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- 1 - UNIVERSITÉ PANTHÉON-ASSAS (PARIS II) Année universitaire 2017-2018 TRAVAUX DIRIGES 2 ème année de Licence en Droit DROIT CIVIL Cours de Monsieur le Professeur Nicolas MOLFESSIS ____________________________________________ Distribution : du 6 au 10 novembre 2017. CINQUIÈME SÉANCE LE CONTENU DU CONTRAT - I - LA CONTREPARTIE ----------------------------------------------------------------- I.- Le contenu du contrat. Premier aperçu Jusquà lordonnance du 10 février 2016, le Code civil retenait deux exigences renvoyant au contenu du contrat, lune tenant à lobjet de lobligation, lautre à sa cause. Pour cette raison, les deux notions dobjet et de cause étaient classiquement essentielles à la formation du contrat. Lobjet renvoie à ce qui forme la matière même de lengagement : à quoi sengage-t-on ? Donner, faire, ne pas faire. Vendre telle chose, peindre un tableau, ne pas faire concurrence, etc. On ne peut alors sobliger valablement que si (i) lobjet de lobligation existe et si (ii) cet objet est licite. La cause renvoie aux raisons qui justifient lengagement : pourquoi sengage-t-on ? Dans un contrat synallagmatique, la raison pour laquelle on sengage est à chercher dans le fait que lautre contractant sest lui aussi engagé : le vendeur sengage à transférer la propriété de la chose parce que lacheteur sengage à en payer le prix. Aussi, le contractant ne sengage valablement que si son obligation nest pas dépourvue de cause. En outre, il faut également que la cause de son engagement soit licite : je ne peux pas mengager à acheter un enfant, car lenfant est hors commerce. Lengagement de payer aurait une cause illicite : le transfert de propriété dun être humain.

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UNIVERSITÉ PANTHÉON-ASSAS (PARIS II)

Année universitaire 2017-2018

TRAVAUX DIRIGES – 2ème année de Licence en Droit

DROIT CIVIL

Cours de Monsieur le Professeur Nicolas MOLFESSIS

____________________________________________

Distribution : du 6 au 10 novembre 2017.

CINQUIÈME SÉANCE

LE CONTENU DU CONTRAT

- I -

LA CONTREPARTIE

-----------------------------------------------------------------

I.- Le contenu du contrat. Premier aperçu – Jusqu’à l’ordonnance du 10 février 2016, le

Code civil retenait deux exigences renvoyant au contenu du contrat, l’une tenant à l’objet de

l’obligation, l’autre à sa cause. Pour cette raison, les deux notions d’objet et de cause étaient

classiquement essentielles à la formation du contrat. L’objet renvoie à ce qui forme la

matière même de l’engagement : à quoi s’engage-t-on ? Donner, faire, ne pas faire. Vendre

telle chose, peindre un tableau, ne pas faire concurrence, etc. On ne peut alors s’obliger

valablement que si (i) l’objet de l’obligation existe et si (ii) cet objet est licite. La cause

renvoie aux raisons qui justifient l’engagement : pourquoi s’engage-t-on ? Dans un

contrat synallagmatique, la raison pour laquelle on s’engage est à chercher dans le fait que

l’autre contractant s’est lui aussi engagé : le vendeur s’engage à transférer la propriété de la

chose parce que l’acheteur s’engage à en payer le prix. Aussi, le contractant ne s’engage

valablement que si son obligation n’est pas dépourvue de cause. En outre, il faut également

que la cause de son engagement soit licite : je ne peux pas m’engager à acheter un enfant, car

l’enfant est hors commerce. L’engagement de payer aurait une cause illicite : le transfert de

propriété d’un être humain.

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Cette approche traditionnelle, qui reposait sur les deux notions d’objet et de cause, et sur les

exigences d’un objet et d’une cause qui à la fois existent et soient licites, souffrait de

différents maux. En premier lieu, elle « doublonnait » souvent : dans les contrats

synallagmatiques, l’objet de l’obligation de l’un est la cause de l’obligation de l’autre.

Ainsi, l’objet de l’obligation du vendeur - transférer à la propriété de la chose - est la cause de

l’engagement de l’acheteur (qui s’engage à payer en contrepartie du transfert de propriété de

la chose). À quoi servait-il d’exiger que l’objet existe et que la cause existe, puisque les deux

aboutissent au même résultat, au moins pour les contrats synallagmatiques ? En outre,

l’approche habituelle était devenue excessivement complexe, car la jurisprudence avait très

nettement enrichi les notions à l’œuvre, au point qu’elles devinrent souvent insaisissables. À

ce titre, la notion de cause était devenue très ambivalente et renvoie à des exigences multiples.

