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Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural des Eaux et des Fôrets Ecole Nationale des Ponts et Chausssées DEA Sciences et Techniques de l’Environnement Thomas ESCLAFFER ETUDE THEORIQUE DE LA FORMATION DES DEBITS DE CRUES A L’ECHELLE DU VERSANT Laboratoire d’accueil : CEREVE – ENPC Centre d’Enseignement et de Recherche Eau Ville Environnement 6-8 av. Blaise Pascal, Cité Descartes, Champs sur Marne 77455 marne La Vallée Cedex 2 Mémoire présenté le 30 juin 2003 à l’Université Paris XII – Val de Marne Maître de stage : Eric GAUME Enseignant superviseur : Gérard DEGOUTTE

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Université paris XII - Val de MarneEcole Nationale du Génie Rural des Eaux et des Fôrets

Ecole Nationale des Ponts et Chausssées

DEASciences et Techniques de l’Environnement

Thomas ESCLAFFER

ETUDE THEORIQUE DE LA FORMATION DESDEBITS DE CRUES A L’ECHELLE DU VERSANT

Laboratoire d’accueil : CEREVE – ENPCCentre d’Enseignement et de Recherche Eau Ville Environnement

6-8 av. Blaise Pascal, Cité Descartes, Champs sur Marne77455 marne La Vallée Cedex 2

Mémoire présenté le 30 juin 2003à l’Université Paris XII – Val de Marne

Maître de stage : Eric GAUMEEnseignant superviseur : Gérard DEGOUTTE

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Remerciements

Mes remerciemments vont d’abord à ceux dont la confiance et l’intervention a permis

que je puisse poursuivre dans cette aventure qu’est la recherche : Hervé Andrieu et Eric

Gaume. J’espère sincèrement que nos collaborations pourront se prolonger.

A Patrick Dangla qui m’a donné de son temps et m’en a fait gagner par l’excellence de

BiL !

A Emmanuel Berthier et Gérard Degoutte qui m’ont suivi, soutenu et sagement conseillé

tout au long de ce travail.

Aux membres de l’ARC Dynas, qui ont donné à ce travail de recherche déja passion-

nant quelques perspectives enthousiasmantes.

A tous ceux, chercheurs, enseignants, techniciens, doctorants, stagiaires qui font du

CEREVE un lieu d’épanouissement, d’échanges et de travail.

A Barbara, Virginie, Dan, Rafik avec qui ont été partagés angoisses, stress et bonne

humeur dans cette petite communauté de la salle P109.

A Annick et Catherine, toujours souriantes et attentionnées.

A mes parents dont le soutien est infaillible, malgré le prolongement de ma vie estu-

diantine.

A Thibault et l’IHSC qui savent me rappeler les vertus sociales de l’hydrologie...

A Nicolas pour sa touche finale apportée à ce mémoire.

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Résumé

Les expériences de séparation isotopique ont mis en évidence l’importante contribution

des écoulements souterrains aux débits de crue. Les zones contributives saturées à proxi-

mité des thalwegs semblent être un lieu privilégié de génèse des écoulements superficiels

et souterrains sur le versant.

Afin de permettre une analyse approfondie du fonctionnement de ces zones, un modèle

numérique couplant les écoulements superficiels (équation d’onde de crue diffusante) et

souterrains (équations de Richards) à l’échelle du versant a été développé dans le cadre

de ce DEA.

Pour valider le modèle, des simulations ont été réalisées à partir de données d’expéri-

mentations sur modèle réduit extraites de la littérature. Les contributions respectives du

ruissellement direct et de l’exfiltration de nappe de versant sont reproduites correctement à

l’équilibre. Par contre, faute de connaissance complète des paramètres hydrodynamiques

du sol, les cinétiques de réponse ne sont pas reproduites. Des explorations réalisées sur

différents types de sol mettent en évidence la grande sensibilité de la réponse du système

«versant» aux propriétés hydrodynamiques du sol.

Le modèle développé permet désormais d’envisager un étude exhaustive de l’influence

des différents paramètres (propriétes hydrodynamiques, profondeur de sol, pente, inten-

sité de pluie, conditions initiales) sur la réponse hydrologique du versant.

Mots Clefs : crues, modèle hydrologique, versant, zone contributive saturée, ruisselle-

ment, écoulement souterrain, frange capillaire.

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Abstract

Experiences of isotopic separation have demonstrated the important contribution of

subsurface flows to flood discharge. Saturated source areas near the streamflow seem to

constitute a priviledged generation area of overland and subsurface flows on the hillslope.

In order to permit a detailed analysis of the functioning of such areas, a numeric hil-

lsplope model coupling overland (diffusive wave) and subsurface flows (Richards’ equa-

tions) has been developed.

In order to validate the model, we performed simulations based on experimental data

of reduced models taken from the litterature. Respective contributions of direct runoff and

water table exfiltration are correctively reproduced in equilibrium. On the other hand, due

to incomplete knowledge of soil hydrodynamic parameters, response kinetics are not well

represented. Trials realized on different soil types demonstrate the important sensitivity

of the hillslope response relatively to soil hydrodynamic properties.

In the future, the developped model will serve as basis for an exhaustive study on

the influence of different parameters (hydrodynamic properties, soil thickness, slope, rain

intensity, initial conditions) on the hillslope’s hydrological response.

Key words : floods, hydrological model, hillslope, saturated source area, overland flow,

subsurface flow, capillary fringe.

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Table des matières

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . i

Résumé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ii

Abstract . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iii

Table des matières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iv

Table des figures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vi

Liste des tableaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . viii

Introduction 1

1 Les processus de genèse des crues 3

1.1 Les écoulements superficiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.1.1 La battance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.1.2 Le ruissellement par saturation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

1.2 Les écoulements souterrains . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2.1 Dynamique de l’exfiltration des nappes . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2.2 Les écoulements hypodermiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.2.3 Les écoulements en macropores . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.2.4 L’intumescence de nappe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.2.5 L’écoulement dans les zones contributives saturées . . . . . . . . 10

1.3 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

2 Méthodologie 13

2.1 A propos de la modélisation physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

2.1.1 Approche réductionniste et systémique . . . . . . . . . . . . . . 13

2.1.2 L’approche réductionniste à l’échelle du versant . . . . . . . . . . 13

2.2 A propos du ruissellement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

2.2.1 La physique du ruissellement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

2.2.2 Simplification des équations de Barré de Saint-Venant . . . . . . 17

iv

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TABLE DES MATIÈRES v

2.3 A propos du l’écoulement souterrains . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

2.3.1 Le milieu poreux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

2.3.2 La physique de l’écoulement en milieu poreux . . . . . . . . . . 19

2.4 Définition du problème physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2.4.1 Géométrie du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2.4.2 Couplage des écoulements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

2.4.3 Paramètres du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

3 Résultats 23

3.1 Modèle numérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3.1.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3.1.2 Module d’écoulement de surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3.2 Confrontation du modèle complet aux expériences . . . . . . . . . . . . . 24

3.2.1 Cas-Test . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

3.2.2 Calage du coefficient de Strickler . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

3.2.3 Conditions initiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

3.2.4 Propriétés du sol . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

3.2.5 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

4 Conclusion - Perspectives 35

Bibliographie 37

Annexes 40

A BiL 41

A.1 Au coeur de BiL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

A.1.1 Discrétisation du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

A.2 Module d’écoulements souterrains . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

A.2.1 Discrétisation temporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

A.2.2 Discrétisation spatiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

A.3 Module de ruissellement de surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

A.3.1 Discrétisation temporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

A.3.2 Discrétisation spatiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

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Table des figures

1.1 Le ruissellement Hortonien (Freeze, 1974). . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.2 Les stades de dégradation de la surface du sol d’après Boiffin. . . . . . . 5

1.3 Suivi de l’évolution des surfaces saturées au cours d’un épisode pluvieux

dans un petit bassin versant japonais de 2,2 hectares (Tanaka et al., 1988). 7

1.4 Versant théorique utilisé par Sklash et Farvolden (Sklash and Farvolden,

1979), évolution de la nappe (a) et du débit d’exfiltration (b) au cours du

temps (conductivité hydraulique à saturation du sol de 1,82.10−2cm/s et

épaisseur de la frange capillaire de 39cm). . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

1.5 Représentation schématique de l’influence de la frange capillaire sur les

mécanismes d’écoulement souterrain de crue : (a) avant la pluie, (b) peu

de temps après le début des pluies (Gillham, 1984). . . . . . . . . . . . . 10

1.6 Ecoulements à l’équilibre à travers un versant expérimental de 140 centi-

mètres de long constitué de sable (conductivité hydraulique à saturation :

9.10−5m/s, épaisseur de la frange capillaire 35 centimètres), et hydro-

grammes de réponse du versant à des intensités variées (Abdul and Gill-

ham, 1984). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

2.1 Division du planFo, ko où les approximations peuvent se substituer vala-

blement aux équations complètes de Barré de Saint-Venant (Daluz-Vieira,

1983). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

3.1 Débit massique à l’exutoire du plan incliné lors du cas test confrontant la

solution analytique du problème (onde cinématique) et la solution numé-

rique (onde diffusante). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

3.2 Comparaison des lignes d’eau de la solution analytique à l’équilibre et

des solutions numériques du modèle d’onde diffusante (VF) calculées à

différents instants. La pluie cesse à partir det = 1000s. . . . . . . . . . 26

vi

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TABLE DES FIGURES vii

3.3 Ajustement des paramètres de Van Genuchten sur quelques points de la

courbe d’humidité expérimentale du sol Perch Lake Sand utilisé dans les

expériences d’Abdul et Gillham. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

3.4 Comparaison des hydrogrammes expérimentaux aux hydrogrammes si-

mulés pour différentes valeurs de coefficients de rugosité. (a) Expérience

1, intensité de pluie 43mm/h. (b) Expérience 2, intensité de pluie 19mm/h. 29

3.5 Influence de la hauteur de la nappe initiale sur la formation du ruissellement. 30

3.6 Séparation des hydrogrammes en une composante superficielle (eaux nou-

velles) et souterraine (totalité des eaux anciennes mélangées à des eaux

nouvelles ayant transitées par le sol). (a) Intensité de pluie 43mm/h. (b)

