Un mal-être démocratique -...

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JANVIER-FÉVRIER 2016 MAGAZINE DES ADHÉRENTS DE L’UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS N° 238 P. 7 Sortir du travail informel ACTUALITÉS P. 13 Menaces sur les CCAS VIE SYNDICALE P. 25 Les complémentaires santé BIEN VIVRE Un mal-être démocratique

Transcript of Un mal-être démocratique -...

JANVIER-FÉVRIER 2016

MAGAZINE DES ADHÉRENTS DE L’UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

N° 238

P. 7 Sortirdutravailinformel

ACTUALITÉS

P. 13 MenacessurlesCCAS

VIE SYNDICALE

P. 25 Lescomplémentairessanté

BIEN VIVRE

Un mal-êtredémocratique

C’EST MON AVIS [ Par Guy Gouyet

Il y a des moments où tout semble basculer. Il y aura désormais un avant et un après le 13 novembre. Un carnage a bouleversé nos concitoyens et brisé trop de vies. Tout ce qui nous paraissait important devient brusquement dérisoire et futile. Mais les bonnes volontés se manifestent aussi. Et les marques de solidarité se multiplient. Des femmes et des hommes ont soigné, abrité, protégé, réconforté et sauvé des vies au risque parfois d’y laisser la leur. Ces marques de solidarité se sont ensuite propagées, venues du monde entier.Tous ont voulu nous transmettre un message : derrière la France c’est tout un symbole qui a été

visé, le symbole des droits de l’homme et d’un mode de vie que beaucoup nous envient. On mesure alors ce qui fait la force et les ressorts d’un pays. La France que l’on dit en déclin, atteinte d’un individualisme forcené, cette France-là a montré qu’elle n’acceptera pas de courber l’échine et de laisser porter atteinte à ce à quoi elle a donné naissance et à ce à quoi elle entend rester fidèle.Nous ne sommes ni des héros ni des donneurs de leçons. Nous avons tous un peu peur - ce dont nous n’avons pas à rougir - mais nous ne voulons pas subir sa domination. Nous voulons et combattrons pour que nos enfants et petits-enfants puissent aussi vivre libres et en paix.

Vivre

C’est votre avis

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Aide refusée[ Gérard G., 37 Beaumont-en-VéronDernièrement j’ai fait une demande d’aide à la complémentaire santé auprès de la MSA d’Indre-et-Loire pour mes beaux-parents, anciens agriculteurs retraités, tous les deux, âgés de 88 et 84 ans. Leurs deux retraites cumulées atteignent à peine 1 600 €. Cependant les ressources prises en compte pour l’obtention de cette aide ne sont pas seulement les pensions, mais également les placements éventuels. L’aide a été refusée. Mes beaux-parents, à leur retraite, ont constitué un petit pécule en vendant terres et cheptel. Ils ont économisé tout en satisfaisant leurs besoins essentiels. S’ils avaient tout dépensé ils seraient alors dans les conditions d’attribution.

Faire sens[ Guy, militant SSR FEP

Loire-AtlantiqueÀ entendre les tenants du libéralisme, les profits ne sont pas au rendez-vous. Pourtant le PIB français est au 8e rang international. La productivité française dépasse largement celle de la zone euro… Et en mars 2015, la Bourse de Paris a franchi la barre symbolique des 5 000 points (son plus haut niveau depuis mai 2008)… Quand certains crèvent de faim ou frappent à la porte des pays nantis, cela n’empêche nullement les croisés de l’actionnariat d’occuper les ondes en permanence pour semer cette lèpre conservatrice qui détricote les accords passés obtenus par les négociations collectives et les luttes syndicales. Le collectif humain circonscrit à un site assurerait cette seule représentativité comme si l’entreprise n’était pas implantée ou liée à un milieu plus vaste, une culture, une histoire. Quand l’espoir des gens disparaît, il ne reste que l’affrontement et les idées simplistes pour se raccrocher.

Le club[ Daniel M., InternetBravo au Fil Bleu et à ses rédacteurs… Notre journal est très bien fait, et je voudrais féliciter trois camarades dont l’amitié m’est chère… C’est le « club » des Jean-Pierre : Bobichon, Delhoménie, Moussy ! Il ne faudrait pas pour autant qu’ils envahissent trop la rédaction…

Et les DOM-TOM ?[ Michel T., 86 Saint-GermainJe suis veuf après une union de 43 ans avec mon épouse native de la Réunion. J’y suis revenu en juillet dernier. Inutile de vous dire que les retrouvailles ont été émouvantes. La situation des retraités du privé n’est pas très reluisante dans ce coin de France. La vie est très chère. Et les salaires sont plus bas qu’ici. Je serais heureux de lire de temps en temps sur Fil Bleu un article concernant la vie dans les DOM-TOM.

NE PERDONS PAS LE FIL

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Pour nous écrire : CFDT Retraités/Fil Bleu, 49, av. Simon Bolivar, 75 950 PARIS Cedex 19 - [email protected]

Pendentif sécuritaire[ Jacques M., 42 Saint-étienneJe ne partage pas la position de Danièle Rived pour son article « Les objets connectés ». Je ne crois pas que beaucoup de conseils généraux distribuent « généreusement » des pendentifs d’alarme. Pour moi qui suis un « aidant » pour mon épouse diabétique qui parfois chute et ne se relève pas, cette alarme est devenue un vrai soulagement lorsque je pars plusieurs jours en déplacement. C’est une sécurité pour elle et une tranquillité pour moi.

Région modèle ?[ Paquito S., InternetQuand arrêterons-nous d’être obnubilés par le « big is beautiful » ? Dans l’article sur les Régionales, l’argument selon lequel les 22 régions françaises ne pouvaient pas rivaliser avec les 16 régions allemandes est repris. Il était donc nécessaire de les réduire à 13 pour les faire grossir… Or si rivalité il doit y avoir entre les régions françaises et allemandes, c’est par les moyens dévolus aux régions : le budget des régions françaises s’élève à 28,7 milliards d’euros en 2013, contre 329,9 milliards d’euros pour les régions allemandes. Une seule question devrait alors se poser : en quoi telle ou telle structure administrative permet-elle réellement à chaque citoyen d’être un sujet de sa propre vie ? À cette aune-là, le redécoupage actuel ne semble pas pertinent tant par la distance géographique qu’il introduit trop souvent entre « administrés » et lieux de pouvoir, que par la confiscation du pouvoir réel par des organismes et des collectivités non soumis aux votes des citoyens.

Notre réponse : Notre millefeuille administratif français fait la course largement en tête en Europe. La région paraît être l’échelon pertinent en matière de développement économique et d’aménagement du territoire. Pour le social au sens large du terme, une solution plus proche du citoyen s’impose à condition de ne pas multiplier comme actuellement des structures où tout le monde pouvait tout faire sans en avoir les moyens. Il faut inventer une nouvelle structuration administrative de notre pays conjuguant efficacité économique, proximité sociale et sociétale, le tout dans un système de démocratie représentative. Vaste programme ! [ Jean-Pierre Delhoménie

Censure ?[ Daniel P., InternetJe viens de lire votre dossier. Il est malheureusement comme tous les autres : le réchauffement y est présenté comme quelque chose de certain, d’inéluctable. Pas un mot sur les scientifiques qui ont des doutes. Les « climato-sceptiques » sont carrément censurés et n’ont pas droit à la parole. Vous trouvez ça normal ? Qui dit que la part des activités humaines n’est pas (volontairement ou non) exagérée ? Luttons bien sûr contre la pollution. C’est une évidence. Mais laissons aussi la parole à tout le monde, et pas seulement à la COP21, qui est trop devenue une affaire d’États.

Notre réponse : Fil Bleu entend donner la parole à tout le monde. La preuve ! Pour avoir été sur place, je suis particulièrement sensible aux réfugiés climatiques que sont les Bangladeshis. Depuis des décennies, ils sont cernés. Entre les cyclones, les barrages tantôt fermés et les vannes tantôt ouvertes côtés indien et Himalaya, avec les deltas du Gange, du Brahmapoutre, de la Megna, et la montée des eaux de l’océan, ils sont cernés de partout. Leur territoire ? Un pays qui, d’île en île, est déjà condamné. [ Daniel Druesne

100 %[ Joseph M., 60 CompiègneParmi les publications syndicales qui me parviennent, Fil Bleu est ma préférée. Elle est brève, traite de l’essentiel, de façon explicite et variée. L’article « C’est mon avis » signé Geo Goubier du dernier numéro m’a réjoui. Son coup de gueule doit lui faire du bien. 100 % d’accord avec lui.

SE DÉTENDREBIEN VIVRE RENCONTRERVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

SOMMAIRE n N0 238 n Janvier-Février 2016

VIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

16P.

P. 12 Laloid’adaptationdelasociétéauvieillissementsurlesrails

P. 13 Droitopposableauxpensionsderéversion:c’estgagné

P. 14 Initiatives

P. 15 Àlaretraite,comptezsurlaCFDT

BIEN VIVREVIE SYNDICALE LE DOSSIER

P. 6 Agircontrelemallogement

P. 6 Brèves

P. 7 L’économiesouterrainesortdel’ombre

P. 8 Éthiquesurl’étiquette

P. 9 LesmusulmansdeFrance,cesinconnus

P. 10 Leclimatentreenscène

P. 11 Réfugiés:necédonspasauxamalgames

P.20 Militantsdelaliberté

P.21 QuestionsàLaurentBerger:Ilfautinvestirdansledialoguesocial

4 l FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016

Suivez l’actualité sur le blog de Laurent Berger sur www.cfdt.fr

P. 11Migrants, réfugiés, déplacés... Ne cédons pas à tous les amalgames.

Cop21, sexisme, la montée de la haine… « Je souhaite y partager mes observations et ma façon de voir l’avenir, confirme le secrétaire général de la CFDT. Ces réflexions se nourrissent de l’analyse de la CFDT, de ses propositions. Mais aussi des discussions avec les adhérents et militants de la CFDT, ainsi que les salariés et agents que je rencontre chaque semaine. Bienvenue ! »

P. 15Parole d’expert à Hervé Wiart :

« A la retraite, la CFDT vous accompagne.»

UN MAL-ÊTRE DÉMOCRATIQUE

P. 7Un nouvel accord international pour lutter contre l’économie informelle.

SUR LE WEB

Directrice de la publication : Dominique FabreRédacteur en chef : Daniel DruesneRédacteur en chef adjoint : Jean-Pierre DruelleMise en page : Eric ToutousRelecture-correction : Sidonie Bazin

Magazine des adhérents de l’Union confédérale CFDT des retraités

49, av. Simon Bolivar, 75950 PARIS Cedex 19 [email protected] - www.cfdt-retraites.frTél. 01 56 41 55 20 - Fax 01 56 41 55 21

FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 5

Éditorial

P. 27 Perdresonparentsansperdresonengagement

P. 28 Desinnovationsàgénéraliser

P. 30 LesprixNobel

P. 31 Desauteurs

ENSEMBLE

P. 22 Vosquestions,nosréponses

P. 23 Complémentairessanté:généralisationpourlessalariés

P. 24 Tableaudebord2015

P.26 L’interminabledébatsurlafindevie

BIEN VIVRE ENSEMBLE

En2016,

BV/CdC/2108260

P. 28Prendre soin avec respect

des personnes âgées : l’enjeu du label «Humanitude».

De nombreux événements ont bouleversé notre pays. Dès le début 2015, nous avons basculé dans l’horreur du terrorisme et pris conscience qu’une haine aveugle et meurtrière nous prenait en otages.Nous avons vu des milliers de migrants, hommes, femmes et enfants, mettre le pied sur le sol européen dans des conditions inacceptables. Ces événements ont engendré une montée des partis extrémistes distillant un sentiment d’intolérance et de refus de l’autre.

Après une année 2015 dramatique et chaotique, 2016 est là. Il nous appartient de rendre cette nouvelle année solidaire, tolérante et humaine.Quels rendez-vous nous attendent au fil de ces douze prochains mois ? De grands chantiers syndicaux en perspective, quoi qu’il en soit.Un projet de loi, tant attendu, et auquel nous avons tant contribué, voit enfin le jour pour un meilleur

accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie. Nous en suivrons les conditions d’application.2016 est aussi le 70e anniversaire de la CFDT Retraités. Une vieille dame qui au fil des années a su se faire reconnaître et respecter. À nous de conforter son dynamisme pour les dix prochaines années.L’audit engagé sur le fonctionnement de l’UCR et de ses structures est un gage de notre jeunesse et de notre souhait de représenter au mieux les retraités et les personnes âgées. C’est notre engagement syndical, militant.Enfin, il nous faut tirer toutes les conséquences de la Cop21 et des récentes élections régionales. Et reconstruire, à notre niveau, un monde, une Europe, une société. Là comme ailleurs, et selon un vieil adage de la CFDT, « nous vivrons ce que nous changerons ».Le nouvel an est le moment où nous présentons nos vœux à nos proches, nos amis, nos collègues. C’est pour moi l’occasion de vous remercier de votre investissement et de vous souhaiter au nom de l’UCR une bonne année à chacun et chacune d’entre vous.

[ Par Dominique Fabre, Secrétairegénérale

CPPAP 0520 S 05510 ISSN 1952-790XImpression : ETC, BP198 76196, YVETOT Cedex

Imprimé sur du papier issu de forêts gérées durablement.