C’est désormais au « contenu » du contrat que se réfère le Code civil. En ce sens, l’article

1128 précise qu’est nécessaire à la validité d’un contrat, outre le consentement des parties et

leur capacité de contracter, « un contenu licite et certain ». Reste que si le Code civil ne

s’embarrasse plus des notions d’objet et de cause, leurs fonctions demeurent…

La première exigence, concernant le contenu du contrat, renvoie à l’existence d’une

contrepartie, d’un engagement : s’obliger signifie s’engager. Faute d’engagement, le

contrat est nul parce qu’il est dépourvu de contrepartie au profit de celui qui s’oblige. Dans

les contrats synallagmatiques, cette première exigence a un corollaire essentiel : si l’une

des parties ne s’est en réalité pas engagée, alors l’obligation de l’autre n’a pas lieu

d’être. Le contrat est nul. Autrement dit, le contrat n’est valable que s’il existe une

contrepartie à l’obligation. C’est l’objet de la présente séance. La seconde exigence porte

sur la licéité du but du contrat. Comme on le verra à la prochaine séance (séance 6), le contrat

doit avoir un contenu licite, sans quoi il est nul. Enfin, une troisième exigence, orientée vers

une recherche de protection de la partie faible, renvoie à une sanction des déséquilibres

contractuels. On verra ainsi, dans un troisième volet du contenu du contrat (séance 8, la 7

étant réservée à l’interrogation), que dans certaines hypothèses, l’équilibre contractuel

s’impose et est protégé.

II.- Premier thème : L’existence d’une contrepartie – Si l’un des contractants ne s’engage

pas, l’autre partie ne saurait être tenue. Faute de contrepartie à son propre engagement, le

contrat est nul. Toute la question est alors de savoir ce que signifie ne pas s’engager. Et c’est

là que doit porter la réflexion. Évidemment, si je ne m’engage à rien, alors mon obligation est

inexistante et, par voie de conséquence, mon contractant ne recevra aucune contrepartie.

En ce sens, selon le nouvel article 1169 du Code civil, « Un contrat à titre onéreux est nul

lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage

est illusoire ou dérisoire ». On veillera par ailleurs à bien distinguer l’hypothèse de la

contrepartie dérisoire ou illusoire du défaut d’équivalence des prestations, qui « n’est pas une

cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement » (C. civ., art. 1168).

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La validité du contrat suppose donc l’existence d’une contrepartie, celle-ci s’appréciant

au moment de la formation du contrat.

Document 1 : Cass. civ. 3e, 15 septembre 2016, n° 15-22.250.

Les choses sont souvent complexes. C’est le thème même de la séance.

a).- Si je cède quelque chose qui ne m’appartient pas ou encore quelque chose qui n’est pas

cessible, alors l’engagement que je prends est vide de portée. Où l’on voit d’ailleurs la Cour

de cassation souligner, à propos d’une cession d’agrément administratif non cessible, que

l’absence d’objet équivaut à une absence de cause :

Document 2 : Cass. civ. 3e, 4 mai 1983, Bull. civ., III, n° 103.

b).- Dans un contrat aléatoire, comme l’est le contrat de vente moyennant rente viagère (la

rente est versée jusqu’au décès du vendeur), si l’aléa fait défaut il y a en réalité absence

d’engagement et corrélativement de contrepartie. C’est évident si les revenus que produit le

bien aliéné moyennant versement d’une rente viagère sont supérieurs à la rente, puisque dans

ce cas l’acheteur encaisse chaque mois plus qu’il ne paye. Il ne peut que gagner.

c).- Quid ensuite lorsque l’engagement pris existe bien mais est dérisoire. C’est notamment

l’hypothèse que vise désormais l’article 1169 du Code civil.

La Cour de cassation passe ici, traditionnellement, par la notion de cause. Le fait que la

contrepartie soit très faible - dérisoire - est assimilé à une absence de contrepartie. C’est la

notion de cause qui remplissait ici son rôle de protection individuelle du cocontractant.

Document 3 : Cass. civ. 3e, 13 octobre 2016, n° 15-11.128.

Document 4 : Cass. com., 22 mars 2016, n° 14-14.218.

d).- Dans certains cas, enfin, la Cour de cassation eut l’occasion de prendre en considération

la finalité même de l’opération pour déterminer si le contractant profitait bien d’une

contrepartie valable. Autrement dit, alors que le débiteur était bien engagé, ce qui aurait du

suffire à constater que l’engagement de son partenaire avait bien une contrepartie, les juges

recherchaient si ce qu’apportait le débiteur était bien de nature à satisfaire l’exécution du

contrat. À ce sujet, on a parlé de subjectivisation de la cause. Dans cette hypothèse, ce que

prenait en compte la Cour de cassation, c’est le fait que « l’exécution du contrat selon

l’économie voulue par les parties était impossible », de sorte que n’existait prétendument

aucune « contrepartie réelle » Mais la première Chambre civile et la Chambre commerciale

ne semblèrent pas l’entendre de la même oreille, en ne défendant pas la même cause.

Document 5 : Cass. civ. 1ère, 3 juillet 1996, Bull. civ., I, n° 286.

