Toi. Moi. Et les étoiles. Tome 1 - ekladata.comekladata.com/izbNCFkQ3tvsZ7o9Y7TdwnYxzCk.pdf · ......
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Toi.Moi.Etlesétoiles.
Tome1
NellyWeaver
©NellyWeaver,2017.Tousdroitsréservés.
Celivreestunefiction.Touteréférenceàdesévénementshistoriques,despersonnagesoudeslieuxréelsseraitutiliséedefaçonfictive.Lesautresnoms,personnages,lieuxetévénementssontissusde
l’imaginationdel’auteur,ettouteressemblanceavecdespersonnagesvivantsouayantexistéseraittotalementfortuite.
ISBN:9782955987506
Ilyadesêtresdontc’estledestindesecroiser.Oùqu’ilssoient.Oùqu’ilsaillent.Unjourilsserencontrent.
ClaudieGallay
Résumé
À17ans,Livieatoutquitté.Savie,safamille,sesamispourseconstruireunenouvellevie.Ellen'a
donnéaucuneexplicationàsongesteetn'alaisséaucuneadresse.3ansplustard,quandellecroiseunfantômedesonpassé, sesangoisses ressurgissent.Alorsqu'elle tentedésespérémentdenepas rouvrird'anciennesblessures,Ethanvas'yengouffreretdemanderadesexplications.Pourquoilaseulefillequ'ilait aimée l'a-t-elle abandonné de la sorte? Qu’a-t-elle tenté de fuir, et pourquoi ? Tant de questionsrestéessansréponses,qu’ilcomptebienperceràjour.
Prologue
Ethan
14ansplustôt
J’aifaim,tellementfaimetmamanditquejenesuisqu’unventresurpatte.Quejedevraisêtrecontentqu’ellemegarde,parcequejenesersàrien.J’aienviequ’ellecomprennequejepeuxserviràquelquechosepourqu’ellem’aime.Moijel’aime.Alorsjevaischercheràmanger.J’aivucettemaisonhieravecpleindefruitsdanslejardin.Despommes,despoires,c’estbonlespoires.J’aimeleursgoûtsetlejusquicoulequandoncroquededans.Jeregardeau-dessusdumuretpourêtresûrequ’iln’yapersonneetgrimpepar-dessus.C’estunejoliemaison.Pascommelanôtre.Lanôtreesttouteabiméeetpoisseuse.Cettemaisondoitsentirbon,elle.Jevoislespoiresetjem’approchesousl’arbre.Desdizainesdefruitssonttombésausol.J’enattrapeunetcroquededans.C’estbon,tellementbon.Monventregrognedepuis2jours,maisjen’airéussiàmangerquelefonddupaquetdecéréalesqu’ilrestaitdansleplacard.Jetiresurmontee-shirtpourymettredesfruits.J’auraisdûprendrequelquechosepourenramasserplus,maisjen’yaipassongé.Mamanditquejesuisbête.Elleapeut-êtreraison,sinon,j’yauraispensé.
—Hey,jepeuxsavoircequetufais?Jesursauteetlaissetomberlespoires.Unegrandefemmemeregardelesbrascroisés.Elleal’airen
colère,ellevamegronderetpeut-êtremêmemefrapper.J’aipeur.Jereculed’unpasprêtàm’enfuir,quandjel’aperçois.Unepetitefilleestcachéederrièrelajambedesamaman.Unemainposéesursonépaule,jecroisquesamamanveutlaprotéger.Demoi.Parcequejenesuisqu’unméchantgarçon.Lapetitefilleestaussiblondequecettedame,maiscequiattireleplusmonregard,cesontsesyeux.Desyeuxd’unbleupresque translucide.Elle s’écartedecettedernièreenme regardant, et croquedansungâteau.Monventregrognerienqu’àlavoirfaire.Çaal’airbon,tellementbon.Elleregardesamamanetluisourituneseconde,avantdefaireunpasversmoi.Ellen’estpasencolèrecommesamaman,etelleestpluspetitequemoi,alorsjen’aipaspeur.Jesaismedéfendre.Elles’arrêtedevantmoietmetendundesgâteauxqu’elletientdanssamain.
—Tuveuxbienpartageravecmoi?Jeregarde legâteauqu’ellemetend,medemandantoùest lepiège.Forcément.Quandlesgensme
voient,ilsmecrientdessus,mefrappent,ilsnesontpasgentils.Jamais.Jenesaispasquoidire,alorsj’attends.Mêmesijemeursd’envied’attrapercegâteauetden’enfairequ’unebouchée.
—Situn’enveuxpas,onpeutledonnerauxoiseaux.Elleestfolle?Jel’attrapeetlemange.C’estungâteauauchocolat,c’esttellementbon.Cegoûtsucré
est un délice. J’en veux encore,mais je n’ose pas le lui demander. Elle sourit en avalant la dernièrebouchéedesongâteauetsamamanserapproche.Jemereculed’unpas,maiscelle-cis’accroupitàcôtédelapetitefilleenlevantunemain.
—N’aiepaspeur.Moic’estSamantha,etvoiciLivie.Commenttut’appelles?Jemetsmesmainsdansmespoches,nerveux.Elleestgentille,ellenecriepas.—Ethan.Ellesouritetjelatrouvevraimentjoliecettedame.—BonjourEthan,dis-moi, j’allaisdonnerunverrede laitàLivieet ilyad’autresgâteaux.Ça te
diraitdevenirprendrelegoûteravecnous?Oui.J’aienviedecrieroui,maisjeregardeautourdemoienmedemandantcequinevapas.Cen’est
pasnormal,toutçaesttropbizarre.ElleselèveetprendlapetiteLivieparlamainenseretournant.—C’estcommetuveux.Tupeuxrentrer,ont’attenddanslacuisine.Livie avance derrière samaman enme regardant, et fait un signe de lamain pourm’inciter à les
suivre. Je les regarde entrer dans lamaison, incapable de comprendre ce qu’il vient de se passer. Jepourrais partir. Attraper quelques poires et partir. Je me baisse et ramasse quelques fruits, mais aumomentdem’enaller,jeregardelaporte-fenêtrerestéeouverte.Jerepenseàcettemamanquiavaitl’airsigentille,etjemedisquemoiaussij’aimeraisunemamancommeça.Alors,jepourraisyaller.Justepourvoircequec’est.Juste…unp’titpeu.Toutdoucement, jem’avancevers la terrasseetmonte lesescaliers.Je lesobserveà ladérobée.Lapetitefilleestassiseetmeregarde,pendantquelafemmeaposéuneassiettedegâteauxetdeuxverresdelaitsurlatable.J’ailecœurquibattrèsfortetjerestelà,àlesépier,sanssavoircequejesuiscenséfaire.Liviesautedesachaiseets’approchedemoi.Quandsamainattrapelamienne,jesaisquejevaisentreretj’aitrèspeur.Alorsjeserresamainplusfort.Parcequemêmesij’aitrèspeur,jen’aipasenviedepartir.
Chapitre1
Ethan
À 23 ans, j’ai connu la douleur plus que je n’aurais voulu la connaitre. Qu’elle soit physique oumorale.Etpourtant,unjour,jemesuispermisàcroiredenouveauenlavie.Parcequ’unjour,j’aicroiséla routed’unepetite fillede6ans,quim’aprofondémentmarquée.Enun regard, j’ai suqu’elleallaitbouleversertoutemonexistence.J’avaisbeaun’avoirque9ans,quandmesyeuxsesontposéssurcettefillette,toutceenquoijecroyaisn’aétéquelaprémissed’unnouveaudépart.Toutcequejeconnaissaisalors, n’était que les coups et la sensation de faim qui m’étreignait jour après jour. Ma mère neconnaissait d’autres marques d’amour à m’offrir, et les placards étaient souvent trop vides pour mepermettredemangeràmafaim.Jevolaispourassouvircebesoin,etramenaitsouventmonbutinespérantgagnerunminimumde considération à cette femme,qui, je le savais, souffrait en silence.Et puis j’aicroisélechemindeSamantha.Cettefemmem’avaitd’abordfaitpeur.Ellem’avaitsurprisàvolerdanssonjardinlesquelquesfruitstombéssousunarbre.Jem’apprêtaisàm’enfuirquandj’aicroiséleregarddecettefillette.Quelquechoses’estalors insinuéeenmoi.Sesyeuxd’unbleupresque translucideontpénétré àmêmemon âme, sansmêmeque je nem’en rende compte.Ellem’a souri et j’ai su. J’ai suqu’ellem’avaitprisaupiège.Alors,jesuisrevenu.Encoreetencore,incapablederefuserlagentillessede cette famille parfaite, digned’unebelle publicité pour dentifrice. J’ai aimé cette famille comme sic’était la mienne, m’apportant plus d’attention que ma propre mère. Bien sûr au début, l’excuse depouvoirmangerétaitpratique.Maisjesavaisaufonddemoiquecen’étaitqu’uneexcusepourlavoir.Livie. La belle Livie. Les années passaient, l’attirance que je ressentais pour elle grandissait. Elledevenait cette jeune femmemagnifiqueque jem’interdisaisd’approcherde tropprès.Saufqu’un soir,allongée dans cette clairière, je n’ai pas pu. Elle fixait les étoiles au-dessus de nous avec cet airangéliquequej’aimaistantchezelle.Etpourlapremièrefois,jemesuisautoriséàposermeslèvressurles siennes. Je savais que c’était unemauvaise idée. Je le savais et pourtant…S’il n’y avait eu quel’attiranceencore,leschosesauraientétébienplussimples.Maisilafalluquej’entombeamoureux,etaujourd’hui,jem’enmordslesdoigts.J’aidelapeinepourGreg.Greg,c’estsonfrère.Duhautdeses25ans,ilyacru.Ilaespéréquecevoyageluidonneraitsatisfaction.Moi,jesavaisàquoim’attendre,maisjemesuisbiengardédeluienleverlepeud’espoirqu’ilgardait.
Dansunetentativedepenseràautrechose,jemesuisdécidéàmelaisserallerauxbienfaitsdeNew
York laissant mon ami déprimé seul dans sa chambre d’hôtel. D’un geste rapide, j’avale la dernièregorgéedemonverreavantdeleclaquersurlebar.Enbalayantlasalledesyeux,jeremarqueunebellechevelureroussetouteàfaitmongoût.Çaauraaumoinseuleméritedenepasavoirétéunvoyagepourrien.Jem’approchedelafemmequimesouritquandjem’assoisfaceàelle.Canon.Unpeuplusâgéesquemoi je dirais, mais jem’en tape. Ses cheveux d’une teinte aussi vive que le feu, lui tombent encascade sur les épaules, s’arrêtant sous sa poitrine. Intéressante d’ailleurs.Ses lèvres charnuesnemelaissentpasdemarbre,alorsquej’imaginedéjàcommentjepourraisentireruncertainavantage.Maisquandmesyeuxrencontrentlessiens,lasensationd’unpoignardqu’onmeretournedanslecœurmefaitréaliser que çane la remplacera jamais.Sesyeux, d’unbleuprofondme font penser à ceuxdeLivie.Mêmes’ilsnesontpasaussibeauxquelessiens,jenepeuxempêchermonespritdelescomparer.Jeme
demandecequ’unefemmeaussibellefaittouteseuleàcetteheuretardiveàsemorfondre,maisjecomptebien luiapporterunpeudecompagnie.Ellesouffleenmeregardant,et je lèvemonbrasenvoyantunserveurapprocher.
—Unwhiskyet…jequestionneduregardjolierouquine.—UneMargarita,répond-elleaprèsunmomentd’hésitation.Ellenedoitpasêtreàsonpremierverrevusesyeuxvitreux,maisjenevaispasfairelafinebouche.
Cesoir,jesuisbiendécidéàoublierLivieunebonnefoispourtoutes.Finilessoiréesàmemorfondrepourunefillequi,visiblement,n’envalaitpaslapeine.Leserveurs’éloigneetjem’adosseàmonsiège.
—Alors,tum’attendais?luidis-je,enluioffrantmonplusbeausourire.Ellepouffederireensoutenantmonregard,etjedevinequ’elleestloind’êtredugenretimide.—Çamarchesouventcegenredediscoursd’habitude?Mes lèvres s’étirent, amusé de voir l’aplomb dont elle est sans aucun doute dotée. Je devine le
tempéramentdefeuqu’ellecachederrièresonairpenaud.—Mauvaisejournée?Ses épaules s’affaissent comme vaincue, aumoment où le serveur pose nos consommations sur la
table.Jeleremercieetavaleunegorgéedemonbreuvage,toujoursenattentedesaréponse.—Jen’aipaspourhabituded’étalermavieàdeparfaitsinconnus.—Siçapeutterassurer,j’aiconnumieuxaussi.Ellecroiselesbrassurlatable,dévoilantsondécolletéquimeditqueçavautvraimentlecoupde
l’amadouer.Ellepenchelatêtesurlecôtéenplissantlesyeux.—OK,quefais-tudanslavie?Etc’estpartipourlesbanalités.Maisçanemedérangepas,jeconnaismesatouts.—Photographe.Unairsurprissedessinesursonvisage.Lecoupduphotographeçamarchetoujours,etjen’aimême
pasbesoindebluffer.Ellen’estpasbellelavie?Elleattrapesonverrepourfaireglisserleliquideentreses lèvres tentatrices.De sa langue, elle lèche le liquide laissé sur le bordde sabouche,medonnantl’envied’accélérerlemouvement.Maisj’aicommel’impressionqu’avecelle,jevaisdevoirredoublerd’efforts.
—Photographe.Dansqueldomaine?demande-t-elle.—J’exposedesportraitsengrandepartie.Je vois à son regard amusé que je l’ai séduite. Jemepenche au-dessus de la table et effleure ses
lèvresdemonpouceavantdeleporteràmabouche,afinderecueillirlestracesdeselqu’elleyavaitlaissé.Sonsourires’agrandit,etj’attrapesamainposéesurlatableenlacaressantdoucement.
—Ettoi,àquoiconsacres-tutesjournées?Ellemefaitsignedem’approcherdesonindexetmemurmureàl’oreilled’unevoixaguicheuse:—Infirmière.Jelesavais.Cettefilleestunfantasmemasculinàelletouteseule.
*—Etvoicimonantre!Jerefermelaportederrièremoietobservelapiècedanslaquellejolierouquinevientdepénétrer.Je
neluiaimêmepasdemandésonprénom,maisvucommentvontfinirleschoses,ons’encontre-fou.Jel’auraissurementoubliéàlaminuteoùj’auraisremislespiedsàCover-roaddetoutefaçon,c'est-à-diredansmoinsde24heures.Elles’adosseaubarengranitàquelquesmètresdemoi,etjedétailleleslieuxd’unairintéressé.Ilfautbienfaireunminimumd’effort.Ouais,sympacetappart.Unpeutropfilleàmongoût,maisjesupposequec’estnormal.C’estplutôtsimpliste.Unegrandesallefaisantofficedesalonet
salleàmangerjouxtantlacuisine.Uncanapétrôneaumilieudelapièceentredeuxfauteuilsdevantungrandmeuble,oùsontposésunetélévisionetdifférentsobjets.J’aperçoisuncouloiràcôtédubartoutenm’approchantdeMisscheveuxflamboyant.Jedéfaismavested’ungesterapideetlaposesurletabouretàcôtéd’elle.Mesmainsentourentsoncorps,enagrippantlebar.
—J’enrevienspas…dit-elleenriantavantd’ajouterplussérieusement,t’asquelâge?Çanemanquepasdemefairerire.—23ans.Elleéclated’unriresonore,résonnantdanstoutelapièce.—Merde,ayez,jesuisunecougar!Saréflexionauraaumoinseul’effetdenousmettredansuneambiancefestive.—T’espassivieillequeça.Jememords la joue espérant ne pas avoir été désobligeant. Elle pose un doigt surmon torse en
descendantsongestedoucement,maissurement,réveillantmonérection.—Jenesuispasvieille.J’ai28ans.—Çanemeposeaucunproblème.Jeneluilaissepasletempsderépondreetm’emparedesaboucheenpassantunemainautourdesa
taille. Sa réaction ne se fait pas attendre quand elle passe ses mains sous mon tee-shirt, que je medébarrasseavantdeprendreseslèvresànouveau.Mesmainsremontent lespansdesarobe,maisellem’arrête en me poussant, une main sur mon torse. Et merde. Elle aurait changé d’avis ? Putain, ellem’allumedepuisqu’ellem’asusurréqu’elleétaitinfirmière,etellemelaisseraitenplandecettefaçon?Jemesuisfait toutunscénarioquin’apasmanquédem’exciter,alorsqu’ellevoulaitqu’on«parle».Ellen’auraitpasétéaussicanon,çafait longtempsquej’aurais lâchél’affaire.Alorssiellemeplantecommeça…
—Macolocvabientôtrentrer,vautmieuxqu’onailledanslachambre.Rassurédesaréplique,jelaregarderoulerdeshanchesendirectionducouloir.Quandjedisqu’elle
m’allume,cen’estpasuneblague!Jelasuisdeprèsetentreàsasuitedanslachambre.Jeladécouvreaccoudéesurlelit,sarobeétaléesurlesol.Jedéboutonnelesboutonsdemonjeans,medébarrassantdetouttextileinutileetlarejoint,biendécidéàluifairecriermonnom.
Chapitre2
Livie
Soulagée quemon service se soit enfin terminé, je posemon plateau sur le bar. La journée a étéépuisante,etmespiedsmelerappellentcruellement.Fred,lepatrondubaroùjetravailledepuispresque3ansmaintenant,estoccupéàformerunnouveaubarmanqui, je l’espère,seraenfin lapersonnedelasituation.C’estrienqueletroisièmecemois-ci,etçan’aidepasFredàgarderlesourire.Siseulementiln’yavaitqueça…maislesserveusesdéfilentégalementassezrégulièrement.Ilditsouventqu’ilaimeraitpouvoir consacrer son tempsàdes chosesplusutilesque lebalaides employés,venant et repartant àvitesse grandV.Mais les journées de 24 heures ne semblent pas lui suffire pourmettre en route sesprojets.EtvoilàcommentjemeretrouveàobserverFredjurer,aumomentoùCédric,lefutur-ouex-barmanmisàl’essaidepuisàpeinequelquesheures,lâcheunverrequisebriseentombantsurlesol.J’aidelapeinepourlui.Ilnedoitpasêtrebeaucoupplusvieuxquemoi,etjemesouviensdelapressionqueFredm’imposaitàmesdébuts.Mêmesiaujourd’huij’entretiensunerelationamicaleaveclui,jen’aipas oublié ses mines renfrognées, ses piques désobligeantes, et l’impression de n’être qu’une petiteécervelée.Ilnem’aimaitpasbeaucoupaudébut.Bond’accord,ilmedétestait.Jennyluiavaitforcélamainquandjen’essuyaisquedesrefuspartoutoùjepostulais.J’avaissurprisuneconversationentreeuxqui nem’avait pas beaucoup plus. Il disait qu’il n’allait pas s’emmerder avec une gamine de 17 ansfraichementarrivéeàNewYork,quiseprécipiteraitpourpleurerdanslesjupesdesamèreaupremieraccroc.Çam’avaitprofondémentblesséetjen’avaispasmanquédeluifairepartdemespensées.J’étaistellementencolère.Cen’étaitpasvraimentpoursonmanquedeconfiance,maisl’imagequ’ilsefaisaitdemoi.Çafaisaitbienlongtempsquej’avaisperdumamèreetcetteréflexionm’avaitfaitsortirdemesgonds.J’avais16anslorsdel’accident,etdepenseràelleesttoujoursdouloureux.Alorssafaçondemeprésenter,jenel’avaispassupporté.Contretouteattente,jem’étaistoutdesuitesentieàmonaise,etjeluiavaitprouvéparcefaitqu’ils’étaitlourdementtrompésurmoi.Leboulotdeserveuse,jen’enn’avaisjamais rêvé. Mais j’entretiens de bonnes relations de travail, et l’ambiance est plutôt bonne. PauvreCédric.Jepensequecommemoi,toutlemondealedroitàunesecondechance.Jenepeuxcependantpasm’empêcherderireenvoyantmonpatronjuréunefoisdeplusentresesdents.Cequin’apaséchappéàce dernier qui me fusille du regard. Comprenant que le moment est plutôt mal choisi, j’effaceinstantanémentmonsourire.S’ilyaunechosequejesaissurcethommede32ans,c’estqu’ilpeutvousfaire passer du rire aux larmes avantmêmeque vous ne vous en rendiez compte.Me voyant prise audépourvue,çanemanquepasd’amusercedernierquim’offreunsourirerassurant.Lesoulagementmesubmerge et je lui rends son sourire comprenant qu’il ne m’en portera pas rigueur. Il me rejointrapidement devant le bar, prenant place sur un tabouret à côté dumien, et laisse le petit nouveau sedébrouilleràréparersesbêtises.
—Jeneluidonnepasunesemaine,medit-il.—Ohlaisse-luiunechance,ilestnerveux.Çafaitdeuxheuresqu’ilaMonsieurgrincheuxsurledos.Fredpassesamainsursonbouccommeillefaitsouventquandilréfléchit.Jecroisqu’ilcompense
parceteffetdemode,qu’iln’apasuncheveusur la tête,maisne luienparlezsurtoutpas. Jennym’aracontéqu’il lerasaitpourcacher lefaitqu’ilsedégarnissaitunpeuavant l’heure.ConnaissantJenny,ellen’apasdûl’épargnersurlesujet.Cédricsedébarrassedesboutsdeverredanslapoubelleetnous
jette un coup d’œil. En voyant son sourire revenir, j’essaie de l’encourager par un hochement de têtediscret.Ilm’envoieunclind’œilavantdeseretournerverslesclientsattendantleurconsommation.
—Génial,etenplusiltedrague,lanceFredensecouantlatête.—N’importequoi!jem’empressederépondreensentantlerougememonterauxjoues.Fredsouritautantqu’ilestpossibleetajoute:—Iltedrague.—Non,ilestgentil,c’estdifférent.Tusais,ilyadespersonnesquilesontnaturellementetquin’ont
pasbesoindeseforcerpourl’être.—Tuparlesdemoilà?s’insurge-t-il.Etmoiquicroyaisquemonpatronétaitunêtreintelligent.—Bien sûr que non. Jamais je n’oserais insinuer une telle chose. Je tiens àmon job, j’ajoute en
pouffantderire,etdescendsdemontabouretavantdelesaluer.Jeprendsladirectionduparking,afinderetrouverladouceurconfortabledemonlitquim’attendde
piedferme.Malheureusement,enarrivantàmi-chemindemavoiture,jedécouvreWilladosséàcelle-ci.Le sentimentdeculpabilitéque je ressent en levoyant abeaume rappelerque jedevrais tout arrêter,pourtant, je sais que c’est la seule façon pourmoi d’oubliermon passé.Ou dumoins essayer.Quandj’arrivedevantlui,iljettesonmégotd’ungestevif,avantdem’attraperparlataille.
—Salutbeauté.Lepetitsourirequejetentedeluidonneresttoutsaufhonnête,etmalgréqu’illesachepertinemment,
çanel’ajamaisrebuté.
*Enentrantdansl’appartement,cettechèreJennyestentrèsbonnecompagnievulesbruitssortantde
sachambre.Jenepeuxm’empêcherdeleverlesyeuxauciel.Jevaisdevoirattendreencoreunpeupourrejoindremachambresi jeneveuxpasassisteràquelquesébatsdont jemepasseraisvolontiers. J’aiassistéàplusdechosequejenel’auraisvoulu,etj’aidoncprisl’habitudedemerendresurletoitdenotreimmeuble,enattendantquelestourtereauxestfinileurpetiteaffaire.
Lanuitestunpeunuageusecesoir,maisondistinguequandmêmelesétoiles.Etc’estcequejesuisvenuevoir.Lessouvenirss’emparentdemonespritsansquejenepuisseenfaireautrement.Toutessesnuits dans la clairière, allongée à même la pelouse, avec pour seul spectacle la voute étoilée. Desmomentsquejechérieparticulièrement.C’étaitunexutoire.Quandleschosesdevenaientàlalimitedusupportable.Alorsjepassaisparmafenêtrepourm’enfoncerdanslanuit,etrejoindrelaclairière.J’ypassais parfois toute la nuit.Évidemment, ça ne plaisait pas àmesparents qui criaient quand ils s’enrendaientcompte.Maisjenepouvaispasleurdirequec’étaitdevenuvitalpourmoi.Combiendefoism’avaient-ilsdemandédesexplications?Maisj’avaistoujourssugardermesémotions,lesdissimulantderrièredessouriresquejemaitrisaisàlaperfection.
Les picotements dut au froidme décident à reprendre la direction de l’appartement. Lesmembresendolorisàcausede la fatiguequi s’additionnent sesderniers jours,medemandentuneénergieque jen’ai plus pour descendre les quelques marches pour regagner le palier. Le silence qui règne enfranchissantlaportemerassure.Ondiraitbienquejevaisenfinpouvoirmelaisseralleràunsommeilbien mérité. Je défais mes chaussures dans l’entrée, avant d’avancer à pas feutrés pour ne réveillerpersonne.
L’appartementn’étantpastrèsgrand,lacuisineestsimplementséparéedusalonparunbarengranit.Malgrécepetitespace,jem’ysenspluschezmoiiciquejenel’aijamaisété.Enpassantàcôtédubarfaisantfaceaucouloir,jeremarqueunevesteposéesurundestabourets.Ilvasurementyavoiruninvitédemainaupetitdéjeuner.C’estunevesteencuir,cequiattisemacuriosité.Jememetsàimaginerquel
genre d’homme Jenny a pu ramener portant ce genre de vêtements. Comprenant que la fatigueme faitpartirdansdes réflexionsplusqu’étrange, je secoue la têtememoquantdemoi-même,etcommenceàremonterlecouloir.Etenplus,ilaabandonnésontee-shirtici.Encoreheureuxquejenesuispasrentréquelquesminutesplus tôt, je l’auraissurement regretté.Enpassantdevant laportede lasalledebain,celle-ci est entrebâillée. Je la referme, un petit toc pas bien méchant. J’avance de quelques pas endirection de la porte de droite, au moment où un bruit attire mon attention. C’est là que je le vois.L’hommeàlavestedecuir.Ilrefermedoucementlaporteduboutducouloir,oùsetrouvelachambredeJenny.Safaçondefairenefaitaucundoute.Ilprendlapoudred’escampette.Queltoupet!Jepourraisluibalancerunepetite jouted’esprit,maisquelquechosem’enempêche.Unedrôled’impressionparcourtmon échine aumoment où il se retourne. Il s’avance versmoi, les yeux baissés, en reboutonnant lesboutonsdesonjean.Lapremièrechosequejevoisc’estsontorsenu.Etpasn’importelequels’ilvousplait.Untorsesculpturalquifaitnaitreenmoidessensationsoubliéesdepuislongtemps.Jetentedemeressaisir et relève lesyeuxvers levisage rattachéàce torse, aussi alléchant soit-il. Jeme fige.C’estimpossible.Illèvealorslatêteetm’aperçoit.Ils’arrête.Avez-vousdéjàentenducequ’onditlorsqu’onest sur le point de mourir ? Toutes ses images qui défilent devant vos yeux, résumant en quelquessecondeslefildevotreexistence?J’aibeauêtreenparfaitesanté,àcemoment-là,c’estexactementcequisepasse.Jen’ai jamaisoubliécesyeuxvertsquimescrutentavec insistance.Lapénombrenemepermetpasde lesdistingueràmaguise,pourtant, je saisqu’ils sontd’unecouleuraussiprofondequel’émeraude, teintée de quelques nuances grises. Il se tient à quelques mètres à peine de moi, aussiimmobile qu’une statue, cequime fait dire qu’ilm’a reconnue également.Le chocque je ressens faitbattremoncœur à une allure effrayante.Un cœurque je croyaismort depuis longtemps.Malgré les 3années qui viennent de passer, je sais que je suis la dernière personne qu’il s’attendait à voir. Qu’ilespéraitrevoirunjourmême.Ladernièrefoisquel’aivu,jen’avaisque17ans.Lui,enavait20,maisçan’ajamaiseuderéelleimportance.Oupeut-êtreunpeu.Jen’encroispasmesyeux.C’est impossible,commentpeut-ilêtreici,dansmonappartement?Mesquestionssemeurentalorsquejenepeuxdétachermonregardde l’hommequ’ilestdevenu.Ilétaitdéjàunhommeà l’époque,mais ilparaitencoreplusmure aujourd’hui. Ses épaules carrées parlent d’elles même. Je frissonne quand je vois son regards’égarer sur mes jambes, remontant doucement sur ma tenue. Je porte encore ma tenue de serveuse,composéed’unsimplechemisierblanc,etd’unejupebleuemarinem’arrivantàmi-cuisse.Jenesauraisdiredepuiscombiende tempsnoussommes làànousobserversansdireunmot. Il finitparsortirsonportabledesapocheetcomposeunnuméroavantdeleporteràsonoreille.
—Greg?C’estbon,jel’airetrouvée.
Chapitre3
Ethan
—Livie,ouvrecetteporte!Jemartèle à la porte où elle vient de s’enfermer.A peine avais-je prononcé le nom de son frère,
qu’elles’estruéedanslachambre.Jen’aimêmepaseuletempsderéagir,qu’elleavaitdéjàverrouillélaporte.
—Livie!Commentpeut-ellemefairecetaffrontaprèstoutcequej’aitraversé?J’aibeaul’avoirdétestétoutes
sesannéespourlafaçondontellem’aabandonnée,j’aibienledroitàdesexplications,non?Etdirequeje pensais ce périple voué à l’échec. Je ne comprends toujours pas ce qui a pris Greg à vouloir laretrouveraprèstoutessesannées,maispendantlesdixheuresderoutesqu’onapartagéenvoiture,iln’apasarrêtédemebassinerqu’ilétaittempsd’alleràellevuqu’ellenecomptaitpasrevenir.Çam’abienfaitrire,maisjesuisretenudetoutcommentairequ’iln’auraitquemoyennementapprécié.Ilavaitréussiàtrouveravecl’aidedeJames,unamidelonguedatetravaillantdanslapolice,l’adressed’unfoyer,icimêmeàNewYorkoùelleavaitséjournéquelquesjours.Maisaprèsça,plusunetrace.Rien.Commesielletentaitdetoutessesforcesderestertransparentepournepasêtreretrouvée.OnenapassédutempsàmontrerlaphotoleLivieàtraverslavilleenespérantquequelqu’unauraitcroisésaroute,maisonparledeNewYork.C’est immense, et ça n’a rien donné.Onne savait plus quoi faire, où chercher.Greg asuggéré de rester quelques jours de plus, espérant qu’elle serait restée dans le coin.Mais ça n’a riendonné,etonétaitsurlepointderepartirdemainàlapremièreheure.
—Maist’esdinguedehurlercommeça?Je m’arrête soudain, ayant pris conscience que je n’étais plus seul. Jolie rouquine m’observe en
resserrantlecordondesonpeignoirqu’elleaenfilé,etn’apasl’aird’appréciermonattitude.—Qu’est-cequetuluiveuxàLivie?ajoute-t-elle,lesyeuxplissés.—Je…euh…c’estquoitonnomdéjà?Elle se retient de rire en croisant les bras, tout en me fixant avec amusement, ce qui ne fait que
m’exaspérerunpeuplus.—Jenny,pourquoi?Çat’intéressed’uncoup?Jememaudis à cet instant précis, cette soirée a pris une drôle de tournure, et cette Jenny a l’air
beaucoupmoinsengageantequequelquesheuresauparavant.—Jenny,j’aibesoindeluiparler,j’affirmed’untonunpeutropsuppliant,maistantpis,jenevois
pasquoifaired’autrepourlaconvaincre.Elleouvrelaboucheprêteàrépondre,quanddescoupsà laportesefontentendre.Gregsurement.
Ellemecontourne,undoigtlevé.—Onn’apasfinicetteconversation.J’enprofiteenlavoyantdisparaitrepourfrapperdenouveauàlaportedeLivie.Jedoisluiparler,
ellenepourrapasresterenferméeindéfiniment.—Liv!Ouvre-moi!Situn’ouvrespascetteporte,jeladéfonce!Toujoursrien.—Oùelleest?
JemeretourneenreconnaissantlavoixdeGreg.—Elles’estenferméequandellem’avu.Paslapeinequ’ilsachequec’estsurtoutluiquil’afaitréagir.Iln’apasbesoindeça.Quandellea
comprisquej’avaisprévenusonfrère,elleapaniqué.Jennyfaitirruptionàsontouretposesesmainssurseshanches.
—Allez-y,faitescommechezvous.Nevousgênezpas!EllemefusilleduregardetGregsetourneverselle.—Excusenouseuh…—Jenny.—Jenny.Jesuissonfrère,jelacherchedepuisunmoment.Leurconversationcommenceàmefatigueretjeredonnedescoupsàlaporte.—Livie!—Bonarrête,ellen’estsurementpluslà,affirmeJennyd’untonsansappel.Quoi?Prisaudépourvu,jelaregardes’éloignerendirectiondelacuisine.Elleouvreuntiroiretensortune
cléqu’elleenfoncedanslaserruredelaporte.Malheureusement,commeellel’avaitprédit,lachambreestvide.Jennymefaitunsignecommepourmedire«jetel’avaisbiendit».LanervositédeGregestvisibleetmonted’uncran:
—Merde!Écoute,onneluiveutpasdemal.Elle…j’aibesoindelavoir.C’estmapetitesœur.Jeveuxsimplementluiparler.
Jenny le regarde et semble voir l’inquiétude sur ses traits. Je commence sérieusement à perdrepatienceet serre lespoings le longdemoncorps, espérantque Jennyprendra labonnedécision.Ellesouffleetsedirigeverslafenêtre.
—Elleestsurletoit.Ellepointedudoigt lafenêtre.Enypassant la tête, jedécouvreuneéchellemenantvers lehautde
l’immeuble.Jen’attendspasqueGregmedisequoiquecesoitsurlafaçondeprocéder,etmehissesurcelle-ci.En remontant l’échelle, je tentede faire lemoinsdebruit possible.Horsdequestionqu’ellem’échappeencoreunefois.
Quandmonpiedseposesurlasurface,jelavois.Ilmefautquelquessecondespourmeressaisirenladécouvrantassisedansuncoin,lesjambesrepliéessursapoitrine.Latêteenfoncéedanssesgenoux,on pourrait croire qu’elle essaie de disparaitre. Je mets toute ma rancœur de coté, en la voyant sieffrayée.Jen’aijamaisvoululuifairepeur.Jem’avanceetm’accroupiedevantelle.Livieatoujoursétéunpeuétrange.Maisjelaconnaismieuxquequiconque,etjesaisqu’untrucclocheàcetinstant.Quandjecroisesonregard,ilréveilleenmoiquelquechosequejemeforced’ignorer.Lebesoindelatouchers’imposeàmonesprit,toutensachantquec’estladernièrechoseàfaire.L’expressiondepeurquejelisdans ses prunelles finit de m’anéantir, et je déglutis difficilement face aux larmes qu’elle balayerapidementdudosdesamain.Lesmotsmemanquent,oubliantpresquequenousnesommespasseulssurcetoit,pendantqu’ellem’observesansmequitterdesyeux.Combiendefoisai-jeimaginécequejeluidiraisquandjelaretrouveraisenfin?Etpourtant,jerestemuetfaceàelle,essayantdetrouverdesmotsquineviennentpas.Jejetteuncoupd’œilàmadroite,oùJennyetGregnousobservent.Gregesttendu,et jedevineaisément toute lapressionqu’il retientdese jetersursasœur.Jennyquantàelle,mefixeavec animosité.Ellemedonne l’impressionde guetter lemoindre fauxpas que je pourrais faire poursortirsesgriffes.EllefaitunpasenavantenreportantsonattentionsurLivie.
—Livie?demandecettedernièred’unevoixdouce.Livie tourne la tête vers elle, et je me relève en faisant un pas en arrière, ne supportant plus la
proximité de son corps. Enme voyant faire, elle se ressaisit et se lève à son tour. Elle réajuste sonchemisier,lesyeuxbaissés.
—ToutvabienJenny,j’ai…toutvabien,dit-elled’unevoixneutre.Mêmesielleessaiedefeindreuneassurancecertaine,ellenemetrompepas.C’estàcemomentque
ça se produit. Son visage se vide de toute expression. On ne peut y lire ni tristesse ni joie. Rien.Absolument rien. Indéchiffrable. Si je n’avais pas assisté à sa tentative de chasser les larmes quimaculaientsesjouesquelquesminutesplustôt,jeseraisincapabledeledeviner.Contretouteattente,elleme contourne par la gauche, mettant encore plus de distance entre elle et son frère qui commence às’approcher.Untrucsedéclenchedansmonesprit.Quelquechosequejen’avaisjamaisoséimaginer.Etsitoutçaavaitunlienaveclui?Duplusloinquejelesconnaisse,ilsonttoujoursétéproches.Malgrénosmauvaisesblaguesquandnousétionsenfants,ilatoujoursététrèsprotecteuravecelle.Tropàmongoût.Cequinousavaludegrossessueursfroidesàtouslesdeuxlesfoisoùonafaillisefaireprendre.Moninstinctprotecteurprendledessus,etjem’interposeentreluietLivie.Ilmefusilleduregard,etjeposeunbrassursonépaule.Jeneveuxpasqu’ill’approche,çaabeauêtremonmeilleurami,jenelelaisseraispasl’approchertantquejen’enauraispaslecœurnet.
—Qu’est-cequetufous?crache-t-il.Iln’estpasravidemonattitude,maistantpis.—Laisse-latranquille.Regarde-la,elleabesoindetemps.Etmoiaussi.Pourensavoirplus.Sesyeuxseposentderrièremoi.Liviel’observe,sesbrasentourés
autourd’ellecommepourseprotégerdequelquechose.Çanefaitquerenforcermescraintes.Pourtant,ilyacettevoixquimerépèteenbouclequec’estimpossible.Gregnes’enprendraitjamaiselle.Elleleregardequelquessecondesdeplus,avantdebaisserlatêteetseretournerverslaporte.Maisaumomentoùelleposesamainsurlapoignée,elles’immobiliseenentendantlavoixdesonfrère:
—Jesaispourquoituesparti!Commesilecielavaitcomprislagravitédelasituation,unebourrasquesefaitsentir.Leventselève,
et je tented’analyser ceque jeviensd’entendre. Il sait. Il saitpourquoiLiviea toutquittédu jouraulendemain sansmême un au revoir.Un jour, elle était là, et le lendemain elle avait disparu avec unesimple lettredisantdenepas la retrouver.Je ressenssoudainunesensationde trahisonencomprenantquemon amim’amené en bateau. Toutes ses paroles pour la retrouver n’étaient que du vent. JemeretourneversLiviem’attendantàtoutuntasderéactionsdesapart,maispasàcelle-là.Elleécarquillelesyeuxdesurprise,etsembleencoreplusbouleverséeennousfaisantface.Ilavanced’unpasverselleenajoutant:
—Jet’enprie,jesuistellementdésolé…petitlapin.Petitlapin.Çafaitdesannéesquejen’avaispasentenducepetitsurnomdanssabouche.Elleinspire
unegrandeboufféecommesielleavaitarrêtéderespirerdepuisuneéternité,etavantmêmequejenem’enrendecompte,ellesejettedanssesbras.Illaserrecontreluicommesisavieendépendait.Mesdoutess’envolentquandjelesvoiscommeça.Moncœurseserre,etj’observeleurétreinteenpensantquemoiaussi j’aiattendu3anspourlaserrerdansmesbrasetm’assurerqu’elleallaitbien.3ansdesecretsetdemensonges.3ansdepuisqu’elleestpartiesansaucuneexplication.
*
GregestentraindeparleravecLiviedanssachambredepuisunpetitmomentmaintenant,etmoi,jesuislà,appuyéaudossierducanapé,pendantqueJennymedévisageaccoudéeaubardelacuisine.Siellem’avaitl’airsympathiqueaupremierabord,leschosesontradicalementchangé.Çaal’aird’êtreuneemmerdeusefinie,etellecommencesérieusementàmefatiguerdemefixerdecettefaçon.Elleaposésonmentondanssamain,sesdoigtstapantàintervalleréguliersajoue.
—T’étaisentraindetefairelamalle,pasvrai?Etvoilà.Onyest.Legenredeconversationquejem’efforced’éviter.Etcommesiçanesuffisaitpas,
Liviem’asurpris.Nonpasqueçaaitlamoindreimportance.—Jen’avaispasprévuderesterenmêmetemps.Pitoyable. Je suis pitoyable.Mais les longs discours, je ne suis pas forcément doué pour ça. Les
chosesauraientétébeaucoupplussimplessijen’avaispascroiséLivieensortantdecettechambre.Àlasecondeoùjel’aiaperçue,j’aicruquejerêvais.Commentcelaétait-ilpossible?Çanepouvaitpasêtreelle.Etpuisjemesuisrenduàl’évidence,elleétaitbeletbiendevantmoi.Toutuntasdepenséesm’onttraversél’esprit.D’abord,l’embrasser,laserrercontremoijusqu’àplussoif.Luidirecombienj’avaisrêvé ce moment, combien elle m’avait manqué. Ensuite, j’ai repensé à ses 3 dernières années decalvaire.Jemesuisdoncrabattusur ladernièreéventualitéquimepermettraitdem’échapperdecettesituation,alorsqu’onétaitchacunfigé,sanssavoircommentréagirl’unenversl’autre.Greg.Maisjenem’attendaispasàcequ’elleaitcegenrederéaction.
Jennyritdoucementetseredresseenposantsesmainsàplatsurlebar.—Ett’asunnomrattachéàtagueuledecon?Purée,onn’estpasbienpartilà.—Ethan.Elleouvresesyeuxengrand,croiselesbrasets’adosseàsondossier—Ethan?—Quoi,ilteplaitpasmonprénom?Elleritdoucementetbaisselesyeux.—Non,non…trèsjoliprénom.Joli?C’estbienlapremièrefoisqu’onmesortuntrucpareil.Jemefrottelesmainssurmonvisage
essayantdedissiperlesémotionsquirefontsurfacedepuisquejesuissortidecettechambre.Etmoiquicroyais qu’on allait simplement passer quelques jours et rentrer les mains vides. Je n’y croyaisabsolumentpas.Leschosesnesepassentvraimentpascommeprévu.
J’enfoncemesmainsdanslespochesdemonjean,fuyantleregarddeJennytoujourssurmoi.Maisquandjeluijetteuncoupd’œildenouveau,sonexpressionachangé.Ellem’observeavec…curiosité?
—Quoi?jedemandeavecagacement.Ellen’apas le tempsderépondre,que j’entends laportede lachambredeLivies’ouvrir.Gregen
sort,seul.OndiraitqueLivienevapassejoindreànous.IlprendplacesuruntabouretàcotédeJennyetluitendlamain.
—Désolépourcetteentrée.Greg,jesuislefrèredeLivie.Elleluiprendlamain:—Jenny.C’estdonctoilesupergrandfrèredontj’aientenduparler.Jevois l’égodecetabrutigonfleràvued’œil. Ilsourit tellementfortqu’ilvasurementsefaireun
claquage.—Çadoitêtreçavuquejesuisleseulfrèrequ’ellea…Regardez-moi ce con en train de se faire mousser. Jenny lui sourit et regarde en direction de la
chambredeLivie.—Commentelleva?demandecettedernière.—Bien.Elles’estendormie.J’ai…onavaitdeschosesàsedire.Beaucoupdechoses.Deschoses.Deschosesqu’iln’apasjugéesutiledemecommuniquer.Ilsait.Ilsaitpourquoielleest
partieetn’apasl’intentiondemefairepartagercetteinformation.—C’estcequej’aicrucomprendre,luirépondJennyenhochantlatête.Jemesensunpeuseul.Cesdeux-làm’ignorent totalement.Jen’aiqu’uneenvies’estdemerendre
danslachambredeLiviepourluiparler,maisdetoutefaçon,elledort.Gregluiracontenosdifficultéspourretrouversasœur.Onvientdepasserplusieurs joursàarpenter laville,dans l’espoirde trouverquelqu’unquireconnaitraitlaphotoqu’onsortaitàtoutboutdechamps.Entreceuxquiavaitl’airdes’en
moquerroyalement,etceuxquineprêtaientpasdutoutattentionàcequ’onleurdisait,çan’apasdonnégrand-chose.Jemesuismêmedemandésiçaservaitàquelquechose.Aprèstout,cettephotoétaitvieillede 3 ans, si ça se peut, elle ne ressemblait plus du tout à ça. Elle a 20 ans aujourd’hui, on en avaitconscience,mais c’est tout ce qu’on pouvait faire.Et puis je l’ai vu. J’aurais pu la croiser aumilieud’une centaine de personnes que je l’aurais reconnu. Bien sûr elle a changé.Mais pas autant que jel’aurais imaginé.Ellea toujoursce regard.Quandellevousregarde,c’estcommesivousvousnoyiezdans lesprofondeursde l’océan.Ellen’apasabandonnésesbellesbouclesderrière lesquellesellesecachaitsouventquandelleétaitintimidée.Etseslèvres,sifinesetgourmandesàlafois,quim’ontvaludenombreusesnuitsblanches.
JennyécouteGregavecattentionavantdeseretournerversmoi.—Etbienondiraitquevousavezeudubol.Si toncrétindecopainn’avaitpasessayédefileren
douce…Etc’estrepartipouruntour.Gregseretientderire.Jedétournemonregardverslaportedechambre
de Livie. Elle m’a vu. Et ça me tord les boyaux rien que d’y penser. Pourquoi ? Ça ne devrait pasm’atteindre,aprèstout,c’estellequiestpartie.Jemeredresseetprendsladirectiondel’entrée.
—J’aibesoind’allerfaireuntour.
Chapitre4
Greg
Non,maisquelcrétin!Çaluiapprendra.Depuisletemps,ilfallaitbienqu’ilfinisseparrendredescomptesunjour.Maispourlecoup,cettefois-ci,jeluiensuisreconnaissant.S’iln’avaitpasatterrichezcettefille,onn’auraitpeut-êtrejamaisretrouvémasœur.Etdirequ’ellehabitaitdansl’immeubleàdeuxpasdenotrehôtel.C’estcomplètementhallucinant.Jeregardelaporteserefermerderrièrelui,etpouffederireenmetournantversJenny.
—Excuse-le.Lesinteractionssociales,c’estpasvraimentsontruc.Ellebalancesatêteenriant.—T’inquiètepas,jem’enfousenfait.Maisilfallaitbienquejel’emmerdeunp’titpeu.Ohellemeplaitelle.Elleseraitparfaitepourlui.Ellearriveraitpeut-êtreàenfairequelquechose.
J’espèrequeçaluiserviradeleçon.Jemefousqu’ils’amuse,ilestgrand.Ilfaitcequ’ilveut,maisilyalabonneetlamauvaisemanière.Etilestabonnéàlamauvaise.Maisc’estmonpote.Monmeilleurpote.EtLivieestcommesasœurpourluiaussi.Onseconnaitdepuistellementdetemps.Mêmenosparentsl’adoraient.Ilfaisaitpartiedelafamilleetilatoujoursétélebienvenuquandc’étaittropchaudchezlui.Samèreétaitunedroguéeinvétéréeetiln’ajamaisconnusonpère.Lapremièrefoisquejel’aivu,jerentraisàlamaisonaprèsunaprès-midichezuncopain.J’avais11ans.Ilétaitassisdanslacuisineavecmaman etLivie. Il était en train d’avaler son poids en gâteau etLivie, qui avait 6 ans à l’époque, leregardaitavecdesyeuxdemerlanfrit.J’aiapprispar lasuitequemamèrel’avaitsurprisàvolerdesfruitsdanslejardin.NotremèreétaitsurlepointdelevirerquandLivieestintervenue.Mafoutuesœuratoujourssuvoirplusquelesautres,etelleavaitcomprisquecegaminnevolaitpasparplaisir,maisparnécessité.6ans.Quandj’yrepensejemedisquej’aiétéunenfoirédenepasl’avoirrecherchéeavant.Aujourd’hui, j’en connais les raisons, mais à l’époque je lui en ai voulu. Jenny a l’air de beaucoupl’aimer.Çamemetdubaumeaucœur.Ellen’étaitpasseule.
Chapitre5
Livie
Quandjemeréveille,jemedemanded’abordsitoutcecin’apasétéqu’unrêve.Jemelèveetsorsdelachambre.Ilestlà,accoudéaubardelacuisine.Monfrèrem’aretrouvée.Ilachangé,maisc’estbienlui. Ses cheveux sont plus longs qu’à l’époque tombant sur ses épaules dumême reflet blond que lesmiens.Ça luivabien.Ses irisnoisettemerappellentceuxdenotremère,cequimedonneuncoupauventre,maisjetentedegarderlesourire.Jenepeuxcependantignorerlescernessoussesyeuxenmedisantquejenedoispasyêtrepourrien.J’observesabarbenaissantemedemandantsic’estuneffetdestylequ’ilcomptegarder.Çalevieillibientropàmongoût.J’avanceversluietdéposeunbaisersursajoue.
—MerciMercidem’avoirretrouvée.Mercidem’avoirpardonné.Ilm’enavoulu,ilmel’aavoué.Maisquand
ilaapprislesraisonsdemafuite,iln’acessédemerechercher.Jen’oseimaginersaréactionquandilacompris.
—Arrêtetesbêtises,tun’aspasàmeremercier.C’estplutôtàmoidem’excuser.Je…Jeluifaisnondelatêteenlevantunemainpourl’interrompre.—Tun’asrienàtereprocherGreg,riendutout.Il sourit etme prend dans ses bras.Mon frère etmoi avons toujours été très proches. Il était très
protecteuretjesaisqu’ilal’impressiond’avoirfailli,maisildoitcomprendrequeriendetoutçan’estsa faute. C’est la mienne, uniquement la mienne.Mais il ne veut pas l’entendre, il a été clair tout àl’heure,alorsjeleserrecontremoietprofitedecetinstantquej’aitantredoutécesdernièresannées.Jemereculeetregardeautourdemoi.JennyadûpartirtravailleràcetteheureetEthanestallongésurlecanapéetsembledormir.
—EtEthan,commentilva?j’osedemander.Gregsouritetbalancesatête.—C’esttouttoiça.Tun’arrêterasjamaisdet’inquiéterpourlui?C’estungrandgarçonmaintenant.Jeluisourisetavanceversl’hommequej’aiaiméetabandonnéilya3ans.Jem’assissurlatable
basseetl’observe.Ilalespaupièresclosesetsapoitrinemonteetdescendaurythmedesarespiration.Lesannéesontl’airdeluiavoirétéfavorable.Ethanatoujoursétébeauetjenepeuxm’empêcherdemedirequeçan’apaschangé.Sesmèchesnoiresluitombentsurlesyeuxetjemeretiensdelesrelever.J’aitellement envie de le toucher,mais Greg n’a jamais rien su et je pense que ce n’est vraiment pas lemomentqu’ill’apprenne.Partirloindeluiaétéladécisionlaplusduredemavie,maisjen’avaispluslechoix.Gregserapprocheets’assoitdanslepetitfauteuil.
