TRAVAUX ROUTIERS Les pistes d’amélioration

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20 Travail & Sécurité – Octobre 2011 20 Travail & Sécurité – Juin 2012 20 Travail & Sécurité – Juin 2012 © Philippe Castano pour l’INRS

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TRAVAUX ROUTIERS

Les pistes d’amélioration de la prévention

Dossier réalisé par Grégory Brasseur, avec Leslie Courbon

Depuis mars 2012, une recommandation de l’Union des syndicats de l’industrie routière française (Usirf) plaide en faveur de la généralisation des enrobés tièdes. Ces dernières années, le développement de techniques et procédés permettant d’abaisser la température de fabrication et d’application des matériaux de revêtement routier a permis de réduire de façon considérable les émissions de fumées de bitume. Les questions de santé et de sécurité des travailleurs sont aujourd’hui au cœur des

politiques d’innovation des entreprises. L’enjeu est majeur : améliorer les conditions de travail sur les chantiers où les opérateurs sont principalement exposés au risque de brûlures, au contact cutané avec le bitume et à l’inhalation de fumées irritantes. Mais aussi répondre à certaines contraintes spécifiques : présence de travaux d’application manuelle, travail à l’air libre, intervention en milieu confiné, etc. Au niveau national, la profession, soutenue par les principaux acteurs en santé et sécurité au travail, se mobilise.

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Vue d’ensemble

La mobilisation prend la route

L a profession est una-nime : la prévention dans les travaux routiers ne

peut être envisagée que de façon globale. Son engage-ment sur le sujet n’est pas nou-veau. Au cours des dernières décennies, il s’est traduit par la participation à des études, en particulier pour apprécier les risques associés à l’utilisa-tion du bitume, la définition de protocoles de mesures d’expo-sition, l’élaboration d’outils de prévention ou encore la dif-fusion de recommandations pour promouvoir les bonnes pratiques de travail. En trente ans, le nombre d’accidents du travail dans les travaux routiers a d’ailleurs été divisé par trois. L’industrie routière française emploie 90 000 salariés, dont 4 500 environ dans l’acti-

Lors de l’application d’enrobés bitumineux, à l’occasion de travaux routiers, les brûlures, le contact cutané avec le bitume et l’inhalation de fumées irritantes constituent les principaux risques. Pour aider à mieux appréhender les chantiers et leurs contraintes, un partenariat s’est engagé entre la profession, les préventeurs institutionnels et la médecine du travail. Une mobilisation forte, en vue d’engagements fermes.

vité enrobés (1). 40 millions de tonnes d’enrobés sont produites industriellement chaque année et mises en œuvre sur un réseau routier de plus d’un million de kilomètres de voies (source Union des syn-dicats de l’industrie routière française, Usirf). Des chantiers très différents, mécanisés à 80 %, avec pour principaux donneurs d’ordres les collecti-vités territoriales (53 %), le sec-teur privé (31 %), les grandes entreprises publiques, les SEM autoroutières et l’État.

Une filière mobiliséeÀ la fin de l’année 2010, une collaboration s’est mise en place entre l’Usirf et les par-tenaires de santé au travail (DGT, CNAMTS, INRS, OPPBTP,

GNMST BTP) (2). Elle entre dans le cadre d’une conven-tion de partenariat signée au début de l’année 2012 avec la Fédération nationale des tra-vaux publics (FNTP). « Notre action s’inscrit dans la durée. L’enjeu est de trouver un dispo-sitif répondant aux exigences réglementaires, qui soit appro-priable et communément par-tagé », explique Jean-Baptiste de Prémare, délégué général de l’Usirf. Des groupes de tra-vail ont été constitués, avec un souci commun de partage d’informations et de définition de priorités pour la mise en œuvre de solutions (cf. encadré

Pour éviter les contraintes liées aux manutentions,

des solutions mécanisées doivent être adoptées dès que possible.

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p. 25). « Nous avions besoin de mieux connaître les produits et les pratiques », affirme Cosmin Patrascu, ingénieur chimiste à l’INRS. Pour la profession, il s’agit également de travailler sur l’image et de mettre fin à certaines incompréhensions. Les produits, les procédés et les expositions professionnelles d’aujourd’hui n’ont en effet plus rien à voir avec ceux d’hier. Pourtant, la confusion entre le bitume, issu du pétrole, et le goudron, issu de la coké-faction de la houille, existe encore. À la différence du gou-dron, banni de l’activité il y a de nombreuses années, le bitume n’est pas classé cancérogène par l’Union européenne. Les fumées de bitume contiennent des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) – dont certains, comme le benzo[a]pyrène sont cancé-rogènes – mais à des concen-trations très faibles. Les études épidémiologiques menées entre 1995 et 2009 sous l’égide du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) n’ont pu établir de lien direct entre l’exposition au bitume ou à ses fumées et le can-cer (cf. encadré p. 24). Le CIRC s’est toutefois intéressé aux expositions professionnelles, et notamment aux tempéra-tures de mise en œuvre des enrobés (autour de 160 °C pour un enrobé classique). Depuis octobre 2011, il classe l’expo-sition professionnelle lors de travaux routiers utilisant des bitumes de distillation directe et de la mise en œuvre d’as-phalte coulé (3) utilisant des bitumes durs « possiblement

cancérogène pour l’homme » (groupe 2B). Loin d’être clos, le débat refait surface dans l’actualité récente. Le 10 mai 2010, l’entreprise Eurovia a été reconnue cou-pable de « faute inexcusable » par le tribunal des affaires de

Sécurité sociale de Bourg-en-Bresse, à la suite du décès, en 2008, de l’un de ses ouvriers atteint un cancer de la peau. La filiale du groupe Vinci a aussi-tôt fait appel de ce jugement, rejetant tout lien avec son acti-vité. Les conclusions de cette affaire devraient être connues en septembre prochain.

Contact cutané et inhalation

« Il existe des certitudes. Le caractère irritant des fumées de bitumes est avéré et ne fait pas débat », affirme Jean-François Certin, ingénieur-conseil à la Carsat Pays-de-la-Loire. Tout doit donc être fait pour sup-primer ou, à défaut, alléger les expositions professionnelles. Sur les chantiers, les risques

sont la brûlure, le contact cutané avec le bitume ou des produits souillés et l’inhalation des fumées. Le port de vête-ments couvrant le corps et de gants est indispensable. « Les entreprises en proposent, mais ces équipements sont-ils distri-

bués partout en nombre suffi-sant ? », s’interroge Giovanni Verrecchia, salarié d’Eurovia, délégué CFDT et vice-président du comité régional de Paris de l’OPPBTP, précisant qu’« un tee-shirt manches longues doit être changé tous les jours ». Dans les faits, lorsqu’il fait chaud, certains ne sont-ils pas tentés de travailler bras nus, prenant également le risque de s’expo-ser aux UV ? « Une étude ergo-nomique est nécessaire pour mieux comprendre les gestes et les habitudes des opérateurs et proposer des moyens de préven-tion efficaces », indique Cosmin Patrascu. Concernant le risque par inha-lation, une évaluation de l’ex-position aux fumées de bitume lors de travaux routiers a été menée en 2001 par le labora-

toire de la Carsat de Bretagne et l’Association finistérienne de médecine du travail du bâti-ment et des travaux publics de Quimper et Brest. Les enquê-teurs ont à la fois suivi les expo-sitions aux fumées globales et les expositions aux HAP, pre-

Les enrobés tièdes peuvent désormais être produits dans la plupart des centrales.

