Tutelle Et Contrôle Juridictionnel MP

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De la tutelle administrative sur les marchés publics en Région wallonne et autres réflexions sur le contrôle juridictionnel de la passation des marchés publics 1 Pr. Dr. AL Durviaux, Ulg., avocat et D. Fisse, assistant à l’Ulg, avocat 1. Introduction Dans le cadre d’une procédure de passation d’un marché public, la décision du pouvoir adjudicateur d’attribuer le marché et la notification de cette décision au soumissionnaire choisi constituent deux moments essentiels. Par la décision d’attribution qui clôture la phase administrative de la procédure de passation, le pouvoir adjudicateur opère son choix. Par la notification de cette décision d’attribution, le contrat se noue entre le pouvoir adjudicateur et le soumissionnaire choisi 2 . 1 Voyez à ce sujet notamment J. HERBOTS, « Contrat sous condition suspensive : conséquences de la faute commise par une partie « pendente conditione » », note sous Cass., 5 juin 1981, R.C.J.B., 1983, pp. 207 et ss. ; X. DIEUX, « Des effets de la tutelle d’approbation sur les contrats conclus avec une autorité publique subordonnée », note sous Cass., 5 juin 1981, A.P.T., 1984, pp. 145 et ss. ; M-A. FLAMME, Droit administratif, Bruylant, Bruxelles, 1989, t 2, pp. 814 et ss. ; P. THIEL, « Les recours des tiers dans les marchés publics : éléments de jurisprudence », J.T., 1997, pp. 329 et ss. ; A. DELVAUX, « Les recours dans le cadre du contentieux de l’attribution d’un marché public », in C.D.V.A., « La nouvelle réglementation des marchés publics », Journée d’étude du jeudi 6 mars 1997, Ed. Col. scient. Fac. droit Liège, 1997, pp. 255 et ss. et spéc. pp. 349 et ss. ; P. GOFFAUX et M. LUCAS, « Des effets sur le contrat de l’annulation par le Conseil d’Etat de la décision d’attribuer un marché public », A.P.T., 1998, pp. 56 à 70 ; Y. HANNEQUART et A. DELVAUX, « L’attribution d’un marché public et les recours judiciaires autres que l’action en dommage et intérêts », E.D., 1998, pp. 312 et ss. ; D. BATSELE, Ph. FLAMME et Ph. QUERTAINMONT, Initiation aux marchés publics, Bruylant, Bruxelles, 2001, 2 ème éd., pp. 373 et ss. et pp. 391 et ss. ; P. GOFFAUX, « Les pontons mosans – Incidence sur le contrat de l’annulation par l’autorité de tutelle de la décision d’attribution d’un marché public, fait accompli et enrichissement sans cause », obs. sous Cass., 14 décembre 2001, E.D., 2002, pp. 349 et ss. ; P. THIEL, Mémento 2009 des marchés publics, éd. Kluwer, Waterloo, 2008, pp. 589 et ss. 2 Voyez article 117 de l’arrêté royal du 8 janvier 1996 relatif aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services et aux concessions de travaux publics ; article 105 de l’arrêté royal du 10 janvier 1996 relatif aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services dans les 1

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Objet

De la tutelle administrative sur les marchs publics en Rgion wallonne et autres rflexions sur le contrle juridictionnel de la passation des marchs publics

Pr. Dr. AL Durviaux, Ulg., avocat et D. Fisse, assistant lUlg, avocat

1. Introduction

Dans le cadre dune procdure de passation dun march public, la dcision du pouvoir adjudicateur dattribuer le march et la notification de cette dcision au soumissionnaire choisi constituent deux moments essentiels. Par la dcision dattribution qui clture la phase administrative de la procdure de passation, le pouvoir adjudicateur opre son choix. Par la notification de cette dcision dattribution, le contrat se noue entre le pouvoir adjudicateur et le soumissionnaire choisi.

Communes, provinces, intercommunales sont quotidiennement confrontes des procdures de passation de marchs publics.

En Rgion wallonne, la dcision dattribution quelles prennent dans ce cadre est soumise la tutelle gnrale dannulation organise par les articles L 3121-1 et suivants du Code wallon de la dmocratie locale et de la dcentralisation.

Dans la mesure o elle mane dune autorit administrative et est susceptible de faire grief, cette dcision dattribution peut galement faire lobjet dun recours en annulation et en suspension devant le Conseil dEtat. Lhypothse ne sera pas rare, loin sen faut, tant la dcision dattribution va videmment retenir lattention des soumissionnaires et spcialement, dans cette perspective, celle des soumissionnaires sur lesquels le pouvoir adjudicateur na pas port son choix.

Thoriquement donc, il se peut que la dcision dattribution du march soit notifie au soumissionnaire retenu avant que la dcision de lautorit de tutelle nintervienne ou que larrt du Conseil dEtat ne soit prononc. Le plus souvent mme, le contrat ainsi conclu aura dj reu au moins un dbut dexcution voire sera entirement excut lorsque la dcision de tutelle sera prise ou larrt du Conseil dEtat prononc.

Quadviendra-t-il de ce contrat et des obligations qui en rsultent, si lautorit de tutelle ou le Conseil dEtat dcide de suspendre ou dannuler la dcision dattribution prise par le pouvoir subordonn?

Tel est lobjet de la prsente contribution. Elle passe par un rappel des caractristiques de la tutelle dannulation (I), des implications des recours en suspension et en annulation qui peuvent tre introduits devant le Conseil dEtat (II). Les nouveauts introduites par la loi du 16 juin 2006 et par la directive 2007/66/CE et, dautre part, un arrt du 18 juillet 2007 de la Cour de Justice des Communauts europennes, susceptibles dclairer dun jour nouveau la problmatique analyse sont mises en avant. Une conclusion synthtique terminera le propos (III).

I. De lannulation de la dcision dattribution dun march public par lautorit de tutelle, en Rgion wallonne

A. Rappel de quelques principes applicables en matire de tutelle gnrale dannulation

2. Le Code de dmocratie locale et de dcentralisation

Larticle L 3122-1, CDLD nonce qu lexception de ceux qui sont soumis une tutelle dapprobation, tous les actes des communes, provinces et intercommunales vises larticle L 3111-1, 1er, CDLD sont soumis la tutelle dannulation.

Il en est ainsi de la dcision dattribution prise par le Collge communal, le Collge provincial ou encore par le conseil dadministration dune intercommunale dans le cadre dune procdure de passation dun march public, ds lors que cette dcision ne figure pas parmi les actes numrs limitativement qui sont soumis la tutelle spciale dapprobation.

3. Les caractristiques de la tutelle dannulation

La tutelle dannulation est une tutelle gnrale en ce quelle concerne lensemble des actes de lautorit subordonne, sauf exception.

Elle est facultative ds lors que lautorit de tutelle nest pas oblige de lexercer, mme dans les hypothses dans lesquelles le pouvoir subordonn a lobligation de lui transmettre sa dcision.

Elle sexerce a posteriori, soit aprs que lacte susceptible dtre contrl ait t pris.

Elle opre comme une condition rsolutoire. Si lautorit de tutelle annule lacte de lautorit subordonne, celui-ci sera cens ne jamais avoir exist. Il disparat de lordonnancement juridique.

Elle permet lautorit de tutelle de contrler lacte de lautorit subordonne au regard tant de la loi que de lintrt gnral.

4. Lautorit comptente pour exercer la tutelle dannulation

La tutelle gnrale dannulation est exerce par le Gouvernement wallon qui, en lespce, a dlgu sa comptence au Ministre des Affaires Intrieures et de la Fonction publique. Linstruction du dossier est toutefois confie ladministration qui clture son examen par un rapport de synthse et un avis.

Sur cette base, lautorit de tutelle peut prendre une dcision qui doit tre formellement motive.

5. La notification de la dcision de tutelle aux intresss

A peine de nullit, cette dcision doit tre notifie au plus tard le jour de lchance du dlai de tutelle, lautorit subordonne concerne et le cas chant, aux intresss.

Le Code de la dmocratie locale et de la dcentralisation ne prcise pas qui sont ces intresss.

Cette notion provient de larticle 7 du dcret du 1er avril 1999 organisant la tutelle sur les communes, les provinces et les intercommunales de la Rgion wallonne. Les travaux prparatoires de ce dcret prcisaient initialement, dans lexpos des motifs prcdant le projet de dcret: Cest essentiellement dans la tutelle gnrale dannulation que des personnes sont susceptibles dtre concernes par la notification dune dcision de lautorit de tutelle. Dans ce cadre, sont considrs comme intresss: - les conseilles communaux ou provinciaux ainsi que les associs des intercommunales qui ont introduit un recours auprs de lautorit de tutelle; - Les agents de ces entits qui ont introduit un recours auprs de lautorit de tutelle.

Cette prcision a t supprime par la suite.

Dans le cadre de lexamen dun addendum au rapport annuel 2007-2008 relatif lexercice de la tutelle, Monsieur VERLAINE, Inspecteur Gnral la Direction Gnrale des Pouvoirs Locaux prcisait toutefois: LAdministration rpond trois catgories de personnes. Dune part, les intresss et lintervenant renvoient pour cela la dfinition au sens des lois coordonnes sur le Conseil dEtat, savoir la personne qui dispose dun intrt personnel. Dautre part, les rclamations politiques. A cet gard, lAdministration doit exercer une fonction qui sapparente de la mdiation politique, ce qui lui parat dangereux. Une rflexion devrait tre mene ce sujet. Enfin, les citoyens qui ne sont pas intresss mais qui contestent des actes.

Le tiers intress serait donc la personne disposant dun intrt personnel au sens des lois coordonnes sur le Conseil dEtat. La jurisprudence du Conseil dEtat reconnat assez largement lintrt des socits qui ont particip une procdure de passation critiquer ensuite les dcisions prises dans le cadre de celle-ci.

Les entreprises ayant dpos une offre rgulire qui na pas t choisie par le pouvoir adjudicateur disposent dun intrt agir en annulation lencontre de la dcision dattribution du march et doivent donc tre considres comme rentrant dans cette catgorie.

Quen est-il des entreprises qui ont dpos une offre qui a t considre comme tant irrgulire? En pareille hypothse, le Conseil dEtat dcide que dans le cadre dune adjudication ou dun appel doffres, un soumissionnaire dont loffre a t juge juste titre irrgulire est en principe sans intrt demander lannulation de la dsignation de lattributaire du march; quil nen va autrement, au nom du principe dgalit de traitement entre les soumissionnaires, qu lgard des moyens dans lesquels le soumissionnaire cart conteste lapprciation qui a abouti dclarer son offre irrgulire et celle de ses concurrents, dont ladjudicataire, rgulire. Cette jurisprudence parat commander lautorit de tutelle de notifier assez largement sa dcision. En effet, il est dlicat danticiper les critiques qui pourraient tre mises par les entreprises. A vrai dire, cette rfrence la notion dintrt agir devant le Conseil dEtat est dlicate manier pour les autorits de tutelles.

En cas dannulation, lentreprise adjudicataire du march doit galement se voir notifier la dcision de lautorit de tutelle puisquelle aurait un intrt poursuivre lannulation de cette dcision devant le Conseil dEtat.