—Jeneluiairiendit,murmure-t-il.Unsoulagementimmensem’envahit.Jenesupporteraipasl’idéequ’illesache.—Tantmieux.Jeneveuxpasqu’ill’apprenne.Ilsouffleets’accoudesursesgenoux—ÉcouteLiv,jecomprendstesraisons,maisc’estd’Ethanqu’ils’agit.Tusaisqu’ilnetejugerapas.
Ilcomprendra.Etpuisilestdelafamille.Quandtuespartie…ilaétélà.Ilnem’ajamaislâché.Je souris en entendant que les deux hommes dema vie sont restés si proches, voir peut être plus
qu’avantmondépart.Jemereprendsetréponds:—NonGreg.C’estunemauvaiseidée.Promets-le-moi.Promets-moiquetuneluidirasrien.Ilexpiredoucement.Jevaisdevoirinsister,jelesens.—Tuessûre?Lemettreàl’écart…çanevapasluiplaire.Ilaautantsouffertquemoiquandtues
partipetitlapin.Ilt’enavouluaussi.JetournelatêteversEthan.C’estlapirechosequ’ilpouvaitmedire.Savoirquej’aifaitsouffrircet
hommem’enserrelecœur.Jefermelesyeuxetchuchoteàpeine:—Neluidisrien.S’ilteplait.Unsilences’ensuit.Quandjerouvrelesyeux,Gregsembleavoircomprisquemadécisionestprise.—D’accord.C’esttoiquivois.Bonjevaisallernouschercheràmanger.Tuasfaim?J’acquiesce. Il se lèveet franchit laporte enmedisantqu’il faitvite. Je reportemonattention sur
l’homme allongé devantmoi. J’avancemamain tremblante et frôle lamèche posée sur sonœil en laremontantsursonfront.Moncœursebriseunpeuplusetj’ailagorgenouée.
—Jesuistellementdésolée,jemurmuredoucement.Jefermelesyeuxenpensantàtouscesmomentsoùons’estpromistantdechoses.Jen’étaisqu’une
petitefillelapremièrefoisquejel’aivue,maisjem’enrappellecommesic’étaithier,ilm’atouchédèslepremierregardetjemedétestedel’avoirtrahi.Jerouvrelesyeuxetm’éloignedelui.Jenesaispascomment ilva réagiravecmoimaintenantquenoussommesseuls, et jepréfèrepasser sous ladouchepouressayerderéfléchiràcequejevaisluidire.Enpassantàcôtédesaveste,toujoursposéaumêmeendroit,ladouleurm’envahi.L’hommequiétaitdanscettechambre,n’étaitautrequ’Ethan.IlétaitavecJenny.Jeravalelabouledansmagorgeetentredanslasalledebain.Quandmesyeuxseposentsurmonépaule,jenerésistepasàpasserundoigtsurcelle-cimaismedétournerapidement.Lejetd’eauchaudedétendmesmuscles tendus et j’espère que cela suffira à calmer mes nerfs à vif. Le problème, c’estqu’Ethanvoudrasurementcomprendreet jenevoispascequejevaispouvoir luidirequiapaisera larancœurquejeluiinspire.Enregagnantmachambre,jenepeuxm’empêcherdejeterunœilaucoffretcachédansletiroirdemacommode,maisenentendantfrapper,jesursauteetlerefermerapidement.
—Tupeuxentrer.Laportes’ouvreetEthanapparait.Moncœurbatplusvitecommeàchaquefoisquejelevois.Même
aprèstoutescesannées,moncœurnel’ajamaisoubliéetmoncorpsréagitpourmelerappeler.Ilfaitunpasdans lachambreet regardeautourde lui, inspectantchaqueobjetquicomposemonpetithavredepaix.Cen’estpastrèsgrand,maisjem’ysensbien.Composéd’unlit,d’unearmoire,d’unecommodeetd’unecoiffeuse, jen’aipasbesoindeplus.Les tonspasteldonnentunepetitenotedoucequimeplaitparticulièrementpourfinirletableau.Jenebougepasetl’observe.Ilfaitletourdelapièceentouchantdudoigtmesbibelotsavantdecontinueràarpentermachambre.Quandilarrivedevantmacoiffeuse,ils’arrêteetdétaillelesphotosaccrochéesautourdelaglace.Ilsetourneversmoietsourituneseconde,avantdelesregarderdenouveau.Cegestesianodin,merassureenpartie.
—Jem’enrappelledecelle-là,dit-ilenpointantdudoigtl’uned’elles.Jem’approcheensachantexactementdelaquelleilparle.—C’estnormal,c’esttoiquil’aspriseUnephotoduchêne,unenuitdepleinelune.Lechênedelaclairière.Cesheuresnocturnespasséesà
observer lesétoiles,etdetempsàautre,Ethanaimaitramenersonappareilpourmeprendreenphoto.J’avaisbeauluidirequejen’aimaispasça,cen’étaitpasçaquil’arrêtait.Etilavaitunvraidonpourça. C’est mamère qui lui avait offert son premier appareil photo et ça avait déclenché chez lui unevéritablepassion.Aprèsça, j’avaispasséplusieursmoisàéconomiserpour luioffrirunappareilplussophistiquépourson19èmeanniversaire.J’avaisvudanssesyeuxàquelpointçal’avaittouché.Jen’aijamaisregrettémonchoix.Ilattrapeuneautrephotoentresesdoigts.C’estmoiavecJennyetHayden.Onregardetousl’objectif,jouescolléesetlesyeuxpétillants.J’adorecettephoto.Ellemerappellequej’ai
faitlebonchoix.—Toujoursaussibelle.Ilfermelesyeuxetsepinceleslèvrescommes’ilsouhaitaitravalersesparoles.Aussidoucequesoit
cettedéclarationàmesoreilles,jeréprimeladouleurdelevoirainsi.Jenesaispasquoiluidire,niquoifaire.J’aimeraistellementqu’ilmepardonne,maiscommentsansluidonnerlamoindreexplication?
—Ethan…je…Illèveunemainpourm’arrêter.—Non,cen’estnilelieunilemoment.Onvaparler,mais…pasmaintenant,j’attendsvraimentde
comprendreLivie,maispasmaintenant.Ilévitemonregardetreposelaphoto.Ladouleurdansmapoitrines’intensifie.Jecroiselesbrassur
monventreenbaissant lesyeux. J’ai tellementhontede toutça,de l’avoirabandonnéde la sorte. Cesentimentcontradictoiremehantedepuis3ans.Ilmetsesmainsdanssespochesetseretourne.
—Entoutcas,tuasl’airbienici.C’estsympa.— C’est chez Jenny en fait, je ne fais que louer la chambre. L’appartement est à elle, elle m’a
beaucoupaidéquandjesuisarrivée.—Ellenedoitpasêtresiteigneusequeçaalors,répond-il.Jelefusilleduregard,s’ilpartsurceterrain…—Ellen’estpasteigneuse,tuasjuste…laissetomber.Jem’écartede lui, lesbruitsquej’aientendusenrentranthiersoirrésonnantencorebeaucouptrop
dansmonesprit.—Tunet’attendaisquandmêmepasàcequejet’attendegentimentenespérantqueturéapparaisses
unjour?C’esttoiquiesparti!Commesicen’étaitpasassezdur,ilfautqu’ilmelerappelle…—Crois-moi,jelesais.Maisçan’empêchequetues…tues…Ilm’offreunsourirenarquoisencroisantlesbras.—JesuisquoiLiv?Vas-yjet’écoute,j’enauraisaussipasmalàdireàtonsujet.Lacolèremonte.—Jevousaientenduquandjesuisrentrée!Jevousaientendupendantquevous…quevous…—DisleLivie!Vas-ydis-le!Jel’aibaisée.Bai-sée.Çafaitmal?Tantmieux, tun’asmêmepas
idéeàquelpointtum’asfaitmal.Sesmotsmedéchirentet je sorsde lachambreen trombe.Oui je l’ai fait souffrir,mais iln’apas
besoin d’être aussi cruel.Greg vient de rentrer et pose un sac sur le bar en se tournant versmoi. Jem’arrêteetessaiedemecalmer.Jeravaletantbienquemalmeslarmesquimenacent,maisiln’estpasdupe.Ilfroncelessourcilsenmevoyantetregardederrièremoi.
—Ethan…qu’est-cequetuluiasdit?Celui-cimecontournepourlerejoindreenhaussantlesépaules.—Justelavérité.Sielleadumalàl’entendre,c’estpasmonproblème.
Chapitre6
Ethan
Àpeineai-jeprononcécesparolesquejelesregrette.Jesuisencolère.Jeluienveux.Maisilvafalloir faire retomber lapressionavecGregdans lesparages.Encoreheureuxqu’il comprenneque jepuisseêtre enpétard,mêmes’ilne sedoutepasdesvéritables raisons.Elle comptait tellement àmesyeux.Monâme sœur, la fille qui représentait toutmonunivers.Mais cequ’elle a fait, je nepeuxpasl’oublier.Impossible.Gregmefusilleduregardetjevoisdanssesyeuxqu’ilessaiedemediredemecalmer.Jesouffleetmetourneverselle:
—Désolé.Jemeretourneverslui,etajoute:—C’estboncommeça?Illèvelesyeuxaucieletjem’assissurletabouretenfacedelui.Elles’installeàcôtédesonfrère,
les yeux baissés.Ce quime tue le plus, c’est qu’ilme suffit de la regarder pourme rappeler chaquemomentpasséavecelle.Chaquebattementdemoncœurmerappellecombienelleestimportanteàmesyeux.Combienelle est belle etmerveilleuse.Et çame tue.Combiend’heures ai-jepassées après sondépartàfixerleplafonddemachambreenmedemandantcequej’avaispufairepourqu’elledisparaissedecettefaçon?Quandelleestpartie,elleaemportéunepartiedemoi.Cettepartiedemonâmequejelui avais confiée les yeux fermés. La confiance, je ne l’accordais pas facilement, pourtant avec elle,c’étaitdifférent.Dèsnotrepremièrerencontre,elleavaitcettefaçondemeregarderquifaisaitdisparaitretouteslesbarrièresquejem’étaissolidementconstruites.Alorselle,cettetrahison…c’étaitplusquejenepouvaislesupporter.
Gregsortdusacsoncontenuen leposantdevantnouset j’attrapeune fritepour lamettredansmabouchesanslaquitterdesyeux.Elleévitedemeregarderetonmangeensilence.JesensGregmefoutreuncoupdepieddansletibiaquimefaitgrimacer.Ilhausselessourcils.«Arrêtetesconneries».C’estcequej’ylis.Jemeconcentresurmabouffe.Ladernièrechosequej’aienviedefaire,c’estdememettresongrand frèreàdos. Il commenceàdiscuter avecelle.Elle lui racontequ’elle travailledansunbarcommeserveuse,qu’enarrivantàNewYork,elleaeudumalàtrouverunboulotàcausedesonjeuneâge.ElleparledeJenny.Elleal’airdebeaucoupteniràelle.Jemedemandecequ’elleseraitdevenuesiellen’étaitpastombéesurcettefille.Souvent,jemedemandaissiunjourGregn’allaitpasdébarquerenmedisantqu’onl’avaitretrouvéemorte.Çam’avalupasmald’insomnies,maiscen’estjamaisarrivéetjesuisheureuxdesavoirqu’elleavaitquelqu’unsurquicomptermalgrétout.
—Etsinon,etvous,jeveuxtoutsavoir!s’exclame-t-elleavecunpeutropd’entrainàmongoût.J’ouvre labouche,prêtà luidonnerune réponsecinglante,maisquand jevoisGregmefusillerdu
regard, jecomprendsquejeferaisbiende laboucler.Putain, il faitchier, j’ai l’impressiond’avoirdenouveau10ansavecsesconneries.
Les souvenirs affluent unpeumalgrémoi. Je repense à toutes cesblaguesqueGregmepoussait àfaire,etmoij’étaisjeuneetcon,jeluiobéissaissansbroncher.Jen’aimaispaslavoirpleureretpourtantelle,ellen’apashésitéàmebriserlecœur.
Ethan
13ansplustôt
Livie:7ans
Ethan:10ans
Greg:12ans
—Tuluidisqu’onveutluimontreruntruc,moi,elleseméfiera.JeregardeGregm’expliquercommentpiégersasœur.Jen’aimepasça.Vraiment.Livieatoujoursété
gentilleavecmoi,maisGregnem’aimaitpasbeaucoupetc’estdepuisquej’acceptedel’aideràfairesesblaguesqu’ilabienvouluêtremoncopain.
—T’essûr?Ellenevapasêtrecontente.Il sourit en hochant la tête. Je rassemble mon courage et part voir Livie en train de jouer à la
balançoire.—SalutLivie.Ellesouritets’élanceplushaut.Ellevabientôttoucherleciel.Outomber.—Tuveuxjoueravecmoi?demande-telle.Jeme tourneversGregquimefaitdegrosyeux. Jesouffle. Jepeux le faire, jeveuxqu’ilm’aime
bien.—Enfait,jevoulaistemontreruntruc.Sit’enasenviebiensûr.Elleralentitetsautedelabalançoire.—C’estquoi?—Unesurprise.Ellemeregarde,soupçonneuse.RefuseLivie.Siturefuses,tunepleureraspas.—C’estpasunedevosblagues?IlestoùGreg?Jemeretourne,maisGregs’estcaché.—Ilestdanslamaison.Techniquement,jeneluiaipasmenti.Jenesuispassûrequeçasuffise,maistantpis.Ellesouritet
mesuisjusquelaterrasse.Jem’arrêtedevantlagrandeporte-fenêtreentrebâillée.—Vas-y,passedevant.Ou pas. Refuse. Ne rentre pas Livie. Elle sourit et passe devant moi. Elle pousse la porte pour
l’ouvriretjefermelesyeux.Jeneveuxpasvoirça.Jel’entendscrieraumomentoùleseaud’eaufroideluitombesurlatête.Gregéclatederireentapantdanssesmains.
—BienjouéEthan!Liviesetourneversmoi,elleestfurieuse.
—Tu…Tu…Tuestropnul!Ellefrottesarobetoutemouilléecommesiçapouvaitarrangerquoiquecesoit.Gregs’approcheet
poseunemainsurmonépaule.—T’esmonpoteEthan,monmeilleurpoteàpartird’aujourd’hui.Jedevraism’en réjouir,mais j’ai le ventrenoué.Livienous crie dessus.Elle est vraiment très en
colère,cequifaitrireGregencoreplusfort.Samantha,leurmaman,adûnousentendre,carellearriveendemandantcequ’ilsepasse.Voilà.Ellevaêtreencolère,nevoudraplusmevoiretjel’auraischerché.Ellenemedonneraplusdegâteaux et jedevrais recommenceràvoler.Elle souffleet se tourneversnous.
—Greg,dans tachambre.Ethan,dans lacuisine.Tuvas t’asseoiret tunebougespasavantque jerevienne.
Greg ça ne l’empêche pas de riremême si c’est discret, je le vois. Il part dans sa chambre et jem’assisdanslacuisine.Jesuistoutseul.LivieetSamanthasontpartiesàl’étagesurementpoursesécher.SamantharedescendavecLivie.Cettedernièremetirelalangueensortantetpartrejoueràlabalançoire.Aumoins,ellen’apaspleuré.Samanthas’assitàlatableenfacedemoi:
—Tusais,tun’espasobligédetoujoursfairecequ’iltedit.Jelaregardeenmedemandantdequoielleparleetelleajoute:—Greg.Cen’estpasparcequ’ilestplusgrandquetoiquetudoisfairetoutcequ’iltedemande.Je
voisbienqueçat’attristedefâcherLivieetc’estnormal.Alors,pourquoilefais-tu?Jegrattemononglesurlatableenregardantleboiss’écailler.JepourraismentiràSamantha,maisje
larespectetroppourça,elleesttellementgentilleavecmoi.—C’estjuste…j’aipasbeaucoupdecopainsetGregiladit…Ellesouffle—Gregestunpetitdiable.Dèsquesonpèrealedostourné,iln’écouterien.Etcen’estpasparce
queturefusesdel’aideràfairedesbêtisesquetuneserasplussoncopain.Detoutefaçon,Gregoupas,tuviensquandtuveuxEthan,tulesais?
Ellemesourit.J’adorequandSamanthamesourit.Elleselèveetsortunbalaietuneserpillèrepournettoyernotrebêtise.Jemelèved’unbond.
—Jevaislefaire,jesuisdésolé,jem’empressedeluidire.Ellelèveunemainau-dessusdematêteetjesursauteenreculant.Moncœurs’estaccéléréetilme
fautquelquessecondespourréaliserqueSamanthanemetaperaitpascommemaman.Ducoupjem’enveuxquandjevoissonregardtristeetj’enfoncemesmainsdansmespoches.
—Désolé.Ellesecouelatêteensouriant,maisjevoisqu’elleseforce.—Non,c’estmoi.Excuse-moiEthan,jen’aipasréfléchi.Jedétournelesyeux.Cetteconversationmemetvraimentmalàl’aise.—Ethan?J’oseunregardversSamanthanesachantquoifaired’autre.—Jem’occupedenettoyer,maissituveuxbienm’aideràfairedeslasagnesaprès,peutêtrequetu
pourrasresterpourlesgoûter,qu’est-cequetuendis?
Chapitre7
Ethan
Danslemilieudel’après-midi,Jennyrentrechargéed’unegrosseboiteavecunmecsursestalons.Celui-ci sourit de toutes ses dents, et attrapeLivie par les épaules en lui chuchotant quelque chose àl’oreille.C’estlemecdelaphoto,jelereconnaisetmespoingsseserrentsansquejeneleveuille.Jemedemandeàquelpointilssontprochescesdeux-là.Maisquisuis-jeàpenserça,alorsquejemesuisenvoyésacolocquelquesheuresplus tôt?Et jen’aipasété trèssubtilàcesujet.Mais j’aivuàquelpointçaluifaisaitmaletjemesuisjetédedanspourenfoncerleclou.C’étaitimmatureetcruel,maissurlecoupjevoulaisqu’ellesouffreautantquej’avaissouffert.Jennym’ignore,maisnousprésentetoutdemême. Hayden. C’est quoi ce nom à deux balles ? Elle pose la boite sur la table de salon et Livies’accroupit devant en l’ouvrant. Elle attrape son contenu et le serre contre elle. Un chat. Mais pasn’importelequel.Évidemment,Livieetlasauveusedescausesperdues.Ilestàmonimageondirait,jen’étaispeutêtrequeçapourelle.Cettepauvrebêten’aquetroispattesetuneoreillecoupée.Iladûenvoirdebellesluiaussi.Gregs’approcheetcaresselabouledepoil.
—Commentils’appelle?—Maya.Etc’estelle,luirépondsasœur.Illuisouritetjerepenseàcejour.AujouroùLivieagagnécepetitsurnomdepetitlapin.Nimoini
Gregn’ycroyions,maisellen’arienlâchéetaréussiàlesauver.Jennys’assitdanslecanapéendisant:—Tasœurestunecrème.Elle s’est ramenéeaveccechatunsoir. Il étaitaffreux,agressif, ilm’a
bousillé la moitié des meubles sans compter les coups de griffes dont on a hérité dès qu’onl’approchait…Jevoulais lemettredehors,maisellea refusé.Ellem’aditquecettepauvrebêteavaitseulementdepatienceetd’amour.Unecrème.
JevoisleregarddeGregsurmoi.—Vatefairefoutre,jerépliqueaussisec.Ilrit—Ouais,certaineschosesn’ontpaschangé.
Greg
12ansplustôt
Livie:8ans
Ethan:11ans
Greg:13ans
Çafaitvingtminutesqu’oncherchemasœurdanscette foutueforêtet jecommencesérieusementàm’inquiéter.Ons’estséparéavecEthanpourlaretrouverplusviteparcequ’ilvabientôtfairenoiretquesionnerentrepastrèsvitelesparentsvontnoustuer.
—Livie!Onétaitjustepartifaireunfootsurleterrain,ellejouaitdanssoncoinàl’oréedelaforêtetquandon
a voulu rentrer elle avait disparu. Elle aime bien grimper aux arbres, alors on s’est dit qu’elle étaitsurementrentréedanslaforêt.
—Livie,ondoitrentrer!Jeregardeautourdemoileventrenoué.Papavametuers’illuiarrivequelquechose,ilditquequand
iln’estpaslà,jesuisresponsable,quejedoislaprotégerparcequec’estmoil’hommedelafamille.Etlàj’aipeur.Trèspeurd’avoirfaillietdeledécevoir.Ill’adoretellementLivie.Jesuisunpeujalouxdesfoisparcequ’illuifaitpleindecadeaux,maisilditquejesuisunhomme,jen’aipasbesoindecadeau.Ilditquec’estsaprincesse.Sapetiteprincesse.Parfoisj’ail’impressionquec’estsapréférée.J’entendsunbruitàmadroiteetjememetsàcourir.Quandj’aperçoissesbouclesblondespenchéesverslesol,l’angoisses’envole.Ethanestàcôtéd’elle,etlaregardebizarrement.
—Livie,tum’asfoutulatrouilleoùt’étais?jedemandesoulagé.Elleseretourneetseforceàsourire,maisjevoisqu’ellepleure.—LepetitlapinGreg…ilestblessé.Jemerapprocheunpeuplusetregardeàsespieds.Unpetitlapinestlà.Ilrespireencore,maisiln’a
pasl’airenbonpoint.Ils’estprislespattesdansunpiègeetsapatteestcoincée.Jem’accroupisenleregardant.
—Jepensequ’ilesttroptardLivie.Ilrespireàpeine.Leslarmescoulentsursonvisageetelleinsiste:—Sors-ledelàGreg…s’ilteplait.Ethanneveutpasquej’ytouche.JemetourneversEthanquiregardemasœurtristement.—TunepeuxpastouslessauverLivie,murmure-t-ild’unetoutepetitevoix.—Aide-moionvalesortirdelà,jeluiréponds.Jesaisqu’ellene lâcherapas l’affaireetmêmesi jepensequ’iln’aaucunechance,onpeutquand
mêmetenterquelquechose.Ethans’agenouilleetouvrelepiègependantquejetiensl’animal.Ilsedébatet j’essaie de lemaintenir,mais il n’a pas l’air d’apprécier. Livie décide d’intervenir et l’attrape aumomentoùjelelâche.Elleleblottitcontreelle,telunpouponetmurmureenlecaressant:
—N’aiepaspeur,onvas’occuperdetoi.Elleluiinsuffleunetelletendressequemêmemoij’ailecœurquiseserre.—Mamanvalesoigneretiliramieux,dit-elled’untondéterminé.Cen’estpasunequestion.Jenetentepasdel’endissuader,ilfaitpresquenoiretonvavraimentse
faire grondermaintenant.On rentre enmarchant vite et quand on entre dans lamaison, papa est déjàfâché.
—Oùvousétiez?Tuasvul’heureGreg?—Jesuisdésolépapa…Je ne cherche pas d’excuse. Je ne veux pas lui dire que j’ai perdu Livie, il serait déçu.Maman
s’approched’elleenvoyantlecadeauquemasœuraramené.—Tum’asramenédutravailLivie?Mamanestvétérinaireetcen’estpas lepremieranimalblesséqueLivie ramèneà lamaison.Elle
hochelatêteetracontequ’elleesttombéesurcettebêtedanslaforêtenallantsepromenertouteseule.Jevoispapameregarderenfronçantlessourcils.JebaisselesyeuxetmetourneversEthanquin’apasditunmotdepuisqu’onest rentré. Ila lesyeuxsurLivie,encore.Çam’énerve, jen’aimepasquand il laregardecommeça.Jevaisluidirequ’iln’apasintérêtàtoucheràmapetitesœur.
—Arrêtedelaregardercommeça,dis-jedurement.Ilsetourneversmoiensursautant.—Je…jenelaregardaispas…—T’asintérêt.Ildéglutitetjeleslaisse.JeneveuxpasrevoirLiviepleurerquandmamanluidiraqu’ellenepeut
rienyfaire.Jemonteversmachambre,maispapam’arrêteenhautdel’escalier.—PourquoielleétaittouteseuleGreg?Jememordslajoueencherchantunebonneréponse.—Ellen’étaitpastouteseule…onjouaitet…Ilserrelamâchoireenmepointantdudoigt:—Nelaquittejamaisdesyeux,jamais.S’illuiarrivequoiquecesoit,tuserasresponsable.J’aienviedeluidirequecen’estpasmafauteetquec’estLiviequiinsistetoujourspourveniravec
nous,maisjeneveuxpasledécevoir.Jeluiprometsqueçanesereproduiraplus.Ilhochelatêteetmetapel’épaule.Jeprendscegestecommeunsoulagement.Etjemeprometsdetoutfairepourqu’ilsoitfierdemoi.Jelaprotègeraistoujours.Jeprotègeraismapetitesœurquoiqu’ilarrive.
Chapitre8
Ethan
Jeregardel’heuredéfilerpendantqueGregmeparle:—Fautqu’t’arrêtesdefairelatronche.T’asétépénibletoutelajournéeEthan.—Quoi ? Je suis censé l’accueillir la bouche en cœur ?Ona traversé lamoitié de l’état pour la
retrouveretMademoisellefaitcommesitoutçaétaitparfaitementnormal.—Maisnon…elle sait plus comment s’yprendre c’est tout.Etdis-le cequi tegêneEthan.Tues
blesséqu’ellerefusedet’enparlerpasvrai?Jemeredressedansmonlit.—P’têtrebien.Il se passe unemaindans les cheveux enme regardant. Je devine aisément sonhésitation,mais je
n’oublie pas qu’il m’a bien eu sur sa soi-disant révélation à vouloir retrouver sa sœur. On se fixequelquessecondesavantqu’ilajoute:
—C’estàellededéciderdeteledireoupas.Elleasesraisons.Debonnesraisons.Alorsessaiedefaireuneffortd’accord?
Jemelèveetm’approchedelaporte:—Ouais…jevaisfaireuntour,c’estpaslapeinedem’attendre.Jel’entendsmarmonnerquelquechose,maisjenecomprendspasetsorsdemachambred’hôtel.Je
regardel’heure.Merde,ilm’atenulagrappe.J’espèrearriveràtemps.J’aientendutoutàl’heureLiviedireàJennyàquelleheureelletravaillaitcesoir,etjecomptebienlasurprendreentêteàtêtepouravoircettepetiteconversation.Etenplusilpleutaverse…génial.Jecourslelongdutrottoirjusqu'àchezelleet patiente sur le trottoir en face de son immeuble à guetter si elle sort. Je suis trempé jusqu’aux osbordel.Jebalayelesgouttesdemonfrontquandsasilhouetteapparait.Ellecourtjusqu'àunevoitureenserrantsonsacsurl’épaule.Elleportelesmêmesvêtementsqu’hiersoir.Çadoitdoncêtresatenuedeserveuse.Ellerentraitsurementduboulotquandellenousa…entendu.Cette idéemefaitgerber,maisimpossiblederevenirenarrière.Jem’avanceetparsencourantjusqu'àelle.Elles’estarrêtéedevantlaportièrede lavoitureet semble tenterdésespérémentde l’ouvrir.Arrivéà sahauteur, je lui attrape lebrasetlaforceàseretournerenlaplaquantcontrelaportière.MonDieuqu’elleestbelle.Elleinspire,les yeux effrayés. Je passe en revue chaque détail qui la compose de plus près, et à cet instant, jeremercielecieldem’offrircespectacle.Lapluieafaitcollersonchemisiercontresapoitrine.Iln’estpasdifficilededeviner lescontoursde sonsoutien-gorge.Blanc,heureusement. Jen’auraispasdonnéchèredemapersonnesinon.Sesbouclesontlaisséplaceàdesmèchesfollesbienpluslissesqu’àsonhabitude, et je passe un doigt dessus en tirant sur l’une d’elle. Ce qui a pour effet de la sortir de satorpeuretellemepousse,lesdeuxmainssurmontorse.
—T’esmalade!Tum’asfaitpeur!Bon,ilesttempsdereprendremesesprits.Unpeudedistancemeferadubien.Jem’imaginaisdéjà
passerunemainsousl’ourletdecettejupetropcourte.—Ondoitparler.Ellesouffleenseredressant:—Pasmaintenant.Jedoisallertravailler,jesuisdéjàenretard.
Sij’enaiquelquechoseàfoutre.Jem’avancedenouveauverselleetposemesmainsàplatsurletoitdesavoituredechaquecôtédesatête,enmeretenantdemepressercontresoncorpsquimehurledelatoucher.
—3ansquej’attendsdesexplications.3ans.Tonboulotattendraquelquesminutesdeplus.Elleme fixe dans les yeux, la respiration saccadée. Sa poitrine se lève et redescend à intervalle
régulier.Jebaisseuninstantlesyeuxverssapoitrinegénéreuse.Putain,ellen’avaitpasautantdeseinsàl’époque.Etjerêvedelesprendredansmesmainsetdepassermalanguesursespetitstétons.Merde,merde,merde.Calme-toi Ethan. Pense à autre chose, il faut penser à autre chose, comme cette foutueconversation!
—PourquoiLivie?Pourquoituespartie?Onavaitdesprojets,jet’aimais,j’auraistoutfaitpourtoi.Est-ceque…est-cequec’estàcausedeça?Denous?
Elle a l’air surprisede ceque jeviensde lui dire. Jeme suisposé laquestionunmillionde foismêmesijesaisaufondquecen’estpaspossible.MaisLivieatoujourseuunecertaineappréhensionàvoirleschosesunpeuloin.Pasmoi.Moijemevoyaisdéjàfairemavieavecelle.Maiselleétaitjeuneetj’essayaisdenepastropluifairepeur.Seulement,parfoisçam’échappaitunpeumalgrémoi.Ellefinitparrépondre:
—Non,çan’a rienàvoir.Ethan, il fautvraimentque j’yaille.Onen reparleraplus tard,cen’estvraimentpaslemoments’ilteplait.
Jemepencheversellepourinsister,maismefaisprendreàmonproprejeu.Monnezeffleureunedesesmèchescolléessursajoueetjejurequejenesaisplusquijesuis,oùjesuis.Labossedansmonjeancommencesérieusementàmefairemalpournepasarrangerleschoses.Jesuisincapabledem’écarterd’elle. Mon cœur tambourine comme pour me rappeler que ça a toujours été elle. Elle et personned’autre.Maiscommentoubliercequ’elleafait?MêmesiGregneluienportepasrigueur,siquelquechosen’allaitpas,elleauraitdûm’enparler.Lebesoindefermeràclélaportedemoncerveausefaitressentirafindemelaisseralleràpressermeslèvrescontrelessiennes.Jefermelesyeuxpourprofiterdecemomentquej’ai l’impressiond’avoirattendutoutemavie.Sansmêmem’enrendrecompte,moncorpss’estrapprochédusienet jepeuxsentirsonpoulss’accélérer.Savoirqueje luifais toujoursdel’effetm’arracheunsourire,quandjereprendsconsciencedecequejesuisentraindefaire.
Jereculed’unpasetluiprendslebraspourladécalerdesavoitureenluiouvrantlaportière.Ellehoche la tête pourme remercier et je referme la porte derrière elle.Elle s’affaire àmettre le contactquandjeprendsplacesurlesiègepassager.
—Jet’accompagneetcen’estpasnégociable.—Ethan…Jetournelatêteverselle:—Non.Négociable.Ellejureentresesdentsenmettantlecontact.Çanemanquepasdem’arracherunrireetjeposeune
mainsurmoncœur:—LivieJohnsquijure!Ehbien,c’estnouveauça!Ellemejetteuncoupd’œil,sourireencoin,avantdesecouerlatêteetfixerlaroutedevantelle.—Jebossejusqu’àminuit,tuvasm’attendretoutcetemps?Minuit?Putainouais,çarisqued’êtrelong.— Pas grave, j’avais rien demieux à faire de toute façon, je lui réponds en croisant les mains
derrièrematête.Lesruesdéfilent lesunesaprès lesautres.Lesoleilsecoucheetnousoffreun jolipanoramaavec
l’averse qui commence à se calmer. Rien à voir avec Cover-road soit dit en passant. Je ne sais pascommentellefait.J’aimenotrevilled’enfance,sesétenduesvertesloindesbuildingsetdel’affolementdecetteville.Etlaplage.J’adorelaplage.
—PourquoiNewYork?Laquestionm’aéchappé.Ellemejetteuncoupd’œilavantdereportersonregardverslaroute.Elle
restesilencieuseunbonmomentavantderépondre:—J’apprécielafoule.Mouais. J’y crois qu’àmoitié. Livie n’a jamais été du genre à se faire beaucoup d’amis et restait
souventenretrait.BonGregn’yétaitpaspourrien,maisquandmême,jenel’imaginepasenreinedesoirée.Alorsjesupposequec’étaitplutôtsafaçondenepasêtreretrouvée.Ellemeprendvraimentpouruncrétin.
—Huitmillionsquatrecentmille.Ons’arrêteàunfeuetrougeetellehausseunsourcilenmeregardant.—C’estlenombred’habitants.Huitmillionsquatrecentmillepersonnesviventdanscetteville.Jene luidispascequim’apousséàregarder.Jenesuispassûred’êtrecapablede luiavouerde
toutemanière. Elle fixe la route devant elle en serrant le volant entre sesmains, faisant blanchir sesjointures.Jemedemandesielleadevinécequej’entendaisparlà.Lefeupasseauvertetelleredémarre.
—Etsurseshuitmillions,ilafalluquetutetapesmameilleureamie,dit-elled’untonsec.Lavoirjalouseestloindemedéplaire.Alorsjedécidedenepaséviterlesujet:—Elleétaittouteseuleàdéprimeraubardenotrehôtel.J’aivoululuirendrelesourire.—Elleétaittouteseule?répond-elleenplissantlesyeux.Boncen’estpastoutàfaitlaréactionquej’espérais,maisj’auraisessayé.—Ouais.Elleétaitdéjààmoitiébourréequandjel’airejoint.Elles’engagedansunparkingunpeutropvite,cequimefaitattraperletableaudeborddevantmoi.—HeyLiv,ducalme!Ellesetourneversmoi.Sesyeuxsesontobscurcisetjedoisdirequelebleuquej’yvoisd’habitude
nesedevinemêmepas.—Elleétaitbourrée,déprimée,ettoitoutcequetuastrouvéàfairec’estdeprofiterd’elle?Houla,maisçavapaslatête?—Jen’appelleraispasçaprofitermapuce.J’avaispasséunemauvaisejournée,elleavaitpasséune
mauvaisejournée,ons’estbienentendusurlesujet.Ellesortdelavoitureenclaquant laportièrefaisant trembler tout l’habitacle.Super.J’auraispeut-
êtremieuxfaitdefermermagueule.Pouravoiruneconversationmaintenantçarisqued’êtrecompliqué.Jelarejoinsenvitesseetluiattrapeparlebraspourl’arrêteraumilieuduparking.
—C’estquoitonproblème?jeluicrie.Elledégagesonbrasenreculant.—Monproblème?Quelproblème?Toutvaparfaitementbien!C’est comme un écho.Cette phrase qu’elle prononce, ce ton qu’elle utilise, je le connais,mais je
n’arrivepasàremettreledoigtdessus.Jesecouelatêtepourrevenirauprésent.—Bonécoute,jenevaispasteredirequec’esttafaute,tulesais.Jenny,jenel’aiforcéàrienalors
nemeprendpaspourquelqu’unquejenesuispas.C’estellequim’ainvitéechezelle.—Pourquoituneluiaspasdittonnom?Sontons’estadoucietquandjevoissesyeuxsevoiler,jedevinequ’elleretientseslarmes.Ilmefaut
unedéterminationàtouteépreuvepournepaslaprendredansmesbras.—Qu’est-cequeçapeutfaire?Ellesecouelatêteenessuyantunelarmeaucoindesonœiletfaitvolte-faceenprenantladirection
dubar.
Chapitre9
Livie
—Livie, t’es à la bourre. Laisse-moi deviner, il pleut ?me demande Fred tandis que j’essaie deremettreunpeud’ordreàmescheveuxetmesvêtements.
—Jesuisaucourant.Vusafaçondemefusillerduregard,jen’auraispeut-êtrepasdûluiparlerdecettefaçon,maisEthan
m’aénervé.Etavecladisputequejevenaisd’avoiravecJenny,jen’avaisvraimentpasbesoindeça.3ansquejeconnaisJennyetc’estlapremièrefoisqu’onsedisputait.J’aibeauavoiressayédeprendresurmoi,quandellem’abalancéun«ilfautqu’onparle»,jen’avaisqu’uneenviec’étaitdeluiarracherlatêteaprèscequ’elleavaitfaitavecEthan.Mêmesijesaisqu’ellen’avaitaucuneidéedequiilétait,çanefaitpasmoinsmalpourautant.Ethans’installesuruntabouretaubaret jeposemesmainssurmeshanchesenmedemandantsiFredpourraitlevirersijetrouvaisunebonneexcuseàluidonner.Cédrics’approchedeluietjel’entendsluicommanderunebièretoutenmeregardantavecinsistance.Connard.C’esttoutcequ’ilm’inspireàcetinstant.JemedétournedeluienpassantderrièrelebartoutensentantleregarddeFred.J’attrapemontablieretlenoueautourdematailleavantdemeretournerverslui.
—Excuse-moi.Mauvaisesjournées,jetentepourm’excuser.Cette répliqueme fait rire jaune,maispassons.Sesdoigts tapent sur lebar et jeme sensprise au
piège,alorsqu’ilmebarrelechemindelasortie.—Quoi?—Soit tu tecalmes,soit tu rentreschez toiLivie.Sic’estpour faire fuir lesclients, jepeuxm’en
chargermoi-même.Çac’estsûr!J’afficheunsourirepourleconvaincrequemonmomentd’égarementestpasséetilfinit
parsedécalerpourmelaisserpasser.J’attrapelechouchouquejelaissetoujoursdanslapochedemontablieretrelèvemescheveuxenchignon.Çamepermetd’yvoirplusclairetd’êtreplusréactiveencasdecasse.Ouiparcequejesuisplutôt:
«c’estpasmoi,c’estlemurquiabougé.»Vousvoyezlegenre…JemetourneversEthanquiboitunegorgéedesabièretoujoursàm’observer.—Je finis tard tu sais, tun’espasobligéde rester,on severrademain, je tentede leconvaincre
mêmesijedevinedéjàsaréponse.Ilsecouelatêteetcroiselesbrasdevantlui.—Nope.Jereste.J’aihâtedetevoirtetrémousserdanscettepetitejupe.J’inspire bruyamment de surprise et le sang me monte aux joues. Il se met à rire, suivi de Fred
derrièremoi.—Etlà,c’estpasdeladraguepeut-être?meditmonpatrond’unregardinsistant.IlfaitréférenceànotredernièreconversationàproposdeCédric,cequinefaitquememettreencore
plusmalàl’aise.Jejetteuncoupd’œilàcedernier,tropoccupépouravoirentendu.Ouf.Unproblèmeàla fois s’il vous plait. Je commence à prendremes premières commandes et Ethan nemanque pas dem’envoyerunedesespiquesdèsqu’ilena l’occasion.Jenesaispasàquoi il joue,mais jesuis loind’êtred’humeurpourça.Quandl’heuredemapauseapproche,jesuissoulagédepouvoirm’éloignerdetoutecetteagitation.Jefaisunpetitarrêtauxvestiairesettendslamainpourattrapermonélixir,maisje
m’arrêteprisederemords.Sijusqu’icij’arrivaisàétoufferlavoixquimedisaitquecen’étaitpasunebonneidée,savoirEthanàquelquesmètresdemoimefaitmesentircoupable.Quandj’aicommencé,jevoulaissimplementquelescauchemarss’arrêtent,maisaujourd’hui,jecroisquec’estdevenuunebonneexcuse.Jerefermemamainpourtrouverlecouragederésisteraumomentoùj’entendsdespasderrièremoi.JerefermemoncasierenhâteetAmyentredanslesvestiairesenouvrantsoncasieràcôtédumien.Je suis soulagé qu’il s’agisse d’elle et me décide à prendre un comprimé qui me permettra de medétendresuiteauxderniersévènements.Tantpispourmaconscience,ellenem’apasétéd’unegrandeaidejusqu’àaujourd’hui.Amyattrapeunebouteilled’eauets’adosseàsoncasierenavalantunegorgée.Amyestserveusetoutcommemoi.Elletravailleicidepuisenvironunan,maisjel’aiconnubienavant.Ellefaisaitpartiedeshabituésavantdepostuleretc’estgrâceàellequej’airencontréWill.
—Alors,c’estquilemecquinetequittepasdesyeux?Sij’étaisdécidéàoublierEthanletempsdemapause,ondiraitquec’estraté.Jehausselesépaules
enrefermantmoncasier.—Unex.L’énonceràvoixhauteestdouloureux,maisc’estbiendeçaqu’ils’agitnon?Jeretienslagrimace
quiessaiedesefaireuncheminsurmonvisageetsouritàAmyavantdeprendrelechemindelasortie.—Etc’esttout?Jemeretourneavantdepasserlaporte.Sonairespièglenemeditriendebon.Avecsoncarréaussi
noirquel’ébèneetsesyeuxenamandecouleurd’ambre.Ellemefaitpenseràunloupguettantsaproie.Unprédateur,voilàcequ’elleest,mêmesi j’aimisdu tempsà lecomprendre,aujourd’huiellenemetrompe plus. Je préfère ne rien répondre et prends le couloir pour rejoindre l’arrière-salle.C’est unepetite pièce réservée au personnel pour profiter de quelques moments de calme. Fred nous a bienchouchoutésnousoffrantdanscetendroitdequoinousressourcer.Ilyainstalléungrandcanapéd’anglelelongdumurdufondencuirnoir.Surlemurd’enface,ungrandplandetravaildecuisinecomprenantdenombreuxrangements,quel’onpeututiliserànotreguise.Unpetitfrigodanslecoindroitainsiqu’unecafetièreetunebouilloiresontànotredispositionpourplaireaugoûtdetous.Jem’installesurlecanapéaprès avoir fouillé dansma réserve personnelle et posemes pieds sur la table basse en observant leplafond.Legoûtsucrédessablésquej’affectionneparticulièrementmeglissesurlalangue,etjefermelesyeuxsentantl’effetdemonélixircommenceràfairesoneffet.MesépaulessedétendentetjeremercieWilletsesremèdesmiracles.C’est lemomentoùmaconscienceseremetàfroncerlessourcilsenmerappelantquesiEthanserendcomptedemonpetitpenchant,ilrisquedeneplusjamaism’adresserlaparole.Cequimefaciliteraitbienleschosesaufond,maisl’idéedeledécevoirmesortdemespenséesaumomentoùjesenslefauteuils’affaisseràcôtédemoi.Cédricmesouritenpenchantlatêtesurlecôté,m’offrantun sourire charmeur. Jemedemande siFredn’auraitpas raisonquand je levoisme sourireainsi.Ilpasseunemaindanssescheveuxchâtainquirelèveversl’arrièreavantdes’arrêtersursanuque.Jel’aitoutdesuitetrouvésympathiqueetenlevoyantlorgnersurmapetiteboitedepéchésucrée,jeluipointedudoigt.
—Tuenveux?Ilacquiesceetdévoreunebouchéeenhochantlatêted’unairappréciateur.Etvoilà,j’aibeauvouloir
essayer d’oublier Ethan, même cette scène me ramène indubitablement à lui. Serais-je capable del’oublier un jour ?Non, je ne pense pas, il estmarqué au fer rouge dans chacune demes cellules etj’auraisbeauessayerdetoutesmesforcesdelechasser,jesaisquej’enseraisincapable.Moncœurluiappartientdepuissilongtemps,celan’ajamaisétéunchoixréfléchi,maisunbesoinincontrôlable.
—C’esttoiquilesasfaits?demande-t-il.—Demespropresmains.Bond’accord,jemevanteunpeu,maisjenesuispaspeufièredecestrésors.Ilsouritdetoutesses
dentsenavalantladernièrebouchée.
—Alors,Fredn’estpastropchiantavectoi?jeluidemande.Ilhausselesépaulesensoutenantmonregard.—J’aiconnupire.Unpeubourru,maisiln’estpassiméchantqu’ilveutlelaisserparaitre.Je pouffe de rire.En effet, c’est tout à fait l’effet qu’il donne, on dirait qu’il a déjà bien cerné le
personnage.—Fais-toiplaisir,j’enaipleind’autres,jeluidisenlevoyantlorgnersurmaboitedebiscuitset
melève.Jeregagnelasalleetdécouvrequ’Ethann’apaslaissétomber.Ilditqu’ilveutdesexplications,mais
que vais-je bien pouvoir lui dire ? La vérité ? Impossible. Je vais devoir trouver une parade pour yéchapper,maisjen’aiaucuneidéedecommentm’yprendre.Ilmefixealorsquemespenséesessaientdetrouverunesolution,aumomentoùjesensunemainseposersurmahanche.JesursauteetvoisCédricmechuchoteràl’oreille.
—Ilvafalloirquetumemontrestestalentsencuisineundecesjours.Endehorsd’icibienentendu.Ilmerenvoieunclind’œilavantdemelâcheretderegagnersonpostesousleregardamusédeFred.
Je n’en crois pasmes yeux. Fred avait raison. Quand j’ose un regard vers Ethan, il m’observe avecinsistance,sesdoigtscrispéssursonverre. Ilesténervé?Parfait.Cen’estque justiceaprèssonpetitcinémaavecJenny.J’attrapemonplateaupourreprendremonserviceenignorantvolontairementEthan,maisquandjecroiseleregarddeFredquipouffederire,jeluibalancelapremièrechosequejetrouvesouslesmainsàlafigure.Iladelachance,cen’étaitqu’untorchon.Ill’évitedejustesseenl’attrapantauvol,et je lui tire la langueenrevenantdans lasalle.Maisquandj’aperçoisWillentrerdans lebar, jepeste. C’est officiel. C’est vraiment une mauvaise journée et je n’ai jamais eu aussi hâte qu’elle setermine.
Livie
12ansplustôt
Livie:8ans
Ethan:11ans
Greg:13ans
Jeme réveille en sursaut. J’ai encore fait un cauchemar.Un cauchemar que je fais souvent et quim’empêche deme rendormir si je suis toute seule. Jeme lève et essuiemes larmes en sortant demachambre.Jenefaispasdebruitparceque jeneveuxpasqu’ilm’entende.Iln’aimepasque jedormeavecmonfrère. Ilditque jenesuispasunbébé.Qu’à8ans,ondortdansson lit,pasavecsongrandfrère.J’arrivedevant laporteet l’ouvredoucement. Il fait toutnoir,mais la lumièrede la luneéclaireassezparlafenêtrepourvoirmonfrèredormir.Jerefermelaportederrièremoietm’arrêteàcôtédulit.
—Greg?jechuchote.Ilnebougepas.Jeluitapotel’épaule.—Greg,tudors?Ilouvreunœil.—Plusmaintenant.Qu’est-cequetuveux?Jetrituremesdoigts.—J’aifaituncauchemar.Ilsouffleetseredressedanssonlit.—PapavanousgronderLiv.—Jesais,maisj’aipeur.Ilmeregardeetjevoisqu’ilhésite.Ilfinitparcraqueretouvrelescouvertures.—Allezviens.Jem’allongeàcôtédeluietilmeregardelessourcilsfroncés—C’étaitquoitoncauchemar?Jenerépondspas.Jenerépondsjamais.Parcequepapaseraitvraimenttrèsfâchésijeleracontaisà
monfrère.Ilsouffleetm’attrapelamain.—Tusaisquesiquelqu’unt’embêtetupeuxmeledirehein?Jehochelatêteetilinsiste:—Tuneveuxvraimentpasmeledire?—Onpeutjustedormirs’ilteplait?Ildéposeunbisousurmonfrontenrépondant:—D’accord.Bonnenuitpetitlapin.
—Bonnenuit,supergrandfrère.Greg c’est mon super grand frère, parce qu’il est toujours là quand j’en ai besoin. Il est parfois
embêtant avec ses drôles de blagues avec Ethan et me fait pleurer parfois. Mais quand quelqu’unm’embête,ildevientcesupergrandfrère.Etaveclui,j’aiparfoisl’impressionqueriendemalnepeutm’arriver.
Chapitre10
Ethan
—C’estquilep’titcon?jedemandeàFredenfaisantunsignedetêteversleconnardquiaoséposersessalespaluchessurLivie.
Bienqu’il soitde l’autrecôtédubar, jenepeuxm’empêcherde levoirobserverLiviedéambulerdanslasalleaumilieudesclients,avecunpeutropd’intérêt.Fredposesesmainsàplatdevantmoiensouriantcommeunabruti.
—Cédric.Etonnemanquepasderespectauxemployéschezmoi.Ilpointedudoigtunécriteauaccrochéaumuroùestinscriteentouteslettres:«Toutmanquederespectenverslepersonneldel’établissemententrainerauneexclusiondéfinitive.»P’titcon,çaluivacommeungantpourtant.Jepréfèrenepasreleveretavaleladernièregorgéede
mabièreavantdeluienrecommanderune.Jen’aipasaimécequej’aivu.Pasdutoutmême.Ilabalayémabonnehumeurd’ungestealorsquejepassaisunebonnesoirée.MaterLiviedanscette jupetoutenrougissantdèsquejeluifaisaisunepetiteremarqueétaitdrôle.EtpuisFred,lepatrondubar,çaavaitl’airdebienlefairemarrer.Onadiscutéunpeuetçam’apermisdepasserletempsdefaçonagréable.Je tournemon regard vers elle etmets unmoment à la débusquer.Elle est dans un coin de la salle àdiscuteravecuntype.Putain,ilyenacombienquiluitourneautouraujuste?Çanem’étonnequ’àmoitiéenmême temps. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir toute la beauté que cette fille dégage. Il luiattrapelementonetjemelèvebiendécidéànepaslalaisserflirterdevantmoisansluifairecomprendrequ’ellepourraitaumoinsm’évitercespectacle.Étantdedos,ellenemevoitpasarriver,mais lemecm’a déjà repéré et laisse retomber samain enme regardant avecméfiance.Ouais c’est ça, dégage letordu.JeposeunbrasautourdesépaulesdeLiviequiseraiditàmoncontact,maisjelaresserrecontremoibiendécidéàfairecomprendreàcemec,qu’iln’aaucunechanceavecmoidanslesparages.J’aiconsciencequejesuistotalementirrationneletpourtantjenepeuxpaslalaisserfaire.Detoutefaçon,cemecestforcémentunpervers.Ilalatrentainebientassésicen’estpasplus.Avecsacoupeenbrosseetsamoustachedignedesannéesquarante,mêmesij’étaissûrequ’ilnepourraitriensepasserentreeux,jeneluiaccorderaispasmaconfiance.Untrucpuechezlui,mais jeneseraisdirepourquoi ilmedonnecetteimpression.Livietentedesedégager,maisc’estpeineperduealorsquejelatiensfermementcontremoi.L’hommeenfacedenousmedévisageavecunrictusensortantunpaquetdecigarettesdesapoche.Ondiraitquetoutçalefaitrire,maisjenevoispascequ’ilpeuttrouverdrôle.