Dix ans de progrès

• 2002. Abandon total du brai de houille (les goudrons ont commencé à disparaître progressivement sur les chantiers dans les années 1980).

• 2004. Abandon des fluxants étiquetés (R40 et R45) au profit de nouveaux produits. Interdiction du fioul, du gazoil et utilisation de débituminants (ou anti-collants) référencés.

• 2004. Recommandation de l’Usirf, à la suite d’essais réalisés par l’INRS, la Carsat Bretagne et la médecine du travail du Finistère, sur les précautions à prendre lors de l’utilisation sur chantier de matériaux bitumineux.

• 2012. Recommandation de l’Usirf demandant l’utilisation systématique des enrobés tièdes, sauf cas particulier (contrainte technique ou refus motivé du maître d’ouvrage).

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nant le benzo[a]pyrène comme traceur du risque cancérogène. « Cette étude a mis en évidence des conditions d’exposition aux fumées parfois élevées. Le risque cancérogène dû aux HAP n’est en revanche pas apparu claire-ment » témoigne Jean-François Certin, pour qui « l’abandon des produits houillés, les plus chargés en HAP, remet désor-mais en cause l’utilisation du benzo[a]pyrène comme unique traceur de risque. » La question d’une nouvelle méthode d’éva-luation globale de l’exposition qui prenne en compte, sans se focaliser sur un produit, les expositions cutanées et l’inha-lation est d’ailleurs débattue par les partenaires. L’idée est également d’élargir le spectre.

Une succession d’évolutions

De nombreux paramètres sont en effet à prendre en considé-ration : type de chantier, condi-tions atmosphériques, choix de l’enrobé, température d’appli-cation, présence de fluxants (4), utilisation de produits anticol-lants... « À l’heure actuelle, nous n’utilisons que des fluxants pétroliers non étiquetés, référen-cés par la direction technique du groupe », affirme Franck Ollivier, directeur de la prévention chez Eurovia. Pour le nettoyage des engins et des outils souillés, le gasoil et le fioul domestique, interdits sur les chantiers en 2004, ont mis un certain temps à disparaître. Depuis 2005, l’en-

treprise Colas utilise des esters méthyliques d’huile de colza. « En les chauffant à 160 °C, nos études ont mis en évidence la formation de produits de dégra-dation, dont certains aldéhydes. Pour limiter ces émissions, nous imposons aux fournisseurs des critères de qualité stricts, concer-nant notamment le niveau d’oxydation du solvant à ne pas dépasser, souligne Vincent Grosshenny, responsable scien-tifique à la direction environ-nement chez Colas. Dès que ces produits ont été disponibles, nous avons renforcé notre com-munication. La résistance au changement est une barrière difficile à franchir. Lorsque l’on bouleverse les habitudes, il est indispensable d’arriver avec un discours pédagogique. »Une fois l’ensemble des condi-tions examinées, le choix des procédés de fabrication et des procédés de mise en œuvre doit permettre de réduire au maximum l’exposition du personnel au contact cutané comme aux fumées. La méca-nisation des chantiers, qui s’est accélérée en s’adaptant notam-ment au milieu urbain, avec l’apparition il y a une dizaine d’années des mini-finisseurs (5),

Une fois l’enrobé épandu sur la chaussée, les cylindres

assurent le compactage.

À la demande de l’industrie routière, et sous l’impulsion de Colas, plusieurs études

épidémiologiques ont cherché, dès le milieu des années 1990, à déterminer si l’exposition aux fumées de bitume était associée ou non à un risque accru de cancer. Une première étude du CIRC, portant sur 80 000 travailleurs européens dont 35 000 ayant été exposés pendant une vingtaine d’années aux fumées de bitume, a conclu en 2001 que les travailleurs exposés à ces fumées étaient dans le même état de santé que la population générale. Un nombre très légèrement plus élevé de cancers du poumon par rapport aux autres travailleurs du BTP était toutefois observé, ce qui a donné lieu à une

nouvelle étude, publiée en 2009. Creusant les habitudes de vie de 433 salariés ayant eu un cancer du poumon (et 1 253 contrôles), celle-ci n’a pas établi de lien direct entre le cancer du poumon et l’exposition aux fumées de bitume. Sur la base des données Colchic (1) (121 prélèvements individuels avant 2000 et 65 depuis), la moyenne des expositions par inhalation de benzo[a]pyrène particulaire a été divisée par 4 environ dans les années 2000, par rapport à la période 1987-1999.1. La base Colchic regroupe, depuis 1986, les résultats des mesures d’exposition professionnelle aux agents chimiques effectuées par prélèvement et analyse de l’air des lieux de travail lors d’interventions menées par les laboratoires de chimie des Carsat et l’INRS.

Rompre avec l’image du passé

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industriels ont équipé leurs postes d’enrobage de disposi-tifs permettant la fabrication d’enrobés tièdes, seuls 3 % des chantiers français les utilisent. « Les maîtres d’ouvrage expri-ment certaines réticences, sou-vent par méconnaissance des produits, autant du point de vue de la qualité que des coûts », explique Vincent Grosshenny. Dans le même temps, les

entreprises travaillent au per-fectionnement des techniques à froid, qui peuvent intéresser certains domaines d’applica-tion, notamment en matière d’entretien préventif de la chaussée.

Bilan et perspectivesAutre axe de travail : le cap-tage des fumées à la source. « Depuis octobre 2011, les finisseurs achetés par les filiales de Colas, en France comme à l’international, doivent obli-gatoirement être équipés d’un dispositif de captage intégré. L’objectif : renouveler tout le

parc machines dans les dix ans, à l’image de ce qui a été fait en Amérique du Nord, affirme Vincent Grosshenny. Les échanges engagés dans le cadre du groupe national nous ont permis de comprendre que les secondes montes (systèmes de captage installés sur des machines existantes) ne don-naient pas les mêmes résultats en termes d’efficacité. Par ail-leurs, ils font apparaître d’autres risques pour nos collaborateurs (encombrement, bruit…). » « Chacun essaie de jouer le jeu et de trouver des solutions, reconnaît Giovanni Verrechia. Malheureusement, les condi-