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Document 6 : Cass. com., 18 mars 2014, n° 12-29.453 ; D. 2014.1915, note D. Mazeaud ; Dr.

et patrim. 2015, n° 243, p. 63, obs. Ph. Stoffel-Munck ; RDC 2014.345, obs. Y.-M. Laithier ;

RTD civ. 2014.884, obs. H. Barbier.

III.- Deuxième thème : la clause inconciliable avec l’obligation essentielle du contrat - À

partir d’un arrêt très important, du 22 octobre 1996, la Cour de cassation avait fait un usage

nettement élargi de la notion de cause. Statuant sur la validité d’une clause limitative de

responsabilité, qui consistait de la part de la société Chronopost à se contenter de rembourser

le prix de la prestation payée en cas de livraison au-delà du délai promis, la Cour de cassation

a estimé que la clause limitative de responsabilité portant sur l’obligation essentielle

« contredisait la portée de l’engagement pris », et par suite « devait être réputée non écrite ».

L’ordonnance du 10 février 2016 codifie la solution, puisque l’article 1170 du Code civil

dispose que « Toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est

réputée non écrite ».

Encore faut-il s’entendre sur la notion d’obligation essentielle. On notera du reste la nature de

la sanction : le réputé non écrit fait subsister le contrat amputé de sa clause. On en reparlera

lors de l’étude des clauses abusives (cf. fiche 8).

Document 7 : Cass. com., 22 octobre 1996, Bull. civ. IV, n° 261 ; D. 1997.121, note A.

Seriaux et 175, obs. Ph. Delebecque ; JCP G, 1997.I.4002, obs. M. Fabre-Magnan ;

Defrénois, 1997.36516, n° 20, obs. D. Mazeaud.

Document 8 : Cass. com., 29 juin 2010, Bull. civ. IV, n° 115, n° 09-11.841.

D’où il ressort que la liberté pour les parties de déterminer le contenu de leur contrat est

limitée par ce qui fait l’essence même de l’engagement, ce qui en constitue la prestation

caractéristique. C’est là le sens de l’arrêt Chronopost.

On comparera cette solution avec celle qui répute non écrite la clause contredisant le fait que

le contrat s’insère dans un ensemble de contrats interdépendants, comme c’est le cas des

contrats qui incluent une location financière. Ex. : contrat de partenariat entre deux parties (A

et B) qui suppose l’installation d’un matériel et son financement par le biais d’un contrat de

location dudit matériel (deuxième contrat, cette fois entre A et C, C étant la société qui en

assure le financement au profit de A lui permettant ainsi de disposer du matériel nécessaire à

la prestation accomplie par B). Selon la Cour de cassation, « les contrats concomitants ou

successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière, sont

interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec

cette interdépendance » : Ch. mixte, 17 mai 2013 (n° 11-22.768 et n° 11-22.927).

V.- Exercice : Commentaire de l’arrêt du 22 octobre 1996 (doc. 7).

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Document 1 : Cass. civ. 3e, 15 septembre 2016.

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rouen, 22 avril 2015), que, par acte notarié du 26 mars 2009,

l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) a vendu deux parcelles de terrain à la

commune de Val-de-Reuil (la commune) pour le prix d’un euro, l’acte de vente précisant que

l’opération présentait un caractère d’intérêt général justifiant la vente à l’euro symbolique ; que, le 3

juillet 2009, la commune a revendu l’immeuble au prix de 1 053 000 euros à une société civile

immobilière, qui l’a revendu le 3 août 2009 à une autre société civile immobilière pour le prix de 1

300 000 euros ; que, sur recommandation de la Cour des comptes, l’APCA a assigné la commune en

rescision de la vente pour lésion ;

Attendu que l’APCA fait grief à l’arrêt de dire que la vente conclue le 26 mars 2009 avec la commune

était parfaite et de rejeter ses demandes ;

Mais attendu qu’ayant retenu, exactement, que l’existence de la cause de l’obligation de chacune des

parties, qui réside dans l’obligation de l’autre dans un contrat de vente, s’apprécie à la date à laquelle

l’obligation est souscrite et que la disparition ultérieure de la cause de l’obligation n’est pas de nature

à entraîner la nullité du contrat et, souverainement, que la contrepartie, cause de l’obligation de

l’APCA, consistait dans la décharge des coûts de gardiennage, des frais d’entretien et des risques

d’occupation sans titre ou de dégradations d’un bien libre de toute occupation depuis 2008, du coût de

la destruction de la résidence universitaire, estimée à plus d’un million d’euros notamment en raison

de la présence d’amiante et de l’obligation de réutilisation, dans des conditions conformes aux

objectifs d’aménagement du territoire et de renouvellement urbain, la cour d’appel a pu en déduire,

sans dénaturation, que l’acte de vente était valide ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Document 2 : Cass. civ. 3e, 4 mai 2003.