—Tunousprésentesmapuce?jedemandeàLiviesanslequitterdesyeux.Il émetunpetit rire, sortunecigarettedupaquetqu’il tiententre sesmainsavantde laporterà sa
bouche. Tout dans son attitudeme dégoute. J’essaie de comprendre ce qui provoque enmoi une tellerévulsionchezcethomme.Soitma jalousieaatteint sonparoxysme, soit je suiscomplètementparano.Voyantque jene lachepas la furiequiessaie toujoursde sedégager, elleprononcemonprénomaveccolère àplusieurs reprises.Mais je l’ignore totalement. Il nouscontourneavecundernier regardversLivie.
—Onsevoitplustardbeauté.
Beauté?Jeserremonpoingsurl’épauledeLivieetlarelâchequ’unefoisqu’ilapassélaporte.—Non,maist’escinglé?lance-t-elle.—C’étaitqui?Elle émet un son étrange, mi-injure mi-grognement en s’éloignant sans me donner de réponse.
Comprenantquejenesupporteraispasdevoirçauneminutedeplus,jesorssurleparkingetrejoinssavoitureenm’yadossant.Jelèvelesyeuxversleciel,commesicelapouvaitmesoulager.Ils’estdégagéetlesétoilessemblenttenterdemedirequejenesuisqu’uncrétin.Jel’aiperduàlaminuteoùelleestpartieetmecomporterdelasorteesttotalementridicule.Pasétonnantqueçal’aimiseencolère.Ellearefaitsavieetjen’enfaispluspartie.
Liviemerejointuneheureplustard.Elles’arrêteàquelquesmètresdemoietjeneseraisdirequellehumeurl’anime.Jedevraism’excuser,maisjen’enaiaucuneenvie.Ellefinitparsoufflerenbaissantlesyeuxetmeparled’unevoixàpeineaudible:
—TunepeuxpasfaireçaEthan.—Fairequoi?jeluiréponds.Ellerelèvelatête,faitunpasversmoietmetraversel’âmedesonregardturquoise.—Fairecroirequetumedétestesetmeprouverlecontraire.Quepuis-jerépondreàça?Jemeredresseetm’avanceverselle.Jeposeunemainsursajoueenla
caressantdemonpouce.Ladouceurdesapeaufaitparcouriruncourantélectriquedansmesdoigtsmetraversant le corps commepourme rappeler que c’est elle.Mon autremain rejoint son visage et ellefermelesyeux.
—Gregm’aappelé,jeluiexplique.Ilétaitpaniqué.J’ycomprenaisrien,ilvoulaitsavoirsijesavaisoùtuétais.UncoupdetéléphoneLivie.Voilàcommentj’aiapprisquetuétaispartie.
Elle rouvre les yeux brillants et j’évite son regard. C’est assez difficile comme ça. Je laissemesdoigtsdescendre le longdesesbras, incapablededétachermesmainsdesoncorpsetm’arrêteen luiprenantlessiennes.
—Cesoir-làLivie,lesoiroùtuespartie.Jet’aiappelépourm’excuser.Ons’étaitdisputé.Unedisputerécurrentequiasubitementétésifutile.MonenviedetoutdireàGreg
et son obstination à garder le secret sur notre relation.On devait passer une soirée tranquille,mais àpeinejel’avaislaisséseule,elles’étaitéclipséedechezmoi.Avecladisputequ’onvenaitd’avoir,jenemesuispas inquiétéplusqueça.C’est ladernièrefoisqueje l’aivujusqu’àcequeje tombesurelledanscefoutucouloirchezJenny.
—Maistun’aspasrépondu.Tulesavais.Tusavaisquec’étaitladernièrefoisqu’onsevoyaitettunem’asriendit.
Quand j’oseenfin la regarder, elle fixenosmains jointes. Jepassemonpouce surde ledosde samain,essayantdeluifairecomprendrecombiencesimplecontactapumemanquer.Jeposemonindexsoussonmentonpourreleversonvisageverslemien.Mesyeuxseposentparinadvertancesurseslèvresqu’elleentrouvrelégèrement.Marespirations’affoletoutcommemoncœurquimehurlequejedevraism’arrêterlà.Àmoinsqueçanesoitmoncerveau.Jemepencheverselle,encoredansl’hésitation.Monnezeffleurelesienalorsquesabouchenesetrouveplusqu’àquelquesmillimètresdelamienne.Moncerveau fait ses valises, vociférant qu’il m’aura prévenu. Je le sais, et j’ai beau en avoir tout à faitconscience,quandmeslèvresrencontrentlessiennes,j’enailesoufflecoupé.J’ail’impressiond’avoirluttétoutemaviecontrel’attractiondenoscorpss’attirantcommedesaimants.Sanselle,mavien’apasdesens.Monâmen’estqu’unemoitiédeviesansjoie,sansintérêt.Pourtant,cebaiserestàlafoisbonetdouloureux.Parcequej’aibesoinderéponses.J’aibesoindecomprendrecequiapuluipasserparlatêtepouragirdecettefaçon.
—J’aibesoindesavoirLivie,jeluidisenreculantdequelquespas,nem’envoulantqu’àmoitiédem’êtrelaisséaller.
Ellehochelatêteenévitantmonregardetouvrelaportièredesavoiture.—Pasici.On monte en voiture et l’espoir naît en moi d’obtenir enfin les réponses que j’attends depuis si
longtemps. Je lui jette quelques coups d’œil rapide pendant la route. Ses jolies boucles sont passéesderrière ses oreilles et j’aimerais les libérer, mais je me retiens. Ils ont bien poussé d’ailleurs. Ilsondulent jusqu'aumilieu de son dos et je trouve çamagnifique. Je ne sais pas vraiment comment êtremaintenantavecelle.C’estdifficile.D’uncôtéjeluienveuxdem’avoirfaitça.D’unautre,c’estLivie,laplusbellepersonnequejeconnaisse.C’estunepersonnegénéreuse,gentilleetquineferaitpasdemalàunemouche.Ellebrisejustelescœurs.Lemiendumoins.Ellevoitquejelaregardeetplisselesyeuxendemandant:
—Quoi?Jesourisetréponds:—Çatevabien.Ellefroncelessourcilsalorsjeprécise:—Tescheveux.Ilsontpoussé.J’aimebien.Elle sourit timidement en rougissant. J’adorai quand elle rougissait et çame fait toujours lemême
effet.Mais il fautque jeme reprenne, c’estunchemindangereuxque je suis en traindeprendre. J’aiconsciencequecebaiserétaituneerreur,jenelâcheraisrien,jeveuxsavoircequiluiaprisdepartir.Arrivéedevantchezelle,elleproposequ’onaillesurletoitpourêtretranquille.Onrejointl’ascenseuretelleappuiesurlebouton.Jem’adosseaumurleplusloinpossibled’elle.Jeneveuxpaslatoucherparinadvertance.Elleaprislamêmepositionquelamiennejustedevantmoilesbrascroiséssursapoitrineetfixesespieds.J’enprofite.Ellenemevoitpasalorsjefaisdéfilermonregardsursesjambes.Cettejupeputain.Livieàl’époqueétaituneadeptedessweatstroplargeetdesjeans.Jelatrouvaismignonne,maislà…Ouch.Etsesbrascroisésfontremontersapoitrine.Sespetitsseinsquej’ailéchésetquim’ontvraimentmanqué.Ilvavraimentfalloirquejemecalme.Ellefrottelapointedesaballerinesurlesolsansleverlesyeux.
—JenevaispasteboufferLivieEllerelèvelatête—Jesais.Tunemefaispaspeur,MrWilliams.Elleinsisteenprononçantmonnomdefamilleensouriantencoin.Ondiraitqu’ellepenseàquelque
chosequilafaitrire,maisn’apasl’airdevouloirmefairepartagersablague.—Monnomtefaitrire?ÇamefaitpenseràlaréflexionqueJennyafaiteenentendantmonprénom.Ellefaitnondelatête.—Non,non…Ledingdel’ascenseurnousinterromptetlesportess’ouvrent.Jelasuisdanslecouloiretelleprend
unpetitescalier.Ne regardepasses fesses…trop tard.Onarriveenfinsur le toitetnous installonsàmêmelesoladossésaumur.
—Alors,tuvienssouventici?jelaquestionne.Ellehochelatêteensouriant.—Ouic’estmonpetitcoinàmoi.—Etpourquoiicialors?C’estpourêtretranquille?Ellesemetàsourire,unéclatdanslesyeux.—EnquelquesorteElle lève alors la tête vers le ciel. Je suis son regard.Les étoiles.Unmagnifique ciel étoilé nous
surplombe. Ça ne vaut pas notre clairière,mais je comprends immédiatement ce qui l’a attiré ici. Jesouffle en tentant de balayer tous ces souvenirs. Bon il est peut-être temps de revenir au sujet quim’intéresse.
—Livie,ilfautquetum’expliques.Qu’est-cequis’estpassé?Tuasdisparu.J’aimeraiscomprendre.Ellebaisselesyeuxenjouantaveclepandesajupeentresesdoigts.—C’estcompliquéEthan.Jenevoulaispasteblesser.C’estjuste…— Juste quoi ? Qu’est-ce qui est si compliqué pour que tu ne prennes même pas la peine de
m’expliquer?Tonfrèreaditquetonpèreavaittrouvéunmotetquetudisaisqu’ilnefallaitpasqu’onessaie de te retrouver. Sauf que jem’en foutais. Je t’avais dit que je te retrouverais. Ce n’est pas lapremièrefoisquejeviensàNewYorkLivie.
Voilàc’estdit.JesavaispourlefoyerpouradoavantqueGregmedemandedeveniraveclui.Maisquand jesuisarrivé,ellen’yétaitplus.Etaucune trace, rien.Pasunecontravention,pasdecontratdetravailàsonnom,rien.Jemedemandeencorecommentelleafaitpourresteraussitransparentetoutescesannées.
—Jenesavaispas.Je…—Jeteretrouveraisoùquetusois,jenetel’aipasdit?Ellesouritdoucement—Si…Unechosequejeluiavaisditepourluifairecomprendrecombienjel’aimais.Jenemedoutaispas
alorscombienmesparolesprendraientréellementunsens.Jesouffleetposemesbrassurmesgenoux.Ellepasseunedesesbouclesderrièrel’oreilleetfixesespieds.
—JepeuxteposerunequestionEthan?—Aupointoùj’ensuis…vas-y.—Quandjesuispartie,qu’est-cequis’estpassé?Pourmonpère,toi,Greg?Jetournematêteverselle:—Tonpère…Jenesaispastrop.Gregm’aditqu’ilgérait,maisquetuluimanquais.Greg…c’est
Greg.Ilfaitcommesitoutvabien,maisilaétéblessé.Etpuismoi…çat’intéresse?Ellepenchelatêtesurlecôtéenmeregardant:—Ethan…—Tum’asbriséLivie.Tusavaiscequetureprésentaisàmesyeux.Tum’asbrisé.Tun’imaginespas
toutessesnuitsàmedemandersionallaitnousannoncerqu’ont’avaitretrouvéemorte.Lesinsomnies,lescauchemars…J’aifiniparmeplongerdansleboulotpourpenseràautrechoseetpuisunjour,j’airéaliséquetunerentreraisjamais.Alors…
Alorsjesuispasséàautrechose.Maisjepensequ’elleacompris,ellen’apasbesoind’undessin.Ellegrimaceuninstantetjem’enveuxd’avoirabordélesujet.
—Liv.Pourquoituespartie?Ellemesouritetposeunemainsurmajoue.Jefermelesyeuxàcecontactenrecouvrantsamaindela
mienne.Lecontactdesapeaumerevientenunedéchargeaussiagréablequedouloureuse.— Parce que je tenais trop à toi pour te faire du mal Ethan, répond-elle. C’est peut-être dur à
comprendre,maisc’estlavérité.C’étaitlaseulesolution.—NonLivie,lasolutionétaitdemeparler.Qu’est-cequit’apousséàfaireça?Ellefaitnondelatêteetlaisseretombersamain.—C’estdupassé.Toutçaestfinietjeneveuxplusypenser.—Livieparlemoi,j’aibesoindesavoir.—C’estdupassé.Ellefixelesétoilesenlemurmurant.Jen’obtiendraipasderéponse,j’ensuiscertain.Jemelèveen
merapprochantdubordlesmainsderrièremanuque.Jenecomprendspassonattitudebutée.—Pourquoi?Pourquoirefuses-tudemedirequoiquecesoit?Ellese lèveàsontouretcommenceàs’éloigner.Siellecroitqu’ellevapouvoirs’entirercomme
ça…jeluiattrapelebraspourl’empêcherdes’enfuir.
—Dis-moiLiv!Dis-moicequis’estpasséoùjenetelepardonneraisjamais!Jamaistuentends?Tum’asabandonné!C’étaitlâche,c’était…
—Tuasraison.Jelalâche,etellecontinue:—Tuasraison.J’aiétélâche.Jet’ailaissésansaucuneexplication.Etjelesuistoujours.Déteste-
moi,hurle-moidessusautantquetuleveux,jelemérite.Maistun’obtiendrasriendeplus.Ellereprendsarouteetouvrelaportealorsquejemebriseunenouvellefois.—LIV!Jerestelà,médusé,alorsqu’ellefranchitlaporteetmelaisseseulsurcetoit.Jemelaissetombersur
lesolententantd’ignorerlesmorceauxdemoncœurblesséquisecraquelleunpeuplus.Jenepensaispasavoirplusmal.Jem’étaistrompé.
Chapitre11
Greg
Ilvamerendrechèvre.2joursàessayerdelerésonneretjenesaisplusquoifaire.Livieestblesséequ’ill’évite,maisellerefusedeluiparlerdequoiquecesoit.Alorscesoir,onvatenterd’allégerunpeul’atmosphèreavecunepetitesortie.Onestdoncsortidansunbarducoin.C’esttellementétrangedevoirmasœur si libérée, jedoisdireque j’aiunpeudemalàm’y faire.Pourmoi, elle restera toujours lapetitefillequemonpèrem’apoussésansvergogneàprotégercoûtequecoûte.Jeledétesteauplushautpoint.Parcequesesintentionsenversellen’étaientpascequejecroyais.Combiendefoisai-jetrembléàl’idéed’avoir failli à sesyeux? J’espérais tellementqu’ilm’apprécieautantqu’il l’aimait.C’était sapetite princesse il disait, et moi j’avais l’impression de ne jamais pouvoir être à la hauteur de sesattentes.Alorsquandilm’afaitcomprendrequ’ilseraitfierquejeveillesurelle,jemesuisjetédedansenmedisantqu’il serait impressionné.Et il l’était. J’auraispudétesterLiviepourça.Par jalousieoudéfi,jen’ensaisrien.Maisc’estLivie,onnepeutpasladétester.Cettefilleestladouceuretlabontéincarnée.Enfin,ellen’apasététoujourstrèsdouce,ellem’afaitsortirdemesgondsdenombreusesfois,maisc’estmapetitesœur.Commentluienvouloir?JelavoisrireàuneblaguedeJennyetmoncœurseserre.C’estbondelavoircommeça,jeluiaireprochédenepasm’avoirparlé,maisquandjelavoiscomme ça, je pense que son départ était inévitable. Elle devait partir, même si j’ai mis du temps àcomprendresesmotivations,c’estcequ’ilfallaitfaire.J’aimeraisledireàEthan,monmeilleuramietelle,ontunliendepuisleurplustendreenfance,quej’aieubeaucoupdemalàaccepter.Maisj’aifiniparm’yfaire.J’avaispeurqu’Ethanlavoitd’unefaçonquim’auraitplusquedéplu,maisaprèsdenombreuxreprochesàce sujet, il a finiparm’expliquerqu’ilne lavoyaitpasdecette façon.Ce jour-là, ilm’araconté le jour où elle l’avait surpris dans le jardin. Je connaissais l’histoire, Livie et ma mère mel’avaientraconté,maisc’étaitbiendifférentdesonpointdevue.Il luiserait toujoursreconnaissantdel’avoirfaitentrerdansnotrevieetc’étaitcequ’elleétaitpourlui.Safamille.Ethann’apasgrandidansunefamillecommenous,ilvolaitpourpouvoirmangeretcen’estqu’unefacettedecequ’ilasubienfant.Aujourd’hui,jeluiconfieraismavielesyeuxfermésetjesaisqu’ilferaitpareilpourmoietLivie.Maisils’estsentitrahiautantquejel’aiété.Jecomprendsqu’ellerefusequ’illesache,maisluidissimulerça,c’estdifficile.Jesouffleetboisunenouvellegorgéedemabièreenmemaudissantden’avoirrienvu.Jeneme le pardonnerais jamais.Tous ces petits détails quime reviennent jour après jour depuis que jesais…
Greg
8ansplustôt
Livie:12ans
Ethan:15ans
Greg:17ans
Jerentrediscrètementdanslamaison.Aucuneenviedeparlerdecettesoirée,j’auraismieuxfaitde
resteràlamaison,çam’auraitévitécettedéception.Etpuismamanestdegardecettenuitalorssijesuisassez discret, je devrais rejoindrema chambre sans un interrogatoire en règle.Lamaison est plongéedanslenoir,papaetLiviedoiventdéjàdormir.Jemontel’escaliertoutdoucementquandj’entendsdespleurs.ÇavientdelachambredeLivie.Jem’arrêteentendantl’oreillepourenêtresûr.Ellefaittoutletempsdescauchemars,maisrefusetoujoursdem’enparler.Jesursautequandlaportes’ouvre.Monpèrerefermederrièreluienfronçantlessourcils.
—Qu’est-cequetufaisdéjàlà?Jehausselesépaules—Debby…Jen’aipasenviedeluiexpliquerquejeviensdemefairejeter.Ilrelèveunsourcilenriantdoucement.—Ilyenaurad’autreGreg.Tut’enremettras,crois-moi.Ils’écartedelaporteetjemeretourneverslui.—EllepleureLivie?Sonregardsefaitplusinsistant.—Elleafaituncauchemar,maisçavaaller.Allezvatecoucher.Je ne réplique pas et rentre dans ma chambre. J’entends mon père regagner sa chambre, mais
j’aimeraism’assurerqu’ellevabienalors j’attendsquelquesminuteset ressors avantde rejoindremasœur.Jem’assisauborddesonlit.Ellealesyeuxfermés,maisjesaisqu’ellenedortpasparcequesespaupièressontserréescommesielleavaitpeur.
—Livie,c’estmoi,çava?Elleouvrelesyeux.Ilssontbouffisetrouges.—Tuasfaituncauchemar?j’insiste.Ellemefixe,maisnerépondstoujourspas.—HeyLivtoutvabien?Jeluiattrapelamain.Ellesanglotefaiblement.—Jen’aimepasquandpapavientmevoir.Jeluisourisettentedelarassurer.
—Iln’aimepasquetufassesdescauchemars,çaneluiplaitpasnonplus,tusais.Ellebaisselesyeux.Jepourraisluireposerlaquestion,encore,maisjesaisqu’ellenemedirarien
sursescauchemars.Jel’embrassesurlefrontetmelève.—Rendors-toietn’ypenseplus.Etnedispasàpapaquejesuisvenud’accord?Ellehochelatêteetjeressorspourrejoindremachambre.
Chapitre12
Ethan
Elleveutmetorturer,iln’yapasd’autresexplications.EllesetrémoussesurlapistededanseavecJenny et je commence sérieusement à me sentir à l’étroit. Elle ne devrait plus me faire cet effet etpourtant…
—Elleestloinlapetitefillequipleuraitànosvieillesblagues,pasvrai?ditGregenl’observantavecuneintensitéétonnante.
Je sais qu’il l’adore, je les ai toujours connus comme ça, mais il y a autre chose, une espèced’admirationouuntruccommeça.Etjenesaispasd’oùçavient.Jesaisqu’ilestaucourantdequelquechose,desraisonsquil’ontamenéici,maisilneveutrienmedireetLivieaététrèsclairsurlesujet.Jemesensàl’écart,maisçanedevraitpasm’étonner.JenesuisquelecopaindeGregetLivieaprèstout.Riendeplus,riendemoins.Pourtantj’yaivraimentcru,j’aivraimenteulasensationdefairepartiedecettefamille.Alorsoui,mêmesic’estridicule,çameblessed’êtreleseulànepassavoir.
—C’estunefemmemaintenantGreg,tuvasencorejoueraugrandfrèresurprotecteurpourqu’aucunmecnel’approche?
Ilsetourneversmoilessourcilsfroncés.—Jel’aiprotégécommej’aipu.Jemesuisplanté,tucroisquejenelesaispas?Oups,iln’estpasd’humeuràrirecesoir.—Heydoucementmec,jenevoulaispasdireça.Ilsouffleetbaisselesyeuxenjouantavecsonverre.—Non,c’estjuste…jemesensmalparrapportàtoutça.Jesaisquetuesblesséqu’onnetedise
rien,mais…jeluiaipromisettupeuxmecroire,s’ilyabienquelqu’unavecquij’auraisbesoind’enparlerc’esttoi.
Je vais devoir de ce pas m’acheter un dictionnaire de chinois, parce que là, c’est tout ce quem’inspirecetteconversation.Jen’aipasuneonced’idéedecequ’ilmecache,maisilnelevitpasbien,çaencrèvelesyeux.Illaregardedenouveauetsesyeuxemplisdetristessemevrillentl’estomac.
—Ethan,tupeuxmerendreunservice?Ilsetourneversmoi.—Ouaistoutcequetuveux,tulesais,jeluiréponds.Ilprenduneprofondeinspirationavantdeselancer:— Pardonne-lui. Pardonne-lui Ethan. Elle n’est pas responsable de ce qui s’est passé, et je vois
qu’ellenesupportepasquetul’évites.—Jenel’évitepas.Ilpenchelatête.—Ethan…Vousétiezcommelesdeuxdoigtsde lamainet là…tu l’évites.Lesraresfoisoùvous
vousêtesparlé,c’estellequiestvenueverstoiettul’envoiesbouleràchaquefois.Jemelaissetombercontreledossier.Est-cequejepeuxfaireça?Fermerlesyeuxsursessecretset
toutoublier?—ÉcouteGreg,j’aimeraisbienmais…Uncœurbriséneseraccommodepasd’unclaquementdoigt.
—Écoute-moiEthan,reprend-il,ellen’arienfaitdemal,rientuentends?Ellen’apaseulechoixetdepartircommeellel’afait,c’étaitlaseulefaçonqu’elleavaitdes’ensortir.RegardelàEthan,regarde-la.
Jemetourneverselleetlaregarde.Ilasurementraison.Ouielleal’aird’êtreheureuse.Ouiçamefaitplaisirbiensûr.Maisladouleuresttoujourslà,etjenesaispassijesuiscapabledel’ignorer.
—Jevaisessayer.Jeneteprometsrien,mais…jevaisessayer,çateva?Ilhochelatête.Maréponseluiconvient.Tantmieuxjenepeuxrienfairedeplus.JennyetLivienousrejoignent,maisGregempêcheJennydes’asseoirenl’attrapantparlamain.—Ondanse?Ohputain,ilestsérieux?Jennybafouilleetj’aiqu’uneenviec’estdemefoutredelagueuledecette
fille qui m’en fait baver depuis que j’ai… ouais bref. Il l’emmène et se tourne vers moi en mimant«parle-lui»deseslèvres.Génial,ilvoulaitjustequejemeretrouveseulavecelle.Commesicen’étaitpasdéjàassezdifficile.Elles’assitenfacedemoiàl’opposédelabanquetteendemi-cercle,commesij’avaislagalleouuntruccommeça,latêtebaissée.J’aiétéconàcepoint?Jesouffleetmelèvepourvenirm’asseoiràcôtéd’elle.Elleestsurpriseetjetournelatêteverselle.
—Tonfrèreveutquej’arrêtedefairelecon.Ilveutqu’onredeviennelesmeilleursamisdumonde.Ellegrimaceetjepouffederire.—Ouaisc’estcequeçam’afaitaussi.JemepasseunemaindanslescheveuxenregardantGregavantdereportermonattentionsurLivie.—Tunedisrien?—Qu’est-cequetuveuxquejetedise?Tuasétéclairettun’aspasàobéiràGregàchaquefois
qu’iltedemandequelquechose.JefermelesyeuxenrepensantauxparolesdeSamantha.C’estàpeuprèslesparolesqu’ellem’adites
cejour-là.Quandjetournelatête,ellesourit.Elleal’airfièred’elle,mais…—Tul’asfaitexprès?Ellesemetàrire.—Jevousaiespionnésurlaterrasse.J’aitoutentendu.Etvoilà,pileaumomentoùilfaut,ellearriveencoreàm’étonner.—Tunousasespionnés?Ellehochelatêteetjebalancelamienne.Cettefilleestincroyable.—Etilyaautrechosequejesuiscensésavoir?Jeveuxdire,àpart…ça.Ellesembleréfléchiretfinitparmurmurer:—Partirloindetoiestlechoixleplusdifficilequej’aieuàfairedetoutemavie.Jem’accoudeàlatableenprenantmescheveuxdanslesmains.—Liv…tunepeuxpasmedireça…— Je voulais simplement que tu le saches, c’est tout.Mais je comprends. Je pense qu’à ta place
j’auraislamêmeréaction.Etqu’est-ceque je suiscensé répondre?Quandnos regards secroisent,unesensationque j’avais
oubliéegonfledansmapoitrine.Jenesaisplusquoifaire,saufquejeluienveuxtoujoursetcen’estpasprèsdechanger.J’aimeraisressentirlasensationdesapeaucontrelamienne,justeunefois,unedernièrefois.J’avancemamainverslasienneetluicaresseledosdesamainenobservantmongeste.Elleneditrienetnebougepas.Commesiellesavaitqueçaneveutriendire.
—Jet’aiattendu,tusais.Je lève les yeux vers elle pour voir sa réaction. Elleme regarde en souriant tristement,mais son
souriren’atteintpassesyeux.J’enlèvemamainavantqueçanedeviennetropdouloureuxetmelève.—Jesuiscrevé,jerentre.Jesorsdubaretprendsdirectementlechemindenotrehôtel.Heureusement,cen’estpastroploinet
ilnemefautquedixminutespouryarriver.Jetraverselasalledubaretm’arrêteenregardantautourdemoi.Jepourraispeut-être…Unejoliebrunemesouritenignorantsacopinequiluiparleàcôtéd’elle.Jescrutelamarchandiseetappréciecequej’yvois.Longuejambe,mini-jupe,petitdébardeur,etpoitrinegénéreuse.Toutcequej’aime.Etvusafaçondem’observer,çanevapasêtredifficile.Jem’approchedelatableetposemesmainssurlasurfaceenluioffrantmonplusbeausourire.
—Salut.Ellesouritdeplusbelleensepenchantversmoi,melaissantentrevoirundécolletédontlehautne
sertplusàgrand-chose.—Salut.Sacopinerâle,maisjen’yprêtepasattentiontropoccupéàobserverlabelleinconnue.—J’aiunechambreici.Jetefaisvisiter?Çaserabienplusfacilequ’avecJenny.J’ensuiscertain.Lecoupauventrequejeressensenpensant
auvisagedeLiviequandellem’asurprismefaitgrimaceruneseconde,avantquejenemeressaisisse.Elleneprendmêmepaslapeinederépondreetselèveenfaisantunsimplesignedemainàsonamie.Jeluiindiquelecouloirmenantauxascenseurs,etoncommenceàavancer.Quandlesportesdelacabinesereferme,ellesetourneversmoi.
—Moic’est…—Jem’entape,jerépondsenlacoupant.J’ai peut-être été un peu brusque, mais c’est comme ça que j’ai toujours fonctionné. Si vous en
connaissez lemoinssur la fille,çafacilitegrandement leschoses.Elleémetunrirequimeditqu’ellen’estpasoffusquéedema réponseaumomentoù lesportes s’ouvrent.On remonte lecouloiretarrivédevantmachambre,jelafaisentreravantderefermerderrièremoi.
*
—Casse-toi.Jem’assisauborddulitenattrapantunboxerdansmonsacavantdel’enfiler.Brunettemeregarde
lessourcils froncés.Quoi?Ellenes’attendaitcommemêmepasàpasser lanuit ici,non?Jenedorsjamaisavecaucunefille.Pasuneseule.Jen’aidormiqu’avecunefilledetoutemavieetc’étaitdanslaclairière avec Livie. Ça nous arrivait de temps en temps. Je la rejoignais au milieu de la nuit, ons’allongeaitetpassaitdesheuresàdiscuter.Discuter.Çaaussijenelefaitpasavecbeaucoupdemonde.Quandvousdiscutezlesgenss’attendentàcequevouslivriezunepartiedevousetmoic’estladernièrechose que j’ai envie de faire. Je fais un effort quand il s’agit de boulot, mais ça s’arrête là et monassistantesechargemerveilleusementdesdiscoursdontjenemesenspasdutoutcapable.ÀpartavecGregetLivie,jenesuispaslegenreàparlerpourneriendire.Enfin,ilyavaitSamantha.Samantha.Leurmère était une femme formidable. Une femme que je n’oublierais jamais. Sa pertem’a profondémentmeurtrietd’unautrecôté,jem’envoulaisderessentircettepeine.Cen’étaitpasmamèreaprèstout.Etpourtant.Elleafaitbienpluspourmoiqu’ellenelepensaitàmonavis.
J’arrive à convaincre brunette de dégager. Ça ne lui plait qu’à moitié. Pas grave. Je me laisseretombersurlelitenmedisantqueçanesuffirajamais.
—Etmerde!Tiens,Gregdoitêtrerentré.Onaprisunechambrecommunicante.Ondistinguedoncbeaucoupplus
cequisepassedanslapièced’àcôtécequiestloindeluiplaire.Jepouffederireetmeredresse.Çaluivabiendemefairelamoraleaujourd’huiquandonsaitquec’est luiquim’atoutappris.C’est luiquim’emmenaitsurlaplageàmaterlesnanas.Premièrecuitemémorablecejour-là,jem’ensouviendrais.Jedevaisavoir14ansetjen’airientrouvédemieuxquededégueulerdanslachambredeGregaprèsqu’onsoitrentré.J’aiapprisunechosecejour-là.Lesjeuxvidéoetl’alcoolnefontpasbonménage.Lepire
danstoutça,c’estquec’estGregquis’enaiprispleinlatroncheparsonpère.Jemesuisprisunsavonaussi,maisGreg…Ilsonttoujourseuunerelationétrange.Jecroisqu’ilessayaitd’attirerl’attentiondesonpèreetquetouslesmoyensétaientbons.Lui,iladoraitLivie.Princesseparci,princesseparlà.Elledétestaitça.Ilestsympa.Unpeubourruaudébutdenotrerencontre,maisonafinipars’entendre.MaisquandGregestpartiàlafac,j’aicommencéàmoinsvenir.Jepassaisleweek-endquandGregétaitlà,mais j’avais besoin de prendre mes distances avec Livie. Je savais que j’allais finir par faire uneconnerieetqueGregmejetteraitdanslafosseauxlionss’ilapprenaitquej’avaisapprochésasœurdetropprès.Depuisqu’elle estpartie, jen’aipas fait l’effortd’allervoir sonpèreune seule fois.Cettemaison,àchaquefoisquejepassedevant,cen’estqueladouleurqu’ellem’inspire.D’abordSamantha,etpuisLivie.Cen’estpastrèssympademapart,j’enaiconscience,maisjen’enétaispascapable.
Chapitre13
Livie
J’entendsunbruitdanslecouloir.Unbruitdepasquej’aiapprisàreconnaitre.Jem’enfoncedansmonlit,lacouetteremontéejusqu'àmonmentonenespérantquecesoirilmelaisseratranquille.Lesbruitsserapprochentaccélérantlesbattementsdemoncœur.MaGorgeestnouée,monventreaussi,etjesensdéjàlanauséem’envahir.Jefermelesyeuxenlesserrantdetoutesmesforces.Jefaistoujoursça,decettefaçonj’espèrequ’ilmelaisseratranquille,mêmesiçan’ajamaismarchéjusqu’ici.Lesbruitss’arrêtentetpendantunesecondejemedisquej’aigagné.Maisc’estlàquejel’entends.Legrincementfamilierdelapoignéedemaportedechambre.Jeserrelespaupièresencoreplusfort.Sijelesserreassezfortpeut-êtrequ’ils’enira,peut-êtrequ’ilnevoudrapasmeréveiller,peut-êtrequ’ilnemedemanderapasd’êtregentilleaveclui.Jeneveuxplusêtregentille,maisiltrouvetoujourslesmotspourmefairepeur.L’autrejour,jeluiaiditnon.Iladitquejen’avaispasledroitdedirenon.Jel’aigriffé.Lelendemain,j’aivucequ’ilavaitentête.Gregétaitentraindedescendrelesescaliersetpapaleregardait.Ils’esttournéversmoietsonregardm’aglacélesang.IladenouveauobservéGregenbasdel’escalieretilamurmuré:
—TuaimestonfrèrePrincesse?Ilatournélatêteversmoi.J’avaistellementpeurquejen’osaispasbouger.—Situaimestonfrère,a-t-ilcontinué,net’aviseplusjamaisdefaireça.Ensuite, il s’est simplement retourné et a rejointGreg etmaman en bas. J’aimis unmoment à
reprendremes esprits,mais j’ai su à cemoment. J’ai su que plus jamais je ne lui dirais non, plusjamaisjenelegrifferais.Quandjelesairejoints,ilsétaienttoussurlaterrasseentrainderire.Moi,moncœurétaitdéchiréà la simple idéequepapas’enprenneàmon frère. JemesuisapprochédeGreg, je l’aiprisdansmesbraset je l’aiserré très fortcontremoi. Ils’estmoquédemoi.Maiscen’étaitpasgrave,j’enavaisjustebesoin.Papam’aregardéetj’aisouripourluifairecomprendrequej’avaiscompris.Cesouriredontj’aimaitrisél’artdesapparences.Alorsquandlaportes’ouvre,jemerépètequejelefaispourGreg.Pourquepapanes’enprennepasàluietqu’illelaissetranquille.Lematelass’affaissederrièremoi.Jenebougepas,nefaitpasungesteetj’aimêmearrêtéderespirer.Jesenssesdoigtscaressermajoue.Lecontactdesontoucherfaitmonterlanausée.Faitesqu’ils’enaille,faitesqu’ildisparaisse.J’aimeraistellementqueGregoumamansoitlà.Quandilssontlà,ilnem’embêtepas.
—Princesse?Jemerecroqueville.Jen’auraipasdû.J’aibougéetmaintenantilvasavoirquejesuisréveillé.
Pourquoij’aifaitça?Ilmelache.Maisjen’espèreplus.Jesaiscequivaarriver.J’entendslebruit.Cebruitquialasimplesonoritémebrisedel’intérieur.Jepleureavantmêmequ’ilnemetouchedenouveau.Parcequecebruit,jesaisqu’ilprécèdeladouleur.Cepetitcarréenaluquejedéteste.Etpuisjemeretrouvesurledos,toujourslesyeuxserréspourpouvoirm’échapperparlapensée.Jesensletissudemachemisedenuitremonteretmessanglotsprennentdel’ampleur.Jenedoispasdirenon,pourGreg.
—SoisgentillePrincesse.Mesyeuxs’ouvrentquand ladouleurme foudroie.Et faceàmoi,deuxyeuxm’observentavec le
sourirequejen’aimepas.Sesyeuxquejedéteste.Sesyeuxbleus.Desyeuxaussibleusquelesmiens.Jemeréveilleensursaut.Jesenslesgouttesdesueurperlerdansmondos.Jetentedereprendremon
souffleetdecalmerlesbattementsdecœuraffolés.Lapénombredecettechambrenefaitquemesentirplusmal.Jesoulèvelacouetteetouvreletiroirdemacommode.Maisquandj’attrapeleflacon,ilestvide.
—Merde!Jen’avaispasréaliséquejen’enavaisplus.Jelejettederagedanslapoubelleetjetteuncoupd’œil
àmonréveil.Iln’estmêmepasencore7heures.Tantpis.J’envoieunmessageàWill.Jenesuispassûrequ’ilmerépondraàcetteheure,maisavecunpeudechance, ilmerappelleradansla journée.Jeparssousladoucheetessaiederavalerleslarmesquipointent,maisladouleurcontinueàsedéverserdansmesveines,moncauchemarencoretropprésent.J’arriveencoreàsentirsonodeur,lasensationdenauséeetd’étouffementalorsquemeslarmesmesubmergeaient.Unsanglotm’échappeetjemelaisseglisserlelongducarrelagefroidenenfouissantmonvisagedansmesgenoux.Jeresserremesbrasautourdemesjambescommesiçapouvaitm’aider.
—Livie?Jesursauteetmeredresse.—JesuissousladoucheJenny.J’espèrequ’ellenem’apasentendue.Mêmesielleconnaitunepartiedel’histoire,çaresteunsujet
quejen’aimepasaborder.—Jesais,çafaituneheurequetueslà-dessous,jevoulaism’assurerqueçaallait.Uneheure?Jeperdslanotiondutempsquandjemeretrouvedanscetétatetçan’aidepasàmesentir
mieux.Jefermelejetetattrapeuneserviette.—Ouic’estbon,jesors.Jemesècheenvitesseetregagnemachambrepourmechanger.Envoyantl’attraperêveau-dessusde
mon lit, je me dis qu’il ne sert vraiment à rien. Je passe un doigt sur les plumes blanches en medemandantsijetrouveraisunjourlemoyendemettrefinàmesmauvaisrêves.Jen’yaijamaiscruàcegenredebibelot,maisj’ytiensénormémentcarc’estmamèrequimel’avaitoffert.Jeledécrocheetlerange dans un tiroir de ma coiffeuse. Peut-être qu’en évitant de le voir, cela me rappellera moinspourquoiilm’aétéoffert.J’enfileunleggingnoir,undébardeurblancetattrapelavesteaccrochéeàlapatèredemaporte.Courirmeferadubienetçaaaumoinsleméritedemeviderlatête.Jen’aimepasvraimentça,maisc’esttoutcequej’aitrouvéjusqu’ici.Jennyestassisedanslefauteuildusalonquandje larejoins,une tasseentre lesmains.J’attrapemapairedebasketsetm’assisdans lefauteuilàcôtéd’elleenlesenfilant.J’évitedelaregarder.Jennyatendanceàvoirenmoiplusquejenelevoudrais.
—Jet’aientenduecematin,medit-elle.Jenerépondspas.Parfois,ilarrivequejeparledansmonsommeil.Jenesaispascequejedis,mais
c’estcommeçaqueJennyacomprisquejefaisaisdescauchemars.J’attachemondeuxièmelacetetelleposesatassesurlatable.
—Pourquoineréessaies-tupasavecleDrHarris?Çat’avaitfaitdubien.LeDrHarris.D’accord,lesséancesm’avaientfaitdubienaudébut,maiscethommes’estavéréun
peutropcurieux.Plusjeluiparlais,plusilvoulaitconnaitrelesdétailssordidesetunjouroùilétaitallétroploin,jesuispartieenluiclaquantlaporteaunez.
—JevaisbienJenny,luidis-jeenmelevant.—Livie,tun’asmêmepasprisdepetitdéjeuner!Jemeretourneavantdefermerlaporteenluisouriant.—Jesurvivraismaman.
*Jecourssurlagrandeavenue,unefouléeaprèsl’autre.Quandjecours,jenepenseàrienetc’estpile
cedont j’avaisbesoin cematin,mais enpassantdevant l’hôtel deGregetEthan je ralentis.Aprèsunmomentd’hésitation,jefranchislehalletm’arrêtedevantlaréception.UnhommetrèsBCBGmetoisedebasenhautsedemandantsurementcequejefaislà.Jejetteuncoupd’œilàmatenueenmedemandantcequinevapasavantdem’accouderaucomptoir.
—GregJohns,jesuissasœur,j’aimeraisconnaitresonnumérodechambre.Il pianote quelques secondes sans un sourire etmedonne l’information. Il s’apprête à le prévenir,
maisjeposeunemainsurlasienneaumomentoùilallaitdécrocherlecombinédutéléphone.—C’estunesurprise.Çan’apasl’airdel’emballer,alorsjerajoute:—Croyez-moi,sivoustenezàlavie,neleréveillezjamaistroptôtlematin.Ça,c’estmonjob.Jeluienvoieunclind’œiletilm’offreenfinunsourireenhochantlatête.Etbah,ildevraitsurement
sourireplussouventcelui-là,çaneluiferaispasdemal.Jefranchislesportesdel’ascenseuretappuiesurledeuxièmeétage.Unemusiquedoucerésonnedansl’espaceclos.MaisdepuisquandGregetEthanpeuvent-ilssepayeruntelluxe?Jen’aipasletempsd’yréfléchir,quelesportess’ouvrent.Jeremontelecouloiretm’arrêtedevantlenuméroquel’onm’adonné.Jefrappeàlaporteàgrandscoupsetentendsrâler,alorsj’insisteplusfortjustepourenrajouterunecouche.Laportes’ouvreviolemment.
—Quoi?Sontonsecagranditencoremonsourireetsamauvaisehumeursembles’envolerquandilcomprend
quec’estmoi.—Livie?Toutvabien?Qu’est-cequetufaislà?Jelepousseetentredanslachambre.—Petitevisitesurprise!Ilrâleetrefermelaporteavantdeselaissertombersurlelit.—Etçanepouvaitpasattendregenre…2ou3heures?Monfrèren’ajamaisétéunlève-tôt.Etçaatoujoursétéundemespasse-tempsfavorisdelefaire
sortirdesesgondsaupetitmatin.Jemelaissetombersurlelitàcôtédelui.—Çaauraitétébeaucoupmoinsdrôlesinon.Ilsemetàrireettournelatêteversmoi.Onseregardesansprononcerunmot.3ansd’absenceeton
ne trouveplus rienàsedire,maisest-cevraiment indispensable?Certainssilencessesuffisentàeuxmême.Ilselèved’uncoupetmedit:
—J’aiuneidée.Jem’assisetilouvresonsacaupieddulit.Ilensortunballonqu’ilmetend:—Tun’asjamaiseuenviedetevengerd’Ethan?Je pouffe de rire.Ça serait plutôt de lui que j’aurais aiméme venger pour tout dire,mais je vais
garderçapourmoi.Ilremplitleballonàl’aided’unepetitebouteilled’eauetsedirigeversuneportequidoitcommuniquerentrelesdeuxchambres.Ill’ouvredoucementetmeletend:
—Prête?Je ne suis pas sûre que ça soit une bonne idée. Ethan m’en veut déjà assez. Il doit sentir mon
hésitation,carilajoute.—Allez,commeaubonvieuxtemps.—Saufquec’étaitmoilaciblejeterappelle.Ilm’enveutdéjàassezcommeça,tuestoutseulsurce
coup.Iln’apasl’aird’êtreébranléetentre.J’entendsungrand«splash»etEthanhurle:—Maist’esungrandmalade!
JerentreàmontouretdécouvreEthanassisdanssonlit,trempé.Lesangmemonteauxjouesquandjele découvre vêtu d’un simple drap sur la taille. Chacun de ses abdos si bien dessinés…Mes yeuxs’attardentunpeutroplongtempssurlui.Maboucheestdevenuesubitementtrèssècheetunesensationmontedansmonventre,alorsquedesvisionsque jem’interdisdepuis longtempss’imposentàmoi.Jepeuxvoirdesgouttescouler lentementsursoncorpsetunevisionabsolumentchoquantedema languepour les recueillirmedonne le tournis.C’est quelque chose quim’a toujours troublée. Je n’ai jamaisressentideréelleattirancepourquiconque.MaisavecEthanc’estdifférent.Ilmefaitressentirdeschosesquej’aimeetdétesteàlafoisetc’esttrèsperturbant.
—Génial,lesfranginsenduo,lâche-t-ild’untonsec.Ses parolesme font revenir sur Terre et quand je remontemes yeux, je le vois m’observer avec
amusement.Ilm’asurprisenflagrantdélitetçaal’airdebienl’amuser.Jejetteuncoupd’œilàGreg,tropoccupéàrireàgorgedéployéepouryprêterattention.
—Etvousavezvul’heure?Vousêtes2grandsmalades,rajoute-t-il.Greg lui répondque je suis seul fautiveayantdécidéde le sortirdu lit. J’expliqueque jevais les
laisserpourfinirmonjogging.—Ethanvaveniravectoi,pasvraiEthan?C’estpasvrai…Gregal’airdeluisoufflerquelquechoseduregard.—ArrêteGreg,c’estpaslapeine,jetentedeleconvaincre.Il ne prête pas attention à ce que je viens de lui dire et ils ont pendant quelques secondes une
conversationsilencieusedontvisiblement,jenefaispaspartie.Jesaisqu’ilessaied’arrangerleschosesentrenous,maisc’estpluscomplexequ’ilnel’imagine.Ethanfinitparaccepteràconditiondeluilaisserquelques minutes le temps de se changer. On retourne dans la chambre de Greg et j’en profite pourapprécier l’endroit.Ungrand litquidoit fairedeux fois lemien trône suruncôtéde lachambre.Unepetite table rondeentouréedequelqueschaises font faceà lagrandebaievitréemenantàune terrasseavecvue surCentralPark.Des tableaux sont accrochés ici et là,mais cequim’impressionne leplus,c’estlatailledel’écrandetélévision.Franchementindécent.
—Vousnevousemmerdezpasdisdoncc’est…classe.Ilsemetàsourireets’asseyantauborddulit.—Ouais…jesuisàmoncomptemaintenant.Jesuis impressionnée.Ils’occupedegérerdeschantiersd’unemaindemaitred’aprèscequ’ilme
raconte. Je lui demande ce que fait Ethanmaintenant.Quand je suis partie, il travaillait dans un petitgarage,mais jesaisqu’ildétestaitça. Ildisaitquec’étaitprovisoire,qu’ilcomptaitbien trouverautrechose.Ilsemetàrireetréponds:
—Ilt’expliqueralui-même.Jen’aipasletempsdeluidemanderdesprécisionsquelaportes’ouvreetEthanentrevêtud’untee-
shirtetd’unshort. Je faisvolte-face.Mêmesi levoirhabilléestplutôtmoinsperturbant, jedoisbienavouerqueçan’entachepasl’attirancequej’aitoujourspourlui.
—Ett’asintérêtàsuivre!jem’exclameenouvrantlaporte.Illèveunsourcilenseretenantderire.—TuvasrentrerenpleurantsitucontinuescommeçaBoucled’or,répond-il.Boucled’or.Super.J’avais15ansladernièrefoisqu’ilm’aappelécommeça.
Chapitre14
Ethan
5ansplustôt
Livie:15ans
Ethan:18ans
Greg:20ans
On arrive devant la maison avec Greg et en entrant on trouve Livie et ses parents à se disputer.Visiblementquelquechosenevapas.
—RaslebolLivie!Oùas-tupassélanuit?Samèreestencolère.Sonpèrequantàluisecontentedel’observerassisàlatabledecuisineenla
dévisageanttoutentapotantdudoigtlatable.Elleestadosséeaufrigoetignoreleursquestions.Ennousvoyant,ellesouritfaiblement.
—Qu’est-cequisepasse?demandeGreg.Sonpèresetourneversluietrépondd’unairfaussementcalme:—Tasœuraencorepassélanuitdehors.—Liv…disGregenlaregardant.Samèrelèvelesbrasaucieletsortdelapièce.Ellen’enpeutplusdetoutça,ilsnesaventplusquoi
faireavecelle,maisc’estunefillebutéeetquin’apasl’intentiondeleurapporterlamoindreréponse.Livieseredresseetattrapesavestedansl’entrée.
—Jesors.Sonpèrefaitunbond,soudainprisaudépourvuparl’attitudedesafille.Moi,ellem’impressionne,
maisjegardeçapourmoi.J’avouequejemedemandebiencequ’ellefaittoutessesnuitsdehors.—Turigolesj’espère!luilance-t-il.Ellesetourneverssonpèreencroisantlesbras.—Pasdutout.JevaisvoirJess.—Horsdequestion!Elleseredresseenfaisantunpasversluietleregardedroitdanslesyeux.—J’aidit.Je.Sors.Savoixestmenaçante.Cesdernierstemps,lapetiteLiviealaisséplaceàunebombeprêteàexploser
àtoutmoment.Sonpèrelaregardeetsemblehésiter.Elleenprofitepourpasserlaporteetsortir.—Ettuvaslalaisserfaire?s’étonneGreg.Sonpèreleregardeenlefusillantduregard:—Mêletoidetesaffaires.Ilsortdelapièceàsontour.Gregmeregardecomplètementhébété.
—Alorslàj’hallucine.IlsortencourantpourrattraperLivie.Jelesuis.Onlarejointalorsqu’ellemarchelelongdutrottoir.
Ill’attrapeparlebraspourl’arrêter.—C’étaitquoiça?s’insurgeGreg.—Dequoi?—Netefouspasdemoi,depuisquandtuparlesàpapacommeça?Ellesemetàrirealorsquejerestemuet,faceàcettescène.—Jeluiparlecommejeveux!réplique-t-elle,depuisquandtuprendssadéfense?—Liv…Qu’est-cequiteprend?LacolèredeGreg s’est évanouie, et l’inquiétudeapris saplace. Jeme sensmalquand je lavois
commeça.J’aimeraismoiaussicomprendrecequisepasse,maisavecGregàlafactoutelasemaine,jepréfèregardermesdistancesavecellequandiln’estpaslà.C’estunequestiondesurvie.
—Rien!Toutvaparfaitementbien!Ellereprendlarouteetjelaregardes’éloignerenmeretenantdelarattraper.— Et bah elle est loin la petite princesse à son papa, crache Greg assez fort pour que Livie
l’entende.Elleseretourneetfoncedroitsursonfrèreenlepoussantdesesdeuxmains.—Nem’appelleplusjamaiscommeça!Jamais!Ellesemetàletaperetjel’attrapeparlatailleencoinçantsesbraspourl’arrêter.Elleessaiedese
débattre,maisjelamaintiensfermementetluimurmureàl’oreille:—Liv,calme-toi,calme-toi.Je voudrais pouvoir comprendre ce qui se passe, sa colère ses derniers temps me tourmente
sérieusement.Ellesecalmeettombeàgenouxsurlebitumeenpleurant.Jedesserremonemprise.Ellepleure et je ne sais vraiment pas quoi faire, agenouillé à côté d’elle, alors queGreg la regarde sansréaction.Jen’aijamaissupportédelavoirpleureretlàc’estencorepire.L’enviedelaserrercontremoien lui chuchotant que tout va bienme prend,mais je sais que c’est la dernière chose à faire. SurtoutdevantGreg.