tions de travail ne changent pas du jour au lendemain. S’il faut dix ans pour renouveler un parc machines, le personnel, pendant ce temps, continue à respirer des produits dange-reux. L’utilisation des enrobés tièdes, quant à elle, est certes bénéfique du point de vue de l’exposition aux fumées, mais elle a des conséquences sur les manutentions et le risque de troubles musculosquelettiques. Ces enrobés, qui refroidissent vite, sont plus difficiles à éta-ler. » Pour le délégué syndi-cal, le meilleur compromis ne pourra être trouvé que dans la concertation, « en pensant, sur ces sujets, à associer systé-matiquement les CHSCT et les représentants du personnel, qui connaissent les contraintes réelles du terrain ». Les plus criantes sont rencontrées sur les chantiers manuels, parfois inévitables. C’est d’ailleurs sans doute sur l’ensemble des petites opérations manuelles, souvent annexes à la réalisa-tion de la route, que l’œil du préventeur doit désormais se porter.1. Enrobé : revêtement composé d’environ 95 % de granulats et 5 % de bitume.2. Direction générale du travail, Caisse nationale d’assurance maladie, Institut national de recherche et de sécurité, Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics, Groupement national multidisciplinaire de santé au travail dans le BTP.3. Asphalte : revêtement utilisé sur les chantiers où le compactage mécanique est difficile (sa formulation est telle qu’il s’étale plus facilement qu’un enrobé) ainsi que sur les portions de route qui ne sont pas soumises à de fortes contraintes (trottoirs, parkings, stations de métro…). 4. Fluxants : produits utilisés afin d’amollir le bitume pour des usages spécifiques.5. Finisseur : engin mobile utilisé pour épandre et précompacter les enrobés bitumineux sur la chaussée.

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y contribue. Par ailleurs, en vingt ans, les températures de fabrication et d’application des enrobés ont régulièrement baissé. D’après une étude de Shell, les émissions de fumées de bitumes diminuent de 50 % tous les 12 degrés. Ces der-nières années, la technique des enrobés tièdes (permettant de descendre à des températures autour de 110 à 130 °C), envi-

sagée dans un premier temps pour réduire la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre, a émergé. « Les enrobés tièdes ont été expérimentés avec succès. Les entreprises sont désormais en mesure de les proposer, affirme Jean-Baptiste de Prémare. Dans une recommandation de mars 2012 (cf. encadré p. 23), l’Usirf demande à ce que leur utilisation soit systé-matiquement proposée aux maîtres d’ouvrage. » Car, si les

L’asphalte est le revêtement utilisé notamment sur les quais de stations de métro.

Concertation nationale

Les travaux en cours visent à faire progresser

la prévention des risques professionnels de la façon la plus large, en regardant aussi bien le risque chimique, la prévention contre les TMS ou la protection contre les UV. Les échanges concernent l’évolution des produits et procédés (types de matériaux, réduction à la source des émissions de fumée sur les engins…), le recyclage des matériaux routiers, la métrologie pour l’exposition au bitume ou encore la constitution d’une base de données répertoriant les connaissances scientifiques afin d’améliorer le suivi des expositions professionnelles.

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Autoroute A28, entre Le Mans et Tours. Les opérations d’entretien et de rénovation menées sur le réseau Cofiroute par Eurovia Grands Travaux avancent à bon rythme. Sur ce chantier hautement mécanisé, la mise en œuvre d’enrobés tièdes, appliqués à une température de 30 à 50 °C inférieure à celle des enrobés traditionnels, permet de réduire de façon considérable les émissions de fumées.

Chantier autoroutier

Eurovia défend les « basses températu res »

D ans la journée, on devrait par-courir 2,5 km. »

Pour le conducteur de travaux, Patrick Pichot, les conditions pour la mise en œuvre des enro-bés sont optimales : un temps sec et sans vent, qui permet au chan-tier d’entretien de l’A28 géré par Eurovia Grands Travaux sur le réseau Cofiroute de mainte-nir sa progression à une vitesse voisine de 6 m/min. À proximité de Neuillé-Pont-Pierre (Indre-et-Loire), près de 3 200 tonnes d’enrobés sont appliquées chaque jour sur la chaussée. Particularité du chan-tier : les deux voies (10,70 mètres) sont couvertes d’un seul trait grâce à un finis-seur grande largeur. Derrière la machine, deux régleurs, deux tireurs de râteaux et quatre cylindres. Ils sont suivis par un atelier de peinture qui réalise le traçage au sol avec une demi-journée de décalage. En début de semaine, Cofiroute a mis en place le balisage et orchestré le basculement de la circulation dans le sens opposé. « Nous nous adaptons au quotidien aux contraintes et exigences que présente ce type de chantier. La communica-tion entre le chef d’application “noir” et la centrale de Neuvy-le-Roi, située à une quinzaine de kilomètres, est permanente », explique Marc Durand, anima-teur sécurité. « Si je fabrique 400 tonnes d’enrobés à l’heure, il faut que l’application suive »,

précise Raymond Garnier, chef de poste à la centrale. Tous les jours, il assure le ravitaille-ment du chantier en enrobés, organisant les rotations des 35 bennes. Neuf camions sont par ailleurs dédiés à l’approvi-sionnement de la centrale en cailloux, à partir de la gare de Saint-Pierre-des-Corps. « On fabrique des enrobés tièdes, appliqués autour de 115 °C sur le chantier », indique-t-il. Une technique qui nécessite de grosses quantités d’eau et l’emploi d’un additif, le Dat5, pour rendre le matériau suf-fisamment malléable à cette température. « Le coût est d’environ 1 euro supplémentaire par tonne en

production, mais doit être mis en regard des gains énergétiques, explique Franck Ollivier, directeur prévention d’Eurovia. Nous avons été les premiers à propo-ser, il y a plus de dix ans, des enrobés tièdes, avec une approche à l’origine essentiellement environ-nementale. Eurovia a depuis systématisé leur emploi pour les travaux en milieu confiné. Au plan national, 12 % de nos chantiers sont réa-lisés en tièdes, l’objectif étant d’atteindre 50 % dans les deux ans. » Eurovia s’est par ailleurs doté d’un logiciel qui permet d’adapter les températures de fabri-

cation au plus bas possible. La finalité, dans tous les cas, est de réduire l’exposition du personnel aux fumées lors de l’application.

Plus de confortRetour sur le chantier. En amont du cortège, une équipe de préparation rabote la chaussée. La répandeuse dépose ensuite une émulsion aqueuse de bitume à 60 °C, pour assurer la cohésion entre les différentes couches et garantir la tenue de la struc-ture. En attente : trois, quatre voire cinq bennes chargées d’enrobés tièdes, prêtes à déverser le matériau dans l’alimentateur. Cette impres-sionnante machine, placée entre la benne et le finisseur, permet de constituer un réser-

Les enrobés tièdes permettent de réduire les émissions de fumées

mais peuvent être difficiles à étaler.

