VALLÉE DE CHAMONIX · DEVENIR RICHE, POUR QUOI FAIRE ? En raison de son insularité hivernale –...

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CHAMONIXLE RÊVE CONTINUE !

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La vallée de Chamonix ne se résume pas à des super-héros. Il existe un Chamonix villageois et humaniste du côté

de Vallorcine, un Chamonix intimiste et apaisant à l’hôtel historique du Montenvers et un Chamonix féminin engagé

dans des actions citoyennes qui bousculent la société.

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À 15 km de Chamonix, Vallorcine fonctionne comme un village où tout le monde se connaît et vit en confiance. Le col des Montets, barrière géographique autant que mentale, a isolé et protégé les Vallorcins du monde extérieur. Ici, pas de terrains à bâtir, pas de chalets de luxe…

VALLORCINE LA VIE, LA VRAIE

et rouvrait au printemps », plaisante Jérémy Vallas, le jeune maire – 36 ans – de Vallorcine. Visage et barbe de Jésus-Christ, Jérémy Vallas est le digne représentant de l’esprit qui anime les Vallorcins : débrouillardise, inventivité et surtout solidarité. « Pour les Chamoniards, nous sommes un peu des babas cool. Avant, nous étions assimilés à des paysans attardés ; quand nous intégrions le collège à Chamonix, les gamins ne se privaient pas de nous le dire. Et aujourd’hui, il y a une forme d’envie. Combien de fois j’entends dire “Quelle chance vous avez d’être là-haut !” Sous-entendu : loin de tout ce business... »

DEVENIR RICHE, POUR QUOI FAIRE ?

En raison de son insularité hivernale – de plus en plus épisodique avec des hivers faiblement enneigés –, Vallorcine serait donc demeuré un Chamonix à taille humaine, celui des romans de Frison-Roche, où tout le monde se connaît, s’engueule, mais se soutient dans les coups durs ?Retour à l’hôtel du Buet, chez Véronique et Marianne Chamel. « Ici, on boit l’apéro à partir de 11 heures. Et c’est tout le temps 11 heures ! » entonnent les deux sœurs. Sacrifions donc à la tradition de l’apéro pour comprendre la saga de ce vieil hôtel familial, où depuis cent trente ans, aucun descendant, depuis les fondateurs Maurice Chamel et Léonie Pache, n’a cédé aux sirènes de l’argent. Véronique : « Quand tu regardes par la fenêtre, ça te porte. Vendre pour devenir riche, et après, tu fais quoi ? » Marianne : « Les Chamoniards nous prennent pour des fous parce que, au Buet, nous vivons cinq à six mois

TEXTE : PHILIPPE BONHÈME PHOTOS : NACHO GREZ

Q ui ne connaît pas Vallorcine ne sait pas ce qu’est un hiver. Vallorcine... une vallée suspendue et séparée de celle de Chamonix par un col – guère très élevé (1 461 m) – mais qui vous

fait basculer dans un autre monde. Un isolat, qui a sa propre vie et sa propre logique, loin de l’effervescence du chaudron chamoniard… À Vallorcine, la communauté fonctionne en famille : il y a les Chamel, les Berguerand, les Ancey, les Dunand, les Vallas, les Bidault. Quoique ces deux dernières familles n’aient qu’une à deux générations au cimetière… En cet hiver 2017-2018 qui retrouve la vigueur de ceux du début des années 1980, le hameau du Buet et son hôtel font plus que jamais figure de « sas d’entrée » à Vallorcine. Entre Noël et la fin du mois de janvier 2018, le col des Montets a été fermé 22 jours pour risques d’avalanche, replongeant les Vallorcins dans un sentiment d’isolement qu’ils n’avaient plus connu depuis le terrible hiver 1999. Nulle panique ou acrimonie contre les services de l’État « qui ne feraient pas leur boulot ». « Nous appelons ça l’effet “outre-col”. Nous ne disons pas que nous sommes coincés, mais “envanelés” – au chaud dans notre vallée », raconte Véronique Chamel, de l’hôtel du Buet. « En janvier 2018, nous avons cumulé jusqu’à cinq mètres de neige en quelques jours. Il n’était même plus question de passer par le tunnel des Montets [cet ouvrage est mixte : ferroviaire et routier, NDLR]. Dans ces moments-là, personne ne râle. Si ! Ceux qui appellent la mairie pour demander “quand est-ce que le col va rouvrir ?” ne sont pas de Vallorcine. Je leur réponds que, autrefois, le col fermait à l’automne

