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RomancecontemporaineEtats-Unis–Arkansas

Résumé

«Achargederevanche…AlainaHaynesn’aurait jamaisdûadressercetteinnocentepetiteexpressionàsoncharmantvoisin

de palier, le très discret Preston Callahan. Ni une ni deux, ce dernier va saisir la perche tendue etl’enrôler,malgréelle,dansunepetitecomédiequiserviraaumieuxsespropresintérêts!»Cetteromanceestunefiction.Lesnoms,personnages,lieuxetincidentssontsoitlefruitdel’imaginationdel’auteur,soitutilisésdemanièrefictive.Touteressemblanceavecdesfaitsréelsoudespersonnesexistantesouayantexisténesauraitêtrequefortuite.

Tousdroitsréservés©2015HéloïseCordellesE-mail:[email protected]:heloisecordelles.blogspot.fr

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UnetimideSt-Valentin

HéloïseCordelles

Dumêmeauteur:

·SecrèteJen–Secondsouffletome1·MarryMe–Westfield&Westfieldtome1·MarryYou–Westfield&Westfieldtome2·Married–Westfield&Westfieldtome3·7Nuitspourteséduire·Détraqué

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Chapitre1

31Janvier2014,Fayetteville,Arkansas.—C’estfinientrenous!Dansquellelanguedois-jeteledire,Kevin?—MaisAlaina,mapuce,cen’estpaspossible.Jenepeuxplusvivresanstoi!Tuesdevenuele

soleildemonexistence…— Au bout d’un seul et unique rendez-vous ? répliqua cette dernière en haussant un sourcil

sceptique.Excuse-moisij’aidumalàtecroire.Quelleidéededraguerenboîtedenuit!fulmina-t-elleintérieurement,aucombledel’exaspération.

Plus jamais ça.Croix de bois, croix de fer, on ne l’y reprendrait plus ! Elle devait certainement êtredésespérée à cemoment-là ou trop imbibée − ou les deux à la fois. Ellemaudit en pensée ses troiscopinesetcollèguesdetravailquiavaientprofitédesafaiblessepassagèreetl’avaientexhortéeaudéfid’aller accostercegars tropcanonsous les spotsdudancefloor.Après seulementdeux toursdepiste,Kevinavaitnotésonnumérodeportableencatastrophesur lecoind’uneserviette.Ilavaitdûévacuerd’urgence la discothèque parce que l’ami qui l’accompagnait venait d’avoir un malaise au bar.Diagnostic:tropdelevéesdeshotsdetequila.

C’était indéniable qu’à la lumière du jour,Kevin était beau gosse avec ses dents blanches bienalignées dans un sourire étincelant… qu’il ne se gênait pas d’exhiber soit dit en passant. Une vraiepublicitésurpattespourdentifrice!SonprofilavantageuxdejeunepremierauraitpuenremontreràunBradPittvieillissant,etsescheveuxchâtainsouplesartistiquementfigésparlegelparachevaientcetrèsséduisanttableau.

—Maisqu’est-cequetufais?s’écria-t-elle,affolée.Non,iln’allaitquandmêmepassemettreàgenoux…Maissi!Soussesyeuxincrédules,Kevinse

prosternadevantelleentendantàboutdebraslebouquetdetulipesjaunessoussonnez.Ellereculasonvisagedelamasseodorante.Elledétestaitlestulipes.Beurk!Jaunesenplus.Rebeurk!Qu’espérait-il?Desfleursetçarepart!Qu’elleaccepteraitdenouveaudesortiraveclui?Danssesrêves!Ilétaitpeut-êtreaussibeauqueJamesDeandans«Lafureurdevivre»,maisniveauconversationilseposaitlà.Sielle ne voulait plus bâiller à s’en décrocher la mâchoire en l’écoutant discourir sur son sujet deprédilection−lui,encorelui,toujourslui−,mieuxvalaitnepluslefréquenterdutout.Etjustement,elleaimeraitbienlaisserKevin/Narcisseentête-à-têteaveclui-même!

—Regarde, je t’aimême acheté des fleurs,ma caille, déclara-t-il avec un sourire encourageantet…étincelant.

«Décide-toiunefoispourtoutes!Jesuisunepuceouunecaille?»Alainalevalesyeuxauciel,exaspérée.Commentsedébarrasserd’unpotdecollepareil?Comme

unfaitexprès,lehalldel’immeubleétaitdésespérémentdésertàcetteheurematinale.Pasuneseuleâmequi vive à laquelle se raccrocher comme une noyée à une bouée. Non, elle était bel et bien coincée

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commeunerateethésitaitentresereplierdanssonappartement−où il risquaitde lapoursuivre−ous’élancer à toutes jambes dans la rue sans un regard en arrière. Elle opta courageusement pour ladeuxièmesolution.Sauvequipeut!Lesfemmesd’abord,hein!Sansoublierlecôtépragmatiquedelafuite:elleallaitarrivermoinsenretardàsonboulot.D’ordinaire,elleembauchaità9h00etlà,ilétait8h45!Quoidéjà?!Enincluantletrajetenvoiture,ellerappliqueraitpour…Stop!Unproblèmeàlafois.

Déterminée à lui glisser entre les doigts, elle s'élança et contournaKevin, toujours à genoux, leprenantentraître.Avecunpetitsourirecarnassier,elleimaginasafiguredécomposéeparladésertion.Ce n’était pas sa faute s’il ne voulait rien comprendre ! Elle sprintait pour atteindre la porte vitréelorsquecelle-cis’ouvritaumêmemoment,livrantpassageàunjeunehomme.Alainalevalesyeuxunefractiondesecondeetreconnutsonvoisindepalierquis’avançaitdanslehall.Bordel!Elletentabiende freiner des quatre fers,mais il était trop tard pour s’arrêter. Emportée dans sa course, sa poitrineheurtadurementletorsemasculindepleinfouettandisquesonfrontlisseluipercutaitdefaçoncavalièrele menton sans y avoir été invité. Sous l’impact du boulet humain, la pauvre cible en mouvements’effondra comme un fragile château de cartes, atterrissant sur ses fesses et sur son dos dans ungrognementsourddedouleur.Complètementvautréesurlui,sesmembresemmêlésauxsiens,ellerepritsesespritslapremièreetessayadeseredressertantbienquemalsursesgenoux.

Lecerveaud’Alainacalculatrèsviteetsesyeuxbleuss’illuminèrentsouslatrouvaillesubite.Elleallait mettre à profit cet accident fortuit pour se tirer d’affaire. Il existait donc bien un dieumiséricordieuxlà-hautpouravoirdéposésonvoisinsursonchemin.Bref,quecesoitlaprovidenceoulehasard,onpouvaitdirequ’iltombaittrèsbiencelui-là!

—Ohpardonmonamour,j’étaistellementimpatientedeteserrerdansmesbras.Alaina lui remit en place ses lunettes aux branches fines, de guingois sur son nez, et le palpa

furtivement−pointtropn’enfaut−pourvérifierqu’iln’avaitriendecassé.Puiselles’étaladenouveausurlui,enverrouillantsesbrasautourdesoncou,etsepenchaàsonoreille.

—Jouezlejeus’ilvousplaît,murmura-t-elled’unevoixdésespérée.—Hein?soufflasoncomplicedésignévolontaireàmoitiégroggy.Ellel’aidaensuiteàsereleverendéfroissantsesvêtements.—Quejesuismaladroite!Dansquelétatjet’aimis,monpauvrechéri!—Ce…cen’estrien,bégaya-t-il.—Si,c’estgrave.Maisjesauraimefairepardonnercesoir.Elle lui lança unbref coupd’œil langoureux en papillonnant des cils.Aussitôt le visage de son

compagnon d’infortune devint plus rouge qu’il ne l’était déjà. Pour accentuer le côté amoureux, elleenroulasonbras telleune lianeautourdesonbicepsetmoulaavec indécencesoncorps toutcontre lesien.Pourenrajouterunecouche,ellefrottalascivementsajouesurlalainedesonmanteaucommeunechatteenchaleur.

Unrugissementblessédéchiralesilenceduhall.—Mais…maisquic’estcelui-là!Alainaluilançaunregardassassin.— Attention à ce que tu vas dire, Kevin ! Lui, c’est mon nouveau petit ami, l'informa-t-elle

fièrementenpromenantunemainsursontorse.Jevoulaistel'annoncer,maistunem’enaspaslaisséletemps.

LeregarddésorientédeKevinpassadel’unàl’autre.Aufuretàmesurequ’ilcontemplaitleduoétroitement enlacé, il perdait de sa superbe.Samâchoire ne cessait de s’affaisser ;même sesmèchesparfaitessemblaients’êtreramolliessousl’effetdeladéception.Asaminedéconfite,Alainacrutqu’ilallait éclater en sanglots. Non,mais un peu de dignité, que diable ! Elle n’éprouvait aucune once decompassion quant à son supposé chagrin, car d’ici demain, il aurait oublié cette histoire qui n’avait

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jamaisvraimentdébuté.Sansunmot,l’amoureuxéconduits’approchabravementducouple.Iltoisaquelquessecondesson

heureux rival avant de lui plaquer avec force le bouquet de tulipes jaunes sur le ventre. Par réflexe,l’autrejeunehommelerécupéradanssesbras.

—Jevoussouhaitebiendumalheur!Ensuite,dansunmouvementvexé–étudié−delatête,Kevinsedétournaavecuncouinementde

gorge et quitta l’immeuble en tirant avec virulence sur la porte. Hic hac hic hac. Le battant vitré sebalançait doucement sur ses gonds avant de s’immobiliser tout à fait. Quelle sortie ! Et quelcomédiensurtout!IlauraitfaitunvéritabletabacàBroadway.

—Oufmerci,s’exclamaAlainaens’écartantvivementdesonvoisin,incapabledeleregarderdansles yeux, embarrassée de l’avoir impliqué dans cette farce. On peut dire que vousm’avez retiré unesacréeépinedupied!Ilnevoulaitplusmelâcher.

—Euhjen’airienfaitenfindecompte,objecta-t-ild’unevoixnasillarde.—Si,si,j’insiste.Vousm’avezbiensecourue.Achargederevanche… Un éternuement intempestif l’interrompit. Elle osa enfin relever la tête et l’observa plus

attentivement. Elle avisa sa figure congestionnée, ses joues enflammées, ses yeux brillants et son nezlégèrementrougi.

—Ohvous,vousn’avezpasl’airbien,s’inquiéta-t-elle.—Jecrois,nonjezuiszûrquej’aiattrabéunrhume.J’aidûm’absenterdèslepremiercours.Le pauvre ! Non seulement il était malade, mais de surcroît, elle venait de le percuter assez

durement.—J’espèrequejenevousaipasfaittropmalenvoustombantdessus?Ilsefrottalebasduvisage.—Cavaaller.Monmentons’enremettra,nevousinquiétezpas.Soudain,Alainasefrappa lefrontd’unemain,semblantseremémorerunechose importante…et

grimaçadedouleurparcequ’elleavaitoubliéqu’ellevenaitjustementdesecognercontrelui.Unbleuouunebosseinesthétiqueferaitbientôtsonapparition…Peut-êtresursonmentonàluiégalement.

—Zut!Jedoismalheureusementvouslaisser.Ledevoirm’appelle.Jesuishyperenretard!Onsereparleplustard,OK?

Elleétaitsurlepointdepousserlaportequandill’interpella:—Maisqu’est-cequejefaisdevosfleurs?—Vouspouvezlesgarder,répliqua-t-elleenluilançantunclind’œil.Lejaunevousvamieuxau

teintqu’àmoi.Sansattendresaréponse,ellequittalehalltelleunetornadeblond-rosepourseprécipiterverssa

voiture.En routepour le travail, elle repensaà l’incidentet songea toutàcoupà sonaudace.Que luiavait-ilprisd’impliquersonsisérieuxvoisindanscettehistoire?Aprèscecontactprolongé,cedernieravaitdû ladéclarer folleetbonneàenfermerdansunasile !C’était lapremière foisqu’ellediscutaitaussilongtempsavecsonvoisind’enfaceet,surtout,avecautantdenaturel.Comments’appelait-ildéjà?Ah oui, PrestonCallahan d’après ce qu’elle avait lu sur l’étiquette de sa boîte aux lettres.A part un«bonjour,bonsoir»lorsqu’ilssecroisaientdansl’ascenseuroudanslehalldel’immeuble,ellen’avaitjamaischerchéàfaireplusampleconnaissanceaveclui.

