enneigés du Grand Nord, les vastes étendues dépouillées des Prairies, la vie paisible des villages de pêcheurs de la côte est et l’architecture moderne des villes comme Montréal et Toronto. Une collection de plus de 500 portraits d’artistes et d’auteurs célèbres (Coco Chanel, Jean Cocteau, Federico Fellini, Glen Gould, Tennessee Williams, etc.) vient compléter, de surcroît, ce corpus photographique.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

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- R. Beny et F. Stark, The Thrones of Earth and Heaven (Londres: Thames and Hudson, 1958).- R. Beny, A Time of Gods: A Photographer in the Wake of Odysseus (Toronto: Longmans, 1962).- R. Beny et R. Macaulay, Pleasure of Ruins (Londres: Thames and Hudson, 1964).- R. Beny et M. Wilson. To Every Thing There is a Season (Toronto: Longmans, 1967).- R. Beny et A. Thwaite, Japan (Lucerne, Suisse: C. J. Bucher, 1968).- R. Beny et A. Menen, India (Toronto: McClelland and Stewart, 1969).- R. Beny et J. N. L. Opie, Island Ceylon (Londres: Thames and Hudson, 1970).- R. Beny et A. Thwaite, Roloff Beny in Italy (Toronto: McClelland and Stewart, 1974).- R. Beny et S. H. Nasr, Persia, Bridge of Turquoise (Toronto: McClelland and Stewart, 1975).- R. Beny, Iran: Elements of Destiny (Toronto: McClelland and Stewart, 1978).- R. Beny et P. Gunn, The Churches of Rome (New York: Simon and Shuster, 1981).- R. Beny et A. Thwaite, Odyssey: Mirror of the Mediterranean (New York: Harper & Row, 1981).- R. Beny et A. Stassinopoulos, The Gods of Greece (Toronto: McClelland and Stewart, 1983).- R. Beny et S. A. Matheson, Rajasthan, Land of Kings (Toronto: McClelland and Stewart, 1984).- R. Beny, The Romance of Architecture (Toronto: McClelland and Stewart, 1985).- R. Beny et P. Sanders, Iceland (Toronto: McClelland and Stewart, 1985).- R. Beny et M Crites, Visual Journey (Vancouver: Douglas & McIntyre, 1994).- R. Beny et M.Crites, People, Legends in Life and Art (Vancouver: Douglas & McIntyre, 1994).

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NOM: ROBERT BOURDEAU (1931- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique

LIEU DE PRATIQUE: Ottawa

BIOGRAPHIE:

Le photographe Robert Bourdeau est né à Kingston, Ontario, en 1931. Se considérant lui-même autodicate, il a néanmoins étudié l’histoire de l’art pendant un an à la Queen’s University, puis l’architecture à l’University of Toronto. C’est d’ailleurs ce qui lui permit de décrocher, quelques années plus tard, un poste de technicien en architecture pour la Société d’hypothèque et de logement du Canada. Mais déjà, depuis le début des années 1950, Bourdeau est animé d’une passion pour la photographie artistique. Sa rencontre avec le professeur et photographe américain Minor White, en 1959, va d’ailleurs s’avérer un point tournant. Dès ce moment, il adopte des appareils grands formats qui l’obligent à travailler avec une minutie extrême tant pour la prise de vue que pour le développe-ment de ses épreuves. Attiré par les paysages traditionnels qu’il traquera tout au long de sa vie en divers points du globe (Irlande, Costa Rica, Sri Lanka, etc.), Bourdeau tentera à chaque fois de donner vie à l’esprit des lieux. Sa photographie cherchera en même temps à montrer l’ordre méthaphysique des choses qui se profile derrière le chaos apparent de la nature. En ce sens, son oeuvre le situe dans le courant moderniste initié par Alfred Stieglitz et le mouvement Straight Photography, en vertu duquel l’accent est mis sur la netteté absolue de l’image, le jeu des formes et l’absence de manipulation. De 1979 à 1993, Bourdeau enseignera la photographie comme professeur-adjoint à l’Université d’Ottawa. Son nom figure parmi les photographes les plus importants du XXe siècle dans l’Encyclopedia of Twentieth-Century Photograph et dans le Dictionnaire mondial de la photographie, publié chez Larousse.

EXPOSITIONS:

- “Robert Bourdeau: Photographs”, Centre for Contemporary Canadian Art (New York): 1988- “Breaking the Mirror”, Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 1989- “Robert Bourdeau: Industrial sites”, Michael Hoppen Gallery (Londres): 1999- “Confluence”, Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 2003

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Art Institute of Chicago (Chicago)- Banque d’oeuvres d’art du Conseil des Arts du Canada (Ottawa)- Centre canadien de l’architecture (Montréal)- George Eastman House (Rochester, New York)- Los Angeles County Museum of Art (Los Angeles)- Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa)- Vancouver Art Gallery (Vancouver)

FONDS D’ARCHIVES:

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Le Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa) possède sous la cote EX 1772 tous les documents manuscrits (dossiers de recherche, correspondance, matériel publicitaire, cartons d’invitation, articles de journaux) de l’exposition “Breaking the Mirror” (1989) faisant une rétrospective de l’oeuvre de Robert Bourdeau. La collection du Musée contient également tout près de 300 négatifs et épreuves de cet artiste.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- R. Bourdeau, Landforms (Kingston, Ont.:Agnes Etherington Art Centre, 1979).- R. Bourdeau, Robert Bourdeau (Toronto: Mintmark Press, 1979).- J. Glancey, Robert Bourdeau: Industrial Sites (Londres: Michael Hoppen Gallery, 1999) [catalogue d’exposition].- M. Hanna, Confluence: Contemporary Canadian Photography (Ottawa: Musée canadien de la de la photographie contemporaine, 2003) [catalogue d’exposition].- S. J. Madill, Breaking the Mirror: the Art of Robert Boudreau (Winnipeg:Winnipeg Art Gallery, 1988) [catalogue d’exposition].- K. Wise, The Photographers’ Choice: A Book of Portfolios and Critical Opinion (Danbury, N.H.: Addison House, 1975).

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NOM: EDWARD BURTYNSKY (1955- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique

LIEU DE PRATIQUE: Toronto

BIOGRAPHIE:

Edward Burtynsky est né en 1955, d’une famille ukrainienne de St. Catharines, Ontario. Après avoir obtenu un baccalauréat en photographie du Ryerson Polytechnic Institute (Toronto), il travaille un temps comme mineur dans le nord de l’Ontario et comme manoeuvre sur les lignes d’assemblage des usines Ford et General Motors de la province. En 1982, il tient à Toronto sa première exposition de photos intitulée,“Landscapes and Greenhouses”. Son oeuvre s’oriente ensuite vers la photographie de sites industriels, qu’il saisit au moyen d’épreuves grand format aux couleurs vives. Plus souvent qu’autrement, ses images montrent des paysages altérés par l’exploitation industrielle (carrières, mines, champs pétroliers, barrages hydro-électriques, etc.), témoins non seulement de l’activité humaine, mais aussi de choix de civilisation. Ce faisant, l’auteur entend soulever de nombreuses questions d’ordres éthique et environnemental. En 1996, la série Débris sur les mines de nickel montre les coulées de déchets incandescents qui traversent le paysage de Sudbury, en Ontario. L’année suivante, il entreprend le premier d’une série de voyages en Chine, en vue de rendre compte de l’émergence industrielle de ce pays, et plus spécifiquement des travaux entourant la construction du barrage des Trois Gorges. Il en tirera d’ailleurs une exposition qui sera présentée au Musée des beaux-arts du Canada en 2003, sous le titre Manufactured Landscape, puis un film documentaire qui remportera un prix au Festival Sundance de Toronto en 2007. Edward Burtynsky est également directeur fondateur du Toronto Image Works, une galerie-laboratoire de photographie numérique qui se veut en même temps un lieu de location de chambres noires pour les artistes. Son oeuvre est dessiminée dans une cinquantaine de musées à travers le monde et dans de nombreuses collections privées.

EXPOSITIONS:

- “Landscape and Greenhouses” (Toronto): 1982- “Breaking Ground”, Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 1988- “Urban Mines”, Mira Godard Gallery (Toronto):1998- “Industry and Entropy”, Freedman Gallery (Reading, Pa.): 2001- “Before the Flood”, Mira Godard Gallery (Toronto): 2003- “Manufactured Landscapes”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 2003

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque nationale (Paris)- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- George Eastman House (Rochester, New York)INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE (suite):

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- Musées des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Museum of Fine Arts (Houston, Texas)- San Francisco Museum of Modern Art (San Francisco, Cal.)- Solomon R. Guggenheim Museum (New York)

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives Canada posséde quelques photographies d’Edward Burtynsky regroupées sous la cote R9748-0-5-E. Celles-ci représentent surtout des paysages miniers qui ont servi de base à l’exposition “Breaking Ground”, tenue en 1988 au Musée canadien de la photographie contempo-raine (Ottawa). De son côté, le Musée des beaux-arts du Canada détient plus 111 oeuvres de l’artiste, dont la série sur les carrières de granit du Vermont, celle sur le barrage des Trois Gorges, en Chine, et celle sur les voies du CN en Colombie-Britannique.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- E. Burtynsky, Profile (Toronto: E. B. Photography, 1999).- E. Burtynsky, Quarries (Göttenberg, Allemagne: Steild, 2007).- G. M. Dault, Before the Flood (Toronto: Mira Godard Gallery, 2003) [catalogue d’exposition].- J. K. Grande, Dialogues in Diversity: Art from Marginal to Mainstream (Toronto: Pari, 2007).- L. Pauli, Paysages manufacturés: photographies d’Edward Burtynsky (Ottawa: Musée des beaux-arts du Canada, 2003) [catalogue d’exposition].- N. Richler, The Evidence of Man: Edward Burtynsky (Londres: Granta, 2003).

