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2015-2019 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire

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2015-2019

Visionstratégique

de la réformedu systèmejudiciaire et

pénitentiaire

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2015-2019

Vision stratégiquede la réforme du systèmejudiciaire et pénitentiaire

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2 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

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Présentation du Ministre de la justice, des droits de l’Homme et de la justice

transitionnelle ............................................................................................................................... 7

Introduction du Président de l’Instance provisoire de supervision de la justice

judiciaire .......................................................................................................................................... 9

Première partie : Les fondements de la vision stratégique ........................................11

I- Les fondements consensuels et participatifs de la vision stratégique ....................11

II- Les attentes en matière de réforme du système judiciaire et pénitentiaire ..........13

1. Appuyer la mise en œuvre du processus de justice transitionnelle .......................13

2. Concrétiser les aspirations à la mise en place d’un Etat de droit ............................13

3. Réviser la chaine pénale ....................................................................................................................14

4. Moderniser le système judiciaire et pénitentiaire ............................................................15

III- L’apport de la vision stratégique au partenariat avec les acteurs nationaux et

internationaux ....................................................................................................................................................15

1. L’établissement d’un référentiel d’investissement concerté ......................................16

2. La maximalisation des avantages comparatifs des intervenants dans l’appui

au secteur ...................................................................................................................................................16

3. La visibilité des objectifs et l’agrégation de la chaine de valeur ajoutée ...........17

Deuxième partie : le contexte du système judiciaire et pénitentiaire ...................19

I - Le contexte pré-transitionnel .............................................................................................................19

II - Les mesures prises durant la période pré-transitionnelle ................................................20

III- Les mesures prises dans le contexte transitionnel .............................................................21

1. La justice transitionnelle et la réforme du système judiciaire et pénitentiaire ......21

2. L’adoption d’une nouvelle Constitution ...................................................................................22

3. L’Instance provisoire pour la supervision de la justice judiciaire et le nouveau

Conseil supérieur de la magistrature .........................................................................................24

Table des matieres

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4 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

Troisième partie : L’état des lieux du système judiciaire et pénitentiaire ............25

I - Le système judiciaire ..............................................................................................................................25

1. La nouvelle Constitution ...................................................................................................................26

2. L’organisation judiciaire .....................................................................................................................27

3. Les conventions internationales ..................................................................................................27

II - Le système pénitentiaire .....................................................................................................................28

III - Les ressources humaines ....................................................................................................................29

1. Le personnel judiciaire ........................................................................................................................30

2. Le personnel administratif des juridictions ............................................................................32

3. Le personnel administratif des prisons ....................................................................................32

4. Les auxiliaires de justice ...................................................................................................................32

IV - Les infrastructures ..................................................................................................................................35

V - Les ressources matérielles .................................................................................................................36

Quatrième partie : Les axes stratégiques de réforme .................................................37

Axe 1 Indépendance et autonomie du pouvoir de la justice ..................................................37

Axe 2 Moralisation des systèmes judiciaire et pénitentiaire .................................................38

Axe 3 Qualité de justice et protection des droits des justiciables ....................................39

Axe 4 Accès à la justice ................................................................................................................................41

Axe 5 Communication et partenariat des institutions judiciaires et pénitentiaires ........42

Cinquième partie : Le cadre d’appui et d’exécution de la vision stratégique .......45

Conclusion ....................................................................................................................................47

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5

AMT : Association des Magistrats Tunisiens

ANC : Assemblée Nationale Constituante

BEPP : Bureau des Etudes, de la planification et de la programmation

CEJJ : Centre d’Etude Juridique et Judiciaire

CC : Cour Constitutionnelle

CPRJ : Comité de Pilotage de la Réforme judiciaire

CSM : Conseil Supérieur de la Magistrature

CT : Comité technique

HCDH : Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme

ISM : Institut Supérieur de la Magistrature

ISPA : Institut Supérieur de la Profession d’Avocats

IPSJJ : Instance Provisoire de supervision de la Justice Judiciaire

IVD : Instance Vérité et Dignité

MJDHJT : Ministère de la justice, des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle

ONAT : Ordre National des Avocats de Tunisie

OSC : Organisations de la société civile

PNUD : Programme des Nations Unies pour le développement

SMT : Syndicat des Magistrats Tunisiens

TPI : Tribunal de Première Instance

UE : Union Européenne

UMA : Union des Magistrats Administratifs

Liste des acronymes et des abreviations

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6 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

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Je suis très honoré de présenter cette vision stratégique qui fixe les grandes orien-

tations et priorités de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire en Tunisie.

Ces orientations ont été formulées par le ministère en étroite concertation avec

tous les acteurs de la Justice en vue de contribuer à la construction d’un Etat de

droit et de garantir l’application des droits et libertés fondamentaux reconnus par la

nouvelle Constitution tunisienne.

Cette vision stratégique s’inscrit à la suite du plan adopté en 2012 par le minis-

tère de la Justice dont l’objectif principal était d’engager un processus de réforme

du système judiciaire et pénitentiaire d’une manière participative et transparente.

Cette vision stratégique va permettre d’encadrer et de démarrer ce processus de

réforme afin de répondre aux fortes aspirations des populations tunisiennes à voir

l’établissement d’une justice indépendante, transparente, efficiente et proche des

citoyens. L’élaboration et la publication de cette vision participe aussi de la volonté

du ministère de reconstruire la confiance des populations envers leur justice après

la révolution.

Ce document est l’aboutissement d’un long processus et il a été élaboré sur la base

des résultats d’une large consultation de tous les acteurs menée en 2013. Cette

consultation nationale sur la réforme de la justice, qui a été organisée par le minis-

tère de la Justice en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le Déve-

loppement (PNUD) et le Haut-commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH), a permis

de recueillir les demandes et les attentes de plus de 4000 acteurs et justiciables

tunisiens qui ont été prises en compte dans l’élaboration de ce document.

Le ministère de la justice, des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle, s’est

engagé dans un processus de réforme qui vise à lui faire acquérir un plan stratégique

Présentation du Ministre de la justice, des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle

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8 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

englobant une vision d’avenir pour les systèmes judiciaire et pénitentiaire dans leur

ensemble. A cet effet, nous nous sommes engagés dans le processus de réforme

en adoptant une approche participative, d’une part pour assurer le consensus sur

les axes de la réforme et d’autre part pour permettre la planification des actions

concrètes menant au changement.

Cette vision stratégique a pour mission d’assurer le bon fonctionnement des institu-

tions judiciaires et pénitentiaires en vue d’offrir aux citoyens, aux justiciables et aux

professionnels un service accessible et efficace susceptible de protéger les libertés

et garantir les droits individuels et collectifs.

Cette vision stratégique sera suivie par le développement et la mise en œuvre de

plans opérationnels découlant des orientations formulées. Ces plans opérationnels

doivent nous permettre de fixer les priorités à court et à moyen terme, d’élaborer le

budget nécessaire, de désigner la partie responsable de l’exécution et de consacrer

ainsi la culture de la redevabilité de chaque acteur envers le bénéficiaire des ser-

vices de la justice.

Nous espérons pouvoir compter sur la collaboration de tous les acteurs du système

et sur l’appui de nos partenaires pour mettre en œuvre cette vision et contribuer

ainsi au renforcement de l’Etat de droit et à la réussite de la transition démocratique

en Tunisie.

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Introduction du Président de l’Instance Provisoire de Supervision de la Justice Judiciaire

Je voudrais savant tout souligner le plaisir que j’ai à introduire ce document de vision

stratégique de réforme du système judiciaire et pénitentiaire tunisien.

C’est une occasion pour moi aussi de transmettre mes félicitations aux experts pour

tous les efforts qu’ils ont fournis pour nous assister à l’ élaboration du document sur

la vision stratégique de cette réforme, et ce, en concertation avec toutes les parties

prenantes publiques, privées, nationales et internationales dans le cadre d’une ap-

proche participative couronnée par l’organisation d’une consultation nationale qui

s’est déroulée d’avril à septembre 2013.

L’instance apprécie à sa juste valeur les efforts entrepris par de nombreuses orga-

nisations internationales dans leur soutien à la Tunisie dans son processus de tran-

sition vers la stabilité. Je voudrais néanmoins préciser que la référence à des expé-

riences vécues par certains états ayant traversé des crises violentes et profondes

doit être prise en compte de manière relative, chaque pays ayant un contexte sin-

gulier. Partant de ce constat, et sans exclure les inspirations bénéfiques découlant

des expériences étrangères, le processus de réforme est, et doit être, fondamenta-

lement tunisien, s’inscrivant dans le cadre du plan de développement du pays et des

orientations établies par la Constitution de janvier 2014.

Je voudrais en outre souligner que cette réforme ne peut se concrétiser qu’à travers

des éléments humains, matériels et financiers importants, rendant alors essentiel

l’élaboration d’un plan d’action organisant l’exécution de cette stratégie. Il s’agit en

effet de fournir toutes les garanties de réussite pour cette vision stratégique, le

succès étant composé d’une croyance et de moyens.

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10 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

A ce sujet, il est important que la vision stratégique présentée dans ce document

s’appuie davantage sur les voies et moyens permettant de restaurer la confiance du

peuple en la Justice et ce via, notamment :

- une volonté politique sincère permettant de lever la tutelle sur la magistrature et

de consolider la profonde croyance au rôle que cette dernière joue dans le déve-

loppement et la prospérité du système judiciaire et pénitentiaire ;

- l’édification d’une conception claire par le magistrat de la notion d’indépendance

et de neutralité vis–à-vis de tous, ainsi que la nécessité d’une mise à jour perma-

nente de leurs capacités en ligne avec les principales innovations adoptées dans

le domaine judiciaire ;

- la mise en place de mécanismes de contrôle, de suivi et de redevabilité permet-

tant d’étendre et d’asseoir les valeurs de la Justice dans son sens universel ;

- le renforcement du cadre humain et matériel de l’inspection afin que cette der-

nière accomplisse sa mission d’enquête, d’évaluation et d’application de la déon-

tologie et sculpte ainsi le modèle du magistrat neutre et intègre.

Je voudrais en outre rappeler que la réussite de toute réforme ne peut se faire qu’à

travers des politiques et des magistrats qui croient en cette dernière et assurent sa

consécration.

