Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

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Sorbonne Université Licence de Mathématiques, 2ème année Topologie et Calcul Diérentiel 2MA216 Nina Aguillon, Jean-Yves Chemin, Ayman Moussa

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Sorbonne UniversitéLicence de Mathématiques, 2ème année

Topologie et Calcul Différentiel2MA216

Nina Aguillon, Jean-Yves Chemin, Ayman Moussa

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Table des matières

1 Normes sur Rnet suites convergentes 9

1.1 Rappels sur Rn et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91.2 Normes sur Rn . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

1.2.1 Trois exemples importants de normes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.2.2 Normes équivalentes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.3 Convergence des suites dans Rn . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151.3.1 Suites de Cauchy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

2 Topologie sur Rn19

2.1 Boules ouvertes, boules fermées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192.2 Ensembles ouverts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202.3 Ensembles fermés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232.4 Intérieur, adhérence et parties denses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262.5 Compacité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

3 Fonctions continues 33

3.1 Ensemble de définition d’une fonction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333.2 Limite d’une fonction en un point et continuité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343.3 Fonctions continues : propriétés et exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

3.3.1 Opérations sur les fonctions continues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 393.3.2 Prolongement par continuité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

3.4 Continuité et topologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 433.5 Connexité par arcs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 473.6 Uniforme continuité et théorème de Heine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

4 Dérivées partielles et fonctions de classe C 149

4.1 Fonctions dérivables, fonctions différentiables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 494.2 Dérivée partielle, matrice jacobienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

4.2.1 Dérivées partielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 514.2.2 Matrice jacobienne, gradient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

4.3 Fonctions de classe C 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 534.4 Opérations sur les fonctions de classe C 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

4.4.1 Combinaison linéaire et produit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 574.4.2 Composition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

4.5 Le gradient d’une fonction numérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

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5 Recherche d’extremum 65

5.1 Extremum local et extremum global . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 655.2 Points critiques et extrema . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 655.3 Le retour de la compacité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 675.4 Dérivées partielles d’ordre deux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 685.5 Nature des points critiques : des critères avec la hessienne . . . . . . . . . . . . . . 72

A Rappels de théorie des ensembles 77

B Un bref aperçu des fonctions holomorphes 79

B.1 La dérivabilité au sens complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79B.2 La formule de Cauchy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80B.3 Formule de Cauchy et analyticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82

C Corrigés des exercices 85

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Préambule

Ce polycopié est parsemé d’exercices dont les corrigés sont fournis en annexe (accessibles parliens cliquables sur la version électronique de ce document). Le lecteur est fortement encouragéà ne pas lire les corrigés instantanément et à se donner le temps de chercher les exercices. Ceciest d’autant plus crucial pour les exercices fondamentaux qu’il est absolument nécessaire de savoirrésoudre pour valider cette UE.

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Introduction

Ce module est consacré à l’étude des fonctions à plusieurs variables. Quand on cherche à modé-liser un phénomène (c’est-à-dire à trouver des équations mathématiques qui décrivent correctementce qu’on observe), qu’il soit physique, biologique, économique ou autre, il est plutôt rare qu’il nedépende que d’un seul paramètre. Par exemple, la température dans une pièce peut être vue commeune fonction du temps et de la position dans l’espace.

L’objet de ce cours n’est pas de proposer des modèles mais d’étudier les outils mathématiquesqui permettent de les analyser. Vous savez déjà très bien, à partir de son expression, étudier unefonction d’une variable réelle : trouver ses points de discontinuité, sa limite en +1 et son minimumpar exemple. Vous savez également faire des développements limités ou calculer des intégrales.Dans ce cours nous allons nous attacher à généraliser certaines de ces notions aux fonctions deplusieurs variables, éventuellement à valeurs vectorielles. Mais avant même de chercher à étudierles fonctions, il nous faudra généraliser plusieurs notions explorées dans le cadre d’une variableréelle. Par exemple : qu’est-ce qu’une suite de vecteurs de Rn convergente ? Comment définir lacontinuité d’une fonction de Rn dans Rp ? Peut-on « dériver » une telle fonction ?

Rappels d’analyse réelle

Comme nous le précisions ci-haut, une bonne partie de ce cours a pour but de généraliser desnotions que vous avez déjà rencontré dans le cadre de l’étude de l’ensemble des nombre réels etdes fonctions définies sur celui-ci. Nous rappelons ci-après quelques unes de ces notions que nousgénéraliserons au sein du cours et qu’il vous faut impérativement connaître.

Commençons par la définition de la limite d’une suite.

Définition

Soit (xk)k2N une suite de nombre réels. On dit que la suite (xk)k2N converge vers un réel ` si et

seulement si

8" > 0 , 9k" / k � k" =) |xk � `| < " .

La notation signifie que le rang k" à partir duquel tous les termes de la suite sont à une distanceinférieure à " de la limite ` dépend de ". Nous l’adopterons tout du long du polycopié.

On voit que la définition de convergence d’une suite donnée ici utilise la notion de distanceentre deux points, donnée par la valeur absolue. Si xk est un vecteur et non un réel, on verra qu’ily a beaucoup de choix pour remplacer la valeur absolue.

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L’une des propriétés remarquables des suites réelles est le théorème suivant. Il signifie quel’on peut choisir certains termes de la suite de sorte que, si on oublie les autres, la suite obtenueconverge.

Théorème (de Bolzano-Weierstrass)

Soit (xk)k2N une suite d’éléments d’un intervalle fermé et borné [a, b] de R. Il existe une sous-suite

de la suite (xk)k2N qui converge vers un élément ` de [a, b].

L’un des résultats très importants de ce cours sera la généralisation du Théorème de Bolzano-Weirestrass au cas de suites vectorielles. En plus du comportement des suites, nous allons nousintéresser à l’analyse et la description des variations de fonctions. L’une des premières notions qu’ilnous faudra traduire dans le cas de plusieurs variables est la continuité, dont nous rappelons ici ladéfinition dans le cas d’une fonction d’une variable réelle.

Définition

Soit x un réel. La fonction f : R ! R est continue au point x si et seulement si

8" > 0, 9⌘" > 0, |x� y| < ⌘" =) |f(x)� f(y)| < ".

Cela signifie que si on prend un tube de diamètre ", aussi petit que soit ", on va pouvoir lecouper à une longueur ⌘" (qui dépend de ") de sorte que le graphe de la fonction reste dans letube autour du point (x, f(x)). La définition de la continuité d’une fonction de plusieurs variablesse rapprochera beaucoup de ce qui précède ; l’effort se concentrera en fait sur la traduction de lanotion de « proximité », dans Rn. Pour la dérivabilité, dont nous rappelons la définition ci-après,les choses se compliqueront un peu : ne pouvant diviser par un vecteur il nous faudra trouver uneformulation cohérente dans le cas de plusieurs variables.

Définition

Soit f une fonction de R dans R une fonction et x un point de R. On dit que f est dérivable au

point x, de dérivée f0(x), si

limh!0

f(x+ h)� f(x)

h= f

0(x) .

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Chapitre 1

Normes sur Rn et suites convergentes

1.1 Rappels sur Rn et notationsNous allons dans cette section introduire la notion de norme sur un espace vectoriel qui nous

permettra de définir une distance associée. Avant de donner une définition, rappelons que l’en-semble Rn est un espace vectoriel sur R de dimension finie égale à n (qui est un entier strictementpositif). Ses éléments sont appelés des vecteurs. En tant qu’espace vectoriel de dimension n, ilexiste une base {e1, . . . , en}, i.e. une famille libre et génératrice, de sorte que tout vecteur x de Rn

peut s’écrire de manière unique

x =nX

i=1

xiei,

où les nombres réels x1, . . . , xn désignent les coordonnées de x dans la base {e1, . . . , en}. La plupartdu temps on utilisera la base canonique définie par

e1 =

0

BBBBBBB@

100...00

1

CCCCCCCA

, e2 =

0

BBBBBBB@

010...00

1

CCCCCCCA

, · · · , en =

0

BBBBBBB@

000...01

1

CCCCCCCA

.

et on identifiera le vecteur x avec la matrice colonne de taille n⇥ 10

[email protected]

1

CA et on écrira x =

0

[email protected]

1

CA = t(x1, . . . , xn).

Attention !

Le fait de représenter un vecteur de Rn sous forme d’un vecteur colonne sera essentiellorsque l’on devra effectuer des produits matrices/vecteurs. Dans les autres situations, la re-présentation d’un vecteur sous forme d’une colonne ou d’une ligne ne sera pas particulièrementimportante et pour cette raison, nous ferons parfois des abus de notations (surtout au tableau).

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10 CHAPITRE 1. NORMES SUR RN ET SUITES CONVERGENTES

Dans le polycopié, nous notons souvent un vecteur t(x1, · · · , xn), l’exposant « t » indiquant latransposée ; il s’agit donc en fait d’un vecteur colonne.

En tant qu’espace vectoriel, Rn possède— une loi interne (l’addition) : si x = t(x1, . . . , xn) 2 Rn et y = t(y1, . . . , yn) 2 Rn, alors

x+ ydéf= t(x1 + y1, . . . , xn + yn) 2 Rn;

— une loi externe (la multiplication par un réel) : si x = t(x1, . . . , xn) 2 Rn et � 2 R, alors

�xdéf= t(�x1, . . . ,�xn) 2 Rn

.

1.2 Normes sur Rn

La définition suivante introduit le concept fondamental de norme sur Rn ; intuitivement un telobjet permet de mesurer la « taille » des vecteurs. Il s’agit d’un prérequis essentiel à de nombreuxconcepts (convergence, continuité . . . ) que nous allons explorer dans le cours lesquels exigent dequantifier la « petitesse » des vecteurs. En réalité, dans la définition qui suit, on peut remplacerRn par un espace vectoriel quelconque, mais ce n’est pas l’objet de ce cours de travailler en toutegénéralité.

Définition 1.1

On appelle norme sur Rnune application N de Rn

dans R+ telle que, pour tout vecteurs x, y

de Rnet tout réel �,

(i) Séparation : N(x) = 0 si et seulement si x = 0Rn = t(0, · · · , 0) ;(ii) Homogénéité : N(�x) = |�|N(x) pour tout x 2 Rn

et tout � 2 R ;

(iii) Inégalité triangulaire : N(x+ y) N(x) +N(y) pour tout x et y dans Rn.

Au collège ou au lycée les vecteurs sont définis selon trois attributs : direction, sens et longueur.Les propriétés (i) et (ii) de la Définition 1.1 coïncident avec l’attribut « longueur » : il est entenduque le vecteur nul est le seul ayant une longueur nulle et si on dilate un vecteur d’un facteur �(en changeant éventuellement son sens), sa longueur va être dilatée d’un facteur |�|. La propriété(iii) est reliée à une autre exigence que l’on peut comprendre en introduisant la notion de distancerelative à une norme.

Définition 1.2

Étant donnée une norme N sur Rn, la distance (relative à N) entre deux vecteurs x et y est le

nombre positif N(x� y) = N(y � x).

Remarque 1.1 Il existe une notion générale de distance (sur un ensemble quelconque) que nous

avons choisi de ne pas présenter ici. Parmi les propriétés exigées figure l’inégalité triangulaire : la

distance entre A est B est plus petite que la distance obtenue en ajoutant un « détour » par un

troisième point C. Dans le cas d’une distance relative à une norme, ce principe naturel est vérifié

grâce à l’inégalité triangulaire (de la norme).

Il peut être un peu surprenant de parler d’une distance entre deux points relative à une normedonnée. On aurait envie de dire que la distance entre deux points, c’est simplement la longueurdu segment qui les sépare ... et pourtant ! Il nous arrive souvent, dans la vie de tous les jours, de

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1.2. NORMES SUR RN 11

manipuler des distances qui ne correspondent pas forcément à la ligne droite : lorsque l’on traverseun quartier rempli d’immeubles (voir la norme de Manhattan à la Proposition 1.2) ou lorsqu’onregarde la distance entre deux stations de métro sur le réseau de la RATP (même si dans ce derniercas, il n’y a pas de norme sous-jacente).

Proposition 1.1 (Inégalité triangulaire renversée)Soit N une norme sur Rn

. Alors pour tout x, y dans Rnon a

|N(x)�N(y)| N(x� y).

Démonstration. En utilisant l’inégalité triangulaire, on obtient

N(x) = N(x� y + y) N(x� y) +N(y),

N(y) = N(y � x+ x) N(y � x) +N(x).

L’homogénéité avec � = �1 donne que N(x�y) = N(y�x), et on peut réécrire ces deux inégalitéscomme

�N(x� y) N(x)�N(y) N(x� y)

ce qui constitue le résultat recherché.

1.2.1 Trois exemples importants de normes

Nous donnons dans ce paragraphe trois exemples fondamentaux de normes sur Rn, qui nousaccompagneront tout au long de ces notes.

Proposition 1.2 (Norme de Manhattan)L’application k · k1 définie sur Rn

par

kxk1déf=

nX

j=1

|xj | = |x1|+ |x2|+ · · ·+ |xn|,

est une norme. On l’appelle norme 1 ou norme de Manhattan.

Démonstration. Commençons par un rappel important : une somme de termes positifs est nullesi et seulement si tous ces termes sont nuls. Ici on a sommé des valeurs absolue donc des termespositif. On a donc kxk1 = 0 si et seulement si tous les |xj | sont nuls, donc si et seulement si tousles xj sont nuls, donc si x = 0Rn : la séparation est établie.

L’homogénéïté résulte du fait que

k�xk1 =nX

j=1

|�xj | =nX

j=1

|�| |xj | = |�|nX

j=1

|xj | = |�|kxk1 .

Enfin, on utilise l’inégalité triangulaire sur R pour écrire que, pour tout x, y 2 Rn et tout j

dans {1, · · · , n},|xj + yj | |xj |+ |yj | .

En sommant par rapport à l’indice j on récupère ainsi l’inégalité triangulaire pour k · k1.

Proposition 1.3 (Norme infinie)L’application k · k1 définie sur Rn

par

kxk1déf= max

1jn|xj |

est une norme. On l’appelle norme infinie.

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12 CHAPITRE 1. NORMES SUR RN ET SUITES CONVERGENTES

Démonstration. Si kxk1 = 0, on a que pour tout j dans {1, · · ·n}, |xj | = 0 et donc x = 0Rn , cequi montre la séparation. Ensuite, puisque pour tout j dans {1, · · ·n}, on a |�xj | = |�||xj |, on a

max1jn

|�xj | = |�| max1jn

|xj |,

cela établit l’homogénéïté. Enfin, pour démontrer l’inégalité triangulaire, on utilise que

8j 2 {1, · · · , n} , 8(x, y) 2 (Rn)2 , |xj + yj | |xj |+ |yj | kxk1 + kyk1.

Ainsi donc max1jn

|xj + yj | kxk1 + kyk1 et l’inégalité triangulaire est démontrée.

Le dernier exemple de norme de ce paragraphe est en fait celui auquel vous êtes le plus familier :il s’agit de la norme euclidienne. La distance relative à cette norme est précisémment donnée parla longueur du segment séparant les deux points.

Proposition 1.4 (Norme euclidienne)L’application k · k2 définie sur Rn

par

kxk2déf=

vuutnX

j=1

x2j =

qx21 + x2

2 + · · ·+ x2n

est une norme. On l’appelle la norme 2 ou norme euclidienne.

Démonstration. On a kxk2 = 0 si et seulement si kxk22 =Pn

j=1 x2j = 0. En utilisant à nouveau le

fait qu’une somme de termes positifs est nulle si et seulement si tous ces termes sont nuls, on endéduit que pour tout j, x2

j = 0, donc que touts les xj sont nuls, donc que x = 0Rn . Cela montrela séparation. En ce qui concerne l’homogénéïté, elle se déduit de l’égalité

k�xk22 =nX

j=1

(�xj)2 = �

2nX

j=1

x2j = �

2kxk22,

puisquep�2 = |�|.

La démonstration de l’inégalité triangulaire pour la norme euclidienne est sensiblement plusdélicate que pour les deux exemples précédents. Cela repose sur l’inégalité fondamentale suivante,souvent utilisée pour elle-même.

Proposition 1.5 (Inégalité de Cauchy-Schwarz)Pour tout vecteurs x, y de Rn

, on a

����nX

j=1

xjyj

���� kxk2kyk2.

L’égalité a lieu si et seulement si x et y sont co-linéaires.

Démonstration. Pour tout nombre réel t, on définit

P (t)déf= kx+ tyk22 =

nX

j=1

(xj + tyj)2.

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1.2. NORMES SUR RN 13

Un développement élémentaire permet d’écrire que

P (t) =nX

j=1

�x2j + 2txjyj + t

2(yj)2�

= kxk22 + 2tS + t2kyk22 avec S

déf=

nX

j=1

xjyj .

La fonction P est donc un trinôme du second degré qui est positif (puisque c’est une somme decarrés) donc a au plus une racine double ; son discriminant est donc négatif ou nul, ce qui assureque 4S2 � 4kxk22kyk22 est négatif ou nul, ce qui exactement l’inégalité voulue.

Le cas d’égalité correspond au cas où le discriminant est nul, c’est-à-dire au cas où le polynôme Padmet une racine t0 tel que kx+ t0yk22 = 0. L’axiome de séparation de la norme implique que x+t0y = 0Rn .

Conclusion de la preuve de la Proposition 1.4 Par un développement élémentaire, on trouve que

kx+ yk22 =nX

j=1

�x2j + 2xjyj + y

2i

= kxk22 + kyk22 + 2nX

j=1

xjyj .

L’inégalité de Cauchy-Schwarz ci-dessus assure alors que

kx+ yk22 kxk22 + kyk22 + 2kxk2kyk2 =�kxk2 + kyk2

�2.

La fonction racine étant croissante sur R+, on termine la preuve en l’appliquant à l’inégalitéprécédente.

Exercice fondamental 1 :

Calculer les normes k · k1, k · k2 et k · k1 du vecteur u = t(1,�1, 2,�3, 1).

Corrigé de l’exercice H

Exercice fondamental 2 :

Dans le cas où n = 2, représenter graphiquement les ensembles

S1 = {(x, y) 2 R2 : k(x, y)k1 = 1},

S2 = {(x, y) 2 R2 : k(x, y)k2 = 1},

etS1 = {(x, y) 2 R2 : k(x, y)k1 = 1}.

Corrigé de l’exercice H

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14 CHAPITRE 1. NORMES SUR RN ET SUITES CONVERGENTES

Exercice fondamental 3 :

Montrer que l’application suivante est une norme sur R2.

N : R2 �! R

(x, y) 7�! |x+ 2y|+ 3|y|.

Corrigé de l’exercice H

1.2.2 Normes équivalentes

La définition suivante fournit un critère de comparaison entre deux normes distinctes.

Définition 1.3

Soient N1 et N2 deux normes sur Rn. On dit que N1 est équivalente à N2 s’il existe deux constantes

↵ > 0 et � > 0 telles que

8x 2 Rn, ↵N1(x) N2(x) �N1(x) .

Remarque 1.2 On remarque qu’une norme est toujours équivalente à elle même (réflexivité),

que si N1 est équivalente à N2, alors N2 est équivalente à N1 (symétrie) et enfin que si N1 est

équivalente à N2 elle-même équivalente à N3, alors cette dernière est équivalente à N1 (transitivité).

Les propriétés précédentes définissent ce que l’on appelle une relation d’équivalence. La symétrie

nous permet en particulier de parler d’une paire N1, N2 de normes équivalentes, sans ambiguïté

sur l’ordre choisi.

Cette propriété signifie intuitivement qu’un vecteur « petit » (au sens infinitésimal du terme)selon la norme N1 le sera aussi selon l’autre norme N2 et réciproquement.

Attention !

Dans la définition de l’équivalence des normes les constantes ↵ et � sont indépendantes duvecteur x !

La Proposition 1.6 ci-dessous montre que les trois normes k ·k1, k ·k2 et k ·k1 sont équivalentes.

Proposition 1.6

Pour tout x de Rn, on a

kxk1 kxk2 kxk1 pnkxk2 nkxk1 .

Démonstration. Pour tout j dans {1, · · · , n}, on a

x2j

nX

j=1

x2j = kxk22 et donc kxk21 kxk22.

Nous avonsnX

j=1

x2j

✓ nX

j=1

|xj |◆2

et donc kxk22 kxk21.

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1.3. CONVERGENCE DES SUITES DANS RN 15

En appliquant l’inégalité de Cauchy-Schwarz avec x = (|x1|, · · · , |xn|) et y = (1, · · · , 1), ontrouve que

nX

j=1

|xj | pn

✓ nX

j=1

x2j

◆ 12

ce qui est exactement l’inégalité kxk1 pnkxk2. Enfin, écrivons que

nX

j=1

x2j n max

1jnx2j

et l’on conclut que kxk2 pnkxk1 et la proposition est ainsi démontrée.

Exercice fondamental 4 :

Savoir redémontrer l’équivalence des normes k · k1, k · k2 et k · k1, au moins dans R2.

Exercice complémentaire 1 :

Sur R2, montrer que la norme définie par N(x, y) = |x + 2y| + 3|y| est équivalente à lanorme k · k1.

Corrigé de l’exercice H

Remarque 1.3 Spoiler : nous verrons plus loin dans le cours, à la fin du Chapitre 2, qu’en réalité

toutes les normes sur Rnsont équivalentes. En dimension infinie – ce que nous n’aborderons pas

dans ce cours – ce n’est pas du tout le cas et cela s’entrevoit en remarquant que les contrôles de la

norme k·k2 par la norme k·k1 et de la norme k·k1 par la norme k·k2 donnés par la Proposition 1.6

se détériorent à mesure que la dimension n grandit.

1.3 Convergence des suites dans Rn

La convergence des suites dans Rn s’exprime en reproduisant la définition de la convergencedans R et en remplaçant la valeur absolue par une norme. Ainsi, a priori, cette notion de conver-gence dépend de la norme choisie.

Définition 1.4

Soit N une norme sur Rn. Considérons une suite (xk)k2N d’éléments de Rn

. On dit que (xk)k2N

converge vers a 2 Rn pour la norme N si et seulement si

8" > 0 , 9k" 2 N / k � k" =) N(xk � a) < " .

Attention !

Dans le cas des suites vectorielles, la notation avec un exposant k peut prêter à confusion :il ne s’agit dans ce cas pas d’une puissance. Notons déjà que si x est un vecteur, xk n’est pas

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16 CHAPITRE 1. NORMES SUR RN ET SUITES CONVERGENTES

définit. On choisit cette notation en exposant car on a pris l’habiture de noter la composanteen indice, ainsi

x0 =

0

BBB@

x01

x02...x0n

1

CCCA, x

1 =

0

BBB@

x11

x12...x1n

1

CCCA, x

2 =

0

BBB@

x21

x22...x2n

1

CCCA, · · ·

Notons aussi que la notation n est réservée pour la dimension de l’espace, on indice donc lasuite avec une autre notation (ici k).

Proposition 1.7

Pour toute norme sur Rn, toute suite admet au plus une limite pour cette norme.

Démonstration. Soit k · k une norme sur Rn. Soient a et b deux éléments de Rn tels que lasuite (xk)k2N converge vers a et vers b, pour la norme k · k. Alors, pour tout " > 0 il existe deuxentiers positifs k",a et k",b tels que

8k � k",a , kxk � ak < " et 8k � k",b , kxk � bk < " .

En utilisant l’inégalité triangulaire, on en déduit que pour tout k supérieur au maximum de k",a

et � k",b on aka� bk ka� x

kk+ kxk � bk < 2"

ce qui montre que a = b, puisque " est arbitraire et que k · k vérifie l’axiome de séparation desnormes.

Une conséquence très importante de l’équivalence entre deux normes est que celles-ci définissentalors les mêmes suites convergentes.

Proposition 1.8

Soient N et N0deux normes équivalentes sur Rn

. Alors une suite (xk)k2N converge vers a 2 Rn

pour la norme N si et seulement si elle converge vers a 2 Rnpour la norme N

0.

Démonstration. Les deux normes sont équivalentes, donc il existe ↵ > 0 et � > 0 tels que

8x 2 Rn, ↵N(x) N

0(x) �N(x).

Supposons que la suite (xk)k2N converge vers a au sens de la norme N . Ceci signifie que pourtout réel strictement positif ", il existe un entier positif k" tel que pour tout k supérieur à k",on ait N(xk � a) "/�, et donc que N

0(xk � a) ". La réciproque est strictement identique enutilisant que N(x) N

0(x)/↵.

Nous avons vu dans le paragraphe précédent que les trois normes fondamentales k · k1, k · k2et k · k1 sont (deux à deux) équivalentes sur Rn. Ainsi, elles définissent la mêmes notion de suiteconvergente. Le résultat suivant précise que cette convergence est équivalente à la convergence dechacune des composantes dans R.

Proposition 1.9

Soit (xk)k2N une suite d’éléments de Rnet a un point de Rn

. Se valent :

(i) (xk)k2N converge vers a pour la norme de Manhattan ;

Page 17: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

1.3. CONVERGENCE DES SUITES DANS RN 17

(ii) (xk)k2N converge vers a pour la norme euclidienne ;

(iii) (xk)k2N converge vers a pour la norme infinie ;

(iv) Pour tout j 2 J1, nK, la suite de réels (xkj )k2N converge vers aj.

Démonstration. En combinant la Proposition 1.6 avec la Proposition 1.8, on obtient directementl’équivalence des trois premiers points. Sans perte de généralité il nous suffit donc de démontrer(iii) , (iv).

Supposons que la suite (xk)k2N converge vers a pour la norme infinie. Ainsi, pour tout " > 0,il existe un entier positif k" tel que pour tout k � k", on ait kxk � ak1 < ". Or par définition dek · k1, ceci implique que

8j 2 {1, · · · , n} , |xkj � aj | < ",

ce qui est exactement la convergence de la suite (xkj )k2N vers aj . Réciproquement, supposons que

cette convergence ait lieu pour tout j dans J1, nK. Par définition, cela veut donc dire

8" > 0 , 9k",j / 8k � k",j |xkj � aj | < " .

Posons k"déf= max

1jnk",j . Nous avons alors

8k � k" , 8j 2 {1, · · · , n} , |xkj � aj | < " et donc kxk � ak1 < "

ce qui montre bien que (xk)k2N converge vers a en norme k · k1.

1.3.1 Suites de Cauchy

La Définition 1.4 présuppose la connaissance de la limite a, afin de définir la convergencede la suite (xk)k2N vers celle-ci. Mais on peut imaginer avoir à démontrer la convergence d’unesuite, avant même d’avoir pu identifier quelle est sa limite. La notion de suite de Cauchy répondprécisément à cette exigence. L’idée est la suivante : si une suite converge vers une limite, c’estque les termes de la suite se ressemblent de plus en plus (au sens où ils se rapprochent les unsdes autres, vers la limite en question). En formalisant cette idée d’approximation, on parvient à ladéfinition suivante.

Définition 1.5

Soit N une norme sur Rn. Une suite (xk)k2N est dite de Cauchy pour la norme N , si pour tout

" > 0 il existe k" 2 N tel que, pour tout p, q � k", on ait N(xp � xq) < ". On dit aussi que la suite

(xk)k2N vérifie le critère de Cauchy.

Tout comme la convergence, le fait d’être une suite de Cauchy se préserve pour les normeséquivalentes.

Proposition 1.10

Soit N et N0deux normes équivalentes sur Rn

. Alors toute suite de Cauchy pour N est de Cauchy

pour N0, et réciproquement.

Démonstration. Par symétrie, il nous suffit de démontrer que si une suite est de Cauchy pour N ,elle est également de Cauchy pour N 0. L’équivalence supposée nous fournit ↵ > 0 tel que N

0 ↵N .Pour " > 0 et "0 := "/↵, le critère de Cauchy (pour la norme N) nous fournit k"0 2 N tel quep, q � k"0 ) N(xp�x

q) < "0 ) ↵N(xp�x

q) < ") N(xp�xq) < ", ce qui termine la preuve.

