Valeurs de la République - Pôle ressource

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PÔLE DE RESSOURCES VILLE ET DÉVELOPPEMENT SOCIAL VAL D’OISE Valeurs de la République : entre valeurs privées et valeurs collectives Intentions .................................................................................................... p. 1 Propos liminaires Quelle urgence à débattre des Valeurs de la République ? ........................ p. 2 Quelles relations entre république et démocratie ? ................................. p. 3 Agir dans l’intérêt général ........................................................................... p. 3 La démocratie, forme légitime de la République ? ..................................... p. 4 La démocratie comme « citoyenneté lucide » ............................................ p. 5 Liberté, égalité, fraternité : devise, symbole de la République ................ p. 6 Une liberté en construction perpétuelle ..................................................... p. 7 De l’égalité de droit à une égalité sociale ................................................... p. 7 Fraternité, solidarité, le lien à l’humanité ................................................... p. 8 Les principes comme valeurs mises en action ........................................... p. 10 Quelques mots sur la Laïcité ....................................................................... p. 10 L’indivisibilité de la République ................................................................... p. 11 Ce qui interpelle ......................................................................................... p. 12 Les enjeux en question ............................................................................... p. 13 Sélection de ressources .............................................................................. p. 14 Synthèse d’un "Petit Déjeuner du Pôle" Herblay, le 19 mai 2016 Novembre 2016

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Page 1: Valeurs de la République - Pôle ressource

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D’O

ISE

8 place de France, 95200 Sarcelles ■ tél. : 01.34.04.12.12 ■ fax : 01.34.04.12.13mail : [email protected] ■ site : http://www.poleressources95.org

Valeurs de la République : entre valeurs privées et valeurs

collectives

Intentions....................................................................................................p.1ProposliminairesQuelleurgenceàdébattredesValeursdelaRépublique?........................p.2Quellesrelationsentrerépubliqueetdémocratie?.................................p.3Agirdansl’intérêtgénéral...........................................................................p.3Ladémocratie,formelégitimedelaRépublique?.....................................p.4Ladémocratiecomme«citoyennetélucide»............................................p.5Liberté,égalité,fraternité:devise,symboledelaRépublique................p.6Unelibertéenconstructionperpétuelle.....................................................p.7Del’égalitédedroitàuneégalitésociale...................................................p.7Fraternité,solidarité,lelienàl’humanité...................................................p.8Lesprincipescommevaleursmisesenaction...........................................p.10QuelquesmotssurlaLaïcité.......................................................................p.10L’indivisibilitédelaRépublique...................................................................p.11Cequiinterpelle.........................................................................................p.12Lesenjeuxenquestion...............................................................................p.13Sélectionderessources..............................................................................p.14

Synthèsed’un"PetitDéjeunerduPôle"

Herblay,le19mai2016

Novembre2016

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Depuis un certain nombre d’années, voiredécennies, le climat politique et social susciteauprèsdescitoyenscommedespolitiquesnombred’interrogations, dont certaines portent le doutesur l’effectivité des principes fondamentaux de laRépublique. Ce malaise puise notamment sasource dans certaines difficultés quotidiennesauxquellessontconfrontéeslespopulations.

Appréciant ces éléments, l’État réaffirme le bienfondédesvaleurset fondementsporteursd’unitépar un discours qui se veut mobilisateur. Cetengagement s’est notamment traduit par laréunion de Comités interministériels égalité etcitoyenneté (Ciec) et une mobilisation spécifiqueetprononcéedel’Educationnationaleàl’égarddecesujet.Plusrécemment,alorsque laLoi“Égalitéet Citoyenneté” est en cours de finalisation, leCommissariat Général à l’Égalité des Territoires(CGET) a été missionné pour porter un plan deformation sur la laïcité auprès des acteurs deterrain, tandis que ces derniers sont invités pourleur part à initier des actions dans les quartiersprioritaires.

Ce contexte invite à actualiser les réflexionsde lasociété civile comme des institutions sur le sensdonné aux mots Liberté, Égalité, Fraternité etLaïcité.

Dans quelle mesure, ces différentes référencesappellent-elles lesmêmesregistresdedéfinition?Comment peut-on en appréhender les usages oules applications ? A quoi renvoient-elles pour lesinstitutionsetlescitoyens?Commentdébattredecette communauté de valeurs et de principes àpartager?

Le Pôle de ressources Ville et développementsocial du Val d’Oise a engagé un cycle desensibilisation entre mai et décembre 2016 pourinvestir le lien et les interactions entre “fairesociété” et les “principes et valeurs de laRépublique”.

*****

Cette démarche s’articule en trois temps avecl’organisation d’un petit déjeuner consacré auxValeurs de la République, lamise enœuvre de 2cycles de qualification de trois jours dédiés à laLaïcité (en partenariat avec la Fédérationdépartementaledescentressociaux)danslecadredudéploiementduKitnationalconçupar leCGETetd’une rencontre s’intéressant spécifiquementàl’idéaldeFraternité.

Leprésentdocument s’appuie sur laprésentationeffectuée par Michel DELATTRE, Professeur dephilosophie à l’École de Sciences Politique deSaint-Germain-en-Laye, lors d’un “petit déjeunerdu Pôle”. Cette intervention qui s’est déroulée letempsd’unematinée,futl’occasiond’interrogerlasignificationphilosophique,historiqueet juridiquedesvaleursetprincipesdelaRépublique.

Il est également alimenté par les remarques etquestions qui ont fait débat lors de cetteprésentation.

Herblay,le19mai2016.

MICHELDELATTREEnseignel’histoiredesidéespolitiquesetlaphilosophieàSciencesPoSaint-Germain-en-Laye.Il participe également à la formation des enseignants à l’ESPE de l’Académie de Versailles(Université de Cergy) et est un contributeur du réseau CanopE sur les sujets relatifs auxValeursrépublicaines.Ilfutégalementmembredu“grouped’experts”chargé,entre2013et2015 de rédiger la proposition au Ministère de l’Éducation nationale du Programmed’enseignementmoraletciviqueentréenvigueurduprimaireauxlycéesàlarentrée2015.

Intentions

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“Si l’ignorance de ces valeurs est

inquiétante, se présenter en expert,

comme si ces valeurs étaient

intouchables, indiscutables, est

également dangereux, car ce

dogmatisme là est souvent

instrumentalisé politiquement dans

des discours divers qui ne sont pas

toujours républicains.”

Les valeurs de la République n’ont pas beaucoupde sens si elles ne sont pas l’objet permanent deréflexions et de débats. Il convient dès lors de sedonnerdeschancesdelesfairevivre.

