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    Un conte de Fe

    Vous tous, les membres de nos familles Certain/Rabourdin, que la Loi, avec raison, a

    dclars majeurs partir de seize ans, vous pensez, pour la plupart dentre vous, que lesfes, les farfadets et autres tres bienfaisants ou malfaisants nexistent que dans les

    contes que les parents lisaient leurs trs jeunes enfants le soir pour leur permettre defaire de beaux rves la nuit.

    Eh bien ! Moi, qui suis maintenant un quasi-vieillard, jai connu en chair et en os quatre

    fes merveilleuses qui, par la puissance de leurs baguettes magiques, ont cr entre deuxfamilles des liens damiti aussi puissants que profonds, sans que ne se produise entre

    celles-ci aucune alliance matrimoniale et cette amiti se poursuit de gnration engnration depuis presque un sicle.

    Il tait une fois une famille de cultivateurs- herbagers du nom de Delam, qui tait

    implante depuis des temps immmoriaux dans un petit village du dpartement delAisne, dnomm Cilly, une vingtaine de km au nord de Laon, dans la valle de la

    Serre. Dans les annes 1904/1905, lun des fils, prnomm Albert, pousa une jeune filledu nom de Rene, qui, elle, tait dascendance urbaine (La Capelle). Le jeune mnage

    stablit dans une nouvelle ferme, un peu lextrieur du village. Cinq enfantsnaquirent de leur union de 1906 1914.

    Aout 1914, coup de tonnerre, dclaration de guerre entre lAllemagne et la France. Les

    troupes allemandes envahissent la Belgique et une grande partie du nord de la France et

    du dpartement de lAisne. Comme cela recommencera en 1940, les populationsfranaises fuient linvasion, mais les cultivateurs restent farouchement attachs leursterres pour essayer de sauver ce qui pourra ltre. Malgr le dchirement affectif que

    provoque cette sparation, Rene avec ses cinq enfants en bas ge (de 8 ans 3semaines) et sa Maman dj ge (Mancia) partirent vers le sud, laissant Albert

    soccuper au mieux de la ferme familiale et pensant que la sparation serait de courtedure.

    Pourquoi Rene, sa Maman et ses enfants furent-ils dirigs vers Dreux et comment y

    ont-ils rencontr notre grandmre, Eugnie Rabourdin ? Je lignore. Je prcise quelanne prcdente, en 1913, Eugnie avait perdu quelques mois dintervalle et son fils

    an, Pierre, g de 20 ans et son mari, Henri Rabourdin. Il lui restait deuxenfants :Maurice (18 ans) le futur Papa de nos cousins Rabourdin et Thrse (16 ans)

    qui devait devenir notre Maman. Eugnie, elle-mme devenue fille unique la suite dudcs de trois frres et sur morts en bas ge et veuve dun commerant prospre, tait

    la tte dune fortune relativement considrable en biens immobiliers, dont uneproprit rurale Morvillette une vingtaine de km de Dreux. Cette proprit

    comprenait notamment une maison de matre. Eugnie offrit Rene et sa famillecette demeure o ils rsidrent pendant toute la dure de la guerre qui sternisa

    jusquen novembre 1918, soit un peu plus de quatre ans. Eugnie leur apporta pendantcette priode un soutien matriel important, mais plus encore des liens damiti trs

    profonds se nourent entre les deux familles par lintermdiaire de Thrse qui soccupa

    beaucoup des enfants Delam au point que ceux-ci lui donnrent le nom de TanteThrse.

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    La guerre termine, la famille Delam regagna sa ferme Cilly. Nanmoins les relations

    damiti entre la famille Certain (Thrse Rabourdin ayant pous Gabriel Certain en1921) et la famille Delam se prolongrent par la suite. Les deux filles Delam faisaient

    de frquents sjours Versailles, lorsque nous tions enfants. Thrse et Gabriel, jeunesmaris, allaient, eux aussi, passer des vacances Cilly. Il existait des photos o on les

    voit parcourant bicyclette les champs de bataille de la Grande Guerre qui setrouvaient dans la rgion de Laon.

    Pour des raisons de sant (dixit mon mdecin de lpoque) je devais passer mes vacances

    la campagne. Cest ainsi que de 1930 1940, je fus accueilli chez eux et ils metraitrent vraiment comme leur sixime enfant. Dailleurs, nous les enfants Certain,

    nous appelions Rene, Tante Nne et Albert, Petit Pre (ctait le nom que luidonnaient ses enfants). Il ntait pas de ftes de famille o nous nous invitions les uns les

    autres. Pendant la guerre 40/45, notre maison de la rue Magenta servait de relai pourque les membres de la famille Delam puissent aller dAgen o ils taient rfugis leurs

    fermes dans lAisne situes en zone interdite , les moyens de communication de

    lpoque taient plus que prcaires et les voyages dangereux.

    Aprs la deuxime guerre mondiale, en 1945, le mari dune des filles Delam, Ludovic

    Gernez qui exploitait une ferme importante dans la rgion de Cilly maccueillit commestagiaire pendant deux ans aprs mes tudes lEcole dAgriculture dAngers et ce,

    avant mon dpart pour le Maroc. Javais t en 1935 garon dhonneur leur mariageet Ludovic fut mon tmoin notre mariage (Marie-Madeleine et moi) en1948. Il y eut

    aussi des liens de parrainage. Franois, mon frre, tait le filleul dun fils Delam, moi leparrain dune petite fille de Rene etc.

    Bien dautres choses me reviennent lesprit en crivant cette relation de notre amiti

    entre nos deux familles, amiti qui se continue avec les descendants, les protagonistesayant maintenant rejoint la maison du Pre. Mais ces souvenirs concernent des

    vnements plus ou moins importants et je craindrais de vous lasser en prolongeant monrcit. Pourtant, si petits soient-ils, ils participent la trame de cette amiti.

    Mais, me direz-vous, o sont les fes dont tu nous parlais au dbut ? Eh oui ! Les fes, ce

    sont ces quatre femmes en chair et en os, Eugnie, Rene, Mancia et Thrse, qui, on nesait comment, ont, par la baguette magique de leur amour maternel, fait natre et

    prosprer une amiti merveilleuse entre deux familles totalement trangres lune lautre tant par lorigine gographique que culturelle. Pourtant, cette amiti perdure

    travers les gnrations malgr la disparition terrestre de ces fes. Celles-ci, jen suis sr,continuent de veiller sur sa prennit.

    Jean-Marie