Page 18: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

18 CHAPITRE 1. NORMES SUR RN ET SUITES CONVERGENTES

Enfin, voici un premier résultat reliant la convergence d’une suite et le critère de Cauchy. Nousétudierons la réciproque à la fin du chapitre suivant.

Proposition 1.11

Soit N une norme sur Rn. Toute suite convergente de Rn

pour la norme N est de Cauchy pour

la norme N .

Démonstration. C’est l’inégalité triangulaire qui va nous permettre de formaliser l’intuition sui-vante : si une suite converge vers quelque chose, elle doit se « ratatiner » et asymptotiquement,tenir toute entière dans un mouchoir de poche. Précisons cela.

Si (xk)k2N converge (pour N) vers une limite a 2 Rn, alors pour tout " > 0 il existe k" 2 Ntel que k � k" ) N(xk � a) < "

2 . Pour p, q � k" on peut alors écrire xp � x

q = (xp � a)� (xq � a)et invoquer l’inégalité triangulaire pour la norme N :

p, q � k" =) N(xp � xq) N(xp � a) +N(xq � a) <

"

2+"

2= ".

Page 19: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Chapitre 2

Topologie sur Rn

Les fonctions d’une variable réelle sont (le plus souvent) définies sur des intervalles. Il n’y a pasbeaucoup de type d’intervalle : les ouverts de la forme ]a, b[, les fermés de la forme [a, b], les ni l’unni l’autre de la forme [a, b[ ou ]a, b]. Enfin, il y a ceux qui ne sont pas bornés (a = �1 ou b = +1)et ceux qui sont bornés. D’un coup d’œil, vous savez sur quel type d’intervalle vous êtes. Lesfonctions de deux variables sont définies sur des parties du plan. Et les parties du plan, même « enun seul morceau », sont bien plus compliquées et variées que des intervalles ! La topologie consiste àidentifier les propriétés des ensembles qui sont préservées par déformation continue (sans déchirer,ni recoller). Dans R, le fait d’être un intervalle (ouvert ou fermé) est un exemple de telle propriété.Nous allons voir qu’en augmentant la dimension, la topologie s’enrichit considérablement.

Dans tout ce chapitre on travaille par défaut sur l’espace Rn, muni d’une norme fixée N . Nousdonnerons régulièrement des exemples en petite dimension, avec l’une des normes fondamentalesintroduites dans le chapitre précédent, mais les définitions et propriétés seront énoncées en toutegénéralité.

2.1 Boules ouvertes, boules ferméesIl s’agit de généraliser (partiellement) les intervalles ouverts et fermés de R à l’espace Rn, muni

de la norme N . Les intervalles ]a, b[ et [a, b] peuvent respectivement se voir commenx 2 R /

���x� a+ b

2

��� <b� a

2

oet

nx 2 R /

���x� a+ b

2

��� b� a

2

o,

c’est-à-dire comme l’ensemble des points qui sont à une distance inférieure (ou égale dans ledeuxième cas) à b�a

2 du centre de l’intervalle a+b2 . Ceci conduit à la définition suivante.

Définition 2.1

Soient N une norme sur Rn, x un point de Rn

et r un réel strictement positif. On définit la bouleouverte de centre x et rayon r associée à la norme N par

BN (x, r) =�z 2 Rn : N(z � x) < r

.

On définit boule fermée de centre x et rayon r associée à la norme N par

BfN (x, r) =

�z 2 Rn : N(z � x) r

.

Si r = 1 et x = 0Rn , on parle de boule unité (fermée ou ouverte).

19

Page 20: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

20 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

Dans le cas où N = k · kk avec k 2 {1, 2,1}, on notera simplement Bk(x, r) et Bfk(x, r) les

boules ouvertes et fermées correspondantes.

Exercice fondamental 5 :

1. Dans R2, représenter B1(�00

�, 3), Bf

2 (�20

�, 2) et B1(

�1

�1

�, 3). On dessinera la frontière en

pointillés si elle n’est pas incluse dans l’ensemble, et en trait plein si elle l’est.2. Exprimer les ensembles suivants comme des boules, en précisant la norme, le rayon, et

si elles sont ouvertes ou fermées.

A := {(x, y, z) 2 R3 : x2 + y2 + z

2< 5},

B := {(x1, x2) 2 R2 : |x1 � 2|+ |x2 + 3| 2}.

Corrigé de l’exercice H

2.2 Ensembles ouvertsDéfinition 2.2

Un ensemble U ⇢ Rnest dit ouvert relativement à la norme N si pour tout x 2 U , il existe un

r > 0 tel que BN (x, r) ⇢ U . En particulier, quelle que soit la norme choisie sur Rn, l’ensemble

vide ? et l’ensemble Rnsont ouverts relativement à celle-ci.

Commençons par se rassurer un peu : les boules ouvertes introduites dans le paragraphe pré-cédent sont bien ouvertes relativement à la norme qui les définit !

Proposition 2.1

Pour tout x 2 Rnet tout r > 0, la boule BN (x, r) est ouverte relativement à la norme N .

Démonstration. Il s’agit donc de démontrer que pour tout élément z de BN (x, r) il existe � > 0tel que BN (z, �) ⇢ BN (x, r). Par définition de BN (x, r), nous savons que N(z � x) < r et doncque � := r �N(z � x) > 0. Si y 2 B(z, �) nous avons alors par inégalité triangulaire N(y � x) N(y � z) +N(z � x) < � +N(z � x) = r. Cela montre que B(z, �) ⇢ B(x, r) et la démonstrationest terminée.

Exemple 2.1 Un intervalle ouvert ]a, b[ est donc un ensemble ouvert dans R, pour la norme

définie par la valeur absolue !

La proposition suivante est essentielle en ce qu’elle montre que deux normes équivalentes défi-nissent les mêmes ensembles ouverts.

Proposition 2.2

Soient N et N0deux normes équivalentes sur Rn

. Alors une partie U de Rnest un ouvert pour la

norme N si et seulement c’est un ouvert pour la norme N0.

Démonstration. Par hypothèse on dispose de deux réels ↵,� > 0 tels que

8x 2 Rn, ↵N

0(x) N(x) �N0(x). (2.1)

Page 21: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

2.2. ENSEMBLES OUVERTS 21

•z

x•

r

kz � xk2

•z

•x

kz � xk1r

Figure 2.1 – Illustration de la preuve de la Proposition 2.1 dans le cas de la norme euclidienne (àgauche) et de la norme de Manhattan (à droite).

Souvenons-nous de la Remarque 1.2 : on a (par symétrie) des inégalités dans l’autre sens, avec lesconstantes 1/↵ et 1/�. En particulier, il nous suffit de démontrer qu’un ensemble ouvert pour N estouvert pour la norme N

0 : la réciproque s’établira exactement de la même manière en échangeantle rôle des deux normes.

Soit donc U un ensemble ouvert pour N . Si U = ?, U est immédiatement ouvert pour N0 et

nous n’avons rien à faire. Autrement, si U contient un élément x on sait (par ouverture) qu’il exister > 0 pour lequel BN (x, r) ⇢ U . Rappelons la définition de la boule précédente :

BN (x, r) =�z 2 Rn : N(z � x) < r

.

La seconde inégalité de (2.1) nous assure que si N 0(z � x) < r/�, alors N(z � x) < r, autrementdit

�z 2 Rn : N 0(z � x) < r/�

⇢�z 2 Rn : N(z � x) < r

,

ce qui n’est rien d’autre que l’inclusion BN 0(x, r/�) ⇢ BN (x, r). Puisque ce dernier ensemble esttout entier inclus dans U c’est également le cas du plus petit, ce qui termine la preuve.

Ainsi, pour démontrer qu’un ensemble est ouvert pour une certain norme, il suffit de le faireavec une norme qui lui est équivalente ; En pratique cela veut dire que l’on pourra choisir la normequi rend la démonstration plus légère.

Exemple 2.2 Soit �déf= {(x1, x2) 2 R2

/ x1 = x2}. L’ensemble R2 \� est un ouvert de R2pour

la norme euclidienne.

Démonstration. Grâce à la Proposition 2.2 et la Proposition 1.6, on peut utiliser la norme deManhattan k · k1 dans la démonstration. Soit a = (a1, a2) un point de R2 \�. Soit x = (x1, x2) unélément de la boule (pour la norme k · k1) de centre a et de rayon 1

2 |a1 � a2|. On a alors

|a1 � a2| |a1 � x1|+ |x1 � x2|+ |x2 � a2| |x1 � x2|+ kx� ak1

|x1 � x2|+1

2|a1 � a2| .

Il en résulte que |x1 � x2| � 12 |a1 � a2| et donc comme a1 6= a2, que |x1 � x2| > 0. Autrement

dit, x1 6= x2, donc (x1, x2) appartient à R2 \� et on a démontré que cet ensemble est ouvert.

Page 22: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

22 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

La proposition suivante précise les opérations ensemblistes que l’on peut effectuer sur les ouvertsen conservant cette propriété.

Proposition 2.3

Soit N une norme sur Rn. Toute union d’ouverts pour cette norme est toujours un ouvert pour

celle-ci. Toute intersection finie d’ouverts pour cette norme est également un ouvert pour celle-ci.

Démonstration. Soit (U�)�2⇤ une famille d’ensembles ouverts de Rn indexée sur un ensemblequelconque ⇤. Considérons un point a de V

déf=

[

�2⇤

U�. Par définition de l’union, il existe un

indice �0 dans ⇤ tel que a appartienne à U�0 . L’ensemble U�0 étant lui même ouvert, il existe unréel strictement positif r tel que la boule B(x, r) soit incluse dans U�0 et donc dans V ; ce quimontre bien que V est ouvert.

Considérons maintenant une famille finie (Uk)1kM d’ouverts de Rn. Soit a un point del’intersection (que l’on suppose non vide). Comme chaque U

k est un ouvert,

9rk > 0 , BN (a, rk) ⇢ Uk.

Posons rdéf= min

1kMrk. Pour tout k, on a

BN (a, r) ⇢ BN (a, rk) ⇢ Uk.

Ceci implique que BN (a, r) est incluse dans l’intersection des Uk. D’où la proposition.

Attention !

La finitude supposée dans le cas de l’intersection est nécessaire (voir l’exemple ci-après).Inversement, aucune condition sur l’union (qui peut être finie, infinie, indénombrable) dans lecas des ensembles ouverts. De manière générale il est absolument vital pour la compréhensionde la topologie que vous soyiez à l’aise avec les opérations élémentaires sur les ensembles(union, intersection, passage au complémentaire). Si les preuves manipulant ces notions vousparaissent trop difficiles, nous vous conseillons dans un premier temps de vous rafraîchir lamémoire à l’aide de l’Annexe A, à la fin du polycopié.

Contre-exemple 2.1 Une intersection infinie d’ouverts de Rnpeut très bien ne pas être ouverte.

C’est le cas pour n = 1 :\

n2N⇤

i0, 1 +

1

n

h=]0, 1],

qui n’est ni ouvert ni fermé.

Exercice complémentaire 2 :

Montrer queT

n2N⇤ B1

�0Rn , 1 + 1

n

�n’est pas un ouvert de Rn.

Corrigé de l’exercice H

Page 23: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

2.3. ENSEMBLES FERMÉS 23

2.3 Ensembles fermésDéfinition 2.3

Un ensemble F ⇢ Rnest dit fermé relativement à la norme N si son complémentaire Rn \ F est

ouvert (pour la norme N). En particulier, quelle que soit la norme choisie sur Rn, l’ensemble vide

? et l’ensemble Rnsont ouverts relativement à celle-ci.

Remarque 2.1 En lisant rapidement cette définition, par passage au complémentaire, on pourrait

s’imaginer qu’étant donnée une norme, les ensembles se répartissent en deux catégories : les ouverts

et les fermés. Il n’en est rien ! Contrairement aux portes ou fenêtres, un ensemble peut être à la

fois ouvert et fermé ou bien ni ouvert, ni fermé !

Exercice fondamental 6 :

Donner un exemple de partie à la fois ouverte et fermée dans R2 muni de la norme eucli-dienne et un exemple de partie ni ouverte, ni fermée.

Corrigé de l’exercice H

De manière analogue aux ouverts, les boules fermées sont fermées relativement à la norme quiles définit.

Proposition 2.4

Pour tout x 2 Rnet tout r > 0, la boule B

fN (x, r) est fermée relativement à la norme N .

Démonstration. Soit BfN (x, r) une telle boule. Il s’agit donc de démontrer que l’ensemble

Rn \BfN (x, r) = {z 2 Rn : N(z � x) > r} ,

est ouvert. Si z est un point de cet ensemble, on a ainsi � := N(z � x) � r > 0. Maintenant, si yappartient à BN (z, �), nous avons

N(z � x)�N(y � x) |N(z � x)�N(y � x)| N(z � y) < �,

où l’on a utilisé l’inégalité triangulaire renversée de la Proposition 1.1. On a donc en particulierN(z � x) � � < N(y � x) ; mais le choix de � donne exactement N(z � x) � � = r, si bienque nous avons établi, pour tout élément y de BN (z, �), l’inégalité N(y � x) > r, soit l’inclusionBN (z, �) ⇢ Rn \Bf

N (x, r) et ce dernier ensemble est donc bien ouvert.

Puisque les fermés sont définis par les ouverts, une conséquence immédiate de la Proposition 2.2est la suivante : deux normes équivalentes définissent les mêmes parties fermées.

Proposition 2.5

Soient N et N0deux normes équivalentes sur Rn

. Alors une partie F de Rnest un fermé pour la

norme N si et seulement c’est un fermé pour la norme N0.

La proposition suivante est une traduction en termes de fermés de la Proposition 2.3.

Proposition 2.6

Soit N une norme sur Rn. Toute intersection de fermés pour cette norme est toujours fermée pour

celle-ci. Toute union finie de fermés pour cette norme est également fermée.

Page 24: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

24 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

Démonstration. La preuve découle de la Proposition 2.3 une fois remarqué le fait suivant : si(F�)�2⇤ est une famille quelconque d’ensembles, alors

Rn \\

�2⇤

F� =[

�2⇤

(Rn \ F�).

Dans le cas particulier où les ensembles F� sont tous fermés, cela veut dire que chacun des ensemblesRn \ F� est ouvert ; d’après la Proposition 2.3, la réunion de tous ces ensembles est toujours unensemble ouvert. Ainsi l’ensemble

T�2⇤ F� est bien fermé.

De même, si (F`)1`k est une famille finie de fermés de Rn, alors

Rn \k[

`=1

F` =k\

`=1

(Rn \ F`),

qui est ouvert à nouveau d’après la Proposition 2.3 (intersection finie d’ouverts) ; ainsi l’ensembleSk`=1 F` est fermé.

Exemple 2.3

• Un intervalle fermé [a, b] est un ensemble fermé de R, muni de la norme définie par la valeur

absolue. Même chose pour un intervalle de la forme [a,+1[ ou ]�1, b].

• L’ensemble � de l’Exemple 2.2 est un fermé de R2, pour les normes k · k1, k · k2 et k · k1.

• Quelle que soit la norme N choisie, un singleton {a} est toujours fermé puisque {a} =Tk�1 B

fN (a, 1

k ).

Nous terminons ce paragraphe sur les parties fermées par une caractérisation fort utile dans lapratique.

Corollaire 2.1 (Caractérisation séquentielle de la fermeture)Une partie F de Rn

est fermée pour la norme N si et seulement si toute suite d’éléments de F qui

converge pour N a en fait sa limite dans F . Autrement dit, l’ensemble F est fermé si et seulement

si pour toute suite (xk)k2N 2 FN

l’implication suivante est satisfaite :

�limk!1

xk = x

�=) x 2 F . (2.2)

Démonstration.

) : soit F une partie fermée et (xk)k2N 2 FN une suite convergente vers un certain x 2 Rn,

pour la norme N . Si x n’appartient pas à F alors x appartient à l’ouvert Rn \F et on disposedonc de r > 0 pour lequel BN (x, r) ⇢ Rn \ F . C’est une contradiction car par définition dela convergence, il existe kr 2 N tel que k � kr ) xk 2 BN (x, r), et la suite (xk)k2N est àvaleurs dans F . Ainsi x appartient à F .

( : supposons que l’implication (2.2) soit satisfaite pour toute suite (xk)k2N à valeurs dans F .Dans ces conditions, si x est un point n’appartenant pas à F , l’une des boules BN (x, 2�k)(définies pour k 2 N) est totalement disjointe de F : dans le cas contraire, on disposerait d’unesuite (xk)k2N 2 F

N satisfaisant xk 2 BN (x, 2�k) et donc (xk)k2N ! x ce qui impliquerait,par (2.2), que x 2 F . Conclusion : pour x 2 Rn \ F , nous venons d’établir l’existence d’unrayon r > 0 pour lequel BN (x, r) ⇢ Rn \ F . Il s’agit du caractère ouvert de Rn \ F quiimplique celui fermé de F .

Page 25: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

2.3. ENSEMBLES FERMÉS 25

Figure 2.2 – La caractérisation séquentielle de la fermeture est valide sur le disque fermé (à gauche,avec la frontière) : pour toute suite convergente d’éléments de cet ensemble, la limite demeure dansl’ensemble. La caractérisation est invalide sur le disque ouvert (à droite, sans la frontière) : ilexiste au moins une suite convergente d’éléments de cet ensemble dont la limite n’appartient pas àl’ensemble.

Attention !

Une lecture rapide du corollaire précédent donnerait envie de croire que toute suite à valeursdans un fermé converge dans celui-ci. Non ! Il s’agit d’un énoncé conditionnel : si une suiteprenant ses valeurs dans un ensemble fermé se trouve être convergente dans Rn

alors sa limiteappartient au fermé.

Exercice fondamental 7 :

1. En partant de la Définition 2.3, montrer que l’ensemble suivant est fermé :

A = {(x, y) 2 R2 : (x� 1)2 + y2 � 2 ou (x+ 1)2 + y

2 � 1 }.

2. Grâce au Corollaire 2.1, montrer que l’ensemble suivant est fermé :

B = {(x, y) 2 R2 : sin(x) + cos(y) 1}.

Corrigé de l’exercice H

Exercice complémentaire 3 :

Montrer que l’ensemble

C =�(x, y) 2 R2 : 2x+ y > 1 et x� y � 0

.

n’est ni ouvert, ni fermé.Corrigé de l’exercice H

Page 26: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

26 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

2.4 Intérieur, adhérence et parties densesComme nous l’expliquions à la Remarque 2.1 il existe de nombreux ensembles n’étant ni ouverts,

ni fermés. Il est toutefois souvent utile d’approcher ces ensembles autant que possible par desensembles ouverts ou fermés. On fixe comme précédemment une norme N sur Rn et les notionsabordées d’ouverts et fermés réfèrent à celle-ci.

Définition 2.4

Soit A une partie de Rn. On dit qu’un point x est intérieur à A si et seulement s’il est le centre

d’une boule ouverte contenue dans A ; L’ensemble des points intérieurs de A s’appelle l’intérieur deA et est noté A.

Théorème 2.1

A est un ouvert. C’est le plus grand ouvert contenu dans A.

Démonstration. Par définition, si x 2 A, il existe r > 0 tel que BN (x, r) ⇢ A. D’après la Propo-sition 2.1, pour tout élément z 2 BN (x, r) on dispose de � > 0 tel que BN (z, �) ⇢ BN (x, r) ⇢ A,cela démontre que z est un point de A et que cet ensemble est ouvert. Enfin, si O est un ouvertcontenu dans A et que x est un élément de O, on dispose donc de r > 0 tel que BN (x, r) ⇢ O ⇢ A,cela établit x 2 A et donc l’inclusion O ⇢ A, ce qui fait de ce dernier ensemble le plus grand ouvertcontenu dans A.

Définition 2.5

Soit A une partie de Rn. On dit qu’un point x est adhérent à A si et seulement si toute boule

ouverte de centre x rencontre A. L’ensemble des points adhérents à A s’appelle l’adhérence de A et

est noté A.

Théorème 2.2

A est un fermé. C’est le plus petit fermé contenant A.

Démonstration. Par définition de l’adhérence les éléments x n’appartenant pas à A sont ceux pourlesquels, pour un certain r > 0, BN (x, r) \ A = ?. Autrement dit, l’appartenance x 2 Rn \ A

équivaut à l’existence de r > 0 tel que BN (x, r) ⇢ Rn \ A. Si B = Rn \ A, nous venons d’établirRn \A = B. En utilisant le Théorème 2.1 (par passage au complémentaire), il s’en suit que A estun fermé contenant A, et que c’est le plus petit ensemble satisfaisant ces propriétés.

Exemple 2.4 L’intérieur d’un intervalle d’extrémités a < b est l’intervalle ]a, b[ ; son adhérence

est le segment [a, b].

En pratique, le critère suivant est très utile pour déterminer l’adhérence d’une partie. En quelquesorte, on peut dire que l’adhérence est constituée de tous les « points limites » que l’on peutfabriquer à partir d’éléments de A.

Proposition 2.7 (Caractérisation séquentielle de l’adhérence)Un point x est adhérent à une partie A ⇢ Rn

si et seulement si il existe une suite (xk)k2N 2 AN

telle que (xk)k2N ! x.

Démonstration. Puisque l’adhérence A est une partie fermée contenant A, si (xk)k2N 2 AN

converge vers x, alors on a effectivement x 2 A, grâce à la caractérisation séquentielle de lafermeture. Réciproquement, si x 2 A, alors par définition des points adhérents on a pour toutk 2 N?, BN (x, 1

k ) \A 6= ?, ce qui signifie que l’on peut trouver xk 2 A tel que N(x� x

k) < 1k , et

ce pour tout entier k � 1. La suite (xk)k2N? ainsi construite appartient à A et converge vers x, cequi démontre l’autre implication.

Page 27: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

2.5. COMPACITÉ 27

Nous terminons ce paragraphe par la notion fondamentale de densité d’une partie dans uneautre.

Définition 2.6

Une partie A ⇢ B deux parties de Rn. On dit que A est dense dans B si B ⇢ A.

Une application immédiate de la caractérisation séquentielle de l’adhérence, conduit à la sui-vante pour la densité.

Proposition 2.8 (Caractérisation séquentielle de l’adhérence)Une partie A ⇢ B est dense dans B si et seulement si, pour tout élément b 2 B il existe une suite

(ak)k2N 2 AN

telle que (ak)k2N ! b.

Exemple 2.5 L’ensemble Q des rationnels est dense dans R.

Exercice complémentaire 4 :

Soit N une norme sur Rn. Déterminer l’intérieur et l’adhérence (au sens de N) d’une bouleouverte BN (x, r).

Corrigé de l’exercice H

Exercice fondamental 8 :

En utilisant la densité de Q dans R, démontrer que Q2 = R2, pour chacune des troisnormes k · k1, k · k2 et k · k1.

Corrigé de l’exercice H

2.5 CompacitéLa notion de compacité est extrêment importante ; la présentation que nous en faisons ici

repose sur la notion de suite extraite, notamment la proposition suivante que nous rappelons, sansdémonstration.

Proposition 2.9

Soit (xk)k2N une suite convergeant vers `. Toute sous-suite de (xk)k2N converge aussi vers `.

Définition 2.7

Une partie K de Rnest dite compacte si et seulement si toute suite d’éléments de K admet une

sous-suite convergente dans K.

Exemple 2.6 Les intervalles fermés et bornés de R sont des parties compactes de R d’après le

théorème de Bolzano-Weierstrass page 8.

Plus bas, dans ce paragraphe, nous identifierons précisément les parties compactes de Rn.Avant cela, observons une condition nécessaire pour qu’une partie soit compacte : celle-ci doitobligatoirement être fermée.

Page 28: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

28 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

Lemme 2.1

Toute partie compacte de Rnest fermée.

Démonstration. Nous allons utiliser la caractérisation séquentielle du Corollaire 2.1. Soit donc K

une partie compacte de Rn et une suite (xk)k2N d’éléments de K convergeant vers un certainpoint x de Rn. Il nous faut montrer que x appartient à K. La compacité de K entraîne l’existenced’une sous-suite (x'(k))k2N et d’un point ex de K tels que

limk!1

x'(k) = ex .

D’après la Proposition 2.9 on. alimk!1

x'(k) = x .

L’unicité de la limite assure que x = ex et donc que x appartient à K ce qui entraine le résultatd’après le Corollaire 2.1.

Proposition 2.10

Soit K une partie compacte de Rn. Un sous-ensemble A de K est compact si et seulement si c’est

une partie fermée de Rn.

Démonstration. Le Lemme 2.1 montre l’aspect nécessaire. Il reste donc à démontrer qu’une partiefermée A d’un compact K est un compact. Pour ce faire, considérons une suite (xk)k2N d’élémentsde A. C’est aussi une suite d’éléments de K qui est compact. Il existe donc une sous-suite (x'(k))k2N

qui converge vers un élément x de K. Comme A est supposé fermé, le Corollaire 2.1 assure que x

appartient à A qui est donc compact.

Définition 2.8

Soit N une norme sur Rn. Une partie A est dite bornée (relativement à N) s’il existe R > 0 tel

que A ⇢ BN (0, R).

Exercice fondamental 9 :

Dans R2 muni de la norme euclidienne, trouver :• un sous-ensemble fermé mais non borné ;• un sous-ensemble borné mais non fermé.

Corrigé de l’exercice H

Théorème 2.3

On munit Rnde l’une des trois normes k · k1, k · k2 ou k · k1. Alors, un sous-ensemble K ⇢ Rn

est compact si et seulement si l est à la fois fermé et borné.

Remarque 2.2 Nous établirons plus loin que toutes les normes sur Rnsont équivalentes : cette

caractérisation des parties compactes est donc en fait vraie pour toute norme sur Rn.

Démonstration. On sait par la Proposition 1.6 que les trois normes en question sont équivalentes.Ainsi, les notions d’ensemble fermé ou borné et de convergence sont les même pour ces trois normes.Sans perte de généralité, on peut donc établir la preuve du théorème uniquement dans le cas oùRn est muni de la norme k · k1. Commençons par le sens direct.Le Lemme 2.1 ci-dessus affirme

Page 29: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

2.5. COMPACITÉ 29

que K est fermé. Pour démontrer que K est borné, nous allons procéder par contraposition etdémontrer que si une partie K n’est pas bornée, alors on peut construire une suite d’élémentsde K qui n’admet aucun suite convergente. Si K n’est pas bornée, pour une entier k il existe unélément x

k de K tel que kxkk1 � k. Toute sous-suite (x'(k))k2N vérifie

kx'(k)k1 � '(k) � k .

Les suites convergentes étant bornées, nous avons démontré que K n’est pas compact.Nous allons démontrer la réciproque dans le cas où n = 2. Le cas général se traite par un raison-

nement parfaitement analogue. Puisque nous travaillons avec la norme infinie et que l’on supposeK borné pour celle-ci, cela veut dire qu’il existe R > 0 tel que K ⇢ [�R,R]2. D’après la Propo-sition 2.10, il suffit donc de démontrer que [�R,R]2 est compact. Pour ce faire, considérons unesuite (xk)k2N d’éléments de [�R,R]2. Nous allons procéder par deux extractions successives. Com-mençons par regarder la suite (xk

1)k2N contenant uniquement la première coordonnée de chacundes x

k. C’est une suite réelle à valeur dans [�R,R]. D’après le théorème de Bolzano-Weierstrassrappelé page 8, il existe une fonction d’extraction '1 et un réel x1 dans l’intervalle [�R,R] tel que

limk!1

x'1(k)1 = x1 .

Par conséquent, dans la suite (yk)k2N = (x'1(k))k2N, la première coordonnée à une limite,mais a priori pas la seconde. En appliquant à nouveau le théorème de Bolzano-Weierstrass àla suite (yk2 )k2N, il existe une fonction d’extraction '2 et un réel y2 de l’intervalle �[R,R] tels quelimk!1 y

'2(k)2 = y2. On en déduit que

limk!1

y'2(k)2 = lim

k!1x('1�'2)(k)2 = y2,

puis que, d’après la Proposition 2.9,

limk!1

x('1�'2)(k)1 = x1 .