Depuisuncertainnombred’années,cesvaleursetprincipessontsanscesseévoqués,maisilnes’agitpasd’unobjetqu’ilsuffiraitdeconvoquer,commeune simple «formule magique». Le risque seraitalorsdelesviderdeleursens, de les reléguer aurang d’étiquettes, deslogans. Pire, c’est dansdes situations de crises,comme celles que laFrance a connues enjanvier et novembre2015, qu’elles sontsollicitées. Elles le sontalors trop souvent noncomme des valeurs,mais comme desremèdes plus ou moinsdésespérés – à unmoment où «hélas»tout le monde n’y adhère plus vraiment. Or, ilsemblebienquelesvaleursrépublicainesrelèventdepuis trop longtemps d’un climat de fausseévidence. Plus elles sont invoquées, plus leursignification est floue, notamment parce qu’ellessont considérées comme des acquis auxquels ilseraitinutiledeconsacrertempsetréflexion.Alorsqu’aucontraire,ellesdevraientêtredesréférencesconstantes dans une logique préventivepermettant de penser les conditions du vivreensemble.

Les événements dramatiques récents, les propos,et comportements qu’ils ont entrainés, alarmentsurlefaitquel’adhésionàcesvaleursn’estjamaisacquiseetexigeune réellevigilance.Cela inviteàne pas attendre qu’elles soient oubliées pour lesfaire (re)vivre, qu’il est important d’en faire unobjet de préoccupation, de conscience, doncd’apprentissageetdediscussionpermanente.Celaimplique des débats, dès lors qu’ils sont animéspardebonnesintentionsetconduitsavec«bonnefoi». En effet, le dogmatisme en la matière estaussi dangereux que l’indifférenceou l’ignorance,car il tend à “fossiliser” les valeurs dont il est

question. De plus, elles peuvent facilement fairel’objet d’une instrumentalisation politique ouidéologique qui constitue une invitation aucontresens.

Le postulat soutenu ici est qu’il est nécessaire derappeler lescombatsetcirconstancesqui leurontdonné naissance – circonstances variables dansl’histoire, car derrière la désignation des mêmes

valeurs, les enjeux ontinévitablement changéde leurpremière affirmation àaujourd’hui.

C’estparexempleenrappelantcontrequoicesvaleurssesontimposées de haute lutte, qu’ilest possible de construire dusens et favoriser l’adhésion,sansméconnaître pour autantles inévitables imperfectionsdans leurmise en application.Cette compréhension passepar l’exploration de domainescomme l’histoire, la

philosophie,lejuridique.

Pourautantilconvientdepréciserégalementqueles connaissances dont il est question ici ne sontpas l’exclusivité de spécialistes des disciplinesconcernées. Connaître les valeurs républicainesn’estl’apanagedepersonnecar,àcertainségards,il n’y a pas d’experts en la matière: elles sonttoujoursàréinterroger,réaffirmer,réactualiserauregarddesréalitésdumoment.

Propos liminaire

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“Ce n’est pas la démocratie en elle-

même qui aurait par principe le

privilège d’être républicaine”.

“Platon défend l’idée que dans une

“vraie République”, les gens feraient

des campagnes pour ne pas être élus

car on s’y battrait pour que ce soit

plus compétent que soi qui exerce les

fonctions de la République ”.

u AGIR DANS L’INTERET GENERAL

Aborder les valeurs républicaines impliqued’interroger le sens du mot république, tropsouvent confondu avec celui de démocratie, aveclequel il serait interchangeable, comme s’ils’agissait de synonymes. En réalité, il semblepossibledesoutenirqu’estrépublicaintoutrégimedans lequel lepouvoirs’exerceenvuede l’intérêtgénéral: larespublica. Ilyadoncdu«commun»

et c’est la recherche, la visée, de cet intérêtcommun qui oriente l’exercice d’un pouvoirpolitique républicain, qu’il soit démocratique,aristocratique ou encore monarchique. Ainsi,Platon est tout autant républicainqu’antidémocrate. En effet, fondamentalementaristocrate, il défend par exemple l’idéal des“philosophes rois”, car à ses yeux le peuple n’estpas en mesure d’exercer le pouvoir. Il appuie saposition notamment sur ce qu’il observe de ladémocratie athénienne, alors en proie à ladémagogieparlejeudelasophistique.Ildénoncedonc la manipulation de l’opinion publique, alorsmêmequelasoliditédeladémocratienepourraitreposerquesurlaqualitédupeuple,descitoyens.Il y voit donc un défaut majeur de ce régimepolitique.

Cette méfiance envers la démocratie se retrouveégalementplusrécemmentchezcertainspenseursdit“libéraux”commeBenjaminConstant(Principesdepolitique,1806)ouAlexisdeTocqueville (De ladémocratie en Amérique, 1835). La démocratiepeut s’égarer et se dégrader en «tyrannie de lamajorité», voire de l’incompétence. Pour eux, lerisquequeladémocratiefaitcouriràlarépubliqueest double: que lamajorité tyrannise laminoritéauméprisdelaliberté;quecettemajorité,sousleprétexte fallacieux que le plus grand nombre aforcément davantage raison que la minorité,exerce un pouvoir illégitime, du fait d’uneincompétence dominante. L’histoire lui donne au

moins raison en ce que bien des dictatures sontarrivéesaupouvoirparlavoiedesurnes.

La démocratie n’a donc pas le privilège d’êtresystématiquement républicaine, car comme lesdeux autres grands types de régimes (monarchie,aristocratie), elle est susceptible de se pervertir.C’estduresteunedesraisonspour lesquellesnosdémocraties modernes fonctionnent parreprésentations, le peuplen’yparticipantqueparlejeud’unedélégationdepouvoir.C’estlàuntypede régimemarquépar l’électiondesgouvernants,que les philosophes de l’Antiquité qualifiaientd’oligarchique ou d’aristocratique. Ainsi, Aristote(4èmesiècleavantJ.-C.)écritdanssonouvrageLesPolitiquesqueladémocratieimpliqueuntirageausort pour l’exercice d’un certain nombre defonctions, commec’est le cas en Franceà l’heureactuelle pour les jurys de cours d’assises. Il estreprisencelaparMontesquieuquiécrit,en1748,dans De l’Esprit des Lois que «le suffrage par lesortestdelanaturedeladémocratie; lesuffragepar le choix est de celle de l’aristocratie». Cesystème suppose alors, et ce n’est pas forcémentacquis, que le processus électoral désigne «lesmeilleurs» (oi aristoi) pour gouverner tant, enprincipe, sur le terrain de la compétence que surceluidel’éthique.

Aristotesouligne le risquededéviancedecetypede système qui lorsqu’il se dégrade, lorsquel’intérêt pour la chose commune disparaît ous’amoindrit, se transforme en tyrannie des plusriches, des plus forts, forme alors nettement plusdangereusequ’unedémocratieimparfaite.

Quelle(s) relation(s) entre République et démocratie ?

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u LA DEMOCRATIE, FORME LEGITIME DE LA REPUBLIQUE ?

