Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par...

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LIVBE PBEMŒB. TBIOlllPBB Sl1B LBS JIÉBBSIU ET LU SCBil1ll8.

LIVRE DEUDÈME. TBIOllPBll S'l!B, LE SCB1Sl!l8 ST L'BÉllÉSIB QVI BÈGQH J.CTUBL­

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Cau DE.MASURES. ao coin de la place Victoire, rue Crois«a­Petit..Cbampa, o• 54.

t830.

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Nota. J'avertis le lecteur que je ne porte que lé

nom de Jacques Mayneau , dans l'acte de bap

tême, et que c'est ce seul nom que j'ai pris quand

j'ai été ordonné prêtre ; mais que dans l'acte civil

il y a un surnom de plus, Toussaint : Voilà pour

quoi j'ai toujours mis dans mes trois ouvrages,

T. J. Mayneau, pour obvier à tout inconvénient;

en outre je suis le seul prêtre qui porte le nom de

Mayneau dans le diocèse de Montpellier, oh j'ai

été vicaire de première classe, à Saint-Denis et

ensuite curé à Murvieil.

Tous les exemplaires de cet ouvrage qui ne se

ront pas revêtus de ma signature, seront regardés

comme édition contrefaite. Deux exemplaires

ayant été soumis à l'administration , conformé

ment à la loi.

IMVltlMEKJE DE ST1HT,

quai rte- AnfultiiM .11. <j.

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DE L'EGLISE.

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1

HARVARD COLLEGE LIBRARY

FROM THE LIBRARY OF

COMTE ALFRED BOULAY DE LA MEURTHE

APRIL 1927

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Plft&MOS.

Uw saint transport d'allégresse en

flamme mon ame, embrase mon es-

. prit , et m'invite délicieusement à

peindre , non-seulement les beautés ,

les charmes, les merveilles de l'Eglise ;

mais encore ses combats, ses tempêtes,

ses orages, le sang des héros de la foi,

ses victoires , ses conquêtes , ses lau

riers et ses triomphes.

Ce n'est pas une société brillante

qui , établie dans une seule contrée ,

y reste toujours victorieuse; non, c'est

cette Eglise sainte et éternelle , hum

ble et puissante, sage et héroïque, sim

ple et magnifique, qui porte partout

l'étendard de la liberté, exerce son

empire dans toutes les régions de l'u

nivers , non-seulement dans ces con

trées heureuses où coule le lait et le

miel, l'abondance et la fertilité, la

volupté pure des jeux innocents ; où

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VI PRÉFACE.

se réunissent les charmes ravissans de

la campagne enchanteresse dans des

plaines fécondes et dans des prairies

émaillées de fleurs odoriférantes ; où

se déployent au regard des hommes ,

des moissons jouissantes , des vigno

bles rians, des vergers délicieux; où

l'œil se réjouit dans des cites pittores

ques , s'étend sur des monts sourcil

leux, et des forêts superbes embellies

par l'art et la nature, qui laissent dans

î'entousiasme. Non, non ; elle parcourt

en guerrière toute la face de la terre, le

climat le plus affreux comme le plus

aimable, ,et fixe dans son sein sa puis

sance et son trône glorieux.

Attaquée, poursuivie , frappée, out

tragée, elle brave toutes les puissances

des tyrans, et leur résiste avec gloire,

établit partout son empire inébran

lable, y règne et y fleurit malgré

les combats et les guerres , les orages

et les tempêtes , elle régit en conqué

rante pacifique l'univers, y répand les

charmes de la paix , et se couronne

de guirlandes d'oliviers. . , ,.

Elle a placé son siège hrillant, prin

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PRÉFACE. VII

cipal et éternel au milieu de Rome,

où la tyrannie la plus affreuse exerçait

ses carnages, et s'y nourrissait du sang

des malheureux! c'est là qu'elle a ar

boré l'étendard de la croix humble et

glorieuse, etqu'elle a établie son triom

phe, dont l'éclat ravissant éclairera le

monde entier jusqu'à la n'a des siècles.

Oui, c'est avec un vrai transport

d'allégresse que je réunis tous les ef

forts de ma plume pour défendre cette

Eglise sainte et en montrer toute la

Eompe, au moment où un grand nora-re drames vraiment religieuses apré-

hendent que la France ne déserte la

bannière romaine, en voyant un nom

bre infini d'ennemis de la religion qui

mettent en jeu tous les ressorts secrets

pour la faire prévariquer.

J'avais déjà commencé un poëme

épique, lorsqu'un de mes compatriotes

vintm'annoncer qu'un individu venait

deforger une religion 5 je pensai sé

rieusement à ce dont il me fit part, ce

qui me donna lieu de rappeler à mon

souvenir les Puristes , ainsi que plu

sieurs autres malheureux qui font

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VIII PRÉFACE.

gloire de vomir sans cesse des blas

phèmes contre la sainte Eglise : je mé

ditai long-temps devant Dieu , je con

sultai des amis zélés pour la gloire de

la religion, et je me convainquis de

l'obligation d'abandonner l'entreprise

de mon poëme, pour travailler au

triomphe de Y Eglise.

Ce qui m'a donné du courage pour

embrasser un travail si délicat, c'est le

succès de mes deux ouvrages (1): Mon

premier essai sur la réforme des

abus, fut loué par beaucoup de savans

illustres qui en furent dans le plus

grand étonnement; entre autres jour-

neaux celui des Débats , en date du

1 1 novembre 1828, porta son enthou

siasme jusqu'à dire : « L'ouvrage de

» l'abbé Mayneau, qui traite des

» abus, est admirable , curieux et ins-

(1) Lesquels ouvrages j'ai composé, ainsi que

ce troisième, uniquement pendant trois ans que

j'ai demeuré à la capitale, sans l'aide même d'un

secrétaire, soit dans la bibliothèque du Roi, soit

dans celle de Mazarin et de la ville de Paris ; mais

il faut que j'avoue que pendant ces trois ans, j'ai

travaillé environ quatorze ou quinze heures par

jour.

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PBÉFACE. IX

» tructif; il réunit, à la pureté du

» style, la force de l'éloquence, il joint

» au génie de l'homme d'état, la sa-

» gesse du législateur, etc. Voilà un

» grand homme, le Fénélon de notre

» siècle, etc., etc. »

Le second ouvrage, intitulé : Le

Génie du Sacerdoce, ou la Gloire des

bons Prêtres, eut les applaudissemens

de plusieurs journeaux remarquables;

entre autres la Quotidienne , qui est

impartiale, en date du 28 septembre

1829, a dit : « L'ouvrage qui a pour

» titre : Le Génie du Sacerdoce, par

» l'abbé Mayneau , est un ouvrage qui

» est nécessaire au clergé ; il est pré-

» cieux et capable de donner aux ecclé-

» siastiques le goût de la littérature;

» le style est beau et pur, on y voit le

» portrait du sacerdoce nourri de bons

» principes incontestables, bon catho-

» liqueetbon gallican, sans être ultra,

» justement tollérant sans être relâ-

» ché, etCe »

Beaucoup de savans et vertueux ec

clésiastiques de la capitale m'en firent

des éloges en me faisant de sages ré

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X PRÉFACE.

flexions (i); ma joie redoubla, lors

que à l'apparition du Génie du Sa

cerdoce je fus honoré de plusieurs

lettres flatteuses des personnages les

plus distingués et les plus pieux de la

capitale ; telles que celles de Son Al

tesse Éminentissime Mgr. le Prince

de Croï , cardinal , archevêque de

Rouen , Grand aumônier de France ,

de M. Desjardins, vicaire - général,

archi-diacre de Paris , de M. le baron

deDamas, gouverneur de S. A. R. Mgr.

le duc de Bordeaux, de Son Excellence

Mgr. le Nonce apostolique, arche

vêque de Gènes , dont le zèle aimable,

l'esprit juste et le génie vaste, lui con

cilient la vénération de tous les bons

et savans ecclésiastiques.

C'est dans ces doux momens où, ces

(i) Un grand nombre d'entre eux me dirent

que j'avais été trop bon de mettre M. l'abbé Gau-

zargueau rang des prédicateurs; ils ajoutèrent de

lui d'autres choses : je leur répondisque j'en étais

affligé, et que j'avais été induit en erreur.

Je déclare ici solennellement que si je savais

que quelqu'un de ceux que j'ai placé dans les

rayons de la gloire sacerdotale eût des senti -

mens contraires à la foi, je l'en rayerai à l'instant

dans un journal.

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PRÉFACE. XI

grands hommes , par l'exemple de leur

piété et de leur science profonde , ex

citant mon émulation , je conçus le

magnifique dessein de travailler au

triomphe de l'Eglise.

Je sais, par expérience, que dès

l'instant que l'on défend la gloire ro

maine, on devient suspect aux yeux

même de quelques ames qui font pro

fession de piété; mais n'importe, au

cune considération humaine ne sera

capable de me détourner de mon no

ble but ; lorsqu'il s'agit de la grande

cause de la Religion, je n'appréhende

rien. 11 ne faut pas cependant croire

que je sois ultramontain ; je suis tout

dévoué catholique et bon gallican ,

sans être ultra (i) ; je suis sincèrement

attaché aux libertés gallicanes ; mais ,

en véritable chrétienne défends la vé

rité aux dépens de mes intérêts les plus

chers, et avec l'aide du ciel je sais tout

sacrifier pour son triomphe.

Je diviserai- cet ouvrage en trois li-

(l) J'ai toujours fait respecter les lois de mon

pays ainsi que le Souverain et l'État; mais je n'ai

jamais aimé les abus qui nuisent à la gloire du

sanctuaire et du trône.

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XII PRÉFACE.

vres : livre premier, Triomphe sur

les Hérésies et les Schismes ; livre

second , Triomphe sur le Schisme et

l'Hérésie oui régnent actuellement en

France; livre troisième, Triomphe

des souverains Pontifes sur leurs en

nemis (1).

Je tâcherai d'offrir au lecteur les

combats des Schismatiques et des Hé

rétiques ; je montrerai succintement

leurs erreurs, leurs vices et leur dé

pravation; j'offrirai, à l'admiration

des sages, le tableau des docteurs illus

tres qui lesont réfutés, les conciles qui

les ont solennellement condamnés ;

quelquefois même nous y admirerons

des Hérésiarques qui, pleins d'un es

prit juste, après avoir arboré l'éten

dard de la révolte, s'avouant vaincus,

venaient déposer aux pieds du pontife

toute la puissance de leurs lumières

et de leur gloire, pour unir le triomphe

(1) Après avoir composé cet ouvrage, je l'ai

soumis à M. Marduel, curé de Saint-Roch, doc

teur en Sorbonne, qui, ayant examiné ce qu'il y

a de plu» délicat, n'y a rien trouvé contre la foi

ni les saints canons, en outre , je le soumets au

Saint-Siège

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PRÉFACE. XIII

de leur esprit au triomphe de l'Eglise.

Dans mon second livre, je tâcherai

de renverser le schisme des Puristes

qui règne encore en France , je mon

trerai que s'ils ont déserté fièrement

le giron de l'Eglise , c'est parce qu'ils

n'ont point trouvé dans son sein une

place assez glorieuse ; nous verrons

combien est déplorable l'égarement

de ces hommes aveugles qui ne savent

pas contempler cette époque célèbre,

où le vénérable pontife Pie VII fit la

restauration de l'Eglise gallicane ; où

sa conduite fut un véritable chef-d'œu

vre de sagesse, qui opéra des merveilles

dans toute la France, qui ne formait

qu'un concert de louanges envers les in-

strumens admirables de la Providence.

Je tâcherai de réfuter l'hérésie de

M. Oegger, ancien premier vicaire de

la cathédrale de Paris. Je montrerai

au grand jourl'abîme où il s'est plongé ;

on verra clairement qu'il se croit un

prophète unique envoyé du ciel, pour

annoncer une nouvelle doctrine qui

est ignorée de tout le monde , des

Protestans de toutes les sociétes, et

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XIV PRÉFACE.

de la sainte Eglise ; c'est ce qu'on ne

peut apercevoir qu'en approfondissant

son ouvrage très-diffus et très-obscur,

avec beaucoup de réflexion (i).

Dans mon troisième livre, je met

trai la dernière main au Triomphe de

l'Eglise; comme il y a de nosjours beau

coup d'esprit pervers et frivoles qui

(i) Si M. Oegger, ainsi que les puristes sont

mécontens de ma réfutatiou , pour terminer l'af

faire avec plus de pompe , nous défendrons notre

cause solennellement devant tous les savans de

la capitale , soit à la Sorbonne ou ailleurs ; je me

soumets , pour leur satisfaction , à ce combat re

ligieux. Comme , à l'exemple de Goliath , tous les

jours ils insultent la milice sainte d'Israël et son

chef auguste, pour moi, à l'exemple de David,

j'offre volontiers de me mesurer avec eux , avec

l'aide unique de saint Pierre : Quinque lapides , etc.

On me trouvera , tous les lundis à trois heures

du soir, dans la bibliothèque de la ville de Paris;

et si je me trouvais en vacances , mon adresse est

à M. l'abbé Mayneau, auteur, chez AI. Fulcrand

Mayneau père, à Saint-Aphrodise, à la Tuilerie,

à Béziers , département de l'Hérault ; je me ren

drai à l'instant à leurs désirs, manifestés dans une

lettre affranchie et signée de deux témoins remar

quables; et ils se convaincront que lorsqu'il s'agit

de défendre l'Église, je ne recule jamais, à l'exem

ple de saint Augustin , qui combattit publique

ment à Carthage les hérésies en présence de cent

cinquante-neuf évoques donatistes , et de deux

cent quatre-vingt évêques catholiques.

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PRÉFACE. XV

s'élèvent contre l'autorité romaine, et

vomissent des blasphèmes contre ses

chefs augustes dignes de la vénération

des hommes , j'offrirai , aux yeux de

l'ame fidèle, le tableau véritable, na

turel et magnifique de Pontifes véné

rables, qui ont honoré le trône pon

tifical par leurs vertus, leur zèle, leur

héroïsme, leur science et leur génie;

j'admirerai ceux qui étaient chéris de

tousles esprits, en donnant dans Rome

la liberté à toutes les religions , con

vaincus, comme les apôtres, qu'on ne

doit soumettre les hommes au doux

empirede Jésus-Christ, ni par la force,

ni par la puissance, mais par la per

suasion par la douceur, en leur pro

diguant toutes les richesses de la

charité.

Nous contemplerons leur génie

puissant parcourant l'univers , pour y

opérer des merveilles, en y déployant

avec générosité les trésors de leurs

vastes lumières 5 répandant partout

les charmes, les délices, les doux par

fums de la paix, créant en tout lieu

des établissemens pompeux de bien

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XVI PREFACE.

faîsance pour adoucir les maux des

victimes de l'infortuue 5 devenant les

pacificateurs entre les peuples et les

souverains, leur décernant avec jus

tice et sagesse des couronnes légitimes,

versant sur eux toute l'étendue de leurs

grâces , de leurs bénedictions, qui de

viennent, pour eux et pour leurs su

jets, la source merveilleuse de l'abon

dance et du bonheur.

Enfin, nous contemplerons la gloire

de Rome chrétienne , maitresse de l'u

nivers, portant l'étendard de la croix,

recevant les hommages des mortels

qui s'y rendent journellement de tou

tes les parties du monde , les éclairant

par sa science vaste et profonde, so

lide et immuable , renversant, pulvéri-

. sant , anéantissant ces fantômes d'er

reurs qui s'élèvent sans cesse contre

elle pour déchirer son sein maternel ,

et affermissant de plus en plus sur la

pierre éternelle, malgré les tempêtes

et les orages, ses conquêtes et sou

triomphe !

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iivve premier.

TRIOMPHE

SUR LES

mâffii&saiss wî iliss (Emasmosik

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4 TRIOMPHE

ploie à leurs regards toutes les richesses de

sa magnificence, surtout lorsque le soleil

naissant vient donner la vie à tousles êtres,

et embellir de ses rayons dorés les îles voi

sines embaumées de fleurs odorife'rantes.

Un tel spectacle est ravissant sans doute;

mais lorsqu'un vaisseau vaste et solide ,

magnifique et inébranlable est agité par les

tempêtes les plus orageuses, tantôt enseveli

dans l'abîme, tantôt élevé au milieu des airs,

tantôt frappant contre des roches effrayan

tes J ou s'arrêtant sur des bancs affreux de

sable ; lorsqu'ainsi agité pendant des siècles,

il s'arrache de tous les périls les plus immi-

nens, franchit tous les obstacles, brave tous

les écueils, et arrive majestueusement avec

une vigueur toujours nouvelle au port de

la paix , tout couvert de gloire et de lau

riers ; on ne peut s'empêcher d'admirer sa

puissance , de contempler ses merveilles et

son brillant triomphe.

Tel est le vaisseau de la sainte Eglise qui

réunit merveilleusement dans son sein les

fidèles de l'univers chrétien; dans les ins-

tans heureux de calme , on voit avec ravis

sement ses chers enfansse nourrir ensemble

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DE L'ELISE. f)

da pain des anges, se soulager dans leur

infortune , ne former tous qu'un cœur et

qu'une ame, et jouir ici-bas au milieu des

cantiques divins , des délices célestes au

sein d'une paix profonde.

Mais lorsqu'elle est attaquée, poursuivie,

cette mère tendre, et que ses fidèles enfans,

inviolablement attachés à la loi divine, souf

frent héroïquement la persécution , traver

sent les déserts, afin de ne jamais abandon

ner le Dieu de leurs pères , bravent la fureur

des tyrans à l'aurore de leur âge tendre ,

confondent leur orgueil par leur héroïsme,

volent vers l'échafaud pour y cueillir la

palme du martyre; ô! qu'il est beau, qu'il

est magnifique , ce triomphe!

Le sang coule de toute part, des chré

tiens sont moissonnés , soit au printemps de

leurs jours , soit au déclin de leur vie , mai*

il en renaît sans cesse ; le champ du père

de famille s'agrandit : des erreurs grossiè

res s'élèvent, une espèce de trophée de l'E

glise s'efface , mais l'Eglise, toujours puis

sante, rétablit bientôt sa beauté primitive ,

elle se couvre d'une plus grande gloire ail

leurs; que d'autres ennemis lèvent l'étçn

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6 TRIOMPHE

dard de la révolte contre elle, des millions

de héros renaissent, l'Eglise, toujours pure,

brillante et glorieuse, s'affermit sur la pierre

contre laquelle viendront se briser tous les

efforts de l'enfer (1), elle élève avec pompe

son triomphe éclatant en répendant ses lu

mières victorieuses sur l'univers chrétien.

Elle se couvre de lauriers, non point

par la force des armes, ni par les gibets,

ni par les chaînes, mais par sa foi inébran

lable, par sa patienc . par son courage

confiant en Dieu et surtout parla vérité,

la justice , et quelquefois par la tolérance.

Comme la colombe plaintive , elle gémit à

la vile de ses chers enfans qui se plongent

dans l'abîme du vice et de l'erreur, elle

élève les mains vers le Tout-Puissant pour

apaiser son courroux, et fléchir la colère

de son bras vengeur.

Sa lumière pure qui brille au sein de ses

fidèles chéris , peut être obscurcie un ins

tant par quelques-uns de ses membres

corrompus, mais son éclat et sa splendeur

(1) TucsPctrus et super hancPeiram edificabo ecclesiam mcam

et portœ inferi non prevatebunt advenus cam. Math. VII , v. a5,

ebap. XVI-XV1II, saint Aug. , liv. I«, du Symbole.

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DE L ÉGLISE. 7

ne pourront jamais être anéantis par le

corps de cette société sainte, auguste et ma

gnifique , qui oppose à ses cruels ennemis

les vérités éclatantes des prophéties , ainsi

que leurs effets merveilleux, les prodiges

du Sauveur, la beauté, les charmes, la gran

deur, la noblesse , la doctrine , l'établisse

ment miraculeux du christianisme , les mi

racles opérés dans tous les siècles pour

soutenir la vérité de notre auguste et su

blime religion.

S'ils osent résistera sa puissance, en ren

versant de fond en comble la sublimité de

nos écrits sacrés, leur attribuant de fausses

doctrines pour s'affermir avec un acharne

ment pitoyable dans leurs erreurs, et pour

en imposer aux simples et aux ignorans,

l'Eglise offre à leurs regards le tableau

honteux de la corruption humaine, leur

assure que le seul moyen de conserver la

foi est de fuir l'air empoisonné de cette

maudite Babylone qui les séduit.

Tel est de ses ennemis aveugles la con

duite odieuse, qui seule a le droit de les

faire nommer par Tertulien les meurtriers

de la vérité. Tel est aussi la grandeur , la

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8 TRIOMPHE

noblesse avec laquelle notre mère chérie

triomphe de ses enfans égarés.

Dieu permet ces attaques, ces combats

toujours glorieux à la chrétienté, pour dé

ployer les trésors de sa justice envers les

héros de la religion , qui versent leur sang

pour cueillir des lauriers éternels , au sein

des tempêtes et des orages; pour accorder

une couronne de miséricorde à ceux qui ,

fidèles aux douces invitations de la grâce ,

désertent les voies perverses du monde, en

se jetant avec confiance dans les bras puis-

sans de la sainte Eglise , pour faire éclater

l'héroïsme de religion et de charité, ré

pendre sur les écrits sacrés des lumières

plus éclatantes, affermir la vigilance des

pasteurs et de leurs troupeaux avec le dé

pôt précieux de la foi , faire briller d'un vif

éclat l'autorité de nos magnifiques tradi

tions.

Etant la base et la colonne de la vérité

que l'esprit saintrend infaillible, elle triom

phera toujours de toutes les hérésies et de

tous les chismes, comme elle l'a fait jusqu'à

nos jours avec une pompe glorieuse.

Je vais tâcher de parcourir rapidement

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DE L'ÉGLISE. 9

les erreurs des chismatiques et des hérésiar-

ques qui ont fait le plus d'éclat dans tous les

siècles , pour en montrer les horreurs, et le

néant en contemplant le triomphe de l'E

glise.

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1 0 TRIOMPHE

CHAPITRE II.

Cuisines et Hérésies des premier et deuxième siècles.

Au milieu de la grandeur, de la pompe,

des prodiges éclatans qui entraînaient des

milliers de mortels au pied de la croix pour

adorer sa puissance et chanter sa gloire, en

contemplanl l'héroïsme des apôtres et l'es

prit saint qui régnait en eux, on vit des

audacieux qui essayèrent d'en ternir la

beauté; mais, dans leurs fatales entreprises,

ils ne firent qu'agrandir leur ignominie ,

et que donner un nouvel éclat au triomphe

de notre auguste religion.

Les premiers hérétiques qui levèrent l'é

tendard de la révolte, pour ravir les con

quêtes glorieuses de l'Eglise naissante de

Jésus - Christ, furent Simon le Magicien,

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DE L'ÉGLISE. II

Ménandre , les Nicolaïtes, les Cérinthiens

et les Ebionites.

La première erreur de Simon fut de croire

qu'on pouvait acheter à prix d'argent les

dons merveilleux du Saint-Esprit ; et c'est

ce qui adonné lieu de nommer Simoniaque,

quiconquevend ou achète les choses saintes.

Cet aveugle mortel porta la folie jusqu'à

vouloir se faire reconnaître pour un dieu.

Il prétendait que les hommes etaient les

auteurs de VAncien Testament; il niait la

résurrection des corps , enseignait et prati

quait des infamies abominables. Ce fut saint

Pierre, prince des apôtres, qui, par ses

prières victorieuses , triompha de cet im

posteur au moment où il s'élevait dans les

airs à la vue d'un peuple immense, auquel

il s'était donné en spectacle pour montrer

sa prétendue divinité; mais Dieu qui se

joue, quand il lui plaît, des projets des

méchans, l'ensevelit dans toutes les horreurs

de la honte, en le précipitant du haut des

nues, où l'on contemplait son triomphe ap

parent (1).

(1) Arnove, liv. II, contre les Gentils. Eusèbe , liv. II. de

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/

'

13 TKIOMPHE

Menandre fut un de ses sectateurs qui

voulait passer pour le sauveur des hom

mes, donnait un faux baptême, auquel il

attribuait des effets miraculeux, comme une

rie éternelle sur la terre, sans aucune es

pèce de vieillesse.

Les Nicoldites, dont il est parlé dans le

second chapitre de YApocalypse , furent

aussi les partisans de Simon. On a cru qu'ils

avaient eu pour coryphée Nicolas , un des

sept diacres de l'église romaine (1).

Les Ebionites avec Cérinthe , entre au

tres blasphêmes, vomirent celui-ci : « Que

Jésus-Christ n'était pas Dieu. » Au rapport

de Saint-Jérôme , Saint - Jean écrivit son

évangile pour les confondre (2).

Les hommes apostoliques de ce temps

renversèrent leur système et triomphèrent,

avec une pompe éclatante , de leurs blas

phêmes.

l'Hist. ecclésiastique, chap. XIII. Saint Epiph. , lier. XXI,

liv. I, n. 5. Saint Aug. , Ut. des héré., n. 1. Théodorct ,

liv. I, des Fables hérétiques , chap. Ier, etc.

(1) Saint Jérôme, épit. 1 à Héliodorc. Le père Alex., Dis

sertation sur l'Histoire ecclésiastique du premier siècle.

(a) Livre des écrivains ecclésiast. sur saint Jean, ch. XIX.

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DE LÉGLISE. l3

Chismes et Hérésies du second siècle.

Ce siècle enfanta un plus grand nombre

d'hérésiarques ; ceux que la tradition a of

fert à nos regards sont Saturnin et Basilide;

leurs disciples furent innombrables, ainsi

que les Gnostiques , les Valentiniens , les

Marcionites , les Montanistes, et les Encra

ntes.

Les disciples de Saturnin et de Basilide

étaient disciples de Simon le magicien et

deMénandre, ils multiplièrent les extra

vagances de leurs coryphées.

Saturnin fut le premier qui condamna

les noces et le mariage. Basilide osa le pre

mier soutenir que Jésus-Christ n'avait eu

qu'un corps fantastique, et qu'il n'avait pas

été véritablement crucifié. Saint Clément ,

prêtre d'Alexandrie, et saint Irénée ont

confondu ces hérésiarques audacieux , ainsi

que les Gnostiques qui niaient la divinisé

du Sauveur du monde.

Les Valentiniens , les Serdoniens et les

Marcionites propagèrent les hérésies pré

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l4 TRIOMPHE

cédentes en donnant un libre essor à leur

imagination fanatique, et malheureuse

ment ils firent tomber dans leurs piéges

séduisans une infinité d'ames faibles.

Saint Epiphane, saint Clément d'Alexan

drie, saint Justin, saint Irénée et Tertu-

lien combattirent ces ennemis de la religion

naissante et en triomphèrent.

Les Montanistes ou Cataphrygiens eu

rent pour chef Montan , Phrygien de na

tion, qui voulait passer pour le Saint-Es

prit ou Paraclet. Il se jeta dans un abîme

d'erreurs absurdes ; il prétendait que les se

condes noces devaient être prohibées; vou

lait introduire l'obligation de trois carêmes,

au lieu de se contenter d'un seul , d'après

la tradition des apôtres. Entre autres choses

ridicules , il enseignait que l'Eglise n'avait

point le pouvoir d'absoudre de tous les pé

chés.

Tertulien , qui était une des plus écla

tantes lumières du second et du troisième

siècle, eut le malheur de tomber dans l'hé

résie des Montanistes, lui qui avait si so

lidement écrit contre les hérésies , qui avait

établi dans ses ouvrages des principes pour

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DE L ÉGLISE. Ï'J

réfuter invinciblement toutes les erreurs de

Montan. S'il avait voulu, ce grand homme,

se soumettre au jugement de la sainte Eglise,

il n'aurait point perdu la gloire éclatante

dontiljouissait dans son sein glorieux (1).

Tatien et ses disciples appellès les Encra-

tites, prohibaient la viande, le vin et le ma

riage , c'est ce qui les fit appeler Encratites,

nom grec qui signifie continent. Ils n'of

fraient au sacrifice de la messe que de l'eau ,

ayant en horreur le vin ; ils niaient qu'Adam

fut sauvé.

Entre autres savans de leurs siècles, saint

Kpiphane , saint Irénée , saint Clément

d'Alexandrie , et Origène confondirent ces

hérétiques, et en triomphèrent.

Ces désertions, ces guerres intestines

semblent , aux yeux des ignares , des hu

miliations et des défaites pour l'Eglise. Non,

non; il en est de ces combats comme de

ceux des guerriers illustres, qui, en exi

lant leurs ennemis vaincus, augmentent

leur gloire, multiplient leurs lauriers et

leurs triomphes.

(1) Eusèbe , au cinquième livre de son Histoire ecclés. rap

porte le nom des auteurs qui ont écrit contre cette hérésie.

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1 f) TRIOMPHE

CHAPITRE III.

Chismes et Hérésies du troisième siècle.

Malgré la grandeur, la beauté, l'éclat,

la magnificence de la religion chrétienne,

qui fleurissait alors , on vit des enfans nés

dans son berceau , à lombre des autels, de

venir assez téméraires pour lever l'étendard

de la révolte contre leur mère tendre, qui

les avait enfantés en Jésus-Christ, et qui leur

prodiguait ses grâces et ses bienfaits les plus

doux.

Les Novatiens , les Sabelliens, les Paulia-

nistes, les Manichéens et les Origénistes for

mèrent des sectes qui firent du ravage dans

la vigne chérie du Seigneur.

Les Novatiens commencèrent par être

chismatiques et finirent par être hérétiques.

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DE L ÉGLISE. i J

Ce chisme prit sa source dans Novatien, qui

voulut se faire élire pape à la place de saint

Corneille, qui avait été canoniquement

élu. Saint Cyprien combattit fortement ce

chisme, et c'est dans cette époque qu'il

écrivit son magnifique ouvrage sur l'unité

dela sainte Eglise, livre capable de ren

verser seul , toutes les hérésies , et tous les

chismes anciens , modernes et futurs (1).

L'hérésie des Novatiens consistait princi

palement en ce qu'ils prétendaient que la

sainte Eglise n'avait pas le pouvoir de re

mettre les grands crimes après le baptême.

Saint Basile, saint Ambroise , saint Paucien,

évêque de Barcelone, et saint Cyprien,

écrivirent contre cette hérésie, qui fut con

damnée par le concile général de Nicée et

par plusieurs autres tenus en .Italie et en

Afrique.

Les Sabelliens , disciples de Praxeas , de

Noëtus et de Sabellius , prétendaient, avec

les impies Sociniens , que Dieu ne subsiste

pas en trois personnes , mais que les noms

(1) Lettre de Corneille h Fabius d'Antioche , dont plusieurs

fragmens sont rapportés par Eusèbe , liv. VI , de l'Hist. ecclé».

chap. XLII1.

a

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t8 . TRIOMPHE

de Père , de Fils et de Saint-Esprit sont

différons noms qui conviennent à une

même personne.

Cette hérésie donna lieu à celle de Paul

de Samosates , évêque d'Anlioche, homme

corrompu et infecté des principes de Sabel-

lius et des hérétiques anciens , réfutés par

saint Jean févangéliste. Il nia la divinité de

Jésus-Christ, et fut condamné dans deux

conciles d'Antioche (1).

Ces hérésies furent condamnées dans le

premier concile général de Nicée et dans

les conciles d'Antioche ; entre autres pères

de l'Eglise , saint Denis d'Alexandrie, saint

Athanase et saint Basile combattirent avec

un éclatant succès ces hérétiques.

Les Manichéens renouvelèrent dans ce

siècle un gr/md nombre d'erreurs des hé

résiarques du premier et second siècles : ils

admettaient deux principes, l'un bon et

l'autre mauvais; ils attribuaient à chaque

homme deux ames , l'une bonne et l'autre

mauvaise ; ils interdisaient et condamnaient

le mariage ; ils disaient que Jésus- Christ

(1) Tenus l'an 266 et 27a , septième livre de l'fliat. ecclés.

d'Eusèbe.chap. VIII.

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DE L'ÉGLISE. i()

n'avait eu qu'un corps fantastique : ils

niaient la liberté de l'homme , le péché ori

ginel, la nécessité du baptême et de la foi.

Ils rejetaient l'autorité de l'Ancien et du

Nouveau Testament, prétendant que Dieu

n'en était pas l'auteur. Ils avaient plusieu rs

autres imaginations pernicieuses qu'on voit

dans saint Augustin.

Ce saint docteur connaissait à fond leur

corruption et leurs dogmes, parce qu'il

avait eu le malheur de s'engager dans leur

secte avant le baptême ; mais il déserta leur

bannière profane apres avoir aperçu l'extra

vagance de leurs sentimens; et Dieu se ser

vit de la puissance de son génie pour les

confondre (1).

Les Origénistes soutenaient les erreurs

d'Origène, qui fut l'homme le plus savant

et le plus renommé de son temps ; les prin

cipales erreurs dans lesquelles il s'est plongé

avec ses disciples, sont, que l'amede Jésus-

Christ avait été unie au Verbe éternel avant

(i) Cette hérésie est prédite et condamnée en termes for

mels par l'apôtre des nations , ch, II, 1. Tbimoth. 4 et suiv.

Saint Léon, sermon i5 qui est le 5, sur le jeûne du dixième

mois , chap. IV et VI. Sermon 67 qui est le 18 , sar la passion

du Sauveur, chap. V.

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2 0 TRIOMPHE

l'incarnation : que Fame de chaque homme

subsistait avant son corps, et n'était en

voyée dans le corps humain que comme

dans une prison , en punition de ses anciens

péchés : que Jésus-Christ était mort, non-

seulement pour les hommes, mais encore

pour les démons , et que les peines de l'en

fer ne seraient pas éternelles. On l'accuse

d'avoir été le précurseur des Pélagiens sur

le péché originel et sur la grace de Jésus-

Christ.

Des théologiens ont cru qu'Origène n'a

vait point enseigné ces erreurs; mais que

ses disciples en avaient augmenté ses écrits,

pour leur donner plus de vogue, par le nom

de ce grand homme qui était l'admiration

de son siècle (i).

Saint Epiphane et saint Jérôme sont les

saints pères qui ont renversé les systèmes

des Origénistes, qui furent condamnés dans

plusieurs conciles généraux et particuliers ,

tenus en Orient et en Occident ; ainsi que

(i) Ceux qui veulent approfondir cette question peuvent

consulter M. Tillemont, le père Alexandre Dupin, Huet,

évêque d'Avranches , dans sa préface sur les Œuvres d'Ori

gine le père Halloix et les autres auteurs qui ont écrit sur

cette matière.

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DE L ÉGLISE. 1 T

dans le cinquième concile général tenu à

Constantinople en 55a, sous le pontificat

de Vigile et sous le règne de l'empereur

Justinien.

Bien loin que ces erreurs effrayantes en

vironnassent de nuages le berceau de la re

ligion, elles faisaient éclater sa puissance,

lui donnaient de la pompe, et contribuaient,

à son triomphe.

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2 2 TRIOMPHE

CHAPITRE III.

Chismes et Hérésies du quatrième siècle.

Comme un conquérant humain qui rem

plit la terre du bruit de ses merveilles , gé

mit au milieu de sa gloire, sur ses ennemis

qui versent leur sang pour ne pas vouloir

se rendre sous ses drapeaux, ainsi l'Eglise

sainte, qui tient l'univers sous sou doux

empire, gémit environné de l'éclat de sa

gloire , sur ses enfans aveugles qui se livrent

à la mort spirituelle, pour soutenir les com

bats de leurs erreurs : ce fut surtout dans ce

siècle qu'elle versa des torrens de larmes ,

et que son tendre cœur fut percé de mille

douleurs, sans néanmoins perdre de sa puis

sance et de sa gloire.

On vit naître dans ces jours de deuil un

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de l'église. • a3

nombreinfini d'hérésiarques audacieux qui

déployèrent toute l'étendue de leurgénie ma

gique. Les principaux furent les Donatistes^

les Ariens, les Macedoniens, lesAnome'ens,

les Aériens, les Photiniens , les Messaliens ,

les Lucife'riens , les Appolinaristes, les Pris-

cillianistes et les Jovinianistes.

Les Donatistes furent d'abord chismati-

ques et ensuite hérétiques; leur chisme dut

son origine à un certain Donat , évêque de

Cases-Noires, en Afrique , qui eut la témé

rité d'ordonner Majorin, évêque de Car-

tage , au préjudice de Cécilien , évêque lé

gitime, qui avait succédé canoniquement à

Mensurius. ' • :

Après la mort de Majorin, les chismati-

ques élurent un autre évêque , nommé

Donat, qui fit du ravage dans la vigne chérie

du Seigneur (1). •»

Les Donatistes joignirent bientôt l'héré

sie au schisme; leurs erreurs principales

étaient que le baptême et les autres sacre-

mens donnés hors de l'Eglise étaient nuls :

qu'il fallait rebaptiser tous les hérétiques ;

(1) Dupin, dans «on éiliiion d'Optai. i ". '. . . ' .

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24 , TRIOMPHE

que l'Eglise sainte était ruinée de fond en

comble , et qu'elle n'existait que dans leur

société ; c'est d'après ces conséquences

qu'ils ordonnèrent des prêtres , des évêques,

pour tous les lieux de l'Afrique, où leur

chisme était répandu , prétendant que toutes

les ordinations faites par les évêques catho

liques étaient nulles, que les pasteurs ca

tholiques étaient déchus de tout droit au

ministère.

Us déployèrent toutes les horreurs de leur

fureur et de leur rage dans les Eglises dont

ils purent se rendre maîtres; ils osèrent,

ces monstres , porter leurs mains sacriléges

sur la sainte Eucharistie , l'offrir avec im

piété à l'avidité des chiens, qui,aussitôt après,

se précipitèrent avec rage sur ces audacieux

sacriléges et les dévorèrent. Les vases sacrés

fftrent profanés, les autels renversés, les

huiles saintes répandues dans le lieu saint et

foulées aux pieds. - . ;

Je ne puis concevoir comment les héré

tiques entreprennent de répéter sans cesse

que l'Eglise romaine les persécute ; et jamais

elle ne l'a fait, et s'il ait existé des Chrétiens

qui , de leur propre gré , aient causé quel

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DE LÉGLISE. 2 5

que trouble, c'est parce qu'ils tâchaient de

se défendre contre ceux qui leur faisaient

du mal. Mais la sainte Eglise n'a jamais ap

prouvé aucun mal : pourquoi donc, crient-

ils sans cesse que les Catholiques romains

attenteraient à leur vie , s'ils en avaient le

pouvoir. Rome ne nous prêche que l'union,

la fraternité, le pardon des injures des en

nemis , elle nous engage à faire du bien à

ceux qui nous font du mal. Bene facile his

qui oderunt vos. Telle est, telle a été et

telle sera toujours la doctrine pure de cette

mère tendre et chérie , qui régit sagement

l'univers chrétien.

Dans ce malheureux siècle ces sectes se di

visèrent entre elles , mais elles se réunirent

par une haine implacable pour ravager le

champ légitime du père de famille : c'est ce

que font ordinairement tous ceux qui déser

tent les drapeaux de Jésus-Christ , comme

l'a fort bien remarqué Tertulien (1).

Ces hérétiques furent condamnésdans un

concile d'Arles, en 314, et dans un autre

tenue à Rome, en3i3. Ils persistèrent dans

(1) Tertulien, Ht. de» Prescriptions , chap. XLI .

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l6 TRIOMPHE

leur hérésie et dans leur chisme jusqu'au

siècle suivant. Pour les réunir au sein de

l'Eglise, l'empereur Honorius proposa des

conférences entre les évêques catholiques,

et ceux de la partie adverse.

Les débats eurent lieu à Carthage en 4 1 1 ;

on y vit cent cinquante-neufprélats donatis-

tes et deux cent quatre-vingts évêques catho

liques; mais ces hommes aveugles furent

confondus; un grand nombre déchirèrent

le bandeau fatal qui couvrait leurs yeux, et

les ouvrirent à la lumière pure qui les

inonda de ses charmes ravissans.

Ce beau triomphe appartient à saint

Augustin auquel tous ses collègues véné

rables avaient laissé l'honneur du combat

religieux. . . v

Le zèle épiscopal se distingua dans cette

époque célèbre d'une manière éclatante. Les

évêques catholiques offrirent d'un consen

tement unanime le partage de leur siége , et

même leur siége propre aux Donatistes., s'ils

voulaient rentrer dans le giron de l'Eglise»

cette secte diminua peu à peu, et l'hérésie

s'éteignit (l).

(1) Optat en a fait l'histoire , »aint Aug. a écrit contre cnx.

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DE L ÉGLISE. . 7-7

On a beau vomir des blasphêmes contre

la doctrine pure de Rome : ce n'est point

par lu force des armes ni par la contrainte

qu'elle essaie de ramener les ames égarées,

mais par le dévouement, par la bienfai

sance, en se dépouillant de ses biens légi

times en leur faveur, comme nous le voyons

par ces prélats distingués, qui auront un

nom immortel dans nos annales sacrées et

une gloire brillante dans la Jérusalem cé

leste.

On connaît assez les Ariens (t) pour les

coups éclatans dont ils frappèrent impu

demment la société catholique. L'erreur

principale flAnus, prêtre d'Alexandrie,

a été celle de Paul de Samosate sur la Tri

nité. Il insistait principalement sur la per

sonne du Fils de Dieu, et prétendait que

le Verbe n'était pas co-éternel ni consub-

stantiel k Dieu son père, et que par consé

quent Jésus-Christ n'était pas véritable

ment Dieu.

(1) Hermant, dans la Vie de saint Athanase; Dupin, dans sa

Bibliothèque des Acteurs ecclésiastiques, les auteurs du pre

mier concile de Nicée, imprimé à Paris , en 1691; Tillemont,

dans ses Mémoires sur l'histoire du quatrième et cinquième

siècles , où il est parlé de l'Arianisme.

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28 TRIOMPHE

Ces malheureux se divisèrent en plu

sieurs parties; mais ils s'unirent pour s'ar

mer contre la sainte Eglise : ils firent jbuer

tous leurs secrets ressorts pour jouir de la

puissance séculière, et par ce moyen ils

firent de honteux et rapides progrès; et

persécutèrent d'une manière atroce les

Catholiques.

Plusieurs grands hommes réfutèrent leurs

erreurs, et la vérité triompha. Saint Au

gustin, saint Ambroise, saint Epiphane,

saint Cyrille d'Alexandrie , saint Basyle ,

saint Grégoire de Nazianze, saint Phœba-

dius , évêque d'Agen ; saint Hilaire, évêque

de Poitiers; saint Athanase, et saint Alexan

dre , évêque d'Alexandrie , furent les intré

pides défenseurs de la foi contre cette secte

effrayante, qui fut condamnée par le grand

concile de Nicée, qui est le premier des

conciles généraux assemblés en 325.

Macédonius, arien de profession, s'em

para du siége de Constantinople par la fac

tion des hérétiques, et en ayant été chassé,

il publia une nouvelle hérésie, dontles sec

tateurs furent appelés Macédoniens. Elle

consistait à nier la divinité du Saint-Esprit,.

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DE L'ÉGLISE. 2Q

comme celle d'Arius, à nier la Divinité du

Verbe.

Saint Augustin et saint Ambroise, saint

Epiphane , saint Grégoire de Nyce , saint

Basyle, saint Athanase, sont ceux qui ont le

plus écrit contre cette hérésie, qui fut con

damnée par le premier concile de Constan-

tinople, qui est le second concile général

tenu en 381.

Les Anoméens ou Eunomiens eurent pour

chefs, Eunomius, évêque de Cysique, dis

ciple d'Aëtius , diacre d'Antioche , sur

nommé YAthée) il joignit beaucoup d'im

piétés à celles de Macédonius et ftArius : il

prétendait que la nature de Dieu n'était pas

incompréhensible, et qu'il connaissait Dieu

aussi parfaitement que Dieu se connaissait

lui-même.

Il jetait du ridicule sur les reliques des

martyrs et sur les prodiges que Dieu opé

rait à leurs tombeaux; il renversa la forme

du baptême , et ne voulut point qu'on le

donnât au nom de la Trinité , aussi il re

baptisait les hérétiques qui entraient dans

son parti; il méprisait les apôtres et les pro

phêtes; il prétendait que les plus grands

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3© TRIOMPHE

crimes n'étaient pas un obstacle au salut,

pourvu qu'on embrassât ses opinions, et

qu'on eût la foi dont il faisait lui-même

profession. Des hérétiques semblables chas

sés de l'Eglise ne pouvaient contribuer

qu'à son triomphe.

L'empereur Théodose fit tous ses efforts

pour éteindre cette secte. Théodoret, saint

Augustin, saint Epiphane, saint Chrysos-

tôme, saint Basyle, saint Grégoire de Nice

renversèrent par leurs savans écrits cette

hérésie , et en triomphèrent.

Aérius, prêtre de l'église de Sébaste ,

partisan des opinions d'Arius, composa plu

sieurs erreurs que les Calvinistes ont re

nouvelées dans une époque II prétendait

qu'il n'y avait point de différence entre les

évêques et les prêtres , et qu'ils étaient

égaux. Il ne voulait ni prières pour les

morts, ni jeûnes, ni abstinences; il affec

tait de faire meilleure chère pendant le ca

rême, les mercredis et les vendredis; il

choisissait quelquefois les dimanches pour

jeûner.

Les dogmes de cet audacieux hérésiarque

ont été condamnés dans presque tous les

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de l'église. 3r•

conciles tenus depuis ce temps-là. Saint

Augustin et saint Epiphane réfutèrent cette

hérésie avec un succès brillant.

Photin porta ses extravagances plus loin

qu'Anus; ses erreurs ressemblaient plus à

celles de Paul de Sarnosate et des Socinieos,

qu'à celles des Ariens : il prétendait que

Jésus-Christ était un pur homme , et qu'il

n'avait rien qui subsistait avant sa naissance

temporelle. Un grand nombre de conciles

ont foudroyé cet audacieux hérésiarque.

Les Messaliens , ou enthousiastes, étaient

à peu près semblables aux Quiétistes; leur

dogme consistait à nier la nécessité du bap

tême, à croire que l'oraison mentale a la force

d'effacer les péchés et de chasser les démons

de l'âme, ilsenseigaient que la prière devait

tenir lieu de tout; pour tout exercice ils

priaient ou dormaient tout le jour. Ils pré

tendaient être favorisés d'un grand nombre

de révélations, et se donnaient pour gens

forts spirituels ; mais ils négligeaient la

mortification , et vivaient dans un horrible

libertinage.

Ils ne firent aucune secte à part, parce

qu'ils se cachaient, en niant même qu'ils

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32 . TRIOMPHE

fussent imbus de telles erreurs. Théodore*

et saint Epiphane nous rendent savant sur

ce point : ces hérétiques furent condamnés

dans le concile d'Ephèse, qui est le troi

sième général (1).

Lucifer, évêque de Clagliari en Sar-

daigne , abandonna la communion des

évêques catholiques , parce qu'ils rece

vaient dans la société des fidèles, des Ariens

convertis (2).

On nomma Lucifériens ceux qui persis

tèrent dans ce chisme , et plusieurs d'entre

eux joignirent l'hérésie au chisme, préten

dant qu'il fallait rebaptiser les Ariens qui

revenaient à l'église. On les accusait aussi

d'enseigner que les ames étaient corporelles

et qu'elles étaient engendrées comme les

corps. Saint Augustin et saint Jérôme écri

virent contre les Lucifériens avec un écla

tant succès.

Apollinaire , prêtre de l'église de Lao-

(1) Act. 7, part, a , voy. saint Epiphane Théodoret , liv. IV,

des Fables hérétiques, chap. XI.

(a) Saint Aug. , let. i85 on 5o , à Boniface, chap. X, D. 47,

liv. du Combat chrétien de Agone christlane chap. XXX,

n. 3a , et sur les ps. 67 , n. 5g.

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DE l'église. 33

dicée, eut beaucoup de disciples appelés ap-

pollinaires. Ils enseignaientque Jésus-Christ

n'avait point d'ame humaine, mais que le

Verbe de Dieu animait son corps. Que du

Verbe et du corps de Jésus-Christ il s'était

fait une seule et même substance; en sorte

que le Verbe avait souffert, et était vérita

blement mort sur la croix; que la chair de

Jésus-Christ n'avait pas été formée du corps

de la sainte Vierge , mais qu'elle était venue

du ciel; que c'était la substance même du

Verbe actuel qui s'était changée en corps;

, que le Saint-Esprit était moins grand que

le fils et le fils moins grand que le père;

Ce fut exactement l'erreur des Millenaires

qu'ils renouvelèrent.

Ils furent condamnés dans le concile

d'Alexandrie, Fan 362; dans un concile

de Rome, en 373; dans un concile d'An-

tioche, en 3y8 ; et enfin dans le second

concile général, tenu pour la première fois

àConstantinople, l'an 38i.Saint-Fulgence,

saint Arnbroise, Théodoret, saint Grégoire

de Nyce, saint Grégoire de Nazianze et

saint Athanase les confondirent par leurs

réfutations victorieuses.

3

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34 TRIOMPHE

Priscillien , homme de qualité de Sara-

gosse, en Espagne, forma une secte qu'il

eut soin de nourrir des erreurs des Sabel-

liens, des Manichéens et des Gnostiques. Il

permettait le mensonge et le parjure pour

se cacher plus aisément.

Sulpice Sévère parle fort de ces héré

tiques au second livre de son histoire, et

c'est à cette époque que saint Augustin

écrivit contre le mensonge. Ils furent con

damnés dans plusieurs conciles : dans ce

lui de Saragosse, en 38o; dans le premier

de Tolède , en 4oo ; dans deux autres con

ciles d'Espagne, dont on ignore la date, et

dans le concile de Prague, en 56g.

Jovinien eut plusieurs disciples nommés

Jovinianistes; leurs erreurs étaient que l'é

tat de mariage était aussi parfait devant

Dieu que celui de la virginité et de la vi-

duité; que c'était une dévotion mal enten

due que de jeûner et de s'abstenir de la

viande en espritde pénitence; que l'homme,

après le baptême , élait impécable; que les

saintsavaient tous le même degré de gloire;

que tous les péchés étaient égaux , et qu'on

ne devait pas distinguer entre les véniels

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DE L'ÉGLISE. 3 )

et les mortels; que Jésus-Christ n'etait pas

né d'une vierge : c'est ce qu'enseignent au

jourd'hui les protestans, en osant dire qu'ils

ne font que suivre la doctrine de la primi

tive Eglise.

Ces erreurs furent condamnées par le

concile de Trente. L'empereur Théodose fit

des -lois pour les éteindre. Le pape saint

Cyrice les condamna dans un concile tenu

à Rome en 3go. Saint Augustin , saint Am-

broise, saint Jérôme ont combattu ces er

reurs et en ont triomphé.

Sans doute dans ces temps orageux l'E

glise , cette mère tendre et chérie, essuya

des larmes, des angoisses, en voyant son

corps auguste affligé de plusieurs plaies ef

frayantes; mais elles ne servirent qu'à ré

veiller la foi d'un grand nombre de fidèles,

et à faire trembler pour leur salut un grand

nombre de ceux qui étaient frappés d'un

état léthargique; ils se réveillèrent du mi

lieu des ombres de la mort, pensèrent au

.Dieu auquel ils n'avaient jamais pensé,

aimèrent la religion qu'ils avaient toujours

méprisée , embrassèrent la vertu qu'ils

avaient toujours détestée, s'y attachèrent

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36 TRIOMPHE

inviolablement, firent éclater un courage

héroïque, rendirent gloire à l'Eglise, la cou

vrirent de lauriers , au milieu des horreurs

des combats, que leur livrèrent ses cruels

ennemis.

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DE LÉGLISE. 37

CHAPITRE V.

Chismes et Hérésies du cinquième siècle.

Réjouissons-nous en voyant sans cesse

agir sur son Eglise le bras puissant du Sei

gneur qui la soutient et l'affermit au milieu

des orages. Ce qui semble souvent l'humi

lier contribue à sa gloire et à son triomphe.

Ce siècle, quoique un peu plus paisible que

le précédent, en offre des preuveséclatantes.

Entre autres hérétiques, Vigilance, les

Pêlagiens , les semi-Pêlagiens , les IVesto-

riens , les Enfichions , furent les principaux

qui essayèrent de faire quelques incursions

dans le champ du père de famille.

Vigilance, prêtre de Barcelonne, com

battit la vénération des reliques, l'interces

sion et l'invocation des saints. Il se déchai

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38 TRIOMPHE .

liait contre les prodiges qui éclataient aux

tombeaux des martyrs, et traitait de culte

superstitieux d'y faire brûler des cierges.

Il enseignait que l'état de virginité ou de

célibat devait être prohibé, et que cet état

n'était point préférable au mariage. Ces er

reurs furent condamnées dans la personne

deJovinien, et réfutées par saint Jérôme.

Célestius et Pelage ont été les coryphées

des Pélagiens. Les fondemens de cette hé

résie reposaient sur ce quidam avait été

créé pour mourir, qu'il tombât dans le pé

ché ou qu'il n'y tombât pas ; que son

péché n'avait nui qu'à lui seul; que les en-

fans ne naissent coupables d'aucun péché

originel, et qu'en conséquence le baptême

n'était pas nécessaire au salut; que la con

cupiscence n'avait rien de mauvais ; que

l'oubli ou l'ignorance ne pouvaient point

être péché; qu'il dépendait de l'homme,

s'il voulait , d'être sans passions et sans au

cun mouvement désordonné; que les vertus

n'étaient pas des dons de Dieu, mais des effets

purement naturels de notre humanité.

S'ils admettaient le nom de grâce et sa

nécessité, ils entendaient par-là les dons

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de l'église. 3g

de Dieu purement naturels , ou les grâces

externes, comme sont les bons exemples,

les miracles, les instructions, ou les grâces

qui éclairent interieurement sans qu'elles

agissent; tout au plus, d'après ces hérésiar

ques , la grâce interne était utile, mais non

pas nécessaire, etc., etc.

Saint Germain, évêque d'Auxerres, saint

Loup de Troies, firent tous leurs efforts

pour détruire cette hérésie, répandue en

Angleterre pendant que Pelage vivait. Saint

Jérôme composa plusieurs traités contre

les Pélagiens. Saint Augustin, l'illustre co

lonne de l'Eglise de ce temps, mérita, en

triomphant de ces hérétiques, le titre glo

rieux de docteur de la grâce. La sainte

Eglise romaine,avec ses souverains pontifes,

admira la puissance de son génie religieux.

Ces hérétiques furent condamnés par le

premier concile, qui fut celui de Carthage,

en 412j parle concile de Diospolis, en Pa

lestine, en 415; par un autre concile tenu

à Carthage , en 416; par le concile de Mi-

lève, la même année. Innocent 1er les con

damna l'an 4i7i et, après cet anathême, saint

Augustin regarda cette affaire comme ter

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4o TRIOMPHE

minée. Zozime , successeur du pape Inno*-

cent, trompé par les artifices de Célestius

et de Pelage, écrivit en leur faveur aux

évêques de l'église d'Afrique.

Ceux-ci tinrent un concile Pan 4'7> ou

ils condamnèrent de nouveau les Pélagiens,

et avertirent le pape Zozime de l'artifice

des hérétiques. Ils en tinrent un autre, en

4i8, où les Pélagiens furent également

condamnés.

Le Saint-Père, après un mur examen,

condamna Pelage et Célestius avec leurs

partisans , et envoya des anciclyques à

toute l'Eglise pour publier son jugement,

qu'on accueillit avec une vive allégresse.

Célestin Ier confirma les décisions de ses

prédécesseurs, et le concile général d'E-

phèse, tenu l'an 43 1, acheva de confirmer

toutes ces condamnations légitimes.

Après les Pélagiens s'élevèrent les semi-

Pélagiens : ils admettaient le péché origi

nel et la nécessité d'une grâce interne pour

parvenir au salut; mais ils croyaient que

l'homme pouvait par ses propres forces

mériter la foi et la première grâce néces

saire pour le salut.

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DE L'ÉGLISE. 4 r

Ils avaient ajoute à ces erreurs un grand

nombre d'autres, qui furent réfutées par

saint Augustin dans un ouvrage de la pré

destination. Ce saint mourut en réfutant

ces hérétiques.

L'an 4g4 1 Ie p<ipe Pélage condamna les

livres de Cassien et de Fauste, semi-Péla-

giens, et autorisa ceux de saint Augustin.

Hormisdas , son successeur, fit la même

chose. Le second concile d'Orange, de l'an

52g , et le concile de Valence en Dauphiné,

tenus peu de temps après, condamnèrent

les erreurs des semi-Pélagiens par les ou

vrages de saint Augustin. Boniface II con

firma ces conciles. Saint Prosper , saint

Fulgence , saint Cesaire d'Arles soutinrent

la doctrine de l'Eglise et triomphèrent de

ces erreurs fanatiques.