En conclusion, je voudrais confirmer l’engagement de l’Instance Provisoire pour la

Supervision de la Justice judiciaire à appuyer la concrétisation de cette réforme du

système judiciaire et pénitentiaire souhaitant qu’elle se réalise dans les délais im-

partis et qu’elle soit à la mesure des attentes de l’ensemble des acteurs.

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I - Les fondements consensuels et participatifs de la vision stratégique

Pour répondre à la demande de réforme du système judiciaire et pénitentiaire exprimée au lendemain de la révolution de 2011, il était nécessaire d’élaborer une vision stratégique de cette réforme de manière participative, partagée et acceptée, et qui prenne sa source dans les opinions et solutions proposées par les parties prenantes de ce secteur.

Cette vision s’est fondée sur des ré-férences institutionnelles de base, sur les recommandations d’organisations nationales et internationales et sur l’expression d’une volonté de la part de tous les acteurs nationaux du sec-teur de la justice à travers l’organisa-tion d’une consultation nationale sur la réforme qui s’est déroulée en 2013 sur tout le territoire national1.

1. Les référentiels de base :

- Le Plan stratégique du ministère de la Justice (2012-2016) : « Le minis-tère compte jouer un rôle actif dans la gestion du processus de réforme du système de justice, y compris le

Première partie :Les fondements de la vision stratégique

système pénitentiaire, en fournis-sant les conditions logistiques et techniques nécessaires à une large participation de tous les intéressés du secteur (…)» (Produit 1.2. Gestion du processus de réforme du sys-tème de justice y compris le sys-tème pénitentiaire).

- Le document de projet conjoint PNUD-HCDH « Soutien à la réforme du secteur de la justice et au pro-cessus de justice transitionnelle en Tunisie (2012-2014) » signé avec les ministères de la Justice et des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle en mai 2012 : « D’ici à la fin 2013, une vision stratégique de la réforme du secteur de la jus-tice, y compris le système péniten-tiaire, est développée en concerta-tion avec l’ensemble des acteurs».

2. Les recommandations des organi-sations nationales et internationales

Ces recommandations issues d’ana-lyses approfondies et pragmatiques de la situation du domaine de la justice en Tunisie adoptent une orientation com-mune pour le traitement des questions issues de cette situation, à savoir l’ins-

1

1 Voir « Consultation nationale sur la réforme de la justice », rapport publié en décembre 2013.

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12 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

cription de la réforme dans :- un processus consultatif de toutes

les parties prenantes publiques et privées ;

- une large participation garante de la pérennité de l’adhésion aux re-formes et à leur applicabilité ;

- un cadre juridique conforme aux normes internationales (notamment les Déclarations de référence-Paris/Accra/World Summit Outcome).

3. Les recommandations de la consultation nationale sur la réforme de la justice

Le Plan stratégique 2012-2016 du mi-nistère de la Justice prévoit, parmi ses priorités, la nécessité de développer un processus de réforme de la justice qui doit mener à l’élaboration d’une vision stratégique de réforme du système judiciaire et pénitentiaire. Ce proces-sus a effectivement débuté en octobre 2012 par la mise en place d’un comité de pilotage pour la réforme de la jus-tice chargé d’adopter une vision stra-tégique de la réforme2. Il est constitué par les représentants des différents services du ministère de la Justice, des droits de l’Homme et de la justice tran-

sitionnelle, d’institutions rattachées, du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), du Haut-com-missariat aux droits de l’Homme (HCDH) auxquels peuvent, sur décision du pré-sident du Comité (le Ministre), se joindre tout membre d’organisation syndicale, de la société civile ou toute autre per-sonne ressource.

Ce comité de pilotage de la réforme a décidé en octobre 2012 d’organiser des consultations nationales afin de re-cueillir et d’analyser, dans un esprit par-ticipatif et transparent, les préoccupa-tions et attentes des populations, de la société civile, des acteurs de la justice et des intervenants institutionnels ain-si que des partenaires techniques et fi-nanciers sur la réforme de la justice. Ces consultations se sont déroulées d’avril à septembre 2013 et les résultats en ont été rendus publics à l’occasion d’un atelier tenu en décembre 2013.

La formulation de la vision stratégique du système judiciaire et pénitentiaire s’inscrit à la suite de cette consulta-tion nationale sur la réforme du secteur de la Justice dont les résultats ont été l’expression de la volonté nationale sur

1

2 Voir « Décision ministérielle portant création du comité de pilotage de la réforme de la justice », MJ 2012

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la réforme de ce secteur. Cette volonté a été accompagnée dans un mouve-ment d’ensemble par les partenaires internationaux à travers les missions de diagnostic, d’expertise, d’études du secteur de la Justice et l’organisation de manifestations portant sur la ré-forme du secteur.

Le résultat de cet effort national et in-ternational, exprimé en recommanda-tions, vérifiées et enrichies par chaque partie-prenante à la réforme, prévoit les axes d’intervention suivants :

Axe 1 : Indépendance et autonomie du pouvoir de la justiceAxe 2 : Moralisation des systèmes judi-ciaire et pénitentiaireAxe 3 : Qualité de la Justice et protec-tion des droits du justiciableAxe 4 : Accès à la JusticeAxe 5 : Communication et partenariat des institutions judiciaires et péniten-tiaires

II - Les attentes de réforme du système judiciaire et pénitentiaire

La restauration de la transparence, de la crédibilité et du respect de l’appareil judiciaire est une condition indispen-

sable à la réussite du processus de justice transitionnelle démarré au len-demain de la révolution et la condition sine qua non à la mise en place d’un Etat de droit.

1. Appuyer la mise en œuvre du processus de justice transitionnelle

La justice transitionnelle est l’ensemble des mécanismes mis en œuvre pour tenter de faire face à des exactions massives commises dans le passé, en vue d’établir les responsabilités, de rendre la justice et de permettre la ré-conciliation. La Justice a donc un rôle fondamental à jouer dans ce proces-sus mais c’est seulement suite à la réforme de ce secteur qu’elle sera à même d’assurer des poursuites effi-caces contre les auteurs des violations passées et qu’elle pourra contribuer à prévenir, au-delà de la période de tran-sition, la réémergence des violations et pérennisera l’Etat de droit.

2. Concrétiser les aspirations à la mise en place d’un Etat de droit

Dans un environnement institutionnel de pays en transition démocratique, la réforme du secteur de la Justice est

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toujours un défi qui doit être relevé par une Nation qui aspire à la liberté et la démocratie dans un Etat de droit per-manent.

En Tunisie, ce défi est en train d’être relevé par les citoyens, à travers leurs institutions, convaincus qu’il ne peut y avoir de paix et de développement sans une Justice indépendante et au-tonome3. Pour concrétiser cette aspira-tion, le ministère de la justice a initié le processus d’élaboration de cette vision stratégique. Cette vision est partagée par l’ensemble des parties prenantes nationales et internationales parte-naires au développement. C’est une vi-sion intégrée, en ce sens qu’elle prend en considération la vision stratégique

du ministère de la Justice, les attentes des acteurs ainsi que les normes inter-nationales relatives à l’indépendance de la Justice, de la magistrature et du barreau, aux droits du justiciable, du prévenu et des conditions de détention et de traitement des détenus4.

3. Réviser la chaine pénale

La vision stratégique s’appuie sur une approche réformatrice qui vise à conso-lider l’Etat de droit en révisant la chaîne des droits, obligations et responsabili-tés dans laquelle s’inscrit le justiciable5. C’est avec la collaboration d’une partie des acteurs de cette chaîne qu’avant la révolution le pouvoir exécutif confisquait les droits et les libertés des citoyens6.

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3 « 59,2% des tunisiens pensent que les magistrats sont actuellement influencés par la politique et uniquement 33,6% pensent que la magistrature tunisienne est actuellement neutre ». Rapport de la consultation nationale de la réforme de la justice, Tu-nis 2013, p. 23.4 Cette vision stratégique trouve, dans l’ensemble des conventions, normes, principes fondamentaux et directeurs élaborés par l’Organisation des Nations Unies relatifs aux magistrats, aux avocats et au traitement des détenus, une source impor-tante de concrétisation de l’indépendance de la justice dans un Etat de droit.5 « Les cinq dysfonctionnements majeurs apparaissent être :•Les abus de la détention provisoire et les conditions carcérales•La surcharge déraisonnable du rôle des audiences, aboutissant à multiplier les renvois et compromettant la plupart des

garanties procédurales (délai raisonnable, présomption d’innocence, examen complet du dossier, droits de la défense…), •L’absence d’accès du plaideur à un avocat compétent, disponible et correctement rémunéré de ses travaux,•L’absence de respect de l’égalité des armes par le Barreau,•L’absence de respect de l’égalité des armes par le Parquet. » Le Réseau d’observation de la Justice tunisien (ROJT : ONAT/LTDH/ASF) - Rapport - septembre 2013.6 « Des valeurs malheureusement piétinées et vidées de leur quintessence par une dictature qui pendant plus de deux décen-nies a distillé insidieusement les fléaux de corruption, de népotisme et de favoritisme afin d’obtenir l’allégeance de certains professionnels pour mettre la main sur les systèmes judiciaire et financier et servir des intérêts personnels. ». Plan straté-gique 2012-2016 du Ministère de la Justice. P.5.

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La réforme du système pénitentiaire, maillon incontournable de cette chaine pénale, s’insère donc impérativement dans la réforme du secteur de la justice et conditionne sa réussite.

La vision stratégique prévoit de pla-cer cette chaîne « police-justice-pri-son » sous l’emprise du droit mis en œuvre par des institutions judiciaires indépendantes et autonomes, en droit et en fait, ayant les moyens humains, matériels et financiers de leur mission dans un environnement professionnel qui promeut les valeurs éthiques et déontologiques.

4. Moderniser le système judiciaire et pénitentiaire

L’inscription de cette vision straté-gique dans une approche de moder-nisation des institutions judiciaires et pénitentiaires, dans leurs méthodes et outils juridictionnels, appelle la dynami-sation des institutions d’études et de formation qui constituent le lieu de la recherche pour l’innovation juridique et le renforcement des capacités du corps judiciaire, du personnel administratif des juridictions et des membres des professions judiciaires.

La vision stratégique n’est donc que l’expression d’une synergie d’ensemble devant aboutir à mettre le droit au ser-vice du citoyen et à donner aux institu-tions qui la mettent en œuvre, la place qui leur revient dans un Etat de droit.