Pour autant, un renversement s’opère au coursdes 17ème et 18ème siècles en opposition auprincipededroitdivinetde l’hérédité,avec l’idéeque la légitimité du pouvoir réside dans leconsentement populaire. En effet, aumoins danslessociétésdites«occidentales»,s’estpeuàpeuaffirmée une orientation politique qui, sousl’influencedu«libéralismepolitique»,aconsidéréque la démocratie, sous une formeouune autre,offrait lesmeilleures garanties que le régime soitrépublicain. Ce libéralisme politique, qu’il ne fautpas confondre avec le libéralisme économiquemême s’ils entretiennent des liens, conduitprogressivement à promouvoir la démocratie,même si cela n’a rien d’une évidence. L’exempledes doctrines philosophiques qui ont développéune “théorie du droit naturel” illustre laconstruction de cette idée nouvelle.Malgré leursdifférences, elles ont en commun d’avoir vouluanalyser les conditions de légitimité du pouvoirnon à partir de références religieuses, nimêmeàvraidiredel’histoireoudelatradition,maisd’uneorigine «naturelle» que l’humanité auraitl’obligation de corriger en passant d’un état denature hypothétique (dont personne ne prétendqu’ilaréellementexisté),état invivable,àunétatdesociété.

Ainsi, Thomas Hobbes dans le Léviathan (1651),présente l’état de nature comme un «état deguerre de tous contre tous et de chacun contrechacun». Il met alors en avant la nécessité d’uncontratparlequelchacun,pourassurersasécurité,s’engage à se soumettre à un souverain (enl’occurrenceunsouverainabsolu).Le«Léviathan»représente ici l’identité politique des citoyens et,en tant que telle, aucun citoyen ne peut s’yopposer ni s’y soustraire. Quelques années plustard, John Locke, dans son Second Traité dugouvernementcivil(1690),soutientquechacunestnaturellementpropriétairedesoi-mêmeetdesesbiens, dès lors qu’ils sont le fruit de son travail.Mais ces droits ne sont pas garantis en l’absencede conventions et d’autorité publique et peuventdoncêtresourcedeconflits.Lasolutionvientdelaconstitution d’un état qui les régule et lesgarantisse, ce qui impose de dépasser l’ordrenaturel. Il imagine alors une organisation socialequi institue une société civile ou peuple et unegouvernance, l’État, légitimépar le consentementde ce peuple. En 1762, Jean-Jacques Rousseau,dans Du Contrat Social, présente également un«état civil» fondé sur l’acceptation des hommesqui le composent.Cequi est intéressantdans cesmodèlesphilosophiques,c’estquelepouvoirn’est

à chaque fois acceptable que sur la base d’unconsentement du peuple, et de ce fait il n’estlégitime que s’il s’exerce en vue de l’intérêtgénéral–larespublica.D’oùl’idéede«pacte»oude «contrat» social - le modèle du contratprésentant l’intérêt, pour être valable, d’êtrelibrement consenti. Est donc introduite l’idéed’uneégalitédetousdansladéfinitiondesdroits.CommeditRousseau«lalibertéestl’obéissanceàla loi qu’on s’est prescrite». La loi ne serait alorspas à craindre et personne ne pourrait jamais seréclamer d’un droit plus fondamental pourremettreencauselaloicommune.C’estaprioriunbonmodèle pour penser le rapport entre valeurspubliques et valeurs privés. En effet, s’il y a desvaleurs privées qui ne touchent pas à l’intérêtgénéral,iln’yaaucuneraisonpourqu’ellessoientopprimées.

Levoiled’ignorance

S’inspirantdecettenotionphilosophique

développéeparThomasHobbes,JohnLockeet

EmmanuelKant,l’AméricainJohnRawls

développedanssonouvrageThéoriedela

Justice(1971),unmodèledelajustice

comparableàceluidu“contratsocial”deJean

JacquesRousseau,ensebasantsurlaméthode

d’analysedu“voiled’ignorance”.Ainsi,si

«personneneconnaîtsaplacedanslasociété,

sapositiondeclasseousonstatutsocial,non

plusquepersonneneconnaîtsafortunedans

ladistributiondesressourcesnaturellesetdes

capacités,sonintelligence,saforceetautres

chosessimilaires,(…)quelespartiesne

connaissentpasleursconceptionsdubienou

leurspenchantspsychologiquesparticuliers

(alors),lesprincipesdejusticesontchoisis

derrièreunvoiled'ignorance».Cevoile

d’ignorancepermetà-chaqueindividu

ignorantsespropreschancesdanslasociétéà

venir-,deconcevoirunsystèmedejustice

traitantchacunéquitablementetpermettant

uneréelleégalitédeschances.

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Page 6: Valeurs de la République - Pôle ressource

Cesmodèles,quisontdesmodèlesthéoriques,ontévidemment des limites, que souligneront lesphilosophes politiques ultérieurs – Georg W.F.Hegel (1770-1831) par exemple – leur reprochantd’ignorer qu’une situation sociale ou politiquen’est jamais seulement un produit ex-nihilo devolontés individuelles,maisaussiengrandepartieun héritage historique. Personne n’a jamais étéconsultépourdéciderdesvaleursetprincipesdelasociété dans laquelle il est venu au monde.L’adhésionauxvaleursrépublicainesestdoncpluscompliquéequ’un simple contrat et constituedèslors un véritable sujet de débat. S’esquissepourtant un idéal politique qui associe désormaislaRépubliqueàlavolontépopulaire,idéemoderneselon laquelle la souveraineté politique vient deshommes, non de Dieu, de la naissance ou del’héritage, ni de la raison du plus fort. L’idée derépublique se précise progressivement pouraboutir à la forme démocratique, selon laquellenonseulementlasouverainetévientdeshommes,mais elle vient du peuple, et c’est au peuple lui-même de l’exercer. Autrement dit, l'idéalrépublicainseconfondpeuàpeuavec leprinciped'un régime démocratique. Régime, comme ditnotre constitution - reprenant une formuled’Abraham Lincoln - qui affirme “le pouvoir dupeuple,parlepeuple,pourlepeuple”.

u LA DEMOCRATIE, UNE CITOYENNETE LUCIDE

Mais cela n’est vrai qu’à certaines conditions, quiexpliquent le lien historique existant entre cettemontée des aspirations démocratiques et lanaissancedeprojetsd’instructionpublique.Celienentre ledéveloppementde ladémocratieet celuide l’instruction du peuple est notammentmis enévidence par Montesquieu. De son ouvrage DeL’Esprit des lois, il est souvent retenu l’exigenced’une séparation du législatif, du judiciaire et del’exécutif,afind’éviterledespotismeenlimitantlepouvoirpar lepouvoir.Cependant ilanalyseaussicequ’ilnommela«nature»etle«principe»desrégimespolitiques. Ilassocieainsi ledespotismeàla crainte et l’aristocratie à l’honneur. Ladémocratie implique, elle, que le pouvoir soitexercédirectementouindirectementparlepeupleen se soumettant à un certain nombre de règles.Aussi, cequigarantit sonbon fonctionnementestce qu’il appelle la «vertu» des citoyens, notiondésignant chez lui la capacité à déterminer où sesituel’intérêtgénéraletàlefairepasseravantsonintérêtparticulier.

