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UNIVERSITE PARIS 8 Diplôme d’Etudes Supérieures d’Université Pratiques du coaching Troisième vague des thérapies comportementales et cognitives : utilisation de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) dans la conduite d’un accompagnement de coaching Sous la direction de Mme Dominique MATTAR Mémoire pour l’obtention du DESU Pratiques du coaching Présenté et soutenu publiquement par Fabrice MEYNIER le 15 novembre 2013

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UNIVERSITE PARIS 8

Diplôme d’Etudes Supérieures d’Université

Pratiques du coaching

Troisième vague des thérapies comportementales et cognitives :

utilisation de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT)

dans la conduite d’un accompagnement de coaching

Sous la direction de Mme Dominique MATTAR

Mémoire pour l’obtention du DESU Pratiques du coaching

Présenté et soutenu publiquement par

Fabrice MEYNIER

le 15 novembre 2013

Jury de soutenance :

Michael PICHAT, maître de conférences en psychologie du développement,

Université Paris 8, Président du jury de soutenance

Dominique MATTAR, psychologue du travail – coach, directeur du mémoire

Elisabeth GEORGES, consultante – coach

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier tout particulièrement Dominique MATTAR, directrice de ce mémoire,

pour ses conseils avisés, sa disponibilité, ses encouragements et son indéfectible soutien.

Je tiens en second lieu à remercier Dominique SOUM-VERGEZ, superviseuse de stage au

sein du DESU, pour la qualité de ses conseils et son souci de partager dans la bonne humeur

son expertise.

Je remercie en troisième lieu Nabil TAK-TAK et Garance YVERNEAU, coordinateurs

pédagogiques de notre promotion 2012-2013, pour leur soutien sans faille, leur compétence et

leur constante bonne humeur.

Je remercie également mes collègues du DESU pour la richesse de nos échanges tout au long

de cette année passée ensemble. Avec une mention particulière pour Isabelle et Franck pour

leur effort de relecture du présent document.

Je remercie également les personnes que j’ai accompagnées en coaching pour leur

disponibilité et pour la confiance qu’elles ont bien voulu m’accorder.

Je tiens enfin à remercier mes proches pour leurs encouragements, leur soutien et leur

participation à la relecture de ce mémoire.

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TABLE DES MATIERES

Introduction...........................................................................................................................................1

1. Le coaching comme réponse au mal-être en entreprise................................................................2

1.1. L’essor du coaching à partir des années 1980.................................................................................3

1.1.1. Les prémices : de la maïeutique au coaching sportif..............................................................3

1.1.2. L’explosion du coaching à partir des années 1990.......................................................................4

1.2. Les sources conceptuelles du coaching......................................................................................4

1.2.1. Le courant psychanalytique et son apport au coaching..........................................................5

1.2.2. Le courant humaniste et son apport au coaching...................................................................5

1.2.3. Le courant systémique et son apport au coaching.................................................................6

1.2.4. Le courant comportemental et cognitiviste............................................................................6

1.3. L’apport au coaching des thérapies comportementales et cognitives........................................7

2. Les thérapies comportementales et cognitives (TCC).....................................................................7

2.1. Les trois vagues des thérapies comportementales et cognitives................................................7

2.1.1. La vague comportementale à partir des années 1950............................................................8

2.1.2. La vague cognitive à partir des années 1960..........................................................................9

2.1.3. La « troisième vague » : à partir des années 1990................................................................10

2.2. Les caractéristiques de la troisième vague des TCC..................................................................11

3. Caractérisation de deux concepts au cœur de la troisième vague : la pleine conscience et l’acceptation.........................................................................................................................................12

3.1. La pleine conscience (mindfulness)..........................................................................................12

3.1.1. Définitions et objectif...........................................................................................................12

3.1.2. Utilisation de la pleine conscience en psychothérapie de la troisième vague......................13

3.1.2.1. Le Mindfulness-Based Stress Reduction (MBSR)...............................................................13

3.1.2.2. Le Mindfulness-Based Cognitive Therapy (MBCT)............................................................14

3.1.3. Domaines d’application et efficacité de la pleine conscience...............................................14

3.2. L’acceptation............................................................................................................................15

3.2.1. Définition..............................................................................................................................15

3.2.2. Efficacité de l’acceptation.....................................................................................................16

3.3. Utilisation de la pleine conscience et de l’acceptation en coaching.........................................16

4. La thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT).......................................................................17

4.1. La genèse de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) : une approche récente née dans les années 1990...........................................................................................................................18

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4.2. Positionnement de l’ACT au regard d’autres approches utilisées en coaching.........................19

4.3. Les fondements de l’ACT : le contextualisme fonctionnel et la théorie des cadres relationnels19

4.3.1. Le contextualisme fonctionnel..............................................................................................19

4.3.2. La théorie des cadres relationnels (TCR)...............................................................................19

4.3.2.1. Le langage entraîne l’évitement d’événements psychologiques......................................20

4.3.2.2. Le langage rend impossible l’évitement des événements psychologiques.......................20

4.3.2.3. Le langage maintient les tentatives d’évitement d’événements psychologiques.............21

4.4. L’objectif de l’ACT : lutter contre la fusion cognitive et son corollaire l’évitement expérientiel22

4.4.1. La fusion cognitive................................................................................................................22

4.4.2. L’évitement expérientiel.......................................................................................................23

4.5. Les résultats de l’ACT................................................................................................................24

4.6. Les critiques adressées à l’ACT.................................................................................................24

4.7. Les 6 processus de l’ACT...........................................................................................................25

4.7.1. La défusion cognitive............................................................................................................26

4.7.2. L’acceptation........................................................................................................................27

4.7.3. Le moment présent..............................................................................................................27

4.7.4. Le soi comme contexte (ou soi observateur)........................................................................27

4.7.5. Les valeurs, principe central de l’ACT...................................................................................28

4.7.6. L’action engagée...................................................................................................................29

4.8. ACT et coaching : similitudes....................................................................................................29

4.8.1. Recadrage et défusion cognitive...........................................................................................30

4.8.2. Méta-communication et le « soi comme contexte »............................................................30

5. Problématique..............................................................................................................................31

6. Méthodologie...............................................................................................................................33

6.1. Le contexte du recueil de données...........................................................................................33

6.2. Les sujets impliqués dans la séance..........................................................................................33

6.2.1. Le coach................................................................................................................................33

6.2.2. Le coaché..............................................................................................................................34

6.3. Grille d’analyse de la séance de coaching observée.................................................................34

6.3.1. Catégorie 1 (C1) - Aide à l’identification de mécanismes de fusion cognitive.......................34

6.3.2. Catégorie 2 (C2) - Aide à l’identification de processus d’évitement expérientiel.................35

6.3.3. Catégorie 3 (C3) - Aide à la pratique de la défusion cognitive..............................................35

6.3.4. Catégorie 4 (C4) - Aide à la pratique de l’acceptation...........................................................36

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6.3.5. Catégorie 5 (C5) - Aide à la pratique de l’attention au moment présent..............................37

6.3.6. Catégorie 6 (C6) - Aide à la pratique du soi observateur......................................................37

6.3.7. Catégorie 7 (C7) - Aide à l’identification des valeurs............................................................38

6.3.8. Catégorie 8 (C8) - Aide à la mise en œuvre de l’action engagée...........................................38

6.4. Analyse des données recueillies...............................................................................................39

6.4.1. Retranscription et codage de la séquence de coaching observée........................................39

6.4.2. Analyse quantitative des données........................................................................................39

6.4.3. Analyse qualitative des données..........................................................................................39

7. Présentation et analyse des données extraites............................................................................40

8. Discussion et perspective professionnelle....................................................................................46

8.1. Synthèse des données recueillies.............................................................................................46

8.2. Confrontation des résultats à la revue de littérature...............................................................47

8.3. Confrontation des résultats à la problématique.......................................................................48

8.4. Confrontation des résultats à ma pratique de coaching...........................................................48

CONCLUSION........................................................................................................................................50

Bibliographie........................................................................................................................................51

ANNEXES..............................................................................................................................................55

ANNEXE 1 : LES METAMORPHOSES DU TRAVAIL..................................................................................56

ANNEXE 2 : LES OUTILS DE L’ACT..........................................................................................................63

ANNEXE 3 : RETRANSCRIPTION DE L’EXTRAIT DE SEANCE ANALYSE.....................................................66

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AVANT-PROPOS - DU PARADIGME DETERMINISTE AU

PARADIGME CONSTRUCTIVISTE

Sur une période de tout juste cinquante ans, l’humanité va connaître dans la seconde moitié du

XIXe siècle et au début du XXe siècle deux révolutions scientifiques matérialistes1 et déterministes

majeures : Darwin (2008) et sa théorie de la sélection naturelle affirme en 1859 que l’évolution de

l’espèce humaine est en partie déterminée par son environnement, et Freud affirme à partir de 1905

que l’homme est en partie déterminé par son inconscient, ce que l’on pourrait reformuler en

reprenant la fameuse phrase issue de la correspondance d’Arthur Rimbaud2 : « je est un autre ».

D’un point de vue épistémologique, cette période est d’ailleurs marquée par le paradigme

déterministe :

- en linguistique (Saussure, 1996) puis en anthropologie (Levi-Strauss, 2003), et même en

psychanalyse (Lacan, 1966), le structuralisme pose que le langage et donc les langues, les

cultures humaines, et même l’inconscient sont constitués d’invariants appelés structures ;

- en sociologie, discipline alors naissante, le fonctionnalisme d’Emile Durkheim considère

que la cause déterminante d'un fait social doit être recherchée par rapport aux faits sociaux

antérieurs et non parmi les états de conscience individuelle (Durkheim, 2010) ; plus tard,

Pierre Bourdieu, dans la lignée du matérialisme de Marx, mettra en lumière les contraintes

sociales faisant des individus avant tout des agents plus que des acteurs ;

- en psychologie, les travaux de Pavlov et Skinner sur le conditionnement marquent la

possibilité de programmer et renforcer des comportements humains ;

- enfin jusque dans les arts, où le naturalisme de Zola, notamment dans L’assommoir, faisant

suite au réalisme de Balzac et Flaubert, infère des caractéristiques psychologiques aux

individus à partir de leur environnement social.

Cependant, la « révolution » quantique du début du XXe siècle (qui constitue un séisme en ce

qu’elle remet en cause la validité de la théorie de la gravité de Newton pour ce qui est des corps de

masse très faible évoluant à grande vitesse), et notamment la dualité onde-corpuscule - c’est-à-dire

le fait que la lumière peut être décrite à la fois par un modèle purement corpusculaire (les photons la

composant ayant alors un masse non nulle), et purement ondulatoire (les photons ayant alors une

masse nulle) – mais aussi le principe d’incertitude d’Heisenberg – on ne peut connaître précisément

à la fois la position et la vitesse d’un corpuscule, mais seulement l’un ou l’autre - amènent à

considérer qu’y compris les sciences dites exactes ne constituent qu’un regard possible parmi

d’autres sur la réalité.

1 Matérialisme : doctrine d’après laquelle il n’existe d’autre substance que la matière, à laquelle on attribue des propriétés variables » (lalande, 2006, p. 591).2 Lettre à Paul Demeny, 15 mai 1871.

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Plus encore, les deux théories de la relativité d’Einstein (relativité restreinte et relativité générale)

caractérisent bien le fait que toute théorie scientifique a un périmètre de validité en dehors duquel

elle n’est plus opérante.

C’est dans ce contexte qu’émerge alors au cours du XXe siècle le paradigme constructiviste. Le

constructivisme peut être défini comme « la théorie issue de Kant selon laquelle la connaissance des

phénomènes résulte d'une construction effectuée par le sujet » (Besnier, 2005, p. 23). Selon ce

paradigme, il n’est donc pas de réalité intangible, mais chaque individu construit sa propre

représentation de la réalité, à partir de son histoire, son éducation, son environnement, etc.

Ce paradigme va progressivement connaître un fort succès :

- en sociologie, les approches mettant l’accent sur une forme de libre-arbitre d’un individu

devenu acteur vont faire florès : on peut citer l’individualisme méthodologique de Raymond

Boudon (2009) (qui aura et a encore un fort retentissement dans la communauté

sociologique, d’ailleurs bien plus à l’étranger qu’en France), ou encore l’analyse stratégique

de Crozier et Friedberg (1992) ; mais surtout, l’interactionnisme symbolique puis les travaux

d’Erving Goffman (1974) posent que l’action des individus se fonde à partir du sens qu’ils

attribuent à la « réalité sociale », et non à partir d’une réalité sociale perçue de façon

univoque ;

- en psychologie et biologie, les travaux de la conférence Macy, ceux de Bateson (1995),

repris et prolongés par l’école de Palo Alto (Watzlawick, Erickson), mais également la

systémique vont fonder leurs travaux sur l’idée d’une construction sociale de la réalité ;

- dans les arts enfin, les écoles telles que le cubisme et le surréalisme en peinture, le

symbolisme et le surréalisme puis le nouveau roman en littérature, entendent figurer une

certaine vision de la réalité plutôt que la réalité elle-même ; en musique le chromatisme

initié par Schoenberg entend sortir du carcan des gammes diatoniques.

Le coaching, en ce qu’il invite le coach à travailler à partir de la « réalité vue par son client »,

sa vision du monde, ses représentations, ses croyances, s’inscrit parfaitement dans ce

paradigme constructiviste. Comme nous le verrons dans ce mémoire, nous nous sommes

intéressé à un courant de la psychologie cognitivo-comportementale, la thérapie d’acceptation

et d’engagement (ACT), qui elle aussi part d’un présupposé constructiviste, à savoir le

contextualisme fonctionnel.

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INTRODUCTION

Introduction

Citation issue des Upanishads du Yoga

Le présent mémoire a pour objet l’évaluation de l’intérêt d’utiliser en coaching les principes et

techniques d’un courant de la troisième vague des thérapies comportementales et cognitives, la

thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT).

Mon intérêt pour cette troisième vague provient du fait qu’elle a repris à son compte certains

principes des philosophies orientales, et du bouddhisme en particulier, auxquels je m’intéresse

depuis bientôt vingt ans, notamment la prise de distance vis-à-vis de ses pensées, l’acceptation des

émotions douloureuses et la pratique de la pleine conscience.

De plus, l’ACT, en ce qu’elle constitue un modèle thérapeutique particulièrement autonome,

structuré et pratique d’une part, tourné vers la mise en ouvre d’actions ayant pour objectif une vie

plus enrichissante d’autre part, ayant fait l’objet de plus d’un certain nombre d’études, m’a semblé

un outil dont il pouvait s’avérer intéressant d’évaluer dans quelle mesure il pouvait être utilisé en

coaching. Coaching qui lui, par ailleurs, aussi reprend certains des fondamentaux des philosophies

orientales : approche contextualiste des situations et résolument moniste, pratique d’un soi

observateur se distanciant du soi agissant notamment.

Enfin, accompagnant au quotidien des cadres demandeurs d’emploi, nous avons constaté que

l’outillage technique de cette population n’était pas l’enjeu majeur du travail à faire, mais qu’il

s’agissait bien plus souvent de les aider à dépasser certaines croyances ruminées les conduisant à

connaître des difficultés à se projeter dans l’action.

La première partie présente la revue de littérature sur ce qui fait l’essence du coaching, les trois

vagues des thérapies comportementales et cognitives, les deux concepts-clés de la troisième vague

que sont la pleine conscience et l’acceptation et enfin, les principes de la thérapie d’acceptation et

d’engagement (ACT). La deuxième partie présente notre problématique de mémoire. Ensuite les

troisième, quatrième et cinquième parties présentent la méthodologie utilisée, pour évaluer les

résultats, et enfin l’analyse critique d’une séance de coaching orientée ACT.

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PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE

1. Le coaching comme réponse au mal-être en entreprise

Le coaching connaît un fort développement à partir des années 1980 aux Etats-Unis puis 1990 en

France et ailleurs en Europe. Il va s’avérer être une réponse parmi d’autres (conseil, formation, …)

mobilisées par les organisations voire les salariés eux-mêmes pour traiter les problématiques vécues

en entreprise. Un certain nombre de constats expliquent cette émergence de ces différents types

d’accompagnement mis en place au sein des entreprises :

- Un délitement du lien social, avec en corollaire des logiques individualistes triomphantes

L’avènement au XXe siècle de l’industrie puis du secteur des services a comme corollaire un exode

rural des travailleurs et de leurs familles des campagnes vers des métropoles urbaines qui ont connu

une formidable expansion à partir de l’après-guerre. Ce faisant, les anciennes formes de lien social,

essentiellement communautaires et rurales, disparaissent progressivement au profit de logiques plus

individualistes, renforcées de manière non exhaustive par d’une part l’architecture des années 1960

et 1970 qui favorise l’anonymat au sein de zones périurbaines dortoirs, d’autre part par les médias

qui se font écho et promoteur d’une logique de consommation de masse impulsée par le monde de

l’entreprise, consommation de masse qui tend à focaliser les individus toujours plus sur la notion de

confort matériel plutôt que sur l’esprit de solidarité (Bernhardt, Colnot, Vitry, 2011).

- Une exigence de performance sans cesse plus forte de la part des entreprises, avec en

corollaire un mal-être croissant des salariés

Dans un contexte de mondialisation des échanges, de libre circulation des personnes, des biens,

services et capitaux, marqué par des crises économiques et maintenant financières se succédant les

unes aux autres, (faisant d’ailleurs des Trente Glorieuses une exception au cours du XXe siècle

(Cohen, 2006) et (Piketty, 2013)), les entreprises, dans un souci de compétitivité seule à même

(selon les tenants du néo libéralisme économique), de pouvoir leur garantir des taux de croissance

(et en corollaire des bénéfices pour leurs actionnaires) toujours satisfaisants, exigent toujours

davantage en termes de productivité à des salariés dont nombre d’études récentes montrent qu’ils se

disent fatigués, stressés et bien souvent démotivés. En est pour preuve l’essor ces dernières années

dans les entreprises de démarches de « lean management », qui ne sont pas sans présenter sous

certains aspects des similitudes avec le taylorisme. Mais également les vagues de suicide en France

(France Télécom, Renault, …), qui ont récemment conduit les directions des ressources humaines à

davantage se saisir de la question de la sécurité et du bien-être au travail (Bernhardt, Colnot, Vitry,

2011).

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- Une aspiration des salariés à ce que la sphère professionnelle, le lieu de travail permette tout

autant que la sphère personnelle une réalisation de soi

De façon apparemment paradoxale, dans ce contexte d’exigence croissante de productivité et de

mal-être des salariés, ces derniers manifestent un désir de réalisation de soi, concernant et c’est

relativement nouveau tant la sphère personnelle que professionnelle (Bernhardt, Colnot, Vitry,

2011). En conséquence, les directions d’entreprise ont été amenées ces dernières années à se saisir

de la question du bien-être des salariés : responsabilité sociétale des entreprises, réflexion sur

l’aménagement des locaux, gestion des talents, promotion et valorisation des compétences

relationnelles, mise en place d’entretiens professionnels systématisés tous les deux ans, sont autant

de dispositifs qui témoignent de cette nécessité ou volonté des entreprises de considérer « l’élément

humain » comme « outil » central de la compétitivité et de mettre en œuvre les moyens pour leurs

collaborateurs de se réaliser au travail, si besoin est en se faisant accompagner par moults

consultants et coachs.

1.1. L’essor du coaching à partir des années 1980

L’idée de faire appel à un tiers pour entamer une démarche de changement, d’apprentissage ou pour

résoudre une difficulté semble vieille comme le monde.

1.1.1. Les prémices : de la maïeutique au coaching sportif

Au Vème siècle avant J-C en Europe, Platon met en scène dans son œuvre le Théétète Socrate

déclarant qu’en sa qualité de fils de sage-femme et lui-même expert en accouchements, il accouche

les esprits des pensées qu’ils contiennent sans le savoir. Platon fera reprendre ce procédé, la

maïeutique, par Socrate dans plusieurs de ses œuvres ultérieures, notamment dans le Ménon. A bien

des égards, et compte tenu de son impact sur les sociétés occidentales, Socrate peut être considéré

comme le père du coaching3. C’est dans les années 1970, que Timothy Gallway, pédagogue issu de

Harvard, passionné de sport en général et de tennis en particulier, publie plusieurs ouvrages sur le

tennis, le ski et le golf et met le doigt sur l’essence du coaching. « Le but du travail d’entraînement

est de libérer le potentiel du joueur, pour le porter à son niveau de performance optimal. Il s’agit de

lui apprendre à apprendre par lui-même, plutôt que de lui faire ingurgiter un savoir extérieur »

(Whitmore, 2007, p. 19).

3 Plus tard, en Asie, dans l’enseignement bouddhiste zen qui se développe au Japon en provenance de Chine à partir du VIème siècle après J-C, le maître zen utilise fréquemment dans son enseignement une aporie appelée « koan » (littéralement : document officiel) prenant le plus souvent la forme d’une question, dont la résolution nécessite pour le disciple de sortir de ses schémas de pensée habituels pour en adopter de nouveaux, l’amenant ainsi à se décentrer, condition sine qua non pour prendre conscience de la distinction à établir entre son moi et son Soi pour atteindre l’Illumination, objectif de l’enseignement. Ainsi le maître zen ne dispense pas un savoir prédigéré, mais invite son disciple à construire par lui-même son chemin.

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Par la suite, à partir des années 1980, des directions d’entreprise aux Etats-Unis puis en Europe,

souhaitant développer la compétitivité de leurs entreprises, et en conséquence la performance de

leurs salariés, et particulièrement celles des managers, s’intéressent de près aux travaux de Gallway

et contribuent ainsi à introduire la culture du coaching dans le monde de l’entreprise.

1.1.2. L’explosion du coaching à partir des années 1990

Depuis lors, le coaching ne cesse de se développer. Tout comme dans les années 80 on peut

observer un nombre considérable de professionnels, pourtant aux activités très diverses (formateurs,

experts désignés par des institutions, conseillers divers - financiers, juridiques, en insertion

professionnelle, …), se réclamant du métier de consultant, on ne peut que constater aujourd’hui

l’extraordinaire hétérogénéité des domaines d’intervention et pratiques des professionnels se

réclamant du coaching. Pour n’en citer que quelques-uns, on peut trouver sans peine des coachs en

séduction, coachs sportifs, coachs en relooking, coachs en cuisine, coachs en Feng Shui, coachs

vocaux etc…

Aujourd’hui, rien qu’en France, on ne dénombre pas moins de trois fédérations réunissant des

professionnels du coaching4.

1.2. Les sources conceptuelles du coaching

A l’instar d’autres « disciplines » elles-aussi enseignées dans les universités françaises et

internationales, telles que les sciences de l’éducation ou encore le management, le coaching repose

sur une approche se voulant résolument intégrative, c’est-à-dire combinant des notions et

techniques empruntées à des théories et démarches relevant de diverses disciplines des sciences

humaines. Ainsi, quatre approches théoriques principales, se subdivisant elles-mêmes en plusieurs

courants et portant chacune un regard différent sur le fonctionnement humain, forment les racines

conceptuelles du coaching (Moral, Angel, 2009).