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par an avec deux mètres de neige devant la porte. Je préfère ça plutôt qu’avoir un immeuble sous le nez ! » Quand j’interpelle Véronique sur l’ambiance folklorique de son hôtel, dont on m’a parlé, elle rétorque : « Si folklorique, ça signifie vie et populaire, alors oui ! Le guide chamoniard qui débarque en hiver du vallon de Bérard avec ses clients et qui veut être servi dans les cinq minutes, je le mets vite au parfum : “Détends ton corps de star !” »

L’ATOUT VILLAGE

« La chance de Vallorcine est d’être resté à l’écart du développement frénétique de Chamonix, assure Patrick Ancey, maire de 2001 à 2008. Nous avons pris notre temps avant de donner notre accord pour faire la télécabine des Posettes. Dans le projet initial, le concessionnaire nous imposait de construire de l’immobilier de loisir. Mais il était hors de question que nous devenions un village de résidents secondaires. Je voulais préserver l’atout du village. Des territoires comme le nôtre au pied du mont Blanc, il n’en existe plus. » Patrick Ancey

aura gain de cause auprès de la Compagnie du Mont-Blanc. Les deux résidences de tourisme sorties de terre depuis n’ont pas bouleversé la tranquillité du village et font travailler les 35 moniteurs de l’école de ski. Autre dossier porté par Patrick Ancey, la « recréation » d’une ferme à Vallorcine qui, aujourd’hui, fonctionne très bien. « La mise en place de la Ferme des Trois Ours a été épique : 7 agriculteurs se sont succédé ! Les gars n’avaient pas la volonté de traire et de faire du fromage. Mais il n’y a que comme ça qu’on peut s’en sortir ! » s’exclame Patrick, qui à son tour s’est lancé dans l’élevage de chèvres et la production de fromages.

UN PEU CORSES

Vallorcine serait-il devenu un « slow food garden » où les Chamoniards s’approvisionnent en produits bio ? David Vallas, le frère aîné du maire, a investi la « niche » du petit fruit rouge bio – framboise, cassis, groseille et myrtille – avant d’étendre sa production aux légumes. Le visiteur extérieur reste perplexe sur la viabilité économique d’une telle entreprise dans un endroit comme Vallorcine : une altitude moyenne de 1 300 mètres et un long hiver limitent les périodes de production. « Ma période de production est limitée à trois mois de l’année, mais dès ma première année de récolte (en 2009), je me suis rendu compte que la demande locale était tellement forte que je n’avais pas besoin d’aller au-delà d’Argentière [situé à 6 km, NDLR]. » Dans le contexte chamoniard, riche en grandes tables gastronomique à la recherche de produits locaux, un maraîcher bio installé à Vallorcine fait figure de perle rare. « Au départ, c’est flatteur d’être sélectionné par un grand chef, reprend David, mais j’avais peur que des Porsche Cayenne débarquent pour acheter un pot de confiture ! » Ils sont comme ça, les Vallorcins... l’argent n’est pas leur préoccupation première. « Nous sommes une commune très, très rose : au premier tour de la dernière élection présidentielle, Mélenchon a fait ici le plus gros score de la Haute-Savoie. Les 400 Vallorcins sont viscéralement humanistes », affirme le maire Jérémy Vallas. Notre jeune élu sait que sa position politique dans une vallée de Chamonix plutôt ancrée à droite aurait tendance

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De gauche à droite : Patrick Ancey a exercé différents métiers – douanier, entraîneur de biathlon, guide –, avant de se lancer dans l’élevage de chèvres ; David Vallas est maraîcher bio ; les sœurs Chamel (Marianne, à gauche, et Véronique), de l’hôtel du Buet, et les jeunes gardiens du refuge de Loriaz, Estelle et Benjamin. En bas : le mont Oreb (à droite) et les aiguilles de Praz Torrent à l’entrée de Vallorcine.

