Vers une mobilité durable en Europe · 2010. 5. 31. · Rédactrice en chef Sophie MARIOTTE (01 77...

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Vers une mobilité durable en Europe Vers une mobilité durable en Europe N° 150 - mars 2009 trimestriel numéro double - 30 ISSN 0153-6184 www.iau-idf.fr © IAU île-de-France

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Versune mobilité

durableen Europe

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N° 150 - mars 2009trimestrielnuméro double - 30 €ISSN 0153-6184www.iau-idf.fr

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PrésidentM. Jean-Paul HUCHONPrésident du conseil régional d’Île-de-France

• Bureau1er vice-présidentM. Daniel CANEPAPréfet de la région d’Île-de-France, préfet de Paris

2e vice-présidentM. Jean-Claude BOUCHERATPrésident du conseil économique et social régional d’Île-de-France

3e vice-présidenteMme Mireille FERRI, vice-présidente du conseil régional chargée de l’Aménagement du territoire, de l’Égalité territoriale, des Contrats régionaux et ruraux

Trésorier : M. Robert CADALBERT

Secrétaire : M. François LABROILLE

• Conseillers régionauxTitulaires : Suppléants : M. Gilles ALAYRAC Mme Jeanne CHEDHOMMEM. Robert CADALBERT Mme Aude ÉVINMme Marianne LOUIS M. Olivier GALIANAM. Stéphane PRIVÉ M. Daniel GUÉRINMme Christine REVAULT-d’ALLONNES M. Philippe KALTENBACHMme Mireille FERRI M. Jean-Félix BERNARDM. Guy BONNEAU Mme Francine BAVAYM. François LABROILLE M. Alain ROMANDELMme Christine MAME M. Jean-Yves PERROTMme Nathalie BOULAY-LAURENT Mme Sylviane TROPPERM. Jean-Jacques LASSERRE M. Michel CAFFINM. Éric AZIÈRE M. Pierre Le GUERINELM. Jean-Michel DUBOIS M. Dominique JOLY

• Le président du conseil économique et social régionalM. Jean-Claude BOUCHERAT

• Deux membres du conseil économique et social régionalTitulaires : Suppléants :M. Michel LANGLOIS M. Jean-Pierre HUBERTM. Pierre MOULIÉ Mme Nicole SMADJA

• Quatre représentants de l’ÉtatM. Daniel CANEPA, préfet de la Région d’Île-de-France, préfet de Paris ;Mme Sylvie MARCHAND, directrice régionale de l’Insee, représentant le ministrechargé du Budget ;M. Pascal LELARGE, directeur régional de l’Équipement d’Île-de-France, préfet,représentant le ministre chargé de l’Urbanisme ;Monsieur le représentant du ministre chargé des Transports : N.

• Quatre membres fondateursLe gouverneur de la Banque de France, représenté par M. Guy CASTELNAU ;Le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations,représenté par M. Claude BLANCHET, directeur interrégional ;Le gouverneur du Crédit foncier de France,représenté par M. Patrick BAYON DE LA TOUR ;Le président du directoire du Crédit de l’équipement des PMEreprésenté par M. Henry SAVAJOL.

• Le président de la chambre de commerce et d’industrie de Paris, représenté par M. Jean-Claude KARPELES

Composition du conseil d’administration au 1er mars 2009PUBLICATION CRÉÉE EN 1964MARS 2009

Directeur de la publicationFrançois DUGENY

Directrice de la communicationCorinne GUILLEMOT (01 77 49 76 16) [email protected]

Responsable des éditionsFrédéric THEULÉ (01 77 49 78 83) [email protected]

Rédactrice en chefSophie MARIOTTE (01 77 49 75 28) [email protected]

CoordinatriceSophie LAURENT (01 77 49 75 74) [email protected]

Secrétaires de rédactionMarie-Anne PORTIER (01 77 49 79 52) [email protected]ès FERNANDEZ

PresseCatherine GROLÉE-BRAMAT (01 77 49 79 05) [email protected]

FabricationSylvie COULOMB (01 77 49 79 43) [email protected]

Maquette, illustrationsAgnès CHARLES (01 77 49 79 46) [email protected]

CartographieJean-Eudes TILLOY (01 77 49 75 11) [email protected] SIVASOUBRAMANIANE (01 77 49 77 42) [email protected]

BibliographiesChristine ALMANZOR (01 77 49 79 20) [email protected] GALLET (01 77 49 79 63) [email protected]

Médiathèque – photothèqueClaire GALOPIN (01 77 49 75 34) [email protected]élie LACOUCHIE (01 77 49 75 18) [email protected]

ImpressionPoint 44

CouvertureOlivier CRANSAC (01 77 49 75 16) [email protected] : © ZIR/SIGNATURES

Commission paritaire n° 811 AD ISSN 0153-6184

© IAU île-de-FranceTous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés. Les copies, reproductions, citationsintégrales ou partielles, pour utilisation autre que strictement privée et individuelle, sont illicites sansautorisation formelle de l’auteur ou de l’éditeur. La contrefaçon sera sanctionnée par les articles 425 etsuivants du code pénal (loi du 11-3-1957, art. 40 et 41).Dépôt légal : 1er trimestre 2009

Diffusion, vente et abonnement :Olivier LANGE (01 77 49 79 38) [email protected]

France ÉtrangerLe numéro : 18 € 20 €Le numéro double : 30 € 32 €Abonnement pour 4 numéros : 72 € 84 €Étudiants (Photocopie carte de l’année en cours, tarif 2008) : 50 €

Sur place : Librairie ÎLE-DE-FRANCE, accueil IAU - 15, rue Falguière, Paris 15e (01 77 49 77 40)

Par correspondance :INSTITUT D’AMÉNAGEMENT ET D’URBANISME DE LA RÉGION D’ÎLE-DE-FRANCE15, rue Falguière - 75740 Paris Cedex 15Abonnement et vente au numéro : http://www.iau-idf.fr

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N° 147 N° 146 N° 145 N° 144

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La mobilité : un enjeu métropolitain

L’Île-de-France est la première écorégion d’Europe.Relever ce défi nécessite de penser une métropole durable et robuste, de promouvoir une agglomération compacte, une qualité urbaine accrue, de renforcer les solidaritésterritoriales, de prendre en compte les problématiquesenvironnementales, climatiques, énergétiques.

Dans tous ces domaines, la mobilité joue un rôle majeur. L’Île-de-France, à l’instar d’autres métropoles européennes, l’a bien compris.

Une nouvelle culture urbaine doit naître, adaptée aux différentes échellesde la métropole, de la proximité aux grands territoires, nécessitantd’améliorer desserte, performances et régularité, de promouvoircirculations douces et voies navigables, de développer une logistiqueurbaine efficace et respectueuse de son environnement.

En Île-de-France, les transports représentent le premier budget du conseilrégional. Depuis sa décentralisation, le Stif, autorité organisatrice destransports, a pris des mesures sans précédent en termes de renouvellementde matériel, de fréquence et de qualité de service, de tarification sociale. La mise en service, à l’automne 2009, de la première rame du « train du futur », le Francilien, est un symbole fort du renouveau des transportspublics en Île-de-France.

Face au défi de l’avenir, ces efforts considérables doivent être encoreaccélérés. C’est ce que j’ai indiqué aux équipes qui réfléchissent au devenirde notre métropole dans le cadre de la consultation du «Grand pari de l’agglomération parisienne».

Pour améliorer le quotidien immédiat des Franciliens, j’ai proposé, dès le mois de juin 2008, un plan de mobilisation de 18 milliards d’eurospour les transports en commun en Île-de-France. Ce plan, élaboré avec la ville de Paris, les conseils généraux, la RATP, la SNCF et le réseauOptile, vise à mieux structurer la métropole et à anticiper la hausseprévisible de fréquentation des transports en commun.

Parallèlement, une attention particulière doit être apportée au développement des modes de transport de fret alternatifs à la route, garant d’un développement durable de notre région, au carrefour des communications nationales et internationales, dans le contexte de la construction d’un réseau transeuropéen de transports dont les Régions doivent être le principal moteur aux côtés des États.

Pour que cette mobilité soit durable et accessible à tous.

Jean-Paul HuchonPrésident du conseil régional d’Île-de-FrancePrésident du Syndicat des transports d’Île-de-FrancePrésident de l’IAU île-de-France

Éditorial

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Pour une mobilité répondant aux défis de la métropole

«Les villes européennes sont toutes différentes.

Mais elles font face à des défis similaires

et sont à la recherche de solutions partagées. »Vers une nouvelle culture de la mobilité urbaine, Livre vert de la Commission européenne, 2007.

La mobilité est, certes, une question d’infrastructures. Mais c’est aussi une question de comportements, et de coordination de l’action, de régulation des flux par des moyens multiples, comme le stationnementou le péage par exemple.

En Île-de-France, la dynamique de croissance du trafic routier des personnes est désormais inférieure à celle des transports en commun:les seniors sont motorisés, l’accession des femmes au marché du travail est acquise, la périurbanisation se ralentit, et on commence à tirer bénéficede la politique mise en œuvre pour les transports en commun. Pour les marchandises, la dynamique est différente car elle est liée aux évolutions économiques et à la nature des biens transportés, avec un véritable enjeu pour la diffusion sur les lieux mêmes de consommation.

Aujourd’hui, à toutes les échelles de la métropole, le défi repose sur l’anticipation de comportements de mobilité prenant en considérationles enjeux environnementaux, de cohésion sociale et d’accès à l’emploi des populations non motorisées, mais aussi les enjeux économiques face à la saturation des réseaux tant routiers que ferrés. C’est dans cet esprit que le projet de schéma directeur régional a intégré la nécessaire interaction entre formes urbaines, organisation des transportset manières de se déplacer. Cet objectif, qui préside aussi au plan de déplacements urbains d’Île-de-France, vise à diminuer le traficautomobile, à augmenter la part des transports collectifs, à favoriser la marche et le vélo comme modes de transport urbain à part entière.

Le défi consiste aussi à identifier et mettre en œuvre des solutionsinnovantes pour financer les projets d’infrastructures en Île-de-France.

Par sa bonne connaissance des différents aspects de la mobilité et des grands projets urbains dans nombre de métropoles européennes et du monde, l’IAU île-de-France s’attache à éclairer le cas francilien. Au moment où le projet de Sdrif promeut une politique des déplacementsau service du projet spatial régional, il était opportun de consacrer un numéro des Cahiers à ce thème pour accompagner les différents acteursdans la mise en œuvre d’une mobilité durable.

François DugenyDirecteur général de l’IAU île-de-France

Avant-propos

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PrologueLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

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En 2000, l’Iaurif consacrait deux numéros successifs de ses Cahiers (n° 127 et 128)aux «transports dans les grandes métropoles». Feuilleter ces documents aujourd’hui,c’est prendre conscience des permanences de notre vision des choses, mais ausside ses évolutions.De quoi parlait-on à l’époque? Comme aujourd’hui, de gouvernance (on se conten-tait du terme « institutions») et de financement. On attendait beaucoup de la décen-tralisation des transports collectifs, qui venait de se produire à Londres et que l’onespérait encore pour l’Île-de-France. C’est chose faite et on peut juger de ses béné-fices. Les besoins financiers considérables des métropoles de rang mondial pourmoderniser et étendre leurs réseaux de transport collectif, afin de conserver leurdynamisme économique, étaient illustrés par New York et Londres. Les plans demobilisation de la Région Île-de-France ou du nouveau maire de Londres témoignentaujourd’hui d’un sujet toujours actuel et toujours sans véritable ressource nouvelleet pérenne. On attendait de l’introduction de la concurrence des fonctionnementsplus efficaces. C’est ce qu’on escompte pour le ferroviaire, mais on sait pour lesréseaux urbains que la clé se trouve du côté de la relation contractuelle entre l’au-torité publique et l’exploitant, qu’il soit public ou privé.Traitant du lien entre aménagement et déplacements, on constatait la part grandis-sante de la voiture particulière dans les déplacements des Franciliens, conséquencedu desserrement spatial des populations. Pour des raisons démographiques et parceque nos efforts ont payé, ce phénomène est probablement enrayé, mais l’étalementurbain persiste et c’est aujourd’hui la croissance de la fréquentation des transportscollectifs, avec les saturations qu’elle entraîne, qui est problématique. Le poids crois-sant des déplacements de banlieue conduisait à juste titre à mettre déjà l’accent surles besoins de liaisons de rocade : Berlin et Tokyo venaient à l’appui des plaidoyersen ce sens. On est conscient, aujourd’hui, que les besoins des habitants de la ban-lieue ne relèvent pas uniquement des transports collectifs lourds et portent aussi surdes déplacements de plus courte portée, internes aux bassins de vie. Ceux qu’on avaitcommencé à appeler les modes doux trouvaient leur place dans ces Cahiers, mais,curieusement, le vélo était le seul représentant de cette catégorie : pas d’article surles piétons, et l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite se limitait aux trans-ports collectifs. Depuis, c’est de code de la rue et de management de la mobilité dontil est question. Lorsqu’on parle d’alternatives à l’automobile « solo», c’est plus sousla forme de nouveaux services, Vélib ou autopartage, que de moyens de transport.Instrument de régulation des circulations automobiles ou moyen de financementcomplémentaire, les péages urbains apparaissaient plus exotiques qu’aujourd’hui,voire utopiques. Entre-temps, Londres, puis Stockholm leur ont donné crédibilité touten confirmant leurs limites financières, mais la véritable nouveauté réside dans lespéages environnementaux en service à Milan et à Londres encore.Enfin, le plus frappant est sans doute la place accordée aux transports de marchan-dises : trois courts articles dans la partie traitant des congestions routières !C’est en fait l’expression «mobilité durable» utilisée dans le titre de cet ouvrage quireflète le mieux l’évolution des esprits. En 2000, elle ne se trouvait que dans l’arti-cle sur le projet de PDUIF. Considéré comme une innovation parce qu’il traitaitpour la première fois de déplacements dans une région où «la tendance a longtempsété de confondre politique des transports et programmation d’investissements, […]ses chances de réussite, écrivait-on en conclusion, dépendront de la capacité [desinstitutions agissant au niveau départemental ou régional, des communes et dumonde économique] à concrétiser, au sein de structures opérationnelles décentra-lisées, les grandes orientations». Quoi de plus actuel ?

Alain MeyèreIAU île-de-France

Il y a presque dix ans…

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SommaireÉditorial : La mobilité : un enjeu métropolitainJean-Paul Huchon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

Avant-propos : Pour une mobilité répondant aux défis de la métropoleFrançois Dugeny . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2

Prologue : Il y a presque dix ans…Alain Meyère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

Agir dans un contextequi évolueÎle-de-France : des investissements pour une mobilité durableInterview de Serge Méry . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

Mobilité durable : les autorités de transportseuropéennes en marcheInterview de Hannu Penttilä . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

La mobilité des Franciliens : une rupture des comportements ?Jérémy Courel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

Mobilité dans les pays européens : des tendances similaires ?Interview de Jean-Marie Guidez . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Les grandes tendances de la mobilité des marchandisesLydia Mykolenko . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Offrir un cadrefavorableAccepter de vivre avec ce qu’on produit et ce dont on a besoinInterview de Mireille Ferri . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

Le lien urbanisme-transport dans le projet de SdrifDominique Riou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

ARTICULER TRANSPORT ET AMÉNAGEMENT

Des contextes institutionnels et financiers contrastésJean-Pierre Chauvel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

Articuler urbanisme et transport : quels outils ?Sophie Laurent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

Après Kyoto, recherche ville écomobile…Paul Lecroart . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

Habiter ou travailler près d’une gare : effet sur le choix modalDany Nguyen-Luong, Jérémy Courel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

ORGANISER ET FINANCER LES TRANSPORTS COLLECTIFS

Gouvernance des transports publics urbains en EuropeAlain Meyère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

Tarification et morphologie urbaine : un choix francilien cohérentCaroline Lemoine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

À la recherche de ressources pour les transportscollectifsAlain Meyère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

Financer par les contrats PPP les ouvrages de transportFrédérique Prédali . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

OPTIMISER LA CIRCULATION ET LE STATIONNEMENT

Optimiser l’exploitation routière en Île-de-FranceJean-Paul Coindet, Denis Verrier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

La gestion dynamique des voies : que se passe-t-il à l’étranger ?Jacques Nouvier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

Réguler les flux automobiles par le stationnementÉric Gantelet, Christophe Begon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

PÉAGES URBAINS : UN INSTRUMENT POUR FAIRE QUOI ?

Péages urbains : des modalités adaptées aux objectifs recherchésCaroline Lemoine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

Grand Londres : deux péages, deux objectifs distinctsCaroline Lemoine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

RÉDUIRE LES NUISANCES LIÉES AU TRANSPORT

Bruit des transports : défi commun pour les agglomérations en EuropeErwan Cordeau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

La qualité de l’air dans les métropoles européennesArthur de Pas, Karine Léger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

Changement climatique, un défi pour l’action localeErwan Cordeau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

Offrir des servicesattractifs et durablesLes autorités de transport, garantes d’une offre durableInterview de Sophie Mougard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

FAIRE FACE AUX DEMANDES DE TRANSPORTS COLLECTIFS

Londres, Paris : performance des transports collectifsDanièle Navarre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

Le bus dans l’offre de transports collectifs : un rôle d’avenir ?Sophie Laurent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

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Mobilien : un concept en mal de réalisationsDominique Rascoll . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

Sites propres bus sur autoroute : une solution d’avenir ?Robert Allio . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84

La desserte des aéroports en transports collectifs : un besoinDanièle Navarre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

Aéroport Berlin-Brandebourg International : desserte ferrée optimiséeJürgen-Peter Hiller . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

DÉVELOPPER DES OFFRES ALTERNATIVES

Management de la mobilité : perspectives franciliennesCéline Meunier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94

Management de la mobilité : une dynamique qui s’amplifie en EuropeInterview de Karl-Heinz Posch . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96

Gérer la mobilité à LondresMatthew Prince . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

Vers des usages partagés de la voitureMuriel Mariotto, Robert Clavel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

Vélos partagés : une floraison d’initiatives dans le monde entierDidier Couval . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

Taxis et transports publics en Île-de-France : quelle articulation ?Interview de Jean-Michel Paumier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106

Taxis de Londres, Madrid, Berlin : des idées pour l’Île-de-FranceFrédérique Prédali . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

Les automobiles de demain : des voitures propres et partagées ?Alain Morcheoine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110

CONTRIBUER À UNE VILLE PLUS ACCESSIBLE

Quelles politiques d’accessibilité au transport en Europe?Éric Heyrman, Claude Marin-Lamellet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

Accessibilité des systèmes de transports : un nivellement par le hautInterview de Christiane Briaux-Trouverie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114

L’avenir des rues : mixité et cohabitation de tous les usagersJérôme Bertrand . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

La marche, mode d’avenirVéronique Michaud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118

Accueillir le transportdes marchandisesLe Grand Bassin parisien, une vision stratégique interrégionaleInterview de Claude Gewerc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124

LE COMMERCE MONDIAL ET LES PORTES D’ENTRÉE MARITIMES

Le commerce mondial et l’enjeu des ports maritimesLydia Mykolenko . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

Conteneurisation, mondialisation et métropolisationAntoine Frémont . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

Le port d’Anvers, porte d’entrée maritime de l’EuropeAnnick Dirkx . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

CMA-CGM : un poids lourd dans l’industrie du transport par conteneursInterview de CMA-CGM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

LA CONSTITUTION DES GRANDS CORRIDORS DE FRET

Les grands corridors européens de fret : quels enjeux ?Lydia Mykolenko . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139

Vers une meilleure combinaison fer-fluvialInterview de Jean-Damien Poncet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

Quel avenir pour le transport routier de marchandises ?Michel Savy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146

Veolia Cargo : un acteur phare de l’activité fret en EuropeInterview de Antoine Hurel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

UNE LOGISTIQUE URBAINE INNOVANTE

Des terminaux inland au cœur des villesLydia Mykolenko . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156

Logistique urbaine, les villes européennes se mobilisentLaetitia Dablanc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158

Le plan fret de Londres, un exemple d’action : le FORSCorinne Ropital, Julie Raffaillac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163

Monoprix : un engagement en faveur d’une mobilité durableInterview de Catherine Rivoallon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165

Livrer en zone urbaine par modes alternatifs : deux cas nord-européensCorinne Ropital . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167

Le port de Bruxelles teste le transport de palettes par voie d’eauGeneviève Origer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

Ressources

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1705

Sommaire

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Agir dans un contextequi évolue

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Les années qui viennent de s’écouler ont très clairementmarqué une rupture dans la vision que les décideurstechniques et politiques ont des systèmes de déplacement et des réseaux de transport. Cette rupture se lit égalementdans les comportements de mobilité des personnes et s’est manifestée un peu plus tardivement dans le domainedu fret. Aux préoccupations d’équité sociale, de performanceéconomique et d’aménagement du territoire sont venuss’ajouter les défis de l’environnement et du changementclimatique. L’hégémonie automobile, dans les esprits comme dans les espaces publics des villes, a commencé à être remise en cause non seulement en France, mais aussi dans plusieurs autres pays européens comme en Allemagne ou en Suisse. Les acteurs des chaînes de transport, sans doute aiguillonnés par le contexteéconomique, sont plus disposés que par le passé à reconsidérer leurs choix modaux. En réalité, ce sont nos sociétés toutes entières, dont les modes de vie et les valeurs évoluent, qui font qu’on ne pense plus la mobilitéaujourd’hui en Europe comme on concevait les transports il y seulement dix ans.© IA

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Agir dans un contexte qui évolueLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

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Les Cahiers – La Région d’Île-de-France a réagi au livre vert de la Commissioneuropéenne Vers une nouvelle culture de lamobilité urbaine. Pourquoi était-ilimportant de faire cette réponse?Serge Méry – L’aménagement durable du ter-ritoire régional francilien est une priorité fortede la Région. Le secteur des transports est res-ponsable d’une part significative de la crois-sance des gaz à effet de serre en France. C’estpourquoi nous devons travailler sur une nou-velle culture de la mobilité urbaine, en déve-loppant les transports en commun pour trouverune alternative à l’automobile, mais aussi enfavorisant les circulations douces et en aména-geant les voies d’eau. Dans un tel contexte, laRégion Île-de-France n’a pu que réagir favora-blement au livre vert proposé par la Commis-sion européenne. Elle s’est associée au Syndicatdes transports d’Île-de-France (Stif), l’autoritéorganisatrice, pour faire pleinement entendresa voix et exprimer la très forte nécessité detraiter localement les questions de mobilitésous la responsabilité des élus directementconcernés, ce qui est bien conforme à lalogique de la décentralisation. Le 7 janvier der-nier, j’ai, à ce sujet, rencontré Gilles Savary, rap-porteur d’initiative sur la mobilité urbaine pourle Parlement européen, afin de lui rappeler lescontributions de nos deux institutions dans lelivre vert.

L. C. – Vous êtes premier vice-présidentdu Stif. Le Stif était, jusqu’à une daterécente, un organisme de l’État avantd’être décentralisé au profit de la Région.En quoi cette évolution permet-elle de mieux répondre aux défis d’une mobilité durable ?S. M. – Le Stif décentralisé est avant tout une«table» où les décisions sont prises par des éluslocaux qui connaissent parfaitement leur ter-ritoire et qui sont donc les mieux placés pourrépondre aux problèmes posés. Depuis ladécentralisation du Stif en 2006, le syndicat amené une politique de développement de l’of-fre, de modernisation des matériels roulants etd’amélioration de la tarification en faveur despersonnes les plus modestes qui s’est traduitepar la mise en place de mesures sans précé-dent. En premier lieu, je relèverais les mesuresexceptionnelles de développement de l’offrede transport, tant sur Mobilien que sur le métro,Transilien et Noctilien : le Stif a ainsi dédié prèsde 400 M€ à l’amélioration de l’offre depuis

2006. Le syndicat a su également instaurer unevraie relation partenariale avec la RATP et laSNCF au travers des contrats conclus en 2008,qui prévoient un budget de transport de 7 mil-liards d’euros, dont 2,5 milliards pour le maté-riel roulant. Ainsi, pour la SNCF, nous auronsrenouvelé ou rénové, d’ici sept ans, l’ensembledes trains circulant en Île-de-France, alors qu’unretard colossal dans ce domaine avait été accu-mulé par l’État depuis plus de vingt ans. L’arri-vée du train du futur, le « Francilien », constitueégalement une démonstration de la politiqueambitieuse menée. Sa mise en service commer-ciale est prévue avant la fin de l’année sur leréseau de Paris Nord. Je rappelle par ailleursque nous avons doublé les contributionspubliques depuis 2006, là où l’État les avait blo-quées. Toutes ces mesures participent grande-ment au développement d’une mobilité dura-ble, dont nous recueillons déjà les premiersfruits par une hausse de fréquentation des trans-ports collectifs à un niveau très significatif. Pourla première écorégion d’Europe que noussommes, l’amélioration de l’offre de transportscollectifs est un enjeu majeur et un défi quenous sommes décidés à relever.

L. C. – Quelles sont, selon vous, les basesde la mobilité durable en Île-de-France?Quels sont les principaux défis et lesprincipales questions que les transportscollectifs franciliens devront affronterdans les prochaines années?S. M. – La mobilité durable en Île-de-Francerepose avant tout sur le développement destransports collectifs et des modes doux, maisaussi du fret et de la logistique urbaine. S’agis-sant du développement des transports en com-mun, nous agissons sur deux champs : d’abordsur l’amélioration immédiate du quotidien desFranciliens, puis sur les investissements à menerpour préparer l’avenir et anticiper la hausse dela fréquentation des prochaines années. Pourrépondre à ces deux objectifs, Jean-PaulHuchon a présenté, en juin dernier, un plan demobilisation pour les transports à réaliser d’ici2020 et chiffré à 18 milliards d’euros. Ce planconjugue trois programmes d’action, un pre-mier plan pour répondre aux urgences concer-nant, notamment, les schémas directeurs desRER et la désaturation de la ligne 13 par le pro-longement de la ligne 14, un plan à court etmoyen terme visant à accélérer les projets descontrats de projets et des contrats entre laRégion et les départements, comprenant en par-

Serge Méry est vice-présidentdu conseil régional d’Île-de-France en charge des transports et de la circulation depuis 1998, premier vice-président du Syndicat des transports d’Île-de-France(Stif) et conseiller général de Seine-Saint-Denis.

Île-de-France : des investissementspour une mobilité durable

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ticulier les tangentielles ferrées Nord, Ouest etSud, le débranchement du tramway T4 à Clichy-Montfermeil, le prolongement du tram-way T1 à Val-de-Fontenay et à Asnières-Genne-villiers, puis, enfin, un plan à moyen et longterme comportant la réalisation des grands pro-jets de demain comme Arc Express ou le REREole prolongé jusqu’à la Défense et le Mantois.La mobilité durable doit s’appuyer avant toutsur une priorité donnée au développement destransports en commun, afin qu’ils soient plusétendus, plus rapides, plus accessibles et moinscoûteux pour les personnes les moins favori-sées.

L. C. – Votre fonction de vice-présidentde la Région d’Île-de-France en chargedes transports et de la circulation inclutle transport des marchandises. L’Île-de-France, avec son bassin de presque 12 millions d’habitants, estl’une des principales régions logistiqueseuropéennes. Comment l’Île-de-Franceenvisage-t-elle de renforcer son attractivité et d’accompagner la croissance de la mobilité des marchandises, tout en répondant au défi d’une mobilité plus respectueusedes contraintes environnementales ?S. M. – Favoriser le développement des modesde transport de fret alternatifs à la route consti-tue également un de nos objectifs majeurs pourgarantir le développement durable de notreRégion. La place de l’Île-de-France, au carrefourdes voies de communication nationales et inter-nationales, l’oblige à développer directementdes projets ambitieux de report modal sur sonterritoire. Nos efforts portent ainsi sur la pour-suite de l’aménagement et de la modernisationdes voies navigables et du réseau ferroviaire,ainsi que sur le développement de plates-formes logistiques portuaires et ferroviaires.Nous mettons tout particulièrement l’accentsur leur insertion dans l’environnement sou-vent urbain, tant du point de vue visuel quesonore. Les objectifs sont donc multiples : nousvoulons garantir un développement optimal del’offre de service ferroviaire pour le fret, préser-ver les sites embranchés au fer (c’est le casnotamment du site de Bercy, qui a permis àMonoprix de s’installer dans la halle GabrielLamé), aménager les infrastructures fluviales,et créer ou développer de nouveaux grandssites multimodaux. La Région a d’ailleurs prévuune contribution à hauteur de 175 millionsd’euros pour réaliser ces projets ambitieux.Avec une croissance des flux estimée à plus de50 % d’ici à 2015, notre Région risque l’asphyxiepar le mode routier. Nous n’avons pas d’autreschoix que de réagir. Je suis donc décidé à

construire une nouvelle politique régionaledurable en faveur du développement des trans-ports de fret et de la logistique. Ce sera sansaucun doute l’un des enjeux de la prochainemandature. Nous devrons soutenir fortementles évolutions positives de la réglementationnationale et européenne et nous servir desoutils réglementairesopposables dont nousdisposons, notammentle PDU (plan de dé -placements urbains),nouer des partenariatsinnovants avec les col-lectivités intéressées,les aménageurs quisont forcément impliqués, les groupements dechargeurs qui sont les premiers intéressés, lesfédérations professionnelles. La Région partici-pera notamment à la construction du RTE-T(réseau transeuropéen de transports) dans sadimension fret.

L. C. – Dans vos activités à la Région Île-de-France et au Gart (Groupementdes autorités responsables de transportspublics), vous êtes amenés à côtoyer voshomologues européens et de province.Au-delà des spécificités de l’Île-de-Francedues à sa taille, pensez-vous qu’il y ait des expériences ou des façons de faire dont nous pourrions nous inspirer ?S. M. – Je suis totalement convaincu que lesretours d’expériences de métropoles euro-péennes, mais aussi des autres régions deFrance sont forcément des sources d’informa-tion dont nous devons tirer profit. Nous devons,au sein du Gart, travailler dans ce sens en échan-geant avec tous les acteurs concernés, tant enFrance qu’en Europe et dans le monde entier,qui travaillent sur des problématiques similairesaux nôtres et qui apportent souvent desréponses intelligentes, dont nous devrions biennous inspirer. Tel est le cas dans les domainesde l’accessibilité, des matériels roulant, de l’in-termodalité, de la télébillétique. Je pensenotamment aux BHNS (bus à haut niveau deservice) qui constituent souvent une réponserapide et efficace aux besoins des usagers. C’estpourquoi le Gart doit jouer un rôle central dansles échanges d’information, que les retours d’ex-périence soient positifs ou négatifs, comme c’estle cas pour la mise en place du péage urbain oude PPP (partenariats public-privé), qui n’ont àce jour pas montré de retour pertinent.

Propos recueillis par Sophie Laurentet Alain Meyère

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» La mobilité durable doit s’appuyer avant tout sur une priorité donnée au développement des transports en commun,afin qu’ils soient plus étendus, plus rapides, plus accessibles et moins coûteux pour les personnes les moins favorisées. «

Dans son Livre vert, intitulé Vers une nouvelle culture de la mobilité urbaine,la Commission européenne exposela vision qu’elle a de son propre rôledans le domaine des transports et d’une possible articulation avec les actions des collectivitéslocales. Après consultationpublique, elle a recueilli plus de 430 contributions, dont une quarantaine en France.

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Vers une mobilité durable en Europe

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Les Cahiers – Quel est le rôle de l’EMTA et pourquoi était-il important pour ellede faire une réponse au Livre vert de l’Union européenne?Hannu Penttilä – L’EMTA représente les auto-rités métropolitaines de transports publics euro-péennes. Son rôle est assez méconnu, particu-lièrement à Bruxelles. C’est pourquoi nousavons essayé de faire entendre notre voix aussifort que possible, afin d’être entendus, en collec-tant les idées communes auprès de nos mem-bres et en les portant au niveau européen.

L. C. – Comment pensez-vous que les métropoles peuvent mettre enœuvre la mobilité durable aujourd’hui ?Quelles sont les actions clés àentreprendre afin d’améliorer la situationlocalement et en quoi les autorités de transports peuvent-elles y contribuer ?H. P. – Ma première réponse à la question desavoir comment les métropoles peuvent met-tre en œuvre la mobilité durable est qu’ellesn’ont pas le choix : nous devons relever ce défi,en peu de temps, en particulier dans les villeset métropoles, où vivent un nombre croissant depersonnes. Concernant les actions clés à entre-prendre, je suis convaincu que le premier élé-ment et le plus difficile à réaliser consiste àmieux articuler l’aménagement du territoire etles transports : nous devons adapter lastructure des métropoles en organisantl’usage des sols en fonction des corridorsde desserte. Une autre action importanteest la mise en place de l’intégration tari-faire par les autorités de transports : quelque soit l’argent investi dans les transportspublics, du point de vue de l’usager, l’of-fre ne peut être attractive qu’avec un sys-tème intégré, permettant d’utiliser un seulet même ticket dans tous les modes de trans-ports. Troisièmement, nous sommes confrontésà d’importants besoins d’investissements : autotal, nos trente membres européens ont besoin,d’ici 2020, de 200 à 300 milliards d’euros pourdes infrastructures et du matériel roulant. Nousdevons trouver la bonne manière d’investir cetargent.

L. C. – En quoi les propositions de l’Union européenne répondent-elles à la question de la mobilité durable dansles métropoles ? Quelle est la position de l’EMTA par rapport à ce Livre vert ?H. P. – Nous avons essayé d’expliquer haut et

fort la nécessité d’une autorité à l’échelle métro-politaine, responsable de la planifiation destransports et des déplacements, ainsi que del’articulation avec le développement urbain.C’est la réponse clé à de nombreuses questions,et notre principal message pour la Commissioneuropéenne dans le cadre du Livre vert. Jepense que l’idée d’une planification des trans-ports à l’échelle métropolitaine devrait être lacondition à toute action, y compris en ce quiconcerne les financements européens ou natio-naux. Le Livre vert a repris certaines de cesidées, mais nous pensons que l’UE doit direplus clairement que les subventions sont condi-tionnées à la mise en place de cette autorité àl’échelle métropolitaine, et à la réalisation d’unplan de mobilité pour le transport durable etl’accessibilité à cette échelle.

L. C. – Le Livre vert dit : « Toutes les villessont différentes, mais font face à des défis semblables et tentent de trouver des solutions communes. » Pouvez-vous commenter ?H. P. – Après dix ans d’existence de l’EMTA, jepense que l’élément principal est que nousavons soulevé des questions communes, à Hel-sinki, Bilbao, Madrid, Vilnius, Varsovie ou Paris :nous évaluons les bonnes pratiques et essayonsainsi d’éviter les mauvaises décisions. Mais les

environnements, cultures, climats politiques etorganisations administratives nationales sonttrès divers. Par exemple, les financements attri-bués aux zones métropolitaines proviennentde sources différentes : au nord de l’Europe, enScandinavie (Danemark, Finlande), ils provien-nent des municipalités locales, alors que dansd’autres cas ils proviennent du gouvernementcentral. Il existe également différents types detaxes: par exemple, la taxe de mobilité française(versement transport) n’existe pas ailleurs. Cesdifférences doivent être prises en compte avantde choisir une solution dans la boîte à outilsEMTA. Il n’y a pas de solution unique à tous lesproblèmes, bien que ceux-ci soient similaires.

Hannu Penttilä est adjoint au maire d’Helsinki, en chargede l’urbanisme et des affairesdomaniales. Il présidel’association EuropeanMetropolitan TransportAuthorities (EMTA) depuis2007. L’EMTA, créée en 1998,regroupe 32 autoritésorganisatrices de transportscollectifs en Europe. Le Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif) en assure la vice-présidence et le secrétariat général. L’EMTA a pour objectif d’œuvrerpour améliorer les conditions de la mobilité urbaine en Europe, où plus de 80 % des citoyens vivent dans les villes, à traversl’échange de bonnes pratiques,la réalisation d’études et d’analyses comparatives des modes d’organisation et de financement des systèmesde transports collectifs, la participation à la définitionde la politique européenne en matière de transport et d’environnement urbain, dans le domaine de la recherche, dans le domaine législatif et dans les autres initiativescommunautaires.

Mobilité durable : les autorités de transports européennes en marche

Interview

EMTA

» Nous avons essayé d’expliquer haut et fort la nécessité d’une autorité à l’échelle métropolitaine, responsable de la planifiation des transports et des déplacements, ainsi que de l’articulation avec le développement urbain. «

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L. C. – Croyez-vous possible de concilierle contexte local et ses spécificités avecles objectifs généraux fixés à l’échelleeuropéenne? Quel rôle doit jouer l’UE ?H. P. – D’un point de vue politique, les ques-tions concernant la subsidiarité sont impor-tantes. Le travail des autorités de transports,aujourd’hui, est fortement encadré par l’UE : ilexiste désormais des directives relatives au bruit,aux nuisances… De nombreux nouveaux stan-dards techniques ont émergé, et la régulationdes appels d’offres publics et des services detransports en commun a été renforcée. Cesthèmes peuvent être réglementés au niveaueuropéen, car il s’agit d’un marché commun etil est important que les autorités, les opérateurset les industries bénéficient d’un cadre com-mun d’un pays à l’autre. Ce qui peut égalementêtre fait à l’échelle européenne – et l’EMTA aproposé sa coopération sur ce thème – c’estd’aider les usagers et les autorités à acquérirun meilleur service et des standards de qualité.Mais d’un autre côté, les solutions et les poli-tiques locales varient beaucoup en fonctiondes contextes, et doivent être réglementées loca-lement, au plus près de la connaissance desbesoins.

L. C. – Quel sera le prochain engagementde l’EMTA dans ce processus ?H. P. – Aujourd’hui, nous avons appris que laCommission européenne présenterait son pland’action pour les transports publics prochaine-ment. La prochaine étape consistera à étudierce plan d’action et coopérer avec la Commis-sion, afin de concrétiser ces actions. Je suisconvaincu que l’EMTA peut apporter son aideet son expérience. Nous devons également enta-mer des discussions sur deux sujets essentiels,tous deux thèmes de notre conférence.Le premier est la nécessité de mettre en placedes autorités de transports publics partout, etparticulièrement dans les nouveaux États mem-bres. Cette mise en place à Varsovie, par exem-ple, s’avère difficile, car la population n’est pasfavorable aux transports en commun. Avantd’instaurer une autorité, les usagers doivent êtresatisfaits et réaliser qu’ils ont besoin des trans-ports publics.Le second est le besoin pressant de finance-ment des transports publics. Ils ne peuvent (etmême ne doivent pas) être entièrement finan-

cés par les ventes de titres, car ils ont un impactsur l’immobilier et le développement (dans cer-taines zones de Barcelone, le niveau des prix del’immobilier augmente de 50 % là où les trans-ports publics sont attractifs), du fait de leurdimension sociale (accès à la mobilité pourtous) et du manque d’espace (aucune ville enEurope ne peut être entièrement desservie pardes voitures). Il est important de préserver laqualité du cadre de vie dans nos villes euro-péennes, voir de l’améliorer.

L. C. – En conclusion, d’après votreexpérience à Helsinki, quelle recommandation feriez-vous à d’autres villes européennes?H. P. – À Helsinki, nous disposons de tous lesmodes de transport : métro, tramways, bus, etmême une ligne de ferry. Je pense que nousn’avons pas réussi sur tous les plans, mais nousavons intégré la nécessité de donner la prioritéaux transports en commun dans l’aménage-ment du territoire. Ainsi, au conseil municipald’Helsinki, nous avons décidé la création d’unnouveau pont tramway qui reliera un quartierd’Helsinki au centre-ville en seulement 2 km(alors que la distance est de 10 km en voiture).C’est la première leçon et nous avons remar-qué qu’avec ce type d’investissements, l’usagedes transports collectifs augmente. Un autre élé-ment important est que nous avons un systèmetarifaire intégré : quand vous avez tout le tempsun ticket valide dans votre poche, vous êtes plussusceptible de prendre les transports en com-mun. C’est la seconde leçon à tirer de notreexpérience.

Propos recueillis le 27 novembre 2008par Alain Meyère et Sophie Laurent

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Helsinki dispose de tous les modesde transport et donne la priorité aux transports en commun dans l’aménagement de son territoire.

Plan d’action pour les transports publics :la publication de ce plan d’action par la Commission européenne, prévue début 2009, a été reportée sine diele 12 janvier 2009.

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Concernant la mobilité quotidienne, ledernier quart du XXe siècle a été marquépar la très forte croissance de l’usage de

l’automobile, que ce soit en termes de motori-sation, de nombre de déplacements ou de dis-tances parcourues. On ne mesure pas toujoursl’ampleur de cette évolution : 80 % de l’accrois-sement des distances parcourues par les Fran-ciliens dans leur région (1976-2001) est attri-buable aux seuls déplacements automobiles,qui génèrent en 2001 près de 100 millions dekm quotidiens sur un total de 170 millions. Onpeut noter, par ailleurs, la progression impor-tante de la part de la voiture dans les déplace-ments pour se rendre à l’école primaire (de13 % à 24 % en Île-de-France entre 1976 et 2001,de 16 % à 44 % dans la communauté urbaine deLille entre 1976 et 1998), qui témoigne de lapénétration forte de l’automobile dans nosmodes de vie dès le plus jeune âge.

La périurbanisation en causeCes transformations ont de multiples causesdont, en Île-de-France notamment, le phéno-mène de périurbanisation, synonyme d’éloigne-ment du centre et de son réseau de transportsurbains dense. Il s’agit d’ailleurs de la secondeévolution remarquable dans la structure desdéplacements en Île-de-France pendant cettemême période: la forte croissance des déplace-ments internes à la banlieue, qui représentent,en 2001, 70 % de l’ensemble des déplacementsinternes à la région contre 62 % vingt-cinq ansplus tôt. Plus précisément, cette période a sur-tout vu croître le poids de la grande couronne :ses habitants sont, à eux seuls, responsables de75 % de la croissance des distances parcouruesentre 1976 et 2001. Si le nombre de déplace-ments par personne dépend de moins en moinsde l’éloignement à Paris, les distances parcou-rues par les habitants de grande couronne sont,en moyenne, deux fois plus élevées que cellesdes Parisiens.Les choses changent. Dès les années 1990, on aassisté à un net infléchissement de la croissancede l’usage de la voiture, même si celui-ci conti-nuait d’augmenter. Certains indicateurs(2) sem-blaient confirmer, avant même la hausse du prixdes carburants et la crise de 2008, que l’on étaitbien sorti de cette phase de croissance tous

azimuts de la voiture. Les années 1990 ont mar-qué le retour de la marche et de l’usage desdeux roues, après des années de forte baisse,tandis que les transports collectifs se mainte-naient à une part stable (20 %) en nombre dedéplacements, tout en perdant du terrain sur lavoiture en termes de distances parcourues (enrevanche, depuis 2000, l’usage des transportscollectifs a crû très significativement).

Des évolutions à confirmerEn l’absence de données plus complètes, il estdifficile de parler aujourd’hui d’une « révolu-tion » des modes de déplacement, mais lesexemples d’autres agglomérations comme Lyonet Lille, avec une baisse sensible de la mobilitéen voiture dans des proportions importantesentre les années 1990 et les années 2000, sontencourageants.Les prochaines années permettront de clarifierces enjeux et de confirmer ou d’infirmer d’au-tres tendances étroitement liées : quelle sera en2010 la répartition par activité des déplace-ments ? La croissance du nombre de déplace-ments provenait pour l’essentiel de celle desactivités non liées au travail : cette tendance va-t-elle se confirmer? Les déplacements profes-sionnels, désormais minoritaires en volume,resteront-ils majoritaires en distances parcou-rues comme en 2001? Comment va évoluer lamobilité des populations économiquement lesplus fragiles, les plus sensibles à la hausse duprix des logements, qui les oblige à s’éloigner deplus en plus ? Captives de la voiture etcontraintes à des déplacements plus longs, ellessont d’autant plus vulnérables au renchérisse-ment de l’énergie. Enfin, l’essentiel de la crois-sance des déplacements se fait en heurescreuses, mais la charge en heures pleines conti-nue de s’accroître. Or c’est elle qui détermine ledimensionnement des infrastructures, particu-lièrement dans les transports en commun. Sicette tendance venait à s’accélérer, comment leréseau actuel pourrait-il, sans augmentation decapacité, absorber un éventuel transfert modalde la voiture aux transports publics ?

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La mobilité des Franciliens : une rupture des comportements ?

Après des décennies de croissance, de nouvelles tendances apparaissent en matière d’usage et de possession automobile. Celles-ci semblent indiquer une évolution vers de nouveaux comportements de mobilité.

Jérémy Courel(1)

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Agir dans un contexte qui évolueLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

La hausse des prix des carburantscontribue au changement des

comportements de mobilité.

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L’Enquête globale de transport (EGT),réalisée en partenariat entre l’État, la Région Île-de-France, la ville de Paris, le Syndicat des transports d’Île-de-France(Stif), la RATP, la SNCF et Cofiroute, est une enquête de grande ampleur sur les déplacements des Franciliens.Depuis vingt-cinq ans, elle permet de suivre et d’interpréter les évolutions des pratiques des habitants de la régionen matière de déplacements : mobilitéindividuelle, modes de transport utilisés,temps consacré aux déplacements, etc.Elle constitue une source précieused’informations pour élaborer les politiquesrégionales d’aménagement et pour prévoirles services et les infrastructures de transport. La dernière enquête a été conduite en 2001-2002.La prochaine enquête, copilotée par le Stif et la Direction régionale de l’équipement d’Île-de-France, devrait se dérouler d’octobre 2009 à avril 2010.

(1) Jérémy Courel est statisticien, économètre.(2) Comme ceux issus des données de trafic ou de l’analysedes ventes de voitures neuves.

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Agir dans un contexte qui évolueLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Les Cahiers – La mobilité est-elle prise en compte et mesurée de la mêmemanière partout en Europe?Jean-Marie Guidez – Premièrement, il n’existepas de définition unique en Europe. Il y a desannées qu’on le dit. Un exemple : la mobilitémoyenne, en Grande-Bretagne, entre 2000et 2005, au même sens que chez nous, c’est-à-dire le nombre de déplacements par personneet par jour, était passée de 3,14 à 3,08, donc sta-ble et proche de 3. Au même moment, la mobi-lité en Hollande est passée de 3,79 à 3,7, stableégalement, mais plutôt proche de 4. Or, je nevois pas pourquoi il y aurait un déplacement deplus en Hollande qu’en Angleterre. Les spécia-listes disent que, dans toutes les villes où onmesure la mobilité comme on la mesure dansnos enquêtes ménages (Certu), la mobilité estpartout entre 3,5 et 4. C’est même plus près de 4que de 3,5. Donc quand on trouve 3, c’est queles définitions sont sans doute différentes. Cen’est pas dramatique, car dans la mesure oùchaque pays garde sa définition, on peut analy-ser les évolutions. C’est l’intérêt des enquêtesCertu en France, faites sur le même modèledepuis trente ou quarante ans, avec une défini-tion constante des déplacements. La deuxièmechose, ce sont les comparaisons de parts demarché, ce qui accentue certains problèmesde définition. Nous travaillons, en France, surles déplacements de la semaine ; d’autres paysincluent le week-end. D’autre part, quels sontles territoires considérés: milieu urbain ou zoneplus large? Certaines enquêtes sont à l’échelled’un pays, d’autres à l’échelle d’une ville. Etquand on dit « ville », parle-t-on de l’aggloméra-tion, de la ville-centre, du centre-ville? On a ten-dance à comparer trop rapidement des partsde marché, alors qu’on ne parle pas toujoursde la même chose.

L. C. – Quelles sont les tendances en matière de mobilité aujourd’hui ?Sont-elles semblables en France et dans les autres pays européens?J.-M. G. – En France, on a constaté, à partir desenquêtes ménages, une stabilisation ou unebaisse de la mobilité voiture, d’abord à Lille, àLyon ensuite, puis à Reims, Rennes et Rouen.Attention, il s’agit bien de la mobilité voiture etpas de la mobilité tous modes (qui baisse uni-quement à Lille et Lyon). La baisse de la mobi-lité voiture va dans le sens de ce que disent laloi ou les plans de déplacements urbains(PDU), alors que la baisse de la mobilité totale

peut inquiéter les politiques et la populationqui la corrèlent avec le PIB, l’efficacité écono-mique, la compétitivité, etc. On ne peut pas diresi cette baisse va durer ou si elle est transitoire.D’autres sources de données confirment labaisse observée : d’une part les comptes de lanation, avec le nombre de kilomètres parcouruspar an et par Français en voiture : en 2005 cenombre a baissé pour la première fois de 1,4 %.D’autre part le volume d’essence vendu à lapompe qui, stable depuis plusieurs années,baisse depuis quelques mois. Dans les autrespays européens, d’après une étude du BIPE(1), ilsemblerait que l’usage de la voiture soit aussi enrecul, depuis 2003, à peu près partout, sauf enEspagne. Cette dernière, ayant démarré plus tardsa croissance de la motorisation, part avec unpeu de retard, ce qui veut dire qu’elle n’est pasencore dans la phase de palier comme lesautres pays. Au Royaume-Uni, la distancemoyenne parcourue en miles par personne etpar jour s’est stabilisée, après avoir augmenté,puis plafonné et être redescendue dans lesannées 2000-2002. En Allemagne, les enquêtesmontrent un nombre moyen de déplacementspar personne et par jour stable depuis quaranteans, puis qui descend depuis 2003. En Suisse, lemicrorecensement(2) montre des résultats trèsdétaillés qui vont dans le même sens, avec unpalier entre 2000 et 2005 en matière, par exem-ple, de distance parcourue, tous modes par per-sonne et par jour, en semaine. Il semblerait qu’encontrepartie le temps augmente. Ce qui est éga-lement très intéressant, c’est le nombre de kilo-mètres parcourus par personne et par an selonle mode de transport, qui montre une évolu-tion forte : le kilométrage parcouru en voiturebaisse, alors qu’on observe une augmentationdu kilométrage à pied, bus-tramway et train.Aux États-Unis, pour la première fois, la distanceparcourue annuellement par les automobilistes,qui a toujours augmenté, s’est stabilisée vers2005 et baisse un peu. Dans tous ces pays, ils’est passé quelque chose entre 2000 et 2003.Reste à l’expliquer.Attention, il s’agit de la mobilité urbaine, ce quiest un peu différent de la mobilité longue dis-tance. La mobilité urbaine plafonne ou baissedans l’urbain au sens large. Mais ce n’est pas lecas de la mobilité longue distance (voyageursau long cours, week-ends en TGV, avion, etc.).

Jean-Marie Guidez est expert enmobilité urbaine (Départementdéplacements durables) auCentre d’études sur les réseaux,les transports, l’urbanisme et les constructions (Certu),ministère de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement durables.Il est également rédacteur en chef de Transflash(newsletter éditée par le Certu,diffusée auprès de4 700 abonnés volontaires) et organisateur des « clubsmobilité », journée-débatannuelle.

Mobilité dans les pays européens : des tendances similaires ?

Interview

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(1) Société de conseil en stratégie spécialisé dans la prévisionéconomique et la prospective appliquée.(2) Enquête au niveau national.

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L’urbain est en avance, car la gouvernance estclairement identifiée dans les agglomérations,et les autorités organisatrices peuvent dévelop-per une politique globale.

L. C. – Quelles raisons voyez-vous à ces évolutions, et quelles sont, selonvous, les perspectives pour les années à venir ?J.-M. G. – Aujourd’hui, en Europe, dans le milieuurbain au sens large, il y a une sorte de consen-sus autour de la nécessité de diminuer la mobi-lité voiture. Pourquoi ce pic et cette baisse de lamobilité depuis trois ou quatre ans? Les raisonsà l’étranger sont les mêmes que chez nous. La

première raison, la plus évi-dente, est la raison écono-mique. C’est la question ducoût de l’essence, qui depuisquelques mois ou semainesbaisse, mais dont on sait qu’ilva remonter. Mais plus généra-lement c’est la question dupouvoir d’achat disponible.Parmi les autres raisons évi-

dentes, on peut citer la politique menée (PDUet autres actions), ou l’augmentation de laconscience environnementale. Enfin, l’effet duvieillissement de la population devrait prendrede plus en plus d’ampleur, car même si la mobi-lité des retraités d’aujourd’hui est infinimentplus grande que la mobilité des retraités d’hier,elle reste moins importante que celle des actifsd’aujourd’hui. Du simple fait que la proportionactifs/retraités change, mécaniquement, la mobi-lité ne peut que baisser. Le coût du pétrole a lemême impact partout. En revanche, les poli-tiques, selon les pays, sont quand même un peudifférentes, de même que la conscience envi-ronnementale. Ce qu’on peut dire, c’est qu’il ya de grands décalages entre pays, entre villes etentre individus. Y compris en France où, entreles villes en avance comme Grenoble, Stras-bourg, Nantes, Lyon, Montpellier, et d’autres, il ya des décalages de dix, vingt ou trente ans ! Cer-taines villes démarrent des choses que d’autresont faites il y a trente ans. On observe aussi undécalage extrêmement important entre les indi-vidus : l’essence chère ne sera pas vécue de la

même manière par les pays riches et par lespays pauvres et par les gens riches et les genspauvres. Tous les experts s’accordent à dire qu’ily aura accroissement des inégalités. Un dernierphénomène à l’œuvre concerne le changementde statut de la voiture : le découplage entre lapossession et l’usage. En Suisse, le nombre dekilomètres parcourus par véhicule et par an esten baisse continue depuis vingt ans. À Lille et àLyon, la mobilité par voiture et par jour, et nonpas par personne et par jour, est en baisse aprèsavoir connu un pic. Cela veut dire qu’on observepeut-être, chez nous, un début de ce qui étaitvisible depuis longtemps dans les villes qui nousservent de vitrines (Berne, Zurich, Amster-dam…). Ils ont autant de voitures à Berne ou àZurich qu’à Grenoble ou à Lyon, mais elles ser-vent moins souvent, parce qu’ils ont un usageplus rationnel de la voiture. Il y a certaines des-tinations, à certaines heures, pour certainsmotifs, où il y a d’autres modes que la voiturequi sont largement aussi pertinents et efficacespour l’individu et la collectivité. Ce découplageest une transition en douceur de la « voitureobjet » vers la «voiture service». On ne dira plus«J’ai besoin d’une voiture», mais «J’ai besoin de2 heures de voiture le mardi et le samedi », cequi est tout à fait différent, puisqu’on n’est plusobligé d’en être propriétaire. On va vers le covoi-turage ou la voiture partagée, qui font que,certes, on circule en voiture, mais plus en étantseul et pas forcément avec « sa» voiture. Enfin, tout le monde appelle de ses vœux le« report modal », considéré comme «vertueux»(de la voiture vers les modes alternatifs), maisil faut bien voir que, quelque part, on va dans lemur. En effet, si on regarde les chiffres de lamobilité et des parts de marché, en Francecomme ailleurs, on voit qu’on n’a sans doutepas fait les investissements suffisants dans lesdécennies précédentes pour absorber un reportmodal important. J’ai un peu peur que, commesouvent, ce soit dos au mur que les choses sefassent. Il y a trente ans qu’on dit les mêmeschoses avec, jusqu’à aujourd’hui, un impact trèslimité. Une partie de la population a intégré deschoses sur la question écologique, mais de là àchanger ses habitudes, qui plus est en les péna-lisant dans un premier temps… Il faut unevolonté politique forte, comme celle de KenLivingstone à Londres, pour faire bouger leschoses. S’il avait demandé son avis à tout lemonde, rien n’aurait été fait. Certaines villesavancent vite, d’autres lentement, et d’autrespas du tout. Que voulez-vous que je vous dise?C’est comme ça ! La volonté politique et le dosau mur…

Propos recueillis par Sophie Laurentet Jérémy Courel

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Mobilité dans les pays européens : des tendances similaires ?

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Quelques chiffres sur les tendances de mobilité en SuisseAnnée 1994 2000 2005

Distance tous modes parcourue/personne/jour (km) en semaine 33,7 37,7 37,7Distance parcourue par jour (en km) en voiture 23,1 25,6 25,5Durée de déplacement/jour (en min) 83,3 93,9 97,6km parcourus/personne/an :

en voiture 8431 9380 9324à pied 547 623 754en train 1715 1918 2272en bus/tramway 474 505 547

Source : La mobilité en Suisse - Résultats du microrecensement 2005 sur le comportement de la population en matière de transports, Office fédéral de lastatistique (OFS)

» Tout le monde appelle de ses vœux le “ report modal ”,

considéré comme “ vertueux ”(de la voiture vers les modes

alternatifs) mais il faut bienvoir que quelque part

on va dans le mur. «

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En réalité, la relation entre le transport demarchandises et l’évolution de l’activitééconomique générale complexifie le

problème. Depuis une trentaine d’années, eneffet, le mode de croissance et d’organisationéconomique a induit l’envol de la demande detransport de fret, avec une augmentation desdistances parcourues. Ces dernières décenniesont vu, en outre, une modification de la naturedu commerce international. Elle s’est traduitepar une augmentation très rapide du transportmaritime, qui assure aujourd’hui plus des troisquarts des tonnages échangés entre les pays.

Des flux plus nombreux et plus fréquentsL’expansion du commerce international etl’évolution de la mondialisation se répercutentsur le transport de marchandises. En effet, parceque nous vivons dans une société fondée sur laconsommation au moindre coût, il faut pro-duire en masse, de moins en moins cher et doncà l’autre bout du monde, où les coûts de main-d’œuvre sont plus bas. Mais nous souhaitonsaussi toujours plus de services et des produitsde plus en plus personnalisés, et sans attendre.Les réponses logistiques à apporter à des sys-tèmes de consommation très complexes sesont, elles aussi, complexifiées et ne peuvent setraduire autrement que par une augmentationconsidérable des flux, avec des envois moinslourds, plus nombreux, plus fréquents.Nous souhaitons légitimement vivre dans desvilles agréables et non congestionnées, non pol-luées, où l’on peut travailler, faire ses achats etse distraire. Or les problèmes liés à l’organisationdu transport de marchandises se révèlent demanière particulièrement cruciale dans lesagglomérations. Certaines tentent, avec un iné-gal succès, de mettre en œuvre des politiques degestion durable du transport de marchandises,en cherchant à améliorer le fonctionnementdu cœur de l’agglomération et à limiter lesimpacts négatifs du transport de fret.

Vers une plus grande part des modes non routiersApporter des améliorations aux problèmescroissants de congestion et de pollution néces-

site de prendre en compte l’ensemble de lachaîne de transport, de la porte maritimejusqu’au « dernier kilomètre ». En outre, pourêtre efficaces, les solutions devraient chercherà impliquer davantage les chargeurs, voire lesconsommateurs.Il y a urgence. Certes, tous les experts s’accor-dent pour dire que la croissance du transport demarchandises devrait se ralentir. Les prévisionsdu SOeS (Service de l’observation et des statis-tiques) du ministère de l’Économie, de l’Éner-gie, du Développement durable et de l’Aména-gement du territoire tablent sur une croissanceavoisinant les 1,4 % par an à l’horizon 2025,résultant d’une croissance sensiblement ralen-tie du mode routier (+ 1,5 % par an contre+ 2,9 % pour la période 1980-2002).

Mais, malgré le net ralentissement du transportroutier de marchandises observé aujourd’huipartout en Europe, une croissance de 1,4 % paran conduit à une hausse importante de lademande de transport de marchandises. EnFrance, la loi relative à la mise en œuvre du Gre-nelle de l’environnement stipule que la partdes modes non routiers devra atteindre 25 %du trafic de marchandises à l’horizon 2022. Cetobjectif ambitieux signifie que les modes nonroutiers assureront 50 % de la croissance dutransport de marchandises. Mais cela signifiedonc aussi que, demain, le trafic de poids lourdssera plus important qu’aujourd’hui. Et, à l’hori-zon 2050, dans leurs scénarios de mobilité, lesprospectivistes n’envisagent pas, pour les poidslourds, la baisse du trafic routier qu’ils prévoientpour l’automobile.Pourtant, un nouveau contexte économique,sociétal et environnemental semble infléchirprogressivement la mobilité des marchandises.L’ensemble des acteurs des chaînes de trans-port (entreprises industrielles, transporteurs,logisticiens, pouvoirs publics) qui ont su répon-dre à l’explosion considérable des échangesdes trente dernières années, vont avoir à le pren-dre en compte.

Les grandes tendances de la mobilitédes marchandises

Compte tenu du poids grandissant du prix du gazole sur le transport de marchandises, conjugué à la crise financière, on pourrait s’attendre à unreport presque «naturel» du transport par camion sur les modes de transportalternatifs à la route, réputés plus vertueux en termes de développement durable.

Lydia Mykolenko(1)

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Agir dans un contexte qui évolueLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Les problèmes liés à l’organisationdu transport de marchandises sontcruciaux dans les agglomérations.En France, la loi relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement stipule que la part des modes non routiersdevra atteindre 25 % du trafic de marchandises à l’horizon 2022.

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(1) Lydia Mykolenko est responsable des études « logistiqueet marchandises ».

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Offrir un cadrefavorable

Les défis du développement durable s’appuient moins sur des mesures physiques que sur des manières différentesde faire, d’anticiper et de planifier, de s’organiser, de surveiller et de réagir. Comprendre ce qui se joue avec la mobilité des personnes, c’est tourner le regard vers les modes de vie, de consommer et de produire qui sont à l’origine du besoin de se déplacer. Côté planification, c’est concevoir un aménagement du territoire et de la ville moins dépendant de l’utilisationdes modes routiers, en privilégiant une plus grande intensitéurbaine, une proximité emplois/habitat, une meilleure mixitéfonctionnelle et sociale. Les autorités organisatrices, qui ont vu le jour et se sont développées en Europe durant les dix dernières années, apportent une réponse, certes partielle, à la question de l’échelle pertinente pour l’organisation des déplacements des personnes. Dans le même temps, le nécessaire développement de l’offre de transports collectifs conduit à des besoins de financement d’une ampleur sans précédent. Offrir un cadre favorable dans les métropoles de demain,c’est aussi gérer les flux par des actions sur la circulation et le stationnement et être attentif aux nuisances des déplacements, pour une meilleure qualité de vie plutôt que d’accroître l’offre routière.

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Offrir un cadre favorableLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

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Les Cahiers – Que vous inspire le titre de ce numéro des Cahiers « Vers unemobilité durable en Europe» ?Mireille Ferri – C’est l’emploi du terme «mobi-lité » plutôt que « transport » qui m’intéresse leplus dans votre question. Les mobilitésaujourd’hui recouvrent des réalités bien diffé-rentes : la mobilité physique, la mobilité profes-sionnelle, la mobilité résidentielle, un luxe etune aspiration en Île-de-France, et de plus enplus la mobilité affective. Ces mobilités compo-sent un territoire de la ville et un aménagementbeaucoup plus complexes que la simple ques-tion des transports. Le vrai conflit moderne n’estplus le conflit de voisinage mais le conflitd’échelles et la mobilité en fournitune parfaite illustration en mon-trant que c’est bien là-dessus quedoit porter l’arbitrage politique.L’aspiration des populations à unemobilité de proximité, donc lente,sécurisée, douce, est totalementcontradictoire avec l’enjeu toutaussi légitime de la mobilité à uneautre échelle, par exemple du grand territoireautour ou de la région. Il faut faire cohabiterles deux, ce qui est un magnifique exercice poli-tique.

L. C. – Parler de mobilité durable, c’est souvent évoquer la proximité ou l’énergie. Est-ce suffisant ?M. F. – La mobilité durable est une mobilité quiretrouve le sens du lien d’un territoire avec d’au-tres et lui permet de se situer comme un élé-ment d’un système. Un territoire est un lieu per-manent d’ajustements dans un système et deliens avec les territoires qui le constituentcomme les quartiers, et avec ceux dont il estun élément, le grand territoire autour ou éven-tuellement l’Europe. On se déplace parce qu’ona besoin d’aller chercher des personnes res-sources, des approvisionnements, des informa-tions ou de vendre des biens. Il faut donc savoirdéfinir le lien de dépendance ou d’autonomiepar rapport aux autres et ensuite seulementdéfinir le transport. Ce n’est donc pas une ques-tion d’utilisation de l’énergie, mais de compré-hension de ce qui motive les déplacementspour pouvoir les organiser de manière efficace.La mobilité durable impose de réfléchir auxraisons de se déplacer, afin, justement, de préser-ver la liberté de déplacement à un coût sup-portable pour le grand ou pour le petit terri-toire. «Vers une mobilité durable en Europe»?

Si la mobilité n’est pas conçue uniquementcomme la variable d’ajustement, si elle n’estpas réduite au fait de se déplacer dans l’espaceet si on l’aborde comme une sorte d’idéal : lapossibilité d’offrir la mobilité de l’emploi, d’ac-cepter la mobilité affective et de permettre lamobilité résidentielle, alors oui, la mobilité estdurable et oui c’est un bel idéal de société.

L. C. – En quoi les enjeux de la mobilitédurable sont-ils liés à la planification et à l’aménagement urbain des métropoles ?M. F. – Lier la mobilité durable à l’aménage-ment conduit à se poser des questions sur ce

qui doit ou non faire partie de laville vécue, quotidienne. La ten-dance a été jusqu’ici d’éloignerce qui était considéré commebruyant, créateur de nuisances,esthétiquement peu désirable, oumoins cher à produire ailleurs.On a mis les hangars sur camions,on a séparé le logement de l’acti-

vité car on considérait que le transport ne coû-tait ni ne valait rien. On s’est rendu comptedepuis que le transport valait, qu’il coûtait enénergie, en nuisances environnementales, entemps de transport et en autonomie des per-sonnes. Pour que la mobilité soit durable, il nousfaut d’abord réinterroger la localisation et sedire que les activités productives ne peuventpas sans cesse être délocalisées. Il faut accep-ter que la zone urbaine vive un peu avec cequ’elle produit ou avec ce dont elle a besoin etrelocaliser à l’intérieur des villes des servicesurbains, des lieux artisanaux et des flux. Évi-demment, cela ne peut se faire qu’en négocia-tion avec la population.

L. C. – Le Sdrif emploie un termeinhabituel en matière d’aménagementqui est celui de « robustesse ». Pourriez-vous le commenter ?M. F. – C’est un terme ancien qui, dans le lan-gage des ingénieurs, désigne la capacité d’unsystème technique de bien fonctionner entoutes circonstances. Puisque nous allons entrerdans une période de turbulences qui va affec-ter l’ordre du monde, il m’a semblé intéressantde le sortir de ce contexte et de garder l’idée.Dans une démocratie, la fonction du politiqueest une fonction d’assurance globale. Le risqueest grand de traverser ces bouleversements avecune insécurité sociale très forte. Il faut donc

Mireille Ferri est vice-présidentechargée de l’Aménagement du territoire et de l’Égalitéterritoriale, des Contratsrégionaux et ruraux au conseilrégional d’Île-de-France.Depuis 2004, elle développeune vision prospective de l'Île-de-France à l'horizon2030, traduit dans le schémadirecteur de la Région Île-de-France adopté par le conseil régional en septembre 2008.

Accepter de vivre avec ce qu’on produitet ce dont on a besoin

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que l’on ait une forme de robustesse qui ne soitpas qu’adaptée aux structures ou aux tech-niques, mais qui soit aussi une robustessesociale. Nous avons également parlé de robus-tesse environnementale pour alerter sur lerisque couru par nos écosystèmes et nos popu-lations en raison du contexte environnemen-tal. Tout cela ne peux pas se faire sans produireet redistribuer de la richesse et de la protec-tion, d’où la notion de robustesse économique.C’est le rapt d’un mot que j’ai trouvé beau enraison de son double sens : celui du langagetechnique, et celui résultant de sa transpositiondans le domaine politique ou social.

L. C. – Cela ne réinterroge-t-il pas la façon dont on fait de la planification?M. F. – Nous devons nous préparer à faire faceà des situations inédites. La robustesse, c’est dene pas devoir se remettre en cause à tousmoments parce qu’on n’a rien prévu. Nousdevons repenser nos façons de planifier, quiseront forcément beaucoup plus complexes etplus malléables qu’auparavant. Dans le Sdrif,nous avions associé deux termes : robustesseet souplesse, seul le premier a survécu. Être fort,c’est montrer réactivité et capacité d’adapta-tion, être à la fois robuste et souple. Il faudranous adapter, réagir et peut-être infléchir, ce quiimplique des outils d’évaluation et desmoments pour des conférences avec les acteurspour bien vérifier si ça fonctionne ou pas. Il fau-dra apprendre à naviguer dans les échelles detemps comme on doit le faire dans les échellesde territoire. Pour assurer la pérennité de l’usageagricole, il faut sécuriser les espaces agricoleset pour cela s’inscrire dans le long terme,comme c’est le cas si on pense infrastructures.Mais si on traite des espaces publics ou de lalocalisation des services, on va devoir penseradaptation plus rapide. Il faut faire l’exerciceen pensant loin en raison de la durée de viedes bâtiments et des infrastructures et en mêmetemps savoir encourager la mutabilité de ceque l’on a construit, sa transformation.

L. C. – En quoi l’intensification urbaineautour des quartiers de gare favorise-t-elle la mobilité durable ?M. F. – La densification préférentielle autourdes gares suppose d’une part que les projetsurbains soient intrinsèquement liés aux projetsde transport et d’autre part une intermodalitétotale, absolue, et intégrée. Il faut cesser de rai-sonner par mode de transport, mais penser ser-vices, comme le préconisait déjà la loi Voynet,cesser de s’intéresser successivement au rail, àla route, au vélo, mais penser mobilité et inter-modalité. Le deuxième aspect est celui du pro-jet urbain et de la façon dont cela s’articule

avec la ville. Il y a un véritable enjeu de maî-trise foncière pour faire des quartiers de gare devrais lieux de centralité. Quels commerces yimplanter ? Quels types d’emplois ? Y aura-t-ildu logement ? Autre question : celle du risqued’effet pervers si l’augmentation de valeur desquartiers de gares se traduisait par l’évictiondes populations qui ont le moins accès à lamobilité individuelle. Ces questions sont magni-fiques, mais chaque cas nécessitera une négo-ciation technique et politique sur le type deprojet souhaité autour de ces pôles redevenuscentraux depuis que le transport n’est plusquelque chose de neutre et de gratuit.

L. C. – Finalement vous souhaitez, avec les projets dans les quartiers de gare, réconcilier la ville et ses transports…M. F. – Pour réfléchir différemment, il faudraitaborder ces sujets non pas sous l’angle destransports, mais sous celui de l’espace public,ce qui permettrait de lier les différents modesde transport, la sécurité de l’espace public, lavitesse de déplacement ou le passage du codede la route au code de la rue et de s’interrogersur les services, les commerces ou les activitésqu’on met dans les limites de cet espace publicet la façon d’y accéder. J’aimerais bien, dansles mois qui viennent, poursuivre ce débat surl’espace public, son utilité et son partage. Celanous permettrait de réintégrer les transportsdans quelque chose de plus urbain. Peut-êtreque le lieu de réconciliation de la ville et destransports s’appelle l’espace public ?

Propos recueillis par Alain Meyèreet Sophie Laurent

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Les quartiers de gare doiventdevenir des lieux de centralités,aménagés en considérant mobilitéet intermodalité de manière globale.

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Visant la robustesse, la qualité de vie et lacohésion régionale, le projet de Sdrif sefixe trois défis principaux qui sont la

cohésion sociale et territoriale au sein du terri-toire régional, les réponses aux enjeux clima-tiques et énergétiques, ainsi que le dynamismerégional et le maintien du rang de l’Île-de-France parmi les métropoles mondiales.Dans ce contexte, les transports, élément natu-rel majeur de la planification, revêtent dans lenouveau document une importance accrue.En effet, et contrairement aux situations pas-sées, les questions de déplacements et d’infra-structures appellent aujourd’hui des réponsescomplexes, moins univoques, pour aller versune mobilité durable des personnes et desbiens. Le projet de Sdrif prend le risque d’unestratégie en grande partie novatrice en cher-chant à :- créer des conditions d’une mobilité plus éco-

nome en distance parcourue et moins cen-trée sur l’usage de l’automobile ;

- réduire les inégalités sociales et territorialespar le développement des réseaux, transportscollectifs et modes doux, mais aussi par l’amé-lioration de la qualité de l’offre ;

- renforcer les capacités des réseaux pour qu’ilspuissent desservir une ville, à terme, plus dense

et plus compacte et faire face à une crois-sance prévisible de leurs

trafics ;

- préserver, dans un souci de compétitivité, lesaccessibilités à l’échelle métropolitaine ;

- rationaliser des fonctions logistiques et envalorisant leur lieu d’implantation en faveurd’un report modal du transport de marchan-dises.

Cette stratégie des transports se place en pre-mier lieu au service du projet spatial régional etvise l’intégration des logiques de localisationdu développement urbain et de répartition desdensités avec celles d’un développement hiérar-chisé des réseaux. Les orientations d’aménage-ment intègrent tout particulièrement le quar-tier de gare comme lieu privilégié de ladensification ou du développement urbain(1000 m autour d’une gare ferroviaire ou d’unestation de métro et 500 m autour d’une stationde transport en commun en site propre - TCSP).Ainsi, l’intensification urbaine souhaitée ducœur de l’agglomération centrale justifie et rendindispensable un accroissement fort de la per-formance des transports collectifs le desser-vant. Outre l’amélioration de l’offre de servicesur les lignes existantes, le maillage des réseauxest développé grâce à de nouvelles liaisons derocade. Le projet phare en est la rocade struc-turante Arc-Express, dont l’intérêt réside dansla capacité de mailler l’ensemble des lignesradiales (métro, Transilien et RER), tout en irri-guant les quartiers denses mais mal desservisdu cœur de l’agglomération ainsi que les terri-toires de projets.Pour l’agglomération dans son ensemble et lesvilles de l’espace rural d’Île-de-France, le pro-jet de Sdrif vise la maîtrise de l’urbanisation dif-fuse et le confortement du polycentrisme fran-cilien par l’intensification des polaritésurbaines. Pour ce faire, il inscrit le nécessairerenforcement des réseaux ferroviaires radiauxvers le cœur d’agglomération, mais aussi la créa-tion de nouvelles liaisons entre pôles voisins etau sein des bassins de vie. Plus de trente projetsde TCSP, tramways et sites propres bus, sont ainsiciblés.

(1) Dominique Riou est ingénieur transport.

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Le lien urbanisme-transport dans le projet de Sdrif

Le conseil régional d’Île-de-France a adopté, le 25 septembre 2008, le projet de nouveau schéma directeur de la région (Sdrif), document de planification qui projette à long terme (2030) le développement de la métropole francilienne.

Dominique Riou(1)

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Vers une mobilité durable en Europe

Le projet spatial régional

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Des contextes institutionnels et financiers contrastés

Articuler urbanisme et transport : quels outils ?

Après Kyoto, recherche ville écomobile…

Habiter ou travailler près d’une gare :effet sur le choix modal

Articuler transport et aménagement

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Les modalités de financement et de ges-tion des systèmes de transport et des pro-jets d’aménagement dans les différents

pays européens apparaissent très diverses. Cecin’est le plus souvent que la conséquence dechoix en matière, d’une part, de partage entresphères publique et privée et, d’autre part, derépartition de compétences entre l’État centralet les différents niveaux de collectivités.

Des hiérarchies administratives variablesLa France appartient au groupe des sept payseuropéens disposant de trois niveaux de col-lectivités, qui rassemblent les trois quarts de lapopulation totale. Elle regroupe 40 % des com-munes européennes, et l’Allemagne 13 %.Conséquence partielle : la population moyennedes communes varie de 1 720 habitants enFrance à près de 140 000 au Royaume-Uni. L’importance du secteur public territorial enproportion du PIB est également très variable, allant de 5 % pour le Luxembourg à 33 % pourle Danemark (et 11 % pour la France). En 2007,il représente en France 20 % de l’ensemble desdépenses publiques (collectivités, État et Sécu-rité sociale). Au Danemark, le pourcentage simi-laire atteint 65 %, en Espagne 54 % et 13 % auLuxembourg. Les collectivités constituent danstous les grands pays européens un acteur clé enmatière d’investissement et d’emploi. Ellesreprésentent plus des deux tiers des investisse-ments publics, même si parfois elles intervien-nent essentiellement pour le compte de l’État(Irlande, Pays-Bas par exemple). Les collectivi-tés infranationales sont également un des plusimportants employeurs (et souvent le plusimportant) : environ 18 millions de personnesen Europe, soit 56 % des agents de l’adminis-tration publique et 16 % de l’emploi total.

Une répartition des compétences et des ressourcesCes différences en termes de hiérarchie admi-nistrative se recoupent avec la répartition descompétences, et des ressources, entre les diffé-rents niveaux. Les collectivités de niveau régio-

nal, par exemple, sont loin d’être uniformes.Dans les pays fédéraux, elles jouent un rôle trèsparticulier. À l’intérieur de certains États, onpeut trouver une autonomie « à plusieursvitesses» (en Espagne, notamment). En matièrede compétences, à l’échelle européenne, la pro-tection sociale et l’enseignement sont les deuxprincipaux postes de dépenses des collectivitésinfra-nationales (21 % chacun). Le troisièmeposte de dépenses est celui des affaires écono-miques (12 %),suivi par la santé, le logement etles équipements collectifs.La taille budgétaire est très variable : le budgetde la région Île-de-France est de 4,5 Md€, celuidu Grand Londres de 11 Md€ et celui de la Com-munauté autonome de Madrid de 16 Md€. Cecirenvoie naturellement aux compétences exer-cées. Parmi les recettes fiscales, certaines pro-viennent des recettes d’impôts étatiques sur les-quels les collectivités ne peuvent pas influer.En moyenne, en 2005 en Europe, 57 % de la fis-calité correspondait à de la fiscalité propre et43 % à de la fiscalité partagée(2) avec l’État. Lestrois impôts locaux les plus répandus en Europesont l’impôt foncier, largement utilisé, l’impôtlocal sur les entreprises et l’impôt local sur lerevenu des personnes physiques. L’autonomiefiscale des collectivités locales varie en fonc-tion de l’importance de la fiscalité locale, maisaussi du degré de liberté dont disposent les col-lectivités locales pour utiliser leurs ressourceset pour déterminer les taux d’imposition. En2005, l’autonomie fiscale(3) est maximale (plusde 40 %) au Danemark, en Suède, en Finlandeet en France. Le pourcentage est, au contraire,inférieur à 10 % dans les pays baltes, en Irlande,en Autriche ou en Bulgarie. Ceci résulte le plussouvent de l’incidence de transferts de compé-tences aux entités locales.

(1) Jean-Pierre Chauvel est économiste.(2) Fiscalité d’État sur le montant de laquelle la collectivitén’a aucune possibilité de modulation via une variation detaux d’imposition.(3) Part des recettes fiscales propres dans les recettes totalesdes collectivités.

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Des contextes institutionnels et financiers contrastés

Aller vers une mobilité durable nécessite des actions de la part des acteurs du monde du transport, mais aussi de ceux de l’aménagement. Tous les niveauxde collectivité sont concernés. Mais les organisations administratives, lescompétences et les ressources de ces différents niveaux diffèrent selon les pays,ce qui nécessite une vigilance dans l’analyse des cas étrangers, les solutionsn’étant pas forcément comparables ni applicables en France. Tour d’horizon.

Jean-Pierre Chauvel(1)

IAU île-de-France

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Vers une mobilité durable en Europe

Articuler transport et aménagement

Une certaine vigilance restenécessaire quant à l’applicabilitéd’expériences étrangères réussiesen Île-de-France.

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Chercher à articuler urbanisme et trans-port n’est pas une problématique nou-velle. Mais le contexte actuel (rareté de

l’espace, réchauffement climatique, pollutionliée aux transports...) donne d’autant plus d’im-portance à cet objectif. Et au-delà de l’objectif,des méthodes et des outils sont aujourd’huinécessaires.Toutes les métropoles sont confron-tées à l’étalement urbain, à la spécialisation desfonctions, au mitage, aux problématiques desdessertes et de l’accessibilité, et cherchent àrapprocher les zones d’habitat et d’emploi, àdensifier les zones urbanisées, notammentautour des axes structurants de transports col-lectifs, pour offrir des alternatives à l’automo-bile… L’Allemagne, active depuis une quinzained’années sur ce sujet, est un exemple intéres-sant, notamment les actions mises en place parles Länder (dont celui de Rhénanie du Nord-Westphalie) ou les autres échelons territoriaux(dont les communes de Stuttgart, Bonn,Cologne, Münster).Aujourd’hui en France et ail-leurs en Europe, des actions se développent.Qu’en sera-t-il pour l’Île-de-France, qui proposeclairement dans le nouveau schéma directeurde la région Île-de-France une densificationautour des axes de transports collectifs ?

En Allemagne : un cadre fédéral relayépar les Länder…L’Allemagne a développé depuis longtemps lesnotions de concentration décentralisée, de villedense, compacte. Dès 1993, l’État fédéral parlede «ville compacte et multifonctionnelle dans

des régions polycentriques »(2). Les actionsconjointes des Länder et communes, ou destructures créées à des échelles intermédiaires,ont permis la réalisation effective d’objectifs deconcentration du développement autour desnœuds de transport et de sa limitation ailleurs.Outre son rôle d’orientation de l’activité descommunes en matière d’urbanisation via le pro-gramme d’aménagement régional, dont lesdéclinaisons à l’échelon communal restent trèsfloues, le Land intervient par le biais de mesuresincitatives et de subventions destinées auxzones situées «au bon endroit ». Depuis plus dedix ans déjà, le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie a développé toute une série d’ac-tions concrètes et d’instruments de subventionen matière d’urbanisme, d’aménagement et delogement, très innovants à l’époque. Une largeconcertation entre 1990 et 1998 (200 tablesrondes locales initiées par le Land avec les com-munes et les districts) avait permis de dresser lediagnostic des possibilités et contraintes. LeLand a ensuite organisé, par le biais des direc-tives pour le renouvellement urbain(3), qu’il amodifiées en 1998, des subventions pour amé-nager les quartiers de gare et développer denouveaux quartiers d’habitat situés aux arrêtsferrés, avec des financements favorisant l’habi-tat peu consommateur d’espace: attribution de

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Vers une mobilité durable en Europe

Articuler transport et aménagement

Articuler urbanisme et transport :quels outils ?

L’Allemagne a développé des outils adaptés pour densifierl’urbanisation autour des axes de transports collectifs.

Sophie Laurent(1)

IAU île-de-France

Articuler urbanisme et transport, en particulier intensifier l’urbanisationautour des axes de transportscollectifs ? L’objectif, largementpartagé, s’avère difficile à mettre en œuvre. Quelques pistes de réflexionà travers l’exemple des outils et méthodes appliqués depuis plus de quinze ans en Rhénanie du Nord-Westphalie, pour une urbanisation« aux bons endroits », et des conceptsinnovants, aujourd’hui développés à Lille, Toulouse ou Grenoble.

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(1) Sophie Laurent est architecte-urbaniste.(2) Zukunft Stadt 2000, rapport de la Commission ZukunftStadt 2000 du Bundesministeriums für Raumordnung, Bau-wesen und Städtebau, Bonn, 1993.(3) Förderrichtlinien Stadterneuerung du Land NRW.

LexiqueTCSP : transport en commun en sitepropre, système de site propre (voie

dédiée) avec aménagements (stations,carrefours...) de qualité tramway,

sur lequel circule avec une fréquence forteun matériel roulant de type bus.

Remerciements à Patricia Gout de la DREAlsace, Julie Blais de l'Agence d'urbanismede Grenoble, Jean-Louis Sehier et CélineDepière de Lille Métropole CommunautéUrbaine.

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subventions forfaitaires pour les coûts d’aména-gement et en fonction de la typologie desconstructions pour les quartiers de plus de 150logements situés à moins de 500 m d’un sitepropre (métro léger, tramway ou métro) oumoins de 1 km d’une gare, au centre de l’ag-glomération ou en première périphérie. Dessubventions sont également allouées aux«zones d’aménagement»(4) (type Zac), toujourspour la mise en valeur de terrains à proximitédes arrêts ferrés et TCSP, ainsi que des aides à laréhabilitation pour les friches ferroviaires. Enfin,les aides au logement locatif sont condition-nées à la proximité (moins de 1,5 km) d’unegare ou d’une station de TCSP, tramway oumétro.En parallèle, le Land a mis en place des actionsen faveur de la réhabilitation et de la requalifi-cation des gares et des emprises ferroviairesqui les jouxtent : un programme pour réhabili-ter les gares, avec un accord cadre Land-DeutscheBahn (DB), le « programme d’actionpour 100 gares »(5) ; un forum d’échange et unprocessus de médiation DB – communes surles problématiques des emprises ferroviaires.Par ailleurs, l’organisation de concours interré-gionaux a permis d’encourager et de dévelop-per l’innovation venant des communes, de renforcer le sentiment d’appartenance commu-nale/régionale et le dialogue intercommunal.Il ne s’agit donc pas seulement d’objectifs, maisaussi de toute une série d’actions concrètesmenées en parallèle et de manière coordon-née, entre la planification régionale, l’urba-nisme, l’aménagement, l’habitat et les trans-ports. À travers ses critères de subvention dulogement et de l’urbanisme, le Land incite lescollectivités locales à jouer la carte de la cohé-rence entre l’urbanisme et les transports. Danscertains cas, des échelons intermédiaires com-binent la compétence urbanisme et transport,ce qui leur permet d’agir de manière coordon-née sur ces deux sujets. C’est le cas par exem-ple de la grande agglomération de Stuttgart(Verbandregion Stuttgart), créée en 1994, auto-rité organisatrice depuis 1996, chargée à la foisdes transports régionaux (S-Bahn et bus régio-naux) et de l’aménagement du territoire. Dansd’autres cas, des structures de coopération urbanisme-transport informelles peuvent avoirun rôle important, comme c’est le cas dugroupe de travail régional Rak (Regionalarbeits-kreis) à Bonn. Cette structure informelle de coo-pération intercommunale, mise en place dansla région au moment du déplacement du gou-vernement à Berlin, centralise par exemple lesaides financières à la construction de logementen provenance du Land et les redistribue.

… Avec une action décisive de l’écheloncommunalMais l’échelon communal, lieu de la planifica-tion de l’usage des sols, reste le niveau majeuren matière d’articulation urbanisme-transport,de densification autour des axes de transportscollectifs, même si les communes ont besoinde l’aide financière des collectivités de niveausupérieur qui peuvent agir par ce biais.

Les solutions, le contenuLes villes allemandes ont développé lesconcepts de «ville des courtes distances», urba-nisation « aux bons endroits », « concentrationdécentralisée ». Ils associent la densificationautour des gares, avec des programmes mixtes,à une amélioration de leur desserte en trans-ports collectifs. Ailleurs, l’urbanisation est frei-née, voire gelée. Les constructions d’habitatsemi-collectif, de maisons de villes sont favori-sées, et le nombre de places de stationnementpar logement réduit, par exemple, à une seuleplace de stationnement dans les quartiers biendesservis par les transports collectifs, afin delimiter le nombre de voitures par ménage. Desopérations de réhabilitation des centres-ville etde constructions dans les friches et dentscreuses sont également menées en parallèle.Stuttgart a par exemple défini dans les années1990 des critères d’ouverture à l’urbanisation :celle-ci n’est possible que dans des secteursbien délimités, situés à moins de 500 m d’unegare ferroviaire ou d’un TCSP, dans un périmè-tre déjà urbanisé, pour une superficie supé-rieure à dix hectares, hors zone de restrictionenvironnementale. En parallèle de l’urbanisa-tion à proximité des nœuds de transport, lesvilles travaillent à l’attractivité et à l’efficacitéde l’offre de transports collectifs. C’est cetteaction conjointe sur l’urbanisation et l’offre detransport qui permet de répondre aux objec-tifs de développement durable. Cette améliora-tion passe à la fois par les aménagements de lagare elle-même: accès, animation, sécurisation,stationnement pour vélos, organisation desrabattements bus…, et par le renforcement desfréquences et vitesses de la desserte ferrée oudu TCSP/tramway, ou encore des extensions delignes existantes (Cologne) ou des réouverturesde lignes ferroviaires périurbaines ou régionaleset/ou des stations (Münster). Les actions volon-taristes engagées par ces villes ont eu des résul-tats encourageants: à Münster par exemple, 75 %des zones d’habitat construites entre 1992et 2002 (plus de 17000 logements) l’ont été àmoins de 1500 m d’une gare, 75 % sont égale-ment à moins de 800 m d’un centre secondaire.

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Articuler transport et aménagement

Articuler urbanisme et transport : quels outils ?

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SourcesLes paragraphes sur l’Allemagne sontessentiellement tirés des travaux dirigéspar Patricia Gout, alors directrice d’étudesà l’Agence du développement urbain etrégional du Land de la Rhénanie du Nord-Westphalie :- Institut für Landes- und

Stadtentwicklungsforschung des LandesNordrhein-Westfalen (Ils) Institut derecherche pour le développementrégional et urbain du Land de laRhénanie du Nord-Westphalie, Mobilitéet urbanisme en Allemagne, Promouvoirl’urbanisation autour des dessertesferrées et des TCSP :. Tome 1 : La politique du Land de la

Rhénanie du Nord-Westphalie, Ademe,Predit 2, Dortmund, 2001.

. Tome 2 : Des politiques localesexemplaires, Drast, Predit/groupe 4.1(gestion des déplacements), 2001.

- GOUT Patricia, L’Allemagne joue la cartedes « courtes distances », in Recherches& synthèses, groupe thématique gestiondes déplacements urbains, Predit 1996-2000.

Quelques éléments complémentaires sonttirés de l’ouvrage Développement d’unurbanisme orienté vers le rail etintermodalité dans les régions urbainesallemandes et françaises - Enseignementsdu projet Bahn-Ville, janvier 2005, projets2001-2004 dans le cadre de lacoopération franco-allemande DEUFRAKO(voir http://www.bahn-ville.net/).

(4) Städtebauliche Entwicklungsmaßnahmen.(5) Initiative intitulée Bahnflächen und Bahnhöfe zur Stadtmachen - Aktionsprogramm 100 Bahnhöfe in NRW.

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La méthode, les outilsTout cela nécessite une forte volonté politique,des structures territoriales et une approche inté-grée de l’action urbaine. Les outils et méthodesdiffèrent selon les villes étudiées, mais visentles mêmes objectifs. Cologne a utilisé par exem-ple la méthode de « l’analyse territoriale inté-grée», qui s’appuie sur une analyse écologiquecouplée d’une analyse socio-économique àl’échelle des grands secteurs territoriaux del’agglomération. Elle précise les potentiels d’évo-lution urbaine et conduit à formuler un ensem-ble de recommandations pour l’évolution desterritoires urbains. Celles-ci sont utilisées pourmettre en cohérence la programmation destransports, de l’habitat, du développement éco-nomique et valoriser les qualités environne-mentales ou la politique foncière. Ce travail encontinu forme à la fois un outil d’aide à la déci-sion déclinant territorialement le projet d’ag-glomération et une préfiguration de la révisiondu document d’urbanisme global (Flächennut-zungsplan).Certaines villes, comme Münster ou Cologne,ont mené, par ailleurs, une politique foncièreambitieuse : grâce à une coordination étroiteentre planification et opérationnel, elles ciblentleur action foncière sur les sites stratégiques dedéveloppement et ont constitué des réservesfoncières dans les zones ouvertes à l’urbanisa-tion (la moitié des surfaces constructibles leurappartient). Cette politique a permis d’asseoirl’action publique, pour modérer les prix du fon-cier et proposer une offre urbaine au bonendroit. C’est un des outils clés pour maîtriser lecoût des logements dans les secteurs bien des-servis par les transports collectifs, dans l’espritdu volet social du développement durable.Enfin, les constructions ont, dans certains cas,été accompagnées, comme dans le programmelocal de l’habitat de Münster, d’actions de «mar-keting de l’habitat » mettant en avant les avan-tages de ces localisations : rapport qualité/prix,coûts réels et, notamment, économies d’énergieet de transport. Certains vendeurs ont eurecours à des actions complémentaires commel’intégration de l’abonnement aux transportscollectifs dans le prix de vente de la maison oude l’appartement.

