Vers la Civilisation Humaine

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    As salamu aleikum wa rahmatullahi wa barakatuhu,

    «Voici enfin, à la disposition des lecteurs francophones, ce livre qui fut unbest-seller dans le monde musulman! Il expose - Peut-être pour la premièrefois - ce que contient le Coran en matière d'éducation pour l'élaboration d'unesociété cohérente, et il met en évidence les vérités qu'il faut connaître pourbâtir une civilisation saine et solide.Il expose aussi - et aussi pour la première fois - les fondements de laconnaissance tels qu'ils s'enracinent dans le Coran: ce sont des choses quebeaucoup ignorent encore à l'heure actuelle...

    Ce livre est à mettre entre les mains de ceux qui prétendent avoir cherché toutcela dans le Coran et ne l'avoir pas trouvé!»Le cheikhMuhammad Saïd Ramadan AL-BOUTI est un savant de renomméemondiale. À l'origine de ce livre, une série de conférences qu'il avait donné à latélévision Syrienne, et qui lui avaient valu un important courrier.Histoire, épistémologie, linguistique, physique viennent prêter leur concours,dans cet exposé solidement ancré au dogme islamique, pour unedémonstration sans faille. A ses vastes connaissances qui ont fait de lui uncheikh, M.S.R AL-BOUTI ajoute cette prise directe sur la vie d'aujourd'hui qui

    rend son discours actuel. Et quand, à la logique rigoureuse, il ajoute l'humouret la poésie, il nous offre l'image d'une science véritablement destinée auxhommes.

    J'ai trouvé ce livre tellement puissant que j'ai décidé de faire mon possible pour le mettre en ligne...Je suis allé à ma vitesse, mais chaque jour qui m'en a laissé l'occasion, je vous en ai envoyé quelquespages.Jusqu'à l'avoir recopié dans son intégralité,wa-l-hamdu lillahi...La hawla, wa la qouwata illa billah... 

    Ce livre écrit par Muhammad Saïd Ramadan Al-Bouti (professeur à la faculté de loi islamique à l'universitéde Damas) a été édité par DAR El FIKR en 1987 et je conseille à tous ceux qui en ont les moyens de s'enprocurer un exemplaire...Bonne lecture,

    As salamu aleikum wa rahmatullahi wa barakatuhu,

    Votre frère, FabriceDernière édition par Fabrice.Abdallah le 08 Mai 2004 18:55, édité 1 fois

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    Vers la Civilisation humaineà la lumière du Coran

    AU NOM DE DIEU

    LE TRÈS MISÉRICORDIEUXLE TOUT MISÉRICORDIEUX 

    Ô mon Dieu, vers Toi montent nos louanges et nos plaintes;De Toi nous implorons le secours, et en Toi nous mettons notre confiance !Que les meilleures des prières et des bénédictions soient sur Ton serviteur et Ton Prophète, notre Maître,Muhammad, ainsi que sur sa famille et sur l'ensemble de ses compagnons.

    Je T'implore, Ô mon Dieu, de me tirer des ténèbres de l'illusion, de m'honorer par la lumière de lacompréhension, de m'accorder la connaissance de la science, de m'inspirer de la reconnaissance pourTes bienfaits, et d'accepter ce travail, que je n'entreprends que pour l'amour de Toi.

    Tu es, certes, Celui qui entend, Celui qui exauce !

    PRÉFACE 

    1 - Parler de la civilisation islamique est, de nos jours, à la mode chez la plupart des écrivains et savants,musulmans ou non. Dès lors, nombre de publications, nombre de magazines, abondent en commentairessur la civilisation islamique et sa splendeur passée.

    Mais la majorité ne dépassent pas le niveau de la description des réalisations de cette civilisation : ilsadmirent ses différents aspects et les vestiges qu’il en reste, mais on ne peut attendre d’eux autre chosequ’un inventaire illustré, assorti d’éloges pour la médecine, la philosophie, l’architecture ou les différentsarts et métiers de ces époques révolues. Voilà ce que nous trouvons dans la bibliographie concernant lacivilisation islamique, qui compte aujourd’hui des dizaines d’ouvrages, des plus volumineux aux plusconcis, et divers traités rédigés par des écrivains musulmans, orientalistes ou autres. Tous, en général,procèdent avec la même méthode, descriptive et élégante, assortie de jolies expression, et publient leurétude dans une édition de luxe, accompagnée de croquis et représentations fidèles qui forcentl’admiration pour la civilisation islamique.

    Pour moi, il ne fait pas de doute que cette manière de discourir sur le sujet ne peut que faire naître, dansl’esprit du lecteur, des questions qui le détournent de toutes ces images et descriptions, de tous cestémoins de la civilisation, quels qu’en soient l’importance et la valeur. Au lieu de contempler et d’admirerla magnificence de ce qu’il voit, il doit s’interroger sur la raison du déclin et de la stagnation de cettecivilisation après une si longue période de prospérité et d’éclat… Au lieu de susciter en lui étonnement etrespect, ces études suscitent des questions qu’elles laissent sans réponse.

    Je me rappelle de l’écrivain allemand Zigrid Hunke, et de son ouvrage «Le soleil d’Allah brille sur

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    l’Occident» (1), qui comprenait un bel exposé de la plupart des réalisations de la civilisation islamique. Apeine cet écrivain avait-elle publié son livre, que les questions des lecteurs affluèrent de toutes parts,demandant par quel secret cette civilisation avait pu briller de la sorte, et pour quel motif s’était-elle ainsiflétrie. Voilà comment fut réduit à néant l’effort considérable qu’avait fourni cet écrivain pour mettre enévidence la célébrité de cette civilisation dans le passé, réduit à néant par le trouble qu’elle avaitengendré chez des lecteurs qui avaient poussé leurs réflexions au-delà du livre… En ce qui concerne laréponse que fit Zigrid Hunke, nous y viendrons plus loin.

    Il me faut signaler ici l’exception que constitue un écrivain comme Malik ibn Nabi (Que Dieu le Très-Haut lui

    fasse miséricorde) qui, dans ses nombreuses recherches, remonta jusqu’aux racines et étudia lesfondateurs de cette civilisation. Mais il a emmené pour cela le lecteur à travers un dédale de théoriesabstraites, au lieu de lui indiquer pratiquement la clef de la compréhension qu’il cherchait. C’est une clefqui, bien utilisée, devrait ouvrir au lecteur le chemin de la civilisation islamique, et lui permettre departiciper à sa reconstruction pour qu’elle accomplisse son rôle, comme auparavant.Malik ibn Nabi est revenu sur la question dans un traité annexe qu’il a ajouté, dans une éditionpostérieure, à son livre intitulé«Les conditions de la renaissance»(2). Il a intitulé cette annexe «L’effet dela pensée religieuse sur la genèse de la civilisation». Ce traité annexe était alors une sorte de réponse aux

    nombreuses questions qui lui avaient été adressées par des jeunes et surtout des étudiants : dans leurensemble, ces questions souhaitaient que Malik revienne sur les chapitres concernant l’explicationhistorique de la genèse de la civilisation islamique, et fournisse davantage de détails et de précisions,pour que les jeunes puissent y trouver la démarche à suivre pour participer au renouvellement de lagrande civilisation islamique. Pour ma part, après avoir lu cet appendice, je doute qu’il satisfasse auxexigences de ces jeunes.

    (1) Publié chez Albin-Michel en 1984.(2)Ed. d’Alger 1948 ; éd. du Caire 1957 ; éd. de Beyrouth 1969.

    2 - L’emploi généralisé de la méthode descriptive pour traiter de la civilisation islamique a poussé denombreux chercheurs musulmans à souscrire à l’opinion pécheresse du philosophe allemandSpengler,qui prétend que toute civilisation a une certaine capacité qui ressemble à la capacité organique de

    l’homme : elle débute en faiblesse, puis évolue vers la vigueur, puis à nouveau vers la faiblesse, laflétrissure et la mort. Selon Spengler, elle progresse d’elle même à travers ces étapes, sans interventiond’un facteur externe. Cette conception est presque la seule conception qui s’offre à celui qui n’a pas uneconnaissance intégrale de la structure de l’univers, à celui qui vit sans qu’on lui ait expliqué les règles et

    lois universelles selon lesquellesDieu (exalté soit-Il)traite Ses esclaves (les êtres humains en particulier)conformément à leur nature. La théorie de Spengler est une compensation, mais une compensationdécevante, pour ceux qui ignorent le secret divin, ceux qui n’ont compris que les apparences des chosessans y apercevoir les lois établies par Celui qui a créé, inventé les cieux et la terre, Celui qui a formé l’êtrehumain comme Il a voulu qu’il soit. Mais les musulmans, eux, détiennent la clef de cette compréhension;ils pourraient même l’exposer à tous les penseurs et chercheurs ; alors, qu’ils se laissent aller à croire àl’illusion, à la fausse théorie, voilà la calamité ! La cause principale de cette facilité avec laquelle les

    musulmans se sont laissés pénétrer d’illusions, réside dans la propagation de cette dangereuse méthodedescriptive avec laquelle est traitée la civilisation islamique et son histoire; ce n’est pourtant pas uneexcuse pour suivre une théorie qui ne résiste ni à la logique, ni aux preuves.

    LeCoran est le Livre de la démonstration deDieu (exalté soit-Il). Chaque musulman véridique le croit sansl’ombre d’un doute. Les musulmans entendent le Coran le matin, le soir, en toute occasion, et le lisentrégulièrement individuellement, en essayant de le comprendre et d’en retenir la sagesse. Ce Livre ne

    cesse de leur rappeler queDieu (exalté soit-Il) a soumis l’univers pour l’intérêt des hommes; il montre auxmusulmans les moyens susceptibles de leur donner la maîtrise du monde terrestre; il les met en gardecontre les dérapages possibles vers un mauvais comportement et il les menace, s’ils s’écartaient de labonne voie, de mauvais résultats pour fruits de leurs actions. Dès lors, qu’est-ce qui leur permet des’enfermer dans ces élaborations descriptives et stériles du discours sur la civilisation islamique si ce

    n’est l’imitation de leurs adversaires? Pourquoi vont-ils chercher chez ces derniers les prétendus motifsde la fondation de ces remarquables monuments de civilisation, et les causes de leur transformation en

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    vestiges? Dans cette démarche, ils ne trouvent que des opinions comme celles deTwinby et deSpengler…

    3 - La pensée islamique contemporaine souffre de ce problème, et c’est ce qui m’a poussé à rédiger ceschapitres qui, avant d’être rassemblés en un livre, étaient de petites conférences que j’ai donné, sans lesrédiger au préalable, à la télévision arabe syrienne, pendant les soirées du mois de Ramadan 1399 (1979).Dès lors, on n’a pas cessé de me demander de les publier, ce que je fais ici, dans le but de faire la lumièresur le chemin intégral menant à une civilisation humaine, si tant est qu’on puisse le distinguer dans leCoran. Je suis certain que le problème soulevé dans les deux premiers paragraphes de cette préfacen’est pas étranger à la demande des téléspectateurs, ni au fait que je réponde à leurs désirs en m’attelantà la rédaction du présent ouvrage.