4 La Société Française de Coaching, créée en 1996, revendique un périmètre centré sur le coaching professionnel, et propose en corollaire une définition circonscrivant le coaching à ce domaine : « le coaching professionnel est l’accompagnement de personnes ou d’équipes pour le développement de leurs potentiels et de leurs savoir-faire dans le cadre d’objectifs professionnels ». L’International Coach Federation, première association internationale de coachs professionnels, qui compte aujourd’hui environ 20 000 membres répartis dans plus de 100 pays, propose pour sa part dès sa création en 1995 une acception plus large étendant le champ du coaching au domaine personnel. En voici la version française proposée par l’ICF France créée en 2001 : « Le coaching professionnel se définit comme une relation suivie dans une période définie qui permet au client d’obtenir des résultats concrets et mesurables dans sa vie professionnelle et personnelle. A travers le processus de coaching, le client approfondit ses connaissances et améliore ses performances ». Enfin, l’European Mentoring and Coaching Council (EMCC), association européenne de coaching créée en 1992, « reconnaît l’existence de nombreux types de coaching et de mentorat, et une définition de leurs diverses formes s’avèrera nécessaire lorsque des normes plus détaillées auront été produites ».Enfin, il est à noter que ces trois fédérations ont décidé en janvier 2013 de « partager une même communication sur la professionnalisation du métier de coach pour contribuer à la structuration de ce métier », à travers notamment la mise en place d’une plateforme commune (www.coach-pro.org ).

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1.2.1. Le courant psychanalytique et son apport au coaching

Créée il y a maintenant un peu plus d’un siècle par Sigmund Freud (1856-1939), qui fonda ses

travaux sur d’une part sa connaissance de la psychiatrie (il fut l’élève du Professeur Charcot à

Paris), d’autre part sur quelques notions philosophiques issues de ses lectures, notamment celles

d’Arthur Schopenhauer en ce qui concerne la représentation que l’homme se fait du monde, et

surtout celles de Friedrich Nietzsche (Onfray, 2012), la psychanalyse propose plusieurs notions

utiles pour le travail du coach.

Parmi les plus significatives, on peut nommer la seconde topique de Freud proposant une

description ternaire de la psyché reposant sur trois instances (moi, ça, sur-moi) dont il précise les

fonctions et interrelations les unes avec les autres, et le phénomène du transfert et du contre-

transfert.

On peut également citer les apports issus des travaux de Carl Gustav Jung (1875-1961), même s’il

se détache du corpus freudien sur la question de l’étiologie sexuelle des psychopathologies, sur la

définition d’inconscient collectif, les notions d’archétype et d’animus/anima (repris ultérieurement

par nombre d’outils, au nombre desquels on peut citer le test Meyer-Briggs Type Indicator (MBTI),

se proposant de classer et décrire les types de personnalité).

Enfin ont peut citer les travaux successifs de Wilfred Bion (2002), Didier Anzieu (2013) et René

Kaës (2009) sur les groupes.

1.2.2. Le courant humaniste et son apport au coaching

Au début des années 1930 et après la Seconde Guerre mondiale se développe le courant de la

psychologie humaniste qui s’oppose avec force aux présupposés de la psychanalyse et du

comportementalisme. Pour le courant humaniste, « l’homme n’est pas esclave de ses pulsions, ni de

l’objet d’un conditionnement opérant que lui inflige l’environnement, mais est au contraire maître

de son destin » (Moral, Angel, 2009, p. 49). Ce courant poursuit l’objectif de « devenir ce que je

suis » pour reprendre la célèbre formule de Nietzsche (2005), à travers une démarche de

développement personnel.

Les contributeurs de ce courant sont nombreux, avec en corollaire un nombre important de

techniques développées5. Le point commun de ces différents sous-courants est de partir d’un

présupposé résolument moniste, c’est-à-dire d’une connexion entre le corps, le cœur et l’esprit.

L’objectif des techniques déployées est de reconnecter pensées, émotions et sentiments.

5 Parmi les principales, on peut relever de façon non exhaustive : la non-directivité (Carl Rogers), la Gestalt-thérapie (Friedrich Perls), l’hypnose (Milton Erickson), la Programmation Neuro-Linguistique ou PNL (Richard Bandler et John Grindler), ou encore l’analyse transactionnelle (Eric Berne), le psychodrame (Jacob Moreno), la dynamique de groupe (Kurt Lewin), l’Elément Humain (William Schutz) (Moral, Angel, 2009).

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1.2.3. Le courant systémique et son apport au coaching

L’approche systémique doit énormément aux théories issues de la cybernétique, impulsées par

Norbert Wiener (1894-1964), mathématicien et Ludwig von Bertalanffy (1901-1972), biologiste. Le

présupposé essentiel de ce courant est qu’un système constitué d’éléments (par exemple un groupe

d’individus) n’est pas réductible à la somme de ses parties (les individus), mais qu’au contraire il

est beaucoup plus que cela, et que donc les lois de fonctionnement du système prévalent sur celles

de ses éléments. Gregory Bateson (1904-1980), anthropologue et psychologue, dégagera des

concepts issus de la cybernétique (homéostasie, le principe de causalité circulaire, la boucle de

rétroaction, entre autres) pour les appliquer à la thérapie dans une logique systémique.

Ses travaux seront par la suite repris et prolongés par l’Ecole de Palo Alto, à travers la

conceptualisation et la mise en œuvre des thérapies brèves6.

Le modèle systémique est centré sur les interactions des éléments d’un système plutôt que sur ses

éléments pris de façon isolée. L’appréhension d’un problème et la recherche de ses solutions

reposent sur une démarche s’opérant par un changement de niveau logique pour dépasser et

transcender les contradictions qui bloquent les individus pris dans le système (Kourilsky, 2008).

L’idée est donc moins d’opérer un changement dans le système, car tout système tend à revenir à

une position d’équilibre (principe d’homéostasie), mais d’opérer un changement du système.

1.2.4. Le courant comportemental et cognitiviste

A partir des années 1920, la psychologie comportementale, qui s’inscrit dans une filiation stoïciste,

reprenant les travaux de Skinner, pose le paradigme selon lequel le fonctionnement humain peut

être décrit et expliqué en s’intéressant uniquement aux stimuli et aux réponses correspondantes Ce

paradigme considérait par ailleurs comme facteur négligeable tout ce qui ne pouvait donner lieu à

une étude expérimentale, à savoir les aspects cognitifs et affectifs du comportement7.

A partir des années 1960, le courant cognitiviste, afin de répondre aux critiques de réductionnisme

(non prise en compte de facteurs tels que les émotions notamment) adressées au courant

comportementaliste, succède à ce dernier en remplaçant le modèle stimulus-réponse par le modèle

stimulus-traitement-réponse, par analogie avec le fonctionnement d’un ordinateur.

Dans la perspective cognitiviste, ce sont les processus automatiques qui sont au cœur du processus

de changement. Ils ont été inscrits par apprentissage et permettent de résoudre en un clin d’œil un

grand nombre de problèmes. « Toutefois, nos processus automatiques sont envahis de schémas

6 Les principales figures marquantes en sont Paul Watzlawick (1921-2007), psychologue, psychanalyse et sociologue, Milton Erickson (1901-1980), psychiatre et psychologue, Donald D. Jackson (1920-1968), psychiatre, qui crée en 1959 le Mental Research Insitute (MRI), John Weakland (1919-1995), anthropologue, et Richard Fisch (1926-2011), psychiatre, qui crée en 1965 le Centre de thérapie brève au sein du MRI.7 « Les techniques thérapeutiques dérivées de la théorie comportementale eurent (…) un rapide succès, car elles permettaient de résoudre rapidement certaines pathologies résistant à la psychanalyse. Ainsi les obsessions et compulsions, les phobies, les problèmes sexuels et certaines formes de dépression pouvaient être guéries en partant de l’idée que ces troubles résultaient d’un conditionnement inadéquat et qu’il suffisait donc de procéder à un déconditionnement et à un reconditionnement » (Moral, Angel, 2009, p. 47).

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distordus, qui rendent impossible une lecture correcte des événements externes, des ressentis et des

relations interpersonnelles (…). Changer, c’est alors remplacer un certain nombre de processus

automatiques par d’autres mieux adaptés » (Moral, Angel, 2009, p. 48).

1.3. L’apport au coaching des thérapies comportementales et cognitives

L’apport au coaching du courant comportemental et cognitif est important, notamment du fait qu’il

permet au coach de structurer et séquencer son accompagnement de coaching selon un processus

clairement défini et séquencé. « L’approche cognitivo-comportementale est probablement la plus

opérationnelle des approches de coaching dans sa capacité à donner une méthode précise et

transparente de changement. Elle offre de plus l’opportunité de transmettre une méthode de

changement. Enfin, elle se situe dans un réel positionnement de coaching, c’est-à-dire ne pas être

dans le conseil qui rend dépendant, mais dans l’accompagnement qui accroît l’autonomie (…) »

(Albert & Piroux, 2007, pp. 146-147).

Ainsi donc, l’approche comportementale et cognitive s’avère particulièrement opérationnelle

et structurante dans l’accompagnement de coaching.

2. Les thérapies comportementales et cognitives (TCC)

Les thérapies comportementales et cognitives ont connu « trois vagues successives, qui en arrivant

au rivage, finissent pas se superposer, après s’être rencontrées » (Cottraux, 2011b, p. 5).

2.1. Les trois vagues des thérapies comportementales et cognitives

Les thérapies cognitivo-comportementales visent à remplacer les comportements inadéquats par

d’autres, mieux adaptés. Elles sont fondées sur un certain nombre de principes issus des théories de

l’apprentissage ainsi que des théories cognitives.

Trois vagues successives caractérisent le développement des TCC.

2.1.1. La vague comportementale à partir des années 1950

La première vague est comportementale et se situe entre les années 1950 et 1980. Elle prend peu en

compte les émotions car elle se réfère au modèle comportemental radical de Skinner, qui repose

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essentiellement sur l’analyse expérimentale du comportement par l’étude des contingences de

renforcement. « Les motivations, les émotions et les réactions physiologiques aussi bien que les

cognitions ne sont que des effets des contingences de renforcement qui les façonnent de

l’extérieur » (Cottraux, 2011b, p. 5).

Les TCC reprennent de l’approche comportementale un certain nombre de principes :

- Le conditionnement classique ou pavlovien   :

Il a été mis en évidence par Pavlov en 1926. Le conditionnement classique, ou pavlovien, a pour

effet de mettre en place les réponses du système nerveux végétatif. Il consiste à associer un stimulus

neutre (une sonnerie), en le présentant un quart de seconde avant à un stimulus inconditionnel (la

nourriture), pour que se déclenche une réponse de salivation. Le stimulus neutre déclenchera par la

suite, à lui seul, la réponse. « L’ensemble des réponses émotionnelles physiques relève de ce

conditionnement par lequel un stimulus neutre – un lieu, une image, un son, une date, un mot – est

associé automatiquement à des manifestations émotionnelles » (INSERM, 2004).

- Le conditionnement opérant ou skinnerien   :

Il décrit le développement et le maintien des réponses motrices et verbales. Il a été décrit dès la fin

des années 1930 par Skinner, comme une extension de la théorie darwinienne de la sélection

naturelle. L’organisme opère sur l’environnement et les conséquences de son action le conduisent à

modifier son comportement. Il répétera ou éliminera certaines réponses. Les actions sont renforcées

par leurs conséquences8.

- La sensibilisation et l’habituation   :

L’habituation désigne le phénomène, très général et vital, d’accoutumance d’un organisme à

certaines excitations sensorielles répétées, auxquelles il ne réagit plus car elles ont perdu leur

signification. En ce sens, l’habituation correspond à un niveau élémentaire d’apprentissage9.

8 « Une formulation adéquate de l’interaction entre un organisme et son milieu doit spécifier trois niveaux d’analyse fonctionnelle :• les circonstances dans lesquelles la réponse survient, autrement dit le stimulus discriminatif qui signale au sujet qu’il doit agir ;• la réponse elle-même ;• les conséquences à effet renforçateur.L’interrelation entre ces trois éléments est une contingence du renforcement, qui entre aussi en interaction avec les motivations internes à agir. L’analyse du maintien d’une séquence comportementale passe par l’étude de ses conséquences qui permet de comprendre la finalité d’un comportement. Une action qui a des conséquences positives va tendre à se répéter (renforcement positif). Inversement, devant les conséquences négatives d’une action, l’organisme aura tendance à émettre des comportements d’évitement ou d’échappement ou d’évitement des situations aversives. L’absence de conséquences négatives ou positives à une action entraînera progressivement la disparition de cette action du fait de l’absence de tout renforcement : c’est l’extinction » (INSERM, 2004).9 « Les thérapies comportementales se sont fondées, au début, sur la notion qu’un certain nombre de comportements, en particulier les comportements d’évitement, résulteraient d’un conditionnement par association de stimuli. Dans un premier temps, un conditionnement classique des réponses émotionnelles va fixer un pattern émotionnel dans la mémoire ; dans un deuxième temps, l’évitement comportemental va soulager de l’anxiété et fixer sur un mode opérant les réponses motrices. Les deux facteurs, conditionnement classique et conditionnement opérant, participent au maintien du trouble anxieux, ce qui fait que les TCC vont agir à ces deux niveaux d’apprentissage : réduire l’anxiété et encourager les comportements actifs d’affrontement. Le plus connu des principes utilisés en TCC est l’exposition aux situations anxiogènes. Celle-ci est en général effectuée de manière graduelle et précédée d’une phase d’exposition prolongée et répétée en imagination, qui vise à habituer les réponses physiologiques inadaptées et à éteindre les réponses motrices d’évitement » (INSERM, 2004).

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2.1.2. La vague cognitive à partir des années 1960

Le développement des sciences cognitives au début des années 1960 a permis d’étudier l’impact des

processus cognitifs dans la souffrance psychologique et l’apparition de comportements

pathologiques. La deuxième vague repose sur le modèle de l’apprentissage fondé sur la métaphore

du « traitement de l’information » ou l’approche cognitiviste (1955). La thérapie des construits

personnels de Kelly, la thérapie émotivo-rationnelle d’Ellis (1962) et la thérapie cognitive de Beck

(1967) sont parmi les approches les plus connues de ce courant (Dionne, & Blais, 2011).

La thérapie émotionnelle d’Albert Ellis (1962) étudie les systèmes de croyances irrationnels

conscients ou préconscients du patient pour les modifier (Cottraux, 2011b). Le but général de cette

thérapie est l’acceptation inconditionnelle de soi, de manière à ce que le sujet ne porte plus de

jugement négatif sur son essence, qu’il puisse considérer avec relativisme les accidents de son

existence.

Ellis a proposé une approche pragmatique de restructuration cognitive, se proposant de traiter les

distorsions cognitives par étapes, selon un système qu’il résume par les lettres A, B, C, D, E.

Modèle ABCDE d’Ellis

A : activation des croyances par un événement : tout d’abord sont isolées les activités ou les situations qui activent les systèmes de croyance ;B : ensuite, sont identifiés les systèmes de croyances irrationnelles ;C : mise à plat conséquences comportementales et cognitives : ces systèmes de croyances irrationnelles constituent les réponses internes aux événements et donnent lieu à des pensées, sentiments et comportements défaitistes ;D : modification des croyances : le thérapeute aide le patient à corriger son système de croyances irrationnelles ;E : le résultat est la mise en place d’une conception rationnelle de l’existence qui devient plus acceptable et satisfaisante pour le sujet (Cottraux, 2011b).

Ce modèle historique laissera place progressivement à un modèle plus sophistiqué et intégratif.

Dans les années 1970, Aaron Beck manifeste un intérêt pour les processus émotionnels et précise de

manière claire la méthode qui lui a permis de construire son système psychothérapeutique, à partir

de l’étude des pensées automatiques préconscientes reliées aux émotions négatives : « l’émotion est

la voie royale vers la cognition » (Cottraux, 2011b, p. 9). Beck fonde en 1961 la thérapie cognitive

qui rapidement prendra son essor. Il donnera le nom de thérapie cognitivo-comportementale

(Congitive-Behavior Therapy, en anglais), voulant dire par là que même si la thérapie cherche à agir

sur le comportement, la modification des systèmes de croyance conscients et inconscients est au

centre du processus thérapeutique.

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Cependant, la deuxième vague soulève ces dernières années un certain nombre de critiques,

concernant essentiellement la philosophie sous-jacente au traitement, le modèle de traitement de

l’information sur lequel la théorie est fondée, le rôle médiateur de la cognition et la visée principale

de la thérapie (Dionne, & Blais, 2011).

2.1.3. La « troisième vague » : à partir des années 1990

La troisième vague des thérapies comportementales et cognitives débute dans les années 1990 et

repose sur une approche centrée sur des principes empiriques ; elle accorde une attention

particulière au contexte des phénomènes psychologiques et s'intéresse davantage à leur fonction

qu'à leur forme, ce qui a conduit au développement de stratégies de changement contextuelles et

expérientielles venues s'ajouter à des techniques plus directement didactiques. Les approches

thérapeutiques en question tendent à la construction de répertoires comportementaux d'une

extension, d'une flexibilité et d'une efficacité accrues plutôt qu'à l'élimination de problème définis

de manière étroite et elles soulignent que les questions sur lesquelles elles se penchent concernent

autant les cliniciens que leurs clients. La troisième vague reformule et synthétise les acquis des

générations précédentes de thérapie comportementale et cognitive et les applique à des domaines et

à des questions qui ont dans un premier temps été traitées par d'autres orientations thérapeutiques,

ce dans l'espoir de mieux les comprendre et de les traiter avec une efficacité accrue (Hayes, 2004).

Dans une sorte de synthèse dialectique entre une ancienne thèse et son antithèse, les thérapies de la

troisième vague semblent en voie de guérir les plaies du passé et d'aplanir les anciens différends

entre les perspectives comportementales et cognitives. Les interventions de la troisième vague ne

représentent pas un rejet des premières et deuxièmes vagues de la thérapie comportementale et

cognitive mais plutôt une transformation des phases précédentes aboutissant à une approche

nouvelle, plus large et plus interconnectée. Ainsi, si les implications de ce mouvement peuvent être

révolutionnaires, le processus qui le sous-tend est évolutif – comme on pouvait s'y attendre dans un

domaine se réclamant explicitement de l'empirisme (Hayes, 2005). Alors que les approches de la

deuxième vague visent essentiellement la modification des pensées irrationnelles et des émotions

désagréables, les approches de la troisième vague favorisent l’élargissement du répertoire

comportemental de l’individu, c’est-à-dire une plus grande flexibilité ou un meilleur

fonctionnement général. Elles ne cherchent pas à opérer des changements de premier ordre (par une

action directe sur le comportement). Elles adoptent plutôt des stratégies expérientielles

(contextuelles) visant d’abord à changer la relation de l’individu à ses symptômes (changements de

deuxième ordre) (Cottraux, 2011b).

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L’acceptation, la pleine conscience (mindfulness), l’activation et l’engagement envers les valeurs

personnelles sont autant de moyens pour parvenir à ces changements.

Les approches de la troisième vague se regroupent d’ailleurs aussi sous l’appellation « approches

basées sur l’acceptation et la pleine conscience ».

2.2. Les caractéristiques de la troisième vague des TCC

Quelques caractéristiques communes à l’ensemble des approches de la troisième vague et les

distinguant de la TCC traditionnelle peuvent être relevées (Dionne, 2009) :

- La forme versus la fonction des symptômes

La troisième vague s’intéresse davantage à la fonction plutôt qu’à la forme d’un symptôme. Elle

s’intéresse aux conséquences du comportement produit (symptôme) dans l’environnement. « Ainsi,

faire une sieste peut paraître contreproductif pour quelqu’un qui souffre de dépression, mais n’a pas

la même fonction pour un individu qui présente une personnalité obsessionnelle. La forme du

comportement est pourtant la même, mais dans un cas la sieste peut servir à éviter des émotions

désagréables, alors que dans l’autre, elle peut être vue comme un rare moment de relaxation. Il faut

se demander si l’action est efficace ou pragmatique pour l’individu, si elle permet d’atteindre ses

objectifs personnels.

- Méthodes didactiques versus expérientielles

Dans la plupart des approches de la troisième vague, le thérapeute ne cherche pas à agir directement

sur les symptômes (pensées, émotions, sensations) par des stratégies de changement didactiques et

verbales (comme le questionnement socratique et la psychoéducation). Il tente davantage de

changer la relation du client face à ses symptômes (on appelle ces changements « contextuels »).

Pour ce faire, sont utilisées des méthodes expérientielles comme l’utilisation de métaphores, la

pratique de la méditation de pleine conscience et le contact avec les émotions dans l’ici et

maintenant. Ces méthodes, axées davantage sur l’experiencing, s’apparentent dans leur forme à des

interventions provenant des traditions humanistes, gestaltistes, psycho-dynamiques, voire

bouddhistes.

- Le contrôle versus l’acceptation des émotions

Plutôt que d’essayer de contrôler, gérer ou diminuer les émotions et les comportements

problématiques, la troisième vague propose de cesser cette forme de lutte, notamment via des

techniques de relaxation ou de désensibilisation systématique (Hayes, 2004).

- Modification du contenu des pensées versus distanciation

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Dans la technique classique des trois colonnes utilisée en TCC, le client est amené à noter les

pensées automatiques reliées aux émotions et comportements qui surviennent dans une situation

donnée. Une quatrième colonne est ensuite utilisée et demande au client de mettre à l’épreuve ses

pensées irrationnelles, en reformulant sur la base d’arguments objectifs une pensée plus rationnelle.

Or les approches de la troisième vague sont en train d’abandonner cette quatrième colonne. Elles

cherchent plutôt à amener le client à prendre une distance face au contenu de ses pensées, à

conscientiser le processus même de penser de façon à voir les pensées comme des phénomènes

transitoires et non comme des faits. Une intervention basée sur la TCC traditionnelle cherchait

plutôt à modifier le contenu ou la forme des pensées ruminatives (Dionne, 2009).

- Restructuration cognitive versus pleine conscience

L’utilisation du processus de pleine conscience, commune à tous les courants de la troisième vague,

s’avère particulièrement opérant pour participer de ce processus de distanciation vis-à-vis des

pensées. Nous y reviendrons plus en détail au chapitre suivant.

3. Caractérisation de deux concepts au cœur de la troisième vague : la pleine conscience et

l’acceptation

3.1. La pleine conscience (mindfulness)

3.1.1. Définitions et objectif

A l’origine, la pleine conscience constitue un des piliers des différentes méditations bouddhistes.

C’est une notion ancienne que l’on trouve dans de nombreuses traditions religieuses et spirituelles

anciennes comme le bouddhisme, le taoïsme, l’hindouisme, le judaïsme, l’islam et le christianisme.

Récemment, la psychologie occidentale a reconnu les nombreux bénéfices de l’approfondissement

des compétences de pleine conscience. La pleine conscience y est définie de différentes façons,

mais elles reviennent toutes à cette formulation : « la pleine conscience signifie prêter attention,

avec souplesse, ouverture et curiosité » (Harris, 2012, p. 20).

Selon Jon Kabat-Zinn, médecin américain fondateur de la Clinique de Réduction du Stress et du

Centre pour la Pleine Conscience en Médecine, pionnier dans l’utilisation de la pleine conscience

en psychothérapie, « elle désigne un état de conscience qui émerge du fait de porter son attention,

de manière intentionnelle, au moment présent, sans jugement, sur l’expérience qui se déploie

moment après moment » (Kabat-Zinn, 2003, p. 145).