Des initiatives récentes en France, à suivre

Les Divat à LilleLa communauté urbaine de Lille Metropole adéveloppé dans son plan local d’urbanisme(PLU) actuellement en vigueur le concept desdisques de valorisation des axes de transport(Divat), disques de 500 m de rayon centrés surles stations de métro/tramway ou gares(6), corres-

pondant à une accessibilité théorique de 5 à10 min à pied. Le PLU actuel intègre d’ores etdéjà des normes de stationnement spécifiquesdans le périmètre des Divat. À l’occasion de larévision de son plan de déplacements urbains(PDU), Lille Metropole souhaite aller plus loinet utiliser ces Divat pour remplir les objectifsqu’elle s’est fixés en matière de développementdurable, en articulant de manière efficace urba-nisme et transport, avec une intégration desmesures définies tout d’abord dans le PDU, sui-vie d’une traduction dans le PLU sous formede règles. L’objectif est également de définirdes règles qui puissent s’appliquer en cas dedéveloppement d’un nouvel axe structurant detransport collectif (comme c’est le cas du futurtram-train). Elle envisage dans ce cadre de hié-rarchiser les Divat en fonction de la dessertedont ils bénéficient (Divat stratégiques et Divatordinaires), de distinguer d’éventuelles sous-zones, par exemple les premiers 250 m autourde la gare ou station, et de définir un Divatélargi, dit Divat cycliste, avec un rayon de 1500 mau lieu des 500 m(7). En ce qui concerne l’urba-nisation, la réflexion porte sur le Cos à définirpour les Divat et les règles de compositionurbaine associées. Elle vise également à uneréflexion sur la valorisation des friches indus-trielles ou ferroviaires, avec une approche deprojet urbain sur les grandes emprises, et à lamise en place d’un outil de veille foncière per-manente, afin que la collectivité soit en mesurede saisir toute opportunité, même sur une par-celle isolée. Côté mobilité, corollaire indispen-

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La Mehrfamilienhaus (MFH) : des entréesséparées mais un toit communC’est une typologie d’habitat très répandueen Allemagne, entre le petit collectif et la maison individuelle, qui permetd’envisager des densités non négligeablestout en conservant un esprit d’habitat« individuel ». Il s’agit de grosses maisonsde plusieurs étages constituées de plusieurs appartements et dans lesquelles vivent plusieurs famillesou ménages. La loi allemande sur la propriété(Wohnungseigentumsgesetz) prévoit la possibilité de répartir la propriété de la maison et de sa parcelle entre les propriétaires des différentsappartements.

Après Euralille 1 autour de la garede Lille Europe, Lille Métropolecontinue à densifier autour des nœuds de transports collectifsavec le quartier Euralille 2, à 10 minutes de marche de la garede Lille Flandres.

(6) Seules les gares bénéficiant d’une desserte minimum dedix trains par jour et par sens sont considérées.(7) Correspondant à un trajet de 10 min en vélo.

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sable, elle prévoit un travail sur le maillage pié-tons/modes doux afin de rendre réellementaccessible toutes les zones du Divat depuis lastation ou la gare en moins de 10 min. Cettemise en accessibilité passe par un travail sur ledomaine privé (phénomènes de résidentialisa-tion), afin de dégager des servitudes de pas-sage. En ce qui concerne les vélos, il s’agit éga-lement d’améliorer l’accessibilité en proposantdes solutions en matière de plan de circulation.Le travail sur la mobilité traite également dustationnement automobile sur le domaine privé,à limiter, voire supprimer pour les bureaux situésdans le périmètre(8), et à optimiser pour les loge-ments. Il prévoit, en revanche, d’augmenter l’offre en stationnement pour les vélos dans lepérimètre Divat élargi, à la fois aux abordsimmédiats de la station ou de la gare, mais aussidans le domaine privé.

Les contrats d’axe à Grenoble et ToulouseDe leur côté, les communautés d’aggloméra-tion de Toulouse (Grand Toulouse) et Greno-ble (Grenoble Alpes Métropole) développenten parallèle un outil d’articulation urbanismeet transport intitulé «contrat d’axe». Celui-ci viseà élaborer de manière conjointe un axe trans-port structurant et l’urbanisation associée, et àcontractualiser entre monde du transport etmonde de l’aménagement, c’est-à-dire essen-tiellement la communauté d’agglomération, lesyndicat des transports, les communes et autrescollectivités concernées, autour d’un projet deterritoire commun intégrant l’ensemble. Greno-ble a élaboré, dans un premier temps, unecharte commune intégrée au PDU 2007-2012,portant sur des principes d’élaborationconjointe et de densification autour des axes

structurants de transport. La ville est,aujourd’hui, en train d’élaborer son projet deligne E de tramway selon ces principes. Il devraitaboutir prochainement à la signature du pre-mier «contrat d’axe», qui décline les principesde la charte en engagements opérationnels descollectivités et du Syndicat mixte des transportscollectifs (SMTC). Celui-ci a lancé une étudepour son élaboration, mobilisant un bureaud’études transport et un cabinet d’urbanisme.Ce long travail, piloté par une équipe techniquerestreinte transversale(9), a associé les com-munes, mais aussi le département, la région,l’État, l’établissement public foncier… Il s’estdéroulé sous forme de comités techniques asso-ciant tous les partenaires, de réunions spéci-fiques avec les communes, séparément etensemble, pour des aller-retour sur le diagnos-tic et les propositions, de groupes de travail tech-niques thématiques composés d’experts, et decomités de pilotage d’élus. Il a permis, après undiagnostic intégrant une analyse des potentielsfonciers et des enjeux urbains du territoire, dedéfinir le long de l’axe transport des zones dedensification et de projets jusqu’à un stade pré-opérationnel. Un périmètre de veille foncièredans le corridor direct du tramway, mais ausside manière élargie dans les communes traver-sées, a été mis en place afin que la collectivitésoit en mesure de réagir dans le cas d’éven-tuelles évolutions non conformes aux objec-tifs. L’année 2009 est une année de transitionqui devrait permettre de préciser les pro-grammes des projets urbains associés, avant lasignature du contrat d’axe. Le processus com-plet prévoit, à la suite des étapes d’élaborationconjointe et de contractualisation, un suivi, uneévaluation et une valorisation des projets et réa-lisations au regard des objectifs définis dans le«contrat d’axe».En Île-de-France, la complexité institutionnelleet les imbrications d’échelles ne facilitent pasla mise en œuvre d’actions concrètes et systé-matiques d’articulation urbanisme-transport. Iln’empêche que la déclinaison des objectifs duSdrif, le contexte actuel de révision du PDUIFpermettent d’imaginer le développement d’ou-tils et de méthodes sur ce thème, qui peuvents’inspirer des exemples européens comme celuide l’Allemagne, ou de province, à adapter auxspécificités du contexte francilien.

(8) Les personnes disposant d’une possibilité de se garer surleur lieu de travail ont tendance à s’y rendre en voiture (huitpersonnes sur dix d’après l’enquête « ménages déplace-ments » de la communauté urbaine de 2006).(9) Quatre personnes de l’agglomération, du SMTC et del’Agence d’urbanisme de la région grenobloise.

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Articuler transport et aménagement

Articuler urbanisme et transport : quels outils ?

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SourcesL’étude stratégique sur les disques de valorisation des axes de transport(Divat) réalisée par le groupement debureaux d’études Spire-Transitec-TracesUrbains pour Lille Métropole Communautéurbaine (LMCU) en janvier 2009 sera disponible au printemps 2009 auprès de la LMCU. La charte urbanisme et transport de Grenoble est téléchargeable surwww.smtc-grenoble.org/files/genese_charte_urbanisme. pdf (contactspossibles : l’Agence d’urbanisme de l’agglomération grenobloise ou le Syndicat mixte des transportscollectifs).Le guide méthodologique pour la mise en œuvre des contrats d’axe de Toulouseest téléchargeable sur http://www.auat-toulouse.org/spip.php?article11513 (site de l’Agence d’urbanisme et d’aménagement du territoire de Toulouse aire urbaine – AUAT).

À Grenoble, la communautéd’agglomération a engagé

des démarches pour accélérer la densification urbaine naturelle

(ici mairie d’Échirolles le long de la ligne A) autour de ses futures

lignes de tramway.

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La forme d’une ville change plus vite quele cœur d’un mortel, regrettait Baudelaire.Elle change en tous cas plus vite que son

système de mobilité n’évolue, pourraient regret-ter les Franciliens d’aujourd’hui, et d’abord lesplus fragiles et les plus captifs, ceux qui ne sontpas en situation de choisir leur mode de trans-port ou leur lieu d’habitat.D’où la nécessité de combiner différentesapproches pour agir à la fois sur l’offre et sur lademande, sur la structure et sur les comporte-ments, depuis l’échelle régionale – celle desdécisions stratégiques d’aménagement et de laprogrammation des grands réseaux de trans-port – jusqu’à l’échelle du quartier – celle del’aménagement opérationnel, celle de laconception et de la gestion des espaces publics,mais aussi du stationnement.Les exemples qui suivent illustrent ces tenta-tives de coproduction de la ville et des «écomo-bilités », à plusieurs échelles, autour de ques-tions qui se posent en Île-de-France :- le «polycentrisme compact interconnecté»,- le renforcement de la centralité autour des

gares,- les tramways et métros comme outils d’urba-

nisme et d’inclusion sociale,- l’aménagement urbain et le financement d’un

métro,- la multimotorisation dans les nouveaux quar-

tiers périphériques,- l’écomobilité dans un quartier urbain,- l’espace public pour les piétons,- la «ville sans voitures ».

Ces exemples sont là pour donner envie d’allerplus loin, d’abord dans la compréhension desinteractions entre urbanisme, transports et mobi-lité, mais surtout dans l’action. Aucun cas n’estexemplaire : les tâtonnements vers une villemoins dépendante de la voiture particulièresont pavés de contradictions, tant « l’automobi-lité » s’est incrustée dans le temps et la matièremême des villes. On peut dire qu’elle fait partieaujourd’hui de leur «patrimoine génétique».

Mais, à toutes les échelles et dans des contextestrès divers, l’une des clés des expériences lesplus abouties est l’organisation d’un dialoguepermanent constructif entre acteurs de mondesdifférents : élus régionaux, métropolitains etlocaux, ingénieurs, urbanistes, transporteurs,architectes, habitants, usagers, entrepreneurs,promoteurs, etc. De cette interaction émergent de nouveauxoutils, comme les « centrales de mobilité » enAllemagne ou en Autriche. Ces « guichetsuniques de la mobilité », qui favorisent le chan-gement dans les pratiques de déplacement, sontles alliés précieux d’un urbanisme qui se vou-drait plus écomobile.

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Vers une mobilité durable en Europe

Articuler transport et aménagement

Après Kyoto, recherche villeécomobile…

Dans le quartier Vauban (Fribourg),la rue est un espace de jeu.

Paul Lecroart(1)

IAU île-de-France

Ville, transports et modes de vie se coproduisent dans le temps. Faire évoluer ces trois variables dans un sens plus « durable », c’est un peucomme tenter de fabriquer en mêmetemps l’œuf, la poule et le coq. Ailleurs,en Europe et en Asie, des villes s’y essayent au travers de politiques etde projets qui inventent une « urbanitéécomobile » : une forme de ville baséesur la marche, le train, le métro, le tram, le bus, le vélo, et… la voiturepartagée.

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Références bibliographiques

• BONANOMI Lydia, Développement urbain et écomobilité, Irec, Lausanne, 1998.

• BONANOMI Lydia, Vers un urbanisme de laproximité : coordonner développementurbain et transports, Irec, Lausanne,2000.

• FAURE Anne et al., Forme urbaine et déplacements à l’échelle del’agglomération, Predit, Ademe, Mate,Arch’Urba, octobre 2001.

• « Grands projets urbains en Europe»,Cahiers de l’IAURIF, n° 146, Iaurif,mars 2007.

• LECOMTE Dominique et al. Madrid, unerégion en forte croissance. Aménagementet planification, Iaurif, décembre 2006.

• LECROART Paul, Tokyo : Stratégies dedéveloppement urbain de la régionmétropolitaine, Iaurif, octobre 2002.

Remerciements à Anne-Sophie Fulda(Eifer), Kyoko Niira (TMG), Corina Lochmann (Eifer) et Corinne Tiry (LACTH-IPRAUS).

À la mémoire de Lydia Bonanomi,architecte-urbaniste, chercheurepassionnée à l’École polytechnique fédérale de Lausanne, dont les travauxpionniers continuent d’inspirer la recherche d’un urbanisme écomobile. (1) Paul Lecroart est géographe-urbaniste.

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Renforcer la centralité autour des gares :BerlinLes gares sont les lieux privilégiés par le plandirecteur de Berlin (2005) et le Plan Mobil2010pour consolider les fonctions centrales au tra-vers des projets urbains, notamment le long del’axe est-ouest Charlottenburg-Alexanderplatz.Comme la plupart des Länder allemands et despays du nord de l’Europe, la législation berli-noise impose l’implantation des centres com-merciaux près des transports : celui de Gesund-brunnen est bâti sur une gare régionale quicroise la rocade RER. Contradictions d’une poli-tique : le stationnement y est gratuit…

Berlin : anciens et nouveaux centres autour des gares

Un « polycentrisme compactinterconnecté » : TokyoDepuis son plan de 1963, Tokyo suit un modèlede développement polycentrique organiséautour des gares d’interconnexion d’unerocade ferrée de type RER (Yamanote) avec lesréseaux régional et national (Shinkansen). Lesfonctions métropolitaines se répartissentaujourd’hui sur neuf centres secondaires (ter-tiaire supérieur à Shinjuku, loisirs sur le Water-front, hi-tech à Akihabara…), lieux d’une inten-sification économique et commerciale portéepar les compagnies ferroviaires propriétairesdes sols. Depuis 2001, une deuxième rocademétro (Oedo) appuie la politique publique dereconversion urbaine des zones industriellesde l’Est pour l’habitat. Cas extrême, Tokyo mon-tre le rôle structurant de rocades ferrées quirelient les lieux forts de la métropole et desser-vent les tissus les plus denses et mutables.

Tokyo : une ville de gares

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Intensification urbaine près de la gare Shimbashi.

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Le centre commercial Gesundbrunnen.

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La mobilité, talon d’Achille des périphéries ? UtrechtL’ambitieux programme Vinex aux Pays-Bas aconduit en dix ans (1995-2005) à la réalisationd’environ 690 000 logements sur 80 sites. Afinde limiter la mobilité automobile, le gouverne-ment a prôné le principe d’extensions urbainescompactes proches des villes existantes. Le plusgrand site Vinex est Leidsche Rijn, en périphé-rie d’Utrecht (30000 logements, 80000 habitantset 40000 emplois prévus en 2015 sur 2500 ha) :ici, l’offre de transport est assez étoffée (nou-velle gare de type TER, bus en site propre vers

le centre-ville, réseau cyclable, etc.). Mais la situa-tion excentrée du quartier, la faible densité et lesmodes de vies éclatés des jeunes ménages, quitravaillent dans différentes villes de la Randstad,ont engendré une multimotorisation et unusage intensif de la voiture. Les normes de sta-tionnement ont été revues à la hausse (entre1,45 et 1,75 place par logement) au détrimentde la qualité urbaine. Le pari de la villed’Utrecht est d’offrir services et emplois surplace, grâce à la réalisation prochaine d’un cen-tre urbain autour d’une nouvelle gare régio-nale…

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Tramways et métros, outils d’urbanismeet d’inclusion sociale : MadridLes ménages socialement fragilisés ont, plusque d’autres, besoin de transports collectifs per-formants pour accéder aux possibilités d’em-ploi, de loisirs, de culture de la métropole. Lestransports sont des leviers puissants pour larégénération des quartiers défavorisés. ÀMadrid, la rocade métro périphérique Metro-Sur (L12), achevée en 2003, a révolutionné l’ac-cessibilité de cinq villes industrielles de la ban-lieue sud (877000 habitants). Elle est devenueun outil de développement urbain partagé et demise en commun de grands équipementscomme les hôpitaux ou les universités. Durant

les deux dernières décennies, les extensions duréseau de métro et de tramway ont accompa-gné la croissance démographique très rapide dela région madrilène en rendant accessibles lesnouveaux quartiers d’habitat périphériques.Grâce à un effort spectaculaire d’investissementde la Communauté autonome de Madrid, lestransports publics assurent aujourd’hui plus dela moitié des déplacements dans la métropole.Mais le modèle a ses limites : ces quartiers-dortoirs sans vie, coupés de la ville par lesrocades autoroutières, et conçus comme unesérie d’îlots fermés sur eux-mêmes, risquent debasculer vers « l’automobilité ».

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Station Alorcon Central en banlieuesud de Madrid (MetroSur).

Quartier de Sanchinarro au nord de Madrid.

Train régional à la gare de Terwijde(Leidsche Rijn).

Stationnement en rez-de-chausséed’immeuble (Leidsche Rijn).

Maquette du projet (les tubes sont les lignes de bus !).

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Articuler transport et aménagement

Après Kyoto, recherche ville écomobile…

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L’aménagement peut-il financer le métro ? CopenhagueDepuis 1947, la région de Copenhague organisesa croissance autour des axes ferroviaires dansle cadre du fameux plan «en doigts de gants »(Finger Plan révisé en 2007) ; cette politiquerepose notamment sur une fiscalité défavora-ble à l’étalement urbain. Jusqu’en 2007, laconstruction du métro automatique de Copen-hague a été payée par les bénéfices de l’amé-nagement du quartier Ørestad, au sud de laville, (20 000 habitants et 60 000 emplois sur310 ha à l’horizon 2017), réalisé concomitam-ment par la société publique d’aménagementd’Ørestad : lorsque le métro est arrivé en 2005,les immeubles n’étaient pas sortis de terre. L’im-possibilité d’asseoir le financement de la futurerocade métro de la ville sur une seule opérationa conduit à scinder les deux activités et à fusion-ner la société d’aménagement d’Ørestad avecle port de Copenhague, où se développent denouveaux quartiers… à l’écart du métro ! Lanouvelle société d’aménagement dont lesactionnaires sont l’État (45 %) et la ville (55 %),n’apportera au final qu’une contribution finan-cière indirecte et minoritaire à la nouvelle ligne.

Écomobilité dans un quartier urbain :StockholmStockholm est une référence pour la coordina-tion entre des politiques d’urbanisme et detransports, tant à l’échelle du comté (région)que de la ville. Limiter à 20 % à l’horizon 2010 la part des dépla-cements en voiture pour diminuer l’empreinteénergétique : tel était l’un des objectifs de laville pour le quartier Hammarby Sjöstad déve-loppé sur un ancien site industriel : 25000 habi-tants et 8 000 emplois prévus pour 2017 sur200 ha. Avec 70 % de déplacements « écolo-giques», l’objectif est en passe d’être atteint parle jeu d’une combinaison de mesures : tramwayen rocade relié à un pôle d’échange, ferry (unquart des déplacements), bus, conception del’espace favorable au piéton et au vélo, auto-partage (8 % des ménages membres du car-pool) et strictes normes de parking (0,55 placepar logement + 0,1 place sur voirie). Mais cerésultat est surtout à mettre à l’actif d’un travailtransdisciplinaire de conception urbaine inté-grée de l’amont à l’aval du projet.

Copenhague : aménagement urbain et transports (2005)

Métro au cœur du futur centre urbain d’Ørestad.

Navette fluviale du quartierHammarby Sjöstad.

Hammarby Sjöstad : une conception urbaine intégrée,

favorable au piéton.

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Libérer l’espace public pour les piétons :CopenhagueCopenhague est l’une des villes les plus éco-mobiles au monde: seuls 23 % des trajets domi-cile-travail se font en voiture, pour 36 % en véloet 33 % en transports en commun. La municipa-lité développe une stratégie d’attractivité quipasse par la reconquête de l’espace public pourles piétons dans toute la ville dans le cadre d’unplan d’action, l’Urban Space Action Plan 2005 –d’ailleurs inspiré de la démarche du GrandLyon.Dans le quartier d’Ørestad, l’absence totale destationnement sur voirie (il y aura à terme dix-sept parkings-silos) et la qualité de traitementdes espaces publics devraient créer un envi-ronnement favorable à la marche à pied.Mais la conception même du quartier est anti-nomique avec l’urbanité piétonne : le centrecommercial est fermé sur lui-même, les îlotsbâtis sont trop grands, monofonctionnels et sansactivités en rez-de-chaussé et le métro aérienen surplomb coupe le quartier en deux. Ce casillustre la nécessité de penser ensemble toutesles échelles et les aspects d’un urbanisme éco-mobile.

Vers la ville sans voitures ? « Car-free living » à FribourgVivre sans voiture, faire ses courses en vélo, lais-ser ses enfants jouer dans la rue, aménager desjardins dans les cours… Tel est le projet qu’ontvoulu réaliser les initiateurs du quartier Vaubanà Fribourg, et d’abord les associations regrou-pées au sein du Forum Vauban.La gestion de la mobilité dans ce quartier de2000 logements (dont la moitié sociaux), créésur le site d’une ancienne caserne française,s’appuie sur : un urbanisme des courtes dis-tances, un tramway sur l’axe principal, une zone30 unique et des Spielstrassen (rues-jeu), desparcs à vélos en pied d’immeuble mais pas destationnement pour les voitures, la constructionen bordure du quartier d’un parking-silo pourles visiteurs et les ménages motorisés (le SolarGarage), un engagement juridique des ménagesvolontaires à ne pas acquérir de voiture. L’adhé-sion à un Car-free Club est l’outil juridique quipermet de déroger à la réglementation du Landsur le stationnement résidentiel. Elle donne droità un pass familial de transport urbain et régio-nal et accès à un système d’auto-partage.Aujourd’hui, 55 % des ménages du quartiern’ont pas de voiture (contre 40 % à Fribourg) etrares sont ceux qui envisagent d’en acquérirune.

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Espace public de qualité, urbanisme d’îlots fermés. Ørestad.

Quand le toit du parking devient la cour du lycée. Ørestad.

Équipement public multimodal : le Solar Garage, Vauban.

L’absence de voitures libèrel’espace. Vauban.

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L’IAU île-de-France a réalisé une étude(2)

pour tenter de fournir des élémentsd’appréciation sur les conséquences

d’une densification autour des gares en matièrede mobilité. L’étude a été menée en deuxtemps.Elle a porté tout d’abord sur une comparaisondes caractéristiques socio-économiques et de lamobilité de deux groupes d’individus (horsParis)(3) : ceux habitant près des gares et ceuxqui en sont éloignés. La même comparaison aété effectuée entre les actifs qui ont leur lieude travail près d’une gare et ceux qui travail-lent loin des gares. On observe que plus on serapproche de Paris, plus les différences socio-économiques et de mobilité entre les deuxgroupes s’amenuisent. Par exemple, le nombremoyen de déplacements par personne et parjour est de 3,5, que l’on habite près ou loin deParis, et près ou loin d’une gare. L’éloignementde Paris a des effets sur les distances parcouruesdont le total passe de 10 km à 30 km entre lazone 2 et la zone 6 de Carte orange, alors quela proximité d’une gare ne joue pas. À mesureque le domicile s’éloigne de Paris, la motorisa-tion augmente, l’utilisation de la voiture s’ac-croît et celle des transports collectifs diminue.La proximité d’une gare va avoir pour consé-quence de moduler cet effet dans le sens d’unmoindre recours à la voiture et, inversement,d’un recours plus grand aux transports collec-tifs, mais de façon moins marquée en zonedense (zones 2 et 3 de la Carte orange). Enfin,si le lieu de travail est situé à proximité d’unegare, alors l’actif prendra davantage les trans-ports en commun, aussi bien dans la zonedense qu’au-delà.Dans un deuxième temps, des analyses écono-métriques ont été réalisées pour expliquer lechoix modal et les distances parcourues en voi-ture chez les individus non captifs(4). Ces ana-lyses montrent que, toutes choses égales par ail-leurs, on a plus de chances d’utiliser sa voituresi on habite loin d’une gare que si on en estproche, et ce d’autant plus que l’on habite loinde Paris. Cependant, d’autres facteurs comme

l’âge, le sexe ou le taux de motorisation ont deseffets plus marqués sur le choix modal, surtoutdans le cœur de l’agglomération. Le fait d’habi-ter près d’une gare n’influence pas significative-ment les distances parcourues en voiture, maisles déterminants sont significativement diffé-rents entre les individus qui habitent près desgares et ceux qui en sont éloignés.Habiter ou travailler près d’une gare de ban-lieue s’accompagne donc, globalement, d’unemoindre mobilité automobile et d’un recoursplus fréquent aux transports collectifs. Il n’estpas possible de vérifier si cela est dû à la pré-sence d’une gare, ou bien aux densités plus éle-vées et aux meilleurs niveaux d’équipement enservices et commerces qui caractérisent lesquartiers de gare. L’étude a permis de quantifierles effets de l’étalement urbain sur les distancesmoyennes parcourues quotidiennement (troisfois plus élevées en moyenne si l’on réside enzone 6 de Carte orange plutôt qu’en zone 3), etles conséquences d’une localisation dans lesquartiers de gare sur le choix modal, toujoursplus favorable au transport collectif.Elle montre également que la densification enhabitat dans les quartiers de gares est, en termesde mobilité durable, d’autant plus intéressanteque l’on réside loin de Paris, alors que la den-sification en activités économiques dans lesquartiers de gare est intéressante, quel que soitl’éloignement par rapport à Paris. En particu-lier, dans le cœur de l’agglomération déjà dense,il est intéressant de continuer à densifier avecde l’habitat, mais pas nécessairement autourdes gares, où le coût du foncier est en moyenneplus élevé. En revanche, il est rentable de den-sifier en activités autour des gares dans le cœurde l’agglomération.

(1) Dany Nguyen-Luong est ingénieur, Jérémy Courel est sta-tisticien, économètre.(2) Habiter ou travailler près d’une gare de banlieue, quelseffets sur les comportements de mobilité? Dany Nguyen-Luong,Jérémy Courel, IAU îdF, novembre 2007.(3) À partir de l’enquête globale Transports 2001-2002.(4) Appartenant à un ménage motorisé et disposant d’unpermis de conduire.

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Habiter ou travailler près d’une gare :effet sur le choix modal

La tendance, aujourd’hui, est d’essayer de densifier autour des axes de transportcollectif et en particulier autour des gares, afin d’offrir une meilleure accessibilitéen transports collectifs et d’encourager leur utilisation. Cette densification favorise-t-elle l’utilisation des transports collectifs ? Faut-il densifier dans le cœur de l’agglomération et/ou en dehors ? Faut-il densifier avec de l’habitat et/ou des activités ?

Dany Nguyen-LuongJérémy Courel(1)

IAU île-de-France

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Vers une mobilité durable en Europe

Articuler transport et aménagement

Travailler près d’une gare incite à utiliser les transports collectifs.

C’est vrai aussi pour le fait d’habiterprès d’une gare, d’autant plus

qu’on s’éloigne de Paris.

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LexiqueDéterminant : caractéristiques

de l’individu ou du ménage (âge, sexe, taux de motorisation…)

à l’origine de son comportement.Étude économétrique : étude de l’effet

de chacun des déterminants sur la mobilité en neutralisant l’effet

des autres.

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Gouvernance des transports publicsurbains en Europe

Tarification et morphologie urbaine : un choix francilien cohérent

À la recherche de ressources pour les transports collectifs

Financer par les contrats PPPles ouvrages de transport

Organiser et financerles transportscollectifs

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Le caractère public ou privé de l’entre-prise exploitante ne suffit généralementpas pour décrire complètement le sys-

tème complexe de gouvernance des transportspublics dans une agglomération donnée d’unpays déterminé. Jusqu’au milieu des années1980 en Angleterre, les services de transport col-lectifs de Londres et ceux des six plus grandesagglomérations (les comtés métropolitains)étaient assurés par des sortes de régies localesde transport, les Passenger Transport Executives(PTE) ; dans le reste du pays, une entreprisepublique unique, la National Bus Company,exploitait réseaux locaux d’autobus et servicesinterurbains par autocar. En Allemagne, lesentreprises de transport locales étaient privées,mais leur capital était en totalité détenu par lespouvoirs publics locaux (à l’instar de Stras-bourg). En France, enfin, coexistaient deuxmodèles de gouvernance : celui de la provinceoù, dans la très grande majorité des cas, l’ex-ploitation était confiée pour une durée limitée,après mise en concurrence, à un transporteurprivé, et celui de l’Île-de-France où l’exploita-tion faisait l’objet d’autorisations administra-tives sans mise en concurrence ni limitation dedurée. La dérégulation des services d’autobusen Angleterre a très probablement été à l’originede certaines des évolutions survenues dans dif-férents pays depuis la fin des années 1990, maisle récent règlement européen sur les obliga-tions de service public va généraliser en Europele modèle de la concurrence régulée.

L’émergence des autorités organisatricesLe concept d’autorité publique de transporturbain est relativement récent en Europe. Il s’estimposé dans les années 1970 en France et 1980en Angleterre, où il recouvre des notions assezvoisines. La présence dans les deux cas (selondes modalités spécifiques à chacun des pays)d’opérateurs extérieurs distincts des servicestechniques locaux a, en effet, conduit à distin-guer les fonctions liées à la définition et l’orga-nisation des services de transport (la politiquede transport) de celles portant sur la fournitureproprement dite de ces services.En province, en France, l’autorité organisatrice(AO) est en charge de la définition de la consis-tance générale du service (choix des lignes etdes modes de transport, structure et niveauxtarifaires) et de son financement. Puis, elle a lapossibilité soit de fournir le service par le biaisd’un opérateur interne (régie ou Epic), qu’ellecontrôle entièrement, soit de faire appel à unprestataire désigné après mise en concurrence,avec lequel elle passera un contrat qui préciseraen particulier la répartition des risques indus-triels et commerciaux entre autorité publiqueet opérateur. L’autorité française intervient doncen amont du processus pour définir l’offre detransport et réguler l’accès au marché par lesopérateurs qui n’y ont pas accès directement.Ceux-ci se voient attribuer un droit temporairede transporter, conformément à un cahier descharges établi par l’AO.

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Vers une mobilité durable en Europe

Organiser et financer les transports collectifs

Gouvernance des transportspublics urbains en Europe

À Londres comme en Île-de-France,il y a quelques années encore,l’autorité organisatrice des transports dépendait de l’État central.

Alain Meyère(1)

IAU île-de-France

Les systèmes de gouvernance des transports publics dans les agglomérations présententdes similitudes, mais aussi des différences que devrait fairedisparaître le récent règlementeuropéen sur les obligations de servicepublic, qui va généraliser en Europe lemodèle de la concurrence régulée.Analyse des cas de l’Allemagne, du Royaume-Uni et de la France, et des adaptations nécessaires des systèmes respectifs.

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(1) Alain Meyère est directeur du département mobilité ettransport de l’IAU îdF.

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Le cas anglaisEn Angleterre(2), les autorités de transport (PTA:Passenger Transport Authorities) interviennentau contraire en aval d’un processus où les opé-rateurs de bus ont librement accès au marché.Ces derniers mettent en place, sur une basecommerciale, les services de bus qu’ils jugentopportun et rentable de proposer, et les PTAcomplètent ensuite le réseau commercial pardes services dits « socialement nécessaires »,dont ils attribuent l’exploitation par appel d’offres aux opérateurs privés. Pour mettre enœuvre concrètement leur politique, les PTA dis-posent d’agences techniques autonomes, lesPTE. À partir du budget alloué par la PTA, laPTE finance les services socialement néces-saires mis en place, ainsi que les compensa-tions tarifaires résultant d’obligations légales. Ilest propriétaire des arrêts et gares routières etresponsable de l’information à destination dupublic. Enfin, il est responsable de la planifica-tion des infrastructures de transport collectif.Pour ce qui est des lignes de tram, elles sontréalisées grâce à des contrats de la famille desconcessions entre la PTA et un consortiumprivé. Première remarque à partir de cet exa-men sommaire: en Angleterre, les fonctions poli-tique et technique sont exercées par deux orga-nismes distincts (PTA et PTE), ce qui n’est pasle cas en France. Deuxième remarque : enFrance et en Angleterre, l’exécution proprementdite des services (le fonctionnement) n’est pasune obligation réglementaire de l’autorité detransport. Troisième remarque : il n’y a relationcontractuelle entre l’autorité organisatrice et letransporteur que dans la mesure où c’est l’au-torité de transport qui définit le service, c’est-à-dire dans tous les cas en France, et seulementpour les services socialement nécessaires et lesinfrastructures concédées en Angleterre.

Un système différent entre les capitales et la provinceEn Angleterre comme en France, les modalitésutilisées à Londres et en Île-de-France diffèrentde celles qui s’appliquent en province. À Lon-dres, la fonction de PTA est exercée par la Grea-ter London Authority (GLA), et c’est Transportfor London (TfL) qui joue le rôle de PTE, maispour autant, l’accès au marché n’est pas libre.TfL exploite directement le métro par l’inter-médiaire de sa filiale London Underground etsous-traite à des exploitants privés sous contrattemporaire l’exécution de la quasi-totalité desservices de bus dont elle a au préalable définila consistance. En Île-de-France, jusqu’à la miseen œuvre du futur règlement européen, l’attribu-tion des droits de transport aux exploitants parl’autorité organisatrice fait l’objet d’autorisa-tions administratives accordées sans condition

de durée et de façon exceptionnelle après miseen concurrence. Pour être complet, il faudraitsituer les autorités de transport par rapport auxdifférents niveaux de collectivités territorialesexistant dans les pays examinés. Pour ce qui estde l’Angleterre et de la France, c’est relative-ment simple, car nous sommes en présenced’États unitaires. En province, c’est le niveaulocal qui est responsable en France (établisse-ments pluricommunaux ou syndicats mixtes)comme en Angleterre (anciens comtés métro-politains). Dans l’agglomération capitale desdeux pays, l’autorité de transport dépendait, ily a quelques années encore, de l’État centralet ce n’est plus le cas aujourd’hui. L’examen deces deux cas suggère deux variables d’analysequi pourraient être utilisées pour examiner lesautres autorités organisatrices: le lien avec l’Étatcentral ou fédéré d’une part, et la relation avecl’exploitant principal d’autre part.

Le cas allemandLe cas allemand va nous fournir une nouvelleperspective en faisant apparaître une autre desfonctions traditionnelles des autorités de trans-port : l’intégration. Dans ce pays, les servicespublics locaux sont assurés généralement etdepuis longtemps par des entreprises localesde droit privé à capitaux publics. Les collectivi-tés publiques qui contrôlent ces entreprises etsiègent à leur conseil d’administration n’ontjamais éprouvé le besoin de faire apparaître,dans ces conditions, un organisme indépen-dant exerçant la fonction d’autorité politiquedes transports. C’est la nécessité de coordon-ner des services de transport proposés par plu-sieurs opérateurs sur le même territoire étendud’une grande métropole qui va conduire à ceque, à Hambourg en 1965, se constitue, pour lapremière fois en Allemagne, une entité uniqueà l’échelon métropolitain, le Hamburger Ver-kehrsverbund (HVV)(3). Non pas autorité poli-tique mais organe technique, le HVV avait étéfondé par les différents transporteurs publicsexploitant des services sur le territoire métropo-litain (exploitant local, chemins de fer fédé-raux, transporteurs régionaux) pour proposerau public une offre coordonnée et intégrée dupoint de vue des horaires, des tarifs et de l’infor-mation. Comme c’est de tradition en Alle-magne, le HVV a pris la forme juridique d’unesociété de type SARL, filiale commune desentreprises de transport. Cet exemple, repris parFrancfort et son FVV (association de trois trans-porteurs) en 1972, puis par Munich, s’est ensuitediffusé progressivement dans le reste du pays en

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LexiqueAO : autorité organisatrice de transport.EMTA : European Metropolitan TransportAuthorities - association des autorités de transport européennes.PTA : Passenger Transport Authorities– AO anglaise.PTE : Passenger Transport Executive– agences techniques autonomes des AO anglaises.GLA : Greater London Authority– autorité du Grand Londres (transport et autres domaines).TfL : Transport for London– agence technique des transports du Grand Londres, par extension AO.Verkehrsverbund : communauté des transports en Allemagne ; approchantd’une AO, mais avec des formes et attributions variables selon les Länder et villes.VBB : Verkehrsverbund Berlin-Brandenburg– autorité pour Berlin-Brandebourg en charge des services ferroviairesrégionaux, de l’intégration tarifaire et de la coordination des horaires et de l’information.CRTM: Consorcio Regional de Transportesde Madrid – AO région autonome, ville de Madrid et communes de la région autonome.

(2) Seul est décrit ici le système qui s’applique aux ancienscomtés métropolitains(3) Terme que l’on peut traduire par «communauté des trans-ports de Hambourg».

DéfinitionsLois TPIL et Loti : L’organisation des transports collectifs a fait l’objet de plusieurs dispositions législatives, dont certaines ont pris place dans des loisdont le transport n’était pas l’objetprincipal. C’est le cas par exemple avec la loi Solidarité et renouvellementurbains (SRU). D’autres lois importantes ont pour objet unique les transports,comme la loi sur les Transport publicsd’intérêt local (TPIL) de 1979 qui reconnaît le rôle d’autorité organisatriceet codifie de façon précise les relationscontractuelles avec les transporteurs, et surtout la loi d’orientation des Transportsintérieurs (Loti), de 1982, qui est la loifondamentale d’organisation des servicespublics de transport et qui a affirmé le droit au transport.

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conservant l’idée initiale d’intégration et enl’étendant à la planification du système de trans-ports collectifs. Des Verkehrsverbunden chargésdu pilotage politique du système ne sont appa-rus que plus tardivement, sous l’effet de l’exten-sion géographique des périmètres de desserte,pour faire participer aux décisions des collec-tivités locales desservies, mais non représen-tées au capital des compagnies de transport.Aujourd’hui, on rencontre en Allemagne troisformes d’autorités : des associations de trans-porteurs comme à Stuttgart, des autorités poli-tiques comme le RMV de la région Rhin-Mainou le VBB de Berlin et des structures mixtescomme le MVV de Munich, la plupart étant juri-diquement équivalentes à des SARL. Parmi lescollectivités participantes, le cas le plus cou-rant pour les grandes métropoles est celui oùl’on rencontre la ville centre, les villes et cantonsde sa périphérie et le Land. Avec l’introductionprogressive de la concurrence, l’idée que letransporteur principal pourrait ne plus être obli-gatoirement cantonné au territoire considéréconduit les collectivités allemandes à adopterde plus en plus le principe en usage en Angle-terre et en France d’une autorité politique dis-tincte du ou des transporteurs. Dans cette confi-guration, on assiste à l’introduction progressivede contrats entre autorité politique et transpor-teurs.

La concurrence régulée : le modèle commun européen…La proposition de « règlement relatif aux ser-vices publics de transport de voyageurs par che-min de fer et par route», dit règlement OSP (obli-gations de service public), a été votée endeuxième lecture du Parlement européen le10 mai 2007. Il s’agit de l’aboutissement d’undébat très âpre débuté en septembre 2000 avecune proposition de la Commission qui avait àl’époque suscité de fortes oppositions de la part

de certains États ou de parlementaires, du faitdu caractère très contraignant de certaines deses dispositions et, en particulier, de l’obligationde mise en concurrence systématique.

… proche du système français appliqué en provinceLe règlement européen est, dans son esprit, trèsproche du système mis en place en France, enprovince, depuis la loi TPIL de 1979, puis la Lotide 1982. Ce dernier prévoit la possibilité pour lesautorités organisatrices de déléguer l’exploita-tion des services à un opérateur extérieur aprèsmise en concurrence, tout en leur laissant, envertu du principe de libre administration descollectivités locales, le soin de décider elles-mêmes de recourir à cette possibilité ou biend’exploiter directement par l’intermédiaired’une régie ou d’un Epic. Selon le vocabulaireemployé par la Commission, il s’agit d’un sys-tème de concurrence régulée, s’opposant ausystème non régulé en place au Royaume-Uniet dont les piètres résultats, en termes de fré-quentation notamment, n’ont pas convaincules autres pays de l’adopter. Le nouveau dispo-sitif a été salué par de nombreuses associations,françaises comme le Gart et européennescomme l’EMTA. Il repose sur plusieurs principeset prévoit une période de transition de dix ansà partir de son entrée en vigueur, prévue fin2009.

… avec contractualisation entre autoritéorganisatrice et opérateurCelle-ci, obligatoire dès lors que l’opérateurbénéficie de droits exclusifs ou de compensa-tions financières, s’est mise en place dans laplupart des villes depuis le début du siècle. EnÎle-de-France, les premiers contrats ont été pas-sés en juillet 2000 entre le Stif et la RATP et laSNCF, et le dispositif a été étendu aux opéra-teurs privés d’autobus en 2007, puis à RFF en2008. Elle a eu pour objectif principal, indépen-damment du statut du transporteur, de faire per-dre aux participations publiques aux coûts defonctionnement leur caractère automatique enles subordonnant au respect d’un cahier descharges et d’un service de référence. Dans denombreux cas, ces contrats ont complété larémunération du transporteur de primes ou depénalités – d’un volume financier pouvantapparaître modeste, mais d’une valeur symbo-lique élevée – pour tenir compte de ses perfor-mances en termes de qualité du service réa-lisé.

… et des possibilités d’attribution directe des services sous conditionsLa reconnaissance du libre choix de l’autoritéorganisatrice pour le mode de gestion des ser-

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Organiser et financer les transports collectifs

Gouvernance des transports publics urbains en Europe

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DéfinitionsRégie et Epic. Gestion directe et gestiondéléguée : Les conditions d’organisation des transports publics réguliers de personnes sont fixés par l’article 7-II de la loi Loti qui précise que « l’exécution du service est assurée soit en régie par une personne publique sous formed’un service public industriel etcommercial, soit par une entreprise ayantpassé à cet effet une convention à duréedéterminée avec l’autorité compétente. »On parle de gestion directe dans le premier cas et de gestion déléguéedans le second. Concernant le mode de gestion directe, on peut distinguer la régie simple, dans laquelle la collectivitécompétente assure avec son proprepersonnel la gestion du service, de l’établissement public industriel et commercial (Epic), qui reste sous le contrôle de la collectivité, mais dispose de son propre conseild’administration et parfois d’un directeurgénéral. En dépit de leurs noms, la régiedes transports de Marseille (RTM) et la régie autonome des transportsparisiens sont des Epic.Dérégulation : Suppression des contraintes légales ou réglementairesentravant la libre concurrence et le libreaccès au marché par une entreprise. La dérégulation ne se confond pas avec la déréglementation, car elle peut au contraire nécessiter un surcroît de réglementation.Comtés métropolitains (MetropolitanCounties) : En Angleterre, pays qui ne compte que quelques centaines de communes, la question de la coopération intercommunale ne se pose véritablement que dans les plus grandes agglomérations.Jusqu’en 1985, ces agglomérations et le Grand Londres étaient constituées en comtés métropolitains qui disposaientde compétences étendues, analogues à celles de nos communautés urbaines. Ils étaient administrés par un conseil éluau suffrage universel direct. Leur abolitionen 1985 s’est traduite par le transfert à l’échelon des districts de l’ensemble de leurs compétences, à l’exceptionimportante et significative de celle portant sur les transports collectifs, qui est doncrestée à l’échelle géographique la plus large.Gart : Groupement des autoritésresponsables de transport. Associationd’élus, le Gart regroupe plus de 250autorités organisatrices de transport(agglomérations, départements et régions) avec pour objectifs :l’amélioration des déplacements et le développement des transportspublics en France.

La première version du règlement relatif aux services publics de transport au Parlementeuropéen a suscité de fortes oppositions, du fait, en particulier, de l’obligation de mise en concurrence systématique.

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vices (autoproduction, recours à un opérateurinterne ou bien à un opérateur extérieur) étaitune exigence française, mais aussi celle denombreux autres pays, comme l’Allemagne parexemple, qui y voit la simple application duprincipe de subsidiarité, particulièrement cheraux États fédéraux. En contrepartie, l’attributiondirecte du service à un opérateur « interne» souscondition de cantonnement géographique de cedernier est une sorte de clause de réciprocitéintroduite à la demande de transporteurs subis-sant la concurrence d’entreprises publiquesfrançaises, elles-mêmes protégées sur leur mar-ché national. La possibilité d’attribuer directe-ment des contrats pour les services de transportferroviaire lourd (trains de banlieue et RER) àcaractère régional introduit au sein des réseauxde transport des grandes métropoles une dis-tinction, fondée apparemment sur un critèretechnique (ferroviaire lourd opposé à métro ettramway), alors qu’il s’agissait en réalité d’évi-ter de traiter la question de l’ouverture à laconcurrence des services utilisant les réseauxferrés nationaux. Lorsque ces services relèventde l’État central, comme c’est le cas à Madrid ouLondres, le règlement ne fait qu’entériner lasituation. Il pourrait créer des difficultés d’appli-cation dans le cas de réseaux plus intégrés, dontune partie seulement serait ainsi soumise àconcurrence.

Le cas spécifique de quelques capitalesComparer entre elles quelques grandes métro-poles est un exercice difficile. La tentation declasser, en dépit de contextes locaux très diffé-rents, peut parfois conduire à confondre diffé-rences de nature et différences de degré. C’estpourquoi l’examen de Berlin, Londres, Madridse bornera ici à constater convergences oudivergences avec l’Île-de-France. Si le territoiredu Stif se confond avec celui de la région-capitale, l’Île-de-France, c’est également le caspour Madrid avec le CRTM et Londres avec TfL.Pour Berlin, le territoire du VBB correspond àcelui de deux Länder, celui de Berlin étantenclavé dans le Brandebourg. Ces territoiresadministratifs sont généralement étendus etcouvrent largement la zone agglomérée ou lebassin de déplacements de la métropole : plusde 8 000 km2 à Madrid et jusqu’à 30 000 km2

pour Berlin-Brandebourg. TfL, à Londres, faitnotablement exception : avec 1 600 km2 et7,5 millions d’habitants, son territoire ne couvrepas le bassin de déplacements, qui concernequant à lui 9,3 millions d’habitants. En matièrede transports collectifs, seul le Stif dispose decompétences aussi larges, depuis les servicesde transport à la demande jusqu’aux trains debanlieue et au RER. À Londres et à Madrid, l’au-torité organisatrice gère les transports urbains,

mais n’a pas compétence sur les trains de ban-lieue, qui sont du ressort de l’État. À Berlin, l’autorité organisatrice (VBB) n’est de son côtéresponsable que des services ferroviaires régio-naux, de l’intégration tarifaire et de la coordina-tion des horaires et de l’information, et les ser-vices d’autobus, de tramway et de métro luiéchappent, car ils relèvent, comme partout ail-leurs en Allemagne, du niveau local (ville-Étatde Berlin et villes autonomes du Brandebourg).Pour ce qui est de l’ensemble des déplace-ments, le cas de Londres est souvent mis à justetitre en avant. TfL attribue les licences des taxislondoniens et gère un réseau de voirie d’agglo-mération de 500 km environ, ce qui en fait unesorte d’autorité organisatrice de la mobilité.Remarquons au passage qu’il s’agit de fonc-tions traditionnellement exercées par les com-tés métropolitains avant leur dissolution, quela GLA a récupérées au moment de sa création.De façon analogue, la communauté autonomede Madrid dispose de compétences opération-nelles en matière d’aménagement et d’urba-nisme, dont bénéficie de façon indirecte leCRTM.

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À Madrid comme à Londres,l’autorité organisatrice gère les transports urbains, mais n’a pas compétence sur les trains de banlieue, qui sont du ressort de l’État.

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À Berlin, les services d’autobus, de tramway et de métro relèvent,comme partout ailleurs en Allemagne, du niveau local.S.

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Dans les agglomérations étendues, il estcourant que la tarification des trans-ports collectifs tienne compte de la dis-

tance parcourue. En dehors de la tarificationkilométrique, les deux dispositions les plusrépandues sont celle de la tarification zonaleconcentrique et celle de la tarification alvéo-laire. La tarification zonale concentrique prenden compte la distance de façon simplifiée pourles trajets radiaux, et de façon très imparfaitepour les trajets en rocade. La tarification alvéo-laire vise à corriger cette imperfection : le terri-toire est découpé en zones polygonales de taillecomparable et le prix d’un trajet, indépendam-ment de sa direction, est fonction du nombre dezones traversées.Lorsqu’on confronte tarification spatiale et mor-phologie urbaine, on remarque que les terri-toires polycentriques, caractérisés par l’étale-ment spatial d’un centre dominant, font appelà des tarifications zonales ou kilométriques.C’est le cas des villes nord-américaines commeMontréal, Chicago et Los Angeles et des grandesmétropoles européennes comme Londres, Berlin, Munich et l’Île-de-France. Parmi lesgrands réseaux européens de transport public,ceux de Berlin, Munich et Londres se caractéri-sent par une intégration tarifaire forte entre lesdivers sous-réseaux qui les constituent et leursdifférents opérateurs. Ils appliquent une tarifica-tion zonale concentrique, même si le réseauberlinois présente une particularité intéressanteen proposant une tarification de type alvéolairesur la partie plus rurale de son territoire (Land

de Brandebourg). Munich, de son côté, qui avaittout d’abord opté pour une tarification alvéo-laire durant les années 1980, a mis en place unetarification zonale concentrique. Les réseauxnord-américains comme ceux de Chicago, LosAngeles et Montréal proposent tous l’équiva-lent d’une tarification zonale concentrique,mais avec un niveau d’intégration tarifaire moin-dre. Dans le cas du Grand Montréal, cette tari-fication intégrée appliquée par l’autorité orga-nisatrice coexiste avec la tarification de chacundes opérateurs locaux.Les territoires polynucléaires sont, quant à eux,des territoires denses à urbanisation répartie.Les villes sont géographiquement distinctes.Elles interagissent fortement, sans que l’uned’entre elles n’exerce de domination. Les prin-cipaux exemples de territoires polynucléairessont la Randstad (Amsterdam, Rotterdam,La Haye), la région Rhin-Ruhr (Essen, Düssel-dorf), et, dans une moindre mesure, la région deGlasgow. Ces trois territoires ont recours à unsystème de type alvéolaire et présentent,comme les autres cas européens, une forte inté-gration tarifaire. Ainsi, le système tarifaire alvéo-laire va de pair avec des territoires polynu-cléaires ou de faible densité comme leBrandebourg. À ce titre, le système zonal concentrique franci-lien paraît cohérent avec sa morphologieurbaine.

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Tarification et morphologie urbaine :un choix francilien cohérent

Les systèmes de tarification des transports publics dans les agglomérationsprésentent des similitudes mais aussi des différences qui peuvent s’expliquer par leur histoire et leur morphologie urbaine. L’Île-de-France a choisi d’appliquerune tarification zonale concentrique pour les différents abonnements forfaitaires.Au vu de ce qui se pratique dans d’autres métropoles, est-ce cohérent avec sa morphologie urbaine ?

Caroline Lemoine(1)

IAU île-de-France

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Organiser et financer les transports collectifs

Aujourd’hui, le zonage francilien

ne comporte que six zones,

les zones 6, 7 et 8 ayant été fusionnées

en 2007.

Tableau des différentes caractéristiques des cas étudiés

Superficie du Population Date données Zonage régional Nb max zones Tarif unique Tarif bassin Intégration Alvéolairepérimètre de l'AO (km2) pop. concentrique abonnement mensuel au centre tarifaire

Île-de-France 12 012 11,3 millions 2004 oui 6 oui non oui nonLondres 1 572 7,4 millions 2004 oui 6 oui non oui nonChicago 9 710 8,1 millions 2006 oui 12 oui non oui nonLos Angeles 10 565 9,8 millions 1999 oui 10 oui oui non nonMontréal 4 360 3,5 millions 2006 oui 8 oui oui oui nonBerlin 30 368 6,0 millions 2001 non --- non, 3 zones oui oui zone non denseRuhr 5 027 7,2 millions 2004 oui 3 oui non oui plus aujourd'huiAmsterdam 1 000 1,3 million 2004 non --- oui oui oui ouiGlasgow 6 500 2,2 millions 2004 non --- non, 8 alvéoles oui oui oui

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Les comparaisons internationales

sont délicates, en raison notamment

de la diversité des contextes

institutionnels, des découpages

administratifs, des aires géographiques

et des compétences

qui leur sont rattachées. (1) Caroline Lemoine est ingénieure transport.

STIF

Références bibliographiques

• LEMOINE C. et PRÉDALI F., Système tarifairedes transports collectifs : éléments deréflexion (vol 2) - Relations entretarification spatiale et morphologieurbaine, Iaurif, avril 2007

• LEMOINE C. et PRÉDALI F. « Urban structureand public transport fare structure:Comparison between polycentric andmultipolar structures ». EuroCities DATTAWorkshop on Urban mobility in Europe,Namur, 2009

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Aucun pays ne considère les transportspublics comme une activité marchandebanale. Intermédiaires obligés de toute

activité économique et sociale, leurs retombéessur le fonctionnement urbain et leur impact surle cadre de vie sont tels que leur financementne repose jamais uniquement sur les recettestarifaires : parmi les métropoles adhérentes àl’European Metropolitan Transport Authorities(EMTA), les subventions publiques représen-tent entre 20 % et 60 % des coûts de fonctionne-ment des réseaux.

Faire face au désengagement de l’ÉtatLa tendance générale en Europe est au désen-gagement financier de la part de l’État centralou fédéral, désengagement qui s’est fait endirection des collectivités locales la plupart dutemps, sauf en Grande-Bretagne, pays encorefortement centralisé qui a eu plutôt recours à laprivatisation. Ceci pose des problèmes particu-liers aux grandes métropoles, car, dans tous lespays, les infrastructures de chemin de fer relè-vent de l’État. Dans de nombreux cas, l’autoritéde ce dernier s’étend également aux servicesferroviaires et en particulier aux trains de ban-lieue qui ne bénéficient pas au sein de son bud-get national des priorités que les autoritéslocales voudraient lui voir attribuées. C’est ainsiqu’à Madrid, l’autorité organisatrice, le CRTM adû se substituer à l’État, déficient, et prolongerune ligne de banlieue par une ligne en corres-pondance, de mêmes caractéristiques mais luiappartenant. À Londres, le gouvernement bri-

tannique donnant priorité plutôt aux servicesinterurbains rapides qu’aux omnibus de ban-lieue, TfL souhaiterait que l’État lui transfère leréseau de chemin de fer de banlieue. C’est cequ’il a obtenu récemment pour la ligne derocade existante en banlieue nord. Ce contextede pénurie, amplifié par les critères de conver-gence européens qui limitent le taux d’endet-tement des collectivités publiques, pousse lesautorités locales à rechercher une participa-tion financière auprès de ce que les profession-nels ont coutume d’appeler les bénéficiairesindirects du transport collectif : propriétairesfonciers et immobiliers d’un côté et automobi-listes de l’autre.

Récupérer les plus-values foncières et immobilièresEn confiant dans les années 1990 la maîtrised’ouvrage de la construction d’une infrastruc-ture de transport à l’aménageur public, Londreset Copenhague avaient imaginé de financerl’ouvrage à partir de la vente des terrains desser-vis. Les établissements publics avaient été, aumoment de leur création, dotés de ces terrains,constitués de friches et d’entrepôts désaffectésdans le cas des Docklands à Londres, d’espacesnon construits dans le cas du nouveau quar-tier d’Ørestadt à Copenhague. Le produit annuelde la vente des terrains valorisés ou des biensimmobiliers devait rembourser les emprunts

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Organiser et financer les transports collectifs

À la recherche de ressources pour les transports collectifs

Table ronde organisée par l’EMTApour ses dix ans, au conseil régionald’Île-de-France en novembre 2008.

Alain Meyère(1)

IAU île-de-France

Les grandes villes européennes sont toutes préoccupées par le financement de leurs transportscollectifs. Une table ronde organiséepar l’European Metropolitan TransportAuthorities en novembre 2008, à l’occasion de son dixièmeanniversaire, en témoigne. Elle a examiné dans un premier tempsles dispositifs susceptibles de procurerde nouvelles ressources, avant de porter attention aux moyensde dépenser de façon plus efficiente.

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(1) Alain Meyère est directeur du département mobilité ettransport de l’IAU îdF.

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engagés. Plus récemment, la commune de Parla,dans la banlieue de Madrid, a imaginé un méca-nisme analogue pour financer son tramway.Copenhague n’aurait probablement pas pu sedoter d’un métro sans ce mécanisme qui aassuré 60 % du besoin de financement (45 % devente de terrains et 15 % de taxe foncière), maisles réalisations n’ont pas été à la hauteur desprévisions : la rénovation, au même moment,des quartiers du port a fait concurrence à laville nouvelle. À Londres, le prolongement dumétro léger des Docklands à l’ouest, depuisCanary Wharf jusqu’à Beckton aurait dû êtreintégralement financé de cette manière, maisle lancement des travaux s’est produit aumoment de l’effondrement du marché immobi-lier londonien en 1993 et aucune transaction nes’est produite pendant dix ans. Les pouvoirspublics ont dû prendre le relais par des finan-cements budgétaires classiques, alors qu’au-jourd’hui chacun peut constater que les déve-loppements urbains espérés se sonteffectivement produits. Plus de dix ans plus tard,c’est une crise analogue qui frappe l’immobilierespagnol. Elle conduit à renégocier l’échelon-nement de la dette pour le tramway de Parladans la banlieue de Madrid, dette qui devait,elle aussi, être couverte par les plus-values fon-cières.Quelles leçons tirer de ces bilans en demi-teinte? S’exposer aux incertitudes du marchéimmobilier, c’était pour Copenhague un risquenécessaire en raison de sa situation financièretrès dégradée à l’époque, a indiqué Nina Kamp-mann, ancienne directrice adjointe de lasociété de développement. Aucun des partici-pants à la table ronde n’a remis, bien sûr, encause la réalité des plus-values. Ils ont enrevanche souhaité des mécanismes de capta-tion permettant de récupérer dans la durée leshausses de valeur et de mettre en partie à l’abrices ressources des fluctuations d’un marchétrès volatil, c’est-à-dire qu’ils ont plaidé, avecJosé Viegas, professeur à l’université techniquede Lisbonne, pour des mécanismes fiscaux.Le montage d’opérations conjointes aménage-ment-transport pour capter la plus-value nedevrait, selon Nicola Cox, associée senior auprèsde TfL sur les questions financières, s’envisagerque comme un complément marginal de finan-cement et à condition que les circonstancess’y prêtent : terrains non pollués situés à proxi-mité immédiate des secteurs d’ores et déjà endéveloppement. C’est ainsi que sur un budgettotal de plus de 15 milliards de livres, le projetde liaison express est-ouest CrossRail à Londressera financé pour seulement 500 millions (soitenviron 3 %) directement par des opérationsd’urbanisme contre 3,5 milliards sous formed’emprunts gagés sur le produit d’une taxe addi-

tionnelle à la taxe professionnelle, le BusinessRate Supplement. Selon Dionisio Gonzalez, res-ponsable des concessions au CRTM de Madrid,il serait parfaitement justifié de solliciter lescommunes de manière accrue, car bien sou-vent l’assiette de la fiscalité locale les rend béné-ficiaires de ces hausses de valeur.

Des ressources en provenance de l’automobileDes automobilistes utilisant les transports col-lectifs et évitant de ce fait des embouteillagessupplémentaires ; des voitures dont la présenceen grand nombre ralentit la progression desautobus : deux arguments avancés depuis long-temps pour justifier de faire appel aux automo-bilistes pour financer les transports collectifs. EnÎle-de-France, la moitié du produit des amendesde police sur le stationnement est attribuée auStif, qui l’utilise pour financer des opérationsponctuelles de qualité de service. Si cetterecette est marginale, il n’en est pas de mêmeen Allemagne avec la taxe spéciale sur le car-burant qui procure chaque année plus de3,5 milliards d’euros à l’État fédéral pour finan-cer des infrastructures locales de transport (enmajorité transport collectif, mais également voi-rie communale).Comme celui de Londres quelques annéesauparavant, le péage urbain instauré à Stock-holm n’a pas été conçu dans l’optique de rap-porter de l’argent, a rappelé Lennart Hallgren,responsable de SL, l’autorité organisatrice deStockholm. De ce fait, les recettes procurées ser-vent en grande partie à couvrir le coût de l’of-fre supplémentaire de transport collectif (horsinvestissement) nécessaire pour faire face autransfert modal qui s’est heureusement produit,et dans le cas de Londres à couvrir des frais defonctionnement particulièrement élevés.

Peut-on augmenter les tarifs tout en évitant l’exclusion sociale ?Il s’agit de la question qui suscite le plus dedébats. Alors qu’un représentant de l’autoritéde transport du South Yorkshire (Sheffield) plai-dait pour étendre aux scolaires, puis à l’ensem-ble de la population, la gratuité des transportspublics, aujourd’hui réservée, en Angleterre, auxpersonnes âgées, José Viegas s’étonnait que lestransports publics puissent faire l’objet deréductions, alors que des biens répondant àdes besoins aussi essentiels que l’alimentationne bénéficient d’aucune subvention publique.Mme Maria Krausberger, vice-sénatrice de Berlin en charge des transports, a souhaité pro-poser une approche plus stratégique de la ques-tion, visant à réduire le besoin de financement :bien séparer les fonctions d’autorité organisa-trice de celles de transporteur ; diversifier les

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Organiser et financer les transports collectifs

À la recherche de ressources pour les transports collectifs

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Nina Kampmann, métro de Copenhague,

ancienne directrice adjointe de la société de développement.

José Viegas, professeur à l’université technique

de Lisbonne.

Nicola Cox, Associée sénior auprès de TfL sur les questions financières.

Alain Meyère, directeur du département mobilité

et transport, IAU île-de-France.

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services pour mieux répondre aux attentes dela population, et en particulier ne pas hésiter àproposer des services non traditionnels (taxiscollectifs, autobus à la demande, vélos urbains);mettre en place au niveau européen desnormes de qualité exigeantes pour accroître laqualité des services offerts.

Contrats d’objectifs pour maîtriser le financementClarifier le partage des responsabilités entrepouvoirs publics et transporteurs s’est accom-pagné de la mise en place progressive decontrats pour définir les relations entre les deuxpartenaires(2). La préoccupation du financementn’a pas été sans influence sur la philosophiegénérale et le contenu de ces contrats. L’expé-rience de Stockholm mérite à cet égard d’êtrerapportée. Les premiers contrats introduits audébut des années 1990 se sont focalisés sur laréduction des coûts : ils appartenaient donc à lafamille des contrats à prix forfaitaires (grosscost contracts). La deuxième génération decontrats est restée focalisée sur la réductiondes coûts, mais a fixé en outre des objectifs dequalité de service à respecter : selon que sesrésultats se situent en-deçà ou au-delà desobjectifs, le transporteur pourra se voir attribuerune prime ou une pénalité. Contrats de qualité,contrats d’objectifs ou contrats de perfor-mances, sous des appellations diverses, ces dis-positifs se généralisent pour l’exploitation desréseaux de transport urbain en Europe dansune perspective d’optimisation des finance-ments publics.

Partenariats public-privé : oui mais…Plusieurs villes européennes ont eu recours àun partenariat public-privé (PPP) pour leurstransports collectifs, formule bien souvent pré-sentée comme susceptible d’aplanir les diffi-cultés de financement. Parce qu’elle comporteun transfert de risques vers le partenaire privé,c’est une disposition plus coûteuse que cellequi consisterait simplement à passer un mar-ché avec un groupe d’entreprises pour les tra-vaux et la fourniture des équipements. La situa-tion où la rémunération du partenaire privé estassise sur les recettes commerciales de l’exploi-tation dont on lui a confié la responsabilité estbien connue, en particulier en France où ellecorrespond à la concession classique. Ce sontdonc plutôt les partenariats sans transfert de risque commercial qui constituent la nou-veauté sur laquelle s’interrogent les autoritéspubliques. À cet égard, l’expérience londo-nienne se révèle une nouvelle fois fort éclai-rante. Le tramway de Croydon, dans la banlieuesud de Londres, avait fait l’objet d’une conces-sion classique avec transfert du risque commer-

cial vers l’opérateur privé, alors même que lapolitique tarifaire restait du ressort du maire duGrand Londres. Comme on pouvait le prévoir,objectifs de gestion sociale des autorités poli-tiques et impératifs économiques de l’entre-prise de transport n’ont pas trouvé à se conci-lier dans ce type de contrat et TfL s’est vucontraint de récupérer le tram de Croydoncomme l’avait fait en son temps, mais pour d’au-tres raisons, le Stif avec Orlyval. Par ailleurs, lerecours à des montages de partenariats pourla rénovation du métro de Londres a susciténombre de questions en raison de son ampleur(32 milliards de livres sur trente ans) et surtoutde l’annonce, quelques années après l’entrée enapplication du contrat, de la faillite d’un desdeux groupements partenaires. Nicola Cox aavancé à ce sujet quelques explications :- la rénovation d’actifs (tunnels et éléments

d’infrastructures) anciens ou très anciens dontl’état de vétusté était largement inconnu aumoment de la signature du contrat, ce qui aconduit à sous-estimer les investissementsnécessaires ;

- un montage financier comportant une faiblepart de capitaux propres et des empruntsgarantis par le secteur public avec pour consé-quence un faible contrôle de la part desbanques ;

- l’existence dans le contrat d’une clause derevoyure (au bout de sept ans et demi) qui aprobablement incité certains des groupe-ments ayant concouru pour l’attribution ducontrat à proposer des prix très avantageuxavec l’espoir de les renégocier à la hausse parla suite.

En revanche, d’autres PPP sont considéréscomme des succès par TfL,en particulier ceuxqui ont présidé à la construction du métro légerdes Docklands. D’où la recommandation auxautres villes de bien spécifier le programme encause ainsi que les apports et les produits atten-dus de la part du contractant.Pour Mario Aymerich, directeur adjoint de laBEI (Banque européenne d’investissement), leséchecs de certains PPP ne doivent pas pourautant faire condamner une technique d’inves-tissement qui peut se révéler fort utile pourmobiliser les capitaux privés prêts à s’investir.Ces échecs ont eu lieu chaque fois que les par-ties n’ont pas suffisamment tenu compte duterme «partenariat », qui est le terme essentiel.La BEI ne favorise aucun type de contrat enparticulier et elle est prête à s’impliquer danstout projet ayant fait l’objet d’analyses de

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Dionisio Gonzalez, responsable des concessions au CRTM de Madrid.

Lennart Hallgren, responsable de SL, autoritéorganisatrice de Stockholm.

Maria Krausberger, vice-sénatrice de Berlin en charge des transports.

Mario Aymerich, directeur adjoint de la Banque européenned’investissement.

(2) À compter de décembre 2009 la directive européenne(EC) 1370/2007 fera obligation de conclure de tels contratsentre autorités organisatrices et opérateurs de transportpublic, dès lors qu’il existera des obligations de service public.

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risques sérieuses portant sur la période d’ex-ploitation, mais aussi et surtout sur la périodede construction.

Le financement : une question ancienneet de nouveaux défisUne question ancienne, amplifiée par la diffu-sion massive de la motorisation en Europedurant la deuxième moitié du vingtième siècleet qui, dès cette époque, avait donné lieu à desréponses spécifiques à chaque pays. Mais le ver-sement transport en France et la taxe spécialesur le carburant allemande imaginés alorstémoignent en fait d’une vision politique com-mune du transport collectif urbain, dont lesfinancements publics constituent et constitue-ront encore à l’avenir la clé de voûte. Depuis, lecontexte a évolué et les besoins se sont ampli-fiés : il faut remettre à niveau des infrastructuresqui ont vieilli, il faut prendre en compte les

attentes d’une population plus exigeante enmatière de qualité, il faut relever le défi d’unemobilité durable plus respectueuse de l’envi-ronnement et plus attentive aux solidaritéssociales et territoriales. Chaque métropole esten recherche de ressources nouvelles ou detechniques financières plus efficaces. L’EMTA,lieu privilégié pour l’échange d’expériences,atteste à la fois de la diversité des contextes etde la variété des approches, et de critères d’ap-préciation communs portant sur l’adéquationdu montant de la ressource aux besoins, soncaractère prévisible et sa stabilité, son accep-tabilité politique et sociale, ou encore les effetspervers que sa mise en application pourraitavoir sur le comportement des acteurs écono-miques. Finalement, c’est de solutions de finan-cement robustes, applicables même en cas deperturbations affectant l’environnement éco-nomique et urbain, dont les métropoles euro-péennes ont besoin avant tout.

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Organiser et financer les transports collectifs

À la recherche de ressources pour les transports collectifs

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C’est de solutions de financementrobustes, applicables même en casde perturbations affectantl’environnement économique et urbain, dont les métropoleseuropéennes ont besoin.

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Alors que le budget du transport (essen-tiellement destiné au financement denouvelles infrastructures) faisait sou-

vent l’objet de coupes au niveau des budgetsnationaux, les besoins d’infrastructures sont désormais tels que les Etats cherchent desmoyens de financement adaptés.

La concession : un outil qui a ses limitesTraditionnellement, le financement d’ouvragesde transport par le privé se fait au moyen deconcessions(2). Bien connu en France, notam-ment avec les concessions d’autoroutes, ce typede contrat permet de confier à un opérateurprivé le préfinancement et la réalisation d’uneinfrastructure publique, tout en lui accordantla gestion d’un service public. Bien que sa rému-nération soit souvent régulée par une subven-tion publique, le concessionnaire est rémunérépar les recettes de l’exploitation. De fait, l’objetdu contrat ne peut porter que sur des servicespublics délégables et rémunérateurs, ce quiexclut en pratique l’instauration de péages vir-tuels, ainsi que tous les ouvrages générant peude recettes d’usagers. Les ouvrages qui ne rap-portent pas suffisamment de recettes d’usagersau concessionnaire, tels que les infrastructuresde transports publics ou certains équipements(comme le système, ERTMS, devant être mis enplace sur les réseaux ferroviaires), nécessitentdonc de recourir à de nouvelles formules definancement…

Le renouveau des contrats de partenariatLes contrats partenariaux ont été revus et adap-tés par les Britanniques, lorsque le pays essayaitde sortir de la crise au début des années 1990.Avec la politique de Private Finance Initiative(PFI), le gouvernement de John Major lancealors un outil qui présente l’avantage de finan-cer la construction ou la remise en état deséquipements publics grâce aux capitaux pri-vés, tout en étalant sur plusieurs décennies ladépense publique, considérée comme unedépense de fonctionnement (et non plus d’in-vestissement). Le respect du critère de Maas-tricht qui impose aux États de conserver leurdette en dessous de 60 % du PIB constitue l’unde ses avantages essentiels. Les autres atoutsdes formules britanniques reposent, outre lamesure de la performance pour optimiser laqualité de service et inciter à une gestion orien-tée vers les résultats, sur l’évaluation et la répar-tition des risques entre les cocontractants, enfonction de la nature du risque et du partenairea priori le mieux à même de l’assumer.Contrairement aux partenariats public-privé bri-tanniques qui ne bénéficient d’aucune loi spé-cifique, les contrats de partenariat français nais-sent encadrés par l’ordonnance de juin 2004. Laraison de la création de ce nouveau dispositifde financement tient surtout au fait que la dis-

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Vers une mobilité durable en Europe

Organiser et financer les transports collectifs

Financer par les contrats PPPles ouvrages de transport

L’expérience des PPP du métro de Londres montre que ce type de financement est davantageadapté à des biens dont la valeur et l’état sont parfaitement connus.

Frédérique Prédali(1)

IAU île-de-France

Quel que soit le pays européen, le recours au financement privés’impose pour financer les infrastructures dans un contexte de capacité de financement publiclimitée. Le terme de partenariat public-privé (PPP) désigne tous les outils contractuels permettant un transfert de risques de construction et de performance ou de trafic au secteur privé. Mais il recouvre des réalités différentes selon le pays et les formules retenues. Exemples.

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(1) Frédérique Prédali est économiste des transports.(2) Outre les concessions, les autres formes partenarialesfrançaises traditionnelles sont les délégations de servicepublic et les marchés publics (pour des contrats passés àcourt terme).

Private Finance Initiative :La Private Finance Initiative (PFI) est lancée par le gouvernement Major en 1992, puis le terme Public PrivatePartnership (PPP) est créé par le gouvernement Blair en 1997 pour se démarquer du précédent. Bien qu’employés indifféremmentaujourd’hui, le terme PFI renvoie le secteurpublic à un rôle d’acheteur de service,alors que celui de PPP intègre la notion de pouvoir de contrôle du secteur publicsur le service assuré par le prestataire.

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tinction entre droit public et droit privé (inexis-tante dans le droit britannique) ne permet pasd’élaborer des formules capables de répondreaux besoins urgents d’équipements des collec-tivités françaises. Le contrat de partenariat sedistingue du montage concessif dans la mesureoù la rémunération du cocontractant se fait parla personne publique en fonction de la perfor-mance tout au long du contrat. Cette rémunéra-tion fait l’objet d’un loyer pour couvrir les fraisd’investissement et d’exploitation que supportele prestataire privé, ainsi que les risques, exceptécelui de la demande. Le schéma suivant récapi-tule les transferts et les niveaux de risques prisselon la formule choisie.

Ainsi, du fait que le concessionnaire assumedes risques sur le niveau de la demande, il tireses revenus des recettes, alors que celui quipasse un contrat de partenariat attend unrevenu déterminé à l’avance et s’engage surdes résultats, que ce soit en termes de délaisde réalisation, de performance ou de producti-vité.Les deux exemples ci-après décrivent des expé-riences de partenariat : l’un britannique, où legouvernement a décidé de recourir à un PPPpour la mise à niveau du réseau métropolitain

londonien, sans que cela soit un réel succès, lesecond espagnol, où une municipalité en ban-lieue de Madrid a décidé de construire uneligne de tramway et a imaginé un montage luipermettant de financer l’investissement, aussibien que l’exploitation, avec la participation del’autorité organisatrice de transport.

Remettre à niveau les installations du métro de LondresLondon Undergound Ltd (LUL) est une filialede TfL à 100 %. Elle est propriétaire et exploiteles douze lignes de métro du réseau. Aumoment où le gouvernement décide de lancerdes partenariats publics-privés pour sa remise àniveau dans les années 1990, le réseau nécessitede façon urgente de lourdes dépenses d’entre-tien, de maintenance, de remplacement dumatériel roulant et de rénovation des stations.Les contrats sont passés en 1998 pour unepériode moyenne de trente ans et sont révisa-bles. London Underground réorganise le réseaupour pouvoir confier les opérations sur l’infra-structure à trois groupes privés sélectionnés :Metronet BCV (lignes Bakerloo, Central et Victo-ria), Metronet SSL (pour Sub-Surface Lines :lignes Circle, District, East London, Hammers-mith & City et Metropolitan) et Tube Lines JNP(lignes Jubilee, Northern et Picadilly). Les PPP visant à la modernisation du métro ontbénéficié d’un premier prêt de la BEI (Banqueeuropéenne d’investissement) de 180 millionsde livres en 1998 et d’un second de 900 mil-lions en 2000. Les emprunts directs de TfL,auto-risés par le gouvernement pour une période desix ans, lui permettent de couvrir la moitié dufinancement des PPP. En 2006-2007, les deuxtiers de l’investissement de London Under-ground Ltd sont consacrés au financement destrois PPP (1,09 Md£).Après avoir annoncé publi-quement la sous-estimation des coûts de réfec-tion des stations par TfL, Metronet(3), signatairedes deux PPP d’une valeur de 30 milliards delivres, évalue à deux milliards de livres le besoinde financement pour couvrir les dépassementsrefusés par ses actionnaires. En juillet 2007, aprèsl’examen de ses performances sur les trois der-nières années, le régulateur des PPP (organismeindépendant du gouvernement et des presta-taires) ne lui accorde qu’une faible partie dubudget attendu. Ne pouvant plus faire face àses engagements financiers, Metronet a étéplacé sous administration judiciaire, jusqu’à sontransfert à TfL en mai 2008. Dans un contexte dedemande de mobilité croissante, TfL s’est vudans l’obligation de poursuivre les travaux de

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Organiser et financer les transports collectifs

Financer par les contrats PPP les ouvrages de transport

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Contrairement aux partenariatspublic-privé britanniques

qui ne bénéficient d’aucune loispécifique, les contrats

de partenariat français naissentencadrés par l’ordonnance

de juin 2004. Dani

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Transfert de risques du public vers le privé

Risques de construction,de performanceet de demande

Risquesde construction

et de performance

Rémunération du partenairepar l’usager(recettes)

Rémunération du partenairepar le secteur public(pas/peu de recettes)

Obligation de moyen Obligation de résultats

Concession à la française Contrat de partenariat

Coût/Bénéfices du financement des contrats globaux

Risques de surcoûts (côté public)/Probabilité de consolider (côté public)

(3) Metronet est constitué à part égale des groupes BalfourBeatty, Bombardier, EDF Energy, Thames Water et WS Atkins,il emploie 5000 personnes, dont la plupart travaillaient chezLUL avant le démantèlement.

Risques, rémunération et obligation de la concession et du contrat de partenariat

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modernisation du réseau métropolitain tout enexploitant le service en toute sécurité, et parconséquent d’intégrer Metronet au sein de sastructure (en conservant légalement des struc-tures distinctes LUL Nominee BCV Ltd et LULNominee SSL Ltd). Il ferait de même pour TubeLines, si ce dernier rencontrait des difficultésanalogues… Même si les premières années ont permis d’ajus-ter les contrats, l’ajustement restait sous-estimépar le secteur public et les contrats âprementnégociés ne laissaient pas assez de marge auxconsortiums engagés. D’après TfL, un des fac-teurs de l’échec tient à la forme même ducontrat, qui annonce des périodes de révision :les soumissionnaires ont proposé des prixattractifs, sachant qu’ils pourraient renégocier àcourt terme. Par ailleurs, les contrats passés rela-tivement tard par rapport à l’état du réseau n’ontpas permis de rattraper le retard d’investisse-ment accumulé. L’expérience des PPP du métrode Londres montre que ce type de financementest davantage adapté à des biens dont la valeuret l’état sont parfaitement connus.

Une ville de la banlieue madrilène réaliseun tramwayLa municipalité de Parla(4) a décidé en 2001,avec la Communauté autonome de Madrid(CAM), la réalisation de 12 000 logements. Ceprojet de Parla Este, « ville nouvelle dans laville », est confié au consortium créé entre lacommune de Parla et la CAM (45 %-55 %), avecpour vocation de revendre des terrains viabili-sés. Afin de relier ce nouveau secteur au cœurhistorique, la municipalité décide la créationd’une ligne de tramway de huit kilomètres, cou-rant 2003. Un contrat de type DBOT(5), portant surla construction, le financement et l’exploitationdu tramway est passé en mai 2005 entre la maî-trise d’ouvrage conjointe autorité organisatricerégionale de transport-ville de Parla et le grou-pement(6) retenu. Parla deviendra propriétairede l’infrastructure au terme du contrat de qua-rante ans. Le projet nécessite un budget d’in-vestissement de 138 M€, taxes incluses. Le grou-pement apporte la totalité du budget grâce àdes emprunts bancaires. Pendant la périodedes travaux, le groupement perçoit 42 M€ pro-venant des plus-values d’opérations foncières etdes « charges urbanistiques » du consortiumurbanistique Parla Este (soit 30 % du coût duprojet). Les « charges urbanistiques » sont lestaxes sur la vente de terrains viabilisés prévuespar la loi espagnole sur les finances locales. Laformule, qui permet au groupement de perce-voir un «capital initial » d’un tiers du coût duprojet pendant les travaux, se distingue descontrats britanniques, où le maître d’ouvragene commence à payer le groupement qu’à la

mise en service du projet. Pour le reste du rem-boursement (70 %), la municipalité de Parlaverse au prestataire un loyer annuel incluantles frais financiers dès la mise en service de laligne. Le financement de ces annuités devaitprovenir des retombées foncières d’autres déve-loppements urbains. Cependant, en raison de laconjoncture du marché immobilier espagnol,Parla ne peut plus honorer les loyers prévus, cequi a contraint le groupement à renégocier avecles banques l’échelonnement des paiements.La ville de Parla assume l’investissement à hau-teur de 83 % (hors frais de concession) et les17 % restant sont à la charge de la CAM, via leconsortium urbanistique Parla Este.Quant au financement de l’exploitation, il faitl’objet, les cinq premières années correspon-dant à la montée en charge du trafic, d’unerémunération au kilomètre parcouru. Sur lestrente-cinq années suivantes, la rémunérationdu groupement couvre essentiellement sescoûts d’exploitation et d’amortissement, soit0,90 euro par passager transporté, dont les deuxtiers sont payés par la vente de titres et l’autretiers est couvert à 50-50 par l’autorité organisa-trice de transport et Parla.Ainsi, la participation du secteur privé dans lesprojets d’infrastructure apparaît actuellementnécessaire, mais ce type de recours doit êtreenvisagé avec prudence, comme le montrentles expériences des autres pays. Les atouts desPPP tournent parfois en faiblesses à l’applica-tion, que ce soit l’exigence de raisonnementsur la longue durée qui pose des problèmesd’anticipation, ou encore le partage des risquesentre les secteurs public et privé qui se révèledifficilement équitable en pratique.

(4) Parla, située à une vingtaine de kilomètres au sud deMadrid, compte environ 100 000 habitants en 2007, contre60000 avant le développement urbain de Parla Este.(5) Design, Build, Operate and Transfer : une formule de typebritannique équivalente à notre contrat de partenariat.(6) Le groupement Tranvia de Parla S.A. est composé à 75 %par les constructeurs Acciona et FCC, à 15 % par Caja CastillaLa Mancha et 10 % par Detren.

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La formule espagnole, qui permet au groupement de percevoir un « capital initial » d’un tiers du coût du projet pendant les travaux, se distingue des contrats britanniques où le maître d’ouvrage ne commence à payer le groupement qu’à la mise en service du projet. Tramway, Parla.

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Références bibliographiques

• PRÉDALI Frédérique, Le financement des infrastructures de transport avec des PPP, IAU île-de-France, 2007.

• CHAUVEL Jean-Pierre, COINDET Jean-Paul,PRÉDALI Frédérique, Les investissements de transport collectif dans les métropoleseuropéennes. Le cas des extensions à Londres, IAU île-de-France, 2008.

• CHAUVEL Jean-Pierre, COINDET Jean-Paul,LEMOINE Caroline, PRÉDALI Frédérique, Les investissements de transport collectifdans les métropoles européennes. Les investissements d’extension à Madrid,IAU île-de-France, 2008.

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Optimiser l’exploitation routière en Île-de-France

La gestion dynamique des voies : que se passe-t-il à l’étranger ?

Réguler les flux automobiles par le stationnement

Optimiser la circulationet le stationnement

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L’exploitation du réseau routier francilienfait appel à plusieurs systèmes de ges-tion adaptés aux objectifs poursuivis,

dont certains communs à l’ensemble duréseau : surveillance du trafic, information desusagers, amélioration de la sécurité… Concer-nant les VRU, la fluidification relative du trafic,afin d’optimiser la capacité du réseau, la fiabi-lisation des temps de parcours et l’accélérationdes interventions de sécurité sont des objectifsessentiels.Concernant les voies départementales, dont lelinéaire et les fonctionnalités viennent d’êtresensiblement modifiés par la décentralisation,ces mêmes objectifs peuvent être assignés, enplus des éléments relevant de l’environnementurbain des voies : sécurité des autres usagers,réduction des nuisances…

Les voies rapidesLa gestion du trafic sur les voies rapides faitappel d’une part à des systèmes d’exploitationextensifs, d’autre part à des opérations locali-sées. Deux systèmes extensifs y sont mis enœuvre :- Sirius, géré par la Dirif exploite 770 km de voi-

rie nationale, essentiellement autoroutes etvoies rapides, hors réseau autoroutierconcédé ;

- le boulevard périphérique fait, quant à lui,l’objet d’une gestion particulière, sous la maî-trise directe de la ville de Paris, avec le postecentral d’exploitation du corridor périphé-rique, le PC Berlier.

Les systèmes d’exploitation concernés sontconstamment mis à niveau, et leur extensiongéographique est quasi achevée. Par ailleurs, le réseau de voies rapides d’Île-de-France fait actuellement l’objet de trois impor-tantes opérations d’exploitation :• A3-A86 (nœud de Rosny) : depuis 2000, grâce

à une réduction de largeur des voies et à l’uti-lisation de l’emprise de la BAU, la capacité dece tronc commun de 650 m, entrecroisementdes autoroutes A3 et A86, point de congestionhistorique du réseau rapide francilien, est pas-sée en permanence de 2x4 à 2x5 voies.

• A4-A86 : le principe d’exploitation de ce tron-çon d’entrecroisement des autoroutes A4 etA86, sur une longueur de 2200 m, est d’ouvrirune cinquième voie, dite « voie auxiliaire »,aux heures et dans le sens de la pointe, en uti-lisant la BAU. L’ouverture de cette cinquièmevoie est liée dynamiquement à l’état du tra-fic, grâce à des capteurs. En dehors des heuresde pointe, la BAU est rétablie.

• Régulation d’accès sur le réseau Sirius : la Dirifmet en place la régulation de 74 accès répar-tis dans le corridor A86. Les véhicules, briève-ment retenus par des feux sur les bretelles,sont libérés par peloton, en fonction de l’étatlocal du trafic sur l’autoroute et sur la voirielocale amont, sans coordination entre lesaccès.

Les voies départementalesLes systèmes de régulation en milieu urbainrelèvent de la compétence départementale :- Surf, à Paris ;- Siter, dans les Hauts-de-Seine ;- Gerfaut, en Seine-Saint-Denis ;- Parcival, dans le Val-de-Marne.Les systèmes d’exploitation départementaux,qui font parfois encore appel à des technologiesanciennes, ont à faire face à des enjeux demodernisation, d’harmonisation et d’extension.Les stratégies d’exploitation, bien qu’éprouvées,pourraient se voir soumises à l’épreuve de nou-veaux objectifs d’environnement.

Les enjeux pour demainLes gains de capacités attendus sur le réseaufrancilien, en raison des limites prévisibles enmatière de réduction de trafic, sont aujourd’huià rechercher principalement sur le réseau desvoies rapides, comme résultat de l’homogénéi-sation de leurs caractéristiques et surtout de lagestion de la congestion. Sur les voies départe-mentales, où la réduction du trafic pourrait serévéler plus conséquente, les outils de gestiondevront s’adapter à des exigences plus diversi-fiées.

Optimiser l’exploitation routière en Île-de-France

Le réseau routier francilien, de par son linéaire très développé, la variété des caractéristiques des voies et l’importance du trafic écoulé, se caractérise notamment par des durées de congestion importantes, dont la réduction passe, désormais, non plus par l’extension des réseaux, mais par l’optimisation de l’exploitation.

Jean-Paul CoindetDenis Verrier(1)

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Vers une mobilité durable en Europe

Optimiser la circulation et le stationnement

Descriptif des outilsSirius a pour objectifs d’accroître la sécurité, de stabiliser les temps de parcours et de relayer l’information vers l’usager. Il porte sur le recueil et le traitement des données de trafic,ainsi que sur les interventions. Outre 1100bornes d’appel d’urgence, la collecte des informations sur le terrain esteffectuée grâce à 770 caméras vidéo et 6000 boucles électromagnétiques, en liaison avec la ville de Paris et les sociétés d’autoroute.Le boulevard périphérique est équipé de capteurs au sol, d’un réseau d’appeld’urgence et d’un système de vidéosurveillance comportant 100 caméras sur le périphérique et les échangeurs autoroutiers, ainsi que 35 caméras sur les boulevardsdes Maréchaux.

Références bibliographiques

• COINDET Jean-Paul, VERRIER Denis,Exploitations routières innovantes en Île-de-France et en Europe,Iaurif, décembre 2007.

(1) Jean-Paul Coindet est ingénieur-architecte, Denis Verrierest ingénieur.

Sirius, un outil en faveur d’une régulation routière optimale en Île-de-France.

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outre

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LexiqueMEEDDAT : ministère de l’Écologie,

de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire.

Dirif : direction interdépartementale des routes Île-de-France,

service déconcentré du MEEDDAT.BAU : bande d’arrêt d’urgence.

VRU : voies rapides urbaines.Sirius : système d’information

pour un réseau intelligible aux usagers.

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Plusieurs familles de gestion dynamiquedes voies (GDV) sont testées ou utiliséesdans le monde, parmi lesquelles les voies

réversibles, les variations du nombre de voiesdans un même sens, et les voies à accès régle-menté. Ces systèmes sont plus ou moins répan-dus et souvent insuffisamment évalués, maisleur analyse constitue une source d’informa-tion à étoffer.

Les voies réversiblesIl s’agit de voies dont le sens de circulation varieen fonction du sens du trafic majoritaire. Cessystèmes sont généralement mis en placelorsque le trafic est très fortement dissymétriqueentre l’heure de pointe du matin et celle dusoir. Ils permettent un écoulement optimal dutrafic pendant ces périodes. Les voies réversiblessont utilisées depuis longtemps, en de nom-breux endroits du monde. On en trouve desexemples emblématiques, notamment auxÉtats-Unis, en Allemagne, en Espagne, en Aus-tralie, au Brésil…Aux États-Unis, il s’agit le plus souvent de bar-rières, accompagnées de simples panneauxd’information sur les horaires d’activation, pla-cés sur l’accotement en début de voie. Cetteinformation, peu visible et faisant largementappel à du texte, est principalement connuedes habitués, mais le système semble fonction-ner. Il existe également des signalisations verti-cales par feux et par panneaux variables, oupar de simples balises au sol. Des systèmes debarrières mobiles, déplacées manuellement ou

à l’aide d’une machine spécifique sont mises enplace dans certaines villes comme Washingtonet San Diego. Ce concept de voie réversible estégalement parfois utilisé sur des voies urbaines,par exemple à Washington. À proximité de cettemême ville, la chaussée centrale à trois voies,d’une autoroute à trois chaussées (chacuned’elles comprenant trois ou quatre voies), estentièrement réversible.L’Allemagne présente d’autres cas intéressants :à Hanovre par exemple, pendant la foireannuelle, une section d’autoroute (à 2x2 ou à2x3 voies, suivant les sections) est transforméeen autoroute à quatre ou six voies, nécessitantune signalisation (en général SAV) et des amé-nagements adaptés, ainsi que l’attention del’usager ! Autre exemple : une voie réversibled’une dizaine de kilomètres, sur la route d’ac-cès à la station de ski de Garmisch-Partenkir-chen, avec affectation par panneaux variablesd’indication implantés sur l’accotement. Ce typede panneau a d’ailleurs été récemment intégrédans la Convention de Vienne sur la signalisa-tion routière. La voie de bus d’Heidelberg consti-

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Vers une mobilité durable en Europe

Optimiser la circulation et le stationnement

La gestion dynamique des voies :que se passe-t-il à l’étranger ?