    Je ne vais pas prétendre que la mise en évidence de cette voie coranique pour l’établissement de lacivilisation humaine typique nécessite beaucoup d’efforts et de travail : non ! Car le point de départ et lesétapes de ce chemin sont clairement exposés dans leCoran. Chacun peut, s’il le veut, distinguer cesenseignements sacrés, et les comprendre convenablement, après une étude consciencieuse et réfléchie.Il me semble que cette voie coranique de civilisation n’a jamais été exposée dans sa totalité, dans un livreou dans une monographie. Certains écrivains ont abordé certains détails, ont donné un aperçu sur lacivilisation humaine et islamique recherché; mais les solutions partielles, quoique valables en elles-mêmes, ne sont efficaces que lorsqu’elles s’harmonisent entre elles pour former un traitement complet etglobal du problème. Tout cela a été divinement tracé dans le Livre sacré, leCoran.

    4 – Il est important de savoir que les racines de la civilisation humaine type sont toujours, et

    conjointement, celles de l’éducation humaine type. En effet, la civilisation humaine n’est que le fruit desefforts et de la coopération des hommes pour profiter des ressources de la Terre; or, ces efforts trouventleur origine dans le chemin éducatif auquel obéit l’homme, à la fois comme individu indépendant etcomme membre d’une communauté. Si leCoran nous offre le cheminement parfait pour construire unecivilisation humaine type, cela veut dire qu’il propose également une voie parfaite pour l’éducationhumaine, ou plutôt le théorème complet de cette éducation. J’attire ici l’attention de ceux qui disent avoircherché une proposition éducative islamique sans la trouver, dans la révélation coranique et dans latradition musulmane. Je leur dit que cette proposition éducative intégrale se trouve dans leCoran, nonpas comme un minerai précieux qui se trouve mélangé à d’autres et dont l’extraction nécessiterait unetechnique spécialisée, mais bien mis en évidence dans le Livre divin et miraculeux. Cette propositionéducative est donc accessible à tous ceux qui étudient leCoran, avec leur sagesse et avec leurcompréhension.

    Ceux qui prétendent avoir cherché et n’avoir rien trouvé n’ont jamais vraiment cherché ! C’est là lemalheur ! Comment peuvent-ils prétendre avoir cherché, s’ils n’ont jamais, ne fût-ce qu’une seule foisdans leur vie, terminé une lecture complète duCoran? Je suis sûr qu’il s’en trouve parmi eux qui neconnaissent pas plus duCoran que du Pentateuque ou de l’Évangile, et n’ont pas plus mémorisé de celui-là que de ceux-ci…

    S’ils voulaient revenir auCoran pour y réfléchir sérieusement, ils seraient surpris de leurs lacunes

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    culturelles regrettables, incapables de prononcer correctement les versets coraniques, manquant dusavoir nécessaire pour comprendre le contenu et savourer le sens de ces versets. C’est que, pendant leurformation, pendant toutes les années qu’ils ont vécues, ils n’ont jamais consacré un peu de temps etd’efforts pour étudier leCoran et aborder ce Livre dans sa réalité.

    Ils continuent à dire qu’ils ont cherché sans trouver ce qu’on pourrait appeler les bases d’une théorie

    éducative compréhensive(compréhensible? NDLR), dans le Livre deDieu, Le puissant, Le Majestueux. Jeleur dis, car je pense qu’il en est des sincères parmi eux, qu’ils pourront les trouver dans ce livre que jeleur mets entre les mains, s’ils veulent le lire consciencieusement. S’ils trouvent ce qu’ils ont cherché, ilsera encore temps pour eux de revenir au Livre deDieu pour entamer un nouveau voyage culturel, afind’endosser sérieusement les responsabilités dontDieu, possesseur de ce Livre suprême, nous a chargétous. Nos aïeux s’étaient exécutés convenablement, mais nous, nous avons honteusement délaissé notrerôle civilisateur. Quand donc la masse des musulmans se rendront-ils compte que leurs différentescultures n’ont pas de valeur dans le domaine de la recherche de soi, si ces cultures ne s’élèvent pas et nese couronnent pas dans le savoir sérieux et souverain du Livre de leur Seigneur, qui leur apprendcomment vivre, et comment traiter avec les composants de l’Univers, avec l’être humain, et avec la viemême ?

    C’est une question dont le monde de demain apportera peut-être la réponse exacte… Certes, demain estproche pour celui qui l’attend…

    Damas, le 20 Jumada 1er 1401Le 25 mars 1981.

    Muhammad Saïd ramadan Al-Bouti.

    LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFSDE LA CIVILISATION 

    Je ne vois pas la nécessité d’aller chercher loin une définition de la Civilisation, comme le font beaucoupd’écrivains. Il faut dire que, jusqu’à présent, je n’ai encore jamais trouvé de définition scientifiquementprécise, malgré les diverses opinions exprimées. Il vaut donc mieux, dans l’intérêt du lecteur, proposerdirectement les deux éléments suivants :

    1 ) Parler de civilisation (sous n’importe quelle forme) revient à parler des efforts fournis par l’hommepour passer de la simplicité de la vie nomade à la complexité de la vie urbaine. Du point de vuesémantique, le mot «urbanisation» est l’opposé du mot «nomadisme», de même qu’un homme «civil» estl’opposé d’un homme «rustre». La relation entre le sens linguistique et le sens conventionnel du mot

    «civilisation» est donc évidente : dans la mesure où les hommes se civilisent, ils s’éloignent dunomadisme et se rapprochent des centres de la vie urbaine.

    2 ) Partant de là, nous pouvons définir la civilisation comme étant le fruit de l’interaction entre l’Homme,l’Univers et la Vie (1) . Au niveau le plus bas de cette interaction, nous voyons les habitants d’un déserts’unir dans un effort collectif pour fortifier l’endroit où ils vivent, en se mettant d’accord sur uneplanification urbaine simple et en exécutant collectivement ce plan. Les efforts de ces gens dépendentd’une exploitation judicieuse du temps qu’ils ont à vivre (ce que nous appellerons ici «la Vie») pourmettre à leur service (au service de l’Homme) les différentes ressources de l’Univers qui sont éparpilléesautour d’eux. Nous pouvons donc résumer en disant que les éléments d’une civilisation, ou plutôt ses

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    piliers de base sont l’Homme, la Vie et l’Univers.

    (1) Je ne tiens pas à comparer cette définition que je propose avec celles proposées et adoptées par d’autres, car jepense que les mots et expressions, si différents soient-ils, reviennent au même sens, ou presque, que le mot«civilisation». Mais je ne peux m’empêcher de m’étonner de l’étrange définition adoptée par Abou-A’la al MAOUDOUDI 

    (Que Dieu lui fasse miséricorde), dans son ouvrage intitulé«La civilisation islamique : fondements et principes», où ilconsidère la civilisation comme étant l’ensemble des principes, croyances, pensées et méthodes éducatives,aboutissant à une certaine vie sociale, avec toutes ses exigences. On pourrait conclure de cette définition que lacivilisation est un caractère propre aux hommes, et non pas un caractère attaché aux choses concrètes attachées auglobe terrestre : dans ce cas, toute civilisation devrait s’effacer à la mort de ses constructeurs, quel qu’en soitl’héritage. Pour ma part, j’estime qu’il a proposé là une définition qui n’est pas basée sur les méthodes et conventionssociales en usage; quant aux principes, croyances et pensées, ils ne sont que les fondements, les points de départ de

    la constitution d’une civilisation.

    Par le mot «Homme», nous entendons ici son esprit, sa pensée et sa conscience. Par le mot «Vie», nousentendons la durée de vie accordée à l’homme avant sa mort, l’âge qui lui a été accordé. «Vie» ou «âge»sont plus précis que le mot «temps» et plus significatifs, car le mot «temps» comporte un sens

    indépendant par lui-même, sans relation avec l’âge de l’homme. Les mots «vie» et «âge» expriment mieuxla distance temporelle durant laquelle l’homme jouit de sa vie et de son esprit.

    Par le mot «Univers», nous entendons les ressources, les différents composants soumis à l’Homme.C’est dans un souci de précision dans la signification des mots que nous remplaçons par «Univers» lemot «nature», trop vague, ou le mot «terre» (qui en fait signifie «poussière»), qui désigne la partie pour letout.

    Quant à l’Homme, il est évident qu’il est l’élément primordial de cette triade «Homme, Vie, Univers», car ilen est l’élément moteur et actif, les deux autres n’étant que passifs et mus. Cela veut dire que l’hommeest l’axe de la construction de l’univers dans le monde d’ici-bas, car il est penseur et clairvoyant.Tout ce que l’homme voit autour de lui ne sont que des moyens, des ressources répandues ça et là, pourqu’il en découvre l’usage idéal et s’en serve dans la poursuite de ses buts et de ses espérances.

    Après que nous ayons expliqué le sens de la civilisation et énuméré ses éléments essentiels, il est facilede saisir la vérité suivante : il n’est pas nécessaire qu’il y ait un lien entre la civilisation en tant que telle,et ce qu’on pourrait attendre d’elle dans le domaine du Bien et de la Justice envers l’Homme. Il arrivequ’une civilisation réussisse à découvrir les principes du Bien et de la Justice et à les mettre en pratique,ou qu’au contraire elle s’égare et s’en éloigne, car la civilisation n’est que le fruit des efforts de l’intellecthumain en vue de rendre utiles les différentes ressources dispersées autour de nous. Que ceux qui ontfourni ces efforts réussissent ou non à atteindre le but, qui est l’intérêt général de l’humanité, cela n’arien à voir avec la signification du mot «civilisation» : telle civilisation, comme un cyclone, a arraché unenation entière à sa sécurité et à son bonheur, tandis que telle autre a élevé une nation jusqu’aux sommets

    du bonheur et du bien-être. Ces deux civilisations ont comme dénominateur commun, le fait d’être le fruitd’une interaction entre l’Homme, l’Univers et la Vie.

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    On pourrait s’étonner, en disant : voici une civilisation qui n’apporte que des malheurs ! on pourrait sedemander : est-il possible que le fruit de la connaissance de l’univers et des moyens d’en profiteraboutisse à autre chose qu’au bien commun de toute l’humanité? Cela s’explique par les deux causessuivantes :

    1 ) Les légèretés et les passions de l’âme humaine. Livrée à elle-même cette âme pousse l’homme àdevenir perfide, injuste, boute-feu, séditieux et tyrannique. Entre les mains de tels hommes, lesressources scientifiques et humaines deviennent des armes, semant partout rébellion et désordre.

