Une (très) brève histoire de la « mondialisation

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Une (très) brève histoire de la « mondialisation » « Mondialisation », quésaco? Le terme « mondialisation » est devenu très populaire pendant les années 1990 à la suite de l’effondrement de l’Union Soviétique et de la fin de la Guerre Froide. Le démantèlement de l’Union Soviétique, dont le nom officiel était Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS), a commencé par un soulèvement populaire qui visait la destruction du Mur de Berlin. Cette fissure dans la séparation existant alors entre l’Ouest et l’Est se répandit vite jusqu’à la perte du pouvoir soviétique en Europe de l’Est, puis à la chute de l’Union Soviétique elle-même. Dotée d’à peu près la moitié du poids économique de l’URSS et de sa superficie, la Fédération de Russie a émergé de cet effondrement pour conserver le siège permanent de l’Union Soviétique au Conseil de Sécurité de l’ONU. La chute de la superpuissance soviétique a semblé ouvrir la voie vers un régime universel de capitalisme mondial. La compétition entre le communisme emmené par les Soviétiques et le capitalisme emmené par les USA avait constitué le cœur des antagonismes planétaires pendant la Guerre Froide, à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale. Entre 1917 et 1991, la durée de vie de l’URSS, le Marxisme soviétique s’était présenté comme l’antidote communiste aux inégalités les plus criantes du capitalisme. L’effondrement de l’Empire Soviétique se déroulant alors sous nos propres yeux, Francis Fukuyama proclama triomphalement la Fin de l’Histoire en 1992. Avec la chute de l’état soviétique, un énorme obstacle avait apparemment été éliminé sur la route du capitalisme vers l’hégémonie mondiale. Fukuyama anticipa les changements à venir par l’institution d’un système

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Une (très) brève histoire dela « mondialisation »« Mondialisation », quésaco?

Le terme « mondialisation » est devenu très populaire pendantles années 1990 à la suite de l’effondrement de l’UnionSoviétique et de la fin de la Guerre Froide. Le démantèlementde l’Union Soviétique, dont le nom officiel était Union desRépubliques Socialistes Soviétiques (URSS), a commencé par unsoulèvement populaire qui visait la destruction du Mur deBerlin. Cette fissure dans la séparation existant alors entrel’Ouest et l’Est se répandit vite jusqu’à la perte du pouvoirsoviétique en Europe de l’Est, puis à la chute de l’UnionSoviétique elle-même. Dotée d’à peu près la moitié du poidséconomique de l’URSS et de sa superficie, la Fédération deRussie a émergé de cet effondrement pour conserver le siègepermanent de l’Union Soviétique au Conseil de Sécurité del’ONU.

La chute de la superpuissance soviétique a semblé ouvrir lavoie vers un régime universel de capitalisme mondial. Lacompétition entre le communisme emmené par les Soviétiques etle capitalisme emmené par les USA avait constitué le cœur desantagonismes planétaires pendant la Guerre Froide, à la sortiede la Seconde Guerre Mondiale. Entre 1917 et 1991, la durée devie de l’URSS, le Marxisme soviétique s’était présenté commel’antidote communiste aux inégalités les plus criantes ducapitalisme.

L’effondrement de l’Empire Soviétique se déroulant alors sousnos propres yeux, Francis Fukuyama proclama triomphalement laFin de l’Histoire en 1992. Avec la chute de l’état soviétique,un énorme obstacle avait apparemment été éliminé sur la routedu capitalisme vers l’hégémonie mondiale. Fukuyama anticipales changements à venir par l’institution d’un système

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cordonné de gouvernance mondiale. L’avenir idéalisé deFukuyama dans ce qu’il appelait la destination finale del’histoire devait, en réalité, impliquer le règne de banquesusurières, d’entreprises multinationales et de forces depolice, de marionnettes médiatiques, de profiteurs de guerre,de dealers de drogue et de sbires technocratiques.

À l’époque, en fonction de son impact et du sens qu’il voulaitrevêtir, le concept de Fin de l’Histoire devint étroitementassocié aux idées populaires concernant la « mondialisation ».Le terme « mondialisation » est devenu un nom de codeconstamment répété par des think-tanks de premier plan, depuissantes associations d’entrepreneurs et leurs médiasclients. La « mondialisation » était le terme primaire employépour promouvoir l’objectif d’universalisation du capitalismeet de fortification du système dominant de relations depouvoir que le capitalisme anime et édifie. À l’ère de lamondialisation, ces structures naguère décrites comme desentreprises multinationales ou transnationales pouvaientgrandir et devenir véritablement des corporations planétaires.

Aucun état communiste, se disait-on, n’allait plus se dressersur le chemin de la mondialisation d’un système unique derelations matérielles. Pour la première fois dans l’histoire,tous les peuples du monde, tous les produits et toutes lesressources pouvaient concrètement être considérées comme lescomposantes d’une matrice universelle de valeur monétaireinterchangeable.

La destruction du Mur de Berlin et le morcellement de l’UnionSoviétique semblaient signifier que le règne du capital allaitindéfiniment devenir le facteur déterminant prévalant dans lesinteractions humaines. Des entités supérieures aux états jadissouverains allaient prendre le contrôle de la gouvernance dela propriété privée, de la banque, de l’établissement desentreprises, du règlement des crédits et des dettes ainsi quede la création monétaire. Les nouvelles agencessupranationales seraient dotées de pouvoirs en abondance afin

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de créer, de faire appliquer et d’arbitrer un cadreuniversalisé pour le mouvement et la protection du capital àl’échelle mondiale.

L’Organisation Mondiale du Commerce fut créée en 1995 afind’aider à gouverner et à superviser l’extension du capitalismeà des proportions planétaires. En 1999 lors d’une réunion del’OMC à Seattle, de nombreux activistes se rassemblèrent pourprotester contre l’élitisme et le secret qu’incarnaient cettenouvelle organisation. Réunissant un vaste éventail derevendications, depuis des ouvriers syndicalistes à desécologistes, les manifestants condamnèrent la nature non-démocratique du projet d’universalisation du capitalisme – demondialisation du capitalisme.

Leur reproche essentiel était que l’approche de l’OMC vis-à-vis de la mondialisation allait dispenser davantage deprivilèges aux fractions les plus riches et les pluspuissantes de la société, tout en suscitant des désavantagespour ceux qui vivent dans les strates moyennes et basses dubien-être, de la sécurité et du pouvoir économique. Le niveauactuel d’inégalité économique dans le monde continue d’êtreobscènement injuste. Une récente étude de l’organisation Oxfama démontré que les 62 individus les plus matériellement richesdu monde possédaient davantage de moyens financiers que lamoitié la plus pauvre de la population mondiale, c’est-à-dire3,6 milliards de personnes.

La répartition des biens et des devoirs au sein de lacommunauté planétaire se projette dans les formescontemporaines d’asservissement par la dette, dérivées del’injustice vieille de plusieurs générations de dominationimpériale et d’assujettissement colonial. Les vols des terresde peuples indigènes et le vol inhérent à l’esclavagisme neforment qu’une partie de la kleptocratie qui imbibe lesprocessus d’accumulation de capital toujours d’actualité. Dansun système où la finance autorise des banques centralesprivées à créer la monnaie par l’émission de crédit,

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l’accumulation perpétuelle de dettes condamne l’écrasantemajorité de l’humanité à l’austérité. La plupart descontribuables doivent supporter le poids d’une dette qui n’enfinit pas d’enfler, encourue à la fois personnellement et entant que citoyens de nationalités endettées.

Au fil de la controverse entourant la « mondialisation », desnuances descriptives ont commencé à émerger si bien que l’onvoyait des adjectifs être attachés au mot contesté. De plus enplus, des phrases comme « mondialisation impériale »,« mondialisation anti-impériale » ou « mondialisationécologique » étaient employées pour décrire des visionsdifférentes de l’économie politique à l’intérieur d’un cadrequi recouvrait toute la planète.