Intensité de pluie 19mm/h. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

3.7 Propriétés hydrodynamiques des sols modélisés : (a) Saturations relatives.

(b) Perméabilités relatives. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

3.8 Sensibilité du modèle numérique aux paramètres hydrodynamiques du sol. 33

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Liste des tableaux

3.1 Solution analytique par la théorie de l’onde cinématique. . . . . . . . . . 25

3.2 Propriétés hydrodynamiques du sable expérimental selon la paramétrisa-

tion de Mualem et Van Genuchten. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

3.3 Propriétés hydrodynamiques des sols «types» utilisés. . . . . . . . . . . . 31

viii

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Introduction

La formation des crues suscite un certain nombre de questions. Dans les petits cours

d’eau soumis à des pluies intenses, les crues se traduisent par des réactions rapides des

bassins versants avec des débits spécifiques élevés. Les écoulements rapides, contribuant

à la crue, sont généralement attribués au ruissellement superficiel produit par dépassement

de la capacité d’infiltration du sol, ou généré sur des zones contributives saturées. Mais,

dans un certain nombre de cas, cette interprétation est en contradiction avec les observa-

tions : débits observés, signature géochimique des débits, dynamique de la crue. D’autres

mécanismes entrent en jeu et sollicitent rapidement des volumes importants d’eau du sol

(issue de la zone non-saturée ou la nappe). Compte tenu des ordres de grandeurs des vi-

tesses d’écoulement dans les milieux poreux, pour rejoindre rapidement le cours d’eau,

l’eau pré-évenementielle doit s’exfiltrer rapidement du sol et ruisseller en surface. Sinon,

soit elle suit des chemins préférentiels dans le sol, soit elle se trouve déja à proximité des

thalwegs avant l’évènement pluvieux.

Plusieurs théories ont étés avancées pour expliquer cette rapide contribution «souter-

raine». L’une d’elle fait l’hypothèse que des écoulements, importants et rapides, peuvent

se produire dans les zones saturées à l’aval du versant, sous l’influence des infiltrations

d’eau se produisant à l’amont du versant. Cette hypothèse, qui a été verifiée expérimenta-

lement sur modèle réduit, mérite d’être approfondie. Dans cette perspective, une modéli-

sation numérique des écoulements d’eau sur le versant aiderait à comprendre l’organisa-

tion spatiale et temporelle des processus mis en oeuvre dans l’écoulement rapide en bas

de versant.

Dans un premier temps, nous nous proposons par une revue bibliographique de pré-

senter les mécanismes proposés à l’échelle du versant ainsi que les processus physiques à

modéliser et leur localisation.

Dans la deuxième partie du travail la physique du problème est explicitée. Nous y

décrivons les équations physiques à résoudre, leurs champs d’application, leurs simplifi-

cations ainsi que leurs limites. Un cadre théorique précis est alors à notre disposition pour

1

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Introduction 2

mener une analyse critique des résultats du modèle.

La dernière partie du travail est dédiée à la validation du modèle. Des expériences me-

nées sur modèle réduit en laboratoire nous fournissent les informations nécéssaires pour

permettre de réaliser des simulations et les confronter aux observtations expérimentales.

Sur cette base une étude de sensibilité du modèle est menée pour chaque paramètre du

modèle : propriétés d’écoulement sur la surface du sol, propriétés hydrodynamiques du

sol, conditions initiales.

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Chapitre 1

Les processus de genèse des crues

C’est à Horton (1933) que l’on doit la première formulation d’un processus physique

expliquant la formation du ruissellement contribuant à l’écoulement rapide de crue.

Selon ce concept, la capacité d’un sol à infiltrer les précipitations est limitée par une

courbe caractéristique, exponentiellement décroissante au cours du temps, et minorée par

un taux d’infiltration constant.

Dès que l’intensité de pluie dépasse cette capacité d’infiltration, l’écoulement de sur-

face se produit sur le versant et le refus d’infiltration alimente la crue du cours d’eau

(figure 1.1).

Si ce modèle s’est très vite répandu au sein de la communauté hydrologique par sa

simplicité, il s’applique surtout aux régions arides où les orages sont intenses et la surface

du sol souvent couverte d’une croûte imperméable.

Dans les régions tempérées son application est plutôt contestée. D’une part, le ruissel-

lement direct est rarement observé, et quand il l’est, il est localisé du fait de l’hétérogénéité

spatiale de la pluie et des propriétés intrinsèques du sol. Le volume d’eau excédentaire

peut soit contribuer au débit de crue soit au contraire s’infiltrer plus en aval sur le versant

(Betson, 1964). Localisé, ce processus ne peut à lui seul expliquer la totalité des volumes

contribuant à la crue.

D’autre part, des crues sont observées lors d’évènements pluvieux dont les intensités

sont faibles et largement inférieures aux capacités d’infiltration des sols les moins per-

méables des bassins versants. D’autres processus sont alors à l’oeuvre.

Enfin différentes expériences de séparation isotopique (Sklash and Farvolden, 1979;

Hubert, 1989; Ribolzi et al., 2000; Winston and Criss, 2002) suggèrent qu’une propor-

tion importante des écoulements de crues a transité par le sol. Lors de crues courantes,

cette contribution souterraine représente 30% à 70% du volume de crue. Compte tenu des

3

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Les processus de genèse des crues 4

FIG. 1.1 – Le ruissellement Hortonien (Freeze, 1974).

connaissances que l’on a des vitesses de transfert de l’eau dans le sol ( quelquesdm/h

à quelquesmm/h), il est difficile d’envisager que l’eau infiltrée sur le versant rejoigne, à

travers le sol, le cours d’eau suffisamment rapidement pour contribuer à la crue. D’autres

processus ont été proposés pour résoudre cette apparente contradiction. Nous nous propo-

sons ici de présenter les concepts majeurs de la genèse des écoulements de crues, impli-

quant des processus superficiels et souterrains. Les contributions respectives de ces pro-

cessus, en période de crues, sont encore discutés au sein de la communauté scientifique

comme en témoigne les revues sur ce sujet (Ambroise, 1998; Cosandey, 1990; Freeze,

1974).

1.1 Les écoulements superficiels

1.1.1 La battance

Ce processus de formation du ruissellement se produit lorsque le sol est peu ou mal

couvert par la végétation. «La pluie provoque une déstructuration de l’état de surface du

sol, sous la forme d’«organisations pelliculaires superficielles». L’impact des gouttes de

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Les processus de genèse des crues 5

FIG. 1.2 – Les stades de dégradation de la surface du sol d’après Boiffin.

pluie provoque un tassement de la surface du sol, un éclatement des agrégats et une redis-

tribution des particules les plus fines en surface, conduisant à la fermeture progressive des

pores et à l’imperméabilisation du sol. Sur la croûte structurale ainsi constituée, un ruis-

sellement diffus se produit, entraînant les particules du sols dans les micro-dépressions.

Les particules se déposent alors en couches stratifiées renforçant l’imperméabilisation du

sol (cf figure 1.2). . . Lors de la formation de telles structures, ce n’est pas la conductivité

hydraulique du sol qui constitue la limite à l’infiltration mais celle de la couche de surface,

qui peut se modifier très rapidement.»(Cosandey, 1990)

Ce processus est spécifique des sols nus ou quasi-nus : sols agricoles travaillés, sols

des régions arides et semi-arides, chemins de terre (Hillel, 1984). En effet l’interception

de la couverture végétale diminue l’effet déstructurant de l’impact des gouttes de pluies

et les racines des végétaux stabilisent le sol superficiel. La battance est une propriété

souvent associés au sols limoneux, appauvris en éléments cohésifs ou structurants (argiles

et humus).

1.1.2 Le ruissellement par saturation

Deux processus de formation du ruissellement direct ont été abordés : le ruissellement

par fermeture de la porosité de la surface du sol (battance) et le ruissellement hortonien

par dépassement de la capacité d’infiltration intrinsèque du sol.

Dans ces processus, c’est la saturation du haut du profil de sol qui génère le ruisselle-

ment, le rôle prépondérant revient alors à l’intensité de pluie.

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Les processus de genèse des crues 6

Le ruissellement peut aussi se produire lorsque tout le profil de sol se sature soit par re-

montée progressive de la nappe, alimentée par les écoulements souterrains, soit parce que

le sol est localement peu profond ou la nappe suffisamment proche et le cumul de pluie

suffisant pour saturer le profil de sol. Ces zones contributives variables se localisent géné-

ralement dans les fonds de vallons à proximité des cours d’eau. La présence d’une nappe

peu profonde y favorise la saturation rapide du sol. Ces zones s’étendent et régressent au

cours de l’évènement pluvieux selon le volume d’eau stocké sur le bassin.

Elles peuvent aussi apparaître sur les versants dans les secteurs où le sol est peu profond

et la roche mère imperméable (Cosandey, 1994).

En général les surfaces contributives occupent une proportion relativement limitée du

bassin versant (figure 1.3). Mais dans des cas extrêmes et des géométries particulière de

bassin, ces zones peuvent s’étendre sur la totalité du bassin versant comme sur le bassin

de la Late au Mont Lozère (Cosandey, 1994).

Ce concept développé progressivement depuis les années 60 par Capus puis Dunne et

Black (Cosandey, 1990; Freeze, 1974) fait aujourd’hui l’objet d’un consensus assez large

au sein de la communauté hydrologique. Mais les mécanismes de sa formation restent

mal connus et discutés (saturation par les pluies incidentes, par remontée de la nappe

sous-jacente au cours de la crue).

Dans sa formulation la plus simple, ce concept suppose que l’écoulement superficiel

est le mécanisme principal d’alimentation de la crue et n’explique pas l’importante contri-

bution d’eau du sol mise en évidence par les expériences de séparation isotopique.

1.2 Les écoulements souterrains

1.2.1 Dynamique de l’exfiltration des nappes

Concernant la contribution des nappes, Freeze résume l’idée largement répandue chez

les hydrologues : «L’écoulement souterrain est rarement la cause des ruissellements im-

portants lors des orages. Son rôle principal consiste à soutenir le débit des cours d’eau

durant les étiages entre les périodes pluvieuses et la fonte des neige . . . ».