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Ci-dessus : pas de gros chalets

à Vallorcine, mais des maisons sans

ostentation qui reflètent l’esprit

trappeur du village. Ci-contre : Jérémy

Vallas, le maire, s’est installé avec sa famille

en 1982 à Vallorcine. Meije Bidault, skieuse

de haut niveau handisport et ses deux enfants, Tess et Adem. Pierre-Loïc Laulagnet,

chef de la centrale EDF de Vallorcine, en famille

avec Lucie, Emma et Paul, né à Vallorcine. Katia, institutrice et directrice de l’école. Stéphanie Carboni a ouvert de superbes

chambres d’hôtes à la Ferme des Cimes.

dont les papas travaillent à la centrale hydraulique franco-suisse d’Émosson. Cet apport de population extérieure – souvent des jeunes couples – soutient la démographie de Vallorcine et les effectifs de l’école. « 14 agents EDF sont employés à la centrale, ce qui représente 46 habitants et 7 enfants scolarisés sur la commune », m’explique Pierre-Loïc Laulagnet, le chef de la centrale de Vallorcine. Si le barrage d’Émosson est situé en territoire suisse, l’eau provient autant de la France que de la Suisse, d’où la signature d’une convention internationale entre les deux pays et la présence depuis les années 1960 d’une communauté EDF. Originaires de Saint-Étienne et de Normandie, Pierre-Loïc et son épouse Lucie sont arrivés à Vallorcine en janvier 2014, en provenance de… Carcassonne. « Depuis petite, je partais aux sports d’hiver. Je connaissais Chamonix et Argentière, raconte Lucie. J’étais la plus motivée pour venir. J’imaginais bien mes deux enfants

à l’isoler. « L’identité vallorcine, je la définirais par ce sentiment d’insularité, qui se traduit par une société qui, depuis toujours, s’autogère. Un exemple : nous avons plus de 10 000 parcelles au cadastre. Quelqu’un qui veut agrandir son terrain devra en passer par l’échange, donc discuter avec son voisin. Au fond, nous sommes une société un peu corse. »

DES ENFANTS AUTONOMES

Au détour d’une phrase, Jérémy Vallas suggère que les Vallorcins seraient des gens plus lettrés que la moyenne. Ils auraient plus de temps pour lire, du fait des longs hivers. Il me faut vérifier cette hypothèse auprès des institutrices qui forment les petits Vallorcins, car c’est dès l’école qu’on apprend à aimer lire. Détail qui a son importance, la fermeture du col a toujours protégé Vallorcine d’un regroupement scolaire avec Argentière. Katia et Lucile, professeurs des écoles, entament respectivement une cinquième et une deuxième année en poste à Vallorcine. Katia explique la particularité de cette école : « Nous avons 37 enfants âgés de 3 à 11 ans répartis en deux classes de quatre niveaux, ce qui implique d’enseigner en même temps, avec quatre programmes spécifiques, à des enfants d’âge différent. C’est une gymnastique très particulière. Ils apprennent très tôt à être autonomes. Le bon côté des choses, c’est qu’en mélangeant les niveaux, les enfants progressent plus vite. Entre eux, ils peuvent se donner des coups de main. Les grands aident les petits à s’habiller ; c’est comme ça que l’esprit vallorcin se transmet… » À regarder Katia et Lucile faire la classe à ces enfants, aidées de Véronique (Atsem), on ressent une bouffée d’émotion. L’école de la République « fabrique » sous nos yeux de futurs hommes et femmes qui seront bien dans leur tête et leur corps. Tous ces enfants ne sont pas forcément des Vallorcins pur sucre : il y a là deux frères écossais, une petite Vénézuélienne, un Franco-Anglais, des Belges, des Suisses de Finhaut… « Pas mal de parents sont saisonniers – moniteurs, guides, employés aux remontées mécaniques –, reprend Katia. Nous les faisons venir pour qu’ils expliquent leur métier aux enfants. » Autre particularité de l’école, la présence d’une importante communauté d’enfants d’agents EDF,

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grandir à la montagne en pleine nature. Pour tout vous dire, Emma (6 ans) est née à Carcassonne et j’ai accouché de Paul (3 ans) en juillet 2014 à la maison. Cela faisait 46 ans qu’un enfant n’était plus né à Vallorcine ! » Pour Pierre-Loïc, cette

installation à Vallorcine représentait un saut dans l’inconnu : « Je me suis vite adapté à l’esprit petit village ; en cas de fortes chutes de neige, les gens viennent facilement vers vous pour savoir si tout va bien. Quand le col ferme, ce sont mes parents qui s’inquiètent en entendant les informations à la télé. On sent que les gens sont habitués à gérer des situations de crise. »