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NOM: SIDNEY CARTER (1880-1956)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique

LIEU DE PRATIQUE: Toronto et Montréal

BIOGRAPHIE:

Sidney Carter est né à Toronto en 1880. Employé de bureau depuis 1897, il s’adonne également à la photographie amateure. Son talent est vite reconnu, tant et si bien que ses épreuves sont exposées dès 1901 au salon de la Société royale de photographie, à Londres. L’année suivante, ses oeuvres reçoivent un accueil chaleureux au Toronto Camera Club et parmi le milieu artistique de Chicago. Proche du mouvement pictorialiste par ses compositions soignées et ses paysages aux contours estompés, il devient tout naturellement membre du Photo-Secession Club, fondé en 1904 par les photographes new-yorkais Edward Steichen et Alfred Stieglitz. Cela lui ouvre d’ailleurs les portes de nombreux salons à Londres, Vienne, New York et Philadelphie, au cours des deux années qui suivent. Se retrouvant sans emploi après que la Ontario Bank pour laquelle il travaillait eût fait faillite, Carter déménage à Montréal en 1906. Il ouvre alors un studio de photographie en association avec Harold Mortimer-Lamb, un autre adepte du mouvement pictorialiste, mais l’aventure est vite vouée à l’échec. Ne se laissant pas décourager par cette expérience, Carter organise dès à fin de l’année 1907 un premier salon de photographies pictorialistes à la galerie de la Société des arts de Montréal. En dépit de ces efforts, Carter est obligé de réorienter sa vie professionnelle vers le commerce de l’art et des antiquités. Il ne revint à la photographie qu’en 1918, comme portraitiste commercial. Au cours des douze années qui suivirent, il produisit toute une série de portraits de personnalités éminentes, dont Sergei Prokofiev, Bertrand Russell et Lord Nothcliffe. Il semble toutefois que le style de Carter ait perdu de son élan innovateur et de sa vision troublée, préférant plutôt des contours plus nets et des effets graphiques plus appuyés. Après 1930, Carter passera le restant de sa vie comme négociant d’art oriental à Montréal. Certains revers de fortune l’obligeront à liquider son commerce deux ans avant sa mort en 1956.

EXPOSITIONS

- Royal Society of Photography (Londres): 1901- Toronto Camera Club (Toronto): 1903, 1906, 1930- Canadian Society of Applied Art (Toronto): 1905- Photo-Secession Club (New York): 1906- Art Association of Montreal (Montréal): 1913

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Metropolitan Museum of Art (New York)- Musée national des beaux-arts du Québec (Québec)FONDS D’ARCHIVES:

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Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) dispose d’une collection de plus 427 épreuves n.& b. de Sidney Carter, sous la cote R10963-0-4-E. Ce fonds rassemble un grand nombre d’oeuvres picto-rialistes réalisées à Toronto et à Montréal au début du XXe siècle, de même qu’une série de portraits de personnalités célèbres--dont Rudyard Kipling et Sergei Prokofiev--couvrant la période 1907-1950. On y retrouve également un catalogue d’une exposition organisée par l’Art Association of Montreal et mettant en vedette les photographes pictorialistes Fenwick Cutten, Walter Mackenzie et Sidney Carter. Il semble que les archives manuscrites de Carter soient encore entre les mains de ses héritiers. On peut toutefois consulter un dossier complet sur sa vie et son oeuvre au Musée national des beaux-arts du Québec (Québec).

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- L. Koltun et al., Le coeur au métier: la photographie amateur au Canada, de 1839 à 1940 (Ottawa: Archives publiques du Canada, 1984).- D. C. Strong, Sidney Carter (1880-1956) and the Politics of Pictorialism, thèse de M.A.(histoire de l’art), Université de Concordia, 1994.

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NOM: LYNNE COHEN (1944- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique

LIEU DE PRATIQUE: Ottawa et Montréal

BIOGRAPHIE:

Lynne Cohen est né en 1944 à Racine, Wisconsin. Après avoir obtenu un bacc. en sciences de l’édu-cation de l’University of Wisconsin (Madison, Wis.) en 1967 et une maîtrise en art de l’Eastern Michigan University (Ypsilanti, Mich.) en 1969, elle part étudier un an à Londres, où elle développe une aptitude pour la photographie, délaissant du même coup la sculpture et la gravure. S’étant installée au Canada en 1973, elle décroche, l’année suivante, un poste de professeur au département des arts visuels de l’Université d’Ottawa, fonction qu’elle occupera jusqu’en 2005. Parallèment à cette carrière universitaire, Cohen commence à exposer ses premières oeuvres photographiques à la Space Gallery de Toronto dès 1974. Son travail est vite reconnu par les spécialistes du monde entier, de telle sorte que les plus grands musées l’inviteront bientôt à y exposer ses photographies. Paris, Londres, Anvers, Édimbourg, Bilbao, New York et San Francisco ne sont là que quelques exemples de villes où seront présentées les oeuvres de l’artiste.Si la plupart des photographies de Cohen sont en noir et blanc, elle en vient peu à peu à flirter avec la couleur (surtout depuis 1998). Caractérisé par des compositions soignées et des éclairages neutres, son travail montre principale-ment des intérieurs domestiques ou publics dépourvus de toute présence humaine: salles de séjour, bibliothèques, spas, lobbys d’hotels, maisons de retraite, laboratoires, usines, bases militaires, etc. Le spectateur ne peut faire autrement que de trouver quelque chose d’insolite et d’étranger à la vue de ces oeuvres. Influencées par le courant du Pop Art, les photographies de Cohen tendent à conférer un statut artistique à la réalité quotidienne. En 1991, Lynne Cohen a obtenu le prestigieux Prix Lynch-Staunton du Conseil des arts du Canada, suivi en 2005 de celui du Gouverneur général pour sa contribution aux arts visuels.

EXPOSITIONS:

- “Latitudes and Parallels”, Winnipeg Art Gallery (Wnnipeg): 1983- “Seing People, Seeing Space”, Photographer’s Gallery (Londres):1984- “Power Plays”, Stills Gallery (Edimbourg, Écosse): 1989- “American Photographs, 1940-1990”, Museum voor Fotografie (Anvers, Belgique): 1990- “Living Evidence”, Presentation House (Vancouver): 1991- “Typologies”, New Harbor Art Museum (San Francisco, Cal.): 1991- “Stages Without Wings”, Art Gallery of York University (Toronto): 1992- “Beau”, Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 1992- “Medir le cuerpo, medir la ciudad” Guggenhein Museum (Bilbao, Espagne): 1994- “Double Mixte”, Galerie nationale du Jeu de Paume (Paris): 1995- “No Man’s Land”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 2001- “Is There a There There?”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 2007

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INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Art Gallery of Ontario (Toronto)- Musée d’art moderne (Paris)- Bibliothèque nationale de France (Paris)- Metropolitan Museum of Art (New York)

FONDS D’ARCHIVES

Le Musée des beaux-arts du Canada possède le plus volumineux fonds d’archives de Lynne Cohen, composé de 1 130 photographies noir et blanc (311 négatifs et 819 épreuves) et de 28 cm de docu-ments manuscrits (correspondance et autres papiers relatifs à l’exposition “No Man’s Land” s’étant tenue en 2001). Le Art Gallery of Ontario dispose de son côté d’une centaine de photographies de Lynne Cohen, se rattachant la plupart du temps à ses oeuvres de jeunesse.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- L. Cohen, Camouflage (Cherbourg, France: Le Point du Jour, 2005).- A. Gerosa, Reflexion d’après l’oeuvre photographique de Lynne Cohen, Thèse de M.A., Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne, 2007.- D. Mellor, Occupied Territory (New York: Aperture Foundation, 1987).- F. Paul et al., L’endroit du décor (Limousin, France: Hôtel des arts, 1992).- A. Thomas, No Man’s Land (Londres: Thames and Hudson, 2001) [catalogue d’exposition].

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NOM: GABRIEL DESMARAIS, DIT GABY (1926-1991)

CHAMP PROFESSIONNEL: Portraits de studio

LIEUX DE PRATIQUE: Montréal, Hollywood et Monaco

BIOGRAPHIE:

Gabriel Desmarais, dit Gaby, est né à Marieville, Québec, en 1926. Dès l’âge de 18 ans, il achète une caméra Voightlander et suit des cours de photographie par correspondance de l’American School of Photography de Chicago. Il arrive à Montréal en 1944, comme commis de banque, et ouvre son premier studio, rue Sainte-Catherine, trois ans plus tard. Ses oeuvres sont publiées très tôt dans les journaux et revues à travers le Canada. Fort de cette notoriété, il commence dès le milieu des années 1950 à parcourir la planète afin d’offrir ses services aux grands de ce monde. Reconnu interna-tionalement pour avoir immortalisé plusieurs personnalités marquantes du XXe siècle (Charles DeGaulle, Léopold Senghor, Bertrand Russell, Albert Schweitzer, Jean Cocteau, Charles Aznavour, Louis Armstrong, etc.), Gaby voit son aura pâlir au début des années 1970, après avoir accepté le poste de directeur des relations publiques pour le compte de Jean-Claude Duvalier, futur dictateur d’Haïti. Il vivra pendant un certain temps à Los Angeles et à Monaco, pour revenir ensuite à Montréal, où il mourra en 1991.