Bien qu’ils soient sensiblement du même âge, dans la vingtaine, leurs attitudes étaientdiamétralement opposées. Tandis qu’elle était décontractée, ouverte et échangeait volontiers quelquesmots avec les autres occupants de l’immeuble, lui, en revanche, semblait d’une nature discrète, d’unehumeur plus taciturne. Le genre qui n’incitait guère à engager la conversation lorsqu’on le rencontraitdanslecouloir.Ellesefaisaitpeut-êtredesidées,maisilévitaitsouventdecroisersonregardpuisqu’ildétournaitlesyeuxetfixaitunpointailleurschaquefoisqu’ill’apercevaitdeprèsoudeloin.Ellehaussa

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lesépaules.Tantpis!Ellenepouvaitpasplaireàtoutlemonde!Sonvoisinvenaitd’emménagerrécemment,enfaitunpeuavantlarentréeuniversitaire.Lesanciens

locatairesétaientpartisdepuis lemilieude l'étépours’installerdansunappartementplusgrandparcequ’ilsallaientaccueillirleurpremierenfant.Moinsd’unmoisaprès,enseptembre,Prestonoccupaitleslieux.Elleserappelaitencoresonarrivéemouvementée.Alorsqu’elles’étiraitparesseusementdanssonlitundimanche,savourantsagrassematinée,elleavaitétédérangéeparuneactivitéinhabituelleàsonétage.Parlejudas,elleavaitespionnéleballet incessantdedeuxgrosbrasensalopettesquiportaientdescartonsetquelquesmeubles.

Danslesilencedel’habitacle,elleremerciadenouveausonvoisinenpensée.Ill’avaittiréed’unmauvaispasmêmesic’étaitàsoncorpsdéfendant.Elleiraitprendredesesnouvellescesoir.Peut-êtreensaurait-elleplussurlui?Nonpasqu’ellesoitunefouineusenée,maisill’intriguait.Elleletrouvaittrèsmignondanslestyleintelloavecsescheveuxbrunsbouclés,seslunettesendemi-luneetsatêtedepremierdelaclasse.D’ailleurs,ellenel’avaitjamaisattrapéenflagrantdélitvêtudejeanetd’unsimplet-shirt.Chemiseetpantalondevillederigueur.

«Peut-êtrepasaulit!»Elle faillit se gifler.Oui, elle étaitmûre pour l’asile ! Pourquoi l’avait-elle visionné au lit ? Il

fallaitqu’elleselesortedelatête,carellenesauraitjamaiscommentilsecomportaitdansl’intimité.Preston était plutôt du genre inaccessible pour elle. Une personne d’apparence aussi réservée nes’intéresseraitjamaisàelle,auxatourssioriginaux.

ArrivéedanslecentredeFayetteville,ellerepérarapidementuneplacelibrepastroploindesontravail−unmiracleàcetteheure-ci!−,etgarasapetiteFordàtoutevitesseavantquequelqu’und’autren’aitl’idéedelaluichiper.Elleattrapasonsacàmainetgalopaendelonguesfouléesdéliéesverslesalon,labuéehivernales’échappantdesabouche.

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Chapitre2Le carillon du « Vanity Hair », un salon de coiffure exclusivement féminin, résonna dans l’air

tandisquedesexclamationssoulagéescueillirentAlainadèsqu’elleeutfranchilaporte.—Salutlesfilles!s’adressa-t-ellejoyeusementàlaronde,essoufflée.Désoléepourmonretard…—CoucouAly,réponditJudith,lapatronne.Maisoùétais-tu?Nousnoussommesinquiétéespour

toi.Pourquoin’as-tupasappelé?Elleajoutaplusdiscrètementsurletondelaconfidence:—MmeAdamspatientedepuisunedemi-heure…—C’estvrai!s’élevaunevoixdepuislesalond’attente.—Vraimentnavrée.J’aieuunpetitcontretempsdunomdeKevin,grimaça-t-elle,excédée.—Nannn,raconte!l’exhortaGeorgia,sonautrecollègue,avantdefroncerlessourcils.Maistune

luiaspasclairementsignifiéquec’étaitfinimercredisoir?Lelendemaindevotrerendez-vous?—Si.Saufqu’iln’arienvoulucomprendre.Cematin, ils’estpointéavecunbouquetde tulipes

jaunes,ens’imaginantquejeluiretomberaisdanslesbras.Jamaisdelavie!Alainasedirigeaversl’espacedétentedanslefonddusalonoùellesaluasaclienteetcaressala

têteducockeraméricainblancinstallésursesgenoux.— Pardon pour ce retard tout à fait indépendant de ma volonté. Comment allez-vous, Mme

Adams?—Trèsbien,merci.—EtMilky?—Cepetitamourdecabotseportecommeuncharme,dit-elleenflattantlatêtedel’animal.Ilest

bientropgâtécommed’habitude.Maisquevoulez-vous?MmeAdamsadoraitfaussementseplaindredesonanimaldecompagniequ’elleaffectionnaitpar-

dessustout.Veuvedepuisdixans,sansenfantniautrefamille,Milkyétaitl’uniqueêtrevivantquibrisaitses soirs de solitude claquemurée dans son appartement.Outre idolâtrer son chien, son second péchémignon consistait à venir se faire chouchouter au salon de coiffure aumoins une fois parmois. Pourcolorer ces vilaines racines, disait-elle.Depuis un an qu’elle avait découvert ce sympathique salon àl’ambiancegaie,unbrinsurvoltéegrâce−ouàcauseselon lepointdevue−à lapersonnalitédesesemployées,ellenedérogeaitpasàsesrendez-vousmensuels,quasireligieux.

—Vousvoulezbienvousavanceraushampooing,MmeAdams?Laclientefitdescendresonadorablechiendesesgenouxetluiordonnades'asseoirsurunboutdu

canapé,aveclaconsignedenepasenbouger.Puisellesedirigeaversl’alignementdesbacsblancs.Alainaaccrochasonépaissedoudouneetsonsacàmainauporte-manteaudanslevestiaireavant

desaisirunecapenoiresurlapatère.Ellefitenfileràlavieilledamelalargeblouseparlesbrasetenlaçalesficellessurlanuque.

—Qu’est-cequ’onfaitaujourd’hui?l’interrogea-t-elle.—Justeunecoupepluscourte.Lacouleurserapouruneautrefois.Jereprendrairendez-vouspour

lemoissuivantpouréradiquercesvilainesracinesblanches.—D’accord.Vousvoulezundégradé,uncarréplongeantoutrèscourt?

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—Assez court. Je trouve que je fais plus jeune avec des cheveux taillés à la garçonne.Ca faitressortir l’ovaledemonvisage.Mêmesiauboutducompte jeneséduisplusaucunhommeavecmontriplementon!

— Il ne faut pas dire ça, la tança aimablementAlaina.Vous verrez.Un jour, un gentilmonsieurviendravousconterfleuretteetvousemmènerafaireletourdumondedanssonjetprivé.

Lapoitrinedelavieilledamesesoulevaparà-coups,sousleséclatsderire.Ellerenversasatêtedans le bacde faïence, cala sa nuquedans l’encoche et lançaun regard espiègle auvisage souriant àl’enverspenchésurlesien.

—Letourdumonde?répéta-t-elle.Riendemoins!Ilfaudraitd’abordqu’ilenaitlesmoyens…Ohvous,mamignonne,vouslisezbeaucouptropderomansàlamodeavecdesmilliardairestourmentés,tapisàchaquecoinderue,n’attendantquevouspourtomberamoureux!

—Iln’estpasinterditderêverderencontrerunclonedeChristianGrey,contra-t-elle,malicieuse.Alainaactionna le jetde ladoucheetmouillaconsciencieusement lachevelureblonddorédesa

cliente.—Cava?L’eaun’estpastropchaude?—Latempératureestidéale,affirma-t-elle.Maisvousnousavezlaisséessurnotrefaimavecvotre

histoireavecheu…Kevin.Commentvousenêtes-vousdébarrassécematin?Alainafaillitpoufferderire.—Grâceàmonvoisin!Figurez-vousqu’ilaeulabonneidéed’attraperunrhumequil’aobligéà

rentrerchez lui, lepauvrechéri.J’étaiscoincéedans lehallavecMrGlueet jeprenaismes jambesàmon cou pour lui fausser compagnie quand il entra en même temps. Et BAM, nous nous sommestélescopés!

—Ouhhh, roucoula Evelyn pendant qu’elle ébouriffait les cheveux secs de sa cliente pour leurdonnerduvolume.C’estdigned’unecomédieromantiqueça.Est-cequ’ilestmignonaumoins?Faudraitpasquecesoitunthon.Unconseil:s’ilestbeauetcélibataire,ressaute-luidessusàpiedsjoints!

Alaina prit son temps pour répondre, histoire deménager le suspens. Les autres femmes étaientaccrochéesàseslèvres.Onauraitpuentendreunemouchevoler.Avecunsourireencoin,elleappliquaméticuleusementunenoisettedeshampooingsurlacheveluredesaclienteavantdelafairemousser.EllemassalecuircheveludeMmeAdamscommesielleavaitl’éternitédevantelle.

— Je le trouve assez à mon goût, finit-elle par admettre, faisant relâcher le souffle de sesauditrices.Quantàêtrecélibataire,jevaissûrementensavoirpluscesoir,carjecompteluirendreunepetitevisitepourprendredesesnouvelles.C’estlamoindredeschoses,aprèstout.

—Ouhouh ! gloussaEvelyn.Deux rencontres dans lamême journée, c’est qu’elle serait accro,notreAlaina!

—Pasdutout,nial’intéresséeavecvigueurenhaussantlesépaules.J’essaied’entretenirdebonsrapports de voisinage. Lui etmoi n’avons rien en commun. Il est plutôt guindé, toujours tiré à quatreépingles.Alorsquemoiavecmespiercingsetmesmèchescoloréesrosebonbon…Bref,onn’iraitpasdutoutensemble!

Ellesecoualatête,faisantvirevoltersalonguechevelureblonde.—Justement,tuapporteraisunetoucheindéniabledefantaisie,glissaGeorgia.—J’attirepluslesincasablescommeKevinqu’unfilsàmaman!—Tuesdigneden’importequelhomme,gronda Judith, depuis le comptoirde la réception.Ne

laissejamaispersonnetedirelecontraire.—Ellearaison,mamignonne,renchéritMmeAdams.Vousêtesadorable.—Mercid’êtretoutesaussigentillesavecmoi.Touscescompliments lui faisaientchaudaucœur.Duhautdesesvingt-deuxans,Alainaétait la

benjamineetladernièreàintégrercetteéquipefémininesisoudée.Lestroisautresemployées,Evelyn,

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JudithetGeorgia,toutesdanslatrentaineetcasées,avaienttendanceàlamaterneretàsemêlerdesesaffaires,surtoutamoureuses.Ellesétaienttoujoursàl’affûtd’unbonplanpouressayerdeluidégotterleprincecharmant.Mêmesileurschoixn’étaientpasforcémentjudicieux−lapreuveavecKevinetconsort−,Alainaneleurenvoulaitpasvraiment.Toutvalaitmieuxquel’indifférenceglacée.Sescollèguessepréoccupaientd’elles,contrairementàsesparents,chacunpositionnéàunboutdel’Amériquedepeurdesecroiserdenouveau.D’ailleurs,ellesn’avaientaucunsecretlesunespourlesautres.Ellesavaientunrituelbienétabli :une foisparmois, elles sedonnaient rendez-vouschez l’uned’entreellespouruneséance«confidencesetfousrires»,commedespetitesfillessurexcitéesdurantunesoiréepyjamas.

Après avoir rincé le dernier soin, Alaina essora les cheveux de Mme Adams avant de lesenvelopperdansuneservietteblanchemoelleuse.Puiselleluiindiqualesiègepivotantdevantlagrandeglace.Elledépliasonnécessairedecoiffuresurlatabletteets’emparad’unepairedeciseaux.

—Passonsauxchosessérieuses…

***

Unfilsàmaman…Alainanecroyaitpassibiendire!Après avoir regagné son appartement, Preston avait dû se résoudre à téléphoner à samère pour

l’informerqu’ilnerentreraitpasceweek-endcommeprévu.Ildutlarassureraumoinsunmilliondefoissursonétatdesanté.Non,iln’étaitpasàl’articledelamort.Cen’étaitqu’unsimplerhume.Quelquesmédicaments,unebonnenuitetletourseraitjoué!Depuistroisansqu’ilavaitquittélecoconfamilialpour sesétudes, samèrecontinuaitde se ronger les sangspour lui.Senourrissait-ilbien?Etassez?Lorsqu’ilrentraitunefoisparmois,ilavaitdroitauxsempiternelleslamentationssursonphysiquetropmince.Dans cesmoments-là, elle se frappait presque la poitrine de l’avoir laissé partir étudier aussiloin. Si encore il était fils unique, il aurait compris ce protectorat maternel à outrance.Mais elle secomportait de lamêmemanière avec ses deux cadets.Bien qu’elle soit du genre hyper protectrice, ilsavaitluitenirtêtequandillefallaitsinonilneseraitpasparvenuàs’affranchirdesonjougdequelquescinqcentskilomètres.Avingt-et-unans,ilpouvaitparfaitementsegérerseul.