ABONNEMENT : 20 e, le numéro : 5 e

Pages sPéciales 3c communication jetées Pour les abonnés adhérents de cette uFr.

nousvivronscequenouschangerons

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BIEN VIVRE ENSEMBLEVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

 Pour relever ce défi social et sociétal, la Fondation Abbé Pierre et AG2R La Mondiale ont créé en 2014 Solifap (Fondation Abbé Pierre Investissements Soli-daires), une structure unique en France d’investissement pour accompagner les associations dans le développement de leur projet social afin de lutter contre le mal-logement. Ce partenariat, fruit d’un long processus de coconstruction entre ces

deux acteurs majeurs sur le champ de l’habitat social en France, permet d’apporter de nouvelles solutions pour dévelop-per la production de loge-ments très sociaux, et ce via 2 leviers : assu-rer un soutien financier aux associations por-teuses de projets (apport en quasi-fonds propres et en garantie) et amélio-rer l’efficacité du modèle associatif par l’accompa-

gnement à la conduite du projet stratégique. L’objectif à horizon 2020 est ambi-tieux : 250 associations soutenues qui œuvrent à l’amélioration des conditions de vie de plus de 100 000 personnes.L’engagement social fait partie des gènes d’AG2R La Mondiale. 1er groupe de protection sociale en France, aux côtés des publics fragilisés depuis sa création, il consacre plus de 100 millions d’euros par an aussi bien en aides individuelles pour faire face aux aléas de la vie qu’en soutien à de grands projets collectifs ou associatifs. En 2015, ce groupe a fait de l’habitat un axe prioritaire de sa stratégie d’engagement social. « Chacun a droit à un lieu de vie digne et adapté à ses besoins, explique Nicolas Garier, membre du comité exécutif d’AG2R La Mondiale. C’est un pilier fondamental pour réussir à construire un projet de vie. S’engager sur le long terme dans ce partenariat a été une évidence tant il est innovant et porteur de solutions concrètes sur tous les territoires. »

[ Daniel Druesne

AGIRCONTRELEMALLOGEMENT

f Brèves• Inégalités. Selon une étude du cabinet Oxfam, les 80 personnes les plus riches de la planète détiendront en 2016, à elles seules, autant que les 3,5 milliards d’individus réunis. La part du patrimoine mondial détenu par les 1 % les plus riches est passée de 44 % en 2009 à 48 % en 2014 et dépassera les 50 % en 2016.

• Religion. La liberté religieuse ne cesse de se détériorer. Parmi 196 pays analysés, 81 ont vu cette liberté décliner. Le plus souvent du fait de persécutions liées à l’extrémisme islamiste ou à des régimes totalitaires. Vingt autres pays sont dans la catégorie « haute intolérance » dont la Syrie, l’Irak, la Chine, le Pakistan, l’Arabie saoudite. Dans les six pays où quelques améliorations ont été relevées, quatre (Iran, Émirats arabes unis, Qatar, Cuba) restent classés comme des lieux de « haute » ou « moyenne » persécution.

• Pots-de-vin. Selon l’OCDE, la corruption internationale concerne en premier lieu les pays industrialisés. Les pots-de-vin représentent en moyenne 13,8 millions de dollars, soit 10,9 % de la valeur totale de la transaction concernée.

• Environnement. L’Équateur, petit pays d’Amérique latine, vient d�entrer au livre des records après avoir planté en une seule journée près de 650 000 arbres. Plus de 44 000 personnes ont participé à cette opération. Le gouvernement espère à terme reconstituer 500 000 hectares de forêt.

• Marcher ou méditer. En 1994, ils étaient 16 000 à avoir fait leur « Compostal », dont 75 Américains. En 2014, ce fut le cas pour 238 000 pèlerins et, parmi eux, on comptait 116 000 Américains. Les Coréens du Sud, eux, sont passés en dix ans de 18 à 3 840. Pour certains, il s’agit d’une randonnée hors du commun, pour d’autres, l’occasion de vivre une expérience puissante qui décape corps et âme.

[ Guy Gouyet

« Peut-être le jour approche où il sera possible de lancer quelque énorme emprunt sacré auquel il ne pourrait pas être touché pour autre chose que pour le logement… un emprunt fraternel pour le logement ! » (Abbé Pierre). Selon le rapport 2015 de la Fondation Abbé Pierre, près de 3,5 millions de personnes sont aujourd’hui toujours mal-logées en France. Parmi elles, 610 000 ne disposent pas d’un domicile personnel. Et 85 000 vivent dans une habitation de fortune toute l’année.

EN SAVOIR PLUS :• http://www.fondation-abbe-pierre.fr• www.youtube.com/

watch?v=cldZcdBJ4gw• www.fondation-abbe-pierre.fr/solifap• www.ag2rlamondiale.fr

La remise des clefs, plus qu’un symbole !

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ACTUALITÉS

FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 7

L’économiesouterrainesortdel’ombre

 Les caractéristiques du travail informel sont bien connues : pas de droits au travail, peu d’emplois de qualité, peu ou pas de protection sociale, pas de dialogue social. Plus de la moitié de la main-d’œuvre mon-diale serait concernée. L’ensemble de ces éléments ne permet pas le développement d’une économie durable reposant sur des entreprises viables.L’écrasante majorité des travailleurs n’entre pas dans l’économie informelle par choix, mais parce qu’ils ne trouvent pas d’autres opportunités d’emploi dans l’économie for-melle alors qu’ils ont besoin de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. La proportion des femmes y est plus élevée que celle des hommes (économie rurale par exemple). Les jeunes, les minorités, les migrants, les personnes handicapées sont également surreprésentés dans la plupart des pays.

Un long travail de réflexionL’originalité de cette nouvelle norme est de proposer un ensemble de mesures pratiques en vue de faciliter la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle. Fruit d’un long travail de réflexion entre les trois piliers de l’OIT : les gouver-nements, les employeurs et les travailleurs, la recommandation se veut un instrument efficace reposant sur des pratiques natio-nales ayant fait leur preuve. Elle propose des objectifs et des stratégies permettant de mettre en œuvre des politiques facili-tant cette transition (1).La recommandation incite les États membres à faire en lien avec les parte-naires sociaux, « une évaluation et un diagnostic des facteurs, des caractéris-

tiques, des causes et des circonstances de l’informalité, pour aider à concevoir et mettre en œuvre une législation, des poli-tiques et d’autres mesures visant à faciliter la transition vers l’économie formelle ».Ces politiques, qui ne doivent en aucune mesure réduire les protections sociales découlant d’autres instruments internatio-naux dont peuvent par exemple bénéficier les travailleurs de l’économie informelle, devront faire l’objet d’examens pério-

Tous les ans en juin, les 186 États membres de l’OIT en délégation tripartite : deux représentants gouvernementaux, un employeur et un travailleur par pays siègent en Conférence internationale du Travail. Lors de celle-ci, ils adoptent parfois des instruments internationaux, à savoir des conventions et des recommandations.Les conventions sont des traités internationaux qui ont force contraignante pour les États les ayant ratifiées. Ils doivent alors obligatoirement les transcrire dans leur législation nationale, et un processus régulier de rapports en vérifie l’application. Les recommandations, comme leur nom l’indiquent, ne sont que des directives incitatives, mais non obligatoires. Depuis sa création en 1919, l’OIT a adopté 189 conventions dont 126 sont encore en vigueur.

Conventions et recommandations

diques et d’adaptations toujours dans un cadre tripartite. Cet instrument très détaillé représente une avancée importante pour essayer de réduire cette partie de l’écono-mie qui recule parfois, mais gagne aussi du terrain dans les pays développés. Il reste à le faire vivre maintenant au niveau des États, ce qui n’est pas gagné d’avance. L’existence de ce texte, qui était impen-sable il y a encore quelques décennies, indique que la question est maintenant au cœur de l’agenda du monde du travail.

[ Jean-Pierre Delhoménie(1) www.ilo.org

La Conférence internationale de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a adopté en juin dernier à Genève une recommandation intitulée : « Recommandation n° 204 sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle ». C’est le premier instrument international destiné à lutter contre ce fléau.

L’écrasante majorité des travailleurs, surtout des femmes, n’ont pas d’autre choix que l’économie informelle.

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8 l FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016

BIEN VIVRE ENSEMBLEVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

Comment fonctionne le collectif ?« Éthique sur l’étiquette », qui va fêter ses vingt ans en décembre, est un regroupe-ment d’organisations syndicales et de soli-darité internationale, autour de campagnes menées par ses associations adhérentes impulsées par le collectif. Ces actions sont relayées sur le terrain par des comi-tés locaux regroupant les membres des organisations qui constituent le collectif et des personnes volontaires. Le collectif vient d’ailleurs de tenir une rencontre de ses comités.

Quelles ont été les campagnes les plus marquantes ?Le point commun des campagnes que nous menons depuis deux décennies est la défense d’hommes et de femmes surex-ploités dans leur travail dans les pays du Sud. Ces actions sont menées dans le cadre de la « Clean clothes campaign » européenne, dont « Éthique sur l’étiquette » est le représentant en France. Dans nombre de pays en effet comme le Bangladesh, le Cambodge, la Turquie…, des travailleurs, notamment du textile, sont soumis à des conditions de travail insupportables pour des salaires dérisoires empêchant toute vie décente. D’où notre campagne « sol-dées » demandant aux commanditaires d’exiger de leurs sous-traitants d’appli-quer un salaire minimum vital - différent du salaire minimum légal généralement très faible - déterminé selon les données de chaque pays par un cabinet d’experts. En France, nous avons rencontré les grands

groupes impliqués comme Carrefour, Pim-kie, Decathlon, mais jusqu’ici les résultats sont très limités. Nous ferons un bilan de ces rencontres en janvier.

Quels sont vos projets pour 2016 ?2016 sera une année d’événements sportifs importants comme les Jeux Olympiques au Brésil ou la coupe d’Europe de football en France. Actuellement, nous finalisons une campagne autour du vêtement spor-tif, des marques et des conditions sociales de production.

L’effondrement du Rana Plaza au Bangladesh en 2013 a provoqué la mort de 1 129 personnes et des milliers de blessés. Aujourd’hui, les victimes sont-elles été indemnisées ?Ce drame est resté gravé dans toutes les mémoires. Non seulement les règles élé-mentaires de sécurité n’avaient pas été respectées, mais la plupart des comman-ditaires s’étaient opposés au départ au principe d’indemnisation. Des mois de campagne ont fait évoluer la situation, un fonds de 30 millions de dollars a été

constitué et est en cours de distribution. En France, les difficultés persistent cepen-dant avec le groupe Auchan qui, malgré les étiquettes trouvées sur place, nie son implication. Un collectif d’avocats a déposé plainte au nom de plusieurs associations, dont le collectif ESE en avril 2014, et, pour relancer cette plainte, nous avons fourni de

nouveaux éléments à la justice début 2015.

Où en est le projet de loi : « Le devoir de vigilance des entreprises » ?Il fait suite à ce drame du Rana Plaza. Nous en sommes à une deuxième version de ce texte, très édulcoré à la demande de Bercy par rapport au texte initial

soutenu par tous les groupes de gauche de l’Assemblée. Il a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, mais vient d’être rejeté par le Sénat où la majorité de droite s’y est opposée. Nous poursuivons notre action conjointement avec les autres organisations engagées dans ce combat pour que le texte revienne sans tarder en deuxième lecture à l’Assemblée et reste suffisamment ambitieux malgré le lobbying intense des grandes entreprises.

[ Propos recueillis par Jean-Paul Rueff

Au moment où « Éthique sur l’étiquette » va fêter ses vingt ans, l’occasion est belle de retracer un parcours émaillé de campagnes aux titres évocateurs : « achats publics, achats éthiques », « exploiter n’est pas jouer ! » avec Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives économiques, qui est le nouveau président du collectif.

GuillaumeDuval

Éthiquesurl’étiquette

POUR EN SAVOIR PLUS :• www.ethique-sur-etiquette

«Lepointcommundetoutesnoscampagnesestladéfensedestravailleurssurexploités»

Le drame du Rana Plaza à l’origine du texte de loi.

ACTUALITÉS

FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 9

LesmusulmansdeFrance,cesinconnusL’islam, comme toutes les religions, est traversé par des courants différents. La méconnaissance des musulmans dans notre pays accentue leur stigmatisation. L’instrumentalisation de cette religion par des terroristes, le traitement médiatique et le communautarisme sont sources de peurs. Voici, à partir de spécialistes, quelques clefs pour comprendre.

 La méconnaissance de cette religion et les idées reçues sur les personnes dites d’origine étrangère sont un facteur de rejet et de racisme. Un phénomène accentué par la crise, les déclarations de certains responsables politiques, le traitement médiatique spectaculaire et manichéen des conflits internationaux. On ne peut pas cependant occulter les éléments qui alimentent les peurs ou les rejets : le com-munautarisme, la distinction vestimentaire et alimentaire, la place de la femme, les jeunes qui partent en Syrie.

L’intégration, malgré les discriminations est une réalitéOlivier Roy, politologue et spécialiste de l’islam (1), apporte un éclairage méconnu sur la situa-tion des musulmans dans notre pays. Pour le cher-cheur, il y a une popula-tion musulmane et non une communauté musul-mane. De plus, les musul-mans français sont bien plus intégrés qu’on ne le dit. « La France réussit mieux l’intégration que ses voisins. Les mariages mixtes sont en hausse. Il y a statistiquement plus de musulmans dans l’armée, la police et la gendarmerie que dans les réseaux Al-Qaïda, sans parler de l’admi-nistration, des hôpitaux, du barreau, de l’enseignement. » Quant à la radicalisa-tion, « elle ne concerne que des marges de cette population ». Le terrorisme ? :« Il

est condamné par les organisations musulmanes. Les jeunes radicali-sés sont en fait en rupture tant avec l’islam de leurs parents qu’avec les cultures des sociétés musulmanes. Certes, l’intégrisme religieux est une réalité chez les musulmans, les juifs ou les chrétiens ». Ce fon-damentalisme est pour Olivier Roy « une conséquence de la crise de la culture, une “quête” du pur religieux et non une protestation identitaire ». Ce dernier point est controversé.Quelle que soit notre perception de l’islam et des personnes dites de culture musul-

mane, croyantes ou pas, force est de constater que pour la CFDT l’inté-gration a encore du che-min à faire. Les discrimi-nations à l’embauche, au travail, dans la cité sont flagrantes.