Les Nestoriens eurent pour coryphée

Nestorius. Son hérésie fit un grand ravage

dans l'Eglise , et subsiste encore dans plu

sieurs endroits de l'Orient.

1° Il prétendait qu'il y avait deux per

sonnes en Jésus-Christ , et que le Fils de

Dieu n'était pas uni , comme parle l'E

glise, hypostatiquement, mais seulement

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/p TRIOMPHE

accidentellement au Fils de l'Homme ; en

sorte que Jésus-Christ n'était Fils de Dieu

que par adoption.

2* Il prétendait , par une suite nécessaire

de ce blasphème, que la sainte Vierge n'é

tait pas mère de Dieu, puisque le fils qu'elle

avait mis au monde n'était pas Dieu en sa

propre personne, comme il le soutenait au-

dacieusement.

Le jugement du pape Célestin Ier, qui le

condamna, fut accueilli, avec acclamation,

et ratifié par le concile général d'Ephèse ,

convoqué exprès pour exterminer cette hé

résie, l'an 43 1. Saint Cyrille, patriarche

d'Alexandrie, saint Proclus , évêque de

Cyzique, le combattirent fortement et fu

rent victorieux.

Les Eutichiens eurent pour chef Eutichès,

prêtre, abbé d'un monastère célèbre de

Constantinople; son hérésie, qui est dia

métralement opposée à celle des Nestoriens

existe encore en Orient. Nestorius prétendait

qu'il y avait deux personnes en Jésus-Christ,

comme il a deux natures : Eutichès voulait,

au contraire, qu'il n'y eut qu'une nature en

Jésus-Christ; parce que l'Eglise avait décidé

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DE L'ÉGLISE* 43

contre Nestorius qu'il n'y avait qu'une per

sonne ; il renouvelait, en quelquesorle, l'hé

résie iïAppollinaire, parce que Appollinaire

prétendait que la nature humaine avait été

absorbée par la nature même du Fils de

Dieu, et que le corps de Jésus-Christ n'a

vait pas été véritablement formé du corps

de la sainte Vierge, tandis que Eutichès

reconnaissait que le corps de Jésus-Christ

avait été véritablement formé du corps de

la sainte Vierge; mais il prétendait que la

nature humaine et la nature divine, étant

unies en la personne de Jésus-Christ, sans

aucune division, il ne résultait de cette

union qu'une seule nature; tandis que l'E

glise a toujours cru que l'union des deux

natures, en la personne du Fils de Dieu,

n'empêche pas que chacune des deux na

tures ne subsiste sans confusion.

Dioscore , patriarche d'Alexandrie , se

déclara le protecteur de cette hérésie, et

étant soutenu de l'empereur Théodose-le-

Jeune, dont les hérétiques avaient surpris

la religion, il tint un faux concile à Ephèse,

où il ne voulut admettre ni les légats du

pape saint Léon , ni saint Flavien ; il les fit

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44 ' TRIOMPHE

au contraire Iraiter de la manière la plus

indigne, et y fit absoudre Eutichès.

Sai^t Flavien, patriarche de Constanti-

nople, s'opposa courageusement aux pro

grès de cette secte; l'an 44g, d tint un

concile dans cette ville où Eutichès fut

condamné; mais ce saint patriarche fut mal

traité, on l'accabla de coups , il reçut plu

sieurs blessures , et fut couronné martyr

par la fureur des hérétiques. C'est pour cela

qu'on donna à ce faux concile le nom de Bri

gandage d'Ephèse,Latrocinium Ephesinum.

Les ennemis de la religion doivent être

réduits au silence, en voyant qu'à cette

époque les catholiques , doux comme des

agneaux , bien loin de faire une légère of

fense à quelqu'un, furent impitoyablement

massacrés par les ordres ou par les conseils

des hérésiarques.

Comment osera-t-on nous répéter sans

cesse que la sainte Eglise Romaine veut

qu'on détruise par le fer et le feu ses enne

mis? non, non; elle ne veut pas la mort

des pécheurs , mais elle désire qu'ils vivent

et qu'ils se convertissent. Nolo mortem

peccatoris , sed ut convertalur et vivat.

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DE L'ÉGLISE. 4r)

Saint Léon défendit courageusement la

foi de l'Eglise. L'empereur Marcien, qui

succéda à Théodose-le-Jeune , fit éclater

admirablement sa piété dans le concile de

Calcédoine; ce concile, qui fut le quatrième

général, se tint l'an 45 1- Eutichès et son

hérésie furent condamnés; l'impie Dioscore

fut déposé; tout ce que saint Léon avait

écrit, contre cette hérésie, fut reçu avec de

grands applaudissemens , et on éleva un

triomphe éclatant à la doctrine de la sainte

Eglise.

Les ennemis du concile de Calcédoine

formèrent différentes sectes ; la plus fameuse

fut celle des Acéphales, ainsi nommés,

parce qu'ils n'eurent d'abord aucun chef,

et qu'ils se séparèrent également du giron

de l'Eglise, et du parti de Pierre Mongus ,

faux patriarche d'Alexandrie , qui proté

geait les Eutichiens de tout son pouvoir.

Les Acéphales furent aussi appelés Sévê-

rins, parce que Sévère, après s'être emparé

du siége patriarchal de l'Eglise d'Antioche,

se mit à la tête de ces hérétiques pour agran

dir le domaine de son usurpation, et donner

un plus grand éclat à son zèle fanatique.

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4<> TRIOMPHE

Au sujet des Prédestinatiens, il semble

qu'il y a quelque difficulté. Le sentiment le

mieux fondé est qu'ils se formèrent d'un

petit nombre de personnes, qui, déduisant

de fausses conséquences des principes de

saint Augustin sur la grâce et sur la pré

destination, prétendaient que Dieu ne vou

lait pas le salut de tous les hommes; qu'il

prédestinait les réprouvés au mal et à la

damnation éternelle, sans aucun mérite

précédent; que la prédestination et la grâce

imposaient à l'homme une nécessité d'agir

incompatible avec la liberté.

Fauste , évêque de Riez, s'étant aperçu

qu'un prêtre, nommé Lucidas, était dans

ces erreurs, lui avait écrit pour l'en détour

ner. Deux conciles tenus, l'an 47$, l'un à

Arles, l'autre à Lyon, condamnèrent les

erreurs des Prédestina tiens (1).

C'est au milieu des pleurs, des larmes et

du sang que versent ses enfans chéris, que

l'Eglise, cette mère tendre , soutient sa

gloire et sa puissance.

(1) Ceux qui veulent approfondir ces questions, peuvent lire

le cardinal liarouius, le père Sumond et le pire Alexandre.

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DE LÉGLISE. l^n

CHAPITRE VI.

Chûmes et Hérésies du sixième siècle.

L'impiété aura beau se déchaîner contre

la sainte Eglise; ses efforts viendront se

briser contre la pierre inébranlable, sur

laquelle elle repose. Elle fleurira toujours,

malgré les erreurs et les persécutions qui

s'élèvent dans son sein.

Les principales sectes, qui dans ce siècle

firent du ravage, furent les Agnoëtes , les

Trithéites, ksJcémètes, et les défenseurs

des trois chapitres.

Thémistius, diacre d'Alexandrie, imbu

de l'hérésie des Eutichiens,fut le chef des

Agnoëtes; leur erreur consistait en ce qu'ils

attribuaient à Jésus-Christ l'ignorance de

plusieurs choses.

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4 8 TRIOMPHE

Euloge, patriarche d'Alexandrie, dont les

écrits furent approuvés par saint Grégoire-

le-Grand, réfuta avec succès leur hérésie (1).

Philopone , surnommé Jean le grammai

rien , infecté de l'Eutichianisme , fut le

chef des Trithéites. Il prétendait qu'il y

avait trois natures divines , comme il y a

trois personnes; il niait la résurrection des

corps. Les Eutichiens renversèrent eux-

mêmes cette hérésie , qui s'éteignit bien

tôt.

Les Acémèles, ainsi nommés du mot grec,

qui signifie gens qui ne dorment point ,

étaient des moines, qui, divisés en trois

bandes , se succédaient continuellement

jour et nuit, pour chanter les louanges de

Dieu. Leur erreur consiste en ce qu'ils niè

rent qu'il fût vrai de dire qu'une personne

dela Trinité se fût incarnée, qu'elle fût née

d'une Vierge, et qu'elle eût souffert.

Ils furent condamnés comme Nestoriens

par le pape Jean II, et, ayant insisté avec opi

niâtreté dans leurs erreurs, ils furent re

tranchés de l'Eglise.

(j) Saint Grégoire, lclt. XLII , du liv. VIII.

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DE L'ÉGLISE. 4f)

Il y a trois sortes de défenseurs des trois

chapitres d'hérétiques, de schismatiques et

de catholiques. Il est juste que le lecteur

connaisse ces trois fameux écrits, qui fu

rent déférés au jugement de l'Eglise, comme

remplis des blasphêmes des Nestoriens.

î?. Les écrits de Théodore , évêque de

Mopsuest, qui avait été le maître de Nesto-

rius;

2°. La lettre d'Ybas , évêque d'Edesse , à

un Persan appelé Maris;

3°. Les écrits deThéodoret, évêque de

Cyr, faits pour réfuter les douze anathéma-

tismes de saint Cyrille d'Alexandrie contre

ïestorius.

Le second concile de Constantinople, qui

est le cinquième général , condamna solen

nellement ces trois écrits, et joignit à leur

condamnation celle de la perSonne de l'im

pie Théodore de Mopsuest , qui , quoique

mort, fut anathématisé comme blasphéma

teur et Nestorien.

Pour ce qui est d'Ybas et deThéodoret,

ce concile se contenta de condamner leurs

deux écrits, sans toucher à leur personne;

la raison de cette différence fut que Théo

4

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5t) TRIOMPHE

dore deMopsuest était mort dans son impié

té sans avoir rétracté ses écrits, au lieu que

Théodoret et Ybas avaient toujours vécu et

étaient morts dans la communion de l'E

glise.

Ils favorisèrent Nestorius en écrivant

pour sa défense ; mais ils condamnèrent

publiquement cet hérésiarque dans le con

cile de Calcédoine; et, en prononçant l'ana-

thême contre lui, ils furent regardés comme

ayant rétracté ce qu'ils avaient écrit de fa

vorable à cet audacieux hérétique, et par

conséquent le concile ne fit nulle difficulté

de les accueillir comme orthodoxes, et de

leur donner une place dans l'assemblée.

La condamnation des trois chapitres fut

contredite par les hérétiques et par un

grand nombre d'églises, dont plusieurs fi

rent un chisme à cette occasion.

Les défenseurs hérétiques des trois cha

pitres furent ceux qui, étant d'accord que

ces trois écrits étaient infectés des opinions

de Nestorius, ne laissaient pas de les dé

fendre comme orthodoxes ; et comme ils

n'osaient prendre ouvertement le parti de

Nestorius , qui avait été publiquement con

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DE L EGLISE. DI

damné par toute la sainte Eglise , pour

pouvoir, avec quelque couleur, soutenir

les sentimens de cet hérésiarque, ils pré

tendaient que ces sentimens avaient eté

approuvés par le concile de Calcédoine;

car, disaient-ils, la lettre d'Ybas a été re

çue comme orthodoxe; donc ce concile,

par son silence , a approuvé tout ce que

cette lettre approuvait.

Ce concile, ajoutaient-ils, a reçu aussi

Théodoret sans exiger de lui aucune rétrac

tation , par rapport à ses écrits contre saint

Cyrille; il a donc, continuaient-ils, ap

prouvé ces écrits. Ces hérétiques abusaient

ainsi de l'autorité du concile de Calcé

doine pour soutenir le Nestorianisme, qui

avait été si solennellement proscrit.

Les défenseurs chismatiqu.es des trois cha

pitres furent les évêques d'Istrie et de quel

ques provinces voisines, et ceux d'Hiber-

nie, en Irlande. Ces évêques condamnèrent

Nestorius et ses blasphêmes, quoiqu'ils fus

sent orthodoxes sur tout le reste; mais s'é-

tant persuadés, par un préjugé dont on

ne put les arracher, que le concile de

Constantinople était opposé-/-dans la con

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f>2 TRIOMPHE

damnation des Irois chapitres, au concile

de Calcédoine; non-seulement ils préten

daient qu'il fallait donner un sens catho

lique aux expressions venimeuses qui se

trouvent dans ces trois écrits, mais ils reje

taient aussi le concile de CoDstantinople,

comme chismatique , et se séparèrent de

la communion des chefs de l'Eglise et des

orientaux, qui avaient applaudi à ce cin

quième concile.

Saint Grégoire-le-Grand et Pélage II tra

vaillèrent avec un grand succès à éteindre

ce chisme.

Les défenseurs catholiques des trois cha

pitres sont ceux qui donnaient un sens ca

tholique à toutes les expressions nesto-

riennes qui sont dans ces trois écrits; quel

ques-uns persévérèrent dans ce sentiment ,

après la tenue du cinquième concile qui

n'avait pas été général et œcuménique ,

n'ayant été célébré que par une partie des

églises d'Orient; mais ils ne se séparèrent

point de la communion du Saint-Siége , ni

des autres églises.

Cette dispute fut terminée par l'accepta

tion de la censure des trois chapitres ; ce

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DE 1/ÉGLISE. 5^

qui est très-evident, car toutes les églises

reçurent comme œcuménique le sixième

concile tenu à Constuntinople contre les

Monotellites, sans aucune contradiction et

exception. Or, ce sixième concile confirma

tout ce qui avait été fait dans les cinq con

ciles précédens. .

Il ne se contenta point d'une confirma

tion générale de la condamnation des héré

sies et des écrits qui avaient été condamnes,

mais il entra dans le détail de chacune de

ces hérésies, de chacun de ces écrits, et

prononça anathême contre leurs défen

seurs.

C'est du choc des sentimens et des opi

nions que jaillit la lumière pure. Ainsi, au

milieu des combats , des erreurs , des chis-

mes et des hérésies , on voit briller l'Eglise,

se dépouiller de toute apparence de faiblesse

et de petitesse , et on aperçoit avec enchan

tement sa doctrine se couvrir d'un lustre

plus éclatant, et devenir plus belle, plus

noble et plus majestueuse.

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54 TRIOMPHE

»■■,■,

CHAPITRE Vil.

Cliismca et Hérésies des septième, huitième et neuvième siècles-.

La puissance de l'Eglise prenant sa source

dans Dieu , ne pourra jamais être ébranlée,

siDeuspronobis quis contra nos. Ainsi, chré

tiens fidéles, ne tremblons jamais à la vue

des orages et des tempêtes qui s'élèvent

contre elle; Dieu les permet pour un plus

grand bien et pour sa plus grande gloire.

Les hérétiques qui jouèrent un grand

rôle dans ce siècle, furent les Monotélites f

les Pauliciens et les Mahoniétans.

Les Monotélites enseignaient qu'il n'y

avait en Jésus - Christ qu'une action et

qu'une volonté , qui était l'action et la vo

lonté divine , quoiqu'il y eut en Jésus-Christ

deux natures.

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DE LÉGLISE. 55

Les coryphées de celle héresie, qui pri

rent naissance sous l'empire d'Héraclius,

Furent Sergius , Syrien de nation , patriarche

de Constantinople, et Cyrus, patriarche

d'Alexandrie. Pyrrhus, Paul et Pierre, qui

après Sergius tinrent successivement le siége

de Constantinople, furent les principaux

appuis de cette secte. Macaire, patriarche

d'Antioche, en était aussi le défenseur du

temps du sixième concile , et cette seclè

persévère encore en plusieurs endroits de

TÔrient.

Plusieurs souverains pontifes condamnè

rent celte hérésie; entre autres Séverin ,

Jean IV, Théodore, saint Martin Ier et Aga-

thon. Ce fut pour l'éteindre entièrement

qu'on assembla le sixième concile général ,

à Constantinople, l'an 68o , sous le pontifi

cat d'Agathon. •

Saint Maxime, célèbre abbé, qui fut mar

tyrisé pour la défense de la foi contre les

Monotélites; Arcadius, archevêque de Chy

pre; Sophronius, patriarche de Jérusalem;

saint Jean l'aumônier, patriarche d'Alexan

drie , furent les principaux défenseurs de la

foi contre ces hérétiques.

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56 TRIOMPHE

Les Pauliciens étaient des Manichéens

qui reparurent sous" ce nouveau nom, et

avec de nouvelles extravagances, vers l'an

653. Ils eurent pour chef un malheureux

appelé Paul de Samosale , en Arménie. Ils

se plongeaient dans toutes sortes d'abomi

nations. Ils firent une secte puissante (1).

Ce fut ce siècle qui enfanta l'impie Maho

met, Cyrénéen de nation, qui, dit-on, à

l'aide de Sergius, moine nestorien, com

posa la religion qui est répandue chez les

Mahométans, qui s'étend en Orient et en

Afrique, et dont les dogmes sont un mé

lange monstrueux du judaïsme, du chris

tianisme , des hérésies anciennes , et dé

mille inventions ridicules.

D'après l'alcoran , qui est le code de

leurs lois , Dieu est auleur du mal ainsi que

du bien; l'homme n'est pas libre dans ses

œuvres; il n'y a qu'une personne en Dieu;

Jésus-Christ n'est qu'une pure créature et

un prophète; Jésus-Christ n'a été crucifié

qu'en apparence; il a été enlevé dans le

ciel ; il doit mourir et ressusciter avec tous

^ (1) Abrégé de l'Histoire Jes Ardennes, torn. I, dans Bos-

suet, évoque de Meaeix , Histoire des variations, liv. XI, n. i3.

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DE L'ÉGLISE. 57

les hommes; les démons seront sauvés; le

Paradis consiste dans des voluptés char

nelles.

D'après leur alcoran encore, les plaisirs

de la chair ne sont pas des péchés : un

homme peut avoir plusieurs femmes, et il

est permis de les répudier; la circoncision

est nécessaire au salut; le baptême est inu

tile, l'eucharistie est une idolâtrie; il est

défendu de boire du vin.

Quoique cette religion soit environnée de

mille dehors ridicules , cependant elle s'est

étendue par la puissance des armes; Dieu l'a

permi en punition des crimes des hommes,

habitans de ces régions où elle règne avec

empire. Ce qui fait la gloire de la sainte

Eglise, et contribue à sa pompe et à son

triomphe , c'est que tout ce qui s'éloigne de

son sein se plonge dans le ridicule et

s'arme contre la saine et sublime raison.

Chismcs et Hérésies du huitième siècle.

Les hérésies de Felix, d1 Eh'pandus et des

Iconoclastes prirent naissance dans ce siècle.

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58 TRIOMPHE

Les Iconoclastes se déclarèrent contre le

culte de la croix, des images de Jésus—

Christ et des saints , et c'est ce qui leur fit

donne rle nom à?Iconoclastes.

Léon , surnommé Isaurien, excité par un

nommé Constantin, évêque, fut le princi

pal appui de cette hérésie ; Constantin Co-

phronime, fils de Léon, et Léon, fils de

Constantin , qui règnèrent successivement,

favorisaient la même impiété, et firent dans

la sainte Eglise de grands ravages.

Le septième concile général de Nreée

condamna cette hérésie, sous le règne de

l'impératrice Irène , et de Constantin, son

fils, Tan 787. Saint Jean de Damas , saint

Germain, patriarche de Constantinople,

Grégoire II et ses successeurs firent tous

leurs efforts pour renverser cette secte.

Félix, evêque d'Urgel en Espagne, et

Elipandus, évêque de Tolède, enseignè

rent, vers la fin de ce siècle, que Jésus-

Christ, n'était fils de Dieu que par adop

tion , et qu'il était esclave du Père Eternel.

Les principaux conciles qui ont condamné

cette hérésie, sont ceux de Ratisbonne, te

nus Pan 79a ; ceux de Francfort, l'an 7g4;

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DE L'ÉGLISE. 5()

ceux de Rome , sous le pontificat de

Léon III, l'an 799.

Entre autres savarrs , Agobard, le celè

bre saint Benoît, fondateur et premier

abbé d'Aniane, dans le diosèse de Mont

pellier, et restaurateur de l'ordre monasti

que en Occident, sous l'empire de Charle-

magne et de Louis-le-Débonnaire; le célèbre

Alcuin , Paulin , patriarche d'Aquilée ;

Etenus, évêque d'Osne, employèrent avec

succès , toutes les ressources imaginables

pour combattre fortement cette hérésie,

qui tendait à renouveler celle des Nesto-

riens (^ ainsi ils établirent en l'honneur

de l'Eglise un triomphe éclatant.

Chismes et Hérésies du neuvième siècle.

Les principaux hérétiques qui déchirè

rent le sein de l'Eglise en ce siècle, furent

Sergius , Baanes, Claude, de Turin, Gotes-

calh , Photius et Jean Scot.

Sergius et Baanes firent naître en Orient,

(1) On peut voir leurs écrits dans la bibliothèque des l'ère».

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f)D TRIOMPHE

l'hérésie des Pauliciens, nouveaux Mani

chéens, dont nous avons parlé ci-dessus,

en y ajoutant de nouvelles impiétés, ou en

donnant une nouvelle couleur, à quelques-

unes des anciennes hérésies.

Claude, évêque de Turin , renouvela les

erreurs de Vigilance et d'Aërius, sur les

reliques, sur l'invocation des saints, et celles

des Iconoclastes sur les images ; il fut réfuté

par un saint diacre du diocèse de Paris ,

nommé Dungale, moine de la célèbre ab

baye de Saint- Denis , en France, et par

Jonas , évêque d'Orléans.

Gotescalk, moine de l'abbaye d'Orbai ,

diocèse de Soissons , fut accusé d'enseigner

les erreurs attribuées, dans le cinquième

siècle , à ceux qu'on nommait Prédestina-

tiens, desquels nous avons parlé.

L'an 848, ces erreurs furent condamnées

parle concile de Mayence et par les conciles

de Cressi, l'an 84g et 853, Hincmarc, ar

chevêque de Rheims, et Raban Maure , ar

chevêque de Mayence, écrivirent contre cet

hérésiarque.

Photius était neveu de saint Tarasius, pa

triarche de Constantinople, sous les aus

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DE l'f.GT.ISF. 6t

pices duquel le septième concile général fut

célébré : c'était un des plus savans hommes

de son temps , comme il paraît par ses écrits

que nous avons de lui , et dont le plus fa

meux est sa bibliothèque, où l'on voit l'ex

trait et la critique des livres qu'il avait lus.

EtantUncore laïque , il fut intrus sur le

siége de Constantinople, à la place de saint

Ignace , patriarche légitime, qui fut chassé

de son siége; et l'impie Bardas, neveu de

l'empereur Michel III. La sainte liberté d'I

gnace lui attira ce traitement; il avait re

fusé la communion à Bardas, qui scandali

sait tout l'empire , par un inceste avec sa

belle-fille.

Photius, homme ambitieux, se fit ordon

ner en six jours, de laïque qu'il était , pa

triarche de Constantinople, par Grégoire

de Syracuse, évéque excommunié et dé

posé, et par d'autres évêques pareillement

excommuniés.

Nicolas 1er, après une mûre discussion,

excommunia Photius et ses adhérens; Pho

tius méprisant l'excommunication, eut l'au

dace de fulminer le pape dans un faux con

cile qu'il assembla. Ce fut alors qu'il écrivit

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G 2 TRIOMPHE

contre l'Eglise romaine, et qu'il enseigna

queleSaint-Esprit ne procède point du Fils;

erreur contraire à la doctrine de la sainte

Eglise, dont les pères grecs et latins, tels

que saint Basyle, saint Athanase et autres,

ont été les dépositaires.

Apres la mort frappante de Bordas, l'em-

pereur Basyle, le Macédonien, ayant succédé

à l'empereur Michel, fit assembler le hui

tième concile général à Constantinople,

l'an 86g. Saint Ignace fut remis sur son siége

dans ce concile : Photius fut déposé et ex

communié, après quoi l'empereur l'exila.

Saint Ignace étant mort dix ans après,

Photius eut assez d'adresse pour se faire ré

tablir dans le siége de Constantinople, par

le crédit du même empereur,dans les bonnes

grâces duquel il était rentré. Il fit confir

mer son élection par le pape Jean VIII, qui

y consentit pour éviter un plus grand mal ,

et alors il fut patriarche légitime.

S'étant vu paisible possesseur du trône

patriarcal , il assembla un faux concile, qu'il

osa nommer le huitième général , il y fit

annnller tout ce qui avait été fait contre lui

dans le huitième concile, et se déclara de

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de l'église. 6 J

nouveau contre l'Eglise romaine ; le saint

Père prononça contre lui une sentence de

déposition, et confirma tout ce qui avait

été' fait contre Photius dans le huitième

concile.

Marin , successeur de Jean VIII , renou

vela la déposition de Photius ; après lui ,

Adrien III et son successeur , Etieqne V, fi

rent la même chose. Photius persista dans

son chisme, appuyé par l'empereur Basyle.

Après la mort de Léon-le-Sage, celui-ci,

fils et successeur de Basyle, chassa Photius

du siége de Constantinople, le fit enfermer

dans un monastère, où il mourut, et fit

élire un patriarche orthodoxe lié à la saipte

Eglise.

Sous l'empire de Charles-le-Chauve ,

Jean Scot publia plusieurs erreurs sur la

prédestination et sur la sainte Eucharistie ;

ce fut de ses écrits que Béranger puisa les

principes de son hérésie sur l'auguste sacre

ment de nos autels.

Toutes ces révolutions opérées dans l'E

glise , ces erreurs, ces chismes , ces hérésies,

ne sontque les effets évidens des prophéties

du Sauveur pendant qu'il vivait sur la terre,

Page 79: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

(34 TRIOMPHE

et qu'il environnait les hommes de sa gloire.

Il faut, disait-il, qu'il y ait des scandales;

necesse est ut ventant scandala. Voilà, en

effet, ce que nous voyons dans tous les siè

cles; le Chrétien, qui est fermement atta

ché à l'ancre de la foi, ne doit point en être

étonné, il doit toujours au contraire y ad

mirer le- doigt puissant du Seigneur, qui

triomphe de tout.

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de l'égl1se. 65

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GHAPITTE VIII.

Chismes et Hérésies rfes dixième, onzième et douzième siècles.

f

Le Ciel sembla vouloir faire cesser les

combats et les guerres de l'Eglise dans le

dixième siècle, et y répandre des bénédic

tions plus abondantes et plus douces

En effet, on n'y vit naître aucune secte

considérable; les Antropomorphites , c'esl-

à-dire ceux qui attribuent à Dieu une forme

corporelle, parurent en Italie; Ratérius,

évêque deVérone, les réfuta. On vit en peu

de temps cette société de gens grossiers et

ignorans, s'éteindre insensiblement,

Valafrid, homme obscur, ne craignit pas

de nier l'immortalité de l'ame ; il fit éclater

ce dogme impie en Languedoc. A Castres,

dans une jibbaye de Sainl-Benoît,se trouva

5

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66 TRIOMPHE

un savant abbé, nommé Durand, qui la ré

futa et en triompha. Jean XXII applaudit à

'ce beau triomphe , et érigea son abbaye en

évêché.

Hérésies du onzième siècle.

La sainte Eglise vit avec douleur déchi

rer son sein maternel , dans ce siècle , par

Béranger et Michel Ce'rulalre, nouveaux

Manichéens.

Sous le règne du roi Robert, ils parurent

en France, dans la ville d'Orléans; ils eu

rent pour chefs deux chanoines de cette

ville, qui, ayant été découverts, furent

condamnés dans un concile , et de'gradés.

Béranger, archidiacre d'Angers, fit sa

réputation au commencement de ce siècle ;

il était le premier, après Jean Scot, qui ait

eu la témérité de prétendre que le corps de

Jésus - Ghrist n'est contenu qu'en figure

dans l'auguste sacrement de nos autels.

L'Eglise universelle s'éleva contre cet héré

siarque , qui voulait renverser la doc rine

pure enseignée par les apôtres.

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DE t'ÉGMSF. 67

Il fut condamné , dans un concile tenu à

Rome sous Léon IX, Pan io5o; par les con

ciles de Versailles et de Paris, tenus la même

année; par le concile de Florence , sous

Victor II, Tan 1o55; par le concile de Tours,

la même annee; par le concile de Rome,

sous Nicolas I! , en io5a ; par le concile de

Rouen , en 1o63 ; par le concile de Poitiers,

en 1075; par un concile de Rome, sous

Grégoire VII, en 1078; et par un autre de

Rome, en 107g.

Alger, diacre de Liége, et dans la suite

abbé de Cluny, Guimond, évêque d'Aver-

sano près de Naples , Durand, abbé de

Troard, Lanfranc, archevêque de Cantor-

beri, Hugues, évêque de Langres, sont ceux

qui écrivirent le plus contre cet hérésiar

que; mais leur triomphe fut d'autant plus

beau , plus éclatant et plus magnifique ,

qu'il rétracta ses erreurs, reçut avec joie

la pénitence imposée , et entra avec allé

gresse dans le sein de la sainte Eglise catho

lique.

En 1o43, un nommé Michel Cérulaire ,

patriarche de Constantinople , écrivit contre

l'Eglise latine. Les principales accusations

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68 TRIOMPHE

fausses ou frivoles dont il voulait la noircir

étaient :

i°. Que le Latins consacraient avec du

pain sans levain;

•j°. Qu'ils mangeaient des viandes suffo

quées;

3°. Qu'ils se rasaient la barbe;

4°. Qu'ils jeûnaient le samedi;

5°. Qu'ils mangeaient de la viande pen

dant toute la semaine dela Quinquagésime;

6°. Qu'ils avaient ajouté au symbole de

iNicée ce motfilioque, pour faire entendre

que le Saint-Esprit procède du Père et du

Fils, ce qu'il taxait d'erreur;

7°. Que deux frères avaient le pouvoir

dans l'Eglise latine d'épouser deux sœurs;

8°. Qu'on se donnait le baiser de paix à

la messe avant la communion ;

9°. Qu'on ne chantait point alleluia en

carême ;

io°. Que l'Eglise n'honnorah pas les re

liques des saints, ni les images, et autres

semblables choses : voilà à peu près ce qui

causa le grand chisme de l'Eglise grecque.

Léon IX employa tous les moyens ima

ginables pour ramener cet hérésiarque au

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DE L'ÉGLISE. 69

sein de l'Eglise ; il envoya à Constantinople,

pour procurer la paix , trois légats , à la tête

desquels était le savant cardinal Humber ,

évêque de Blanche Selve.

L'empereur Constantin, surnommé Mo-

nomacus , les reçut avec honneur; ils con

férèrent, souvent avec le patriarche, mais

n'ayant' pu le convertir à force de raison-

nemens et de prières, ils lancèrent contre

lui l'excommunication dans l'église de

Sainte-Sophie.

Ce malheureux hérésiarque eut l'audace ,

après cela , d'excommunier les légats et le

pape; il posa les fondemens d'un grand

çhisme dans l'Orient, quoique l'empereur

l'eût chassé du siége de Constantinople , et

qu'un grand nombre d'églises grecques fus

sent liées avec l'église romaine.

Chismes et Hérésies du douzième siècle.

Les principaux hérésiarques qui déchi

rèrent le sein de l'Eglise pendant ce siècle

furent Tanchelin , Pierre de Bruis, Henri,

moine apostat, chef des Albigeois , Arnaud

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70 TRIOMPHE

de Bresse , Pierre Abaillard, Gilbert de la

Porrée , les Apostoliques et les Vaudois.

Tanchelin , rempli d'un esprit pervers ,

eut la temérité d'enseigner, a Anvers , que

Jésus - Christ n'avait pas institué le mi

nistère des évêques et des prêtres, et que la

participation de l'eucharistie était inutile

pour le salut : il joignait à ses erreurs une

vie infâme. Il profita du temps où il n'y

avait à Angers qu'un prêtre corrompu pour

répandre sa doctrine , la faire accueillir , et

s'y faire admirer comme un prophète.

Heureusement Dieu jeta des yeux de mi

séricorde sur ce troupeau chéri, déjà égaré.

ll suscita saint Norbert, fondateur de l'ordre

de Prémontrès et ensuite évêque deMagde-

bourg, qui , s'étant transporté à Angers,

combattit si bien cette hérésie , qu'il l'étei-

gnit entièrement, et qu'elle devint pour l'E

glise une joie vive et un triomphe éclatant.

A Saint-Gilles, diocèse de Nismes , Pierre

de Brjiis renouvela les erreurs des Mani

chéens , auxquelles il joignit plusieurs nou

veautés qui ont été épousées dans les siècles

suivans par les Calvinistes et les Luthériens;

ses sectateurs furent appelés Petrobusiens ,

Page 86: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

DE L ÉGLISE. 7i

et après la mort de Pierre de Bruis , ils fu-

ventappelés Henriciens, parce qu'ils eurent

pour chef un nommé Henri , moine apos

tat , qui publia les erreurs de son maître ,

et y en ajouta de nouvelles. C'est de là que

prit naissance la secte des Albigeois (1).

Ces hérétiques furent condamnés par le

second concile de Latran , tenu l'an 103g,

sous Innocent II; c'est le dixième des con

ciles généraux. Saint Pierre-le-Vénérable ,

abbé de Cluny , le grand saint Bernard,

premier abbé de Clairvaux, réfutèrent leurs

erreurs.

Arnaud de Bresse , en Italie , fut d'abord

clerc, de là religieux, et ensuite apostat; il

enseigna plusieurs erreurs sur l'eucharistie,

sur le baptême des enfans , sur l'état reli

gieux efsur l'état ecclésiastique : il suivit de

près les erreurs des Petrobusiens. Il fut con

damné l'an i %3q par le concile général de

Latran, sous Innocent II. Saint Bernard le

réfuta.

Pierre Abaillard né dans le territoire de

Nantes , en Bretagne, s'acquit une brillante

(1) Histoire des variations ; Bossuet , éveque de Mcaux ,

Ut. XI.

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^?2 TRIOMPHE

réputation dans l'université de Paris, où il

montra publiquement la philosophie : sa

triste dialectique le plongea dans plusieurs

erreurs, sur la Trinité , et sur d'autres ma

tières.

Il fut condamné parle concile de Soissons

en 1120, et dans celui de Sens, en n40,

ces condamnations furent confirmées par

le pape Innocent II. Saint- Bernard combat

tit avec un brillant succès ces erreurs ,

son triomphe fut d'autant plus éclatant,

qu'Abaillard retracta ses erreurs, et vécut

pieusement dans l'abbaye de Cluny, où il

avait été admis par Pierre-le-Vénérable.

Il.se réconcilia avec saint Bernard, et

mourut d'une manière édifiante, dans un

monastère de cet ordre, dans le prieuré de

Saint-Marcel de Châlons-sur-Saône, où il

avait été envoyé pour rétablir sa santé, par

saint Pierre-le-Vénérable, abbé de Cluny,

qui fait de grands éloges de la vie édifiante,

qu'il mena jusqu'à la mort. .

Gilbert de la Porrée, évêque de Poi

tiers, enseigna des erreurs sur la Trinité,

l'an 1148. Elles furent condamnées, au

concile de Keims. Saint-Bernard les réfuta,

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DE L'ÉGLISE. "]3

avec un si heureux succès , que cet heré

siarque se retra cta.

Les Apostoliques élaient des Manichéens,

qui s'étaient répandus vers le pays de Co

logne : ils étaient à peu près plongés dans

les mêmes erreurs que les Albigeois (1).

Les Vaudois doivent leur origine à un

marchand de Lyon, nommé Valdo : ils se

mêlèrent de prêcher sans mission, car ils

étaient tous laïques. Ayant été réprimandés

ils ne voulurent point se soumettre , ils en

seignèrent plusieurs erreurs condamnées

dans le livre onzième de l'histoire des Va

riations, par Bossuet, évêque de Meaux.

Ces hérétiques furent condamnés par

plusieurs conciles; dans celui de Lombes,

l'ann63; dans celui de Toulouse, l'an 1178;

dans le troisième de Latran , célébré sous

Alexandre III, l'an 1 179: et enfin dans le

quatrième concile du Latran , tenu sous le

pontificat dTnnocent III, Tan I215.

Reinerus, chrétien Vaudois nouveau con-

(1) Sermons de saint Bernard, 64, sur les cantiques n. 8.

Serm. 65 , n. î, a, 4, 6, 7, serm. 66, n. 8 et 12 , Bossuet, éyc-

gue de Meaux ; Histoire des variations , liv. XI.

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74 TBIOMPHE

verti, s'étant fait dominicain , écrivit contre

ces hérétiques avec applaudissement.

Comme le soleil après des éclipses, de

vient plus agréable , et attire d'avantage les

regards des mortels; de même, la sainte

Eglise , ce soleil de justice et de vérité , de

vient après les combats des erreurs, plus

intéressante , et attire davantage les regards

de l'univers , et les bénédictions du ciel qui

verse sur son sein les richesses de ses grâces

et de sa magnificence.

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DP LÉGLISE. 75

^^^>»p<fci^&Ê*trm*mt*m&mmr*t*m*********

CHAPITRE IX.

Chismes et Hérésies des treizième, quatorzième et quinzième

siècles.

Les combats des hérésies, qui ont eu

lieu pendant tant de siècles, montrent evi

demment la puissance de l'Eglise, sa gran

deur, sa noblesse, et son triomphe.

Les hérétiques qui jetèrent la consterna

tion dans son sein maternel , pendant le

treizième siècle , furent les albigeois , les

disciples d'Almaric pu d'Aimeri , ceux qui

se dirent les disciples de l'abbé Joacliim,

les Circoncellions d'Allemagne , les Flagel-

lans, les Fratricelles , les Béguards et les

Béguines.

Les Albigeois, ainsi nommés parce qu'ils

se répandirent principalement dans le dio

cèse d'Albi, et dans tout le Haut-Languedoc,

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y6 TRIOMPHE

firent profession des erreurs des Mani

chéens, des Petrobusiens, des Arnaldistes

et des Vaudois, desquelles ils avaient fait

un composé monstrueux. Ces malheureux

se plongeaient dans toutes sortes d'infamies.

Ils furent condamnés par plusieurs con

ciles de la Gaule-Narbonnaise , par un

concile d'Avignon , en 1210; par celui de

Lavaur , Tan 1243 ; par le concile de Saint-

Gilles, la même année ; par un concile de

Montpellier; par le quatrième concile gé

néral de Latran , tenu l'an I215 ; par un

concile provincial de Sens à Paris, l'an 1223;

par celui de Toulouse, l'an 123g; par celui

de Narbonne, l'an 1225; et par celui de

Béziers, l'an 1256

Saint-Dominique fit tousses efforts pour

éteindre cette hérésie; Arnaud, abbé de Ci-

teaux, réfuta leurs erreurs , ainsi que le

bienheureux Pierre de Castelnau , légat du

Saint-Siége , qui fut martyrisé par la fureur

des Albigeois, qui mettaient tout à feu et

à sang; voilà ce qu'inspire le fanatisme.

Amairie ou Aimeri, clerc du diocèse de

Chartres, écolier de philosophie, et ensuite

de théologie dans l'université de Paris, en

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DE L EGLISE. n~

seigna plusieurs erreurs, et eut un grand

nombre de disciples; il fut pour ainsi

dire le précurseur des Calvinistes; il niait

outre cela la résurrection des corps, pré

tendait que le Paradis et l'Enfer étaient

une chimère , qu'on portait le Paradis en

soi-même, quand on était occupé de Dieu;

qu'on portait l'Enfer avec soi quand on

était en péché-mortel , que la parole de

Dieu ne se trouvait pas plus dans les écrits

des Saints-Pères , que dans les fictions des

poetes.

Il ajoutait d'autres extravagances ; il

fut condamné dans un concile de Paris,-

l'an 120g , et dans le quatrième concile gé

néral de Latran , l'an 121 5.

Joachim,abbé d'un monastère de l'ordre

de Citeaux, dans la Calabre, s'acquit une

grande réputation par ses vertus; il tomba

par simplicité dans une erreur sur le mys

tère de la très-sainte Trinité; voulant dis

tinguer la" nature divine des personnes et

admettre une quaternité, pour ainsi dire,

plutôt qu'une Trinité.

Cette erreur, qui était un effet de l'ima

gination sophistique, fut suivie de quelques

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78 TRIOMPHE

fanatiques, qui prenantl'abbé Joachim pour

un prophète s'attachèrent à lui. L'un d'entre

eux composa un livre sous le titre de YE-

vangile éternel, rempli de mille extrava

gances. Ce livre et ses défenseurs furent

condamnés dans un concile tenu à Arles en

1260. Les erreurs de l'abbé Joachim furent

condamnées par le concile général de La-

tran, tenu sous Innocent III, en 1215.

Vers l'an 1268, les Circoncellions paru

rent en Allemagne, et renouvelèrent l'er

reur des Donatistes du quatrième siècle. Us

prétendirent, avec ces anciens hérétiques,

que les pécheurs ne pouvaient conférer va-

lidement aucun sacrement, ni avoir aucun

droit au ministère dont ils étaient privés;

dès-lors qu'ils étaient pécheurs. Que par

conséquent il n'y avait plus dans l'Eglise

aucun évêque , ni aucun prêtre qui eut le

pouvoir de lier et de délier? parce que,

disaient-ils , le pape , les évêques et les prê

tres étaient hérétiques, simoniaques et pé

cheurs.

Ces malheureux audacieux osèrent s'at

tribuer le pouvoir dont ils prétendaient

que les prêtres et les évêques de la sainte

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DE L'ÉGLISE. 7Ç)

Eglise étaient tléchus. Ces erreurs ont été

condamnées depuis long-temps, et dans le

quatrième siècle , dans la personne des Do-

na listes. ,

Les "Flagellans commencèrent par une

dévotion populaire , et dégénérèrent en

hérésie l'an 1260. Plusieurs personnes s'at

troupèrent en Italie, et, marchant en pro

cession par les rues , nus jusqu'à la ceinture,

ils se donnaient la discipline jusqu'au sang.

Ce spectacle attendrissant produisit d'a

bord la conversion de plusieurs pécheurs;

mais ils poussèrent les choses jusqu'à dire

qu'on ne pouvait recevoir la rémission des

péchés si on n'entrait dans cette confré

rie. Ils prirent la liberté de se confesser et

de s'absoudre sacramentellement les uns les

autres, quoique laïques.

La secte passu en Italie, en Allemagne

et en Hongrie, où elle fut renouvelée le

siècle suivant , l'an i34q. La faculté de

théologie de Paris s'opposa foriement à

cette secte; et le fameux Gerson, chance

lier de l'université de Paris, la réfuta dans

le quinzième siècle.

Les Fratricelles , les Béguards et les Be-

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80 TRIOMPHE

guines eurent pour chefs quelques religieux

apostats, qui, sous prétexte de spiritualité,

menaient une vie fainéante , vagabonde et

fort débauchée. Ces erreurs, empruntées

des Manichéens et des Albigeois, avaient

beaucoup de rapport.avec celles qu'ont en

seigné les Quiétistes.

Ces erreurs furent condamnées par la

sainte Eglise , dans un concile général de

Vienne, tenu sous Clément V, l'an1311.

Chismes et Hérésies du quatorzième siècle.

Les hérétiques qui firent du ravage dans

l'Eglise , en ce siècle , furent les Turlupins ,

Raimond Lulle et Wiclef.

Les Turlupins étaient des hommes abo

minables, qui, sous le pontificat de Gré

goire XI, parurent enDauphinéeten Savoie.

Ils embrassèrent les erreurs des Béguards ,

et soutenaient que la prière mentale était

la seule bonne et utile. Ils marchaient nus

en public, et faisaient gloire de se plonger

dans des vices honteux. Cette secte infâme

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DE L'ÉGLISE. 8l

fut bientôt dissipée par l'autorité des magis

trats (i).

On compte deux Raimond Lulle , que

plusieurs ont confondus sans raison : le pre

mier était de l'île de Majorque; ayant été

marchand , on croit qu'il entra dans le tiers,

ordre de Saint-François. Il composa un

grand nombre d'ouvrages, qui furent dé

férés au pape Grégoire XI comme conte

nant plus de cent erreurs sur la nature et

les attributs de Dieu, sur la Trinité, et sur

plusieurs autres matières.

Le souverain pontife l'ayant condamné,

il se soumit au jugement de l'Eglise ; par

conséquent il ne fut pas hérétique. On pré

tend même que sa foi fut si vive , et son cou

rage si héroïque , qu'il obtint la palme du

martyre en Afrique.

Dans la suite on nomma Lullistes ceux

qui épousèrent les erreurs de Raimond

Lulle , condamnées par la sainte Eglise.

Le second Raimond Lulle s'étant fait

(1) Je suis bien éloigné d'approuver les cruautés dont on

a usé quelquefois pour éteindre les hérétiques ; mon opinion

est de ne les convertir que par la force de la doctrine, a l'exem

ple des apôtres.

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02 TRIOMPHE

chrétien , de juif et de rabin qu'il était, fut

surnommé le Néophite. Il composa plusieurs

ouvrages de magie et de chimie, remplis

de mille extravagances.

Jean fViclef, prêtre anglais, curé dans

le diocèse de Lincoln , enseigna plusieurs

erreurs contre Dieu, contre Jésus-Christ,

contre l'Eglise et contre les sacremens. Il re

nouvela les erreurs des Donatistes : il a été,

en beaucoup de choses, le précurseur de

Calvin. Il ne rejetait pas le sacrement de

confirmation, de pénitence, d'extrême-onc

tion, ni la messe, ni l'invocation des saints,

ni l'honneur que l'on rend aux reliques et

aux images.

Les erreurs de Wiclef'furent condamnées

dans le concile général de Constance, com

mencé l'an 1414i et dans plusieurs conciles

tenus en Angleterre, ailleurs, et dans l'il

lustre faculté de Paris*, c'est-à-dire. que ce

fut la Sorbonne qui confondit , par la puis

sance merveilleuse de sa science, l'orgueil

des Wicletites.

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de l'église. 83

Cblsmes et Hérésies du quinzième siècle.

Jean Hus enfanta dans ce siècle un parti

assez considérable , qu'on appela Hussites.

Etant prêtre de Bohême et recteur de l'u

niversité de Prague , il enseigna publique

ment les erreurs de Wiclef. Les Calvinistes

le regardent comme leur protecteur, et le

traitent de martyr.

Cependant le ministre Laroque a prouvé

que Jean Hus a toujours enseigné la pré

sence réelle de Jésus-Christ dans l'eucha

ristie, l'invocation et le culte des saints,

les sept sacremens , et l'honneur dû aux

aux images et aux reliques.

Cet hérétique fut condamné, comme Wi

clef, au concile général de Constance, où,

n'ayant pas voulu se rétracter, il fut livré

au bras séculier.

Jérôme de Prague , laïque , fut disciple

de Jean Hus, soutint à peu près les mêmes

erreurs que son maître, et subit le même

sort.

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84 TRIOMPHE

L'Eglise versa sans doute des larmes, en

voyant tant d'enfans déserter ses drapeaux

glorieux; mais la désertion de ces ames pu

sillanimes n'affaiblirent ni sa puissance , ni

sa gloire.

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DE LÉGLISE 85

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CHAPITRE X.

Chismes et Hérésies du seizième siècle.

C'est après des jours sombres et téné-

breux que l'on voit, avec une vive allé

gresse , arriver ces jours beaux et sereins

où l'astre répand partout sa lumière fé

conde; ainsi l'Eglise, après ces jours de

tempête et d'orage, voit avec une véritable

jubilation la splendeur du soleil de vérité

qui l'éclaire, et attire de nouveaux specta

teurs pour contempler son triomphe.

Parmi les hérétiquesqui , en déchirant le

sein glorieux de l'Eglise , enfantèrent des

erreurs opposées les unes aux autres, parut

dans ce siècle Luther, Carlostade , Zuingle,

OEcolampade, Melancton, Bucer, Osiandre,

Brentius, les anabaptistes, Calvin , les Anti->

Trinitaires , les Socinicns , et autres.

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86 TRIOMPHE

Il serait fatigant de rapporter au long

toutes les erreurs de ces hérésiarques et de

leurs disciples ; je vais me contenter de

dire uniquement qu'elles furent condam

nées toutes par le Saint-Siége et par le

concile général de Trente, depuis l'an 1545

jusqu'à l'an 1563.

Hérésies de Jansenius.

Jansenius , docteur et professeur d'écri

ture sainte de la faculté de théologie de

Louvain , et ensuite évêque d'Ypres , com

posa plusieurs ouvrages qu'il soumit au

Saint-Siége par son testament.

À peine le fameux ouvrage qu'il avait

composé sur la grâce eut-il paru , qu'il s'é

leva plusieurs contestations à ce sujet. Qua

tre-vingt-cinq evêques de France écrivirent

sur cela au pape Innocent X, pour, lui de

mander son jugement sur cinq propositions

de ce livre , qui était la source d'un nombre

infini de disputes théologiques. Je vais offrir

au lecteur les cinq articles, comme quelque

chose d'utile à savoir.

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DE L'ÉGLISE. 87

1 . Quelques commandemens de Dieu

sont impossibles aux hommes justes , lors

même qu'ils veulent et s'efforcent de les ac

complir, selon les forces qu'ds ont présen

tées ; et la grace qui les leur rendrait pos

sibles leur manque;

2°. Dans l'état de nature corrompue , on

ne résiste jamais à la grdee intérieure ;

3°. Pour mériter et démériter dans l'état

de la nature corrompue , la liberté qui exclut

la nécessité n'est pas requise en Vhomme ,

mais la liberté qui exclut la contrainte suffit;

4°. Les semi- Pélagiens admettaient la

nécessité ne la grâce intérieure , prévenante

pour toutes les actions en particulier , même

pour le commencement de la Foi , et ils

étaient herétiques en ce qu'ils voulaient que

cette grace fût telle que la volonté humaine

pût lui résister ou lui obeir;

5°. C'est donner dans l'erreur des sémi-

Pélugiens que de dire que Jésus- Christ est

mort ou qu'il a répandu son sang généra

lement pour tous les hommes.

Le souverain pontife , après avoir fait

assembler un grand nombre de congréga

tions, pour cette aflaire importante, l'exa

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88 TRIOMPHE

mina lui-même, et rendit une constitution

le dernier du mois de mai, l'an 1653, par

laquelle il qualifie ainsi chacune de ces

propositions.

1°. Nous déclarons, dit-il, la première

téméraire , impie , blasphématoire , condam

née d'anathème et hérétique , et comme telle ,

nous la condamnons ;

2°. Nous déclarons ta seconde hérétique ,

et comme telle, nous la condamnons;

3°. Nous déclarons la troisième héretique,

et comme telle nous la condamnons;

4°. Nous déclarons la quatrième fausse

et hérétique, et comme telle nous la con

damnons ;

5°. Nous déclarons la cinquièmefausse ,

téméraire, scandaleuse, et en ce sens que

Jésus-Christ soit mort pour le salut seulement

des prédestinées , nous la déclarons impie ,

blasphématoire , outrageante , dérogeante à

la bonté de Dieu et hérétique , et comme

telle nous la condamnons.

Ce sage souverain pontife ajoute qu'il ne

prétend point approuver les autres opinions

du livre de Jansenius.

Alexandre VII , successeur d'Innocent X ,

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UE L'ÉGLISE. 8()

donna une nouvelle constitution le 16 oc

tobre i656, par laquelle, en confirmant

celle de son prédécesseur, il déclara que

les cinq propositions étaient tirées du livre

de Jansenius, intitulé ufugustinus, et qu'elles

avaient été condamnées dans le sens de l'au

teur. Il défendit la lecture de ce livre.

Le i5 février 1664 il ordonna, par une

constitution, la signature d'un formulaire

qu'il dressa sur celte matière.

Comme par ce formulaire on était forcé

de déclarer que Ton condamnait les cinq

propositions dans le sens du livre de Jan

senius , ses disciples firent des difficultés de

s'y souscrire purement et simplement ; ils

prétendirent qu'ils n'étaient obligés à signer

qu'avec la distinction du droit et du fait,

c'est-à-dire qu'ils voulaient bien condam

ner les cinq propositions en elles-mêmes,

mais qu'ils ne voulaient pas reconnaître que

ces propositions fussent hérétiques dans le

sens qu'elles avaient dans le livre de Jan

senius, et ils continuaient à soutenir que

la doctrine de ce livre était orthodoxe.

Dans la suite , étant pressés de signer ce

formulaire , ils enseignèrent qu'on n'était

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QO TRIOMPHE

pas obligé de se soumettre intérieurement

à la condamnation du livre de Jansenius,

qu'il suffisait de garder un silence respec

tueux sur cette condamnation; ils soutin

rent même qu'on pouvait signer le formu

laire sans être persuadé que la doctrine du

livre de Jansenius fût hérétique.

Pour éteindre les mouvemens excités en

France, Clément XI publia, le i6 juillet

1706, une constitution nouvelle, dans la

quelle il rappelle tout ce qui a été décidé à

ce sujet par ses prédécesseurs , dont il in

sère les constitutions dans la sienne ,.et les

confirme en renouvelant et en déclarant de

plus « que par le silence respectueux on ne

satisfait point à l'obéissance , qui est due aux

constitutions apostoliquessusdites, mais que

le sens de Jansenius condamné dans les cinq

propositions, et que les termes dont elles

sont composées portent d'eux-mêmes , doi

vent être non-seulement de bouche, mais

aussi de cœur , rejetées et condamnées

comme hérétique par tous les fidèles Chré

tiens, et qu'on ne peut licitement signer le

formulaire dans un autre esprit, dans uneau-

tre disposition ou dans un autre sentiment.

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DE L ÉGLISE. ()I

« De manière que ceux qui penseront,

tiendront, prêcheront, enseigneront ou as

sureront, soit de vive voix, soit par écrit ,

le contraire sur toutes ces choses ou sur

quelques-unes d'entre elles , seront soumis

comme transgresseurs des susdites consti

tutions apostoliques , à toutes et à chacune

des peines qui y sont portées. »

Tout le clergé de France, accepta solen

nellement toutes ces constitutions du Saint-

Siége.

Peu de temps après cette epoque remar

quable on vit naître un germe de disputes

effrayantes, touchant la doctrine du livre

des Réflexions morales sur le nouveau Tes-

ment, composé par Quesnel , qui, ayant

refusé de se soumettre aux constitutions

apostoliques , était sorti du royaume.

Il se retira ensuite dans la Hollande par

mi les Protestans; il fut néanmoins excom

munié par sentence de Parchcvëquede Ma-

lines, Pan 1704. Il mourut frappé de cet

ana thème sans jamais en avoir appelé à au

cun tribunal ecclésiastique.

Pour éteindre lest disputes nées à l'occa

sion de son livre , Clément XI publia , le 8

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g'2 TRIOMPHE

septembre 1713 , la constitution unigenitus;

par cette bulle il condamna cent et une

propositions, extraites de ce livre : elle fut

acceptée par une assemblée dé quarante

évéques de France. Cette acceptation (ut

confirmée par sept autres assemblées du

clergé de l'Eglise gallicane.

Innocent III, Benoît XIII, Clément XII

et Benoît XIV, ont confirmé la condamna

tion portée par Clément XI , laquelle fut

reçue avec acclamation par les conciles de

Rome, d'Avignon etd'Ambrun.

Tous les évêques de l'Eglise catholique

s'y soumirent. Quelques évêques de France

s'étaient d'abord opposés à l'acceptation de

cette bulle , et en avaient interjeté appel au

futur concile , presque tous révoquèrent

leur appel ou moururent, et furent rem

placés par des évêques qui acceptèrent le

décret du souverain pontife.

Par conséquent cette constitution accep

tée par l'Eglise est un jugement indéforma

ble. Tous les Chrétiens sont obligés de s'y

soumettre de cœur et de bouche, en con

damnant le livre des Reflexions morales , et

les cent et une propositions de la même ma

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DE LÉGLISE. 93

nière que le souverain pontife les a con

damnées.

On prétend qu'il existe, de nos jours,

beaucoup de Jansénistes recelés d;i os le sein

de l'Eglise gallicane , qui se déchaînent

continuellement contre l'autorité romaine,

vomissent des injures contre elle, et font

ainsi plus de mal que les hérétiques connus.

Je ne veux pas m'étendre davantage sur

cette matière; je me borne à leur dire : si

vous êtes Chrétiens, vous devez pensera

sauver votre ame , vous devez considérer

combien est grande l'affaire du salut éter

nel, et qu'il ne servira de rien à l'homme

d'avoir gagné l'univers entier s'il vient à se

perdre lui-même : Quid prodest homini si

universum mundum lucretur animee vero de

trimentumpatiatur; et que, par conséquent,

le seul moyen de vous sauver, c'est de vous

attacher inviolablement à la société la plus

ancienne , la plus brillante, la plus savante,

la plus grande et la plus pure établie par

notre divin législateur.