Preston se dirigea vers la salle de bains et fouilla dans la petite armoire à glace au-dessus dulavabo. Il attrapa le flacon de paracétamol et en avala deux comprimés avant de retourner dans sachambre. En s’emmitouflant sous les couvertures, il ne put s’empêcher de songer, avec un malicieuxsourireauxlèvres,àsontélescopaged’avecsavoisinedepalier.

Achargederevanche…Cen’étaitpastombédansl’oreilled’unsourd!

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Chapitre3Il étaitpresque19hquandAlaina rentradu travail aprèsune journéebien remplieau salon ; le

vendredi était généralement chargé. Les clientes avaient défilé entre ses mains adroites et en étaientrepartiesraviesdeleursséances.Lespourboiresétaienttombésenconséquence.Dèsqu’ellerefermalaportedesonappartement,ellesedirigeaverslastationhi-fietmitenrouteunemusiqued’ambiancezen.Riende tel pour sedétendre aprèsune activité aussi intense !Elle sedéchaussa en revenantvers soncanapésurlequelelles’allongeaenpoussantunsoupirdebien-être.

Vendredi soir.Qu’allait-elle faire ?Bouquiner ?Sortir ?Unplateau repasdevant la télé et puispeut-êtreune séancedecinéouallerboireunverredans lebarduquartier ?Maisd’abord, elle iraitfrapperàlaportedePrestonpourprendredesesnouvelles.Sonmignonvoisin.

Relaxéeàprésent,elleserelevaetquittasonappartement.Ellen’avaitqu’àeffectuerdeuxgrandesenjambéespourseretrouversurlepaillasson«welcome»voisin.Justeuncouloirlesséparait…Superpratique!Doucement,elleassenaquelquescoupscontrelepanneaudeboisetattendit.

Aucunbruit.«Nigaude!»Pourquoi n’avait-elle pas réfléchi avant de se déplacer ? Il était malade et devait certainement

dormiràpoingsfermésà l’heurequ’ilétait.Caluiapprendraàêtreaussi impulsive!Elleseretintauderniermomentdesefrapperlefront,sesouvenantdesonbleudouloureux.Quelleidéedeledérangerdansuninstantpareil!Quefaire?Attendreourepartir?Sanscompterqu’ilseraitsûrementénervédedevoirquittersonlit.Elle-mêmen’étaitpasàprendreavecdespincettesquandelleétaitmalade.Mieuxvalaitlelaissersereposer.

Troptard!Alainaallaitsedétournerlorsquelaportes’entrouvritlentement.Prestonapparutdansl’encadrement,vêtud’unpeignoirbleufoncédontilnoualesliensautourdelataille.Sescheveuxbrunsétaientenbataille,commes’ilvenaitdeplongersamaindanslamassebouclée,etluiretombaientsurlefront.Sesiriscouleurchocolatétaientvitreuxetnesemblaientpaslareconnaître.Unefoisdeplus,elles’en voulut de l’avoir réveillé. Il paraissait tellement vulnérable dans cet état de faiblesse. Plus…mignon encore si c’était possible ! Zut, lemoment étaitmal choisi pour penser à ça ! Elle remarquacependantquesonteintétaitplusvifquecematin.Elleeutuneenvieirrépressibledel'étreindrepourleconsoler.

—Bonsoir,lesalua-t-elleavecunegrimacecontrite.Désoléedevousavoirarrachéàvotrelit.Jen’aipasréfléchiavantdevenir.Maisjevoulaisabsolumentprendredevosnouvelles…

—C’esttrèsgentilàvousd’êtrepassée,l’assura-t-ilnéanmoinsavecunsourireforcé.Monétataempiré.Maisnevousinquiétezpas,j’iraimieuxdemain.

—Vousavezconsultéunmédecin?—Non,jen’aipasbougédechezmoi.—Sivousavezbesoind’unchauffeur,vousconnaissezlechemin.Justeenface!désigna-t-elledu

pouce,en riantdoucement.Bon, jenevaispasvous retenirplus longtempsdanscecas.Reposez-vousbienalors.

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—Merci.Aplustard.Il referma rapidement la porte. Elle n’eut d’autre choix que de s’en retourner, penaude, et…de

s’abreuverde tous lesnomsd’oiseauxquiexistaient!Endeuxfouléesrageusescontreelle-même,elleréintégra son petit appartement. Cependant, en se dirigeant vers la cuisine, elle était préoccupée. Neferait-ilpasmieuxd’allerconsulterundocteur?Ets’ilneseremettaitpasaussivitequ’illeprétendait?Maisbon sang,dequoi semêlait-elle !Ellevenait de lui adresser laparolepour lapremière fois cematinetelles’imaginaitdéjàpouvoirintervenirdanssavie.Prestonn’étaitpasensucreetilétaitassezgrandpoursedébrouillertoutseul.

Quandelleouvritleplacardàlarecherched’unsachetdepâtes–sadeuxièmespécialitéculinaireaprèsleriz−,sonregardabsenttombasurunebriquedesoupe.Avait-ilmangé?Sûrementquenon.Uneidée lui traversa l’esprit.Elle supposait qu’il était célibataire, car sapetite amie aurait été làpour lesoignersinon…

«Encoreunefois,çaneteregardepasmavieille!»Dans cesmoments demaladie ne voudrait-il pas du réconfort, peu importait de quelle source il

provenait. Avant de changer d’avis, Alaina attrapa résolument le pack de soupe et franchit la courtedistancequilaséparaitduseuilopposé.Lecœurbattant,elleappuyasurlasonnetteetpatienta.Ilallaitêtrefurieuxdelaretrouverencoredevantsaporte…

Ellen’eutpasàattendrelongtempsavantqu’ilneseprésentedansl’embrasure.Effectivement,sesyeuxfiévreuxs’agrandirentsousl’effetdelasurprise.

—Jesupposequevousn’avezpasmangé?attaqua-t-elle.—Heu…non.—Quediriez-vousd’unesoupepourvousrequinquer?Ilhésitauninstant,gêné,avantd’ouvrirpluslargementlebattant.—Sivousvoulez,concéda-t-il.Maisjevouspréviens:jenesuispasprésentablepourrecevoir.—Pasgrave.Vulescirconstances,jevousexcusevolontiers.Elle lui adressa un large sourire en pénétrant dans son appartement, la brique de soupe serrée

contresapoitrine.Illaprécédadanslapetitecuisineaméricaine.Ilextirpaunecasseroled’untiroiretlaposasurlefeu.

—Faitescommechezvous,l’invita-t-ild’ungestedelamain.Alaina prit place devant la cuisinière et, après avoir découpé le bec de la brique, en versa le

contenupour le réchauffer.Dèsque la soupe futchaude,elle la retiradu feupendantqu’il finissaitdemettrelatable.

Elleétaitravie.Aumoinsunquin’attendaitpasquelafemmefassetoutleboulot!Mêmemalade,il ne perdait pas ses bonnesmanières. Un vrai gentleman. Elle se sentit fondre devant cette attentionanodine.Ellefronçalessourcilsetserepritimmédiatement.Enfallait-ilsipeupourlafairecraquer?

Alainaservitlasoupedelégumesetilscommencèrentàmanger.Dequoipourraient-ilsdiscuter?Lesilencemenaçaitdes’étireret iln’étaitpasdécidéà lebriser.Après tout, iln’avait riendemandé.Elles’étaitimposéeàsatable,ceseraitàelled’amorcerlaconversation.

—Vousfaitesquoidanslavie?—Jesuisétudiantàl’écolevétérinaire.Etvous?—Jetravailleentantquecoiffeusedansunsalonducentre-ville.—J’auraisdûledeviner,lâcha-t-ilavecunsourireencoin.C’estpourçaquevouschangezaussi

souventdecouleur.—Oui,c’estundesavantagesdumétier.—Vouspourriezpeut-êtremecouperlescheveux?Ilspoussenttropvite.—Adomicilealors,parcequelesalonestréservéauxfemmes.—OK.

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Ilsfinirentleursoupeaccompagnéedetranchesdepaindemiegrillé.Soudain,ilexhalaunsoupirlasetétouffadiscrètementunbâillementderrièresonpoingserré.Ilétaittempspourellederentreretdelelaissersereposerpourlanuit.

—Jevaisvousquitter.—Désolé,jenesuispasd’unecompagnieagréable.—Onleseraitàmoinsdansvotreétat.—Votresoupeétaitunetrèsbonneidée.Merci.—C’étaittroisfoisrien.Ilselevaenmêmetempsqu’elleetlaraccompagnajusqu'àlaporte.—Soignez-vousbien,recommanda-t-elle.Sivousavezbesoin,n’hésitezpasàvenirsonnerchez

moi.—Jen’ymanqueraipas.Enplusd’êtrecraquant,Prestonétaittoutàfaitcharmant!Ensepréparantdanslasalledebains,Alainajetauncoupd’œilàsonproprerefletdanslaglace.

Sescheveuxétaientbicolores,blondsparsemésdegrossesmèches roses.Ellepossédaitunpiercingàl’oreille, deux autres à l’arcade sourcilière et à la commissure des lèvres. Preston était galant etintelligent. Ca la changeait agréablement des machos aux manières rudes qu’elle attiraitimmanquablement à cause de son look. Parce qu’elle avait des cheveux teintés, elle était cataloguéecommedéjantée.C’étaitsafaçond’être,decroquerlavieàpleinesdents.Elleétaitfantaisiste,maisnerecherchait pas forcément son pendant masculin. C’était même tout le contraire. Avec son enfanceinstable, elle avait besoin de sécurité, d’un homme avec les pieds bien ancrés sur terre. Un hommecommePrestonCallahan…

***

Alainanerevitpassondiscretvoisindetoutleweek-end.Iln’étaitpasnonplusvenusonneràsa

porte pour lui demander de l’aide. Elle avait mis sa main à couper qu’il ne le ferait pas ! Elle nereprésentaitrienpourlui.Pourquoil’aurait-ilsollicitée?Enplusdudimanche,lelundiétaitl’autrejourdefermeturedusalon.Elleenprofitaitgénéralementpourfairedegrossescoursespourlasemainedansla zone commerciale à la périphérie de Fayetteville. S’il lui manquait quelque chose entre-temps,l’épicerieduquartierétaitlàpourladépanner.

Lorsqu’elle rentra des commissions les bras chargés de grands sacs en papier kraft prêts àdéborder,ellel’aperçutdans lehalletprit toutdemêmele tempsde luiadresserunsourire lumineux.Ouf,lecorpsdePrestonn’étaitpasentraindesedécomposerdansuncoindesonappartement.Elleneferaitpasdedécouvertemacabrenin’appelleraitlesExperts!Ellefutsincèrementheureusedelevoird’aplomb.Tandisqu’ilvenaitàsarencontre,lecœurd’Alainamanquaunbattementavantdes’emballerdirect.Serait-elledéjàaccrocommelesupposaitEvelyn?

Malgrélespoidslourdsdanschaquebras,elles'immobilisaaumilieudupassagepourlesaluer.Etpourquoinepaséchangerquelquesmotsaveclui?Elleenavaitterriblementenvie.

—Bonsoir,vousvousportezmieuxàcequejevois.—Oui,jevaisbien…Luinesedonnapaslapeinedes’arrêter.Etcommeauparavant,sonregardfuyantricochaitpartout

dans lehall, saufsurson interlocutrice. Ilétait redevenuglacialàsonégarden luiparlantencoupdevent.Retouràlacasedépartdu«bonjour,bonsoir»distant,commes’ilsn’avaientjamaispartagéunesoupeensemble.Bienfaitpourelle!Caluiapprendraàs’imposerchezlesgens!Quandcomprendra-t-ellequ’ilnel’appréciaitpas?Unpetitpincementluiserralecœur.Rienqu’untoutpetit.Promis,juré!Alaina s’adressa un sourire narquois.Elle n’allait sûrement pas se laisser abattre par cette rebuffade.

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Ellehaussa les épaules en suivant le profilmasculinderrière la façadevitréede l’immeublequand illongea le trottoir.Libre à lui de l’ignorer !Elle le croyait charmant,mais s’était trompée sur toute laligne.Finalement,iln’étaitpassidifférentdesautresgoujats!

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Chapitre4Le lendemain,Alainaattaquasasemaineavecmoinsd’entrainqued’ordinaire.Zut !Ellen’allait

pasfairelagueuleparcequesonvoisinétaitlepiremalotruquelaTerreaitjamaisporté.Néanmoins,elleétait…déçue.Horriblementdéçuemême!Celaenflaitendesproportionsinattenduesetinquiétantes.Pourtantdesétoiles,ilyenavaitdesmilliersdansleciel.

