Un ou plusieurs inconscients dans nos neurones?
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DOSSIER - INCONSCIENT
Un ou plusieurs inconscients dans nos neurones?
La notion d'inconscient ne va pas forcément de soi pour les neurosciences. En parler facilite néanmoins la compréhension de processus qui agissent et réagissent à tout moment dans la façon dont nous percevons notre monde interne et alentours. Les docteurs Morar, Ducreux et Knafo nous proposent quelques points de repÚre importants.
Lors d'un enseignement, un Ă©tuÂdiant m'a posĂ© une question qui m'a laissĂ©e sans voix durant quelques secondes: «Quand
vous nous dites "inconscient", de quel inconscient parlez-vous?» J'ai alors compris qu'il existe un Ă©cart de langage non nĂ©gligeable, que je n'avais pas pris en compte. Pour moi, il n'y en a qu'UN SEUL, et dans ce «un seul» le conscient se mĂ©lange Ă l'inconscient, comme un ballon fermĂ©, Ă l'intĂ©rieur duquel il existe une toile d'araignĂ©e en 3D (mĂȘme si certaines modĂ©lisaÂtions vont jusqu'Ă onze dimensions du temps et de l'espace!), une toile extrĂȘmement dense, composĂ©e de milÂliards de neurones et de milliards de fibres entrelacĂ©es ( 4 km/mm3)~ Les humains adultes possĂšdent 86 Ă 100 milliards de neurones (seulement 800 millions chez nos amis les chats), 100 billions de cellules gliales et 160 trillions de synapses. Pour supÂporter cette construction, le cerveau utilise 20 % de la totalitĂ© de l'Ă©nergie
humaine pour seulement 2,5 % du poids de l'organisme. Les neurones se connectent entre eux par une dense toile de cĂąbles connecteurs (axones et dendrites), pour former une architecÂture hiĂ©rarchisĂ©e et dynamique dont les plus gros points de connexion sont appelĂ©s des hubs 1
, ou plaques tourÂnantes, reprĂ©sentant des endroits straÂtĂ©giques dans la circulation et le traitement de l'information. Les milliards des neurones qui comÂposent les hubs ont la capacitĂ© de travailler en sĂ©rie et en parallĂšle en mĂȘme temps-d'oĂč les modĂšles quanÂtiques du fonctionnement cĂ©rĂ©bral qui embrasent actuellement la toile des rĂ©seaux sociaux avec de nombreux Ă©crits plus ou moins scientifiques. Dans cet immense mĂ©lange se trouvent le Conscient et !'Inconscient qui en fait ne forment qu'UN. La sĂ©paraÂtion - quoique totalement illusoire -est parfois utile Ă faire dans l'Ă©tude de l'inconscient, car la mĂ©thodologie passe par ce qu'il (l'inconscient) veut
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1 Hub: Plateforme, structure logistique oĂč sont acheminĂ©s plusieurs flux d'inforÂmation pour ĂȘtre triĂ©s, remodelĂ©s et rĂ©acheÂminĂ©s. Organisation permettant une Ă©conomie d'Ă©nergie et de temps.
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TRa NSES
L'induction hypnotique change le fonctionnement habituel du Mode par DĂ©faut
temps), ouvrant la voie Ă son pasÂsage vers l'espace conscient. En praÂtique, on a l'habitude que les processus inconscients et conscients perceptuels soient parfaitement sĂ©parĂ©s et indĂ©Âpendants. Cette habitude est la pierre angulaire des thĂ©ories actuelles de la conscience (que proposent Dehaenne, Changeux, Naccache, etc.).
1. Silvia Morar est neurochirurgienne, rĂ©fĂ©rente au Centre de Coordonnation des Maladies Rares. Elle enseigne l'hypnose et hypnoanalgĂ©sie Ă UniversitĂ© ParisÂSud. Elle pratique l'hypnoanalgĂ©sie en neurochirgrgie et dans le traitement des douleurs neuropathiques.
2. Le professeur Denis Ducreux est Chef du Service de Neuroradiologie au CHU BicĂȘtre. Il est le crĂ©ateur du Logiciel BrainAnalyst, cofondateur de la start-up BrainAnalyze, spĂ©cialisĂ© dans les pathologies Tumorales cĂ©rĂ©brales et mĂ©dullaires, les TC, PTSD et DĂ©pression.
