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Rapport du Réseau Emplois Compétences Juin 2017 Vision prospective partagée des emplois et des compétences La filière numérique

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Rapport du Réseau Emplois Compétences

Juin 2017

Vision prospectivepartagée des emploiset des compétencesLa filière numérique

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JUIN 2017

VISION PROSPECTIVE PARTAGÉE DES EMPLOIS ET DES COMPÉTENCES

LA FILIÈRE NUMÉRIQUE

Rapport du Réseau Emploi Compétences

Rapporteurs

Sandrine Aboubadra-Pauly, Nicolas Le Ru et Marième Diagne (France Stratégie)

Damien Brochier et Joachim Haas (Céreq)

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AVANT-PROPOS

Lors de sa séance plénière d’octobre 2015, le Conseil national de l’industrie (CNI) remettait pour la première fois un avis au gouvernement sur les enjeux de l’emploi et de la formation pour l’industrie1. Les questions centrales étaient les suivantes : comment construire une démarche d’anticipation des besoins en compétences et en qualifications dans un contexte d’incertitude forte ? Comment identifier les mutations économiques et technologiques, et les transitions professionnelles à opérer ?

Pour tenter de répondre à ce défi, le CNI a proposé l’élaboration au sein de chaque Comité stratégique de filière (CSF) d’une « Vision prospective partagée des emplois et des compétences », bâtie non par simulation de scénarios macroéconomiques mais à partir des réalités des stratégies industrielles et territoriales.

Le ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et la ministre du Travail de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social ont demandé que cette démarche fasse l’objet d’une expérimentation.

Ce rapport sur la filière numérique est le premier résultat visible de ce travail, conduit dans le cadre d’un partenariat entre le CNI, France Stratégie et le Céreq.

Il aboutit à deux principaux résultats opérationnels : la production d’un répertoire des métiers « cœur du numérique », qui crée un langage commun et partagé entre des acteurs d’horizons divers et donne une vision des métiers en développement à deux ou trois ans ; et la mise en lumière, à partir de cas concrets, d’une nouvelle approche « itérative et en réseau » qui doit fonder la relation formation-emploi.

Le rapport confirme aussi tout l’intérêt du processus innovant mis en place pour cette expérimentation : mode de travail participatif, co-construction, recherche de solutions pragmatiques face à des difficultés d’analyse, travail finalisé sur la production d’une synthèse partagée et appropriable par tous. L’approche par filière a favorisé une

(1) CNI (2015), « Avis du conseil national de l’industrie sur la formation initiale », 16 octobre.

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vision transversale à plusieurs secteurs, permettant de converger vers des repères collectifs indispensables en situation d’incertitude forte sur les évolutions des métiers et des compétences.

Cette « prospective du temps présent » appelle une exigence de suivi, formulée par les acteurs de la filière numérique, car l’enjeu est d’identifier en continu les évolutions de l’emploi, des métiers et des compétences.

Pour consolider la méthodologie, une deuxième expérimentation sera réalisée prochainement sur la filière Valorisation industrielle des déchets, et une démarche similaire sera engagée par la filière Automobile dans le cadre d’un projet soutenu par le Programme des investissements d’avenir sera capitalisée.

Espérons que ces résultats soient utiles aux instances décisionnelles de la formation, de l’emploi et de l’orientation professionnelle, et contribuent à éclairer toutes les parties prenantes.

La qualité de ce rapport est d’abord le fruit de l’engagement assidu de tous les participants au groupe de travail, et des équipes de France Stratégie et du Céreq. Qu’ils en soient vivement remerciés.

Isabelle Martin,

ex-présidente de la Section transversale Emploi et compétences du Conseil national de l’industrie,

et ancienne membre du bureau du CNI pour la CFDT (2012-2016)

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SOMMAIRE

Introduction ............................................................................................................... 7

1. Des mutations qui renouvellent l’approche prospective ........................................ 8

2. Les bases d’une expérimentation sur la filière du numérique ............................... 9

Chapitre 1 – La filière numérique, filière d’avenir : de quoi parle-t-on ? ............ 11

1. Branche, secteur, filière : quel périmètre d’observation et d’action ? .................. 11

1.1. La filière numérique en France : 860 000 salariés et 80 000 indépendants ...........11 1.2. Seule l’activité de programmation et de conseil informatique connaît une nette

croissance de ses effectifs en France ...................................................................15

2. La diffusion des technologies sur de nombreux marchés porte la croissance de l’emploi dans la filière .................................................................................... 17

3. Des métiers « cœur du numérique » qui se diffusent dans tous les secteurs ..... 20

Chapitre 2 – Dresser un répertoire des emplois et métiers du numérique ....... 23

1. Une dynamique positive en termes de création d’emploi… mais avec des inconnues ........................................................................................................... 23

2. Un diagnostic original sur l’évolution des métiers du numérique ........................ 27

2.1. Partage des connaissances, des perceptions et des questionnements.................27 2.2. L’identification de neuf familles de métiers « cœur du numérique » .........................28 2.3. Descriptif détaillé des familles de métiers .............................................................33

Chapitre 3 – Un lien formation-emploi rénové par une approche itérative et en réseau ....................................................................................... 49

1. Le numérique comme facteur d’insertion et levier d’accès à l’emploi ................. 50

2. Des structures de formation initiale engagées dans des dynamiques de coopération avec les entreprises ................................................................... 53

3. Un engagement multiforme et partenarial des entreprises ................................. 57

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Chapitre 4 – Comment passer à l’opérationnel ? ................................................. 61

1. Éclairer les instances décisionnelles de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle ........................................................................... 62

2. Un réseau de lieux ressources en interaction ..................................................... 63

ANNEXES

Annexe 1 – Composition du groupe de travail ..................................................... 69

Annexe 2 – Ressources bibliographiques ............................................................ 73

Annexe 3 – Glossaire .............................................................................................. 77

Annexe 4 – Liste des encadrés, tableaux et graphiques ..................................... 81

Ce rapport a été rédigé par une équipe composée de membres de France Stratégie et du Céreq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications).

• Sandrine Aboubadra-Pauly, Nicolas Le Ru et Marième Diagne pour France Stratégie (Département Travail Emploi Compétences).

• Damien Brochier et Joachim Haas pour le Céreq (Département Travail, Emploi et Professionnalisation).

Compte tenu de son mode d’élaboration fondé sur une implication continue des membres du groupe de travail, ce rapport peut être considéré comme le fruit d’un travail collectif. Toutefois, son contenu relève de la seule responsabilité de l’équipe conjointe de France Stratégie et du Céreq.

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INTRODUCTION

Réaliser des études prospectives des métiers et des compétences constitue pour les acteurs économiques une démarche à la fois de plus en plus indispensable et de plus en plus complexe. Indispensable, car l’organisation des entreprises est confrontée de manière toujours plus intense à la nécessité de s’adapter aux fluctuations des marchés et à l’évolution des besoins des consommateurs, en mobilisant des ressources technologiques et organisationnelles elles-mêmes en pleine transformation. Complexe, car les mutations se sont singulièrement accélérées dans certains pans de l’économie, ce qui impose une réflexion à la fois plus fréquente et davantage partagée sur les compétences professionnelles de la population active.

Le paysage n’est bien entendu pas vierge dans ce domaine de la prospective des métiers et des compétences. Depuis près de trente ans, les organisations professionnelles et syndicales et l’État élaborent des contrats d’études prospectives1, panoramas très complets sur les transformations technologiques, économiques et sociales ainsi que sur la capacité des ressources humaines à s’adapter à ces évolutions. Par ailleurs, plusieurs exercices de prospective supervisés au niveau national par le groupe Prospective des métiers et qualifications ont été réalisés au cours de ces quinze dernières années en vue de formuler des perspectives d’évolution quantitative des emplois et des métiers sur des horizons de moyen terme. Le dernier de ces exercices, intitulé Les métiers en 20222, qui a été publié par France Stratégie et la Dares en 2015, détaille les perspectives d’emploi à dix ans pour environ 80 familles de métiers.

(1) Pour en savoir plus sur les contrats d’études prospectives, voir la page dédiée sur le site du ministère du Travail. (2) Pour prendre connaissance de ce rapport : www.strategie.gouv.fr/publications/metiers-2022-0.

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1. Des mutations qui renouvellent l’approche prospective Bien qu’utiles pour orienter les décisions des acteurs économiques, des partenaires sociaux et des pouvoirs publics sur le moyen terme, de telles démarches ne répondent pas complètement aux besoins de ces acteurs en matière d’évolution des métiers et des compétences :

─ comment mieux articuler une approche prospective fondée sur le temps long avec les nécessaires prises de décision à court terme des décideurs publics et économiques ?

─ comment concilier l’impératif de réactivité des entreprises face à la recomposition d’une partie de leurs emplois avec le fonctionnement des systèmes de formation initiale et des organismes de formation continue, sachant que ces systèmes nécessitent un temps d’appropriation pour intégrer ces évolutions dans leurs programmes pédagogiques ?

─ comment faire en sorte que des acteurs et des institutions ayant chacun leur propre représentation de ce que sera l’avenir des métiers parviennent à partager leurs connaissances pour décider quelle formation promouvoir à court terme, quelle catégorie de salariés accompagner ou quel métier stratégique valoriser ?

Ces questions recoupent largement celles formulées par le Conseil national de l’industrie dans un avis qu’il a rendu en octobre 2015 (Encadré 1) et qui est à l’origine de la demande adressée à France Stratégie de conduire une expérimentation en matière de vision prospective partagée des emplois et des compétences (VPPEC) dans deux filières.

Encadré 1 – Une démarche inscrite dans les travaux du Conseil national de l’industrie (CNI)

Créé en 2010 comme instance permanente d’expertise et de consultation pour le gouvernement, représentative de tous les acteurs de l’industrie, le CNI est composé de 14 comités stratégiques de filière (CSF) qui correspondent chacun à une filière stratégique de l’industrie française. Il a été sollicité par la Grande Conférence sociale de juillet 2014 pour établir des recommandations sur les besoins et les attentes de l’industrie en matière de compétences et de formation.

Un groupe de réflexion transversale (la section thématique emplois compétences), composé de membres issus du monde de l’industrie, de responsables des ministères de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et du Travail ainsi que de représentants de régions, a publié en octobre 2015 un « Avis sur la formation initiale » qui formule une série de six recommandations. L’une d’elles

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Introduction

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vise à « élaborer, dans chaque CSF, à partir de réalités et de stratégies industrielles et avec une méthodologie commune permettant de repérer les besoins transversaux et les besoins spécifiques, des « visions prospectives partagées des emplois et des compétences industrielles », appropriables par tous les acteurs (entreprises industrielles, avec une vision englobant industrie et services associés, partenaires sociaux, acteurs de la formation, territoires) ».

Au cours des mois suivants, le CNI a choisi d’expérimenter un processus d’élaboration d’une vision prospective partagée des emplois et des compétences (VPPEC) sur la filière numérique. Il a sollicité France Stratégie et le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq), organismes publics reconnus pour leur expertise dans le champ de l’évolution des métiers et des compétences. Une équipe mixte de cinq personnes appartenant à ces deux structures a été constituée pour expérimenter cette démarche qui s’est déroulée entre mai et décembre 2016.

Le cahier des charges initial de la VPPEC, tel qu’il était formulé dans l’avis du CNI était le suivant : « Élaborer pour chaque CSF une “vision prospective partagée emplois et compétencesˮ (VPPEC) à partir de réalités et de stratégies industrielles, ancrées sur les territoires, et non par simulation de scénarios macro-économiques. Il s’agit, sur la base d’une méthodologie partagée :

– d’établir à l’usage de tous les acteurs et de tous les publics une référence commune des besoins en emplois et en compétences des entreprises industrielles à court et moyen terme, en termes de tendances (vision à 5 ans actualisée tous les 2 ans), avec une vision nationale articulée avec des visions territoriales ; elles contribueront à donner un accès égalitaire, aux employeurs et aux salariés, à l’information sur une vision prospective, qui sera probablement inexacte dans le temps mais constituera la meilleure analyse partagée des tendances qualitatives et quantitatives à venir ;

– de développer une capacité d’évaluer par branches, filières, métiers, territoires le potentiel d’alimentation des emplois (sorties de jeunes du système éducatif, formation de demandeurs d’emploi, mobilités professionnelles) ».

2. Les bases de l’expérimentation sur la filière numérique Compte tenu du caractère faiblement prescriptif de la feuille de route fixée à France Stratégie et au Céreq sur la manière de réaliser cette VPPEC, nous présentons un aperçu des axes méthodologiques retenus pour conduire un tel processus. Un rapport exclusivement méthodologique, consacré aux apports et limites de cette expérimentation, est publié en parallèle [à paraître], dans la perspective d’une extension de la démarche à de nouvelles filières industrielles. Trois choix

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méthodologiques centraux structurent cette première VPPEC dans la filière numérique.

Un mode de travail participatif et itératif

Pour offrir des garanties maximales de construction d’une vision prospective partagée, un effort particulier a été porté sur la constitution d’un groupe de travail représentant la diversité des acteurs travaillant pour ou au sein de la filière numérique. Ce groupe de travail est ainsi composé de représentants des partenaires économiques et sociaux (professionnels d’entreprises, représentants d’organisations syndicales de branche, responsables d’observatoires de branche), d’experts en analyse des emplois et des compétences aux niveaux national et territorial (chargés d’étude issus d’organismes nationaux, représentants de Carif-Oref) et enfin de cadres des principaux ministères concernés par les thématiques liées à l’éducation, la formation et la professionnalisation. Fondée sur un échange régulier entre ces différents partenaires, la démarche prospective s’est déroulée sur un cycle de sept réunions mensuelles (voir le détail des séances en Annexe 1).

Une grande diversité de matériaux

Dans son avis publié en octobre 2015, le CNI a explicitement formulé le souhait de ne pas fonder la démarche VPPEC sur la réalisation de scénarios macro-économiques de projections d’emploi par métier, mais bien plutôt sur des études qualitatives et des diagnostics quantitatifs repérés par les membres du groupe, et sur des auditions de représentants d’institutions et d’organisations ayant une expertise en matière d’évolution des métiers et des compétences dans le numérique.

Une synthèse partagée… et partageable

Pour que les conclusions de cette démarche prospective soient appropriables par les acteurs de la filière numérique et plus largement par les individus et les organisations intéressés par le devenir des emplois et des métiers de cette filière, un effort a été réalisé pour soumettre à la discussion des membres du groupe les travaux intermédiaires, le plan du rapport de synthèse et les principaux résultats. L’objectif n’était pas de produire un rapport « d’experts », qui pourrait paraître détaché de la réalité économique et sociale de la filière analysée, mais bien de construire une référence commune aux acteurs et partenaires de la filière numérique. Une des conséquences d’un tel choix est de suggérer dans la dernière partie du rapport un certain nombre d’instances ou de lieux-ressources où les résultats de cette démarche VPPEC pourraient être mis en débat, afin d’en tester la portée et le cas échéant de la faire évoluer (voir Chapitre 4).

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CHAPITRE 1 LA FILIÈRE NUMÉRIQUE, FILIÈRE D’AVENIR :

DE QUOI PARLE-T-ON ?

1. Branche, secteur, filière : quel périmètre d’observation et d’action ?

Le comité stratégique de la filière numérique (CSF Numérique) du Conseil national de l’industrie rassemble les entreprises des secteurs producteurs de biens et services numériques : industries du numérique (fabrication d’ordinateurs et de matériel informatique, industrie des composants électroniques, fabrication d’équipements électroniques grand public, etc.), services de télécommunications, services informatiques, de l’édition de logiciels et de jeux vidéo, portails internet, services d’hébergement et du commerce et services en ligne.

Suivant cette définition, une prospective des emplois et des compétences de la filière numérique consisterait à anticiper les besoins en emplois et en compétences des entreprises qui exercent l’une des activités listées ci-dessus.

Tout en estimant important de s’approcher au plus près du périmètre du CSF Numérique pour mesurer pleinement les enjeux en termes d’emplois et mobiliser l’ensemble des acteurs de cette filière, le groupe de travail a privilégié une analyse prospective centrée sur les métiers « au cœur du numérique », en mobilisant principalement les partenaires de deux branches professionnelles (télécommuni-cations et services-ingénierie-conseil).

1.1. La filière numérique en France : 860 000 salariés et 80 000 indépendants

Combien de personnes travaillent actuellement dans l’économie numérique ? Répondre à cette question nécessite de faire des choix méthodologiques (Encadré 2) : s’intéresse-t-on aux personnes qui exercent un métier lié au numérique ? À celles qui

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travaillent dans les entreprises dont l’activité est numérique ? Dans ce cas, comptabilise-t-on l’ensemble des effectifs de ces entreprises ou uniquement ceux qui contribuent à l’activité de production de biens et services numériques de ces entreprises ? Doit-on faire référence à la convention collective à laquelle appartiennent les salariés pour identifier ceux qui participent à l’économie numérique ? Une fois l’approche retenue, quelle liste de métiers, d’activités, de conventions collectives retenir dans les nomenclatures officielles pour le périmètre de l’économie numérique1 ?

Plutôt que de rechercher un consensus sur la liste des éléments à retenir, il apparaît plus pertinent de mobiliser différents travaux existants (OCDE, Inspection générale des Finances, branches professionnelles, observatoires régionaux, etc.) afin de déterminer un ordre de grandeur du nombre d’emplois concernés.