En Italie, sur l’autoroute A4, la bande d’arrêt d’urgence est ouverte à la circulation des véhicules légers, mais aussi des poids lourds, le matin dans un sens, le soir dans l’autre, et de plus en plus dans la journée.

Jacques Nouvier(1)

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Répondre aux problématiquesrécurrentes liées aux flux automobilesne se résume pas à construire des infrastructures routières nouvelles.D’autres solutions existent, comme le concept de gestion dynamique des voies(2), qui se développe en Franceet ailleurs depuis plusieurs années, et vise une optimisation de l’usage des voiries existantes. Zoom sur des exemples d’expériencesétrangères. Mais ces systèmes sont-ilsefficaces ? Et sont-ils transférables ?

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LexiqueBAU : bande d’arrêt d’urgence.

SAV : signaux d’affectation des voies.PMV : panneaux à messages variables.

(1) Jacques Nouvier est chargé de mission « Technologiespour une voirie durable» au Centre d’études sur les réseaux,les transports, l’urbanisme et les constructions. ([email protected])(2) L’acception retenue ici ne comprend que l’affectationvariable des voies. Dans certains pays, la GDV comprend laquasi-totalité des opérations de gestion avancée du trafic(régulation de la vitesse, interdictions dynamiques de dépas-ser, régulation d’accès…). Dans les pays de langue anglaise,la GDV est appelée managed lanes ou advanced traffic mana-gement, ou encore active traffic management.

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tue un autre cas intéressant : la faible fiabilitéhoraire des transports collectifs liée à l’impor-tance du trafic sur la route n° 37, entre Heidel-berg et Neckargemünd, a été améliorée par unsystème de voie réversible centrale pour les bus(la faible largeur de la route ne permettant pasl’aménagement d’un double site propre), quipermet d’isoler le bus du trafic routier dans lesens le plus chargé.En Espagne, on trouve plusieurs exemples devoies centrales réversibles : voies rapides à Bar-celone, ponts de Séville (cinq voies) et de Cadix(trois voies)... Avec le cas du pont José LeónDe Carranza à Cadix, on peut parfois trouverplusieurs changements d’affectation dans lamême heure, le souci d’optimisation de l’usagedu pont s’accompagnant de celui d’éviter l’en-gorgement du centre-ville. Il faudrait citer encore, en Australie, le cas d’Adé-laïde, où une voie réversible de quatorze kilo-mètres de long a été mise en exploitation. LeBrésil a également mis en place des opérationstrès intéressantes, notamment en milieu urbain(par exemple, une section à 2x5 voies utilisée en7 + 3 ou 2 + 8 ou 4 + 6 selon les besoins !).

Variation du nombre de voies dans le même sensCes dispositifs, qui consistent à adapter le nom-bre de voies au trafic en fonction des périodes,sont particulièrement utilisés aux Pays-Bas etégalement, mais à un degré moindre, en Alle-magne ou encore en Italie. Trois types de «pro-fils en travers variables» ont été testés aux Pays-Bas :• Les peak lanes ou voies supplémentaires «de

pointe» qui consistent à ouvrir la bande d’ar-rêt d’urgence (BAU) à la circulation, temporai-rement et uniquement aux heures de pointe.L’inconvénient est qu’il n’y a plus de BAU pen-dant ces périodes.

• Les plus lanes ou voies supplémentaires «desurcapacité», qui consistent à garder la BAU etréduire les largeurs de toutes les voies à laplace, ce qui permet d’ajouter une voie àgauche utilisable en période de pointe. L’in-convénient est que le marquage est perma-nent, par conséquent les voies restent étroites,quelle que soit la période.

• Les variable cross sections ou «profils en tra-vers variables » qui sont des plus lanes avecmarquage au sol dynamique (bandes lumi-neuses variables) permettant d’adapter lenombre de voies au volume de trafic.

À chacun de ces trois types d’aménagementsont associées des signalisations verticales ethorizontales, en section courante et dans leszones d’insertion ou de sortie, et des conditionsspécifiques de surveillance (vidéo) et de miseen œuvre (périodes, limitations de vitesse). Des

études d’impact (capacité et sécurité) ont mon-tré l’intérêt des peak lanes et plus lanes: gain decapacité pour les plus lanes de 35 % à 40 %,avec une sécurité améliorée, en respectant unelimitation de vitesse à 70 km/h, sur des tron-çons limités (huit à dix kilomètres), pour nepas trop « peser » sur l’attention des conduc-teurs. En revanche, pour les variable cross sec-tions, les difficultés sont nombreuses, et les opé-rations très gourmandes en énergie. Cependant,ce principe de gestion dynamique des profils entravers semble intéressant ponctuellement, pourles zones difficiles, telles les zones de forts entre-croisements.L’Allemagne utilise également les BAU enamont de certains échangeurs. Les expérimen-tations ont commencé à Göttingen et Holdorf(Basse Saxe) : lorsqu’il y a une congestion dansla direction principale de l’autoroute, les usa-gers qui souhaitent sortir sont autorisés à utili-ser la BAU sur une distance d’environ un kilo-mètre. Depuis ces premières expérimentations,l’utilisation des BAU a été autorisée sur des lon-gueurs allant jusqu’à vingt kilomètres environ,et l’Allemagne a modifié sa réglementation, lesaménagements et la signalisation en consé-quence. Une autre expérience, particulièrement intéres-sante, est menée en Italie, sur quelques kilomè-tres de l’autoroute A4 Trieste-Padoue suppor-tant un trafic mixte important (transitinternational et trafic local). La BAU est ouverteà la circulation des véhicules légers, mais aussiet surtout des poids lourds (plus de 25 %)(3), lematin dans un sens, le soir dans l’autre, et deplus en plus dans la journée. Le tronçon est sur-veillé par vidéo et les ouvertures-fermeturessont signalées par des panneaux à messagesvariables sur portiques, tous les 800 m environ.

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En Allemagne, lors de la foireannuelle de Hanovre, une sectiond’autoroute est mise en sensunique.

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(3) Puisque ceux-ci sont tenus de rouler sur une seule file àdroite, à 50 km/h, sans pouvoir doubler.

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Voies à accès réglementé : HOV et HOT lanesLes HOV (High Occupancy Vehicles) lanes sontdes voies de circulation à accès réservé auxvéhicules transportant au moins deux (HOV2)ou trois passagers (HOV3), l’objectif étantd’écouler plus de personnes, avec moins devéhicules, donc moins de perturbations de tra-fic. Très répandues aux États-Unis, elles ont pourbut initial de favoriser le covoiturage, en étantmoins congestionnées que les voies adjacentesouvertes à tous les véhicules. Pour remédier àun déficit de remplissage, mal accepté, l’accèsen est parfois autorisé aux voitures les moinspolluantes, et notamment les hybrides (mêmeavec le conducteur seul à bord). Ce système

pose le problème du contrôle du nombre depassagers, car il n’existe pas encore aujourd’huid’appareils automatiques adaptés. Les HOT (High Occupancy Tolling) lanes sontdes HOV sur lesquelles un péage est appliquépour d’autres catégories de véhicules que lesHOV,pour «compléter» l’occupation. Ordinaire-ment, le système ne fonctionne qu’avec du télé-péage. Certaines HOT peuvent provenir de voiesà péage, comme les voies de la SR91 (Califor-nie). Ces voies ont été aménagées sur le terre-plein central de l’autoroute, initialement concé-dée à Cofiroute. Le système du value pricingpermet de faire varier le montant du péage demanière dynamique, en fonction de la conges-tion et/ou du montant que l’usager est prêt àpayer, soit en fonction des heures de la journée,soit même en temps réel.

Autres exemples et systèmesDans certains cas, des voies sont réservées (demanière permanente ou non) aux transportscollectifs, bus ou tramway, comme la voie busnon permanente de La Haye aux Pays-Bas, réser-vée aux bus à certaines heures (à l’aide dediodes lumineuses inscrivant le mot «bus» surle sol), ou la voie de bus non permanente duPortugal, activée ponctuellement quand un busest détecté (les usagers sont informés grâce àdes panneaux et à des plots clignotants). Onpeut également citer la voie de bus sur l’auto-route M4 en Angleterre, à l’est de Londres, et lavoie de tramway de Melbourne (Australie) : àl’approche du tramway, interdiction aux piétonset automobilistes de faire certains mouvementssusceptibles de le gêner. D’autres systèmes tech-niques spécifiques intéressants sont à mention-

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Optimiser la circulation et le stationnement

La gestion dynamique des voies : que se passe-t-il à l’étranger ?

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Aux États-Unis, le système des High Occupancy Vehicles

Lanes, voies de circulation à accèsréservé aux véhicules transportant

au moins deux personnes, favorise le covoiturage.

À l’est de Londres, une voie de busest réservée sur la voie rapide de l’autoroute M4.

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ner, comme le séparateur motorisé à Sydney(Australie), qui se présente comme un îlot, maisqui est capable de bouger, de manière à sépa-rer les voies de manière optimale. Un autre sys-tème ingénieux est mis en place à Sydney : lescabines rétractables de péage. Si les voies sontaffectées à l’entrée payante sur le pont, lescabines sont déployées. Dans le cas où on veutse servir du pont pour une manifestation spor-tive (marathon, par exemple), et donc suppri-mer le péage, toutes les cabines sont serrées lesunes contre les autres (un peu à la manière descintres dans une penderie !).

Des systèmes efficaces, adaptables,compatibles ?Ces expérimentations et systèmes sontaujourd’hui plus ou moins aboutis et leur effi-cacité n’est pas toujours prouvée. L’évaluationdes impacts de ces systèmes n’est pas toujoursréalisée ou publiée, ou peu fiable. Par ailleurs,la question du périmètre géographique de l’éva-luation des impacts est un point délicat, encoretrop rarement développé dans les évaluationset qui devrait faire, à chaque fois, l’objet d’unconsensus. Car augmenter la capacité d’unevoie quelques kilomètres avant un point dur,s’il n’y a pas de sortie importante avant ce point,ne fait que déplacer le problème. À l’inverse,un périmètre trop large peut rendre toute éva-luation impossible.La transférabilité des expériences n’est, par ail-leurs, pas évidente : une voie étroite, de 2,50 mde large par exemple, peut fonctionner dansdes pays respectueux des limites de vitesse, etse révéler catastrophique dans d’autres. La com-préhension de l’usager, quand les habitudes nese sont pas encore créées ou quand des utilisa-tions différentes sont envisagées à quelqueskilomètres d’intervalle, ainsi que la variabilitéd’usages dans le temps de vingt-quatre heures,constituent un frein à la mise en œuvre de cessystèmes. En même temps, il faut vérifier quede «mauvaises » habitudes ne se prennent pas,par laxisme ou par incompréhension. L’exploi-tation en mode dégradé, les marges de manœu-vre et les capacités d’adaptation à la suite d’in-cidents plus ou moins graves sur le tronçon, oude situations exceptionnelles bloquant un sec-teur entier (renversement d’un poids lourd,neige…), devraient aussi être systématiquementprises en compte, ce qui est loin d’être toujoursle cas. Par ailleurs, ces systèmes flexibles ne s’ar-ticulent pas forcément bien avec les aménage-ments plus «lourds» et fixes, tels par exemple lessites propres bus avec séparateurs fixes et« infranchissables » prévus par les aménageurs.La solution est-elle donc d’aller vers un espacetotalement modulable : affectation de voiesvariables en fonction de la demande, notam-

ment autour des grandes agglomérations ousur les corridors sujets à de fortes pointes (àl’image des limites de vitesses variables en fonc-tion des conditions météo et du trafic) ? En cesens, les recherches conduites actuellement surla « signalisation horizontale» variable, notam-ment aux Pays-Bas, sont à suivre avec attention,de même que le système de limitation devitesse variable appliqué au Japon sur l’auto-route Kobe-Osaka (plus aucune signalisationfixe de limite de vitesse), ou encore les notionsde « carrefour intelligent » développées enSuède.Les comportements actuels des automobilistesfrançais incitent à une approche moins prag-matique et moins rustique que dans certainspays, comme les États-Unis ; cela nécessitedavantage d’explications et d’informations surle terrain, et pour les gestionnaires plus de pré-cautions dans le maintien de la sécurité quedans l’efficacité de la régulation.Cependant, il y a très certainement des cas enFrance où les voies réversibles, d’une part, lesHOV, d’autre part, apporteraient des solutionsintéressantes à certains problèmes de conges-tion. Mais nous ne sommes probablement pas«mûrs » pour les HOT,et encore moins pour lesHOT avec péage variable.Un élément de succès important, évoqué auxÉtats-Unis, est de ne pas dégrader les conditionsexistantes. Il est notamment conseillé, là-bas, dene pas «prendre» une voie normale existantepour la réserver à certains véhicules. Souve-nons-nous aussi du fait que les seuls essaismenés en France (Paris et Marseille) pour affec-ter, sur autoroute, une voie normale (hors BAU)aux cars et aux taxis n’ont pas tenu longtemps !La nouvelle voie réservée aux autobus et auxtaxis, prévue sur l’autoroute A1, sera donc à exa-miner avec attention.L’analyse des exemples étrangers et des problé-matiques que pose leur adaptabilité montrel’intérêt d’échanger nos réflexions et nos expé-riences pour identifier et maîtriser les meilleurespratiques. Elle montre également la nécessité deprogresser sur le plan de l’évaluation de telssystèmes ou modes d’exploitation, que ce soiten milieu urbain dense, sur les voies rapidespériurbaines ou sur les corridors interurbains,et la nécessité d’une articulation avec les poli-tiques générales, notamment avec les objectifsgénéraux des plans de déplacements, afin devaloriser sur le long terme les aménagementsréalisés.

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Le stationnement payant est, depuis denombreuses années et partout enEurope, une forme de péage très répan-

due et relativement bien acceptée par la popu-lation et les décisionnaires politiques. La moti-vation première a été de réallouer l’espacepublic aux visiteurs des commerces, afin desoutenir le dynamisme économique des cen-tres-ville. Les usagers de stationnement longuedurée (automobilistes habitant ou travaillantdans le quartier) étant « invités » à stationnerailleurs. Le stationnement payant a-t-il égale-ment un effet sur les flux automobiles? Quellessont les autres actions ou politiques complé-mentaires qui peuvent être efficaces?

Rendre payant le stationnement sur voirieLe premier dispositif de stationnement payanta probablement été installé aux États-Unis (desparcmètres sont mentionnés à Oklahoma Citydès 1935). En France, le concept est né à la findes années 1950, et apparu de façon significa-tive autour de 1967. La zone bleue (gratuité dustationnement avec limitation de la durée) exis-tait depuis 1955, mais s’avérait souvent inadap-tée : fraude importante et difficultés à financerla surveillance. Aujourd’hui, la plupart desagglomérations européennes ont mis en placele stationnement payant à des échelles plus oumoins larges, transformant leurs trottoirs en pro-menades plantées… d’horodateurs.Sur le plan des flux automobiles, les effets dustationnement payant se révèlent assez incer-

tains. En favorisant la rotation des véhicules,on a cherché à attirer davantage de visiteurs envoiture, ce qui a priori a engendré une augmen-tation locale de la circulation routière. Pourtant,la réalité n’est pas aussi simple. Des enquêtes«avant-après»(2) montrent que, dans certains cas,la mesure a permis de diminuer les temps derecherche de places, de résorber le stationne-ment interdit, voire de supprimer des places survoirie… sans augmentation du nombre de voi-tures de visiteurs. Le stationnement payant : véri-table aspirateur à voitures ou simple outil pourfreiner le déclin des centres-ville ? Questionardue. La réponse varie probablement d’uncontexte urbain à l’autre. Mais la diminutiondes temps de recherche de places de stationne-ment permet de réduire un peu le trafic routierlocal : de l’ordre de 10 % du trafic total – c’esttoujours ça de pris !En fait, le péage a été jusqu’ici très largementconçu comme un moyen de financer le servicepublic du stationnement (dont le budget estsouvent plombé par de coûteux parkingspublics souterrains), mais rarement comme unoutil de dissuasion de l’accès en voiture. Le tarifd’une heure de stationnement sur voiriedépasse rarement 1,60 € en France (à part dansquelques zones hypercentrales de Paris, Lyonou Bordeaux). Le tarif horaire maximal s’éta-blit même à 1,20 € à Rome et 1 € à Madrid. Pour-

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Optimiser la circulation et le stationnement

Réguler les flux automobiles par le stationnement

Dans le nouveau quartier de ZurichNord, Eschenpark, le nombre de places de stationnement sera volontairement très restreint, et les places non nominatives.

Éric GanteletChristophe Begon(1)

Sareco

Suite à une instauration très médiatisée à Londres, le péageurbain apparaît aujourd’hui comme un outil incontournable de régulationdes flux automobiles. Le dispositif a fait des petits dans de nombreusesagglomérations européennes, mais n’est pas aujourd’hui une solutionretenue en France. Plus discret, le stationnement constitue unevéritable alternative pour la limitationdes déplacements en voiture, qui peutse décliner sous différentes formes.

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(1) Éric Gantelet est directeur général de Sareco, ChristopheBegon est ingénieur d’études à Sareco.(2) Par exemple, Sareco-ville de Paris (1979): Les effets du sta-tionnement payant sur la voie publique – Rue d’Avron, Paris.

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tant, certaines agglomérations du nord de l’Eu-rope ont commencé à pratiquer des tarifs dis-suasifs, y compris pour les visiteurs : pour lais-ser sa voiture garée pendant une heure dans lecentre, il peut en coûter jusqu’à 4 £ à Londres,4,80 € à Amsterdam ou encore 3,50 € à Copen-hague.

Le stationnement payant tel qu’il a été mis enplace au départ présentait un réel inconvénientpour les résidents : ceux qui ne disposaient pasd’alternative à la voirie pour stationner leurvéhicule se voyaient obligés de libérer leurplace tous les matins, les tarifs horaires étantpour eux totalement prohibitifs. Cela poussaitles résidents à aller travailler en voiture, ce quiaugmentait le trafic à l’heure de pointe. Cet effetpervers a été corrigé par la mise en place detarifs préférentiels à destination des résidents,avec des formules de durée assez variables :115 £ par an à Londres-Westminster (réduit à80 £ pour les véhicules peu émetteurs de CO2),environ 260 € par an à Lausanne, 70 € par moisà Rome (soit 840 € par an), 1 € par semaine àBarcelone (soit 52 € par an), 0,50 € par jour àParis (soit environ 115 € par an). La facilitationdu stationnement résidentiel peut aller encoreplus loin, avec la création de voies réservéesaux résidents, par exemple très répandues enAllemagne, en Angleterre ou encore enEspagne. On en rencontre quelques-unes enFrance, mais le dispositif est assez discutablesur le plan juridique.Faciliter le stationnement des visiteurs et desrésidents sur la voirie a impliqué la chasse auxactifs, qui ont fait les frais du stationnementpayant. Ce qui est d’autant plus intéressant quela contrainte porte sur une catégorie d’usagersse déplaçant très majoritairement aux heures depointe. Mais alors, pourquoi constate-t-on tou-jours des embouteillages aux heures de pointe?

Il peut s’agir d’un défaut de surveillance : mal-gré la réglementation, des actifs continuent àstationner sur la voirie, tels les commerçantsdevant leur boutique, qui « s’arrangent » avecles agents de surveillance. Mais surtout, le sta-tionnement payant sur voirie trouve ici seslimites : il épargne les actifs disposant d’unemplacement privatif dans leur entreprise oubénéficiant d’une prise en charge par leuremployeur d’un abonnement en parking public.Et, en France, leur part est fréquemment supé-rieure à 75 % des actifs utilisant leur voiturepour se rendre en zone dense.

Taxer le stationnement dans les parkingspublics ou privésAlors, comment toucher les usagers stationnanthors voirie ? Deux solutions peuvent être envi-sagées : le péage urbain (on y revient…) ou lamise en place d’une taxe sur les parkings privéset/ou publics déjà construits. Existant sous dif-férentes formes aux États-Unis, en Australie et auCanada, les taxes sur le stationnement hors voi-rie semblent avoir été jusqu’ici dédaignées parles agglomérations européennes. Bien souvent,ces taxes sont limitées aux parkings de bureaux(encore une fois, ce sont les actifs qui trin-quent…) situés en centre-ville, les équipementspériphériques tels que les centres commerciauxse trouvant épargnés.En Grande-Bretagne, la loi prévoit la possibilitépour les villes de mettre en place une taxe surles parkings privatifs. Cependant, les collectivi-tés locales ne se sont pas précipitées… Seule laville de Nottingham envisage pour avril 2010 lamise en place d’une workplace parking tax, àniveau de 185 £ par an et par emplacement…,montant amené à doubler d’ici 2015. Pourquoice peu d’engouement pour la taxe parking dansles villes britanniques ? Le péage londonien,très médiatisé, a probablement contribué à relé-guer la taxe parking au second plan. Pourtant,

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Sur le plan des flux automobiles, les effets du stationnement payantse révèlent assez incertains. Dans le meilleur des cas, la réduction du trafic routier localatteindrait 10 % du trafic total.

Variation des taux d’utilisation de la voiture

pour les déplacements domicile-travail en fonction

de la disponibilité d’une place de stationnement

sur le lieu de travail.

Réguler les flux automobiles pour faire de la place aux transportscollectifs peut passer par une taxesur le stationnement privatif.Nottingham, en Grande-Bretagne,devrait mettre en place en 2010une taxe sur le stationnement au lieu de travail.

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celle-ci présente de nombreux avantages :• Elle est moins risquée sur le plan technolo-

gique que le si sophistiqué péage londonien,et peut donc être mise en place d’emblée àgrande échelle.

• Ses charges de fonctionnement sont a priorilimitées. Ainsi, passées les premières années demise en place, elles représenteraient environ5 % des recettes de la taxe parking de Vancou-ver. Le taux attendu à Nottingham est de l’or-dre de 10 % (par comparaison, ce tauxapproche les 50 % pour le péage londonien).

• Des extensions peuvent être assez facilementréalisées par modification du périmètre.

• Par le jeu du zonage, des tarifs différenciés parsecteurs peuvent être pratiqués, sans créerd’usine à gaz pour l’usager.

• Son indexation annuelle n’implique pas l’ac-tualisation lourde de supports de communica-tion à destination du grand public.

• Son acceptabilité est peut-être plus simple àobtenir sur le plan politique, puisqu’elle n’estpas directement perçue auprès du grandpublic.

Cependant, elle présente un inconvénient nonnégligeable : elle n’est pas obligatoirementrépercutée par les employeurs. Et si lesemployés n’acquittent pas leur stationnement,la taxe devient alors pour la collectivité localeune source de financement bienvenue, mais unoutil peu efficace de régulation des flux auto-mobiles. Deux alternatives s’apparentant à unetaxe sur le stationnement sur le lieu de travail etpermettant de résoudre (partiellement) ce pro-blème sont à considérer. Une première, envigueur en Suède, consiste à taxer directementles contribuables, en intégrant dans le calculde l’impôt sur le revenu la mise à dispositiond’une place de parking sur le lieu de travail.Une seconde solution est le cash-out, renduobligatoire en 1992 pour une partie desemployeurs californiens. Le principe est d’obli-

ger l’entreprise à donner le choix à sesemployés entre la prise en charge (totale oupartielle) de la location d’une place de station-nement à proximité du lieu de travail, et le ver-sement mensuel d’une somme d’argent aumoins équivalente. Selon une étude réaliséeauprès de huit entreprises(3), le kilométragedomicile-travail annuel a diminué de 12 % à lasuite de l’instauration du cash-out dans l’entre-prise. Cette diminution est notamment liée audéveloppement du covoiturage. Cependant, lesentreprises disposant de leur propre parking nesont pas concernées par le dispositif.

Limiter le nombre de places de stationnement privatives construitesQuitte à contraindre le stationnement, autantagir à la racine en limitant le nombre de placesconstruites… Et, dans beaucoup de pays euro-péens, c’est plutôt l’inverse qui s’est produitjusqu’ici. Avant, les promoteurs construisaientdes équipements sans forcément prévoir deplaces de stationnement privatives, pour limi-ter les coûts. Les nouveaux utilisateurs pou-vaient stationner sur la voirie ou en parkingpublic : l’addition était réglée par la collectivité !La plupart des pays ont donc mis en place desoutils juridiques permettant aux collectivitéslocales d’exiger du promoteur la constructiond’un nombre minimal de places privatives, cequi a eu plusieurs conséquences négatives. Pre-mièrement, certaines collectivités locales ontfixé des normes planchers égales (voire supé-rieures !) à la demande. Si bien que, dans cer-tains immeubles de logements, les parkings,chroniquement sous-occupés, ne peuvent êtreentretenus de façon satisfaisante par manquede recettes, et les bailleurs en sont réduits àlouer des places aux entreprises du quartier !Deuxièmement, (trop) sensibles aux préoccu-pations de leurs prospects en matière de sta-tionnement, les promoteurs se sont mis àconstruire plus de places que nécessaire avec,par exemple, des parkings de centres commer-ciaux calibrés sur des période «d’hyperpointe».Cette sur-construction de places a créé de véri-tables aspirateurs à voitures, sans même parlerdu surcoût, très lourd pour les opérations immo-bilières.L’identification de ces effets pervers a amenécertains pays ou agglomérations à adopter desmesures correctives. Ainsi, la mairie de Paris afixé à zéro les normes planchers pour lesimmeubles de bureaux. Elle aurait souhaitéaller plus loin en édictant dans son plan locald’urbanisme (PLU) des normes plafonds, maisn’a pas pu le faire car le plan de déplacementsurbains d’Île-de-France (PDUIF) de 2000, éla-

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Optimiser la circulation et le stationnement

Réguler les flux automobiles par le stationnement

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La suppression totale du stationnement privatif serait sans doute efficace pour limiter l’usage de l’automobile.Or, il reste un facteur d’attractivitépour certaines opérations. Pour combien de temps ?

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(3) « Evaluating the effects of parking cash out : eight casestudies », Donald C.Shoup, Transport Policy, vol.4, n° 4, 1997.

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boré avant la loi SRU qui autorise ces normesplafonds, ne prévoyait pas cette possibilité. Vive-ment sa révision ! En Allemagne, les communesont la possibilité de fixer des normes plafonds…qui peuvent être inférieures aux normes plan-chers requises par l’État fédéral. Le promoteurs’acquitte alors de ses obligations minimalesvis-à-vis du Land en versant une compensationfinancière correspondante aux places nonconstruites : de l’argent frais à investir dans lesmodes alternatifs à la voiture. À titre d’exem-ple, la norme plafond pour les bureaux à Franc-fort est de une place pour 350 m2 de Shon(4)

(soit 10 % de la norme plancher imposée par laHesse). Enfin, la Grande-Bretagne a poussé leraisonnement un peu plus loin, allant jusqu’àsupprimer les normes planchers, considérantcelles-ci comme un gaspillage de l’espaceurbain.

Maîtriser totalement le stationnementdans un quartierLa logique, poussée à l’extrême, consisterait àsupprimer totalement le stationnement priva-tif. Autrement dit, pas d’alternative au station-nement sur voirie ou en parking public. Cettesolution, qui peut essentiellement s’envisagerdans de nouveaux quartiers en développement,est probablement la plus aboutie pour régulerles flux automobiles. Elle suppose de mettre enœuvre différents dispositifs évoqués précédem-ment : péage pour le stationnement sur voirie(et, naturellement, en parc public) et totaleabsence d’emplacements privatifs (des normesplafonds égales à zéro, en quelque sorte). Lacollectivité maîtrise alors totalement la res-source stationnement : un dispositif tout à faitmachiavélique du point de vue des automobi-listes. En effet, la collectivité peut disposer demoyens d’actions extrêmement puissants pourlimiter la circulation routière : fixation de quo-tas d’abonnements par catégorie d’usagers etmaîtrise totale de la tarification.Au-delà du simple niveau des tarifs (qui peu-vent aisément évoluer au gré des améliorationsapportées à la desserte dans les modes alter-natifs), on peut donc également imaginer desformules tarifaires innovantes. Tout d’abord,comme cela existe déjà dans certains parkingslyonnais et parisiens, des abonnements à tarifpréférentiel pour les résidents «petits rouleurs» :plus les sorties sont nombreuses, plus le coût del’abonnement est élevé, ce qui incite à utiliserson véhicule avec parcimonie. Autre possibi-lité : le remplacement des abonnements par des« cartes à décompte » pour les actifs ; au-delàd’un coût d’abonnement fixe limité, l’employépaie pour chaque entrée dans le parking. Troi-sième exemple : l’attribution de tarifs préféren-tiels pour les covoitureurs.

Une maîtrise totalement publique du station-nement, c’est le choix qui a été fait pour le quar-tier de Zurich Nord, Eschenpark, en Suisse. En2011, la zone devrait compter 1800 résidents et7 000 employés, et seulement 1 750 places destationnement (un tiers de la demande des pro-moteurs), soit neuf parkings publics à gestion-naire unique desservant le quartier. L’accès àces parkings repose sur l’achat d’un ticket decourte durée pour les occasionnels ou d’unecarte-code pour les abonnés. L’exploitation s’appuie sur le principe d’un usage non affectédes places de stationnement : pas de placesnominatives mais un droit d’accès à un ou plu-sieurs parkings locaux, avec une logique de« forfait à points ». L’automobiliste dispose d’unquota d’entrées-sorties du parking inclus dansson abonnement. En cas de dépassement deson forfait, l’abonné passe au tarif « horaire »,nettement plus élevé. Après la deuxième annéed’ouverture, le gestionnaire des parkings doitpayer des indemnités à la ville en cas de nonrespect des maxima de déplacements prévus.

Des solutions variées à articulerIntervention via le stationnement sur voirie, enparcs publics ou en garages privés, dans desquartiers existants ou en construction, enciblant l’usager directement ou par des voiesdétournées : on le voit, les façons par lesquellesle stationnement peut participer à la régulationdes flux automobiles sont nombreuses. Cesinterventions peuvent et doivent être mises enplace à différents niveaux de décision: souventlocal pour le stationnement payant sur voirieet les prescriptions en matière d’urbanisme, àéchelle intermédiaire (communauté urbaine,département ou région) pour les taxes parking,à échelle nationale pour l’intégration du sta-tionnement dans l’impôt sur le revenu… Com-plémentaire ou alternatif au péage urbain, lestationnement constitue, pour la mise en œuvredes politiques de développement durable, unoutil puissant et multiforme que l’on aurait tortde dédaigner. De ce point de vue, les expé-riences de nos voisins européens peuvent beau-coup nous apporter.Le stationnement a été jusqu’ici très majoritai-rement utilisé pour limiter l’usage de la voiturechez les actifs, ce qui est particulièrement inté-ressant sur le plan de la régulation des flux auxheures de pointe. Cependant, l’effet de serre, lapollution atmosphérique et la raréfaction dupétrole vont probablement nous amener à luifaire jouer un rôle grandissant, en ciblant toutesles catégories d’usagers.

(4) Surface hors œuvre nette.

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Références bibliographiques

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Péages urbains : des modalités adaptées aux objectifs recherchés

Grand Londres : deux péages, deux objectifs distincts

Péages urbains : un instrument pour faire quoi ?

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Les péages urbains peuvent avoir plusieursvisées : maîtrise de la congestion, soucisenvironnementaux et besoins de finance-

ment complémentaires. Les villes norvégiennessont pionnières en matière de péages de finan-cement, Singapour en matière de péage decongestion. Plus récemment, Londres ou encoreMilan ont mis en place des péages à vocationenvironnementale. Aujourd’hui, dans les plusgrandes métropoles, des projets de péage urbainsont à l’étude. Certains gouvernements centrauxproposent même des financements pour le lan-cement d’expérimentations. C’est le cas desÉtats-Unis et du Royaume-uni. Ces péages ont-ils un réel impact ? Quelles sont les leçons àtirer des expériences existantes ?

Diversité des situations, variété des dispositifs pratiquesOn peut définir trois catégories de péage selonce qu’on en attend. Le péage de financementpermet de mieux répartir les besoins de finan-cement des infrastructures de transport entrel’utilisateur qui en bénéficie et le contribuable.Le péage dit «de décongestion» est utilisé pourrendre l’usager conscient du coût externe decongestion(2) qu’il impose à la collectivité. Ildevient, de ce fait, un mécanisme de régulationde la demande par les prix. Le péage dit «envi-ronnemental» est fondé sur l’internalisation descoûts environnementaux et le principe du «pol-lueur-payeur ». Son principal objectif est deréduire les nuisances, en particulier la pollu-tion atmosphérique, en pénalisant l’usage des

modes les plus polluants et en favorisant lereport sur d’autres moyens de transport, plusrespectueux de l’environnement. Les péagespeuvent aussi être différenciés selon trois typesmorphologiques : le péage d’axe ou de réseau,le péage cordon et le péage de zone. Le péaged’axe ou de réseau, dit «d’infrastructure», per-met de faire payer aux usagers l’utilisation d’uneinfrastructure, soit dans le but de la financer,comme pour l’autoroute urbaine A14 auxabords de Paris (1996), soit dans le but d’opti-miser son utilisation pour éviter que les condi-tions de circulation se dégradent, comme sur laSR91 (1995) dans le comté d’Orange aux États-Unis. Dans le cas du péage cordon, l’usager doitpayer pour le franchir. Les trajets ayant leur ori-gine et leur destination à l’intérieur de l’airedélimitée par le cordon ne sont pas tarifiés. Aucontraire, dans le cas du péage de zone, toutvéhicule passible du péage et présent dans lazone doit payer, même s’il n’en franchit pas leslimites. Selon l’objectif recherché, la zone cou-vre la partie du réseau la plus embouteillée(centre-ville, centre d’affaires) ou bien une zonepermettant de maximiser les profits (cas despéages de financement). Pour les péages «envi-ronnementaux », elle se déploie sur des terri-toires plus étendus que pour ceux de déconges-tion (ex : Low Emission Zone à Londres).

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Péages urbains : un instrument pour faire quoi ?

Péages urbains : des modalitésadaptées aux objectifs recherchés

Le péage urbain a des modalitésd’application variables, selon les villes, qui dépendent des objectifs prioritaires recherchés.

Caroline Lemoine(1)

IAU île-de-France

André Lauer, directeur du Certu en 1997, définissait le péage urbaincomme « toute forme quelconque de paiement imposé aux usagers de la route pour pouvoir circuler en certains endroits de certainesparties des zones urbaines ». Il s’agit d’une tarification de l’usagedes véhicules automobiles en ville. En pratique, ses modalitésd’application sont variables et dépendent des objectifs recherchés.

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(1) Caroline Lemoine est ingénieure transport.(2) Le dernier automobiliste qui emprunte la voie impose auxautomobilistes déjà présents un coût supplémentaire repré-senté essentiellement par les pertes de temps.

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Quelques exemples remarquablesLes cas les plus significatifs de péage de finan-cement se trouvent en Norvège. Jusqu’au milieudes années 1980, dans la plupart des pays, lespéages de financement étaient des péages d’in-frastructure. L’argent collecté était affecté à l’ou-vrage en question. Avec l’introduction du pre-mier péage cordon en zone urbaine en Europe,Bergen (1986) a changé la vision de ce type depéages. En faisant appel à une forme de péagedifférente et en élargissant l’assiette, Bergen atrouvé une source complémentaire pour finan-cer non pas un projet, mais tout un plan d’inves-tissements. C’est ainsi que d’autres villes nor-végiennes ont fait appel à ce mécanisme definancement pour leurs infrastructures. En 1990,Oslo a mis en place un péage cordon permet-tant de financer 55 % du Oslo Package, un pro-gramme d’investissements comprenant une cin-quantaine de projets (1 800 M€) sur 18 ans(1990-2007), dont 20 % affectés aux projets detransports en commun. Il a été reconduit en2001 jusqu’en 2012, puis en 2008 jusqu’en 2027,pour financer les Oslo packages 2 et 3 avec unepart plus importante consacrée aux transportsen commun. Pour ce faire, le tarif a été aug-menté et, en 2008, un cordon à péage supplé-mentaire a été mis en place. Trondheim a aussisuivi l’exemple, mais avec un objectif mixte :financer à hauteur de 60 % le TrondheimPackage (266 M€) sur quinze ans (1991-2005),et réguler le trafic aux heures de pointe. Il n’acependant pas été reconduit en 2005.Une des particularités des péages norvégiens,voire même un des facteurs de leur acceptabi-lité, est leur identification à un programme d’in-vestissement établi et une durée de vie limitée.

La marge de bénéfice est importante du faitdes faibles coûts de fonctionnement : de l’or-dre de 20 % à Bergen, 10 % à Oslo et 7 % à Trond -heim. Les niveaux de péage, relativement bas(environ 2 €), et la zone d’application ont étédéfinis de manière à maximiser les recettes etnon à dissuader les usagers, contrairement aupéage de décongestion. D’où les baisses relati-vement faibles de trafic : 3 % à 5 % à Oslo, 6 % à7 % à Bergen ; à l’exception de Trondheim(10 %), du fait des modulations tarifaires (heurede pointe/heure creuse).Alors que la mise en place de péages commesource de financement est une pratique assezrépandue (du moins sous la forme de péaged’infrastructure), celle des péages de décon-gestion ne l’est pas. Même si de grands écono-mistes du début du siècle, inspirés par Dupuit etPigou, ont prôné le péage comme le moyenoptimal pour la régulation de la circulationautomobile, ce n’est qu’en 1975 que Singapourmet en place le premier péage de déconges-tion. Une vignette journalière, permettant decontrôler l’accès au centre d’affaires, a entraînéune baisse du trafic de 45 %. Les coûts d’exploi-tation étaient alors de l’ordre de 25 % desrecettes brutes. En 1998, grâce aux avancéestechnologiques, la vignette a été remplacée parun péage électronique permettant de modulerles tarifs selon les itinéraires et le moment de lajournée, de manière à maintenir une vitesseoptimale sur le réseau. Cette évolution techno-logique a contribué à une baisse supplémen-taire du trafic de 15 % et a permis de diminuerles coûts d’exploitation de 7 %. En pratique, lapremière version du péage singapourien s’ap-parentait à un péage cordon, tandis qu’au-jourd’hui il comporte, en outre, des élémentsd’un péage de réseau.Après Singapour, il faudra attendre février 2003pour qu’une grande métropole européennecomme Londres(3) s’engage sur cette voie et qued’autres suivent son exemple. C’est le cas deStockholm qui a expérimenté durant sept mois,à partir de janvier 2006, un péage cordon avecmodulation tarifaire selon l’heure de la jour-née. Après cette expérimentation réussie et unrésultat favorable au référendum organiséauprès de la population de la ville de Stock-holm (48 % pour, 43 % contre), le péage fut réta-bli le 1er août 2007. Le principal objectif a été lar-gement dépassé : le trafic routier traversant lecordon de péage a diminué de 22 % au lieudes 10 % à 15 % espérés, sans qu’on observepour autant de report de trafic important (+ 1 %)sur les rocades extérieures (non payantes). Lepéage seul est amorti financièrement en quatreans et l’opération globale en six ans. Les coûtsde fonctionnement du péage représentent 29 %des recettes. Même si l’objectif principal n’était

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Péages urbains : un instrument pour faire quoi ?

Péages urbains : des modalités adaptées aux objectifs recherchés

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Après une expérimentation réussieet un résultat favorable au référendum organisé

auprès de la population de la villede Stockholm, le péage cordon

avec modulation tarifaire fut définitivement établi. M

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Jules Dupuit et Arthur Cecil Pigou, deux grands économistesJules Dupuit (1804-1866). Ingénieur des Ponts et Chaussées et économiste, il est considéré comme le précurseur du calcul économique appliqué aux infrastructures de transport au traversde deux concepts, celui de l’utilité et celui du surplus du consommateur. Ses deux articles les plus célèbres sont«De la mesure de l’utilité des travauxpublics » publié en 1844 et «De l’influence des péages sur l’utilité des voies de communication » en 1849.Arthur Cecil Pigou (1877-1959).Économiste britannique, il est considérécomme le pionnier de l’économie du bien-être (Welfare Economics)et le précurseur de l’économie de l’environnement en introduisant le premier ce que l’on appelle aujourd’huile principe pollueur-payeur.

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pas l’amélioration de la qualité de l’air, lesmodèles montrent que les diminutions d’émis-sions de microparticules (PM10), de composésorganiques volatils (COV) et de gaz carbonique(CO2) sont du même ordre que celle de la cir-culation (14 %).La réduction des émissions de polluants atmo-sphériques et de gaz à effet de serre est devenueun enjeu majeur des politiques de transport.De plus, compte tenu des normes européennesen la matière, la mise en place de zones à faibles émissions de polluants se généraliseaujourd’hui. Dans ce contexte, le péage est unoutil destiné à orienter les comportementsd’achat et/ou d’utilisation de la voiture par lesconsommateurs, particuliers ou entreprises,grâce à une tarification sélective, modulée selonle niveau d’émission du véhicule. Parmi les pre-mières expériences, on trouve celles de Lon-dres et de Milan, qui ont démarré début 2008.Le principal effet attendu est une modificationdu parc de véhicules. Sous le nom d’Ecopass etavec le slogan « moins de trafic et plus d’airpur », un péage écologique est en vigueur àMilan depuis le 2 janvier 2008. Il permet de limi-ter l’accès des véhicules les plus polluants aucœur historique de la ville. Le prix de la vignettejournalière varie selon le niveau de pollution duvéhicule, indiqué par sa norme Euro : de la gra-tuité à 10 €. L’objectif principal est de réduire lesémissions des poussières fines (PM10) au seinde la zone : les résultats sur les onze premiersmois montrent que leur concentration baisse de20 % par rapport à la moyenne 2002-2007. Laréduction du nombre de véhicules entrants aété de 12,3 % dans la zone à péage et de l’ordrede 3 % à l’extérieur de celle-ci, ce qui consti-tuait le deuxième objectif recherché. Le troisième objectif est de pouvoir réinvestir lesbénéfices dans le cadre du programme d’in-vestissements en faveur de la mobilité durablecofinancé par le gouvernement, la région lom-barde et la province. Les recettes estimées sontde l’ordre de 24 millions d’euros par an. Tel quele système a été conçu (gratuité pour les véhi-cules les moins polluants et les deux rouesmotorisés), on pourrait craindre, à terme, deseffets indésirables sur la circulation, voire mêmesur les émissions de polluants.

Les leçons de l’expérienceLe péage urbain n’est qu’un outil qui doit êtreutilisé dans le cadre d’une politique globale detransports et qui doit s’apprécier par compa-raison avec des mesures alternatives.Il fonctionne bien comme outil de régulationdu trafic automobile. On constate des baisses dunombre de véhicules entrant dans les zonestarifiées allant de 4 % à 16 %; le cas de Singa-pour reste exceptionnel (45 %).

De ce fait et indépendamment de son objectifprincipal, il permet aussi d’améliorer la qualitéde l’air, grâce à la réduction des émissions depolluants (de l’ordre de 10 % à 15 %). Par ail-leurs, il constitue, une fois les coûts d’investis-sement amortis, une source de financementcomplémentaire : la marge de bénéfice étantd’autant plus importante que les coûts d’ex-ploitation sont faibles. Ces derniers sont varia-bles en fonction des choix technologiques et dela typologie morphologique : de 46 % desrecettes (pour le péage de décongestion à Lon-dres) à 7 % (pour Singapour et Trondheim). Lesévolutions techniques et informatiques peu-vent, à terme, conduire à une diminution deces coûts. Le type morphologique (cordon, zone ou infra-structure) est souvent mis en avant dans les des-criptions d’expériences, mais ce sont l’étenduede la zone sous péage, la règle tarifaire appli-quée avec ses modulations et exemptions éven-tuelles, et le niveau moyen du tarif qui permet-tent au mieux de juger de la cohérence dudispositif avec l’objectif poursuivi. Ainsi, à Lon-dres, deux péages avec des objectifs et desmodalités d’applications différents coexistent.C’est également le cas pour les péages de finan-cement norvégiens, qui combinent, sur un ter-ritoire étendu, tarifs peu élevés et formulesd’abonnements, de manière à maximiser lesrecettes ; ils sont également associés à un pro-gramme d’investissement précis avec durée devie limitée.La mise en place d’un péage urbain est unchoix politique difficile, qui se heurte à des réti-cences et qui demande des compromis. Il estimportant d’en définir correctement les moda-lités d’application pour mieux répondre à l’ob-jectif principal et éviter des effets secondairesnon désirés.

(3) Voir article ci-après «Grand Londres : deux péages, deuxobjectifs distincts », Caroline Lemoine, Iau île-de-France.

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Le péage urbain fonctionne biencomme outil de régulation du traficautomobile. Singapour fait figure de bon élève, avec une baisse du nombre de véhicules entrantdans les zones tarifiées de 45 %.Yo

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Àla différence de la plupart des péagesurbains, ceux de Londres sont despéages de zone. Le péage de déconges-

tion a été mis en place dans l’hypercentre de laville sur une superficie de 21 km2 puis étenduen 2007 à 38 km2. Le péage environnemental,quant à lui, couvre une grande partie du GrandLondres sur plus de 1 500 km2, ce qui en faitaujourd’hui la zone à faibles émissions de pol-luants payante la plus étendue d’Europe.

Un péage de décongestion…Il a été mis en place sur une faible partie duGrand Londres (1,3 % de sa superficie), danslaquelle se trouvent 2,4 % de sa population etplus du quart des emplois londoniens (26 %).Le tarif est très élevé si on le compare aux autrespéages : fixé en 2003 à cinq livres par jour(6,20 €), il a été relevé en 2005 à huit (10 €). Lechoix d’un niveau de tarif élevé a porté sesfruits, puisque le principal objectif a été atteint :une baisse de 16 % du nombre de véhiculesentrants (de 21 % pour les voitures particu-lières), une diminution de 14 % des véhicules-kilomètres parcourus et une augmentation de37 % de la fréquentation des bus (dont la moi-tié attribuée directement au péage). Toutefois,la forte dissuasion du trafic automobile a eudes conséquences négatives sur les revenusnets, sans compter la part importante que repré-sentent les coûts de fonctionnement du sys-tème (46 % des recettes des quatre premièresannées). En fait, les dépenses d’exploitationsont de l’ordre de 90 millions de livres (112 M€)par an en raison du type de péage adopté (exi-geant un contrôle dans toute la zone et pas auxseules entrées), de la difficulté du contexte géo-graphique (beaucoup de points d’entrée) et dela technologie de contrôle choisie. Ainsi, lepéage dégage peu de ressources supplémen-taires : environ 100 millions de livres par an, soit125 millions d’euros après hausse du tarif jour-nalier et déduction faite de l’amortissementdes coûts d’implantation du système (162 mil-lions de livres). Il faut noter que les amendesconstituent environ un tiers de ces recettes. Le19 février 2007, après la réélection de KenLivingstone, la zone de péage a été étendue à

l’ouest, doublant ainsi sa superficie. Cette exten-sion, moins bien acceptée par les Londoniensque ne l’avait été le péage en 2003, a été récem-ment remise en cause par le nouveau maire(Boris Johnson). La zone à péage devrait doncreprendre sa forme initiale après 2010.

… auquel s’ajoute un péageenvironnementalLe péage de décongestion a permis de contri-buer à hauteur de 8 % à la réduction de 13 %des émissions de NOx entre 2002 et 2003, de6 % à la diminution de 16 % des PM10 et à labaisse de 16 % des émissions de CO2 (le resteétant attribuable aux améliorations de perfor-mance environnementale du parc de véhi-cules). Toutefois, depuis le 4 février 2008, Londres dispose en outre d’un péage écolo-gique, la Low Emission Zone (LEZ), avec desobjectifs et des moyens de mise en œuvre dis-tincts. Il s’applique à une grande partie duGrand Londres et ne concerne aujourd’hui queles poids lourds diesel non conformes auxnormes d’émissions Euro III. L’extension auxautres véhicules utilitaires, minibus et grandescamionnettes, prévue pour 2010, a été récem-ment remise en cause. À la différence du péagede décongestion, la LEZ est en application24 h/24, chaque jour de l’année. Malgré uneredevance journalière élevée (200 £ soit 250 €),le revenu annuel n’atteint que 5 à 7 millions delivres (soit 6 à 9 M€). Compte tenu des coûtsd’exploitation de l’ordre de dix millions delivres (12,5 M€), le système est déficitaire horsamortissement des coûts d’implantation(50 millions de livres).En résumé, Londres semble avoir fait des choixcohérents avec les objectifs recherchés : d’uncôté un péage de congestion sur une zone trèsréduite et des tarifs très élevés ne proposantaucun abonnement, et de l’autre un péage envi-ronnemental (LEZ) appliqué à l’ensemble duterritoire du Grand Londres, et modulé selonles caractéristiques d’émissions des véhicules.

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Grand Londres : deux péages, deux objectifs distinctsLondres est pionnière en matière de péage urbain. En février 2003, Ken Livingstone a lancé le premier péage de décongestion dans une grandemétropole démocratique après avoir été élu maire de Londres en 2002, le péage urbain étant une des mesures de son programme électoral. Depuis février 2008, Londres dispose, en outre, d’un péage environnemental.

Caroline Lemoine(1)

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Vers une mobilité durable en Europe

Péages urbains : un instrument pour faire quoi ?

Le péage de décongestion(Congestion Charge) a permis une forte réduction du traficautomobile, une augmentation de la fréquentation des bus et une diminution des émissions de polluants.

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La Low Emission Zonequi s’applique à la quasi-totalité

du Grand Londres est aujourd’hui la zone à faibles émissions

de polluants payante la plus étendue d’Europe.

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(1) Caroline Lemoine est ingénieure transport.

Compte tenu des récentes variations du taux de change, le taux appliqué par convention est 1 £ = 1,25 €

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Bruit des transports : défi commun pour les agglomérations

en Europe

La qualité de l’air dans les métropoles européennes

Changement climatique, un défi pour l’action locale

Réduire les nuisancesliées au transport

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La préoccupation de l’Union européenne(UE) en matière de bruit des transportsest assez récente. Elle date de 1996, avec

la parution du Livre vert de la Commission euro-péenne sur la future politique du bruit. Leconstat était clair : un quart de la population del’Union européenne se plaignait d’être gênépar le bruit, et en premier lieu par celui destransports. Il s’avérait indispensable de comblerles carences en matière de connaissance desnuisances, de compléter certaines législationsnationales, de définir les bases d’une politiquecommunautaire et d’amorcer un rapproche-ment des politiques nationales. Le Parlementeuropéen a approuvé en 1997 les orientationsproposées par le Livre vert et a demandé l’éla-boration rapide d’une directive-cadre : la direc-tive 2002/49/CE était née. Cette directive imposeà toutes les agglomérations européennes deplus de 100 000 habitants une évaluation del’impact territorial sonore de leurs systèmes detransport avec une méthodologie et des indi-cateurs de bruit comparables, comme le Lden,indicateur de bruit pour le jour, le soir et la nuit,associé globalement à la gêne pour la route, lefer et l’aérien. En fonction de l’importance dutrafic, deux volets sont distingués: grandes infra-structures pour les voies les plus fréquentéeset agglomérations pour tout le reste.

Des cartes du bruit et des plans d’actionqui se font attendre…La transposition de la directive par les États quidevaient désigner les autorités compétentespour l’établissement de cartes stratégiques dubruit et de plans d’actions associés n’a, parfois,pas été sans mal. En France, cette transpositiona été effectuée par voie d’ordonnance le12 novembre 2004, la loi de ratification n’ayantété adoptée que le 26 octobre 2005. En Île-de-France, la mise en œuvre de la directive euro-péenne s’avère relativement compliquée,compte tenu du nombre de sources de bruit àprendre en compte, de la taille des territoires etdes populations concernés, et plus encore, dunombre d’acteurs impliqués. Comme ce sontles communes et/ou EPCI à compétences bruit

qui ont été désignés pour traiter le volet agglo-mération, l’État étant impliqué pour le voletgrandes infrastructures, la complexité institu-tionnelle et le nombre d’intercommunalités enÎle-de-France pèsent lourdement. L’échéancede publication des cartes fixée au 30 juin 2007n’a pu être respectée que par les collectivitésqui s’étaient lancées dans l’élaboration des car-tographies du bruit bien avant la transpositionde la directive.

… mais une mobilisation incontestable à propos du bruit des transportsÀ ce jour, l’UE n’a pas encore dressé de bilaneuropéen sur les travaux des agglomérationsurbaines concernées par la première échéance,signe vraisemblablement de la très grandeambition du chantier lancé. Cette directive a,néanmoins, permis de définir un cadre euro-péen en matière de bruit. Elle a ouvert unespace de convergence pour les échanges etles expérimentations au niveau des villes et desrégions européennes. En Île-de-France, un obser-vatoire du bruit – Bruitparif – a été créé fin 2004,pour aider, entre autres, les acteurs franciliensimpliqués dans les travaux de la directive, etpour développer un réseau permanent demesure du bruit (Rumeur). Un grand nombrede projets européens ont été lancés ces der-nières années sur la question du bruit des trans-ports (Smile, Heaven, Imagine, Silence, Harmo-noise, Gipsynoise…). «Silence» est par exempleun projet de recherche sur le bruit des moyensde transport de surface en zone urbaine.Financé par la Commission européenne, il aregroupé, de février 2005 à mai 2008, 42 parte-naires, dont Bruitparif, afin de développer uneméthodologie et une technologie qui permet-tront, à terme, de réduire de 10 dB(A) le bruitdes moyens de transport. Il est composé d’unedizaine de sous-projets : perception de la gênepar les riverains, modélisation, génération et pro-pagation du bruit routier et du bruit ferroviaire,urbanisme, formation et communication…

(1) Erwan Cordeau est environnementaliste.

62

Les Européens placent régulièrement le bruit comme la première des nuisances :en quoi les transports des agglomérations urbaines sont-ils responsables ? Une directive européenne a impulsé, en 2002, un travail, harmonisé à l’échelleeuropéenne, pour tenter de répondre à cette question, et définir pour l’avenir une politique plus contraignante et efficace. Mais les résultats se font attendre…

Erwan Cordeau(1)

IAU île-de-France

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Vers une mobilité durable en Europe

Réduire les nuisances liées au transport

Bruit des transports : défi communpour les agglomérations en Europe

Directive 2002/49/CE sur l’évaluation et la gestion du bruit dans l’environnementLa directive du 25 juin 2002 vise à poserles bases communautaires de lutte contrele bruit des infrastructures de transportsterrestres, des aéroports et des industries.Elle s’applique au bruit perçu par les populations dans les espaces bâtis,dans les parcs publics ou dans d’autreslieux calmes d’une agglomération, dans les zones calmes en rase campagne,à proximité des écoles, aux abords des hôpitaux ainsi que dans d’autresbâtiments et zones sensibles au bruit.Deux des principaux objectifs visés par le texte sont l’établissement d’un cadastre de l’exposition au bruit – les cartographies stratégiques de bruit –et, sur la base de ces cartes, l’adoption de plans d’action en matière de préventionet de réduction du bruit dans l’environnement ainsi que de préservation des zones calmes(PPBE). Les échéances sont différenciéesselon la taille des agglomérations et les trafics liés aux infrastructures.

LexiqueLden (Level day evening night) :

indicateur du niveau de bruit globalpendant la journée, la soirée et la nuit

utilisé pour qualifier la gêne liée à l’exposition au bruit.

EPCI : établissement public de coopérationintercommunale qui désigne

un regroupement de communes ayant pour objet l’élaboration de «projets

communs de développement au sein de périmètres de solidarité ».

Certains EPCI ont pris la compétence de la lutte contre le bruit.

Rumeur (réseau urbain de mesure de l’environnement sonore d’utilité

régionale) : réseau de mesure permanentdu bruit dans l’environnement déployé

prochainement par Bruitparif sur le territoire de l’Île-de-France.

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rance

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La source de pollution la plus importantedans la plupart des métropoles euro-péennes est le trafic automobile. Que ce

soit à Paris, à Londres ou à Berlin, trois polluants,principalement, ne respectent pas les normeseuropéennes : le dioxyde d’azote et les parti-cules (en situation de fond, selon les années,mais systématiquement à proximité du traficroutier), et l’ozone (en situation de fond). Lesproblèmes liés à la densité des trafics et à lacongestion étant récurrents dans toutes lesmétropoles, la surveillance et la gestion de laqualité de l’air constituent un enjeu commun.Le projet européen Citeair permet de comparerquotidiennement la qualité de l’air dans lesvilles participantes et d’informer simplementle public. Il renvoie à des outils, solutions etactions d’amélioration de la qualité de l’air misen place dans chacun des pays ou villes.

Citeair : un projet commun à plusieursdizaines de villes européennesComparer la qualité de l’air des différentes villeseuropéennes est aujourd’hui facilité par le pro-jet Citeair. L’objectif de ce projet européen estd’apporter pour la première fois une informa-tion simple et comparable pour le public surla qualité de l’air dans la quarantaine de villesparticipant au projet. Deux indices ont été éla-borés : l’un près du trafic et l’autre pour la pol-lution de fond. C’est une évolution importantepar rapport à l’indice actuel français (indiceAtmo), qui ne reflète que la pollution de fond.Il s’agit d’indices horaires qui permettent de

visualiser, pour un jour donné, l’évolution de lapollution en fonction de la circulation ou deschangements météorologiques. Ils prennent encompte les principaux polluants : dioxyded’azote, ozone, particules, et dioxyde de soufrepour les villes à forte activité industrielle. Lesindices ont été fixés en fonction des seuils régle-mentaires. Ils varient de très bon (vert), à trèsmauvais (rouge), en passant par le jaune et l’orange. À partir de 100 (rouge), on atteint les seuils d’alerte européens. Par exemple, le6 novembre 2008 à 11 h, la qualité de l’air étaitmédiocre à proximité du trafic de Paris, Berlinou Bristol. Quant à la pollution de fond, elleétait également médiocre à Paris (à cause desparticules PM10), mais bonne à Berlin et trèsbonne à Bristol. Un indice journalier pour laveille a également été mis au point : pour laveille du 6 novembre, on pouvait ainsi consta-ter que Berlin était dans le rouge, à proximité dutrafic, à cause des PM10. Enfin, l’indice annuelCiteair met en lumière les polluants les plusproblématiques au regard des seuils européenset leur évolution d’une année sur l’autre.Citeair a commencé en 2004. Depuis 2006, sesindices sont diffusés sur Internet, et le réseaude villes partenaires ne cesse d’augmenter.Depuis octobre 2008, le projet est entré dansune deuxième phase de développement(2), afin

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Vers une mobilité durable en Europe

Réduire les nuisances liées au transport

La qualité de l’air dans les métropoles européennes

Les aménagements de sites propresbus et tramway figurent parmi les mesures choisies en Île-de-France pour réduire la pollution de l’air liée aux transports.

Arthur de PasKarine Léger(1)

Airparif

Toutes les grandes agglomérations sont concernées par la pollutionatmosphérique. Le projet Citeair(Common information to European air)a ainsi été élaboré pour comparer les niveaux de qualité de l’air de différentes villes à travers l’Europe.Pour améliorer la qualité de l’air,celles-ci mettent en place des programmes d’action,conformément aux obligationsréglementaires. Exemple à Paris, Londres et Berlin.

63

J.-F.

Mau

bous

sin/

RATP

(1) Arthur de Pas est ingénieur communication et KarineLéger est adjointe au directeur en charge de la communica-tion à Airparif.(2) Citeair II, cofinancé par Interreg IVc, qui rassemble onzepartenaires européens, dont Airparif est le chef de file.

LexiqueCommon information to European air

(Citeair) : projet européen financé par Interreg IVc rassemblant

des indicateurs européens permettant une comparaison de la qualité de l’air

quotidienne des villes européennes(www.airqualitynow.eu).

Situation de fond : concentration enpolluants dans l’air ambiant,

éloigné des voies de circulationIndice Atmo : indice utilisé

pour caractériser la qualité de l’air de l’agglomération parisienne grâce

à un chiffre associé à une couleur allant de 1 : très bon (vert) à 10 : très mauvais (rouge).

Nouvelle grille de couleur de l’indice ATMOAirparif

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notamment de mettre en place une prévisionpour ces indices et d’intégrer les PM2,5, confor-mément à la nouvelle directive de 2008.

La surveillance : un préalable à l’actionAfin de répondre aux objectifs et directiveseuropéennes, et pour alimenter le projet com-mun d’information sur la qualité de l’air, lesmétropoles organisent leur propre surveillanceet mettent en place des solutions d’améliorationqui varient de l’une à l’autre.Toute stratégie de surveillance de la qualité del’air doit aujourd’hui combiner trois moyensd’évaluation: stations de mesure; mesures semi-permanentes, campagnes de mesures ponc-tuelles ; modélisation. Paris, Londres et Berlinutilisent un réseau de mesure d’importancevariable en fonction de leur stratégie : le réseaud’Île-de-France compte quarante-sept stations,quatre-vingt-dix-neuf pour celui de l’aggloméra-tion londonienne et quinze pour Berlin. En complément de ces mesures fixes, des mesuressemi-permanentes sur des sites trafic et descampagnes de mesure ponctuelles peuvent êtremenées. Enfin, les outils de modélisation de laqualité de l’air permettent une évaluation entout point du territoire, notamment à proximitédu trafic, la prévision des niveaux de pollutionà venir, et l’évaluation de l’impact des plansd’action mis en place ou envisagés. Ces outilssont donc largement utilisés pour appuyer lesplans de réduction de la pollution.

En Île-de-France : plusieurs outils de réduction de la pollutionLa surveillance de la qualité de l’air en Île-de-France est réalisée par Airparif. L’améliorationde la qualité de l’air s’appuie sur trois outils deplanification définis par la loi sur l’Air de 1996 :le plan de protection de l’atmosphère (PPA),le plan régional de la qualité de l’air (PRQA) etle plan de déplacements urbains (PDU). Deuxétudes menées par Airparif permettent un bilande l’impact sur la qualité de l’air des actionsmises en œuvre à travers ces outils, en Île-de-France pour le PPA et le PRQA, et dans Parispour le plan de déplacements de la ville deParis (PDP).Dans le cadre du premier PPA réalisé en Île-de-France sous l’égide de l’État et approuvé en2006,Airparif a réalisé une évaluation de la qua-lité de l’air dans la région en 2010(3), en particu-lier pour le dioxyde d’azote, dont les niveaux nerespectent pas la réglementation(4). Une baissede 32 % des émissions d’oxydes d’azote entre2000 et 2010 a été constatée en Île-de-France, entenant compte des réductions d’ores et déjàengagées. Les mesures et objectifs prévus par lesPRQA et PPA permettent d’espérer une réduc-tion supplémentaire de près de 10 %. Les actions

du PPA prises en compte dans les calculs com-prennent par exemple la réduction de la valeurdes émissions des usines d’incinération desordures ménagères, la fermeture de certainesusines EDF ou encore l’équipement en brû-leurs faiblement émetteurs d’oxydes d’azotedans l’habitat (chaudières). Néanmoins, le res-pect de la valeur limite de 2010 relative audioxyde d’azote (40 (µg/m3) n’est pas garantipour toutes les configurations météorologiques,en particulier dans le cas d’une année défavo-rable comme 2003. D’autre part, le problèmene paraît pas résolu au voisinage des princi-paux aéroports franciliens, et il est loin d’êtrerésorbé à proximité du trafic routier, où lesniveaux observés dépassent deux fois cettevaleur réglementaires.Dans le cadre du PDP, Airparif a mené uneétude d’évaluation de l’impact sur la qualitéde l’air de l’ensemble des aménagements devoirie effectués dans Paris intra-muros entre2002 et 2007 (dont les sites propres bus et letramway, réduisant la place dévolue à la circu-lation automobile). Une baisse des rejets pri-maires d’oxydes d’azote de 32 % a été évaluéeentre ces deux dates, dont 6 % attribuables àces aménagements de voirie, le reste provenantdu renouvellement du parc automobile entreces deux dates. Une analyse plus détaillée mon-tre que les niveaux de dioxyde d’azote sontsupérieurs aux objectifs de qualité de l’air danstoutes les rues, en 2007 comme en 2002, maisavec une tendance à l’amélioration et des situa-tions contrastées. En effet, les concentrationsont diminué sur 780 km d’axes, et de manièreplus forte sur les axes où le trafic a été réduit parles aménagements. En revanche, des reports detrafic ont été observés, avec une stagnation desconcentrations de dioxyde d’azote sur 100 kmd’axes et même une augmentation sur 20 km.L’étude d’Airparif a également porté sur lesémissions de dioxyde de carbone, gaz à effetde serre qui n’a pas d’impact direct sur la pol-lution locale ni sur la santé. Une baisse de 9 %entre 2002 et 2007 a été évaluée pour ce gaz : - 11 % dus aux aménagements de voirie dansParis, mais + 2 % dus à l’évolution du parc auto-mobile, avec une tendance vers des véhiculesplus lourds et plus consommateurs de carbu-rant.

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Réduire les nuisances liées au transport

La qualité de l’air dans les métropoles européennes

64

LexiqueDioxyde d’azote (NO2) : issu de toutes

les combustions, à hautes températures,de combustibles fossiles (charbon, fuel,

pétrole...). Le secteur des transports est responsable de 52 % des émissions

de monoxyde d’azote qui, rejeté par les pots d’échappement,

est oxydé par l’ozone et se transforme en dioxyde d’azote.

PM10/PM2,5/PM (particules en suspension) : issues du transport

routier, des combustions industrielles, du chauffage domestique

et de l’incinération des déchets. Le principal secteur d’émission des PM10

est le transport routier (36 %), dont les véhicules diesel particuliers

(13 %), suivi de près par l’industrie (33 %).

Airparif (http://www.airparif.asso.fr) :association type loi 1901 en charge,

conformément à la loi sur l’Air de 1996, de la surveillance de la qualité de l’air

en Île-de-France. Comme ses homologuesdes autres régions ou départements

français, Airparif regroupe au sein de son conseil d’administration l’ensemble

des acteurs de la qualité de l’air : l’État, les collectivités locales, les activités

émettrices de polluants et les associationsde consommateurs et de protection

de l’environnement.ERG (Environmental research group) :fait partie du King’s college (université

de Londres) et gère le réseau de surveillance de la qualité de l’air

de Londres.

PRQA (plan régional de la qualité de l’air) : plan fixant les orientations

et recommandations en matière de pollution de l’air, en vue d’atteindre

les objectifs de qualité ; le précédent(2000) avait été réalisé par l’État (Drire Île-de-France). Sa révision

est en cours à la Région.PPA (plan de protection

de l’atmosphère) : plan réalisé par l’État(Drire), qui définit les mesures

réglementaires devant concourir à la réduction de la pollution

(2006 en Île-de-France) et qui porte sur les polluants problématiques au regard

du respect des réglementations.

(3) Évaluation de la qualité de l’air en Île-de-France àl’échéance 2010 et impact du plan de protection de l’atmo-sphère, Airparif, novembre 2004(4) L’année 2000 a été prise comme référence en termes derejets de polluants. Les concentrations de dioxyde d’azoteont été calculées en se basant sur deux années météorolo-giques très différentes : une plutôt dispersive, comme en 2000ou en 2002, et une très défavorable à la dispersion de la pol-lution, comme en 2003.

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Le Grand Londres et son plan de réduction du traficLe réseau de surveillance de la qualité de l’airde Londres est géré par l’Environmental researchgroup (ERG). En matière d’amélioration de laqualité de l’air, Londres a mis en place deuxsystèmes successifs visant, pour le premier(Congestion charging scheme), la limitation dutrafic routier en centre-ville, pour le second,(LEZ : Low Emission Zone), la limitation de lacirculation des véhicules polluants en zoneurbaine. Une étude de l’ERG, à paraître au cou-rant du premier semestre 2009, un bilan desimpacts sur la qualité de l’air des premièresmesures (Congestion Charge). Les impacts dela LEZ seront évalués ultérieurement.Le Congestion charging scheme a été mis enplace à partir de février 2003 avec un quotajournalier de véhicules entrant dans la zonecentrale de 21 km2, entre 7 h et 18h30, tous lesjours de la semaine. Les taxis, bus, motos, véhi-cules pour personnes handicapées, ou véhi-cules de neuf sièges et plus ne sont pas soumisà cette taxe, et les résidents de la zone en sontexonérés à 90 %. Dans cette zone, le trafic rou-tier a diminué de 15 %, la vitesse moyenne aaugmenté de 20 % et les embouteillages ontbaissé de 30 %. Les entrées en voiture dans lazone ont baissé de 30 % et les véhicules utili-taires et poids lourds de 10 %, au bénéfice desbus (+ 20 %), des taxis (+ 13 %). Depuis, le péri-mètre et les tarifs ont été augmentés. La LEZ aété mise en place en février 2008, sur une sur-face de 1500 km2, avec un coût d’entrée prohi-bitif pour les véhicules les plus polluants : lespoids lourds de plus de douze tonnes, lescamions, campings-cars, autocars… qui ne res-pectent pas les normes européennes (Euro 3)doivent désormais payer une taxe de 200 livrespar jour. La LEZ est en fonction permanente,24 h/24 toute l’année. L’objectif est de réduire lesémissions de particules PM10 et de NOx liées autrafic automobile à l’intérieur et, par extension,au-delà des limites du Grand Londres.

Berlin et la zone environnementaleC’est le Land de Berlin qui mesure la qualitéde l’air dans cette région. Comme à Paris et àLondres, les fortes concentrations de polluantsliés au trafic routier dans le centre de Berlinsont problématiques pour la santé des habi-tants. Ainsi, depuis le 1er janvier 2008, les véhi-cules les plus polluants (inférieurs à la normeEuro 2) n’ont plus le droit de circuler dans l’hy-percentre(5). Cette limitation permet de dimi-nuer significativement les concentrations depolluants. La restriction est appliquée en per-manence, indépendamment du niveau de qua-lité de l’air, et aucune limite dans la durée n’estfixée. Les véhicules doivent porter une vignette

délivrée par les autorités permettant de distin-guer les niveaux d’émission des véhicules, surla base des normes d’émission européennes(normes Euro).

Pour les véhicules diesel, l’équipement d’un fil-tre à particules permet d’atteindre le groupesupérieur. Cette sélection est aussi appliquéepour les véhicules étrangers, qui doivent éga-lement disposer d’une vignette pour entrer dansla zone de restriction. Trois vignettes sont actuel-lement autorisées : rouge, jaune, verte, corres-pondant aux groupes 2, 3 et 4. À partir du1er janvier 2010, seules les vertes pourront cir-culer. Lors de cette deuxième phase, les émis-sions de particules liées aux véhicules dieselseront quasiment réduites de moitié dans lazone de restriction. Les particules PM10 et ledioxyde d’azote sont particulièrement visés parcette nouvelle réglementation, étant donné queles valeurs limites deviennent contraignantespour ces deux polluants début 2010, alorsqu’elles sont actuellement dépassées dans denombreuses rues du centre de Berlin. Le traficroutier est la principale source de ces polluantsà Berlin (environ 40 % pour les particules et80 % pour le dioxyde d’azote). Grâce à la zoneenvironnementale, le nombre d’habitants tou-chés par les dépassements de qualité de l’airdevrait diminuer d’environ un quart.

(5) Hundekopf, zone de 88 km2 délimitée par la rocade S-Bahn, correspondant à une population de un million d’ha-bitants environ.

65

La réglementation européenneLa pollution atmosphérique estréglementée en Europe par des directives,et en France par la loi sur l’Air. Une directive cadre de 1996 définit les grandes lignes de surveillance et de la gestion de la qualité de l’airambiant. Quatre directives « filles » ont étépubliées entre 1999 et 2004, fusionnées(à l’exception de la dernière) depuis mai 2008 avec la directive cadre, et complétée d’une réglementation sur les particules fines PM2,5. La réglementation fixe pour la pollutionchronique des valeurs limites, à ne pas dépasser, des valeurs cibles etdes objectifs de qualité (notion française),à atteindre dans une période donnée, et, en cas d’épisode, des seuilsd’information et d’alerte. Les Étatsmembres sont responsables de sa mise en œuvre. Pour les zones dépassant les valeurs limites, ils doivent établir un programme permettant de les atteindredans un certain délai (dont les PPA en France). Ils doivent également en informer la population.

Références bibliographiques

• Étude Airparif pour le PDP (L’évolution de laqualité de l’air à proximité des rues parisiennesentre 2002 et 2007, Airparif, janvier 2007) :Cette étude, portant sur près de 900 km de voies, repose sur les données de traficfournies par la Direction de la voirie deParis, qui ont alimenté les modèlesnumériques d’Airparif. Dans Paris intra-muros, on constate entre 2002 et 2007que l’usage des voitures particulières (- 15 %), des poids lourds (- 11 %) et descars de tourisme (- 11 %) a diminué, auprofit des deux roues motorisés (+ 25 %),des bus (+ 10 %) et des véhicules delivraison (+ 25 %).

Type de vignette selon les niveaux d’émission des véhiculesmoteur groupe vignette

dieselEuro1 1 sansEuro 2 2 rougeEuro 3 3 jauneEuro 4 4 verte

essenceSous norme Euro1 1 sansEuro 1 à 4 4 verte

Source : Berlin - Senatsverwaltung für Gesundheit, Umwelt und Verbraucherschutz

Jojo

659/

Wik

iped

ia Berlin a mis en place une zoneenvironnementale pour limiter la circulation des véhicules les pluspolluants dans le centre. À partir de 2010, seuls ceuxdisposant d’une vignette vertepourront y circuler.

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La Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique(CCNUCC), adoptée en 1992 et entrée en

vigueur en 1994, reconnaît la responsabilité his-torique des pays industrialisés dans le dérègle-ment climatique. Elle exige de leur part qu’ilsélaborent des politiques nationales de réduc-tion de leurs émissions, et de la part de tous lespays qu’ils réalisent un inventaire nationalannuel de leurs rejets de gaz à effet de serre(GES).

Mobilité urbaine et changementclimatique : un contexte partagé en EuropeDécoulant de la CCNUCC, le protocole deKyoto, adopté en 1997 et entré en vigueur seu-lement en 2005, a instauré pour trente-huit paysindustrialisés un objectif global – qui s’avèreaujourd’hui peu ambitieux – de diminution deleurs GES de 5,2 % en 2008-2012(2) par rapportau niveau de 1990. Décliné pour l’Union euro-péenne (UE), cet objectif de réduction est glo-balement porté à 8 %, différencié selon lesquinze États membres: la France se doit ainsi demaintenir le même niveau d’émission qu’en1990. En 2005 par rapport à 1990, l’UE-15 a diminué ses rejets de seulement 1,5 %, et seulsla Suède (- 7,3 % pour un objectif assigné de+ 4 %), la Finlande et la France (respectivement- 2,7 % et - 1,9 % pour un objectif de 0 %), et leRoyaume-Uni (- 14,8 % pour - 12,5 %) attei-gnaient leurs objectifs respectifs.Qui plus est, l’UE-27 s’est engagée en 2007 à

réduire ses émissions de 20 % en 2020 par rap-port à 1990. Or, ses émissions à 27 n’étaient en2005 inférieures que de 8 % par rapport à 1990.Dans la même période, les émissions des trans-ports ont augmenté de 26 %, représentant 22 %du total des émissions de GES de l’UE en 2005(3).Il en est de même pour la France, car si la sta-bilisation des émissions est globalement confir-mée, les transports, qui en 2006 représentaientle premier secteur d’émission de GES du terri-toire avec 26,4 %, présentaient au contraire uneaugmentation de 20 % par rapport à 1990,devant le secteur résidentiel tertiaire(4). Enquinze ans, les déplacements de personnes ontaugmenté de plus de 40 % et, à l’heure actuelle,plus d’un déplacement automobile sur cinq estinférieur à un kilomètre (sur de courtes dis-tances, le moteur thermique fonctionne avec detrès mauvais rendements et engendre plus depollution locale et de GES). Le secteur des trans-ports a été trop longtemps exempt de régulationcoercitive en ce qui concerne la lutte contre leréchauffement climatique de la planète et lesémissions de carbone. Les réglementationseuropéennes, par exemple, ont principalementporté, jusqu’à présent, sur la limitation des émis-

Offrir un cadre favorableLes Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Réduire les nuisances liées au transport

Changement climatique, un défi pour l’action locale

La montée des prix du pétrole devrait avoir un impact certain sur le choix modal de mobilitéquotidienne en Europe, au bénéficedes transports collectifs .

Erwan Cordeau(1)

IAU île-de-France

Veiller à assurer la durabilité des systèmes de transport est aujourd’hui incontournable.L’échelle des agglomérations urbainesen Europe est de plus en plus reconnuecomme pertinente pour l’action. La question des inventaires locaux de gaz à effet de serre pour sensibiliserles acteurs métropolitains et pour partager, guider et suivre les actions à mettre en œuvre, est au cœur des préoccupations des Européens.

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M.-A

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IAU

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(1) Erwan Cordeau est environnementaliste.(2) Fourchette de dates : chaque pays qui a souscrit un objec-tif doit y parvenir «en moyenne» entre 2008 et 2012, ou, plusexactement, si l’on fait la moyenne de ses émissions sur lapériode 2008-2012, cette moyenne doit être inférieure de X %(X % étant l’engagement du pays) à la valeur de 1990.(3) Source : Climat for transport change, EEA, mars 2008.(4) Source : Citepa (Centre interprofessionnel techniqued’études de la pollution atmosphérique), février 2007.

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sions de polluants atmosphériques par des amé-liorations technologiques des véhicules et de laqualité des carburants. Alors qu’environ 12 %des émissions de CO2 dans l’UE proviennentdu carburant consommé par des voitures par-ticulières, les engagements volontaires des fabri-cants automobiles à améliorer l’efficacité desvéhicules n’ont pas généré de gains suffisants.En outre, les taux d’occupation des véhiculesprivés ont progressivement diminué.

En France, des orientations affirméespour l’action localePour stabiliser ses émissions, la France a mis enplace, en janvier 2000, le programme national delutte contre le changement climatique(PNLCC), qui comprend une centaine demesures dans tous les secteurs d’activité. Un«plan climat » en 2004, révisé en 2006, est venule renforcer par un objectif de division par qua-tre des émissions de GES à l’horizon 2050(«objectif facteur 4»), inscrit dans la loi de pro-gramme de 2005 fixant les orientations de lapolitique énergétique française. Parmi lesmesures concernant le secteur transport, peu-vent être cités les plans véhicule propre et bio-carburants, les mesures d’information, commela généralisation en 2006 de l’étiquetage éner-gétique et CO2 à sept classes de A à G pour lesvoitures, et les incitations fiscales comme la fis-calité des biocarburants. Le PNLCC et le plan cli-mat affirment que l’ancrage territorial est l’unedes conditions de la diminution des émissionsnationales de GES, du respect des engagementsde Kyoto et du facteur 4. Ce principe est par-tagé par les grandes agglomérations et les villeseuropéennes, comme en témoigne par exemplela Convention des maires, lancée en jan-vier 2008 par la Commission européenne pourengager des actions visant à l’efficacité éner-gétique. Les documents d’orientation françaisinvitent notamment les collectivités territorialesà agir localement en mettant en place les plansclimat territoriaux pour introduire dans leurspolitiques d’urbanisme et d’aménagement duterritoire, des critères de sobriété énergétique etd’adaptation aux effets des changements cli-matiques. La phase diagnostic – connaissancedes émissions de GES du territoire et de leurstendances d’évolution – constitue la premièrephase avant celle de l’action(5).

Une comparaison européenne encoredifficile des évaluations locales de GESLa comparaison des systèmes de transportsdans les grandes agglomérations européennesà l’heure du développement durable se doitd’aborder l’impact des transports en matièrede consommation d’énergie et d’émissions degaz à effet de serre associées. À partir de don-

nées descriptives des systèmes de transports(données de consommation énergétique, dekilomètres parcourus par mode…), des facteursd’émissions pour les différents GES permettentd’estimer l’impact de ce secteur vis-à-vis duchangement climatique. Encore faut-il que lesapproches retenues pour les inventaires locauxdes émissions de GES soient comparables entreles agglomérations. La base de référence offi-cielle pour les comparaisons reste, pour l’heure,l’inventaire national des émissions de gaz à effetde serre que les États sont tenus, au titre de laCCNUCC, d’établir dans un format précis, avecdes facteurs d’émissions validés, et de mettre àjour. Cet inventaire décrit en particulier les émis-sions de gaz à effet de serre direct : dioxyde decarbone (CO2), méthane (CH4), protoxyded’azote (N2O), hydrofluorocarbures (HFC…),perfluorocarbures (PFC…) et hexafluorure desoufre (SF6). Ils déterminent également le pou-voir de réchauffement global (PRG) qui aide àévaluer l’impact relatif de chacun des polluantssur le changement climatique (il s’agit de l’ef-fet radiatif d’un polluant intégré sur une périodede cent ans, comparativement au CO2 pourlequel le PRG est fixé à un). Pour la France, c’estle Centre interprofessionnel technique d’étudesde la pollution atmosphérique (Citepa) qui a lacharge de mettre à jour l’inventaire national. Sila responsabilité du secteur transport dans lesémissions de GES est déjà lourde (26 % en 2006et plus forte augmentation), elle est sous-évaluée, puisque les déplacements internatio-naux ne sont pas pris en compte (en raison enpartie des difficultés à imputer les émissionsdes activités internationales de transports aérienet maritime à un pays spécifique) et que lesémissions de GES liées à la réalisation d’infra-structures et d’équipements routiers, mais aussià la fabrication des véhicules et à l’extraction etau raffinage des carburants ne sont pas comp-tabilisées. Les chiffres officiels ne reflètent doncque partiellement l’impact réel de ce secteur,puisque la filière transport considérée dans sonensemble serait, selon les experts, à l’origine de30 % à 40 % des émissions françaises(6). La ques-tion du périmètre considéré par ces inventaires– des approches globales comme les approchesdu type analyses de cycles de vie aux approchesterritoriales ou cadastrales – est au cœur de laproblématique de comparaisons et plus encorelorsqu’on se situe à l’échelle locale des grandesagglomérations européennes.

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(5) Source: kit d’information et de formation sur les plans cli-mat-énergie territoriaux : « Comment réduire les émissionsde gaz à effet de serre au niveau local et adapter les territoiresaux effets des changements climatiques», Réseau action cli-mat France, novembre 2008.(6) Notamment J.-M. Jancovici, expert qui a travaillé pourl’Ademe, et est l’inventeur de la méthode Bilan Carbone(TM).

LexiqueConvention cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) :adoptée en 1992, elle a pour objectif de stabiliser les émissions de gaz à effetde serre à un niveau qui ne met pas en péril le climat mondial.Gaz à effet de serre (GES) : gaz présentsdans l’atmosphère terrestre qui interceptent les radiations infrarougesémis par la surface terrestre, engendrantune augmentation de la chaleur. On peutciter la vapeur d’eau (H2O), le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4),l’ozone (O3), le protoxyde d’azote (N2O),les hydrofluorocarbures (HFC), les perfluorocarbures (PFC) et les hexafluorure de soufre (SF6).Protocole de Kyoto : traité fils de la CCNUCC, entré en vigueur en février 2005, il contient des mesuresplus fortes en engageant les payssignataires à des objectifs individuels,légalement contraignants, de réduction ou de limitation de leurs émissions de gaz à effet de serre.UE-15/UE-27 : désigne respectivementl’ensemble des pays qui appartenaient à l’Union européenne entre 1995 et 2004(quinze) et à partir du 1er janvier 2007(vingt-sept).

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L’inventaire des GES d’AirparifSi le Citepa s’exerce, périodiquement, à déclinercet inventaire au niveau régional, pour l’Île-de-France, Airparif, association chargée de la sur-veillance de la qualité de l’air en Île-de-Frances’est aussi vu confier cette mission d’élaborationd’un inventaire territorial des GES. Le dernieren date, portant sur l’année 2005, met en évi-dence que le secteur routier est le deuxièmesecteur contributeur des émissions de gaz àeffet de serre sur le territoire francilien, justederrière le secteur résidentiel et tertiaire. Elless’élèvent à près de 16000 kt équivalent CO2, soitprès de 29 % du total des émissions franci-liennes, en augmentation de plus de 6 % encinq ans, depuis le premier inventaire (14923 kten 2000)(7). À ces estimations issues de modèlesrelativement élaborés, d’autres approchesbasées directement sur le constat des ventesde carburants peuvent apporter des précisionscomplémentaires, compte tenu de la relationdirecte entre énergie et émissions de CO2 pourle secteur transport. Dans le cadre de l’évalua-tion du plan de déplacements urbains d’Île-de-France, l’Institut d’aménagement et d’urba-nisme île-de-France (IAU île-de-France) amontré, en s’appuyant sur les consommationsde carburant observées en Île-de-France entre2000 et 2005, une stabilisation des GES émis surl’ensemble de la région à partir de 2003, recou-vrant deux phénomènes contradictoires : unebaisse des émissions provenant des automo-biles due à la baisse des taux moyens d’émis-sion des véhicules particuliers, et une hausseconcomitante de celles du transport de mar-chandises à cause de la croissance des traficsroutiers.

La méthode Bilan Carbone(TM) de l’AdemeD’une approche différente, la méthode BilanCarbone(TM) a été développée par l’Ademe(Agence de l’environnement et de la maîtrisede l’énergie). Elle s’inscrit dans les préconisa-tions du plan climat 2004 pour appuyer la réa-lisation des plans climat territoriaux. Cetteméthode a été expérimentée en Île-de-France

par l’IAU île-de-France, le conseil régional d’Île-de-France s’étant porté candidat dès 2005 à uneopération lancée par l’Ademe au niveau natio-nal. La méthode a la particularité d’évaluer nonseulement les GES émis sur le territoire franci-lien, mais aussi tous ceux dont la Région estresponsable et qui sont liés à chaque étape dela vie d’un produit. Ainsi, pour les transportsindividuels sont considérés tous les déplace-ments individuels par la route, le fer et l’avion– des résidents mais aussi des visiteurs (tou-ristes…) – autorisés par la présence des infra-structures routières, ferroviaires et aéropor-tuaires d’Île-de-france, ainsi que tous lesdéplacements liés à l’importation, l’exportationet au transit des marchandises assurés par laroute, la voie d’eau, le ferroviaire et l’aérien. Lesordres de grandeur dégagés par cette premièreétude du Bilan Carbone(TM) de la région d’Île-de-France soulignent que le secteur des trans-ports terrestres (près de 31000 kteq CO2) – avecune prédominance des déplacements en voi-ture particulière – se place bien après celui dutransport aérien (52300 kteq CO2, le cumul desdistances origine-destination de tous les mou-vements enregistrés sur les plates-formes aéro-portuaires franciliennes étant considéré), maisdevant tous les autres secteurs d’activité commecelui du secteur résidentiel-tertiaire(27700 kteq CO2). Les émissions des transportsrégionaux (soit transport aérien exclu), avec

Offrir un cadre favorableLes Cahiers n° 150

Réduire les nuisances liées au transport

Changement climatique, un défi pour l’action locale

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(7) Airparif - Inventaire 2005- version 2008.

LexiqueProgramme national de lutte

contre le changement climatique(PNLCC) : programme dont l’objectif

est de permettre à la France de respecterses engagements internationaux

comme l’objectif défini par le protocole de Kyoto.

Plan climat 2004 : premier plan completdéfinissant des actions nationales

de prévention du changement climatique.Plans climat territoriaux (PCT) :orientation du Plan Climat, l’État

encourage les collectivités à réaliser des PCT à tous les échelons de territoires

de compétence et de projet.Objectif Facteur 4 : objectif de division

par quatre des émissions de GES à l’horizon 2050.

Réseau METREX : réseau européen créé en 1996 ayant pour objectifs de favoriser

l’échange de connaissance sur la planification spatiale des métropoles

et sur les problématiques de développement, et de contribuer

à la dimension métropolitaine en matièrede planification au niveau européen.

Programme EUCO2 80/20 : programmeeuropéen initié par METREX,

EU pour Europe, CO2 pour équivalentdioxyde de carbone, 80/50 pour objectif

de 80 % de réduction des gaz à effet de serre à l’horizon 2050.

GRIP (Greenhouse gas RegionalInventory Project) : logiciel mis au point

par l’Université de Tyndall en Ecossepermettant d’évaluer les émissions de GESde l’ensemble d’un territoire, par secteurs

d’activités, et de tester des scénarii pour aider les décideurs.

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jusqu’à 42 % du total hors aérien, représententplus du double des émissions comptabiliséesdans l’inventaire territorial d’Airparif pour cemême secteur. La différence entre les deuxapproches est donc très significative.

L’approche Grip pour une comparaisoneuropéenneForce est de constater que nous manquonsaujourd’hui de références comparables entreles agglomérations européennes en matière dedonnées d’émissions réelles de GES du secteurdes transports, du fait vraisemblablement qu’iln’y a pour l’heure pas d’obligation à établir desinventaires à l’échelle locale. Cependant, desinitiatives se mettent en place, comme celle ini-tiée par le réseau européen Metrex avec le lan-cement, fin 2008 (achèvement prévu en 2012),du programme EUCO2 80/20. Le but est de met-tre à disposition des décideurs un outil simplepermettant d’évaluer l’impact des politiques deréduction des GES qui seront mises en œuvreen milieu urbain. Le logiciel Grip (Greenhousegas Regional Inventory Project) a été mis aupoint par l’université de Tyndall en Écosse et adéjà été testé dans quatre villes ou régions(Glasgow, Bologne, Stockholm, Vénétie), à l’oc-casion d’un programme interrégional (InterMe-trex+). Dans le cadre d’EUCO2, dix-sept métro-poles ou régions utiliseront Grip : Athènes,Bruxelles, Francfort, Glasgow, Hambourg, Helsinki, Ljubljana, Madrid, Naples, Oslo, ParisÎle-de-France, Porto, Rotterdam, Stockholm, Stuttgart, Turin, et Venise. Grip est basé sur laméthodologie des inventaires nationaux desémissions de gaz à effet de serre de la CCNUCCet propose d’intégrer, selon ce cadre prédéfini,les données statistiques descriptives régionalesou locales. Pour les transports, sont considéréesles émissions de la combustion directe deliquides fossiles à base de pétrole (essencemoteur, gasoil pour véhicule diesel, gaz natu-rel, kérosène avion, fuel bateau) et de laconsommation électrique (la plupart du tempscelle du transport ferroviaire). Pour ce quiconcerne l’introduction des données statis-tiques, l’entrée principale est souvent énergé-tique, avec comme garde-fou les définitions etles données de l’inventaire national (facteursd’émission, données de consommation d’éner-gie…) qui sont intégrées pour l’occasion. Dansle cadre du projet InterMetrex+, la comparai-son des résultats des systèmes de transports ter-restres métropolitains rapportés par personne amontré que les émissions de CO2 de la provincede Bologne sont les plus élevées, suivies desrégions de la Vénétie et de Glasgow; celles dela région de Stockholm sont les plus faibles enraison du niveau plus élevé d’utilisation destransports publics.