3. Le docteur Steven Knafo est neurochirurgien, chef de clinique Ă l'hĂŽpital BicĂȘtre. Il exerce Ă©galement au Centre de rĂ©fĂ©rence des Maladies Rares C-MAVEM.
bien nous donner comme résultat par le biais de la composante consciente. à certains moments, l'activité de ces circuits va dépasser un seuil (espace/
MODE PAR DĂFAUT : PAS DE REPOS POUR NOTRE CERVEAU Longtemps, les neuroscientifiques ont pensĂ© que les circuits cĂ©rĂ©braux Ă©taient inactifs au repos, et les hypnothĂ©rapeutes qu'il Ă©tait dans un Ă©tat modifiĂ© de conscience (la transe hypnotique quotidienne ... ). Mais les Ă©tudes en imagerie ont montrĂ© que l'activitĂ© cĂ©rĂ©brale augmentait au repos de 70 % par rapport Ă une activitĂ© exĂ©cutive, comme la rĂ©alisation d'une tĂąche. Raichle l'a nommĂ© le Mode par DĂ©faut (Default Mode ou Resting State) et ce type de fonctionnement est un processus dynamique d'activitĂ© de certaines rĂ©gions cĂ©rĂ©brales en dehors de toute activitĂ© exĂ©cutive consciente ou inconsciente. Il est liĂ© Ă la pensĂ©e, rĂȘverie diurne, mĂ©moire Ă©pisodique, ou conscience de soi. Les relais majeurs du mode par dĂ©faut sont le cortex prĂ©frontal mĂ©dian (qui gĂšre habituellement les diffĂ©rents aspects de notre Ă©tat Ă©motionnel ainsi que la façon d'imaginer ce que pense autrui) et le cortex pariĂ©tal mĂ©dian (gyrus angulaire, prĂ©cuneus antĂ©rieur gauche, cortex cingulaire postĂ©rieur, rĂ©gion mĂ©diane prĂ©frontale, cortex cingulaire antĂ©rieur, sulcus mĂ©dian frontal, sulcus supĂ©rieur gauche, et cortex orbito· frontal gauche). Pour porter son attention vers le monde, il faut Ă©teindre une partie du soi, donc Ă©teindre le Mode par DĂ©faut. L'activitĂ© du Mode par DĂ©faut est anti·corrĂ©lĂ©e avec l'activitĂ© des structures impliquĂ©es dans les mĂ©canismes attentionnels aux stimuli extĂ©rieurs (conscients et/ou inconscients). Il existe une alternance estimĂ©e Ă trois fois par minute: les structures corticales impliquĂ©es dans les processus attentionnels vont s'activer pĂ©riodiquement, ce qui dĂ©clenche l'inactivation des centres corticaux du Mode par DĂ©faut. Ce processus a comme consĂ©quence la« sortie de la rĂȘverie», la vĂ©rification du monde extĂ©rieur et/ou intĂ©rieur, ou la prĂ©paration de la focalisation sur une tache exĂ©cutive.
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DOSSIER - INCONSCIENT
L'induction hypnotique change le fonctionnement habituel du Mode par Défaut et active les régions attentionnelles préfrontales, habituellement silencieuses en Mode par Défaut (Deeley 2012). Le Mode par Défaut lors de l'hypnose montre une augmentation de la connectivité dans sa partie antérieure et une diminution des connexions postérieures et parahippocampiques probablement liées à une conscience de soi altérée et à l'amnésie post-hypnotique.
Des modelĂ©s divers et variĂ©s ont vu le jour, certains (assez compliquĂ©s) mathĂ©matiques, respectant les lois de physique gĂ©nĂ©rale, newtonienne, d'autres tenant compte du thĂ©orĂšme d'incomplĂ©tude de Godel, d'autres de type quantique. Ces derniers sont proÂbablement les plus proches de la rĂ©alitĂ© comme celui d'Antoine Suarez qui considĂšre que la libertĂ© et la crĂ©ativitĂ© excluent le fonctionnement cĂ©rĂ©bral selon des sĂ©quences causales d'Ă©vĂ©Ânements. Donc le Hasard Quantique est la condition du libre arbitre. Mais comme nous le verrons plus loin, le libre arbitre conscient est seulement celui de refuser.