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est diffusé aux chefs d’agence, auxquels nous souhaitons don-ner les moyens d’être de véri-tables patrons. » Suivant les spécificités des chantiers, des consignes sont communiquées aux intervenants. « Les chauf-feurs de bennes sont sensibili-sés aux procédures d’entrée et de sortie de la zone de travaux, explique Daniel Armellini, chef d’agence Centre-Blois pour Eurovia Grands Travaux. Sur le chantier, ils doivent suivre des instructions précises : utilisa-tion du gyrophare, limitation de vitesse, respect des distances entre les véhicules, interdiction de quitter la cabine au cours des périodes d’attente, orientation vers les zones de nettoyage… Au niveau des équipes, le quart d’heure sécurité est organisé une fois par mois autour d’un thème déterminé. Tous les matins, le chef de chantier fait un point sur l’activité du jour et les dangers qui s’y rattachent. »En matière d’hygiène, de protections individuelles ou encore de nettoyage des équipements, tout le monde

reçoit le même niveau d’infor-mation. Inflexible sur le port de vêtements de protection couvrants et propres, Eurovia vient de mettre au point une nouvelle gamme de tee-shirts manches longues, aérés, anti-UV et haute visibilité. Ces nou-velles tenues, de couleur rouge, seront distribuées tout au long de l’année 2012. « Nous avons interdit l’utilisation du fioul ou du gazoil pour le nettoyage des outils ou des machines, ajoute Raphaël Limonier, chef de sec-teur Eurovia Grands Travaux. Depuis plusieurs années, nous n’utilisons que des débitumi-nants référencés à base d’huile de colza. Il semblerait d’ailleurs qu’avec l’emploi des enrobés tièdes, les surfaces soient moins collantes et les besoins de net-toyage réduits. » Un argument supplémentaire donné aux défenseurs des tièdes.

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voir de 50 tonnes de produit disponible à l’application. Elle alimente le finisseur et donne le rythme. L’enjeu : ne pas interrompre la marche. Le cylindrage doit se faire à température constante pour éviter la formation de bosses sur la chaussée. « Avec les enrobés tièdes, il faut être réac-tif. Le produit refroidit vite et devient plus difficile à étaler », commente Mimoun Boudih, l’un des tireurs de râteau. S’il est conscient que « c’est l’ave-nir », il n’est pas encore certain d’y trouver totalement son compte. Au niveau du poste de conduite du finisseur, le son de cloche est un peu différent. « Il n’y a plus aucune odeur ! Et vous voyez de la fumée ? Rien ! », s’exclame Pascal Offer, le chauffeur. « Sur des chantiers comme celui-ci, où l’application mécanique des produits bitu-mineux est favorisée, l’utilisa-tion des enrobés tièdes amène un certain confort », affirme Patrick Pichot. En matière de procédés de mise en œuvre, Eurovia encourage d’ailleurs ces chantiers mécanisés. Lorsque l’application manuelle ne peut être évitée, il faut en revanche continuer à travail-ler sur des formules d’enrobés adaptées.

Hygiène et propreté« Nous avons un guide d’ins-tructions national reprenant l’ensemble des solutions que nous proposons en matière de risque chimique lors des tra-vaux de mise en œuvre d’enro-bés, explique Franck Ollivier. Il

Chantier autoroutier

Eurovia défend les « basses températu res »

Une fois le finisseur lancé, la marche se poursuit à vitesse constante. Les camions bennes se succèdent pour l’alimentation en enrobés.

Carnet de chantier

• Activité : mise en œuvre d’enrobés sur un segment autoroutier d’une cinquantaine de kilomètres dans les deux sens, sur l’axe Tours-Le Mans.

• Largeur de la chaussée : 10,70 m.

• Tonnage : 85 000 tonnes d’enrobés nécessitant 4 300 tonnes de bitume et 80 000 tonnes de granulats issus de la carrière de Luché.

• Température d’application : 115/120 °C.

• Réalisation : de début mars à mi-mai 2012.

• Moyens : un finisseur grande largeur, un alimentateur, quatre cylindres (ou compresseurs), une répandeuse thermofluide, 35 semi-bennes, 70 personnes.

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Recherche

Le labo trace la voie de l'innovationÀ Mérignac, Eurovia consacre de gros moyens à la recherche, au développement et à l’innovation. En 2003, l’entreprise y a implanté son centre de recherche, dont l’activité, étroitement liée à sa politique de développement durable, est essentielle dans l’élaboration de solutions aux problématiques de santé et de sécurité qui touchent les travailleurs routiers.

L e d éve l o p p e m e nt durable, la gêne à l’usa-ger, les coûts… Tels

étaient, en 2011, les princi-paux axes de travail du centre de recherche d’Eurovia situé à Mérignac, en Gironde. « En période de crise, n’oublions pas que nos exploitants doivent avant tout répondre aux appels d’offres, explique Ivan Drouadaine, directeur de la recherche. Le développement durable, la protection du milieu naturel, la sécurité des infras-tructures et leur longévité sont des préoccupations majeures. Il nous faut également travailler sur l’acceptabilité des chan-tiers par le public, qui demande moins de bruit et des inter-ventions plus courtes. » Conçu en 2003 pour prendre la suc-

cession des laboratoires de Dourdan, en région parisienne, le centre de Mérignac est impressionnant. Plus de 250 essais différents y sont menés. Les équipes travaillent aussi bien sur la formulation d’en-robés assistée par ordinateur et la recherche des meilleurs arrangements granulaires, que sur le développement de techniques de recyclage, la valorisation des déchets, la réduction des consommations énergétiques et des émissions de gaz à effet de serre, l’adhé-rence des matériaux, l’acous-tique routière, les chaussées dépolluantes, etc.En 2012, l’axe santé et sécu-rité des travailleurs routiers s’est renforcé, avec la multi-plication des travaux visant à

la réduction des températures d’application des matériaux, et notamment le développe-ment des enrobés tièdes et de l’asphalte coulé basse tem-pérature. « Pour un asphalte coulé, la température de réfé-rence était de 240 °C, précise Ivan Drouadaine. Grâce à des stratégies de fluidification par des ajouts, nous pouvons des-cendre à 180 °C et moins. C’est ce qu’Eurovia propose désor-mais à la ville de Paris, pour la réfection de ses trottoirs. » Et pour chaque pas franchi, la mission est de convaincre.

Améliorer les connaissances

« L’éducation au changement doit se faire aussi bien en

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Recherche

Le labo trace la voie de l'innovationinterne que chez le client, insiste Pascal Rousseau, ingénieur de recherche. Aujourd’hui, les enrobés tièdes sont acceptés. Nous pouvons nous inscrire

dans une démarche de pro-grès. » Comment ? En étudiant par exemple la pérennité de ces matériaux additivés, qui permettent de réduire la tem-pérature d’application des enrobés de 40 à 50 °C, mais également leurs domaines d’emploi ou la compatibilité avec le recyclage. Ou encore en développant d’autres tech-niques, comme la mousse de bitume. « Tous nos travaux ne donnent pas immédiatement lieu à un procédé. Nous visons le long terme avec un objectif constant d’amélioration des connaissances, explique Ivan Drouadaine. À l’heure où la

réduction des températures d’application constitue une priorité, le travail sur les émul-sions de bitume nous semble par exemple essentiel. » Il est