Si c’est l’une des indications à retenir, c’est plusencore l’échange entre Européens sur les expé-rimentations innovantes, transposables ou non,les bonnes pratiques, les scénarios, les straté-gies à adopter, qui est l’objectif pertinent de ceprojet. Il permettra d’établir plus finement descomparaisons sur l’impact des systèmes detransport des agglomérations européennes vis-à-vis du changement climatique et s’inscrit ainsien toute complémentarité par rapport à d’autresapproches locales ou plus globales comme leBilan Carbone(TM) d’un territoire.

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Les collectivités locales doivent veiller à favoriser une véritable complémentarité des modes doux et des transports collectifs pour une moindre émission de CO2.

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Offrir des servicesattractifs et durables

Offrir aux habitants des métropoles une alternative crédibleà l’utilisation de l’automobile, c’est proposer des servicesvariés, performants et adaptés et, en premier lieu, une offrede transports collectifs capable d’absorber les traficsactuels et à venir. Des adaptations, une augmentation de la capacité des réseaux existants et la construction de nouvelles infrastructures sont nécessaires, mais pas seulement. Développer les transports collectifs ne signifie pas uniquement investir dans des infrastructureslourdes, mais proposer également des services diversifiés.Par ailleurs, tout ne passe pas par les transports collectifs.Doivent s’ajouter des services alternatifs qui se développentet font appel à d’autres modes, de la marche au taxi, en passant par le développement de véhicules moinspolluants. Il faut penser diversité, complémentarité et transversalité, adaptation au plus juste de l’offre aux besoins. Et réfléchir à l’accessibilité de la ville pour tous, aux différentes échelles et de manière intégrée.

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Offrir des services attractifs et durables

Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

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Les Cahiers – Vous êtes vice-présidente de l’EMTA(1), association européenned’autorités métropolitaines de transport.Quelles leçons tirez-vous de la confrontation avec vos homologuesd’autres pays ?Sophie Mougard – L’EMTA est une associationqui permet la mise en commun d’expérienceset l’échange de bonnes pratiques. Nos propossont très libres car nous sommes entre pairs,chargés de dossiers concrets et opérationnels,capables de faire état de nos difficultés, voire denos échecs.Avec mes homologues, nous échan-geons beaucoup, notamment sur la qualité deservice et la façon de la prendre en comptedans les différents contrats. Nous menonsactuellement une analyse sur la façon dont lesautorités organisatrices contractualisent les indi-cateurs et les processus utilisés, le recours ounon à l’allotissement. Nous échangeons sur latélé-billettique et les possibilités offertes par lanouvelle technologie RFID(2).Chaque année, nous mettonsà jour le baromètre(3) quinous permet de nous situerpar rapport aux autres métro-poles et de montrer parexemple aux élus de notreconseil d’administration oùse situent nos marges de manœuvre. L’associationpeut également être une instance de lobbyingefficace vis-à-vis de nos propres États membreset de l’UE sur nos problématiques communes.Nos réseaux sont anciens et nécessitent desinvestissements importants de remise à niveauqui ont été trop longtemps retardés sur l’infra-structure et sur le matériel roulant, et le dévelop-pement d’outils techniques nouveaux. Nousdevons en outre offrir des réseaux accessiblesà tous. Enfin, grâce à une offre qui s’améliore etdes pratiques qui évoluent, nous devons faireface à une saturation de nos réseaux que lahausse du prix du pétrole a accéléré. Face à cedéfi, nous avons un besoin considérable de res-sources. Pour le Grenelle de l’Environnement etavec l’aide de l’IAU, nous l’avons évalué à 27 mil-liards d’euros pour l’ensemble des réseaux fran-ciliens. Les autres métropoles européennes ontles mêmes préoccupations et des besoins com-parables, rapportés à leur population: le plan deLondres se monte à 46 milliards d’euros d’ici2022, celui de Madrid à 26 milliards et celui deBruxelles à 8,5 milliards.

L. C. – L’entrée en vigueur du règlementeuropéen sur les obligations de servicepublic (OSP) dans les transports urbainsest-elle pour le Stif une contrainte ou une opportunité ?S. M. – En exigeant un contrat entre l’autoritéorganisatrice et les entreprises de transport, lerèglement a le mérite d’identifier clairement lerôle d’une autorité organisatrice de transport.C’est, de ce point de vue, une opportunité pourle Stif dont la légitimité avait déjà été renforcéepar la décentralisation qui lui avait donné unconseil d’administration composé essentielle-ment d’élus. Les premiers contrats passés avecla RATP et la SNCF ne datent que de 2001 etnous en sommes aujourd’hui à la troisièmegénération. Grâce au poids et au soutien desélus, nous avons pu affirmer, dans les nouveauxcontrats, des exigences en matière d’offre et dequalité de service, ou encore des objectifs par-tagés avec les entreprises en matière d’investis-

sements. Avec les entre-prises d’Optile(4), nousavons signé nos premierscontrats fin 2006, ce quinous a permis de mettreen place les fondamen-taux qui alimenteront lanégociation des contratsde type 2. Le règlementOSP nous offre une double

opportunité. D’abord, celle de pouvoir vérita-blement contractualiser sous la forme d’unedélégation de service public. Ensuite, celle deréfléchir à la réorganisation des réseaux de busen grande couronne, constitués par l’histoire etaujourd’hui pas nécessairement en parfaitecohérence avec les bassins de déplacement,comme l’ont montré des analyses de l’IAU île-de-France. Nous disposons d’une période detransition de dix ans prévue par le règlementafin de mettre en œuvre ces évolutions. Noussouhaitons que l’État clarifie d’abord le cadrenational et adapte le droit. Il y a des enjeux fortsà une mise en concurrence, encore faut-il quece processus procure des gains. Et des gainspas seulement économiques mais aussi enmatière d’efficacité et de qualité du servicepublic.

Sophie Mougard est directricegénérale du Syndicat des transports d’Île-de-Francedepuis mars 2006. Le Stif,autorité organisatrice des transports d’Île-de-France,est devenu, en vertu de la loi du 13 août 2004, un établissement public suigeneris dirigé par un conseil de 29 membres, comportant15 représentants de la région,5 représentants de la ville de Paris, un représentant de chacun des 7 autresdépartements d’Île-de-France,un représentant de la Chambrerégionale de commerce et d’industrie de Paris-Île-de-France et un représentant élupar les présidents des établissements publics decoopération intercommunale.Son conseil est présidé par le président du conseilrégional. Il fixe les relations à desservir, désigne les exploitants, est responsablede la politique tarifaire, et assure le financement du système des transports en commun en Île-de-France. À ce titre, il verse chaque annéeenviron 3,9 milliards d’eurosaux entreprises exploitantes. Il coordonne par ailleurs les investissements du contratde plan.

Les autorités de transport, garantes d’une offre durable

Interview

STIF

(1) European Metropolitan Transport Authorities.(2) Technologie d’identification par radiofréquence.(3) Directory of public transport in the European metropolitanareas, édité chaque année par l’EMTA.(4) Organisation professionnelle regroupant les entreprisesprivées de transport par autobus d’Île-de-France.

» La mobilité durable supposede faire le lien entreaménagement des territoires,efficacité du système detransport et qualité de vie,dans une agglomération plus dense et plus compacte «.

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L. C. – Que vous inspire le titre de ce cahier « Vers une mobilité durableen Europe» ? Comment les métropolespeuvent-elles répondre aux objectifs de mobilité durable ?S. M. – Ce titre est particulièrement bien choisi.Il est au cœur des préoccupations des grandesagglomérations comme Paris-Île-de-France maisaussi Londres, Madrid, Berlin, etc. La révision duplan de déplacement urbain (PDU) que le STIFengage, nous permettra de fixer un cadre globaltraitant de l’ensemble des déplacements selonles trois dimensions du développement dura-ble : le volet économique avec la question desbesoins et des outils de financement, le voletenvironnemental et l’objectif d’une réductiondes émissions de gaz à effet de serre de 20 %d’ici 2020, et, enfin, le volet social avec l’ambi-tion de servir des logiques d’équilibre et de soli-darité des territoires. Plus largement, la mobi-lité durable suppose de faire le lien entreaménagement des territoires, efficacité du sys-tème de transport et qualité de vie, dans uneagglomération plus dense et plus compacte.Cela suppose que nous soyons capables aussid’évaluer l’efficacité de notre politique. En Île-de-France, il s’agit en premier lieu de répondreà la croissance prévisible du trafic due aux évo-lutions urbaines et aux nouveaux modes devie. Pour cela, il faut s’assurer de l’efficacité duréseau existant, le compléter, notamment pourles déplacements de banlieue à banlieue enmode lourd (Arc Express), le développer engrande couronne sans systématiquement faireappel à des modes lourds, mais en offrant unevéritable alternative à la voiture particulière. Ilfaut répondre de façon diversifiée et adaptée àchaque type de besoin de déplacement. Parexemple, les aménagements entre Les Mureauxet La Défense ou sur l’autoroute A10 à Briis-sous-Forges ont permis, sans investissementsconsidérables, un partage de l’espace plus favo-rable aux transports collectifs. De la mêmemanière, les modes doux doivent être pris encompte, et tout particulièrement la marche, ycompris en dehors de Paris, et de nouvellesmodalités d’utilisation de la voiture envisagées.Par ailleurs, il faut développer les bus à hautniveau de service (BHNS), comme entre Sénartet Corbeil où nous allons engager les travaux dupremier BHNS francilien. Il s’agit également deprendre en compte l’évolution des temps de lavie et c’est ce que nous avons fait par des ren-forcements de l’offre le soir, le week-end et auxheures creuses. Le cadencement des trains pré-voit aussi de renforcer les fréquences tout aulong de la journée. Nous agissons aussi pour ledésenclavement des quartiers en politique dela ville avec des renforts importants sur leslignes de bus. Au total, le Stif a déjà engagé

400 millions d’euros depuis mars 2006 pour ren-forcer l’offre, tous modes confondus. Il doitpoursuivre ses efforts.

L. C. – Diverses instances ont évoquél’idée d’une autorité organisatrice de la mobilité. Quel est votre sentiment à ce sujet ?S. M. – Une autorité organisatrice forte, garantede la mise en œuvre d’une politique de dépla-cements à l’échelle de la région, est une desconditions de la mobilité durable. L’utilité dela révision du PDU est d’inviter l’ensemble denos partenaires à s’engager à nos côtés, nonseulement financièrement, mais au travers deleurs compétences propres et de l’organisationdes déplacements à leur échelle. Nous avonsfait le constat, lors de l’évaluation du PDU de2000, que l’organisation actuelle de la gouver-nance des déplacements pouvait, dans certainscas, être un frein à sa mise en œuvre. Pourautant, il faut éviter des redistributions de com-pétences a priori pouvant ouvrir la porte à desquerelles entre collectivités qui paralyseraientleurs actions. Cette question se reposera avec larévision en cours du PDU et des changementsne pourront être envisagés efficacement que siceux qui sont concernés partagent le constat etla même vision des évolutions.

Propos recueillis par Alain Meyèreet Sophie Laurent

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Réseau structurant de transports collectifs d’Île-de-France (2009)

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Londres, Paris : performance des transports collectifs

Le bus dans l’offre de transportscollectifs : un rôle d’avenir ?

Mobilien : un concept en mal de réalisations

Sites propres bus sur autoroute : une solution d’avenir ?

La desserte des aéroports en transports collectifs : un besoin

Aéroport Berlin-Brandebourg International :

desserte ferrée optimisée

Faire face aux demandes de transports collectifs

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Londres et Paris ont élaboré des contratsd’objectifs de qualité de service afind’améliorer la fréquence et la régularité

des services de train, métro, tramway et bus. ÀLondres, les contrats lient les exploitants auministère des Transports (Department for Trans-port) pour les chemins de fer et à la ville deLondres (Transport for London) pour les trans-ports urbains autres que le métro classique(2),tandis qu’à Paris, c’est entre les exploitants et leSyndicat des transports d’Île-de-France (Stif)que les contrats sont passés. Dans ces deuxmétropoles, les limites de capacité des réseauxsont atteintes (notamment aux heures depointe), ce qui impacte la qualité du serviceoffert. Cette dernière varie selon les métropoles,en fonction du développement des réseaux, deleur structure, des moyens financiers mis enplace pour la maintenance des infrastructures,du renouvellement du matériel roulant et del’adaptation de l’offre à la demande.Les réseauxlourds londoniens souffrent notamment de plusieurs années de sous-investissement parmanque de fonds publics.

Analyser des territoires comparablesLa comparaison de l’offre de transport desréseaux de Londres et de Paris ne peut êtresignificative que si elle concerne des territoiresrelativement semblables en taille, tissu urbain etsituation au sein de la métropole. Or, les entitésadministratives existantes ne sont pas équiva-lentes comme le montre le tableau ci-contre.Nous avons donc délimité par convention au

sein de l’Île-de-France un premier territoires’étendant jusqu’à 20-25 km du centre de Pariscomparable à l’ensemble du Greater London(surface équivalente et couverture de l’essentielde la zone urbaine). À l’instar des profession-nels anglais qui distinguent Inner London(321 km2), cœur dense du Greater London etOuter London (1 258 km2), sa couronne péri-phérique, nous avons délimité des territoireséquivalents en superficie en Île-de-France avecun noyau central de 338 km2, constitué de laville de Paris et de la proche banlieue, et unecouronne périphérique (1241 km2) débordantsensiblement de la limite de la zone 4 de laCarte orange.

Offrir des services attractifs et durables

Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Faire face aux demandes de transports collectifs

Londres, Paris : performance des transports collectifs

Améliorer la régularité des transports collectifs est un objectif partagé par Londreset Paris.

Danièle Navarre(1)

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À la base de l’attractivité des lignes de transport en commun, la fréquenceet la régularité des services sont variables selon les métropoles. À Londres et Paris, elles font l’objet de contrats d’objectifs de qualité de service, difficiles à atteindre en matière de régularité. Comparaisonentre les deux métropoles.

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(1) Danièle Navarre est ingénieure transport.(2) Exploité par Transport for London pour son proprecompte.

Comparaison statistique des territoires

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La superficie de Greater London(1579 km2) représente 15 fois celle de la ville de Paris (105 km2) et celle de l’Île-de-France (12000 km2) 7,6 fois celle de Greater London.En termes de poids démographique et économique, l’agglomération de Parisau sens de l’Insee comptait plus de 9,6 millions d’habitants sur 2723 km2

en 1999, tandis que selon l’Office forNational Statistics, l’aire urbaine de Londres comprenait 8,2 millionsd’habitants répartis sur 1623 km2.

Superficie Population Emplois(km2)

LONDRESInner London 321 2 859 000 2 2168 000

(2001)Outer London 1 258 4 463 000 1 637 000Greater London 1 579 7 322 000 3 805 000

PARISNoyau central 338 4 417 712 2 900 618

(2005)Couronne périphérique 1 241 4 162 901 1 431 040Territoire aggloméré 1 579 8 580 613 4 331 658

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Des structures de réseaux et des niveauxde desserte différentsOn observe une meilleure desserte ferrée ducentre de l’agglomération à Paris, et de l’agglo-mération périphérique à Londres. Les niveauxde desserte sont plus ou moins importants selonles modes de transport collectifs.

Nombre de gares et fréquences des trainsLes gares ferroviaires sont plus nombreuses àLondres qu’à Paris, mais les trains sont plus fré-quents à Paris qu’à Londres, en particulier dansle noyau central. Le réseau de chemins de ferlondonien présente une architecture compli-quée, en particulier au sud de la Tamise, où l’im-brication des lignes dessine une véritable toiled’araignée. Malgré le maillage du réseau, l’ex-ploitation est essentiellement radiale, avec desservices qui convergent vers la dizaine de garesterminus situées dans le centre de Londres.Seule la ligne Thameslink assure une liaisonrégionale nord-sud via le centre de Londres oùelle dessert cinq gares de passage. Le réseau dechemins de fer francilien présente une struc-ture moins complexe, avec des lignes radialesplus indépendantes, dont les cinq lignes duréseau express régional (RER) qui traversentParis de part en part en desservant une tren-taine de gares de passage dans la capitale. Cettedifférence de structure entre les réseaux desdeux métropoles a un impact sur le nombre degares : sur le territoire de Greater London (316gares dont 13 gares terminus dans le centre), oncompte 1,3 fois le nombre de gares du territoireaggloméré francilien. Cet écart en faveur deLondres concerne aussi bien le noyau central(120 gares à Londres et 78 à Paris), que la cou-ronne périphérique (196 gares à Londres et 156à Paris). Les gares de Greater London sont des-servies par 12 compagnies privées principales,

à la fréquence moyenne de 8 trains par heureet par sens durant les heures de pointe, cettefréquence moyenne étant de 11 pour les garesd’Inner London et de 6 pour les gares d’OuterLondon. À Paris, la SNCF et la RATP assurentune meilleure desserte, avec 11 trains par heureet par sens en moyenne durant les heures depointe dans les gares du territoire aggloméré,cette fréquence moyenne étant de 16 trainsdans le noyau central et de 8 trains dans la cou-ronne périphérique, les écarts de desserte entreles deux zones étant plus importants à Parisqu’à Londres.

Desserte métro : stations et fréquencesLa desserte métro est plus fine et plus fréquenteà Paris qu’à Londres, mais concentrée sur lenoyau central. Le réseau de métro classique deLondres, ou Underground (408 km), comprend12 lignes qui se prolongent jusqu’aux limitesde Greater London, à l’exception de la rocadeCircle Line qui maille l’ensemble des lignes à lapériphérie de l’hypercentre londonien. Lamaille de desserte de ce réseau est assez largecar l’interstation moyenne est élevée (1300 m)et il existe des troncs communs entre plusieurslignes et la Circle Line. Le réseau de métro deParis (212 km) comprend 16 lignes qui assu-rent une desserte très fine de la ville de Paris,notamment des onze arrondissements cen-traux, car elles sont toutes indépendantes etl’inter-station moyenne n’est que de 600 m. Parcontre, les lignes ne se prolongent guère au-delà de la proche banlieue, d’où une des-serte concentrée sur le noyau central. De cesdifférences entre les deux réseaux résultent degros écarts de finesse de desserte selon leszones, avec :- un noyau central desservi par 167 stations à

Londres et 297 à Paris,

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Londres, Paris : performance des transports collectifs

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Les zones centrales ou périphériques

respectives comparées diffèrent

en densité de population ou d’emplois :

le noyau central de Paris accueille

1,5 fois plus d’habitants et 1,3 fois plus

d’emplois qu’Inner London tandis

qu’Outer London est 1,07 plus dense

en habitants et 1,14 fois plus dense

en emplois que la couronne

périphérique francilienne

correspondante.

Les territoires comparables

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- une couronne périphérique desservie par 119stations à Londres et seulement 3 à Paris.

Les réseaux présentent également des écartsimportants de fréquences durant les heures depointe. La ramification du métro de Londres,l’existence des troncs communs et la vétustéde la signalisation sur plusieurs lignes font quela fréquence moyenne offerte par ligne et parsens n’est que de 23 trains contre 38 pour lemétro de Paris. La fréquence londonienneatteint cependant 28 à 30 trains sur la plupartdes stations située dans l’hypercentre ou sur laCircle line.

Desserte ferrée (train + métro) aux heures de pointeOn dénombre plus de trains s’arrêtant dans lesgares ferroviaires et les stations de métro deParis que dans celles de Londres durant lesheures de pointe. Ce contraste est lié aux diffé-rences de densité de gares ou de stations et auxécarts de fréquence sur les réseaux avec (ennombre d’arrêts de trains par sens dans les gareset stations de métro) :- 6130 arrêts pour Inner London contre 12560

pour le noyau central de Paris,- 3 050 arrêts pour Outer London contre 1 350

pour la couronne périphérique de Paris.Sur l’ensemble des deux zones, la desserte estmeilleure à Paris : 9120 trains dans Greater Lon-don, 13910 trains pour le territoire aggloméré deParis. La prise en compte des populations etemplois desservis réduit sensiblement l’écartentre les deux agglomérations avec (en nombrede trains pour 100000 habitants + emplois) :- 119 trains dans Inner London contre 172 dans

le noyau central de Paris,- 50 trains dans Outer London contre 24 dans la

couronne périphérique de Paris.Malgré la faible performance pour la couronnepériphérique, les gares et stations de métro duterritoire parisien aggloméré de Paris offrent 1,3fois plus de trains par sens à l’heure depointe pour 100 000 habitants + emplois (108trains) que celles de Greater London (81 trains).

Desserte de surface : tramway et busL’unique réseau de tramway de Londres, le Croy-don Tramlink, est constitué de trois lignes quioffrent un intervalle de 7 à 10 min durant lesheures de pointe. Ces lignes convergent vers untronc commun dans le centre de Croydon, oùl’intervalle est réduit à 3 min. Paris dispose de4 lignes de tramway, plus urbaines que le Croy-don Tramlink, dont le Tram-Train T4 qui offre unniveau de desserte semblable à celui des lignesT1, T2 et T3 durant les heures de pointe (inter-valle de 4 à 6 min), mais une meilleure dessertede soirée (intervalle de 9 à 12 min) que les troisautres lignes pourtant plus proches du centre.

Londres possède en revanche un réseau de busétoffé et fréquent, composé de 617 lignes dont368 lignes à haute fréquence (intervalle moyende 5 à 6 min sans effet de pointe marqué), quisuppléent au manque de finesse de la desserteferrée. L’offre s’élève à 458 millions de kilo -mètres-voitures par an, soit 3 fois l’offre duréseau RATP (153 millions de kilomètres-voi-tures annuels) qui ne compte que 352 lignes,dont 64 desservant la ville de Paris. La fréquen-tation des lignes de bus de la RATP est d’ail-leurs anormalement élevée par rapport à l’offre,l’adaptation de l’offre à la demande se révélantêtre un enjeu majeur.

Régularité : Londres rattrape son retard,Paris s’accrocheLes transports en commun sont plus irréguliersà Londres qu’à Paris mais la situation est envoie d’amélioration: les plans d’investissementsdans les transports mis en place dès l’an 2000par l’État, puis par la ville de Londres (GreaterLondon Authority) intègrent des crédits deremise à niveau des réseaux dont les effets com-mencent à être bénéfiques pour la régularité.

Des trains plus ponctuels à Paris qu’à LondresOn observe une meilleure régularité des che-mins de fer à Paris qu’à Londres. Celle-ci va depair avec une tendance à la dégradation à Pariset une amélioration à Londres. La régularité deschemins de fer londoniens s’améliore progres-sivement au fur et à mesure du renouvellementdes voies suite au déraillement d’Hatfields de2001, et de la modernisation des installationset du matériel roulant ; elle atteint désormais86,1 % pour les heures de pointe et 88,8 % pourla journée en 2007. Les causes d’irrégularitéincombent pour 55 % au gestionnaire d’infra-structures Network Rail (défaillance desréseaux pour 30 %, gestion des réseaux pour30 %, causes externes pour 24 %) et pour 45 %aux exploitants privés (dont 47 % liées au maté-

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Définition de la régularité à Londres et Paris :Les indicateurs de régularité à Paris et à Londres sont identiques pour les réseauxferrés mais diffèrent pour les transportsurbains (métro, tram, bus). La comparaisondoit donc être relativisée.• Régularité fer Londres et Paris :pourcentage des trains ayant moins de 5 min de retard.

• Régularité métro Londres : pourcentage de kilomètres réalisés par rapport au kilométrage prévu.

• Régularité métro Paris : pourcentage de voyageurs attendant moins de 3 min en heure de pointe, 6 min en heurecreuse et 10 min la nuit.

• Régularité tramway et bus Londres :pourcentage de kilomètres réalisés par rapport au kilométrage prévu.

• Régularité tramway et bus Paris :pourcentage de voyageurs n’attendantpas plus de 2 min de plus que l’intervalleprévu.

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riel roulant, les causes externes ne représentantque 10 %). La régularité 2007 des chemins de ferfranciliens est meilleure (90,3 % à 94,7 % selonles heures et les exploitants), mais elle a ten-dance à se dégrader. Cette dégradation traduitune augmentation continue du nombre detrains pour faire face à la croissance du trafic,sur des infrastructures saturées et interdépen-dantes (RER notamment). Pour le RER SNCF etle Transilien, les événements sociaux et la mal-veillance totalisent 47 % des causes en 2008,devant les causes liées aux infrastructures(17 %) et celles liées au matériel roulant (15 %),encore ancien sur certaines lignes.

Métros : Londres s’améliore sensiblementLa régularité du métro londonien s’amélioresensiblement mais reste inférieure à celle dumétro parisien. Le métro de Londres affiche unerégularité de 96 % en 2008,soit un point de plusqu’en 2002, date de démarrage des travaux derénovation engagés dans le cadre d’un partena-riat public-privé (contrats entre Transport forLondon et trois entreprises privées). Les travauxde voies, la modernisation de la signalisation, le renouvellement du matériel roulant déjà réa-lisés sur certaines lignes se traduisent par unelégère amélioration de la régularité globale du

réseau. Les contraintes d’exploitation, liées à lasurcharge et à l’interférence des lignes, comp-tent pour 65 % dans les causes d’irrégularité, lematériel roulant pour 11 % et les causesexternes seulement pour 3 % à 4 %. La régula-rité globale du métro de Paris est de 99 %, maiscertaines lignes (2, 6, 9, 13) présentent des pour-centages de régularité inférieurs de 2 à 3 points.Les incidents techniques (signalisation, appa-reils de voie, matériel roulant) et les incidentsvoyageurs sont les premières causes de l’irré-gularité, celle-ci étant aggravée sur certaineslignes par des contraintes liées à la charge ouà la gestion des terminus.

Réseaux de surface : des divergencestramway/autobusOn observe une meilleure régularité des tram-ways à Paris qu’à Londres, et l’inverse pour lesbus. Le tramway de Croydon présente unebonne régularité (98,7 %), bien qu’inférieure àcelle des tramways T1, T2 et T3 de Paris quiapproche 100 %. La régularité des bus londo-niens s’améliore progressivement : de 95,3 % en2000 à 97,5 % en 2007. Ceci résulte d’une réduc-tion de l’ensemble des causes précitées, cellesliées aux conditions de circulation totalisant1,9 % sur les 2,5 % de kilomètres non réalisés en2007 et les causes externes 0,6 %. À Paris, la régu-larité des bus RATP a gagné 1 à 1,5 pointsdepuis 2004, les valeurs 2008 s’élevant à 95 %pour les lignes figurant au PDU, 95,2 % pour lesautres lignes du réseau de Paris et 96,5 % pourles autres lignes de banlieue. En forte progres-sion de 1995 à 2005, le nombre de kilomètresperdus pour causes externes (problèmes de cir-culation dans la majorité des cas) a été divisépar 1,5 entre 2005 et 2008 sur le réseau de Paris,et n’a été réduit que de 15 % sur le réseau debanlieue (stabilité des causes liées aux condi-tions de circulation). Ces pertes kilométriqueset la dispersion des temps de parcours tradui-sent les très mauvaises conditions de circulationdans l’agglomération centrale.

La comparaison montre des structures deréseaux et des niveaux d’offre comparables surles territoires définis, malgré une hiérarchisa-tion différente, notamment dans l’équilibreréseaux ferrés et métro/offre de surface bus.Quant à la régularité, primordiale pour l’attrac-tivité des réseaux, elle constitue un enjeu fortpour les métropoles, avec des solutions à trou-ver en Île-de-France pour minimiser les causesexternes et pallier aux insuffisances des réseauxlourds (saturation des lignes, vieillissement desinfrastructures), et aux conditions de circula-tion pour les réseaux de surface.

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Références bibliographiques

• Stif, Rapport d’activités 2006.• Ratp, Statistiques annuelles 2007.• Department for Transport, Annual report

2007.• Network Rail, Annual Return 2007.• Transport for London, London Travel

Report 2007.

La régularité des bus londonienss’améliore, notamment,

par de meilleures conditions de circulation. F.

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Il est nécessaire de continuer à accroître l’of-fre de transports collectifs pour apporter unealternative crédible et adaptée aux besoins

de déplacement des personnes. Pour des rai-sons d’ajustement de l’offre à la demande, ainsique de coût, développer des infrastructureslourdes n’est pas envisageable partout.Aujourd’hui, le bus et ses diverses déclinaisonsjouent un rôle plus ou moins central dans l’offre de déplacement selon les métropoles(rôle principal ou complémentaire de des-serte). Dans le Grand Londres, dans la région deBerlin-Brandebourg et dans celle de Madrid parexemple, le rôle et l’organisation de l’offre busprésentent des spécificités qu’il est intéressantd’analyser. Comprendre quel est ce rôle, quellesen sont les raisons, ainsi que les avantages etcontraintes, permet d’éclairer la réflexion surce thème en Île-de-France.

Des compétences réparties différemmentLa place et le rôle du bus dans l’offre de trans-port sont souvent liés au système de gouver-nance et à la manière dont l’offre est définie.Alors que la compétence bus est généralementexercée par l’autorité organisatrice qui plani-fie et gère l’ensemble des transports collectifspour le compte de la ou des collectivités qui lacomposent, comme à Londres, Madrid ou enÎle-de-France, ce n’est pas le cas à Berlin-Bran-debourg. Le Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif) a l’avantage d’être responsable dela définition de l’offre de transports collectifs surl’ensemble des réseaux régionaux (même si les

trains de banlieue et RER partagent avec lestrains grandes lignes ou le fret le réseau ferrénational qui appartient à l’État), Transport forLondon (TfL) a, comme le Consorcio Regionalde Transportes de Madrid (CRTM), la compé-tence sur les bus mais dans ces deux métro-poles, le fer reste de la compétence de l’État, cequi pose des problèmes d’équilibrage de l’offreglobale, et n’est pas sans incidence sur la placeimportante du bus dans ces territoires.Dans la région de Berlin-Brandebourg, la situa-tion est différente car le système est plus décen-tralisé. Le Verkehrsverbund Berlin-Brandebourg(VBB), l’autorité organisatrice, n’a la compé-tence complète, notamment la définition del’offre (infrastructure et réseaux), que pour lesmodes ferroviaires (trains régionaux, S-Bahn), etne gère pour l’ensemble des modes que la tari-fication et la coordination horaire. Ce sont lesdistricts et villes autonomes en Brandebourget la ville de Berlin qui ont la compétence« transports collectifs non ferroviaires » (doncle bus, mais aussi le métro, le tramway, le trolley-bus et les navettes fluviales).

Transporteurs/autorité organisatrice :quelles relations ?Le réseau d’autobus de la ville centre relève engénéral d’un seul exploitant qui est souventl’exploitant historique, de statut public ou para-public(2), lié par contrat à l’autorité responsa-

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Le bus dans l’offre de transportscollectifs : un rôle d’avenir ?

À Berlin, les lignes Métrotram et Metrobus, lignes de tramway et de bus structurantes de surface,complètent depuis 2005 le réseauprincipal (métro et S-Bahn).

Sophie Laurent(1)

IAU île-de-France

Quel rôle peut jouer le bus, à l’heure du développement durable, dans l’ensemble du réseau de transportscollectifs d’une métropole ? Londres,Berlin, Madrid et leur régionmétropolitaine ont des manièresdifférentes de l’intégrer et de l’organiser,souvent héritées de l’histoire. Elles sontriches d’enseignement, qu’il s’agisse de la gouvernance, de la définition de l’offre et de sa place dans l’ensembledes modes, des aménagements… Essai d’analyse comparative.

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Stef

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rg

(1) Sophie Laurent est architecte-urbaniste.(2) De type régie autonome ou EPCI.

LexiqueTfL : Transport for London -

autorité organisatrice des transports du Grand Londres.

VBB : Verkehrsverbund Berlin-Brandenburg.

Autorité pour Berlin-Brandebourg en charge des services ferroviairesrégionaux, de l’intégration tarifaire et de la coordination des horaires

et de l’information.CRTM: Consorcio Regional de Transportes

de Madrid - autorité organisatrice des transports de la Région autonome, de la ville de Madrid et des communes

de la région autonome.Stif : Syndicat des transports

d’Île-de-France - autorité organisatrice des transports de la Région Île-de-France.

BVG : Berliner Verkehrsbetriebe - exploitantdes bus de Berlin, également exploitant du métro, des tramways, des trolleybus

et des navettes fluviales de Berlin.EMT : Empresa Municipal de Transportes -

exploitant des bus de Madrid.

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ble : ainsi à Madrid (EMT), Berlin (BVG), Paris(RATP). Dans le cas de Berlin et de Paris, ilexploite aussi les autres modes de surface et lemétro, ainsi qu’une partie du RER pour Paris. À Madrid, EMT était aussi l’exploitant tram-way/trolleybus jusqu’à ce que ceux-ci soientsupprimés, mais le métro a toujours été exploitépar un opérateur distinct.En dehors de la ville centre, les situations sontvariables: en Brandebourg, la compétence étantaux districts et villes autonomes, les réseaux debus sont distincts et exploités chacun par unopérateur spécifique (mais souvent unique),appartenant la plupart du temps à 100 % au dis-trict ou à la ville autonome correspondante,avec parfois des exploitants privés complémen-taires. En Île-de-France, le réseau de bus exploitépar la RATP s’étend au-delà des limites de Paris,mais il est complété, en particulier en grandecouronne, par les lignes du réseau Optile, auto-risées par le Stif et exploitées par des compa-gnies privées. À Madrid, en dehors des busurbains, l’offre se compose de réseaux commu-naux exploités soit par des entreprisespubliques communales, soit par des exploitantsprivés de bus interurbains, exploités par 33 com-pagnies privées, liés à CRTM par des conces-sions administratives ou DSP(3). Ce contextedevrait évoluer avec l’introduction du règle-ment européen sur les obligations de servicepublic (OSP).Londres constitue un cas à part : chaque lignede bus fait l’objet d’un contrat spécifique (Fra-mework Agreement), attribué par appel d’offrelancé par TfL, sur un cahier des charges trèsprécis, à un exploitant distinct et la plupart dutemps privé, pour cinq ans (extensible à sept).Le contrat stipule une rémunération forfaitaireproposée par l’exploitant pour la réalisation duservice demandé. Tout en reposant sur laconcurrence entre opérateurs, cette organisa-tion permet à TfL de garder la main sur l’équi-libre entre les exploitants et la définition de l’of-fre et des services. D’autant que les exploitantssont soumis depuis 2001 à un système debonus–malus (Quality Incentive Contracts –

QIC) portant essentiellement sur la régularitédes services, qui leur permet, s’ils parviennentà une grande efficacité, d’augmenter demanière significative leur rémunération (jusqu’à+ 15 % de celle prévue au contrat, mais jusqu’à- 10 %, en revanche, si les résultats sont trop endeçà des objectifs). Ce système a permis uneamélioration importante de la qualité de ser-vice, qui a eu des conséquences sur la fréquen-tation du réseau. Une nouvelle génération decontrats (QIC II) est en préparation, qui tiendracompte de critères complémentaires tels que lapropreté du bus ou l’attitude du conducteur, àl’instar du contrat entre le Stif et la RATP.

Place dans l’offre globale : Londres mise sur le busRamenée à la population, et malgré un réseaupeu développé en linéaire de lignes, l’offre busà Londres apparaît largement supérieure à celledes autres métropoles. Les véhicules-km offertspar habitant y sont deux à trois fois plus élevés(61 contre la moitié à Madrid et autour de 25pour Paris-petite couronne et Berlin) et l’inten-sité de l’offre en véhicules-km/km de lignes y estquatre fois plus forte. Alors qu’à Berlin, Madridet Paris, on compte moins (et parfois largementmoins) de voyageurs dans les autobus que dansle métro, c’est l’inverse pour le Grand Londresavec presque autant de voyageurs-km annuelsen bus qu’en métro (respectivement 7 et 7,6 mil-lions) et plus de voyageurs au total (1,8 mil-liard en bus, 1,1 milliard en métro). Commentexpliquer cette singularité? Le réseau ferré lon-donien, très présent mais mal connecté, occupeune place moins importante dans les déplace-ments internes au Grand Londres que le RER àParis ; le réseau de métro est ancien (problèmestechniques), mais aussi sous-dimensionné, lesinterstations longues (1 500 m en moyennecontre 500 m par exemple à Paris). Mais, au-delà de raisons techniques qui tiennent à l’his-toire, ce résultat est aussi le fruit d’une volontépolitique forte et des plans d’action associéssuccessifs qui ont focalisé les investissementssur le réseau de bus. Dès 1994, la définition duLondon Bus Priority Network (LBPN) a permis,par des améliorations de l’offre sur une sélec-tion de lignes, de doubler leur fréquentation endix ans. En 2000, dans le souci d’obtenir unrésultat rapide, l’accent mis sur le réseau de busa été renforcé à travers le document The Mayor’sTransport Strategy, qui prévoyait d’améliorer lacapacité, la ponctualité et les fréquences desbus. Il visait notamment + 40 % d’augmentationdu niveau de service d’ici 2010 et un accès pourtous les Londoniens à un bus en moins de5 min.

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Le bus dans l’offre de transports collectifs : un rôle d’avenir ?

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Éléments de comparaison de l’offre et de la demande bus

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TfL,

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Une comparaison à relativiserIl est toujours délicat de comparer des statistiques entre les réseaux car il est presque impossible de trouverdes zones comparables, a fortiori quatre à quatre. Les éléments de comparaison(tableau) portent sur les entitésadministratives les plus proches possiblesen termes de superficie et de populationsoit : Paris et la Petite Couronne(correspondant aux chiffres Ratp/horsOptile), la ville de Madrid (chiffres EMT), le Grand Londres (chiffres TfL) et la villede Berlin (chiffres BVG).

(3) Délégation de service public.

Paris + petite couronne* Madrid Grand Londres Berlin

Superficie (km2) 762 606 1580 892Nombre d'habitants 6,2 3,1 7,5 3,4Nombre de lignes 346 209 617 193dont lignes de jour 315 171 549 147km de lignes 3794 3209 3730 2230km de lignes (jour)/1000 hab. 0,6 1,0 0,5 0,7Millions de véhicules-km 150,5 99,9 458,0 89,3Véhicules-km/habitant 24,3 32,2 61,1 26,3Véhicules-km/km de lignes 39670 31131 122788 40045Milliards de places-km 10,2 7,8 - 7,1Millions de voyages/an 932,9 481,0 1800,0 403,8Millions de voyages-km/an 2,6 1,8 7,0 1,3

* zone RATP

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Berlin et le secteur Paris-petite couronne en Île-de-France, qui disposent d’une offre ferroviaireabondante et attractive (notamment métro+ RER en Île-de-France et S-Bahn à Berlin), sont,parmi les quatre métropoles considérées, cellesqui font le moins appel au bus. Madrid se trouvedans une situation intermédiaire avec une offrede bus relativement développée, face à uneoffre insuffisante sur le réseau ferré, mais uneoffre métro qui s’est récemment accrue àgrande allure, plaçant ainsi la ville au rang descapitales européennes les mieux dotées enmétro. Le métro est donc le mode majoritaire enmilliards de places-km offertes (27,5 milliards),même si le bus conserve une place importante(7,8 milliards pour les bus urbains, mais 18,8 mil-liards pour l’ensemble des réseaux de bus de laCommunauté autonome). En fréquentation, lemode bus est le plus utilisé en nombre devoyages (802 millions de voyageurs par an).Dans cet ensemble, le réseau de bus de la RATP,qui irrigue le cœur de l’agglomération franci-lienne, présente, par rapport aux autres réseaux,une particularité importante. Le nombre devoyageurs montants lorsqu’un autobus parcourt1 km est en moyenne supérieur à 6, alors qu’iln’est que de 3,5 dans les autres réseaux françaiset toujours inférieur à 5 à Berlin, Londres ouMadrid. Deux interprétations non exclusives decette différence sont possibles, qui ont toutesdeux des implications en termes d’actions : leréseau de bus du cœur de l’Île-de-France estplus sollicité que celui des autres villes, ce quipeut être lié au dimensionnement de l’offre, eton y rencontre une proportion plus grandequ’ailleurs de trajets courts, ce qui peut être liéà l’effet Carte orange ou à l’importance destemps de parcours sur des longues distances.La structure de l’offre peut avoir aussi une inci-dence sur la fréquentation. Par exemple, l’offresur les lignes de bus de Londres est pratique-ment la même tout au long de la journée, avecun intervalle moyen de 5-6 minutes pour leslignes haute fréquence. À Berlin, les lignes hautefréquence (Metrobus) présentent égalementune structure d’offre journalière élevée à peuprès constante. En Île-de-France, les différencesheure de pointe/heure creuse sont plus mar-quées, et les fréquences davantage différen-ciées entre les lignes de bus de Paris et les lignesde bus de banlieue (intervalles de 7 à 9 minutespour les bus de Paris, de 9 à 15 pour la ban-lieue). Les réseaux de bus de Londres et deBerlin présentent par ailleurs l’avantage d’of-frir sur les lignes haute fréquence une ampli-tude importante et même des services 24/24 h,ce qui n’est pas le cas de l’offre francilienne.

Hiérarchisation de l’offre bus : une réussite à BerlinLe réseau de bus de la Communauté autonomede Madrid offre une répartition claire entre lesbus urbains, interurbains et municipaux, distin-gués par un code couleur (rouge pour les busEMT(4), vert pour les bus interurbains). Pourautant, l’offre bus n’est pas véritablement hiérar-chisée. À Londres, le réseau est réparti entredes lignes haute fréquence, au nombre de 368,parmi lesquelles 60 fonctionnent 24h/24, 181lignes basse fréquence et 68 lignes de nuit. Maisil n’y a pas de communication particulière deTfL autour de ces catégories de lignes qui nesont pas « labellisées ». En Île-de-France, la pro-grammation et la mise en œuvre des lignesMobilien, qui avaient pour but initial, dans leplan de déplacements urbains (PDU) de 2000,une amélioration des fréquences et de la régu-larité sur ces lignes, permet une hiérarchisationde l’offre. Mais le Stif ne communique quedepuis peu sur l’« identité » Mobilien.Berlin se distingue sur ce thème avec la mise enplace depuis 2005 des lignes Metrotram etMetrobus. BVG, l’exploitant bus, métro, tramway,navettes fluviales de Berlin a modifié fortementson réseau par la mise en œuvre du programmeBVG 2005 Plus, dont l’objectif était d’optimiserl’offre, par concentration sur les axes princi-paux, afin de réaliser des gains d’exploitation,tout en donnant une meilleure lisibilité auréseau, et de gagner des parts de marché. Ceprogramme portait notamment sur la créationde deux nouveaux «produits » dans l’offre detransports collectifs : les lignes Metrotram etMetrobus, lignes de tramway et de métro struc-

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Ramenée à la population, et malgré un réseau peu développéen linéaire de lignes, l’offre de bus à Londres apparaît largementsupérieure à celle des autresmétropoles.Tf

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(4) Les bus rouges EMT sont peu à peu remplacés par des busbleus à la demande de la municipalité.

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turantes de surface, associées à l’offre princi-pale déjà en place de métro et S-Bahn. L’ajoutdes lignes Metrotram et Metrobus au réseauprincipal a permis de faire passer son taux dedesserte des Berlinois de 73 % à 87 %. Le nou-veau réseau a été élaboré sur la base du réseauexistant en transformant ou modifiant certaineslignes à forte fréquence (intervalle inférieur à10 min) pour en faire des lignes Metro. Le prin-cipe du programme est de définir des famillesde fréquences plutôt qu’une offre spécifique àchaque ligne : famille moins de 10 min sur leréseau principal, Metrotram et Metrobus (à l’in-térieur de laquelle on peut trouver seulementtrois intervalles : 4, 5 et 10 min), famille moins de20 min ou moins de 60 min sur le réseau com-plémentaire. Ces grandes familles donnent uneforte lisibilité à l’offre proposée et facilitent lacommunication. Toutes les lignes Métro s’arrê-tent à tous les arrêts, il n’y a pas de tronçonsexpress. Leur efficacité est liée à la forte densitéde services et aux temps d’attente réduits et legain est dans le cadencement.

Aménagements bus : le rôle majeur des pôles d’échanges à MadridLondres a développé un réseau de lignes prio-ritaires de bus et des gares routières permettantdes correspondances directes bus/métro ouDLR ; Berlin a construit des sites propres busdans le cadre de la mise en place de son pro-gramme de hiérarchisation BVG 2005 Plus ; l’Île-de-France associe le développement duMobilien à des sites propres pour les lignesconcernées. Mais elles ne vont pas aussi loinque la Communauté autonome de Madrid, lamairie de Madrid et le CRTM qui mènent unepolitique de localisation et d’aménagementfonctionnel des pôles d’échanges bus/autresmodes sur leur territoire.

La plupart des pôles d’échanges principauxsont aménagés au débouché des radiales auto-routières et au croisement avec la ligne demétro en rocade n° 6, et généralement d’une ouplusieurs autres lignes de métro. Ils forment ainsiune couronne autour du centre ville de Madrid,offrant un maillage idéal avec le réseau de trans-ports collectifs structurant. Les pôles sont par ail-leurs aménagés en souterrain de manière ver-ticale en un empilement des fonctions : unecouche pour le métro, une couche de com-merces, une ou plusieurs couches de bus etdes accès piétons en surface, permettant descorrespondances rapides et efficaces. Notam-ment avec les bus interurbains et les busurbains. Les bus disposent d’une voie d’accèssouterraine directe au niveau dédié à la gareroutière. Ce type de pôle d’échange apparaîten 1995 avec la conception de la station de busde Moncloa, aménagée en souterrain faute d’es-pace en surface. Ils ont été réalisés dans le cadred’un montage de type partenariat public-privé(PPP) portant sur la conception, la construc-tion et l’exploitation de l’ouvrage pendant vingt-cinq ans (cinquante ans pour les parkings rési-dentiels). La rémunération du groupementd’investisseurs provient de trois sources : facturation de droits d’accès aux opérateurs debus et de cars, baux pour les commerces etbureaux, autres revenus (publicité, etc.), etplaces de stationnement public. Le Ministeriode Fomento (Développement) a par ailleursréalisé une voie réservée aux bus (type BHNS :bus à haut niveau de service) et aux véhiculespratiquant le co-voiturage sur l’A6, autorouteradiale d’accès au centre ville depuis la périphé-rie, donnant directement accès à ce pôle.Aujourd’hui le CRTM envisage de poursuivre àson compte le développement de ce typed’aménagement, qui permet, associé aux pôlesd’échanges, d’optimiser encore l’efficacité de ladesserte bus. La construction de cinq autressites propres menant aux pôles d’échanges deMadrid est prévue d’ici 2011.

Le bus présente l’avantage de se décliner selondifférentes catégories de services afin de répon-dre au mieux aux besoins et aux objectifs,depuis le transport à la demande en zone ruraleau bus à haut niveau de service, approchant, àun coût moindre, les performances d’une lignede tramway. Il offre une palette large pour uncoût réduit et des caractéristiques tout à faitadaptées au contexte actuel de développementdes réseaux et de l’offre. Il occupe une placevariable dans les métropoles dont les approchessont souvent éclairantes pour notre propre ter-ritoire.

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Les Cahiers n° 150

Faire face aux demandes de transports collectifs

Le bus dans l’offre de transports collectifs : un rôle d’avenir ?

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Références bibliographiques

• PRÉDALI Frédérique, LEMOINE Caroline,MESSENET Agnès, La place des bus dans les transports collectifs de Madrid,étude IAU îdF, octobre 2008.

• La place des bus dans les transportscollectifs de Londres, étude IAU îdF à paraître au printemps 2009.

• La place des bus dans les transportscollectifs de Berlin-Brandebourg,étude IAU îdF à paraître au printemps 2009.

Les pôles d’échanges forment

une couronne autour du centre ville

de Madrid, offrant un maillage idéal

avec le réseau de transports collectifs

structurant.

Les pôles d’échanges principaux à Madrid

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Le PDUIF arrêté en 2000 distingue troiscatégories de lignes Mobilien :

- une à Paris et zone dense : lignes du réseaubus armature, qui complète le réseau ferrémagistral ;

- deux en dehors de la zone agglomérée:lignesstructurant les centres anciens et villes nou-velles et liaisons entre pôles urbains (lignesexpress).

149 axes, dont 16 projetés, sont inscrits au PDUIFpour l’ensemble de l’Île-de-France (lignes duréseau armature et lignes pôle à pôle), dont lamise en œuvre est prévue dans le cadre decomités d’axes regroupant l’ensemble desacteurs concernés, y compris les associationsreprésentant les usagers. Les lignes structurantles centres anciens et villes nouvelles sont àdéfinir quant à elles par les comités locaux desplans locaux de déplacements (PLD).Le PDUIF précise le niveau d’offre attendu surces lignes :- amélioration du fonctionnement, avec un

objectif de vitesse commerciale de 18 km/hou un gain de vitesse d’au moins 20 %;

- niveau de fréquence de 10 min (y compris enheures creuses) pour les lignes de Paris et lazone dense, de 30 min pour les lignes de pôleà pôle ;

- fonctionnement tous les jours, avec élargisse-ment de l’amplitude aux horaires du métroinformation aux arrêts et dans les véhicules ;

- accessibilité aux personnes à mobilité réduite(véhicules et points d’arrêts).

Des lenteurs de mise en œuvreLe Stif a mené en 2007 l’évaluation du Plan dedéplacements urbains (PDU), permettant unbilan de la démarche :- en 2008, un peu moins de la moitié des axes

inscrits (56 projets) ont été lancés, seulementun quart validés et 5 % achevés. C’est à Parisque la démarche a le plus avancé : près dutiers des axes inscrits est achevé et la moitiévalidée. En petite couronne, la phase travauxest nettement moins engagée: 14 projets d’axeont vu leur exécution débuter par les premiersaménagements, mais un seul est totalementachevé. En grande couronne, la démarche est

encore moins avancée : moins de 20 % desprojets d’axe y ont été lancés, seuls 6 % descontrats sont validés. Sur les montants pro-grammés pour les projets validés (320 M€,dont 240 M€ financés au titre du PDU), seulela moitié a été consommée ;

- la multiplicité des acteurs et des maîtrisesd’ouvrage complique cette mise en œuvre :les contrats d’axe ont été pilotés par les ges-tionnaires de voirie concernées, soit parcinq types différents de structures ;

- les limites de capacité des rocades de banlieue (voies faiblement dimensionnées)entraînent des difficultés d’insertion des sitespropres ;

- la validation du projet d’axe se fait sur pro-gramme d’aménagement, ce qui permet desajustements en phase de mise en oeuvre, maisreste un engagement moral dont peuvent sedélier ultérieurement les partenaires. Ce futnotamment le cas, avec le désengagement del’État fin 2005, tant sur le pilotage de projetsd’axe, que sur le financement global du PDU,qui a fortement pénalisé l’émergence des pro-jets et conduit le Stif et la Région à reprendrela part financière non assumée par l’État ;

- mais les données d’évaluation, encore insuffi-santes, montrent une réelle efficacité des réa-lisations avec des gains de vitesse intéressantssur les tronçons aménagés (de + 3,5 % à+ 18 %) et une forte croissance de la fréquen-tation (+ 15 % en 3 ans sur la ligne 170).

Alors que peu d’aménagements avaient étéachevés, le Stif a procédé, dès 2006, à un renfor-cement de l’offre, à hauteur de 110 M€ financépar la Région. Cet effort s’est poursuivi en 2008.Au-delà de ce que prévoyait le PDUIF, ce réseauMobilien renforcé bénéficiera d’une identitévisuelle propre, telle que décidé par le conseildu Stif en juillet 2007, dont le déploiement seraprogressif.La mise en révision du PDUIF, engagée en 2008,sera accompagnée d’une relance des actionsopérationnelles, tels les comités d’axes Mobi-lien.

(1) Dominique Rascoll est chargé de projets des plans dedéplacements urbains (PDU), direction de l’exploitation ausein du Syndicat des Transports d’Île-de-France (Stif).

Mobilien : un concept en mal de réalisations

Dominique Rascoll(1)

Stif

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Vers une mobilité durable en Europe

Faire face aux demandes de transports collectifs

La ligne Mobilien n° 91 à Paris, site propre bus à double sens avec piste cyclable, relie notammenttrois gares SNCF.

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FAfin de rendre le bus crédible comme alternative à la voiture, le plan de déplacements urbains de l’Île-de-France (PDUIF) arrêté en 2000 a procédé à une hiérarchisation du réseau d’autobus en créant le réseau principal Mobilien.

LexiquePDUIF : plan de déplacements urbains

d’Île-de-France.En application de la loi sur l’Air

et l’utilisation rationnelle de l’énergie de1996, le PDUIF a été approuvé par arrêté

interpréfectoral le 15 décembre 2000, à l’issue de près de trois ans d’élaborationen concertation avec les différents acteursimpliqués dans la gestion et l’organisation

des transports et des déplacements en Île-de-France. Il a le statut

de document d’urbanisme opposable à des documents de niveau

de compétence inférieur, comme les planslocaux d’urbanisme (PLU) ou les schémas

de cohérence territoriale (Scot). À l’inverse, le PDUIF doit être compatible

avec le schéma directeur de la région Île-de-France (Sdrif).

Le PDUIF, élaboré et mis en œuvre sous l’autorité de l’État, est,

depuis la promulgation en 2004 de la loisur les Responsabilités et libertés locales,

sous la responsabilité du Stif, présidé par le conseil régional.

Stif : Syndicat des transports d’Île-de-France.

PLD : plan locaux de déplacements.© IAU île

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Depuis quelques années, on assiste audéveloppement des sites propres surautoroutes destinés aux autobus, aux

autocars et au covoiturage. Ce type de partagedes voiries rapides s’est particulièrement déve-loppé aux États-Unis, au Canada, en Australie. EnEurope, les voies de bus sur autoroutes ont com-mencé à se développer, notamment à Madrid.En France, sur l’autoroute A48 à l’entrée de Gre-noble, quelques kilomètres de site réservé sonten cours d’expérimentation. Dans tous les cas,le niveau et la qualité du service offerts garan-tissent le succès des projets, qui doivent êtreconçus de manière systémique, la séparationphysique des voies n’étant qu’un des nombreuxéléments d’un projet plus global.

Une idée née en Amérique du Nord…Les États-Unis ont développé, depuis les années1970, le concept des lignes de Bus Rapid Tran-sit (BRT) : des lignes d’autobus très perfor-mantes, assurant un débit important, et circulantsur des voies réservées. Le BRT, généralementimplanté sur autoroute, peut égalementemprunter un site propre indépendant ou descouloirs réservés le long des routes classiques.La labellisation BRT implique que les stations nesoient pas de simples arrêts, mais de vraies sta-tions de transport collectif accessibles, équi-pées de guichets, de quais, de passerelles d’ac-cès, de panneaux d’affichage dynamiques etautres services liés à l’accueil et au confort desusagers. Plusieurs dizaines d’agglomérationsaux États-Unis sont aujourd’hui desservies par

des lignes de BRT. La plupart des sites propres,dont au départ certains étaient de vrais cou-loirs bus avec séparateurs, ont été convertis enHOV lanes (voies réservées aux autobus et auxvéhicules pratiquant le covoiturage). Les véhi-cules, à finition souvent soignée et conforta-bles, peuvent être équipés de systèmes leurdonnant la priorité aux feux.Les voies réservées aux bus sur autoroutes sontsoit des voies de droite dédiées, soit des voiescentrales. Elles peuvent être fixes ou réversi-bles. Les voies de droite dédiées sont aména-gées en plus ou à la place de la bande d’arrêtd’urgence(2). Pour les voies centrales, des sta-tions spécifiques sont nécessaires, avec circula-tions verticales et passerelles et/ou souterrains.Certaines voies réservées sont réversibles, éven-tuellement à contre-sens de la circulation géné-rale, avec ou sans séparateurs physiques, per-mettant d’être en voie réservée dans unedirection le matin et dans le sens inverse le soir.Lorsque l’emprise au sol est large, ce qui estsouvent le cas aux États-Unis, les voies réser-vées aux autobus sont à double sens, à 2x1 voie,ou parfois 2x2 voies, ce qui permet égalementaux covoitureurs de les emprunter (cas desHOV lanes). Dans certains cas, elles sontouvertes aux véhicules s’acquittant d’un péage(HOT lanes), permettant de satisfaire les auto-

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Faire face aux demandes de transports collectifs

Sites propres bus sur autoroute :une solution d’avenir ?

À Ottawa, l’accès aux stations du réseau Transitway se fait par des ouvrages d’art aériens. Les sites propres comportent 2x2 voies, permettant ainsi la desserte de bus express et de services omnibus.

Robert Allio(1)

IAU île-de-France

Si le besoin de se déplacer est universel, les réponses apportéesaux usagers par les autoritésorganisatrices de transports varient d’une métropole à l’autre. Pour répondre aux problématiques de congestion et d’accessibilité aux centres des agglomérations,notamment aux heures de pointe, des systèmes de voies réservées aux bus sur autoroute se développent :des États-Unis à Madrid, quelques exemples.

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(1) Robert Allio est économiste des transports.(2) Dans ce cas, la bande d’arrêt d’urgence est utilisée demanière permanente car son utilisation temporaire, auxheures de pointe par exemple, est jugée dangereuse aux États-Unis.

LexiqueBRT : Bus Rapid Transit :

lignes d’autobus à haut niveau de service,assurant un débit important,

et circulant sur des voies réservées.HOV lanes : High Occupancy Vehicles

lanes : voies réservées aux autobus et aux véhicules pratiquant le covoiturage.

VAO : vía de alta ocupación :HOV espagnoles.

HOT lanes : High Occupancy Tolling Lanes :HOV avec accès à tout véhicule

moyennant paiement.

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mobilistes qui souhaitent bénéficier de cesvoies HOV sans pratiquer le covoiturage.Ces sites sont souvent implantés sur des liai-sons radiales, et peuvent être aménagés sur plu-sieurs dizaines de kilomètres. Ils sont en effettrès souvent destinés à relier les principaux cen-tres d’activité (les Central Business Districts)aux quartiers résidentiels éloignés. Il est remar-quable de constater, dans de nombreux cas, lafréquence très élevée des lignes : des intervallesinférieurs à la minute ne sont pas rares sur dessections d’autoroutes accueillant plusieurslignes sur leur site propre. Plus on se rapprochedu centre-ville, plus le tronc commun comportede lignes. Les fréquences très élevées sont ren-dues possibles soit par l’absence de station, soitpar l’équipement des stations en voies d’évite-ment, permettant ainsi le passage sans arrêt deslignes directes. Pour atteindre ces objectifs derégularité et de fréquence, des investissementsconséquents, en particulier des ouvrages d’artet des stations voyageurs ou des pôlesd’échanges multimodaux en bout de lignes sontnécessaires. C’est particulièrement le cas pourle site propre axial. On trouve des ouvragesaériens «en arête de poisson» (fishbones), uti-lisés dans le cas des sites propres réversibles, ou«en T» lorsqu’il s’agit de faire accéder les auto-bus à un complexe d’échange ou à un centrecommercial important situé à proximité de l’au-toroute. D’autres réalisations utilisent des accèsen souterrain, comprenant des trémies situéesdans l’axe de l’autoroute, et des franchissementssitués sous les chaussées.À Ottawa, le réseau de desserte de l’aggloméra-tion comporte essentiellement trois corridorsd’autobus BRT (réseau Transitway) et une lignede tram-train. Le réseau Transitway fait actuelle-ment environ 60 km. Il existe depuis plus de

vingt ans et transporte plus de 200 000 voya-geurs/jour. Les lignes du réseau Transitway sontinsérées en grande partie sur des sites propressitués dans l’axe d’autoroutes et parfois sur dessites propres indépendants. Dans les deux cas,l’accès aux stations se fait par des ouvragesd’art aériens. Au droit de certaines stations, lessites propres comportent 2x2 voies, permettantainsi la desserte de bus express et de servicesomnibus. Sur d’autres sections, les autobus dece réseau utilisent les bandes d’arrêt d’urgenceconverties en couloirs réservés. Enfin, dans latraversée du centre dense, les autobus utilisentdes couloirs réservés sur la chaussée.À Montréal, l’autoroute urbaine A10 est le sup-port de plusieurs lignes d’autobus. Ces dernièresrelient la banlieue extérieure au centre-ville, oùse trouve leur terminus. La séparation des auto-bus de la circulation générale y est assuréeselon les tronçons, par des couloirs réservés surla bande d’arrêt d’urgence, par un site propreaxial ou encore par un couloir réversible àcontre-sens.

… puis qui s’est diffusée en Europe, et plus particulièrement à MadridDepuis 1995, l’agglomération de Madrid estéquipée d’une autoroute comportant unechaussée réservée aux autobus et aux véhiculespratiquant le covoiturage (VAO – Vía de altaocupación). Cette chaussée est insérée dansl’axe de l’autoroute radiale A6 qui relie les quar-tiers résidentiels situés au nord-ouest de l’ag-glomération et le centre de Madrid. Cette infra-structure est réversible: elle fonctionne le matindans le sens de l’accès vers le centre, et le soiren sens inverse. D’une longueur de 16 km, elleaboutit au sein du complexe multimodal de Moncloa qui est un important nœud

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Les États-Unis, précurseurs en la matière, ont développé depuis les années 1970 le conceptdes lignes de Bus Rapid Transit,circulant sur des voies réservées,notamment sur autoroute.Ch

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d’échanges composé de nombreuses lignesd’autobus et de deux lignes de métro. Sur lesdouze premiers kilomètres situés en périphé-rie, le site propre (sans station) comporte deuxfiles réversibles réservées aux autobus et auxcovoitureurs. La section la plus proche du cen-tre, d’environ 4 km, ne comporte qu’une seulefile réversible, strictement réservée aux auto-bus.

Pendant la période de pointe du matin (7 h-10 h), 478 autobus empruntent le couloir ettransportent plus de 14 000 passagers. L’inter-valle moyen est proche des vingt-cinq secondes.Le gain de temps (15 min sur un trajet en buspar rapport à l’automobile) a fortement encou-ragé le report modal et le développement àgrande échelle de ce système est aujourd’huiprogrammé. Ce sont, à terme, sept voies VAOradiales réversibles qui devraient être réaliséesselon ce modèle. Les stations terminales desvoies de bus sont prévues au sein de complexesd’échanges.

Que retenir de ces bonnes pratiques ?Les exemples évoqués décrivent des lignes debus rapides sur autoroute assurant essentielle-ment des liaisons radiales périphérie/centreville. Le terminus est généralement un pointd’échange unique, maillé avec les transportsferrés urbains. Côté périphérie, les zones subur-baines sont desservies par les lignes empruntant(totalement ou partiellement) le site propre surl’autoroute.

Les concepteurs de projet de ligne d’autobus ensite propre intégral ont souvent recherché laréversibilité de l’aménagement, qui est opéra-tionnel dans le sens périphérie-centre à lapointe du matin, et dans le sens inverse à lapointe du soir. Ce dispositif d’insertion a sur-tout l’avantage appréciable d’être moinsconsommateur d’espace. Les stations sont sou-vent aménagées de manière soignée et qualita-tive: les quais y sont larges, munis d’abris confor-tables et équipés d’informations électroniquesen temps réel, accessibles aux usagers en fau-

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Sites propres bus sur autoroute : une solution d’avenir ?

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CG38

Grenoble expérimente un site proprebus sur la bande d’arrêt d’urgence,

activé quand l’autoroute est saturée.

À Madrid, la voie réservée aux bus

et véhicules pratiquant le covoiturage

permet aux bus d’accéder directement,

par un ouvrage souterrain,

au complexe multimodal de Marchoa.

Les autres véhicules

doivent la quitter avant.

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teuil roulant. L’accès aux véhicules, souvent arti-culés, se fait simultanément par toutes les portesaprès prépaiement sur le quai, afin de limiter letemps d’arrêt en station. Les stations intermé-diaires peuvent aussi servir de point d’entrée àdes lignes utilisant le site propre ou de pointde rabattement pour des lignes secondaires.Enfin, pour inciter le report modal vers les trans-ports en commun, certaines stations sont équi-pées de parcs de rabattement gardiennés pourles véhicules particuliers. En Île-de-France, unparking de rabattement est mis à la dispositiondes usagers qui utilisent la gare autoroutièrede Briis-sous-Forges sur l’autoroute A10. Les sitespropres exclusivement réservés aux transportsen commun peuvent être mal perçus par desautomobilistes souvent ralentis aux heures depointe. C’est pourquoi, aux États-Unis notam-ment, les HOV lanes pour bus et covoitureursont souvent été transformées en HOT lanes,HOV ouvertes aux véhicules ayant acquitté unpéage. Mais cette cohabitation peut devenirgênante à l’approche des centres ville, la solu-tion est alors de prévoir, à l’instar de Madrid, unouvrage de sortie pour les véhicules particu-liers.

En France, deux expériences à suivre : Grenoble et Briis-sous-ForgesDepuis 2002, le conseil général de l’Isère a misen place un réseau de lignes express, dont laTransisère Voiron-Grenoble-Crolles. Celle-ciemprunte depuis septembre 2007 la bande d’ar-rêt d’urgence de l’A48, appelée VSP (voie spé-cialisée partagée). Elle est activée quand l’auto-route est saturée, ouverte aux lignes régulièresautorisées sur un tronçon de 4,2 km. La pre-mière phase d’expérimentation d’un an, réaliséedans des conditions de sécurité strictes défi-nies par le ministère des Transports, est prolon-gée en 2009. Cela permettra d’intégrer des amé-liorations au dispositif, puis de tirer le bilansocio-économique de l’opération. Les haussesde fréquentation de cette ligne express (+ 90 %de progression par an depuis 2004) encoura-gent le conseil général, qui envisage d’utiliser cedispositif, pour le déploiement du « RER rou-tier », sur les trois autoroutes d’accès à l’agglo-mération grenobloise : A48 depuis le péage deVoreppe, A41 depuis celui de Crolles, et A51 ausud. Depuis le mois de mai 2006, en Essonne, les usa-gers des lignes 91-03 Dourdan-Massy et 91-02Dourdan-Courtabœuf-Orsay peuvent prendreleur bus au bord de l’autoroute A10 à hauteurde Briis-sous-Forges. L’ouverture d’une gare rou-tière sur une autoroute est une première enEurope. Et bien qu’il n’y ait pas de files réser-vées, ces lignes express font gagner beaucoupde temps aux anciens automobilistes (30 min

sur un trajet Briis-sous-Forges-Massy) quiempruntaient auparavant le réseau départe-mental faute d’accès à l’A10. Cette réalisationconnaît un franc succès et l’extension récentedu parc-relais l’a démontré. Elle a d’ailleurs étéprimée par Ville et transport,magazine spécia-lisé, en 2008.

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La gare routière, créée en 2006 sur l’A10 à Briis-sous-Forges(Essonne), rencontre un francsuccès.

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Les aéroports internationaux sont de fortsgénérateurs de trafic au sein des grandesmétropoles. À l’importante circulation

aérienne s’ajoutent en effet les transports desurface liés au fonctionnement de la plate-forme aéroportuaire: acheminement des passa-gers aériens et du fret, livraisons des entreprises,déplacements des employés et des visiteurs. Lemode individuel étant majoritaire, le fonction-nement des aéroports contribue à la saturationdes réseaux routiers d’accès et génère une pol-lution environnementale qui s’ajoute à celledu transport aérien. Des mesures effectuéesauprès des aéroports de Londres-Gatwick etStockholm-Arlanda montrent que 50 % du CO2

émis par les deux plate-formes provient destransports de surface. D’où la nécessité de favo-riser l’usage des transports collectifs, notam-ment par les passagers aériens, en améliorantl’accessiblité des aéroports par ce mode.

Les passagers aériens : une clientèle spécifiqueLe comportement des passagers aériens se dis-tingue de celui des utilisateurs réguliers destransports en commun urbains. Ils privilégienten effet la fiabilité du transport, le côté pratique(les changements et les longs parcours à piedsont mal perçus, surtout avec des bagages) et leconfort dans les véhicules. Le mode de trans-port utilisé pour accéder aux aéroports diffèrepar ailleurs selon la nature du voyage et le lieude résidence du voyageur. C’est ainsi que,d’après le Rapport 4 de l’Airport Cooperative

Research Program:- les résidents affaires utilisent plutôt les trans-

ports en commun, car ils connaissent bien lesmodes d’accès à l’aéroport, ont peu debagages, et sont très sensibles à la fiabilité dutransport, d’autant que le parcours a souventlieu durant les heures de pointe ;

- les non résidents affaires préfèrent prendreun taxi ou louer une voiture car ils se rendentdans des endroits particuliers (hôtel, centrede congrès) et privilégient la souplesse dumode de transport ;

- les résidents non affaires utilisent plutôt la voi-ture particulière (dépose notamment), car ilssont munis de bagages, sont plus sensibles aucoût du transport que les passagers voyageantpour affaires et sont moins familiarisés avecles modes d’accès en transport en commun àl’aéroport ;

- les non résidents non affaires utilisent plutôtle taxi (ou la dépose par des amis ou lafamille), car ils connaissent mal la région et lesréseaux de transport desservant l’aéroport.

L’amélioration de l’accessibilité en transports encommun aux aéroports nécessite ainsi d’iden-tifier au préalable les différents segments declientèle afin d’adapter au mieux l’offre à lademande.

Offrir des services attractifs et durables

Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Faire face aux demandes de transports collectifs

La desserte des aéroports en transports collectifs : un besoin

Une bonne desserte par les transports collectifspermettrait d’agir sur la saturationroutière des accès et l’impactenvironnemental du trafic.

Danièle Navarre(1)

IAU île-de-France

Le fonctionnement des aéroportsinternationaux génère de forts traficsroutiers, apportant congestion et pollution environnementale.Développer l’accès en transportscollectifs à ces aéroports permettraitde limiter le phénomène. Quelle est la situation actuelle ?Comment concevoir des servicesattractifs ? Comment les aéroportsfranciliens se positionnent-ils dans ce contexte ?

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(1) Danielle Navarre est ingénieure transport.

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Diversifier la desserte en privilégiant le mode ferroviaireLa comparaison de la desserte en transport encommun d’une quarantaine d’aéroports inter-nationaux et des modes d’accès utilisés par lespassagers aériens permet de tirer plusieursenseignements sur l’efficacité de l’offre. Le clas-sement de ces aéroports par ordre de taux d’uti-lisation des transports en commun décroissantpermet d’identifier l’efficacité de leur desserteen transports collectifs, et de les répartir en troiscatégories selon que la part des transports col-lectifs est :- comprise entre 40 % et 60 % (catégorie 1) ;- comprise entre 20 % et 40 % (catégorie 2) ;- inférieure à 20 % (catégorie 3).Un certain nombre de recommandations peu-vent ainsi être formulées en vue d’optimiserl’accessibilité en transport en commun auxaéroports.

Prévoir une desserte ferrée la plus diversifiéepossibleL’obtention d’un choix modal favorable auxtransports collectifs demande à ce que l’aéro-port soit desservi par un mode ferré (chemin defer ou métro). Les aéroports qui présentent untaux d’utilisation des transports collectifs supé-rieur ou égal à 20 % (catégories 1 et 2) sonttous accessibles par le mode ferroviaire. Enrevanche, les aéroports qui présentent un pour-centage d’utilisation des transports en communinférieur à 20 % (catégorie 3), tous situés auxÉtats-Unis, ne sont pas ou sont mal desservispar le mode ferré. Mais pour être efficace, ladesserte ferroviaire doit être multiple, de façonà ce que l’aéroport soit accessible, non seule-ment depuis le centre (à partir de plusieursgares ou d’un nœud d’échanges central), maisdepuis le plus grand nombre de territoires pos-sibles. Pour cela, la gare de l’aéroport doit être

reliée aux lignes ferrées environnantes (clas-siques ou à grande vitesse) par des lignes traver-sant la plate-forme aéroportuaire, et non par desimples branches ne desservant qu’une direc-tion, comme cela est parfois le cas. Les aéro-ports de la catégorie 1 (Shanghai excepté)bénéficient ainsi de plusieurs types de servicesferroviaires assurant des connections avec lecentre (dont des services directs dédiés pour laplupart d’entre eux), plusieurs secteurs de larégion, des grandes villes des régions voisines etdu reste du pays (aéroports d’Oslo, de Zurich,de Londres-Stansted, de Paris-Charles-de-Gaulle). L’aéroport de Shanghai doit son tauxd’usage des transports en commun de 51 % à laqualité de desserte d’un réseau d’autobus etd’autocars très étoffé qui le relie à différentspoints du centre et de la région, et compense leslacunes de la desserte ferrée (ligne à grandevitesse de 30 km reliant l’aéroport à une stationde métro excentrée). Les aéroports de la caté-gorie 2 présentent soit une bonne desserte fer-roviaire mais une desserte bus déficiente (aéro-ports d’Amsterdam, de Copenhague), soit unedesserte ferroviaire limitée, soit une liaison peu performante avec le centre (aéroports deMunich, d’Orly, de Düsseldorf).

Ne pas négliger la desserte par autobus et autocarLa souplesse de l’autobus et de l’autocar per-met de compléter la desserte ferroviaire sur lesliaisons ne pouvant être assurées par ce der-nier mode, pour des raisons de niveau de clien-tèle ou de configuration des réseaux ferrés. Lemode routier peut ainsi être déployé avec debonnes fréquences (aéroports de Hong Kong,Tokyo, Shanghai, Stockholm) sur des liaisonsentre l’aéroport et :- un certain nombre de points particuliers du

centre, tels que hôtels, gares, centres d’affaires,

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pôles touristiques (navettes, services publics,autocars des compagnies aérien nes) ;

- le secteur environnant (lignes publiques assu-rant la desserte locale et le maillage avec leréseau ferré voisin) ;

- les villes ou pôles importants de la région oudes régions voisines (lignes d’autocarspubliques ou privées).

Par ailleurs, ce mode permet d’offrir des liai-sons attractives pour les passagers aériens : par-cours directs, dédiés, assurant du porte-à-porteentre l’aéroport et différents points stratégiquesde la métropole.

Assurer les meilleures connexions possibles et optimiser l’informationL’attractivité des services de transport en com-mun desservant les aéroports passe par la mini-misation des parcours piétonniers entre lesgares routières ou ferroviaires et les terminauxaériens. Une attention particulière doit êtreapportée aux gares ferroviaires car leur implan-tation sur la plate-forme aéroportuaire est moinsaisée que celle des gares routières. La meilleureimplantation est généralement à proximité du hall d’enregistrement ou du hall de livrai-son des bagages, avec mécanisation des che-minements piétons. Plusieurs aéroports inter-nationaux présentent de bons exemples deconnexions entre gares et terminaux :- Hong Kong : arrivée des trains au niveau du

hall d’enregistrement (niveau supérieur del’aéroport) et départ des trains au niveau duhall de livraison des bagages (niveau infé-rieur) ;

- Londres-Stansted : gare implantée au sous-solde l’aéroport et liaison par escalator entre lequai d’arrivée des trains et le hall d’enregistre-ment et entre le hall de livraison des bagageset la quai de départ des trains ;

- Amsterdam: gare implantée sous le hall com-mun à l’enregistrement et à la livraison des

bagages (liaison par escalator) ;- Oslo, Zurich: gare ferroviaire implantée sous le

hall d’enregistrement (liaison par escalator) ;- Vienne : gare ferroviaire implantée au niveau

du hall de livraison des bagages.Une bonne information est également néces-saire pour favoriser l’usage des transports col-lectifs (le taux d’utilisation de ces derniers estplus élevé pour les passagers résidents de larégion que pour les non résidents). Cela va del’information à l’aéroport, où l’accès aux sta-tions de transports en commun doit être claire-ment signalé dès le hall d’arrivée, jusqu’à l’infor-mation par Internet sur les services de dessertede l’aéroport.

L’apport des liaisons express dédiées et de l’intermodalité air-ferDe plus en plus d’aéroports internationaux sontdotés de liaisons express dédiées avec le cen-tre et d’une desserte par les trains à grandevitesse afin d’améliorer et de diversifier leuraccessibilité ferrée.

Les liaisons express dédiées avec le centreIl existe une dizaine de liaisons de ce type dansle monde et une dizaine d’autres sont à l’étude,dont celles concernant les aéroports de Paris-Charles-de-Gaulle (CDG Express), Bangkok etSao Paulo. Conçues pour prolonger le voyageaérien, ces liaisons sont :- directes entre l’aéroport et le centre, car

dédiées aux passagers aériens ;- fréquentes : généralement toutes les 10 ou

15 min tout au long de la journée ;- exploitées par un matériel adapté au trans-

port des passagers aériens : confort, informa-tions embarquées sur le trafic aérien, espacespour les bagages.

Les deux gares terminales sont situées de façonà offrir les meilleures connections :- avec les terminaux aériens (gare de l’aéro-

port) ;- avec les réseaux de transport en commun

urbains (gare du centre).La gare du centre offre parfois la possibilitéd’enregistrer les bagages pour le vol aérien,mais ce service de pré-enregistrement connaîtun succès mitigé auprès des usagers et coûtecher aux compagnies aériennes, d’où sa sup-pression dans un certain nombre de gares : Victoria et Paddington à Londres, Nuevos Minis-terios à Madrid, gares centrales de Vienne,Munich, Moscou, Hong Kong. Réalisées la plu-part du temps dans le cadre de partenariatspublic-privé, ces liaisons express offrent destarifs plus élevés que ceux des transportspublics régionaux, le prix du billet étant déter-miné à l’avance en fonction des estimations detrafic. Compte tenu du niveau des tarifs appli-

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Les Cahiers n° 150

Faire face aux demandes de transports collectifs

La desserte des aéroports en transports collectifs : un besoin

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De plus en plus d’aéroportsinternationaux sont dotés à la foisd’une liaison express avec le centreet d’une desserte grande ligne.

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qués, ce type de liaison devrait être envisagéen complément de liaisons existantes moinschères et moins performantes, et non en subs-titution ou comme seul moyen d’accéder à lazone centrale. S’adressant en premier lieu à laclientèle des taxis, les liaisons express dédiéessont de nature à augmenter de façon non négli-geable la clientèle des transports collectifs : àLondres, la réalisation de Heathrow Express, encomplément de la desserte assurée par la lignePicadilly du métro, a permis d’augmenter de33 % la part d’utilisation des modes ferrés parles passagers aériens.

L’intermodalité air-ferLes premières gares d’intermodalité entrel’avion et les trains grandes lignes (trains àgrande vitesse notamment) ont vu le jour enEurope, et désormais plusieurs aéroports ensont équipés :- Paris-Charles-de-Gaulle et Lyon-Satolas en

France ;- Amsterdam aux Pays-Bas ;- Francfort, Düsseldorf, Cologne-Bonn et Leip-

zig en Allemagne ;- Genève et Zurich en Suisse.La complémentarité avion-train, optimale entreles vols long-courrier et les trajets en train d’unedurée inférieure à trois heures, permet d’ache-miner par chemin de fer une part non négli-geable de passagers aériens (13 % à Düssel-dorf). Elle permet par ailleurs d’accroître laclientèle aérienne du fait :- de l’élargissement du marché de l’avion sur

des liaisons ne pouvant être assurées par cedernier ;

- de l’augmentation de la capacité de l’aéro-port, suite à la suppression des vols court cour-rier nouvellement assurés par fer.

Le succès de ces gares d’intermodalité passepar une bonne coopération entre les compa-gnies aériennes et les exploitants ferroviaires,afin d’optimiser les services offerts : coordina-tion des horaires, billet combiné avion-train,enregistrement des bagages dans les gares dedépart comme cela est le cas dans les garessuisses et dans celles de Cologne, Stuttgart etBruxelles.

Le cas des deux aéroports de ParisLes aéroports de Paris-Orly et Paris-Charles-de-Gaulle bénéficient d’une desserte par le réseauRER, d’où une accessibilité depuis les secteursde banlieue traversés et, ce qui est un avantage,depuis plusieurs gares parisiennes. Ces servicesmanquent cependant de performance, du faitdes arrêts nécessaires à la desserte régionaleet de l’inconfort des trains durant les heures depointe. Par ailleurs, la connexion à l’aéroportse fait par l’intermédiaire de navettes Val ou bus

pour la plupart des terminaux. D’où un usagemodéré des transports collectifs par les passa-gers aériens (40 % pour Paris-CDG et 26 % pourParis-Orly) et une concurrence marquée destaxis, vu la situation des aéroports au sein del’agglomération francilienne. Le pourcentagede 40 % pour l’aéroport de Paris-CDG se décom-pose en fait en 34 % pour les transports régio-naux et 6 % pour la desserte TGV assurée par 54trains quotidiens. Le pourcentage des transportsrégionaux devrait augmenter à la mise en ser-vice (2012-2015) du projet de liaison dédiéeCDG Express (640 millions d’euros), laquellepourrait réduire de plusieurs points la part destaxis (actuellement de 30 %). Quatre trainsdirects par heure et par sens relieront en 20 minl’aéroport à la gare de l’Est dans Paris, sur desvoies indépendantes de celles du RER B dontla fréquence et la régularité seront améliorées.Par ailleurs, un projet de raccordement ferro-viaire au réseau Nord SNCF devrait faciliter l’ac-cès à l’aéroport depuis la région Picardie voi-sine. La desserte de l’aéroport de Paris-Orly seraétoffée par la ligne de tramway en cours de réa-lisation sur la RN 7, mais ce projet intéresse plusles employés de la plate-forme que les passagersaériens. L’aéroport pourrait également bénéfi-cier d’une gare TGV, implantée sur un nouveautracé à l’étude de la ligne d’interconnexion suddes TGV.

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Les aéroports franciliens bénéficientd’une bonne desserte ferrée, comme Orlyval pour Orly, mais l’offre gagnerait à êtreaméliorée.RA

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Le futur aéroport devrait employer 19000personnes et accueillir 22,5 millions depassagers aériens et un million de visi-

teurs au cours de l’année 2013-2014. Après denombreuses discussions, les deux Länder ontdécidé d’agrandir et de moderniser l’actuelaéroport de Berlin-Schönefeld, autour duquelun plan de développement urbain et régionalcommun (Landesentwicklungsplan) a été dé -fini. Ce site, au sud-est de Berlin, a été retenudu fait de la disponibilité des terrains, mais ausside sa proximité avec la métropole, lieu d’ori-gine de la majorité des déplacements aériens,afin de limiter la dispersion des parcours ter -

restres des passagers aériens et de réduire lapollution et la consommation d’énergie.Les planificateurs se sont donné comme objec-tif d’atteindre un taux d’utilisation des trans-ports en commun par les passagers aériens de50 %. La conception et la desserte du futur aéro-port BBI prennent en compte cette ambition.Les aménagements routiers sont relativementréduits : un raccordement à l’A113 assurera l’ac-cès au centre de Berlin et au reste de la métro-pole (via les rocades A100 et A10), et un élargis-sement de la B96 bis, la liaison avec Potsdam.L’accent est mis sur les réseaux ferroviaires qui

font l’objet de plus gros investissements, dont :- la construction d’une gare à six voies et trois

quais en dessous du terminal aérien du BBI ;- la construction de 15 km de double voie fer-

rée électrifiée reliant la ligne de Görlitz à larocade extérieure, via la gare de l’aéroportBBI et un tunnel creusé sous la plate-formeaéroportuaire ;

- le prolongement de la ligne S-Bahn desser-vant l’aéroport actuel de Schönefeld jusqu’àla gare du futur aéroport.

La conception du schéma de desserte ferro-viaire permettra de desservir la gare de l’aéro-port par :- un service Airport Express, exploité par au

moins quatre trains par heure qui relierontl’aéroport à la gare centrale de Berlin en20 min, en desservant deux gares intermé-diaires importantes (Südkreuz et PotsdamerPlatz) ;

- les services de deux lignes de S-Bahn, qui assu-reront toutes les 10 min des connexions entrel’aéroport et les réseaux de transport en com-mun de la métropole ;

- des trains régionaux et longue distance, natio-naux ou internationaux (liaisons avec laPologne et la République tchèque notam-ment), dont les Inter City Express (ICE), trainsà grande vitesse.

Cette desserte ferroviaire étoffée et diversifiéesera complétée par de nombreux services d’au-tobus. La mise en place de la desserte ferro-viaire s’effectuera en plusieurs étapes, étantdonné l’importance des travaux à réaliser et lesdélais des travaux en cours sur certaines partiesdu réseau ferré régional, notamment la lignede Dresde: par exemple, à l’ouverture de l’aéro-port en 2011, l’Airport Express ne circulera quetoutes les 30 min, et deux trains régionaux parheure compléteront la desserte en reliant l’aé-roport à l’axe ferré traversant le centre de Ber-lin (Stadtbahn). Le pourcentage d’utilisationdes transports en commun devrait augmenterprogressivement et passer de 23 % à 32 % à lafin des travaux sur la ligne de Dresde.

(1) Responsable du département des chemins de fer, minis-tère des Infrastructures et de l’Aménagement du territoiredu Land de Brandebourg.

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Aéroport Berlin-BrandebourgInternational : desserte ferrée optimisée

Les besoins du transport aérien national et international des Länder de Berlin et du Brandebourg ont conduit ces derniers à décider la construction d’un nouvelaéroport international pour la région : Berlin-Brandebourg International (BBI).Avec une volonté d’optimisation de la desserte ferrée en transports collectifs.

Jürgen-Peter Hiller(1)

Ministère des Infrastructures

et de l’Aménagement du territoire

du Land Brandenburg

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Faire face aux demandes de transports collectifs

Implantation et desserte du futur aéroport de Berlin-Brandebourg International

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Management de la mobilité :perspectives franciliennes

Management de la mobilité : une dynamique qui s’amplifie

en Europe

Gérer la mobilité à Londres

Vers des usages partagés de la voiture

Vélos partagés : une floraisond’initiatives dans le monde entier

Taxis et transports publics en Île-de-France : quelle articulation ?

Taxis de Londres, Madrid, Berlin : des idées pour l’Île-de-France

Les automobiles de demain : des voitures propres et partagées ?

Développer des offres alternatives

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Le management de la mobilité (MM) apour objectif principal de rationaliserl’usage de la voiture au profit des modes

alternatifs. Moins consommateurs d’énergie,moins émetteurs de polluants et de gaz à effetde serre, ces derniers sont aussi plus favorablesà la santé, à la sécurité et à la convivialité, etsouvent moins coûteux.

Une nouvelle approchePour ce faire, le MM part du constat qu’agir surl’offre ne suffit pas et qu’il faut égalementréorienter la demande et faciliter l’accès à unemobilité alternative pour tous. Le MM impliqueen ce sens un changement de culture et de pra-tiques en matière de déplacements, tant pourles usagers de transport que pour les décideurspublics. Il nécessite une meilleure connaissanceet compréhension des usages et des usagers,afin de définir des actions adaptées pour modi-fier les pratiques de transport. Il privilégie deuxgrandes familles de cibles :- l’usager de transport (personne physique),

qu’il soit résident ou de passage ;- le générateur de trafic (personne morale) :

entreprise, zone d’activités, centre commer-cial, centre administratif, école…

Fondé sur une action partenariale, le MM néces-site de coordonner les différents acteurs(2) afinde mener des actions d’ensemble, chacun assu-mant sa responsabilité à son niveau (responsa-bilité solidaire). Il se distingue également parson approche transversale et souple : il n’a paspour but d’enrichir l’offre « lourde » de trans-

port mais de compléter celle-ci par des mesuresdites « souples ou douces», généralement peucoûteuses et rapides à mettre en place. Il a voca-tion à dépasser le cadre strict du transport pourinteragir avec d’autres domaines comme l’urba-nisme, l’organisation des entreprises, etc.

Les modes et champs d’interventionD’un point de vue plus opérationnel, le MMprend appui sur :- le conseiller en mobilité, facteur décisif pour

assurer une interface entre les acteurs ;- une méthode d’intervention participative et

ciblée : diagnostic et plan d’actions concerté ;- une articulation des interventions publiques

et privées aux différentes échelles.

Il repose sur six principaux champs d’action :- améliorer l’information multimodale ;- conseiller les acteurs du territoire ;- optimiser l’usage de l’offre existante ;- créer de nouveaux services de mobilité ;- aider l’usage des modes alternatifs ;- comprendre et anticiper les besoins de mobi-

lité.

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Développer des offres alternatives

Management de la mobilité :perspectives franciliennes

Le conseil régional d’Île-de-France,l’Ademe et l’Arene Île-de-France co-animent le réseau francilien« Partenaires pour l’écomobilité » de l’école à l’université, qui compte aujourd’hui plus de quatre-vingt membres. Ici, le Pédibus à Nanterre.

Céline Meunier(1)

Arene Île-de-France

Le management de la mobilité a été introduit en Île-de-France à la findes années 1990, avec l’objectifprincipal de rationaliser l’usage de la voiture au profit des modesalternatifs. Renforcé dans le cadre du plan de déplacements urbains de 2000, il continue de se développeraujourd’hui. Comment ? Avec quelobjectif ? Zoom sur les dispositifs et actions menées en Île-de-France.

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(1) Céline Meunier est chargée de mission mobilité durableau sein de l’Arene Île-de-France.(2) Par exemple autorité organisatrice/entreprise/mairie/transporteur, ou encore mairie/parents d’élèves/directeursd’école.

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Le développement du MM en Île-de-FranceLe MM est encouragé depuis la fin des années1990 grâce à l’action pionnière de l’Ademe etde l’Arene Île-de-France. Ces actions sont confor-tées depuis 2000 par le plan de déplacementsurbains de l’Île-de-France (PDUIF) et ses pres-criptions en matière de gestion de la mobilitépour les déplacements des écoliers et desemployés.

L’écomobilité scolaire en plein essorImpulsée par le PDUIF(3), l’éco-mobilité scolaireest apparue en 2002 via un groupe de villespilotes lancé par l’Ademe et l’Arene. Rejointsen 2006 par le conseil régional d’Île-de-France,ils co-animent, ensemble, depuis 2005 le réseaufrancilien Partenaires pour l’écomobilité del’école à l’université, qui compte aujourd’huiplus de 80 membres, dont environ 70 collectivi-tés locales. Ce réseau apporte à ses membres :- des aides financières (Ademe et Région) pour

la réalisation d’études (plans) ou d’actions ;- des ressources: informations et échanges d’ex-

périences, formations, outils (programmeannuel d’activités, lettre d’informations, kitpédagogique, kit Marchons vers l’école…) ;

- un accompagnement des membres dans leurprojet et leur évaluation.

En 2008, 161 démarches ont été recensées enÎle-de-France dont soixante-dix bus pédestres,cinquante plans de déplacements scolaires(PDES) ainsi que des actions pédagogiques(4).Tous les ans, plus d’une trentaine de collectivi-tés participe à «Marchons vers l’école» opéra-tion internationale de sensibilisation à la pra-tique des modes actifs sur le trajet de l’école. Enoctobre 2008, quarante-trois participants(5) ontmobilisé environ 250 écoles et 50000 écoliers.

Pro’Mobilité : la dynamique régionale autour des déplacements des salariésDepuis près de dix ans, l’Ademe et l’Arene met-tent en place des actions de promotion (forumsd’échanges, visites de terrain) des plans dedéplacements d’entreprise (PDE). En outre,l’Ademe accorde des aides financières auxentreprises pour réaliser leur PDE. Fin 2007, laRégion Île-de-France s’est engagée dans le pro-jet européen Commerce qui a pour but de faci-liter le développement des PDE en Europe. Ceprojet a permis de redynamiser les actions enÎle-de-France en fédérant les acteurs concernésà l’échelle régionale sous une bannière com-mune : Pro’Mobilité. En parallèle, l’Ademe Île-de-France a créé un réseau PDE, le Club capitalemobilité, pour améliorer la diffusion d’informa-tions vers les porteurs de projet PDE et faciliterleurs échanges. Enfin, il faut souligner une évo-lution réglementaire encourageante : l’obliga-

tion faite par le plan de protection de l’atmo-sphère, pour environ 150 établissements franci-liens, de mettre en place un PDE. En juillet 2008,l’Ademe dénombrait une soixantaine de PDEen cours dans la Région, incluant ceux en phasede lancement(6).