MĂ©canismes de l'attention in consciente
La notion d'inconscient revĂȘt de trĂšs nombreuses dĂ©finitions, depuis le modĂšle freudien, le modĂšle archĂ©typal de Jung, le modĂšle de Kahnemann et Tversky (Prospect Theory). Du point de vue des neurosciences, l'inconscient est Ă©tudiĂ© et compris seulement par son aspect cognitif, Ă©motionnel, neuroÂprocessuel, pharmacologique et lĂ©gal. Pour beaucoup, l'inconscient reprĂ©Âsente une activation endogĂšne Ă basse frĂ©quence avec haute amplitude des
structures limbiques, subordonnĂ©es aux structures composant le Mode par DĂ©faut (Elman, 2018). Quelques exemples de fonctionnement inconscients: on connaĂźt bien laperÂception subliminale; citons aussi Ch en qui a montrĂ© que les stimuli non conscients de menace peuvent influenÂcer la perception visuelle, ou encore Dijksterhuis et Nordgren qui ont quant Ă eux dĂ©montrĂ© que la pensĂ©e inconsciente est distincte de la pensĂ©e intuitive et notamment qu'elle a un caractĂšre rationnel. Il est ainsi bien connu que les reprĂ©sentations nonÂcognitives, non abstraites (morpholoÂgie et lettres d'un mot) font l'objet d'un traitement au niveau inconscient.
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11 y a un énorme fossé entre ce que nous croyons savoir sur notre fonctionnement, et les résultats retrouvés en laboratoire
Des nombreuses recherches ont utilisĂ© une grande variĂ©tĂ© de paraÂdigmes expĂ©rimentaux pour dĂ©monÂtrer la perception inconsciente. Dans le Masqued-Priming Expriment, par
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exemple, le stimulus est prĂ©sentĂ© de façon trĂšs brĂšve et masquĂ© de façon Ă ĂȘtre totalement indĂ©tectable consciemment. Il est nĂ©anmoins perçu de façon inconsciente car tous les stimulis sont prioritaires et ont un
THE HARD PROBLEM
effet sur les rĂ©ponses comportemenÂtales en aval. Il existe par ailleurs des preuves expĂ©rimentales del' existence de rĂ©ponses inconscientes, une forme de contrĂŽle cognitif inconscient, nous pouvons ainsi comprendre le sens d'un mot en dehors de l'accĂšs Ă la conscience. Mais ces procesÂsus peuvent atteindre des niveaux trĂšs abstraits. Lors de la technique de prĂ©sentation visuelle subliminale (brĂšve prĂ©sentation excluant l'accĂšs Ă la conscience), on dĂ©tecte une actiÂvation de l'amygdale reproductible, liĂ©e Ă la valeur Ă©motionnelle des mots inconsciemment perçus, il s'agit d'un dĂ©codage inconscient de la significaÂtion des mots.
Afin d'essayer de comprendre le fonctionnement de l'inconscient, la voie incontournable est le Conscient. Or, celui-ci est déjà trÚs difficile à cerner. Le « hard problem of conscioussness » déclare qu'il sera toujours impossible à la science d'apporter une explication satisfaisante à la question : Qu'est-ce que la conscience? Comment font les neurones, les neurotransmetteurs, les molécules et l'ensemble de ce« staff» cérébral pour créer l'expérience abstraite de la conscience de soi et du monde? Les vingt-cinq derniÚres années ont vu une explosion de travaux scientifiques dans ce domaine et les nouvelles technologies ont fourni aux neurosciences de nombreux outils pour étudier le fonctionnement cérébral. Une fois expliqués les événements à l'intérieur de nos cerveaux et de nos corps, ce mystÚre a priori insoluble devrait commencer à disparaßtre. C'est du moins ce qui est prévu. Mais de nombreuses questions subsistent et, paradoxalement, ne cessent d'augmenter de façon exponentielle au fur et à mesure que les découvertes neuroscientifiques progressent. On ne comprend toujours pas comment l'expérience subjective relie l'expérience consciente de notre vie et l'émergence de la conscience. C'est une des questions les plus mystérieuses des neurosciences, question que le philosophe David Chalmers a nommée« le problÚme difficile» (the Hard Problem).