EXPOSITIONS:

- “Portraits de Gaby”, Musée des beaux-arts de Montréal, 1965

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE SON OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives nationales du Québec (Montréal)- Succession de Gabriel Desmarais, dit Gaby

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives nationales du Québec ne possèdent qu’une partie du fonds de Gabriel Desmarais, dit Gaby, soit 47 000 épreuves et négatifs (sur un total de 150 000) réunis sous la cote P-795. Le corpus comprend principalement les portraits de personnalités de la haute société mon-tréalaise et québécoise prises dans les studios locaux de Gaby, entre 1947 et 1970. La plupart de ces portraits sont classés sous les rubriques affaires (ex. Samuel Bronfman), arts (ex. Alfred Pelland), chant (ex. Monique Leyrac), comédie (ex. Jean Duceppe), littérature (ex. Marcel Dubé), politique (ex. Pierre Elliot Trudeau), sciences (ex. Fernand Séguin) et sports (ex. Maurice Richard). Plus de 700 de ces portraits ont été mis en ligne par l’institution.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

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- Gaby, Place Ville-Marie (Montréal: Porcupine Publications, 1962).- Gaby, Portraits with Personality and Character (Montréal, c.1966).- G. Desmarais, Canada, 2000 A.D. (Montréal: Gaby Productions, 1969).- L. Lapointe, Gaby, photographe (Saint-Lambert, Qué.: Stromboli, 2003).

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NOM: DAVID HEATH (1931- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique

LIEU DE PRATIQUE: New York et Toronto

BIOGRAPHIE:

David Heath est né à Philadephie, Pa., en 1931. Il s’initie par lui même à la photographie vers la fin des années 1940 et tire bientôt plusieurs clichés de la Guerre de Corée (1950-1953), durant son séjour comme fantassin des forces armées américaines. Après de brèves études en art au Philadelphia College of Art, puis à l’Institute of Design de Chicago, il travaille momentanément auprès de photo-graphes commerciaux. En 1959, Heath perfectionne son art au contact du célèbre photographe new yorkais W. Eugene Smith. Il y apprend notamment l’importance de la narration photographique. Heath connaît ses premiers moments de gloire en 1963 avec l’exposition A Dialogue with Solitude, laquelle aborde le thème de l’isolement des êtres dans la société contemporaine. S’étant installé à Toronto en 1970, il s’intéresse à la technologie Polaroid et réalise une série d’oeuvres narratives qu’il intitule Songs of Innocence. Heath organise par la suite plusieurs présentations thématiques à partir de diapositives, comme Le grand album ordinaire (1973) et Ars Moriendi (1980). Entre-temps, il amorce une carrière d’enseignant au Ryerson Polytechnical College de Toronto, qu’il poursuivra jusqu’en 1997. L’oeuvre de David Heath est sombre, mais pas nécessairement pessimiste. Elle aborde le thème de l’aliénation et s’inspire librement de ses expériences personnelles en tant qu’orphelin de parents juifs et en tant que soldat durant la Guerre de Corée. On a dit de ses séries photographiques qu’elles étaient un testament humanitaire sur la capacité de l’art à transformer la misère en beauté, la déréliction en solitude.

EXPOSITIONS:

-“A Dialogue with Solitude”, George Eastman House (Rochester): 1963-“Pierre Gaudard, Gabor Szilasi, David Heath”, National Film Board of Canada (Toronto): 1977-“A Dialogue with Solitude / Songs of Innocence”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 1981-“David Heath, Photographer”, Photofind Gallery (New York): c.1984-“David Heath”, San Francisco Camerawork (San Francisco, Cal.): c.1990

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Art Gallery of Ontario (Toronto)- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Musée des beaux-arts de Montréal (Montréal)- Museum of Modern Art (New York)- Art Institute (Chicago)FONDS D’ARCHIVES

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Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) possède, sous la côte R8312-0-0E, plus de 192 albums du photographe David Heath. Présentés à la manière d’un journal intime illustré, ceux-ci retracent les activités de Heath, sa vision de l’art, ses réflexions sur la condition humaine et ses projets photographiques entre 1974 et 2001. Ces albums sont constituées à 62% de photographies Polaroid, à 35% de reproduction tirées de magazines ou de livres, et à 3% de documents manuscrits. Pour sa part, le Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa) dispose de 102 épreuves photographiques de l’artiste décrivant son séjour en Corée au début des années 1950, la vie quotidienne dans les villes nord-américaines, le Ground Zero aux lendemains de l’attentat terroriste du 11 septembre 2001, et les prestations publiques des poètes de la Beat Generation. Le Musée est également propriétaire des archives graphiques et textuelles entourant les préparatifs de l’exposition “A Dialogue with Solitude / Songs of Innocence” tenue en 1981.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- D. Heath, A Dialogue with Solitude (Culpeper, Va.: Community Press, 1965).- D. Heath, Korea: Photographs, 1953-54 - Fiftieth Anniversary (Toronto: Lumiere Press, 2004).- D. Heath, Dave Heath’s Art Show (Toronto: Anonymous Press, 2007).- M. Torosian, Extempore: David Heath: Reflections and Ruminations on Art and Personal History (Toronto: Lumiere Press, 1988).

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NOM: GEOFFREY JAMES (1942- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique

LIEU DE PRATIQUE: Montréal, Ottawa et Toronto

BIOGRAPHIE:

Geoffrey James est né en 1942 à St Asaph, au pays de Galles (Angleterre). Après avoir obtenu une maîtrise en histoire moderne, du Wadham College (Oxford Univ.), en 1964, James s’installe aux États-Unis et travaille pendant un certain temps comme journaliste au Philadelphia Evening Bulletin. Opposé à la guerre du Vietnam, il déménage deux ans plus tard à Montréal, où il exerce la profession de reporter pour le compte du quotidien Montreal Star. Cette courte expérience journalistique l’amène tout naturellement à collaborer, de 1967 à 1975, au magazine Time (édition canadienne), en qualité de chroniqueur d’art. Entre-temps, James s’est découvert une passion pour la photographie de paysages. Il s’intéresse tout particulièrement à la géométrie des jardins à la française, qu’il s’amuse à prendre en format panoramique. En 1971, il est invité par l’Université Sir George Williams (Montréal), où il enseigne l’histoire de la photographie depuis peu, à y tenir sa première exposition. Influencé par l’école de la nouvelle topographie de Lewis Baltz de même que par le photographe français Eugène Atget, James explorera pendant plus de trente ans la psyché des sociétés occidentales à travers les paysages tant enchanteurs que dévastés. Un vif intérêt pour le genre humain se dégage de son oeuvre photographique, malgré l’absence quasi totale d’êtres vivants. Durant les années 1980, il parcourera la campagne romaine, en quête de jardins du XVIIe et XVIIIe siècles, série pour laquelle il recevra le prestigieux prix John Solomon Guggenheim couronnant les meilleures oeuvres d’art contemporain à l’échelle internationale. Durant les années 1990, il s’inté-ressera aux aménagements de parcs urbains de l’architecte américain F. L. Olmsted, grâce au soutien du Centre Canadien d’Architecture, puis réalisera une série intitulée, Running Fence, sur la clôture de 23 kilomètres qui sépare la frontière americano-méxicaine dans la région de San Diego, en Californie. Ses productions récentes, telles que Lethbridge et Toronto 905, mettent davantage l’accent sur les formes architecturales en milieu urbain.

EXPOSITIONS:

- “Entrances & Exits: The Garden as Theatre”, Agnes Etherington Art Centre (Kingston, Ont.): 1984- “La Campagna Romana”, Galerie René Blouin (Montréal): 1991- “Running Fence”, Presentation House Gallery (North Vancouver, B.C..): 1998- “The Lethbridge Project”, Southern Alberta Art Gallery (Lethbridge, Alta.): 1998- “Paris: Geoffrey James”, Centre culturel canadien (Paris): 2001- “Geoffrey James: Past, Present, Future”, University of Toronto Art Centre (Toronto): 2003- “Field Notes”, Kitchener Art Gallery (Kitchener, Ont.): 2008- “Utopie/Dystopie”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 2008

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

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- Bibliothèque nationale (Paris)- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Centre canadien de l’architecture (Montréal)- Musée d’art contemporain de Montréal- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Museum of Modern Art (New York)- University of Toronto

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives Canada disposent d’une trentaine de photographies de Geoffrey James, sous la côte R11886-0-3-E. Celles-ci consistent essentiellement en des images panoramiques de jardins français (Fontainebleau, Saint-Cloud, Marly, etc.) et de scènes du Mont-Royal (Montréal). De son côté, le Musée des beaux-arts du Canada possèdent plus de 116 oeuvres de James repré-sentant entre autres les immeubles de Paris, des villas romaines et ‘Liberty Village’ en banlieue de Toronto.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- G. James, Triumph of an Outcast (Toronto: Maclean’s, 1988).- G. James, Running Fence (North Vancouver, B. C.: Presentation House Gallery, 1998) [catalogue d’exposition].- G. James, Paris (Paris: Services culturels de l’Ambassade du Canada, 2001) [catalogue d’exposition].- G. James, Toronto (Vancouver: Douglas & McIntyre, 2006).- P. Lambert (dir), Frederick Law Olmsted en perspective (Montréal: Centre canadien de l’archi- tecture, 1996) [catalogue d’exposition].- L. Pauli, Utopie/Dystopie: les photographies de Geoffrey James (Ottawa: Musée des beaux-arts du Canada, 2008) [catalogue d’exposition].- R. Wiebe, Place: Lethbridge, a City on the Prairie (Vancouver: Douglas & McIntyre, 2002).