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Alexandre Heeren, chercheur à l’Université Catholique de Louvain, en prolongement de la

définition de Kabat-Zinn, apporte une des précisions dans le champ psychologique à la définition de

Kabat-Zinn : « il s’agit d’un état qui résulte du maintien de l’attention sur un stimulus (ou un pattern

de stimuli) donné, dont l’expérience présente constitue le stimulus principal. Suivant cette

approche, l’expérience présente réfère tant aux données sensori-motrices (par exemple, ce que

l’individu entend) que cognitives (par exemple, les pensées et les images mentales) et émotionnelles

qui surgissent spontanément dans le champ de la conscience. En outre, une attitude de non-

jugement est également impliquée. Cette attitude consiste à explorer de manière similaire et à

accepter toutes les facettes de l’expérience présente, quelle qu’en soit a priori la valence

émotionnelle » (Heeren, 2011).

Pierre Philippot, docteur en psychologie et professeur à l’université de Louvain, précise l’objectif

de cette démarche : « les jugements que nous portons sur toute donnée de notre expérience sont

pour la plupart automatiques et il serait vain d’essayer de les supprimer. Le but est plutôt de ne pas

nous laisser emporter par ces jugements, de ne pas les laisser gouverner notre attention. Il s’agit de

les observer comme des créations de notre esprit, comme des données de notre expérience ici et

maintenant » (Phillippot, 2011).

3.1.2. Utilisation de la pleine conscience en psychothérapie de la troisième vague

En sus de la thérapie d’acceptation et d’engagement que nous aborderons en détail au prochain

chapitre, deux autres courants de la troisième vague intègrent la pleine conscience dans leur cadre

thérapeutique.

3.1.2.1. Le Mindfulness-Based Stress Reduction (MBSR)

Jon Kabat-Zinn fut le premier à développer à partir de la fin des années 1970 des programmes

d’interventions psychologiques mobilisant la pleine conscience. Il développe notamment son

programme d’entraînement à la gestion du stress par recours à la pleine conscience (MBSR) auprès

de patients souffrant d’un problème chronique pour lequel il n’y avait pas de traitement médical

satisfaisant.

Il s’agit d’un programme structuré en huit séances hebdomadaires, appliqué en groupe de 20 à 30

personnes, présentant des troubles divers : douleur ou maladie chronique, anxiété stress. Les

séances durent entre 2 heures et 2 heures 30 à l’exception de la sixième séance qui consiste en une

journée entière d’exercices. Les exercices proposés aux participants peuvent être classés en deux

catégories. Il y a d’une part, des exercices dits « formels » qui sont structurés et impliquent qu’on

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leur réserve un temps et un espace propres. Ils sont généralement assez longs (entre 20 et 45

minutes). D’autre part, il y a des exercices « informels ». Il s’agit là principalement de pratiquer des

activités quotidiennes en pleine conscience plutôt qu’en pilote automatique. Qu’ils soient formels

ou informels, les exercices ne constituent jamais un but en eux-mêmes. Ils ne sont que des prétextes

pour développer la capacité de pleine conscience (Philippot, 2011).

3.1.2.2. Le Mindfulness-Based Cognitive Therapy (MBCT)

Ce programme est une approche de groupe développée par les psychologues Zindel Segal, John

Teasdale et Mark Williams. Comme la MBSR, la MBCT s’inspire des enseignements bouddhistes

en se détachant de leur dimension spirituelle. La MBCT s’enracine dans une démarche plus

scientifique établie par des psychologues cognitivistes mettant au point des techniques de thérapie.

En ce sens, ils emploient la médiation à des fins thérapeutiques de gestion émotionnelle. Le

programme est ainsi généralement instruit par des psychologues et des psychiatres car, à travers

leurs connaissances cliniques, ils sont en mesure d’expliquer ce que sont les ruminations et les

signes cliniques des troubles psychologiques. Ils peuvent alors apprendre aux participants à utiliser

la pleine conscience au quotidien comme « baromètre » de l’humeur et des pensées pour adopter

des stratégies plus efficaces avant que les troubles ne s’installent (site internet www.mindfulness-

paris.fr ).

3.1.3. Domaines d’application et efficacité de la pleine conscience

La pleine conscience a été appliquée à de nombreux domaines : troubles anxieux, dépression,

troubles des conduites alimentaires, douleurs chroniques, autres troubles psychosomatiques

(Philippot, 2011).

En ce qui concerne l’efficacité, « en termes de réduction des symptômes psychologiques centraux

de ces troubles, la taille d’effet moyen est de .74, ce qui marque une efficacité modérée à bonne

(…). Les programmes MBSR et MBCT sont conformes aux critères de traitements probablement

efficaces selon les critères de l’APA » (Philippot, 2011, 74).

3.2. L’acceptation

3.2.1. Définition

L’acceptation n’est pas un concept nouveau. Au début du vingtième siècle, un certain nombre de

psychanalystes, Sigmund Freud, mais aussi Sandor Ferenczi et Otto Rank, traitent de l’acceptation.

Plus tard, dans les années 1940, Carl Rogers fait de l’acceptation de soi le point central de sa

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psychothérapie. Les thérapies de la troisième vague encouragent l’acceptation de l’expérience

intérieure pour favoriser le changement comportemental. Elles incitent à accepter ce qui ne peut être

modifié dans le but de changer ce qui peut l’être. Dans ce sens, l’acceptation est le moyen principal

de réduire l’impact négatif de l’expérience privée (émotions, pensées, etc.) sur les comportements

que l’on voudrait voir adopter (Kotsou, Schoendorff, 2011).

Steven Hayes, psychologue pionnier de la troisième vague des TCC, définit l’acceptation de la

manière suivante : « il s’agit d’accepter les événements intérieurs, ou événements privés comme les

émotions, les pensées, les souvenirs et les croyances. Accepter signifie donc embrasser

l’expérience, quelle qu’elle soit, ici et maintenant, ce qui implique de s’exposer à ses pensées,

émotions, sensations physiques sans tenter d’y échapper ou d’y résister » (Hayes, 2004).

Christophe André, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne à Paris, en fait d’ailleurs le point de départ de

toute démarche de changement « pour espérer changer durablement, tout commence par

l’acceptation (…). Si je souhaite ne plus éprouver sans cesse de la tristesse, de la peur, de la colère,

plutôt que de vouloir ne pas les ressentir lorsqu’elles se présentent, je vais avoir intérêt à accepter

d’abord de les éprouver pleinement et lucidement ; « d’y aller » au lieu de les fuir ; de les examiner

avec attention. Il me faut pour cela m’opposer à une tendance naturelle : accueillir l’agréable mais

repousser le désagréable. Car cette attitude purement hédonique ne peut fonctionner que pour des

situations ponctuelles et limitées ; par pour des expériences de vie complexes » (Schoendorff, 2010,

p. 10).

Williams et Lynn (2011) relèvent un certain nombre de bénéfices apportés par l’acceptation

expérientielle : l’accès à une plus grande palette d’expériences ; un potentiel accru pour une action

productive ; plus de compassion et moins de jugement négatif envers les autres ; moins de

résistance, plus de consentement, de sérénité ; une réduction des émotions négatives douloureuses ;

des résultats thérapeutiques positifs.

Surtout, l’acceptation n’est pas un but en soi dans les thérapies de la troisième vague, mais est à

considérer comme une alternative à l’évitement des expériences douloureuses, évitement

expérientiel dont nous verrons au prochain chapitre que s’il est souvent efficace à court terme, il

s’avère avoir pour conséquence à moyen terme de réduire les options comportementales et la qualité

de vie des patients.

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3.2.2. Efficacité de l’acceptation

De nombreuses études expérimentales ont évalué les effets positifs des stratégies d’acceptation,

souvent en les comparant avec des stratégies de suppression ou de contrôle. Ainsi, de manière non

exhaustive :

- Levitt et ses collègues, dans une étude expérimentale de 2004, randomisée sur les troubles

paniques, ont comparé les effets respectifs de l’acceptation, de la suppression des émotions

et de la distanciation. On constate que l’acceptation engendre beaucoup moins d’anxiété que

les autres comportements ;

- Marcks et Woods ont montré en 2005 que des individus pratiquant l’acceptation ressentaient

moins d’inconfort face à leurs pensées intrusives que lorsqu’il leur était demandé de

supprimer ces pensées ;

- En 2007, une étude des mêmes auteurs a montré que la suppression était liée à de plus hauts

niveaux d’anxiété que l’acceptation ;

- Liverant, Brown, Barlow et Roemer ont démontré dans une étude en 2008 que l’utilisation

de la suppression, chez des sujets déprimés, pouvait amener une réduction du sentiment de

tristesse à court terme lorsque les niveaux d’anxiété étaient bas. Toutefois, cette atténuation

n’était plus aussi notable avec des niveaux d’anxiété plus élevés ;

- Steven Hayes et ses collègues ont démontré dans une étude de 2009 qu’une logique

d’acceptation était plus efficace face à la douleur qu’une logique de contrôle (Kotsou,

Schoendorff, 2011).

3.3. Utilisation de la pleine conscience et de l’acceptation en coaching

Sylvie de Frémincourt (2013), présidente pendant 10 ans de Syntec Coaching, souligne

l’importance pour le coach d’agir dans « l’ici et le maintenant », en devant conjuguer quatre temps :

le temps du coach, le temps du coaché, le temps de l’entreprise et le temps du coaching.

Florence Lamy et Michel Moral tiennent le lâcher prise comme un des outils génériques du coach :

« dans le lâcher prise il y a donc cette double position : ouverture vers un possible et abandon de ce

qui n’est plus vraiment utiles : interdits injustifiés, croyances limitantes, co-dépendance, objectifs

inatteignables, émotions négatives, ressentiment et attentes abusives » (Lamy, & Moral, 2011, p.

73).

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Concernant la posture d’écoute du coach et en corollaire ce qu’elle génère chez le coaché, Bernard

Hévin et Jane Turner précisent : « c’est entrer en résonance avec les sentiments, les émotions qui

sont là, que le sujet lui-même n’ose pas exprimer et que, dans certains cas, il méconnaît au point de

s’interdire de les ressentir. C’est dans une attitude profonde, ce moment où le coach est sans

mémoire et sans désir, que l’attitude de compréhension et de neutralité bienveillante prend toute sa

signification technique. Et c’est dans cette écoute offerte par le coach que le coaché peut puiser le

courage de se regarder, de se reconnaître et de s’accepter de façon réaliste, de prendre des décisions

et d’apporter certains changements à sa vie » (Hévin, & Turner, 2006, pp. 120-121).

Nous allons aborder au prochain chapitre un des courants majeurs de la troisième vague des

TCC, à savoir la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT). Nous avons choisi ce modèle

pour plusieurs raisons :

- Il utilise diverses « techniques » issues des philosophies orientales qui nous tiennent

tant à cœur : recours à la pleine conscience, acceptation et distanciation avec les

pensées non aidantes ;

- Il constitue un modèle complet, structuré, autonome et opérant ayant été l’objet de

nombreuses études ayant montré son efficacité ;

- Enfin, il s’agit en quelque sorte d’une théorie de l’action : l’objectif de l’ACT est la

mise en place par le client d’actions en accord avec ses valeurs, c’est-à-dire le chemin

de vie que celui-ci se fixe.

4. La thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT)

La thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) est née au début des années 1990 de la réflexion

menée par des psychologues américains souhaitant poursuivre et optimiser les thérapies de la

deuxième vague.

4.1. La genèse de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) : une approche récente

née dans les années 1990

Au milieu des années 1980, un groupe de psychologues américains essaya de découvrir les

ingrédients actifs des thérapies par la parole, notamment de l’approche d’A.T. Beck, afin de les

systématiser. La thérapie de Beck fonctionnait mais ils voulaient comprendre comment et pourquoi,

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afin de l’étendre et de l’améliorer. Ils souhaitaient aussi appliquer une méthodologie expérimentale

rigoureuse à l’étude du langage et de la cognition, deux fonctions dont ils avaient l’intuition qu’elles

occupent une place centrale dans l’origine des troubles psychologiques. Ils firent alors le pari que

l’ingrédient le plus efficace de la thérapie était la capacité à prendre de la distance par rapport aux

pensées et aux émotions. Partant de cette intuition, ils bâtirent un modèle thérapeutique qui avait

pour objectif de recourir à la distanciation face aux événements psychologiques douloureux. Ce

modèle s’appuyait principalement sur des exercices et des métaphores destinés à faire prendre

conscience aux patients du fait qu’ ils pouvaient regarder leur pensée comme un processus

indépendant et automatique, dont ils pouvaient davantage prendre conscience, mais auquel ils

pouvaient aussi moins adhérer. Les fondateurs de cette approche procédèrent alors à des

expérimentations en laboratoire. Les premiers résultats s’avérèrent comparables à ceux obtenus par

la thérapie de Beck, mais les processus impliqués semblaient différents. Leurs travaux les

conduisirent à une compréhension pointue des phénomènes langagiers, du symbolisme, de la

capacité du langage à évoquer des émotions, ainsi que de la cognition. C’est grâce à ces découvertes

sur les mécanismes impliqués dans le langage et la pensée qu’ils créèrent la thérapie d’acceptation

et d’engagement (Acceptance et Commitment Therapy, en anglais). Leur choix a été alors de la

diffuser sous l’appellation ACT, c’est-à-dire de prononcer son acronyme comme un seul mot, afin

de marquer l’ancrage de la thérapie dans le changement et souligner le caractère actif de ce modèle

thérapeutique » (Monestès, Villatte, 2011.

Le premier article traitant de l’ACT date de 1991. Mais il faudra attendre 1999, soit près de quinze

années de recherche après la mise en place de ses prémices, pour que paraisse le premier ouvrage

qui en pose les bases telle que connues actuellement. La diffusion de ce modèle en France est

récente : on dénombre à ce jour moins d’une dizaine d’ouvrages traitant de l’ACT publiés en

français : ils sont par ailleurs tous évoqués dans le présent mémoire.

4.2. Positionnement de l’ACT au regard d’autres approches utilisées en coaching

La thérapie d’acceptation et d’engagement est une psychothérapie comportementale appartenant à

la troisième vague des thérapies comportementales et cognitives. L’ACT se veut résolument une

approche non intégrative, en se sens qu’elle propose un modèle thérapeutique complet et autonome.

Elle présente néanmoins un certain nombre de similitudes avec la thérapie des schémas, la Gestalt,

l’hypnose ericksonienne, l’entretien motivationnel ou encore la thérapie rationnelle-émotive d’Ellis

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(Monestès, Villatte, 2011) : recours à la pleine conscience, prise de distance par rapport aux pensées

et comportements en autres.

4.3. Les fondements de l’ACT : le contextualisme fonctionnel et la théorie des cadres

relationnels

4.3.1. Le contextualisme fonctionnel

Le contextualisme fonctionnel est une philosophie qui considère que le rôle de la science n’est pas

tant de percer la réalité ultime des choses – ni d’en produire la parfaite représentation -, mais plutôt

d’élaborer des explications qui fonctionnent dans les contextes pour lesquels elles ont été élaborées.

C’est un pragmatisme qui s’intéresse en priorité à ce qui fonctionne. Pour le contextualisme

fonctionnel, le but de la psychologie n’est pas seulement de décrire les phénomènes psychologiques

et comportementaux, mais tout autant d’identifier les moyens efficaces de les influencer. Ainsi,

l’ACT, et c’est ce qui le différencie de l’approche de la deuxième vague, ne cherche pas à

déterminer le niveau de réalité ni le caractère plus ou moins irrationnel des pensées du client. Elle se

centre plus volontiers sur l’efficacité de se soumettre aux prescriptions de ces pensées pour

progresser dans les directions de vie choisies (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011).

4.3.2. La théorie des cadres relationnels (TCR)

La théorie des cadres relationnels peut être considérée comme une troisième forme d’apprentissage

(après l’apprentissage classique et l’apprentissage opérant), l’apprentissage relationnel. Cette forme

d’apprentissage s’appuie sur l’apprentissage opérant tout en rendant compte des spécificités du

fonctionnement du langage humain (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011).

Skinner fut le premier à présenter une analyse détaillée du langage d’un point de vue fonctionnel

(Skinner, 1957). Il applique au langage les principes de l’apprentissage classique en montrant qu’il

s’agit d’un comportement comme les autres, en ce sens qu’il est appris au travers d’une interaction

avec l’environnement. Toutefois, l’analyse skinnerienne ne résout pas le problème qui consiste à

savoir comment un comportement peut être appris ou modifié sans avoir jamais été soumis

directement aux conséquences concrètes de l’environnement. « Le langage a la capacité de donner

aux événements psychologiques une valeur aversive. Et c’est parce qu’ils deviennent aversifs que

nous essayons de les éviter, que nous tentons d’éviter l’expérience même de vivre nos évitements

psychologiques. Mais parallèlement, le langage empêche que ces évitements d’expérience soient

durablement efficaces. De plus, les évitements expérientiels se maintiennent souvent en dépit de

leurs conséquences délétères, toujours en raison du langage (Monestès, Villatte, 2011) ».

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Ainsi, le langage présente trois caractéristiques, dont certaines sont paradoxales (Monestès, Villatte,

2011).

4.3.2.1. Le langage entraîne l’évitement d’événements psychologiques

Dymond et Roche (2009) ont montré comment des événements peuvent être évités même lorsqu’ils

n’ont pas été impliqués directement dans une situation aversive10. Par exemple, lorsqu’une personne

est victime d’un accident grave de voiture, il arrive souvent qu’elle ressente un stress important en

retournant sur les lieux de l’accident ou en voyant une voiture similaire. Mais elle peut également

ressentir des émotions très douloureuses en pensant à l’anniversaire de son fils, bientôt âgé de 18

ans. Dans ce dernier cas, le langage a établi une relation d’équivalence entre l’accident et le fait que

son fils aura bientôt la possibilité de conduire. « Avec ce mécanisme, mêmes nos pensées (qui ne

peuvent pourtant pas en elles-mêmes être physiquement dangereuses) sont identifiées comme une

menace et deviennent cibles d’échappement et d’évitement : nous cherchons par tous les moyens à

ne pas penser à quelque chose de douloureux, alors qu’une pensée n’a pas la dangerosité de

l’événement ou de l’objet à laquelle elle se réfère » (Monestès, Villatte, 2011, pp. 10-11).

4.3.2.2. Le langage rend impossible l’évitement des événements psychologiques

Si nous pouvions contrôler facilement et sans conséquence notre pensée, le fait que le langage nous

amène à éviter notre propre pensée ne serait sans doute pas un problème. Il nous suffirait alors de

faire le tri entre nos bons et mauvais souvenirs, et de choisir de ne garder que ceux qui nous agréent.

Malheureusement, les recherches menées sur le sujet ne sont guère encourageantes. Daniel Wegner

(1989), un des psychologues ayant le plus étudié la question du contrôle de notre propre pensée est

arrivé à la conclusion que plus on essaie de ne pas penser à quelque chose et plus on y pense11.

10 « Le principe était de soumettre les participants à un apprentissage relationnel de type A = B = C. Dans un deuxième temps, le stimulus A acquérait la fonction d’avertir un événement aversif par apprentissage répondant (une image anxiogène était présentée sur l’écran d’ordinateur juste après le stimulus A). Les participants apprenaient également qu’en appuyant sur une touche de l’ordinateur, ils pouvaient éviter que l’image anxiogène apparaisse. Dans une phase test finale, les chercheurs ont observé que les participants appuyaient sur la touche d’évitement lorsqu’ils voyaient apparaître le stimulus A, mais aussi lorsqu’ils voyaient le stimulus B (en relation d’implication mutuelle avec A), et le stimulus C (en relation d’implication combinée avec A). Pour résumer, même les stimuli qui n’avaient jamais été associés à l’image anxiogène déclenchaient une réponse d’évitement » (Monestès, Villatte, 2011, p. 10).11 Dans une expérience, il était demandé à des participants de tout faire pour ne pas penser à un ours blanc. Il en résultait que non seulement ces participants ne parvenaient pas à effacer l’ours blanc de leur pensée, mais voyaient même leurs pensées davantage se concentrer sur celui-ci que si on ne leur donnait pas une telle instruction. La théorie des cadres relationnels suggère que cette incapacité à contrôler notre pensée est due à la constante mise en relation des événements par le langage, d’une manière qui peut être indépendante de leur apparence. Pour ne pas penser à un ours blanc, il ne nous faut pas seulement éviter l’ours blanc, ce qui est blanc, ce qui ressemble à un ours, etc., mais aussi tout ce qui peut se rapporter symboliquement à cette cible

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4.3.2.3. Le langage maintient les tentatives d’évitement d’événements psychologiques

Alors que tenter d’éviter pensées et émotions apparaît vain et même contre-productif, il s’agit,

pourtant d’une stratégie très répandue et persistante. Bien que certains comportements d’évitement

s’avèrent contre-productifs à long terme, ils se maintiennent car ils sont renforcés à court terme12.

La théorie des cadres relationnels est complexe, et nous n’avons pas ici la place pour l’évoquer de

manière plus exhaustive. Simplement, en résumé, la théorie des cadres relationnels propose une

nouvelle définition fonctionnelle du langage. D’après cette théorie, le langage « est un

comportement de dérivation de relations selon des contextes arbitrairement définis (…) On pourrait

également dire que le langage, c’est la capacité unique qu’ont les humains de transformer leur

expérience sensorielle en expérience mentale – et qui leur permet d’utiliser ensuite ces

transformations pour contrôler leur environnement extérieur (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p.

398).

En conséquence des phénomènes décrits, l’ACT comme on le verra vise à favoriser l’acceptation

des événements privés (pensées, images, sensations physiques) désagréables dans les situations où

leur évitement conduit au renoncement à des actions allant dans le sens des valeurs choisies par le

sujet ou à la persistance dans des actions contraires à ses valeurs. En ce sens, prendre un

engagement, c’est choisir ici et maintenant une attitude future dont on sait qu’elle pourra entraîner

un inconfort à court terme, mais contribuera à la direction qu’on souhaite donner à sa vie (Cottraux,

2008).

4.4. L’objectif de l’ACT : lutter contre la fusion cognitive et son corollaire l’évitement

expérientiel

L’ACT cible les effets délétères de processus langagiers normaux et vise à réduire la lutte contre

son expérience intérieure afin de permettre l’engagement dans des actions au service de ses valeurs.

En d’autres termes, l’ACT cible la fusion cognitive et l’évitement expérientiel qui peuvent

enfermer. Dans ce cadre, l’ACT met en œuvre six processus thérapeutiques : la défusion cognitive,

l’acceptation, le contact avec le moment présent, l’identification des valeurs, l’action engagée vers

les valeurs et le contact avec un sens de soi transcendant. Ces six processus sont souvent présentés

12 « A court terme, concentrer son attention sur une pensée agréable ou consommer de l’alcool peut permettre d’oublier un événement traumatisant, au moins pendant un moment. On persiste donc dans cette stratégie, même si cela entraîne des conséquences négatives plus graves encore (dépendance à l’alcool, incapacité à entamer une conversation de peur qu’un sujet abordé soit relié au traumatisme) » (Monestès, Villatte, 2011, p. 13).