Pour simplifier, cela revient à affirmer, dans lecontexte du siècle des Lumières, que la qualité

d’une démocratie est étroitement dépendante dela luciditéetdesconvictionsdescitoyens.Poursapart, Montesquieu est peu enthousiaste, peuoptimiste quant à la capacité de chacun àdétermineroùsesituel’intérêtgénéraletàlefairepasser avant son intérêt propre. Mais laconstructionet le renforcementprogressifdu lienentre République et démocratie contribue àexpliquer l’intérêtpour lesquestionsd’instructiondupeupleet ledéveloppementde lascolarisationqui va s’opérer toutau longdu20ème siècle.C’estce qui fera dire à Jules Ferry, dans une célèbrelettre aux instituteurs que leur mission centrale,quifaitladignitédeleurprofession,c’estlamoralerépublicaine. Ladémocratien’estviablequesi lescitoyens qui la composent partagent un certainnombre de valeurs et de principes. Cela supposeévidemment d’abord qu’ils les connaissent, qu’ilsles comprennent et qu’ils en éprouvent lanécessité afin de pouvoir y adhérer. Dès leursorigines, leursprémices, lesquestionsrelativesausens que prennent ces valeurs, à leurappropriation, sont donc posées. Cela illustrel’importance de ne pas s’y intéresser seulementdansdescontextescompliqués.

Montesquieuetl’éducation

“C’estdanslegouvernementrépublicainque

l’onabesoindetoutelapuissancede

l’éducation.Lacraintedesgouvernements

despotiquesnaitd’elle-mêmeparmiles

menacesetleschâtiments;l’honneurdes

monarchiesestfavoriséparlespassions,et

lesfavoriseàsontour:maislavertu

politiqueestunrenoncementàsoi-même,

quiesttoujoursunechosetrèspénible.On

peutdéfinircettevertu,l’amourdesloisetde

lapatrie.Cetamourdemandantune

préférencecontinuelledel’intérêtpublicau

sienpropre,donnetouteslesvertus

particulières:ellesnesontquecette

préférence”.

ExtraitduChapitre5,Tome1,livre4del'Espritdeslois,1748.Titre:«Del'éducationdans

legouvernementrépublicain».

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Leterme«Valeur»renvoieàquelquechosedontil est dit que cela vaut la peine de le défendre.C’estun idéalauquel ilest interditderenoncer.Ace sujet, Emmanuel Kant, philosophe qui adéveloppé l’une des conceptions les plusexigeantes de la morale, parle «d’idéalrégulateur». Il emploie pour s’en expliquer uneformule assez expressive: « une idée à réaliserdans un horizon infini». L’horizon on le sait, nepeut jamais être atteint: plus on avance, plus ilrecule.Pourautant,ilesticiinterditd’yrenoncer.C’est cela le propre des valeurs: elles ne seréalisentjamaistoutàfait,ellessontconstammentpoursuivies,maiscefaisant,ellesdonnentformeàlaréalité.

Les valeurs peuvent être privées ou publiques. LaRépublique portent logiquement des valeurspubliques.Pourautant, l’articulationentrevaleursprivées – publiques est plus complexe, plusintriquée qu’il n’y paraît: au rang des valeurspubliques se trouve l’obligation de respectercertainesvaleursprivées.

Parler de valeurs républicaines, c’est doncadmettre qu’il existe une morale républicaine.Autrement dit, au sein de la République, il existeunedistinctionentre lebienet lemal, lesbonsetles mauvais comportements. Les valeurs de laRépublique sont doncnormalement celles quiguident tous noscomportements decitoyen, et ce quelle quesoitnotrepositiondanslasociété.

Ces valeurs – liberté, égalité, fraternité – ont étéaffirmées progressivement tout au long du 19èmesiècleàlasuitedelaRévolutionde1789etaugréd’une instabilité politique hésitant entremonarchieetdémocratie.«Liberté»et«Égalité»sont ainsi inscrites dans l’article 1er de laDéclarationdesdroitsdel’hommeetducitoyende1789:«tous leshommesnaissent libresetégauxen droits». La «fraternité» arrive plustardivement, le 14 juillet 1790, sur les drapeauxdes fédérés lors de la fête de la Fédération auChamp-de-Mars(Paris).Cestroismotssontlaissésde côté durant l’Empire, puis à la Restauration,

avant de ressurgir lors de la Révolution de 1830,pourensuiteêtreinscritsdanslaconstitutiondela2ème République en 1848. Cette devise, devenuesymboleettémoignantdel’ambitionrépublicaine,estdepuis reprisedans lespréambulesdechaqueconstitution,ycomprisles4èmeet5èmeRépublique,de manière quasi continue, avec une courteinterruption lors du Régime de Vichy qui lui apréféré«travail,famille,patrie».

Ainsi, la formule «liberté, égalité, fraternité»énonce les valeurs qui vont servir d’horizon auxprincipesde ladémocratie française.EllessontaufondementdelaRépubliquefrançaisetellequ’elles’affirmeetsontsolidaires.Autrementdit,ellesnepeuvent être totalement comprises que parréférences les unes avec les autres et chaqueprincipes’ennourrit.

u UNE LIBERTE EN CONSTRUCTION PERPETUELLE

La référence à la liberté est évidemmentfacilement source de contresens, surtout dans lecontexte actuel d’affirmation de valeursindividualistes. Reste que fondamentalement, lalibertésedistinguedelalicenceetn’octroiepasàquiconque le pouvoir de faire n’importe quoi. Cen’est ni l’absence de toute valeur, ni de toutes

règles. Être libre, c’estpouvoir décider de ce quel’on pense, de ce que l’onfait, mais en sachantpourquoi il est bon de lepenser ou de le faire. Laliberté s’oppose au fait

d’êtrecontraint,maiselleneconsistepasàpenserouagirsansaucuneraison.Decepointdevue, ladistinctionentrecontrainteetobligations’impose.

La liberté dont il s’agit ici est essentiellement laliberté politique. Elle consiste à pouvoir agir dansun espace déterminé par la loi dans un cadredémocratique et républicain, en respectant doncles règles d’un état de droit. L’accès à la libertépasserait donc nécessairement par la loi, quigarantiraitquepersonneneseraitjamaiscontraint[danssaliberté]parautrechosequelesexigencesde la vie en commun et du respect de la libertéd’autrui. A ce titre, la République garantit le

“Il y a souvent contresens, car les gens

s’imaginent que la liberté c’est le droit

de faire exactement ce que l’on veut”.