—Hey,qu’est-cequinevapas?jeluidemandeavectouteladouceurdontjesuiscapable.Ellelèvelesyeuxetnousregardetouràtour.—Toutcequejedemandec’estqu’onmelaissetranquille.C’esttropdemander?Elleserelèvealorsd’uncoupetpartencourant.Jem’apprêteàlarattraper,maisGregm’arrête.—Laisse-la(ilsetourneversmoi.)Masœurnem’ajamaisfrappé.Jamais.Laisse-lapartir.
Livie
5ansplustôt
Livie:15ans
Ethan:18ans
Greg:20ans
Jem’appuieauchambranledelaporte.Vendredidernier,j’aiabusé,jelesais,jel’aifrappéetonnes’estpasreparléduweek-end.Jel’aiblesséetjeneveuxpasqu’ilrepartepoursasemaineàlafacenétantencorefâché.Gregestassissursonlitetpianotesursonordinateuràmêmelelit.
—Salut,jelancetimidement.Ilmerépondsèchementsansleverlesyeux:—Salut.Jesouffleetrentredanslachambre.—Greg…excuse-moi.Ilfermesonordinateuretselève.—Viens,onvafaireuntour.Ilm’attrapelamainetonsortàl’extérieur.Jenem’attendaispasàça,alorsjemedemandeoùonva.
Onmarcheunmomentetils’arrêtedevantlamaisond’Ethan.—Tuvoiscettemaison?Ethanyvit.Ouplutôt,ilysurvit.Tusaisautantquemoicequisepasselà-
dedanspasvrai?Oui,jelesais.J’aidéjàvuplusieursfoislesbleusd’Ethanqu’ilessaiedecacher.Àchaquefois,il
avaitl’airgênéalorsjeneluienaijamaisparlé.Etpuiscen’estpasunsecretdansnotrepetitevillequesamèreestdépendantedecertainesdrogues.
—Oui,jesais.Ilsetourneversmoi.—Tu imagines ceque ça lui a fait de tevoir enpetite fillepourriegâtée ?Tuasdesparentsqui
t’aiment,tumangesàtafaim,tunemanquesderien.TonpetitcinémaLivie,çal’aretourné,jel’aivuetilesthorsdequestionqueçasereproduise,c’estbienclair?
Jesouffleenl’écoutant,s’ilsavait,ilnediraitpasça.—D’accord.—Bien.Maintenant, jem’excused’avoirdit ça. Je sais, c’étaitminable.Lapetiteprincesseà son
papa.Maisnet’aviseplusdemefrapper.Jamais.—Je sais, jem’excuse.C’est juste… ils sont tout le temps surmondos en cemoment.On fait la
paix?
Ilsouritetpassesonbrasautourdemesépaules.—Onfaitlapaixpetitlapin,unlapinenragé,maisunpetitlapinquandmême.Jepouffederireetonentredanslejardind’Ethan.Gregsetourneversmoietfroncelessourcils.—Dis-moiLiv.Tunefaispasdeconneriesquandtusors?Jeveuxdire…Jeleregardesanssavoirquoirépondre.Jenepeuxpasluidireoùjevais,s’illesait,ilnemerestera
plusrien.—Jeteprometsquejenefaispasdebêtises.J’aijuste…besoindeça.Ilsouffleetsesépauless’affaissent.—Tunemedirasriendeplus,pasvrai?Jenerépondspasetmecontentedesourireenfrappantàlaporte.Çafaitbizarredevenirici.Jene
suis jamais venue chercher Ethan, c’est toujours lui qui est venu. Une femme ouvre. Elle fait peur àvoir…Elleadegrossescernessoussesyeux,desvêtementsdansunpiteuxétatetauraitsurementbesoind’unebonnedouche.EllegrimaceennousvoyantetjesensGregmeserrerplusprèscontrelui.
—Ethanestlà?—Ethan!Dégage!Toncopainestlà!OnentenddesbruitsetEthanapparait.Quandilnousvoit, ilsedépêchedesortiretfermelaporte
derrièrelui.—Jet’aiditdem’appeler,nevienspasici,pasavecLivieenplus.Jeluifaiscoucoudelamain.—Hého,jesuislà!Jevousentends,tusais.—Excuse-moi,répond-il,c’estjuste….allezons’enva.Ilnousprécèdeetonrejointletrottoir.GregmefaitunsignedementonversEthanquimarchedevant
nous.—Ethan…je…jevoulaism’excuserpourl’autrejour.C’étaitnulcequej’aifait.Ilsetourneversmoienreculant.—Pourquoitut’excusesLivie?Cen’estpasmoiquiai3côtesdecassées.—Trèsdrôle.Jen’aipasfrappéàcepoint,dis-jeengrimaçant.Ilrigoleetprendmonbicepsentresesdoigts.—Ouaisenmêmetemps,tunepouvaispasluifairetrèsmalavectesmusclesdelarves.Gregéclatederireetjem’arracheàcecontact,quimemettoujoursmalàl’aise.Ilyacettesensation
quimeprendàchaquefoisqu’ilmetoucheetjesaisaufonddemoiquecen’estpasbien.Pasbiendutout.
—Sijeveuxvraiment,jesuissûrequejepeux.Ethans’arrêteaumilieudutrottoirenécartantlesbras.—Vas-yfrappe.JeregardeGregquin’apasl’airnonplusd’appréciercetteblague.—Allez,tunemeferaspasmal,frappepourvoirBoucled’or.Je sais qu’il veut me provoquer avec ce surnom ridicule supplémentaire qui m’exaspère. Je
m’approcheetm’arrêteàquelquescentimètresdelui.Ilbaisselatêteversmoi,sesyeuxémeraudemeprovoquantd’unairamusé.Maisl’idéemêmedeluifairedumal,ouseulementd’essayer,nonjenepeuxpas.Ilsepencheversmoietajoutedoucement:
—Frappe.SiGregn’étaitpaslà,jejureraisquecen’estpascequ’ilessaiedemedire,maisjesaisquejesuis
ridicule.Ethanestgentilavecmoi,justeparcequejesuislasœurdeGreg,riendeplus.Jecomprendsd’uncoupquej’aiététroplongueàréfléchirenlevoyanthausserunsourcildansl’attente.Alors,jememetssur lapointedespiedsetdéposeunbaisersursa joue.Ilestsurpris. Jenepeuxm’empêcherdesouriredemonaudace.Ilécarquillelesyeuxetreculed’unpas.
—JamaisjenetefrapperaisEthan.Jamais.
Chapitre15
Ethan
Undoigtsurmontorse,Greginsiste:—Tuarrangesleschosesavecelle,tufaisuneffort.Tuluidoisbiença.Sinon,jesuisprêtàvous
enfermertouslesdeux,jusqu’àcequemorts’ensuive.Jerefermelaportederrièremoi.Liviem’attend,adosséeaumur.Putain,elleestvraimentcanonlà-
dedans.Elleporteunevestedejoggingouvertelaissantapparaitresondébardeurquidévoileunepoitrinetropalléchante,quejemeforced’ignorer.Elleaattachésescheveuxenqueuedechevalcequimeparaitunpeuétrange.Jel’aitoujoursvulescheveuxdétachés,misàpartladernièrefoisàsontravail,maisçaluivabien, il fautbien l’avouer.Ellese tourneenavançantdans lecouloiretmevoilàà ladécouvrirdans un pantalon moulant parfaitement ses petites fesses parfaites. Comment vais-je pouvoir resterconcentré avec ça à portée demain ?Ondescendde l’hôtel alors qu’elle s’excuse de l’insistance deGreg.Jepréfèrene rien répondre.Oncommenceàcourir. Je lasuisdeprèspourprofiterdupaysage.J’essaiedenepastroplaregarder,maismesyeuxsontsanscesseattirésverselle.Ilvavraimentfalloirquejemereprenne.Cen’estpasbon.Pourmoi,commepourelle.Jen’aipastrèsbiendormipourdirevrai. J’ai repenséàcequ’ellem’avaitdit.Partir.Unchoix.Leplusdifficilequ’il luiaitétédonnédefaire.Pourquoi ?Et si ellem’aimait autant que je le croyais, pourquoi être partie sansprévenir ?OnrentredansCentralPark.Lesdernièresfoisoùjesuisvenuseulpourlachercher,jen’aipasvraimenteul’occasiondevisiteretjecommenceàvraimentapprécier.Cover-roadestunetoutepetitevilleetàpartuncentrecommercialminusculeavecquelquesbars,unepetiteplageainsiquelaclairièreoùj’aipassélesplusbeauxmomentsdemavie,iln’yavaitpasgrand-choseàfaire.Icic’estl’effervescencedejourcommedenuit.Lesgratte-cielsontàpertedevue,peuimporteoùonregardeautourdenous.Jenesuispasfan,maisçaatoutdemêmesoncharme.Lesarbreslongentlecheminqu’onestentraindetraverser,nousisolantdecetteimpressionden’êtrequedesfourmisdansunevillequinedortjamais.Onn’apaséchangéplusdedeuxmotsetjevoisqu’ellecommencefatiguer.Jeralentisetluiproposeunepause.Elleaccepte et on continue notre promenade enmarchant. On arrive au niveau d’un superbe pont, loin del’imagedecetteville.Uneélégancefeintepardesmouluresquis’entrelacentcommesortied’untableaudegrandpeintre.J’adorecespectacle,ilfaudraquejerevienneicifairequelquesphotos.Elleadumalàreprendresonsouffleetelledoitcreverdechaudavecsaveste,alorsqu’ildoitbienfairedéjàaumoins20degrés.
—EnlèvetavesteLivieoutunevaspastenirOui, enlève ta veste histoire que j’en profite un peu. Elleme jette un coup d’œil sans arrêter de
marcheretsecouelatête.—Nonc’estbon.—Jeteprévienssitut’écroulesjeneteportepas.Elles’arrêteàproximitéd’unefontaineetsepassede l’eausur levisage.Elleestennageet jene
comprends pas son insistance. Elle finit par laisser tomber sa veste et la noue autour de sa taille enreprenant notremarche. C’est là que je le vois. Sur son épaule droite. Un tatouage dépassant de sondébardeur.Desfeuillesdelierre.Maisjenevoispasledébutcachéparsonvêtement.Avantsondépartellenel’avaitpas,ellel’adoncfaitdepuissonarrivéeàNewYorketjedoisbiendirequeçamerend
curieux.Ilmesuffiraitdetendrelebrasetdebaisserletissu…detouchersapeauparfaite…NonEthan,oublieça!Jemerendscomptequeçadoitêtrepourcetteraisonqu’ellerefusaitd’enleversavestedecettechaleur.EllenedoitpasvouloirqueGregl’apprenne.J’imaginebiensatête,tiens.Maisilvabienfalloirqu’illalâcheunjour,ellea20ansmaintenant.Ilfautquejemechangelesidées.
—Alorstuteplaisici?Ellesourit,undesessouriresàvousfairechavirerlecœur.—Oui,lavieestdifférente,c’estunautremonde.Tum’étonnes,elleestpasséed’unepetitebourgadeàlagrandepomme,c’estuneautreplanèteàcôté.
Ellecommenceàmeracontercommentestsavie ici.Cequ’elleaimefaire, lessitesqu’elleavisités,toutes ses choses étonnantes qu’elle n’aurait jamais pu faire dans notre petite ville d’enfance.Elle enparleavecunetellepassion,jevoisàsonexpressionqu’elleadorecetteville.Onsortduparcetsansreprendrevraimentnotrecourse,oncontinueàdiscuterenlongeantuneavenue.
Elles’arrêtesoudain—Jetelaisse,jedoisrentrerlà.Jetournelatêteversunepetitemaison.Quandjelislapancarte,jememetsàrire.—JennyvatetuersituramènesuneautreMaya.Ellesemetàrireàsontour.—Non,je…jefaisdesheuresdebénévolatici.Ellem’intrigueencoreplusetjenepeuxm’empêcherdesourireenlaregardant.C’estmaLivieça.
Ma Livie. Elle passe unemèche de cheveux échappés de sa queue de cheval derrière son oreille etajoute:
—Situveuxvenir…çanemedérangepas.Ellemeledemandeavectimiditéetjenepeuxm’empêcherderiredelavoirainsi.Elleplisseson
nezenposantsesmainssurseshanchesenmeprovoquantduregardcomprenantquejememoqueunpeu.Jemetsfinàsonsuppliceetaccepte.Jeveuxlaredécouvrir,voirsavie,cetteviepourlaquelleelleal’aird’êtreaussiépanouie.Onrentredansunepetiteréception.Génial.Hayden.Jel’avaisoubliécelui-là.Illuisouritdetoutessesdentsavantdeluifaireuneaccolade.Ellesetourneversmoi:
—Tutesouviensd’Ethan?Ilestvenuavecmoiaujourd’hui.Ilmetoisedebasenhautavecundrôledesourire.—Sijem’ensouviens…C’est quoi son problème à ce type ? Livie lui donne un coup sur la tête qui le fait râler et elle
m’attrapelamainavantdenousenfoncerdanslamaison.Jeserresamaindanslamienne.Parcequejesaisquecemomentserabref.Onressortàl’arrièreparunebaievitréeetdécouvreunhangarréaménager.Des chats. Des chats partout qui ont vu la guerre. Ils sont tous affabulés de blessures plus oumoinsgraves,maisLivien’apasl’airdemoinslesaimer.Elles’agenouilleaumilieudelapièceetquelques-unsviennentàsarencontre.Jemedemandes’ilestpossibled’aimerplusquejel’aimedéjààcetinstant.Elleesttellementattendrissante.Onpassedeuxbonnesheuresici.Ellememetàl’ouvrage,maisçanemedérangepas.Onritbeaucoup.Etjeretrouveunepartiedemoi.Jemesensléger,ladouleurdevientplussupportable.Alorsjeprendsunedécision.Jenepeuxpasluipardonnerd’avoirpiétinémoncœur,maisjeneluitourneraipasledospourautant.Carc’estl’unedesplusbellespersonnesquejeconnaisseetjeserais incapablede la rayerdemaviepourdebon.Ellemeditqu’onpeut repartiraumomentoùsonportablesemetàsonner.Ellefixel’écranetrejettel’appelenlerangeantdanssapoche.
—Tunerépondspas?jel’interroge.Ellemesouritenpenchantlatête.—Plustard.Jesuisavectoilà.Jenepeuxm’empêcherdesourire.Quelcrétinjesuis!JesecouelatêteetsalueHaydenrapidement,
parpurecourtoisieetfranchilaportepourl’attendredehors.Jelavoisluiparlerau-dessusducomptoir
quilessépare.Jemedemandes’ilssontjusteamis.EtceCédric.Etcetypelouche.Jesuisentraindemefairedumal,maisjenepeuxpasm’enempêcher.Quandjelavoissepenchersurlecomptoir,j’inclinelatêtesurlecôtépourvoirsesfessessedévoilerdemanièreintéressante,maisquandelleattrapeHaydenparlecoldesontee-shirtenluichuchotantquelquechoseàl’oreille,çafinitdemecalmer.IléclatederireetreculesousleregardamusédeLivie.Moi,c’estloindemefairerireetlabonnehumeurquis’étaitinstalléeestentraindes’évaporer.Ellesortetfroncelessourcilsenmeregardant:
—Quoi?Jemefrottelanuquenerveusement.—Nonrien,onyva?Onrepartendirectiondechezelleenmarchant.Pourquelqu’unquiétaitcenséfaireunjogging,onne
peut pas dire qu’on a beaucoup couru. Mais je n’arrête pas de penser à Hayden et je finis par luidemander:
—C’esttonpetitami?Çam’arrachelaboucherienqu’àleprononceràvoixhaute.Elleécarquillelesyeuxensetournant
versmoi:—Quiça?Hayden,typelouche,Cédric,onal’embarrasduchoix.—Hayden.Ellepouffederireensecouantlatête:—Non.Haydenestuntrèsbonamic’esttout.Bon,undemoins.C’estdéjàça.Ellemejetteuncoupd’œilensouriantencoin.—Tuesjaloux?Jepréfèrenepasrépondre.J’aibeaumedirequejeneveuxriendeplusd’elleaprèscequ’ellem’a
fait,l’imagineravecquelqu’und’autremeretournelestripes.Ellepouffederireenm’attrapantlebrascequiapoureffetdemefairerire.Putain,çam’avaitmanqué.Sespetitsmomentsdecomplicitésisimpleetnaturelleavecelle.
—Situveuxtoutsavoir,jen’aipasdepetitami.Etvoilàdequoifairedecettematinée,uneexcellente journée.Monsouriredoitmetrahir,carelle
souritàsontourdeplusbelle.Sonbrasentouranttoujourslemien,j’aienviedeplus,maisjemeretiens.Onaplusretrouvéenunematinéequedepuissesderniersjours.Jeneveuxpasgâcherça.
—Mêmepascemec,Cédric?Ellesemetàrougirenbaissantlesyeux.Putain.Illafaitrougir.Çametordlebide.Iln’yaquemoi
quienailedroitetjesaisparfaitementm’yprendreàcesujet.Ellefaitnondelatêteenregardantfaceàelle.
—Non,c’estjusteuncollèguedetravail.Justeuncollèguequitefaitrougirmapuce.Etçanemeplaitpasdutout.—Maisiltedrague.Jen’aipasoubliélafaçondontcep’titconaposélamainsurellequandellerevenaitdesapause.
J’aidûmecontenirpournepaslaluiarracher.Ellerougitdeplusbellecequim’énerved’autantplusetellehausselesépaules.
—Çam’estégal.Quandelles’arrête, jemerendscomptequ’onestarrivédevantchezelle.Jeluidisquejerepasse
toutàl’heureavecGreg.J’aibesoind’unebonnedouche.Froidedepréférence.Elleacquiesceetenlavoyants’éloigner,j’aperçoiscefoututatouagemefairedel’œil.
—Hey,Liv…Elleseretourneetjepointedudoigtsonépauleoùdépassel’encresursapeau.—Tontatouage…C’estquoi?
Ellepasseundoigtdessusensouriantavantderépondre:—L’histoiredemavie.
Chapitre16
Livie
Enrentrant,jedécouvreGregetJennydanslesalonentraindediscuter.Jennyadéjàrevêtusatenued’infirmièreetsepréparepourallertravailler.
—Alorscejogging?demandeGreg.J’essaie de ne pas trop souriremême si ça s’avère plus difficile que je ne l’imaginais. J’ai plus
qu’appréciercemomentavecEthanquejenel’espérais,maisvautmieuxnepastropendireàGreg.—Bien.luidis-jeenhaussantlesépaules.Je jette un coup d’œil à Jenny qui m’observe avec un air amusé et Greg plisse les yeux en me
regardant.Merde,ilfautquejedétournecetteconversation.—Ettoi,qu’est-cequetufaisdéjàlà?Ilséchangentunregard…complice?—Unefollem’avaitsortidulit,j’avaisriend’autreàfaire.Jepouffederire.Voilà,sujetévité,c’estparfait.Jennynoussalueendisantqu’ilfautqu’elleyailleet
franchit laporte. J’abandonneGreg le tempsd’aller sous ladoucheetquand je reviens, je le retrouvedansmachambre,assisauborddulit.Iltientunephotoentresesdoigtsetmoncœurmanqueunbattementenvoyantquec’estlaphotoqu’Ethanaprisdanslaclairière.Jen’auraispeut-êtrepasdûlalaisseràvuesurmacoiffeuse.Mêmesiellenedévoilerien,jesupposequ’ildoitseposerdesquestionssurlaraisonquimepousseàgarderunephotocommecelle-ci.Illèvelesyeuxversmoi,lessourcilsfroncésalorsjedétourneleregardenposantmesaffairessurmacommode.
—C’estCover-road.N’étantpasunequestion,jesupposequeçanesertàriendenier.—Oui.—Pourquoitul’asgardé?Jem’adosseàmacommode.Gregmeregardeaveccetteexpression.Je laconnaisbien,c’estcelle
quiessaiedemedéchiffrer,sesquestionsqu’ilmeposaitdontilnetrouvaitjamaisderéponse.Surmescauchemars,surmessortiesnocturnesentreautres.Jememordslajoueréfléchissantàtoutevitesseàuneréponseàluidonnerquiprendunpeuplusdetempsqueprévu.Ilposelaphotoàcôtédeluisurlelit,selèveets’approchedemoi.Simesmensongesétaientfondésàl’époque,l’idéedeluimentiraujourd’huimemetmalàl’aise.Ilattrapemonmentonenmeregardantplusintensément.
—Plusdesecretpetitlapin.Aide-moiàcomprendre.Tecomprendre.Jesouffleenmedégageantetbaisselesyeux.Aprèstoutcequ’ilafait,jeluidoisbiença.—Tuterappellesquandtumedemandaiscequejefaisaisquandjesortaislanuit?Ilhochelatêteetjefaisungesteverslaphoto,toujourssurlelit.—J’allaisàlaclairière.Lessoirsoùtoietmamann’étiezpaslà,j’avaisbesoindem’éloignerdelui.Ilsetournelégèrementenregardantlaphotocommes’ilréalisaitenfinquelquechoseetseretourne
versmoi.— Il savait…c’est pour ça qu’il ne te grondait qu’àmoitié. J’ai jamais compris pourquoi il était
aussilaxistelà-dessusavectoi.Maintenant,jecommenceàcomprendre.Je hausse les épaules en tournant mon visage vers la fenêtre incapable d’affronter son regard, le
regarddenotremère.—Jeluiaiexpliquéquejen’enpouvaisplus.Quej’avaisbesoindesesmomentsetqu’iln’avaitpas
intérêtàm’enempêcher.Quand j’oseànouveau le regarder, sesyeux tristesme transpercentdedouleur. Jen’aimepasvoir
cetteexpressionsurlevisagedemonfrère.Jetenteunsourireenmepenchantverslui.—T’inquiètespas,moiaussijeluienaifaitbaver.Ses lèvres s’étirent et je suis fier de voir que j’ai réussi à détendre l’atmosphère pesante de cette
chambre.—Etpasqu’àlui!s’exclame-t-ild’unregardinsistant.Jerisplusparnervosité,maispeuimporte,celamefaitdubientoutdemême.—Cen’étaitquejustice!J’aijamaisfaitlecomptedetesblagues,maisjesuissûrequeçasecompte
encentaines!Cettefois,c’estluiquiéclatederire.—EtsiEthannem’avaitpaslâché,ilyenauraiteubeaucoupplus!J’enperdsmon sourire,maisme rattrape envitesse. J’avaispresqueoublié ce jour-là, le jourdes
confitures.EthanetGregavaientremplidesballonsavecunmélangepoisseuxd’eauetdeconfitureavantdemecoincerdanslejardinetdemebalancerunedizainedesesconcoctions.Jen’aiquemoyennementappréciécejour-là,maisc’estaussilejouroùEthanm’afaitunepromesse,etilatoujourstenuparole.
Livie
10ansplustôt
Livie:10ans
Ethan:13ans
Greg:15ans
Mamanessuielaconfiturequimerecouvrelescheveux,ellen’estpascontente.GregfixesespiedsetEthanme regarde.Onpourraitpresquecroirequ’il est triste.Moi, ilm’énerveavecmon frèreça lesamusedetrouverdesblaguespourmefairepleureretaujourd’huiilsontencoreréussi.Ilssesontamusésàremplircequidevaitêtredesbombesàeauavecdelaconfitureetmaintenantjesuisrecouverted’uneconfiturepoisseusedelatêteauxpieds.Monpèreleurcriedessusetjenelesquittepasduregard.JefixeEthanetessaiedeluimontreràquelpointjesuisloindetrouverçadrôle.Iljetteuncoupd’œilàmonfrèreavantdemeregarderdenouveauetmime«désolé»deseslèvresenpenchantlatêtesurlecôté.Dumoins je croisque c’est cemot.Mais c’est unpeubizarre, je ne comprendspaspourquoi ils’excuseraitaprèsavoirfaitça.Mamans’éloigneetjemerapprochedeluiencroisantmesbras.J’essaiedemeredresserpourêtreplusgrande.
—Excuse-moiLivie,jenevoulaispastefairepleurer,déclare-t-il.Jeplisselesyeuxenleregardant:—J’aipaspleuré.Ilmesouritdoucementetmurmure:—Non,biensûrquenon.Jenepeuxpasm’empêcherde lui sourire et on semet à rire tous lesdeux.C’est énervant, car je
n’arrivejamaisàluienvouloir,maisj’aifiniparm’yfaire.—Entoutcasjenerecommenceraisplus,promis,assure-t-il.Jenesaispassic’estlavérité,maisEthann’estpastoujoursaussibêtequemonfrèreetilluiarrive
d’êtregentilavecmoi.—AttentionEthan,onnefaitdespromessesquequandonestsûredelestenir!criemamanprèsdu
garage.Illaregardeensouriantjusqu’auxoreillesethochelatête.Quandilreportesonattentionsurmoi,il
meprendlamain.—JetefaislapromesseLivie,jenet’embêteraisplus.Je sens que ce n’est vraiment pas des paroles en l’air alors à cemoment, je le crois. Çame fait
bizarrequandilmeserrelamainunpeuplusfortenregardantnosmainsjointes,maisj’enprofitepourmevengeretluibarbouillelevisagedeconfitureavecmonautremain.Ilsedébatetmefaitlâcherprise
enriantfortetontombetouslesdeuxsurlesfesses.Gregetpapasontrentrésetmamannousregardeensouriant.
—Elleestgentilletamaman,jel’aimebien.Moimamaman…Ils’arrêteetjevoissonsouriredisparaitre.C’estlapremièrefoisqu’ilparledesamaman,iln’en
parlejamais.Mamanm’aracontéqu’ellel’avaitdéjàvueetqu’ellen’étaitpastrèsgentilleavecEthan,maisqu’ilnefallaitpasluienparlerparcequ’ilauraitpeuretneviendraitplusjoueravecnous.Alorsjenedisrien.Ilbaisselesyeuxetsefrottelesmainssursonjeancommes’ilregrettaitd’avoirditça.C’estàcemoment-làqu’onsentlejetd’eaufroide.Mamanasurgiparsurpriseavecletuyaud’arrosageetjemecachelatêtedansmesbras.
Chapitre17
Ethan
L’histoiredemavie.Jemerépètecettephraseenboucledepuisque je l’ai laissédevantchezellerienquepourmefairedumal.Qu’est-cequ’elleavouludire?Est-ceunlienavecsondépart?Ouunedesesénigmesétrangesdontjenecomprendsabsolumentrien?Gregm’alaisséunmotdisantqueJennyl’avaitappelé.Ellevoulaitluiparleretjeremontedonccecouloirseulendirectiondel’appartement.Envoyant lepetitescaliermenantau toit, lanostalgiemeprend.Lesétoilesmemanquentàmoiaussi,ouplutôt,delesregarderavecelle.Lesobserverseuldanslaclairièren’avaitplusrienàvoir,maisc’esttoutcequ’ilmerestaitd’elle.Jecontinuemaroute,maisarrivéedevantsaporte,quandj’entendslesonstridentde lavoixdeLivie, lapaniquemeprend.J’ouvre laportesansprendre lapeinedefrapperetéclate de rire devant cette scène.Livie etGreg couvert de farine de la tête aux pieds, se chamaillentcomme des gamins et s’arrêtent enm’entendant. Livie agrandit encore plus son sourire enme voyant.Mêmelescheveuxenfarinéselleestirrésistible,jesuisbonàenfermer.Gregenprofitepourl’attraperetlahissersursonépaule.
—Non!Greg,lâche-moi!—C’esttoiquiascommencéLivie!Fallaityréfléchiravant.Ilss’éloignentdanslecouloir,Liviesedébattantcommeellelepeut.Ellen’aaucunechance,Grega
une carrure à faire frémir beaucoup demonde, alors un petit bout de femme comme Livie, elle peuttoujoursrêver.Jem’installesuruntabouretdubar,leslaissantprofiterdecemomentderetrouvailles.Çafaitplaisirdelesvoirainsi.Unedouceodeurdechocolatfaitfrémirmespapillesetj’aperçoislefourrenfermantsurementundestrésorsdeLivie.Cettefilleatoujoursadorépréparersucreriesetpâtisseriesentoutgenre.Ondiraitqueçan’apaschangé.EllepartageaitcettepassionavecSamanthaet jenemelassaisjamaisdelesregarderfaire.Samanthaauraitpuêtrecuistot,jesuissûrequ’elleauraitadoré,maiselleaffectionnaitaussibeaucoupsontravaildevétérinaire.ÇaaussielleadûrefilercegèneàLivie.Jetrouvevraimentdommagequ’ellesecontented’unsimpleboulotdeserveuse,c’estunvraigâchis.Maisàceque j’aicrucomprendre,ellen’apasvraimenteu lechoix.Etpuiselleestpartie sansmêmeavoirterminésonannéedeterminale,ilnefallaitpass’attendreàautrechose.
—Greg!Non!Jepouffederireenentendantlejetdeladouche.Ilesttempsd’allerjeteruncoupd’œil.Jedécouvre
Livie assisedans labaignoire,unairboudeurpendantqueGreg l’aspergeàgrandeeau.Elle lève lesyeuxversmoietjemeforceànepasregardersontee-shirtluicollantàlapoitrine.Unechosemefrappesoudain.Elleporteàchaquefoisdesvêtementscachantàlaperfectionsonépaule.Cetatouage.Jejetteuncoupd’œilàGreg,paspeufierdesonpetitmanègequiritdeplusbelle.Elleneveutpasqu’illevoie,àcemoment,j’ensuiscertain.Enentendantunesonnerieprovenantdelacuisineelles’écrie:
—Mesbrownies!—Jem’enoccupe,jerépondsenreprenantlechemindelacuisine.Ilssontparticulièrementalléchants,maiscesontlessouvenirsdesmeringuesqu’ellepréparaitchez
moiquime reviensà l’esprit.Quand j’aiprismonappartement,onacommencéàdélaisserunpeu laclairièreetpassaitlasoiréechezmoi.Unesoiréemerevientparticulièrement,j’ailéchésesmeringuesàmême son corpsqui resteraun souvenirmémorable.Moncorpsme rappelle combien cemoment était
particulièrement excitant et je ferme les yeux en entendant des pas arriver derrièremoi. Putain Ethanpenseàuntructriste,deschatsmorts,descentainesdechatsmorts.Jem’installeunpeuprécipitammentsur un tabouret essayant de camouflermon jean tendu sous le bar.Gregme rejoint encore enfariné ets’assisfaceàmoi.
—C’estellequim’acherché.—C’estpasmonproblèmedis-jeenpouffantderire.LesondeladoucherésonneetGregjetteuncoupd’œilendirectionducouloiravantdesepencher
versmoi:—J’aibesoind’uncoupdemain.Jesecouelatêteencroisantlesbras.—Necomptepassurmoipourtevenger.Jenefaisplusçaetpuisonn’estpasunpeuvieuxpourcegenredeconnerie?Iléclatederireen
ajoutant:—Maisnon,t’escon.Ils’arrêteetperdsonsourire.Jedevinequ’ilaquelquechosedetrèssérieuxentête.—Jennyvoulaitmeparlercematin.Ellefaittoujoursdescauchemars.Çamebroiede l’intérieurquandilmeditça.Sesyeuxrivéssur lebar, ilévitedemeregarderen
ajoutant:—J’aiessayédeluienparler,maiselles’estbraquée.Jennyditqu’elleaconsultéunpsypourça,
maisqu’elleatoutarrêtésansdirepourquoi.J’avaisespéréquetumedonnesuncoupdemainpourlaraisonneretaccepterdelerevoir.Jennyditqu’ilestbien,qu’audébutçal’avraimentaidé.
Ilrelèvelesyeux.Jem’adosseàmonsiègeenproieàtoutuntasdequestionnement.Lapremièrefoisqu’ilm’enaparlé,ilétaitcomplètementbourréetm’afaitjurerdenejamaisdireàLiviequ’ilmel’avaitdit. Il semblait désemparé et s’en voulait de s’être laissé aller à ce genre de confidence avecmoi. Ilm’avaitalorsracontéqu’elledébarquaitsouventenpleinenuitdanssachambretellementeffrayéeparsescauchemarsqu’elletremblaitcommeunefeuille.
—Cesontlesmêmes?Jenesaispasdequoisontfaitssessonges,maissielleavaitbesoindesonfrèrepourserassurerça
nedoitpasêtreunepartiedeplaisir.Ilmefixeuninstantethochelatête.—Dumoinsjepense,elleatoujoursrefusédemedirequoiquecesoit.Bizarrement,lepeudefoisoùons’endormaitensembledanslaclairièreellen’enfaisaitjamais.—Etjesuiscenséfairequoi?Ilsefrottelesmainssurlevisageàplusieursreprisesavantdereprendre:— Elle t’écoutait toujours Ethan. Peut-être qu’elle t’écoutera encore. J’ai cru comprendre que ça
s’étaitbienpassétoutàl’heure.Jeneteledemanderaispassijepouvaisfaireautrement.Jedoisbienavouerquetoutcelam’intrigue,dequoipeut-ellerêverdelasorte?Çafaitdesannéeset
çaseraittoujourslemêmecauchemar?Jetapotelasurfacedubarmeretenantdel’assenerdequestionsavantdesouffler:
—Etjem’yprendscommentaujuste?—Dequoi?OnsursautetouslesdeuxenvoyantLivierevenir.Elleatroquésontee-shirtetjeancontreunepetite
robequimedonnededrôledepensée.Elleestd’unrougefoncétrèsélégant.Mesyeuxs’attardentsursesjambesnues,maismereprendrapidement.Ellenemefacilitevraimentpaslatâche.
—JeracontaisàGregpourtonp’titboulotaurefuge.Greghausseunsourcilet je lui intimesilencieusementde la fermer, s’ilveutque je luiparle ilva
falloiryallerdoucement.QuandLiviesebraque,iln’yaplusrienàfaireetiln’ajamaiscomprisqueplus il insistait plus elle s’enfermaitdans sa coquille.Moi je l’avaisvite compris et c’est cequim’a
permisdefairetamponentrelesdeuxfranginsquandcesdeux-làs’étripaient.—C’est le refuged’Hayden, répond-elle. Il a dumal à rassembler des fonds pour faire vivre cet
endroit.Ducoup,jeluidonneuncoupdemaindetempsentemps.Ellebaisselesyeuxetenveloppeleplatdebrownies.—Onnevamêmepasavoirdroitd’ygoûter?questionneGreg.Ellesouritensecouantlatête.—C’estpourleboulot.J’aimebienramenerdesp’titstrucsàgrignoter.—Tuvasfinirpardevenirénorme,leprovoquesonfrère.Elleécarquillelesyeuxetbaissesonregardsursarobecommepourychercherquelquechose.Quand
jecomprendsqu’ilafaitmouche,jemeretiensdeluidirequejelatrouveparfaite.Absolumentparfaite.—IltefaitmarcherLivie,jemecontentedepréciser.Elleme regardeun instant avantde se tournerversGregen luipinçant lebras. Il faitunbonde3
mètresetjecroisemesmainsderrièrelatêteenpouffantderire.Çaluiapprendra.—Jenesuispasgrosse!—Justeunpeuenveloppé,mamant’avaitprévenud’arrêterdetegoinfrer!Ellelefusilleduregardetjemeretiensderire.C’estloindeluiplairemêmesiGregal’airdebien
semarrer.Elleattrapeleplatdebrowniesetlejettederagedanslapoubelleavantdes’éloignerverssachambreenclaquantlaporte.
—Livie!Jerigolais!Jesecouelatêteenrépondant:—T’esvraimentuncrétin,pasétonnantquet’esbesoindemoipourluiparler.
*Elle n’aura pas fait la gueule bien longtemps,Greg s’est excusé une bonnevingtaine de fois avant
qu’elleaccepted’ouvrirlaporte,maiscettesemi-disputeaviteétéoubliéequandJennyestrentrée.Onapassélafindel’après-midiàdiscuteravecJennypendantqueLivieétaitpartietravailleretonafiniparrentreràl’hôtel.QuandGregfinitparregagnersachambre,j’enprofitepourressortir.J’arriveàattraperuntaxiassezrapidementetluiindiquel’adressedubaroùtravailleLivie.Pendantlaroute,jerepenseàce queGregm’a dit à propos de ses cauchemars. Je ne peuxm’empêcher deme dire que son départn’étaitpeut-êtrepassiprécipitéqueça.Quandsamèreestdécédée,ellel’atrèsmalvécuetellen’étaitplus tout à fait elle-même après ça. C’était déjà une vraie énigme,mais c’est devenu encore pire. Jerepenseàsonpère,etsiçaavaitunlienaveclui?Livien’ajamaiseuunerelationtrèstendreaveclui.Ellesuppliaitsouventsonfrèredenousaccompagnerquandonsortaitetqu’elleétaitseuleaveclui.J’aibiententédeluiparleràcesujetquandonacommencéàsefréquenter,maiselledisaitqu’illafatiguaitàluiprêterautantd’attentionetqu’ellenesupportaitpassonsurnomdigned’unegaminede4ans.Maissionmettoutçaboutàbout…Non,c’estridicule,jenel’imaginepasunesecondes’enprendreàelle.Letaxis’arrêteet je laisseauchauffeurunbonpourboireavantdesortir.LavoituredeLivieestgaréeàquelquesmètres,elleestdonctoujourslà.Jerentredanslebarenlacherchantduregard,maisnelavoispas.Jem’approcheducomptoiroùFredregardeunmecservirunclientavecsévérité.Jenel’aijamaisvu,ondiraitbienquep’titconn’apasfait longfeu. Iln’approcheraplusdemaLiviecommeça.Tantmieux.JetendslamainàFredqu’ilmeserrequandilm’aperçoit.
—Ethan,tuesvenuvoirLiviejesuppose.—Onpeutrientecacher,elleestoù?—Partiecherchersesaffairesauvestiaire,ellevientdefinir,ellenevapastarder.Bon, je ne l’ai pas manqué c’est déjà ça. Je m’installe sur un tabouret pour l’attendre. Fred me
proposeunebièrequejerefusequandjelavoisfranchirlaportemarquée«privé»aucôtédep’titcon.
Jecomprendsquejemesuislourdementtrompé.Ilesttoujoursbeletbienlàetilsrienttouslesdeux.Illafaitrire.Putain.Elles’arrêteenmevoyantetsemetàrougirenregardantleconnardavantdeluidirequelquechoseetmerejoint.Jeneveuxpasfaired’esclandre,maiscen’estfranchementpasl’enviequim’enmanque.JemetourneversFred.
—Unebière,ouaisjeveuxbienenfait.Ilsefrotteleboucenplissantlesyeux:—Quoi?j’aboied’untonsec.Ilpouffederireenattrapantunverre.Jen’aimepascetteimpressionqu’onestentraindesefoutrede
moietlà,jenesuisvraimentpasd’humeur.Livies’arrêteàcôtédemoietjeluijetteuncoupd’œilaprèsavoirvup’titconfranchirlaporte.C’estça,casse-toi.
—Qu’est-cequetufaislà?demandecettedernière.J’attrapelabièrequeFredvientdeposerdevantmoietenboisunegorgée.—J’avaisenvied’unverre.Elles’installeàcôtédemoienpenchantlatêtesurlecôté.—Ettuasfaittoutcechemin,pourunebière?Ilsn’enserventpasdanstonhôtel?Sonpetitsourirenem’échappepas.Jereposemonverreetmetourneverselle.—Lesserveusessontbeaucoupmoinssympasàregarder.Je lui fais unpetitmouvementde sourcil qui la fait pouffer de rire.Elle rosit légèrement et jeme
félicite. Il était temps. Fred a repris son poste à quelquesmètres de nous,mais je le vois nous jeterquelquescoupsd’œil.
—Tuveuxqu’onsorte?m’interroge-t-elleenfixantlebarenrougissant.Putain,c’esttropbondelavoircommeça.—Pourquoipas,tuveuxalleroù?Elleplissesonnez,jecroisqu’elleréfléchitavantd’ouvrirsesyeuxengrandetdit:—LeCottonClub.
Chapitre18
Ethan
5ansplustôt
Livie:15ans
Ethan:18ans
Greg:20ans
Samanthaenfourneleplatdanslefouretseretourneversmoi—Voilà,merciEthanturestesavecnouspourmangerj’espère.Ellemesouritetj’acquiesce.Ellelesait,maisellemeposetoujourslaquestioncommepournerien
m’imposer. Elle est tellement gentille, je ne regrette vraiment pas d’avoir franchi cette porte depuismaintenant7ans.Ellem’aaccueilli àbrasouvertset jemesenscommechezmoi ici.Enfin, façondeparler,c’estbiendifférentdechezmoi…
—Gregnedevraitplustarder,situveux,Livieestdanslejardin.Ellemefaitunsignedementonendirectiondelaporte-fenêtreavantd’ajouter:—Etsituarrivesàluiparler,çam’arrangeraitbien.Ellevamerendrefolle.—Jepeuxtoujoursessayer.Jesorsetlavois.Livieestassisesurlapelouseadosséeaupoirier,uncahiersurlesgenoux.Unstylo
entrelesmains,elleal’airconcentréeetgriffonne.Malgrésonsweattroplargequ’ellenequittepresquejamais,jelatrouvevraimentmignonne.Nonplusqueça.
Ellesemetàrâleretlancelestyloderagedevantelle.Ellemevoitetsarages’envolepourm’offrirleplusbeaudessouriresdonnantunratéàmoncœur.Jerisetm’assisenfaced’elle.
—Tufaisquoi?Ellesourittimidementetplongesonregarddanslemien.J’adorequandnosregardssecroisent.Livie
adesyeuxmagnifique,vraimentmagnifique.J’ail’impressiondemenoyerdansleplusbeaudeslagonsquandellemeregarde.
—J’aidesdevoirsàrattraperetjen’ycomprendsrien.Elle souffle et referme le cahier. Samm’a dit qu’elle s’était fait prendre à sécher les cours cette
semaine,elleenfaitbaveràtoutlemondeencemoment.Saufàmoi.Elleatoujoursétéadorableavecmoi.J’attrapelecahieravantqu’ellen’aitletempsdeleposeretnosdoigtssefrôlent.Jemeretiensdel’enviedeluiprendrelamain.Jenepeuxpas,jen’enaipasledroit.Onlâchetouslesdeuxlecahierenmêmetemps.Ellerapprochesesgenouxdesapoitrineenbaissantlesyeuxetsemetàrougir.Jetrouvequ’ellerougitbeaucoupencemoment,elleestadorablequandellerougit.
—Çaenvalaitlapeine?—Dequoi?
—Desécherlescours?Ellelèvelesyeuxauciel—Non,pastois’ilteplait…Jememetsrireetreprendlecahier.Desmaths.Etelleestcomplètementàl’ouestvucequej’ylis.—Situveuxquejet’aide,jepeuxtedonneruncoupdemain.Jerelèvelesyeuxverselle.Ellemeregardesansrépondre.—Quoi?—Gregm’aditquetucherchaisdutravail.Tuvasabandonnerlelycée?Merde.Jenepensaispasqu’ilenparlerait.Nonpasquec’estunsecret,maisjeneveuxpasavoirà
mejustifiersurmesmotivations.—Peut-être.Surement.Toutdépendsijetrouvequelquechose.Detoutefaçon,jen’auraispaspufaired’étudealorsquelquesmoisdeplusoudemoinsnechangeront
plus grand-chose. Je ne veuxpas avoir à lui expliquer que si je trouvedu travail, j’espère trouver lemoyend’aidermamèreàsesortirdecetrouquinoussertdemaison.J’espèrelafaireentrerendésintoxaussi,maisrienn’estsûravecelle.
—Etsitu…tutrouvesdutravailetunejoliemaisonettoutettout…tuviendrasencorenousvoir?EllemefaitrireLivie,elleatoujoursdesrépliquesquimedonnentenviedel’aimerencoreplus.—TucroisquejeviensquepourlajoliemaisonetlespetitsplatsdeSam?Elle pose sonmenton sur ses genoux et hausse les épaules. Je tourne la tête vers lamaison pour
vérifier que personne ne nous regarde et une fois rassuré je me penche vers elle. Elle est toujoursconcentréesurseschaussurescequin’estpasunemauvaisechose,carjesuistropprès,bientropprès.
—C’estpourtoiquejeviens…EtGregbiensûr…maissurtoutpourtoi.Jesaisquejenedevraispasluidireça,maisjen’yrésistepas.Ellesemetàrougirencorepluset
relèvelatêtetoutdoucement.Seslèvress’entrouvrentetmesyeuxsontcommeaspirésparelle.Jedoism’arrêterparcejerisquedefaireuneénormeconnerie,jelesais.Ellemesortdemonétatsecondenmepoussantl’épaule.
—Arrêtedetemoquerdemoi.Jepouffederireetétalemesjambesàcôtéd’elleenappuyantmesmainsderrièremoi.Jedéconneà
pleintubeencemoment.Jemarchesurunepenteglissante, jelesais,maisellemerenddingueet j’aibeau essayer, je n’arrivepas à la sortir dema tête.Laquestion est, combiende tempsvais-je encoreréussiràgardermesdistancesavecelle?
Chapitre19
Livie
Onestrepassérapidementàl’appartementpourquejemechangeetnousvoilààlongerlesruesdeHarlemsousleregarddubitatifd’Ethan.
—Dansquoitum’embarquesLivie?Lesmaisons accolées toutes de pierres rouges défilent quand j’aperçois leCottonClub apparaitre
devant nous. Je neme gare pas trop loin et sors de la voiture en claquant la porte. En voyant la têted’Ethan,jedevinequ’ilnes’attendaitsurementpasàça.C’estHaydenquim’afaitconnaitrecetendroitet on est souvent venu avec Jenny nous offrir une soirée dépaysante à souhait. Rien qu’à voir sadevanture, on devine que le club n’est pas d’hier. Endroit incontournable selonHayden, il date de laprohibition.Àl’origine,c’étaitunesalledeconcert,clubdejazzetdancing.C’esticiqu’onpouvaitvenirécouterLouisArmstrongetmêmesijen’étaispasforcémentfandeJazz,j’ailaissémonamipartagersonamourde lamusiqueavecmoi. Jene l’aipas regretté. J’attrape lamaind’Ethanpour l’entraineravecmoi.
—Allezviens,tuverras,çavautlecoupd’œil.À peine passé la porte que les sonorités de la musique nous parviennent. Un grand homme nous
demandenoscartesd’identité.Mince,j’avaisoubliécedétail.Quandjelatendsetqueleportiernouslaisseentrer,Ethanmeregardeavecperplexité.Jenesuispascensépouvoirrentrer,vuquejen’aipasencore21ansenréalitéetçan’apasdûluiéchapper.Ons’installesurunepetitetablerondeunpeuàl’écart.Ils’accoudeàlatableenmefixantplusquenécessaire.
—Desfauxpapiers,voilàpourquoionnetrouvaitriensurtoi.Jemecontentedeleregarderespérantqu’iln’insisterapassurlesujet.J’avaisentêtedem’amuser,
pasderépondreàuninterrogatoire.Lesondusaxophoneal’airdelesortirdesesréflexionsetquandilmeregardedenouveau,ilsouffleenattrapantmamainsurlatable.Lesfrissonsmeparcourentcommelapremièrefois.Serais-jeunjourcapabledel’oublier?Jenecroispas,3ansloindeluin’ontpasréussialorsjesaisquec’estpeineperdue.Sonpoucecaresselemienetilmedemandedoucement:
—C’estàcausedetonpère?Toutmoncorpsseraiditsansquejepuissem’enempêcher.Iladûlesentir,carilenglobemamain
dessiennes,meserrantplusfort.—Qu’est-cequitefaitdireça?jedemandelavoixtremblante.Ilpenchelatêtesurlecôtéenplissantlesyeux.—Tudisparais.Tuluilaissesunelettreenluidisantdenepasteretrouver.Tutefaisdefauxpapiers
pourt’enassurer.Etpasuneseulefois,tun’asdemandédesesnouvelles.Pasunefoisjet’aientendueenparleravecGreg.C’estcommesivousévitiezcarrémentlesujet.
Jeluidiraisbienquejeluienaiparlésurletoit,maisjepensequ’ilacomprisquecen’étaitqu’unemanœuvredediversion.Labouledansmagorgem’empêchededirequoiquecesoit.Etmêmesi j’enétais capable je ne serais quoi lui dire. Un serveurme sort dema torpeur et j’arrachemamain dessiennesencommandantunMojito.Jevaisavoirbesoind’unremontant.Ethanquantàlui,commandeunManhattan.Onrestesilencieuxàs’observerjusqu’àcequeleserveurnousrapportenosboissons.J’avaledeuxbonnesgorgéesdemonverrelaissantlachaleurdel’alcools’infiltrerdansmesveinespourtenter
decalmerlapaniqueàl’idéequ’ilpuisseconnaitrelavérité.J’aitellementmalàl’idéequ’ilpuissemevoir différemment, je ne le supporterais pas. Bizarrement, il n’insiste pas. Ce dont je lui suisreconnaissante.Auboutdeplusieursminutesoùnil’unnil’autren’aémisunson,ilselèveetmetendlamain:
—Viensdanseravecmoimapuce.Jerisdel’entendrem’appelerdelasorteetprendssamainpourmelever.Ilpassesonbrasautourde
ma taille etme serre contre lui. Lamusique a beau être entrainante, je crois qu’on improvise à notreproprerythme,appréciantlecontactdel’autre.Jeposematêtecontresonépauleenmelaissantbercer.Jemerendscomptequec’estlapremièrefoisqu’ondanseensemble.Toussesmomentsqu’onapartagés,c’étaitàl’abri,loindesregards.Sortir,s’amusercommeuncouple,nousn’avonsjamaispuenprofiter,etpourtant ses moments étaient tout ce que j’avais. Il était ma bouée au milieu de l’océan, mon trésorinestimable.Serend-ilcomptequesansmêmelesavoir,ilestàmesyeuxl’unedesseulespersonnesquimepermettaitdesourire?Quandj’étaisaveclui,pendantunmomentj’arrivaisàoublier.Oublierquedèsque je franchissais le seuil dema porte, l’enferm’y attendait. Je sens son souffle contremon oreillependantquesamainremontesurmanuqueencaressantmescheveuxduboutdesdoigts.