Cette évolution dans les nuances pour identifier des types demondialisation différente aide à clarifier le fait qu’il n’y aaucun usage universellement accepté du terme« mondialisation ». La mondialisation doit-elle êtreprogrammée et régulée? Quelles sortes de nouvellesconfédérations de peuples variés est-il possible d’envisager?Quelles espèces de corps représentatifs peuvent être créés?Quelles nouvelles sortes de nouvelles institutions faut-ilétablir pour que prévale la règle du droit, plutôt que lerègne de la violence débridée telle qu’elle est mise enévidence par le militarisme sans retenue des guerresd’agression? De quelles sortes d’agences d’application de laloi y a-t-il besoin, afin que les droits humains des peuplesbénéficient de garanties au moins équivalentes aux protectionsprésentement fournies par les forces de police à la propriétéet au mouvement des biens et du capital?

Les possibilités sont inépuisables. La mondialisation n’estpas une chose cohérente dont les gens peuvent dire qu’ils sontpour, ou contre. Il existe de nombreuses versions différentesde la mondialisation. La mondialisation est un processus detransformation historique. Il a revêtu de multiples formesdans le passé, tout comme la poursuite de ce même processus

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prendra de nombreuses formes à l’avenir. La mondialisationimplique des transformations dans les relations entre lesêtres humains et le reste de la nature qui se déploient auniveau local, régional et mondial.

La manifestation populaire contre l’OMC eut lieu en 1999. Cepugilat public à propos du futur de la mondialisation a reçule nom de Bataille de Seattle. La couverture médiatiquemondiale, étant donné le spectacle en direct dans les ruesd’un conflit global, aida à rendre le mot « mondialisation »politique. Les conflits autour de l’avenir mondial ont reflétéles antagonismes concernant le sens donné au mot« mondialisation ». Le débat sur la sémantique du mot« mondialisation » est doté de répercussions importantes, pournotre époque et notre situation présente. Au départ, ceux quicritiquaient l’agenda de transformation de la gouvernancemondiale au service des branches les plus riches et puissantesde la société ont été étiquetés comme les défenseurs de« l’anti-mondialisation ».

Cette définition d’activiste « anti-mondialisation » n’a aucunsens. La désignation de ceux qui critiquaient l’OMC et lesagences assimilées comme des défenseurs d’une « anti-mondialisation » échoue à rendre compte du fait que lesmanifestants aspiraient dans leur ensemble à des formes plusdémocratiques et écologiques de la mondialisation. Ses membresn’ont pas proposé une quelconque forme de rejet de lamondialisation. Quel sens y aurait-il à s’opposer à lamondialisation tandis que l’humanité toute entière, ainsi quenos cousins des règnes végétaux et animaux partageons tousavec une évidence si flagrante une sphère dans les cieux, àlaquelle nous faisons parfois référence sous le nom de Terre?Nous partageons tous la même planète. Donc nous sommes tous,d’une certaine manière, des mondialistes.

Il existe de nombreuses manières d’envisager l’avenir de notre

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globe, et beaucoup de façons de négocier et de prioriser lesobjectifs désirés du changement mondial. Une fois que lesobjectifs primaires ont été établis, il y a de nombreusesroutes pour avancer vers des objectifs et des idéaux partagés.Où que nous allions, le terme « mondialisation » a pénétrédans le langage pour devenir le centre d’une discussionpolitique, de débats et de contestations considérables. Lesenjeux sont élevés dans ce débat. Ils concernent beaucoup plusqu’une simple discussion sur l’usage du langage ou l’abus decelui-ci. Ce qui se joue, c’est le genre de monde que nousallons léguer à notre postérité, et même à sept générationsd’ici dans le temps.

D’Al-Andalus au Quart Monde

Bien que le terme « mondialisation » soit récent, lesprocessus d’interaction humaine qu’il décrit sont trèsanciens. La connaissance de la sphéricité de notre foyerpartagé était largement répandue parmi les classes éduquées,longtemps avant que Christophe Colomb se soit engagé à prouverque la Terre est ronde en 1492. En Grèce pendant l’Antiquité,Pythagore avait avancé le postulat de la sphéricité de laTerre aussi tôt qu’au sixième siècle avant l’ère chrétienne.

Au neuvième siècle de notre ère l’érudit perse musulman, al-Biruni, se servit d’une combinaison de géométrie, d’algèbre etde trigonométrie pour calculer avec une grande précision lataille réelle de la Terre sphérique. Les nombreuxaccomplissements scientifiques et littéraires d’al-Birunifaisaient partie de l’essor majeur d’accomplissementsintellectuels ayant accompagné l’expansion rapide de l’Islam,en particulier pendant le 8ème et le 9ème siècle.

Cette transformation géopolitique couvrait un vaste territoires’étendant de l’Espagne actuelle à l’Afrique du Nord etjusqu’en Arabie, au Levant ainsi qu’en Perse et au Pakistan.Accompagnant cet essor de l’empire islamique, une révolution

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scientifique et intellectuelle mena à d’importantes percées enmathématiques, en astronomie, en architecture et en médecinenotamment, ainsi que dans tous les domaines d’expressionartistique.

Cette ère est parfois remémorée comme l’Âge d’Or de la quêteislamique de la connaissance. Dans cette quête de lacompréhension, l’identification de principes universelsinscrits dans les lois de la nature était particulièrementrévérée. Sous la supervision des dirigeants des Omeyyades etensuite des califats des Abbassides, ce phénomèned’intégration impériale de grands pans de la famille humainedonna lieu à un interlude important dans l’histoire de lamondialisation. Avec un accent mis sur la promotion de lacollégialité, de la traduction ainsi que sur l’accumulation etl’étude systémique de textes érudits réunis depuis toutes lesparties du monde connu, les sages et les savants travaillèrenten collaboration pour repousser les frontières de laconnaissance dans de grands centres d’apprentissage lourdementsubventionnés comme Bagdad et Cordoue.

Le califat islamique d’Al-Andalus, dans la Péninsule Ibérique,est devenu un site majeur de collaboration entre intellectuelsjuifs, chrétiens et musulmans. Leurs percées sur de nombreuxfronts scientifiques, technologiques et artistiques, y comprisen ramenant à la connaissance de l’époque beaucoup de travauxérudits de l’Antiquité, en particulier de la Grèce et de laRome antiques, ont aidé à poser les fondations de laRenaissance en Europe.

Cette période d’interaction éclairée s’avéra toutefois decourte durée. L’essor du Vatican lié aux Croisades de laChrétienté, orientées contre le contrôle musulman surJérusalem et la Terre Sainte environnante, a contribué à la« Reconquista » au nord du Détroit de Gibraltar. Le derniercalifat hispanique de Grenade est tombé aux mains des soldatsde la Chrétienté en 1492, la même année où Christophe Colombaccomplissait son voyage transformateur du monde vers

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l’Hémisphère Occidental.

La Reconquista de la Péninsule Ibérique, où sont aujourd’huisitués l’Espagne et le Portugal, a inclus dans sa réalité lasévérité croissante de l’Inquisition et de ses persécutionssanglantes « d’hérétiques » présumés. Galilée fut l’un de ceuxà se voir condamnés par les Inquisiteurs chargés de préserverl’orthodoxie Catholique Romaine. Le crime qui lui étaitreproché était d’avoir publié ses découvertes, réalisées àpartir de recherches effectuées avec un télescope en 1633. Ilcroyait que son examen attentif des corps célestes enmouvement démontrait que Copernic avait raison dans sa thèseantérieure selon laquelle le Soleil, et non la Terre, est lecentre fixe de notre système planétaire en révolution. LaTerre n’est pas le centre de l’Univers.

Le caractère de violence intolérante qui infusaitl’Inquisition prévalait aussi dans la Reconquista lourdementmilitarisée au nord de la Mer Méditerranée. Cette éthiqued’expansion violente s’étendit aux exploits transatlantiquesdes conquistadors espagnols précoces, comme Hernan Cortès etFrancisco Pizarro. La conquête de l’Empire Aztèque par Cortèsà Mexico et le pillage de l’Empire Inca par Pizarro dans lesAndes péruviennes ont mis en branle des incursionsgénocidaires parmi les populations indigènes des Amériques,qui n’a toujours pas réellement pris fin.

Avec l’assentiment du Vatican, la transformation de la majeurepartie de l’Amérique Centrale et « Latine » en Nouvelle-Espagne et en Nouveau-Portugal a initié la phase la plusagressive de mondialisation impériale de toute l’histoire.D’abord les puissances Catholiques Romaines d’Europe puisensuite les puissances Protestantes, mais prioritairementl’Angleterre et les Pays-Bas, ont commencé à étendre leurinfluence par l’élaboration de marines dévouées à la créationde colonies outre-mer. Ce processus de colonisation impliquaitl’établissement de réseaux étendus de commerce, de cadres

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juridiques et d’agendas bellicistes, ainsi que le mélange depeuples, de cultures et de connaissances à une échelle jusque-là sans précédent.