Les agences locales de mobilitéL’agence locale de mobilité (ALM) est l’instru-ment par excellence du MM à l’échelle territo-riale. Elle permet de coordonner et centraliserles actions de MM menées sur un territoire etd’en mutualiser les coûts (notamment en res-sources humaines). Cette activité reste encorepeu développée en Île-de-France avec deuxagences en activité (association Voiture&co,une agence à Nanterre, une à Paris). Cinq ALMsont développées au niveau national. Mais denombreux projets, majoritairement portés pardes collectivités sont en gestation : treize enFrance, dont neuf en Île-de-France.

Le conseiller en mobilité, une clé de la réussiteLe recrutement d’un conseiller en mobilité estindispensable pour développer une politiqueefficace et pérenne de MM sur un territoire, leretour d’expérience le prouve. Il remplit desmissions de promotion, d’information, de coor-dination des acteurs, de marketing, et d’assis-tance sur les plans de déplacements et offredes conseils personnalisés. En Île-de-France,l’activité se développe progressivement dansles ALM, les collectivités, les associations et leschambres de commerce et d’industrie.

Vers une mobilité durableLe MM représente une réelle opportunité pourles acteurs régionaux (Région, Stif, Ademe, collectivités…) de conforter leurs initiativespour réduire la consommation d’énergie et lesémissions de gaz à effet de serre associés autransport. Par ailleurs, le MM met en cohérenceles usages avec les évolutions de l’offre en trans-port alternatif, et donc avec les investissementsréalisés en infrastructures, équipements ou services. Il est complémentaire aux politiquesd’offre et indispensable à l’efficacité écono-mique, sociale et environnementale du systèmede transport. En ce sens, il contribue directe-ment aux politiques de développement dura-ble.

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LexiqueManagement de la mobilité (MM) :le terme désigne l’approche adoptée par un acteur public ou privé (une collectivité, une entreprise, un centreadministratif, un opérateur de transportscollectifs, etc.) pour rationaliser lespratiques de déplacement des publicsqu’il cible (habitants, écoliers, employés,clients, usagers de transport, etc.) en intervenant essentiellement sur la demande (information, conseils,organisation, marketing, etc.) et enprivilégiant les partenariats et la participation des publics ciblés.Ademe : Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.Arene : Agence régionale de l’environnement et des nouvellesénergies.Commerce : Creating optimal mobilitymeasures to enable reduced commuteremissions. Projet de trois ans cofinancé par la Commission européenne à travers le programme Énergie intelligenteEurope.(www.commerce-eu.org)

Le projet européen Commerce a pour but de faciliter le développement des plans de déplacements d’entreprise en Europe.

(3) Le PDUIF vise notamment à réduire de 10 % la part dedépose en voiture au profit de la marche pour les trajetsdomicile-école.(4) Évaluation réalisée par l’Ademe à l’échelle nationale en2007-2008.(5) Dont trente-six communes, des associations de parentsd’élèves et des écoles.(6) Source : Club mobilité capitale animé par l’Ademe Île-de-France, juillet 2008.

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

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Les Cahiers – D’où vient le concept de management de la mobilité (MM),quand et où a-t-il été créé? Commentest-il répandu aujourd’hui et existe-t-ilune définition commune?Karl-Heinz Posch – Le management de lamobilité, sous l’appellation management de lademande de transports, a été appliqué pour lapremière fois par les Américains dans lesannées 1970, lors de la crise pétrolière. L’objec-tif était de diminuer l’usage de la voiture parti-culière au profit du covoiturage et des trans-ports en commun, ce qui a mal fonctionné dufait d’une offre en transport collectifs insuffi-sante et de systèmes de covoiturage encore dif-ficiles à maintenir sur la durée. Au début desannées 1990, des opérations similaires ontémergé en Europe, particulièrement aux Pays-Bas, sur le modèle américain, mais sous le nomde management des transports. À la mêmepériode, l’Allemagne a développé un systèmede regroupement de l’information sur les trans-ports. L’institution, appelée Centrale de mobilité,a été progressivement chargée, d’inciter lesentreprises à favoriser l’usage des transports encommun. Cette nouvelle action a donné nais-sance au concept de management de la mobi-lité en 1992. Cette formule s’est ensuite éten-due à d’autres activités influençant lescomportements de mobilité. L’expression s’estrépandue hors d’Allemagne et a gagné d’au-tres pays européens. En 1994, l’Union euro-péenne a lancé un programme qui visait àencourager le MM, avec deux grands projets :Momentum et Mosaic, regroupant les princi-paux pays actifs en matière de MM, notammentla Suisse, l’Autriche, l’Allemagne, les Pays-Bas etle Royaume-Uni. Tous ces pays avaient lancédes opérations qui pouvaient être regroupéessous la dénomination MM. À la fin du projetMomentum en 1997, a été créée la Conférenceeuropéenne sur le management de la mobilité(Ecomm) qui est devenue un rendez-vousannuel. La Plate-forme européenne sur le mana-gement de la mobilité (Epomm)(1), créée pourla gestion de cette conférence sous forme d’as-sociation internationale, a notamment un objec-tif de lobbying auprès de la Commission euro-péenne, qui soutient financièrement lesactions(2). Aujourd’hui, le concept est actif dansplusieurs pays. Le Royaume-Uni possède unréseau national nommé Association for Com-muter Transport Travelwise (ACT-Travelwise).Cette plate-forme nationale regroupe des entre-prises appliquant des plans de mobilité et des

villes pratiquant le MM. Londres a notammentdéveloppé une approche systématique auprèsdes écoles, des entreprises et des administra-tions. Le MM est également très utilisé en Suède,où l’administration des routes soutient cesactions dans le but d’éviter les voyages inutiles,et, de ce fait, la construction de certaines infra-structures. Le gouvernement apporte un sou-tien financier pour les opérations qui utilisentla méthode d’évaluation préconisée(3). Les Pays-Bas ont également développé de nombreusesactions, particulièrement pour les entreprises,car une loi stipule que celles de plus de 300employés doivent appliquer un plan de mobi-lité. Les travaux de reconstruction des auto-routes sont toujours accompagnés de mesuresde MM, afin que les usagers utilisent d’autresmoyens de transport pendant les travaux. Legouvernement hollandais teste également undispositif qui permet aux usagers de recevoir del’argent s’ils utilisent leur véhicule en dehorsdes heures de pointe. L’Allemagne est LE pays des centrales de mobi-lité avec plus de soixante centrales en fonction-nement aujourd’hui. Le pays vient juste de lan-cer une plate-forme nationale dans l’objectifde rendre les actions systématiques. L’Autriche a également une plate-forme natio-nale nommée Klima Aktiv Mobil,qui présente denombreux projets et soutient les mesures degestion de la mobilité dans le domaine desadministrations, des écoles et des entreprises. La France est très active en matière de créationde plans de déplacements urbains (PDU), maisle MM systématique n’est pas très répandu,excepté dans quelques villes. En Italie, de nom-breux plans de mobilité ont été réalisés parcequ’obligatoires, particulièrement pour les entre-prises, mais souvent sans suites concrètes,excepté dans quelques villes (notammentParme). L’Espagne était peu active mais elle ledevient : elle a mis en place un programmenational de soutien depuis un an, avec encorepeu de résultats. Durant toutes ces années, le concept de MM amûri et bénéficie aujourd’hui d’une définitionpartagée : il s’agit de promouvoir un transportdurable tout en gérant la demande et enœuvrant pour un changement des comporte-

Karl-Heinz Posch estcoordinateur de la plate-formeeuropéenne sur le managementde la mobilité (Epomm) et du Max Project depuis 2006.Diplômé en planification des transports de l’université de Graz (Autriche), il est, depuis 1999, directeurscientifique chez FGM-Amor, le centre de recherches sur la mobilité autrichienne(Amor). FGM-Amor est une organisation indépendanteà but non lucratif, proposantconseils, formation et aide à la réalisation de projetss’inscrivant dans le cadre du management de la mobilitéauprès des institutionspubliques et des entreprisesprivées, pour promouvoir les bonnes expériences de mobilité internationales et européennes.

Management de la mobilité : une dynamique qui s’amplifie en Europe

Interview

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(1) http://www.epomm.org/(2) Particulièrement l’Intelligent Energy Agency.(3) Sumo est un outil d’évaluation développé en tant queprojet européen, par la suite traduit en suédois et adapté à lasituation du pays. Une centaine de projets suédois ont été éva-lués grâce à cette méthode.

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ments. Le MM recouvre le plus souvent desmesures soft dans tous les domaines, au-delàdes transports, avec une bonne coordinationentre les différents partenaires. Il peut ainsi êtrepris en compte dans les processus de planifica-tion urbaine.

L. C. – Quels sont les acteurs de la villeimpliqués et les différentes approches du MM dans les métropoleseuropéennes?K.-H. P. – Le MM consiste à se rendre là où estgénéré le trafic et à tenter de changer le com-portement des usagers sur place. À l’origine, lesactions étaient concentrées sur les entreprises,et visaient à changer les modes de déplace-ment des employés. Désormais, elles sont élar-gies à toutes les institutions. Les administrations,notamment municipales, font la promotion duMM et essayent en premier lieu de se l’appli-quer à elles-mêmes (incitations à l’usage destransports en commun ou des bicyclettes, prêtde vélos d’entreprise pour les courts trajets, co-voiturage pour les voyages d’affaires et de loi-sirs, etc.). Par ailleurs, les actions portent deplus en plus sur les écoles, afin de combattre latendance à l’accompagnement des enfants envoiture : bus pédestre ou pédibus, réorganisa-tion de l’offre bus, ou même covoiturage.

Des actions de MM sont également engagéeslors de grands événements sportifs, tels que desmatches de football, avec par exemple un titrede transport intégré au prix du billet. Demanière générale, la promotion des transportsen commun est un point central du MM. Agirauprès des personnes qui déménagent ou quichangent de travail, période favorable à uneréflexion sur la mobilité, peut entraîner un chan-gement de comportement, surtout si cetteaction est appuyée par des informations sur lestransports en commun et un ticket-test, valableune semaine, pour sensibiliser à l’efficacité dusystème. Une autre priorité du MM concerne la

promotion de la bicyclette : assurer la présenced’espaces pour le stationnement des vélos audomicile et sur le lieu de travail ainsi que lesmoyens de les réparer aisément à proximité.Certaines entreprises offrent des services deréparation et une révision de bicyclette au prin-temps. Je trouve cette initiative très positive.Une nouvelle tendance consiste à appliquer leMM au logement, partant du principe qu’unegrande majorité des déplacements a pour ori-gine ou destination le domicile, et qu’agir à lasource rendra les actions plus efficaces. Celles-ci pourraient être intégrées au processus deplanification de l’aménagement du territoire(4).C’est le cas par exemple d’un projet immobilierpour un nouveau quartier visant à loger 20000personnes à Vienne.

L. C. – Quel est le rôle de la plate-formeeuropéenne sur le MM (Epomm) et quels sont ses objectifs ?K.-H. P. – Epomm vise à promouvoir le dévelop-pement du MM et soutenir l’échange d’infor-mations et d’expériences entre les différentspays européens. Elle est censée être la plate-forme des plates-formes nationales, même sicelles-ci sont encore rares. Nous tentons d’ai-der au développement du MM en organisantdes ateliers et en regroupant des représentantsde chacun des sept pays représentés. Nous nousréunissons deux fois par an et débattons dequestions précises comme les nouveautés euro-péennes, ou bâtissons des équipes sur des sujetsspécifiques comme la manière d’instaurer leco-voiturage. Nous essayons aussi de standar-diser certains éléments tels que la définitiondu MM ou son évaluation. Epomm organiseaussi la conférence annuelle Ecomm. Le déve-loppement d’Epomm continue: sept pays euro-péens en sont actuellement membres. L’objec-tif est, à terme, de tous les rassembler.

L. C. – Pouvez-vous nous fournir quelques exemples de bonnes pratiques(organisation, actions, etc.) de MM en Europe et nous expliquer leur intérêt,leurs avantages et leurs limites ?K.-H. P.– Munich, Londres, Brême, Bruxelles, Graz,les exemples sont nombreux et variés. La villede Munich distribue un kit mobilité de bienve-nue à tous les nouveaux habitants, comprenantdes informations sur l’organisation des trans-ports, un ticket-test gratuit valable une semainepour tous les transports en commun, un guidehoraire personnalisé et des renseignements pré-cis en fonction du lieu d’habitation. Dans undeuxième temps, la ville établit un contact per-

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Max Project : une définition«européenne» du management de la mobilitéMax est le dernier programme européen de recherche sur le MM. Il a débuté en octobre 2006 et devrait se terminer en 2009 à Cracovie. Les participants ont proposé une définition commune du management de la mobilité commebase de leur travail : le MM est un conceptvisant à promouvoir la mobilité durable et optimiser l’usage de l’automobile par un changement des comportementsdes usagers. Il consiste essentiellement à mettre en place des mesures softcomme l’information et la communication,l’organisation de services et la coordination des différents acteurs.Ces mesures améliorent souvent l’efficacitédes mesures hard mises en place dans les transports urbains. Les mesuresMM (en comparaison des mesures hard)ne nécessitent pas forcément des investissements financiers importants et peuvent avoir un ratio coût-bénéficeélevé.http://www.max-success.eu/

Epomm, la plate-forme européennesur le management de la mobilité,regroupe aujourd’hui sept payseuropéens. L’objectif est de tous les rassembler à terme.

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Partout dans le monde, et en particulier en Europe,des métropoles font la promotion du management.

(4) Ce point est développé dans le Max Project (lire aussi lanote ci-dessus, à droite).

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sonnel par téléphone afin de s’assurer que lespersonnes disposent des informations suffi-santes. Cette démarche s’est révélée fructueuseet a conduit à un accroissement de l’usage destransports en commun de ces nouveaux habi-tants. Beaucoup d’argent a été dépensé danscette action mais, en contrepartie, de moindressommes ont été dépensées pour les transportspublics. La ville supervise cette opération avecun budget d’environ un million d’euros par an.Londres a une approche systématique du MM

dans les entreprises. Une équipe de vingtpersonnes travaille sur le management dela demande de transports, appellationlocale, et met en place des plans de mobi-lité, analysant les déplacements domicile-travail des employés des entreprises et pro-posant des actions et objectifs ciblés pourchacune d’entre-elles. Il en est de mêmemaintenant pour les écoles : l’objectif estde réaliser un plan de mobilité pourchaque école en 2009. Brême a instauré un ticket qui peut êtreutilisé pour les transports en commun maisaussi pour le co-voiturage, qu’elle promeutactivement comme partie intégrante de la

mobilité. Bruxelles pousse encore plus loin l’ex-périence : la municipalité bruxelloise soutientune initiative en faveur des usagers qui se débar-rassent de leur voiture pour modifier leurs habi-tudes de mobilité. Ils obtiennent, en échange, unticket annuel pour les transports en commun etune adhésion pour bénéficier de covoituragegratuit toute l’année (pour le propriétaire). Ilspeuvent également obtenir 400 € de subven-tion pour l’achat d’une bicyclette. Dans le cen-tre de mobilité de Graz, on trouve des informa-tions sur les soixante entreprises de transportsen commun de la région. Ce centre vend destickets pour les transports publics, les transportsferroviaires dans toute l’Europe et propose deslocations de vélos et remorques. Il regroupetoutes les informations nécessaires sur le co-voiturage et délivre les adhésions. Le nombred’usagers a augmenté de 20 % par an. Le coûtdu centre de mobilité est compensé par l’aug-mentation des ventes des tickets de transportsen commun.

L. C. – Le MM a-t-il un réel impact sur la mobilité en général ? Les mesuressoft pèsent-elles véritablement sur la mobilité globale et améliorent-ellesincidemment l’impact des mesures hard(métro, lignes de tramway…) ?K.-H. P.– Les méthodes d’évaluation ne sont pastrès approfondies et il s’avère difficile de surveil-ler les changements et surtout d’isoler lescauses : une campagne de publicité pour lestransports publics peut induire une augmen-

tation de leur usage, tout autant que la haussedu prix du pétrole. Par ailleurs, la qualité intrin-sèque des réseaux de transports publicsinfluence l’impact des actions, de même que lapart des comportements à modifier : dans uneécole où 50 % des enfants sont conduits en voi-ture, les actions mises en place ont plus dechance de se faire sentir que s’ils ne représen-tent que 10 % des élèves. On estime qu’après lamise en place d’un plan de mobilité dans uneécole ou une entreprise, l’usage de la voiturebaisse en moyenne de 5 % à 25 %. Si les condi-tions sont très favorables à ce changement,vous pouvez atteindre des résultats bien meil-leurs.

L. C. – Comment les actions de MM sont-elles intégrées dans le processusglobal de planification et d’organisation des autres modes de transport ?K.-H. P.– Je peux seulement vous dire commentelles devraient être intégrées ! À Vienne, pourun nouveau quartier de 5 000 habitants, noussouhaitons prévoir l’ensemble des alternativesdès la conception : transports en commun, co-voiturage, emplacements pour garer les bicy-clettes, afin de réduire au minimum l’offre enstationnement automobile. Ces alternatives doi-vent être mises en avant auprès des futurs nou-veaux habitants du quartier, mais aussi auprèsdes promoteurs et aménageurs, qui doivent inté-grer ces nouveaux enjeux et les faire valoir(notamment dans les brochures de vente). La ville doit, en parallèle, négocier avec les entre-prises de transport qui fournissent les différentsservices. Cet exemple concerne un projetd’aménagement de quartier, mais le même prin-cipe d’anticipation serait à appliquer à tous lespermis de construire (y compris les centrescommerciaux et les entreprises). À ce sujet, onpeut citer l’exemple d’un nouveau centre com-mercial (Sihl City), construit récemment àZurich, où la ville a demandé une forte réduc-tion de l’offre de stationnement afin de limiterl’impact de cet équipement sur le trafic. Le pro-jet prévoit la mise en place d’arrêts de trans-ports publics, d’un service de livraison desachats à domicile, de places de parking pour lesbicyclettes et de quelques places de parkingpayantes pour les voitures, ainsi qu’une largecampagne d’information. L’opération a été unsuccès. Le centre commercial a accepté toutesces contraintes et il s’est même avéré que lesplaces de parking, en nombre réduit, n’étaientpas toutes utilisées.Ce type de démarche devrait être entrepris à lamise en service d’une nouvelle ligne de bus oude tramway. L’entreprise de transport devrait yassocier une campagne marketing, en particu-lier auprès des riverains (prospectus, etc.) et,

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Management de la mobilité : une dynamique qui s’amplifie en Europe

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» Le concept de management de la mobilité vise

à promouvoir un transportdurable tout en gérant

la demande et en œuvrant pour un changement

des comportements.Recouvrant plusieurs

domaines, il peut s’inscriredans les processus

de planification urbaine. «

Le centre de mobilité de Graz(Autriche) centralise l’information sur les transports collectifs de la région mais aussi sur le covoiturage. On peut y acheter des tickets de train et y louer des vélos.

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pourquoi pas, leur offrir un service gratuit pen-dant quelques jours pour susciter des change-ments de comportement. Cela a été le cas àLeipzig, où la municipalité a dû reconstruire en2000-2001 une partie de son réseau de tramwaypour adapter l’écartement des rails aux normesdu tramway moderne. Cela a causé un immensedésordre et une très mauvaise image, contrelaquelle la ville a décidé de réagir en mettanten place une action de MM: publicité en faveurdes améliorations à venir et information auprèsdes usagers sur la démarche à suivre pendantla période de travaux, action auprès des com-merçants dans les rues affectées par les travaux,etc. L’opération s’est avérée si réussie que lemécontentement a cessé et les services intro-duits pendant la période de travaux ont été lar-gement utilisés.

L. C. – Quels sont, selon vous, les éléments clés pour que les métropolespassent un cap en matière de MM? Se dirige-t-on aujourd’hui vers une reconnaissance générale du concept ?K.-H. P.– Je pense que le premier élément clé estcelui des ressources. L’argent reste un aspectprimordial. Mais la mise en place des actionsnécessite également des ressources humainesaffectées aux projets. Dans la plupart des villes,le budget affecté aux mesures de MM estminime ou inexistant. Il paraît normal de dépen-ser des millions en infrastructures routières ouferroviaires, et impensable de dépenser 30000 €

pour une campagne en faveur de la circulationdes vélos ! Le deuxième élément consiste à ren-dre systématique cette approche, à l’image desvilles qui ont décidé d’avoir un plan de mobi-lité pour chaque entreprise, chaque école etchaque événement sportif. Peut-être qu’un passupplémentaire consisterait à introduire le MMdans le processus de planification urbaine, enfournissant des informations relatives à la mobi-lité à tous les acteurs concernés, et en intégrantla réflexion sur l’évolution des comportementsau processus global d’élaboration des projets.Je pense que seules quelques villes ont franchice seuil. La plupart d’entre elles n’appliquentpas cette démarche dans sa totalité ou ne l’ap-pliquent pas du tout. Comme vous l’avez sansdoute remarqué, les membres d’Epomm sontuniquement des pays d’Europe de l’Ouest. Leprocessus d’intégration des pays d’Europe del’Est est très long. Il m’est arrivé, lors d’un courssur le MM, de proposer le défi suivant : «Si vousdisposez d’un million d’euros, mais que vousne pouvez pas les dépenser dans des infrastruc-tures, comment pouvez-vous l’utiliser ? » Pourde nombreuses personnes issues des nouveauxpays membres de l’UE, c’était difficile à imagi-

ner. Mais cela est en train de changer. Il est trèsimportant d’échanger des idées. De plus en plusde personnes issues de ces pays participent à la conférence annuelle (Ecomm), et auxréseaux européens. Ils réalisent que les trans-ports peuvent être envisagés différemment avecde petits budgets, et pas nécessairement avecdes infrastructures lourdes.Pour les années à venir, je crois que l’une desprincipales actions consistera à consacrerdavantage de moyens au MM. Nous devonsaussi encourager les échanges, afin que les habi-tants d’une ville puissent aller découvrir direc-tement sur place la qualité des projets d’autresvilles. Cette méthode constitue la meilleuremanière de véhiculer une nouvelle idée. Par ail-leurs, il me semble primordial de développer lastandardisation dans l’évaluation, afin de per-mettre les comparaisons entre projets. Ce seraun des principaux thèmes de la prochaineconférence annuelle (Ecomm) en mai 2009(5).

Propos recueillis par Sophie Laurent et Dominique Riou

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À Zurich, la réduction de l’offre de stationnement dans le nouveaucentre commercial Sihl City,accompagnée de mesures favorisantd’autres modes (service de livraisondes achats), a été un succès.Si

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(5) http://www.ecomm2009.eu/

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Le développement du management de lamobilité (MM) a commencé à Londres,il y a quinze ans environ, dans les

boroughs qui travaillaient avec les associations.Au départ, il s’agissait surtout d’agir sur lesdéplacements en lien avec les établissementsscolaires et les lieux de travail. En 2004, le minis-tère des Transports (DfT) a produit le rapportSmarter Choices qui a mis en avant l’impactbénéfique que pouvait avoir le MM sur la réduc-tion de l’usage de la voiture et de la conges-tion en Grande-Bretagne. Transport for London(TfL) a mis en place une petite équipe dédiéepour soutenir les actions des trente-trois boroughs dans ce domaine. Elle a grossi etest devenue le département Smarter Travel Unit.De leur côté, les trente-trois boroughs ont mis-sionné, avec l’aide de TfL,des correspondantsMM locaux, assistés de correspondants sub-régionaux (un pour sept boroughs environ)financés par TfL. Des correspondants pour lesdéplacements vers les écoles ont égalementété placés dans chaque borough avec l’aide deTfL, du DfT et du ministère de l’Enfance, del’Éducation et des Familles (DCSF).Ces dispo-sitifs ont permis l’élaboration, dans tous lesboroughs, de plans de déplacements d’entre-prises (PDE) et de plans de déplacementsd’écoles, ainsi que l’organisation de campagnesen faveur du MM.L’objectif de TfL est d’inciter les Londoniens àréfléchir sur les raisons et les modalités de leurmobilité, et de rendre plus durables leurs choixmodaux. Quatre principes guident les actionsde la Smarter Travel Unit : utiliser les transportscollectifs (TC), le vélo ou la marche à la placede la voiture ; éviter les zones et périodescongestionnées ; marcher ou pédaler au lieud’utiliser les TC ; adopter des comportementsd’achat et d’usage des véhicules plus durables.L’ensemble des modes est pris en considéra-tion. Les leviers d’action sont les suivants :• Legible London (Londres lisible) : système de

repérage piéton pour favoriser le choix de lamarche plutôt que les transports collectifs.

• PDE: deux packages, l’un pour les entreprisesde plus de 250 employés (Corporate), l’autrepour les entreprises de 20 à 250 employés(Enterprise). Plus de 10 % des 450 000 actifslondoniens travaillent dans une entreprise quidéveloppe ou a développé un PDE.

• Plans de déplacements d’écoles : 71 % desécoles de Londres ont un plan en activité.

• Vélo : cours de pratique du vélo, informationà destination des usagers.

• Une expérimentation de projet de déplace-ment personnalisé(2) a été réalisée dans leborough de Camden : rencontre entre desménages pour discuter de leurs choix dedéplacement et de la manière de les rendreplus durables. Elle sera poursuivie ailleurs.

• Des campagnes marketing et d’informationsont organisées, par exemple pour des événe-ments de type « semaine de la mobilité ».

• Programmes intégrés : concentration simulta-née de tous les types d’actions sur une airegéographique limitée, afin d’observer l’impactsur les choix modaux; la première expérimen-tation réussie dans la ville de Sutton sera pour-suivie à Richmond upon Thames.

• Mise en œuvre et financement de Liftshare,site de covoiturage et de systèmes d’autopar-tage (Car Clubs) par borough (plus de 1000véhicules et 50000 membres).

• Prise en compte du MM dans les opérationsd’aménagement : TfL a réalisé un guide à des-tination des aménageurs, qui ont l’obligationpour les opérations de bureau ou de logementde grande ampleur de réaliser un plan dedéplacements spécifique.

Les effets des actions sont suivis de manièresystématique par TfL, principalement via le logi-ciel de modélisation iTrace (objectifs : observerles changements de choix modal et vérifier l’ef-ficacité des plans de déplacement).L’équipe de TfL intervient en interne, à l’échellerégionale auprès des boroughs, et auprès desacteurs extérieurs comme les associations ouentreprises. En interne, elle participe aux étudesde planification et intervient dans l’élaborationdes réglementations locales. Auprès desboroughs, outre le support financier, elleapporte un soutien pour la réalisation des plansde déplacements, des campagnes d’informa-tion et journées d’action, des aménagementspour les vélos ou les piétons. Elle assure aussila coordination des actions à l’échelle du GrandLondres, afin d’éviter les coupures d’un boroughà l’autre.

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Gérer la mobilité à Londres

Le management de la mobilité se développe partout en Europe sous diversesformes. Londres présente la particularité d’avoir intégré cette compétence au sein de l’autorité organisatrice des transports, avec un départementspécifique, la Smarter Travel Unit. Description.

Matthew Prince(1)

Transport for London

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Vers une mobilité durable en Europe

Développer des offres alternatives

Résultats iTrace- Plus de 1625 PDE recensés,

dont 150 Corporate et 300 Enterprise.On observe une baisse de 13 % de l’utilisation d’un véhicule par le seulconducteur.

- Plus de 2100 plans de déplacementsécoles et, depuis 2004, une baisse de 6,4 % de l’utilisation d’un véhiculepar le seul conducteur pour un déplacement vers l’école.

(1) Land Use Planning Manager, Smarter Travel Unit, TfL.(2) Personalised Travel Planning Project.

LexiqueBorough : circonscription administrative

de Londres correspondant aux arrondissements.

TfL : Transport for London,autorité organisatrice des transports

du Grand Londres.DFT : Department for Transport, ministère

des Transports.Smarter Travel Officers : correspondants

MM locaux.School Travel Advisors : correspondants

locaux pour les déplacements de/vers les écoles.

DCSF : Department for Children, Schools and Families,

ministère de l’Enfance, de l’Éducation et des Familles.

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En 1996, la loi sur l’Air et l’utilisationrationnelle de l’énergie a énoncé l’ob-jectif d’une « diminution de la circula-

tion automobile » dans les agglomérations. Lanécessité de réduire les nuisances sonores, lapollution de l’air, la consommation énergétiqueet les émissions de gaz à effet de serre, a conduitd’une part, à réaffirmer la volonté de maîtriserl’usage de la voiture particulière et, d’autre part,à mettre en œuvre des alternatives. Ainsi, le Gre-nelle de l’environnement s’est prononcé pourla promotion de l’usage du vélo, de l’écomobi-lité scolaire, du transport à la demande, de l’au-topartage et du covoiturage, au sein des plansde déplacements d’entreprises (PDE) et desplans de déplacements urbains (PDU). Il s’agitaujourd’hui de mettre en place une gammecontinue de services à la mobilité permettantde répondre à la diversité des demandes dedéplacements, dans « les conditions écono-miques et sociales les plus avantageuses pourla collectivité», conformément aux dispositionsde la loi sur les transports intérieurs. L’autopartage et le covoiturage allient certainsavantages de la voiture individuelle, comme lafinesse de desserte, le confort et l’intimité, etd’autres avantages propres au transport collec-tif : moindre consommation d’espace, meilleureperformance énergétique, économique et envi-ronnementale par passager. Ils constituent ainsiune alternative crédible à l’usage de la voitureen solo.

L’autopartage : accéder à l’usage d’une voiture sans en être propriétaire«L’activité d’autopartage est définie par la miseen commun au profit d’utilisateurs abonnésd’une flotte de véhicules de transports terrestresà moteur. Chaque abonné peut accéder à unvéhicule sans conducteur pour le trajet de sonchoix et pour une durée limitée ». C’est ainsique le projet de loi Engagement national pourl’environnement (Grenelle 2) définit l’autopar-tage.Les enquêtes ménages déplacements les plusrécentes (2007) ont révélé, sur plusieurs agglo-mérations françaises, une réduction de l’usagede la voiture, alors même que l’équipement desménages en automobile continue de progresser.Les modes alternatifs sont donc de plus en pluscrédibles, et l’usage de la voiture plus raisonné.Pour un usage ponctuel, une utilisation entemps partagé, incluse dans un «bouquet » deservices à la mobilité, avec un véhicule nonpossédé, est possible. Toutefois, les expérimen-tations démontrent l’existence de freins audéveloppement de l’autopartage. L’automobi-liste recherche une intensification d’usage pour«amortir » son achat initial, sa méconnaissance

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Vers une mobilité durable en Europe

Développer des offres alternatives

Vers des usages partagés de la voiture

Le covoiturage est une des alternatives à l’usage de la voiture en solo.

Muriel MariottoRobert Clavel(1)

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Maîtriser l’usage de la voitureparticulière est devenu un objectif fortdes politiques publiques, mais les transports collectifsne peuvent répondre à toutes les demandes de déplacements. Entre ces deux modes, il n’existait pas,jusqu’à présent, d’offre intermédiaire. Mais, depuis quelques années, de nouveaux services se développent.L’autopartage et le covoituragecommencent à offrir une alternativeréelle à l’usage de la voiture en solo.

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(1) Muriel Mariotto est chargée de projets management dela mobilité et Robert Clavel est chargé de projets transportsinnovants au Centre d’études sur les réseaux, les transports,l’urbanisme et les constructions publiques (Certu). Ce cen-tre conduit des études dans le domaine des réseaux urbains,des transports, de l’urbanisme et des constructions publiques,pour le compte de l’État ou au bénéfice des collectivitéslocales, établissements publics ou entreprises chargés de mis-sions de service public ou des professions en cause…

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du coût réel d’usage et de possession d’unevoiture particulière faussant la comparaisoncoûts-avantages avec les autres modes. Or, enfacturant à l’usage, l’autopartage permet uneoptimisation du comportement économiquede l’utilisateur grâce à une meilleure percep-tion de ce coût. Il porte ainsi les germes d’unerationalisation de l’usage de la voiture, favorisel’usage des modes alternatifs et participe auxconditions de réussite de services intégrés enmatière de mobilité.

Un développement aux retombéesprometteuses en Suisse et AllemagneL’autopartage est aujourd’hui particulièrementdéveloppé en Suisse et en Allemagne, où les densités d’utilisateurs sont les plus élevées d’Europe (respectivement 972 et 122utilisateurs pour 100000 habitants contre 7 enFrance). En Suisse, il existe un seul opérateur,Mobility Carsharing,présent sur l’ensemble duterritoire avec 2000 voitures et 80000 abonnés,soit environ 1 % de la population (le plus forttaux de pénétration au niveau d’un pays). ÀZurich, en particulier, 4 % de la population uti-lise l’autopartage. En Allemagne, l’offre est pluséclatée et portée par des structures locales.L’autopartage regroupe 100000 usagers sur 250villes.Le projet européen Moses a montré que lesvéhicules d’autopartage sont généralement uti-lisés pour des déplacements liés aux loisirs etaux achats. On observe une évolution vers uneplus grande occupation des véhicules de l’au-topartage, une moindre utilisation des modesmotorisés par les autopartageurs, un déséquipe-

ment des ménages ayant recours à cette solu-tion. En outre, le développement des servicesd’autopartage représente pour les collectivitésun potentiel de gain en termes d’occupationde l’espace et de congestion. L’offre publique detransports, en se conjuguant avec l’autopartage,garantit une offre plus efficace pour l’usagerintermodal et multimodal. L’autopartage per-met donc une accessibilité optimisée aux lieuxd’activité, renforçant l’attractivité et la compéti-tivité de certains territoires.

En France, des freins au développement à leverOn compte dix-neuf services d’autopartage enFrance, présents principalement dans les cen-tres urbains des agglomérations de plus de100000 habitants. Ils comptent près de 10000adhérents, 60 % d’entre eux résidant à Paris,avec un ratio moyen de quinze adhérents parvéhicule sur l’ensemble des services. Les opéra-teurs sont essentiellement des entreprises com-merciales ou des sociétés coopératives d’inté-rêt collectif. Le développement de l’autopartageen France se heurte à des problèmes organisa-tionnels. L’offre est encore trop peu dévelop-pée pour permettre des économies d’échelle.L’équilibre financier des structures est contraintpar la faible adhésion des entreprises aux ser-vices pour les déplacements professionnels, quipermettrait une utilisation des véhicules auxheures creuses. La méconnaissance des ser-vices d’autopartage (une enquête(2) a indiquéque seuls 8 % des Parisiens en 2007 pouvaientdéfinir le terme) et sa faible visibilité sont autantde freins à son développement. La loi Engage-ment national pour l’environnement créera unnouveau cadre juridique indispensable au déve-loppement de l’autopartage : définition de l’ac-tivité, création par décret d’un label et possibi-lité de réserver des places de stationnement ensurface pour les véhicules d’autopartage.

Le covoiturage : regrouper les usagerspour réduire la circulationLe covoiturage est défini dès juillet 1989(3)

comme « l’utilisation en commun d’une voi-ture». Le covoiturage entre personnes privées nedoit pas donner lieu à une rémunération duconducteur, celui-ci partageant simplementavec le(s) passager(s) les frais (carburants,péages, etc.) liés à l’utilisation de son véhicule.Le covoiturage est évoqué par la loi sur l’Air etl’utilisation rationnelle de l’énergie de 1996,puis par la loi Solidarité et renouvellementurbains de 2000, comme un moyen de réduire

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L’autopartage permet une accessibilité optimisée

aux lieux d’activité, renforçant l’attractivité

et la compétitivité de certains territoires.

(2) Étude relative à l’autopartage à Paris : Analyse des compor-tements et des représentations qui lui sont associés, mairiede Paris, Ademe, 6-T, décembre 2007.(3) Arrêté du 18 juillet 1989 relatif à l’enrichissement du voca-bulaire des transports.

LexiqueCovoiturage : utilisation en commun

d’une voiture particulière.Autopartage : mise en commun

d’une flotte de véhicules de transportsterrestres à moteur au profit d’utilisateurs

abonnés. Chaque abonné peut accéder à un véhicule sans conducteur

pour le trajet de son choix et pour une durée limitée.

PDE : plan de déplacements d’entreprises.Un ensemble d’actions mises en œuvrepar une entreprise pour limiter l’usage

individuel de la voiture dans les déplacements quotidiens

des salariés au profit de mode de déplacements alternatifs.

PDU : plan de déplacements urbainsCentrale de mobilité : lieu d’information,

physique et/ou virtuel, destiné à fourniraux usagers des transports l’information

multimodale d’une agglomération. Le centre propose ses services

pour faciliter les déplacements de l’usageret peut constituer un observatoire

des déplacements pour adapter les services à la demande exprimée.

Projet européen Moses :projet de recherche collaboratif

sur la période 2001-2004 pour développerdes services d’autopartage

et analyser le potentiel du marché à l’échelle de l’Europe.

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la circulation automobile, essentiellement à tra-vers les PDE, que les PDU doivent encourager ausein des administrations et des entreprises pri-vées. Plus récemment, le Grenelle de l’environ-nement préconise la suppression des obstaclesjuridiques à son développement.

En France, une offre de services qui croît rapidement et se structureEn 2007, on peut recenser près de 80 sites Inter-net de covoiturage en France(4), ouverts à tous,qui concentrent 430 000 inscrits et 500 000annonces. Le nombre de sites a été multipliéau moins par quatre depuis 1990. La croissancedu nombre d’inscrits a été importante sur l’an-née 2008, les sites les plus importants gagnantchaque jour entre 400 et 800 nouveaux mem-bres. Plus de la moitié de ces sites, mis en œuvreprincipalement par des associations dédiées,proposent à la fois des trajets réguliers (domi-cile-travail ou domicile-école) et des trajetsoccasionnels, notamment sur de longues dis-tances, avec une majorité de trajets réguliersdans 32 % des cas. Le mode de mise en rela-tion va du simple affichage des coordonnéespar les covoitureurs, avec prise de contactdirecte, à des systèmes d’alerte par courriel indi-quant aux inscrits les offres correspondant àleur demande de trajet. Dans 84 % des cas, unecharte fixe un minimum de règles pour que lecovoiturage se passe dans de bonnes condi-tions. Il existe également des opérateurs decovoiturage sous la forme d’entreprises privées(Comuto, La Roue verte, Greencove, etc.) quisont spécialisés dans des prestations de four-niture de sites à des collectivités ou entreprises.Certains opérateurs proposent en outre un ser-vice de sensibilisation et d’accompagnementde la mise en place de la démarche covoitu-rage en entreprise. Une Fédération nationaledu covoiturage (Feduco)(5) s’est constituée enseptembre 2008, regroupant les principauxacteurs associatifs et privés du covoiturage enFrance. Elle s’est donnée pour mission la promo-tion du covoiturage auprès des instancespubliques et privées. Un de ses objectifs priori-taires est notamment de faire évoluer la régle-mentation en matière de covoiturage afin quecette pratique soit facilitée.

L’entreprise, un lieu privilégié pour organiser le covoiturageLe fait d’appartenir à une même structureapporte une certaine confiance aux covoitu-reurs. Par ailleurs, la saturation des parkingspousse les entreprises à mettre en place ducovoiturage, à travers leur PDE. Elles peuventpar exemple réserver les places les mieuxsituées aux covoitureurs, ou assurer aux passa-gers un service de garantie de retour au domi-

cile (taxis, navettes) en cas de désistement oud’empêchement du conducteur. Dans certainscas, une gratification financière ou matérielle estapportée par l’entreprise aux salariés faisantleur trajet domicile-travail en covoiturant. L’éva-luation nationale des PDE de juillet 2005, réalisée par l’Ademe, précisait que sur 240démarches recensées, le covoiturage représen-tait 19 % des actions. On observe entre 50 et600 inscrits selon les entreprises(6) mais il estdifficile d’avoir un retour précis de l’utilisationréelle du covoiturage, qui nécessiterait uneenquête auprès des salariés.

Le covoiturage et les collectivités localesDepuis 2005, le covoiturage suscite un grandintérêt de la part des collectivités locales. Lesconseils généraux, les intercommunalités et lescommunes sont très actifs pour mettre en placedes sites Internet de mise en relation pour lecovoiturage (24 % des sites recensés), unemesure peu coûteuse. Néanmoins, la créationd’un tel site suppose un suivi et une actualisa-tion des données, afin que les offres proposéessoient pertinentes et que le covoiturage soit unservice fiable. Certaines collectivités mettentégalement en place des aires de covoiturageaux abords de certains échangeurs autorou-tiers, souvent en réponse à du stationnementsauvage de véhicules dans ces zones. Ces airespeuvent éventuellement être multimodales(arrêts des cars, etc).

Un département pilote en France : le FinistèreLe conseil général du Finistère est le premier àavoir mis en œuvre une politique complète enfaveur du covoiturage. Elle s’appuie sur troispiliers : la sécurisation de la pratique (aires decovoiturage), la mise en relation (site Internet)et la sensibilisation (campagnes de communi-cation). Le conseil général a pris à sa chargel’intégralité des investissements, l’entretien desaires étant assuré par les collectivités compé-tentes sur le territoire concerné. Lancé en

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Les dix-neuf services d’autopartageen France comptent près de 10 000 adhérents dont 60 % résident à Paris, avec un ratio moyen de quinze adhérents par véhicule sur l’ensemble des services.

(4) Le covoiturage en France et en Europe - État des lieux etperspectives, Certu, 2007.(5) http://www.feduco.org/(6) Op. cit.

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septembre 2005, le site Internet de covoiturage(7)

est agrémenté d’une cartographie dynamiquepour un repérage visuel de l’offre et de lademande. Il a fait l’objet d’une importante cam-pagne de communication trois mois avant sonlancement. En janvier 2007, il a enregistré 2200inscrits, dont 85 % résidant dans le département,157000 visiteurs et pas moins de 2500 mises enrelation effectives.

Les bons élèves du covoiturage en Europe :l’Allemagne et l’AngleterreDepuis la fin des années 1990, le covoituragesuscite un intérêt particulièrement importanten Allemagne et en Angleterre, pays qui comp-tent les plus forts nombres d’inscrits sur les sitesde covoiturage. L’Italie, la Belgique et certainspays d’Europe de l’Est ont également mis enplace des initiatives, dans le cadre de projetseuropéens (Civitas). Néanmoins, sur l’ensem-ble de ces pays, comme en France, il manquedes données précises sur la réalité des usages.En Allemagne, de nombreux sites Internet pro-posent des trajets longue distance avec au pre-mier plan le site national Mitfahrzentrale(8) quicompte 700000 inscrits. Ces sites nationaux réfé-rencent aussi les trajets réguliers, dits Pendler-netz, mais de manière indirecte à travers lescollectivités locales à qui ils vendent leur plate-forme. Par exemple, le service Pendlernetz duLand de Rhénanie du Nord-Westphalie est unsite de covoiturage disponible dans les 165municipalités qui composent cette région del’ouest de l’Allemagne. Le service est accessibleen passant par un site central(9) ou par ceux desdifférentes municipalités, l’ensemble étant misen réseau. Les personnes n’ayant pas d’accèsInternet peuvent y avoir accès par l’intermé-diaire de centrales de mobilité et des adminis-trations locales. Entre 8000 et 9000 trajets sontproposés chaque jour sur le site national. En Angleterre, Liftshare(10) est un service decovoiturage d’ampleur nationale dont l’accèspeut se faire par le site national ou par des siteslocaux. Ce service compte plus de 200000 ins-crits et environ 34 % des trajets proposés sur lesite national sont effectivement réalisés encovoiturage. Au niveau des sites locaux, ce tauxest de 43 %. Liftshare estime que le service per-met d’économiser environ 29 millions de kilo-mètres en voiture chaque année. Liftshare peutégalement être considéré comme un opérateurde covoiturage puisqu’il propose ses servicesaux entreprises, aux autorités locales, aux éta-blissements scolaires, aux hôpitaux, aux univer-sités, aux services de l’État et aux parcs d’acti-vités.

Les perspectives de développement du covoiturageTout d’abord, pour augmenter les chances d’ap-pariement entre les covoitureurs, le regroupe-ment des offres de covoiturage et la mutualisa-tion des bases de données seraient nécessaires,afin de permettre à l’utilisateur de trouver uncovoitureur sans pour autant être obligé des’inscrire sur plusieurs sites. Cette interopérabi-lité implique le soutien et l’engagement dedivers acteurs (collectivités, entreprises, etc).Pour faciliter la pratique du covoiturage, la col-lectivité dispose de plusieurs moyens d’actionsur l’infrastructure, dont la mise en place d’airesde covoiturage au niveau d’échangeurs auto-routiers. En outre, la création de voies réservéesaux véhicules en covoiturage(11), comme c’est lecas aux Etats-Unis(12), permettrait des gains detemps de trajets en évitant les situations decongestion routière. Enfin, la notion de covoitu-rage dynamique (aujourd’hui au stade deconcept) est à développer. Il se caractérise parune grande souplesse d’utilisation et moins d’in-terdépendance que le covoiturage classique. Il s’agit de pouvoir trouver une course dans undélai rapide (moins d’une demi-heure parexemple) pour un trajet donné et en fonctionde la position des véhicules des conducteurspotentiels. L’accès au service et son mode defonctionnement doivent être faciles et souples.Sous réserve d’une inscription préalable, le tra-jet peut être proposé quasiment instantanémentet traité en quelques minutes seulement. L’orga-nisation de ce service en temps réel et enréseau est rendue possible grâce aux technolo-gies de l’information et de la communication.Des expérimentations ont eu lieu à San Fran-cisco, sur des durées limitées, pour des trajets derabattement sur la station terminale d’une lignede métro automatique. Elles ont montré lanécessité de communiquer en amont et de met-tre en place des mesures incitatives (stationne-ment réservé par exemple).Autopartage et covoiturage se développent enFrance et partout ailleurs, portés par le contexteet les politiques actuelles. Il est important dene pas les isoler des autres modes alternatifs, carils ne peuvent être efficaces à eux seuls. Pourdévelopper une alternative crédible à la voi-ture solo, il faut s’appuyer sur l’ensemble desmodes (transports en commun, autopartage,covoiturage, vélo, marche, etc), chacun d’entreeux ayant son domaine de pertinence.

(7) http://www.covoiturage-finistere.fr(8) http://www.mitfahrzentrale.de(9) http://www.nrw.pendlernetz.de(10) http://www.liftshare.com(11) Il n’en existe aucune en France pour le moment.(12) Washington, Los Angeles, Houston, Seattle, etc.

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Références bibliographiques

• Le covoiturage en France et en Europe -État des lieux et perspectives, Certu, 2007.

• L’autopartage en France et en Europe -État des lieux et perspectives, Certu, 2008.

• Projet européen Moses, Commissioneuropéenne, 2005.

• Projet européen Civitas, Commissioneuropéenne : http://www.civitas-initiative.net

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Lyon, Paris et Barcelone forment le trio parqui tout a changé. Le nouveau vélo enlibre-service (VLS) arrive en 2004 à Lyon,

avec le programme Vélo’v, sur un concept iné-dit : large couverture de la ville, nouvelle tech-nologie et financement adossé à des recettes depublicité.

Lyon, Paris, Barcelone, le trio qui a tout changéL’histoire à succès se poursuit en 2007 avec lelancement de Bicing à Barcelone et de Vélib’àParis. Plus qu’une question d’échelle, ce sont lechangement d’ambition et la pertinence deschoix retenus pour ces trois expériences quiconstituent la clé de leur réussite. Le contre-exemple est l’expérience de Bruxelles, au sys-tème identique à celui de Paris, mais pénalisépar un périmètre trop réduit.

Les limites du financement par la publicité et l’émergence de nouveaux modèlesDe nombreuses villes ont succombé à la for-mule vélos + publicité mise en avant par le Fran-çais Jean-Claude Decaux et l’Américain ClearChannel, pour développer leur offre VLS. Maisdes dispositifs tel que Vélib’ ne se financent inté-gralement par le marché publicitaire que dansles très grandes villes. Des collectivités localesde taille plus modeste, ayant choisi ce système,sont souvent amenées à apporter des complé-ments financiers.C’est pourquoi d’autres villes ont souhaité dis-socier le service VLS de la gestion de l’affichagepublicitaire. En France, la ville d’Orléans a confiéson réseau VLS à Effia(2) et assume l’intégralitéde la charge financière en échange d’une plusgrande capacité de contrôle. C’est égalementle choix de Montpellier qui a privilégié l’intégra-tion de Vélomagg dans son offre globale detransports urbains. À Barcelone, les coûts duservice Bicing sont couverts par un nouveaurégime de stationnement payant. Ces différentesalternatives montrent que les possibilités sontplus vastes qu’il n’y paraît et que de nouveauxacteurs et de nouveaux montages, adaptés à

chaque territoire, pourraient encore voir le jour.La déferlante VLS a, en outre, occulté la perfor-mance d’offres plus conventionnelles de prêtou de location de vélos longue durée. Certesmoins sophistiqués technologiquement, doncpeu médiatiques, ces dispositifs offrent pour-tant un rapport efficacité-prix imbattable(3). Bor-deaux a ouvert une voie alternative en lançantdès 2002 un service qui compte désormais 4000vélos, imité depuis par la ville d’Angers, selon leprincipe du prêt gratuit d’un vélo pour unedurée renouvelable de trois mois. De même, lacommunauté urbaine du Grand Lyon, au lieud’étendre son système Vélo’v, proposera pourses quartiers périphériques la location de véloslongue durée.

L’apparition de challengers de poidsLes opérateurs historiques des transportsurbains, jusqu’ici très en retrait, se positionnentsur ce marché considéré comme un prolonge-ment naturel de leurs métiers : après Transdev àMontpellier, c’est au tour de Kéolis et de Véoliad’élaborer des offres de vélos partagés. Demême, les compagnies ferroviaires expérimen-tent des services susceptibles de favoriser l’in-termodalité avec leurs propres réseaux, commela Deutsche Bahn, avec Call a Bike, ou la com-pagnie NS (Pays-Bas), avec un service de vélosdans des gares de zone urbaine peu dense.La liste de nouvelles villes prévoyant de se doterd’un dispositif de vélos partagés devrait s’allon-ger : Milan, Montréal, Chicago, Tel-Aviv, Brisbaneou Sydney. On évoque même des projets baséssur l’usage de vélos à assistance électrique àMonaco ou à San Francisco, option testée avecbonheur à Clermont-Ferrand ! Gageons quecette floraison sera entretenue par les membresdu Club des villes cyclables, à l’initiative d’unréseau international d’échanges d’expérienceslancé en juin 2008 autour de la Charte des villesà vélos partagés.

Vélos partagés : une floraisond’initiatives dans le monde entier

Les vélos en libre-service (VLS) occupent aujourd’hui une place de choix dans les politiques cyclables. Les premières expériences datent pourtant des années1970, aux Pays-Bas, au Danemark, ou encore, en France, à La Rochelle, mais ellesont connu récemment un essor considérable grâce à de nouvelles technologiespermettant d’emprunter un vélo à un endroit et de le restituer à un autre.

Didier Couval(1)

Mairie de Paris

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Les vélos en libre-serviceconnaissent aujourd’hui un essor considérable.

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Références bibliographiques

• Paris - Apur. Étude de localisation desstations de vélos en libre-service.Rapport décembre 2006. Égalementdisponible : Note de 4 pages n° 27,septembre 2007. Implanter 1 451stations Vélib’ dans Paris. www.apur.org

• Londres - Transport for London (TfL).Étude de définition du dispositiflondonien : Feasibility study for a centralLondon cycle hire scheme. Rapportnovembre 2008. www.tfl.gov.uk

• France - Comparaison entre dispositifsde vélostations et de vélos en libre-service.Actes de la 9e Journée d’étuded’avril 2007. www.fubicy.org

• Espagne - Instituto para ladiversificacion y el ahorro de la energia(Idae). Répertoire des expériencesespagnoles : Guía metodológica para laimplantación de sistemas de bicicletaspúblicas en España. 2007. www.idae.es

• International - Communautéeuropéenne. Panorama des systèmes devélos en libre-service existants dansdiverses villes européennes, pour leprogramme Niches de mobilité durableen ville, par Sébastien Bührmann.www.niches-transport.org

• Réseau des villes à vélos partagés duClub des villes cyclables.www.villes-cyclables.org

Principales expériences de vélos partagésdans le mondeAllemagneBerlin : juillet 2002, 1650 vélos.EspagneBarcelone : mars 2007, 6000 vélos.FranceBordeaux : 2002, 4000 vélos.Lyon : octobre 2004, 4000 vélos.Montpellier : juin 2007, 600 vélos.Paris : juillet 2007, 20600 vélos.Pays-Bas2004, 200 gares du réseau NS,4000 vélos.

(1) Ingénieur terrritorial, en poste à la direction de la Voirieet des Déplacements de la ville de Paris.(2) Filiale de la SNCF.(3) Enquête de la Fédération française des usagers de labicyclette (FUBicy) présentée en avril 2007.

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Les Cahiers – Le rapport que vous avezprésenté sur l’avenir du rôle de l’autoritéorganisatrice de transport en Île-de-France a eu un certain échodans la presse… sur la question des taxis.Pourquoi vouloir changer la gouvernancedes taxis en Île-de-France ?Jean-Michel Paumier – Dans un sondagerécent Sofres pour l’Observatoire de la villeauprès d’un millier de Franciliens, la questiondes transports et de la circulation est apparuecomme le principal défi à relever pour conci-lier mobilité et développement durable. Si ledéveloppement des réseaux de transports col-lectifs est jugé comme le moyen le plus perti-nent pour progresser dans cette voie, les moyensalternatifs sont considérés comme des solu-tions efficaces pour répondre à la fois à la fortepréoccupation environnementale des Franci-liens et aux enjeux d’une mobilité facilitée etrationalisée à l’échelle régionale.Dans ce contexte, il est important de considérerla place que peuvent occuper les taxis et lesconditions nécessaires pour leur faire jouer plei-nement un rôle dans le système de transportpublic francilien, alors qu’aujourd’hui la partqu’ils assurent dans les déplacements motorisésreprésente moins de 1 % (quatre fois moinsqu’à Londres).Le taxi constitue par sa souplesse et son adap-tabilité un maillon indispensable entre trans-port collectif et transport individuel et un outilnécessaire à la mobilité urbaine. À l’exemplede ce qui est mis en œuvre dans certaines villescomme La Rochelle ou Poitiers, le service destaxis peut venir en complément des transportscollectifs, sur certaines relations où la demandeest faible, à certainesheures de moindre tra-fic ou pour participer audésenclavement de cer-tains quartiers périphé-riques dont la dessertese prête mal à un trans-port public traditionnel.Ainsi, transports collectifs et taxis ont partie liée,ces derniers bénéficiant d’ailleurs des aména-gements de voirie (couloirs réservés, sites pro-pres) en partage avec les autobus. En matière degouvernance cependant, il n’existe pas de réellecoordination et encore moins de synergie entreces activités de service public pourtant toutesdeux dédiées à la mobilité, situation préjudi-ciable à une contribution efficace et structu-rée à l’efficacité globale du système de trans-

port francilien. Pourtant des organisations inté-grées existent ailleurs et fonctionnent à la satis-faction des utilisateurs. Ainsi, la mairie de Lon-dres supervise Transport for London, autoritéqui, en plus des transports collectifs, exerce saresponsabilité sur la voirie principale, les feuxde signalisation et la régulation des taxis, aubénéfice d’une coordination assez poussée desdifférents modes de déplacement.On peut donc se poser légitimement la questionde la pertinence du cadre actuel en Île-de-France, où coexistent les taxis communaux engrande couronne, ceux de la petite couronne,ceux d’Orly et les taxis parisiens. Cette situationne va pas dans le sens d’une gestion intégrée del’activité ni d’une intermodalité avec les trans-ports collectifs, le Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif) étant actuellement tenu àl’écart de cette problématique.

L. C. – Selon vous, étant donné la complexité du paysage institutionnelet l’organisation de la profession, à quelle échéance cette préconisationpourrait-elle être mise en œuvre?J.-M. P. – Alors que viennent de s’engager les tra-vaux d’élaboration d’un nouveau plan de dépla-cements urbains en Île-de-France dont la res-ponsabilité incombe désormais à l’autoritéorganisatrice des transports, le Stif, la questionde placer l’organisation des taxis sous cetteautorité publique unique se pose en des termesd’autant plus légitimes que, s’agissant d’uneactivité réglementée, il y aurait là une voie versplus d’exigence de qualité de service, de trans-parence et d’écoresponsabilité, assortie d’obli-gations de service public plus affirmées.

Une telle évolution nepeut se concevoir queprogressivement, en parte-nariat notamment avec les diverses organisations professionnelles concer-nées, dans une relation« gagnant-gagnant ». Elle

pourrait faire l’objet d’expérimentations à l’oc-casion, par exemple, d’événements mobilisantdes moyens de transport d’une exceptionnelleimportance, ou dans le cadre d’une dessertede pôles multimodaux mobilisant une largegamme de moyens de transport, à planifier etcoordonner en synergie.

Propos recueillis par Frédérique Prédali

Jean-Michel Paumier a réalisél’essentiel de sa carrière à la RATP dont il est, depuis 2001, le représentant au Conseil économique et social de la région Île-de-France. Dans ce cadre, il a préparé avec DanielRabardel, au titre de laCommission des transports, un rapport sur les perspectivesd’évolution du rôle et des compétences du Stifapprouvé par le CESR en octobre 2007. Entretien sur la gouvernance des taxis en Ile-de-France.

Taxis et transports publics en Île-de-France : quelle articulation ?

Interview

J.-F.

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» Le taxi constitue par sa souplesse et son adaptabilité un maillonindispensable entre transport

collectif et transport individuel et un outil nécessaire

à la mobilité urbaine. «

Les institutions en Île-de-France en charge des taxisLa profession des taxis en France est sous la tutelle du ministère de l’Intérieur. Les taxis parisiensdépendent de la Préfecture de police de Paris. Leur périmètre, défini légalementen 1966, est moins étendu que celui de la petite couronne. Il s’étend sur 480 km2 (territoire de près de 5,5 millions d’habitants), et inclut la desserte du parc des expositions de Villepinte et des aéroports d’Orly et Roissy. Dans le reste de la région, d’autres taxisont obtenu leur autorisation par la mairie.Ils sont encadrés par les préfectures de leurs départements respectifs.

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ÀLondres, Madrid et Berlin, les taxis pré-sentent des différences avec les taxisparisiens. Ces contextes variés donnent

un éclairage pour faire évoluer la situation enÎle-de-France où l’absence de liens entre le Syn-dicat des transports d’Île-de-France (Stif) et laprofession ne favorise pas la complémentaritéavec l’offre de transport public.

Pour un périmètre cohérent…Rappelons tout d’abord que le périmètre destaxis parisiens date de la fin des années 1960 etn’a jamais évolué depuis. Il ne couvre pas l’ag-glomération ni l’ensemble de la zone dense,comme c’est le cas pour le Grand Londres oùles taxis couvrent un territoire trois fois plusvaste que le périmètre des taxis parisiens. Moinsde la moitié de la population francilienne estdirectement incluse dans le périmètre des taxis,alors que cette part est plus élevée dans lesautres régions examinées. Par exemple, Madrida étendu régulièrement le périmètre des taxismadrilènes jusqu’à desservir aujourd’hui plusde 80 % des habitants de la Communauté. Lestaxis parisiens ne fournissent qu’une partie del’offre en Île-de-France, le ministère de l’Inté-rieur dénombrant 2 140 taxis communaux endehors de ce périmètre (2004). Même si ce par-tage des rôles et des territoires ressemble à celuides taxis à Berlin-Brandebourg ou Madrid, l’ef-ficacité des systèmes n’est pas la même, notam-ment à cause d’un manque de lisibilité de l’of-fre en Île-de-France.

… et une gouvernance simplifiée en lien avec les transportsUn vaste panel d’acteurs intervient dans le sec-teur des taxis de notre région: différents niveauxde collectivités (départements, communes etville de Paris) et plusieurs acteurs représentantl’État (ministère de l’Intérieur, des Finances, etles préfectures départementales et de policede Paris). Les taxis ne faisant pas partie destransports régis par la Loti(2), le Stif n’est pasimpliqué dans leur gestion et aucune adminis-tration n’a le souci ni la compétence pour pro-poser une offre de transport cohérente sur l’en-semble du territoire régional et complémentaireavec l’offre de transport public. À l’opposé, àLondres, c’est la même entité, contrôlée par lemaire de Londres, qui est en charge des trans-ports publics, des taxis et de la remise, ce quipermet d’intégrer ces modes en amont de touteréflexion sur la desserte d’un site ou d’un évé-nement.Le manque de cohérence du cadre réglemen-taire francilien se traduit par une multiplicitédes grilles tarifaires (une par département). Cesgrilles proposées n’entraînent pas de diffé-rences majeures pour des courses de faibleampleur, mais cette multiplication contribue àrenforcer le sentiment de confusion que res-sent le client qui a des difficultés à connaître sesdroits ou tout simplement à identifier l’offre :

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Développer des offres alternatives

Taxis de Londres, Madrid, Berlin :des idées pour l’Île-de-France

À Londres, Madrid, Berlin ou Paris,les taxis n’occupent pas tous la même place entre la voitureparticulière et les transportscollectifs.

Frédérique Prédali(1)

IAU île-de-France

Un taxi est, par définition, un mode hybride, ni totalement privé,ni totalement public, destiné à transporter une à quelquespersonnes. Ce mode particulier devraittrouver une place complémentaire aux transports publics mieux établiedans les grandes métropoles.

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(1) Frédérique Prédali est économiste des transports.(2) Loi d’orientation sur les transports intérieurs du 30 décem-bre 1982.

LexiqueTaxi : l’appellation taxi est réservée aux véhicules quatre-roues équipés d’un taximètre. Les taxis bénéficient

d’espaces réservés sur la voie publique et peuvent travailler sans réservation,contrairement à l’activité de remise.

Petite remise (PR) : location de véhiculebanalisé avec chauffeur sur réservation

pour le transport de personne, qui ne peut être loué à la place.

Grande remise (GR) : location de véhiculehaut de gamme, sur réservation

et selon des conditions fixées à l’avanceentre les parties. Elle dépend du ministèredu Tourisme et des préfectures (Préfecture

de police de Paris en Île-de-France) qui accordent les licences

aux entrepreneurs pour un nombre définide voitures. D’après le ministère, il y aurait

180 entreprises et 1400 véhiculescertifiés en Île-de-France.

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visibilité des bornes, plan mentionnant les sta-tions, accès et différences avec la remise… Lesautres métropoles proposent des véhicules detaxi aux couleurs uniformisées. Enfin, les sta-tuts sont plus homogènes dans les autres métro-poles où les conducteurs de taxis sont surtoutdes travailleurs indépendants, alors qu’en Île-de-France, quatre statuts coexistent (locataire,actionnaire, salarié et artisan) et divisent la pro-fession.De cette multiplicité de statuts et enchevêtre-ment d’acteurs aux préoccupations diverses,et pas forcément en lien avec le transportpublic, ressort une difficulté à poser un constatétayé sur l’activité, que ce soit en termes d’offre,ou de demande pour l’ensemble de la région.

Taxis et remise, complémentaires ou concurrents ?L’activité de remise est relativement méconnue,il s’agit d’une location de véhicule avec chauf-feur, sur réservation et selon des conditionsfixées à l’avance entre les parties. Contraire-ment au taxi, le véhicule de remise est bana-lisé et ne dispose pas de compteur. Les licencessont différentes pour les taxis et la remise et lessituations sont contrastées selon les métropoles:si la licence de remise ne fait nulle part l’objetde marchandage, celle de taxi est négociable etcessible à Madrid et en Île-de-France alorsqu’elle n’a pas de valeur patrimoniale à Berlinet Londres.Dans les autres métropoles, moins d’acteurs ins-titutionnels sont impliqués : ce sont souvent lesmêmes pour les taxis et la remise. Ils sont aussien lien avec les transports publics, directement(Londres) ou indirectement (Madrid, Berlin).À Londres, les taxis et la remise dépendent del’autorité organisatrice de transport, Transportfor London (TfL), organisme sous l’égide dumaire de Londres. Les taxis sont davantage pré-sents dans le cœur de Londres, tandis que lesmini cabs (remises) sont actifs dans l’Outer London. En Allemagne et en Espagne, la gouver-nance de type fédérale permet aux régions delégiférer, et donc d’agir sur ces activités. Tandisqu’à Madrid, la remise a été intégrée à l’offre detaxi lors d’une réforme en 1979, la remise est àLondres et à Berlin davantage perçue commeun complément d’offre (ce qui porte l’offretotale de taxis et remise à un niveau très élevé).Dans le Land de Brandebourg, les chauffeursont la possibilité de demander des licencesmixtes (remise-taxi), alors que le nombre delicences de taxis est plafonné dans ce Land.Les tarifs de la remise y sont plus élevés queceux des taxis, notamment en raison d’un tauxde TVA différent (la remise est taxée à 19 %contre 7 % pour les taxis).Dans ces métropoles où la remise englobe des

véhicules spécifiques comme les véhiculesluxueux ou plus capacitaires, et parfois mêmeles ambulances, l’activité de remise est mieuxperçue qu’en Île-de-France. En France, en dis-tinguant la petite et la grande remise, on ren-force le sentiment que l’on autorise aux véhi-cules de la petite remise, aux dimensionséquivalentes à celles des taxis, plus de permis-sivité et moins de sécurité.

Pour une offre en rapport avec la demandeAvec une offre totale de 1,5 taxis pour1000 Franciliens (et 3 pour 1000 habitants dansle seul périmètre des taxis parisiens), l’Île-de-France n’est pas a priori la mieux placée entermes de niveau d’offre. Cet indicateur très glo-bal a cependant ses limites car une comparai-son complète nécessiterait la prise en considé-ration du temps de travail des chauffeurs, de lataille des périmètres d’activité(3), de l’étalementde l’urbanisation et des activités…Juger de l’adéquation de l’offre à la demandemériterait de tenir compte de la satisfaction dela demande selon l’heure ou la zone, et duniveau de desserte des transports publics, dumaillage et leur tarification… Si les profession-nels parisiens connaissent les lieux et les heuresoù la demande s’exprime, ils se concentrentaux points les plus attractifs comme les aéro-ports. Le développement des outils de localisa-tion et de communication et l’affiliation auxcentraux radio permettent de mieux connaîtreles attentes des clients et aident à faire coïnci-der l’offre et la demande. Ces moyens contri-bueraient à diminuer le temps où le taxi rouleà vide (environ 40 % du temps selon les taxisparisiens de la compagnie G7).Évaluer le niveau de demande, par lieu, horaireou motif, est également une gageure. En tantqu’autorité gestionnaire, les mairies de Madridet Londres réalisent des enquêtes de satisfaction

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Taxis de Londres, Madrid, Berlin : des idées pour l’Île-de-France

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Les taxis et remises en Île-de-France : un contexte institutionnel complexeEn Île-de-France, la situation est complexeavec la Préfecture de police de Paris qui contrôle les taxis parisiens, les autrespréfectures encadrant les taxiscommunaux en périphérie du périmètredédié aux taxis parisiens. Le ministère de l’Intérieur est le ministère de tutellepour la profession des taxis et de la petiteremise, mais pas celui de la grande remisequi est encadrée par le ministère du Tourisme. Enfin, le ministère desFinances intervient pour la définition des barèmes de prix.

Quelques chiffres• Nombre moyen de passagers par course :

1,12 (enquête aux bornes - Ville de Paris- 2007).

• Distance moyenne d’une course à Paris :4,8 km.

• Durée moyenne d’une course entre 7 h - 21 h un jour ouvrable : 25 min(source : syndicat professionnel descentraux radio taxi de Paris, et la régionparisienne pour 2006 et 2007).

• Consulter les statistiques sur les taxis à Paris : http://www.paris.fr/Rubrique : déplacements/voitures et deux roues motorisés/taxis.

État de la remise en IDFLes données statistiques actualisées sur l’offre de taxis sont difficiles à obtenirde façon exhaustive, et cela est encoreplus aigu pour les véhicules de remise. En Île-de-France, on peut estimer que l’activité de remise – au sens strict et assimilé, et exercée légalement –concernerait au moins 7400 véhiculesdont les véhicules luxueux, minibus et navettes, et plus de 300 motos-taxis(terme impropre puisqu’un taxi est un véhicule à quatre roues obéissant à certaines normes de taille, confort et sécurité). Faute de statut légal clair, ces motos sont assimilées aux véhiculesde grande remise. En pleine expansion,elles gagnent des clients aux aéroports,aux gares parisiennes et dans Paris.Les motos-taxis n’existent pas à Madrid ouBerlin mais sont présentes depuisplusieurs années dans le Grand Londresavec une licence temporaire deTransport for London (TfL)(les régularisera-t-il vraiment?).

(3) Pour les licences des chauffeurs de taxi à Londres, le péri-mètre d’action peut être limité à une zone, équivalente à unou deux boroughs, située en périphérie du Grand Londres.

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auprès des clients et des statistiques sur lescourses. Deux tiers de la clientèle francilienneserait une clientèle d’affaire, alors qu’à Londres,la clientèle d’affaires est moins prépondérante,et les taxis et mini cabs sont très utilisés pour lesmotifs «achats et loisirs ». À Madrid, les achats-loisirs représentent autant de courses envolume que les motifs professionnels. Viennentensuite «santé-affaires personnelles». Là encore,la performance et la couverture des réseaux detransport en commun peuvent expliquer enpartie ces différences d’usage des taxis selon lesvilles, mais aussi le niveau de prix des taxis. Enfait, leurs tarifs sont perçus comme élevés dansles métropoles où les tarifs des transportspublics sont attractifs, comme c’est le cas enÎle-de-France. Ils sont moins ressentis commecoûteux à Londres au regard des prix élevésdu métro (quatre livres le ticket simple).Outre le niveau de prix, les tarifications propo-sées par les taxis des différentes métropolessont assez similaires dans leur structure exceptésur la facturation du parcours d’approche.Lorsque le client réserve (à une borne, sur appeltéléphonique ou via le site web d’un central) àMadrid ou en Île-de-France, le compteur du taxile plus proche tourne dès qu’il a fini sa courseprécédente, alors que les taxis londoniens etberlinois facturent un forfait qui met le client àl’abri d’une mauvaise surprise.

Vers une nouvelle gouvernance ?Pour constituer une véritable alternative ou uncomplément au transport public, les taxisdevraient au moins être visibles (couleur duvéhicule et lisibilité du lumineux), attractifs

(tarification unifiée, forfait ou ordre de prix) etdisponibles aux heures et aux lieux où les busse font rares. La mise en œuvre de ces exigencesen Île-de-France se heurte à la fois à la com-plexité du paysage institutionnel et au morcel-lement de la profession (statuts et réticencesaux réformes) et dépend de fait de la bonnevolonté des professionnels, notamment desgroupes qui occupent le marché des taxis pari-siens.Londres, Madrid et Berlin présentent une orga-nisation plus claire et cohérente du secteur destaxis. La comparaison nous enseigne que l’exis-tence d’une autorité unique sur un périmètrerégional, et compétente en matière de trans-port (autre que taxi), évite l’obsolescence desrèglements et facilite l’amélioration de ces ser-vices au fil du temps…

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L’offre de taxis dans les capitales européennesTaxis Parisiens Madrilènes Londoniens Berlinois

Autorité Préfecture de police de Paris Ville de Madrid (délégation de la Cam) Transport for London (TfL) Land de Berlin (ministère des Transports)

Tutelle État (min. Intérieur et Minéfi pour tarifs) État et Communauté autonome État (DfT) et Grand Londres (maire) État et LandPérimètre partie de Paris-petite couronne zone dense Grand Londres Land de Berlin

En km2 480 1766 1580 892

Part du territoire régional 4 % (des 12012 km2) 22 % (des 8022 km2) 100 % (des 1580 km2) 100 % (des 892 km2)

Part de la population 47 % (des 5453138 Franciliens) 83 % (des 5074275 hab. CAM) 100 % (des 7512400 Londoniens) 100 % (des 3404000 Berlinois)

Nombre de taxis 15600 (05/2008) 15646 21729 6936Quotas ou seuils numerus clausus numerus clausus illimité illimité

Taxis/1000 hab. 3 3 3 2Taxis/km2 33 9 14 8

Licencepour un véhicule, sur le périmètre, à vie et cessible

pour un véhicule, sur le périmètre, à vie et cessible

licence pour le chauffeur, à renouveler tous les3 ans, sur un périmètre donné, incessible

permis et licence du chauffeur valables 5 ans sur un périmètre donné, incessibles

Statut des taxisartisans, coopérateurs, salariés et loueurs-locataires

indépendants, titulaires ou non, salariés indépendants en majoritéindépendants en majorité, salariés (locataire interdit)

Temps de travail contrôlé, 10 à 11 h d’amplitude par jour roulement imposé par l’autorité (5 jours/7) aucun contrôlepas pour les artisans (les salariés peuventtravailler sur une amplitude de 10 h)

Remise distinction petite (PR) ou grande (GR) pas de distinction pas de distinction pas de distinction

Nombre de véhicules de remiseN. R. (en Île-de-France : 94 entreprisesautorisées PR et 1400 véh. recensés GR)

569 486071150(inclut transport spécialisé et GR)

Autorité/tutellePR : ministère de l’IntérieurGR : ministère du Tourisme

Ville de Madrid (délégation de la CAM)

TfLLand de Berlin(ministère des Transports)

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Références bibliographiques

• Consulter les études de l’IAU sur les taxis àLondres, Madrid et Berlin, à paraître en2009.

S.Vo

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À Berlin, on compte en moyennedeux chauffeurs par véhicule. Ces derniers peuvent donc roulerpotentiellement 24 h sur 24, ce qui double l’offre. À Paris, moins de 800 taxis sont autorisés à faire deux sorties par jour.

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La couleur des taxis (ici à Madrid)participe de leur bonne visibilité par les clients.

Les fameux Black Cabs sont parfois peints pour des raisons publicitaires, mais ils restentreconnaissables par leur forme.

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Le secteur des transports représenteaujourd’hui 37 % des émissions natio-nales de CO2 avec 50,8 mégatonne équi-

valent pétrole (Mtep), 31,3 % de la consomma-tion énergétique nationale, dont 47 % pour letransport routier de personnes.

Constructeurs automobiles : peuvent mieux faire !Malgré les accords de réduction des émissionsde CO2 des voitures mises sur le marché à140 g/km en 2008 en Europe, les constructeursn’atteindront pas l’objectif. Les progrès faits surles moteurs, alliés à une forte diésélisation desventes, ont fait passer l’émission de CO2/km desvoitures neuves en Europe de 185 g/km en 1995à seulement 160 g/km en 2006. Depuis 1970, lesémissions de polluants locaux ont diminué de15 % à 50 %, selon les polluants, grâce auxnormes Euros successives. Mais les gains sur lesémissions CO2/km ne sont pas aussi importantsqu’ils auraient pu l’être car, pendant ce temps,les voitures se sont alourdies d’un peu plus de20 kg/an, soit plus de 250 kg depuis 1995 ; lapuissance des moteurs a crû de 45 %, ce quipermet à 96 % des voitures neuves de pouvoirrouler à plus de 150 km/h, et les accessoires deconfort, climatisation en particulier, sont deve-nus la règle. La négociation acharnée autourde l’objectif de 120 gCO2/km en 2012 s’est tra-duite par… un objectif porté à 130 g/km en2015, et un système permettant d’introduire lamasse du véhicule dans le système de péna-lité.

Adapter les performances des véhiculesIl faut réduire la vitesse maximale des véhi-cules. Alors qu’environ un tiers des kilomètresparcourus par an en voiture le sont dans deszones agglomérées, les véhicules sont conçuspour rouler sur autoroute. Pollution de l’air,consommation exagérée d’espace public, ainsique nuisances sonores, en sont les consé-quences. Il est donc nécessaire de traiter lesdeux types d’utilisation de manière séparée,avec une offre urbaine à développer.

Développer les motorisations alternativesLe moteur électrique présente l’avantage, parrapport au moteur thermique, d’avoir son cou-ple maximum dès le démarrage, la capacité derécupérer l’énergie au freinage sous formed’électricité, et d’être silencieux. Il est donc inté-ressant dès lors que les accélérations et frei-nages sont fréquents (en ville, sur route…). L’ali-mentation en électricité de ce moteur peut êtreassurée par un ensemble moteur à explosion/alternateur/batterie tampon (hybridation), parune batterie, ou par une pile à combustible.Dans le premier cas, les combustibles sont fos-siles ou des biocarburants(2). L’autonomie et lapolyvalence sont analogues à celle d’un véhi-cule thermique. Dans les deux autres cas, lacapacité de stockage à bord limite l’autonomie(actuellement de l’ordre de 200 km). Par ail-leurs, le bilan global en CO2 peut s’avérer néga-tif selon la nature de la production d’électricitéou d’hydrogène.

Adapter l’offre aux nouveaux usagesLa tendance au recul de la possession de l’au-tomobile au profit des services de mobilité(autopartage, libre-service, covoiturage…) impli-querait une autre manière de concevoir lesvéhicules, pour les adapter au mieux aux nou-velles caractéristiques de la demande. Pourl’usage en agglomération, ou des déplacementscourts, ils pourraient être électriques, petits,maniables, à deux, trois ou quatre roues. Alorsque pour des usages routiers, il faut plutôt pri-vilégier des véhicules confortables, hybrides etéconomes.La panoplie des solutions techniques à dévelop-per reste très ouverte. Il n’y aura pas de solu-tion unique, mais la cohabitation de plusieurséléments apportant chacun une contributionpourrait se révéler payante. Ne dit-on pas que lespetits ruisseaux font les grandes rivières ?

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Les automobiles de demain : des voitures propres et partagées ?

La récente envolée des prix du pétrole nous a rappelé brutalement la très forte dépendance du secteur des transports à l’égard des produitspétroliers. Elle fragilise une économie fortement basée sur les échanges. Par ailleurs, leur utilisation massive fait du secteur des transports un des principaux contributeurs de l’effet de serre et de nuisances locales.Comment les choses peuvent-elles évoluer ?

Alain Morcheoine(1)

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

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Le moteur électrique présente des avantages par rapport au moteur thermique, notammenten ville. Mais dans le cas de moteurs non hybrides, la capacité de stockage à bordlimite l’autonomie.

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(1) Alain Morcheoine est directeur de l’air, du bruit, et del’efficacité énergétique à l’Agence de l’environnement et lamaîtrise de l’énergie.(2) La disponibilité limitée des biocarburants pouvant impli-quer une dépendance.

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Quelles politiques d’accessibilité au transport en Europe?

Accessibilité des systèmes de transports :un nivellement par le haut

L’avenir des rues : mixité et cohabitation

de tous les usagers

La marche, mode d’avenir

Contribuer à une villeplus accessible

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Depuis la fin des années 1990, l’Unioneuropéenne multiplie les initiatives enmatière d’accessibilité des services de

transport pour favoriser la libre circulation despersonnes et la libre concurrence au sein deson marché commun, avec la volonté d’amé-nager les services de transport aux besoins detoute la population. Cette volonté s’inscrit dansune démarche plus globale de lutte contretoutes les formes de discrimination – l’inacces-sibilité pouvant être perçue comme une formede discrimination indirecte –, et d’égalité desdroits et des chances. Ceci afin d’assurer la par-ticipation «à part entière» des personnes han-dicapées, leur autonomie et la réalisation deleur potentiel social et professionnel. La créationd’un environnement « positif et bienveillant »pour tous permet ainsi de valoriser au mieux ladifférence entre les individus et la diversité dela population européenne.

Un cadre européen pour une ambitionpartagéeLa directive européenne 2001/85 précise lescaractéristiques d’accessibilité des autobusvalables dans toute l’Europe, pour éviter qu’unpays n’instaure des barrières à l’entrée de sonmarché domestique. Dans le même esprit, ladirective 2004/17 fixe les conditions de passa-tion des marchés avec les opérateurs de trans-port. Elle indique que les spécifications tech-niques du cahier des charges de ces marchésdoivent «chaque fois que possible [...] être éta-blies de manière à prendre en considération

les critères d’accessibilité pour les personneshandicapées ou la conception pour tous lesutilisateurs ». On peut également citer la déci-sion de la Commission européenne du21 décembre 2007 concernant la spécificationtechnique d’interopérabilité relative aux per-sonnes à mobilité réduite dans le système fer-roviaire transeuropéen conventionnel et àgrande vitesse qui définit, comme la directivesur les autobus, un niveau minimal de prestationgaranti partout en Europe. Enfin, l’Union euro-péenne facilite l’accès au transport des per-sonnes à mobilité réduite en poursuivant salutte contre les discriminations débutée en 1997avec l’adoption du traité d’Amsterdam.L’ambition d’un monde adapté à tous est désormais partagée: la quasi-totalité des pays del’Union européenne soutiennent des politiquesd’accessibilité. En France, la loi n° 2005-102 du11 février 2005 impose la mise en accessibilitédes services de transport collectif d’ici 2015.L’État français répond ainsi à une demandesociétale. Il s’inscrit également dans le cadredes politiques européennes et tient ses enga-gements vis-à-vis d’organisations internationalestelles la Conférence européenne des ministresdes transports ou l’Organisation des nationsunies (Onu), qui a adopté la convention sur lesdroits des personnes handicapées en 2007.

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Contribuer à une ville plus accessible

Quelles politiques d’accessibilitéau transport en Europe?

La France est l’un des rares payseuropéens à avoir fixé une datelimite pour l’accessibilité des transports collectifs :février 2015.

Éric HeyrmanClaude Marin-Lamellet(1)

INRETS-LESCOT

L’accessibilité au transport pour tous, y compris aux personnes à mobilitéréduite, est devenue une priorité, en Europe comme ailleurs. Mais si le cadre général, les ambitionset les valeurs sont communes, les moyens utilisés, et leur déclinaisondans les textes législatifs, sont parfois différents.

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Références bibliographiques

• TENNOY Aud, LEIREN Merethe Dotterud,Accessible public transport. A view ofEurope today - policy, laws and guidelines,Deliverable of WP 1 of Euro-AccessProject, 6th framework programme, DGRTD, 2008.

(1) Éric Heyrman est ingénieur des TPE, reconnu spécialistepar le comité de domaine «Transport, sécurité » du MEEDAT,doctorant en sciences politiques. Claude Marin-Lamellet estchargé de recherche en ergonomie-sciences cognitives, res-ponsable de l’équipe de recherche Vieillissement, handicapset mobilité.

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Des moyens variables selon les paysMalgré une volonté commune de se diriger versdes services de transport accessibles, lesmoyens utilisés varient selon les pays.

Les échéancesSi les pays européens s’accordent sur le fait queles nouvelles constructions d’infrastructures,les rénovations importantes, et l’achat de nou-veaux véhicules sont autant d’opportunitéspour améliorer la qualité du système de trans-port, peu de pays ont introduit dans leur légis-lation une date limite. La France fait figure d’ex-ception avec l’obligation de rendre accessiblesles services de transports collectifs avant le11 février 2015. Le gouvernement du Royaume-Uni a lui aussi imposé des dates limites : leséchéances de 2015 et de 2020 ont été respecti-vement adoptées comme dates limites de circu-lation pour les autobus de moins de 7,5 tonneset les autocars.

L’intégration de l’accessibilité dans lescontrats autorités locales/exploitantsLes gouvernements nationaux ont cherché àorienter le comportement des acteurs locauxen imposant un certain contenu aux contratsliant les autorités locales et les exploitants. EnItalie, ces contrats doivent obligatoirementcontenir une «charte de la mobilité» qui décritnotamment les mesures prises pour satisfaireles besoins des personnes handicapées. AuxPays-Bas, ces contrats doivent spécifier unniveau minimal d’accessibilité pour être légaux.Dans les économies à forte dérégulation, lesopérateurs de transport doivent obtenir unelicence d’exploitation… qui ne peut être accor-dée que si ces opérateurs précisent leur poli-tique d’accessibilité, comme en Slovaquie etau Royaume-Uni.

La planification des aménagementsEn raison des investissements importants néces-saires, les États européens ont fréquemmentadopté la programmation et la planificationcomme logique d’action. Ils ont imposé auxcollectivités locales responsables des transportsou aux opérateurs de transport de préparer desplans stratégiques d’accessibilité, qu’il s’agissed’un document spécifique (tel le schéma direc-teur d’accessibilité en France), ou d’un docu-ment consacré de manière plus globale à laprogrammation des services de transport. LeRoyaume-Uni (2000), l’Allemagne (2002), l’Ita-lie (1997) et la Slovaquie (1996) avaient déjà,entre autres, imposé l’élaboration de tels sché-mas directeurs à leurs collectivités territoriales.

Le conditionnement des subventions publiquesLes différents États européens utilisent égale-

ment des instruments financiers pour inciterles acteurs locaux à ne pas oublier les besoinsdes personnes handicapées dans leurs diffé-rents projets de transport. Depuis 2005, la loifrançaise interdit l’octroi de toute subventionpublique à un projet de transport non accessi-ble aux personnes à mobilité réduite. L’accessi-bilité est également une condition d’éligibilitéaux subventions publiques en Allemagne, enAutriche, en Norvège, au Portugal et en Irlande.Des budgets spécifiques peuvent être attribuéspour aménager les services existants, parfois àtravers des contrats État-collectivités territorialescomme aux Pays-Bas.

La formation des professionnelsLa connaissance des besoins des personneshandicapées par les professionnels du cadrebâti et des transports étant souvent jugée insuf-fisante, l’État français a rendu obligatoire la for-mation à l’accessibilité de ces professionnelslors de leur cursus initial. Cette initiative existedans d’autres pays sans être imposée par la loi.Seule exception : l’Irlande qui a créé un centred’excellence sur la conception universelle ;cette autorité publique a compétence pour s’as-surer que les formations des professionnelscomportent effectivement des modules sur laconception universelle et pour définir lecontenu minimal de ces formations.

La mise en place d’indicateursUn dernier instrument, encore peu utilisé par lespays européens – la Norvège l’explore actuel-lement –, consiste à définir des indicateurs d’ac-cessibilité. Les États européens devront, enapplication de la convention sur les droits despersonnes handicapées de l’Onu, signée partous les membres de l’Union européenne,contrôler l’application de leur politique natio-nale. Ces indicateurs permettraient d’évaluerl’état de l’accessibilité sur leur territoire et inci-teraient les acteurs locaux à agir.

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Définitions• La discrimination directeSelon la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008,la discrimination directe est « la situationdans laquelle, sur le fondement de son handicap, une personne est traitéede manière moins favorable qu’une autrene l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable ».• La discrimination indirecteSelon cette même loi, la discriminationindirecte est « une disposition, un critèreou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autrespersonnes, à moins que cette disposition,ce critère ou cette pratique ne soitobjectivement justifié par un but légitimeet que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés ».• La conception universelle (universaldesign)Le conseil de l’Europe a défini la « conception universelle (universaldesign) comme une stratégie qui vise à concevoir et à composer différentsproduits et environnements qui soient,autant que faire se peut et de la manièrela plus indépendante et naturelle possible,accessibles, compréhensibles et utilisablespar tous, sans devoir recourir à des solutions nécessitant une adaptationou une conception spéciale ».

L’attribution de subventionspubliques est souvent conditionnéeà la mise en accessibilité des systèmes pour les personnes à mobilité réduite.

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Les Cahiers – Comment les métropoleseuropéennes prennent-elles en compte la problématique de l’accessibilité auxpersonnes à mobilité réduite (PMR) ?Comment la mettent-elles en œuvredepuis ces dix dernières années?Christiane Briaux-Trouverie – Le changementmajeur de ces dix dernières années repose surle fait qu’aujourd’hui, l’accessibilité des sys-tèmes de transports pour les personnes à mobi-lité réduite dépend davantage de la législationeuropéenne que des textes nationaux. Par exem-ple les normes pour la construction des cars etdes bus sont issues de la directive européenne,qui doit être systématiquement reprise dans leslégislations nationales. Le problème du finance-ment est lui aussi généralisé. Dans le domainedu métro, les priorités sont actuellement de ren-dre accessibles les grosses correspondancesmétro, avec un relais bus en surface. Mais l’âgedes métros, leur profondeur, leurs caractéris-tiques, leur environnement rendent impossiblela comparaison entre par exemple le métro pari-sien, qui a plus d’un siècle, etun métro inauguré voici troisans.Aujourd’hui, en Europe, laprise en compte de l’accessi-bilité est systématiquementintégrée dans les cahiers des charges. Cette prise deconscience est due à laconjonction de la pression des associations, etd’une évolution des mentalités, que l’on trouveégalement dans l’aide aux voyageurs handica-pés, de la part des autres usagers.

L. C. – Quelles sont les méthodes utiliséespar les différentes métropoles en matièrede programmation de la mise en accessibilité des réseaux ?C. B.-T. – Cela dépend vraiment de la géogra-phie de la ville, et de l’histoire de ses transports.Le choix des pôles à rendre accessibles se faitpar hiérarchisation : en priorité les pôles d’em-ploi, de commerce et d’habitat qui les compo-sent. En général, pour les réseaux de surface(les bus), la mise en accessibilité se fait parligne (un arrêt éventuellement non accessibleétant signalé), alors que pour les réseaux sou-terrains existants, elle se fait plutôt par points. Lamise en accessibilité de ces réseaux passenécessairement par l’ascenseur et l’aménage-ment de l’interface quai-train. La priorité de lamise en accessibilité est généralement donnéeau réseau de surface car elle est plus simple à

réaliser. La mise en accessibilité d’une ligne desurface commence souvent par le matériel rou-lant. L’adaptation des arrêts se faisant dans undeuxième temps pour permettre une accessibi-lité progressive sur tout le réseau. Le renouveaudu tramway apporte une autre dimension, carmatériel et stations sont accessibles dès leurmise en œuvre. La programmation ne passe pastoujours par un schéma directeur comme celaest demandé par la législation française. Elledépend de l’exploitant, des fonds publics, dessubventions complémentaires données à l’ex-ploitant. Il y a autant de méthodes que de pays,l’accessibilité est gérée comme sont gérés lesmodes de transport.