Il ressort de ces analyses que les entreprises de la filière numérique au sens du Comité stratégique de la filière numérique du Conseil de l’industrie emploient en 2014 environ 700 000 salariés en équivalent temps plein. Une vision plus large de l’économie du numérique (secteur des contenus et supports culturels, commerce de détail, fabrication de câbles et fibres optiques) aboutit à une estimation d’environ 860 000 salariés en équivalent temps plein. D’autres travaux, notamment régionaux, adaptent ce périmètre en y incluant des activités à fort enjeu dans certains territoires. C’est notamment le cas d’une étude relative à l’Île-de-France, qui inclut dans son champ d’étude la publicité et la communication. En plus de ces effectifs salariés, on peut estimer qu’environ 80 000 personnes exercent ces activités comme indépendants.

Rapportée au nombre total d’emplois, l’économie numérique – au sens des secteurs TIC de l’OCDE qui est proche du périmètre retenu par le Comité stratégique de la filière numérique du Conseil de l’industrie – emploie une part de salariés similaire à celle observée en Allemagne, au Canada ou aux Pays-Bas (autour de 3 %). Toutefois, certains pays, tels l’Irlande, la Corée du Sud, la Finlande, les États-Unis ou encore le Royaume-Uni, sont nettement plus présents sur ce secteur (Graphique 1).

(1) Pour un exposé complet des différentes méthodologies existantes, le lecteur pourra se reporter à l’annexe A intitulée « Délimitation du périmètre de la filière numérique », disponible sur le site de France Stratégie. Cette annexe présente des chiffrages de l’emploi de l’économie numérique selon ces différentes approches méthodologiques.

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Graphique 1 – Part de l’emploi du secteur TIC dans le total des emplois en 2013 (en pourcentage)

Source : France Stratégie, d’après données OCDE

Encadré 2 – Comment définir le contour d’une activité économique ?

Trois approches coexistent pour identifier les différentes activités économiques qui composent l’économie française.

L’approche par secteur Un secteur d’activité rassemble les entreprises qui réalisent la même activité principale. Ainsi, le secteur de la fabrication de matériel informatique rassemble toutes les entreprises dont l’essentiel du chiffre d’affaires est généré par cette activité. Son poids économique est alors mesuré en agrégeant le poids économique de ces entreprises. Le nombre de salariés du secteur est donc égal à la somme des salariés employés par les entreprises dont l’essentiel du chiffre d’affaires est généré par cette activité, que ces salariés contribuent à la fabrication de matériel informatique ou à une autre activité (minoritaire) réalisée par ces entreprises.

L’approche par branche Une branche d’activité regroupe les entreprises et les sous-parties d’entreprises qui réalisent la même activité. Ainsi, la branche de la fabrication de matériel informatique rassemble les entreprises qui réalisent uniquement cette activité et les entités dédiées à la fabrication de matériel informatique au sein d’entreprises qui réalisent plusieurs activités. Le nombre de salariés de cette branche est donc égal à la somme des salariés dédiés à la fabrication de matériel informatique, que

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que ce soit l’activité unique de l’entreprise ou l’une seulement de ses nombreuses activités.

L’approche par filière Une filière d’activité fait quant à elle référence aux interdépendances qui existent entre les entreprises, c’est-à-dire « à l’idée qu’un produit, bien ou service, est mis à la disposition de son utilisateur final par une succession d’opérations effectuées par des unités ayant des activités diverses. Chaque filière constitue donc une chaîne d’activités qui se complètent, liées entre elles par des opérations d’achats et de ventes » (Monfort, 1983). Ainsi, la filière de la fabrication de matériel informatique rassemble à la fois les entreprises qui réalisent cette activité, celles qui réalisent les activités en amont – soit l’ensemble des fournisseurs – et les entreprises en aval – soit les entreprises clientes qui achètent le matériel informatique pour leur propre usage ou pour le revendre. Les liens commerciaux entre entreprises n’étant pas enregistrés et stockés dans une base d’information statistique, la composition d’une filière d’activité peut être approchée au mieux par un regroupement de branches d’activité ayant des liens commerciaux forts, sinon celui de secteurs d’activité ayant des liens commerciaux forts.

La filière du numérique au sens du Comité stratégique de la filière numérique du Conseil national de l’industrie est ainsi composée des secteurs producteurs de biens et services numériques, c’est-à-dire : les industries du numérique (fabrication d’ordinateurs et de matériel informatique, industrie des composants électroniques, fabrication d’équipements électroniques grand public, etc.) ; les services de télécommunications, les services infor-matiques ; l’édition de logiciels et de jeux vidéo ; les portails internet, les services d’hébergement et le commerce et les services en ligne.

L’approche par filière a connu un certain regain au milieu des années 2000 (Bidet-Mayer et Toubal, 2013) pour définir des politiques économiques dont la stratégie repose sur les coopérations interentreprises (États généraux de l’automobile en 2008, États généraux de l’industrie en 2009, Grenelle de l’environnement en 2007 et 2009).

Si l’approche par filière a un intérêt certain pour l’analyse économique et la définition de stratégies industrielles intégrées, elle présente toutefois certaines limites dont celle qu’une même entreprise ou une même activité peut appartenir à plusieurs filières, étant donné qu’un même produit peut avoir des débouchés multiples.

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1.2. Seule l’activité de programmation et de conseil informatique connaît une nette croissance de ses effectifs en France

Aussi surprenant que cela puisse paraître, les effectifs de la filière numérique au sens du CSF Numérique du Conseil national de l’industrie n’ont pas augmenté au cours des dernières années. Cela s’explique par des dynamiques très différentes au sein de cette filière. Les activités informatiques –programmation, conseil et autres – ont connu une croissance des effectifs salariés d’environ 4 % par an ces dernières années, les activités de construction de réseaux électriques et de télécommunications enregistrant quant à elles une croissance de 1,5 %. Mais les autres activités de la filière ont vu leurs effectifs décroître : la baisse est de 3 % par an dans les télécommunications (hors construction de réseaux)1 et dans la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques. Le recul atteint près de 6 % dans le commerce de détail en magasin spécialisé (voir Graphique 2).

Graphique 2 – Évolution des effectifs salariés des activités de l’économie numérique*

* Au sens des secteurs TIC de l’OCDE élargis au commerce de détail d’équipements TIC et à l’ensemble de la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques.

Lecture : la taille des bulles est proportionnelle au nombre de salariés en 2013 pour le secteur concerné.

Source : France Stratégie, d’après données Insee

(1) Salariés de droit privé et de droit public.

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Encadré 3 – Structuration institutionnelle des branches du numérique

Une branche professionnelle représente un secteur d’activité, dont le périmètre est défini par une convention collective qui relève de la négociation entre les partenaires sociaux. Ces représentants des employeurs et des salariés ont une responsabilité essentielle dans la définition et la mise en œuvre de la politique emploi-formation de leur branche professionnelle. Mais leur organisation institutionnelle est plutôt complexe, dans la mesure où plusieurs instances paritaires se partagent les responsabilités et que chaque branche professionnelle a une composition qui lui est propre. Deux branches étaient représentées au sein du groupe de travail VPPEC.

La branche des Télécommunications (Conventions collectives 02148 et 05516) est composée de l’UNETEL-RST, le syndicat professionnel qui regroupe les entreprises des télécommunications (34 adhérents), et des cinq syndicats de salariés F3C-CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et FO (fédérations communications ou télécommunications).

La branche des Bureaux d’études techniques, des Cabinets d’ingénieurs-conseils et des Sociétés de conseils (Convention collective 01486) – regroupe deux organisations patronales : la Fédération Syntec, composée de plusieurs fédérations dont l’une dédiée aux entreprises du numérique (Syntec numérique), et le CINOV, regroupant également plusieurs syndicats professionnels dont le CINOV-IT, dédié aux TPE et PME du numérique ou de Tech In France, dédié aux éditeurs de logiciels et sociétés internet. Les fédérations des syndicats de salariés membres de la branche sont les suivantes : F3C-CFDT, CFE-CGC Fieci, fédération CGT des personnels des sociétés d’études et de conseil et de prévention, CFTC / CSFV, la fédération des employés et cadres FO.

Au sein de chaque branche, les différentes instances paritaires (générales ou spécifiquement dédiées aux questions emploi formation) sont :

– la commission paritaire de la convention collective nationale - CPCCN (qui fonctionne en commission mixte pour les télécom), négocie la convention collective et les accords de branche, sous l’égide du ministère du travail ;

– la commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation (CPNE) a une mission d’information et d’étude sur l’évolution de l’emploi et participe à l’orientation de la politique de formation définie par la branche (avec la CPCCN /commission mixte) ;

– la section paritaire professionnelle au sein de l’OPCA (OPCALIA pour les télécommunications, le FAFIEC pour la branche conseil-ingénierie), gère les contributions de la formation professionnelle collectées auprès des entreprises suivant les priorités définies par la CPCCN/commission mixte et la CPNE ;

– l’observatoire paritaire des métiers (Observatoire des métiers des télécommunications, OPIIEC pour la branche conseil-ingénierie) analyse

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l’évolution des métiers suivant un programme de travail défini par les partenaires sociaux.

La branche conseil-ingénierie dispose également d’instances régionales, avec les commissions paritaires régionales de l’emploi et de la formation professionnelle (CPREFP) et les antennes régionales de l’OPCA.

2. La diffusion massive des technologies porte la croissance de l’emploi dans la filière

Il existe une forte convergence des experts pour anticiper une croissance nette du nombre global d’emplois liés au secteur du numérique. Cette croissance résulterait de l’accélération permanente des innovations technologiques : design, robotique, big data, open data, etc. Ces innovations constituent des leviers de croissance pour de nouveaux marchés et également des supports de transformation importants pour les marchés existants. En forte résonance avec les travaux récents de Cap Digital, pôle de compétitivité spécialisé dans la transformation numérique (Cap Digital, 2015-2016), on peut ainsi identifier onze « grands marchés » qui sont et seront fortement impactés, autant d’un point de vue économique qu’en termes d’emploi, par les transformations technologiques à venir (Tableau 1).

Tableau 1 – Les « grands marchés » du numérique

Marché Transformations technologiques

Médias Jeu, édition, cinéma, télévision…

Commerce et distribution E-commerce, services activables à volonté…

Banque et assurance Ultra-segmentation de la clientèle et approche prédictive…

Communication, publicité Vente optimisée dans l’espace de publicité, storytelling des marques…

Éducation et formation Cours en ligne, e-learning…

Santé et bien-être Réalité augmentée, télémédecine…

E-tourisme Évolution des modèles de vente au profit du e-commerce…

Systèmes de transport Ville connectée, géolocalisation…

Industrie manufacturière Objets connectés, robotique, simulation/modélisation…

Bâtiment Building information modeling (BIM) ou modélisation des données du bâtiment

Ménages Domotique, bâtiments intelligents…

Source : Cap digital, 2015-2016 et groupe de travail VPPEC Numérique, 2017

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Dans tous ces domaines, la France compte de nombreuses startups, dont certaines sont des leaders au niveau européen et international (robots de services, marketing en ligne, effets spéciaux, etc.). Cet écosystème d’entreprises est très diversifié : entreprises de service numérique et de télécommunications de taille mondiale, important écosystème de startups, de pôles de compétitivité liés au numérique présents dans plusieurs régions, etc. Il bénéficie d’un niveau élevé de compétences et d’un fort appui des pouvoirs publics (Encadré 4). Sa localisation est plutôt urbaine et métropolitaine, ce qui facilite les déplacements et les échanges physiques.

Cet ensemble d’éléments concourt au développement de la filière en France et en particulier en Île-de-France (DIRECTTE Île-de-France, 2016-1), et s’articule à des perspectives positives en termes de création d’emploi.

Encadré 4 – Des politiques publiques de soutien au développement de la filière

L’État et les collectivités locales ont développé de très nombreux dispositifs de soutien au développement économique de la filière et de ses emplois. Quelques exemples illustrent la volonté des pouvoirs publics de soutenir le fort potentiel de croissance de la filière.

• Les Pôles de compétitivité sont déjà bien implantés, ils rassemblent sur un territoire des entreprises, petites et grandes, des laboratoires de recherche et des établissements de formation. Les pouvoirs publics nationaux et locaux sont étroitement associés à cette dynamique. Plusieurs pôles sont dédiés au numérique sur le territoire français, comme Cap Digital, en Île-de-France, qui a pour mission de « contribuer à la compétitivité et la visibilité de ses membres, aux niveaux national et international, et à l’attractivité du territoire, en s’appuyant sur la mise en réseau et la collaboration, et en agissant sur les leviers que sont la recherche, l’innovation, l’évolution des compétences, la transformation numérique des entreprises et des marchés, le soutien à la croissance des PME et à la coopération entre PME, grands comptes, laboratoires et financeurs ». www.capdigital.com

• L’initiative French Tech, lancée en novembre 2013 par Bpifrance, Business France, la Caisse des dépôts, le ministère des Affaires étrangères, la DG Trésor et le CGI, est structurée autour de trois axes : fédérer l’écosystème de startups français, accélérer la croissance des startups par l’investissement en capital-risque et faire rayonner la French Tech à l’international. www.lafrenchtech.com

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La filière numérique, filière d’avenir : de quoi parle-t-on ?

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• Le Plan numérique à l’école, lancé en 2015 par le président de la République, est destiné à développer des méthodes d’apprentissage innovantes, former des citoyens responsables à l’ère du numérique et préparer les élèves aux emplois digitaux de demain. Il se déploie dans les écoles et les collèges. http://ecolenumerique.education.gouv.fr/plan-numerique-pour-l-education/

Ces perspectives favorables doivent toutefois être légèrement nuancées. Un exercice d’identification des forces/faiblesses et des opportunités/menaces auxquelles sont confrontés les entreprises et les actifs de la filière a été réalisé par le groupe de travail (Graphiques 3 et 4). Il a permis de mettre en lumière les atouts, mais aussi les facteurs qui peuvent retarder ou compromettre le développement de la filière et la croissance de ses emplois.

Graphique 3 – Forces et faiblesses de la filière numérique en France

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

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Graphique 4 – Opportunités et menaces sur la filière numérique en France

3. Des métiers « cœur du numérique » qui se diffusent dans tous les secteurs

La diffusion des technologies au sein de nombreux domaines souligne combien l’analyse des emplois et des métiers à partir des seuls secteurs d’activité qui composent la filière numérique présente des limites. En effet, une part importante des métiers du numérique est créée hors de ces secteurs dits numériques : la banque-assurance, l’e-commerce, l’e-tourisme, etc. (Tableau 1).

L’activité des entreprises de service numérique (ESN), définies par Syntec comme les entreprises « qui aident les entreprises de tous les secteurs à se transformer et à améliorer leurs performances grâce aux outils numériques », pourrait également préfigurer un développement important de métiers « numériques » au sein des entreprises aujourd’hui clientes (dans une logique d’internalisation de ces métiers). Dès lors, où arrêter le périmètre des secteurs à analyser ? Un exemple situe bien la nature du problème : en Pays de la Loire, 50 % des professionnels du numérique « assurent des fonctions support dans une large gamme d’activités, comme les

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La filière numérique, filière d’avenir : de quoi parle-t-on ?

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banques et les assurances, les directions des services informatiques des grandes entreprises, de l’industrie »1 (Graphique 5).

Graphique 5 – Quels emplois et quels métiers numériques en Pays de la Loire ?

Source : Carif-Oref Pays de la Loire (2016), Les Métiers du numérique recrutent et recruteront, série Études et enquêtes, janvier

Ce constat a conduit à privilégier très tôt une analyse des métiers « cœur du numérique », c’est-à-dire qui sont à la fois constitutifs des deux principales branches de la filière numérique (la branche des télécommunications et celle du numérique, de l’ingénierie, du conseil, des études et des métiers de l’événement) et identifiables dans les activités contribuant à la « numérisation » croissante de nombreux autres secteurs.

(1) Carif-Oref Pays de la Loire (2016), Les Métiers du numérique recrutent et recruteront, série Études et enquêtes, janvier.

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CHAPITRE 2 DRESSER UN RÉPERTOIRE

DES EMPLOIS ET MÉTIERS DU NUMÉRIQUE

1. Une dynamique positive en termes de création d’emploi… mais avec des inconnues

De nombreuses études de prospective convergent sur l’augmentation de l’emploi dans la filière numérique et plus largement pour les professions du numérique, et ce, quelle que soit l’activité des entreprises employeurs (Encadrés 5 et 6).

Encadré 5 – Des perspectives favorables de créations nettes d’emplois

L’exercice de prospective des Métiers et Qualifications réalisé par France Stratégie et la Dares, publié en 2015, propose des projections d’emplois par métiers et qualifications à l’horizon 2022 selon la nomenclature des familles professionnelles (FAP). Dans le scénario central, 110 000 emplois seraient créés entre 2012 et 2022 pour les métiers de l’informatique et des télécommunications, soit une croissance annuelle moyenne de l’emploi de 1,8 % (contre 0,7 % pour l’ensemble des métiers).

La Commission européenne a publié en 2014 un rapport intitulé E-Skills Jobs in Europe, qui estime également le nombre d’emplois créés pour les « profession-nels des technologies de l’information et de la communication » (soit à partir d’une autre nomenclature des métiers). Entre 2012 et 2020, un peu plus de 100 000 emplois seraient créés dans ce domaine, soit un taux de croissance annuel moyen de l’emploi de l’ordre de 1,4 %.