Le mélange qui s’accélère encore de peuples, de cultures etd’idées forme l’essence primordiale de la mondialisationdepuis 1942. Bien entendu de nombreux peuples indigènes ontrésisté à ce processus de mondialisation impériale. De plus enplus, la pulsion naturelle contre cette mondialisationimpériale a nécessité la création de confédérations derésistance pour s’opposer aux agences, aux armées et auxploutocrates dominateurs qui faisaient progresser lesincursions expansionnistes de la colonisation agressive.L’effort des peuples indigènes pour se rassembler en soutienaux initiatives de défense légitime des uns et des autres,constitue la base de la mondialisation anti-impériale. L’undes exemples les plus saisissants de la mondialisation anti-impériale prit place à Bandung en Indonésie, en 1955.

Les dirigeants de plusieurs nations colonisées d’Afrique etd’Asie se sont rencontrés pour projeter l’indépendance deleurs pays, à un moment où ils allaient être libérés del’ancien pouvoir impérial de leurs gouverneurs européens. Lesdeux guerres mondiales du vingtième siècle avaient ruiné etdécimé les puissances européennes. Épuisées, elles ont rétrécien taille, en richesse et en assurance. Les puissanceseuropéennes ne pouvaient plus entretenir leurs empirescoloniaux qui avaient inclus la majeure partie de l’humanitésur la planète au dix-neuvième siècle.

Les délégués qui se sont réunis à Bandung ont résolu des’allier ensemble dans l’adhésion commune aux principes depaix, de justice et de règle du droit. En 1961 ilspoursuivirent ce qu’ils avaient commencé à Bandung en fondantle Mouvement des Non-Alignés, composé d’anciennes colonies.Cette entité internationale existe encore à ce jour.

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George Manuel

Un Amérindien du Canada nommé George Manuel donna une voix àla philosophie du Mouvement des Non-Alignés composé de peuplesindigènes colonisés du monde entier. Dans le contexte de laGuerre Froide, Manuel parlait du refus des peuples indigènesde se désolidariser de leur héritage aborigène afind’embrasser sans réserves des modèles imposés dedéveloppement, qu’ils fussent capitalistes ou communistes.

Le chef Shuswap, de l’intérieur des terres en ColombieBritannique allait pour sa part fonder le Conseil Mondial desPeuples Indigènes. George Manuel s’est servi des Nations Unieset d’autres fora des relations internationales pour rejeter leparadigme du « Tiers-Monde » et du « sous-développement ». Àla place, Manuel imaginait le Quart Monde, un domaine où lespeuples indigènes se serviraient de la science et de latechnologie pour progresser vers des avenirs reposant sur desprojections de leurs propres systèmes de connaissance, despiritualité et de philosophie. Manuel décrivit sa vision dansun livre écrit en collaboration intitulé « The Fourth World »[« Le quart monde« , NdT].

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Certaines des idées professées par GeorgeManuel ont trouvé une expression dans laDéclaration des Nations Unies sur lesDroits des Peuples Indigènes. Cetinstrument international a été ratifié parl’Assemblée Générale de l’ONU en 2007.Quatre délégations nationales ont toutd’abord voté contre la résolution. Defaçon révélatrice, ceux qui s’opposaient àla Déclaration de l’ONU sur les DroitsAborigènes étaient les gouvernements des

USA, du Canada, d’Australie et de Nouvelle-Zélande.

La propagande et la psychologie du colonialisme

Un aspect vital de la colonisation inclut le façonnement descroyances et des attitudes, afin de donner à des systèmesviolents de contrôle hiérarchisé une semblance de normalitéacceptable. Cette colonisation des esprits pour rendre laguerre, l’injustice et l’inégalité apparemment naturelles etanodines constitue un énorme facteur de l’établissement desenvironnements psychologiques artificiels où nous vivons.L’exploration du facteur psychologique dans les habitatsartificiels de l’humanité est un travail d’une grandeimportance dans l’étude de la mondialisation.

Franz Fanon, un psychiatre noir de la colonie française de laMartinique, donna un tournant psychologique important à sonagenda pour le changement révolutionnaire. Son analyse donnaitune cohérence pondérée à la lutte des peuples colonisés pourse libérer des conditions externes du colonialisme, ainsi quedu traumatisme interne issu d’une haine de soi conditionnée.Trop souvent, les gouverneurs blancs ont poussé lespopulations d’une complexion plus foncée à prendre à cœur lesperceptions impériales d’une infériorité des « Indigènes ».

« Les Damnés de la Terre » de Fanon est arrivé en premièreligne des luttes de décolonisation pendant les années 1960.

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Écrit dans le contexte de la lutte contre le colonialismefrançais en Algérie, le livre de Fanon a surtout eu del’influence à travers l’Afrique et au sein du mouvement duBlack Power aux États-Unis.

Fanon avait anticipé que les luttes révolutionnaires despeuples colonisés seraient sabotées par une caste ambitieusede la bourgeoisie noire, qui remplacerait les gouverneursblancs qui régnaient pendant les jours fastes du colonialismeeuropéen désormais révolu. Cette prophétie allait êtrevérifiée par les dictatures fantoches soutenues par l’Occidentinstallées pour superviser l’exploitation corporatiste duCongo de Mobutu ou de l’Indonésie de Suharto, par exemple.

Les écueils formels du colonialisme ont diminué alorsqu’augmentait le nombre de nations reconnues par les NationsUnies, techniquement parlant. Ce nombre a augmenté de 50 paysadhérant à la Charte des Nations Unies à San Francisco en 1945à quelques 200 pays, qui bénéficient aujourd’hui d’unereconnaissance internationale à l’Assemblée Générale de l’ONU.Cependant, ce processus universellement salué dedécolonisation ne sert qu’à camoufler de nombreuses forces quicontinuent de cliver le monde entre de minusculesconcentrations d’élites ultra-privilégiées et l’immense massedes gens, qui sont déshérités et asservis et que Fanondécrivait comme Les Damnés de la Terre. Cet asservissementstéréotypé peut parfois transcender les configurations de raceet de couleur de peau. Les divisions de classe et de castepeuvent prévaloir à l’intérieur des pays, comme entre lespays.

La perpétuation de la colonisation d’oppression, parfoisdénommée néo-colonialisme et néo-impérialisme, dépend destructures injustes pour la répartition du crédit et de ladette, ainsi que de l’application permanente d’instrumentshautement puissants de propagande et de guerre psychologique.

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Le terme « propagande » trouve son origine dans la pulsionévangélique à propager l’Évangile du Christianisme par letravail du missionnaire. L’une des organisations missionnairesles plus efficaces de tous les temps a été la Compagnie deJésus, dont les membres sacerdotaux sont parfois décrits commeles « Jésuites ».

Fondé en 1540 par Ignace de Loyola, l’Ordre Jésuite estparfois décrit comme l’avant-garde de la Contre-Réforme, laréaction Catholique à la Réforme Protestante. Lesmissionnaires jésuites faisaient un usage très efficace detechniques psychologiques sophistiquées pour gagner desconversions par la propagation de l’Évangile. Des Amériques auJapon et à la Chine, les Jésuites étaient des intermédiairesdans les échanges de savoir entre l’Europe et de nombreusessociétés non-occidentales. Leurs activités présentent un casd’étude important dans les points communs entre la propagande,la colonisation et la mondialisation.

Les missionnaires chrétiens ont souvent sapé l’intégritéinterne des sociétés aborigènes, alors qu’ils n’ont queparfois défendu les droits aborigènes des groupes autochtonesau sein desquels ils travaillaient. Le Frère DominicainBartolome de las Casas fut l’un des premiers missionnaires deNouvelle-Espagne à se présenter comme un défenseur desIndiens. Pendant les années 1500, il occupa entre autres lafonction d’Évêque du Chiapas et de Protecteur des Indiens pourle compte de la Couronne Espagnole. Las Casas se distinguacomme juriste qui prit la défense des Premières Nations desAmériques au cours de procès majeurs de l’Espagne du seizièmesiècle.