Avant de commencer la journée, elle prenait le café avec ses collègues dans la petite cuisine.Armées de leurs grandes tasses, elles discutaient du planning et recevaient des instructions de Judith.Aujourd’hui,enplusdesclientes,ellesauraientenchargeladécorationdusalonsurlethèmedelaSaint-Valentin.C’est-à-diregonfler lesballons rougesà l’héliumetaccrocherdegroscœurssur lesmursetdans lavitrine.Lapartieboulot terminée, les femmesse racontèrentvolontierscequ’ellesavaient faitpendant leurs week-ends. Ses collègues se regardaient discrètement, attendant qu’Alaina daigne leurrelater sa fin de semaine avec son voisin.Toutes trois avaient des vies bien rangées, avec pour deuxd'entreellesdesenfants.Laseulequiapportaitdel’animationavecsesrécitsinsolitesétaitAlaina.

—Cava,Aly?s’enquitEvelyn.Tuparaisbiensongeuse.C’esttonvoisinquiterendtoutechosecommeça?Allezraconte,petitecachottière!Depuissamedimatin,nousrongeonsnotrefrein.Tudevaisprendredesesnouvelles.Est-ilcélibataire?Etsioui…luias-tusautédessus?

Alainaesquissaunsouriredevantl’avalanchedequestions.—Nousavonsdînéensemble…—Nannndéjà! Ilestdugenrerapidedisdonc.C’estchou!Vousdînezdéjàenamoureux.Hum,

rassure-nous,tun’aspascouchéavecluilesoirmême?—J’aiseulementparlédedîner,Evie,pasdebatifolage!—Tuenpinçaispour lui, intervintGeorgia.Leschosess’annoncentcommetuveux.Heu…alors

pourquoicetteminepréoccupée?Mince!J’aideviné.C’estunKevinbis.Ilcausetrop,iltecourtaprèsettunesaispluscommentt’endébarrasser?

—Oui,làçavaêtrebeaucoupplusdifficile,renchéritEvelyn.Ilhabitejusteenface…Alainasecoualatête.—Non,c’esttoutlecontraire!Ilestdugenreàsefairetirerlesversdunez…Enfaitdedîner,je

mesuisimposéechezluiavecunevulgairebriquedesoupe.Nousavonsmangédanssapetitecuisineetavonsdiscutédetoutetderien.Can’avaitabsolumentrienderomantique…

—Bonsang,Alaina,arrêtedenousfairelanguiretdis-nouscequis’estpasséaveclui?Judith,lapatronne,jetauncoupd’œilàlapenduleets’exclama:—Hé,Evie,tuasvul’heure.C’esttoiquiinaugures!MmeBrooks,tapremièrecliente,arrivedans

cinqminutes.—Nannn,pasdéjà!Jeveuxentendrelasuitedel’histoire,moi,s’écria-t-elledépitée.Néanmoins,elles’éloignaàregret,traînantlapatte,toutelatristessedumondesemblantpesersur

sesfrêlesépaules.—Allez,dis-noustout,lapressaJudith.—Maisiln’yarienàraconter.Jel’aiaidéaumomentoùilétaitmaladeetças’arrêtelà!

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—J’ail’impressionquetuenattendaisplus…—C’est ridicule, je sais. Je ne le connaismêmepas ou si peu !Hier dans la soirée, nous nous

sommesrecroisésetilm’aàpeinesaluée.—Quoi?Lesalaudingrat!Jecomprendsquetusoisdépitée.—Tuveuxqu’onailleluisecouerlespuces?proposaGeorgia.—Nonsurtoutpas!Onnepeutpasforcerlesgensàvousapprécier.—MapauvreAly.Net’inquiètepas.Tutrouveraschaussureàtonpied.Tiens,situveux,monmari

m’aparléd’uncollèguecélibatairesupercanon…Alainaéclataderire.—C’estgentilàtoi,Jud,maislesrencardsarrangés,jedisstop!— Comme tu le sens, mais si tu changes d’avis, fais-moi signe ! Mon mari a beaucoup de

collèguescélibataires!

***Depuisleseuildesaporte,Alainabalançasesballerinesàtraverslesalonetseruapourfaireun

volplanésursoncanapé.Ellegrognadedouleuràl’atterrissage.Aïeeesesseins!Ellelesavaitoubliésdans laprécipitation.Lanatureétaitmal faite :pourquoinepoussaient-ilspasdans ledosplutôt !Lajournées’étaitdérouléetranquillemententrefousriresetpapotagesaveclescollèguesetlesclientes.Auprogramme : des permanentes, des colorations, des brushings de dernière minute pour desbusinesswomenavantun rendez-vous important…Lesactivitésétaientassezvariéespour luiéviterdes’ennuyer.

Ses parents avaient divorcé quand elle n’avait que neuf ans, après neuf longues annéesd’engueulades. En restant avec samère qui avait la bougeotte, elle n’avait jamais suivi une scolaritéstable.Detoutefaçon,lesétudeslabarbaient.Cequil’intéressaitc’étaitunmétiermanuel.Ellesesentaitl’âmed’uneartiste,d’unecréatrice.Enplusdescoupes,ellecomposaitdescoiffurespourlesmariagesetautrescérémonies.

Alaina somnolait doucement le visage plongé dans les coussins, les bras dépliés comme si elleflottaitau-dessusducanapé…Cefutàcetinstantfatidiquequelasonnetteretentitdansl’air.Merde,non!Elleétaittropbiendanscetteposition!Ellemauditenpenséel’importun.Quiquecesoit,ilchoisissaittrèstrèsmalsonmoment.Toutefois,ellefituneffortsurhumainpourémerger.Cen’étaientpaslesvisitesqui l’étouffaient, elle en recevait si peu.Pourvuque ce ne soit pas undémarcheur, elle avait toujourstoutes les peines dumonde à s’en dépêtrer. Sa gentillesse la perdrait ! Elle se frotta unemain sur levisagepourchasserleséventuelstraitsqu’auraitlaisséslecontactprolongéaveclescoussins.

Elleouvritlaporteetrestauninstantsansvoix.Sonvoisinlunatiqueenchairetenossetenaitsurlepalier.Queluivoulait-ilcelui-là?Elleeutenviedeluiclaquerlebattantdanslenez.Maisc’eûtétéserabaisseràsonminableniveau.Ileuttoutdemêmeladécencedeparaîtrelégèrementcontrit,unsourirevacillantauxlèvres.Ellel’accueillittelleunevagueconnaissance,sanseffusionnifroideur.Ilavaitétéclairàsonsujet,elleluirenvoyaitl’ascenseur.

—Bonsoir,lasalua-t-il.J’espèrequejenevousdérangepas?Il semblait de plus en plus embarrassé par son mutisme et elle savoura mentalement sa petite

revanche.Allait-ilseconfondreenexcusespoursoncomportementgrossier?Elleluiriraitpeut-êtreaunezavantde les accepter.Cequ’ellepouvait semontrermesquineparfois !Crâneuse, elle sebornaàtenirlechambranledelaportesanspipermot.

—Est-cequejepeuxentrer?J’aiàvousparler.Hey, minute ! Quoi, pas d’excuses ? Pasmême unmicroscopique pardon prononcé du bout des

lèvres?Elles’enseraitcontentée,àvraidire.Là,ellefutlittéralementestomaquéeparsademande.Ilne

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manquaitpasdeculotdevouloirviolersonappartementalorsqu’illuiavaitàpeineadressédeuxmotslaveille.Maislacuriositél’emportasurlereste.Dequoipourrait-ill’entretenir?

—Oui,deuxminutesparcequej’allaispasseràtable.Cen’étaitpasvrai.Ellen’avaitrienpréparédutout.Maisça,ill’ignorait.Ilsdemeurèrentdeboutaumilieudel’entrée.Ellenel’invitapasàs’asseoir.Auplacardlesbonnes

manières!Quiavaitcommencéd’abord?—Quepuis-jefairepourvous?—Etsionsetutoyait…Demieux en mieux ! Elle serra les dents pour éviter que sa mâchoire ne se fracasse contre le

parquet. Sur quel énergumène était-elle tombée ? Il était schizo, ce n’était pas possible autrement !Asoufflerlechaudetlefroidainsiavecelle.

Alainacroisalesbrassoussapoitrineethaussaunsourcilméfiant.—Heu…pourquoionpasseraità«tuetàtoi»?— J’ai un service à te demander. Et pour plus de crédibilité, il faudrait qu’on se tutoie. Tu te

souviensquandjet’aiaidéeàtedébarrasserdeKevin,tum’aslancé:«àchargederevanche».Etjechoisiscemomentpourréclamermondû.

Etprofiteurpar-dessuslemarché!Sesbrasétaientsurlepointdesedécrocherdeleursligamentsdevant tant d'outrecuidance. Preston venait de dégringoler d’une dizaine de crans dans son échelled’estime qui n’en comptait que… dix. De prince charmant il devint un vilain crapaud tout visqueux.L’habitnefaisaitdécidémentpaslemoine!

— Je vous… pardon, t’écoute. En quoi puis-je te dépanner ? Tu as besoin de sel, de sucre, defarine?

—Bon,situmelaissaisparler?—Tuasraison,reconnut-elledemauvaisegrâce.Ellesefaisaitl’effetd’ungéniedanslalampemagiqueattendantl’ordredesonseigneuretmaître.«Parleetj’exauceraitonimbéciledevœu.»Prestonavaitpréparétoutundiscoursd’introduction,maisseretrouvaitcoiaumomentdesoumettre

sarequête.Il toussapours’éclaircirlavoix.Aprèsmûreréflexion,iln’avaitpastrouvéd’autremoyenpourparveniràsesfins.Autantêtredirect!

—Voilà, j’aimerais demander à une amie dema promo de sortir avecmoi le jour de la Saint-Valentin.Maisellenefaitpasvraimentattentionàmoi.Jevoudraislarendrejalouse…

Uneballe se logeadans lecœurd’Alainaet lui coupamomentanément le souffle.Aumoins, ellen’avaitplusrienàespérerdececôté-là!Prestonétaitvraimenthorsdesaportée.Ilavaitdesviséessurune autre ; elle ne l’intéressait pas lemoins dumonde…Et cette fichue blessure qui s’élargissait deseconde en seconde. Non, elle n’allait pas pleurnicher sur quelque chose qui n’existait que dans sonimagination.Ridicule!

—Tuauraisbesoindemacomplicitépourluiouvrirlesyeuxenquelquesorte?—C’esttoutàfaitça.—Etquedevrais-jefaireconcrètement?—Ehbien, simuler ceque tous lesgensamoureux sont censés fairequand ils sont ensemble.Se

toucher,secaresser,s’embrassersurlabouche…—Quoi?!s’écria-t-elleenseraidissant.Echanges salivaires, lèvres contre lèvres, languedans laglotte…Tout le toutim !Nerveuse, elle

esquissaquelquespasets’arrêtadevantlui,lesmainssurleshanches.—Tupousseslebouchonunpeuloin,là,non?—Si tu n’as pas envie dem’embrasser, je le comprendrai, concéda-t-il avecunpetit sourire en

coin.

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—Combiendetempsdureracettemascarade?—Auplustardjusqu’au14février.Presquedeuxsemaines.«Toutcetemps-là?»Ellefaillitsefrapperlefrontaveclapaumedelamain.Ilfallaitqu’elleperdecettehabitude…Son

bleucamouflésoussonmaquillagen’avaitpasencoretotalementdisparu.EllemauditledestinquiavaitplacéPrestonsursonchemin.Pourquoiavait-ilfalluqu’ilsoitmaladecejour-là!ElleauraitdûappelerlesflicspourdélogerKevinduhall.Aumoins,ilsneluiauraientréclaméaucunserviceenéchange.Maisbon,uneparoleétaituneparoleetellenecomptaitpassedérober.Ellelevalesyeuxaucieletsoufflapourbienluifairecomprendrequ’ellen’aimaitpasêtremanipulée.

—Tuacceptesalors?lapressa-t-il.Commesielleavaitlechoix!—Lemieuxseraitdeleluidemander,tunecroispas?Tuseraisplusvitefixé.—Jen’osepas.—Hein?Ad’autres!Nemefaispascroirequetuestimide!Entoutcas,tuosesbienavecmoi.—Avectoi,cen’estpaspareil.«Ahoui,tun’espasamoureuxdemoi!»Quelgentlemandeleluirappelersanscesse!Qu'onentermineunebonnefoispourtoutes!—OK,j’acceptedeteprêtermain-forte.—Merci.Cachantdumieuxsasatisfaction,Prestonluitenditlamainenguised’accord.Hésitante,ellebaissa

lesyeuxsurcettemainfinedépliéeetfinitparlaserrer.Ellefutsurprisequandildéposaunbaiseraériensursajoue.Cefrôlementfutsifurtifqu’ellecrutl’avoirimaginé,maislachaleurpersistaaprèsqu’ilsefutéloigné.Elleleregardabouchebée.