Ces perspectives ne concernent toutefois qu’une part des métiers analysés dans ce document.

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Encadré 6 – Quelques études prospectives récentes sur le développement de l’emploi dans le secteur du numérique

à l’horizon 2020/2022

Babet C. (2016), Portraits statistiques des métiers 1982-2014, Synthèse.Stat’, n° 19, Dares, mars, 687 p.

Carif-Oref Pays de la Loire (2016), Les métiers du numérique recrutent et recruteront !, série Études et enquêtes, janvier, 89 p.

Dares et France Stratégie (2015), Les métiers en 2022, Rapport du Groupe Prospective des métiers et qualifications, avril, 411 p.

FAFIEC (2013), Contrat d’études prospectives du secteur professionnel du numérique, étude réalisée par les cabinets Katalyse et Merlane (Lécole J.-F., Dulong C., Zoroddu M., Lutz M., Mathieu J.-M. et Bonnefous C.), août, 189 p.

FAFIEC (2016), Étude prospective pour la branche des métiers du numérique en région Île-de-France, étude réalisée par le cabinet Ambroise Bouteille et Associés pour le compte du FAFIEC et de la DIRECCTE Île-de-France, mai, 408 p.

Empirica (2015), « e-skills in Europe. Trends and forecasts for the European ICT professional and digital leadership labour markets (2015-2020) », Working Paper (Hüsing T., Korte W. B. et Dashja E.), novembre.

Toutefois, une analyse comparée de ces études souligne un certain nombre d’incertitudes et de points aveugles.

En l’absence de consensus sur le périmètre de l’économie numérique comme sur la manière de le définir (en termes de familles professionnelles ou de secteurs économiques), les analyses prospectives de créations d’emploi varient du simple au double selon les études recensées. Cette forte incertitude ne doit pas être ramenée à une simple question de méthode, les entreprises du secteur affirmant éprouver elles-mêmes des difficultés pour anticiper des recrutements à l’horizon d’un trimestre. Un membre du groupe de travail a ainsi déclaré : « La grande hétérogénéité des travaux de GPEC des entreprises du secteur des télécoms rend la synthèse des éléments de prévision de recrutement particulièrement compliquée ».

Au titre des incertitudes, ajoutons qu’il existe dans le débat public – comme parmi les experts – des controverses importantes sur la définition du changement, donc sur la vitesse d’apparition et de diffusion des nouvelles technologies du numérique : seront-elles des évolutions ou des révolutions ? Plusieurs contributions récentes, notamment le rapport du Conseil national du numérique (Encadré 7), montrent que si

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Emplois et métiers du numérique : état des lieux et diagnostic

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certains considèrent les évolutions actuelles comme s’inscrivant dans une continuité assez forte avec les tendances passées, d’autres n’hésitent pas à qualifier la période actuelle de révolution technologique, organisationnelle et sociale.

Encadré 7 – Contributions récentes sur les effets de la numérisation et de l’automatisation sur l’emploi

Arntz M., Gregory T. et Zierahn U. (2016), « The risk of automation for jobs in OECD Countries. A comparative analysis », OECD Social, Employment and Migration Working Papers, n° 39, juin.

Babinet G. (2015), Big Data, penser l’homme et le monde autrement, Paris, Le Passeur, février, 256 p.

Conseil d’orientation pour l’emploi (2017), Automatisation, numérisation et emploi, tome 1 : Les impacts sur le volume, la structure et la localisation de l’emploi, janvier, 190 p.

Conseil national du numérique (2016), Travail Emploi Numérique : les nouvelles trajectoires, rapport remis à la ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, janvier, 209 p.

Frey C. B. et Osborne M. (2013), « The future of employment: How susceptible are jobs to computerization? », Working Paper, Oxford Martin School, septembre.

Le Ru N. (2016), « L’effet de l’automatisation sur l’emploi : ce qu’on sait et ce qu’on ignore », La Note d’analyse, n° 49, France Stratégie, juillet.

Un autre élément d’incertitude réside dans la mesure nette des effets des technologies numériques sur le nombre d’emplois à moyen terme, résultant à la fois des créations et des destructions d’emploi.

Il existe en revanche un consensus sur la nécessité de différencier les perspectives de croissance selon les différentes catégories d’emploi, qu’il s’agisse des catégories socioprofessionnelles, des métiers, des secteurs d’activité et des statuts d’emploi.

Concernant les catégories socioprofessionnelles, les experts anticipent le prolongement des différences de croissance observées dans les vingt années passées entre les grandes catégories socioprofessionnelles. Ainsi, les projections de la Dares et de France Stratégie (Encadré 7) aboutissent aux mêmes conclusions : ce sont surtout les ingénieurs et cadres techniques de l’informatique qui devraient continuer à bénéficier d’une croissance d’emploi très positive. La croissance des

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

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effectifs des techniciens serait à terme nettement plus modeste, et celle des employés et opérateurs de l’informatique devrait rester stable, voire reculer légèrement.

En ce qui concerne l’évolution des métiers, une croissance particulièrement significative est attendue pour le métier de développeur (ou concepteur-développeur, voir infra). Cela se manifeste déjà par des tensions chroniques sur le recrutement (Pôle emploi, 2016 ; Carif-Oref Pays de la Loire, 2016 ; OPIIEC, 2016). Principale porte d’entrée dans l’emploi du numérique, ce métier est en effet particulièrement stratégique : les difficultés de recrutement à ce niveau-clé affectent par ricochet d’autres postes et domaines du numérique. Schlechter et al. (2016) évoquent d’autres métiers qui se développeront dans la transition numérique : les métiers liés aux réseaux sociaux qui font figure de nouvelles places publiques (social media manager), les métiers liés aux solutions Cloud (ingénieurs et architectes Cloud), les métiers de l’analyse de données massives (data scientist, data officer), les responsables et spécialistes de la cybersécurité.

Si on se focalise sur les domaines d’activité, plusieurs observations s’imposent. La première concerne le secteur des éditeurs de logiciels et sociétés internet qui connaît une croissance conséquente de ses effectifs, même en période de faible croissance économique. À l’avenir, ce secteur trouvera un champ de croissance supplémentaire dans son internationalisation, encore peu développée. Il profitera également de l’expansion du « big data », technologie représentant quasiment l’ADN de nombreuses créations d’entreprise. Selon l’étude de prospective du FAFIEC (2013), des réserves de croissance soutenue existent dans des domaines connexes au numérique – ou d’application du numérique – par exemple l’audiovisuel, la communication et plus généralement les services aux entreprises.

Un dernier point sensible pour le numérique concerne les statuts d’emploi, avec un accord général sur la dynamique de développement importante des emplois non salariés. Ce constat partagé rejoint des données récentes (DIRECCTE Île-de-France, 2016-2) selon lesquelles la création d’emploi hors salariat, notamment sous statut d’auto-entrepreneur (micro-entrepreneur), contribue très largement depuis une dizaine d’années à la croissance des effectifs. Tout en confirmant cette dynamique, le groupe a considéré que la thématique des non-salariés (travailleurs indépendants, professions libérales, etc.) ne pouvait être traitée de manière superficielle dans le cadre de cet exercice et nécessitait un suivi et un approfondissement ultérieurs (voir Chapitre 4).

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Emplois et métiers du numérique : état des lieux et diagnostic

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2. Un diagnostic original sur l’évolution des métiers du numérique

2.1. Partage des connaissances, des perceptions et des questionnements

Les membres du groupe de travail ont cherché à construire un diagnostic partagé de la situation actuelle et de l’évolution probable des métiers du numérique. Le partage de connaissances et de perceptions en la matière a identifié trois dimensions.

Donner une meilleure visibilité aux métiers de la filière

Le fondement de cette démarche prospective est qu’elle doit permettre d’améliorer la lisibilité d’une filière souvent perçue de l’extérieur comme une « nébuleuse ». Peuvent contribuer à cette meilleure lisibilité :

─ un listing pratique et pertinent des principaux métiers du numérique ;

─ l’identification des évolutions et des enjeux majeurs affectant ces métiers ;

─ une traduction compréhensible du vocabulaire technique relatif aux activités couvertes par ces métiers.

Ce besoin de lisibilité de la filière numérique est en partie dû au décalage existant actuellement entre les nomenclatures de la statistique publique (PCS, FAP, ROME, NAF) et les expressions et classifications utilisées par les entreprises, les branches et leurs observatoires. Ce constat a conduit à élaborer collectivement un répertoire des métiers qui constituent le « cœur du numérique ».

Rapprocher des secteurs et des branches jusqu’alors distants

Un deuxième enjeu de taille pour les professionnels concernés est la construction d’une représentation unifiée des métiers du numérique, au-delà des singularités de chaque branche. Ainsi, les représentants des entreprises de services du numérique (ESN / conseil en technologie) et les représentants des télécommunications ont reconnu les similitudes entre un nombre croissant de métiers au sein de leurs branches respectives, notamment au niveau des familles de métiers liées à la conception, au déploiement et à la mise à disposition des services et infrastructures Cloud.

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Ouvrir les compétences nécessaires pour intégrer la filière du numérique

Une troisième dimension porte sur la construction d’une représentation élargie des compétences nécessaires pour intégrer les métiers de la filière numérique. Le constat de départ est celui de la place occupée en France par les mathématiques comme discipline faisant office de filtre de sélection dans la formation et dans les recrutements. Selon une récente évaluation internationale des compétences des adultes réalisée par l’OCDE (2013), la France a obtenu des résultats plutôt moyens en « numératie », à savoir la capacité d’utiliser des concepts numériques et mathématiques dans des environnements à forte composante technologique. De tels résultats freinent-ils l’appropriation des technologies numériques par les actifs et le potentiel de recrutements pour des postes nécessitant des compétences numériques ?

Dresser un répertoire des métiers « cœur du numérique » vise précisément à relativiser cette importance des qualifications requises pour occuper un emploi dans le numérique. Il s’agit de démontrer que tous les métiers du numérique ne nécessitent pas d’être « fort en maths », les compétences en codage s’assimilant davantage à l’apprentissage d’une nouvelle « langue ». D’autres qualités moins objectivables, comme l’agilité, la curiosité et la créativité, sont également un atout considérable pour exercer dans ce secteur. La tendance actuelle serait finalement à l’hybridation : adjoindre des compétences numériques à certains métiers non scientifiques à l’origine (marketing, design, etc.), tandis que d’autres métiers techniques se verraient symétriquement imposer l’adjonction de compétences transversales (sociales, créatives, etc.).

2.2. L’identification de neuf familles de métiers « cœur du numérique » Pour pallier les difficultés liées aux nomenclatures actuelles de la statistique publique, le groupe de travail a identifié, par un recensement d’informations auprès de ses membres1, les métiers constituant le – ou au moins faisant partie du – « cœur du numérique ». Ce choix de concentrer la réflexion sur un « cœur » fait référence à des analyses consistant à désagréger l’économie en cercles concentriques (voir les analyses mobilisées par l’Inspection générale des Finances, 2012). Plus récemment, c’est un rapport conjoint de plusieurs inspections (Schlechter et al., 2016) qui a décomposé l’économie numérique en un segment numérique « dur » (informatique, télécom), un segment où une adaptation des compétences de certains métiers est

(1) Les détails de la méthodologie utilisée figurent dans un rapport méthodologique sur l’élaboration d’une VPPEC, complémentaire au présent rapport.

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Emplois et métiers du numérique : état des lieux et diagnostic

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nécessaire et un segment de numérique « mou » où les outils numériques sont utilisés sans changer le métier. On peut noter que le même type d’approche a été mobilisé dans son domaine par l’Observatoire national des emplois et métiers de l’économie verte pour distinguer métiers verts (« cœur »), métiers verdissants et métiers impactés à la marge (CGDD, 2014).

Trente-six métiers ont donc été identifiés, structurés en neuf familles (Tableau 2). Pour chacune de ces familles, une analyse a permis de présenter les évolutions et les enjeux respectifs de chacun des métiers qui la composent, en se fondant sur l’ossature des compétences, tâches ou fonctions qui les caractérisent. Mais une évidence s’est imposée au groupe de travail après l’achèvement de cette liste : « Ce type de travaux n’a d’intérêt que si on peut l’actualiser de manière régulière ». De là l’idée qui sera reprise plus loin (Chapitre 4) d’actualiser régulièrement cette liste par le biais d’un rendez-vous annuel réunissant a minima les représentants des institutions participant à cette démarche de VPPEC.

Quel statut revendiquer pour le répertoire de métiers ainsi créé ? Il ne s’agit pas d’une nouvelle typologie qui prétendrait entrer en compétition avec d’autres nomenclatures des métiers du numérique, dont on peut avoir un bon aperçu dans le rapport de Schlechter et al. (2016). Les objectifs sont multiples et visent conjointement à :

─ éclairer les acteurs institutionnels demandeurs d’un panorama simplifié de la filière ;

─ favoriser l’apprentissage mutuel des acteurs des deux branches du numérique (télécoms et ESN/conseil en technologie) représentées au sein du groupe de travail sur la structuration de leurs métiers respectifs ;

─ construire une liste partagée, consensuelle, qui ne résulte pas de l’agrégation des répertoires individuels des différents participants, mais qui constitue la synthèse d’un travail collectif ;

─ recenser une liste de métiers qui évite, autant que faire se peut, les focalisations médiatiques (le « buzz ») sur les « nouveaux jobs » du numérique et les simplifications commerciales associant des métiers à des certifications privées1.

(1) Pour plus de détails, voir l’annexe B « Les fiches métiers : formation, compétences et emploi », disponible sur le site de France Stratégie. Pour chacun des métiers, une fiche résume la formation nécessaire et les compétences requises, ainsi que les perspectives d’emploi.

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Tableau 2 – Répertoire des métiers « cœur du numérique »

Famille de métiers Intitulé des métiers

Programmation et développements

Développeur Ingénieur étude et développement Architecte logiciel

Métiers de l’intelligence artificielle et de la donnée

Administrateur de bases de données Data analyst Data scientist

Infrastructures, clouds, réseaux et data centers

Technicien Cloud et réseaux Ingénieur Cloud et réseaux Architecte Cloud et réseaux / Urbaniste

Maintenance, assistance et support pour l’exploitation

Technicien de maintenance, support et services aux utilisateurs en informatique

Interfaces utilisateurs et créations numériques

Web designer Designer d’expérience et d’interface Ergonome Directeur artistique Showrunner / Story architect / Transmedia producer

Direction, management et stratégie

Manager de projet Manager d’équipe Responsable de la stratégie et de la prospective Chargé des relations avec l’écosystème Coach agile, product owner Business analyst Directeur des systèmes d’information Responsable sécurité des systèmes d’information

Communication et marketing

Community manager Social Media Manager Marketeur digital Chargé de référencement Analyste de trafic

Commerce

Chargé de clientèle Ingénieur d’affaires / Chargé d’affaires Ingénieur commercial Ingénieur avant-vente

Expertise et conseil

Responsable cybersécurité Consultant / expert métier Expert en protection des données Expert en propriété intellectuelle

Source : groupe de travail VPPEC Numérique, 2017

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Quels sont les métiers qui peuvent être considérés comme « cœur du numérique » ? La liste élaborée ne prétend pas être exhaustive et se caractérise globalement par trois éléments attachés à ces métiers :

─ ils concernent essentiellement les deux branches d’activités représentées dans le groupe de travail. Il existe donc un biais sectoriel dans la mesure où le secteur des activités du numérique est souvent défini de manière plus large, en incluant également un certain nombre de sous-secteurs de l’industrie manufacturière et du commerce de gros, voire les services de communication et de publicité et le secteur des multimédias (Chapitre 1) ;

─ ils correspondent à deux catégories : on y trouve bien sûr les métiers du numérique « dur » (informatique, réseaux, télécoms) mais aussi des métiers nouveaux ou qui nécessitent une forte adaptation de leur contenu. Cette deuxième catégorie correspond souvent à des métiers liés à la diffusion dans de nombreux secteurs de l’économie (Tableau 1) d’applications initialement portées par les secteurs de l’ESN /conseil en technologie et des télécoms (communication, marketing, données massives, etc.). Comme l’a relevé un membre du groupe, « on est arrivé à l’idée d’entreprises productrices et utilisatrices du numérique. Du coup, les métiers sont trans-sectoriels». Cette problématique de la diffusion des métiers du numérique au-delà de leurs secteurs de référence devra être réexaminée (Chapitre 4) ;

─ ils répondent à un critère de durabilité : aux yeux des experts qui les ont identifiés, il s’agit de métiers relativement pérennes. Ils sont perçus comme des métiers qui existeront encore dans quelques années, que ce soit des métiers « à gros flux » (avec l’idée de minimiser la prise en compte des « métiers de niche ») ou des métiers émergents et à faibles effectifs qui seront amenés vraisemblablement à prendre de l’importance dans l’avenir. Pour certains, un indice est ici que ce sont des « métiers sur lesquels on voit déjà des tensions et des pénuries sur le marché du travail ».

Un dernier point à noter concerne les sources mobilisées pour ce travail. Tout en s’appuyant de manière directe et à titre principal sur les propos et travaux des membres du groupe de travail, l’analyse a également exploité un ensemble de sources complémentaires d’information (Encadré 8).

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Encadré 8 – Les références mobilisées sur les évolutions des métiers du numérique

Études et Rapports

APEC (2014), Les métiers en émergence, Hors-série, Les référentiels des métiers Cadres, 111 p.