De la propagande aux relations publiques: la carrière d’EdwardBernays comme psychologue maître du contrôle social

Le vingtième siècle a été une période où de vastes ressourcesont été consacrées à la manipulation et au contrôle desattitudes et des opinions de grands groupes de gens par le

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biais de la propagande. À cette époque Edward Bernays, unneveu du célèbre psychologue Sigmund Freud, est devenu le pèredu mensonge médiatique. Ainsi qu’illustré par le texte de« Propaganda« , le livre qu’il publia en 1928, Bernayss’appuya sur les recherches pionnières des missionnaires enpsychologie pour développer la science du contrôle mental dansle domaine laïque.

Bernays a écrit, « la propagande est le bras exécutif dugouvernement invisible« . Il a ajouté,

La lecture et l’écriture universelles devaient éduquerl’homme ordinaire à contrôler son environnement. Une foisqu’il pourrait lire et écrire, il serait pourvu d’un espritapte à régner. Ainsi dictait la doctrine démocratique. Mais àla place d’un esprit, la lecture et l’écriture universelleslui ont donné des tampons en caoutchouc, des tampons encaoutchouc encrés avec des slogans publicitaires, avec deséditoriaux, avec des données scientifiques fraîchementpubliées, avec les banalités des tabloïdes et les platitudesde l’histoire, mais somme toute bel et bien exempts de penséeoriginale.

L’un des admirateurs du texte de Bernays « Propaganda » étaitJoseph Goebbels, le Ministre de la Propagande allemand dugouvernement national-socialiste d’Adolf Hitler. Dans lesannées 1930 Bernays chercha à prendre ses distances vis-à-visde ses liens professionnels avec Goebbels et des techniques depropagande alors employées en Allemagne. Cet alignement destactiques pour influencer l’opinion publique en Allemagne etaux USA forma la toile de fond de la décision de Bernays pourinventer un nouveau nom à donner à son travail. Bernays décidaque « relations publiques » serait un terme plus bénin pourdes activités précédemment identifiées avec celles de la« propagande ».

À ce jour, le terme « relations publiques » couvre un vaste

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éventail d’activités de contrôle mental dans la sphèrepublique. Par exemple, beaucoup des reportages d’informationsà grande diffusion qui nous arrivent proviennent en réalité degrandes firmes de relations publiques. Les agences derelations publiques prennent de plus en plus d’importance ausein des organisations de collecte d’informations. Ces entitéscorporatistes de relations publiques font leur beurre ens’adressant à nos attitudes, nos impressions, nospréoccupations, nos compréhensions et, en fin de compte, à noscomportements.

Les plus gros et les plus lucratifs contrats de relationspubliques concernent la vente des guerres à l’acceptation dugrand public. Il nous est demandé de payer, avec notre argentde contribuables, les coûts astronomiques de la guerre dehaute technologie. Il est également attendu de notre part deservir la logistique de la machine de guerre y compris par lebiais de la fourniture, par nos familles, de soldats etd’autres personnels. D’usage, il est nécessaire de diaboliseret de déshumaniser l’image de l’ennemi en prélude à une guerreeffective.

Bernays s’est fait un nom en réalisant un marketing de masseen faveur des cigarettes à destination des femmes pour lecompte de son client, l’American Tobacco Company. Afin deréaliser cet objectif, Bernays créa une « opportunitéphotographique » pendant le Défilé de Pâques de New York. Ilembaucha des suffragettes pour allumer des cigarettes devantles caméras. Les cigarettes allumées par les suffragettes ontété décrites dans la narration médiatique comme des « torchesde la liberté ». L’histoire fut ainsi placée dans de nombreuxrapports d’informations, indiquant que des femmes fumant descigarettes équivalait à l’adoption d’une attitude pluséclairée sur l’égalité des sexes. Cet épisode aida à rendreindistincte la frontière entre la publicité, le reportaged’information et les « relations publiques ». Le mélanged’informations, de divertissement et de marketing allait

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s’intensifier avec l’introduction et le développement de latélévision.

Depuis ses bureaux d’entreprise sur Madison Avenue à New York,Bernays a ouvert la voie du développement des méthodes decommunication de masse, afin d’envahir et d’influencer lesniveaux subconscients des fonctions cérébrales humaines. Lebut de cette infiltration des fonctions mentales étaitd’imposer diverses formes de contrôle social.

Les techniques de gestion de l’opinion publique de Bernays ontattiré l’attention des forces armées US, et surtout de la CIA.Au début des années 1950, la CIA confia à Bernays la tâche defaire en sorte que le renversement, provoqué par les USA, dugouvernement élu du Guatemala passe pour être une révoltepopulaire locale dirigée contre le communisme soutenu par lesSoviétiques. La volonté d’extraire de sa fonction JacoboArbenz, le président élu du Guatemala, provenait à l’originede la United Fruit Company. Les bénéfices de l’entreprise seréduisaient à cause du type de réformes agraires appliquéespar le gouvernement Arbenz.

La réussite de Bernays dans la production d’un faux récit surle Guatemala, semblant réel et authentique dans les médiasgrand public, a établi un prototype pour de nombreux cycles detromperie encore à venir. La stratégie de la tension – lastratégie de création de clivages entre les peuples et en leursein, pour les empêcher de développer la force collective dela solidarité politique – a dominé la guerre psychologique ducôté US de la Guerre Froide. Cette Guerre Froide allaitconnaître une fin abrupte avec la chute de l’Union Soviétiqueen 1991.

La révolution cubaine, l’Opération Mockingbird, MK-Ultra et lastratégie du choc

Le médecin argentin Che Guevarra et l’avocat, soldat etpoliticien cubain Fidel Castro ont été intensément affectés

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par la démonstration de cruauté US au Guatemala, de pair avecle mépris total de la CIA pour la vérité. Ayant été témoins dudéploiement des tactiques US pour prendre le contrôle duGuatemala, Che et Castro se sont radicalisés. Che et Castrofirent équipe avec pour objectif le renversement dugouvernement mafieux qui dominait Cuba. Leur tactique pouraccomplir le changement sociétal allait être la guérillaclassique, combinée avec l’infiltration révolutionnaire de lapaysannerie rurale. Le contrôle mafieux US sur Cuba avant 1959est mis à l’image avec luxe et paillettes dans la deuxièmepartie de la saga cinématographique de Francis Ford Coppola,Le Parrain.

La Révolution Cubaine devint l’un des points culminants de lalutte de la Guerre Froide, dépeinte dans les médias populairescomme un duel planétaire entre le capitalisme emmené par lesUSA et le communisme emmené par les Soviétiques. Cuba consacraénormément d’énergie révolutionnaire au développement d’unsystème de santé sociale, qui a envoyé de nombreux milliers demédecins formés à Cuba parmi les peuples dépourvus et opprimésd’Afrique et d’Amérique Latine. Le gouvernement cubain futaccessoire dans l’aide fournie à l’effort, surtout en Angola,d’écraser militairement et psychologiquement les bastions desoutien au notoire régime d’apartheid d’Afrique du Sud.

Le leader de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud, NelsonMandela, rendit hommage à l’aide fournie par le gouvernementde Castro peu de temps après qu’il ait été libéré de prisonpour diriger son pays, dans sa route vers un affranchissementpolitique ignorant les couleurs. L’un des facteurs dans lachute du régime d’apartheid en Afrique du Sud fut la chute del’Union Soviétique. La disparition de l’URSS sapa l’allégationde propagande du gouvernement d’apartheid, selon laquelle ilavait criminalisé le Congrès National Africain de Mandela pourempêcher l’arrivée au pouvoir d’un dangereux agent desubversion communiste.

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L’un des aspects de l’assaut datant de l’époque de la GuerreFroide contre les médias libres, équilibrés et honnêtes a étémis en lumière à la fin des années 1970. Une enquêteparlementaire révéla que la Central Intelligence Agency US, laCIA, avait assumé le contrôle de maintes officines decommunication de masse dans le cadre de l’Opération« Mockingbird ». Essentiellement, l’Opération Mockingbirdimpliquait la cooptation financière de milliers dejournalistes, de rédacteurs, de directeurs et de propriétairesde médias par la CIA. La stratégie de Mockingbird était decensurer et de distordre les dépêches d’informations, oud’implanter de la désinformation pure et simple afin depromouvoir l’agenda anti-communiste de la partie emmenée parles USA dans la Guerre Froide.