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NOM: YOUSUF KARSH (1908-2002)

CHAMP PROFESSIONNEL: Portraits de studio

LIEU DE PRATIQUE: Ottawa

BIOGRAPHIE:

Yousuf Karsh est né à Madin, en Arménie, le 23 décembre 1908. Déplacée de village en village durant le génocide arménien de 1916, sa famille se réfugie finalement en Syrie en 1922 afin d’échap-per aux persécutions des Turques. Deux plus tard, le jeune Yousuf est envoyé outre-mer, où il rejoint son oncle George Nakash, un photographe vivant à Sherbrooke, au Québec. Après de brèves études dans cette ville, Karsh entre au service de l’entreprise de son oncle. Celui-ci voyant les aptitudes de son neveu pour l’art pictural l’envoie dès 1928 faire un stage d’apprentissage auprès du célèbre photographe-portraitiste de Boston, John H. Garo. C’est là qu’il apprendra pendant trois ans l’art de créer des ambiances grâce à un contraste étudié entre l’ombre et la lumière. Garo encouragera d’ailleurs son jeune apprenti à étudier les grands maîtres de la peinture (Rembrandt, Rubens et Valasquez) afin de perfectionner son style. Après être retourné brièvement chez son oncle, Karsh déménage en 1932 à Ottawa, où il ouvre son propre studio de photographie. Ses services sont bientôt sollicités par le Ottawa Little Theatre, lieu de rendez-vous de l’élite politique et culturelle de la capi-tale. Au fur et à mesure que les travaux de Karsh commencent à être connus, il attire vers lui, dans son studio, les personnalités politiques locales et les dignitaires en visite à Ottawa. Le gouverneur général du Canada Lord Bessborough, et son épouse, sont les premières personnalités importantes à être immortalisées par Karsh. En décembre 1941, il réalise le fameux portrait de Winston Churchill dans les locaux du Parlement canadien, lequel sera aussitôt publié dans le magazine Life, conférant ainsi une notoriété internationale à son auteur. Commence alors pour Karsh une carrière de plus de cinquante ans, dans laquelle il finit par représenter les images officielles des plus grandes personna-lités politiques, scientifiques et culturelles du XXe siècle. Les autres portraits biens connus de Karsh sont ceux de Charles De Gaulle, de John F. Kennedy, de Martin Luther King, d’Albert Einstein, de Carl Jung, d’Ernest Hemingway, de Marshall McLuhan et de Sophia Loren, pour ne nommer que ceux-là. De l’avis même de l’artiste, il ne lui manquait que les portraits de Roosevelt et de Staline. À partir de 1946, Karsh se mit à publier régulièrement des ouvrages portfolios de ses portraits, convaincu que la présentation collective de ceux-ci offrait un plus grand impact qu’une exhibition à l’unité. Outre les portraits de studio, l’oeuvre de Karsh inclut également une série sur les villes, une autre sur la population canadienne, plusieurs contrats commerciaux, une description des conditions de travail des ouvriers d’usine et quelques clichés cinématographiques. Karsh exposera pour la première fois ses portraits en solo lors d’une rétrospective tenue en 1960 au Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa). Depuis ce moment, ses oeuvres ont voyagé un peu partout à travers le monde. Un 1965, Karsh fut honoré de la médaille du Conseil des arts du Canada. Décoré de l’Ordre du Canada trois ans plus tard, il est élevé au rang de compagnon de cette prestigieuse institution en 1990. Karsh mettra la clé à son studio du Château Laurier à Ottawa en 1992. Il ira vivre par la suite à Boston, où il mourra en 2002. On estime son corpus photographique à plus de 50 000 portraits.EXPOSITIONS:

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- “Yousuf Karsh”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 1960- “Portraits of Greatness”, Palazzo Venzia (Rome): 1963- “Men Who Make Our World”, Exposition universelle (Montréal): 1967- “Portraits by Karsh”, Museum of Fine Arts (Boston): 1968- “Yousuf Karsh: The Art of the Portrait”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 1989- “Karsh’s American Legends”, International Center of Photography (New York): 1990- “Karsh: A Sixty Years Retrospective”, Museum of Fine Arts (Boston): 1996- “Karsh In London”, Canada House Cultural Centre Gallery (Londres): 1998- “Yousuf Karsh: Heroes of Light and Shadow”, Deutsches Historischse Museum (Berlin): 2001- “Yousuf Karsh; cadrage, carrière, célébrité”, Théâtre de la photographie (Nice, France): 2007- “Yousuf Karsh: Industrial Images”, Art Gallery of Windsor (Windsor, Ont.): 2007- “Karsh: créateur d’images”, Musée des sciences et de la technologie du Canada (Ottawa): 2009

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Musée national des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Art Institute of Chicago (Chicago)- George Eastman House (Rochester, N.Y.)- Metropolitan Museum of Art (New York)- Museum of Modern Art (New York)- National Portrait Gallery (Londres)

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) est le dépositaire officiel de l’immense fonds documen-taire (70 mètres de document manuscrit) et photographique (355 870 épreuves & négatifs) de Yousuf Karsh, couvrant les années 1925-1993. Identifié sous la cote R613-0-5-E, le fonds comprend onze séries représentant chacunes un volet particulier de sa vie professionnelle: portraits de studio, administration et correspondance d’affaires, albums de coupures de presse, projets publicitaires et commandes spéciales, recueil de photographies historiques, dossier concernant John H. Garo, son mentor, entrevues sur film et bandes audio, prix honorifiques, etc. Le Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa) dispose quant à lui d’une centaine de portraits réalisés par Karsh, dont ceux de Fidel Castro, d’Albert Camus, d’Andy Warhol, de Jean-Paul Riopelle et de Grey Owl. En outre, le musée est propriétaire d’un certain nombre de dessins de Karsh, de même que de tous les documents administratifs se rapportant aux diverses expositions internes du photographe (dont un projet non réalisé datant de 1952).En 1998, Karsh a légué au Musée des sciences et de la technologie du Canada la majeure partie de son équipement de studio (385 pièces). On y retrouve notamment la caméra de studio Calumet que Karsh utilisait depuis 1956, son agrandisseur Salzman acheté en 1945, ses dispositifs d’éclairage et ses accessoires de retouche (dont une série de pinceaux offerts par Garo).

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

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- Y. Karsh, Faces of Destiny (New York: Ziff-Davis Publishing, 1946).- Y. Karsh, Portraits of Greatness (Toronto: University of Toronto Press, 1959).- Y. Karsh, In Search of Greatness: Reflections of Yousuf Karsh (Toronto: University of Toronto Press, 1962) [autobiographie].- Y. Karsh, Karsh Portfolio (Toronto: University of Toronto Press, 1967).- Y. Karsh, Karsh Portraits (Toronto: University of Toronto Press, 1976).- Y. Karsh, Karsh Canadians (Toronto: University of Toronto Press, 1978).- Y. Karsh, Karsh: A Fifty-Year Retrospective (Toronto: University of Toronto Press, 1983).- Y. Karsh, Karsh: American Legends: Photographs and Commentary (Boston: Little Brown, 1992).- Y. Karsh, Karsh: A Sixty-Year Retrospective (Boston: Little Brown, 1996).

- J. Borcoman et al, Karsh: The Art of Portrait (Ottawa: National Gallery of Canada, 1989) [catalogue d’exposition].- J. Fielder, Karsh: A Biography in Images (Boston: MFA Publications, 2003).- J. Fielder et al., Yousuf Karsh: Industrial Images (Windsor, Ont.: Art Gallery of Windsor, 2007). [catalogue d’exposition].- L. Goodhall, Photographing Greatness: The Story of Karsh (Toronto: Napoleon, 2007).- L. Koltun, Yousuf Karsh: cadrage, carrière, célébrité (Nice: Théâtre de la photographie, 2006) [catalogue d’exposition].- D. Travis, Regarding Heros: Yousuf Karsh (Boston: D.R. Godine, 2009).

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NOM: MICHEL LAMBETH (1923-1977)

CHAMP PROFESSIONNEL: Documentaire et photojournalisme

LIEU DE PRATIQUE: Toronto

BIOGRAPHIE:

Michel Lambeth est né à Toronto en 1923. Après avoir terminé des études en administration au Eastern High School of Commerce, Lambeth est enrôlé en 1943 comme artilleur dans l’Armée cana-dienne. Une fois la guerre terminée, il étudie les beaux-arts à Londres puis à Paris. Aussitôt revenu au Canada, il s’inscrit en 1948 au département de littérature anglaise de l’Université de Toronto. On le retrouve ensuite membre de l’équipe de production de la Toronto Film Society. Il y dirigera entre autres un court-métrage intitulé, "8h:15", qui obtiendra un prix au Canadian Film Award de 1954.Ayant fait l’acquisition d’une caméra Rolleiflex puis d’une Leica, Lambeth opte finalement pour une carrière de photo-reporter pigiste. De 1955 à 1960, il remplira des contrats pour des publications comme le Canadian Architect, le Canadian Metalworking et le Business Week. En 1960, il entrera au service du journal hebdomadaire Star Weekly de Toronto, pour lequel il fournira non seulement des clichés, mais aussi des articles et des compte rendus d’exposition. Après avoir quitté ce journal, il fondera en 1972 la galerie Mind and Sigh avec quelques collègues photographes de Toronto. C’est également à la même époque qu’il deviendra membre du Committe to Strengthen Canadian Culture. Il semble, par ailleurs, que son action énergique pour la défense des droits des artistes lui ait valu des inimitiés un peu partout au Canada, au point de lui fermer les portes de plusieurs institutions. Associé un temps avec le Toronto Free Theatre, il devra finalement recourir à l’assistance sociale en 1976. Tombé en profonde dépression, Lambeth mourra l’année suivante, à l’âge de 54 ans. L’oeuvre photographique de Lambeth est remplie de scènes de vie quotidienne prises dans les lieux publics à Toronto ou ailleurs. Il y décrit notamment les stratégie de survie des gens modestes et de personnages marginaux de la société. Sa série-reportage sur la pauvreté dans la paroisse Saint-Nil, en Gaspésie, est particulièrement touchante. On dit souvent de son oeuvre qu’elle est inspirée de l’humanisme documentaire des Kertész, Brassai, Doisneau et Cartier-Bresson.