Babet C. (2016), Portraits statistiques des métiers 1982-2014, Synthèse.Stat’, n° 19, Dares, mars, 687 p.

Carif-Oref Pays de la Loire (2016), Les métiers du numérique recrutent et recruteront !, série Études et enquêtes, janvier, 89 p.

Dares et France Stratégie (2015), Les métiers en 2022, Rapport du Groupe Prospective des métiers et qualifications, avril, 411 p.

FAFIEC (2013), Contrat d’études prospectives du secteur professionnel du numérique, étude réalisée par les cabinets Katalyse et Merlane (Lécole J.-F., Dulong C., Zoroddu M., Lutz M., Mathieu J.-M. et Bonnefous C.), août, 189 p.

FAFIEC (2016), Étude prospective pour la branche des métiers du numérique en région Île-de-France, étude réalisée par le cabinet Ambroise Bouteille et Associés pour le compte du FAFIEC et de la DIRECCTE Île-de-France, mai, 408 p.

ORM (2016), Les métiers du numérique en région PACA. Quels besoins en compétences et en formations ?, Rapport d’étude n° 11 (Chaintreuil L., Inthavong S. et Petrovitch A.), octobre, 76 p.

Pôle emploi (2016), « Le secteur du numérique et ses métiers », Statistiques, études et évaluations, n° 16.015, avril.

Schlechter F., Bergmann C., Gaubert-Macon C., Azéma A., Christmann P., Castellazi M. et Laval D. (2016), Les besoins et l’offre de formation aux métiers du numérique. Rapport IGAS, IGEN, IGAENR, CGE, avril, 89 p.

Référentiels métiers

Cartographie des métiers du numérique de l’OPIIEC.

Nomenclature des métiers des systèmes d’information du CIGREF.

Médias

Les Échos, 8 décembre 2016, Dossier : les 10 métiers du digital qui décollent.

Site lesjeudis.com : offres d’emploi informatiques par métier.

Site geekfr.com

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Emplois et métiers du numérique : état des lieux et diagnostic

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2.3. Descriptif détaillé des neuf familles de métiers

1. Métiers de la programmation et du développement

Les métiers de la programmation et du développement constituent le centre de la production d’applications et de logiciels. Ils consistent pour l’essentiel à développer et à livrer des applications ou des composants numériques, à agir dans le respect des spécifications et des exigences de conception (qualité, délais), à assurer l’assem-blage et l’implémentation des différents composants logiciels nécessaires au fonctionnement des solutions de services, à procéder à la réception et à l’intégration des composants logiciels dans leur environnement d’exploitation et à s’assurer de leur exploitabilité. Par ailleurs, ces métiers concourent de plus en plus à la construction et l’exploitation de plateformes de big data par les éditeurs de logiciels.

Au sein de la programmation et du développement trois métiers se distinguent, correspondant chacun à un niveau différent de responsabilité :

─ le développeur (aussi appelé programmeur ou codeur) produit les composants logiciels par codage et paramétrage ;

─ l’ingénieur d’étude et de développement élabore pour l’essentiel les spécifications techniques du travail du codeur, intègre les composants logiciels créés par ce dernier et peut être responsable de la documentation technique du produit ;

─ l’architecte logiciel (ou architecte applicatif) conçoit les systèmes composés de plusieurs programmes/logiciels, coordonne leur production et est responsable de leur intégration et leur exploitabilité.

Cette division des métiers de la programmation et du développement est typiquement celle mise en œuvre dans les sociétés de taille importante. Certaines grandes entreprises emploient également des qualiticiens (ou ingénieurs validation) qui ont pour mission de vérifier la conformité du produit avec les spécifications d’origine et les normes officielles. Dans les petites entreprises, les fonctions de conception, d’intégration ou de production sont souvent fusionnées dans des profils de travail polyvalents, dénommés concepteurs-développeurs, analystes-programmeurs, ingénieurs de développement ou encore développeurs « full-stack ».

Pour ces métiers, la réduction des délais de mise sur le marché de logiciels (accélération du développement) et la maîtrise de la qualité (fiabilité, sécurité et traçabilité des programmes) sont deux des grands enjeux qui peuvent contribuer à modifier les compétences recherchées.

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Le développement de logiciels s’appuie sur une combinaison d’outils, d’infra-structures, de processus organisationnels et de méthodes de travail. La performance de cette combinaison conditionne la rapidité de mise sur le marché des logiciels. L’adoption, depuis une quinzaine d’années, des principes du DevOps implique davantage de comportements coopératifs, l’appropriation d’outils spécialisés et le respect des processus de travail « agiles » afin de permettre d’accélérer le dévelop-pement des logiciels (Encadré 9). Certaines grandes entreprises « réinternalisent » actuellement leurs activités de programmation et de développement, afin d’en assurer la qualité. Le DevOps est ainsi à la fois source de qualité et d’accélération de la production et de la mise sur le marché des logiciels.

Encadré 9 – Approche DevOps et méthodes « agiles » : définitions

Le DevOps est un mot-valise formé de l’anglais development (développement) et de l’abréviation ops pour operations (exploitation). Il désigne une approche visant à mieux faire travailler ensemble deux fonctions de la gestion des systèmes informatiques qui ont souvent des objectifs difficiles à concilier.

Les méthodes « agiles » servent à réduire la durée requise pour la réalisation des projets numériques par le découpage des travaux en étapes courtes et par l’itération des démarches. La phase de conception est volontairement courte pour pouvoir aller le plus tôt possible dans le développement d’un prototype. Celui-ci sera ensuite soumis au client de manière répétée, à intervalles réguliers et courts, pour une adaptation conjointe du livrable. Cette méthode est censée répondre avec souplesse aux demandes (changeantes) du client.

Les profils de compétences recherchés pour les programmeurs et développeurs varient selon la taille et l’activité des entreprises et le type de poste. Ainsi, les entreprises de l’édition de logiciels – où un salarié sur trois, selon l’association Tech In France, exerce un métier de la programmation et du développement – accordent de l’importance (en plus d’une bonne technicité) à la rapidité d’apprentissage, la créativité, la vivacité d’esprit et la capacité d’adaptation à un nouvel environnement. De ce fait, certaines de ces entreprises recrutent parfois des diplômés de niveau Bac + 2/3 ou détectent des talents notamment lorsqu’ils sont en alternance. Les entreprises de services du numérique quant à elles exigent généralement un niveau de diplôme plus élevé : « Le Bac + 5 est un prérequis et il faut être formé sur les technologies utilisées par les grands comptes clients de ces entités ». Par ailleurs, les recruteurs ont tendance, notamment dans les grandes entreprises, à privilégier un diplôme d’ingénieur pour un poste plutôt polyvalent (relation client, définition et

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réponse au besoin client) ou un diplôme universitaire pour un poste axé sur du développement pur (Carif-Oref Pays de la Loire, 2016).

Des difficultés de recrutement non négligeables et durables existent pour ces métiers. Elles proviennent notamment du renouvellement rapide des technologies de production logicielle, avec des langages de programmation en perpétuelle évolution. En témoigne aujourd’hui la diminution du poids relatif des applications pour PC/web, basées sur des langages comme Java ou C++, en faveur des applications pour mobiles, basées sur Android et IOS. Les difficultés sont liées également à la tendance à recruter des personnes spécialisées sur les technologies propres à l’entreprise ou aux besoins du client et de ses outils informatiques. Le phénomène est amplifié par la forte concentration géographique des entreprises du numérique qui accroît la concurrence entre employeurs lors des recrutements (Carif-Oref Pays de la Loire, 2016 ; FAFIEC, 2016). Toutefois, il existe une multitude de sous-spécialités pour le métier de développeur. Si certains métiers sont en forte tension, d’autres ne le sont pas, notamment des profils plus banalisés, consistant à réaliser des codages pré-spécifiés et cadrés. Malgré les tensions sur le marché de développeurs, les informaticiens qui maîtrisent peu de langages informatiques, qui ne se sont pas formés aux outils en rapide évolution – l’expérience vaut moins ici que l’actualisation des connaissances – ou qui n’ont pas étendu leur champ de compétence à d’autres fonctions en entreprise éprouvent des difficultés pour sortir, le cas échéant, du chômage.

2. Métiers du domaine de l’intelligence artificielle et de la donnée

Pour les entreprises et les administrations, les enjeux de l’usage des « données massives » sont multiples : améliorer l’efficience de leur marketing, identifier de manière plus efficace les risques et les erreurs, mieux piloter les ressources et les flux (énergie, production, circulation), visualiser en temps réel les évolutions sur le web et sur les marchés, commercialiser les données en tant que telles et les services associés, etc.

Les métiers du domaine de la donnée consistent à stocker, à mettre en forme et à étudier les données digitales pour faire émerger les informations qui ont une valeur pour l’organisation et ses clients. Concrètement, ils sont en charge de la conception, la gestion et l’administration des systèmes de bases de données ainsi que de l’exploitation des données collectées. Dans un rôle d’appui à la décision, ils formalisent des recommandations.

Trois métiers illustrent la « division du travail » dans le domaine de l’intelligence artificielle et de la donnée :

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─ l’ingénieur(e) de la collecte et de l’administration des données (data stewart, data officer, ingénieur datawarehouse) est responsable de la collecte, la manipulation et la qualité de la donnée. La consolidation des informations issues de sources multiples, disparates et volumineuses est une activité centrale pour la filière des big data ;

─ le/la data analyst développe et administre des solutions logicielles permettant la mise à disposition des données, leur traitement et leur exploitation. Pour examiner la faisabilité de ses produits, il/elle effectue une première analyse de la donnée ;

─ le/la data scientist est un(e) spécialiste de l’analyse des données massives provenant de sources multiples. Il/elle maîtrise l’informatique et l’économétrie. Ses exploitations de données apportent une valeur ajoutée au bénéfice du client interne ou externe. Ainsi, il/elle doit bien connaître le secteur du client ou la fonction en entreprise auquel s’adressent ses résultats et recommandations.

La rapidité de l’émergence des métiers de data analyst et data scientist « s’est traduite par un consensus quasi immédiat dans la définition de ces deux métiers [et l’adoption dans son répertoire RH de métiers du numérique]. Alors qu’habituellement l’apparition d’un métier suit un parcours connu qui peut prendre plusieurs années (…). C’est suffisamment exceptionnel pour être mentionné » (CIGREF, 2015). Cette rapidité s’explique en partie par des tensions élevées sur le marché du travail (FAFIEC, 2016).

Cependant, comme pour tous les métiers traités dans ce rapport, la question de leur combinaison avec d’autres se pose. Les compétences requises pour la maîtrise et la valorisation des big data se cristallisent-elles dans les seuls métiers susmentionnés ? D’autres profils, plus hybrides, ne seront-ils pas amenés à se développer ? La compétence « big data » doit-elle être totalement internalisée en entreprise, avec une chaîne de métiers spécifique ? Ira-t-on plutôt vers des solutions d’organisation où un référent big data dans une entreprise sera amené à solliciter et piloter un service de fournisseurs externes ?

Les réflexions en cours dans le secteur de l’édition logicielle, telles qu’elles ont été exposées lors d’une séance du groupe, illustrent bien la diversité des pistes envisageables. En effet, avec l’utilisation de données massives, ce secteur est amené à réorienter ses équipes et ses métiers pour proposer des offres commerciales pertinentes : « […] les éditeurs doivent organiser en douceur, sans big bang, la mutation de leurs équipes vers la data. Des profils tels que des ingénieurs des données, des architectes des données vont travailler avec les habituels développeurs, architectes logiciels pour construire et exploiter les

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plateformes big data des éditeurs. Les data scientists sont à associer aux équipes en tant que fabricants des traitements algorithmiques entrant dans la conception des offres “data servicesˮ. Le product management sera également touché au plus près par la nécessité d’imaginer puis in fine de monétiser des services nouveaux et innovants. Il est sans doute encore un peu tôt, mais à terme il est possible d’envisager la création de fonctions de chef de produit des offres “Data Servicesˮ qui piloteront un catalogue d’offres. L’exercice du métier de la vente se voit lui aussi impacté par la digitalisation des pratiques, les vendeurs peuvent s’appuyer sur les data pour orienter la pertinence de leur discours, défendre leurs argumentations. Et pour les plus matures d’entre elles, la nomination d’un chief data officer, à l’image des chief digital officer dans le digital, permettra d’impulser, de faire émerger, de fédérer et de coordonner les plans d’action autour de la data » (un représentant de Tech In France).

3. Métiers du domaine de l’infrastructure, Cloud et réseaux

Les métiers de ce domaine ont pour objet la conception, le développement, l’exploitation et la maintenance des systèmes informatiques. Trois métiers apparaissent au cœur du numérique : technicien Cloud et réseaux, ingénieur Cloud et réseaux et architecte/urbaniste cloud et réseaux. L’informatique dans le nuage (cloud computing), en forte expansion, permet de dématérialiser et d’externaliser les ressources requises. Les données, les équipements réseau et les applications sont soit concentrés sur une entité unique de l’entreprise, soit externalisés chez un prestataire spécialisé. L’adjonction du terme cloud révèle l’importance, pour ces métiers, de maîtriser cette technologie de délocalisation – sur un ou plusieurs serveurs internes ou externes – de l’infrastructure informatique, via un réseau de télécommunications.

Une part grandissante du contenu de ces métiers sera déterminée par cette technologie et nécessitera des connaissances sur le processus d’utilisation externe des services (software as a service...), sur les machines virtuelles et de réseaux (architectures de virtualisation...), sur l’interconnexion de plateformes hétérogènes, sur la sécurisation, etc. Perdront en revanche de l’importance certaines parties classiques du domaine des infrastructures/réseaux comme l’administration du parc local d’équipements et de logiciels, le support technique aux utilisateurs et la maintenance.

La vitesse de cette réorientation est toutefois difficile à estimer. Selon l’OPIIEC, si la plupart des entreprises françaises privilégient actuellement la limitation du cloud à un mode intra-muros, contrôlé par l’organisation, « plusieurs de nos interlocuteurs

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semblent enclins à penser que les plus importants gisements de croissance sur les activités cloud se situeront dans l’avenir sur la migration sur du cloud externe » (OPIIEC, 2015).

Les techniciens sont particulièrement affectés par ces changements technologiques : « Certains techniciens d’entreprise vont perdre (dans un scénario d’extension du cloud public), mais d’autres vont gagner si on part de l’hypothèse de l’explosion de l’internet des objets et de la robotique qui demandera des techniciens qualifiés d’installation-maintenance. Bien sûr, il est difficile de mesurer l’impact – encore moins les scénarios de formation/mobilité à construire avec le renouvellement nécessaire des compétences ». Au final, en raison des besoins dans les méthodes (définition de normes, tests, analyse d’incidents), dans les nouvelles technologies et dans les services (conseil et support aux usagers), l’OPIIEC prévoit une stabilisation de la demande en direction de ce métier. De plus, la généralisation du très haut débit et l’installation de la fibre optique sur le territoire nécessiteront des effectifs conséquents en techniciens. Selon un représentant des télécoms au sein du groupe VPPEC, ce secteur estime la part des techniciens parmi les effectifs techniques à 25-30 % (29 % en 2016 sur le périmètre des entreprises qui relèvent de la convention collective nationale des télécommunications).

Les ingénieurs Cloud et réseaux sont également affectés par la recomposition de ces activités. Les entreprises misant davantage sur les réseaux virtuels et le Cloud, les ingénieurs se chargent en conséquence du déploiement, du stockage et de la gestion des données dans un environnement virtuel. Dans ce cadre, ils vont devenir décisionnaires sur le choix de la solution cloud/réseau la plus adaptée aux besoins de l’entreprise. De ce fait, ils devraient de plus en plus se muer en gestionnaires de projets, en charge du pilotage d’un ou plusieurs prestataires ou encore de la sécurité, étant donné que les données de la firme ne seront plus nécessairement hébergées dans ses infrastructures propres.

L’architecte/urbaniste s’assure de l’évolution cohérente de l’ensemble du système informatique de l’entreprise. Il l’adapte aux changements de stratégie de la firme et à l’arrivée des nouvelles générations de technologies, l’uniformise suite à des fusions d’entreprises, etc. Le développement du cloud interroge la maîtrise du risque de perte d’intégrité du système dans un contexte qui combine mutation technologique, évolutions stratégiques et organisationnelles de l’entreprise et changements dans la disponibilité des données (sécurité, juridique).

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4. Métiers des activités de maintenance, support et services aux utilisateurs en informatique

Ces métiers, généralement ouverts aux techniciens ou employés qualifiés débutants, consistent à résoudre à distance les problèmes des clients, à réaliser les actions de télémaintenance nécessaires dans le cadre de la gestion individuelle d’incident ou encore à rétablir sur site le service au client conformément aux dispositions des contrats.

L’assistance opérationnelle sur un registre technique (par exemple la maintenance, qui suppose une compétence de technicien en système d’exploitation, équipements et logiciels) pourrait rester une source importante de valeur ajoutée si le client a besoin d’un véritable accompagnement de la part de son fournisseur. Toutefois, une partie des tâches d’assistance technique tendront de plus en plus à être assurées au niveau du cloud et des réseaux, délocalisés à l’étranger (Inde, Europe de l’Est ou Maghreb par exemple), ou effectuées par des programmes ou machines apprenantes. De même, il existe une incertitude sur les métiers d’assistance du type hot-line ou help-desk dont les tâches pourraient être confiées à des programmes d’autocorrection ou d’auto-assistance guidée ou au contraire se concentrer sur la relation humaine pour la qualité du conseil.