L’opération Mockingbird était étroitement apparentée auxexpériences de contrôle mental de la CIA connues sousl’acronyme MK-Ultra. Une partie des recherches réalisées parles scientifiques de l’Opération MK-Ultra concernaitl’expérimentation sur l’usage possible de la droguepsychédélique LSD comme « sérum de vérité ». Un centre majeurdes activités de MK-Ultra se situait à l’Allan MemorialInstitute de l’Université McGill à Montréal. Là-bas, le Dr.Ewen Cameron mena de nombreuses expériences durant les années1950 sur diverses formes d’altération mentale.

Naomi Klein a discuté des applications sur le long terme desexpériences du Dr. Cameron sur le contrôle du comportementdans l’introduction de son livre et de son documentaireéponyme essentiel, « La Stratégie du Choc« .

L’existence de l’Opération Mockingbird fut exposée dans uneenquête parlementaire suite à la démission du Président USRichard Nixon en 1974 sous une pluie d’opprobre. Nixon futpoussé à la démission à cause des conséquences des révélationsqui accompagnèrent le scandale du Watergate. Carl Bernstein aété l’un des deux journalistes, depuis tellement encensés, qui

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dévoilèrent les informations initiales qui ont mené à la chutede Nixon. Bernstein rapporta de façon célèbre dans RollingStone Magazine en 1977 la ribambelle de liens rattachant lesmédias, dont beaucoup des plus célèbres journalistes des USA,aux stratégies de contrôle mental de la CIA.

Les BRICS et le business de la guerre

L’ère de la bipolarité de la Guerre Froide céda la route à cequi a semblé être à un moment d’uni-polarité, entre 1991 et ledébut du vingt-et-unième siècle. En 2008, la déliquescence decertaines institutions financières dérégulées de Wall Streetprovoqua une contagion commerciale internationale qui adémontré la fragilité de l’Occident. Alors que s’ouvrait levingt-et-unième siècle, l’apparente omnipotence unipolaire desÉtats-Unis céda la route à un monde multipolaire pluscomplexe.

La Chine a émergé en tant que moteur commercial et industrielde l’entreprise capitaliste. La Chine a parfois été adjointe àl’Inde, à la Russie, au Brésil et à l’Afrique du Sud dans unnouveau conglomérat économique intitulé, les « BRICS ».L’Union Européenne a continué de s’étendre, alternant entredes périodes de croissance et de récession. Travaillantétroitement avec l’OTAN, l’UE a intégré les anciens payssatellites de l’Union Soviétique. Cette trajectoired’expansion a été limitée par un problème de surexpositionfinancière. Cette crise fut reflétée dans l’énorme endettementde nombreux pays européens, tel que mis en évidence parl’épopée entourant l’économie assiégée de la Grèce.

La Guerre Mondiale contre la Terreur fut initiée dans lesillage des événements du 11 septembre 2001. Le complexemilitaro-industriel qui avait crû pendant la Seconde GuerreMondiale puis durant la Guerre froide s’est maintenu, tandisque l’outillage anti-communiste fut recalibré et augmenté poursatisfaire l’anti-terrorisme. Effectivement, les budgetsmilitaires de nombreux pays, mais tout particulièrement du

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gouvernement US, ont gonflé à des niveaux sans précédent suiteau 11 septembre (2001). L’une des continuités qui ressort durôle des USA dans la transition de la Guerre Froide à laGuerre Mondiale contre la Terreur, c’est que le déploiement deressources militaires, policières, diplomatiques et depropagande orientées vers les ennemis désignés a entretenu lastructure de classes dominée par les bénéficiaires,propriétaires et directeurs principaux du complexe militaro-industriel, qui devient outre mesure de plus en plus élaboré.

Les profiteurs de guerre en ont énormément bénéficié tandisque les dirigeants corporatistes et les clients de la machinede guerre la plus dominatrice du monde ont démultiplié leurcommerce du meurtre industrialisé. Ces armements de hautetechnologie ont été dirigés contre les populations deplusieurs pays dont l’Afghanistan, l’Irak, la Libye et plusrécemment, la Syrie.

L’invasion de la Syrie s’est accompagnée de l’encerclementmilitaire de la Russie. Ce processus place surtout en premièreligne les pays de l’OTAN qui sont frontaliers avec laFédération de Russie. L’Organisation du Traité del’Atlantique-Nord, l’OTAN, est issue du rôle dominant qu’ontjoué les USA en Europe Occidentale comme rempart contre celuijoué par les militaires soviétiques dans les pays du Pacte deVarsovie. L’OTAN n’est pas morte avec la Guerre Froide maiss’est plutôt étendue de pair avec l’Union Européenne, l’UE. Lapuissance militaire de l’OTAN est actuellement orientée versla provocation de disputes territoriales impliquant l’Ukrainepour justifier le déclenchement d’une guerre contre la Russie.

Toutes cette activité militaire pourrait être interprétéecomme un prélude à la Troisième Guerre Mondiale devantcomprendre une invasion à grande échelle de la RépubliqueIslamique d’Iran. Construit sur les profondes fondations de lacivilisation perse, l’Iran est un pays riche en ressourcespeuplé par 80 000 000 d’habitants, pour la plupart bienéduqués.

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La guerre selon Charlie Wilson

La Guerre Froide et les prémisses de la Guerre Mondiale contrela Terreur se sont notablement croisés en Afghanistan. La CIAet ses alliés au Pakistan avaient mis sur pieds des armées demercenaires en Afghanistan pendant les années 1980 dans le butde renverser le régime de Mohammed Naijibullah, soutenu parles Soviétiques. Cette instrumentalisation de forcescombattantes islamiques durant la Guerre Froide a pris desnoms divers et variés. Les « moudjahidines » est l’un destermes employé pour décrire les ennemis soutenus, recrutés,armés et entraînés par les USA du régime communiste deNaijibullah. Les Talibans est un autre de ces termes, souventdéployé avec une intention propagandiste. Au centre de gravitédes Talibans se trouvent des tribus parlant le Pachtoune etd’ascendance persane. Leurs territoires comprennent la régionfrontalière entre l’Afghanistan et le Pakistan.

Al-Qaeda est encore un autre terme fortement associé audjihadisme, qui signifie « lutte » en langue arabe. La CIAadopta pour la première fois la terminologie « al-Qaeda » pourdécrire une base de données militaires qu’elle entretenait enArabie Saoudite. Le terme fit son entrée définitive dans leshautes sphères du jargon géostratégique quand les événementsdu 11 septembre 2001 furent immédiatement imputés à Oussamaben Laden et à al-Qaeda, avant même que les Tours Jumellesaient eu le temps de tomber. C’est révélateur, le même groupeaccusé des attentats du 11 septembre 2001 reçoit désormais unsoutien considérable de la part des USA, en appui de la partieemmenée par les USA dans le conflit de superpuissances visantà renverser le gouvernement syrien de Bachar al-Assad? Qu’est-ce qui ne colle pas avec cette histoire? Pourquoi legouvernement US vient-il en aide à ce même groupe qu’il accuseencore d’être coupable des crimes du 11 septembre 2001?

L’issue du conflit en Afghanistan allait avoir desrépercussions majeures dans la diminution du prestige del’Union Soviétique. La réussite des armées par procuration US

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qui ont vaincu les forces soviétiques a contribué à stimulerle mouvement « Solidarność » (Solidarité) appuyé par leVatican et la CIA en Pologne. Rétrospectivement, c’est lesuccès rencontré par le mouvement Solidarność emmené par LechWałęsa qui a fait s’orienter les événements vers l’échec etl’implosion du système de gouvernance soviétique. Le célèbremetteur en scène d’Hollywood Mike Nichols a rendu unescénographie enlevée de l’appui US aux combattants islamiquesen Afghanistan pendant l’Opération Cyclone. Dans « La Guerreselon Charlie Wilson« , Tom Hanks joue le premier rôle duReprésentant au Congrès du Texas qui a fait la promotion decette aventure militaire soutenue par les USA en Afghanistan.

Par conséquent, il y a une toile de fond de Guerre Froide plusvaste qui explique l’élaboration par la CIA d’armées parprocuration dont les membres sont des soldats mercenairespayés pour combattre sous des drapeaux islamiques. Une grandepartie du financement de cette opération fut réalisé par lebiais de la Banque de Crédit et de Commerce Internationalsoutenue par les Saoudiens, et dont la corruption dominée parla CIA fut mise en lumière pendant l’exposition du scandaledit des Contras iraniens.