Ainsi les deux coordonnées de la suite (x('1�'2)(k))k2N convergent respectivement vers x1 et y2 cequi signifie, d’après la Proposition 1.9, que cette suite converge en norme infinie vers (x1, y2).

La notion de compacité est absolument fondamentale. Elle permet notamment d’établir lerésultat suivant, qui est l’un des plus importants du cours.

Théorème 2.4

Toutes les normes sur Rnsont équivalentes entre elles.

Remarque 2.3 Il faut bien saisir la puissance de ce résultat : les notions de convergence, d’ouverts,

de fermés, d’intérieur, d’adhérence, de densité ou de compacité sont donc exactement les mêmes,

quelle que soit la norme choisie sur Rn! Dans la suite de ce cours, il nous arrivera souvent (sans

perte de généralité) de choisir la norme la plus commode en fonction de la situation dans laquelle

on se trouve. Ce résultat est spécifique à la dimension finie : on peut montrer qu’il demeure vrai

pour tout espace euclidien et qu’il est toujours faux dans un espace de dimension infinie.

Démonstration. En se remémorant la notion de transitivité introduite dans la Remarque 1.2, ilnous suffit de démontrer que toute norme N sur Rn est équivalente à la norme infinie : si onmontre cela et que N

0 est une autre norme, celle-ci sera alors également équivalente à la normeinfinie, et donc à N par transitivité. On fixe donc une norme N sur Rn jusqu’à la fin de la preuve.

Page 30: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

30 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

Commençons par remarquer qu’il existe une constante C > 0 telle que

8x 2 Rn, N(x) Ckxk1, (2.3)

ce qui est la moitié de ce que l’on souhaite démontrer. En effet, si (ei)1in est la base canoniquede Rn, en appliquant l’inégalité triangulaire à la décomposition x =

Pni=1 xiei pour un vecteur

x 2 Rn arbitraire, il vient

N(x) nX

i=1

|xi|N(ei) max1in

|xi|nX

i=1

N(ei),

où l’on a également utilisé l’homogénéité de la norme N pour la première inégalité. On en déduitbien (2.3) avec C :=

Pni=1 N(ei), puisque par définition kxk1 = max1in |xi|.

Pour prouver l’équivalence entre N et k · k1 il nous suffit maintenant de montrer l’existence deD > 0 telle que

8x 2 Rn, Dkxk1 N(x). (2.4)

On introduit la sphère unité associée à la norme infinie, soit l’ensemble

S1 := {x 2 Rn : kxk1 = 1} .

L’ensemble A := {N(x) : x 2 S1} est une partie non vide de R, minorée par 0. A admet doncune borne inférieure, que l’on appelle D. Puisque 0 est un minorant de A, on a (par définition de laborne inférieure) D � 0. Observons maintenant que pour tout vecteur non nul x 2 Rn, le vecteurnormalisé z := x

kxk1appartient à S1 par homogénéité. En particulier, on en déduit N(z) 2 A et

donc D N(z). En utilisant à nouveau l’homogénéité, nous avons donc établi pour tout vecteurnon nul x 2 Rn l’inégalité (2.4) ; celle-ci est par ailleurs évidemment vérifiée pour x = 0. Attention,contrairement à ce que l’on pourrait croire, la preuve n’est pas finie : il faut encore démontrer quela constante D est strictement positive car si D = 0, l’estimation (2.4) perd tout intérêt !

Puisque D est la borne inférieure de l’ensemble A, on dispose d’une suite minimisante, i.e. unesuite d’éléments de A convergeant vers D. Autrement dit, il existe une suite (xk)k2N 2 SN

1 telle que(N(xk))k ! D. On invoque maintenant le Théorème 2.3 : l’ensemble S1 est borné pour la normeinfinie (il est par exemple inclus dans B1(0, 2)) et aussi fermé pour celle-ci par caractérisationséquentielle. En effet, si (zk)k2N est une suite d’éléments de S1 qui converge en norme k · k1 versun vecteur z, on a grâce à l’inégalité triangulaire renversée

|kzk1 � 1| =��kzk1 � kzkk1

�� kz � zkk1 �!

k!+10,

ce qui montre effectivement z 2 S1. Le Théorème 2.3 montre donc que S1 est compact pour lanorme uniforme, et on peut donc extraite de la suite (xk)k2N introduite ci-haut une sous-suite(x'(k))k2N, qui converge pour cette norme vers un certain point x de S1, en norme infinie. Maissouvenons-nous de (2.3). Appliquée au vecteur x� x

'(k) cette inégalité nous donne

|N(x)�N(x'(k))| N(x� x'(k)) Ckx� x

'(k)k1 �!k!+1

0.

Par ailleurs, D est la limite de (N(xk))k et donc également celle de (N(x'(k)))k (une suite extraited’une suite convergente converge vers la même limite). Par unicité de la limite on en déduit D =N(x), où x est un vecteur de S1. Cela assure que D 6= 0, car dans le cas contraire on aurait x = 0(axiome de séparation), ce qui contredirait l’égalité kxk1 = 1.

Page 31: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

2.5. COMPACITÉ 31

Exercice fondamental 10 :

Montrer que l’ensemble suivant est compact dans R2 :

D = {(x, y) 2 R2 : x2 + y4 4}.

Corrigé de l’exercice H

Comme expliqué dans la Remarque 2.3, une conséquence de ce théorème est que l’on peutparler, dans Rn, d’ensemble ouvert, fermé, compact de manière intrinsèque sans avoir besoin despécifier avec quelle norme on travaille. Profitons de ce cadre simplifié pour énoncer une propriétébien utile en pratique.

Proposition 2.11

Soient n1, n2 2 N?, O1 un ensemble ouvert de Rn1 et O2 un ensemble ouvert de Rn2 . Alors le

produit cartésien O1 ⇥O2 est ouvert dans Rn1+n2 .

Remarque 2.4 On montre de même que le produit cartésien de deux fermés est fermé, et le

produit cartésien de deux compacts est compact : c’est un bon exercice d’essayer de le démontrer !

Démonstration. Par équivalence des normes on peut travailler avec k ·k1, aussi bien sur Rn1 , Rn2

que Rn1+n2 . Si a = t(x, y) 2 O1 ⇥ O2 avec x 2 O1 et y 2 O2, puisque ces deux ensembles sontouverts, on dispose de r > 0 (quitte à prendre le minimum des deux rayons) tels que B1(x, r) ⇢ O1

et B1(y, r) ⇢ O2 (noter que la première boule est une partie de Rn1 , la seconde une partie deRn2). La définition de la norme infinie montre alors que B1(z, r) ⇢ O1 ⇥ O2 (et cette fois-ci ils’agit d’une boule de Rn1+n2 !).

Le caractère intrinsèque vis-à-vis de la norme considérée s’applique aussi au critère de Cauchyque l’on a introduit à la fin du chapitre précédent : en alliant le Théorème 2.4 et la Proposition 1.10,on peut parler d’une suite de Cauchy dans Rn sans fixer de norme particulière. Nous allons jus-tement terminer ce chapitre par une caractérisation de la convergence manipulant ce critère deCauchy. Il est important de remarquer que cette caractérisation de la convergence se fait sans nullepart mentionner la limite !

Proposition 2.12

Dans Rnune suite est convergente si et seulement si elle est de Cauchy.

Remarque 2.5 En particulier, en utilisant la caractérisation séquentielle des fermés on constate

le fait suivant : une suite à valeurs dans un fermé converge dans celui-ci si et seulement si elle est

de Cauchy.

Remarque 2.6 Il est intéressant de remarquer que cette propriété n’est plus vérifiée dans Qn

(pourquoi ?) : une suite de vecteurs rationnels peut être de Cauchy, sans pour autant converger

dans Qn. Cette propriété de convergence pour les suites de Cauchy fait de Rn

(et de tout ses

fermés, par la remarque précédente) un espace complet.

Démonstration. Un sens est démontré par la Proposition 1.11 : une suite convergente est néces-sairement de Cauchy. Pour démontrer la réciproque, on travaille (sans perte de généralité) avec lanorme euclidienne k · k2 par la suite.

Page 32: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

32 CHAPITRE 2. TOPOLOGIE SUR RN

En prenant " = 1 dans la définition du critère de Cauchy, on dispose d’un entier k1 2 N tel quep, q � k1 ) kxp � x

qk2 < 1. En particulier, pour tout p � k1, le vecteur xp appartient à la boule

B2(xk1 , 1). En posant R := maxk2J0,k1K(kxk�xk1k2), on en déduit que tout les éléments de la suite

(xk)k2N appartiennent à la boule B2(xk1 ,max(R, 1)), et donc également à l’adhérence de celle-ciBf

2 (xk1 ,max(R, 1)). Ce dernier ensemble est compact d’après le Théorème 2.3 : la suite (xk)k2N

possède donc une sous-suite convergente : il existe ` 2 Rn et une extraction ' : N ! N tels que(x'(m))m2N converge vers `. Nous allons montrer qu’en réalité toute la suite (xk)k2N converge vers`.

Soit " > 0 et k" (donné par le critère de Cauchy) tel que p, q � k" ) kxp � xqk2 <

"2 . Puisque

(x'(k))k2N converge vers `, on dispose également de m" tel que m � m" ) kx'(m) � `k2 <"2 .

Puisque '(m) !m +1, on en déduit qu’il existe j" � m" tel que '(j") � k". En particulier, pourtout p � k" on a, par le critère de Cauchy, kxp � x

'(j")k2 <"2 . Mais puisque j" � m" on a aussi

(par convergence de la suite extraite) kx'(j") � `k2 <"2 . En combinant ces deux inégalités avec

l’inégalité triangulaire, nous avons finalement démontré

p � k" =) kxp � `k2 kxp � x'(j")k2 + kx'(j") � `k2 <

"

2+"

2= ",

ce qui établit la convergence de (xk)k2N vers `.

Page 33: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Chapitre 3

Fonctions continues

On s’intéresse dans ce chapitre à des fonctions de deux variables ou plus, définies sur une partieD de Rn (n � 2) à valeurs dans Rp, réelles (si p = 1) ou vectorielles (si p � 2) :

f : D �! Rp

x = (x1, . . . , xn) 7�! (f1(x), . . . , fp(x)).

Quand p � 2 on parle aussi de champ de vecteurs. Les fonctions fk (qui sont, elles, à valeurs réelles)sont alors appelées les composantes de la fonction vectorielle f . Quand n = 2 ou n = 3, on noteraparfois f(x, y) ou f(x, y, z) au lieu de f(x1, x2) ou f(x1, x2, x3).

3.1 Ensemble de définition d’une fonction

Avant d’étudier la fonction f sur le domaine D, il faut veiller à ce que la quantité f(x) aitun sens pour tout élément x de D, autrement dit à ce que le domaine de départ D soit inclusdans l’ensemble de définition de la fonction f . Il est absolument nécessaire de connaître le domainede définition des fonctions usuelles (le logarithme népérien, la racine carrée etc). Il faut garder àl’esprit qu’une fonction peut toujours être prolongée en dehors de son domaine de définition, pardes valeurs arbitraires. L’une des questions que nous nous poserons dans ce chapitre est de savoirs’il existe un moyen de la prolonger, tout en conservant certaines propriétés valides sur son domainede définition (continuité, dérivabilité . . . ).

Exemple 3.1 Soit la fonction

f : R �! R

x 7�!(ln(x) si x > 0

�10 si x 0.

f est définie sur R entier, et est un prolongement du logarithme népérien. Mais f n’est pas continue

en 0 (ni même bornée proche de ce point).

33

Page 34: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

34 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

Exercice fondamental 11 :

Trouver l’ensemble de définition de la fonction (x, y) 7! ln(3� x2 � y

2)

Corrigé de l’exercice H

Exercice fondamental 12 :

Donner deux exemples de fonctions continues sur R, coïncidant avec la fonction racinecarrée sur son domaine de définition.

Corrigé de l’exercice H

3.2 Limite d’une fonction en un point et continuitéLe but de ce paragraphe est de définir la notion de continuité en un point, pour une application

à valeurs vectorielles dépendant elle-même de plusieurs variables. Tout comme pour les fonctionsd’une variable réelle, nous allons voir que la continuité exige que la proximité des antécédents setraduise pas une proximité des images : « si x se rapproche de a, alors f(x) se rapproche de f(a)également ». La seule différence notable est que la notion même de proximité s’exprime au traversd’une norme. L’équivalence des normes que nous avons démontrée dans le chapitre précédent vadonc considérablement simplifier la donne : nous allons pouvoir définir une notion de limite en unpoint pour une fonction, sans nous soucier du choix de la norme, au départ ou à l’arrivée.

Définition 3.1 (Limite en un point d’une fonction)Soit D ⇢ Rn

, z un point adhérent à D et f : D ! Rpune fonction. Étant données N une

norme sur Rnet N

0une norme sur Rp

, on dit que f(x) tend vers ` 2 Rpquand x tend vers z

(relativement aux normes N et N0) si

8" > 0 , 9↵" > 0 : 8x 2 D, N(x� z) < ↵" =) N0(f(x)� `) < " . (3.1)

Remarque 3.1 Il est important de noter que z n’appartient pas nécessairement au domaine de

définition de la fonction f . La fonction x 7! sin(x)x est par exemple uniquement définie sur R?

mais

admet bel et bien une limite en 0 (laquelle ?).

Sans plus tarder nous allons chercher à simplifier considérablement cette notion de limite ense débarassant de la dépendance en les normes N et N

0. Cela se voit aisément à l’aide de lacaractérisation séquentielle de la limite.

Proposition 3.1

Sous les hypothèses de la Définition 3.1, on a la caractérisation suivante : f(x) tend vers ` 2 Rp

quand x tend vers z si et seulement si, pour toute suite (xk)k2N convergeant vers z, la suite

(f(xk))k2N converge vers `. En particulier, on en déduit

• si f a une limite en un point, celle-ci est unique ;

• la notion de limite en un point est indépendante de la norme choisie au départ, ou à l’arrivée.

On peut ainsi parler, lorsqu’elle existe, de la limite de f en z, ce que l’on note limx!z f(x)

Page 35: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.2. LIMITE D’UNE FONCTION EN UN POINT ET CONTINUITÉ 35

Démonstration. Tout d’abord, remarquons que si la caractérisation est établie, le premier pointqui la suit découle de l’unicité de la limite d’une suite (Proposition 1.7) quand elle existe. Pour lesecond point, il suffit de se souvenir que par le Théorème 2.4, toutes les normes sur Rn ou Rp sontéquivalentes et définissent donc (Proposition 1.8) les mêmes suites convergentes sur ces espaces. Ilnous reste donc à établir la caractérisation séquentielle. Supposons d’abord que f admet ` pourlimite au point z, au sens de la Définition 3.1. Si (xk)k2N est une suite à valeurs dans D convergeantvers z, ceci s’exprime ainsi pour la norme N : N(xk�z) !k 0 (ceci est vrai pour toutes les normes,mais c’est celle-ci qui nous arrange ici). En particulier, pour tout " > 0, il existe un rang k" 2 Nau-delà duquel N(xk � z) < ↵", où ↵" est le réel fixé dans (3.1). On en déduit, précisément par(3.1), que k � k" ) N

0(f(xk) � `) < ". Cela démontre que f(xk) !k `, au sens de la norme N0

et donc en fait pour toute norme (à nouveau par équivalence des normes). Réciproquement si onsouhaite, à partir de la formulation séquentielle, récupérer la Définition 3.1, on peut procéder parcontraposition. Si f n’admet pas ` comme limite au point z au sens de la Définition 3.1, cela veutdire

9" > 0 : 8↵ > 0, 9z↵ 2 D : N(z↵ � z) < ↵ et N0(f(z↵)� `) � " .

En particulier, dans cette formulation, puisque ↵ > 0 est arbitraire, on peut considérer le cas de↵ := 1

2k , fournissant une suite (xk)k2N 2 DN satisfaisant, pour tout k,

N(xk � z) <1

2ket N

0(f(xk)� `) � "

ce qui contredit manifestement la formulation séquentielle puisqu’alors xk !k z sans pour autant

que f(xk)!k f(a).

Définition 3.2

Soit D ⇢ Rnet f : D ! Rp

. On dit que f est continue en a 2 D si l’une des trois conditions

équivalentes est vérifiée

(i) f admet f(a) comme limite au point a ;

(ii) pour toutes normes N sur Rnet N

0sur Rp

on a

8" > 0 , 9↵" > 0 : 8x 2 D, N(x� a) < ↵" =) N0(f(x)� f(a)) < " ;

(iii) caractérisation séquentielle : pour toute suite (xk)k2N 2 DN

convergeant vers a, la suite

(f(xk))k2N converge vers f(a).

On notera par la suite C 0(D;Rp) l’ensemble des fonctions continues en chaque point de D, et

simplement C 0(D) lorsque m = 1.

Remarque 3.2

• La continuité ne dépend donc pas des normes que l’on choisit sur Rnet Rp

. Cette énorme

simplification provient du cadre fini dimensionnel que nous suivons dans ce cours. En dimen-

sion infinie (que cela soit au départ, ou à l’arrivée), la continuité d’une application dépend

très fortement du choix de la norme.

• Il est instructif de constater la similarité de (ii) avec la définition de la continuité pour les

fonctions d’une variable réelle, sur un intervalle.

• Par unicité de la limite, la formulation (iii) implique que s’il existe deux suites (xk)k2N et

(zk)k2N convergeant vers a telles que

limk!1

f(xk) 6= limk!1

f(zk),

alors la fonction f n’est pas continue au point a.

Page 36: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

36 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

Proposition 3.2

Soit D ⇢ Rn. Une application f : D ! Rp

est continue en un point a de D si et seulement si les

m composantes de f sont continues en a.

Démonstration. Rappelons que f étant à valeurs dans Rp, son évaluation en un point x 2 D s’écritf(x) = (f1(x), . . . , fm(x)) ; les composantes de f sont les applications fk, pour 1 k m. Il suffitalors d’invoquer la caractérisation séquentielle de la continuité associée à la Proposition 1.9 : laconvergence d’une suite (f(xk))k2N vers f(a) est équivalente à la convergence de chacune des suites(fj(xk))k2N vers fj(a), respectivement.

Exercice complémentaire 5 :

Montrer que la fonction

: R2 ! R

(x, y) 7!

8<

:

1� cos(xy)

ysi y 6= 0

0 si y = 0

est continue sur R2 tout entier. On pourra utiliser sans justification le fait que

8✓ 2 R, 0 1� cos(✓) ✓2

2.

Corrigé de l’exercice H

Attention !

Une erreur fréquente, lorsque l’on essaie de démontrer la continuité d’une fonction en unpoint, par exemple f : R2 ! R au point (0, 0) est de se contenter de vérifier que les fonctionsx 7! f(x, 0) et y 7! f(0, y) sont continues. Cette « continuité partielle » n’est pas une notionpertinente et elle ne suffit pas à montrer la continuité, comme le montre le Contre-exemple 3.1 !

Contre-exemple 3.1 La fonction f : R2 ! R définie par

f(x, y) =

8>><

>>:

xy

x2 + y2si (x, y) 6= (0, 0)

0 si (x, y) = (0, 0),

n’est pas continue au point (0, 0), puisque pour x 6= 0, f(x, x) = 12 ne tend pas vers 0. Pourtant, les

applications partielles y 7! f(0, y) et x 7! f(x, 0) sont identiquement nulles, donc bien continues.

En pratique, que faire lorsqu’on nous demande d’étudier l’existence d’une limite ou d’un pro-longement continu en un point ? La Figure 3.2 propose un modèle de marche à suivre, dans le casd’une dans le cas d’une fonction de deux variables f à valeurs réelles, qui n’est pas définie au point(0, 0), pour étudier son comportement au voisinage de ce point. Bien sûr, tout cela est généralisable

Page 37: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.2. LIMITE D’UNE FONCTION EN UN POINT ET CONTINUITÉ 37

f : Df ✓ R2 ! R, avec (0, 0) /2 Df .

f a-t-elle une limite en (0, 0) ?

(0, 0) 2 Df ?

limt!0 f(0, t) < +1 ?

limt!0 f(0, t) < +1 ?

8↵ 2 R, limt!0 f(t,↵t) = `↵ < +1 ?

8↵,� 2 R, on a `↵ = `� ?

J’arrive à montrer quelim

z!(0,0)|f(z) � `| = 0 ?

En coordonnées polairesj’arrive à montrer que

|f(r cos ✓, r sin ✓)� `| h(r)

avec h(r) !r!0 0 ?

Je trouve une fonction � : R ! Rtelle que limt!0 f(t, �(t)) 6= ` outelle que limt!0 f(�(t), t) 6= ` ?

Erreur dans l’énoncé !

f n’admet pas de limite finie en (0, 0)

f admet une limite finie en (0, 0)

On ne peut pas parler de limz!(0,0) f(z)Non

Oui

Oui

Oui

Oui

Oui et on note ` = `↵

Non

Non

Non

Non

Oui

Oui

Oui, et cela contredit donc l’unicité de la limite

Non

Non

Non

Figure 3.1 – Un exemple d’attitude possible face à une étude de limite.

(en dehors du passage en coordonnées polaires) pour une fonction dépendant de trois variables ouplus, à valeurs vectorielles et en un point différent de l’origine. Appliquons la méthodologie de ce

Page 38: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

38 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

grafcet à la fonction suivante

f : (x, y) 7! exp(xy)� 1

x� y,

en cherchant à répondre à la question suivante : f admet-elle une limite au point (0, 0) ?

1 Identifions d’abord le domaine de définition Df de cette fonction. Le cosinus étant défini surR entier, il nous faut juste assurer que le dénominateur ne s’annule pas : Df = R2 \�, ou� = {(t, t) : t 2 R2} est la première bissectrice du plan. Pour vérifier que l’origine (0, 0) estbien un point adhérent de Df , le plus simple est d’utiliser la caractérisation séquentielle del’adhérence : par exemple, la suite définie par z

k := ( 12k ,�

12k ) converge vers (0, 0) et vérifie

(zk)k2N 2 DNf .

2 En suivant l’un des axes principaux x = 0 ou y = 0 (qui, épointés de l’origine, sont contenusdans Df ), on observe que les limites limt!0 f(0, t) ou limt!0 f(t, 0) se calculent facilementpuisque pour t 6= 0 on a f(0, t) = f(t, 0) = 0. On pourrait avoir envie de croire que ces deuxconvergences « le long des axes » suffisent à établir la limite, mais il n’en est rien : il fautse souvenir du Contre-Exemple 3.1 ! En l’état on a seulement l’information suivante : si unelimite existe pour f en (0, 0), cela ne peut être que 0.

3 Voyons si d’autres directions linéaires (i.e. de la forme y = ↵x) peuvent nous aider. Notonsque toutes ces droites appartiennent à notre domaine de définition Df , en dehors de lapremière bissectrice correspondant à ↵ = 1. On a, pour ↵ 6= 1,

f(x,↵x) =e↵x2 � 1

(1� ↵)x.

Puisque ez�1 ⇠z!0 z, on en déduit f(x,↵x) ⇠x!0

↵1�↵x ! 0. Toutes les directions linéaires

conduisent donc à la même limite pour f , à savoir 0.

4 À ce niveau de l’analyse, on pourrait être tenté (encore plus qu’à la deuxième étape) de croireque la fonction f admet effectivement 0 comme limite en l’origine. Et pourtant, ce n’est pasnécessairement le cas ! Le seul moyen de montrer effectivement que f(x, y) !(x,y)!0 0, c’estde majorer l’écart |f � `| (bien penser aux valeurs absolues) pour montrer qu’il tend vers 0.Une telle majoration contient infiniment plus d’informations que le seul comportement de f

sur les directions linéaires. Parfois, le passage en coordonnées polaires peut être utile pourdémontrer ce type de majoration : en remplaçant x par r cos ✓ et y par r sin ✓, il faut alorsmontrer une inégalité du type |f(r cos ✓, r sin ✓)�`| h(r), où la fonction h ne dépend pas de✓ et tend vers 0 en 0. Dans l’exemple de la fonction f qui nous préoccupe ici, on ne parvientpas à démontrer de telles convergences.

5 Puisque nos tentatives pour montrer que f tend effectivement vers 0 en l’origine n’aboutissentpas, il se peut que l’on ait affaire à une situation un peu pernicieuse ou f admet la mêmelimite selon toutes les directions linéaires, mais n’admet pas de limite globalement. Il va doncfalloir nous approcher de l’origine, non pas suivant une droite, mais suivant une courbe. L’idéeest de se rapprocher dangereusement de la droite interdite � : en considérant par exemplela courbe d’équation y = x + x

2. Une autre puissance pourrait faire l’affaire, l’essentiel estque x

2 = ox!0(x). Puisque x 6= 0 ) x 6= x + x2, l’expression f(x, x + x

2) est correctementdéfinie et on a

f(x, x+ x2) =

ex2+x3 � 1

�x2⇠x!0

x2 + x

3

�x2! �1.

Cette dernière limite ne coïncide pas avec celle obtenue sur les droites linéaires : f n’admetdonc pas de limite en l’origine.

Page 39: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.3. FONCTIONS CONTINUES : PROPRIÉTÉS ET EXEMPLES 39

Ce qui précède n’est pas un modèle de rédaction : c’est bien trop long ! Beaucoup de ce quiprécède doit être fait au brouillon. Ensuite, il faut isoler les arguments cruciaux, soit ici : il existeune direction linéaire le long de laquelle f tend vers 0 (une seule direction suffit), il existe unecourbe le long de laquelle f ne tend pas vers 0.

3.3 Fonctions continues : propriétés et exemples

3.3.1 Opérations sur les fonctions continues

Commençons par identifier plusieurs opérations préservant la continuuité.

Proposition 3.3

Soit n,m 2 N?et D une partie de Rn

. On a les propriétés suivantes.

• l’ensemble C 0(D;Rp) est un espace vectoriel : toute combinaison linéaire de fonctions conti-

nues est continue ;

• dans le cas p = 1, l’ensemble C 0(D) est même une algèbre : le produit de deux fonctions

continues à valeurs réelles est continu ;

• dans le cas p = 1, si une fonction f : D ! R à valeurs réelles est continue et ne s’annule

jamais, alors la fonction 1/f est bien définie sur D et continue ;

• Si f : Rn ! Rpest continue en a 2 Rn

, et g : Rp ! Rpest continue en f(a), alors

g � f : Rn ! Rpest continue en a.

Remarque 3.3 Le troisième point est souvent invoqué de manière locale : si une fonction f

continue à valeurs réelles est non nulle en un point a, alors il existe une boule ouverte centrée

en ce point sur laquelle la fonction ne s’annule pas et le fonction 1/f y est alors bien définie et

continue.

Démonstration. Les deux premiers point se vérifient directement par la caractérisation séquentielle :une combinaison linéaire (ou un produit, en dimension 1) de suites convergeantes converge vers lacombinaison linéaire (ou le produit) des limites. Le troisième point est similaire, la non nullité de f

assurant que l’on puisse définir son inverse en tout point et la continuité est également obtenue parle point de vue séquentiel. Enfin, pour la composition, on peut à nouveau user de la caractérisationséquentielle en l’invoquant deux fois : si (xk)k2N est une suite de Rn telle que x

k ! a dans Rn,par continuité de f en a, on a que f(xk) ! f(a) dans Rp, puis par continuité de g en f(a), il vientg(f(xk)) ! g(f(a)) dans Rp, ce qui montre que g � f est continue en a.

Exemple 3.2 Les fonctions usuelles (d’une variable réelle) comme les fonctions polynômiales,

l’exponentielle, le logarithme et les fonctions trigonométriques, sont continues sur leur domaine

de définition. Avec la proposition précédente, cela fournit déjà un quantité de fonctions continues,

comme par exemple

f : (x, y, z) 7! exp(x+ y + z) ln(1 + x2)

2 + cos(z),

dont on vérifie qu’il s’agit d’un produit de fonctions continues elles-mêmes inversées (et ne s’annu-

lant pas) ou composées avec des fonctions elles-mêmes combinaisons linéaires de fonctions conti-

nues.