Or , vous ne pouvez pas l'ignorer , c'est

Borne : vous lui appartenez, en qualité de

simples Chrétiens; vous êtes ses enfans; au

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Q^ TRIOMPHE

riez-vous la témérite de mépriser son sein

maternel , qui vous a enfanie' en Jésus-

Christ, qui vous a comblé de ses grâces, de

ses bienfaits et de ses bénédictions les plus

abondantes ? venérez-la , faites la vénérer ;

attachez-vous fortement à l'ancre de la foi ;

que votre piété corresponde à vos discours

édifians; de quelque côté que vous soyez

égaré dans la mer orageuse du monde,

tournez vos regards vers cette étoile du

ciel, elle vous dirigera au port de la paix

véritable , vous conduira sur cette pierre

brillante, triomphante et solide, où vous

pourrez environner votre ame de l'espé

rance d'un bonheur éternel.

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tfhtt* bcuxièmc.

TRIOMPHE

SUR

aa ismasmiB ibh tL'miliailsiiïB

QUI REGNENT ACTUELLEMENT EU FRANCK.

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TRIOMPHE

i t

DE L EGLISE.

^rtom*^ sur U çjgfa't&VM <i f||p«si<

<jHt rouent acfueffemcnf en i!g|granc« ,

f. MT'A'DIXE ,

RÉFUTATION DU CHI6ME DES PURISTES ET DE L'HERESIE D'OEGGEB

CHAPITRE PREMIER.

Réfutation du chisme des Puristes.

La France offre, dans ce siècle, le spec

tacle attendrissant d'un schisme singulier ,

qui paraît dans le sein de beaucoup de dio

cèses, et y fait quelques ravages, en attirant

dans ses piéges séd licteurs, les ames ignares

7

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gS TRIOMPHE

et pusillanimes. Cenl fois mon ame atten

drie à la vue de ces hommes aveugles, éga

rés, a été navrée de douleur, en voyageant

dans une grande partie du sol français.

Ces schismatiques, qui ont déserté le gi

ron de l'Eglise , ont quelques dehors de

piété , et quelques-uns même en avaient

donné des preuves à des époques remar

quables : mais en voulant suivre l'élan de

leur imagination exaltée ils ont perdu la

\o\r du ciel , ils ont formé une société qu'ils

nomment le petit nombre des élus, en fai

sant gloire de l'appeler la petite Eglise. Ils

ont élevé secrètement des autels dans leur

habitation, où ils réunissent les victimes de

leur fanatisme et exercent leur ministère:

c'est ce que l'on voit dans plusieurs pro

vinces, et à Paris où ils se sont créés un co

ryphée.

Ce chisme prit naissance au moment où

Pie VU fit le grand rétablissement de l'E

glise de France, pendant la république.

Les membres de cette secte commencèrent

alors à se séparer de la communion de ce

souverain pontife ; soit parce qu'ils ne trou

vaient point un grand avantage temporel à

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DE L ÉGMSE. 99

demeurer dans le sein de la sainte Eglise,

soit parce qu'ils se persuadèrent faussement

de s'acquérir une plus grande gloire hu

maine en l'abandonnant.

Leur conduite est un entêtement ridicule,

ou un aveuglement total de lumières. Exa

minons succinctement cette grande affaire ,

digne de toute notre attention. La France

venait d'être bouleversée , l'ordre moral

n'existait plus, le culte religieux avait cessé,

les cérémonies augustes avaient disparu

avec leur éclat et leur grandeur, les dépo

sitaires de la loi divine, les ministres du

Seigneur, étaient dispersés dans des régions

lointaines.

Les temples étaient fermés , ou déserts ,

ou dégradés, ou réduits en cendres, ou de

venus la demeure des plus vils animaux;

les signes augustes de notre sublime reli

gion étaient brisés , ou anéantis; les autels

renversés , les statues magnifiques des hé

ros de la religion réduites en poudre; et

dans le sanctuaire où avait reposé mille fois

le saint des saints, on voyait avec horreur

l'abomination de la désolation , et bien sou

vent les statues honteuses du paganisme.

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IOO TMOMPHK

Pie VII , dans sa sagesse , résolut d'y faire

fleurir la religion flétrie; et après avoir as

semblé sa cour, et avoir long-temps medité

devant Dieu et devant les hommes, crut

qu'il était nécessaire de rétablir l'Eglise gal

licane, et que le moyen le meilleur et le

plus solide était de faire une nouvelle orga

nisation. Tout homme de génie sera d'avis

que, pour l'aire une organisation nouvelle

il faut renverser la précédente : c'est ce qoi

était nécessaire et indispensable alors; c'est

ce que fit cet illustre souverain pontrfe,

d'accord avec le premier consul de la répu

blique française.

Comme il y avait peu d'ecclésiastiques en

France , qu'il n'y avait point de revenus

pécuniaires , que tous les biens du clergé

avaient été vendus , et qu'une grande partie

avait passé dans les mains de plusieurs pro

priétaires, il décida d'établir dix métro

poles et cinquante évéchés , en supprimant

d'abord toutes les prélatures existantes. Ceci

était dicté par la sagesse la plus pure ; nous

pouvons nous en convaincre par la bulle

magnifique de Pie VII, qui sera un monu

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DE L ÉGLISE. IOI

meut éternel de son zèle éclaire, que la pos

térité eéléhrera toujours avec pompe.

DECHET ET BULLE

Pour la nouvelle circonscription des Diocèses.

« Nous , Jean-Baptiste Caprara, cardinal,

prêtre de la sainte Eglise romaine , du titre

de Saint-Onuphre , archevêque , évêque

d'Yesi , légat à latere de notre saint-père le

pape Pie VII, et du Saint-Siége apostolique,

auprès du premier consul de la république

française ;

«A tous les Français , Salut en Notre-

Seigneur.

» Pie Vil, par la divine Providence, sou

verain pontife, voulant concourir au réta

blissement du culte public de la religion ca

tholique et conserver l'unité de l'Eglise en

France, a solennellement confirmé par ces

lettres apostoliques scellées en plomb, com

mençant par ces mots : Ecclesia Christi, et

données à Rome à Sainte-Marie-Majeure ,

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i02 TRIOMPHE

le 18 des calendes de septembre, l'an de

l'incarnation -1801, le second de son ponti

ficat , la convention conclue entre les plé

nipotentiaires de Sa Sainteté et ceux du gou

vernement français ; et comme dans ces

mêmes lettres Sa Sainteté a ordonné qu'il se

rait fait une nouvelle circonscription des

diocèses français, elle a voulu procéder à

cette nouvelle circonscription par les let

tres apostoliques , scellées en plomb , dont

la teneur suit :

» Pie,évêque, serviteur des serviteurs de

Dieu, pour en conserverie perpétuel sou

venir;

» Le pontife , qui remplit sur la terre les

fonctions de représentant de Jésus-Christ,

et qui est établi pour gouverner l'Eglise de

Dieu , doit saisir avidement toutes les oc

casions qui se présentent , et tout ce qu'elles

offrent d'utile et de favorable pour ramener

les fidèles dans le sein de l'Eglise, et pour

prévenir les dangers qui pourraient s'élever,

afin que l'occasion perdue ne détruise pas

la juste espérance de procurera la religion

les avantages qui peuvent contribuera son

triomphe.

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DE LÉGLISE. lo3

« Tels sont les motifs qui, dans les der

niers mois , nous ont engagés à conclure et

signer une convention solennelle, entre le

Saint-Siége et le premier consul de la répu

blique française. Ce sont encore ces mêmes

motifs qui nous obligent à prendre mainte

nant une délibération ultérieure sur ce même

objet, qui, si elleétait plus long-temps dif

férée, entraînerait après elle de très-grands

malheurs pour la religion catholique, et

nous ferait perdre cet espoir flatteur, que

nous n'avons pas témérairement conçu, de

conserver l'unité catholique au milieu des

Français.

«Pour procurer" un aussi grand bien,

nous avons, dis-je, résolu de faire une nou

velle circonscription des diocèses français,

et d'établir, dans les vastes états qui sont

aujourd'hui soumis à la république fran

çaise, dix métropoles et cinquante évéchés.

» Le premier consul doit nommer à ces

siéges, dans les trois moia qui suivront la

publication de nos lettres apostoliques, des

hommes capables et dignes de les occuper,

et nous avons promis de leur donner l'ins

titution canonique, dans les formes usitées

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Io4 TRIOMPHE

pour la France , avant cette époque. Mais

nous étions bien éloignés de penser que

nous fussions pour cela obligés de déroger

au consentement des légitimes évêques qui

occupaient précédemment ces siéges, vu que

leurs diocèses devaient être totalement chan

gés par la nouvelle circonscription, et re

cevoir de notre part de nouveaux pasteurs.

» Nous les avions invités d'une manière

si pressante, par nos lettres remplies d'af

fection et de tendresse, à mettre par ce der

nier sacrifice le comble à leur mérite précé

demment acquis, que nous espérions rece

voir de leur part la réponse la plus prompte

et la plus satisfaisante; nous ne doutions

pas qu'ils ne remissent librement, et de

plein gré, leurs titres et leurs Eglises entre

nos mains.

» Cependant, nous voyons avec la plus

vive amertume que, si d'un côté les libres

démissions d'un grand nombre d'évêques

nous sont parvenues, d'un autre côté celles

de plusieurs autres évêques ont éprouvé du

retard, ou leurs lettres n'ont eu pour objet

que de développer les motifs qui tendent à

retarder leur sacrifice.

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DE LÉGLISE. I05

» Vouloir adopter ces délais, ce serait

exposer la France, dépouillée de ses pas

teurs, à de nouveaux périls; non-seulement

le rétablissement de la religion catholique

serait retardée, mais, ce qui est à remar

quer, sa position deviendrait de jour en

jour plus critique et plus dangereuse, et

nos espérances s'évanouiraient insensible

ment. Dans cet état de choses, c'est pour

nous un devoir, non-seulement d'écarter

les dangers qui pourraient s'élever, mais

encore de préférer à toute considération,

quelque grave qu'elle puisse être, la con

servation de l'unité catholique et celle de

la religion , et de faire , sans délai, tout ce

qui est nécessaire pour consommer l'utile

et glorieux ouvrage de sa restauration.

» C'est pourquoi , de l'avis de nos véné

rables confrères les cardinaux de la sainte

Eglise romaine , nous dérogeons à tout con-.

sentement des archevêques et des évêques

légitimes des chapitres, et des différentes

Eglises , et de tous les autres ordinai

res, etc., etc.

» En sorte que les différentes Eglises

archi-épiscopales . épiscopales et cathé

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IOÔ TRIOMPHE

drales, et les diocèses qui en dependent,

soit en totalité, soit en partie, suivant la

nouvelle circonscription qui va être établie,

doivent être regardés et sont dans la réalité

libres et vacans, de telle sorte que l'on

puisse en disposer de la manière qui sera

ci-dessous indiquée.

» Considérant donc comme exprimé de

droit, dans les présentes lettres apostoliques,

tout ce qui doit être nécessairement con

tenu , nous déclarons annuller, supprimer

et éteindre à perpétuité tout l1état présent

des Eglises archi-épiscopales etépiscopales,

ci-après désignées, avec leurs chapitres,

droits, priviléges et prérogatives, de quel

que nature qu'ils soient; savoir :

» L'Eglise archi-épiscopale de Paris ,

avec ses suffragans; les évéchés de Chartres,

Meaux , Orléans et Blois , etc. , etc. , etc. »

Il serait trop long de rapporter ici tous

les archevêchés, qui étaient au nombre de

vingt-trois, et les évéchés, qui étaient au

nombre de cent trente-cinq environ.

Continuons la suite de la bulle , et nous

l'admirerons de plus en plus.

« En sorte que, sans excepter le droit des

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DE L ÉGLISE. 107

metropoles, quels qu'ils soient et quelque

part qu'ils soient, tous les susdits archevê

chés, évéchés, abbayes mêmes indépen

dantes, et dont le territoire n'appartient à

aucun évéchi, doivent être considérés, avec

leur territoire et leur juridiction , comme

n'existant plus dans leur premier état, parce

que ces titres, ou sont éteints, ou vont être

érigés sous une nouvelle forme , etc. , etc. »

Il est donc clair qu'il était impossible,

à cette époque, de faire occuper digne

ment tous les siéges vacans des Eglises de

France; il était absolument nécessaire de

les aunuller pour établir une nouvelle orga

nisation ; voilà pourquoi la bulle continue.

« Notre dessein étant de terminer, sui

vant les désirs que nous a exprimés le pre

mier consul de la republique française, l'é

tablissement du régime ecclésiastique, dans

tout ce qui est urgent et nécessaire, nous

déclarons établir, et parles présentes lettres

nous érigeons de nouveau en France dix

églises métropolitaines et cinquante siéges

épiscopaux, savoir :

» L'église métropolitaine et archiépis

copale de Paris, et les nouveaux évéchés

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Iû8 TRIOMPilE

de Versailles, de Meaux, dWmiens , etc.

etct. , etc.

» Nous mandons en consequence et or

donnons à notre cher fils Jean Baptiste

Caprara, cardinal de la sainte Eglise ro

maine... de procéder de suite à retablisse

ment des églises archi-episcopales et épis-

copales que nous venons d'ériger , suivant

la forme que nous avons adoptée dans cette

érection, en assignantà chacun des archevê

ques et évêquescequi doit lui appartenir.

» En assignant le patron ou titulaire spé

cial de chaque diocèse, sous l'invocation

duquel la principale église est consacrée a

Dieu; les dignités et membres de chaque

chapitre, qui doit être formé suivant les

règles prescrites par les canons des saints

concdes ; l'arrondissement et les limites

précises de chacun des diocèses, le tout

expliqué par lui de la manière la plus

claire, et la plus distincte, dans tous les

décrets ou actes qu'il fera pour l'établisse

ment desdits archevêchés au nombre de

dix et de cinquante autres évêchés.

» Nous lui conférons à cet effet les pou

voirs les plus amples, avec la faculté de

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DE L ÉGLISE. 109

les sub-léguer; nous lui donnons en outre

toute l'autorité, dont il a besoin pour ap

prouver et confirmer les statuts des cha

pitres, pour leur accorder les marques

distinctives , qui peuvent leur convenir ;

pour supprimer les anciennes paroisses,

les resserer dans des bornes plus étroites ,

ou leur en donner qui soient plus étendues;

en ériger de nouvelles et leur assigner de

nouvelles limites; pour décider toutes les

contestations qui pourraient s'élever dans

l'exécution des dispositions consignées dans

nos présentes lettres apostoliques, et géné

ralement le pouvoir de faire tout ce que

nous ferions nous-même pour pourvoir le

plus promptement possible aux pressans

besoins des fidèles catholiques de France ,

par l'érection desdites Eglises archiépisco

pales, par l'établissement des séminaires ,

dès qu'il sera possible, et par celui des pa~

roisses devenu nécessaire, en leur assignant

une portion convenable à toutes, etc.

» Nous voulons aussi qu'on ajoute aux

copies des présentes, même imprimées, si

gnées de la main d'un notaire ou officier

public, et scellées du sceau d'une personne

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I II) TRIOMPHE

constituée en dignite ecclésiastique , la

même foi qu'on ajouterait aux présentes .

si elles étaient représentées et montrées en

original.

» Qu'il ne soit donc permis à aucun

homme d'enfreindre ou de contrarier, par

une entreprise téméraire, cette bulle de

suppression, extinction, érection, établis

sement , concession , distribution de pou

voir, commission , mandement , décrets de

gradation et volonté. Si quelqu'un entre

prend de le faire , qu'il sache qu'il encourra

l'indignation du Dieu tout-puissant et des

bien-heureux saint Pierre et saint Paul.

». Donné à Rome, à Sainte-Marie-Ma

jeur, l'an de l'incarnation 1801, le 3 des

calendes de décembre , la seconde année

de notre pontificat.

Signé, A. Card. Prod. ; R. Card.

Braschi Onesti.

Visa de Curie, J. Mahasseï.

Cette Bulle est à mon avis un chef-

d'œuvre de sagesse dicté par l'esprit

saint , par l'amour de la paix , par le zèle le

plus pur et le plus circonspect; et je ne puis

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DE L ÉGLISE. I I I

point m'imaginer , comment il peut y avoir

des hommes si aveugles pour ne pas en ad

mirer la beaute, la grandeur, et Futilite.

Par cette grande et magnifique œuvre

une infinité de citoyens qui étaient préve

nus contre la religion, ne pouvaient point

être épouvantés du rétablissement de l'E

glise amené avec tant de sagesse, et ne pen

saient point à se soulever contre une si sage

ordonnance ; mais au contraire ils étaient

portés à l'accueillir favorablement. Pie VII

réunit trois grandes merveilles ensemble

dans cette grande œuvre ; il rétablit la reli

gion avec peu de prélats, sans beaucoup

de revenus, et en ménageant les esprits de

puis long-temps aigris contre l'Eglise. C'est

ce qu'on a droit d'appeller un véritable

chef-d'œuvre de sagesse.

La religion depuis si long-temps ense

velie dans les ténèbres de l'oubli, sortit du

milieu de ses ruines , recommença à faire

flotter ses étendards; on vit les temples ou

verts réprendre leur première beauté , les

peuples en foule y volaient avec un vrai

transport d'allégresse, des cantiques de ju

bilation et d'actions de grâces faisaient re

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I I i TRIOMPHE

tentir les lieux saints depuis si long-temps

deserts. Les autels renversés renaquirent du

milieu de la poussière, furent parés de la

grandeur et de la magnificence conve

nables, les sacrifices commencerent à s'of

frir avec une pompe éclatante. Les fidèles

se hâtèrent de renouveller la ferveur de leur

âmes; beaucoup de chrétiens endurcis res-

sucitèrent à la vie de la grâce , les impiétés

s'affaiblirent, les blasphèmes contre Dieu

s'appaisèrent, les anciennes coutumes reli

gieuses commencèrent à fleurir; enfin la

France entière ne formait qu'ut, concert

merveilleux de louanges, et d'actions de

grâces envers le Dieu de miséricorde, qui

leur apportait le bonheur et la paix , et en

vers les instrumens admirables de la divine

Providence.

Pour rendre cette œuvre plus belle, plus

glorieuse , pour mettre le sceau à la restau

ration de l'Eglise, cet illustre souverain-

pontife ayant lieu d'appréhender que les

fêtes obligatoires hebdomadaires ne fus

sent un objet de scandale pour un grand

nombre de fidèles pusillanimes, fit publier

l'indult qui suit :

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DE LÉGLISE. I I J

INDULT

Pour la rédaction des Fêtes.

Nous Jean Baptiste Caprara cardinal,

prêtre de la Sainte-Eglise romaine du titre

de Sainte-Onuphre , archevêque, évêque

d'Iési, légat a latere de notre très saint père

le pape Pie VII , et du Saint-Siége aposto

lique. Auprès du premier consul de la ré

publique Française.

» Le devoir du Siége apostolique qui a

été chargé par notre Seigneur Jésus-Christ

du soin de toutes les églises, est de modé

rer l'observance de la discipline ecclésias

tique , avec tant de douceur et de sagesse ,

quelle puisse convenir aux différentes cir

constances des temps et des lieux.

» Notre saint père le pape Pie VII, par

la divine Providence , souverain pontife ,

avait devant les les yeux ce devoir, lorsqu'il

a mis au nombre des soins qui l'occupent ,

à l'égard de l'Eglise de France, celui de

réfléchir sur ce qu'il devait statuer , tou

chant la célébration des fêtes dans ce nou

8

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I I 4 TRIOMPHE

vol ordre de choses. Sa Sainteté savait par

faitement que dans la vaste étendue des

pays qu'embrasse le territoire de la répu

blique française, on n'avait pa* suivi par

tout les mêmes coutumes; mais que dans

les diverses diocèses , des jours de fêtes dif-

férens avaient été observés.

» Sa Sainteté observait de plus que les

peuples soumis au gouvernement de la

mêmerépublique, avaientle plus grand be

soin■, après tant d'événemens et tant de

guerres, de réparer les pertes qu'ils avaient

faites pour le commerce , et pour les autres

choses nécessaires à la vie, ce qui devenait

difficile par l'interdiction du travail aux

jours de fêtes, si le nombre de ses jours

n'était diminué. Enfin elle voyait, et ce

n'était point sans une grande douleur , elle

voyait que, dans ce pays, les fêtes jusqu'à

ce jour n'avaient pas été observées partout

avec la même piété; d'où il résultait en plu

sieurs lieux un grave scandale pour les

âmes pieuses et fidèles.

» Après avoir examiné et mûrement pesé

toutes ces choses, il a paru qu'il serait avan.

tageux pour le bien de la religion et de l'é

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DE l/ÉGLlSE. I l5

tat, de fixer un certain nombre de jours de

fêtes, le plus petit possible , qui seraient

gardees dans tous le territoire de la répu

blique, de manière que tout ceux qui sont

régis par les mêmes lois, fussent également

soumis à la même discipline; que la réduc

tion de ces jours vint au secours d'un grand

nombre de personnes , dans leurs besoins ,

et que l'observation des fêtes conservées en

devint plus facile.

« En conséquence , et en même temps

pour se rendre aux désirs et aux demandes

du premier consul de la république, à cet

égard, Sa Sainteté nous enjoint, en notre

qualité de son légat a latere , de déclarer,

en vertu dela plénitude de la puissance apos

tolique , que le nombre de jours de fêtes ,

autres que les dimanches, sera réduit au*

jours marqués dans le tableau que nous met

tons au bas de cet indult . de manière qu'à

Vavenir tous les habitans de la même répur

blique soient sensés exempts , et que réelle

ment ils soient entièrement déliés , non-seu

lement de l'obligation d'entendre la mes,$e,

et de s'abstenir des œuvres serviles aux au

tres jours de fêtes; mais encore de l'obligar

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I l6 TRIOMPHE

tion du jeûne aux veilles de ces mêmes

jours.

i. Elle a voulu cependant que dans au

cune église rien ne fût innové dans l'ordre

et le rit des offices et des cérémonies qu'on

avait coutume d'observer aux fêtes mainte

nant supprimées et aux veilles qui les pré

cèdent; mais que tout soit entièrement fait

comme on a coutume de faire jusqu'au mo

ment présent, exceptant néanmoins la fête

de l'Epiphanie de Notre-Seigneur, la Fête-

Dieu, celle des apôtres saint Pierre , saint

Paul, et celle des saints patrons de chaque

diocèse et de chaque paroisse, qui se cé

lèbreront partout le dimanche le plus pro

che de chaque fête.

» En l'honneur des saints Apôtres et des

saints Martyrs, Sa Sainteté ordonne que

dans la récitation, soit publique, soit pri

vée , des heures canoniques, tous ceux qui

sont obligés à l'office divin, soient tenus de

faire , dans la solennité des apôtres saint

Pierre, saint Paul, mémoire de tous les

saints apôtres, et dansla fête de saint Etienne,

premier martyr, mémoire de tous les saints

martyrs, on fera aussi ces mémoires dans

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t,li L EGLISE. 1 in '

toutes les messes qui se célèbreront ces

jours-là.

»Sa Sainteté ordonne encore que l'anni

versaire de la dédicace de tous les Temples

érigés su rle territoire de la république, soit

célébrée dans toutes les églises de France ,

le dimanche qui suivra immédiatementl'oc-

tave de la Toussaint.

» Quoiqu'il fût convenable de laisser sub

sister l'obligation d'entendre la messe aux

jours des fêtes qui viennent d'être suppri

mées, néanmoins Sa Sainteté , afin de don

ner de plus en plus de nouveaux témoigna-

gnesde sa condescendance envers la nation

française, se contente d'exorter ceux prin

cipalement qui ne sont point obligés de vi

vre du travail des mains, à ne pas négliger

d'assister ces jours-là aux saints sacrifices

de la messe.

» Enfin Sa Sainteté attend de la religion

et de la piété des Français, que plus le nom

bre des jours de fêtes et jours de jeûnes sera

diminué, plus il observeront avec soin, zèle

et ferveur le petit nombre de ceux qui res

tent, rappelant sans cesse dans leur esprit

que celui-là est indigne du nom Chrétien ,

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I l8 TRIOMPHE

qui ne garde pas comme il le doit les Com-

mandemens de Jésus-Christ et de son Eglise;

car, comme l'enseigne l'apôtre saint Jean :

Quiconque dit qu'il connaîtDieu et n'observe

pas ses Commandemens, , est un menteur, et

la vérité n'estpas en lui.

» Les jours de fêtes qui seront célébres

en France, outre les dimanches, sont:

» La Naissance de Notre-Seigneur Jésus-

Christ;

» L'ascencion;

» L'Assomption de la très-sainte Vierge;

» La fête de tous les Saints.

» Donné à Paris, en la maison de notre

résidence, ce jourd'hui 9 avril 18o3.

• J. B. Card. Gapbaha, Légat;

» J. A. Sala, Secrétaire de

la Légation apostolique. „

On voit évidemment que ce fut par le

conseil de l'Esprit saint que ce grand pon

tife daigna accorder alors l'indulgence que

nous venons d'admirer, et dans laquelle est

incluse l'abrogation des fêtes obligatoires

hebdomadaires.

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DE L'ÉGLISE. 1 19

Dans ces temps malheureux, tout ordre

moral était renversé, le mépris de la religion

régnait avec empire. Les saints jours des di

manches et des l'êtes étaient profanés avec

impiété : on faisait gloire de livrer au fléau

du ridicule les religieux observateurs des

jours solennels consacrés à l'honneur des

bienheureux, et à la gloire du Dieu puissant

du ciel et de la terre.

L'indigence s'unissant à la faiblesse

de la vertu, aurait pu plonger beaucoup

de Chrétiens pusillanimes dans les voies

perverses du monde , et les empêcher de

marcher d'un pas ferme et solide dans le

chemin du ciel : cette abrogation fut donc

pour eux un aiguillon admirable , dont le

ciel voulut faire grâce par l'entremise de ce

pontife vénérable.

Il couronna l'œuvre en introduisant dans

cet ordre nouveau et pacifique quatre gran

des solennités : celle de ta naissance du Sau

veur, son ascension triomphante dans les

d'eux, l'assomption glorieuse de Marie dans

la gloire céleste, le jour solennel de tous

les bienheureux. 0 c'est ici que j'admire

Rome chrétienne , que je contemple avec

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1.20 TMIOMPHE

ravissement la droite du Seigneur qui l'en

vironne sans cesse de sa puissance!

Ces quatre grands jours, qui ne semblent

qu'un grain de poussière aux yeux d'un fa

natique exalté , sont un des plus beaux, des

plus sublimes dessins, que l'homme, sage

ment religieux, puisse concevoir. Il em

brasse pleinement la profession ostensible

de toute la religion , que fait gloire de pro

fesser la sainte Eglise catholique, aposto

lique et romaine , dans tout son éclat et

dans toute sa pompe.

On ne peut point l'ignorer, on est forcé

de l'avouer , cette époque sera toujours re

gardée dans les grandes histoires de France

comme une des époques les plus célèbres

et les plus glorieuses à la religion ; elle fera

toujours, dans tous les siècles futurs, l'ad

miration des religieux , des sages, et des sa-

vans les plus distingués.

Que vit-on naître de ce prodige si écla

tant? Une secte d'aveugles qui ne voulurent

point prendre part à un si beau triomphe.

Oui, malheureusement, les puristes, dans

leur exaltation fanatique, osèrent appeler

ces merveilles opérées en France , une pré

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UK L'ÉGLISE. 22 i

varication ; osèrent publier secrètement que

la sainte Eglise romaine s'était égarée et

corrompue, et que le chef auguste de l'E

glise avait dissipé toutes ses richesses spiri

tuelles; que les évêques de France, placés

légitimement par le Saint-Siége , étaient des

intrus téméraires. Tous les jours , dans leur

assemblée clandestine, ils vomissent mille

noires calomnies contre les légitimes suc

cesseurs de saint Pierre et de ses apôtres.

On peut assurer que ces chismatiques

sont remplis d'un caractère bizarre . origi

nal et superbe, dépourvus autant d'un es

prit solide que d'une science féconde. S'ils

n'aperçoivent point le flambeau de la vé

rité éclatante que je leur offre avec simpli

cité, je ne craindrais pas, avec l'aide de

Dieu, de le leur montrer publiquement

dans le lieu qu'ils voudront m'assigner (1) ;

je n'accepterai ce combat religieux que

dans l'unique but de les convertir à Dieu ,

de sauver leur ame et de les rendre heu

reux sur la terre et dans le ciel.

Il faut néanmoins que j'avoue une chose

(i) J'ai donné mon adresse dans nia préface.

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1'1'2 TRIOMPHE

qui me navre le cœur; c'est que parmi ces

victimes de l'erreur on voit des Chrétiens

aimables , ornés de mille heureuses qua

lités, et même des prêtres, qui, avec de

l'esprit et de la science, ont été introduits

dans cette secte vile et honteuse par fai

blesse et sans malice , n'y ont été entraînés

que par l'esprit pervers de leur coryphée.

Oh ! qu'ils sont dignes de compassion, ohl

que je les plains sincèrement! Ah! si je

pouvais leur adresser la parole ; je leur di

rais du fond de mon cœur : Mes frères

bien aimés, vous êtes plongés dans l'abîme

éternel , si vous ne cherchez point à vous en

arracher au plutôt. Où cherchez-vous votre

salut? Vous le cherchez où il n'est pas;

vous vous laissez envelopper du manteau

brillant de l'erreur mensongère. Au nom du

Dieu trois fois saint , je vous l'assure , vous

êtes hors du bercail du véritable pasteur;

vous n'avez au milieu de vous que des loups

féroces qui se nourrissent des brebis le? plus

tendres, et qui se font un plaisir barbare

de répandre dans votre esprit docile les té

nèbres de l'erreur.

Profitez du temps précieux que le Sei

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DE L'ELISE. 123

gneur vous accorde pour revenir à lui dans

toute la sincérité de votre aine, pour ad

mirer la lumière du ciel qui vous éclaire.

Quel dommage que vous vouliez vous per

dre, vous qui jusqu'ici avez offert tant de

magnifiques sacrifices au Seigneur pour

vous sauver! Pensez sérieusement devant

Dieu à la grande affaire de votre salut, Dieu

vous bénira et vous arrachera le bandeau

fatal qui couvre vos yeux , vous montrera

la vrai étoile de Jacob , :ifin que vous puis

siez un jour jouir des délices de la Jérusa

lem céleste.

Portez vos regards sur l'arche sainte de

la nouvelle alliance que Dieu conserve de

puis tant de siècles sur la pierre romaine,

malgré les tempêtes de la mer orageuse qui

mugit sans cesse contre elle sans l'ébranler.

Pénétrés d'un profond repentir, proster

nez-vous au pied de ce nouveau mont Sinaï,

où le Dieu tout-puissant, par l'entremise

de son prophète , nous donne ses lois bé

nignes au milieu de la foudre et des éclairs.

Admirez le voyant de nos jours qui nous

explique magnifiquement la loi que Dieu

lui inspire; considérez avec ravissement,

Page 139: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

12-4 TRIOMPHE

au milieu du Capitole , l'étendard de la

croix qui y brillera éternellement; contem

plez le prince des apôtres qui, à l'exemple

du Sauveur , se nommant le serviteur des

serviteurs au milieu de la splendeur et de

la pompe qu'il méprise, dirige paisible

ment en père l'univers chrétien , qui l'en

vironne de toute sa vénération.

Page 140: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

DE L EGLISE. 12.'

CHAPITRE 11.

Réfutation de l'Hérésie de Oegger , ancien premier vicaire de

la cathédrale de Paris (1).

La France , qui depuis plus d'un siècle

n'avait point vu d'hérésiarque , ne pensait

point à en voir naître de son sein ; elle sem

blait même n'en voir jamais paraître an mi

lieu de l'assoupissement des Chrétiens re-

làchés et timides qui paraissent incapables

d'embrasser un parti formidable. C'estnéan-

moins à ce moment de calme et de paix que

(1) .Te me fais volontiers un vrai plaisir de rendre hommage

à Mgr. l'Archevêque de Paris, Pair de France, membre de

l'Académie française, y occupant, par son génie et par son

zélé, le fauteuil de Fénélon. Il n'est nullement cause de

la désertion de M. Oegger, Sa Grandeur a fait au contraire tout

ce qu'elle a pu pour le conduire au chemin de la vérité, et

aujourd'hui même elle le recevrait comme l'enfant prodigue ,

selon l'Évangile. Voila ce que j'ai entendu dire d'une personne

de mérite.

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J^6 TRIOMPHE

les hommes savans et religieux ont vu avec

un grand étonnement un prêtre elevé àl'om

bre de nos autels , nourri depuis longues

années de leurs dons et de leurs grâces ,

prendre les armes contre l'Eglise, déchirer

son sein maternel , lever l'étendard de la

révolte contre elle , devant tout Israël.

Cet aveugle téméraire , environné de per

fides séducteurs dans sa désertion, croupis

sant dans l'erreur pendant quelques an

nées , a osé réunir tous les efforts de sa

plume de fer pour enfanter une hérésie

monstrueuse , afin de conquérir une gloire

imaginaire.

Il ne s'est point contenté de la produire

au grand jour sous tous les dehors qui lui

ont parus magnifiques et brillans , de faire

paraître son ouvrage dans toute la France,

et même dans l'Europe, il a- porté l'audace

plus loin ; il a osé demander au gouverne

ment un temple pour y exercer solennel

lement son ministère , pour y accueillir fa

vorablement et y réunir, avec un avantage

éclatant , les ames faibles et ignares qui

voudraient prêter une oreille attentive à sa

voie séductrice.

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DE L ÉGLISE. i2 7

Comme à l'instant où ou a vu uaitre cet

héresiarque, nul sage ne pensait qu'il fût

jamais capable de se montrer tel aux yeux

de tous les hommes, ifaurait-on pas lieu

de croire aujourd'hui que , lorsqu'on y

pensera le moins , il ne réussisse à faire

tomber cruellement dans ses piéges un

grand nombre d'aveugles, toujours bien

précieux aux yeux du Seigneur? C'est pour

prévenir ce grand malheur, pourfaire bril

ler à ses yeux le flambeau de la vérité , lui

frayer le chemin du ciel , que j'entreprends

de dévoiler sagement ses erreurs funestes à

la société chrétienne.

Il divise son ouvrage en deux parties :

en dogme et en morale : Dans le dogme,

pour enchanter et ravir les amateurs des

nouveautés , il commence à publier avec

les transports d'une feinte allégresse , la

divinité du Sauveur , l'exalte dans tout

l'éclat de sa gloire , avec tout le ravis

sement d'un faux prophète ; il renverse avec

impiété et emphase la Trinité , en jetant du

ridicule sur ce dogme auguste enseigné par

les apôtres; il essaie de prouver son système

par l'ancien et le nouveau Testament : voilà

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i2 8 TRIOMPHÉ

les fondcmens sur lesquels repose sa reli

gion nouvelle.

Sa morale est fort douce : il renverse avec

une haine farouche la confession . la fait

regarder comme contraire à l'avancement

spirituel, tandis que les Protestans même,

conseillent d'y recourir comme à une pis

cine salutaire , qui porte dans Pame des pé

cheurs contrits le baume de la paix. Il s'ef

force de faire voir que tous les péchés sont

égaux, et que les peines spirituelles de l'en

fer auront des bornes.

Il vomit des calomnies contre les apôtres,

contre l'Eglise et ses chefs augustes et véné

rables. Il va plus loin, il porte son exaltation

fanatique jusqu'à dire que la vérité n'a été

aperçu, dans aucun temps, nulle part, dans

aucune secte, ni chez les Protestans , ni

même dans l'Eglise romaine, et qu'il n'y a

que lui qui l'a trouvé aujourd'hui. Voilà,

en peu de mots, toute l'étendue de l'hérésie

de notre prétendu prophète ; je vais tâcher

de montrer au grand jour la fausseté des

principes sur lesquels il prétend l'appuyer

solidement.

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DE L ÉGLISE. I 29

ARTICLE PREMIER.

Fausseté de ses principes.

Pour faire paraître sa prétendue vérité

avec quelque faux éclat éblouissant, il a

cherché divers moyens qui pussent paraître

plausibles aux yeux de certains hommes : il

a été recourir aux hiéroglyphes égyptiens ;

par ce moyen il donne à FEcriture-Sainte

le sens qui lui est le plus propice pour édi

fier et embellir son système; il prétend

même que les hiéroglyphes égyptiens et

païens, sont l'unique moyen de découvrir les

grandes vérités chrétiennes.

II. pose la puissance de son système sur le

système de M. Champollion; je conviens

que cet auteur moderne est très - savant

dans les hiéroglyphes égyptiens, qu'il y

a fait même de très -grandes découvertes

et -que, quoique plusieurs autres auteurs

l'aient contrarié, ses ouvrages ont pour but

des caractères et des figures vraiment hiéro

glyphiques, tandis que M. Oegger veut trou

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IJJO TRIOMPHE

ver, ou veut mettre des hiéroglyphes dans

les mots, dans les paroles qui portent par

elles-mêmes des significations , mais jamais

des hiéroglyphes , soit dans la langue fran

çaise, soit dans la latine , soit dans la grec

que, etc.

Ce n'estque dans la languehébraïque que

ces figures hiéroglyphiques existent, mais

il faut en avoir fait une élude particulière

pendant tout le cours de sa vie pour en

connaître tout le prix , or , M. Oegger pos-

sède-t-il dans un degré éminenl cette lan

gue difficile ? Non sans doute , et l'on voit

aisément, par la citation de quelques mots,

quljl n'en a qu'une légère connaissance.

Supposez même qu'il sut l'entendre, l'ex

pliquer et la parler dans un suprême degré :

tout homme sage et savant aurait droit

d'appréhender que cet individu ne plon

geât les hommes dans une abîme d'erreurs

épouvantables, en arrachant de l'Ecriture-

Sainte, écrite en hébreu, une doctrine nou

velle qui n'a point paru jusqu'à nos jours, et

de nouveaux principes que les hommes les

plus savans n'y ont jamais aperçus.

Je n'ignore pas que Moïse à employé

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de l'église. 131

dans certains mots , trois sens distincts , l'un

propre, l'autre figuré, et le troisième hié

roglyphique.

Heraclite a parfaitement exprimé la dif

férence de ces trois styles , en les désignant

par des épithètes. Les deux premières ma

nières, qui consistaient à prendre les mots

dans le sens propre ou figuré, étaient ora

toires; mais le troisième ne pouvait rece-

voirsa forme hiéroglyphique qu'au moyen

des caractères dont les mots étaient com

posés , n'existaient que pour les yeux et ne

s'employaient qu'en écrivant.

Moïse, initié dans tous les mystères du

sacerdoce égyptien , s'est servi avec un

grand avantage de ces trois manières , sa

phrase est presque toujours rendue de ma

nière à offrir trois sens : mais les interpré

tes les plus savans, qui ont traduit les li

vres saints écrits en hébreu , soit de Moïse ,

soit des autres prophètes, étaient des hom

mes qui mûris par l'expérience, et versés

dans les connaissances entières de cette lan-

langue difficile, en connaissaient alors les

hiéroglyphes mieux qu'aucun savant de nos

jours, puisque la langue hébraïque est une

Page 147: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

l3z TRIOMPHE

langue morte, qu'on ne cultive presque

point, ou bien très-faiblement aujourd'hui.

Ces interprêtes dont je veux parler sont

ceux qui , étant au nombre de soixante-

dix, sans se voir , sans se parler, étant

séparés, traduisirent miraculeusement l'an

cien Testament dans le même sens de l'hé

breu en grec , et c'est ce qu'on a appelé

depuis lors la version des Septantes.

La Vulgate que nous possédons en latin ;

qui est répandue dans tout l'univers chré

tien , et qui a été déclarée authentique par

le concile de Trente, est entièrement d'ac

cord avec la version des > eptantes.

Voilà les traductions fidèles qui nous con

servent la vérité sans la dégrader, et qui mé

ritent notre vénération et notre croyance.

Voilà l'autorité qui a droit d'expliquer les

livres saints écrits en hébreu , et ce n'est

pas à un simple individu comme Oegger à

venir nous donner une nouvelle explica

tion dans une langue qu'il ne connaît pas-

Quant aux langues grecque, latine , fran

çaise et autres, elles peuvent avoir un sens

ou naturel, ou moral, ou mystérieux, ou

figuré, etc.; mais elles n'ont jamais des

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iîe l'égmse. t33

figures hiéroglyphiques* Aucun savant n'a

droit de donner à un mot un sens differend

de celui que lui donne sa langue propre ,

tandis que M. Oegger prétend le contraire.

Tputniqt, toute parole, ne peut avoir

que le sens que lui donne la convention

que les hommes d'une nation font entre

eux, et tout homme n'a le, droit de donner

un sens à un mot que d'après les lexipo-

graphes approuvés dans sa nation. Ainsi

M. Oegger, qui prétend qvi'pn peut donner

à un mot, par des hiéroglyphes qu'il ap

pelle la langue de la nature , un sens dif

férend de celui que lui donne la langue

propre , est entièrement enseveli dans les

ténèbres de l'erreur, et ses principes sont

évidemment faux. : . . . .,

,, Qu'il y ait dans les paroles un sens mys

térieux , figuré, moral, etc., on ne peut pas

en disconvenir et on ne peut 'pas le conr

naître sur un mot, mais uniquement d'a

près un livre, ou d'après un chapitre. Il

faut avoir soin de bien observer alors qu'un

homme sage , qui cherche son salut dans

l'Ecriture-Sainte , ne doit jamais se fier à

son explication propre , et même à l'expli

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l34 TRIOMPHE

cation d'un savant , parce que l'homme est

faillible et capable par sa faiblesse d'abon

der dans son sens, quelques lumières qu'il

puisse avoir.

La raison dicte au vrai savant que le

«îoyen le plus sûr de ne pas tomber dans

l'erreur et de connaître le veritable sens de

l'Ecriture - Sainte , c'est de suivre le sens

approuvé, publié depuis dix-huit cents ans

par la société la plus nombreuse , la plus

ancienne, la plus religieuse et la plus sa

vante; or, cette société est la sainte Eglise

catholique, apostolique et romaine.

1°. Je dis d'abord la plus nombreuse; en

effet, quelle société pourra être plus ré

pandue sur toute la terre que celle dont

nous nous enorgueillissons d'être les en-

fans bien aimés : c'est elle qui règne avec

modestie dans toutes les contrées de l'Amé

rique , de l'Afrique , de l'Asie , de l'Europe ,

de la Chine , de l'Allemagne , de l'Angle

terre, qui a des adorateurs partout, et sur

tout en Espagne, en France et en Italie, où

elle brille d'un vif éclat.

2". La plus ancienne; car les sectes in

finies qui ont paru dans diverses régions

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de l'égl1se. i35

n'ont pris leur origine que dans la sainte

Eglise , quelque temps après que la 'erre

entière a admiré le pompeux établissement

du Christianisme romain qui l'environnait

de toute sa gloire.

3*. La plus religieuse, parce que depuis

l'aurore de ses premiersjoursjusqu'àprésent

elle a constamment annoncé la doctrine la

plus pure, la plus sûre et la plus sage,

étant parfaitement d'accord avec la raison ,

elle cherche à convaincre les hommes pour

les rendre heureux sur la terre et dans le

cieli, n'emploie d'autres armes pour les con

quérir au doux empire de la religion de

Jésus-Christ que la douceur, la tolérance

et la force de la vérité ; qui fait sa toute-

puissance.

C'est elle seule qui prend toujours le parti

le plus sûr dans toutes les décisions qu'elle

donne , et surtout dans la foi qu'elle pres

crit, sans laquelle il n'est point de salut. Ce

qui est étonnant et merveilleux, c'est que

les coryphées de toutes les sectes avouent

publiquement qu'on peut faire son salut

dans le sein de notre sainte Eglise.

C'est elle qui compte le plus de héros

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l36 TRIOMPHE

*

de ht Foi ; elle a fourni des milliers de mar

tyrs, de confesseurs , de vierges illustres

qui avalent coulé leurs précieux jours pour

la gloire de la religion , les uns sous le

chaume où le ciel les avait fait naître, les

autres dans les palais des monarques où la

Providence les avait conduits pour y opérer

des prodiges.

Si quelquefois on aperçoit des ames qui

désertent son sein maternel , ce sont des

pécheurs endurcis , des aveugles , des lâches

qui , fatigués des douceurs et des richesses

qu'ils né savent point apprécier , veulent

vivre dans l'indépendance au gré de leurs

passions ; et ce qui a fait toujours la re

marque des savans, c'est que les plus reli

gieux des sectes , pénétrés d'un profond

repentir à la vue des prodiges qui éclatent

dans notre sainte Eglise , volent dans son

sein avec une confiance entière. C'est là

qu'ont pris naissance tons les grands hom

mes qui ont enrichi la terre chrétienne de

leur charité , et d1un nombre infini et porn*

peux d'établissemens merveilleux de'bien-

faisance que tout l'univers admire.

4". La plus savante ; on y voit desauteurs

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de l'église. i37

célèbres de toutes les classes de la littéra

ture, des historiens dignes de la plus h^ute

confiance, des poetes dont la sublime et re

ligieuse imagination unie à leur style en

chanteur, feront dans tous les siècles la

gloire de la religion et des lettres ; des ora

teurs rares dont l'éloquence égale celle de

Cicéron et de Démosthene ; des hommes

d'état célèbres qui par la vaste étendue de

leur génie ont su éteindre les dissensions

et les guerres intestines, unir tous les mo

narques de la terre , et établir dans l'univers

une paix profonde et enchanteresse au mi

lieu des acclamations des hommes et des

lauriers les plus magnifiques*

Clément XIV sut enrichir l'Eglise des

trésoçs de sa science et de sa charité.

Léon X illustra, sgft sjècle par les mo-

numens immortels qu'il établit à la gloire

des lettres au milieu de la capitale de l'u

nivers chrétien. Les Augustin , les Gé-

rôme, les Chrysostôme , déployèrent toute

la vaste étendue de leur science pro

digieuse pour confondre les plus grands

esprits de leur siècle qui étaient enveloppés

des ténèbres de l'erreur , pour les éclairer

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1 38 TRIOMPHE

les conduire en triomphe au pied de la

croix de Jésus-Christ.

Combien d'autres grands hommes n'y

voyons-nous pas qui , comme Bossuet et Fé-

nélon, ont contribué par leurs lumières écla

tantes au triomphe de l'Evangile. Les vrais

savans et les vrais sagesqui penseront sérieu

sement à conquérir le royaume des cieux, se

ront contraints d'avouer dans tous les temps

que la sainte Eglise catholique est la plus so

lide et la plus sûre , pour ne pas tromper et

pour n'être pas trompés, et qu'elle est seule

capable de porter dans l'esprit des mortels

dociles à la grâce le flambeau éclatant de

la vérité dont le triomphe sera éternel.

'---i> '> V», ■ , , . \Ki :.'

ARTICLE H.

Falsification des textes sacrés.

'■ '■' "'-•'-Vf jjï

Notre prétendu prophète , persuadé que

le moyen d'être admiré des hommes et d'en

recueillir les suffrages glorieux , est de les

nourrir, de les enchanter d'abord des opi

nions et des croyances agréables qu'ils ado

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de l'église. i 3g

rent et dont ils font une profession solen

nelle, offre à l'admiration du lecteur ravi

les magnifiques prophéties de la divinité de

notre Sauveur que l'Eglise a contemplé

cent fois avant lui avec un véritable ra

vissement, et en déploie à ses regards la

grandeur, la noblesse et la majesté. Pour

parvenir à son but , il donne toutes les ex

plications qui lui plaisent , qui lui sont

agréables , par le moyen de ses hiéroglyphes

imaginaires auxquels il donne quelquefois

le nom splendide de langue de la nature.

« Rendez gloire , dit-il (i\ à la sainteté

de Jehovah, le dieu des armées; qu'il soit

lui-même votre crainte et votre terreur , et

il deviendra votre sanctuaire. Il sera une

pierre d'achoppement , une pierre de scan

dale pour les deux maisons d'Israël , un

piège et un sujet de ruine à ceux qui habi

tent dans Jérusalem. Plusieurs (Pentre eux

se heurteront contre cette pierre ; ils tom

beront et se briseront , ils s'engageront dans

le filet ety serontpris. »

Au commencement du treizième verset

(i) Page 134, de Oeggcr. Isaïe,ch. VIII, v, i3-i4-t5-i6.

Page 155: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

I/JO TRIOMPHE

du 'chapitre huit du prophète Tsdle , il

augmente la phrase d'un mot de plus; il

ajoute Jehovah , tandis que le texte hébreu,

grec et latin, ne nomment qu'une seule

fois dieu des armées. Dominum exercituunx

ipsum sanctificate.

Jusqu'à présentnul grand homme n'avait

trouvé mieux que M. Oegger le moyen ma

gique de rapiécer l'Ecriture-Sainte; quand

son imagination sinistre lui persuade qu'il

y a un vide qui nuit à ses desseins , il y

place, avec un art merveilleux de devin, une

pièce de sa façon. Continuons le chapitre

d'isaïe, et vous apercevrez l'adresse de

notre Ahacien ; il ajoute avec abondance

de egeur, sans doute , il deviendra votre

sanctuaire , tandis qu'il n,'y a aucune pa

role qui désigne sanctuaire. C'est apparem

ment par sa prétendue langue de la nature

qu'il a cru voir le sanctuaire véritable ; mais

pourquoi ce pauvre homme allait-il mettre

son esprit à la torture pour expliquer ces

paroles si simples : et erit vobis in sanctifi-

cationem ? Tout individu médiocrement

instruit expliquera naturellement au pre

mier abord il deviendra votre sanctification.

Page 156: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

DE LÉGLISE. l4l

Je ne veux pas examiner davantage ce

chapitre du prophète Isdie, ce que je viens

d'en dire me suffit pour convaincre le sage,

que M. Oegger, pour édifier son système

imaginaire , a élé contraint de falsifier les

textes sacres.

Portons nos regards sur le nouveau cha

pitre d'Isaïe (1) , et nous nous convaincrons

de ce que j'ai avancé : Un petit enfant,

ajoute-t-il , nous est né , et un fils nous a été

donné; il portera sur son épaule la marque

de saprincipauté; il sera appeléAdmirable,

Conciliateur, Dieu , Héros, Père du siècle

jutur , Prince de la paix. Son empire s'éten

dra de plus en plus, et la paix qu'il établira

n'aura point defin. Il s'asseoira sur te trône

de David, et ilpossédera son royaume,pour

l'affermir et lefortifier dans l'équité elddins

la justice ', depuis ce temps jusqu'à jamais*

Le zèle de Jehovah-Zebaoth fera ce que je

dis (2).

Pourdonner plus de pompe et de magni

ficence à ce brillant chapitre, il veut l'orner

(1) Page 136 de Oegger. Isaïe, chap. IX, v. 6.

(a) Parvulus. Ieaïe , 9-6. Natns est nobis datas est.

Page 157: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

l4' TBIOMPHF,

du nom magnifique de conciliateur, qui n'y

est point renfermé ; on n'y aperçoit que Je

mot consiliarius : or , jamais consiliarius n'a

voulu signifier Dieu conciliateur, comme

il prétend lui-même: mais celui qui donne

des conseils; ce qui est très-applicable et

très-conforme à la mission de Jésus-Christ,

qui nous a donné les conseils évangéliques,

connus et admirés de toute la terre, qui est

soumise à son doux empire.

Il ne se contente point de cet ornement,

il y ajoute deux noms hébreux de plus, Je-

hovah-Zebahoth , dans cette phrase où l'on

voit uniquement le zèle du seigneur : fera

ce que je dis, zelus Domini exercituum fa-

ciet hoc; et en y ajoutant deux mots inu

tiles il en omet un qui est essentiel : exerci

tuum.

Nous nous donnerons la peine de parcou

rir succinctement le chapitre onzième d'I-

saïe, expliqué à sa façon (1).

// sortira , dit-il , un rejeton de la tige de

Jesse', et une fleur naîtra de sa racine, et

l'esprit de Jehovah se reposera sur lui , t'es-

(i) Page 139, de Oegger. lai, ch. XI du 1" v. jusqu'au i3.

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UE L'ÉGLISE. l43

prit de sagesse et d'intelligence , l'esprit de

conseil et de force , L'esprit de science et de

piéte', et il sera rempli de l'esprit de la

crainte de Jehovah. Il ne jugera point sur le

rapport des yeux, et il ne condamnerapoint

sur un oui-dire / mais il jugera les pauvres

dans lajustice , et il se déclarera le vengeur

des humbles qu'on opprime.

Il frappera la terre de la verge de sa

bouche , et il tuera l'impie par le souffle de

- ses lèvres. La justice sera la ceinture de ses

reins , et lafidélité la ceinture de sesflancs.

Le loup demeurera alors avec Vagneau , et

le léopard gîtera avec le chevreau. Le veau,

le lionceau et le bétail qu'on engraisse , se

ront confondus ensemble , et un petit enfant

les conduira.

La jeune vache paîtra avec l'ours , leurs

petits gîteront ensemble , et le lion mangera

du fourage comme le bœuf. L'enfant qui

tête s'abattra sur le trou de l'aspic, et Fen

fant qu'on sevre mettra sa main dans la ca

verne du basilic. Aucun ne nuira ni ne fera

aucun dommage sur ma montagne sainte,

parce que la terre aura été remplie de la

connaissance de Jehovah f comme le bassin

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144 TRIOMPHE

de la mer est rempli des eaux qui le cou

vrent. En cejour-là le rejeton de Jessé sera

exposé comme un étendard devant tous les

peuples ; les nations viendront lui offrir leurs

prières , et son sépulcre sera glorieux. Alors

le Seigneur étendra sa main plus loin , pour

acquérir le residu de son peuple , qui sera

demeuré de reste en Assyrie, en Egypte, a

Patras, à Cus, à Hélam, à Sinhar, à Ha-

math et dans les îles de la mer y il élevera

sort étendard parmi les nations, et assern*

blera les Israélites , qui auront etéchassés;

il recueillera des quatre coins de la terre

ceux de Juda , qui auront été dispersés.

Je n'ignore pas la beauté de cette mer

veilleuse prophétie, j'en admire, j'en con

temple la noblesse , la splendeur et la ma

gnificence , qui s'est solennellement réalisée

dans l'univers chrétien qui adore la divinité

du Sauveur. --> - v .,..

Maïs je suis saintement indigné que

M. Oeggery falsifie certaines choses, comme

dans toutes les prophéties qui agrandissent

le volume de son ouvrage, et qui y so'nt

comme de riches diamans ensevelis dans

les horreurs exécrables d'un fumier infect.

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DE L'ÉGLISE. î45

Je suis affligé que dans toutes les autres ,

comme dans celle-ci, il y ajoute ou re

tranche ce qui flatte ou irrite son imagina

tion fanatique , et qu'il se montre ainsi le

cruel tyran de l'Evangile, en y faisant peser

un sceptre de fer qu'il a usurpé audacieu-

sement. Le nom le plus magnifique et le

plus brillant qu'il ajoute à fantaisie dans

son ouvrage ennuyeux, c'est le nom hébreux

Jèhovah , qu'il emploie souvent pour signi

fier Dieu , et qu'il y promène sans cesse en

pompe.

Voici la raison pour laquelle il se sert sou

vent de ce nom si magnifique : c'est que,

s'imaginanl que les Français ne peuvent pas

bien comprendre la grandeur de Dieu , ni

se soumettre à ses lois , au lieu de leur ré

péter Dieu, en français , pour les convertir,

il le leur répète en hébreu , Jéhovah. Voilà

la manière ingénieuse dont se sert notre

fameux prophète dans sa doctrine singu

lière; il ose même espérer qu'ils entendront

mieux l'hébreu que le français (1).

(1) Page 3 , de Oegger. La carrière , dit-il , que nous....

IO

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1 46 TRIOMPHE

ARTICLE III.

Ses blasphèmes.

On a certainement bien droit de gémit

sur l'aveuglement du pauvre M. Oegger;

il réalise dans sa malheureuse personne la

prophétie du Sauveur, qui, s'adressant aux

apôtres, leur prédit qu'un jour il y aurait

des hommes qui croiront rendre gloire à

Dieu que de persécuter leurs personnes vé

nérables , et de vomir des injures contre

eux et contre leur Eglise.