L’idéologie marxiste adoptée par l’Union Soviétique et par sessatellites, y compris le régime de Naijibulah en Afghanistan,était caractérisée par son matérialisme et par son athéisme.Ces attributs faisaient du gouvernement US l’ami de toutessortes de théocrates religieux, parce que les personnesreligieuses étaient forcément anti-communistes. La CIA etd’autres prétendues agences de sécurité nationale ont mis ungros accent sur la construction de l’Islam politique [dans saversion saoudienne]. Les fonctionnaires de la sécuriténationale ont travaillé main dans la main avec la dynastiesaoudienne régnante et riche en pétrole, qui accorde unsoutien financier considérable à l’exportation de l’extrémismewahhabite à travers le monde islamique.

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Cette avancée datant de la Guerre Froide du gouvernement USdans le domaine de l’Islam politique a également été manipuléecomme levier contre les tendances plus laïques des politiquespan-arabes quelque peu socialistes de Gamal Abdel Nasser et deses successeurs baathistes dont Saddam Hussein en Irak etBachar al-Assad en Syrie. Le rôle de la CIA dans l’essor desFrères Musulmans est décrit dans le livre de Ian Johnson, « AMosque in Munich: The Nazis, the CIA, and the Rise of theMuslim Brotherhood in the West » [« Une Mosquée à Munich: LesNazis, la CIA, et l’Essor des Frères Musulmans en Occident« ,NdT] (Boston: Houghton Mifflin Harcourt, 2010).

USA-Israël; Israël-Palestine

Dans les années qui ont précédé la chute de l’Union Soviétiquebeaucoup de think-tanks US ont commencé à chercher un nouveauparadigme d’interaction mondiale, à même de préserver le rôledominant tenu par les États-Unis dans la géopolitique dumonde. Le paradigme primaire adopté par les stratèges en routevers la Guerre Mondiale contre la Terreur est connu sous lenom de « choc des civilisations ».

Cette conception a émergé des travaux du soi-disant« orientaliste » Bernard Lewis et du politologue Samuel P.Huntington. Huntington est l’auteur de « Le Choc desCivilisations » [titre original, « The Clash of Civilizationsand the Remaking of World Order« , « Le Choc des Civilisationset la Refondation de l’Ordre Mondial« , NdT] (New York: Simonand Schuster, 1999). Le « choc » prioritairement présenté,qu’il soit réel ou fantaisiste, se plaçait entre la« civilisation occidentale » prétendument centrée aux États-Unis et la culture islamique autour de plusieurs centrespolitiques au Moyen-Orient.

Comme Bernard Lewis l’avait observé, il y avait dans le « chocdes civilisations » des implications particulièrementsignificatives pour Israël, entouré par la culture arabe quiest majoritairement, mais pas exclusivement, musulmane. Dans

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son article paru dans The Atlantic en septembre 1990 intitulé« Les racines de la rage musulmane: pourquoi tant de Musulmanshaïssent profondément l’Occident », Lewis a considéré larelation intime existant entre les États-Unis et Israël commeétant l’une des causes principales du ressentiment musulman.Il a écrit, « la cause la plus souvent avancée pour lessentiments anti-américains parmi les Musulmans aujourd’hui estle soutien américain pour Israël ».

Les aspects politiques, économiques et culturels des relationsentre les gouvernements des États-Unis et d’Israël sontdevenus le cœur d’une controverse et de débats enlevés,surtout depuis le 11 septembre 2001. Un problème centraldevant être réglé à cet égard, est celui de savoir si le chocdes civilisations ayant suivi le 11 septembre 2001 est réel,ou au moins partiellement artificiel. Quel est le rôle dupartenariat US-Israël dans la construction du cadrepsychologique et géopolitique de la Guerre Mondiale contre laTerreur? Cette opération militaire, psychologique et policièrecorrespond-elle à une situation existant d’elle-même, ou lesantagonismes entre Occidentaux et Musulmans sont-ilsartificiellement alimentés pour faire progresser certainsintérêts et certains agendas?

Une partie du discours sophistiqué entourant les relationsentre les USA et Israël a été généré par les débats relevésqui ont accompagné la publication en 2007 du travail de JohnJ. Mearsheimer et Stephen M. Walt. Leur ouvrage écritcollaborativement est intitulé « The Israel Lobby and U.S.Foreign Policy » [« Le lobby pro-israélien et la politiqueétrangère US« , NdT] (New York: Farrar, Straus and Giroux,2007). Les co-signataires de ce livre sont tous deux desfigures vénérables et accomplies du monde académiqueétasunien; Mearsheimer et Walt ont plaidé que le pouvoir dulobby israélien est vaste et composé de multiples aspects. Lesco-auteurs ont appuyé l’argument que les intérêts nationauxdes États-Unis ne sont pas toujours servis convenablement par

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l’application d’une telle emphase sur le soutien auxpolitiques du gouvernement israélien.

Beaucoup des critiques dirigées contre Israël et provenant demultiples sources concernent la condamnation du traitement dupeuple palestinien par les Israéliens. Les habitants indigènesdes territoires sur lesquels s’assoit aujourd’hui Israël ontété déracinés, expulsés, criminalisés et emprisonnés, souventsans accusation formelle. Les Palestiniens ont été torturésdans l’impunité. Ils ont été tués, privés de la plupart desconditions sanitaires nécessaires à l’humanité, etperpétuellement subjugués depuis l’établissement de l’étatd’Israël en 1947-48.

Les territoires sur lesquels se trouvent Israël et lesprétendus Territoires Occupés avaient anciennement étéassujettis à l’Empire Ottoman, puis au Mandat britannique enPalestine. Ceux qui défendent les actions du gouvernementisraélien décrivent son traitement des Palestiniens comme dela « légitime défense », pour l’obtention d’une protectioncontre les incursions réelles ou imaginaires de« terroristes ». La discussion publique à propos du droit égaldes Palestiniens à s’engager dans la légitime défense ararement l’occasion d’aller bien loin.

Une nouvelle phase de la relation entre Israël et lesPalestiniens s’est manifestée peu de temps après le 11septembre 2001 par l’érection d’un mur de séparation, commencéen 2002. Ce mur, qui est encore en construction, continue dedécouper des territoires proclamés faire partie du terreau dela patrie israélienne, hors des fragments qui restent encoredes prétendus « Territoires Occupés ».

Ces Territoires Occupés devaient être préservés en accord avecune résolution des Nations Unies qui appelait à la créationd’un état arabe. Les autres pays arabes, toutefois, ont décidéde ne pas suivre le plan de l’ONU de création d’un mini-état

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palestinien, comme il avait été imaginé par les rédacteurs dela Résolution 181 de l’ONU. Le « plan de partition » introduitpar la Résolution 181 a été un accessoire dans l’établissementdes fondations juridiques de l’état d’Israël. Cette terredevant être réservée pour un futur pays palestinien futcapturée par la force des armes en 1967 par les Forces deDéfense Israéliennes. Ces terres conquises sont devenues lesite de nombreuses nouvelles colonies juives dont leshabitants ont tendance à adhérer à la vision sionisterévisionniste d’un Israël plus vaste, ou d’un Grand Israël(Eretz Israel).

Le gouvernement israélien appelle le mur une « Barrière deSéparation ». Ceux qui critiquent l’état juif le décriventcomme le Mur de l’Apartheid. Quel que soit le nom utilisé,cette structure est une variante des forces de la GuerreFroide qui avaient érigé le Mur de Berlin comme moyen pourempêcher les Allemands de l’Est de s’échapper en Allemagne del’Ouest. Le mur séparant Israël à l’intérieur du domaineextérieur palestinien sert aussi de symbole approprié desdichotomies perceptuelles qui ont permis le renouvellement desanciens paradigmes impériaux de « barbarie et decivilisation »au nom cette fois-ci de la prétendue GuerreMondiale contre la Terreur.