5. Métiers du domaine « Interface utilisateurs et créations numériques »

Ces métiers sont chargés de la création d’une architecture de l’information sur un produit numérique (présentation, animation sur un terminal mobile, un site web, un logiciel, etc.) correspondant à la fois à la stratégie de l’organisation et aux profils et attentes des utilisateurs ciblés. Les métiers correspondants peuvent être classés selon leurs fonctions prépondérantes :

─ les métiers du webdesigner (ou infographiste) et du designer d’expérience et d’interface (UI designer, UX designer) sont plutôt au service des fonctions marketing. Leur mission réside dans la conception et l’optimisation d’une interface en tenant compte des contraintes particulières en matière d’utilisabilité et d’accessibilité. Ils garantissent la conformité du produit aux objectifs de l’expérience-utilisateur ;

─ les métiers du directeur artistique et du showrunner (story architect, transmedia producer) sont plutôt au service de la communication. Ils concourent à attirer l’attention des publics à l’aide de l’esthétique et de l’animation multimédia. Le showrunner par exemple peut être considéré comme un scénariste qui impulse et dirige la création artistique (d’une série de produits, d’une marque, etc.) sur une base numérique ;

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─ l’ergonome intervient comme expert dans la conception ou l’optimisation des interfaces homme-machine des applications et des sites web ou des logiciels. Il veille notamment à une bonne fonctionnalité des programmes compte tenu des caractéristiques psychophysiques de la personne.

Si ces métiers ne sont a priori pas nouveaux, ils trouvent néanmoins un nouveau champ d’activité sur les plateformes numériques. Il existe actuellement une forte demande pour ces métiers, et les débutants sont recrutés parmi les diplômés hors formations numériques. En effet, savoir programmer n’est généralement pas une compétence indispensable pour exercer ces métiers, qui s’appuient sur des logiciels d’application spécialisés.

6. Métiers de direction, management et stratégie

Les managers du secteur numérique sont des moteurs au cœur de la transition numérique des organisations. Leur fonction suppose les « capacités techniques, méthodologiques et humaines nécessaires pour exploiter les opportunités liées à internet et aux technologies de l’information, dans un contexte de pilotage d’équipes multiculturelles et mondialisées, en optimisant l’efficacité des organisations et des processus, en explorant les nouvelles possibilités de chaîne de valeur, en identifiant de nouveaux business » (Schlechter et al., 2016).

Les métiers de direction, management et stratégie identifiés par les membres du groupe de travail témoignent des différents enjeux organisationnels auxquels sont confrontés les entreprises du numérique. Ces dernières mettent notamment en œuvre les principes organisationnels suivants :

─ une organisation matricielle : le travail est effectué en équipes composées de spécialistes complémentaires. Ce principe est incarné par le manager de projet dans sa fonction de chef de projet pour la maîtrise d’œuvre ou pour la maîtrise d’ouvrage ;

─ une organisation apprenante et compétente : elle demande une gestion des ressources humaines qui conforte les profils de compétences correspondants et qui procède à la constitution d’équipes de spécialistes adéquates. Ce rôle est dévolu au manager d’équipe (ou resource manager) ;

─ une organisation en veille sur l’amélioration permanente de ses processus : les organisations matures et de taille importante confient le pilotage de cette mission à un acteur spécifique, appelé coach agile. Dans les TPE et les startups, cette mission est confiée au product owner (appelé également chef de projet agile ou

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product manager). En qualité d’agent d’innovation, il conçoit un produit ou un service en méthode agile en coordination avec les développeurs ;

─ une organisation en capacité d’évoluer ou de faire évoluer son modèle d’affaire (business model) : l’agent pivot qui travaille dans ce sens est le responsable stratégie, placé souvent dans un rôle d’entrepreneur ;

─ une organisation qui est en mesure de repérer des innovations technologiques, économiques et culturelles et d’évaluer leur exploitabilité par la production numérique de l’entreprise. C’est le métier du business analyst ;

─ une organisation qui définit et valide ses besoins en matière d’infrastructure informatique et établit le planning de son renouvellement. Cela concerne aussi bien les investissements nécessaires pour tenir compte des sauts technologiques que les arbitrages entre « faire » et « faire faire ». C’est le métier du directeur des systèmes d’information ;

─ une organisation qui a besoin d’un service d’identification des dangers et de sécurisation de ses ressources numériques et intellectuelles garantissant leur disponibilité et leur confidentialité : cette fonction est assurée par le responsable sécurité des systèmes d’information (RSSI) ;

─ une organisation qui a besoin d’informations pour trouver toutes sortes de ressources externes essentielles pour son développement : des clients et marchés, des partenaires, des modèles ou expériences, des spécialistes et experts, des technologies, des formations, des aides financières. C’est le rôle du chargé des relations avec l’écosystème. Il travaille généralement dans une agence de développement, un incubateur, une chambre consulaire ou une association de grappes d’entreprises.

L’accès à ces métiers demande en règle générale une expérience préalable longue dans plusieurs domaines afin de posséder une double compétence en « gestion » et en « informatique », nécessaire à la réalisation efficiente des missions évoquées. La connaissance des méthodes du travail « agiles », la détention de compétences sociales propices à la coopération et une véritable capacité de leadership sont des dispositions fondamentales pour l’exercice de ces métiers stratégiques.

7. Métiers de la communication et du marketing

Les tâches principales des métiers de la communication et du marketing digital sont « la fidélisation des utilisateurs des plateformes et services web d’une organisation en procédant à toutes les actions pertinentes d’interactivité. Ces métiers développent sa présence sur les principaux médias sociaux ; ils procèdent aux actions de création

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de “buzzˮ et de visibilité sur le web, en particulier sur les réseaux sociaux ; ils assurent eux-mêmes la partie animation et communication rédactionnelle ; ils participent à ou gèrent la définition de la stratégie de communication de l’organisation sur les médias sociaux ».

Les métiers de community/social media manager, marketeur digital, chargé de référencement et d’analyste de trafic sont typiques de ces activités. Bien qu’en apparence assez récents, ils s’inscrivent dans le prolongement du métier précurseur de webmaster (également précurseur pour certains métiers du domaine « interface utilisateurs et créations numériques »). Ce métier impliquait à l’origine une forte polycompétence liée à la connaissance conjointe des grands principes du développement, du design et de la communication sur le web. L’évolution des usages de la communication sur internet – tout se connecte et participe de plus en plus souvent aux échanges dans les médias sociaux – a conduit à un éclatement de ce métier de webmaster. Les métiers qui en découlent, davantage spécialisés, concourent pour l’essentiel à l’optimisation de la présence des organisations sur le web (entreprises, associations, administrations…) en concevant et en mettant en œuvre des campagnes de communication et/ou de publicité en ligne. Autrement dit, la diversification en métiers spécialisés témoigne de l’enjeu stratégique pour les organisations de tirer profit de la large place publique créée sur et par le web.

• Le chargé de référencement (ou SEO, search engine optimizer) vise à augmenter l’audience de l’organisme pour lequel il travaille auprès des publics du web (généraux ou ciblés). Pour cela, il met en œuvre et optimise des techniques qui permettent au site de l’organisme d’être bien positionné dans les résultats des moteurs de recherche, accroissant ainsi l’audience et cela, pour un coût inférieur à celui d’une campagne de publicité.;

• L’analyste de trafic (ou consultant web analytique, traffic manager) fournit des données sur la fréquentation d’un site web. Il utilise des outils d’exploitation des données pour analyser la fréquentation du site. Assez souvent, dans les petites entreprises, il cumule cette activité avec celles de référencement, de pilotage des campagnes publicitaires ou de mise en place de stratégies de communication.

• Le community / social media manager (animateur de communautés, community architect, manager de communautés) se charge d’assurer sur le web la réputation et l’image de marque de l’organisme et de ses produits/services/programmes. Ces métiers sont désormais de plus en plus distincts : le community manager anime pour l’essentiel des communautés d’internautes à travers des discussions et des renseignements, tandis que le social media manager met en œuvre la stratégie de relations publiques de l’organisation dans l’univers numérique, en

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particulier dans les médias sociaux (Facebook, LinkedIn, Twitter etc.). Pour ce faire, il décrypte les tendances d’opinion sur ces plateformes et gère la communication de l’organisme en cas d’incident ou de crise. La relative nouveauté de ce métier se conjugue avec la forte diversité de ses appellations : community architect, social media architect, responsable des médias sociaux, stratège en médias sociaux, responsable des animateurs de communautés, architecte en médias sociaux, etc.

• Le marketeur digital (webmarketer) prépare, met en œuvre et analyse des campagnes de communication commerciale (publicité, etc.) basées sur le web et ses infrastructures. Il existe de nombreuses manières de transmettre des contenus sans engagement financier ou temporel important : créer des vidéos, composer des infographies, accompagner les messages par des créations artistiques, piloter des interventions sur les médias sociaux, concevoir une application mobile, analyser les données clients, sponsoriser des liens, etc.

L’importance grandissante qu’a prise la communication dans l’univers du numérique et ses conséquences sur l’évolution des métiers peuvent être illustrées par la professionnalisation des métiers de community / social media manager. Il y a quelques années encore, les tâches relevant de ce domaine correspondaient à des activités de communication sans grandes responsabilités qui étaient souvent confiées à des stagiaires. Dans un premier temps, avec l’apparition des réseaux sociaux, une partie de ces activités a été prise en charge par le responsable en e-réputation. Il s’agit d’un métier spécialisé dans la gestion de l’image de l’organisme sur les réseaux sociaux qui ressemble à celui du community manager d’aujourd’hui. De nos jours, ces community managers ont été remplacés, pour une partie d’entre eux, par des social media managers, au champ de responsabilités plus large et beaucoup plus valorisé du fait de leur rôle de conseiller de la direction au sujet de la politique de communication.

Dans ce contexte de diversification et de professionnalisation de ce domaine, on peut constater une structuration en filière des métiers. L’accès au métier du community manager, auparavant ouvert à des profils très divers, a commencé à se structurer (Bac + 2/3, Bac + 4/5). Cette tendance est confortée par l’apparition d’une offre abondante en formations certifiées. Des connaissances techniques approfondies ne sont pas nécessaires au démarrage, mais pour évoluer dans la filière, il faut s’approprier ces connaissances qui apportent un deuxième pilier de compétences. Le social media manager constitue l’étape supérieure. L’accès à ce métier demande une expérience de plusieurs années dans le domaine et une formation supérieure en communication/économie/école de commerce. Quant au métier du marketeur, dès

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lors qu’il comporte des responsabilités au niveau de la stratégie, il requiert des expériences étendues et variées dans le domaine. Il suppose aussi la connaissance des leviers du marketing et de leurs dérivés dédiés à une application sur le web.

Restent à part dans cette perspective de filière le chargé de référencement et l’analyste de trafic. Ces métiers seraient (encore) accessibles aux autodidactes à condition qu’ils développent une double compétence webmarketing et outils d’appli-cation numérique.

8. Métiers du commerce

Les métiers de la fonction commerciale renvoient à l’exploration des besoins du client, à l’élaboration de propositions correspondantes et à la vente « business-to-business » de services et d’applications numériques. Ces métiers détectent des projets et développent le portefeuille clients. Ils procèdent à la qualification détaillée du besoin et animent la réponse commerciale. Enfin, ils procèdent à la présentation de la proposition commerciale au client.

Quatre métiers commerciaux apparaissent au cœur de l’économie numérique. Ils ont en commun de disposer à la fois de compétences dans le domaine des affaires et de solides connaissances techniques :

─ l’ingénieur d’affaires (ou business developer, business manager, chargé d’affaires) : en tant que responsable du développement commercial, il est une figure clé dans ce domaine. Il a pour mission de développer des propositions commerciales, de gérer les contrats/portefeuilles de clients et de clôturer les ventes. L’accès à ce métier demande une expérience professionnelle étendue et une bonne culture des techniques de l’informatique. Les tensions sur le marché du travail sont chroniquement élevées pour ce métier ;

─ le chargé de clientèle correspond à deux types d’activités. Il renvoie d’une part à des tâches d’administration des ventes, et de l’autre à la responsabilité des relations commerciales avec un sous-groupe de la clientèle. Par exemple, le chargé de clientèle peut assurer la gestion des partenariats avec les clients importants de l’entreprise (« commercial grand compte ») ;

─ l’ingénieur avant-vente est spécialisé dans l’étude approfondie des demandes spécifiques du client et se charge de communiquer le diagnostic à l’équipe de développement de sa maison. Pour être crédible, il doit disposer de connais-sances informatiques approfondies ;

─ l’ingénieur commercial de la donnée est spécialisé dans l’acquisition/vente des ressources d’information numérique, du big data, qui sont en forte croissance.

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L’observatoire du numérique OPIIEC (2015) rapporte la pratique fréquente selon laquelle les entreprises envoient sur le terrain deux représentants pour vendre une même prestation en lien avec les technologies de rupture en voie de diffusion (par exemple big data), l’un étant commercial, l’autre du domaine technique. Cela indique qu’à la fois les commerciaux du numérique et leurs interlocuteurs chez les clients utilisateurs paraissent dépassés par la complexité des nouvelles technologies. Selon l’OPIIEC, il en ressort pour la fonction commerciale deux enjeux à maîtriser :

─ déplacer encore plus le centre de gravité de l’activité vers l’identification et le diagnostic du besoin du client, et l’explication des options pour la solution. D’où l’insistance des experts au sein du groupe VPPEC sur les métiers d’avant-vente et de la donnée ;

─ trouver des modèles qui assurent la mise à jour très rapide des connaissances technologiques de la fonction commerciale, dans la mesure où le profil de technico-commercial généraliste, bien établi, ne suffira plus. Le duo commercial/technologue en est un exemple. La double certification ou l’immersion du commercial dans les projets techniques pourrait à notre sens également être examinée.

9. Métiers de l’expertise et du conseil

Les conseillers, consultants et experts en services numériques effectuent des missions et élaborent des solutions pour ou dans des organisations qui souhaitent mener à bien des projets technologiques complexes. Comme l’expliquait un participant au groupe VPPEC, « ils interviennent le plus souvent en phase amont (conception, validation/qualification, accompagnement de la mise en œuvre) pour éviter au maximum les risques de crise en phase d’exploitation ». Leurs effectifs sont particulièrement élevés (DIRECCTE Île-de France, 2016-1). L’étude sur le numérique en Île-de-France (FAFIEC, 2016) suggère que la fonction de conseil tend à devenir indispensable parallèlement à la prestation.

Beaucoup d’entre eux travaillent dans une entreprise de services du numérique (ESN, anciennement SSII, société de services en ingénierie informatique) et interviennent comme consultants chez des clients. Ils peuvent évoluer vers des missions plus importantes dans leur domaine d’expertise (senior expert), vers le management (pilote d’équipe) ou la direction (responsable d’unité) ou encore vers la mise à leur compte en profession libérale.

Le domaine d’intervention de ce groupe est très large, allant des solutions pour l’architecture des systèmes d’exploitation au développement de logiciels, à la gestion des données (massives), du cloud et des réseaux, à la sécurisation, à la

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commercialisation, aux ressources humaines et à la formation, ou encore aux conseils juridiques.

On constate différents niveaux de compétences allant de l’application de consignes à une expertise de haut niveau en passant par une spécialisation dans tel ou tel domaine. Corrélativement à cette différenciation, le traitement peut varier du simple au triple dans un domaine de spécialité donné.

Parmi les métiers de ce groupe, les représentants de la profession ont mis en exergue l’expert en protection de données numériques. Ce métier serait nouveau, en fort développement et très recherché. Cette évolution reflète l’accentuation des risques de vulnérabilité des systèmes informatiques et des bases de données. C’est le résultat de l’introduction, sans interruption, d’innovations à de multiples niveaux. De nos jours, il s’agit notamment de l’accès par différents canaux à l’internet et ses ressources, de l’extension exponentielle des objets connectés par des dispositifs numériques (et de l’accumulation de données massives associées), de la détention de données sur les individus dont le stockage et l’exploitation doivent être particulièrement sécurisés, de la gestion à distance via le cloud. S’ajoutent à cela les risques inhérents à la cohabitation de systèmes hétérogènes au sein de l’entreprise et la sophistication des cyberattaques.

L’OPIIEC (2015) s’attend à une croissance particulière de la demande concernant ce type de métiers. Selon une étude du consultant PricewaterhouseCoopers (PwC), « les entreprises françaises ont subi en moyenne 21 incidents / jour en 2015 (…) Pour faire face, les budgets de sécurité des entreprises ont augmenté dans cette année en moyenne de 29 %, soit autant que les pertes financières estimées imputables à ces incidents (+ 28 %) » (PwC, cité dans Arlandis et al., 2017).