Liberté, égalité, fraternité : devise, symbole de la République

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respect d’un certain nombre de libertésfondamentales qui conditionnent son existence.C’est par exemple la «liberté de jugement» quipeut même aller jusqu'à l'affirmation d'une«souveraineté de la conscience »- nul ne peutm'obliger à croire ou à ne pas croire - qui vadonner naissance par extension à la «liberté deconscience», la «liberté d’opinion», la «libertéd’expression».

Ces libertés sont fondamentales car ellesgarantissent que tous les citoyens sont bien aufondementdel’autoritépublique.Ellessontenliendirectaveclesarticles6et10delaDéclarationdesdroits de l’homme et du citoyen. De l’idéal de«liberté»découleraledroitdevoteuniversel,quivas’affirmerprogressivement,ladernièreavancéeinstituantlevoteetl’éligibilitédesfemmes(8mars1944).Aujourd‘hui, lesdiscussionssurcesujet sesont déplacées du côté du droit de vote desétrangers lors des électionslocales. D’autres droits sontégalement directementinspirés par cette valeurcomme par exemple «lalibertédelapresse»en1880,la «liberté d’association» en1901ouencore«la libertédeculte»en1905.Cette liberté républicaine vaégalement imposer unedistinction très importante,entre le domaine public et ledomaine privé. Il y a deslibertés publiques, à la foisencadrées et garanties par laloi; il y a également deslibertés privées, tout aussigaranties.C’estencesensquechacunest«libredefairetoutce qui ne nuit pas à autrui». Ces libertés privéesprennent des formes diverses comme le droitd’organiser savie familialecommeon l’entend, laliberté de choisir son orientation sexuelle, laliberté de création artistique, culturelle ou derecherche scientifique, la liberté de circuler parexemple.

L’idéaldelibertéamèneégalementàinterrogerledroitd’entreprendre,dumoinspourcequi relèvede l’initiative privée. Cela entraîne lequestionnementdulienentrelibéralismepolitiqueetlibéralismeéconomique.Ils’agitalorsdepensercequirelèvedelalibreentrepriseetcequirelèvede l’État tout en sachant que ce débat pèselourdementsurl’adhésionàlaRépublique.

Restequ’enrégimerépublicain,lesvaleursprivéesnepeuventpasêtreinvoquéespourdisqualifierlesvaleurs publiques. Il est évidemment toujourspermis de discuter les conséquences des valeurspubliques, c’est-à-dire les lois qui doivent êtrerespectéesaunomdecesvaleurs.Celarelèvedelaliberté d’expression et de publication, et c’est deces discussions que viennent les évolutions.Maistantque«laloiestlaloi»,nulnepeutseréclamerdesesvaleursprivéespourlatransgresser.

u DE L’EGALITE DE DROIT A L’EGALITE SOCIALE

L’égalité, elle, est essentiellement une égalité dedroit (définie en 1792), et est une conditionindissociable de la liberté. L’égalité dont il estquestion dans cette transition du 19ème au 20èmesiècles se distingue de l’égalité telle qu’elle estentendue actuellement. Elle ne se réclame

durablementdelarépubliquedémocratique qu’aux débutsde la 3ème République. À cetitre des personnagespolitiques comme Jules Ferry(1832-1893), alors Présidentdu Conseil, se méfient toutautant des utopies socialescomme, selon lui, lesocialisme,quede labranchecatholiquedespartisansdelamonarchiedesonépoque.

Cen’estqu’àpartirdel’Entre-deux-guerres que laRépublique se réclame d’unerecherche de l’égalité sociale– inscritedans laconstitutionactuelle – même si cetteambition semble moinsaffirmée actuellement, dans

uncontexteoù les inégalitésaugmententetoù lamission sociale de l’État est parfois contestée.Cette référence à la «république sociale», sansêtre une exclusivité française, constitue tout demême une particularité contribuant à illustrer lesrelations complexes, parfois contradictoires, quiunissent les idéaux de liberté et d’égalité. A titrede comparaison, dans les pays anglo-saxons, laliberté individuelle, d’entreprise est biendavantagemiseenavant.

Lanotiond’égalitédeschancespermetégalementd’illustrer cette complexité, d’autant qu’elle visel’abolitiondeprivilèges.Danslebutdevaloriserlemérite, elle vise en principe un refus que lesconditionsdu succès soient soumisesà la chance.On comprend bien, là encore, que si on peut

“Le « Code de la route »

illustre parfaitement

l’organisation de la liberté. Il

établit ainsi les règles

définissant l’utilisation des

véhicules dans l’espace public.

Cette liberté ne pourrait être

effective chacun faisant « ce

qu’il veut » au mépris d’autrui

et de la sécurité collective. Il

ne serait dès lors plus possible

de circuler.”

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tendre à cet idéal, on ne peut jamais totalementl’atteindre. Ilestparailleursextrêmementdifficilede définir ce qu’on appelle «le mérite» - et parvoie de conséquence ce quien relève - tout en sachantquec’estune référencedonton ne peut pas vraiment sepasser si l’on est animé parunsoucidejustice.Lemérite,ce n’est pas strictementl’égalité, ce n’estcertainement pas«l’égalitarisme», ni le refusdes hiérarchies. Il désignedonc les inégalités quiprennent une forme qu’onest prêt à considérer commelégitime, même si on peuts’interrogersurlescritèresdece mérite. Les écrits deCondorcet (1792), surl’instruction sont assezéclairantsà ce sujet. Toutenindiquant l’importance del’École dans le projetrépublicain reposant sur unecitoyenneté nécessairementperfectible, il prend soin dedistinguer égalité etégalitarisme. L’idée centrale est qu’à traversl’instruction élémentaire, on doit dispenser lessavoirs accessibles et permettre la constructiond’unesprit critique. L’égalitéd’accèsà ces savoirsestdoncactée,pourtous-ycomprislesfemmes.Ilentend ainsi promouvoir le meilleur en chacun.Mais il n’affirme pas que tous les savoirs soientaccessibles à tous. Il s’agit de «donner à touségalementl'instructionqu'ilestpossibled'étendresur tous, mais ne refuser à aucune portion descitoyens l'instruction plus élevée, qu'il estimpossibledefairepartageràlamasseentièredesindividus». C’est en cela qu’il parle «d’élitismerépublicain»: il y a inévitablement une inégalitéd’instruction,maisellenedoitpasavoirpoureffetde fonder de nouveaux privilèges. Même si onpeut être tenté de déplorer que cet idéal servetrop souvent à dissimuler de façon hypocrite desinégalités qui demeurent des privilèges de fait.Mais il a le grand mérite de souligner le sens leplusprofonddelanotionrépublicained’égalité:àla fois le refus de toute forme de privilège et detouteformedediscrimination.