également important de tes-ter les matériaux. « On connaît les difficultés rencontrées sur les chantiers d’application manuelle. Des solutions doivent être trouvées pour améliorer la maniabilité des enrobés », indique Pascal Rousseau. Dans l’un des laboratoires, un maniabilimètre permet d’ail-leurs de tester différents types d’enrobés.« Nous devons répondre aux questions qui se posent sur le terrain, poursuit l’ingénieur de recherche. Eurovia propose par exemple des débitumi-nants à base d’huile de colza. En laboratoire, nous regardons leur action sur les matières plastiques ou les flexibles pré-sents sur les chantiers. » Dans un autre domaine, des techni-ciens travaillent sur la métrolo-gie et la prévention des risques

liés aux émanations de sulfure d’hydrogène (H2S) au cours de la livraison de l’enrobé, lors de l’ouverture de la trappe. Un additif, utilisé lors de la pré-paration du produit, permet d’éviter le dégagement de ce gaz.Autre axe de recherche : le développement de liants végé-taux renouvelables, composés majoritairement d’huiles et de résines. Ces produits, dont la longévité sur le plan tech-nique n’est pas comparable à celle d’un enrobé traditionnel, n’ont bien sûr pas vocation à les substituer. Ils sont d’ailleurs d’un usage exceptionnel et les ressources naturelles pour les fabriquer restent limitées et onéreuses. Néanmoins, ils s’adaptent à de nombreuses applications décoratives et qualitatives, sont recyclables et s’appliquent à basse température.

Des procédés pour le futur

Car c’est bien là l’essentiel : un quart de la superficie du centre de recherche est consa-cré aux matériaux travaillés à température ambiante. « Je vais vous préparer des enrobés coulés à froid, propose Frédéric Delfosse, chargé d’affaires. Ceux-ci ne sont pas fabriqués en centrale mais in situ, dans des camions spécifiques. » La démonstration est rapide : dans un récipient, il mélange les granulats, l’émulsion de bitume, l’eau et les additifs qui permettent de régler la rupture de l’émulsion par rap-port à la température exté-

rieure. Voici un produit qui ne contient pas de fluxant et ne nécessite aucune étape à chaud. Il est étalé manuel-lement, avec un temps de prise très court, et peut être utilisé lorsque la chaussée ne présente pas de problème de structure, en couche de rou-lement. « Les procédés à froid répondent déjà à de nombreux marchés, précise le spécialiste. Nous disposons aujourd’hui de solutions d’entretien et de structure pour les chaussées à faible trafic. Le Graal ? Ce serait bien sûr d’atteindre un niveau de performances mécaniques comparable à ce que l’on sait faire avec les enrobés classiques ou les tièdes. Un jour peut être… » À la direction de la préven-tion du groupe, Franck Ollivier revient plus largement sur le risque chimique. « Nous avons constitué une base de données de l’ensemble des fiches de don-nées de sécurité (entrantes et sortantes), que nous croisons avec notre base d’évaluation du risque chimique, explique-t-il. Ce travail énorme, réa-lisé en lien avec notre centre de recherche, nous a permis d’identifier 1 900 références. À terme, la volonté est de trouver le meilleur compromis entre technique et prévention afin de réduire notre panel de produits pour un même emploi. » Faire face à l’extrême diversité des situations avec des solutions précises, toujours plus ciblées, évaluées dans les salles d’es-sais de Mérignac. C’est à l’évi-dence ici que s’invente la route de demain.

G. B.

Les enrobés coulés à froid, fabriqués in situ, ont un temps de prise très rapide. Ils constituent une solution d’entretien et de structure pour les chaussées à faible trafic.

La recherche par Eurovia

Inauguré en 2003 à Mérignac, le centre de recherche d’Eurovia crée et valide des produits et procédés avec le souci

constant de travailler à des solutions opérationnelles, pouvant être directement utilisables sur le terrain. Ses dépenses sont supérieures à 5 millions d’euros. La superficie du centre est de 4 000 m2, dont 2 000 m2 de salles d’essais. On ne dénombre pas moins de 150 machines. 31 personnes, dont 18 techniciens, y travaillent et apportent des compétences pluridisciplinaires dans les domaines de la chimie, des matériaux, de la mécanique et de l’environnement. Le découpage en sections thématiques permet une représentation des différents métiers du groupe. Au sein de chaque pôle, de nombreux projets de recherche sont conduits.

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30 Travail & Sécurité – Octobre 2011 30 Travail & Sécurité – Juin 2012

Lors de la réfection des revêtements en asphalte coulé, les ouvriers sont confrontés à plusieurs risques, qui sont accrus lorsque la zone à couvrir est située dans un lieu confiné, comme dans une station de métro. C’est pourquoi ces chantiers nécessitent la mise en place de solutions techniques répondant à ces contraintes spécifiques.

S tation de métro Strasbourg-Saint-Denis, à Paris, 1 heure du matin.

Alors que les derniers usagers quittent la station, l’équipe de l’agence Voirie basée à Vitry-sur-Seine de la Société des mines de bitume et d’asphalte du Centre (SMAC), société spé-cialisée dans les asphaltes de voirie et chargée de la réfection du revêtement des couloirs de la station (1), s’interroge. Les ouvriers vont-ils pouvoir faire circuler les robots de manu-tention alors qu’il pleut ? Leurs chenilles étant en caoutchouc,

ils risquent de glisser dans les escaliers humides. Après un essai à vide concluant, l’un des quatre robots est rempli d’asphalte et conduit vers la zone à couvrir. L’épreuve de la pluie est réussie pour ces robots créés pour monter et descendre les escaliers afin de transporter l’asphalte chaud depuis le camion dans lequel il est stocké, garé à proximité de la bouche de métro, jusqu’à la zone de travaux, située en sous-sol, au niveau des quais.Depuis juillet 2011, la SMAC s’est dotée de neuf robots de

manutention, conçus spécia-lement pour les stations du métro parisien. Lors de son appel d’offres pour la réfection du revêtement de ses stations, la RATP avait exigé des presta-taires qu’ils mettent en place des techniques limitant le port de charges lourdes. L’objectif était d’améliorer la sécurité et les conditions de travail. Auparavant, ce type de chan-tier nécessitait une dizaine de personnes minimum pour acheminer l’asphalte dans des seaux en bois, ce qui engen-drait des risques de troubles musculosquelettiques (TMS), de brûlures, et de contact cutané avec des substances bitumineuses. Certains soirs, la cuve du camion pouvait être vidée, ce qui représentait 7 tonnes d’asphalte que les ouvriers devaient transporter manuellement en quelques heures. Aujourd’hui, deux opé-rateurs, formés à la conduite des robots, assurent le ravitail-lement constant en asphalte à l’intérieur de la station. Ils les pilotent avec des télé-commandes et marchent à côté, véhiculant ainsi 400 kg d’asphalte à chaque trajet : « C’est l’équivalent de 20 seaux, explique Jean-François Pietri, chef d’agence. C’est une vraie plus-value humaine, tant du point de vue de la fatigue que de l’intérêt du métier : les agents peuvent se recen-trer sur leur cœur de métier, la pose de l’asphalte. » Sur le plan technique aussi, les robots apportent une amélioration : « Ils sont calorifugés, on a ainsi, lors de ce type de transport, une meilleure conservation de la

Travaux en milieu confiné

Métro, boulot, robot…

L’asphalte contenu dans le robot est versé dans un seau en bois puis

mis en œuvre manuellement.