L’un des leviers politiques importants dans ces disputes estle statut du mouvement Boycott, Désinvestissement etSanctions, dit « BDS ». Ses défenseurs sont résolus à fairepression sur le gouvernement israélien par le biais de moyenséconomiques, afin de faire reconnaître et respecter les droitshumains du peuple palestinien. Les campagnes BDS ont été lethéâtre de disputes particulièrement enlevées sur de nombreuxcampus universitaires en Amérique du Nord. Selon un récentrapport rendu par Judy Maltz dans le journal israélienHaaretz, cet antagonisme incite de nombreux étudiants juifs àesquiver complètement les discussions concernant Israël et lesPalestiniens.

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Un choc des civilisations?

Tout comme pour la Guerre Froide, mener la Guerre Mondialecontre la Terreur implique l’usage d’une composanteparticulièrement intense de guerre psychologique. Puisquetellement d’invasions US sont dirigées contre des paysmajoritairement musulmans comprenant la Syrie, l’Irak et leYémen, une grande partie de la propagande de guerre revêt uncaractère anti-musulman. Quelques-uns de ceux qui ont étudiécet aspect de la propagande de guerre entourant la GuerreMondiale contre la Terreur en cours ont trouvé le terme,« Industrie de l’Islamophobie ». Ils avancent que la raisonqui explique l’incitation propagandiste à haïr les Musulmansconsiste à exploiter la peur afin d’acquérir l’assentimentpublic pour des invasions militaires à l’étranger, et pourl’incursion domestique des foyers familiaux par lasurveillance.

Certains des détracteurs des héritiers de l’empire anglo-étasunien se sont permis d’identifier le phénomène duterrorisme sous faux drapeau comme une tactique d’acquisitionde soutien populaire pour l’accélération des activités de lamachine de guerre. Le terrorisme sous faux drapeau implique lafabrication d’épisodes de violence afin que les populationsciblées puissent être blâmées et diabolisées dans laperception du public, comme prélude au lancement de guerresd’agression.

Le terrorisme sous faux drapeau découle directement du genrede tactiques déployées par Edward Bernays dans la mise enscène d’événements concoctés pour leurrer les citoyens US defaçon à ce qu’ils ignorent les actions illégales de leurgouvernement, y compris l’assassinat de dirigeants étrangers.Un exemple d’un tel assassinat politique concernel’élimination de Patrice Lumumba en 1961, qui était le premierPrésident élu du Zaïre. Il fut tué avec l’accord de la CIA etdes anciens dirigeants belges du Zaïre afin de nettoyer laroute pour l’instauration du dictateur fantoche, le Général

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Mobutu.

Le terrorisme sous faux drapeau est cohérent avec lesactivités de l’Opération Gladio montée par des responsables del’OTAN et leurs agents. L’Opération Gladio impliquaitl’exécution d’épisodes de violence devant spécifiquement êtreimputés à des communistes, à des socialistes et même à desgauchistes progressistes modérés. L’objectif du terrorismesous faux drapeau de l’OTAN était de retourner l’opinionpublique en Europe Occidentale contre les partis politiquesmoins enclins à soutenir la partie emmenée par les USA dans laGuerre Froide.

Mon collègue, le Dr. Kevin Barrett, a gravité vers le centred’une enquête aux multiples facettes concernant des épisodesrécents que certains ont interprété comme des exemples deterrorisme sous faux drapeau. Sur un laps de temps dépassant àpeine un an le Dr. Barrett a rédigé des portions de troislivres collaboratifs qu’il a publiés tout seul. Inclus dansces livres publiés par le Dr. Barrett figurent les essais de55 observateurs de trois événements distincts.

Ces livres ont été publiés en 2015 et en 2016. Ils ont tousété publiés par la maison d’édition « Sifting and WinnowingPress ». Le premier de l’ensemble est intitulé « We Are NotCharlie Hebdo: Free Thinkers Question the French 9/11 » [NdlR:cet ouvrage a d’ores et déjà été traduit et publié enfrançais, et est disponible sur ce lien]. Les deux autresvolumes sont intitulés « Another French False Flag: BloodyTracks from Paris to San Bernardino » [« Un autre « False-Flag » français: pistes sanglantes de Paris à San Bernardino »– bientôt également disponible en français, NdT] et « OrlandoFalse Flag: The Clash of Histories » [« Attentat sous fauxdrapeau d’Orlando: le choc des narrations« , NdT]. J’ai écrittrois essais dans les deux premiers livres. Les titres de cesbillets sont, « Chasse aux sorcières terroristes »,

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« Complicité du monde académique dans la guerre mondiale deterrorisme sous faux drapeau », et « Impérialisme US etdestruction nihiliste de cultures: lettre ouverte àl’Ayatollah Khamenei d’Iran ».

Comme Christopher Bollyn et le Dr. Alan Sabrosky, le Dr.Barrett impute en priorité la plus grande part du blâmeconcernant la fournée actuelle de terrorisme sous faux drapeaucommençant avec le 11 septembre 2001 aux comparses étasuniensde l’Israël du Likoud. Le Likoud est un parti politique dedroite en Israël, emmené par le Premier Ministre BenjaminNetanyahou. Ses racines se trouvent dans le SionismeRévisionniste et dans la quête d’Eretz Israel, du GrandIsraël. L’interprétation du Dr. Barrett a été dénigrée avecvéhémence en tant qu’abomination par Jonathan Kay don sonlivre, « Among the Truthers: A Journey into the GrowingConspiracist Underground of 9/11 Truthers, Birthers,Armageddonites, Vaccine Hysterics, Hollywood Know-Nothings andInternet Addicts » [« Parmi les chercheurs de vérité: unvoyage dans le monde parallèle conspirationniste en expansiondes chercheurs de vérité sur le 11 septembre, des avocats del’inéligibilité de Barack Obama, des prophètes del’Apocalypse, des timbrés anti-vaccination, des colporteurs derumeurs sur Hollywood et des accros à l’Internet« , NdT](Toronto: Harper Collins, 2011). Selon Kay, l’analyse du Dr.Barrett absout l’Islam d’un « terrible crime » (p. 167).

Que Kay impute la responsabilité d’un événement transformateurdu monde à une grande religion est pour le moins bizarre. Lesreligions ne commettent pas de crimes. Ce sont les gens qui lefont. Kay assène sa condamnation sur ceux qui éprouvent duscepticisme face au récit officiel du gouvernement concernantce qui s’est réellement passé le 11 septembre 2001, sansprendre la peine d’évaluer consciencieusement la vastelittérature traitant du sujet. Cette littérature comprend dixlivres écrits par le Pr. David Ray Griffin, qui examinent lespreuves existantes et se rapportant à divers aspects des

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crimes du 11 septembre 2001.

Un ouvrage par Trevor Aaronson étaye la notion que la théoriedu « choc des civilisations », si essentielle à l’élaborationde la Guerre Mondiale contre la Terreur, est davantage unefabrication qu’une réalité. Dans « The Terror Factory: Insidethe FBI’s Manufactured War on Terrorism » [« L’usine àterreur: à l’intérieur de la guerre artificielle du FBI contrele terrorisme« , NdT] (Brooklyn, NY: Ig Publishing, 2013)Aaronson examine le rôle de la police fédérale [US] et de ses« indics » dans la création et la facilitation decirconstances aboutissant souvent dans l’arrestationd’individus musulmans, qui sont par la suite accusés detentative de perpétration d’actes de terrorisme. Aaronson adécouvert que dans l’immense majorité des cas, des agents duFBI étaient carrément impliqués dans le financement,l’organisation et la préparation de scénarios de terreurislamique qu’ils ont ensuite été félicités d’avoir prévenu.

L’abus policier dans la construction de l’imaginaire du« terrorisme islamique » a été mis en pleine lumière auCanada, pendant l’été 2016. En Colombie Britannique, la JugeCatherine Bruce a statué qu’une équipe d’agents et d’officiersde la RCMP (Royal Canadian Mounted Police, la « police montéecanadienne », équivalent du FBI aux USA) avaient concocté lesconditions nécessaires pour piéger les toxicomanes en soin desevrage et récemment convertis à l’Islam, John Nuttal etAmanda Korody. L’objectif de cette opération policière trèsélaborée et très coûteuse était d’aider Nuttal et Korody àperpétrer un acte de violence au parlement de ColombieBritannique. La Juge Bruce a décidé que les officiers de laRCMP étaient coupables d’avoir piégé leurs deux éléments.