L’égalité vient également nourrir différentesobligations de l’Étatcomme celle de neutralitéinterdisant toute discrimination, tant sociale, quereligieuse ou politique, neutralité qui incombe à

l’ensemble de ses représentants (fonctionnaires).C’est aussi cet idéal d’égalité qui contribue àexpliquerquesoientaussipénaliséesdespratiques

privées de discriminations.L’égalité républicaine nesignifie donc pas que noussommestouségauxentouteschoses, mais elle entraîne aminima qu’aucune formed’inégalité ne mette qui quece soit en situation de semettreentraversdel’intérêtgénéral.

L’égalitéestdoncdedroit,etnon de fait,même si avec lapriseencompterelativementrécente de son acceptionsociale, elle évolueet justifiela mise en place demécanismes visant àcompenser les inégalités dedépart: les bourses d’étude,la parité élective danscertains scrutins, lesdispositions en faveurs deshandicapésparexemple.

Toutes les inégalités ne sontdonc pas opposées au

principe d’égalité de droit, mais ces inégalités nedoivent en aucun cas produire ou pérenniser desformes de domination et de despotisme. Celaimplique un débat constant, qui ne peutvéritablement être réglé dans le temps, sur leslimitesopposablesauxinégalités.

u FRATERNITE, SOLIDARITE, LE LIEN A L’HUMANITE

Si laFraternitéestbienunevaleurinscritedansladeviserépublicaine,présentedans laconstitution,la fraternité n’est cependant pas une réalitéjuridique. En effet, il n’existe aucune loi quil’impose et personne ne peut être poursuivi enjusticeparcequ’iln’estpasfraternel.

Si la liberté et l’égalité prennent une formejuridique, la fraternité demeure sans doute avanttoutessentiellementunevaleurmorale.Aumieux,elleinspiredespolitiquesetc’estsansdouteàellequeseréfèrel’idéedeRépublique«sociale»quiaétéà l’originede l’ÉtatProvidence initiéà l’Entre-deux-guerres, développée à la Libération etaujourd’huienpartieremiseencause.

La notion de fraternité reste ambiguë de partnotamment son étymologie. Ce terme est trèsprésentdanslevocabulairereligieux.D’autrepart,

Déclaration Universelle

des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

Article 6 : « la loi est

l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont

droit de concourir personnellement, ou par leurs

représentants, à sa formation. »

Article 10: « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions,

même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble

pas l'ordre public, établi par la loi. »

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la racine commune avec “frère”, laisse entendredes liensde sangentrechacun.Quel sensdonnerainsi à cette valeur ? Et concrètement, que peutsignifier la fraternité, siellenedoitpasdemeurerun simple mot? Quelles formes peut-elleprendre? La charité? La solidarité interne à ungroupe donné? L’engagement associatif ouhumanitaire? Le souci de la dignité de chacun,quelle que soit sa place dans la société, dans uncadre hiérarchique? La politesse? Et si lafraternitéconsistaitàtraitercommeunfrèreceluiquinel’estpas?

La fraternité serait fondamentalement liée àl’engagement personnel dans la solidaritéhumaine. Il existe une solidarité institutionnelle,dontundespremiersactesconsisteraitàpayersesimpôts (en exigeant qu’ils soient librementconsentis)envuedefinancercettesolidarité.Maisils’agitlàd’unesolidaritéquipeutêtrequalifiéede«froide», une des raisons sans doute pourlaquelle, elle n’est pas toujours consentie. Tandisque la fraternité est une solidarité plus affective,qui repose sur l’initiative individuelle: elle n’estpas obligatoire, mais elle est socialementindispensable. S’il est possible d’accuser l’État detrop imposer la population, de pratiquer destaxations inéquitables, d’utiliser l’argentpublicdefaçon injuste, un acte de fraternité, par contre,n’est que très rarement exposé aux mêmesaccusations. C’est par exemple la différence deniveau qu’il peut y avoir entre une gestionpolitique de l’immigration ou d’accueil desdemandeurs d’asile et les actes de solidaritéindividuelle qui s’adressent aux mêmes êtreshumains. De la même manière, il existe unedifférencenotableentre leseffetsproduitssur lespopulations par les statistiques et les réactionsfaceàdes réalitésconcrètes,parfoisvécues,dontces chiffres sont l’expression désincarnée. Laréaction massive et quasi unanime de l’opinionpublique face à la médiatisation de laphotographieduPetitAylan,enfantretrouvémortsur une plageméditerranéenne dans un contextedemigrationetd’exilenjuillet2015,témoignedecedécalage.Cemêmedécalageexistequandà laperception des chiffres globaux du chômage, lesprises de position de chacun sur les politiques àtenirenlamatière,etlesréactionspersonnellesaucontact de quelqu’un qui en est concrètementvictime.

Au bout du compte, la fraternité, c’est ce quicontribue à combler le hiatus existant - et quiexistera sans doute toujours - entre les idéauxde

liberté et d’égalité républicaines et la réalité. Legeste fraterneln’empêchepasque tout lemondenejouitpasdela libertéàlaquelleiladroit;tousles hommes ne sont non plus pas égaux en fait;mais elle rend ces écarts sinon plus justes, dumoins parfois plus vivables. La liberté et l’égalitésontdesvaleursqui inspirentuneréalitédedroit,sinon une réalité de fait, la fraternité est unevaleurmorale,maisquidèslorsqu’elleestpriseausérieux,permetdedonneràlalibertéetàl’égalitédavantagederéalité.

Lesvaleurs,constituentdesrepèresàconserveràl’esprit pour «faire société». Elles reposentessentiellementsurdesconvictions.Et,encoreunefois,ilyatoujoursunécartentrecesvaleursdontil est question et la réalité dans laquelle nousvivons.Pourautantcelan’autoriseaucuncynisme,ne disqualifie pas ces valeurs: elles restent desaspirationsetdesobjetsdedébatsquiparticipentàfonderlesloisrégissantlaRépubliqueetvisantàlesinscriretoujoursdavantagedanslaréalité.

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Page 11: Valeurs de la République - Pôle ressource

Les valeurs qui viennent d’être définies inspirentdesprincipes.Orsilesvaleurssontdesidéaux,lesprincipes sont au contraire beaucoup plusnettement affirmés et sont en généralcontraignants. Les principes, ce sont les loisfondamentalesquenousavonstousl’obligationderespecter, et, en cas contraire, il est possible d’ycontraindretoutepersonnerécalcitrante.