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Il y a un Ă©norme fossĂ© entre ce que nous croyons savoir sur notre foncÂtionnement, et les rĂ©sultats retrouvĂ©s en laboratoire. Un point de vue traÂditionnel depuis William James (touÂjours valable aujourd'hui et confirmĂ© par les Ă©tudes) est que la construction de l'expĂ©rience consciente dĂ©pend des mĂ©canismes attentionnels : I 'expĂ©Ârience phĂ©nomĂ©nologique d'un indiÂvidu correspond Ă ses attentes. La rĂ©alitĂ© est «sĂ©lectionnĂ©e, transformĂ©e et adaptĂ©e» aux attentes conscientes et inconscientes de l'individu (Chelazzi, 2018). Dans une revue de la littĂ©rature, Kosh et Tsuchiya (2007) ont montrĂ© que l'attention et la conscience sont deux processus neuronaux distincts. Pour que le processus neuronal de l'atÂtention consciente et/ou inconsciente se focalise vers un but, il est absoluÂment nĂ©cessaire que certaines strucÂtures corticales s'activent et que d'autres se taisent. Les centres impliÂquĂ©s dans l'attention (sulcus pariĂ©tal bilatĂ©ral, prĂ©frontal antĂ©rieur, et latĂ©Âral, insula antĂ©rieur, bilatĂ©ral, gyrus cingulaire dorsal antĂ©rieur dorsal, aires supplĂ©mentaires motrices, gyrus mĂ©dian temporal bilatĂ©ral) constituent deux voies: la voie dorsale, top down, prĂšs du corps («bercer l'enfant») et la voie ventrale, loin du corps, bottom up («échapper au tigre»). La focalisation de l'attention se proÂduit essentiellement en dehors de la conscience. Les processus inconscients sont beaucoup plus rapides que ceux conscients (la rĂ©ponse de l'amygÂdale Ă un stimulus est de 150 milliÂsecondes, la rĂ©ponse consciente est de 750 rnillisecondes). Dans l'hĂ©miÂsphĂšre droit, la rĂ©gion de la jonction
DOSSIER - INCONSCIENT
les processus inconscients sont beaucoup plus rapides que ceux qui sont conscients
temporo-pariĂ©tale, reprĂ©sentĂ©e par la partie ventrale du lobule pariĂ©tal infĂ©Ârieur et par la partie caudale du gyms supĂ©rieur temporal, constitue un hub qui intĂšgre une grande quantitĂ© d'inÂformations sensorielles et sensitives, et a comme pour rĂŽle l'interface avec les centres impliquĂ©s dans les mĂ©caÂnismes attentionnels (la voie dorsale de l'attention). De façon inattendue, il a Ă©tĂ© constatĂ© une activation importante des centres impliquĂ©s dans les mĂ©caÂnismes attentionnels non conscients Ă des Ă©noncĂ©s non-congruents comme «pensez Ă un singe assis dans votre cuisine», le but est de faciliter l'accĂšs de l'information au niveau conscient. MĂȘme si l'attention semble ĂȘtre guidĂ©e par un dĂ©sir conscient, et ĂȘtre consĂ©Âcutive Ă des stimulations Ă©videntes et pertinentes, de nombreuses Ă©tudes montrent le contraire. Les rĂ©sultats mettent en Ă©vidence que ce ne sont ni les facteurs top down, ni bottom up, qui guident l'attention, mais des mĂ©canismes de rĂ©compense, facteurs motivationnels et Ă©motionnels, activaÂtions des parties de la mĂ©moire, facÂteurs contextuels et signaux corporels; ces derniers Ă©tant tous en dehors du champ de la conscience. Dans ces processus inconscients, un rĂŽle important est tenu par l'amygdale ainsi que par des structures appartenant au systĂšme limbique, des structures corticales, comme le cortex prĂ© fronÂtal. Il est dĂ©montrĂ© depuis longtemps
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MĂȘme si ]'attention semb1e ĂȘtre guidĂ©e par un dĂ©sir conscient, et ĂȘtre consĂ©cutive Ă des stimulations Ă©videntes et pertinentes, de nombreuses Ă©tudes montrent Je contraire
se dĂ©barrasser des circuits anciens («autoroutes dĂ©labrĂ©es»), les cellules gliales pratiquent «l'Ă©lagage synapÂtique» durant le sommeil, en reconÂnaissant les connexions peu utilisĂ©es car parquĂ©es par une protĂ©ine (la Clq).