6. Le dlai dans lequel lautorit de tutelle doit se prononcer

Dans le cadre de la tutelle gnrale dannulation, le dlai dans lequel lautorit de tutelle doit se prononcer est en principe de trente jours dater de la rception de lacte et de ses pices justificatives. Le Ministre a toutefois la possibilit de proroger ce dlai, qui est suspendu entre le 15 juillet et le 15 aot, dune dure maximale de quinze 15 jours.

Il sagit donc dun dlai de rigueur. A dfaut de notification de la dcision du Ministre dans ce dlai, lacte nest plus susceptible dtre annul dans le cadre du contrle de tutelle.

7. Les actes transmissibles et les rclamations

Linitiative de soumettre un acte au contrle de la tutelle dannulation peut tre prise tant par lautorit subordonne elle-mme que par lautorit de tutelle. La tutelle peut encore sexercer la suite dune rclamation.

Depuis la rforme introduite par le dcret du 22 novembre 2007, larticle L 3122-2, CDLD prvoit en outre que certains actes des autorits communales et provinciales doivent tre transmis lautorit de tutelle, accompagns de leurs pices justificatives, dans les quinze jours de leur adoption. Parmi ces actes, limitativement numrs, figurent notamment:

le choix du mode de passation et lattribution des marchs publics de travaux dune part, de fournitures et de services dautre part, dun montant HTVA excdant respectivement 250.000,00 et 200.000,00 en adjudication publique et en appel doffres gnral, 125.000,00 et 62.000,00 en adjudication restreinte, en appel doffres restreint et en procdure ngocie avec publicit et 62.000,00 et 31.000,00 en procdure ngocie sans publicit ;

lavenant apport ces marchs de travaux, de fournitures et de services qui porte au minimum sur 10% du montant initial du march;

lavenant apport ces marchs de travaux, de fournitures et de services dont le montant cumul aux montants des avenants successifs atteint au minimum 10% du montant initial du march.

Les travaux prparatoires du dcret du 22 novembre 2007 ne fournissent pas de renseignements sur lorigine des montants retenus larticle L 3122-2, CDLD. En ralit, ces montants proviennent de larrt du Gouvernement wallon du 17 juillet 1997 relatif au contrle administratif et budgtaire qui dispose en son article 15, 1er, tel que modifi par un arrtdu 16 octobre 2003 :

Par drogation aux dispositions de l'article 14, 2, l'avis de l'Inspecteur des Finances n'est pas requis pour :

()3 des marchs publics pour entreprises de travaux, de fournitures et de services dont le montant de l'estimation ou le montant hors T.V.A. est infrieur aux montants suivants :

adjudicationadjudicationprocedurepublique ourestreinte ounegociee et

appel d'offreappel d'offremarche de gre

generalrestreinta gre

---travaux250.000125.00062.000fournitures200.000125.00031.000services125.00062.00031.000.

La cohrence de ce systme de rfrence nest pas immdiatement perceptible ds lors que le contrle instaur par larrt du 17 juillet 1997 qui nest pas, loin sen faut, propre la matire des marchs publics, sapplique aux projets de dcisions du Gouvernement ainsi qu ceux des services d'administration gnrale de la Rgion. Il ne concerne pas les dcisions des pouvoirs subordonns.

8. Le caractre excutoire des actes transmissibles et la suspension de la notification de la dcision dattribution impose par le lgislateur fdralLarticle L 3122-2, CDLD prvoit en outre que ces actes ne peuvent tre mis excution avant davoir t transmis avec leurs pices justificatives. En dautres termes, tant que la transmission na pas t effectue conformment aux prescriptions du Code, le pouvoir adjudicateur subordonn ne peut pas notifier sa dcision au soumissionnaire retenu et ainsi, conclure le contrat avec celui-ci. Il ne peut pas davantage informer les soumissionnaires vincs quils nont pas t retenus en qualit dadjudicataire.

Toutefois, la communication effectue dans les formes et dlais prvus par le Code ne permettra pas ncessairement au pouvoir subordonn de mettre son acte excution.

Il faut en effet conserver lesprit quen vertu de larticle 6, 1er, VI, alina 4, de la loi du 8 aot 1980 de rformes institutionnelles, lautorit fdrale reste comptente pour fixer les rgles gnrales en matire de marchs publics, ce quelle a fait notamment par le biais de la loi du 24 dcembre 1993 relative aux marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services. Larticle 21 bis, 2, de cette loi, tel que modifi par larticle 3 de la loi du 8 juin 2008 portant des dispositions diverses (II) nonce : Lorsque le march public ou la concession de travaux publics est obligatoirement soumis la publicit europenne lors du lancement de la procdure, le pouvoir adjudicateur communique en mme temps que l'information prvue au 1er :

1 tout soumissionnaire non slectionn, les motifs de sa non-slection ;

2 tout soumissionnaire dont l'offre a t juge irrgulire, les motifs de son viction ;

3 tout soumissionnaire dont l'offre n'a pas t choisie, la dcision motive d'attribution du march.

La communication se fait sans dlai par tlcopieur ou par des moyens lectroniques et est confirme le mme jour par lettre recommande la poste.

Le pouvoir adjudicateur accorde aux soumissionnaires un dlai de quinze jours compter du lendemain du jour de l'envoi par tlcopieur ou par des moyens lectroniques prvu l'alina 2. Les soumissionnaires peuvent endans ce dlai introduire un recours en suspension auprs d'une juridiction, et ce exclusivement, selon le cas, dans le cadre d'une procdure en rfr devant le juge judiciaire ou, devant le Conseil d'Etat, par une procdure d'extrme urgence. En l'absence d'une information crite au pouvoir adjudicateur en ce sens, parvenue dans le dlai accord l'adresse qu'il a indique, la procdure peut tre poursuivie.

Cette obligation de standstill simpose donc dans tous les marchs publics et concessions de travaux publics soumis la publicit europenne lors du lancement de la procdure. Il sagitdes marchs publics de travaux et des concessions de travaux publics dun montant de 5.150.000,00 HTVA, des marchs publics de fournitures dun montant de 206.000,00 HTVAet des marchs publics de services dun montant de 206.000,00 HTVA.

Il pourrait en tre ainsi dun march pass par une commune ou une province. Dans ce cas, outre que celle-ci devra respecter le prescrit de larticle L 3122-2, CDLD, elle devra galement respecter le prescrit de larticle 21 bis de la loi du 24 dcembre 1993.

Concrtement, dans les quinze jours de ladoption de la dcision dattribution du march, celle-ci devra tre transmise avec ses pices justificatives, lautorit de tutelle. Ensuite, le pouvoir adjudicateur devra communiquer aux candidats soumissionnaires et/ou aux soumissionnaires vincs linformation prvue larticle 21 bis, 1et 2 et respecter un dlai de quinze jours avant de notifier la dcision dattribution au soumissionnaire choisi, de manire permettre aux candidats dus dintroduire le recours prvu larticle 21 bis prcit. Ce nest quaprs avoir respect lensemble de ces dispositions que la procdure pourra, le cas chant, tre effectivement poursuivie par la notification de la dcision dattribution ladjudicataire retenu et donc, par la conclusion du contrat.

Si le pouvoir adjudicateur subordonn peut craindre des contestations lgard de la procdure dattribution du march, il pourrait avoir intrt attendre la dcision de lautorit de tutelle avant de communiquer linformation vise larticle 21 bis de la loi du 24 dcembre 1993 et de faire ainsi courir le dlai de standstill. Ainsi, si lautorit de tutelle nannule pas sa dcision dattribution, le pouvoir adjudicateur peut invoquer ultrieurement ce brevet de rgularit et de conformit lintrt gnral dans le cadre dun ventuel recours diligent par un candidat soumissionnaire ou par un soumissionnaire vinc. Si au contraire lautorit de tutelle annule sa dcision dattribution, le pouvoir adjudicateur subordonn aura la possibilit, soit dintroduire un recours contre cette dcision dannulation devant le Conseil dEtat, soit de refaire lacte annul, en purgeant celui-ci de ses vices, avant quun candidat soumissionnaire ou quun soumissionnaire vinc nait lui-mme introduit un recours susceptible, le cas chant, de se rvler victorieux en se fondant notamment sur lirrgularit ventuellement constate par la dcision de lautorit de tutelle. Cette rfection nest possible que pour autant que la dcision dattribution annule nait pas dj t notifie au soumissionnaire choisi, auquel cas, avec la conclusion du contrat qui en rsulte, cette dcision dattribution aura sorti tous ses effets.

Cependant, pour une question de temps, par exemple des contraintes budgtaires ou lies loctroi de subsides, le pouvoir adjudicateur subordonn peut galement souhaiter ne pas attendre la dcision de lautorit de tutelle pour notifier sa dcision dattribution ou, tout le moins, procder linformation vise larticle 21 bis de la loi du 24 dcembre 1993.

Si lobligation de transmettre les dcisions dattribution de marchs publics dun certain montant permet dviter une annulation de tutelle des mois, voire des annes aprs que la dcision ait t prise, il nen reste pas moins que le dlai de 30 jours, prorog ventuellement de 15 jours et suspendu entre le 15 juillet et le 15 aot est suffisamment long que pour permettre la notification de la dcision dattribution et donc la conclusion du contrat avant mme que la dcision de lautorit de tutelle ne se soit prononce. Il est mme possible que le contrat ait dj reu un dbut dexcution voire soit compltement excut lorsque tombe la dcision de tutelle.

Quadvient-il du contrat conclu si lautorit de tutelle dcide dannuler la dcision dattribution?

B. Consquence dune annulation de tutelle sur le contrat conclu par le pouvoir subordonn

9. La comptence exclusive des tribunaux judiciaires pour les contestations qui ont pour objet des droits civils en vertu de larticle 144 de la Constitution

Il est admis que lannulation de la dcision dattribution par lautorit de tutelle ne se rpercute pas directement sur le contrat conclu la suite de la notification de cette dcision dattribution au soumissionnaire retenu. Larticle 144 de la Constitution prvoit en effet que les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des tribunaux. Admettre que lannulation de tutelle emporte lannulation du contrat revient permettre une autorit administrative de trancher (par rpercussion) une contestation ayant pour objet des droits subjectifs civils, en loccurrence ceux rsultant du contrat qui fait la loi des parties en vertu de larticle 1134 du Code civil. Cest donc heurter de plein front la disposition constitutionnelle prcite.

10. La dcision dannulation comme fondement dune action en annulation du contrat ou en dommages et intrts (article 1382 et suivants du code civil)

En revanche, lannulation de tutelle pourrait servir de fondement une action en justice tendant obtenir la remise en cause du contrat ou, tout le moins, des dommages et intrts.

Il est renvoy sur ce point aux dveloppements relatifs aux consquences dun arrt dannulation prononc par le Conseil dEtat lencontre dune dcision dattribution, qui sont repris ci-dessous, et qui pour lessentiel, peuvent tre transposs une annulation de tutelle.

Par rapport un arrt dannulation de la Haute juridiction administrative, quelques spcificits peuvent toutefois tre mises ds prsent en exergue.

En premier lieu, la dcision dannulation prise par lautorit de tutelle est elle-mme une dcision susceptible de faire lobjet dun recours en annulation devant le Conseil dEtat.