EXPOSITIONS:

- “Encounter”, National Film Board of Canada (Toronto): 1976- “Michel Lambeth: Photographer”, Archives publiques du Canada (Ottawa): 1986- “Michel Lambeth: Photographer”, Art Gallery of Ontario (Toronto): 1998

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Art Gallery of Ontario (Toronto)- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Winnipeg Art Gallery (Winnipeg)

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FONDS D’ARCHIVES

Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) possède le fonds d’archives le plus complet sur la vie et l’oeuvre de Michel Lambeth. Regroupé sous la cote R5716-0-6-E, ce fonds est constitué de 68 593 négatifs n.& b., de 34 boîtes de diapositives Kodachrome, de 23 gravures, de 9 court-métrages amateurs totalisant 33 minutes et de 83 cm de documents manuscrits. La partie graphique du fonds recouvre les photographies de scènes de rue prises dans les lieux publics de Toronto (Allan Garden, Cabbagetown, Old Woodbine Racetrack, St Lawrence Market, etc.), de même que les clichés originaux de reportages réalisés pour de compte de diverses magazines ou journaux, entre 1955 et 1976. S’y retrouvre aussi une série sur le Mexique et une autre intitulée “Between Friends”, réalisée en 1974 pour le compte du National Film Board of Canada et visant à souligner le Bicentenaire de l’Indépendance américaine. De son côté, la partie manuscrite du fonds rassemble la correspondance personnelle de Michel Lambeth, ses écrits, des coupures de presse à son sujet, des affiches d’expo-sitions, des cahier de notes identifiant ses négatifs, de même que les papiers concernant le Canadian Artists Representation (1971-1976), le Committe to Strengthen Canadian Culture (1972-1973) et le Toronto Free Theatre (1973-1977).Le Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa) dispose quant à lui de 120 épreuves photographiques de Lambeth.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- M. Lambeth, “Nuescapes”, Causeway (Toronto), 1.4 (1966).- M. Lambeth, Made in Canada: Photographs of Toronto, circa 1910, from the Collection of Michel Lambeth (Toronto: Grafikos, 1967).- M. Lambeth, The Reflexion of Existence (Toronto: Lumiere Press, 1982).- M.Lambeth, The Confession of a Tree Taster (Toronto: Lumiere Press, 1987).- M. Torosian, Michael Lambeth, Photographer (Ottawa: Archives publiques du Canada, 1986) [catalogue d’exposition].

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NOM: ANDRÉ LE COZ (1929-1998)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photojournalisme et photographie de plateau

LIEU DE PRATIQUE: Montréal

BIOGRAPHIE:André Le Coz est né à Paris en 1929. Il émigre au Québec en 1952 et s’y installe à titre de photo- journaliste. Il réalisera notamment des reportages pour les magazines Chatelaine et Maclean. En 1954, il sera engagé par la Société Radio-Canada comme photographe de scène pour les dramatiques et les concerts télévisés. Commence alors une carrière qui l’amènera à pratiquer sa profession auprès des arts de la scène (théâtre, concert, ballets et opéras) pendant plus de 40 ans. Il participe également à une trentaine de films produits par l’ONF ou des firmes privées. Son oeuvre est surtout constituée de photographies de comédiens et d’artistes célèbres de la scène québécoise. Ses compositions soignées en font l’un des pionniers en ce domaine au Québec. André Le Coz est décédé à Magog, Québec, en 1998.

EXPOSITIONS:

- “André Le Coz”, Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 1996- “Visages de petit écran”, Cinémathèque québécoise (Montréal): 1997

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Musée national des beaux-arts du Québec (Québec)- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Université de Sherbrooke (Sherbrooke, Qué.)

FONDS D’ARCHIVES:

Constitué de 120 871 photographies noir&blanc et de 40 cm de documents textuels, le fonds d’André Le Coz est conservé au Service des archives de l’Université de Sherbrooke, sous la cote P 29. Ce fonds, qui s’étend sur plus de quarante années de vie artistique, constitue une source importante pour étudier le milieu culturel québécois et ses manifestations importantes durant la seconde moitié du XXe siècle. Le corpus est divisé en fonction des grandes institutions (conservatoires, compagnies théâtrales, troupes de ballet, etc.) pour lesquelles André Le Coz a travaillé durant sa carrière. Les documents photographiques incluent des comédiens en répétition ou en représentation, les décors et les accessoires de plus de 700 productions réalisées entre 1954 et 1995. Les documents textuels regroupent des programmes de théâtre, des coupures de presse, des cartons d’invitation, des affiches et du matériel d’exposition d’André Le Coz.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

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- A. Le Coz, La mémoire de l’oeil: 25 ans d’émotions sur les scènes du Québec (Montréal: Éditions Mille-Iles/Levain, 1988).- A. Le Coz, Visages du petit écran: florilège photographique (Montréal: Cinémathèque québécoise, 1997) [catalogue d’exposition].- S. Pressé et F. Brochu, André Le Coz, photographe (Sherbrooke: Université de Sherbrooke, 2007) [catalogue d’exposition].- F. Vézina, L’hippocanthrope (Montréal: L’Hexagone, 1979) [illustrations de A. Le Coz].

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NOM: RINO NOTO (1959- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie publicitaire et portraits

LIEU DE PRATIQUE: Toronto

BIOGRAPHIE:

Rino Noto est né en Italie en 1959. Il s’initie à la photographie dès l’âge de 13 ans, effectuant ici et là des randonnées à bicyclette avec une caméra empruntée à des amis. Après avoir immigré au Canada au début des années 1980, il ouvre à Toronto un studio spécialisé dans la photographie commerciale. Son talent est vite repéré, tant et si bien qu’il finit par compter parmi sa clientèle des compagnies aussi connues que Levis, Molson Canadian, Rogers Communications, Fidelity Invest-ment et American Express. Il faut dire que les images publicitaires de Noto sont influencées par la brillance lumineuse des toiles de Modigliani et par les extravagances de l’artiste-peintre britannnique Lucian Freud. Travaillant avec une camera Hasselblad équipée d’un dos numérique, Noto a dévelop-pé une signature artistique facilement reconnaissable grâce aux effets qu’il obtient avec le puissant système d’éclairage Cumulite de 2 000 watts et le système de flash différé à l’infrarouge Pulso 8. Outre la photographie commerciale, Noto se passionne depuis quelques années pour le portrait. Utilisant ses nombreux contacts, il parvient à photographier des personnalités célèbres du monde littéraire et artistique, tels que Umberto Eco, Farley Mowat, Leonard Cohen et Cindy Gomez. Ses créations font la couverture de publications aussi prestigieuses que Zoom Magazine et Fotographia Actual. Un projet de livre à son sujet est d’ailleurs en cours. Plus récemment, Rino Noto a participé aux émisions télévisées “Behind the Camera” et “Behind the Lens” produites au Canada par les chaînes Bravo et Discovery. En 2009, Noto s’est joint à l’agence publicitaire torontoise Atomic Clock Cinematic Arts, en qualité de directeur de la photographie.

EXPOSITIONS:

- “About Face”, De Luca Fine Art Portrait (Toronto): 2009

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa)

FONDS D’ARCHIVES:

Le Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa) est en voie d’acquérir la série de portraits d’artistes de Rino Noto.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

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- S. Kay, “Rino Noto: Canada’s Premier Fashion Photographer”, Photonews,17.3 (été 2008):pp.14s.- “Rino Noto: Photographer”, site web, http://rinonotofoto.wordpress.com

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NOM: CONRAD POIRIER (1912-1968)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photojournalisme

LIEU DE PRATIQUE: Montréal

BIOGRAPHIE:

Nous ne savons que très peu de choses sur la vie de Conrad Poirier. Selon toute vraisemblance, il serait né dans la région de Montréal en 1912. Devenu professionnel à la pige, il vend dès les années 1930 ses photographies à divers journaux montréalais tels Le Samedi, The Gazette, La Patrie et La Presse. Adepte d’une nouvelle vision, il fait de la photographie sociale avant l’heure, s’intéressant au travail en usine, aux scènes de vie quotidienne et aux diverses manifestations populaires. On lui doit notamment plusieurs photos sur le programme de travaux publics mis en place durant la crise des années 1930, pour pallier au chômage dans les villes. On lui doit également une séries très détaillée sur le matriçage de disques à l’usine de la RCA Victor, à Saint-Henri (Montréal). Il est un des rares photographes à avoir documenté la sévère crise du logement survenue à Montréal au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Par son caractère non composé, ses scènes de rues rappellent les photographies de grands maîtres tels que Cartier-Bresson ou Doisneau. Pour des raisons que l’on ignore, Poirier semble avoir délaissé la photographie au cours des dernières années de sa vie. Il meurt à l’âge de 55 ans en 1968.

EXPOSITIONS:

- Archives nationales du Québec (Montréal): 1988

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DES SON OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives nationales du Québec (Montréal)

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives nationales du Québec ont acquis en 1972 le fonds photographique de Conrad Poirier des mains de Guy Côté, collectionneur privé et l’un des fondateurs de la Cinéma-thèque québécoise. Constitué de 23 460 photographies, de plusieurs recueils de presse et de nombreux albums, ce fonds est conservé sous la cote P-48. Parce qu’elle dévoile des aspects inédits de la vie quotidienne, culturelle, intellectuelle, economique, sociale et sportive de Montréal et de ses environs, l’oeuvre de Conrad Poirier constitue un matériau précieux pour chercheur en histoire sociale du Québec.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- Le Montréal des années ‘40' vu par Conrad Poirier, photographe (1912-1968) (Montréal:

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Ministère des affaires culturelles, 1988).- Rendez-vous d’août: une exposition de photographies de Conrad Poirier (Montréal: Ministère des affaires culturelles, 1988) [catalogue d’exposition].- M. Lessard et al., Montréal au XXe siècle: regards de photographes (Montréal: Éditions de l’Homme, 1995).