En effet, compte tenu des lois d’écoulement et des temps de réponses qu’impliquent

les conductivités hydrauliques des sols, les écoulements sont trop lents pour contribuer si-

gnificativement à l’onde de crue. Les travaux de Keith Beven (1982) à ce sujet confortent

cette hypothèse. Une réponse rapide des nappes de versant ne peut être envisagée que

dans le cas où la nappe est proche de la surface, et la conductivité hydraulique à satura-

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Les processus de genèse des crues 7

FIG. 1.3 – Suivi de l’évolution des surfaces saturées au cours d’un épisode pluvieux dans

un petit bassin versant japonais de 2,2 hectares (Tanaka et al., 1988).

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Les processus de genèse des crues 8

tion élevée.

Finalement la contribution des nappes accompagne la décrue et le tarissement des cours

d’eau, mais ne semble pas expliquer les volumes d’eau ayant transité dans le sol et parti-

cipant à l’onde de crue.

1.2.2 Les écoulements hypodermiques

C’est le premier processus invoqué pour tenter d’expliquer cette contribution souter-

raine rapide de crue. Certains auteurs comme Hewlett & Hibbert (1963) travaillant sur des

bassins versants forestiers ont suggéré que l’horizon superficiel du sol (humus, horizon

exploré par les racines), plus perméable, pourrait être une zone d’écoulement préférentiel.

Du fait de la diminution de la porosité en profondeur, la percolation verticale serait

ralentie voire bloquée. Un niveau plus humide, voir une nappe perchée, pourrait se déve-

lopper. Un écoulement latéral le long du versant pourrait alors rejoindre le cours d’eau.

Ce mécanisme souffre des mêmes limitations que les écoulements de nappes, les conduc-

tivités observées restent, en général, insuffisantes pour que l’ensemble du versant contri-

bue à l’écoulement de crue. De plus, il faut une très forte anisotropie verticale de la

conductivité pour que l’écoulement privilégié ne soit plus vertical. Comme les écoule-

ments de nappe, ce mécanisme s’il est significatif participe plutôt au tarissement.

1.2.3 Les écoulements en macropores

D’autres auteurs ont suggéré que, dans ces horizons superficiels, des macropores (conduits

creusés par la macrofaune, espaces libérés après la décomposition des racines) pouvaient

constituer des drains naturels ou des lieux préférentiels d’infiltration. Dans certains cas,

les fissures de la roche mère semblent jouer un rôle de drain du sol et du sous-sol.

Les bassins où ces mécanismes sont bien appréhendés et contribuent significativement

aux crues restent isoléspeu nombreux. Cependant on retiendra de ces travaux, l’hétérogé-

néité du sol et du sous-sol, ainsi que la variabilité spatiale de la perméabilité qui peuvent

contribuer à un drainage plus rapide que l’écoulement simplifié de Darcy.

1.2.4 L’intumescence de nappe

Ce mécanisme a été proposé par Sklash et Farvolden (1979) pour expliquer la contri-

bution de l’écoulement souterrain au débit des crues.

Lorsque la nappe est proche de la surface, la percolation verticale de l’eau dans les

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Les processus de genèse des crues 9

FIG. 1.4 – Versant théorique utilisé par Sklash et Farvolden (Sklash and Farvolden, 1979),

évolution de la nappe (a) et du débit d’exfiltration (b) au cours du temps (conductivité

hydraulique à saturation du sol de 1,82.10−2cm/s et épaisseur de la frange capillaire de

39cm).

horizons superficiels non-saturés du sol peut rapidement rejoindre la nappe et contribuer

localement à l’élévation de son niveau, et ce d’autant plus que le sol permet le dévelop-

pement d’une frange capillaire au dessus de la surface libre de l’aquifère.

Avec ces apports différenciés dans le temps et l’espace, un gradient de charge se déve-

loppe et engendre un écoulement souterrain latéral qui alimente le cours d’eau. La vitesse

de réaction de ce mécanisme dépend principalement du temps de percolation de l’eau de

pluie jusqu’à la nappe, plus celle-ci est proche de la surface plus la réaction est rapide.

L’évolution des débits mis en jeux par ce processus est directement proportionnelle

au gradient de charge qui s’est instauré, conformément à la loi de Darcy. Ce mécanisme

ne nécessite pas la saturation totale du profil de sol, même à proximité immédiate des

thalwegs.

D’après les expérimentations numériques de Sklash et Farvolden (cf figure 1.4), les

débits susceptibles d’être générés sont relativement variables selon la géométrie des ver-

sants. Dans la situation la plus «favorable» l’écoulement souterrain contribue jusqu’à 70

% de l’écoulement rapide de crue, tous mécanismes confondus ; il faut cependant préci-

ser que le sol utilisé présente une conductivité hydraulique (ks = 1,86.10−4 m/s soit 670

mm/h) très supérieure à l’intensité de pluie, déjà forte (67mm/h pendant deux heures).

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Les processus de genèse des crues 10

FIG. 1.5 – Représentation schématique de l’influence de la frange capillaire sur les mé-

canismes d’écoulement souterrain de crue : (a) avant la pluie, (b) peu de temps après le

début des pluies (Gillham, 1984).

1.2.5 L’écoulement dans les zones contributives saturées

L’existence d’une frange capillaire, au dessus de la nappe d’eau, concourt-elle au dé-

veloppement d’écoulements souterrains en crue ?

En raison de l’affinité des sols avec l’eau, une zone quasiment saturée en eau, sous

tension, se développe au dessus de la surface libre de la nappe : la frange capillaire.

A proximité des thalwegs, là où cette frange capillaire affleure, quelques millimètres de

précipitations suffisent à saturer complètement le sol et modifier brutalement la répartition

de la charge hydraulique. Dans cette nouvelle configuration, des écoulements souterrains

en direction du cours d’eau sont susceptibles de se mettre en place et de participer à

l’écoulement de crue, comme l’illustre la figure 1.5.

Des expérimentations sur modèle réduits (Abdul and Gillham, 1984) montrent que

les ordres de grandeur des temps de réponse de ce mécanisme sont équivalents à ceux

proposés par Sklash et Farvolden. De plus, ces expérimentations mettent en évidence

l’existence de zones d’exfiltration et d’infiltration respectivement à l’aval et à l’amont de

le zone saturée (cf figure 1.6). Ainsi l’eau nouvellement infiltrée à l’amont «chasse» l’eau

préexistante du sol à l’aval du versant. Selon ce mécanisme, une contribution importante

de l’eau du sol à l’écoulement de crue (comme le montrent les expériences de traçage

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Les processus de genèse des crues 11

FIG. 1.6 – Ecoulements à l’équilibre à travers un versant expérimental de 140 centimètres

de long constitué de sable (conductivité hydraulique à saturation : 9.10−5m/s, épaisseur

de la frange capillaire 35 centimètres), et hydrogrammes de réponse du versant à des

intensités variées (Abdul and Gillham, 1984).

isotopique et géochimique) est alors envisageable : puisque la transmission des ondes de

pression est instantanée, l’eau exflitrée se mélange à l’écoulement de surface et rejoint le

cours d’eau dans les mêmes gammes de temps.

1.3 Synthèse

Les débits de crues sont donc générés par la combinaison de multiples processus dont

le déclenchement et la contribution sont variables dans le temps et l’espace. Si nous écar-

tons les processus de type hortonien (au sens large), la zone contributive saturée apparaît

comme le lieu stratégique pour la compréhension de la dynamique de genèse des débits

de crues à l’échelle du versant. C’est en effet l’interface où se mélangent les écoulements

superficiels et souterrains mais aussi des eaux d’origine et d’âges différents. Si les méca-

nismes qui convergent dans cet espace sont relativement bien identifiés individuellement,

leur contribution relative, lorsqu’il sont combinés, présente encore quelques mystères.

C’est dans un esprit de description et de compréhension du fonctionnement de la zone

saturée et des ces processus que s’inscrit cette étude.

– Comment évoluent l’extension de la zone saturée et le débit de crue au cours de

temps ?

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Les processus de genèse des crues 12

– Quelle proportion d’écoulements superficiel et souterrain contribue à l’écoulement

rapide de crue et pour quelles conditions hydroclimatiques ?

– Quelle est l’influence des propriétés hydrodynamiques du sol sur la contribution et la

dynamique des processus participant à l’écoulement de crue à l’échelle du versant ?

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Chapitre 2

Méthodologie

Puisque nous cherchons à comprendre l’organisation des mécanismes conduisant à

la genèse des débits de crues sur les versants, et particulièrement ceux qui siègent au

niveau des zones contributives saturées, le choix d’une modélisation physique du versant

se dessine naturellement . . .

Avant d’aller plus loin, examinons un peu cette démarche.

2.1 A propos de la modélisation physique

2.1.1 Approche réductionniste et systémique

L’approcheréductionnisteest le principe de base de toute modélisation physique. Le

problème est supposé réductible dans son ensemble à une loi physique établie sur des

quantités ponctuelles (équation en dérivées partielles par exemples). Selon ce principe,

un problème à grande échelle est supposé reconstructible dans sa totalité par agrégation

de multiples problèmes posés et résolus à l’échelle de la loi physique associée.

A l’inverse, l’approchesystémiquepropose d’identifier des relations, mathématiques, à

l’échelle d’intérêt du système puis de rechercher au niveau inférieur les propriétés qui ont

pu y conduire. Cette démarche, fondatrice des modèles conceptuels, nécessite de tester et

valider les lois proposées sur des observations.

2.1.2 L’approche réductionniste à l’échelle du versant

Keith Beven (1996) argumente que la modélisation physique du versant dans son ac-

ception la plus stricte est vouée à l’échec pour plusieurs raisons :

13

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Méthodologie 14

– le système hydrologique réel est fortement hétérogène, les connaissances des para-

mètres physiques du système sont parcellaires, ces informations doivent être éten-

dues à la totalité des sous-ensembles du système, supposés suffisamment vastes pour

intégrer l’hétérogénéité du milieu ;

– la géométrie du système est trop complexe pour être représentée dans sa totalité ;

– les conditions initiales de tels systèmes sont en général méconnues ou partiellement

identifiées.