Dans le cadre dune procdure judiciaire tendant lannulation du contrat, la lgalit de la dcision de tutelle pourrait galement tre conteste sur pied de larticle 159 de la Constitution qui prcise que les cours et tribunaux n'appliqueront les arrts et rglements gnraux, provinciaux et locaux, qu'autant qu'ils seront conformes aux lois. Si lillgalit de la dcision prise par lautorit de tutelle est constate par le juge, celui-ci en cartera lapplication.

Dans cette hypothse comme dans celle de lannulation par le Conseil dEtat de la dcision de tutelle, il parat difficile de pouvoir fonder sur celle-ci une action judiciaire concernant la validit du contrat ou lobtention de dommages et intrts.

Par ailleurs, si le Conseil dEtat annule la dcision de lautorit de tutelle, il conviendra de se demander si celle-ci peut prendre une nouvelle dcision ou plus prcisment, refaire la dcision annule. Lexercice de la tutelle gnrale dannulation tant facultatif, mme dans les cas o le pouvoir subordonn lobligation de communiquer un acte ou une dcision, le dlai dans lequel lautorit de tutelle doit se prononcer est un dlai de rigueur. En pareil hypothse, il semble que la jurisprudence du Conseil dEtat soit actuellement tablie en ce sens quen cas dannulation de la dcision de lautorit de tutelle, celle-ci est prive de la possibilit de refaire sa dcision dannulation.

Il faut ensuite se souvenir que lannulation de tutelle peut intervenir pour violation de la loi (au sens large) ou contrarit lintrt gnral.

A supposer que lannulation de la dcision dattribution du march fonde sur la violation de la loi et spcialement de la rglementation des marchs publics puisse servir de fondement une action en annulation du contrat n de la notification de la dcision dattribution ou une action en obtention de dommages et intrts, il est permis de douter quil en soit de mme en cas dannulation pour contrarit lintrt gnral.

La rglementation des marchs publics est cense tre connue par le pouvoir local qui se lance dans une procdure dattribution dun march public. Mme si cette rglementation est dune complexit redoutable et sous rserve de brusque changements jurisprudentiels, elle prexiste la mise en uvre de la procdure de passation. Le pouvoir adjudicateur doit donc en prendre connaissance et agir dans le respect de celle-ci. A dfaut, il sait demble quil commettra une faute susceptible de justifier les actions judiciaires prcites.

La notion dintrt gnral, elle aussi, prexiste la mise en uvre de la procdure de passation du march. Au sens de larticle 162 de la Constitution, lintrt gnral est non seulement lintrt de lEtat ou de la Rgion, mais tout intrt auquel lautorit de tutelle accorde une plus grande valeur qu celui poursuivi par la dcision annule. La formule est cependant abstraite et il est dlicat de tracer avec prcision les contours de son contenu ou encore de prvoir celui-ci. Certes les notions de lgalit et dintrt gnral ne se confondent-elles pas, tandis que le contrle au regard de lintrt gnral ne se confond pas avec un contrle dopportunit. Il nen reste pas moins que le plus souvent, tout sera cas despce et il sera alors malais de reprocher au pouvoir public auteur de la dcision dattribution annule par lautorit de tutelle pour contrarit lintrt gnral, une faute pouvant servir de fondement une action en annulation du contrat ou en obtention de dommages et intrts.

Enfin, lannulation de la dcision dattribution par lautorit de tutelle peut avoir des incidences sur le plan des finances communales, en particulier si le pouvoir adjudicateur a dj effectu des paiements en faveur du soumissionnaire avec lequel elle a conclu un contrat, avant que lannulation de tutelle nintervienne.

Larticle L 3131-1, CDLD soumet en effet la tutelle spciale dapprobation du collge provincial ou du Gouvernement, selon les cas, notamment les comptes annuels des communes, des provinces et des intercommunales. Dans ce cadre, lautorit de tutelle peut approuver ou ne pas approuver tout ou partie de lacte soumis son approbation.

En cas dannulation par lautorit de tutelle de la dcision dattribution du march, il est hautement probable que lautorit de tutelle comptente refusera dapprouver le paiement de la dpense se rapportant au contrat conclu la suite de la notification de la dcision dattribution annule. Ce refus dapprobation na pas en lui-mme deffet sur la validit du contrat conclu. Mais en toute logique, il devra amener le pouvoir adjudicateur vouloir rcuprer les montants verss son cocontractant en sollicitant lannulation du contrat, le cas chant par la voie judiciaire.

De son ct, le cocontractant devra assigner le pouvoir adjudicateur sil souhaite obtenir paiement du travail, des fournitures ou des services fournis en excution du contrat conclu.

Il en ira de mme si le receveur communal refuse de payer les montants dus au soumissionnaire en application de la convention conclue (article L 1124-40, CDLD).

Dans ces hypothses, le contentieux judiciaire relatif la validit du contrat ne pose pas de difficult puisquil se noue entre parties.

Le juge ventuellement saisi du litige pourra tre amen devoir trancher de dlicates questions, commencer par celle de la nullit du contrat conclu. Sil annule effectivement le contrat, il devra examiner la question des restitutions en principe en nature, dfaut par quivalent impliques par leffet rtroactif du contrat, qui impose que les choses soient remises dans leur pristin tat et que les parties soient replaces dans la situation qui et t la leur si la convention navait pas exist. Les montants verss au soumissionnaire devront donc tre restitus au pouvoir adjudicateur, tandis que celui-ci devra restituer au soumissionnaire, pour autant que cela soit possible, lobjet de son intervention. Si le contrat vient tre annul, le soumissionnaire ne pourra certes plus se fonder sur la convention pour rclamer paiement des prestations accomplies. Mais il pourra soutenir quen adoptant une dcision dattribution irrgulire la base de lannulation de la convention, le pouvoir adjudicateur a commis une faute au sens des articles 1382 et 1383 du Code civil qui lui cause un dommage et dont il peut solliciter rparation. Le juge pourra toutefois refuser de faire droit cette rclamation, spcialement sil estime que le soumissionnaire a conclu le contrat avec le pouvoir adjudicateur en toute connaissance de lirrgularit commise par celui-ci (et a fortiori si lirrgularit a t commise en vue de favoriser ce soumissionnaire). Dans pareil cas, le soumissionnaire cocontractant pourra encore invoquer son bnfice, titre subsidiaire, la thorie de lenrichissement sans cause. Si le juge a annul la convention pour contrarit lordre public, il lui sera encore loisible de refuser de faire droit la demande du soumissionnaire par application de ladage in pari causa turpitudinis cessat repetitio .II.. De lannulation et de la suspension de la dcision dattribution dun march public par le Conseil dEtat

A.. Rappel de quelques principes applicables en matire de recours en suspension et en annulation pour excs de pouvoir

11. Le recours en annulation contre la dcision dattribution

La dcision dattribution qui mane dune autorit administrative est galement susceptible de faire lobjet dun recours en annulation pour violation des formes substantielles ou prescrites peine de nullit, excs ou dtournement de pouvoir devant la section du contentieux administratif du Conseil dEtat.

Pour tre recevable, ce recours doit tre introduit par toute personne justifiant dun intrt, dans le dlai de 60 jours prvu larticle 4, alina 3, de larrt du Rgent du 23 aot 1948 dterminant la procdure devant la section du contentieux administratif du Conseil dEtat et dans les formes prescrites par les lois coordonnes et par larrt prcit.

Lintroduction dun recours en annulation na pas pour effet de suspendre le caractre excutoire de la dcision dattribution jusquau prononc de larrt, lequel peut intervenir aprs plusieurs annes. Le dlai de recours na pas davantage pareil effet.

La dcision dattribution est donc susceptible dtre notifie au soumissionnaire choisi avant que le juge administratif ne se soit prononc sur sa lgalit. Dans bien des cas, larrt ventuel dannulation interviendra un moment o le contrat est non seulement dj conclu mais en outre, excut.

12. Le recours en suspension

Dans cette perspective, la possibilit dintroduire un recours en suspension lencontre de la dcision dattribution du march, apparat comme capitale.

A la double condition de faire tat de moyens srieux susceptibles de justifier lannulation de lacte attaqu et de dmontrer lexistence dun risque de prjudice grave difficilement rparable en cas dexcution immdiate de celui-ci, le soumissionnaire vinc peut solliciter et obtenir, le cas chant en extrme urgence, la suspension de lexcution de la dcision dattribution du march prise par le pouvoir adjudicateur.

Encore faut-il, pour que cette demande de suspension puisse tre accueillie, quelle intervienne avant la notification de la dcision dattribution au soumissionnaire retenu. Depuis un arrt du 15 juin 2000, la jurisprudence du Conseil dEtat est en effet fixe en ce sens que la demande de suspension introduite postrieurement la conclusion du contrat doit tre rejete. Le Conseil dEtat nonce en effetdans cet arrt prononc en assemble gnrale: Considrant quil a t indiqu plus haut, dans lexpos des faits, que la dcision du 26 aot 1999, par laquelle la partie dfenderesse a attribu le march la s.p.r.l. Bureau dEtude GVE, a t communique cette dernire sous pli recommand le 22 septembre 1999; que cette communication a eu pour effet de faire natre un contrat entre les deux parties prcites; quune suspension de la dcision dattribution du march par le Conseil dEtat nentranerait pas la suspension de ce contrat ds lors que la suspension de lexcution dun contrat est de la comptence exclusive des cours et tribunaux; Considrant ds lors que le prjudice qui, selon les requrants, risque de leur tre caus savoir limpossibilit dfinitive dexcuter le march avec les consquences qui en dcoulent ne peut tre annul ou vit par un arrt de suspension du Conseil dEtat; que cette constatation suffit pour rejeter la demande de suspension.

Cette jurisprudence tait de nature remettre en cause lutilit du recours en suspension lencontre de la dcision dattribution.

Il en est dautant plus ainsi que les chambres francophones interprtent de manire svre la condition du risque de prjudice grave difficilement rparable. Ainsi considrent-elles habituellement que le prjudice financier rsultant pour le soumissionnaire vinc de la non-excution du march, est toujours rparable puisquil peut tre adquatement rpar par lallocation de dommages et intrts. Il nen va autrement que si ce prjudice financier est de nature mettre en cause la viabilit conomique du soumissionnaire. Pour les chambres francophones, la perte dun march mis en concurrence ne suffit pas constituer un prjudice grave difficilement rparable; quen effet, la perte dune commande publique et, ds lors, dune part de march dans le domaine considr, est inhrente toute procdure de mise en concurrence; quelle ne le peut que si elle saccompagne de circonstances particulires dmontrant concrtement, par exemple, quelle risque dempcher la continuation des activits ou mme lexistence de la demanderesse, ou de compromettre lourdement sa rputation ou sa stratgie commerciale dans son secteur dactivit. Exceptionnellement, le risque de prjudice grave difficilement rparable est retenu dans le cas o le soumissionnaire irrgulirement vinc peut invoquer la perte dune chance de se voir attribuer un march de rfrence cest--dire celui dont la raret, lampleur, la complexit de conception ou dexcution, la mise en uvre de techniques particulires ou nouvelles sont susceptibles de confrer son attributaire une rputation toute particulire.