Page 40: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

40 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

Exemple 3.3 Un exemple un peu plus générique est celui des fonctions polynômiales de plusieursvariables, soit les combinaisons linéaires de fonctions (x1, . . . , xn) 7! x

k11 · · ·xkn

n , où les kj sont des

entiers naturels. En particulier, toute application linéaire L : Rn ! Rpest continue.

Exemple 3.4 Toute norme N sur Rnest continue de Rn

dans R+ : c’est une simple conséquence

de l’inégalité triangulaire renversée |N(x)�N(y)| N(x� y).

Pour montrer qu’une fonction est continue, le plus facile est de la décomposer en somme, pro-duit, et commposée de fonctions dont on sait qu’elles sont continues. Il sera très utile par la suite quecette décomposition soit écrite de manière la plus explicite possible, comme dans l’exemple suivant.

Exercice fondamental 13 :

Montrer que la fonction (x, y) 7! ln(3�x2�y

2) est continue sur son domaine de définition.

Corrigé de l’exercice H

Quand il y a un point problématique, on le traite à part.

Exercice complémentaire 6 :

Montrer que la fonction f : R2 ! R, définie par

f(x, y) :=

8<

:

x4

x2 + 3y2si (x, y) 6= (0, 0),

0 si (x, y) = (0, 0),

est continue.

Corrigé de l’exercice H

3.3.2 Prolongement par continuité

Définition 3.3

Soit f une fonction définie et continue sur une partie non fermée D ⇢ Rn, à valeurs dans Rp

.

Soit z 2 D\D. On dit que f est prolongeable par continuité en z s’il existe une application continue

ef : D [ {z} ! Rptelle que pour tout x 2 D on ait ef(x) = f(x). La fonction ef est alors appelée

prolongement continu de f au point z.

Proposition 3.4

Sous les hypothèses de la Définition 3.3, f admet un prolongement continu en z si et seulement

s’il existe ` 2 Rppour lequel f(x) tend vers ` quand x tend vers z. On dit alors que f se prolonge

continûment par la valeur ` en z.

Démonstration. Si f admet un prolongement continu en z que l’on note ef , alors la continuité decette fonction en z montre précisément que ef(x) tend vers ef(z) quand x tend vers z, et puisquef(x) = ef(x) dès lors que x 6= z, on a montré la première implication. Réciproquement, si f admet

Page 41: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.3. FONCTIONS CONTINUES : PROPRIÉTÉS ET EXEMPLES 41

une limite ` 2 Rp au point z, alors on pose Si f admet une limite ` 2 Rp au point z, alors onintroduit la fonction

ef : D [ {z} �! Rp

x 7�!(f(x) si x 2 D,

` si x = z.

Il s’agit bien sûr d’un prolongement de f (les valeurs prises sont les mêmes sur l’ensemble D) et ilest continu grâce à la caractérisation séquentielle.

Rappelons que si deux suites réelles convergeantes vérifient uk v

k, alors leurs limites respec-tives u et v satisfont u v ; et si uk = v

k, les limites sont égales. Cette propriété de passage à lalimite dans les égalités ou les inégalités larges admet un analogue, pour la notion de limite en unpoint. Nous allons nous en servir pour étudier l’existence de prolongements continus.

Proposition 3.5

Soient D ⇢ Rn, f, g : D ! Rp

et z 2 D \D un point en lequel f et g possèdent une limite.

(i) Si pour tout x 2 D, on a f(x) = g(x), alors

limx!z

f(x) = limx!z

g(x).

(ii) Si p = 1 (il s’agit donc de fonctions à valeurs réelles) et que pour tout x 2 D on a f(x) g(x),alors

limx!z

f(x) limx!z

g(x).

Remarque 3.4

• Les inégalités strictes ne sont pas conservées par passage à la limite comme le montre l’exemple

de la fonction x 7! x qui est strictement positive sur R?+, mais admet une limite nulle en

l’origine.

• Attention, une inégalité stricte est un cas particulier d’inégalité large (c’est la réciproque qui

est fausse). Ainsi, on peut remplacer l’hypothèse de l’énoncé précédent par f(x) < g(x), et

garder la même conclusion (mais certainement pas une inégalité stricte à la limite !).

Démonstration. Commençons par démontrer (ii). Soient ↵ et � les limites respectives de f et g

au point z. En invoquant la définition de la limite en un point avec la norme infinie sur Rn, on adonc pour tout " > 0 l’existence de ⌘f > 0 et ⌘g > 0 tels que

�x 2 D et kx� zk1 < ⌘f

�=) |f(x)� ↵| < ",

et �x 2 D et kx� zk1 < ⌘g

�=) |g(x)� �| < ".

Ainsi, pour x un point de D tel que kx� zk1 < min(⌘f , ⌘g), on a

↵ = (↵� f(x)) + f(x) "+ g(x) = "+ g(x)� � + � 2"+ �,

ce qui veut dire que l’on a montré pour tout " que ↵ �+2", d’où l’on déduit effectivement ↵ �.

Pour démontrer (i), on remarque que l’égalité f(x) = g(x) implique celle des composantes deces fonctions, soit fj(x) = gj(x) pour j 2 J1,mK. En particulier, les deux inégalités fj(x) gj(x)et fj(x) � gj(x) sont vérifiées, si bien que le point (ii) s’applique pour établir que limx!z fj(x) =limx!z gj(z), et on en déduit bien (i) en revenant au vecteur entier.

Page 42: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

42 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

Terminons ce paragraphe par un corollaire très utile en pratique pour démontrer qu’une fonctionadmet un prolongement continu.

Corollaire 3.1

Soit D ⇢ Rn, f : D ! Rp

et z 2 D \D.

(i) Si f admet un prolongement continu en z, ce prolongement est unique.

(ii) Théorème des gendarmes : si p = 1 et supposons qu’il existe deux fonctions ', : D ! Rtelles que

8x 2 D, '(x) f(x) (x).

Si ' et admettent toutes les deux la même limite en z, soit ` := limx!z '(x) = limx!z (x),alors f est se prolonge continûment par la valeur ` en z.

Exercice complémentaire 7 :

Montrer que la fonction

(x, y) 7! ln(1 + x4 + 2y6)

x2 + 3y4

est prolongeable par continuité en (0, 0).

Corrigé de l’exercice H

Exercice complémentaire 8 :

La fonction g : (x, y) 7! sin(x2)

x+ yn’est pas prolongeable par continuité en (0, 0).

Corrigé de l’exercice H

Exercice complémentaire 9 :

Soit f 2 C 1(R;R) continûment différentiable de R dans R. Montrer que l’applicationF : R2 ! R définie par

F (x1, x2) =

8>><

>>:

f(x1)� f(x2)

x1 � x2si x1 6= x2

f0(t) si x1 = x2 = t,

est continue.

Corrigé de l’exercice H

Page 43: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.4. CONTINUITÉ ET TOPOLOGIE 43

3.4 Continuité et topologieCommençons par une court rappel sur les notions d’image et d’image réciproque d’un ensemble

par une fonction.

Définition 3.4

Soient X et Y deux ensembles et f : X ! Y une fonction. Si A est une partie de X, l’image de A

par f est

f(A) :=�y 2 Y / 9x 2 A/ y = f(x)

.

Si B est une partie de Y , l’image réciproque de B par f est

f�1(B) :=

�x 2 X / f(x) 2 B

.

Attention !

La notation f�1 ne doit pas faire croire que f est supposée bijective : cette défini-

tion s’applique à n’importe quelle fonction ! En particulier les identités f�1(f(A)) = A ou

f(f�1(B)) = B ne sont en général pas vérifiées. On renvoie à la Figure 3.4 pour une illustra-tion.

Exercice fondamental 14 :

Soit f : R2 ! R, (x, y) 7! |x| + |y|. Soit B =] � 1, 1[ et soit A = [0, 1] ⇥ [0, 1]. Calculerf(A), f�1(B) et f

�1�f(A)

�.

Corrigé de l’exercice H

La notion d’image réciproque permet d’exprimer une caractérisation de la continuité pour lesapplications définies sur l’espace entier.

Proposition 3.6

Soient n,m 2 N?et une application f : Rn ! Rp

. Se valent :

(i) Pour tout ouvert V ⇢ Rp, f

�1(V ) est ouvert dans Rn;

(ii) Pour tout fermé F ⇢ Rp, f

�1(F ) est fermé dans Rn;

(iii) f est continue en tout point de Rn.

Remarque 3.5 Deux remarques importantes sont de mise.

• Cette caractérisation ne fonctionne que pour les applications définies sur tout l’espace Rn.

Il en existe une parfaitement similaire, pour caractériser les applications continues sur une

partie D ( Rn, mais cela nécessite de définir les ensembles ouverts et fermés induits par une

partie D, notion que nous avons choisi d’omettre dans ce cours.

• Cette proposition suggère que l’on pourrait définir la continuité uniquement par le point (i),par exemple. C’est exactement ce que l’on fait lorsqu’on veut définir la continuité sur les

espaces topologiques, une classe d’espaces généralisant considérablement l’espace euclidien.

Page 44: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

44 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

••

A

f(A)f�1(f(A))

f

E F

••

f�1(B)

B

f(f�1(B))

f

E F

Figure 3.2 – Ces dessins représentent une application f : E ! F par les flèches (en noir) ainsique deux parties (en vert) A ⇢ E (dessin du haut) et B ⇢ F (dessin du bas). Les images directe etréciproque f(A) et f

�1(B) sont en bleu. On constate que les ensembles f�1(f(A)) et f(f�1(B))

(en rouge) sont bien différents des ensembles A et B.

Démonstration. Observons tout d’abord que pour toute partie A ⇢ Rp, on a l’égalité

Rn \ f�1(A) = f�1(Rp \A).

Page 45: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.4. CONTINUITÉ ET TOPOLOGIE 45

Une fois que l’on s’est convaincu de cette identité, puisque les ensembles ouverts sont en correspon-dance avec les ensembles fermés par passage au complémentaire, on en déduit que les assertions (i)et (ii) sont équivalentes. Il suffit donc de démontrer (i) , (iii). Il convient à ce moment de revenirà la Définition 3.2 de la continuité, et de regarder droit dans les yeux la formulation (ii), que nousreproduisons ici avec la norme euclidienne au départ et à l’arrivée (sans perte de généralité), pourun certain point a 2 Rn :

8" > 0 , 9↵" > 0 : 8x 2 Rn, kx� ak2 < ↵" =) kf(x)� f(a)k2 < ".

Si on traduit cette assertion en utilisant la notation des boules ouvertes euclidiennes, on obtient laformulation suivante

8" > 0 , 9↵" > 0 : x 2 B2(a,↵") =) f(x) 2 B2(f(a), ").

En utilisant la notion d’image réciproque, l’implication devient une inclusion

8" > 0 , 9↵" > 0 : B2(a,↵") ✓ f�1�B2(f(a), ")

�,

que l’on peut enfin synthétiser en :

« Pour toute boule ouverte B centrée en f(a),f�1(B) contient une boule ouverte centrée en a. »

Ainsi cette dernière phrase est équivalente à la continuité de f au point a.

Revenons maintenant à l’équivalence (i) , (iii). Si l’assertion (i) est vérifiée, alors elle esten particulier vérifiée lorsque V = B2(f(a), ") est une boule ouverte centrée en un point f(a),et elle affirme donc que f

�1(V ) est un ouvert. Puisque a appartient à f�1(V ), par définition

d’un ouvert on en déduit l’existence de ↵" > 0 tel que B2(a, ") ⇢ f�1(V ) : on obtient ainsi

exactement la formulation obtenue ci-haut de la continuité au point a. Inversement, supposons que(iii) est vérifiée i.e. que la fonction f est continue sur Rn, et considérons V ⇢ Rp un ouvert. Sif�1(V ) = ? alors c’est en particulier un ouvert et il n’y a rien à démontrer. Autrement, considérons

a 2 f�1(V ) pour lequel on a donc f(a) 2 V . L’ensemble V est ouvert et il existe donc " > 0 tel

que B2(f(a), ") ⇢ V . À nouveau, on exploite la formulation de la continuité (au point a) établiequelques lignes plus haut : on sait que f

�1(B2(f(a), ")) contient une boule ouverte centrée en a.Mais puisque B2(f(a), ") ⇢ V , on en déduit que f

�1(B2(f(a), ")) ⇢ f�1(V ). Et finalement, nous

avons montré que f�1(V ) contient une boule ouverte centrée en a, et c’est donc effectivement un

ensemble ouvert.

Attention !

La Proposition 3.6 ne dit rien de l’image directe d’un ouvert ou d’un fermé par uneapplication continue (voir le Contre-exemple 3.2). Le prochain théorème fournira justementun exemple de notion topologique (la compacité) préservée par l’image directe d’une fonctioncontinue.

Contre-exemple 3.2 L’application f : x 7! x2

est continue de R dans lui-même, pourtant l’image

par f de l’intervalle ouvert ]� 1, 1[ est l’intervalle [0, 1[, qui n’est ni ouvert, ni fermé !

La caractérisation topologique qu’offre la Proposition 3.6 est fort utile en pratique pour montrerqu’un ensemble est ouvert ou fermé. Il suffit de montrer que c’est l’image réciproque d’un ouvertou d’un fermé par une fonction continue.

Page 46: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

46 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

Exercice fondamental 15 :

Traiter ces deux questions à l’aide de la Proposition 3.6.

1. Montrer que l’ensemble Udéf=

�(x, y) 2 R2 : x2 � y

2> 0

est un ouvert de R2.

2. Montrer que l’ensemble Fdéf=

�(x, y) 2 R2 : x2 + 3y2 4 et y 0

est fermé.

Corrigé de l’exercice H

Comme nous l’avons déjà souligné, les propriétés d’ouverture ou de fermeture d’un ensemblene sont pas préservées par les applications continues. En revanche, c’est le cas de la compacité.

Théorème 3.1

Soient K une partie compacte de Rnet f : K ! Rp

une fonction continue. Alors f(K) est une

partie compacte de Rp.

Démonstration. Pour démontrer la compacité de f(K), considérons une suite (yk)k2N une suited’élements de f(K). Par définition de l’ensemble image, pour tout indice k, il existe un élément xk

de K tel que f(xk) = yk. Comme K est une partie compacte de Rn, il existe une fonction

d’extraction ' et un point ` de K tel que

limk!1

x'(k) = `.

D’après la caractérisation séquentielle de la continuité (point (iii) de la Définition 3.2), on peutaffirmer que

limk!1

f(x'(k)) = y'(k) = f(`) 2 f(K) .

Cela démontre donc que f(K) est une partie compacte de Rp.

Le dernier résultat de ce paragraphe est une première incursion vers la recherche d’extremad’une fonction à valeurs réelles.

On dit qu’une fonction f : D ! R est majorée si l’ensemble f(D) admet un majorant. Lors-qu’une fonction est majorée, sa borne supérieure (ou supremum) est par définition sup f(D). Onparle de maximum lorsque sup f(D) 2 f(D). En remplaçant la majoration par une minoration,on définit la borne inférieure ou infimum de la fonction, qui devient un minimum lorsqu’il s’agitd’une valeur effectivement prise par la fonction.

Théorème 3.2

Soient K une partie compacte de Rn et f une fonction continue de K dans R. Il existe deuxpoints a et b de K tels que

f(a) = minx2K

f(x), f(b) = maxx2K

f(x).

Exercice fondamental 16 :

1. Quel est l’ensemble de définition de la fonction ' : (x, y) 7! sin(x)y ?

Page 47: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

3.5. CONNEXITÉ PAR ARCS 47

2. Montrer que l’ensemble K = {(x, y) 2 R2 : y � 1 et � 1 ex2

+ y 4} est compact.3. Montrer que ' admet un maximum global sur K.

Corrigé de l’exercice H

Démonstration. Démontrons l’existence d’un minimum ce qui démontre aussi l’existence d’un maxi-mum en changeant f en �f . Le théorème précédent implique que f(K) est inclus dans un intervalledu type [�M,M ] ; il existe donc un réel m tel que m = inf

x2Kf(x). Par définition de la borne infé-

rieure, pour tout entier positif k, il existe un élément xk de K tel que

m f(xk) m+1

k + 1· (3.2)

Comme K est compact, il existe une fonction d’extraction ' telle que la suite (x'(k))k2N convergevers un point a de K. En utilisant la caractérisation séquentielle de la continuité, on en déduit que

limk!1

f(x'(k)) = f(a).

D’après l’encadrement (3.2), on en déduit que f(a) = m ce qui démontre le théorème.

3.5 Connexité par arcsNous abordons dans ce paragraphe une notion topologique qui vient enrichir la description

des ensembles multidimensionnels. Après avoir défini les ensembles ouverts, fermés, bornés oucompacts, nous définissions maintenant les ensembles connexes par arcs. Cette définition nécessitela manipulation de fonctions continues, ce qui explique sa présence à cet endroit du polycopiéet non dans le chapitre précédent. Mais il faut bien garder à l’esprit que c’est une propriété quis’applique aux parties de Rn.

Définition 3.5

On dit qu’une partie A de Rnest connexe par arcs si et seulement si pour tout couple (a, b) de points

de A, il existe une application continue (qu’on appelle un arc) � de [0, 1] dans A telle que �(0) = a

et �(1) = 0.

Intuitivement la connexité par arcs d’un ensemble signifie qu’il est « d’un seul tenant » ouencore « en un seul morceau ». Donnons quelques exemples.

Exemple 3.5 Un singleton est connexe par arcs (il suffit de prendre un arc constant). L’espace

tout entier Rnest connexe par arcs : pour a, b 2 Rn

il suffit de prendre le segment t 7! tb+(1� t)ales reliant. Il en va de même pour toute partie convexe de Rn

: c’est le cas des boules (ouvertes ou

fermées) associées à une norme quelconque (grâce à l’inégalité triangulaire).

Contre-exemple 3.3 Soit k · k une norme sur Rn, a 6= b 2 Rn

, r 12ka � bk, et enfin Ba et

Bb les boules ouvertes (pour k · k) centrées en a et b, de rayon r. Alors l’ensemble A := Ba t Bb

n’est pas connexe par arcs. En effet, si un arc � : [0, 1] ! A reliait les points a et b, alors la

fonction réelle de la variable réelle t 7! k�(t) � ak vérifierait �(0) < r et �(1) > r : le théorème

des valeurs intermédiaires assurerait l’existence de t0 2]0, 1[ tel que k�(t0) � ak = r, mais alors

�(t0) ne pourrait appartenir ni à Ba (par définition) ni à Bb, par l’inégalité triangulaire renversée :

k�(t0)� bk � ka� bk � r � 12ka� bk � r.

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48 CHAPITRE 3. FONCTIONS CONTINUES

Exercice complémentaire 10 :

Démontrer que les parties connexes par arcs de (R, k · k) sont les intervalles.

Corrigé de l’exercice H

3.6 Uniforme continuité et théorème de HeineNous terminons ce chapitre par la notion de continuité uniforme. Il s’agit d’un subtil renforce-

ment de la notion de continuité. Nous travaillons pour la suite avec la norme k · k1, mais commeà l’accoutumée, l’équivalence des normes montre que la définition qui suit est équivalente lorsquel’on change la norme sur l’espace de départ ou d’arrivée.

Définition 3.6

Une fonction f d’une partie D de Rnà valeurs dans Rp

est dite uniformément continue si

8" > 0 , 9�" > 0 / 8(x, y) 2 D : kx� yk1 < �" =) kf(x)� f(y)k1 < ".

La différence entre continuité et uniforme continuité est subtile et réside dans l’ordre des quan-tificateurs. Dans la définition de la continuité en un point a, le �" dépend à la fois de a et de ". Enrevanche, dans la définition de l’uniforme continuité, le �" est indépendant du point ; il ne dépendque de ".

Exemple 3.6 La fonction x 7! x est uniformément continue sur R, contrairement à la fonction

x 7! x2

qui ne l’est pas.

Théorème 3.3 (Heine)

Soit f : Rn ! Rp une fonction continue sur un compact K de Rn. Alors f est uniformémentcontinue sur K.

Démonstration. On raisonne par contraposition. Supposons que f n’est pas uniformément continuesur K. Nous allons alors démontrer qu’il existe un point a de K tel que f ne soit pas continue aupoint a.

Si f n’est pas uniformément continu, alors il existe "0 > 0 tel que

8↵ > 0 , 9(a↵, b↵) : kb↵ � a↵k1 < ↵ et kf(b↵)� f(a↵)k1 � "0 .

En appliquant ceci pour ↵ = 2�k, avec k 2 N on en déduit l’existence de deux suites (ak)k2N

et (bk)k2N telles que

kbk � akk1 < 2�k et kf(bk)� f(ak)k1 � "0 .

La compacité de K implique l’existence d’une fonction d’extraction ' et d’un point c de K telle(a'(k))k2N ! c. Mais comme kak � b

kk 2�k on en déduit également, par inégalité triangulaire,que (a'(k))k2N ! c. Finalement, appliquant une dernière fois l’inégalité triangulaire, on obtient

"0 kf(b'(k))� f(a'(k))k kf(b'(k))� f(c)k+ kf(c)� f(a'(k))k .

Cette dernière inégalité contredit la continuité de f au point c 2 K, par caractérisation séquentielle.

Page 49: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Chapitre 4

Dérivées partielles et fonctions declasse C 1

4.1 Fonctions dérivables, fonctions différentiablesDans ce chapitre, nous allons chercher à généraliser le concept de dérivée au cas de fonctions

de plusieurs variables prenant des valeurs vectorielles. Rappelons tout d’abord, dans le cas desfonctions de la variable réelle, la définition de la dérivabilité.

Définition

Une fonction f : R ! R est dite dérivable au point a 2 R s’il existe `a 2 R tel que

f(a+ h)� f(a)

h�!h!0

`a.

Cette limite, lorsqu’elle existe, est la dérivée de f au point a.

Les généralisations que nous avons opérées dans les précédents chapitres nous permettent detraduire la notion de limite dans le cas vectoriel. La difficulté réside ici plutôt dans l’expressionmême du taux d’accroissement qui fait intervenir une division : il s’agit d’une opération que l’onne peut pas généraliser convenablement pour une fonction f définie par exemple sur R2 ou R3,car on ne sait pas diviser par un vecteur !

Afin de pouvoir passer à la dimension supérieure, il faut changer de point de vue et comprendreque la dérivabilité au point a définie ci-haut peut s’exprimer, de manière parfaitement équivalente,par la formulation suivante

f(a+ h) = f(a) + h`a + "a(h)|h|,

où la fonction "a(h) tend vers 0 lorsque h ! 0. C’est ce point de vue « développement limité » quiest le bon pour parvenir à généraliser cette notion en dimension supérieure. Il s’agit en réalité del’essence de ce qu’on appelle le calcul différentiel : au premier ordre, tout se passe comme si onavait affaire à une application linéaire.

Définition 4.1

Soit f une fonction définie sur un ouvert U ⇢ Rn, à valeurs dans Rp

. On dit que f est différentiable

49

Page 50: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

50 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

au point a 2 U s’il existe une application linéaire La : Rn ! Rptelle que pour tout h 2 Rn

tel

que a+ h 2 U on ait

f(a+ h) = f(a) + La(h) + "a(h)khk1, (4.1)

où la fonction "a : Rn ! Rptend vers 0 lorsque h ! 0, ce qui est équivalent à la formulation

quantitative

8" > 0, 9�" > 0 : khk1 < �" ) kf(a+ h)� f(a)� La(h)k1 < "khk1. (4.2)

Une fonction est dite différentiable sur U si elle est différentiable en tout point de U .

Remarque 4.1 Cette définition est locale car les applications La et "a dépendent du point a

considéré. Le choix de la norme infinie est arbitraire, et l’équivalence des normes assure que l’on

pourrait utiliser n’importe quelle autre norme dans cette définition.

Définition-Proposition 4.1

Sous les notations de la Définition 4.1, si la fonction f est différentiable en un point a, l’application

linéaire La est unique. Il s’agit de la différentielle de f au point a et on la note dfa.

Démonstration. Supposons que l’on dispose de deux applications linéaires La et eLa et de deuxfonctions "a et e"a telles que

f(a+ h) = f(a) + La(h) + "a(h)khk1,

f(a+ h) = f(a) + eLa(h) + e"a(h)khk1.

Alors, par soustraction, l’application linéaire T := La � eLa satisfait, pour h 6= 0

T

✓h

khk1

◆= "a(h)� e"a(h)�!

h!00.

Cela montre que l’application linéaire T est nulle sur la sphère unité S1 de la norme uniforme, cequi établit que T = 0 et donc bien La = eLa.

Pour les fonctions d’une variable réelle, plusieurs niveau de régularité sont possibles : la classedes fonctions continues (notée C 0), puis celle des fonctions dérivables, puis encore mieux celle desfonctions de classe C 1 et ensuite celles des fonctions deux fois dérivables, puis celle des fonctionsde classe C 2 et ainsi de suite. La notion de fonctions différentiables que nous venons de définirpour des fonctions de plusieurs variables correspond exactement à celle de fonctions dérivables. Ettout comme pour les fonctions d’une variable, la différentiabilité implique la continuité.Proposition 4.1

(i) La différentiabilité d’une fonction en un point équivaut à celle de toutes ses fonctions com-

posantes.

(ii) La différentiabilité en un point implique la continuité en celui-ci.

Démonstration. Le point (i) est une conséquence immédiate de la définition de la différentiabilitéet du point (iv) de la Proposition 1.9. Pour le point (ii), si f est différentiable au point a, sadifférentielle dfa : Rn ! Rp est linéaire, donc en particulier continue et nulle en 0. Puisque parailleurs "a(h) !h!0 0, on déduit de (4.1) que f admet f(a) comme limite au point a.

Remarque 4.2 Pour une fonction de R dans R ( i.e. n = p = 1), la différentiabilité signifie

exactement la dérivabilité. Ainsi, à l’aide de la proposition précédente, on voit qu’une fonction

f : R ! Rpest différentiable si et seulement si toutes ses composantes (qui sont des fonctions de

R dans R) sont dérivables.

Nous définirons un peu plus loin la classe C 1 pour les fonctions de plusieurs variables, mais ilnous faut pour cela introduire la notion de dérivée partielle.

Page 51: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.2. DÉRIVÉE PARTIELLE, MATRICE JACOBIENNE 51

4.2 Dérivée partielle, matrice jacobienneEn l’état, la Définition 4.1 est un peu énigmatique : à quoi ressemble concrètement l’application

La correspondant à la différentiabilité au point a ? Si n = p = 1 (fonction réelle de la variable réelle),une fonction linéaire est de la forme x 7! ↵x et est entièrement déterminée par le paramètre ↵ :pour une fonction différentiable (i.e. dérivable) en a il s’agit simplement de f

0(a). Mais commentcela se passe-t-il avec plusieurs variables ? La donnée d’une application La est équivalente à celled’une matrice de taille n⇥ p, que peut-on dire de ses coefficients ? Pour répondre à ces questions,l’idée est de fixer toutes les variables de la fonction f sauf une, et ensuite de dériver par rapport àcelle-ci.

4.2.1 Dérivées partielles

Définition 4.2

Soit f une fonction définie sur un ouvert U de Rnà valeurs dans Rp

. On note {e1, . . . , en} la base

canonique de Rnet on fixe k 2 J1, nK. Étant donné a 2 U , on dit que f admet une dérivée partielle

par rapport à sa k-ième variable au point a si le quotient suivant (t est un réel ici)

f(a+ tek)� f(a)

t=

f(a1, . . . , ak�1, ak + t, ak+1, . . . , an)� f(a)

t,

admet une limite lorsque t ! 0. Lorsque cette limite existe, on note@f

@k(a) cette valeur ou @kf(a),

ou encore@f

@xk(a) dans le cas où les variable sont notées (x1, · · ·xn).

Dans le cas où n = p = 1, on récupère la définition de la dérivabilité au point a.