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NOM: ROBERT POLIDORI (1951- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie documentaire et artistique

LIEU DE PRATIQUE: Montréal, New York et Paris

BIOGRAPHIE:

Robert Polidori est né à Montréal en 1951. Parti vivre à New York en 1969, il devient assistant- réalisateur à l’Anthology Film Archives. Cela l’amènera à participer, sous la gouverne de John Mekas, à l’élaboration de nombreux films d’avant-garde durant les années 1970. En 1979, il obtient une maîtrise en art de la State University of New York (Buffalo) et se consacre entièrement à la photographie, parvenant depuis lors à produire une vingtaine d’expositions solos à New York, Paris, Londres et Berlin. En 1998, il est embauché comme photographe en résidence au magazine New Yorker. L’oeuvre artistique de Polidori est tout autant influencée par le sens de la perspective des peintres de la Renaissance que par les théories mnémoniques de Frances Yates, selon lesquelles les lieux abandonnées retiendraient les strates de mémoire de leurs anciens occupants. Ses images révèlent presque toujours une sorte d’entre-deux. À la fois artiste et documentariste, Polidori est constamment à la recherche de ces moments bien concrets qui créent un avant et un après. C’est le cas entre autres de sa série sur Beyrouth (1994-1996), de celle sur Prepiat/Tchernobyl (2001) et de celle relatant l’état de dévastation de la Nouvelle-Orléans, à la suite du passage de l’ouragan Katherina (2005). En insistant sur les détails, ses photographies grand format d’espaces vides nous renvoient une vision apocalyptique de la réalité. Les oeuvres de Polidori ont été exposées au Metropolitan Museum of Art de New York en 2006 et font l’objet actuellement d’une rétrospective au Musée d’art contemporain de Montréal.

EXPOSITIONS:

- “Brasilia”, Robert Miller Gallery (New York): 2000- “Photographs of Robert Polidori”, Nicholas Metivier Gallery (Toronto): 2005- “Tchernobyl”, Edwynn Houk Gallery (New York): 2006- “Works of Robert Polidori”, Metropolitan Museum of Art (New York): 2006- “Robert Polidori: rétrospective”, Musée d’art contemporain (Montréal): 2009

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Musée d’art contemporain (Montréal)- Metropolitan Museum of Art (New York)- Flowers-East Gallery (Londres)- Martin Gropius Bau Gallery (Berlin)

FONDS D’ARCHIVES:

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Aucune institution n’est dépositaire pour le moment des archives de Robert Polidori. On peut consulter cependant un dossier biographique détaillé sur cet artiste au Musée d’art contemporain de Montréal, sous la cote BIO 000984.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- R. Polidori, After the Flood (Gottingen, All.: Steild, 2006).- R. Polidori, Havana (Londres: Thames & Hudson, 2001).- R. Polidori, Métropolis (New York: Metropolis Books, 2004).- R. Polidori, Transitional States (Gottingen, All.: Steild, 2008).- R. Polidori, Zones of Exclusion: Pripyat and Tchernobyl (Gottingen, All.: Steild, 2003).- R. Polidori et al., Chateaux de la Loire Valley (Cologne, All.: Köneman, 1997).- R. Polidori et al., La Jordanie (Paris: Place des Victoires: 2006).- R. Polidori et al., Libya: The Lost Cities of the Roman Empire (Cologne, All.: Köneman, 1999).- R. Polidori et al., Versailles (New York: Abbeville Press, 1991).- J. Siemens, Robert Polidori: Essay (Hambourg, Allemagne, 2006).

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NOM: GABOR SZILASI (1928- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie documentaire et artistique

LIEU DE PRATIQUE: Montréal

BIOGRAPHIE:

Gabor Szilasi est né à Budapest, Hongrie, en 1928. Ayant entrepris des études de médecine à l’Université de Budapest en 1946, il doit les interrompre trois ans plus tard à la suite d’une tentative avortée d’évasion de son pays, qui lui vaut cinq mois de prison. Revenu à la vie normale, il travaille pendant un certain temps à la construction du métro de Budapest, puis pour une coopérative de confection de mouchoirs. C’est aussi à cette époque qu’il s’initie à la photographie avec une caméra Zorkij (copie russe de la Leica IIIF). Profitant du soulèvement populaire de Budapert en 1956, il s’enfuit de son pays et rejoint le Canada, l’année suivante. Atteint de tuberculose, il doit recevoir des traitements dans un hôpital de Halifax, avant de s’installer à Québec où il travaillera momentanément comme cartographe pour le gouvernement provincial. Szilasi déménage ensuite à Montréal, où il exercera la profession de photographe pour l’Office du film du Québec, de 1959 à 1971. On lui assignera alors diverses missions, dont celle de documenter l’Exposition universelle s’étant tenue à Montréal en 1967. Au début des années 1970, il collabore au Groupe d’action photographique (GAP), qui utilise la force du médium photographique comme outil d’intervention socio-culturelle dans les milieux populaires de Montréal. Intéressé par la photographie documentaire, Szilasi connaît ses premiers succès avec deux importantes séries, “Charlevoix” (1970) et “La Beauce” (1973), qui présentent une vision à la fois sensible et fantasque des transformations de la société rurale sous l’effet du modernisme. Durant les années 1980, il explore un temps le portrait, pour se concentrer ensuite sur la beauté de l’héritage architectural de Montréal, dans des images panoramiques réalisées avec une caméra de banquet (1982) et dans divers projets commandés par le Centre canadien d’archi-tecture (1989-1995). C’est aussi à cette époque qu’il réalise une série de recueils photographiques à la suite de ses séjours en Italie (1986), en Hongrie (1987) et en Pologne (1990). Au début des années 1990, Szilasi reçoit du Musée des beaux-arts du Canada le mandat de photographier les jardins de Claude Monet à Giverny, France, en vue d’une éventuelle exposition. Aussitôt de retour au Canada, il se lance dans une série de portraits psychologiques au moyen d’épreuves noir et blanc tirées avec un appareil Polaroid grand format. On dit de ses compositions qu’elles sont franches sans jamais pour autant tomber dans la froideur. Une retrospective des oeuvres de Gabor Szilasi fait actuellement l’objet d’une exposition au Musée d’art de Joliette (Joliette, Qué.) et au Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa). Gabor Szilasi a également enseigné la photo-graphie au CÉGEP du Vieux Montréal (1970-1980) et à l’Université Concordia (1980-1995).

EXPOSITIONS:

- “Charlevoix: photographies récentes de Gabor Szilasi”, Studio 23 (Montréal): 1970- “La Beauce”, Musée McCord (Montréal): 1974- “La Fête”, Rencontre internationale de photographie (Arles, France): 1978

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EXPOSITIONS (suite):

- “Gabor Szilasi: photographies récentes”, Musée d’art contemporain (Montréal): 1980- “Panoramas de Montréal”, Galerie Art 45 (Montréal): 1982- “Passages à l’Université de Montréal”, Centre canadien de l’architecture (Montréal): 1990- “Gabor Szilazi: photographies, 1954-1996”, Musée des beaux arts de Montréal (Montréal): 1997- “Les Impatients”, Centre d’expression et d’interprétation de l’art thérapeutique (Montréal): 2003- “Réflexion: Hongrie-Canada”, Galerie d’art Stewart Hall (Pointe-Claire, Qué.): 2006- “Gabor Szilasi: l’éloquence au quotidien”, Musée canadien de la photographie contemporaine (Ottawa): 2009

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- Musée d’art contemporain (Montréal)- Musée national des beaux-arts du Québec (Québec)

FONDS D’ARCHIVES:

Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) possède une cinquantaine de photographies n.& b. de Gabor Szilasi, dont une série de vues sur l’Ile-aux-Coudres et une autre sur les municipalités de l’Abitibi, regroupées sous les cotes C0072 et C0522, alors que le Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa) est dépositaire de 111 photographies de même type,représentant des bâtiments de Montréal, des intérieurs domestiques de maisons rurales du Québec, quelques portraits de gens ordinaires et quelques exemplaires de scènes de rue prises en Hongrie et en Pologne.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- S.Grant Marchand, Esthétiques actuelles de la photographie au Québec (Montréal: Musée d’art contemporain de Montréal, 1982).- D.Harris, Gabor Szilasi: l’éloquence au quotidien (Ottawa: Musée canadien de la photographie contemporaine, 2009) [catalogue d’exposition].- V.Leblanc, Familles: photos de Gabor Szilasi (Montréal: Centre des arts visuels, 2008). [catalogue d’exposition].- M. Lessard, Montréal au XXe siècle: regards de photographes (Montréal: Éd. de l’Homme, 1995).- G. Szilasi, Passages à l’Université de Montréal (Montréal: Centre canadien de l’architecture, 1990) [catalogue d’exposition].- G. Szilasi, Photographies, 1954-1996 (Montréal: McGill-Queen’s University Press, 1997) [catalogue d’exposition].

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- G. Szilasi, Une incursion photographique dans l’univers des impatients (Montréal: Les Impatients, 2005).

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NOM: PAUL TAILLEFER (1924- ...)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photojournalisme

LIEUX DE PRATIQUE: Ottawa et Montréal

BIOGRAPHIE:

Paul Taillefer est né à Ottawa en 1924. Il fit ses premières armes en qualité de photographe de presse pour le quotidien Le Droit d’Ottawa, dès le début des années 1940. Après un bref séjour dans l’armée comme photographe du Service des relations publiques de la Défense canadienne, de 1944 à 1946, il entra au service des Studios Bier, principaux pourvoyeurs de reportages photographiques pour le journal Montreal Star, pour lesquels il travailla jusqu’en 1979. Au début des années 1960, il fut l’un des fondateurs de l’Association des photographes de presse de Montréal et du Canadian Press Photographers Association, avant de devenir un peu plus tard président du comité consultatif de la photographie au Ministère de l’Éducation du Québec, dont le travail aboutira à l’implantation de l’enseignement de la photographie au niveau collégial. Honoré plusieurs fois pour ses contri-butions photojournalistiques, Paul Taillefer participa aux reportages d’une quinzaine de congrès à la direction de divers partis politiques, à quelques-unes des visites royales à travers le Canada, de même qu’à plusieurs événements importants: déploiement des Forces canadiennes à Chypre en 1964, Expo 67, Jeux olympiques de Montréal en 1976, etc. De 1977 à 1981, il fut tour à tour enseignant au département de design de l’Université du Québec à Montréal et responsable de la recherche photographique pour le Mémorial du Québec, une série encyclopédique en huit volumes vouée à l’histoire du Québec. Depuis quelques années, il participe en tant que conférencier aux séminaires de la National Press Photographers Association (États-Unis) et aux congrès de la Corporation des photographes professionnels du Québec et du Canada.