—Hey,maiscen’étaitpasprévudanslecontrat!Onavaitditpas«embrasser».—J’aiprécisésurlabouche.Maisjepeuxsurlajoue.Cefutàsontourderestercoite.Ellen’avaitrienvuvenir.Finstratège,ilavaitréussiàretournerla

situationcommeunecrêpe,enl’enroulantdedans!Elleétaitsoussacoupedésormais.Ilprofitadesonhébétudepours’éclipser.Elledemeurasongeuseaprèssondépart.Prestonétaituncurieuxmélangedetimiditéenverssonamoureuseetd’audaceavecelle.Elleavaitpeut-êtreacceptétropvitedeseprêteraujeu!

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Chapitre5

Alainas’envoulaitdes’êtrelaisséembarquerdanscettehistoiredefaussepetiteamie.Elleavait

résisté toute la journée à l’envie de révéler la supercherie à ses collègues, de peur de se faireenguirlander.Siellessavaient…Quandelless’ymettaient,cestroisdrôlesdedamessetransformaientenvéritablesmèrespoulesdéfendant,becsetergotsdehors,leurpoussinfragile!Depuissesseizeans,ellevivaitseule.Elleavaitacceptétoutessortesdepetitsboulotspourfinancersaformationdecoiffeuse.Adix-septans,elles’étaitprésentéeparleplusgranddeshasardsdanscesalon,cherchantuneplaceentantqu’apprentieenalternanceavecsonécole.Depuis,lestroisfemmesavaientadmissousleursailescettetoutejeunefilleunpeuperdue.

En rentrantdu travail,Alaina s’adossaaubattantde laporteet soupiraàplusieurs reprisespourchassersacolèrelatente.Elleétaitfurieusecarelleavaitdûtairelavéritéàsescollèguesetellen’aimaitpasça.Dansunmouvementdecontrariété,elleimaginaPrestondevantelle,lanarguantavecsonsourireencoin,etlepritpourcibledesamauvaisehumeur.Ellevisal’emplacemententreseslonguesjambesetbalançaseschaussuresàcetendroitprécis.

«Tuvoisdansquelétattumemets!»Elleenavaitrasleboldeseshistoiresdecœur.Toutess’étaientsoldéespardeséchecs.Tousdes

Kevin,imbusdeleurpersonnequicroyaientqu’unecoiffeuseavaitdeuxneuronesquisebattaientendueldans sacervelle.Quipensaientqu’ellen’était làquepouradmirer leursbiscoteaux !Etpourune foisqu’elleéprouvaituneforteattirancepourungarçoncharmant,ilavaitfalluqu’ils’entiched’uneautre!Lapoisse!Elleimaginaitsonamieenjeunefillesage,loindechangertouslesmoisdecouleurselonsonenvie.

Merde!Serait-ellejalouse?Ellesedirigeaverslasalledebainsets’observadanslaglace.Unbarbellcourbédansl’arcade,undiamantdanslanarine,unlabretdécalédansla lèvreinférieureetuntragusdans l’oreille.Et si elle les enlevait ?Elle paraîtrait plusnormale aux yeux de tous.Non, sonhommedevraitl’acceptercommeelleétait!Toutàcoup,ledingdongdelaporteluiparvintauxoreillesetinterrompitsoninspection.Ellejetauncoupd’œilàlapendule.Depuiscombiendetempssetenait-elleplantéedanslasalledebainsentraindefairel’inventaire?Ellesoupira.Ellesedoutaitdel’identitédusonneur.Avantill’ignoraitsuperbement,aujourd’huisesactesconfinaientauharcèlement.

Elle s’arrangea un peu avant de sortir de son refuge, histoire également de gagner de précieusesminutesloindesonmaître-chanteur.Elleavaitacceptésonmarché,maisellen’étaitpasàsabottenonplus!

—Bonsoir,lesalua-t-elleduboutdeslèvres,aprèsluiavoirouvert.—Bonsoir,répondit-ilavecunsourire.J’espèrequetun’aspasencoremangéparcequej’apporte

ledîner.Décontenancée, elle s’en voulut – rien qu’un tout petit peu − de l’avoir fait poireauter. Son

tortionnaireétaitvenu,animéd’unelouableintention.

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—Nonvous…tusupposesbien,jen’aipasdîné.—Jenesavaispasquoiprendrealorsj’aichoisidesspécialitéschinoises.Aussitôt,elleretrouvasabonnehumeur.Sonestomacreprenaitledessus!Oupeut-êtreétait-cela

présencedePrestonquiluiredonnaitlapêche?—J’adore!—Commeçatuaimeslesplatsasiatiques.Intéressant.Ellefronçalessourcils.—Oui,confirma-t-elle,ainsiquelacuisineaméricaineeteuropéenne.Enfait,j’adorelabouffeen

général,maisjesuisnullederrièrelesfourneaux.—Tasoupeétaitpourtanttrèsbonneladernièrefois!—Tuparles!Jen’aieuaucunmalàdécouperl’emballagedelabrique.Ilssesouriaienttrèscomplicescommes’ilsseconnaissaientdepuisdeslustres.—Entre,jetefaisvisitermonantre.L’appartementestpetit,maisbienagencé.Chambre,sallede

bains, désigna-t-elle du doigt au passage. Et la cuisine est par là. Nous allons réchauffer toutes cesbarquettesaufouràmicro-ondes.

Illasuivitetdéposalescartonssurleplandetravail.—Dis-moioùsontlesassiettesetlescouverts,jevaismettrelatable.Amoinsquetuneveuilles

utiliserlesbaguettes?—Jesuisaussiadroiteaveccesboutsdeboisquesij’avaisdeuxmainsgauches.Lesplatssontici

etlescouteauxetfourchettessetrouventdansletiroirdedroite.Lacuisineétaitexiguëetelledevaitfaireattentionànepaslefrôlerpendantqu’ilfouillaitdansses

meublescommeenterrainconquis.Ellenebougeapasdesaplacestratégique,scotchéeàcôtédufour.Ildressalatableets'yinstallatandisqu’elleamenaitlesboîtesréchauffées.—Bonappétit.—Merci,toiaussi.Ilscommencèrentàmanger.—Commentes-tudevenuecoiffeuse?—C’étaitunrêvedepetitefille.Mesparentsm’ontoffertunetêteàcoifferquandj’avaishuitans

avec toutes sortes d’accessoires : pinces, épingles, bigoudis... Je pouvais passer des heures à luiconfectionnerdescoiffures.

Elleoubliaitdepréciserquesesparentsn’arrêtaientpasdesedisputeravantleurdivorceetqueparlebiaisdumannequin,elles’évadaitetoccultaitleurshurlementsconstants.

—Ettoi?J’imaginequetuaimesbeaucouplesanimauxpourdevenirvétérinaire.—Oui.Etpuisj’admirebeaucoupmonpèrequiestaussivétérinaire.Alainaledévisagea.Soussesairsmachiavéliques,Prestonparaissaitdouxetpatient.Desqualités

indispensablespourapporterlessoinsnécessairesauxanimauxetrassurerleursmaîtresinquiets.—Ettoi,tuaimeslesanimaux?demanda-t-il,soudain.—Jenesaispaspuisquejen’enaijamaispossédédemavie.Mêmepasunpoissonrouge.—Maisçanetedéplairaitpas?—Jenecroispas,non.Quandilseurentfinidemanger,aulieudelalaisserenplanaveclatablesale,Prestonbalayales

miettes,ramassalesassiettesetlesdéposadansl’évier.Pendantqu’Alainas’occupaitdeleslaver,illesessuyaavecuntorchonetlesrangeadansleplacard.

Ensuite ils s’installèrent sur le canapé à unmètre l’un de l’autre. Alaina conservait la distancesciemment. Allait-il s’incruster encore longtemps ? Il la rendait nerveuse, si près d’elle et pourtanttellement inaccessible ! Il tenta un rapprochement manifeste. En réponse, elle se reculaimperceptiblement.

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—Situt’éloignesdemoichaquefoisquejem’approchedetoi,nousauronsdumalàfairecroireànotrecouple.

—Ohexcuse-moi,jen’avaispascomprisquec’étaitunerépétition,pouffa-t-elle.—J’aiinvitéCarolineavecdeuxamisàvenirréviserchezmoi,cedimanche.—Ah!Elle s’appelait donc Caroline, la huitième merveille du monde. Ouais pas très original comme

prénom!Alainasortaitplusdel’ordinaire.Ettoc!Lavoilà,laraisonpourlaquelleilétaitsiempressécesoir:sachèreCarolineseraitlà,dansson

appartementetbientôtdanssesbras!Cetteidéeluifutàpeinesupportable.Lentement,elles’enharditàrefairelechemininverseetàse

rapprocherlepluspossibledePreston.Ill’enlaçaetelleposasatêtecontresonépaule.—Tuvois,cen’étaitpassidifficile.—Mhmmm,non.—Ilfaudraitpeut-êtrequetumeserresaussi.Unpetitsourireétiraseslèvresàcettesuggestion.SesmainsvinrententourerletorsedePrestonet

caressèrentsondos.«N’yprendspastropgoût,cen’estquedelacomédie!»Maisellesesentaitintensémentbiendanslachaleurdesesbras!Tout à coup, il s’écarta d’elle et ses doigts vinrent encadrer son visage. Alaina commença à

paniquer. Comptait-il l’embrasser ? Oui ! Ses yeux bleus s’agrandirent cependant que la bouche dePrestons’abattitsurlasienne.Elleallaitprotesterquandilglissaprécisémentsalangueentreseslèvresouvertes.Malgréelle,ellese laissaenivrerparcebaiservoluptueux.Lorsqu'elledéposaunemainsurson torse pour le repousser, elle put sentir les pulsations de son cœur battre à l’unisson des siennes.Vaincue,elleréponditauxsollicitationsardentesdesalangueaudacieusecontrelasienne.

Aboutdesouffle,ilrelâchasaboucheetplaquasonfrontcontrelesien.—Cen’étaitpassidifficiledem’embrassernonplus!—N’avait-onpasdit«pasdebaiser»?haleta-t-elle.—J’avaisspécifié«situn’aspasenvie»,maislaconsignenes’appliquepasàmoi,carj’avais

trèsenviedetegoûter,conclut-iltriomphant.Pouvait-il répéter ça ? Un début de bonheur s’insinua en elle… qu’elle choisit d’ignorer. Elle

préférachangerdesujet.—Comment fera-t-ondimanche? Jedoisêtreenadmirationdevant toi?Tecollerconstamment,

pirequedelaglue?—Faiscommetulesens,maisrienquedetrèsnaturel,ensomme!N’es-tupasdéjàfolledemoi?—Vantard!répliqua-t-elleenluidonnantuncoupdecoude.—Tuasréponduavecpassionàmonbaiser…—Purréflexe!«Pureidiotie!»—Ah,dèsqu’onglisseunelanguedanstabouche,turépondsautomatiquement?Deuxièmecoupdecoude.—Cequetupeuxêtredésagréable!J’aiétéattaquéeparsurprise.DevantunPrestonhilare,Alainacroisalesbrassoussapoitrineetfronçalessourcils.—J’aichangéd’avis,jeneveuxplusmeprêteràtacomédie!—Tureviendraissurtaparole?C’estindignedetoi.Ildonnaitl’impressiondebienlaconnaître.—Grrrr,j’aimeraistebalancertrèsfortuncoussinàlafigure…Iléclatad’unbrefrire.

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—Impossibledes’ennuyeravectoi!Nevenait-ilpasdelacomplimenter?Commes’ils’enétaitrenducompteégalement,ilseraclalagorgeavantdequitterlecanapé.Elle

enfitautant.—Jevaisyalleravantquetunemettestamenaceàexécution.Ilsepenchapourdéposerunchastebaisersursajoue.—Tut’améliores,chuchota-t-ilcontresapeau.Tunebondisplusquandjem’approchedetoi.Ellenesortitdesatransequequandilrefermalaporte.Siellen’yprenaitpasgarde,ellerisquait

deprendregoût à ces contacts.Une chaleur persistait auniveaude sapommette àmoinsqu’elle n’aitrougideplaisir…

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Chapitre6Aujourd’huiétaitlejourJ.«Soisnaturelle!»Comme siPreston était sonvéritable amoureux alors qu’il ne l’était pas.Faire semblant… Il lui

avaitdonnérendez-vousàmiditrente.Al’heuredite,ellepressalasonnettedesonappartement.Ilvintluiouvriravecunpetitsourire.Ilétaitvêtud’untablier.

—Entre,jesuisentraindeterminerdepréparernotredéjeuner.Jenousaiconcoctédesspaghettisàlabolognaise.Tum’asconfiéaimerlacuisineeuropéennedoncj’enconclusquetun’asriencontredesspécialitésitaliennes.