Exemple 4.1 Ainsi, si par exemple n = 3 et que f dépend de trois variables x, y, z, dire qu’elle

admet une dérivée partielle par rapport à sa deuxième variable au point (2, 1, 0) signifie que la

limite suivante existe

limh!0

f(2, 1 + h, 0)� f(2, 1, 0)

Pour calculer une dérivée partielle, il suffit en général de dériver la fonction « comme d’habi-tude » selon la variable qui nous intéresse, mais en imagineant que toutes les autres variables sontdes constantes. Noter que si la fonction f est à valeurs vectorielles (i.e. si p > 1), alors ses dérivéespartielles également.

Exemple 4.2 La fonction g : R2 ! R2définie par

g(x, y) =

✓x2 + y

4

sin(yex)

◆,

admet des dérivées selon ses deux variables en tout point de R2, lesquelles sont données par les

formules

@g

@1(x, y) =

✓2x

yex cos(yex)

◆,

@g

@2(x, y) =

✓4y3

ex cos(yex)

◆.

Page 52: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

52 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Exercice fondamental 17 :

Vérifier que la fonction f : R3 ! R définie par f(x, y, z) = �2x cos y admet des dérivéespartielles en tout point selon toutes les variables, et les calculer.

Corrigé de l’exercice H

Dans de plus rares cas, en particulier si la fonction est définie de manière spécifique en certainspoints, il faut revenir à la définition, comme limite d’un accroissement directionnel.

Exercice complémentaire 11 :

Montrer que la fonction g : R2 ! R définie par

g(x, y) =

8<

:

sin(xy)

xsi x 6= 0n

y si x = 0,

admet des dérivées partielles selon ses deux variables au point (0, 1).

Corrigé de l’exercice H

4.2.2 Matrice jacobienne, gradient

Introduisons maintenant la matrice jacobienne, qui est l’objet permettant de relier la différen-tiabilité d’une fonction et ses dérivées partielles.

Définition 4.3

On considère une fonction f définie sur un ouvert U de Rnà valeurs dans Rp

admettant en un

point a 2 U des dérivées partielles par rapport à toutes ses variables. La matrice jacobienne de f

au point a, notée Jf (a), est alors définie ainsi

Jf (a) :=✓@f

@x1(a)

@f

@x2(a) · · · @f

@xn(a)

◆=

0

BBBBBBBB@

@f1

@x1(a)

@f1

@x2(a) · · · @f1

@xn(a)

@f2

@x1(a)

@f2

@x2(a) · · · @f2

@xn(a)

.

.

....

@fp

@x1(a)

@fp

@x2(a) · · · @fp

@xn(a)

1

CCCCCCCCA

,

où pour 1 k p, les fonctions fk sont les composantes de la fonction vectorielle f . Ainsi, la

matrice jacobienne en un point est un élément de Mp,n(R).

Définition 4.4

Soit f une fonction d’ouvert U de Rnà valeurs dans R qui admet des dérivées partielles au point

a 2 Rn. Le vecteur colonne

rf(a)déf=

✓@f

@x1(a), . . . ,

@f

@xn(a)

◆T

est appelé gradient de f en a.

Page 53: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.3. FONCTIONS DE CLASSE C 1 53

Attention !

Quand on calcule une matrice jacobienne, il est crucial de faire attention à sa taille (nombrede lignes, nombre de colonne), et à l’ordre dans lequel elle est remplie. Cela se retrouve enfaisant le cas f : Rn ! R. On verra plus loin la formule

f(a+ h) = f(a) + Jf (a)h+ reste,

qui généralise le développement limité d’ordre 1. Ici, a et h sont des vecteurs colonne et f(a+h),f(a) sont des réels ; pour que cette formule ait un sens, il faut donc que Jf (a)h soit un réel etdonc que Jf (a) soit un vecteur ligne. Cela donne donc dans ce cas

Jf (a) =✓@f

@x1· · · @f

@xn

◆.

Exercice fondamental 18 :

1. Soit f : (a, b, c) 7! ("ca, sin(a � b)c), quelle est la taille de Df(0, 0, 0) ? Calculer ensuitecette matrice.

2. Soit g : (x, y) 7! (x2 + y2,xy ). Où trouve t-on le coefficient @g2

@x (1, 1) dans Dg(1, 1) ?Calculer cette matrice.

Corrigé de l’exercice H

4.3 Fonctions de classe C 1

Définition 4.5

Une fonction définie sur un ouvert U de Rnà valeurs dans Rp

est dite de classe C 1sur U si elle

admet des dérivées partielles selon toutes ses variables en tout point de U et si toutes les fonctions

a 7! @f@k (a) sont continues sur U pour k 2 J1, nK. L’ensemble des applications de classe C 1

sur U

et à valeurs dans Rpest noté C 1(U ;Rp).

Exercice fondamental 19 :

Montrer que la fonction f : R3 ! R est définie par f(x, y, z) = �2x cos y est de classe C 1.

Corrigé de l’exercice H

Page 54: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

54 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Exercice complémentaire 12 :

Montrer que la fonction f : R2 ! R définie par

f(x, y) = x

px2 + y2,

appartient à C 1(R2;R).

Corrigé de l’exercice H

Le résultat fondamental de cette section est le suivant.

Théorème 4.1 (Développement limité à l’ordre 1)Soient U un ouvert de Rn

et f : U ! Rpune fonction de classe C 1

. Soit a 2 U et r > 0 tel que

B1(a, r) ⇢ U . Pour tout h 2 B1(0, r)

f(a+ h) = f(a) + Jf (a)h+ "a(h)khk1

= f(a) +nX

j=1

@f

@xj(a)hj + "a(h)khk1,

où la fonction "a : B1(0, r) ! Rptend vers 0 lorsque h ! 0. Autrement dit : une application de

classe C 1sur un ouvert est différentiable en tout point de celui-ci et la matrice de sa différentielle

en un point (dans les bases canoniques) est donnée par la matrice jacobienne : daf(h) = Jf (a)h.

Remarque 4.3 On rencontre aussi la notation suivante, plus compacte mais moins explicite

f(a+ h) = f(a) +nX

j=1

hj@f

@xj(a) + o(h),

où il faut comprendre que h 7! o(h) est une fonction de Rndans Rp

qui dépend de a et h (et pas

seulement de h comme le suggère la notation) telle que

limkhk1!0

o(h)khk1

= 0.

Remarque 4.4 Nous avons énoncé le théorème avec la norme k · k1 mais tout comme nous

l’avions remarqué pour la Définition 4.1, le Théorème 2.4 d’équivalence des normes montre que cet

énoncé est toujours vrai pour des normes quelconques sur Rn.

Avant de démontrer ce théorème, remarquons le corollaire suivant, conséquence immédiate duThéorème 4.1 et de la Proposition 4.1.

Corollaire 4.1

Une fonction de classe C 1sur un ouvert est continue sur celui-ci.

Pour démontrer le Théorème 4.1, nous aurons besoin de l’inégalité des accroissements finispour les fonctions de la variable réelle. Nous nous contentons ici de rappeler une version (un peuaffaiblie) de ce résultat que nous utiliserons plusieurs fois dans le cours.

Théorème (Inégalité des accroissements finis)Soit I un intervalle et f : I ! R une application de classe C 1

. Pour tout ↵,� 2 I, on a l’inégalité

|f(�)� f(↵)| |� � ↵| sup[↵,�] |f 0|.

Page 55: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.3. FONCTIONS DE CLASSE C 1 55

Preuve du Théorème 4.1. À l’aide du point (i) de la Proposition 4.1, il nous suffit de montrer ladifférentiabilité des composantes de f . Sans perte de généralité, on suppose donc dorénavant quef est à valeurs réelles (i.e. p = 1).

Par souci de simplicité, nous allons écrire la démonstration dans le cas où n = 2, la structurede la preuve étant identique en dimension plus grande. Pour un vecteur h destiné à être petit, ons’intéresse donc à l’accroissement

�(h) := f(a+ h)� f(a)� @f

@x1(a)h1 �

@f

@x2(a)h2.

L’idée est de relier le point a au point a+ h en passant par le point intermédiaire bh1 := a+ h1e1,

de sorte que l’on fait deux développements de Taylor suivant les deux directions canoniques duplan. On écrit donc

�(h) =

:=✓(h1,h2)z }| {f(a+ h)� f(bh1)�

@f

@x2(a)h2 +

:=�(h1)z }| {f(bh1)� f(a)� @f

@x1(a)h1 .

Puisque f est supposée de classe C 1, la fonction réelle de la variable réelle t 7! �(t) est de classeC 1 et par définition des dérivées partielles sa dérivée est

t 7! @f

@x1(a+ te

1)� @f

@x1(a).

De la même manière, pour h1 fixé, la fonction t 7! ✓(h1, t) est également de classe C 1, de dérivée

t 7! @f

@x2(bh1 + te

2)� @f

@x2(a).

Puisque � et t 7! ✓(h1, t) sont nulles en t = 0, le théorème des accroissements finis implique que

|�(h1)| |h1| sup|t||h1|

����@f

@x1(a+ te

1)� @f

@x1(a)

����

|✓(h1, h2)| |h2| sup|t||h2|

����@f

@x2(bh1 + te

2)� @f

@x2(a)

���� .

Puisque �(h) = �(h1)+✓(h1, h2), on en déduit par inégalité triangulaire, en rappelant que khk1 =max(|h1|, |h2|),

|�(h)| khk1 sup|t||h1|

����@f

@x1(a+ te

1)� @f

@x1(a)

����+ khk1 sup|t||h2|

����@f

@x2(bh1 + te

2)� @f

@x2(a)

���� .

On remarque alors que les vecteurs a + te1 et bh1 + te

2 = a + h1e1 + te

2 intervenant dans cetteinégalité appartiennent tous à la boule Bf

1(a, khk1). Ainsi, on en déduit l’inégalité

|�(h)| khk1 supkz�ak1khk1

(����@f

@x1(z)� @f

@x1(a)

����+����@f

@x2(z)� @f

@x2(a)

����

)

Puisque f est supposée C 1, ses dérivées partielles @1f et @2f sont continues au point a, pour tout" > 0 on en déduit l’existence de �" tel que

khk1 < �" ) |�(h)| < "khk1,

ce qui n’est rien d’autre que la formulation quantitative (4.2) de la différentiabilité.

Page 56: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

56 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Attention !

Nous avons défini la notion de fonction différentiable et la notion de fonction C 1, et nousvenons de voir que la seconde impliquait la première. Mais tout comme il existe des fonctions dela variable réelle qui sont dérivables sans être de classe C 1, une fonction de plusieurs variablespeut-être différentiable sans être C 1. De manière générale, attention aux fausses implications :on renvoie à la Figure 4.3.

Classe C 1

Différentiable

Existencede dérivéespartielles

Continuité

Continuité partielle

Figure 4.1 – Les implications non écrites sur ce diagramme sont fausses ! La notion (inutile) de« continuité partielle » mentionnée, avait déjà été évoquée lors de l’encart précédent le Contre-exemple 3.1.

Dorénavant, nous ne travaillerons qu’avec des fonctions de classe C 1, même si les propriétésque nous allons exprimer demeurent vraies pour la plupart pour des fonctions différentiables.

Exercice fondamental 20 :

La fonction f : R2 ! R définie par

f(x, y) =

8>><

>>:

xy

x2 + y2si (x, y) 6= (0, 0)

0 si (x, y) = (0, 0),

admet des dérivées partielles en tout point. Elle n’est pas de classe C 1, ni même continue.

Corrigé de l’exercice H

Page 57: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.4. OPÉRATIONS SUR LES FONCTIONS DE CLASSE C 1 57

4.4 Opérations sur les fonctions de classe C 1

4.4.1 Combinaison linéaire et produit

Comme le calcul des dérivées partielles se ramène au calcul de dérivées classiques, celles-cijouissent des mêmes règles que celles connues pour les fonctions d’une seule variable. La propriétésuivante est présentée sans démonstration.

Propriété 4.1 (Combinaison linéaire)Soit U un ouvert de Rn

et m 2 N?. L’ensemble C 1(U ;Rm) est un espace vectoriel. Plus préci-

sément, si f, g 2 C 1(U ;Rm) et � 2 R, alors h := f + �g 2 C 1(U ;Rm) et pour tout a 2 U on

a

8(i, j) 2 J1,mK ⇥ J1, nK, @hi

@xj(a) = �

@fi

@xj(a) + µ

@gi

@xj(a),

soit, de manière plus concise, Jh(a) = �Jf (a)+ Jg(a), et l’application f 7! Jf (a) est donc linéaire.

Proposition 4.2 (Formule de Leibniz)Soit U un ouvert de Rn

et m 2 N?. Soient f : U ! R et g : Rn ! Rm

deux fonctions de classe

C1. La fonction p := fg est bien définie de U dans Rm

, et c’est un élément de classe C 1vérifiant

8(i, j) 2 J1,mK ⇥ J1, nK, @pi

@xj(a) =

@f

@xj(a)gi(a) + f(a)

@gi

@xj(a),

soit, de manière plus concise, Jp(a) = g(a)Jf (a) + f(a)Jg(a).

Démonstration. La formule impliquant les dérivées partielles est une conséquence immédiate dela formule de Leibniz à une variable (' )0 = '

0 + '

0, que l’on utilise en considérant toutesles autres variables comme des paramètres. Il reste ensuite à vérifier la traduction en termes dematrices jacobiennes :

g(a)Jf (a) + f(a)Jg(a)

=

0

B@g1(a)

...gm(a)

1

CA⇣

@f@x1

(a) · · · @f@xn

(a)⌘+ f(a)

0

BBBB@

@g1

@x1(a) · · · @g1

@xn(a)

......

@gm

@x1(a) · · · @gm

@xn(a)

1

CCCCA

=

0

BBBB@

g1(a)@f

@x1(a) · · · g1(a)

@f

@xn(a)

......

gm(a)@f

@x1(a) · · · gm(a)

@f

@xn(a)

1

CCCCA+

0

BBBB@

f(a)@g1

@x1(a) · · · f(a)

@g1

@xn(a)

......

f(a)@gm

@x1(a) · · · f(a)

@gm

@xn(a)

1

CCCCA.

Attention !

Dans la formule pour le produit Jp(a) = g(a)Jf (a) + f(a)Jg(a), l’ordre est importantpuisque les éléments sont des matrices. Ainsi, Jp(a) a m lignes et n colonnes. C’est aussi le casde Jg(a). Quant à g(a), c’est un vecteur colonne de taille m, et Jf (a) est un vecteur ligne detaille n. On ne peut les multiplier que dans ce sens là !

Page 58: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

58 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Terminons ce paragraphe par une dernière propriété qui est une généralisation directe d’unphénomène bien connu pour les fonctions d’une variable : les fonctions constantes ont une dérivéenulle !

Propriété 4.2

Soit U un ouvert de Rnet soient f : U ! R une fonction de classe C 1

. Si f est indépendante de xj,@f@xj

(a) = 0 pour tout a 2 U . En particulier, si f est une fonction constante alors Jf (a) = 0Mm,n(R).

Nous verrons une réciproque partielle de cette propriété plus tard.

4.4.2 Composition

Nous établissons à présent une formule de différentiation des fonctions composées, que l’onappelle la formule de la chaîne. Il s’agit d’un des résultats les plus techniques de ce cours mais ilest totalement indispensable.

Théorème 4.2 (Formule de la chaîne)Soit U un ouvert de Rn

et V un ouvert de Rm. On considère deux fonctions f : U ! V et

g : V ! Rp, toutes les deux de classe C 1

. Alors la fonction composée g � f est un élement de

C 1(U ;Rp) et on a la formule de la chaîne

8a 2 U, 8j 2 J1, nK, @

@xj(g � f)(a) =

mX

k=1

@g

@yk(f(a))

@fk

@xj(a),

ce qui s’écrit aussi

8a 2 U, 8i 22 J1, pK, 8j{1, · · · , p} , 8j 2 {1, · · · , n}, @

@xj(g � f)i(a) =

mX

k=1

@gi

@yk(f(a))

@fk

@xj(a).

De manière plus compacte, cette formule exprime l’égalité suivante

8a 2 U , Jg�f (a) = Jg(f(a))Jf (a) .

Attention !

Il faut bien comprendre que le dernier produit est un produit matriciel : là encore l’ordreest très important ! Jg

�f(a)

�possède m lignes et p colonnes tandis que Jg(a) a p lignes et m

colonnes. Le produit de ces deux matrices ne peut se faire que dans cet ordre, sauf dans le casn = m où seul cet ordre donne le bon résultat.

Exercice fondamental 21 :

Soit ' : R2 ! R une fonction de classe C 1 et soit g : R2 ! R définie par

g(x, y) = '(x+ y, x2 + y

2).

Exprimer les dérivées partielles de g en (2, 3) en fonction de celles de ' en un point bien choisi.

Corrigé de l’exercice H

Page 59: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.4. OPÉRATIONS SUR LES FONCTIONS DE CLASSE C 1 59

Exercice fondamental 22 :

Soient g : R2 ! R une fonction de classe C 1 et � : R2 ! R2 la fonction définie par

�(x, y) :=

✓ax+ by

cx+ dy

◆, pour tout (x, y) 2 R2

.

Montrer que F = g � � est de classe C 1 et calculer ses dérivées partielles.

Corrigé de l’exercice H

Exercice complémentaire 13 :

Démontrer que la fonction

F

⇢Rn \ {0} �! R

x 7�! kxk�22

est de classe C 1 et calculer JF (a) pour a dans Rn \ {0}.

Corrigé de l’exercice H

Démonstration du Théorème 4.2. Afin d’alléger la preuve de ce théorème, nous allons d’abordprocéder à plusieurs réductions. Déjà, il suffit d’établir l’existence des dérivées partielles de g � fet les égalités annoncées : le caractère C 1 découlera ensuite des propriétés usuelles des fonctionscontinues (stabilité par combinaison linéaire et produit). Ensuite, il suffit d’établir le théorèmedans le cas p = 1 : on pourra alors d’appliquer la formule obtenue à chacune des composantes dela fonction g � f . Dorénavant g est donc à valeurs réelles, et nous cherchons donc à établir étantdonné a 2 U et j 2 J1, nK

@

@xj(g � f)(a) =

mX

k=1

@g

@yk(f(a))

@fk

@xj(a). (4.3)

Maintenant que nous avons réduit le nombre de variables de l’ensemble d’arrivée, nous allonsprocéder de même pour les variables de l’ensemble de départ, en introduisant (j est fixé par lasuite) la courbe à valeurs vectorielles � : t 7! f(a+ te

j). Notons que puisque a appartient à l’ouvertU , il existe "a > 0 tel que B1(a, "a) ⇢ U de sorte que la fonction � est correctement définie sur]� "a, "a[.

Par définition de la dérivation partielle par rapport à la variable xj , la formule (4.3) est satisfaitesi et seulement si la fonction d’une variable t 7! g � �(t) est dérivable en 0 et vérifie

(g � �)0(0) =mX

k=1

@g

@yk(f(a))

@fk

@xj(a). (4.4)

Le reste de la preuve repose alors sur le lemme suivant.

Page 60: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

60 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Lemme 4.1

Soit " > 0 et h : B1(0Rm , ") ! R une fonction de classe C 1. Alors, la fonction ' : t 7! h(t, t, . . . , t)

est définie sur ]� ", "[ et dérivable en 0, sa dérivée en ce point valant

'0(0) =

mX

k=1

@h

@xk(0, 0, . . . , 0).

Avant d’établir ce lemme, assurons-nous qu’il nous permet de conclure. En introduisant lescomposantes �1, �2, . . . , �m de la courbe vectorielle � (i.e. �k : t 7! fk(a + te

j)), on considère lafonction

h : B1(0Rm , "a) �! R

(t1, t2, . . . , tm) 7�! g(�1(t1), �2(t2), . . . , �m(tm)).

Si on fixe toutes les variables de h sauf la k-ième, on regarde la fonction d’une variable

s 7�! g(�1(t1), . . . , �k(s), . . . , �m(tm)).

Cette dernière fonction est en réalité la composée de la fonction d’une variable

yk 7�! g(�1(t1), . . . , yk, . . . , �m(tm)),

avec la fonction tk 7! �k(tk) = fk(a + tkej). Par hypothèse, il s’agit de fonctions dérivables : le

théorème de dérivation de fonctions composées de la variable réelle s’applique et montre que h

admet bien des dérivées partielles, données par

@h

@tk(t1, . . . , tm) =

@g

@yk((�1(t1), . . . , �m(tm))�0k(tk)

=@g

@yk((�1(t1), . . . , �m(tm))

@fk

@xj(a+ tke

j).

Cela démontre que h est effectivement de classe C 1. La formule précédente se simplifie considéra-blement en l’origine et devient

@h

@tk(0, . . . , 0) =

@g

@yk(f(a))

@fk

@xj(a).

Finalement, en appliquant le Lemme 4.1 à la fonction h, on obtient exactement l’égalité demandée(4.4).

Preuve du Lemme 4.1. On procède par récurrence sur l’entier naturel m � 1, l’initialisation m = 1étant immédiate puisqu’alors ' = h. Supposant l’énoncé du lemme avéré jusqu’à l’entier m� 1, onconstate que la fonction (s1, s2, . . . , sm�1) 7! h(s1, s2, . . . , sm�1, 0) est définie et de classe C 1 surB1(0Rm�1 , "). L’hypothèse de récurrence montre donc que la fonction : t 7! h(t, t, . . . , t, 0) estdérivable en l’origine, et que sa dérivée en ce point vaut

m�1X

k=1

@h

@xk(0, 0, . . . , 0).

Fixons |t| < " et un point ⇠ := (⇠1, ⇠2, . . . , ⇠m�1, 0) 2 B1(0Rm , |t|). Puisque h est supposée declasse C 1, l’inégalité des accroissements finis appliquée à la fonction

� 7! h(⇠ + �em)� �

@h

xm(0Rm),

Page 61: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.5. LE GRADIENT D’UNE FONCTION NUMÉRIQUE 61

montre que����h(⇠ + te

m)� h(⇠)� t@h

@xm(0Rm)

���� |t| sup|�||t|

����@f

@xm(⇠ + �e

m)� @h

@xm(0Rm)

����

|t| supkzk1|t|

����@f

@xm(z)� @f

@xm(0Rm)

���� .

Il est crucial de noter que cette dernière majoration ne dépend plus du point ⇠ que l’on s’étaitdonné. En particulier pour tout |t| < ", en considérant ⇠ = (t, t, . . . , t, 0) nous avons établi

����h(t, t, . . . , t)� h(t, t, . . . , t, 0)� t@h

@xm(0Rm)

���� |t| supkzk1|t|

����@f

@xm(z)� @f

@xm(0Rm)

���� ,

ce qui après division par |t| 6= 0 montre que����'(t)� '(0)

t� (t)� (0)

t� @h

@xm(0Rm)

���� supkzk1|t|

����@f

@xm(z)� @f

@xm(0Rm)

���� ,

où l’on a utilisé que '(0) = (0). Dans le membre de gauche, le taux d’accroissement de ' est celuiqui nous intéresse ; celui de converge, lorsque t ! 0 vers 0(0) que nous avons déjà identifiée.Enfin, le terme de droite de l’inégalité converge vers 0 avec t, puisque f est supposée C 1 et donc@mf continue en l’origine. Finalement, on a montré que

'(t)� '(0)

t�!t!0

mX

k=1

@h

@xk(0, 0, . . . , 0),

ce qui est la dérivabilité requise et la formule annoncée.

4.5 Le gradient d’une fonction numériqueNous terminons cette section par une notion qui est très utile dans l’étude des fonctions numé-

riques, i.e. des fonctions à valeurs réelles.

Définition 4.6

Soit U un ouvert de Rnet f : U ! R une fonction de classe C 1

. Le gradient de f au point a 2 U

est un vecteur de Rn, noté rf(a), valant par définition

rf(a) =

0

BBB@

@1f(a)@2f(a)

.

.

.

@nf(a)

1

CCCA.

Proposition 4.3

Sous les notations de la Définition 4.6, pour tout point a 2 U et tout vecteur h 2 Rn, on a l’égalité

Jf (a)h = hrf(a), hi,

où h·, ·i est le produit scalaire usuel sur Rn.

Page 62: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

62 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Démonstration. Pour une application allant de Rn dans R, la matrice jacobienne en un point estune matrice possédant une ligne et n colonnes : en réalité, on a simplement rf(a) = tJf (a), ce quiimplique directement la formule annoncée.

Terminons par deux propriétés caractéristiques du gradient, qui permettent de s’en faire uneidée plus précise. Pour simplifier on considère ici une fonction f : R2 ! R, de classe C 1.

(i) Le gradient est orthogonal aux lignes de niveau.

La ligne de niveau � 2 R de la fonction f est l’ensemble L� = {x 2 Rn : f(x) = �}. Lapropriété mentionnée signifie que pour toute courbe appartenant à une ligne de niveau donnée,la tangente à cette courbe en un point est orthogonal au gradient en celui-ci. Et effectivement,si � :]�", "[! L� est une courbe de classe C 1, la fonction f �� :]�", "[! R est alors constante(égale à �) et donc de dérivée nulle. La formule de la chaîne montre alors que (en notant� = (�1, �2) les composantes de la courbes)

0 = (f � �)0(t) = @1f(�(t))�01(t) + @2f(�(t))�

02(t)

= hrf(�(t)), �0(t)i.

(ii) Le gradient indique la direction de plus grande variation.

Pour visualiser cela, on peut imaginer que les valeurs prises par la fonction f indiquentl’altitude, de sorte que le graphe de cette fonction représente le profil d’une montagne. Dansces conditions, le gradient de f indiquera (sur le plan horizontal) la direction à suivre la pluspentue, l’orientation de ce vecteur pointera vers la prise d’altitude et sa norme sera d’autantplus grande que la pente sera élevée. Pour le démontrer rigoureusement, on imagine qu’onest quelque part sur la montagne, soit en un point (a, f(a)), où a 2 R2. On se demande dansquelle direction du plan, notre variation d’altitude sera la plus forte. Autrement dit, on sedemande pour quel vecteur v de norme 1 la dérivée en 0 de la fonction h : t 7! f(a + tv)sera maximale. À nouveau, la formule de la chaîne s’applique et on a h

0(0) = hrf(a), vi ;l’inégalité et le cas d’égalité de Cauchy-Schwarz nous assurent que ce produit est majorépar krf(�(a))k2, l’égalité ne pouvant avoir lieu que lorsque le vecteur v est positivementcolinéaire au vecteur rf(�(a)).

Exemple 4.3 Soit v 2 Rnet fv : x 7! hx, vi. Il s’agit d’une application linéaire, donc de classe

C 1. Pour tout x 2 Rn

on a rfv(x) = v : son gradient est donc constant en tout point et vaut le

vecteur v. Ce calcul généralise celui de la dérivée des fonctions linéaires x 7! ↵x en dimension 1.

Exemple 4.4 Soit A 2 Mn(R) et fA : x 7! hAx, xi. Il s’agit d’une application polynômiale, donc

de classe C 1. Pour tout x 2 Rn

on a rfA(x) = (A+ tA)x. Ce calcul généralise celui de la dérivée

des fonctions quadratiques x 7! ↵x2

en dimension 1.

Théorème 4.3 (Inégalités des accroissements finis)Soit U un ouvert de Rn

. Pour toute application f : U ! R de classe C 1et tout couple de points

(a, b) 2 U tel que le segment [a, b] soit inclus dans U on a les inégalités

|f(b)� f(a)| kb� ak1 supt2[0,1]

krf(a+ t(b� a))k1,

|f(b)� f(a)| kb� ak2 supt2[0,1]

krf(a+ t(b� a))k2,

|f(b)� f(a)| kb� ak1 supt2[0,1]

krf(a+ t(b� a))k1.

Page 63: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

4.5. LE GRADIENT D’UNE FONCTION NUMÉRIQUE 63

Terminons ce chapitre par une généralisation de l’inégalité des accroissements finis, dans le casd’une fonction numérique de plusieurs variables.