—JetepardonneLiv.Jereculemonvisagenecomprenantpasdequoiilparle.Ilsouritencaressantmajoue.—Tuneseraispaspartiesansunebonneraison,etmêmesijet’enveuxdenepasm’enavoirparlé,
jetepardonne.Une larme m’échappe. Je reste immobile face à lui ne comprenant pas ce que j’ai pu faire pour
mériter cette rencontre. J’aime cet homme, plus que de raison, j’aime cet homme comme il n’est paspossibled’aimer,j’aimecethomme,àquijeconfieraismavielesyeuxfermés.Ilsepencheetembrassemajoueouleslarmesontlaisséunetrainéehumideavantdeprendremonvisageentresesmains.
—Net’enfuisplusLivie.Plusjamais.Jenesupporteraispasdeteperdreànouveau.Çafinitdem’anéantiretunsanglotm’échappe.Jefermelesyeuxetm’agrippeàsontee-shirtcomme
pourmeraccrocheràquelquechosepournepasm’effondrer.Toutessesémotionsquej’étouffedepuissilongtempssontsur lepointdesortir toutesenmêmetemps,etc’estdouxetdouloureuxàlafois.Ilmeserrecontre lui,enmechuchotantquetout irabienmaintenantet jenesaispassi jedois lecroire.Samainposéesurmatête,j’essaiedemecalmer,demedirequejesuisentraindememontrerenspectacle.Mais quand je relève la tête vers lui et que ses émeraudesm’observent avecunedouceurque j’avaisoubliée,jenerésistepasauxbattementsdemoncœurquimerappelleàlui.Jememetssurlapointedespiedsetàlasecondeoùmeslèvresseposentsurlessiennes,laTerrearrêtedetourner,l’universcessed’existeretjepassemesbrasautoursoncoupournepasflancherencoretremblantedemapetitescène.Jesensseslèvress’étirercontrelesmiennesetsesbrasm’entourermesoulever.Jetoucheàpeinelesol,mais ce n’est pas grave, je suis dans ses bras.Là où j’ai toujours rêvé être.Et pour la première foisdepuislongtemps,jemesensvivante.Vivanteetàmaplace.
*
Jemegaresurleparkingdel’hôteletEthansetourneversmoi.—Tusouriscommeunimbécile luidis-jeenvoyantlesourirequinel’apasquittédepuisqu’on
s’estembrassé.—Jesuisunimbécile.Je pouffe de rire et il m’attrape la nuque enm’entrainant vers lui. Ses lèvres sont d’une douceur
exquise et même si j’adore ça, j’ai conscience qu’à un moment il exigera des réponses. Il voudracomprendre,mais comme il semble ne pas en vouloir en parler pour lemoment, j’essaie de ne pas ypenser.Ilposesonfrontcontrelemiensansmelâcheretdit:
—Vautmieuxgarderçapournouspourlemoment.Gregn’apasencorecoupélecordonavectoisituveuxmonavis.Onluidira,maisj’aimeraisunpeuprofiterdenousavantqu’ilnem’empale.
Nous.Ilyaunnous.Ilpouffederireenajoutant:—Iln’yapasquemoiquisouriscommeunimbécile.Jemereculeetlepousse:—Allezvast’en,jesuiscrevé.Ilsortdelavoiture,maissepencheaumomentavantdefermerlaportière:—Liv,Cédrictedrague.Tupeuxluidireàlui,sinonjem’enchargemoi-même.Ilfermelaportièresansattendremaréponse.Ilfautquej’arrêtedesourirecommeça.Jeleregarde
s’éloignervers lesportesde sonhôtel et aprèsundernier signedemain, il franchit lesportes. Jemelaisseretombersurmonsiègeenfixantl’horizondevantmoi.Qu’est-onestentraindefaire?Jen’enaipaslamoindreidéeetpourl’instant,jem’interdisd’yréfléchir.Jemetslemoteurenrouteetparcourslesquelqueskilomètresquime séparent de chezmoi.En sortant demavoiture, je sursaute envoyant unesilhouettedansl’ombreetposeunemainsurmoncœurenreconnaissantWill.
—Tum’asfaitpeur,t’esdinguedeteplanquercommeça?Ils’avanceversmoienrépondant:—Jesuispassétoutàl’heureaubar,maist’avaisl’airoccupé.Livraisonspéciale.Ilmetendmonflacontantattenduetj’hésiteuninstant.Mevoyantsansréaction,ilm’attrapelamain
avecforceetleposedanscelle-ciavecinsistance.—Cadeaupouraujourd’hui.Maisn’oubliepasquetumedoisencoredufricmabelle.Ilfaitvolte-faceets’éloignesansattendremaréponse.Aumilieudutrottoir,jeleregardeentrerdans
sa voiture avant de partir en trombe. Je resserre le flacon dansmamain.Aussi belle qu’ait été cettesoirée,WillasumeramenersurTerre.Jeneseraisjamaiscapabledemedétacherdemonpassé.J’entredanslebâtiment,lesémotionscontradictoires.SiEthanserendcomptequej’aiétéfaible,quej’aifaitlesmêmeserreursque samère, il neme lepardonnera jamais,maisd’unautre côté, jenepeuxpas faireautrement, lescauchemarsnemelaissentaucunrépit.Quandj’entredans l’appartement,Jennya trouvéunenouvelleconquête.Génial.Commentpeut-elle faireça?Çame rendplusquedubitative.Celamerappellecequ’aditEthanlesoiroùilm’aaccompagnélapremièrefoisautravail.Elleétaitdéprimée.Çam’interpelle,carellenem’enapasdutoutparléetjenesaispascequiapusepasserpourlaminer.Jennyesttoujoursjoyeuse,pleinedevie,jenecroispasl’avoirdéjàvuneserais-cequ’unpeutriste.Jefaisunpetit arrêt sur le toitetobserve le flacon toujoursdansmamain.Quelautremoyenpourrais-jetrouver?Siseulementlescauchemarss’étaientarrêtés,çamefaciliteraitgrandementleschoses.LeDrHarrisabiententédemefaireparlerdeceux-ci.Audébut,jemesuispliéaujeu.Maisquandilavoulusavoircequis’étaitpassélesoiroùjesuisparti,undescauchemarslesplusrécurrents,jen’aipaspu.Cettejournéejetentedel’effacerdemamémoireplusquetoutautresouveniretjenesuisplusjamaisretournélevoir.
Chapitre20
Ethan
4ansplustôt
Livie:16ans
Ethan:19ans
Greg:21ans
Remontant le petit chemin en direction de chezmoi, je suis surpris quand j’aperçois sa silhouetteallongée dans l’herbe. Elle a les yeux fixés vers les étoiles. Je regarde autour demoi.Nous sommescomplètementseuls.Sescheveuxsontétalésdansl’herbe,celaluidonneunairangéliquequifaitbattremoncœurunpeuplusvite.Çafaitlongtempsquejepensequejenesuispaspourelle,maismoncœurenadécidéautrement.Detoutefaçon,c’estimpossible,sonfrèrem’arracheraitlescouillesavantmêmequejenem’enrendecompte.
—Tucomptesresterlààm’espionnerencorelongtemps?Plongé dans mes pensées, je n’ai pas remarqué que Livie s’était accoudée dans l’herbe. Elle me
regarde en souriant, et ce sourire accélère encore mon rythme cardiaque à un rythme dangereux. Lachaleurqui irradiedansmapoitrinesepropagealorsdans toutmoncorpsetc’estcommesi toutes lesbarrièresquejemesuisconstruitesdepuissilongtempss’évanouissaientfaceàelle.Alorsj’aicompris,j’aicomprisquejepouvaislutterdetoutesmesforces,jenepouvaisjamaisrienyfaire.Parcequ’ilnes’agissaitpasd’unesimpleattiranceentreungarçonetunefille.Avecelle,çaallaitbienau-delàdeça.C’estpourcetteraisonquetoutessesfillesn’ontjamaisréussiàmelafaireoublier.Jecroyaisqueçam’aiderait,quejetrouveraisunmoyendelachasserdemonesprit.Envain.Maisellen’aque16ans,elleestsijeune.Avecmes3ansdeplus,j’ailereculnécessairepourcomprendrequec’estunemauvaiseidée. Mais savoir que l’on est là tous les deux, rien que tous les deux, est une occasion que je nelaisseraispaspasser.Jem’approched’elleetm’allongeàsescôtés.Je l’observe.Sesyeuxbrillentenobservantlecieletjelatrouveencoreplusbelleàcetinstant.
—Qu’est-cequetufaislà?jeluidemande.Ellehausselesépaulesenrépondant:—J’aimebienvenirici,c’est…apaisant.—Ettuvienssouvent?—Commesitunelesavaispas,déclare-t-elled’untonsarcastiqueC’estlàquejecomprends.Toutessesfoisoùellesefaitpunirpouravoirfaitlemur,ellevientici.Je
memetsàéclaterderire.Desoulagementengrandepartie.Elletournesonvisageversmoi.—Qu’est-cequitefaitrire?—Tonfrèreimaginequetupassestoutestesnuitsbourréesouavecunmec.
Jeneluidispasquemoiaussij’enaipassédutempsàréfléchiràlaquestionetquejesuisraviedemadécouverte.Ellesejointàmonrireetreportesonattentionversleciel.Elleesttellementbelle.Maisjerestetoujoursprudentavecsonfrèredanslesparages.
—Pourquoituneluidispasquetuviensici?Etpourquoituviensd’ailleurs?Ellebaisselesyeuxetsonsourires’efface.Àcemomentj’aimeraislaserrerdansmesbraspourla
revoirsourire.Jemeredresseau-dessusd’elle:—HeyçavaLivie?Ellelèvelesyeuxversmoi:—Neluiditpasquejeviensici,s’ilteplait.Ilnedoitpassavoir.C’estpresqueunesupplication.Jesaisquesonfrères’inquiète,maisapriori,ellenefaitriendemal.
Etpuisjeviendraisdetempsàautrejeterunœilmaintenantquejesaisoùellesetrouve.—D’accord.Maisàunecondition.Ellefroncelessourcilsetjeprécise:—Gardemoiuneplacedetempsentemps.Lesoulagementselitsursonvisageetjenerésistepas.Jecaressedemonpoucesajouequirositàce
contact.Jevoisqu’elleestsurprise,maisellenemerepoussepas.J’aitellementenviedel’embrasser.Doucement, je me penche vers elle.Mes lèvres effleurent les siennes et je crois qu’elle a arrêté derespirer.J’attendsqu’ellemerepousseoudisequelquechose,maiscommeellen’enfaitrien,jedéposeundouxbaisersurseslèvres.C’estunecaressedouceetsoyeuse.J’aisouventimaginél’embrasser,maislaréalitéestbienplusdélicieuse.Quandjem’écarte,l’éclatdanssesyeuxquej’yvoierenforcetouteslesémotionsque jecontiensdepuis si longtemps.Lepouce toujours sur sa joue, j’attendsqu’elledisequelquechose.Elleouvrelabouche,puislareferme.Jeposemonfrontcontrelesien.
—Disquelquechoses’ilteplait.—Je…jedoisyaller.Ellemepousse,serelèveetcommenceàs’éloigner.—Hey,tucomptespartircommeça?Je la rejoins rapidement et enfoncemesmains dansmes poches pour ne pas être trop tenté de la
toucher.—Excuse-moiLivie…je…c’étaitstupide,jenesaispascequim’apris.Onpeutoublier?Nedis
rienàGregs’ilteplait.Ellenerépondpas.Elleal’airencolère.Onfaittoutelaroutedanslesilenceleplustotal.Seulle
bruit de nos pas résonne autour de nous. J’ouvre la bouche à plusieurs reprises pour trouver quelquechoseàdire,maismeraviseàchaquefois.Quandonarriveenfindevantchezelle,elleseretourneversmoi.
—Unmotsurmaplanqueetjeluidis,Monsieurjefaisdestrucsstupides.Çateva?J’aienviedeluidirequec’étaitloind’êtrestupide,quej’enrêvedepuistellementlongtemps,mais
ellen’apasl’aird’avoirfranchementapprécié.Etvuletonagressifdesavoix,jesaisquecen’estpaslemomentdelacontrarieraurisquederéveillertoutlequartier.
—D’accord.Excuse-moiLivie.Onoublie?Ça me déchire de l’intérieur de lui sortir un truc pareil, mais l’idée même de la perdre m’est
insupportable.Ellemefixependantunmomentetseretourne:—Ouais,c’estdéjàoublié.Jerespireànouveau.Ellegrimpeàsafenêtredechambreetjerestelààlaregarderfaire.J’aimerais
endireautant,maiscebaiser,jesuisloind’arriveràl’oublier.
Chapitre21
Ethan
—Ilfautquetuluienparles,aujourd’hui.Gregmeregardeavecinsistance,ilcroitquec’estsifacilequeça?—Laisse-moidutemps,sijeluidisçadebutenblanc,ellenevoudraplusm’écouter.Ilfautquetu
melaissesfaireàmafaçon.IllaissesatêteretombersurlecanapéaumomentoùJennynousrejointsurlecanapé.Livienevapas
tarderàrentreretGregm’aharcelétoutelamatinéepourquej’abordelesujetépineuxavecelle,maisc’estdélicatetj’aimeraisensavoirplus.
—C’estquoisescauchemars?JennyetGregéchangentunregardsansrépondre.Jesaisquesondépartaunlienavecsonpère,mais
est-cequesescauchemarssontliés?Aucuneidée.Livieentreaumêmemomentcequim’empêched’ensavoirdavantage.Elleselaisseretomberdanslefauteuilàcôtédesonfrèreetétalesesjambessurlatablebasse.Sesjoliesjambes…putain.
—Jesuismorte,dit-elled’unairlas.—Pasbiendormi?demandeGreg.Vueàsafaçonderegardersonfrère,ellen’appréciepaslaremarque.—SiJennynes’étaitpasenvoyéenl’airjusqu'àpasd’heurepeutêtrequej’auraispudormirplustôt.Gregsetournesiviteversmoiquejenepeuxm’empêcherderire.—C’estpasmoi,dis-jeenlevantmesmainsinnocemment.À cemoment, jeme rends compte que le jour où on va lui dire risque d’être vraiment, vraiment
délicat.Sonopinionsurmoin’estpastrèsélevée,maisc’estsurementunpeumafaute.QuandLivieestpartie, je l’ai attendue. Encore et encore jusqu'à ce que je finisse par voir la vérité en face. Elle nereviendraitpas.La suitedes évènements estunenchainementde fillesquidéfilent sansque jene leuraccordelamoindreimportance.Moncœurm’avaitétéarrachéetilétaiticiàNewYorkavecelle,sansquejenelesache,alorsàquoibonfaireautrement?Ajoutezàçaunpeutropd’alcooletvousavezunsavantmélange.Jennylèvelesyeuxaucielavantd’ajouter:
—Gregaproposédesortircesoir,maissit’estropcrevéonpeutremettreça.Ellesemblehésiterunmomentavantdeselever.—Non,c’estbon,laissez-moicinqminutes,letempsdemechanger.Quandellerevient,ellearevêtuunsimplejeanetuntee-shirtetmêmecommeçajelatrouvecanon.
Livien’ajamaiseubesoindefairebeaucoupd’effortpourêtrelaplusbelleàmesyeux.Etc’estcequiatoujoursposéproblème.Onpartmangeraurestaurantdenotrehôtel.Jennys’estinstalléeàcôtédeGregetmoiàcôtédeLivie.Elleestcomplètementcrevée lapauvre,ellepiquedunezàplusieursreprises,maisseressaisitàchaquefois.Enmêmetemps,hiersoirelleestrentréetard,etavecJennyellen’apasdûdormirbeaucoup.EllesfinissentparrepartiretquandjesuisàpeuprèssûrequeGregdortàpoingsfermés,jeressors.JelongelaroutemeséparantdeLivieetarrivéenbasdechezelle,jefaisletourdubâtiment. Je repère l’échelleetarriveàm’yhisserpour remonter jusqu'à sachambre.Putain,devraisadosobligésdesecacher, ilnefaudrapasattendre trop longtempspour ledireàGreg, jenevaispasrejoueràçaencorelongtemps.C’étaitaussipourlatesterunpeuquejeluiaiditqu’onallaitenparlerà
sonfrère.Onsedisputaitsouventàcesujetàl’époque,jevoulaistoutdireàGreg,maisellerestaitbutéeetfaisaitlagueuleplusieursjoursjusqu'àcequejefinisseparlaissertomber.C’estcequis’estpassélesoiroùelleestpartie,maisellen’apaseudemauvaisesréactionsquandjeluiaidit,doncjesupposequeceproblèmeestderrièrenous.Arrivédevantsafenêtre,jelavoisprofondémentendormie.J’arriveàl’ouvriretmeglissedanslachambreaussidiscrètementquepossible.Jem’assisauborddulitetpasseundoigtsursajoue.Elleestsibelle.
—Jemedisaisbienquej’avaisentendudubruit.JelèvelesyeuxetaperçoisJennysurleseuildelaporte.Jesouffleenrépondant:—Désolé.Jenevoulaisréveillerpersonne.Ellemefaitunsignepoursortirdelachambre.Jem’arracheàLivieàcontrecœuraprèsavoirdéposé
unbaisersursonfront.Jennysortunebouteilleetmetendunverrequej’accepte.Elles’assitenfacedemoietverselecontenudelabouteilledansdeuxverres.
—Elleestrentréetardhier,jesavaisqu’elleétaitavectoi.J’attrapeleverreetleboisd’unetraite.Beurk,tequila.—Commentas-tudeviné?Ellemeregardeuninstantensouriantavantderépondre:—Disonsquej’aivucertainsindices.Jecroiselesbrassurlatableenjetantuncoupd’œilverslecouloir.SiJennyasulevoiralorsilne
faudrapasattendretroplongtempspourledireàGreg.Ilnousenvoudraits’ill’apprenaitautrementquedenotrebouche,etceneseraitpasjustepourlui.
—Jenepensaisjamaislarevoir.Quandmes yeux se reposent sur Jenny, elleme regarde en plissant les yeux tout en semordant un
ongle.Etpuis,d’unseulcoup,ellelaissesonbrasretomber.—C’étaittoi!Jenevoispasoùelleveutenveniralorselleajoutedevantmonsilence:—Descollèguesaufoyer,ilsontditqu’ilyavaitunmecquiétaitvenuplusieursfoisenposantdes
questionssurLivie.Jeneluiaijamaisriendit,jenevoulaispasqu’elleprennepeur,maisc’étaittoipasvrai?
Jebaissemesyeuxversleverreenlefaisanttournerentremesdoigts.Pourcequeçaadonné…—Cinqfois.Jesuisvenucinqfois.Maisàchaquefois,onmedisaitqu’onnelareconnaissaitpassur
lesphotos.Jemedoutaisquelalanguedeboisétaitdemise,maisàchaquefoisquejerevenais,j’avaisl’espoir
quequelqu’unfinisseparmedirequelquechosequimemèneraitàelle.—Donctutravaillesaufoyer,jecomprendsoudain.Jennyhausselesépaules.—Detempsentemps,pasofficiellement,jedonneunp’titcoupdemainensimplebénévole.Jesuis
infirmièreàl’hôpitallerestedutemps.—C’estlà-basquetul’asrencontré?—Oui,quandjel’aivu…ellem’atouchée.Elleétaittellement…Ellenesemêlaitpasauxautres,
elleévitaitmêmedeteregarderdanslesyeux,j’aieuenviedel’aider.Ellesouffleenfermantlesyeuxuninstantalorsquej’essaied’analysercequ’ellemedit.—Jenny,est-cequ’ellet’aditpourquoielleétaitpartie?Ellerelèvelesyeuxversmoid’unetristesseàvousfendrel’âme.—Ellen’apaseubesoindemeledire,jel’aivu.Elledétournealorslesyeuxrapidement.Elleal’airmalàl’aise.Jem’accoudeàlatableenajoutant:—J’aibesoindesavoirJenny.—ElletelediraEthan,maisilfautquetuyaillesdoucementavecelle.Situlapoussestrop…
—Ouais,jesais,jeconnaisl’animal.Ellepouffederireetremplitdenouveaulesverresdevantnous.—Alorsvousdeux,c’est…—Mafemme.C’esttoutàfaitça.Iln’yapasd’autremotpourladécrire.Ellerelèvelesyeuxetposesonmenton
danssesmains.—SijeteprometsdeneriendireàGreg,j’ailedroitauxdétailscroustillants?CetteJennyestunsacrénuméro.Aprèsunmomentd’hésitation, jemelaisseallerà luiraconter.Je
passesoussilencemavieen lui racontantqu’un jour j’aicroisé le regarddecettepetite fillequim’atouchéauplusprofonddemoi.Quejen’aipurésisteràrevenir,mefaisantaccepterdanscettefamillequiest devenue ma famille de cœur. Que les années passaient et que Livie devenait cette jeune fillemagnifique,alorsquejetentaisdetoutesmesforcesdegardermesdistances.JeluiracontelescrisesdecolèredeGregquandunmecavaitl’arrogancedel’approcherdetropprès.Cequinousapoussésànouscacherdelasortequandunsoirdanscetteclairière,jen’aipasrésistéàl’embrasser.Mêmesiellem’arepoussé,maisLivien’enaipasrestélà,ilafalluqu’ellemefouteenrogne.Ellen’imaginepascombienellem’a foutu hors demoi ce jour-là quandGregm’adit qu’il l’avait vu avec Jefferson. Je lui parlebeaucoupdelaclairière,sesmomentssouslesétoilesquiresterontgravésdansmamémoirecommeledébutdetout.Jennym’écouteavecintérêtetquandjem’arrête,elleseredresseendisant:
—Lesétoiles,ellem’enaparlé.Jenedisrienattendantqu’ellepoursuive.—Quand elle est arrivée, elle a eu une période… difficile, tu sais. Elle était prostrée, parlait à
peine… Elle me faisait peur, je craignais qu’elle fasse une bêtise ou disparaisse en pleine nuit. Jebarricadaistoutetj’enfermaistoutàdoubletouraucasoù.Ellequittaitàpeinesonlit,etafiniparfaireunebelledépression.
Jetombedehaut.Qu’a-t-ilpusepasserpourquecettehistoirelamettedanscetétat?—Ellerestaitdesheuresdanssonlitàfixerlafenêtre.Lesseulesfoisoùelleensortaitdesonpropre
chef,c’étaitunefoislanuittombée.Elles’asseyaitsurleborddelafenêtreetjelarejoignais,c’étaitlesseulsmomentsoùj’arrivaisàcommuniqueravecelle.Elleregardaitlecieletellemeparlaitdesétoiles.Jeme doutais qu’il y avait un garçon parce qu’un jour ellem’a demandé « tu crois qu’il les regardeaussi?»Jen'aipassuquoirépondreetelleafiniparajouter«s’illefait,c’estunpeucommesionlesregardaitensemble,non?»
Moncœursefigeunesecondeavantdereprendreàunrythmeeffrénéenentendantça.Jenepensaispaspouvoirplus l’aimer,maisàcet instant, je saisquec’estpossibleparcequ’en sesquelquesmots,Jennyvientdememettreàgenoux.Ilmefautquelquessecondesavantdereprendrelecontrôledemoncorps.Jemelèvesansunmotetentredanslachambre.Jem’allongederrièreelleenlaserrantcontremoi.Quoiqu’ilsesoitpassé,riennepourrameséparerd’elleàpartird’aujourd’hui.Jel’aime,jel’aimetellement.Nosâmesétaientfaitespourserencontrer.Jedéposeunbaisersursonépauleenmurmurant:
—Jet’aimeLivie.
Chapitre22
Greg
4ansplustôt
Livie:16ans
Ethan:19ans
Greg:21ans
Masœurestjolie,vraiment,ellefaitpartiedesesfillesquin’ontpasbesoindesetartinerlevisageoudemettredesvêtementstropcourtpourattirerl’attentionetc’estbiençamonproblème.Jesuisàlafacmaintenantetjenepeuxpluslasurveillercommeavant,cequimecompliquegrandementleschoses.AlorsquandjevoiscepetitgringaletdeJeffersonlapelotersurleperronmonsangnefaitqu’untour.Jesorsdelamaisonetlepousseàl’épaule.
—Dégage.Ilécarquillelesyeuxetmasœurcrie:—Greg!Jemetourneverselle:—Turentres.Toutdesuite.Ellen’apasl’airravie,maisjen’enairienàfoutre.Ellen’aque16ans,elleestnaïve.Ellenese
doutepasquelesgarçonssontloind’êtreinnocents.EtJeffersonnefaitpasécartàlarègle.Etila17anscetenfoiré.Maisellenebougepas.
—J’aiditturentresLivie!jeluicrieenpointantlaportederrièreelle.Ellesouffleetrentresachantpertinemmentquejenelâcherairien.JemeretourneversJefferson.Ce
mecmedégoute,jeleconnaisquetropbien.Ilhabiteàdeuxmaisonsdecheznousetjel’aidéjàsurprisàmaterLiviedansnotrejardin.Jel’avaisdéjàprévenuetiln’apastenucomptedemesavertissements.
—TudégagesJeffersonetsijetevoisencoreunefoisluitournerautour,tudevrasalleraulycéeenfauteuilroulant,jesuisbienclair?
Ils’adosseàunepoutreensouriant.Ilmeprovoque,maiss’ilcroitêtreleplusmalinilsetrompe.—MonpauvreGreg.Tuesaucourantquetasœurestunegrandefille?—Jemefoudecequetupenses,tuvasluifoutrelapaix,unpointc’esttout.Ilrigoleetdescendlesmarches.Ethanarriveaumêmemomentetfroncelessourcilsenvoyantàquel
pointjesuistendu.—Toutvabien?demande-t-il.IldévisageJeffersonetcelui-cil’ignoreenpassantàcôtédelui.—Cep'titconaessayédepeloterLivie.Jeffersonsemetrireetmerépondenreculant:
—Etj’aipasl’intentiondem’arrêterlà.Tunepourraspastoujourslasurveilleretcejour-là….Jen’aimêmepasletempsderéagir.Ethansejettesurluietluienvoieun,puisdeuxettroiscoupssur
latronche.Jemeprécipiteversluipourl’arrêter.—OK,c’estbon,ilasoncompteEthan,laisse-le.Jeffersonserelèveetpartennousinsultantdetouslesnoms.Çaluiapprendra,Ethanestuneboulede
nerfetjeluiaifaitcomprendrequequandjen’étaispaslà,jecomptaisurluipouravoirunœilsurmasœur.Cequ’ilfaitplutôtbienjedoisdire.Ilfaitpartiedelafamillemaintenantalorsc’estnormal.C’estcommeçaqu’ilagagnélesfaveursdemonpèrequinel’appréciaitpasbeaucoupaudébut.Maismamèreainsistéetilafinipars’yfaire.SurtoutdepuislejouroùonadécouvertqueLiviesefaisaitracketteraucollègeetqu’Ethans’estmisen têtedecomprendrepourquoiellepleurait tous lessoirsenrentrantdel’école.Ilm’aracontéqu’ill’avaitvuavec3p’titsconsquiluivolaientsonargentdepoche.Ilatentédelesprévenir,maisà3contre1c’était légèrement foutupour lui.Çane lui apas faitpeurpourautant.Ensuite,onadébarqué tous lesdeuxunsoireton leura faitcomprendrequesiçase reproduisait,çaallaittrèsmalsepasserpoureux.Ilsontrecommencé.Ilsl’ontregretté.Ons’estfaitpunirendisantquecen’étaitpasunefaçondefaire,maisj’enavaisrienàfaire.Enfaisantça,jesavaisqueçaallaitfaireletourducollègeetquelesgensréfléchiraientdeuxfoisavantdes’enreprendreàelle.OnrentredanslamaisonetLivieestassisedanslecanapé.Lesparentsnesontpaslà,etjevaisenprofiterpouravoirunepetiteconversationavecelle.J’attrapelatélécommandeetéteinslatéléenm’asseyantdevantellesurlatablebasse.Ethans’assitdanslefauteuilàcôtédenous.
—Qu’est-cetufaisaisavecceconnard?T’esstupideoutulefaisexprès?jeluidemande.Ellemefusilleduregard:—TumesaoulesGreg.J’enaimarre,touslesmecsm’évitentàcausedetoi.J’ai16ans!Calme-toiGreg,calme-toi.—Livie,turéfléchisdeuxsecondes?Jefferson…franchement?Ellesouffle:—Ilestnul,jesais.Maisaumoinsiln’apaspeurdetoi,lui.—Etdonctuvastecontenterdeça?Ethan,dis-luiquelquechose,peut-êtrequ’ellet’écoutera,toi!Jesaisqu’ellel’écoutera.Lui,ellel’écoutetoujours.Lesfoisoùleschosesexplosentavecmasœur,
ilfaitsouventlemédiateuretj’avouequ’ilarriveparfaitementàdésamorcerlabombe.Maisquandjemetourneverslui,jeletrouvelesdoigtscrispéssurlefauteuilàlafusillerduregard.
—Ethan?Je le regardeavec insistancepour lui implorerunpeud’aide. Ildétourne son regardversmoiune
seconde,avantdes’accouderàsesgenouxsanslaquitterdesyeux.—Iln’enveutqu’àtaculotteLiv.Waouh.Ouaisjevoulaislafaireréagir,maisjenem’attendaispasàcequ’ilsoitaussicru.Jeluienvoieunetapesurl’épaulepourluifairecomprendredepesersesmots.C’estquandmêmema
sœurbordel.Ilserenfoncedanssonfauteuilenhaussant lesépaules.Jemeretourneversmasœurquinousregardetouràtour,l’airdebiensemarrer.Jerêveouelleestentraindesefoutredenotregueule?Ellefinitparpoufferderireetselève:
—Sérieux,vouscraignez,vraiment.Maisvousavezraison,lesmecssonttroplâches,jevaisdevenirlesbienne!J’ailedroitGregouj’aibesoind’uneautorisation?
—Troplâche?répondsEthan.Ellesetourneverslui:—Ouais,lâche.T’asparfaitementbienentendu.Ellefaitvolte-faceetprendladirectiondel’étage.Jeluicrie:—Lesbienne!Çamevamoi!
Ethanmeregardeetpouffederireenbalançantsatêteetlèvesamain.Jelaclaque.Jeprendsplacesurlecanapéendisant:
—Cettefillevamerendredingue.Illèvelesyeuxversl’escalieretrépond:—Ouais,complètementdingue.
Chapitre23
Livie
4ansplustôt
Livie:16ans
Ethan:19ans
Greg:21ans
Jefixelesétoilesallongéesdanslaclairièreetjesaisqu’ilestlààmeregarder.Ilcroitquejenelevoispas,maisjel’aidéjàaperçuplusieursfois.J’espèrequ’ilvaenfinosersemontreraprèsladisputedecetteaprès-midi.J’aivuquejel’aifaitréagirenletraitantdelâche.Enmêmetemps,ill’amérité.M’embrasser comme ça etme dire juste après que c’était stupide… J’ai été tellement surprise qu’ilm’embrasse, je ne savais plus quoi faire. Bien sûr moi, j’en avais envie, mais je ne m’y attendaisvraimentpas.Ilditdestrucsdesfoisquandonesttouslesdeux,maisjepensaisqu’ilsemoquaitdemoi.Il dit tout le temps à Greg que je suis comme sa petite sœur alors jem’étais fait une raison. Quandj’entendsdespasserapprocher,jenebougepas.Sonvisageapparaitau-dessusdemoietilm’attrapeparlebraspourm’obligeràmelever.
—HeytumefaismalEthan!Ilm’entrainejusqu’auchêneetm’yadosse.—Jenesuispaslâche!—Situl’es!Tuasditquec’étaitstupide!ToutçaparcequetuaspeurdeGreg!Ilsouritenlevantunsourcil:—Tuasl’airbiensûrdetoi,peuxêtrequejenevauxpasmieuxqueJefferson.Jelèvelesyeuxauciel.—N’importequoi.Tuvauxbienmieuxquelui,jeteconnaisEthan,tuvauxbienmieux.Ilposeunemain surmanuqueetobserve sonpoucecaresserma joue.Les frissonsmeparcourent
commeladernièrefoisqu’ilm’a touché.J’aiembrasséplusieursfoisdesgarçons,mais jamais jen’airessentilamêmechosequequandilm’aembrassé.
—Qu’est-cequetufaisaisaveclui?Faut-ilvraimentquejerépondeàça?Envérité,jesavaisqu’iln’allaitpastarderàarriveretjeme
suisditqueçapourraitpeut-être lefaireréagir.Jevoulaisêtrecertainequejenemetrompaispas.Leproblèmec’estqueJeffersonaprisçapourplusqueçanel’étaitetacommencéàallertroploin.J’étaiscontentequeGregintervienneenvrai,maisilétaithorsdequestiondeluiavouer.Çaluiauraitfaittropplaisir.
—Qu’est-cequeçapeuttefairevuquetutrouvesquem’embrasserc’eststupide.Ilsouffleetfermelesyeuxenlaissanttombersamain.Ilseretourneenprenantsescheveuxdansses
mains.—Cen’estpasbienLiv.Pasbien.Tun’asque16ans,etpuis…vousêtestoutcequej’ai.Sivous
n’étiezpaslà…SiGreg…—Iln’estpasobligédesavoir.Ils’arrêtequandilm’entend.Ilsemetàéclaterderireensecouantsatête.—Tueslaplusgrandetêtedemulequejeconnaisse,tulesais?Jehausselesépaules.—Tutrouvesvraimentquec’étaitstupide?Ilm’observe sansbouger. Il resteplusieurs secondes sans réactionet j’attends, j’attendsqu’ildise
quelque chose. Il s’avance alors versmoi si vite que je n’ai pas le temps dem’en rendre compte. Ilattrapemonvisageentresesmainsavantdem’embrasserbrusquement.Jem’agrippeàson tee-shirtensentantmesjambesdevenuescoton.Iln’estpasdouxcommeladernièrefois,maisj’aimebiença.C’estcommes’ilserattrapait,commesiletempsavaiteuraisondesapatience.Salangueforcel’entréedemabouchesansménagementetjelelaissefaire.Ilmeserreplusfortcontrelui,commesij’allaism’envoler,ouuntruccommeça.Jenesuispastrèssûreetquandilserecule,ilposesonfrontcontrelemien.
—Non,cen’étaitpasstupide.Loindelà.
Chapitre24
Ethan
Quandj’ouvrelesyeuxetlavoisàmescôtés,j’aienviedel’embrasser.Encoreetencoreetnejamaism’arrêter.Jelaréveilleenpassantmalanguesurlecreuxdesonoreilleetdescendsdanssoncou.Ellegémitetouvrelesyeux.Mamaindescendsursesfessesetjelaserrecontremoi.Jepassemalanguesurses lèvres.Unefois,deuxfoisavantqu’elleentrouvreses lèvresetcaressemalanguede lasienne,semêlantdansunedanselangoureuse.Troisansdebaisersàrattraperçarisquedeprendredutempsetjecomptebienm’ymettredèsmaintenant.J’aienvie,tellementenvied’elle.Elleaemprisonnémoncœuravantmêmequejenem’enrendecompte,etjenesuisqu’unepauvremarionnetteentresesdoigts.Desdoigts qui remontent le long demes bras et s’arrêtent dans la nuque en caressant lesmèches demescheveux. Jegrogne. J’adorequand elle fait ça. Jem’enfonceplus loindans sabouche comme si je lapénétrais et passemes bras autour d’elle en la recouvrant demon corps. Et dire que j’ai gardémesfringuespouréviterdefaireunebêtise.Jemesuisditquej’allaisdevoirprendremontemps,maisjenesuispassûred’enêtrecapablevucommentvontleschoses.Jedescendsdanssoncouenremontantmesmainssoussontee-shirt lesoulevantdoucementalorsqueje l’entendshaleter.Mabouches’emparedeses tétons dressés, ses seins qui m’avaient vraiment manqué. Avec Livie, on s’est un peu amusé àl’époque,maisonn’ajamaisétéjusqu’aubout.Elleétaitjeuneetstressaitbeaucoupàchaquefoisquejetentaisd’allerunpeuplusloin,alorsjemesuisefforcédeluilaisserletemps.J’avaisconsciencequenotredifférenced’âge jouaitbeaucoupdans labalanceet jevoulais luiprouverque jene la forceraisjamaisàfairequelquechosedontellen’étaitpasprête.Ellesecambreaumomentoùjemordilleundesesseinsetelleattrapemonvisagetandisquemamainremontel’intérieurdesacuisse.Putain,jevaisexploser, mais je vais lui faire l’amour comme il se doit, alors je vais prendre mon temps pour ladégustercommeellelemérite.Cettefemmeestunedéesseetelleestàmoi.Ellemeforceàreleverlatêteetjerisenvoyantsesjoliesjouesrosiesparl’excitation.Elleessaiedereprendresonsoufflequandjeposeunbaisersurseslèvres.
—Jet’aimeLivie.Je ne suis pas sûre qu’elle m’est entendue hier soir vu qu’elle dormait, alors j’ai besoin qu’elle
l’entendedenouveau.Ellesouritetrépond:—Jet’aimeEthan.Jen’aijamaisaiméquetoi.Sesmotssontd’unedouceurexquise.Jesoulèvemontee-shirtetm’endébarrasseavantdemefondre
sursabouche.Lasensationdesesmainspassantdansmondos,jemerendscomptequejamaisriennipersonne n’aurait pu la remplacer. Elle fait partie de moi et toutes ses aventures sans lendemain nem’auraientenaucuncasapportédecequej’aiavecelle.Jen’aijamaiscompriscebesoinirrépressiblequim’attirait àelle,meconfirmantencoremaintenantque jen’ai jamaiseu lechoix. Jepasseunbrasautour d’elle pour la rapprocher plus près de moi, toujours plus près pour que cette fois, elle nem’échappepas.Jenelalaisseraispluspartir.Plusjamais,quitteàl’enfermers’illefaut.Jecaressesacuisseet la remontesurma taille lui faisantsentirà travers le jeanque jeporte toujourscombienellem’excite.D’unseulcoup,sesmainsseposentsurmesépaulesetmepoussent.Jemelaisseallersurprispar son geste et la voit me forcer àm’allonger avant dem’enfourcher. Je ris de voir la petite Liviedevenircettebelleamazone.Lebesoind’êtreenellesefaitplusfortalorsqu’ellem’observehaletante
sesmainssurmontorse.—J’aienviedetoi,jelacheavantmêmedem’enrendrecompte.Elleéclatederireensecouantlatête.—Ça,j’avaisdeviné.Je ris en pressant mes mains sur ses fesses la faisant onduler sur moi. Elle ferme les yeux une
seconde,avantdelesrouvrir.Quandsalangueentreencontactavecmapeau,ungémissementm’échappe.Putain.Mes yeux apprécient cette vision de sa chevelure ondulant surmon torse. Jeme retiens de laretourner pourm’enfoncer en elleme rappelant que je veux profiter de cemoment. Elle s’arrête à lalimitedemaceinture,m’offrantunsourirecoquintoutendéfaisantlesboutonsdemonjean.
—JeveuxyallerdoucementEthan.Maisj’aienviedetefaireplaisir.Jem’accoude en comprenant ce qu’elle a en tête. Bon je n’aime pas cemot.Doucement. J’ai été
abonnéauxdouchesfroidespendanttroplongtempsàCover-roadmaissiellem’offrelavisionquivientdesedessinerdansmonesprit,jesuisprêtàfaireuneffort.Jesoulèvemeshanchespourl’aiderquandellebaissemonjeanetmonboxermelibérantfaceàelle.Sesjouesdeviennentécarlatesetellerelèveles yeuxversmoi.Un rire s’échappe sans que je ne puisse faire autrement se stoppant instantanémentquandellemeprenddanssamain.Ellecommenceunva-et-vientsurmoietjemelaisseretombersouscettecaresse.Jenelaquittepaspourautantduregard,troppressédelavoirenaction.Quandenfinsalangueremontelelongdemonmembre,jeperdspiedetfermelesyeuxuninstantavantdeposerunemainsursajoue.
—Nesoitpasaussicruellemapuce.Prends-moidanstabouche.Cettescène,j’enairêvéetjemeposelaquestion.Suis-jevraimentbienréveillé?Sic’estlecas,je
neveuxpasquecerêves’arrête.Ellepassesalanguesurseslèvresgourmandes,faisantencoremonterlapression.Ellejouesérieusementavecmonselfcontrôle,maisfiniparmedonnersatisfactionquandseslèvress’entrouvrent,glissantsurmaqueuequin’attendaitqueça.Lasensationqu’ellefaitnaîtreenmoiestloindetoutcequej’aipuconnaitre.Desbouchesilyenaeu.Chezmoi,chezelles,dansdesendroitsimprobables, etmêmedansmagalerie.Mais là à cet instant, jeme sens commeunpuceau lors de sapremièrefellation.Etputain,c’esttropbon.Jemedélectedelavoirmonteretdescendresurmoisamainl’accompagnanttoujours.Jeposeunemainsurlasienneenmurmurantcommejelepeux.
—PlusfortLivie.Elleresserresonempriseobéissantàmesrecommandationscequinefaitquem’exciterd’autantplus.
Sionm’avaitditilyaquelquesjoursquejeseraislààcetinstant,jejurequejenel’auraispascru.Etpourtant, c’est un fait. Je lui arracherai bien son tee-shirt pourm’offrir unemeilleure vue,mais celavoudraitdire l’interrompreet jen’enaiaucuneenvie.Leplaisirqu’ellemedonnesepropageenmoi,arpentantchacunedemesveinesquandjecommenceàsentirleplaisirmonterd’uncran.
—Livie,jenesuispasloin,situneveuxpasdemoidanstabouche…Elleserelèveetladéceptionmeprend.Maisquandellemereprenddanssabouche,jemeretiensde
crierun«YES»deplaisir,lesdeuxbraslevés.Jepasseunemainsursagorge,glissantjusqu'àsanuqueenlamaintenantpendantquejecommenceàl’accompagnerpardescoupsdehanches.L’idéedelabaiserpar la boucheme fait grimacer un instant, je n’aime pas cemot quand il s’agit d’elle, mais j’oublierapidementmespenséesquandlecourantmetraverselacolonne.Madeuxièmemainlamaintientàsontouralorsquej’accélèrelerythme,incapabled’yrésister.
—PutainLivie.Jemedéverseentreseslèvresdansunrâledeplaisiroubliantjusqu'àmonproprenom.Jemelaisse
retomberdetousmesmembres,plussatisfaitquejenel’aijamaisété.Elleposesatêtesurmontorseetjelaserrecontremoiavantdeposerunbaisersursatête.
—C’était…bien?murmure-t-elleàpeine.Jebaisselesyeuxverselleetladécouvrefixermontorsedessinantdescerclessurmapeaudubout
desondoigt.Vient-ellevraimentdemeposercettequestion?Jepouffederirecequi lafait lever lesyeuxversmoitimidement.
—Tuneledevinespas?Elle se redresse légèrement au-dessus de moi. J’ai comme l’impression qu’elle a besoin d’être
rassurémaisavantd’avoirletempsderépondreelleajoute:—C’estlapremièrefoisquejefaisais…ça.Mabouches’étiredevantcetteconstatation.Àl’époque,riendesavoirquejeseraissonpremier,me
faisait bander directe alors quand elle me sort des trucs pareils… Je pose une main sur sa joue enrépondant.
—TuasétéparfaiteLivie.Parfaite.Ellesouritenbaissantlesyeuxpaspeufiers.Jerisenlavoyantainsietmeditqu’ilseraittempsque
je lui rende l’appareil, mais quand mes yeux se posent sur son radio réveil posé à côté du lit, jecomprendsqueçanevapasêtrepossible.Sijeneparspasmaintenant,Gregnevapastarderàserendrecomptequej’aipassélanuitdehors,etçarisquedesouleverdesquestions.Jesoufflededépit,déchiréàl’idéedelalaisseraprèscequ’onvientdepartager.Elleseredresserabaissantsontee-shirt,ets’assoitsurleborddulitlesyeuxbaissés.
—Vas-y.Net’inquiètepas.Jem’assisetpasseunbrasautourdesatailleenposantunbaisersursanuque—Excuse-moiLivie.Maisonnepeutpas lui annoncerçacommeça.Laisse-moiunpeude temps
pourpréparerleterrain.L’ironiede la situationnem’échappepas.À l’époque, les rôlesétaient inversés.C’estmoiqui lui
disaisquejevoulaistoutdireàGregetellequirefusaitdetoutessesforces.Combiendefoisa-t-ellefaitlagueulealorsquej’essayaisluiexpliquerquejen’enpouvaisplusdelavoirencachette?Jevoulaispouvoir la toucher, l’aimer sansavoirpeurde faire legestede tropdevant son frère,dedirequelquechosequinoustrahirait.Elletournelatêteau-dessusdemonépaule,restantsilencieuseunmomentavantdedire:
—Pourquoi?Cen’estpastafaçondefaired’habitude?Siellem’avaitplantéuncoupdepoignardenpleincœur,çan’auraitpasfaitmoinsmalquecequ’elle
vientdedire.L’idéemêmequ’ellepuisseimaginerquejelametteaumêmerangquemesaventuresesttoutbonnementridicule.Jeprendssonvisageentremesmainsalorsqu’elleessaiedeselibérer,maisnelalaissepasfaire.
—Je t’aimeLivie.Çan’a rienàvoir. Je t’aime tucomprends?Toutes ses filles…ellesn’étaientrien.Jen’aifaitquetenterd’avancerquandtum’aslaisséderrièretoi.Maisaucunedesesfillesnem’aapportélaseulechosedontj’avaisbesoin.
—Quetuavaisbesoin?Jesourisetdéposeunbaisersurseslèvres.—Toi.J’avaisbesoindetoi.L’expression de carpe qu’elle afficheme fait rire et comprendre par lamême occasion qu’elle ne
réalisepas.Elleneréalisesansdoutepasl’intensitédessentimentsquejeluiporte.Jepasseunemaindanslapochedemonjeanethésiteuninstant.Jemedécideetluiprendssamainenpassantlebraceletautourdesonpoignet.Elleleregardeindécisealorsjeluiexplique:
—Tuespartiavantton18emeanniversaire,maisjet’avaisdéjàachetétoncadeau.Jen’aijamaiseul’occasiondeteledonneralors…jenem’enséparaisjamais.
Ellefixelebraceletetj’espèreluifairecomprendreparcegestetoutcequ’ellereprésentepourmoi.Ellepasseundoigtsurcelui-ciensouriantnerveusement.J’attrapelapremièrebreloqueenajoutant:
—Unepoire,ça,c’estpournotrepremièrerencontre.Elleritalorsqu’unelarmes’écoulesursajoue.J’attrapeladeuxièmebreloque.
—J’aicherchéquelquechosepourreprésenterungâteaujen’aitrouvéqu’uncupcake.Ellen’apasbesoinquejeluiexplique.OnavaitunpetitrituelavecLivie.Unrituelquirendaitfolle
samèremêmesiellenousatoujourslaisséfaire.Onselançaitdansleconcoursdeceluiquimangeraitleplus de gâteaux. C’est elle qui avait lancé les hostilités le jour où j’avais osé revenir après notrerencontreetçamefaisaittoujoursbeaucouprire.Évidemmentc’estmoiquigagnaisàchaquefois,maisonafinipararrêterlejouroùelleétaitdevenuetouteverteetavaitvomitoutcequ’ellepouvait.Jem’enétaissacrementvoulucejour-là.J’attrapeladernièrebreloque.
—Celui-là, je l’ai fait faire.UnEetunLentrelacé. Inséparable.Commenous.Oùque tu soismapuce,toncœuretlemiennefontplusqu’un.
Quandellesejettedansmesbrasenpleurant,jenepeuxm’empêcherderire.Jelaserrecontremoienluimurmurantencoreetencorecombienjel’aimeetqu’ilnepeutenêtreautrement.
*
Enarrivantàl’hôtel,jepriepourqueGregn’estpasremarquémonabsence.Jen’aiaucuneidéedela
façondontjevaism’yprendre,maisjedoisd’abordluifairecomprendrequejenesuispasleconnardaveclesfillescommeilmel’asouventrépété.S’ilpensequejenevoisenLiviequ’unefilledeplus,jevais le sentir passer. Je rentre discrètement dansma chambre etme faufile sous la douche. Commentarriverais-jeàprouverqu’ilpeutmefaireconfiancesanstropmedévoiler?Jemetorturel’esprit,maisnetrouveaucuneréponsemalheureusement.Quandjeregagnemachambre,jel’entendsjureràtraverslacloisonquinoussépare.Ilestréveillé.Ungrandfracass’ensuitetj’ouvrelaportepourdécouvrirGregbalançantunvasecontrelemurd’enfaceavecrage.Ilsetournealorsversmoi,sesyeuxnoirsdecolère.Jenesaispascequiluiprend,maisàlaminuteoùjelevoiscommeça,lapaniquemeprend.Gregn’estpasdugenreàselaissermarchersurlespieds,etilvautmieuxêtredanssespetitspapierssivoustenezneserais-cequ’unpeuàlavie.Etlà,jeflippe.Jeflippevraiment.S’ilmefaisaitdéjàpeurquandj’avais10ans,làçadépassetout.Jenebougepasd’unpoucenesachantàquoim’attendredesapart.Ilfinitparbaisserlesyeuxetselaissetombersurlelit,lesépaulesvoutées.Bon,çan’apasl’êtrecontremoi,c’estdéjàça.
—Toutvabien?j’oseluidemander.Ilpassesamainsursescheveuxavantdesefrotterlevisage.Jemedemandecequiluiaprisdefaire
pousser ses cheveux de la sorte, je suis sûre que Livie trouverait une bonne blague à ce sujet.Maisrevenonsauprésent.
—Ouais…leboulot.Riendegrave.Ilseredresseetsedétourne.J’ouvrelabouchepourinsister,maisilmefusilleduregardetjedécide
delaissertomber.Putain,j’ai23ansetcemecmefaittoujoursautantflipper,c’estquandmêmegrave.JecroisqueladiscussionàproposdeLiviedevraattendre.Ellepeutbienattendregenre,quelquesjours…semaines…mois…années.Ouonpourraits’enfuiravecLivie.Loin,trèsloindesonfrère.Tiensçac’estunebonneidée.Ontrouveraituneiledéserteavecpersonnepournousfairechier.Jepasseraistoutmontempsàluifairel’amouret….
—Tupeuxmedirecequitefaitsourirecommeça?JesursauteenentendantGreg.Merde,j’étaisbienpartilà.—Rien.Ilsecouelatêteavantd’ajouter.—Alorsonvapeut-êtrepouvoiryaller?