L. C. – Selon vous, quels sont les éléments clés pour la mise en accessibilité des réseaux ? Quels en sont les freins et les différences ?C. B.-T. – Le gros frein est financier… À maconnaissance, il n’y a pas eu d’innovations enmatière de financement de ce type d’aménage-

ment (taxe spécifique, etc.).Dans certains pays, l’État s’im-plique dans l’investissementneuf puis donne en gestion àl’exploitant, qui a notammenten charge la maintenance etle renouvellement. Dans d’au-tres pays, comme l’Allemagne

par exemple, les collectivités locales et territo-riales s’impliquent plus, tant dans la créationque dans la maintenance. Les actions de miseen accessibilité sont en général intégrées dansle financement global des systèmes de transports. Le deuxième frein, récurrent, est lamaintenance des ascenseurs, des systèmes d’ac-cès, etc. La mise en accessibilité repose essen-tiellement sur la généralisation de la technique,et en particulier sur le plancher bas (dont ledéveloppement a été le «Cap» vers une meil-leure accessibilité) pour les autobus, puis pourles tramways et maintenant pour le ferré lourd.On observe peu de différences entre les paysdans les méthodes de mise en accessibilité, àl’exception de l’usage de repères podotactilespour les personnes aveugles. De manière géné-rale, la mise en accessibilité bénéficie à tout lemonde. Les métropoles l’intègrent dans la pla-nification générale des déplacements et del’aménagement, avec très souvent une forteconcertation avec les associations locales.L. C. – Les différentes catégories de handicap sont-elles toutes prises

Christiane Briaux-Trouverie est consultante spécialiséedans l’accessibilité des personnes à mobilitéréduite (femmes avecpoussette, personnes âgées,handicapés physiques,sensoriels, mentaux).Consultante permanente auprèsdes grands groupes exploitants de transports urbains, elle a été conseil auprès des constructeurs de matérielferroviaire (trains, tramways) et d’autobus. Membre du Coliac(Comité de liaison pour l’accessibilité destransports et du cadre bâti), qui remplace le Colitrah(Comité de Liaison pour le transport des personneshandicapées) dont elle a présidé la Commissionpermanente « Accessibilité des réseaux de surface », elle participe depuis 1995 au groupe de réflexion« Insertion des lignes de bus »auprès du Centre d’études surles réseaux, les transports,l’urbanisme et les constructionspubliques (Certu). Elle a également participé à divers ouvrages avec le Certu.

Accessibilité des systèmes de transports :un nivellement par le haut

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» Aujourd’hui,l’accessibilité des personnesà mobilité réduite dépend

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en compte de la même manière? En casd’absence de solution techniquesatisfaisante, les autorités organisatricesont-elles recours à l’aide humaine?C. B.-T. – Les premières actions ont été desti-nées aux personnes ayant un handicap moteur(usagers en fauteuil roulant), impliquant dessolutions techniques spécifiques. Progressive-ment, d’autres formes de handicap ont étéprises en compte, engendrant le développe-ment de solutions sonores, visuelles. Certainspays (Amérique latine), qui ont un taux d’anal-phabétisation important, utilisent par ailleursles couleurs et les dessins. Les mesures prises enmatière d’accessibilité reposent principalementsur la connaissance qu’a l’exploitant de lapopulation, du terrain, et sur les spécificitéslocales (culture, histoire, climat…). Les direc-tives européennes intègrent tous les types dehandicap. On assiste à un vrai nivellement versle haut de l’accessibilité, notamment sur leréseau de surface bus, mais pas seulement: Lon-dres par exemple a commencé à aménager sonmétro. En Europe, pour le ferré lourd, en casd’absence de solution technique satisfaisante,les autorités organisatrices ont systématique-ment recours à l’aide humaine. Sur le ferré debanlieue, la présence de personnel en garedépend des pays et des lignes. Les trainsmodernes de la banlieue londonienne sontaccessibles sans besoin d’aide humaine, ce quidevrait être le cas bientôt en Île-de-Francepuisque tous les marchés des nouveaux trainsde banlieue exigent l’accessibilité par au moinsune porte, ce qui entraînera une rehausse par-tielle de quai, à l’instar des réseaux allemands.Une autre approche : à Stuttgart, le tramway aune rampe manuelle, que le chauffeur pose à lademande, ce qui est interdit dans d’autres pays.

L. C. – Dans quel domaine manque t-onde solutions techniques en matière de mise en accessibilité ? Quelles sont lesmétropoles particulièrement innovantes ?C. B.-T. – Techniquement, tout est possible main-tenant. En matière de solutions techniquesinnovantes, je pense à un train de banlieue sué-dois qui a une plate-forme élévatrice intégréepivotante permettant une accessibilité faciledes fauteuils roulants. Pour les bus, un des pro-blèmes est l’accostage et l’aménagement desarrêts. Les Espagnols (Barcelone, Figueras,Madrid) avaient mis au point des arrêts préfa-briqués à rajouter au trottoir : c’est une formuleintéressante. De même, en billettique, un sys-tème généralisé à Barcelone pour le rachat deticket de métro est intéressant : vous introdui-sez votre ticket usagé et la machine vous en res-titue un nouveau aux caractéristiques iden-tiques. C’est très apprécié par les personnes

âgées et par les touristes. Le pass sans contact,le système d’information par portable (très à lapointe au Japon) se développent en France,notamment pour les abonnés et les usagersréguliers. C’est intéressant pour un grand nom-bre de personnes handicapées. Pour les per-sonnes non-voyantes, des expérimentations rela-tives au repérage, au guidage, au système sonoreavec des balises sont menées dans certainspays, comme la France. Mais c’est assez limité.Les pays commencent à y réfléchir et testentdes systèmes par balise, par GPS, etc. Afin d’évi-ter que les voyageurs sourds, aveugles ou enfauteuil roulant, ne pénètrent dans un systèmedégradé ou perturbé, des tests d’informationsur portable sont effectués (par exemple enAllemagne et en France) : envois de SMS pourles sourds, et informations sonores pour lesaveugles. C’est, à mon sens, la seule formule effi-cace pour une information en temps réel, maisà terme il faudra envisager une approche euro-péenne. En matière de préparation de voyage,d’information, du choix des itinéraires et desmodes, tous les pays sont soumis à la réglemen-tation européenne sur l’accessibilité des sitesInternet. On arrive aussi désormais à une cer-taine uniformisation de fonctionnement dutransport à la demande (TAD) et du transportde personnes à mobilité réduite (TPMR). Resteà prévoir leur accès pour tous les Européens !

L. C. – Quelles sont les grandestendances, les évolutions, les enjeux pour les années à venir ?C. B.-T. – Le grand enjeu pour les années à venirva être le retour sur investissements. Est-ce quele surcoût lié à l’accessibilité est compensé parun nombre plus important de voyageurs, unemeilleure fluidité, par une vitesse commercialeaccélérée, un meilleur confort et un meilleurservice aux voyageurs? Je pense que les exploi-tants et les investisseurs vont sérieusement yréfléchir au regard de systèmes qui commen-cent à s’uniformiser. Quelques études impor-tantes ont été faites en Angleterre, démontrantque l’augmentation de la clientèle permettait definancer les intérêts des prêts contractés. Desétudes sur des tramways à plancher bas, prêtésentre métropoles ont montré une économie detrois rames dans la journée grâce à une meil-leure rotation due à la fluidité des montées etdes descentes des voyageurs. Néanmoins, l’ac-cessibilité dans l’exploitation sera un plus danscertains systèmes (par exemple les systèmesurbains) et une contrainte dans d’autres (parexemple l’interurbain), et pour ceux-ci les com-pensations sont à rechercher.

Propos recueillis par Sophie Laurent et Jérôme Bertrand

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L’accessibilité des personnes à mobilité réduite, quel que soit le type de handicap, doit être une priorité.

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La mise en accessibilité des réseauxsouterrains passe nécessairementpar l’ascenseur et l’aménagementde l’interface quai-train.

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Depuis une trentaine d’années, les dispo-sitions réglementaires visant à modérerla vitesse en milieu urbain se dévelop-

pent dans de nombreux pays européens afinde répondre le plus efficacement possible àl’insécurité routière en ville et de protéger lesusagers les plus vulnérables (cyclistes et pié-tons, notamment les enfants, les personnesâgées et handicapées). Par ailleurs, ces mesuresparticipent à la mise en valeur des quartiers età leur animation par la réduction des nuisancesliées au trafic motorisé et une distribution del’espace public plus équitable.

Une prise en compte nécessaire des usagers vulnérablesLa convention internationale de Vienne sur lacirculation routière du 8 novembre 1968 pose,pour la première fois, le principe de prudencedu conducteur d’un véhicule motorisé enversles usagers les plus vulnérables. Vingt ans plustard, la Commission européenne adopte unerésolution sur la protection des piétons et lacharte européenne des droits des piétons, appli-quées parfois dans le cadre des politiques natio-nales de sécurité routière. Depuis les années1990, les pays du nord de l’Europe comme laSuède ou les Pays-Bas mènent des politiquespubliques volontaristes et ambitieuses. Au coursdes années 2000, la Belgique et la France ontengagé des démarches de « code de la rue »,visant à mieux faire connaître la réglementa-tion existante en milieu urbain et à apporterdes évolutions au code de la route afin d’amé-

liorer la sécurité des usagers vulnérables etl’usage des modes doux. En parallèle, la régle-mentation pour la protection de l’environne-ment préconise des actions en faveur de lamodération de la vitesse et du trafic automo-bile.

Une succession de concepts et de réglementationsLa première disposition réglementaire s’oppo-sant à la prédominance de l’automobile dansl’espace public urbain fut l’aire piétonne, àl’image de celle de Munich en 1972, qui donnepriorité aux piétons en soumettant la circulationet le stationnement des véhicules à des pres-criptions restrictives (vitesse au pas et desserteinterne uniquement pour les riverains, livrai-sons ou services urbains). Mais l’aire piétonneest surtout adaptée aux centre-villes anciensou commerciaux, où la vie locale se manifestefortement, et reste une réponse défensive faceà l’automobile, car l’espace n’est pas partagémais séparé.S’inspirant des travaux de Colin Buchananpubliés en 1963, la cour urbaine ou rue rési-dentielle fut le premier concept de zone àvitesse limitée permettant la cohabitation detous les modes de déplacement. Initié en 1969à Delft, aux Pays-Bas, et intégré dans la régle-mentation néerlandaise en 1976, ce conceptpris son essor dans les années 1970, puis 1980,essentiellement en Hollande, en Allemagne, en

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Contribuer à une ville plus accessible

L’avenir des rues : mixité etcohabitation de tous les usagers

La réduction du trafic motoriséfavorise la convivialité dans l’espace public et l’animationdans les quartiers. Ici, Bienne(Suisse).

Jérôme Bertrand(1)

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La place de l’automobile ne peut plusêtre hégémonique comme elle l’a étépendant la seconde moitié du XXe siècle.L’organisation globale des déplacementspasse par un urbanisme de proximité, un système de transport public intégrantla mobilité douce et une politique de stationnement plus restrictive. Les zones de circulation apaisée en villepeuvent contribuer à encourager la mobilité durable et à réduire l’usagedes véhicules motorisés.

Pas de sécurité routière sans limitationdes vitesses autoriséesLes études de tous les observatoiresnationaux de la sécurité routièredémontrent que le nombre d’accidents et leur gravité sont directementproportionnels à la vitesse. À une vitessede 30 km/h au lieu de 50 km/h, un véhicule motorisé raccourcit de moitiésa distance de freinage. Le risque de mortalité pour les piétons en cas de collision passe alors de 85 % à 10 %.D’autre part, le champ visuel du conducteur s’élargit et le différentiel de vitesse avec les autres usagers de l’espace public devient propice à un comportement plus respectueux.

(1) Jérôme Bertrand est géographe-urbaniste.

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Suède et au Danemark. La cour urbaine a pourobjectif d’améliorer le cadre de vie des zonesrésidentielles par un aménagement de plain-pied de l’espace rue sur toute sa largeur, où lapriorité est donnée aux piétons, et les condi-tions sont propices aux jeux d’enfants. Le sta-tionnement y est autorisé uniquement auxemplacements marqués au sol et la vitesse desvéhicules correspond à l’allure du pas aux Pays-Bas et en Allemagne, ou doit être inférieure à20 km/h en Belgique, en Espagne ou en Suisse.Du fait du coût du traitement de façade àfaçade, leur emploi est généralement limité àquelques voies de quartier.Par un souci de simplification et de diffusion àgrande échelle de zones à vitesse modérée, leconcept de zone 30 a émergé à partir du milieudes années 1980 et s’est développé dans lesannées 1990 partout en Europe. Il diffère de lacour urbaine par des aménagements légers (lachaussée et le trottoir se distinguent toujours),l’absence de règles de circulation spécifiques,et une vitesse limitée à 30 km/h permettantd’améliorer nettement la sécurité tout en main-tenant un fort volume de trafic. Compte tenude l’efficacité, du coût et de la facilité de leurmise en œuvre, de nombreuses villes d’Europedu Nord et germaniques décident, à partir desannées 1990, de systématiser la réalisation deces zones à l’ensemble des voies locales ou duréseau de la ville (concept de «ville 30» à Graz,en Autriche, en 1992). En 2004, le code de laroute allemand rend obligatoire la zone 30 enagglomération à l’exception des voies priori-taires et, la même année, la réglementationbelge offre la possibilité d’aménager une villeou un village entier en zone 30.Le dernier concept de circulation apaisée enville, introduit dans la réglementation belge,française et helvétique dans les années 2000, estla zone de rencontre. Apparu en 1996 à Ber-thoud, en Suisse, et influencé par les expé-riences menées à Chambéry depuis les années1980, ce concept constitue une solution inter-médiaire entre l’aire piétonne et la zone 30. Lazone de rencontre, qui présente des similitudesavec la cour urbaine, est un espace public où lepiéton est prioritaire, mais ne doit pas faire obs-tacle à la circulation des véhicules dont lavitesse est limitée à 20 km/h. Elle peut être des-tinée aussi bien aux centres historiques, auxrues résidentielles, étroites, commercialesqu’aux lieux à forte présence piétonne, tels queles places de gare. Pour le moment, ce statut sedéveloppe surtout en Suisse, comme à Bâle ouà Zurich.D’autres concepts sont également à considé-rer, bien que ne faisant pas l’objet d’une régle-mentation, comme le Shared Space(2), qui secaractérise par l’absence de signalisation, indui-

sant des comportements d’usagers plus pru-dents et respectueux : l’usager devient plusattentif à l’environnement et recherche lecontact visuel avec les autres usagers de la rue,ce qui réduit les vitesses des véhicules et lesrisques d’accidents.

Cadre, outils, méthodeAprès un temps d’expérimentation technique,les règlements nationaux de circulation rou-tière évoluent en intégrant les concepts demodération de la vitesse, offrant aux gestion-naires de voirie un cadre juridique pour desaménagements profitables à tous les usagers.Cependant, toute réflexion sur les mesures res-trictives de circulation ou un aménagementsuppose une hiérarchisation préalable duréseau de voirie : routes principales (suppor-tant le trafic de transit et jouant le rôle de liai-son indispensable au système du transport rou-tier), et voies d’intérêt local ou de desserte desquartiers, qui se prêtent plus particulièrementaux mesures de limitation de vitesse. Selon lesdysfonctionnements constatés, leurs objectifset leurs moyens, les gestionnaires de voirie peu-vent ensuite agir sur le trafic, la vitesse, la com-munication ou l’évaluation. Concernant lereport du trafic de transit sur des voies princi-pales, il peut s’agir d’une modification des sensde circulation ou de carrefour, de la créationde sens unique, de boucles, d’une zone de tra-fic limité, ou bien d’un péage urbain zonal.Quant à la modération de la vitesse des véhi-cules motorisés, il peut s’agir de dispositifs géo-métriques induisant un changement de trajec-toire de la circulation (rétrécissement, chicanesou giratoires), de résistance au sol (dénivelésverticaux et revêtements rugueux ou réson-nants), ou de signalisation (panneaux et mar-quage au sol). Ces aménagements doivent êtreadaptés selon les spécificités des lieux (entréede zone, intersection, proximité d’équipement),assurer la circulation des véhicules d’urgenceou de transport public, ainsi que l’accessibilitéà tous, particulièrement aux personnes malvoyantes ou aveugles dont la sécurité, l’orienta-tion et le guidage est primordial.La concertation sur le projet est fortementconseillée afin de s’assurer de l’acceptation detous les usagers, accompagnée d’une sensibili-sation du public aux bienfaits de la modéra-tion des vitesses, et d’une information des usa-gers sur les opérations d’aménagement. Enfin,l’évaluation de l’efficacité des dispositifs doitêtre mesurée par le contrôle des vitesses et dutrafic.

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Piétons et cyclistes, les usagers les plus vulnérablesSelon l’Irtad (International Road Traffic andAccident Database), pour les dix-huit payseuropéens dont les données sont disponibles, en 2006, en moyenne, les deux tiers des accidents corporels se sont produits en milieu urbain et ont représenté un tiers des victimes (tués à 30 jours). Parmi les 37000victimes d’un accident de la route, près d’un quart sont des piétons ou des cyclistes. À Paris, ces catégoriesd’usagers représentent 45 % des tués (en moyenne de 2002 à 2007, selon l’Observatoire nationalinterministériel de sécurité routière).

Moins de trafic : moins de bruitDiviser le trafic par deux équivaut à une réduction du bruit de 3 dB(A), soit une diminution du bruit de moitié. Par ailleurs, la baisse de la vitesse decirculation des véhicules de 50 à 30 km/hpermet d’atténuer le bruit de 2,5 dB(A).

(2) Développé par Hans Monderman, le Shared space est àl’origine d’un programme européen du même nom.

Dans les années 2000, la Belgiqueet la France ont engagé des démarches de « code de la rue », visant à améliorer la sécurité des usagers vulnérableset l’usage des modes doux.

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La marche, mode de déplacement trèsmajoritaire il y a trente ans, serait-elle enpasse de redevenir centrale dans un sys-

tème global de mobilité durable? L’intérêt pourla marche touche, en effet, beaucoup d’acteursde notre société. La Commission européenne(2)

insiste sur la marche et le vélo comme condi-tions de la «comodalité». Plusieurs programmeseuropéens de recherche(3) mettent en avant lesmodes doux. Des villes européennes, commeGenève ou Londres, commencent à bien inté-grer les enjeux de la marche. Des villes améri-caines lancent des programmes dits activeliving, très ouverts à la marche et au vélo. Lesacteurs du monde de la santé et des équipe-ments sportifs ont également repéré les enjeuxde la marche urbaine. Enfin, la montée en puis-sance d’outils d’aide à la navigation piétonne,comme Evadeo de l’IGN, participe de cet essoret de cet engouement pour la marche.

Le retour du piéton ?Transversale, mais rarement perçue comme unmode, peu médiatisée, la marche a, pendantlongtemps, faiblement intéressé les décideurs,alors que tous leurs administrés sont des pié-tons. Bien qu’elle représente une part impor-tante des déplacements urbains dans toutes lesvilles (54 % à Paris, 33 % en Île-de-France)(4), ellen’a pas, jusqu’à ce jour, fait l’objet d’uneapproche ciblée dans notre pays. Les aména-geurs ont considéré la sécurité du piéton, plu-tôt que ses attentes et la spécificité du déplace-ment pédestre. Par ailleurs, la question de la

marche est dispersée dans les différents ser-vices d’une collectivité. Les associations de pié-tons existent, mais sont souvent postées sur uneligne de défense des droits du piéton et d’un ter-ritoire menacé. La marche ne dispose pas, nonplus, d’un réseau économique d’opérateurs deservice et de fournisseurs de matériels. Enfin, lepiéton inquiète l’aménageur: il a accès à tout oupresque, il s’arrête sans arrêt, il change de direc-tion, choisit le trajet le plus court, traverse où etquand il veut(5).Aujourd’hui, les préoccupationsliées au développement durable, la nécessitéde concevoir et de mettre en œuvre un serviceglobal de mobilité alternative à la voiture indi-viduelle, offrent un contexte favorable, incitantles acteurs de la mobilité à prendre en compteles modes doux, dont la marche. En outre, l’en-couragement de la marche et des modes douxen général est un enjeu de santé publique: 11 %de la population française est obèse, 30 % ensurpoids. Si l’obésité continue de se propager,l’essentiel des améliorations observées depuisquelques décennies sur la santé des personnesde plus de cinquante ans serait annulé par les

Offrir des services attractifs et durables

Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Contribuer à une ville plus accessible

La marche, mode d’avenir

La reconquête de l’espace public au profit de tous les usagers de la ville, et non des seuls fluxautomobiles, requiert une prise en compte des spécificités des différents usages et usagers de la rue, et notamment les piétons.

Véronique Michaud(1)

Prospective RATP

Socle de la mobilité, la marche faitdepuis quelques années son entréedans l’agenda des politiques publiquesde transport et d’urbanisme. Le piéton,véritable acteur urbain, bénéficieaujourd’hui d’une attention nouvelle, en lien avec les exigences du développement durable. Dans un contexte technique renouvelé et multidisciplinaire, avec un portagepolitique fort, la marche peut devenirune source d’innovation au service des politiques de mobilité. Explications.

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(1) Véronique Michaud est chercheuse associée, prospec-tive RATP. Elle est également secrétaire générale du Club desvilles et territoires cyclables.(2) Livre vert européen, Vers une nouvelle culture de la mobi-lité urbaine.(3) Programmes européens de R&D: Adonis, Prompt, Cost.(4) Cette part a baissé : en un quart de siècle, elle est passéed’un tiers à un quart des déplacements en France et, en Île-de-France, de plus de 40 % à un tiers !(5) Cf. J.-M. Offner «Trente ans de pas perdus ! », Urbanisme,mars-avril 2008 n° 359 et «Les piétons, nouveaux enjeux, nou-veaux savoir-faire », Métropolis, n° 75, 3e trimestre 1986.

Durées de marches observées, durées de marche préconiséesHuit minutes, c’est la durée moyennequotidienne de marche des automobilistes, dont la moitié est consacrée à rejoindre ou quitter leur véhicule(1). C’est trois fois moins que pour les non-automobilistes et six foismoins que la durée préconisée d’activitéphysique quotidienne par l’OMS et les plans français nutrition et santé.

(1) Francis Papon, Inrets.

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conséquences du surpoids. Et il ne faut pasoublier le sentiment de bien-être qu’apporteune activité physique quotidienne devenue peuà peu étrangère à nos modes de vie. Il faut doncredonner le goût de marcher aux citadins, pourleur bénéfice individuel et celui de la collecti-vité.

Conflit d’usages, conflit d’échelles : un contexte à faire évoluerL’essor de la voiture dans nos villes s’est exercéaux dépens de tous les autres modes de dépla-cements. Il a créé un système délétère (pollu-tion, insécurité routière) et destructeur de l’es-pace public. Comme le montre Jacques Lévy(6),l’automobile privatise l’espace tandis que lesmétriques pédestres – la marche et les trans-ports collectifs – créent de l’espace public, ycompris dans le réseau de transport. Le (biennommé) code de la route a entériné, dès 1922,le primat de la circulation sur les autres fonc-tions de la rue. Ses modifications successivesont certes permis de mieux prendre en comptel’ensemble des usagers, mais sans jamais remet-tre en cause ce référent. Depuis une vingtained’années, les aménageurs disposent d’une boîteà outils en faveur d’un meilleur partage de lavoirie et de l’espace public, qui leur permet,avant tout, de réduire les vitesses. On privilégieencore trop souvent les seuls aspects défensifs.Comme le fait observer Anne Faure (urbaniste),«bien souvent, la méthode ne questionne ni lalogique de conception d’ensemble de l’espace,ni la logique du vécu des différents usagers :elle juxtapose des dispositifs physiques contrai-gnants », sans remettre en cause la hiérarchiedu plus fort sur le plus faible ! La reconquêtede l’espace public au profit de tous les usagersde la ville, et non des seuls flux automobiles,requiert une prise en compte des spécificitésdes différents usages et usagers de la rue.Encourager la marche, c’est retrouver les itiné-raires directs, confortables, accueillants que lavoiture leur a confisqués. Le développementde la marche profite aussi aux autres modes,vélo, bus, tram, métro… Ne sont-ils pas enquelque sorte les « bottes de sept lieues » dumarcheur, lui permettant d’aller plus vite et sur-tout plus loin ? L’excellence des réseaux detransports est indissociable du traitement desespaces urbains, et la qualité des itinérairespédestres conditionne largement le succès del’offre de transports publics. La ville de Paris,dans le cadre de son plan local de déplace-ments (PLD), va plus loin en agissant non seu-lement sur les conditions du cheminement àpied vers le réseau de transport public pour enaméliorer l’attractivité, mais aussi en intégrantcette dimension de l’accessibilité piétonnière àla réflexion sur le report modal(7). Autrement

dit, en se demandant si on peut volontairementaugmenter la distance de marche pour attein-dre sa voiture, afin de favoriser les transportscollectifs. La démarche actuelle d’évolution versun code de la rue, engagée par le ministre desTransports en 2006, vise à intégrer à ce disposi-tif réglementaire un changement profond devision, une inversion des priorités, afin de faci-liter et accompagner le rééquilibrage en coursdans les agglomérations(8). Mais on ne peut trai-ter les circulations douces à la seule échelledu quartier ou du centre-ville en les confinantà ces territoires. Les outils de planificationurbaine doivent permettre de construire un pro-jet de territoire partagé, intégrant les différenteséchelles et les différents espaces de vie. Le lienentre ces espaces et ces échelles sera toujoursl’infrastructure mais, selon son gabarit, sa géo-métrie, son traitement paysager, elle rappro-chera, reliera ou au contraire séparera, éloi-gnera(9)… Dans toutes ces démarches derééquilibrage de l’espace public et de nouvellescivilités est également en jeu notre capacité àlutter contre l’étalement urbain et à densifierla ville, en transposant dans le périurbain lesmêmes «remèdes» que dans les centres-villes eten faisant le chemin inverse de celui du code

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Le piéton, acteur urbain total,devrait occuper une positionprivilégiée dans le processus de concertation et de décision, car il emprunte les cheminementsles plus simples, agréables et directs.

(6) Jacques Lévy est professeur de géographie et d’aména-gement de l’espace à l’École polytechnique fédérale de Lau-sanne depuis octobre 2004 et directeur du laboratoire Chô-ros.(7) Ronan Golias, «Utiliser l’accessibilité piétonne pour untransfert modal de la voiture vers les transports en commun:le cas de Paris» in Transports urbains, n° 111, septembre 2007.(8) Le premier train de modifications réglementaires, principede prudence, zone de rencontre et généralisation des double-sens cyclables dans les zones apaisées, a été adopté pardécret du 30 juillet 2008.(9) Geneviève Laferrère, Certu, 2003.

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Le plan marche de LondresDans la perspective de l’accueil des JO de 2012, Londres souhaite devenir une walking-friendly city. Après le planpiétons de 2004, le programme LegibleLondon (Londres lisible)(1) est un ensemblede mesures pour créer un nouveau réseaude trajets sûrs, simples et rapides pour les piétons. Après une phase d’étudespréalables(2), une expérimentation a été menée en novembre 2007 sur OxfordStreet avec évaluation en 2008. Il concerne la part des déplacementsaccessibles à pied de moins de deux kilomètres ou vingt-cinq minutesenviron. Pour le métro, un trajet sur dix fait moins de deux kilomètres et 109 trajets entre stations de métro sont plus rapides à la marche qu’en métro,soit 55 % du total des trajets inférieurs à deux kilomètres(3). Une expérimentation a été menée sur Oxford Street autour de la station de métro Bond Street, forte zone de chalandise (200 millions de visiteurs par an dont 87 % à pied). La démarche s’est concentrée sur les questions d’orientation (cartes devie quotidienne) et de navigation(signalétique urbaine) à partir de différentsscénarios d’usage. Une signalétique a été conçue sous des formats et sur des supports suffisamment diversifié(totems, panneaux, mobiles, plans,...) pour permettre à chacun de marcher et s’orienter. Elle associe informationverbale et visuelle en recourant à des représentations mixant une carte en perspective avec des objets en relief,dans un style inspiré des Google maps.

(1) Il est initié en commun par la ville de Londres,Transport for London et London Development Agencysur la zone du péage urbain (Congestion ChargeZone) - site web :http://www.legiblelondon.info/wp01/index.php(2) Deux enquêtes quantitatives ont été réaliséesWalkable journeys (AIG/LES) et Walking Tube Study(AIG).(3) Pour le réseau bus, environ la moitié des déplacements font moins de deux kilomètres.

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de la route en 1922 qui a contribué à faire ren-trer la route dans la ville. Pour ces raisons, lepiéton, acteur urbain total, devrait occuper uneposition privilégiée dans le processus deconcertation et de décision alors qu’au-jourd’hui les pouvoirs constitués dialoguentavec l’une ou l’autre des figures sectorielles.Passer à côté de la globalité du piéton, c’est sepriver de son expertise de citoyen, de son expé-rience de la ville.

Agir sur la demande pour développer la marche comme modeOn voit bien l’importance de la distance demarche ainsi que des conditions de confort etde sécurité du trajet à pied qui pèse sur lesconditions de compétition entre les modes dedéplacement ! Ces approches posent, par ail-leurs, la question de l’efficacité de la marche,de la rapidité. Le PLD de Paris prévoit d’élabo-rer un schéma directeur piétons, destiné à aug-menter le confort mais aussi l’efficacité de lamarche (longueur des trajets, temps d’attenteaux carrefours…). Quels sont les moyens effi-caces?L’infrastructure – un trottoir large et confortable– est une des conditions majeures pour redon-ner envie de marcher. Mais si la rue n’est pasagréable, l’environnement inhospitalier, cecontexte ne suffira pas. Sonia Lavadinho(10) etYves Winkin(11) ont montré combien il faut pro-curer au marcheur des aménagements maté-riels – un ensemble d’infrastructures et d’ac-cessoires matériels (de la chaussure à l’i-pod)– mais aussi des accessoires symboliques sus-ceptibles de donner à la marche un statut demode de transport à part entière. L’approchefonctionnelle ayant dominé nos cahiers descharges et envahit nos modes de pensée, lesdémarches symboliques autour de la marche sefont encore rares. Mais les aménagementsurbains qui permettent au piéton de ne plusêtre sur la défensive, de partager l’espace publicà égalité avec les autres modes – et bien sûr ensécurité – agissent fortement sur cette montéeen grade. L’association suisse Mobilité piétonnea expérimenté dans des villes suisses (Bienne,Burgdorf) une signalisation piétonne avec, parexemple, des indications à destination des pié-tons (un pictogramme piéton et/ou cyclistequand ceux-ci sont effectivement concernés)sur les panneaux voie sans issue. Une idée àsuivre, pour la perméabilité du réseau viaire, enfacilitant aussi la traversée de lieux publics(comme en Suisse), des parcs par les cyclistes,en luttant contre la privatisation des espaces, enretrouvant les chemins, les venelles, les esca-liers, les cours… Le jalonnement des itinérairespédestres, l’indication des lieux, monuments,services publics, etc. est un élément essentiel.

Les indications en temps et en distance sontégalement précieuses. L’édition de plans pié-tons avec le temps des trajets à pied offre uneautre lecture de la ville (et du réseau de sur-face). L’établissement de cartes isochrones desdéplacements à pied autour d’un pôle généra-teur de trafic (station de transports publics, équi-pement sportif, université, lycée, centre com-mercial, etc.) permet de vérifier l’accessibilitéd’un lieu, le taux de desserte d’une station oud’une gare… et d’intervenir pour améliorerl’existant. La sécurité des déplacements setrouve renforcée par des flux mieux signalés etcanalisés. Et on augmente la sécurité subjec-tive en évitant les endroits inhospitaliers. En pri-vilégiant les rues commerçantes par exemple.La rue n’est pas qu’un lieu où l’on circule maisun espace aux multiples usages. S’y arrêter, flâ-ner, rencontrer un ami, téléphoner sans incom-moder les autres, se reposer… autant de besoinsque peu de lieux permettent. Les micro-jardinsà Lyon, les jardins de poche à Genève, les micro-oasis nocturnes de Rome (Notte bianca 2004),etc., autant d’exemples qui prouvent que nosvilles disposent de nombreux « lieux en panne»à qui on redonne ainsi une destination, une uti-lité.Les touristes sont de grands marcheurs, maisles territoires du quotidien se prêtent aussi àdes usages inattendus, des explorations, l’intro-duction occasionnelle de pratiques vacan-cières. À preuve les randonnées pédestres dansParis, best seller de la Fédération de randonnéepédestre, les visites à roller, la varappe dans deslieux non destinés à ce sport, les balades gui-dées à vélo…, ce que Jean-Didier Urbain ras-semble dans la formule du City break, l’exo-tisme du quotidien et du furtif.

La marche, mode innovantLa marche, parce qu’elle est à la fois un modeà part entière et davantage qu’un mode (le seulmode qui n’a pas comme vocation unique ledéplacement), parce qu’elle conjugue le mou-vement et l’arrêt, peut également devenir unchamp d’innovation. C’est le parti pris de laprospective de la RATP dans la démarche deréflexion et de conception autour de la marchequ’elle a engagée depuis 2006. La marche peutà son tour, à l’image de l’impact sur les choixmodaux des vélos en libre service à Lyon enmai 2005 et Paris en juin 2007, aider à relever de

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Genève et son plan piétonsProgramme global de valorisation de la marche, il fédère sur le territoire de Genève toutes les actionsd’amélioration de l’espace public en faveurdes piétons pour leur assurer sécurité,continuité et attractivité des parcoursdepuis 1995. Sans base réglementaire, il vise à redonner aux piétons « droit de cité » et à encourager la marche avec une mobilisation de la ville en faveurde son environnement, du développementdes modes alternatifs à la voiture, de la lutte contre le bruit. Il a été suivi en 2000 d’un plan directeur des cheminspour piétons, outil de planificationopposable, composé de cinq volets :encourager les promenades, valoriser des lieux par quartier, faciliter les mouvements piétons, éliminer les obstacles, modérer le trafic à l’échelledu quartier. Il dispose d’un très importantvolet de communication avec des campagnes de promotion,d’information et de marketing urbain.Depuis 1995, un dépliant présentant une promenade thématique paraît chaque année, l’occasion de poser chaque fois un nouveau regard sur Genève.Site web : http://www.ville-ge.ch/geneve/plan-pietons/index.html

(10) Sonia Lavadinho est collaboratrice scientifique à l’Écolepolytechnique fédérale de Lausanne.(11) Yves Winkin est professeur des universités en sciencesde l’information et de la communication. Spécialisé enanthropologie de la communication, il enseigne la sociolo-gie des interactions et l’histoire sociale des cultural studiesanglo-saxonnes à l’École normale supérieure de Fontenay-Saint-CLoud. Voir notamment «Du marcheur urbain», Urba-nisme, n° 359, mars-avril 2008.

La carte « Genève en tempspiéton » est un des outils du planpiétons. Elle indique les distances en minutes à la vitesse moyenne de 5 km/h entre les grands pointsde repère (équipements,carrefours, …) de la ville.

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nouveaux défis, d’autant plus que ses atoutssont aujourd’hui relayés par la saturation desréseaux de transports collectifs. À Londres, TfLa décidé de consacrer des investissementsimportants dans le domaine de la marche etdu vélo pour contribuer à la désaturation dumétro, partant de l’observation que près de 20 %des trajets en métro seraient plus rapides à pied!L’oubli qui frappe la marche, depuis plus devingt-cinq ans en France, restreint la quantitéde données disponibles. Cependant, quelquescalculs réalisés récemment sur le réseau RATPnous donnent des indications déjà précieuses :49 % des parcours métro de moins de un kilo-mètre sont plus rapides à pied.Les travaux de la prospective RATP ont rencon-tré un écho grandissant. Un séminaire sur « lamarche au cœur des mobilités » a été organiséen 2007 et a réuni chercheurs, collaborateurs dela RATP, partenaires institutionnels (ville deParis, Région Île-de-France, Certu, Predit, CNT,Coliac)(12). Cette démarche a mis en évidencequ’il existe à la RATP un grand savoir-faireautour du piéton, mais que celui-ci est dispersé:calculs d’évacuation, gestion des flux, signalé-tique, calcul d’itinériaires… Une disciplinetransversale s’est ainsi constituée à la RATP, une«piétonique» qu’il s’agit de valoriser.La RATP est aussi impliquée dans un proces-sus général de rééquilibrage de l’usage de lavoirie. Les problématiques de marchabilité(englobant l’accessibilité) deviennent détermi-nantes dans la conception des espaces et desoffres de transport. À titre d’exemple, la ques-tion des circulations piétonnes sera placée aucentre de la conception des futurs terminaux del’extension du tramway des Maréchaux. Ce prin-cipe de réalisation à l’échelle du piéton devraitêtre systématisé pour toutes les réalisations desites propres : c’est la condition de leur intégra-tion urbaine, de leur capacité à créer de nou-velles centralités en proche couronne, à assurerdes continuités en retissant la maille fine des iti-néraires piétons, à favoriser de nouvelles mobi-lités et de nouvelles habitudes. La responsabilitéde l’opérateur de mobilité porte aussi sur l’am-biance des espaces publics et des lieux dutransport, qui conditionne les comportementset les usages. Les voyageurs marchent dans lemétro et en sortent pour rejoindre leur destina-tion : la qualité de cette marche est un élémentessentiel du confort et de la qualité de service.

La marche, outil d’intermodalitéLa marche est, par excellence, le mode des cor-respondances. C’est un champ de conceptionimportant si on considère le déplacement àpied non pas comme une fatalité mais commeun élément à intégrer dans l’expérience desvoyageurs. Et une composante importante du

service. Proposer des trajets par la rue, alterna-tifs aux correspondances en sous-sol ou à descourts trajets en métro, augmenter la connecti-vité du réseau avec de nouvelles «correspon-dances par la ville », en guidant le voyageur surson trajet (jalonnement, signalétique, infomo-bilité), cheminements faciles et agréables…sont des pistes qui peuvent intéresser les spécia-listes de l’exploitation. La ligne 10 du métro pari-sien et ses agents étudient d’ailleurs actuelle-ment plusieurs de ces possibilités. Soulignonségalement qu’au quotidien, les questions desusagers portent autant sur les transports eux-mêmes que sur l’accès à un lieu donné qui,bien sûr, intègre la marche. La prise en comptedes besoins du marcheur participe donc de larelation de service au voyageur.Marcher, ce n’est pas seulement accéder à unedestination, à un autre mode de transport. C’estaussi une expérience multisensorielle, unespace-temps aux mille et une sensations ! Lemarcheur configure l’espace dans lequel il che-mine. Il recompose, en marchant, l’espace deson déplacement. L’enjeu consiste à amplifierce potentiel de conception dont dispose le pié-ton. Après avoir voulu le canaliser pendant cestrente dernières années, il s’agit de redonnerau piéton toutes ses capacités d’action grâceà une marche plus performante, plus agréable,plus confortable. Le marcheur urbain aura alorsaccès à toutes les ressources de la ville oupresque. Il surfera ainsi sur les différenteséchelles du déplacement : à pied, en transportscollectifs ou encore à vélo.

(12) Rapport Prospective RATP n° 152, «La marche au cœurdes mobilités ».

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Références Bibliographiques

• DEMERS Marie, Pour une ville qui marche.Aménagement urbain et santé.Les éditions Ecosociété.

• « La marche au cœur des mobilités » -une démarche innovante, VéroniqueMichaud, Blanche Segrestin, collectionProspective RATP, n° 152, juin 2008.

• THOMAS Rachel, « Les territoires del’accessibilité », Bernin, À la croisée,2005.

• PAQUOT Thierry, Des corps urbains,sensibilités entre béton et bitume, Paris, éditions Autrement,2006.

• SOLNIT Rebecca, L’art de marcher, Paris, Actes sud, 2002.

• « La rue entre réseaux et territoires »,n° 66-67 de la revue Flux,octobre 2006-mars 2007.

• « Marcher », in Urbanisme, n° 359, mars-avril 2008.

• Zone 30, des exemples à partager, coll.Une voirie pour tous, Certu, 2006.

• Certu, Gart, Ademe, Bonnes pratiquespour des villes à vivre : à pied, à vélo…,Paris, Gart, 2000.

La signalétique expérimentée dans le cadre du programme Legible London, associe informationverbale et visuelle. L’objectif est de développer le recours à de la marche pour les trajets de moins de 2 km.Ia

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Accueillir le transportdes marchandises

Le transport de marchandises, par nature, comporte une dimension internationale forte. Il n’y a, pour ainsi dire,plus de produit que nous achetons qui n’ait été fabriqué, en totalité ou en partie, dans un autre pays, voire sur un autre continent que celui où ils sont consommés.L’organisation des flux de marchandises s’est profondémentmodifiée au cours des dernières décennies, y compris pour une partie de nos produits alimentaires.

Comprendre les évolutions qui ont abouti à cette extraordinaire multiplication des échanges – et aux problèmes générés dans toutes les grandesagglomérations – nécessite une prise en compte globale des chaînes logistiques, depuis l’échelle internationale des grands flux intercontinentaux jusqu’à l’échelle locale de la distribution des marchandises dans nos grandessurfaces et nos commerces de proximité.

Cette démarche globale permettra une meilleureanticipation des évolutions à venir par les pouvoirs publics.Les réponses apportées seront d’autant plus importantesque, aux termes du protocole de Kyoto, l’Europe s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % d’ici 2008-2012 par rapport aux émissionsde 1990, et d’au moins 20 % d’ici 2020. L’enjeu, de taille,consistera à concilier le développement de la demande de transports de marchandises avec les nouveaux impératifsde développement durable.

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Accueillir le transport des marchandises

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Les Cahiers – Vous êtes président de la conférence permanente des présidents du Grand Bassin parisien.Pouvez-vous nous présenter la démarche«C8»?Claude Gewerc – Les huit régions qui compo-sent la conférence du Grand Bassin parisienreprésentent environ 40 % de la population etplus de 50 % de la richesse française. Il a doncété essentiel d’appréhender cette échelle deterritoire dès la conception de la « C8 » : ellenous permet de traiter les pro-blèmes que nous subissons etqui résultent, en grande par-tie, des conséquences d’uneorganisation spatiale enétoile, centrée sur Paris.Il s’agit donc aujourd’hui derechercher des solutions àl’échelle de la « C8 » et d’en-visager les contournements de la région pari-sienne que nous pourrons mettre en place, touten conservant et en développant les relationséconomiques que les sept régions entretien-nent avec l’Île-de-France. La «C8» porte un pro-jet global commun aux huit régions. Il respectela capacité de chacune des régions de traiterelle-même les problèmes qui lui sont spéci-fiques. Le Grand Bassin parisien est situé aucœur de la partie de l’Europe la plus riche et laplus développée : le rôle de la «C8» est de luipermettre de poursuivre une politique de déve-loppement extrêmement active, en cohérenceavec cette échelle interrégionale.

L. C. – De quelle marge de manœuvredisposez-vous pour aboutir au positionnement souhaité pour le Grand Bassin parisien,notamment pour ce qui concerne le transport de marchandises ?C. G. – À l’échelle française, nous sommes enpleine contradiction, quant au rôle et à l’actiondes collectivités territoriales : c’est l’État central,en effet, qui décide. Les Régions ont compé-tence en matière d’aménagement du territoireet, tout du moins en partie, en matière d’actionéconomique. Dans le domaine du transport devoyageurs, nous « avons la main ». La RégionPicardie a ainsi fortement investi dans cedomaine et, aujourd’hui, 80 % des trains qui cir-culent en Picardie sont neufs ou rénovés. Enconséquence, le trafic voyageurs a augmentéde 20 % depuis 2004.

Il y a donc des solutions pour ce domaine decompétence qui est le nôtre. Mais pour ce quiest du réseau ferroviaire par exemple, l’État esten train de se désengager. Que pouvons-nousfaire, face à cela, alors que nous n’avons pas lamaîtrise de ce domaine, et que les sommes enjeu sont considérables ?On ne retrouve pas cette contradiction partouten Europe. En Allemagne, en Italie, en Espagne,les Régions peuvent dialoguer directement avecles institutions européennes, parce qu’elles sont

autorités organisatrices,et ont donc une capa-cité de faire et d’organi-ser. Pour ce qui nousconcerne, nous n’avonspas autorité dans uncertain nombre dedomaines, alors quenous devrions l’avoir

pour pourvoir mettre en œuvre notre vision del’organisation territoriale.Ceci vaut pour la problématique fret. Nousavons une vision géostratégique pour chaquemode (ferré, fluvial, maritime, aérien), mais cecin’est pas dans notre champ de compétences. Ily a un hiatus entre notre volonté d’agir et nosmoyens d’actions.

L. C. – Dans le contexte de structurationdes grands flux de marchandises à l’échelle internationale, quel devraitêtre le positionnement du Bassin parisiendans le Nord-Ouest européen?C. G. – Une véritable politique des échangesinternationaux devrait organiser l’achemine-ment des flux de marchandises vers les lieux dedestination, sans que les réseaux soient engor-gés. Il faut, au contraire, favoriser la fluidité, pourles marchandises, comme pour les personnes.Une telle politique doit intégrer tous les modesde transport, pour que l’ensemble du territoiredu Grand Bassin parisien vive et échange avecle reste de l’Europe et du monde. Cela dit, onconsidère trop souvent que les ports maritimesne sont que des portes d’entrée des marchan-dises sur notre continent. Le renchérissementtrès probable du coût de l’énergie, et le très pro-bable redéploiement des outils de productionindustrielle en Europe (notamment dans leGrand Bassin parisien, où l’activité industrielleest largement présente) et dans les pays d’Eu-rope centrale et orientale, pourraient renforcerla vocation d’exportation de ces grands portsmaritimes.

Claude Gewerc est président de la conférence permanenteinterrégionale des présidents du Grand Bassin parisien(« C8 ») et président du conseilrégional de Picardie.À l’initiative du président du conseil régional et du président du conseiléconomique et social régionald’Île-de-France, les présidentsde conseil régional et de conseil économique et social de Bourgogne, du Centre, de Champagne-Ardenne, de Basse et de Haute-Normandie, des Pays de la Loire, et de Picardie se sont réunis le 22 mai 2006 pour la première conférenceinterrégionale des présidents du Bassin parisien. Une deuxième conférence a eu lieu le 23 janvier 2008.

Le Grand Bassin parisien, une vision stratégique interrégionale

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» Une véritable politique des échanges internationauxdevrait organiserl’acheminement des flux de marchandises vers les lieuxde destination, sans que les réseaux soient engorgés. «

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Il faut également penser aux évolutions desfonctions logistiques. Nous nous acheminonsvers la troisième génération de plate-forme, oùles produits et composants sont assemblés etconditionnés, puis réexpédiés vers les lieux deconsommation sur le territoire national et inter-national. Dans cette nouvelle organisation deschaînes de transport, qui s’appuieront sur desplates-formes de « logistique avancée», la fonc-tion des ports maritimes et fluviaux, des réseauxd’infrastructures, des lignes ferroviaires prendtoute son importance.

L. C. – Sur quel réseau d’infrastructures le Grand Bassin parisien devrait-ils’appuyer ?C. G. – Le monde est en train de changer. Il fauten tenir compte dès aujourd’hui pour imaginerdes solutions pérennes à long terme. D’autantque le délai de réalisation des projets d’infra-structures peut être de vingt ans !Un projet d’infrastructure doit être réfléchi dansson ensemble : la problématique des intercon-nexions doit être appréhendée, de même queles perspectives de report de trafic de la routevers le fer et la voie d’eau, mais aussi entre cesdeux modes alternatifs. La question de l’opti-misation de l’usage des infrastructures exis-tantes est, elle aussi, importante.Une question se pose, celle de l’organisationde la réception et de l’expédition des marchan-dises par voie d’eau, en tenant compte d’uncertain nombre d’éléments : le développementde Port 2000, de l’axe Le Havre-Rouen et, plusglobalement, de notre façade maritime allantdu Havre à Dunkerque, et le projet Seine-NordEurope.S’agissant du mode ferroviaire, il faut, certes,permettre aux trains de marchandises de tra-verser l’Île-de-France. Cela doit être le cas pourcertains trains en provenance du Havre et pourceux empruntant l’autoroute ferroviaire Nord-Sud, laquelle pourrait contribuer à résorber lacroissance du trafic routier de l’A1. Mais l’itiné-raire principal doit être un itinéraire de contour-nement complété par un réseau de plates-formes multimodales. Avec l’ouverture de l’Europe à l’est, le transportferroviaire est amené à jouer un rôle considéra-ble. Les marchandises arriveraient par voie fer-rée et pourraient rentrer au cœur des villes parvoie fluviale.C’est pourquoi la question des plates-formeslogistiques, en lien avec les infrastructuresactuelles et futures est importante. Il faudra amé-nager les zones logistiques, les raccorder auxvoies ferrées. Le problème – et il est de taille ! –est de trouver les financements.

L. C. – Quelle stratégie la «C8 » va-t-elle mettre en œuvre à l’avenir pour une meilleure prise en compte du Grand Bassin parisien dans les programmes d’investissement ?C. G. – La première étape de la stratégie de la«C8» est aujourd’hui achevée. Les huit régionsdu Grand Bassin parisien se sont remises autourd’une table et ont évoqué leurs problématiques,leurs enjeux, leurs projets structurants et leurspriorités, dans un esprit d’ouverture et de coopération. Ce premier travail, qui s’est traduitpar un document d’orientation, a permis derefonder une volonté d’agir ensemble.Ensuite, la stratégie de la «C8» doit se traduirepar la sélection d’un certain nombre de champsopérationnels qui sont déjà déclinés dans lepré-projet.Ce que nous avons commencé à mettre enplace s’inscrit dans une réflexion à l’échelleinternationale et repose sur le constat que leGrand Bassin parisien n’est pas pris en compteà l’échelle européenne. Il faut donc que la «C8»négocie avec l’Union européenne et que lespremières pistes évoquées dans le pré-projetsoient discutées.

Propos recueillis par Lydia Mykolenko et Corinne Ropital

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Les grands enjeux et territoires logistiques du Nord-Ouest européen

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Le commerce mondial et l’enjeu des ports maritimes

Conteneurisation, mondialisation et métropolisation

Le port d’Anvers, porte d’entréemaritime de l’Europe

CMA-CGM : un poids lourd dans l’industrie

du transport par conteneurs

Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

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Tandis que les nouveaux pays émergentscomme la Chine et l’Inde se sont posi-tionnés pour accueillir les délocalisa-

tions industrielles, la conteneurisation – quiconcerne aujourd’hui plus de 80 % des pro-duits manufacturés – et la mise en service denavires porte-conteneurs de plus en plus grandsont permis de produire massivement à des mil-liers de kilomètres des lieux de consommation.De fait, un conteneur peut être chargé rapide-ment à bord d’un navire puis déposé sur untrain, une barge ou un camion sans qu’il y aitbesoin d’intervenir sur le contenu. Il a rendupossible la mise en place d’une nouvelle orga-nisation logistique fondée sur la connexion descontinents entre eux.Le transport maritime mondial de conteneurss’est élevé à 110 millions équivalent vingt pieds(EVP) en 2006 et 121,7 M EVP en 2007, soit undoublement par rapport à 2000 (60,5 M EVP).Il croît de plus de 10 % par an depuis la fin desannées 1990 et de 13 % depuis le début desannées 2000. Son développement s’est effec-tué en priorité sur les axes Asie-Europe, Europe-Amérique du Nord et Amérique du Nord-Asie.

Les navires porte-conteneurs : un doublement de la flotte mondiale en dix ansPour répondre à la croissance du trafic, notam-ment de la dernière décennie, la flotte mon-diale de navires porte-conteneurs a considéra-blement augmenté. En janvier 2008, ellecomptait 4300 unités (3600 en 2006 et 2600 en

2000) d’une capacité totale de 10,9 M EVP(8,2 M en 2006 et 4,5 M en 2000). Compte tenudes navires en commande (plus de 1 000navires), la flotte devrait compter 5800 unités enjanvier 2012, représentant une capacité nou-velle de 7 M EVP et une capacité totale de18 M EVP(2). Au cours des quatre prochainesannées, la flotte devrait croître à un rythmemoyen de 14 % par an en termes d’EVP, offrantune capacité de plus de 18 M EVP (contre10,9 M EVP en 2008), malgré un contexte éco-nomique très difficile. La plupart des expertssemblent s’accorder à penser que la criseactuelle affectera peu la croissance mondialedes échanges et que la chute du trafic conte-neurisé qui a pu s’observer dès septembre 2008dans les ports internationaux serait passagère.Parallèlement à cette croissance de la flotte, lataille des navires augmente. L’évolution la plusremarquable concerne les VLCS (Very LargeContainer Ships, navires de plus de 7500 EVP),dont la flotte compte actuellement 188 unités(dont 7 de plus de 10000 EVP). Le nombre desVLCS devrait presque tripler en l’espace de qua-tre ans (514 unités en 2012 dont 158 de plus de10000 EVP). Conséquence de cette évolution dela taille des navires, les ports maritimes ont dûse lancer dans des travaux gigantesques pourpouvoir accueillir ces navires de plus en plus

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

Le commerce mondial et l’enjeu des ports maritimes

Le porte-conteneurs géant EugenMaersk fait son entrée à Port 2000.

Lydia Mykolenko(1)

IAU île-de-France

Le développement du transportmaritime, notamment à partir des années 1960, a été sans aucundoute l’un des principaux facteurscontribuant à la formidableaugmentation des échanges mondiauxet à l’accélération de la mondialisationde l’économie.

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Transport maritime : la primauté des ports asiatiquesAujourd’hui, le transport maritime assureen tonnage plus des trois-quarts des importations et exportations de marchandises entre les pays. Il a atteint 7,4 milliards de tonnes en 2006. Quinze ports, dont douze sont asiatiques*, ont assuré à eux seulsplus de la moitié de ces tonnages.Shanghai est de loin le premier portmondial, avec plus de 500 millions de tonnes traitées.Le port de Rotterdam, premier porteuropéen avec 420 Mt de marchandisestraitées en 2008, est le troisième portmondial. Le port d’Anvers, deuxième porteuropéen, figure pour sa part au dix-septième rang mondial avec 186 Mt traitées en 2007, loin derrière Rotterdam. Hambourg,troisième port européen, n’arrive qu’au vingt-deuxième rang, Le Havre au quarante-cinquième rang.

* Shanghai, Singapour, Ningbo, Guangzhou, Tianjin,Hong Kong, Qingdao, Pusan, Nagoya, Qinhuangdao,Kwangyang et Dalian.

(1) Lydia Mykolenko est responsable des études « logistiqueet marchandises ».(2) Il est possible que ces prévisions soient revues à la baisseou décalées dans le temps, du fait du report de certainescommandes.

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gros, nécessitant un tirant d’eau minimal de16 m, voire 20 m pour les VLCS de plus de 10000EVP, des longueurs de quais de 400 m, des équi-pements de manutention pouvant couvrir aumoins vingt-deux rangées de conteneurs…

Les ports asiatiques sont devenus les plus grands ports du mondeLa Chine, qui est devenue l’un des principauxmoteurs du trafic maritime mondial, a entreprisla modernisation de ses ports maritimes à par-tir des années 1980 et, en 2007, après Singapour,les trois premiers ports mondiaux à conteneurssont chinois (les cinq premiers étant asia-tiques).

Le « range » Nord dans la courseÀ l’autre bout de la planète, les grands courantsd’échange avec l’Asie se sont donc fortementstructurés par les ports de la mer du Nord quitraitent environ les deux tiers du trafic euro-péen de conteneurs. Les ports de Rotterdam,Hambourg et Anvers(3) sont devenus les grandesportes d’entrée et de sortie maritimes du conti-nent européen. Grands importateurs des pro-duits fabriqués en Chine et dans les pays émer-gents, ils tentent de suivre le mouvement et des’adapter car, dorénavant, seuls les ports euro-péens capables d’accueillir les plus gros navirespeuvent se situer sur les grandes lignes mari-times régulières « tour du monde» est-ouest. En

2007, Rotterdam est le 6e port mondial à conte-neurs (7e en 2002), Hambourg conserve sa 9e

place. Anvers, au 14e rang, a marqué le pas parrapport à 2002 (10e). Le Havre avec 2,6 M EVPtraités en 2007 est au 36e rang. La mise en servicedes premiers terminaux de Port 2000 lui ontjuste permis de garder son rang par rapport à2002 (37e place). Marseille, premier port fran-çais avec 100 Mt de marchandises traitées en2007 et 1 M EVP, arrive loin derrière au regardde son trafic de conteneurs.

Les grands travaux du « range » NordRotterdam, premier port européen, réalise unnouveau terminal, Maasvlakte II, d’un coût d’en-viron 3 Md €, dont la capacité sera de 8,5 M EVP.Il envisage d’engager, dès 2013, un nouveau pro-jet qui poussera à 32-35 M EVP, voire 38 M EVPles capacités portuaires en 2035.Le port de Hambourg avait projeté, en 1997, demanipuler 5 M EVP en 2005 ; cet objectif a étéatteint dès 2002. En 2007, il a pratiquementatteint les 10 M EVP et prévoit, avec le dévelop-pement des futurs terminaux, 13 M EVP en 2010et 18 M EVP en 2015.Anvers a inauguré en 2005 son nouveau termi-nal Deurgangdock d’une capacité de 4 M EVPpour un coût d’un peu plus d’un milliard d’eu-ros. Une extension est déjà prévue sur la partieest (le terminal Antwerp Gateway). Avec 2450 mde quai, il aura une capacité de 3,5 M EVP.Au Havre, « Port 2000 » devrait porter la capa-cité de traitement à 6 M EVP. Deux des douzequais prévus au total ont été mis en service : leterminal de France en mars 2006 et le terminalde la Porte Océane en novembre 2007. La miseà disposition des futurs postes à quai est prévueentre mi-2009 et mi-2010.Les ports de la rangée Nord (du Havre à Ham-bourg) ont traité 34 M EVP en 2007 et ont déjàà faire face à une saturation de leurs capacitésde traitement et à la congestion de leurs zonesde stockage, voire à celle de leur desserte terres-tre. Conséquence de la poursuite annoncée surles années à venir(4) de la croissance du trans-port maritime et des investissements récentsou en cours pour adapter leurs installations etconstruire de nouveaux terminaux, ils pour-raient traiter 77 M EVP en 2015. Les projets dedéveloppement de la dizaine de ports de la ran-gée Nord représentent un potentiel d’une tren-taine de millions d’EVP.

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Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

Le commerce mondial et l’enjeu des ports maritimes

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Le port du Havre accueille les mastodontes des mersDébut 2007, le plus grand porte-conteneurs du moment, MSC Pamelade Mediterranean Shipping Company,escalait au port du Havre. D’une longueurde 336 mètres pour une largeur de 45 mètres et un tirant d’eau de 13 mètres, le MSC Pamela transporte9200 EVP.En février 2008, c’est l’Eugen Maersk qui a fait son entrée à Port 2000.L’empilement des conteneurs se fait sur 10 étages en cale et 8 en pontée. Sa longueur est de 397,7 mètres, sa largeur de 56,40 mètres et il nécessiteun tirant d’eau de 16 mètres.Enfin, en novembre 2008 c’est au tour du CMA-CGM Vela d’escaler pour la première fois en France. Ce nouveau géant de 11000 EVP est le plus gros porte-conteneurs mis en service chez CMA-CGM. Il mesure347 mètres de long pour une largeur de 45,2 mètres. Son tirant d’eau atteint15,5 mètres. La valeur marchande de sa cargaison est d’environ un milliardde dollars.

Les 15 principaux ports mondiaux à conteneurs (en millions d'EVP) – classement par rapport à 2007

Pays 2002 2005 2007 Variation annuelle2002-2007

1 Singapour Singapour 16,9 23,2 27,9 10,5 %2 Shanghai Chine 8,6 18,1 26,1 24,9 %3 Hong Kong Chine 19,1 22,4 23,9 4,6 %4 Shenzhen Chine 7,6 16,2 21,1 22,7 %5 Pusan Corée Sud 9,4 11,8 13,3 7,2 %6 Rotterdam Pays-Bas 6,5 9,3 10,8 10,7 %7 Dubaï Émirats A. U. 4,1 7,6 10,6 20,9 %8 Kaohsiung Taïwan 8,5 9,5 10,3 3,9 %9 Hambourg Allemagne 5,4 8,1 9,9 12,9 %10 Qingdao Chine 3,4 6,3 9,5 22,8 %11 Ningbo Chine 1,9 5,2 9,3 37,4 %12 Guangzhou Chine 2,2 4,7 9,2 33,1 %13 Los Angeles États-Unis 6,1 7,5 8,4 6,6 %14 Anvers Belgique 4,8 6,5 8,2 11,3 %15 Long Beach États-Unis 4,5 6,7 7,3 10,2 %

Total 15 ports 109,0 163,1 205,8 13,6 %

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Évolution de la structure de la flotte des naviresporte-conteneurs

janvier 2008 janvier 2012Navires Capacité Navires Capacité

(nb) EVP (nb) EVP> 10000 EVP 7 106400 158 20449007500 - 10000 EVP 181 1546400 356 31035005000 - 7500 EVP 333 2002000 505 31070003000 - 5000 EVP 779 3177500 1163 48007001000 - 3000 EVP 1869 3397200 2362 4279800< 1000 EVP 1142 691800 1292 820700Total 4311 10921300 5836 18156600 So

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(3) Trafic en 2007 : Rotterdam : 400 Mt, 10,8 M EVP ; Ham-bourg : 135 Mt, 8,8 M EVP (18 M EVP prévus en 2015) ; Anvers :186 Mt, 8,2 M EVP.(4) D’après une étude allemande de la banque Hypovereins-bank(HVB) présentée en 2008, la croissance annuelle surles lignes Asie-Europe de la rangée Nord serait de 13,3 % paran jusqu’en 2015.

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Les ports méditerranéens, une alternative pour demain ?Pourtant, si les ports de la façade Nord traitentenviron les deux tiers du trafic conteneurs euro-péen, l’évolution récente a également été favo-rable au développement des ports de la façademéditerranéenne. La part de marché des portsde la façade Nord a diminué au profit des portsde l’Europe du Sud dont l’expansion est favori-sée par la croissance des échanges en prove-nance d’Extrême Orient.Les ports de la façademéditerranéenne se veulent être une alterna-tive pour irriguer l’hinterland centre-européen,en particulier quand il s’agit des flux venantd’Asie où le gain en transit time(5) devient trèsintéressant pour les lignes passant par le canalde Suez.À la croisée des lignes Europe-Asie, Europe-Afrique et Méditerranée-Amérique du Nord, lesprincipaux armateurs mondiaux ont mis enplace, en Méditerranée, des hubs maritimes,notamment à Malte, dans le Sud de l’Italie(Gioia Tauro), dans le Sud de l’Espagne (Algé-siras) et tout récemment au Maroc (TangerMed)(6). Ils pourraient juger pertinent, à terme,d’abréger leurs parcours en déchargeant enMéditerranée une partie de ce qui estaujourd’hui débarqué en Europe du Nord. Algésiras, avec 20 % des parts de marché de lafaçade, a connu une augmentation de 2 M EVPau cours des quinze dernières années. Un nou-veau terminal à conteneurs, Isla Verde Exterior,est en cours de construction. Il offrira un quaide 1900 m de long et un tirant d’eau comprisentre 17,50 et 18,50 m de profondeur. Il devraitentrer en fonction au 1er juillet 2010.Gioia Tauro,en Calabre, totalement dépourvu d’arrière pays,traite 3 M EVP. À Malte, Marsaxlokk traite plusd’1,5 M EVP.À Marseille, les deux nouveaux terminaux deFos 2XL permettront de traiter 2 M EVP à l’ho-rizon 2011, contre une capacité actuelle de700 000 EVP. Puis suivront Fos 3XL (800 m dequai et 50 ha de terre-pleins) et Fos 4XL(entre 1000 et 1200 m de quai et entre 60 ha et80 ha de terre-pleins). Leur mise en service estprévue à l’horizon 2014. À cette date, le port deMarseille-Fos espère pouvoir traiter jusqu’à6 millions d’EVP par an, soit six fois plus que letrafic réalisé l’an passé. De l’autre coté du détroit de Gibraltar, juste enface d’Algésiras, le nouveau port à conteneursTanger Med a été inauguré en 2007. Le premierterminal en activité compte 800 m de quai, 16 mà 18 m de profondeur, huit portiques « super-panamax » et permettra de manutentionner1,4 M EVP par an à l’horizon 2011. En 2009, deuxnouveaux terminaux permettront de porter à8,5 M EVP les capacités du nouveau port d’ici2015 et de faire de Tanger Med le premier port

à conteneurs d’Afrique et de Méditerranée.Sur longue période, le trafic de conteneurs acrû trois fois plus vite que la production mon-diale et cette évolution devrait se poursuivreau cours des prochaines années à un taux deprogression annuel situé autour de 10 %. Elledevrait entraîner au minimum, à l’horizon 2015,un nouveau doublement de trafic.Alors que les grands ports sont confrontés àdes besoins en terre-pleins et en zones destockage de conteneurs croissants et à unmanque de place chronique, ces perspectivesnous amènent à poser la question de la perti-nence de cette spirale qui impose de dévelop-per sans cesse de nouvelles capacités de traite-ment des conteneurs à coup d’investissementsconsidérables. Les ports méditerranéens pour-raient bien prendre le relais des ports du Nord.D’autres modes de transport – en particulier letransport ferroviaire – pourraient peut-être aussiredessiner une nouvelle géographie des grandsflux intercontinentaux et faire émerger de nou-velles portes d’entrée, continentales cette fois.Déjà, alors que la Deutsche Bahn a réceptionnéson premier train Pékin-Hambourg en jan-vier 2008, d’autres opérateurs étudient ce mar-ché, dont le potentiel serait estimé au quart desflux acheminés par voie maritime. Certes, cevéritable «pont terrestre eurasiatique» sur plusde 10 000 km ne pourra pas remplacer lesnavires, même si le transit time est inférieur auparcours maritime. La capacité d’un train estau mieux de 80 conteneurs (ou de 130 conte-neurs superposés sur deux niveaux comme lesgrands trains « double stack » américains), cequi est bien peu en comparaison de la tailledes VLCS. Mais le mouvement est lancé…

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(5) Durée d’acheminement d’un conteneur entre le terminalde départ et le terminal d’arrivée.

Les grandes lignes maritimes Asie-Europe

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La conteneurisation permet une très forteproductivité lors des opérations de manu-tention portuaire, la mise en œuvre d’éco-

nomies d’échelle par l’augmentation de la tailledes navires et un transport multimodal porte-à-porte. De ce fait, elle offre aux industriels ouaux distributeurs un très faible coût du transportinternational associé à une très grande fiabi-lité. Cela explique sa croissance exponentiellede 7 % à 8 % par an.

La conteneurisation : épine dorsale de la mondialisation80 % des conteneurs circulent entre l’Amériquedu Nord, l’Europe et l’Asie orientale et plus dela moitié des conteneurs manutentionnés dansle monde le sont dans les ports d’Asie orien-

tale. Le marché intra-asiatique est aujourd’huile premier marché mondial des conteneurs. À partir de ce cœur asiatique se déploient versl’est la route transpacifique à destination del’Amérique du Nord et vers l’ouest la route àdestination de l’Europe. Depuis les années 1980,l’Atlantique Nord n’est plus qu’un segmentsecondaire de l’artère circumterrestre de cir-culation des marchandises qui relie les troispôles mondiaux. Le long de cette autoroute est-ouest s’égrènent des ports de transborde-ment qui se situent de part et d’autre du canalde Panama, en Méditerranée sur l’axe Suez-Gibraltar (Algésiras, Gioia Tauro), et de la mer

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Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

Conteneurisation, mondialisationet métropolisation

La conteneurisation offre aux industriels un très faible coût du transport international associé à une très grande fiabilité.

Antoine Frémont(1)

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La conteneurisation est née il y a cinquante ans. Simple innovationtechnique à l’origine, elle participe à la dynamique de mondialisation et de métropolisation de nos sociétés.La compréhension des logiques des acteurs qui organisent ces fluxinternationaux est essentielle pour définir des politiques pertinentesd’aménagement des territoires de la logistique métropolitaine.

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Sources : (1) CI-Online ; (2) United Nations, Department of Economic and Social Affairs, Population Division (2006). World Urbanization Prospects: The 2005 Revision. New York: United Nationssauf (3).

Région portuaire Ports à conteneursTrafic annuel(1)

en millions d'EVP AgglomérationsPopulation(2) en

millions d'habitants1980 2005 1980 2005

Delta de la rivière des Perles Hong Kong, Shenzhen, Guangzhou 1,5 43,3 Hong Kong, Shenzhen, Guangzhou-Guangdong 8,0 22,7

Région de Singapour Singapour, Tanjung Pelepas 0,9 27,4 Singapour 2,4 4,3

Delta du Yangtze Shanghai, Ningbo 0,0 23,3 Shanghai, Ningbo 8,5 16,3

Delta du Rhin Rotterdam, Anvers, Zeebrugge 2,8 17,2 Randstad Holland, Flandres belges et Bruxelles - 10,0

Baie de San Pedro Los Angeles, Long Beach 1,2 14,2 Los Angeles-Long Beach-Santa Ana 9,5 12,3

Taïwan Kaohsiung, Keelung 1,6 11,6 Kaohsiung 1,2 1,5

Corée du Sud Pusan, Gwangyang 0,6 13,3 Pusan 3,1 3,6

Baie d'Helgoland Hambourg, Brême 1,5 11,8 Hambourg, Brême(3) - 2,9

Baie de Tokyo Tokyo, Yokohama 1,4 6,5 Tokyo 28,5 35,2

Trafic des neuf principales régions portuaires 11,5 168,5% par rapport au trafic mondial 32,8 44,0

Les neufs principales régions portuaires dans le monde

(1) Antoine Frémont est agrégé de géographie et directeur derecherche à l’Institut national de recherche sur les transportset leur sécurité. [email protected].

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Rouge à Singapour (Dubaï, Colombo au SriLanka ou Port Klang en Malaisie). Les traficsnord-sud ne cessent de prendre de l’importanceen valeur absolue, justifiant de nouvelles routesdirectes entre l’Asie orientale et l’Afrique parexemple. Reflétant les profonds déséquilibresdu commerce international, les trafics conte-neurisés sont totalement asymétriques : nom-bre de navires au départ d’Europe ou d’Amé-rique du Nord repartent vers l’Asie orientaleavec des conteneurs vides !

Conteneurisation et métropolisationEn 2005, neuf très grandes régions portuairesconcentrent 44 % des trafics conteneurs manu-tentionnés dans les ports mondiaux contre 33 %en 1980. À l’exception des hubs de transborde-ment, les plus grands ensembles portuairesmondiaux se situent tous dans des aggloméra-tions multimillionnaires qui représentent le mar-ché de destination de ces marchandises. Laconteneurisation va aussi de pair avec la métro-polisation.Dans ces régions métropolitaines, les complexesportuaires sont un facteur supplémentaire denuisances (congestion, pollution), dans uncontexte de montée des contraintes environ-nementales. Mais pour répondre aux exigencesde compétitivité et de fiabilité des chaînes detransport ainsi qu’à la hausse des trafics, lesports doivent développer leurs infrastructures etde nouveaux services de transport, tant sur leurterritoire que dans l’hinterland. D’importantesréserves foncières sont nécessaires. Elles devien-nent une variable clé des développements por-tuaires futurs, qui s’insèrent dans la probléma-tique plus vaste de l’aménagement du territoirede ces régions métropolitaines.

Des opérateurs mondiauxTrois acteurs essentiels ont participé à la miseen place de ce système conteneurisé mondial,en réponse à la demande des chargeurs : lesarmements de lignes régulières, les manuten-tionnaires et les commissionnaires de transport.Depuis les années 1990, ces trois acteurs se sontglobalisés. Les armements cherchent à être pré-sents simultanément sur les trois principauxmarchés : Asie, Europe, Amérique du Nord. Pourassurer une vaste desserte géographique avecde fortes fréquences, les armements asiatiquessont, à quelques exceptions près, regroupés ausein de trois alliances, essentiellement investiessur l’axe est-ouest. Les réseaux maritimes desarmements asiatiques sont très dépendants ducommerce extérieur de leur pays. Ce sont desarmements « chargeurs ». Ils se heurtent à la

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Trafic des principaux ports à conteneurs dans le monde en 2006

Les dix premiers armements de lignes régulièresen novembre 2008. En % de la capacité de la flotte mondiale en EVP*

* La capacité de la flotte mondiale est évaluée à 12,9 millions d’EVP.

Rang Opérateur Nationalité %1 Maersk Danois 15,72 Mediterranean Shg Co Italo-suisse 11,13 CMA-CGM Français 7,64 Evergreen Line Taïwanais 4,85 Hapag-Lloyd Allemand 3,86 COSCO Container L. Chinois 3,87 APL Singapourien 3,88 CSCL Chinois 3,49 NYK Japonais 3,2

10 Hanjin/Senator Coréen du Sud 2,9Part des dix premiers 60,2Part des vingt premiers 82,0Total monde 100,0DontArmements européens 40,6Armements asiatiques 35,8

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croissance continue des trois armements euro-péens Maersk, MSC et CMA-CGM, qui, indépen-damment de leur nationalité, exploitent desréseaux de dimension véritablement mondiale,articulant les grands marchés est-ouest avec lesmarchés nord-sud via les hubs de transborde-ment.Les opérateurs de manutention portuaire onteux aussi développé des réseaux globaux determinaux, à la faveur du recentrage des auto-rités portuaires sur leurs fonctions régalienneset d’aménagement. 70 % de la manutention por-tuaire mondiale est désormais effectuée par degrandes compagnies internationales qui ontune énorme capacité de financement et contrô-lent un grand nombre de terminaux à travers lemonde. Ce faisant, elles réalisent d’importanteséconomies d’échelle en négociant au mieux,auprès de leurs fournisseurs, le matériel stan-dardisé nécessaire à l’équipement des termi-naux, optimisent le matériel entre les différentsterminaux, la gestion informatique des parcs àconteneurs et la maîtrise d’un carnet de clientsarmateurs et améliorent ainsi leurs perfor-mances en matière de productivité. Ellesconcentrent leurs efforts d’investissements surl’artère circumterrestre est-ouest de circulationdes marchandises, même si elles s’intéressent deplus en plus aux ports du Sud.Enfin, quelques commissionnaires de transportoffrent à leurs clients des prestations logistiquesà l’échelle de la planète, grâce à un vaste réseaud’agences. Ces groupes diversifient leurs acti-vités pour être en mesure de proposer toutesolution de transport en utilisant les différentsmodes ou en les combinant. Leurs activités peuvent s’étendre de la messagerie express à lagestion d’ensemble de la supply chain d’unchargeur. À l’inverse des armements et des

manutentionnaires, l’activité des commission-naires n’est pas capitalistique.

Les logiques d’intégration verticaleLa conteneurisation incite à l’intégration verti-cale pour tirer tout le parti de l’intermodalité.Un unique opérateur de transport intermodalpeut théoriquement se substituer à l’ensembledes acteurs pour organiser la chaîne de trans-port porte-à-porte. Mais, le plus souvent, ceslogiques d’intégration verticale visent à confor-ter les cœurs de métier, comme le montrel’exemple des armements.

Les armateurs cherchent à intégrer les fonc-tions de manutention, afin de sécuriser leursopérations portuaires, notamment dans les portsoù ils ont une forte activité, liée par exempleaux transbordements. De la bonne coordina-tion des escales dans les ports pivots dépend lafiabilité de l’ensemble du réseau maritime. C’estpourquoi certains armements créent leur pro-pre filiale de manutention ou s’allient avec desopérateurs de manutention. Ils sont dans unrapport de compétition/coopération avec cesderniers. Les armements cherchent aussi à opti-miser la gestion du parc des conteneurs. Cesderniers sont un élément de la cale du navireet constituent un important capital fixe immo-bilisé. Un navire nécessite théoriquement troisfois sa capacité en conteneurs, sans doute plusdans les faits. Plus un conteneur effectuera devoyages par an, moins le capital immobilisé seraimportant. Les temps de voyage en mer étantincompressibles, c’est aussi en contrôlant lesflux terrestres de leurs conteneurs que les arme-ments parviennent à comprimer leurs coûts.Cela leur permet en outre d’offrir de nouvellesprestations à leurs clients chargeurs et de drai-ner des hinterlands plus vastes. C’est ce quiexplique le développement du carrier haulage,c’est-à-dire la réalisation du transport terrestrede pré- ou post-acheminement sous la respon-sabilité effective de l’armement de lignes régu-lières. Ils le font lorsqu’ils maîtrisent desvolumes suffisants de conteneurs FCL (FullContainer Load). Par opposition aux conteneursLCL (Less than Container Load) qui nécessitentle regroupement de petits lots en provenance

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Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

Conteneurisation, mondialisation et métropolisation

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Les dix premiers manutentionnaires mondiaux en 2006. En % du nombre d’EVP manutentionnésdans les ports mondiaux*Rang Opérateur Nationalité Cœur de métier %

OT/A**

1 HPH Hongkongais OT 13,82 APMT*** Danois OT 11,83 PSA Singapourien OT 10,74 DPW Dubaïote OT 9,45 Cosco Chinois A 56 Eurogate Allemand OT 2,77 Evergreen Taiwanais A 2,18 MSC Italo-suisse A 29 SSA Marine États-unien OT 1,710 HHLA Allemand OT 1,5Part des dix premiers 60,7Part des opérateurs globaux 70,7

* 443 millions d’EVP ont été manutentionnés en 2006 dans le monde.** OT = Opérateur de manutention

A = Armement de lignes régulières*** APMT est la filiale manutention du groupe AP Möller qui détient aussiMaersk, premier armement mondial de lignes régulières. Les terminaux APMTtravaillent d’une façon privilégiée pour Maersk, pas exclusivement cependant.

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L’intégration de la chaîne de transport à travers l’exemple de l’armateur

ARMATEURSA B C D E

Armateur

Agent maritime

Manutentionnaire

Commissionnaire

Transporteur terrestre

Intégration verticale

Intégration horizontale par fusion de D et E

LexiqueEVP : équivalent vingt pieds.

Unité de mesure standard d’un conteneurpermettant d’élaborer des statistiques.

Hinterland : dans le domaine du transportmaritime, arrière-pays continental

d’un port que ce dernier approvisionne ou dont il tire les marchandises

qu’il expédie.Hubs : zones de concentration

et d’éclatement des conteneurs à l’échelled’un pays, voire d’un continent. Singapour fait exception : 80 %

de son activité est liée au transbordement,bien que le port se situe

dans une grande métropole.Carrier haulage : réalisation du transport

terrestre de pré-post acheminement sous la responsabilité de l’armement.

Merchant haulage : le transport terrestrede pré-post acheminement

est du ressort du transitaire.

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de différents chargeurs et qui sont l’apanagedes commissionnaires de transport, les conte-neurs FCL dépendent de gros chargeurs (auto-mobile, grande distribution), capables d’assurerdes volumes et des flux réguliers. Les armateursorganisent alors directement l’ensemble dutransport porte-à-porte pour le compte de cesgros chargeurs. Avec le carrier haulage, ils cher-chent à réduire les coûts du transport terrestre.Les triangulations consistent à trouver un fretretour pour un conteneur import à partir deson point d’acheminement intérieur, au lieu dele ramener vide directement au port. Le recoursà des modes massifiés comme le rail ou lesbarges fluviales permet de baisser les coûts dutransport. Mais il nécessite une organisationplus complexe que la route, afin d’offrir uneprestation porte-à-porte, notamment par la miseen place de terminaux intérieurs, fluviaux ouferroviaires, à proximité immédiate ou dans l’es-pace urbain des métropoles. À partir de ces ter-minaux intérieurs s’organisent les derniers kilo-mètres routiers vers les entrepôts ou les usines.Plus les réseaux maritimes et terrestres sont étof-fés et maillés, plus il est pertinent de mettre enœuvre ces solutions qui nécessitent desvolumes importants. Lorsque les armements necontrôlent pas le porte-à-porte, mais qu’il estdu ressort du transitaire (merchant haulage),ils perdent la maîtrise de leurs boîtes. En déve-loppant le carrier haulage, ils entrent en concur-rence avec les transitaires. Mais leur perspec-tive n’est pas tant de les contester qued’optimiser leurs flux de conteneurs en amontet en aval du trajet maritime. De plus, les réali-tés sont différentes d’un marché à l’autre, leplus souvent pour des raisons historiques. Lecarrier haulage domine en Amérique du Nord,grâce à l’importance des services ferroviairesdédiés au fret, ou au Royaume-Uni. Ailleurs, enEurope et en Asie, les transitaires et les char-geurs continuent de jouer le rôle dominantdans l’organisation terrestre du transport, la partdu transport terrestre directement maîtrisée parles armements pouvant être raisonnablementévaluée environ à 30 %. Mais cette moyennecache de profondes différences entre les arme-ments, chacun jouant sa propre partition.Cette implication des armements dans la partieterrestre du transport se limite souvent à descontrats de sous-traitance à plus ou moins longterme avec des entreprises spécialisées dansles modes routiers, ferroviaires ou fluviaux. Siles armements prennent en charge la presta-tion commerciale et l’organisation du transportporte-à-porte, en revanche ils s’impliquent peu,sauf exception, dans le capital des sociétés detransport terrestre. Ils se limitent donc à une« logistique du conteneur » qui concourt aufonctionnement des réseaux maritimes et terres-

tres, mais ne participent en rien à la « logistiquede la marchandise».

L’exemple de la rangée Nord-EuropeEn Europe du Nord, le mouvement d’interna-tionalisation s’est traduit par une répartitiondes terminaux entre les armements et les opé-rateurs de manutention. L’activité des ports estdominée par une poignée d’acteurs. Le mar-ché tend à devenir oligopolistique.L’organisation de la desserte terrestre varie enfonction des ports et des acteurs. Seuls,quelques armateurs disposent des volumes suf-fisants de conteneurs FCL pour maîtriser unsegment terrestre. Le groupe danois Möller, quidétient à la fois le second manutentionnairemondial (APMT) et le premier armement mon-dial de lignes régulières (Maersk), est celui quiest allé le plus loin dans le processus d’intégra-tion verticale. À partir des ports de Rotterdamet de Bremerhaven, il a mis en place desnavettes ferroviaires via ses filiales ERS et BoxXpress vers l’Allemagne rhénane et du Sudainsi que vers l’Europe orientale. MSC, secondarmement mondial, a fait de même à partird’Anvers, grâce à des navettes ferroviairesdédiées dont il assure la gestion commerciale.Au Havre, l’ouverture récente de Port 2000 s’esttraduite par l’implication des trois premiersarmements mondiaux dans la manutention etdans la mise en place de navettes fluviales.Les flux conteneurisés participent au « ravitail-lement » des grandes métropoles. La maîtrisede ces flux internationaux s’avère d’autant plusnécessaire qu’ils ne cessent d’augmenter, qu’ilsdépendent d’un grand nombre d’acteurs diffé-rents, chacun avec leur propre logique et qu’ilsnécessitent des réserves foncières aussi biendans les ports que dans l’espace métropolitainqui souvent ne font qu’un.

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* Hutchison est détenu à 20 % par PSA.

Principaux opérateurs de terminaux dans les ports d’Europe du Nord

Opérateur NationalitéOpérateur

de terminal ou armement

Hambourg Bremerhaven Rotterdam Anvers Zeebrugge LeHavre

DPW Dubaïote OT •PSA Singapourien OT • •MSC Italo-suisse A • •APMT Danois OT • • • •Hutchison* Hong Kongais OT •Eurogate Allemand OT • •HHLA Allemand OT •CMA-CGM Français A • •

Références bibliographiques

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Le port d’Anvers se situe à 80 kilomètresde la mer, sur l’Escaut. Il s’étend sur13000 hectares dont 3700 sont dédiés à

l’activité industrielle. Anvers héberge le plusgrand complexe pétrochimique européen. Leport d’Anvers, c’est aussi cinq millions de mètrescarrés de stockage couvert. De nombreux cen-tres de distribution européens sont implantés àAnvers, parmi lesquels ceux de Volvo, Pioneer,Panasonic…Une extension de 1 400 hectaresest projetée en rive droite. Pour les marchan-dises destinées ou en provenance de l’hinter-land ouest-européen, la localisation du portd’Anvers, à l’intérieur du continent, apparaîtcomme un avantage précieux pour maîtriserles coûts et desservir le marché de façon effi-cace. Mais cet avantage ne suffit pas et, compte

tenu de la compétition que se livrent les portsmaritimes de la façade Nord, l’autorité portuaired’Anvers doit en permanence démontrer auxarmateurs et aux chargeurs qu’ils ont intérêt àchoisir Anvers comme premier port d’escale.

Anvers, un grand port vraquier et un pôle chimique de premier ordrePort polyvalent, Anvers ne traite pas que desconteneurs et sa vocation de grand port d’im-portation de matières premières en vrac devientde plus en plus importante. De fait, avec sesvingt-quatre millions de tonnes de transborde-ment de vracs secs, Anvers est un port vraquierde premier ordre. Par ailleurs, le port anversoisest fortement spécialisé dans la distribution deproduits chimiques, secteur dans lequel iloccupe la première place sur le marché d’Eu-rope occidentale. La présence des plus grandsgroupes pétrochimiques multinationaux (Total,BASF, ExxonMobil…) et la constitution de touteune filière industrielle chimique dans son hin-terland ont fait du port d’Anvers l’un des grandspôles mondiaux de la chimie et du raffinage.L’agencement des terminaux vraquiers, la per-formance de leurs équipements (par exemple,le port met à disposition des transitaires et chargeurs anversois une gamme complète deciternes construites pour le stockage de vracsliquides d’une capacité de 30 000 m3 à50000 m3, adaptés à tous types de vracs et de gaz

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Vers une mobilité durable en Europe

Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

Le port d’Anvers, porte d’entréemaritime de l’Europe

Grâce à sa stratégie commerciale et à ses investissements, le port d’Anvers est devenu le deuxième port européen après Rotterdam.

Annick Dirkx(1)

Autorité portuaire d’Anvers

En Europe, les grands courantsd’échange, notamment avec l’Asie,sont fortement structurés par les ports de la mer du Nord, qui traitent environles deux tiers du trafic européen de conteneurs. Grâce à sa stratégiecommerciale et à ses investissements,le port d’Anvers est devenu le deuxième port européen après Rotterdam, le troisième pour ce qui concerne le trafic de conteneurs.

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En trente ans, le trafic maritime d’Anvers a été multiplié par trois.

Pour le trafic conteneurisé, le cap du million d’équivalent vingt pieds (EVP) a été passé

dans les années 1980. Entre 2000 et 2007, ce même trafic a doublé en passant de 4 à 8 millions d’EVP.(1) Annick Dirkx est porte-parole de l’autorité portuaire d’An-vers.

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liquides), la localisation centrale du port sur lafaçade maritime de la mer du Nord et la qualitéde la desserte de son arrière-pays font d’Anversune alternative de premier choix pour l’impor-tation et la distribution de vracs dans toute l’Eu-rope de l’Ouest. L’avenir, pour Anvers, se situedans sa capacité de traiter tous types de traficet, notamment, les vracs qui restent une compo-sante essentielle du système d’échanges, four-nissant les matières premières nécessaires aufonctionnement de l’industrie mondiale.

Une capacité de traitement des conteneurs en extensionÀ coté des vracs, le trafic de conteneurs, dont lacroissance a été spectaculaire au cours desquinze dernières années, est devenu un enjeumajeur pour le port d’Anvers comme pour tousles ports maritimes. Parce qu’ils peuvent êtreexpédiés par divers modes de transport etfaciles à transborder, les conteneurs sont deve-nus le contenant idéal. Leurs dimensions standardisées permettent leur transport en fluxmassifiés, de manière efficace et donc écono-miquement rentable. Leur usage ne se limitepas au transport de marchandises diverses. Lesmarchandises autrefois transportées en vrac lesont de plus en plus par conteneur. Au planinternational, on constate aussi que le volumede marchandises transportées par conteneurcroît plus rapidement que le volume total de

marchandises transportées. Pour répondre àcette croissance, le port d’Anvers s’est lancédans d’importants investissements. Avec laconstruction d’un nouveau bassin, le Deur-ganck, d’une capacité de traitement de septmillions d’EVP, il dispose maintenant d’unsérieux atout. En outre, un plan de développe-ment stratégique a été élaboré, il définit lescapacités de traitement supplémentaires quidevront être réalisées dans les années à venir.Pour l’élaboration de ce master plan, il a ététenu compte d’une croissance encore soute-nue pour les années à venir. À partir de 2010, unralentissement progressif de la croissance acependant été intégré dans les calculs. Bienque la croissance demeure très élevée (envi-ron 5 % annuellement), se fonder sur des pour-centages de croissance de 10 % et plus pourles dix à vingt ans à venir n’aurait pas été réa-liste.

Vers un transport maritime plus vertueuxsur le plan environnementalEn raison de la globalisation, les volumes trans-portés augmentent plus vite que la croissanceéconomique. Le transport – notamment mari-time – et la logistique internationale ont encoreamélioré leur efficacité économique ces der-nières années avec comme conséquence unetendance à la réduction du prix des prestations.Dans ce contexte, le renchérissement du prix del’énergie pèse parfois lourdement, mais il nefaut pas perdre de vue que le transport maritimedemeure de loin moins coûteux et plus écolo-gique que le transport terrestre.Ceci étant, pour compenser la hausse impor-tante du prix du pétrole, les armateurs ont réduitleur vitesse de navigation et ont réorganisé leursservices, notamment en augmentant le nombrede navires sur une ligne pour conserver lesmêmes fréquences. Aujourd’hui, par suite de lacrise économique, le prix des combustibles a denouveau diminué, mais les armateurs conti-nuent d’appliquer le slow steaming.

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Le port d’Anvers en quelques chiffresEn 2008, le port d’Anvers a manutentionnéprès de 190 millions de tonnes de marchandises, dont 101 millions de tonnes transportées par conteneurs ou 8,6 millions d’EVP, 40 millions de tonnes de vracs liquides, 27 millions de tonnes de vracs secs et 17 millions de tonnes de marchandises générales. À l’échelle européenne, Anvers est le deuxième port pour le trafic global et troisième port pour les conteneursderrière Rotterdam (10,8 millions d’EVP) et Hambourg (10 millions d’EVP). Anvers est le hub européen pour les échanges de produitssidérurgiques. En 2008, Anvers a reçu16400 navires et 61359 barges. Il possède 160 kilomètres de quais,400 kilomètres de routes, plus de 1000 kilomètres de voies ferrées.La plus grande partie des pré- et post-acheminements est assurée par la voie d’eau (32 % du tonnage). La route représente 31 % des pré- et post-acheminements, les pipelines 21 %, le fer 12 % et la voie maritime 4 %.

Développement portuaire et développement durableLe projet de construction du bassinDeurganck a reposé sur une intégrationcomplète de l’économie et de l’écologie.Les espaces naturels qu’il a fallu préleverpour la réalisation du projet ont été reconstitués à proximité de façon équivalente. Lors des prochainstravaux d’aménagement et d’extension du port, ce concept sera étendu et un développement des espaces naturelsproactif ira dorénavant toujours de pairavec le développement économique du port.

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Avec la construction d’un nouveau bassin, le Deurganck, d’une capacité de traitement de sept millions d’EVP, le port d’Anvers pourra faire face à la croissance du volume de marchandises transportées par conteneur.

La croissance du trafic de conteneurs a été spectaculaire.

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LexiqueEVP : équivalent vingt pieds.

Unité de mesure standard d’un conteneurpermettant d’élaborer des statistiques.

Hinterland : dans le domaine du transportmaritime, arrière-pays continental

d’un port que ce dernier approvisionne ou dont il tire les marchandises

qu’il expédie.Hubs : zones de concentration

et d’éclatement des conteneurs à l’échelled’un pays, voire d’un continent. Singapour fait exception : 80 %

de son activité est liée au transbordement,bien que le port se situe

dans une grande métropole.Slow steaming : navigation

à vitesse réduite.