Un deuxième métier d’expertise/conseil en numérique cité est celui d’expert en propriété intellectuelle. L’importance prise par ce métier renvoie à l’enjeu de la suppression des téléchargements illégaux (films, musique, textes), des actes de piratage devenus légion : en 2011 en France, on a dénombré 18 millions de constats d’infractions par les ayants-droit ou leurs représentants. Ces pratiques exploitent des techniques de téléchargement comme le streaming et l’interconnexion des sites (Rapport d’activité 2010 de l’HADOPI). Pour améliorer l’application des droits de propriété intellectuelle, toute une série de législations ont été instaurées au niveau international, européen et national (lois HADOPI en France). La raison pour les entreprises (fournisseurs d’accès à internet et d’autres distributeurs) de solliciter les services d’experts en propriété intellectuelle réside dans leur responsabilisation. Ce sont elles qui doivent se charger de la lutte anti-piratage, les régulateurs ayant décidé

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Emplois et métiers du numérique : état des lieux et diagnostic

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que les entreprises trouvent leurs propres solutions, au lieu de privilégier une conception plus interventionniste. Ainsi, les entreprises doivent prendre des mesures pour détecter promptement l’existence d’activités illégales, voire prévenir efficacement ce type d’infractions, et se mettre en mesure de le prouver en cas de conflit juridique. Des irrégularités en matière de gestion de la propriété intellectuelle peuvent exposer à des responsabilités pénales et notamment entraîner des dommages et intérêts élevés.

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CHAPITRE 3 UN LIEN FORMATION-EMPLOI RÉNOVÉ

PAR UNE APPROCHE ITÉRATIVE ET EN RÉSEAU

Exposée à des évolutions technologiques rapides et perpétuelles, la filière numérique nécessite un système de formation reposant non pas sur une succession d’interventions segmentées d’acteurs de la formation et du monde professionnel, mais sur un « continuum » entre la formation et l’emploi, fondé sur une approche itérative et en réseau.

Le phasage traditionnel, que l’on peut schématiser par l’enchaînement ci-dessous, ne suffit plus à répondre aux enjeux de professionnalisation des jeunes et des actifs de la filière, avec des métiers dont le contenu change au rythme des évolutions technologiques :

Évolution des métiers et des emplois

Formalisation des besoins en compétences par les acteurs du monde professionnel

(entreprises, organisations professionnelles, instances paritaires des branches professionnelles, etc.)

Réponse de l’appareil éducatif en termes d’adaptation des filières de formation

Alimentation du marché du travail par les nouvelles générations

passées par ces filières

Ce schéma séquentiel de la relation formation-emploi ne permet pas l’évolution rapide du contenu des formations alors que certains emplois se voient profondément transformés par les mutations technologiques. De ce fait, de plus en plus de dispositifs créés ou mobilisés pour trouver des solutions aux défis de l’adaptation des hommes et des organisations s’inscrivent dans des montages ad hoc, des

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coopérations ponctuelles ou des partenariats plus pérennes entre des structures appartenant au système « classique » de formation initiale, à celui de la formation continue, de l’insertion professionnelle et sociale, ou encore des entreprises et leurs organismes-relais que sont les OPCA ou les branches professionnelles.

Trois composantes de la relation formation-emploi traditionnelle sont particulièrement touchées par cette évolution :

─ le monde de l’insertion sociale et professionnelle où l’apprentissage des technologies numériques donne lieu à plusieurs initiatives particulièrement innovantes pour renouveler la vision des parcours vers l’emploi des personnes qui en étaient durablement éloignées (1) ;

─ les structures de formation initiale organisent des réponses en développant de nouveaux modes de coopération avec les entreprises, et en intégrant de plus en plus de pratiques de formation initiale et d’actions de formation continue. Une telle dynamique est particulièrement observable dans tout ce qui concerne la formation des techniciens au numérique (2) ;

─ enfin, les entreprises elles-mêmes peuvent être amenées à s’impliquer fortement dans la formation continue pour résoudre des tensions importantes dans leurs besoins de recrutement. Elles peuvent également être mobilisées sur des problématiques de reconversion de certains salariés touchés par l’obsolescence rapide des compétences constitutives de leurs métiers (3).

1. Le numérique comme facteur d’insertion et levier d’accès à l’emploi

À court terme, la filière numérique continuera à embaucher. Dès lors, des difficultés de recrutement pourraient apparaître pour certains métiers, comme cela s’est déjà produit pour les développeurs (voir Chapitre 2). Élargir les recrutements à de nouveaux profils de candidats est un des leviers dont disposent les entreprises pour faire face à ces difficultés. Deux types d’initiatives, visant à organiser l’insertion socioprofessionnelle de personnes éloignées de la formation et de l’emploi via la maîtrise de compétences numériques, ont pris récemment une certaine ampleur : l’insertion par l’activité économique et la Grande École du numérique. À leur façon, ces deux initiatives augmentent le vivier de candidats potentiels.

Des Structures d’insertion par l’activité économique (SIAE) ont ainsi engagé des initiatives dans le but de formaliser des parcours d’insertion par le numérique (Graphique 6). Pour favoriser le retour à l’emploi de personnes qui cumulent

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Les transformations de la relation formation-emploi dans la filière du numérique : l’enjeu d’une approche itérative et en réseau

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généralement un ensemble de difficultés sociales et professionnelles (logement, santé, faible niveau de qualification, absence d’expérience professionnelle, etc.), ces structures s’appuient sur la formation en situation de travail. En se formant et en réalisant diverses activités numériques (gestion électronique de documents, création de sites web ou d’applications numériques, montage audio et vidéo, graphisme, développement web, infogérance, développement logiciel, etc.), ces personnes éloignées de l’emploi acquièrent des connaissances, des techniques et des gestes professionnels, tout en bénéficiant d’un accompagnement social et professionnel. Aucun prérequis n’est exigé à l’entrée, si ce n’est « une passion pour le domaine informatique ».

Si elle peut représenter un premier palier pour sortir les personnes d’une situation d’isolement et de précarité et les remettre dans une dynamique d’apprentissage, la formation en situation de travail, au fondement du projet des SIAE, reste cependant dans la plupart des cas insuffisante pour acquérir un niveau de qualification permettant l’accès direct à un emploi ou un métier « cœur du numérique ». Les promoteurs de l’insertion par le numérique en sont conscients et se positionnent clairement comme un palier intermédiaire, un « sas » permettant à des individus d’accéder à des structures leur offrant des formations complémentaire qualifiantes, seules à même de leur ouvrir les portes vers des perspectives d’insertion professionnelle durable (Graphique 6).

Graphique 6 – Le parcours d’insertion sociale et professionnelle par le numérique pour les personnes éloignées de l’emploi

Source : Colombbus, novembre 2016 ; www.colombbus.org

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C’est surtout sur ce palier du renforcement de l’employabilité que se positionne une deuxième initiative importante et en plein développement : celle de la Grande École du numérique (Encadré 10). Trop récente pour être évaluée, cette initiative apparaît d’ores et déjà intéressante sur plusieurs aspects. Par la nature et la qualité des dossiers présentés, elle met en évidence une forte demande de la part des publics comme des entreprises, qui émane de l’ensemble du territoire. Elle souligne aussi la forte dose d’innovation au niveau de la pédagogie et des métiers préparés que recèle la mise en place de formations sur et autour du numérique.

Encadré 10 – La Grande École du numérique

La Grande École du numérique (GEN) a été mise en place en 2015 à l’initiative du président de la République. Elle vise à structurer sur l’ensemble du territoire national une offre de formation diversifiée, les « fabriques du numérique », afin de « répondre aux besoins croissants du marché de l’emploi en compétences numériques » et de « favoriser l’insertion socio-professionnelle des publics éloignés de l’emploi et de la formation ».

Au premier semestre 2017, à l’issue du lancement de plusieurs appels d’offres, 268 formations sont désormais labellisées. Chacune d’elles concerne un groupe compris le plus souvent entre 20 et 30 apprenants, dont au moins la moitié doivent être des décrocheurs.

Si la plupart sont des formations dépendant de petites structures locales, d’autres sont intégrées à des réseaux d’écoles nationaux (Simplon, Webforce 3, etc.) ou liées à de grands opérateurs du numérique (CISCO, Google, etc.).

Ces formations préparent à plus de 30 métiers, dont certains métiers « cœur du numérique » (administrateur/trice réseau et sécurité, développeur/se web, etc.), et d’autres que l’on peut plutôt qualifier d’utilisateurs du numérique (ex : prépa-ration d’un certificat de qualification professionnel (CQP) d’animateur/animatrice périscolaire création numérique). Certaines formations sont qualifiantes (accès à un titre, diplôme ou certificat), d’autres non ; leur durée varie de 3 à 24 mois (toutes gratuites pour les apprenants).

Gérée par un Groupement d’intérêt public depuis novembre 2016, la GEN vise à associer une expertise centralisée et une approche très décentralisée, fondée sur une grande variété de solutions au plus près des territoires et notamment des régions.

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Sources : Audition de Daniel Ratier, chargé de la préfiguration du GIP de la Grande École du numérique le 16 novembre 2016 Site : www.grandeecolenumerique.fr Distinguin S., Marquis F.-X. et Roussel G. (2015), La Grande École du numérique, une utopie réaliste, Rapport au Premier ministre, septembre, 207 p.

La réussite de ces deux initiatives repose sur un réseau de partenaires structuré, allant des « prescripteurs sociaux » aux entreprises du numérique. Ces dernières doivent donc être pleinement parties prenantes dans le processus d’insertion. La mise en place de clauses d’insertion dans les marchés publics, le développement de démarches RSE au sein des entreprises pourraient renforcer, par une approche plus volontariste, l’accès de personnes non ou très peu qualifiées aux métiers « cœur du numérique », et répondre à certains besoins des entreprises de la filière.

Malgré quelques trajectoires individuelles marquées par la réussite, l’image d’une filière numérique qui permettrait facilement aux « décrocheurs » d’accéder aux métiers « cœur du numérique » est loin de correspondre encore à la norme.

Les professionnels de la filière restent prudents, jugeant indispensable d’avoir plus de recul pour identifier la suite des parcours individuels après la formation. Il serait également intéressant de mesurer si ces offres alternatives font évoluer les pratiques de recrutement des entreprises, notamment en reconsidérant la place prépondérante qu’elles accordent au diplôme dans leurs critères de sélection.

2. Des structures de formation initiale engagées dans des dynamiques de coopération avec les entreprises

Loin de rester inertes face aux nouveaux enjeux de recrutement que soulèvent les entreprises de la filière du numérique, de nombreuses structures de formation initiale développent de nouveaux modes de coopération avec les entreprises, et intègrent progressivement, en plus des pratiques de formation initiale, des actions de formation continue1. Une telle dynamique existe notamment pour la formation de techniciens au numérique.

(1) Voir l’Annexe C « L’offre de formation initiale aux métiers du numérique », disponible sur le site de France Stratégie.

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Concernant les formations d’ingénieurs, les besoins en compétences semblent déjà suffisamment identifiés (Schlechter et al., 2016). En revanche, de nombreux recrutements paraissent exiger un profil d’ingénieur, alors que d’autres profils de type technicien pourraient convenir (niveau Bac + 3 pour les développeurs et les designers, issus par exemple de BTS relevant de diverses spécialités informatiques), notamment dans les PME du secteur de l’édition de logiciels.

Des solutions alternatives à la « production » d’ingénieurs ou d’universitaires de niveau Bac + 4 ou Bac + 5 existent, mais elles exigent un certain nombre de conditions.

Tout d’abord, les entreprises et les instances chargées de la formation initiale des techniciens (STS, IUT et en amont lycées professionnels) doivent faire preuve d’un comportement volontariste de coopération. On voit ainsi apparaître progressivement des formes de partage de l’ingénierie pédagogique avec des formations en alternance, des parcours coordonnés, des projets tuteurés et encadrés par des professionnels et surtout des co-constructions de l’offre de formation initiale et continue (Encadré 11).

Encadré 11 – Un exemple de coopération entre enseignement supérieur et entreprises du numérique : le programme de formation

de l’Institut universitaire de technologie (IUT) de Villetaneuse

Départements Informatique, Génie électrique et informatique industrielle, Réseaux et télécoms

Le diplôme universitaire de technologie (DUT) est le cœur d’activité de l’IUT : formation de deux années après le baccalauréat avec un volume horaire assez important (1 600 à 1 800 heures). Le programme d’études est découpé en blocs de compétences afin de s’aligner sur des parcours professionnels.

L’IUT propose également des licences professionnelles (qui permettent plus facilement des adaptations locales) et des diplômes universitaires (qui peuvent être adaptés à la demande des partenaires).

À côté de la formation initiale classique ou en apprentissage, l’IUT propose de la formation continue universitaire (qui représente 3 % de la formation continue générale).

Le Centre de relations extérieures pour l’insertion professionnelle (CREIP) de l’IUT de Villetaneuse regroupe les activités de stages, d’apprentissage et de formation continue de l’IUT. Il participe au développement du réseau de l’IUT et surtout au maintien de son maillage territorial qui est très dense. Il renforce les liens entre l’IUT et les entreprises du territoire tout en assurant leur implication

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dans le développement de l’offre de formation afin de favoriser l’insertion professionnelle. En outre, l’encadrement pédagogique est assuré par des enseignants-chercheurs appuyés par de nombreux professionnels.

L’institut jouit de relations très étroites avec les entreprises par le biais de conférences métiers, de projets tutorés pour la mise en pratique des acquis universitaires. Une place importante est laissée aux travaux de préparation à l’emploi (ateliers RH et simulations) ; un suivi individualisé des apprentis est assuré.

Les formations sont souvent co-construites avec les entreprises en réponse à des besoins d’emploi. Sur analyse d’indicateurs relatifs à l’emploi (statistiques de Pôle emploi), des partenaires « entreprises » sont identifiés et se voient proposer le montage de formations qui peuvent s’appuyer sur des cursus diplômants ou correspondre à des formations très spécifiques, par exemple :

– le montage d’une certification SDA 21 – SCALA Data Analyst ;

– une licence professionnelle Fibre très haut débit (en lien avec de grosses entreprises du secteur des télécoms : Orange, SFR, etc.).

Le contenu des formations peut être réajusté à l’issue d’une première année de fonctionnement.

Extraits de l’intervention de Pierre Gérard, IUT Villetaneuse (séance VPPEC du 16 novembre 2016)

C’est précisément cet engagement dans des actions de formation continue, en complément des formations initiales « lourdes », qui constitue la deuxième condition d’un meilleur partenariat entre structures de formation et entreprises. Alors que les contenus de la formation initiale ont vocation à durer dans le temps, les technologies du numérique et leurs usages (donc les compétences requises) évoluent très vite. Cette tension crée une bonne opportunité pour un montage en commun d’opérations locales de formation continue (formations complémentaires d’initiatives locales, mentions complémentaires, licences professionnelles, dispositifs de certification, etc.). Toutefois, selon un intervenant issu d’un IUT, le montage d’une formation continue apparaît toujours « très compliqué au niveau budgétaire ».

Une troisième condition, qui est plutôt une recommandation aux instances nationales concernées tant elle reste à opérationnaliser sur le terrain, est l’engagement des acteurs du monde de la formation dans ces dynamiques de coopération avec les entreprises. Or, un frein majeur à cet engagement reste le fait que les enseignants-chercheurs sont évalués sur leurs activités de recherche et non sur la pédagogie ou le montage de partenariats.

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Une dernière condition est le développement de partenariats entre les structures de formation initiale et continue, quel que soit leur statut (public ou privé) dans des territoires identifiés, pour répondre de la manière la plus ajustée aux besoins des entreprises d’un territoire. Le cas d’un Campus des métiers et des qualifications spécialisé autour de thématiques liées au numérique (Encadré 12) souligne la plus-value majeure que représente l’affirmation d’une logique de coopération interinstitutionnelle dans le domaine de la relation formation-emploi.

Encadré 12 – Un exemple de coopération formation-entreprises du numérique : le Campus des métiers et des qualifications

« Technologies et usages numériques » en Bretagne

Au deuxième trimestre 2017, la France compte 77 campus des métiers et des qualifications avec plusieurs thématiques : aéronautique, métallurgie, services aux personnes, numérique et design, etc. Ce dispositif partenarial privilégie une approche territoriale en s’appuyant sur filière identifiée comme à fort enjeu économique et social. Le dossier soumis à labellisation est porté conjointement par l’académie et la région et se fonde sur l’organisation d’un réseau d’établis-sements d’enseignement au niveau secondaire et supérieur, de structures de formation continue et d’organismes de recherche. Ces partenaires se coordonnent pour construire une offre de formation initiale et continue adaptée aux besoins des entreprises de la filière, pour contextualiser les projets pédagogiques et promouvoir des métiers en tension. L’objectif est de favoriser la lisibilité et la fluidité des parcours de formation, de faciliter l’accès au premier emploi des diplômés et de dynamiser le tissu territorial.

Le campus des métiers et des qualifications (CMQ) « Technologies et usages numériques » à Lannion (Bretagne) est porté par le lycée Le Dantec. Ce CMQ spécialisé sur la « Sécurité numérique et internet des objets » a été créé pour renforcer l’offre de formation aux métiers basés sur les technologies et les usages du numérique, accroître l’attractivité des filières de formation et développer/valoriser les compétences via le numérique. Avant la constitution de ce campus, des projections de recrutement ont été effectuées par la Maison de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’insertion (MEFPI) du territoire afin d’identifier les besoins des entreprises. Ces projections suggèrent un besoin potentiel pour des profils Bac + 3 à Bac + 5, mais plus particulièrement au niveau technicien.

Après l’identification de ces besoins, les parties prenantes se sont penchées sur l’évolution de l’offre de formation ainsi que sur la mise en place de nouvelles formations au plus près des attentes des entreprises, autant pour le contenu pédagogique que pour le format (formation initiale, continue, formation à distance, etc.). Une des actions engagées dans ce cadre est le développement de la formation DUT Réseaux et télécommunications en un an, en réponse à un

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besoin spécifique exprimé par des entreprises partenaires. Cette formation cible en priorité les salariés en reconversion professionnelle et les demandeurs d’emploi (de niveau Bac +2) et s’appuie sur un engagement fort des entreprises (accueil de stagiaires et d’apprentis).