III - L’apport de la vision stratégique au partenariat avec les acteurs nationaux et internationaux

L’intervention des partenaires dans le secteur de la Justice est handica-pée par l’absence d’une cadre adéquat d’appui à sa réforme. Les partenaires internationaux, notamment, ont poten-tiellement la capacité de soutenir et de financer des pans de la Réforme mais leur intervention ne s’inscrit que dans leurs programmes d’intervention en fonction de leur perception de l’appui qu’ils peuvent apporter.

Cette perception est conforme aux conventions d’aide au développement et aux programmes régionaux spéci-fiques que chaque organisation met en œuvre au profit du pays bénéficiaire. Il en résulte que leur cadre d’interven-tion est celui de normes, référentiels et standards que ces organisations défi-nissent et traduisent dans leurs inter-

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ventions. Elles s’appuient en cela sur l’arsenal juridique international que la Tunisie a ratifié et sur les résultats de diagnostics, d’études et de recomman-dations issues des missions d’exper-tises qu’elles réalisent dans le secteur de la Justice.

1. L’établissement d’un référentiel d’investissement concerté

Ce louable effort d’appui ne s’insère ce-pendant pas dans le cadre d’une stra-tégie globale qui inclue tous les besoins et les attentes en matière de réforme du secteur de la Justice. En effet, ces appuis ont jusqu’à maintenant été mis en œuvre en réponse à des besoins ex-primés de manière ponctuelle par les acteurs du système ce qui ne concourt pas à un développement harmonisé de l’appui et de son apport au secteur. La chaîne de valeur ajoutée par la contri-bution internationale en renforcement des capacités, sous forme matérielle et immatérielle, est donc diffuse et il est difficile de mesurer sa contribution d’ensemble à la réforme du secteur.

L’absence d’un plan définissant, à l’échelle de la politique sectorielle de l’Etat, les attentes et les besoins du secteur de la

Justice a donc constitué un manque de référentiel pour tous les financements internationaux dans le secteur.

Il n’y avait pas jusqu’à maintenant un cadre concerté et participatif tradui-sant, en un document d’orientation et d’action, les attentes des pouvoirs pu-blics et pouvant servir de référentiel pour justifier et orienter les interven-tions internationales dans l’appui au secteur de la justice.

La vision stratégique répond à ce be-soin en traçant ce cadre qui devra ser-vir de référentiel d’investissements en mettant en évidence les attentes et les besoins du secteur de la Justice.

2. La maximalisation des avantages comparatifs des intervenants dans l’appui au secteur

Servant de cadre conceptuel, la vision stratégique permet à chaque parte-naire d’intervenir en fonction de son expertise technique en tenant compte de son champ de compétences. Elle offre une approche d’investissement en termes d’avantages comparatifs propres à chaque agence ou organisme partenaire.

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L’inscription des actions des parte-naires dans le cadre de la vision stra-tégique permet à la fois d’optimiser l’in-tervention des partenaires, en évitant les investissements redondants et en donnant aux pouvoirs publics la capa-cité de suivre l’ensemble des interven-tions dans le secteur.

Le monitoring par les pouvoirs publics de l’intervention des partenaires, en s’appuyant sur leurs programmes d’in-tervention et référençant les aspects de la réforme dans lesquels ils inter-viennent, permettra de créer une ef-ficacité dans l’investissement et une complémentarité entre les actions en-treprises dans ce secteur.

3. La visibilité des objectifs et l’agré-gation de la chaîne de valeur ajoutée

Durant ces dernières années, l’inves-tissement dans le domaine de la jus-tice s’est caractérisé par un manque de visibilité quant aux moyens, mé-

thodes et résultats. La valeur ajou-tée des investissements successifs ne transparaît pas dans des résultats concrets.

En matière de coopération, chaque organisation internationale intervient dans l’aspect qui lui semble le plus im-portant pour développer le secteur de la Justice. Il en résulte, du fait même du manque de coordination entre les pro-grammes d’intervention de ces diffé-rentes organisations, la création certes d’une valeur ajoutée mais non agrégée avec celle apportée par les autres or-ganisations dans ce même secteur.

Ainsi, l’adoption d’une vision straté-gique qui sera mise en œuvre sous la supervision de l’autorité nationale et largement diffusée auprès des parte-naires, permettra de créer une synergie rendant plus cohérents et visibles les objectifs poursuivis et qui permettra aussi un meilleur monitoring des résul-tats attendus.

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La Justice tunisienne s’inscrit dans un cadre normatif interne qui définit le pouvoir judiciaire, l’organise et le struc-ture et dans un cadre normatif interna-tional, expression d’engagements in-ternationaux de l’État tunisien.

Malgré un cadre normatif sophistiqué, la justice a souvent été un instrument au service de politiques de l’Etat, la ré-duisant alors à un appareil soumis aux contraintes du pouvoir exécutif7. Dans ce contexte autoritaire, elle n’a pu dé-velopper ni autonomie ni indépendance8. Cette situation a eu un impact consi-dérable sur les droits et libertés des ci-toyens. L’expression la plus immédiate a été la répression des mouvements d’opi-nion et de réforme, la violation des droits et des libertés, les détentions arbitraires, les jugements partiaux, l’engorgement des centres pénitentiaires et la détério-ration des conditions carcérales.

L’ensemble des réactions pour dénon-cer cette situation n’ont pu aboutir et ont été dissipées par la coercition9. Avec l’avènement de la transition, cette situation a été remise en cause publiquement et a été suivie d’un mou-vement de fond national mené par les organisations de la société civile10, les autorités publiques et accompagné par les organisations internationales.

I - Le contexte pré-transitionnel

Durant la période politique précé-dente au 14 janvier 2011, l’étau qui enserrait la Justice donna lieu à de vives réactions de la part des ac-teurs nationaux et internationaux contre l’hégémonie du pouvoir exé-cutif sur le judiciaire. Ces réactions entrainèrent cependant un ensemble « d’améliorations » très limitées face à l’ampleur des maux dont souffrait la

Deuxième partie :le contexte du système judiciaireet pénitentiaire

1 2 3 4

7 «La révolution tunisienne de janvier 2011 constitue une opportunité pour l’instauration d’un état de droit respectueux des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ». Mission UE de Diagnostic du système judiciaire et pénitentiaire (Peer Based Review). Rapport final 2011, P. 3. 8 «La justice tunisienne, dans son ensemble, est strictement contrôlée par le régime, à la fois dans les textes et dans la pra-tique. Au cours des dernières années, certaines réformes techniques ont été adoptées afin de moderniser l’administration de la justice, sans toutefois jamais aborder la question de son indépendance ». Rapport Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme. 2008, P. 45.9 « La situation du Juge Mokhtar Yahyaoui illustre également parfaitement ce à quoi s’exposent les juges qui réclament le respect de leurs droits. Pour plus d’informations sur ce sujet et l’état de la justice tunisienne en général, voir « L’indépendance et l’impartialité de la justice tunisienne », www.euromedrights.net et REMDH, 2008.10 «Authoritarian mechanisms for regulating civil society curbed the capacity of CSOs (…). Human rights activists were of-ten imprisoned». In International Alert “Transforming Tunisia: The Role of Civil Society in Tunisia’s Transition, P. 12-13 et M. Rishmawi (2007). “Overview of civil society in the Arab world”, Praxis Paper No. 20. October (http://www.intrac.org/data/files/resources/421/Praxis-Paper-20-Overview-of-Civil-Society-in-the-Arab-World.pdf).

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20 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

Justice11. Durant cette période, aucune réforme d’ensemble n’a été mise en œuvre et seules des mesures éparses en réponse aux aspects décriés du moment ont été mises en œuvre.

Quant à l’appui apporté par les organi-sations internationales, il fut décrié par les acteurs de la société civile car il n’al-lait pas vers les problèmes cruciaux de la Justice, mais se cantonnait à l’infrastruc-ture, à l’équipement (mobilier, informa-tique etc.) ou à des formations éparses déconnectées des besoins réels12. Cette situation transparaissait tant dans les garanties constitutionnelles de l’indé-pendance de la Justice que dans le sta-tut des magistrats et des professions judiciaires dans leur ensemble.

II - Les mesures prises durant la période pré-transitionnelle

Ces mesures ont concerné des as-pects techniques et procéduraux

dont la portée d’ensemble est limi-tée. Il en fut ainsi de la révision de la carte judiciaire, avec l’instauration de nouvelles juridictions, dont le Tribunal des conflits, le Tribunal pour enfant et des Cours d’appel dans certaines ré-gions ainsi que la création d’organes juridictionnels des chambres d’appel (Tribunal administratif) telle que les chambres fiscales (Cours d’appel), les Chambres d’appel criminelles, le juge d’exécution des peines, le juge des affaires de sécurité sociale et les chambres commerciales, le juge des affaires familiales (première instance), et enfin, la révision de certains or-ganes juridictionnelles (les chambres prudhommales). Toutefois, ces me-sures n’ont pas apporté de modifica-tions de fond dans la situation de dé-pendance et de manque d’autonomie et de gestion dans laquelle s’exerçait la Justice.

1 2

11 « Malgré le potentiel humain et matériel dont dispose le système de justice, les analyses menées par les experts nationaux et internationaux ont mis l’accent sur des lacunes qui nous ont amenés à élaborer ce Plan stratégique destiné à relever un grand nombre de défis dont les plus urgents résident dans le regain de confiance du citoyen vis-à-vis d’un système judiciaire fondé sur l’indépendance, l’impartialité, l’intégrité et le respect. Des valeurs malheureusement piétinées et vidées de leur quintessence par une dictature qui pendant plus de deux décennies a distillé insidieusement les fléaux de corruption, de népotisme et de favoritisme afin d’obtenir l’allégeance de certains professionnels pour mettre la main sur les systèmes judiciaire et financier et servir des intérêts personnels. » Plan stratégique 2012-2016 du Ministère de la Justice, P. 5.12 « Tous ces obstacles ont généré un système de justice incapable de respecter les standards internationaux et d’adopter les meilleures pratiques judiciaires utilisées aux niveaux régional et international ». Idem, p.4-5.

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III - Les mesures prises dans le contexte transitionnel

1. Justice transitionnelle et réforme de la justice

Après le 14 janvier 2011, la revendica-tion de réforme s’est inscrite dans le cadre du processus de « justice tran-sitionnelle » dont le but ultime est d’établir les responsabilités, de rendre la justice et de réparer les personnes physiques et personnes morales, y compris l’Etat lui-même, dont les droits ont été violés et les biens spoliés du-rant l’ancien régime ainsi que de mettre en place des garanties de non-répéti-tion de ces violations.