La Juge a déclaré, « Le monde a suffisamment de terroristes.Nous n’avons pas besoin que la police en crée d’autres àpartir de personnes marginalisées… Il est dégradant que lapolice commette des actes illégaux facilitant un crime, dansdes circonstances où ils savaient que les accusés n’auraient

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pas pu commettre ces crimes sans leur assistance. »

L’intervention du FBI et de la RCMP pour créer des dépêchesmédiatiques sensationnelles mettant en exergue l’imaginaire,mais sans substance, de la terreur islamique est reflétée auxplus hauts niveaux à l’international. En commençant parOussama ben Laden lui-même, des agences de renseignementscomme la CIA, le Mi6 britannique et le Mossad israélien ontdéveloppé des rapports étroits et intimes avec beaucoup desboucs émissaires, éléments et pigeons islamiques les pluscélèbres devant ensuite servir de coupables pour desévénements terroristes. Dans certains cas les épisodes deviolence sont entièrement fabriqués puis imputés à des boucsémissaires musulmans. Dans d’autres, des individus violents etdérangés sont identifiés puis placés dans des situations oùils commettent effectivement les crimes indispensables à lagénération de la denrée politique négociable qu’est la peurpublique.

Ces deux modèles de terrorisme sous faux drapeau sont àcontre-courant du mensonge rémanent si largement diffusé dansles médias grand public, selon lequel les actions violentesattribuées à des terroristes islamistes se déroulent en touteindépendance, sans aucun soutien, sans direction ou aidelogistique de la part des agences de renseignementoccidentales. Le Gros Mensonge est que ces événementsviolents, y compris ceux qui sont exposés dans les troislivres du Dr. Barrett, ne surviennent qu’à cause des pulsionsd’extrémisme religieux et de haine irrationnelle dirigéecontre les libertés occidentales entretenues par les coupablesdésignés.

Dans « The War on Truth: 9/11, Disinformation and the Anatomyof Terrorism » [« La guerre à la vérité: le 11 septembre, ladésinformation et l’anatomie du terrorisme« , NdT], NafeezMosaddeq Ahmed souligne le gouffre entre la façon dont leterrorisme islamique est rapporté dans les médias grand publicet ce qui est réellement su ou connaissable à propos des

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phénomènes eux-mêmes, à partir de recherches authentiques etd’investigations honnêtes. Les textes d’Aaronson et d’Ahmed enajoutent encore au poids considérable de preuves existantesqui indiquent l’existence d’éléments probants de fabricationet de fraude, visant à donner l’apparence de la validation dela théorie du choc des civilisations. L’objectif ultime del’ajout de vernis de validation à cette théorie consiste àjustifier la conduite de la Guerre Mondiale contre la Terreurdans ses diverses incarnations.

Prophète ou profit? Le legs de Nikola Tesla à notre époqueactuelle

La descente de la société dans l’ingénierie d’après Bernaysd’illusions au service des intérêts du pouvoir s’accélère àune époque où les affaires et l’industrie sont soumis à demoins en moins de régulation publique. En Alberta au Canadapar exemple, l’industrie gazière et pétrolière finance et gèresa propre agence de surveillance environnementale. Lesconflits d’intérêts compris dans de tels modèles d’auto-régulation industrielle sont énormes.

L’autre versant de ce processus de dérégulation est d’éliminerles protections des intérêts publics et de la santé publique.Cet éloignement de l’état-providence pour privilégier plutôtl’état-entreprise a d’immenses conséquences, dont l’effet estd’élargir les inégalités plutôt que de refermer les écartsentre les riches et les pauvres.

Un thème central dans la détermination de la forme future dela mondialisation doit concerner l’économie politique del’énergie. Les combustibles fossiles continueront-ils à êtrela source primaire d’énergie dans nos sociétésindustrialisées, ou des sources alternatives de générationd’électricité seront-elles développées? Qui en décidera? D’oùproviendront les ressources, si les infrastructures deproduction d’énergie et de consommation doivent êtreradicalement changées? Que faut-il faire à propos des intérêts

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concernés, dont les agents s’échinent à faire usage de leuraccès supérieur au capital pour maintenir le statu quo dedépendance à de vieilles technologies démodées?

Comment l’innovation technologique doit-elle être gérée afinde servir convenablement les êtres humains et l’ensemble de lavie sur la planète plutôt que les marges de bénéfices deconglomérats industriels existants? Comment une civilisationtechnologique pacifique peut-elle être réalisée pour dépasserla barbarie de l’économie de guerre permanente qui a dominéles États-Unis depuis 1941 et qui n’entend pas s’arrêter?

Un bref aperçu de la carrière de Nikola Tesla, le brillantscientifique serbo-étasunien, inventeur et ingénieur, offreune conclusion appropriée à ce court examen de la technologieet de la mondialisation dans l’intérêt public. La carrière deTesla a atteint son apogée dans les dernières années du dix-neuvième siècle et les premières du vingtième siècle. C’estpendant cette période que la révolution industrielle acommencé à incorporer la technologie de la puissanceélectrique, ainsi que les communications sans fil à travers ladiffusion d’ondes électromagnétiques.

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Avec le soutien de l’industriel George Westinghouse, Teslaétait en compétition avec Thomas Edison et son entreprisenaissante la General Electric Company, pour l’établissementdes standards de transmission de la puissance électrique surdes courtes et des longues distances. Tesla est sortitriomphant de ce défi en ayant conçu la plupart des composantsdu courant alternatif, ou « AC ». Ce système s’avéraimmensément supérieur à la technologie de courant directd’Edison, ou « DC ».

Le lieu principal de la victoire industrielle de Tesla a étéla World Columbian Exposition, qui s’est déroulée à Chicago en1893. Tesla et Westinghouse surpassèrent Edison dans le défide production de puissance électrique réalisé pendantl’Exposition de Chicago. L’objectif déclaré de cette FoireMondiale était de commémorer le 400ème anniversaire de la« découverte » des Amériques par Christophe Colomb en 1492.

Tesla émergea comme l’une des vedettes de la foire où beaucoupdes éléments qui allaient projeter l’Amérique en premièreligne des transformations mondiales du vingtième siècle ontété introduites. Après son triomphe à Chicago, Tesla tournason attention vers les chutes du Niagara, où il travailla avecses collègues de Westinghouse à la construction et à la miseen service du premier générateur d’hydro-électricité du mondeà l’échelle industrielle.

Les travaux de Tesla attirèrent de gros investissements,surtout de la part de l’un des banquiers les plus puissantsdes USA, J.P. Morgan. Tesla tomba cependant en disgrâce auprèsde son soutien financier principal, lorsqu’il fut compris quele but de l’inventeur était de développer une technologie quipuiserait naturellement l’énergie gratuitement depuisl’ionosphère et d’autres sources naturelles de transformationénergétique. Tesla combina sa quête d’une énergie libre etpropre avec des recherches sur les voitures électriques ainsique sur des formes de technologie sans fil qui anticipaient ceque nous appelons aujourd’hui nos téléphones portables.

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Plutôt que de donner le feu vert à Tesla pour développer desinnovations technologiques dans l’intérêt public et pour lebien commun, les vivres financiers furent coupés auxexpériences les plus coûteuses du formidable savant. Lesinnovations de Tesla menaçaient apparemment de nombreuxintérêts particuliers et des fortunes établies. Très souventles modèles de commerce qui entretiennent la prédominanced’élites retranchées dans leurs privilèges dépendent de lapoursuite de l’usage de vieilles technologies etd’infrastructures établies.

Cet essai expose la relation difficile qui existe entre lecapital et des formes de changement technologique quipourraient énormément améliorer la qualité de vie, mais demanières qui ne se conforment pas aux impératifsd’accélération et d’expansion de modèles très circonscritsd’activité commerciale prévisible. L’expérience de Tesladémontre qu’il ne suffit pas de simplement « laisser faire lemarché » quand il s’agit de la perspective d’utiliser denouvelles technologies d’énergie libre et propre. Quirestaurera les principes de l’intérêt public et du bien commundans un lieu vénérable d’influence majeure pour l’organisationde la société mondiale?

Pr. Anthony Hall

Will Summer

Photo: Le Pr. Anthony Hall, enseignant à l’Université deLethbridge en Alberta, au Canada

Source:http://ahtribune.com/in-depth/1186-globalization-studies.html

https://globalepresse.net/2016/09/10/une-tres-breve-histoire-de-la-mondialisation/