Ainsi, à l’échelle du versant, les modèles décrivant les processus physiques, lorsqu’ils

sont exhaustifs, doivent eux aussi êtres calés . . . Ils rentrent alors dans la catégorie des

modèles conceptuels.

Compte tenu des ces remarques, nous devrons, dans notre travail, définir avec soin :

– les équations qui composent notre modèle : leur niveau de simplification et les hypo-

thèses qui les sous-tendent, afin d’en déterminer précisément les limites physiques et

d’identifier les paramètres qui peuvent constituer des degrés de liberté conceptuels,

– la géométrie du modèle, ces conditions aux limites.

2.2 A propos du ruissellement

2.2.1 La physique du ruissellement

Dans le cas d’écoulement à surface libre en eau peu profonde, comme le ruisselle-

ment ou la propagation d’une onde de crue dans un bief, la connaissance de la répartition

verticale des vitesses n’est pas nécessaire, c’est la vitesse moyenne dans le plan horizon-

tal qui est intéressante. Les écoulements sont alors décrit par le système d’équations de

Barré de Saint-Venant (par exemple Viollet etal.,1998). Si l’on considère un écoulement

unidimensionnel, le système d’équations s’écrit :

∂y∂t

+∂uy∂x

= wr (2.1)

∂u∂t

+u∂u∂x

=−g∂h∂x

+g(I −J) (2.2)

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Méthodologie 15

y, la hauteur d’eau verticale (m) ;h, la charge hydrostatique (m) ;u, la vitesse moyenne horizontale de l’écoulement (m−1) ;wr , l’intensité de la pluie (m−1) ;I , la pente du fondI = ∂Zf /∂x, avecZf la côte du fond ;J, la pente de frottement sur le fond.

Dans l’équation de quantité de mouvement (2.2), l’écoulement résulte de l’équilibre

entre trois termes moteurs : les termes d’inerties (1er membre), le terme de pression (2e

membre gauche) et le terme de gravité (2e membre droit) .

A propos du terme de frottement sur le fond

Dans la littérature, plusieurs expressions sont données pour exprimer le terme de frotte-

mentJ. Chacune de ces formulations s’appuie sur des relations empiriques données pour

les écoulements permanents dans les biefs de canaux et rivières (cas oùI = J).

Darcy-Weisbach : J= λc8ρ

V2

R4H

soit V =√

λc8g · I

1/2 ·R2H ,

Mannig-Strickler : J= V2

K2SR4/3

H

soit V = K1/2s · I1/2 ·R2/3

H ,

Chézy : J= λc8g

V2

RHsoit V = CH

√RH · I =

√λc8g · I

1/2 ·R1/2H

λc, le coefficient de perte charges linéaire (-) ;KS, le coefficient de Strickler (enm1/3/s) ;CH , le coefficient de Chézy (-) ;RH , le rayon hydraulique (enm) exprimé comme le rapportde la section d’écoulement (A) sur le périmètre mouillé (χ).

Ces formulations empiriques ont été établies pour représenter le comportement d’écou-

lements de nature différente : la formule de Darcy-Weisbach est représentative d’un ré-

gime d’écoulement laminaire, la formule de Chézy est représentative d’un régime turbu-

lent pleinement constitué, quant à la formule de Manning-Strickler elle est représentative

d’un régime de transition entre les précédents extrêmes.

Quelle formulation choisir pour décrire le ruissellement ?

Le régime de l’écoulement dépend du nombre de Reynolds qui lui est associé (Re=Ulν ), rapportant les travaux de Morgali (1970)1, Pirotton (1995) justifie le choix d’une

loi turbulente sur l’ensemble de versant en raison des perturbations causées par l’impact

des gouttes de pluie sur la surface libre de l’écoulement. De plus, les écarts produits

1Des ajustements de lois d’écoulement réalisés sur les débits observées à l’aval de surfaces tests

montrent un écoulement de nature laminaire sur l’asphalte lisse et turbulent (Manning) sur des surfaces

engazonnées.

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Méthodologie 16

avec cette loi de comportement, lorsqu’il existe des régions à écoulement laminaire, sont

acceptables.

La formulation de Manning-Strickler étant choisie pour exprimer le terme de frotte-

ment sur le fond, le choix de la valeur du coefficient de Strickler est à préciser.

Souvent la valeur de ce coefficient fait l’objet d’un calage sur des données expérimen-

tales. Des ordres de grandeurs sont donnés dans la littérature (Viollet et al., 1998) :

KS = 70 à 80m1/3s−1 pour un fond revêtu (bétonné) ;

KS = 30 à 50m1/3s−1 pour un fond naturel, pour une rivière bien calibrée, peu

sinueuse ;

KS = 10 à 30m1/3s−1 pour un écoulement sur un fond très encombré d’obstacles,

ou pour un champ d’inondation.

Des valeurs plus basses peuvent êtres observées en rivière lorsque la végétation aqua-

tique est abondante2.

Ces ordres de grandeurs sont donnés pour des écoulements en rivières (pour des pro-

fondeurs de quelques dizaines de centimètres à quelques mètres), de tels ordres de gran-

deurs ne semblent pas être appliquables dans le cas du ruissellement où l’écoulement à

lieu sur quelques millimètres de profondeur. Des mesures de terrains, réalisées sur le bas-

sin des Maurets (France) sur litière (végétation herbeuse dense), évaluent le coefficient de

Strickler à 1,85m1/3s−1 (Gomis and Grésillon, 2000). D’autres mesures réalisés sur un

bassin versant au Nouveau-Mexique, avec l’hypothèse d’un écoulement laminaire (Darcy-

Weisbach), sur des sols variés (dénudés, herbeux, arbustifs), montrent des coefficients de

perte de charge linéaireλc variant entre 0,73 et 1,37 (soit un coefficient de Strickler,KS,

entre 3,27 et 2,39m1/3s−1 si l’on suppose une équivalence des vitesses d’écoulement

pour une hauteur d’eau de 1mm; ou 1,03 et 0,75m1/3s−1 pour une hauteur d’eau de 10

mm) (Howes and Abrahams, 2002).

Finalement, pour le ruissellement, nous retiendrons des ordres de grandeur du coeffi-

cient de Strickler compris entre 1 et 10m1/3s−1. Aussi lors de la modélisation, ce coeffi-

cient sera calé sur des mesures expérimentales lorsqu’elles existent.

2Des mesures effectuées en Angleterre (Sellin,Keast,Van Beesten, 1997), sur une petite rivière ont

conduit à un coefficient de Strickler variant entre 12,5m1/3s−1 l’hiver et 3,3m1/3s−1 en août-septembre,

quand la prolifération des algues est à son maximum.

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Méthodologie 17

2.2.2 Simplification des équations de Barré de Saint-Venant

Dans sa formulation complète le système d’équations de Barré de Saint-Venant contient

deux inconnues à résoudre : la profondeur et la vitesse de l’écoulement. Si les outils nu-

mériques résolvant cette équation existent (Zhang and Cundy, 1989; Esteves et al., 2000),

est il nécessaire de conserver un tel niveau de description compte tenu de la nature du

ruissellement et des approximations concédées dans l’expression du coefficient de frot-

tement ? Quelles sont alors les simplifications envisageables du système d’équations de

Saint-Venant, leurs hypothèses et leurs domaines de validité.

Lorsque les termes d’inertie sont négligeables dans l’équation 2.2, le système résultant

constitue l’approximation de l’onde de crue diffusante: dans le cas monodimensionnel

où l’écoulement est assimilé à une mince lame d’eau, alorsRH = y et J = u2

K2s y4/3 ; l’écou-

lement est décrit par le système :

∣∣∣∣∣∣∣∂y∂t

+∂uy∂x

= wr

∂h∂x

= I −J

∂y∂t

+∂∂x

[KS·y5/3∂H

∂x

1/2]

= wr (2.3)

H, la charge hydraulique totale :H = h+Zf .

Une simplification supplémentaire conduit à l’approximation de l’onde cinématique.

Si l’on suppose que l’évolution du débit amont est suffisamment lente pour que la dyna-

mique de l’écoulement soit assimilée à une suite d’états d’équilibres où l’écoulement est

uniforme. Cette hypothèse conduit àI = J = u2

K2s y4/3 soit :

∂y∂t

+∂∂x

[KS

√I ·y5/3

]= wr (2.4)

En fixant comme hypothèseI = J, le gradient de charge disparaît de l’équation, la pente

devient l’unique moteur de l’écoulement. Ainsi cette simplification n’est plus capable de

gérer un stockage d’eau dans des dépressions ou toute autre contrainte imposée à l’aval

de l’écoulement. Aussi ces modèles requièrent généralement des routines spécifiques ca-

pables de corriger la formation de front d’onde virtuel, lorsque que la célérité des ondes à

l’amont amont dépasse celle des ondes en aval (dans le cas d’un crue par exemple) (Borah

et al., 1980).

Les domaines de validité des approximations du système de Barré de Saint-Venant,

sont définis à partir du couple de paramètres caractéristiques résultant de l’analyse adi-

mensionnelle du système complet (cf figure 2.1) :

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Méthodologie 18

Imposition d’une vitesse critique à l’aval. Imposition d’un gradient nul à l’aval.

FIG. 2.1 – Division du planFo, ko où les approximations peuvent se substituer valablement

aux équations complètes de Barré de Saint-Venant (Daluz-Vieira, 1983).

– le nombre de Froude :Fo = u√gy

– le nombre d’onde cinématique :ko = gLu2 = L

y1

F2O

2.3 A propos du l’écoulement souterrains

2.3.1 Le milieu poreux

«Le sol est un système hétérogène, polyphasique, finement divisé, dispersé et po-

reux. . . Les trois phases naturelles sont présentes dans le sol : la phase solide est représen-

tée par les particules du sol, la phase liquide par l’eau du sol et la phase gazeuse par l’air

du sol. . . On peut donc dire que le sol est un système extrêmement complexe.» (Hillel,

1984)

L’approche des hydrologues, centrée sur l’écoulement de l’eau, simplifie la description

du milieu poreux naturel : le squelette solide est considéré comme indéformable, seule

compte la porosité connectée, constituée par l’arrangement des grains, siège de l’écoule-

ment de l’eau et de l’air.