La loi constitutionnelle n°2011-6 du 16 décembre 2011, relative à l’organisa-tion provisoire des pouvoirs publics, en son article 24, a ainsi habilité l’Assem-blée Nationale Constituante à voter « une loi organique qui organise la jus-tice transitionnelle et en détermine les bases et le champ d’application ». Un ministère des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle a ensuite été créé. Ce dernier avait pour mission, à

côté « de la présentation et du suivi de l’exécution de la politique portant sur les droits de l’Homme », de développer « un ensemble de stratégies pour trai-ter les atteintes aux droits de l’Homme commises dans le passé, basées sur la recherche de la vérité, le jugement et la réconciliation conformément aux principes de justice transitionnelle tel qu’adoptés au niveau national, afin de renforcer la transition démocratique et de contribuer à la réalisation de la ré-conciliation nationale »13.

Ce ministère avait pour mission d’agré-ger la stratégie des pouvoirs publics déjà commencée en février 2011 avec la création de commissions et de comités nationaux (pour l’investigation sur les abus enregistrés durant la révolution, sur la corruption,…), les décrets lois por-tant sur les réparations aux victimes de la révolution et l’amnistie, en un cadre lé-gal unique et cohérent. Pour arriver à ce résultat, il était d’ailleurs chargé « d’or-ganiser des consultations portant sur le cadre légal de la justice transitionnelle et ses mécanismes de mise en applica-tion en veillant à inclure les instances gouvernementales et les acteurs de la

1

13 Décret n°2012-22 du 19 Janvier 2012.

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22 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

société civile pertinents14 ». C’est ainsi qu’à partir d’avril 2012, une commission technique nationale créée par arrêté du ministre des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle a été chargée de superviser l’organisation d’un dialogue national sur la justice transitionnelle devant aboutir à l’élaboration d’une loi sur la justice transitionnelle. Cette loi, dont le projet avait été déposé à l’ANC en janvier 2013, a finalement été adop-tée le 15 décembre 2013.

La loi organique n°2013-53 relative à l’instauration et l’organisation de la jus-tice transitionnelle prévoit la création de l’Instance Vérité et Dignité (IVD) qui de-vra rechercher la vérité sur les violations commises du 1er juillet 1955 au 31 dé-cembre 2013 et mettre en place un fond pour la réhabilitation des victimes. Elle insiste aussi sur le rôle des institutions judiciaires qui devront entamer des poursuites contre les auteurs présumés de ces violations en prévoyant notam-ment la création de chambres spéciali-sées au sein de certains tribunaux tuni-siens. Elle prévoit en outre un chapitre spécifique relatif aux réformes des ins-

titutions nécessaires pour « démanteler le système de corruption, de répression et de dictature, et à y remédier d’une ma-nière à garantir que les violations ne se reproduisent plus, que soient respectés les droits de l’Homme et que soit consa-cré l’Etat de droit15 » et la mise en place d’un « comité de l’examen fonctionnel et de la réforme des institutions » au sein de l’IVD qui devra notamment « présen-ter des propositions pratiques en vue de réformer les institutions impliquées dans la corruption et les violations16 ».

La réforme du secteur de la justice est donc d’autant plus urgente qu’elle est une condition essentielle à la réussite du processus de justice transitionnelle qui doit pouvoir compter sur un appareil judiciaire capable, par son indépendance et son intégrité matérielle et morale, de rendre pleine justice aux victimes mais aussi contribuer à la non-répétition des violations graves des droits de l’Homme.

2. L’adoption d’une nouvelle Constitution

La Constitution du 1er juin 1959, telle qu’elle fut amendée, énonçait un en-

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14 Décret n°2012-22 du 19 Janvier 2012.15 Art. 14 loi organique n°2013-5316 Art. 43 loi organique n°2013-53

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semble de principes d’indépendance de la Justice et du magistrat et conférait au Conseil supérieur de la Magistrature la fonction de veiller «au respect des garanties accordées aux magistrats en matière de nomination, d’avancement, de mutation et de discipline». Toute-fois, l’effectivité de ces dispositions re-latives au « pouvoir de la justice » était neutralisée par la référence explicite à la loi pour «définir les modalités, les conditions, les garanties etc. » d’ap-plication de chaque disposition. Ceci a conduit à la confiscation des pouvoirs du juridictionnel et sa mise sous tutelle d’un pouvoir exécutif, dont le pouvoir législatif - du fait du parti unique et de la personnalisation du pouvoir politique - n’était qu’une extension.

La nouvelle Constitution promulguée le 27 janvier 2014 a consacré son chapitre V au « Pouvoir de la justice», constitué de trois ordre juridictionnels : le judi-ciaire, l’administratif et le financier re-présentés au sein du Conseil supérieur de la Magistrature, et qui comprend aussi une assemblée des conseils de ces différents ordres.

Elle consacre les principes d’indépen-dance et d’autonomie des organes ju-

ridictionnels ainsi que la compétence, l’intégrité et l’inamovibilité des magis-trats sous le contrôle et la supervision du Conseil supérieur de la Magistrature.

La nouvelle Constitution promulguée le 27 janvier 2014 a donc posé les prin-cipes fondamentaux et les mécanismes organiques et fonctionnels généraux pour l’instauration d’une justice indé-pendante et autonome administrative-ment et financièrement.

Toutefois, l’effectivité des dispositions du Chapitre V relatif au «Pouvoir de la Jus-tice» est tributaire de la référence consti-tutionnelle explicite à la loi pour définir les modalités, les conditions et les garan-ties d’application de chaque disposition. Ce renvoi à la loi - organique et ordinaire - avait sous la Constitution du 1er juin 1959 conduit à neutraliser les principes et mécanismes d’indépendance du pouvoir judiciaire énoncés dans la Constitution.

La réforme du pouvoir de la justice dans le cadre de la nouvelle Constitu-tion, sera donc mise en œuvre à travers les lois d’application des dispositions constitutionnelles et devra renforcer les moyens institutionnels de leur édic-tion et de leur contrôle.

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24 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

3. L’Instance provisoire pour la supervision de la justice judiciaire et le nouveau Conseil supérieur de la magistrature

La loi organique n° 2013-13 du 2 mai 2013 a créé « une instance provisoire indépendante » qui supervise la justice judiciaire jouissant de l’autonomie ad-ministrative et financière et remplaçant le conseil supérieur de la magistrature prévu par la Constitution de 1959, dé-nommée « instance provisoire de su-pervision de la justice judiciaire17».

Cette instance « statue sur la carrière professionnelle des magistrats concer-nant leur nomination, promotion, mu-tation et discipline. Elle émet un avis consultatif sur les projets de loi relatifs au fonctionnement de la Justice et aux voies de réforme du système de la jus-tice judiciaire. L’instance peut présenter de sa propre initiative toute proposition et recommandation qu’elle juge utiles pour promouvoir l’action judiciaire18 ».

Toutefois cette instance reste limitée par ses moyens matériels, financiers et techniques. Ne disposant ni d’un siège

propre, ni d’un budget effectivement affecté, ni d’une administration auto-nome, l’instance provisoire de supervi-sion de la justice judiciaire ne peut rem-plir sa mission dans un environnement de dépendance matérielle et financière.

La nouvelle Constitution du 27 janvier 2014 a institué un Conseil supérieur de la Magistrature (CSM) qui est composé de quatre organes : le Conseil de la juridic-tion judiciaire, le Conseil de la juridiction administrative, le Conseil de la juridiction financière et l’Assemblée générale des trois conseils juridictionnels. Il garantit le bon fonctionnement de la Justice et le respect de son indépendance. Ses trois organes chargés des juridictions judi-ciaires, administratives et financières statuent sur les questions relatives à la carrière et à la discipline des magistrats.

La Constitution a conféré au nouveau CSM une large autonomie administrative et financière, qu’elle a qualifiée de « ca-pacité d’autogestion » lui permettant d’élaborer son budget annuel et de le présenter à la discussion à la Commis-sion compétente de l’assemblée des re-présentants du peuple.

1 2

17 Art. 1 loi organique n° 2013-13 du 2 mai 2013.18 Loi organique n° 2013-13 du 2 mai 2013, art. 2.

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Le secteur de la Justice, à travers le pouvoir judiciaire qui l’anime, a hérité d’une situation issue de dizaines d’an-nées d’instrumentalisation et de dé-pendance. Maintenu dans une dépen-dance professionnelle, administrative et financière le privant de la gestion au-tonome de ses ressources humaines et matérielles en fonction de ses besoins et de ses attentes19. Avec l’avènement de la transition, le secteur de la justice est apparu dans sa véritable dimension à facettes multiples : une infrastruc-ture délabrée, des moyens matériels vétustes et obsolètes, des ressources humaines à mettre à niveau et un pou-voir judiciaire qui le sous-tend, récla-mant son indépendance et son auto-nomie confisquées.

I - Le système judiciaire

Le système judiciaire a subi, ces der-nières années, l’influence d’un envi-ronnement politique défavorable à la promotion de l’Etat de droit20. Il a, sur certains plans, manifesté une résis-tance à la dérive la payant par les re-présailles qui ont touché une frange du

corps professionnel alors que l’institu-tion juridictionnelle elle-même souffrait de sa dépendance à l’égard d’un pou-voir exécutif qui, durant des décennies, lui a imposé des relations de subordi-nation. Ceci explique que le secteur ju-ridictionnel, maintenu dans la dépen-dance, ne définissait pas de priorités sociales, économiques et financières pour son développement, ni ne pouvait en exprimer librement.

L’avènement de la Révolution, et la re-mise en question de l’ordre existant qui l’accompagne, a mis en évidence les faiblesses du secteur de la justice. Cet élément est d’autant plus important que c’est sur ce secteur qu’il fallait, pa-radoxalement, s’appuyer pour réussir la transition. La revendication majeure des mouvements étant de rendre jus-tice à la Nation, à la masse, au groupe, à l’individu, personne physique ou mo-rale et il fallait que le secteur y contri-bue dans l’urgence. Ce défi, les pou-voirs publics de la transition ont tenté d’y faire face en adoptant des mesures dont l’effet, mitigé, n’a pas eu l’impact attendu du fait de l’ampleur de la tâche.