Les principes républicains les plus fondamentauxaujourd’hui sontdéfinis dans la constitutionde la5ème République, qui date de 1958. Plusprécisément,ilssontinscritsdanslepréambuledeladite constitution, reproduisant celui de la 4èmeRépublique. En cela, ils sont positionnés commedesrèglesabsoluesquidoiventêtrerespectéesau-dessusdetouteslesautres,nonseulementparlescitoyens,maiségalement,etpeut-êtresurtout,parles hommes et les institutions qui occupent despositionsdepouvoir.

Le respect de ces principes est de fait assuré pardes institutions spécifiques dont ce peut être lafonction essentielle, comme le Conseilconstitutionnelquiétudiechaque loiproduiteparle législateuretpeutêtreamenéà l’annulerpourdéfaut de constitutionnalité. D’autres institutionscomme le Conseil d’État et plus largementl’appareil judiciaire à travers ses tribunaux jouentaussi ce rôle de garant des lois et principesrépublicains. Ainsi, les tribunaux ordinairespeuvent être par exemple saisis lorsqu’unepersonne est victime d’actes discriminatoires auregarddel’obligationd’égalitédetraitement.

La constitution met en avant une multitude deprincipes. Ainsi, la France y est définie comme :«uneRépubliqueindivisible,laïque,démocratiqueetsociale.Elleassurel'égalitédevantlaloidetousles citoyens sans distinction d'origine, de race oudereligion.Ellerespectetouteslescroyances.Sonorganisationestdécentralisée.Laloifavorisel’égalaccès des femmes et des hommes aux mandatsélectoraux et fonctions électives, ainsi qu’auxresponsabilitésprofessionnellesetsociales.»

Ilnes’agitpasicidevaleurs,maisbiendeprincipesdont l’application prend une forme plus concrèteetcontraignante.Onpeutseprésenterdevantuneinstancejudiciairepourfairevaloirquel’undecesprincipes n’a pas été respecté dans telle ou telle

circonstance. Il est question ici, plusparticulièrement, des notions de laïcité etd’indivisibilité.

u QUELQUES MOTS SUR LA LAÏCITE

Chaque principe, mais aussi chaque texte de loi,peut faire l’objet d’un examen visant à définir enquoi il relève, ou non, des valeurs de liberté,d’égalitéetdefraternité.Ainsilalaïcité,-devenueconstitutionnelle en 1946,mais déjà énoncée parlaloien1905etpréciséeen2004-estàlafoisunprincipe de liberté, d’égalité et s’inscrit dans unedémarchefraternelle.Elleneseraabordée iciquetrès rapidement, puisque la question estapprofondie dans le cadre des formations laïcitémisesenplaceparailleurs.

En effet, ce principe affirme la liberté de tous lescultes,libertégarantieparl’Étatetdansleslimitesdes règles républicaines, tout en accordant àchacun de ces cultes une égalité de traitement.L’État ne reconnaît aucun culte en particulier ets’engage à n’en privilégier aucun. Non qu’il n’enreconnaisse pas l’existence, mais il s’interdit des’immiscer dans leur fonctionnement, dans leslimites de l’ordre public. C’est la condition d’unecertaineharmonieentre croyantsetnoncroyantsainsiqu’entrechaquepratiquecultuelle.

L’existence de ce principe n’empêche pas lesdiscussions, voire les instrumentalisationspolitiques. Mais la référence est ici juridique: cen’estpasunevaleur,c’est la loi.Cependant, ilestabsurdede séparer la laïcitédesvaleursquesontla libertéet l’égalité.Sansréférenceàcesvaleurs,danslesquellesellepuisesonorigineetqu’elleviseàmettreenapplication,dumoinsdanslatraditionfrançaise, elle risque d’être vidée de sens.Évidemment, il convient de le rappeler, la laïcité«à la française» ne peut pas non plus êtrecomprise si on ne la réinscrit pas dans l’histoirenationalequiluiadonnénaissance.Enparticulier,la question de la laïcité de l’État n’a pasexactement aujourd’hui les mêmes enjeux queceuxqu’elleavaitauXIXèmesiècle,où ils’agissaitde préserver la République des prétentions d’uncertain catholicisme à s’immiscer dans l’exercicedupouvoirpolitique.

Les principes républicains, quand les valeurs sont mises en application

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u L’INDIVISIBILITE DE LA REPUBLIQUE

Que la France soit une république indivisible, -autre principe fondamental -, signifie qu’aucunepartie ne peut accaparer la souveraineté, celle-cirepose sur l’ensemble du peuple, sans aucunedistinction ni partition possibles. C’est donc unprincipe qu’on peut opposer à tout individu,groupe social ou communauté qui prétendraitavoir des droits que d’autres n’auraient pas. Ilcontribue d’ailleurs à expliquer la difficulté àenvisager des politiques de discriminationspositives,commecelaexisteauxÉtats-Unis.

Ce principe d’«indivisibilité» interdit l’existencede privilèges et garantit pour toutes et tous,l’égalitédedroitsdevant lepouvoiret la loi.Acetitre, une loi - même votée à l’unanimité -, quiattribueraitdesdroitsàunepartiedupeupleetlesrefuserait à d’autres serait immédiatementannulée, car contraire à la constitution. Pour les

mêmes raisons, une loi qui cibleraitspécifiquementunepartiedelapopulationsubiraitun sort identique. Autre exemple, un citoyenestimant qu’une administration qui s’exerce aunomdel’État(parexemplel’École)neletraitepasdefaçonconformeauxprincipesdelaRépublique,outoutsimplementconformémentauxloisquiendécoulent, peut faire appel aux tribunauxadministratifs et en dernier recours, au Conseild’État. Il existe donc un certain nombred’institutions dont la mission est d’assurer lerespectdesprincipesdelaRépublique.

Lesprincipesrépublicainsénoncentdonclesrèglesfondamentalesquisontnécessaires,surunmêmeterritoire, au bien commun de tous les membresdelanation:lescitoyens,quellesquesoientleursdifférences par ailleurs. Les lois sontsystématiquement lues et validées au regard deces principes au fondement de la Républiquefrançaise qui ne peuvent être transgressés.

Principe

Cequiestà l'originedequelquechose,quienestlacausepremière:«Dieuestleprincipedetoutechose».

Propositionfondamentale,loi,règledéfinissantun phénomène dans un domaine d'études:Principed'Archimède.

Base sur laquelle repose l'organisation dequelque chose, ou qui en régit lefonctionnement: Classement établi sur leprincipedel'ordrealphabétique.

Proposition fondamentale, hypothèse qui sertde base à un raisonnement, qui définit unmoded'action:Sijeparsduprincipequ'iln'estjamaisenretard,sonabsenceestinquiétante.

Règle définissant une manière type d'agir etcorrespondant le plus souvent à une prise depositionmorale:«Jerefusetoujourscegenred'invitation,c'estunprincipe».

Élément constitutif de quelque chose: «Quelestleprincipeactifdeceproduit?»