Qui est le capitaine et oĂč est-il ?
que l'attention peut ĂȘtre dirigĂ©e vers un stimulus visuel en l'absence de la perception consciente de ce stimuÂlus. Les processus conscients sont loin d'ĂȘtre une condition sine qua non dans les mĂ©canismes attentionnels. La prise de dĂ©cision (bien sĂ»r touÂjours inconsciente au dĂ©part, malgrĂ© notre certitude de prendre les dĂ©cisions consciemment) est fortement dĂ©penÂdante de l'attention non consciente dirigĂ©e par les circuits limbiques, et notamment ceux de la rĂ©compense. GrĂące Ă la plasticitĂ© cĂ©rĂ©brale, des circuits se forment en permanence et au fur et Ă mesure qu'un circuit est utilisĂ©, il va se renforcer. Au dĂ©part, l'information circule (quel qu'en soit le sens, bottom up ou top down) sur une dĂ©pa1tementale puis, avec le renÂforcement, sur une nationale et enfin sur de vĂ©ritables autoroutes. Pour
Les nombreuses Ă©tudes sur la prise de dĂ©cision consciente et inconsciente ont mis en Ă©vidence et prouvĂ© ce leurre selon lequel la conscience dirige notre vie et notre esprit. Ă la question «qui est le capitaine?», la rĂ©ponse est facile. Il est bien Ă©tabli maintenant que toute dĂ©cision que nous prenons est d'abord totalement inconsciente et nous sommes seulement «informĂ©s» au niveau conscient de la conclusion finale (choix parmi un grand nombre). L'activitĂ© cĂ©rĂ©brale d'un humain prĂ©ÂcĂšde la prise de dĂ©cision consciente, comme si notre inconscient ne faisait que nous informer de ce que nous dĂ©cidons de vouloir. En bref, nous ne choisissons pas consciemment nos pensĂ©es ou nos sentiments, nous en prenons conscience et nous avons l 'ilÂlusion de dĂ©cider ... Le capitaine est donc notre inconscient. Paradoxalement, Ă la question« oĂč est le capitaine?», la rĂ©ponse est plus compliquĂ©e. D'une part Ă cause des suppositions que certaines thĂ©ories soulĂšvent (Jung, Varela ... ), et d'autre part Ă cause de l'intrication fonctionÂnelle au niveau neuronal.
Au ëlépart, ]'information circule sur une départementale puis, avec 1e renforcement, sur une nationale et enfin sur de véritables autoroutes
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La perception inconsciente dĂ©crit une situation oĂč la prise de dĂ©cision et le comportement d'un sujet sont influenÂcĂ©s par un stimulus qui n'accĂšde pas
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Ă la conscience. Depuis plus de trente ans, des techniques de neuro-imagerie et de stimulation cĂ©rĂ©brale ont montrĂ© qu'on peut dĂ©terminer quel choix dĂ©ciÂsionnel une personne va faire avant qu'elle ait pris la dĂ©cision consciente; le choix est donc prĂ©dĂ©terminĂ© au niveau inconscient. Les potentiels d'activation appaÂraissent minimum 350 ms avant la prise dĂ©cision consciente; Soon (2008) a utilisĂ© l'IRM fonctionnel pour prĂ©Âvoir si un bouton sera appuyĂ© par les sujets avec l'index gauche ou l'index droit. Les rĂ©sultats ont montrĂ© que la dĂ©cision inconsciente de choix (droit ou gauche) peut ĂȘtre prise jusqu'Ă 10 secondes avant que le sujet ait conscience de sa dĂ©cision. Les stimulations subliminales n'inÂfluencent pas seulement les rĂ©ponses motrices mais aussi les mĂ©canismes de contrĂŽle cognitif (Rahnev, 2012), les processus volontaires exĂ©cutifs, et les rĂ©ponses dans la demande de faire des libres choix (Parkinson, 2014). Cependant, les philosophes ont bien rĂ©sistĂ© Ă ces rĂ©sultats qui mettent en question le libre choix et favorisent un certain degrĂ© de dĂ©terminisme. Par exemple, Angela Sirigu montre que le potentiel de prĂ©paration du mouÂvement survient avant que la personne prenne la dĂ©cision consciente de rĂ©aliÂser le mouvement. Le cerveau prĂ©fĂšre anticiper que rĂ©agir Ă une situation. La partie consciente a seulement le choix de refuser et ce choix a seuleÂment 200 millisecondes environ pour se manifester. Le chercheur amĂ©riÂcain Libet a dĂ©montrĂ© que la dĂ©ciÂsion consciente Ă©tait initiĂ©e par des processus inconscients et une vague