Autres idées reçues sur cette religionÀ partir du Coran et de l’islam pour les nuls, Malek Chebel, anthro-pologue des religions (2), démonte les clichés. Extraits  : « Le livre de “foi et de paix” qu’est le Coran est un livre de

plénitude et de miséricorde […]. Le dji-had signifie avant tout “un effort sur soi”, un combat intérieur pour le bien et contre le mal, et non la guerre sainte comme le prônent les terroristes aujourd’hui […] ». Vis-à-vis des incroyants et des autres reli-

gions : « Le Coran appelle les musulmans à traiter les incroyants pacifiques avec justice et bonté. Enfin, le Coran consi-dère les femmes comme complètement égales aux hommes aux yeux de Dieu. » Dounia Bouzar, anthropologue du fait reli-gieux (3), s’attaque aux « dérives sectaires qui défigurent l’islam » accentuées par les préjugés négatifs sur l’islam. Elle explique le danger de transformer une religion en idéologie.Autre méconnaissance, la confusion et les amalgames sont courants entre islam et islamisme, ils font le jeu des terroristes. L’islamisme est l’instrumentalisation de l’islam à des fins politiques. Le dialogue interculturel et interreligieux ne peut que faire progresser la perception des citoyens et la laïcité. Comme l’écrit le philosophe Abdennour Bidar (4) : « La France et l’is-lam sont une chance l’un pour l’autre. »

[ Jacques Rastoul

(1) La Peur de l’islam, Olivier Roy, coédition Le Monde-L’aube, 11 €.

(2) Le Coran pour les nuls et L’islam pour les nuls, Malek Chebel, éditions First, 12 €.

(3) Désamorcer l’islam radical, Dounia Bouzar, Éditions de l’Atelier, 20 €.

(4) Plaidoyer pour la fraternité, Abdennour Bidar, éditions Albin Michel, 6 €.

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LeclimatentreenscèneImpacts écologiques, économiques et sanitaires, ces questions à la veille de la conférence mondiale COP21 ont été présentes lors du colloque d’Age Village qui a réuni 1 200 participants du médico-social, les 12 et 13 novembre 2015 à Paris. Analyse, expériences, débat, la CFDT Retraités était partie prenante.

  Selon la fondation Nicolas-Hulot, le changement climatique modifie la vie de 100 millions de personnes. Malnutri-tion, misère accrue, raréfaction de l’eau, migrations sont les conséquences les plus graves. Ce risque était déjà inscrit dans le développement durable puisque ce concept date de 1978. La priorité est d’imaginer et de mettre en place un déve-loppement économiquement efficace, socialement équitable et écologiquement soutenable. En fait, selon la fondation Nico-las-Hulot, répondre aux besoins du pré-sent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs.Lors de la table ronde, Dominique Fabre, secrétaire générale de la CFDT Retrai-tés, a souligné notre engagement. « Les retraités CFDT sont engagés sur le déve-

loppement durable depuis 1980. Que ce soit sur les privations d’énergie pour les basses pensions, le type de logement, l’épargne sociale et solidaire, la biodi-versité, les conséquences mondiales du réchauffement de la planète. »

Réduire la quantité et agir sur la qualitéL’avenir de nos sociétés est une préoc-cupation constante des organisations syndicales. « La CFDT a été pleinement investie dans le Grenelle de l’environne-ment. Elle l’est tout autant dans la COP21 avec la présence de plusieurs secrétaires confédéraux. Nos rassemblements natio-

naux sont conçus en écocongrès. La sen-sibilisation de nos adhérents retraités à la citoyenneté est permanente. Les solidari-tés intergénérationnelles et la transmission entre générations jouent favorablement dans ce sens.» L’Agirc-Arrco en lien avec la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie) s’en mêlent aussi. Ils soutiennent une recherche-action de déve-loppement durable au service du grand âge. Treize maisons de retraite (Ehpad) et deux services de soins d’infirmiers à domicile (Ssiad) sont concernés dans le projet « Add’Age » (1). L’action soutenue réduit le gaspillage alimentaire, modifie la politique d’achat vers des produits bio de meilleure qualité et en circuit court. La qualité des plats et leur préparation font partie des objectifs. Il en est de même pour la modification du type d’éclairage et des produits d’entretien, du tri sélectif et des emballages recyclables. Les sala-riés et les résidents adhèrent et coopèrent à la démarche. Dominique Fabre se féli-cite que le Conseil de la vie sociale (CVS) collabore à ce projet.Des économies sont réalisées, un cercle vertueux est amorcé. Le développement durable participe pleinement à la qualité de vie et à la sauvegarde de notre planète.

[ Jacques Rastoul(1) www.fnaqpa.fr Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées. Elle est porteuse du projet « Add’Age » (Action développement durable au service du grand Age).

L’avenir de nos sociétés - écologie incluse - est une préoccupation constante de la CFDT.

Les retraités CFDT sont engagés sur le développement

durable depuis 1980 !

Positionner l’activité des maisons de retraites dans l’écologie, c’est l’ambition du projet Add’Age.

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ACTUALITÉS

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EUROPE

L’actualité liée aux attentats a mis en sourdine la situation de ces femmes, de ces hommes et de ces enfants qui continuent d’échouer sur le territoire européen. Où en sommes-nous ?

  Les questions d’immigration font partie des fondamentaux de l’histoire de la CFDT. Au quotidien, nous devons sans cesse informer et lutter contre les amalgames. Ces populations dému-nies continuent de frapper aux portes de l’Union européenne. Ces réfugiés quittent leur pays respectif pour des raisons de conflits armés, d’instabilité politique, démocratique, écono-mique, financière et sociale. Les droits de la personne humaine y sont bafoués et l’extrême pauvreté se développe.Les 11 et 12 novembre derniers, le Conseil européen à La Valette (Malte) a réuni les États membres de l’Union européenne et des États d’Afrique. Une déclaration politique et un plan d’action ont été adoptés. Cinq orientations concrètes ont vu le jour :- s’attaquer aux causes profondes des migrations ;- renforcer la coopération pour ce qui concerne les migrations légales ;- assurer la protection des personnes déplacées ;- prévenir et lutter contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains ;- progresser sur les conditions du retour des personnes non autorisées à rester sur le territoire de l’Union européenne.Ces volontés politiques devront se concrétiser par des projets européens pour accroître l’emploi dans les régions d’origine et de transit des migrants d’Afrique de l’Est, du Nord et de

l’Ouest : Doublement des bourses accordées aux étudiants et chercheurs, programmes régionaux de développement et de protection dans la Corne de l’Afrique et en Afrique du Nord, mise en place de possibilités d’enquêtes au Niger et ailleurs pour lutter contre les réseaux de trafiquants…Pour contribuer à la mise en œuvre de ces dispositions, un fonds de l’Union européenne, doté d’un montant minimal de 1,8 milliard d’euros a été adopté auquel s’ajoute l’aide au déve-loppement aux pays africains pour un montant de 20 milliards d’euros chaque année.Comme l’affirme la Confédération européenne des syndicats (CES) : « Toute la communauté internationale a intérêt à rétablir la paix dans les régions en conflit. Pour prévenir d’autres conflits, il est essentiel d’investir dans le développement démocratique et durable. » [ Jean-Pierre Bobichon

POUR EN SAVOIR PLUS : http://ec.europa.eu/immigration

LE BUDGET DE LA COOPÉRATION EXTÉRIEURE DE L’UNION EUROPÉENNE (2014/2020)• 96,8 milliards d’euros• 344 millions d’euros consacrés aux migrations

SOUTIEN DE L’UNION EUROPÉENNE DESTINÉ À L’AFRIQUE POUR SON DÉVELOPPEMENT (2010/2015)• 9,4 millions de personnes inscrites dans

l’enseignement primaire.• 5,4 millions de naissances suivies par un

personnel médical qualifié.• 41 millions de personnes raccordées à une eau

potable de qualité

Quelques repères PROTECTION DES MIGRANTS ET DEMANDEURS D’ASILE• 38 millions d’euros pour l’opération « Triton »

(aide au sauvetage en mer de personnes en Méditerranée centrale depuis 2014)

• 18 millions d’euros pour l’opération « Poséidon » (aide au sauvetage en mer de personnes en Méditerranée orientale depuis 2006)

• En 2016, la Commission européenne attribuera une enveloppe de 45 millions d’euros pour ces deux opérations.

DEMANDES D’ASILE EN 2014• 662 680 demandes de protection internationale• 387 805 décisions rendues• 47 % des demandes acceptées

Réfugiés:necédonspasauxamalgames

Accroître l’emploi dans les régions d’origine des réfugiés à venir, une des meilleurs armes contre a terreur.

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POINTCHAUD

MichelDevacht,présidentdelaFerpa

Laloid’adaptationdelasociétéauvieillissementsurlesrails Le 21 octobre dernier, une délégation de la CFDT Retraités a rencontré Céline Thiébault, conseillère chargée de l’adap-tation de la société au vieillissement (ASV) auprès de Laurence Rossignol, la secré-taire d’État en charge de la loi. L’UCR souhaitait faire une série de propositions et demander des précisions pour qu’elles soient traduites dans les textes qui devaient être définitivement votés par l’Assemblée nationale le 10 décembre et le Sénat le 14 décembre dernier.L’intervention de l’UCR portait essentiel-lement sur deux points que sont la place des organisations syndicales de retraités dans les nouvelles structures départemen-tales et nationales, et le souci des per-sonnes touchées par la perte d’autonomie et confrontées à des budgets contraints.

L’UCR a précisé qu’il fallait absolument que les organisations représentatives de retraités soient inscrites clairement dans la loi mais aussi dans le décret d’applica-tion. Notre remarque a reçu une approba-tion de la part du ministère.Par contre, sur la conférence des finan-ceurs, nous avons reçu un refus de parti-cipation. Un paradoxe quand on sait que les retraités et personnes âgées sont les seuls à contribuer à la Casa (Contribution additionnelle de solidarité pour l’autono-mie). Mais la CFDT Retraités entend bien présenter sa candidature par d’autres voies.Elle a également rappelé au ministère son exigence de voir réapparaître dans la loi la possibilité d’un recours APA dans chaque département. Car comment ne pas s’inquiéter de la menace de l’Asso-

ciation des départements de France (ADF) qui annonçait, sous forme d’ultimatum le 16 octobre dernier, exiger l’adoption de mesures permettant de ralentir l’envolée des dépenses sociales que les départe-ments servent au nom de l’État, notam-ment l’APA (ticket modérateur, recours sur succession…). « Il n’est plus question pour les départements de subir des dépenses nouvelles, qu’elles soient imposées par voie législative ou réglementaire. »

La loi a abouti. Il faut que les budgets suivent ! Tous les budgets !

Intersyndicale:«Onparledecequinefâchepas!» Le 27 novembre dernier, les organisations syndi-cales de retraités se sont retrouvées pour une réu-nion de travail. À l’ordre du jour, la Fédération euro-péenne des retraités et personnes âgées (Ferpa), la loi Adaptation de la société au vieillissement (ASV) et le groupe de travail intersyndical sur le pouvoir d’achat des retraités. Sur la Ferpa et sur la loi ASV, les organisations syndicales de retraités partagent des points d’accord. Mais le fonctionnement du groupe de travail intersyndical sur le pouvoir d’achat des retraités pose problème. Le 9 novembre 2015, l’UCR CGT, inscrite dans le groupe de travail de l’inter-UCR sur les questions du pouvoir d’achat des retraités, a fait savoir que suite à des interpel-lations de ses organisations sur l’unité syndicale, elle suspend sa présence à ce groupe de travail. Les représentants de la CGT présents le 27 novembre nous ont fait part du besoin de « débat interne et d’approfondissement sur l’unité syndicale » au sein de la Commission exécutive de la CGT.

 Le 26 octobre, le comité exécutif de la Ferpa, réuni à Bruxelles, a élu brillamment Michel Devacht comme nouveau président. Seules les organisations syndicales CGT et F0 ont voté contre. La CFDT Retrai-tés, soutenue par la CFTC, la CFE-CGC et l’UNSA, avait en effet pro-posé la candidature de son précédent secrétaire général à la prési-dence de la Fédération européenne des Retraités et personnes âgées. Depuis, Michel Devacht a pris ses fonctions et a assisté aux côtés de Carla Cantone, nouvelle secrétaire générale elle aussi au comité exé-cutif de la Confédération européenne des syndicats (CES) des 28 et 29 octobre. À l’occasion de son élection, Michel Devacht a rappelé son engagement européen, sa volonté de porter les valeurs de la Ferpa et défendre les retraités et personnes âgées au niveau européen.

[ Rubrique assurée par Daniel Druesne

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Les membres du comité des femmes de la Ferpa.

VIE SYNDICALE

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LEPOINTSUR

Depuis le 1er septembre dernier, cette garantie, rendue nécessaire suites aux retards accumulés dans le ver-

sement des pensions, particulièrement en Languedoc-Roussillon, en Nord-Pas-de-Calais et Picardie, concerne désormais aussi les pensions de réversion, jusqu’ici étrangement oubliées dans le décret du

À la suite d’une interpellation de la CFDT Retraités relayée par plusieurs médias nationaux, la ministre des Affaires sociales a annoncé fin octobre l’extension du droit opposable à la retraite aux pensions de réversion.

Droitopposableauxpensionsderéversion:c’estgagné

P lusieurs mesures risquent de porter atteinte à la cohésion sociale de cer-taines catégories de la population

et en particulier les retraités et personnes âgées. Le législateur a cru bon, en effet, de supprimer l’obligation de constituer un Centre communal d’action sociale dans les communes de moins de 1 500 habi-tants (Loi n° 2015-991 du 7 août 2015). Ce afin de favoriser la prise en charge de l’action sociale par l’établissement public de coopération intercommunale. Louable intention que de regrouper les services. Cependant, la création d’un centre inter-communal d’action sociale par l’établis-sement public ne constitue pas une obli-gation. Dès lors, la prise en charge des publics en difficultés échappe à toutes obligations dans les communes de moins de 1 500 habitants qui auraient décidé la dissolution de leur CCAS !

L’action sociale locale sans outil ?D’autre part, l’obligation de réalisation annuelle d’une analyse des besoins sociaux (ABS) définie par l’article R123-1 du Code

de l’action sociale et des familles par les centres communaux d’action sociale a été abrogée par le comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015. Cette ABS, introduite dans la réglementation par décret du 6 mai 1995, permet aux diffé-rents intervenants de mieux identifier les publics en situation de précarité, d’identi-fier les situations ignorées sur le territoire et d’apporter les réponses adaptées. Un outil utile à la définition des priorités et des

objectifs d’action sociale sur la commune ou la com-munauté de communes : clarification, bilan, le réalisé ou non, nouvelles actions, les partenaires, etc.