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (0rleans, 8 octobre 1979), que par acte sous seing prive m y... a donné en

location a M. X... pour une durée de trois années un établissement d’enseignement de la conduite

automobile qu’il exploitait dans des locaux appartenant a un tiers ; que par cet acte les parties sont

convenues en outre de régulariser, à l’expiration de la location et moyennant le prix de 50000 francs la

cession par m y... a m x... de l’agrément administratif nécessaire a l’exploitation de l’établissement ;

que M. X..., ayant cesse d’acquitter le prix de la location avant la fin de la période de trois années et

n’ayant pas réglé le prix de cession de l’agrément, M. Y... l’a assigne en paiement ; […]

Sur le second moyen :

Attendu que M. Y... fait grief a l’arrêt d’avoir rejeté la demande en paiement du prix de cession de

l’agrément administratif d’exploitation de l’établissement alors, selon le moyen, que d’une part,

l’exploitant d’un établissement d’enseignement de conduite automobile, inscrit au registre du

commerce et achetant des véhicules pour en louer l’usage, est un commerçant qui exploite un fonds de

commerce dont l’agrément, accorde de plein droit à l’acquéreur qui remplit les conditions

réglementaires, constitue non un élément personnel mais un élément réel pouvant, dès lors, être cédé à

titre onéreux, et alors, d’autre part, que, et en tout état de cause, à supposer que ledit agrément fut hors

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commerce, la convention litigieuse par laquelle l’exploitant s’était engagé à démissionner de son

agrément afin que son successeur puisse, moyennant un prix convenu, obtenir le même agrément,

s’analysait en une obligation de faire parfaitement licite et dont ce dernier devait respecter les termes,

puisqu’il l’avait acceptée, peu important, dès lors, que la clientèle de l’établissement fut (ou non)

éphémère ;

Mais attendu que le nombre d’établissements d’enseignement de la conduite automobile n’étant limité

par aucune disposition légale et l’agrément préfectoral nécessaire a l’exploitation d’un tel

établissement étant délivré à titre personnel à tous ceux qui présentent les aptitudes requises par

l’arrêté du 10 mars 1970 et justifient des conditions et des moyens matériels exiges par ce texte, la

convention relative a la cession de l’agrément était, quelle qu’en soit la qualification donnée par M.

Y..., dépourvue d’objet ;

Que, des lors, l’obligation de payer mise a la charge de M. X... en contrepartie était nulle faute de

cause ;

D’ou il suit que l’arrêt se trouve légalement justifié ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé contre l’arrêt rendu le 15 novembre 1979 par la cour d’appel

d’Orléans.

Document 3 : Cass. civ. 3e, 13 octobre 2016.

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 11 décembre 2014), que le capital de la société civile

immobilière du 29 A rue Deparcieux (la SCI), propriétaire d’un immeuble, était constitué de 102 000

parts détenues par la SCI Renaissance et de 18 000 parts détenues par M. X... ; que, par acte du 3 août

2011, la SCI Renaissance et M. X... ont vendu l’intégralité de leurs parts à Mme Y... et à M. Z... pour

le prix de un euro ; que, le 12 septembre 2011, Mme Y... a cédé à la société Rifar 60 000 des 114 000

parts sociales dont elle était propriétaire dans la SCI Renaissance au prix de un euro ; que, par acte du

8 juin 2012, la société Rifar a acquis l’immeuble de la SCI au prix de 995 000 euros et, par acte du 25

janvier 2013, elle l’a revendu au prix de 1 660 000 euros ; que la SCI Renaissance a été placée en

redressement judiciaire, la date de la cessation des paiements étant fixée au 14 août 2010 ; que M. X...

et la société Ouizille-de Keating, ès qualités de mandataire judiciaire et de commissaire à l’exécution

du plan de redressement de la SCI Renaissance, ont assigné Mme Y..., M. Z... et la société Rifar en

annulation de la cession des parts sociales en date du 3 août 2011, sur le fondement de l’article 1591

du code civil, pour le premier, et sur le fondement de l’article L. 632-1 du code de commerce, pour la

seconde ; que, subsidiairement, M. X... a sollicité une expertise pour déterminer la valeur du bien

immobilier de la SCI ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la cession de droits sociaux pour un euro symbolique est valable à la condition que les

prestations complémentaires de l’euro symbolique constituent une contrepartie réelle et sérieuse qui

soit évaluable ; qu’en décidant, pour décider que la cession au prix de l’euro symbolique des parts de

la SCI du 29 A rue Deparcieux était valable, qu’elle trouvait sa contrepartie, en l’absence de garanties

de passif, dans le paiement des dettes sociales par les cessionnaires, sans qu’il y ait lieu de déterminer

la valeur de l’immeuble qui constituait son seul actif au besoin en ordonnant une mesure d’instruction

qui ne serait pas utile à la solution du litige dont elle était saisie, quand il lui appartenait de déterminer

la valeur de l’immeuble dont dépendait celle des droits sociaux cédés au prix symbolique d’un euro, la

cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs, en violation des articles 4 et 1591 du code civil,

ensemble les articles 143 et 144 du code de procédure civile ;