DOSSIER - NCONSCIENT
Nous ne choisissons pas consciemment nos pensées ou nos sentiments, nous en prenons conscience et nous avons l'i11usion de décider
d'activitĂ© corticale dĂ©nommĂ©e le potentiel de prĂ©paration (Readiness Potential) peut ĂȘtre mis en Ă©vidence avant la prise de dĂ©cision consciente. De quelle façon des processus inconscients peuvent savoir Ă l'avance quelle dĂ©cision une personne va prendre, Ă un moment dans le temps oĂč ils n'en sont pas sĂ»rs eux-mĂȘmes ... ? Cette observation retrouvĂ©e dans de nombreuses Ă©tudes neuroscientifiques a Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©e comme une preuve du dĂ©terminisme Ă©liminant le «libre choix», lequel ne serait alors qu'une illusion. Nos dĂ©cisions sont donc en rĂ©alitĂ© prĂ©dĂ©terminĂ©es par des procesÂsus inconscients, elles ne rĂ©sultent pas du «moi» conscient. Pour autant, le libre arbitre reste bien prĂ©servĂ©. Ainsi, Blankertz et Schultze-Kraft ont testĂ© les mĂ©canismes impliquĂ©s dans la prise de la dĂ©cision en se focalisant sur le dĂ©sir et le dĂ©terminisme Ă l 'Ćuvre dans ce processus. Ils montrent que nous ne sommes pas soumis Ă la
La partie consciente a seulement le choix de refuser et ce choix a seulement 200 mi11isecondes environ pour se manifester
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décision inconsciente; nous pouvons «poser un veto» car Je conscient peut intervenir et interrompre le processus, en tout cas jusqu'à un certain seuil de temps.
Nous ne sommes pas soumis à la décision inconsciente; nous pouvons «poser un veto»
S'il s'agit d'actions ou d'opĂ©raÂtions cognitives connues, la dĂ©cision inconsciente est rapide: elle semble apparaĂźtre sur la base d'intentions dĂ©jĂ existantes et de buts pour lesquels
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il existe dĂ©jĂ un plan d'action. En revanche, s'il s'agit d'une dĂ©cision importante ou difficile, elle est souÂvent considĂ©rĂ©e comme le rĂ©sulÂtat d'un processus conscient issu d'une rĂ©flexion. Ainsi, les processus conscients semblent ĂȘtre nĂ©cessaires uniquement pour mettre au point une tĂąche et parvenir Ă une dĂ©cision finale. Toutefois, de nombreuses Ă©tudes tendent Ă prouver le contraire et cerÂtaines dĂ©cisions complexes prises de façon inconsciente ont un rĂ©sultat de qualitĂ© supĂ©rieure Ă la prise de dĂ©cision consciente. La thĂ©orie de la pensĂ©e inconsciente [Unconscious Thought Theory- UTT (Dijksterhu is et Nordgren, 2006)] propose deux types de prise de dĂ©cision. Une consciente et une inconsciente. La prise en charge par hypnose peut trouver dans ce type de fonctionnement des portes d'accĂšs Ă rĂ©soudre certaines «rĂ©sistances» et Ă©tablir lors de la transe la dĂ©ciÂsion (comme par exemple arrĂȘter de fumer). Nous savons maintenant que la dĂ©cision inconsciente va s'imposer au conscient. Ce travail peut ĂȘtre renforcĂ©, lors de l'entretien prĂ© et post sĂ©ance, par ce qu'on appelle dans la UTT la dĂ©cision consciente, en appliquant des techniques de thĂ©rapie cognitivocomÂportementale.