L’alerte de la CFDT RetraitésLa CFDT est inquiète des conséquences que peuvent avoir ces mesures sur le désengagement des col-lectivités locales dans la prise en charge de l’action

sociale curative, mais également préven-tive, dans une période où les problèmes sociaux demeurent préoccupants. Dans un courrier au Premier ministre, elle sou-haite que la mise en œuvre de la réforme territoriale soit l’occasion de mesures qui permettent le développement d’une poli-tique d’action sociale efficace en parte-nariat avec le mouvement associatif et syndical qui représente la société civile.

[ Daniel Druesne

19 août dernier. Pour les bénéficiaires des pensions de réversion, une majorité de femmes, c’était une priorité sociale au regard de leur niveau de ressources, par-fois faibles.Quelque 750 000 personnes partent en retraite chaque année. Elles seront à terme sécurisées dans leurs nouveaux revenus.

Pour les demandes de pensions de retraite relevant du régime des salariés agricoles et du régime social des indépendants, le texte entrera en vigueur au plus tard le 1er  janvier 2017, date à laquelle s’appli-queront de nouvelles règles pour la liqui-dation des droits à pensions des assurés ayant relevé de plusieurs régimes.La CFDT s’était déjà fortement mobilisée en juin dernier sur le sujet. Sa détermina-tion a été payante. Toutefois, nous reste-rons vigilants à la mise en œuvre de cette garantie de versement, tant pour les réver-sions que pour les pensions de retraite.

Descentrescommunauxd’actionsocialemenacésdedisparaître

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Demain certains territoires ruraux sans outils ni moyens sociaux ?

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INITIATIVES

LesAlsaciensdébattentavecÉdouardMartin

Tierspayant:mobilisationàAnzinetvoteàl’Assemblée Le 9 octobre dernier, sur le marché d’Anzin, là comme partout ailleurs, plusieurs militants de la CFDT Retraités ont distribué un tract pour dire : « Le tiers payant est un droit ». Les militants voulaient ainsi dénoncer l’attitude de certains médecins libéraux qui avaient décidé de boycotter la carte Vitale en dehors de toute légalité. Alors que le renoncement aux soins pour raisons financières atteint plus de 25 % des Français, la CFDT estime que la mise en œuvre du tiers payant est une priorité nationale.La CFDT Retraités demandait donc que le gouvernement et le Parlement ne laissent pas les corporatismes bloquer toute possibilité de réformer notre système de santé, alors que la plupart des soins sont financés par la collectivité. L’accueil des habitants à cette initiative faisait dire qu’ils attendaient avec impatience le vote de la loi sur la généralisation du tiers payant. Depuis cette mobilisation de toutes les équipes de la CFDT Retraités, on le sait, le tiers payant sera étendu d’ici 2017 à tous les assurés. L’Assemblée nationale a voté mardi 1er décembre 2015 en seconde lecture la mesure emblématique du projet de loi de santé de la ministre de la Santé Marisol Touraine. D’ici novembre 2017, ce droit sera étendu à tous les bénéficiaires de l’Assurance maladie, quels que soient leurs revenus. Les modalités techniques du tiers payant généralisé restent encore à définir. Les caisses nationales d’assurance maladie, les mutuelles, instituts de prévoyance vont maintenant plancher ensemble sur les possibles solutions techniques à mettre en œuvre pour unifier un système complexe.

 À Strasbourg, l’un des temps forts de la Semaine Bleue a été le débat public avec Édouard Martin, député européen et ancien syndicaliste. L’Union territoriale des retraités d’Alsace souhaitait en effet inviter les militants pour évoquer avec eux l’actualité sociale et politique resituée dans le contexte euro-péen. L’emploi était au cœur de la rencontre qu’animaient Suzanne Fratto et Bernard Blanche, la présidente et le secré-taire général du syndicat bas-rhinois.Édouard Martin n’a pas oublié de remercier les retraités CFDT d’Alsace venus soutenir les sidérurgistes lorrains. Il a parlé du rapport qu’il a signé et qui vise à « pérenniser l’industrie européenne ». Il a souligné l’importance des choix des élec-teurs et illustré son propos.« Parce que mon rapport inclut, entre autres, le principe pol-lueur-payeur prévu par les règles de l’Organisation mondiale du commerce, j’ai toute la droite contre moi… ». L’ancien syndicaliste a parlé de la solution aberrante d’un élu FN du Parlement qui propose de « renvoyer les femmes au foyer pour faire baisser le chômage […] Je ne me vois pas dire à ma fille : “ Chérie, ce n’est pas la peine d’aller à l’école, ça ne sert

 Le 31 octobre dernier, une délégation de la FNTR (Fédération nationale des travailleurs retraités, affiliée à l’Union générale des tra-vailleurs algériens) a rencontré l’UCR CFDT. La délégation était composée de Abdelka-der Dellal, Mouloud Belkhodja et de Smail Boukris. Il était important de renouer les contacts, car nos amis se posent beau-coup de questions sur les retraites et leur avenir en Algérie.

à rien, quand tu auras l’âge de te marier, tu seras femme au foyer ”. Il faut que cela se sache, a-t-il lancé à son public. La nécessité du syn-

dicalisme pour « défendre les droits individuels et collectifs des retraités », la dette que les Grecs « ne pourront jamais rembourser », l’arrivée des migrants, sont autant de sujets qui ont permis aux retraités d’interpeller un parlementaire qui a su transmettre son enthousiasme aux militants présents.

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Édouard Martin entouré de Bernard Blanche et de Suzanne Fratto.

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La délégation de la FNTR algérienne.

VIE SYNDICALE

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D epuis le 4 novembre, tous les adhérents de la CFDT peuvent accéder au nouveau service d’in-

formation et de conseil par téléphone « Réponses à la carte », ouvert six jours sur sept. « L’ambition était d’offrir à tous nos adhérents la possibilité d’avoir en per-manence un contact, une aide. Notam-ment pour les salariés ou agents isolés », explique Isabelle Perrin, responsable du projet à la Confédération. Désormais, du lundi au vendredi de 9 heures à 19 heures et le samedi de 9 heures à 13 heures, un conseiller vous répond. Qu’il s’agisse d’un problème purement professionnel ou d’une question relevant davantage de la vie privée, « Réponses à la carte » s’ins-crit dans un registre complémentaire au travail des militants sur le terrain.L’identification des personnes-ressources et la bonne structuration du réseau ont constitué un préalable indispensable à l’installation du service. Dans ce cadre, l’UCR collecte et traite l’ensemble des demandes des adhérents sur les ques-tions de retraites… Et les questions sont nombreuses : vérifier que l’on peut partir et liquider ses droits, construire un dos-sier de liquidation des droits, possibilité de cumuler emploi et retraite, questions relatives aux polypensionnés, etc.En tout état de cause, la satisfaction de ceux qui ont eu recours à « Réponses à la carte » est indéniable. « Réponses à la carte » est un service inédit dans le syndicalisme français. Il participe à l’ori-

PAROLED’EXPERT

Réponses à la carte : appelez le 09 39 69 19 39Adhérents CFDT, pour appeler « Réponses à la carte », munissez-vous de votre carte d’adhérent ! Votre numéro personnalisé d’adhérent (NPA) vous sera demandé. Appel non surtaxé.

Hervé Wiart

La CFDT a fait le choix de promouvoir un syndicalisme d’adhérents. Dans l’échange ainsi créé, cela implique pour elle des devoirs et des services vis-à-vis de chacun d’entre eux. Lors de son dernier congrès à Nantes, la CFDT Retraités a réaffirmé le choix de faire du développement une priorité.

Secrétaire national de la CFDT Retraités en charge du Développement

ginalité de la CFDT dans le paysage syn-dical. Pour cela, le service se doit d’être effectivement rendu.

Futurs retraitésLe « kit développement », engagé dans la mandature précédente, se mène conjoin-tement avec la confédération. L’objectif, là encore, est d’établir un contact le plus

en amont possible avec les adhérents qui sont susceptibles de faire valoir leurs droits à la retraite. Ce kit rassem-blera un maximum d’informations et de fiches thématiques qui permettront de présenter la CFDT Retraités à tra-vers ses valeurs, ses revendications, ses différents services… Il prendra la forme d’un supplément à Fil Bleu qui sera envoyé par la confédération à chaque adhérent proche du départ à la retraite. La confédération travail-lera avec les fichiers adresses four-nis par les syndicats. Le démarrage de cette opération est prévu pour le début de l’année 2016.La mise en œuvre de ses deux outils combinés doit nous permettre de conforter et/ou favoriser nos rap-ports avec les syndicats, de faire progresser le taux de réussite de

« transferts », et au bout du compte de développer la CFDT. C’est aussi l’occasion pour les UTR de se faire connaître et de présenter le syn-dicalisme CFDT Retraités, de faire décou-vrir l’ensemble de nos services et, s’ils le souhaitent, d’accompagner les futurs retraités au moment de la liquidation de leur retraite. [ Hervé Wiart

«Àlaretaite,comptezsurlaCFDT»

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BIEN VIVRE ENSEMBLEVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

Les Français plus que les autres se méfient de leurs concitoyens, de leurs représentants politiques, des syndicats, des corps intermédiaires (justice, associations…). Pourquoi cette méfiance ? Avec la complexité de la société, l’arrivée du numérique, le changement territorial, la nouvelle législation européenne, les citoyens ou usagers sont perdus. Ils ont le sentiment de ne pas être pris en compte. La plupart des médias choisissent la simplicité et certains la caricature des faits pour faire le buzz. L’urgence prime ! Et les responsables politiques, syndicaux sont décriés. La démocratie représentative est rejetée. On lui préfère la démocratie d’opinion, faite de sondages ou de pseudo-référendums, vite faits, vite oubliés, construits sur une réflexion binaire. Comment répondre à la désaffection démocratique ?

P. 20MILITANTS DE LA LIBERTÉ

[ Dossier réalisé par Danielle Rived avec les contributions de Jean-Paul Rueff, Jacques Rastoul, Jean-Pierre Moussy, Daniel Druesne.

Depuis la Seconde Guerre mondiale, notre système s’est construit autour de deux piliers : l’étatisme et le corporatisme. Or ces deux systèmes sont malmenés par

le changement de la société, la décentra-lisation, la globalisation financière, l’Eu-rope. Dans notre société, les citadins sont majoritaires. Mais hors du centre-ville, les populations se sentent mal aimées : quartiers, banlieues, proches ou lointaines périphéries, campagnes.L’arrivée des nouvelles technologies bous-cule nos métiers. Certains disparaissent. D’autres se créent. Comment dans une réglementation rigide, inadaptée, ces nou-veaux entrants peuvent-ils prendre leurs places ? Les carcans éclatent alors que le pays doit faire face à des jacqueries (voir

les Bonnets rouges, les taxis parisiens, les médecins qui appellent à la désobéis-sance civile). Chaque corporation défend ses intérêts immédiats dans un système fermé. La société française a du mal à

P. 21QUESTIONS À LAURENT BERGER : IL FAUT INVESTIR DANS LE DIALOGUE SOCIAL

mal-êtredémocratique

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Depuis plus de 10 ans, le premier parti de France est celui des abstentionnistes.

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LE DOSSIER

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créer de l’universel, car le corporatisme consiste à octroyer des droits sociaux associés au statut. D’où un enchevêtre-ment de dispositifs particuliers attachés à chaque corps qui empêche toutes évo-lutions (voir les différents systèmes de retraites). La réussite et la compétition individuelles tout au long de la vie priment, l’intérêt général perd son sens Et quand les distorsions sont trop fortes, les égoïsmes s’exaspèrent, le poujadisme est plébiscité par les petites élites qui vont grossir les rangs de l’extrême droite.

Démocratie d’opinionAu niveau national, notre démocratie représentative est à la peine. L’étatisme réglemente l’ensemble de la société. Il empêche l’universalisme, crée des inéga-lités en essayant de colmater les brèches

du système et il vide le dialogue social de son contenu. Les citoyens ne se sentent plus responsables. La notion de respect diminue. L’insécurité et les incivilités aug-mentent.Comment prendre en compte les évolutions de la société ? Le changement n’est pas synonyme de crise, ni de baisse de notre qualité de vie. Les réformes ont besoin du temps long. Dans notre société qui prône l’immédiateté, on demande au politique de gérer l’ici et maintenant. Peu importe

le futur, il est trop incertain. Beaucoup de jeunes pensent que demain, la retraite par répartition n’existera plus.Même si certaines élections voient leur taux d’abstention augmenter, les élections en France restent le moyen le plus efficace pour peser sur les décisions politiques. Certains citoyens ne sont pas enregistrés sur les listes électorales. D’autres ne se sentent pas concernés. Ce sont toujours les mêmes catégories, les jeunes, les plus fragiles économiquement, les chômeurs

Irène Frachon, pneumologue au CHU de Reims, a contribué à révéler le scandale du Médiator, ce médicament commercialisé par les laboratoires Servier, parfois utilisé comme un coupe-faim. Le Médiator aurait causé la mort d’au moins 500 malades. Ces lanceurs d’alerte sont le symptôme d’une crise de la représentation politique. Pour certains « ils choisissent de faire prévaloir leur conscience sur le devoir d’obéissance » Pourront-ils être soutenus, écoutés dans une législation encadrée pour éviter les dérives des délateurs, sans risquer de perdre leur emploi ou d’être mis au ban de la société ?

Les lanceurs d’alerte sont-ils les vigies de la démocratie ?