    2 ) Les hommes ont, de tous temps, cherché à identifier le Bien et le Mal, mais en vain : ils s’égarent dansdes labyrinthes, des suppositions, dans les traditions qui ont cours à leur époque; de plus, ils sont endiscordance lorsqu’il s’agit d’adopter des mesures définitives limitant le sens du Bien et du Mal. Lesefforts civilisateurs deviennent des initiatives contradictoires en vue d’atteindre ce que l’on croit être lebien et le bonheur de l’homme.

    De ces deux causes surgissent ce que l’on appelle «les problèmes de la civilisation dans l’histoire de la

    vie humaine», et là se révèle le secret caché, à savoir que la communauté humaine, à différentes époques,fut plus malheureuse que satisfaite de ses efforts civilisateurs. Voilà le problème, et sa solution est loind’être connue, sinon par l’audition des enseignements duCréateur des trois éléments que sont l’Homme,l’Univers et la Vie. C’est un premier signe du besoin qu’a l’homme de se soumettre à la Religion Vraie, etd’appliquer les enseignements éternels et indubitables qui lui furent communiqués parLe Seigneur desmondes.

    Pour répondre à ce besoin de l’homme, leCoran a tracé pour ce dernier le chemin d’une civilisationhumaine modèle, et lui a indiqué la voie la plus proche pour asservir la vie et l’univers, afin de concrétiserle bonheur humain (au plein sens du mot), purifié des troubles et des impuretés.

    Comment leCoran nous trace t-il le chemin de la civilisation, et nous avertit-il en même temps de ne pastomber dans les pièges aux conséquences néfastes? C’est le sujet des chapitres suivants, que nousallons traiter par la volonté deDieu, Le Puissant, Le Majestueux.

    COMMENT LE CORAN PLACE L'HOMMEDEVANT SES RESPONSABLITÉSEN CE QUI CONCERNE L'ÉDIFICATION

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    DE LA CIVILISATION 

    Quelqu’un pourrait se demander : «Puisque leCoran est un livre de religion qui sert à rappeler auxhommes leur adoration et leurs devoirs envers le Seigneur, pourquoi donc s’intéresse-t-il à la civilisation,à ses problèmes et à ses bases doctrinales ?». La réponse est que leCoran n’est un livre de religion etd’adoration deDieu que parce qu’il confie à tous les hommes la charge d’établir une civilisation. En effet,le but principal de la religion est la purification de l’âme humaine, purification des vices qui peuventl’atteindre et nuire à sa pureté. Dans un verset coranique,Dieu dit :"Réussit, certes, celui qui se purifie"

    (s87,v14) ; et dans un autre verset,Dieu dit en s’adressant àMoïse(prière et paix sur lui), lorsqu’il l’envoyaau Pharaon d’Égypte: "Puis dis : te convient-il de te purifier, et que je te guide vers ton Seigneur, et que tule craignes ?"(s79,v18-19). ; ailleurs encore : " […]et quiconque se purifie, ce n’est que pour lui-même qu’ilse purifie, tandis que vers Dieu est le devenir"(s35,v18).

    La purification de l’âme n’est elle-même que la condition essentielle pour que l’homme puisse faire face,avec sérieux et probité, à ses responsabilités de civilisateur, comme le démontreront les chapitressuivants. Dans la mesure où l’âme est purifiée de ses défauts, l’homme devient plus sincère et plus fidèleà ses devoirs envers autrui. À l’inverse, dans la mesure où une âme est faible et nonchalante, l’hommen’est qu’un instrument de désordre sur la terre, ne cherchant à réaliser que ses propres désirs et intérêts,parfois sous des dehors d’homme agréable et honnête.

    En résumé, la fonction de l’homme, dans laCoran, réside dans le peuplement de la terre dans son sens le

    plus large, ainsi que dans la constitution d’une société humaine saine et d’une civilisation qui embrassele monde entier, ceci afin que l’homme devienne un aspect de la Justice et de la Loi divines, non passous la pression et l’oppression, mais grâce à l’éducation et au libre choix. De nombreux versetscoraniques rappellent cette fonction del’homme : " […]de la terre, Il (Dieu) vous a créés, et là même Ilvous l’a fait peupler[…]"(s11,v61) ; "Et lorsque ton Seigneur dit aux anges : «Je vais désigner un

    lieutenant sur la terre […]»"(s2,v30) le lieutenant ainsi désigné étaitAdam(prière et paix sur lui), puis sesdescendants, vivant dans la soumission àDieu, dans l’établissement de la justice entre Ses créatures. Unautre verset dit : "Mais nous voulions favoriser ceux qu’on avait affaiblis sur terre, et en faire lesdirigeants, et en faire les héritiers"(s28,v5). Ailleurs,Dieu dit : " A ceux qui croient parmi vous, et fontoeuvre bonne, Dieu a promis que très certainement Il les ferait lieutenants sur la terre comme Il l’a fait pour ceux d’avant eux[…]"(s24,v55).

    Ces versets - et il y en a de nombreux semblables dans leCoran – rappellent que la fonction primordialedont l’homme est chargé, et qu’il doit accomplir durant sa vie sur terre, est la réalisation d’une liguehumaine active en vue de peupler la terre (au sens complet du mot peupler) dans tous les domaines :matériel, scientifique, économique… De là,Dieu a honoré l’homme, en le désignant lieutenant et enfaisant le dirigeant, parce que ce dernier a accepté d’entreprendre cette mission selon le modèle dessinéparDieu, Le Puissant, Le Majestueux.

    Puisque cette mission nécessite l’élévation de l’âme humaine au-dessus d’elle-même, nécessite qu’ellese débarrasse des impuretés morales, et des poisons secrétés par l’orgueil et l’égoïsme, le Seigneurdéfinit pour l’homme des exercices psychiques et une éducation capable, si l’homme s’y applique, depurifier son âme de ses impuretés, pour être à la hauteur de son devoir sacré. Ces exercices et ces leçons

    résident dans ce queDieu a imposé à l’homme : tels sont la pratique des différents actes d’adoration etde dévotion, les principes de la foi, ainsi que des bonnes mœurs.

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    On voit donc que le but essentiel de l’Islam, qui est la religion absolue de la création depuis sa genèse,est de peupler la terre au mieux. Les détails de la loi islamique n’existent que pour faciliter aux hommesl’accomplissement de ce devoir sacré, exigé parDieu, Le Puissant, le Majestueux.

    Les vérités suivantes sont des indicateurs importants :

    1 ) Toutes les lois islamiques se divisent en deux catégories : la première concerne l’accomplissementdes devoirs de l’homme envers sonSeigneur, tandis que l’autre concerne ses devoirs envers autrui. Enles comparants, on remarque que la première est relativement peu importante, en quantité, par rapport aucontenu de la deuxième. En effet, la majorité des lois affirment les droits des hommes, ainsi que lamanière de protéger et garantir ces droits. Vous pouvez la vérifier en vous rapportant à n’importe quelindex de traité de droit islamique, qu’il soit concis ou détaillé.

    2 ) Parmi les règles de droit islamique les plus connues, il y en a une qui dit :«Les droits deDieu sontbasés sur l’indulgence, et ceux des hommes sur la stricte observance» : c’est à dire que la négligence del’homme envers ce qu’il doit à sonSeigneur, ou même le délaissement total de ses devoirs, pourront être

    excusés (ou même acquittés) en se repentant du fond du cœur, et en promettant sincèrement de ne pluscommettre cette faute. Si l’homme mourait après ce repentir, il retournerait vers sonSeigneur avec unregistre vierge de tout péché, quelques graves qu’aient été ses fautes passées. Mais pour celui qui a léséautrui, le repentir seul n’est pas valable : il doit d’abord réparation de son manquement au droit d’autrui, ildoit demander pardon à celui-ci et être pardonné, avant de demander pardon àDieu. S’il mourait avantd’avoir réparé sa faute, il retournerait vers sonSeigneur alourdi par la charge de sa faute, jusqu’à ce quela volonté divine le veuille autrement.

    Cette règle signifie queDieu n’a imposé aux hommes ce que l’on nomme droits duSeigneur (l’office de laprière, le jeûne du mois de ramadan, le pèlerinage en Terre sainte, et autres actes de piété…) que pourpurifier les âmes des croyants, et protéger au maximum les droits d’autrui.

    Celui qui a lésé autrui dans ses droits, et va ensuite pratiquer ses devoirs enversDieu, est encontradiction avec lui-même : il ment, et devantDieu et devant les hommes, par son apparence dévote etson âme malsaine. En fait, s’il était un pratiquant sincère, il aurait une âme pure qui ne lui permettrait enaucun cas de trahir les intérêts des hommes. On peut se demander comment certains peuvent adopter uncomportement paradoxal tel que celui que nous avons décrit, alors qu’ils savent queDieu n’a imposé seslois, en matière de pratiques cultuelles, que pour éveiller, à l’intérieur de l’homme, la surveillance divinequi l’empêchera de nuire aux autres.

    Quels sont donc, dans la Législation divine, les droits d’autrui ? Ils résident dans les différents moyens,comportements et bienfaits qui aident les hommes à atteindre leur bonheur individuel et collectif, dans uncadre de coopération, de garantie mutuelle et de justice. N’est-ce pas que la civilisation humaine en est le

    fruit ?

    3 ) Presque les deux-tiers des règles de la Loi divine islamique (à l’exception des pratiques cultuelles)nécessitent l’intervention du système de gouvernement islamique, représenté soit par l’autorité du chefsupérieur (comme les règles concernant l’Imamat, ou ce que l’on appelle les règles de la politiquelégitime), soit par le pouvoir législatif (la jurisprudence). En l’absence d’une autorité gouvernante quidétienne le pouvoir dans son intégralité, toutes ces règles juridiques sont nulles et non avenues. Parconséquent, tout ce qui a trait au gouvernement, au grand imamat, à l’élection du Khalife, et tout ce quien dérive, sont considérés comme étant la préoccupation majeure des législateurs musulmans, car cessujets forment la clef de voûte indispensable à l’exécution de la majorité des lois divines qui nous sontimposées.

    Pourquoi donc se trouve-t-on devant la nécessité de faire intervenir le système exécutif pour faireappliquer et garantir ces lois ? PourquoiLe Seigneur n’a-t-Il pas confié directement cette responsabilité à

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    ceux de qui dépendent ces lois ? La réponse réside dans le fait que la majorité de ces jugements visent àl’instauration de la société humaine optimale, avec tout ce qui peut garantir l’harmonisation des efforts etdes relations des différents membres entre eux. Ceci n’est possible que grâce à l’intervention d’unsystème de gouvernement auquel est octroyé, en toute légitimité, une autorité de protection, etsuffisamment de pouvoir exécutif, ainsi que le droit d’être entendu et obéi. Ceci se résume dans le versetcoranique suivant : "Ô vous qui croyez ! Obéissez à Dieu, obéissez au messager et à ceux d’entre vousqui détiennent le commandement[…]» (s4,v59).