Un travail sur l’attractivité de la filière et la mixité a également été effectué afin d’ouvrir les métiers du numérique aux lycéennes (de seconde et de première). Un concours de programmation par équipes, le challenge Ada Lovelace, a été organisé en partenariat avec des entreprises et institutions à destination des lycéennes. Les élèves ont été encadrées par des tutrices étudiantes à l’ENSSAT et des ingénieures d’entreprises.

Extrait de l’intervention de Floriane Blusseau, Mission relation école-entreprise de l’Académie de Rennes (séance VPPEC du 10 octobre 2016)

3. Un engagement multiforme et partenarial des entreprises Les entreprises doivent également faire évoluer leur positionnement dans le champ de la relation formation-emploi. Sans présumer d’autres dimensions, on peut percevoir cette évolution à trois niveaux.

Le premier concerne la perception par les entreprises de l’enjeu que représente leur engagement direct dans la construction de compétences numériques, dès lors qu’elles identifient des besoins spécifiques auxquels le système de formation n’est pas en mesure de répondre de manière immédiate. Le cas d’Henix Formation est emblématique d’une telle évolution (Encadré 13), à double titre. D’une part, en créant un cursus de formation spécialisé dans l’acquisition de compétences liées aux métiers du test, l’entreprise devient elle-même un acteur de la formation continue. D’autre part, en associant l’OPCA de branche et les pouvoirs publics dans le cadre du dispositif de la Préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI), son action s’intègre dans une logique partenariale, à l’image des coopérations propres aux IUT ou aux Campus des métiers et des qualifications.

Par ailleurs, les entreprises – notamment les plus grandes – s’investissent de plus en plus dans la reconversion interne de leurs salariés, et cela de manière permanente. Au gré des évolutions techniques et des choix stratégiques, des salariés peuvent être amenés à voir le contenu de leurs fonctions modifié, ce qui implique de la part de leur entreprise un effort continu pour les accompagner dans l’actualisation de leurs compétences, voire pour leur proposer des fonctions nouvelles (Encadré 14).

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Enfin, ces évolutions techniques et ces choix stratégiques questionnent la place des managers dans les organisations inscrites dans une « transition numérique ». Souvent déterminants pour la réussite du projet, ces managers doivent porter ce processus de manière proactive, développer les capacités nécessaires pour assurer une organisation agile et exploiter les opportunités permises par les changements technologiques. Disposent-ils pour autant de compétences numériques suffisantes, et ainsi de l’autorité nécessaire pour impulser l’adoption de ces technologies dans leur entreprise ? Sont-ils porteurs de refus ou de déni, attitudes fréquentes dans un contexte de changement, ou en sont-ils les victimes ? Les technologies du numérique, en incitant à la diffusion d’organisations fractales d’équipes auto-organisées, sont susceptibles de remettre en question le rôle des managers. Certains pourraient vivre la numérisation comme un risque, leur rôle de coordination des processus et des équipes étant à terme amoindri. Les entreprises ont donc ici un rôle particulièrement important pour donner les moyens aux managers de passer ce cap parfois difficile1.

Encadré 13 – L’engagement d’une entreprise dans une dynamique de formation : le cas d’Henix Formation

Henix est un cabinet de conseil en système d’information dont les services s’articulent autour de deux métiers : l’assistance à maîtrise d’ouvrage et la qualité logicielle. Face à l’évolution des métiers du test logiciel liée à la multiplication des systèmes d’information, à l’offshoring (délocalisation) des développements et à l’augmentation de la part des tests dans l’informatique, l’institution s’est très vite retrouvée confrontée à une pénurie de compétences sur ce marché. La professionnalisation des métiers de la qualité logicielle est donc apparue comme essentielle pour accompagner le développement d’Henix. Le cabinet a donc créé en 2012 une école de la qualité logicielle dédiée à la reconversion de chercheurs d’emploi et spécialisée dans les métiers du test qui interviennent une fois le développement de l’outil réalisé.

L’école propose une offre clé en main (formation et emploi) par le biais de la Préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI). Le dispositif prévoit 52 jours de formation alliant cours théoriques et cas pratiques, avec à terme, quatre projets de soutenance en présence des recruteurs. Henix a choisi de recourir à la POEI car il s’agit d’un dispositif sécurisant qui assure, à l’issue de la formation, l’insertion immédiate de l’apprenant au sein d’une entreprise.

Le dispositif global suit plusieurs étapes :

(1) Voir aussi l’annexe D « Quelques caractéristiques de la formation continue dans le secteur du numérique », disponible sur le site de France Stratégie.

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– l’école identifie des entreprises recruteuses ;

– elle sélectionne les candidats en fonction des besoins des entreprises dans le vivier. La formation cible uniquement des demandeurs d’emploi avec un profil Bac + 5 (mais n’ayant pas forcément suivi un cursus en informatique ;

– l ’équipe pédagogique propose également un coaching emploi à tous les candidats (préparation CV et entretien d’embauche) ;

– une promesse d’embauche est délivrée au candidat avant son entrée en formation ;

– le demandeur suit gratuitement la formation, à plein temps et de manière intensive ;

– à l’issue de la formation, le nouveau collaborateur intègre l’entreprise.

La formation étant gratuite pour le demandeur d’emploi, le coût est supporté par Pôle emploi et le FAFIEC.

Cette sécurité de l’emploi avant même d’être formé et l’opérationnalité immédiate des candidats à la fin de la formation constituent les plus grands attraits du dispositif. Pour les entreprises, le recours à cette école réduit le coût de recrutement, notamment dans les métiers particuliers dont les concepts ne sont pas enseignés dans la majorité des formations du numérique. Les entreprises ont plus de garantie de trouver les profils recherchés en choisissant ce dispositif qu’en ayant recours à un chasseur de têtes ou à des cabinets externes.

Fort de son succès, Henix souhaite déployer ce dispositif de la POEI sur d’autres métiers du numérique. Il s’agira d’identifier les métiers en tension, de référencer une société (cabinet ou entreprise) qui va porter ce dispositif, le promouvoir et participer à l’ingénierie pédagogique et à la délivrance des enseignements. Ce dispositif de formation n’est cependant pas transférable à tous les métiers car les prérequis sont différents d’un métier à l’autre et le format court et intensif n’est pas applicable dans tous les domaines.

Encadré 14 – Le numérique, source d’actions de reconversion interne dans les grandes entreprises

« Le secteur des télécoms connaît des besoins de reconversion professionnelle initiés par la transformation d’un secteur qui devient de plus en plus “logiciel ˮ.

Un vaste programme de reconversion, en cours chez Orange, permet de proposer à des salariés employés sur des métiers en décroissance dans cette entreprise de se reconvertir vers des métiers en lien avec la transition numérique

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de ce secteur : ingénieur en développement logiciel, intégrateur valideur/

qualifieur, ingénieur sécurité.

Ainsi, des chefs de projet sont amenés vers des fonctions de développement de logiciels et de systèmes informatiques, une mutation qui inclut l’apprentissage du codage comme une nouvelle langue technique.

Ces initiatives de reconversion sont travaillées en partenariat avec des écoles ou des universités dans le cadre de la formation continue. »

(Un membre du groupe VPPEC)

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CHAPITRE 4 COMMENT PASSER À L’OPÉRATIONNEL ?

Cette expérimentation VPPEC a permis de produire un répertoire des métiers « cœur du numérique », qui crée un langage commun et partagé entre des acteurs d’horizons divers et donne une vision des métiers en développement à 2/3 ans. Elle a montré la nécessité d’une approche décloisonnée, « itérative et en réseau » de la relation formation-emploi dans cette filière.

Afin d’assurer la pérennité de ces travaux pour la filière numérique, il paraît indispensable :

─ que ce diagnostic soit approprié par les instances décisionnelles de l’Emploi, Formation, Orientation professionnelles (EFOP) au niveau national, régional, local ;

─ que des « lieux ressources » s’approprient également et diffusent le diagnostic auprès d’un public le plus large possible et surtout participent à son actualisation de façon régulière. Il s’agit d’assurer une veille collective sur l’évolution des métiers, d’approfondir des intuitions identifiées lors de cette première VPPEC et de contribuer aux nouvelles adaptations nécessaires pour répondre aux besoins des actifs et des entreprises de cette filière.

Plusieurs pistes ont été proposées pour instaurer une VPPEC dynamique que l’on peut aussi qualifier de « prospective du temps présent », dans la mesure où l’enjeu consiste à identifier « en continu » les évolutions de l’emploi, des métiers, des compétences de demain. Les pistes présentées ci-dessous ne concernent que la filière numérique. Leur généralisation à l’ensemble des filières sera étudiée dans un guide méthodologique distinct [à paraître] qui tire les enseignements de cette expérimentation.

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

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1. Éclairer les instances décisionnelles de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle

La liste des métiers élaborée par le groupe de travail est un résultat concret dont de nombreux acteurs peuvent se saisir, pour la discuter, l’enrichir, la décliner pour leur propre usage.

• Les instances paritaires emploi-formation des branches de la filière numérique comme celles des branches qui recrutent de plus en plus de métiers « cœur du numérique » sont invitées à se saisir de cette liste.

• De même, étant donné la diffusion large de ces métiers dans l’économie, le COPANEF, en tant qu’instance interprofessionnelle, pourrait contribuer à diffuser ce travail au sein des branches.

• Cette liste pourrait alimenter le processus d’actualisation du répertoire opérationnel des métiers et des emplois (ROME) de Pôle emploi, comme d’autres référentiels et nomenclatures des métiers.

• Enfin, s’agissant des métiers, la connaissance statistique reste lacunaire. Une évolution de l’appareil statistique pourrait être discutée dans le cadre du CNIS (Conseil national de l’information statistique).

Plus largement, eu égard à l’importance de l’échelon régional dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de formation professionnelle, cette démarche VPPEC a pour ambition de nourrir la réflexion des acteurs régionaux et académiques. Ainsi, en plus des rectorats, des conseils régionaux, des DIRECCTE, des COPAREF ou encore des CREFOP (cf. commission Territoires du CNEFOP), les résultats de la démarche VPPEC peuvent contribuer à la réalisation du volet « transition numérique » des Contrats de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles (CPRDFOP), en cours d’élaboration sur l’ensemble des régions.

Dans cette perspective, plusieurs instances nationales sont susceptibles de faciliter la diffusion des résultats de cette expérimentation, parmi lesquelles :

─ le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP), qui, par son organisation quadripartite, est l’une des principales instances nationales susceptibles d’intégrer ce travail dans ses réflexions. Cela peut se décliner par une présentation des résultats de l’expérimentation VPPEC numérique (puis à terme des enseignements méthodologiques de l’expérimentation). La commission Territoires du CNEFOP,

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Quelles voies d’action pour soutenir les processus de décision opérationnels ?

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qui capitalise les travaux en cours dans l’élaboration des CPRDFOP qui déclinent un volet « transition numérique », peut assurer une diffusion des résultats de la VPPEC auprès des CREFOP notamment, afin d’alimenter les réflexions des acteurs territoriaux (cf. ci-dessous) ;

─ le Conseil national éducation-économie (CNEE) pourrait également organiser un échange annuel autour des évolutions de la relation formation-emploi dans les métiers du numérique, en lien avec les travaux menés par le Conseil sectoriel national du numérique mis en place par la DGESIP, et les Commissions professionnelles consultatives (CPC) de la DGESCO. Un rendez-vous annuel pourrait être organisé entre des représentants de la DGESCO, de la DGESIP, des Observatoires de branche concernés par les métiers du numérique, et du GIP de la Grande École du numérique. Il contribuerait à suggérer des chantiers nouveaux et urgents à ouvrir et pourrait produire un relevé de conclusions faisant l’objet d’une large diffusion. La DGEFP qui accompagne les branches avec les dispositifs de Contrats d’étude prospective et les actions de développement de l’emploi et des compétences (ADEC) pourrait être associée à cette réflexion.

2. Un réseau de lieux ressources en interaction Les évolutions permanentes des métiers dans le numérique montrent que les solutions optimales pour permettre l’adaptation des compétences des individus reposent en grande partie sur des espaces où se rencontrent l’ensemble des acteurs qui organisent la relation formation-emploi (entreprises, branches, intermédiaires de l’emploi, structures de formation initiale, organismes de formation continue, etc.). L’élaboration d’une VPPEC implique nécessairement de ne pas en faire une démarche ponctuelle mais de se positionner dans une logique de continuité du partage d’expériences. La diffusion et l’échange autour du présent rapport au sein de ces différents espaces peuvent constituer un élément intéressant de continuité de la démarche.

Deux enjeux doivent être distingués.

Le premier est la veille et l’actualisation de la VPPEC, dans un lieu qui relèverait du niveau national, en associant des acteurs d’horizons variés y compris de niveau régional, à l’image de la composition du présent groupe de travail (partenaires sociaux, entreprises, techniciens des branches, acteurs de terrain, représentants de l’État et des organismes d’étude et de statistique, etc.).

Il serait pertinent d’y associer les acteurs de l’orientation professionnelle (opérateurs du conseil et évolution professionnelle, ONISEP, Centre Inffo, Régions et Service

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

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public régional de l'orientation-SPRO, etc.) et des associations de représentants de familles. Ce lieu serait également chargé d’approfondir certaines questions soulevées lors de cette première VPPEC, notamment :

─ comment renforcer la capacité des entreprises à expliciter leurs besoins (métiers, compétences) ? (voir les travaux de Sémaphore pour le Medef) ;

─ comment promouvoir des fonctions dédiées au partenariat opérationnel au sein des établissements pour renforcer les rapprochements avec les entreprises et faire de l’ingénierie de formation (IUT, universités, lycées, collèges) ?

─ quelles évolutions pour l’action des acteurs « intermédiaires » (OPCA, syndicats professionnels, etc.) ?

─ comment renforcer l’attractivité des métiers « cœur du numérique », notamment pour les femmes ?

Il convient d’identifier l’instance, l’organisme (Conseil national éducation-économie, Conseil national de l’industrie, autre) qui pourrait assurer l’animation et la continuité de cette mission de veille et d’actualisation de la VPPEC.

Le second enjeu est l’expérimentation et la diffusion de pratiques innovantes. Il s’agit de multiplier les partenariats locaux (IUT, universités, écoles, réseaux d’entreprise, OPCA, etc.) en matière d’enseignement, de formation, de pratiques de recrutement, de mobilité, etc. Cela repose sur une action réciproque des acteurs de la professionnalisation, pour se tourner vers les entreprises et leurs représentants, qui eux-mêmes doivent ouvrir les portes des établissements et être réceptifs aux enjeux de professionnalisation.

Les Campus des métiers et des qualifications numériques ou, sur des secteurs connexes au numérique, les Pôles de compétitivité numérique, ou encore les conseils départementaux du numérique, qui se mettent en place depuis peu (Seine-Saint-Denis, Val-d’Oise) constituent des lieux d’expérimentation et de mise en réseau de ces acteurs.

Au niveau régional, les Carif-Oref, dans le cadre de leur mission d’observation et de prospective, animent des réseaux d’acteurs locaux, et pourraient suivre les initiatives, pour contribuer à l’actualisation de la VPPEC.

* * *

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Quelles voies d’action pour soutenir les processus de décision opérationnels ?

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Comme l’ont souligné ses membres, ce qui a été fait au sein du groupe de travail VPPEC numérique « ne constitue pas un travail définitif » mais bien une matière amenée à évoluer, s’enrichir, se confronter à de nouvelles expérimentations (en particulier sur les enjeux de professionnalisation et d’insertion). L’enjeu consiste donc à suivre comment chaque institution ou instance identifiée précédemment s’emparera de ce rapport pour faire vivre cette production collective.

Ce travail « appelle donc une exigence de suivi » de la part notamment des représentants de la filière et des représentants institutionnels, afin d’en tirer des conclusions opérationnelles et de les décliner en actions (appropriation de la liste des métiers, rapprochements opérationnels avec des établissements ou organismes de formation, entreprises, etc.).

Ensuite, comme pointé dans le rapport, la rapidité des transformations oblige à « rester modeste », personne n’étant à l’abri d’une erreur d’anticipation. C’est probablement une des avancées de l’approche par filière. Elle favorise l’élargissement de la réflexion à plusieurs secteurs, la production d’observations et d’intuitions communes, et limite le risque d’erreur : « plus on a d’incertitudes sur les évolutions des métiers et des compétences qui y sont associées, plus il est utile d’adopter des approches permettant de dresser des repères collectifs », résume un membre du groupe de travail. Cette approche transversale et « trans-sectorielle » a également favorisé une prise de distance progressive des acteurs avec leurs « ancrages » institutionnels.

La production d’une telle « vision » peut constituer enfin une opportunité pour les représentants d’autres branches ou filières. Il serait utile de penser à des points de dialogue entre les secteurs ou filières qui ont ou vont avoir besoin de compétences numériques, et la filière numérique qui a besoin d’autres compétences. Il pourrait ainsi être envisagé un élargissement du rendez-vous annuel de discussion de la VPPEC à de nouvelles branches ou filières impactées par le numérique.