Chapitre25
Greg
Jefrappeàlaportedel’appartementdeLivieenmedisantquejedoismecalmer.Sefaireréveillerparleconnardquimesertdegéniteurm’aplusqu’énervé.Évidemment,iln’apasfallulongtempspourqu’il se rende compte que je n’étais plus à Cover-road. Et évidemment, il a vite deviné pour quelleraison.Ilacomprisquejel’avaisretrouvé,maiss’ilcroitquejevaisluidireoùlatrouver,ilsetrompelargement.S’ilveutquejeluirappellelacolèrequim’animedepuisquej’aidécouvertlavérité,jesuisprêtàluifaireunpetitrappel.QuandJames,unamid’enfancequitravailleaujourd’huidanslapoliceafrappéàmaporteunbeaumatin,j’aicomprisquequelquechoses’étaitpassé.Mapremièrepenséeétaitqu’onavaitretrouvéLivie,morte.C’étaitunepenséerécurrentequimehantaitprofondément.Jel’aifaitrentrerchezmoietàsafaçonqu’ilmeregardaitj’yaivraimentcru.Jesuisrestélà,àsupplierjenesaisqueldieuquim’avaitlâchédepuislongtempsquecen’étaitpasça.Ilaalorscommencéàparler.IldisaitquelesAndersonétaientpassésaucommissariatcematinmême.Qu’ilsavaientdéposéuneplainte.Leurfillede4ansavaitétévictimed’attouchements.Jelesconnaissaisunpeu.Enfindevue,ilsontemménagédanslamaisonvoisinedemonpère, ilyadecelaquelquesmois.Jeneleurai jamaisvraimentparlé,maisonsesaluaitquandjevenaisrendrevisiteàcedernier.JenecomprenaispaspourquoiJamesmedisaitça.Ilestsoudaindevenutrèsnerveuxetm’adit:
—Ilsaffirmentquec’estFranck.Mes jambes se sont soudainementdérobées sousmoi et j’ai eubesoindem’asseoir.Qu’est-cequi
pouvaitsepasserdansla têtedesesgenspouraccusermonpèredecettefaçon?Je l’aifoutudehors.Comment pouvait-il oser imaginer que c’était la vérité ? J’ai pris ma voiture et je me suis rendudirectementchezmonpère.Aumêmemoment,lavoituredesAndersonsegaraitdevantchezeux.J’étaisencoredansmavoitureet je lesaiobservés sortiraccompagnésdecette fillette.C’est làquequelquechosem’afrappé.Cettepetitegaminede4ansetsesbouclesblondes.Ellem’afaitpenseràLivie.J’aiattenduqu’ilsrentrentchezeuxetjesuissorti.Quandjesuisrentrédanslamaison,nelevoyantnullepartaurez-de-chaussée,j’aisuoùletrouver.Oùjeletrouvaistropsouvent.Jesuismontéàl’étageetjel’aidécouvertdanslachambredeLivie.Jusqu’ici,jen’avaisjamaisréussiàyrentrerdenouveau,maislui,jel’aisouventsurprisici.Cettechambreétaitrestéedanslemêmeétatquedepuisqu’ellel’avaitquittélejourdesondépart.Lesmêmespostersaccrochésaumur,lemêmebazarqu’ellelaissaittoujoursderrièreelle.Unvraimusée.Ilétaitassisauborddulit,uncadreentrelesmains.Lecadre,quid’habitudeétaitposésursatabledenuit.C’étaitunephotodontelletenaitbeaucoup.Jelesaisparcequelejouroùjeluiavaisfaitcroirequejel’avaisjetéàlapoubellepourlafaireenrager,jem’enétaisvoulu.Elles’étaitmiseàpleurercommejamais.Jel’avaisdéjàfaitpleurerunnombredefoisimpressionnante,maiscettefois-là,c’étaitpirequetout.C’étaitunephotodeLivieetmaman.MamanavaitdumalavecLivie.Elledisait qu’elle ne comprenait pas pourquoi elle faisait tant de cauchemars et organisait souvent desjournéesentrefillespouressayerdeluifairedirecequidevaitluifairepeuràcepoint.Laphotoavaitété prise un de ces jours où elles étaient parties toutes les deux dans un centre aquatique. Livie étaitrentréedesétoilespleinlesyeux,endisantqueplusgrandeellevoudraitêtrevétérinairepourdauphin.Jem’étaisbienfoutud’elle.Çal’avaitmisdansunecolèrenoireetellenem’avaitpasadressélaparolependant toute une semaine. Jusqu'à ce qu’Ethan arrive à lui faire entendre raison et me dise que je
pourraisaumoinsm’excuserpourqu’ellearrêtedefairelatronche.SansEthan,jesuisàpeuprèssûrequ’ellenem’auraitpeut-êtrejamaisréadressélaparole.
J’ai oséunpas dans cette chambre, le premier depuis trois ans et j’ai regardé autour demoi.Sonsweatétaitencoreposésurlachaisedesonbureauetj’aipresqueeul’impressionqu’elleallaitsurgiràtoutmomentpourmediredenepasrentrerdanssachambre.Sansquitterlesweatdesyeux,j’aibrisélesilence.
—Kim.TusaislafilledesAnderson…jen’aipaspum’empêcherderemarquerqu’elleressemblaitàLivie.
Jevoulaisvoirsaréactionavantd’enveniràcequemonespritétaitentraindemehurler,maisquejerefusaisencoredecroire.Ilareposélaphotoàsaplaced’ungestecalmeetsûredelui.Cethommeétaitunmaitreenlamatièrequandils’agissaitdesemaitriser.Maisjeconnaissaiscertainesdesesfacettespoursavoirquelesapparencessontsouventtrompeuses.
—Ahoui?Peut-être…Unrirem’aéchappé.Ilsefoutaitdemagueulej’enavaislecœurnet.—Commesitun’avaispasremarqué,ai-jerépondud’untonsarcastique.Ils’estlevé,meregardantaveccettefaçonquimedonnaittoujoursl’impressionden’êtrequ’unesous
merdeetasoutenumonregard.—Etenquoiçadevraitm’intéresser?Tunedevraismêmepasêtredanscettechambre.Sorsd’ici.Àcemoment,j’aiétépartagé.L’enviedeluihurlerquej’avaissupportétroplongtempsden’êtrerien
àsesyeuxàcôtédelaparfaitepetiteLivie.Ouluifairepartdemadécouvertematinale.J’aimaintenumonregardetluiaidit:
—Jamesestvenumevoircematin.Est-cequec’estvrai?Tuastouchéàcettegamine?Ilaeul’airsurprisetj’aicomprisqueJamesétaitvenumevoiravantdeluirendreunepetitevisite.
J’aifaitunpasversluietj’aienfinoséverbalisermaplusgrandecrainte.—Pourquoielleestpartie?Qu’est-cequetuluiasfait?Ilm’afixésansrépondrecomprenantquej’avaisfaitmespropressuppositions.Devantsonsilence
plus qu’éloquent,mon poing est parti pour atterrir directement sur le visage de cemonstre. J’ai tapéencoreetencoresanspouvoirm’arrêter,luihurlanttoutcequej’avaissurlecœur.Quandj’airéussiàm’arrêter,j’aireculéd’unpasetils’estmisàrire.Cetenculés’estmisàrire.Jeluiaienvoyéuncoupdepiedenpleinefigureenluidisantquesijelevoyaiss’approcherdenouveaud’unegamine,laprochainefoisjenem’arrêteraispas.JesuispartiretrouverJames.Jeneluiaipasfaitpartdemadécouverte,maisje lui ai expliqué que j’avais besoin de retrouverma sœur et qu’il fallait qu’il trouve quelque chose,n’importequoinousdonnantunindiceoùelleavaitpuserendreenpartant.J’aibienvuquelefaitquejerecherchemasœurl’interpellait,maisjen’enaipasditplus.Deuxjoursplustard,ilm’appelaitenmedisantqu’ilavaittrouvéuneadresse.UnfoyeràNewYork,maisqu’ellen’yétaitpasrestéelongtempsd’aprèscequ’ilsavait.J’aifaitmonsacprêtàpartir,alorsqu’ilétaitdéjàtard,sansriendireàpersonne.Jenevoulaispasque leschosess’ébruitent.Maisquand j’aiouvertmaporte, j’ai trouvéEthansur leseuil,ivremort.Çaluiarrivaitsouvent.Quandilétaittropcuitpourreprendrelevolantjusqu'àchezlui,ilvenaits’échouersurmaporte.J’aicomprisquemondépartallaitdevoirattendrequelquesheuresdeplus. Jamais je n’aurais laissé mon ami seul dans cet état. Je l’ai porté jusqu'au fauteuil alors qu’ilbaragouinaitdesmotssansaucunsensetl’ailaissédécuvé.Quantàsonréveil,ilavuquej’étaissurledépart,j’aihésitéàtoutluidire,maisprononcersesmotsétaitencorebientropdureetj’avaisbesoindel’entendredelabouchedeLivie.Alorsjeluiaisimplementditquej’avaiseuunepisteparJamesetqu’ilétait temps que je la retrouve, que si elle avait voulu revenir, elle l’aurait déjà fait. Ilm’a fixé sansrépondreetjeluiaidemandédem’accompagner.Iln’étaitpasconvaincu,ildisaitqueçaneserviraitàrienqueNewYorkétaitimmenseetquejenepourraispaslaretrouvermêmesijelevoulais.J’aifiniparleconvaincreàforced’insistanceetonestparti.JemesuisbiengardédedireàLiviepourlapetiteKim.
Jeluiaisimplementditqu’ons’étaitdisputéavecnotrepèreetquecertaineschosesm’étaientrevenuesàl’esprit.Des choses quim’avaient faitmeposer des questions et que papa avait fini par admettre leschoses.
Ethansetourneversmoienfronçantlessourcils—T’essûrequeçava?—Ouais.Leboulotmeprendlatêtec’esttout.Cen’estmêmepasunmensongevuqueçafait2joursquej’essaiederéglercertainsproblèmespar
téléphone,mais jenevaispaspouvoirycouperet çanemevapasvraimentde laisserLivieàpeineretrouvée. La porte s’ouvre et Jenny nous offre un sourire avant de nous inviter à rentrer. Quandj’aperçoisLiviedanslacuisineàéclaterderireàcôtéd’Haydenjemerendscompteàquelpointj’aiétéaveugle.Jenecroispasl’avoirdéjàvuriredecettefaçon.Jem’installesuruntabouretalorsquejenesuismêmepassûrequ’ilssesoientrenducomptedenotreprésence.IlssontdedosetLivieritdeplusbelle.
—Maisnon,pascommeça!Ellearrachedesmainsd’Haydenunepocheàdouilleenprenantleschosesenmain.—DejoliesboulesHaydenpasdegrospâtés.Sinonçaneressemblerajamaisàdeschouquettes.—Etmoiquicroyaism’yconnaitreenboules,luirépondcedernier.J’éclate de rire alors queLivie lache la poche laissant lamixture se renverser sur le sol. Elle se
retourneenm’entendantetrougiedefaçonimpressionnante.Masœurrougittoujourscommequandelleavait15ans,quelquechosequin’apaschangé.
—Qu’est-cequisepasseici?Ethannousrejointens’installantàcôtédemoi.Haydenleregardeavecinsistanceenrépondant:—Liviecroitmieuxs’yconnaitrequemoien…pâtisseriedit-ild’untonsuave.Jepouffederire.JecroisquecetrèscherHaydenenpincepourEthan,maislecrétinassisàcôtéde
moin’arienremarquéetçanefaitquem’amuserunpeuplus.Livievireàl’écarlateetsebaissepourramassercequ’ellearenversésansrépondre.
— Et vous faites quoi ? demande Ethan en se penchant sur le comptoir pour regarder Livies’affaireràsatâche.
Elleserelèveenreprenantuneteinteunpeuplusnormale.—Deschouquettes.Haydenveutquejeluiapprenneàfairedesmeringues,maisiladéjàdumalavec
deschouquettesalors…Ethansemetàrire.—J’adoretesmeringues.Elle semetà rougirdenouveau. Je lève lesyeuxauciel.Putain. Jepensaisqu’elleaurait finipar
arrêter d’en pincer pour lui, mais on dirait bien que ce n’est pas le cas. Heureusement que je faisconfianceàEthansinonçaferaitlongtempsqu’illuimanqueraitquelquesmembres.Maispouravoireuquelquesdéboiresavecluiàcesujet,jesaisquejepeuxluiaccordertoutemaconfiance.Etpuis,ilneferaitpasçaàLivie, j’oseespérerqu’il larespecteunpeuplusqueça,mêmesi je lesoupçonned’enjouerunpeu.Maisc’estundragueur,ilestcommeça.
—Toutlemondeadoresesmeringues!Jevendraismamèrepoursesmeringues!s’exclameHayden.Ellebaisselesyeuxperdantsonsourire.—C’étaitlarecettedemamère.Quandellerelèvelesyeuxversmoi,unsoupirm’échappe.Livieaeubeaucoupdemalàseremettre
del’accidentquiaemporténotremère.J’aipassédesheuresàtenterdelacalmeravantd’appelerEthanàlarescoussecejour-là.Unsouvenirdouloureuxquiresteragravédansmamémoire.
Chapitre26
Ethan
4ansplustôt
Livie:16ans
Ethan:19ans
Greg:21ans
Jemetslepetitétuidansmapochepournepasquemamèreletrouve.Sinon,jesaisqu’ellelevendrapoursepayersespilulesmiracles.J’aiuncadeaupourLivieaujourd’hui.Onvasurementsevoirà laclairièrecesoiret j’espèrequ’elle l’aimera.Jesuisnerveuxparcequ’ilyaunechosequejeveuxluidireenluioffrantetj’aipeurdesaréaction.
Çafait2moisquel’onseretrouverégulièrementàlaclairièreetjen’aipasencoreeulecouragedeluidire. Jesorsdechezmoiet reçoisunmessage.C’estGreg. Ilditquec’esturgentqu’il fautque jevienne.Çaneluiressemblepasalorsj’arriveencourantchezluietfrappeàlaporte.Sonpèrem’ouvreetjevoisquequelquechosenevapas.Ilmefaitrentreretj’attendsqu’ilmedisequelquechose,maisilneditrien.Ilalesyeuxbouffisetlevisagetorduparladouleur.C’estlàquej’entendssoncri.Livie.Jemeprécipitedans lesescaliersetcours jusquesachambre. Jemepétrifiequand je lesvois.Livieestagenouilléesurlesol,lecorpsconvulséparlessanglots.Greglaserredanssesbrasetlèvelatêteenm’apercevant.
—IlestlàLivie,jevaisvoirpapad’accord?Ilselève,maiselleresteprostréesurlesolcommeincapabledumoindregestelesmainsposéesà
plat sur le parquet. J’ai le ventre noué quand il s’approche demoi. On sort dans le couloir et ilmeregardecommejamaisilnem’aregardé.Ladouleurestuneuphémisme.
—Greg,qu’est-cequisepasse?—C’estmaman.Elle…unchauffard.Ill’arenversé.Elleest…Moncœurs’arrêteetjereculed’unpas—Non…C’est comme si tout s’écroulait autour de moi. Samantha. Pas elle. Pas cette femme qui m’a tout
donné.J’aidumalàrespirer,maisj’essaiedegarderlaface.Ilbaisselatêteenlaissantéchapperdessanglots.
—Ethan,resteavecelle.J’yarriveplus.Elleestinconsolable.J’aijustebesoin…besoin…Jeposemamainsursonépaule—Vas-yc’estbon,jeresteavecelleIlmeremercieetparss’enfermerdanssachambre.J’essaiedemeressaisir.Elleabesoindemoi.Je
nepeuxpascraquer.Jerassemblemoncourageetentredanslachambre.Elles’estrecroquevilléesurle
soletnepleureplus,maisc’estencorepire.Elleestamorphe,sansréaction.Jemepencheverselleetlasoulèvepourlaposersurlelit.Jem’allongeàcôtéd’elleetlaprendsdansmesbras.
—Liv,jesuislà.Jesuislà.Jeneluidispasqueçavaallerparcequeçan’iraplus,jelesais.Àcetinstant,jemefouqu’onnous
surprenne,jenesupportepasdelavoircommeça.Ellenemeregardepas.Ellealeregardvide,perdu.—Livie,jet’enprie,regarde-moiMa voix se casse. Je sens la boule monter dans ma gorge. Et un sanglot que j’essaie de retenir
m’échappemalgrémoi.Ellelèvelesyeuxversmoietposesamainsurmajoue.Moncœursebriseetjecraque.Jefermelesyeuxetenfouismonvisagedanssoncouenlaserrantcontremoi.Jelaissecoulerleslarmespourlibérertoutelapeinequejeressens.Jepleurecettefemmequim’aaccueillichezellealorsquejen’étaisqu’ungamin.Cettefemmequejeconsidéraisplusquemapropremère.Ellem’aouvertsaporte etm’a apprisque lavien’était pas aussimocheque je lepensais.Et jeme rends compte à cetinstant,quejeneluiaijamaisdit.Jeneluiaijamaisditmerci.
Chapitre27
Livie
J’ai réussiàmeressaisir. Je finisdenettoyermabourdeetmêmesic’étaitdansunsilencepesant,j’essaie de ne rien laisser paraitre. Jenny nous dit qu’elle nous abandonne. Journée familiale. C’estl’anniversairedesonfrèreaujourd’hui.Jeluidisdelessaluerdemapartavantqu’ellenefranchisselaporteetmeretourneversles3hommesdiscutantautourdubardelacuisine.Bon,jepeuxlefaire.Fairesemblant,jepeuxfaire,maissiEthansemetàmereparlerdemeringues,jenesuispassûredepouvoir.J’aibienvulapetiteinsinuationqu’ilm’envoyaitsubtilement.Moinonplusjen’aipasoubliélafoisoùilm’adonnéduplaisiravecsalanguepourlapremièrefois.Évidemmentàchaquefoisquejevoisunemeringue,c’estàcettescènequejepense,maisoserdireunechosepareilledevantGreg,ilabuse.
—Bon,jetravaillecesoir,maisonpeutsortirunpeusivousavezenvie,jeleurindiquepourpenseràautrechose.
Gregsefrottelanuqueensoufflant.—ÀceproposLivie, jevaisdevoir repartirdemain. Jedois repasser surunchantier,maisEthan
resteraavectoi.Ilal’airembêtéetjemeretiensdeluidirequejen’aiaucuneenviequ’ils’enaille.Maisçadevait
bien arriver non ? Sa vie est à Cover-road. Tout comme celle d’Ethan, ce constat me donne despalpitations que j’essaie d’ignorer d’un sourire. Ethan se tourne versmon frère, les yeux écarquillés.Greglefusilleduregardcommepourleprévenirqu’iln’apaslechoix,cequinemanquepasdemefairerire.Ethansouffleensecouantlatête.
—C’estdemandésigentiment.Ilmefaitunclind’œildiscretaumomentoùGregseretourneversmoi.—J’essaieraisdefaireauplusvite,maisjenesaispascombiendetempsçaprendra.Jereviendrais
d’accord?Jejetteuncoupd’œilàHaydenquidoitcomprendrelemessage,carilseredresseenregardantune
montrequ’iln’apas.—Houla,vousavezvul’heure?Fautquej’yaillemoi!Ildéposeunbaisersurmajoueetmechuchoteàl’oreille:—Situcroisquejen'airienremarqué.Tuviensdemebriserlecœurmapoulette.Il salue ensuiteGreg et Ethan, une poignée demain bien trop longue en ce qui concerneEthan, et
prendladirectiondelasortie.Jeprendsplacefaceàmonfrèreencherchantlesmots.—TavieestàCover-roadGreg,jelesais.Jenereviendraispas,mavieesticimaintenant.J’espère
quetuviendrasmerendrevisitedetempsentemps.J’évitederegarderEthanendisantça.Jeluienvoieunmessagequejen’oseluidiredepuisqu’ilest
revenu.JenereviendraipasàCover-road.Ena-t-ilconscience?Gregsouffleenattrapantmamainposéesurlebar.
—Jesais.Jenetedemanderaipasderevenirpetitlapin.Etpuis,tuesheureuseici,jereviendraisnet’inquiètepas.
Jesuissoulagéparsaréponse,maislèveundoigt:—Arrêtedem’appelercommeça.
Ilpouffederireencroisantlesbras—Lapinoutupréfères?Jesecouelatêteénergiquement.—J’ai20ansGreg.Ilm’offreunepetitemoueboudeuseetjememetsàrireenjetantuncoupd’œilàEthan.Ilmeregarde
lesyeuxplissésetjedonneraischerpoursavoircequ’ilaentête,maisilsemetàsourireenselevant.—Bon,tucommencesàquelleheure?—18heures.Jefaislafermeture.Ilhochelatêteetajoute—Alorsonvaprofiterdecettejournéetousles3.FaisnousvoirNewYorkLivie.
*J’ai rarement autantmarché. J’ai voulu enprofiter pour leurmontrer tout ce que j’avais découvert
danscetteville,unevisiterapidevutoutcequ’ellerenferme,maisj’espèreavoirréussiàleurpartagermonamourdelagrandepomme.Onaétépique-niquédanscentralPark,aprèsêtremontétoutenhautdel’EmpireStateBuilding.Ensuite,onaprisleferrypourStatenIslandpourvoirlastatuedelaLiberté,etonafiniparTimesSquareenleurexpliquantquedenuit,c’estcommemêmebeaucoupplussympa.Onaaussibeaucoupparlé,Ethanafiniparm’avouerqu’ilavaitouvertsagalerieàCover-road.Lesphotos,comment cela pouvait en être autrement ? Ilm’abeaucoup fait rire, car il semblait embarrassé demel’avouer.Gregnes’estpasretenudelecharrierunpeusurlesujetd’ailleurs.Jemesuisrenducomptecombien ses moments m’avaient tant manqué. Si à l’origine je m’étais un peu imposée à plusieursreprisesaveceuxquand ils sortaient, c’était surtoutpournepasme retrouver seul avecpapa,mais letempspassant, j’appréciaivraimentdepasserdu tempsaveceux. Je les regardais jouerau foot sur leterrainderrière la forêt.Onallait jeterdescaillouxcontre les fenêtresduvieuxMrLewis.Ça,c’étaitmonidée,depuisquejel’avaissurprisàdonnerdelamort-aux-ratsauxchiensetchatserrantsdanssonjardin.Etj’aisouventservid’appâtpourallerpiquerdesbonbonsàlaconfiserie.JedevaisdistrairelemarchandpendantqueGregetEthans’enmettaientpleinlespoches.Lejouroùons’estfaitprendre,çaachauffé,maisçarestedetrèsbonssouvenirs.Unjour,j’étaispartipourlesrejoindresurlaplage.Etj’aivuEthanaveccette fille.Voirmonfrèredraguerétaitunechose, je trouvaisça franchementdégoutant,maislà,çam’afaittrèsmal.J’aicompriscejourquejen’avaisplusmaplace.Jesuisrestéimmobileàle regarder embrasser cette fille et jeme suis dit que j’aurais aiméque ça soitmoi.C’est là que j’aicomprisquejeressentaisdeschosespourEthan.Deschosesquejenedevaispasressentir.Auboutd’unmoment, il m’a vu et m’a regardé, longtemps. Les minutes se sont écoulées avant qu’il détourne sonregardetareprislàoùils’étaitarrêté.J’aifaitdemi-touretjesuisrepartiendirectiondechezmoi.Jeme trouvais ridicule, j’ai pleuré un bonmoment enme traitant d’imbécile.C’est là que j’ai rencontréJess.Enlongeantunerue,j’aivucettefillehurlercommeunefolledansunjardinsursonpère,dumoinsjepensaisquec’étaitsonpère,etjemesuisditquej’aimeraisavoirlecouragededirecequejepensaiscommeelle.Elleestsortiedujardinenclaquantleportailetm’aregardé.
—Qu’est-cequet’as?J’aisourietj’airépondu:—Lesmecssonttousdesporcs.Elleaéclatéderireetm’aattrapéparlebrasenmedisantquejenepouvaismêmepasimaginerà
quelpoint.Onestpartibrasdessusbrasdessousetjel’ailaisséem’entrainer.Desamisonnepouvaitpasdirequej’enavaisbeaucoup.EntreceuxquimetrouvaientbizarreetceuxquiavaientpeurdeGreg,onnepeutpasdirequeçasebousculaitauportillon.J’aidécouvertmonparfaitopposé.Elleétaitexubérante,sûred’elle etn’avaitpas froidauxyeux.Elleavait16ans,unandeplusquemoi, et trouvaitque les
garçons de son âge étaient ennuyeux.Celui que j’avais pris pour son père n’était autre que son grandamourdumoment,dumoinsc’estcequ’ellepensait.Jusqu'àcequ’elleapprennequ’ilétaitmarié.Ilavait28 ans et avait 2 enfants. Jeme suis dit que cette fille était complètement folle.Mais on est très vitedevenueamieetlaseuleàquij’aiconfiémonsecretsurmoietEthan.Ellevivaitseuleavecsamèrequiétaitunefemmeaussifollequesafille.Jemedemandecequ’elleestdevenueaujourd’hui.
Ons’estditaurevoiravecGregetilm’apromisdem’appelerpourmeteniraucourant.J’aivraimentappréciécettejournéeoùj’airetrouvénotrepetittrioquim’avaitbeaucoupmanqué.Alorsquandj’arriveau bar pour travailler jusqu'à la fermeture, j’ai déjà les pieds en bouilli et je ne sais vraiment pascommentjevaistenirlecoup.JerentredanslesvestiairesetrentredansCédricquiensortait.
—Désolé,jem’excuse.Sonsourires’agranditalorsqu’ilmebloquetoujourslepassage.—Pasmoi.Ilnebougepasd’unpoucealorsjeluifaisunsigneversmonvestiaire.—IlfautquejepasseCédric.Ilcroiselesbrasens’appuyantauchambranledelaporte.—Tufinisàquelleheurecesoir?—Jefaislafermeture.Ilhochelatêteavantd’ajouter:—Commemoi,çatombebiennon?Ilvavraimentfalloirquejefreinesesardeurs,maisonfaitcommentaujuste?Jenesuispasvraiment
habituéàcegenredechoseetj’imaginebienlatêted’Ethans’ilmevoyaitàcetinstant.—TuvasmemettreenretardCédric.Ilfinitparmelaisserpasser.Jesuissoulagéetprendsmonservice.Mespauvrespiedsmehurlentque
jenetiendraispaslecoup,maisjeleurdisqu’ilsn’ontpaslechoix.Quandenfinlesderniersclientssontsortis,jem’offrecinqminutesderépitsavantdetoutranger.Fredal’aircrevéaussietCédrics’accoudedevantmoisurlebar.
—Alors,etsijet’emmenaisboireunverreunsoir?Jejetteuncoupd’œilàFredquipouffederire.Ilmériteraitunebonnecorrectioncelui-là.—C’esttrèsgentilCédric,maisçanem’intéressepas.Ilsepencheunpeuplusversmoietjereculemonvisagelevoyants’approcherd’unpeutropprès.—AllezLivie,justeunverre.Jemerelèveenrépondant:—Non.Allezauboulot,moij’aienviederentrer.Jemedirigeverslestablesànettoyerquandilcrie:—Jenetelâcheraispasavantquetuesditoui!
Chapitre28
Ethan
Gregestparti,onvadoncpouvoirsevoirsansproblème.Cen’estqueprovisoire, je lesais, ilvavraimentfalloirqu’onluiparle.Jemedemandesimplementcommentluifairepasserlapilule,çanevapasêtrefacile,maishorsdequestionderetomberdansnosvieilleshabitudesàseplanquersansarrêt.J’enavaisdéjàraslebolàl’époquecen’estpaspourretomberdanslemêmeschéma.Quandj’arrive,ellen’estpaslà.Jennymeditqu’elleestàsoncours.Coursdequoiaujuste?Cettefuriem’auratoutfait.Descoursdeboxe,nonmaissérieux!Etlà,jen’aiqu’uneenviec’estdevoirLivieàl’œuvreetjemerendsàl’adressequeJennym’aindiquée.Jeladécouvredansunegrandesalleàtaperdespoingsdansunsacquidoitfairedeuxvoiretroisfoissataille.Elleal’airsipetiteàcetinstant.Pourtantelleneselaissepasdémonterettapecommeuneforcenée.Etlàfranchement,ellem’excite.Ellem’exciteplusquejamaisputain.Elle finitparm’apercevoir.Nonpasque jemecachais,mais jenevoulaispaspasserpourunvoyeurnonplus.Ellemerejointensautillant.
—Qu’est-cequetufaislà?—JevoulaisvoirsiJennyneblaguaitpas.Tunet’ennuiespasondirait,laboxe?Sonsourires’agrandit.Sapetitebouchedevientd’unseulcoupvraimentirrésistibleetjenerésiste
pas.Jeluiattrapelebrasetl’attireàmoiavantdeplaquermeslèvrescontrelessiennes.Ellefaitnaîtreenmoidesémotionsquiontétéétoufféesdepuistellementdetemps,c’estcommeunelibération.Jemesensenfinmoi-même,entier.Ellegémitcontremaboucheetcequiapoureffetdem’exciterdavantagealors je la resserrecontremoi.Ma langueforce l’entréedesaboucheoubliantoùnousnous trouvons.Quandjem’écarte,ellealeteintdescoquelicotsetregardeautourd’elleunpeuembarrassée.Jepouffederireetpassemonpoucesursalèvreinférieure.
—Tuesmignonnequandturougis.Ellemepousseenrâlantets’écarteenattrapantdesgantsaccrochéslelongd’unmur.—Allezviens,montre-moicequetusaisfaireJehausseunsourcil:—T’enessûre?Elleinsiste:—Tunemefaispaspeur.J’aiapprisquelquestrucs,jesaismedéfendre.Ça peut être drôle après tout. J’attrape les gants et la suis dans un coin. Elle monte sa garde et
commenceàsautiller.Putaindemerdesiellecontinuecommeça,jevaislaprendrelà,directementsurlesol.Ons’amuseunpeu,gentiment.Coupdroit,uppercutetj’enpasse.Jelalaissefaire,c’estvraimenttropdrôledelavoirmettreautantd’énergielà-dedans.Jeprofitequ’ellebaissesagardeetpassemonbrasautourdesoncouenlaretournantdedos.
—Etmaintenant,qu’est-cequetuvasfairepourt’ensortir?—J’aip’têtrepasenviedefairequoiquecesoit,répond-elle.Jepassemalanguesurlecreuxdesonoreilleetdéposedesbaisersendescendantdoucementlelong
desoncou.Quandj’arriveauniveaudesonépaule,jelerevois.Cefoututatouage.Jedégagemonbras,mordslegantpourl’enleveretpasseundoigtsurletissupourl’abaisser.Maisellesedégageavantquejen’aieeuletempsdevoirquoiquecesoit.
—OhnonEthan,tuestopcurieux.—C’estquoil’histoiredetavieLivie?Ellemeregardeaveccepetitsourireencoin.—Toi.Moncœurs’arrêtenetavantdereprendre.—Moi?Elle ne répond pas etme contourne avec son air fier d’elle. Je la regarde s’éloigner essayant de
comprendrecequ’elleatentédemedire.Mespiedssontcommeclouésausol.Quandj’arriveenfinàbouger,elleestrentréedanslesvestiaires.Jel’attendsàl’extérieur.Jemesuisassissurunerambardeetj’observeledéfilédesabonnésquirentrentetsortentdelasalle.J’aidumalàréfléchir.Entresapetiteconfidenceàproposdesontatouageetcesoudainintérêtpourunsportdedéfense,çanemanquepasdemettremoncerveauenébullition.Bon,jesaisquesonpèreàunliendirectavecsondépart,mêmesiellenel’apasavoué,ellemel’aclairementfaitcomprendre.J’aiencoredumalaveccetteidée,ilétaitunhommedouxetsympathique.Jedevraispeutêtreparléàcemecqu’elleaconsultéavecJenny.Ilnemedirapeut-êtrepascequ’elleluiaconfié,maisilpourraitm’aideràtrouverlemoyendelaconvaincredelerevoir.Monportablesonneetquandjevoislenuméros’affichersurl’écran,jerejettel’appel.Jen’aipasbesoindeçapourlemoment.Ellesortaumêmemomentetjerangemonportabledansmapocheenmeredressant.Sonpetitairmutinmefaitrireetjepasseunbrassursonépauleenriantdelavoirjoueravecmoidelasorte.
—Tuesdiabolique.Onmarcheendirectionduparking.—Tunelesavaispas?On s’arrête devant sa voiture et je la regarde. Son sourire donne un éclat à ses yeux absolument
magnifiques.Jel’embrasseetpasseunemainsursesfessesenluivolantsesclésdevoiture.Elles’écarteens’enrendantcompteetjelèvelamainpourl’empêcherdelesrécupérer.
—C’estmoiquiconduis,turoulescommeunemamie.Elleposesesmainssurseshanchesenmefusillantduregard:—Jeneroulepascommeunemamie.—Siçasepeut,t’asmêmepastonpermis.Après tout elle s’est fait faire de faux papiers, pourquoi pas un faux permis ? Elle souffle en
répondant:—Jel’aipasséetjel’aieuhautlamain.—Etbien,laisse-moitemontrercequec’estquedeconduire.
*Ok.Jecomprendsmieux,cettevoitureestunetortureàconduire.Jenepeuxm’empêcherderâlersur
toute laroute,entre laboitedevitessequisebloquesansarrêt, ladirectionassistée inexistante,et lesessuiesglacequisemetteenroutetoutseulalorsqu’ilnepleutmêmepas.Cevéhiculeestbonpourlacasse.Jemegareheureuxd’arriverenunseulmorceau.
—Fautvraimentquetuterachètesunevoituremapuce,cetrucestundangerpublic.Ellebaisselesyeuxensetriturantlesdoigts.Qu’est-cequej’aidit?—Liv?Ellelèvelesyeuxensouriantfaiblement:—Jen’aipaslesmoyensEthan.C’estçaouallerbosserenmétro.Rienqu’àimaginerLivieprendrelemétrotouteseuleauxheuresnocturnesmeretournel’estomac.Je
sorsdelavoitureetluiouvrelaportière:
—J’essaieraisdetetrouverquelquechosedemieuxquecetasdeferraille.Ellesecouelatête,jem’endoutaisenmêmetemps.—Non,jemedébrouilletouteseuleEthan.J’insisteraisbien,maisjesaisquec’estpeineperdue,jetrouveraisunmoyendelapersuaderunpeu
plustard.Enrentrantàsonappartement,ilestvide,ellepartens’éloignantverssachambre:—Jevaisprendremadouche,nedisparaispas.Elles’éloigneverssachambreet je lasuis.Elleouvresesplacardsenattrapantdesvêtements.Et
puisjen’ytiensplus,jeposeunemainsursonépauleenlamaintenantpourl’empêcherdebouger.Elleessaiedesedégageralorsjeluiattrapelebrasetluimurmureàl’oreille.
—Montre-le-moioujevaisdevenirfou.Elleamismapatienceàrudeépreuveetjen’ytiensplus.Jebaisseletissu.Moncœurs’arrête.Tout
l’oxygènedemespoumonssevide.Mesmainssemettentàtrembler.Jepassemondoigtsurles5lettresdemonprénomenremontantverssonépauledesbranchesdelierre.
—PutainLiv…Jedéposedesbaiserssurcetatouage.Ilestsibeau,si…elleestàmoi.Elleestmienneetellel’acrié
entatouantsoncorps.Jememetsàrire.—ÉvitedemontrerçaàGreg.Ellesemetàrireàsontouretjelaretourne.Sesyeuxseplongentdanslesmiens.Jecaressesalèvre
inférieuredemonpouce.Seslèvresquim’ontrendudingueavantdepouvoirm’autoriseràydéposerlesmiennes.Etlàjen’aiqu’uneenvie.Mêmesijel’aidétestédem’avoirlaissésansunmot,jenepeuxnierquemoncœurreprendviedepuisquejel’airetrouvé.Moncœurn’ajamaisappartenuàpersonned’autrequ’àelleet ilmelerappelleencoreetencoreaujourd’hui.Jeplaquemabouchecontrelasienneenlapoussantcontrelemurloindelatendressequejeluiaiaccordéejusqu’ici.Jeladévore,lafaimd’ellesefaisantplus forte tandisquemesmainssemblentaffaméeset impatientesde la toucher.Nos languessemêlent,nosgémissementsrespectifsrésonnantdanslapièce,quandjeluimordillelalèvre.Putain,j’aitellement envie d’elle à cet instant. Elle amamarque sur elle, ellem’a gravé comme une empreinteindélébile.Mesmainsdescendent le longdesesflancset jeremontesondébardeur.Elle lève lesbraspourmelaisserfaireet jenepeuxm’empêcherdesourire.Àl’époque,onn’est jamaisallée très loin,elleétaitjeuneetviergeetappréhendaiténormément.Jebaissemesbaiserssursagorgeendescendantdoucementverssapoitrine.Jepeuxsentirsarespirationaccéléreretçanefaitquem’exciterdavantage.Elleestàmoi.J’aitantattenducemoment.Jeluiattrapelesmainsenreculantetl’entraineavecmoi.
—Jevaistefairel’amourLivie.Ettunepourrasplusjamaism’échapper.Je m’assis sur le bord du lit et pose mes mains sur son pantalon que je commence à descendre
doucement.Elleposesesmainssurmesépaulessedébrasantd’unepuisdesdeuxjambes.Jeposedesbaiserssursonventreenmedisantquelavienem’arienapportédeplusbeauquecettefille.Qu’auraitétémavie si jen’avaispas croisé sa route ?Elle aurait été sans intérêt, sans lemoindredoute.Sansm’interrompre, je passemesmains derrière ses cuisses en remontant. La douceur de sa peau est unetorturealorsque jeveuxprendre toutmon temps.Mesdoigts seglissent sur ses fesseset j’attrape lespassantsdesaculotteque jebaisseen levant lesyeuxverselle.Ellesemble tellement intimidéeàcetinstant que je ne peux m’empêcher de me poser une question. Une question que je me suis refusé àréfléchirjusqu’ici,maisc’estimpossible.J’ouvrelabouche,prêtàluiposeraumomentoùonentenduneporteclaquer.
—Livie,t’eslà?
Chapitre29
Livie
Jemeretourneenattrapantunpeignoirquej’enfileenvitesseaumomentoùHaydenpasselatêteparlaportedechambre.Ethanselaisseretombersurlelit,unbrassursesyeux.
—Putain,j’aicruquec’étaitGreg…Je me retourne vers Hayden en le fusillant du regard. Encore un peu et ça devenait vraiment
embrassant.Plusqueçanel’estdéjà.—T’asjamaisapprisàfrapper?Ilsouritens’appuyantauchambranledelaporte.—Jedérangepeut-être.Jel’attrapeparlebraspourlefairesortiretl’emmèneausalon:—Qu’est-cequetuveux?Ilpouffederireens’asseyantdansunfauteuil:—Ouais,t’asvraimentbesoindet’envoyerenl’air,t’esaffreuseaujourd’hui.Ilposesespiedssurlatablebasseetattrapelatélécommandeenallumantlatélévision.Ilcommence
légèrementàm’agacerlà.—Jepeuxsavoircequetufais?—Allezterminer,jet’attends,tuserasdemeilleurehumeuraprès.Jem’apprêteàrépliqueraumomentoùlaportes’ouvre.Jennyentrelesbraschargésdecourses.Elle
s’arrêtedansl’entréealorsquej’essaiedereprendremesesprits.—Qu’est-cequisepasse?demande-t-elleennousregardanttouràtour.—J’aiinterrompuLivieetEthanetelleestdemauvaispoilducoup,répliquecedernier.Jenny écarquille les yeux et je n’ai qu’une envie c’est que le sol s’ouvrepourm’engloutir. Je fais
volte-faceenlevantlesbras.—C’estn’importequoi!Je me rue sous la douche sans un regard dans la chambre où Ethan doit encore être. J’essaie
d’analyser cequi vient de sepasser.C’est la panique.En suis-je vraiment capable ?Si j’ai repoussél’échéanceladernièrefoisenluioffrantunepetitegâterie,çanepourrapastoujoursmarcher.Jesursauteen sentant unemain se poser surmon ventre et découvreEthan derrièremoi.Nu.Ohmon dieu. Si jeflippaiscarrémenttoutàl’heuredanslachambre,cen’estrienparrapportàmaintenant.
—Qu’est-cequetufaislà?Ilfrottesonérectioncontremesfessesquidoitêtresaréponse,alorsquesamaindescendsurmon
ventre.—J’aienviedetoimapuce.J’aibesoinderalentirleschoses,maisjenesaispascommentfaire.—JennyetHaydensontjusteàcôté.—T’inquiètespaspourça.Salangueremontele longdemoncou.Quandsamainatteintsonbut, je laissematêteretomberen
arrière sur son épaule. Ses sensations tellement étrangesme traversent de part en part.D’un côté j’aienviedel’arrêteretdel’autredeluidiredecontinuer.Ilatoujourseucepouvoirsurmoi,d’unsimple
contact, il fait naître enmoi des sensations que jeme suis toujours interdites. Il passe son autre brasautourdemoiattrapantundemesseinsdanssapaumequ’ilmepincelégèrement.Samains’activeplusbasalorsquelecrépitementdansmonventresefaitsentir.
—Ethan…Ilsemetàrireenmemordillantlelobe.—Jeveuxt’entendrejouirmapuce.Ilintroduitundoigtenmoicequiapoureffetdelaisserungémissementrésonnerdanslapièce.Je
senslapaniquemonteralorsquesoncorpssepressedeplusenpluscontremoi.J’aitoujourscombattusessensationsquin’étaientpassaines,maisEthansembleêtredotéd’unpouvoirluidonnanttoutdroitsurmoncorps.Jesenslecrépitementdansmonventres’intensifier,alorsqu’ilintroduitundeuxièmedoigtenmoisansarrêterlescaressesqu’iloctroiesurmesseins.Sonnezeffleurelecreuxdemanuqueetjesenssalanguelaremonterdoucement.
—Situsavaiscombientumerendsdingue.Jeserrelespaupièresalorsquelessensationsmontentdeplusbelle,maisjenepeuxpas,jenedois
pas.—Laisse-toiallerLivie.Pourmoi.Ilappuiesesparolesensefrottantdeplusbellecontremoipendantquesesdoigtss’enfoncentplus
fort enmoi.Quand lavagueme submerge, je tentede la retenir,mais c’est trop tard.Ellem’emporte,balayant tout sur sonpassage alors quemespenséesme rappellent combien tout ça estmal.Quand jereviensàmoi,ilm’attrapelesmainslesplaquantsurlecarrelagedevantmoi.Sesmainsremontentmesbrasenunedoucecaresseetdescendent le longdemondosd’une lenteuratrocealorsque j’essaiedefairedisparaitrelabouledansmagorge.J’aipeur,trèspeur,maisjesaisquesijeveuxlegarder,jevaisdevoirfaireuneffort.Siàl’époque,ils’estmontréd’unepatienceplusqu’acceptable,jesaisquejenepeuxplusrepousserl’échéance.Ildéposeunbaisersurmonomoplateoùj’aifaitgraversonnomvoilàmaintenant2ansetposesesmainssurmeshanches.
—ArrêtedetremblerLivie.Tun’esplus…vierge?Lesondel’eauquicoulerésonnealorsquejecherchequoirépondre.—Non.C’esttoutcedontjesuiscapabledeluidire.Jeneluiaijamaismentiàcepropos,ilatoujoursfait
ses propres suppositions et je ne l’ai jamais contre dit, alors pourquoi j’ai envie de vomir rien qu’àprononcercesimplemot?Sonérectionsepressedeplusenpluscontremoialorsqu’il redéposedesbaisersdansmondos.
—Jet’aimeLivieUnsanglotm’échappequandilprononcesesmotsquel’ons’esttantettantrépétésàuneépoquequi
semblesilointaine.Ilmeretourne,meretrouvantdosaumur.Ilmefixelessourcilsfroncésetprendmonvisageentresesmains.Soudain,samâchoireseserreetsonregards’assombrit.
—Qu’est-cequ’ilt’afaitLivie?La têteme tourne. Jenepeuxpas. Jeneveuxpas.S’il comprend, jevais ledégouter. J’aibeau le
savoir,aucunmotnesortpour le rassureralorsque j’aideplusenplusdemalà respirer.Soudain, ilécarquillelesyeux,laissetombersesmainslelongdesoncorpsenreculantd’unpas.
—Non…Ildétournesonregard,attrapeuneservietteavantdesortirdelasalledebainsansunmotdeplus.Le
cœurenlambeau,jecomprendsquecequejecraignaisleplusvientdeseproduire.Jel’aiperdu.Jemelaisseglisserjusqu’ausoletenfouismonvisagedansmesmainsenlaissantenfintouteladouleurquejeressenss’écoulerdansmeslarmes.
*
Quand je sorsde la salledebain, j’ai l’impressionqu’uncamionm’estpassédessus.Sansgrande
surprise,Ethann’estpluslà.QuandJennymevoit,ellesefige.Jenedoispasêtrebelleàvoir,j’enaiconscienceetlavoiraveccetteexpressiondetristesse,rouvrelesvannesquejepensaisépuisées.Elles’avanceversmoietjemeprécipitedanssesbrasenpleurantdetoutmonsaoul.
—JeledégouteJenny.—Maisnon,nedispasdebêtise,répond-elleenmeserrantplusfortcontreelle.Jesaisqu’elletentedemerassurer,maisçanefaitquemeprécipiterunpeuplusdansunesensation
detomberencoreetencoresanspouvoirm’arrêter.Jennyetmoi,c’estunegrandehistoire.Depuisnotrepremièrerencontre,ellearéussiàgagnermaconfiancealorsquejetentaisdetoutesmesforcesdegardermonsecret.Ceterriblesecretquej’avaisfuiavectantdeforce.EnarrivantàNewYork,j’ailonguementerrésansbutetquandj’aidécouvertlefoyerréservéauxadolescentsdanslebesoin,jesuistombésurelle. Elle est venueme voir à plusieurs reprises.Moi, tout ce que je voulais, c’est qu’onme laissetranquille.Jenevoulaispasinspirerlapitiéoutoutautresentimentquimefaisaitmesentirplusmalquecen’étaitdéjàlecas.Ellenem’ajamaispousséàluiparler,commesielleavaitdevinéquec’étaitcequimeferaitfuirdenouveau.Etpuisunjour,elles’estassiseàcôtédemoipendantl’heuredurepas.Jenememêlaisjamaisauxautres,jerestaisdansmoncoinn’ayantaucuneenviedecréerunquelconquelienavecquiquecesoit.Onamangé l’uneàcôtéde l’autresansdireunmotpendantde longuesminutes.Maissaprésencem’étaitdifficile,jenesavaispasalorsqu’elleavaitdevinémaraisondemaprésence,ellemel’avouerabienplustard.Elles’estalorstournéeversmoiensouriantetadit:
—Jedétestevivretouteseule.Je l’ai regardésanscomprendre.Qu’est-cequi luiprenaitdemedireçaalorsqu’onnes’étaitpas
encoreéchangéuneseuleparole?Etpuis jenevoyaispas troppourquoiellemefaisaitcetaveu.J’aihaussélesépaulesencontinuantàmangerespérantqu’ellecomprennedecettefaçonqueçam’étaitégal.Elleaalorsajouté:
—Macolocm’alaisséenplanetjenetrouvepersonnepourlouerlachambre.Çatedirait?Mesyeuxsesontplisséspourl’observer.Soitelleétaitfolle,soitelleétaitfranchementimprudente
deproposerunechosepareilleàlapremièrevenue.Sonsourires’estélargietelleadit:—Àmoinsquetupréfèresresterdanscetendroitsuperbeoùtuesobligédepartagertachambreavec
3autresfilles.Etquediredesdouchescommunes,çadoitêtreuneexpérienceexaltante!Sonsarcasmenem’apaséchappéetpourlapremièrefoisdepuismafuitejen’aipaspum’empêcher
desourire:—C’estpascequejepréfèreeneffet.Onaéchangéunregardetonari.C’étaitsibon.Rire.Unechosequej’avaisoubliée.J’ainéanmoins
refusésacharmanteattention.Ellen’enestpasrestéelà.Elleestrevenueàlacharge,chaquejour,encoreet encore jusqu'à ceque je finissepar accepter.Ellem’a aidé àme sortir de cet endroit,m’a forcé àconsulterpourmesortirdema«déprime»avantquejesoisenétatdetrouveruntravail.
Jemeredresseetelleposesesmainssurmesépaulesenm’offrantunsourireréconfortant:—Laisse-ledigérerlanouvelleLivie.Illuifaudrapeut-êtreunpeudetemps,c’esttout.QuandjetournelatêteetaperçoisHaydenànousobserver,jemerendscomptequ’onavaitunpublic.
Iln’estaucourantderienetilesthorsdequestionçachange.J’espèrenepasenavoirtropdit.Ilselèveet s’approche de nous. Je baisse les yeux, j’ai affronté assez de regards de pitié aujourd’hui, je n’ensupporteraispasundeplus.
—Uneénormeglaces’imposeavecdoubledosedechantilly,tunecroispasLiv?Jerelèvelesyeuxensouriant.Voilàpourquoij’adoreHayden,iltrouvetoujourslesmotsquimevont
droitaucœur.
Chapitre30
Livie
Assisedevantcetteénormeglace, j’ai leventrenoué.D’habitude, jenemeseraispas laisséprier,maisaveccequivientdesepasser,j’aijusteenviedemelaisserengloutirsousmacouettepourneplusjamaisensortir.Haydenavaleunebouchéedelasiennesansmequitterdesyeux,cequin’arrangerienàma nervosité. Il m’a emmené à son glacier préféré. Le Big Gay Ice Cream, n’y voyez aucune traced’humour,c’estvraimentlenomdecepetitmagasindeglace.Sivousvoulezmonavis,lepropriétaireavaitdûfumerlamoquettele jouroùiladécidédecenomets’iln’yavaitqueça.Maisladevanturereprésenteunelicorneléchantuneglacedontlescouleursdecelle-cifontimmédiatementpenseràlaGayPride.Letonestdonné.Pourtant,d’aprèsledétecteurinfaillibled’Hayden,etc’estluiquiledit,pasmoi,lepropriétaireest100%hétérosansaucundoute…cherchezl’erreur.Jesouffleetavaleunebouchéedechantillyafindenepasêtrevenupourrien.