Remarque 4.5 Si on utilise d’autres normes dans ces inégalités sans plus de précautions, il faut

alors ajouter une constante (provenant de l’équivalence des normes). Cette subtilité n’est pas pré-

sente dans le cas de fonctions de la variable réelle puisque les trois normes k · k1, k · k2 et k · k1correspondent à la valeur absolue !

Démonstration. Notons d’abord que les bornes supérieures présentes dans l’énoncé sont toutes lestrois finies. En effet, par hypothèse f est de classe C 1 sur U , donc l’application rf : U ! Rn estcontinue. C’est donc également le cas de la restriction rf : K ! Rn, où K = {a+ t(b� a) : t 2[0, 1]} est le segment reliant les points a et b (qui est supposé contenu dans U). K est une partiefermée et bornée, donc compacte : le Théorème 3.1 assure que (rf)(K) est également une partiecompacte de Rn, et donc en particulier bornée (pour toute norme !).

Pour l’inégalité, on introduit la fonction réelle de la variable réelle

� : R �! R

t 7�! f(a+ t(b� a)).

La formule de la chaîne montre que � est de classe C 1 avec

�0(t) = Jf (a+ t(b� a))(b� a) =

⌦rf(a+ t(b� a)), b� a

↵,

où h·, ·i est le produit scalaire sur Rn. Finalement, le théorème des accroissements finis (usuel)appliqué à � montre

|f(b)� f(a)| supt2[0,1]

��⌦rf(a+ t(b� a)), b� a↵��.

Les trois inégalités énoncées découlent alors en utilisant, soit l’inégalité de Cauchy-Schwarz (Pro-position 1.5), soit la remarque suivante : pour ⇠, ⇣ 2 Rn, on a

��⌦⇠, ⇣↵�� k⇠k1k⇣k1 et

��⌦⇠, ⇣↵�� k⇠k1k⇣k1.

Pour vérifier cela, on revient à la définition du produit scalaire pour écrire, par inégalité triangulaire

��⌦⇠, ⇣↵�� =

�����

nX

k=1

⇠k⇣k

����� nX

k=1

|⇠k| |⇣k|,

et les inégalités en découlent par définition des normes k · k1 et k · k1.

Terminons ce chapitre par une application de l’inégalité des accroissements finis, généralisantle fait qu’une fonction définie sur un intervalle est constante si et seulement si sa dérivée estnulle. Cette généralisation fait appel à la notion d’ensemble connexe par arcs introduite dans laDéfinition 3.5.

Théorème 4.4

Soient U ⇢ Rnun ouvert connexe par arcs et f une fonction de classe C 1(U ;Rm) telle que

Jf (x) = 0Mm,n(R) pour tout x dans U . Alors f est constante sur U , autrement dit, il existe c 2 Rm

tel que f(x) = c pour tout x dans U .

Page 64: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

64 CHAPITRE 4. DÉRIVÉES PARTIELLES ET FONCTIONS DE CLASSE C 1

Démonstration. Sans perte de généralité, on peut supposer que m = 1, en étudiant les composantesde la fonction f . L’hypothèse sur f peut donc s’écrire rf(x) = 0 pour tout point x de U . Il nous fautdémontrer que pour a et b deux points de U , on a f(a) = f(b). Traitons tout d’abord un premiercas simplifié : si le segment [a, b] est tout entier contenu dans U , alors l’(une des )inégalité(s) desaccroissements finis du Théorème 4.3 s’applique et montre immédiatement que f(a) = f(b). Celatraite donc le cas particulier où U est une partie convexe 1. Nous sommes dans une situation unpeu plus générale et on suppose l’ouvert U connexe par arcs : il existe donc � : [0, 1] ! U uneapplication continue telle que �(0) = a et �(1) = b.

L’ensemble I := {t 2 [0, 1] : f(�(t)) = f(a)} est une partie fermée de R, par caractérisationsséquentielles de la fermeture et de la continuité : si (tn)n ! t, avec f(�(tn)) = f(a), cette égalitése conserve à la limite et on a bien t 2 I. L’ensemble I est non vide (il contient t = 0) et majorépar 1, par définition. Soit donc t

? := sup I. Si t? < 1, on aboutit à une contradiction. D’une part,en considérant une suite minimisante, on a nécessairement f(�(t?)) = f(a). D’autre part, �(t?)appartient à l’ouvert U . Il existe donc r > 0 tel que B := B1(�(t?), r) ⇢ U . La remarque réaliséeen début de preuve montre que f (qui a un gradient nul sur la boule B) est constante sur B, puisquecette partie est convexe. L’application continue ' : t 7! k�(t) � �(t?)k1 est nulle en t

?, il existedonc � > 0 tel que '(t? + �) < r. Autrement, dit �(t? + �) 2 B et donc f(�(t? + �)) = f(t?) parconstance de f sur la boule B. Finalement, on a exhibé un élément de I strictement plus grandque t

? = sup I : c’est une contradiction.

Bilan : on a nécessairement sup I = 1 et puisque I est une partie fermée et bornée, elle contientsa borne supérieure (il suffit de considérer une suite maximisante) ce qui signifie que 1 appartientà I et f(a) = f(b).

L’hypothèse de connexité par arcs est réellement nécessaire comme le montre le contre-exemplesuivant.

Contre-exemple 4.1 On reprend l’ensemble utilisé au Contre-exemple 3.3 : soit A := Ba t Bb

l’union de deux boules ouvertes disjointes de Rn. A est un ouvert. Si l’on définit la fonction

f : A ! R par la valeur 0 sur Ba et la valeur 1 sur Bb, alors rf(z) = 0 pour tout z 2 A, mais

pourtant f n’est pas constante sur A.

1. C’est un cas particulier de connexité par arcs !

Page 65: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Chapitre 5

Recherche d’extremum

5.1 Extremum local et extremum globalPrécisons tout d’abord que lorsque l’on parle de l’extremum (pluriel : extrema) d’une fonction,

cela sous-entend que la fonction étudiée est à valeurs réelles. Il s’agit d’un terme générique quiregroupe les notions de minimum et maximum. Nous allons distinguer dans ce chapitre les extremalocaux et les extrema globaux.

Définition 5.1 (Extrema globaux)Soit D ⇢ Rn

et f : D ! R une fonction numérique. On dit que f admet un maximum global sur

D au point a 2 D si f(a) � f(y) pour tout y 2 D. On dit que f admet un minimum global sur D

au point a 2 D si f(a) f(y) pour tout y 2 D.

Il est souvent difficile de montrer qu’une fonction atteint un extremum global au point a car ilfaut comparer f(a) à tous les f(x), y compris pour x très éloigné de a. Il est parfois pertinent delocaliser cette étude des extrema, grâce à la notion suivante.

Définition 5.2 (Extrema locaux)Soit D ⇢ Rn

et f : D ! R une fonction numérique. On dit que f admet un maximum local sur D

en a 2 D s’il existe " > 0 tel que f(a) � f(y) pour tout y 2 D \ B1(a, "). On dit que f admet un

minimum local sur D en a 2 D s’il existe " > 0 tel que f(a) f(y) pour tout y 2 D \ B1(a, ").

Remarque 5.1 Comme à l’accoutumée, le choix de la norme infinie définissant les boules est

ici arbitraire et l’équivalence assure que l’on pourrait choisir de définir les boules avec une autre

norme, sans que changer cette définition.

Exemple 5.1 Un extremum global est toujours local, la réciproque est fausse. Si D est la ville

de Paris et f représente l’altitude, la tour Zamansky est un maximum local si on se limite, par

exemple, au 5ème arrondissement de Paris. Ce n’est pas un maximum global à cause de la tour

Eiffel ou de la tour Monparnasse.

5.2 Points critiques et extremaRevenons un instant au cas des fonctions de la variable réelle, avec le rappel suivant

Théorème

Soit f :]a, b[! R une fonction dérivable. Si f a un extremum local au point x0 2]a, b[, alors

f0(x0) = 0

65

Page 66: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

66 CHAPITRE 5. RECHERCHE D’EXTREMUM

Nous allons généraliser cette propriété aux fonctions numériques de plusieurs variables, dans lecadre de la classe C 1.

Attention !

Les objections suivantes, de notoriété publique quand l’espace de départ est R, le serontencore pour les fonctions à plusieurs variables !

• L’implication n’est vraie que dans un sens : si f 0(x0) = 0, la fonction peut ne pas avoird’extremum local en ce point. Par exemple : f : R ! R, x 7! x

3 n’a ni minimum local,ni maximum local au 0.

• Il faut prendre garde au fait que l’intervalle est ouvert. Pas exemple, la fonction [0, 1] !R, x 7! x

2 a un maximum local en x = 1, pourtant sa dérivée en ce point est non nulle :le résultat n’est pas valable pour les points du bord de l’intervalle.

Définition 5.3

Soit U ⇢ Rnun ouvert et soit f : U ! R une fonction de classe C 1

. On dit que a 2 U est un

point critique de f si rf(a) = 0Rn c’est-à-dire si

8j 2 J1, nK , @f

@xj(a) = 0 .

Le théorème ci-après montre que lorsque l’ensemble où est réalisé l’extrespace de départ estouvert, les points critiques sont les seuls points où il est possible que la fonction ait un extremumlocal. Il est donc important d’être capable de trouver les points critiques.

Théorème 5.1

Soit U ⇢ Rnun ouvert et f 2 C 1(U ;R) . Si f admet un extremum local sur U en un point a

de U , alors a est un point critique de f .

Démonstration. Comme U est ouvert, il existe un réel strictement positif r tel que B1(a, r) soitincluse dans U . Pour tout j dans {1, · · · , n}, la fonction d’une variable

Fj : t 7! f(a+ tej),

est alors définie sur l’intervalle ]�r, r[ et est dérivable. De plus, le point 0R est un extremum local :le théorème rappelé en début de paragraphe assure que

F0j(0) =

@f

@xj(a) = 0,

ce qui termine la preuve du théorème.

Être un point critique est donc une condition nécessaire pour être un extremum. Elle n’estcependant pas suffisante : les points critiques sont seulement les « candidats » pour les extremalocaux. Parfois, comme pour les fonctions d’une variable réelle, un point critique peut très bienn’être ni un minimum ni un maximum local ; un tel point est appelé un point selle. Nous reviendronssur cette notion un peu plus tard.

Page 67: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

5.3. LE RETOUR DE LA COMPACITÉ 67

Exercice fondamental 23 :

On considère la fonction

g :R2 �! R

(x, y) 7�! x2(1 + y)3 + y

2.

Montrer que g a un seul point critique.

Corrigé de l’exercice H

Exercice fondamental 24 :

Montrer que la fonction g : R2 ! R, (x, y) 7! x2(1+ y)3 + y

2 a un minimum local en (0, 0)et que ce n’est pas un minimum global.

Corrigé de l’exercice H

Exercice fondamental 25 :

Soit f : R2 ! R la fonction définie par f(x, y) = x2 � y

2 pour tout (x, y) 2 R2. Montrerque (0, 0) est un point critique de f qui n’est ni un minimum local ni des maximum local.

Corrigé de l’exercice H

5.3 Le retour de la compacité

Il faut faire bien attention au fait que dans l’énoncé du Théorème 5.1, l’ensemble sur lequelest réalisé l’extremum est ouvert. Voyons ce qui se passe si l’extremum est réalisé sur une partiecompacte. D’un côté, c’est plus agréable car l’existence d’un extremum local est garantie par leThéorème 3.2, relatif aux fonctions continues sur les compacts. Par contre, localiser les extremumsn’est pas si simple, car les points sur la frontière de K doivent être étudiés à part.

Cela contraste avec la section d’avant où on localise facilement les points où il y a peut-être unextremum local grâce aux points critiques (Proposition 5.1), mais où il est difficile de savoir s’ilexiste oui ou non un extremum local ou global.

Théorème 5.2

Soit K un compact de Rnet soit f : K ! R une fonction continue, que l’on suppose de classe

C 1sur l’intérieur K de K. Alors la fonction f admet un maximum global et un minimum global

sur K. De plus, si f admet un extremum local sur K en un point a intérieur de K, alors a est un

point critique. Si l’extremum local est atteint en un point a de la frontière K \ K, on ne peut rien

dire du gradient de f au point a .

Page 68: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

68 CHAPITRE 5. RECHERCHE D’EXTREMUM

Démonstration. La fonction f est continue sur un compact, donc par le Théorème 3.2, elle atteintson infimum et son supremum sur ce compact, autrement dit elle a un maximum et un minimumglobal sur K.

Passons à la seconde partie du théorème. Supposons que f ait un extremum local en a quiappartient à K. Dans ce cas, f|K : K ! R a un extremum local en a et le Théorème 5.1 précédentnous dit que rf|K(a) = 0Rn , et bien entendu rf|K(a) = rf(a).

Contre-exemple 5.1 Sur le compact Bf2 (0, 1), la fonction (x, y) 7! x

2 + y2

admet des maxima

globaux en chaque point du cercle unité. Pourtant, le gradient ne s’annule jamais sur celui-ci !

Exercice fondamental 26 :

On considère la fonction de deux variables

f(x, y) =1p1 + y

+ x2

1. Quel est sont ensemble de définition ?2. Montrer que f est de classe C 1 sur son ensemble de définition.3. La fonction f a t-elle des points critiques ?4. On considère l’ensemble A = {(x, y) 2 R2 : 0 x 1, 0 y x

2 }. Montrer qu’ilexiste un (x0, y0) 2 A tel que

8(x, y) 2 A, f(x, y) f(x0, y0).

5. Où se situe le point (x0, y0) : à l’intérieur ou sur la frontière de A ?

Corrigé de l’exercice H

5.4 Dérivées partielles d’ordre deuxTout comme pour les fonctions d’une seule variable, nous avons aussi des notions de dérivées

d’ordre supérieur pour les fonctions de plusieurs variables. Nous nous limitons ici à la notion dedérivée partielle d’ordre deux et au cas où l’espace d’arrivée est R. Nous verrons dans la partiesuivante que cela nous permet, dans la plupart des cas, de déterminer si un point critique est unminimum local, un maximum local ou un point-selle (c’est-à-dire ni l’un ni l’autre).

Définition 5.4 (Dérivées partielles d’ordre 2)Soit U ⇢ Rn

un ouvert et f : U ! R une fonction de classe C 1. On dit que f admet des dérivées

partielles d’ordre deux en a 2 U si les fonctions@f@x1

, . . . ,@f@xn

admettent des dérivées partielles en

a. On note alors pour tout 1 i, j n,

@2f

@xi@xj(a) :=

@

@xi

@f

@xj

�(a)

la i-ème dérivée partielle de la j-ème dérivée partielle de f en a. La matrice formée des dérivées

Page 69: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

5.4. DÉRIVÉES PARTIELLES D’ORDRE DEUX 69

partielles d’ordre 2 en a est notée

Hf (a) =

✓@2f

@xi@xj(a)

1i,jn

est appelée matrice hessienne de f au point a.

Définition 5.5 (Fonctions de classe C 2)Soit U ⇢ Rn

un ouvert. On dit que f : U ! R est de classe C 2sur U si f est de classe C 1

, admet

des dérivées partielles d’ordre deux en tout point et si, pour tout couple (i, j) de J1, nK2, la fonction

U �! R

x 7�! @2f

@xi@xj(x),

est continue.

Le résultat suivant est fondamental, il s’agit de la relation de Schwarz : pour une fonction C 2,l’ordre des variables dans l’expression de ses dérivées partielles d’ordre deux n’importe pas.

Théorème 5.3 (Schwarz)

Soit U ⇢ Rnun ouvert et f : U ! R une fonction de classe C 2

. Alors pour tout 1 i, j n et

tout a 2 U ,

@2f

@xi@xj(a) =

@2f

@xj@xi(a).

En particulier, la matrice hessienne Hf (a) est symétrique.

Démonstration. Remarquons tout d’abord qu’il suffit d’établir la preuve de ce théorème en dimen-sion 2 : au point a 2 U , les dérivées partielles d’ordre 2 de f d’indices i, j sont exactement lesdérivées partielles d’ordre 2 d’indice 1, 2 de la fonction de deux variables (on suppose i < j)

(x, y) 7�! f(a+ (x� ai)ei + (y � aj)e

j) = f(a1, a2, . . . ,

i#x, . . . ,

j#y, . . . , an),

au point (ai, aj). On suppose dorénavant que n = 2.

Soit t 6= 0. Pour une fonction g de deux variables on définit les opérations suivantes

�t1(g)(x1, x2) :=

g(x1 + t, x2)� g(x1, x2)

t, �t

2(g)(x1, x2) :=g(x1, x2 + t)� g(x1, x2)

t.

Le réel t étant fixé, ces deux expressions sont des fonctions des deux variables x1, x2. Remarquonsalors les faits suivants.

A Les opérations g 7! �t1(g) et g 7! �t

2(g) sont linéaires et commutent entre elles. Ce dernierpoint signifie que pour toute fonction g

�t1(�

t2g) = �t

2(�t1g).

B Si g est de classe C 1, les opérations �t1 et �t

2 commutent avec les dérivations partielles,c’est-à-dire que pour i, j 2 {1, 2}

�ti(@jg) = @j(�

tig).

Page 70: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

70 CHAPITRE 5. RECHERCHE D’EXTREMUM

C Si g est de classe C 1, on a

|�t1g(x1, x2)| sup

s2[0,1]|@1g(x1 + st, x2)|,

|�t2g(x1, x2)| sup

r2[0,1]|@2g(x1, x2 + rt)|.

Seul le point C nécessite vraiment une justification, et celle-ci provient du théorème des accrois-sements finis appliqué (pour le premier cas, le second est similaire) à la fonction d’une variables 7! g(x1 + st, x2), qui est dérivable de dérivée s 7! t@1g(x1 + st, x2).

Maintenant, en notant `a := @212f(a), et '(x1, x2) := x1x2`a on a �t

2(�t1') = `a. En particulier,

en utilisant A il vient

�t1(�

t2f)� `a = �t

1(�t2(f � ')) = �t

2(�t1(f � ')).

Il vient alors, en utilisant l’égalité précédente puis successivement B et C

|�t1(�

t2f)(a1, a2)� `a| sup

r2[0,1]|@2(�t

1(f � '))(a1, a2 + tr)|

= supr2[0,1]

|(�t1(@2f � @2'))(a1, a2 + rt)|

supr2[0,1]

sups2[0,1]

|(@1(@2f � @2'))(a1 + st, a2 + rt)|

= sups,r2[0,1]

|@212f(a1 + st, a2 + rt)� `a|

supx2B1(a,t)

|@212f(x)� `a|.

Puisque f 2 C 2(U), la fonction @212f est continue au point a. On en déduit donc, par la dernière

inégalité étbalie,

|�t1(�

t2f)(a)� `a|�!

t!00.

Revenant à la définition de `a, on a donc démontré que la foncion t 7! �t1(�

t2f)(a) converge vers

@212f(a) lorsque t ! 0. Mais par le point A ci-haut, cette fonction est égale à t 7! �t

2(�t1f)(a),

et par symétrie des rôles le même raisonnement montre que cette fonction converge vers @221f(a)lorsque t ! 0. Par unicité de la limite on en déduit finalement @212f(a) = @

221f(a).

Exercice complémentaire 14 :

1. Montrer que la fonction définie pour (t, s) 6= (0, 0) par '(t, s) =st(t2 � s

2)

t2 + s2est prolon-

geable par continuité. On appelle toujours ' la fonction définie sur R2 tout entier grâceà ce prolongement.

2. Montrer que ' est C 1 sur R2.

3. Calculer@2'

@t@s(0, 0) et

@2'

@s@t(0, 0). Que peut-on en déduire ?

Corrigé de l’exercice H

Page 71: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

5.4. DÉRIVÉES PARTIELLES D’ORDRE DEUX 71

La connaissance de dérivées partielles d’ordre 2 permet de donner une formule de Taylor àl’ordre 2 pour les fonctions de plusieurs variables.

Théorème 5.4 (Formule de Taylor à l’ordre 2)Soit U ⇢ Rn

un ouvert et f : U ! R une fonction de classe C 2sur U . Soit a 2 U et r > 0 tel que

B1(a, r) ⇢ U . Pour h 2 B1(0, r) on a

f(a+ h) = f(a) +nX

i=1

@f

@xi(a)hi +

1

2

X

1i,jn

@2f

@xi@j(a)hihj + "a(h)khk21 ,

où la fonction "a : B1(0, r) ! R tend vers 0 lorsque h ! 0. En utilisant matrices jacobienne et

hessienne, cela se réécrit

f(a+ h) = f(a) + Jf (a)h+1

2

⌦Hf (a)h, h

↵+ "a(h)khk21 . (5.1)

où h·, ·i est le produit scalaire usuel sur Rn.

Attention !

Dans la formule (5.1), il faut bien faire la distinction entre le produit scalaire, noté avecdes crochets, et les produits matriciels notés sans rien. En effet, puisque f : Rn ! R, h estun vecteur colonne de taille n, Jf (a) un vecteur ligne de taille n, donc le produit matricielJf (a)h 2 R (et c’est aussi le produit scalaire de rf(a) avec h). D’autre part, Hf (a) est unematrice carrée, donc Hf (a)h est un vecteur colonne tout comme h ! Pour obtenir un réel commedans le reste de l’identité, il faut donc prendre le produit scalaire.

Remarque 5.2 On rencontre aussi la notation suivante, plus compacte mais moins explicite

f(a+ h) = f(a) +nX

i=1

@f

@xi(a)hi +

1

2

X

1i,jn

@2f

@xi@xj(a)hihj + o(khk21)

= f(a) + Jf (a)h+1

2

⌦Hf (a)h, h

↵+ o(khk21),

où il faut comprendre que h 7! o(khk21) est une fonction de Rndans R qui dépend de h (et pas

seulement de khk21 comme le suggère la notation) telle que

limkhk1!0

o(khk21)

khk21= 0.

Démonstration. Soit r > 0 tel que B1(a, r) ⇢ U . On introduit l’application reste

Rf : B1(a, r) �! R

h 7�! f(a+ h)� f(a)� Jf (a)h� 1

2

⌦Hf (a)h, h

↵,

de sorte que la preuve du théorème se ramène à l’existence de "a : Rn ! R tendant vers 0lorsque h ! 0, telle que |Rf (h)| "a(h)khk21. Remarquons que Rf est une application declasse C 1 à valeurs réelles : c’est le cas de h 7! f(a + h) par hypothèse, et également le casde h 7! �f(a)� Jf (a)h� 1

2

⌦Hf (a)h, h

↵, qui est une fonction polynômiale. Calculons le gradient

Page 72: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

72 CHAPITRE 5. RECHERCHE D’EXTREMUM

de la fonction Rf . Puisque Jf (a)h = hrf(a), hi et que la matrice Hf (a) est symétrique par leThéorème de Schwarz, on en déduit, à l’aide des Exemples 4.3 et 4.4,

rRf (h) = rf(a+ h)�rf(a)� Hf (a)h.

L’application f étant supposée de classe C 2, l’application rf : U ! Rn est de classe C 1. Si onécrit la définition de la matrice jacobienne pour cette dernière application, on s’aperçoit qu’il s’agitde la matrice hessienne, i.e. Jrf (a) = Hf (a). Finalement, nous avons établi l’identité suivante

rRf (h) = rf(a+ h)�rf(a)� Jrf (a)h.

Puisque rf : U ! Rn est une fonction de classe C 1, le Théorème 4.1 fournit un développementde Taylor à l’ordre 1 pour cette fonction vectorielle : il existe une fonction �a : Rn ! Rn tendantvers 0 en 0 telle que

rRf (h) = �a(h)khk1.

En revenant à la définition de la fonction Rf , on constate que celle-ci s’annule en 0. Ainsi, enutilisant la troisième inégalité des accroissements finis du Théorème 4.3, il vient

|Rf (h)| = |Rf (h)� Rf (0)| khk1 supt2[0,1]

krRf (th)k1

k�a(h)k1khk21.

Et la fonction "a(h) := k�a(h)k1 tend bien vers 0 en l’origine, ce qui achève la preuve du théorème.

5.5 Nature des points critiques : des critères avec la hessienneNous avons vu au Théorème 5.1 que pour une fonction de classe C 1, un extremum local sur un

ouvert est nécessairement un point critique. Dans ce paragraphe, nous allons étudier la situationréciproque : sachant que a est un point critique de f , peut-on dire qu’il s’agit d’un extremumlocal ? D’un maximum ? D’un minimum ? Pour répondre à ces questions nous allons voir qu’il estpertinent d’utiliser le développement de Taylor à l’ordre deux (ce que l’on peut faire lorsque lafonction est de classe C 2). Nous aurons besoin d’un résultat d’algèbre linéaire que nous rappelonsici.

Théorème 5.5 (Théorème spectral)Pour toute matrice symétrique A 2 Sn(R) il existe une base orthonormée de Rn

composée de

vecteurs propres de A. Autrement dit, A est diagonalisable dans une base orthonormée.

Nous utiliserons en réalité surtout le corollaire suivant.

Corollaire 5.1

Soit A 2 Sn(R) une matrice symétrique. Toutes ses valeurs propres étant réelles, si on désigne par

�min la plus petite et �max la plus grande, on a les inégalités suivantes

8x 2 Rn, �minkxk22 hAx, xi �maxkxk22

Démonstration. D’après le théorème spectral, on dispose d’une base orthonormée B := {v1, . . . , vn}de Rn et de valeurs propres {�1, . . . ,�n} (réelles) telles que pour tout i, Av

i = �ivi. Par commo-

dité, supposons les valeurs propres rangées par ordre croissant, si bien que �1 = �min et �n = �max.

Page 73: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

5.5. NATURE DES POINTS CRITIQUES : DES CRITÈRES AVEC LA HESSIENNE 73

Le fait que B soit une base orthonormée signifie, pour i, j 2 J1, nK,

hvi, vji =(0 si i 6= j,

1 si i = j.

Soit maintenant x 2 Rn. Ce vecteur se décompose dans la base B, et il existe donc des réels↵1, . . . ,↵n 2 R tels que x =

Pni=1 ↵iv

i. Ainsi, d’une part

kxk22 =

*nX

i=1

↵ivi,

nX

j=1

↵jvj

+=

nX

i=1

nX

j=1

↵i↵jhvi, vji =nX

i=1

↵2i , (5.2)

et d’autre part

hAx, xi =*

nX

i=1

↵iAvi,

nX

j=1

↵jvj

+=

*nX

i=1

�i↵ivi,

nX

j=1

↵jvj

+=

nX

i=1

�i↵2i . (5.3)

Puisque toutes les valeurs propres sont comprises entre �1 = �min et �n = �max, on tire de (5.3)l’inégalité suivante

�min

nX

i=1

↵2i hAx, xi �max

nX

i=1

↵2i .

Il ne reste alors plus qu’à utiliser (5.2) pour conclure.

Dans le paragraphe précédent, nous avons vu (Théorème 5.1) que pour une fonction de classeC 1 sur un ouvert, une condition nécessaire pour avoir un extremum local est d’être en un pointcritique. Si on a affaire à une fonction de classe, la condition se renforce encore un peu, comme lemontre le théorème suivant.

Théorème 5.6

Soit U ⇢ Rnun ouvert de Rn

et f : U ! R une fonction de classe C 2sur U . Si f admet un

extremum local en un point a de U , alors a est un point critique de f et toutes les valeurs propres

de la matrice hessienne Hf (a) sont de même signe : positives ou nulles s’il s’agit d’un minimum

local, négatives ou nulles s’il s’agit d’un maximum local.

Remarque 5.3 On générale ainsi la condition nécessaire d’extremum local pour les fonctions

d’une variable réelle ; pour celles-ci la condition devient simplement f00(a) � 0 (pour un minimum

local) ou f00(a) 0 (pour un maximum local).

Avant de prouver ce théorème, signalons-en le corollaire suivant qui est très utile en pratiquepour montrer qu’il ne peut pas y avoir d’extremum local en un point.