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ANNEXES

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ANNEXE 1 COMPOSITION DU GROUPE DE TRAVAIL

Ce rapport s’appuie sur les réflexions et les analyses d’un groupe de professionnels issus d’horizons divers qui a tenu sept réunions entre mai et décembre 2016.

Émilie Bourdu Chef de projet, La Fabrique de l’industrie Chantal Caritey Cheffe de projet « démarches territoriales » ; référente

développement numérique et impacts sur l’emploi, DGEFP Lydie Chaintreuil Chargée d’étude, Observatoire régional des métiers

(OREF de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur) Pierre Chanceaulme Responsable de l’Observatoire des métiers des

Télécommunications, représentant Unetel-RST Patrick Cocquet Délégué général, Cap Digital Barbara Commandeur Chargée d’étude, Carif-Oref Pays de la Loire Olivier Coone Délégué à la formation, Syntec Numérique, membre du

CSF Numérique Sylvie Dodu Département du lien formation-emploi, chargée du

partenariat avec le monde professionnel, DGSIP Françoise Farag Présidente, société Salvia Développement Frédéric Lainé Département observatoire de l’emploi, Direction statistiques,

études et évaluation, Pôle emploi Suzanne Lam Responsable relations partenaires, Henix Formation Olivier Lelong Secrétaire fédéral, F3C CFDT Matthieu Mille Directeur des études et de l’innovation, Tech In France Olivier Rodriguez Département observatoire de l’emploi, Direction statistiques,

études et évaluation, Pôle emploi Nathalie Tessier Cheffe du bureau de la Formation, de l’Emploi et des

Transitions sociales, CGDD

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

FRANCE STRATÉGIE 70 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

Brigitte Trocmé Adjointe à la sous-directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie, DGESCO, ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

Ce groupe de travail a en outre accueilli, à l’occasion d’auditions ou de participations ponctuelles :

Carole Aboaf Adjointe département du lien formation-emploi, DGSIP

Kathleen Agbo Chef de mission anticipation et développement de l’emploi, DGEFP

David Anglaret Adjoint à la chef de mission anticipation et développement de l’emploi, DGEFP

Catherine Beauvois Secrétaire générale du CNEFOP Ivan Béraud Ancien secrétaire général F3C CFDT, membre du CSF

Numérique Floriane Blusseau Campus des métiers et des qualifications

Françoise Brancourt Chargée de mission professions de conseil et actifs immatériels, Direction générale des entreprises, DGE

Renaud Bricq Conseiller technique, CNEFOP Cécile Brousse Chef du département Métiers et qualifications, Dares

Christine Bruniaux Chef du département du lien formation-emploi, DGSIP

Julia Charrié Responsable de projet, France Stratégie Philippe Charry Secrétaire général, Fédération FO Com

Audrey Direr Responsable développement RH, société Smile

Brigitte Doriath Sous-directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie, DGESCO, ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

Geoffroy du Manoir Groupe Aubay (ESN)

Anne Faure Égalité numérique des territoires, CGET

Marc Laget Responsable Aménagement numérique des territoires, CGET Anne-Isabelle Lichterowicz

Directrice Développement des compétences et Orange Innovation School, Orange

Christophe Michel Chargé d’étude, département Métiers et qualifications, Dares

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Composition du groupe de travail

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Catherine Moalic Responsable de la mission Campus des métiers et des qualifications, DGESCO, ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

Charles-Louis Molgo Sous-directeur des mutations économiques, de l’emploi et de l’innovation, CGET

Camille Parra Responsable Affaires publiques, Tech In France

Jacques Peyrondet Digital Aquitaine Benoît Prady Association Colombbus Daniel Ratier Co-créateur de GEN GIP, Grande École du numérique

(GEN) Laetitia Steffen Chargée de mission, responsable de la communication, CNI Agnès Zobel Chef du bureau de la formation et de l’emploi industriel,

Direction générale des entreprises

Séances de travail de la démarche de VPPEC Numérique

N° Thème général de la séance Date Principaux sujets abordés

1 Séminaire de lancement

18 mai 2016

Première approche du périmètre de la filière. État des lieux des connaissances sur la relation formation-emploi dans la filière, et recensement des travaux existants.

2 Validation collective

de la feuille de route

16 juin 2016

Partage des objectifs et des enjeux. Approfondissement de l’état des lieux et identification des grands enjeux stratégiques.

3 Stratégie

et évolutions de la filière

10 juillet 2016

Stratégie et évolutions de la filière : quelles orientations et à quel horizon ? Enjeux économiques et technologiques de la filière numérique, et leurs impacts sur l’évolution des emplois et des compétences.

4

Analyse des besoins en emplois

et compétences à court terme

23 septembre 2016

Analyse des besoins quantitatifs et qualitatifs des entreprises (emplois, métiers, compétences, niveau de qualification).

5 Repérage des métiers

10 octobre 2016

Élaboration collective et partagée d’une liste des métiers « cœur du numérique ».

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6 Modalités

de formation et de professionnalisation

16 novembre 2016

Analyse des modes de formation et de profession-nalisation et conséquences sur l’alimentation des métiers « cœur du numérique ».

7 Séance conclusive 16 décembre

2016

Discussion collective des principaux enseigne-ments de la démarche prospective et du plan du rapport final.

8 Réunion de clôture 9 mars 2017

Échange collectif sur une version provisoire du rapport final et retour d’expérience sur la démarche.

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FRANCE STRATÉGIE 73 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

ANNEXE 2 RESSOURCES BIBLIOGRAPHIQUES

APEC (2014), Les métiers en émergence, Hors-série, Les référentiels des métiers Cadres, 111 p.

Arlandis R.-P., Tessier J., Pannetier C., Didry J. et Stefanescu I. (2017), Métiers du numérique et diplômes professionnels de niveau IV, Rapport pour le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Direction générale de l’enseignement scolaire, février, 83 p.

Arntz M., Gregory T. et Zierahn U. (2016), « The risk of automation for jobs in OECD Countries. A comparative analysis », OECD Social, Employment and Migration Working Papers, n° 39, juin.

Babet C. (2016), Portraits statistiques des métiers 1982-2014, Synthèse.Stat’, n° 19, Dares, mars, 687 p.

Babinet G. (2015), Big Data, penser l’homme et le monde autrement, Paris, Le Passeur, février, 256 p.

Bidet-Mayer T. et Toubal L. (2013), À quoi servent les filières ?, Paris, La Fabrique de l’industrie, novembre, 136 p.

Cap Digital (2016), Marchés et leviers – Cahier de tendances 2015-2016 (plan stratégique de Cap Digital 2013-2018), 44 p.

Carif-Oref Pays de la Loire (2016), Les métiers du numérique recrutent et recruteront !, série Études et enquêtes, janvier, 89 p.

CGDD (2014), « Comprendre l’emploi dans l’économie verte par l’analyse des métiers », C. Babet, S. Margontier et M. Matus, Le point sur, n° 188, juin.

CIGREF (2015), Nomenclature RH. Version 2015. Les métiers des systèmes d’information dans les grandes entreprises, octobre, 237 p.

Commission européenne (2014), E-Skills for Jobs in Europe: Measuring progress and moving ahead, Final Report, février.

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

FRANCE STRATÉGIE 74 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

Conseil national du numérique (2016), Travail, Emploi, Numérique : les nouvelles trajectoires, Rapport remis à la ministre du Travail, de l’Emploi de la Formation professionnelle et du Dialogue social, janvier, 209 p.

Conseil d’orientation pour l’emploi (2017), Automatisation, numérisation et emploi, tome 1 : Les impacts sur le volume, la structure et la localisation de l’emploi, janvier, 190 p.

Coulange J.-P. (2016), « Les 10 métiers du digital qui décollent », Les Échos, 9 décembre.

Dares et France Stratégie (2015), Les métiers en 2022, Rapport du Groupe Prospective des métiers et qualifications, avril, 411 p.

DIRECCTE Île-de-France (2016-1), « Économie numérique : 80 % des établissements franciliens concentrés en cœur d’agglomération », Synthèse thématique, n° 64, mars.

DIRECCTE Île-de-France (2016-2), « L’économie numérique en Île-de-France : une dynamique d’emploi portée par les non-salariés ». Synthèse thématique, n° 65, mars.

Distinguin S., Marquis F.-X. et Roussel G. (2015), La Grande École du Numérique, une utopie réaliste, Rapport au Premier ministre, septembre, 207 p.

Dubois J.-M. et Rousset P. (2017), « Les entreprises du numérique : de l’innovation au renouvellement des compétences », Bref du Céreq (à paraître).

Empirica (2015), « e-skills in Europe. Trends and Forecasts for the European ICT Professional and Digital Leadership Labour Markets (2015-2020) », Working Paper (Hüsing T., Korte W. B. et Dashja E.), novembre.

FAFIEC (2013), Contrat d’études prospectives du secteur professionnel du numérique, étude réalisée par les cabinets Katalyse et Merlane (Lécole J.-F., Dulong C., Zoroddu M., Lutz M., Mathieu J.-M. et Bonnefous C.), août, 189 p.

FAFIEC (2016), Étude prospective pour la branche des métiers du numérique en région Île-de-France, étude réalisée par le cabinet Ambroise Bouteille et Associés pour le compte du FAFIEC et de la DIRECCTE Île-de-France, mai, 408 p.

Frey C. B. et Osborne M. (2013), « The future of employment: How susceptible are jobs to computerization? », Working Paper, Oxford Martin School, septembre.

HADOPI, Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (2011), Rapport d’activité 2010, 144 p.

IGF (2012), Le soutien à l’économie numérique et à l’innovation, Rapport N° 2011-M-060-02, janvier, 421 p.

Le Ru N. (2016), « L'effet de l'automatisation sur l'emploi : ce qu'on sait et ce qu'on ignore », La Note d’analyse, n° 49, France Stratégie, juillet.

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Ressources bibliographiques

FRANCE STRATÉGIE 75 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

Lugnier M., Plaud A., Bajou B., Beauvalet D., Billiet J.-C., Costa P., Foucault M. et Perez M. (2015), Affectation des bacheliers technologiques et professionnels dans les instituts universitaires de technologie et les sections des techniciens supérieurs, Rapport n° 2014-089 de l’Inspection générale de l’Éducation nationale et de l’Inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la recherche, février, 80 p.

Monfort Jean-Alain (1983), « À la recherche des filières de production », Économie et statistique, vol. 151, n° 1, p. 3-12

OCDE (2013), Perspectives de l’OCDE sur les compétences 2013 : Premiers résultats de l’Évaluation des compétences des adultes, décembre, 480 p.

OPIIEC (2015), Formations et compétences Cloud computing et Big data en France, Étude réalisée par le cabinet Ambroise Bouteille et associés et l’IDATE.

OPIIEC (2016), Chiffres clés du secteur du numérique.

ORM (2016), Les métiers du numérique en région PACA. Quels besoins en compétences et en formations ?, Rapport d’étude n° 11 (Chaintreuil L., Inthavong S. et Petrovitch A.), octobre, 76 p.

Pôle emploi (2016), « Le secteur du numérique et ses métiers », Statistiques, études et évaluations, n° 16.015, avril.

Schlechter F., Bergmann C., Gaubert-Macon C., Azéma A., Christmann P., Castellazi M. et Laval D. (2016), Les besoins et l’offre de formation aux métiers du numérique, Rapport IGAS, IGEN, IGAENR, CGE, avril, 89 p.

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ANNEXE 3 GLOSSAIRE

2D Deux dimensions (ou bidimensionnel)

3D Trois dimensions (ou tridimensionnel)

ADEC Action de développement de l’emploi et des compétences

Bac Baccalauréat

CARIF Centre d’animation, de recherche et d’information sur la formation

CEP Conseil en évolution professionnelle

Céreq Centre d’études et de recherches sur les qualifications

CGDD Commissariat général au développement durable

CGE Conseil général de l’économie

CGET Commissariat général à l’égalité des territoires

CIGREF Club informatique des grandes entreprises françaises

CMQ Campus des métiers et des qualifications

CNAM Conservatoire national des arts et métiers

CNEE Conseil national éducation-économie

CNEFOP Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles

CNI Conseil national de l’industrie

COPANEF Comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation

COPAREF Comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation

CPC Commission professionnelle consultative

CPCCN Commission paritaire de la convention collective nationale

CPNE Contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles

CPREFP Commission paritaire régionale de l’emploi et de la formation professionnelle

CQP Certificat de qualification professionnel

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

FRANCE STRATÉGIE 78 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

CREFOP Comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles

CREIP Centre de relations extérieures pour l’insertion professionnelle

CSF Comité stratégique de filière

Dares Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques

DevOps software Development and Information Technology Operations

DGE Direction générale des entreprises

DGEFP Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle

DGESCO Direction générale de l’enseignement scolaire

DGSIP Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle

DIRECCTE Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi

DUT Diplôme universitaire de technologie

EDF Électricité de France

EFOP Emploi, formation, orientation professionnelles

ESN Entreprise de services du numérique

ENSSAT École nationale supérieure des sciences appliquées et de technologie

FAFIEC Fonds d’assurance formation Ingénierie et Conseil

FAP Famille professionnelle

FCIL Formation complémentaire d’initiative locale

GEN Grande École du numérique

CIP Groupement d’intérêt public

GPEC Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences

HADOPI Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet

IGF Inspection générale des finances

IUT Institut universitaire de technologie

MEFPI Maison de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’insertion

NAF Nomenclature d’activités française

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

ONEMEV Observatoire national des emplois et métiers de l’économie verte

ONISEP Office national d’information sur les enseignements et les professions

OPCA Organisme paritaire collecteur agréé

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Glossaire

FRANCE STRATÉGIE 79 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

OPIIEC Observatoire paritaire des métiers de l’informatique, de l’ingénierie, des études et du conseil

OREF Observatoire régional Emploi Formation

ORM Observatoire régional des métiers

PACA Provence-Alpes-Côte d’Azur

PCS Professions et catégories socioprofessionnelles

PIAAC Programme for the International Assessment of Adult Competencies

PME Petites et moyennes entreprises

POEC Préparation opérationnelle à l’emploi collective des chômeurs

POEI Préparation opérationnelle à l’emploi individuelle

PwC PricewaterhouseCoopers

RH Ressources humaines

ROME Répertoire opérationnel des métiers et des emplois

RSE Responsabilité sociétale des entreprises

RSSI Responsable sécurité des systèmes d’information

SIAE Structure d’insertion par l’activité économique

SNCF Société nationale des chemins de fer français

SPRO Service public régional de l'orientation

STI2D Sciences et technologies de l’industrie et du développement durable

STS Section de techniciens supérieurs

TIC Technologies de l’information et de la communication

TPE Très petites entreprises

VAE Validation des acquis de l’expérience

VAP Validation des acquis professionnels

VPPEC Vision prospective partagée des emplois et des compétences

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FRANCE STRATÉGIE 81 CEREQ www.strategie.gouv.fr www.cereq.fr

ANNEXE 4 LISTE DES ENCADRÉS,

TABLEAUX ET GRAPHIQUES

Encadrés

Encadré 1 – Une démarche inscrite dans les travaux du Conseil national de l’industrie (CNI) ..............................................................................8

Encadré 2 – Comment définir le contour d’une activité économique ? ....................13

Encadré 3 – Structuration institutionnelle des branches du numérique ...................16

Encadré 4 – Des politiques publiques de soutien au développement de la filière ...18

Encadré 5 – Des perspectives favorables de créations nettes d’emplois ................23

Encadré 6 – Quelques études prospectives récentes sur le développement de l’emploi dans le secteur du numérique à l’horizon 2020/2022 ........24

Encadré 7 – Contributions récentes sur les effets de la numérisation et de l’automatisation sur l’emploi ...........................................................25

Encadré 8 – Les références mobilisées sur les évolutions des métiers du numérique ...................................................................32

Encadré 9 – Approche DevOps et méthodes « agiles » : définitions .......................34

Encadré 10 – La Grande École du numérique ........................................................52

Encadré 11 – Un exemple de coopération entre enseignement supérieur et entreprises du numérique : le programme de formation de l’Institut universitaire de technologie (IUT) de Villetaneuse ..........54

Encadré 12 – Un exemple de coopération formation-entreprises du numérique : le Campus des métiers et des qualifications « Technologies et usages numériques » en Bretagne ...................................................56

Encadré 13 – L’engagement d’une entreprise dans une dynamique de formation : le cas d’Henix Formation ...................................................................58

Encadré 14 – Le numérique, source d’actions de reconversion interne des salariés dans les grandes entreprises ........................................59

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Vision prospective partagée des emplois et des compétences : la filière numérique

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Tableaux

Tableau 1 – Les « grands marchés » du numérique ............................................... 17

Tableau 2 – Répertoire des métiers « cœur du numérique » .................................. 30

Graphiques

Graphique 1 – Part de l’emploi du secteur TIC dans le total des emplois en 2013 (en pourcentage) ............................................................................. 13

Graphique 2 – Évolution des effectifs salariés des activités de l’économie numérique........................................................................................ 15

Graphique 3 – Forces et faiblesses de la filière numérique en France ................... 19

Graphique 4 – Opportunités et menaces sur la filière numérique en France .......... 20

Graphique 5 – Quels emplois et quels métiers numériques en Pays de la Loire ? ... 21

Graphique 6 – Une représentation de l’insertion par le numérique à travers les différentes étapes du parcours d’insertion sociale et professionnelle de personnes éloignées de l’emploi ................... 51

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