Les ténèbres et tous les crimes, voilà le

siècle de Jésus-Christ; c'est ainsi que ce vé

ritable aveugle ose parler pour blasphémer

ce qu'il ignore (t). Comment a-t-il pu pen

ser que le siècle de Jésus-Christ fût un

siècle de ténèbres et de crimes? Ce siècle

dans lequel les apôtres, avec l'Evangile

renversèrent l'idolâtrie, les vices, les crimes',

les abominations, la dépravation des mœurs,

(0 Page 241 , de Oegger.

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DE LÉGLISE. l/fi

etétablirent, sur les ruines du paganisme, la

religion triomphante.

Ce fut dans ce siècle où les prodiges mer

veilleux des apôtres éclatèrent en tout lieu ;

l'admiration saisit tous les esprits; les ténè

bres de l'erreur se dissipèrent; la déprava

tion s'étonna , s'irrita ; la tyrannie trembla ,

se cacha, arrêta ses fureurs et frémit; les

sceptres de fer se brisèrent, le sang humain

ne ruissela plus dans le sanctuaire des dieux

monstrueux , les temples consacrés à la dé

bauche s'écroulèrent, les autels profanes se

renversèrent, et sur leurs ruines s'élevèrent

avec enchantement l'olivier de la paix, le

laurier de la victoire , le règne de la jus

tice.

L'univers tomba aux pieds de ces hommes

apostoliques pour leur offrir ses hommages,

en reconnaissant et contemplant en eux la

véritable puissance divine ; les princes , les

monarques , les savans les plus distingués

de tous les rangs , de toutes les conditions

reçurent leurs lumières, et cédèrent à la

puissance de leurs œuvres miraculeuses.

Hé ! le pauvre Oegger à osé appeller ce

siècle célèbre de Jésus-Christ ; 1 e siècle des

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I 48 TRIOMPHE

tenèbres et des crimes : on voit évidem

ment par-là que quand un homme se jete

dans l'erreur , il roule de précipice en pré

cipice , se plonge enfin dans l'abyme de ses

pensées sinistres, sans reconnaître le mal

heur déplorables de son aveuglement.

Dans la même page , il avance que lors

qu'on a parcouru toutes les erreurs on est

plus près de la vérité ; c'est une imposture :

elle est d'autant plus claire, que, communé

ment , les hommes, même très-savans, qui

parcourent les erreurs et se familiarisent

avec elles, non-seulement s'y plongent,

mais s'y affermissent , et y restent inébran

tables jusqu'à la fin de leurs jours. Tel

est peut-être l'étal malheureux qui vous

attend, ô infortuné Oegger ! mais touché

de votre triste sort , je prie Dieu de déchi

rer le voile fatal qui couvre vos yeux.

; Voici d'autres blasphèmes qu'il vomit,

contre les apôtres dans une autre endroit

non moins absurde (1); les apôtres , dit-il,

partageaient encore des idees aussi gros

sières , ils reçurent depuis , dira-t-on le

(1) Page ubi. Ouvrage de Oegger.

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de l'égl1se. 149

Saint-Esprit. Nous ne l'ignorons pas , nous

savons même qu'ils le reçurent trois ou

quatrefois , preuve qu'ils en avaient besoin,

et que le Saint-Esprit n'était point une

personne. Nul homme fi*a peut-être , ajoli-

te-t-il une plus grande idée que nous des

douzes pécheurs de Galilée ; mais toujours

étaient-ils des hommes , et des hommes de

leur temps : aujourd'hui seulement la masse

du genre humain devait par conséquent

pouvoir envisager un vrai rayon de sa divi-

vinité manifestée. ' ■

Peut-on porter le déraisonnement à un

plus haut période , que de mépriser les

apôtres et de prétendre que la vérité na pas

étéannoncée par eues, daqjs toute son éten

due ; qu'aucune société existante sur la terre

ainsi que la sainte Eglise n'ont pu apperce-

voir encore la véritable lumière du ciel, et

qu'il n'y a que lui qui vient de trouver ces

jours-ci , dans un coin d'un livrefanatique,

la véritable vérité.

Il ose, ce malheureux , insulter, dans le

cours de son ouvrage, à nos vénérables

prélats et surtout aux saints pontifes Ro

mains, que tous les sages de là terre envi

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l"5o TRIOMPHE

ronnent de leur vénération; à ces véritables

successeurs de saint Pierre , qui nourissent

l'univers chrétien et le fécondent par leur

charité, leur science , leurs bienfaits et leur

grâces , comme l'astre du jour qui ranime

le monde par sa lumière brillante et pom

peuse.

Il ose, cet aveugle, vomir des blasphèmes

contre leur majesté pontificale; mais Rome,

toujours glorieuse, méprise cette infortunée

victime de son aveuglement , la regarde

comme un ver de terre, et ne montre son

magnifique triomphe qu'en la laissant gé-

mirdansl'iguominie, couverte de confusion.

Pour moi je n'essaye de renverser son

système de fond^en comble , d'un coup de

plume, que pour convaincre les hommes,

qu'il est aisé d'entrer en lice, même avec

un savant ennemi de la religion , puis

que nous avons pour nous la vérité, qui

triomphe toujours.

A la page 437 , il redouble ses calomnies

et ses fureurs contre Rome, et montre évi

demment qu'il cherche à renverser la chaire

de Saint-Pierre, pour établir le trône pon

tifical de Rome à Paris et s'y asseoir en

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de l'église. 15i

qualité de nouveau prophète. Mais il ne

voudra pas qu'on lui reproche publi

quement toutes les trames secrèles qu'il

ourdit à la congrégation de au

poste où exerçant son ministère, comme

Scribe et Pharisien, il imposait aux autres

un joug pénible , qu'il ne touchait que du

bout du doigt. On pouvait alors lui appli

quer tout au long le chapitre 23, de saint

Mathieu, qu'il ose impudemment appliquer

a nos souverains pontifes.

Il est bon, je crois, d'observer à noire

faux prophète, qu'on donne aux rois, aux

empereurs le titre de majesté comme à

Dieu; mais pour cela prend -ton, sur

tout de nos jours , les rois et les empe

reurs pour des dieux? non sans doute, et

il s'en faut de beaucoup. Mais un sage, un

savant quelconque, ne fait pas de difficulté

lorsqu'il s'adresse à un monarque , de lui

dire votre ma/este par un sentiment de vé

nération dont-il est rempli pour un souve

rain légitime.

De même, quant aux souverains de l'E-i

glise, devra-t-on être étonné qu'on leur

donne le titre de Sainteté? Ce ne sont vas.

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1 5a TRIOMPHE

les chefs de l'église, qui ont pris ce nom'

glorieux; personne ne pourra prouver le

contraire, mais ce sont des hommes rai-

sonahles , qui , dans certaines époques , es

sayèrent de donner le titre de Sainteté à

celui qui occupait avec dignité le trôné

papal et édifiait l'univers entier par sa

science et ses vertus héroïques. Dans la

suite, insensiblement , l'usage eut force de

loi; voilà pourquoi aujourd'hui on se sert

du nom de sainteté pour rendre les hom

mages légitimes, aux chefs augustes de

l'Eglise.

Je suis bien surpris qu'il ait porté l'au

dace jusqu'à dire que le souverain pontife

se faisait adorer ; de tels blasphèmes dé

célent un aveuglement total , une privation

entière de lumières naturelles. Et comment

pourra-t-il prouver qu'une cérémonie re

ligieuse, appellée adoration dupape, a lieu

dans quelque époque, à moins que ce ne

soit un lieu saint où le pape lui-même

aille adorer, en marchant à pied, pour don-

ner l'exemple.

Si on leur baise les pieds et les mains 5

est-ce contraire à la religion ? ne baise-t-on

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DE L'ÉGLISE. I 53

pas les mains des princes , sans les prendre

certainement ni pour des saints, ni pour

des dieux ? Et un bon chrétien s'éloigne-

ra-t-il de la loi divine, lorsqu'à l'exemple

de la Magdelaine , il baisera les pieds de

celui qui est le représentant de Jésus-Christ,

ou qui, comme la femme de l'Evangile, sai

sira avec un saint transport d'allégresse , le

pan de sa robe dans l'intention de guérir

les plaies de son âme ?

Qu'il se rappèle, cet aveugle, que leur titre

favori , dont leur sainteté s'en orgueillit, est

celui de serviteur des serviteurs , qui paraît

à la tête de tous leurs écrits sublimes et de

leur bulles toujours pieuses et magnifiques,

a l'exemple de notre divin maître qui , en

lavant les pieds des apôtres , voulut être le

serviteur de tous; n'est-ce pas la vérité ? qui

osera me contredire justement ?

Il ne faut pas croire que je sois ultra-

montain; point du tout : je suis sincère

ment et entièrement attaché aux libertés

gallicanes, et en gardant le juste milieu ,

n'étant ultra d'aucun côté; je me fai6 un

vrai plaisir , en quatilé de chrétien fidèle ,

de défendre la justice partout, de soutenir

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1 54 TRIOMPHE

la vérité aux dépends de tous mes intérêts.

Ainsi que M. Oegger vienne recon

naître, admirer, contempler le flambeau

éclatant de la vérité, que je lui offre avec

franchise pour faire luire à ses yeux l'au

rore du vrai bonhem»! qu'il se hâte de se

prosterner devant cette pierre inébran

lable , contre laquelle ses blasphèmes s'é

crasent, et rejaillissent sur lui pour le noir

cir, et qu'en avouant la faiblesse de son

aine et la grandeur de ses erreurs , il

vienne unir le triomphe de ses passions,

au triomphe de l'Eglise !

ARTICLE IV.

Ses absurdités.

Je désirerais beaucoup queles protestans,

que M. Oegger semble le plus caresser ,

s'occupassent à considérer le grand coup de

pinceau que notre nouveau prophète donne

avec enchantement : que la vérité n'est au

jourd'hui nulle part . ni dans l'Eglise Ro

maine, ni chez les protestans, ni dans au

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dé l'église. I 55

cune secte existante, et quelle n'est que

chez lui en bonne santé.

Enjetant, dit-il (1), un regard impartial

sur là société depuis dix-huit cents ans, et

ses haineuses et inconcevables divisions, n'est-

on pas en droit de soupçonner que , dès les

premiers temps , il a dû être commis quelque

grande erreur qui aura entravé Vœuvre de

la régénération de Tunivers , et qu'ily apar

conséquent quelque grand obstacle à lever

pour que la véritépuisse se répandre.

Il est évident que le pauvre Oegger veut

montrer finement que l'univers est ploqgé

dans un cahos d'erreurs; que lui seul, pa

raissant comme un phénomène, vient éclai

rer la terre corrompue des beaux rayons de

ses lumières immenses.

Ah ! pour le coup , le pauvre Oegger a

trop médité sur ces paroles de l'Ecriture-

Sainte: Borate cœli desuper et nubespluant

justum. Il a tant prié depuis qu'il n'est plus

demi-Déiste, que dans un moment d'en

thousiasme il a cru tomber juste du ciel,

chargé de sa nouvelle doctrine.

(1) Page 3 , de l'ouvrage de Oegger.

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1 56 TRIOMPHE

Je n'avance vien que je ne prouve ;

Que les lecteurs, dit - il (1), apprennent

donc quen commençant notre travail nous

étions , comme ils peuvent l'être , Déiste s

ou quelque chose Rapprochant, et quen le

terminant nous nous sommes trouvé Chré

tien. .. , , . , A . W.l

J'en appelle à tous les hommes sages >

ainsi qu'aux philosophes sa vans.: je les in

vite à venir contempler son eclatante frao-r

chise, qui le trahit et dévoile entièrement

le noir projet qu'il avait formé de mettre

le feu à l'Eglise, en créant une religion qu'il

ne croyait pas, puisqu'il avoue lui-même,

naïvement, qu'il n'est devenu Chrétien

qu'en terminant son ouvrage. ,_ .,,

Comment peut -on., concevoir qu'un

Déiste, qui a étudié l'Ecriture-Sainte pen

dant plusieurs années, sans la croire, vienne

tout-à-coup se soumettre à la foi , l'ayant

toujours méprisée; comment pourra-t-on

se persuader que cet aveugle, qui, pendant

toute sa vie, s'est traîné dans la boue de

l'erreur, vienne nous montrer la vérité sans

(j) Pag>: 3, ouvrage du Ooggci.

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DE L'ÉGLISE. 1 5^

qu'il soit capable d'errer; mais qu'il soit de

venu subitement Ja vérité unique ! Ce serait

réellement le comble du déraisonnement

que de vouloir suivre un tel guide , qui

veut créer un système nouveau pour se faire

une gloire monstrueuse.

J'avoue qu'il a du talent et une grande

science, ayant des notions du grec, du latin,

et même une teinture de l'hébreu; con

naissant assez la géographie, et même je

crois l'astronomie et surtout la physique,

c'est une science qui est très-bonne de ce

temps pour amuser les jeunes gens.

Mais quant à la philosophie il n'y entend

rien. Je regrette, beaucoup de n'avoir ja

mais eu l'avantage glorieux de jouir de son

aimable présence, pour lui demander ce

qu'il veut dire par ce mot, qui se trouve

solemnellement publié dans la fameuse

page 4, que Jésus-Christ est un dieu mé

taphysique. Je me suis empressé de consul

ter nos meilleurs lexiques , qui m'ont con

firmé , que le mot jéhovah, métaphysique,

qu'il promène en triomphe dans son ou

vrage , était selon lui , le dieu trop abstrait,

trop subtil avant de paraître sur la terre.

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I 58 TRIOMPHE

Il parait que dans la page 3 16 , il nie

l'immensilé de Dieu, et qu'il soit partout.

Ce créateur infiniment bon , qui nous avait

placés sur cette terre et qu'on nous disait

présentpartout. Voyez qu'elle absurdité de

la part d'un homme tel que Oegger, qui

fait gloire de connaître la philosophie; tant

il est vrai que la raison, conduite par l'am

bition, se jete dans des écarts effrayans;

la philosophie bien saine apprend à tout

homme, que Dieu parcourt d'un seul re

gard l'espace immense de l'univers, règne

en tout lieu, assiste à tous les actes de tous les

êtres , et de tous les mortels ; voit tout jus

qu'à nos plus secrètes pensées, sans que

nous puissions le voir ni le comprendre ;

sans cela il faudrait dire , qu'il ne peut pas

nous entendre quand nous avons le bon

heur de lui offrir nos prières , nos vœux et

nos hommages.

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DE L'ÉGLISE. i09

ARTICLE V.

Ses contradictions.

Quand un homme n'a pas la vérité pour

lui, il s'égare et se contredit nécessaire

ment; c'est ce que nous pouvons voir bien

clairement dans M. Oegger. Il serait trop

long de montrer toutes les contradictions

qui fourmillent dans son ouvrage ; je me

contenterai de mettre au grand jour quel

ques-unes des principales.

Pour comprendre la Bible , dit-il , à la

page fy], il ne suffit pas, par conséquent, de

de comprendre l'hébreu , lé grec , le latin ,

on tel autre idiome dans lequel elle est tra

duite 1 mais ilfaut aussi comprendre la lan-

gue de la nature ; les auteurs sacrés , etc.

Il est évident qu'il veut faire voir que,

pour comprendre la Bible, il faut qu'un

homme très-savant et très-intelligent sache

l'hébreu, le grec, le latin et la langue de sa

nation , ainsi que celle de la nature , tandis

que, à la page 3i6 , il dit qu'un enfant sans

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l6o TRIOMPHE

aucune instruction peut la comprendre. Il

est évident que M. Oegger, se contredit

d'une manière visible aux jeux de tout

homme rempli du sens commun.

Quelle conduite extravagante dans notre

prétendu prophète !' Dans le frontispice de

son livre, il invoque la philosophie, du

moins il semble se servir de ses armes vi

goureuses, pour se couvrir de gloire; il

paraît même lui elever un triomphe par ses

paroles :

Un peu de philosophie éloigne du christianisme ,

Beauconp de philosophie y ramène.

Tandis que dans l'intérieur de l'ouvrage

il ne cesse d'insulter les philosophes, qui

ne lui disent rten et qui ont plus de sa*

gesse que lui-même. A la page 253, il

dit d'eux , que le Seigneur se présente à

un de nos prétendus sages , à un de nos de-

mi-savans , ou de nos philosophes natura

listes pour se /aire reconnaître ? Tous ces

raisonnemens les reconnaîtront-ils' plutôt ,

quand, dans le monde-esprit, Useprésen

tera à eux comme un ange resplendissant de

lumière, qu'ils ne' le reconnaissent sous la

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DE LÉGLISE. l6l

forme dun homme vertueux et aimant ? Il

y a lieu d'en douter.

Est-ce ainsi que l'on doit parler aux phi

losophes ? M. Oegger devrait les respecter

un peu plus, ce sont nos frères égarés qui,

souvent remplis de toutes les richesses de

l'esprit, ont des idées plus pures, plus vastes

et plus magnifiques que lui. Il redouble sa-

diatribe contre eux, à la page 316,oûil

dit : en attendant nous nous égarions au loin

avec dorgueilleux philosophes. Hélas ! mon

Dieu ! et nous en voyons qui ont une idée

juste d'eux mêmes et qui ne se prévalent ja

mais des dons magnifiques dont la nature a

orné leur esprit, et leur ame, et qui n'en font

un glorieux usage qu'envers l'humanité

souffrante.

Il prétend, dans un endroit, que l'Eglise

Romaine n'est pas Universelle , et qu'elle a

usurpé ce titre ; tandis que, dans un autre

article , il ose se nommer lui-même chré

tien catholique; il est forcé d'avouer qu'il

nVsfpas concluant dans ses principes et, qu'il

se contredit manifestement.. -•■

Le. mot catholique vient du mot grec

katholikos , qui signifie répandus sur toute

ti

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l62 THIOMPHE

la terre; or, nous ne voyons pas que M. Oeg-

ger soit répandu sur toute la terre : au con

traire, bien loin d'être répandu dans tout

l'univers, il est caché dans l'obscurité, dans

un coin de Paris, méprisé de tout le monde;

ainsi , à dire la vérité , il n'a le droit que de

se nommer chrétien singulier.

ARTICLE VI.

Système dogmatique de M. Oegger.

C'est avec de faux principes, en falsi

fiant les écrits sacrés, en vomissant des

blasphèmes contre les apôtres et la sainte

Église , qu'il prétend élever son système ,

parlequel il montre uniquement la divinité

de Jésus-Christ, créateur et sauveur, en

renversant avec impiété le dogme auguste

de la très-sainte Trinité. Il essaie de le

prouver par l'Ancien et le Nouveau Testa

ment ; dans cet essai on aperçoit des absur

dités, des contradictions qui révoltent la

raison ; je ne vais pas me donner la peine

de les réfuter article par article , ce serait

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de l'église. 163

trop ennuyeux pour le lecteur, qui aurait,

de la peine à en supporter la lecture.

Avant toute chose, je vais d'abord lui

annoncer qu'il a renouvelé l'herésie des

Sabelliens, disciples de Praxe'as, de Noëtus

et de Sabetlius , qui prétendaient , avec les

impies Sociniens , que Dieu ne subsiste pas

en trois personnes j mais que les noms de

Père , de Fils et de Saint-Esprit , sont dif-

férens noms qui conviennent à une même

personne. Celte hérésie donna lieu à celle

de Paul de Samosate, évêque d'Antioche,

homme corrompu et infecté des principes

de Sabellius, et des hérétiques anciens ré

futés par saint Jean l'évangéliste. Cet héré

siarque fit plus que celui de nos jours, il

nia la divinité de Jésus-Christ , et fut con

damné dans deux célèbres conciles d'An-

tioche, tenus pendant les années 266 et 272;

on peut s'en convaincre dans le septième

livre de YHistoire ecclésiastique cTEusèbe,

au chapitre huitième.

Ces hérésies furent publiquement con

damnées par le premier concile général de

Nicée, et par les conciles d'Antioche.

Entre autres Pères de l'Eglise, saint Denis

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l64 TRIEOMPHE

d'Alexandrie, saint Athanase et saint Basyle

les combattirent avec un éclatant succès. En

voilà assez pour la confusion de M. Oegger,

et pour le triomphe de l'Eglise , dont je vais

montrer au grand jour le dogme auguste de

la Trinité sur les ruines de son nouveau sys

tème.

Bien loin de croire que ce dogme sacré,

de notre auguste religion puisse tendre à

introduire le Polythéisme ; nous voyons au

contraire qu'il est la base solide de la foi

catholique , par laquelle un esprit docile à

la grâce embrasse avec aisance les lumières

pures qui jaillissent du sein de la Divinité.

Oui , le Chrétien véritable croit ferme

ment avec orgueil jusqu'à son dernier sou

pir : trois personnes en Dieu , qui ne sont

néanmoins qu'un seul Dieu. J'avoue qu'on

ne peut aisément comprendre ce grand et

auguste mystère, et qu'il est le cas de s'é

crier avec l'apôtre : Que les jugemens de

Dieu sont incompréhensible ! Çuam sunt

incomprehensibiliajudicia Dei!

C'est Dieu qui a parlé clairement sur ce

point; il ne peut être induit en erreur ni

nous y induire. La sainte Eglise , qui recèle

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DE L'ÉGLISE. l65

dans son sein les plus grands hommes, qui

ont répandu leurs vastes et brillantes lu

mières dans l'univers entier, doit être, pour

tout homme raisonnable, le plus sûr ga

rant de celle vérité qui nous est sans cesse

annoncée dans nos Temples , au milieu de

l'éclat et de la pompe divine qui y règne.

M Oegger, simple particulier, veut for

ger un dogme nojuveau sur les ruines de no

tre foi antique, en détruisant la puissance

étonnante du sens naturel qui s'offre à tout

lecteur fidèle et juste , qui se délecte à lire

de bqnne foi le code sacré des lois divines.

Portons nos regards sur ce beau texte de

saint Mathieu, au chapitre vingt-huitième:

Allez instruire toutes les nations, en les bap

tisant au nom du Pere , du Fils et du Saint-

Esprit; euntes ergo docete omnes gentes,

baptisantes eos in nomine Patris, et Filii et

Spiritus sancti. On voit évidemment par ce

texte formel, qu'il y a un Dieu en trois

personnes distinctes.

Pour peu qu'on se livre à la méditation,

on aperçoit que le Père est Dieu, le Fils est

Dieu, et le Saint-Esprit est Dieu. Au com

mencement , dit saint Jean au premier cha

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l66 TRIOMPHE

pitre , etait le Verbe , et le Verbe était avec

Dieu, et Dieu était le Verbe. In principio

erat Verbum, et Verbum erat apud Deum,

et Deus erat Verbum.he quinzième chapi

tre de saint Jean vient à l'appui de notre

proposition. Lorsque le Consolateur, dit-il,

l'esprit de véritéquiprocède du Verbe vien

dra , il rendra témoignage de moi: Cum au-

tem venerit paracletus quem ego mittam vo-

bis à Pâtre , spiritum veritatis, qui a Pâtre

procedit^ille testimonium per hibebit de me.

Ces trois personnes n'ayant qu'une même

nature et une même divinité, étant égales

en majesté, en ancienneté et en perfection,

ne forment qu'un seul et même Dieu.

Le Père a engendré de toute éternité le

Fils, qui lui est consubstantiel, qui est Dieu

comme lui, et qui est appelé le Verbe, la

sagesse de Dieu ; nous en avons une preuve

dans le pseaume 2, v. 7. Vous êtes monfils,

je vous ai engendré aujourd'hui. Filiusmeus

es tu , ego hodie genui te. Saint Paul vient à

l'appui de notre foi légitime. Quel est l'ange,

s'écrie-t-il, à qui Dieu ait jamais dit, vous

êtes mon fils, je vous ai engendré aujour

d'hui Je suis son Père, il sera mon Fils.

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DE L'ÉGLISE. l67

Cui enim dixit aliquando angelorum : Filius

meus es tu , ego hodie gentri te? et rursum

ego ero Mi in Patrem et ipse erit mihi in

Filium.

Le Père et le Fils , en s'aimant , produisent

de toute eternité la troisième personne, que

nous appelons Saint-Esprit. Saint Jean nous

en donne une notion dans le chapitre qua-?

torzième, afin que le monde, dit Jésus-

Christ, connaisse, que j'aime mon Père,

j'exécute ses ordres. Sed ut cognoscat mun-

dus quia diligo Palrem et sicut mandatum

dedit mihi Pater sic jacio.

Le Saint-Esprit procède du Père et du

Fils ; nous en voyons une preuve éclatante

au quinzième chapitre de Saint-Jean que

nous avons déjà cité : Lorsque le consola

teur, dit-il, Vesprit de vérite' qui procède

du Père , queje vous enverrai de la part de

mon Père , sera venu , il rendra témoignage

de moi. Cumautemveneritparacletus, quem

ego mittam vobis à Patre spiritum veritatis ,

qui a Patre procedit, Me testimonium per

hibebit de me. Dans le.seizième chapitre où

notre Sauveur parle, il ajoute : lime glori

fieraparce qu'il recevra, de ce qui est à moi,

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l68 TRIOMPHE

et il vous Vannoncera. ïlle me glorificahit ,

quia de meo accipiet, et annonciabit vobis.

Tout ce qui est à mon père , ajoute-t-

il ailleurs, est à moi -, c'est pourquoi je vous

dis qu'il recevra ce qui est à moi , et vous

l'annoncera.

Ces trois augustes et divines personnes

sont aussi anciennes les unes que les au

tres ; le Père n'a pas existé un instant sans

produire le Fils , et le Fils n'a pas été un seul

moment sans produire avec lui leSt.-Esprit.

Tel que le soleil , qui , ouvrant sa carrière

glorieuse, déploie sa magnificence céleste

sur la surface de la terre , ne peut exister

sans produire tout à la fois son brillant

éclat , sa chaleur et sa lumière , ainsi ces

trois personnes en Dieu réunissent en

semble leurs qualités essentielles, magni

fiques et brillantes, raniment au même

instant l'univers, et l'environnent de leur

gloire pompeuse.

Que M. Oegger contemple donc la beauté,

la grandeur, la majesté de ce sacré mystère;

que , pénétré de repentir, et contraint de

frapper sa poitrine, il vienne se prosterner

aux pieds du Dieu trois fois saint, recpn.r

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DE LÉGLISE. 169

naître la triple puissance d'un Dieu uni

que , manifesté aux hommes de bonne

volonté, pour les environner un jour dans

le ciel des rayons éclatans de sa gloire eter

nelle.

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I-'O • TRIOMPHE

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CHAPITRE III.

Morale de M. Oegger.

Après s'être enseveli dans un gouffre d'er

reurs absurdes ton chant le dogme de la foi,

ej s'être efforcé de les annoncer solennel

lement, en falsifiant les textes de l'Ecriture-

Sainte,il vient, avec le même front d'airain,

présenter à la Société chrétienne une doc

trine nouvelle qui fait gémir les vrais sages.

Il essaie de montrer avec emphase au

grand jour, qu'il n'existe point de distinc

tion entre le péché mortel et le péché vé

niel, que tous les péchés sont égaux, et

qu'également on ne doit point distinguer

entre les préceptes et les conseils. Il ne

craint pas d'endormir les pécheurs dans l'é

tat malheureux où ils traînent leursjours, en

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DE L ÉGLISE. i7 I

voulant leur faire croire que les peines de

l'autre rie auront certainementleurs bornes.

Il semble se délecter eu répétant ce que

cent autres aveugles comme lui ont mille

fois répété; il assure que le jeûne, dont nous

parle notre Sauveur, n'est point un jeune

physique réel , mais un jeûne spirituel, une

privation du péché, des plaisirs honteux de

la terre : il détruit les sacremens de bap~

tême et de pénitence, et prétend qu'ils con

sistent uniquement dans la contrition et

dans la perfection.

Il ne fait pas de difficulté de renverser

le sens véritable du Pater, prétendant que

ce n'est pas un pain réel que l'on doit de

mander à Dieu tous les jours , mais unique

ment la vie spirituelle; que la dévotion

du saint Rosaire est une cérémonie ridicule.

Il porte l'audace jusqu'à mépriser le culte

des saints et de la sainte Vierge, ainsi que

la beauté du célibat; mais on voit en lui

l'homme égaré, poursuivi à toute outrance

par les remords cruels de sa conscience ,

. qui lui reproche sans cesse sa honteuse

apostasie.

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I72 TRIOMPHE

ARTICLE PREMIER.

Destruction des Sacremen's du Baptême et de la Pénitence, du

Pater et du Rosaire.

Il' faut avoir parcouru tout l'ouvrage de

M. Oegger, et l'avoir approfondi quelque

temps , pour concevoir combien est grand

l'aveuglement dans lequel il est plongé. Il

commence d'abord à faire connaître, à la

page 317, que toutes les sociétés du monde,

sans excepter l'Eglise romaine, usent d'une

fausse manière d'annoncer l'Evangile. L#

fausse manière , dit-il , dont on annonce

l'Evangile à l'univers , n'est pas même le

veritable obstacle qui s'oppose aux Chretiens

de nos jours , quoique sans doute elle soit

bien capable de les dérouter.

D'après ce raisonnement il faut conclure

qu'il n'y a que lui qui soit capable de se

flatter, avec un légitime orgueil , de montrer

aux hommes la doctrine qu'ils ont ignorée

jusqu'à ce jour : voyons lefaire et nous ad

mireronspeut-être la grosseur de son génie

destructeur.

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DE LÉGLISE. 173

Le baptême d'eau, dit-il à la page 32* ,

qu'administrait le precurseur Jean , n'était

que l'emblème matériel de cette conversion

du cœur, indispensable pour entrer au

royaume céleste queJéhovah venaitfonder

en terre. Baptême, vu la signification emblé

matique de l'eau et de l'absolution, veut

dire connaissance de la vérité, et par elle

pénitence ; et lapenitence elle-même ne si

gnifie que conversion. Sans le changement

radical de l'intérieur de l'homme, le bap

tême et la pénitence ne sont que de pures

cérémonies ; mais changer Vintérieur de

l'homme , c'est-à-dire Vintérieur de son es

prit et de son cœur , n'est point une chose

aussi facile qu'on pense , ni l'œuvre d'un

jour.

Vhomme n'est point, ajoute-t-il, si on

nous permet cette expression , une simple

surface, mais un solide profond, et, pour

ainsi dire, immense : vraie raison pour la

quelle Dieu nepeutjamais se décider à l'a

néantir , quelque progrès qu'ait fait chez

lui la corruption. Ily a des degrés de con

version , ily a des degrés de bonne volonte

qui vontjusqu'à l'infini. '^uxyeux de Dieu

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1^4 TRIOMPHE

nous serons même dans le mal, et nous de

vons travailler éternellement à notre ré

forme.

Tel est donc le baptême que l'on doitprê

cher aujourd'hui ; continue- t-il , convertis

sez-vous sérieusement et sans retour; allez

droit à la perfection , même dans les plus

petites choses / suivez non-seulement ce qu'on

a appelé les commandemens de Dieu , mais

suivez les conseils qu'il a bien voulu vous

donner , persuadé que vous ne pouvez les

deprécier sans blasphème.

Reconnaissez en un mot Jésus - Christ

pour l'unique Dieu du ciel et de la terre , et

commencez, dès aujourd'hui, à marcher sur

ses traces ou bien vous êtesperdus. Tant que

vous ne serez point attachés irrevocablement

à la vérité qui sauve , vous ne serez point

baptisés dans toute laforce du terme.

Et tant que vous ne serez pas convertis de

manière à ne plus retomber sciemment,

même dans les plus petites fautes, telle que

de négliger uneplus grandeperfectionpour

une moindre, vous ne pourrez point vous

flatter d'avoir véritablement reçu le sacre

ment de pénitence.

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DE LÉGLISE. 175

Il st évident qu'il détruit le sacrement

du baptême , son essence et sa forme.

Eunomius, évêque de Cyzique, renversa

autrefois la forme du baptême; il fut réfuté

par Théodoret, par saint Augustin, saint

Epiphane , saint Chrysostôme , saint Ba

sile et saint Grégoire de Nice.

Mais Oegger a fait plus même que les

Protestans qui admettent le baptême et bap

tisent réellement avec de l'eau au nom du

Père , du Fils et du Saint-Esprit , tandis que

notre faux prophête est plus savans que tous

les hommes lorsqu'il s'agit de détruire, il est

unique. Ce seul point important suffit pour

que jamais aucun sage Chrétien quelcon

que, soit catholique, soit protestant, ne

se confie, en aucune époque, à sa doc

trine et n'aille se ranger sous son noir éten

dard.

On voit également, par les passages que

je viens de citer, qu'il détruit aussi le sacre

ment de pénitence. D'après lui , si on né

glige de prendre une plus grande perfec

tion pour une moindre , il n'y a plus de

conversion , plus de pénitence ; d'après ses

raisonnemens, il faut être ou tout pécheur

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I76 TRIOMPHE

ou tout parfait; mais la saine raison nous

montre qu'il peut y avoir un juste milieu

entre le pécheur et l'homme parfait, et que

s'il fallait obliger les hommes à embrasser

les choses les plus parfaites, Ce serait mettre

un des plus grands obstacles à la conversion

des hommes.

Il prétend, ce malheureux, que la con

fession sert à endormir les pécheurs dans

les douceurs funestes du péché ; tout homme

raisonnable reconnaît, je l'avoue, qu'elle

est pénible, mais qu'elle est un moyen très-

salutaire pour rendre la conversion solide

et durable, pour |précautionner les faibles

contre les périls éminens qui se rencontrent

sans cesse dans cette vallée de larmes , pour

fournir des remèdes efficaces aux âmes dé

sespérés, et les environner des plus flat-

teuses et des plus douces consolations que

notre auguste religion nous offre dans la

personne vénérable de ses ministres sacrés.

Quoique les ministres protestans n'obli

gent pas comme nous leurs fidèles à la con

fession, néanmoins ils conviennent qu'elle

estbonne, et conseillent d'y recourir comme

à une piscine salutaire qui porte le beaume

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DE LÉGLISE. I77

dans l'ame du pécheur contrit. Mais Oeg-

ger veut être plus savant que les catholi

ques et que les protestans; il tranche la dif

ficulté : il a trouvé un chemin plus court

pour aller au ciel; il ne veut pas qu'on

s'arrête aux confessionaux pour y arriver

plutôt.

Destruction du Pater.

Il a autant de mérite dans l'explication

vicieuse de l'oraison dominicale, que dans

l'article que nous venons de parcourir. Je

suis bien surpris que notre prétendu pro

phète , ne puisse pas encore bien com

prendre le sens naturel .de ces magnifiques

paroles, qui sont incluses dans la prière,

la plus belle que le Sauveur du monde en

seigna lui-même à ses apôtres, et qui sont,

tout à la fois simples, et sublimes; donnez-

nous aujourd'hui notre pain quotidien :

panent nostrum quotidianum danobis hodie.

Il s'agit véritablement ici d'une nourri

ture réelle quotidienne, que nous deman

dons à Dieujournellemen t pour le soutien de

12

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r"S TIUOMPHE

notre corps : mais IM. Oeggerplus mystique

an/ourd'huique les plus grands mystiques de

Tantiquité, ne veut pas qu'on prie pour cela.

Lorsqu'il s'agit dans l'Ecriture-Sainte du

mot Pain signifiant nourriture de l'âme, il

lui donne un sens naturel , nourriture du

corps, et ici où tous les hommes entendent

par pain, nourriture du corps , il veut lui-

même lui donner un sens mystique, nour

riture de l'âme où la vie de Dieu. Il ne faut

plus en douter, c'est parfaitement le langage

d'un chrétien singulier.

Destruction du Rosaire.

Voici comment il essaye de renverser le

saint usage de rendre nos hommages à Dieu

et à la sainte Vierge. Le chrétien éclairé

dit-il, à la page 333 , r?adresserapasfaci

lement à son createur , d'autre prière que

celle qu'il lui a lui-même enseignée. Et

quand il l'aura dite, une ou deuxfois dans

unejournée, avec une confiance et unepiete

vraiment filiales , il sera persuadé que l'a

mour éternel l'a suffisamment compris... Le

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de l'égl1se. j^q

chrétien eclairé évitera surtout cet usage

sacrilège de s'adresser à d'autres êtres qu'à

Dieu, quelque parfaits que ces autres êtres

puissent paraître...

Il est évident qu'il veut parler ici du ro

saire et qu'il jette du ridicule sur «et an

tique et sublime usage, par lequel nous

rendons en commun , les savans avec les

ignorans tous ensemble , nous rendons nos

humbles et profonds hommage au Iloi et

à la Reine des cieux. . ? •

Quant à la sainte-Vierge, il parait qu'il

prohibe insolemment nos salutations et nos

vœux; cette puissante médiatrice qui jouit,

auprès de son divin fils, de toute les puis

sances célestes, qui distribue les grâces et

les couronnes, n'a-t-elle pas droit à notre

reconnaissance, et ne mérife-t-elle pas tous

les jours l'encens de nos mains pures, et

les dons de nos cœurs. .; ! ; . . ,, ■

Quant au pater, il recommande très-ex

pressément que quand, pendant une jour

née on le répete deux fois, on doit s'arrê

ter tout de suite , et prendre bien garde

au moins de ne plusprier le reste du jour ,

de peur d'ennuyer le bon dieu. Voyez com

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l8o TRIOMPHE

bien est grande la simplicité âe notre grand

prophéte , que de borner la prière à ce

point; je veux bien croire que si nous con

sultons le langage des incrédules , ils nous

diront avec Oeggér, que c'est assez de finir

sitôt quton a commencé. Mais parcourons

le code sacré des lois divines, nous ver

rons qu'il est dit partout, qu'il faut prier et

prier sans cesse : sine intermissione ora-

te. Il nous est dit aussi dans saint Luc,

chap. XVIII , v. 1 : il ne faut jamais cesser

de priera oportet semper orare et non defi-

cere. On voit évidemment que M. Oegger est

diamétralement opposé à l'esprit de l'E-

vangile:;. ■ ■: --

Qu'il soit donc frappé d étonnement, en

voyant le ravage de sa plume sacrilége,

qui va profaner le sacrement du baptême et

de la pénitence , détruire le sens naturel du

pater , et le saint usage des ames simples

qui rendent leurs sincères hommages au Roi

et à la Reine des cieux, en leur offrant de

cœur et d'ame , la répétion solennelle de

la salutation angélique , et de l'oraison do

minicale- « . . ■

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de l'église. i8l

article ii.

] 1 ne distingue pain t entre les préceptes et les conseils, entre

les péchés mortels et véniels ; il nie l'éternité des peines ;

il détruit le jeune et les abstinences.

Que les hommes se rapprochent de Dieu,

et Dieu se rapprochera d'eux : dit-il avec

majesté à la page 3i7, qu'il renoncent aux

petites passions ; qu'ils ne marchandentplus

avec leur conscience ; qu'en attendant de

plus grandes lumières, ils commencentpar

vivre conformement , au peu de vérites mo

rales qu'ils connaissent ; que dans le doute

ils s'abstiennent, selon le conseil que leur

donne un païen ; qu'ils ne distiguent plus,

continue-t-il, avec une noire sévérité, qu'ils

ne distinguent plus entre préceptes et con

seils} qu'ils ne parlent plus d'offenses vé

nielles quand il £agira de leur eternelpère.

Vraiment à entendre parler M. Oegger,on

le prendrait pour un Saint dans cet article;

ets'il observe entièrement tout cequ'ilydit,

il ne lui manque que la foi romaine pour

être canonisé. Mais sans l'avoir jamais ni

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l8l TRIOMPHE

vu , ni connu, je crois qu'il fait comme les

membres de la sinagogue, qui annonçaient

toujours des lois sévères pour les autres, et

n'en observait jamais aucune eux-mêmes.

N'est-ce pas réellement contre la raison

que de publier solennellement , qu'on ne

doit point distinguer entre les préceptes et

les conseils ? Un monarque qui commande

légitimement, n'a-t-il pas le droit de faire

punir si on n'exécute pas les ordres émanes

de sa puissance et de sa sagesse ? Oui sans

doute; mais s'il donne un conseil sur tel ob

jet à son peuple chéri , les sujets seront

libres d'agir, du moins seront privés, ou

dignes d'une récompense, sans manquer de

respect à leur souverain. Il en est de même?

jusqu'à un certain point, à l'égard de Dieu

qui donne aux hommes des préceptes et

des conseils ; ne pas les distinguer c'est tom

ber dans un abyme d'erreurs effrayantes.

Il ne veut pas non plus qu'on parle d'of

fenses vénielles; il veut donc que tous les

péchés soient égaux, soient mortels; qu'elle

absurdité de sa part! Il voudrait donc,cebar-

bare,damner un chrétien qui aurait la fai

blesse de dire un léger mensonge , le con

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de l'église. ' 183

damner au même fea de l'enfer que le mon

stre apostat qui égorgeait sans pitié, et avee

plaisir un grand homme d'un siècle célèbre.

On voit clairement que M. Oegger à aban

donné entièrementla voie magnifique de la

raison.

Il a renouvelé la même erreur de Jove-

nien , qui vécut dans le quatrième siècle,

et qui ne voulait pas qu'on distinguât entre

les péchés mortels et les véniels , prétendan t

qu'ils étaient tous égaux. Entre autres er

reurs vomies par cet hérésiarque , celle-ci

fut condamnée par le concile de Trente.

L'empereur Théodose fit des efforts pour

contribuer à son extinction. Le pape saint

Cyrice le condamna dans un concile, tenu à

Rome en 3go. Saint Augustin, saint Ambrai-

se, saint Jérôme, combattirent cette erreur.

Il nie l'éternité des peines.

Nous ne saurions nous arrêter, dit-il, à

ces images grossières qui représentent les

damnés comme brûles éternellement dans un

feu matériel, à la page 402. Il ajoute, nous

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l84 TBIOMPHE

dirons ailleurs que , selon nous, lespeines de

Tautre vie ne sont éternelles que pour ceux

qui voudront bien rester éternellement mé

dians; mais qu'il y a toujours lieu au re

pentir devant le père, quoique le retour de

vienne plus difficile à mesure qu'on ienfonce

dans l'abîme.

On voit évidemment que M. Oegger a si

peur d'être damné éternellement, qu'il pu

blie solennellement que les peines de l'enfer

pourront un jour finir, soit pour apaiser ,

endormirles remords de sa conscience , soit

pour attirer des partisans à sa doctrine.

Il a renouvelé l'erreur ÏÏOrigène , qui

fut un des hommes les plus savans et les

plus renommés du troisième siècle. Entre

autres erreurs celle-ci, qui nie l'éternité des

peines, fut réfutée par saint Epiphane et

saint Jérôme, fut condamnée dans plu

sieurs conciles généraux et particuliers te

nus en Orient et en Occident , ainsi que dans

le cinquième concile général tenu à Cons-

tantinople, en 552, sous le pontificat de

Vigile et sous le règne de l'empereur Justi-

nien.

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pe l'église. i85

Il détruit le jeûne et les abstinences.

On voit aussi par ce passage, dit-il à la

page 376 , que par jeûner le Seigneur en

tendait simplement s'affliger dans le sens

moral ou iaffluer de ses péchés. Lejeûne

corporel , continue-t-il , en usage dans cer

taines églises , et que dans quelques-unes on

a rendu si ridiculepar les details minutieux

et absurdes dans lesquels ont est entré', riest

donc , dans la realité, qu'un mémorial du

jeûne du cœur, et dont Tunique importance

est de rappeler ce dernier.

Ce n'est point du tout entrer dans Fesprit

de l'Evangile , ajoule-t-il, que de croire

que Von à tout faitquandon ajeûnéauprin-

temps et quon s'est abstenu pendant quel

ques semaines d'œufs et de graisse , il faut

jeûner toute Vannée ; faites jeûner vos pas-

sions.....

M. Oegger, à quoi pensez-vous? Peut-on

se faire illusion sur un point si évident?

lorsque notre divin Sauveurjeûna quarante

jours dans le désert et qu'il eut faim : post

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j86 tr1omphe

quantjejunasset quadraginta diebus et noc-

tibus. etpostea esuriit. On voit évidemment

que c'était un jeûne corporel, réel, et on

ne peut, en aucune manière, prouver que

c'était un jeûne spirituel. C'est d'après ce

grand exemple , que notre Sauveur nous

donna, que la sainte Eglise a fait à tous les

fidèles une loi de jeûner pendant le carême

et pendant certaines époques de l'année , et

nous ordonne, avec une sagesse admirable,

des abstinences en certains jours , et en

particulier tous les vendredis et samedis de

chaque semaine , afin que nous pensions

continuellement à mortifier notre chair,

nos passions, et que nous puissions par-là

nous élever plus aisément à la contempla

tion des choses célestes.

M. Oegger a renouvelé une des erreurs

de Aërius, prêtre de l'église de Cébaste,

partisan des opinions fi!Anus. Cet hérésiar

que ne voulait ni jeûnes, ni abstinences,

et affectait de faire meilleure chair pen

dant le carême. Il fut condamné dans beau

coup de conciles. Saint Augustin et saint

Epiphane le réfutèrent avec un brillant

succès.

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DE L'ÉGLISE. 187

Contemplons la conduite admirable de

notre mère chérie, organisant cette insti

tution merveilleuse pour contribuerai] bien

temporel et spirituel de ses chers enfans ,

dociles à ses douces lois. C'est par cette

magnifique institution qu'elle les anime

journellement à dompter leurs passions re

belles et à remporter sur elles les plus belles

victoires , et bien loin d'altérer les charmes

éclatans de la nature dont la Providence a

orné leurs corps , elle les affermit et les cor

robore , de l'aveu mê:ne des plus savans

disciples d'Hyppocrate.

Je connais un personnage distingué par

ses vertus et ses sublimes écrits admirés des

sa vans, qui a gardé l'abstinence pendant

trois années consécutives à Paris. Ce grand

homme, au milieu de ses mortifications sé

vères et volontaires, jouit de la plus bril

lante santé, sans prendre aucun ménage

ment, sans éprouver la plus légère infir

mité ; mais il faut avouer qu'il méprise tous

les plaisirs du monde, et, qu'au milieu de

la corruption séduisante du siècle , il n'a

d'autres passions que celle des bellesrlct-

tres : aussi est-il vertueux et sage autant

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lH8 TRIOMPHE

qu'il est possible de l'être à un véritable

apôtre. Ainsi, enchanté, ravi des merveilles

qu'opère la sainte Eglise par ses préceptes

ei ses conseils, je l'admire, et, en particu

lier sur ce point sublime , je l'admirerai

toujours avec un saint transport d'allé

gresse , et tous les sages savans seront con

traints de l'admirer dans tous les siècles.

ARTICLE III.

Il méprise la canonisation des saints, le culte de la sainte

Vierge , le célibat.

M. Oegger, s'étant déchaîné contre lesPro-

testans, contre les philosophes et contre tous

les hommes, il est absolument nécessaire

qu'il se déchaîne contre Rome; et qu'à Romey

dit-il, à la fin de la page 36o, on ne dise

pas que dans la canonisation des saints on a

aussi, et particulièrement, égard aux vertus

qu'ils ontpratiquées dans un degréhéroïque.

Il n'estpoint donne à Phomme de connaître

ce degrédans un individu : éest là un mys

tère

Pardonnons le pauvre aveugle Oegger

sur toutes ses erreurs; expliquons-les lui,

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DE L'ÉGLISE. 189

et enfin peut-être il comprendra la beauté,

la majesté de l'ordre qui règne à Rome au

tour du trône pontifical.

Dès l'aurore des beaux jours de l'Eglise,

les fidèles unis ensemble par la charité, ne

formant tous qu'un cœur et qu'une ame,

offraient l'encens de leurs hommages à des

personnages défunts, ayant été témoins de

leurs vertus héroïques pendant leur vie;

ainsi on les voyait courir en foule, honorer

les restes précieux de saint Pierre, de saint

Paul et de tant d'autres saints dignesde leur

vénération , et les supplier d'obtenir pour

eux des grâces signalées auprès de Dieu.

Mais l'Eglise voyant naître de cette fer

veur des abus dangereux, et qu'insensible-

nrentles fidèles rendaient des hommages à

des personnages qui en étaient indignes,

pensa alors avec sagesse à prohiber tout

culte envers tout défunt , avant d'être re

connu digne de cette vénération. Elle éta

blit alors un tribunal pour juger ceux qui,

pendant leur vie , s'étant distingués par des

vertus sublimes ou par des prodiges, méri

taient d'être honorés comme saints après

leur mort. Ainsi Rome ne fait pas les saints

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TC)C) TRIOMPHE

comme on veut le dire, mais déclare uni-*

quement saints ceux qui , pendant le cours

de leur vie, ont montré un héroïsme écla

tant des vertus les plus magnifiques.

En outre, quoi de plus juste que de vé

nérer et de prier les saints sans les adorer:

nous supplions tous les jours nos meilleurs

amis environnés de l'éclat de gloire du

trône, d'obtenir du monarque des grâces,

des bienfaits; ainsi, sans blesser la Majesté

divine , on a bien droit de prier les bien

heureux d'obtenir miséricorde auprès du

Seigneur; c'est avec justice que nous con

servons précieusement les tableaux qui

rappellent à notre souvenir leur héroïsme,

comme nous conservons ceux de nos plus

chers amis, et, sans leà adorer, nous les en

vironnons sincèrement, de toute notre vé-

ration et. de nos plus.éclatans hommages.

11 détruit le culte de la sainte Vierge.

. ',; '. '$: ..••'... i ' .'' , .

Ceci devrait, dit-il à la page 3o5, don

ner à penser à ceux qui ne craignent pas

d'élever des autels a cette créature, qui,

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DE T. ÉGLISE. 1C)1

toute intéressante qu'elle puisse être, ne

devrait jamais , sous aucun rapport , être

assimilée au Créateur.

Comment est-il possible que M. Oegger

ait l'audace de faire entendre au public que

l'Eglise assimile la sainte Vierge au Créa

teur? Dans quel temps, dans quelle époque

peut-il avoir vu cela? Qu'il le prouve, et

alors il ne méritera pas le titre d'imposteur.

Nous la regardons comme une créature, et,

si nous lui dressons des autels comme nous

en dressons aux saints comme aux anges,

c'est pour y faire brûler en pompe l'encens

pur de nos hommages, maisjamais celui de

nos adorations ; c'est pour faire couler sur

nous, par son intercession, les bénédictions

divines, et non pour reconnaître en elle

quelque divinité.

t II méprise le célibat. . -

- Est-il nécessaire, dit-il à la page 427i

après cela de longs raisonnemens pour dé

montrer Vabsurdite du célibat , tel que dans

des temps d'ignorance et de barbarie, on l'a

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192 TIUOMPHE

introduitparmi les Chrétiens, au risque de

donner naissance par là à tout ce que For

dre des choses possibles peut offrir....

On voit assez bien que M. Oegger a re

nouvellé l'erreur de Jovinien, qui préten

dait que l'état du mariage etait aussi parfait

devant Dieu que celui de la virginité; ainsi

que celle deVigilance, prêtre de Barcelone,

qui enseignait que l'état de virginité ou du

célibat devait être prohibé. Celte erreur fut

réfutée dans la personne de Jovinien par

saint Jérôme, et condamnée par le concile

de Trente , et par un autre concile tenu à

Rome l'an 3go.

M. Oegger prétend de plus que , dans le'

ciel, les hommes seront unis par les liens cou-

jugaux ; et en cela il ne fait que renouveller

l'erreur honteuse de Mahomet qui enseigne

dans son infâme Alcoran , que dans l'autre

vie les justes jouissent des plaisirs charnels,

ce qui est entièrement opposé à l'Evangile,

où il est dit que les mariages n'auront point

lieu dans la cité sainte : Neque nubent, ne-

que nubentur. ••.... , ', , ,,

lla porté sa témérité jusqu'à vouloir ren

verser le célibat sacerdotal. J'avoue que lui

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de l'église. ig3

même, né avec un penchant honteux au

mal , d'une manière particulière , reconnaît

qu'il est dans l'impossibilité de garder la

continence , et de faire briller dans sa mal

heureuse personne l'éclat des vertus ange-

liques; mais s'il en était convaincu avant de

porter le pied dans le sanctuaire, il devait

reculer, nous aurions été plus enchantés de

sa lâcheté, qu'affligés aujourd'hui de sa folie

ou de son prétendu courage.

La sainte Eglise n'a établi ce magnifique

usage qu'à l'exemple de notre divin Sau

veur , et des apôtres qui n'ont jamais été

liés par le lien conjugal; cette mère ten

dre et sage n'a prescrit la virginité aux

habitansdu sanctuaire, que pour l'avantage

et la gloire de la religion; en effet, si le

célibat n'existait pas, on verrait des Ophni,

des Phinées, des prêlres pères de familles

dans les horreurs de l'infortune, des en-

fans nombreux entre les mains dela justice;

que de soins innombrables pour les nour

rir, les élever, les établir avantageusement'

Tous ces objets divers ne pourraient -ils

pas devenir }a source d'une ambition dan

gereuse ! tandis que leur état sacré leur im

i3 .

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iq4 triomphe

pose le devoir de veiller aux soulagemens

temporels et spirituels des pauvres fidèles

qui gémissent sous le poids de l'indigence.

Rien au contraire n'est plus beau , n'est

plus magnifique que de voir un saint mi

nistre des autels, environné de tout l'éclat

des vertus angéliques, dépouillé du soin

d'une famille et occupé uniquement de

celui de ses fidèles, leur déployant toutes

les richesses de sa charité, et remplissant

toutes ses fonctions glorieuses avec un dé

vouement héroïque.

ARTICLE IV.

Ses aveux et ses remords.

Voici le tableau singulier qu'offre M. Oeg-

ger, en parlant de Judas, traître du Sauveur

du monde ; il le dépeint comme un autre en

fant prodigue, qui, pénétré d'un profond

repentir, trouva miséricorde auprès du Père

céleste, et jouit de la gloire divine.

Ce Judas, dit-il à la fin de la page 3q6,

gui poussa le repentirjusqu'à ne plus pou

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DE L'ÉGLISE. 1g5

voir vivre t taudis qu'il n'estpoint dit que les

autres apôtres , à Fexception de Pierre ,

aient pensé le moins du monde à pleurer

leurs lâches desertions; et Judas, qui pou

vait s"1être laissé persuader que son maître

n'était quunfauxprophete , ou bien , qu'é

tant unprophète veritable , il Saurait quuh

miracle à faire pour le sauver, n'était au

fond que Vemblème vivant de tous ceux qui

trahissent leur Dieu. Il était nôtre emblème

à tous!

Nous sommes tous des Judas, continue-

t-il dans l'amerttlriie de son ame, et mal

heur à celui qui se croirait meilleur que

lui/i.... Quel spectacle, ô Dieu! que de se

représenter. Le pauvre Judas! au

ciel! avec son ancien maître..*... aimant

beaucoup, parce qu!on lui a beaucoup par

donné.... Et ce même bon maître , nefaisant

d'autre distinction entre lui et les autres

apôtres, que de le choisir plus particulière

mentpour aider à ramener ceux de ses der

niers et malheureux en/ans représentés par

Benjamin , et qui ne sont autres que lesJuifs

actuels.....

Lecteurs, qui que vous soyez, ajoute-t-il,

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196 TRIOMPHE

vos larmes coulent en cet endroit! oui, elles

coulent, carles miennes inondent ma plu

me.' ..... Malheur, oui malheur à ce cœur as

sez infortuné, qui nepalpiteraitpas à la seule

idée de Judas sauvé, ou même d'une chance

de salutensa faveur!Hélas ! cepauvre mal

heureux, il riavait pu survivre à sa faute:

J 'ai péché, faipéché'!.... n'en doutonsplus,

éest Venfantprodigue pour lequel le père,*,

a tué le veau gras.

On voit bien que le pauvre Oegger s'é

gare en suivant son imagination exaltée. Ce

Judas , dit-il, poussa le repentir jusqu'à ne

pouvoir plus vivre; ce furent les remords

durs et affreux qui le dévoraient , ce fut le

désespoir qu'il conçut en reconnaissant la

divinité de, notre Sauveur, qui le porta à se

suicider. Ce n'est pas un repentir visible ,

comme celui de saint Pierre, qui pleure sa

faiblesse, et qui, dans la suite, donne des

preuves incontestables de son repentir, en

étonnant toute la terre par son courage hé

roïque.

Dans cet article, Oegger fait un aveu bien

éclatant : Nous sommes tous des Judas, dit-

il ^ en se mettant du nombre; mes larmes,

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DE L EGLISE. 197

ajoute — t — il ailleurs, inondent maplume.

Il faut que j'avoue qu'à la vue de cet atten

drissement de son cœur, j'ai espéré qu'un

jour M. Oegger pourrait se convertir.