Troisième partie :L’état des lieux du système judiciaire et pénitentiaire

1 2

19 Voir les comptes rendus sur ces différents aspects d’indépendance et d’autonomie du judiciaire dans les rapports de l’Ob-servatoire Tunisien de l’Indépendance de la Magistrature (OTIM). 2012 et 201320 Voir les résultats de l’enquête d’opinion réalisée auprès des justiciables dans le cadre de la « Consultation nationale sur la réforme de la justice», rapport publié en décembre 2013.

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26 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

Les mesures de révocation de certains magistrats et la libération de détenus politiques ont opéré un apaisement plus qu’un véritable changement dans le secteur juridictionnel. L’élément le plus significatif de l’effort de réforme, décrié dans ses prérogatives et ses moyens, fut la création de l’Instance provisoire de supervision de la justice judiciaire. Ces mesures, ne constituant que des approches pour parer au plus urgent, ne s’inscrivaient pas dans une approche stratégique intégrée devant servir à réformer le système judiciaire.

1. La nouvelle Constitution

La nouvelle Constitution du 27 janvier 2014 a apporté des améliorations fon-damentales quant à l’indépendance organique et fonctionnelle du pouvoir de la justice. Toutefois du fait du renvoi de cette Constitution à des lois d’ap-plication, l’effectivité de cette indépen-dance sera tributaire de la conformité des textes législatifs d’application aux principes constitutionnels posés.

L’édiction de ces textes se doit donc d’intervenir après la mise en place d’une « Instance provisoire chargée du contrôle de la constitutionnalité des

projets des lois » prévue par les dis-positions transitoires qui fera ensuite place à l’institution de la Cour Consti-tutionnelle. Ce contrôle de la consti-tutionnalité des lois relatives à l’indé-pendance du pouvoir juridictionnel est donc une condition sine qua non de viabilité et de continuité de la réforme dudit secteur.

La nouvelle Constitution prévoit no-tamment une réorganisation du Pouvoir de la Justice en établissant la mise en place d’un Conseil supérieur de la Ma-gistrature qui est composé de quatre organes : le Conseil de la juridiction ju-diciaire, le Conseil de la juridiction ad-ministrative, le Conseil de la juridiction financière et l’Assemblée générale des trois conseils juridictionnels.

L’article 115 de la nouvelle Constitution relatif à la justice judiciaire établit en outre qu’elle est composée d’une Cour de cassation, de tribunaux de second degré et de tribunaux de première ins-tance. Il précise que le Ministère public fait partie de la justice judiciaire et béné-ficie des mêmes garanties constitution-nelles et que les magistrats du Ministère public exercent leurs fonctions détermi-nées par la loi et dans le cadre de la poli-

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tique pénale de l’Etat conformément aux procédures déterminées par la loi.

2. L’organisation judiciaire

Les juridictions de l’ordre judiciaire sont soumises aux dispositions de la loi n°67-29 du 14 juillet 1967, relative à l’organisation judiciaire, au Conseil su-périeur de la magistrature et au statut de la magistrature tel qu’il a été com-plété et modifié par la loi organique n°2005-81 du 4 aout 2005. Le nombre de juridictions est de 139 juridictions constituées d’une Cour de cassation, de Cours d’appels (10)21, des tribunaux de première instance (28) auprès de Cours d’appel, de tribunaux de justice cantonale (85) auprès des tribunaux de première instance et du Tribunal immobilier. Les juridictions judiciaires statuent sur toutes les affaires civiles et pénales que la loi ne confie pas à d’autres organes juridictionnels.

3. Les conventions internationales

Bien avant la transition, la Tunisie avait ratifié d’importantes conventions im-posant aux Etats la protection des

droits et des libertés des personnes, notamment : le Pacte international re-latif aux droits civils et politiques du 12 décembre 1966, la Convention des Nations unies relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes du 18 décembre 1979, la Convention sur les droits de l’enfant du 20 novembre 1989, la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984, la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples du 26 juin 1981.

D’autre part, la Constitution tunisienne du 1er juin 1959, telle qu’amendée, dis-posait en son article 32 que «les trai-tés ratifiés par le président de la Répu-blique et approuvés par la chambre des députés ont une autorité supérieure à celle des lois ». Ce même principe est d’ailleurs repris par la nouvelle Consti-tution qui établit en son article 20 que « les traités approuvés par l’Assemblée représentative et ratifiés ont une auto-rité supra-législative et infra-constitu-tionnelle ».

1

21- 12 suite à la création des cours d’appel de Kasserine et Sidi Bouzid qui ne sont pas encore fonctionnelles à la date de publication de ce rapport.

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28 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

Cependant, la traduction en droit in-terne des traités internationaux ra-tifiés n’a pas été, et pour les causes précitées, une préoccupation majeure du juge22 bien que ces traités sur les droits civils et politiques, sur les droits de l’Homme en général, constituent son champ naturel de compétence étant le protecteur des libertés individuelles et le garant de la propriété privée.

II - Le système pénitentiaire

Le secteur pénitentiaire est actuelle-ment dans une situation critique du fait de l’engorgement des prisons, du manque d’espace dans ses installa-tions, de l’insuffisance et de la vétusté de ses moyens logistiques et de trans-port.

Avec plus de 25.000 détenus, les pri-sons sont saturées23. Le transport quotidien des prévenus en détention vers les tribunaux pour leur jugement est un obstacle majeur pour l’admi-nistration pénitentiaire puisque le nombre de ces prévenus avoisine la

moitié de l’ensemble des détenus. A titre d’exemple, la prison de Mornaguia réalise un transport quotidien moyen de plus de 400 prévenus vers les tribu-naux du grand Tunis, avec 5 voitures vétustes et les conséquences que cela peut comporter sur le service péniten-tiaire et la sécurité des agents. Ceci donne une image réduite de l’état des lieux des moyens du pénitentiaire, qui s’aggrave encore davantage puisque plus d’une quinzaine de prisons pré-sentent des failles de sécurité dues à la destruction de plusieurs parties des bâtiments ou de leurs installations in-térieures.

Les prisons se caractérisent par une gestion difficile en termes de moyens matériels et logistiques. De cette situa-tion résulte l’incapacité de faire face, non seulement à l’encadrement interne des prisonniers, mais aussi aux services requis par les visiteurs. Ainsi le nombre de prisonniers ne recevant plus de vi-sites, du fait soit des difficultés d’ac-cès des visiteurs aux prisons, soit d’un abandon du prisonnier par sa famille,

1 2 22 « La tendance du juge, quoique difficile encore à systématiser, semble mitigée, consistant tantôt à occulter du champ de ses sources les traités, tantôt à articuler ses décisions sur le principe de la supériorité des traités » cf. Rapport 2008 du Ré-seau méditerranéen des droits de l’Homme « l’indépendance et l’impartialité de la justice », p.8.

23 A la date du 31 décembre 2013.

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a atteint des pourcentages alarmants avec ce que cela a comme consé-quences sur l’état psychique et mental des détenus, tous âges confondus.D’autre part, près de la moitié de la po-pulation actuelle des prisons est consti-tuée de « prévenus » qui subissent des conditions carcérales difficiles. La pro-cédure de mise en dépôt des personnes prévenues est utilisée à grande échelle par les juges entrainant une surpopu-lation carcérale, des conditions de dé-tention précaires et une immersion de personnes non encore condamnées dans un milieu pénitentiaire impactant leur devenir social et psychologique.

L’impact du judiciaire, à travers ses dé-lais de jugements et ses renvois, sur la saturation du pénitentiaire de préve-nus en attente de procès ou dont les procès sont en cours, doit être pris en compte pour trouver des solutions à la forte population carcérale, constituée par ces prévenus.

III - Les ressources humaines

Le système judiciaire et pénitentiaire nécessite une mise à niveau de ses res-sources humaines ; non seulement celles constitués par les corps judiciaires et

administratifs des tribunaux et de l’ad-ministration pénitentiaire mais aussi par les membres des ordres professionnels de la justice. La formation continue et le recyclage ont été négligés durant les dernières années. Cette situation est due, pour les corps judiciaires, à leur si-tuation statutaire et réglementaire car leur avancement ne tient compte ni de l’efficience, ni de l’efficacité de leur tra-vail mais de l’ancienneté ou d’une no-mination et, pour les professionnels de justice, à l’absence d’obligation légale de recyclage imposée.

Un magistrat peut dérouler toute sa carrière et prendre sa retraite sans ja-mais se recycler ni entreprendre une mise à niveau de ses connaissances. Il n’y est obligé ni par son statut ni par un intéressement de carrière quelconque. Cette situation a porté grand tort à la Justice. Elle en a perdu en qualité et en autorité. C’est en effet la qualité d’une décision de justice qui impose son res-pect, son acceptation par le justiciable et son exécution.

Les professionnels de la justice, quant à eux, se suffisent de leur diplôme de base - ou de leur réception à un concours professionnel - et de leur pé-

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30 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

riode de stage, pour accéder à l’exercice de la profession. La place qu’ils laissent à leur mise à niveau est réduite. Or le développement fulgurant du savoir en contenant et contenu, en concepts et en pratiques, en méthodes et en outils nécessite une formation continue et continuelle.

La qualité scientifique et technique des professionnels de la justice a un impact considérable sur la Justice. Or, sur ce plan, l’effet d’entraînement de ces pro-fessions n’a pas été à la hauteur des attentes. Les institutions de formation des magistrats et des avocats ne sont pas impliquées de façon programma-tique et périodique dans la mise à ni-veau des professions judiciaires. Ils développent des formations initiales et ne consacrent pas de recyclages obligatoires pour les professionnels en exercice.

Le personnel administratif des tribu-naux est dans une situation de quasi abandon puisqu’il n’existe pas de plan de formation suivi et appliqué entre les juridictions et les institutions de formation. Cette situation s’explique

par le manque d’autonomie (adminis-trative et financière) des tribunaux en la matière mais aussi et surtout par l’absence d’une approche managériale permettant, par exemple, de gérer l’in-suffisance de personnel afin de libérer du personnel pour le recyclage.

En effet, en 2011, les besoins en per-sonnel judiciaire (magistrats du siège, de parquet et juges) se présentaient comme suit : 39 pour les cours d’ap-pel, 445 pour les tribunaux de première instance, et 20 pour les tribunaux can-tonaux. Les besoins en personnel ad-ministratif (agents et greffiers) de l’en-semble des tribunaux se présentaient comme suit : 174 (Cours d’appel), 364 (tribunaux de première instance), 242 (tribunaux cantonaux)24.