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du temps de travail de l’entreprise Smart en Moselle, à l’initiative de l’employeur, a été voté majoritairement par les cadres à 74 % et minoritairement par les ouvriers à 39 %. La réalité du travail « ouvrier » et « cadre » n’est pas la même. Sans la médiation des syndicats, on tombe vite dans des dérives. Un vote ne suffit pas à construire une démocratie. Un corpus de règles doit garantir le vivre ensemble. Le président de la République et son ministre du travail ont dû dénoncer ces pratiques : « Je ne crois pas aux référendums d’en-

ENCHIFFRES

Le vote en berneLe constat est dur à avaler mais la réalité est là, entêtante. Les Français boudent de plus en plus les élections politiques. Et les scrutins syndicaux ne sont guère mieux lotis. Le droit de vote, pour lequel tant de femmes et d’hommes se sont battus et combattent encore aujourd’hui, acquis bien souvent dans le sang et les larmes, s’étiole dans notre pays. Aux élections politiques, quel que soit le type de scrutin, les résultats les plus récents sont systématiquement parmi les plus faibles jamais enregistrés. Aux présidentielles de 2012, on constate une perte de plus de 3 points de participation par rapport à celle de 2007. Même perte de 3 points entre les deux derniers scrutins municipaux. Aux législatives de 2012 le constat est pire encore puisque l’on est sur une abstention record. Le taux de votants aux élections régionales de 2010 s’est effondré de 15 points par rapport aux précédentes. Et que dire des presque 60 % d’abstention frôlés lors des élections européennes ou des scores en dents de scie – marqués d’une amplitude de 40 points selon les sujets –

des référendums ? Du côté des élections professionnelles, les emblématiques élections prud’homales ont vu leur niveau d’abstention pourtant élevé dès le départ se dégrader à chaque nouveau scrutin. Les élections fonctions publiques de 2014 ont connu elles aussi leur part d’abstentions record, notamment dans la territoriale. Face à de tels résultats, constater ne suffit pas. Il est temps de se donner les moyens pour infléchir sérieusement cette tendance lourde qui se répète et parfois même s’amplifie au fil du temps.Si l’on connaît peu ou prou les catégories sociales les plus marquées par l’abstention – jeunes, ouvriers, chômeurs – les raisons de la perte de confiance apparaissant plus complexes à appréhender. Parmi celles qui émergent le plus : élus jugés trop éloignés des populations, manque d’efficacité sur les grands problèmes sociaux, dégradation de la situation économique avec son lot de conséquences. Autant de sujets qui, à n’en pas douter, interrogent notre réflexion et le syndicalisme. [ Jean-Paul Rueff

qui font défaut. Les électeurs veulent être consultés. Ils veulent participer et avoir des réponses claires, simples, rapides. Aussi se tournent-ils vers la démocratie d’opinion. Le succès des sondages et les demandes de référendums n’ont jamais été aussi grands. Savoir combien de fois on donne à boire aux résidents des mai-sons de retraite est-il plus important que de s’investir dans la gestion des maisons de retraite via les conseils de la vie sociale ? (voir page 27 de ce numéro)

Les oubliés de la représentationLes corps intermédiaires ne sont plus légitimes. Mais en l’absence de repré-

sentants, qui est légitime pour prendre la décision finale ? Pourquoi avoir des syn-dicats pour négocier puisqu’il suffit de répondre à un référendum pour avoir la solution ! Le référendum pour l’allongement

Les forums citoyens, les conseils de quartiers… Depuis 2002, ceux-ci sont obligatoires pour les communes de plus de 80 000 habitants. Que leur reproche-t-on ? Ce sont les initiés qui prennent la parole. Ils sont plus informatifs que participatifs. La mairie informe de ses décisions. Rendez-nous leur ambition ! C’est aux citoyens de leur redonner du sens. « On ne peut pas résumer l’exercice de la démocratie à la figure du citoyen-électeur, affirme Pierre Rosanvallon. Il faut désormais penser les figures nouvelles du citoyen-surveillant, du citoyen-juge, et du citoyen-contrôleur. »

Démocratie participative

L’Islande après la crise de 2008 et l’effondrement de ses banques a souhaité changer de constitution. En 2011, une commission, composée de parlementaires et de citoyens tirés au sort, a été chargée de réécrire la constitution.

Citoyenstirésausort

Certains citoyens ne sont pas enregistrés sur les listes électorales. D’autres ne se sentent pas concernés.

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LesusagersdelasantéaussiMalgré l’esprit de la loi de 2002 sur les droits des usagers, on est encore loin d’une culture du dialogue et de la démocratie sociale dans le secteur de la santé et du médico-social. Même si les choses évoluent, l’usager est souvent considéré uniquement comme un « patient » par le corps médical et paramédical. L’usager est dans un rapport de dépendance aux professionnels. Il méconnaît ses droits. La participation des usagers et leur représentation collective demeurent une obligation formelle insuffisamment activée. La CFDT est donc particulièrement attachée à faire vivre le conseil de vie sociale (CVS) dans le médico-social, et dans le sanitaire, la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC).

[ Jacques Rastoul

LE DOSSIER

FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 19

Surleterrain

treprise, je crois aux syndicats. Ils ont été élus par les salariés.»La démocratie représentative n’est pas un objet fini. Elle est une construction permanente, en perpétuel mouvement par la gestion des conflits et des intérêts divers au nom de l’intérêt général : « Il faut enrichir la démocratie, la développer de deux façons, affirme Pierre Rosanvallon. D’abord, il faut améliorer les procédures électorales et représentatives, ensuite trou-ver des façons d’inclure dans le système

représentatif les oubliés de la représen-tation. Il faut trouver des formes de prise de parole sociale qui rendent présents dans la société les problèmes des popu-lations, qui donnent une voix à ceux qui n’en ont pas. La représentation, ce n’est pas seulement la délégation, le mandat. »

[ Danielle Rived

Il est urgent d’interroger le manque d’efficacité des politiques sur les grands problèmes sociaux.

Le monde entier nous envie l’Europe. Mais alors, pourquoi ce malaise et cette forte abstention aux dernières élections ? (57,46 %). Pour Jacques Delors, « l’explication essentielle est que les peuples ont peur de la mondialisation, de l’avenir et se replient sur eux-mêmes ». Comment améliorer le système ? Doit-on changer le système électoral ? : « Dans chaque pays, ce sont les partis nationaux qui présentent des candidats aux élections européennes. Mais au niveau européen, ce ne sont plus des partis nationaux mais des groupes de parlementaires européens (le parti populaire, les socialistes, les verts…). De fait, selon Dieter Grimm, professeur de droit, le lien direct entre l’élection et son député est brisé. » Aussi, aux dernières élections, nous avons élu pour la première fois le président de la commission européenne. Certains pensent que les politiques ont refusé d’assumer leurs choix au niveau européen. Et ils ont oublié d’informer leurs concitoyens, tout comme les médias. Les citoyens se sentent abandonnés par l’État. Ils se méfient des politiques et ne leur font plus confiance (voir la politique agricole commune). Aujourd’hui face au désastre humanitaire créé par la crise des migrants, et aux attentats de Paris, l’Europe saura-t-elle retrouver ses valeurs de solidarité ?

Refonderl’Europe

Comment inclure dans le système représentatif les oubliés de la représentation ?

Dan

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rues

ne

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CFDt

20 l FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016

La zoologie nous apprend que parmi les vertébrés il y a deux sortes d’êtres. Ceux qui ont une colonne vertébrale développée n’ont que la peau pour les protéger. Les autres ont une carapace ! Qu’un événement surgisse, les uns vont se renfermer sous cette protection sans issue. Les autres vont souffrir, mais ils chercheront et sauront affronter le réel.

  À quelles conditions travailler à l’enrichis-sement de notre colonne vertébrale citoyenne puisque nous n’avons qu’elle pour nous proté-ger ? D’ailleurs, s’agit-il seulement de protec-tion ? Ne s’agirait-il pas tout autant d’ambition, de création, d’enrichissement ?Platon dans sa République identifiait déjà les trois registres sur lesquels investir : le Bien, le Beau, le Vrai. Une spiritualité républicaine ! Une autre trilogie qui correspond à notre devise : « Liberté, Égalité, Fraternité » que tous les conti-nents ont criée en cœur et en chœur au lende-main des massacres qui ont ensanglanté Paris.

InlassablementLa République ? Platon sait en critiquer la démagogie, la tyrannie, les volontés de pouvoir.Mais la loi n’est pas là pour assurer un bon-heur exceptionnel à une classe de citoyens, mais pour réaliser le bonheur de la « Cité » tout entière. Si la République forme ainsi de tels hommes, ce n’est point pour les laisser libres de se tourner du côté qu’il leur plaît, mais pour les faire concourir à fortifier le bien de l’État et de la société. Autrement dit, le Bien commun.Faire société, la reconstruire aujourd’hui, c’est

MILITANTSDELALIBERTÉUnedémocratieouvertevialenumérique?La loi sur le numérique pourrait-elle rétablir la confiance dans le législateur ? En septembre-octobre 2015, pour la première fois un projet de loi – celui sur le numérique pour l’ouverture des données publiques et pour le renforcement des droits des internautes – a été cocréé avec les internautes : 21 300 participants, 8 500 consultations, et 150 000 votes. Ce texte a connu 78 modifications. Le projet de loi est passé de 30 à 41 articles en 3 semaines. Objectifs de la loi : faciliter la circulation des données et du savoir, œuvrer pour la protection des individus dans la société du numérique et introduire de nouveaux droits pour les individus, garantir l’accès au numérique pour tous, en maintenant la connexion Internet pour les personnes les plus défavorisées. Plusieurs propositions d’articles nouveaux qui ont été étudiés par le Parlement.

Surlevif

Réagir à l’actualité ET prendre en compte les longs temps de l’éducation et des mutations.

réagir, mais aussi prendre en compte le temps long de l’éducation et des mutations plutôt que les indignations de surface. C’est travail-ler au sens du bien commun plutôt qu’à l’im-moralité d’une société purement marchande. C’est œuvrer pour une justice forte plutôt qu’une force (supposée) juste. C’est se faire les militants de la liberté et de la diversité plu-tôt que des radicalismes, quelles que soient leurs natures. Sans carapace, mais avec une solide colonne vertébrale.En tant qu’adhérent à la CFDT « Nous sommes également des acteurs de la cohésion sociale, du vivre ensemble et de la démocratie », constate Laurent Berger. Et le secrétaire général de la CFDT de poursuivre : « Nous devons pour notre part inlassablement contribuer à construire du progrès social et à donner des perspectives d’avenir notamment à la jeunesse, elle qui, en plus de connaître une entrée dans la vie active marquée par la précarité, doit désor-mais apprendre à vivre durablement avec la menace terroriste. » [ Daniel Druesne

SITES :• Conseil de l’Europe : principale

organisation de défense des droits de l’homme : www.coe.int

• Comité économique et social européen : assemblée représentative de la société civile au plan européen (syndicats – employeurs – activités diverses) : www.eesc.europa.eu : « La société civile organisée au niveau européen » (Convention d’octobre 1999)

PourensavoirplusOUVRAGES• Le Parlement des invisibles dans

l’édition de Pierre Rosanvallon, Raconter la vie. Cet essai constitue le manifeste de la collection de ces récits de vie. Une collection de livres, un site Internet participatif : www.raconterlavie.fr

• La Démocratie à l’œuvre, ouvrage collectif d’historiens, sociologues, politistes, philosophes autour de Pierre Rosanvallon (Seuil, 2015)

INITIATIVES• Le pacte civique est un appel à des

personnes et à des organisations qui sont prêtes à se transformer et à transformer la société pour penser, agir et vivre autrement en démocratie www.pacte-civique.org

• La journée citoyenne. Cette initiative annuelle de la société civile vise à : « Faire ensemble pour mieux vivre ensemble ». Agence des pratiques et des initiatives locales www.apriles.net

BIEN VIVRE ENSEMBLEVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

D.r.

LE DOSSIER

FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 21

7 Français sur 10 disent qu’ils n’ont pas confiance dans les syndicats. Quelles en sont les raisons ?La défiance vaut pour l’ensemble des institutions. Concernant les syndicats, il y a la méconnaissance de ce que produit un syndicat. Les salariés attendent qu’on puisse s’investir sur le devenir de l’entre-prise et en même temps sur leur situation de travail. Or dans l’inconscient collectif, le syndicat c’est la CGT ! Et cela joue. Il faut arrêter de parler « DES » syndicats en général pour parler de la CFDT, de la CGT, de FO… En 2017, lors des élections professionnelles, on peut commencer à inverser cela. Tous les jours, dans les entre-prises, des militants de la CFDT font ce travail de construction de nouveaux droits des salariés. C’est moins spectaculaire que d’autres modes d’action. Mais c’est plus efficace.

En quoi les réformes actuelles du droit du travail portent-elles plus de démocratie ?Les patrons ne sont pas vertueux par nature. Les rapports de force qui s’exercent dans une entreprise sont utiles pour les sala-riés. Plutôt que de penser à tout régir d’en haut, donnons de l’espace à la négociation collective dans les branches et dans les entreprises. Mais il faut préalablement un haut niveau de protection dans le Code du travail. Cela favorise la négociation. D’ail-

uestionsàQLaurent Berger

Refuser les totalitarismes d’où qu’ils viennent. Avoir une vision claire des inégalités sociales. Donner sa place au dialogue

social, et sa chance au « faire société ». Par l’échange et le débat d’idées. La démocratie est à ce prix !

Ilfautinvestirdansledialoguesocial

leurs, le dialogue social dans une entre-prise ne peut s’opérer qu’avec quelqu’un de mandaté par une organisation syndi-cale et non avec un salarié lambda qui ne sera pas entendu.

Quelles sont les conditions pour aboutir ?Il faut d’abord contraindre les patrons à s’engager dans un vrai dialogue social, et à reconnaître le fait syndical dans les entreprises. Il faut également faire marcher l’intelligence collective. Les contraintes et les besoins de l’entreprise doivent être partagés pour construire le compromis entre les impératifs économiques et la situation sociale.Nous avons, en France, un risque démo-cratique très élevé avec la montée du Front National qui donne le sentiment qu’on aura une puissance publique autoritaire tout en se passant des corps intermédiaires. Mais on n’offre pas une autre voie, celle du dialogue, de la construction collective au plus près des citoyens. Tout système, qui a voulu passer par autre chose que de débattre en son sein des intérêts contra-dictoires, est devenu un pays totalitaire !