Notre cerveau hallucine la réalite et prévoit le futur
L'univers physique de notre cerveau n'est pas un ensemble d'objets, mais un rĂ©seau complexe d'interactions en perpĂ©tuel mouvement (Dennett, 1984, 1991). Sa tĂąche principale consiste Ă
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guider le corps, qu'il contrĂŽle Ă traÂvers un monde aux conditions chanÂgeantes et aux surprises soudaines, en sorte qu'il doit rĂ©colter l'information en provenance du monde extĂ©rieur et intĂ©rieur et l'utiliser rapidement pour anticiper et «produire le futur» afin d'ĂȘtre toujours« en dehors du krach». MĂȘme si notre cerveau n'utilise pas la totalitĂ© de l'information disponible (une importante quantitĂ© d'informaÂtion du monde extĂ©rieur est Ă©liminĂ©e), il garde et utilise la quantitĂ© stricteÂment nĂ©cessaire pour prendre la dĂ©ciÂsion la plus adaptĂ©e. Ce que l'humain pense et ressent est le rĂ©sultat d'un nombre infini de sĂ©quences physiques et physiologiques du fonctionnement cĂ©rĂ©bral au cours desquelles, hormis l'Ă©limination d'une grande quantitĂ© d'information, celle qui retenue est aussi retravaillĂ©e et modifiĂ©e. Par exemple, au sein de l'aire corticale principale pour la vision, seulement 10 % du cortex est dĂ©diĂ© Ă recevoir l'information tandis que 90 % le sont «aux rĂ©arrangements» de la rĂ©alitĂ© extĂ©rieure. De plus, des 10 milliards de bits d'information reçus par la rĂ©tine, seulement 10 000 arrivent au co11ex visuel (aire principale), le reste est Ă©liminĂ© en cours de route. De ces 10 000 bits, seuls 100 passent le seuil de la conscience. Nous regarÂdons donc une minuscule fraction de la rĂ©alitĂ©, laquelle est, de plus, modiÂfiĂ©e et retravaillĂ©e par nos structures inconscientes. Le premier pas dans la hiĂ©rarchie cognitive est la traduction des inforÂmations en signaux, laquelle est suivie par de nombreuses interactions ayant comme rĂ©sultat des signaux bottom up
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Nous regardons une minuscule fraction de la réalité, laquelle est, de plus, modifiée et retravaillée par nos structures inconscientes
(venant de la rĂ©alitĂ© externe et du corps) et top down (partant du niveau cĂ©rĂ©bral). Les signaux top down sont de type prĂ©dictif (sur la base des apprentissages anciens ou des attentes). En permanence a lieu au niveau neuronal une comparaison entre rĂ©sultat prĂ©dit et le rĂ©sultat perçu, ayant comme conclusion soit un rĂ©sulÂtat attendu, soit un rĂ©sultat inattendu. En cas de rĂ©sultat inattendu, se produit soit un changement de rĂ©ponse, soit un changement de la rĂ©alitĂ©. Ces prĂ©Âdictions dĂ©pendent essentiellement de signaux sensoriels venant du plus profond de notre corps. L'idĂ©e imporÂtante du cerveau, en tant qu'engin de prĂ©diction, signifie que la perception -dĂ©chiffrer ce qui est lĂ - relĂšve d'un processus de conjecture Ă©clairĂ©e oĂč se combinent ces signaux sensoriels avec nos attentes ou croyances antĂ©Ârieures. L'objectif est de former la meilleure hypothĂšse sur la cause de ces signaux, et d'en dĂ©duire la meilÂleure dĂ©cision. La «perception» est de fait un choix parmi ces nombreuses hypothĂšses. Au niveau cellulaire dĂ©jĂ , chaque neurone qui reçoit des inforÂmations va «prĂ©voir>> plusieurs conclusions alternatives et dĂ©cisions potentielles. On remarque de minusÂcules changements de tension sur leur surface pendant ce travail de choix Ă
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TRa NSES
propos de ce qui est le plus pertinent/ adaptĂ©. Ces changements s'accuÂmulent jusqu'Ă ce que la cellule proÂduise une grande dĂ©charge Ă©lectrique: cette impulsion signifie que la dĂ©cision finale a Ă©tĂ© prise. La perception ne dĂ©pend pas que de signaux extĂ©rieurs entrant dans le cerveau; elle dĂ©pend tout autant, si ce n'est plus, de prĂ©Âdictions perceptives circulant dans le sens opposĂ©. Par consĂ©quent, le monde n'est pas perçu de façon passive, mais il est fabriquĂ© activement: l' expĂ©Ârience du monde vient autant, si ce n'est plus, de l'intĂ©rieur que de l'exÂtĂ©rieur.