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)

FONDS D’ARCHIVES:

Constitué de 24 640 photographies de reportage couvrant les années 1939-1990, le fonds de Paul Taillefer est conservé à la Bibliothèque et Archives Canada, sous la cote R-662-0-9-F. Ce fonds contient de nombreux clichés réalisés pour le compte de divers journaux, dont une série ayant pour thème “Montreal Changing Face”, une autre sur les Mohawks de Caugnawaga et une dernière consa-crée à la mode des années 1960. On y retrouve aussi les portraits qui l’ont élevé au rang des plus éminents photographes de presse, comme ceux de Mme Eleonor Roosevelt, lors de la deuxième con-férence de Québec en 1943, et ceux de Maurice Duplessis, de Camilien Houde, de John Diefenbaker, de Joey Smallwood et du Gouverneur général George Vanier. Outre ces photographies, le fonds d’archives contient une entrevue accordée par Paul Taillefer au réseau anglais de la Société Radio-Canada, et plusieurs objets (médailles, écussons, épinglettes, etc) de sa collection privée.

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BIBLIOGRAPHIE

- A. Désilets et P. Taillefer, Guide des accessoires et des appareils photos (Montréal: Éditions de l’Homme, 1981).

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NOM: JOHN VANDERPANT (1884-1939)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique et portrait commercial

LIEU DE PRATIQUE: Okotoks, Alta., et Vancouver, C.-B.

BIOGRAPHIE:

John Vanderpant est né à Alkmaar, Hollande, en 1884. Après des études en littérature à l’Université d’Amsterdam, puis à celle de Leiden, il publie ses premiers poèmes et quelques nouvelles dans diverses revues littéraires hollandaises. Faute de ne pouvoir vivre de ses écrits, il entre en 1910 au service du magazine Op de Hoogte, en qualité de photo-reporter. Il émigre l’année suivante au Canada, mais retourne peu de temps après dans son pays natal pour une série de conférences visant à promouvoir, au nom du gouvernement canadien, l’émigration de ses compatriotes vers les Prairies. Ce n’est qu’en 1913 qu’il établit à Okotoks, Alberta, son premier studio de photographie commer-ciale. Ayant de la difficulté à s’habituer à l’isolement culturel et au dur climat de la région, il s’installe en 1919 à New Westminster, en Colombie-Britannique, et y achète le Rexhall Photo Studio, qu’il rebaptisera quatre ans plus tard le Vanderpant Photo Studio. Mais son talent d’artiste commence bientôt à attirer l’attention, d’autant que le portrait qu’il a pris de sa fille, Eve Every Time, est primé photographie de l’année par un magazine britannique en 1923, puis exposé au London Salon of Photography, l’année suivante. Commence alors une recherche esthétique qui jouera un rôle majeur dans l’évolution de la photographie au Canada durant les années 1920 et 1930. Son oeuvre sera surtout marquée par une omniprésence de la lumière et par un intérêt pour les formes. Prota-goniste de l’expérimentation et du modernisme en photographie, Vanderpant répudiera toutefois les procédés de manipulation de l’image. Ses préoccupations se porteront d’abord sur les bâtiments industriels (notamment les élévateurs à grains du port de Vancouver), dont il tirera plusieurs séries entre 1926 et 1936. C’est à lui que le Canadien Pacifique confiera, en outre, le soin d’illustrer l’album-souvenir du 50e anniversaire de ce chemin de fer en 1931.Après avoir manifesté un certain engouement pour les portraits d’artistes-peintres (Fred Varley, A. Y. Jackson, Charles Scott, etc.), Vanderpant s’adonnera à des études de composition conçues à partir de close-up de plantes naturelles ou de tranches de légumes. Ses photographie seront non seulement exposées dans les musées les plus prestigieux du monde, mais elle figureront également dans les albums du mouvement pictorialiste, auprès de celles d’Alfred Steiglitz et d’Edward Steichen. Le nom de Vanderplant sera également associé aux salons internationaux de photographie qu’il organisera pour la compte du Musée de beaux-arts d’Ottawa, entre 1926 et 1935, et aux nombreuses conférences sur l’art moderne qu’il prononcera dans les métropoles du monde entier. La crise économique finira toutefois par avoir raison de la carrière et de la santé de John Vanderpant, qui cessera toute activité professionnelle en 1937 et qui décèdera deux ans plus tard.

EXPOSITIONS:

- “John Vanderpant”, Royal Photographic Society of Great Britain (Londres): 1925- Tournée dans les musées aux États-Unis, 1928EXPOSITIONS (suite):

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- Tournée dans les musées en Hollande, 1931- “Photographic Works of Art”, Vancouver Art Gallery (Vancouver): 1932- “Vanderpant Salon of Photography Memorial”, Vancouver Art Gallery (Vancouver): 1940- “John Vanderpant: Photographs”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 1977- “John Vanderpant”, Vancouver Art Gallery (Vancouver): 1993- “Modernist Photographs”, Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa): 2007

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa)- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- New Westminster Historic Centre and Museum (New Westminster, C.-B.)- Vancouver Art Gallery (Vancouver)- Los Angeles County Museum of Art (Los Angeles, Cal.)- Université de Leiden (Leiden, Hollande)

FONDS D’ARCHIVES

Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa) est dépositaire du plus important fonds d’archives de John Vanderpant. Classé sous la cote R2991-0-3-E, ce fonds contient 2 209 photographies couvrant les années cruciales de la carrière artistique de Vanderpant, soit de 1918 à 1937, et plus de 86 cm de documents manuscrits. Ces derniers rassemblent du matériel biographique, de la correspondance, des livres de compte, des catalogues d’exposition, des coupures de presse, ainsi que des brouillons de poèmes et de nouvelles. On retrouve également à l’intérieur de ce fonds les nombreuses médailles ayant honoré le travail de Vanderpant et plus de 200 diapositives de verre ayant servi de matériel didactique pour ses conférences sur la photographie contemporaine. Le Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa) possède quant à lui quelques photographies inédites de John Vanderpant, alors que le Musée des sciences et de la technologie du Canada (Ottawa) détient quelques spécimens de son équipement de travail (caméra portative Vest Pocket de marque Ansco, pellicule et filtres).

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- G. Arnold, The Terminal City and the Rhetoric of Utopia: John Vanderpant’s Photographs of Terminal Grain Elevators, 1926-1936 (Vancouver: University of British Columbia, 1996).- M. Bice et al., The Informing Spirit : Art the American Southwest and West Coast Canada, 1925-1945 (Kleinburg, Ont.: McMichael Canadian Art Collection, 1994).- C. C. Hill, John Vanderpant Photographs (Ottawa: Musée des beaux-arts du Canada, 1976).- S. Saloum, The Photography and Life of John Vanderpant (Victoria, C.-B.: Horsdal, 1995).- S. Saloum, “John Vanderpant and the Cultural Life of Vancouver, 1920-1939”, BC Studies (1993).- A. Thomas, Modernist Photographs (Ottawa: Musée des beaux-arts du Canada, 2007).

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NOM: MARGARET WATKINS (1884-1969)

CHAMP PROFESSIONNEL: Photographie artistique et publicitaire

LIEU DE PRATIQUE: New York et Glasgow

BIOGRAPHIE:

Margaret Watkins est née en 1884 à Hamiton, Ontario. Dès sa tendre jeunesse, elle manifeste un talent naturel pour la peinture, la musique et l’écriture. Voulant s’affranchir de son milieu familial, Watkins part travailler en 1909 comme femme de chambre à East Aurora, New York. Elle déménage quatre ans plus tard à Boston, pour y exercer le poste d’assistante auprès du photographe commercial Arthur Jamieson. C’est là qu’elle apprendra les rudiments techniques de la photographie. Après un court séjour à l’école de photographie de Clarence White, où elle s’initie au jeu expressif de la lumière et à l’importance des formes abstraites, Watkins trouve un emploi auprès de la photographe new-yorkaise, Alice Boughton, personnalité bien connue du mouvement pictorialiste. En 1919, elle commence à produire sa première série de natures mortes (Kitchen Sink, Shower Hose, etc.), qui lui vaut quelques critiques élogieuses et qui lui ouvre les portes de prestigieuses galeries à New York, San Francisco, Londres et Paris. Parallèlement aux motifs artistiques, Watkins exécute de nombreux contrats de photos commerciales pour l’agence publicitaire Fairfax et le magasin à rayon Macy’s à New York. En 1926, sa carrière prend un nouveau tournant alors qu’elle est élue vice-présidente du Pictorial Photographer Society of America. C’est aussi à cette époque que son oeuvre photographi-que s’oriente vers de nouveaux sujets tels que le nu, le portrait et les intérieurs. Appelée en Écosse au chevet d’un membre malade de sa famille, Watkins s’installe à Glasgow en 1928 et entreprend de nombreux voyages en Europe qui alimenteront ses projets photographiques. L’un d’eux l’amènera à constater les effet du communisme en URSS, au moyen d’une série de photographies portant sur la vie quotidienne des gens de la rue, réalisées en 1933 et exposées ultérieurement dans les salons internationaux de photographie. Parvenant de peine et de misère à vivre de son art, Watkins aban-donne la photographie en 1938 et se lance dans le commerce d’antiquités à Glasgow. Elle y décèdera paisiblement en 1969, à l’âge de 85 ans.