La notion d’intérêt général n’est-elle pas aussi dans une qualité d’être ?La progression de très fortes inégalités mine notre pacte social et républicain.

Mais où commence l’inégalité ? Il faut avoir cette capacité à avoir une photogra-phie de la société. Où sont ses zones de fracture ? Il n’y a pas de solution miracle. Nous disposons juste de cette capacité à faire émerger du dialogue qui permet de trouver des solutions ensemble. C’est plus dur, plus long, plus exigeant.

Un mot sur les événements, leurs prolongements ?À l’occasion de la remise du prix Nobel de la paix, les Tunisiens disent que le défi N° 1, pour faire perdurer la démocratie construite après le Printemps arabe, c’est la sécurité. Mais la sécurité ne doit pas nous empêcher de mener un autre com-bat : lutter contre le totalitarisme et le fas-cisme. Nous avons une autre conception du « faire société », bien sûr fait de « coups de gueule », de rebondissements, mais qui garantit un pays où on peut construire des choses, où on peut encore se parler.On aura toujours des dingues. Et la menace va durer. Nous devons y opposer une capacité à recréer du lien social, à vivre et travailler ensemble. Chacun peut être créateur de ce lien social qui passe par l’échange et le débat d’idées. On ne réglera pas le problème démocratique avec simplement des experts mais avec les citoyens.

[ Propos recueillis par Daniel Druesne

Secrétaire général de la CFDT

22 l FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016

BIEN VIVRE ENSEMBLEVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

VOS QUESTIONS / NOS RÉPONSES

[ Page proposée par Claude Wagner

Revenu fiscal de référence exonérant de

la taxe d’habitation 2015Nombre de parts

Revenu fiscal de référence 2014

1 part 10 686 euros

1,5 part 13 539 euros

2 parts 16 392 euros

2,5 parts 19 245 euros

1/2 part en plus 2 853 euros

Pourquoisuis-jeexonéréedelataxed’habitationetpasdelaCSG?

Question de Casenove

Pourquoi le revenu fiscal de référence pris en compte pour l’exonération de la CSG n’est pas le même que celui de l’exonération de la taxe d’habitation ?

Notre réponse. Les règles de revalorisa-tion ne sont plus identiques. Ces mon-tants résultent d’une application de la loi (Code de la sécurité sociale modifié fin 2014). Pour la CSG, le barème augmente comme la hausse moyenne annuelle des prix hors tabac de l’avant dernière année, soit +0,4 % en 2014. Pour la taxe d’habitation, le barème est indexé sur la limite supérieure de la première tranche de l’impôt sur le revenu. Mais comme en 2015, il y a suppression de la première tranche, les montants sont revalorisés de 0,5 % (loi n° 2014-1654).

Notre réponse. Les retraites et pensions de retraite sous soumises à des cotisations pour la protection sociale : - CSG (assurance maladie) : 6,6 %,- CRDS (dette de la sécu) : 0,5 %, - Casa (solidarité pour l’autonomie) : 0,3 %- assurance maladie : 1 % uniquement sur les retraites complé-mentaires.Toutefois, les retraités dont le revenu fiscal de référence sur les reve-nus de 2014 est inférieur ou égal aux seuils de revenus indiqués dans le tableau 2 seront dispensés en tout ou partie sur les pen-sions versées en 2016 quel que soit leur âge.Ces seuils reposent sur les revenus perçus en 2014 et déclarés en 2015. Le revenu fiscal de référence figure sur chaque feuille d’impôt reçue en septembre.

QuiestexonérédelaCSGen2016?Question de Nana

Retraitée depuis 2014, serais-je exonérée de CSG en 2016 ?

Montant du revenu fiscal de référence déterminant les taux de cotisation en 2016

Cotisations pour la protection sociale

Revenu fiscal de référence

inférieur ou égal à :

inférieur ou égal à :

supérieur à :

1 part 10 675 € 13 955 € 13 955 €

1,5 part 13 525 € 17 681 € 17 681 €

2 parts 16 375 € 21 405 € 21 405 €

Demi-part en plus

2 850 € 3 725 € 3 725 €

CSG Exonération 3,8 % 6,6 %

CRDS Exonération 0,5 % 0,5 %

Casa Exonération Exonération 0,3 %

Assurance maladie (1) Exonération Exonération 1 %

Quiestexonérédelataxed’habitation2015?

Question de Jérôme

Je me demande si je fais partie des personnes concernées par la reculade du gouvernement pour la taxe d’habitation 2015 ?

Notre réponse. Les retraités de 60 ans et plus dont le revenu fiscal de référence des revenus de 2014 est inférieur ou égal aux seuils de revenus indiqués dans le tableau 1 sont exonérés de la taxe d’habitation en 2015.Attention, la suppression de la demi-part des veuves et veufs a eu pour consé-quence de soumettre à la taxe d’habitation ces personnes. Si la loi adoptée en juillet 2014 prévoit que les plus de 60 ans « ayant bénéficié de l’exonération de la taxe d’habitation [...] au titre de 2013 restent exonérés pour 2014 », ils ont oublié 2015 ! Le parlement a donc voté dans l’urgence fin 2015 un amendement. Il reconduit pour deux ans, soit 2015 et 2016, l’exonération de la taxe d’habi-tation pour les exonérés de 2014. D’autre part, deux dispositifs ont été créés pour 2017 et après, dont la création d’un barème spécial pour les déjà exonérés.

L’EXONÉRATION DE LA TAXE D’HABITATION ENTRAÎNE :• l’exonération de la redevance audiovisuelle ;•  l’exonération de la taxe foncière pour les per-

sonnes âgées de plus de 75 ans ;•  un abattement de 100 euros sur la taxe fon-

cière de 65 à 75 ans ;•  un abattement de 100 euros sur la taxe fon-

cière pour les personnes âgées de plus de 65 ans, hébergées dans une maison de retraite ou dans un établissement de soins de longue durée, qui conservent la jouissance exclusive de leur ancienne résidence principale.

(1) Sur les retraites complémentaires uniquement.

FIL BLEU - N° 238 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 23

BIEN VIVRE

(1) Sur les retraites complémentaires uniquement.

 La CFDT a porté haut et fort cette reven-dication de la complémentaire santé pour tous les salariés. Car, si dans la plupart des grandes entreprises les salariés en bénéficiaient, ce n’était pas le cas dans les petites et moyennes entreprises.C’est une étape importante. Mais elle impose de trouver des réponses satisfai-santes pour les populations non ciblées par les accords qui ont été ou vont être signés : les personnes au chômage de longue durée, celles qui multiplient les petits contrats, celles qui ne travaillent qu’à temps très partiel et les retraités.

[ Marie-Solange Petit

ComplémentairessantéGénéralisationpourlessalariésL’environnement des complémentaires santé se modifie de manière importante. Au 1er janvier 2016, les salariés devront tous être couverts par un contrat d’entreprise financé par moitié par leur employeur. C’est une avancée majeure pour les salariés qui relève de l’accord national interprofessionnel de janvier 2013.

La CFDT Retraités propose ont le sait à ses adhérents un contrat de groupe sous-crit près de la Mgen Filia. Les contenus du contrat ont intégré les nouvelles règles concernant les contrats solidaires et responsables. Pour 2016, pas d’augmen-tation de la cotisation pour les personnes seules et les familles. Les cotisations des « duos » sont révisées. Elles étaient sous-cotées.

Le gouvernement a souhaité avoir une meilleure visibilité des contrats pour les personnes qui bénéficiaient de l’Aide à la complémentaire santé. Un cahier des

charges a été défini, et une dizaine de contrats ont été labellisés au vu de la qualité de leur offre. Cette décision gouvernementale répond à plusieurs nécessités. Un bilan a démontré que de nombreuses personnes qui pouvaient bénéficier de l’Aide à la complémentaire santé (ACS) n’en faisaient pas la demande ou ne poursuivaient pas le pro-cessus jusqu’au bout. Cette organisation pourra permettre de mieux suivre les bénéficiaires potentiels. D’autre part, la libre utilisation de leur « chèque » amenait certains à s’ins-crire dans des contrats auprès d’organismes ne respec-tant pas les règles des contrats solidaires et responsables.Une douzaine de mutuelles, relevant du titre II du Code de la mutualité, se sont regroupées pour offrir un panier de soins commun qui a obtenu le label ACCES Santé. C’est le même contenu, tant pour les cotisations que pour les prestations. Parmi elles, Adrea, Apreva, Eovi, Harmonie Mutuelle, MNT, Ociane, MGEN. Les bénéficiaires de l’ACS sont invités à choisir une des options offertes par ce contrat.La CFDT suivra l’évolution de ce dossier pour vérifier que les droits des personnes sont respectés.

Contrat UCR/Mgen Filia

Bénéficiaires de l’ACS

Tarif généralBase Tulipe Blanche Tulipe Jaune Tulipe Orange Tulipe Rouge

Isolé 32,60 46,51 64,16 82,24 101,47

Duo 60,31 86,04 118,70 152,14 187,72

Famille 71,72 102,34 141,17 180,95 223,25

Régime localBase Tulipe Blanche Tulipe Jaune Tulipe Orange Tulipe Rouge

Isolé 21,03 29,99 41,39 53,05 65,45

Duo 38,91 55,48 76,57 98,14 121,08

Famille 46,26 66,01 91,06 116,72 144,00

La prévention et la complémentaire santé pour bien se porter.

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24 l FIL BLEU - N° 228 - JANVIER-FÉVRIER 2016

TABLEAU DE BORD 2015Mis à jour au 1er octobre 2015

CUMUL SANS LIMITE. Le cumul d’un salaire avec les retraites est possible sans limite à condition : - d’avoir obtenu toutes ses retraites per-sonnelles obligatoires ; - d’avoir au moins l’âge légal en ayant obtenu ses retraites au taux plein.CUMUL AVEC LIMITES. Si les conditions ci-dessus ne sont pas remplies, le cumul est possible avec plafond de ressources. Le total des revenus (retraites personnelles obligatoires + salaire de reprise d’activité soumis à la CSG) doit être inférieur au mon-tant le plus favorable :- soit 160% du Smic en vigueur en janvier ; - soit les trois derniers salaires. Pour les seules retraites complémentaires

le salaire moyen des dix dernières années d’activité peut aussi être pris en compte si c’est plus favorable.ATTENTION ! Toute retraite liquidée est défi-nitive. Si la nouvelle activité est bien sou-mise à toutes les cotisations pour la pro-tection sociale, elle n’apporte aucun droit supplémentaire, quel que soit le régime de retraiteLe retraité ayant repris une activité profes-sionnelle peut tomber en chômage et béné-ficier de l’allocation au régime d’assurance chômage avant 65 ans. Mais cette alloca-tion est alors amputée de 25 à 75% suivant l’âge du montant de la pension perçue à titre de droit direct (le bénéfice d’une pension de réversion n’entraîne pas amputation).

Revalorisation des retraites Régimes de base +0,1%

Ce taux appliqué depuis le 1er octobre résulte de la hausse des prix en moyenne annuelle prévue pour l’année 2015 dans le PLF 2016. Cela concerne les régimes Sécu (régime général et agricole), les régimes des fonctionnaires et les régimes spéciaux.

Complémentaire Ircantec +0,1%

Applicable au 1er octobre selon les mêmes règles que le régime de base.Point Ircantec : 0,47507 €

Complémentaire Arrco

Hausse en moyenne annuelle.Point Arrco : 1,2513 €

Complémentaire Agirc

Hausse en moyenne annuelle.Point Agirc : 0,4352 €

Majoration pour enfants élevés D’un taux de 10%, elle est accordée aux assurés qui ont eu trois enfants ou les ont élevés pendant neuf ans avant l’âge de 16 ans.Majoration pour tierce personne Elle est accordée aux assurés dont l’inaptitude

au travail et le besoin d’une tierce personne leur a été reconnu avant l’âge de 65 ans. Montant mensuel avril 2015 : 1 103,08 €.Surcote au-delà de l’âge légal L’assuré justifiant du nombre de trimestres

exigé pour sa génération et ayant atteint l’âge légal de la retraite bénéficie d’une « surcote » de 1,25% par trimestre, soit 5% par an.

Majorations pension Sécu

Cumul emploi-retraite

• Plafond Sécu mensuel 2016 : 3 218 € Utilisé pour le calcul de certaines cotisations sociales : cotisations retraite de base et complémentaire, fonds national d’aide au logement et assurance chômage. Les prestations sont plafonnées également.

• Salaire nécessaire à l’acquisition d’un trimestre en 2015 : (150 heures x 9,61 €) : 1 441,50 €

Chiffres retraite Sécurité socialeRetraite Sécurité sociale au taux plein de 50%• Âge du taux plein : taux de 50% acquis si au moins un trimestre validé.

C’est 65 ans si né avant juillet 1951 jusque 67 ans si né en 1955 (écart de 5 mois entre chaque année de naissance).

• Âge légal : À 60 ans si né avant juillet 1951 jusque 62 ans si né en 1955 (écart de 5 mois entre chaque année de naissance). Justifier de 163 trimestres si né en 1951 (164 si né en 1952, 165 si né en 1953 et 1954, 166 si né de 1955 à 1957, 167 de 1958 à 1960, 168 de 1961 à 1963, 169 de 1964 à 1966, 170 de 1967 à 1969, 171 de 1970 à 1972 et 172 à partir de 1973). Si inférieur, un coefficient de minoration ou décote est appliqué sur le taux de 50%.

• Avant l’âge légal : Avoir eu une carrière longue en ayant cotisé avant 16 ans ou avant 20 ans ou avoir été travailleur handicapé.

L’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) garantit un revenu minimum aux personnes ayant peu ou pas cotisé pour la retraite. Elle est récupérable sur la part de succession dépassant 39 000 € (depuis 2006).

Allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa)

Conditions personnes âgées d’au moins 65 ans (60 si inaptes), résidant légalement en France (depuis dix ans si étranger hors UE) et disposant de ressources inférieures à un plafond annuel.