—J’adoreça,eneffet,maisilnefallaitsurtoutpastedérangerpourmoi.—Ledimanche,jeprendsplusletempsdemitonnerdespetitsplats.Preston ressemblait de plus en plus à son homme idéal ! Il ne rechignait pas à dresser la table,

donnait volontiers un coup demain pour la vaisselle, officiaitmême derrière les fourneaux leweek-end…Commentrésister?SicetteCarolinefaisaitlafinebouche,d'autresbrasl'accueilleraientpourlecajoler…enl’occurrencelessiens!

Une idée germa dans la tête d’Alaina. Pourquoi attendre ? Elle comptait bien le détourner deCaroline.Elleferaitsonpossiblepourleséduire.Prestonétaitàelle!

Ellesesouvenaitdel’emplacementdesacuisine.—Jevaismettrelecouvert,proposa-t-elle.Lesassiettessetrouvaientdansunplacardbasjusteàcôtédelaplaquedecuisson.Pourl’occasion,

elleavaitrevêtuundébardeurnoiraulargedécolletéarrondietunpullroselâchequiluidécouvraituneépaule fine.Unsautoiravecdesbreloquespendait jusquesursonnombril.Ellesebaissaexagérémentpour qu’il ait une vue imprenable sur ses seins. Quand elle releva les yeux, elle nota le brusquemouvementdetêtecommes’ils’étaitattardéplusquenécessairesursapoitrine.

ByebyeCaroline!—C’estprêt,annonça-t-ilenfin.Ilamenadeuxcasserolesfumantessurlatableetcommençaàservir.—Aquelleheuredoivent-ilsarriver?—Vers14h.—Jeserailàpourlesaccueilliretensuite…Jenevaispasvousregardertravailler?—Non.Tupourrasrepartiraprèsavoirprouvétoutetonaffectionàtonchéri.—Trèsdrôle!ironisa-t-elle.—Mangetantquec’estchaud.—Oui,chef.Ellegoûtaauplatetémitunmarmonnementgourmand.Lesspaghettisétaientaldente et la sauce

bolognaiseonctueuse.Ellefinitsonassietteenunriendetempsavantdeserejetercontreledossierdesachaise.

—C’étaitexcellent.Vraiment!—Merci.Qu’allaient-ils bien pouvoir faire jusqu’à 14 h ? Ils avaient presque une heure à tuer. Elle ne

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connaissaitaucunjeudecartes.Aprèsavoirdébarrassélatableetessuyélavaisselle,elles’installasurlecanapé.Unpetitfrisson

d’anticipationluiparcourutledos.Elleavaithâtedeseretrouverlovéeentresesbras.— J’ai téléchargé une vieille comédie romantique, annonça-t-il. Jeme suis dit qu’on pourrait la

visionner.—Ah.—Valentine’sDay.Untitreonnepeutplusprémonitoire.—Jeneconnaispas.—Quelgenredefilmaimes-tu?—Jen’aipasdepréférence.Jepeuxaussibienregarderunfilmd’actionqu’unfilmplusintimiste.

Enfait,çadépendbeaucoupdel’humeurdumoment.Maisjenesavaisquetoi,tuaimaiscegenre.—C’estsurtoutpournousmettredansl’ambiance.D’habitude, jepenchepourlesdocumentaires.

Maisj’aiuntravers:j’adoreregarderlebase-ballàlatélé.—Personnen’estparfait!—Trèsdrôle!Onselematecefilm?Il s’installa à son tour dans le canapé etmanipula les télécommandes.Enfin, la comédie débuta.

Commeelles’yattendait,ilnetardapasàlaserrerdanssesbras.Elleselaissafairesansrésisteretcalason dos contre son torse. Un film en amoureux… une jolie façon de passer un dimanche après-midihivernal.Pourtant,auboutdedixminutes,ellesentitleboutdunezdePrestonparcourirethumersoncou.

—Tusensbon,murmura-t-il.—J’aividéleflaconpourlagrandeséduction.Prestonritdoucement.Lesimagesdéfilaientsurl’écranplat,maisilavaitl’espritailleurs.Lapeau

douced’Alainaétaitbienplustentantequecettecomédieromantique.Ilsemitàdistribuerdesbaisersinsistantslelongdesoncou.Plusillatouchaitplusilsentaitsonsangs’échaufferdanssesveines.

De son côté, Alaina avait du mal à se concentrer sur Ashton Kutcher, pourtant fort mignon audemeurant.Maisbeaucoupmoinsqueceluiqui s’appropriait soncou telunvampiresur lepointde ladéguster.Sonhaleinechaudeluienvoyadesfrissonsirrépressibles.

—Jecroyaisqu’onregardaitlefilm?—Tupeuxcontinuerdevisionnerpendantquejeparfaismonentraînement.Ellefitlamoue.—Jenesaispassijedoismesentirflattéequetumeprennespourunterraindejeu.—Tupeux!—Prétentieux,va!Ellerit.Elleadoraitleurséchangesverbaux.Elleredevintsérieusequandilsemitàcaresserlalignearrondiedesonsourcilduboutdudoigt.Il

butacontresonpiercingbanane.Elleretintsonsouffle.Ilneluiavaitjamaisfaitaucuneremarquesursonlook.

—J’aimebeaucouptesaccessoires,déclara-t-ilsimplement.Alainasesentitfondrecommeneigeausoleiletsemorditlalèvreinférieurefaisantjouersonautre

piercing.Ce qui eut pour effet d’aimanter le regard concupiscent de son compagnon sur sa bouche. Ils’approchatrèslentementdeseslèvresserréespourluilaisserletempsderefusersoncontact.Maisellen’avaitaucuneenviedesedérober.Aucontraire,elleappelaitcetteintimitédetoussesvœux.

Lorsque leurs bouches s’unirent dans un profond baiser, Alaina noua d’instinct ses bras sur sanuque,l’attirantplusprèsd’elle.Leurssouffless’accélérèrent,semélangèrenttandisqueleurslanguessecherchaient,sereconnaissaient.Illapoussadélicatementsurlecanapéoùils’allongeasurelle.Quandsonbassinépousaseshanches,elleputsentirsonérectionpalpitercontresacuisse.Illadésirait…

Toutendévorantseslèvres,Prestonglissadesdoigtsimpatientssoussondébardeuretremontale

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vêtementnoirmoulantlelongdesescôtes.Ilserelevalégèrementetavisasonventrenu.—Trèsjolisaphir…Aussitôt, saboucheaffaméefonditsur lenombrilpercé,embrassa lapeaufrémissanteet lemétal

froid.Ensuite,seslèvresparcoururentparesseusementunlanguidecheminjusqu’àlalisièredusoutien-gorge.Rapidement,ilécartalesbonnetsetpinçalestétonsrosesquiavaientdurcisousledésirlancinant.Alaina gémit sous ses caresses appuyées et brûla d’envie de sentir sa langue agacer ses mamelonsdressés.

Toutàcoup,lebruitdelasonnettelesinterrompitdansleursinstantsdepurevolupté.Tropabsorbésl’unparl’autre,ilsn’avaientpasvul’heuretourner.Aprèsunultimebaisersursapoitrine,ilsedétachad’elleetremitsondébardeurenplace.

—Jecroisquej’aiunproblème,affirma-t-il,néanmoins,ens’asseyant.—Ahbon,lequel?—Jenepeuxpasaccueillirmesamisdanscetétatd’excitation…—Oh.Elleauraitpuledevinertouteseulesielleavaiteutoutesatête!—Net’inquiètepas,jevaislefaire,pouffa-t-elle.—Arrête,cen’estpasdrôle!—Filedanslasalledebains,espècedepervers!Illuilançaunderniercoupd’œiltorveavantdedisparaître.Elleétaitassezfièredel’avoirexcitéà

cepoint.IlpenseraitbeaucoupmoinsàsaCaroline!Amoinsquejustementcenefûtellequ’ilavaitentêtequandill’embrassait…Unedoucheglacéefitchutersonenthousiasme.Elles’étaitréjouietroptôtdesavictoire.

Piquéepar lacuriositéquantà l’amiequ’il comptait séduire,elle seprécipitavers laportepourl’ouvrirengrand.

—Bonjour,dit-elle.Sur le seuil se tenaient troispersonnesaux regardsexorbités.C’étaitvraiqu’elle faisait tacheau

milieudecesétudiantssérieux.—Est-cequePrestonestlà?—Oui,ilarrive.Unevoixsefitentendrederrièreelle.—Entrez,jesuisjusteallécherchermesbouquins.«Menteur!»Prestonvintl’enlacertendrement.—Chérie,jeteprésentePhil,ConnoretCaroline.VoiciAlaina.Ilssesaluèrentpoliment.AlainaavaitlesyeuxrivéssurCaroline.Sesprévisionss’avéraientexacts.

Cette dernière était la sagesse incarnée : des cheveux bruns lisses retenus par une simple queue decheval,unejupeenlaineàcarreaux.Ellepouvaitpresquedevinerungiletgrisperlesouslemanteau!Ellen’avait rien contre le style coincé,mais la jeune femmecorrespondait en touspoints augenredeprédilectiondePreston.

—Alaina,nousnousretrouvonsplustard?—Hein…Oui,oui.Ilentremêlasesdoigtsauxsiensetlesramenadanssondospourl’attirercontresontorseferme.Il

luiadressaunsouriredeconnivence.Jouerlejeuàfond!Quandilposaseslèvressurlessiennes,elleouvritlargementlaboucheprêteàl’avalertoutentier

etsa languevinthapperavecsauvagerie lasiennepour la retenirprisonnière.Sansoublier lebruitdeleurssuccionsenstéréo.Aprèsuneéternité,ilrelâchaenfinsonétreinte.

—Ravied’avoirfaitvotreconnaissance,lança-t-elle.Travaillezbien!

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Desmarmonnementshautementembarrassésluirépondirent.AlainaobservaàladérobéeuneultimefoislevisagedeCaroline.Ydécèlerait-elledelacolère,delajalousie,deladéception?Maisriendetoutcela!Cettedernièreétaittropoccupéeàbavarderaveclesdeuxautresétudiantspourprêterattentionau baiser torride. Cette indifférence ne pouvait signifier qu’une chose : elle ne s’intéressait pas àPreston !Dansunsens,celaarrangeaitbiensesaffaires,carellepourrait leconsoler,maisd’unautrecôtéelleétaittristepourlui.

—Atoutàl’heure…

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Chapitre7La séance de travail entre étudiants semblait être terminée. Alaina entendit un brouhaha dans le

couloiraumomentoùilssequittaient.Ellevenaitderentrerdesalonguepromenadeetsepréparaitunetasse de chocolat chaud dans la cuisine. Elle aimait le froid mordant, revigorant de l’hiver avant leredoux du printemps. Pendant que sa boisson tiédissait, elle se précipita pour intercepter Preston. Ilfallait absolument qu’elle lui parle de Caroline. Elle fut d’autant plus surprise de le trouver sur lepaillassonlepoingfermé,surlepointdefrapperàsaporte.

—Quelsynchronisme!Jen’aimêmeplusbesoindetoquerpourquetum’ouvres.—Entre.—Tuaslesjouestoutesroses.Cen’estpastacourseaumoins?— Non, après mon ménage, je suis sortie faire une grande balade dans le quartier. Je me suis

préparéunchocolatchaud.Tuenveuxun?—Cen’estpasderefus.—Assieds-toi.Jet’apporteçatoutdesuite.Elledisparutderrièrelecomptoirdelacuisineaméricaineetluiramenatrèsviteunetassefumante.

Elles’installaàcôtédeluiavecsapropreboisson.—Merci.Ilavalaunegorgéechaudeavantdesetournerverselle.—Alorstupensesquej’aiunechanceavecCaroline?—Tuveuxquejesoishonnête?—Biensûr!—Jecroisque tun’asaucunechanceavecelle. Je l’aibienobservéeetellenem’apasparu le

moinsdumondeaffectéeparnotrecomédie…—Peut-êtrefait-ellesemblant?insista-t-il.Jeluiplais,maisellen’osepaslemontrer…Alainahaussalesépaules,défaitiste.Ils’entêtaitetiln’étaitpiresourdqueceluiquinevoulaitrien

entendre!—Jet’aidonnémonavisavecfranchise.—Etjet’enremercie.Jelasonderaiplussérieusementlundi.Ellefaillits’étoufferavecsonchocolatchaud.—Tuvasluidirequetumelarguessielleacceptedesortiravectoi?Dansuneseconde,elleallaitmordre!—Pasencestermesabrupts.Jesauraiymettrelesformesetj’épargneraitonamour-propre.—Commec’estaimableàtoi,rétorqua-t-elled’unevoixacide.—Ondiraitquetum’enveux?—Cas’entendtantqueça?—Oui,tuesunbrinhargneuse.Est-cequetuenpinceraispourmoi?—N’importequoi!Nedispasdesbêtises.Mais…—Mais?—Jesuismalàl’aise,c’esttout.—Rassure-toi,ceserabientôtfini.