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Le commerce mondial et les portes d’entrée maritimes

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Les Cahiers – Avec ses 377 navires et 77 autres en commande, quelle est la stratégie déployée par CMA-CGM, 3e armateur mondial, pour répondre à la croissance du commerce mondial ?Groupe CMA-CGM – Le transport par conte-neurs joue un rôle prépondérant dans leséchanges économiques, représentant plus de80 % des marchandises échangées dans lemonde. Au cours des trois dernières années, letrafic maritime mondial de conteneurs a aug-menté en moyenne de 12 % par an. Pour répon-dre à cette croissance, CMA-CGM a investi dansune flotte moderne et performante, lancé denouvelles lignes et renforcé ses services exis-tants sur l’ensemble de son périmètre mondial.Le groupe a également pris des participationsdans des terminaux portuaires, développé letransport combiné, afin d’offrir des solutionsporte-à-porte à ses clients, et il a consolidé sapolitique de croissance externe au travers d’ac-quisitions de plusieurs sociétés expertes surleurs marchés, intensifiant ainsi sa présence surtous les marchés du monde.

L. C. – Comment sont choisis les portseuropéens desservis par CMA-CGM?CMA-CGM – Afin de répondre aux demandesde ses clients, CMA-CGM est présent dans plusde 50 ports européens. De nombreux critèrespeuvent justifier la mise en place d’une escaledans un port, tels que le potentiel commercialde ce port (volumes, qualité du fret, etc.), sesconnexions vers l’intérieur, le coût de l’escale,l’efficacité opérationnelle, ou encore l’existenceou non de congestion portuaire. De même, lademande exprimée par un client peut parfoisdonner lieu à une escale. En ce qui concernel’hinterland, il n’y a pas de minimum. La zoneportuaire, de par l’importance de son activité ouencore sa proximité à une grande ville, peut suf-fire à justifier une escale.

L. C. – Alors que le maître mot du commerce international est la massification, avec pour corollaire la course aux navires porte-conteneursde plus en plus grands et la réduction du nombre d’escales, pourquoi la CMA-CGM a-t-elle introduit des ports« outsiders » tels Zeebrugge et plus récemment Dunkerque sur ses lignes « tour du monde » ?CMA-CGM – Comme évoqué précédemment,de nombreux critères justifient la mise en place

d’une escale dans un port et notamment lademande exprimée par les clients. Dans le casde Dunkerque, nous avions promis aux char-geurs une escale de notre service FAL 3 le5 août 2008, nous avons tenu parole. Cette escalenous permettra notamment d’étendre l’hinter-land du port, grâce à des solutions de pré- etpost-acheminement adaptées. La mise en placede l’escale à Zeebrugge répond à la mêmelogique. Il s’agit pour le groupe d’offrir à sesclients le meilleur service possible, grâce à lagrande facilité d’accès à ce port, sa capacitéde manutention et son excellent réseau deconnexions vers l’hinterland.

L. C. – Pourquoi le contrôle des terminaux maritimes est-il devenu un enjeu aussi important ?CMA-CGM – La croissance du trafic conteneu-risé, doublée de l’arrivée de navires de trèsgrande capacité, imposent aux terminaux por-tuaires un développement dynamique et uneréorganisation rapide, à l’aide de vastes pro-grammes d’extension et de modernisation deleurs infrastructures. Le groupe CMA-CGM mènedepuis 2003 une politique de participations,d’acquisitions et d’exploitations de terminauxmaritimes dans les principaux ports mondiaux.Cette démarche vise à sécuriser l’accostage deses navires et à limiter le temps nécessaire auxopérations de chargement/déchargement, pourun meilleur service dans un contexte decongestion portuaire grandissant. Les retardsdans un port peuvent compromettre les autresescales de la rotation d’une ligne régulière. Eninvestissant dans des terminaux, le groupe opti-mise l’utilisation des quais, des équipements etdes aires de stockage, en vue de maintenir leshoraires et contrôler les coûts. Ce gain de pro-ductivité obtenu est profitable non seulement àla clientèle de CMA-CGM, mais aussi à l’ensem-ble des utilisateurs des ports.

L. C. – CMA-CGM développe maintenantdes offres de transport terrestre enEurope et en France. Quelles sont-elles et quelles en sont les raisons?CMA-CGM – L’objectif de CMA-CGM est d’êtreun des premiers groupes maritimes mondiauxà maîtriser toute la chaîne logistique afin degarantir à ses clients un service complet et per-formant, offrant des solutions ferroviaires, rou-tières et fluviales intégrées. Par ailleurs, le déve-loppement du transport intermodal s’inscrit,encore une fois, dans une démarche de déve-

Cet entretien est le fruit d’un travail à plusieurs mainseffectué au sein du groupeCMA-CGM. Compte tenu du caractère transversal des sujets traités, mais également du nombre de personnes ayant contribué à cet entretien, nous avons prisle parti de regrouper ces dernières sous le vocable« groupe CMA-CGM ».Fondé et dirigé par Jacques R.Saadé, le groupe CMA-CGM est aujourd’hui le troisièmearmement mondial de transportmaritime en conteneurs et le premier français.Desservant plus de 400 portsdans le monde, le groupeemploie 16 000 personnes,dont 4 200 en France. Il poursuit son développementinternational, appuyé sur une stratégie combinant la création de nouvelles lignesmaritimes, des opérations de croissance externe et d’alliances, une politique de diversification dans le transport multimodal et les terminaux portuaires ainsi que l’extension de son patrimoine immobilier.Son objectif est d’être un des premiers groupesmaritimes mondiaux à maîtrisertoute la chaîne logistique pour apporter à ses clients un service complet et performant, offrant des solutions ferroviaires,routières et fluviales intégrées.À Marseille, une tour haute de 147 mètres dessinée par l’architecte Zaha Hadidabritera, fin 2009, le siègesocial du groupe.

CMA-CGM : un poids lourd dansl’industrie du transport par conteneurs

Interview

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loppement durable qui fait partie des engage-ments et des valeurs de CMA-CGM. En Europe,la filiale rail de CMA-CGM, Rail Link Europe,développe ainsi l’activité rail du groupe auniveau européen et dessert plus de vingt desti-nations. Elle propose des solutions ferroviairesinnovantes avec un système de trains réguliersentre les grands terminaux portuaires et les prin-cipales régions économiques européennes.Trois hubs ferroviaires ont été créés à Ludwigs-hafen (Allemagne), Lille (France) et Lyon(France). Du côté du transport fluvial, la filialeRiver Shuttle Container (RSC), spécialisée dansle transport fluvial combiné fleuve-rail-route,assure le transport entre Fos, Lyon, Mâcon etChalon-sur-Saône, entre Le Havre, Rouen et Paris-Gennevilliers ainsi qu’entre Dunkerque et Lille-Dourges. RSC est aujourd’hui le premier trans-porteur fluvial de conteneurs en France, et leseul prestataire présent sur l’ensemble des prin-cipaux bassins français à grand gabarit que sontla Seine, le Rhône, la Saône et les canaux duNord-France.

L. C. – Quelle stratégie le groupe CMA-CGM envisage-t-il pour faire face à la crise financière et économiqueactuelle et à un prix du pétrole plus élevéà l’avenir ?CMA-CGM – La crise n’a pas touché toutes lesrégions de façon comparable. Il est vrai quenous subissons un ralentissement sur le mar-ché Asie-Europe, mais d’autres marchés restentstables et la croissance est encore forte sur cer-taines zones (Amérique du Sud, Afrique del’Ouest, Europe de l’Est, Asie du Sud-Est). CMA-CGM est une entreprise mondiale qui disposed’un savoir-faire régional, grâce notamment auxrachats successifs de plusieurs sociétés expertessur leurs marchés. Le groupe est de plus en plusprésent, au travers de ses filiales (Delmas surEurope-Afrique, Asie-Afrique), USL sur Austra-lie-Asie-Amérique, CNC sur l’intra-Asie) dansces régions en croissance qui viennentaujourd’hui compenser le ralentissement entrel’Asie, l’Europe ou la Méditerranée et, dans unemoindre mesure, les États-Unis. Le groupe CMACGM s’est bien préparé à la situation et a suprendre les mesures adaptées: nous avons ratio-nalisé ou fusionné certaines lignes pour mieuxrépondre aux évolutions de la demande, etdéveloppé des partenariats stratégiques généra-teurs d’importantes économies d’échelle. Dansle même temps, nous privilégions la maîtrisedes coûts dans tous les secteurs, en réduisantnotamment la vitesse de nos navires (ce quinous permet non seulement d’abaisser notreconsommation énergétique mais également deréduire les émissions de CO2), et nous recevonsde nouveaux navires performants qui vont nous

permettre de réduire nos coûts d’exploitation.Nous continuons également à lancer de nou-veaux services sur les marchés en croissance,et mobilisons toutes nos équipes sur le terrainau travers de notre réseau de 650 bureaux.Aujourd’hui, nous sommes donc confiants dansl’avenir. L’industrie du transport par conteneursest une industrie en croissance (prévisions de+ 5 % à + 8 % en 2009 selon les experts), et nouspensons qu’elle sera amenée à se développerencore, car de plus en plus de marchandises,comme les produits réfrigérés par exemple, ontrecours à la conteneurisation.

L. C. – Un repositionnement à plus ou moins long terme des armateurs sur les ports méditerranéens (Marseille,Algésiras, Malte, Tanger Med…) au détriment des ports du « range» Nordest-il envisageable ?CMA-CGM – D’une manière générale, il y a peud’intérêt à supprimer une escale commerciale.En période de ralentissement de la croissance,l’idée est, au contraire, d’aller chercher des nou-velles opportunités dans de nouveaux ports.C’est la démarche du groupe CMA-CGM, quicontinue à se positionner sur tous les marchésporteurs en ouvrant de nouvelles lignes mari-times, là où la demande le justifie. En revanche,le nombre de services concurrents escalant lemême port peut être réduit, en cas de dispari-tion d’un ou de plusieurs de ces services. On nepeut pas parler de « repositionnement » desarmateurs. Ce qui est vrai est que de nombreuxports méditerranéens, à l’instar de Marseille, ontune carte à jouer en tant que portes d’entréesud vers le continent européen. Déjà, de nom-breux ports, comme Trieste, Koper ou Rijeka,captent ou tentent de capter une part crois-sante des trafics à destination des régions ducentre de l’Europe (Bavière, Suisse, Autriche,République tchèque, Hongrie, Slovaquie…).

Propos recueillis par Lydia Mykolenko

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» L’objectif de CMA-CGMest d’être un des premiersgroupes maritimesmondiaux à maîtrisertoute la chaîne logistique,afin de garantir à ses clients un servicecomplet et performant,offrant des solutionsferroviaires, routières et fluviales intégrées. «

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Les grands corridors européens de fret :quels enjeux ?

Vers une meilleure combinaison fer-fluvial

Quel avenir pour le transport routier de marchandises ?

Veolia Cargo : un acteur phare de l’activité fret en Europe

La constitution des grands corridors de fret

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Du fait de la formidable croissance deséchanges conteneurisés, les grandsports sont confrontés à une saturation

chronique et croissante de leurs terminaux àconteneurs. Les conséquences de cette satura-tion pour les armateurs peuvent être trèslourdes : l’absence de disponibilité de quai aun coût, selon la taille du navire et la cargaisonconcernée, de plusieurs dizaines de milliers dedollars par jour d’attente. Cette saturationtouche aussi les grands axes routiers qui desser-vent les ports, avec des conséquences impor-tantes, puisque la part des coûts de desserteterrestre à partir d’un port représente approxi-mativement 30 % de l’ensemble des coûts detransport. Ainsi, aux cotés de la qualité, de la fiabilité et del’efficacité des services aux navires et des ser-vices de manutention, qui doivent être enmesure de traiter des escales de plus en plusmassives dans un temps le plus bref possible,

l’offre terrestre est devenue, elle aussi, l’un desprincipaux facteurs d’efficacité portuaire. L’en-jeu est désormais de modifier les parts modalesterrestres.

La répartition modale terrestreDans le port de Rotterdam, la part du rail estencore très minoritaire et n’atteignait pas les10 % de conteneurs transportés de et vers l’hin-terland en 2005. L’autorité portuaire vise, toute-fois, à faire passer la part du rail à 20 % en 2035avec le déploiement de la Betuwe Lijn. Cetteligne ferroviaire de 160 km qui relie Rotterdamà la frontière allemande est dédiée au trans-port de marchandises. Inaugurée en 2007, ellepourrait accueillir 480 trains par jour si, cotéallemand où les capacités sont plus limitées,une troisième voie était construite. La ville deHambourg va, pour sa part, investir 500 millionsd’euros au cours des sept prochaines annéesdans le développement de l’infrastructure fer-

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

La constitution des grands corridors de fret

Les grands corridors européensde fret : quels enjeux?

La constitution de grands corridorsde fret au départ des grands portsmaritimes est devenue un enjeu de première importance.

Lydia Mykolenko(1)

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Conséquence du développement des échanges économiques mondiauxqui a promu les grands ports d’Europeau rang de porte d’entrée des marchandises, le paysage des fluxeuropéens s’est profondément modifié.En 2015, 77 millions de conteneurspourraient passer par les ports de la rangée Nord, soit le doubled’aujourd’hui. La constitution de grands corridors de fret au départdes ports maritimes est ainsi devenueun enjeu de première importance.

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Répartition modale du trafic d’hinterlanddans les principaux ports d’Europe du Nord en 2005

Route Rail FleuveRotterdam 59,6 % 9,3 % 31,1 %Anvers 59,9 % 9,1 % 31,0 %Le Havre 87,4 % 6,2 % 6,4 %Hambourg 67,4 % 30,2 % 2,4 %Bremerhaven 55,0 % 43,0 % 2,0 %

Source : A. Frémont, P. Franc, Voies navigables et desserte portuaire - Predit - Inrets 2008.

(1) Lydia Mykolenko est responsable des études « logistiqueet marchandises ».

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roviaire de son port. Sur les 18,1 millions d’équi-valent vingt pieds (EVP) que le port de Ham-bourg traitera en 2015, 4,5 M EVP devraient pou-voir être transportés via le rail. À Anvers, la partfluviale est de 31 % et celle du rail de 9 %. Laréouverture et la modernisation du Rhin d’acierà l’horizon 2015 créera un trajet Anvers-Ruhrplus court que l’itinéraire actuel (162 km aulieu de 211 km). Mais, avec 110 trains prévuspar jour, il sera saturé en 2020. Aussi, un projetprévoit une nouvelle traversée ferroviaire sou-terraine de l’Escaut. Par ailleurs, l’autorité por-tuaire d’Anvers a élaboré un « schéma direc-teur pour la navigation intérieure », l’objectifétant d’accroître d’un tiers, à l’horizon 2018, lestonnages acheminés de et vers le port d’An-vers. Au Havre, la part du mode routier estencore très importante (près de 90 % du traficterrestre). Conscient de cette faiblesse qui limitela compétitivité du port, le grand port maritimedu Havre (GPMH)(2) s’est inscrit dans unedémarche lourde de traitement de ses raccor-dements terrestres, ferroviaires et fluviaux, dontl’aménagement de l’écluse fluviale de Port 2000en particulier. À Marseille, le port joue la cartedu fluvial. Le Rhône apparaît comme la meil-leure solution pour éviter la congestion du GPMde Marseille, la vallée du Rhône étant déjàasphyxiée par les 15 000 camions circulantchaque jour. Parmi les aménagements prévus,deux quais seront réservés pour les barges, uneliaison fluviale en fond de darse 2 sera percéepour mettre en relation directe les terminaux deconteneurs et le canal du Rhône à Fos. Au total,20 M€ de travaux seront investis. À l’autre boutde la chaîne fluviale, le port Édouard-Herriotde Lyon double sa capacité de stockage et serasaturé dans cinq ou six ans, justifiant le projet deconstruction d’un troisième terminal d’ici 2014au sud de Lyon, à Solaize, sur une zone d’amé-nagement concerté de 300 ha en création.

Les compagnies maritimes, nouveaux acteurs du transport terrestreDe leur coté, les compagnies maritimes s’enga-gent dans la création de filiales de transportfluvial ou ferroviaire(3) qui offrent de nouveauxservices de transport terrestre. L’enjeu est, pourelles, particulièrement stratégique, car si ellesgèrent leurs flottes de navires, elles gèrent aussiun important parc de conteneurs et ont intérêtà ce que leur rotation et leur repositionnementsoient le plus rapide possible. Par ailleurs, lademande des chargeurs a changé; ces derniersattendent désormais un service de transport debout en bout. Ce nouvel enjeu nécessite queles armateurs maîtrisent l’ensemble des chaîneslogistiques – et donc la desserte terrestre – etqu’ils pratiquent le carrier haulage, le transportterrestre étant dans ce cas sous la responsabi-

lité de l’armateur. C’est ainsi que, au Havre,emboîtant le pas à Logiseine(4) qui a mis enplace le premier service fluvial entre Le Havreet Gennevilliers (1994), les compagnies mari-times ont développé de nouvelles navettes fluviales à destination de l’Île-de-France ; CMA-CGM et MSC dès 2004, suivies de Maersk et deMarfret en 2006. Les nouveaux services de trans-port que les compagnies maritimes dévelop-pent viennent ainsi renforcer les axes lourdshistoriques qui se sont constitués au départ desgrands ports de la mer du Nord. C’est donc toutnaturellement que les plates-formes de distri-bution d’envergure européenne s’installentdorénavant de préférence à proximité des portsmaritimes et aux nœuds des axes lourds qui lesdesservent, c’est-à-dire là où se concentrent lesservices de transport les plus performants.

Le renforcement des corridors en Franceet dans l’Ouest européenC’est dans le corridor central européen, de laRuhr à Milan, que se trouvent les grandes zonesde concentration logistique et les grandesplates-formes destinées à approvisionner desespaces de consommation transnationaux. Tou-tefois, un nouveau contexte en matière de fluxde marchandises est en cours d’émergence. Ledéveloppement du port du Havre est l’une deces nouvelles donnes, avec la constitution d’unnouveau grand corridor de fret ouest-est. Paral-lèlement, le développement en cours du portde Marseille-Fos contribuera à la constitutiond’un nouveau grand flux de marchandises sud-nord. Premier port de France, Marseille a traité,l’an passé, près de 100 millions de tonnes demarchandises et un million d’EVP. À l’avenir, ilva bénéficier de nombreux investissements,dont la construction des terminaux à conte-neurs de Fos. Son trafic devrait atteindre, grâceaux projets en cours, 152 à 155 millions detonnes et cinq à six millions d’EVP à l’horizon2015. Si les grands armateurs n’envisagent pas,pour le moment, de bouleverser leurs pra-

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Les Cahiers n° 150

La constitution des grands corridors de fret

Les grands corridors européens de fret : quels enjeux?

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LexiqueCarrier haulage : réalisation du transport

terrestre de pré- et post-acheminement sous la responsabilité de l’armement.

EVP : équivalent vingt pieds. Unité de mesure standard d’un conteneur

permettant d’élaborer des statistiques.Hinterland : arrière-pays d’un port,

qui correspond à son aire de marché.Hub : plate-forme (port) vers laquelleconvergent des flux de marchandises

massifiées qui sont ensuite dispatchés. Les hubs permettent de concentrer les flux

et d’utiliser de manière optimale desmoyens de transport. Le principe de hubs’applique à tout équipement logistique

de grande échelle comme les portsmaritimes majeurs (Anvers…),

les aéroports, ou les plates-formesmultimodales dont la vocation

est territoriale.Réseau transeuropéen de transport

(RTE-T) : programme de développementdes infrastructures de transport de l’Union

européenne arrêté par le Parlement et le Conseil européen. Il concerne à la fois

le transport routier et combiné, les voiesnavigables et les ports maritimes

ainsi que le réseau européen des trains à grande vitesse. Les premières

orientations du programme ont été adoptées en 1996,

puis ont été révisées à plusieurs reprises,notamment en 2001 et 2004.

(2) Avec la réforme portuaire adoptée en 2008, qui s’estnotamment traduite par le transfert de la manutention ausecteur privé et la mise en place d’opérateurs intégrés determinaux responsables de l’ensemble des opérations et desoutillages, les ports autonomes sont devenus les grands portsmaritimes (GPM).Sont concernés les ports de Dunkerque, duHavre, de Rouen, de Nantes-Saint-Nazaire, de Bordeaux, deLa Rochelle et de Marseille.(3) Cette création de filiales opérateurs de transport ferro-viaire a été rendue possible par l’ouverture du marché du fretà la concurrence. Cette ouverture mise en place par l’Europepour redynamiser le fret ferroviaire a été rendue effectivepar le «premier paquet ferroviaire», qui prévoyait l’ouvertureà la concurrence du fret ferroviaire international à partir du15 mars 2003, et par le «deuxième paquet ferroviaire », qui afixé au 1er janvier 2007 l’ouverture des réseaux nationaux.(4) Logiseine est un groupement d’intérêt économique (GIE)créé en 1994 par la compagnie fluviale de transport (CFT),les Terminaux de Normandie, et la société gestionnaire du ter-minal à conteneurs de Gennevilliers : Paris Terminal SA.

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tiques(5), ils pourraient juger pertinent, à plus oumoins long terme, d’abréger leurs parcours endéchargeant dans les hubs qu’ils ont mis enplace en Méditerranée (à Malte, à Algésiras,dans le nouveau port de Tanger Med et, demain,à Marseille). Les deux grands axes sud-nord quitraversent la France seront alors particulière-ment sollicités.Un autre élément marquant du contexte de cesquinze dernières années et de demain se situedans l’évolution du trafic transpyrénéen, quis’est vivement développé à la suite de l’intégra-tion de l’Espagne dans l’espace européen. Surla période récente, le rythme moyen est moinsrapide, mais la progression reste forte : + 28 %entre 1999 et 2004. En 2004, d’après le SOeS(6), sixmillions de poids lourds (représentant 80 Mtde marchandises) ont franchi les Pyrénées ;50 % de ces camions étaient en transit sur leterritoire français. À Biriatou (frontière cotéAtlantique), 2,8 millions de poids lourds (soit7 600 PL/j dont 42 % en transit à travers laFrance) ont franchi les Pyrénées. À l’horizon2020, les estimations montrent que ce traficpourrait atteindre 12000 PL/j sur ce passage. AuPerthus (coté méditerranéen), on comptait3,2 millions de poids lourds (8400 PL/j). La pro-gression devrait être identique à celle du cotéAtlantique. Tandis que les experts prévoient undoublement de ces flux à l’horizon 2020, ledéveloppement de l’autoroute ferroviaire entrePerpignan et Bettembourg, près de Luxem-bourg, et le projet d’autoroute ferroviaire atlan-tique ne concerneront, ensemble, qu’un traficde 600 000 à 900 000 PL/an(7), soit l’équivalentd’une dizaine de millions de tonnes : uneréponse partielle à la croissance de ces trafics.Un projet d’envergure, la construction d’uneliaison ferroviaire à grande capacité à travers lesPyrénées, est inscrit dans la liste 2 des projetsprioritaires du réseau RTE-T. D’après les pre-mières pré-études, cette ligne aurait le poten-tiel de prendre en charge 30 % du trafic terres-tre, soit 60 Mt à l’horizon 2020.Outre ces trafics croissants entre l’Espagne et laFrance, il faut également prendre en compte ledéveloppement en cours du nouveau hub mari-time de Tanger Med et le projet de liaison fixeentre le Maroc et l’Espagne par Gibraltar qui aété présenté à l’Union européenne en octo-bre 2008. Ces projets auront des conséquencesimportantes sur les échanges entre le Maroc etl’Europe, notamment sur la circulation des mar-chandises en France, principal partenaire éco-nomique du Maroc, et terre de transit pour lesflux sud-nord.

Les réponses de l’Union européenne face aux congestions des réseauxPour répondre à ces évolutions attendues destrafics, les réseaux ferroviaires ont besoin de semoderniser et de se développer et certains pro-jets font l’objet d’un soutien de la part del’Union européenne. Dès la fin des 1990, toutesles réflexions européennes faisaient état d’uneforte croissance de la demande future en trans-port. Le Livre blanc de la Commission euro-péenne, en 2001, annonçait une croissance àl’horizon 2010 de 38 % pour les marchandiseset pointait «un risque croissant de dysfonction-nement et de blocage du système européen detransport à l’horizon 2010». Considérant la crois-sance attendue du trafic entre les États mem-bres, l’Union européenne a adopté, dès 1990, unpremier plan d’actions, qui englobe tous lesmodes de transport, sur les réseaux transeuro-péens de transport (RTE-T). En 2004, une révi-

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(5) Voir l’étude allemande présentée par la banque Hypove-reinsbank (HVB) sur les besoins en capacités des ports duNord-Ouest européen, ou l’article «L’Asie pousse l’Europe àinvestir dans ses ports », Transports Actualités, n° 887-888,mars 2008.(6) Service de l’observation et des statistiques du ministèrede l’Économie, de l’Énergie, du Développement durable et del’Aménagement du territoire. (7) À raison de 20 allers-retours par jour et 40 remorques partrain.

Rail Link, l’offre ferroviaire de CMA-CGMLe premier train a été mis en service en janvier 2007 entre Marseille et Mannheim en Allemagne. Ce trainreprésente un gain de temps appréciablepar rapport à un déchargement dans les ports du nord de l’Europe pour des navires en provenance d’Asie. Rail Link dessert à fréquence plurihebdomadaire plus de vingtdestinations en Europe, grâce à un système de trains réguliers et directs entre les grands terminaux portuaires et les principales régions économiqueseuropéennes. Marseille, Le Havre, Paris,Lyon, Anvers, Rotterdam, Zeebrugge et Ludwigshafen-Mannheim sont ainsi desservies. CMA-CGM a décidé de poursuivre son expansion sur le marchédu fret ferroviaire grâce au lancement de trois nouvelles navettes opérées en traction privée. Elles sont déployées sur les axes Dourges-Zeebrugge (troisrotations par semaine), Lyon-Fos et Le Havre-Bonneuil (respectivement deux rotations par semaine).

Les trente axes du réseau RTE-T

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sion du RTE-T a été faite pour tenir compte de« l’aggravation inquiétante de l’engorgementdes réseaux due à la persistance de gouletsd’étranglement, aux chaînons manquants, aumanque d’interopérabilité»(8). Une liste de trenteaxes et projets prioritaires(9) – de laquelle le Bas-sin parisien est absent, à l’exception de la liai-son fluviale à grand gabarit Seine-Escaut(10) – aété arrêtée. Or il est évident que, pour très impor-tant que soit ce projet fluvial, il ne pourra à luiseul apporter une réponse à l’engorgementcroissant des réseaux routiers et ferroviaires quitraversent l’Île-de-France.L’importance de la desserte ferroviaire est deve-nue capitale, tant pour l’élargissement de l’hin-terland à des zones lointaines que pour la «dé-saturation» des accès routiers au port. Et, là oùla géographie le permet, le transport par bargesest une solution compétitive. Certains ports sesont aussi tournés depuis quelques temps versle cabotage maritime, qui prend une part demarché croissante, et l’on parle, depuis peu,d’autoroutes de la mer. Soutenues par l’Unioneuropéenne, les autoroutes maritimes le sontaussi en France, par la loi de programmationsur la mise en œuvre du Grenelle de l’environ-nement, et par l’Espagne. Ces deux pays ontlancé, en avril 2007, un appel à projets destinéà créer une première autoroute maritime entreles deux pays. L’objectif est de transférer de100000 à 150000 remorques par an sur le modemaritime. Les Pays-Bas, le Royaume-Uni, le Dane-mark, la Suède et la Norvège ont aussi lancédes appels à projets. La Commission euro-péenne a réservé (2007-2013) une enveloppe de310 M€ pour le financement d’autoroutes de lamer.

Les ports inland, un nouveau maillonessentiel des grandes chaîneslogistiques internationalesPour accompagner l’évolution des flux interna-tionaux, les grands ports, mais aussi les arma-teurs et les opérateurs de transport, investissentdésormais dans des ports inland qui devien-nent des maillons essentiels dans les chaîneslogistiques du transport maritime et continen-tal. Ce sont eux désormais qui orientent et struc-turent les grands flux internationaux de mar-chandises. C’est la carte qu’a jouée Duisbourgen Allemagne, qui est devenu le plus grand portinland du monde. La CMA-CGM y a investi 20 M€

en partenariat avec le japonais NYK et entendy traiter 100000 EVP d’ici deux ans. Cette plate-forme logistique de plus de 2000 ha (dont unezone logistique trimodale, Logport, de 650 ha)est située à la confluence Rhin-Ruhr, à environ200 km des terminaux de Rotterdam, Anvers etZeebrugge. De nouveaux travaux vont faire pas-ser la capacité du port de Duisbourg à 2,5 MEVP

et un plan d’investissement de 100 M€ est des-tiné à l’amélioration de la desserte ferroviaire.C’est la carte aussi que joue le port de Lille avecle développement de sa plate-forme trimodaleDelta 3, située à 20 km au sud de Lille. Ouverteà l’activité logistique fin 2003, elle s’étend sur300 ha et accueille dans ses 330000 m2 d’entre-pôts des centres de distribution européens. Uneextension sur 115 ha (et 230000 m2 d’entrepôts)attenants au site actuel est prévue et deux nou-veaux entrepôts seront livrés courant 2011. Leterminal de transport combiné est équipé desept voies ferrées de 750 m et quatorze trains parjour relient Delta 3 à Mannheim, Le Havre, lesud de la France, le nord de l’Italie, l’Espagne,Anvers et Zeebrugge. D’autres destinations sontà l’étude, ainsi que l’autoroute ferroviaire atlan-tique Dourges-Hendaye. L’accès fluvial reposesur un quai de 250 m bordant le canal à grandgabarit Dunkerque-Valenciennes. Encore peudéveloppé aujourd’hui, le transport fluvial deconteneurs bénéficiera de l’ouverture du canalà grand gabarit Seine-Nord.Pour l’avenir, on peut penser que les conges-tions observées dans les grands ports ne vontpas disparaître rapidement. C’est sans douteune chance à saisir pour le port du Havre : denouveaux services ferroviaires partiront de ceport, dès lors que les goulets d’étranglementsur le réseau francilien seront résorbés et qu’uncontournement ferroviaire de l’Île-de-Francesera opérationnel. C’est aussi une chance pourle port de Marseille. L’Allemagne du Sud est,d’ores et déjà, desservie aisément par le portde Trieste et des trains remontent la vallée duRhône en direction de l’Allemagne rhénane.La création d’un nombre limité de plates-formesmultimodales d’envergure européenne, dontcertaines devront être situées en Île-de-France,permettrait d’orienter et de structurer les grandsflux internationaux de marchandises. Grâce àleur taille importante et leur desserte nécessai-rement trimodale, ces ports inland pourrontmassifier les flux et jouer un rôle de levier dansle report modal en faveur des modes alternatifsà la route.

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La constitution des grands corridors de fret

Les grands corridors européens de fret : quels enjeux?

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Les autoroutes de la merLes projets d’autoroute de la mersupposent une réorganisation des chaîneslogistiques dont la mise en œuvre est complexe pour les chargeurs, les logisticiens et les transporteurs et nécessite notamment des ruptures de charges et des augmentations de stockage. C’est pourquoi de nombreuxprojets de lignes régulières ont échoué dès le début ou au bout de quelques moisd’exploitation. La liaison Toulon-Civitavecchia, lancée en février 2005, a étéla première autoroute de la mer française. La ligne desservie par un ferry, pouvant embarquer jusqu’à800 passagers, 160 voitures et entre 130 et 150 remorques ou camions, s’est appuyée sur un fonds de cale industriel de voitures neuves (trafic de GEFCO).

(8) Livre blanc de la Commission européenne : La politiqueeuropéenne des transports à l’horizon 2010: l’heure des choix,publié en 2001.(9) Voir le rapport de la Commission européenne : «Réseautranseuropéen de transport, axes et projets prioritaires 2005».(10) Ce projet a été déclaré d’utilité publique en septem-bre 2007. Il vise à relier la Seine au canal Dunkerque-Escautet au réseau du Benelux par une voie navigable à grandgabarit de 105 km. L’étude économique estime un trafic com-pris entre 13 Mt et 15 Mt (dont 250000 conteneurs) en 2020et montre qu’il améliorera les conditions de transport ducorridor nord-sud en provenance des ports de la mer duNord en augmentant de cinq points la part de marché du flu-vial (3,6 % en 2000, 8,4 % en 2020).

Duisbourg, premier port inland d’EuropeLe port de Duisbourg a manutentionné900000 EVP en 2007. Il est desservi par une liaison fluviale à grand gabarit et par 300 mouvements de trains par semaine.

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La constitution des grands corridors de fret

Les Cahiers – Le Port du Havre est le premier port français pour le traficde conteneurs. Les développements de Port 2000 en renforceront la placeparmi les grands ports du « range» Nord.En quoi la réforme des grands portsmaritimes constitue-t-elle une chancepour les ports français, celui du Havre en particulier, par rapport aux portsconcurrents du nord de l’Europe?Jean-Damien Poncet – L’objectif du plan derelance(1) consiste à permettre à chaque parte-naire de la communauté portuaire de jouerpleinement et clairement son rôle dans sondomaine de compétence. Le plan de relancerepose sur quatre orientations majeures :- conforter les grands ports maritimes dans

leurs missions de développement durable,d’aménagement et de catalyseur du dévelop-pement des transports massifiés, au-delà desmissions régaliennes ;

- moderniser la gouvernance des ports pourpermettre un pilotage pertinent et concerté ;

- faciliter les investissements portuaires et dedessertes ;

- transférer vers les opérateurs privés toutes lesactivités d’outillage et les personnels.

Les opérateurs auront ainsi la pleine maîtrisedes terminaux, tant au niveau des équipementsque des personnels (porti-queurs et dockers). En ce quiconcerne plus particulière-ment les conteneurs, le plande relance permet de confir-mer un objectif de développe-ment important et rapide, pouratteindre un volume de traficde 5 millions équivalent vingtpieds (EVP) en 2015 et plus de6 M EVP en 2020. Pour cela, leport du Havre dispose de leviers essentiels pouratteindre ces objectifs :- la présence de trois armements leaders mon-

diaux (CMA-CGM, MSC et Maersk) qui sontimpliqués dans l’exploitation de terminauxen association avec des partenaires de taillemondiale comme DP World ;

- des investissements pour le développementet la modernisation des terminaux (terminauxNord, terminaux Sud – postes onze et douzede Port 2000), pour répondre notamment àl’augmentation de la taille des navires et auvolume des transbordements ;

- des investissements d’amélioration des modes

de transports massifiés alternatifs à la route,comme le canal fluvial ou le futur chantiermultimodal.

La réforme portuaire doit donc permettre derépondre aux attentes de productivité liées àla manutention et à la cohérence d’un com-mandement unique de l’ensemble des opéra-tions maritimes et terrestres. Cette réformeassigne aux grands ports maritimes la missionde développer la performance du transfert destrafics vers les modes terrestres et d’augmenterl’hinterland terrestre, condition impérative pourdévelopper les escales et attirer davantage lesservices maritimes des armateurs de premierrang. La taille des navires augmente considéra-blement et limite le nombre d’escales dans lesports pivots. Ceci conduit à accroître considé-rablement le volume des conteneurs traités parescale (record actuel au Havre : 4000 mouve-ments, soit 6000 EVP). Ceci signifie que la com-pétitivité d’un port, pour attirer les plus grandsporte-conteneurs, sera fonction à la fois de lacapacité de traiter dans un temps court un nom-bre très élevé de mouvements, de la disponibi-lité d’espaces importants de stockage, de lacapacité d’évacuation adaptée à ces grandesquantités, et de la connexion avec un hinter-land suffisamment vaste pour que l’armateurconcerné ait effectivement accès au trafic voulupour justifier l’escale de son navire. Les capaci-

tés d’accueil pourles plus grandsnavires sont enconstant dévelop-pement depuisl’ouverture, enavril 2006, par Ter-minal de France,adossé à CMA-CGM, des deux pre-miers postes à quai

de Port 2000. Depuis novembre 2007, TerminalPort Océane et l’armateur Maersk opèrent deuxnouveaux postes à quais et d’ici 2012, six autrespostes à quais seront en service. À terme, douzepostes à quai sur 4200 mètres linéaires serontopérationnels à l’horizon 2020, permettant ainside traiter 4,2 M EVP. Tous ces terminaux sontaccessibles sans limite de tirant d’eau 365 jourspar an.

Jean-Damien Poncet estdirecteur du développement du port du Havre. Depuis plusieurs années, le port du Havre est le premierport français pour le trafic des conteneurs et le cinquièmeport européen. Ce trafic est amplifié pour un tiers de transbordements maritimeset pour deux tiers d’échangesavec l’hinterland.La plate-forme havraise s’inscritdans une forte dynamique de structuration de la filièrelogistique régionale normande.Le port du Havre connaît un essor significatif des projetsou implantations logistiques, en lien avec les perspectivesouvertes par les récentsdéveloppements portuaires et, en particulier, le nouveauport à conteneurs Port 2000.L’économie portuaire est également une véritablelocomotive pour la zoned’emploi du Havre, ayant permisune bonne part de créationsd’emplois par des entreprisesdirectement liées aux activitésmaritimes et portuaires.

Vers une meilleure combinaison fer-fluvial

Interview

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» La réforme portuaire doitpermettre de répondre aux attentesde productivité liées à la manutention et à la cohérenced’un commandement unique de l’ensemble des opérationsmaritimes et terrestres. «

(1) Il s’agit du plan de relance de l’économie, qui vient abon-der les engagements financiers de l’État pour les ports mari-times, dans le cadre de la mise en œuvre de la loi portant surla réforme portuaire adoptée le 4 juillet 2008 (depuis cette loi,les ports autonomes sont devenus des grands ports mari-times).

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L. C. – La compétitivité des ports se jouedorénavant à terre… Or, le port du Havrese caractérise par une part encore trèsfaible du ferroviaire et du fluvial (environ10 %) dans la desserte de son hinterlandà comparer avec Anvers, Rotterdam ou Hambourg (part supérieure à 40 %).Pourquoi cette part des modes alternatifsà la route est-elle restée si faible en France? À quelles conditions, pour le mode fluvial et ferroviaire,pourrait-elle être significativementaccrue? Le port du Havre projetted’aménager un chantier multimodal sur le site portuaire. Quels sont les enjeuxde cette future interface mer-terre du port du Havre?J.-D. P. – S’il est exact que la part modale pourle fluvial et le ferroviaire reste inférieure à cellesde nos voisins, celle-ci évolue positivement(14 %) fin 2008, particulièrement grâce à uneforte progression du combiné rail-route (+ 80 %par rapport à 2006). Le combiné fluvial a aussifortement progressé depuis 2006 (+ 30 %), grâceà l’augmentation du nombre d’opérateurs flu-viaux, dont les filiales des trois premiers arma-teurs mondiaux. L’une des clés de réussite pouratteindre notre objectif d’1 M EVP en transportcombiné fer et fluvial est de massifier tant surle port du Havre que sur les terminaux ferro-viaires ou ports intérieurs.

Cette massification peut s’opérer sur le portdu Havre sur un chantier dédié au transportcombiné, permettant d’élargir l’offre terrestreet offrant à tous les opérateurs de transportscombinés fluviaux et ferroviaires la possibilitéde desservir tous les terminaux maritimes.Cependant, seuls les trafics ferroviaires pour les-

quels les volumes pour un seul terminal ne sontpas assez réguliers et importants pour constituerun train ont vocation à passer par ce chantier.Pour le mode fluvial, l’un des handicaps actuelsest l’obligation de desservir, sur une plage detemps limitée, plusieurs terminaux maritimes.Cette méthode présente trop d’aléas pour assu-rer des taux de remplissage conformes aux cri-tères de rentabilité, freinant ainsi l’offre com-merciale et l’augmentation des fréquences. Cechantier, qui permettra d’augmenter la produc-tivité des modes massifiés, est un composantessentiel du système industriel de massificationdu port du Havre, indispensable pour permettrela croissance souhaitée des trafics massifiés.Complémentaire à cette plate-forme multimo-dale, le prolongement du grand canal, maillonimportant du système de transports massifiésdu port, doit en particulier permettre de répon-dre à l’enjeu de la fluidité des différents modesde transport sur le domaine portuaire (notam-ment au regard de la croissance du mode flu-vial), en limitant les manœuvres de ponts sur lecanal du Havre à Tancarville et, par conséquent,les encombrements. L’ensemble de ces outilsde massification et de fluidification impliquedes moyens financiers et des aides publiques àla hauteur des enjeux.

L. C. – Les ports maritimes sont devenusles portes d’entrée des marchandises sur le continent européen. Les grandesplates-formes de distributioneuropéennes cherchent à s’installer à proximité ou aux nœuds des axes de transport massifiés qui desservent les ports maritimes. Quel serait le réseaueuropéen de terminaux inland dont le port du Havre aurait besoin? Les compagnies maritimes CMA-CGM et NYK vont investir dans un terminalintérieur dans le port de Duisbourg et l’Ocean Carrier Terminal du port de Duisbourg sera ainsi le premierterminal intérieur en Europe exploité par des armements maritimes. Le port du Havre envisagerait-il d’investir dans des terminaux fluviaux ou ferroviaires en France ou en Europe?J.-D. P. – Rappelons d’abord que grâce au trans-port maritime à courte distance, Le Havre joueun rôle de hub maritime pour tous les ports dela façade atlantique française, les Îles britan-niques et la péninsule ibérique. Par les modesterrestres, le port du Havre est déjà relié à d’im-portantes plates-formes multimodales sur le ter-ritoire français et en Europe, comme Rouen,Gennevilliers, Lyon, Strasbourg, Dourges etMannheim. Le port du Havre se veut un parte-naire actif des principaux terminaux inland aux-

Accueillir le transport des marchandises

Les Cahiers n° 150

La constitution des grands corridors de fret

Vers une meilleure combinaison fer-fluvial

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LexiqueEVP : équivalent vingt pieds.

Unité de mesure standard d’un conteneurqui permet d’élaborer des statistiques.

Hinterland : arrière-pays d’un port, qui correspond à son aire de marché.

Hub : plate-forme (port) vers laquelle convergent des flux

de marchandises massifiées qui sont ensuite dispatchés. Les hubs

permettent de concentrer les flux et d’utiliser de manière optimale

des moyens de transport. Le principe de hub s’applique à tout équipement

logistique de grande échelle comme les ports maritimes majeurs

(Anvers…), les aéroports, ou les plates-formes multimodales.

Hub maritime : il s’agit des portsmaritimes capables d’accueillir

les très grands navires effectuant les lignes tour du monde et à partir

desquels sont ensuite desservis les portsplus petits par des navires collecteurs.

Range Nord-Ouest : ensemble des portsmaritimes de la façade Nord-Ouest,

du Havre à HambourgTerminaux « inland» : parfois appelés

«ports secs », il s’agit de grandes plates-formes multimodales situées

dans l’hinterland des ports maritimes vers lesquelles sont évacués les trafics,

notamment par les modes massifiés.

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Sur le port du Havre, la massification peut s’opérer sur un chantier dédié aux transportscombinés, permettant d’élargir l’offre terrestre et offrant à tous les opérateurs de transportscombinés fluviaux et ferroviaires la possibilité de desservir tous les terminaux maritimes.

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quels il est relié. La coopération est basée surdes échanges d’information, sur des actions depromotion concertées et sur le développementde l’offre de transport massifié. Avant la miseen service du canal Seine-Nord Europe, les portsde la vallée de la Seine (ports du Havre, deRouen, et de Paris) vont structurer un réseaude plates-formes sur l’axe Seine qui augmen-tera encore le maillage du territoire du nord dela France. Il est impératif de développer ceréseau de plates-formes, notamment sur l’axeSeine, en cohérence avec les capacités des axesferroviaires de conforter, et avec un schéma degrandes zones logistiques propices à un déve-loppement conjoint du port et son hinterlandproche. Un projet de connexion au port de Duis-bourg permettra au Havre de trouver sa placedans le réseau paneuropéen de transport ferro-viaire et fluvial et de desservir un hinterlandbeaucoup plus vaste. D’autres projets sont àl’étude en Suisse et dans le nord de l’Italie. Uneréflexion est en cours afin de formaliser unestratégie plus offensive de connexion aux plates-formes européennes en partenariat avec lesautres acteurs du secteur portuaire.

L. C. – Les experts s’accordent à penserque la croissance du transport maritimese poursuivra à un rythme soutenu au cours des deux prochaines décennies.Quelle place pourrait être celle du Havre au-delà de la réalisation de Port 2000 et des 6 millions d’EVP qui seront traitésà terme ?J.-D. P. – Sur le moyen terme, soit d’ici à 2015-2020, les perspectives de trafic établies par lesprincipaux consultants spécialisés, en l’occur-rence Drewry Shipping Consultants Ltd pourles prévisions les plus récentes (septembre

2008), tablent sur une poursuite de la croissancede l’activité portuaire dans le domaine desconteneurs.Les flux de conteneurs sont déterminés par denombreux paramètres du commerce interna-tional : relations géopolitiques, croissance éco-nomique des zones géographiques, développe-ment économique de l’hinterland, notammentsur les activités logistiques, règles de fonction-nement du commerce mondial et régional. Àceci s’ajoutent les évolutions propres du trans-port maritime conteneurisé qui impactent plusparticulièrement tel ou tel port sur un rangedonné : augmentation de la taille des navires,développement du transbordement et des fonc-tions de hub, concentration… On peut néan-moins évaluer à long terme le « gabarit » desdéveloppements futurs du Havre. Ainsi retient-on 14 M EVP comme chiffrage de dimensionne-ment à l’horizon 2030. Il ne s’agit pas tant d’éta-blir des prévisions précises sur un tel horizon,que de nous assurer dès maintenant que nouspourrons disposer des espaces nécessaires, etde réfléchir aux scénarios d’aménagement etde partenariats qui nous permettront de resterdans la compétition.

Propos recueillis par Lydia Mykolenko

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Les hypothèses de trafic du port du Havrese fondent sur deux éléments :1 • Un marché en Europe avec une croissance modérée qui se réduitau cours du temps :- 6,5 % par an sur la période 2005 à

2010.- 5,3 % sur la période 2010 à 2015.- 4,4 % sur la période 2015 à 2020.2 • Un objectif raisonnable d’évolution de part de marché du Havre sur le rangeNord-Ouest :- 7,9 % sur la période 2005/2010.- 9 % sur la période 2010/2015.- 9,3 % sur la période 2015/2020.En moyenne, la part de transbordementdevrait s’établir autour de 40 % du traficglobal, les 60 % restants correspondraientau trafic hinterland.

Prévisions d’activité portuaire à moyen termeEn millions d’EVP 2007 2010 2013Monde (millions d’EVP) 496,6 637,9 824,3Monde, TCAM* + 8,7 %/an + 8,9 %/anNord Ouest Europe (millions d’EVP) 55,9 67,5 81,2Nord Ouest Europe, TCAM* + 6,5 %/an + 6,4 %/an

* Taux de croissance annuel moyenSource : Drewry Shipping Consultants Ltd 2008

Complémentaire à la plate-formemultimodale, le prolongement du grand canal, maillon importantdu système de transports massifiésdu port, doit permettre de répondreà l’enjeu de la fluidité des différentsmodes de transport sur le domaineportuaire.Gr

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Pour « rééquilibrer le partage modal », ilfaudrait diminuer l’usage du mode rou-tier et renforcer celui des modes alter-

natifs que sont le chemin de fer, la voie fluvialeou la voie maritime ainsi que des combinai-sons multimodales ou intermodales. Le discourspolitique voudrait davantage affecter l’usagedu transport routier à la desserte fine du terri-toire (enlèvements et livraisons), les achemine-ments longue distance étant assurés par lesmodes alternatifs (ferrés notamment).

La part de la route ne cesse de croîtrePour l’heure, les statistiques évoluent en sensinverse de celui souhaité par les responsablespolitiques : parmi les modes terrestres, la part

de la route ne cesse de croître. Cette évolutionest engagée depuis fort longtemps, depuis la finde la Première Guerre mondiale, avec l’avène-ment de la route moderne et de la traction auto-mobile. Mais ce type de répartition modale n’estpas universel. L’Europe, et en particulier l’Eu-rope occidentale, fait un usage bien plus intensede la route que d’autres grands ensembles éco-nomiques de par le monde.À l’intérieur même de l’Union européenne(sans parler de l’Europe de l’Atlantique à l’Ou-ral), les différences sont très grandes. Elles résul-tent de raisons multiples : taille, spécialisationéconomique, politique des transports des pays.De cette diversité, on peut tirer une conclusionpolitique, ou du moins une hypothèse : le par-tage modal évolue sans doute lentement, maisn’est pas immuable et ne répond pas à une loiunique. Les politiques de transport, si les gouver-nements leur donnent les moyens de leursobjectifs, peuvent avoir un effet. Le cas de laSuisse ou de l’Autriche, par exemple, montreque l’on peut conserver une part notable autransport ferré de fret, même dans des pays detaille modeste.

Volume de transport et partage modal à l’horizon 2030L’avenir du mode routier ne saurait donc êtreenvisagé indépendamment de celui des autresmodes : le transport de fret forme un système,même si ses diverses composantes ne fonction-

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Vers une mobilité durable en Europe

La constitution des grands corridors de fret

Quel avenir pour le transportroutier de marchandises ?

Il faut diminuer l’usage du moderoutier pour le transport de marchandises et renforcer celui des modes alternatifs.

Michel Savy(1)

Université de Paris-Est

Le rôle du transport routier de marchandises est dominant et croissant dans la plupart des paysd’Europe occidentale. Pourtant, les politiques de transport entendentdepuis de longues années rééquilibrerle partage modal. L’augmentation de la congestion, la nécessité de réduire les émissions de gaz à effetde serre, les fluctuations des prix dupétrole renforcent ces préoccupations.Quel est alors l’avenir du transportroutier de marchandises ?

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(1) Michel Savy est professeur à l’université de Paris-Est.

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nent pas suffisamment de manière complémen-taire. Dans la recherche intitulée Prospectivefret 2030(2), le degré du «couplage»(3) entre crois-sance économique et croissance des transportsa été établi selon quatre scénarios contrastéscorrespondant à une combinaison d’hypo-thèses macroéconomiques d’une part, relativesaux politiques de transport d’autre part (plus oumoins soucieuses de régulation et de diminu-tion des émissions de gaz à effet de serre). Cetterecherche établit le spectre des possibles à l’ho-rizon de 2030 : la « fourchette » à l’intérieur delaquelle, sauf événement de crise majeur(conflit armé de grande ampleur, épidémiemondiale, etc.), le volume de transport enFrance devrait se situer.

Comme on le voit, les hypothèses sont suffisam-ment contrastées pour que le volume de fret etle partage modal soient fort différents d’un scé-nario à l’autre. Pour s’en tenir à la route, la crois-

sance de son activité se situerait entre 6 % et60 %, entre 2002 (année de base du calcul) et2030. Aucun scénario ne projette un déclin, nimême une stagnation du transport routier demarchandises. En termes de part modale, laroute se situerait entre 72 % et 88 % du total dufret terrestre (pour une situation de départ de82 %). La domination routière peut s’accentuerou se restreindre, elle ne disparaît dans aucunehypothèse. Quels que soient les discours ou lesespoirs relatifs à l’intermodalité, parfois présen-tée comme le remède à tous les maux, la routerestera indispensable, ne serait-ce que pour lestransports à courte distance. Or, plus de la moi-tié des tonnages de marchandises en Europesont transportées sur des distances inférieuresà 50 km… Toute politique de développementdurable dans le champ du transport peut sansdoute viser à élargir la part des modes alterna-tifs à la route. Il demeure que le gisement deprogrès principal réside dans l’amélioration dutransport routier lui-même.

Route et développement durableLes scénarios de Prospective fret 2030 montrentque la gamme des possibilités est étendue etdésigne le champ de politiques plus ou moinsambitieuses et puissantes. L’avenir est plastiqueet l’enjeu du développement durable justifiepleinement une intervention volontaire dansle domaine du transport. En Europe, en 2004,la part du transport était, en effet, de 21 % du

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Transport de marchandises en France à l'horizon 2030

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En milliards 2002 2030 2030 2030 2030de tonnes-km S1 S2 S3 S4

Transport routier 257 412 340 296 272Transport ferroviaire 50 50 80 76 87Transport fluvial 6,9 7 20 15 20Total 314 469 440 387 379(avec SSS)* (427) (419)

* SSS : cabotage maritime

Partage modal en France à l'horizon 2030

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030En % 2002 2030 2030 2030 2030

S1 S2 S3 S4

Transport routier 82 88 77 76 72Transport ferroviaire 16 11 18 20 23Transport fluvial 2 1 5 4 5Total 100 100 100 100 100

(2) Prospective fret 2030 (Philippe Duong et Michel Savy, rap-porteurs), Predit et Meeddat, 2008.(3) Pour reprendre ici le terme du Livre blanc de la Commis-sion européenne en 2001, qui proposait de «découpler » lesdeux grandeurs de manière à promouvoir un mode de déve-loppement plus soutenable.

Seule une combinaison de mesuresopérationnelles, organisationnelles,technologiques, économiques et règlementaires permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport routierde marchandises.DR

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total de la consommation d’énergie primaire, de24 %(4) dans les émissions de gaz carboniqueet de 31 % dans la consommation d’énergiefinale (dont 82,5 % pour la route). Dans l’en-semble du transport routier, les poids lourdsreprésentent, en France, 28 % des émissions, lesautomobiles 55 %, les véhicules utilitaires légers(camionnettes de toutes sortes) 17 %. Parmitous les secteurs économiques, le transport estle seul à avoir augmenté ses émissions pendantles dernières années. Un travail de prospectivemené dans le cadre du Conseil d’analyse stra-tégique centré sur les émissions de gaz carbo-nique par le transport routier de marchandises(5)

a répertorié les principaux moyens pour réduireles émissions de gaz à effet de serre du transportroutier de marchandises et évalué leur impact(6).Il apparaît qu’il n’y a pas de solution technolo-gique miracle suffisant à résoudre le problèmeet qu’il faudra cumuler de multiples mesurespartielles, d’une efficacité limitée, pour atteindreun résultat substantiel :- mesures opérationnelles et organisationnelles:

incitation à l’organisation du stockage, mar-quage du prix du transport, label «produit éco-logique », aménagement du territoire, reportmodal, formation à la conduite écologique,label « transporteur écologique», mesures por-tant sur la logistique urbaine ;

- mesures technologiques : amélioration desmoteurs, amélioration des composants desvéhicules, introduction des biocarburants,développement et incitations aux véhiculeshybrides, développement et incitations auxvéhicules au gaz, amélioration de la conduiteet de la logistique grâce aux NTIC(7) ;

- mesures économiques et réglementaires :normes réglementaires sur les émissions deCO2, accords volontaires avec les construc-teurs, marchés de quotas d’émissions, taxespécifique sur le carbone, hausse de la TIPP,tarification de l’usage de l’infrastructure rou-tière, modulation des péages (dans le temps

et dans l’espace, pour tenir compte de l’état decongestion du réseau mais aussi des possibi-lités de report modal sur tel ou tel itinéraire),modulation de la taxe à l’essieu.

Dans l’hypothèse où la croissance est celle desprojections centrales (au fil de l’eau) à l’horizon2025 du service des études du ministère chargédes Transports et en supposant que l’ensemblede ces mesures de réduction soit mis en œuvre,on peut espérer ramener les émissions dues autransport routier de marchandises de 27 mil-lions de tonnes en 1990 (année de référencedes accords de Kyoto) à 21 millions en 2025. Sil’on prolonge la tendance, on obtiendrait unvolume d’émission de 15 millions de tonnes en2050, soit une division par un facteur un peuinférieur à deux par rapport au niveau initialde référence. On est loin de la réduction parun « facteur 4 », fixée comme objectif par la loid’orientation pour l’énergie votée en 2005.Si l’on veut atteindre les objectifs de la loi, desmesures plus radicales devront être appliquées,

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Les Cahiers n° 150

La constitution des grands corridors de fret

Quel avenir pour le transport routier de marchandises ?

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(4) Source : Panorama of transport, Eurostat, 2007.(5) Michel Savy, président, Caroline Daude, rapporteuse, Trans-port routier de marchandises et gaz à effet de serre, Centred’analyse stratégique, avril 2008. Résumé dans la revue Trans-port, n° 449, mai-juin 2008.(6) cf. Transport et émissions de CO2 : quel progrès?, CEMT,février 2007.(7) On remarque que l’augmentation de la taille des véhi-cules ou ensembles routiers ne figure pas parmi les mesuresprises en compte. On expérimente aujourd’hui dans plusieurspays d’Europe des trains routiers composés de trois élémentsattelés les uns derrière les autres, les «EMS» (European Modu-lar System) d’une longueur totale de quelque 25 m contre18 m selon la réglementation actuelle. S’il est incontestableque de tels ensembles soient plus efficaces en termes éner-gétiques et donc d’émission de gaz carbonique, le bilan glo-bal de l’introduction de ces engins n’est pas fait et sembleincertain. D’une part, l’accessibilité de ces engins à l’ensem-ble du territoire n’est pas étudiée et les conséquences éco-nomiques et sociales d’une discrimination spatiale de la des-serte ne sont pas mesurées. D’autre part, le transport routierpourrait ainsi abaisser ses coûts et élargirait donc sa part demarché, et l’on ne sait pas si les gains énergétiques directsaccomplis ne seraient pas annulés par la perte de compéti-tivité que subiraient les autres modes de transport encoremoins consommateurs d’énergie : rail, fleuve, voie maritime.

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sortant de la logique de simple inflexion de ten-dance envisagée jusqu’alors : substitution mas-sive d’énergie électrique d’origine non fossileou nucléaire à l’énergie pétrolière consomméedans les véhicules, limitation du volume detransport lui-même en accomplissant un réeldécouplage entre niveau d’activité économiqueet transport, etc. De telles perspectives mérite-raient bien sûr d’être explorées, selon uneméthode de backcasting partant de l’imagefinale pour identifier les chemins susceptiblesd’y mener, à l’inverse des méthodes de forecas-ting qui identifient les tendances existantes oususceptibles d’émerger pour en déduire desimages finales.

PerspectivesLes incertitudes pesant sur l’avenir de l’écono-mie française, européenne et mondiale se sontencore accrues avec l’éclatement de la crisefinancière, qui se répercute aujourd’hui surl’économie toute entière. On a vu, en outre, queles variables déterminant le fonctionnementdu système de transport de fret sont nom-breuses et, comme le montrent les comparai-sons internationales, peuvent aboutir à des dis-positifs très différents. Il n’est donc pas questionde dresser ici une image unique et donc «pro-bable» du transport routier de marchandises àmoyen et long terme. Quelques traits essentielsdu transport routier de l’avenir se dessinentcependant. Quel que soit le succès des poli-tiques de transfert modal, celles-ci n’ont dechance de réussir que sur quelques segmentsassez limités du marché : il y faut des flux demarchandises massifs, équilibrés, sur d’assezlongues distances, en supposant bien sûrqu’existent les infrastructures et l’offre de ser-vices pour les acheminer par d’autres modesque la route. La route restera l’élément domi-nant et indispensable du système de fret, neserait-ce que pour les transports de courte dis-tance, les plus massifs. Croissant ou à tout lemoins stagnant en volume, le transport routierde fret ne sera pas pour autant identique à cequ’il est aujourd’hui. Il changera bien sûr danssa technique, avec des véhicules plus économes(structure allégée, meilleure chaîne cinéma-tique, moteurs plus efficaces consommant desbiocarburants de deuxième génération, usageexclusif ou hybride de l’électricité, utilisationmassive des TIC pour optimiser le fonctionne-ment des engins). Les méthodes d’exploitationseront également très différentes d’aujourd’hui,en matière d’utilisation directe des engins etde mise en œuvre dans des circuits logistiques.On peut citer la conduite plus économe et plussûre, la réduction des vitesses limites, l’optimi-sation des tournées, la mise en place de labelssensibilisant les chargeurs et les consomma-

teurs à choisir des produits transportés demanière écologiquement efficace, l’améliora-tion de l’efficacité du transport par la mutuali-sation des installations et des organisationslogistiques (y compris dans le domaine de lalogistique urbaine), la recherche de fournis-seurs et de clients moins lointains, etc. En termesgéographiques, on peut ainsi s’attendre à unepoursuite du regroupement des activités logis-tiques dans des zones dédiées, situées le plussouvent à la périphérie des grandes aggloméra-tions(8) (évitant le mitage du territoire, la «plate-formisation» de la logistique et du fret permetde mieux résoudre les problèmes de servicesaux entreprises et de sécurité ainsi que les pro-blèmes sociaux pour l’accès des travailleurs àleur emploi, la formation professionnelle, etc.).La massification des flux est, en outre, un facteurfavorable à l’usage de modes alternatifs à laroute, surtout si les activités logistiques se voientréserver les sites bénéficiant d’une dessertemultimodale.À l’intérieur de l’Île-de-France, fonctionnelle-ment élargie aux départements de l’Oise et duLoiret, la réservation de vastes espaces logis-tiques dans les plans de développement estindispensable, d’autant plus que, contrairementà d’autres activités, la logistique se prête mal àla mixité urbaine, souvent préconisée par lesurbanistes. De grandes plates-formes peuventcontinuer à créer un emploi productif pérenne,non soumis aux délocalisations, près de bas-sins de main-d’œuvre en manque d’emploi. Denouveaux types d’équipement, plus légers (des«hôtels logistiques» à l’articulation de la logis-tique interrégionale et internationale et de lalogistique urbaine), doivent aussi être dévelop-pés au sein de l’agglomération pour assurerl’activité de messagerie qui, avec la croissancedu e-commerce, irrigue le tissu professionnel etla consommation urbaine. La multimodalité est,en Île-de-France, un enjeu spécifique, comptetenu de la concurrence pour l’usage des sols.Les terrains bordant les voies d’eau ou reliésau chemin de fer sont des ressources rares àne pas gaspiller. De nouveaux chantiers rail-route doivent être créés, pour profiter du redé-marrage imminent du fret ferroviaire et com-biné. Les ports fluviaux devront accueillir lacroissance des trafics de conteneurs, mais ausside trafics traditionnels de pondéreux (commeà Montereau, pour les matériaux de construc-tion). Le développement de la logistique dufret aérien à Roissy (30 % de la valeur du com-merce entre l’Union européenne et le reste dumonde passe par voie aérienne) est un atoutnational majeur.

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(8) cf. SAVY Michel, Logistique et territoire, La Documentationfrançaise, 2006.

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Le cadre réglementaire du transport routier évo-luera aussi, pour accélérer et diffuser ces chan-gements. Une normalisation européenne devraorganiser la diminution de la consommationdes poids lourds et des véhicules utilitaireslégers, comme il a été fait avec succès pour lapollution locale des moteurs diesel et pour laconsommation des automobiles. La fiscalité etla tarification seront sollicitées : mise en placed’un marché de quotas d’émissions dans le sec-teur du fret, instauration d’une taxe spécifiquesur le carbone, hausse de la TIPP, tarification del’usage de l’infrastructure routière (LKW Mautà la française), modulation des péages selondes critères environnementaux. De telles évolu-tions supposeront un cadre industriel adéquat.Le mouvement de concentration du capital quirestructure l’industrie du transport de fret et dela logistique à l’échelle européenne et mon-diale laisse, pour l’heure, subsister un vaste sec-teur de PME du transport routier, utilisé massi-vement comme sous-traitant par les grandsdonneurs d’ordres (commissionnaires de trans-port, prestataires logistiques). La « bipolarisa-tion» qui s’ensuit ne devrait pas, à notre avis, êtreremise en cause, à condition que les PME detransport routier aient accès aux innovationstechniques et organisationnelles nécessaires àla promotion d’une mobilité durable(9). Cetteperspective a enfin une dimension sociale cru-ciale. Pour schématiser les choses, deux direc-tions sont possibles. La première serait que letransport routier se rapproche du modèle dutransport maritime, où les pavillons de complai-sance autorisent trop souvent l’usage d’unemain-d’œuvre sous-qualifiée et sous-payée. Unetelle évolution serait une régression sociale, ellene serait pas non plus compatible avec les exi-gences de qualité d’une logistique moderne.La seconde direction serait de sortir de la situa-tion actuelle par le haut, alors que les entre-prises se plaignent de leur difficulté à recruterdes jeunes conducteurs, en élevant la profes-sionnalisation, la compétence et la rémunéra-tion de ses métiers. Entre ces deux avenirs pos-sibles, gris ou rose, le choix est largement ouvert,il relève d’arbitrages politiques à l’échelle del’Europe (une option purement nationale ayantpeu de chance de réussir au sein du marchéunique du transport, aujourd’hui en place).Le transport routier de marchandises est, ensomme, amené à évoluer intensément dans lestemps à venir, sous l’influence réciproque deschangements de la consommation de transport(selon la composition et le volume de la pro-duction et des échanges nationaux et interna-tionaux, les modes de gestion des flux, etc.) etdes changements de son organisation propre. Saplace dans le dispositif français et européen detransport restera dominante, voire se renforcera

encore si les politiques de rééquilibrage modalse montrent aussi inefficaces que par le passé,faute de moyens et de volonté.Pour autant, il sera amené à coopérer davan-tage avec les autres modes. Il utilisera un maté-riel profondément renouvelé, moins exclusive-ment dépendant de l’énergie pétrolière. Ils’insèrera dans des gestions logistiques mieuxintégrées, allant jusqu’à la mutualisation desflux relevant d’entreprises différentes, voireconcurrentes par ailleurs.Le transport routier ne cessera pas d’être unmilieu traversé de contradictions permanenteset de conflits. Les organisations professionnellesreprésentant les transporteurs ont bien du malà s’accorder avec celles représentant les com-missionnaires de transport, puisque leurs inté-rêts sont souvent opposés, sans évoquer leslimites du dialogue social entre employeurs etsalariés. Le respect inégal de la réglementationcrée de permanentes distorsions de concur-rence, où les fraudeurs gagnent une compétiti-vité illégitime face aux entreprises vertueuses.L’élévation de la qualification vient buter surle niveau de rémunération des salariés. La coopération entre entreprises est subordon-née aux rapports de force asymétriques de la«bipolarisation». L’extrême concurrence sur lemarché routier est avivée par l’élargissementde l’Union et, faute d’harmonisation euro-péenne dans un marché unique, le dumpingsocial et fiscal a abouti au quasi-retrait dupavillon français du marché du transport routierinternational en Europe. La sensibilité à laconjoncture générale met souvent les entre-prises de transport en difficulté et, en dépitd’une attitude volontiers antiétatique, celles-cise tournent vers les pouvoirs publics pourdemander protection et secours, parfois aumoyen de la grève (y compris la grève des chefsd’entreprise !) et des barrages routiers. Si l’ons’est efforcé de dégager des perspectives géné-rales à long terme, il ne faut donc pas s’attendreà ce que l’évolution s’opère, au niveau événe-mentiel, de manière continue et harmonieuse.Les crises sont souvent le passage obligé deschangements…

(9) cf. SAVY Michel, Le transport de marchandises, Paris,Eyrolles-Éditions d’organisation, 2006.

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La constitution des grands corridors de fret

Quel avenir pour le transport routier de marchandises ?

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LKW Maut : taxe kilométrique qui a étéintroduite sur les autoroutes allemandes

en 2005 pour les camions de plus de 12 tonnes.

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Vers une mobilité durable en Europe

La constitution des grands corridors de fret

Les Cahiers – Vous êtes l’un des grandsnouveaux entrants ferroviaires en Franceet aussi en Europe. Pouvez-vous nousprésenter l’activité de Veolia Cargo?Antoine Hurel – Veolia Environnement a réaliséen 2007 un chiffre d’affaires de 32,6 milliardsd’euros et intervient dans quatre activités com-plémentaires : la gestion de l’eau, des déchets,énergétique et des transports de voyageurs. Ausein du groupe Veolia Environnement, VeoliaTransport représente un chiffre d’affaires de sixmilliards d’euros dont 200 millions d’euros pourVeolia Cargo. Bien que son portefeuille indus-triel ne soit pas très développé, l’activité de Veo-lia Cargo est stratégique, car c’est un métier dudéveloppement durable, dans le cœur de ciblede la stratégie de Veolia Environnement.

L. C. – Comment s’organise votre activitéfret en France et en Europe?A. H. – Il y a deux schémas dans le fret ferro-viaire. Dans le premier schéma, l’entreprise fer-roviaire passe des contrats directement avec lechargeur qui organise sa propre logistique etcommande lui-même des trains complets oudes wagons isolés à l’entreprise ferroviaire. Leschargeurs, qui sont nos clients directs, sont posi-tionnés sur le fret conventionnel, plutôt domes-tique ou transfrontalier. Les prestations portentsur des trafics de papier, d’acier, de matériaux deconstruction, etc. Dans le deuxième schéma,de plus en plus fréquent, le chargeur s’adresseà un organisateur de transport, qui est enquelque sorte l’intégrateur de tous les modes detransport – le ferroviaire étant l’un des maillons.Dans ce deuxième schéma, l’entreprise ferro-viaire n’est pas en contact direct avec le char-geur, mais avec le logisticien qui organise letransport. Le transport ferroviaire de conteneursmaritimes s’organise selon ce schéma. Nous nevendons pas de prestations de transport deconteneurs point à point, sauf via notre partici-pation minoritaire à Rail Link Europe (filialede l’armateur CMA-CGM). Schématiquement,notre activité se répartit en un tiers de conte-neurs, un tiers de charbon-acier et un tiers d’au-tres produits (automobile, chimie, matériaux deconstruction, agroalimentaire…). Nous déve-loppons notre activité fret dans cinq pays endirect. Il s’agit, outre la France, de l’Allemagne,de l’Italie et du Benelux où nous intervenonsavec nos propres matériels. Notre plus grosseactivité a lieu en Allemagne, qui a ouvert sonréseau dès 1994, bien avant la France. Nous fai-sons également des prestations de traction fer-

roviaire sur sites : sur des terminaux portuaires,sur des ports secs, sur des sites industriels privés.Et nous offrons aussi des services associés quine sont pas directement de la traction ferro-viaire : fourniture de wagons, notamment enAllemagne, prestations logistiques, de conseilen logistique ferroviaire pour aider les clients àoptimiser leur flux, services de maintenance…

L. C. – Votre activité présente-t-elle des spécificités selon les pays ?A. H. – En Allemagne, où nous avons acquisnotre filiale allemande de Veolia Cargo en 1997,nous faisons du fret ferroviaire depuis dix anset notre marché est relativement stabilisé. Nousy sommes très présents sur l’acier, parce quenous avons fait l’acquisition en 2005 d’unesociété, Dortmunder Eisenbahn, qui était unefiliale du port de Dortmund et de ThyssenKrupp. Cette acquisition a permis de développernotre activité dans la Ruhr sur des trafics decharbon et d’acier. En France, notre premiertrain n’a circulé qu’en juin 2005. Il s’agissaitd’un train de chaux qui partait des fours àchaux dans la Meuse vers des aciéries de laSarre. Actuellement, du fait de notre allianceavec CMA-CGM, le marché des conteneursreprésente une part de plus en plus importantede notre activité, en complément de notre cœurde cible, le secteur industriel.

L. C. – Quelles difficultés avez-vousrencontrées pour mettre en place vos trafics ?A. H. – Tout nouvel entrant se heurte à troistypes d’obstacles. Le premier se situe au niveaude sa capacité de mettre en place des res-sources propres. Dans la plupart des pays d’Eu-rope, l’ouverture du marché du fret ferroviaires’est faite avec le maintien en place de l’opéra-teur historique. Or ce n’est pas le cas partout: lesAnglais ont ouvert leur marché en remplace-ment de l’opérateur historique. Tout le patri-moine ferroviaire national (les locomotives, lesdépôts, les ateliers de maintenance, etc.) a étémis à disposition des opérateurs privés. Dansles autres pays, la libéralisation a consisté àmaintenir l’opérateur historique et à placer àcôté de lui des opérateurs indépendants quilui font concurrence. Or, il faut comprendre quecette situation est extrêmement difficile pourles nouveaux entrants, qui ont à construire uneactivité qui nécessite des investissements consi-dérables à partir de zéro et cela sous contrainted’une rentabilité du capital à court terme. Le

Antoine Hurel est directeurgénéral adjoint de VeoliaTransport et président de VeoliaCargo, filiale de Veolia Transportspécialisée dans le fretferroviaire. Antoine Hurel est également président, depuis 2005, de la Commissionferroviaire de l’Union des transports publics (UTP),fédération représentative du secteur et vice-président de la Communauté européennedu rail (CER). Veolia Cargo a été la première entrepriseferroviaire privée à être autorisée à circuler sur le marché français en 2005,en concurrence de la SNCF.Veolia Cargo est aujourd’hui un groupe européen qui développe ses activitésdans près d’une dizaine de pays en Europe.

Veolia Cargo : un acteur phare de l’activité fret en Europe

Interview

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deuxième obstacle, lié au premier, est spéci-fique à la France et résulte de la complexité dusystème d’organisation de la production : lesnouveaux entrants dépendent de Réseau ferréde France (RFF) pour l’attribution des sillons.Mais RFF n’est pas pour autant maître dessillons qu’il vend, du fait du rôle que joue laSNCF en tant que gestionnaire d’infrastructuredélégué (GID). Cette situation rend les chosesdifficiles d’un point de vue commercial, parceque RFF dépend de la SNCF pour pouvoir faireune offre. La SNCF possède, ainsi, toute l’infor-mation commerciale et entre en concurrenceavec le nouvel entrant pour l’attribution dusillon. La séparation entre le gestionnaire del’infrastructure et l’opérateur historique n’estpas satisfaisante. Il faudrait confier au gestion-naire de l’infrastructure toutes les fonctions –depuis la planification pluriannuelle des tra-vaux et des capacités jusqu’à la gestion quoti-dienne des sillons et des situations perturbées– pour assurer la continuité dans un contexted’indépendance par rapport à la SNCF pourl’attribution des capacités et pour les rétablisse-ments de trafic en cas de perturbations. Or, le faitque la SNCF soit à la fois juge et partie pénaliseles nouveaux entrants malgré les décisions desdirigeants, qui, eux, voient dans la libéralisationun facteur de progrès. Ce fonctionnementRFF/SNCF devrait être considérablement amé-lioré par la mise en place d’un régulateur – laCommission de régulation des activités ferro-viaires (CRAF)(1) – doté de larges compétenceset d’un pouvoir de sanction et d’arbitrage. Letroisième obstacle est la crédibilité commer-ciale vis-à-vis des clients chargeurs – qui consta-tent qu’il a fallu plus de dix ans aux nouveauxentrants en Allemagne pour atteindre à peuprès 20 % du marché… Peut-être qu’en Franceles choses iront un peu plus vite, du fait d’unemeilleure maîtrise de la libéralisation, mais lesparts de marché des nouveaux entrants ne vontcroître que très progressivement. Dans cecontexte, les chargeurs qui ont recours au fer-roviaire en France ne veulent pas prendre lerisque de se détourner de la SNCF et de s’enga-ger avec un nouvel entrant ne pouvant pas assu-rer une part suffisamment importante de leurtrafic, faute de moyens et de sillons. Au total,beaucoup d’offres ont été faites par les nou-veaux entrants auxquelles les clients n’ont pasdonné suite.

L. C. – Quelle est la stratégie de VeoliaCargo en matière de parc de locomotives, compte tenu de la diversité des réseaux en Europe?A. H. – La locomotive électrique présente plu-sieurs avantages du point de vue de l’exploita-tion : plus puissante, dotée d’un couple plus

régulier et très progressif, plus agréable àconduire et moins bruyante. Mais il y a des obs-tacles à l’usage des locomotives électriques, cartoutes les lignes ne sont pas électrifiées. Lorsquel’on tracte des trains dans une région où lescinquante derniers kilomètres à parcourir sonten diesel, on est obligé de tout faire en diesel.Il faut trouver les bonnes solutions au cas parcas. Ceci dit, la traction électrique a bonnepresse en France, parce que nous avons recoursau nucléaire. En Allemagne, si on fait le bilancarbone global d’une traction électrique, celle-ci a un bilan qui n’est pas meilleur que le die-sel. Il est même parfois moins bon, car la plupartdes centrales électriques sont à charbon et lerendement du transport du courant de la cen-trale jusqu’au pantographe de la locomotiven’est pas très élevé. Le diesel est quant à luiconsommé sur place et il s’agit, de plus en plussouvent, de diesel filtré.

L. C. – Peut-on dire dans ce contexte que l’Europe du fret ferroviaire existe ?A. H. – L’Europe du fret a toujours existé. Il y atoujours eu des trafics transfrontaliers et lesgrands corridors européens de fret se mettenten place. Mais il est vrai qu’il y a des conflitsd’usage à régler, notamment entre les capacitésattribuées au fret et les capacités attribuées aux voyageurs. Dans les années 1970 en France, la SNCF réalisait 70 milliards de tonnes-kilomètre, contre 40 milliards de tonnes-kilomètre aujourd’hui… Pourtant, on a construitdes infrastructures nouvelles pour le train àgrande vitesse (TGV), ce qui aurait dû libérerdes capacités pour le fret sur le réseau conven-tionnel. Cela ne s’est pas produit du fait de l’explosion de la circulation des trains expressrégionaux, posant la question du partage dessillons entre les trains de fret et de voyageurs,problèmatique nationale comme internatio-nale.

L. C. – Comment peut-on gérer les sillonsfret et voyageurs de manière à ne pas pénaliser systématiquement les trains de marchandises ?A. H. – La solution à long terme, ce serait decréer de nouvelles infrastructures et, notam-ment, des voies de contournement des grandesagglomérations. Mais, en fait, je ne suis pas par-tisan de la séparation voyageurs-fret parce quecela réduit les capacités et semble totalementirréaliste aujourd’hui. Il y a d’autres moyens quel’investissement lourd dans les infrastructurespour traiter le problème de la saturation, dont

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» L’Europe du fret a toujours existé. Il y a toujours eu

des traficstransfrontaliers

et les grands corridorseuropéens de fret

se mettent en place. Mais il est vrai

qu’il y a des conflitsd’usage à régler,

notamment entre les capacitésattribuées au fret

et les capacités attribuéesaux voyageurs. «

(1) La Commission de régulation des activités ferroviaires(CRAF), qui devrait être mise en place en 2009, sera une auto-rité administrative indépendante chargée de garantir « unaccès non discriminatoire au réseau ferroviaire ».

La locomotive électrique présenteplusieurs avantages, maisnécessite que la totalité d’un axesoit électrifiée, ce qui ne rend passon utilisation envisageable partout.

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par exemple le cadencement. C’est le travailque mène actuellement RFF. S’agissant de la«compétition» entre les voyageurs et les mar-chandises, il faut aussi un changement de cul-ture en France. Les élus, en tant qu’autoritésorganisatrices et au nom de l’aménagement duterritoire, doivent comprendre l’importance delaisser des capacités disponibles pour les trainsde marchandises.C’est une idée absolument pas répandue,puisque les autorités organisatrices n’ont pasla charge de la mobilité des marchandises. Je nesuis pas du tout en train de plaider pour que, auniveau régional, elles s’occupent aussi des mar-chandises, encore que le débat soit parfaite-ment ouvert. Mais il y a une responsabilité desélus à ce niveau-là. RFF a, en permanence, àgérer des demandes de la part des élus, demodifications des horaires des trains de voya-geurs pour gagner une ou deux minutes sur untrajet. Faire gagner deux minutes à un TER surun trajet de quinze minutes, c’est considérableet c’est tout à fait fondamental pour un élu.Mais quand vous faites ça, vous consommez unsillon qui aurait pu être attribué au fret. Donc lanotion de saturation est relative et peut se résou-dre, sans nécessairement mobiliser d’énormesressources financières.

L. C. – Lorsque vous demandez des sillonset que vous n’obtenez pas ceux que vous voulez, est-ce parce que le réseau est réellement saturé?A. H. – En fait, l’infrastructure en ligne n’est passaturée, sauf à de rares exceptions près. Mais ily a un phénomène de concentration des tra-fics sur un certain nombre de zones sur le ter-ritoire, qui sont les grandes agglomérations, oùse concentrent à la fois le trafic fret et le traficvoyageurs. Les trains de fret ont parfois à traver-ser plusieurs de ces nœuds ferroviaires parti-culièrement saturés à certaines périodes de lajournée, pendant lesquelles ils sont mis sur desvoies de garage pour laisser passer les circula-tions voyageurs. On ne pourra pas non plus assu-rer de transfert modal de la route sur le rail, sinous avons des sillons de mauvaise qualité. Cequi est très important, c’est que nous puissionsdisposer, pour nos clients, de sillons fiables, iden-tifiés et de qualité, qu’ils puissent avoir unevitesse, de l’ordre de 80 km/h en moyenne surle trajet, et être pérennes pour nous permettred’être compétitif. Or, parce que les sillons sontattribués deux ans à l’avance pour les voya-geurs, il est important qu’il y ait des sillons disponibles «réservés fret». Autres éléments per-turbateurs, susceptibles de générer des satura-tions, sont les plages travaux et l’absence deprogrammation pluriannuelle des travaux etdes plages horaires. Des travaux sur les infra-

structures sont déjà un élément de saturation ensoi, puisque vous êtes obligés de mobiliser desplages horaires et des tronçons pour faire les tra-vaux. Mais, s’ils ne sont pas planifiés à l’avance,il n’est plus possible de modifier les sillons demanière à faire passer les trains. La saturation estalors liée à un manque d’anticipation.

L. C. – Selon vous, quelles actions doiventêtre mises en place pour favoriser un développement significatif du fretferroviaire ?A. H. – La première chose qui me vient à l’es-prit, c’est le régulateur. Il faut qu’il y ait un régu-lateur, de façon à assurer une bonne fluidité etune bonne équité des circulations. L’Europe dufret repose aussi beaucoup sur les bons rap-ports entre le gestionnaire d’infrastructures etles différents utilisateurs du réseau. Cela com-mence à bien se passer en Allemagne et enHollande, mais ce n’est pas encore très clair enFrance. Et puis il y a aussi les questions écono-miques. Parce qu’on ne pourra pas transférer25 % du tonnage routier sur des modes de trans-port moins polluants, s’il n’y a pas d’incitationéconomique pour le faire. Les chargeurs sontdes entreprises privées qui ont un profit à justi-fier en fin d’année. S’agissant du principe del’eurovignette – ou du principe des pol-lueurs/payeurs –, on peut continuer à débattreindéfiniment pour savoir si le transport routierpaie déjà ses impacts environnementaux avecla taxe intérieure de consommation sur les pro-duits pétroliers (TIPP) ou s’il faut ajouter d’au-tres taxes. Mais si on veut transférer des mar-chandises de la route vers le rail, il faut que lerail soit économiquement compétitif pour queles chargeurs y aient recours. Ce ne sont pasdes philanthropes. Tout au plus accepteront-ilsde payer 1 ou 1,5 % de plus pour dire : «c’est macontribution…». La mise en place d’une euro-vignette présenterait deux avantages ; celui derééquilibrer économiquement les prix de trans-port et, surtout, celui de générer des sources definancement qui seraient a priori affectées auxinfrastructures de transport. S’il n’y a pas derééquilibrage des coûts ni une bonne qualité decirculation sur l’infrastructure, le transfert desmarchandises de la route sur le rail restera unvœu pieux pendant de nombreuses annéesparce que, en définitive, ce sont les chargeursqui prennent la décision en fonction d’un rap-port qualité/prix qui leur est offert.

L. C. – Avez-vous senti une évolution de la part des chargeurs, ces dernièresannées, dans le sens d’une demande plusimportante en faveur du ferroviaire ?A. H. – Il y a une évolution. Nous observonsque les chargeurs ont tout de même une cer-

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On ne pourra assurer de transfertmodal de la route sur le rail que si les sillons sont fiables et pérennes.

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taine latitude pour organiser leurs stocks et leursexpéditions de façon à pouvoir utiliser un modemassifié dans des conditions où le ferroviairedevient plus compétitif que la route. Les nou-veaux entrants sont probablement un des fac-teurs de cette évolution. Les chargeurs com-mencent à se sentir responsables par rapportaux émissions de gaz à effet de serre et à remet-tre en cause le stock zéro, le flux tendu…

L. C. – Quel impact peut avoir la criseactuelle sur cette évolution?A. H. – Je n’arrive pas à bien voir les consé-quences qu’elle pourrait avoir. Cela peut avoirdeux conséquences contradictoires. La pre-mière serait qu’il y ait moins de recettes, doncmoins de trafics. Mais, en même temps, cettesituation de crise peut favoriser des expéditionsbeaucoup plus massifiées, et donc favoriser lerail, et être l’occasion d’une redistribution entrela route et les autres modes… Pour ce qui nousconcerne, nous avions jusqu’à maintenant desplans à six ans. Nous avons envisagé une crois-sance qui nous permettait d’atteindre un chif-fre d’affaires d’un milliard d’euros en 2015, cequi était un très beau challenge… Mais comptetenu de la conjoncture, je ne sais pas si nousallons atteindre 250 millions d’euros en 2009.Nous avons revu nos hypothèses de croissanceà la baisse et envisageons un objectif de 500 mil-lions d’euros de chiffre d’affaires en 2013-14.

L. C. – À l’avenir, envisagez-vous de bâtir votre stratégie sur des segments de marché particuliers ?A. H. – Nous sommes déjà positionnés sur l’in-dustrie lourde, l’automobile, la chimie, le bois etpapier, l’agroalimentaire (eau minérale,céréales…), les produits pétroliers. Nous déve-loppons ces marchés au cas par cas en propo-sant des solutions sur-mesure. En Allemagne,

où nous sommes déjà bien implantés, nous pou-vons faire des économies d’échelle en utilisantmieux les locomotives, en les faisant passer d’untrafic à l’autre. En France, le trafic n’est pas assezdense pour pouvoir optimiser. Nous envisa-geons également un scénario de développe-ment selon lequel nous pourrions devenir opé-rateur de transport combiné.

L. C. – Vous n’avez pas parlé des opérateurs ferroviaires de proximité. Ce n’est pas un marché sur lequel vous souhaitez vous positionner ?A. H. – Beaucoup d’études ont été faites sur lesujet. La mise en place d’un opérateur ferro-viaire de proximité n’est possible que si, dans lazone où il va opérer, les trafics sont suffisam-ment importants pour justifier la mise en œuvrede locomotives, de personnels présents à pleintemps, donc des recettes supérieures auxcharges fixes. Plusieurs pistes ont été envisa-gées pour tenter de rentrer dans cette équation.Sur le plan des infrastructures, on pourrait faireen sorte qu’elles ne relèvent pas de la mêmeclasse que les lignes du réseau principal ; dèslors, le prix des sillons pourrait être moins élevé,les trains pourraient circuler moins vite, les per-sonnels être polyvalents et les coûts de mainte-nance moins élevés… On pourrait envisagerque, au titre de l’aménagement des territoires,les Régions prennent en charge le matériel rou-lant, comme c’est le cas pour les voyageurs,dans le cadre de contrats à trois ou cinq ans.Mais il faut savoir que, juridiquement, cela poseun problème, parce que, sur le réseau ferrénational, on ne peut pas garantir d’exclusivité àun opérateur. Si dans cette zone-là, un chargeurtrouve une solution qui est moins chère quecelle de l’opérateur de proximité sélectionné,rien ne peut s’opposer à ce que le chargeurfasse appel à un autre opérateur… Enfin, il fautqu’il y ait une certaine coordination entre leschargeurs, de façon à avoir des flux suffisam-ment massifiés, permettant de justifier le ferro-viaire, qui est un mode lourd, très efficace pourles grosses expéditions, mais qui l’est beaucoupmoins sur des petits volumes. Les pistes ne man-quent pas. Il faudrait un exemple concretd’équilibre des comptes dans une activité de cetype. Aujourd’hui, nous ne voyons pas de mar-ché pour ce type d’activité ; mais nous sommestout à fait prêts à travailler sur un projet en tantque partenaire, sous réserve des contrainteséconomiques que nous avons indiquées.

Propos recueillis par Lydia Mykolenko et Corinne Ropital

Accueillir le transport des marchandises

Les Cahiers n° 150

La constitution des grands corridors de fret

Veolia Cargo : un acteur phare de l’activité fret en Europe

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Veolia Cargo est fortement actif aujourd’hui en Europe du Nord.

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Des terminaux inland au cœur des villes

Logistique urbaine, les villes européennes se mobilisent

Le plan fret de Londres, un exemple d’action : le FORS

Monoprix : un engagement en faveur d’une mobilité durable

Livrer en zone urbaine par modes alternatifs :

deux cas nord-européens

Le port de Bruxelles teste le transportde palettes par voie d’eau

Une logistique urbaineinnovante

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Alors que les évolutions économiques ettechnologiques ont permis aux entre-prises de se libérer en grande partie des

impératifs de proximité (proximité des fournis-seurs, des sous-traitants, voire même proximitédes marchés), un certain nombre d’interfacesphysiques de traitement des marchandises doi-vent toujours être assurées. L’externalisation del’activité logistique, traditionnellement accom-plie au sein des entreprises industrielles et réa-lisée de plus en plus souvent par des spécia-listes, s’est traduite par la constitution de grandsgroupes internationaux dans les domaines dela messagerie, de la logistique et de l’organisa-tion du transport. Cette structuration du secteurde la logistique, qui s’est opérée au cours destrente dernières années, s’est caractérisée par lamise en place de nouveaux schémas d’organi-sation et de recomposition des flux de mar-chandises et par des systèmes de livraisons enflux tendus et en « juste à temps», d’une extra-ordinaire efficacité, s’appuyant sur le dévelop-pement d’un parc d’entrepôts considérable.

Un engouement pour les grandes plates-formes à vocation internationalePlus récemment, ce mouvement s’est traduit,en France comme en Europe, par l’implanta-tion de grandes plates-formes à vocation inter-nationale sur des sites disposant d’une trèsbonne desserte routière, parfois ferroviaire et,dans certains cas, aéroportuaire ou portuaire. Lameilleure localisation se situait à proximité desnœuds des grands réseaux de communication,

afin de pouvoir desservir des aires de marchétrès larges le plus efficacement possible à par-tir du plus petit nombre possible d’interfaces.Les stratégies des grands chargeurs européensont convergé vers une réduction du nombredes portes d’entrée maritimes et le regroupe-ment des importations sur un seul port, lestockage des marchandises sur un seul sitelogistique européen (non plus sur un site parpays) et la desserte de grandes zones transna-tionales à partir de quelques plates-formes (parexemple, l’une, située dans le nord de la Franceapprovisionnant ce secteur et les pays du Bene-lux, l’autre, située dans le sud, approvisionnantce secteur ainsi que l’Espagne, le Portugal etl’Italie), plutôt qu’à partir d’une dizaine oud’une quinzaine de plates-formes nationales.Pour la livraison urbaine, ces grandes plates-formes sont relayées par des plates-formes dedistribution urbaine de plus petite dimension,plus proches des lieux de consommation. Mais,compte tenu de l’urbanisation et des pressionsfoncières s’exerçant notamment dans les cœursd’agglomération, on assiste à un desserrementprogressif de ces fonctions logistiques urbainesvers des secteurs géographiques de plus en pluséloignés du centre de l’agglomération.Les grands réseaux de distribution comportentainsi plusieurs niveaux d’implantation aux rôlesemboîtés : des pôles centraux alimentant l’en-semble du dispositif, des centres secondaires

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Une logistique urbaine innovante

Des terminaux inlandau cœur des villes

La livraison des marchandises en centre-ville interfère avec les besoins de mobilitéquotidienne des personnes.