Il a osé avancer, en parlant de Judas : mal

heur à celui qui se croirait meilleur que lui;

c'est une erreur grossière; on peut fort bien

croire qu'il y ait des gens qui n'ont pas trahi

Jésus-Christ . et que ces paroles ne peuvent

mieux s'appliquer qu'à un apostat qui trahit

la religion en perdant toute espèce d'hon

neur, et en avouant lui-même qu'il n'est

pas meilleur que Judas. •

Il semble que Dieu s'est plus à manifester

dans cet ouvrage sa puissance miraculeuse,

lorsqu'on voit que M. 0eggery déploie toute

l'étendue de la perversité de son cœur, avec

une franchise vraiment ravissante et digne

de pardon.

Nous allons nous en convaincre à la

page 33 1. « Faire tout pour moi, dit-il au

» pluriel , rapporter tout à moi , n'attacher

de prix qu'à l'orgueil, à la vanité, à la re-

» nommée ; ne voirjamais que mon individu

» dans toutes mes démarches , même dans

» mes prétendues bonnes œuvres; m'ap

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1g8 TRIOMPHE

» puyer sur mo\, sur mon bras, et non sur

» Dieu. C'est là , dit-il au commencement

» de cette phrase, c'est là effectivement mon

» grand mal. »

On voit évidemment que la main divine

a dirigé sa plume pour le conduire à faire

Taveu éclatant de l'intérieur de son ame. La

page 3i8 va nous le confirmer d'une ma.r

nière indubitable. « Ce n'est pas Dieu, dit-

» il au pluriel, qui s'est éloigné de moi , c'est

» moi qui me suis éloigné de lui, il me cher-

» che et je me dérobe à ses regards; il me

» poursuit, et je le fuis; il m'adresse la pa-

» rôle , et je ne l'entends point; il vient se

« se montrer à mes yeux sous les traits les

» plus palpables de l'être, et je ne veux pas

» le reconnaître. »

Voyez comment cet homme , savant sans

doute, laisse échapper des traits visibles qui

décèlent les remords cuisans qui déchirent

son ame alarmée, malgré les triomphes ima

ginaires que lui montrent dans le lointain

des flatteurs esprits frivoles, qui veulent se

servir de sa faiblesse, pour renverser la

colonne puissante de l'illustre Eglise de

France.

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DE L EGLISE. I99

ARTICLE V.

Réflexion consolante adressée à M. Oegger.

O mon cher Oegger, que je suis allarme

de votre aveuglement que tout le monde

déplore ! Ne voyez-vous pasl'abimeeffrayants

où vous êtes plongé ? Et si vous ne voulez

point revenir à Dieu avec sincérité, n'a-

prébendez-vous pas que le ciel ne frappe

d'un anathème éternel votre endurcisse

ment, dont vous avez fait l'aveu sans vous

en douter? Vous ne pouvez pas ignorer

que le Seigneur poursuit le pécheur du feu

de sa colère , et que souvent il le frappe au

moment où il se croit tranquille, et qu'il se

joue des conseils des sages et des lois de

Dieu , odisti omîtes qui operantur iniquita-

tem , perdes omnes qui loquuntur menda—

cium. '

Les anges étaient les chefs-d'œuvre des

mains du Créateur, mais l'instant qui les

vit coupables les vit réprouvés. Baltasar,

Sédécias , Jéhu , et tant d'autres pécheurs

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200 TRIOMPHE

sont punis de mort et arrosent de leur sang

la place glorieuse qu'ils avaient occupée in

dignement. Mariasses, oubliant son Dieu,

est chargé de fers et enseveli dans les hor

reurs d'un souterrain.

Ce fut la colère divine , nous dit l'Ecri-

ture-Sainte , qui abrégea les jours de David

et iïEzéchias , à cause de leurs péchés. C'est

pour punir les crimes que le ciel réduisit

en cendres des villes rebelles à ses ordres,

renversa des provinces , désola des royau

mes , et que sous Noé il ensevelit la terre

sous les eaux.

En homme rempli de vénération et de

foi pour les écrits sacrés , les cheveux se

dressent sur ma tête à la vue de ces traits

effrayans. Les beautés , les charmes écla-

tans de la jeunesse , et les glaces de Tâge

très-mûr, n'arrêtent point le courroux du

ciel ; les vieillards calomniateurs sont pu

nis comme les enfans qui avaient insulté le

prophète.

Oza le téméraire tomba subitement mort

à côté de l'arche. Le grand prêtre Eli ou

blie ses devoirs , il est renversé dans le

sanctuaire ; Heliodore profane le temple de

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DE L ÉGLISE. 201

Jérusalem , il est étendu au pied de l'autel ,

et y est laissé à demi-mort par un ange qui

y paraît miraculeusement. Saùl, Antiochus,

ayant méprisé la puissance de Dieu, finis

sent leurs malheureux jours dans les hor

reurs du désespoir.

Voilà le malheur qui vous attend , mon

cher Oegger , si vous n'ouvrez les yeux à la

lumière qui vous éclaire; votre crime d'a

postasie est bien grand, sans doute, mais

Dieu s'apaisera si vous revenez à lui sincè

rement. Prosternez-vous aux pieds du Dieu

trois fois saint que vous avez abandonné,

. il se laissera toucher; suppliez-le dans toute

l'amertume de votre ame, et il vous fera

miséricorde.

L'impie Achab , ennemi des saints et des

prophètes , implora sincèrement le secours

du ciel , et la foudre destinée à tomber sur

sa tête fut réservée pour sa postérité. Ninive,

condamnée à devenir l'exemple des ven

geances célestes, devint par la prière le mo

nument glorieux des miséricordes divines.

La femme de Samarie demande au Sauveur

les eaux vives de la grâce, et son cœur n'est

plus altéré des voluptés de Babylone.

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203 TRIOMPHE

Etes-vous agité par les mouvemens sédi

tieux d'une cupidité rebelle? priez avec les

disciples, le calme succédera à la tempête,

les flots des passions mutinées s'abaisseront,

et dans le silence des sens votre ame n'en

tendra que la voix de la grâce.

Pour moi , mon cher Oegger, plein

d'une tendresse fraternelle à votre égard,

depuis quelques temps je supplie le Très-

Haut de faire un prodige en votre faveur,

et de vous arracher comme Lazare du tom

beau du péché , où vous êtes enseveli de

puis quatre ans , afin que vous deveniez

l'admiration d'Israël. ■ -

Mais auriez-vous, peut-être, la pensée

effrayante que votre crime est trop grand

pour que le ciel daigne vous pardonner?

Non, mon cher ami, non; rappelez ici à

votre souvenir saint Augustin , ce grand

homme qui s'était plongé dans toutes sortes

d'erreurs, d'opinions bizarres, et de systè

mes absurdes , qui avait croupi pendant

plusieurs années dans le cloaque de toutes

les passions humaines, et qui obéit àla grâce

qui l'anima ,fit un effort, fut victorieux , se

rendit à. la voix d'Ambroise , qui le pressa

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de l'église. ao3

tendrement sur son sein , et l'enfanta à la

foi pure de Jésus-Christ.

Ce grand génie, qui possédait toutes les

richesses de la poésie , tous les trésors de

l'éloquence , ne craignit pas de faire l'aveu

de ses erreurs; combattit les Donatistes, les

Tertulliens, les Pélagiens; il peupla les dé

serts de l'Afrique de bons Chrétiens, en y

établissant la religion et la pureté des

mœurs; ainsi, celui qui avait été si faible

devint upe des plus puissantes colonnes de

l'Eglise. Eh! savez-vous si Dieu ne veut pas

faire de vous un second Augustin ?

Saint Paul avait persécuté cpmme vous

l'Eglise , avait insulté aux saints qui en

avaient été les membres, il se faisait un jeu

de l'Evangile dont on lui parlait, et, dans

le moment où il était dans le dessein de

l'anéantir , il est frappé par un ctfup du

ciel, et renversé sur le chemin de Damase.

Alors, pénétré de douleur, il entendit une

Yoix qui lui disait : Saul , Saul, pourquoi

me persécutez-vous? Ayant aussitôt obéi à

la voix céleste , il se convertit , il prêcha le

Dieu qu'il avait persécuté, et devint l'a

pôtre des nations.

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204 TRIOMPHE

Ah ! mon cher Oegger , c'est peut-être

vous que Dieu réserve pour être l'apôtre

de la France ! Hâtez-vous de reconnaître la

voix du ciel qui vous parle et vous terrasse

au moment où vous portez, les armes contre

l'Eglise? Ah! relevez-vous, suivez-moi, je

vais vous conduire chez Ananie ; vous re

couvrerez la vue, vous rétablirez vos forces

épuisées , et il ne vous restera qu'à faire

des conquêtes et qu*à cueillir des lauriers.

Hélas ! peut-être encore vous êtes sourd

à la foudre du ciel qui gronde sur votre tête,

et vous cherchez à endormir les remords

affreux de votre ame qui ne vous donnent

aucun véritable repos. Pourriez-vous vous

faire illusion sur vos égaremens et applaudir

à votre rebellion, comme à une victoire glo

rieuse. Votre endurcissement me navre le

cœur; que votre position est digne de pitié!

Les larmes coulent de mes yeux ; ô que je

vous plains du fond de mon cœur!

O mon Dieu! faites un prodige; sauvez cet

enfant chéri que vous avez racheté au prix

de votre sang précieux. O Vierge sainte! ô

Marie ! ne laissez point périr cette ame qui

a coûté si cher à votre divin Fils ; mettez le

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DE LÉGLISE. 2û5

comble à vos bienfaits; brisez les liens hon

teux qui l'attachent à la terre, et donnez-lui

la liberté des véritables enfans de Dieu.

Mon cher Oegger , laissez-vous toucher de

la grâce que Dieu vous prodigue 5 pénétré

d'un profond repentir, arrosez la terre de

vos larmes; Dieu écoutera vos vœux et fera

pleuvoir sur vous toute l'abondance de ses

bénédictions : c*est peut-être lui-même qui

frappe à la porte de votre cœur au moment

où je vous parle. Oh ! que vous seriez heu

reux si vous pouviez comprendre sa voix !

c'est lui qui vous appelle, qni vous tend les

bras, vous offre son sein miséricordieux: por

tez vos regards dans le Ciel, il y prépare vo

tre couronne.

Vous persuaderait-on que ce serait un

déshonneur pour vous de vous rétracter?

Non, non, ce serait pour vous, au con

traire un honneur signalé; vous seriez du

nombre de ces grands hommes qui, s'étant

égarés, retrouvèrent avec ravissement la

voie romaine à la lueur de l'éclat de sa

gloire.

Gilbert de la Porrée, évêque de Poitiers,

qui enseigna des erreurs sur la Trinité, fut

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20Ô TRIOMPHE

condamné en n48 parle concile de Reims,

et réfuté par saint Bernard ; il se rétracta et

ne fit que mettre le sceau à sa réputation.

Pierre Abaillard, né dans le territoire de

Nantes en Bretagne , s'acquit une brillante

réputation dans l'université de Paris, où il

montra publiquement la philosophie; sa

dialectique le plongea dans plusieurs er

reurs sur la Trinité. Il fut condamné par le

concile de Soissons , en aïo, et par celui

de Sens, en n4o. Le pape Innocent II con

firma sa condamnation : saint Bernard 'le

Combattit. Il avoua ses erreurs, et son aveu

donna un nouveau lustre au nom glorieux

dont il jouissait.

Béranger, archi-diacre d'Angers, fit sa

réputation au commencement du onzième

siècle. Il prétendait que le corps de Jésus»

Ghrist n'était contenu qu'en figures dans

l'augustcsacrement de nos autels ; l'Eglise

universelle s'éleva contre cet hérésiarque ,

qui renversait la doctrine enseignée par les

Apôtres.

Il fut condamné , dans un concile tend à

Rome, sous Léon IX, l'an io5o^ par les con

ciles de Versailles et de Paris, tenus la même

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DE L ÉGLISE. 207

année; par le concile de Florence, sous Vic

tor II, l'an 1o55 ; par le concile de Tours, la

même année ; par le concile de Rome , sous

Nicolas II, l'an 105g; par le concile de Rome,

en1o63; parle concile de Poitiers, en 107$$

par le concile de Rome, sOus Grégoire Vil,

en 1078. ii

Alger, diacre de Liége, et dans la suite

abbé de Cluny , Guimond, évêque d'Aver-

sano, près de Naples, Durand, abbé de

Troard, Lanfranc, archevêque de Cantor-

béri,Hugues, évêque de Langres, sont ceux

qui écrivirent contre le célèbre Béranger ,

qui reconnutses erreurs etfutreçu en pompe

dans le sein de l'Eglise catholique.

Féhélon, évêque de Cambrai, auteur im

mortel , composa un ouvrage sur le Quié-

tisme, et, après beaucoup de conseils et de

combats religieux qu'il daigna accepter

avec soumission , il aperçut qu'il était tombé

dans une grande hérésie , dont il fit l'aveu

public. Il brûla lui-même son ouvrage en

chaire, sans néanmoins éclipser sa gloire.

Ce personnage, illustre par son génie, sa

science profonde dans toutes les branches-

de la littérature et par ses sublimes vertus ,

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208 TRIOMPHE

jouit aujourd'hui d'une plus grande gloire

que Bossuet, son antagoniste ; il possède les

suffrages de tous les savans français , et en

est regardé comme un des plus illustres

grands hommes que la France ait vu naitre

de son sein glorieux.

Suivez l'exemple de jes ames magnani

mes, dont l'esprit sublime et les vertus hé

roïques seront célébrés dans tous les siècles.

Quoi ! n'auriez-vous pas le courage de voler

vers votre triomphe éclatant? Est-ce que

vous n'oseriez pas rompre les liens d'atta

chement qui vous unissent encore à quel

que société? Un lien injuste peut se dissou

dre, et l'honneur n'y met jamais opposition.

La raison vous appelle à la religion de vos

pères, et si elle voit vos combats et vos bles

sures, elle saura donner du prix à vos vic

toires.

Ecoutez celui qui vous parle aujourd'hui

sincèrement; ce n'est point votre ennemi,

non ; c'est votre ange tutélaire , c'est votre

ami véritable qui fait luire à vos yeux l'au

rore de la vraie félicité. Leslarmes luiéchap

pent; seriez-vous insensible? Votre cœur,

bon , tendre, reconnaissant, ne serait-il pas

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DE L ÉGLISE. 209

attendri? ne reconnaîtrait-il pas la main

charitable qui dirige ma plume?

Oh ! quel dommageque vous vouliez vous

perdre et vous affermir pour toujours dans

les ténèbres des erreurs, que vous contem

plez peut-être encore avec allégresse! quel

dommage que vous vouliez vous perdre

sans ressource , vous dont les talens, l'esprit

et la science étonnent les savans, vous dont

le cœur a été toujours noble , qui n'a été

faible que par trop de tendresse?

Oui, je ne l'ignore pas; des amis perfides

ont séduit votre esprit, lui ont tendu des

piéges par des éloges séducteurs ; détournez

vos regards de ces monstres vomis de l'en

fer, avant qu'ils vous laissent dans l'igno

minie et le désespoir. J'ai entendu leurs

sentimens à votre égard. Vous vous êtes dé

claré formellement contre eux dans plu

sieurs articles : c'est fini pour vous, et s'ils

vous caressent aujourd'hui de peur que vous

ne rentriez dans le bercail du véritable pas

teur, ils vous délaisseront un jour à coup

sûr, quand ils seront assurés que tous les

hommes vous laissent dans l'oubli entière

ment.

4

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5>TO TRIOMPHE

Certainement l'état ne satisfera pas vos

désirs, puisqu'il n'a pas satisfait ceux des

puristes, dont le nombre, assez prodigieux

dans toute la France, forme une société

réelle qui , depuis plusieurs années , a de

mandé des temples avant vous.

Profitez donc de l'occasion merveilleuse

que le ciel vous offre par un prodigeicette oc

casion heureuse ne reviendra peut-être plus.

Suivez héroïquement le sentier glorieux que

je vous trace ; ne balancez pas : soyez ferme

et inébranlable , et vous arriverez , je vous

l'assure, à un terme parfaitement heureux.

Quel malheur qu'on ait abusé de la bonté

de votre cœur e t de la docilité de votre esprit?

O mon cher Oegger ! Pensez sérieusement à

la grande affaire de votre salut! pensez qu'un

grand nombre d'ames gémissent dans l'abî

me infernal , et qui voudraient pouvoir se

repentir ; mais il n'est plus temps pour elles :

elles croyaient que ces peines auraient des

bornes; mais elles se sont trompées , et ne

pouvant plus revenir sur la terre elles sont

perdues pour toujours, etsont malheureuses

pendant toute l'éternité.

Pour vous , il vous reste encore un temps

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DE L EGLISE.- 2ii

magnifique et propice que le ciel fait briller

à vos yeux j saisissez-le avec un saint trans

port ! L'Eglise vous offre un rayon de sa

gloire, hâtez-vous d'en ceindre votre front;

mais pensez que c'est peut-être la dernière

grâce signalée qu'elle vous accorde ; prêtez

une oreille attentive à sa voix maternelle,

venez vous jeter dans le sein de cette mère

tendre et chérie , elle vous prépare un fes

tin pompeux, une place auprès des sages,

des lauriers immortels dans l'autre vie.

Le zélé prélat que vous avez abandonné

vous recevra avec joie dans ses bras pater

nels, son cœur tendre vous ouvrira encore

la porte du sanctuaire : comme lui l'Eglise

pleure , gémit sur votre malheureux sort ,

sur votre égarement , sur votre ignominie.

Vos véritables amis, avec lesquels vous cou

lâtes autrefois, avec un charme enchanteur

les plus beaux jours de votre innocence, se

réjouiront avec vous, prendront part à vo

tre triomphe.

Hâtez-vous de donner un véritable lustre

à votre gloire ; venez , vous trouverez dans

ma simple personne un homme franc et

sincère, qui ne connaît point la trahison ,

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212 TRIOMPHE

je vous donne ma parole d'honneur la plus

sacrée : je vous conduirai moi - même sur

le Thabord, pour yvoir à découvert la véri

table grandeur de Jésus-Christ, vous mon

trer la grandeur d'ame de saint-Jean, dont

vous avez été disciple , et dont vous avez ou

blié la doctrine pure: nous y contemple

rons saint Pierre, comme le véritable prince

de la terre chrétienne.

Auprès de son trône pontifical, environné

d'une pompe céleste , nous admirerons

avec un charme ravissant , l'éclat modeste

de l'Arche de la nouvelle alliance, conser

vée pure comme le soleil, ainsi que le Ployant

vénérable, qui possède la véritable sagesse

et les principes du chef invisible, toujours

établis et inébranlables pendant tant de siè

cles sans aucune interruption.

Nous y contemplerons cette humble reine

de l'univers [chrétien , toujours puissante ,

toujours glorieuse, accueillant journelle

ment avec tendresse les hommes, qui , de

toutes les parties de la terre, viennent lui

offrir l'encens pur de leurs hommages, et

y consulter le Samuel de nos jours.

Nous y admirerons toute la pompe des

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DE L'ÉGLISE. 2l3

beaux arts, la pureté et l'éclat de toutes les

langues antiques et modernes, qui, dans

tous les temps , ont augmenté son doux em

pire; en amateur de toutes les sciences,

nous n'oublierons point toutes les richesses,

toute la magnificence de la littérature,

brillant d'un vif éclat au milieu de la piété

sincère de la religion romaine; il ne dé

pendrait que de vous, ô mon cher Oegger,

d'avoir une place au milieu de l'éclat ra

vissant de sa splendeur immortelle ; vous

seriez au nombre des hommes remarqua

bles de ce siècle , qui ne terniriez nullement

les rayons éclatans de sa gloire immense,

si vous vous attachiez solidement à son

char de triomphe.

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iivvc troisième.

TRIOMPHE

SOUVERAINS PONTIFES SUR LEURS ENNEMIS.

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TRIOMPHE

?JL

DE L EGLISE.

i«r Unts «utwtnis.

CHAPITRE PREMIER.

Tableau des vertus héroïques des Pontifes romains.

Que j'aime à contempler nos augustes

chefs de l'Eglise , portant sur leur front ra

dieux l'image éclatante de la grandeur de

leur ame et de la bonté de leur esprit paci

fique et sublime, dont ils déploient les ri

chesses pures dans l'univers chrétien ! A leur

vue, l'enfer frémit, le Ciel entonne des can_

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ri I 8 TRIOMPHE

tiques de jubilation; à leur aspect, les amis

de l'erreur et de la corruption tremblent et

frémissent; leur autorité ne règne, n'a d'em

pire que pour le bonheur des hommes, elle

renverse les erreurs nuisibles à la société.

Les rébellions clandestines ourdies contre

la sécurité publique n'échappent point à

leurs regards : les foudres de leur puissance

légitime éclatent sur eux. , et les ordres

pompeux, puissans , mais pernicieux, ne ré

sistent point à leur génie : ils s'écroulent

devant eux avec tout l'éclat de leur gloire

colossale.

Dans tous les siècles, leur ame magna

nime, ne goûtant de bonheur sur la terre,

que de voirles peuples heureux, réunirent

toujours leurs efforts pour couronner les

vœux des malheureux qui, abandonnés des

hommes puissans, sont souvent livrés à la

fureur de l'injustice, et ne voient jamais

briller à leur égard les secours de la pre

mière puissance , qui devrait adoucir leur

infortune.

Certains savans s'étaient persuadés quel

quefois que les souverains de l'Egljse font

peser un sceptre de fer sur les sujets dociles

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de l'église. 2i9

à Jeurs lois, et que leur plaisir barbare est

de les faire gémir dans les chaînes de l'es

clavage; non, un tel langage ne peut être

que celui de la calomnie. "Ils ne dirigent

leurs peuples chéris qu'au milieu des dou

ceurs, des charmes de la paix , sous l'éten

dard glorieux de la vertu et de la religion

libre, et on verra avec ravissement que

dans le sein de leur domaine légitime plu

sieurs donnaient la liberté d'agir à tous les

hommes, de quelque opinion et de quel

que religion qu'ils fussent, leur offrant,

avec un cœur généreux, une retraite assu

rée , un asile charitable , et la protection de

toute leur autorité, en leur prodiguant

leurs bienfaits et leurs grâces.

La diatribe, qui depuis tant de siècles ne

cesse de se servir de ses noirs pinceaux

pour noircir audacieusement les augustes

représentans de Jésus-Christ , s'arrêtera au

spectacle magnifique des vertus héroïques

de toutes les espèces qu'ils ont fait éclater

au milieu de la pompe romaine, et dont

les exemples sublimes et mémorables ont

environné le trône pontifical d'une gloire

solide et inébranlable.

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2 20 TRIOMPHE

Bien loin de réunir tous leurs efforts pour

faire briller le luxe et l'éclat des richesses

dans leurs demeures papales, on en a vu

un grand nombre se dépouiller du vain

éclat de la grandeur humaine, embrasser

la simplicité des premiers Apôtres en ver

sant dans le sein de l'humanité souffrante

toutes leurs richesses; d'autres , animés d'un

zèle plus héroïque,* renonçaient à leurs

grands revenus pour voler au secours de

l'indigence, et vivant eux-mêmes comme

des anachorètes, se contentaient d'un re

pas frugal , comme les hommes de la cam

pagne, et, bien loin de consacrer leur

temps précieux aux plaisirs de la vie, le

consacraient au bonheur de la société chré

tienne, se livraient aux jeûnes, aux veilles

et aux travaux pénibles du ministère pour

contribuer au salut des fidèles et à la gloire

de la religion.

Peut-on ignorer l'héroïsme éclatant de

ceux qui , brûlant d'une foi vive . non-seu

lement animaient les fidèles à recevoir la

doctrine pure de Jésus-Christ, à vaincre ou à

mourir plutôt que del'abandonner, frayaient

eux-mêmes le chemin de l'héroïsme, volaient

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DE L EGLISE. 22 1

vers l'échafaud pour cueillir la palme glo

rieuse du martyre , arrosaient de leur sang

la terre chrétienne, embaumaient l'Eglise

de l'odeur de leurs vertus , et l'affermis

saient sur la pierre, en la laissant pour mon

ter dans les Cieux ?

Nous contemplerons la grandeur d'ame

de plusieurs autres, persécutes par des ty

rans qui dévastaient sans pitié leur domaine

légitime; nous les verrons envoyés en exil,

condamnés aux plus durs travaux, termi

nant leurs malheureux jours au milieu de

l'héroïsme de leur patience , n'ayant d'autre

douceur et d'autre consolation que les char

mes de la paix de leur ame.

Combien n'en voyons-nous pas qui ,

pleins d'un zèle éminent et pacifique , ren

versaient les impôts qui faisaient gémir

leurs malheureux sujets, arrêtaient leurs

vices dans leur source , étendaient l'empire

d'une sage liberté, afin que l'homme , en

tièrement libre, embrassant un genre de

vie conforme à sa fortune , à ses forces

physiques et morales, pût être évidemment

utile à la société et à la religion.

Nous les contemplerons, nonpas comme

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2 22 T1lIOMPHE

des despotes qui veulent désunir les princes

de la terre , porter le fer et le feu chez les

peuples, semer la zizanie parmi eux, afin

de faire couler à grands flots le sang au mi

lieu des guerres et des carnages; au con

traire , nous les admirerons véritablement

avec justice comme des pères tendres, bien

faiteurs de l'humanité , parcourant de leurs

regards attentifs l'univers chrétien , pour

lui prodiguer leurs soins paternels.

Nous les verrons chérir les monarques

qui font briller dans leurs augustes person

nes les plus magnifiques vertus, tantôt en

les comblant de leurs bienfaits et de leurs

grâces, en condescendant à leurs justes dé

sirs, tantôt en favorisant leurs entreprises

glorieuses, en portant l'amour de la paix

jusqu'à descendre du trône pontifical pour

venir dans leur cour , leur offrir leur hom

mage, traverser même les armées pour por

ter la paix entre les princes chez lesquels

régnait la discorde, et parleur présence '

arrêter à l'instant le sang, la guerre et le

carnage.

Si nous voyons un grand nombre de

pontifes romains reçus en .France par nos

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DE L'ÉGLISE. 223

illustres monarques , qui les accueillent au

milieu de tout l'éclat, de toute la pompe

royale, et leur donnent des asiles avec

tous les honneurs imaginables, de même

nous les voyons accueillir pompeusement

dans Rome, les princes infortunés, se dé

clarer leurs pères, leurs protecteurs intré

pides, en leur prodiguant leurs richesses et

leurs bienfaits , dignes de leur rang au

guste.

Dans des époques remarquables, les

sciences, chassées des autres nations, vin

rent se réfugier à Rome, y trouvèrent un

asile puissant sous les auspices de nos sou

verains pontifes; l'imprimerie y établit son

empire et y déploya toutes les richesses et

toutes la magnificence des langues antiques

et modernes : on vit naître aussi alors une

infinité de découvertes merveilleuses.

Tandis que l'ignorance régnait dans

l'univers, on voyait dans cette cité célèbre

des grands hommes qui, à la laveur des

princes de l'Eglise , répandaient leurs lu

mières dans toutes les parties du monde.

Les beaux-arts y ont toujours fixé leur

plus magnifique empire : la musique, la

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2 24 TRIOMPHE

peinture, l'architecture, la poésie y ont dé

posé des monumens qui feront l'admiration

de tous les peuples. Un grand nombre d'é-

tablissemens de bienfaisance, non-seule

ment établis dans son sein , mais encore ré

pandus par toute la terre, par leur bénigne

influence, ainsi que les temples majestueux

consacrés à la Divinité , sont les monumens

magnifiques qui rappelleront éternellement

les combats , les victoires , les lauriers et les

triomphes des souverains pontifse.

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DE L'ÉGLISE. 225

CHAPITRE 11.

Extinction de certains ordres par les chefs de l'Eglise.

La beaute , l'éclat, la grandeur de notre

auguste et sublime religion, se conservera

toujours au milieu des tempêtes et des ora

ges, en renversant les erreurs qui peuvent

secrètement s'opposer à ses principes ma

gnifiques et inébranlables. Ainsi nos pon

tifes romains , augustes représentans de Jé

sus-Christ, destinés à veiller au champ du

père de famille, dont ils sont à la tête, ont

conservé la pureté de sa magnificence cé

leste , en renversant avec force et courage

les digues qui pouvaient s'opposer aux pro

grès du véritable Evangile : c'est ce qu'ils

ont fait dans des époques remarquables ,

en éteignant le corps célèbre des Jésuites,

i5

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aaC TRIOMPHE

dont une partie était imbue d'erreurs per

nicieuses.

Clément XIV, ou Ganganelli, naquit,

le 3i décembre 1705, d'une famille noble:

de bonne heure les lumières de son génie

le firent admirer : il fit des progrès rapides

dans ses études, dans les sciences les plus

abstraites. Benoît XIV, charmé de ses bon

nes qualités et de ses grands talens, le fit

élever à la dignité de consulteur d'office.

Clément XIII le revêtit de la pourpre ro

maine; les Jésuites, venant d'être chassés

du Portugal , de l'Espagne , de Naples, par

Clément XIII, on demanda, après la mort

de ce pontife , l'extinction de ce corps cé

lèbre en France à Clément XIV, son suc-

seur, qui voulut peser cette affaire au poids

du sanctuaire.

« Je suis , dit-il , le père des fidèles , et

» particulièrement des religieux: pour,sup-

» primer un tel ordre puissant et illustre , il

» faut des motifs qui me justifient aux yeux

» de Dieu et de la postérité. » Il fit des recher

ches immenses, pendant très-long-temps,

dans les écrits et les archives qui pou

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DE L'EGLISE. 227

vaient lui donner de justes renseignemens

sur cette fameuse société (1).

Des réclamations s'élevèrent de toute

part; des lettres anonymes , des e'crits pu

blics, et même des menaces, ne purent

point ébranler le grand pontife, qui fit

éclater contre eux, avec un courage he

roïque, son bref d'extinction. La discipline

de l'Eglise, la réforme des abus, l'ordre po

litique , et la tranquilité de différens états

demandaient cette grande catastrophe.

Clément XIV était autant bon souverain

pontife que sage, et profond politique. Le si

lence était un de ses grands principes ; sa

tactique était de ne se fier à personne: il

avait raison, car tôt ou tard on est trahi. Il

était très-aimable, gai et tolérant, traitant,

avec une fraternité touchante , les Catholi

ques et les hérétiques; il avait coutume de

dire, pour maintenir la foi : « N'oublions

» pas la charité, s'il ne nous est pas permis

» de tolérer le crime, il nous est défendu

» de haïr ceux qui y sont tombés. »

(i) On sait qu'une partie des Jésuites n'avait pas les seuti-

mens de tout le corpscorrouipu , comme par exemple Ricci et

et tant d'autres.

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2ïR TRIOMPHE

Il vivait sans luxe au milieu d'une grande

et magnifique simplicité évangélique, que

quelques Romains, partisans du faste et de

la magnificence , osèrent lui reprocher in

justement. Les Anglicans ayant élevé une

statue en son honneur, il s'écria : « Plut à

» Dieu qu'ils fissent pour la religion ce qu'ils

» font pour moi. » Ce qui prouve incontes

tablement qu'il était rempli de zèle pour la

gloire de Dieu.

Ce grand souverain pontife fit des éta-

blissemens très-utiles; c'est à lui qu'on est

redevable du musée Clémentin, où se dé

posent les monumens de l'antiquité. Il mé

rita d'être regardé comme un homme de

lettres, comme un bon prince et un sage

pontife: il avait fait inscrire les noms des plus

célèbres écrivains de ses états, et si la mort

n'eût pas empêché l'exécution de ses nobles

projets , il aurait récompensé ceux dont les

chefs-d'œuvre avaient pour objet la reli

gion et la patrie. Il fit quelques ouvrages ,

où l'on voit briller ses grands talens et son

génie.

Paul V, nommé Camille Borgèze, fut d'a

bord clerc de la chambre apostolique, en

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DE L'ÉGLISE. 229

suite nonce en Espagne sous Clément VIII,

qui lui donna le pourpre : il monta sur la

chaire de saint Pierre après Léon XI. Use

forma un parti contre lui, il eut recours à

Henri IV, roi de France , qui eut tout l'hon

neur de cet accommodement glorieux.

Ce bon souverain pontife accorda le ré

tablissement des corps religieux; mais il ne

voulut jamais consentir avec un courage

héroïque à rétablir l'ordre des Jésuites : les

Vénitiens promirent d'envoyer un ambassa

deur à Rome, pour remercier Sa Sainteté,

qui chercha à terminer un autre différend

long-temps agité dans les congrégations de

auxiliis ; elle leur fit annoncer qu'elle fai

sait défense aux parties belligérantes de se

censurer mutuellement.

Quelques autels ont avancé que Paul V

avait dressé, contre la doctrine de Molina ,

une bulle à laquelle il n'a manqué que d'ê

tre promulguée.

Il tâcha d'embellir Rome, et d'y rassem

bler les plus beaux ouvrages de peinture et

de sculpture : cette superbe capitale du

monde chrétien , doit à son z,èle les plus

belles fontaines , surtout celle qui fait jaillir

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î3o TRIOMPHE

l'eau d'un vase antique tiré des thermes de

Vespasien ; et celle qu'on appelle VAqua

pa-ola , ancien ouvrage d'Auguste , que ce

pontife rétablit; à l'exemple de Sixte-Quint,

il y fit conduire l'eau par un aquéduc de

trente-cinq mille pas.

Il fit mettre la dernière main au frontis

pice de Saint-Pierre , ainsi qu'au magnifi

que palais de Monte - Cavallo. Il releva

tous les monumens délabrés, pour les faire

servira la gloire du christianisme. Plusieurs

ambassadeurs ne craignirent point 'd'aban

donner les délices de leur cour, pour venir

admirer la gloire véritable de ce grand sou

verain de l'Eglise.

Il n'oublia jamais les devoirs sacrés que

lui imposait la dignité auguste dont la Pro

vidence l'avait honoré; n'envoya des prê

tres et des êvêquesau roi du Japon , à celui

de Congo et à quelques autres princes des

Indes. Il confirma en France l'ordre de l'O

ratoire , ainsi que la congrégation des Ur-

sulines , dépendante de l'ordre de la Cha

rité. Il ne laissa couler un seul jour, pen

dant son pontificat, sans célébrer les saints

mystères: il édifia l'univers chrétien par

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de l'église. a31

sa piété, ses talens et ses vastes lumières, et

contribua pleinement au triomphe de l'E

glise.

Le célèbre Benoît XIV, qui a fait plu

sieurs ouvrages, qui a fait des merveilles

dans l'Eglise, et y créa des établissemens

glorieux à la religion , ce souverain pon

tife, dis-je , reforma les Jésuites en Por

tugal.

Un autre excellent pape, dont le nom glo

rieux a échappé à ma mémoire , détruisit

l'ordre des Jésuitesses, qui se plongeaient

dans la dépravation , par suite de leur mau

vais système religieux introduit dans leur

institut. ' '

Nous voyons évidemment que nos véné

rables pontifes, brûlant de zèle pour la

gloire de la religion, en cherchant à en,

étendre le doux empire dans l'univers , n'ou

blient jamais de retrancher, de foudroyer

les membres vicieux qui peuvent corrom

pre la société sainte , afin de contribuer

ainsi solidement au triomphe de l'Eglise.

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a3i TRIOMPHE

CHAPITRE III.

Tolérance des Pontifes.

C'est toujours avec le même ravissement

que l'on comtemple dans la personne au

guste des chefs de l'Eglise, leur zèle pacifi

que et tolérant , leur amour pour les mal

heureux, et leur sollicitude admirable qui

les porte sans cesse à veiller au salut des

hommes que le ciel a confié à leur soins.

Pie VII, né à Césène, de l'illustre famille

de Chiara-Monte , élevé par ses sublimes

vertus et par ses vastes talens à la dignité

d'évêque d'Imola, monta sur le trône pon

tifical dans un moment de trouble, et de

désordre de Denise, où il fut élu souverain

pontife.

Il vint à Rome , malgré les périls qu'il y

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de l'égl1se. 2 33

avait d'y fixer son séjour, au milieu des Na

politains qui l'occupaient. Son premier soin

fut de rétablir l'ordre , de calmer la tem

pête, et d1y faire régner la paix et la con

corde.

On n'ignore pas que ce souverain pon

tife fut rempli d'une sincère vénération

pour les libertés de l'Eglise gallicane; il fit

lin concordat signé par la majorité des

évêques français, pour unir l'Eglise de

France à l'Eglise Romaine. C'est un véri

table chef-d'œuvre de sagesse, digne de

l'admiration des savans de tous les siècles.

Ce grand pontife avait fait tous ses ef

forts pour faire fleurir l'Eglise et l'enrichir

des trésors de ses vertus et de ses magni

fiques exemples. On le vit traîné dans toute

la France couvert de chaînes, recueillant

partoutles bénédictions du peuple qui volait

en foule sur son passage, et s'empressait

de recevoir avec allégresse ses bénédictions

et ses grâces. (1)

(1) J'ai eu le bonheur de contempler , à Bézier, sa Sainteté

pendant un moment assez favorable pour recevoir avec une

pleine satisfaction toute l'abondance de ses bénédictions. On

prétend que l'illustre cardinal Fech, qui jouit d'une brillante

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2 34 TRIOMPHE

Ce pontife vénérable aimait la tolérance,

il donna l'hospitalité dans ses états à tous

les individus de toutes les communions qui

cherchaient un azile, et y accueillit avec

bienveillance tous les proscrits de tous les

royaumes, même la famille de celui qui

l'avait persécuté; tant était grande sa cha

rité héroïque : il finit ses jours, chéri de

son peuple, comme un père tendre, comme

un grand homme admiré de tout l'univers.

Léon XII, appellè Annibal della Genga,

monta sur le trône pontifical eu 1823. Il

s'était déjà distingué dans ses hautes fonc

tions : ayant été nonce auprès de l'empe

reur des français, auprès du roi de Bavière,

et de Louis XVIII, après la première res

tauration. Dès le moment qu'il fut assis sur

la chaire de saint Pierre , il redoubla de

ferveur et donna des exem ples éclatans de

douceur , de charité et de sagesse à tout

l'univers chrétien. En 1825, il fit publier

le Jubilé à Rome, et dans tous le monde

réputation en France, soit par son bon esprit, soit par son

zèle , soit en défendant l'Église toujours au péril ce de sa vie ,

on prétend, dis je, que c'est lui-même qui fit donner la liberté

à Pie VII.

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de l'égl1se. 7 35

chrétien ; la bulle qu'il écrivit à ce sujet

est un chef-d'œuvre de son génie pacifique,

et de ses vertus apostoliques. Nous avons

vu avec édification qu'il a respecté nos li

bertés gallicanes, (t)

Il s'est toujours montré l'ami des malheu

reux; il aimait les sciences et les beaux-

arts : il enrichit le Musée des antiques, de

plusieurs statues de la plus grande beauté

et du plus grand intérêt, il augmenta la

bibliothèque du Vatican et l'enrichit de

magnifiques ouvrages capables de con

tribuer à la gloire de la religion et des

lettres.

Paul II , noble Vénitien, neveu du pape

Eugène , qui l'honnora du chapeau de car

dinal, en 1440i monta sur la chaire de

saint Pierre après Pie II; il accorda aux

cardinaux le privilége de porter l'habit de

pourpre, le bonnet de soie rouge et une

(1) LéoD XII était lie avec l'illustre baron de Damas , gou

verneur de S. A. R. Mgr. le duc de Bordeaux ; étant ministje

des affaires étrangères, Sa Sainteté lui fit don d'un reliquaire

magnifique, que j'ai tu, pompeusement placé dans sa cha

pelle, pendant long-temps, lorsque j'avais l'honneur d'y être

aumônier.

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2 36 TRIOMPHE

mitre de soie semblable à celle que les sou

verains pontifes avaient seuls droit de

porter.

Les seigneurs d'Italie divisés entre eux ,

exerçaient des vexations horribles : Paul II,

réussit à les appaiser et à les réunir par le

moyen de la tolérance. On a de ce grand

souverain pontife des lettres et des ordon

nances , on lui attribue un traité des règles

de la chancellerie. Si on lui reproche un

peu de luxe , il faut néanmoins que ses en

nemis avouent qu'il fit de grandes choses

utiles à l'Eglise.

Il abolit la simonie, il donna rarement

des indulgences; il abrogea les grâces ex

pectatives, il défendit d'aliéner les biens

ecclésiastiques , et même de les affermer à

la même personne plus de trois ans. Il pour

vut libéralement aux besoins des pauvres ,

et à la dotation des filles indigentes. C'est

par ces beaux exemples de vertu qu'il fit

fleurir la religion.

Saint- Victor I", Africain de nation, oc

cupa la chaire de saint Pierre, après saint

Eléuter. Son zèle pour la gloire de la reli

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DE L'ÉGLISE. 337

gion brilla toujours dans son auguste per

sonne. Il excommunia Thédore de Bysance,

qui niait la divinité de Jésus-Christ : cette

ancienne hérésie désola long-temps l'Eglise

chrétienne.

Il fixa te jour de Pâques au quatorzième

jour de la lune de mars, ce qu'on observa

dans toutes les Eglises , à l'exception de

celles de l'Asie , qu'il menaça des foudres

de sa puissance légitime; mais plein de dou

ceur et d'aménité, il donna l'exemple d'une

belle tolérance de peur d'égarer un trou

peau si antique et si digne de mémoire.

Adrien VI, fils d'un tisserand nommé

Florent, parvint par son esprit et sa science

à être professeur de théologie, doyen de

l'Eglise , et vice-chancelier de Louvain.

Dans la suite il devint précepteur de l'ar

chiduc Charles, et fut élevé à cet emploi

éminent par l'empereur Maximien Ier; Fer

dinand, roi d'Espagne, auprès duquel il

avait été ambassadeur, lui donna l'évéché

de Tortose en Catalogne : après la mort du

roi, il partagea la régence d'Espagne avec

le cardinal Ximénès , il devint même vice

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238 TRIOMPHE

roi de Charles Vj enfin quelque temps

après , en i522 , il fut élu pape après

Léon X , qui l'avait fait cardinal.

Il réforma le clerge et la cour romaine ;

il retrancha beaucoup d'offices et d'em

plois inutiles; il réprima les abus qui s'é

taient glissés dans la collation des bénéfices,

dans les réserves et les dispensations des

indulgences. Il supprima les dépenses super-

perflues , il vécut aussi frugalement qu'un

religieux.

Dans l'instruction qu'il donna à son

Nonce, envoyé à la Diète de Nuremberg as

semblée, pour pacifier les différends, excités

par Luther, on voit combien il désirait une

réforme générale dans l'Eglise : « Avouez

dit-il, que Dieu à permis cette persécution

à cause des péchés des hommes, etc.. » Il

avait de grandes vertus, il était grand éco

nome, et ennemi du luxe : il ne chercha

point à s'enrichir ni a combler de richesses

ses parens, il ne pensa qu'à la gloire de

l'Eglise.

Il faut donc avouer que nos pontifes ro

mains remplissent le monde de leur vertus

héroïques , de leur esprit pacifique et tolé

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DE l'ÉGLISF. 23p

rend, et de leur genie sublime, et qu'ils

ramènent ainsi les hommes à la religion ,

en contribuant non-seulement à augmen

ter la gloire des lettres , mais a multiplier

les triomphes de l'Eglise.

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24û TRIOMPHE

CHAPITRE IV.

Héroïsme de vertu et de zèle.

C'est sur le trône pontifical que l'on peut

admirer des héroïsmes de vertus portés à

son dernier période , et qui laissent le

spectateur dans l'étonnement , dans l'en

thousiasme.

Grégoire-le-Grand , docteur de l'Eglise ,

descendant du pape Félix III , ne dut le

beau nom de Grand qu'à son rare mérite.

Il était Romain de naissance et fils d'une

famille très-illustre par son ancienne no

blesse; son père Gordien lui conservait le

rang de sénateur. Il eut pour mère sainte

Silvie : sainte Emilienne et sainte Tharsille

furent ses tantes. Il joignait à un caractère

heureux de hautes vertuset un grand génie.

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DE L'ÉGLISE. 24l

De sénateur qu'il était , il fut fait préfet

de Rome par l'empereur Justin II, et bien

loin d'oublier Dieu dans cette haute di

gnité, il remplissait avec noblesse tous les

devoirs d'un véritable chrétien. Après la

mort de son père , étant dans une pleine li

berté d'agir , voyant que le monde ne lui

offrait de toute part qu'une coupe empoi

sonnée de plaisir, au milieu des périls de

faire un triste naufrage, il pensa à Dieu

plus sérieusement , et voulut s'y attacher

d'une manière particulière , surtout lorsque

sa mère Sylvie fut vivre en veuve chrétienne

dans une maison religieuse nommée Celle-

Neuve.

Il fit bâtir six monastères en Sicile , et les

dota; il en fonda.un autre à Rome dans la

maison paternelle où il dédia l'Eglise de

Saint-André; il se démit de sa charge, ven

dit tous ses biens immenses, en donna le

prix aux pauvres , et se retira dans un mo

nastère de Saint-André sous la discipline

d'un religieux , nommé Valence , qu'il avait

fait créer abbé.

Les jeûnes, les veilles et la lecture conti

nuelle des livres saints , lui affaiblirent la

16

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$4^ TRIOMPHE

santé ; il n'avait d'autre jouissance sur la

terre que Dieu. Pelage II , étonné des ses

vertus héroïques , de sa profonde science

et de son génie, l'arracha du sein de la so

litude et le fit diacre de l'Eglise de Rome;

il l'envoya nonce du Saint-Siége à Constau-

tinople auprès de l'empereur Tibère. Il vi

vait à la cour comme un ange; c'est sur ce

théâtre brillant et périlleux qu'il fit briller

l'éclat de la piété la plus pure des anacho

rètes qui vivent au milieu des forêts dans le

désert.

C'est au sein de la pompe des richesses et

des grandeurs terrestres qu'il composa son

excellent ouvrage des Morales de Job, qu'il

acheva dans la suite à Rome. Il se montra

une des plus solides colonnes de l'Eglise ,

par les savantes conférences qu'il fit en pré

sence de l'empereur avec Eutyque, patriar

che de Constantinople. Il Convertit cet hé

résiarque qui prétendait que les corps après

la résurection seraient insensibles comme

les esprits. Les ouvrages de cet hérésiarque

furent livrés aux flammes avec une pompe

triomphante.

Quelques temps après il vint à la capitale

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DE L'ÉGLISE. 243

du monde chretien , couvert de gloire et

de lauriers, y ayant passé quelque temps

en qualité de secrétaire du pape; il se retira

dans la solitude de son premier monastère ,

où il fit fleurir la discipline dans tout son

éclat. La cour de Rome, convaincue du gé

nie vraiment religieux de Grégoire, avait

recours à lui dans les grandes affaires de

l'Eglise , et se furent ses lumières qui éclai

rèrent les évêques d'Istrie pour condamner

les trois chapitres , conformément au cin

quième concile général, ainsi que pour les

réunir à l'Eglise.

Il était encore ahbé de Saint-André lors

que malgré lui il fut élu souverain pontife

par le clergé , le sénat et le peuple, après

la mort de Pélage II. Attaqué de la peste qui

eut lieu à l'occasion de l'inondation du Ti

bre , il fit tous ses efforts pour se soustraire

aux désirs des Romains; il écrivit même à

l'empereur Maurice pour révoquer sa pro

motion ï mais, malgré ses instances récu-

satoires, l'empereur approuva l'élection de

Grégoire , qui , l'ayant appris , fut se cacher

dans une forêt. Mais il fut pris et conduit à

Rome pour être sacré souverain pontife.

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244 TRIOMPHE

Sur le trône de saint Pierre son zèle re

doubla. On voyait dans son auguste per

sonne le portrait d'un véritable apôtre; les

qualités de son esprit et de son bon cœur

lui conciliaient tous les ecclésiastiques, qu'il

chérissait et traitait comme ses frères; mais

autant sa bonté éclatait envers les bons , au

tant sa fermeté se manifestait à l'égard des

méchans. Partout il envoyait des ouvriers

évangéliques pour agrandir la vigne ché

rie du Seigneur, renverser le paganisme,

éteindre les chismes et combattre les hé

résies.

Son zèle brilla aussi dans la réforme d'une

multitude d'abus et dans la pureté de la dis

cipline ecclésiastique ; les malheureux , l'or

phelin et la veuve étaient l'objet précieux

de ses soins , quoiqu'il remplit toujours par

lui-même toutes les fonctions du ministère

papal avec un héroïsme qui enchantait.

Il montra un respect étonnant pour l'em

pereur; au lieu de se regarder comme son

égal , il se regardait, au contraire, comme

son sujet. A l'instance de plusieurs person

nages il se retira à la campagne pour réta

blir les forces de sa santé , et ce fut alors

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DE LÉGLISE. 245

qu'il composa les dialogues de la vie et des

miracles des saints de l'Italie. On y voit une

aimable négligence régner au milieu d'une

r.imable simplicité; c'est un de ses ouvrages

les moins travaillés. Sa science était si vaste

et si profonde, qu'il comptait pour penses

morales sur Job, ainsi que son Pastoral au

quel il avait donné un soin particulier.

Il éteignit la puissance qu'allait prendre

le patriarche de Constantinople , en se nom

mant évêque universel ; il fit sentir qu'un

titre semblable serait par lui-même une vé

ritable usurpation qui renverserait les droits

réels du prince des apôtres; et afin que ja

mais personne n'eût droit de douter que ce

saint combat fût le fruit de l'ambition, il

prit pour titre : Serviteur des serviteurs de

Jésus-Christ.

C'est avec juste raison qu'il mérita le

titre d'apôtre d'Angleterre, quoique la

Grande - Bretagne eût embrassé le chris

tianisme long-temps avant son pontificat..

Les Anglais et les Saxons , peuples ido

lâtres sortis de la Germanie , avaient con

quis la partie de ce pays qu'on appelle

Angleterre , et avaient chassé les Bretons

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2^6 TRIOMPHE

dans l'extrémité de Pile : le paganisme y

était entré. Saint Grégoire y aurait été lui-

même pour les évangéljser en personne s'il

n'avait été retenu à Rome par de grands

personnages; mais, ne pouvant s'y rendre

lui-même, il y envoya des ouvriers évan-

géliques.

Il écrivit aux rois de France, qui de tout

temps ont fait du bien aux souverains pon

tifes, et en particulier à Thierry de Bour

gogne , à Théoderet d'Austrasie , et à leur

aïeule la reine Brunchaut , aux évêques

d'Arles, de Vienne et d'Autun , au gouver

nement de Provence, pour les engagera

favoriser cette conquête spirituelle de l'An

gleterre et à y envoyer des secours et des

missionnaires. Ce fut ainsi, par ses soins,

qu'il fit fleurir bientôt la chrétienté dans

ces pays comme dans les plus beaux en

droits de l'Eglise.

Outre qu'il y détruisit le paganisme , il y

convertit un grand nombre de juifs en n'em

ployant que la douceur et la tolérance, dé

fendant expressement qu'on ne les fît ja

mais baptiser par force. La gloire dont il

se couvrit en renversant les erreurs des

^,

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• DE L'ÉGLISE. 2 47

Nçstoriensi des Manichéens eldes Agnoëtes,

egala celle qu'il avait acquis eu pulvérisant

l'hérésie des Ariens.

En France il employa tous ses soins pour

exterminer la simonie qui déshonorait cette

belle partie de la vigne chérie du Seigneur;

il y rétablit la discipline de l'Eglise et la

pureté des mœurs dont il donnait lui-même

l'exemple , comme saint Paul , pouvant dire

comme ce grand apôtre : imitatores mei

estote, .

Nous avons de cet illustre souverain pon

tife un recueil de ses lettres au nombre de

huit cents , que l on regarde comme ce

qu'il y avait de meilleur dans son siècle. Il

avait tant de respect pour les princes, qu'il

les regardait comme les dépositaires de la

puissance céleste ; il portait à cet égard sa .

vénération à un si' haut degrès, qu'il res

pecta toujours, dans la personne du tyran

Phocas , le caractère de souverain.

Voilà un grand homme dont la piété, le

zèle, le courage, la douceur, la charité, la

vertu la plus pure et la plus sublime , ainsi

que le génie le plus solide , sont capa

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248 TRIOMPHE

bles de confondre les ennemis de la re

ligion , en nous montrant dans son auguste

personne tout l'éclat de sa gloire triom

phante.

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DE L'ÉGLISE. 2 49

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CHAPITRE V.

Héroïsme de courage, de patience, de charité et de religion.

Le sage sera toujours contraint d'admirer

la grandeur d'ame, l'héroïsme de toutes les

espèces, dans ces anges tutélaires de l'E

glise.

Saint Pierre, premier pape, mérita par

sa foi , son zèle et son courage , de devenir

le prince des Apôtres et d'être choisi par

notre divin Sauveurpour fonder son Eglise,

contre laquelle les portes de l'enfer ne pré

vaudront jamais. Tu es Petrus, etc.

Il fut toujours fidèle à son divin Maître,

et si, pendant son jugement, il eut la fai

blesse de le renier, il répara un instant après

sa faute par un torrent de larmes. Il brava

tous les périls et la mort pour annoncer

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230 TRIOMPHE

l'Evangile et étendre l'empire de Jésus-

Christ.

Dans son premier discours, il convertit

trois mille ames. 11 souffrit la persécution ;

il fut plongé dans les fers par les tyrans;

mais, se confiant en Dieu, il s'arracha du

milieu de l'oppression par son éloquence et

par son courage religieux.

Il prêcha dans plusieurs royaumes de

l'Asie, et y fonda l'église d'Antioche; de là

il se rendit à Rome pour combattre l'idolâ

trie.

Il renversa ses autels, ses temples, et

éleva sur leurs ruines les fondemens de l'E

glise éternelle de Jésus-Christ.

Il confondit l'impiété de Simon le Magi

cien par des prodiges éclalans en présence

de tout Israël.

Léon IV, Romain de naissance, monta

sur le trône pontifical après Sergius II. Il

illustra le pontificat par ses vertus et son

courage héroïque. Les Sarrasins étaient aux

portes de Rome , prêts à s'emparer de la ci

tée sainte : les empereurs d'Orient et d'Oc

cident l'avaient abandonnée. Léon, plus

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DEL ÉGLISE. 25 1

grand qu'eux, prit dans cette grande affaire

l'autorité d'un souverain , d'un père qui dé

fend ses enfans chéris.

Il fit réparer des murs, élever des tours

et tendre des chaînes sur le Tibre ; il équippa

l'armée à ses dépens; il encouragea les ha-

bitans de Naples et de Gayette à venir dé

fendre les côtes et le port d'Ostie. Il visitait

tous les postes, il prit les Sarrasins à leur

descente, non pas en équipage de guerrier,

mais comme un bon pontife qui exhortait

un peuple chrétien, comme un monarque

qui veille à la sûreté de ses sujets.

Il était Romain de naissance. «Le courage

des premiers âges , dit l'auteur de YHistoire

générale, revivait en lui dans un temps de

lâcheté et de corruption, tel qu'un des plus

beaux monumens de l'ancienne Kome, qu'on

trouve quelquefois dans les ruines de la

nouvelle. »

Une partie des ennemis fut jetée dans les

fers. Le pape rendit sa victoire utile en fai

sant travailler aux fortifications de Rome et

à ses embellissemens les mains qui devaient

la détruire. Il fit bâtir à quelques milles de

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ùbl TRIOMPHE

Rome une ville à laquelle il donna son nom.

Léopolis (1).

Félix Ier, Romain de naissance, monta

sur la chaire de saint Pierre après saint De

nis. Il combattit courageusement l'hérésie

de Paul de Samosate, évêque d'Antioche,

qui attaquait le mystère de la Trinité et de

l'incarnation. Il refusa la communion à cet

hérésiarque , qui fut condamné dans un

concile d'Antioche. Il se dévoua au sou

lagement des martyrs persécutés par l'em

pereur Aurélien , dans l'Italie et dans

les Gaules. Il gouverna avec sagesse l'E

glise pendant quelques années, et donna

l'exemple d'un courage héroïque au milieu

des angoisses qu'il essuya dans les fers.

Sixte III succéda au pape Célestin sous

l'empire de Théodose-le-Jeune et de Va-

lentinien III. L'odeur de ses vertus, l'éclat

des lumières brillantes de son esprit furent

l'objet des réjouissances du peuple romain

en le voyant sur la chaire de saint Pierre.

Depuis long-temps il avait attaqué les

(1) Cinq jour» après sa mort, Benoît III fut élu Pape, ce

qui détruit l'histoire de la papesse Jeanne, qui est placé entre

ces d.cux pontifes.

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DE LÉGLTSE. 2 53

hérésies des Pélagiens et des Nestoriens ;

niais alors il les renversa avec un brillant

succès. Il triompha de la calomnie de ces

novateurs, qui avaient répandu le faux bruit

que Sa Sainteté était le protecteftr de leurs

sentimens.

