Traite négrière

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1 La traite transatlantique Doc.2. L’auteur de cette gravure est un officier de la marine française qui s’est rendu en Angola en 1786-1787. Il décrit le processus de la production d’esclave sur le continent. Des Africains se rendent à l’intérieur pour acquérir des esclaves (achat, guerres). Suivent plusieurs jours de marche jusqu’au littoral durant lesquels 3 ou 4 esclaves sont conduits par une vingtaine d’hommes. Il est donc presque impossible de s’échapper. Ceux qui résistent ont les mains attachés derrière le dos, ceux qui résistent et tentent de fuir sont attachés par une cangue (double fourche en bois attaché autour du cou). Louis de Grandpré, Voyage à la côte occidentale d'Afrique, fait dans les années 1786 et 1787, Paris, vol. 2, 1801, page 49. Doc.1. Enfin, nous vîmes apparaître l’île de la Barbade. Après notre débarquement, on nous dirigea vers la cour d’un marchand où nous fûmes parqués comme des moutons, sans souci du sexe ni de l’âge. Nous étions là depuis quelques jours quand on procéda à notre vente. Au signal du roulement de tambour, les acheteurs, marchands ou planteurs, se précipitaient tous ensemble dans l’enclos où étaient massés les esclaves et choisissaient le lot qu’ils préféraient. Sans scrupule, on sépara les familles et des amis qui, pour la plupart, ne se reverraient plus jamais. C’était vraiment déchirant d’entendre les cris de parents perdant leurs enfants, des frères leurs sœurs, des époux leurs femmes. D’après la Véridique Histoire par lui-même d’Olaudah Equiano Africain, esclave aux Caraïbes, homme libre, 1789. Doc. 5. 1. Noirs en vente. 2. Examen avant l’acquisition. 3. Anglais regardant les dents pour déterminer l’âge et l’absence de maladie (on privilégie la catégorie d’âge des plus forts et en meilleure santé : déstructuration des sociétés africaines). 4. Africains arborant la marque de son nouveau statut, un objet ("bois d’ébène"), 5-6. Esclaves dans la chaloupe le conduisant dans le bateau. 7. Pleurs. M. Chambon, Le Commerce de l'Amérique par Marseille, vol.2, Avignon, 1764, p. 400 Doc.3 Le premier objet qui s’offrit à ma vue quand j’atteignis la côte, ce fut la mer, ainsi qu’un bateau au mouillage qui attendait sa cargaison. Ce spectacle m’emplit d’un étonnement sans borne, qui se mua bientôt en terreur quand on me transporta à bord. […] Terrassé par l’horreur et l’angoisse, je tombai inanimé sur le pont et perdis connaissance. Quand je recouvrai quelque peu mes esprits, je vis près de moi quelques Noirs dont je pensai qu’ils étaient de ceux qui m’avaient amené à bord et avaient été payés pour cela ; ils me prodiguèrent des paroles d’encouragement, mais ce fut en vain. Je leur demandai si ces hommes blancs au regard effrayant, avec leurs figures rouges et leurs cheveux flottants n’allaient pas nous manger. Ils me dirent que non […]. Peu de temps après, je trouvai parmi les pauvres enchaînés des hommes de mon propre peuple, ce qui me soulagea quelque peu. […]. Quand le bateau où nous nous trouvions eut embarqué toute sa cargaison, ils firent toute sorte de préparatifs avec une foule de bruits effrayants, et on nous fourra dans l’entrepont […]. L’exiguïté du lieu et la chaleur du climat, ajoutées à la densité de population du bateau, si tassée qu’il restait à peine à chacun de quoi se retourner, nous coupaient presque la respiration […]. L’air devint bientôt irrespirable, à force de pestilences diverses, et provoqua parmi les esclaves des maladies dont beaucoup moururent […]. D’après la Véridique Histoire par lui-même d’Olaudah Equiano Africain, esclave aux Caraïbes, homme libre, 1789. Doc.4 Au cours de la première [période], celle d’un commerce diversifié entre l’Europe [surtout le Royaume-Uni, la France, l’Espagne, le Portugal, les Provinces-Unies… et les Etats-Unis !] et l’Afrique noire, des comestibles voisinaient avec des armes blanches, des articles de parure et de fantaisie, des métaux, des produits finis ou semi-finis et des cauris (coquillages de l’océan Indien). En échange, l’Afrique fournissait quelques esclaves, de l’or, du poivre (la malaguette), ou encore de l’ivoire. […] A partir de la fin du XVII e siècle, les comestibles disparaissent, tandis que textiles, armes à feu et spiritueux viennent s’ajouter aux anciens produits toujours importés. On passe alors à une phase de commerce hautement spécialisé, l’Afrique ne fournissant plus, en échange, que des esclaves. Olivier Pétré-Grenouilleau, "Les traites négrières", La documentation française, Paris.