    Vous n’êtes pas sans savoir que la Loi islamique considère comme fondamentale l’édification d’unesociété humaine harmonieuse, construite sur les piliers les plus robustes de la science et de lacivilisation. Sans quoi, cette Loi aurait mis de côté les problèmes du gouvernement et ses méthodes,pour laisser à chacun le soin d’appliquer personnellement les règles de loi en tant qu’individu, et d’entirer à sa guise le profit qu’il jugeait utile.

    Nous aboutissons donc au fait que leCoran a été révélé pour poser sur le dos des hommes laresponsabilité d’établir la civilisation optimale, et au fait qu’il n’est un livre de prière, d’adoration et dedévotion que dans la mesure où il est la source d’une civilisation et le vivificateur d’une renaissance. Le

    Coran ordonne aux hommes d’obéir à ses enseignements afin que soient réalisés ses buts. La religionn’est donc pas, comme l’imaginent les incultes, réduite à la pratique de la prière, du pèlerinage et dujeûne, mais elle est la soumission absolue à tout ce queDieu a tracé pour les hommes en fait decomportement dans la recherche scientifique, dans les relations sociales et dans les mœurs. N’avons-

    nous pas entendu la parole duProphète Muhammad (Que les bénédictions et la paix de Dieu soient sur lui) :"La foi comporte soixante-dix et quelques branches, dont la plus élevée est le témoignage qu’il n’y a pasde divinité en dehors de Dieu, et la plus basse, le fait d’écarter du chemin tout ce qui peut représenter undanger".

    Il nous faut dès lors aborder la question que se posent certains: "La religion est-elle venue servir lesintérêts de la vie d'ici-bas ou, au contraire, est-ce le monde terrestre qui est au service de la religion"?

    A première vue, on pourrait dire: "C'est la religion qui est venue pour soutenir nos intérêts dans cemonde, car l'Islam est venu pour confier à l'homme la responsabilité de bâtir la civilisation et de peuplernotre planète"; et on pourrait appuyer cette réponse en disant: "La société humaine qui jouirait de lameilleure et de la plus grande civilisation pourrait-elle être autre chose qu'un aspect typique de cemonde, avec toutes les séductions de la vie aisée, du bonheur et du bien-être que cela comporte? " Sil'on admettait que l'Islam, dans tout ce qu'il renferme de principes doctrinaux, de règles de conduite et depratiques cultuelles, n'est venu que pour aider l'homme à atteindre le but voulu, à savoir l'édification de lasociété d'une façon correcte et utile, on serait en droit de dire que c'est la religion qui est au service dumonde. C'est en effet ce qu'on dirait à première vue. Mais ne nous hâtons pas ! Écoutons ce que leCoran lui-même nous dit en réponse à cette question: "Ô vous qui croyez! Cherchez à répondre à Dieu et au

    Messager lorsqu'il vous appelle à ce qui vous donne la vie[…]" (s8,v24) et "Quiconque, mâle ou femelle,

    fait œuvre bonne tandis qu'il est croyant, alors très certainement Nous lui ferons vivre une excellentevie[…]" (s16,v97). Mais leCoran dit aussi: "Et cherche, en ce que Dieu t'a apporté, la demeure

    dernière[…]" (s28,v77) et "Dis: «En vérité, mon Office et mon culte, ma vie et ma mort, appartiennent àDieu Seigneur des mondes »" (s6,v162).

    Les deux premiers versets expriment l'idée que celui qui veut avoir une vie bonne et heureuse, doit obéiraux ordres deDieu et de SonMessager, ce qui nous laisse penser que la religion est au service dumonde. Dans les deux autres versets, leCoran nous ordonne de vivre notre vie, dans ses labeurs et sesdouceurs, pour l'amour deDieu, afin de gagner la satisfaction divine et la Demeure dernière. Nouspouvons donc déduire la réponse à la question de l'ensemble de ces déclarations divines: tout en visantau bon ordre des choses de ce monde, la religion attire l'attention des hommes sur le fait qu'ils ne sont,en vérité, que des esclaves dont le Maître estDieu, Le Puissant, Le Majestueux, et que leur devoir est degagner, par toutes les grâces queDieu leur accorde, la satisfaction duSeigneur.

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    Pour gagner la satisfaction deDieu, la tâche des hommes s'élève par échelons, dont le plus bas est demettre ce monde périssable au service du monde éternel, parfait et plein de félicités, selon les ordresdivins mis en évidence dans leCoran. Le plus élevé des échelons est que votre cœur ne cesse de glorifierDieu dans Sa Majesté et Sa Toute-Puissance, tout en percevant l'humilité de votre servitude àDieu et lapetitesse de votre être, qu'àLui seul vous vous adressiez dans vos efforts et dans vos espérances, qu'àLui vous n'associez rien d'autre, même pas le désir du Paradis ou la crainte de l'Enfer. Le niveau le plusbas de cet échelon supérieur, c'est que vous vous attachiez fermement et constamment à exécuter lesordres deDieu et à vous éloigner de ce qu'Il a interdit, même en l'absence de toute perspective derétribution ou de sanction, même si le Paradis et l'Enfer n'existaient plus.(1) 

    Celui qui s'appuie sur la religion pour prendre pied dans ce monde, recherchant ses douceurs et sesplaisirs, est un homme qui, en vérité, cherche à tromperDieu (àDieu ne plaise qu'Il ne soit trompé!); eneffet, il est semblable à ces nombreux Occidentaux qui ont prêché la religion et se sont donné uneapparence dévote pour s'assurer la réalisation de leurs rêves personnels et de leurs espérancesmondaines, sans jamais se préoccuper de la contradiction de leur religion avec la raison, la logique et lascience.

    De même, on peut dire que celui qui a mis un mur entre la religion et les choses de ce monde pour,comme il dit, servirDieu dans une retraite isolée, et ne participe ni aux devoirs sociaux, ni aux œuvres debienfaisance, ni au peuplement du globe, est un homme qui désobéit, en réalité, aux ordres divins en cequi concerne son rôle de lieutenant deDieu sur terre. Il lui est en effet ordonné de peupler le monde etd'établir dans ses moindres recoins la justice, conformément aux enseignements de sonCréateur.

    Ce qu'il y a de merveilleux dans la relation queDieu établi entre la religion et le monde, c'est que celui quin'est pas sincère dans sa façon de servirDieu de tout son être, ne sera jamais sincère dans sa façon deservir sa nation, ni dans l'accomplissement de ses affaires les plus pressantes, car il ne servira pas maisexploitera; son but sera l'amour-propre, et ses passions seront fonction de son égoïsme. Il mangera sansêtre jamais rassasié; il convoitera sans jamais être content.

    (1) Atteindre un tel degré de foi ne veut pas dire oublier le Paradis promis parDieu, et ne veut pas dire non plus cesserde demander àDieu Sa protection contre l'Enfer avec lequelIl fait peur à Ses serviteurs. En fait, pour le musulman,atteindre un tel degré de vraie adoration consiste à demander àDieu le Paradis, et même à répéter continuellementcette demande, et àLui demander Sa protection contre l'Enfer, et même à répéter continuellement cette demande. La

    différence, c'est que, pour un musulman qui a atteint ce degré, le but de son adoration ne réside pas dans l'attente du

    Paradis et la crainte de l'Enfer. Car plus il se libère de son adoration des récompenses, plus il se dirige vers l'adorationdu seulÊtre de Dieu, carLui seul mérite l'adoration. Voilà réellement un degré plus élevé et plus noble en ce quiconcerne la compréhension del'Unicité de Dieu, Son adoration et la foi enLui.

    Si les individus d'une nation, ou la majorité d'entre eux, se mettent à ressembler à ce type d'homme, lerésultat sera indubitablement une totale éclipse de la confiance mutuelle, accompagnée d'unepropagation généralisée des soupçons de l'un vis-à-vis de l'autre, et des conflits entre des passionsopposées. Avec l'adversité et la haine qui les habiteront, les gens s'entre-déchireront, s'égorgeront l'unl'autre, et la nation disparaîtra.

    Voilà le cœur de notre sujet; nous le traiterons dans les prochains chapitres. EtDieu n'a tracé auxhommes le chemin correct de la civilisation que pour leur épargner de se précipiter dans ce gouffre qui a

    englouti de nombreux peuples et broyé en son sein bien des cités et des civilisations: transformées enruines, c'est comme si elles n'avaient jamais vécu.

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    Je m'étonne toujours de ceux qui ne voient pas cette vérité, et mettent la religion au service de la vie d'ici-bas, proclamant qu'elle est conçue pour servir le monde et non l'inverse, et ne savent même pas ce queles enfants n'ignorent pas, à savoir que si la religion devenait un serviteur fidèle des désirs et despassions de ce monde, elle deviendrait une partie inséparable de ce monde. Les prétextes et les ruses quiont cours sur la terre, quels que soient les noms qu'on leur donne et les apparences qu'ils revêtent,soutiendront les désirs et passions… Alors, à ce moment, où seront la réalité propre et l'autonomie de lareligion?

    Il reste une ambiguïté à lever à ce propos; elle porte sur la question de savoir comment les musulmansvont pouvoir prendre intérêt à peupler la terre et à y établir une civilisation aboutissant à la prospérité etau bonheur, s'ils considèrent la vie de ce bas monde comme une ombre fugace, et si leur préoccupationmajeure est tournée vers les choses de la religion et la vie de l'Au-delà. Les chapitres suivantsrépondront à ces interrogations et donneront les explications nécessaires, siDieu m'accorde Son aide,car enLui est la meilleure des espérances.

    COMMENT LE CORAN ÉCLAIRE L'HOMMESUR LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFSDE LA CIVILISATION ET LUI INDIQUELE MOYEN DE COOPÉRER AVEC EUX 

    Ce troisième et dernier préliminaire renferme un résumé du chemin coranique, traçant les meilleuresvoies pour édifier une civilisation humaine exemplaire.

    Le chemin de la civilisation humaine tel qu'on le trouve dans leCoran consiste à éclairer l'homme, d'unemanière très précise, à propos de son être, de sa vie, et de l'univers dans lequel il vit. Nous avons déjà

    appris que ce sont là les piliers de base de toute civilisation, dans les différentes époques de la longuehistoire humaine: l'effort individuel ou collectif en a toujours dépendu, quels qu'aient pu être leurscroyances, leurs acquis de culture, de science et d'expérience.

    En réfléchissant un peu, on comprend que la seule façon d'évaluer une démarche de la civilisationhumaine et son utilité potentielle, dépend de l'identification correcte de ces trois éléments, et de laconnaissance de leurs caractéristiques véritables: cette connaissance peut éclairer l'homme sur cequ'est un corps civilisateur correct, formé de ces trois éléments.