La calomnie, bien loin de lui nuire en atta

quant sa pureté, donna un plns grand éclat

à Sa Sainteté , de telle manière que l'empe

reur Valentinien assembla un concile pour

examiner la chose : on découvrit l'impudent

caliomnateur, qui fut exilé et dépouillé de

ses biens par l'autorité impériale.

On vit un spectacle digne des anges à

la mort de ce malheurenx. Saint Sixte, plein

d'une charité héroïque, ensevelit de ses

mains ce calomniateur, nommé Bassus, qui

mourut trois mois après son jugement et sa

condamnation. Rome retentit aussitôt du

bruit de cette merveille, et ce souverain

pontife redevint aussi éclatant que l'or qui

sort du creuset.

Il travailla avec un zèle étonnant à la

gloire de Rome et de toute l'Eglise ; il fit

bâtir plusieurs temples et en rétablit quel

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1 54 TRIOMPHE

ques-uns, entre autres la basilique de Li-

bériuS, appelée Sainte-Marie-Majeure. Il

poursuivit les Pélagiens jusque dans ses re-

tranchemens; il découvrit un grand nom

bre de Pëlagiens cachés , qu'il ramena

dans le sein de l'Eglise, qu'il gouverna

huit ans avec une gloire magnifique et

pompeuse.

La jeunesse de Simplice, natif de Tibur

dans l'ancien Latium , fut embelli par ses

vertus, qui lui méritèrent de devenir mem

bre du clergé de Rome. Son mérite éminen t

le fit élire souverain pontife par une voix

unanime , après la mort de saint Hilaire. Au

commencement de son pontificat, il fit tous

ses efforts pour arrêter les progrès de l'hé

résie des Macédoniens, que l'empereur An-

thèue avait amenés à Rome, en les hono

rant de sa protection.

Ce zèle fut couronné d'un heureux suc

cès. Quatre empereurs depuis Anthène, dé

trônés successivement en Occident en moins

de trois ans, donnèrent lieux aux barbares,

conduits par Odoacre, d'envahir le reste de

l'empire en Italie, après les démembremens

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de l'égl1se. 255

qu'en avaient déjà fait les Français, les Bour

guignons, les Goths et les Vandales, qui

s'étaient rendus les maîtres des Gaules, de

l'Espagne et de l'Afrique.

Au milieu de cette tempête orageuse, qui

agitait le vaisseau de l'Eglise, on vit dans

l'intrépide Simplice un zèle éclairé qui ré

sista à tout, et qui porta la lumière de l'Evan

gile dans les quatre parties du monde, dans

un siècle, où aucun prince n'était catho

lique.

Zénon et le tyran Bazilique étaient les

protecteurs des Ariens. Odoacre , qui était

maître de l'Italie, après avoir renversé l'em

pire d'Occident , était Arien , ainsi que les

rois des Goths, des Bourguignons et des

Vandales, qui faisaient gémir l'Eglise sous

le poids de leur tyrannie.

Il arrêta une grande hérésie dans l'Eglise

d'Orient, où près de cinq cents prélats avaient

fait naufrage. Ses soins s'étendirent aussi sur

les Eglises d'Antioche et d'Alexandrie, dont

le sein était déchiré par des audacieux no

vateurs. Pendant son règne, qui dura quinze

ans, il composa difFérens règlemens utiles

à l'Eglise et à la gloire de la religion.

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256 TRIOMPHE

L'Eglise regardera toujours ces grands

personnages, dont nous venons d'admirer

l'héroïme de courage , de patience, de cha^-

rité et de religion comme des monumens

glorieux de son triomphe.

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de l'égl1se. 2 5y

CHAPITRE VI.

Tableau de plusieurs Martyrs Pontifes.

Qu'il, est attendrissant, le spectable de ces

pontifes qui non-seulement animaient les

fidèles à aller cueillir la palme du martyre,

mais qui versaient eux-même leur sang

d'une manière héroïque ! Oh ! qu'il est beau,

qu'il est consolant pour la religion! et le

chrétien sincère avoûra que c'est un des

plus beaux triomphes pour l'Eglise.

Saint Télesphore , sorti de la Grèce, tint

avec un grand avantage les reines de l'E

glise romaine pendant qu'elle fut persécu

tée; il éprouva lui-même le fléau de la per

sécution , ne triompha de la fureur des

tyrans, que parle martyre ; il futle septième

pontife , après saint Pierre. Il régna onze

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2 58 TRIOMPHE

ans après Sixte premier. Quelques-uns lui

attribuent l'institution du carême.

Anterre, grec de nation, fut exilé en Sar-

daigne sous, l'empire de Maximien; après

la mort du pape Pontien, il occupa la chaire

de sant Pierre : ce ne fut pas certainement

par les appas des richesses qu'il accepta

l'honneur de la thiare î moins encore par

ambition, mais pour y cueillir la palme du

martyre; cette première dignité de l'E

glise en était un sûr garant : en effet il fut

persécuté et couronné de la palme du mar

tyre , la sixième semaine de son glorieux

pontificat.

Sixte premier , vécut dans le onzième

siècle; dans le temps qu'il prit les rênes de

la Sainte Eglise, le trône de saint Pierre

• n'offrait à ses princes que des douleurs, des

guerres, des supplices ou la mort; et ce

ne fut qu'en offrant au ciel le sacrifice de

ses plaisirs , que Sixte accepta cette auguste

dignité. Toute sa vie ne fut qu'un tableau

magnifique de vertus et de grâces; la fin

répondit merveilleusement à son heureux

commencement, et, pour récompense de

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DE L'ÉGLISE, 2 5()

ses glorieux travaux, le ciel lui donna la

palme du martyre.

Cayus se conduisit en grand pontife,

dans le gouvernement de l'Eglise, que Dieu

lui confia, sa conduite fut si sage, si édi

fiante, son zèle si admirable , qu'il obtint

la couronne du martyre. C'est sous ce pon

tificat qu'eut lieu le martyre de la légion

Thébaine, qui fait tant d'honneur à la re

ligion. L'empereur voulant contraindre ces

braves à égorger leurs coynpagnons d'ar

mes , parce qu'ils étaient chretiens ; alors

pleins d'un noble sentiment; ils préférèrent

la mort plutôt que d'obéir à un commen-

dement si atroce.

Félix premier fut élu pape , lorsque Paul

de Saraosate déchirait l'Eglise, par une hé

résie, qui détruisait la divinité de Jésus-

Christ. Cet hérésiarque fut chassé honteu

sement de l'évéché d'Antioche, après avoir

été condamné dans plusieurs conciles. Pen

dant la persécution d'Aurélien, il n'oublia

rien pour préserver les fidèles de l'aposta

sie. Il combattit vaillament lui-même pour

la foi , et sortit victorieux du milieu de ses

souffrances. Les malheurs et les peines qu'il

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260 TRIOMPHE

essuya, lui firent donner le nom glorieux

de martyr.

Martin I" , élu pape après Théodore,

mérita la chaire de saint Pierre, par ses ver

tus et ses talens; il tint à Home un nom

breux concile , dans lequel il condamna

l'hérésie des Monothélites , avec YEcthèse

de Héraclius et le Type de Constant II; ce

qui lui causa sa disgrâce , auprès de ce der

nier prince.

Il souffrit déjà autant de mauvais traite-

mens que notre divin Sauveur; on entre

prit de l'assassiner dans Rome : on l'arra-

cha du milieu de cette grande cité, pour

le conduire à Constantinople, où. on l'acca-

bla de toute sortes d'outrages, d'injures et

de calomnies. Il fut chargé de fers, et in

carcéré , étant toujours sur le point de

mourir.

Constant l'exila dans la Cherspnèze , où

ce bon souverain pontife, expira au milieu

des souffrances. On a eu l'audace de dire

que les papes de tout les temps ont fait du

mal; peut-on tenir un tel langage ? C'est

un blasphême. C'est aux papes qu'on a fait

dans tout les temps, toutes sortes d'injus

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DE L'ÉGLISE. 2ÔI

tices. Nous avons de ce bon pontife dix-

huit épitres dans la bibliothèque des Pères,

et dans l'édition des conciles de Labbe.

Zéphirin, romain de naissance, fut élu

pape après saint Victor I" ; il eut la dou

leur de voir son pontificat troublé, parla

cinquième persécution que Sévère ordonna,

et par des hérésies que ce saint pontife

combattit courageusement , comme par

exemple celle des Patripassiens : le chef de

ces hérétiques se convertit, et se soumit à la

condamnation prononcée par le pape, qui

pendant son pontificat, s'appliqua à main

tenir la pureté de la foi, et la discipline

dans le clergé, qui, de son temps, acquit une

splendeur toute nouvelle.

Un nommé Natalis , partisan de l'hérésie

de Théodote le Corroyeur , se convertit , fit

à sa sainteté l'aveu des erreurs qu'il profes

sait; il se jetla avec confiance dans ses bras

paternels; il en fut accueilli avec tous les

avantages imaginables que l'on pût désirer

de ce véritable père des fidèles, qui l'ad

mit à la communion de l'Eglise. Ce saint

pontife fut persécuté, et le martyre, cou

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2Ô2 TRIOMPHE

ronna ses travaux, ses souffrances, et ses

œuvres.

De tous les héros de la foi , qui ont fait

le plus d'honneur à la religion, ce sont

sans contredit, ceux qui ont versé leur sang

pour sa défense, pour sa gloire, et pour

son triomphe.

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DE l'église. 263

CHAPITRE VII.

Pontifes qui ont fait de glorieuses réformes.

C'est par la restauration que l'on peut

conserver l'éclat, la beauté, la grandeur,

la noblesse de la religion; c'est ce qu'ont eu

soin de faire, dans tous les siècles , les au

gustes princes des apôtres que le ciel avait

mis à la tête de l'empire doux et pacifique

de Jésus-Christ , sur la terre chrétienne.

Benoît XIII, né à Rome d'une famille il

lustre , fut de l'ordre des Dominicains de

Venise, ensuite cardinal en 1672, et après

avoir été orné dela pourpre romaine, il fut

fait évêque de Manfrédonie de Cézene,

et archevêque de Bénévent. On croit que

la Providence le conserva d'une manière

miraculeuse. Le 5 juin 1688 un tremble,^

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264 , T1UOMPUE

ment de terre ayant eu lieu , renversa une

partie de son palais archi-épiscopal ; un in

dividu, qui était à ses côtés, fut écrasé, mais

lui-même fut précipité de l'appartement du

second sur la voûte de la cave , où quelques

roseaux, miraculeusement croisés, le mi

rent à l'abri de tout mal. Au bout d'une

heure et demie on le tira des décombres ,

et le jour même, il prêcha le Saint-Sacre

ment à la main.

L'église de Bénévent fut rétablie et em

bellie par ses soins. Etant souverain pontife

il honora la chaire de saint Pierre par ses

sublimes vertus, il veilla sur les séminaires

et réforma avec exactitude son clergé. Il

assembla un concile à Rome, un au après

son élévation à la chaire de saint Pierre,

pour confirmer la bulle unignitus. La mé

moire de ce bon pontife est en honneur à

Rome qu'il édifia par ses exemples et sou

lagea par ses bienfaits.

Calixte II , Gui de Bourgogne , fils de

Guillaume , tête hardie , surnommé le

Grand , comte de Bourgogne , étant élu

archevêque de Vienne en 1o88 , dirigea

cette église avec beaucoup de succès pen

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de l'église. 265

dant trente ans environ. Après la mort de

Gélas II , il fut élu souverain pontife à Cluny

le 1er février mg; il ne fut pas redevable

de la papauté à son illustre naissance, étant

parent de l'empereur, des rois de France

et d'Angleterre, et d'Adelaïde de Savoie,

épouse de Louis-le-Gros ; mais il dut la sou

veraineté de l'Eglise à ses talens et à ses

vertus.

Il fut jugé capable d'apaiser les troubles

qui désolaient l'Eglise; en effet, il y établit

la paix la plus profonde avec l'empereur

Henri V , que l'anti-pape Grégoire VIII

avait couronné à Rome , après en avoir

chassé Gélas II. Les Simoniaques, les prê

tres concubinaires et tous ceux qui exi

geaient un salaire pour les sépultures et

pour les baptêmes , furent condamnés.

L'empereur restitua tous les domaines

confisqués sur l'Eglise depuis le commen

cement de la discorde ; les deux parties

contractantes se promirent mutuellement

une paix durable et sincère. Calixte ne s'at

tribua point la puissance temporelle, et,

dans cette circonstance remarquable , il

agit comme médiateur.

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'l66 TRIOMPHE

Il vint à Rome en 112o pour rétablir le

véritable siége pontifical; il y fut reçu en

pompe; ses bontés, son affabilité, lui ga

gnèrent tous les cœurs. Il tint un concile

général , qui est regardé comme le neu

vième écuménique , et le premier de La—

tran, où l'on remarque, parmi plusieurs

décrets , celui qui annulle les ordinations

de l'anti-pape Bourdin.

Son pontificat fut couvert de gloire; il

rétablit la paix dans l'Eglise et dans la ca

pitale du monde chrétien ; il renversa les

tours de Cercio-Frangipane, et des autres

petiis tyrans; il soumit quelques comtes qui

pillaient lesbiens de l'Eglise; il répara quel

ques monumens, et donna des aqueducs à

la ville de Rome; il enrichit l'église de Saint-

Pierre en empêchant des hommes puis-

sans de voler les offrandes qui lui étaient

destinées.

Nous avons de cet auguste chef de l'E

glise plusieurs bulles, sermons, imprimés

dans le Miscellanea de Baluze. Le Specile—

gium de d'Àchéry, la Collection des Conci

les de Labbe , la Florin censis Bibliotheca

de J. du Bosco, la Bibliothèque des Pères,

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DE L'ÉGLISE. 267

Vltalia sacra d'Ughelli , le Bullarium cassi-

nense de Margarini , la Marca hispanica ,

et dans le de Re diplomatica de Mabillon.

Deux lettres de Calixte I1 à Othon , évêque

de Bamberg, ont été imprimées à Ingoles-

tads en 1602, in-12. Quatre sermons sur

saint Jacques, apôtre , furent publiés à Co

logne. On lui attribua une vie de Charle-

magne et un traité de obitu et vita sanclo-

rum.

Alexandre II, auparavant nommé An

selme, était de Milan; il fut tiré du siége de

Lucques pour être élu pape à Rome. Il eut

à combattre un anti-pape, qui, quoique

soutenu par l'empereur Henri IV, fut con

damné dans plusieurs conciles etcbasséde

Rome.

Il fit rendre les terres , que les princes

normands avaient envahi , au Saint-Siége.

Nous possédons de ce souverain pontife

plusieurs épîtres, parmi lesquelles on dis

tingue celles qu'il écrivit aux évêques de

France, à l'occasion des persécutions dos

Juifs. Ce bon pontife loua beaucoup les pré

lats français qui avaient détourné certains

mauvais Chrétiens de massacrer les Juifs;

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2Ô8 TRIOMPHE

il était convaincu que les hommes quelcon

ques, quoique hors de l'Eglise , sont nos

frères , et que nous devons les chérir ,

comme dit l'Evangile. Il entreprit de ré

primer la simonie et les mœurs du clergé

en Allemagne; il régla certains objets de

discipline en France.

Benoît XII fut élu pape à Avignon. Dès

son bas âge il embrassa la vie monastique

de l'ordre de Citeaux : étant venu étudier

à Paris il passa bachelier, et fut fait abbé

de Font-Frode , monastère de son ordre.

Lorsqu'il fut docteur, il devint évêque de

Pamiers, et dans la suite évêque de Mire-

poix, etenfin cardinal parle pape JeanXXII.

A peine fut-il élevé sur la chaire de saint

Pierre, qu'une députation de Romains vint

le prier de venir en Italie; il ne seconda pas

leur vue , et demeura à l'endroit où il crut

que la Providence l'avait appelé. Il gou

verna l'Eglise avec distinction; son premier

soin fut d'ordonner la résidence aux évé-

ques et de leur défendre de paraître à la

cour sans y être appelés pour affaires.

Il écrivit au clergé de Castille pour exor-

icr les ecclésiastiques à réformer les mœurs;

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DE L'ÉGLISE. 269

il abolit la pluralité des bénéfices, tâcha de

bannir la faveur et la simonie dans la dis-

pensation des emplois; il fit tous ses efforts

pour renverser les hérésies de son temps,

celles des Vaudois en Lyonnais et en Dauphi-

né, et celles desFratricelles en Italie, ainsi

que d'autres en Irlande et en Allemagne.

Le roi Philippe de Valois vint visiter Be

noît XII, à Avignon , pour lui faire part du

dessein qu'il avait d'entreprendre une nou

velle croisade. Ce prétexte parut à ce mo

narque , et à celui d'Angleterre , une cause

suffisante pour lever sur le clergé de leurs

états des dîmes pour les frais de la guerre.

Il se plaignit auprès du roi de France au

sujet de l'extension et de l'abus du droit de

régale, à la faveur duquel les officiers royaux

pillaient ou dégradaient les bénéfices va

cants. Les objets de discipline et de dogme

occupèrent Sa Sainteté : il réforma les frères

mineurs.

Son pontificat fut rempli de grands évé-

nemens et de travaux utiles à la religion. Il

releva la statue de ce chef auguste de l'E

glise qui avait été érigée autrefois au Vati

can , ayant deux couronnes à la thiare. Il

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27O TRIOMPHE

laissa plusieurs écrits qui ne sont pas impri

més : on a à Rome son principal ouvrage ,

qui est un traité de la vision béatifique.

Marcel II, natif de Montepulciano, était

fils du receveur général des revenus du

Saint-Siége à Alfano; il fit ses études avec

distinction et devint secrétaire du pape

Paul III. Il accompagna en France le car

dinal Farnèse, neveu de ce pontife, et s'y*

fit admirer par ses talens et ses vertus; de

retour à Rome , il obtint de son bienfaiteur

le bonnet de cardinal, et fut choisi pour

être un des présidens du concile de Trente.

. 11 succéda à Jules III ; il établit une con

grégation de six cardinaux pour travailler

à la réforme des abus de l'Eglise. Quelques-

uns de vos prédécesseurs, dit-il , s'imagi

nèrent que la réforme diminuait leur auto

rité; c'est par-là , ajoutait- il , qu'il faut

commencer àfermer la bouche aux héré

tiques.

Il donna ordre aux nonces qui étaient

auprès de l'empereur et du roi très-chré

tien de les presser de faire la paix , et de

leur dire que s'ils ne la faisaient , il irait lui-

même les conjurer de la faire. Il ne voulut

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DE L EGLISE. 21; I

jamais recevoir aucune requête qui ne fût

juste. Il disait avec Caton : Heureux celui à

qui personne n'oserait demander une injus

tice! Il mourut avec le regret de n'avoir pas

assez pacifié les troubles de l'Eglise et assez

réformé les abus, après y avoir fait fleurir la

science et la piété.

Léon IX, fils du comte d'Egesheim, par

vint du siége de Toul à celui de Rome ; par

l'entremise de l'empereur Henri III, son pa

rent. Elu souverain pontife malgré lui , il

partit pour Rome en habit de pélerin , et

ne prit celui de pontife que lorsque les ac

clamations de joie du peuple romain l'eu

rent engagé à accepter la tbiare.

Ce bon pontife assembla des conciles en

Italie, en Allemagne et en France, pour

arrêter le mal dans sa source , et pour y ré

pandre le bien. La simonie et le concubi

nage paraissaient d'une manière éclatante

au milieu du sanctuaire : il porta un décret

pour éteindre ces abus effrayans.

C'est sous son pontificat que le schisme

des Grecs , dont Photius avait jeté les fonde-

mens , éclata par les écrits de Michel Çœru-

larius, patriarche de Constantinople. Ses

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272 TRIEOMPHE

écrits infâmes furent réfutés par ordre de

Léon IX, qui envoya à Constantinople trois

légats qui excommunièrent le patriarche,

après avoir employé tous les moyens de

douceur.

Il fut un excellent pontife , rempli d'un

zèle ardent, d'une piété tendre et solide; il

fut le fléau des hérétiques et la terreur des

mauvais prélats. dont il déposa un grand

nombre. Plusieurs personnages distingués

de son temps s'attachèrent à son auguste

personne , entre autre Pierre Darnien,Hum-

bert et Hildebrand.

Il était si actif et si laborieux, qu'à l'âge

de plus de cinquante ans il commença d'ap

prendre la langue grecque , pour p'ouvoir

réfuter les écrits des Grecs schismatiques.

Nous avons de ce saint pontife , canonisé ,

des sermons, des épî très décrétales, et une

Vie de sainte Hidulphe.

On ne peut point disconvenir que ces

hommes, illustres par leurs vertus sublimes

et par leurs rares talens , et auxquels Dieu

avait confié les rênes de la sainte Eglise,

n'aient contribué, parleur courage héroï

que, à réformer les abus qui la dévoraient

et à étendre ainsi sa gloire et son triomphe.

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DE L'ÉGLISE. -273

GHAPITTE VIII.

Exemples de vertus rares.

La vertu est le premier fondement sur

lequel repose l'édifice spirituel des chefs

augustes de l'Eglise; c'est avec elle qu'ils

peuvent tout, étant aidés de l'esprit saint :

c'est ce que nous admirons dans tous les

pontifes vénérables dont Rome chrétienne

s'honore.

Saint Félix III , Romain de naissance et

d'une famille sénatoriale, ayant été admis

au nombre du clergé de Rome, son mérite

lui conquit tous les vœux pour être élevé

sur le trône pontifical , qu'il honora de ses

vertus sublimes. 1l fit briller son zèle en ré

tablissant la foi orthodoxe dans les Eglises

d'Orient ; il travailla à rétablir la pureté de

18

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jy4 TRIOMPHE

la foi dans l'Eglise d'Afrique, long-temps

troublée par l'arianisme.

Syrice , Romain de naissance , fut élu

pape après Damas I"; il gouverna l'Eglise

avec zèle : il condamna Jovinien et ses sec -

tateurs. Nous possédons de ce bon pontife

plusieurs épîtres intéressantes, entre autres

une à Homère, évêque de Tarragone, dans

laquelle il répond à diverses questions de

ce prélat : elle passe, parmi les savans,

pour la première épître décrétale qui soit

véritable.

Symmaque, natif de Sardaigne, fut élu

pape après saint Anastase II; son pontificat

fut troublé par le schisme d'un anti-pape,

Laurent. Théodoric , roi des Goths , s'unis-

sant au pape Symmaque , éteignit ce schis

me, fit proclamer sa légitimité sur la chaire

de saint Pierre en le montrant , par un ju

gement équitable, innocent des crimes dont

ses cruels ennemis l'avaient impitoyable

ment noirci.

Tant il est vrai qu'on s'est plu dans tous

les siècles à ternir par la calomnie les chefs

augustes de l'Eglise, pleins de zèle pour la

gloire de la religion. Ce vénérable pontife

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DE L'ÉGLISE. 275

fit un bien immense dans l'Eglise, autant

par ses œuvres admirables que par ses ver

tus pures et sublimes; il fit bâtir plusieurs

temples magnifiques. Nous possédons de

lui onze épîtres dans le recueil deD. Cons

tant, ainsi que divers décrets.

Théodore ï" succéda à Jean IV; il con

damna avec sagesse Pyrrhus et Paul , pa

triarches de Constantinople, qui étaient

monothélites. C'est le premier pape qui fut

nommé souverain pontife : il le mérita par

ses vertus sublimes , et surtout par sa dou

ceur et sa charité , qui éclatèrent dans toute

sa conduite. ,

A sa mort, il fut regretté des fidèles

comme un père tendre et chéri, et des évê-

ques comme un frère aimable qui versait

Sur eux ses lumières, ses bénédictions et ses

grâces.

Saint Higin, originaire de Grèce, au

commencement du règne de l'empereur

Antonin-le-Débonnaire,occupa le siége apo

stolique après la mort de Thélesphore. Ce

fut avec la pompe et la magnificence la plus

grande qu'il fit briller l'ordre et la paix au

sein du sanctuaire de la capitale de l'univers

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276 TRIOMPHE

chretien. Les hérésies, qui commençaient

à déchirer le sein maternel de la sainte

Eglise , furent éteintes presque aussitôt par

sa douceur, sa vigilance et son bon es

prit pacifique. Il tendit une main secoura-'-

ble aux hérésiarques Ce'dron et Valentin,

qui retombèrent dans la suite dans l'abîme

de leurs erreurs ; et pendant quatre ans

qu'il gouverna l'Eglise, il y déploya toutes

les richesses de ses vertus et toute la noblesse

de son ame.

Agathon ne fut pas moins vertueux que

les pontifes précédens. Ce fut au printemps

de son enfance que la vertu commença à

germer dans son cœur, et que son esprit

essaya de s'enrichir des trésors dela science.

Après la mort de Domnus, chefde l'Eglise,

les brillantes qualités de son esprit, le

beautés de ses sublimes vertus , et la no

blesse de sa belle ame, lui méritèrent le

trône de saint Pierre : l'Eglise n'eut qu'à se

louerdu zèle éclairé de cet Apôtre.

Le sixième concile écuménique , tenu à

Constantinople contre les monothélites, par

l'empereur Constantin Pogonat, fut une

époque mémorable de son règne. Il y en

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DE LÉGLISE. 2 77

voya ses légats après avoir fait assembler ,

outre son synode de Rome, qui fut de cent

vingt-cinq évêques , différens conciles par

ticuliers en Italie, en France, en Angle

terre , en Espagne , et partout l'Occident ,

afin de recueillir la tradition de l'Eglise

contre l'hérésiarque qu'il fallait combattre.

Ses légats, accompagnés de savans ecclé

siastiques qu'Agathon avait choisi, furent

reçus en pompe par le patriarche Georges,

l'an 680. Le succès fut brillant par les béné

dictions heureuses qu'y répandit le génie

d'Agathon. Les jours de son pontificat fu

rent courts , mais pleins , selon l'expression

de l'Ecriture.

Une douceur admirable, une aimable

gaîté et un heureux naturel , joints à ses

grandes œuvres , à ses vertus, à sa charité

et à sa modestie , offraient dans sa personne

la véritable imagedu vicaire de Jésus-Christ.

Il se signala par sa charité héroïque au mo

ment où il possédait en ses mains le trésor

de l'Eglise , et pendant la peste qui affligeait

tous les habitans de Rome et une partie de

l'Italie. Ce fut par ses soins qu'il fit cesser

l'impôt exorbitant que le Saint-Siége payait

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278 TRIOMPHE

à la réception de chaque pontife. Il mourut

couvert de gloire , en laissant à la postérité

un nom brillant et immortel , capable

de contribuer au triomphe de la sainte

Eglise.

Célestin fut élu souverain pontife au mo

ment où il jouissait avec raison de la bril

lante réputation d'être le meilleur sujet de

Rome, joignant à la solidité de l'esprit les

charmes des plus belles vertus : il fit revi

vre avec une sagesse merveilleuse les ap

pellations des clers et des évêques d'A

frique.

Sa Sainteté était si vénérée , que saint

Augustin lui-même , le docteur de la grâce,

une des plus puissantes colonnes de l'E

glise, n'eut pas honte d'y venir goûter les

doux fruits de ses brillantes et solides lu

mières.

Cet illustre souverain pontife, non-seule

ment content de poursuivre l'hérésie des Pé-

lagiens,exilaunde leurs coryphées, nommé

Celestius , qui se réfugia dans les îles bri

tanniques. Il y envoya, entre autres ouvriers

évangoliques , Pallade, diacre de l'Eglise

de Rome, qu'il ordonna évêque apostoli

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DE L ÉGLISE. 27g

que d'Irlande et d'Ecosse , alin d'étouffer

le germe de la zizanie, que l'hérésie avait

pu repandre dans cette partie du champ

de l'Eglise.

Son zèle éclairé s'étendit également dans

diverses parties du monde chrétien; il res

taura la discipline ecclésiastique et corrigea

les vices dans l'Eglise d'Occident; il fou

droya l'impiété du patriarche de Constan-

tinople, qui ravageait par une nouvelle

doctrine cette belle portion de la vigne

chérie du Seigneur. L'empereurThéodose-

le-Jeune prit part à son triomphe en con

tribuant de toutes ses forces à la ruine de

cet audacieux hérésiarque.

Victor III, qui descendait d'une illustre

famille de Bénévent, fut abbé duMontcas-

sin, 1o57, ensuite légat à Constanlinople ,

de là cardinal, et enfin pontife souverain

après Grégoire Vll; il s'était retiré dans son

abbaye pendant les troubles, excités par

l'anti-pape Guibert, lorsque les Normands

le prièrent de se mettre à leur tête pour tâ

cher de conclure la paix avec Grégoire Vll

et Henri.

Lorsqu'il avait été élu pape, il avait fait

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280 TRIOMPHE

tous ses efforts pour refuser la thiare , et ce

ne fut qu'au bout d'un an qu'il consentit à

exercer ses augustes fonctions. Que les en

nemis de Rome chrétienne, qui traitent

constamment les chefs augustes de l'Eglise

d'intrigans et d'ambitieux, portent leurs

regards sur tous les bons pontifes qui , par

humilité, ne voulaient point accepter la

papauté; et en particulier sur Victor III,

qui, par un esprit d'une piété sincère, ne

voulait nullement s'en charger. Il fit ana-

thématiser l'anti - pape Guibert dans un

concile : son zèle se distingua en faisant

rebâtir l'église du Montcassin avec magni

ficence. On a de ce pape trois volumes de

dialogues sur les miracles de saint Benoît,

et autres moines du Montcassin.

Saint Evariste, Grec de naissance, fut

élu pape après saint Clément; il eut le cou

rage de supporter la persécution de Trajan.

On s'efforce de nous dire que les chefs au -

gustes de l'Eglise font du mal, afin de nous

dissuader que dans beaucoup d'époques

plusieurs d'entre eux ont été les malheu

reuses victimes des tyrans.

Ce saint pontife honora la chaire de Saint

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DE L'ÉGLISE. 28l

Pierre par ses vertus et par son bon esprit;

c'est ce célèbre souverain pontife qui fit le

département ecclésiastique de Rome, en la

distribuant par quartiers ^auxquels il donna

le nom de paroisse.

Soter , né à Fondis dans la terre de la

bour, devint pape, le 1" janvier 162; il

gouverna l'Eglise sous Marc-Aurele : il dé

ploya, dans son auguste ministère, les fruits

de ses vertus et de ses talens ; il conbattit

courageusement les hérésies qui commen

çaient à naître , celles des Montanistes on

Cataphryges.

Pascal Ier, Romain de naissance , était fils

de Bonase; sa brillante éducation religieuse,

ses vertus éminentes, son amour pour les

austérités comme pour l'étude de l'Ecri-

ture-Sainte, lui firent confier la direc

tion du monastère de Saint-Etienne , sous

Léon III. A peine fut-il monté sur le trône

pontifical , qu'il envoya en France des lé

gats ,' qui apportèrent des présents à l'em

pereur Lonis-le-Débonnaire; ces députés

rapportèrent à Rome un acte authentique,

qui confirmait la donation de Pepin et de

Charlemagne , à laquelle Louis ajoutait les

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282 TRIOMPHE

îles de Corse, de Sardaigne et de Sicile.

Il était l'arni de la paix et de la concorde.

L'Orient étant désolé par les fureurs des

Iconoclastes; quelques Grecs , chassés par

la persecution , se réfugièrent à Rome:

Pascal, plein d'une charité apostolique, y

fonda pour eux un monastère, où ils trou

vèrent un asile et un libre exercice de leur

religion. Il rétablit un grand nombre d'é

glises et de monumens qu'il embellit avec

magnificence. Ce fut lui qui couronna l'em

pereur Lothaire.

Pascal II, né en Toscane, fut d'abord

moine de Cluni ; il fut envoyé à Rome à

l'âge de vingt ans, pour régler les affaires

du monastère ; il se fit connaître de Gré

goire VII , qui , charmé de son mérite , le

retint auprès de lui, l'honora de la pour

pre , et le créa abbé de Saint-Paul.

Sa piété était si grande et si solide,

qu'ayant été élu pape après Urbin II , il

prit la fuite et se cacha : il fallut employer

toutes les violences de la religion pour l'y

faire consentir. Il fut persécuté par quel

que tyran; il s'en délivra de la manière la

plus sage. Il voulait de nouveau abdiquer

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DE L'ÉGLISE. 283

son pontificat, tandis que Dieu l'appela

dans le ciel , pour lui donner une couronne

immortelle. Nous avons , de cet excellent

pontife , un grand nombre de lettres dans

la collection des conciles du père Labbe.

Qui n'admirerait pas ces beaux exemples

des plus hautes vertus qui brillent dans nos

pontifes romains, qui élèvent notre ame,

nous confirment dans la foi , et contribuent

infailliblement à la gloire et au triomphe

de l'Eglise !

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l84 TRIOMPHE

CHAPITRE IX.

Exemples de piété.

Quand nos pontifes romains n'auraient

pour partage que la piété solide et vénéra

ble, ce serait assez pour confondre leurs

ennemis et pour faire triompher l'Eglise

Sainte. Portons nos regards sur quelques-

uns d'entre eux , et nous en serons enchan

tés et ravis.

Saint Hormisdas , né à Frusinone , en

Campanie , monta, par sa piété, sur le

trône de saint Pierre; ses vertus, jointes à

ses grands talens et à son amour pour les

lettres, lui méritèrent l'honneur de la thiare :

il éteignit le chisme des Eutéchiens ; il reta

blit la paix en Orient, et déploya son zèle

pour conserver la foi dans les églises d'Oc

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DE l'ÉGLISE. 28 5

cident; on peut en voir une preuve dans ses

instructions adressées à saint Avit, dans la

Gaule narbonnaise, à Jean de'Tarragonne,

et à Sallusle de Sèville , dans l'Espagne.

Sa. conduite intérieure ne fut pas moins

honorable : il donna des exemples touclians

de modestie, de pénitence, de charité; il

prit un grand soin du culte extérieur de la

religion , instruisit le clergé dans la psal

modie, et fit orner beaucoup d'églises de

Rome. Nous avons de cet excellent pontife

plusieurs lettres bien écrites.

Saint Hilaire, né en Sardaigne, fut si di

gne du trône pontifical, que tous les évê-

ques éprouvèrent une joie éclatante de son

élection. Ses vertus sublimes, ses œuvres

admirables furent plus magnifiques parleur

solidité que par leur éclat. C'est le premier

pape qui ait défendu aux prélats de se choi

sis des successeurs, afin d'éviter par là les

faveurs particulières , qui retranchent les

plus dignes des emplois importans.

Etienne 1" fut pape après la mort de Lu-

cius; son pontificat est remarquable par la

question sur la validité du baptême donné

par les hérétiques. Ce sage pontife , plein

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^86 TRIOMPHE

d'une piété solide,répondit affirmativement,

et qu'il ne fallait rien innover; son senti

ment triom pha après sa mort dans le concile

de Nicée.

Saint Etienne fut victime de la persécu

tion de l'empereur Valérien; sa doctrine

fut toujours aussi pure que sa piété , sa con

duite fut admirable ainsi que sa douceur

pourleshérétiques nouvellement convertis.

Innocent XIII , nommé Michel - Ange

Conti , était d'une des plus illustres familles

de Rome ; il en était sorti sept papes, et dans

laquelle la charge de grand-maître apos

tolique était héréditaire. En 16g3 il fut gou

verneur de Vilerbe: en 16g5 archevêque

de Tharse , et nonce en Suisse , il fut fait

cardinal en 1706, et enfin il fut élevé sur

la chaire de saint Pierre après la mort de

Clément XI.

Il sut, dit un auteur, immortaliser son

règne si court par sa piété , par de grandes

vertus et par la science du gouvernement;

les grands et les petits le regrettèrent beau

coup à sa mort. Lalande ajoute qu'il est au

nombre des meilleurs souverains pontifes :

sous son règne , le bonheur était chez tous

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DE L'ÉGLISE. ^87

les sujets; la police était parfaitement exacte,

et l'abondance régnait en tout lieu, parmi

ses fidèles Chrétiens.

Saint Jules 1" ne vit au tour de son trône

papal que les horreurs de la persécution

élevée contre Athanase par Anus; et, après

l'avoir reçu en pompe au milieu des hon

neurs, il le fit justifier dans un concile , des

calomnies dont les Eusébiens avait osé le

noircir.

Ce saint pontife écrivit à ses persécuteurs

une lettre qui , au jugement de Tillemont ,

est un de plus beaux monumens de l'anti

quité. Il leur reprocha» d'avoir abandonné

la doctrine du concile de Nicée, pour em

brasser les hérésies condamnées. Il termina

cette grande affaire , en élevant saint Atha

nase sur le siège d'Alexandrie.

Innocent X, natif de Rome, succéda au

pape Urbain VIII à l'âge de soixante-douze

ans; il se distingua principalement par sa

bulle contre les cinq propositions de Jansé-

nius, qui fut publiée en 1763. Les propo

sitions y sont qualifiées chacune en par

ticulier. Les trois premières sont déclarées

hérétiques; la quatrième fausse et héréti

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?.88 TRIOMPHE

que , et la cinquième, sur la mort de Jesus-

Christ, fausse, téméraire, scandaleuse.

Ce bon pontife était doué de grandes

qualités; il était sobre , vivant de peu , dé

testant le luxe , économe dans les dépenses

superflues, magnifique dansles nécessaires,

rendant la justice avec exactitude à tous les

sujets, en jugeant des affaires avec esprit,

célérité et discernement.

Innocent IX, natif de Bologne , se distin

gua au concile de Trente; il fut fait cardinal

par Grégoire XIII, monta sur le trône pon

tifical en 15g1. Il est fâcheux qu'il n'ait pas

long-temps régné; il avait de grands pro

jets qu'il ne peut mettre en exécution. Un

de ses desseins était de restaurer le port

d'Ancône,pour faciliter la navigation, et de

creuser un canal près du château de Saint-

Ange, pour mettre la ville de Rome à cou

vert des inondations fréquentes du Tibre.

Il avait résolu aussi de délivrer les sujets

de Rome de plusieurs impôts , et de travail

ler à la conversion des fidèles, d'extirper

les hérésies et de soulager , par ses libéra

lités , l'Eglise du Japon , affligée sous la ty

rannie du prince qui y régnait.

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DE L'ÉGLISE. 28g

Bnoit IV, natif de Rome, fut élu pape

'en g00. Cet excellent souverain pontife,

rempli de belles qualités, parut sur le trône

de saint Pierre dans le temps où les abus

fourmillaient de toutes parts : ses exemples

de piété convertirent beaucoup d'ames,et

opérèrent un bien merveilleux.

Louis XIII} surnommé l'Aveugle, qui fut

si indignement traité par le cruel Bérenger,

son concurrent , vint à Rome , où il fut cou

ronné empereur des mains de ce sage pon

tife.. On admira toujours , dans son auguste

personne , l'amour pour la justice ainsi que

sa libéralité envers les pauvres.

Saint Corneille I" fut élu souverain de

l'Eglise par le clergé romain , un an et demi

après que le Saint-Siége eut demeuré va

cant; il était rempli d'une pureté vir

ginale, d'un esprit, d'une modestie et d'un

courage extraordinaires. Ce fut avec une

patience angélique qu'il repoussa les ca

lomnies d'un chismatique nommé Nova-

tien.

Les bons fidèles environnaient d'une pro

fonde vénération ce saint pontife, se plai

saient à se réunir dans son bercail , à y con

*9

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290 TRIOMPHE

templer ses beaux exemples de vertu , et à

y goûter ses doux fruits ; il confessa la foi

avec un héroïsme étonnant : il fut envoyé

en exil par l'empereur Gallus, et finit ses

jours au milieu des angoisses, mais au sein

de la véritable gloire.

Saint Eleuthère était originaire (VEpire,

il reçut sous son pontificat, la célèbre dépu-

tation des martyrs de Lyon , au sujet des

Montanistes , qui excitaient de grands trou

bles parmi les fidèles de l'Asie.

Il combattit avec un courage héroïque,

les erreurs de ces hérétiques, qui sous le

brillant manteau de la vertu, recélaient

dans leur cœur le germe des vices les plus

iniâmes. Il gouverna la Sainte-Eglise ro

maine avec douceur , et avec une sagesse

angélique. -

Jean VI, Grec de naissance, succéda à

Sergius Ier. Peu de temps après son élec

tion, Théophylacte, chambellan de l'empe

reur Tibère III, exarque d'Italie, vint de

Sicile à Rome ; les troupes Payant appris ,

s'assemblèrent dans la ville, pour le mal

traiter; le pape, par un esprit de paix s'y

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DE L ÉGLISE. 2C)I

opposa, et calma la sédition, en envoyant

des évêques pour haranguer les soldats.

La sédition était à peine appaisée, que

Gisulfe Lombard, duc de Bénévent,vint ra

vager la Campanie, pillant , et enlevant les

hahitans impunément. Le pape, par le

moyen de riches présens , se fil rendre les

captifs , que Gisulfe avait fait. Ce bon

pontife entre autres grandes œuvres , justi

fia dans un concile saint Vilfrid , accusé par

l'archevêque de Cantorbery.

Bonifacel", élu pape en 4l!^i après la

mort de Zozime, gouverna paisiblement le

Saint-Siége , pendant quatre ans environ ;

ce fut sous son pontificat que mourut saint

Gérôme, et que saint Augustin adressa à Sa

Sainteté ses quatre livres, en réponse aux

deux lettres des Pélagiens.

Cet excéllent pontife soutint avec cou

rage les droits du Saint-Siége sur l'Illyrie,

que le patriarche de Constantinople vou

lait détacher de sa juridiction. Boniface ter

mina cette contestation, traitée entre les

empereurs Honorius et Théodose.

Benoît II, Romain de naissance , fut un

bon souverain pontife; très-pieux, patient?

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2fp TRIOMPHE

doux , et généreux, et très-instruit dans l'E-

criture-Sainte. Etant élevé sur la chaire de

saint Pierre, il s'occupa aussitôt d'ordonner

la convocation du quatorzième concile de

Tolède, pour y faire recevoir la définition

du sixième concile écuménique. Il rétablit

les Eglises de Saint-Pierre, de Saint-Va-

lentin et de Sainte-Marie.

Qn'il est beau pour un chrétien fidèle de

parcourirces magnifiques exemples de piété

que nous donnent les princes de l'Eglise ,

pour contribuer à la propagation de la foi ,

à la gloire de l'Eglise et à son triomphe!

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de l'égl1se. 2g3

CHAPITRE X.

Exemples de zèle.

C'est par un zèle juste et éclairé que

l'on peut faire briller la religion , con

tribuer à sa gloire et à son triomphe; por

tons nos regards sur la vie magnifique de

quelques-uns de nos saints pontifes,revêtus

légitimement de la puissance divine et nous

nous en convaincrons avec un charme ra

vissant.

Boniface IV, fils d'un médecin > fut fait

pape après la mort de Boniface III; son

zèle pour la gloire de l'Eglise fut sans bor

nes ; il obtint de l'empereur Phocas le Pan

théon , qu'Agrippa avait fait élever en

l'honneur de tous les. dieux , et le consacra

à l'honneur de tous les martyrs et de la

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2C)4 TRIOMPHE

Sainte-Vierge , sous le nom de Sainte-Ma

rie de la Rotonde, qui existe encore. Il fit

de sa maison un monastère , qu'il dota de

très-grands biens On lui' attribue quelques

ouvrages.

Benoît I" fut élu pape en 5y4 , après la

mort de Jean III; ce fut sous son règne

que les Lombards avaient fait quelques

progrés en Italie, il s'en suivit pendant long

temps un partage de domination , entre les

empereurs Grecs, et les rois des Lombards*

Il tâcha de réparer les maux que causait

aux Romains l'armée des Lombards, et usa

de toutes les ressources de son zèle éclairé ,

pour les soulager dans un temps affreux de

peste et de famine.

Benoit III, né Romain, fut élu pape au

milieu des troubles, et fut conduit en triom

phe au palais de Latran , au milieu des lar

mes de joies universelles et de cantiques

mélodieux : il honora le trône pontifical

par ses vertus sublimes , et par un zèle qu'il

déploya sur la terre chrétienne pour la

gloire de la religion.

C'est entre ce pontife et Léon IV, que des

imposteurs osèrent placer la papesse Jeanne.

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DE L'ÉGLISE. 295

Jl ne faut point s'étonner de cette calomnie,

reconnue de tous les savans : de tout temps,

ainsi que de nos jours , les ennemis de la

religion se sont fait un plaisir de noircir

les chefs augustes de la sainte Eglise ro

maine, par des accusations atroces; mais

les traits de leur satyre viendront se briser

au pied des monumens glorieux du zèle

des successeurs légitimes de saint Pierre.

Saint Clément 1" fut élu pape l'an 91 ; il

fut témoin de la persécution de Donatien,

qui dura trois ans environ. Ce fut saint

Pierre lui-même qui avait ordonné saint

Clément. Saint Paul a parlé de ce souverain

pontife , dans son Epure aux Philippiens.

On croit aujourd'hui que c'est à saint Clé

ment qu'est due la première mission des

évêques dans la Gaule : quoiqu'il en soit ,

on ne peut pas lui disputer un zèle admira

ble et magnifique pour la gloire de l'Eglise.

On lui attribue plusieurs,écrits : le seul qui

soit avéré est une épître aux Corinthiens,

publiée à Oxford en 1633; c'est un des plus

beaux monumens de l'antiquité, qui fut

long-temps lu dans l'église de Corinthe.

Saint Calixte 1" fut Romain de naissance

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296 TRIOMPHF

et successeur du Pape Zéphirin. Cet ex

cellent pontife était estimable et très-estimé

d'Alexandre Sévère, qui proposait ses exem"

ples de piété à ses officiers subalternes et à

son peuple.

C'est à son zèle que nous devons la ma

gnifique institution du jeûne et des quatre-

temps; les registres de l'Eglise romaine en

font encore la glorieuse mention. Ce fut

sous son pontificat que les chrétiens com

mencèrent à bâtir des églises , sous la tolé

rance des magistrats.

Le nom de Calixte est illustre, surtout

par le cimetière placé sur le chemin d'Ar-

dée, qui s'étend jusqu'à la voie appienne.

On lit sur une inscription placée dans l'é

glise ces mots : (Test ici le cimetière du cé

lèbre pape Calixte, martyr. Cent soixante-

quatorze martyrs y ont été enterrés avec

quarante-six évêques illustres.

Saint Anastase 1" occupa le trône de

saint Pierre en 3g8; son zèle se distingua

par la réconciliation de l'Eglise orientale

avec l'occidentale : il foudroya les Origé-

nistes, et mérita des éloges pompeux de

saint Jérôme , qui l'appelait l'homme d'une

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DE L ÉGLISE. 297

riche probité et (Tune sollicitude aposto

lique.

Il réforma la discipline de l'Eglise, fit

plusieurs réglemens, entre aulres celui qui

défendait d'ordonner prêtres les nouveaux

convertis, surtout venant d'Amérique. Nous

avons de lui, dans le pontifical romain,

deux lettres qui sont de la plus grande im

portance. La solidité de son esprit corres

pondit aux charmes de ses sublimes vertus.

Saint Pie I", natif d'Aquilée, devint pape

après saint Hygin : ses émineutes vertus lui

firent donner le nom de Pie, et le firent

respecter sous l'empire &Adrien et d'An-

tonin , qui conservèrent la paix, pendant

son pontificat, malgré les combats que ce

saint pontife eut à soutenir, et qui lui con

quirent la couronne de martyr.

Aidé des lumières de saint Justin, dit le

philosophe, il travailla avec ardeur à com

battre les hérésies de Valentin et de Mar-

cion ; le premier était un platonicien exalté ,

qui, en mêlant la doctrine des idées, et les

mystères des nombres avec la théogonie

d'Hésiode et l'Evangile de saint Jean ne

formait qu'un système absurde. Toute la

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298 triomphe

vie de ce saint pontife fut une suite des

bonnes œuvres et de son zèle éclairé.

Pie II , nommé Enéas, né en Toscane

d'une famille noble et illustre, succéda au

pape Calixte III ; son éducation fut très-

soignée , et ses progrès dans les lettres fu

rent étonnans ; à vingt-six ans il fut fait se

crétaire au concile de Bale, par le cardinal

Dominique Capronica. Félix II lui donna

le même emploi auprès de son auguste per

sonne.

L'empereur Frédéric l'ayant appelé, en

lui conservant le même titre, l'honora de

Ja couronne poétique; l'envoya comme am

bassadeur à Rome, àNaples, à Milan, en

Bohême et dans d'autres cours. Le pape

Eugène IV en fait un grand cas et s'en ser

vit quoiqu'il lui eut été contraire dans le

concile de Bàle. Nicolas V l'employa en qua

lité de nonce en Autriche, en Bohême, en

Moravie, en Silésie. Il réussit partout et

principalement dans les diètes de Ratis-

bonne et de Francfort, qu'il fit assembler

pour déterminer une croisade contre les

Turcs; et quand il fut sur son trône ponti-

cal, il ne fut pas en peine de répandre dans

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DE L'ÉGLISE. 299

l'Eglise les fruits magnifiques de ses lumiè

res et de son zèle éclairé.

Melchiade était originaire d'Afrique; il

vit, pendant son pontificat, la religion

chrétienne s'étendre par toute la terre , et

adoptée par Constantin, qui en fut le pro

tecteur. Ce triomphe fut troublé par le

schisme des Donatistes, il mit en jeu tous

les ressorts de son zèle pour les engager à

se soumettre.

Etienne IX, frère de Godefroi , duc de

Lorraine , un des plus grands princes de

son temps, fut d'abord archidiacre de Liége,

d'où le pape Léon IX le tira pour le faire

chancelier de l'Eglise romaine , et l'en

voya ensuite, en qualité de légat, à Cons-

tantinople, en 1o54; il se retira au Mont-

cassin où il embrassa la vie monastique , et

dont il devint abbé.

Le pape Victor l'ayant fait cardinal du

titre de saint Chrysostôme, il fut obligé

d'aller à Rome, pour prendre possession

de ce titre, et ce fut là qu'on le prit de

force pour l'élever sur le trône pontifical.

Ce zélé pontife tint à Rome plusieurs con

ciles pour empêcher le mariage des prêtres,

■ jz

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3oO TRIOMPHE

qu'il bannit du sanctuaire pour un temps ,

avec défense de célébrer la messe.

Il fit un voyage au Montcassin, pour y

reformer la 'conduite des moines qui se

laissaient corrompre par l'amour des ri

chesses ; il mena une vie angélique qui

honora le trône pontifical.

Nous voyons donc évidemment briller

dans l'auguste personne des princes véné

rables de la sainte Eglise , de nombreux

exemples de zèle , capables de ranimer la

ferveur des fidèles, d'éteindre parmi eux la

discorde allumée par l'enfer , d'y appor

ter la paix , de soutenir la gloire, de la reli

gion et de consolider son triomphe.

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DE L EGLISE. 3oi

CHAPITRE XI.

Pontifes amis du peuple.

Sans la charité, l'édifice magnifique de

notre foi s'écroulerait, nous dit le grand

Apôtre, et c'est sur ce pompeux et solide

fondement que les chefs augustes de l'E

glise se fondent pour se rendre les dignes

représentans de Jésus-Christ sur la terre.

Clément IX, issu d'une famille noble de

la Toscane, fut envoyé nonce en Espagne

par Urbain VIII, qui l'avait donné dans une

époque au cardinal Barbarin pour auditeur

de légation. Pendant onze ans qu'il remplit

avec dignité la place de nonce , il se conci

lia l'estime de tous les grands de la capitale

et de la cour, de telle manière qu'il fut

prié d'être parrain d'une des filles du roi.

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302 TRIOMPHE

Après la mort d'Alexandre VII, il fut

elevé sur le trône papal; il s'y montra ma

gnifique et libéral à l'égard des malheu

reux, ami des lettres et de la paix; il fit ad

mirer les beaux commencemens de son

règne en déchargeant le peuple de l'état

ecclésiastique, des tailles et de beaucoup

d'autres subsides : il envoya tous ses revenus

pour secourir les habitansde Candie contre

les Turcs.

La distinction de fait et de droit dans l'af

faire de Jansénius lui donnait de grandes

inquiétudes ; il fit tous ses efforts pour étein

dre ces contestations, allumées depuis long

temps. Il se contenta des soumissions des

quatre évêques opposans ; il leur rendit ses

bonnes grâces et les honora d'un bref en

1668 : c'est ainsi que, par les moyens de la

plus grande douceur , il établit la paix.

Le roi, satisfait de ce triomphe pacifique,

l'annonça solennellement à la France en

tière , et fit frapper une médaille pour per

pétuer cette action glorieuse , digne de vé

nération et de mémoire.

Etienne fêtait Romain et fils d'une fa

mille noble ; il fut élu pape par un consen

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de l'église. 3o3

tement unanime des évêques, du clergé et

du peuple; il était si pieux, qu'il fallut qu'on

le forçât à sortir de sa maison pour lui faire

accepter le pontificat , dont il se croyait in

digne.

Cette époque fut remarquable par plu

sieurs calamités qu'il tâcha d'étouffer. Des

sauterelles ravageaient les campagnes;

Rome était menacée par les Sarrasins; la

France , qui avait été toujours l'amie de

Rome, était alors désolée par les Lombards,

ne pouvait nullement lui apporter de se

cours.

Les trésors de l'Eglise étaient vides :

Etienne V remédia autant qu'il pût à ce

grand fléau , en distribuant tout son pa

trimoine aux pauvres , et en admettant à sa

table des orphelins qu'il nourrissait chari

tablement.

Clément XII, issu d'une famille de Flo

rence, fut élevé d'abord à différentes char

ges d'honneur par sa piété et ses talens. Il

devint trésorier de la chambre apostolique,

et obtint la pourpre en 1706. A peine fut-

il élevé sur la chair de saint-Pierre , qu'il

abolit une partie des impôts, et fit châtier

T

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3o4 TRIOMPHE

ceux qui s'étaient mal comporté sous le

pontificat suivant. Aussi tout le peuple ro

main témoignait publiquement sa joie par

des acclamations publiques : il distribuait

aux pauvres tous ses revenus.

Il se distingua en lançant un bref pour

condamner une instruction pastorale de

l'évêque de Montpellier, Colbert, grand

Janséniste , qui , dans diverses circonstan

ces, ne respecta pas les évéques ses collè

gues; il montra même sa désobéissance aux

jugemens de l'Eglise, et plusieurs de ses

ouvrages furent condamnés par le Saint-

Siége.

Le peuple romain, justement enthou

siasmé du mérite rare de Clément XII, lui

érigea, par reconnaissance, une statue de

bronze qui fut placée en pompe dans la ca

pitale.

Anastase IV fut un souverain pontife

doué d'une grande charité qu'il exerça pen

dant une famine qui désolait ses Etats : il

protégea l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusa

lem, vulgairement appelé les Templiers, et

les honora de beaucoup de priviléges.

H était rempli de vertus, et avait une

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de l'église. 305

grande expérience pour les affaires de la

cour de Rome : ou voit, dans le recueil du

père Labbe, neuf lettres de ce pontife.

Eugène //, natif de Rome , fils de Bohé-

mond, succéda à Pascal I"; il fut élu pape

le 5 juin 824; il fut remarquable par des

qualités et des vertus qui lui méritèrent la

préférence sur son concurrent : il sut, par

son esprit aimable, se lier avec les monar

ques français.

Louis-le-Débonnaire , roi de France, en

voya Lothaire, son fils, à Rome, pour ré

gler avec le pape tout ce qu'exigeait la

nécessité des circonstances. Déjà , depuis

quelques années, les troubles de Rome

avaient excité la sollicitude de l'empereur.

On avait fait beaucoup de fausses condam

nations ; le pape, par un esprit de justice,

consentit au redressement de tous les griefs,

et on vit la paix se rétablir à la grande sa

tisfaction du peuple romain.

Pour affermir ces heureuses réformes,

Lothaire fit publier un.e constitution où il

sembla ajouter aux concessions de Charle-

magne, en mettant sur la même ligne l'au

torité du pape et celle de l'empereur. Il

20

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3o6 TRIOMPHE

recommanda qu'on eût une obéissance en

tière au souverain de l'Eglise , à ses juges et

à ses ducs pour l'exécution de la justice.

Cet admirable pontife tint un concile à

Rome pour la réforme du clergé. Lorsqu'il

mourut, tous les Romains le regrettèrent;

il avait pourvu, pendant son pontificat, à

l'abondance des blés avec une telle sa

gesse, que la ville de Rome était celle où

Ton vivait à meilleur marché. Son amour

pour les malheureux , ses soins pour les

malades, les orphelins et les veuves, lui

conquirent le beau titre de Père des pau

vres.