—J’avais16ansquandj’aicomprisquej’étaisplusattiréparlecostume3pièces.Àtoi.Haydenmefaitsigneavecsacuillèrepourm’encourager.Jesensquejenevaispasaimercejeu.—C’estmamèrequim’aapprisàfairelesmeringuesquetuaimestant.Commençonspardesbanalités,çafaciliterapeut-êtreleschoses.—Elleest…—Morte.Ladouleurseréveillequandj’yrepense.Ilarrêtesongesteaumomentoùils’apprêtaitàavalerune
nouvellebouchéeetreposelacuillèredanssacoupe.JepartagetrèspeudemavieavantmonarrivéeàNewYork,c’estpourquoiHaydenneconnaitpas
grand-chose.—À18ans,reprend-il,monpèrem’asurprisavecunmec.Ilm’avirédechezluietc’estladernière
foisquejeluiaiparlé.Ce qui explique pourquoi il ne parle que très peu de lui de son côté également. Je reprends une
cuillèrequejelaissefondredoucementdansmabouchepourmedonnerunpeudetemps.—Gregafrappémonpremierpetitamietafaillil’envoyeràl’hôpital.C’estcejour-làquej’aicomprisquepapaavaitobtenucequ’ilvoulaitdeGreg.Jamaisjen’aurais
penséqu’iliraitjusque-là,maisjemesuisrenduàl’évidence.Iln’apasfaitquemebrisermoi,ils’enestaussiprisàmonfrère.Haydenécarquillelesyeuxavantdepoufferderire.
—Ehbah…Ethanaintérêtàcourirvitealors.Je ferme les yeux en entendant son prénom. L’expression quand ilme regardait, je n’arrive pas à
l’oublier,jeledégoute.Etilestparti.Jel’aiperdu.—Qu’est-cequis’estpasséLiv?demandeHayden.Jerouvrelesyeuxetcelui-cimesouritfaiblement.—C’estcompliqué,jeluirépondscommeuniqueréponse.Mavieestcompliquéeetjenesaispascommentm’ensortir.Chaquejourquipasse,jem’enfonceun
peuplusdanslesprofondeurs,sanssavoirsiunjourj’arriveraisàsortirlatêtedel’eau.
*
Travailler aura eu le mérite de me changer les idées. J’ai l’impression que mes gestes sont
coordonnéestelunautomate,maisj’aiassurémonservicesanscasse.Jevaismesatisfairedecettepetitevictoire. En arrivant à ma voiture, celle-ci refuse de démarrer. J’ai beau insister, seul un cliquetisincessantsortducapotetjemelaisseretombersurmonsiège.C’estofficiel,cen’estvraimentpasmajournée.Jevaisdevoirrentrerenmétro,cequinem’enchanteguère,surtoutdanscettetenue.Ensortantdemavoiture,j’aperçoisCédricveniràmarencontre.
—Unproblème?m’interroge-t-il.—Montasdeferrailleneveutpasdémarrer.Ilpouffederireenfaisantunsigneverslecapot.—Tuveuxquej’yjetteunœil?—Situpensesqueçapeutservir…Ilouvrelecapotetsepenchel’airconcentré.JerepenseàEthan.S’ilmevoyait,ilmediraitsurement
qu’ilm’avaitprévenu.Çapourraitpresquemefaireriresimoncœurn’étaitpasenmiette.Cédricsouffleavantdeseredresser:
—Bon,jevaist’avouer.Jen’yconnaisabsolumentrien,maisjevoulaist’impressionner.Jedoisfairesemblantencorecombiendetempsavantquet’acceptesdevenirboireunverreavecmoi?
Sesmainsposéesàplatsurlavoiture,ilmeregardeensouriant.Jenepeuxm’empêcherderiredesatirade.
—Etsitutecontentaisdemeraccompagnerchezmoi?Ilsefrottelementonenréfléchissant:—Onpeutcommencerparça,eneffet.Allezviens,jesuisgaréparlà.Ilrefermelecapotetjelesuisjusqu'àsavoiture.Ilm’ouvrelaportière,etjeleremercieavantde
m’installer.Jeluiindiquelecheminàprendre,etoncommenceàrouler.Cédricestvraimentgentil,maismoncœurestdéjàpris.Leproblèmeestqu’ilestprisparunepersonnequinevoudraplus jamaismerevoir.Aumomentoùlavoituresegaredevantchezmoi,jenepeuxm’empêcherdesoufflerdedépit.
—Alors,onleprendceverre?JetournelatêteversCédricquin’apasl’aird’avoirabandonné.—ÉcouteCédric…—Allez, justeunverre.Çan’engageà rienLivie.Etpuis, si tuveuxmonavis, t’auraisbesoinde
sortir,c’estbeaucoupplussympaquandtusourisquedetevoirfairelatronche.Ilal’airdéterminé,maismoi,jen’aiqu’uneenviec’estderetrouvermonlit.Aprèstout,ilaraison,
unverre,çan’engageàrien.—Unverre.Ilagranditsonsourireenhochantlatête.—Super,ceweek-end?Jehochelatêteetsorsdelavoiture.Jeremonteàmonappartement.Jennyestdéjàcouchéeousortie,
carc’estplongédanslenoir.Pourtant,quandjeprendslecouloirendirectiondemachambre,jevoisdela lumièreenprovenancedecelle-ci.J’essaiedemerésonnerenmedisantquesi j’espèrequecesoitEthan,jerisqued’êtregrandementdéçu.J’avanceenessayantderesterlucideetpousselaporte.Quandmesyeuxseposentsur lesbougiesposéesausol traçantunchemin jusqu'àmafenêtre, jemedemanded’abordsi jenemesuispas trompéedechambre.Qu’est-cequec’estqueça?Mesyeuxremontent lecheminquejesuisetjem’arrêtedevantmafenêtre.J’arrachelePostitcollésurlavitreetlislesmots:
«Toi.Moi.Etlesétoiles»Jeposeunemainsurmabouchealorsquejeretiensdifficilementmeslarmes.Ilestrevenu.Personne
d’autre n’aurait pu me laisser ce mot. Les étoiles, notre havre de paix. Ses moments où tout ce quiexistait, était cette clairière et les étoiles qui nous surplombaient. Je pose le bout de papier sur ma
coiffeuseàcôtédemoietouvrelafenêtre.Jegrimpeàl’échelle,moncœurreprenantvieenpartiemêmesi jene l’aipasencorevu.Quandma têtepassesur lahauteurde toit, c’estunenouvelle surprisequim’attend.Desbougiesparsèmentletoit.Jeseraisincapablededirecombienilenamis,maisiln’apasdûs’amuser.Jepassemajambeau-dessuspourmeretrouversurlaterreferme.Ilestallongésurungrandtransatqu’ilainstalléaumilieudutoit.Jel’observe,sansfaireungeste,encoreindécisedel’attitudeàavoir.Ilfixelecielsansbouger,jen’aidoncaucuneidées’ilm’aentendu.Iltournealorslatêteversmoiet me tend la main. Je me décide et m’approche de lui en lui attrapant. Je suis prête à tout pourcomprendrecequiabienpusepasserpourqu’ilmerevienne.Ilm’aideàm’installerentresesjambesetjem’adosseàlui.Ildéposeunbaiserdansmoncouetjefermelesyeux,j’aitellementcrunejamaislerevoir.
—TucherchaisquoiquandturegardaislesétoilesLivie?Jelèvelesyeuxversleciel,etellessontlà.Toujoursaurendez-vous.Ellesnem’ontjamaislâché,à
chaque fois que j’ai eu besoin d’elles, elles répondaient présentes, illuminant la nuit de leur doucelumièreaufonddutunnelnoirdemonexistence.
—Lapaix.Etoublierquelquesinstants.Sesbrasseresserrentautourdemoi.Jenequittepasdesyeuxcecielmagnifiqueenmedisantqueles
regardersansEthanrendaitleschosesbienplustriste.—Moi,jen’avaispasbesoindeça.Parcequej’avaisdéjàtrouvémonétoile.Jetournelatêteversluietilmesourit.Samainseposesurmajoueetsesémeraudesreflétanttoutce
quej’aitoujourscherché.—Excuse-moiLivie.Jen’auraispasdûpartircommeça.Jebaisselesyeux.Jeneveuxpasluiavouerquej’aicruqu’ilnevoudraitplusjamaismerevoiretla
douleurquesonacteaentrainé.Ilm’attrapelementonetdéposeunbaisersurmeslèvresdoucement.—Jet’aimemapuce.Çanechangerarienàcequej’éprouvepourtoi.Necroispasqueçapuisse
changerquoiquecesoit.Bercé par ses paroles, je me blottis contre lui. Le silence nous entoure alors que je sens mes
paupièresdevenirlourdes,maisjen’aiaucuneenviedebouger.Jesuislàoùjedoisêtre.Oùjeveuxêtre.Danssesbras,etnullepartailleurs.
—Tum’enparlerasmapuce?Jesaisquec’estdifficile,mais tun’imaginespas toutcequim’estpasséparlatêtedepuisquejet’ailaissé.
Jerestesilencieuse.Luienparler?Çameparaitdifficile.Commentpourrais-jeluiavouertoutessesannéesdetortureenaffrontantsonregard?Ildéposeunbaisersurmonfrontenajoutant:
—Quandtuserasprête.J’attendraisletempsqu’ilfaudra.Ilattrapemonpoignetetdéposeunbaisersurlebraceletqu’ilm’aoffertavantdedire:—OnatoutelaviedevantnousLivie.Jenerepartiraispassanstoi.Jemefige.Toutmoncorpsesttenduquandilajoute:—J’aimebienNewYork.Jemeredresse.Est-cequ’ilvientvraimentdesuggérercequejecrois?Ilsouritdeplusbelle.— Je pourrais ouvrir unegalerie ici.T’imagines,moiEthanWilliams, exposer àNewYork.New
Yorkbordel!Quandjevoissonexpressionsiréjouie,j’éclatederire.Debonheur,d’amouretdesoulagement.
Chapitre31
Ethan
Enmeréveillantlelendemainmatin,jesuisseuldanscelit.Jemetournesurledosessayantdefaireletridansmespensées.Jeneferaispluslamêmeerreur,j’aidelachancequ’ellenem’estpasclaquéelaporteaunezenmetraitantdeconnard.Commentai-jepulalaissercommeçaquandj’aicompris?Maisles images ont défilé dans ma tête. Des images que je me suis empressé d’effacer. Ça faisait bienlongtemps que je n’avais pas bu autant,mais à cet instant, j’en avais grandement besoin.Ensuite, j’aidécuvé et j’ai réussi à réfléchir demanière cohérente. Ou dumoins comme j’ai pu. J’avais beaumetriturerl’espritsurcequis’étaitpassé,jamaisjen’auraisimaginéqu’ilaitpuluifaireunechosepareille.On n’en a pas encore parlé. Le sujet devra être abordé et je comprends d’un seul coup pourquoi sescauchemarslahantentdepuissilongtemps.Jemeredressedevantuneconstatationquejem’étaisencoreinterdite.Quand?Quanda-t-iloséposersesmainssurelle?Quelâgeavait-ellequandila…jepassemamainsurlevisageetmelève.Ilestencoretroptôtpourcegenrederéflexion.JeretrouveLiviedanslacuisine.Elleestdedos,penchéesurleplandetravail,m’offrantunemagnifiquevueplongeantesursesfesses.Calme-toi,Ethan,jenepeuxpasavoircegenredepensée,aprèscequ’elleavécu.Jevaisdevoirmemontrerplusquepatientavecelle,maiscen’estpasgrave,ellelemérite.Jem’installesuruntabouretetprofitedelavuequ’ellem’offreaumomentoùelleseretourne.Elleseredressed’uncoupetm’offreunsourirequejen’avaispasvudepuislongtemps.
—Biendormi?medemande-t-elle.Jeluitendslamainqu’elleprendens’approchantd’unpas.Jedéposeunbaisersurledosdecelle-ci
etréponds:—Toujoursavectoi.Ellesemetàrougiret jemedisquerienn’achangé.C’est toujoursmaLivie.Cellequej’arriveà
faire rougir d’un battement cil quand l’enviemeprend.Unbip nous interrompt, et elle se retourne ensortantdeuxtassesduplacard.
— Jenny vient de partir travailler, tu vas devoir me supporter aujourd’hui dit-elle en versant lecontenudelacafetièredanslestasses.
—Tunetravaillespasaujourd’hui?Elleseretourneenposantsurlebarlestassesets’installefaceàmoi.—Non,pas aujourd’hui.D’ailleurs…mavoiturem’aunpeu lâchéhier soir.Ça tedérangerait de
jeteruncoupd’œil?Jeluidiraibien«jetel’avaisbiendit»,maisvusafaçondeleverlesyeuxauciel,jedevinequ’elle
s’endouteunpeu.—OK.Çafaitunmomentquejen’aipasmislesmainssousuncapot,maisjedevraispouvoirm’en
sortir.Elleportesatasseàseslèvresenintensifiantsonregard.Jevoisqu’ellepenseàquelquechose,mais
jen’aiaucuneidéedecequ’elleaentête.—Tuasarrêtédetravailleraugarageilyalongtemps?Merde.Sujetdélicat.Jehausselesépaules.—Unboutdetemps.
Ellereposesatasseetcroiselesbrassurlebar.—T’asdûenfairedesheuressuppourt’acheterlagalerie.Dugenre…vraimentbeaucoup.Ok.Livieestloind’êtrebêteetlà,ellemebluffe.Jenem’attendaispasàdevoirluienparlerunjour.
Jepasseunemaindansmescheveuxencherchantdequoirépondre:—Ouais,onpeutdireça.Cen’est pas tout à fait unmensonge.Disonsque le petit garagedeCover-road avait des activités
annexesquim’ontétéproposéesenéchangedepetitboulotàexécuterunefoislanuitvenue.Forcerunevoiture, n’avait plus de secrets pourmoi, et le patron du garage, avait pour habitude de désosser lesvoiturespourvendrelespiècesdétachéescequim’apportaitunbonpetitpactole.Çanemeplaisaitpasplusqueça,maisçam’apermisdemettreassezd’argentdecôtépourquitterceboulotetm’offrirmonrêvedepuisqueLiviem’avaitoffertmonappareilphoto.Toutefois,vautmieuxéviterdeluidirequej’aicommencésespetitesmagouillesquelquesmoisavantqu’elleparte.Àl’origine,c’étaitpourpouvoirluioffriruncheznousdignedecenom.Lepetit appartementoù j’avais emménagéenpartantdechezmamèreétaitminusculeetjevoulaispouvoirluioffrirquelquechosedigned’elle.Jenevoulaispasqu’ellecroiequejeneseraispascapabledeluioffrirdebelleschosesmoiaussi.Ellebaisselesyeuxentapantsonindexsurlatable.
—Jesupposequ’onfaittousdeschosesdontonn’estpasfière.Jenelasuispastrop,maissielleenvisageunesecondequejeluienveuxencorepourlafaçondont
elleestpartie,jevaisdevoirlarassurer.J’attrapesamainetluidis:—C’estdupasséLivie.Onvaseconcentrersurleprésentàpartirdemaintenant,d’accord?Elle hoche la tête en retrouvant en partie son sourire.Quandmes yeux se posent sur lemédaillon
qu’elleporteautourducou,jenepeuxm’empêcherdesourire.Ellepasseundoigtdessusenmevoyantl’observer.
—J’aimebientevoirleporter,jeluidisavecunecertainefierté.Sonsourires’agranditetj’ajoute:—Bonalors,t’asuneidéedelafaçondem’yprendrepourqueGregnem’enterrepasvivant?Parce
quejesèchevraimentsurcecoup.Ellepouffederire.—Etsitumelaissaisgérerçatouteseule?Bonneidée.Pourquoin’ai-jepaseucetteidéeavant?
*Endescendantenbasdel’immeuble,jenevoispassavoiture.JemetourneversLiviequimedit:—Elleestencoresurleparkingdubar.—Ett’esrentrécomment?Nemeditespasqu’elleaprislemétrotouteseuleavecsonuniformedeserveusepitié!Elledétourne
leregardenavançantlelongdutrottoir.—J’aitrouvéquelqu’unpourmeraccompagner.Ellemejetteuncoupd’œilalorsquejenelaquittepasduregard.—Etparquelqu’untuveuxdire…Ellesouffleavantderépondre:—Cédric.J’enétaissûre.Lep’titconn’apaslâchél’affaireetilvafalloirquejeposeleschosesàplat.Elleest
àmoi,elleamonnomtatouésursapeau,c’estbienlapreuvenon?Cetatouageputain,quelleplusbellepreuved’amourpouvait-ellem’offrir?
—Jenel’aimepas.
J’aibienvuquep’titconlafaisaitrougirluiaussietc’estloindemeplaire.Ellesouritencoinavantdedire:
—C’estmignon.—Dequoi?—Tuesjaloux.Jeluirendssonsourireetm’arrêteavantdel’attraperparlataille.—IltedragueLivie,tulesaisetnemedispaslecontraire.Ellesemetsurlapointedespiedsetm’embrassefurtivementavantd’ajouter:—Moncœurestdéjàpris.BonOK,elleagagné,maiscen’estquepartieremise.Onarrivedevantunebouchedemétro,maisavantqu’ellenes’yengage,jel’arrête.—OniraplusviteentaxiLiv.Ellemeregardesansrépondre.Jel’entraineavecmoiethèleuntaxiavantd’ymonter.Jeluiindique
l’adressedubaretoncommenceàrouler.Jelavoisfouillerdanssonsacetposeunemainsurlasienne.—C’estbonLivie.Ellesecouelatêtesansarrêterdefouiller.—Non,horsdequestion.Çam’emmerdeauplushautpointqu’ellerefusecatégoriquementmonaideetjenesaispascomment
luifaireentendreraison.Déjà,ilesthorsdequestionqu’ellecontinueàroulerdansletombeauouvertquiluisertdevoiture.Letaxis’arrêteetjenelaissepasletempsàLiviederéagirenluitendantunbillet.Ellerâle,maisjem’enfou.Lesaffairesmarchentplusquebienàlagaleriealorsellevadevoirs’yfaire.
Jepasse20minutessursavoitureessayantd’êtreassezcrédibleavantderefermerlecapot.—Elleestmorte.Ellemefusilleduregardencroisantlesbras.—Etjesuiscensétecroire?—Tuasunemeilleureidée?Ellelèvelesyeuxaucielenrâlantetseretourne:—Tum’énerves!J’éclatede rireet la rejoinsenquelquesenjambées.Elleme jettequelquescoupsd’œil furtifet je
devineaupetitsourirequ’ellearborequ’ellenem’enporterapasrigueur.Ellefinitparsouffler:—TusaisEthan,c’estgentil,çametouche.Mais…depuisquejesuisarrivée,jemedébrouilletoute
seule.Jeneveuxpasquetupayestoutpourmoi.Jeveuxêtreindépendante.J’aibesoindemesentir…libre.
Elleévitemonregardenmedisantsesderniersmots.Çaal’aird’êtrequelquechosequilatouchebeaucoup. Je repense à toutes ses années oùGreg gérait sa vie d’un peu trop près, où elle devait sejustifier sur tout et n’importe quoi. Elle a beau aimer son frère, je crois que cette envie de liberté leconcerneaussibeaucoup.
— Je ne veux pas t’enlever ça Livie, mais je veux te savoir en sécurité. Écoute, je vais devoirm’acheterunevoiture,onaqu’àdirequejetelaprêterais.Çatelaisseraunpeudetempspourtemettredessousdecôtépourt’enracheterune.
J’évite de lui dire que ça fait bien longtemps que je neme déplace plus en voiture, pas la peinequ’ellelesache.Quandelleaccepte,jemefélicited’avoirréussiàlafairecraquer.
Chapitre32
Livie
4ansplustôt
Livie:16ans
Ethan:19ans
Greg:21ans
Àquelquesmètresdelaclairière, je l’aperçois.Ilestassisdansl’herbeetmesouritenmevoyantarriver. 2 semaines que je ne suis pas revenu.Que l’on ne s’est qu’à peine vu, et jamais seul à seul.Depuis la mort demaman, les choses sont devenues tellement compliquées. Je m’assis face à lui, etl’embrasseenattrapantsesmains.
—Désolédenepasêtrerevenuavant.Ilsecouelatête—Net’inquiètepas,jecomprends.Çavatoi?Ilposeunemainsurmajoueet j’essaiedesourirecommeje lepeux,malgré ladouleurquineme
quitteplus.—Jefaisaller.Ilsouffleetm’attrapepourm’asseoirsursesgenoux.—Jesuistellementdésolémapuce,situasbesoindequoiquecesoit,dislemoi.Ilesttellementadorable.—Toi.Pourl’instantj’aijustebesoindetoi.Il hoche la tête avant dem’embrasser. Jeme laisse aller à ses sensations.Depuis l’accident qui a
emportémaman,c’estcommesilesémotionsm’avaientétéôtées,maisdemeretrouvericidanssesbras,meredonneunmorceaudemoi-mêmequis’étaitperdu. Il interromptnotrebaiser,etenfonceunemaindanssapoche.
—Écoute, je ne sais pas si c’est le bonmoment,mais comme je ne suis pas sûre qu’il y en auraencoreun,jetenaisàtedonnerça.
Ilmetendunpetitcoffretquej’attrape.—C’estquoi?—Ouvre-le,tuverrasbien.J’ouvrelecoffret,etmoncœurseraccommodeenpartiemalgrémaperte.Jeleregardeensouriant.—C’estjoli.Ilmesouritetattrapelemédaillonqu’ilfaitpasserautourdemoncou.C’estuncœur,unmagnifique
cœur. J’ai peur de lui dire mes sentiments depuis tellement de temps.Mais je n’ose pas lui avouer.Pourtant ce cœur, j’espèrequ’il signifiequ’ilpartageceque je ressenspour lui. Il passeundoigt sur
celui-ci et le retourne pourmemontrer la gravure au dos. « Je t’aime » inscrit en une jolie écritureélégante.
—Jet’aimemapuce.Jet’aimetellement.Jevoulaisquetulesaches.Leslarmescoulentenentendantsesmots.Ilpassesespoucessurmesjouesensecouantlatête.—Nepleurepas.Cen’estpasgravesitoi…Neteforcepasàdirequoiquecesoit.Maisjevoulais
quetusachesàquelpointtuesimportantepourmoid’accord?—Espèced’imbécile.Ilécarquillelesyeux—Jet’aime.Jet’aimedepuispluslongtempsquetoi.Ilhausseunsourcilenrigolant.—Impossible.—Tuasl’airsûrdetoi.Ilhochelatête.—Jet’aimedepuisjejourdesbombesdeconfiture.Doncoui,j’ensuissûre.Jeleregardeabasourdiparsaconfidence.—Depuis…laconfiture?Commentest-cepossible?C’étaitilyasilongtemps…—Tuvois,c’estmoiquisuistombéamoureuxenpremier.Lapromessequejet’aifaitecejour-là,je
l’aitoujourstenunon?Etbienc’estcejour-làquej’airéalisé.J’airéaliséquejet’aimais.C’estvrai.Unepromesse.Unesimplepromessequiparaissaitsiinnocenteàl’époque.Ilm’apromis
qu’àpartirdece jour, ilneparticiperaitplusauxblaguesdeGregcontremoi.Et il a toujours tenusaparole.Jel’embrasseetlebasculepourlefairetomberdansl’herbe.Onéclatetouslesdeuxderireetons’arrêteenmêmetemps.Ilposeunemainsurmajoueenmeregardant.
—C’estbondeteréentendrerire.Jefermelesyeuxencomprenantsesparoles.Ildéposeunbaiserdansmoncouetmechuchote.—Ellememanque.Jemeredresseetvoisl’émotiondanssesyeuxbrillants.—Tun’étaispasjustelecopaindeGregpourelle,tusais.Ellet’adorait.Ilinspirebruyammentenfermantlesyeuxetjeleserrecontremoi.Cesoir,c’estàmontourd’êtrelà
pourlui.Aprèslesheuresqu’ilapasséesàmeconsoler,aujourd’huic’estàsontourdeselaisseralleretjemeprometsquejeseraistoujourslàpourlui.Quoiqu’ilarrive.
Chapitre33
Ethan
J’ouvre les yeux en sentantLivie remuer à côté demoi. Elle se redresse doucement et je ne peuxm’empêcherdesoupirer.Troisjoursquejem’endorschaquesoiràsescôtés,etpasuneseulefoisjemeréveilleavecelle.Sijepensaisquecen’étaitpeut-êtrepasvouluaudébut,làjecommenceàcomprendrequec’estparfaitementprémédité.Elles’assitauborddulit,prêteàselever,maisjeluiattrapelepoignetpourl’enempêcher.Ellesetourneversmoi,surprise,etjem’accoudesurlecôtésanslalâcher.
—Unefois,çapasse.Deuxfois…admettons.Maislà,ilvafalloirquetum’expliquesLivie.Ellebaisselesyeuxsansrépondrecomprenantqu’elleaétéprisesurlefaite.J’essaiedecomprendre
ce qui lui trotte dans la tête pour qu’elle s’enfuie de la sorte chaque matin. Je veux profiter de sesmoments. Me réveiller à ses côtés, une expérience qui me manque cruellement à cet instant. Je meredressepourm’asseoiretmerapproched’elleenposantunemainsursahanche.
—PourquoitufaisçaLivie?Elle relève les yeuxdoucement et je vois la peur se dessiner sur ses traits.Une idéede cequi la
tourmentecommenceàsedessiner,quandelledétournesoudain le regard.Jedéposeunbaisersursonépauleoùlesbranchesdelierremerappellentcombiennotrelienestprécieux,etquejedoistrouverlesbonsmotspourlarassurer.
—Jeneteforceraijamaisàrienmapuce,tulesais?Des images d’elle prise au piège sous son bourreau se dessinent dansmon esprit. Je ne veux rien
laisser paraitre alors que le veninde ceque tout celam’inspiremeplongedansuneprofonde colère.Contre lui.Contrecethommequiétaitcensé l’aimeret laprotéger, riend’autre.Commentai-jepumelaisserbernerdelasorte?J’yaibeaucouprepensé.Mêmesionn’enapasvraimentreparlé,deschosesmesontrevenues.Cettefaçonqu’avaitLiviedetoujourssecachersousdesvêtementstropamples.Sonattitude,gardanttoujoursunecertainedistanceavecluipournepasl’approcherdetropprès.Sesregardstristes qu’elle cachaient derrière des sourires trompeurs. Jamais je n’aurais pu imaginer une chosepareille.Ilsavaitmanipulersonmondemieuxquepersonne.Etjemesuisfaitprendresansmeposerdequestion.J’aibeaucouprepenséàSamanthaaussi,etmêmesisaperteaétédouloureuse,jemedisquecen’estpasplusmalqu’ellen’enaitriensu.Safamillecomptaiténormémentpourelle,ellenel’auraitpassupportée.
—J’aipeurden’enêtrejamaiscapableEthan.J’avais donc visé juste. Je la force à se retourner pourme faire face. Je veux voir ses yeux pour
m’assurer qu’elle comprenne bien ce que j’ai à lui dire. Je lui attrape lesmains les serrant dans lesmiennesetbaissemonvisageàsahauteurafindenepaséchapperàsonregard.
—TuterappellescequejetedisaisàceproposLivie?Commejevoisqu’ellenerépondpas,jecontinue:—Je tedisaisque j’attendrais tout le tempsqu’il faudrapourque tu te sentesprête. Je te répétais
qu’iln’étaitpasquestionquetuteforcesàquoiquecesoit.C’esttoujoursd’actualité.Quand je vois son sourire se dessiner timidement sur son visage, je suis soulagé d’avoir réussi à
apaisersescraintes.Ellerapprochesonvisagedumienetposeunemainsurmajoue.—Etàchaquefoisquetuledisais,jet’aimaisunpeuplus.
Monsoufflesecoupeenmerendantcompteàquelpointsesmotsdevaientêtreimportantpourelle.Mêmesijen’enavaispasconscienceaumomentoùjelesprononçais.Ellepassesamainsurmoncouetjedéposeunbaisersurseslèvres.Jetentedefreinermesenviesencemoment,etjedoisdirequec’estloind’êtrefacile.Maisjedoisluiprouverquejelamérite.Alorsquandjesensmonérectionseréveillerquand elle passe sa langue sur mes lèvres, je serre les dents essayant de camoufler avec le drapdiscrètementlespenséesquim’animent.Ellesereculeenbaissantlesyeuxsurledrapalorsquejetentedegarderunairnonchalant.Elleremontesonregardsurmoietdit:
—Ilyacertaineschosesquimesontencoreimpossibles,maisj’aimeraisquetuarrêtesdefaireça.—Fairequoi?Ellesemordlalèvreetjelesobservealorsquelessouvenirsdeseslèvressurmoimereviennentà
l’esprit.Putain,cen’estpascommeçaquejevaisréussiràmecalmer.—Tunemetouchesplus.Jerelèvelesyeuxquandellemesortdemespensées.—Jeneveuxpasfairequelquechosequitemettemalàl’aiseLivie.Unpetitsouriresedessinealorsqu’elleseredressesursesgenouxetsepencheàmonoreille,ses
mainssurmesépaulesm’offrantunevuesursesseins,toutàfaitdélicieuse.—JeveuxquetumetouchescommeavantEthan.Mesyeuxrivéssurledécolletédesondébardeur,jeréponds:—Etjepeuxcommencermaintenant?Elles’apprêteàreculer,maisjepasseunbrasautourdesataillepourl’empêcherdes’écarteravant
debaisserletissudesondébardeur.Quandj’emprisonnesonseinavecmabouche,ellegémit.Jepassemesmainssursescuissespourlaporteretl’asseoirsurmoiafindemepermettreunmeilleuranglesansinterrompre les bienfaits de ma langue qu’elle semble apprécier. Putain, il va me falloir une sacréemaitrisepourtenirlecoup.Jesuisabonnéauxdouchesfroidesetjepeuxvousdirequec’estloind’êtreunesituationvivable.Maisjenepeuxfaireautrement.Ellesecambresurmoipassantsesmainssurmanuque,sesdoigtss’emmêlantdanslesmèchesdemescheveuxqu’elletiredoucement.Ayez,j’aicomprispourquoiGregnesecoupepluslescheveux,iln’yapasmeilleuresensationquecelle-ci.Jedérivemesbaisers,remontantsursagorgealorsquemesmainsremontentsurl’extérieurdesescuissespassantsousletissudesonshort.Jelafaisbasculersurledosenlarecouvrantdemoncorpstoutenmerappelantquejedoismeconteniretnepasallertroploin.Putaincecorpsestunvéritableappelàlaluxure,etilvamerendrecomplètementmarteau.Sesmainsglissentdemesépaulesàmondoslaissantunetrainéedelaveenfusionsurmapeau.Monérectiondévientvraimentdouloureuse,alorsquejen’aiqu’uneenvie,c’estdeluiarracherceshortetdem’enfoncerenelleencoreetencore.L’abstinencecen’estvraimentpasmontruc.Mêmesij’aifaitdesacréseffortsdececôtéavecLivie.Maisendehorsd’elle,jedoisdirequejenesuisjamaisrestébienlongtempssansm’envoyerenl’airetlàjeressenslebesoinplusquejamais.Lesfrottementsdenoscorpsnefontrienpourarrangerleschosesquandjem’emparedesabouchelaissantma langue la pénétrer n’ayant d’autres choix envisageables. Je descends sur son épaule, ses seinsmerapprochantdesonventre.Arrivéà laceinturedesonshort, jem’arrête, lui jetantuncoupd’œilpourm’assurer qu’elle n’est pas contre cette idée,même si c’est une chose que l’on a déjà partagée. Ellehoche la tête comme une autorisation. C’est presque imperceptible,mais je neme laisse pas prier etdescendsd’ungeste short et culotte la recouvrant bien trop avantde ladébarrasserde sondébardeur.J’admiresoncorpsnudevantmoi,agenouilléentresesjambesenlaissantmesmainsglisserlelongdesesflancs.
—TuesmagnifiqueLivie.Ellerougitetmonsourireluioffre,jel’espère,laconfirmationdetoutel’admirationquejeluiporte.
J’essaie de calmer les tremblements que je ressens sous mes doigts quand j’écarte un peu plus sescuisses.J’aitoujoursprisçapourdelatimidité,etmêmes’ildevaityavoirunpeudeça,jecomprends
toutel’appréhensionquecelaimplique.Jedéposeunbaisersursonnombrilenlafixant,etmurmure:—Lesmeringues.Ellepouffederireenrepensantàlapremièrefoisoùmalanguel’afrôléedanssonintimité,cequia
étéuneexpérienceinoubliable.Jeremontesesgenoux,m’offrantunevuealléchanteeteffleureduboutdema langue sonbouton sensible en écartant ses lèvres.Elle se cambre en inspirant et jeplongeen elleincapabled’yrésisterpluslongtemps.Chacundemescoupsdelangueluifaitl’effettantrecherchéalorsqueseshalètementss’intensifient.Lavisiondesonvisageselaissantallerauplaisirquejeluiprodiguenefaitquem’exciterdavantage.Unemainsursahanche,jepressemalangueplusfortementetdescendsmon autre main sous le tissu de mon boxer afin d’assouvir ce besoin devenu insupportable. Mesmouvements sont rapides, sous son regardqui s’embrasent chaqueminuteunpeuplus.Quand tout soncorpssetend,jelasensrésister.Ellefaittoujoursça,commesiellesel’interdisait.J’accélèrelerythmeenremontantmamaindesahanchesurundesesseinsquejepinceavecunpeuplusdeforcequeprévu.Elleperdpiedsoudain,selaissantenfinaller,sonorgasmerésonnantdanstoutelapièce.Lavoirjouirdelasorteestd’unebeautéinégalée.Jemeredresseetmepenchesurellesansquesoncorpsetlemiennesoientencontact.Meslèvrescontrelessiennes,jesensleplaisirpointeralorsquejecontinueàm’offrirunplaisirsolitaire,oupresque.Elleposesamainsurlamiennem’accompagnantdansmesgestesavantdemedéversersurelle.Jel’observe,larespirationsaccadéeavantdeposermesyeuxsursonventreoùmasemences’estétaléesursapeau.Jenepeuxm’empêcherdesourireàcettevisionetellesemetàrireenmeregardant.
—Laisse-moideviner,tuesfierdetoi?Ilyaquelquechosequim’atoujourschoquéechezLivie.Ellepeutêtred’unetimiditémaladiveun
instantetàd’autresmomentsoùellesembleplusaffirméequejamais.Jecroisquec’estsafaçondeseprotéger,etjedevinequ’ellerenfermeuntempéramentdefeuqu’elleétouffeauplusprofondd’elle.
—Etpasqu’unpeu,jeluirépondsenpassantmamainsursonventrem’étalantunpeuplussursapeau.
*
—Jen’arriveraisjamaisàmegareraveccetruc!Je regardeLivie les yeux ronds commedes soucoupes fixantmon dernier achat, ou pour exact, sa
voiture.Enfin…officieusementbiensûr.—Tut’habituerasmapuce,aumoinslà-dedans,tunerisquesrien.J’ouvre la portière de cette petite merveille, enfin petite façon de parler. Je voulais la savoir en
sécurité et quand j’ai vu ceSUV, jeme suis dit que je nepourrais trouvermieux.D’ungrismétallisédiscret, jen’aipaspum’empêcherde rirede l’imaginerconduirecetenginen repensantà laboitedeconservequiluiservaitdevoiture.Jeprendsplaceauvolantluidonnantquelquesconseilsd’usagepourla familiariser avec son cadeau. Elle écoute attentivement, et je mets le moteur en route avant dem’engagerdanslacirculation.
—Pouraujourd’hui,jetedépose,maistuverrastuvasadorerlaconduire.Ellen’apasl’airconvaincue,maisdetoutefaçon,ellen’apaslechoix.J’aifaitremorquersavoiture
hierquiétaittoujourssurleparkingpourl’emmeneràlacasse.Jemegaresurleparkingdubaretelledescend,prêteàprendresonservicequand j’aperçoisp’titconlarattraperencourant.Mespoingsseserrentsurlevolantavantquejenemedécideàsortirdelavoiture.IlluiparleaumilieuduparkingetjepasseunemainautourdesépaulesdeLivieavantdeluitendrelamain.
—Salut,jecroisqu’onnes’estpasprésenté,moic’estEthan.P’titconmeregardeenperdantsonsourireavantdemeserrerlamain.—Cédric.
—Ouais,jesuisaucourant.Situpouvaiséviterdeposertesmainssurmafemme,çam’arrangerait.J’espèrequeçaluiferacomprendresansquejen’aiebesoindem’énerver.Il tourneleregardvers
Liviequiestdevenueaussirougequ’ilestpossibledel’être,avantqu’ellenefasseunsignedemainversmoi.
—Cédric,jeteprésentemon…petitami.Petitami.Çasonnefranchementbizarrecommemot.Moijenevoispasd’autresmotspourladécrire
quecommemafemme.JetournelatêteversLivieenattrapantsonmentonpourtournersonvisageversmoietl’embrasseavecavidité.Silà,ilnecomprendpaslemessage,jenesaispascequ’illuifaut.Ets’iloseencores’approcherdetropprès,ilvaviteleregretter.Quandnoslèvresseséparent,elleal’airfranchementembarrassée,cequialedondemefairerire.Jedéposeundernierbaisersursonnezavantdeluidire:
—Jevienstecherchertoutàl’heuremapuce.Soitsage.Jem’écarted’elleenjetantunderniercoupd’œilàp’titconensigned’avertissementetjerejoinsla
voiture.Quandjelesvoisreprendreleurroutejusqu’aubaravecunecertainedistancel’undel’autre,jejubile.
Chapitre34
Livie
Commenta-t-ilosém’embarrasserdelasorte?Cédricn’osemêmeplusmeparleretàchaquefoisque j’oseun regardvers lui, il détourne le regard.Çan’étaitpasune façonde faire, je lui avaisdéjàreparlédeceverreenluiexpliquantquej’étaisdéjàprise.Ethanmefait-ilsipeuconfiance?Commesij’étaisdugenreàallervoirailleurs.Cetteidéemefaireriretouteseulependantquej’essuieladernièretableaumomentdelafermeture.Enmeretournant,FredestengrandediscussionavecAndréaetCédricsembledéjàparti.Jel’aimaisbien,onauraitpuêtreami,maisavecl’hommedeCro-Magnonquipartagemavie,celasembletrèspeuprobable.Jemerapproched’Andréaquisetourneversmoiensouriant.
—Alors,pastropdur?jeluidemande.Andréaestencoreétudianteetvientdepasseràtempspleinpourlesvacancesquicommencentcette
semaine.Netravaillantqueleweek-endjusqu’ici,jedevinequelerythmedoitlachanger.Ellehochelatêteenjetantuncoupd’œilàFredquinousobserve.
—Çava,jedevraistenirlechocjusqu’àlarentrée,répond-elleavecunpeutropd’empressement.Jemepenchesurlebarenattrapantuneolivequej’avalesouslegrognementdeFred.—Ilyaintérêtquetutiennes,luirépondscedernierd’unairbougon.Melindavientdemelâcherje
vaisencoredevoirtrouverquelqu’unpourlaremplacer.Andréaseredressesursontabouretencroisantlesbrassurlebar.—Situcherchesquelqu’un,j’aiunecopine.Elleestétudianteaussietn’apasencoretrouvédejob
pourcetété.ElleadéjàserviauManderleyBar,tun’auraismêmepasàlaformer.QuandjevoislesyeuxdeFredpétiller,jedevinequ’elleatoutesonattention.Jesautillelesmains
poséessurlebarenajoutant:—LeManderley?Ilesttopj’ai…JemestoppenetenvoyantFredmefusillerduregard.Jelèvelesyeuxauciel.Commesijen’avais
pasledroitdesortirm’amuserdansd’autresendroitsquemonlieudetravail.—Bienévidemment,rienàvoiravecleBarockquiestlemustdumust.Ilsemetàricanerenseredressant.—Allez,rentrezchezvouslesfilles,jeferme.EtAndréa,disàtacopinedepasserrapidementsielle
estintéresséeparleboulot.Onprend toutes lesdeux le cheminde la sortie et quand j’aperçois le tankgaré sur leparkingme
faisantdesappelsdephare,jesoupire.Jamaisjeneseraiscapabledeconduireuntrucpareil.
*Lesvoixdusalonmeparviennentalorsquejefinisdedéposerlesdernièresperlesdesucressur
lespetitesoffrandesque je viensdepréparer. Jeposemesmains sur leshanches, fièredu résultat,avant d’attraper le plat et rejoins Ethan etGreg assis dans le canapé du salon. Je pose les petitsgâteauxsurlatablebasseavantd’ouvrirlesbras.
—Tadaaa!Ethan me sourit en se penchant sur la table avant d’attraper un gâteau dont il ne fait qu’une
bouchée.Jesoupireenleregardantessuyerunetracedesucresurlecoindesabouchedupoucealorsquededrôlesdepenséespeuplentmesrêvessesdernierstemps.Maisjesaisquejenedoispasavoircegenredepensée.Etpuisdepuisquejel’aivuaveccettefillesurlaplage,ilyaquelquessemaines,jemerappellesanscessequec’estpeineperdue.Ilportesonpouceàsaboucheenmefixant,éveillantune sensation inconnue dans mon ventre. Qu’est-ce qui m’arrive au juste ? Je regarde ailleursespérant de ne pas avoir l’air top troublée etm’assis dans le fauteuil à côté deGreg.Celui-ci estconcentrésursontéléphoneetlerangeavantdemeregarderd’unairdur.
—NecroispasqueçameferaoublierLivie.Jelaissematêteretombersurledossiercomprenantqu’iln’atoujourspaslâchél’affaire.—Dequoi?demandeEthanenreprenantungâteau.Gregsetourneverslui.—Elleestrentréebourréehiersoir.—J’étaispasbourrée.Bonpeut-êtreunpeu.Maisc’était lapremière foisque jegoûtaisunverred’alcool,comment je
pouvaissavoirqueçamonteraitaucerveauaussivite?Expérienceabsolumentgrandiose,soitditeenpassant.Jusqu'àcequejevomissedansmacorbeilledechambren’ayantpaseuletempsdemerendrejusqu'à la salledebain.Papam’aentendueetm’apasséun sacré savon. Il s’est empresséde toutraconteràGregquandcelui-ciestrentrédefaccematin,etj’aidûsupporterunenouvellesalvedemoraledelapartdemonfrère.Ethan,quimâchaitavectrèspeudeclasse,s’arrêtedanssongesteenmeregardantdurement.Jelèvelesyeuxaucielenluifaisantunpetitrappel.
—Moiaumoins,j’aivomidansmachambre.Ilpouffederireenavalantsabouchéesetapantletorseavantderépondre:—Ouais,maisbon,t’étaisencoreaveccettefille?Gregleregardeenplissantlesyeux,sij’avaiscrugarderJessàl’écart,jecroisqu’Ethanvientde
toutficheenl’air.—Quellefille?Ethanhausselesépaules.—Elletraineavecunefillequi,franchement,nem’inspirepastrop.—Jelaconnais?insisteGreg.—Allez-ysurtout,faitescommesijen’étaispaslà,j’ail’habitude,jerépliqueenmesentantd’un
seulcouptransparente.Gregsepencheversmoiencroisantsesmainssursesgenoux—C’estqui?Jememordslajoueespérantqu’illaisseratomber.Pourunefoisquej’arriveàgarderunecopine
plusd’unesemaine,jenevaispastoutgâcherpourqu’ilailleluifairepeur.Ilselèved’unbondetmepointedudoigt.
—NejouepasàçaLiv,c’estquicettefille?C’estavecellequetusorslanuit?Alorsc’estça?Tutebarrespourtebourrerlagueule?Bravo.Tutefaisdescopinesenor!
Jemelèvesentantlacolèremonter.Commentpeut-ilfairedetellessuppositionssansmêmesavoirdequiils’agit?
—Lâche-moi,c’estunecopine!Tuvasfairequoi?Luirejouertonnuméropourquejen’aieplusaucuneamie?Çat’amuseouquoi?J’enairasleboldemesentirenprisondanscettemaison!
—Ouibahsit’arrêtaisdefréquentern’importequi,peut-êtrequet’auraisplusd’amies!Ilestinjuste,lesgensmetrouventbizarreetmêmesij’essaiedenepasprêterattentionauxmesses
bassesquej’entendsdanslescouloirsdulycée,çanemefaitpasmoinsmalpourautant.—Jetedéteste,jeluidissanslequitterdesyeux.Jesaisquec’estlacolèrequim’anime,maisjesuistellementfatiguéedetoutça.J’aimeraisêtre
normal,avoirdesamies,sortir,peut-êtremêmeavoirunpetitami,maisdepuisqueGregafrappéMattlepremiergarçonquis’intéressaitunpeuàmoi,jen’aipasretentél’expérience.Ilécarquillelesyeuxetseretourned’ungestebrusqueenattrapantlatablebassequ’ilbasculerenversanttoutsoncontenusurlesol,avantdepartirprécipitamment.
—Parfait!VastefairevoirLivie,Ethanons’casse!Je baisse les yeux sur la table renversée,mes gâteaux éparpillés sur le sol. Jeme penche pour
ramasser le désastre, essayant de ravaler les larmes qui essaient de sortir. Quand je vois Ethans’agenouiller face àmoi pourm’aider, je lève les yeux, lui faisant comprendre que c’est lui qui aprovoquétoutça.
—Va-t’en.—Livieje…—Va-t’en,jeneveuxrienentendrevenantdetoi.C’esttafaute.Ilbaisselesyeuxuninstantavantdemurmurer:—Ellenem’inspirepascettefilleLivie,elle…— Tu ne la connais pas. Et si tu avais quelque chose à me dire, tu n’étais pas obligé de tout
balanceràGreg.Maisjenedoispasêtreassezbienpourtoivuquetuneviensjamaismevoirquandiln’estpaslà.
Jen’aipasréfléchiàcequejedisaisetsanslevouloirjeviensdeluiavouercequimetrottedanslatêtedepuisunmoment.DepuisqueGregestàlafac,ilnevientplusàlamaisonqueleweek-endetçameblesse.Jepensaisvraimentqu’onétaitamis,maisjenedoispascomptertantqueçapourluivuqu’ilneprendpas lapeinedevenirpendant l’absencedemon frère. Ilbaisseànouveau la têteaumomentoùlavoixdemonfrèreretentitdenouveau.
—Ethan,qu’est-cequetufou?Laisse-lasedémerder!Jecontinueàramasserlesgâteauxenlesposantdansleplatalorsqu’Ethann’apasprislapeine
de répondre àGreg en continuant à ramasser avecmoi.Quand il se relève, il redresse la table etcommenceàs’éloigner.Jepose leplat sur la table fatiguéde toutça,medemandant siun jour leschosesmeparaitrontplussimples.
—TutetrompesLivie.JerelèvelatêteenvoyantEthanmefixeravecinsistancesurleseuildelaporte.Ilajoute:—Tucomptesbeaucouppourmoi.Necroisjamaislecontraire.Ilseretourneetfranchitleseuildelaporte.Jeresserremesbrasautourdemesgenoux.Jeneveux
pasréfléchiràcequ’ilm’adit,jevaisencoremefairedesidéesetçaneferaqu’empirerlasituation.Jefinisparmeleverpourallerjeterlesgâteauxàlapoubelle.Çavalaitvraimentlapeinequejemedonnetantdemal.EtmoiquipensaisfaireplaisiràEthan,toutcetempsdeperdu.Quandj’entendslaporteclaquer,jemeprécipiteenmedisantqueGregachangéd’avisetquejedevraism’excuser,maiscen’estpaslui.Papaposesasacochedansl’entréeenmeregardant.Ilestenavanceaujourd’hui,ilnedevaitpasrentreravantdeuxbonnesheures.Jefaisdemi-touressayantdefeindrequetoutvabien.Jesaisque jen’aiaucunechancederessortiravecmonpetit fiascod’hiersoiretquand jesenssamainseresserrersurmonbras,jefermelesyeux.
—Onn’apasfininotreconversationdecematin,mechuchote-t-ilàl’oreille.
Chapitre35
Ethan
Desbruits étrangesme sortentdemon sommeil. J’ouvre lesyeuxetdécouvreLivie recroquevilléecommeunanimalblessé,sanglotantdanssonsommeil.Elletremblecommeunefeuilleetjemeredresseenposantunemainsursonépaule.
—Livie?Elleserecroquevilledeplusbelleet lessonsétouffésdesespleursmefontcomprendrequ’ildoit
s’agird’undescauchemarsdontGregm’aparlé.Jen’aipasencoreabordé lesujetavecelleespérantqu’elle finirait par m’en parler. Mais quand je la vois comme ça, je comprends que je vais devoirprendrelesdevants.Jenesaispasvraimentquoifairepourlaréveiller,maisquandellesemetàémettreuneplaintededouleurenpleurantdeplusbelle,jedécidequejenelalaisseraispasendurercettetortureuneminutedeplus.Jelaretournesurledosenprenantsonvisagetrempédeseslarmesentremesmains.
—Livie,cen’estqu’unrêve,réveille-toimapuce.Elle secoue la tête, toujours lespaupières closesen sedébattant contremoiquand soncri résonne
danslapièce.Jevaisdevoirréagiravecplusd’insistancepourlaréveiller.Jem’accroupisfaceàelleetluisecouelesépaulespourlasortirdecetenfer.
—LIVIE!LIVIERÉVEILLETOI!Elleouvresoudaindesyeuxdont la terreurne faitaucundoute. Je laisse retomberma tête, rassuré
d’avoirréussià laréveiller,alorsqu’elleregardeautourd’ellecommesiellesedemandaitoùellesetrouvait.Elleal’aircomplètementperdueetquandellemeregardedenouveau,jeposeunemainsursajouepourlarassurer.
—Toutvabienmapuce.Tuasfaituncauchemar.Ellefermelesyeuxquelquesinstantsavantdelesrouvrir.—Jesuisdésolé,dit-ellelesyeuxbaissés.Jemepenchesurelleetl’embrassedoucementenrépondant:—Tuveuxm’enparler?Elleseredresseetjem’écarteenlavoyants’asseoirsurleborddulit—Non.Detoutefaçonjenem’ensouviensjamais.Elleselèveetjen’enrevienspasqu’ellepuissemesortiruntrucpareil.—JenesuispasGreg!jeluilanceenlavoyants’approcherdelaporte.Elles’arrêteetseretourne,alorsj’ajoute:—Tut’ensouviensLivie.Jelesais.ToutcommejesaispourleDrHarris.C’estlemomentoujamaisdemettrelesujetsurletapis.Ellesemetàrire.Unriresansjoieempli
d’uneformedesarcasme.—Évidemment.Gregn’apaspus’enempêcherpasvrai?—Ils’inquiètepourtoi.Toutcommemoi.J’évite de lui dire que j’ai aussi abordé le sujet avec Jenny,mais qu’elle nem’a pas apporté de
réponse.Ellem’asimplementditquequandçaseproduisaitLiviemettaitunpetitmomentàreprendrevieetqu’ellerefusaitcatégoriquementd’enparler.Cesjours-làuneenviesoudained’allercourirlaprenaitetcelam’aimmédiatementfaitpenseraujouroùonestallécourirensemble.CequeJennym’aconfirmé.
Liviemefixesansbougerpendantunmomentetfinitparlâcher:—NetemêlepasdeçaEthan.Jesaisquejerisquedemeretrouverfaceàunmur,maisj’aicommel’impressionquecettefois,sije
neforcepasunpeuleschoses,elleneferaaucuneffortpourm’enparler.Jemelèvedulitetm’approched’elle.