Le lgislateur, pouss dans cette direction par les instances communautaires, a entendu mettre un terme ces inconvnients. Dune part, il a introduit dans la rglementation le dlai de standstill, cens permettre lintroduction du recours en suspension avant la notification de la dcision dattribution du march. Dautre part, il a supprim lexigence de dmonstration de prjudice grave difficilement rparable pour obtenir la suspension dacte dtachable du contrat, terme du moins, puisque la loi du 16 juin 2006 nest pas encore entre en vigueur.

13. Des effets de la suspension et de lannulation

La suspension ordonne par le Conseil dEtat porte sur lexcution de lacte. Elle na pas deffet rtroactif. Tant quelle dure, elle empche le pouvoir adjudicateur de mettre sa dcision dattribution excution.

Lannulation prononce par le Conseil dEtat quant elle, a un effet rtroactif. Lacte annul sera censne jamais avoir exist.

Quen adviendra-t-il alors du contrat rsultant de la notification de la dcision dattribution au soumissionnaire retenu?

B. Les consquences dun arrt dannulation ou de suspension de la dcision dattribution: le contentieux indemnitaire et le contentieux relatif la validit du contrat conclu par le pouvoir subordonn 14. Les notions dillgalit et de faute

Sur la base de la jurisprudence de la Cour de cassation, il est permis de considrer que lillgalit commise par le pouvoir adjudicateur lorsquil a adopt la dcision dattribution illgalit constate par larrt dannulation prononc par le Conseil dEtat est, en principe, constitutive dune faute.

Le soumissionnaire irrgulirement vinc par leffet de cette faute, va pouvoir rclamer au pouvoir adjudicateur, la rparation du dommage quil a subi en suite de celle-ci. Le principe de la rparation par quivalent est admis.

15. La course au contrat: le chemin du rfr

La rparation par quivalent peut toutefois ne pas satisfaire les entreprises dont lobjet social nest pas de faire des procs mais bien de livrer des prestations ou des fournitures.

Aussi, souhaitent-elles trs souvent pouvoir excuter elles-mmes le march ou tout le moins retrouver une chance de lexcuter.

Dans cette perspective, un soumissionnaire a tout intrt, pouvoir obtenir la remise en cause dun contrat conclu illgalement ou bloquer le processus de passation ou dexcution du march.

Les dernires volutions en matire de protection juridictionnelle des soumissionnaires ont logiquement pris le chemin des actions en rfr.

Comme dj indiqu, la suspension de la dcision dattribution du march peut, en principe, tre obtenue dans le cadre dun recours devant le Conseil dEtat, du moins lorsque le march est attribu par une autorit administrative au sens de larticle 14 des lois coordonnes sur le Conseil dEtat (ou devant le juge judiciaire lorsque le pouvoir adjudicateur ou lentit adjudicatrice nest pas une autorit administrative). Tel sera le cas des marchs qui nous occupent. Pour obtenir cette suspension, il faudra notamment que la dcision dattribution nait pas encore t notifie au soumissionnaire retenu et que le requrant tablisse dans son chef un risque de prjudice grave difficilement rparable, ce qui ne sera pas ais spcialement devant les chambres francophones du Conseil dEtat.

Si la suspension est prononce, le pouvoir adjudicateur ne pourra plus mettre excution sa dcision dattribution en la notifiant au soumissionnaire retenu. Le contrat ne pourra donc plus tre conclu. Cet empchement prendra cependant fin si la procdure en annulation de la dcision dattribution nest pas poursuivie, ou encore lorsquayant t poursuivie, la procdure en annulation sachvera par un arrt dannulation ou par un arrt de rejet.

Confront un arrt de suspension, le pouvoir adjudicateur subordonn pourra prfrer retirer la dcision suspendue et refaire lacte en supprimant lillgalit qui lui tait reproche, plutt que dattendre lissue de la procdure en annulation.

La suspension de lexcution dun march public relve, en principe, de la comptence du juge des rfrs judiciaires. Cest donc vers celui-ci que se tournera le soumissionnaire vinc si la dcision dattribution a dj t notifie au soumissionnaire choisi, puisque dans ce cas, le Conseil dEtat rejettera la demande de suspension de la dcision dattribution qui pourrait lui tre soumise. Lanalyse de la jurisprudence semble toutefois montrer que sauf dans de rares hypothses, ces demandes ont gnralement t rejetes lorsque le contrat tait dj conclu et a fortiori, lorsquil tait presque entirement excut.

1. Le contentieux relatif la validit du contrat

a. Exposs des thses visant ouvrir aux tiers une action en nullit du contratLa dcision dattribution du march arrte par un pouvoir subordonn est une dcision administrative. Elle constitue un acte dtachable du contrat n la suite de sa notification au soumissionnaire retenu. Sauf reconnatre au Conseil dEtat un pouvoir de statuer sur des contestations portant sur des droits subjectifs civils, en contradiction avec larticle 144 de la Constitution, il ne peut tre admis que lannulation de la dcision dattribution rejaillisse directement sur le contrat lui-mme qui, par rpercussion, sen trouverait galement annul.

En revanche, tout comme dans lhypothse dune annulation de tutelle, lannulation de la dcision dattribution par un arrt du Conseil dEtat peut servir de base une action porte devant un tribunal de lordre judiciaire visant faire anantir le contrat lui-mme.

16. La thse de labsence du consentement

Une partie de la doctrine et de la jurisprudence considre en effet que lirrgularit affectant la dcision dattribution du march doit ncessairement rejaillir sur le contrat rsultant de la notification de cette dcision dattribution. Ecartant le point de vue selon lequel la rglementation belge empche le soumissionnaire irrgulirement vinc dobtenir autre chose quune rparation par quivalent sous forme de dommages et intrts une fois le contrat conclu, Messieurs GOFFAUX et LUCAS ont ainsi dvelopp la thse selon laquelle (l)a dissociation de lacte dtachable du contrat nest quune opration purement intellectuelle. En ralit, dcision dattribution et consentement concident; celle-l tant lexpression de celui-ci. La notification, quant elle, nest quun acte purement matriel. Aussi, pensons-nous, avec dautres, que lannulation par le Conseil dEtat de la dcision dattribution dun march entrane la disparition, avec effet rtroactif, du consentement de lautorit adjudicative. Sans consentement de la partie qui soblige, le contrat ne peut tre valablement conclu. Il peut ds lors tre annul.

Il reste que la nullit qui sanctionne labsence de consentement un contrat est en principe relative. Cela signifie que seules les parties contractantes ont la possibilit de demander lannulation du contrat litigieux. Pour autant, elle nest pas entirement inutile aux dbats, singulirement lorsque lautorit de tutelle annule une dcision dattribution dun march public alors que lexcution de celui-ci est commence ou acheve. Cette situation tait possible sous lempire de lancienne rglementation puisque des recours pouvaient tre introduits sans limitation particulire de dlai. Concrtement, si un problme de paiement dtats davancement se posent alors que la dcision dattribution du march est annule par lautorit de tutelle, le pouvoir adjudicateur pourra opposer la nullit du contrat ladjudicataire.

Mais la solution de labsence de consentement nest pas de nature satisfaire le soumissionnaire irrgulirement vinc qui est un tiers par rapport au contrat conclu la suite de la notification de la dcision dattribution.

17. La thse du caractre dordre public de la rglementation relative aux marchs publics et la cause illicite

Les auteurs prcits estiment toutefois que la rglementation des marchs publics ressortit de lintrt gnral et est dordre public. La violation de cette rglementation devrait ds lors, selon eux, tre sanctionne de nullit absolue, ce qui permettrait alors un tiers intress tel que le soumissionnaire irrgulirement vinc, de solliciter lannulation de la convention laquelle il nest pas partie.

Il convient de relever que plutt que labsence de consentement, certaines dcisions font appel la notion de cause illicite pour justifier louverture pour les tiers dune action en annulation du contrat conclu sur la base dune dcision dattribution irrgulire. Cette interprtation a t contredite par les Btonniers Hannequart et Delvaux.

18. Les arguments dduits du principe de lgalit

Par ailleurs, Messieurs GOFFAUX et LUCAS soutiennent que le principe de lgalit qui simpose au pouvoir adjudicateur contraint celui-ci prendre toutes les mesures ncessaires pour rtablir la lgalit dont la violation a t tablie par un arrt dannulation du Conseil dEtat. En cas dannulation de la dcision dattribution du march, il appartient ds lors ce pouvoir adjudicateur den tirer les consquences en ce qui concerne le contrat conclu la suite de la notification de la dcision dattribution annule. Sil nest pas en mesure de rgulariser la situation, il devra poursuivre la nullit du contrat, soit de commun accord avec son cocontractant, soit par la voie judiciaire.

Pour ces auteurs, cette obligation de solliciter la nullit du contrat ou la possibilit pour le tiers vinc de la demander peut toutefois cder le pas devant la ncessit dassurer la continuit du service public ou encore tre carte si le march litigieux est dj excut. Il sagit l dun point faible de la dmonstration, tant lhypothse risque dtre frquente, tout le moins si lon ne tient compte que du recours en annulation et du temps ncessaire pour obtenir une dcision dans ce cadre. Ces auteurs insistent dailleurs sur limportance pour le soumissionnaire vinc, dobtenir au plus vite la suspension de lexcution de la dcision dattribution litigieuse ou la suspension de lexcution du contrat.

b. Analyse critique des thses visant ouvrir aux tiers une action en nullit du contrat

En cas dannulation du contrat, la juridiction civile saisie de la demande devra examiner les questions relatives aux effets de cette annulation, lindemnisation du cocontractant et aux restitutions en nature par principe, dfaut par quivalent. Il est renvoy cet gard ce qui a t dit au point 18 ci-dessus.

Si elle est utile pour lutter contre la politique du fait accompli et a reu un cho certain en jurisprudence, la doctrine et la jurisprudence majoritaires ne semblent toutefois pas partager cette analyse qui est de nature bousculer la scurit juridique en permettant la remise en cause de relations contractuelles existantes.

Singulirement, la thse dfendue par Messieurs GOFFAUX et LUCAS se heurte diffrents arguments justifiant que la rparation en nature poursuivie par le soumissionnaire irrgulirement vinc soit en principe carte.

19. Les arguments de texte: les articles 15 et 16 de la loi du 24 dcembre 1993

Parmi ces arguments figure dabord un argument de texte tir des articles 15 et 16 de la loi du 24 dcembre 1993.

Larticle 15 prvoit que dans le cadre dune adjudication, le march doit tre attribu au soumissionnaire qui a remis loffre rgulire la plus basse, sous peine dune indemnit forfaitaire fixe 10 % du montant HTVA de loffre.

Larticle 16 quant lui dispose quen appel doffres, le march doit tre attribu au soumissionnaire qui a remis loffre rgulire la plus intressante.

Selon certains auteurs, qui sappuient sur les travaux prparatoires relatifs ces dispositions et celles qui les ont prcdes, le lgislateur a voulu carter toute sanction, en particulier lannulation de la convention, autre que celle consistant en loctroi de dommages et intrts.

Sil viole ces dispositions, le pouvoir adjudicateur commet certes une faute susceptible, sur pied des articles 1382 et 1383 du Code civil, de donner lieu rparation dans le chef du soumissionnaire irrgulirement vinc. Mais cette rparation ne pourra prendre la forme que de dommages et intrts.