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La traite transatlantique

Doc.2. L’auteur de cette gravure est un officier de la marine

française qui s’est rendu en Angola en 1786-1787. Il décrit le processus de la production d’esclave sur le continent.

Des Africains se rendent à l’intérieur pour acquérir des esclaves (achat, guerres).

Suivent plusieurs jours de marche jusqu’au littoral durant lesquels 3 ou 4 esclaves sont conduits par une vingtaine d’hommes. Il est donc presque impossible de s’échapper.

Ceux qui résistent ont les mains attachés derrière le dos, ceux qui résistent et tentent de fuir sont attachés par une cangue (double fourche en bois attaché autour du cou).

Louis de Grandpré, Voyage à la côte occidentale d'Afrique, fait dans les années 1786 et 1787, Paris, vol. 2, 1801, page 49.

Doc.1. Enfin, nous vîmes apparaître l’île de la

Barbade. Après notre débarquement, on nous dirigea vers la cour d’un marchand où nous fûmes parqués comme des moutons, sans souci du sexe ni de l’âge. Nous étions là depuis quelques jours quand on procéda à notre vente.

Au signal du roulement de tambour, les acheteurs, marchands ou planteurs, se précipitaient tous ensemble dans l’enclos où étaient massés les esclaves et choisissaient le lot qu’ils préféraient. Sans scrupule, on sépara les familles et des amis qui, pour la plupart, ne se reverraient plus jamais. C’était vraiment déchirant d’entendre les cris de parents perdant leurs enfants, des frères leurs sœurs, des époux leurs femmes.

D’après la Véridique Histoire par lui-même d’Olaudah

Equiano Africain, esclave aux Caraïbes, homme libre,

1789.

Doc. 5. 1. Noirs en vente. 2. Examen avant l’acquisition. 3. Anglais regardant les dents pour déterminer l’âge et l’absence de maladie (on privilégie la catégorie d’âge des plus forts et en meilleure santé : déstructuration des sociétés africaines). 4. Africains arborant la marque de son nouveau statut, un objet ("bois d’ébène"), 5-6. Esclaves dans la chaloupe le conduisant dans le bateau. 7. Pleurs.

M. Chambon, Le Commerce de l'Amérique par Marseille, vol.2, Avignon,

1764, p. 400

Doc.3

Le premier objet qui s’offrit à ma vue quand j’atteignis la côte, ce fut la mer, ainsi qu’un bateau au mouillage qui attendait sa cargaison. Ce spectacle m’emplit d’un étonnement sans borne, qui se mua bientôt en terreur quand on me transporta à bord. […] Terrassé par l’horreur et l’angoisse, je tombai inanimé sur le pont et perdis connaissance.

Quand je recouvrai quelque peu mes esprits, je vis près de moi quelques Noirs dont je pensai qu’ils étaient de ceux qui m’avaient amené à bord et avaient été payés pour cela ; ils me prodiguèrent des paroles d’encouragement, mais ce fut en vain. Je leur demandai si ces hommes blancs au regard effrayant, avec leurs figures rouges et leurs cheveux flottants n’allaient pas nous manger. Ils me dirent que non […]. Peu de temps après, je trouvai parmi les pauvres enchaînés des hommes de mon propre peuple, ce qui me soulagea quelque peu. […]. Quand le bateau où nous nous trouvions eut embarqué toute sa cargaison, ils firent toute sorte de préparatifs avec une foule de bruits effrayants, et on nous fourra dans l’entrepont […]. L’exiguïté du lieu et la chaleur du climat, ajoutées à la densité de population du bateau, si tassée qu’il restait à peine à chacun de quoi se retourner, nous coupaient presque la respiration […]. L’air devint bientôt irrespirable, à force de pestilences diverses, et provoqua parmi les esclaves des maladies dont beaucoup moururent […].

D’après la Véridique Histoire par lui-même d’Olaudah Equiano Africain, esclave aux Caraïbes, homme libre,

1789.

Doc.4

Au cours de la première [période], celle d’un commerce diversifié entre l’Europe [surtout le Royaume-Uni, la France, l’Espagne, le Portugal, les Provinces-Unies… et les Etats-Unis !] et l’Afrique noire, des comestibles voisinaient avec des armes blanches, des articles de parure et de fantaisie, des métaux, des produits finis ou semi-finis et des cauris (coquillages de l’océan Indien). En échange, l’Afrique fournissait quelques esclaves, de l’or, du poivre (la malaguette), ou encore de l’ivoire. […] A partir de la fin du XVII

e siècle, les comestibles

disparaissent, tandis que textiles, armes à feu et spiritueux viennent s’ajouter aux anciens produits toujours importés. On passe alors à une phase de commerce hautement spécialisé, l’Afrique ne fournissant plus, en échange, que des esclaves.

Olivier Pétré-Grenouilleau, "Les traites négrières", La documentation française, Paris.