Calcul Montant égal à la différence entre les ressources de la personne ou du couple et le plafond fixé, depuis octobre 2014 :- personne seule : 800 € ;- pour un couple : 1 242 €.

EN SAVOIR PLUS

Consultez notre Guide sur :

www.cfdt-retraités.fr/Retraites-2015

BIEN VIVRE ENSEMBLEVIE SYNDICALEACTUALITÉS LE DOSSIER

FIL BLEU - N° 228 - JANVIER-FÉVRIER 2016 l 25

BIEN VIVRE

Conditions Prestation en nature destinée à aider à prendre en charge tout ou partie des frais liés à la perte d’autonomie. Nous ne traitons ici que de l’APA à domicile. En Ehpad, l’aide est versée directement à l’établissement.

Montant maximal Le montant maximal de l’APA à domicile est fixé par groupe iso-ressources (GIR), soit depuis avril 2014 :

GIR 1 : 1 312 € GIR 2 : 1 125 €GIR 3 : 843 € GIR 4 : 562 €

Ticket modérateur Le montant du ticket modérateur est fonction des ressources mensuelles du demandeur. Si les ressources mensuelles sont :- inférieures à 739 € : exonération ;- entre 739 € et 2 945 € : le montant est progressif ;- supérieures à 2 945 € : 90% du montant de l’aide.Attention, ne pas respecter le ticket modérateur, et donc le nombre d’heures attribués, est considéré comme de la fraude.

APA d’urgence En cas d’urgence attestée d’ordre médical et social : 656 €.

RÉVERSION SÉCU• Conditions : pension au survivant âgé d’au moins 55 ans ; cumulable avec ses ressources propres dans la limite d’un plafond. Pas de condition de durée de mariage et de non-remariage. • Calcul : pension égale à 54 % des droits à pension du défunt. Avant 62 ans ou avant sa retraite propre, elle est révisable annuellement. La réversion est cristallisée (définitive) trois mois après le départ en retraite. Les droits sont partagés entre ex-conjoints divorcés.• Plafond mensuel de cumul autorisé pour une liquidation en 2015 entre revenus personnels du survivant et réversion Sécu du défunt. Le plafond est trimestriel (calculé au mois ici) :- personne seule (2080 heures/Smic au

1er janvier) : 1 665 € ;- pour un couple (1,6 fois le montant

personne seule) : 2 665 €. Si la réversion dépasse le plafond, elle est réduite d’autant.Certaines ressources sont exclues : - les revenus d’activité et de

remplacement de l’assuré décédé ;- les pensions de réversion versées par

un régime de retraite complémentaire obligatoire (Arrco, Agirc, Ircantec) ;

- les revenus du patrimoine (valeurs mobilières ou revenus immobiliers) acquis du chef du conjoint décédé ou par le ménage, y compris ceux obtenus en héritage par le conjoint décédé ou réservés par contrat de mariage. Les revenus d’activité du conjoint survivant font l’objet d’un abattement de 30%. • Minimum de réversion : 283,87 € pour 60 trimestres validés (proratisés si moins de 60 trimestres).• Majoration pour enfants : elle est de 10% si son bénéficiaire a eu ou élevé au moins trois enfants à sa charge ou à celle de son conjoint. • Majoration pour enfant à charge : 96,30 € par mois (proratisée en cas d’écrêtement de la réversion). Enfant de moins de

16 ans ou moins de 18 ans s’il est en apprentissage ou moins de 20 ans s’il poursuit des études ou est handicapé. Etre âgé de moins de 65 ans à la date de la demande de la pension de réversion et ne pas être titulaire d’un avantage personnel de vieillesse. • Majoration de pension de réversion : Attribuée dès les conditions remplies. La pension de réversion est majorée de 11,1% (égal au passage de 54 à 60% pour ces basses pensions de réversion), si au moins 65 ans et si tous les droits à retraite demandés. Le montant total des retraites ne doit pas dépasser un plafond de ressources de 853,24 € par mois. En cas de dépassement, la majoration est réduite.

RÉVERSION ARRCO-AGIRC• Conditions : marié et non remarié. À partir de 55 ans à l’Arrco et 60 ans à l’Agirc ; ou avant si deux enfants à charge ou invalide.• Calcul : pension égale à 60% des droits du conjoint décédé. Droits partagés entre ex-conjoints divorcés non remariés selon la durée du mariage.

RÉVERSION IRCANTEC• Conditions : si marié entre deux et quatre ans selon le cas (sauf si enfants) et non remarié et plus de 50 ans, ou deux enfants à charge, ou invalide.• Calcul : pension égale à 50% des droits du conjoint décédé. Droits partagés entre ex-conjoints divorcés non remariés.

RÉVERSION FONCTIONS PUBLIQUES• Conditions : si marié depuis un certain temps (sauf si enfants) et non remarié, ou deux enfants à charge, ou invalide.• Calcul : pension égale à 50% des droits du conjoint décédé. Droits partagés entre ex-conjoints divorcés non remariés.

Pensions de réversionAllocation personnalisée autonomie (APA)

Franchises médicales Franchise par boîte de médicament et par acte paramédical de 0,50 €, et par transport sanitaire de 2 €. Plafond journalier de 2 € pour les paramédicaux, et 4 € pour les transports. Plafond annuel de 50 €. Non remboursable par la complémentaire santé. Sont exonérés les moins de 18 ans, les bénéficiaires de la CMU-C, les femmes enceintes de plus de 6 mois.

Forfait hospitalier Forfait de 18 € en hôpital ou clinique, 13,50 € dans un service psychiatrique. Sont exonérés, entre autres, les bénéficiaires de la CMU complémentaire, de l’aide médicale de l’État, les pensionnés de guerre avec un taux d’invalidité supérieur à 85%.

Participation forfaitaire Participation forfaitaire d’1 € par consultation médicale et par acte de biologie médicale avec un plafond de 50 € annuel non remboursable par la complémentaire santé. Sont exonérés les moins de 18 ans, les femmes enceintes de plus de 6 mois, les bénéficiaires de la CMU complémentaire et les bénéficiaires de l’aide médicale de l’État.

Forfait 18 € Participation de 18 € par un acte médical supérieur à 120 € (20% en-dessous).

Assurance maladie

Précision : Les informations sur la retraite et la réversion Sécu concernent le régime général et les salariés agricoles (MSA). Les montants sont arrondis à l’euro.

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L’interminabledébatsurlafindevieAvec La dernière leçon, la littérature et le cinéma s’emparent de la délicate question de la fin de vie. Certains militent pour une assistance active à mourir, d’autres sont contre. Les multiples rebondissements du cas de Vincent Lambert en témoignent. La loi Clayes-Leonetti, qui crée de nouveaux droits pour les malades, adoptée par l’Assemblée le 6 octobre, est une avancée, mais permettra- t-elle d’apaiser les esprits ? [ Danielle Rived

Si je refuse tout prélèvement d’organes le jour de mon décès, j’ai la possibilité de m’inscrire sur le registre national des refus auprès de l’agence de la biomédecine. J’aurai, dès lors, l’assurance de ne pas être prélevé. Si au contraire, je suis pour le don d’organes, je dois porter sur moi ma carte de donneur d’organes et le signaler à mes proches pour qu’ils puissent témoigner de ma volonté

Le don d’organes

Un film de Pascale Pouzadoux avec Sandrine Bonnaire et Marthe Villalonga d’après le livre de Noëlle Châtelet.

Le scénario : Madeleine (92 ans), engagée dans un combat moral et citoyen pour le droit à une aide active à mourir, décide de fixer la date et les condi-tions de sa disparition. En l’annonçant à ses enfants et à ses petits-enfants, elle veut les préparer aussi doucement que possible à sa future absence, mais pour eux, c’est le choc et les conflits s’enflam-ment. Diane, sa fille, en respectant son choix, partagera dans l’humour et la complicité ces derniers moments. Par ses aspects comiques, cette comédie dramatique a la dimension populaire propice à mettre le débat sur la place publique.

Le livre : La dernière leçon est le témoignage que Noëlle Châtelet a publié en octobre 2005. Elle raconte le suicide de sa mère, Mireille Jospin, mili-tante de l’ADMD (association pour le droit à mourir dans la dignité) qui mit fin à ses jours le 5 décembre 2002. L’ouvrage a eu le prix Renaudot des lycéens en 2004.

(deuxième lecture à l’Assemblée le 5 octobre 2015) fait toujours débat, voir les 400 amendements qui ont été déposés lors de cette deuxième lecture, entre ceux qui prônent « une assistance active à mourir » et ceux qui considèrent que cette loi est « un premier pas vers l’euthanasie ». La loi votée permet une sédation profonde en fin de vie et elle rend les directives anticipées écrites par le patient contraignantes. Elle prône « le laisser mourir », mais elle ne lève pas l’ambiguïté pour « une aide à mourir à la personne ».

La loi Claeys-Leonetti

Après sept ans de coma, des juridictions favo-rables pour suspendre son alimentation (arrêts du Conseil d’État et de la Cour européenne des droits de l’Homme), Vincent Lambert est toujours maintenu artificiellement en vie. La famille, les parents, les frères, son épouse se disputent la décision. Cela pose la question de savoir qui est responsable de la décision ? Après les juge-ments, le docteur en charge du patient avait lancé une nouvelle procédure pour l’arrêt des soins. Procédure qu’il a annulée suite aux pressions. Le tribunal administratif de Châlons-en-Cham-pagne du 9 octobre 2015 vient de décider que c’était au médecin de choisir. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a déclaré « qu’aucune cour de justice n’impose à un hôpital d’arrêter des traitements, c’est à la structure hospitalière de prendre la décision ». D’autres procès sur des cas de fin de vie se multiplient : procès contre des médecins ou des individus qui ont aidé une personne à mourir.

L’affaire Lambert

La dernière leçon

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L a perte d’un parent, même quand on y est pré-paré, est toujours une épreuve et une souffrance. Mais perdre son parent ne signifie pas obligatoire-

ment la perte de son engagement envers les personnes du grand âge. C’est même parfois salutaire pour mieux vivre son deuil. De plus, cet engagement peut concerner notre propre devenir et celui des futures générations.Être un aidant familial, au domi-cile de son parent ou en établis-sement, est effectivement un engagement. Cela nécessite d’y consacrer un temps important de sa vie personnelle, que l’on soit retraité ou en activité profession-nelle, et beaucoup d’énergie.Cet engagement amène nombre d’aidants à s’intéresser aux rela-tions avec les accompagnants professionnels, aux situations des autres personnes âgées en perte d’autonomie, au fonction-nement du médico-social… Cer-tains aidants s’investissent au sein d’un conseil de la vie sociale (CVS), d’un centre local d’information et de coordination (CLIC), d’un comité départemental des retraités et per-sonnes âgées (Coderpa), d’un centre communal d’ac-tion sociale (CCAS) ou d’une association de bénévoles.

Expérience, savoir-faire et transmissionLe plus souvent, ces personnes ont déjà une culture mili-tante syndicale et associative. Se consacrer, pendant dix à quinze ans, parfois plus, à la cause des proches âgés, voire très âgés, permet aussi d’acquérir une solide expé-rience. Cette connaissance, ces savoir-faire gagnent à être poursuivis et au moins transmis. Gilbert Billon de la CFDT, après le décès de son épouse, a continué à ani-mer pendant des années l’association des familles de malades à l’hôpital gériatrique de Limeil-Brévannes, forte

de 40 adhérents. « D’autres membres dans la même situa-tion que moi ont continué. C’était une condition de survie de l’association et le moyen de mettre dans le coup des usagers non militants. Mon savoir-faire syndical m’a alors été très utile », précise-t-il. En revanche, les élus ou présidents de CVS vivent mal qu’au décès d’un de leurs parents certains directeurs leur demandent de mettre fin à leur mandat, alors qu’ils ont été élus par et pour l’ensemble des usagers et non pour leur proche. En cas de décès de son parent, il n’y a aucune disposition légale à ne pas mener son mandat à terme. D’autant que la durée de vie des résidents en établisse-ment se réduit. Pourquoi se priver de compétences aussi

précieuses pour le bien-être et la bientraitance des per-sonnes vulnérables ?

Une démarche positiveAvec un groupe d’élus de la Maison de retraite intercom-munale de Fontenay-sous-Bois de la Fondation Favier dans le Val-de-Marne, Arielle Corbani s’est battue pour que le président du CVS puisse rester en fonction jusqu’aux prochaines élections après le décès de son proche. Elle-même, devenue présidente, a poursuivi cette fonction mal-gré une situation identique. Mieux, l’ancien président est

devenu un « expert » au sein des quatre établissements du groupe public. Cet état de fait a provoqué la rédaction d’un règlement intérieur du CVS, qui était inexistant jusque-là, dans lequel cette nouvelle disposition a été intégrée. « Cette évolution nous permet d’intervenir sur le terrain et de conseiller les familles, explique Arielle. Et surtout, d’assurer la transmission aux nouveaux membres ou can-didats. Cet appui est essentiel compte tenu des difficul-tés à trouver des candidats et le manque d’expérience »Bien sûr, les élus qui ne souhaitent pas poursuivre leur mandat sont à respecter. Nombre d’entre eux sont épui-sés et saisissent l’occasion pour vivre autre chose ou autrement. [ Jacques Rastoul

(1) http://eluscvs91.over-blog.com

Lorsqu’on s’est consacré pendant des années à la bientraitance des personnes âgées vulnérables à domicile ou en établissement, comment vivre après la perte d’un proche ? Poursuivre son engagement, transmettre son expérience ou vivre autre chose ?

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Se consacrer à la cause des âgés, voire des très âgés permet d’acquérir une solide expérience.