Labsence de forfaitisation des dommages et intrts dans le cadre de lappel doffres ne permet pas de conclure une solution diffrente de celle qui prvaut dans le cas de ladjudication. Elle sexplique en effet par le pouvoir dapprciation dont dispose le pouvoir adjudicateur quant la dtermination de loffre la plus intressante.

Il en rsulte quen appel doffres, le prjudice subi par le soumissionnaire vinc prend gnralement la forme de la perte dune chance dobtenir le march. Cette chance pouvant tre plus ou moins importante, le lgislateur navait pas intrt fixer un montant forfaitaire de dommages et intrts puisque lapplication des rgles habituelles utilises pour lvaluation du dommage pouvait dboucher, bien souvent, sur un montant infrieur aux 10% retenus en adjudication.

20. La confusion entre lexistence du consentement et la rgularit de son objet

Messieurs HANNEQUART et DELVAUX critiquent galement lanalyse prnant un effet direct de lannulation de la dcision dattribution sur la validit du contrat conclu la suite de la notification de celle-ci supposer quil ny soit pas fait obstacle par les articles 15 et 16 de la loi du 24 dcembre 1993 dans la mesure o elle considre que cette annulation a pour effet de faire disparatre le consentement du pouvoir adjudicateur au contrat litigieux. Selon eux, en raisonnant de la sorte, une confusion est opre entre existence du consentement et rgularit de son objet.

21. La notion de mobile dterminant

Les mmes auteurs ne sont pas davantage convaincus par le raisonnement fondant la nullit absolue de la convention sur lexistence dune cause illicite, par application des articles 6 et 1131 et 1133 du Code civil. Si la cause dun contrat doit tre entendue comme tant le mobile dterminant commun aux parties qui a amen celles-ci conclure le contrat, son illicit ne pourrait tre retenue comme motif de nullit absolue du contrat que dans lhypothse que lon peut esprer rarissime dans laquelle le choix irrgulier du soumissionnaire serait lui-mme le mobile dterminant commun aux parties contractantes ou tout le moins celui de lune dentre elles. 22. Labsence de pertinence des notions de vices de consentement, de capacit, dobjet et de causePour le reste, ni les vices du consentement (erreur, dol, violence), ni la capacit, ni lobjet, ni la cause ne fournissent argument pour justifier, en raison de lexistence dune dcision irrgulire dattribution du march, une action en nullit du contrat rsultant de la notification de cette dcision.

23. Largument historique et systmique

Au surplus, la cration de la thorie jurisprudentielle de lacte dtachable en France et en Belgique sexplique par linexistence dune action en nullit lencontre du contrat ouverte aux tiers. Partant, si la doctrine dfendant louverture aux tiers dune action en nullit du contrat tait reconnue, le Conseil dEtat devrait, par cela mme, se dclarer incomptent sur base des articles 144 et 145 de la Constitution, puisquil existerait une juridiction comptente pour accorder, sur base de la thorie de lobjet rel du litige, ce que recherche le soumissionnaire prtendument irrgulirement vinc.

24. La loi du 16 juin 2006

Enfin, il nest pas inutile de relever que la loi du 16 juin 2006 qui nest pas encore entre en vigueur, introduit une innovation majeure en disposant que sauf exception, une fois le march conclu, le contrat ne sera plus susceptible dune suspension ou dune annulation par le juge fonde sur une passation irrgulire. Cette prise de position du Lgislateur sinscrit clairement dans les pas de la doctrine qui considre quune fois le contrat conclu, le soumissionnaire vinc, tiers ce contrat, ne peut obtenir en principe quune rparation par quivalent, sous la forme de dommages et intrts.

25. Labsence de pertinence de la recherche de la rparation en nature

En toute hypothse, mme retenir la doctrine qui dfend une thorie permettant la nullit absolue du contrat, il reste dlicat dvoquer une rparation en nature.

En effet, la consquence dune annulation du contrat ne peut rsider dans lattribution du march celui qui poursuit celle-ci sans violer le principe de sparation des pouvoirs de manire manifeste. Une chose est de dire pour droit dans un jugement que tel march a t conclu en violation de la rglementation des marchs publics qui doit tre considre comme dordre public. Une autre chose est de dire pour droit dans un jugement que le march aurait d tre attribu tel soumissionnaire plutt qu tel autre. Les juges ne nous semblent pas tre en mesure de pouvoir prendre ce genre de dcision qui implique, la plupart du temps, des comptences dordre technique et des apprciations dlicates en opportunit dordre politique ou budgtaire qui relvent de la comptence du pouvoir excutif et des administrations.

Aussi, la suspension ou lannulation du contrat et la suspension ou lannulation dune dcision dattribution ne peuvent jamais avoir pour consquence une rparation en nature en faveur du soumissionnaire irrgulirement vinc.

Elles nimpliqueront au mieux que lobligation de recommencer une procdure dattribution si lexcution du contrat a t arrte suffisamment tt pour lenvisager et partant, ne permettent aux soumissionnaires plaignants que de retrouver une chance de participer cette seconde procdure.

2. La rparation par quivalent

Compte tenu de la difficult (limpossibilit dans la thse que nous dfendons) dimaginer une rparation en nature de son prjudice consistant en lexcution du contrat, le soumissionnaire irrgulirement vinc peut donc se tourner vers le juge civil pour obtenir une rparation par quivalent, sous la forme de dommages et intrts.

Sa tche sera indiscutablement facilite par lexistence dun arrt dannulation prononc par le Conseil dEtat, eu gard la thorie de lunit, certes relative des notions dillgalit et de faute. Lexistence de pareil arrt ne conditionne toutefois nullement la recevabilit de laction diligente devant les juridictions de lordre judiciaire.

Pour obtenir rparation de son dommage, le soumissionnaire irrgulirement vinc devra rapporter la triple preuve dune faute, dun dommage et dun lien de causalit.

26. La faute

En principe, la preuve de la faute ne soulvera donc pas de difficult particulire, sil existe un arrt dannulation prononc par le Conseil dEtat. En labsence darrt dannulation, la confrontation du comportement dun pouvoir adjudicateur aux contraintes de la rglementation relative aux marchs publics permettra didentifier des fautes dont la gravit sera dailleurs trs variable. Elles peuvent en effet, rsulter dun non respect flagrant dune rgle prcise (par exemple, la prise en compte des rectifications de mtr rcapitulatif opres par les soumissionnaires dans la comparaison des offres) ou dune maladresse sans consquence (la rdaction des avis reste un exercice dlicat).

27. Lexistence et la hauteur du dommage

La preuve du dommage subi et de sa hauteur, peut en revanche se rvler prilleuse dans bien des cas.

Larticle 15 de la loi du 24 dcembre 1993 facilite certes les choses dans le cadre dune adjudication publique puisquen son alina 1er, cette disposition, faisant une application particulire des articles 1382 et 1383 du Code civil, prvoit que (l)orsque l'autorit comptente dcide d'attribuer le march, celui-ci doit tre attribu, en adjudication publique ou restreinte, au soumissionnaire qui a remis l'offre rgulire la plus basse, sous peine d'une indemnit forfaitaire fixe 10 pourcents du montant, hors taxe sur la valeur ajoute, de cette offre.

Une disposition comparable nexiste cependant pas dans lhypothse dun appel doffres ou dune procdure ngocie. Sachant que le soumissionnaire vinc ne pourra pas se prvaloir dun droit subjectif lattribution du march, cest le plus souvent la perte dune chance dobtenir celui-ci qui sera indemnise. Conformment au droit commun de la responsabilit extra-contractuelle, cette chance doit tre relle et non simplement hypothtique. La probabilit quelle se concrtise peut tre plus ou moins importante. Pour indemniser la perte de cette chance, la jurisprudence tiendra compte de cette probabilit et le plus souvent, appliquera au pourcentage de 10 pourcents retenu en adjudication et considr, sans aucune justification conomique rationnelle, comme reprsentant la marge bnficiaire habituelle spcialement dans les marchs publics de travaux, un pourcentage cens traduire la concrtisation de cette probabilit. Toutefois, dans certains cas o les chances du soumissionnaire vinc frlaient la quasi certitude dobtenir le march si la dcision dattribution prise par le pouvoir adjudicateur navait pas t entache dirrgularit, les cours et tribunaux ont pu accorder un montant gal, voire suprieur au 10 pourcents allous en adjudication.

Lorigine de cette indemnisation forfaitise 10 pourcents peut tre trouve dans les travaux parlementaires de la loi qui allait devenir la loi du 14 juillet 1976 sur les marchs publics de travaux et de fournitures. M.-A. Flamme avait t auditionn et avait relat une affaire, dnonce dans un cahier dobservation de la Cour des comptes, dans laquelle une administration avait octroy une indemnisation la hauteur de 50 pourcents du march. La solution des 10 pourcents est alors apparue comme une mesure de protection des intrts publics. Il est toutefois raisonnable de critiquer cette forfaitisation qui place certains soumissionnaires (ceux vincs dans le cadre dune adjudication) dans une position trs avantageuse, tant en quelque sorte garantis dun montant en rparation alors que ceux vincs dans le cadre dun appel doffres ou dune procdure ngocie doivent faire la preuve du montant de leur dommage. A notre connaissance, la Cour constitutionnelle na pas encore t saisie de cette question.Par ailleurs, sagissant dtablir la ralit dun prjudice rsultant dune responsabilit extra-contractuelle, la preuve peut en tre rapporte par toute voie de droit, en ce compris par le biais dune expertise.

Outre la perte dune chance, le dommage peut galement tre constitu par le non-recouvrement des frais engags pour dposer loffre, tels des frais dtudes spcifiques exposs cette fin ou encore de la perte de profit que le soumissionnaire vinc aurait pu retirer de laugmentation de son chiffre daffaire et de laccroissement de sa rputation commerciale sil avait obtenu le march.

28. Le lien de causalit

A ct de la faute et du dommage, il reste encore tablir lexistence dun lien de causalit entre celui-ci et celle-l. Lexistence de ce lien de causalit va rarement de soi.

Il est gnralement admis quelle pourrait ainsi faire dfaut dans lhypothse ou lillgalit reproche la dcision dattribution tiendrait un dfaut de motivation formelle, sans pour autant que le choix opr par le pouvoir adjudicateur soit irrgulier sur le fond ou viole lgalit de traitement des soumissionnaires.

Lirrgularit de la propre offre du soumissionnaire vinc pourrait galement faire disparatre le lien de causalit entre la faute du pouvoir adjudicateur et le dommage allgu par ledit soumissionnaire. Dans ce cas en effet, le march ne pourrait en tout tat de cause pas lui tre attribu. Dans pareilles hypothses, une indemnisation nest alors pas possible.

Plus fondamentalement, toutes les illgalits ne sont pas toujours utiles au dbat sur lindemnisation. Ainsi, un soumissionnaire qui a particip une procdure ngocie avec publicit qui prvoyait des critres dattribution pondrs et qui critique le choix de la base lgale de cette procdure est dans une position trs dlicate pour tablir un lien de causalit entre cette faute et le dommage (la perte du march).