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2°/ qu’il n’y a carence dans l’administration de la preuve que lorsque la mesure sollicitée est destinée à

recueillir des renseignements que la partie demanderesse aurait dû elle-même fournir ; qu’en relevant,

pour refuser de déterminer la valeur de l’immeuble dont dépendait l’évaluation des actifs sociaux,

qu’une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence d’une partie dans

l’administration de la preuve, sans expliquer en quoi le prononcé d’une mesure d’expertise visait à

pallier une insuffisance reprochable dans l’administration de la preuve de M. X..., la cour d’appel a

privé sa décision de base légale au regard de l’article 146, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’ayant relevé, d’abord, que les acquéreurs des parts sociales avaient repris l’intégralité

du passif de la SCI et déclaré connaître le contentieux existant avec deux banques dont l’une avait

sollicité la vente forcée de l’immeuble de la SCI qui n’avait pu vendre son bien à l’amiable, ni apurer

ses dettes dans le délai accordé par le jugement, ensuite, qu’à l’époque de la cession, la SCI avait un

passif de 964 000 euros, alors que son unique actif était l’immeuble dont le bail d’habitation rapportait

un loyer mensuel de 5 500 euros et qui faisait l’objet d’une procédure de saisie immobilière sur une

mise à prix fixée à 780 000 euros, enfin, que le bilan de la SCI, clos au 31 décembre 2011, dégageait

une perte nette de 96 296 euros, la cour d’appel, qui en a déduit, d’une part, que la prise en charge du

passif constituait une contrepartie sérieuse et non dérisoire au transfert de propriété des parts sociales

alors au surplus que l’acte de cession excluait toute garantie de passif, d’autre part, que la nomination

d’un expert pour procéder à l’évaluation de l’immeuble était dépourvue d’utilité, a, par ces seuls

motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ; […]

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

Document 4 : Cass. com., 22 mars 2016.

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 21

janvier 2014), que MM. X..., Y... et Z..., qui

sont les associés fondateurs de la société Tleta

devenue la société Atir rail (la société), ont

souhaité obtenir la participation de M. A... à

leur projet de développement de la société ;

que le 14 février 2003, ils ont conclu avec M.

A... un "accord-cadre", aux termes duquel

MM. X..., Z... et Y... s’engageaient chacun à

céder à celui-ci 5 % du capital de la société

"pour le prix forfaitaire et symbolique de 500

euros", cependant qu’"en contrepartie de la

cession au prix d’acquisition symbolique

précité", M. A... s’engageait à "mettre au

service de la société en qualité de directeur

commercial sa connaissance du marché ainsi

que son industrie, pendant une durée minimum

de cinq années" ; que le 5 mars 2003, trois

actes de cession de parts sociales ont été signés

conformément à l’accord-cadre ; que le 31

mars 2003, la société a engagé M. A... en

qualité de directeur commercial ; que par acte

du 17 mars 2010, MM. X..., Y... et Z... ont

assigné ce dernier, à titre principal, en nullité

des cessions de parts pour indétermination du

prix, à défaut, pour vileté du prix et, à titre

subsidiaire, en résolution des cessions du fait

de sa défaillance dans l’exécution de ses

obligations ; que M. A... a soulevé la

prescription de l’action en nullité et,

reconventionnellement, a réclamé le paiement

de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal,

pris en sa première branche :

Attendu que MM. X..., Y... et Z... font grief à

l’arrêt de dire prescrite l’action en nullité des

actes de cession de parts alors, selon le moyen,

que la vente consentie sans prix ou sans prix

sérieux est affectée d’une nullité qui, étant

fondée sur l’absence d’un élément essentiel du

contrat, est une nullité absolue soumise à la

prescription de droit commun qui était, à

l’époque de l’acte litigieux, trentenaire ; que

pour déclarer l’action en nullité pour

indétermination du prix prescrite, la cour

d’appel a retenu que l’action pour

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indétermination du prix constituait une action

en nullité relative visant à la protection des

intérêts privés du cocontractant et se

prescrivant par cinq ans ; que ce faisant, elle a

violé l’article 1591 et l’article 2262 du code

civil dans sa rédaction applicable à l’espèce ;

Attendu que la Cour de cassation jugeait

depuis longtemps que la vente consentie à vil

prix était nulle de nullité absolue (1re Civ., 24

mars 1993, n° 90-21.462) ; que la solution était

affirmée en ces termes par la chambre

commerciale, financière et économique : "la

vente consentie sans prix sérieux est affectée

d’une nullité qui, étant fondée sur l’absence

d’un élément essentiel de ce contrat, est une

nullité absolue soumise à la prescription

trentenaire de droit commun" (Com., 23

octobre 2007, n° 06-13.979, Bull. n° 226) ;

Attendu que cette solution a toutefois été

abandonnée par la troisième chambre civile de

cette Cour, qui a récemment jugé "qu’un

contrat de vente conclu pour un prix dérisoire

ou vil est nul pour absence de cause et que

cette nullité, fondée sur l’intérêt privé du

vendeur, est une nullité relative soumise au

délai de prescription de cinq ans" (3e Civ., 24

octobre 2012, n° 11-21.980) ; que pour sa part,

la première chambre civile énonce que la

nullité d’un contrat pour défaut de cause,

protectrice du seul intérêt particulier de l’un

des cocontractants, est une nullité relative (1re

Civ., 29 septembre 2004, n° 03-10.766, Bull.