Il faut donc convenir que la charité a fait

dans tous les temps l'objet précieux des bel

les occupations, des vénérabbs princes de

l'Eglise, et qu'animés par elle ils ont ré

pandu avec une libéralité ravissante, dans

le; sein des malheureux, toutes leurs riches

ses pour contribuer à la félicité et à la gloire

dela religion.

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de l'église. 307

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CHAPITRE XII.

Pontifes amis des peuples et des Souverains.

On est ravi , sans doute , lorsqu'on voit

une main libérale prodiguer avec sagesse,

dans le sein de l'indigence , les dons de la

magnificence pontificale; mais quel charme,

quel ravissement , quel spectacle magnifi

que , lorsqu'on voit la thiare unie à la cou

ronne pour faire éclater les grandeurs de la

terre et pour faire admirer la puissance du

Ciel.

Urbain V, nommé Guillaume de Gri-

moald, fils du baron du Roure et de l'Em-

phélise de Sabran , sœur de saint Elzéar ,

né à Grisac, dans le diocèse de Mende, dans

le Gévaudan , de bénédictin , il devint abbé

de Saint-Germain-l'Àuxerre, ensuite de

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3o8 TRIOMPHE

Saint-Viclor, et enfin pape, le 27 octobre

i362, après la mort d'nnocent VI;le Sainte

Siége était alors à Avignon, et ce pontife

l'y occupait avec gloire. Le roi de France,

Jean , vint l'y visiter : ils formèrent ensem

ble le projet de renouveler une nouvelle

croisade qui n'eut pas lieu.

En 1 367, les Romains l'engagèrent à venir

à Rome poury fixer le Saint-Siége et pour ré

parer les maux causés en Italie par la lon

gue absence des papes; il s'y rendit et y fut

reçu avec d'autant plus d'allégresse et de

pompe, que depuis Benoît XI aucun sou

verain pontife n'y avait résidé. Entre au

tres choses , il y fit rétablir le Vatican avec

une magnificence digne de la grandeur

pontificale.

L'empereur Charles IV vint en Italie en

1368 , a la prière du pape, avec une nom

breuse armée , pour soumettre les usurpa

teurs des terres de l'Eglise ; mais aupara

vant il avait confirmé , par une bulle d'or,

tous les priviléges et donations accordés

aux papes par les empereurs. Le dénom

brement des domaines et des droits de

l'Eglise y étaient faits avec exactitude.

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de l'église. 3og

L'empereur trouva le souverain pontife"

à Viterbe, et alla l'attendre à son tour à un

mille de Rome, où Urbain fit son entrée

triomphante à cheval. L'empereur et le

comte de Savoie, marchant à pied, tenaient

la bride chacun de son côté; l'impératrice

s'y rendit quelques jours après, et le pape

la couronna le jour de la Toussaint, à la

messe. L'empereur y remplissait la fonction

de diacre ; mais il ne lut point l'Evangile,

ce qu'il ne pouvait que le jour de la Noël.

L'empereur d'Orient, Jean Paléologue,

vint aussi visiter Urbain à Rome, pour de

mander des secoure aux princes d'Occident

contre les Turcs. Ce grand pontife, ami des

souverains, le reçut très-favorablement, et

avec tous les honneurs possibles.

Etant très-attaché au roi de France , il se

détermina à revenir à Avignon pour réta

blir la paix entre la France et l'Angleterre:

il exerça son zèle contre les clercs déréglés,

simoniaques, et contre les usuriers: il ré

forma , autant qu'il fut en son pouvoir, la

pluralité des bénéfices.

Pendant les beaux jours de son glorieux

pontificat , il entretint cent étudians en dif

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3lO TRIOMPHE

férentes universités; il fonda à Montpellier

un collége pour douze élèves en médecine;

il donna , en mille occasions , des marques

de son affection sincère pour les malheu

reux.

Il fit construire plusieurs églises, et fonda

plusieurs chapitres de chanoines. Ce fut par

ses soins que le palais d'Avignon fut cons

truit. Cet édifice magnifique, qui existe en

core, frappe d'étonnement par sa belle an

tiquité. En voyageant, j'ai eu l'avantage de

le contempler avec une sincère vénération,

ainsi que l'Eglise papale, qui vient d'être

restaurée naguère par Monseigneur l'arche

vêque actuel d'Avignon (1).

Il était l'ennemi déclaré des abus; il tâ

cha de les réformer jusque dans les procu

reurs et les avocats. On ne le vit point pro

diguer ses richesses à ses parens ; il se pré

serva de cette légère faiblesse : il s'éleva

noblement au faite de la vraie gloire par des

actions admirables et immortelles.

Clément XI , nommé Jean-François Al-

bani , fils d'un sénateur romain , devint se-

(1) Je puis en parler savamment , puisque j'ai prêché à

Avignon pendant le carême 1827.

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DE LÉGLISE. 3 II

crétaire des brefs et cardinal : il n'accepta

la papauté qu'après avoir consulté des per

sonnages religieux du premier mérite. Le

cardinal de Bouillon , doyen du sacré col

lége, distingué par son esprit et par sa

piété, contribua 'à son élection. :",

Ce bon pontife fut élu pape à un âge

peu avancé, plein de vigueur et de sagesse

au moment où la sainte Eglise romaine en

avait besoin; il détourna des malheurs de

la guerre l'Italie , qui allait en devenir le

théâtre; mais il fut contraint par l'empe

reur Léopold à reconnaître l'archiduc pour

roi d'Espagne , et quoique naturellement

attaché à la France, il renonça à son al

liance.

Son pontificat fut troublé par les guerres

du Jansénisme. En 1705, il publia la bulle

fineam Sabahot contre ceux qui soute

naient les cinq fameuses propositions, et

qui prétendaient qn'on satisfaisait par le

silence respectueux à la soumission due aux

bulles apostoliques. Il publia aussi la fa

meuse constitution Unigenitus contre cent

et une propositions du Nouveau Testameqt

de Qucsnel, prêtre de l'Oratoire. Un his

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3 12 TRIOMPHE

torien malin, indigne de foi, osa lancer

quelques satyres contre cette belle et ma

gnifique conduite, capiible d'illustrer ce

grand pontife.

C'est avec juste raison qu'on a toujours

xlit que ce vénérable pape était autant

pieux que savant ; il composa une assem

blée remarquable des plus fameux astro

nomes d'Italie pour rétablir le calendrier

Grégorien; et comme il leur parut impos

sible de corriger les défauts qu'il y avait, il

aima mieux le laisser dans son état primi

tif. Il donna retraite au fils de Jacques II,

qui jouit à Rome des honneurs de la

royauté sous le nom de Jacques III.

C'est à cetilluslre pontife que la Provence

fut redevable de beaucoup de greniers d'a

bondance et de sommes considérables qu'il

y envoya pour y être distribuées aux mal

heureux pendant la peste de 172o. Hé!

des Français oseront insulter les souverains

pontifes, les accusant de porter la désunion

parmi les princes etles peuples! Comment

a-t-on l'audace de vomir de semblables

blasphêmes? Peut-on être plus magnifique

et plus charitable lorsqu'on répand à pleines

N

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de l'égl1se. 3i3

mains des bienfaits immenses sur une nation

qui a toujours joui des plus beaux privilè

ges de Rome?

Ce vénérable chef de l'Eglise fut auteur

de quelques ouvrages. Le cardinal Albani,

son neveu , les recueillit et les fit imprimer

à Rome en deux volumes in-folio. Sa vie

magnifique fut conservée pour orner le

frontispice de ses belles œuvres.

Qu'il est beau de voir, de contempler la

gloire de Clément XI triomphant par son

génie et ses vastes lumières des jansénistes,

qui troublèrent la paix de l'Eglise comme

des reptiles venimeux. Son triomphe fut

d'autant plus magnifique, qu'il les confon

dit en leur prodiguant les richesses de sa

charité au sein de la France, où. cette hé

résie alarmante avait un siége secret, impo

sant et pompeux.

HonoriusIV, noble Romain, fut cardi

nal du titre de Sainte-Marie, par Urbain IV.

Il fut élu pape à Pérouse, sans que les car

dinaux en eussent été informés, comme

c'était l'usage depuis la constitution de Gré

goire X. Il confirma les décimes accordés

par son prédécesseur à Philippe-le-Hardi ,

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3 I 4 TRIOMPHE

roi de France , pour faire la guerre à Pierre

d'Arragon, qui retenait captif Charles II,

roi de Sicile , et le neveu de saint Louis.

Il purgea l'État des voleurs qui l'infec

taient; il signala son zèle autant pour les

malheureux que pour les droits de l'Eglise

et pour le recouvrement de la Terre-Sainte.

Il conçut l'idée de quelques établissemens

utiles pour accélérer les progrès des lettres,

très-négligées dans son siècle. ; il fonda à

Paris un collége où l'on put apprendre les

langues orientales. Il était laborieux, et

quoique les incommodités de la goutte nui

sissent à ses affaires, il ne les négligeait ja

mais.

Nous devons donc rendre hommage aux

augustes chefs de l'Eglise , qui se montrent

les amis des souverains, les pères des peu

ples, pour nourrir leur corps et leur ame, et

pour éclairer leur esprit au milieu des triom

phes éclata ns de l'Eglise.

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de l'église. 3l5

CHAPITRE XIII.

Union des Pontifes avec les Souverains.

L'union des sages pontifes avec les bons

souverains contribue à l'affermissement des

Etats , au bonheur de la société , à la gloire

et au triomphe de l'Eglise. C'est ce dont

nous pouvons aisément nous convaincre.

Alexandre III, natif de Sienne j fut car

dinal et chancelier de l'Eglise romaine.

Après la mort d'Adrien IV , tous les cardi

naux, à l'exception de trois, l'élurent sou

verain pontife. Sa Sainteté persécutée injus

tement par l'anti-pape Victor IV, se réfu

gia en France , où elle fut très-bien ac

cueillie par Louis-le-Jeune.

Alexandre était si bon, qu'il fit du bien

même à l'anti-pape , son ennemi déclaré; il

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3l6 TRIOMPHE

lui rendit toutes sortes- d'honneurs , et l'ad

mit à sa table; lorsqu'il revint à Rome, où il

fntreçu en pompe en 117g,où il convoqua le

troisième concile général deLatran. Il était

respecté de toute l'Europe, et chéri de tous

les Romains.

Il renversa la servitude, rendit la liberté

à ses sujets , et montra la justice aux mo

narques. Il contraignit Henrii II, roi d'An

gleterre, à expier le meurtre de saint Tho

mas de Cantorbéri. C'est lui-même qui a

fait réserver au Saint-Siége la canonisation

des saints, qui dépendait des Métropoli

tains, et chez lesquels on voyait un grand

nombre d'abus.

Alexandre VII, né d'une famille illustre,

fut vice-légat à Ferrare , nonce en Allema

gne, évêque, et dans la suite cardinal : il

devint enfin pape après Innocent X. On ne

put jamais lui reprocher aucune faute qui

échappe ordinairement à fa jeunesse : l'es

prit et la vertu brillèrent en lui dès l'aurore

de ses tendres années.

Les commencemens de son pontificat

furent embellis par plusieurs réformes. Un

de ses premiers soins fut de confirmer ta

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DE L'ÉGLISE. 3 17

bulle d'Innocent X, son prédécesseur,

contre les cinq propositions de l'évêque

Jansénius , et de prescrire la fameuse for

mulaire de »656. Louis XIV fit enregistrer

ces deux bulles au parlement, d'accord

avec le Saint-Père.■

Il embellit Rome de plusieurs édifices

magnifiques , n'épargna rien pour achever

le collége de la Sapience , qu'il orna d'une

belle bibliothèque. Il aima les lettres et les

cultiva avec succès. Nous avons de Sa Sain

teté des poésies intitulées Philomathi, musœ

Juveniles, qu'il avait composées dans sa

jeunesse , étant membre de l'Académie de

Philûmathie de Sienne.

Anastase II fit du bien à l'Eglise par son

zèle; il était très-lié avec l'empereur Atha-

nase, qui vivait alors, et avec Clovis, roi

de France, auquel il écrivit une lettre char

mante dans laquelle il se félicite de sa con

version et de ses victoires. L'Arianisme avait

tellement étendu son empire, que Clovis

se trouvait alors le seul prince en commu

nion avec Rome. Ce fut à cette époque que

le nom de Fils de l'Eglise, de Roi très

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3 I 8 TRIOMPHE

chretien fut donné aux monarques français

et à ses successeurs.

Adrien l'\ issu d'une ancienne famille

romaine, était doué du caractère prudent

des Romains, réunissant à de sublimes

vertus un génie vaste et solide. llse lia avec

Charlemagne, roi de France, qui vint à

Rome pour défendre ses droits , ainsi que

dans la Lombardie. Ce grand roi confirma

Adrien dans la donation qu'avait faite au

trefois au pape le roi Pepin. Adrien, de

son côté , créa Charlemagne patrice de

Rome. Ce bon souverain pontife secourut

les Romains dans une famine , et répandit

sur eux de grandes aumônes : il embellit

l'Eglise de saint Pierre d'ornemens magni

fiques.

Clément PIII, originaire de Florence ,

fut d'abord auditeur de Rote et référendaire

de Sixte V , qui l'honora de la pourpre ro

maine. Après avoir été pénitencier et légat

en Pologne , où il montra visiblement son

zèle pour la religion catholique , il monta

sur la chaire de saint Pierre après Inno

cent IX.

Ce pontife était attaché à Henri IV ; mais

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de l'église. 319

les Espagnols Payant prévenu contre Sa

Majesté, et en faveur de Philippe II, il en

voya une bulle pour refuser l'absolution à

Henri IV. Cependant, ayant reconnu son

erreur par la voie de Duperron et d'Ossat ,

il se réconcilia avec le bon Henri. Ce bon

pontife, enchanté lui-même de sa réconci

liation , voulut conserver le souvenir pré

cieux de cette grande époque par des mé

dailles où se trouvaient d'un côté l'effigie

de Clément VIII, et de l'autre celle de

Henri IV.

Sous son pontificat , les Grecs reconnu

rent la primatie de l'Eglise romaine. Le

livre de Molina de la Compagnie de Jé-

' sus ayant suscité des querelles entre les Do

minicains et les Jésuites sur les matières dé

la grâce , le roi d'Espagne renvoya les an

tagonistes à Clément VIII, qui établit à

H orne les fameuses congrégations de Ai*xi-

liis , composées de prélats distingués. Ce

vénérable pontife assistait aux conférences

qui y avaient lieu. Les consulteurs ne furent

pas favorables à Molina ; ainsi ces choses

continuèrent sous Paul V , son successeur.

Clément VIII rendit de grands services à

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320 TRIOMPHE

l'Eglise; il corrigea le cérémonial desévê-

ques et le pontifical romain. Il fut aussi bon

pape que bon prince; il abolit les duels

dans ses Etats; il établit une congrégation

pour l'examen des nouveaux évêques en

Italie; il réprima les brigandages usuraires

des Juifs en ne leur permettant de s'établir

qu'à Rome , à Ancône et à Avignon. Il ra

mena un grand nombre d'hérétiques au

sein de l'Eglise , et contribua beaucoup à

la paix des Vervins^ en 15g8, après la mort

d'Alphonse II , duc de Ferrare et de Mo-

dène : il accrut le domaine ecclésiastique

du duché de Ferrare.

Grégoire XP, nommé Alexandre Ludo-

visio, fut pape en 1621 après Paul V; il

avait été successivement archevêque de Bo

logne , sa patrie , et nonce en Espagne , où

il pacifia les démêlés entre ce monarque et

le duc de Savoie. Son élection fut générale

mentapprouvée : il était alors âgéde soixante

ans; il avait toujours montré de l'équité, de

la candeur et beaucoup de justice dans les

emplois qu'il avait occupés.

Il fit un nouveau réglement pour le con

clave , à l'égard des élections ; il régla que

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DE L'ÉGLISE. 32 1

les scrutins des cardinaux seraient secrets

dorénavant, et qu'on ne ferait plus usage

des suffrages donnés à haute-voix, ce qui

pouvait donner lieu à des erreurs.

Il érigea l'évéché de Paris en métropole ,

fonda le collége de la Propagande , en 1622.

La maison palatine ayant succombé sous

les armes bavaroises , le pape aida l'empe

reur dans le dessein qu'il avait de relever

cette famille puissante. Maximilien , duc de

Bavière, également reconnaissant de ce ser

vice , donna à Grégoire XV la plus grande

partie de la bibliothèque palatine.

En 1623 , la cour de France ayant formé

une ligue contre la maison d'Autriche pour

la [restitution de la Vatteline , Philippe III

pressa Grégoire XV d'interposer sa média

tion pour terminer ce différend. Il fit beau

coup de bien à Rome pendant les deux ans

qu'il occupa le Saint-Siége; il y entretint

l'abondance et déploya tous ses soins et ses

richesses daus le sein des pauvres et des in

firmes ; il réunissait à de grandes vertus de

très-grands talens : on lui doit la publication

de plusieurs collections importantes.

Jean IX, natifde Tibur, fils de Rampolde,

ai

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32 2 TRIOMPHE

fut élu pape après Théodore II : il "tut tou

jours en union avec Charlemagne, Lothaire

et Louis, ainsi qu'avec un empereur. Dans

un concile , il déclara excommunié quicon

que s'opposerait à leur puissance et vou

drait résister à leur autorité.

Il fit 'briller un z.èle éclatant pour la gloire

de la religion; il écrivit à Stylien, évêque de

Néocésarée, pour 'le louer de la fermeté avec

laquelle i) avait résisté au schisme de Pho-

tius. Ce fut par ses ménagemens heureux

que l'empereur promit de conserver invio-

lablement les privilèges de l'Eglise.

Eugène III, né à Pise , devint abbé de

Saint-Anastase après avoir passé quelque

temps à Clairvaux sous la discipline de

«aint Bernard. Il fut sacré pape au monas

tère de Earfe , parce qu'il craignait la fu

reur des Romains, nouvellement excités

par les discours séditieux d'Arnaud, qui

ne reconnaissaient point l'autorité du pape,

et demandaient la confirmation du Sénat

nouvellement établi. Ils s'étaient porté à

d'autres excès ; rls avaient abattu les maisons

des cardinaux; ils forçaient les pélerins à

payer une offrande qu'ils gardaient pour

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de l'église. 523

eux : ils portèrent leur audace jusqu'à en

tuer plusieurs.

Eugène y établit l'ordre et la paix, fit

connaître que le Sénat ne tenait son pou

voir que de lui. Les Romains le reçurent

en pompe dans Iiome; mais ils exigèrent

ensuite qu'il détruisît Tibur. Pour se déro

ber à tant d'honneurs , il quitta Rome et

passa le Tibre. Ce fut vers cette même épo

que, en ii455 que la prise d'Edesse par

Zengui consterna les chrétiens d'Orient et

les contraignit à demander des secours à

toutes les puissances de l'Europe.

Eugène,informé de tous ces désastres par

Hugues , évêque de Gabela en Syrie , écrivit

à Louis-le-Jeune , pour l'exorter, ainsi que

> tous les Français, à venir au secours des

Croisés.

Les mouvemens séditieux des Romains

obligèrent ce souverain pontife à fuir : il

se réfugia en France , où le roi le reçut en

pompe dans Paris, en allant à sa rencontre.

llse retira à Clairvaux, où il vivaiteomme

un religieux , jusqu'à ce qu'il retournât à

Rome. Il fit la réforme des chanoines de

Sainte-Geneviève, condamna les erreurs

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32 4 TRIOMPHE

de Gilbert de la Porrée. Nous possédons de

de lui des décrets, des épîtres et des consti

tutions.

Eugène IV, nommé Gabriel Condolmero,

fils d'une famille roturière, commença à

être chanoine de la congrégation de Saint-

Grégoire-en-Alga , de là évêque de Sienne.

Son oncle, Grégoire XII, le fit cardinal,

sous le titre de saint Clément : il fut élu

pape le 3 mars 1 43i , après Martin V.

Il lança une bulle pour dissoudre le con

cile de Bâle. L'empereur Sigismond mit

d'accord Eugène avec les pères de ce con

cile. Ce bon pontife fit tous ses efforts pour

unir l'Eglise grecque à la latine ; mais cette

réunion ne fut pas de longue durée , il fut

mal récompensé des services qu'il avait

rendu à l'Eglise; les pères du concile de

Bâle se révoltèrent contre lui, et osèrent

le déposer injustement.

Les rois de France, toujours bons à l'é

gard des souverains pontifes ; le roi d'An

gleterre , l'empereur et les princes d'Alle

magne se plaignirent au concile d'un si

mauvais et si injuste traitement envers ce

bon pontife, qui se retira à Florence , tan

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DE LÉGLISE. 32D

disque Amédée VIII était à Rome, nommé

pape par ce concile hérétique.

Eugène mourut en i447 , il fat extrême

ment regretté, et d'autant plus, qu'il s'était

toujours montré l'ami sincère de l'ordre et

de la pajx ; il ne se mêla jamais des affaires

des princes; il obligea les Grecs à se sou

mettre à l'Eglise romaine; il convertit les

Arméniens et les Jacobites; il composa

quelques écrits contre les Hussites; il fonda

plusieurs églises; il aima les savans et les

pauvres, en leur faisant part de ses bien

faits et de ses grâces.

Saint Innocent I", originaire d'Albo , fu,t

élevé, après la mortd'Athanase, sur le trône

pontifical par ses vastes lumières et ses émi-

nantes vertus. Il fut toujours très—lié d'a

mitié avec les Chrysostôme, les Jérôme et

les Augustin]qui vivaientt de son temps.

L'empire d'Occident était gouverné par

Honorius; l'Eglise d'Afrique était divisée

par la secte des Donatistes, il employa avec

succès son crédit auprès de l'empereur,

pour obtenir des lois sévères contre les Do-

natistes. L'irruption des Goths sous la con

duite d'Alaric, amena de grands événemens,

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32Ô TRIOMPHE

à un tel point , que ce chef des barbares

menaça la capitale du monde chrétien.

Saint Innocent quitta Rome pour aller trou

ver Honorius, afin de traiter de la paix avec

AUaic.

Après ces malheurs et ces guerres r il

revint à Rome où il fut reçu en pompe

comme un ange consolateur; il redoubla

ses travaux , ses soins et son zèle pour faire

fleurir la religion. Il condamna les erreurs

de Pelage, déjà combattus avec éloquence

par saint Jérôme , et saint Augustin. Nous

possédons de ce saint pontife des décrétâtes

et des lettres qui eurent pour objet l'éta

blissement du dogme , sur la tradition et

TEcriture-Sainte.

Nous ne pouvons donc pas ignorer que

dans tous les siècles les princes de l'Eglise

se sont unis aux bons princes de la terre

pour contribuer au bonheur des peuples

et au triomphe de la religion.

Page 342: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

de l'église. 3? 7

CHAPITRE XIV.

Vénération des Pontifes envers les Souverains , et vénération,

des Souverains envers les Pontifes.

Qu'elle délectation délicieuse goûte mon

ame ravie , à la vue des saints pontifes , re

cueillant avec modestie les honneurs de la

pompe royale , et rendant à leur tour l'en

cens de leurs hommages aux héritiers des

trônes légitimes, pour donner de hautes

idées aux hommes , des princes que la pro

vidence conserve pour diriger paisiblement

les peuples, et pour leur faire contempler

avec ravissement ces instrumens merveil

leux, qui soutiennentla puissance vénérable

de l'Eglise.

Innocentll, originaire de la maison des

Papir , devint chanoine régulier de Latran»

cardinal-diacre de Sainte-Ange , et fut en

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3^8 TRIOMPHE

fin élevé sur le trône pontifical par la ma

jeur partie des cardinaux. Son élection fut

approuvée par toute l'Europe, et par saint

Bernard; mais il eut pour anti-pape Pierre

de Léon, qui opprima par une faction ce

bon pontife , qui se réfugia en France, où

tous les papes ont été bien accueillis dans

tous les temps , des peuples et surtout des

bons monarques.

Ce fut à Cluni, qu'Innocent II, ainsi que

ses cardinaux furent reçus avec tous les

honneurs possibles. Le roi de France , ac

compagné de la reine, et des princesses

enfans , vint à sa rencontre jusqu'à Saint-

Benoit sur Loire , se prosterna à ses pieds ,

et offrit ses services à l'Eglise et à ce légi

time pontife, qui visita plusieurs monas

tères de France, et fut accueilli à Saint-De

nis, par le fameux abbé Suger, qui alla au-

devant de Sa Sainteté , en procession avec

tout son chapitre.

Innocent II, y fit une entrée solennelle,

étant couronné d'une thiare, ornée d'un

cercle d'or ; étant monté sur un cheval

blanc , que les barons et les vasseaux de

l'abbaye conduisaient par la bride; un

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DE L'ÉGLISE. 3-2i)

peuple immense s'y était rendu de Paris ,

pour contempler cette entrée triomphante.

Quelque temps auparavant, ce vénérable

pontife était passé en Lorraine, ensuite à

Liège , où le roi Lothaire se trouva avec la

reine pour le recevoir , et le faire recon

naître dans une assemblée solennelle d'é-

vêques et de seigneurs, qu'il avait convo

qué. Ce prince , vraiment digne du nom

glorieux très-chrétien, s'avança à pied dans

la place,"devant l'Eglise cathédrale, tenant

d'une main une verge, pour écarter la mul

titude, et de l'autre la bride du cheval

blanc, que le pape montait.

Ce vénérable souverain pontife, désirant

retourner à Rome , le roi Lothaire l'y ac

compagna pour le protéger, et le mettre a

labri de la fureur de ses ennemis; il y re

çut en même temps de sa main paternelle

la couronne impériale, dans l'Eglise de

Latran.

L'anti-pape faisant injustement la guerre

à Innocent , Lothaire repassa les Alpes et

y aporta de nouveaux secours. Lorsque le

calme eut succédé à la tempête, et que le

vaisseau de l'Église cessant d'être agité,

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33o TRIOMPHE

/

commença à jouir des charmes de la paix ,

dans Rome, Sa Sainteté répara tous les dé

sordres commis pendant l'usurpation ; il

tint un concile dans le palais de Latran, où

se trouvèrent mille évêques.

Il s'occupa de la condamnation des er

reurs d'Abailard, et d'Arnaud de Bresse.

Il honora le trône pontifical par ses subli

mes vertus. 11 veilla d'une manière particu

lière sur la justice, et faisait prêter serment

aux juges et aux avocats. Plusieurs d'entre

eux étaient gagés pour exercer la justice

gratuitement.

Innocent IV, natif de Gène, fut d'abord

chancelier de l'Eglise romaine ; il fut ho

noré de la pourpre par Grégoire IX en 1227;

enfin il parvint à la chaire de saint Pierre ,

en 1243 , après la mort de Célestin IV.

Pendant long - temps Innocent IV avait

été fort lié avec l'empereur Frédéric , mais

malheureusement sa majesté ne voulant pas

ménager les intérêts de l'Eglise , perdit son

amitié; ce savant pontife persécuté se réfu

gia en France , où il fut bien accueilli par

saint Louis, qui fut le visiter à Lyon, et

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de l'église. 33 i

tâcha d'appaiser la colère de cet empereur,

injustement irrité contre Sa Sainteté.

Ce vénérable pontife était profond dans

la jurisprudence; il était appelé le père du

droit. Nous avons des fruits de son génie ,

un ouvrage précieux intitulé A'pparatus su

per Decretales. On croit que c'est lui qui

donna le chapeau rouge aux cardinaux.

Il avait peut-être des sentimens ultramon-

tains qui ne furent pas approuvés de tout

le monde, mais il eut toujours une vie irré

prochable et magnifique.

Innocent VI, appelé Etienne d'Albert ,

natifde la paroisse de Beissac, au diocèse de

Limoges, commença dès son jeune âge à

honorer sa famille, par ses grands talens,et

ses belles vertus; il professa le droit à Tou

louse, et devint évêque de Noyon , ensuite

de Clermont, de là cardinal-évêque d'Os-

tie, et enfin pape, après la mort de Clé

ment VI.

Il fit briller dans son auguste personne

un zèle éclatant, la simplicité et la modestie

apostolique. Il fit une constitution contre

les commandes. Quatre ans après son exal-

/

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3âï TRIOMPHE

/

tation, il fonda la Chartreuse de Ville—

Neuve-les-Avignon. (1)

Il Employa tous ses soins à reconcilier

les rois de France et d'Angleterre. On vit

toujours briller dans son auguste personne,

les belles qualités d'un pape excellent. Ami

de la justice, il punit jusque dans sa cour les

scandales. Protecteur des gens de lettres , il

en récompensa plusieurs. Zèle pour l'Eglise,

il en fit réparer toutes les ruines causées

dans quelques endroits , par ses ennemis.

Il déploya toutes les richesses de sa charité

envers les pauvres, qu'il accueillait comme

ses frères. Il aima beaucoup les Français et

chercha toujours à les soustraire au mal

heur qui les menaçait.

Innocent f///,nommé Jean-Baptiste Tibo

noble Génois , Grec d'extraction , naquit

en i 432 , il fut quelque temps à la cour de

Naples. Etant devenu dataire , cardinal-

évêque de Melfi, sous Sixte V, il s'acquitta

(1) Il n'y a pas long-temps que j'ai parcouru cette Char

treuse, où j'ai contemplé les mausolées splendides de quelques

papes; cette Chartreuse était plus magnifique que la Grande

Chartreuse de Grenoble , que j'ai vue aussi de nos jours avec

ravissement.

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de l'église. 333

avec un merveilleux succès de plusieurs

commissions importantes ; il signala son

zèle en réunissant les princes chrétiens

contre les Turcs. Par le grand maître de

Malte, il se fit remettre Zizime, frère de

Bajazet II.

Enfin, il fut honoré de la thiare en i4S4i

en recompense de son mérite éminent et de

ses grandes actions. Il se montra partout un

excellent pontife; il fut un modèle de bien

faisance et de douceur; on vit toujours bril

ler, dans son auguste personne, la science

sans orgueil, l'amour de la paix sans osten

tation.

Il fut très-lie d'amitié avec Charles VIII,

roi de France; il lui accorda toutes les fa

veurs que son zèle légitime pouvait lui con

céder. Nous possédons de Sa Sainteté quel

ques ouvrages, un traité du sang de Jésus-

Christ sur la puissance de Dieu, sur

l'immaculée conception de la sainte Vierge.

Il ordonna que ce dogme serait prêché dans

toute l'Eglise , sans néanmoins accuser d'hé

résie ceux qui soutiendraient l'opinion con

traire. Il essaya d'accorder la doctrine de

saint Thomas et celle de Scot; il employa

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334 TRIOMPHE

tous ses soins pour apaiser la grande dis

pute des stigmates de sainte Catherine-de—

Sienne, contre les Jacobins et les Francis

cains.

11 confirma l'ordre des Minimes , la

congrégation des Angustins déchausses, et

l'ordre de la Conception de lasainte Vierge,

instituée par Béalrix de Silva. Il condamna

plusieurs propositions avancées par Jean

Pic dela Mirandole comme suspectes d'hé

résie; il fit briller la justice dans toutes ses

actions, et n'accorda qu'au mérite toutes

les dignités ecclésiastiques, qualités ma

gnifiques d'un vicaire de Jésus-ChrisU

Innocent XII, Napolitain , né d'une fa

mille distinguée , fut d'abord employé par

les papes dans diverses dignités de l'Eglise;

il monta enfin sur le trône pontifical après

Alexandre VIII ; il eut toujours le bonheur

de jouir d'une brillante réputation pendant

tout son pontificat.

Son élection causa une jqie étonnante

aux Romains. Son amour pour les pauvres

était si grand qu'il les appelait ses neveux,-

il répandit dans leur sein toutes sortes de

bienfaits; il fonda plusieurs hôpitaux , et

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de l'église. 335

agrandit les ports d'Anzio et de Nettuno.

Sous son règne il fut question , entre la

cour de Rome et la cour de France , des

quatre articles de la déclaration du clergé

gallican. Louis XIV écrivit à ce bon pon

tife , qui , satisfait de la lettre des évêques

et de cet illustre monarque , accorda les

bulles si long-temps désirées, et la paix ré

gna entre les deux cours. Il procura des

secours au roi d'Angleterre pour le rétablir

dans ses droits ^ il vola également au se

cours des Vénitiens.

D'après la décision d'une congrégation

établie pour examiner la question, le livre

dé l'explication des maximes des saints fut

condamné par un de ses brefs; l'ouvrage de

l'immortel Fénélon fut aussi condamné.

En 1694 , Innocent XII donna une nou

velle preuve* de sa droiture et de sa pru

dence , en adressant à l'archevêque de Ma-

lines un bref, par lequel il lui défendit

d'inquiéter aucune personne sur des accu

sations vagues d'hérésie ou de jansénisme,

sans les avoir juridiquement convaincus

d'attachement aux erreurs condamnées.

Honorius II fut élevé sur le trône ponti

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336 TRIOMPHE

fical après Caliste II. Il était natif de Bolo

gne , dont il avait été archidiacre; le pape

Pascal lui avait donné l'évéché (TOstie, et

enfin, il devint souverain pontife.

Son élection fut assez vivement disputée;

il ne fut nommé qu'après son rival , qui eut

une partie des voix. Sqo concurrent se dé

mit de son titre, et lui-même, rempli de

piété, apréhendant par un vrai scrupule de

sa tendre conscience que sa nomination

ne fût légitime , voulait renoncer à la thiare.

On le vit se dépouiller de tous les ornemens

de sa dignité , lorsque tous les cardinaux le

réhabilitèrent solennellement, et de suite la

paix régna parmi les deux partis.

Il prit part à la querelle de l'évêque de

Paris, contre lequel son clergé s'était ré

volté à cause de la réforme qu'il avait voulu

y opérer : heureusement cet évêque triom

pha de ses ennemis.

Honorius favorisa la conversion de la

Poméranie , entreprise par saint Othon ,

évêque de Bamberg , et sollicitée par le duc

de Pologne , Boleslas. Il donna l'habit aux

Templiers , dont l'ordre venait d'être établi.

Il confirma solennellement, avec une vive

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DE L'ÉGLISE. 337

joie, l'élection de Lothaire à l'empire; il

condamna les abbés de Cluny et du Mont-

cassin , accusés de divers crimes. On voit

plusieurs de ses lettres dans la collection

des papes.

Honorius III, romain de naissance , fut

élevé sur la chaire de saint Pierre après In

nocent III. Il confirma l'ordre de Saint-Do

minique et celui des Carmes. ( Ces derniers

religieux tirèrent leur nom du Mont-Car-

mel en Syrie ; le patriarche de Jérusalem

leur donna une règle que Honorius ap

prouva.)

Ce vénérable pontife fit prêcher des croi

sades pour le recouvrement de la Terre-

Sainte. 11 est le premier pape qui ait accordé

des indulgences dans la canonisation des

saints. Nous avons de lui plusieurs ouvrages

précieux.

Il couronna Frédéric II , empereur d'Al

lemagne. Il eut de grandes relations avec

Louis XIII , successeur de Philippe; il était

très-lié avec ce prince , qui , ayant reçu

avec vénération d'excellens conseils de

Sa Sainteté , les mit en exécution avec

succès.

22

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338 TRIOMPHE .

Nous voyons donc avec une grande satis

faction que les pontifes vénérables se sont

fait toujours un vrai plaisir de s'unir aux

bons monarques pour étendre la gloire de

la religion.

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DE L'ÉGLISE. 339

CHAPITRE XV.

Union de la thiare avec la couronne.

Si l'accord merveilleux des princes vé

nérables de l'Eglise, avec les princes dis

tingués de la terre , n'avait éclaté que dans

quelques époques remarquables, on aurait

raison de me dire que c'est une ostentasion

frivole, dont je m'en orgueillis avec une sa

tisfaction ridicule. Non , ce n'est pas seule

ment dans un temps où l'on a admiré leurs

amitiés passagères ; mais il est incontestable

ment sûr par l'histoire, qui nousen offre de

magnifiques tableaux , que les bons pon

tifes ont été toujours intimement et solide

ment unis avec les bons monarques pour

le salut des hommes et pour la gloire de

Dieu.

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3/|.0 TRIEOMPHE

Etienne III', Sicilien d'origine, fils d'O-

livus, fut ordonné prêtre par le pape Za-

charie; il fut élu pape après l'expulsion de

Constantin et de Philippe , anti-papes , qui

avaientusurpés le Saint-Siége pendant treize

mois. Rome le reçut avec une pompe éton

nante; et malgré son bon cœur et tous ses

soins, il ne put s'opposer aux vengeances

atroces exercées contre les intrus et leurs

partisans.

Etienne III étant lié d'amitié avec le roi

de France , et étant plein de confiance

pour Sa Majesté, lui envoya Sergius pour

le prier de lui envoyer des secours; mais

malheureusement ce bon monarque mou

rut lorsqu'il arriva. Il montra combien il

était attaché aux Français et aux rois de

France dans une lettre qu'il écrivit aux

deux rois français à l'égard de la reine

Berthe, qui avait intention de marier un de

ses enfans avec une fille de Didier, roi des

Lombards.

Souvenez-vous , leur dit-il , que le roi

votre père apromis en votre nom que vous

demeureriez fermes dans la fidélité de la

sainte Eglise , à l'obéissance et à l'amitié

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DE L'ÉGLISE. 34l

des papes, et que vous avez renouvele' les

mêmes promesses par vos lettres. Ce souve

rain pontife se montra grand observateur

des traditions ecclésiastiques, et eut soin de

renouveler plusieurs anciennes coutumes

pour l'honneur du clergé.

Etienne If, fils d'une famille noble , de

vait son instruction aux soins du pape

Adrien, et son diaconat à Léon, qui l'esti

mait pour ses vertus et son application à

l'étude des choses spirituelles : il fut élu

pape d'un consentement unanime.

Plein de vénération pour les monarques

de France , il se disposa peu de temps après

à aller visiter Louis IV, qui. le reçut avec

les plus grands honneurs. Ce bon pontife

le couronna empereur, ainsi que son épouse

Ermengarde impératrice. Il revint à Rome

chargé des dons des Français. La mort ne

lui permit pas d'exécuter plusieurs grands

desseins qu'il avait formé pour la gloire de

l'Eglise.

Martin /^Romain de naissance, fils d'une

ancienne et illustre famille nommée Othon-

Colonne, fut cardinal-diacre , et monta sur

le trône pontifical le 11 novembre 1417i

Page 357: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

34^ TUIOMPHE

après l'abdication de Grégoire XII. Jamais

pontife ne fut plus solennellement inau

guré. Il fut à l'église monté sur un cheval

blanc, dont l'empereur et l'électeur palatin

tenaient les rênes. Un grand nombre de

princes et un concile entier fermaient la

marche triomphante. Après avoir été or

donné prêtre et évêque , il fut couronné de

la triple couronne, que les papes avaient

porté depuis deux siècles environ.

Etant sur la chaire de saint Pierre , son

premier soin fut de lancer une bulle contre

les Hussites de Bohême, qui causaient jour

nellement des ravages. Le premier article

de cette bulle est remarquable , en ce que

le pape y veut que celui qui sera suspect

d'hérésie, jure qu'il reçoit les conciles gé

néraux , et en particulier celui de Cons

tance, représentant l'Eglise universelle, et

qu'il reconnaisse que tout ce que ce der

nier concile a approuvé et condamné doit

être approuvé et condamné par tous les fi

dèles.

Il tint les dernières sessions du concile

de Constance au commencement de 14i8.

On avait crié pendant deux ans dans cette

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DE L'ÉGLISE. 343

assemblée contre les annateS, les exemp

tions, les réserves, les impôts des papes sur

le clergé au profit de la cour de Rome : il

promit de remédier à tout; mais le concile

cessa , et les choses n'eurent pas leur effet.

Le retour du pape à Rome fut si beau ,

si solennel, qu'on en marqua le jour dans

les fastes de la ville pour en conserver un

éternel souvenir. Le schisme n'était pas en

core éteint, puisque l'anti-pape Benoît XI II

vivait. Après la faction, les deux seuls car

dinaux de ce schisme élurent un chanoine

espagnol : ce prétendu pape se démit quel

que temps après de son faux titre.

Notre vénérable pontife, plein de bonté

pour cet intrus converti^ lui donna l'évéché

de Majorque. Ce fut par sa douceur qu'il

mit fin au schisme affligeant qui avait causé

tant de douleurs à la véritable Eglise pen

dant un demi-siècle. >

Il avait convoqué un concile à Pavie dans

le dessein de réformer l'Eglise; mais des

évenemens contrarièrent ses vues. Cet il

lustre souverain pontife avait Jes qualités

d'un prince et les vertus d'un apôtre. L'E

glise lui est redevable de sa paix et de son

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344 TRIOMPHE

union, l'Italie de son repos, Rome de son

rétablissement, et la littérature de quelques

ouvrages.

Nicolas I'\ dit le grandfils de Theodore ,

Romain de naissance diacre de l'Eglise de

Rome, fut élu pape après Benoit III, et

sacré le même jour dans l'Eglise de

Saint-Pierre en présence de l'empereur

Louis II.

Une ambassade solennelle lui fut adres

sée par l'empereur Michel III, qui suppliait

Sa Sainteté de faire cesser le schisme qui

venait d'éclater au sujet de la déposition

du patriarche saint Ignace, auquel on

avait substitué Photius. Le pape envoya des

légats à Constantinople pour éclairer cette

affaire. Le résultat des informations fut que

la doctrine de Photius n'était point hété

rodoxe, mais que la déposition de saint

Ignace était irrégulière.

Les soins qu'employa ce souverain-pon

tife pour la propagation de la foi produisi

rent la conversion de Bogoris , roi des Bul

gares. Ce monarque embrassa la religion

avec une partie de ses sujets, en 865. Ce

souverain pontife lui envoya des évêques,

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DE LÉGLISE. 345

des prêtres et tant d'autres choses que le

roi lui avait demandé par la voix de son

fils, qu'il avait envoyé à Kome pour cela.

Ce chefauguste de l'Eglise, plein de con

fiance pour l'Eglise gallicane, écrivit aux

évêques de France , en 867 , pour les infor

mer des calomnies que les Grecs vomis

saient contre l'Eglise de Rome, et des re

proches injustes qu'ils lui osaient adresser. .

Nous avons de lui un grand nombre de

lettres sur différens points de morale et de

discipline , qu'on a recueillies à Rome en.

i54a. Sa charité, sa fermeté et son zèle lui

ont conquis une place glorieuse dans le

Martyrologe, et l'ont fait regarder comme

un des plus grands souverains pontifes.

Nicolas //, nommé Gérard de Bourgogne,

né dans cette province, fut elevé par ses

sublimes vertus sur le siége pontifical à

Florence, et ensuite à Rome, où il fut placé

le 28 décembre io58, et couronné le 18jan

vier io5g. C'est le premier pape dont l'his

toire ait marqué le couronnement.

Il fit déposer un anti-pape qu'une fac

tion ennemie lui avait opposé. Sous son

pontificat, un concile convoqué à Rome

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3^6 TRIOMPHE

décida qu'à la mort du pape les évêques-

cardinauxtraiteraientensembleles premiers

des affaires électorales, qu'ils appelleraient

les clercs-cardinaux , afin que le reste du

clergé et du peuple pût donner justement

leur consentement.

Il avait une profonde vénération pour

les souverains ; un de ses décrets en offre

une preuve non équivoque : On choisira

dans le sein de CEglise, s'il s'y trouve un su

jet capable , sauf Phonneur dû à notre cher

fils Henri, qui est maintenant roi, et quisera,

s'il plaît à Dieu, empereur, etc.

Ce bon pontife passa ensuite dans la

Pouille , à la prière (des Normands , qui lui

restituèrentles domaines del'Egliseromaine,

dont ils s'étaient emparés : ij y fit un traité

avec eux, après avoir levé l'anathême qu'ils

avaient encouru.

Richard, l'un de leurschefs, fut confirmé

dans la principauté de Capoue, qu'il avait

conquise sur les Lombards. Robert Gui-

chard, autre chef de ces conquérans, fut

confirmé dans le duché de la Pouille et de

la Calabre. Nous avons de ce vénérable

pontife, qui a toujours joui d'une bonne ré

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DE L'ÉGLISE. 347

putation , neuf lettres pontificales qui con

cernent les affaires de France.

Nicolas IV, général des frères mineurs ,

né à Ascoli, dans la Marche d'Ancône, fut

élevé sur le trône papal en 1288 : il renonça

deux fois à son élection , et n'y consentit

qu'avec beaucoup de peine. Le commen

cement de son pontificat fut embelli par

une ambassade d'Argon, kan des Tartares.

Ce prince demandait le baptême et pro

mettait de faire la conquête de Jérusalem

pour les chrétiens; mais ses projets s'éva

nouirent.

Ce souverain pontife redoubla ses efforts

pour exciter le zèle des princes chrétiens ;

il fit assembler des conciles; mais sa mort

renversa tous ses grands et magnifiques

projets. En 1289, il érigea l'Université de

Montpellier. Il composa plusieurs ouvrages:

1*. des commentaires sur l'Ecriture sainte,

2°, sur le maître des sentences; 3°. plusieurs

bulles en faveur des Franciscains ses con

frères.

Paul 1" succéda sur la chaire de saint

Pierre à Etienne II , son frère , en 757 ; il

donna avis de son élection à Pepin, roi de

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348 TRIOMPHE

France, lui promettant union, amitié , fide

lité, jusqu'à l'effusion de son sang. Ce bon

prince , très-chrétien , lui prêta tous les se

cours possibles pour le défendre contre les

vexations de Didier, roi des Lombards. Il

gouverna l'Eglise avec prudence et sa

gesse, et fonda diverses églises. Nous avons

de Jui vingt-deux lettres dans le recueil de

Gretser.

Sergius /'r, originaire d'Antioche, fut

mis sur la chaire de saint Pierre, après là

mort de Conon , en 687 ; il désapprouva les

canons du concile connu sous le nom de

In trulla.

C'est ce souverain pontife qui statua le

chant de VAgnusDei, et qui reçut les hom

mages de Cerdowalla, roi de Wertsex, qui

vint à Rome pour recevoir le baptême.

Sergius, sensible à une piété si héroïque ,

rendit toutes sortes d'hommages à ce prince,

et lui donna le baptême de ses mains.

Sergius II, Romain de naissance , fut

élevé par son mérite. Etienne IV le fit sous-

diacre; Pascal Ier l'ordonna prêtre, et Gré

goire IV le fit archi-prêtre. A la mort de

Grégoire, ilfutélu d'un consentement una

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DE L'ÉGLISE. 34<)

nime pour monter sur le trône papal. La

noblesse romaine, malgré une dissention

qui s'éleva, le porta en triomphe sur la

chaire de saint Pierre.

Sergius reçut avec toutes sortes d'hon

neurs Louis, roi d'Italie, que Lothaire em

pereur lui envoya à Rome. Ce bon roi,

plein de la plus sincère vénération pour le

pape, fut couronné par Sa Sainteté, et sacré

roi des Lombards.

Sylvestre i", Romain de naissance, fut

élu pape après saint Miltiade : il avait été

ordonné prêtre par saint Marcellin, pape.

Son pontificat fut heureux, parce que le

grand Constantin avait fait cesser les per

sécutions, et faisait aimer la religion chré

tienne en enrichissant les églises de ses

dons et de sa magnificence.

Les Donatistes troublèrent la paix qui

régnait dans l'Eglise. Ce fut aussi dans ce

temps qu'éclata l'hérésie d'Arius. Constan

tin, qui convoqua cet hérésiarque dans le

premier concile écuménique de Nicée ,

triompha. C'est sous .les auspices de ce

grand monarque, qui était très-lié avec

Page 365: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

35t) TRIOMPHE

Sylvestre, que la religion romaine se for

tifia et étendit son empire.

Sylvestre //, né en Auvergne, reçut dès

son bas-âge ; dans le monastère d'Auriac ,

la plus.brillante éducation. Ses rares talens

l'avaient fait rechercher par l'empereur

- Ôthon II , qui lui donna l'abbaye de Bobio,

et ce choix fut applaudi de tout le monde.

Après la mort d'Othon , il revint en France

et devint précepteur de Robert, fils de Hù-

gues-Capet : il se montra un zélé gallican.

Après la mort de Grégoire V, il fut élevé

sur le trône pontifical , et , au milieu de ce

siècle d'ignorance et de barbarie, il fit bril

ler ses grands talens , ses vastes lumières et

ses éminentes vertus. On lui attribue l'intro

duction du chiffre arabe ou indien. C'est ce

grand homme qui inventa la première

horloge à roue. Sa grande science était

si étendue, qu'il semblait opérer des mer

veilles. Nous avons de cet illustre chef de

l'Eglise cent quarante-neuf épîtres, un dis

cours contre la simonie, et quelques opus

cules de mathématiques.

Leon III, Romain de naissance, reçut

son éducation au palais de Latran; il fut

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DE 1/rGUSF. 35 I

ordonné prêtre du titre de Sainte-Suzanne.

On vit toujours briller dans son auguste

personne le zèle, le courage pour la gloire

de la religion; ses mœurs pures, jointes à

son esprit, lui gagnèrent tous les cœurs à

un tel point, qu'il fut élu souverain pontife

d'un consentement unanime.

Il se lia d'amitié avec Charlemagne , roi

de France, en lui offrant l'obéissance. Ce

grand monarque répondit à ces hommages

ravissanspardes présens magnifiques. Qua

tre ans après , en 7gg , une conspiration af

freuse éclata contre ce pontife; on chercha

à lui arracher la vie; mais quelques-uns de

ses domestiques intrépides l'arrachèrent des

portes de la mort ( tant il est vrai qu'on a

toujours persécuté les bons pontifes!)

Il se réfugia en France, asile sûr des chefs

augustes de l'Eglise : il y fut reçu avec une

pompe solennelle, au milieu des cantiques

de jubilation. Léon, après quelque temps,

étant escorté par l'armée française , vint à

Rome , et y entra en triomphe. Charlema

gne quitta Aix-la-Chapelle et alla dans la

capitale du monde chrétien pour y être

couronné : il y fut sacré ainsi que son fils ,

le roi Pepin.

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Ô'JI TRTOMfHE

Ce grand monarque poursuivit les enne

mis de Léon III , et les fit juger par le tri

bunal romain; mais cet excellent pontife ,

à l'exemple du Sauveur, tout puissant au

milieu de l'éclat de sa gloire, intercéda

pour eux, leur sauva la vie. Ce chef au

guste de l'église avait de très-grands talens

et de l'Eloquence. Nous avons de lui treize

épîtres.

Constantin , Syrien de naissance , monta

sur le trône pontifical après la mort de Si—

sinnius, en 708. Ce chef auguste de l'Eglise

illustra la thiare par son zèle et par ses hau

tes vertus, gouverna avec sagesse la sainte

Eglise. 1l fit un voyage en Orient, où il fut

reçu en pompe par l'empereur Justinien,

qui lui fit toutes sortes d'honneurs.

Nous voyons évidemment que les chefs

augustes de l'Eglise se sont unis ensemble,

non-seulement dans quelques époques cé

lèbres , mais dans tous les siècles , pour con

tribuer au bonheur de la société et au triom

phe de l'Eglise.

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de l'égl1se. 353

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CHAPITRE XVI.

Pontifes amis des Souverains et des arts libéraux.

Non-seulement nous sommes enchantes

de voir les princes vénérables de l'Eglise

chérir les bons monarques de la terre;

mais nous sommes ravis encore en contem

plant leur génie, protecteur des grandes

choses , des sciences et des beaux arts.

Grégoire XInommé Pierre Roger, né au

château de Maumont , dans la paroisse de

Rosier, dans le bas Limousin , fut créé car

dinal par Clément VI, avant l'âge de dix-

huit ans, et reçut de Sa Sainteté plusieurs

bénéfices nécessaires pour soutenir l'éclat

de sa naissance. Son amour pour l'étude

s'étendit sur toutes les sciences qui étaient en

vogue de ce temps, et il y fit d'heureux

a3

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35^ TRIOMPHE

progrès; il joignit à de grands talensde su

blimes vertus. Après la mort d'Urbain V, il

réunit tous les suffrages des cardinaux, et

fut élu pape au premier scrutin en 1370.

Il profita du crédit de sa haute dignité

pour engager les rois de France et d'An-,

gleterre à suspendre leurs hostilités par une

trêve de quatre ans , pour obliger ceux de

Castille, d'Arragon et de Navarre à termi

ner, par une solide paix , la guerre qu'ils se

faisaient, et pour réconcilier la reine de

Navarre avec le roi de Sicile.

Les soins qu'il donnait pour rétablir l'har

monie entre les princes, ne furent point

préjudiciables à ceux qu'il devait au gou

vernement de l'Eglise. Il obtint d'André

Contarini, doge de Venise, qu'on n'admet

trait plus, dans l'île de Candie, d'autres

prêtres que ceux qui auraient été ordonnés

par des évêques du rit latin ou du rit grec

en communion avec le Saint-Siége. Il en

voya au duc de Moldavie, rentré dans le

sein de l'Eglise, des prêtres pieux elsavans,

pour y ramener sa famille et ses sujets.

Il ouvrit, avec l'ex-empereur JeanCan-

tacuzène, une négociation, dans le butdV

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de l'église. 355

pérer la réunion des deux Eglises; sa sol

licitude pastorale s'étendit sur les fron

tières de Hongrie , pour faire cesser l'a

bus des nouveaux convertis , qui, quelque

temps après , retombaient dans le mahomé-

tisme. Son zèle s'étendit aussi sur l'Allema

gne, pour réprimer Abbert, évêque d'Hal-

berstad,qui enseignait ouvertement le plus

absurde fatalisme.

Son zèle s'étendit egalement sur l'Espa

gne où ArnaudMoutanier prêchait en Cata

logne, que toute personne qui portait l'ha

bit de saint François, était sauvé. Il fit

prendre de sages mesures contre certains

moines qui publiaient des propositions té

méraires sur l'Eucharistie.

En France, il déploya tous ses soins pour

engager Charles V à éteindre des sectes

turbulantes qui étaient autant nuisibles à

l'état qu'à l'Eglise , comme les Mbigeois,

les Vaudou, qui agitaient le Languedoc et le

Dauphiné; les Bégards ouTurlupins qui,

par le plus scandaleux cynisme, offensaient

ouvertement les mœurs publiques. Il réta

blit l'ancienne discipline de l'Eglise , en re-

nouvellant les anciennes constitutions sur

,'

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356 TBTOMPHK

la tenue des conciles provinciaux, sur la ré

sidence des évêques. Il fit donner des con

fesseurs aux criminels; tant était grande sa

charité !

Malgré les invitations contraires que lui fit

le roideFrance,qui le chérissait, il transféra

le Saint-Siége d'Avignon à Rome pour réta

blir la paix dans cette capitale de l'univers

chrétien , où le désordre et le brigandage

régnaient depuis longues années. Ce grand

pontife mérita les éloges dela postérité, par

la protection qu'il accorda aux sciences et

aux beaux-arts, et par les soins glorieux

qu'il avait eu d'élever aux grandes dignités,

et de combler de bienfaits ceux qui les cul

tivaient avec un brillant succès. On voit un

grand nombre de ses lettres dans Wadding,

dans Ughelli et dans d'autres collections.

C'est le dernier pape que la France ait donné

à l'Eglise.

Benoît XIV naquit à Boulogne en 1675,

de l'illustre famille de Lambertini. A peine

eut-il fini ses études avec distinction, qu'il

fut fait chanoine de la bazilique de Saint-

Pierre , consulteur du saint office , promo

teur de la foi , avocat consistorial, secrétaire

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DE LÉGLISE. 357

de la congrégation du concile . canoniste

de la sacrée pénitencerie, archevêque titu

laire de Thépdosie en 1724, ensuite cardi

nal en 1728. Benoît XIII le nomma à l'ar

chevêché de Bologne en 173*. Après la

mort de ce pontife, -en 174°, il.fut élu par

quarante voix pour occuper le trône de

saint Pierre.

Chaque année de son pontificat fut mar

qué par quelque bulle,, qui réformait des

abus, ou quiintroduisaitdes usages utiles. La

modération., l'équité et l'esprit de paix ont

toujours brillé dans son auguste.personne.

Il avait cultivé de tout temps les belles-let-

res; mais il leur donna un nouveau lustre

dès le moment qu'il fut assis sur le trône

pontifical.

Il établit des académies dans Rome ; il

envoya "des gratifications à celle de Boulo

gne ; il orna cette belle cité de plusieurs

monumens magnifiques; il honora bien des

fois les hommes de lettres et les encouragea

par des récompenses, entre autres le cé

lèbre Gagliani , littérateur et naturaliste ,

auquel il donna une pension considérable.