En dfinitive, ce nest que lorsque le soumissionnaire peut tablir quen labsence de la faute critique il aurait du tre dsign adjudicataire quil dmontre le lien de causalit. Or, il est rare que pareille hypothse puisse tre dmontre sur base des pices dune procdure de passation. En effet, les apprciations trs techniques inhrentes au processus de comparaison des offres tant dans le cadre dune adjudication dailleurs (sous lange du dbat sur la rgularit de loffre) que dans le cadre dun appel doffres ou dune procdure ngocie, rendent cette dmonstration alatoire.

III. De quelques considrations concernant la loi du 16 juin 2006, la directive 2007/66/CE et larrt du 18 juillet 2007 de la Cour de Justice des Communauts Europennes29. Limportance des actions prventivesDans la mesure o une fois le contrat conclu, le soumissionnaire irrgulirement vinc a gnralement peu despoirs de retrouver une chance dexcuter lui-mme le contrat, les actions prventives de la conclusion irrgulire du contrat sont videmment essentielles. Linstauration du standstill constitue une avance importante dans cette perspective puisquil permet aux soumissionnaires vincs dintroduire un recours lencontre de la dcision dattribution soit en suspension dextrme urgence devant le Conseil dEtat lorsque le march est attribu par une autorit administrative au sens de larticle 14 des lois coordonnes sur le Conseil dEtat, soit devant le Juge des rfrs lorsque le march est attribu par un pouvoir adjudicateur ou une entit adjudicatrice qui nest pas une autorit administrative, avant que le contrat ne soit conclu et ainsi, de conserver intactes leurs chances de se voir attribuer le march dans lhypothse o ce recours se rvlait victorieux ou plus exactement de participer une procdure de passation dpourvue de lillgalit dnonce.Le standstill ne constitue pas pour autant une panace, eu gard notamment son champ dapplication rduit et labsence de sanction en cas de non-respect de celui-ci par le pouvoir adjudicateur.

30. Laction en nullit du contrat, sanction du non respect du standstill: le dispositif restrictif de la loi du 16 juin 2006

A cet gard, nous avons dj relev que la loi du 16 juin 2006 qui nest pas encore entre en vigueur, introduit une innovation majeure en disposant que sauf exception, une fois le march conclu, le contrat ne sera plus susceptible dune suspension ou dune annulation par le juge fonde sur une passation irrgulire.

Lexception vise par le Lgislateur est lhypothse o le march a t conclu avant lexpiration du dlai dattente ou sans quun dlai dattente nait t respect alors quil aurait d ltre. Le non respect du dlai de standstill sera donc dsormais sanctionn ou, plus prcisment, susceptible dtre sanctionn par la nullit du contrat. Cette nullit ne sera toutefois pas automatique mais devra tre demande par le soumissionnaire ls ou risquant de ltre. Pour ce faire, celui-ci devra sadresser, dans les trente jours compter de la date laquelle il a pris connaissance de la conclusion du march, au prsident du Tribunal de Premire Instance ou du Tribunal de commerce, en fonction de la qualit des parties. Le magistrat statuera sur la demande comme en rfr, cest--dire au fond mais avec la clrit du rfr. La demande devra tre dirige contre le pouvoir adjudicateur et le soumissionnaire retenu et devra tre rejete par le juge sien dehors de la mconnaissance du dlai dattente, lattribution a eu manifestement lieu de manire rgulireou si le soumissionnaire concern nentre manifestement pas en considration pour pouvoir prtendre lattribution du march.

En outre, le juge aura la facult de rejeter la demande lorsque le march sera partiellement ou totalement excut au moment du prononc. Il serait trop simpliste de considrer que cette prcision pourrait inciter certains pouvoirs adjudicateurs peu scrupuleux violer sciemment le dlai de standstill. En effet, le risque pnal trs prsent dans lattribution des marchs publics est en soi, plus dissuasif que la sanction de la nullit du contrat. Par contre, il existe des situations objectives o la prservation de la continuit du service doit tre assure.

En dehors de cette exception, lannulation du contrat sera exclue. La seule indemnisation encore possible lorsque le contrat sera conclu, consistera en lobtention de dommages et intrts.

31. La directive 2007/66/CE

Il convient galement de dire un mot de la directive 2007/66/CE qui modifie les directives recours 89/665/CEE et 92/13/CE.

Elle y introduit notamment un article 2 quinquies qui prvoit diffrentes hypothses dans lesquelles le march devra, en principe, tre dclar dpourvu deffets par une instance de recours indpendante du pouvoir adjudicateur. Est notamment vis le cas o le dlai de standstill na pas t respect.

Toutefois, il peut tre prvu que linstance de recours pourra ne pas considrer un march comme tant dpourvu deffets alors que lon se trouve dans une des hypothses o cela devrait tre le cas, si elle constate que des raisons imprieuses dintrt gnral imposent que les effets du march soient maintenus. Dans ce cas, des sanctions de substitution devront tre appliques (pnalits financires autres que des dommages et intrts imposes au pouvoir adjudicateurou abrviation de la dure du march).

32. Larrt quon aurait aim ne jamais devoir lireC.J.C.E, 18 juillet 2007

Il y a lieu enfin de faire tat dun arrt prononc le 18 juillet 2007 par la Cour de Justice des Communauts europennes, dans le cadre dun recours en manquement dirig par la Commission lencontre de la Rpublique Fdrale dAllemagne.

Lenseignement de cet arrt pourrait en effet tre susceptible davoir des implications au moins indirectes sur la validit des contrats conclus en violation des rgles relatives la passation des marchs publics.

A lorigine, la commune allemande de Bockhorn avait conclu avec une entreprise de distribution dnergie, un contrat dune dure dau moins trente ans portant sur lvacuation des eaux uses de la commune, sans lancer pralablement dappel doffres et sans publier le rsultat de la procdure dattribution. Au terme dune procdure ngocie sans publicit, la ville allemande de Brunswick avait de son ct conclu un contrat par lequel elle confiait une socit, pour une dure de trente ans, llimination de ses dchets rsiduels en vue dun traitement thermique.

Estimant que les rgles europennes en matire de passation de marchs publics navaient pas t respectes dans lun et lautre cas, la Commission avait introduit un recours en manquement lencontre de la Rpublique Fdrale dAllemagne, sur pied de larticle 226 CE.

Dans un arrt du 10 avril 2003, la Cour avait fait droit au recours estimant que dans lun et lautre cas, les rgles europennes en matire de passation des marchs publics avaient t violes.

Parmi les enseignements principaux de cet arrt, lon retiendra:

la Cour prcise que la directive 92/50/CEE a t adopte en vue de supprimer les entraves la libre prestation des services et vise donc protger les intrts des oprateurs conomiques tablis dans un Etat membre dsireux doffrir des services aux pouvoirs adjudicateurs tablis dans un autre Etat membre. Latteinte porte la libre prestation des services par la mconnaissance des dispositions de la directive 92/50 subsiste pendant toute la dure dexcution des contrats conclus en violation de celle-ci;

larticle 2, 6, de la directive 89/665/CEE permet certes aux Etats membres de limiter les pouvoirs de linstance responsable des procdures de recours, aprs la conclusion du contrat qui suit lattribution du march, loctroi de dommages et intrts toute personne lse par une violation du droit communautaire en matire de marchs publics. Mais si cette disposition autorise le maintien des effets du contrat conclu en violation des directives europennes en matire de passation des marchs publics, protgeant ainsi la lgitime confiance des cocontractants, elle ne saurait, sans rduire la porte des dispositions du trait tablissant le march intrieur, avoir pour consquence que le comportement du pouvoir adjudicateur lgard des tiers doit tre considr comme conforme au droit communautaire postrieurement la conclusion dun tel contrat.

En vertu de larticle 228, 1er CE, il appartenait la Rpublique Fdrale dAllemagne dadopter les mesures ncessaires lexcution de larrt de la Cour, de manire se conformer celui-ci.

Estimant que tel navait pas t le cas parce que lEtat concern navait pas fait procder la rsiliation du contrat litigieux avant lexpiration du dlai fix dans lavis motiv lui adress sur pied de larticle 228, 2 CE, la Commission introduisit un nouveau recours en manquement sur pied de cet article 228 CE, sollicitant la condamnation de lAllemagne sous peine dastreinte.

Dans larrt quelle va rendre dans le cadre de ce recours le 18 juillet 2007, la Cour va notamment rappeler ce quelle avait dj dit dans larrt prcdent, savoir que latteinte porte la libre prestation des services par la mconnaissance des dispositions de la directive 92/50/CEE subsiste pendant toute la dure dexcution des contrats conclus en violation de celle-ci.

Elle va ensuite passer en revue largumentaire du Gouvernement allemand en vertu duquel larticle 2, 6, second alina, de la directive 89/665/CEE, les principes de scurit juridique et de protection de la confiance lgitime, le principe pacta sunt servanda, le droit fondamental de proprit, larticle 295 CE, ainsi que la jurisprudence de la Cour en matire de limitation des effets dun arrt dans le temps, sopposaient ce que la constatation dun manquement au sens de larticle 226 CE au sujet dun tel contrat entrane lobligation de rsilier celui-ci.

De larticle 2, 6, de la directive 89/665/CEE, la Cour va rappeler ce quelle avait dj dit dans larrt du 10 avril 2003 quant au rapport de cette disposition avec les rgles du trait CE tablissant le march intrieur. Mais elle va ajouter en outre: Par ailleurs, larticle 2, 6, second alina, de la directive 89/665 () concerne, ainsi quil rsulte de son libell, la rparation quune personne lse par une violation commise par un pouvoir adjudicateur peut obtenir de ce dernier. Or, en raison de sa spcificit, cette disposition ne saurait tre considre comme rglant galement la relation entre un Etat membre et la Communaut, relation dont il sagit dans le contexte des articles 226 CE et 228 CE.

La Cour va poursuivre en prcisant que les principes de scurit juridique et de protection de la confiance lgitime, le principe pacta sunt servanda ou encore le droit de proprit ne peuvent tre invoqus par un Etat membre pour justifier la non-excution dun arrt constatant un manquement au titre de larticle 226 CE et, de ce fait, chapper sa propre responsabilit en droit communautaire.

Ainsi, si lon tente une synthse de lenseignement contenu dans ces deux arrts, il faut considrer quun contrat conclu (par procdure ngocie) en violation des dispositions europennes relatives la passation des marchs publics de services, constitue une atteinte la libre prestation de services.

Cette atteinte subsiste pendant toute la dure de lexcution dudit contrat. Elle peut faire lobjet dun constat de manquement au sens de larticle 226 CE, dans le chef de lEtat membre concern. Sauf rduire la porte des dispositions du Trait tablissant le march intrieur, larticle 2, 6, alina 2, de la directive 89/665/CEE ne fait pas obstacle ce constat. En effet, il ne rgle pas les relations entre les Etats membres et la Communaut, dont il sagit dans les articles 226 et 228 CE. Le seul moyen dont dispose lEtat membre concern pour se conformer larrt de la Cour constatant le manquement, est de rsilier le contrat conclu irrgulirement. Le maintien du contrat pourrait toutefois tre envisag dans le cas o son annulation pourrait tre la source dune perturbation grave du service public.

33. Les consquences de cet arrt

Cette jurisprudence pourrait trouver sappliquer mme dans le cadre de marchs publics qui ne sont pas soumis la publicit europenne, mais pour autant quils prsentent un lment dextranit. Or, cela pose un problme particulier compte tenu de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle.