Corollaire 5.2

Soit U ⇢ Rnun ouvert de Rn

et f : U ! R une fonction de classe C 2sur U . Soit a 2 U un point

critique de f . Si la matrice hessienne Hf (a) a une valeur propre strictement positive et une valeur

propre strictement négative, alors f n’a pas d’extremum local en a.

Preuve du Théorème 5.6. On sait, par le Théorème 5.1, que le point a est nécessairement critique.Supposons dans un premier temps que Hf (a) possède une valeur propre � strictement positive,et soit v 2 Rn \ {0} un vecteur propre associé, que l’on peut supposer vérifier kvk1 = 1. Soit

Page 74: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

74 CHAPITRE 5. RECHERCHE D’EXTREMUM

enfin r > 0 tel que B1(a, r) ⇢ U . Le Théorème 5.4 nous assure que pour h 2 B1(0, r), on a ledéveloppement à l’ordre 2

f(a+ h) = f(a) + Jf (a)h+1

2

⌦Hf (a)h, h

↵+ "a(h)khk21,

où "a tend vers 0 en l’origine. Puisque a est un point critique, la formule précédente se simplifie :

f(a+ h) = f(a) +1

2

⌦Hf (a)h, h

↵+ "a(h)khk21.

Exploitons cette formule en prenant h = tv avec t 2] � r, r[, de sorte que khk1 = |t|kvk1 < r.Puisque Hf (a)v = �v, on a ainsi

f(a+ tv) = f(a) +�t

2

2kvk22 + t

2"a(tv)kvk21.

Puisque l’on a choisi kvk1 = 1 et que k · k2 � k · k1, on en déduit (en utilisant que � > 0)

f(a+ tv) � f(a) + t2

✓�

2� "a(tv)

◆.

Par définition, la fonction "a tend vers 0 en l’origine : il existe donc � > 0 tel que

|t| < � ) |"a(tv)| <�

2.

Cela démontre que pour tout t 2]� �, �[ non nul, f(a+ tv) > f(a). Ainsi, f ne peut pas atteintreun maximum local en a. En reprenant la preuve pour une valeur propre strictement négative, onen déduit que f ne peut alors pas atteindre un minimum local en a.

Nous terminons ce chapitre par le seul résultat qui donne une condition suffisante pour q’unextremum local soit réalisé.

Théorème 5.7

Soit U ⇢ Rnun ouvert de Rn

, f : U ! R une fonction de classe C 2sur U et a 2 U un point

critique de f .

• Si les valeurs propres de la matrice hessienne Hf (a) sont toutes strictement positives, alors

f admet un minimum local sur U au point a ;

• Si les valeurs propres de la matrice hessienne Hf (a) sont toutes strictement négatives, alors

f admet un maximum local sur U au point a.

Démonstration. Commençons par traiter le premier point. Soit r > 0 tel que B1(a, r) ⇢ U . Puisquea est un point critique, la matrice jacobienne Jf (a) est nulle et le Théorème 5.4 nous assure quepour h 2 B1(0, r), on a le développement à l’ordre 2

f(a+ h) = f(a) +1

2

⌦Hf (a)h, h

↵+ "a(h)khk21,

où "a tend vers 0 en l’origine. D’après le théorème de Schwarz, la matrice hessienne Hf (a) estsymétrique. On peut donc lui appliquer le Corollaire 5.1 en notant que, puisque toutes les valeurspropres de Hf (a) sont strictement positives, c’est en particulier le cas de la plus petite d’entre elle,�min. Ainsi, nous avons, pour h 2 B1(0, r),

f(a+ h) � f(a) +1

2�minkhk22 + "a(h)khk21.

Page 75: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

5.5. NATURE DES POINTS CRITIQUES : DES CRITÈRES AVEC LA HESSIENNE 75

Puisque k · k2 � k · k1, on en déduit, toujours pour h 2 B1(0, r),

f(a+ h) � f(a) + khk21✓�min

2� "a(h)

◆.

Par définition la fonction h 7! "a(h) tend vers 0 lorsque h ! 0. Il existe donc � > 0 tel que pour

h 2 B1(0, �) ) |"a(h)| <�min

2.

On a finalement établit, pour tout élément z = a+h 2 B1(a, �), l’inégalité f(z) � f(a) : f réalisebien un minimum local au point a.

Pour traiter le deuxième point (le cas d’un maximum local) il suffit de considérer la fonction�f pour se ramener au premier.

Remarque 5.4 En dimension n = 2, la matrice hessienne est une matrice symétrique 2⇥ 2 et le

signe de ses valeurs propres �1 et �2 s’obtient facilement. Il suffit de se souvenir des égalités

det�Hf (a)

�= �1�2 et Tr(Hf (a)) = �1 + �2.

On constate alors que

• si det�Hf (a)

�< 0, il y a une valeur propre strictement négative et une valeur propre stric-

tement positive donc f n’a pas d’extremum local au point a, grâce au Corollaire 5.2 ;

• si det�Hf (a)

�> 0 alors les valeurs propres sont non nulles et de même signe et on peut

appliquer le Théorème 5.7 dans l’un des deux cas de figure :

� si Tr�D

2f(a)

�> 0 alors les deux valeurs propres sont strictement positives et a est un

point de minimum local ;

� si Tr�D

2f(a)

�< 0 alors les deux valeurs propres sont strictement positives et a est un

point de maximum local ;

• si det�Hf (a)

�= 0, au moins une des valeurs propres est nulle et il faut faire une étude

spécifique, ce cas n’étant couvert par aucun de nos théorèmes.

Exercice fondamental 27 :

Trouver les extrema locaux de la fonction g : (x, y) 7! �x2y + y2

2 + y et déterminer leurnature.

Corrigé de l’exercice H

Page 76: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

76 CHAPITRE 5. RECHERCHE D’EXTREMUM

Page 77: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Annexe A

Rappels de théorie des ensembles

On rappelle briévement ici les notions d’union, d’intersection et de complémentaire ; en cas dedoutes sur les propriétés, un petit dessin avec des patates permets toujours de les retrouver. Danstout ce qui suit, X désigne un ensemble quelconque, par exemple X = R2.

Définition A.1

Soit A un sous-ensemble de X. Le complémentaire de l’ensemble A est l’ensemble des points qui

n’appartiennent pas à A :cA = {x 2 X : x /2 A}.

Définition A.2

Soient A et B deux sous-ensembles de X. On définit

— l’union de A et de B comme l’ensemble des points qui appartiennent à l’un ou l’autre des

ensembles (ou les deux) :

A [B = {x 2 X : x 2 A ou x 2 B};

— l’intersection de A et de B comme l’ensemble des points qui appartiennent aux deux en-

sembles :

A \B = {x 2 X : x 2 A et x 2 B};

Rappelons qu’en mathématiques, le « ou » signifie toujours « et/ou « . De la même manière, onpeut faire des unions et des intersections d’une famille quelconque de sous-ensemble.

Définition A.3

Soit (A�)�2⇤ une famille quelconque de sous-ensemble de X. On définit

— l’union des A�, � 2 ⇤ comme l’ensemble des points qui appartiennent au moins un ensemble

de la famille : [

�2⇤

A� = {x 2 X : 9�0 2 ⇤, x 2 A�0};

— l’intersection des A�, � 2 ⇤ comme l’ensemble des points qui appartiennent à tous les en-

sembles de la famille : \

�2⇤

A� = {x 2 X : 8� 2 ⇤, x 2 A�};

77

Page 78: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

78 ANNEXE A. RAPPELS DE THÉORIE DES ENSEMBLES

Exercice fondamental 28 :

Écrire les deux ensembles suivants comme des unions, intersections et complémentairede boules euclidienne, puis donner une écriture développée du type {(x, y) 2 R2 : · · · } del’ensemble et de son complémentaire.

x

y

x

y

Corrigé de l’exercice H

Proposition A.1

Soit (A�)�2⇤ une famille quelconque de sous-ensemble de X. On a

c[

�2⇤

A� =c\

�2⇤

A� etc\

�2⇤

A� =c[

�2⇤

A�

Démonstration. Si x n’est pas dans l’union cS

�2⇤ A�, cela signifie qu’il n’est dans aucun desensembles A� : pour tout � 2 ⇤, x n’appartient pas à A�. Le complémentaire de l’union est doncl’intersection des complémentaires.

Si x n’est pas dans l’intersection cT

�2⇤ A�, cela signifie qu’il n’est pas dans tous les ensembles,donc qu’il y a au moins un ensemble auquel il n’appartient pas. Le complémentaire de l’intersectionest donc l’union des complémentaires.

Exercice fondamental 29 :

Prenons X l’ensemble des hommes, A l’ensemble des barbus, B l’ensemble des moustachus.À quoi correspond A [B, A \B, et leurs complémentaires ?

Corrigé de l’exercice H

Page 79: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Annexe B

Un bref aperçu des fonctionsholomorphes

B.1 La dérivabilité au sens complexeDans ce chapitre, nous considérerons des fonctions définies sur un ouvert U de C à valeurs

dans C. Nous identifierons C à R2 par l’application⇢

R2 �! C(x, y) 7�! x+ iy

Une fonction f de U dans C étant donnée, on note

ef(x, y) = f(x+ iy) = f<(x, y) + if=(x, y).

Dans le cas de C, il est d’usage de noter la boule euclidienne ouverte (resp. fermée) de centre z0

et de rayon r par D(z0, r) (resp. Df (z0, r)).La définition de la dérivation des fonctions d’une variable réelle se généralise sans problème aux

fonctions d’une variable complexe.

Définition B.1

On dit que fonction f de U dans C est dérivable au sens complexe en un point z0 de U si et

seulement si

limz!z0

f(z)� f(z0z � z0

existe. Cette limite est alors noté f0(z0).

Proposition B.1

La somme et le produit de deux fonctions f et g dérivables au sens complexe en un point z0 sontdérivable au sens complexe et l’on a

(f + g)0(z0) = f0(z0) + g

0(z0) et (fg)0(z0) = f0(z0)g(z0) + f(z0)g

0(z0) .

Démonstration. Preuve strictement identique au cas des fonctions d’une variable réelle ; elle estdonc laissée au lecteur.

79

Page 80: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

80 ANNEXE B. UN BREF APERÇU DES FONCTIONS HOLOMORPHES

Exemple B.1 Les polynômes en z, c’est-à-dire les fonctionsPd

k=0 akzk sont dérivables au sens

complexe en un point z0 de C. La fonction z�1 est dérivable au sens complexe en un point z0

de C \ {0}.

Exemple B.2 La fonction ⇢C �! Cz 7�! z

n’est dérivable au sens complexe en aucun point.

Définition B.2

Soit U un ouvert de C ; une fonction f de U dans C est dite C 1-holomorphe si elle est dérivable au

sens complexe en tout point de U et si la fonction de U dans C qui à z associe f0(z) est continue.

1

Proposition B.2

Soit (ak)k2N une suite de nombres complexes telle que la rayon de convergence de la série entièreassociée un réel positif r. Alors la fonction f défine sur D(z0, r) par

f(z)déf=

X

k2N

ak(z � z0)k

est dérivable au sens complexe en tout point de D(z0, r).

Proposition B.3

Les deux propriétés suivantes sont équivalentes :

i) La fonction f est C 1-hoplomorphe sur U

ii) La fonction ef est de classe C 1(au sens de la théorie des fonctions de deux variables réelles)

et l’on a@f<@x

(x0, y0) =@f=@y

(x0, y0) et@f<@y

(x0, y0) = �@f=@x

(x0, y0) . (B.1)

B.2 La formule de CauchyNous allons tout d’abord définir la notion d’intégrale le long d’une courbe C 1.

Définition B.3

Soit f une fonction continue sur un ouvert U de C et � une fonction de classe C 1de [0, 1] dans U .

On pose alors Z

�f(z)dz

déf=

Z 1

0f(�(t))�0(t)dt .

Théorème B.1 (Formule de Cauchy)Soit f une fonction C 1

-holomorphe sur un ouvert U . On considère un point z0 de U et R un réel

strictement positif tels que

Df (z0, R) ⇢ U .

Alors, pour tout z de D(z0, R), on a

f(z) =1

2i⇡

Z

C(z0,R)

f(⇣)

⇣ � zd⇣ .

où l’on note Z

C(z0,R)g(z)dz =

Z

�f(z)dz avec �(t) = z0 +Re

2i⇡t.

1. Dans un cours d’analyse complexe plus avancé, on démontre que cette hypothèse de continuité de la dérivéeest superflue : c’est une propriété démontrée.

Page 81: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

B.2. LA FORMULE DE CAUCHY 81

Démonstration. Elle repose sur le lemme suivant.

Lemme B.1

Soient z0 et z deux points de U et r et R deux réels strictement positifs tels que

z 2 D(z0, R) et r < R� |z � z0| .

Si g est une fonction holomorphe sur U \ {z}, alors

Z

C(z,r)g(⇣)d⇣ =

Z

C(z0,R)g(⇣)d⇣ .

Admettons momentanément ce lemme. La fonction

⇣ 7�! 1

⇣ � z

est holomorphe sur C \ {z} et la fonction ⇣ 7�! f(⇣) est holomorphe sur U . Ainsi donc la fonction

g(⇣)déf=

f(⇣)

⇣ � z

est holomorphe sur U \ {z}. Le lemme B.1 ci-dessus appliquée à la fonction g assure queZ

C(z,r)

f(⇣)

⇣ � zd⇣ =

Z

C(z0,R)

f(⇣)

⇣ � zd⇣ .

Par définition de l’intégrable sur une courbe assure queZ

C(z,r)

f(⇣)

⇣ � zd⇣ =

Z 2⇡

0

f(z + rei✓)

rei✓ire

i✓d✓

= i

Z 2⇡

0f(z + re

i✓)d✓ .

La fonction f étant continue en z on a

limr!1

Z 2⇡

0f(z + re

i✓)d✓ = 2⇡f(z) .

Le théorème est alors démontrée pourvu bien sûr que l’on démontre le lemme B.1.

Démonstration du lemme B.1. On procède en déformant le cercle C(z0, R) en le cercle C(z, r) dela manière suivante. Posons pour t dans [0, 1],

z(t)déf= tz + (1� t)z0 et r(t)

déf= tr + (1� t)R .

Remarquons que, pour tout z0 sur C(z(t), r(t)) on a

|z0 � z| � |z0 � z(t)|� |z(t)� z|� r(t)� (1� t)|z � z0| .

Comme |z � z0| < R� r on a par définition de r(t)

|z0 � z| � tr + (1� t)R� (1� t)(R� r) = r .

Page 82: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

82 ANNEXE B. UN BREF APERÇU DES FONCTIONS HOLOMORPHES

Donc pour tout t de [0, 1], le cercle C(z(t), r(t)) est inclus dans D(z0, R)\Df (z, r) qui est un ouvertoù la fonction g est dérivable au sens complexe. Considérons maintenant la fonction

G(t)déf=

Z

C(z(t),r(t))g(⇣)d⇣ .

En posant �(✓, t) = z(t) + r(t)ei✓, le lemme B.1 est la conséquence du lemme plus général suivant.

Lemme B.2

Considérons une fonction � de classe C 1sur ]0, 2⇡[⇥]0, 1[ continue sur [0, 2⇡] ⇥ [0, 1] à valeurs

dans C telle que

8t 2 [0, 1] , �(0, t) = �(2⇡, t).

Alors pour toute fonction g holomorphe sur un ouvert U contenant l’image de �, la fonction

G(t)déf=

Z 2⇡

0g(�(✓, t))

@�

@✓(✓, t)d✓ .

est constante.

Démonstration. Pour tout ✓ de l’intervalle [0, 2⇡, la fonction

t 7�! g(�(✓, t))@�

@✓(✓, t)

est dérivable et l’on a

@

@t

⇣g(�(✓, t))

@�

@✓(✓, t)

⌘= g

0(�(✓, t))@�

@t(✓, t)

@�

@✓(✓, t) + g(�(✓, t))

@2�

@t@✓(✓, t)

La théorème de dérivation des intégrales de fonctions continues s’applique et donc G est dérivableet sa dérivée est

Z 2⇡

0

✓g0(�(✓, t))

@�

@t(✓, t)

@�

@✓(✓, t) + g(�(✓, t))

@2�

@t@✓(✓, t)

◆d✓ .

Il suffit maintenant d’observer que

g0(�(✓, t))

@�

@t(✓, t)

@�

@✓(✓, t) + g(�(✓, t))

@2�

@t@✓(✓, t) =

@

@✓

⇣g(�(✓, t))

@�

@t(✓, t)

⌘.

Ainsi donc, la fonction G0 est identiquement nulle et donc la fonction G est constante.

B.3 Formule de Cauchy et analyticitéLa formule de Cauchy a d’innombrables applications et conséquences. Nous allons ici en donner

l’une des plus spectaculaires.

Théorème B.2

Soit f une fonction C 1-holomorphe sur un ouvert U de C. On considère un point z0 de U et un

réel strictement positif R tel que le disque fermé de centre z0 et de rayon R soit inclus dans U .

Alors la série de terme général (an)n2N définie par

andéf=

1

2⇡

Z 2⇡

0f�z0 +Re

i✓�(Re

i✓)�nd✓

Page 83: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

B.3. FORMULE DE CAUCHY ET ANALYTICITÉ 83

a un rayon de convergence supérieur ou égal à R et f est somme de la série entière associée,

c’est-à-dire que

8z 2 D(z0, R) , f(z) =1X

n=0

an(z � z0)n.

Démonstration. La formule de Cauchy (théorème B.1) assure que, pour tout R1 < R, et pourtout z tel que |z � z0| R1,

f(z) =1

2⇡

Z 2⇡

0

f�z0 +Re

i✓�

z0 +Rei✓ � zd✓

=1

2⇡

Z 2⇡

0

f�z0 +Re

i✓�

1� (z � z0)e�i✓

R

d✓

On utilise que

8⇣ 2 C / |⇣| k < 1 ,���

1

1� ⇣�

NX

n=0

⇣n���

kN+1

1� k·

Cela implique que

����f(z)�1

2⇡

NX

n=0

Z 2⇡

0f�z0 +Re

i✓� (z � z0)ne�in✓

Rnd✓

���� ⇣R1

R

⌘N+1 R1

R�R1max✓2[0,1]

��f�z0 +Re

i✓��� .

D’où le résultat.

Page 84: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

84 ANNEXE B. UN BREF APERÇU DES FONCTIONS HOLOMORPHES

Page 85: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

Annexe C

Corrigés des exercices

Corrigé de l’exercice fondamental 1 :

En revenant aux définitions, on trouve kuk1 = 8, kuk2 = 4 et kuk1 = 3.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 2 :

L’ensemble S2 n’est autre que {(x, y) 2 R2 : x2 + y2 = 1} : c’est donc un cercle centré en

l’origine (0, 0) et de rayon 1 (Figure C.1, gauche).Pour la norme k k1, on a

S1 = {(x, y) 2 R2 : k(x, y)k1 = 1} = {(x, y) 2 R2 : |x|+ |y| = 1}.

Distinguons selon le signe de x et y :— si x � 0 et y � 0, |x|+ |y| = x+ y et nous avons la portion de droite y = 1� x contenue

dans le quadrant supérieur droit ;— si x 0 et y � 0, |x|+ |y| = x� y et nous avons la portion de droite y = x� 1 contenue

dans le quadrant supérieur gauche.En procédant de même pour les deux autres quadrant, on obtient un carré de sommets (1, 0),(0, 1), (�1, 0) et (0,�1) (Figure C.1, milieu)

Enfin pour la norme k · k1, il nous faut comparer |x| et |y|. Dans le demi plan x � 0,

|y| |x| () |y| x () �x y x.

Ainsi, toujours si x � 0,

k(x, y)k1 =

(|x| si � x y x

|y| sinon

ce qui nous permet de dessiner la moitié de l’ensemble S1 contenue dans le demi plan x � 0,qui contient :

85

Page 86: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

86 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

x

y

x

y

x

y

Figure C.1 – De gauche à droite, les ensembles S2, S1 et S1.

— la portion droite x = 1 à l’intérieur de l’entonnoir �x y x ;— les deux portions de droite |y| = 1 en dehors de cet entonnoir (y = 1 ou y = �1 en

fonction du signe de y).En remarquant que k(�x, y)k1 = k(x, y)k1, on complète le dessin par une symétrie d’axex = 0 et on obtient un carré de sommets (1, 1), (�1, 1), (�1,�1), (1,�1) (Figure C.1, droite).

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 3 :

Démontrons que N vérifie les trois points de la définition 1.1, en commençons par la pro-priété de séparation (on voit immédiatement que N est à valeurs positives). Si N(x, y) = 0,comme les deux termes de la somme sont positifs, il faut qu’ils soient tous les deux nuls ; on adonc

N(x, y) = 0 ()(|x+ 2y| = 0

|3y| = 0()

(x+ 2y = 0

3y = 0()

(x = 0

y = 0

L’homogénéïté est comme souvent facile. Soit � un réel,

N(�x,�y) = |�x+ 2�y|+ |3�y| = |�|�|x+ 2y|+ |3y|

�= |�|N(x, y).

Enfin, l’inégalité triangulaire découle de celle sur la valeur absolue :

N(x+ x0, y + y

0) = |(x+ x0) + 2(y + y

0)|+ |3(y + y0)|

= |(x+ 2y) + (x0 + 2y0)|+ |3y + 3y0| |x+ 2y|+ |x0 + 2y0|+ |3y|+ |3y0| N(x, y) +N(x0

, y0).

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Page 87: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

87

Corrigé de l’exercice complémentaire 1 :

Soit (x, y) un élément de R2. En utilisant d’abord l’inégalité triangulaire puis le fait que|x| et |y| sont tous les deux inférieurs ou égaux à max(|x|, |y|), on obtient

|x+ 2y|+ 3|y| |x|+ 2|y|+ 3|y| 6max(|x|, |y|) = 6k(x, y)k1.

Pour l’autre sens, faisons apparaitre la majoration connue max(|x|, |y|) |x|+ |y| :

k(x, y)k1 |x|+ |y| |(x+ 2y)� 2y|+ |y| |x+ 2y|+ |2y|+ |y| N(x, y).

On a finalement obtenu

8(x, y) 2 R2, k(x, y)k1 N(x, y) 6k(x, y)k1

ce qui montre que ces deux normes sont équivalentes.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 5 :

1. Les trois ensembles sont représentés ci-bas.

B2(�00

�, 2)

B1(�00

�, 3)

B1(�

1�1

�, 3)

x

y

Page 88: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

88 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

En utilisant les définitions des normes, on a

Bf2 (�20

�, 2) = {(x, y) 2 R2 : (x� 2)2 + (y � 0)2 22}

c’est donc un disque de rayon 2 et de centre (2, 0), frontière comprise puisque l’inégalitéest large. Ensuite, B1(

�00

�, 3) = {(x, y) 2 R2 : |x| + |y| < 3} et un raisonnement tout

à fait similaire à celui de l’Exercice fondamental 2 permet de dessiner cet ensemble, enremplaçant le 1 par un 3.Enfin B1(

�1

�1

�, 3) =

�(x, y) 2 R2 : max(|x � 1|, |y + 1|) < 3

. Le plus simple est de

placer l’origine du repère en (1,�1) ; on note les nouvelles coordonnées (X,Y ) et ona X = x � 1, Y = y � 1. Une fois ceci fait, le dessin découle aisément de l’Exercicefondamental 2.

2. En revenant aux définitions, on voit que (attention à la racine carrée dans la définitionde la norme euclidienne)

A = B2

�(0, 0, 0),

p5�,

et queB = Bf

1

�(2,�3), 2

�.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 2 :

Nous allons montrer queT

n2N⇤ B1

�0Rn , 1 + 1

n

�= Bf

1 (0Rn , 1). Tout d’abord, comme 1 <

1 +1

n, on obtient que

Bf1 (0Rn , 1) ⇢

\

n2N⇤

B1

✓0Rn , 1 +

1

n

◆.

Réciproquement, si un point appartient à l’intersection, alors pour tout n 2 N⇤, kxk1 < 1+ 1n .

En passant à la limite quand n tend vers +1, on obtient kxk1 1.Montrons maintenant que Bf

1 (0Rn , 1) n’est pas un ouvert. Cela peut sembler évidentpuisque c’est une boule fermée mais jusqu’ici, nous ne l’avons pas démontré. Nous pouvons lefaire en formalisant l’intuition que les points de la frontière ne vérifient pas la définition d’unouvert. Ainsi, le point x = (1, 0, · · · , 0) appartient à cette boule fermé. Soit " > 0, le point(1 + "/2, 0, · · · , 0) appartient à B1(x, ") mais il n’appartient pas Bf

1 (0Rn , 1). Ceci étant vraipour tout ", la boule fermée n’est pas ouverte.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 6 :

Les ensembles R2 et ? sont ouverts et fermés (quelle que soit la norme choisie !). L’ensembleA := {0}⇥R? n’est pas ouvert pour la norme euclidienne : x := (0, 1) appartient à cet ensemble

Page 89: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

89

et pour tout r > 0, z := ( r2 , 1) appartient à B2(x, r) puisque kz � xk2 = k( r2 , 0)k = r2 < r.

Mais z /2 A, donc B2(x, r) * A. Le même raisonnement s’applique pour démontrer que R2 \An’est pas ouvert en considérant le point 0R2 : pour tout r > 0, la boule B2(0R2 , r) contient(0, r

2 ) qui est un élément de A : B2(0R2 , r) * R2 \A. Finalement A n’est ni fermé, ni ouvert.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 7 :

1. Le complémentaire de A est

cA = {(x, y) 2 R2 : (x� 1)2 + y

2< 2 et (x+ 1)2 + y

2< 1 }

= B2

�(1, 0),

p2�\ B2

�(�1, 0), 1

�.

C’est une intersection finie de deux boules ouvertes (pour la norme euclidienne), donc dedeux ouverts, par la Proposition 2.1. Par conséquent, R2 \A est ouvert et A est fermé.

2. Soit (xk, yk) une suite d’élément de B qui converge vers un point (x, y) de R2. Commetout les éléments de la suite appartiennent à B, on a

8k 2 N , sin(xk) + cos(yk) 1.

D’après la Proposition 1.9, xk ! x et yk ! y, donc en passant à la limite et par continuitédes fonctions sin et cos

sin(x) + cos(y) = limk!+1

sin(xk) + cos(yk) 1

et la limite (x, y) est en fait dans B, ce qui montre que B est fermé.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 3 :

Cet ensemble est l’ensemble des points qui se trouvent à la fois en dessous de la droite y = x

et au dessus de la droite y = 1 � 2x. Nous adoptons comme d’habitude la convention qu’unefrontière pointillée n’appartient pas au domaine. Ce dessin est fort utile pour répondre à laquestion, puisque les points de la frontière inclus dans le domaine empêche C d’être ouvert,tandis que ceux qui en sont exclus l’empêche d’être fermé.

Page 90: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

90 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

x

y

y = 1� 2x

y = x

L’ensemble n’est pas ouvert : le point (2, 2) appartient à C, mais pour tout " > 0, le point(2� ", 2) n’appartient pas à C, donc on ne peut trouver aucune petite boule centrée en (2, 2)entièrement incluse dans C. L’ensemble n’est pas fermé non plus : on peut construire unesuite d’élément de C qui converge vers un point qui n’est pas dans C, par exemple la suite�(1,�1 + 1/n)

�n2N⇤ .