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sous la forme d’un hexagone nommé hexaflex. Ils participent tous à la promotion de la flexibilité

psychologique.

4.4.1. La fusion cognitive

En soi, le processus de transformation, via le langage, de l’expérience sensorielle en expérience

mentale n’a rien de pathologique. Il est même la source de nos capacités d’abstraction. Mais cet

avantage va brouiller la différence entre expérience sensorielle et mentale. Ainsi, pour une victime

d’agression, la simple évocation du mot « agression » lors d’une conversation pourra évoquer

l’expérience de l’agression elle-même et déclencher frayeur et honte. A la simple évocation d’un

mot, les fonctions dérivées pourront prendre le pas sur l’expérience directe, même en l’absence de

tout danger présent. Quand les fonctions dérivées issues de l’activité mentale prédominent sur les

fonctions directes issues de l’expérience sensorielle directe, on parle de fusion cognitive. « Le terme

de fusion cognitive a été proposé par les fondateurs de l’ACT pour rendre compte du fait que le

langage a tendance à se fondre dans la perception de l’expérience directe de manière si complète

que c’est comme si les pensées fusionnaient avec la perception et la coloraient de manière

indétectable » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 51).

La fusion cognitive signifie que « nos pensées dominent notre comportement. Donc dans l’ACT,

nous parlons avec nos patients de « se faire piétiner par nos pensées » ou laisser nos pensées nous

dire quoi faire » (Harris, 2012, p. 36).

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4.4.2. L’évitement expérientiel

Comme nous l’avons vu, une autre conséquence de la fusion cognitive est une insensibilité au

contexte extérieur qui peut amener à persister dans des comportements qui ne fonctionnent pas.

Fusionner avec des pensées non aidantes (exemple : je ne suis pas intéressant) peut induire des

comportements d’évitement de certaines expériences jugées potentiellement désagréables ou

douloureuses. Sous contrôle verbal, nous perdons donc le contact avec l’inefficacité de nos

stratégies de gestion des émotions, au détriment de ce qu’il semblerait plus adapté de faire lorsque

nous sommes traversés par des événements psychologiques difficiles. C’est ce que l’ACT appelle

l’évitement expérientiel, qui peut être formellement défini par « la tendance rigide, influencée par le

langage, à essayer d’échapper ou éviter les expériences psychologiques en tentant de modifier leur

fréquence, leur forme ou leur intensité, alors que cette tendance interfère avec l’engagement dans

des actions valorisées » (Monestès, Villatte, 2011, pp. 14-15).

Dans ce contexte, les expériences intérieures vont être classées comme plaisantes ou déplaisantes,

les pensées comme acceptables ou inacceptables. Des jugements vont venir s’y greffer : désirable,

insupportable, à fuir, à rechercher, etc. Pris littéralement, ces jugements vont induire des

comportements dont le but va être la modification de son expérience intérieure : l’élimination d’une

expérience intérieure évaluée comme insupportable, ou au contraire, la recherche d’une expérience

intérieure agréable (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011).

Le problème de l’évitement expérientiel est qu’il augmente la souffrance. Plus nous consacrons de

temps et d’énergie à essayer de nous débarrasser d’expériences indésirables ou à les éviter, plus

nous serons susceptibles de souffrir psychologiquement à long terme. « Les addictions nous

donnent un bon exemple évident. Beaucoup d’addictions commencent comme une tentative d’éviter

ou de se débarrasser de pensées indésirables et d’émotions, comme l’ennui, la solitude, l’anxiété, la

culpabilité, la colère, la tristesse, etc. A court terme, le jeu, la drogue, l’alcool et les cigarettes aident

souvent les gens à se débarrasser ou à éviter ces affects temporairement, mais à long terme il en

résulte une immensité de douleur et de souffrance » (Harris, 2012, p. 42).

4.5. Les résultats de l’ACT

A ce jour, plus de cinquante essais et études ont été conduits pour évaluer l’ACT, dont une trentaine

d’essais randomisés contrôlés. Ces travaux montrent les effets positifs significatifs de cette

approche en comparaison avec un traitement habituel ou une liste d’attente, et ce pour une

importante variété de troubles psychologiques ou de problèmes de santé :

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- La dépression (Zettle, 2011), le trouble obsessionnel-compulsif (Twohig et al., 2010), la

psychose (Bach et Hayes, 2002), l’addiction (Hayes et al., 2004), la trichotillomanie (Woods

et al., 2006), le trouble anxieux généralisé (Roemer et al., 2008), le trouble de la

personnalité état limite (Gratz et Gunderson, 2006)

- La prise en charge de la douleur chronique (Wicksell et al., 2009), l’épilepsie (Lundgren et

al., 2006), le diabète (Gregg et al., 2007), le stress lié au travail (Bond et Bounce, 2000),

l’arrêt du tabac (Gifford et al., 2004), l’obésité (Lillis et al., 2009), les trouble alimentaires

(Juarascio et al., 2010) (Monestès, Villatte, 2011, pp. 16-17).

4.6. Les critiques adressées à l’ACT

Un certain nombre de critiques ont été adressées à l’ACT.

Corrigan (2001) insiste sur le nombre insuffisant d’expérimentations concernant l’ACT, et sur le

caractère par trop empirique de nombre d’entre elles.

Ost (2008, 2009) souligne certaines faiblesses méthodologiques d’expérimentations sur l’ACT. Les

conclusions d’Ost seront par la suite discutées et réfutées par Gaudiano (2009 et 2009b).

Asmundson et Hadjistavropolous (2006), à partir de l’analyse du cas d’une jeune fille souffrant de

douleur chronique traitée par l’ACT, concluent que bien que les résultats soient intéressants, il

semble prématuré de conclure que la thérapie puisse être également efficace avec d’autres

adolescents souffrant de troubles similaires.

Hofmann et Asmundson (2008) ne remettent pas en cause l’ACT, mais estiment que, faute de

données suffisantes, les thérapies basée sur l’acceptation ne constituent pas une troisième vague des

TCC remplaçant le modèle de Beck.

Arch et Craske, (2008), dans une étude comparant la thérapie de Beck et l’ACT pour le traitement

de l’anxiété, arrivent à la conclusion paradoxale que la thérapie de Beck est plus efficace en ce qui

concerne l’amélioration de la qualité de vie et l’ACT sur la disparition des symptômes.

Au final, deux constats nous confortent dans note intérêt pour l’ACT :

- les quelques critiques ayant porté sur la méthodologie de l’ACT ont toutes été réfutées par

des praticiens ACT, arguments à l’appui ;

- les principales critiques portent finalement sur la légitimité de l’ACT et des autres thérapies

de l’acceptation à se revendiquer d’une troisième vague plus efficace que la deuxième. Nous

ne nous immiscerons pas dans ce débat de spécialistes ; de plus, ces dernières critiques ne

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remettent pas en cause l’efficacité de l’ACT mais bien souvent, au contraire, reconnaissent

ses bienfaits.

4.7. Les 6 processus de l’ACT

Les six processus centraux de l’ACT peuvent être regroupés en trois axes :

- Premier axe : la défusion et l’acceptation visent ensemble à se distancier des pensées et des

émotions, diminuer l’évitement expérientiel et la rigidité engendrés par le langage ;

- Deuxième axe : le soi comme contexte (ou soi observateur) et le contact avec le moment

présent visent à diminuer l’insensibilité à l’environnement et l’attachement excessif à la

conceptualisation de soi dont le langage est aussi à l’origine ;

- Le troisième axe vise la construction et/ou la clarification des domaines de vie valorisés et

l’accroissement des actions dirigées vers ces domaines.

Axe 2 : Etre présent

Axe 1 : S’ouvrirAxe 3 : Faire ce qui importe

Toucher l’instant présent Soi comme contexte

Défusion

Acceptation

Action engagée

Valeurs

Souplesse

psychologique

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4.7.1. La défusion cognitive

Afin de prémunir des pièges de la fusion cognitive, le thérapeute va entraîner son client à cultiver

une relation plus distanciée et plus flexible avec ses productions psychologiques. « La défusion

cognitive ne vise pas à changer le contenu des pensées. Elle vise à changer la relation que le client

entretient avec ses pensées, dans l’optique d’assouplir les interactions rigides et littérales avec ses

pensées. La défusion cognitive vise à affaiblir les fonctions verbales dérivées au profit des fonctions

directes, c’est-à-dire des perceptions sensorielles » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 201).

Harris (2012, p. 141) précise que « La défusion signifie se séparer ou se distancier de ses pensées,

en les laissant aller et venir plutôt que d’être happé par elles. En d’autres termes, la défusion

signifie :

- Regarder ses pensées plutôt que regarder depuis ses pensées ;

- Observer ses pensées au lieu d’être happé par elles ;

- Laisser ses pensées aller et venir plutôt que s’accrocher à elles) ».

Le « thérapeute ACT » va alors utiliser différents outils pour exercer son client à la défusion

cognitive : utilisation de métaphores, exercices de verbalisation, consignation puis analyse des

pensées non aidantes, techniques méditatives, …

Le lecteur trouvera en annexe 2 un panorama complet des différentes techniques utilisées pour

favoriser la défusion cognitive.

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4.7.2. L’acceptation

Ce concept a largement été décrit au chapitre précédent.

« Pas plus que la défusion, l’acceptation ne vise à changer le contenu de l’expérience intérieure,

mais cherche à recadrer celle-ci en vue de favoriser une relation caractérisée par l’approche et

l’accueil. C’est aussi la mise en mouvement d’un processus de réconciliation qui va favoriser

l’acceptation de soi, en son temps considérée comme le principal processus thérapeutique par Carl

Rogers (2005) et la psychothérapie humaniste (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 266).

Ici encore, le « thérapeute ACT » va utiliser différentes techniques (cf. annexe 2) pour amener son

client à pratiquer l’acceptation.

4.7.3. Le moment présent

« Contacter le moment présent signifie être dans l’ici et maintenant, pleinement conscient de notre

expérience, au lieu d’être perdus dans nos pensées. Cela implique de prêter attention à la fois à

notre monde psychologique (intérieur) et au monde matériel (extérieur), de façon souple (Harris,

2012, p. 213).

Comme on l’a vu, la fusion cognitive et l’évitement expérientiel ont pour effet de restreindre

l’expérience sensorielle et faire perdre le contact avec le moment présent et l’environnement

extérieur. L’ACT va donc encourager et entraîner le client à être en contact avec le moment présent

et à développer une flexibilité attentionnelle permettant de devenir conscient de la totalité de son

expérience du moment. « L’ACT va utiliser des méthodes issues des approches de pleine

conscience, que ce soit des exercices de type méditatif, ou un entraînement plus direct de

l’observation de différents aspects de son expérience de l’instant. Cela se fera notamment en

entraînant la capacité de différencier entre son expérience sensorielle et son expérience mentale »

(Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 56).

On trouvera en annexe 2 les principaux outils utilisés par le thérapeute ACT pour inviter son client

à considérer le moment présent.

4.7.4. Le soi comme contexte (ou soi observateur)

La fusion cognitive et le pouvoir d’attraction du dialogue intérieur ont pour effet de faire se réduire

le sens de soi au contenu du discours intérieur sur soi, ses rôles ou son histoire. Mais il existe aussi

une expérience de soi qui transcende toutes les expériences que l’on a vécues et tous les discours

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construits par l’activité mentale. « En prenant une plus large perspective, on peut faire l’expérience

d’un soi observateur. Ce sens de soi est aussi appelé soi-contexte, car il constitue le contexte dans

lequel toute expérience prend place. Le soi-contexte, c’est la perspective, ou encore le point de vue,

qui permet de faire l’expérience de tout ce dont on a fait l’expérience à travers le temps »

(Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 56).

« Le soi comme contexte n’est pas une pensée ou une sensation, mais un point de vue duquel nous

pouvons observer les pensées et les émotions, et un espace dans lequel ces mêmes pensées et ces

émotions peuvent se déplacer. Nous accédons à cet espace psychologique par l’observation de ce

que nous observons, ou en devenant conscients de notre propre conscience (…) La « pure

conscience » est un terme alternatif qui convient parfaitement, car c’est de cela dont il s’agit : la

conscience de notre propre conscience » (Harris, 2012, p. 237).

On trouvera en annexe 2 les principaux outils utilisés par le thérapeute ACT pour inviter son client

à pratiquer le soi observateur.

4.7.5. Les valeurs, principe central de l’ACT

Pour l’ACT, « les valeurs sont ce que nous voulons faire de notre vie : ce que nous voulons

représenter, et comment nous voulons nous comporter pour y arriver. Elles s’appuient sur des

principes qui peuvent nous guider et nous motiver tout au long de notre vie » (Harris, 2012, p. 257).

« Les valeurs représentent ce qui donne du sens à l’existence, ce qui l’organise. Ce sont toutes ces

actions plaisantes par le simple fait qu’elles permettent de se sentir en accord avec soi-même, avec

ce que l’on croit juste de faire (…) » (Monestès, Villatte, 2011, p. 55).

Le modèle entier de l’ACT est orienté vers un objectif : une vie pleinement consciente basée sur les

valeurs ou en d’autres termes une vie riche, remplie et qui ait du sens. «  C’est cet objectif qui

motive tout ce que nous faisons dans l’ACT : nous ne voudrions pas que quelqu’un accepte sa

douleur, pratique la défusion, ou s’expose à des situations de défi si ce n’est dans le but de rendre sa

vie riche et épanouissante » (Harris, 2012, p. 258).

« La focalisation sur le libre choix associé à ses valeurs personnelles et la liberté de choisir les

actions permettant de les mettre en œuvre rapproche l’ACT des thérapies existentielles et

humanistes. Le père de la psychothérapie humaniste, Carl Rogers, considérait qu’agir en accord

avec ses valeurs était la clé de la réalisation de soi » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 234).

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L’ACT propose de comprendre les valeurs comme des directions de vie que l’on peut traduire par

des actions précises. Dans ce cadre, fixer des objectifs permet d’avancer dans ces directions. En

dirigeant sa vie vers les valeurs, le client va progressivement se centrer sur ce qu’il peut faire ici et

maintenant pour les incarner. Alors que les objectifs peuvent paraître parfois lointains et

inaccessibles, les valeurs permettent d’agir dans l’instant présent, par diverses actions permettant de

se rapprocher de ce que l’on choisit d’être important pour soi (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011).

Le thérapeute ACT va donc, via des outils divers (questionnement, métaphores, exercices divers),

mener un travail avec son client visant à clarifier ses valeurs, souvent obscurcies par le monologue

intérieur ou des objectifs que l’on se donne et qui ne sont pas en accord avec elles. On trouvera en

annexe 2 les principaux outils utilisés.

4.7.6. L’action engagée

« L’action engagée signifie entreprendre des actions efficaces guidées et motivées par les valeurs

dans des domaines de plus en plus grands. Cela signifie également entreprendre des actions

modulables : s’adapter facilement aux impératifs de chaque situation, maintenir ou changer son

comportement si besoin ; faire ce qu’il faut pour vivre selon ses valeurs » (Harris, 2012, p. 283).

Les actions engagées en phase avec les valeurs ne sont pas des actions isolées, mais forment des

ensembles cohérents par lesquels la personne exprime et vit ses valeurs, et donne un sens à sa vie.

Cet aspect de l’action engagée signifie que ce n’est ni l’ampleur ni l’impact de l’action individuelle

qui comptent, mais son inclusion dans un pattern plus large cohérent avec ses valeurs. L’action

n’est pas une pensée, une intention, ni non plus une émotion. L’action engagée, c’est le choix fait

dans le moment présent d’engager une action en cohérence avec ses valeurs (Schoendorff, Grand,

Bolduc, 2011).

« Le thérapeute sera à l’affût du moindre mouvement cohérent avec un tel ensemble afin de pouvoir

le renforcer et inviter le client à observer les qualités particulières de cette action d’approche

comparée à une action d’éloignement » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 333).

4.8. ACT et coaching : similitudes

On trouve dans l’ACT des principes d’intervention communs avec ceux que le coach met en œuvre.

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4.8.1. Recadrage et défusion cognitive

Particulièrement utilisé en Programmation Neuro-Linguistique et en systémique, le recadrage a

depuis quitté ses courants d’origine pour devenir un des outils de base du coach. « Le recadrage

consiste dans ses grandes lignes à imaginer différentes facettes de soi-même, représentant des avis

ou des intérêts apparemment différents et à susciter un dialogue, des échanges productifs entre ces

différentes parties » (Cudicio, 2012, p. 420).

« Le recadrage est un des outils favoris du coach. Il s’agit de faire adopter un autre point de vue sur

un événement donné. L’art du recadrage sera donc d’apporter un nouvel éclairage, une nouvelle

résonance à une situation pour donner au coaché une autre perception de la réalité. C’est en quelque

sorte l’inviter à regarder le côté positif de la situation, une autre façon de voir » (Cannio, & Launer,

pp. 48-49).

Le recadrage est un type d’intervention fréquemment utilisé par ceux qui ont une référence

systémique. Il implique dans un premier temps une affiliation au système de pensée du coaché par

le coach (…) La perspective nouvelle ouverte par le recadrage permet au coaché de sortir de son

univers référence et d’envisager des solutions auxquelles il n’aurait pas pensé autrement » (Lamy,

& Moral, 2011, p. 78).

A l’image de la défusion cognitive, le recadrage va donc amener le coaché à prendre de la distance

avec ses propres idées, croyances et représentations.

4.8.2. Méta-communication et le « soi comme contexte »

« La métacommunication consiste à communiquer sur la situation elle-même (Moral, & Angel,

2009, p. 87).

La posture méta consiste à être attentif à la fois au contenu (le quoi), au processus (le comment), et

au sens (le pourquoi). « Elle consiste à percevoir à la fois la personne du coaché, mais aussi sa

propre personne en train de coacher. C’est cette faculté que tout être humain a de se décentrer de

lui-même en ayant conscience à la fois du contenu et du processus (Delivré, 2012, p. 267).

La métacommunication présente comme on le voit de fortes similitudes avec le soi comme contexte

(soi observateur) promu par le thérapeute ACT.

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DEUXIEME PARTIE : PROBLEMATIQUE

5. Problématique

Pour accompagner au quotidien des cadres en recherche d’emploi au sein d’une structure prestataire

de Pôle Emploi, nous avons pu faire le constat que la population cadre, en ce qu’elle a, jusqu’à ces

dernières années, été peu touchée par le chômage, est confrontée à de nombreuses difficultés

constituant autant d’obstacles à son retour à l’emploi :

- difficulté à accepter cette période d’inactivité, surtout après avoir occupé des postes à forte

responsabilité ; difficulté à se détacher de la pensée que le fait d’être au chômage constitue

une forme de honte et de disgrâce ;

- idées fausses, croyances et représentations concernant l’emploi, les attentes des recruteurs et

des entreprises, la façon dont doit être menée une recherche d’emploi notamment ;

- dans certains cas, incapacité à faire le deuil de l’ancienne situation professionnelle, apathie,

anxiété, stress, dépression ;

- en corollaire, une difficulté à se projeter dans l’action de manière organisée et efficace, à

solliciter de l’aide, à communiquer sur sa situation.

Nous sommes fréquemment sollicités par des cadres désireux de bénéficier d’un accompagnement

de coaching, à la fois portant sur les techniques de recherche d’emploi, mais aussi susceptible de les

aider à se mobiliser davantage qu’ils ne le font. L’appropriation des aspects théoriques et techniques

de la recherche (rédaction du CV, d’une lettre de motivation, réalisation de candidatures spontanées,

démarche de mobilisation et de développement de son réseau, participation à des événements …) ne

pose aucun souci. En revanche, le « passage à l’action » nécessite un important travail de

dépassement de certaines croyances non aidantes et de construction de nouvelles représentations qui

puisse leur permettre de se projeter dans l’action et ne plus ruminer sans cesse un passé souvent

idéalisé.

Or, nous avons précédemment vu que la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT), courant

majeur de la troisième vague des TCC, est un outil particulièrement efficace pour traiter un nombre

important et varié de troubles psychologiques mais également de problèmes de santé, et surtout par

un travail d’acceptation et de défusion cognitive, pour favoriser la mise en œuvre d’actions allant

dans le sens des valeurs que l’on se fixe. Son découpage en six axes (pratique de la défusion

cognitive, de l’acceptation, mise en place du soi observateur, attention portée au moment présent,

identification des valeurs et mise en action) en fait de plus un outil éminemment autonome,

structuré et pratique.

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Au-delà des quelques points communs de l’ACT avec certains outils du coaching (recadrage, méta-

communication), il nous semble pertinent d’étudier si l’ACT peut constituer un outil opérant

et efficace pour le coach dans son travail avec son client, cadre à la recherche d’un emploi,

notamment en termes de mise en action de ce dernier.

Bien entendu, le résultat d’un tel accompagnement ne se mesure pas à l’aune du retour à l’emploi,

mais bien dans la restauration d’un état corporel, psychologique et émotionnel (confiance en soi,

prise de distance avec les pensées non aidantes, acceptation des émotions douloureuses) propice à la

mise en action de la recherche d’emploi.

Nous allons pour ce faire étudier les différentes verbalisations du coach lors d’une séance menée

avec un cadre demandeur d’emploi.

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TROISIEME PARTIE : METHODOLOGIE

6. Méthodologie

6.1. Le contexte du recueil de données

La séance de coaching observée a été enregistrée via un enregistrement audio. Cette séance s’est

déroulée en novembre 2012 à Paris dans un bureau au calme de l’entreprise prestataire de Pôle

Emploi qui nous emploie.

La finalité de cette séance était de travailler sur les croyances du coaché, ces dernières l’empêchant

de mener une recherche d’emploi organisée et efficace. De manière classique, cette séance a eu une

durée dune heure et demie ; l’enregistrement porte sur une durée d’environ vingt minutes de cette

séance.

Le coach et le coaché étaient tous deux assis autour d’une table, de biais l’un par rapport à l’autre.

6.2. Les sujets impliqués dans la séance

Ils sont au nombre de deux : le coach et son coaché.

6.2.1. Le coach

Le coach est un homme âgé de 43 ans, titulaire d’un DESS en Ingénierie de la formation. Il est

consultant en ressources humaines, et a 17 années d’expérience professionnelle dans le conseil en

ressources humaines. Le fil rouge de son parcours est l’accompagnement des organisations et de

leurs managers dans le développement de leurs compétences, notamment via la formation. Cinq

premières années professionnelles passées ans un cabinet de conseil en ressources humaines lui ont

permis d’aider diverses institutions (conseils régionaux, OPCA, branches professionnelles,

associations nationales) à construire, mettre en œuvre, et évaluer des dispositifs de formation ou

d’insertion professionnelle. Par la suite, il a souhaité élargir son expertise dans le champ du

développement des compétences ; à cet effet il a évolué cinq années comme Délégué Interrégional

au sein d'un OPCA interprofessionnel (13 branches professionnelles). A ce titre, il a eu en

responsabilité une équipe de 11 personnes (dont 4 cadres) chargée de conseiller les grands comptes

de l’OPCA, les accompagner dans la gestion de leur budget formation ; et par ailleurs d’initier ou

accompagner des projets régionaux et nationaux dans le champ de l’ingénierie des compétences, en

lien avec les entreprises et les branches professionnelles concernées.