L’impact du règlement Reach

À la suite de la mise en place du règlement Reach, depuis 2010, l’asphalte est fabriqué et appliqué à une température

inférieure à 200 °C. Cette baisse de température a été préconisée par les fabricants de bitume, auxquels les professionnels de l’asphalte, par le biais de l’Office de l’asphalte, se sont associés. L’objectif est de réduire les émissions de fumées, de gaz à effet de serre et la quantité d’énergie nécessaire à la production, dans un souci de protection des applicateurs et de l’environnement.

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permet d’en abaisser d’environ 30 à 40 °C la température, qui passe de 200 °C à 170-160 °C. La quantité de fumées émises est ainsi considérablement réduite (environ quinze fois moins d’émissions en volume). Jean-Pierre Dean, directeur technique de la SMAC, se félicite: « C’est un brevet que nous avons déposé en 2003. Et regardez, il n’y a plus de fumées, presque pas d’odeurs et c’est aussi facile à poser que de l’asphalte traditionnel, il n’y a aucune moins-value ! » Ce que confirment les opérateurs. Autre avantage, les coûts éner-gétiques liés à la production de l’asphalte sont diminués. Dernier élément du dispositif, deux ventilateurs produisent un courant d’air permanent, afin d’assurer le renouvelle-ment d’air. Enfin, les ouvriers sont munis d’équipements de protection individuelle. Ils portent un masque filtrant l’air et des gants qui évitent le contact cutané lors de la manipulation

chaque chenille, il faut prendre le coup. » Depuis la mise en service des robots, aucun inci-dent n’est à déplorer. Ils ne sont actuellement utilisés que dans les stations de métro, mais, à terme, ils pourraient l’être dans tous les chantiers inaccessibles aux camions.

Des émissions de fumées limitées

Les contraintes liées à l’émis-sion de fumées de différents composés hydrocarbonés, dont certains pourraient être clas-sés dangereux, sont une autre problématique forte dans une station de métro. De par le confinement, les fumées sont mal évacuées et il est difficile d’y mettre en place une ven-tilation efficace, trop longue à installer, alors que les travaux sont réalisés la nuit, pendant les quelques heures de ferme-ture de la station au public. Afin de limiter les émanations de fumées, la SMAC a modifié le liant de son asphalte, ce qui

de l’asphalte. Ces éléments viennent compléter le dispo-sitif de protection collective mis en place sur le chantier. Pour la SMAC, ces évolutions techniques, en plus d’amélio-rer la sécurité et les conditions de travail, ont également pour effet de faciliter la mise en œuvre du chantier. Les robots permettent par exemple une meilleure conservation de la température dans le temps, d’où une certaine souplesse en cas d’imprévus.1. L’asphalte est étanche dans la masse, résistant au feu, capable d’absorber les arcs électriques, ce qui est important du fait de la proximité des rails d’alimentation. De plus, il ne nécessite pas de compactage mécanisé qui ne serait pas envisageable dans les couloirs de la station ou sur les quais, du fait des accès. Enfin, il est esthétique car il n’y a pas de granulats saillants en surface, et facile d’entretien.

L. C.

température qu’avec les seaux. En une heure, on perd seule-ment une dizaine de degrés ! », ajoute-t-il. Du côté des opéra-teurs, on affirme que le travail est beaucoup moins fatigant. Pour terminer l’achemine-ment, seuls deux membres de l’équipe portent encore des seaux : ils y déversent l’as-phalte contenu dans le robot, situé à quelques mètres de la zone à couvrir, et le répandent au pied de l’applicateur, qui l’étale sur le sol.Cet engin atypique, doté de chenilles en caoutchouc et pesant un peu plus d’une tonne en charge, est-il facile à piloter ? Guillaume Luberriaga, l’un des neuf opérateurs habilités à conduire le robot, répond : « Il faut un peu d’expé-rience, mais ça vient vite. On a reçu une formation d'une heure et demie. Nous avons conduit en ligne droite, fait des sla-loms, puis nous sommes venus nous entraîner en station. La difficulté, c’est que la télécom-mande a une manette pour

Le robot monte et descend les escaliers, acheminant l’asphalte à l’intérieur de la station, inaccessible au camion.

La SMAC en bref• Créée en 1884, elle a

intégré le groupe Bouygues en 1986, puis le groupe Colas en 1999.

• Activité : étanchéité, bardage, façades haut de gamme, enveloppes de bâtiments, performances énergétiques, voirie urbaine dont asphaltes qualitatifs.

• 11 000 chantiers par an.• Effectif : 3300 employés.• Chiffre d’affaires : 660

millions d’euros en 2011.• La SMAC réalise la

rénovation des stations Bastille et Strasbourg-Saint-Denis entre juin 2011 et septembre 2012.

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Spécialisée dans les travaux routiers, la PME normande Guérin TP s’est équipée, au début de l’année 2011, d’un finisseur doté d’un système d’aspiration des fumées, intégré dès la conception. Les travailleurs chargés de l’application du revêtement, satisfaits de ne plus respirer les vapeurs d’enrobés, sont également moins exposés au bruit et à la chaleur.

I l est 7 heures du matin. D’un moment à l’autre, une première benne calorifu-

gée doit arriver. Elle transporte les enrobés bitumineux qui seront appliqués à chaud sur le parking de l’église du Gros-Theil, dans l’Eure. Pendant deux jours, la mission mobi-lise sept hommes de l’équipe revêtement de la société Guérin TP. La surface à couvrir est inférieure à 2 500 m2, mais les opérations de finition sont nombreuses. « 250 tonnes d’enrobés sont nécessaires, explique Guillaume Brisset, le chef d’application. Le produit est chargé à 180 °C en centrale et appliqué dès l’arrivée de la benne à une température voi-sine de 160 °C. Les dégagements de fumées étant importants, l’entreprise a investi, au début de l’année 2011, dans un finis-seur muni d’un système d’aspi-ration intégré à la conception, l’un des premiers de ce type en France. Le principe est de cap-ter les polluants à la source et de les rejeter loin du poste de travail. » À l’arrivée de la benne, tout va très vite. Dans un premier temps, l’enrobé est distribué à la brouette, étalé et nivelé à l’aide d’un râteau, puis com-pacté avec un rouleau vibrant équipé d’un système d’arro-sage à eau sous pression qui le refroidit et l’empêche de coller. On prépare ainsi le « lit » sur lequel le finisseur vient se positionner. « Le camion se place à l’avant de l’engin et vide sa benne dans la trémie », commente le chef d’applica-tion. Sur un tapis, l’enrobé est convoyé jusqu’à une vis de

répartition, puis ressort sous la table de compactage du finis-seur. C’est dans cette zone, au-dessus de la vis, qu’est située la lèvre d’aspiration. « Les fumées se dégagent principalement lors du déchargement du camion et au niveau de la vis, pendant le brassage de l’enrobé, explique Cosmin Patrascu, ingénieur chimiste à l’INRS. Aujourd’hui, les professionnels du revête-ment routier se tournent vers les constructeurs pour deman-der l’intégration d’un dispositif de captage dès la conception de la machine. » En plus de l’aspiration des fumées, qui sont rejetées par la cheminée en partie haute, on augmente le confort et l’ergo-nomie du finisseur, sans ajou-ter le bruit d’un ventilateur additionnel et en réduisant les dégagements de chaleur. Aux États-Unis, depuis 1997, des accords entre le gouver-nement, les fournisseurs de matériel et les utilisateurs ont conduit, au fil des années, à doter tout finisseur mis sur le marché de ce type de captage. En Europe, cet équipement est parfois proposé en option, mais c’est lorsqu’il est intégré à la conception de la machine qu’il est le plus efficace.