La mobilité de l’eau dans le sol dépend de l’équilibre des forces existant entre ses

différentes phases. Deux paramètres permettent de qualifier l’état du sol et sa capacité à

conduire l’eau :

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Méthodologie 19

La teneur en eau volumique :

θ =Volume d’eau contenu dans le sol

Volume total de sol

Dans un sol la teneur en eau prend des valeurs comprises entre 0 et une valeur maxi-

male,teneur en eau à saturationθs, signifiant l’occupation complète de la porosité

du sol par l’eau. Dans la situation de saturation, une partie de l’eau du sol circule

librement, la conductivité du milieu est maximale. Dans la pratique, l’état de satu-

ration nulle d’un sol n’est jamais rencontré. L’adsorption de l’eau sur la matrice du

sol mobilise des quantités d’énergie très supérieures à celles mises en jeu par les

phénomènes de drainage et d’évaporation. Ainsi, une valeur minimale empirique,

la teneur en eau résiduelleθr , est souvent définie dans les lois expérimentales dé-

crivant l’état de saturation des sols.

La pression capillaire : PC = Pair −Peau

Elle définit l’intensité des forces de liaison entre l’eau et la matrice solide, soit les

forces nécessaires à mettre en oeuvre pour rendre l’eau mobile.

Dans le milieu poreux, à chaque teneur en eau correspond une répartition des phases

air et eau. La phase eau étant continue, les pressions s’égalisent à une cote donnée, il en

résulte un pression capillaire unique : cette relation caractéristique du sol s’appelle courbe

d’humidité. On constate expérimentalement que cette relation n’est pas unique, pour une

saturation donnée l’état d’équilibre varie selon que le sol y parvienne par sorption (humi-

dification) ou désorption (drainage). Cette hystérésis est sonvent attribuée au phénomène

de capillarité et à la répartition non uniforme des pores (effet bouteille d’encre) (Musy

and Soutter, 1991).

2.3.2 La physique de l’écoulement en milieu poreux

La loi d’écoulement de l’eau en milieu poreux saturé et non-saturé, est donnée par

l’équation de Richards :

∂θ∂t

=−div(k(θ) ·∇H) (2.5)

θ, la teneur en eau volumique (m3/m3) ;k(θ), le tenseur de perméabilité ou conductivité hydraulique (m.s−1) ;ρ, la masse volumique de l’eau (kg/m3) ;g, l’accélération gravitaire,H = h+z, la charge hydraulique totale (m) oùh désigne le potentiel matriciel,h =−PC/ρg avecPC la pression capillaire (Pa).

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Méthodologie 20

Lorsqueh > 0 le sol est saturé en eau,k(θ) = ks, c’est la situation dans la nappe.

La ligne h = 0 correspond à la surface libre de la nappe. Lorsqueh < 0, le sol est non

saturé, ou à la quasi-saturation dans la frange capillaire, la valeur dek est déduite des lois

hydrodynamiques ajustées sur des valeurs expérimentales.

Plusieurs formulations sont proposées dans la littérature pour représenter les courbes

d’humidité, θ(h), et de perméabilité,k(θ). Ces formulations sont généralement équiva-

lentes : aucune n’intègre le phénomène d’hystérésis, l’existence de la frange capillaire est

prise en compte sous une forme plus ou moins explicite par l’un des paramètres (c’est la

notion de pression d’entrée d’air)3. Nous avons retenu la paramétrisation de Mualem et

Van Genuchten :

θ(h) = [1+(−αh)n]−m, h < 0,

k(θ) = ksθ1/2[1−(

1− θ1/m)m]2 (2.6)

avec θ =θ−θr

θs−θr, m= 1− 1

n. (2.7)

θs, la teneur en eau à saturation ;θr , la teneur en eau résiduelle ;ks, la conductivité à saturation ;α etn, les paramètres de Mulean-Van Genuchten.

2.4 Définition du problème physique

2.4.1 Géométrie du problème

Nous nous sommes proposés de décrire les écoulements de l’eau dans le sol et à la

surface du sol à l’échelle du versant. Compte tenu des limitations de la modélisation

physique (Beven, 1996), il semble sage de simplifier dans un premier temps la géométrie

du problème afin d’identifier la dynamique propre au processus physique.

La représentation schématique retenue correspond à une coupe verticale du versant

perpendiculaire au thalweg. Le sol est considéré comme homogène et isotrope, limité à sa

base par une couche imperméable (pas de flux d’eau à travers cette surface), la surface du

versant est plane de pente et d’état de surface constants.

3Deux formulations sont largement répandues en hydrologie :Mualem & Van Genuchten et Brooks

& Corey : θ(h) = (PC/Pl )−λ etkrel(θ) = (θ)5/2+2/λ avec 0,1< λ < 10.Ces deux formulation sont proches,

elles possèdent un paramètre relatif à la valeur de pression d’entrée d’air ou la hauteur de la frange capillaire,

et un facteur de forme.

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Méthodologie 21

Les plans de symétrie au droit du thalweg et de la ligne de crête permettent d’imposer

une condition de flux d’échange nul à travers les limites verticales de la représentation.

Ainsi les flux d’eau souterrains, dans le sens du cours d’eau au niveau du thalweg, sont

ignorés et considérés comme nuls.

Les apports d’eau par précipitations sont considérés homogènes le long du versant et

constants dans le temps. L’excès d’eau est uniquement évacué par l’écoulement de surface

à l’aval du «versant». Au niveau de l’exutoire sont mélangées l’eau de pluie ruisselée et

l’eau exfiltrée au niveau de la zone contributive saturée.

C’est finalement la dynamique du système vers l’état d’équilibre qui nous permettra

de mieux appréhender l’évolution et l’organisation des flux d’eau dans le système.

Cette représentation implique des hypothèses fortes sur la nature du versant. Notre

démarche, ici, n’essaie pas de reproduire le comportement d’un bassin versant, mais elle

cherche à identifier les paramètres qui expliquent et modifient la nature des contributions

à l’écoulement rapide de crue. Une fois la dynamique de ce système et ses variables

essentielles identifiées, une simplification des processus pourra être envisagée ainsi que

la description de géométries plus complexes à l’échelle du bassin versant réel . . .

2.4.2 Couplage des écoulements

Deux équations décrivent les écoulements dans notre représentation ; il faut donc cou-

pler ces flux pour résoudre le problème. Les flux d’eau souterrains sont décrits par deux

variables liées entre elles ; les écoulements souterrains peuvent donc êtres donnés soit à

partir de la teneur en eauθ, soit à partir de la pression matricielleh (appelée aussi charge

hydrostatique en milieu saturé). En ce qui concerne les écoulements de surface, dans le

cadre de l’approximation de l’onde de crue diffusante, deux variables décrivent l’écoule-

ment : le tirant d’eauy et la charge hydrostatiqueh.

Les deux écoulements ont la variablehen commun, continuement définie sur[−∞;+∞],

c’est donc l’inconnue du problème couplé à résoudre sur l’ensemble du domaine.

La réécriture de l’équation de Richards (2.5) avec cette variable est directe, en utilisant

les relations de Mualem-Van Genuchten (2.6) pour les paramètres hydrodynamiques on

obtient :

(θs−θr)∂θ(h)

∂t+∇ ·

(k(θ) ·∇(h+z)

)= win f iltation (2.8)

Pour réécrire l’équation d’onde de crue diffusante (2.3), une relation entre les deux

variablesy et h doit être explicitée. Dans les équations de Barré de Saint-Venant, trois

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Méthodologie 22

hypothèses sont faites : (i) l’écoulement est quasi horizontal, (ii) l’accélération verticale

de vitesse est négligeable, (iii)la pression est hydrostatique. Par conséquent, dès que

l’écoulement de surface se produit, la relationh= y est vérifiée. L’équation d’onde de crue

diffusante est donc définie sur tout le domaine de variation deh de la manière suivante :∂h∂t

+∂∂x

(KS·h5/3

(∂∂x

(h+z))1/2

)= wr −win f iltration si h > 0,

wr = win f iltration si h≤ 0.

(2.9)

2.4.3 Paramètres du problème

Dans cette forme simplifiée, le problème comporte neuf paramètres (ou degrés de li-

berté) sur lesquels nous pourrons jouer pour appréhender le comportement dynamique du

versant théorique et les contributions souterraines et superficielles à l’écoulement rapide

de crue :

Forçage climatique : l’intensité des pluieswr ,

Géométrie : la pente du versantI , ainsi que sa longueurL,

Propriétés de la surface du sol : par l’intermédiaire du coefficient de Manning-Strickler

KS,

Propriétés intrinsèques du sol : par l’intermédiaire des relations hydrodynamiquesθ(h)

et (θ) controlées par :

– la conductivité hydraulique à saturationks,

– la porosité du sol avecθs et θr ,

– les paramètres de Mualem-Van Genuchtenα etm.

Page 33: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Chapitre 3

Résultats

3.1 Modèle numérique

3.1.1 Généralités

L’outil utilisé dans cette étude est un code développé par Patrick Dangla au sein du

LCPC1-LMSGC2 pour résoudre des problèmes de bilan de masse.

La structure de l’outil permet de résoudre des problèmes physiques combinant plu-

sieurs inconnues et plusieurs équations, ou lois de comportement, sur un même domaine

ou des domaines voisins. Le maillage est non structuré, le pas de temps adaptatif. Le sol-

veur résout un problème du typeF(u) = 0 selon un schéma de Newton (méthode de la

tangente(cf annexe A)). Les valeurs deF(u) et deF ′(u) sont calculées par des modules

individuels relatifs aux équations physiques résolues.

Pour résoudre notre problème deux modules sont nécessaires : (i) un module d’écou-

lement en milieux poreux, ce module existe dans la version originale du code, en 2 et 3

dimensions en éléments finis ; (ii) un module d’écoulement de surface monodimensionnel

basé sur l’approximation de l’onde de crue diffusante (équation 2.3). Ce module n’exis-

tant pas, nous l’avons construit et formulé de sorte qu’il puisse être couplé au module

d’écoulement en milieu poreux.