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Enfin, il conseille depuis ces quatre dernières années des organisations et des cadres salariés sur des

problématiques organisationnelles au sein d’un prestataire Pôle Emploi.

6.2.2. Le coaché

Le coaché est un homme, âgé de 35 ans, vivant en couple, sans enfant, titulaire d’un diplôme de

niveau I dans les métiers de la finance. Il a 13 années d’expérience professionnelle passées au sein

d’un des principaux groupes bancaires français, sur des activités de développement de prêts

syndiqués principalement, en direction de groupes du CAC 40.

Lassé de travailler dans un groupe où il estime ne pas être reconnu, lassé de la finance, il a négocié

il y a deux ans un départ volontaire dans le cadre d’un plan de réduction d’effectifs de son

employeur. Il a créé son auto-entreprise afin de vendre des prestations de conseil, sans toutefois se

donner réellement les moyens de développer son activité. En conséquence, son entreprise n’a pas de

client et ne lui génère donc aucun revenu. Il est donc au moment de la séance à la recherche d’un

emploi et à quelques mois de sa fin de droits au chômage. Sa demande de coaching concerne

justement sa recherche d’emploi, pour laquelle il estime qu’il a besoin d’aide afin de se dynamiser,

de mieux structurer sa recherche, retravailler ses outils.

En séance, le coaché s’avère toujours très souriant et communiquant, calme et détendu. Comme il

l’a indiqué à plusieurs reprises, il a plaisir à participer à nos séances. En revanche, il se dit anxieux

au sujet de sa fin de droit à venir et plus globalement de sa situation, et surtout anxieux du fait qu’il

n’arrive pas « à se mobiliser » sur sa recherche qu’il considère négliger.

6.3. Grille d’analyse de la séance de coaching observée

Nous avons défini un certain nombre de catégories devant nous permettre d’analyser l’extrait de

séance concerné par notre étude. Elles sont au nombre de huit.

6.3.1. Catégorie 1 (C1) - Aide à l’identification de mécanismes de fusion cognitive

Définition théorique : «  à la simple évocation d’un mot, les fonctions dérivées pourront prendre le

pas sur l’expérience directe, même en l’absence de tout danger présent. Quand les fonctions

dérivées issues de l’activité mentale dominent sur les fonctions directes issues de l’expérience

sensorielle directe, on parle de fusion cognitive » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, pp. 50-51).

« Le terme de fusion cognitive a été proposé par les fondateurs de l’ACT pour rendre compte du fait

que le langage a tendance à se fondre dans la perception de l’expérience directe de manière si

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complète que c’est comme si les pensées fusionnaient avec la perception et la coloraient de manière

indétectable » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 51).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à prendre conscience de processus de fusion

cognitive qu’il met en œuvre (attachement à des croyances irrationnelles, verbalisation de pensées

automatiques, utilisation de dissonances cognitives, …).

Intérêt pragmatique : pour le coach, aider son coaché à identifier ses processus de fusion cognitive

et ses effets souvent délétères doit permettre à ce dernier de mieux repérer et prendre de la distance

avec ce type de mécanisme pour justement mieux pratiquer la défusion cognitive.

6.3.2. Catégorie 2 (C2) - Aide à l’identification de processus d’évitement expérientiel

Définition théorique : l’évitement expérientiel est « la tendance rigide, influencée par le langage, à

essayer d’échapper ou éviter les expériences psychologiques en tentant de modifier leur fréquence,

leur forme ou leur intensité, alors que cette tendance interfère avec l’engagement dans des actions

valorisées » (Monestès, Villatte, 2011, pp. 14-15). « Les expériences intérieures vont être classifiées

comme plaisantes ou déplaisantes, les pensées comme acceptables ou inacceptables. Des jugements

vont s’y attacher : désirable, insupportable, à éviter, à rechercher, etc. Pris littéralement, ces

jugements vont induire des comportements dont le but va être la modification de son expérience

intérieure : l’élimination d’une expérience intérieure évaluée comme insupportable, ou au contraire,

la recherche d’une expérience intérieure agréable » (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, pp. 51-52).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à prendre conscience de processus d’évitement

expérientiel qu’il met en œuvre (exemples : apathie, investissement dans des activités annexes,

ajournement de ce qui est prévu au titre de la recherche d’emploi, évocation d’excuses).

Intérêt pragmatique : pour le coach, aider son coaché à identifier ses processus d’évitement

expérientiel et ses effets souvent délétères sur sa qualité de vie doit permettre à ce dernier de mieux

repérer ce type de processus et l’inviter à pratiquer l’acceptation et l’action engagée.

6.3.3. Catégorie 3 (C3) - Aide à la pratique de la défusion cognitive

Définition théorique : afin de prémunir des pièges de la fusion cognitive, le thérapeute va entraîner

son client à cultiver une relation plus distanciée et plus flexible avec ses productions

psychologiques. « La défusion cognitive ne vise pas à changer le contenu des pensées. Elle vise à

changer la relation que le client entretient avec ses pensées, dans l’optique d’assouplir les

interactions rigides et littérales avec ses pensées. La défusion cognitive vise à affaiblir les fonctions

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verbales dérivées au profit des fonctions directes, c’est-à-dire des perceptions sensorielles »

(Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 201).

« La défusion signifie se séparer ou se distancier de ses pensées, en les laissant aller et venir plutôt

que d’être happé par elles. En d’autres termes, la défusion signifie :

- Regarder ses pensées plutôt que regarder depuis ses pensées ;

- Observer ses pensées au lieu d’être happé par elles ;

- Laisser ses pensées aller et venir plutôt que s’accrocher à elles » (Harris, 2012, p. 141).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à prendre de la distance avec ses propres

pensées, à les observer, les laisser aller sans s’accrocher à elles ni les considérer comme une vérité

intangible.

Intérêt pragmatique : pour le coach, inviter son coaché à pratiquer la défusion cognitive, doit

permettre à ce dernier de bien dissocier son expérience sensorielle de son expérience mentale, et en

corollaire de ne plus laisser ses pensées non aidantes dicter ses comportements.

6.3.4. Catégorie 4 (C4) - Aide à la pratique de l’acceptation

Définition théorique : Steven Hayes, psychologue pionnier de la troisième vague des TCC, définit

l’acceptation de la manière suivante : « il s’agit d’accepter les événements intérieurs, ou

événements privés comme les émotions, les pensées, les souvenirs et les croyances. Accepter

signifie donc embrasser l’expérience, quelle qu’elle soit, ici et maintenant, ce qui implique de

s’exposer à ses pensées, émotions, sensations physiques … sans tenter d’y échapper ou d’y

résister » (Hayes, 2004). En prolongement, Christophe André, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne à

Paris, auteur de plusieurs ouvrages sur la méditation, affirme que « pour espérer changer

durablement, tout commence par l’acceptation (…). Si je souhaite ne plus éprouver sans cesse de la

tristesse, de la peur, de la colère, plutôt que de vouloir ne pas les ressentir lorsqu’elles se présentent,

je vais avoir intérêt à accepter d’abord de les éprouver pleinement et lucidement ; « d’y aller » au

lieu de les fuir ; de les examiner avec attention. Il me faut pour cela m’opposer à une tendance

naturelle : accueillir l’agréable mais repousser le désagréable. Car cette attitude purement

hédonique ne peut fonctionner que pour des situations ponctuelles et limitées ; par pour des

expériences de vie complexes » (Schoendorff, 2010, p. 10).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à accepter ses émotions, positives comme

négatives, sans essayer de les fuir ou d’y résister (invitation à prêter attention à ses émotions, les

reconnaître, les laisser surgir puis s’atténuer, …).

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Intérêt pragmatique : pour le coach, aider son coaché à accepter ses émotions de telle manière que

celles-ci ne le conduisent pas à des processus d’évitement expérientiel.

6.3.5. Catégorie 5 (C5) - Aide à la pratique de l’attention au moment présent

Définition théorique : « contacter le moment présent signifie être dans l’ici et maintenant,

pleinement conscient de notre expérience, au lieu d’être perdus dans nos pensées. Cela implique de

prêter attention à la fois à notre monde psychologique (intérieur) et au monde matériel (extérieur),

de façon souple (Harris, 2012, p. 213).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à ne pas se perdre dans ses pensées, à ne plus

seulement prêter attention à son monologue intérieur, mais à embrasser dans l’ici et maintenant,

l’ensemble de son expérience sensorielle et psychologique (exemple : ne plus ruminer le passé, ne

pas trop se projeter dans un avenir incertain, …)

Intérêt pragmatique : pour le coach, inviter son coaché à se détacher de son expérience intérieure,

psychologique, afin de pouvoir mieux se lancer dans l’action engagée.

6.3.6. Catégorie 6 (C6) - Aide à la pratique du soi observateur

Définition théorique : « en prenant une plus large perspective, on peut faire l’expérience d’un soi

observateur. Ce sens de soi est aussi appelé soi-contexte, car il constitue le contexte dans lequel

toute expérience prend place. Le soi-contexte, c’est la perspective, ou encore le point de vue, qui

permet de faire l’expérience de tout ce dont on a fait l’expérience à travers le temps » (Schoendorff,

Grand, Bolduc, 2011, p. 56). « Le soi comme contexte n’est pas une pensée ou une sensation, mais

un point de vue duquel nous pouvons observer les pensées et les émotions, et un espace dans lequel

ces mêmes pensées et ces émotions peuvent se déplacer. Nous accédons à cet espace psychologique

par l’observation de ce que nous observons, ou en devenant conscients de notre propre conscience

(…) La « pure conscience » est un terme alternatif qui convient parfaitement, car c’est de cela dont

il s’agit : la conscience de notre propre conscience » (Harris, 2012, p. 237).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à s’observer, prendre conscience de ses propres

modalités de fonctionnement (invitation à s’auto-observer, s’analyser en termes de fonctionnement,

…).

Intérêt pragmatique : pour le coach, inviter son coaché, au-delà de la prise de recul par rapport à

ses pensées non aidantes et sa tendance à l’évitement expérientiel, à adopter une démarche globale

de prise de recul, d’observation de son fonctionnement de manière à ce qu’il puisse de manière

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autonome analyser les aspects dysfonctionnels de ses « modus operandi » psychologiques et

comportementaux.

6.3.7. Catégorie 7 (C7) - Aide à l’identification des valeurs

Définition théorique : « les valeurs sont ce que nous voulons faire de notre vie : ce que nous

voulons représenter, et comment nous voulons nous comporter pour y arriver. Elles s’appuient sur

des principes qui peuvent nous guider et nous motiver tout au long de notre vie » (Harris, 2012, p.

257). « Les valeurs représentent ce qui donne du sens à l’existence, ce qui l’organise. Ce sont toutes

ces actions plaisantes par le simple fait qu’elles permettent de se sentir en accord avec soi-même,

avec ce que l’on croit juste de faire (…) » (Monestès, Villatte, 2011, p. 55).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché à identifier les objectifs, actions et principes de

vie qui vont lui permettre de mener une vie qu’il puisse considérer comme plaisante.

Intérêt pragmatique : pour le coach, inviter son coaché à identifier le chemin de vie qu’il veut

suivre, le sens qu’il souhaite donner à sa vie.

6.3.8. Catégorie 8 (C8) - Aide à la mise en œuvre de l’action engagée

Définition théorique : « l’action engagée signifie entreprendre des actions efficaces guidées et

motivées par les valeurs dans des domaines de plus en plus grands. Cela signifie également

entreprendre des actions modulables : s’adapter facilement aux impératifs de chaque situation,

maintenir ou changer son comportement si besoin ; faire ce qu’il faut pour vivre selon ses valeurs »

(Harris, 2012, p. 283). « Les actions engagées en phase avec les valeurs ne sont pas des actions

isolées, mais forment des ensembles cohérents par lesquels la personne exprime et vit ses valeurs, et

donne un sens à sa vie. Cet aspect de l’action engagée signifie que ce n’est pas l’ampleur ni

l’impact de l’action individuelle qui comptent, mais son inclusion dans un pattern plus large

cohérent avec ses valeurs (…). L’action n’est pas une pensée, une intention, ni non plus une

émotion. L’action engagée, c’est le choix fait dans le moment présent d’engager une action en

cohérence avec ses valeurs (Schoendorff, Grand, Bolduc, 2011, p. 333).

Définition opératoire : toute verbalisation du coach, de nature diverse (affirmation, question,

métaphore, exercice proposé) qui amène le coaché, à partir de l’identification de ses valeurs, à

mettre en place des actions en accord avec ces valeurs, le chemin de vie qu’il s’est fixé.

Intérêt pragmatique : pour le coach, et il s’agit là de l’objectif central de l’ACT, inviter son coaché

à passer à l’action, se donner les moyens de tendre vers le chemin de vie qu’il s’est donné.

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6.4. Analyse des données recueillies

6.4.1. Retranscription et codage de la séquence de coaching observée

Nous avons retranscrit l’ensemble des verbalisations du coach et du coaché relatives à l’extrait de

séance étudiée. Elles figurent en annexe.

La séance a ensuite été analysée au regard des catégories d’analyse précédemment définies. Cette

analyse a permis de ventiler les verbalisations du coach sur les différentes catégories. Précisons

d’emblée que certaines verbalisations du coach ne relèvent d’aucune de ces catégories.

Un code couleur a été attribué à chaque catégorie.

Numéro de catégorie

Intitulé de la catégorie Code couleur

C1 Aide à l’identification de mécanismes de fusion cognitive

C2 Aide à l’identification de processus d’évitement expérientiel

C3 Aide à la pratique de la défusion cognitive

C4 Aide à la pratique de l’acceptation

C5 Aide à la pratique de l’attention au moment présent

C6 Aide à la pratique du soi observateur

C7 Aide à l’identification des valeurs

C8 Aide à la mise en œuvre de l’action engagée

6.4.2. Analyse quantitative des données

Pour chaque catégorie d’analyse, nous procèderons à un dénombrement des occurrences puis à un

calcul de son pourcentage. Le tableau ainsi obtenu sera analysé en dégageant les grandes tendances,

les singularités ou encore les résultats éventuellement surprenants.

6.4.3. Analyse qualitative des données

Pour chaque catégorie d’analyse, nous procèderons également à une analyse qualitative, reliée à

l’analyse quantitative, qui sera l’occasion de commenter, à l’aide d’exemples issus de la

retranscription, la façon dont le coach a procédé à sa pratique de coaching.

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QUATRIEME PARTIE : PRESENTATION ET ANALYSE

DES DONNEES EXTRAITES

7. Présentation et analyse des données extraites

Le tableau 1 présente les occurrences des verbalisations pour les trois axes du triflex (cf. 4.7. ) de

l’ACT : l’axe « s’ouvrir » (catégories C1 à C4), l’axe « être présent » (catégories C5 et C6), l ‘axe

« faire ce qui est important » (catégories C7 et C8). Les pourcentages sont calculés sur la base des

interventions catégorisées du coach.

Axe du triflex Nombre de verbalisations

du coach

En % du total

Axe « s’ouvrir » 42 45 %

Axe « être présent » 15 16 %

Axe « faire ce qui est important

36 39 %

TOTAL 93 100 %Tableau 1 : nombre d’occurrences pour chaque axe d u Triflex de l’ACT

On remarque que l’axe « s’ouvrir » représente près d’une intervention sur deux du coach. L’axe

« faire ce qui est important » vient ensuite concentre près de 40 % des interventions du coach. En

revanche, l’axe « être présent » est moins représenté, ne totalisant que 16 % des occurrences.

Le tableau 2 présente pour chaque catégorie d’analyse le nombre d’occurrences.

Numéro de catégorie

Intitulé de la catégorie Nombre de verbalisations

du coach

En % du total

C1 Aide à l’identification de mécanismes de fusion cognitive

10 11 %

C2 Aide à l’identification de processus d’évitement expérientiel

7 8 %

C3 Aide à la pratique de la défusion cognitive 15 16 %

C4 Aide à la pratique de l’acceptation 10 11 %

C5 Aide à la pratique de l’attention au moment présent

6 6 %

C6 Aide à la pratique du soi observateur 9 10 %

C7 Aide à l’identification des valeurs 20 21 %

C8 Aide à la mise en œuvre de l’action engagée 16 17 %

TOTALMoyenne

9312

100 %

Tableau 2 : Nombre de verbalisations du coach et pourcentage par catégorie d’analyse

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Le graphe 1 présente la répartition en pourcentage de chacune des catégories de verbalisations par

rapport au nombre total de verbalisations catégorisées.

11

8

16

116

10

21

17

C1C2C3C4C5C6C7C8

Graphe 1 : répartition en pourcentage de chacune des catégories de verbalisations par rapport au nombre total

de verbalisations catégorisées

La catégorie C1- Aide à l’identification de mécanismes de fusion cognitive regroupe 10

verbalisations du coach, soit 11 % du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la cinquième

troisième catégorie la plus importante en termes de nombre de verbalisations. Concrètement, on

trouve ces verbalisations en début de séance, juste avant un exercice de défusion cognitive

(catégorie C3) proposé par le coach. Elles sont constituées, d’une part de questions visant à faire

préciser les pensées auxquelles s’accrochent le coaché : « quand votre esprit vous culpabilise

vraiment, vous rabâche ce qui ne va pas, la difficulté de votre vie, qu’entendrais-je si j’étais

connecté à votre esprit, comme je pourrais l’être à une radio ? » ou encore « quelles autres histoires

sombres ou effrayantes sur le futur votre esprit vous raconte-t-il ? », d’autre part des éléments d’un

petit exercice proposé par l’ACT (Harris, 2012), visant à prendre conscience des conséquences

délétères en termes de qualité de vie des phénomènes de fusion cognitive : « j’aimerais que vous

teniez fermement, avec les deux mains, ce carnet, et que vous le mettiez juste devant votre visage,

de telle manière que vous ne me voyiez pas. Tout ce que vous pouvez voir, ce sont les pensées sur

le carnet … ? », ou encore « observez donc ce qui se passe ici. Votre esprit vous raconte toutes ces

histoires désagréables, et plus vous y pensez, moins vous profitez de la vie ». Le travail du coach a

été de premièrement identifier les pensées avec lesquelles le coaché fusionne, puis deuxièmement

de souligner leurs conséquences négatives, pour troisièmement pouvoir introduire le processus de

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défusion comme réponse possible et introduire des techniques (exercices, métaphores) de défusion

cognitive.

La catégorie C2- Aide à l’identification de processus d’évitement expérientiel regroupe 7

verbalisations du coach, soit 8 % du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de l’avant-

dernière catégorie la plus importante en termes de nombre de verbalisations. Pour une part, on y

trouve des interventions du coach lors de l’exercice d’identification du processus de fusion qui

soulignent que la fusion entraîne l’évitement d’actions enrichissantes : « remarquez aussi que tant

que vous vous accrochez à ces pensées, tant que vous tenez ce carnet, il vous est difficile de faire

quoi que ce soit d’autre, d’aller faire du sport, prendre un café avec un ami par exemple ». D’autre

part, ce sont des interventions du coach lors du travail d’identification des actions engagées à mettre

en œuvre visant à souligner les tentatives d’évitement du coaché : « ah, j’ai l’impression qu’à

nouveau vous évitez de vouloir actionner ce qu’il peut être intéressant pour vous de mettre en

œuvre ».

La catégorie C3- Aide à la pratique de la défusion cognitive regroupe 15 verbalisations du coach,

soit 16 % du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la troisième catégorie la plus

importante en termes de nombre de verbalisations. Ces verbalisations interviennent juste après

l’exercice ayant permis (catégorie C1) l’identification des pensées avec lesquelles le coaché

fusionnent et la mise à plat des conséquences néfastes de ce mécanisme de fusion sur

l’enrichissement de sa vie. Pour l’essentiel, les verbalisations concernent :

**deux techniques de défusion classiques de l’ACT (Harris, 2012) : un exercice de défusion - en

fait, la fin de l’exercice entamé en début de séance et ayant dans sa première partie fait identifier au

coaché les pensées avec lesquelles il fusionne ainsi que leurs conséquences délétères - : « puis-je

reprendre le carnet ? Maintenant, puis-je le mettre sur vos genoux ? Alors, qu’est-ce que cela vous

fait maintenant de ne plus l’avoir devant les yeux ? Vous sentez-vous plus connecté à moi ? Avec

votre environnement immédiat ? » ; un deuxième exercice faisant appel à une technique de

verbalisation de ses pensées favorisant la prise de distance avec elles : « maintenant, répétez-la

encore, mais cette fois, ajoutez cette phrase : je remarque, qu’ici et maintenant, j’ai la pensée que

… ».

**les deux métaphores du « grand conteur » et de la « radio catastrophes », illustrant les

phénomènes de fusion et défusion.

Le travail du coach durant cette partie de la séance est finalement assez dirigiste : il s’agit de pointer

le phénomène de fusion cognitive et d’entraîner le coaché à la pratique de techniques de défusion.

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S’agissant d’un des processus centraux de l’ACT, le coach a volontairement souhaité consacré un

temps conséquent à ce travail de sensibilisation à la défusion.

La catégorie C4- Aide à la pratique de l’acceptation regroupe 10 verbalisations du coach, soit 11

% du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la quatrième catégorie la plus importante en

termes de nombre de verbalisations. Elle se situe à peu près dans la moyenne en termes de nombre

de verbalisations. Pour l’essentiel, les verbalisations concernent un exercice classique de l’ACT

(Harris, 2012), visant à entraîner le coaché à pratiquer l’acceptation des émotions douloureuses. Cet

exercice vise tout d’abord à faire ressentir et identifier corporellement les émotions qui l’animent à

l’évocation des pensées non aidantes : « maintenant (voix plus douce et lente du coach), observez

ces émotions, ces sensations, comme un scientifique observerait je ne sais pas, une amibe au travers

d’un microscope par exemple. Où se trouvent-t-elles en vous, dans votre corps ». Ensuite, l’exercice

invite à laisser de la place à ces émotions, sans tenter de lutter ou de les chasser : « vous

commencez à vous ouvrir à ces émotions, vous leur laissez de la place. Même si elles peuvent

s’avérer désagréables, continuez à les observer. N’essayez pas de vous en débarrasser ou de les

modifier ». Enfin, l’exercice propose de considérer que quelle que soit leur intensité, ces émotions

sont susceptibles d’être relativisées : « tout en continuant à les observer, et à respirer profondément,

notez que vous êtes plus grand que ces objets ».

Enfin, le coach évoque aussi la métaphore des sables mouvants (Harris, 2012) qui tend à illustrer

l’inutilité de la lutte contre les émotions : « Comme pris dans des sables mouvants, plus j’essaie de

me débattre et de lutter contre les émotions négatives qui m’animent, et plus je m’enfonce. Alors

qu’au contraire, je peux m’en sortir en restant le plus immobile possible, bref en les observant et en

les laissant aller et venir ».

La catégorie C5- Aide à la pratique de l’attention au moment présent regroupe 6 verbalisations

du coach, soit 6 % du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la dernière catégorie en

termes de nombre de verbalisations. Ces verbalisations n’occupent pas un temps particulier de la

séance, mais apparaissent en filigrane tout au long de celle-ci. Pour l’essentiel, il s’agit

d’interventions du coach invitant le coaché à prêter attention, dans l’ici et maintenant, à ses

sensations corporelles, à ses émotions ou à ses ressentis : « ces émotions, peur, appréhension,

colère, je vous propose de nous y arrêter quelques instants. Prenez 10 respirations profondes, et

portez attention à vos sensations corporelles. Mettez le reste de côté », ou encore « que ressentez-

vous à l’instant même ? Essayez de vraiment porter attention à votre ressenti ».