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«Z éro soin de force (sans abandon de soin), res-pect de la singularité et de l’intimité de la per-sonne, vivre et mourir debout, ouverture de la

structure vers l’extérieur, être des lieux de vie et des lieux d’envies » sont les principes traduits en objectifs par la philosophie de l’Humanitude. Les attitudes de soin à l’égard des patients âgés sont modifiées, les discrimina-

tions liées à l’âge sont combat-tues, l’abus de médicaments aussi. Les personnes les plus atteintes par un handicap ou une maladie neuro-dégénéra-tive sont les plus concernées.Un grand nombre de situations de la personne en perte d’au-tonomie ont été évoquées et débattues au cours du colloque les 12 et 13 novembre 2015 à Paris. Citons notamment les pièges du huis clos à domicile, source de maltraitance. Mais aussi les effets positifs de la musicothérapie sur le cerveau chez les personnes atteintes de

troubles cognitifs. Autre exemple : la méthode Montessori qui préconise une approche globale de l’accompagne-ment centrée sur la personne et la communauté. Celle-ci permet aux professionnels et aux bénévoles d’utiliser des

Prendre soin avec respect des personnes âgées en perte d’autonomie,

tel est le défi relevé par les approches non médicamenteuses. La formation et

le label « Humanitude » sanctionnent les pratiques innovantes de la bientraitance.

Ces évolutions sont encore loin d’être appliquées dans l’ensemble des

secteurs du médico-social et sanitaire.

Au cours du 8e colloque de formation professionnelle de l’Humanitude organisé par les instituts Gineste-Marescotti et le site Agevillage (1), 1 200 professionnels du médico-social et du sanitaire ont découvert ou approfondi des pratiques pour faire vivre la bientraitance. Huit cents établissements et services à domicile ont déjà choisi cette formation, 50 se sont engagés vers le label « Humanitude » et quatre sont labélisés.(1) www.agevillagepro.com/actualite-12608-1-colloque-de-formation-professionnelle-sur-les-approches-non-medicamenteuses-12-et-13-novembre-2015-a-paris.html

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capacités préservées d’un patient. La professionnalisation du plaisir de manger est aussi importante. On parle de gastronomie gériatrique, de repas personnalisés, de nou-velles techniques de préparation des plats pour prévenir les troubles de la déglutition. « Mixer moins pour mieux restaurer les aînés », devient un autre axe de la bientrai-

tance. L’organisation du travail a été également pointée. « Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont sensibles aux ambiances, aux ruptures de rythme. Pour éviter les angoisses et les troubles du comportement, il faut organiser le service comme une suite de tranches de vie continues ». D’autres savoir-faire et techniques ont été mis en avant. Tout un programme de pratiques audacieuses. [ Jacques Rastoul

Si les salariés ont envie de mettre en œuvre une qualité des soins, force est de constater que les moyens ne sont pas à la hauteur des pathologies de plus en plus lourdes en Ehpad. L’absentéisme et le turn-over important sont des indicateurs de mal-être au travail. Ils ont un impact négatif sur la qualité des prestations. La formation initiale n’intègre pas ou peu les approches non médicamenteuses. L’accès à la formation professionnelle est inégal selon la taille des entreprises. Son évolution est actuellement retardée dans le secteur privé lucratif par la CGT qui a dénoncé un accord de

branche. Les compétences professionnelles acquises sont insuffisamment reconnues. Les usagers constatent encore trop souvent le décalage entre les objectifs de la qualité et la réalité.La charge de travail est telle que les employés ont peu de temps à consacrer à un résident. Cela ne permet pas relations détendues pour écouter, parler, échanger en dehors des tâches habituelles. L’encadrement est de plus en plus absorbé par la gestion administrative et commerciale. L’absence du volet 2 de loi vieillissement pour les établissements est encore un obstacle.

Les moyens et les pratiques ne suivent pas

LespasseursLoin du « passeur » qui en Méditerranée conduit vers l’exil ceux qui mettent leur destin entre ses mains, le mot qui nous est familier a un tout autre sens. Et c’est heureux ! Le passeur est celui « qui conduit un bac ». Un pont naviguant entre deux rives d’une vie. Qui donc n’a pas ressenti que, le temps ayant passé, du plus jeune, il est devenu le plus âgé de son service, de son entreprise, de son métier ? Quoi de plus naturel alors que de nous retourner sur nous-mêmes ?« Est-ce qu’à un moment donné, j’ai pu, je tiens ou je jouerai plus tard ce rôle du passeur ? Et que vais-je faire de tout ce que j’ai appris sans avoir eu le temps de le passer. Est-ce voué à l’oubli ? » C’est un grand moment de solitude pour ceux qui l’ont vécu. Mais rien n’est perdu. Le passeur se révèle aussi ailleurs puisqu’il y a la famille, les loisirs, le bénévolat, une nouvelle activité professionnelle et ce temps qui passe… Il n’est jamais trop tard pour s’accomplir. Un certain nombre d’entre nous y sont arrivés. Ils forcent même l’admiration, le respect et la reconnaissance de ceux qui ont appris.

[ Max UrvoisMédiateur professionnel

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1 200 professionnels du médico social ont voulu se former à la bientraitance.

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A lfred Nobel, créateur éponyme de ce prix, est né en 1833 à Stockholm. Génie créatif exceptionnel, il dépose tout au long de sa vie des centaines de

brevets. Son invention la plus importante concerne l’uti-lisation de la nitroglycérine, explosif instable et très dan-gereux. Il l’incorpore à une terre siliceuse et ce mélange forme une pâte, qu’il nomme « dynamite ». Nobel exploite ses découvertes en industriel avisé. Cosmopolite, il parle plusieurs langues et vit successivement en Russie, en Allemagne, en France, en Italie. Son ami, Victor Hugo, le décrit comme « le plus riche vagabond d’Europe ». En effet, Nobel possède, à sa mort en 1896, une fortune considé-rable. Le chimiste suédois, sans héritiers, rédige un tes-tament altruiste : « Sa fortune constituera un fonds dont l’intérêt devra être annuellement distribué à ceux qui, pen-dant l’année précédente, auront apporté les plus grands bienfaits à l’humanité. »

Prix et nobélisésUne fondation est créée pour gérer la fortune et mettre en œuvre l’attribution des récom-penses décidées par Alfred Nobel. Le 10 décembre, jour anniversaire de son décès, les prix de physique, chimie, médecine, littérature sont remis à Stockholm, le prix de la paix à Oslo, en présence des rois de chaque pays au

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Le 10 décembre de chaque année, et depuis leur création en 1901, sont remis les prix Nobel qui font accéder leurs récipiendaires à une notoriété mondiale.

Alfred Nobel : l’inventeur de la dynamite et du Prix qui porte son nom.

cours d’une cérémonie à l’étiquette rigoureuse. (À la mort d’Alfred Nobel, les deux pays scandinaves étaient réunis sous la même couronne, ce qui explique le partage des récompenses entre les deux capitales actuelles). Dans le testament, Nobel précise que les bénéficiaires doivent être vivants, qu’un prix peut être partagé mais entre trois per-sonnes au maximum et qu’une association peut aussi en être bénéficiaire. Chaque prix consiste en une médaille, un diplôme et un chèque qui, en 2015, s’élève à 860 000 €.En 1969, la Banque Centrale de Suède institue, pour célébrer ses trois cents ans, un sixième prix qu’elle finance chaque année : le prix de science économique « en mémoire d’Al-fred Nobel ». Des voix s’élèvent souvent contre ce tour de passe-passe et souhaitent dissocier le prix d’économie des prix Nobel aux motifs que l’économie n’est pas une

science expérimentale et qu’elle est étroitement liée aux options politiques de ses praticiens. Mais la fondation Nobel a accepté que l’attribution de ce prix se fasse au cours de la même cérémonie que les cinq prix d’origine.En plus de cent ans d’existence, les prix Nobel ont distingué 900 per-sonnes ou organisations. Certains l’ont reçu plusieurs fois, comme Marie Curie, physique puis chimie, ou la Croix Rouge, trois fois lauréate pour le prix Nobel de la paix. La France avec 15 écrivains distingués est le pays qui a le plus grand nombre de Nobel de littérature. Le Nobel de

la paix, qui n’a pu être décerné certaines années, revêtait pour son fondateur une importance particulière : il pensait que la dynamite par sa force dissuasive de destruction mettrait fin aux guerres… Mais si l’espoir de Nobel en un monde pacifié ne s’est pas réalisé, en revanche, depuis plus d’un siècle et tous les ans, ses prix distinguent les personnes ou les associations qui ont apporté « un bien-fait » à l’humanité. [ Françoise Berniguet

LesprixNobel

En 2015, ce sont une organisation et dix personnalités, originaires de quatre continents et de huit pays, qui se sont vu remettre à Stockholm et à Oslo les prix institués par Alfred Nobel.• Physique : Takaaki Tajita (Japon) et Arthur Mac Donald

(Canada).• Chimie : Thomas Lindahl (Royaume-Uni) – Paul Modrich (USA)

– Aziz Sancar (USA).• Médecine : William C. Campbell (Irlande) – Satoshi Omura

(Japon) – Youyou Tu (Chine).• Littérature : Svetlana Alexievitch (Biélorussie).• Paix : Le quartet, parrain du dialogue national tunisien

pour la transition démocratique.• Economie : Angus Deaton (Royaume-Uni).

RepèresRemise du prix Nobel de la Paix au quartet du dialogue national en Tunisie.

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ursPermis de construire

« Nous vivrons ce que nous changerons ! ». Laurent Berger reprend ici ce célèbre slogan de la CFDT. Une sorte d’évidence marquée par l’expérience. C’est tout l’enjeu de cet ouvrage. Le syndicalisme est actif tous les jours dans les entreprises. Il procure des résultats. Mais la présence ne suffit pas. La méthode et l’engagement des militants sont essentiels.Selon le secrétaire général de la CFDT, on n’a pas

d’autres voies que le dialogue social, qui doit être à la fois créateur de droits attachés à la personne et permettre que les représentants des salariés aient une vision sur ce qui va se passer dans leur entreprise, dans leur secteur professionnel. Les mutations du monde sont considérables :

numérique, démographique, écologique. Mutations du travail lui-même avec d’autres formes qui se développent. « Face à cela, le syndicalisme a toujours sa place. Et le progrès social est toujours possible à condition qu’on regarde la réalité en face », affirme Laurent Berger. Fustigeant les déclinistes en tous genres, qui se réfugient dans « C’était mieux hier », pour ne pas construire demain, Laurent Berger est convaincu que « le syndicalisme est toujours une idée d’avenir à condition qu’on n’en fasse pas seulement des slogans, mais quelque chose d’ancré dans la vie des tous ». [ Daniel Druesne

Permis de construire. Nous vivrons ce que nous changerons. Laurent Berger. Editions Tallandier. 192 pages. 15,50 €.

Blabla Banque. Le discours de l’inactionCe livre vise à déconstruire le discours du lobby bancaire à l’encontre des réformes bancaires et prudentielles dont il s’acharne le plus souvent à limiter la portée. Le livre s’appuie sur la grille d’analyse proposée par Albert Hirschman dans Deux siècles de rhétorique réactionnaire dans lequel sont décrits « trois refrains de la rhétorique réactionnaire » : l’effet pervers (« le remède est pire que le mal ») ; l’inanité (« cela ne sert à rien ») ; la mise en péril (« ceci tuera cela »). Hirschman s’intéressait aux réformes politiques et sociales. Couppey-Soubeyran transpose cette grille aux réformes bancaires. La démonstration est plutôt réussie tant le lobby bancaire est parfois caricatural. Le troisième argument vise à faire prendre en compte le fait que l’économie pâtirait des règles mises en place,

pour renforcer la sécurité du secteur bancaire et à faire passer la réglementation pour un étau. La stabilité financière mettrait en péril la croissance ? Il y a plutôt lieu de s’interroger quand un secteur bancaire pèse 4 à 5 fois de plus que le PIB sans être pour autant un véritable moteur de l’investissement des entreprises. Pour conclure, l’auteure appelle à

une plus grande transparence des données bancaires avec la création d’un « répertoire des données bancaires et financières » et à un équilibre subtil avec une réglementation qui protège sans déresponsabiliser. Pour qui s’intéresse aux rôles des banques dans l’économie et à la stabilité financière, ce livre est à lire et à méditer. [ Jean-Pierre Moussy

Blabla Banque. Le discours de l’inaction. Jézabel Couppey-Soubeyran. Éditions Michalon. 261 pages. 19 €.

La fraternité réhabilitéeQue reste-t-il de l’esprit du 11 janvier ? Y a-t-il une alternative à la peur et aux logiques sécuritaires ? Patrick Viveret réhabilite avec passion cette oubliée de la République : la fraternité. La fraternité loin d’une approche sentimentale conduit à une laïcité et à une spiritualité ouverte. Bien différente de la « démocratie de compétition », elle peut réinventer la politique. Faites de la fraternité ! Boîtes à idées d’initiatives, nouveau pacte social…, le philosophe donne des outils aux citoyens.

Fraternité, j’écris ton nom ! Patrick Viveret. Éditions Les liens qui libèrent, 192 pages. 15,50 €

Le Maigret de la santéL’homme de l’infiniment petit, microscope à l’appui, le vainqueur de la rage, le pionnier de la microbiologie, c’est Louis Pasteur. Erik Orsenna nous fait pénétrer dans la vie de ce savant. Ses recherches toujours à l’œuvre ont des retombées mondiales sur la santé. Élève médiocre, fils de tanneur, une enfance à Arbois dans le Jura, Louis se réveille peu à peu. Sa vie rivée au microscope le conduira de découvertes en découvertes.

La Vie, la Mort, la Vie. Louis Pasteur. Erik Orsenna. Éditions Fayard. 18 €.

NOTESDELECTURE[ Par Jacques Rastoul

—Parce que la personne est au cœur de nos préoccupations, nous concevons l’engagement social comme un métier à part entière.

Sur tous les territoires, nous agissons pour une société responsable et solidaire face aux défis sociétaux d’aujourd’hui :• soutenir les personnes fragilisées par les aléas de la vie parce

que chacun a droit à une attention particulière ;• concevoir des actions de prévention parce que la santé doit

être une priorité ;• accompagner sur le long terme des projets en matière d’habitat

parce que disposer d’un lieu de vie adapté à ses besoins est fondamental.

Nous consacrons chaque année 100 millions d’euros pour servir l’intérêt général.

Pour en savoir plus : www.ag2rlamondiale.fr

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