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—J’espère…—Tun’aimesvraimentpasquejet’embrasse?—Si…heu,sereprit-elle,jeveuxdirequeçamepèsededevoirfairesemblant.«J’aimeraissurtoutquetoutsoitréel!»—Bon,jedoistelaisserparcequ’ilfautquej’appellemamère.Ilselevaetdéposaunbaiserdanslescheveuxd’Alaina.Pourquoifallait-ilqu’ilsoitsitendre!Chaquemomentpasséauprèsdeluiaccentuaitsontrouble,

renforçait sa convictionqu’elle avait affaire à l'hommede ses rêves.Elle était sur lepointde tomberamoureusedelui!

***

En reprenant le travail le mardi, Alaina était sur des charbons ardents. Elle n’avait pas eu le

couraged’aller l’interroger le lundisoiret iln’étaitpasnonplusvenu l’informerdequoiquecesoit.Silenceradio.Ellecommençaitàenavoir l’habitude.Cematin,aumomentde leurcafé,sescollèguesnotèrentsonhumeurtaciturne,sicontraireàsoncaractèreenjoué.

—Aly,dis-nouscequisepasse!exigeaJudith.Nousavonstoutesremarquéquetun’étaispasdanstonassiettedepuisquelquesjours.

—Cava,nevousinquiétezpaspourmoi.— Non, tu ne vas pas bien. Tu nous racontes toujours tout et là ce serait « motus et bouche

cousue»?Horsdequestion!Lesproblèmescommelesjoies,onlespartageensemble.Alorspourquoicettetêted’enterrement?

Ellen’enétaitpasàsapremièrebourdeencequiconcernaitlesmecsetellenarraitdeboncœurtoussesdéboiresamoureux.Souventavecdérision.Cependant,cettehistoireavecPrestonétaitenfindecomptesérieuse,mêmeprécieuseàsesyeux,etelleavaitenquelquesortevoulupréserverunepartdesonjardinsecret.Maisellesavaientraison:vidersonsacluiferaitunbienfou.

—C’estàproposdemonvoisin.—Jelesavais!s’écriaGeorgia.Ilt’emmerdeettun’osespasnousl’avouer?Tun’asqu’unmotà

direetonvaluibriserlesjambes…—Non,ilnem’embêtepasdutout.Jecroisquejesuisamoureusedelui.Lesvisagesdesestroiscollèguess’illuminèrentsousl’aveu.—Wouah, c’est unenouvelle formidable, s’écriaEvelyn avant que son enthousiasmene retombe

commeunsoufflé.Doncsitufaisunetêtelonguecommelebras,c’estqu’ilyamanifestementuncouacquelquepart.

—Ilnes’intéressepasàmoi.—Zut ! fit-elleen semordant la lèvre.Ca,c’estplusembêtant.Ah, je sais !Présente-le-nouset

nousnouschargeronsdetefaireunepublicitéd’enfer.—Vousêtesadorables.Enfait,iladesviséessurunefilledanssonécoledevétérinaireetilm’a

demandédejouerpouruntempslafaussecopinepourlarendrejalouse.—Quelsalaud!T’entraînerdanscestratagème.—Etdansleprocessus,jesuistombéeamoureusedesesnombreusesqualités.—Quevas-tufaire?—Leséduireàmontour!répliquaAlainaavecentrain.—Je tereconnaisbien là! Il fautprendre le taureaupar lescornes.Si tuasbesoinque les trois

mousquetairesinterviennent,fais-noussigne!—OK.Alaina se sentit beaucoup moins maussade. Comme toujours, ses copines avaient réussi à lui

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remonterlemoral.Avantl’heuredel’ouverture,elles’approchaduplanningetjetauncoupd’œilsurlesclientes de la journée. Sa matinée ne commençait qu’à 10 h par une répétition de coiffure pour unmariage.Ellemettrait son sens artistique à l’œuvre. Parmi les filles, elle était la seule àmaîtriser cesavoir-faire.Ellelutlenomdelacliente;celle-cinefaisaitpaspartiedeshabituées.

***

Lecarillonretentitdanslesalonlorsqu’unejeunefilleenfranchitleseuil.Ellerepoussad’unemainsalonguechevelurebrunemalmenéeparlepetitventglacé,toutensedirigeantavecunaimablesourireverslecomptoirdelaréception.

Alainasupposaquec’étaitsonrendez-vous.Elleneputs’empêcherdela trouverbienjeunepourunefuturemariée.Eneffet,cettedernièresemblaitàpeinesortiedel’adolescence.Néanmoins,avecsasilhouetteélancée,elleporteraitlarobenuptialeavecéléganceetdistinction.

—Bonjour,mademoiselle.—Bonjour,réponditlacliente,jesuisPatienceMaitland.J’airendez-vousà10hpouruneséance

decoiffage.Alainabaissaleregardsursonagendaetrayalenomavantdereveniràsacliente.—Pourunessaidecoiffuredemariage?—Oui,c’estexact,confirma-t-elle.—Sivousvoulezbienmesuivre,c’estmoiquivaism’occuperdevous.Alainaladevançaavantdes’arrêteràcôtéd'unlargefauteuil.—Toutesmesfélicitationspourvotrefuturmariage,MademoiselleMaitland.Patiencearboraunsourireembarrasséavantdeladétromper.— J’espèrememarier un jour,mais je ne serai que la demoiselle d’honneur à cette cérémonie.

C’estlamèredemonpetitamiquiconvoleenjustesnocesenjuin.—Oh,excusez-moidelaméprise.—Iln’yapasdemal.Jen’avaisrienprécisé.—Est-cequevousavezuneidéedutypedecoiffurequevoussouhaitez?—Non, pas tellement. En fait, je comptais sur vous pourme conseiller. Je souhaiterais quelque

chosedejolietdetrèssimple.—D’accord,nousallonsdéciderensemble.Enattendant,jevousdébarrassedevosaffaires?Patienceenlevasonmanteauetleluitenditavecsonsacàmain.—Installez-vouss’ilvousplaîtpendantquejevaischercherunbook,luienjoignitAlaina.Désirez-

vousboirequelquechose?Thé,café?—Riendutout,merci.Patiences’assitdanslefauteuilencuirpendantquel’employées’éloignait.Curieuse,elleobserva

avecdiscrétionlesalonauxcouleursgaies.ElleavaitchoisicetendroitgrâceauxbonnesnotationssurInternet.Et elle avait eu raisonde se fier auxcommentaires.Le salon était accueillant et lepersonnelsympathique, agréable. Une bonne humeur imprégnait indubitablement l’air ambiant. La décorationcoloréede laSaint-Valentinenaccentuait encore le côté jovial.Deuxcoiffeusesbavardaient et riaientavecleursclientespendantqu’uneautreparticipaitàladiscussionenbalayantdescadavresdemèchesbrunessurlecarrelage.

Alainarevintavecunépaisvolumequ’elledéposasurlatablettedetravail.—Vousn’êtespasobligéedechoisirunmodèleprécis.Jepeuxmodifierlesdétailssivouspensez

quec’esttropsophistiqué.—Trèsbien.Patiencecommençaàfeuilleterrapidementlesdifférentsexemplesdecoiffure.Craig,sonpetitami,

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viendraitlachercherdansuneheureetdemie;ellenedevraitpastroplambiner.Elleoptaassezvitepourunecoiffuresanstropdefiorituresquidégageraitsonvisage.Sescheveuxbrunsseraientrelevésdansunentrelacsdebouclesetdécorésd’épinglesauxperlesrosesàl’extrémité.Lacouleurassortieàsarobedetémoin,tailléedansunemousselinevaporeuse.

—Vousferezunemagnifiquedemoiselled’honneur.—Merci.Pendantque le feràbouclerchauffait,Alainas’assit sur son tabouret roulantet semitàbrosser

méticuleusementleslonguesmèchespourlesdémêler.—Vousavezdescheveuxdouxcommedelasoie.Ensuite, elle saisit unemèche souple pour les enrouler dans l’appareil. Les cheveux disciplinés

prirentinstantanémentlaformed’unespirale.Soussesyeuxnaissaientdesbouclesanglaisesrégulières.Ellelestordit,lesrelevaavecdélicatesseavantdelesépingleravecartpresqueausommetducrâne.Unnuagede laque fixait le tout.Pendantqu’elle répétait l’opération sur l'ensemblede la chevelure, ellesdiscutèrentdelapluieetdubeautempsetd’autressujetsanodins.Alainaétaithabituéeàparleretàêtreattentiveàchaquegestedanslemêmetemps.Alafin,ilnerestaitplusqu’unegrossemècheàonduler.

—LaSaint-Valentinestdanstroisjours,vousavezprévuquelquechoseavecvotrepetitami?—Ilmeréserveunesurprise,déclaraPatience,lesyeuxbrillants.Maisjesupposequeceseraun

voyageétantdonnéqu’ilm’ademandésimonpasseportétaitvalide.—Oùaimeriez-vousvousrendre?— L’endroit n’a pas d’importance pourvu que je sois avec lui. J’aimerais profiter de chaque

moment en sa compagnie, car à la rentrée, nous allons reprendre nos études. Et vous ?Vous avez unamoureux?

Alainaréfléchitavantderépondreprudemment.—Marelationavecluiestunpeucomplexepourlemoment.Patienceémitunpetitriresansjoie.—Entermedecomplications,jepeuxvouscomprendre,jesuispasséeparlàaussi…Son regard noisette se voila légèrement pendant quelques secondes.Toutefois, elle retrouva très

viteunsourireradieux,carlepassétumultueuxétaitàprésentloinderrièreelle.—Maissivoustenezvraimentàlui,foncez!ajouta-t-elleavecconviction.Pournerienregretter

parlasuite.Leurs regards se rencontrèrentdans laglace.Alaina se retintdeposerdesquestions.Cette toute

jeune fille avait dû traverser quelques épreuves dans sa courte vie et elle aurait aimé en savoir plus.Toutefois,ilyavaitdeslimitesànepasfranchir.Engénéral,elleabordaitdessujetssansconséquence,riendetropintime.Aprèstout,lesclientesn’étaientpasassisesdansunfauteuildepsy.EllesecontentadoncdereposerensilenceladernièrebouclesurlapoitrinedePatiencepourjugerdel’effet.

—Jevousapporteunmiroirpourquevouspuissiezconstaterlerésultat.Alaina revintavecunegrosseglace rondeet ledéplaça lentementautourde la têtedesacliente

pourqu’elleexaminesonœuvresoustouteslescoutures.—C’estparfait,affirmaPatienceenbougeantlatête.Jediraiàmabelle-mèredeprendrerendez-

vousd’iciquelquessemaines.Enmêmetempsqu’ellequittaitsonfauteuil,lebruitdelasonnetterésonnadansl’air.Lenouveau

venusalua lesfemmesprésentes.Patienceneputs’empêcherdefrissonneravecdéliceausondecettevoix grave et chaude. Lorsqu’elle se retourna et aperçut Craig qui s’avançait vers elle, son visages’illumina.Soncœurbattitàtoutromprequandsonregardbleuclairerraavidementsurelle,commeunecaresse.Luiplaisait-elle?Elleavaittortdes’inquiéter,carlaréponseétaitévidente:iln’avaitd’yeuxquepourelle.Commehypnotisé,plusriennesemblaitexisterautourdelui.

—Bon…heu,jevousrapportevosaffaires,murmuraAlaina.

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PatienceserapprochadeCraigquil’attrapaparlataille.—Tuessplendide,bébé,chuchota-t-ilpourn’êtreentenduqued’elle.—Merci.Ill’embrassatendrementsurlatempe.— Si je n’avais pas peur de déranger ta coiffure, nous sauterions dans la Mustang pour aller

batifolerdansunendroittranquille…—Ahnon,tunevaspastoutgâcher.J’aipasséuneheureetdemieàmefairebelle.— Tu es resplendissante dans n’importe quelle tenue et… peu importe, ta coiffure, sobre ou

sophistiquée.Maiscellequejepréfèrecesontteslongscheveuxemmêlésaprèsl’amour…—Craig,arrêtes’ilteplaît,murmura-t-elle,intimidée.Jesuisentrainderougir.—J’ailedroitd’essayerdetefairechangerd’avis,non?Alainatoussotapourprévenirdesaprésence.Craig se détacha de Patience pour aller récupérer le manteau des mains de la coiffeuse. Il le

présenta galamment à sa petite amie pour qu’elle puisse l’enfiler. Ensuite, il régla la note avant del’entraîneravecunecertainehâtehorsdusalon.Aussitôtlescoiffeusesseprécipitèrentteluntroupeaudebrebis affolées pour venir plaquer leurs museaux contre la vitrine. Elles voulaient observer le jeunecouple.Unpeuplus loinsur le trottoir,CraigavaitsoulevéunePatiencerieusedanssesbrasmusclés.Elle avait noué ses mains sur sa nuque tandis que ses doigts jouaient avec ses mèches noires. Ilss’embrassèrentàpleinebouche.