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La catégorie C6- Aide à la pratique du soi observateur regroupe 9 verbalisations du coach, soit

10 % du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la sixième catégorie la plus importante en

termes de nombre de verbalisations. D’une part, ces verbalisations présentent ce qu’est le soi

observateur : « et puis il y a une autre partie de l’esprit qui ne fait presque jamais parler d’elle. C’est

une part de votre esprit qui ne pense pas, qui ne peut pas penser, elle observe seulement », ou

encore « on pourrait la nommer la conscience, l’attention, la concentration. Dans l’ACT, nous

l’appelons le soi observateur. ». D’autre part, ces verbalisations évoquent la métaphore du ciel et du

temps (Harris, 2012), qui vise à illustrer la possibilité en toute circonstance d’accéder à son soi

observateur. Enfin, quelques verbalisations invitent le coaché à identifier ce que son soi observateur

« dit » de son fonctionnement : « qu’est-ce que ce spectateur voit sur l’écran par rapport à votre

dilemme : rester dans la finance et ne plus y trouver son compte, ou aller vers un nouveau devenir

professionnel inconnu à ce stade et perdre une part du bénéficie tiré de vos compétences acquises en

finance ? ». On peut noter également que le coach évoque le soi observateur du coaché comme s’il

s’agissait d’un troisième personne dans la salle, afin de mieux permettre à ce dernier de dissocier

son soi penseur de son soi observateur : « Ce spectateur voit-il un (prénom du coaché) qui a fait son

choix, mais qui n’ose se le dire clairement ? » ou encore : « C’est ce que pourrait voir votre soi

spectateur ? Un (prénom du coaché) qui a le deuil de son ancien métier à faire) ? ».

La catégorie C7- Aide à l’identification des valeurs regroupe 20 verbalisations du coach, soit 21

% du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la première catégorie en termes de nombre de

verbalisations. Ces occurrences se trouvent majoritairement dans la deuxième partie de l’extrait de

séance analysée, consacré à l’axe « faire ce qui est important » du triflex. D’une part, les

verbalisations du coach sont des questions issues du questionnaire sur les valeurs (Harris, 2012).

Elles ont pour objectif d’aider le coaché à identifier les valeurs qu’il veut incarner : « Ce que je

veux dire. Si vous pouviez développer des qualités, des capacités personnelles qui vous aideraient

en quelque sorte à devenir une « meilleure personne », à grandir humainement, ou à mettre en place

un changement par rapport à votre fonctionnement ou par rapport à la vie des autres, quelles

seraient-elles ? ». Ensuite, le coach présente la métaphore de la boussole de vie (Harris, 2012) pour

illustrer la manière dont les valeurs peuvent guider notre chemin de vie : « Les valeurs son comme

une boussole. Une boussole vous donne une direction et vous permet de rester sur le bon chemin

lorsque vous voyagez. Et les valeurs font de même pour le voyage de vie. Nous les utilisons pour

choisir la direction dans laquelle nous voulons aller, et nous maintenir sur la bonne voie ». Le coach

approfondit ensuite cette question des valeurs dans la dimension de vie professionnelle, qui est au

cœur de la demande de coaching : « OK. Qu’est-ce qui pourrait aujourd’hui vous faire rester dans la

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finance ? Quelles valeurs y retrouveriez-vous qui puissent vous convenir ? Un poste très intéressant,

avec un salaire tout autant intéressant à la clé ? Un poste à forte responsabilité ? En lien avec des

clients VIP ? Une forte dimension de management ? ». Enfin, le coach invite le coaché, ainsi que le

préconise l’ACT, à traduire ses valeurs en termes d’objectifs précis à atteindre : « Parfait. A présent,

quels objectifs pouvez-vous vous fixer en ce sens ? ».

La catégorie C8- Aide à la mise en œuvre de l’action engagée regroupe 16 verbalisations du

coach, soit 17 % du total des verbalisations catégorisées. Il s’agit de la deuxième catégorie la plus

importante en termes de nombre de verbalisations. Ces occurrences constituent la dernière partie de

l’extrait de séance analysé. Elles font immédiatement suite au travail d’identification des valeurs et

de la définition des objectifs dans la dimension de vie professionnelle. Pour l’essentiel, ces

verbalisations visent à aider le coaché, via un questionnement, à décliner les actions concrètes, à

court terme, qu’il pourrait mettre en œuvre pour atteindre les objectifs professionnels qu’il s’est

donnés : « Et donc, quelles actions pourriez-vous mettre en œuvre de façon à vous engager vers cet

objectif ? », ou encore : « Très bien. En parallèle de ce travail ensemble, quelles autres actions

pourriez-vous mettre en œuvre ? ». On peut également remarquer que devant les difficultés du

coaché à identifier de telles actions, qui relèvent des techniques de recherche d’emploi, le coach

propose certaines pistes d’actions : « la Cité des Métiers pourrait être un bon premier petit pas. », ou

encore : « vous pourriez éventuellement voir dans votre réseau si vous avez des contacts qui tout

comme vous le souhaitez, ont déjà franchi le pas d’une reconversion en dehors de la finance. Les

rencontrer pourrait s’avérer utile pour voir ce qu’ils font, les difficultés qu’ils ont rencontrées, les

conseils qu’ils peuvent vous donner ».

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CINQUIEME PARTIE :

DISCUSSION ET PERSPECTIVE PROFESSIONNELLE

8. Discussion et perspective professionnelle

Nous allons aborder dans cette partir les enseignements tirés de notre pratique de coaching.

8.1. Synthèse des données recueillies

L’extrait de séance analysé a été l’occasion d’aborder et utiliser chacun des six processus (défusion,

acceptation, attention au moment présent, pratique du soi observateur, identification des valeurs et

mise en œuvre de l’action engagée) de l’ACT. Même si mes interventions ont plus particulièrement

concerné l’axe « s’ouvrir » (défusion et acceptation, 45 % des verbalisations) et « faire ce qui est

important » (valeurs et action engagée, 39 % des verbalisations), l’ensemble des six axes ont bel et

bien été mobilisés.

Les verbalisations du coach ont été l’occasion de proposer au coaché des exercices et métaphores

utilisés par le praticien ACT dans son travail avec son client.

En toute conscience, au moment de la préparation de la séance, j’ai choisi de privilégier plus

particulièrement un découpage en deux temps :

- dans un premier temps de la séance, un travail de distanciation par rapport aux pensées et

d’acceptation des émotions douloureuses ;

- dans un second temps, un travail d’identification des valeurs que le coaché veut incarner

dans sa dimension de vie professionnelle, de définition d’objectifs professionnels

corollaires, et d’identification des premières actions, des premiers petits pas, à mettre en

ouvre pour atteindre ces objectifs.

L’inconvénient de ce souci d’exhaustivité, justifié de mon point de vue si l’on veut pouvoir

prétendre répondre à la problématique choisie d’évaluer si l’ACT peut s’avérer un outil opérant et

efficace en coaching, est que bien entendu il n’a pas été possible d’approfondir chacun des axes

autant qu’ils l’auraient sans doute mérité.

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Néanmoins, j’en tire l’enseignement que ce type de séance mobilisant chacun des six processus peut

constituer une forme de propédeutique intéressante en début de coaching, une sorte de tour

d’horizon permettant à la fois :

- au coach de faire un diagnostic des problématiques à traiter (fusion, …),

- et également au coaché d’avoir un aperçu relativement complet de ce qu’est une démarche

« ACT ». Je compte donc réutiliser ce genre de séance, plutôt en début de coaching, afin

d’une part de sensibiliser le coaché à l’ACT, d’autre part de faire une première

« évaluation » du coaché.

Ma deuxième remarque concerne les interventions du coach : l’ACT est un outil où le coach est

appelé à beaucoup intervenir et verbaliser, à travers la proposition d’exercices, de métaphores

notamment. Etant un coach débutant et un néophyte dans l’utilisation de l’ACT, je considère avoir

été un peu trop long sur certaines interventions, ou avoir trop multiplié les interventions (par

exemple, proposition à la fois d’exercices et de métaphores sur certains axes alors que l’un ou

l’autres des deux aurait peut-être pu suffire), et surtout n’avoir pas du coup suffisamment relancé

suite à certaines verbalisations du coaché.

J’en tire la conclusion que d’une part, il me faudra davantage assimiler les interventions-type du

praticien ACT (exercices, métaphores) afin de pouvoir en tirer la quintessence et être moins

« bavard », et ne pas faire de l’ACT « en force » ou à tout prix ; autrement dit, il s’agira surtout

d’intégrer les processus ACT dans la dynamique d’entretien, et non pas l’inverse, comme cela a été

trop le cas me semble t-il lors de la séance analysée.

Une troisième remarque concerne la durée : le temps de l’ACT n’est pas le temps du coaching, plus

bref. En effet, dans le cadre de l’ACT peuvent être traitées des problématiques psychologiques

(addictions, troubles de la personnalité) ou des problématiques de santé (épilepsie, troubles

alimentaires) assez lourdes, amenant fréquemment l’accompagnement a duré de nombreux mois.

Bien entendu, un coaching peut lui aussi se dérouler sur plusieurs mois, mais a sans doute vocation

à se dérouler sur un temps moins long qu’une thérapie ACT. Il y aura donc sans doute concernant

ma pratique future à réfléchir comment, sans dénaturer le processus ACT, il est possible de

l’inscrire dans un cadre temporel qui soit celui du coaching, sans doute en ayant des interventions

plus ciblées et moins nombreuses, laissant plus de place du coup à une interactivité accrue avec le

coaché.

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Enfin, n’oublions pas que l’ACT est un processus thérapeutique, ce que n’a pas vocation à être le

coaching. De ce fait, on trouve dans certains des exercices et métaphores de l’ACT, des éléments de

contenu qui sont sans doute éclairants pour un patient, mais qu’il convient d’adapter dans le cadre

d’un accompagnement de coaching.

8.2. Confrontation des résultats à la revue de littérature et à la problématique

Les données et l’analyse réalisées nous apportent plusieurs enseignements.

Elles confirment premièrement que l’ACT est un outil particulièrement structuré et cohérent dans

son articulation des six processus de l’hexaflex. En effet, j’ai pu sans trop de difficultés aborder de

manière relativement exhaustive chacun des six processus (défusion, acceptation, attention au

moment présent, pratique du soi observateur, identification des valeurs et mise en œuvre de l’action

engagée) au cours de la vingtaine de minutes qu’a durée l’extrait de séance analysée.

Pour rappel, notre problématique était d’étudier si l’ACT peut constituer un outil opérant et

efficace pour le coach dans son travail avec son client, cadre à la recherche d’un emploi,

notamment en termes de mise en action de ce dernier.

Les résultats confirment également que l’ACT est particulièrement opérant pour aider le coaché à

mener un travail de défusion cognitive, c’est-à-dire de mis à distance des pensées non aidantes, et

d’acceptation des émotions douloureuses, à la fois :

- pour le coach : les outils proposés (exercices, questionnement, métaphores) sont

particulièrement précis et simples d’utilisation : je n’ai eu aucune difficulté à m’approprier

les quelques outils que j’ai utilisés parmi la multitude proposée, et leur utilisation en séance

ne m’a pas posé de difficulté particulière, et m’a aidé à structurer ce travail de défusion et

d’acceptation ;

- pour le coaché : pour en avoir discuté avec le coaché, il s’avère que les outils lui ont paru

particulièrement clairs et aidants afin d’identifier les processus de fusion cognitive, en

corollaire de pratiquer la défusion, mais également l’acceptation.

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L’ACT s’avère également opérant pour aider le coaché à identifier les valeurs qui vont guider son

chemin de vie.

Ici encore, les nombreux exercices et métaphores à disposition sont autant outils précis et pratiques :

le questionnaire d’identification des valeurs que j’ai utilisé m’a paru particulièrement logique dans

son déroulé et aidant ; pour le coaché, après l’avoir interrogé à ce sujet, l’outil n’a pas posé de

problème d’appropriation et s’est révélé particulièrement opérant.

Les résultats concernant la mise en action sont un peu plus difficiles à évaluer. En effet, par

définition, les actions permettant au coaché d’enrichir sa vie et lui permettant d’incarner ses valeurs,

vont se dérouler essentiellement hors séance.

Il serait donc prématuré, au motif que de telles actions ont été identifiées en séance, que le coaché

va dans les faits les réaliser. Dans le cadre de la séance analysée, un certain nombre d’actions utiles

pour le coaché dans le cadre de sa recherche d’emploi ont effectivement été validées, mais pour

autant demeure une incertitude sur leur future mise en œuvre.

Enfin, les résultats montrent que l’ACT fonctionne particulièrement bien avec la population cadre

en recherche d’emploi. Comme nous l’avons déjà souligné dans la partir consacrée à la

problématique, cette population est confrontée à de nombreuses difficultés constituant autant

d’obstacles à son retour à l’emploi : difficulté à accepter cette période d’inactivité, surtout après

avoir occupé des postes à forte responsabilité ; difficulté à se détacher de la pensée que le fait d’être

au chômage constitue une forme de honte et de disgrâce ; idées fausses, croyances et représentations

concernant l’emploi, les attentes des recruteurs et des entreprises, la façon dont doit être menée une

recherche d’emploi notamment ; dans certains cas, incapacité à faire le deuil de l’ancienne situation

professionnelle, apathie, anxiété, stress, dépression ; en corollaire, une difficulté à se projeter dans

l’action de manière organisée et efficace, à solliciter de l’aide, à communiquer sur sa situation.

L’ACT, qui insiste particulièrement sur le travail de défusion, s’avère dans ces conditions

particulièrement intéressant à utiliser.

Bien entendu, certains exercices de l’ACT méritent d’être affinés pour être complètement adaptés à

cette population. Mais j’ai trouvé au final les outils de l’ACT particulièrement intéressants pour

amener le coaché cadre demandeur d’emploi à dépasser certaines croyances limitantes et à se

décider de se projeter dans l’action.

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8.3. Confrontation des résultats à ma pratique de coaching

Dans le cadre de la formation, j’ai conduit cinq accompagnements de coaching, qui se sont déroulés

selon les règles édictées dans le cadre du DESU.

L’ensemble de ces coachings furent de type bipartite. Un contrat a été systématiquement signé entre

les deux parties prévoyant la réalisation de dix séances. Chaque séance de coaching a duré en

moyenne 1h30 et a en amont donné lieu à un travail de préparation et d’analyse en aval. Un délai

d’environ deux semaines séparait un entretien du suivant. Ces entretiens se sont toujours déroulés

dans les locaux de l’entreprise qui m’emploie, avec l’accord de ma Directrice Générale.

Pour chaque coaching, les objectifs de coaching ainsi que les indicateurs de mesure du niveau

d’atteinte des résultats ont été définis. J’ai par ailleurs suivi une supervision individuelle externe au

DESU sur la période de réalisation de ces coachings.

Chacune des personnes accompagnées présentait une problématique particulière :

- coaching n°1 : développer son assertivité et sa prise de parole en public, pour un directeur

du marketing

- coaching n°2 : coaching de recherche d’emploi, pour une directrice de la communication

- coaching n°3 : développer sa capacité à de « vendre » dans le cadre d’une mobilité

professionnelle souhaitée, pour un ingénieur dans le secteur de l’industrie

- coaching n°4 : coaching de recherche d’emploi, pour un cadre du secteur de la finance

souhaitant ses reconvertir professionnellement

- coaching n°5 : développer sa capacité à mieux gérer sa relation avec son supérieur

hiérarchique, pour une directrice des ressources humaines.

De manière tout à fait délibérée, seuls les coachings 1, 2 et 4 se sont appuyés sur la thérapie

d’acceptation et d’engagement. En effet, j’ai souhaité pouvoir avoir des éléments de comparaison,

pour pouvoir affiner ma pratique professionnelle future, entre un coaching basé sur l’ACT, et un

coaching peut-être plus classique dans son approche. L’ACT présentant dans son approche certaines

similitudes avec des principes ou des techniques du coaching, ma pratique d’un « coaching orienté

ACT » a été pour moi l’occasion développer des premières compétences diverses, certaines plus

particulièrement liées à l’ACT, d’autres non.

La posture de coach

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C’est une première compétence que j’ai pu développer au fil des coachings. Cette compétence, sans

doute une des plus essentielles pour le coach, fut pour moi un enjeu constant. En effet, il m’a fallu

abandonner 17 années de posture haute de consultant en ressources humaines, et donc d’expert

sensé être omniscient, prodiguant ses bons conseils, ayant des réponses toutes faites, pour aller vers

cette fameuse « position basse » du coach. Travailler la posture m’a également amené à développer

certaines qualités d’écoute qui sont autres que celles du consultant, notamment amenant à prêter

attention tout autant sinon plus au processus qu’au contenu d’entretien.

Bien entendu, il me reste à continuer à développer cette compétence, et notamment peut-être à :

- savoir être plus directif sur le processus quand la situation l’exige

- également à ne pas être dans l’attitude de vouloir pour le client.

Le questionnement

Les coachings réalisés ont été l’occasion également d’améliorer mon «art du questionnement » :

notamment d’avoir un questionnement qui couvre tant le champ référentiel (contenu), que le champ

modal (processus). Notamment, le coaching comme l’ACT mettent l’accent sur la nécessité pour le

coach de méta-communiquer, de communiquer sur ce qui se passe entre le coach et le coaché durant

les séances.

Là encore, il me faudra bien entendu continuer à améliorer cette compétence, notamment et peut-

être paradoxalement pour développer des questionnements plus ciblés et donc moins nombreux (cf.

8.1.)

L’invitation à la pratique de la défusion cognitive et de l’acceptation

Il s’agit, rappelons-le, de deux des processus fondamentaux de l’ACT. Les nombreux exercices,

techniques de questionnement et métaphores proposés par l’ACT (Harris, 2012), au service du

praticien ACT pour qu’il puisse inviter son client à pratiquer la défusion cognitive et l’acceptation

des émotions difficiles, se sont révélés pour moi des outils très précieux pour développer cette

compétence.

Ces outils sont très nombreux (cf. annexe 3), et je n’ai utilisé à ce stade que certains d’entre eux. Il

me reste donc à affiner cette pratique.

Au final, la rédaction de ce mémoire, la pratique des accompagnements de coaching, et plus

globalement l’ensemble de cette année universitaire, ont été de mon point de vue

exceptionnellement enrichissants et riches d’enseignements quant à ma future pratique.

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Les enseignements théoriques et pratiques ont été l’occasion d’appréhender à la fois les

fondamentaux du coaching, mais également les spécificités liées à certains courants (systémique,

TCC, …).

Le mémoire a été pour moi l’occasion de travailler un courant particulier qui va enrichir ma

pratique et alimenter ma réflexion sur le métier pour les années à venir.

Les coachings « pratiques » ont été une expérience particulièrement intense, permettant de

confronter la théorie à la pratique, de développer de premières compétences, d’appréhender les

progrès faits et de mesurer l’important chemin qu’il me reste à parcourir avant que de devenir un

professionnel confirmé du coaching.

Enfin et surtout, cette année a été l’occasion de se forger une identité de coach, ce qui est sans doute

l’élément central dans toute démarche de coaching.

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CONCLUSION

Le travail mené dans le cadre de ce mémoire permet de conclure que la thérapie d’acceptation et

d’engagement, courant de la troisième vague des TCC, en ce qu’il est d’une part un outil autonome,

structuré et pragmatique, d’autre part une théorie de l’action, constitue un outil opérant et efficace

dans l’accompagnement de la population cadre à la recherche d’un emploi.

Notamment, il permet un travail intéressant de défusion cognitive permettant de se distancier des

pensées qui gênent et freinent la recherche d’emploi (sentiment d’incompétence, de dévalorisation

sociale et professionnelle, …), le dépassement des émotions difficiles, l’identification des valeurs

professionnelles et enfin l’identification des actions de recherche d’emploi à mener.

Bien entendu, le travail réalisé comporte certaines limites :

- vouloir aborder et « évaluer » les six processus de l’ACT (défusion, acceptation, attention au

moment présent, pratique du soi observateur, identification des valeurs et mise en œuvre de

l’action engagée) lors d’une même séance m’a naturellement conduit à ne pas pouvoir

approfondir chacun des axes

- ce souci d’exhaustivité m’a également conduit à ne pas suffisamment rebondir sur certaines

verbalisations du coaché qui auraient mérité d’être creusées ;

- enfin, le travail ne permet pas de conclure à une efficacité concernant l’action engagée : en

effet, si la séance a effectivement permis d’identifier des actions à mener par le coaché pour

sa recherche d’emploi, le fait que ces actions sont amenées à être mises en œuvre après la

séance ne permet, si l’on s’en tient à la séance analysée, d’en conclure à l’efficacité.

Les outils de l’ACT (exercices, questionnements, métaphores) sont divers et nombreux. J’ai donc

« pioché » dans ce réservoir d’outils et en ai utilisé certains plutôt que d’autres, ceux avec lesquels

j’étais le plus à l’aise. En termes d’approfondissement, il serait donc intéressant parmi cette

multitude d’outils pour chacune des six axes de l’ACT, d’étudier via la pratique, lesquels semblent

les plus pertinents à utiliser.

Néanmoins, malgré les limites inhérentes à ce travail, ce dernier a été l’occasion pour moi de

m’approprier un outil, tant théorique qu’éminemment pratique, que j’entends bien continuer à

utiliser pour ma pratique professionnelle. Il me reste bien entendu à approfondir la maîtrise que je

peux avoir de cet outil, tout comme me restent à approfondir les fondamentaux du coaching que

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sont la posture de coach, l’art du questionnement, de manière à consolider mon identité

professionnelle de coach que cette extraordinaire année universitaire a permis de construire.

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ANNEXES

ANNEXE 1 : LES METAMORPHOSES DU TRAVAIL

ANNEXE 2 : LES OUTILS DE L’ACT

ANNEXE 3 : RETRANSCRIPTION DE L’EXTRAIT DE SEANCE ANALYSE

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ANNEXE 1 : LES METAMORPHOSES DU TRAVAIL

A/1. Les métamorphoses du travail depuis l’Antiquité jusqu’au XIXe siècle : de la sphère

privée à la sphère publique

« Ce que nous appelons « travail » est une invention de la modernité. La forme sous laquelle nous le

connaissons, pratiquons et plaçons au centre de la vie individuelle et sociale, a été inventée, puis

généralisée avec l’industrialisme. Le « travail », au sens contemporain, ne se confond ni avec les

besognes, répétées jour après jour, qui sont indispensables à l’entretien et à la reproduction de la vie

de chacun ; ni avec le labeur (…) qu’un individu accomplit pour réaliser une tâche dont lui-même

ou les siens sont les destinataires et les bénéficiaires (…) » (Gorz, 1988, p. 29).

Le travail dans l’antiquité grecque puis romaine est une occupation servile qui exclue de la

citoyenneté, c’est-à-dire de la participation aux activités publiques de la cité. Il est réservé aux

femmes et aux esclaves parce que travailler, c’est asservir à la nécessité (Arendt, 2001). L’homme

libre, au contraire, refuse de se soumettre à la nécessité. De ce fait, « la plus grande partie de

l’économie est, dans la cité antique, une activité privée qui se déroule non point au grand jour, sur la

place publique, mais au sein du domaine familial (Gorz, 1988, p. 32).