Lydia Mykolenko(1)

IAU île-de-France

Nos nouvelles exigences en tant que consommateurs habitués à obtenirtout de suite et au moindre coût, et de plus en plus sans même nous déplacer, ont généré une explosion des flux de marchandises.Dans les grandes métropoles, tous les flux de marchandises se superposent et interfèrent avec la mobilité locale quotidienne des personnes, exacerbant la concurrence pour l’usage de la voirieet de l’espace public.

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(1) Lydia Mykolenko est responsable des études « logistiqueet marchandises ».

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d’envergure régionale, des centres locauxréduits à une fonction de transfert rapide (sansimmobilisation ni traitement approfondi desmarchandises). En termes de distance, troisrayons d’action se dégagent :- un rayon de 700 km et plus : rayon d’action

des entrepôts centraux d’entreprises à voca-tion européenne ;

- un rayon de 30 km à 250 km: celui de la dis-tribution régionale. (cinq à dix implantationsen France suffisent à atteindre chaque jourpar la route les points de vente de la grandedistribution) ;

- un rayon de 0 km à 30 km: celui de la distri-bution urbaine de proximité.

Mais la tendance à la polarisation des réseaux,avec la réduction du nombre de nœuds et l’aug-mentation de la taille de chacun d’eux, induitune très forte augmentation du nombre de véhi-cules-km parcourus pour desservir ce «dernierkilomètre » qui constitue le maillon le pluscontraint des chaînes logistiques et le plus nui-sible en termes environnementaux. L’augmen-tation des distances parcourues par les mar-chandises qui en résulte (dans l’UE-15, ladistance moyenne en transport terrestre, par-courue par une tonne de marchandises estpassé de 89,4 km en 1982 à 106 km en 2006(2))génère, outre des nuisances environnementales,des difficultés chez les professionnels pour leurs tournées de livraison en centre-ville. C’estpourquoi, dans un contexte de prix de l’énergietendanciellement à la hausse et de contraintesréglementaires grandissantes, ce modèle logis-tique, qui a fait ses preuves, mais se révèle coû-teux en énergie et en congestion, commence àêtre remis en cause. On voit se manifester unnouvel intérêt des logisticiens mais aussi deschargeurs pour des sites moins éloignés ducœur de l’agglomération et pour les modes detransport alternatifs à la route qui permettraientd’accéder directement à la zone dense en s’af-franchissant des territoires congestionnés.

Les actions développées en Europe et les perspectives alternativesConfrontées à ces problèmes de congestion etde protection de l’environnement, de nom-breuses villes européennes ont mis en placedes actions destinées à réglementer les condi-tions d’accès à la ville. Elles portent la plupartdu temps sur les points suivants :- les types de véhicules autorisés à pénétrer en

centre-ville (poids, taille, norme Euro d’émis-sion de polluants…) ;

- les périodes d’accès à des secteurs détermi-nés ;

• les itinéraires préférentiels pour les poidslourds ;

- les zones de desserte et d’enlèvement des

marchandises hors voirie ;- les « espaces logistiques urbains », point de

rupture de charge obligatoire pour tout véhi-cule de livraison supérieur à un certain ton-nage visant à rationaliser les tournées de livrai-son ;

- l’utilisation des modes ferroviaire et fluvialpour le «dernier kilomètre»…

Pour que les expérimentations intervenant surle « dernier kilomètre » puissent être plus effi-caces et trouver leur rentabilité économique,elles doivent s’accompagner d’actions plus glo-bales, portant sur l’organisation de l’ensembledes chaînes logistiques, depuis les grands cen-tres de distribution européens jusqu’aux plates-formes relais des transporteurs. Dans le contextede crise financière et économique qui ébranledepuis quelques mois les entreprises de trans-port de marchandises et de logistique, de nou-veaux schémas logistiques vont nécessairementse mettre en place. Fondés sur moins de trans-port, plus de stocks et donc sur une augmenta-tion du nombre d’implantations pour diminuerles tonnes-km, sur un approvisionnement desplates-formes logistiques en plus grande quan-tité, sur de la mutualisation et de la collabora-tion, y compris entre concurrents, ces nouveauxschémas induiront plus de massification et favo-riseront le recours aux modes de transport alter-natifs à la route. Il reviendra alors aux aména-geurs de leur offrir des plates-formesmultimodales plus proches des consomma-teurs. Mais, sans l’action des pouvoirs publics,le risque est réel de voir l’aliénation des raressites logistiques existant encore en zone dense,multimodaux comme uniquement routiers,alors que leur nécessité est dorénavant avéréepour répondre aux exigences du développe-ment durable.L’organisation de la logistique devrait s’appuyersur un ensemble cohérent de structures d’ac-cueil, localisées tant dans les zones urbainesdenses des agglomérations que dans des zonespériphériques plus éloignées. Elle devrait privi-légier la recherche de sites d’implantation mul-timodaux route et fer ou voie navigable, et celay compris en zone dense, et contribuer ainsi,par la limitation de la croissance des flux depoids lourds que cette multimodalité autorise,à prendre en compte les préoccupations envi-ronnementales largement partagées par lesdécideurs aujourd’hui.

(2) Source : GUILBAULT M., SOPPÉ M., Les grandes tendancesd’évolution des pratiques de transport et logistique au traversdes enquêtes « chargeur 88» et «ECHO 2004». Inrets, septem-bre 2007.

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L’organisation de la logistique en Europe devrait privilégier la recherche de sites d’implantationmultimodaux route et fer ou voienavigable, y compris en zone dense.

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Tous les jours, pour servir ses 700000 éta-blissements, ses onze millions d’habi-tants et ses plates-formes d’échanges,

plus d’un million de livraisons et d’enlèvementssont effectués en Île-de-France. Ce chiffre illus-tre une réalité fondamentale de la mobilité desmarchandises dans les agglomérations : c’est lacomposition du tissu économique d’une villequi détermine directement la mobilité du fret.Chacun des (très nombreux) secteurs écono-miques qui composent une ville possède sespropres caractéristiques logistiques, qui elles-mêmes déterminent presque mécaniquementles types de véhicules, les heures et les fré-quences de livraison qui seront nécessaires auxapprovisionnements de ce secteur. Par ailleurs,avant d’être livré ou enlevé dans une zoneurbaine, un produit a toutes les chances de tran-siter par une plate-forme (entrepôt, agence demessagerie, terminal, chantier de transport com-biné…), c’est-à-dire un lieu nodal où la mar-chandise va être au minimum transférée d’unvéhicule à un autre, et bien souvent va subir uncertain nombre de transformations (stockage,réemballage)(2). La mise en œuvre d’une chaînede transport particulière pour les premiers etles derniers kilomètres constitue ainsi l’un desprincipaux signes distinctifs de la mobilité desmarchandises dans les grandes métropoles. Cescaractéristiques structurantes posent une pre-mière limite à l’intervention publique : il est dif-ficile, par des politiques publiques, de faire évo-luer la façon dont s’organisent les flux urbainsdes marchandises. Les horaires, les fréquences

de livraison, les types de véhicules ne se modi-fient pas au travers de simples décisions locales,car les différents secteurs économiques qui lesmettent en œuvre sont organisés, sur un planlogistique, par des forces extérieures aux terri-toires locaux.

Des terrains métropolitains, vecteurs d’innovations logistiquesLe transport urbain des marchandises et la logis-tique urbaine restent des mondes sous optimi-sés où quelques secteurs innovants coexistentavec beaucoup d’opérations routinières. Unepart non négligeable de la mobilité des mar-chandises est peu efficace, c’est-à-dire qu’ellemet en œuvre plus de véhicules-km que néces-saire pour approvisionner les agents écono-miques urbains. Malgré un fonctionnement glo-bal du transport de marchandises dans lesgrandes villes qui pose d’importants problèmesenvironnementaux, un certain nombre de nou-veaux services de logistique urbaine innovantsdans les parties les plus urbanisées des grandesmétropoles sont apparus. C’est le cas tout

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Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Une logistique urbaine innovante

Logistique urbaine, les villeseuropéennes se mobilisent

À Stockholm, le chantier du nouveau « quartier durable » de Hammarby bénéficie d’une gestion collective des approvisionnements et de l’évacuation des matériaux de construction.

Laetitia Dablanc(1)

Inrets

Parce que la ville est un espacecontraint et très partagé, l’intervention publique y prend une place importante. De plus, face à l’accroissement des contraintesenvironnementales, les villes ont dorénavant pour objectifl’amélioration du bilan énergétique de leurs transports, notamment de celui des marchandises. Reste à trouver les bons outils pour le faire.

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(1) Laetitia Dablanc est chargée de recherche à l’Institutnational de recherche sur les transports et leur sécurité. Labo-ratoire Systèmes productifs, logistique, organisation des trans-ports et travail.(2) Les enquêtes «chargeurs » de l’Inrets ont montré qu’en-tre 1988 et 2004, le taux de passage par une plate-forme d’unenvoi de marchandises est passé de 66 % à 85 % pour lesenvois sortant de l’agglomération parisienne, et de 50 % à62 % pour les envois arrivant dans l’agglomération parisienne.Beaudoux E., Dablanc L., Guibault M., Routhier J.-L.(2008) « Lapartie urbaine de la chaîne de transport », Enquête Écho2004, Actes de la journée spécialisée Inrets (à paraître).

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d’abord de la logistique du e-commerce quiconstitue aujourd’hui près de 5 % du chiffred’affaires du commerce de détail en Europe.La zone dense parisienne, comme d’autresagglomérations européennes, concentre lesinnovations qui sont liées à ce nouveau modede consommation. Une entreprise comme Star’sServices, l’une des sociétés de transport fran-çaises les plus innovantes apparues ces der-nières années sur le créneau réputé difficile dela livraison à domicile des produits alimentaires,est née et s’est d’abord développée en régionparisienne. C’est là qu’elle fait circuler quotidiennement la grande majorité de ses1 200 véhicules, tous frigorifiques et équipésd’informatique embarquée communicante.C’est dans les grandes villes allemandes que laDeutsche Post a installé un réseau aujourd’huitrès important de consignes automatiquesurbaines, les Packstationen, destinées à facili-ter les transactions des particuliers qui com-mandent ou vendent par internet. Sur le mêmemodèle, La Poste a installé la plupart de ses nou-velles consignes automatiques «Cityssimo» enÎle-de-France, et plus particulièrement à Paris.D’autres secteurs que le e-commerce génèrentdes innovations techniques ou organisation-nelles dans les très grandes villes. La sociétéChronopost a conçu et développé son systèmede « chronocity », un conteneur à assistanceélectrique, pour livrer les centres des grandesagglomérations françaises. À Amsterdam, Vos-Logistics avec d’autres partenaires a développéle River Hopper, une unité fluviale en partieautodéchargeante qui assure la distribution parvoie d’eau de fret palettisé (notamment de bois-sons). C’est aussi à Amsterdam qu’un bateauDHL parcourt les canaux de la ville et sert debase centrale pour des coursiers en vélo, équi-pés de systèmes d’information reliés aux ordi-nateurs du bateau.

Des leviers d’action multiples testés par les grandes villes européennesDevant les réalités économiques et environne-mentales du transport de fret, les villes d’Eu-rope, depuis une vingtaine d’années, se sontprogressivement lancées dans l’action. Elle peutprendre une forme traditionnelle (réglementa-tion de la circulation et du stationnement) ouaudacieuse : contrôles automatisés, péagesurbains, gestion intelligente du trafic, nouveauxpartages de voirie, promotion de matériels etde véhicules innovants, développement dutransport fluvial ou ferroviaire.

La planification stratégique et la concertationLes villes sont désormais nombreuses à inté-grer dans leur planification le transport de fret.

La France a été l’un des premiers pays à géné-raliser la prise en compte des marchandisesdans les divers documents d’aménagementurbain. L’article 28-1 de la loi d’orientation destransports intérieurs de décembre 1982 donnemandat aux agglomérations, lorsqu’elles élabo-rent leurs plans de déplacements urbains, de« traiter des transports de marchandises et deslivraisons tout en rationalisant les conditionsd’approvisionnement de l’agglomération afinde maintenir les activités commerciales et arti-sanales […]». Dans d’autres pays européens,l’établissement de plans de transport, de docu-ments d’aménagement ou de plans climat sefait, également, en y intégrant les enjeux dutransport des marchandises. Les pratiques deconcertation y sont souvent plus anciennesqu’en France et très bien établies. Les FreightQuality Partnerships dans les villes anglaisessont, par exemple, des lieux où s’engagent devéritables négociations définissant les règles dujeu réglementaires et financières de la circula-tion des véhicules utilitaires en ville. Pointd’orgue à plusieurs années de discussion avecles transporteurs, le London Freight Plan, quidéfinit la stratégie du Grand Londres à court etmoyen termes sur ces questions, a été adopté ennovembre 2007. Les villes hollandaises, de leurcôté, se sont regroupées avec les représentantsdes transporteurs dans un réseau national, le« comité pour la distribution urbaine » (Com-missie Stedelijke Distributie), une structure sou-ple qui est lieu de concertation, force de propo-sition et soutien aux initiatives innovantes.

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En Île-de-France, des systèmesinnovants liés à la logistique du e-commerce se développent,comme Cityssimo, nouvelles consignes automatiquesinstallées par La Poste.Ci

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Les difficultés des plates-formesurbaines de distribution des marchandisesDès les années 1980, les enjeux environnemen-taux ont suscité des démarches expérimentalesde logistique urbaine, dans lesquelles les villesont cherché à dépasser les simples politiques deréglementation. Les municipalités se sont essayéen particulier à la mise en place de services dedistribution urbaine centralisée des marchan-dises, avec pour objectif la rationalisation destournées de livraisons au centre-ville. Plusieursétudes de consultants ou d’universitairesavaient, en effet, démontré qu’il existe sur lepapier un bénéfice net, en termes d’économiede véhicules-km et donc de CO2, apporté pardes schémas de massification et de mutualisa-tion (ou consolidation selon le terme anglo-saxon) de la distribution urbaine des marchan-dises. Ces expérimentations ont permisparallèlement de tester l’usage de véhicules delivraison peu polluants. Certaines avaient mêmeun fort contenu social à travers l’emploi de per-sonnes handicapées ou en réinsertion. Maisl’application de ces schémas sur le terrain s’estrévélée difficile, coûteuse, décevante sur le plandes résultats.Une centaine de petites plates-formes urbainesde livraison de marchandises ont été mises enplace ces quinze dernières années, notammentdans les villes d’Europe du Nord, des Pays-Bas,de Suisse, d’Allemagne et dans quelques villesfrançaises (La Rochelle, où la plate-forme esttoujours en activité, sous forme d’une déléga-tion de service public attribuée en 2006 augroupe Veolia) ainsi que Monaco. Il en resteaujourd’hui moins d’une dizaine réellementopérationnelles. Le logisticien Exel (groupeDHL) gère l’une de ces plates-formes, qui des-sert de façon collective le centre-ville de Bristol.Pour l’entreprise, le constat est clair : il ne peutexister de modèle économique à ces plates-formes, sans subventions publiques. Or, les villes

sont réticentes à financer ce type de service.De nouvelles plates-formes ont néanmoins vu lejour depuis quelques années, qui prennent desformes très spécifiques. Certaines d’entre ellessont spécialisées et ne traitent qu’un type deproduits, comme les centres de distribution desmatériaux de construction desservant les groschantiers urbains à Londres et Stockholm. ÀStockholm, le chantier du nouveau « quartierdurable» de Hammarby, démarré en 2001, béné-ficie d’une gestion collective des approvision-nements et de l’évacuation des matériaux deconstruction. Toutes les livraisons passent par lacentrale de distribution où les produits sontidentifiés et mis en attente pour être livrés surle chantier en juste à temps. Le gros vrac,comme le ciment ou l’acier, ne passe pas par laplate-forme, mais la livraison est coordonnéepar un système de rendez-vous sur internet, afind’éviter les déchargements de camions simul-tanés. La plate-forme emploie dix personnes,utilise huit véhicules aux normes Euro IV(3) etune aire de stockage de 8000 m2. Cette gestioncentralisée des matériaux a permis de diviserpar trois le nombre de camions desservant lazone de chantier. De son côté, le Grand Lon-dres a cofinancé, avec des partenaires privés, leLondon Construction Consolidation Centre(LCCC) qui est opérationnel depuis 2006 et estgéré par le logisticien Wilson James. Selon unbilan effectué en 2007, cette plate-forme a per-mis de réduire de près de 70 % le nombre devéhicules lourds circulant sur les zones de tra-vaux, se traduisant par une diminution nonnégligeable des émissions de CO2.Un certain nombre de villes d’Italie du Nordont également œuvré, ces dernières années, à lamise en place de nouveaux types de plates-formes de livraison urbaine. Ces petites struc-tures (City Porto Padova, Mestre City Logistics,Vicenza Veloce, etc.) desservent les centres-villehistoriques, désormais fermés au trafic général.Elles sont financièrement soutenues par lamunicipalité, ce qui suscite réactions et oppo-sitions de la part de certains transporteurs. Unedécision récente du tribunal administratif deVénétie, saisi par un groupe de grands messa-gers parmi lesquels UPS et DHL, pourrait d’ail-leurs remettre en cause ces organisations muni-cipales. Les juges ont en effet estimé que lamunicipalité de Vicenza n’avait pas le droit dese substituer aux professionnels du transportni de restreindre trop fortement leur accès aucentre-ville pour la distribution urbaine desmarchandises.

Accueillir le transport des marchandises

Les Cahiers n° 150

Une logistique urbaine innovante

Logistique urbaine, les villes européennes se mobilisent

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Elcidis, à La Rochelle, est l’une des plates-formes urbainesde livraison de marchandises encore en activité.

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(3) Les normes Euro sont des normes européennes d’émis-sions maximales de polluants que doivent respecter les nou-veaux véhicules vendus dans l’Union européenne. La normeactuelle des poids lourds neufs est Euro IV, la norme Euro Ventre en vigueur en octobre 2009.

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Très médiatisées en Europe et valorisées par lesgrands programmes de recherche et de coopé-ration comme Civitas, ces expérimentations deplates-formes urbaines de distribution des mar-chandises présentent néanmoins des résultatsmodestes, sur le plan climatique, à l’échelled’une agglomération : le City Porto de Padoue,par exemple, permet l’économie de trentetonnes de CO2 par an.

Des politiques de soutien à la logistiquede proximitéPlusieurs grandes villes ont mis en place desservices innovants de logistique urbaine, detaille et d’ambition plus mesurées que les plates-formes urbaines – mais néanmoins promet-teurs. Paris et Barcelone sont intéressantes à cetitre, car leurs projets s’inscrivent dans une poli-tique de gestion globale et diversifiée des trans-ports de marchandises. Paris offre des espaceslogistiques de 500 m2 à 1000 m2 dans les parcsde stationnement publics à des sociétés commeLa Petite Reine, un transporteur qui utilise exclu-sivement des triporteurs à assistance électrique,et agit en sous-traitance dans les quartiers cen-traux de la capitale pour le compte de grandsmessagers.De la même manière, Chronopost bénéficied’un espace de gestion de ses colis sous laplace de la Concorde, qu’elle livre par véhiculesde livraison électriques et au gaz naturel. Cesexpérimentations ont de bons résultats sur leplan énergétique, même s’ils restent marginauxen termes d’amélioration globale du bilan CO2

de la ville de Paris. De son côté, Barcelone aengagé une politique des petits pas visant à

l’amélioration progressive de la gestion de lavoirie en faveur des livraisons. Les aires de livrai-son ont été repensées et beaucoup mieuxcontrôlées grâce à la mise en place d’agentsde surveillance dédiés circulant en scooter. Desdisques de stationnement ont été distribués auxlivreurs (le système a depuis été imité par Paris),qui leur assurent ainsi une identification facilepar les agents. Par ailleurs, plusieurs boulevardsde la ville ont été rendus multi uso : les voies decirculation latérales changent d’usage en fonc-tion du temps, devenant des aires de livraisonaux heures creuses de la journée, des zones destationnement résidentiel la nuit et des voiesde circulation générale aux heures de pointe.Une action spécifique sur les livraisons noc-turnes (avec la promotion de matériels demanutention et de transport silencieux) est éga-lement entreprise par la capitale catalane. Rete-nons un dernier élément très original de la poli-tique barcelonaise sur les marchandises, àtravers le règlement municipal d’urbanisme quiimpose à certains commerces (les bars et res-taurants) de réserver 5 % de leur surface austockage de bouteilles. La municipalité espèreainsi limiter le nombre de livraisons quoti-diennes de boissons pour ces établissements.Dans ce cas, la ville agit à la source sur lademande et donc sur la fréquence des livrai-sons et sur la circulation quotidienne descamions.Peu de villes européennes, en revanche, se dis-tinguent par l’introduction des technologies del’information et de la communication pour lagestion du fret. L’information embarquée à des-tination des transporteurs sur le trafic en temps

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Paris offre des espaces logistiques à des sociétés comme La PetiteReine, transporteur qui utiliseexclusivement des triporteurs à assistance électrique, et agit en sous-traitance dans les quartierscentraux de la capitale pour le compte de grandsmessagers.ww

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réel et sur les perturbations, par exemple, estrelativement peu développée. La ville deBologne vient de se lancer dans la mise enplace expérimentale d’un système d’informa-tion par GPS adapté à son nouveau service dedistribution urbaine mis en place dans la zoneà accès réservé du centre-ville. Un projet euro-péen, SmartFreight,est aujourd’hui entièrementdédié aux questions de collecte et partage d’in-formation trafic au bénéfice des chauffeurs-livreurs (www.smartfreight.info). Mais ces deuxexemples en sont au stade expérimental. Ducôté des opérateurs de transport eux-mêmes,l’équipement technologique des véhicules estencore aujourd’hui à un niveau minimal. Unesociété comme Stars’ Services, dont l’ensemblede la flotte est équipée de GPS, demeure encoreaujourd’hui une exception.

L’introduction du facteurenvironnemental dans les réglementations localesL’un des éléments sans doute les plus intéres-sants des politiques des grandes villes euro-péennes sur le transport de marchandisesrelève de l’introduction de facteurs environne-mentaux dans les règles d’accès des camionsaux zones urbaines. Les réglementations localesfavorisent ainsi les camions récents et « bienchargés », abandonnant de fait les référencesaux gabarits et tonnages. Par exemple, à Amster-dam, seuls les camions de moins de huit ansqui chargent ou livrent au moins 80 % de leursmarchandises dans le périmètre central peu-vent pénétrer dans la zone centrale. Ces règlessont souvent associées à la mise en place dezones environnementales. Aucun camion niaucune camionnette ne peuvent entrer dans leGrand Londres s’ils ne sont pas «Euro III », souspeine de très fortes redevances d’accès. Cesnouvelles mesures d’accès liés à l’âge des véhi-cules utilitaires ne concernent pas seulementl’Europe du Nord, mais aussi l’Italie (notam-ment les plus grandes villes), l’Espagne (Madrid,Barcelone), et même les grandes villes alle-mandes, qui, récemment, ont mis en place desinterdictions de circulation pour les véhiculesles plus polluants. Au-delà des pollutionslocales, l’adjoint aux transports de la ville sué-doise de Göteborg a, depuis peu, identifié lebilan CO2 des véhicules utilitaires comme l’unde ses objectifs réglementaires privilégiés pourles prochaines années.En France, peu de villes se sont lancées dans cetype de mesures. Depuis 2007, la ville de Parisréserve aux seuls véhicules Euro III (depuis le1er janvier 2009, aux véhicules Euro IV), la pos-sibilité de livrer entre 17 heures et 22 heures. Ilest néanmoins encore difficile pour la munici-palité de faire connaître et appliquer cette régle-

mentation, qui relève davantage d’un signalinformatif envoyé aux transporteurs que d’unerègle impérative. À l’inverse, à Londres, Romeou Madrid, ces mesures sont strictement appli-quées, grâce à des systèmes de contrôle auto-matisé(4).Pour conclure, il faut savoir que, si les municipa-lités ont toutes aujourd’hui mis en place desprocédures de concertation avec les transpor-teurs, seules certaines comme les villes britan-niques ont fait de ces tribunes de véritableslieux de négociation aboutissant à des déci-sions de compromis entre les différents parte-naires. Les villes européennes sont de plus enplus nombreuses à adopter des critères envi-ronnementaux, délaissant les règles tradition-nelles d’accès fondées sur les tonnages ou lesgabarits. Poussant la logique à son terme, lesvilles suédoises souhaitent aujourd’hui inclureun objectif climatique dans ces mesures d’ac-cès, en favorisant les camions à faibles émis-sions de CO2. De nombreuses villes, au sudcomme au nord de l’Europe, introduisent dessystèmes sophistiqués comme le contrôle sanc-tion automatique pour l’accès aux zones cen-trales. D’autres, comme les villes allemandes etfrançaises, sont beaucoup plus prudentes quantà ce type de mesures coercitives. Les réactionsface à la tarification des infrastructures rou-tières urbaines sont également variables: si Lon-dres, Stockholm ou Oslo ont décidé une pra-tique généralisée du péage urbain, pour lesvoitures comme pour les camions, en revanchenombre de villes européennes restent pru-dentes, ou ne ciblent, dans un premier temps,que les camions. Il est en revanche surprenant de constater queles villes européennes, à de rares exceptionsprès, ne portent qu’une faible attention à la col-lecte de données, à la mise en place d’enquêteset aux travaux de modélisation sur le transportdes marchandises. Elles sont peu nombreuses,également, à se préoccuper de l’inscription spa-tiale régionale des équipements logistiques.Pourtant, l’urbanisme logistique pourrait consti-tuer l’un des domaines les plus prometteursdes politiques des collectivités locales à l’ave-nir.

(4) Les transporteurs (et le cas échéant les automobilistes)doivent inscrire leur numéro d’immatriculation dans la basede données du centre de contrôle de trafic. Des caméras ins-tallées sur la voirie enregistrent les plaques d’immatriculationdes véhicules qui pénètrent dans la zone, et émettent auto-matiquement un avertissement, une facture ou une amendeaux véhicules dont le numéro n’a pas été reconnu.

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Une logistique urbaine innovante

Logistique urbaine, les villes européennes se mobilisent

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En 1999, le document «Une stratégie pourla distribution durable » (SustainableTransport: a Strategy) publié par le minis-

tère des Transports affichait l’objectif d’amélio-rer l’efficacité de la distribution du fret routieret de développer le report modal. Cette poli-tique à visée nationale s’est déclinée à d’autreséchelles du territoire.

Le plan fret de LondresÀ Londres, la politique en matière de marchan-dises a été initiée en 2001, avec pour ambition«d’aboutir à un système de distribution de mar-chandises efficace et durable […] ». En 2004-2005, les choix stratégiques relatifs aux actionsen matière de fret ont été arrêtés par le LSDP –London Sustainable Partnership. Depuis, le LSDPa été conforté et relayé par la création de FQPs– Freight Quality Partnerships –, structures asso-ciant des acteurs publics et privés.La stratégie fret vient en appui du plan d’actionclimat de Londres.Le plan fret englobe le trans-port de marchandises tous modes confondus,pour les secteurs privé et public, ainsi que letransport spécifique des déchets. Il couvre leterritoire du Grand Londres, ce qui correspondaux trente-deux boroughs de Londres et à lacorporation de Londres, autrement connue sousle nom de City de Londres. Pour mettre enœuvre cette stratégie fret, TfL s’appuie sur diverspartenaires, notamment les opérateurs de trans-port, les boroughs, les associations de transportde fret et les destinataires (essentiellement lesgrandes enseignes commerciales comme, par

exemple, Marks & Spencer)… Le plan fret et lesdocuments qui en découlent n’ont pas de sta-tut juridique et ne sont donc pas opposables. Ils’agit d’outils d’information et de recomman-dation destinés aux boroughs pour l’élabora-tion de leurs plans locaux de transport(2). Leplan fret doit être cohérent avec les documentsde développement et d’urbanisme (Develop-ment Plan Documents : DPDs) et avec le Strate-gic Freight Network 25, réseau fret stratégique,qui concerne le réseau ferré national. Les prio-rités du plan fret ont été identifiées et sont por-tées à travers quatre projets clés qui visent laréduction des émissions de CO2 :• Les plans de livraison et de service (DSPs). Ils

engendrent la mise en oeuvre d’un planningde livraison et l’utilisation de véhicules pro-pres lors de la réalisation d’opérations deconstruction.

• Les plans logistique de construction (CLPs).Ils se traduisent par l’engagement d’utiliserdes véhicules propres et les modes alternatifs(ferré ou voie d’eau) dès le stade de laconception des grands projets d’aménage-ment et d’urbanisme (par exemple les JeuxOlympiques).

• Le portail d’information sur le fret (FIP). Il viseà partager des informations pour une meil-leure pratique du transport, à simplifier les for-

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Vers une mobilité durable en Europe

Une logistique urbaine innovante

Le plan fret de Londres, un exemple d’action : le FORS

Le FORS, un des quatre projetsphare du plan fret de Londres, vise à encourager la mise en œuvrede meilleures pratiques pour une distribution plus durabledu fret à Londres.

Corinne RopitalIAU île-de-France

Julie Raffaillac(1)

MEEDDAT/CGDD/CLORA

Pour accompagner son développementéconomique dans le respect de ses habitants et de l’environnement,Londres a mis en œuvre une réflexionsur le transport de marchandises. Elle a abouti au plan fret de Londres,élaboré par Transport for London (TfL)puis publié, après consultation et approbation, en 2007.

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(1) Corinne Ropital est chargée d’études « logistique et mar-chandises » et Julie Raffaillac travaille au sein de la directionde la Recherche et de l’Innovation, MEEDDAT/CGDD. Elle est,également, représentante permanente auprès de l’Unioneuropéenne, CLORA.

Les actions du plan doivent bénéficier :- au secteur économique : contribuer

à la croissance des activitéséconomiques et de la population de Londres par l’amélioration de la circulation générée par l’activitééconomique (transport de marchandises, entretien, dépannage,services…) à l’intérieur de Londres ;

- à l’environnement : améliorer la qualitéde l’air en réduisant les émissionspolluantes liées au transport de marchandises et aux activités de services, améliorer la qualité de vieen réduisant l’impact du bruit et les vibrations causées par le transportde marchandises ;

- à la collectivité : améliorer la santé, la sécurité et la qualité de vie des Londoniens en réduisant le nombred’accidents et les nuisances liées au fret.

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malités administratives, et à augmenter l’effica-cité des transports. Cet outil facilite larecherche d’informations relatives aux livrai-sons dans Londres.

-• Le projet de reconnaissance des opérateursde fret – le FORS.

Ces quatre projets sont relayés par trois axes detravail :- le développement du partenariat (dont le

LSDP et les FQPs sous-régionaux) ;- des projets majeurs pour le report modal ;- la production de statistiques, de modèles et

de guides de bonnes pratiques.

Le FORS, un des quatre projets phares du plan fretLe FORS a pour objectif d’encourager les opé-rateurs de fret à utiliser des véhicules propres,à améliorer les compétences des conducteurset des opérateurs, à mettre en œuvre de meil-leures pratiques pour une distribution plus dura-ble du fret à Londres et à améliorer la sécuritédes transports, les rendre plus efficaces et plusdurables. Pour optimiser les résultats, le FORSintègre la diversité du monde du transport demarchandises et s’adresse aux petits commeaux grands opérateurs. Le programme FORS atrois caractéristiques principales :• Reconnaître et récompenser la qualité du tra-

vail des opérateurs. Il existe trois niveaux derécompense (bronze, argent et or), les opéra-teurs les plus performants, identifiés à traversune évaluation, étant éligibles aux niveauxargent et or.

• Améliorer les standards. FORS forme et sensi-bilise les opérateurs à suivre de meilleurespratiques en accord avec la législation.

• Favoriser un comportement durable. FORSsoutient les transporteurs qui améliorent lasécurité dans leurs activités, augmentent l’ef-ficacité de leur organisation tout en réduisantleur impact sur l’environnement.

Le 7 octobre dernier, le projet FORS comptaitsoixante adhérents, totalisant 12000 véhicules.Vingt-trois d’entre eux, représentant une flotte de7 000 véhicules de fret (véhicules utilitaireslégers et poids lourds), ont été les premiers à

recevoir le prix bronze. Cela correspond res-pectivement à 10 % et 6 % des véhicules commerciaux immatriculés sur Londres. Endécembre 2008, on comptait quatre-vingt-onzeadhérents (représentant 13 500 véhicules) auprogramme. Quarante-deux transporteurs(représentant 10000 véhicules) ont reçu le prixbronze pour avoir appliqué les pratiques duFORS. Ils représentent respectivement 11 % et8 % de la flotte des véhicules commerciauxenregistrés à Londres. Le plan d’entreprise 2009-2018 de TfL a identifié le partenariat FORScomme un nouvel indicateur clé de perfor-mance du fret et fixe comme objectif d’avoir300 adhérents en 2009 et 500 nouveaux adhé-rents les années suivantes. Plus globalement,l’action du plan fret de Londres s’inscrit dans lestrente ans à venir. En s’ajoutant aux autresmesures envisagées ou en cours, sa mise enœuvre pourrait aboutir à une économie de1,21 million de tonnes de CO2 à l’horizon 2025,soit une division par deux de la quantité deCO2 émise par le fret routier en 2006.

En décembre 2008, le plan fret de Londres ainitié une nouvelle réflexion en vue d’une éven-tuelle réorientation.Indépendamment de la mise en œuvre du planfret, les tendances en cours et la mise en placed’un plan de péage routier au niveau nationalaboutiraient à une économie de 0,46 Mt de CO2

par an, dont près de 45 % seraient à imputer àla taxation de l’usage du réseau routier. La miseen œuvre du plan fret permettrait l’économie de1,21 Mt de CO2 (soit 0,75 Mt de CO2 supplémen-taires par rapport à une évolution sans planfret). Un quart de cette réduction proviendraitdes actions portant sur les véhicules et un tiersd’actions portant sur les carburants.

(2) Chaque borough doit développer son plan transport encohérence avec le niveau supérieur, celui du Grand Londres,et avec les règlements de gestion du réseau d’infrastructureset de voiries. Ce plan local permet de solliciter des finance-ments à TfL et aux structures de développement local.

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Le plan fret de Londres, un exemple d’action : le FORS

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Les critères d’éligibilité au FORSDomaines d’intervention Objectifs

Formation des conducteursAméliorer la sécurité, la réduction de CO2

et des émissions de polluants

Maintenance des véhiculesAméliorer la sécurité, réduire la consommation, le CO2 et les émissions de polluants

Gestion du risque routier Améliorer la sécurité des cyclistes et des piétons

CarburantRéduire les coûts, le CO2 et les émissions de polluants

L’utilisation de nouvellestechnologies

Réduire la consommation de carburant, le CO2 et les émissions de polluants en utilisant des véhicules hybrides ou électriques, des technologies hydrogène ou le biocarburant

Le Grand Londres et l’Île-de-France en quelques chiffresEn 2005, 155 millions de tonnes de fretont été transportées à Londres, tous modes confondus. La route assure88 % du trafic et la distance moyenne des transports effectués par la routes’élève à vingt-six kilomètres.

En 2006, Londres a émis 44,3 millions de tonnes de CO2 (soit 5,98 tonnes par habitant par an), dont 22 % ont été générés par les transportsterrestres. Le fret routier représente 23 %des émissions de l’activité de transportterrestre. Rapportées à la population, ces 2,24 millions de tonnes de CO2 émispar le fret routier représentent 0,30 tonnede CO2/hab./an. En 2025, le London Plan(plan stratégique de développement et d’aménagement du Grand Londres)prévoit une croissance de la population de 900000 habitants (atteignant alors un total de 8,3 millions d’habitants) et de 847000 emplois, engendrant une augmentation de la demande de transport de marchandises de 15 %. En Île-de-France, les émissions de gaz à effet de serre pour l’année 2005représentent 54,8 milions de tonnes en équivalent CO2, soit 4,76 tonnesCO2/hab./an. 29 % de ces émissions sont générées par le trafic routier dont31 % par les véhicules utilitaires légers(VUL) et les poids lourds (PL). Le fretroutier a ainsi émis 4,93 millions de tonnes de CO2, soit 0,43 tonne de CO2/hab./an.

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Réduction potentielle de CO2 à l'horizon 2025CO2 économisé

Actions Sans plan fret Avec le plan fretmises en œuvre en Mt/an en Mt/anTaxation de l'usage de la route 0,2 0,2Transfert modal 0 0,08Flotte des véhicules 0,06 0,29Horaires de livraison 0 0,01BTP : centres de consolidation 0 0,13Commerces et bureaux : centres de consolidation 0 0,1Déchets (véhicules) 0 0,002Carburants « propres » et véh. à faible émission de carbone 0,1 0,2Biocarburants 0,1 0,2

Total 0,46 1,21

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Vers une mobilité durable en Europe

Une logistique urbaine innovante

Les Cahiers – Monoprix est l’un des pionniers de l’utilisation du mode de transport fluvial pour l’acheminementde ses produits en provenance du grandimport. Pourquoi avoir fait ce choix à un moment où le transport fluvialn’avait pas vraiment le vent en poupe?Catherine Rivoallon – Tout le monde connaîtles enseignes du groupe : Monoprix, Monop’,beauty monop et plus récemment dailymonop’.Monoprix, c’est aussi 20 000 collaborateurs etplus de 300 magasins dans toute la France.Les produits alimentaires représentent une partimportante de notre chiffre d’affaires, mais letextile et les produits pour la maison et les loi-sirs sont des secteurs qui se développent forte-ment et c’est un élément majeur dans notrechoix de recourir aux modes fluvial et ferro-viaire. Nous avons démarré le transport fluvialen 2003, avec comme objectif de transporterpar voie fluviale 60 % de la marchandise conte-neurisée arrivant d’Asie, d’Inde, du Bangladesh,etc.À cette époque, Monoprix était déjà engagédans le développement durable depuis plus dedix ans et avait souhaité inscrire cette démarchedans la stratégie du groupe à tous les niveauxde l’entreprise : architecture et équipement,logistique, ressources humaines, etc.

L. C. – Quels ont été les obstacles que vous avez dû surmonter pour imposer ce mode de transport ?C. R. – Il s’agissait d’un véritable pari, puisqu’ilfallait transporter par voie fluviale – donc par unmode réputé lent – des marchandises qui sontessentiellement saisonnières et dont les cyclesde production en magasin changent tous lesdouze à quinze jours.Lorsque nous avons démarré le transport flu-vial, nous avons dû réorganiser toute la logis-tique de grand import de Monoprix et revoirl’implantation de nos entrepôts. Nous avonsrecentré tous nos trafics – qui arrivaient aupa-ravant sur différents ports en Europe – sur leport du Havre et avons concentré notre activitélogistique sur un seul entrepôt que nous avonsdécidé de positionner le plus près possibled’une voie fluviale. Le site de Combs-la-Ville enSeine et Marne a été choisi.Jusqu’en 2006, l’organisation n’était pas opti-male, puisque, faute d’une desserte fluviale duport de Bonneuil-sur-Marne, nos conteneursétaient déchargés à Gennevilliers. Nos camionsdevaient alors traverser l’agglomération pari-sienne et subir tous les aléas en termes de cir-

culation pour arriver jusqu’à Combs-la-Ville.C’est pourquoi, en 2005, nous avons recherchéune solution alternative à la voie d’eau. L’étudeque nous avons menée nous a conduit, enaoût 2007, à expérimenter le mode combinérail-route via le chantier combiné de Valenton.Mais nous ne sommes pas parvenus à fiabiliserles rendez-vous en entrepôt, du fait de pro-blèmes d’organisation au niveau de la récupé-ration des conteneurs arrivant du Havre par ferau chantier combiné de Valenton.Depuis 2006, le port de Bonneuil-sur-Marne s’estéquipé et peut recevoir des barges de conte-neurs ; nous y déchargeons depuis la majoritéde nos importations. Il reste toutefois une diffi-culté : certaines compagnies maritimes refusentque nous restituions les conteneurs une foisvidés au port de Bonneuil-sur-Marne et exigentqu’ils soient ramenés soit au port de Gennevil-liers, soit directement au port du Havre.

L. C. – Quel bilan dressez-vous,aujourd’hui, de votre nouvelleorganisation logistique sur le planéconomique et environnemental ?C. R. – Aujourd’hui, 75 % de nos marchandisesarrivant au Havre sont transportées par voie flu-viale. Pour les 25 % restants, qui correspondentessentiellement à des retards fournisseurs ou àdes problèmes de contrôle qualité ou de qua-lité au départ, nous utilisons la route.À la lumière de cette expérience qui duredepuis cinq ans, nous pouvons montrer quenous avons réussi non seulement à économisersur notre facture de transport, mais aussi à réor-ganiser l’ensemble du processus opérationnel,depuis la passation de commande et la fabrica-tion dans les usines, jusqu’à la fiabilisation desrendez-vous de livraison en entrepôt.Dans le passé, lorsqu’un camion partaitdu Havre et livrait directement notre entrepôtnational de Combs-la-Ville, les rendez-vous posi-tionnés au niveau de l’entrepôt n’étaient passouvent respectés du fait des problèmes decongestion routière rencontrés dans la traverséede l’agglomération parisienne. Depuis l’utilisa-tion du mode fluvial, nous avons pu fiabiliser lesrendez-vous, ce qui est essentiel pour le fonc-tionnement de l’entrepôt, et organiser de façondifférente et beaucoup plus soutenue la livrai-son de nos magasins.En 2007, nous avons continué à mettre en œuvreune chaîne logistique plus respectueuse de l’en-vironnement : nous avons inauguré une liaisonferroviaire entre notre plate-forme de Combs-la-

Catherine Rivoallon est chef de département Internationalchez Monoprix.

Le groupe Monoprix• 5 enseignes : Monoprix, Inno,

Monop’, beauty monopet dailymonop’.

• Chiffre d’affaires 2007 :3 575 millions d’euros HT.

• Capital détenu à 50/50 par les groupes Galeries Lafayette et Casino.

• Une utilisation de modes de transport alternatifs(transport fluvial, transport ferroviaire et de véhicules au gaznaturel).

Monoprix : un engagement en faveurd’une mobilité durable

Interview

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Ville et nos magasins, via la halle Gabriel Laméà Bercy, à partir de laquelle les magasins sontlivrés par véhicules roulant au gaz naturel pourvéhicules (GNV). Ce faisant, nous avons réalisé

un gain annuel de 337 tonnesde dioxyde de carbone (CO2),25 tonnes d’oxydes d’azote(NOx) et supprimé l’entréedans Paris de 12000 camions.Nous avons également mis enplace un cahier des chargesen nous engageant, avec nos transitaires, dans unedémarche environnementaleet sociale pour pouvoir effec-tivement remplir toutes lesconditions d’un transport ver-tueux et respectueux de son

environnement.Aujourd’hui, 75 % de nos marchandises arrivantau Havre sont transportées par voie fluviale. Lerecours aux modes fluvial et ferroviaire, lié à lalocalisation de nos entrepôts et magasins et àune réorganisation du processus opérationnel,a permis d’économiser sur notre facture detransport.

L. C. – Votre expérience en matière de recours aux modes de transportalternatifs est remarquable. Peut-elle êtretransposable et servir de modèle à d’autres enseignes?C. R. – Notre réussite dans le recours aux modesfluvial et ferroviaire est totalement liée à la loca-lisation de nos entrepôts et de nos magasins.Le choix d’implanter notre plate-forme natio-nale en Seine-et-Marne a été fait par rapport à

la localisation géographique de l’ensemble denos magasins. Ceux-ci sont surtout situés dansles grandes agglomérations et en région pari-sienne. Nous avons également souhaité être leplus proche possible de la voie d’eau pour pou-voir utiliser le mode fluvial. L’entrepôt deCombs-la-Ville répondait bien à ces critères.Pour ce qui est de la halle Gabriel Lamé àBercy – où sont acheminées par mode ferro-viaire les marchandises de l’entrepôt de Combs-la-Ville avant livraison dans les magasins –, cesite est très pertinent au regard de l’épicentre denos magasins en région parisienne. Nous yavons installé une station GNV, qui a été inaugu-rée en novembre 2008, pour que la livraison denos magasins soit faite avec des véhicules rou-lant au GNV. La mise en place de cette liaisonferroviaire entre Combs-la-Ville et Bercy a étépossible parce que les magasins Monoprix sonten grande majorité situés à Paris et dans laproche banlieue.Dans le cas des hypermarchés implantés enpériphérie éloignée, la livraison des dernierskilomètres par un mode de transport massifién’est pas forcément envisageable. En revanche,l’utilisation d’un mode de transport alternatifpour leur approvisionnement amont, depuis leszones export jusqu’à un entrepôt central posi-tionné près de la voie d’eau ou embranché fer,reste possible. C’est une question de cultured’entreprise, de volonté et d’engagement parrapport à une démarche de développementdurable. Et nous étions fortement engagés danscette démarche.

Propos recueillis par Lydia Mykolenko et Corinne Ropital

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Une logistique urbaine innovante

Monoprix : un engagement en faveur d’une mobilité durable

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Depuis 2007, une liaison ferroviairepermet de transporter

les marchandises à la halle GabrielLamé (gare de Bercy),

de laquelle 85 magasins sont livréspar véhicules GNV. Gain annuel :

337 tonnes de CO2, 25 tonnes de NOx

et 12 000 camions en moins dans Paris. C.

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» Aujourd’hui, 75 % de nos marchandises

arrivant au Havre sont transportées par voie fluviale.

Le recours aux modes fluvial et ferroviaire, lié à la localisation

de nos entrepôts et magasins et à une réorganisation du processusopérationnel, a permis d’économiser

sur notre facture de transport. «

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Leurs actions portent sur la réglementa-tion, le développement de plates-formesde groupage et l’usage de modes massi-

fiés et moins polluants, tels que la voie d’eau etle tramway. Utrecht et Amsterdam s’inscriventdans ces démarches.

Le bierboot d’Utrecht pour la logistiqueurbaine fluvialeLe bierboot a été mis en service en 1997. Peude temps avant, des grossistes de la brasserieavaient contacté le port d’Utrecht pour trans-porter leurs marchandises par voie d’eau. Leurmotivation étaient liées aux conditions de cir-culation routière et à leurs difficultés de livrai-sons sur les axes du centre historique d’Utrechtqui longent les canaux :- la réglementation interdisant la circulation

aux véhicules de plus de deux tonnes, élé-ment déclencheur du projet ;

- la réglementation réduisant les horaires delivraison sur une partie du secteur d’Oude-gracht (le vieux canal au cœur d’Utrecht) ;

- la congestion routière ;- la législation sociale de la manutention.En 1997, un bateau est disponible. La villed’Utrecht décide de l’utiliser et de devenir opé-rateur du bierboot. L’opération pilote est lan-cée. Pour optimiser l’organisation du service,une plate-forme située au nord-est d’Utrecht estouverte en 2006. En trente minutes de naviga-tion, le bierboot accède au centre historique.Équipé d’une grue, il peut transporter trente« rolls » ou trente tonnes. Quatre grossistes tra-vaillant pour les plus grands brasseurs sont lesutilisateurs du bierboot. Au démarrage du ser-vice, pour des raisons de concurrence, il n’étaitpas possible de grouper les produits de plu-sieurs brasseurs, ce qui complexifiait le rem-plissage du bierboot. Aujourd’hui, le servicefonctionne à plein : chaque grossiste disposed’un jour de bateau par semaine et souhaiteraitle louer davantage. Un cinquième grossiste uti-lise le bierboot pour livrer des bars et des restau-rants en produits frais, ultrafrais et surgelés.Le bierboot effectue en moyenne soixante-septlivraisons par jour, cinq jours sur sept. Avec lademande croissante, il pourrait fonctionner au

moins deux jours de plus. La ville d’Utrecht réa-lise une étude de marché pour mettre en ser-vice un deuxième bateau. Pour l’instant, le pre-mier bierboot a été remplacé par un bateauélectrique.

Un tramway pour le fret à AmsterdamEn mars 2007, la société City Cargo a testé àAmsterdam, durant quatre semaines, le projetpilote de livraison des marchandises dans lecentre-ville à l’aide d’un tramway. La logistiques’exécute en quatre étapes :- les marchandises sont acheminées par

camions dans un centre de distribution ;- elles sont conteneurisées puis chargées dans

le tramway ;- les conteneurs sont débarqués du tramway

sur des points de transfert ;- ils sont chargés dans des véhicules utilitaires

légers électriques – les e-cars – et acheminésjusqu’au client final.

Pour la phase test, un tramway « classique » aété utilisé. Mais le concept repose sur l’utilisa-tion de tramways spécifiques fret, pouvant trans-porter trente tonnes de marchandises mises en«mini-conteneurs». Le but affiché est de réduirede moitié le nombre de camions circulant dansla ville, soit 2500 véhicules par jour de moinsselon les estimations de City Cargo.Amsterdama des caractéristiques bien particulières quipourraient permettre le développement de ceservice. C’est une ville fortement contrainte enmatière de circulation routière, sur le planurbain (étroitesse de la voirie, nombreuxcanaux et ponts…) et réglementaire (livraisonsautorisées uniquement entre 7 heures et11 heures – réglementation stricte de la qualitéde l’air…). Ce concept permettrait, selon CityCargo, de réduire de 15 % à 20 % la pollution del’air d’Amsterdam. Le projet de City Cargo pour-rait débuter sa phase opérationnelle en 2009avec une mise en service de cinq trams fret,quarante-sept véhicules électriques et un cen-tre de distribution. À terme, il est prévu qua-rante-deux trams fret, 611 véhicules électriqueset deux centres de distribution.

Livrer en zone urbaine par modesalternatifs : deux cas nord-européens

En réponse aux enjeux de la circulation des marchandises, de nombreuses villeseuropéennes mettent en œuvre des actions pour améliorer le bilanenvironnemental de leur distribution urbaine et pour rationaliser cette activité.Utrecht et Amsterdam en font partie.

Corinne Ropital(1)

IAU île-de-France

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Vers une mobilité durable en Europe

Une logistique urbaine innovante

Le bierboot est équipé d’une gruedotée d’un bras de huit mètresprolongé d’une cage.

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(1) Corinne Ropital est chargée d’études « logistique et mar-chandises ».

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L’objectif de cette opération était de tes-ter le système utilisé pour le décharge-ment, ainsi que la viabilité économique

du transport palettisé par voie d’eau. Cette opé-ration pilote cadre parfaitement avec l’une desmissions du port de Bruxelles, celle de favoriserun transfert modal de la route vers les modesmoins polluants. Laurence Bovy, présidente duport de Bruxelles, a déclaré : « Le test auquelvous assistez aujourd’hui illustre parfaitementla volonté d’évoluer vers un mode de transportplus respectueux de l’environnement, mais quidoit rester tout aussi performant économique-ment que les modes de transport plus tradition-nels (…). Nous sommes convaincus au port deBruxelles que le transport par la voie d’eau doitdevenir l’un des modes de transport privilégiéspour ce type de conditionnement (les palettes).C’est la raison pour laquelle nous avons décidéd’appuyer son développement en organisantcette opération pilote. »

Les perspectivesLe transport palettisé représente une évolutioncomparable au transport par conteneurs, modede transport en développement rapide. Maiscontrairement aux conteneurs, le transport despalettes par voie d’eau est encore trop rare, laroute en a l’exclusivité. Pour autant, les perspec-tives du transport palettisé par la voie d’eausont très positives, notamment pour le centreTIR – Transport international routier – et le futurBILC – Brussels International Logistics Centre –qui sont dédiés à la distribution urbaine. Ce tra-fic permettra de relier le TIR et le BILC presquedirectement à la voie d’eau, afin d’en faire descentres logistiques bimodaux, voire trimodauxgrâce au projet du port de Bruxelles permet-tant de réactiver la liaison ferroviaire.

Les partenariatsCe test a été possible grâce à un subside de laRégion de Bruxelles-Capitale (différence duprix du transport palettisé par voie d’eau parrapport à la route) et par une collaborationétroite entre la Région de Bruxelles-Capitale etla Région flamande. Les avancées obtenuesdans le transport de palettes par la voie d’eausont en effet la conséquence d’une initiativede la ministre flamande des Travaux publics,mise en œuvre par les sociétés De Scheepvaartet Waterwegen & Zeekanaal, les experts en trans-port et les entreprises concernées par ce typede transport.

Cette expérience fera l’objet d’une évaluation,en termes de prix, de fiabilité, de gains environ-nementaux, de possibilités d’étendre le réseaude distribution, etc.

(1) Geneviève Origer est directrice marketing et développe-ment au port de Bruxelles.(2) Wintam se situe à quarante kilomètres au nord deBruxelles.

168

Le port de Bruxelles teste le transportde palettes par voie d’eau

Le port de Bruxelles a organisé, en septembre 2008, un test du transport de palettes par la voie d’eau, dans les installations de la société Mpro (groupeSaint-Gobain), implantée dans le bassin Vergote du port de Bruxelles. Proche du centre-ville, ce bassin accueille principalement des entreprisesspécialisées dans les matériaux de construction et le béton. Au cours de ce test, 310 palettes de matériaux de construction ont été transportées jusqu’à Bruxelles. Le bateau d’une capacité de 600 tonnesavait été chargé la veille à Niel, près de Wintam(2) par Coeck et Wienerberger,deux producteurs de matériaux de construction.

Geneviève Origer(1)

Port de Bruxelles

Accueillir le transport des marchandises

Les Cahiers n° 150

Vers une mobilité durable en Europe

Une logistique urbaine innovante

Les perspectives du transportpalettisé par voie d’eau, en test par le port de Bruxelles,semblent positives, notamment pour les entreprises de distribution urbaine.

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Ressources

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AGIR DANS UN CONTEXTE QUI ÉVOLUE

SAVY Michel (dir.)Questions clés pour le transport en EuropeParis, La documentation Française, 2009.

Alors que l’Europe des transports n’existeencore que de manière imparfaite et inaboutie,le projet ou le défi qu’elle constitue appellentune approche organisée à son échelle. C’estl’objet des questions clefs traitées par quinzeexperts européens du domaine des transports.Les domaines abordés portent sur le systèmeeuropéen des transports, l’analyse comparativedes systèmes de transport, les différents modesde transport, le rôle de l’État et des régions dansles politiques de transport, le service public detransport, la mobilité durable, la politique euro-péenne des transports.IA 49570

Livre vert : Vers une nouvelle culture de la mobilitéurbaineBruxelles, Commission des Communautés européennes, 2007

Après avoir rappelé l’importance du milieuurbain en termes de localisation des popula-tions et de production économique, les pro-blèmes que cela génère (pollution atmosphé-rique, accidents de la route), et se proposantde planter les jalons d’une stratégie européennede la mobilité urbaine, ce livre vert expose lesdéfis qui doivent être relevés dans le cadred’une approche intégrée: des villes fluides (pro-blème de congestion, solutions possibles, pro-motion de la marche à pied et du vélo, optimi-sation du recours à la voiture particulière,transport de marchandises), des villes moinspolluées (pollution par les transports, solutionspossibles par l’utilisation de nouvelles techno-logies, de politiques d’achats respectueuses del’environnement, de marchés publics verts, par la promotion de nouveaux modes deconduites, par de possibles restrictions de circu-lation), des transports urbains plus intelligents(face à l’augmentation des flux de fret et depassagers, utilisation de péages intelligents, meil-leure information), des transports urbains acces-sibles (pour toutes les catégories de personnes,avec un cadre juridique approprié et des solu-tions innovantes, un maillage équilibré des ter-ritoires), des transports urbains sûrs et sécuri-sants (risques d’accident, promotion decomportements moins dangereux, infrastruc-tures plus sûres et sécurisantes, véhicules plussûrs). Le rapport souligne ensuite l’importancedu développement d’une nouvelle culture de lamobilité urbaine en s’appuyant sur l’améliora-tion des connaissances et de la collecte desdonnées. Est enfin abordée la question du finan-cement avec le concours européen.CDU 61368 ; DCN 58-1299

OFFRIR UN CADRE FAVORABLE

PAUMIER Jean-Michel ; RABARDEL DanielPerspectives d’évolution du rôle et des compétences du STIFParis, Cesrif, 2007.

Après un rappel du rôle et des compétencesdu Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif),le rapport traite du cadre organisationnel et ins-titutionnel actuel et de ses perspectives d’évo-lution à moyen terme, en particulier, celle liéeà l’adoption du règlement européen relatif aux« Services publics de transports de voyageurspar chemin de fer et par route». Il aborde lesproblématiques de délégation à des autoritésorganisatrices de proximité et celle de l’élargis-sement des compétences du Stif aux questionstouchant à la mobilité. Des recommandationssont formulées en vue d’une organisation pluscohérente de la mobilité et des déplacements,tant individuels que collectifs. Le principe etles bases d’une expérimentation au niveau d’unbassin de déplacement sont développés.IA 48778

COUREL Jérémy ; NGUYEN-LUONG Dany ; PRETARI,AlexiaHabiter ou travailler près d’une gare de banlieue.Quels effets sur les comportements de mobilité ?Paris, Iaurif, 2007.

Le projet de schéma directeur de la Région Île-de-France arrêté au 15 février 2007 accorde uneimportance majeure aux quartiers de gare. Eneffet, en les rendant attractifs, la densificationautour de ces quartiers permettrait à termed’optimiser l’utilisation des transports en com-mun. Cette étude a pour objectif d’analyser lescomportements de mobilité des habitants deces territoires. Pour cela, les auteurs exploitentles données de l’enquête globale Transports de2001-2002 et procèdent à des analyses descrip-tives et économétriques, selon les caractéris-tiques des ménages concernés et selon descaractéristiques géographiques. À l’issue decette étude, trois enseignements sont dégagés :– la proximité d’une gare influence la décisionde recourir à la voiture pour se déplacer, d’au-tant plus que l’on habite loin de Paris ; – iln’existe pas de corrélation directe entre la dis-tance parcourue lors d’un déplacement et lefait d’habiter près d’une gare ; – le nombre dekilomètres parcourus en voiture ne se déter-mine pas de la même manière pour les indivi-dus habitant à proximité d’une gare et pour lesautres.IA 48837

GUIGOU Brigitte ; LECOMTE Dominique ; LECROART Paul ;PALISSE Jean-Pierre ; NAVARRE DanièleMadrid, une région en forte croissance.Aménagement et planification. Compte-rendu de visite (3-5 mai 2006)Paris, Iaurif, 2006.

Moins médiatique que Barcelone ou Bilbao,Madrid connaît depuis dix ans une croissanceurbaine et économique accélérées. Pendant la

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BibliographieLes références bibliographiques

sont issues de la base de donnéesUrbamet. La cote permet de localiser

le ou les centres de documentation où consulter l’ouvrage.

IA (Iau-Idf) ; CDU (Centre dedocumentation sur l’Urbanisme) ; DCN ;

DRE (Direction régionale del’équipement ) ; CGPC (Ponts et

Chaussées) ; CTM (CETE méditerranée) ;TU (Certu)

Une bibliographie plus complète est disponible sur le site

de l’IAU île-de-France.

Nous recommandons la lecture de certaines revues telles que

Transports urbains, Transport publicinternational, Ville et Transports,pour leur approche comparative

avec l’étranger.

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dernière décennie, le territoire de la Commu-nauté autonome de Madrid a gagné près d’unmillion d’habitants et l’emploi y a crû de 4,3 %par an. Ce développement s’appuie sur uneextension très rapide des réseaux de transports,notamment du métro et des rocades autorou-tières, et sur la réalisation de grands quartiersd’habitat périphériques. Madrid dispose main-tenant d’un niveau d’équipements de qualitédigne d’une grande région-capitale euro-péenne. Mais ce modèle atteint ses limites, enl’absence d’une planification régionale :consommation d’espace naturel, congestion duréseau de voirie, ségrégation sociale par l’habi-tat, etc. Et la Communauté de Madrid, institu-tion régionale aux compétences étendues,cherche à se doter d’une stratégie et desmoyens d’un développement plus durable. Quoiqu’il en soit, par ses réussites, mais aussi par lesquestions qu’elle soulève, l’expérience deMadrid offre des éléments précieux de réflexionpour l’aménagement de l’Île-de-France.IA 48005

GOUT PatriciaMobilité et urbanisme en Allemagne. Promouvoir l’urbanisation autour des dessertesferrées et des TCSP : la politique du Landde la Rhénanie du Nord-WestphalieDortmund, ILS, 2001.

Compte rendu d’une recherche visant à analy-ser la cohérence de l’urbanisme et des trans-ports à l’échelle du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie. Des mesures ont été mises en placepour développer une offre urbaine de qualité àtravers une large concertation, des subventions(pour l’aménagement des quartiers de gare, ledéveloppement de nouveaux quartiers d’habi-tat situés aux arrêts du réseau de transport fer-roviaire et du réseau de transport en communen site propre), des financements favorisantl’habitat peu consommateur d’espace, un pro-gramme de réhabilitation des gares, un proces-sus de médiation entre la DB (Deutsche Bun-desbahn) et les communes pour requalifier lesanciennes emprises ferroviaires.CDU 61182

OFFNER Jean-MarcLes plans de déplacements urbainsParis, La Documentation Française, 2006.

Relancés par la loi sur l’air de 1996, les PDUsont un outil majeur de la conduite des poli-tiques publiques locales. Par-delà les aspectssociaux, économiques et environnementauxdu transport, cette procédure de planificationmet en cause pratiques et structures urbaines.Les impératifs du développement durable luiconfèrent des enjeux aussi bien locaux que glo-baux. Mieux articuler gestion de la mobilité etorganisation des territoires agite les institutionspubliques depuis plusieurs décennies. C’est àl’aune de ces apprentissages que doit s’analyserle mode de fabrication actuel des PDU. Lesrecherches concluent à une enquête inache-

vée de la cohérence et de l’efficacité de l’actionpublique. Deux principes permettront de dépas-ser ces démarches par trop sectorielles : l’éla-boration de référentiels, aptes à formaliser unevision mobilisatrice du monde que les acteursentendent transformer ; l’attention aux modali-tés concrètes du travail au sein des instancestechnico-administratives. Dans cette œuvre idéo-logique et pragmatique de «repolitisation», l’ex-pertise tant savante que participante constitueune ressource stratégique pour l’État et les pou-voirs locaux.IA 47344 ; CDU 59942 ; DRE 9978

FEDOU Daniel ; LHOSTIS Alain ; RAYMOND Michel ;SYLVESTRE GérardLa tarification sociale dans les transports urbains,la mise en œuvre de l’article 123 de la loi SRUParis, CGPC, 2006.

Le droit au transport selon l’article 123 de la loi Solidarité et renouvellement urbains du13 décembre 2000 garantit aux personnes endifficulté une réduction d’au moins 50 % dansles transports urbains de voyageurs. Toutefois, laloi est inégalement appliquée par les autoritésorganisatrices de transport urbain, d’où l’exper-tise de la mission sur ce sujet. Après un rappelde l’organisation administrative en matière detransport de voyageurs, le rapport examine lasituation en matière de tarification sociale. Puisil analyse les difficultés d’application de l’arti-cle 123 de la loi SRU et, enfin, émet des propo-sitions et recommandations, en vue d’unebonne application généralisée de cet l’article.CGPC 004551-01

ORFEUIL Jean-PierreUne approche laïque de la mobilitéParis, Descartes & Cie, 2008.

Après une présentation des éléments essentielsà la compréhension de la mobilité aujourd’huiet à ses évolutions passées et à venir, lesconcepts et indicateurs qui sont nécessaires àl’élaboration de connaissances sont présentés.Avec l’évolution des conditions de la mobilitéet de nos pratiques, on aborde ce que celle-cia apporté à la construction de nos vies. Enfin,l’état des lieux fait apparaître des perspectivesde développement de la mobilité en ville pluslimitées qu’on ne le pense, du moins dans lespays développés. La seconde partie est consa-crée au renversement des objectifs des poli-tiques de mobilité. On s’attache à évaluer si lessolutions qui font aujourd’hui consensus dansle champ politique sont susceptibles deconduire à la société de grande sobriété éner-gétique qu’impliquent les difficultés croissantesd’accès à la ressource pétrolière et la menacedu changement climatique. Enfin, une réflexionprospective sur l’avenir possible des systèmesde déplacement dans un contexte d’exigencecroissante de durabilité est présentée.IA 49569

Bibliographie

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REINER Daniel ; BILLOUT Michel ; BIWER ClaudeRapport d’information sur le fonctionnement et lefinancement des infrastructures des transportsParis, Sénat, 2008.

Après avoir constaté que le sous-investissementen infrastructures de transport menace lamodernisation et le développement de l’éco-nomie française, le rapport formule des propo-sitions qui suivent deux axes. En premier lieu,il est vital, dans un contexte de financespubliques très contraintes, de mieux dépenserles ressources existantes ; en second lieu, il fauttrouver d’importantes ressources supplémen-taires pour les infrastructures de transport, c’est-à-dire que le financement des transports doitêtre assuré tant par le contribuable que parl’usager. Le système français de transport et aveclui la richesse de la France seraient en danger,si un consensus politique fort ne se dégageaitpas très rapidement pour sanctuariser les inves-tissements en infrastructures de transport.IA 49052

CHAUVEL Jean-Pierre ; COINDET Jean-Paul ; LEMOINE

Caroline, PRÉDALI FrédériqueLes investissements de transport collectif dans les métropoles européennes. Les investissement d’extension à Londres, MadridParis, IAU îdF, 2008.

L’IAU île-de-France, à l’initiative de la RégionÎle-de-France, étudie les investissement de trans-ports collectifs des grandes métropoles euro-péennes Londres, Madrid, Berlin et Paris.IA 49170 ; DRE 10429(1) ; IA 49490

COINDET Jean-Paul ; VERRIER DenisExploitations routières innovantes en France et en EuropeParis, Iaurif, 2007.

Cette étude dresse un état des lieux des tech-niques utilisées pour la gestion du trafic routier. Les auteurs s’inspirent d’expériencesétrangères, afin d’en tirer des enseignementspour l’Île-de-France. Les mesures strictementréglementaires et administratives de contrôlede la circulation ne sont pas abordées. Dans unpremier temps, les auteurs dressent une nomen-clature des différents moyens techniques utili-sés dans l’exploitation routière : les capteurs,les caméras, les transmissions…, mais égale-ment les principaux dispositifs de gestion dutrafic (régulation de la vitesse, l’utilisation devoies auxiliaires, etc.). La partie suivante estconsacrée aux mesures franciliennes de régu-lation du trafic, et évoque les mesures histo-riques jusqu’aux expériences récentes. Une par-tie est également consacrée aux expériencesen province, et le dernier chapitre évoque lasituation dans différents pays étrangers: la Répu-blique d’Irlande, l’Allemagne, le Royaume-Uni,les Pays-Bas et les États-Unis.IA 49003

PAUL-DUBOIS-TAINE OlivierPéage urbain : principes pour une loiParis, Centre d’analyse stratégique, 2008.

Le rapport a pour objectif de présenter lespoints de repère utiles à la préparation d’unprojet de loi et du débat parlementaire consé-cutif. Abordant l’intérêt socio-économique etenvironnemental du péage urbain ainsi que lesconditions d’acceptabilité, il souligne que lepéage urbain devrait reposer sur les avantagessocio-économiques globaux qu’il apporte à lacollectivité. Il examine l’encadrement législatifnécessaire et précise les conditions adminis-tratives de sa mise en œuvre. Il propose desmesures destinées à faciliter les modalités pra-tiques de perception, de contrôle et de recou-vrement des infractions ainsi que les possibili-tés de délégation à des opérateurs spécialisés.IA 49334

SERVANT LouisLe péage urbain de Londres. Éléments pour un bilan coûts-avantagesParis, IAU îdF, 2008.

Ce document présente la méthode et les prin-cipaux résultats de la mise en place d’un péageurbain à Londres. Cet équipement a été intro-duit le 17 février 2003 dans la partie centralede l’agglomération londonienne, afin de réduirela congestion routière de ce territoire. Au boutde quelques semaines, une baisse de 15 % dunombre de véhicules entrant dans cette zone aété observée, et le niveau de circulation a stagnépar la suite. Mais ce dispositif coûte très cheren fonctionnement : 45 % des recettes TTC dupéage hors amortissements. Cette note se fondesur les données du cinquième rapport annuel2007 d’évaluation du TfL (Transport For Lon-don), promoteur du péage. Elle présente suc-cessivement l’impact du péage sur la circulationroutière, le bilan financier et le bilan socio-économique du péage.IA 49169

Le péage urbain de Stockholm. Bilan de l’expérimentation (du 3 janvier au 31 juillet 2006),(SERVANt Louis, 2008), IA 49018

Les péages urbains en Norvège : Oslo et Trondheim. Rapport des visites des 27 et 28 mai 2002(SERVANT Louis ; VINCENT Pascal ; RAUX Charles ;LANVERSIN Emmanuel de, 2002)IA 44165

MÉYÈRE AlainLes Franciliens et l’automobile : deux ou troischoses à savoir pour faire face au défi climatiqueCahiers de l’Iaurif, n° 147, fév. 2008.

Avec 27 % du total, les transports terrestres sontle premier secteur d’activité à l’origine des émis-sions de gaz à effet de serre en Île-de-Francedevant le secteur résidentiel (24 %). La circula-tion des voitures particulières représente à elleseule plus de la moitié de ces émissions dues

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Bibliographie

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aux transports et elle est très largement le faitdes Franciliens eux-mêmes. Depuis 25 ans, laplace occupée par l’automobile au sein desdéplacements des Franciliens s’est accrue. Lapoursuite éventuelle de ce phénomène et lesconditions à réunir pour infléchir les évolutionsdu partage modal sont abordées en tentant demieux cerner les marges de manœuvre pourfaire face au changement climatique. Il semblequ’aucun domaine d’action n’est en mesure àlui seul de fournir la solution permettant deréduire les émissions de gaz à effet de serredans les transports.IA P.117

OFFRIR DES SERVICES ATTRACTIFS ET DURABLES

PRÉDALI Frédérique ; LEMOINE Caroline ; MESSENET

AgnèsLa place des bus dans les transports collectifs de MadridParis, Iau-Idf, 2008.

Cette étude offre l’opportunité de comparer lapart du bus dans l’offre globale et la demandede transports en commun dans les régions fran-cilienne et madrilène. Selon les critères del’étude, le réseau de bus francilien est deux foismoins dense que le réseau mis en place parl’autorité organisatrice des transports de lamétropole espagnole. L’Île-de-France est cepen-dant couverte par un important réseau ferré(RER et trains de banlieue), ce qui lui permet deconserver une offre de transport plus élevéeque celle de la Communauté autonome madri-lène.IA 49432

NAVARRE Danièle ; JACOB ChristianÉtude de cas étrangers de transports collectifs de banlieue. Cas n° 1 : Madrid (2006) ; Cas n° 2 :Londres (2007) ; Cas n° 3 : Berlin (2007)L’IAU île-de-France a réalisé une série de troisétudes sur des capitales européennes ayant undéveloppement urbain similaire à celui de l’Île-de-France : Madrid, Londres, et Berlin. Elles ontpour objet de faire le point sur les besoins enmoyens de transports desservant les zones péri-phériques des grandes agglomérations.Sur Londres : IA 48437 ; DRE 10083(2) sur Berlin : IA 48772 ;

DRE 10083(3) ; sur Madrid : IA 47842

ALLIO Robert ; GALLAND Jean-ClaudeTransports en commun sur autoroutes et voiesrapidesParis, Iaurif, 2007.

Ce rapport étudie des expériences étrangèresd’implantation de ligne de bus à haut niveau deservice sur les autoroutes et les voies rapides. Ceconcept n’existe pas encore en Île-de-France. Ilest donc pertinent d’analyser les différentesexpériences étrangères, afin de savoir s’il seraitjudicieux d’implanter cette pratique sur lesroutes franciliennes. Le rapport se déroule donc

en trois phases: l’analyse d’exemples étrangers ;les enseignements de ces expériences pour l’Île-de-France ; la faisabilité de l’implantation de ceconcept en Île-de-France.IA 48168 ; DRE 10107

Bus à haut niveau de service : concept et recommandationsLyon, Certu, 2005.

Le concept de bus à haut niveau de service(BHNS) est une approche globale du systèmebus incluant l’infrastructure, l’insertion urbaineet les modalités d’exploitation. Il s’inspire de ladémarche Bus Rapid Transit (BRT) mise enœuvre en Amérique et se veut un outil métho-dologique et pédagogique visant à soulignerles points clés pour réussir un projet de bus effi-cace et structurant. Il s’applique aux véhiculesroutiers, guidés ou non, thermique ou trolley-bus, bus ou autocar. Ce document présente : lesdéfinitions et objectifs du concept ; les notionsde niveau de service, qualité de service, attentesdu voyageur et contractualisation avec l’exploi-tant ; l’utilisation du concept pour développer leréseau de transports collectifs, son inscriptiondans les démarches de planification de dépla-cements et son opportunité pour développerla ville ; l’approche globale du système en utili-sant le concept BHNS ; la conception d’uneligne BHNS: tracé, stations, insertion en sectioncourante, séparateurs de voies, géométrie, fran-chissement des carrefours, règles de circulationet signalisation, le matériel courant ; le cas d’untronc commun de plusieurs lignes – le cas desdessertes périurbaines ou interurbaines ; lesbesoins en recherches et évaluations ; les réfé-rences à l’étranger et en France.IA 46748 ; TU CEDO 166 ; CDU 59491 ; DRE 9894 ; CTM 17649

Déplacements : ces villes qui innoventDunkerque, AGUR, 2006.

Des agglomérations françaises et européennesont expérimenté avec succès des réponsesinnovantes au problème des déplacementsurbains. Dans un premier temps, l’exemple deMünster (Allemagne) démontre l’importancede combiner et de bien articuler politiqueurbaine, stratégie foncière et transports. La pro-blématique de la qualité urbaine et les solu-tions rendant la place au piéton dans la villesont examinées à travers l’analyse de la poli-tique espaces publics à Lyon. Les réponses pro-posées en matière de parking relais sont abor-dées. L’exemple du plan de déplacementd’entreprises de Chambéry et des plans dedéplacement des écoles à Angers et à Caenmontre que l’on peut aussi agir sur la demande.Enfin, l’exemple du conseil en mobilité de Saint-Etienne illustre l’intérêt d’un lieu de réunionpour réfléchir et innover sur la question desdéplacements.IA 47969

Bibliographie

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CHALAS Yves (dir.) ; PAULHIAC Florence (dir.)La mobilité qui fait la ville. Actes des 3e

rencontres internationales en urbanisme de l’Institut d’urbanisme de GrenobleLyon, Certu, 2008.

Trois dimensions de la relation entre ville etmobilité sont plus précisément abordées. Dansla première (les nouvelles configurations socio-spatiales des pratiques de mobilité quoti-dienne), Marie-Hélène Massot et Jean-PierreOrfeuil retracent l’évolution des paradigmes dela mobilité dans son rapport à la forme urbaine;Vincent Kaufmann examine les mouvementspendulaires de longue distance au cours des-quels le temps de déplacement devient dutemps social ; Sonia Chardonnel s’appuie surles résultats statistiques des enquêtes-ménages-déplacements grenobloises pour aborder lesmobilités et montre que les programmes jour-naliers des individus conditionnent leurs mobi-lités; Richard Shearmur s’interroge sur les dépla-cements domicile-travail à Montréal à partir dulieu où se trouve l’emploi. Dans la deuxième(les enjeux des nouvelles approches théoriqueset méthodologiques pour les comprendre),Jean-Charles Castel examine l’articulation deschamps d’action de l’urbanisme et des trans-ports ; Antoine Brès cherche à faire comprendrecomment le mouvement fait lieu ; Jean-François Doulet montre que le développementde la mobilité chinoise est révélateur des muta-tions profondes de la ville postmaoïste ;Guy Burgel souligne les ambiguïtés nombreusesqui pèsent sur l’organisation rationnelle et effi-cace des villes contemporaines qui sont à l’ori-gine d’un urbanisme à pensée faible ; GeorgesAmar affirme qu’il faudra inventer de nouvellesformes de mobilités d’échanges, ce qui laissesupposer que les transports vont fortement évo-luer et Marc Wiel revient sur les ambivalencesde la mobilité dans une vision prospective maisorientée vers l’aide à la décision. Dans la troi-sième (le renouvellement de l’action publiqueurbaine relative à la gestion des déplacementset de la mobilité), Bruno Faivre d’Arcier retracel’évolution des politiques de transport et de ges-tion des déplacements pour mettre en évidencel’émergence actuelle d’un nouveau type d’ac-tion publique qu’il appelle management de lamobilité ; Florence Paulhiac s’interroge aussisur l’action publique dans le domaine des trans-ports et Philippe Zittoun analyse les expertisesqui participent de la culture des transports etcelles qui participent de la culture de l’urba-nisme.IA 49548

BALLET Jean-Christophe ; CLAVEL RobertLe covoiturage en France et en Europe : état des lieux et perspectivesLyon, Certu, 2008.

Face à l’augmentation de l’utilisation de l’auto-mobile et ses conséquences sur l’énergie et lapollution atmosphérique, le covoiturage peutêtre une solution efficace pour limiter la circu-

lation. Cette étude dresse un état des lieux desservices de covoiturage en France et à l’étran-ger, en analysant l’ampleur du phénomène parle biais d’éléments quantitatifs. Ce rapport pro-pose : historique et définition du covoiturage,état, lieux de services tout public, état des lieuxdes services en entreprises et administrations,le covoiturage en Europe et ailleurs, vers uncovoiturage dynamique : quelques exemples,barrières à franchir et recommandations pourun service de covoiturage efficace. En annexesfigurent une bibliographie et les éléments dela base de données covoiturage.TU CE02 10686 ; DRE 1026

La (Dé-)réglementation du secteur des taxis : Conclusion de la Table ronde 133 d’économie des transportsParis, OCDE, 2007.

Ce rapport traite du rôle des taxis dans les trans-ports publics au Québec, de la déréglementa-tion de ce secteur en Europe, avec l’expériencedes Pays-Bas. Puis il aborde le sujet de la régle-mentation de ce secteur au Royaume-Uni etconclut sur l’étude de ce secteur en France eten Irlande.IA 48752 ; DCN 57-949

MORCHEOINE Alain ; DOUAUD André« Quel avenir pour l’automobile et la mobilitéautomobile ? »Infrastructures et mobilité, n° 81, sept. 2008.

Un représentant de l’Ademe et le directeur tech-nique du Comité des constructeurs françaisd’automobiles s’interrogent sur l’impact dubonus-malus sur les comportements d’achatdes consommateurs, sur l’apparition à grandeéchelle d’une voiture propre et sur le rôle del’industrie automobile française dans ce cas,sur la part de marché de l’automobile dans lesdéplacements en France, sur la gestion du tra-fic urbain, sur les biocarburants et sur laconduite respectueuse de l’environnement.IA P.742

JAUMIN François« Les enjeux de l’industrie automobile face au réchauffement climatique »Problèmes économiques, n° 2947, 7 mai 2008.

La Commission européenne a récemmentrendu public son plan de réduction des émis-sions de dioxyde de carbone, dont l’objectif estd’atteindre, en 2012, la barre des 130 g/km. Le secteur des transports est considéré commel’un des principaux responsables des émissionsde gaz à effet de serre (14 %) et diversesmesures ont été prises au sein de l’Union euro-péenne. Le gouvernement français, par exem-ple, a mis en place un dispositif de bonus-malusqui constitue un élément majeur du Grenelle del’environnement. Les principales actions envisa-gées par l’industrie automobile pour réduireles émissions de CO2 sont exposées. Article parudans Accomex, n° 78, novembre-décembre 2007IA P.323 ; CDU 61854

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BERTRAND JérômeÉtat de l’art en matière de transport spécialisé.Enquête sur les services de transports adaptésdes grandes agglomérations françaisesParis : Iaurif, 2007.- 57 p.

Cette étude dresse une typologie des servicesde transports adaptés à la demande pour lespersonnes handicapées dans plusieurs grandesagglomérations françaises. Après un état deslieux de la législation en la matière, l’auteurexpose les résultats de l’enquête réalisée auprèsde 65 autorités organisatrices de transport fran-çaises, en discernant l’analyse selon les théma-tiques suivantes : les usagers des services ; l’offrede service ; l’organisation du service ; les résul-tats d’exploitation des services.IA 48487

BAILLARD Michel ; BOUTRY Britta« Du code de la route au code de la rue : dossier »Vélocité, n° 90, avr. 2007.

Quels sont les enjeux du code de la rue? Coupde comm’, petit toilettage ou début d’unegrande réforme ? Après avoir balayé l’étatd’avancement du travail préparatoire françaissur le sujet, ce dossier fait un petit tour d’hori-zon des aménagements et dispositions quiétayent et favorisent le code de la rue en Bel-gique : les zones de rencontre, les «SUL» (sensuniques limités), les trottoirs traversants, le cous-sin, la ville entière à 30 km/h, les contresensbelges tels qu’on les vit à Liège et Herstal (Wal-lonie).IA P.640

« Marcher »Urbanisme, n° 359, mars-avr. 2008.

À l’heure de la sobriété énergétique et de lachasse aux gaz à effet de serre, vélo et marcheont la cote. Après l’histoire du piéton par Jean-Marc Offner, Sonia Lavandinho et Yves Win-kin dégagent quelques-unes des incitations àla marche urbaine. Ensuite, Marie-José Wied-mer-Dozio expose les actions mises en placepar la municipalité de Genève pour promou-voir la marche et Sonia Lavandinho présentele plan piétons de cette même ville.Bengt Kayser demande une adaptation de notreenvironnement construit à la marche et au vélo alors que Jacques Lévy montre que la marche est d’abord un moyen de transport.Georges Amar et Véronique Michaud appréhen-dent la marche comme un champ de concep-tion. Jean-Paul Thibaud aborde la marche auxtrois personnes (je, tu, il), articulant les pratiquesde la marche en ville à l’expérience desambiances urbaines. S.Lavandinho évoque leschoix d’itinéraires du marcheur urbain, alorsque Rob Methorst expose les conditions denaissance du réseau de recherche européensur la marche en ville, que Jean-Pierre Charbon-neau revient sur l’intérêt accordé à la marcheen ville et que Thierry Paquot cite des auteursqui ont étudié la marche en ville.IA P.414

ACCUEILLIR LE TRANSPORT DES MARCHANDISES

Loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portantréforme portuaireLes dispositions de la loi concernent environ2000 personnes, essentiellement les grutiers etportiqueurs déchargeant les bateaux des portsde Marseille, Le Havre, Rouen, La Rochelle, Bor-deaux, Nantes-Saint-Nazaire et Dunkerque. Elles’articule autour de quatre axes : l’évolution desmissions des sept ports autonomes (rebaptisés«grands ports maritimes»), l’organisation de lamanutention portuaire, la modernisation de lagouvernance des grands ports maritimes et ladéfinition d’un plan d’investissement.http://www.legifrance.gouv.fr

Forum international des transporteursTirer parti de la mondialisation. Contribution du secteur des transports et enjeux politiques.Rapports introductifs et synthèse des discussions.17e symposium international FIT/OCDE sur l’économie des transports et la politique, Berlin,25-27 octobre 2006Paris, OCDE, 2008.

Les transports sont au cœur de la mondialisa-tion – car ce terme n’aurait aucun sens s’iln’était pas possible de transporter les produitset les personnes autour de la planète. Les entre-prises et les personnes peuvent d’autant plusprofiter de la mondialisation que les réseauxde transport sont efficaces et rentables. Par unepolitique rendant le secteur des transports pluscompétitif, plus réactif et mieux organisé, il seraitpossible d’être efficace et rentable : tel était la thématique principale du 17e symposiumFIT/OCDE. Cette publication reprend l’ensembledes rapports introductifs ainsi qu’une synthèsede ses débats. Le lecteur trouvera dans ce rap-port l’aboutissement des réflexions les plusrécentes sur le thème de la mondialisation etdes transports.DCN 61-1258

ROPITAL Corinne ; HEMINGWAY AliceLa place de l’Île-de-France dans l’hinterlanddu Havre : le maillon fluvial. Résultats des entretiens auprès des chargeurs et des opérateurs de transport fluvialParis, Iau-Idf, 2007.

Ce rapport s’inscrit dans un ensemble d’étudessur la place de l’Île-de-France dans l’hinterlanddu Havre. Ce document s’attache plus particu-lièrement au volet fluvial. Il s’appuie sur desentretiens auprès de sept opérateurs de trans-port fluvial et de terminaux fluviaux situés prin-cipalement dans le sud-est de l’Île-de-France etutilisant particulièrement la voie d’eau pouracheminer la marchandise en Île-de-France. Cesacteurs représentent près des trois quarts desconteneurs acheminés depuis Le Havre versl’Île-de-France.Après une première partie décri-vant le schéma d’importation de ces sept char-geurs, l’étude s’appuie sur l’analyse des entre-tiens pour déterminer quels sont les facteurs

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qui favorisent le choix de la voie d’eau pources chargeurs, quelles sont les limites de cemode de transport et quels sont les atouts etcontraintes des terminaux existants et futurs.IA 49171

ROPITAL CorinneLes portes d’entrée marchandises de l’Île-de-France. Premier volet : la plate-forme portuaire de Zeebrugge.Deuxième volet : la plate-forme portuaire d’Anvers.Troisième volet : Quatre exemples et terminauxfluviaux intérieurs : Liège, Bruxelles, Meerhout,WillebroekParis, Iaurif, 2006.

IA 48034(1) ; IA 48034(2) ; IA 48034(3)

SAVY Michel ; DAUDÉ CarolinePour une régulation durable du transport routierde marchandises. « Transport routier de marchandises et gaz à effet de serre »Paris, Centre d’analyse stratégique, 2008.

Dans un premier temps, la situation actuelle dutrafic et des émissions du secteur du transportroutier de marchandises, la situation projetéeà l’horizon 2025 et les conclusions qui peuventen être tirées pour une projection à l’horizon2050 sont présentées. Dans un second temps,l’ensemble des mesures techniques et organisa-tionnelles qui peuvent être mises en œuvre afinde réduire les émissions de gaz à effet de serredu secteur du transport routier de marchan-dises est analysé. En appliquant ces mesuresaux projections de trafic actuellement établies,le bilan de ces mesures est présenté en termesde réduction des émissions de CO2, leur impactest chiffré et elles sont classées. Enfin, le volumede trafic et l’organisation du transport néces-saires pour respecter les objectifs de réductiondes émissions envisagés par la loi sont analysés.IA 49207

ABRAHAM ClaudePour une régulation durable du transport routierde marchandises. Rapport de synthèseParis, Centre d’analyse stratégique, 2008.

Le rapport de synthèse est fondé sur les rap-ports de quatre groupes de travail : développe-ment, compétitivité et emploi ; l’acceptabilitésociale des poids lourds ; les relations et les évo-lutions sociales ; transport routier de marchan-dises et gaz à effet de serre. La création d’em-plois, la compétitivité du pavillon français, lalutte contre le réchauffement climatique consti-tuent les trois enjeux majeurs du transport rou-tier de marchandises et les trois thèmes princi-paux de réflexion de la mission. Après uneintroduction, le rapport rappelle, dans trois cha-pitres, les évolutions récentes du secteur, lesenjeux associés et les recommandations consi-dérées comme prioritaires pour un développe-ment durable du secteur. Chacun des chapitrescherche à mettre en perspective l’ensemble desrecommandations en envisageant la régulation

du secteur et en s’interrogeant sur l’action deses différents acteurs.IA 49213

DABLANC LaetitiaLa notion de développement urbain durableappliquée au transport des marchandisesCahiers scientifiques du transport, n° 51, sept. 2007.

Peut-on dire que le développement durable estun moteur de l’action locale sur le transport demarchandises? À l’évidence pas encore. Certes,le développement durable n’est plus unconcept incantatoire, il a désormais sa placedans la planification des transports à moyen etlong termes des villes. Un certain nombre d’ex-périmentations de logistique urbaine durableont été menées, et certaines avec succès. Maisau-delà de ces expériences, l’action effective etconcrète des villes en matière de transport dura-ble des marchandises est très limitée. Cetteaction est évaluée à travers l’analyse des actesréglementaires les plus banals qui soient ; lesarrêtés municipaux de circulation et de station-nement. Ces réglementations à destination desvéhicules de livraison sont routinières, fragmen-tées et peu efficaces. Les motifs de protection del’environnement, notamment d’amélioration dela qualité de l’air, en sont encore aujourd’huiabsents. Ce résultat est d’autant plus surprenantqu’aujourd’hui l’arsenal législatif relatif au déve-loppement durable n’est plus négligeable. L’ar-ticle fait le point sur les textes s’appliquant auxcollectivités locales relatifs au développementdurable. Il analyse les contentieux des tribu-naux liés à la circulation des camions, avec uneattention particulière portée aux obligationsdes villes concernant la qualité de l’air. Il détailleles innovations récentes des villes européennes,qui intègrent des critères environnementauxdans leur législation municipale sur les livrai-sons.IA P.122 ; CDU

MYKOLENKO Lydia« Le transport de marchandises par véhiculeutilitaire léger en Île-de-France »Note rapide, n° 362, oct. 2004.

Les transports routiers de marchandises sontl’objet d’un intérêt accru des collectivitéslocales et des pouvoirs publics soucieux d’of-frir une meilleure qualité de vie aux Franciliens.Si l’attention se focalise encore sur les poidslourds, ils ne sont pas les seuls véhicules à inter-venir dans le transport routier de marchandises.Le recours aux véhicules utilitaires légers (VUL)s’est fortement développé ces dernières annéesavec, notamment, la limitation d’accès aux cen-tres-ville fondée sur la taille des véhicules. Afinde mieux comprendre cette augmentationrécente (PTAC) ne dépassant pas 3,5 tonnes.État des lieux et principaux renseignementssont présentés.IA P.246/6

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Crédits photographiques p. 169Tomisti/WikipediaA. Lacouchie/IAU îdFTfLIan Bell/TfLPhilip Jackson/SxcHuSvenwert/Flick’rMaersk Line

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Un espace ouvert sans interruption de 10 heures à 17 heuresqui offre au public :• une bibliothèque de 60 000 ouvrages

sur l’aménagement et l’urbanisme,dont 5 000 en libre accès

• 5 000 études et rapports publiéspar l’IAU île-de-France depuis sa création

• une collection de 100 000 imageset de 800 cartes et plans

• 600 collections de revues disponibles, ainsique 2 800 documents d’urbanisme locaux

• un accès au système d’information géographique régional (création, impressionet téléchargement de cartes à la demande)

La Médiathèque de l’IAU île-de-France

15, rue Falguière - Paris 15e

Tél. : 01 77 49 79 17Mél. : [email protected]

L. G

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Retrouvez la sélection complète des références bibliographiques et iconographiques de ce Cahierssur le www.iau-idf.fr

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Envies de villesdécembre 2008France : 18 €Étranger : 20 €

Les solidarités territorialesseptembre 2008France : 18 €Étranger : 20 €

Contraintes énergétiqueset mutations urbainesfévrier 2008France : 36 €Étranger : 38 €

Grands projets urbainsen EuropeConduire le changementdans les métropolesmars 2007France : 36 €Étranger : 38 €

Immobilier d’entrepriseNouvelle géographie,nouvelles stratégiesoctobre 2006France : 36 €Étranger : 38 €

Liban :retour sur expériencemars 2006France : 36 €Étranger : 38 €

En vente à l’IAU île-de-France15, rue Falguière, 75740, Paris Cedex 15 - Tél. : 01 77 49 79 38

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