n° 216) ;

Attendu qu’il y a lieu d’adopter la même

position ; qu’en effet, c’est non pas en fonction

de l’existence ou de l’absence d’un élément

essentiel du contrat au jour de sa formation,

mais au regard de la nature de l’intérêt, privé

ou général, protégé par la règle transgressée

qu’il convient de déterminer le régime de

nullité applicable ;

Attendu qu’en l’espèce, l’action en nullité des

cessions de parts conclues pour un prix

indéterminé ou vil ne tendait qu’à la protection

des intérêts privés des cédants ;

Attendu que c’est donc à bon droit que la cour

d’appel a retenu que cette action, qui relève du

régime des actions en nullité relative, se

prescrit par cinq ans par application de l’article

1304 du code civil ; que le moyen n’est pas

fondé ;

Sur le second moyen de ce pourvoi :

Attendu que MM. X..., Y... et Z... font grief à

l’arrêt de rejeter leur demande de nullité des

actes de cession de parts alors, selon le

moyen :

1°/ que le prix de la vente doit être déterminé

ou déterminable ; que le prix de vente n’est pas

déterminable lorsqu’il est fonction d’éléments

dépendant de la volonté unilatérale de l’une

des parties ; que pour retenir que le prix n’était

pas soumis à la volonté de M. A..., la cour

d’appel a relevé que la partie du prix constituée

par son activité pour le compte de la société

Atir rail était encadrée par un contrat de travail

; que l’exécution du contrat de travail étant

rémunérée par un salaire, elle ne pouvait

constituer le prix de la cession des parts

sociales, qui ne pouvait consister qu’en une

contribution au développement de la société

allant au-delà de la seule exécution de ses

fonctions de directeur commercial ; que le prix

prévu sous la forme de cette contribution

dépendait de M. A... et était donc indéterminé ;

qu’en retenant le contraire, la cour d’appel a

violé l’article 1591 du code civil ;

2°/ que pour dire que le prix n’était pas vil, la

cour d’appel a énoncé que la société Atir rail

s’était développée en termes de chiffre

d’affaires et de résultat ; qu’en ne recherchant

pas si ce développement pouvait être imputé à

l’activité de M. A... et constituer ainsi le

complément de prix prévu, la cour d’appel a

privé sa décision de base légale au regard de

l’article 1591 du code civil ;

Mais attendu que la cour d’appel ayant déclaré

la demande de nullité prescrite sans la rejeter,

le moyen, qui n’attaque pas un chef du

dispositif de l’arrêt, est irrecevable ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que M. A... fait grief à l’arrêt de

rejeter sa demande reconventionnelle de

dommages-intérêts alors, selon le moyen, que

les juges doivent motiver leur décision ; qu’en

se bornant à affirmer que le droit à

investissements de M. A... résultait de

l’accord-cadre du 14 février 2003, "lequel a été

- 9 -

valablement résilié le 2 décembre 2009", sans

répondre aux conclusions de M. A... qui faisait

valoir que la résiliation unilatérale et sans

préavis du droit à investissements prévu par cet

accord-cadre se heurtait à la force obligatoire

du contrat, la cour d’appel a violé l’article 455

du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’après avoir constaté que M.

A... soutenait que sa qualité d’actionnaire lui

donnait le droit de participer aux

investissements de la société, la cour d’appel,

qui a retenu que ce droit n’était pas lié à sa

qualité d’actionnaire mais résultait de l’accord-

cadre qui avait été résilié le 2 décembre 2009,

a répondu, en les écartant, aux conclusions

prétendument délaissées ; que le moyen n’est

pas fondé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par

une décision spécialement motivée sur le

premier moyen du pourvoi principal, pris en

ses deux dernières branches, qui n’est

manifestement pas de nature à entraîner la

cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois, principal et incident.

Document 5 : Cass. civ. 1ère, 3 juillet 1996.

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que la société DPM fait grief à l’arrêt attaqué (Grenoble, 17 mars 1994) d’avoir annulé, pour

défaut de cause, le contrat de création d’un « point club vidéo » et de location de cassettes conclu avec

M. et Mme Y..., en retenant que la cause, mobile déterminant de l’engagement de ces derniers, était la

diffusion certaine des cassettes auprès de leur clientèle, et que cette exploitation était vouée à l’échec

dans une agglomération de 1314 habitants, alors que, d’une part, dans un contrat synallagmatique la

cause de l’obligation d’une partie réside dans l’obligation de l’autre partie, et qu’en l’espèce la cause

de l’engagement des époux X... était la mise à leur disposition des cassettes vidéo, et que, d’autre part,

les motifs déterminants ne peuvent constituer la cause du contrat que dans le cas non relevé par la cour

d’appel où ces motifs sont entrés dans le champ contractuel ;

Mais attendu qu’ayant relevé que, s’agissant de la location de cassettes vidéo pour l’exploitation d’un

commerce, l’exécution du contrat selon l’économie voulue par les parties était impossible, la cour

d’appel en a exactement déduit que le contrat était dépourvu de cause, dès lors qu’était ainsi constaté

le défaut de toute contrepartie réelle à l’obligation de payer le prix de location des cassettes, souscrite

par M. et Mme Y... dans le cadre de la convention de création d’un « point club vidéo » ;

Que l’arrêt est ainsi légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- 10 -

Document 6 : Cass. com., 18 mars 2014.