1. Le personnel judiciaire

1.1. Le statut des magistrats

Le statut de magistrats est régi par la Loi organique n° 67-29 du 14 juillet 1967 relative à l’organisation judiciaire, au Conseil supérieur de la magistrature et au statut de la magistrature, tel qu’il

1 24 Source : Rapports de l’Inspection générale du Ministère de la Justice (2011 et 2012) et rapports de la Direction générale des services communs (2011/2012).

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fut amendé, et le décret n° 73-436 du 21 septembre 1973 relatif à la fixation des fonctions exercées par les magis-trats de l’ordre judiciaire.

Ce statut s’est avéré inadapté et ina-déquat à la profession. En effet, les magistrats étaient nommés par décret présidentiel sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature, or ce dernier a souvent servi les intérêts de l’exécutif dans la sphère juridictionnelle.

Les modalités de nomination des ma-gistrats ont été modifiées par la loi organique n° 2013-13 du 2 mai 2013, relative à la création d’une instance provisoire pour la supervision de la justice judiciaire en conformité avec la loi constituante n° 2011-6 du 16 décembre 2011, portant organisa-tion provisoire des pouvoirs publics. Cette loi prévoit que la nomination et la désignation des magistrats est ef-fectuée sur la base d’une proposition de l’instance et que les promotions et mutations se font par décret du chef du gouvernement sur la base d’un avis conforme de l’instance.

La nouvelle Constitution du 27 janvier 2014 a consacré les principes d’indé-

pendance, d’intégrité, de compétence, d’autonomie et d’inamovibilité du ma-gistrat et les a consolidés par l’affecta-tion au Conseil supérieur de la Magis-trature des prérogatives organique et fonctionnelle de gestion de la carrière du Magistrat et du contrôle de son acti-vité professionnelle. Le pouvoir exécu-tif, quant à lui, dispose de prérogatives de nomination des magistrats confor-mément aux avis du Conseil supérieur de la Magistrature.

1.2. La formation des magistrats

L’exécutif s’est attribué le pouvoir d’édicter les règles, les procédures et les standards de la formation des ma-gistrats ainsi que les modalités de leur recrutement et de leur accession à la profession, à travers une institution de formation qui lui est rattachée.

La création par la Loi 85-80 du 11 août 1985 d’un nouvel établissement pu-blic administratif, dénommé « Institut supérieur de la magistrature », dépen-dant du ministère de la Justice a mis la formation des magistrats sous tu-telle d’un organe de l’exécutif. Entré en fonctionnement seulement en 1991 et ayant pour objectif une « profession-

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32 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

nalisation » du magistrat, cet Institut a davantage contribué à effectuer un monitoring discrétionnaire par l’exécu-tif du contenu des programmes, des conditions d’entrée, de sélection.La nouvelle Constitution du 27 jan-vier 2014 a imposé la « compétence » comme critère d’exercice de la fonc-tion de magistrat. Cette référence donne une assise constitutionnelle aux dispositifs législatifs et institu-tionnels à mettre en place dans le cadre de la réforme pour le renforce-ment des capacités des professions judiciaires.

2. Le personnel administratif des juridictions

2.1. Les Greffiers

Régis par le Décret n°2002-1007 du 29 avril 2002, portant organisation des greffes, et le Décret n° 2012-246 du 5 mai 2012, fixant leur statut particulier, les greffes de l’ordre judiciaire ont, du-rant ces dernières années, accumulé une image négative auprès des jus-ticiables. En effet, cette dernière est due à l’insuffisance de leur formation qui ne suffit pas à assurer leur spécia-lisation mais aussi à des causes qui

sont indépendantes de leur volonté dont notamment la surcharge de tra-vail, l’insuffisance de leurs effectifs, les moyens matériels limités dont ils dis-posent.

3. Le personnel administratif des prisons

3.1. Agents des prisons et de rééducation

Ce personnel est régi par le Décret n°2006-1167 du 13 avril 2006, fixant le statut particulier du corps des cadres et agents des prisons et de la rééduca-tion, tel que complété et modifié par les textes subséquents. Longtemps confi-né dans l’anonymat du fait de la nature de son activité en milieu carcéral, les difficultés de cette profession n’ont pu être exposées qu’après le 14 jan-vier 2011. Son mouvement syndical a dénoncé les conditions sociales et ma-térielles dans lesquelles s’exerce cette profession et qui n’ont pas trouvé solu-tion auprès des autorités de l’époque.

4. Les auxiliaires de justice

Les auxiliaires de justice ont été au cœur du processus de revendication des

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changements dans le secteur judiciaire. Ils en ont constitué le moteur principal à travers les dénonciations et actes de « résistance » aux décisions illégales et limitatives de l’indépendance de la Jus-tice. Leurs revendications ont aussi por-té sur les conditions professionnelles, matérielles et morales d’exercice de leurs activités. Ces réactions ont pous-sé les pouvoirs publics à prendre des mesures « réformatrices ». Mais elles étaient insuffisantes et n’apportaient aucune solution réelle à l’état de déli-quescence du secteur de la justice.

4.1. Les avocats

Régie avant 2011 par la loi n° 87 du 7 septembre 1989, la profession d’avo-cat a subi les dispositions répressives prises à son encontre par cette loi et les lois successives. Il en fut ainsi de la création d’« infractions » de plaidoirie et de « non révélation de secret profes-sionnel », constitutives de délits punitifs de l’avocat. C’est ainsi que les dénoncia-tions publiques des dérives du système en place et son hégémonie sur le pouvoir juridictionnel ont trouvé un terreau favo-rable dans le milieu du barreau tunisien.

C’est dans ce mouvement que s’ins-crivent tout au long de ces dernières années les revendications des avocats quant à la revalorisation de la profes-sion, l’amélioration des conditions hu-maines, matérielle et morales, la révi-sion des cadres juridiques régissant leur activité.

La profession d’avocat est maintenant régie par le décret-loi n° 2011-79 du 20 août 2011 portant organisation de la profession d’avocat qui a notamment redéfinit les compétences de la profes-sion, les modalités d’inscription ainsi que les droits et devoirs des avocats.

4.2. Les experts judiciaires

Le secteur comprend 1781 experts ju-diciaires25. La profession est régie par Loi n°93-61 du 23 juin 1993, relative aux experts judiciaires, telle que modifiée et complétée par la Loi n°2010-33 du 21 juin 2010. Toutefois l’évolution de la profession est restée tributaire d’amé-liorations attendues par la profession relatives à sa représentation profession-nelle, aux mécanismes de nomination et à la rémunération de ses membres.

1

25 A la date du 31 décembre 2013.

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34 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

Cette profession revendique la trans-parence et la standardisation dans les procédures de désignation des experts par les instances habilitées, et l’objec-tivité par les juges lors de la fixation de leurs honoraires.

Le secteur nécessite une mise à niveau tant dans la formation continue de ses membres que dans la modernisation de ses moyens de travail et d’expertise. De même, la profession a, durant ces der-nières années, accusé un réel handicap du fait des difficultés d’accès à l’informa-tion tant au niveau des tribunaux qu’au-près des institutions administratives pu-bliques. Ceci est dû à la fois à l’absence de moyens d’information adéquat qu’à l’inca-pacité des membres de pouvoir y accéder quand il s’agit de systèmes informatisés.

4.3. Les Notaires

Le notariat est organisé par la loi n° 94-60 du 23 mai 1994.26 La profession regroupe 974 notaires. Tout comme pour le reste des professions judiciaires, ses membres ne sont pas soumis à la mise à niveau obligatoire. S’ajoute à cela les limites de leur mobilité dues à la compétence terri-

toriale et l’empiétement d’autres profes-sions judiciaire sur leur champ de travail. L’absence de structures de regroupe-ment, à l’image des « sociétés profes-sionnelles » permettant leur spécialisa-tion ainsi qu’une structure disciplinaire professionnelle indépendante de l’exécu-tif continuent d’être des revendications exprimées par le corps des notaires. L’accès à l’information tant au niveau des greffes des juridictions qu’au niveau de l’administration publique constitue un handicap à l’exercice de la profession tout au long de ces dernières années.

4.4. Les huissiers de justice

Actuellement au nombre de 935,27 les huissiers de justice sont régis par la loi n°95-29 du 13 mars 1995 portant or-ganisation de la profession des huis-siers de justice. Ils rejoignent les no-taires dans la plupart des difficultés inhérentes à leur profession (formation, organisation…) à laquelle s’ajoute l’in-sécurité qui prévaut lors de l’exécution des décisions de justice (cette situa-tion s’étant encore aggravée après le 14 janvier 2011), les résistances de l’ad-ministration publique à s’exécuter ainsi

1 2 26 A la date du 31 décembre 2013.27 A la date du 31 décembre 2013.

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que les difficultés d’accès à l’informa-tion relatives aux justiciables auprès des services concernés et la nécessité de simplifier les procédures.

IV - Les infrastructures

Bien avant la transition, le patrimoine immobilier du secteur de la justice souffrait d’un délabrement remarqué. L’allocation budgétaire annuelle al-louée au secteur pour la construction et la rénovation de l’immobilier de 139 juridictions de l’ordre judiciaire à tra-vers la République péchait par son in-signifiance comparée à celle d’autres ministères de souveraineté.

Avec l’avènement de la Transition, la faiblesse du budget du fait de la situa-tion économique et financière du pays n’a pas encore permis pas de redres-ser la situation et les infrastructures restent aujourd’hui dans une situation difficilement gérable avec les moyens alloués par les budgets récents.

La Cour de cassation, elle-même, est dans une situation immobilière très dif-ficile : en effet, à l’étroitesse des lieux, s’ajoute l’insécurité des locaux. Il en va de même de la situation immobi-

lière des autres tribunaux du pays qui, d’extensions en extensions souvent mal étudiées et exécutées, se trouvent dans un espace de travail peu propice à leur fonctionnement efficace.

Les infrastructures adéquates consti-tuent le premier niveau de réalisation de toute volonté d’amélioration de la justice. L’infrastructure conditionne l’ef-ficacité de travail de ceux qui rendent la Justice et de l’accueil de ceux pour les-quels elle est rendue.

L’infrastructure reflète, à travers les bâtiments, sa grandeur. Elle répercute l’image imposante de la Justice telle qu’elle devrait être perçue par le justi-ciable et dans laquelle il voit la force et la hauteur du droit.