    La constitution d'une civilisation est, en effet, une copie, à plus grande échelle, d'une opération desynthèse d'un produit chimique. Étant donné que la réussite de cette synthèse dépend pour beaucoup de

    la connaissance des matériaux de base et de leurs caractéristiques, il va de soi que la réussite d'unecivilisation dépendra, elle aussi, de la bonne connaissance des éléments de base, connaissance exempte

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    d'erreurs et d'illusions.

    Elles sont nombreuses dans l'histoire de l'homme, les civilisations qui ont abouti au désordre au lieu dela bienfaisance, parce que leurs constructeurs avaient mal identifié la réalité de l'homme, de l'univers etde la vie… Basée sur une erreur, leur action avait abouti au même résultat que celle d'un chimiste quis'est trompé sur la nature de certains produits: il a obtenu un poison au lieu d'un remède ! Il est évidentque le mal n'est pas dû à la nature même des constituants, mais à l'ignorance de leur nature spécifique,et à un mode de préparation non adéquat.

    Tout homme qui ne connaît pas son identité propre, et ignore les caractéristiques de son être, risque dese réfugier sur un trône illusoire fait de tyrannie et d'injustice: à peine entre-t-il en contact avec d'autreshommes ou avec tout ce qui l'entoure, qu'il se modifie, à l'exemple du "markh" et du "a'far", deux

    arbustes bien connus du Hijaz(une région d'Arabie Saoudite), dont le frottement des branches entre ellesengendre du feu et parfois même, s'il y a du vent, des incendies.

    Mais aussi, celui qui connaît son être et ses caractéristiques propres, sans connaître la nature deschoses qui l'entoure, se met tantôt à diviniser leur apparence, tantôt à les considérer comme un défi auxhommes. Un tel individu est incapable de saisir les rênes qui pendent au cou de la plupart de ceséléments de l'univers: ces rênes, seule la main de l'homme sage peut les saisir convenablement, pour lesmettre au service de l'homme et de ses intérêts. Un homme incapable aura dès lors envers cescomposants (qu'il appelle "nature") l'attitude d'un homme humilié et effrayé, ou bien celle d'un opposanttoujours en lutte avec eux.

    On peut dire de même de l'homme qui connaît son être et l'univers environnant, mais ignore tout dusecret de la vie dont il dispose, son issue et sa destination. L'indécision dans laquelle il se trouve vasusciter un sentiment d'étrangeté vis-à-vis de lui-même: il risquera sa vie, tout en croyant la rendreheureuse, alors qu'une de ces aventures pourra le mener à la mort ou au suicide…

    N'avons nous pas ainsi défini une nation à laquelle il serait accordé de franchir une étape sacrée decontemplation et de réflexion, ou elle connaîtrait l'identité de l'homme (son origine et sa destinée), lessecrets de l'univers (ses lois, ses signes et ses caractéristiques), et enfin la signification de la vie del'homme (sa source et son devenir)? C'est cette nation là qui serait à même de comprendre le sens de laconvergence fructueuse de ces trois éléments; comme il serait dès lors facile à une telle nation decomposer un ensemble harmonieux, assurant à l'homme ainsi qu'à la communauté humaine le maximumde Bien et de bonheur !

    Mais qui peut donc informer l'homme sur ces trois éléments, et l'éclairer sur la façon adéquate de lesasservir et d'en profiter, conformément à la réalité, sans erreur ni illusion?

    On peut facilement connaître la réponse, en se penchant sur une question similaire: de quelle manièrepourrait-on s'informer d'un appareil nouvellement sorti d'usine? Qui nous indiquerait le mode d'emploi etd'entretien correct de cet appareil? C'est sans aucun doute le directeur de l'usine productrice, ou lamaison qui l'a conçu et produit en exclusivité! Il est donc nécessaire et logique que l'appareil nous soitlivré, accompagné d'une notice contenant la description simplifiée des éléments constitutifs de l'appareil,la méthode d'assemblage, ainsi que le mode d'emploi et d'entretien.

    Eh bien ! Trouvez-vous une différence entre cette façon de faire déjà en usage, et la question de laconstitution d'une civilisation à partir des trois éléments de base? Celui qui peut nous informer à propos

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    de l'homme, de l'univers et de la vie, c'est sans aucun doute Celui qui les a crées et les a dotés desaptitudes et fonctions qu'ils ont à remplir; c'estLe Créateur Sage " […]qui a donné à chaque chose sa

    forme puis Il l'a dirigée" (s20,v50) " […]Lui qui a créé chaque chose et a assigné à toutes leur destination"(s25,2).

    La Sagesse divine a voulu que l'homme détienne la responsabilité de peupler la terre et qu'il asservissebeaucoup de ses composants, et qu'il asservisse même la vie dont il dispose, en vue d'accomplir cettemission. La question est de savoir comment se comportera cet homme; et comment il connaîtra lesspécification des trois éléments dont il lui est indispensable de se servir, lui-même étant un de ces troiséléments…

    Dieu n'a pas laissé l'homme à son ignorance et à son trouble, à ses fantasmes et à ses illusions, maisIl lui a envoyé, avec ces éléments asservis, un Livre détaillé et clair lui expliquant, un par un, les troiséléments, et lui indiquant leur mode d'emploi ainsi que la meilleure façon d'en tirer profit. Après cela, quereste-t-il?

    Il reste que l'homme (qui est la force motrice et le chef de ces éléments) revienne à ce Livre pour, tout

    d'abord, s'assurer par des preuves scientifiques de ce que ce Livre a bien été révélé parLe Créateur SageLui-même , puis ensuite pour s'appliquer à l'étudier consciencieusement, pour enfin y distinguer la réalitéde l'homme et de sa fonction dans la vie, les dangers de cette responsabilité qu'il porte, et y saisir larelation entre lui même et le monde qui l'entoure de toutes parts. Ainsi comprendra-t-il la valeur de ladurée de vie dont il jouit, son début et sa destination.

    Sachant dès lors tout cela, l'homme doit se mettre sérieusement au travail, pour exécuter la missionsublime par laquelleDieu l'a honoré en la lui confiant, à l'exclusion des autres créatures; il doit collaboreravec ses frères (les autres êtres humains), et suivre strictement le chemin tracé pour lui dans le Livredivin.Il ne fait pas de doute qu'en agissant ainsi, en suivant les recommandations qu'il a en mains, et en ayantla foi dans les jalons de départ, plantés parDieu, l'homme recevra deDieu un bonheur sans limite, unbonheur que les malheurs ne pourront ébranler. Ainsi se réalisera la parole deDieu: " A ceux d'entre vousqui auront cru et fait le bien, Dieu promet formellement de donner la suprématie sur terre, comme Il l'adonné à d'autres les ayant précédé. Il établira fermement, à leur intention, le culte qu'Il a choisi pour êtrele leur. Il changera leur crainte en sécurité. Ils M'adorent sans rien M'associer ! Ceux qui après cela

    renieront leur foi, seront en vérité des pervers! " (s24,v55).

    N'est il pas temps pour nous, maintenant, d'aborder l'étude du chemin qui mène vers la civilisationhumaine, tel que nous le trace leCoran, puisque nous croyons déjà, bien sûr, qu'il est descendu de lapart duSeigneur des mondes,Créateur des cieux et de la terre, ce Livre qui parle à l'élite choisie de Sacréation, pour en bien définir l'identité de l'homme, de l'univers et de la vie, dans leurs caractéristiques ettraits propres, puis pour proposer la manière optimale de composer un véritable corps civilisateur…

    Il est certain que la réponse du lecteur objectif et réfléchi sera: "Oui! Il est temps!"

    Je pense que maintenant, nos pensées et nos cœurs sont prêts à s'orienter vers ce que leCoran nous dità ce propos. Car leCoran n'a été révélé à l'homme que pour lui fournir cette connaissance, et le dirigerdans la bonne voie, pour qu'il profite des différentes ressources et composants de l'univers. Par lepeuplement de la terre, l'homme peut volontiers démontrer sa servitude àDieu, lui qui était déjà Sonserviteur avant même que d'être né…

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    QU'EST-CE QUE L'HOMME,D'APRÈS LE CORAN? 

    Nous avons déjà dit, dans les préliminaires de ce livre, que l'homme est l'élément prépondérant des troiséléments, de la convergence et de l'interaction desquels surgit la civilisation humaine; car c'est bienl'homme qui forme l'élément actif et dynamique, tandis que les deux autres sont des éléments passifs etactionnés; de plus, l'homme est l'axe du peuplement de la terre, et son but. A part lui, les choses ne sontque des ressources éparpillées ça et là, pour qu'il les remarque et les utilise afin d'atteindre ses buts etremplir ses obligations. C'est la raison pour laquelle leCoran s'intéresse à l'homme plus qu'à tout autrechose: avant tout, il lui enseigne l'identité de son être. La primauté accordée à ce point est évidente, quece soit dans la chronologie de la révélation ou dans la séquence écrite des versets.

    Ne voyons-nous pas comment le premier verset coranique révélé interpelle directement l'homme, luifaisant faire connaissance avec lui-même et lui expliquant son origine et sa fin: "Lis, par le nom de ton

    Seigneur qui a créé, qui a créé l'homme d'un caillot de sang" (s96,v1et2). D'un autre côté, en examinantles tout premiers versets du Livre, nous voyons comment ils commencent, eux aussi, par discourir surl'homme, en le classifiant comme croyant, mécréant ou hypocrite (s2,v1 à 20): s'adressant à cesdifférentes catégories d'hommes, ces versets les définissent; ils racontent ensuite l'histoire de leur

    germination sur la terre, et la façon dontDieu a créé leur pèreAdam (Prière et salut de Dieu sur lui), ainsique la position noble qu'Il lui a donné par rapport à toutes les autres créatures, lui accordant même lapréséance sur les anges (s2,v28 à 34).

    C'est ainsi que leCoran commence (selon la priorité de la séquence écrite, et selon la chronologie de larévélation) par informer l'homme et l'éclaircir sur son être, son origine et ses qualités, ainsi que sur son

    importance dans l'univers ou il vit… Ceci parce qu'il est le plus important des éléments de la civilisation,et l'axe autour duquel se meuvent tous les composants de l'univers qui l'entoure; ceci parce que c'est luiqui doit se charger de les asservir et de les orienter vers un but sublime.

    Qui est donc l'homme dans leCoran ? Quels en sont les traits et les caractéristiques? Quelles sont sesresponsabilités dans la vie de ce bas monde?

    En réfléchissant, on trouve que leCoran éclaire l'homme sur sa propre réalité, sur ses différentescaractéristiques et sur sa responsabilité dans ce monde, par l'affirmation de ces vérités inhérentes à sonêtre et à sa constitution humaine, deux vérités apparemment opposées.

    1) L'homme est une créature modeste, la poussière (la terre) est son origine première, et sa descendancedérive d'une eau vile… S'il peut vivre longtemps, il déclinera, au point d'oublier tout ce qu'il savait danssa jeunesse. Cependant, l'homme est souvent fier et orgueilleux, malgré son humble condition; il se

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    dispute et s'oppose, il discute et s'entête.