3.1.2 Module d’écoulement de surface

Le module d’écoulement de surface, que nous avons construit, est formulé selon le

principe des volumes finis centrés (Eymard et al., 1997). Les termes d’échange élémen-

1Laboratoire Central des Ponts et Chaussées.2Laboratoire des Matériaux et Structures du Génie Civil.

23

Page 34: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 24

taires sont exprimés sous un forme décentrée amont ; cette formulation supprime un de-

gré de liberté dans le calcul des flux et facilite la convergence du modèle lors du couplage

(Giammarco et al., 1995). Une description plus détaillée du schéma numérique est donnée

dans l’annexe A).

Pour s’assurer de sa cohérence, le modèle de ruissellement est testé, seul, sur un cas

simple dont les conditions permettent de le comparer à la solution analytique donnée

par la théorie de l’onde cinématique. Le cas test est un plan incliné de longueur,L = 20

m, et de pente constante,I = 10%, de rugositéKS = 10 m1/3.s−1. Une pluie homogène

d’intensité constante,wr = 100 mm/h, est appliquée sur le plan jusqu’à l’établissement

du régime d’équilibre. At = 1000s, les précipitations sont stoppées, le plan incliné se

vidange librement. Dans ces conditions, les équations de l’onde diffusante et de l’onde

cinématique sont des approximations valides de l’équation complète de Barré de Saint

Venant (cf tableau 3.1).

La condition à la limite à l’amont du plan est un flux imposé nul, la condition à l’aval

s’écrit sous la forme d’une charge et d’un flux libre, de sorte que toute l’eau qui arrive

à l’exutoire s’évacue. Nous avons choisi d’imposer cette contrainte par l’intermédiaire

d’un élément spécial au niveau de l’exutoire, imposant une relation entre le flux et la

pression (tirant d’eau) au noeud. Nous supposons qu’à l’aval du plan incliné la longueur

d’écoulement est suffisante pour que le régime d’écoulement soit à chaque instant un

régime d’équilibre uniforme.

La relation à l’exutoire s’exprime alors :Q(h) = KS√

I h5/3.

Les hydrogrammes à l’exutoire, obtenus par le modèle d’onde diffusante en volumes

finis et la solution analytique de l’onde cinématique sont identiques pendant toute la durée

de la pluie (cf figure3.1). En revanche, lors de la vidange, les lignes d’eau diffèrent, la

contribution du modèle diffusant et moins brutale et se prolonge dans le temps, l’effet

diffusif s’exprime. Les gradients de pression calculés sont très inférieurs à la pente de

fond (deux ordres de grandeur environ), l’hypothèse faite sur la condition aval est donc

vérifiée, à posteriori.

Finalement, le modèle numérique d’onde diffusante, que nous avons construit, présente

un comportement cohérent.

3.2 Confrontation du modèle complet aux expériences

Pour valider l’ensemble du modèle, nous avons choisi de confronter les résultats nu-

mériques aux résultats d’expérimentations sur modèle réduit (Abdul and Gillham, 1984).

Page 35: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 25

TAB . 3.1 – Solution analytique par la théorie de l’onde cinématique.

Écoulement d’une lame d’eau (h> 0) sur un plan incliné de pente constante, sousune intensité de pluie constante, homogène.

L’approximation de l’onde cinématique s’écrit :

∂h∂t

+53

kS

√I .h2/3 ∂h

∂x= wr sih < 0 (3.1)

1. Phase de montée de l’hydrogramme, intensité de pluiewr :La dérivée totale deh s’écrit :

dh=∂h∂t

dt+∂h∂x

dx soit∂h∂t

dtdh

+∂h∂x

dxdh

= 1

Par identification à l’équation (3.1), on en déduit l’expression du débit à l’exutoire etde la hauteur d’eau à l’équilibre :

qex(t) = KS

√I(wrt)5/3 et hequ(x) =

(wr

KS√

I

)3/5

2. Phase de vidange, intensité de pluie nulle. A l’exutoire on a :

t(qex) =3

5wrKS√

I

(q3/5−wrL.q−2/5

)

FIG. 3.1 – Débit massique à l’exutoire du plan incliné lors du cas test confrontant la

solution analytique du problème (onde cinématique) et la solution numérique (onde dif-

fusante).

Page 36: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 26

FIG. 3.2 – Comparaison des lignes d’eau de la solution analytique à l’équilibre et des

solutions numériques du modèle d’onde diffusante (VF) calculées à différents instants.

La pluie cesse à partir det = 1000s.

En effet, dans ce cas, la géométrie du système est simple et bien connue, les conditions

aux limites ainsi que les conditions initiales semblent maîtrisées.

3.2.1 Cas-Test

Modèle expérimental d’Abdul et Gillham

Le modèle expérimental est constitué d’une boite en plexiglas de 140cm de long, 8

cmet 120cmde hauteur. Il est rempli avec un sable homogène, la pente est uniforme en

surface et vaut 12o, l’épaisseur de sable à l’aval est de 80cm. Un tube est inséré en bas

de pente pour drainer le ruissellement. Les courbes enveloppes d’humidité, en sorption et

désorption, sont mesurée expérimentalement, la conductivité hydraulique à saturation est

mesurée à 9.10−5 m/s, en présence d’air piégé cette valeur est mesurée à 3,5.10−5 m/s,

la frange capillaire s’étend sur 35cm.

Des expériences de traçages ont été réalisées, avec de l’eau chlorée, pour identifier la

contribution de l’eau événementielle et pré-événementielle au ruissellement. Des résultats

sont disponibles pour des intensités de pluie de 43mm/h (expérience 1) et 19mm/h (ex-

périence 2), soit deux tiers et un tiers environ de la conductivité hydraulique à saturation.

Dans l’état initial, la nappe est supposée affleurée en bas de vresant, au niveau de l’exu-

toire. L’équilibre hydrostatique est supposé atteint. Ainsi le sol est proche de la saturation

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Résultats 27

TAB . 3.2 – Propriétés hydrodynamiques du sable expérimental selon la paramétrisation

de Mualem et Van Genuchten.

Sols ks (m/s) α (m−1) n (−) θs (−) θr (−)

Sol expérimental, Perch Lake Sand (Abdul & Gillham, 1984).

Sorption 5,00.10−5 2,3 5,5 0,338 0,083

Désorption 5,00.10−5 1,5 8,3 0,338 0,083

sur une grande partie du versant.

Réprésentation numérique du problème

Pour mener la modélisation numérique, tous les paramètres relatif à la géométrie sont

identifiés. La géométrie du modèle expérimental est représentée par un trapèze de lon-

gueur, hauteur et pente identique à la tranche de sable. Les frontières verticales sont dé-

coupées en 10 segments, les frontières horizontales en 20 segments uniformes. Le milieu

poreux est représenté par 200 éléments quadrangulaires, la surface par 20 segments.

Une condition de flux nul est imposée aux frontières verticales et sur la frontière hori-

zontale inférieure. Le chargement de pluie, uniforme et constant, est imposé sur tous les

noeuds de la frontière supérieure. La condition d’exutoire, présentée précédemment, est

imposée au noeud aval.

Par contre, les paramètres relatifs aux propriétés physiques des matériaux ne sont pas

identifiés. Les propriétés hydrodynamiques du sol peuvent êtres déduites par ajustement

des paramètres de Van-Genuchten (α et n) sur les courbes d’humidité expérimentales (cf

figure3.3). Les paramètres du sable, Perch Lake Sand, ainsi obtenus, sont donnés dans le

tableau 3.2. La conductivité hydraulique à saturation est celle qu’Abdul et Gillham ont

choisie pour les simulations numériques de leurs expériences, en régime permanent soit

5,00.10−5 m/s (valeur intermédiaire entre les conductivités avec et sans air piégé).

Deux courbes sont donc disponibles pour décrire le comportement du sol selon que il

se trouve en situation de drainage (perte d’eau) ou d’humidification (apport d’eau). Dans

notre cas test, l’utilisation des propriétés relative à l’humidification semble s’imposer.

Les coefficients de rugosité de la surface du sol sont inconnus, il devront êtres calés sur

les données expérimentales. Cependant les ordres de grandeurs énoncés précédemment

nous invitent à rechercher des valeurs de coefficients de Strickler de l’ordre de 10m1/3.s−1

ou inférieures.

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Résultats 28

FIG. 3.3 – Ajustement des paramètres de Van Genuchten sur quelques points de la courbe

d’humidité expérimentale du sol Perch Lake Sand utilisé dans les expériences d’Abdul et

Gillham.

Ces choix sont très discutables et montrent déjà les difficultés relatives à la représenta-

tion théorique et numérique d’une réalité expérimentale.

3.2.2 Calage du coefficient de Strickler

La figure 3.4 illustre les hydrogrammes obtenus pour différents choix de coefficient

de Strickler. Les deux intensités de pluie sont envisagées, le sol est supposé se comporter

comme en situation d’humidification. Les conditions initiales correspondent à une nappe

d’eau horizontale à l’équilibre à la hauteur de l’exutoire, les pressions se répartissent de

part et d’autre du toît de la nappe selon un profil hydrostatique. L’écoulement à l’exutoire

est supposé libre, les conditions d’écoulement étant identiques à celles en amont.

Les dynamiques simulées ne correspondent pas aux observations. Le modèle numé-

rique atteint l’équilibre plus rapidement que le modèle expérimental. Des valeurs très

basses de coefficients de Strickler (KS = 1 et 2 m1/3.s−1) permettent de retrouver des

temps d’équilibre équivalents dans l’expérience 1 (wr = 43 mm/h), mais cette valeur ce

coefficient ne compense pas l’avance du modèle numérique dans l’expérience 2 (wr = 19

mm/h). Ces essais montrent que le terme de rugosité modifie le temps de concentration

des écoulements superficiels de quelques minutes. Ainsi la dynamique de l’expérience 2

est contrôlée par d’autres processus.

Page 39: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 29

(a) (b)

FIG. 3.4 – Comparaison des hydrogrammes expérimentaux aux hydrogrammes simulés

pour différentes valeurs de coefficients de rugosité. (a) Expérience 1, intensité de pluie 43

mm/h. (b) Expérience 2, intensité de pluie 19mm/h.