Sur le moyen unique, qui est recevable comme étant de pur droit :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 28 septembre 2012), que le 27 novembre 2006, la société Les

Complices a concédé à la société Yangtzekiang, devenue la société Yang design (la société Yang) une

licence d’exploitation de sa marque « Les Complices » en contrepartie d’une redevance annuelle

calculée par un pourcentage sur le chiffre d’affaires, avec minima ; que n’ayant pas reçu paiement des

redevances convenues, la société Les Complices a obtenu une ordonnance d’injonction de payer à

laquelle la société Yang a fait opposition ;

Attendu que la société Yang fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à payer à la société Les

Complices les sommes de 37 685,13 euros et 42 319,75 euros avec intérêts, alors, selon le moyen, que

la disparition de la cause d’un engagement à exécution successive en cours d’exécution du contrat

entraîne sa caducité ; que l’évolution des circonstances économiques peut déséquilibrer l’économie

générale du contrat tel que voulu par les parties et priver de contrepartie réelle l’engagement de l’une

d’elles qui devient caduc ; que la société Yang a fait valoir que l’évolution des circonstances

économiques du marché du textile et la chute des ventes dans la grande distribution ont entraîné un

déséquilibre du contrat le rendant non viable pour elle et privant de cause son obligation au titre des

minima garantis ; que pour rejeter ce moyen, la cour d’appel a jugé que la rentabilité du contrat ne

participe pas davantage à la définition de la cause dont l’existence s’apprécie au moment de sa

conclusion ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 1131 du code civil ;

Mais attendu que la cause de l’obligation constituant une condition de la formation du contrat, la cour

d’appel, appréciant souverainement la volonté des parties, a considéré que celle-ci résidait dans la

mise à disposition de la marque et non dans la rentabilité du contrat ; que par ce seul motif, la cour

d’appel a justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Document 7 : Cass. com., 22 octobre 1996.

Sur le premier moyen :

Vu l’article 1131 du Code civil ;

Attendu, selon l’arrêt infirmatif attaqué, que la société Banchereau a confié, à deux reprises, un pli

contenant une soumission à une adjudication à la société Chronopost, venant aux droits de la société

SFMI ; que ces plis n’ayant pas été livrés le lendemain de leur envoi avant midi, ainsi que la société

Chronopost s’y était engagée, la société Banchereau a assigné en réparation de ses préjudices la

société Chronopost ; que celle-ci a invoqué la clause du contrat limitant l’indemnisation du retard au

prix du transport dont elle s’était acquittée ;

Attendu que, pour débouter la société Banchereau de sa demande, l’arrêt retient que, si la société

Chronopost n’a pas respecté son obligation de livrer les plis le lendemain du jour de l’expédition avant

midi, elle n’a cependant pas commis une faute lourde exclusive de la limitation de responsabilité du

contrat ;

Attendu qu’en statuant ainsi alors que, spécialiste du transport rapide garantissant la fiabilité et la

célérité de son service, la société Chronopost s’était engagée à livrer les plis de la société Banchereau

dans un délai déterminé, et qu’en raison du manquement à cette obligation essentielle la clause

limitative de responsabilité du contrat, qui contredisait la portée de l’engagement pris, devait être

- 11 -

réputée non écrite, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 30 juin 1993, entre les parties, par

la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se

trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Caen.

Document 8 : Cass. com., 29 juin 2010.

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 26

novembre 2008), que la société Faurecia sièges

d’automobiles (la société Faurecia), alors

dénommée Bertrand Faure équipements, a

souhaité en 1997 déployer sur ses sites un

logiciel intégré couvrant principalement la

gestion de production et la gestion

commerciale ; qu’elle a choisi le logiciel V 12,

proposé par la société Oracle mais qui ne

devait pas être disponible avant septembre

1999 ; qu’un contrat de licences, un contrat de

maintenance et un contrat de formation ont été

conclus le 29 mai 1998 entre les sociétés

Faurecia et Oracle, tandis qu’un contrat de

mise en œuvre du "programme Oracle

applications" a été signé courant juillet 1998

entre ces sociétés ; qu’en attendant, les sites

ibériques de la société Faurecia ayant besoin

d’un changement de logiciel pour passer l’an

2000, une solution provisoire a été installée ;

qu’aux motifs que la solution provisoire

connaissait de graves difficultés et que la

version V 12 ne lui était pas livrée, la société

Faurecia a cessé de régler les redevances ;