    Voici quelques versets coraniques qui font voir à l'homme les aspects de cette vérité qui le concerne:

    " […]Que l'homme regarde donc de quoi il a été créé. Il a été créé d'une giclée d'eau sortie d'entre leslombes et les côtes[…]" (s86,v5 à 7).

    " À mort l'homme! Quel ingrat! De quoi Dieu l'a-t-il créé? D'une goutte de sperme Il le crée, puis il ledétermine; puis le sentier Il lui rend facile[… ]" (s80,v17 à 20). "Oui, c'est Nous qui créons l'homme d'une goutte d'un mélange de sperme, pour l'éprouver, nous l'avons donc fait entendre et voir" (s76,v2).

    "Ô les gens ! Si vous êtes en doute au sujet de la résurrection, eh bien, c'est nous qui vous avons créé de poussière, puis de sperme, puis de caillot, puis de chair, formée aussi bien qu'informe - pour tout vousexpliquer -; et Nous déposons dans les matrices ce que Nous voulons jusqu'à un terme dénommé; puisNous vous faisons sortir bébés, pour qu'ensuite vous atteigniez vos pleines force. Tel d'entre vous estachevé; tel d'entre vous est reconduit jusqu'au plus vil de l'âge de sorte qu'après avoir su, il ne sait plusrien[…] " (s22, v5)

    2)La deuxième vérité, qui forme l'autre partie de l'identité humaine, c'est que l'homme est la créature laplus honorée d'entre les autres créations; c'est bien lui qui a mérité (en la personne de son ancêtreAdam) que les anges se prosternent devant lui, sur ordre deDieu, et c'est lui aussi queDieu a honoré enl'établissant comme lieutenant sur terre, lorsqu'Il a voulu qu'il soit (par la mission qui lui fut confiée)l'illustration de la Parole et de la Justice divines. Outre cela, l'homme est le seul être vivant queDieu aéquipé de la raison, de la réflexion et du pouvoir d'administrer les affaires.

    Voici de nombreux versets qui montrent à l'homme les aspects de cette réalité qui est la sienne.

    "Et très certainement, Nous avons ennobli les fils d'Adam. Et Nous les avons portés sur la terre ferme etsur la mer, Nous leur avons accordé d'excellentes nourritures, Nous leur avons donné la préférence surbeaucoup de ceux que Nous avons créés" (s17,v70).

    "Et lorsque Nous dîmes aux anges: "Prosternez-vous devant Adam", ils se prosternèrent sauf Iblis(Satan)[…]" (s2,v34).

    "Et lorsque ton Seigneur dit aux anges: "Je vais désigner un lieutenant sur la terre[…]" (s2,v30) "Et Ilapprit à Adam les noms, tous; puis Il les présenta aux anges et dit: "Informez-moi des noms de ceux-là, sivous êtes véridiques!" Ils dirent: "Pureté à Toi! Nous n'avons de savoir que ce que tu nous as appris!C'est Toi Le Savant, Le Sage, vraiment!"" (s2,v31 et 32).

    "Il (Dieu) a enseigné à l'homme ce qu'il ne savait pas" (s96,v5).

    "Oui le Dépôt que Nous avons proposé aux cieux et à la terre et aux montagnes, ils ont refusé de le porter, et en ont eu peur, alors que l'homme le porta: celui-ci reste, oui, très prévaricateur, très ignorant"(s33,v72).

    ****

    La question qui se pose maintenant est de savoir comment ces deux aspects de l'être humain se sontharmonisés pour ne former qu'une personne. Et lorsqueDieu attire l'attention de l'homme sur sa doublenature, quel effet cela peut-il avoir sur lui?

    En ce qui concerne l'harmonisation des deux réalités dans la nature de l'homme, il faut la mettre aucrédit, non pas de lui-même, dut-il être célèbre ou bourré de qualités, mais de la profusion généreuse deDieu, déposée en lui et confiée à sa vigilance, pour un temps déterminé. Pour ce qui est de sa propre

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    que les hommes s'étaient égarés par rapport à leur identité, à leur nature et à leur caractère humain: lesforts érigés en divinités, les faibles humiliés devant eux, chacun était en dehors des limites de sa naturehumaine. La coopération abolie entre eux, la haine mutuelle s'acharna et aboutit aux heurts et auxmeurtres. Telle est l'histoire du désordre, histoire ancienne et nouvelle à la foi. Ses motifs sont toujoursles mêmes, quel que soit le degré d'évolution du monde, quelle que soit la cité et la culture. La voiepréventive est celle que trace leCoran: tous ceux qui l'ont comprise et mise en pratique en ont profité.C'est la voie que nous sommes en train d'expliquer dans ce livre.

    ****

    En ce qui concerne l'avertissement continuel duCoran, lorsqu'il montre à l'homme sa double nature,voici ce que j'en pense. Quiconque aura vu son âme et ses sens éduqués à ces deux vérités, profiterad'une évolution complète de tout son être, dans ses sentiments et dans ses pensées, et ne se comporteraque dans la ligne de cette conception qu'il aura assimilée. Cette notion de son identité déterminera sessentiments et ses actions dans tous les cas, dans toutes les circonstances. Cette éducation coranique luisera une protection contre tout extrémisme de droite ou de gauche. Il ne cédera pas au mépris, ne sesoumettra pas corps et âme à d'autres, quelle que soit sa faiblesse, quelles que soient sa pauvreté et sa

    modestie apparentes. Il ne cédera pas non plus à la tentation de la domination, voir de la tyrannie vis-à-vis d'autrui, même s'il en a l'opportunité et les moyens.

    Sur les opprimés, l'éducation coranique aura pour effet de les élever au-dessus de l'atmosphère demépris habituelle; sur les orgueilleux, elle les fera abandonner leur trône de tyrannie; ils convergeronttous vers une voie moyenne, faite de fraternité et de coopération, pour peupler la terre et y bâtir lacivilisation humaine dans toute sa pureté. Cette éducation, sur de tels hommes, sera manifeste: c'est euxqui rendront possible la fondation de la civilisation humaine idéale.

    En considérant le discours duCoran et ce qu'il renferme d'éclaircissements, d'instruction spirituelle etd'enseignements, on constate que tout converge vers l'axe de ce but: il incite l'homme, tout d'abord, àbien comprendre son identité et à faire connaissance avec lui-même, à suivre une démarche ferme etharmonieuse, à ne s'humilier et à ne se soumettre qu'àCelui qui dispose de sa vie et de sa mort, de sonbien et de son mal, à ne pas devenir tyran, lui qui n'est qu'un esclave deDieu. De plus, leCoran indique àl'homme comment se libérer de l'humiliation et du mépris et comment se réveiller de l'ivresse de l'orgueilet de l'injustice. Nous n'allons pas aborder ici le remède, nous contentant de le résumer comme suit: c'estla religion qui, globalement et en détails, est la prescription thérapeutique qui guérit ces deux épidémiesdestructrices du corps de la communauté et de la civilisation humaine.

    Voyons ce que dit leCoran, par exemple concernant les calamités qui s'abattirent sur le peuple duPharaon d'Égypte. C'est un exemple et une leçon qu'Il donne aux nations et communautés qui viennentaprès eux. "Oui, Pharaon fit le hautain sur la terre; il désigna en sections ses habitants, cherchant àaffaiblir l'un des groupes, égorgeant ses garçons et laissant vivre ses filles. C'était donc vraiment un

    fauteur de désordre. Mais nous voulions favoriser ceux qu'on avait affaiblis sur terre, et faire voir de leur part à Pharaon et Hâman et aussi aux armées de ces deux là, cela même qu'ils redoutaient" (s28,v4 à 6).La calamité, ce fût une augmentation de la tyrannie du Pharaon, d'une part, et de l'humiliation de sonpeuple, d'autre part. Pour venir à bout d'une telle calamité, il faut que chaque parti se réveille, prenneconscience de son origine et de sa destination: la tyrannie, ainsi, devient tendresse et modestie;l'humiliation devient grandeur d'âme et élévation… De la rencontre des deux partis naît une coopérationfructueuse pour constituer une société prospère et heureuse.

    C'est ainsi que leCoran nous dessine les perspectives, nous montre les fruits de ce traitement et larapidité des résultats, lorsqu'il nous informe de la transformation subite des magiciens du Pharaon,

    aussitôt qu'ils eurent cru en la prophétie deMoïse (prière et paix sur lui) et qu'ils eurent connu leur naturevéritable. Peu de temps avant, ces mêmes magiciens étaient dans un état de complète humiliation vis-à-vis du Pharaon, au point qu'ils en avaient oublié leur être et leurs devoirs, en face de sa puissance et de

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    son autorité: la preuve en est que, en jetant leurs cordes de magiciens devantMoïse, ils avaient dit: "Parla puissance de Pharaon!… C'est nous qui avons le dessus!"(s26,v44).

    Voilà comment leCoran nous montre le rapide passage entre l'attitude de mépris et celle de la foi quis'est éveillée en eux, cette foi que leCoran offre à tout homme d'esprit et de clairvoyance. "Voilà donc lesmagiciens jetés, prosternés, disant: "nous croyons au Seigneur d'Aaron et de Moïse". Pharaon dit: "Allez-vous croire en lui avant que je vous le permette? Certes Moïse est votre chef qui vous a enseigné lamagie. Eh bien ! Vous allez savoir ! Je vous ferai couper la main et la jambe opposée, puis je vous feraitous crucifier aux troncs des palmiers, alors vous saurez très certainement qui de nous est le plus fort enfait de châtiment, plus durable aussi!" Ils dirent: "Nous ne te préférerons jamais à ce qui nous est parvenu de preuves décisives, ni à Celui qui nous à créé. Décrète donc ce que tu as à décréter. Tesdécrets ne touchent que cette présente vie! Oui, nous croyons en notre Seigneur, afin qu'Il nous pardonne nos fautes, ainsi que la part de magie à laquelle tu nous as contraints. Et Dieu est Meilleur, etPerdurable!" " (s20, v70 à 73).

    Ainsi ces magiciens se sont-ils convertis, en une heure, passant de l'humiliation extrême, qui les avaitcontraints à oublier leur existence propre devant le pouvoir du Pharaon et sa puissance illusoire, au plus

    haut degré de l'élévation sur son orgueil, jusqu'à arriver à une libération absolue par rapport à satyrannie: les menaces foudroyantes et la colère mugissante de Pharaon avaient perdu tout effet sur eux!Leur âme découvrit la liberté à partir du moment où elle connut sa nature propre, et sut qu'elle n'étaitl'esclave que deDieu Le Puissant, Le Majestueux. Regardez comment les magiciens dirent au Pharaon,sans avoir peur, sans craindre qu'il mette ses menaces à exécution: "Décrète donc ce que tu as àdécréter! Tes décrets ne touchent que la présente vie!" … Eux qui avaient dit, peu auparavant, dansl'humilité: "Par la puissance de Pharaon!… C'est nous qui avons le dessus!"