La rénovation et la modernisation des infrastructures pénitentiaire est elle aussi urgente. En effet, déjà décriée depuis plusieurs années par les orga-nisations des droits de l’Homme quant aux conditions d’espace de vie, de san-té et d’hygiène dans lesquelles sont incarcérés les détenus ; les infrastruc-tures pénitentiaires peinent à contenir la population carcérale. Cette situation s’est encore détériorée puisque sur les

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36 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

28 établissements pénitentiaires, 17 ont été endommagés pendant la révo-lution.

Une stratégie de développement des infrastructures judiciaires et péniten-tiaires permettant l’inventaire exhaus-tif du patrimoine immobilier, sa classifi-cation par niveau de délabrement et de vétusté et sa rénovation ou sa recons-truction, est un impératif.

V - Les ressources matérielles

Le mobilier existant des juridictions ac-cuse un état de vétusté du à l’absence de remplacement et de maintenance. Les meubles sont utilisés en l’état jusqu’à remplacement avec ce que cela génère comme inconfort et détérioration des conditions de travail. Cette situation entraine parfois la délocalisation des magistrats en dehors de leurs bureaux contribuant ainsi à une désorganisation de fait des services. Les salles d’au-dience pâtissent de sonorisations défail-lantes, sinon inexistantes et d’un condi-tionnement d’air souvent hors d’usage.

L’équipement informatique est, dans certains tribunaux, obsolètes. Les greffes de plusieurs tribunaux pré-fèrent travailler manuellement pour parer au plus urgent des demandes de services courants. Le fonctionnement du réseau informatique intranet est er-ratique pour certains services, inacces-sible pour d’autres. Quant à l’immatériel (logiciels, progiciels, programmes etc.), il ne bénéficie pas de service spécialisé ou d’inventaire adéquat. Cette situa-tion est aggravée par le faible niveau de compétence en informatique du per-sonnel des tribunaux.

L’environnement de travail est forte-ment influencé par ses conditions ma-térielles. Cette situation explique pour un grande part le retard accusé dans la production de documents requis par le justiciable auprès des greffes ou émis par les tribunaux (jugements arrêts etc.). L’efficacité de la justice et la qua-lité du service public qu’elle délivre sont donc tributaires des moyens dont elle dispose et de la qualification de ceux qui les utilisent.

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Axe 1 : Indépendance et autonomie du pouvoir de la justice

Résultat 1 : D’ici à 2019, l’indépendance et l’autonomie du pouvoir de la justice sont garanties et mises en application.

L’indépendance et l’autonomie du pou-voir de la justice sont désormais garan-ties par la Constitution de 2014 et sont au cœur de la réforme de ce secteur. Les recommandations proposées par les acteurs de la justice lors des consul-tations nationales mettent l’accent sur la nécessité de mettre en application ces principes pour rétablir la confiance des citoyens envers la Justice.

La réforme du système judiciaire et péni-tentiaire vise à les concrétiser à travers notamment, (i) la consécration de l’Indé-pendance et de l’autonomie du corps ju-ridictionnel, (ii) l’Indépendance organique et fonctionnelle du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) et (iii) le renforce-ment de l’autonomie administrative et financière des juridictions et des orga-nismes de formation et de recherches.

L’indépendance et l’autonomie du pou-voir de la justice constitutionnellement

codifiées supposent une redéfinition des missions et mandats du ministère de la Justice afin d’optimiser son orga-nisation interne et clarifier son inter-face de suivi et de liaison avec son en-vironnement institutionnel.

Pour mettre en application ces prin-cipes, six (6) résultats intermédiaires (RI) sont fixés :

•RI. 1.1. Le CSM est indépendant du pouvoir exécutif, jouit de l’autonomie administrative et financière et est opérationnel.

•RI. 1.2. Le principe d’inamovibilité des magistrats est garanti et leurs pro-motions et mutations sont gérées par les conseils sectoriels compétents selon des critères objectifs.

•RI. 1.3. Le Ministère public est indé-pendant du pouvoir exécutif et est placé sous tutelle du Chef du Parquet (Procureur général près de la Cour de cassation).

•RI. 1.4. Les juridictions judiciaires, ad-ministratives et financières jouissent d’une autonomie de gestion adminis-trative et financière.

Quatrième partie :Les axes stratégiques de réforme

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38 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

•RI.1.5. Les organismes chargés de la formation des professionnels de la justice et des études et recherches sont autonomes et sont placés sous la tutelle du CSM.

•RI.1.6. Les missions et mandats du ministère de la Justice et notamment ceux des organes de contrôle et d’ins-pection sont redéfinis en conformité avec les dispositions de la Constitu-tion et mis en application.

Axe 2 : Moralisation du système judiciaire et pénitentiaire

Résultat 2 : D’ici à 2019, les valeurs éthiques et déontologiques des personnels judicaires et pénitentiaires ainsi que des auxiliaires de Justice sont définies et mises en application.

L’institution judiciaire est confron-tée à un affaiblissement des valeurs d’éthique qui frappe l’ensemble des professionnels de la justice et les em-pêche de réaliser leur mission. De même, l’accumulation de pratiques contraires à la déontologie profession-nelle, auto-entretenues directement ou indirectement par un environnement

défavorable à la morale publique, a por-té atteinte à l’intégrité de la Justice et aux droits du justiciable.

Les consultations nationales, et no-tamment les résultats de l’enquête au-près du public, mettent la corruption au premier rang des causes du déficit de confiance envers le système de justice. Il devient impératif de faire respecter les valeurs éthiques et principes déon-tologiques des professions judiciaires et pénitentiaires et de renforcer les prérogatives de contrôle et de sanction du Conseil Supérieur de la Magistrature en la matière.

Pour ce faire, cinq (5) résultats intermé-diaires sont fixés :

•RI. 2.1 Des codes d’éthique et de déontologie professionnelles pour les magistrats et les autres professions concourants à la justice sont élabo-rés en conformité avec les normes internationales de prévention et de contrôle de l’éthique professionnelle.

•RI. 2.2. Les capacités des magistrats et des auditeurs de justice sont ren-forcées en éthique et en déontologie professionnelle.

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•RI. 2.3. Les mécanismes de contrôle existants sont adaptés aux manque-ments à l’éthique et à la déontologie professionnelle.

•RI.2.4 Les capacités des auxiliaires de justice sont renforcées en matière d’éthique et de déontologie profes-sionnelle.

•RI 2.5 Les capacités du personnel des services pénitentiaires sont renfor-cées en matière d’éthique et de déon-tologie professionnelle.

Axe 3 : Qualité de la justice et protection des droits du justiciable

Résultat 3 : D’ici à 2019, la qualité des services judiciaires et pénitentiaires et la protection des droits des justiciables sont améliorées.

L’instauration d’une justice de qualité, offrant les garanties de respect des droits du justiciable et de protection des droits du prévenu, constitue une priorité majeure de la réforme judiciaire. Sa réalisation se fera à travers cinq (5) niveaux d’intervention prioritaires :· le cadre juridique, dont la révision

notamment des procédures pé-

nales, civiles et de la législation pé-nitentiaire va (i) renforcer la protec-tion des droits du prévenu à tous les stades des procédures judiciaire et juridictionnelle, (ii) apporter des réponses pratiques aux difficultés procédurales notamment en ma-tière d’exécution des jugements en matière civile, (iii) améliorer le trai-tement des contentieux spécialisés au sein des juridictions (iv), intro-duire des alternatives à la détention et des mesures d’aménagements des peines, (v) renforcer la protec-tion des enfants en conflit avec la loi à travers la recherche d’alternatives à la solution carcérale et l’adoption de nouvelles stratégies d’insertion et de rééducation(vi). Enfin, le ren-forcement de l’approche genre à travers la mise en conformité des cadres juridiques aux normes inter-nationales afin d’assurer une meil-leur prise en charge des femmes au sein des systèmes judiciaires et pé-nitentiaires.

· La gestion des services judiciaires et pénitentiaires, dont la mise à ni-veau va permettre (i) une meilleure définition des compétences adminis-tratives et financière des chefs des juridictions, (ii) le renforcement des

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40 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

capacités du personnel de gestion, (iii) la réorganisation des services de greffe sur les plans humains et logis-tiques, (iv) l’amélioration de la gestion de l’institution pénitentiaire à travers son autonomisation administrative et financière, sa responsabilisation et l’implication de la société civile au des conditions de détention, enfin (v) l’aménagement et la gestion des espaces de détention et le renfor-cement des services de santé (phy-sique et psychique) et d’hygiène.

· Les ressources humaines, dont le renforcement aura un impact positif sur la qualité de la Justice à travers, (i) la meilleure définition du champ de compétences, des droits et obliga-tions de chaque profession judiciaire, (ii) l’amélioration du niveau de qualifi-cation et de compétences ainsi que l’indépendance, l’intégrité des pro-fessions judiciaires et pénitentiaires.

· L’infrastructure et les équipements, dont la vétusté et les dégâts su-bis depuis la révolution imposent un effort de rénovation et de moder-nisation conforme aux standards internationaux pour garantir un envi-ronnement juridictionnel et carcéral susceptible de préserver les droits du justiciable et la dignité des détenus.

· Le système Informatique et e-jus-tice, dont les performances ne ré-pondent plus aux exigences et aux standards de qualité mérite d’être évalués et mis à niveau pour ré-pondre aux besoins des profession-nels et institutions de la justice et du pénitentiaire. Ils requièrent un appui logiciel, matériel et humain important.

Pour ce faire, dix (10) résultats inter-médiaires sont fixés :

•RI. 3.1. La législation pénale, y compris la législation pénitentiaire, est révisée et mise en conformité avec les stan-dards internationaux.

•RI. 3.2. La législation civile, notam-ment en matière d’exécution des ju-gements, est révisée.

•RI. 3.3. L’autorité du Ministère public sur la Police judiciaire est renforcée.

•RI. 3.4. Les capacités des juridictions pour le traitement du contentieux spécialisé sont renforcées.

•RI. 3.5. La protection judiciaire des groupes vulnérables, notamment des

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femmes, et des enfants et des ado-lescents, est renforcée.

•RI. 3.6. Les services judiciaires sont mieux organisés et offrent des ser-vices de qualité.

•RI. 3.7. Les services pénitentiaires sont mieux organisés et offrent des services de qualité.

•RI. 3.8. Le statut et les compétences des acteurs du système judiciaire et pénitentiaire sont améliorés.