50 à 60 % de fumées en moins

« On ne voit quasiment plus les fumées ! Nous sommes donc forcément gagnants. Car, même si on s’y était habitués, on se doute bien que respi-rer ça n’est pas très bon pour la santé », confie Guillaume Brisset. Et les premiers à s’en

satisfaire sont les régleurs, qui contrôlent la largeur et l’épais-seur de la couche appliquée, et le conducteur du finisseur. Afin d’évaluer plus précisément l’ef-ficacité de l’équipement, l’INRS prévoit, sur un même chantier, de comparer les performances de deux finisseurs, l’un étant doté d’une aspiration intégrée, l’autre non, dans les mêmes conditions d’utilisation (type de bitume, température d’ap-plication, météo…). « Les pré-lèvements sont effectués au niveau des voies respiratoires du chauffeur et du régleur, ainsi que sous la table de compac-tage. Cette mesure est la plus fiable car elle est moins sen-sible aux courants d’air et aux déplacements des personnes », estime Cosmin Patrascu. Les premiers résultats, obtenus sur un petit chantier comparable à celui du Gros-Theil, indiquent, sous la table du finisseur, une réduction de 50 à 60 % des fumées grâce au captage. Il faudrait les confirmer et pro-céder à de nouveaux prélève-

Innovation

Un engin qui a tout capté

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Travail & Sécurité – Juin 2012 33

souillé par le revêtement rou-tier. « Plus les raccords sont nombreux, plus on piétine autour de la zone d’applica-tion, d’où l’intérêt de l’aspira-tion des fumées. D’autant que personne n’a envie de porter un masque ! », affirme Julien Laville.

Une équipe soudée« Le métier reste dur, souligne Éric Guérin, le chef d’entre-prise. J’ai la chance d’avoir constitué une équipe jeune pour appliquer les enrobés bitu-mineux à chaud. Si je veux la conserver, je dois savoir la pré-server. » En 2009, il contacte le service prévention de la Carsat Normandie pour exposer son projet de changement de matériel. « Au-delà du captage des fumées de bitume, l’entre-prise avait identifié d’autres risques, notamment les manu-tentions des bouteilles de gaz

car nous travaillons ensemble depuis longtemps. » À portée de main, chacun a sa bouteille de débituminant : un ester méthylique d’acides gras végé-taux, utilisé en substitution du gasoil, fourni par l’entreprise pour le nettoyage des outils, des chaussures, des machines ou de tout autre équipement

lors des chargements à l’arrière des finisseurs. Les critères de choix se sont donc appuyés sur une analyse globale de l’activité, insiste Guillaume Lodde, contrôleur de sécurité à la Carsat Normandie. En plus d’un système d’aspiration des fumées, Guérin TP a choisi un système de chauffage électrique du bitume, supprimant la mani-pulation des bouteilles de gaz. » Pour Cédric Barrois qui, en tant que conducteur de machine, est « aux premières loges », le confort est incomparable. « Et nous avons réglé le problème des fuites de gaz qui, sur une machine de plus de vingt ans, était récurrent », explique-t-il. Épaulée par la Carsat, l’entre-prise a testé plusieurs finis-seurs et différents types de captage. L’occasion notam-ment de constater qu’un aspi-rateur de fumées additionnel est bruyant et peut causer des problèmes d’encombre-ment, ce qui perturbe les déplacements ou la visibilité des opérateurs. « Le captage intégré s’est imposé, poursuit le dirigeant. Notre finisseur coûte 15 000 euros, soit 15 à 20 % de plus qu’un engin stan-dard. Si nous avons franchi le pas alors que certains grands groupes hésitent, c’est aussi par intérêt. J’ai une machine performante sur le plan du rendement, de la qualité, de l’hygiène et de la sécurité. Mais surtout, j’ai des gars satisfaits des conditions dans lesquelles ils interviennent, conscients de la qualité de leur travail et qui n’ont aucune envie d’aller voir ailleurs. »

G. B.

ments sur un chantier routier linéaire, où les va-et-vient autour de la machine sont plus rares. « Sur le parking, la coactivité est énorme, explique Julien Laville, l’un des régleurs. On dépose 5 à 6 cm d’enrobé, puis chacun s’attelle aux petites tâches. Les croisements se multiplient autour des machines avec, en permanence, la possibilité de contact avec des surfaces et outils souillés. Une situation que nous parvenons à gérer

Guérin TP en bref

Pour les travaux routiers, infrastructures

et aménagements urbains, l’entreprise Guérin TP déploie ses compétences autour des activités de terrassement, d’assainissement voirie et réseaux divers et de mise en place de revêtement routier. Basée à Neaufles-Auvergny, dans l’Eure, elle emploie une quarantaine de salariés dont sept au sein de l’équipe revêtement.

Le régleur contrôle la largeur et l’épaisseur de la couche

appliquée. Debout derrière le finisseur, il est en première ligne

lors des émissions de fumées.

Les dispositifs de captage des fumées intégrés à la conception du finisseur sont les plus efficaces.

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Sur le chantier de construction du second tube routier du tunnel de Toulon, l’utilisation d’enrobés tièdes contribue à la réduction des émissions de fumées irritantes. En milieu confiné, la mise en œuvre d’un dispositif de ventilation conséquent reste néanmoins nécessaire.

L ’émission de fumées est deux fois moins impor-tante dès que l’on des-

cend de 12 °C en température d’application. » Pour Julien Beauveil, adjoint d’exploita-tion chez Screg Sud-Est, l’uti-lisation de bitumes dits tièdes pour le revêtement routier du tunnel de Toulon, dans le Var, s’est impo-sée, pour le confort de tous, comme une évidence. Avec Colas, l’entreprise est char-gée de la réalisation des réseaux et des structures de chaus-sée du deuxième tube routier devant assurer la liaison entre l’A50 et l’A57 sur l’axe Marseille-Nice. Le tube qui relie l’Est à l’Ouest est ouvert à la circulation depuis 2002. Sur la région, Screg Sud-Est a équipé ses centrales pour la fabrication d’enro-bés tièdes il y a près de deux ans. L’une d’entre elles se situe à quelques kilomètres du tunnel. Seule différence avec la préparation d’un revê-tement traditionnel : lors du malaxage, un additif est intro-duit et permet d’abaisser de 30 à 40 °C la température d’ap-plication (voisine de 130 °C pour un enrobé à module élevé), sans altérer les perfor-mances du produit. À ce jour, Screg Sud-Est fabrique 30 % de ses enrobés en tiède, mais leur utilisation est encore, pour des raisons de malléabilité,

limitée aux chantiers les plus mécanisés.