    Chaque fois que leCoran nous transmet l'histoire d'une nation qui a vécu autrefois et a maintenantdisparu, il nous rappelle les causes de sa chute: les individus se sont égarés, furent impuissants àdécouvrir leur réalité propre; comme résultat, ils se divisèrent progressivement en deux factions: uneminorité orgueilleuse et répressive, et une majorité humiliée et opprimée; de là surgirent les causes dudéchirement et de la destruction de cette nation, puis l'issue fatale… Jugement juste et récompenseconforme! Personne n'y échappe, à part ceux qui ont eu un éveil intérieur et ont fait attention à leurpropre identité, aboutissant ainsi à vivre sur la bonne voie.

    Au sujet du peuple deSalih (prière et paix sur lui), le Discours divin montre comment leur histoire tourneautour d'un axe formé d'orgueil, d'une part, et de faiblesse, d'autre part: "La cohorte des grands de son peuple, qui s'enflaient d'orgueil, dit aux opprimés, à ceux d'entre eux qui avaient cru: "Savez-vous si Salihest envoyé de la part de son Seigneur?" Ceux-ci de dire: "Oui, nous sommes croyants en son messaged'Envoyé" Ceux qui s'enflaient d'orgueil, dirent: "Nous nions, vraiment, ce à quoi vous avez cru!"" (s7,v75

    et 76). Au sujet du peuple deChu’aïb(prière et paix sur lui): "La cohorte des grands de son peuple, quis'enflaient d'orgueil, dit: "Nous t'expulserons très certainement de notre cité, Chu’aïb, toi et ceux qui ont

    cru avec toi, ou alors il vous faudra revenir à notre religion!" Il dit: "Quoi! Malgré notre aversion!""(s7,v88). Au sujet de la ruine du Pharaon et de son peuple: " Ainsi chercha-t-il (Pharaon) à étourdir son peuple, et ainsi lui obéirent-ils. C'étaient vraiment des gens pervers. Puis lorsqu'ils Nous eurent irrité,

    Nous Nous vengeâmes d'eux et les noyâmes tous" (s43,v54 et 55).

    LeCoran nous informe encore, à travers la confession de ces hommes perdus, revenus à la vie au jour duJugement Dernier -car ce jour viendra, c'est une certitude. Leur confession exprime la cause de leurmisère, due uniquement à l'ivresse des orgueilleux d'entre eux, pleins de tyrannie et de violence, puis à lasoumission des opprimés aux ordres de ceux-ci.

    Le dialogue suivant est une Parole divine: " […]Et si tu voyais, quand les prévaricateurs seront devant leurSeigneur, arrêtés, se renvoyant la parole les uns aux autres! Ceux que l'on rendait faibles diront à ceuxqui se gonflaient: "Si vous n'aviez pas été là, nous aurions certes été croyants". Ceux qui se gonflaient

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    diront à ceux que l'on rendait faibles: "Est-ce que nous vous empêchions d'accepter la guidance aprèsqu'elle vous fut parvenue? Non, mais vous-mêmes étiez criminels!" et ceux que l'on rendait faibles dirontà ceux qui se gonflaient: "C'est le stratagème, plutôt, de la nuit et du jour, quand vous nous commandiezde mécroire en Dieu et de Lui désigner des rivaux!" Et ils cacheront leur regret, quand ils verront lechâtiment et que nous assignerons des carcans au cou de ceux qui mécroyaient. Quoi! Les paie-t-ond'autre chose que de ce qu'ils œuvraient?" (s34,v31 à 33).

    ****

    De tout ceci, on comprend que le point de départ, scientifique et juste, pour accomplir une tâchequelconque, c'est de commencer par la connaissance de soi et de ses propres caractéristiques et del'étudier à fond, et dans les détails. L'homme n'est qu'un instrument comme un autre, lorsqu'il estquestion d'un travail à accomplir. Or, quiconque veut se servir d'un appareil doit d'abord l'identifier, endistinguer ses propriétés et connaître son mode d'emploi. L'homme ne fait pas exception à cette règle: ilest un instrument confié à lui-même, et se sert de sa personne pour accomplir de grandes missions. Ilnous est donc permis de dire que celui qui ne débute pas par cette connaissance de soi ne pourra arriverà aucune harmonisation entre son caractère et ses aptitudes, d'une part, et la nature du travail, d'autre

    part. Il n'aura pas la possibilité d'accomplir et de réussir une œuvre: en effet, au plus le domaine dutravail s'élargit et prend de l'importance, au plus la condition de se connaître soi-même est impérative.Que dire alors d'une tâche qui vise à édifier la communauté islamique optimale! Car c'est bien ce que l'onentend par "La civilisation humaine exemplaire"… De toute façon, ce ne peut être le travail d'un seulhomme, ou d'une minorité, mais bien le fruit des efforts coordonnés de toute une nation.

    Mais cette connaissance vers laquelle leCoran mène l'homme, dans ses premiers pas vers unecivilisation humaine, n'est atteinte qu'en suivant une voie unique: il s'agit d'avoir la foi en l'existence deDieu, puis la certitude qu'IlestUnique et Caractérisé par toutes les qualités de perfection; ensuite, enfonction de cette certitude, on peut imaginer la relation entre l'homme et sonSeigneur comme étant larelation entre un être créé et sonCréateur, c'est à dire la soumission obligée et absolue d'un esclaveenvers son maître. Par cette certitude et ses conséquences, l'homme est prêt à s'éveiller et à connaîtreson être, les limites de ses possibilités, ses aptitudes innées et ses capacités acquises. Il sera sur labonne voie: libre de toute négligence et de toute exagération.

    Quant à celui qui ne croit pas enDieu, il n'est pas prêt à avouer sa servitude, ni son appartenance à quique ce soit: c'est déjà le premier faux pas qui fait égarer l'homme par rapport à lui-même, qui prive saconscience et son intellect d'une juste connaissance de soi. Il s'enfle éperdument de lui-même et de sesqualités (dontDieu l'avait doté pour qu'il puisse accomplir sa mission), il s'aliène par rapport à lui-même,par rapport à la vraie connaissance de sa nature. Perturbé, égaré, il va se hisser sur un trône de tyran, ouil va se laisser tomber aux fins fonds de l'humiliation et du mépris, selon les circonstances et selon sesmoyens. Voilà donc l'évolution d'une communauté qui n'admet pas l'existence deDieu: les individuss'égarent et se divisent en deux groupes: une minorité oppressive et tyrannique surplombant la

    communauté et s'érigeant en divinité en dehors deDieu (que Son Nom soit loué), et une majorité affaiblieet méprisée, soumise bon gré, mal gré, à un pouvoir et à des décisions perverses et injustes.

    L'homme a donc besoin de croire enDieu l'Unique, le Créateur de l'univers,Lui qui régit son ordre etintervient, de toute éternité, dans toutes ses affaires. Cela revient à dire queDieu n'a imposé à Sesesclaves, les hommes, de connaître Son existence, que pour les guider, par cette certitude, vers lechemin le plus aisé de la connaissance d'eux-mêmes et de la compréhension de leur identité dans cevaste univers, chemin de l'entraide, de la fraternité, de la bonne entente, pour une exploitation maximalede leurs efforts et capacités.

    Si les hommes ne se dirigent pas vers ce chemin, il adviendra ce qu'il est advenu dans le passé: certainsd'entre eux prendront les autres pour divinités en dehors deDieu; le désordre se répandra sur la terre;l'homme deviendra un élément de malheur pour lui-même et pour autrui. Cette réalité est clairementénoncée dans ce verset: "Dis: "Ô gens du Livre! Venez-en à un langage qui soit commun entre nous et

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    vous: que nous n'adorions que Dieu, sans rien Lui associer, et que parmi nous, personne ne prenned'autres pour seigneurs en dehors de Dieu". Puis, s'ils tournent le dos, et bien dites: "Soyez témoins que,oui, c'est nous qui sommes les soumis!"" (s3,v64). Ce verset déclare fermement que les hommes sont

    mis devant deux possibilités de choix, et qu'il n'y en a pas de troisième: soit la certitude queDieu existe,Seul et sans associé, avec en conséquence la soumission àLui Seul (et les hommes vivront donc, danscette certitude, en frères égaux et en bonne entente), soit la négation deDieu et de Sa divinité (et, les unsprenant les autres pour maîtres en dehors deDieu, le désordre et la haine suivront).

    Vous pourriez avoir l'impression que ce tableau ne correspond qu'aux communautés anciennes, là ou ilétait coutume de voir de fausses divinités, qui réclamaient pour elles-mêmes une dévotion absolue(comme les Pharaons et autres Crésus); vous pourriez penser que les communautés postérieures, etsurtout les plus récentes d'entre elles, sont exemptes de gens qui osent se diviniser. En fait, laconséquence obligée de la mécréance, selon les règles édictées dans leCoran, et qui prouvent saconnaissance profonde de l'âme humaine, c'est le fait de s'imposer aux autres comme objet d'adoration,et une certaine manière de faire valoir ses exigences. Cette attitude recouvre une réalité très large, qui estloin d'être circonscrite par des mots tels que divinisation ou esclavage au sens auquel on les entend

    couramment: il est en effet facile, pour qui veut se diviniser, de le faire à travers des slogans tels queliberté, égalité, justice, démocratie…

    Tout le monde est bien d'accord aujourd'hui sur le fait que se proclamer dieu est une méthode primitive,périmée pour s'emparer de l'autorité; le moyen le plus moderne, c'est se hisser au sommet d'une échellefaite de slogans trompeurs qui dissimulent les visées réelles. Eh bien! Jetons un coup d'œil aux quatrecoins de ce monde, fier de son athéisme et de son attitude purement matérialiste; par delà les slogans, nevoyons-nous pas les mêmes aspects de divinisation que chez les anciens Pharaons? Ce que noustrouvons à l'heure actuelle est même plus grave et plus dangereux, noyé dans des conventions et despropagandes nouvelles: il suffit de constater la manière dont on piétine ce qui est humain dans l'homme,pour plaire à de nouveaux dieux, et comment on les protège de toute mise en question, de toute critique!Chercher une différence entre les anciennes divinités couronnées qui ont péri et les nouvelles divinitésnon couronnées qui leur ont succédé, ne changera rien à la situation et ne soulagera pas le malheur desgens. Si cette vérité vous paraît difficile à voir en Occident (Europe et Amérique), pays de ce que l'onnomme liberté, démocratie et droits de l'homme, regardez donc devant quels dieux ils cèdent: ceux de lamatière et du plaisir!