Par un arrt du 12 dcembre 2005, celle-ci a en effet rejet le recours en annulation des articles 302 et 308 de la loi-programme du 9 juillet 2004 qui modifiaient la loi du 24 dcembre 1993 relative aux marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services.Selon le requrant, le principe dgalit et de non-discrimination tait viol en ce que la rglementation insre larticle 21 bis, 2, de la loi du 24 dcembre 1993, en vertu de laquelle le pouvoir adjudicateur doit procder une notification particulire et respecter un dlai dattente avant de poursuivre la procdure dadjudication (le principe de standstill), sapplique exclusivement aux marchs publics qui atteignent le montant estim, fix par le Roi, en vue de la publicit europenne, alors que cette mesure de protection juridique ne sapplique pas aux marchs publics dont le montant estim natteint pas cette valeur seuil partir de laquelle la publicit europenne est obligatoire. Pour le requrant, il nexistait pas de motif valable cette diffrence de traitement.

La Cour estimera, au contraire, que la diffrence de traitement dnonce entre les diffrentes catgories de participants et de soumissionnaires des adjudications de marchs publics tait fonde sur un critre objectif, le montant du march public.

La modification apporte la loi du 24 dcembre 1993 par la loi-programme du 9 juillet 2004 concernait linformation des candidats et des soumissionnaires, et plus particulirement linstauration pour les marchs relevant du rgime gnral et atteignant les seuils fixs pour la publicit europenne dun dlai avant la conclusion du march .

Prenant appui sur les travaux prparatoires, la Cour considrera que le lgislateur avait uniquement voulu mettre en uvre des directives europennes et avait, pour cette raison, limit la rglementation de la protection juridique aux marchs publics entrant dans le champ dapplication de ces directives. Le lgislateur ne devait pas, cette occasion, justifier spcialement la raison pour laquelle il navait pas tendu ce rgime de protection juridique aux participants ou soumissionnaires dautres marchs publics. La Cour ajoutera: Il nest pas douteux que des arguments pertinents en faveur de cette extension peuvent tre avancs, comme le fait le requrant. Il nappartient toutefois pas la Cour de substituer en lespce son jugement celui du lgislateur, lequel, en cas dune ventuelle extension du rgime de protection juridique, ne doit pas seulement tenir compte des ventuels effets qui pourraient dcouler dune application illimite du principe de standstill, aussi bien au niveau du droulement de la procdure et de sa dure quau niveau de lefficacit ncessaire de lintervention des pouvoirs adjudicateurs. Cette proccupation gnrale ressort dailleurs des travaux prparatoires. () Il dcoule de ce qui prcde que la mesure attaque nest pas dpourvue de justification raisonnable.

Il semble galement que mme dans les cas o la directive 2007/66/CE ne limpose pas, cette jurisprudence serait de nature inciter fortement les Etats membres prendre une position claire dans leur rglementation sur la possibilit dobtenir lannulation dun contrat conclu au terme dune procdure de passation dun march public de services, en violation des rgles europennes en la matire. A dfaut, tant que dure lexcution du contrat ainsi conclu, un recours en manquement est susceptible dtre introduit lencontre de lEtat membre concern qui risque, en bout de course, de se voir infliger des astreintes sil ne se conforme pas larrt constatant le manquement en assurant la rsiliation du contrat litigieux.

Le respect de la libre prestation de services au sein de lUnion europenne, telle quinterprte par la Cour de Justice, semble tre ce prix. Quoi quen dise la Cour cependant, pareille solution est source dinscurit juridique et dinstabilit dans les relations conomiques qui se nouent entre les pouvoirs adjudicateurs et les soumissionnaires. Elle peut par ailleurs se rvler coteuse pour la collectivit et prjudiciable au souhait de promouvoir les partenariats public-priv. Ceux-ci impliquent trs souvent des relations contractuelles de longue dure. Partant, leur annulation peut se rvler trs couteuse tant pour la collectivit que pour le partenaire priv.

IV. Conclusion

La question des consquences de lannulation de la dcision dattribution dun march public par lautorit de tutelle ou par le Conseil dEtat est et reste une question dlicate.

Larticle 144 de la Constitution empche que cette annulation rejaillisse directement sur le contrat conclu la suite de la notification de la dcision dattribution au soumissionnaire choisi.

La question de savoir si elle peut servir de fondement une action diligente devant un juge de lordre judiciaire, tendant obtenir lannulation de ce contrat est controverse et restera controverse aprs lentre en vigueur de la loi du 16 juin 2006 compte tenu de la jurisprudence rcente de la Cour de Justice.

Cette action peut en toute hypothse tre le fait dune des parties la convention, singulirement le pouvoir adjudicateur subordonn qui se trouverait confront un refus dapprobation par lautorit de tutelle de la dpense implique par le contrat ou encore au refus de son receveur dexposer cette dpense.

Plus dlicate est en revanche la question de savoir si un tiers au contrat lon pense en particulier au soumissionnaire vinc pourrait solliciter lannulation du contrat.

Doctrine et jurisprudence sont divises sur cette question. Une partie de celles-ci fait valoir le caractre dordre public de la rglementation des marchs publics et fait appel aux notions de consentement et de cause illicite pour admettre cette action en nullit du contrat diligente par un tiers. Une autre partie en revanche considre que sauf exception, un tiers ne peut solliciter la nullit du contrat et devra se contenter de dommages et intrts. Le libell des articles 15 et 16 de la loi du 24 dcembre 1993 semble pouvoir les conforter dans leur point de vue.

Lintroduction dun dlai de standstill pour certains marchs publics est de nature prvenir le contentieux de lannulation du contrat la demande dun tiers, susceptible de remettre en cause la scurit juridique et celle des affaires et de se rvler coteuse pour les pouvoirs adjudicateurs.

Maintenant ce dlai de standstill tout en lui apportant certaines amliorations, la loi du 16 juin 2006, qui nest pas encore en vigueur, a voulu mettre fin la controverse en prvoyant que sauf prcisment en cas de non-respect du dlai de standstill, la nullit du contrat conclu ne pourrait plus tre sollicite par un tiers celui-ci.

Il reste vrifier que cette loi est bien conforme la directive 2007/66/CE qui a prvu, quant elle, certaines hypothses dans lesquelles le contrat devrait tre considr comme tant priv deffet.

Il faudra galement se demander si elle peut se concilier avec larrt du 18 juillet 2007 de la Cour de Justice des Communauts Europennes qui ouvre une nouvelle perspective en termes danantissement du contrat conclu en violation de la rglementation des marchs publics, au nom de la libre prestation de services.

Plan

1De la tutelle administrative sur les marchs publics en Rgion wallonne et autres rflexions sur le contrle juridictionnel de la passation des marchs publics

1.Introduction1I. De lannulation de la dcision dattribution dun march public par lautorit de tutelle, en Rgion wallonne2A. Rappel de quelques principes applicables en matire de tutelle gnrale dannulation22.Le Code de dmocratie locale et de dcentralisation23.Les caractristiques de la tutelle dannulation34.Lautorit comptente pour exercer la tutelle dannulation35.La notification de la dcision de tutelle aux intresss46.Le dlai dans lequel lautorit de tutelle doit se prononcer57.Les actes transmissibles et les rclamations58.Le caractre excutoire des actes transmissibles et la suspension de la notification de la dcision dattribution impose par le lgislateur fdral7B. Consquence dune annulation de tutelle sur le contrat conclu par le pouvoir subordonn99.La comptence exclusive des tribunaux judiciaires pour les contestations qui ont pour objet des droits civils en vertu de larticle 144 de la Constitution910.La dcision dannulation comme fondement dune action en annulation du contrat ou en dommages et intrts (article 1382 et suivants du code civil)10II.. De lannulation et de la suspension de la dcision dattribution dun march public par le Conseil dEtat13A.. Rappel de quelques principes applicables en matire de recours en suspension et en annulation pour excs de pouvoir1311.Le recours en annulation contre la dcision dattribution1312.Le recours en suspension1413.Des effets de la suspension et de lannulation15B. Les consquences dun arrt dannulation ou de suspension de la dcision dattribution: le contentieux indemnitaire et le contentieux relatif la validit du contrat conclu par le pouvoir subordonn1514.Les notions dillgalit et de faute1515.La course au contrat: le chemin du rfr161.Le contentieux relatif la validit du contrat17a. Exposs des thses visant ouvrir aux tiers une action en nullit du contrat1716.La thse de labsence du consentement1817.La thse du caractre dordre public de la rglementation relative aux marchs publics et la cause illicite1918.Les arguments dduits du principe de lgalit19b. Analyse critique des thses visant ouvrir aux tiers une action en nullit du contrat2019.Les arguments de texte: les articles 15 et 16 de la loi du 24 dcembre 19932020.La confusion entre lexistence du consentement et la rgularit de son objet2121.La notion de mobile dterminant2222.Labsence de pertinence des notions de vices de consentement, de capacit, dobjet et de cause2223.Largument historique et systmique2224.La loi du 16 juin 20062225.Labsence de pertinence de la recherche de la rparation en nature232. La rparation par quivalent2326.La faute2427.Lexistence et la hauteur du dommage2428.Le lien de causalit26III. De quelques considrations concernant la loi du 16 juin 2006, la directive 2007/66/CE et larrt du 18 juillet 2007 de la Cour de Justice des Communauts Europennes2629.Limportance des actions prventives2630.Laction en nullit du contrat, sanction du non respect du standstill: le dispositif restrictif de la loi du 16 juin 20062731.La directive 2007/66/CE2832.Larrt quon aurait aim ne jamais devoir lireC.J.C.E, 18 juillet 20072933.Les consquences de cet arrt31IV. Conclusion33

Voyez ce sujet notamment J. HERBOTS, Contrat sous condition suspensive: consquences de la faute commise par une partie pendente conditione, note sous Cass., 5 juin 1981, R.C.J.B., 1983, pp. 207 et ss.; X. DIEUX, Des effets de la tutelle dapprobation sur les contrats conclus avec une autorit publique subordonne, note sous Cass., 5 juin 1981, A.P.T., 1984, pp. 145 et ss.; M-A. FLAMME, Droit administratif, Bruylant, Bruxelles, 1989, t 2, pp. 814 et ss.; P. THIEL, Les recours des tiers dans les marchs publics: lments de jurisprudence, J.T., 1997, pp. 329 et ss.; A. DELVAUX, Les recours dans le cadre du contentieux de lattribution dun march public, in C.D.V.A., La nouvelle rglementation des marchs publics, Journe dtude du jeudi 6 mars 1997, Ed. Col. scient. Fac. droit Lige, 1997, pp. 255 et ss. et spc. pp. 349 et ss.; P. GOFFAUX et M. LUCAS, Des effets sur le contrat de lannulation par le Conseil dEtat de la dcision dattribuer un march public, A.P.T., 1998, pp. 56 70; Y. HANNEQUART et A. DELVAUX, Lattribution dun march public et les recours judiciaires autres que laction en dommage et intrts, E.D., 1998, pp. 312 et ss.; D. BATSELE, Ph. FLAMME et Ph. QUERTAINMONT, Initiation aux marchs publics, Bruylant, Bruxelles, 2001, 2me d., pp. 373 et ss. et pp. 391 et ss.; P. GOFFAUX, Les pontons mosans Incidence sur le contrat de lannulation par lautorit de tutelle de la dcision dattribution dun march public, fait accompli et enrichissement sans cause, obs. sous Cass., 14 dcembre 2001, E.D., 2002, pp. 349 et ss.; P. THIEL, Mmento 2009 des marchs publics, d. Kluwer, Waterloo, 2008, pp. 589 et ss.