L’idée moderne du travail n’apparaît que bien plus tard avec l’essor au XIXe siècle du capitalisme

manufacturier13. Ce dernier, plus qu’un gagne-pain, est alors un mode de vie, agréable par ailleurs :

le manufacturier ne produit et donc ne gagne qu’à hauteur de ce dont il a besoin pour vivre  : il

travaille pour vivre. Il n’y a pas de concurrence sur les prix car ils sont les mêmes pour tous, les

modes de production et les volumes d’heures travailles sont identiques, les journaliers payés à un

salaire unique.

A/1.1. La rationalisation économique du travail et son corollaire l’organisation scientifique du

travail : du taylorisme au fordisme

C’est à partir de vers 1830 en Grande-Bretagne que le capitalisme manufacturier, puis industriel,

change de visage. Sous l’impulsion de quelques jeunes esprits, la rationalisation économique prend

13« Jusque-là, c’est-à-dire jusqu’au XVIIIe siècle le terme de travail désignait la peine des serfs et des journaliers qui produisaient soit des biens de consommation, soit des services nécessaires à la vie et exigeant d’être renouvelés (…) les artisans, en revanche, qui fabriquaient des objets durables (…) ne travaillaient pas, ils œuvraient et dans leurs œuvres ils pouvaient utiliser le travail d’hommes de peine appelés à accomplir les tâches grossières, peu qualifiées. Seuls les journaliers et les manœuvres étaient payés pour leur travail ; les artisans se faisaient payer pour leur œuvre selon un barème fixé pas ces syndicats professionnels qu’étaient les corporations et les guildes » (Gorz, 1988, p. 35).

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le pas sur le modèle ancien : sélection des fournisseurs, contrôle accru de la qualité de leur

marchandise, suppression des intermédiaires de vente, adaptation des produits aux goûts et besoins

de la clientèle, réduction des prix et augmentation du chiffre d’affaires sont systématisés (Gorz,

1988, p. 37)14.

A/1.2. L’organisation scientifique du travail ou taylorisme

Cette rationalisation économique a comme conséquence la mise en place d’une organisation

scientifique du travail : en effet, il faut que le coût du travail puisse être calculé et prévisible avec

précision, afin de pouvoir en corollaire calculé le volume et le prix des marchandises produites et

donc le profit prévisible. Ce qui suppose de pouvoir calculer le rendement du travail, le traiter

comme une valeur quantifiable, détachée de l’individualité et des motivations du travailleur.

L’organisation scientifique du travail correspond donc à l’effort de détacher le travail en tant que

catégorie économique quantifiable de la personne vivante du travailleur (Gorz, 1988).

Elle est conceptualisée à partir de ses observations par l’ingénieur Frederick Winslow Taylor (1856-

1915), qui lui laissera son nom : « il faut établir des critères extérieurs et objectifs qui ne dépendent

plus de l’exécutant. Il faut séparer le savoir et le faire, la conception des méthodes et leur exécution.

Ce principe nouveau s’appuie d’abord sur d’anciens moyens : sélection des ouvriers, spécialisation,

décomposition des tâches. Ensuite, toutes les ressources de l’analyse rationnelle sont mises à

contribution, observation, description, mesure, etc., en vue de simplifier et accélérer les opérations

(…). Le résultat de l’analyse scientifique, la meilleure méthode, le one best way, devient la norme à

respecter dans les temps alloués » (Stroobants, 1994, p. 40).

A/1.3. Les apports d’Henri Fayol (1841-1925) : analyse et différenciation des fonctions

« Henri Fayol, ingénieur des mines, directeur de sociétés minières et enseignant du Conservatoire

national des arts et métiers, développe quelques années après Taylor une théorie de l’organisation

industrielle qui prend en compte toute la complexité de ce qu’il appelle la fonction administrative »

(Sainsaulieu, 1988, p. 36).

Partant du constat que l’entreprise forme un corps organisé, Henri Fayol formalise les différentes

fonctions utiles à son fonctionnement : opérations techniques (production, transformation,

fabrication), opérations commerciales (achat, vente, échanges), opérations financières (recherche et

gestion de capitaux), opérations de sécurité (protection des biens et des personnes), opérations

14 « L’ancien mode de vie, confortable et sans façons, lâchait pied devant la dure sobriété de quelques-uns. Ceux-ci s’élevaient aux premières places parce qu’ils ne voulaient pas consommer mais gagner (Gorz, 1988, p. 37). « Tous les liens complexes et variés qui unissaient l’homme féodal à ses supérieurs naturels, elle (la bourgeoisie, note de l’auteur) les a brisés sans pitié pour ne laisser d’autre lien entre l’homme et l’homme que le froid intérêt … » (Marx, Engels, 1999, p. 36).

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administratives (prévoyance, organisation, commandement, coordination et contrôle) (Sainsaulieu,

1988).

A/1.4. Le fordisme, ou l’émergence d’un nouveau paradigme : de la production en série à la

consommation de masse

Au tout début du XXe siècle, à partir de 1908, Henry Ford (1863-1947), entrepreneur du secteur

automobile définit le système de production qui portera son nom. Le système fordien s’inscrit dans

la continuité du taylorisme tout en marquant une rupture du même type que le passage de la

manufacture à la fabrique, à savoir une nouvelle matérialisation d’un aspect de l’organisation du

travail.

Il repose tout d’abord sur une intensification de la parcellisation des tâches, la division horizontale

du travail. Le processus de production, déjà découpé en opérations spécialisées et mécanisées, va

être encore plus tronçonné, jusqu’au niveau de la tâche (Friedmann, 2012). Ensuite, la

standardisation s’applique aux pièces, aux produits ainsi qu’aux machines. La chasse aux temps

morts s’étend jusqu’entre les postes de travail, aux temps de transfert des pièces15.

La productivité ne dépend plus du respect qu’accordent les travailleurs aux ordres de leur

hiérarchie. « En ce sens le fordisme n’agit pas seulement sur la répartition horizontale du travail

mais aussi sur la division verticale » (Stroobants, 1994, p. 44).

Toutefois, le fordisme n’est pas seulement une méthode d’organisation du travail, il représente au-

delà un épisode qui, tirant parti d’une conjoncture particulière, va donner une nouvelle impulsion à

l’économie et voir triompher la société de consommation. « L’idée de faire de la voiture un produit

de grande consommation, à portée des budgets moyens, paraissait incroyable à ce moment16.

A/2. Les « nouvelles formes » d’organisation du travail

Les « nouvelles » formes d’organisation du travail ont aujourd’hui beaucoup perdu de leur

nouveauté. On regroupe sous cette appellation toute une série d’aménagements de l’organisation du

travail qui ont fait florès dans le milieu des années 1970 et qui consistent pour la plupart à

recomposer des tâches ou des fonctions préalablement séparées, notamment à passer d’un

15 Dès lors, ce n’est plus l’ouvrier qui ira de machine en machine, mais la machine qui ira à l’ouvrier  : ainsi que cela est visible dans le film de Charlie Chaplin intitulé « les temps modernes », ces derniers travaillent désormais sur des convoyeurs, système que Ford découvrira à l’occasion de visites d’usines de découpage de la viande.16 De plus, autre innovation surprenante, Ford pousse encore l’idée de Taylor d’élever le plus possible les salaires. La brusque augmentation au salaire jusqu’aux « five dollars a day » était sans doute un moyen d’attirer puis de retenir les ouvriers : mais le fameux slogan signifiait surtout que Ford avait fait le pari de relier la production à la vente » (Stroobants, 1994, p. 47). Les premiers clients seraient les ouvriers eux-mêmes. L’ère de la production et de la consommation de masse est lancée.

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fonctionnement dit en silo (cloisonnement des différentes fonctions de l’entreprise) à un

fonctionnement dit horizontal puis matriciel, mêlant autour d’équipes-projet des professionnels

relevant de différentes fonctions. Dans ce contexte, une nouvelle forme de management se fait jour :

le management indirect ou fonctionnel.

A/2.1. Les limites du taylorisme et du fordisme : absentéisme et turnover du personnel

Tout au long de la première moitié du XXe siècle et jusqu’à la fin des années 1960, l’organisation

scientifique du travail s’étend progressivement à tous les pans de l’industrie, mais aussi plus tard à

ceux de métiers de service. Cependant, un certain nombre de difficultés se manifestent lors de la

décennie suivante : les relations de travail se révèlent alourdies, la répartition des tâches entre les

différents postes de travail s’avère difficile à équilibrer, enfin et surtout la fragmentation extrême

des tâches nuit paradoxalement à la productivité : plus les postes de travail sont nombreux, plus les

temps de transfert entre postes, improductifs, augmentent. « Enfin, l’accélération des cadences

génère des rebuts, des gaspillages et des malfaçons. Au-delà des déficiences techniques, les effets

des cadences infernales se confirment, les conditions de travail se détériorent. La routine et

l’abrutissement engendrent surmenage et accidents de travail. L’absentéisme se développe et les

taux de rotation du personnel s’élèvent » (Stroobants, 1994, p. 50).

A/2.2. De l’école des relations humaines à la structuration de la gestion de la ressource

humaine

A partir de 1927, soit peu avant la crise économique de 1929, et jusqu’en 1932, des expériences

menées à Hawthorne, d’après des observations conduites à l’usine Western Electric Company située

à Chicago, par l’équipe d’Elton Mayo (1880-1949), réunissant tout comme lui des chercheurs de

Harvard, vont constituer un événement fondateur17.

Un facteur humain est ainsi découvert, celui de la considération :

- les comportements au travail ne sont pas que la conséquence du salaire et des aptitudes

techniques, ils traduisent aussi des besoins plus complexes et plus profonds qu’on appellera

motivation. Connaître cette motivation deviendra une exigence de la gestion des problèmes 17 « Le point de départ est un phénomène paradoxal : quand on accroît la luminosité d’un atelier, la productivité augmente non seulement dans le groupe concerné, mais aussi dans le groupe de contrôle, où la luminosité ne varie pourtant pas  ! Apparemment, ce groupe aligne son comportement sur celui du groupe expérimental. De plus, la productivité continue d’augmenter dans le groupe expérimental même si l’on diminue ensuite l’éclairage ! La productivité ne dépend donc pas seulement des circonstances physiques du travail, constatent les chercheurs, aussi intrigués que la direction » (Stroobants, 1994, p. 26).L’expérience se poursuit en faisant varier toutes sortes de paramètres : le système de salaire, le nombre et la durée des pauses ainsi que la durée quotidienne ou hebdomadaire du travail. La productivité des ouvrières augmente presque tout le temps, même quand les conditions de travail se détériorent. En fait, les chercheurs ont mis en évidence un phénomène qui sera largement exploré par les psychologues du travail et exploité par les directions d’entreprise : « l’observation et l’enquête contribuent à valoriser les sujets observés, à augmenter leur satisfaction au travail et leur rendement (…). Dès qu’on s’intéresse aux travailleurs, leur travail leur emble plus intéressant. Dans une certaine mesure, les conditions objectives – négatives ou positives – de travail importent moins que cette valorisation. Ce constat est devenu célèbre sous le nom d’effet Hawthorne  » (Stroobants, 1994, p. 27).

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du travail pour tenter de prendre en compte les attentes et aspirations qui en résultent et

viennent agir sur les conduites au travail ;

- les conduites humaines trouvent à s’exprimer dans les relations et les groupes informels qui

se créent autour du travail. Tout un environnement humain de la tâche prend en fait

consistance, sous forme d’amitiés, affinités, relations duelles, groupes. Une véritable

dynamique d’intégration s’y développe avec des clans, des oppositions, des exclus, des

meneurs et des boucs émissaires. C’est donc en agissant aussi à ce niveau de l’organisation

que l’on pourra traiter des problèmes économiques (Sainsaulieu, 2008).

« De telles pratiques du personnel ne sont pas apparues spontanément, il a fallu organiser de

véritables services du personnel ; c’est même la fonction personnel qui en est quasiment née. Dans

une conception purement taylorienne de l’organisation du travail, ce sont, en effet, les bureaux des

méthodes qui sont importants ; le service du personnel n’est qu’une partie de l’administration

générale d’entreprise avec ses bureaux de paie. C’est au chef hiérarchique à gérer ses propres

problèmes de personnel par le règlement, la discipline et l’expérience professionnelle. Avec la

théorie de la motivation, la fonction du personnel s’élargit considérablement, prenant en compte la

gestion des carrières, la formation d’adultes, le conseil au personnel, l’information et maintenant la

gestion de l’emploi » (Sainsaulieu, 1988, p. 52).

A/2.3. L’ère du management de l’humain

Dès lors, à partir des années 1980, de nouvelles organisations du travail vont tenter de concilier

humanisation du travail et productivité, en mettant l’accent sur le rôle clé des managers :

- Le courant du «   job enrichment   » et les recherches de Maslow et Hertzberg

Ce courant qui conteste à la fois la rationalisation taylorienne et les compensations

envisagées par la gestion des relations humaines, se fonde non pas sur analyse des situations

de travail, mais sur la théorie générale des motivations, alimentée par la hiérarchie des

besoins proposée par Maslow (1908-1970), psychologue. Il préconise de satisfaire les

travailleurs, non pas par l’octroi davantage matériels (primes, cadeaux, …), mais par la

proposition d’un travail exigeant et permettant davantage de créativité (Stroobants, 1994).

Dans ce contexte, l’organisation et le manager se penchent surtout sur le développement du

contentement, par la satisfaction des besoins d’appartenance, d’estime de soi, et

d’accomplissement de soi des individus. Cependant, « cette école n’a pu répondre à la

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question essentielle de l’origine du besoin et a péché par excès d’universalisme. Elle a, par

ailleurs, fait l’impasse sur le contexte socio-économique, culturel qui interagit sur les

niveaux d’aspiration et les seuils de satisfaction » (Cruellas, 1993, p. 29).

- Le courant autogestionnaire

Né à la fin des années 1970, il se développe dans les pays scandinaves sous l’appellation de

démocratie économique et en Allemagne sous forme de cogestion. Il met l’accent sur des

valeurs clés : justice sociale, reconnaissance des capacités individuelles, égalité des chances.

« Les expériences suédoises et allemandes ont montré leur efficacité face aux aléas des

conjonctures : grâce à des petites structures, ou à des groupes de projets, et en s’appuyant

sur un héritage culturel et politique spécifique (social-démocratie), les membres de

l’entreprise deviennent de véritables acteurs. Les organisations devront permettre à leurs

membres de répondre à la question du sens, de l’identité et de la cohérence : leurs systèmes

de croyance mobilisent les aspirations profondes des individus » (Cruellas, 1993, p. 31).

- Le courant du manager-leader

Ce courant se répand quant à lui au cours des années 1980 aux Etats-Unis puis au cours des

années 1990 en Europe. Hier charismatique, affichant un management technocratique voire

autocratique (donneur d’ordres), le manager-leader doit désormais non seulement « savoir

faire, mais générer de plus en plus de cohésion autour d’un projet et non plus se contenter de

proclamer des objectifs obsolètes avant d’avoir pu être atteints » (Cruellas, 1993, p. 31).

L’accent est mis sur le nécessaire leadership que doit présenter le manager : capacité à

développer une vision et à y faire adhérer, à donner du sens à l’action, à communiquer de

façon efficace, capacité à influencer et entraîner les équipes, à faire progresser

individuellement chacun par une écoute et un accompagnement personnalisés, à argumenter

de façon logique mais aussi à toucher les affects, capacité à susciter le dépassement, la

confiance et la prise d’initiative pour accompagner le changement (Cruellas, 1993).

Ainsi, les formes d’organisation tout au long du XXe siècle et jusqu’aujourd’hui, tendent à passer

progressivement d’une logique :

**de rationalisation purement économique, associant organisation scientifique du travail dans une

perspective de productivisme et production de masse,

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**à une autre plus souple, qui bien que ne rompant pas fondamentalement avec la précédente, place

la gestion de la ressource humaine au centre des préoccupations du management, et installe les

managers comme acteurs clés de l’accompagnement du changement dans les entreprises.

Est en corollaire promue la figure du manager-leader, présentant leadership et vision, donneur de

sens, vecteur de confiance, promoteur du dépassement de soi et de la prise d’initiative, en capacité

de motiver et entraîner ses équipes, jouant pour ce faire aussi bien sur les registres émotionnels que

logiques.

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ANNEXE 2 : LES OUTILS DE L’ACT

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ANNEXE 3 : RETRANSCRIPTION DE L’EXTRAIT DE SEANCE

ANALYSE

Intervenant Contenu de l’intervention CatégorieCoach La dernière fois, nous avons vu qu’une grande part du

problème, c’est que vous avez de fréquentes pensées sur le fait d’être incompétent et sans valeur. C’est bien ça ?

Coaché Oui, c’est vrai. J’ai l’impression que même dans mon métier, je suis une sorte d’imposteur.

Coach Et je remarque que lorsque vous dites cela, vous avez ce petit sourire désabusé. J’ai l’impression que ces pensées vous enfoncent vraiment. (Acquiescement du coaché). Ce doit être douloureux. Que ressentez-vous à l’instant même ? Essayez de vraiment porter attention à votre ressenti ?

C5

Coaché Du malaise. Et beaucoup d’incertitude.Coach D’accord. Et nous avions également vu la dernière fois que l’un

de vos objectifs ici est d’apprendre de nouveaux moyens pour appréhender les pensées et les émotions difficiles. Est-ce toujours important pour vous ?

Coaché Tout à fait.Coach Ce que j’aimerais faire, c’est noter certaines de vos pensées sur

ce carnet, pour que nous ayons quelque chose sur quoi appuyer notre travail. C’est OK pour vous ?

Coaché Oui.Coach OK. Quand votre esprit vous culpabilise vraiment, vous rabâche

ce qui ne va pas, la difficulté de votre vie, qu’entendrais-je si j’étais connecté à votre esprit, comme je pourrais l’être à une radio ?

C1

Coaché Euh, des choses comme « tu es stupide », « fainéant ».Coach Très bien, je le note. Quoi d’autre ? C1Coaché Euh, que je ne vais pas m’en sortir, que je vais arriver en fin de

droits. Que ça va être la dégringolade.Coach D’accord. Quelles autres histoires sombres ou effrayantes sur le

futur votre esprit vous raconte-t-il ?C1

Coaché Que je vais me retrouver seul, que ma copine va sûrement me quitter.

Coach Donc, c’est ce genre de sornette que vous livre votre esprit quand il vous culpabilise ?

C1

Coaché Oui.Coach OK. Je vais vous demander de faire deux ou trois petites choses

avec ce carnet (le coach tend un carnet au coaché qui s’en saisit). Vous êtes d’accord ?

Coaché OK (petit rire).Coach J’aimerais que vous teniez fermement, avec les deux mains, ce

carnet, et que vous le mettiez juste devant votre visage, de telle manière que vous ne me voyiez pas. Tout ce que vous pouvez voir, ce sont les pensées sur le carnet (le coaché s’exécute). C’est ça. Tenez-le si près qu’il touche presque votre nez. A présent, c’est comment d’essayer d’avoir une conversation avec

C1

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moi pendant que vous êtes obnubilé par vos pensées ?Coaché Euh, c’est pas évident.Coach Effectivement. Pouvez-vous voir les expressions de mon

visage ? Vous sentez-vous réellement en interaction avec moi ?C1

Coaché Pas vraiment. Coach Et votre vision de la pièce, de votre environnement ? C1Coaché C’est pareil, je ne vois rien.Coach Observez donc ce qui se passe ici. Votre esprit vous raconte

toutes ces histoires désagréables, et plus vous y pensez, moins vous profitez de la vie. Vous vous coupez du monde, de vos proches, vous vous isolez. Vous vous coupez de tout, sauf de vos pensées.

C1

C2

Coaché C’est vrai. Coach Remarquez aussi que tant que vous vous accrochez à ces

pensées, tant que vous tenez ce carnet, il vous est difficile de faire quoi que ce soit d’autre, d’aller faire du sport, prendre un café avec un ami par exemple. Etes-vous d’accord ?

C2

Coaché Oui, vu comme ça, effectivement.Coach Donc, lorsque vous vous accrochez à ce genre de pensées, non

seulement vous vous coupez du monde, mais en plus vous ne faites pas les choses qui enrichissent votre vie.

C2

Coaché C’est tout à fait ça. Je ressasse ces pensées, et du coup je ne fais rien.

Coach Très juste. Alors essayons autre chose. Puis-je reprendre le carnet ? (Le coaché le rend au coach). Maintenant, puis-je le mettre sur vos genoux ? (Le coaché acquiesce). Alors, qu’est-ce que cela vous fait maintenant de ne plus l’avoir devant les yeux ? Vous sentez-vous plus connecté à moi ? Avec votre environnement immédiat ?

C3

Coaché Oui, absolument.Coach Remarquez bien que vos pensées n’ont pas bougé. Elles sont

toujours là. Si vous le souhaitez, vous pouvez à nouveau leur prêter toute votre attention. Mais que préférez-vous ? Etre aspiré par vos pensées ou être ici dans le monde à interagir ?

C3

Coaché Sans aucun doute être dans le monde à interagir.Coach Vous avez donc un choix à faire. Vous pouvez soit regarder

vers le bas et être enfoncé par ces choses, soit les laisser là, et vous préoccupez du monde. Qu’est-ce que vous décidez ?

C3

Coaché Le deux, mais comment faire ?Coach Il existe un processus pour ça. Cela s’appelle la défusion. Et

justement, je voulais vous proposer une technique simple pour vous permettre de prendre de la distance avec vos pensées, mettre le carnet sur les genoux finalement. Ca vous dit ?

C3

Coaché Oui, bien sur.Coach Formulez en une phrase courte une autocritique que vous vous

adressez. Par exemple : « je ne vaux rien ». Allez-y.C3

Coaché Euh, et bien : je ne suis pas compétent.Coach Ok, maintenant, fusionnez avec cette pensée pendant 10

secondes. Prêtez-y toute votre attention, soyez absorbé par elle. (Pause). A présent, répétez-vous plusieurs fois cette pensée en y ajoutant devant : j’ai la pensée que … Par exemple, j’ai la

C3

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pensée que je ne suis pas compétent. (Pause). Ca y est ? Coaché (Acquiescement du coaché).

OK. Maintenant, répétez-la encore, mais cette fois, ajoutez cette phrase : je remarque, qu’ici et maintenant, j’ai la pensée que … (Pause). Quel effet cela produit-il ?

C3

Coaché En fait, c’est comme si … (hésitation), comme si la pensée était moins forte, moins impactante.

Coach Cela vous permet-il du coup de davantage vous séparer ou vous distancier de cette pensée ?

C3

Coaché Oui. D’ailleurs, c’est un peu comme si ce n’était plus vraiment ma pensée.

Coach C’est cela la défusion. Des techniques pour mettre ses pensées à distance. Ce qui pourrait être intéressant, c’est d’essayer de parler comme ça à propos de vos pensées en séance. Pensez-vous cela possible ?