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 4 :

On sait, par la Proposition 2.1, que BN (x, r) est un ouvert. Puisque l’intérieur de cetensemble est le plus grand ouvert le contenant, on a BN (x, r) = BN (x, r). On sait parla Proposition 2.4 que Bf

N (x, r) est fermé, et cet ensemble contient BN (x, r). On a doncBN (x, r) ⇢ Bf

N (x, r), puisque l’adhérence d’un ensemble est le plus petit ensemble ferméle contenant. Réciproquement, si z 2 Bf

N (x, r), cela veut dire que N(z � x) r et donc, pourtout k � 1 en définissant z

k := z � 1k (z � x), on a

N(zk � x) =

✓1� 1

k

◆N(z � x)

✓1� 1

k

◆r < r,

donc zk 2 BN (x, r). Et par ailleurs

N(zk � z) =1

kN(z � x) �!

k!+10

On a finalement exhibé une suite (zk)k2N 2 BN (x, r) convergeant vers z : ce point est doncadhérent à la boule et cela établit Bf

N (x, r) ⇢ BN (x, r) et donc égalité, par double inclusion.Retour à l’énoncé de l’exercice N

Page 91: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

91

Corrigé de l’exercice fondamental 8 :

La caractérisation séquentielle de la densité de Q dans R montre que pour tout réel x ilexiste une suite de rationnels (rk)k2N convergeant vers celui-ci. En particulier, si x = (x1, x2) 2R2, on dispose de deux suites (rki )k2N pour i = 1, 2, respectivement convergeantes vers x1 etx2. La Proposition 1.9 montre alors que la suite (rk1 , r

k2 )k2N (qui appartient à Q2) converge

vers (x1, x2), pour les trois normes k · k1, k · k2 et k · k1.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 9 :

1. N’importe quel ensemble « qui comprend sa frontière » et « qui s’échappe vers l’infini »convient. Le plus dur n’est donc pas de faire un dessin, mais de trouver un exempleexplicite. Par exemple

{(x, y) 2 R2 : y x}

convient. On montre qu’il est fermé grâce à la caractérisation séquentielle de la fermeture(Corollaire 2.1). Il est non borné puisqu’il contient des points de norme aussi grande quel’on veut, par exemple les points (2n, n) pour tout n entier positif.

2. Toute boule ouverte de rayon fini donne un exemple.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 10 :

Montrons que cet ensemble est à la fois fermé et borné. L’équivalence des normes nouspermettant de fixer la norme de notre choix pour le faire, on prend par exemple la normek · k1. En particulier (et cela serait vrai pour toute norme !), la convergence d’une suite(xk, yk)k2N équivaut à la convergence des coordonnées (xk)k2N et (yk)k2N. Soit (xk, yk) unesuite de points de D qui converge vers un point (x, y) de R2. Par passage à la limite dans lesinégalités larges, on a

x2 + y

4 = limk!+1

x2k + y

4k 4

puisque tous les (xk, yk) appartiennent à D. Par conséquent, la limite appartient à D et D estfermé. Reste à montrer que D est borné. Si (x, y) est dans D,

x2 x

2 + y2 x

2 + 3y2 4 et y4 x

2 + y2 x

2 + 3y2 4

donc x 2 [�2, 2] et y 2 [�p2,p2] ⇢ [�2, 2], c’est-à-dire (x, y) 2 Bf

1(0, 2). Finalement l’en-semble D est fermé et borné donc compact.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Page 92: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

92 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

Corrigé de l’exercice fondamental 11 :

Cette fonction est bien définie si et seulement si 3 � x2 � y

2> 0, autrement dit si (x, y)

appartient à B2(0R2 ,p3).

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 12 :

On peut prolonger la fonction racine par 0 sur l’axe négatif, ou bien par parité ou imparité.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 5 :

Le continuité de la fonction sur l’ensemble {(x, y) 2 R2, y 6= 0} est facile, puisque sur cet

ensemble f est le quotient de deux fonctions continues dont le dénominateur ne s’annule pas.Reste à démontrer la continuité sur la droite y = 0. Soit (x0, 0) un point de cette droite, où x0

est réel fixé. Si (x, y) est tel que y 6= 0, on a

|f(x, y)� f(x0, 0)| =����1� cos(xy)

y

���� ����(xy)2

2y

���� =����1

2x2y

����

et cette inégalité est aussi vrai si y = 0. Quand (x, y) tend vers (x0, 0), x2y tend vers x2

0⇥0 = 0 ;par conséquent,

lim(x,y)!(x0,0)

f(x, y) = f(x0, 0)

et f est continue sur R2 tout entier.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 13 :

On a déjà vu que la fonction f : R2 ! R, (x, y) 7! ln(3 � x2 � y

2) est bien définie surB2(0,

p3). Elle y est également continue car f = ln � p, où

p : R2 ! R, (x, y) 7! 3� x2 � y

2

qui est continue car polynomiale, et de la fonction usuelle ln : R+⇤ ! R qui est continue.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Page 93: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

93

Corrigé de l’exercice complémentaire 6 :

Les fonctions (x, y) 7! x4 et (x, y) 7! x

2 + 3y2 sont polynomiales donc continues. Deplus, la dernière fonction ne s’annule pas sur R2 \ {(0, 0)}. Par conséquent, f est continuesur R2 \ {(0, 0)} comme quotient de deux fonctions dont le dénominateur ne s’annule pas.Montrons maintenant que f est continue en (0, 0). Pour x 6= 0 on a comme x

2+3y2 � x2> 0 :

|f(x, y)� f(0, 0)| = x4

x2 + 3y2 x

4

x2 x �!(x,y)!(0,0) 0

Si x = 0, on a f(x, y) = f(0, 0) donc ces points ne posent pas de problème.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 7 :

Cet énoncé est volontairement flou. Il faut commencer par s’interroger sur le domaine dedéfinition de f . Comme on n’a que des puissances paires, le logarithme ne pose pas de problèmepuisque 1 + x

4 + 2y6 � 1 > 0. De même, le dénominateur ne s’annule que si (x, y) = (0, 0). Ilsuit en utilisant le fait que pour tout s � 0, ln(1 + s) s et x

4 + 2y6 positif :

0 ln(1 + x4 + 2y6)

x2 + 3y4 x

4 + 2y6

x2 + 3y4

x4

x2 + 3y6+ 2y6

x2 + 3y4

x4

x2+ 2y6

3y4

x2 +

2

3y2

et le résultat découle du théorème des gendarmes puisque x2 + 2

3y2 �!(x,y)!(0,0) 0.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 8 :

Ici encore s’interroger sur l’ensemble de définition est très utile. En effet, on voit quela fonction n’est pas définie sur la droite y = �x (qui contient (0, 0)) et de plus, on voit“facilement” que f n’est pas prolongeable par continuité aux points de cette droite dès lors quesin(x2) ne s’annule pas.

On a de plus g(x,�x+x3) =

sin(x2)

x3⇠x!0

1

x, donc g n’est pas prolongeable par continuité

en (0, 0). La grande question est : d’où sort ce �x+ x3 ? L’idée est de se rapprocher de (0, 0)

Page 94: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

94 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

en s’approchant de la droite y = �x sur laquelle on sait que la fonction “explose”. Cela incite àposer y = �x+"(x). On trouve g(x,�x+") = sin(x2)

"(x) . Il reste à choisir " de sorte que "(x) ! 0

quand x ! 0 et que cette quantité explose. En utilisant le fait que sin(s) ⇠s!0 s, on voit que"(x) = x

3 convient.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 9 :

La fonction F est continue sur le domaine R2 \�, où � = {(t, t) 2 R2 : t 2 R}, commele produit deux fonctions continues

(x1, x2) 7�! f(x1)� f(x2) et (x1, x2) 7�!1

x1 � x2·

Étudions maintenant la continuité de notre fonction en un point (t0, t0) 2 �. Si x = (x1, x2) /2�, en appliquant l’inégalité des accroissements finis entre les points x1 et x2 à la fonctiont 7! f(t)� f(x2)� (t� x2)f 0(t0) (nulle en x2), il vient

��f(x1)� f(x2)� (x1 � x2)f0(t0)

�� supt2[x1,x2]

|f 0(t)� f0(t0)| .

On a donc, l’estimation suivante, selon que le point x appartiennent à � ou non.

|F (x1, x2)� f0(t0)| sup

t2[x1,x2]|f 0(t)� f

0(t0)| si x 62 � et

|F (t, t)� f0(t0)| |f 0(t)� f

0(t0)| si x = (t, t) 2 � .

La fonction f0 étant continue en t0, on a

8" > 0 , 9↵" > 0 / |t� t0| < ↵" =) |f 0(t)� f0(t0)| < " .

Observons maintenant que

k(x1, x2)� (t0, t0)k1 < ↵" =) 8t 2 [x1, x2] , |t� t0| < ↵" .

d’où l’on tirekx� (t0, t0)k1 < ↵" =) |F (x)� f

0(t0)| < "

ce qui conclut la démonstration.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 14 :

On voit facilement que f(A) = [0, 2]. Par définition, (x, y) appartient à f�1(B) si et

seulement si �1 < |x|+ |y| < 1, et donc si et seulement si (x, y) appartient à B1(0R2 , 1) (boule

Page 95: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

95

ouverte centrée en l’origine, de rayon 1, pour la norme k k1). Un raisonnement similaire donnef�1�f(A)

�= Bf

1 (0R2 , 2).

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 15 :

1. La fonction f : (x, y) 7! x2 � y

2 est continue sur R2 et U = f�1(]0,+1[) avec ]0,+1[

ouvert dans R. On en déduit que U est ouvert dans R2.2. Cette question est légèrement plus difficile car il y a deux conditions dans sa définition.

On introduit la fonction

g : R2 ! R2✓x

y

◆7!

✓x2 + 3y2

y

et on vérifie qu’on a F = g�1([0,+1[⇥] � 1, 0]). En effet, vu la définition de l’image

réciproque,

(x, y) 2 g�1([0,+1[⇥]�1, 0]) () g(x, y) 2]�1, 4]⇥]�1, 0]

() x2 + 3y2 2]�1, 4] et y 2]�1, 0]

() (x, y) 2 F

Les deux composantes de la fonction g sont polynomiales donc continues, donc g estcontinue. De plus, l’ensemble ]�1, 4]⇥]�1, 0] est fermé, donc F est fermé.Pour démontrer ce résultat, on peut aussi écrire

F =�(x, y) 2 R2 : x2 + 3y2 � 0

\�(x, y) 2 R2 : y 0

et montrer que ces deux ensembles sont fermés en introduisant les bonnes fonctionsR2 ! R comme dans la première questions. On conclut avec la Proposition 2.6.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 16 :

1. Le seul point qui pose problème est la division par y, qui doit être non nul. L’ensemblede définition est

{(x, y) 2 R2 \ y 6= 0}.

2. Montrons que K est fermé et borné. Soit (xk, yk) une suite d’éléments de K qui convergevers un point (x, y) de R2. On a pour tout k

yk � 1 et 1 e(xk)

2

+ yk 4

Page 96: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

96 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

et en passant à la limite, ce qui est autorisé puisque les fonctions exponentielle et loga-rithme sont continues, on obtient

y � 1 et 1 ex2

+ y 4.

La limite (x, y) est donc dans K, ce qui montre que K est fermé. Reste à montrer queK est borné. Soit (x, y) 2 K. On a d’une part

1 y ex2

+ y 4

donc y 2 [1, 4]. On en déduit 0 ex2 4 � y 3 donc x

2 2 [0, ln(3)] donc x 2[� ln(3), ln(3)]. L’ensemble K est fermé et borné donc compact.

3. Pour commencer, notons que l’ensemble K est bien inclus dans l’ensemble de définition def . Le résultat suit par le Théorème 3.2 puisque la fonction f est continue sur R2\{(x, y) :y 6= 0} et donc sur K.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 10 :

Soit I un intervalle de R et (a, b) un couple de points de I. Posons �(t) = a+ t(b� a). Pardéfinition d’un intervalle �([0, 1]) est inclus dans I. Donc I est connexe par arcs.

Considérons maintenant une partie A de R qui n’est pas un intervalle. Ceci signife qu’ilexiste un triplet (x0, x1,↵) de A

2 ⇥ Ac tel que x0 < c < x1. Soit � une fonction continue

de [0, 1] dans R telle que �(j) = xj . Le théorème des valeurs intermédiares implique l’existencede point t0 de l’intervalle [0, 1] tel que �(t0) = ↵. Donc �([0, 1]) n’est pas inclus dans A etdonc A n’est pas connexe par arcs.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 17 :

Il suffit de se rendre compte qu’on a que des fonctions usuelles qu’on sait dériver.

@f

@x(x, y, z) = �2 cos y,

@f

@y(x, y, z) = 2x sin y,

@f

@z(x, y, z) = 0.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 11 :

Page 97: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

97

Pour la direction y on a

limh!0

g(0, 1 + h)� g(0, 1)

h= lim

h!0

(1 + h)� 1

h= 1

et par conséquent,@g

@y(0, 1) = 1. Pour la direction x

g(h, 1)� g(0, 1)

h=

sin(h)h � 1

h=

h+o(h2)h � 1

h=

1 + o(h)� 1

h= o(1) !h!0 0

donc cette limite existe et@g

@x(0, 1) = 0.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 18 :

1. Cette matrice a deux lignes et trois colonnes. On a

Jf (a, b, c) =✓

ceca 0 ae

ca

c cos(a� b) �c cos(a� b) sin(a� b)

◆et Jf (0, 0, 0) =

✓0 0 00 0 0

2. Le coefficient@g2

@x(1, 1) se trouve sur la deuxième ligne et la première colonne de Jg(1, 1).

On a pour y 6= 0,

Jg(x, y) =

0

@2x 2y1

y� x

y2

1

A et donc Jg(1, 1) =✓2 21 �1

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 19 :

Les dérivées partielles de cette fonction ont été calculées dans l’Exercice fondamental 17 eton voit sans difficulté qu’elles sont continues.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 12 :

Page 98: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

98 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

Le problème vient de la racine carrée : la fonction d’une variable t 7!pt n’est pas dérivable

en 0. Il faut donc se méfier quand x2+y

2 = 0, ce qui se produit si et seulement si (x, y) = (0, 0).Commençons par ce qui ne pose pas de difficulté : sur R2 \ {(0, 0)}, on a

@f

@x(x, y) =

px2 + y2 +

x2

px2 + y2

et@f

@y(x, y) =

xypx2 + y2

, (C.1)

et ces deux fonctions sont continues sur R2 \ {(0, 0)} comme quotient de deux fonctions conti-nues dont le dénominateur ne s’annule pas.

En (0, 0) il nous faut calculer les dérivées partielles grâce à la définition. D’une part, lafonction t 7! f(t, 0) est t 7! t

pt2 = t|t| ; cette fonction est dérivable en 0, de dérivée 0 (on

le vérifie en calculant les dérivées en 0+ et en 0�). D’autre part, la fonction t 7! f(0, t) estconstante égale à 0, donc dérivable de dérivée 0. Cela montre que

@f

@x(0, 0) =

@f

@y(0, 0) = 0.

Montrons maintenant que les dérivées partielles sont continues en (0, 0). Dans la directionx, on

@f

@x(x, y) =

px2 + y2 +

x2

px2 + y2

=p

x2 + y2 +x2

px2

p

x2 + y2 + |x| !(x,y)!(0,0) 0

Pour la direction y, on a en utilisant l’inégalité 2|xy| x2 + y

2,����@f

@y(x, y)� @f

@y(0, 0)

���� =|xy|px2 + x2

x2 + y

2

2px2 + x2

1

2

px2 + x2 !(x,y)!(0,0) 0.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 20 :

Pour (x, y) 6= (0, 0) la fonction est dérivable par rapport à chacune des variables en tantque prosuit de composées de fonctions à valeurs réelles d’une variable réel et l’on a

@f

@x(x, y) =

y(y2 � x2)

(x2 + y2)2et

@f

@y(x, y) =

x(x2 � y2)

(x2 + y2)2·

Quant l’existence de dérivées partielles au point (0, 0), il suffit d’observer que

f(x, 0) = f(0, y) = f(0, 0) et donc que@f

@x(0, 0) =

@f

@y(0, 0) = (0, 0) .

La fonction f admet donc des dérivées partielles en tout point. Malgré tout, la fonction f n’estpas continue en (0, 0). En effet, utilisons les coordonnées polaires en posant

(x, y) = r(cos ✓, sin ✓) .

Page 99: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

99

Il apparait alors quef�r(cos ✓, sin ✓)

�= cos ✓ sin ✓ =

1

2sin(2✓).

Ainsi donc il suffit de prendre une suite

xk déf= 2�k(cos ✓0, sin ✓0) avec ✓0 62 ⇡

2Z

qui tend vers (0, 0) pour laquelle f(xk) =1

2sin(2✓0). La fonction f n’est pas pas continue

en (0, 0).

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 21 :

Le plus délicat est de décomposer g en une composée de deux fonctions ; après "il suffit"d’appliquer la formule. Introduisons la fonction h : R2 ! R2 définie par

h(x, y) = (x+ y, x2 + y

2)

de sorte que g = ' � h. On a h(2, 3) = (5, 13) et

Jh(x, y) =✓

1 12x 2y

◆donc Jh(2, 3) =

✓1 14 6

de sorte que

Jg(2, 3) = J'(h(2, 3))Jh(2, 3)

=

✓@'

@x(5, 13)

@'

@y(5, 13)

◆✓1 14 6

=

✓@'

@x(5, 13) + 4

@'

@y(5, 13)

@'

@x(5, 13) + 6

@'

@y(5, 13)

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 22 :

La fonction � est classe C 1 sur R2 car c’est une application linéaire. La fonction f estdonc de classe C 1 comme composée de deux fonctions de classe C 1. De plus on a

8><

>:

@F

@x(x, y) = a

@g

@u(ax+ by, cx+ dy) + c

@g

@v(ax+ by, cx+ dy),

@F

@y(x, y) = b

@g

@u(ax+ by, cx+ dy) + d

@g

@v(ax+ by, cx+ dy).

Page 100: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

100 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 13 :

On a F (x1, x2) =1

x21+x2

2et F s’écrit donc comme l’inverse d’une fonction polynômiale qui

ne s’annule pas sur Rn \ {0} : F admet donc des dérivées partielles sur ce domaine et on a,plus précisément,

@F

@x1= �2

x1

(x21 + x2

2)2,

@F

@x2= �2

x2

(x21 + x2

2)2,

soit rF (a) = �2a/kak22.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 23 :

Notons déjà que g est de classe C 1 car g est polynomiale. On a

Jg(x, y) =�2x(1 + y)3 3x2(1 + y)2 + 2y

�.

Pour trouver les points critiques, nous devons résoudre le système linéaire(2x(1 + y)3 = 0

3x2(1 + y)2 + 2y = 0

La première ligne implique que soit x = 0, soit y = �1. Si y = �1, le deuxième ligne devient�2 = 0 qui n’a pas de solution. Si x = 0, la deuxième ligne donne 2y = 0 et donc y = 0 ; onvérifie que (0, 0) est bien une solution du système.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 24 :

Nous avons déjà vu que (0, 0) est un point critique de g donc il est possible que g ait unminimum local en ce point. On a g(0, 0) = 0. De plus si y 2 [�0.5, 0.5], 1 + y est positif doncg est une somme de termes positifs et

8y 2 [�0.5, 0.5] 8x 2 R, g(x, y) � 0 = g(0, 0)

Page 101: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

101

ce qui montre que g atteint un minimum local en ce point. On devine ici que quand y devienttrès négatif, le terme cubique va l’emporter sur tout le reste et donner des valeurs négatives.Par exemple g(1,�11) = (�10)3 + 102 = �900 < g(0, 0) donc le minimum local n’est pasglobal.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 25 :

Cherchons d’abord les points critiques de f . Pour ce faire, on résoud l’équation Df(x, y) =(0, 0), i.e.,

@f

@x(x, y) = 2x = 0,

@f

@y(x, y) = �2y = 0,

et on trouve que (x, y) = (0, 0). La fonction f admet donc un unique point critique qui est(0, 0). Par ailleurs, on constate que f n’admet ni un minimum local ni un maximum local surR2 en (0, 0). Pour cela, on va construire une suite de points (xn, yn) qui tend vers (0, 0) telleque f(xn, yn) > f(0, 0) et une autre suite de points (x0

n, y0n) qui tend aussi vers (0, 0) tel que

f(x0n, y

0n) < f(0, 0) :

8n 2 N⇤, f(1/n, 0) = 1/n2

> f(0, 0) =) donc (0, 0) n’est pas un point de maximum local,

et

8n 2 N⇤, f(0, 1/n) = �1/n2

< f(0, 0) =) donc (0, 0) n’est pas un point de minimum local.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 26 :

1. La fonction est définie si 1 + y � 0 (pour pouvoir appliquer la racine carrée) et sip1 + y 6= 0 (pour pouvoir diviser par cette quantité). Par conséquent,

Df = {(x, y) 2 R2, y > �1} = R⇥]� 1,+1[.

2. L’ensemble Df est ouvert, et de plus comme y > �1, on va être amener à dériver lafonction racine sur ]0,+1[ où elle est effectivement dérivable. Ainsi, f est C 1 car c’est

la somme de la fonction polynomiale (x, y) 7! x2 et de la fonction (x, y) 7! 1p

1 + y, et

cette dernière est de classe C 1 sur Df car le dénominateur ne s’annule pas et que lafonction sous la racine carrée est non nulle. Un calcul donne

8x 2 R, 8y > �1,@f

@x(x, y) = 2x,

@f

@y(x, y) =

�1

2(1 + y)32

.

Page 102: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

102 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

3. Trouver les points critiques, c’est trouver les solutions (dans Df ) du système8<

:

2x = 01

2p1 + y

= 0.

Ce système n’a aucune solution car la deuxième équation n’a aucune solution. Donc f

n’a aucun point critique.4. Cette question revient à montrer que f admet un maximum global sur A. Pour ce faire,

montrons que A est compact. Soit (xk, y

k)k2N une suite d’élements de A qui convergevers un point(x, y) 2 R2. On a donc pour tout k, 0 x

k 1 et 0 yk (xk)2 donc en

passant à la limite (ces inégalités ne faisant intervenir que des fonctions continues) onobtient 0 x 1 et 0 y x

2 donc (x, y) 2 A et A est fermé. De plus A est borné.On a immédiatement que si (x, y) appartient à A, x 2 [0, 1]. Il suit 0 y x

2 1.Finalement A ⇢ [0, 1] ⇥ [0, 1] donc A est borné. On est en dimension 2, A est fermé etborné, donc A est compact.Comme A ⇢ Df , et comme f est continue sur A, on en déduit que f admet un maximumglobal sur A, c’est-à-dire qu’il existe (x0, y0) 2 A tel que

8(x, y) 2 A, f(x, y) f(x0, y0).

5. Le point se situe sur la frontière de A. En effet, s’il existe r > 0 tel que B =B1

�(x0, y0), z

�⇢ A, la fonction f aurait un minimum local sur l’ouvert B, et (x0, y0)

serait donc un point critique de f , ce qui n’est pas possible d’après la question 3.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice complémentaire 14 :

1. On peut prolonger ' par continuité en posant '(0, 0) = 0. En effet, en utilisant l’inégalitéde Young qui stipule que pour tout (a, b) 2 R2, |ab| 1

2 (a2 + b

2) on obtient����st(t2 � s

2)

t2 + s2� 0

���� =����

|st|t2 + s2

���� |t+ s||t� s| 1

2|t+ s||t� s| !(s,t)!(0,0) 0

2. Il est évident que ' est de classe C 1 sur R2 \ {(0, 0)} puisque sur cet ensemble, c’estun quotient de polynôme dont le dénominateur ne s’annule pas. Un calcul passionnantdonne alors, pour (s, t) 6= (0, 0),

@'

@t(t, s) =

3st2 � s3

s2 + t2� 2t(st3 � s

3t)

(s2 + t2)2

et@'

@s(t, s) =

t3 � 3s2t

s2 + t2� 2s(st3 � s

3t)

(s2 + t2)2

En revenant à la définition, on trouve@'

@t(0, 0) = lim

"!0

'(", 0)� '(0, 0)

"= lim

e!00 = 0

Page 103: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

103

et de même@'

@s(0, 0) = 0. Il reste à voir que ces dérivées partielles sont continues en

(0, 0). En utilisant le fait que

8(t, s) 2 R2, |t| k(t, s)k1, |s| k(t, s)k1 et k(t, s)k21 t

2 + s2

il vient ����@'

@t(t, s)� @'

@t(0, 0)

���� 3|s||t|2 + |s|3

s2 + t2+

2|s||t|4 + 2|s|3|t|2

(s2 + t2)2

3|s||t|2 + |s|3

k(t, s)k21+

2|s||t|4 + 2|s|3|t|2

k(t, s)k41

4k(t, s)k31k(t, s)k21

+4k(t, s)k51k(t, s)k41

8k(t, s)k1 �!(s,t)!(0,0) 0

On montre de la même manière la continuité de@'

@sen (0, 0).

3. Ici encore, les dérivées partielles en (0, 0) étant définies à part, il nous vaut revenir à ladéfinition. On a

@2'

@t@s(0, 0) = lim

"!0

@'

@s(", 0)� @'

@s(0, 0)

"

= lim"!0

"3

"2� 0

"= lim

"!01 = 1

et

@2'

@s@t(0, 0) = lim

"!0

@'

@t(0, ")� @'

@t(0, 0)

"

= lim"!0

�"3

"2� 0

"= lim

"!0�1 = �1

La fonction ' ne vérifie pas le théorème de Schwarz en (0, 0) puisque@2'

@t@s(0, 0) 6=

@2'

@s@t(0, 0). Donc cette fonction n’est pas de classe C 2 sur R2 tout entier.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 27 :

Cherchons d’abord les points critiques de g.8><

>:

@g

@x(x, y) = 0

@g

@y(x, y) = 0

()(�2xy = 0

�x2 + y + 1 = 0

()(x = 0 ou y = 0

�x2 + y + 1 = 0

Page 104: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

104 ANNEXE C. CORRIGÉS DES EXERCICES

Si x = 0, la deuxième équation donne y = �1 et si y = 0, elle donne x = ±1. La fonction g atrois points critiques, (1, 0), (�1, 0) et (0,�1). La matrice hessienne de g est

Hg(x, y) =

✓�2y �2x�2x 1

Donc Hg(1, 0) =

✓0 �2�2 1

◆. Le polynôme caractéristique de cette matrice est �X(1�X)�4 =

X2�X�4 admet les racines 1±

p17

2 . L’une est strictement positive, l’autre strictement négative,donc g n’a pas de maximum en (1, 0). En (�1, 0), on trouve les mêmes valeurs propres et c’est

aussi un point selle. En (0,�1), Hg(0,�1) =

✓2 00 1

◆, on voit tout de suite les deux valeurs

propres 2 et 1, toutes deux strictement positives, donc g a un minimum local en (0,�1).

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 28 :

Pour la figure de droite, le grand disque est Bf2

�(0, 0), 4

�. Les points ne doivent pas appar-

tenir au disque central blanc fermé B2

�(0, 0), 2

�. Finalement c’est l’ensemble

A = Bf2 ((0, 0), 4) \ Bf

2 ((0, 0), 2) = {(x, y) 2 R2 : 4 < x2 + y

2 16}.

Son complémentaire est

R2 \A = {(x, y) 2 R2 : x2 + y2 4 ou x

2 + y2> 16} = R2 \ Bf

2

�(0, 0), 4

�[ Bf

2

�(0, 0), 2

�.

L’ensemble de droite, qu’on note B, est l’union de deux disques fermés :

B = Bf2

�(�1, 0), 2

�[ Bf

2

�(1, 0), 2

= {(x, y) 2 R2 :p(x+ 1)2 + y2 2 ou

p(x� 1)2 + y2 2}

Son complémentaire est

R2 \B = {(x, y) 2 R2 :p

(x+ 1)2 + y2 > 2 etp

(x� 1)2 + y2 > 2}.

Retour à l’énoncé de l’exercice N

Corrigé de l’exercice fondamental 29 :

A [ B est l’ensemble des hommes ayant une barbe ou une moustache ou les deux, sontcomplémentaire est l’ensemble des gens totalement rasés (au niveau du visage s’entend). A\B

est l’ensemble des gens ayant à la fois une barbe et une moustache, son complémentaire est

Page 105: Topologie et Calcul Di fférentiel 2MA216

105

l’ensemble des gens n’ayant qu’une barbe ou qu’une moustache ou bien qui sont totalementrasés.

Retour à l’énoncé de l’exercice N