La différence de comportement entre observations et simulations peut encore être ex-

pliquée par :

– des conditions initiales inexactes (cf 3.2.3) ;

– une mauvaise description des paramètres hydrodynamiques du sol (cf 3.2.4) ;

– une description physique inadaptée.

3.2.3 Conditions initiales

La condition initiale expérimentale est une nappe affleurante au niveau de l’exutoire

avec une répartition des pressions hydrostatique. Au regard des courbes d’humidité, cela

se se traduit par un profil vertical de sol quasiment saturé sur plus de la moitié du do-

maine. La capacité de stockage d’eau dans le sol est donc très faible, dès les premières

gouttes de pluie, le versant se sature immédiatement dans la partie aval, le ruissellement

et l’exfiltration sont immédiats. La situation d’équilibre est rapidement atteinte, dès que

le volume infiltré dépasse les capacités de stockage de l’ensemble du milieu poreux. Ce

comportement est effectivement observé sur les résultats de simulation. Par contre, les

courbes expérimentales présentent des dynamiques différentes. En effet l’expérience 1,

menée pour des précipitations de 19mm/h, montre un déclenchement du ruissellement

retardé.

Page 40: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 30

FIG. 3.5 – Influence de la hauteur de la nappe initiale sur la formation du ruissellement.

Une hauteur de nappe initiale plus basse augmente la capacité de stockage du sol,

l’apparition de la saturation et le ruissellement, sont alors retardés.

Les calculs réalisés pour trois hauteurs de nappes différentes (cf figure3.5) montrent

que si l’abaissement de la nappe retarde le début du ruissellement, la dynamique de l’hy-

drogramme reste différente. En outre les courbes indiquent que plus la nappe est profonde,

ou moins la frange capillaire affleure, moins le ruissellement apparaît brutalement. Entre

la situation où la nappe est au niveau de l’exutoire et celle où la frange capillaire est

peu affleurente, le temps d’atteinte de l’équilibre passe de 2 à 8 minutes pour l’intensité

pluvieuse de 19mm/h.

Pour que le ruissellement calculé par le modèle débute en même temps que le ruisselle-

ment observé dans l’expérience 2, il faudrait que le niveau initial de la nappe soit environ

10 cm en dessous du niveau de l’éxutoire, autrement dit la capacité spécifique de sto-

ckage du sol devrait augmenter d’environ 0,32mm.m−2 (volume de pluie tombé pendant

cette période). A priori, il semble assez facile d’obtenir expérimentalement une hauteur

de nappe initilale au niveau de l’éxutoire. Par contre la condition de répartition hydrosta-

tique des pressions dans la zone non-saturée semble plus difficile à assurer compte tenu

des flux éventuels d’évaporation.

Page 41: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 31

TAB . 3.3 – Propriétés hydrodynamiques des sols «types» utilisés.

Sols ks (m/s) α (m−1) n (−) θs (−) θr (−)

Silty Clay Loam (SCL) 7,22.10−7 1,9 1,31 0,41 0,10

Yolo Light Clay (YLC) 5,00.10−6 3,6 1,9 0,55 0,23

Sandy Soil (SAND) 2,78.10−5 3,7 5,0 0,50 0,05

3.2.4 Propriétés du sol

Pour l’expérience 1 (intensité de pluie de 43mm/h), notre modèle numérique prévoit,

à l’équilibre, une zone saturée qui s’étend sur 80 % du versant. Dans des conditions iden-

tiques, des simulations numériques en régime stationnaire, réalisées par Abdul et Gillham,

prédisent une saturation de 78,5 %. Aussi, les flux d’exfiltration, calculés au niveau de la

zone saturée, donnent des débits à l’équilibre comparables à ceux observés et ceux simu-

lés en régime stationnaire (Abdul and Gillham, 1984). Par conséquent notre modèle tend

vers des situations d’équilibre cohérentes avec les données existantes.

Par contre, les dynamiques de l’exfiltration sont très différentes (cf figure 3.6). Nous

pouvons alors nous interroger sur la validité des propriétés hydrodynamiques que nous

avons attribué au sol sur la base des courbes d’humidité. En effet nous n’avons pas de

données expérimentales sur la relationk(θ) propre au sol, et nous ne savons pas quelle

peut être l’influence de ce paramètre sur la réponse du système.

Pour illustrer la sensibilité de la dynamique du système aux propriétés du sol, nous

avons réalisé des calculs pour trois sols «types» trouvés dans la littérature (Kao, 2002) :

un sol très argileux (silty clay loam, SCL), un sol limoneux (yolo light clay, YLC), un

sol sableux (sandy soil, SAND)3 dont les propriétés sont données dans le tableau 3.3 et

illustrées dans la figure 3.7.

Les résultats obtenus illustrent parfaitement l’importance des propriétés du sol dans la

dynamique des débits mesurés à l’éxutoire (cf figure 3.8). Nous laisserons de coté le sol

SCL qui présente un conductivité hydraulique à saturation inférieure à l’intensité de pluie

et qui produit un ruissellement de type hortonien. Cependant nous noterons que selon

les propriétés hydrodynamiques du sol, des processus faisant intervenir des écoulements

souterrains (sol PLS) peuvent contribuer au débit de crue plus rapidement que ne le ferait

un processus strictement hortonien (sol SCL).

3Les propriétées de ces sols sont tirées de la base de données UNSODA développée par le USSL (US Sa-

linity Laboratory) et la base de donnée GRIZZLY développée au LTHE (Laboratoire d’étude des Transferts

en Hydrologie et Environnement).

Page 42: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 32

(a) (b)

FIG. 3.6 – Séparation des hydrogrammes en une composante superficielle (eaux nou-

velles) et souterraine (totalité des eaux anciennes mélangées à des eaux nouvelles ayant

transitées par le sol). (a) Intensité de pluie 43mm/h. (b) Intensité de pluie 19mm/h.

Page 43: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 33

(a) (b)

FIG. 3.7 – Propriétés hydrodynamiques des sols modélisés : (a) Saturations relatives. (b)

Perméabilités relatives.

FIG. 3.8 – Sensibilité du modèle numérique aux paramètres hydrodynamiques du sol.

Page 44: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Résultats 34

Les comportements des sols SAND et YLC sont assez proches malgré des courbes

d’humidité très différentes. A l’inverse, avec des courbes d’humidité de formes voisines,

les deux sols sableux se conportent très différemment. Ces différences pourraient être

attribuées à la nature de la relationk(θ). En effet, pour le domaine de succion envisageable

dans cet expérience[0;0,3m], la conductivité relative du sol expérimental évolue entre 100

et 65% environ, alors que celle des sols «types» varie entre 100 et 5% (cf figure 3.7). Il

n’est donc pas surprenant de voir le sol PLS réagir rapidement et de manière relativement

uniforme.

3.2.5 Synthèse

En confrontant notre modèle numérique aux résultats expérimentaux nous avons pu

mettre en évidence la sensibilité du modèle aux différents paramètres ou degrés de liberté

du problème.

Le sol apparaît comme l’élément clef dans l’organisation des processus de génèse du

ruissellement. L’écoulement de surface, dans cette géomètrie simple, ne joue qu’un rôle

secondaire.

L’étude de sensibilité aux conditions initiales a montré que, plus la nappe et la frange

capillaire affleurent en bas de thalweg, plus la réponse du système est rapide. L’état hy-

drique du sol, ainsi que sa capacité de stockage en début d’évènement, pourraient êtres

des paramètres influants sur la dynamique de l’écoulement de crue.

Dans les sols à forte conductivité, rapidement saturés par le bas (affleurement déve-

loppé de la frange capillaire), la contribution à l’écoulement de crue peut être plus rapide

que si des processus hortoniens seuls étaient mis en jeu. Dans cette configuration la com-

posante souterraine de l’écoulement contribue à plus de 30%.

Pour formuler ces remarques nous avons supposé valide notre modèle malgré la peu de

fidélité entre les cinétiques des résultats expérimentaux et numériques. Cette conclusion

s’appuie sur la physique particulière qui semble se dégager de la combinaison proriétés

du sol - intensité de pluie - géométrie, cette particularité doit être vérifiée soit directement

soit indirectement en validant le modèle par d’autres expérimentations plus appropriées.

Page 45: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Chapitre 4

Conclusion - Perspectives

La connaissance des processus de genèse de crue sur les versants et de leur dynamique

est fondamentale en hydrologie, si l’on veut développer des outils opérationnels de prévi-

sion des crues fiables.

Les zones contributives saturées, à proximité du thalweg, se présentent comme le car-

refour des écoulements sur le bassin versant. La compréhension des phénomènes qui y

siègent apparaît essentielle. Pour explorer ce problème, nous avons élaboré un modèle

numérique couplant les mécanismes d’écoulements superficiels et souterrains à l’échelle

du versant. En hydrologie, les modèles physiques qui couplent les processus de surface et

souterrains forment classiquement deux familles :

– les modèles à écoulement de surface prépondérant, simulant des processus de type

hortonien (Esteves et al., 2000), le sol n’intervient que pour ses capacités d’infiltra-

tion (modèle d’infiltration verticale) ;

– les modèles à écoulement souterrain prépondérant, les solutions de l’écoulement

superficiel utilisent comme entrée, les sorties du modèle souterrain, mais l’inverse

n’est pas vrai.

Le modèle présenté ici est différents puisque les deux équations d’écoulement inter-

agissent complètement l’une sur l’autre. De plus les équations physiques utilisées restent

suffisamment complètes malgré quelques simplifications.

La confrontation des simulations aux résultats expérimentaux nous conduit à quelques

réflexions.

Dans la genèse des écoulements rapides de crues, au niveau des zones contributives

variables, le sol et ses propriétés hydrodynamiques constituent les variables maîtresses du

système, déterminant à la fois la dynamique de la genèse du débit mais aussi les sources

de l’écoulement et leur contributions respectives (exfiltration de nappe et ruissellement

35

Page 46: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

Conclusion - Perspectives 36

direct).

Les représentations des phénomènes physiques que nous avons choisies, couramment

utilisées en hydrologie à l’échelle du versant, ne permettent pas de reproduire complè-

tement la dynamique observée à l’échelle du modèle expérimental, par contre les solu-

tions stationnaires sont cohérentes. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces différences.