t::e monde n'est pas perçu de façon passive, mais il est fabriqué activement
Un exemple est cette quĂȘte permaÂnente consistant Ă deviner au mieux ce qui fait ou ne fait pas partie de son corps. Une expĂ©rience bien connue en neurosciences illustre ce propos : la main en caoutchouc. Les prĂ©dicÂtions que notre cerveau utilise pour contrĂŽler et rĂ©guler constituent notre vie. Finalement, nos expĂ©riences de nous-mĂȘmes et du monde autour sont des sortes d'hallucinations contrĂŽlĂ©es et formĂ©es par des millions d'annĂ©es d'Ă©volution, dont la finalitĂ© est de nous maintenir en vie dans un monde plein de dangers et d'opportunitĂ©s. Pour cela, notre cerveau inconscient anticipe en permanence notre exisÂtence. Ce concept est Ă©galement dĂ©montrĂ© par une des thĂ©ories uniÂficatrices de la conscience qu'est le
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codage prĂ©dictif (Predictive coding, PC). Cette thĂ©orie est basĂ©e sur l'idĂ©e, ancienne (Von Helmholtz 1866/1925, Dayan 1995) que le cerveau est essenÂtiellement une machine prĂ©dictive ayant pour objectif de minimiser le risque d'erreur. Le PC stipule que la perception n'est pas directement reliĂ©e Ă l'environnement extĂ©rieur par la rĂ©ception des informations, voie bottom up, mais qu'elle est recrĂ©Ă©e de façon endogĂšne par des prĂ©dictions top down, transformant les signaux reçus en fonction de la connaissance dĂ©jĂ accumulĂ©e. Dans le PC, la conscience perceptuelle est la «conclusion», le «rĂ©sultat» des constructions inconscientes. Comme cela ne suffit pas Ă perturber nos croyances, des travaux ont Ă©gaÂlement montrĂ© que notre conscience est imparfaite quand elle nous informe sur le fonctionnement du temps. Dans les modĂšles couramment acceptĂ©s, les phĂ©nomĂšnes physiques passant le seuil de la conscience se produisent dans un temps physique linaire et absolu. Or, depuis des annĂ©es, les physiciens et les neuroscientifiques (du moins cerÂtains!) savent que l'ordre absolu des Ă©vĂ©nements est une illusion. Pourtant, le modĂšle persiste car il est plus simple Ă accepter. On peut dire que, pour l'inÂconscient (et donc pour nous), le temps linĂ©aire n'existe pas, ou plutĂŽt que le futur et le passĂ© sont en (le) mĂȘme temps. Les travaux de plusieurs cherÂcheurs se sont penchĂ©s sur cet aspect: le cerveau voit-il le futur? La rĂ©ponse est: oui. Seul le dĂ©lai varie entre les diverses Ă©tudes : il va de 15 secondes Ă 2 minutes (Li et al., 2014). Plusieurs chercheurs ont rapportĂ© des rĂ©sultats
![Page 11: Un ou plusieurs inconscients dans nos neurones?](https://reader036.fdocuments.fr/reader036/viewer/2022062513/62b23968b8d14653cc759d4c/html5/thumbnails/11.jpg)
L'oré:ire abso1u des événements est une i11usion
d'expĂ©riences testant l'idĂ©e que les mesures physiologiques semblent ĂȘtre capables de prĂ©dire la valence Ă©moÂtionnelle et/ou ! 'intensitĂ© des Ă©vĂ©neÂments 2-15 secondes dans le soi-disant «futur» (Mossbridge 2012, 2014). Ces travaux analysent l' ActivitĂ© Anticipatoire PrĂ©dictive cĂ©rĂ©brale (Predictive Anticipatory Activity), notamment par mesure des constantes physiologiques. Par exemple, une Ă©tude de Tressoldi (2015) montre que l'occurrence de la dilatation pupilÂlaire qui se produit avant le son d'une arme Ă feu dĂ©passe de 10 % le niveau du hasard. L'interprĂ©tation de cette apparente violation de la symĂ©trie du temps est toujours soumise Ă des
Bibliographie
DOSSIER - ~CONSCIENT
controverses. Mais les résultats sont là , qu'on les aime ou pas!
Conclusion
En conclusion, on peut affirmer que: l. Parmi les Ă©vĂ©nements se produiÂsant dans le monde physique, cerÂtains sont en dehors de la conscience. Le traitement non-conscient semble accĂ©der Ă l'information portant sur davantage d'Ă©vĂ©nements que le traiteÂment conscient: l'inconscient a donc un meilleur accĂšs Ă la rĂ©alitĂ© physique. 2. Notre conscience dispose d'informaÂtions sur les Ă©vĂ©nements de façon Ă crĂ©er l'apparence d'un «passé» dont nous nous souvenons vaguement et d'un «futur» dont nous ne nous souvenons pas du tout. La version des Ă©vĂ©nements se produisant au fil du temps dans notre «conscience consciente» de veille n'est pas nĂ©cessairement une reprĂ©sentation exacte du monde physique.
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