Mouvements d’airDans le tunnel, après le pas-sage du compacteur, les opé-rations de finition sont peu nombreuses. À mesure que le

finisseur avance, les opérateurs ont principalement à s’assurer de la netteté du joint avec le trottoir. « En matière de venti-lation, on travaille en flux d’air forcé. Lors du percement, les tra-vaux souterrains ont été réalisés avec un système mixte d’insuf-flation d’air et de captage,

explique Roland Niéri, contrô-leur de sécurité à la Carsat Sud-Est. Une fois la jonction réalisée, nous avons demandé l’ajout d’un sas pour compenser les turbulences créées et bloquer la pénétration d’air par l’Est. » Les opérateurs sont continuelle-ment alimentés en air neuf, qui

arrive par l’Ouest et circule dans le tunnel dans le sens du mis-tral. Une fois chargé en polluants, l’air est extrait du tunnel par deux turbines, avec un débit de 64 m3/s au niveau du sas.« Le sas est la porte d’entrée sur le chan-tier. Les véhicules légers l’empruntent égale-ment pour sortir, tan-dis que les camions, qui ne circulent que dans un sens, repartent par l’Ouest, précise David Audebert, respon-sable sécurité pour Bouygues, qui était chargé des premières phases de travaux. Lors du creusement, nous avons relevé des pics de température

à 40 °C. Le sas a rendu possible l’installation d’une ventilation efficace qui a permis d’amé-liorer les conditions de circula-tion d’air dès la réalisation des bétons de finition. » Mais il a surtout joué son rôle dans l’as-sainissement de l’atmosphère de travail lors du chantier de pose du revêtement routier, étendu sur un mois, qui laissait craindre de nouvelles montées en température. Deux équipes d’une dizaine de

Ventilation

Toulon voit le bout du tunnel

L’utilisation des enrobés tièdes, plébiscitée sur les chantiers

mécanisés, est particulièrement adaptée au milieu confiné.

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Var. Chaque atelier de travail est doté d’une balise de détec-tion des gaz avec enregistre-ment en continu pour le relevé des niveaux de dioxyde de car-bone, de dioxyde de soufre et d’oxygène et de la limite infé-rieure d’explosivité. « Enfin, nous avons travaillé sur

le repérage de tous les postes de travail et des différents chan-tiers (pose d’enrobés, reprise d’étanchéité…) avec des respon-sables manœuvres, en procé-dant à une identification des zones d’activité par éclairage et signalétique au sol spécifiques », insiste Bernard Péglion. La vitesse de circulation dans le tunnel est limitée à 25 km/h et 5 km/h au niveau des ateliers. « Tout concourt à ce que chacun ait une meilleure conscience de son environnement de travail, commente un opérateur. Nos grosses contraintes sont liées aux poussières et aux tempéra-tures élevées. Dans le tunnel, les débits d’air mis en œuvre nous ont permis de les atténuer. » Les premières mesures indiquent d’ailleurs des vitesses d’air de

Colas. Le dispositif favorise les mouvements d’air sur toute la longueur du tube, sans perte de charge. Des prélèvements d’air réalisés lors de l’applica-tion des enrobés confirment l’efficacité de la ventilation. L’exposition des deux équipes (amont et aval) aux différents polluants est en effet sensible-ment la même.

Exigences« En amont de l’opération, j’ai proposé une réunion de coordi-nation pour analyser l’interven-tion et proposer des solutions de prévention. Outre l’utilisa-tion de bitumes tièdes et la mise en place d’une ventilation devant permettre le maintien des mouvements d’air avec une vitesse supérieure à 0,5 m/s, un certain nombre d’exigences ont été formulées », souligne Bernard Péglion, contrôleur de sécurité à la Carsat Sud-Est, en charge depuis 2007 du suivi du chantier. La première concerne le choix du carburant, un gazoil non routier (GNR) à basse teneur en soufre. Imposée dès la phase de construction, l’utilisation de ce carburant est désormais une obligation réglementaire (1). « Nous avons également demandé à Screg et Colas l’ajout de pots catalytiques sur les engins afin de limiter les émissions de particules. Pour les véhicules en location, non équipés, la consigne est d’arrê-ter le moteur lorsque le camion est en attente dans le tunnel », poursuit Julien Bonnans, ingé-nieur-conseil à la Carsat Sud-Est, responsable du secteur

0,7 m/s en moyenne, supé-rieures aux exigences initiales. Dans les tunnels comme sur les autoroutes, l’application d’une couche de roulement plus résistante est nécessaire. Un enrobé au bitume élasto-mère, qui n’est manipulable que s’il est chauffé à plus de

160 °C doit alors être utilisé. « C’est l’occasion de réaliser une campagne de mesures en deux temps, explique Cosmin Patrascu, ingénieur chimiste à l’INRS. Au même endroit, avec les mêmes équipes et dans des conditions iden-tiques, nous allons comparer les dégagements de fumées pour différentes températures d’application. »1. Le GNR est un carburant à faible teneur en soufre, destiné notamment aux engins mobiles non routiers de travaux publics. Son utilisation permet, conformément à la Directive 2009/30/CE, de limiter les émissions polluantes des moteurs.

G. B.

personnes, l’une de chez Colas, l’autre de Screg, travaillent en simultané. Quatorze camions de ravitaillement se succèdent pour déverser l’enrobé dans le finisseur, dont la progression s’effectue à contre-courant du flux d’air. L’un des risques : faire travailler la deuxième équipe dans le flux de la première. « Une distance de sécurité est maintenue entre les deux postes. Nous avons une turbine d’une capacité de 135 m3/s à l’entrée Ouest, une seconde déplaçable de 30 m3/s, en milieu de chantier, pour renforcer le flux d’air et deux ventilateurs de 10 m3/s, gérés par les chefs d’application, afin de gagner en confort », explique Jean-Philippe Halary, conducteur des travaux chez

Ventilation

Toulon voit le bout du tunnelLe chantier

en bref• Longueur totale de

l’ouvrage : 1 818 m de tunnel.

• Tranchées couvertes à l’est 650 m et à l’ouest 530 m, accompagnant la jonction aux routes existantes.

• Premier tube creusé de 1993 à 2002.

• Début des travaux pour le second tube : février 2007.

• 15 000 tonnes d’enrobés mises en œuvre.

• Épaisseur de couche : 28 cm dans le tunnel et 20 cm en trémie.

• Marché attribué à Bouygues Solétanche/Colas/Screg.

• Livraison courant 2013.

Une fois chargé en polluants, l’air est extrait du tunnel

par deux turbines, avec un débit de 64 m3/s au niveau du sas.

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