En 1756 , il décida , par une lettre encY*

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358 ÏT.IOMPHE

clique , qu'on ne devait refuser les sacre—

mens qu'à ceux qui seraient convaincus

notoirement d'être désobéissans à la bulle

unigenitus. Cette conduite fut admirable ,

mit la paix dans beaucoup d'endroits où la

guerre régnait depuis long- temps entre

les partisans de Molina et de Jansenius.

Louis XV sut le reconnaître, et en remercia

ce grand pontife , en faisant enregistrer

au parlement une déclaration conforme à

ce sage décret.

Cet illustre chef de la sainte Eglise ro

maine était bon et pacifique , et n'adoptait

pas toutes les idées ultramontaines. Moins

de libertés gallicanes , disait-il, au père de

Montfaucon, moins de presentions ultra

montaines, et nous mettrons les choses du

niveau qu'elles doivent être.

Il existait une guerre, enlrepris'e par la

France et la Prusse coalisées , pour exclure

la nouvelle maison d'Autriche de la dignité

impériale; Sa Sainteté établit la paix et ne

négligea rien pour la maintenir. Son atta

chement pour la France fut inébranlable;

il chercha aussi à obliger Marie-Thérèse

qui croyait , mais à tort , avoir à s'en plain

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de l'église. 35q

dre, pour avoir marqué quelque prédilec

tion à l'électeur de Bavière.

1l accorda à cette princesse la suppres

sion du patrîarchat d'Aquilée, malgré l'op

position des Vénitiens , et lui permit de to

lérer le culte des Protestans dans ses états.

« C'est un très-grand bien, écrivait-il à cette

princesse , de chercher à rapprocher les

protestans du St.-Siége; ou ne les convertira

jamais que par la persuasionet la douceur. »

Les rois, les grands hommes, les Protes

tans même étaient remplis de vénération

pour Sa Sainteté. L'impératrice de Russie

Elisabeth le nommait le sage par excellence.

Les souverains de la Sardaigne et du Por

tugal lui étaient très-attachés; il était esti

mé même, à Constantinople. «Le bon Turc,

écrivait-il à un de ses amis , m'a fait dire

les choses du monde les plus agréables par

le marquis Maïo. »

En recevant le Roi de Naples qui venait

lui rendre hommage , il lui dit : Comme

chef de la religionje vous vois à mes pieds,

et comme particulier je suis aux vôtres. La

Margrave de Bareith, sœur du roi de Prusse,

princesse du mérite le plus distingué, vint

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36o TRIOMPHE

à Rome pour visiter Benoît XIV. Les étran

gers de toutes les nations et de toutes les

sectes se hâtèrent d'aller voir un si grand

pontife*

Il favorisa les beaux-arts , releva l'obé

lisque du champ de Mars; fit bâtir l'église

de Saint-Marcelin , dont il traça lui-même

le plan ; il fit exécuter en mosaïque les beaux

tableaux de Saint-Pierre , traduire en ita

lien les bons livres anglais et français ; il

augmenta la bibliothèque du Vatican d'un

grand nombre de livres qui allaient jusqu'à

trois mille trois cents , ce qui était beau

coup pour ce temps-là.

Son administration intérieure fait éga-

ment honneur à sa sagesse; il s'éleva contre

les usuriers et les faux nobles, favorisa la

liberté du commerce, diminua le nombre

des fêtes. Sa piété était solide, éclairée et

tolérante; il s'appliqua à conserver le dogme

et les bonnes mœurs, dont il donnait lui-

même l'exemple; il réforma les jésuites en

Portugal; il confirma la bulle de Clément XI

contre les cérémonies chinoises.

Ses ouvrages sont en seize volumes in-fo

lio; les cinq premiers ne traitent que de la

Page 376: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

de l'église. 36 1

beatification et de la canonisation des saints :

il y a épuisé la matière ; tant il y montre de

la profondeur. Le sixième contient les actes

des saints qu'il canonisa. Les deux tomes

suivans renferment des supplémens et des

remarques sur les volumes précédens. Le

neuvième est un traité du sacrifice de la

messe ; le dixième traite des fêtes instituées

en l'honneur de JésusrChrist et de la sainte

Vierge.

Giacomelli a traduit ces deux derniers

ouvrages. Le onzième renferme les instruc

tions et les mandemens qu'il avait donnés

avant que d'être pape> le douzième est un

synode qui est le meilleur et le plus ré

pandu de ses ouvrages. Les quatre derniers

sont un recueil de ses brefs et de ses bulles.

On remarque dans tous ses écrits une

vaste érudition et une profonde connais-*.

sance du droit civil et canonique, de l'his

toire sacré et profane. On a encore de lui

un martyrologe et quelques autres œuvres.

Benoît XIV était si vertueux et si sa

vant , que les ennemis de l'Eglise étaient

forcés à lui rendre leurs hommages. Vol

taire lui-même, l'ennemi acharné de la re

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3Ô2 TRIOMPHE

i

li" ion , a fait de cet illustre pontife un ma

gnifique éloge dans un poëme de Mahomet

dédié à Sa Sainteté.

Lambartinus hic est, Romœ decus, et paHr orbis.

Qui mundum scriptis doeuit , virtutibus ornat.

Grégoire XIII , né à Bologne s'appelait

Hugues Buon Compagno ; il parvint au grade

de docteur en droit à l'âge de dix-huit ans ;

il assista au concile de Trente sous Paul III.

Pie IV l'avait honoré de la pourpre ; il fut

élevé sur le trône pontifical par une voix

unanime. Des réjouissances odieuses sur le

massacre de la saint Barthélemi signalèrent

les premiers temps de son règne ; son ca

ractère , plein de douceur et d'aménité ,

était bien loin de tels excès. L'histoire as

sure que ses discours et ses actions ont fait

voir qu'il détestait les auteurs de cette san

guinaire conspiration. Les mémoires de la

ligue ajoutent même qu'il refusa de lancer

des bulles d'excommunication contre Hen

ri IV et contre le prince de Condé, malgré

les instances du Jésuite Maldonat.

En i5y5, il déploya tous les charmes de

son zèle à la célébration du Jubilé , qui at

tira à Rome plus de trois cents mille péle

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de l'égl1se. 363

rins. Il fonda plusieurs colléges à Rome*

l'un pour les Catholiques anglais, un pour

les Allemands, un pour les Juifs néophytes,

un pour les Grecs, un autre pour les Mos

covites, etc., etc.... En 158o, il fit publier

une nouvelle édition du décret de Gratien

avec des notes et des gloses très-savantes.

Ce qui a le plus contribué à illustrer le

pontificat de Grégoire XIII , c'est la réfor

mation du calendrier ; il s'y, était glissé des

erreurs si condérables, que la fête de Pa

ques se serait insensiblement trouvée au

solstice d'été, au lieu de demeurer entre la

pleine lune et le dernier quartier de la lune

de mars , qui suivent l'équinoxe du prin

temps comme l'avait ordonné le concile de

Nicée.

Un retranchement de dix jours dans le

mois d'octobre 1582 , replaça l'équinoxe du

printemps au 21 mars de l'année suivante,

et, par conséquent, la fête de Paques se

trouva à la même époque du concile de

Nicée.

Louis Lilio, médecin calabrais, Chris

tophe Clavius et Pierre Chacon, eurent la

plus grande part à cette grande œuvre. Ce

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364 TRIOMPHE

calendrier, nommé Grégorien, fut adopté

sucessivemcnt dans tous les états catholi

ques de l'Europe ; on s'en servit en France

en 1 582. Les Protestans même l'adoptèrent

environ un siècle ;iprès. On voyait briller

dans ce grand ponlife la science , la dou

ceur, la modération et la bienfaisance.

Etienne II , Romain de naissance , fut

élevé sur le trône pontifical par une voix

unanime. Rome étant sur le point d'être

prise, il demanda des secours à Constantin-

Copronyme, empereur d'Orient, qui ne

voulut point condescendre à sa prière ; il

s'adressa à Pepin , roi des Français , qui

consentit à tout ce qui lui demanda Etienne.

S'étant réfugié en France, ce bon prince

alla à sa rencontre, et l'ayant joint, il des

cendit de son cheval , se prosterna devant

Sa Sainteté avec sa femme, ses enfans, et

les seigneurs de sa cour : le roi lui-même

marcha à côté du pape, tenant la bride de

son cheval et lui servant d'écuyer.

Ce bon pontife , rempli de vénération à

son tour pour le roi Pepin, parut le lende

main devant sa majesté sous le cilice, se

prosterna à ses pieds pour implorer le se-r

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DE l'église. 36^

Cours de ses armes contre son persécuteur :

le roi lui promit à l'instant sa protection.

Ce vénérable pontife passa l'hiver à Saint-

Denis, et («ce fut, dit-on, pendant ce long

séjour que les clercs de sa suite apprirent

aux Gallicans à mieux chanter l'office di

vin. ») Au printemps suivant, Pepin célébra

la fête de Pâques, qui était le i4 avril y54,

à Quercy-sur-Oise , il y tint, en présence de

sa Sainteté, une assemblée des seigneurs de

son royaume, où il annonça son dessein de

passer en Italie.

Il fit donation ail pape de plusieurs villes

et territoires usurpés par les Lombards , et

qui étaient, en grande partie, des proprié

tés conquises sur les domaines de l'empire

d'Orient, tel que l'exarchat de' Ravenne.

Le 1 8 du même mois , ce vénérable pontife

absout Pepin de son manque de fidélité au

roi légitime, lui donna l'onction royale

qu'il avait déjà reçu de saint Boniface, ar

chevêque de Mayence : il conféra en même

temps au roi et à ses deux fils le titre de

patrices des Romains.

Le roi Pepin , fidèle à ses engagemens ,

passa les Alpes et essaya d'abord, sur les

f

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366 TRIOMPHE

instances de Sa Sainteté, la voie des re

montrances auprès d'Astolphe, son enne

mi; mais il se vit obligé d'en venir aux

hostilités. Ce prince lombard , pressé dans

Pavie par Pepin , qui le tenait assiégé , fut

contraint de se soumettre à la force de ses

armes victorieuses ; il s'obligea , par écrit ,

ainsi que ses principanx seigneurs, de resti

tuer Ravenne et plusieurs autres villes : sa

tisfait de cette soumission, Pepin repassa en

France.

En l'absence du vainqueur français , As-

tolphe, ayant marché contre Rome, Pepin,

à la prière d» pape , repassa les Alpes , at

taqua Astolphe , le pressa dans Pavie et le

força à demander quartier. Le roi de France,

couvert das plus beaux lauriers , prit des

mesures sûres pour assurer la restitution

déjà promisé au souverain pontife : elle

composa la donation définitive et à perpé

tuité que Pepin fit à saint Pierre, à l'Eglise

et à son chef auguste : dans ce don sont

comprises vingt- deux villes. Ce vénérable

pontife était très - religieux , il assemblait

souvent son clergé dans le palais de Latran

et l'exhortait à étudier les saintes Ecritures

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DE L'ÉGLISE. 367

pour être capable de confondre les enne

mis de la religion. Il aima les beaux - arts ,

se fit un devoir de les encourager, et fit ré

tablir plusieurs monumens glorieux à l'E

glise et aux lettres.

Zacharie, grec de naissance, orné des

plus belles qualités de l'esprit et de l'ame ,

vint à Rome dans le huitième siècle, quel

que temps après que Grégoire III eut de

mandé du secours à Charles Martel, duc

des Français; il fut élu souverain Pontife

pour la gloire de l'Eglise : les plus subli

mes vertus brillèrent dans son auguste per

sonne d'un vif éclat, la douceur, l'aménité

accompagnaient toujours ses paroles de

paix et de charité , et jamais personne n'a

pu être témoin d'aucun mouvement de co

lère de sa part.

Il se servit quelquefois de la puissance

spirituelle du trône pontifical pour faire du

bien à ses ennemis : rempli d'un courage

vraiment héroïque pour le bien de l'Eglise,

il ne craignit pas d'exposer sa vie en en

voyant un nonce auroiLiutprand, avec des

lettres pleines de douceur , et réussit à ga

gner l'estime de ce prince qui acquièsça à

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368 TRIOMPHE

tout ce que ce Sa Sainteté lui proposait: ce

vénérable pontife fut lui-même trouver

Liutprand, à Terni, en Ombrie, où il fut

reçu par sa Majesté avec toute la pompe

royale.

Il fit avec ce prince un traité de paix très-

avantageux à l'Eglise, dans une époque où

ce roi était eu guerre avec le peuple de lia-

venne; il fut lui-même trouver ce monar

que et lui fit faire la paix. A peine Hilde—

brand fut-il monté sur le trône de Liut

prand , après sa mort , que Zacharie lui

envoya aussitôt un nonce, et lui fit signer

un traité de paix avec toute l'Italie , pen

dant vingt-ans.

11 profita des doux et heureux momens

de la paix pour arrêter les désordres pu

blics, pour faire réformer les mœurs du

peuple et du clergé, et faire fleurir par

tout la discipline. Il fit construire des éta-

blissemens magnifiques, utiles à la société,

fit bâtir et orner de belles églises, surtout

celle de Saint-Pierre.

Son zèle éclairé se déploya dans toutes

les parties de l'univers; il contribua aux

brillans succès de Boniface , apôtre de l'Al

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de l'église. 36g

lemagne : il éteignît par sa douceur la fu

reur de l'empereur Constantin Coprony-

me, ennemi déclaré des saintes images:

rassembla divers conciles à Rome, pour le

bien de l'Eglise : il excommunia deux hé

résiarques Adalbert et Clément, condam

nés déjà quelque temps avant par saint Bo-

niface. Nous devons à ce vénérable Pontife

une place distinguée parmi les savans lit

térateurs, il traduisit en grec les dialogues

de saint Grégoire-le-Grand.

Il fit la conversion de Carloman , maire

du palais d'Austrasie , fils de Charles Mar

tel , et frère aîné de Pepin , qui fut , peu de

temps après , élu roi de France ; ce prince,

qui portait la qualité de duc des Français et

qui avait part à la gloire royale , après avoir

contribué à la discipline de l'Eglise , se con-

v ertit , renonça au monde , vint à Rome , y

reçut la tonsure de sa Sainteté, et se retira au

mont Soracte, où il fit bâtir un monastère.

Rachis, roi des Lombards, après avoir

mis le siège devant Pérouse , fut converti

par Zacharie; ce bon monarque donna

l'exemple d'une vie édifiante, abandonna

le trône et resta dans la solitude, ainsi que

24

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370 TRIOMPHE

sa femme et sa tille. On vit ce vénérable

pontife se rendre aux désirs des Français ,

qui souhaitaient que leur roi Pepin futcou-

ronné; il exhorta même ce prince à rece

voir la couronne que la Providence lui of

frait d'une manière éclatante.

Qu'il est beau de voir nos souverains

pontifes sacrifier leurs plus chers intérêts,

pour s'unir aux rois , pour faire éclater la

puissance céleste , rendre les peuples heu

reux, faire fleurir les beaux-arts, les sciences

et la religion! Et comment peut -il exister

des hommes qui osent insultera la thiare,en

regardant ceux qui en sont ornés comme des

perturbateurs de l'univers I Aveugles in

sensés , ouvrez les yeux à la lumière qui

vous éclaire, ne laissez point endurcir vos

cœurs, éteignez en vous ce germe d'hérésie

qui appelle sur vos têtes les malédictions

divines. NoUte obdurare corda vestra , ho-

die si vocem ejus audieritis.

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DE LÉGLISE. 37 I

CHAPITRE XVII.

Pontifes restaurateurs des beaux-arts et des lettres.

Mon ame ravie se délecte à contempler

les tableaux magnifiques que l'histoire nous

offre des princes vénérables de l'Eglise, qui,

environnés des pompes et des grandeurs

terrestres qu'ils méprisent, nourris des dou

ceurs de la vertu, plongés dans les mys

tères profonds de l'Evangile, n'oublientja-

mais ce qui peut contribuer à éclairer

les hommes et à agrandir leur génie; ils

se font un plaisir de restaurer pour leur

avantage , les beaux-arts et les belles-let

tres, afin que leur esprit, élevé dès l'au

rore de leur vie aux grandeurs véritables de

la terre , puisse s'élever heureusement vers

les grandeurs du ciel.

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372 TRIOMPHE

Léon A, issu d'une famille illustre, s'a

donna , dès le printemps de ses beauxjours,

aux délices des lettres avec un succès pro

digieux; et si la magnificence de son illus

tre maison a toujours accompagné les ac

tions de sa vie , elle n'a contribué qu'à faire

briller sa grandeur d'ame et son genie.

Nous admirerons dans son auguste personne

le grand homme d'état, le véritable apôtre

et le restaurateur des beaux -arts et des

lettres.

Il éteignit le feu effrayant des guerres

qui existaient, depuis long-temps, entre

différens monarques et diverses nations ; il

y établit la paix, dans plusieurs époques re

marquables , et s'y couvrit de gloire et de

lauriers brillans et immortels, dignes des

héros de la guerre. Il fit un concordai avec

François Ier, où il fut convenu que le roi

nommerait aux grands bénéfices de France

et du Dauphiné.

Au moment où , en véritable successeur

de saint Pierre, il préparait une croisade

contre les Turcs , à l'exemple de ses pré

décesseurs, il fit annoncer des indulgences,

en statuant que les quêtes ou les dons se

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de l'église. 3} 3

raient consacrés au rétablissement de la ba

silique de saint Pierre; c'était la chose la

plus magnifique qu'on pût faire alors;

néanmoins Luther trouva là un prétexte

pour se révolter contre l'Eglise et les or

donnances de son chef auguste.

Léon X , dont la finesse d'esprit accom

pagnait toujours la grandeur d'ame, après

avoir mis enjeu tous les ressorts imagina

bles de sa douceur angélique , tous les

charmes de sa tendresse paternelle, fou

droya cet hérésiarque , qui , roulant de

précipice en précipice, renversa la religion

dans une partie considérable du champ de

l'Eglise , et ne craignit pas, à un âge avancé,

d'épouser une jeune vierge qu'il pervertit

à la face de tout Israël.

Adorons la Providence qui, dans toutes

les œuvres qu'elle tolère, a ses grandes

vues incompréhensibles. Quant sunt incom-

prehensibiliajudicia dei. L'Ecriture-Sainte

nous l'a dit ; notre divin Sauveur nous a

assuré qu'il est nécessaire que des scandales

arrivent; necesse est ut ventant scandala.

Le grand cœur, la belle ame de Léon en

étaient déchirés de douleur , en faisant

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374 TRIOMPHE

tous ses efforts pour apaiser ces tempêtes

enrayantes que le ciel laissait mouvoir.

Son génie et son goût pour les belles-

lettres eurent un triomphe plus eclatant. La

chute de l'empire grec amena beaucoup de

savans en Italie; Rome, Naples, Florence,

Venise , Milan , possédaient des hommes de

lettres; mais les discordes civiles contra

riaient extrêmement leurs études.

Cet illustre pontife forma le dessein de

créer une source intarissable de lumières;

il y réussit merveilleusement; il fonda une

université à laquelle il fit don de tous ses

revenus; il chercha dans toutes les parties

de l'Europe de savans professeurs pour la

théologie , le droit canon , le droit civil, la

médecine, la philosophie, la morale, la

logique, la rhétorique, les mathématiques:

il leur avait fait accorder de bons re

venus.

Il accorda des privilèges aux étudians

pour exciter l'émulation. La langue grec

que fut le premier objet de cette célèbre

entreprise ; il fit venir une colonie de jeu

nes hélénistes dont les chefs furent Marc

Muturus et Jean de Lascaris. Bientôt on vit

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DE L'ÉGLISE. 375

Homère , Sophocle sortir de l'obscurité;- de

même les œuvres de Platon reçurent un

nouvel eclat sous les presses XAide Ma-

rence.

La litterature latine eut aussi beaucoup

de part à ses libéralités ; il acheta cinq cents

sequins un exemplaire des cinq premiers

livres de Tacite; il protégea également les

langues orientales; il en confia les soins

à Thésée Ambrosio. La langue hébraïque

fut montrée par Santés Pagnini, qui tra

duisit les livres saints, et par Agacio Gui-

dacerio.

La poesie s'enrichit de tous les trésors de

la littérature. Les écrivains du premier or

dre travaillèrent surtout dans la versifica

tion latine. On accorda à quelques-uns

d'entre eux une double couronne.

On s'éleva jusqu'aux plus sublimes scien

ces ; la philosophie rationnelle fut l'objet

de leurs principaux soins; on s'attacha

aussi aux principes de la philosophie mo

rale, ainsi qu'à la métaphysique. Une as

tronomie méthodique succéda à la vieille

astrologie, qui commença à disparaître. Le

système de Copernic fut soupçonné par

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376 TRIOMPHE

Celio Calcagnini, qui essaya de montrer le

mouvement diurne de la terre.

Ce fut alors que Leon X essaya de réfor

mer le calendrier. Il prit part à la gloire de

Cristophe Colomb et ÏÏAméric Vespuce,

qui avait découvert une grande partie de

la terre inconnue jusqu'alors.

Non-seulement il fit des concessions aux

princes conquérans , mais il étendit sa puis

sance pour y protéger les malheureux In

diens et les mettre à l'abri des vexations

des Espagnols ; il rompit les chaînes de leur

servitude , et se déclara leur zélé protec

teur.

Il recueillit tous les ouvrages d'esprit, et

en forma une bibliothèque pour laquelle

il fit construire un édifice particulier dont

"il confia le soin à Michel-Ange. Telle fut la

bibliothèque Laurentienne ; celle du Vati

can jouit des mêmes avantages.

Les beaux-arts furent en triomphe dans

cette belle capitale du monde chrétien sous

le règne de ce grand pontife, qu i encouragea

la recherche des antiquités; il composa

lui-même une pièce de vers qui est rap

portée par Roscoé. Son palais papal fut orné

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DE L'ÉGLISE. 377

des plus beaux chefs-d'œuvre de Raphaël :

Michel-Ange embellit de ses magnifiques

tableaux la chapelle Sixtine.

C'est sous ses auspices que la gravure au

burin et la gravure à Peau-forte prirent

naissance pour agrandir la magie dela pein

ture. Il encouragea aussi la musique, dont

il était amateur. Des écrivains célèbres

écrivirent de son temps, et méritèrent des

éloges de la postérité la plus reculée.

Les savansd'un grand nombre de royau

mes se rendirent à la capitale de l'univers

chrétien pour contempler les merveilles

produites par le génie de Léon : il avait

beaucoup de présence d'esprit, et même

de profondeur; il traitait avec dignité les

sujets les plus sérieux, les matières les plus

graves.

Sa science correspondait à ses vertus; il

observait une grande sobriété, et même

il jeûnait fréquemment, comme l'ont rap

porté plusieurs historiens dignes de foi. Sa

vie fut brillante et sans reproche , de l'aveu

même de quelques anglicans qui ont dé

cerné à sa mémoire des hommages bien

flatteurs.

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378 TRIOMPHE

Pie //, nommé Eneas, reçut le chapeau

de cardinal en i458, et fut élu pape dans

un conclave paisible; Ja joie publique con

firma l'élection. Il reconnut bientôt combien

était onéreuse la dignité du pontificat; il

donna des preuves de zèle et d'humilité d'un

successeur de saint Pierre : à l'exemple de

saint Augustin, il se rétracta de quelques

erreurs qu'il avait commises.

Il était un des hommes les plus instruits

de son siècle. Ce fut lui qui accueillit

en Italie les beaux arts et les belles-let

tres, chassées de la Grèce. Le cardinal

de Pavie fit avec raison son éloge , loua son

zèle pour la religion, la pureté de ses mœurs

et sa profonde érudition.

Ce pape a laissé beaucoup d'écrits, entre

autres des mémoires sur le concile de Bâle,

une histoire des Bohémiens, et un poëme

sur la passion de Notre-Seigneur Jésus-

Christ. Ses œuvres ont,été recueillies en un

volume in-folio, en 1571 : ses ouvrages

historiques et géographiques ont été don

nés à part.

Ses harangues, dont plusieurs étaient

encore inédites, ont été publiées par J. D.

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DE L'ÉGLISE. 379

Mansi , Lucques , 1755 ; ses lettres, qui ren

ferment des particularités curieuses, ont été

souvent réimprimées; son roman di'Euriale

et de Lucrèce, fruit de sa jeunesse, qu' il dé

plora dans un âge avancé , a été plusieurs

fois traduit en français. On lui appliqua so

lennellement, en l'honneur de son illustre

pontificat, ce beau vers de Virgile:

Sum plus Eneas, famâ super athera aotus.

Pie VI , né à Cézène , petite ville de l'état

ecclésiastique , devint trésorier de la Cham

bre apostolique sous Benoît XIV , qui l'ho

nora de son amitié ; devenu cardinal sous

Ganganelli, il devint bientôt son succes

seur. Tous les suffrages se réunirent en sa

faveur : à peine fut-il élu , qu'il prédit les

malheurs dont il serait un jour environné.

Les premiers actes de son autorité furent

de distribuer des aumônes, de répriman

der le gouverneur de Rome , qui était en

défaut, de supprimer pour quarante écus

romains des pensions onéreuses au trésor

public , de faire rendre un compte sévère

au préfet de l'annone, accusé de dilapida

tion, de compléter au Vatican un Museum

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38o TRIOMPHE

commence par son prédécesseur, et con

sacré à recueillir les monumens, les vases ,

les statues et médailles que les fouilles dé

couvriraient dans les états de l'Eglise.

Charmé d'étendre les progrès du com

merce, il fit réparer"*le port d'Ancône et

construire le superbe fanalquiy manquait.

Il employa avec succès toutes ses ressources

pour dessécher les marais Pontins. Ce fut

un très-grand et très-utile projet que des

empereurs et des papes n'avaient jamais pu

exécuter. Ces marais occupenttoute la vallée

qui s'étend des Apennins à la mer; ils com

mencent au port d'Astura , couvrent la côte

de Terracine , et parviennent jusqu'au

royaume de Naples. Il fit rendre ce terri

toire à l'agriculture, en le purgeant des va

peurs pestilentielles.

A l'exemple de Boniface VIII , de Mar

tin V, de Léon X et de Sixte-Quint , Pie VI

fit pratiquer une route sûre, réparer l'an

cien aqueduc de Terracine , dégager la voie

Appienne du limon sous lequel elle avait

disparu, et fit creuser le canal du Sogliano

en consacrant à cette grande entreprise le

fruit de ses épargnes.

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de l'église. 38 i

Chaque année il visitait ces ouvrages, et

ranimait les artistes par sa présence. Il fit

construire une église et une bibliothèque

dans l'abbaye de Subiaco; il fonda des hô

pitaux; il fit construire avec magnificence

une sacristie à la superbe église de Saint-

Pierre, à Rome.

Il fut visiter plusieurs souverains de l'Eu

rope qui étaient venu contempler la capi

tale du monde chrétien et les merveilles

qu'elle renfermait. Joseph II , empereur

d'Allemagne, Paul I", empereur de Rus

sie, Gustave-Adolphe, roi de Suède, les

fils du roi d'Angleterre, et son frère, le duc

de Glocester, furent touchés de son accueil

et de ses hautes vertus.

En 1788, il abolit la nonciature dans ses

Etats, Ce bon pontife chérissait les princes

et en était chéri. Après avoir remis le gou

vernement de Rome au cardinal Colonne ,

il partit de cette ville le 27 février. L'empe

reur et son. frère l'archiduc Maximilien al

lèrent à sa rencontre à quelques lieues de

Vienne; ils descendirent de voiture dès

qu'ils aperçurent Pie VI, et l'embrassèrent.

Joseph II ayant pris le Saint-Père dans la

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382 TRIOMPHE

voiture , ils entrèrent ainsi ensemble dans

la capitale d'Autriche, le 22 mars 1782.

Leurs conferences furent fréquentes et

amicales, quoiqu'elles ne fussent pas publi

ques : l'empereur Joseph disait que le pape

étaitle meilleur des hommes. Ce bon pontife

donna l'hospitalité dans des maisons reli

gieuses à beaucoup de prêtres émigrés de

la France, en 17g2. Il fut fait prisonnier

par les Français, et traîné captif, couvert

de chaînes , sur leur sol toujours hospita

lier : il montra, dans le malheur, le cou

rage héroïque d'un véritable apôtre.

Il reçut toutes sortes d'honneurs dans

beaucoup de villes de France, surtout à

Gap , à Grenoble et à Voiron. Il mourut à

Valence , où sont encore ses vénérables en

trailles, dans un mausolée érigé en son hon

neur dans l'Eglise de la cathédrale, que

j'ai vu et contemplé en voyageant.

L'abbé Delille fit en son honneur des

vers dignes de sa grandeur pontificale :

Pontife révéré , souverain magnanime ,

Noble et touchant spectacle , et du monde et du ciel :

Il honora la foi par «a vertu sublime ,

Les malheurs , la vieillesse , et le trône et l'autel,

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de l'église. 383

Nicolas F', cardinal-évêque de Bologne,

né dans un bourg près de Luni, fut élu pape

malgré lui après Eugène IV , en i447- Son

premier soin fut de travailler à la paix de

l'Eglise et de l'Italie , et ce fut avec un très-

heureux succès.

Les Allemands le reconnurent et renon

cèrent à toute communication avec l'anti

pape Félix IV. Charles VIII, roi de France,

approuva cette élection, et envoya, pour

manifester son obéissance au nouveau pape,

une magnifique ambassade (Mézerai croit

que c'est ce qui donna lieu à la pompe et à la

dépense de ces grandes ambassades d'aubé-

dience que les rois envoyaient à chaque mu

tation des pontifes). L'anti-pape Félix se

prêta à la paix et fut traité généreusement

par Nicolas , qui le créa doyen des cardi

naux. Cette modestie lui conquit la consi

dération des sages, des grands et des savans.

L'année i45o fut célèbre par l'ouverture

du Jubilé-, cette solennité attira tant de

monde à Rome, que plusieurs personnes

furent étouffées dans les églises et ailleurs.

Des conspirations vinrent troubler les doux

charmes de la paix qui environnaient son

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384 TfUOMPHE

trône pontifical -, il avait engagé depuis

long-temps les princes et les peuples à se

courir les Grecs, mais son zèle n'eut abso

lument aucun effet heureux , et les malheurs

des Chrétiens orientaux lui causèrent la

mort.

Il fit revivre avec pompe les belles-lettres

laissées dans l'oubli pendant plusieurs siè

cles, où l'ignorance régnait partout; il les

cultiva lui-même et répandit ses bienfaits

sur ceux qui s'y distinguèrent. Il enrichit sa

bibliothèque des plus beaux manuscrits

grecs et latins recueillis par son ordre dans

tous les lieux du monde. «

Il fit traduire les ouvrages grecs et com

bla de bienfaits ceux à qui il confiait les

traductions et la recherche des livres ; il

promit cent mille ducats à celui qui lui ap

porterait l'évangile de saint Mathieu en hé

breu. Il fit élever dans Rome des monumens

glorieux à la religion et aux beaux-arts; il

fit construire des palais , des églises , des

ponts et des fortifications.

Il accueillit avec joie les Grecs qui se ré

fugièrent chez lui; il vint au secours d'un

grand nombre de gentilshommes; il n'ac

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de l'église. 385

corda qu'au mérite les charges et les bé-

néfices; enfin tout annonça, dans son au

guste personne, un grand pontife, qui

travailla ardemment avec succès au salut

des hommes, à la gloire des lettres et de la

religion. Sa vie , publiée par l'abbé Georgi,

déploie son illustration avec un plus grand

éclat.

Il faut donc avouer qu'ils sont ravissans

les beaux rayons de la gloire pure qui en

vironne le trône éclatant et légitime de nos

vénérables pontifes, lorsqu'on contemple

leur zèle éclairé, leur vaste génie , s'occu-

pant à agrandir le doux et vaste empire de

la religion , ainsi que le brillant empire des

sciences et des arts , en créant ou en res

taurant des monumens éternels qui contri

bueront à la gloire et au triomphe des

beaux-arts , des belles-lettres et de l'Eglise.

a5

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386 TRIOMPHE

Il faut donc que la fureur des ennemis

de la religion vienne échouer et se briser

contre la pierre antique et inébranlable

qui soutient fermement l'Eglise au milieu

de l'éclat et de la pompe romaine , et

qu'en dépit de leurs combats et de leurs

guerres intestines, ils viennent reconnaître

ses victoires , ses lauriers flottant sans cesse

sur le Capitule , en contemplant son triom

phe splendide, brillant dansl'univers entier.

Tous les siècles passés ont été témoins de

sa gloire pompeuse; tous les siècles futurs

l'admireront éternellement. Tu es Petrus et

super hanc Petram dificabo ecclesiam meam

et portée inferi non prevalebunt adversus

eam.

Le premier siècle vit des hommes auda

cieux lever l'étendard de la révolte contre

cette mère tendre et chérie ; mais que de

vinrent-ils? Ils ne furent que le jouet ridi

cule de l'enfer qui les plongea dans l'igno

minie, en faisant accroître la grandeur, la

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de l'église. 38t

noblesse de la vraie religion. Ainsi Simon,

Ménandre , les Nicolaïtes , les Cérinthiens ,

les Ebionites , en donnant naissance à des

erreurs absurdes et monstrueuses , n'affai

blirent point l'éclat, les beautés de la nou

velle Jérusalem ; mais ils fournirent l'heu

reuse occasion de purger la partie malsaine

qui aurait pu corrompre toute la société

sainte.

Le second siècle enfanta aussi une réu

nion de malheureux , parmi lesquels furent

Saturnin , Bazilide , les Gnostiques , les

Montanistes , les Ancratites, les Valenti-

niens , les Marclonites ; ils ne furent que

comme des nuées de sauterelles sauvages

qui effrayèrent plutôt les Pharaons que de

les enchanter, et contribuèrent eux-mêmes à

donnerlavéritable 1 iberté aux enfans d'Israël.

Le troisième siècle donna naissance à plu

sieurs suppôts de l'enfer , parmi lesquels on

a nombre les Novatiens , les Sabelliens , les

Paulianistes , les Orige'nistes , les Mani

chéens ; tous semblables aux serpens des

prêtres magiciens de l'Egypte corrompue ,

furent dévorés par le serpent miraculeux

de Moïse pour leur confusion et pour la

gloire du ciel. ■;..>-.

Page 403: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

388 TRIOMPHE

Le quatrième siècle déroula des milliers

de ces monstres dont les vapeurs pestilen

tielles, grossissant les ténèbres de l'igno

rance , ne résistèrent point à l'éclat du so

leil de justice et de vérité qui les dissipa.

Ainsi les Donatistes , les Ari' ns f les Macé

doniens , les Anomeens , les Aeriens, les

Photiniens , les Messatiens , les Lucife'riens,

les Appollinaristes, les Priscillanistes , les

Jovinianistes , ne s'élevèrent du cloaque de

leurs passions que pour être confondus en

présence de la milice sainte.

On vit naître encore du cinquième siècle

de ces êtres bizarres, tels que Vigilance,

les Pe'lagiens , les semi-Pélagiens, les Nes-

toriens, les Eutichéens , qui, ne trouvant

point dans le giron de l'Eglise assez de

gloire, se révoltèrent contre elle, déchirèrent

son sein maternel ; et n'offrant journelle

ment au seigneur que des sacrifices impurs,

osèrent, par envie, verser le sang de leur

frère Abel, dont l'âme généreuse plaisait

au Seigneur : Dieu frappa leur crime d'a-

nathême; ils furent chassés de la Terre -

Sainte de leur père et errèrent dans les

lieux sauvages , portant sur leur front le

signe de la réprobation éternelle.

Page 404: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

DE L'EGLISE. 389

Les Agnoëtes., les Trithéites, les Acé-

mètes et les défenseurs des trois chapitres ne

sortirent du sixième siècle, comme des rep

tiles hideux que pour être écrasés et pour

servir à engraisser la terre fertile de la vigne

chérie du Seigneur.

Les Monotelites , les Pauliciens et les

Mahométans dressèrent leur théâtre dans le

septième siècle; les Iconoclastes , avec Fé

lix et Elipandus dans le huitième ; Sergius

Badnes, Claude, de Turin , Gotescalh, Po-

tius et Jean Scot dans le neuvième , ils s^é—

croulèrent dans l'abîme de leurs erreurs,

excitèrent les risées du peuple saint, et

firent éclater sa gloire.

Les Antropomorphites sortirent du

dixième , Béranger et Michel Cérulaire du

onzième; Gilbert de la Porre'e, Pierre

Abaillard , Arnaud de Bresse , Pierre de

Bruisdu douzième, les Albigeois et les disci

ples cfAiméri du treizième, les Turlupins du

quatorzième , les Hussites du quinzième ,

Luther, Carlostade, Zuingle, OEcolampade,

Mélancton , Bucer , Osiande , Brendus ,

Calvin , les Anabaptistes , les Antitrini-

taires, les Sociniens, jaillirent avec impé

tuosité du sein du seizième siècle, ainsi que

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39O TRIOMPHE

les partisans de Jansenius, et firent du ra

vage dans le champ de l'Eglise.

Ces hommes qui , comme les prêtres

égyptiens, essayèrent, par mille enchante-

mens divers , d'anéantir la vertu divine de

Moïse ne méritèrent que la confusion , et ,

voulant détruire les enfans d'Israël, n'en

tendirent que l'arrêt formidable de l'ange

exterminateur qui , visitant terriblement

leur demeure, les y marqua du sceau de la

réprobation.

.Endurcis jusqu'à la dernière heure de

leur vie, poursuivant les Israélites, ils sont

engloutis miraculeusement dans les flots

de la mer Rouge; et contribuent ainsi, avec

un grand éclat, à la beauté, à la grandeur,

à la noblesse, au triomphe d'Israël , qui ar

rive heureusement dans la terre promise,

éclate en actions de grâces, et goûte les dou

ceurs d'une paix profonde ainsi que les bé

nédictions de Dieu, qui fait couler le lait et

le miel dans ses prairies charmantes, dans

ses clairières , d'où jaillissent des torrens

d'eau vive , l'abondance de la manne, l'o

deur des parfums et de fleurs odoriférantes

qui embeaument ces lieux chéris du ciel.

Que j'aime à contempler l'Arche sainte,

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de l'égl1se. 3g I

Couvrant toute l'immensité de Ja gloire di

vine sous des tentes, au milieu du désert,

errant çà et là , bravant les glaces de l'hiver

et les feux de l'éte, les frimats et les neiges,

les tempêtes et les orages, arrêtant le cours

des fleuves dans leur fureur. Au seul son

du clairon, les murs de Jérico rebelle trem

blent, s'écroulent, et offrent un vaste champ

au triomphe dela milice sacrée.

Nabuchodonosor ayant persécuté les Is

raélites, et après avoir vaincu tonte l'Asie,

voulant se faire adorer comme un dieu,

fut réduit, par une permission divine, à la

condition des animaux sauvages pendant

sept années, et offrit un éclatant exemple

des victoires du dieu d'Israël.

Que les puristes se hâtent de déposer leur

orgueil aux pieds d u trône de la vérité ; qu'ils

viennent reconnaître leur égarement, et ap

prendre qu'au son du clairon de l'armée

sain tel'édificedeleur schisme s'écroulera in

sensiblement; qu'ils contemplent cette épo

que célèbre où le vénérable pontife réta

blit l'Eglise de France, et dont la conduite

fut un véritable chef-d'œuvre de sagesse.

La religion, ensevelie depuis si long

temps dans les ténèbres de l'oubli, sortit du

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3gi TRIOMPHE

milieu deses ruines, commença à faireflot-

ter sesétendards. On vit les temples ouverts

reprendre leur premièrebeauté;les peuples

en foule y volaient avec un vrai transport

d'allégresse ; des cantiques de jubilation et

d'actions de grâces faisaient retentir le lieu

saint, depuis si long-temps désert.

Les autels renversés renaquirent da mi

lieu de la poussière, furent parés de la gran

deur et de la magnificence convenables; les

sacrifices commencèrent à s'offrir avec une

pompe éclatante ; les fidèles se hâtèrent de

renouveler la ferveur de leurs ames; beau

coup de chrétiens endurcis ressuscitèrent à

la vie de la grâce; les impiétés s'affaibli

rent, les blasphêmes contre Dieu s'appaisè-

rent, les anciennes coutumes religieuses

commencèrent à fleurir, enfin la France

entière ne formait que concert de louanges

et d'actions de grâce envers le Dieu de mi

séricorde qui leur apportait le bonheur et

la paix , et envers les instrumens admira

bles de la divine Providence.

Que M. Oegger se hâte de déposer le faste

de sa science au pied de la croix humble et

triomphante; qu'en enfant élevé à l'ombre

des autels , nourri des dons du Seigneur, il

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de l'église. 3g3

vienne rendre mille actions de grâce au

Dieu miséricordieux qui fait jaillir sur lui

un rayon de lumière pour le diriger dans le

vraie chemin du Ciel.

L'ignominie, je ne crains point de l'assu

rer, l'ignominie ou l'état de Nabuchodono-

sor l'attend à coup sûr, s'il n'ouvre les yeux

au soleil de vérité qui le frappe, et s'il ne vient

à l'instant célébrer avec nous le triomphe

de la sainte Eglise.

Que l'impiété, toujours prêle à faire la

guerre au trône de saint Pierre et à flétrir

l'éclat dela thiare , baisse ici ses armes em

poisonnées; qu'elle se prosterne et con

temple sa pureté et sa grandeur véritable

et éternelle !

Ce n'est point l'éclat pompeux des ri

chesses colossales qui devient la source in

tarissable des voluptés terrestres où se plon

gent jusqu'à satiété les augustes princes de

l'Eglise; cène sont ni les crimes, ni les pas

sions de toutes les espèces qui les environ

nent comme des serpens et en répandent

le venin sur la terre entière. Arrête ta voix

audacieuse, téméraire! admire ces hom

mes... Je me trompe...; contemple ces an

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3p4 TRIOMPHE

ges qui , abhorrant les plaisirs de la terre ,

vont chercher les délices de la croix!

Est-ce sur le Thabord ? Non , non , c'est

sur le Calvaire. A l'exemple de leur divin

maître, ils coulent leurs jours paisibles dans

lasolitude,livrentleur corps à la pénitence,

aux jeûnes, aux veilles, à la mortification

des sens et à la privation de toutes les vo

luptés mondaines, quelquefois abhorrant

même la pompe légitime et convenable, se

dépouillent de leurs moindres richesses

pour ne conserver que la simplicité des

premiers apôtres.

On ne peut point l'ignorer, il faut l'a

vouer, ces pasteurs aimables dirigent en

paix l'univers; leurs regards attentifs par

courent toutes les parties de la terre , veil

lent au soin dechaquemalheureux, de cha

que fidèle, écoutent sa voix , sa prière , et

accordent à chacun des dons et des grâces.

L'infidèle est-il rebelle à leur voix , ils

ne se réfroidissent point, ils le supportent, le

conservent dans, le bercail par la douceur

et la tolérance, le convertissent par leurs

bienfaits. C'est sur les habitans de tous les

climats qu'ils portent leurs regards, sur l'In

dien comme sur l'Arabe, sur le Français

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DE LÉGLISE. 395

comme sur l'Asiatique, sur l'Africain comme

sur le Grec; ils se transportent quelquefois

dans les régions lointaines, traversent les

monts et les mers ou les Deux-Mondes pour

contribuer à leur bonheur : leur zèle n'a de

bornes que dans le Ciel.

C'est dans Rome, séjour heureux de leur

gloire pure, où ils font flotter l'étendard de

la liberté ; c'est là où les hommes de toutes

les religions sont leurs amis , leurs frères

bien-aimés;ilslesaccueillentavec honneur,

les reçoivent dans leurs bras paternels, les

pressent sur leur sein, leur prodiguent leurs

bienfaits, leur assurent leur protection,

leur donnent un asile sûr; ils forcent leur

vénération , font la conquête de leur cœur

et le triomphe de leur esprit.

Fermes sur le trône de Pierre, rien n'é

branle leur doctrine , toujours pure , tou

jours glorieuse ; que les tyrans les attaquent,

ils leur opposent avec une tranquillité d'es

prit ravissante, avec un courage héroïque,

le bouclier le plus redoutable, leur foi :

Hœc est Victoria quœ vicit mundumJides

nostra. Qu'on les persécute, ils résistent

avec gloire; ils souffrent l'exil en bénissant

le Ciel, qui le permet; ils traînent avec une

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3C)6 TRIOMPHE

patience angélique leur chaîne , et s'envi

ronnent des plus beaux rayons d'une gloire

éternelle.

Qu'on leur offre la mort, s'ils ne cèdent

à la puissance qui leur commande, s'ils

n'abandonnent la loi divine ; rien ne les

ébranle; et bien loin de trembler à la vue

de la tyrannie , la tyrannie tremble à leur

vue. Ils montrent eux-mêmes le chemin

magnifique du Ciel à leurs fidèles chéris;

ils volent avec allégresse vers l'échafaud

pour cueillir la palme du martyre, et vont

avec ravissement dans les Cieux chercher

la triple couronne immortelle.

Leurs jouissances terrestres ne sont que

des objets charitables; ils versent leurs ri

chesses dans le sein des malheureux; ils les

consolent dans leur infortune; ils essuient

leurs larmes, partagent avec eux un pain

de douleur, allègent le poids des impôts

dont ils sont les victimes.

Ils ont créé dans tout l'univers, par leurs

grâces ou par leurs bienfaits, des établisse-

mens immenses pour mettre à l'abri des in

jures du temps, et pour soulager des infir

mités de la vie les victimes de toutes les

espèces d'infortune. Ces édifices magnifi

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DE L'ÉGLISE. 397

ques de bienfaisance , placés merveilleuse

ment dans toutes les parties de la terre

comme des colonnes nombreuses réunies

par le lien de la charité fraternelle , forme

ront le véritable triomphe de la sainte

Eglise , jusqu'à la fin des siècles.

Venez , héros de la sagesse humaine , ve

nez contempler la vaste étendue du génie

sublime de nos vénérables pontifes, dont

les lumières pures s'étendent dans toutes les

cours de l'univers chrétien ?

Ils consolent les princes affligés* ils rani

ment des reines mourantes; ils adoucissent

les maux des monarques opprimés, con

seillent des empereurs glorieux; ils leur

montrent sagement le danger des victoires;

ils portent la paix au milieu des tyrans, arrê

tent le sang et le carnage, et, se plaçant eux-

mêmes entre le fer et le feu , entre la vie et

la mort, suspendent les combats, font des

victoires brillantes et merveilleuses en ar

rêtant les conquêtes.

Au milieu de la magnificence pontificale

qui les environne sur leur trône , ils accueil-

lent avec tendresse les princes infortunés,

qui, chassés, exilés, persécutés, courent,

volent dans leur sein paternel, trouvent au

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3g8 TRIOMPHE

près de leur Sainteté un azile sûr et tran

quille, des bienfaits abondans, l'honneur

et la gloire.

Que les savans viennent admirer encore

la pompe, la magnificence des richesses,

de l'esprit humain, regorgeant dans Home

sous les auspices de nos illustres pontifes.

L'ignorance, exerçant un empire univer

sel sur toute la terre, et la couvrant de ses

ténébres pendant des époques remarqua

bles, la science avait son empire à Rome.

Les belles-lettres, chassées de certaines ré

gions, de certains royaumes, trouvèrent

dans cette capitale du monde chrétien un

azile glorieux; c'est là que les beaux-arts et

toutes les sciences découvrirent des mines

inépuisables d'or pur pour s'enrichir et se

féconder.

Les arts libéraux y ont fixés leur plus bril

lant théâtre :1a peinture, l'architecture, la

sculpture, la musique, réunissent toute leur

grandeur, leur beauté, leur éclat et leur

pompe, pour agrandir la magnificence des

édifices religieux, qui annoncent vraiment

la gloire et le triomphe de l'Eglise.

On y voit briller non -seulement des

sciences communes, comme les langues

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DE L'EGLISE. 399

hébraïque, syriaque , chaldéenne , grec

que , latine , française , allemande , anglaise,

espagnole, etc., l'histoire , la géographie ,

mais encore les hautes sciences qui ne

sont le partage que des esprits sublimes,

comme les mathématiques, la dialectique,

la physique, l'astronomie, la médecine, le

droit civil , le droit canon , la poésie, l'élo

quence, y ont fait des progrès merveil

leux, et ont répandu leurs fruits sur toute

la terre.

Des ouvrages de tous les genres, de toutes

les espèces, ont été créés par nos vénéra

bles pontifes romains ; de* bibliothèques

immenses , établies par leurs soins , remplis-

sent la capitale du monde , pour l'inonder

de lumières immenses , et toujours fécon

des, capables de nourrir l'esprit ainsi que

l'ame des fidèles qui contemplent sans cesse

l'arche sainte de la nouvelle alliance, con-s

servée pure pendant tant de siècles, toujours

inébranlable et couverte de gloire, rece

vant les hommages de tous les hommes

qui se prosternent au pied de ce triom

phe éternel de l'Eglise.

Ecclésiastiques, sincèrement religieux,

voilà nos modèles! A leur exemple, réu-

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400 TRIOMPHE DE l'ÉGLISF.

nissez à ce moment critique tous vos efforts

pour soutenir le veritable autel. Voyez de

toutes parts les ennemis de la sainte Eglise

tendre des pièges pour la renverser; mon

trez-vous à la tête des fidèles, des pasteurs

courageux et intrépides , toujours disposés

à verser votre sang pour sa gloire : n'ap

préhendez ni les peines, ni les fatigues, que

votre présence et vos exemples édifians ra

niment partout la piété des fidèles!

Arrêtez, avec la douceur des apôtres , les

abus qui y éclatent; rétablissez les lois an

tiques, humaines et divines; faites revivre

les beaux jours de l'Eglise naissante , et

vous aurez la gloire d'unir vos lauriers à

ceux de notre illustre souverain pontife

Pie VIII, dont le zèle éclairé, l'esprit paci

fique et le vaste génie , sont capables de

soutenir dans l'univers chrétien le triomphe

de l'Eglise.

FIN.

Page 416: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

<\§U bt$ y^atifrts.

Page».

Priïfack . ... S

LIVRE PREMIER.

TRIOMPHE DE l.'ÉGISE.

Ghapitsk I". — Tableau de ses combats et de ses vic

toires 3

Cjiap. II.—Schismes et Hérésies des premier et deuxième

siècles 10

Chap. III. — Schismes et Hérésies da troisième siècle.. . 16

Chu, IV, — Schismes et Hérésies du quatrième siècle., aa

Chap. V. — Schismes et Hérésies du cinquième siècle. . 5j

Chap. VI. — Schismes et Hérésies du sixième siècle. ... iy

Chap. VII. — Schismes et Hérésies des septième, hui

tième et neuvième siècles 54

Chap. VIII. — Schismes et Hérésies des dixième, on

zième et douzième siècles 65

Chap. IX. — Schismes et Hérésies des treizième, qua

torzième et quinzième siècles 75

Chap. X. — Schismes et Hérésies du seizième siècle. ... 85

27

Page 417: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

402 TABLE.

LIVRE DEUXIÈME.

TRIOMPHE

Pagei.

Sur le Cbisme et l'Hérésie qui régnent actuellement , en

France; c'est-à-dire réfutation du Chisme des Puristes

et de l'Hérésie de Oegger 97

Chapitre I". — Réfutation du chisme des Puristes.. . . id.

Décret et Bulle pour la nouvelle circonscription des Dio

cèses - 101

Induit pour la réduction des Fêtes u5

Chap. II. — Réfutation de l'Hérésie de Oegger, ancien

premier vicaire de la cathédrale de Paria 126

Article I". — Fausseté de ses principes 129

Art. II. — Falsification des textes sacrés i38

Art. III. — Ses blasphèmes i46

Art. IV. — Ses absurdités i54

Art. V. — Ses contradictions i5g

Art. VI. — Système dogmatique de M. Oegger 162

('.11 av. III. — Morale de M. Oegger 170

Amt. Ier. — Destruction des Sacremens du Baptême et de

la -Pénitence, du Pater et du Rosaire 172

Art. II. — Il ne distingue point entre les préceptes et

les conseils , entre les péchés mortels et véniels ; il nie

l'éternité des peines; il détruit le jeûne et les abstinences. 181

Art. III. — Il méprise la canonisation des saints, le

culte de la sainte Vierge , le célibat 188

Art. IV. — Se» aveux et ses remords 194

Art. V. — Réflexion consolante adressée à M. Oegger. . . 199

LIVRE. III.

TRIOMPHE DES SOUVERAINS PONTIFES SUR LECRS ENNEMIS.

Chapitre I". —Tableau des vertus héroïques des Pontifes

romains 2 > S

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TABLE 4°3

Page»-

Chip. II. — Extinction de certains ordres par les chefs

de l'Eglise a. . . . ? ■;!>

Chap. III. — Tolérance des Pontifes 232

Chap. IV. — Héroïsme de vertu et de zèle a4o

Chap. V. — Héroïsme de courage, de patience, de charité

et de religion 249

Chap. VI. — Tableau de plusieurs Martyrs pontifes 257

Chap. VII Pontifes qui ont fait de glorieuses réformes. 2g3

Chap. VIII. — Exemples de vertus rares 273

Chap. IX. — Exemples de piété 284

Chap. X. — Exemples de zèle 2g5

Chap. XI. — Pontifes amis du peuple 3oi

Chap. XII.—Pontifes amis des peupleset des Souverains. 3oj

Chap. XIII. — Union des Pontifes avec les Souverains. ■ 3i5

Chap. XIV. — Vénération des Pontifes envers les Souve

rains , et vénération des Souverains envers les Pontifes. 327

Chap. XV. — Union de la thiare avec la couronne 53g

Chap. XVI. — Pontifes amis des Souverains et des arts

libéraux 353

Chap. XVII. — Pontifes restaurateurs des beaux arts et

des belles-lettres 071

Conclusion , 386

PIM DE I.A TABLI.

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^

Nota. Si quelque savant croit avoir droit de con-

tredir qeulques vérités contenues dans mes trois

ouvrages, que j'ai composé seul à la capitale, sans

l'aide même d'un secrétaire, soit à la bibliothèque

du Roi , soit à la bibliothèque Mazarine et de la

ville, pendant trois ans que j'ai demeuré à Paris,

travaillant quatorze ou quinze heures par jour, je

me soumets volontiers à les défendre dans le lieu

qu'on trouvera à propos.

On me trouvera tous les lundis, à trois heures

du soir, à la Bibliothèque de la ville de Paris, et

si je me trouvais en vacances, moi adresse est à

M. l'abbé ÏHayneau, prêtre, prédicateur, auteur du

Traité des Abus, du Génie du Sacerdoce et du

Triomphe de l'Église, chez M. Fulcrand Mayneab

père, fabricant, marchand, propriétaire, électeur,

à Saint-Aphodise, à la tuilerie, à lîéziers, dépar

tement de l'Hérault.

Je me rendrai à ses désirs, manifestés dans une

lettre affranchie et signée de deux témoins re

marquables.

Page 421: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830

C 12Ô3.V57

HARVARD ^^g^T COLLEGE

LIBRARY

+

FROM THE LIBRARY OF

Comte ALFRED BOULAY DE la MEURTHE

PURCHASED APRIL, l 927

1

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DE L'EGLISE. KD

LIVRE PREMIER.im

IgiOMPHE SIR LES HERESIES ET LES SCHISMES.

LIVRE DEUXIEME.

TRIOMPIIE SIR LE SCniSME ET l'hÉRÉSIE QCI RtGSEST ACTUEL

LEMENT EN FRANCE; c'EST-A-DIBE, BEFI'TATION DU SCHISME

DES PURISTES ET DE l'hÉbESIE DEM.OEGGEP., ANCIEN PREMIER

W CAIRE DE LA CATHEDRAIE DE PABIS.

ïm

3

1 .. y.

LIVRE TROISIEME.

TRIOMPHE DES SOUVERAINS POXTiFES SUR LEURS ENNEMIS.

Pas l'abbé T. J. MATNEAU,

Prédicateur de France , ex - Professeur P. d'éloquence et de

philosophie, etc.;

Aceeur do GÉNIE DU SACERDOCE et do TRAITÉ DES ADl'S.

Tu ee Pefru», et »aper hanc Pciram a'dlficabo

ecieeiam meam ei poreœ inferi nan prœvalebune

advenus eam.

S;. Mi-.ii. c. iei. e. 18.

PARIS.

(LÏÎROI, Libraire, devant le Louvre et la paroisse royale, W a4.

CORBET, Libraire, rue Saint-Jacques , n° 58.

" DEMAS LIRES, au coin delâ place des Victoires, rue Croix-

des-Petits-Cbauips, n° 54.

1830. .

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Page 423: Triomphe de l'Eglise... sur l'hérésie de l'Abbé OEGGER, vicaire de la Cathédrale de Paris, par l'Abbé T.J.Mayneau, 1830
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