EXPOSITIONS:

- Canadian Business and Professional Women’s Club (New York): 1924- Salon international d’art photographique (Paris): 1924- London Salon of Photography (Londres): 1928- Third Eyes Centre (Glasgow): 1931- “Building a Collection: Recent Acquisitions”, Musée des beaux-Arts du Canada (Ottawa): 1991- “Margaret Watkins, her Life and Photographic World”, Street Level Gallery (Glasgow): 1994- “Margaret Watkins”, Robert Mann Gallery (New York): 1996

INSTITUTIONS DÉTENTRICES DE L’OEUVRE:

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- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa)- McMaster University Archives (Hamilton)- Duke University Archives (Durham, North Carolina)- Amon Carter Museum (Fort Worth, Texas)

FONDS D’ARCHIVES

L’essentiel de l’oeuvre photographique de Margaret Watkins a été déposée au McMaster University Archives (Hamilton), sous la cote 56-2002. On y retrouve notamment 89 cm de matériel photo-graphique qui couvre son travail artistique et publicitaire entre 1919 et 1938. Le reste est constitué de 64 cm de documents manuscrit (correspondance, journaux intimes, cahiers de note, coupures de presse, livres de compte, plans d’expositions, matériel de promotion, etc.). Un instrument de recher-che a d’ailleurs été conçu par le personnel des archives afin de faciliter la tâche des chercheurs. Peu de temps avant sa mort, Margaret Watkins avait elle-même organisé ses archives et confié le tout à un mandataire, de telle que son oeuvre puisse retourner dans sa ville natale.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE:

- H. Bellof et al., Margaret Watkins, 1884-1969: Photographs (Glasgow: Street Level Photography Gallery, 1994).- M. E. O’Connor, Seduded by Modernity: The Photography of Margaret Watkins (Montréal: McGill-Queen’s University Press, 2007).- L. Pauli, “Margaret Watkins: Making it Home”, Studies in Photography (2001).- A. Thomas, Margaret Watkins (Ottawa: Musée des beaux-arts du Canada, 2007).

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BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE

1. Archives

- Bibliothèque et Archives Canada (Ottawa, Ont.):

. R662-0-9-F, Fonds Paul Taillefer, 1924-...

. R5529-0-8-E, Fonds Ken Bell, 1914-2000

. R613-0-5-E, Fonds Yousuf Karsh, 1908-2002

. R2991-03-E, Fonds John Vanderpant, 1884-1939

- Bibliothèque et Archives nationales du Québec (Montréal, Qué.):

. P48, Fonds Conrad Poirier, 1932-1960

. P795, Fonds Gabriel Desmarais (Gaby), 1947-1990

- Musée des beaux-arts du Canada (Ottawa, Ont.):

. s/c, Collection Robert Bourdeau

. s/c, Collection Edward Burtynsky

. s/c, Collection Lynne Cohen

. s/c, Collection David Heath

. s/c, Collection Gabor Szilasi

. s/c, Collection Margaret Watkins

. s/c, Fonds Lynne Cohen, 1944- ...

. s/c, Fonds Margaret Watkins, 1884-1969

2. Ouvrages théoriques

- R. Bélanger (dir.), Feintes, doutes et fictions: réflexions sur la photographie numérique (Québec: J’ai Vu, 2005).

- P. Bourdieu et al., Un art moyen: essai sur les usages sociaux de la photographie (Paris: Éditions de Minuit, 1965).

- E. Edwards et J. Hart, Photographs Objects Histories: On the Materiality of Images (Londres: Routledge, 2004).

- B. Finn (éd.), Presenting Pictures (Londres: Science Museum, 2004).

- H. Fischer, Le Choc du numérique: essai (Montréal: VLB, 2001).

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- H. Fischer, Les défis du Cybermonde (Sainte-Foy, Qué.: Presses de l’Université Laval, 2003).

- G. Freund, Photographie et société (Paris, Seuil, 1974).

- V. Mosco, The Digital Sublime: Myth, Power and Cyberspace (Cambridge, Mass. MIT Press, 2004).

- S. Sontag, On Photography (New York: Farrar, Straus and Giroux, 1978).

- S. Sontag, Regarding the Pain of Others (New York: Farrar, Straus and Giroux, 2003).

- A. Trachtenberg, Classic Essays on Photography (New Haven, Conn.: Leete’s Island Books, 1980).

3. Ouvrages généraux et monographies

- A. Aaland, Digital Photography (New York: Random House, 1992).

- J. Barnier, Coming into Focus: A Step-by-Step Guide to Alternative Photographic Printing Processes (San Francisco, Ca.: Chronicle Books, 2000).

- P. Dyson, Digital Cameras for Studio Photography (Media, Pa.: Seybold Publications, 1995).

- M. Frizot, Nouvelle histoire de la photographie (Paris: Bordas, 1994).

- E. Godeau, Ces images qui nous racontent le monde (Paris: Albin Michel, 2007).

- L. Goodhall, Photographing Greatness: The Story of Karsh (Toronto: Napoleon, 2007).

- R. Graham, Digital Imaging (Caithness, Écosse: Whittles Publishing, 1998).

- A Gunthert et M. Poivert, L’art de la photographie, des origines à nos jours (Paris: Citadelles et Mazenod, 2007).

- C. C. Hill, John Vanderpant Photographs (Ottawa: Musée des beaux-arts du Canada, 1976).

- P. Hook, Photographie numérique (Saint-Constant, Qué.: Broquet, 2006).

- R. Lenman (éd.), Oxford Companion to the Photograph (Oxford, Angl.: Oxford University Press, 2005).

- A. Rouillé, La photographie: entre document et art photographique (Paris: Gallimard, 2005).

- R. Sheppard, National Geographic Photography Field Guide Digital: Secrets to Making Great

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Pictures (Washington, D.C.: National Geographic, 2003).

- L. D. Stroebel (éd.), The Focal Encyclopedia of Photography (Boston: Focal Press, 1993).

- M. Tippett, Portraits in Light and Shadow: The Life of Yousuf Karsh (Toronto: Anansi Press, 2007).

- D. Vorsteher et J. Yates (éd.), Yousuf Karsh: Heroes of Light and Shadow (New York: Stoddart Publishing Co., 2001).

4. Articles de revue et de journaux

- A. Ananthaswamy, “ Too Many Photos, Little Time”, New Scientist, 181 (3 avril 2004): p.21.

- A. Ashley, “Liquid Zoom”, Scientific American, 297.4 (oct. 2007): p.30.

- R. Aubin, “La photographie au Canada: 25 brefs hommages à 25 grandes influences”, Photo Sélection, 26.6 (nov.2006): pp.38-48.

- C. Biever, “Phone Face Power Failure”, New Scientist, 181 (28 févr. 2004); p.21.

- C. Biever, “The Scanner you can Take Everywhere”, New Scientist, 182 (25 déc. 2004): p.21.

- S. H. Edwards (éd.), “Electronic and Digital Photography”, History of Photography, 22 (1998): pp.1-30.

- H. Farid, “A Picture Tells a Thousand Lies”, New Scientist, 179 (6 sept. 2003): pp.39-41.

- H. Farid, “Digital Image Forensics”, Scientific American, 298.6 (juin 2008): pp.66-71.

- B. Fox, “Evading the Secret Snappers”, New Scientist, 181 (13 nov. 2004): p.27.- “Innovations, 1980-2000", Photo District News, 20.5 (mai 2000): suppl.

- S. Kay, “Rino Noto: Canada’s Premier Fashion Photographer”, Photonews, 17.3 (été 2008): p.14.

- P. Marks, “Copyright Crimes and Misdemeanours”, New Scientist, 199 (5 juill. 2008): pp.24s.

- D. Mattison, “Canadian Photography: A Selected Bibliography”, History of Photography, 20.2 (1996): pp.186-188.

- J. Mullins, “History in the Making”, New Scientist, 184 (13 nov. 2004): p.22.

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- J. Mullins et al., “Picture This”, New Scientist, 184 (16 oct. 2004): pp.24-32.

- J.-F. Nadeau, “La pellicule hors foyer”, Le Devoir (Montréal), 5 janv. 2006.

- “The Phone will See you now”, New Scientist, 198 (3 mai 2008): p.23.

- J. M. Schwartz, “Records of Simple Truth and Precision: Photography, Archives, and the Illusion of Control”, Archivaria, 50 (aut.2000); pp.1-40.

- D. J. Solove, “The End of Privacy?”, Scientific American, 299.3 (sept. 2008): pp.101-106.

- R. Tremblay, “Une photographie vaut-elle mille mots? Aperçu des problèmes méthodologiques liés à l’utilisation des sources photographiques en histoire”, Communication présentée au Con- grès de l’IHAF (Montréal), 23 oct. 2003.

5. Périodiques

- American Heritage’s Invention and Technology (New York), 1997-2008.

- History of Photography (Londres), 1997-2008.

- New Scientist (Cambridge, Mass.), 2000-2008.

- Photo District News (New York), 1990-2000.

- Photonews (Markam, Ont.), 2003-2008.

- Scientific American (New York), 2000-2008. - Tech Bits (Rochester, N.Y.), 1997-2008.

6. Sites web

- http://www.capacanada.ca (Association canadienne d’art photographique).

- http://www.collectionscanada.gc.ca/framingcanada (Framing Canada: A Photographic Memory).

- http://www.archivescanada.ca/fr/virtual/search.asp?todo=all (Réseau canadien d’information archivistique).

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- http://www.thecanadianencyclopedia.com/index.cfm?PgNm=TCECategories&Params=A1SUB (Encyclopédie du Canada).

- http://www.puredigitalinc.com (Pure Digital: appareils photo jetables, Ritz Dakota).

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