D’abord les conditions initiales ne sont pas parfaitement connues et maîtrisées (niveau de

la nappe, évaporation...). Ensuite la relation reliant la conductivité à la saturation n’est pas

connue expérimentalement. Cette relation est estimée à partir des paramètres de la courbe

d’humidité, sur des relations théoriques. Enfin d’autres phénomènes comme l’hystéré-

sis ou le piégeage de l’air peuvent jouer un rôle non négligeable à l’échelle du modèle

expérimental.

La validation du modèle doit se poursuivre en deux étapes. Si l’on veut vérifier la

qualité du modèle et le choix des équations physiques, il est nécessaire de mener des

expérimentations à petite échelle, en laboratoire, pour être sûr de contrôler et caractériser

tout les paramètres du système (notamment les propriétés hydrodynamiques du sol). L’ex-

périmentation grandeur nature à l’échelle du (petit) versant, plus réaliste, est tout aussi

incontournable, puisque c’est à ce niveau de description que l’on cherche à comprendre

et modéliser les processus de genèse des crues.

Lorsque la modélisation des mécanismes à l’échelle du versant sera validée, une modé-

lisation 3D du versant élémentaire pourra être envisagée. Cette étape permettra de mener,

à l’échelle du bassin versant théorique, des études de sensibilités (propriétés des sols, état

de saturation initial, profondeur de sol, . . . ) visant à identifier les variables sur lesquelles

doit être porté l’effort de mesure sur le terrain.

A partir de ces informations, des modèles conceptuels simplifiés pourrait être dévelop-

pés à l’échelle du bassin versant. Contrairement au modèle physique, ceux là auraient une

vocation opérationnelle.

Page 47: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

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Annexes

40

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Annexe A

Un outils de résolution des problèmes de

bilan de masse : BiL

A.1 Au coeur de BiL

BiL est un code développé par Patrick Dangla au LCPC/LMSGC pour résoudre des

problèmes transitoires de conservation de la masse :

∂m(ui)∂t

=−divw(ui) (A.1)

avecui , les inconnues du problème ;m, la masse des variables conservées (fonctiondes inconnues) ;w, les flux massiques échangés.

Sur le domaine,Ω de frontière∂Ω, durantδt, le problème à résoudre s’écrit :∫δt

∫Ω

(∂m(ui)

∂t+div(w(ui))

)= 0 (A.2)

A.1.1 Discrétisation du problème

Le domaine de définition du problèmeΩ est partitionné en un ensemble d’éléments

E j , délimités par des noeuds, tels que∪ jE j = Ω. Les variations de masse et les flux

d’échanges sont calculés sur chaque éléments en fonction des valeurs aux noeuds.

La loi de conservation de la masse doit être localement vérifiée pour chaque noeudNi ,

sur un volume de contrôleVi .∫Ω

(∂m∂t

+div(w))

= ∑i

∫Vi

(∂m∂t

+div(w))

= 0 (A.3)

Le bilan de masse au niveau du volume de contrôle du noeudNi , s’écrit donc :∫Vi

(∂m∂t

+div(w))

=∫

Vi

∂m∂t

+∫

∂Vi

w ·n = 0 (A.4)

41

Page 52: Université paris XII - Val de Marne Ecole Nationale du Génie Rural ...

BiL 42

∑j,E j⊃Ni 6=0

(∫E j∩Vi

∂m∂t

)+ ∑

j,E j⊃Ni 6=0

(∫E j∩∂Vi

w ·n)

= 0 (A.5)

n, vecteur normal externe ;Vi , volume de contrôle du noeudNi ; ∂Vi , sa frontière ;Ei

élémentj.

Dans l’équation A.5, le terme(∫

E j∩Vi∂m∂t

)exprime l’accumulation locale de masse cal-

culée au sein de l’élémentE j , contribuant au bilan du noeudNi. Le terme(∫

E j∩∂Viw ·n

)exprime le flux échangé à travers la frontière de volume de contrôle du noeudNi au sein

de l’élémentE j .

A l’intersection de l’élément,E j , et du volume de contrôleVi , le problème discrétisé

sur le pas de tempsδt s’écrit, entre les tempstk et tk+1 :

∫δt

(∫E j∩Vi

∂m∂t

+∫

E j∩∂Vi

(w ·n))

= 0 (A.6)∫E j∩Vi

(mk+1−mk

δt

)+

∫δt

∫E j∩∂Vi

(w ·n) = 0 (A.7)

Mk+1j,i −Mk

j,i

δt+Wk,k+1

j,i = 0 (A.8)

Les termes élémentaires d’accumulationMk et d’échangeWk,k+1 dépendent unique-

ment des valeurs des inconnues aux noeuds de l’élément, et des lois de comportement qui

s’appliquent au domaine d’appartenance de l’élément.

Le problème complet A.2, s’écrit sous la forme de multiples problèmes posées aux

noeuds du maillage sous la forme

∑j,E j⊃Ni

(M j,i(uk+1

i )−M j,i(uki )

δt+Wj,i(uk

i ,ui ,k+1

)= 0 (A.9)

Autrement dit,

Fi(uki ,u

km, ,uk+1

m ,uk+1p ) = 0

i, l’index du volume de contrôle et du noeud pour lequel est réalisé le bilan de masse ;k, le début du pas de temps ;k+1, la fin du pas de temps, pour lesquels sont cherchés les valeurs des inconnues ;p, les index des noeuds appartenants aux éléments contribuant au bilan de masse dunoeud i.

Une fois les fonctions résidus,Fi , identifiées sur chaque noeud et chaque volume de

contrôle,uk étant connu, le problème consiste à identifier le champsuk+1 qui conduit∀i

àFi(uk) = 0.

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BiL 43

La valeur deuk est approximée par itérations successives selon la méthode de New-

ton. Cette méthode nécessite le calcul des dérivées deF(uk+1). Elle consiste à linéariser

F(uk+1) au voisinage d’un point d’initialisation proche deuk+1, et calculer la racine de la

droite ainsi obtenue, donnant une nouvelle valeur approchée deuk+1 permettant de conti-

nuer l’algorithme :

Développement de Taylor : 0= F(uk)+(uk+1−uk0)F

′(u0)+ . . .

Une valeur approché deuk+1 est obtenue paru1 = u0− F(u0)F ′(u0)

. Et ainsi de suite . . .

A.2 Module d’écoulements souterrains

L’équation à résoudre dans le milieu poreux est de la forme :

∂θ(h)∂t

+div [k(θ) ·∇(H)] = 0 (A.10)

A.2.1 Discrétisation temporelle

La dicrétisation temporelle de cette équation est une formulation mixte dans laquelle

les gradients sont exprimés sous une forme implicite et les autres variables sous une forme

explicite. On obtient : ∫ tk+1

tk

(∂θ(h)

∂t+div [k(θ) ·∇(H)]

)= 0 (A.11)

θ(hk+1)−θ(hk)+δt×div[k(hk) ·∇(Hk+1)

]= 0 (A.12)

En exprimant la perméabilité relative explicitement, les dérivées des fonctions résidus

sont plus simples. Les fonctions résidus sont alors plus stables, la convergence du modèle

est améliorée. Cependant cet formulation n’est stable que si∂∂t k(θ) << ∂

∂t

(∂H∂x

).

A.2.2 Discrétisation spatiale

Dans BiL cette équation est résolue selon la méthode des éléments finis. Cette méthode

ne sera pas décrite ici, pour de plus amples informations sur cette méthode on pourra se

reporter à l’ouvrage écrit par Zienkiewicz (1977).

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BiL 44

A.3 Module de ruissellement de surface

Selon l’approximation de l’onde de crue diffusante, l’équation à résoudre s’écrit :

∂h∂t

+div[KSh5/3∂H

∂x

]= 0 (A.13)

A.3.1 Discrétisation temporelle

Dans cette équation la formulation mixte (explicite-implicite) n’est pas envisageable.

En effet, dans cette équation le terme explicite devrait êtreh5/3, et le terme implicite∂(h+z)

∂x . Dans ce cas, la condition de stabilité énoncé plus haut n’est pas toujours vérifiée,

dans oscillations peuvent apparaître et s’amplifier

Un schéma totalement implicite est retenu :∫ tk+1

tk

(∂h∂t

+div

[KSh5/3

(∂H∂x

)1/2])

= 0 (A.14)

hk+1−hk +div[KS(hk+1)5/3∂(hk+1 +z)

∂x

]= 0 (A.15)

A.3.2 Discrétisation spatiale

Ici le domaine est monodimensionnel, nous avons choisi d’exprimer le schéma en sui-

vant la méthode des volumes finis centrés (Eymard et al., 1997).

Le bilan de masse est réalisé sur un noeud en intégrant l’équation sur le volume de

contrôle centré sur ce noeud. L’intégration de l’équation sur le volume de contrôleV,

avecσ les éléments de sa frontièredV s’écrit :∫V(hk+1 +hk)+δt

∫V

div

[KSh5/3

(∂H∂x

)1/2]

= 0 (A.16)

LV(hk+1V +hk

V)+δt ∑σ

LσKSh5/3σ

(∂∂x

(hk+1σ +z)

)1/2

= 0 (A.17)

avec,LV , longueur caractéristique du volume de contrôleV ; Lσ, longueur caractéristiquede la frontièredV.

Il faut maintenant expliciter le calcul deKSh5/3σ

(∂(hk+1

σ +z)∂x

)1/2. PosonsU le volume

de contrôle à l’amont deV, hU et hV les valeurs aux noeuds au centre des volumes de

contrôle. Le flux élémentaire échangé entreV etU s’exprime :

WV|U =−WU |V = ks.h5/3V|U

((hk+1

U −hk+1V )+(zk+1

U +zV)xU −xV

)1/2

(A.18)

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BiL 45

Flux centré : hV|U = 12(hV +hU)

Avec cette formulation le modèle pose parfois des problèmes de convergence. Pour

remédier à ce problème nous avons utilisé une formulation décentrée vers l’amont

du flux d’échange.

Flux décentré : hV|U = hU cette formulation ne contient plus qu’une variable, comme

pour le schéma mixte du milieu poreux, la suppression d’une variable permet de

définir des fonctions résidus plus stables et facilite alors la convergence du modèle.