    Si les musulmans d’aujourd’hui se soumettaient, avec foi et application, auSeigneur de l’univers(loué soit

    Son Nom), d’une soumission égale au dixième seulement de celle que manifestent tous les paysoccidentaux à l’égard de leur faux dieux, leur situation serait meilleure, et ils obtiendraient grâce etprotection divine. En observant bien, nous pouvons maintenant distinguer l’étendue de la tyrannie de cesdémocrates «humanistes», qui se disent gardiens de la liberté et du droit… et obéissent à la matière etrien qu’à la matière!

    Et le colonialisme, sous toutes ses formes et ses couleurs, par tout ce qu’il sous-entend de menaces deguerres destructrices, dans les troubles et guérillas qu’il suscite partout, est-il autre chose que dessacrifices faits pour complaire à la fausse divinité de ce dieu de la matière? N’admettez-vous pas cettevérité, à la vue des églises hautaines dressées dans ces pays, où à l’écoute des discours de ces hommeslorsqu’ils parlent de la liberté, de l’humanisme, de la religion ou de la foi? Les apparences, et les motseux-mêmes, sont livrés, eux aussi, en sacrifice aux dieux qu’ils vénèrent en dehors deDieu : leurs dieuxde matière et des plaisirs…

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    Résumons tout ceci en disant que leCoran éduque l’homme en lui donnant deux nourritures : l’uned’elles fait croître en lui la perception de son origine méprisable et de sa soumission constante àDieu, LePuissant, Le Majestueux; l’autre fait croître en lui la sensation de sa puissance, de sa dignité et de sonimportance dans l’univers où il à été créé. Or l’homme ne peut concevoir cette dualité (ou même un seulde ses aspects) que s’il est convaincu de l’existence deDieu, L’Unique, Le Seigneur qui n’a pas d’associédans tout l’univers.

    L’homme de la civilisation humaine est, dans leCoran, celui qui a acquis cette double éducation; il estl’homme que leCoran forme à peupler la terre et à constituer la communauté humaine la plus raffinée; ilest l’homme qui ne s’abaisse pas, qui ne s’humilie pas. De même, il ne s’enfle pas d’orgueil et netyrannise pas; il est l’homme qui connaît bien la place que lui a accordé la finalité divine; il n’ignore pasnon plus la permission majeure qui lui fut confiée : produire tout l’effort possible, en vue de servirl’humanité absolue, et la faire fondre dans un creuset de bonne entente, d’affection mutuelle et defraternité.

    Nous avons constaté, il est vrai, que cette prise de conscience ne se produit dans l’homme que souscertaines conditions qui, en définitive, reviennent à une seule : il faut que l’homme connaisse avecprécision son identité et sa réalité. Il prêtera dès lors attention à la vie qu’il mène, car elle est son premierinstrument dans toute tâche, dans tout travail… Quelle est la réalité de cette vie, sa source et sa finalité?Quand faut-il que l’homme la préserve, s’y attache et l’épargne, et quand faut-il au contraire qu’il lasacrifie, qu’il abandonne toute précaution de sauvegarde? Voilà posé le problème du deuxième pilier de

    base de la civilisation humaine.

    A peine leCoran a-t-il enseigné à l’homme la réalité de son être, qu’il passa à lui faire connaître la viedont il jouit. Le chapitre suivant sera consacré, par la volonté deDieu, à ce sujet.

    QU'EST-CE QUE LA VIE HUMAINED'APRÈS LE CORAN? 

    D'habitude, quand on parle de la vie de l'homme, on parle de sa durée de vie, de la longueur de sa vie

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    avant qu'il atteigne l'âge ou il est mort.

    Il est évident que ce que l'homme a de plus cher, c'est sa vie: il en est plus avare que de toute autrechose. Tout son labeur, qu'il s'agisse de gagner son pain, de se construire une maison, de se vêtir ou demanger, ne vaut que dans la mesure ou il lui garantit cette vie et la préserve.

    C'est ce qu'exprime bien la Démonstration divine, qui parle du travail inlassable de l'homme en vue des'accrocher à la vie et de la sauvegarder, dans cette expression concise et compréhensible à la fois:"L'ivresse de la mort fait venir la vérité: voilà ce dont tu t'écartais!" (s50,v19).

    C'est bien une poignante sagesse de la part deDieu, que l'homme soit caractérisé, de manière innée, parl'amour de sa vie propre: elle est en effet le capital le plus sacré qu'il possède, car elle est le moyentemporel nécessaire pour remplir les conditions du peuplement de la terre et de l'exploitation de sesdifférentes ressources, afin de constituer une bonne communauté humaine.

    Étant donné l'importance de cette vie, la Sagesse divine a implanté dans l'homme, dès sa premièreorigine, l'amour de la survie et l'attachement à la vie. Pour prouver cette importance de la vie, prenons

    l'exemple de l'œil: l'œil et la vue ont une fonction primordiale; or l'œil est, par nature, faible et facilementaltéré; leSeigneur a donc créé, au fond de l'instinct humain, davantage de moyens de protectionauxquels l'homme obéit indépendamment de sa volonté pour protéger cet œil: ce sont, par exemple, lesmouvements réflexes qui le préservent des agressions extérieures.

    La vie étant un capital essentiel pour l'homme, il est donc indispensable que celui-ci s'en serve avec unegrande sagesse, en ce qui concerne ses devoirs et les affaires dont il s'occupe, et qu'il en fasse uninstrument pour accomplir la mission qui lui a été confiée. Lorsque l'homme asservit sa vie à la missiondont il est chargé, il lui arrive de devoir mettre en jeu son capital, de risquer sa vie; par contre, dans biendes cas, il lui arrive de sentir le besoin de s'y attacher davantage et de l'épargner, pour les exigences dela grande mission dont il est chargé.

    Il faut pouvoir concevoir ces deux éventualités, pour avoir la certitude que cette vie est bien un capitalentre les mains de l'homme. Sinon, cette conception perdrait toute signification et la vie ne serait plusqu'un bien demandé pour lui-même, sans autre but attendu, ce qui, comme nous le verrons, n'estadmissible ni pour la raison, ni dans l'optique du chemin que nous trace leCoran.

    La question est de savoir à quel moment l'homme doit risquer sa vie et à quel moment, au contraire, ildoit la préserver à tout prix. Une autre question est de savoir quel est le rapport entre ce dilemme d'unepart, et les vœux et visées de l'homme, d'autre part. Pour cela, il faut connaître les points d'accord ou dedésaccord entre la vraie valeur de la vie, d'une part, et les buts et intérêts divers auxquels elle estsubordonnée, d'autre part.

    Si la science nous démontre quelles sont les lois régissant cet accord, il nous sera alors facile dedistinguer quand nous devons risquer et sacrifier notre vie, ou quand, au contraire, nous devonsl'épargner, la préserver.

    Mais la connaissance des différents critères de compatibilité entre la vie et ses buts dépend, elle, d'uneconnaissance approfondie de la réalité de notre séjour sur terre, ou de la vie dont nous disposons, ycompris son origine, sa destinée, et ce qui doit lui succéder. Celui qui n'a pas l'occasion d'acquérir cetteconnaissance (et de l'évaluer scientifiquement), ne connaîtra jamais sa vraie valeur. Il ne saura pascomment se comporter lorsque certaines nécessités humaines se trouveront en contradiction avec lesconditions nécessaires pour préserver sa vie. Dans l'embarras, il ne pourra juger: Faut-il risquer sa viepour un but humanitaire et noble? Faut-il sacrifier ce but pour sauver sa propre vie?

    On comprend pourquoi le chemin tracé dans leCoran en vue de la civilisation exemplaire nécessite,après que nous nous connaissions nous-mêmes, que nous connaissions aussi notre vie, c'est à dire le

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    début et la fin de notre séjour sur terre, les événements qui nous attendent dès que cette vie sera finie,ainsi que la relation entre la durée de vie qui sera accordée à chacun de nous et ces événements à venir.

    On constate, dans leCoran, une corrélation entre les nombreux versets qui éclairent l'homme sur lui-même, sur ses aptitudes ainsi que sur ses fonctions et responsabilités, et les nombreux autres versetsqui l'éclairent sur la durée de sa vie sur terre, et sur la valeur de celle-ci par rapport aux événements quivont suivre la mort. La durée de vie de l'homme est en effet, après sa propre personne, le premierinstrument qu'il peut utiliser pour l'accomplissement de ses tâches. A moins de se servir de cetinstrument à l'aveuglette, laissant les résultats à la merci du hasard, il est primordial d'en appréhender lanature, l'importance, et la relation avec le travail à accomplir.

    Pour définir et analyser la vie humaine, nous allons voir que leCoran adopte la même méthode quelorsqu'il définit et analyse la nature de l'homme.

    En ce qui concerne l’homme, leCoran attire l’attention de celui-ci sur la dualité de son être, et lui expliqueque la véritable intégrité de sa substance et de son être est fonction de la rencontre et de la combinaisonde ces deux aspects. En ce qui concerne la vie humaine, leCoran attire, ici aussi, l’attention de l’homme

    sur deux aspects contradictoires, et démontre à l’homme que l’intégrité de l’essence de la vie est fonctionde l’intégration de ces deux aspects de la vie, dans l’optique de l’homme.

    Les versets suivants définissent le premier aspect de la réalité de la vie : "Sachez qu’il n’y a rien d’autre :la vie présente est jeu, et amusement, et décor, et lutte de jactance entre vous, et surenchère de biens etd’enfants. C’est comme la pluie : la végétation qui vient plait aux cultivateurs, puis elle fane –tu la voisdonc jaunie – puis elle devient sèche et cassante. Dans l’au-delà, cependant, est un dur châtiment, etaussi un pardon de Dieu, et un agrément. Et la vie présente n’est qu’une jouissance trompeuse "(s57,v20); "Et propose leur la parabole de la vie de ce bas-monde : elle est semblable à une eau que nousavons fait descendre du ciel ; puis la végétation de la terre s’y est mélangée ; puis celle-ci devient unherbage desséché que le vent disperse. Certes, Dieu est Puissant sur toutes choses" (s18,v45); "Et cette présente vie n'est qu'amusement et jeu. La demeure dernière, cependant, c'est elle la vivante! S'ilssavaient!" (s29,v64); "Ne te trompe point en voyant les mécréants sillonner les pays à leur aise. Piètre jouissance temporaire! Puis leur refuge est la Géhenne. Et quel mauvais lit!" (s3,v196 et 197); " […]Dis:"La jouissance d'ici bas est infime; meilleur est l'Au-delà pour qui se comporte en pieux. Et on ne vouslésera pas, fusse la mèche de la noix d'une datte"" (s4,v77); " […]Et il y aura pour vous sur terre, halte et jouissance pour un temps" (s7,v24); "Et c'est Lui qui vous donne la vie, puis Il vous donne la mort, puis Ilvous donne la vie. L'homme est, certes oui, très ingrat" (s22,v66); "Toute âme est faite pour goûter la