•RI. 3.9. Les infrastructures et les équi-pements du système judiciaire et péni-tentiaire sont rénovés et modernisés.

•RI.3.10. Les systèmes d’information des services judiciaires et péniten-tiaires sont améliorés.

Axe 4 : Accès à la justice

Résultat 4 : D’ici à 2019, l’accès des usagers de la justice et des justiciables à la connaissance du droit et aux services de justice est amélioré.

Alors que l’emprise du droit sur la vie sociale est toujours plus forte, les

consultations nationales viennent de démontrer que la Justice ne répond pas à toutes les attentes des citoyens. La mise en place d’une véritable justice de proximité apparait alors comme l’un des moyens de combler le fossé entre les citoyens et le système judiciaire. La réalisation de cet objectif implique que soient réduits plusieurs types de distances entre les citoyens et leur justice : distances géographiques, dis-tances temporelles liées à des délais excessifs, distances sociales liées à des contraintes économiques ou cultu-relles et que divers mécanismes soient mis en place pour garantir l’effectivité de l’accès de tous les citoyens à la jus-tice. Parmi ces mécanismes figurent :· La carte judiciaire, dont la révision et

la meilleure gestion vont permettre de mieux desservir les citoyens par des tribunaux cantonaux notam-ment dans les zones géographiques à populations rurales éparses. Cette stratégie de proximité est aussi va-lable pour la révision de la carte pé-nitentiaire qui permettra de rappro-cher le détenu de sa famille.

· L’aide juridictionnelle, dont la mo-dernisation des procédures vers da-vantage de souplesse et de rapidité va permettre au plus grand nombre

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42 Vision stratégique de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire 2015-2019

de personnes vulnérables de béné-ficier de ce mécanisme qui consti-tue un des points forts du système de justice tunisien.

· L’aide à l’accès au droit et à la connaissance du droit qui consiste à encourager les autorités éta-tiques, les professions judiciaires et la société civile à mettre en place des mécanismes de consultation et d’assistance juridique pour orien-ter les usagers et les justiciables et améliorer leurs connaissances en matière de droit et les sensibiliser sur leurs droits. Le développement d’un système d’information ouvert et accessible aux citoyens (orien-tation juridique, assistance aux fa-milles des détenus etc.) a été vive-ment recommandé.

Pour ce faire, trois (3) résultats inter-médiaires sont fixés :

•RI. 4.1. Le système de justice est plus accessible à travers l’adoption et la mise en œuvre de la justice de proxi-mité.

•RI. 4.2. Les personnes vulnérables bé-néficient d’une aide juridictionnelle et financière adaptée à leurs besoins.

•RI. 4.3. La connaissance du droit est disponible et accessible aux usagers de justice et aux justiciables.

Axe 5 : Communication et partenariat des institutions judiciaires et pénitentiaires

Résultat 5 : D’ici à 2019, la communication institutionnelle du système judiciaire et pénitentiaire, le partenariat et les capacités de planification et de suivi et évaluation sont renforcés.

La communication est un outil déter-minant pour renforcer la crédibilité de la Justice face à un environnement d’usagers publics et privés réclamant la transparence à travers une information disponible. Il est donc impératif que les tribunaux et les institutions péniten-tiaires puissent bénéficier de struc-tures et moyens de communication adéquats et de ressources humaines qualifiées dans le domaine de l’infor-mation et de la communication.

En outre, le système judiciaire et pé-nitentiaire est appelé à s’ouvrir sur son environnement extérieur en impli-quant la société civile, les médias et

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les autres acteurs extérieurs dans les différentes étapes de planification, de suivi et d’évaluation des actions entre-prises dans le cadre de conventions de partenariat. Les performances du système judiciaire et pénitentiaire ne peuvent être optimisées sans une dé-marche systématisée de concertation et de coordination intersectorielle avec les acteurs nationaux, les nouvelles instances démocratiques et les sec-teurs en rapport avec le secteur de la justice.

Aussi, et aux fins de garantir la perti-nence, l’efficacité, l’efficience et la du-rabilité des actions entreprises dans le cadre de la réforme du système judi-ciaire et pénitentiaire, des mécanismes de planification et de programmation sont à développer. Ils favoriseront en outre le suivi et l’évaluation des per-formances du système sur la base d’indicateurs rationnels permettant de mesurer les progrès et de commu-niquer d’une manière transparente sur

les opportunités et les contraintes de réalisation des objectifs de la réforme.

Pour ce faire, cinq (5) résultats intermé-diaires sont fixés :

•RI.5.1. Des nouvelles structures de communication sont créées et sont opérationnelles.

•RI.5.2. Les compétences des profes-sionnels du système judiciaire et pé-nitentiaire en matière d’information et de communication sont renforcées.

•RI.5.3. Le partenariat avec la société civile est consolidé.

•RI.5.4. La coordination intersectorielle et la coopération avec les instances de régulation sont renforcées.

•RI.5.5. Les mécanismes de planifica-tion et de suivi et d’évaluation des programmes du système judicaire et pénitentiaire sont opérationnels.

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La réforme du système judiciaire et pé-nitentiaire telle que définie dans le pré-sent document de vision sera structurée à travers un Plan d’action quinquennal (2015-2019) ainsi que des plans d’ac-tion annuels. Le ministère de la Justice, des droits de l’homme et de la justice transitionnelle, l’Instance Provisoire de Supervision de la Justice Judiciaire et le Conseil Supérieur de la Magistrature qui sera mis en place en conformité avec la Constitution seront responsables de la mise en œuvre de ce Plan.

Aux fins de garantir son appropriation par tous les acteurs nationaux, les or-ganisations de la société civile (asso-ciations et syndicats) seront impliqués dans toutes les étapes de planifica-tion, de mise en œuvre et de suivi. Les partenaires bilatéraux et multilatéraux de coopération seront sollicités pour appuyer techniquement et financière-ment la mise en œuvre de la réforme conformément à la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide.

La participation des acteurs natio-naux et internationaux à cette mise en œuvre suppose la création de mé-canismes de coordination et de suivi en vue d’harmoniser les interventions,

créer des synergies et garantir l’effica-cité et l’efficience requises. Leur parti-cipation sera déterminée par les avan-tages comparatifs et la valeur ajoutée de chaque partenaire à la réalisation des objectifs de la réforme.

Les autorités Tunisiennes seront ap-pelées à mettre en place un cadre de concertation pour rendre compte d’une manière périodique des progrès, ainsi que des contraintes susceptibles d’en entraver la réalisation. Elles mettront à la disposition de l’ensemble des par-tenaires les données probantes re-latives à la réforme et garantiront leur accessibilité. Elles développeront un système de suivi et d’évaluation pour mesurer les progrès selon des indica-teurs pertinents.

A cet effet, un Comité de Pilotage de la Réforme de la Justice (CPRJ) sera mis en place. Il se réunira au moins une fois par an et sera co-présidé par le Ministre de la justice et le Président de l’Instance Provisoire de Supervision de la justice Judiciaire, jusqu’à son remplacement par le Conseil Supérieur de la Magistra-ture. Il comprendra des représentants des directions du Ministère concernés par la réforme, de l’Inspection Géné-

Cinquième partie :Le cadre d’appui et d’exécutionde la vision stratégique

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rale, de l’ISM, du CEJJ, des juridictions, des représentants des acteurs de la justice (magistrats, avocats,…) ainsi que des représentants des autres mi-nistères indirectement concernés par la réforme, le Ministère de l’Intérieur en l’occurrence, et des représentants des organisations de la société civile. Se-ront également conviés au CPRJ les re-présentants des bailleurs de fonds en tant qu’observateurs.

Le CPRJ déléguera à un Comité Tech-nique (CT), dirigé par le responsable du Bureau des Etudes, de Planification et de Programmation (BEPP)28, les tâches de coordination et de suivi de la mise

en œuvre de la réforme. Le Comité

Technique assurera aussi le secrétariat technique du CPRJ. Le CT sera composé du personnel du BEPP et de représen-tants de l’Inspection Générale ainsi que de la Direction de la Coopération Inter-nationale. Il organisera régulièrement des réunions thématiques par axe stra-tégique avec les directions, institutions et partenaires internationaux concer-nés afin de suivre la mise en œuvre des plans d’action annuels. Le CT préparera un rapport trimestriel dont la synthèse servira à l’organisation de la revue au sein de la réunion annuelle du CPRJ. Une évaluation à mi-parcours sera conduite en 2017 pour mesurer les progrès, ap-précier la pertinence, l’efficacité, l’effi-cience et la durabilité des actions

1 28 Ce bureau est positionné actuellement au sein du Cabinet selon l’organigramme prévu par le décret n° 2010-3152 du 1er décembre 2010.

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La réforme du système judiciaire et pénitentiaire bénéficie de l’appui de l’ensemble des parties prenantes of-ficielles et civiles, nationales et inter-nationales. Tous les intervenants se retrouvent dans sa nécessité et son urgence et tous y placent une volonté de rompre avec une justice qui, par le passé, a desservi les droits du citoyen et les intérêts de la Nation.

L’histoire des progrès dans le cadre de la justice en Tunisie ne s’est faite que par des mouvements de fond, civils et professionnels, qui, malgré la coerci-tion qu’ont subi leurs promoteurs, ont permis d’influencer les pouvoirs publics afin d’obtenir des réformes du système judiciaire et pénitentiaire.

Cette vision stratégique pose les jalons nécessaires à la réalisation des objec-tifs d’indépendance et d’autonomie du

pouvoir de la justice. Son importance est d’autant plus grande qu’elle accom-pagne la mise en œuvre des principes prévus par la nouvelle Constitution consacrant l’indépendance et l’autono-mie de ce pouvoir et cela par des me-sures concrètes (exprimées en objectifs et résultats) qui vont s’inscrire dans un plan d’action participatif et concerté. La vision stratégique et son plan d’action sont donc un référentiel conceptuel et pratique de suivi qui permettra aux justi-ciables et aux parties prenantes du sec-teur de s’assurer de la mise en œuvre effective des réformes attendues.

Enfin, servant de cadre aux approches programmatiques, c’est un outil de travail concerté permettant de maxi-miser les avantages comparatifs de l’ensemble des intervenants nationaux et internationaux dans le secteur de la Justice.

Conclusion

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Les opinions exprimées dans cette publication sont celles de leur(s) auteur(s) et ne représententpas nécessairement celles des Nations Unies, y compris le PNUD et le HCDH, ni des Etats Membres.

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