C3

Coaché Je pense que oui.Coach Souvent, notre esprit est entraîné à croire que tout ce que nos

pensées nous disent est vrai et très important et que nous devons y prêter attention. Mais ces idées ne sont qu’une vision parmi d’autres possibles de la réalité. Vous pouvez, soit continuer à être minée par ces idées, soit laisser ces idées là où elles sont, et vous préoccupez des projets qui vous tiennent à cœur. (Pause). Nos idées sont parfois comme des hameçons qui nous accrochent et nous enfoncent. Un hameçon particulièrement tenace chez vous est cette idée d’incompétence. Imaginez maintenant que cette pensée s’affiche sur un écran d’ordinateur, comme dans un Powerpoint. Visualisez-la si besoin en fermant les yeux. (Silence). Ca y est ? Vous visualisez l’écran ?

C1

C3

Coaché (Silence). Oui.Coach Maintenant, modifiez la police (petite, grosse, en gras, italique,

souligné), la couleur (noir, bleu, vert, jaune), faites bouger les mots.

C3

Coaché (Rires). Coach Et maintenant, si vous reconsidérez cette idée qui vous traverse

souvent, que vous dites-vous ?Coaché Je ne sais pas trop en fait. Il faudrait peut-être que je vois ça

dans quelques temps.Coach OK. En fait, notre esprit est un grand conteur, sans doute même

le plus grand conteur. Il ne se tait jamais et veut qu’on l’écoute. Et il dira tout ce qu’il faut pour qu’on l’écoute, même si c’est douloureux ou méchant. Certaines des histoires qu’il nous raconte sont vraies. Ce sont des faits. Mais la plupart des histoires qu’il nous sert sont des opinions, des croyances, des principes, des jugements, etc. ce sont des histoires sur la façon dont nous voyons le monde, sur ce que nous pensons vrai ou faux, juste ou injuste. Mais l’une des choses que nous voulons apprendre ici est de reconnaître si une histoire est utile et aidante ou non.

C3

Coaché Ouais, et le problème c’est que ce sont souvent voire toujours des histoires que l’on n’a pas envie d’entendre.

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Coach Exactement. Autre image que je pourrais prendre, notre esprit est un peu comme une radio annonçant à longueur de journée des catastrophes : tu es nul, tu n’y arriveras pas, etc. Et le problème, c’est que tout comme les informations rapportées à la radio ne sont pas les faits eux-mêmes, mais des opinions, commentaires, jugements sur les faits, notre esprit de même nous livre une vision de la réalité faite de commentaires, opinions, jugements pas nécessairement vrais ni aidants.

C3

Coaché Je vois ce que vous voulez dire.Coach Le problème est qu’il n’y a pas d’interrupteur off à cette radio :

on ne peut l’arrêter. Tout ce que je peux essayer de faire, c’est de réduire le volume, c’est-à-dire mettre à distance ces mauvaises nouvelles.

C3

Coaché OK.Coach Et quand votre esprit vous culpabilise comme ça, vous fait

prendre vos idées négatives pour argent comptant, comment cela se traduit-il du point de vue de vos sensations physiques ?

C1

Coaché Je me sens fatigué, alors que je ne fais pas grand-chose.Coach Vous voyez là encore comme votre petite voix intérieure vous

conduit finalement à l’inaction, à de la fatigue pour reprendre votre expression, alors que finalement vous n’êtes pas spécialement hyperactif. Et quoi d’autre ? Ce que je veux dire, quelles émotions vous traversent alors ?

C3

Coaché Ben, c’est de la peur j’imagine. En tout cas de l’appréhension. Et de la colère, car du coup je ne fais rien. Oui de la peur et une colère froide contre moi-même.

Coach Ces émotions, peur, appréhension, colère, je vous propose de nous y arrêter quelques instants. Prenez 10 respirations profondes, et portez attention à vos sensations corporelles. Mettez le reste de côté. Prenez le temps qu’il faut. (Silence). Vous y êtes ? (Silence, puis acquiescement du coaché). Je vous propose maintenant un petit exercice. C’est OK pour vous ? (Acquiescement du coaché). Maintenant (voix plus douce et lente du coach), observez ces émotions, ces sensations, comme un scientifique observerait je ne sais pas, une amibe au travers d’un microscope par exemple. Où se trouvent-t-elles en vous, dans votre corps ?

C5

C4

Coaché Dans le ventre. Ca me fait une boule au ventre. Dans la poitrine aussi. Comme un poids sur la poitrine.

Coach OK. En même temps que vous observez ces deux sensations de peur et de colère froide, respirez amplement et profondément, comme nous l’avons vu lors d’une de nos séances précédentes, en commençant par gonfler le ventre puis seulement après la poitrine. (Silence). Puis, lentement, vous commencez à vous ouvrir à ces émotions, vous leur laissez de la place. Même si elles peuvent s’avérer désagréables, continuez à les observer. N’essayez pas de vous en débarrasser ou de les modifier. D’un simple hochement de tête, signifiez-moi si vous y arrivez.

C4

Coaché (Après un court moment, hochement de tête du coaché).Coach Si d’elles-mêmes elles changent, ce n’est pas un problème. Si C4

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elles ne changent pas, pas de problème non plus. Permettez-leur d’être simplement là, acceptez-les, laissez-les être.

Coaché (Acquiescement du coaché).Coach Très bien. A présent, imaginez que ces émotions sont des

objets. Quelles formes ont-elles ? Quelle consistance ? Quelle couleur ? Quelle texture ? Que pouvez-vous m’en dire ?

C4

Coaché Ma colère est comme un morceau de glace, froide, dure, terne.Coach (Silence).Coaché Ma peur est bleue, bleue foncé. Une peur bleue finalement

(Sourire). Elle n’a pas vraiment de forme définie, mais elle est bleue.

Coach Tout en continuant à les observer, et à respirer profondément, notez que vous êtes plus grand que ces objets. Peu importe leur taille, vous serez toujours plus grand.

C4

Coaché Oui, si on veut. Coach Ces émotions vous apprennent que finalement, vous êtes un être

humain normal, que vous êtes vivant, qu’il y a des choses dans la vie qui vous importent et vous touchent. Et c’est exactement ce que ressentent tous les être humains quand il y a un fossé entre ce que nous voulons et ce que nous avons en réalité. Plus le fossé est grand, plus l’émotion est forte. On continue ?

C4

Coaché OK.Coach Maintenant, prenez une de vos mains et posez-la sur votre

ventre. Imaginez que c’est une main bienfaitrice, celle d’un ami proche, d’un parent ou d’un médecin. Sentez à présent la chaleur que cette main diffuse en vous, non pour vous débarrasser des émotions désagréables, mais pour leur faire de la place.

C4

CoachéCoach La vie est comme une scène de théâtre. Sur cette scène il y a

toutes vos pensées, émotions, tout ce que vous pouvez voir, entendre, toucher, goûter et sentir. Pour ces derniers instants, nous allons baisser les lumières sur la scène et orienter un projecteur sur ces émotions. (Pause). Vous y êtes ?

C4

Coaché Oui.Coach Et maintenant, rallumons la lumière. Elle éclaire votre corps.

Remarquez vos bras, vos jambes, votre tête, et remarquez que vous les contrôlez. Bougez-les pour vérifier par vous-même. Et observez tout ce que vous pouvez voir, tout ce que vous pouvez entendre.

C4

Coaché Apaisé. Je me sens apaisé. Coach Finalement, nos émotions sont un peu comme des sables

mouvants. Comme pris dans des sables mouvants, plus j’essaie de me débattre et de lutter contre les émotions négatives qui m’animent, et plus je m’enfonce. Alors qu’au contraire, je peux m’en sortir en restant le plus immobile possible, bref en les observant et en les laissant aller et venir.

C4

Coaché Effectivement.Coach Si maintenant vous aviez une baguette magique qui permettrait

de faire en sorte que toutes vos pensées et émotions négatives n’aient plus d’impact sur vous, que commenceriez-vous à faire,

C7

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ou à faire davantage ?Coaché M’investir pleinement dans ma recherche d’emploi : répondre à

des offres, ça je le fais, mais faire des candidatures spontanées, activer des contacts, être plus dynamique. Et puis m’activer plus sur le projet de déménagement dont je vous ai déjà parlé.

Coach OK. La recherche d’emploi, le déménagement. A ce sujet, avez-vous déjà ressenti de la détermination, voire de la plénitude, de la satisfaction concernant ces deux projets ?

C7

Coaché (Rires). Ah non pas vraiment, ce serait plutôt le contraire. Je ne m’implique pas assez, je me le dis tous les jours, mais c’est pas pour autant que ça change quoi que ce soit.

Coach Alors que vous manque-t-il pour y parvenir ? Ce que je veux dire. Si vous pouviez développer des qualités, des capacités personnelles qui vous aideraient en quelque sorte à devenir une « meilleure personne », à grandir humainement, ou à mettre en place un changement par rapport à votre fonctionnement ou par rapport à la vie des autres, quelles seraient-elles ?

C7

Coaché Bon. Sans doute comme je l’ai dit du dynamisme, de l’opiniâtreté. Et puis bien sur une plus grande confiance en moi. Je sais que j’ai certaines qualités, on me dit toujours que j’ai un très bon relationnel, que je suis avenant, souriant. Mais je crois que j’ai à l’intérieur un gros problème de confiance.

Coach Ce problème de confiance, que nous avons déjà rapidement évoqué, je vous proposerai d’y revenir plus en profondeur plus tard. Maintenant, autre question, que faites-vous actuellement qui est contradictoire avec la personne que vous voulez être au plus profond de vous-même ?

C7

Coaché Et bien justement, je ne fais rien, alors que je devrais m’activer chaque jour pour trouver un emploi.

Coach Concernant votre environnement maintenant, si le travail que nous faisons ici pouvait avoir un impact positif sur les relations les plus importantes de votre vie, quelles relations voudriez-vous améliorer ? Et dans quel sens ? Comment aimeriez-vous être dans ces relations si vous pouviez être « idéal » ?

C7

Coaché (Réflexion manifeste du coaché). Avec ma copine, j’aimerais pouvoir me montrer plus fort, plus soutenant. Etre un moteur dans mon couple, alors que j’ai l’impression d’en être spectateur. Et (hésitation), dans le travail, être justement plus confiant, pouvoir davantage m’imposer. Et puis surtout ça veut dire avoir un emploi où je m’épanouis.

Coach Donc, être plus fort, plus soutenant, moteur, avancer davantage en confiance dans la vie, pouvoir mieux vous imposer, c’est donc le genre d’homme, de conjoint, de collègue que vous aimeriez-être ?

C7

Coaché Absolument. Coach Nous sommes là sur la question des valeurs. Les valeurs son

comme une boussole. Une boussole vous donne une direction et vous permet de rester sur le bon chemin lorsque vous voyagez. Et les valeurs font de même pour le voyage de vie. Nous les utilisons pour choisir la direction dans laquelle nous voulons aller, et nous maintenir sur la bonne voie. Je suis clair ?

C7

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Coaché Très.Coach Quand vous agissez selon vos valeurs, c’est comme si vous

vous orientez vers l’ouest. Peu importe la distance que vous parcourrez, vous n’arriverez sans doute jamais complètement à l’ouest. Mais les objectifs de vie sont comme les choses que vous essayez d’atteindre, comme les paysages que vous voulez voir tout au long de votre voyage vers l’ouest.

C7

Coaché Les valeurs sont un guide en quelque sorte.Coach. Absolument. Je vais vous demander de noter sur le carnet que

je vous ai passé tout à l’heure vos valeurs : de la force, de la confiance en soi, être moteur, dynamique, savoir s’imposer. (Pause). Ok, ça y est ?

C7

Coaché Oui.Coach En voyez-vous d’autres que vous souhaiteriez mentionner ? C7Coaché Euh … Etre peut-être plus attentionné avec ma copine, et avec

les autres d’ailleurs en général. J’ai un peu tendance à être très focus sur moi-même.

Coach. Très bien, je vous laisse le noter. C7Coaché C’est fait.Coach Retenons cela pour tout à l’heure. Creusons davantage votre

quotidien justement. Comment occupez-vous vos journées ?C8

Coaché Ben, pas grand-chose. Je fais pas mal de sport, du badminton, je surfe aussi sur internet. Et puis il y a le projet de déménagement.

Coach Du sport, le projet de déménagement. Je trouve cela très positif. Mais cela vous empêche-t-il du coup d’avoir du temps pour votre recherche d’emploi ?

C8

Coaché Non (rires). Et même le déménagement, je ne peux pas dire que je m’implique plus que ça. Non, j’ai du temps de libre, mais en fait je n’en fais pas grand-chose.

Coach Si maintenant vous essayez de vous centrer ici et maintenant, sur ce qui vous importe en termes de perspective professionnelle, qu’est-ce qui est important pour vous dans (accentué) le travail ? Et qui donc vous permettrait de vous y épanouir comme vous le souhaitez ?

C5C7

Coaché Comme nous en avons déjà parlé, ce qui m’intéresserait, c’est un métier où je peux me sentir utile, aider les autres. Je ne sais pas quel métier, peut-être quelque chose dans le conseil. Après, je ne sais pas trop ce qui est possible. Et puis d’un autre côté, mettre tout ce que j’ai appris dans la finance de côté, …

Coach Et dans votre ancienne situation, vous n’aviez pas l’impression de pouvoir être utile, aider les autres ?

C7

Coaché Si, d’une certaine manière. Mais il s’agissait surtout à de permettre à de gros groupes d’avoir du cash, de la trésorerie, en souscrivant des prêts. Donc, … (hésitation).

Coach Est-ce le sens que vous donnez à l’utilité et la dimension d’aide que vous souhaitez retrouver dans votre activité professionnelle ?

C7

Coaché Non, certainement pas. Oui, l’idée serait davantage d’aider des personnes qui en ont besoin. Mais je ne parle pas nécessairement des métiers du social. Je ne me verrais pas non

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plus dans ce genre de contexte.Coach D’accord. Qu’est-ce qui ne vous conviendrait pas ? C7Coaché Je ne sais pas trop. Mais … Coach OK. Je sens en vous comme une tension. D’un côté, vous avez

me semble t-il l’envie de quitter ce monde de la finance, où vous ne semblez plus y trouver votre compte, justement en termes de valeurs, et donc vous diriger vers un métier plus en accord avec ce que à quoi vous aspirez, et dans le même temps, je sens une hésitation à quitter un métier où vous avez acquis un certain nombre de compétences. Qu’en dites-vous ?

C7

Coaché C’est exactement cela. Déjà que je ne me sens pas particulièrement compétent, je me dis que je vais me retrouver en situation d’imposture dans un nouveau métier.

Coach Nous aurons l’occasion de revenir sur ce qui vous donne ce sentiment d’incompétence. Ce que je vous propose, c’est de porter attention, d’observer attentivement votre façon de fonctionner. Il est très important dans notre travail de comprendre que l’esprit comprend deux parties distinctes. Il y a la partir qui nous est familière, la part qui pense, imagine, se souvient, analyse, planifie, rêve … Appelons-la le « soi penseur ». Ca vous va ?

C6

Coaché Euh, oui.Coach Et puis il y a une autre partie de l’esprit qui ne fait presque

jamais parler d’elle. C’est une part de votre esprit qui ne pense pas, qui ne peut pas penser, elle observe seulement. Elle observe tout ce que vous pensez et ce que vous ressentez, faites et voyez, entendez et goûtez, etc. On pourrait la nommer la conscience, l’attention, la concentration. Dans l’ACT, nous l’appelons le soi observateur. L’appellation vous convient ?

C6

Coaché Oui, pas de problème.Coach Pour vous donner un exemple, votre soi observateur est comme

le ciel, et vos pensées et émotions sont comme le temps. Le temps varie continuellement, mais peu importe qu’il soit mauvais, il ne peut en aucun cas être nuisible pour le ciel. Derrière le plus gros des orages, le ciel est là, intact. Vous êtes d’accord ?

C6

Coaché Bien sur.Coach Et bien, il arrive quelquefois que l’on oublie que le ciel est là,

mais il l’est bel et bien. Et parfois il peut être voilé par les nuages. Mais si nous nous mettons plus haut que ces nuages, tôt ou tard, nous atteignons un ciel clair. De plus en plus, vous pouvez donc apprendre à accéder à cette part de vous-même : c’est un espace intérieur depuis lequel vous pouvez observer.

C6

Coaché Je vois très bien ce que vous voulez me dire.Coach Alors, je vous propose ici et maintenant, de prendre 10

respirations amples, et de vous connecter à votre soi observateur, à votre conscience (Pause). Ca y est ?

C5

Coaché Oui, je crois.Coach. Prenez votre temps. Accordez pour quelques instants attention à

vos sensations corporelles. Puis essayez de passer dans la position d’un spectateur qui visualiserait sur grand écran le film

C5C6

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de votre vie. (Pause). Vous y êtes.Coaché (Rire). Oui.Coach Que peut me dire ce spectateur observateur de votre façon

actuelle d’appréhender votre futur professionnel ?C6

Coaché C’est-à-dire ? Je vois pas trop ce que vous voulez dire.Coach. Euh, dit autrement, qu’est-ce que ce spectateur voit sur l’écran

par rapport à votre dilemme : rester dans la finance et ne plus y trouver son compte, ou aller vers un nouveau devenir professionnel inconnu à ce stade et perdre une part du bénéficie tiré de vos compétences acquises en finance ?

C6

Coaché (Réflexion du coaché). Il voit quelqu’un qui finalement sait qu’il ne veut plus retourner vers ce milieu artificiel, mais qui a peur, oui qui a peur, de… de se tromper, qui ne sait pas vers quoi aller, des conséquences possibles (pause).

Coach Ce spectateur voit-il un (prénom du coaché) qui a fait son choix, mais qui n’ose se le dire clairement ?

C6

Coaché Ah, je ne sais pas. Il voit en tout cas quelqu’un qui a besoin d’être épaulé pour y voir plus clair par rapport à cette question.

Coach OK. Qu’est-ce qui pourrait aujourd’hui vous faire rester dans la finance ? Quelles valeurs y retrouveriez-vous qui puissent vous convenir ? Un poste très intéressant, avec un salaire tout autant intéressant à la clé ? Un poste à forte responsabilité ? En lien avec des clients VIP ? Une forte dimension de management ?

C7

Coaché (Soupir. Pause). Franchement, je ne sais pas. Ca pourrait m’aller un moment, mais sur le long terme, je crois que ça ne me conviendrait pas. Je m’aperçois maintenant que j’ai le deuil de mon ancienne situation à faire.

Coach C’est ce que pourrait voir votre soi spectateur ? Un (prénom du coaché) qui a le deuil de son ancien métier à faire) ?

C6

Coaché Il me semble que oui.Coach Et que ressentez-vous, ici et maintenant, à cette idée de devoir

faire ce deuil ? Prenez le temps qu’il faut pour y réfléchir.C5

Coaché De … je ne sais pas trop. Coach A présent, essayons de voir quelles actions vous pourriez mettre

en œuvre afin justement d’aller dans le sens de vos valeurs.C8

Coaché OK.Coach. Quel domaine de vie : professionnel, personnel, famille, amis,

loisirs souhaitez-vous que l’on investigue en premier ?C8

Coaché Clairement le professionnel.Coach Très bien. Quelle valeur souhaiteriez-vous suivre dans ce

domaine professionnel ?C7

Coaché Pouvoir être utile aux autres, clairement.Coach Si je reformulais en disant, pouvoir exercer un métier où je me

sens utile, aider les autres, est-ce exact ?C7

Coaché Oui, c’est ça.Coach Parfait. A présent, quels objectifs pouvez-vous vous fixer en ce

sens ?C7

Coaché Avoir un travail qui justement me permettrait de me sentir réellement utile. Et donc déjà l’avoir identifié, je veux dire savoir quel travail, et puis bien sur, chercher activement.

Coach Très bien. Vous avez donc deux objectifs : identifier une cible C8

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professionnelle, un métier que vous pourriez exercer et qui vous permettrait de vous sentir utile, et deuxièmement une fois identifié, chercher activement un emploi en lien avec cette nouvelle cible. C’est bien ça ?

Coaché Exactement.Coach Concernant le premier objectif, essayons de le préciser.

Notamment, quel deadline vous donnez-vous pour identifier cette nouvelle piste ?

C8

Coaché Je pense que la rentrée prochaine, ce serait, pas mal.Coach La rentrée, c’est-à-dire septembre ? C8Coaché Oui, ce serait bien.Coach Et donc, quelles actions pourriez-vous mettre en œuvre de

façon à vous engager vers cet objectif ?C8

Coaché Et bien, travailler avec vous de manière à identifier les possibles.

Coach Très bien. En parallèle de ce travail ensemble, quelles autres actions pourriez-vous mettre en œuvre ?

C8

Coaché Je ne vois pas trop. Me renseigner sur les métiers peut-être. J’ai pensé à quelques métiers qui pourraient m’intéresser. Etre formateur, ou bien, l’immobilier, le conseil en patrimoine notamment. Mais c’est vrai que je ne me suis pas plus renseigné que ça.

Coach Ok, très bien. Avez-vous réfléchi à où et comment vous pourriez avoir de l’info sur ces métiers ?

C8

Coaché Non, pas vraiment. Coach La Cité des Métiers pourrait être un bon premier petit pas. C’est

à la Villette, et vous pourrez y avoir de l’information sur tous les métiers et même y rencontrer des conseillers d’orientation. Qu’en pensez-vous ?

C8

Coaché Ah oui, c’est vrai ? Oui, ça me semble intéressant.Coach Je vous enverrai un mail avec les coordonnées. C8Coaché OK, merci.Coach Puis-je me permettre de vous faire une autre suggestion

d’action possible ?C8

Coaché Bien sûr, je suis preneur.Coach Vous pourriez éventuellement voir dans votre réseau si vous

avez des contacts qui tout comme vous le souhaitez, ont déjà franchi le pas d’une reconversion en dehors de la finance. Les rencontrer pourrait s’avérer utile pour voir ce qu’ils font, les difficultés qu’ils ont rencontrées, les conseils qu’ils peuvent vous donner. Qu’en pensez-vous ?

C8

Coaché Je ne sais pas. Est-ce que vous pensez que cela peut apporter quelque chose ;

Coach Ah, j’ai l’impression qu’à nouveau vous évitez de vouloir actionner ce qu’il peut être intéressant pour vous de mettre en œuvre.

C2

Coaché C’est sans doute vrai, mais bon ça me semble difficile de solliciter des personnes comme ça.

Coach Difficile pour vous, ou difficile pour elles ? C2Coaché Un peu des deux. Peut-être qu’elles n’auront pas de temps à me

consacrer.

Page 87:  · Web viewconsidérer qu’y compris les sciences dites exactes ne constituent qu’un regard possible parmi d’autres sur la réalité. Plus encore, les deux théories de la relativité

Coach Encore une fois, j’ai le sentiment que vous que vous essayez d’éviter ce qui pourtant vous permettrait d’aller dans le sens de vos valeurs et vos objectifs.

C2

Coaché Oui, c’est un peu vrai.Coach Que risquez-vous à solliciter ces personnes, finalement ? Quel

intérêt à C2

Coaché Pas grand-chose, en fait.Coach Allez également regarder dans mes contacts sur Linkedin,

éventuellement.C8

Coaché (Acquiescement). Tout à fait.Coach Quelles autres actions vous semblent nécessaires ou

intéressantes ?C8