UN SENTIMENT D’INSULARITÉ

Si le papa s’est mis au trail et au ski de randonnée, sa fille Emma s’est coulée dans le moule de tous les petits Vallorcins : elle a intégré le ski-club et slalome entre les arbres. Son frère attaque le club Piou-Piou… Cet enracinement à Vallorcine que les enfants de Pierre-Loïc et Lucie sont en train de se créer, Meije Bidault l’a vécu trois décennies plus tôt et le transmet à son tour à ses enfants. « C’est très difficile de partir de Vallorcine, tu vis dans un cocon qui te protège du surplus de Chamonix. Tu veux voir du monde, faire la fête ? Tu descends à Chamonix. Une fois que tu en as bien profité, tu remontes te mettre au vert à Vallorcine. » C’est le grand-père de Meije, Georges Bidault, au départ résident secondaire, qui a décidé de s’établir à Vallorcine pour sa retraite. Il sera même élu maire (1989-1995). « Mon grand-père, originaire de l’Allier, a épousé Marie-Louise Jacquier, une Suissesse originaire de Vernayaz, un village proche de Martigny. C’est elle qui a ramené la famille ici. Parmi ses sept enfants, deux sont devenus guides : Philippe, mon père, et mon oncle Hervé. » Pour vivre à Vallorcine, la

famille Bidault a dû inventer son activité. Elle a racheté l’ancien centre de vacances de la ville de Barentin (Seine-Maritime) et l’a transformé en « chalet Skiroc », qui accueille familles, groupes, scolaires. Bercée dans cet environnement de guides

et de montagne, Meije aurait aimé suivre les traces de son père, si un accident de la route ne l’avait pas rendue paraplégique. Son énergie, elle l’a canalisée dans le ski de compétition handisport.« Qu’est-ce qui fait qu’on s’attache à un lieu comme Vallorcine, quand

on n’en est pas originaire ? s’interroge son père Philippe Bidault. La frontière du col est autant une barrière physique que mentale. En vivant ici, nous rentrons dans un autre univers, moins aseptisé, moins superficiel qu’à Chamonix. Les enfants peuvent jouer toute la journée dehors, aller la pêche, construire des cabanes, faire de la luge... C’est unique, cette ambiance insouciante ! »Ce que confirment les néo-Vallorcins Hubert Duperray, artisan menuisier, et sa femme Sylvie Monfleur, professeur d’allemand au lycée du Mont-Blanc. « Notre baptême du feu, ce fut trois semaines de fermeture du col, l’hiver 1999. Notre deuxième fille Leïla avait un an. J’ai dû traverser plusieurs fois à pied le tunnel des Montets pour aller chercher du lait infantile. Il y avait eu l’avalanche meurtrière de Montroc. C’était rude comme spectacle ! » « Cette vie isolée, à seulement 15 kilomètres de Chamonix, nous l’avons choisie précisément pour ressentir ce sentiment d’insularité, ajoute Sylvie. C’est ça, le vrai luxe, aujourd’hui… »Derniers arrivés, le couple de trentenaires Estelle Blesbois et Benjamin Bottollier-Curtet gardent le refuge de Loriaz, un ancien chalet d’alpage perché à 2 020 m. Ils ont vécu leur premier hivernage en 2015. « Au début, combien de fois avons-nous entendu cette interrogation : “Vous arriverez à survivre ?” » Pour ne pas craquer, Estelle et Benjamin ont adopté quelques règles simples : déneiger autour du refuge et se prendre une journée par semaine pour souffler. « J’ai dit à Benjamin que si nous arrivions à tenir le refuge en hiver, alors nous étions bons pour construire quelque chose de durable… » C’est bien parti !

Ci-dessus : sortie ski de fond pour les enfants

de Vallorcine. Le foyer se situe à

cent mètres de leur école… Ci-contre : après une carrière

dans la publicité à Lyon, Thierry

Berguerand est revenu sur les terres

familiales pour ouvrir le Café-Comptoir avec

son épouse Nathalie. Hubert Duperray (à

droite) et son épouse Sylvie (en bas, avec leur fille Leïla) sont arrivés à Vallorcine

en 1996. Artisan, monsieur retape des

maisons en vieux bois et madame est

professeur d’allemand.

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« LES ENFANTS PEUVENT JOUER TOUTE LA JOURNÉE DEHORS... C’EST UNIQUE, CETTE AMBIANCE INSOUCIANTE ! »

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