Point, fait, position définissant l'essentiel, labase de quelque chose: «Être d'accord sur leprinciped'unenégociation».

Mélangeoucomposéextraitd'unesubstancevégétaleouanimale.

Idéesstructurantes:Loi–Origine–Règle–Constitutif–Essentiel

Valeur

Vientdu latin«valor», dérivéde«valere» quisignifie«êtrefort,puissant,vigoureux».

Cequevautunobjetsusceptibled'êtreéchangé,vendu, et, en particulier, son prix en argent:Terrainquiadoublésavaleur.

Équivalent d'unequantité:Ajoutez lavaleurdedeuxcuilleréesderhum.

Mesure conventionnelle attachée à quelquechose, àunsymbole,àunsigne: Lavaleur descartesàjouer.

Ceparquoiquelqu'unestdigned'estimesur leplan moral, intellectuel, professionnel, etc.:Recruedegrandevaleur.

Caractère de ce qui remplit les conditionsrequises pour être valable: Sans signature, cetacten'aaucunevaleur.

Caractèredecequiproduitl'effetvoulu:Valeurd'uneméthode.

Importance, prix attaché subjectivement àquelque chose : Attacher de la valeur à dessouvenirsdefamille.

Ce qui est posé comme vrai, beau, bien, d'unpoint de vue personnel ou selon les critèresd'unesociétéetquiestdonnécommeunidéalàatteindre, comme quelque chose à défendre:Nousavionsdessystèmesdevaleursdifférents.

Idéesstructurantes:Quantifier–Différencier–Juger–Distinguer–Hiérarchiser

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BienquelaLaïciténefûtpaslesujetprincipaldecetterencontre,elleaoccupél’intégralitédeséchangesdeclôture. Les questionnements relatifs à ce principe ont concerné différents domaines: éducation (scolaire),monde professionnel (relations entre collègues), lieux publics (piscine). Ces interrogations appellent à uneclarificationd’unprincipe juridico-politiquequi,depuis la loide1905,aperduen lisibiliténotammentdufaitd’uncontextemédiatico-politiquealimentantlaconfusion.Lestexteslégislatifs,sanspourautantdonneruneréponseàchaquesituation,constituentunebasedecompréhensionetd’interprétation.

LedevoirdeNeutralitéFerdinandBuisson,undespèresdelaloide1905,définit la laïcité comme«l’État neutre entre touslescultes,indépendantdetouslesclergés,dégagéde toute conception théologique.» Cetteneutralité confessionnelle s’applique auxpolitiques, aux bâtiments et aux agents publics.C’estuneneutralitépar«abstention».La neutralité religieuse ne s’applique pas auxentreprises privées, comme c’est le cas dans lecadre de la fonction publique.

L’usagedesPiscinesmunicipalesLe principe de non-discrimination interdit auxcollectivités d’octroyer un créneau horaire enheures ouvrables à un groupe de personnesmettant en avant leur souhait de se séparer desautres du fait de leur pratique ou de leurconvictionreligieuse.Une demande de cours de sport reservés auxfemmesdans l’intentiondepromouvoir l’accèsdefemmes à la pratique sportive et aux loisirs estlégitime. Il ne pourra pas être demandé que leprofesseur soit une femme ou un homme. La loiautorise«lesdiscriminations fondéesenmatièresd’accès aux biens et services sur le sexe lorsquecette discrimination est justifiée par la promotiondel’égalitédessexesoudesinterêtsdeshommesou des femmes, la liberté d’association oul’organisation d’activités sportives» (code penal,art.225-3).Une piscine peut être reservé à des activitésspécifiques(bébénajeurs,aquagym...).

Lecodedel’éducation«Danslesécoles,lescollègesetleslycéespublics,leportdesignesoutenuesparlesquels lesélèvesmanifestent ostensiblement une appartenancereligieuse est interdit. Le règlement intérieurrappelle que la mise en oeuvre d’une procéduredisciplinaire est precedé d’un dialogue avecl’élève»(L.141-5-1).Le code l’éducation précise que, dansl’enseignement supérieur, les usagers du servicepublic peuvent exercer la liberté d’information etd’expression à l’égard des problèmes politiques,économiques sociaux et culturels dans desconditionsquinetroublentpasl’ordrepublic.Toutedissimulationduvisagedansl’espacepublic(voies publiques, lieux ouverts au public ouaffectésàunservicepublic,autrementditleslieuxouverts aux publics) est prohibée par la loi de2010.

Ce qui interpelle

La laïcité est un système juridico-politique qui instaure la separation entre le pouvoir politique et le pouvoir religieux. Elle garantie à la fois la neutralité de l’État et sa non-gérance dans les affaires religieuses. Extraits: « La République ne reconnait, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte », « Elle assure la liberté de conscience et garantit le libre exercise des cultes ». La laïcité en 3 minutes : https://www.youtube.com/watch?v=fx50d_aqaUo

La loi de 1905

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Égalité

Qu’est-cequ’uneinégalitéacceptable?

Lesinégalitéscontribuent-ellesàfragiliserlepacterépublicain?

Commentassureruneégalitéréelle

d’accèsauxdroits?

Les enjeux en question

Liberté

Queléquilibreentrel’intérêtgénéraletl’intérêtprivé?

Faut-ilorganiserleslibertés?

Sioui,comment?Etavecqui?

Fraternité

Quelleplacepourlafraternitédansdessociétésindividualistes?

Qu’est-cequ’unactefraternel?

Commentlerendrevisible,lepromouvoiretpourquoi?

Lerapportàautruipeut-ilêtrepensé

endehorsdessphèresfamilialeouamicale?

Enjeux/Risques

u Figerlesvaleurs u Instrumentaliserles

valeursu Décrédibiliserlesvaleurs

u Adhérerauxvaleursn’estjamaisacquis u PenserlesvaleursdelaRépubliqueauregardducontextehistorique u Prendreencompteladimensiondel’intérêtgénéraletledéfinir

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Page 15: Valeurs de la République - Pôle ressource

Ouv

rages

Sites

Audios/Vidé

os

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LaLaïcitéças’apprend.MarineQuenin,1ernovembre2015,8min53.http://www.tedxparis.com/jouer-pour-mieux-comprendre-religions-et-laicite/

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Observatoiredelalaïcitéhttp://www.gouvernement.fr/observatoire-de-la-laicite

LaïcitéetenseignementdanslaRépubliquefrançaisehttp://www.educasources.education.fr/fiche-detaillee-187074.html

LesvaleursdelaRépubliquehttps://www.reseau-canope.fr/les-valeurs-de-la-republique.html

Sélection de ressources

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PôlederessourcesVilleetdéveloppementsocialduVald'Oise–39,ruedesBussys–95600EaubonneTél:01.34.05.17.17▪Mail:[email protected]▪Site:www.poleressources95.org

Mettreenréseau

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