Lestroisfemmessoupirèrentenchœur.— Ce qu’ils sont mignons tous les deux ! s’exclama Judith, d’une voix rêveuse. Elle est jolie

commeuncœuretluiest…tropbeau!—Et tellement grand ! Vous avez vu la carrure de ses épaules ?Même sous sa veste, on peut

devinersonimpressionnantemusculature.—Etsifort!renchéritGeorgia.SeuleAlainafitlamoue.—Cen’estpasdutoutmontype!déclara-t-elleenreniflantlégèrement.Tropgrand,tropbaraqué,

trop…toutquoi!Elleétaitpersuadéequec’étaitluiquiavaitassombrilesyeuxnoisettedesacliented’unvoilede

tristesse.Sonpetitamitropparfaitenapparencenedevaitpasêtrefacileàgérer!MaisPatiencesemblaits’enaccommoder,mêmeheureuse.Grandbienluifasse!Quantàelle,elleaspiraitàautrechose.

—C’est vrai, toi, tu asplutôt un faiblepour les intellos, glissaEvelyn en lui décochantun clind’œil.N’empêchequ’elleenadelachancecettepetite!

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Chapitre8Vendredi14Févier.LaSaint-Valentin!Cettejournéepourlesamoureuxnefinirait-elledoncjamais?Elleallaitdevenirfolleàforcede

ruminer ! Preston − ce traître − n’avait plus donné signe de vie depuis dimanche soir dernier. Ilshabitaientpourtantl’unenfacedel’autre,maisétaientredevenusdesétrangers.Ilsn’avaientplusaucuncontact,carilsnesecroisaientmêmeplusparaccidentdansl’ascenseuroudanslehall.Poursûr,ilseterraitdanssonappartement !Carolineavaitdûaccepterdesortiravec luiet ilmouraitde froussedevenirleluiannoncerenpersonne.Leshommes,tousdeslâches!Hélas,ellen’étaitguèrepluscourageusefaceà lasituation.Alainan’avait jamaisétépeureuse,mais là,malgrésa résolutionde leséduire, sesmembresrefusaientdeluiobéirquandils’agissaitd’allercogneràlaportedesonvoisinindélicatpourexigerdescomptes.

Toutefois,ilfaudraitbienqu’elleluiparledenouveau.Lesparolesaudacieusesdesajeuneclienteluirevinrententête.Cettedernièreavaitdûappliquercetteméthodede«foncez!»pourconquérirsonbodybuildédepetitami.Pourquoipaselle!Allez,asseztergiversé!Maisavant,elleressentituneenvieirrépressibledesedésaltéreravecunetassedethébienchaude…

«Trouillarde!»Non,elleavaitjustebesoind’unremontantavantdelivrerbataille!Elles’apprêtaitàserendreàlacuisinequandelleentenditunfroissementducôtédelaporte.Ou

plutôtparendessous.Etonnée,ellevituneenvelopperoseglissersurleparquetavantdes’immobiliserpresqueà sespieds.Unadmirateur secret?Perplexe,elle sebaissapour ramasser lamissive.C’étaitPrestonquiluidemandaitdetouteurgencedevenirchezlui.Quesignifiaitdonccetteinvitation?N’était-il pas censé être avecCaroline ?Ou alorsAlaina était la rouede secours…Au lieude se triturer lecerveauenvain,elleferaitaussibiendecreverl’abcèsunebonnefoispourtoutes!

Niunenideux,elletraversalecouloir,appuyaavecforcesurlasonnetteetattenditlecœurbattantlachamade.Aussitôt,laportes’ouvritsurunPrestonplus…séduisantquejamais.Zut!Ilavaiteubeaulatraiter de façon cavalière, la laissant sans nouvelles pendant des jours, elle réalisa en l’apercevant sidistingué à quel point ce salaud lui avait manqué. Leur complicité, leurs conversions ponctuées degentillespiques,leursbaiserssavoureux,toutluirevintd’unbloc.Conclusioncatastrophique:elleétaitamoureusedecemufle!

Il était infiniment élégant avec sa chemise blanche et sa cravate rouge à rayures bordeaux.Desvêtements pour recevoir…Caroline. Elle s’enfonça les ongles dans sa paume pour juguler la cruelledéception.

—Jenetedérangepaslongtempsparcequetuattendssûrementtapetiteamie…—Oui,toi.—Paslafausse,jeteparledelavraie.—Oui,toi,répéta-t-ilavecunlargesourireensorcelant.Alaina papillonna des cils, incrédule. Que devait-elle comprendre ? Si son cœur voulait bien

cesserdetambouriner,ellepourraitpeut-êtremieuxassimilerlesparolesincohérentesdePreston.

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—Commentça,moi?—Tuasbienreçulemotquejet’aiglissé?—C’estmêmepourçaquejesuisici.—Alorsc’esttoiquej’attendais.Depuisunboutdetempsd’ailleurs.Alainamitlesmainssurleshanches,ensignedecontrariété.—Jetesignalequejeviensjustederecevoirtonmessage.—Tunecomprendsdoncpas?—Non,jesuismêmelarguée.Situavaisl’obligeancedet’expliquer.Ils’esclaffatandisqu’elleenrageait.Pourquoisemoquait-ild’elle?Elleavaitlanetteimpression

des’êtreencorefaitberner.Maisaulieud’éclairersalanterne,Prestonl’attiravivementàl’intérieur.—C’estunehistoireentretoietmoi.Jen’aipasbesoinquetoutlevoisinagesoitaucourant.Bien

qu’ilsleserontforcément…Une fois dans le salon, la mauvaise humeur d’Alaina s’envola comme par enchantement. Elle

contemplaitlesyeuxécarquillésladécorationdesonappartement.Rienn’étaitoubliépourcetteoccasiondelaSaint-Valentin.Ellevitdegrosballonsrougesaccrochésauxétagèresdelabibliothèque.Latableétaitdécoréedepétalesderosesrouges.Descouvertsétaientmispourundînerentête-à-tête.Unseauàchampagneainsiquedeuxflûtescôtoyaientlesassiettes.Sonregardéberluépassadelatabledresséeauvisage fendu d’un sourire satisfait de son hôte.Que signifiait toute cette débauche romantique ?Cettearmada,serait-cevraimentpour…elle?

—Depuisquej’aiemménagéici,jet’airemarquée,toiavectesmultiplespiercings,tescouleursdifférenteschaquemois.Maispourmonplusgrandmalheur,tunesortaisqu’avecdesersatzdeKevin.Jen’aurais jamais fait lepoids faceàeux.Ceque tuprenaispourde l’indifférencen’étaitquede la trèsgrande timidité. Je n’osais pas t’aborder de peur de me faire rembarrer. Quand nous nous sommesheurtés,c’étaitl’occasioninespéréequej’attendaispourmerapprocherdetoi.

—Stop!Tupeuxrembobinerlà,parcequejecroisquej’ailoupéunépisode.Tuesentraindemedirequejet’avaistapédansl’œil.

C’étaitàpeinecroyable!Elleallaitsepincerpourseréveiller.—Et sur lementonégalement !Quand tum’as lancé ton fameux«àchargede revanche», j’ai

inventé ce petit stratagème avec mon amie Caroline pour passer du temps avec toi. Pour mieux teconnaîtreetpourquetumevoiesau-delàdesapparences.Etcequej’aidécouvertm’airrémédiablementplu.Jen’aijamaiscouruaprèsCaroline,maisaprèstoi.

—Jesuissouslechoc,jenesaispasquoidire.Tut’esservidemoi!Ilaffichal’airpenaudd’unpetitgarçonprislamaindanslepotdeconfiture.Alainasesentitincapabledeluirésister.Ilétaittellementattendrissant…—Oui,avoua-t-il.Lâchement.Abominablement.Mais,machérie,situmelaissaisunechancede

meracheter, tune le regretteraispas.Disque tuveuxbienm’essayer !Adopte-mois’il teplaît !Je teparaisassezdésespérécommeça?

—Tumériteraisquejetefassemarinerunpeupourlapeine…maisjenepeuxpas.Jet’aimetroppourça…

—Quoi,qu’as-tudit?—Jesuisentraindet’avouerquejesuisaussiamoureusedetoi,PrestonCallahan.—Depuisquand?exulta-t-il.—C’estvenutoutnaturellement.Jetetrouvaisdéjàcraquantaudépart.Etpuis,pourreprendretes

termes,j’ai«vuau-delàdesapparences»etj’aidécouverttesmerveilleusesqualitésaufuretàmesure.Impossibledenepastomberamoureusedetoi!

Soudain, ilfitunrapidealler-retourverslatablebassepours’emparerd’unbouquetdefleursetd’uneboîtedechocolatsenrubannée.Ils’agenouilladevantelleenluitendantlescadeaux.

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—AlainaHaynes,veux-tuêtremaValentine?Pouraujourd’huietpourlestrèsnombreusesannéesàvenir?Etleplusimportant:est-cequetuveuxbienm’embrasserdetonpleingré?

—Oui,ouietouiavecgrandplaisir,répondit-elled’unevoixémue.Alainas’approchadesonValentinetencadrasonvisageentresesmains.Ellesebaissapourposer

sa bouche avec gourmandise sur la sienne. Elle voulait le dévorer de baisers langoureux. Sa languehardieetimpatientesefrayauncheminentreleslèvressensuellesetdébusqualasienneenlataquinant,l’excitantpourdebon.Ilnetardapasàrespirerplusvitesousl’effetd’undésirgrandissant.

Délaissantlescadeauxetsansrelâcherseslèvrestentatrices,Prestonserelevalentement.Sesbrasvinrententourersataillepourlaplaquerplusétroitementcontresoncorpsminceetferme.Ilécrasasesseinsfrémissantscontresontorseetfrottasonérectioncontreseshanchesmenues.Elleputsentiravecacuitésonsexepulserfurieusementcontresonaine.Unfrissondevoluptélaparcouruttouteentière.Undésirlancinantcommeellen’enavaitjamaisressentimartelaitlecœurdesaféminité.

—J’aienviedetoiPreston,jeteveuxtoutdesuite,haleta-t-elle.—Attends,murmura-t-ilhorsd’haleineavantdelaisseruninfimeespaceentreeux.Avantd’aller

plusloin,ilfautquejet’avouequelquechose.—Quoi?—Cen’estpasfacileàdire.Tujuresdenepastemoquerdemoi?—Tumefaispeur…OhmyGod!Tuasunepetitequeueettun’assumespas?Promis,jesaurai

m’encontenter.Jet’aimePreston!—Tuvasvoirsij’aiunepetiteverge!gronda-t-il.Quevais-jefairedetoi?Ilsecoualatête.Espiègle,elleluitiralalangue.—Jesuistoutouïe,monchéri.Quelestdonccebigsecret?—Voilà,lavéritéc’estquejesuis…vierge.Alaina s’attendait à tout sauf à cet aveu. D’ailleurs, elle resta un instant sans voix, la bouche

légèrementouverte.Inquietdesonsilence,ill’interrogea:—Tun’espastropdéçue?Ellesecoualatêteàsontouretlerassuraavecunsourirecoquin.—Etpourquoileserais-je?—Parcequejeneressemblepasauxautresgarssûrsd’euxaveclesquelstuasl’habitudedesortir.— Oh Preston. Tu dépasses de très loin tous les toquards que j’ai connus ! Tu es exactement

l’hommequejerecherchais!Ettoi,tun’espasdéçuquej’aiedéjàunpeud’expérience?—Non,pasdutout.—Alorsnousapprendronsensemble!—Alaina,monamour…Prestonallaitlahisserdanssesbrasquandauderniermomentellel’arrêtad’ungesteimpérieuxde

lamain.—Minute.Ellesebaissapourramasserlaboîtedechocolatetdénouerlerubanrouge.—Maintenant,tupeux.Avecunpetitrire,ilputenfinlasouleverpourl’emmenerjusquedanslachambreàcoucher.Surle

court trajet, elle en profita pour ouvrir le paquet de confiseries et piocher parmi les chocolats fins.Délicatement,elleenplaçaunàmoitiéentre sesdentsetprésenta l’autreextrémitéàPreston.Sanssefaire prier, ce dernier fondit comme un aigle sur sa bouche pour croquer l’autre côté et l’embrassergoulûment.

QuelmeilleuraphrodisiaquequelechocolatpourdébuterlanuitdelaSaint-Valentin?

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FIN

Vousvenezdeterminerlalecturede:«UnetimideSaint-Valentin»

etjevousenremercieinfiniment.;-)

HéloïseCordellesMail:[email protected]:heloisecordelles.blogspot.fr