Voyez article 117 de larrt royal du 8 janvier 1996 relatif aux marchs publics de travaux, de fournitures et de services et aux concessions de travaux publics; article 105 de larrt royal du 10 janvier 1996 relatif aux marchs publics de travaux, de fournitures et de services dans les secteurs de leau, de lnergie, des transports et des services postaux.

A lexception des communes de la rgion de langue allemande et de la Ville de Comines-Warneton (article L 3111-1, 1er, 1, CDLD) dont les actes restent soumis la tutelle organise par les articles 264 et ss. de la Nouvelle Loi Communale, ainsi que des intercommunales dont le ressort dpasse les limites de la Rgion wallonne (article L 3111-1, 1er, 4, CDLD) et qui doivent faire lobjet dun accord de coopration conclure entre les rgions concernes en vertu des articles 162 de la Constitution et 92 bis, 2, d) de la loi spciale du 8 aot 1980 de rformes institutionnelles.

Ci-aprs CDLD.

Loi du 16 juin 2006 relative lattribution, linformation aux candidats et soumissionnaires et au dlai dattente concernant les marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services (Moniteur belge, 15 fvrier 2007, pp. 7388 et ss.). Cette loi a t complte par une loi du 12 janvier 2007 modifiant la loi du 16 juin 2006 relative lattribution, linformation aux candidats et soumissionnaires et au dlai dattente concernant les marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services (Moniteur belge, 15 fvrier 2007, p. 7392).

Directive 2007/66/CE du Parlement europen et du Conseil du 11 dcembre 2007 modifiant les directives 89/665/CEE et 92/13/CEE du Conseil en ce qui concerne lamlioration de lefficacit des procdures de recours en matire de passation des marchs publics, J.O.U.E., 20 dcembre 2007, L 335/31 et ss.

C.J.C.E. (2e ch.), 18 juillet 2007 (Commission c./ Allemagne), aff. n C-503/04, http://curia.europa.eu.

A propos de la tutelle administrative, voyez J. Dembour, Les actes de la tutelle administrative en droit belge, Bruxelles, Larcier, 1955, 395 p.; P. LEWALLE, Droit administratif, Premire partie, Ed. de lUniversit de Lige, d. 2008-2009, pp. 99 et ss.

Et dailleurs des autres actes administratifs adopts par lautorit subordonne dans le cadre de la phase administrative de la passation du march.

Article L 1222-4, CDLD.

Article L 2222-2, alina 5, CDLD.

Articles L 3131-1 et L 3141-1, CDLD.

Les actes soumis une tutelle dapprobation, les actes de nature juridictionnelle ou encore les contrats ou les marchs publics passs avec des particuliers (voyez P. LEWALLE, Droit administratif, op. cit., pp.133-134).

Articles L 3122-2 et suivants CDLD.

Article L 3122-1, CDLD.

Article 20 de larrt du Gouvernement wallon du 26 aot 2004 portant rglement du fonctionnement du Gouvernement (Moniteur belge, 7 septembre 2004, p. 65.416), tel que modifi par des arrts du 16 septembre 2004 (Moniteur belge, 23 septembre 2004), 15 avril 2005 (Moniteur belge, 4 mai 2005) et 15 mai 2008 (Moniteur belge, 22 mai 2008) et lu en combinaison avec larticle 5 de larrt du Gouvernement wallon du 8 janvier 2008 fixant la rpartition des comptences entre les Ministres et rglant la signature des actes du Gouvernement (Moniteur belge, 11 janvier 2008, p. 851). Au sujet de la lgalit de cette dlgation, voyez C.E., n 182.279, 23 avril 2008, Ville dAndenne c./ Rgion wallonne.

Article L 3112-1, CDLD.

Article L 3114-1, CDLD.

En ce qui concerne la computation des dlais, voyez les articles L 3113-1 et L 3113-2, CDLD.

Article L 3115-1, CDLD. Voyez C.E., n 174.534, 17 septembre 2007, MELISSE c./ Commune de Theux et Rgion wallonne.

Moniteur belge, 7 mai 1999, p. 15.893. A la suite de modifications introduites par un dcret du 12 fvrier 2004 (Moniteur belge, 29 mars 2004, p. 17.597), lintitul de ce dcret est devenu dcret organisant la tutelle sur les communes, les provinces, les intercommunales et les zones de police unicommunales et pluricommunales de la Rgion wallonne. Il a ensuite t insr dans la codification opre par le Code la dmocratie locale et de la dcentralisation.

Doc. parl., P.W., 401 (1997-1998) n 1, Expos des motifs, pp. 5 et 6.

Doc. parl., P.W., 401 (1997-1998) n 1 bis, Expos des motifs, p. 5.

Doc.parl., P.W., 648 (2007-2008) n 9, 492 (2006-2007) n 3, 493 (2006-2007) n 3, 666 (2007-2008) n 2, p. 24.

Voyez article 19, alina 1er, des lois coordonnes sur le Conseil dEtat, ainsi que P. LEWALLE, Contentieux administratif, Coll. Fac. Droit Univ. Lige, Larcier, Bruxelles, 2008, 3me d., pp. 778 et ss.

C.E., n 182.271, 23 avril 2008, S.A. PETRUS c./ Etat belge.

Article L 3113-2, CDLD.

Article L 3122-6, CDLD.

Article L 3122-5, CDLD.

Dcret du 22 novembre 2007 modifiant certaines dispositions du Code de la dmocratie locale et de la dcentralisation, Moniteur belge, 21 dcembre 2007, p. 64.993. Selon son article 22, il est entr en vigueur le 30me jour suivant sa publication au Moniteur belge, soit le 20 janvier 2008. Au sujet de ce dcret, voyez L. REA FUENTE et M. LAZZARI, La rforme de la tutelle sur les pouvoirs locaux en Wallonie introduite par le dcret du 22 novembre 2007, Rev.dr.comm., 2008, liv. 4, pp. 6 et ss.

Larticle L 3111-2, 3, CDLD prcise ce quil y a lieu dentendre par pices justificatives. Il sagit de tous les documents et annexes de nature tayer un acte administratif. Constitue notamment une pice justificative, le dossier qui a t soumis aux membres de l'organe qui a adopt la dcision ou l'organe lui-mme. Voyez galement la circulaire du 14 fvrier 2008 relative aux pices justificatives, Moniteur belge, 18 mars 2008, p. 15.869.

Moniteur belge, 8 aot 1997, p. 20.267.

Moniteur belge, 4 novembre 2003, p. 53.675.

Article 1, alina 2, de larrt du 17 juillet 1997.

Des dispositions analogues sont prvues pour les intercommunales larticle L 3122-3, CDLD. Pour ce qui concerne la distinction quil convient de faire entre la force excutoire dun acte administratif et sa force excutoire qui rsulte de sa publication, voyez doc. parl., P.W., 648 (2007-2008) n 1, Avis du Conseil dEtat, p. 13.

A linvitation de la section de Lgislation du Conseil dEtat, le Gouvernement a prcis dans lexpos des motifs du projet de dcret devenu le dcret du 22 novembre 2007: Concernant les marchs publics, il ya lieu de rappeler que la lgislation reste de la comptence de lautorit fdrale; la transmission lautorit de tutelle desdits actes ne permet donc pas ncessairement lautorit locale de passer sans plus attendre lexcution des actes et dlibrations viss, ds lors quil peut y avoir une obligation de standstill (voyez Doc. parl., P.W., 648 (2007-2008) n 1, Expos des motifs, p. 2 et Avis du Conseil dEtat, p. 14.

Moniteur belge, 16 juin 2008, p. 30.562. Larticle 7 de loi du 8 juin 2008 prvoyait que ses articles 2 6 entreraient en vigueur une date fixe par le Roi. En vertu de larticle 28 de larrt royal du 31 juillet 2008 modifiant certains arrts royaux pris en excution de la loi du 24 dcembre 1993 relative aux marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services (Moniteur belge, 18 aot 2008, p. 43.572), ces articles 2 6 sont entrs en vigueur le jour de la publication de cet arrt royal au Moniteur belge, soit le 18 aot 2008. Voyez galementla loi du 15 juin 2006 relative aux marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services (Moniteur belge, 15 fvrier 2007, pp. 7355 et ss.). Cette loi abroge la loi du 24 dcembre 1993 qui porte le mme intitul (article 78). Elle a dores et dj t complte et modifie par une loi du 12 janvier 2007 modifiant la loi du 15 juin 2006 relative aux marchs publics et certains marchs de travaux, de fournitures et de services (Moniteur belge, 15 fvrier 2007, p. 7391). Voyez aussi la loi du 16 juin 2006 prcite. Pour lessentiel, ces deux lois ne sont pas encore entres en vigueur, dans lattente des arrts dexcution. Ainsi, larticle 80 de la loi du 15 juin 2006 prcise que le Roi fixe la date dentre en vigueur des titres Ier, II, III et IV et de chacune des dispositions du titre V de la loi (Dispositions diverses et finales). Seuls entrent en vigueur le jour de leur publication au Moniteur belge (sic), les articles 2,4, 15, 31, 77,3 et 79 de la loi. Larticle 5 de la loi du 16 juin 2006, introduit par la loi modificative du 12 janvier 2007, prvoit galement que le Roi fixe la date dentre en vigueur de la loi ( lexception de larticle 5 lui-mme qui entre en vigueur le jour de la publication de la loi au Moniteur belge).

A leur sujet, on consultera par exemple P. THIEL et V. DOR, Aperu du futur rgime des marchs publics en Belgique, Revue de droit communal, 2007/1, pp. 2 et ss.

Article 1er, 1er et 3 et article 123, de larrt royal du 8 janvier 1996 relatif aux marchs publics de travaux, de fournitures et de services, et aux concessions de travaux publics.

Article 27, de larrt royal du 8 janvier 1996 prcit.

Article 53, 1er et 3, de larrt royal du 8 janvier 1996 prcit.

Tant que la communication lautorit de tutelle nest pas effectue, la dcision nest pas excutoire. Tant que la dcision nest pas excutoire, le pouvoir adjudicateur doit sabstenir de communiquer aux candidats soumissionnaires ou aux soumissionnaires vincs les informations prvues larticle 21 bis de la loi du 24 dcembre 1993.

Mais lobservation peut valoir galement pour les marchs qui ne sont pas soumis la publicit europenne et donc lobligation de respecter un dlai dattente.

Ce qui nempchera toutefois pas ce candidat soumissionnaire ou ce soumissionnaire vinc de soutenir lillgalit de la dcision dattribution.

Voyez P. LEWALLE, Contentieux administratif, op. cit., pp. 1160 et ss.

Voyez P. LEWALLE, Droit administratif, op. cit., p. 132.

Voyez P. LEWALLE, Conte