qu’assignée en paiement par la société

Franfinance, à laquelle la société Oracle avait

cédé ces redevances, la société Faurecia a

appelé en garantie la société Oracle puis a

assigné cette dernière aux fins de nullité pour

dol ou résolution pour inexécution de

l’ensemble des contrats signés par les parties ;

que la cour d’appel a, par application d’une

clause des conventions conclues entre les

parties, limité la condamnation de la société

Oracle envers la société Faurecia à la garantie

de la condamnation de celle-ci envers la

société Franfinance et rejeté les autres

demandes de la société Faurecia ; que cet arrêt

a été partiellement cassé de ce chef (chambre

commerciale, financière et économique, 13

février 2007, pourvoi n° Z 05-17.407) ; que,

statuant sur renvoi après cassation, la cour

d’appel, faisant application de la clause

limitative de réparation, a condamné la société

Oracle à garantir la société Faurecia de sa

condamnation à payer à la société Franfinance

la somme de 203 312 euros avec intérêts au

taux contractuel légal de 1,5 % par mois à

compter du 1er mars 2001 et capitalisation des

intérêts échus dans les termes de l’article 1154

à compter du 1er mars 2002 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Faurecia fait grief à

l’arrêt d’avoir ainsi statué, alors, selon le

moyen :

1°/ que l’inexécution, par le débiteur, de

l’obligation essentielle à laquelle il s’est

contractuellement engagé emporte

l’inapplication de la clause limitative

d’indemnisation ; qu’en faisant application de

la clause limitative de responsabilité après

avoir jugé que la société Oracle avait manqué à

l’obligation essentielle tenant à la livraison de

la version V 12 en 1999, laquelle n’avait pas

été livrée à la date convenue, ni plus tard et

que la société Oracle ne démontrait aucune

faute imputable à la société Faurecia qui

l’aurait empêchée d’accomplir ses obligations,

ni aucun cas de force majeure, la cour d’appel

n’a pas tiré les conséquences légales de ses

constatations, violant ainsi les articles 1131,

1134 et 1147 du code civil ;

2°/ qu’en jugeant que la clause limitative de

responsabilité aurait été prétendument valable

en ce qu’elle aurait été librement négociée et

acceptée et qu’elle n’aurait pas été imposée à

Faurecia, la cour d’appel s’est prononcée par

- 12 -

un motif inopérant, violant ainsi les articles

1131, 1134, 1147 du code civil ;

3°/ qu’en jugeant que la clause, qui fixait un

plafond d’indemnisation égal au montant du

prix payé par Faurecia au titre du contrat des

licences n’était pas dérisoire et n’avait pas

pour effet de décharger par avance la société

Oracle du manquement à une obligation

essentielle lui incombant ou de vider de toute

substance cette obligation, la cour d’appel a

violé les articles 1131, 1134, 1147 du code

civil ;

Mais attendu que seule est réputée non écrite la

clause limitative de réparation qui contredit la

portée de l’obligation essentielle souscrite par

le débiteur ; que l’arrêt relève que si la société

Oracle a manqué à une obligation essentielle

du contrat, le montant de l’indemnisation

négocié aux termes d’une clause stipulant que

les prix convenus reflètent la répartition du

risque et la limitation de responsabilité qui en

résultait, n’était pas dérisoire, que la société

Oracle a consenti un taux de remise de 49 %,

que le contrat prévoit que la société Faurecia

sera le principal représentant européen

participant à un comité destiné à mener une

étude globale afin de développer un produit

Oracle pour le secteur automobile et

bénéficiera d’un statut préférentiel lors de la

définition des exigences nécessaires à une

continuelle amélioration de la solution

automobile d’Oracle pour la version V 12

d’Oracles applications ; que la cour d’appel en

a déduit que la clause limitative de réparation

ne vidait pas de toute substance l’obligation

essentielle de la société Oracle et a ainsi

légalement justifié sa décision ; que le moyen

n’est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Faurecia fait encore le

même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen,

qu’après avoir constaté que la société Oracle

n’avait pas livré la version V 12, en

considération de laquelle la société Faurecia

avait signé les contrats de licences, de support

technique, de formation et de mise en œuvre

du programme Oracle applications, qu’elle

avait ainsi manqué à une obligation essentielle

et ne démontrait aucune faute imputable à la

société Faurecia qui l’aurait empêchée

d’accomplir ses obligations, ni aucun cas de

force majeure, la cour d’appel a jugé que

n’était pas rapportée la preuve d’une faute

d’une gravité telle qu’elle tiendrait en échec la

clause limitative de réparation ; qu’en statuant

ainsi, la cour d’appel n’a pas tiré les

conséquences légales de ses constatations,

violant les articles 1134, 1147 et 1150 du code

civil ;

Mais attendu que la faute lourde ne peut

résulter du seul manquement à une obligation

contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se

déduire de la gravité du comportement du

débiteur ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu que les deuxième et quatrième

moyens ne seraient pas de nature à permettre

l’admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.