—Alorsquoi?Jeteregardesansrienfaire?Depuisquandlesfais-tusescauchemarsLivie?Jesaisquetulesfaisdepuisquetuesgamine,cequej’ignore,c’estdepuisquandexactement.Situnefaisrien,ilsvonttehantertoutetavieetilesthorsdequestionquejerestelààteregardersansréagir.
Ellesecouelatêteenreculantd’unpas.—NemeforcepasEthan.Jenepeuxpas…Ellesortdelapièceetjelasuis.J’aperçoisJennyenprenantlecouloir,maisluifaisunsignedetête
pour lui faire comprendre que jem’en occupe. Elle n’a pas pumanquer le cri de Livie pendant soncauchemaretjecomprendssoudaincommentelleadûserendrecomptedel’ampleurdelasouffrancedeLivie.Jeretrouvecettedernièrefaisantdesaller-retourderrièrelecanapédusalon,sesbrasentourantsataillecommepourseraccrocheràquelquechose.Quandellem’aperçoitm’avançantverselle,ellelèveunemainentrenouspourm’arrêter.J’obtempère,mêmesi jenecomptepas laisser tomber.Elle laisseretombersamain,passantcelle-cidanssescheveux,lespaupièresserrées.
—5ans.J’avais5anslapremièrefoisqu’il…Elles’arrêteavantdereprendre:—Lescauchemarsontcommencépeuaprès.Savoixrésonneenboucledansmatête.DesimagesdeLivielapremièrefoisquejel’aiaperçudans
ce jardin alors que je n’étais venu que pour piquer de quoimangerme reviennent.Elle avait 6 ans àl’époque,cequiveutdirequececonnardavaitdéjàposé lamainsurelle.Dèsque je l’avaisvu,ellem’avaittouché.Quelquechoseenellem’avaitinterpellé.Ceregardqu’elleavait,sitristequijuraitaveclesourirequ’ellearborait.Pourtant,àl’instantoùelleacommencéàmeparler,j’aivuenelleuneforceetuneassurancequim’avaitbeaucoupeffrayé,mêmesijeneluiavoueraijamais.Siellenem’avaitpasforcé à rentrerdans lamaisonce jour-là enm’attrapantpar lamain, je serais sansdoute reparti.Ellerelève les yeux vers moi, cette assurance que j’ai vu ce jour-là dans les yeux mêlés a une certainesévérité.
—Tuescontent?Tuvasmelaissertranquillemaintenant?Jemerapprochedenouveauetattrapesamain.—Pourquoies-tuparti?Elleplisselesyeux—Tulesais.Jesecouelatêteenprécisant:—Pourquoicejour-là?Pourquoies-tupartilejouroùtut’esévaporédechezmoi?Jemesuisretournélecerveauunmilliondefoisàcesujet,ils’estforcémentpasséquelquechose.
Dès que j’ai eu le dos tourné, elle est partie de chez moi alors qu’on venait à peine d’arriver. J’aitoujoursmisçasurlecomptedeladisputequ’onvenaitd’avoir,maisaujourd’hui,jesuispersuadéqueçacacheautrechose.Ellearrachesamainde lamienneenmecontournant,mais je luiattrape lebraspourl’empêcherdes’enfuirunefoisdeplus.
—Dis-moicequis’estpasséLivie!Elledégagesonbrasenrépondant:—TuneveuxpassavoirEthan!Tuneveuxpassavoir!—SiLivie!Jeveuxsavoir!Carj’aimeraiscomprendrepourquoitunem’enasjamaisparlé!Etmerde.Jenecomptaispasluidireça.Maislefaitestquel’ons’estfréquentépendantunpeuplus
d’unansansqu’elleestimedememettreaucourant.Rienqued’imaginercequ’ellepouvaitsubiralors
quelanuittombée,onétaitensemble,estunechosedureàavaler.Ellen’apourtantpasl’airétonnéedecequejeviensdeluidire,tandisquejelascruteattendantuneréactiondesapart.
—Parcequemêmesij’avaispu,commence-t-elle,tut’enseraismêlé.—Parceque…tucroisqu’enlesachant,jet’auraislaisséaveccemonstrepeut-être?—Maisc’est ça leproblèmeEthan !Tuaurais forcément faituneconnerie !Tune le connaispas
Ethan!TucroisquelescolèresdeGreg,safaçondevouloirtoujourstoutcontrôlerdansmavienesontqu’un heureux hasard ? Il ne s’en est pas pris uniquement àmoi Ethan ! Il s’est servi de lui, il l’amanipulécommeilmemanipulait!Jenevoulaispasqu’ils’enprenneàtoi!
Lesbrasm’en tombent.Bien sûr j’ai toujours trouvéqueGregabusait à surprotéger sa sœurde lasorte,maisjamaisjen’auraispenséquetoutçaavaitunlienavecleurpère.Ellesouffleenbaissantlatêteavantdemurmurer:
—Jenevoulaispasqu’ils’enprenneàtoi.Jem’envoulaisdéjàassezpourGreg.Comprenanttoutlepoidsqu’elleportesursesépaulesdepuisbientroplongtemps,jelaprendsdans
mesbras.Elleselaissefaireetjelaserredansmesbrasafind’apaiserlatensionquecetteconversationafaitnaître.Jecomprendsàcetinstanttoutel’ampleurduproblème.Livie.ÇaatoujoursétéLivie.Cetordun’estpasqu’unvioleur,maisunvraipsychopathe.Sijecomprendsbien,nonseulementilluiafaitendurerunetorturesansnom,maisenplus,ilvoulaitavoiruntotalcontrôlesurelle.Cetteconstatationmeditqu’ilyaunecertaineobsessionderrièretoutçaetcelafaitnaîtreenmoiunecrainte.EtsiGregenrevenantàCover-roadluidévoilaitoùtrouverLivie?Combiendefoisl’ai-jesurprisàseplierenquatrepourattirer l’attentiondesonpèreafind’avoirunminimumdeconsidération?JesaisqueGregadoreLivie malgré ce qu’elle vient de me dire, mais il a les cartes en main pour enfin trouver lareconnaissance,qu’ilatoujourscherchée.
Chapitre36
Livie
La nuit a été dure.Mais contre toute attente, sortir certaines vérités m’a en partie soulagé. FairecomprendreàEthancombienleschosesnesontpasaussisimplesm’alibéré.Jenesuispasprêteàtoutluidévoiler,maisc’estdéjàbeaucoup.JesorsdelachambreencoreàmoitiéensommeilléeetvoisJennyassiseaubardelacuisine.Jem’apprêteàlarejoindre,quandjesensqu’onm’agrippelebraspourmeretourner.Ethanm’attrapesouslesjambesmehissantsursonépaulealorsquej’essaiedecomprendrecequisepasse.
—Ethan!Qu’est-cequetufabriques?Ilmelaissetombersurlelitavantdemerejoindreetmeserredanssesbras—Voilà,c’estmieux.Jepouffederireravidevoirquel’épisodedecettenuitnevapasêtreréabordédesibonmatin.—Tum’expliques?—Chut…Aurais-jeratéquelquechose?Jemelaisseraisbienalleràcemomentdecalme,maisl’heuredéfile
etcematin j’aiunrendez-vousquejeneveuxpasmanquer.J’avaisespérépartiravantqu’Ethanneseréveille,maisjecroisbienquec’estraté.
—IlfautquejemelèveEthan.—Tune travaillespas aujourd’hui. J’ai l’intentionde faire la grassemat avec toi et quand je dis
grassematjeveuxdireplustardque8heures.Tusais, ilyadesgensquidormentjusque10voire11heures,et jefaispartiedesespersonnes.Donctufermes lesyeux,et tu terendors.Aveclanuitqu’ons’esttapé,tuasencoredusommeilàrattraper.
Mêmes’iln’apastortetquejemerendormiraisbienjevaisdevoirinsister.—J’ai…untrucdeprévucematin.Iltournelatêteversmoi.—Untruc?ChercheLivie,chercheunebonneexcuse.—J’aipromisàHaydendepasserl’aideraujourd’hui.Ilsouffleenmeregardant,sesémeraudess’assombrissantlégèrement—Alorsqu’onsoitbienclaireLivie.Tescachoteriespassentencore,maisquandtumemensessaie
d’êtrecrédible.Onestdimancheettusaisaussibienquemoiquelerefugeestferméaujourd’hui.Biensûrjelesavais,maisjenepensaispasquelui,lesavait.Ilseredresseetsetournesurleflanc
enm’observant.—PlusdemensongesLivie.Dis-moilavérité.Je m’assis enm’adossant à la tête de lit. J’ai été tellement habitué à mentir et à trouver de faux
prétextesque j’aicomme l’impressionquec’estunedeuxièmenature.MaisEthanneméritepasça. Jebaisselesyeuxsurmesmainsenluiavouant.
—Detempsentemps…jevaisàungroupedeparole.Jennym’aforcéàm’yrendreavant…avantquejerencontreleDrHarris.Çamefaitdubien.Jemesens…moinsseule.
J’oseunregardverslui.Ilmeregardesanssourirenelaissantparaitreaucunindicedesespensées.Il
finitparhocherlatêteavantdedire:—D’accord.Tuveuxquejet’accompagne?Jesecouelatête—JepréfèreyallerseulEthan,s’ilteplait.L’idéemêmequ’ilpuisseentendrecequiseracontelà-bas…mondieu,non,cen’estpaspossible.Il
serallongeenencroisantlesbrasderrièresatête.—OK,jeteproposaisjustevuquetuaspeurdeconduirelavoiture,maissitutesensprêtelesclés
sontdansmaveste.C’estpasvrai.J’avaisoubliécedétail.Ilmejetteuncoupd’œilenpouffantderire.—Allez,jetedépose,nefaispascettetête,maisilvabienfalloirquetutelancesunjour.
*Jeme suis assuréqu’Ethan était bienparti avant depénétrer dans le bâtiment.C’est ungymnase à
l’originequel’associationlouepourcegenred’évènements.JemerappellelapremièrefoisqueJennym’y a emmené, je ne voulais pas venir,mais ellem’a dit que je n’étais pas obligé de parler, écoutersuffirait.Alorsj’aiécoutéetjesuissortipourvomiraprèsseulementquelquesminutes.J’aivomitoutesmes tripesce jour-là.Je luiaihurlédessusen luidisantque jeconnaissais toutça,que jen’avaispasbesoindel’entendre.Etpuisellem’afaitréaliserunechose.Jen’étaispaslaseule.Jen’étaispasuncasisolé,çaarrivaitmalheureusementetsoitjerestaismuréedansmonsilenceetilauraitunpouvoirsurmoitoute ma vie, malgré les kilomètres qui nous séparait maintenant, soit j’acceptais d’en parler. À deparfaitsinconnusquinemejugeraientjamaisparcequ’ilssavaientetcomprenaientcequej’avaisvécu.Alors je suis revenu.Encoreet encore. Jen’ai faitqu’écouter, encoreet encore. Jusqu’au jouroù j’aienfin pris la parole. J’ai pleuré ce jour-là. Et j’ai vidémon sac. J’ai raconté toutes ses nuits à fairesemblant de dormir,mes angoisses quand jeme retrouvai seul avec lui à lamaison. La honte que jesentaisdanschacunedescellulesdemoncorpscommeunpoison.Etpluslesmotssortaient,plusj’avaisl’impressionquemoncorpsselibérait.Moncorpsetmonesprit.Aujourd’hui,jeviensencoredetempsentemps.
Quand j’entre dans la salle, tout lemonde est déjà installé. Joeyme sourit quand j’approche et jem’assis sur un siège. Ilme tendune corbeille de croissants. J’en attrape un etm’adosse àmon siège.Aprèsunebrèveprésentationpourlesnouveaux,lesrécitsdéfilent.J’aimeêtreicimalgrécequim’yaamené, c’est une sensation agréable de se sentir comprise. Greg sait. Il dit qu’il s’en veut et je lecomprends,mais jamais ilnecomprendraàquelpoint toutçaaétéautodestructeurpourmoi.Après lamortdemaman,leschosessesontvraimentcompliquées.J’étaisbeaucoupplussouventseulavecpapaetGreg étant à la fac… il n’était plus aussi souvent là.Bien sûr il y avait toujours la clairière etEthanheureusement. S’il n’avait pas été-là, je ne sais pas comment j’aurais tenu le coup. Pourtant, jem’envoulais. Je savais que si papa apprenait pourEthan, il serait furieux.Le soir demondépart restera àjamaisgravédansmamémoirecommelejouroùj’airéaliséquejenesupporteraisplusuneminutedeplusdecettetorture.Alors,jesuisparti.Jeluiailaisséunmotendisantquejen’enpouvaisplus.Quejepartaisloin,trèsloindelui.Jel’aimenacé.S’ilessayaitdemeretrouverous’ils’enprenaitàceuxquej’aimais,jeraconteraistout.C’étaitfaux,j'enauraisétéincapable,maislamenaceaeusoneffet.
JesorsdemespenséesquandTianaprendlaparole.Çafaitplusieursmoisqu’ellevientetc’estlapremièrefoisqu’elleose.Elledoitavoirmonâgeàpeuprèsjediraisetsonrécitesttoutaussipoignant.Elleraconted’unepetitevoixfluettecommentlecercleinfernals’estrefermésurellealorsqu’undesesprofesseursdefacaprofitéd’elle.Seshommesmedégoutent,ilsprofitentdeleurpositionhiérarchiquepourprendrelecontrôlesurnous.Unpère,unprofesseur,parfoismêmeunmari.Maislepiredanstoutça,c’estqu’iln’yapasquedesfemmesautourdecettetable.Deuxhommessontprésentsetcenesont
pas lespremiersque jevois ici.Souvent, ilsontbeaucoupplusdemalàenparler, je supposeque lahonte est beaucoup plus forte pour eux. Joey se tourne versmoim’interrogeant du regard. J’hésite uninstantetfinisparmelever.Cen’estpaslapremièrefoisquejeparle,maiscen’estjamaisunmomentagréable.Joeyditquemonrécitpeutaidercertainespersonnesàoserseconfieretquepeutêtrequesanslesavoir,jeleurapportequelquechose.C’estpourçaquejecontinuedevenir.Imaginerquetoutcommemoi,desfillettespleurentlesoirens’endormant,lapeurauventred’entendrelegrincementdelaporteestunechosequimerévolte.Alorsj’espèrequ’envenantici,jepeuxaideràbriserlaloidusilence.Unsilencequejemesuismoi-mêmeimposé.Jefixelatabledevantmoi,incapabled’affronterlesregards.
—Ilm’appelaitprincesse.Ildisaitquej’étaissajolieprincesseetquesijel’aimaisaussifortquelui,jedevaisêtregentilleaveclui.
Jefermelesyeuxuninstantavantdelesrouvriretprendreunegrandeinspiration.— Quand mon frère passait la soirée chez un copain, quand maman était de garde et que je me
retrouvaisseulaveclui…cettemaisondevenaitmonenfer.Pause.Lesilenceemplitlapièceetonpourraitpresqueentendreunemouchevoler.—À16ans,mamèreaeuunaccidentdevoiture.Monfrèreétaitpartiàlafac.Jemesuisretrouvéà
vivreseulaveclui.Je lève les yeux vers Joey quim’encourage du regard et j’ose une question que je n’avais jamais
posée—Ilyaunmotpourdécrirequelquechosedepirequel’enfer?Ilm’offreundemi-sourirequejedevineforcé,etilrépond:—JenesaispasLivie.Jehochelatêteenrebaissantmesyeuxsurlatable.— À 17 ans, je me suis enfui. J’ai attendu qu’il s’endorme, j’ai pris quelques affaires que j’ai
enfouiesdansunsacetjesuissortiparmafenêtre.J’aicourujusqu'àl’arrêtdebusetjesuispartisansunregard en arrière. Je ne savais pas où j’allais, mais tout ce que je voulais c’était partir le plus loinpossibledelui.
JerelèvelesyeuxversJoey.Ilmefaitunhochementdetêteenmeposantunequestionqu’ilnem’ajamaisposéeluinonplus:
—Turegrettes?D’êtreparticommeça?Jemerassoissanslequitterdesyeuxetréponds:—Laseulechosequejeregrettec’estdenepasluiavoirplantéuncouteaudanslecœur.Oudanslescouilles.Parcequ’uncœur,visiblement,iln’enétaitpasdoté.
Chapitre37
Ethan
Gregaappelé.Ilyaeuunaccidentsurlechantieretseretrouveavecquatremecssurlecarreau.Ilvaenavoirpourunpeuplusdetempsqueprévu.J’aigardémesdernièresinterrogationspourmoimedisantquec’estdeGregqu’ils’agit,etquesijeneluifaispasconfianceetqu’ils’enrendcompte,çanevapasfaciliter les choses quand on va lui annoncer pourmoi et Livie. Et puis c’estGreg, c’est la dernièrepersonnequis’enprendraitàelle,jenepeuxdoncpasimaginerqu’ilpuissefaireunechosepareilleensachantcequ’elleatraversé.IlavoulusavoirsijeluiavaisreparléduDrHarris.Jeluiaisimplementditqu’onavaitsurvolélesujet,maisquej’ytravaillais.Ilm’aditd’accélérerlacadence,jevaislefaire,maischaquechoseensontemps.Livieapassél’après-midiaurefuged’Haydenetm’ademandédevenirlachercher, elle refusecatégoriquementdeconduirecettepetitemerveille,mais ilva falloirque je lapersuade,jenevaispasluiservirdechauffeurensachantquec’estsavoiture.Bon,ellenelesaitpas,maisquandmême.Pourmapart,j’aiprofitédesonabsencepourcommenceràvisiterquelqueslocauxenvue d’ouvrirma galerie. Je crois que j’ai trouvémon bonheur et j’ai hâte de commencer à aménagerl’espace qui sera parfait. Mais il va bien falloir que je repasse à Cover-road pour déménager mesaffairesetc’estunechosequinem’enchantepasplusqueça.JesaispertinemmentqueLivierefuseradem’accompagnercequin’estpasunemauvaisechose,mais jeneveuxpas la laisser seule. Jen’aipasencoreprismadécisionencequiconcernemagalerielà-bas.Jedevraislavendre,maisc’estunendroitplus que symbolique pour moi. Ma première galerie. On verra bien comment vont les choses et jeprendraisunedécisionlemomentvoulu.Entoutcas,ilyaunarrêtquejecomptebienfaire.Jeveuxvoirlevisagedececonnardetluifairecomprendreàmafaçoncequejepensedecequ’ilafaitendureràLivie.Ill’abrisé,cettefillequineferaitpasdemalàunemouche,ill’abriséetafaitd’ellecettefilleblesséequiserefermaitplusdejourenjourdevantmesyeuxsansquejen’encomprennelesraisons.Etmoi qui pensais que c’était dû à toute la pression que son frère lui imposait. Quand je l’ai entenduprendrelaparolehierdevanttoutessespersonnes…Ellenelesaitpas.Jesaisqu’ellem’envoudraitdel’avoirespionnédelasorte,maisj’avaisbesoindesavoir.Jel’aiécoutéetj’aicruvomirenentendantsesmotssortirdesabouche.Ellesemblaitsifragileetj’aidûmeretenirdenepasallerlavoirpourlaprendredansmesbras.C’estétrangecettesensationquej’aiavecelle,detoujoursavoircebesoindelatoucher,de lasentiretsurtoutde laprotéger.Maissi jesaisunechose,c’estque jeveuxfairemavieavecelle.Jecomptebienlarendreheureuseetessayerdeluifaireoubliersonpassé.
Jemegaredevantlamaisondurefugeetsorsdelavoiture.Enentrant,lecomptoirdel’accueilestvide.
—Livie?Hayden?J’aiunpeudemalavecHayden,ilpartageunecomplicitéavecLiviequinemeplaitqu’àmoitié.Si
Liviem’arépétéplusieursfoisqu’ilsn’étaientqu’amis, jenepeuxm’empêcherdecraindrequ’ilnelavoit pas uniquement de cette façon. Je les ai déjà surpris à se jeter des coups d’œil en coin en maprésencecommes’ilspartageaientuneblaguequ’euxseulspouvaientcomprendreetçacommenceàmetapersurlesnerfs.Jetraverselamaisonetm’engageàl’extérieurendirectionduhangar.Quandj’entre,jetrouveHaydenetLivie.Mespoingsseserrentenvoyantquecelui-ciaposéunemainsursonépauleluiparlantd’unpeutropprèsàmongoût.Ilaposésamainsurmonépaule.Cetteépauleoùestgravéeà
mêmesapeauqu’ellem’appartient.Àmoietàmoiseul.Jem’approched’euxetdécidequ’ilesttempsd’éclaircirlasituation.
—Hayden,dégage.Jeneprendspasdegants,jecompteluifairecomprendrequ’ilaintérêtàgardersesdistancesavec
elle.Ilseretourneetm’aperçoit.Ilsemetàrireens’adossantaumurderrièrelui,lesbrascroisés.—Ethan…Onparlaitjustementdetoi.Livieluidonneuncoupdecoudetoutenmefixantensouriant.Jereportemonattentionsurlui.—Ett’asbesoindelatoucherpourluiparler?Cettedernièrepouffederirecequinefaitquem’irriterunpeuplus—Etçatefaitriretoi?jeluilance.—Ohbaissed’untonhein,onestjusteami,réplique-t-elle,irritéeparmonattitude.—OuiEthan,tun’asaucunsouciàtefaire.Livieetmoicen’estpasprèsd’arriver,ajouteHayden.Livieetmoi.Jet’enfoutraisduLivieetmoi.— Oui bah en attendant, tu vas garder tes mains dans tes poches et on arrivera peut-être par
s’entendre.Illèvesesmainsenlesagitantdevantmoietrépond:—Pourtant,tun’imaginespaslesmiraclesqu’ellespeuventfaire.—Hayden!s’exclameLivie.Celui-cisetourneverselleenhaussantlesépaules—Quoi?Jen’aipasledroitdetoucher,jepeuxbienm’amuserunpeu!Et me voilà encore complètement largué. Livie se redresse d’un coup, m’attrape par le col pour
plaquersabouchecontrelamienned’unefaçonpossessive.Trèsbien,çameva,unepetitedémonstrations’impose.Jepassemesmainssursesjoliesfesses,laplaquantplusprèscontremoi,luimontrantparlamême occasion combien elle m’excite. Un gémissement s’échappe de sa bouche, ce qui ne fait quem’exciter un peu plus et j’approfondis ce baiser tandis que je la possède par la bouche.Mes lèvress’étirentenentendantHaydenrâlerpendantquemalangueluiindiquequ’elleestàmoietrienqu’àmoi.Je la veux.Entière. Son âme, son cœur, son corps, àmoi et àmoi seul. Quand enfin nos bouches seséparent,lesangluiaimontéauxjoues.Ellesouritdeplusbellealorsquejedéposeundernierbaisersurseslèvresavantqu’ellenedisetoutenm’observant:
—Tun’asaucunechanceHayden,ilestàmoi.Cettemarquedepossessivitéest loindemedéplaire,maisquand jecomprendssoudaincequ’elle
insinue,j’enperdsmonsourire.Haydensecouelatêteenriant.—Dubeaugâchissituveuxmonavis.TunesaispascequeturatesEthan.Salepetitecachotière.Elles’estbientenuedemedirequoiquecesoitsurceHayden.Ellenemanque
pasdesefoutredemagueule.Jedoisbienavouerqueçamerassure,aumoinsmaintenantjesuissûrequ’ilnepourrariensepasserentreeux.Onretourneà l’appartement,maisavantd’entrer, je laplaquecontrelemurducouloir.
—J’adorequandtumarquestonterritoiremapuce.Ellepouffederireetmepousseavantd’ouvrirlaporte.Jelarattrapeenvitesseetentendscrier:—Livie!Ungaminsejettedanssesbras.Elleleserrecontreluietluidit.—Killian!Jenesavaispasquetuvenaisnousvoir.Ilsereculeenrougissantethausselesépaules.—J’aidemandéàmamandevoirJenny,c’esttout.Elleluisouritencoreplusetlèveundoigt.—Tum’attendslàd’accord?J’aiunpetitquelquechosepourtoi.Elles’éloigneendirectiondelachambre.Jennyestassisesurlecanapéetnousregardeensouriant.
Legaminsetournealorsversmoietfroncelessourcils.—T’esquitoid’abord?Bon,lesgaminscen’estpasmontruc,etlàencoremoins.Ilnem’appréciepasondirait.—Ethan,ettoilemioche?Ilmelancedeséclairs.—Jesuispasunmioche!J’ai13ans!Je pouffe de rire. Jenny aussi à l’air de bien s’amuser en nous voyant. Elle répond à mes
interrogations:—Ethan,voiciKillian.Monpetitfrère.Killian,Ethanest…unamideLivie.Jehausseunsourcil.Unami?Ellem’envoieunregardinsistant.Jemesouvienscommentarougice
gaminavecLivie.Lecon.IlestdinguedemaLiv.Commentluienvouloir?13ans,c’estpile-poilàcetâgequej’aicomprisquej’étaistombéamoureuxdelaplusbellefillequecetteterreestportée.Lafilleenquestionrevientavecunpaquetbienemballéetluitend:
—Tun’espasvenumevoirpourtonanniversaire,maiscen’estpaspourautantquejet’aioublié!Il rougit deplusbelle enprenant lepetit paquetdans sesmains. Je rejoins Jenny sur le canapéen
regardantcepetitcrétinfairedespiedsetdesmainspourdéballersoncadeau.IlensortuniPodetsesyeuxbrillentd’excitation.Illaregardeavectellementd’émerveillementquej’aipresquepitiépourlui.Ellevaluibriserlecœur,lepauvre.
—MerciLivie.C’est…c’estsupergentil.Elle lui sourit en lui ébouriffant les cheveux. Il râle en lui disant que ça l’énerve qu’il est grand
maintenant.—Tuasraison,unvraipetithomme.Elleluisouritetjelevoisvireraurougeécarlate.Cettefilleestcruelle.Elles’agenouilleàcôtédela
tablebasseenluimontrantcommentfairefonctionnersoncadeau.Onpassel’heurequisuitàjoueràdesjeuxvidéoquimerappellentétrangementlesheurespassées
danslachambredeGreg.C’étaitundinguedejeudecombat.Moi,jem’enfoutaispasmal,j’étaistropoccupéàépierLiviequivenaitnousregarderjouerdetempsentemps.Elles’asseyaitdevantlecanapéàcôtédemoien repliant ses jambessouselle.Toujours.Ses jolies jambesque jemeforçaisdenepasregarder. Et c’était loin d’être facile, vous pouvez me croire. Mais avec Greg à côté de moi, çam’obligeaitàrestersageaumoins.Sanslui,jejurequejeluiauraissautédessusbienavant.Jennyfinitpar repartir avec lemiochepour le raccompagner. Je suismortetn’aiplusenviedemebougerdececanapé.Livierevientaprèss’êtreéloignéequelquesminutesetmetendunbolremplidefraises.Mmmmdesfraises.Cettefillea toujours trouvélemoyendemeparleretsansmêmeprononceruneparole.Jel’attrapeetellesecoueunebombeavantdedessinerunjolidômedechantillypar-dessus.Elles’installeàcôtédemoi,unautreboldanslesmainsenavalantunefraise.
—Tusaisquejet’aimetoi?jeluidis.Ellepouffederire.—Mêmesijenem’occupaipasunpeudetonestomacinsatiable?J’attrapeunefraiserecouvertedechantillyenlaportantàmabouche—Disonsqueçajouebeaucoup.Elle fixe la télévisiondevantnousoùunerediffusiondeFriendsdéfile.Liviea toujoursaimécette
sérieridicule.Moi,jenecomprendspastrop.C’estàmourird’ennui.Maislà,àcetinstant,uneimagesedessine dansmon esprit. Je posemon bol sur la table basse et attrape le sien qui le rejoint. Ellemeregardenecomprenantpascequejefais,quandjemepencheverselleenlaforçantàs’allongersurlecanapé.
Jel’embrasseetremontesontee-shirtavantd’attraperlabombequ’elleaposéesurlatable.—Jetroquelesmeringuespouraujourd’hui,contreuneLivieàlachantilly.
Chapitre38
Livie
3ansplustôt
Livie:17ans
Ethan:20ans
Greg:22ans
—DélicieuseJe le regarde, les cheveux ébouriffés, alors que sa langue remonte le long demon ventre versma
poitrine. Les pans de mon chemisier écartés, j’essaie de ne pas paraitre trop nerveuse de le voir sientreprenantcesoir.
—Jeneverraisplusjamaislesmeringuesdelamêmefaçonmapuce.Jepouffederireenlevoyantlécherlesdernièresmiettesqu’ilaétaléessurmoncorps.Manervosité
monteencored’uncran.J’aipeurparcequejevoisqu’ilveutallerplusloincesoir,plusquelessimplescaressesquel’ons’estautoriséesjusqu’ici.Ilremonteversmoietm’embrasseenmemordillantlalèvre.
—J’aienviedetoi,maissitun’espasprête,onpeutattendre.Est-cequetuenasenvie?Ilplongesesyeuxdans lesmiens,unemainsurmahanche, traçantdescerclessurmapeau. Jeme
détesteàcetinstant.Parcequej’aimeraisluidireoui.Biensûr,j’enaienvie,illuisuffitdemetoucherpourquetoutmoncorpss’éveille.Maisàchaquefoisquej’ypense,lanauséemonteetçameterrifie.Jepasseunemainsursajoue.
—JesuisdésoléEthan.Jet’aime,mais…Ilsouritetdéposeunbaisersurmeslèvres.—Cen’estpasgrave, je te l’aidit, je tedonnerais tout le tempsdont tuaurasbesoin. Iln’estpas
questionquetuteforcesàquoiquecesoit.Unan.Unanqu’ilmontreunepatiencesansbornealorsquejenesuismêmepassûredeluidonnerce
qu’ilattenddemoiunjour.Combiendetempsmettra-t-ilavantquesapatiencen’atteigneseslimites?—JesuistellementdésoléEthan,j’aimeraisvraiment…Ilm’embrassedenouveaumettantfinàmaphraseetdescendsesbaiserslelongdemoncou.Cesoir,
onatroquélaclairièrecontresonpetitappartementqu’ilaenfinprisseul.Jecroisqu’ilacomprisqueplus il s’entêtait à aider samère, plus elle s’enfonçait sans son addiction.Et ce canapé est bien plusconfortable que la clairière, il faut bien l’avouer. Il m’a fait comprendre que si j’en avais envie çapouvait vite devenir « chez nous ». Çam’a emballé au début, je ne le cache pas, mais si mon pèrel’apprend, ilnemelaisserapasfaire.Etmaplusgrandepeurestqu’ils’enprenneàEthan.J’aivucequ’il pouvait faire avecGreg, et je penseque j’ai déjà fait assezdemal auxgensque j’aimepour lerajouteràlaliste.Jemetrouvedéjàtellementégoïstedeluifairecourircerisque.Ilrelèvelatête,un
grandsourireauxlèvres.Jepassemamaindanssescheveuxenlesentortillantsousmesdoigts.Jel’aimetellement, je ne sais pas où tout ça va nousmener. Je n’en ai aucune idée,mais je profite de chaquemomentquimefaitoublierpendantuntempsmonquotidien.
—TumefaisconfianceLiv?Jepouffederire—Plusqu’àn’importequi.Ilhochelatête—Alors,fais-moiconfiance.Il baisse sa tête et descend ses baisers sur mon ventre et s’arrête à la ceinture de mon jean. Il
s’accroupitentremesjambesendéboutonnantlepremierbouton.Jeposemamainsurlessiennespourl’arrêter.
—Ethan…Ilneperdpassonsourireetattrapemamainenydéposantunbaiser—Net’inquiètepas.Onn’irapasjusqu’aubout.J’aijusteenviedetegoûter.Sentirtongoûtsurmes
lèvres.Jeteprometsquetuvasadorer.Jen’aiabsolumentaucuneidéedecequ’ilentendparlà,maisjesaisquejepeuxluifaireconfiance.
Dumoins jecrois. Il faitdescendremon jean le longdemes jambesenremontantdesbaiserssurmescuisses.C’estlapremièrefoisqu’ilm’embrasseàcetendroitetjedoisdirequec’estplutôtagréable.Jeresserrelescuissesunpeuembarrasséesqu’ilsetrouveàunendroitaussiintimedemonanatomie,maisilsouritensecouantlatête.
—Arrêted’avoirtoujourspeurLivie,tusaisquetupeuxmefaireconfiance.Il n’avraiment pas consciencede l’effort surhumainque celamedemandede le laisser agir de la
sorte.Jelaisseretombermatêtemedisantquejedoisfaireuneffort.Ethanestlaseuleetuniqueraisonquimefaitencoretenir.Sesmainsseposentsurmesgenouxécartantdenouveaumesjambesalorsquejefermelesyeuxenessayantdem’évaderpar l’esprit loind’ici.Jesuisvite interrompudansmarêveriequandjesensqu’ildéposeunbaisercontreletissudemaculotte,m’arrachantuncridesurprise.Oh.Jecroisquejecommenceàcomprendre.Desonpouce,ilmecaresseenobservantmesréactions.Ohmondieu.Cettesensationdansmonventre…Elleestbienplusintensequelesfrotti-frottaàlaquelleons’estarrêtéjusque-là.Ilal’airravidel’effetquecelamefait.Ilpasselesdoigtssurmaculotteetlabaissedoucement.
—Onneferariendeplus,d’accord?Laisse-moisimplementtegoûterLiv.Jehochelatête,sicequejeressensjusqu’iciestaussibienquequandilme«goûtera»jenecompte
pasl’arrêterensibonchemin.Jen’enrevienspasd’êtrelààlelaissermetoucherdelasorte.C’estunechosequejenepensaisjamaisêtrecapable.Ilnequittepasmonregardetquandsalanguefrôlemazonesensible,jemecambredesurprise.
Ilémetunpetitrireets’arrêteenm’observant.—Jet’avaisditquetuadorerais.Il replonge entre mes cuisses et active sa langue entre mes lèvres. Des sensations d’une ampleur
incroyablemontentenmoi.Des sensationsquime font toutoublier.Commentest-cepossible?Etquesuis-je en trainde faire ? Jenedevraispas le laisserme toucherde la sorte, jedevrais…Sesmainsagrippentmeshanches,plusfort,alorsquejelesensaspirermonclitorisentresesdents.Monventresemetàcrépiterpourmonterenpuissance.J’agrippesescheveuxsousmesdoigtsenluipriantdenesurtoutpass’arrêter. Jeneveuxpasqu’il s’arrête, jamais.Le feumeconsumeet jeplantemesonglessursesépaulesquandjesensl’explosionenmoi.Unrazdemaréeengloutissanttoutsursonpassage.
—Ethan!Moncorpsnem’obéitplus,pritdespasmesincontrôlables.Jereprendsmonsouffle,enrevenantpeuà
peusurterre,alorsquemoncorpsflotteencoreàmillelieuesdecesalon.Jeleregarde,ébahi,etilse
rallongesurmoienm’embrassant.—Tuesvraimentbellequandtujouis.Jeretiensmonsouffleetsensmonvisages’empourprer.Iléclatederireetm’embrassesurlenez.—Tropmignonne,vraimenttropmignonneIl s’allonge à côté de moi et je m’empresse de remettre mes vêtements et de reboutonner mon
chemisier.Jelesensm’observerderrièremoi,maisjefaiscommesijeneleremarquaipas.Quandjelerejoins, ilmeserrecontre luiet jeposema têtesursonépauleendessinantdescerclessurson torse.Ethanestvraimentbeauetjemedemandepourquoiils’embêteavecunefillecommemoiincapabledeluidonnercedontilaledroit.
—Ethan?—Mmm?—Etsijen'enétaisjamaiscapable?Tum’aimeraistoujours?Ilémetunpetitrireetm’embrassesurlatête.—Arrêtedeteposertropdequestions.Etpuisilyad’autreschosesqu’onpeutfaireavantd’aller
jusque-là.Alors,net’inquiètepas,çaviendra.Jet’aimeLiv,lesexecen’estpasleplusimportant.Tuesimportante.
Jefermelesyeuxabsorbantsesparoles.Jel’aimetellement,j’aimeraisêtrecapabledeluidonnerduplaisir comme il vient de le faire pour moi. Je descends ma main sur le duvet de son ventre avantd’atteindresonjean.Ilm’attrapelepoignetetm’arrête.
—Jenel’aipasfaitpourçaLivie.Jelèvelesyeuxverslui.—Etsij’enavaisenvie?Enfinpas...mais…Jemesenstellementnul!Ilpouffederire.—Tunevaspasdisparaitresitufinistaphrase,tusais.Jerougis,j’aivraimentdumalàenparleretçal’amuseàchaquefois.—Tun’esqu’unsalecrapaudEthan.Ilhausseunsourcil—Uncrapaud?—Pire…Çat’amusedememettremalàl’aise.Il hausse les épaules en se retenant de rire. Je récupèremamain et descends en déboutonnant les
premiersboutonsdesonjean.Ilinspirefortementaumomentoùmesdoigtsfrôlentlaproéminencedesonboxer.
Je me sens un peu idiote, je ne sais vraiment pas comment m’y prendre. Je le regarde et il doitcomprendre,carilattrapemamainladéposantsurlabosse.Ilfermelesyeuxetfaitdesaller-retoursursonmembre avant deme lâcher lamain. Je continuemongeste, prise d’unenouvelle assurance etmeconcentresursonvisage.Ilrespiredeplusenplusfortetjedécided’allerplusloinenpassantmamainsous le tissu.Quand je leprendsdansmamain, ilouvre lesyeuxetm’attrape lanuqueenplaquantunbaisersurmeslèvres.Jereprendsmesmouvementsdemamainenintensifiantnotrebaiser.Ilpasseunemain surmes fesses,me rapprochant de lui en se frottant contremoi alors quemamain accompagnetoujourssesmouvements.
—PutainLiv…J’accélèrelesmouvementsetildéposedesbaiserssurmoncouenrespirantdeplusenplusfortement.
J’aime l’effetque je lui fais.Çamedonnesoudainuncertainpouvoir sur luique jen’ai jamaiseu. Ilpasseunemainsousmonchemisierenprenantmonseindanssamainquandjesensunliquidesousmesdoigts.Ilselaisseretombercontremonépaule.
—PutaindemerdeLivie...Jepouffederire.
—Jet’aime.Ilrelèvelatêteetmeregarde.—Àencrever.Jamaisjenetelaisseraispartir,tulesais?Jeteretrouveraistoujours.Ouquetusois.
Parcequejenevoispasmaviesanstoi.
Chapitre39
Ethan
Jeposeladernièresignaturesurlecontratavecunecertaineexcitation.Trent,l’agentimmobilierquiaeulapatiencedemefairevisiterunnombredelocauxassezimpressionnant,hochelatêteenattrapantlecontratquejeluitends.
—Ravid’avoirtravailléavectoi.Tuverras,c’estvraimentbiensituéetjesuissûrequetuenserasplusquesatisfait.
Il n’a pas tort, situé au plein cœur de New York dans une rue piétonne au milieu des boutiquesmarchandes,l’endroitestparfait.J’imaginedéjàtrèsbiencommentjevaistransformercetendroitpourenfaireunesatisfactionpersonnelle.Jemeretournesurmoi-mêmesansquitterlesourirequinemequittepassesderniersjours.Pourtant,ilmeresteunedernièrechoseàfaire,etjemedemandeencorecommentvaréagirLiviequandjevais luiannoncer.Jesuisnerveux.Cequiarriveassezsouventquandils’agitd’elle,mais j’aicettesensationangoissanteencoretropprésente.Quejepourraismeréveillerunbeaumatinetqu’elleaitdisparu.Qu’ellepuissedisparaitredenouveauestuneangoissequinemequittepas.Maisjesaisquejen’aipasdecrainteàavoir.Elleneferaitplusça,pasvrai?J’essaiedemerassurerenlongeantletrottoirendirectiondel’appartementdeJenny.Sij’arrivaisaumoinsàfaireensortequ’elleaccepteenfindemeparler.Ilyaencorebeaucouptropdezonesd’ombredontj’ignorelecontenu,maisjenedésespèrepas.J’aiétérendreunevisiteauDrHarrishier.Jennym’adonnésonadresseetjemesuisditqu’ilpourraitpeut-êtrem’aider.Ilnem’apasapportégrand-chose.Lesecretprofessionnelselonluineluipermettaitpasdemedirequoiquecesoit,maisonaquandmêmeparlédufaitqu’elledevraitlerevoir.Jeluiaiditqu’ellefaisaittoujoursdescauchemars.Iln’apaseul’airétonné.Ilditquec’estlaraison pour laquelle elle a arrêté de le voir. Il voulait approfondir certains de ceux-ci,mais elle estcomplètement réfractaireàcette idée.Etpuisun jouroù ilaessuyéd’ensavoirplus,elles’est levéaclaqué la porte et n’ai plus revenu. Il a bien tenté de l’appeler, mais elle n’a jamais répondu auxnombreuxmessagesqu’illuialaissés.Jedoisdoncréaborderlesujetavecleplusdeprudencepossiblepouressayerde laconvaincreque lesilencequ’elles’imposene l’aiderapasàse libérer,etqu’ilesttemps qu’elle se détache de tout ça. Je rentre dans l’appartement et pose ma veste dans l’entrée enentendantdesvoix.JennyetLiviesontdéjàrentréesdeleurpetiteséancedeshoppingondirait.
—Tudisn’importequoi!affirmeLivied’untonsec.—Livie,ouvrelesyeux!Regarde!luirépondJenny.Jemerapprochedesvoixetlestrouvedanslasalledebain.Liviefixelelavaboensemordantun
onglependantqueJennylaregarded’unairamusé.Celle-cimevoitsurleseuildelaporteetajoute:—Demande-lui,tuverrasquej’airaison.Livielèvelatêteversmoi,l’airperplexe.—Qu’est-cequisepasse?jemedécideenfinàdemander.Lesdeuxfemmessejettentuncoupd’œil.TandisqueLivieserenfrogne.Jennyéclatederireenlui
tapantsurl’épaule.—Livierefused’admettrequetuasemménagéavecnous!JepouffederirealorsqueLivieestdevenuebeaucoupplusblanchequ’àsonhabitude.Ellen’adéjà
pasbeaucoupdecouleursavecsapeaucrémeusequej’aimebeaucoup,maislechangementdesonteint
nem’échappepas.JecomprendssoudaincequeregardaitLivie.Mesaffairesrangéesautourdulavaboàcôtédessiennes.Jeneprendspasbeaucoupdeplace,maisjedoisbienavouerquej’aiprismesaisessesderniersjours.
—Etçateposeunproblème?jedemandeàJenny.Celle-ciposesesmainssurseshanchesensouriantencoin.—Aucun,mais jeveuxqueLivie l’admette.Et ilvafalloirqu’ons’organisepour lasalledebain.
Vousm’avezmiseàlabourrehier.LadiscussionquejetenaisàavoiravecLivievasefaireplustôtqueprévuondiraitbien.J’essaiede
nepasrepenseràlaraisonpourlaquellenousavonsmisJennyenretardlaveille,alorsquejeretenteraistrèsvolontierscetteexpérience.Ellesemontred’ailleursdeplusenplusentreprenante,cequiestloindemedéplaire.Jecroisqu’elleaenfincomprisquejenelaforceraijamaisàfranchirdeslimitesdontellen’est pas capable, ce qui me fait dire qu’elle m’offre enfin une certaine confiance qui va surementm’aiderdansmonprojetavecleDrHarris.Maischaquechoseensontemps.Sijebrulelesétapestropvite, jerisquedetoutgâcher.Liviea toujoursétémonfruitdéfenduetenlesachant, jedoism’assurerqu’ellesoitassezmurepourfranchircertaineslimites.Livieasoudainreprisdescouleursàl’annoncedeJennycequim’indiquequesespenséesontprislesmêmestournuresquelesmiennes.Jennyafficheunegrimacequimefaitrireensortantdelapièce.
—J’auraispréférénepassavoir!Livielaregardes’éloigner,etjem’avancedanslapièceenluiprenantlamain.—C’estunproblèmeLivie?Jesaisqu’onaétéunpeuvite,mais…jenepeuxpasm’imaginerpasser
unenuitloindetoi.Quandjevoisunpetitsouriresedessiner,jesaisquej’aitrouvélesmotsjustes.—Moinonplus,répond-elledoucement.Jepasseunemainsursajoueetl’embrassecommesijenel’avaispasvuedepuisdesjoursalorsque
çane faitquequelquesheures.Quandnos lèvresseséparent, jedécidequ’ilest tempsdeprendre leschosesenmain.
—Onvafaireuntour?
*J’enfonce la clé dans la serrure et laisse entrer Livie dansma future galerie. Je referme la porte
derrièremoietlaregardeposersesyeuxsurl’espacevideautourdenous.—Alors,qu’est-cequetuenpenses?Elleseretourneversmoiensouriantethochelatête.—C’estsympa.J’aiunpeudemalàimaginercequeçadonnera,maisjesuissûrequetuvasfaire
desmerveilles.Siellesavaitcombienj’aihâtedeluimontrermontravail.Jenepeuxpasimaginercequ’auraisété
maviesijen’avaispascroisésaroute,etjesuisconscientqueriendetoutçan’auraitétépossiblesanselle.
—Çaaurabesoind’unboncoupdepeinture,maissinon,j’aidéjàquelquesidéesdelafaçondontjevaisorganiserl’espace.
Elleritenmevoyantdéjàsipressédetoutorganiser,maissonsourires’effacetoutd’uncoup.Monportablesemetàsonneretjerejettedenouveaul’appelavantdelerangerdansmapoche.Ellefroncelessourcilsenm’observantalorsquejetentedenepasluiparlerdel’interlocuteurquicommenceàdevenirdeplusenplusinsistantsesderniersjours.Maisjepréféreraiévitercesujetépineux.
—C’est laquatrième fois cette semaine,dit-elle sansmequitterdes yeux.Et à chaque fois tunedécrochespas…C’estqui?
Jepasseunemaindansmescheveux.Jesupposequejenepeuxplusrepousserl’échéance.—MonassistantedeCover-road.Elledoitcommenceràtrouverletempslong,mais…jeneluiai
pasencoreannoncéquejecomptaisemménageràNewYork.Ellehochelatêteavantd’ajouter:—Etpourquoituneluirépondspas?Jememordslajoue,jesuisloind’êtreàl’aise.—Disons…que je n’ai pas encore pris de décision pourma galerie là-bas et que je voulaisme
donnerencoreunpeudetemps.Ellecroiselesbrasenseretournantdanslapièce,arpentantlesmurspendantquelquesminutesavant
dedire:—Tavieestlà-basEthan.Jelesaisetjeneveuxpasquetuquittestoutpourmoi.Quandelleseretourneversmoi,jetentedelarassurer— Il n’est pas question que j’y retourneLivie. Pas sans toi.Ma vie est là où tu seras. Jeme fou
complètementoùçasera,tantquec’estavectoi.Ellesecouelatêteenbaissantlesyeux—Etsituleregrettais?Sidans6moistuterendaiscomptequetuavaisététropviteetquetuavais
faituneerreur?Jemerapprochedequelquespasetprendssonvisageentremesmains—Laseuleerreurquejeregrettec’estdenepast’avoirrattrapécesoir-làLivie.Quandtunem’as
pasrépondu,j’aicruquejepourraism’excuserunpeuplustardpournotredispute.C’estleseulregretquej’ai.
Lafaçondonttoutabasculécesoir-là…Jen’oublieraisjamaislecoupdefildeGreglelendemainme faisantme rendre compte que le cours des évènementsm’avait complètement échappé. En voyantl’expressiondesonvisagechangéenuneprofondetristesse,jemedécideàchangerdesujet.
—J’aiencoreunedernièrechoseàtemontrer.Jeluiattrapelamainetonressortdelagalerie.Onremontequelquesmètresetpasselaported’un
grandHallsousleregardperplexedeLivie.Quandj’appuiesurleboutondel’ascenseur,elledemande:—Oùonva?Jetentedecachermonsourireenhaussantlesépaules—Tuverras.Quandonpénètredansl’appartementquej’aiacquisilyaquelquesjours,j’essaiededevinerceque
celaluiinspire.Elledoitdéjàavoircomprisoùjeveuxenvenir,maisjeguettechacundesesgestesquimedonneraientunindicedutournantdesespensées.Etc’estloind’êtrefacile,alorsqu’elleneprononcepasunmot.Elles’immobiliseaumilieudusalonvideenfixantlagrandebaievitréequifaittoutlepandemur. C’est ce quim’a fait craquer quand je suis entré dans cette pièce. Jeme suis toute de suiteimaginéàobserverlesétoilesàsescôtésàtraverscettevitre.Elleseretournesansmelaisseraucunechancedeladéchiffreretj’enfoncelesmainsdansmespochesenmedemandantsijen’aipasvouluallerencoretropviteavecelle.
—C’estquoicetendroitEthan?Jemeforceàgarderunebonnedistancequandjerépondsleplushonnêtementpossible:—Notreappartement.QuandtuserasprêteàquitterJenny.J’ai bien conscience qu’elle est très proche d’elle et que cette fille aux taches de rousseur aussi
coloréesque la tignassede feuqu’ellearbore, faitbeaucoupdebienàLivie.Mais j’aimeraispouvoirpartagerunendroitànous,rienqu’ànous,etcetappartementseraparfait.Maintenant,ilvajustefalloirqu’ellesoitenaccordaveccetteidée.Ellesouffleenregardantautourd’elleavantdereposerlesyeuxsurmoi.
—Rienquecettepiècefaitlatailledel’appartementdeJennyEthan,jen’aipaslesmoyens.
Bonpremierbonpoint,ellen’estpascomplètementcontre.C’estdéjàça.—Çan’estpasvraimentunproblèmevuquejel’aidéjàacheté,jerépondsdeplusenplusnerveux.Sesépauless’affaissentetsonregardsedurcit.—Ethan!Je lève les mains en m’avançant vers elle. Je veux qu’elle comprenne que l’argent n’est pas un
problèmepourmoietquejecomptebienluienfaireprofiter.—Livie,jegagnebienmavie.Etjeveuxtefaireplaisir.Laisse-moifaireça.—Jen’aipasbesoindetoutça.—Moisi.J’aibesoindeplace.Jeneluidispasquejenesupportepaslespetitsespaces.Qued’avoirététropsouventreclusdans
desplacardstoutemonenfancealaissédestracesquejemeforced’oublier.Jeposemesmainsencoupesursonvisageendemandant:
—Dis-moisimplementsituaimes.Quandellehochelatêteensouriant,lesoulagementdétendenfintouslesmusclesdemoncorps.La
tensions’évaporeetjeluiprendslamainenl’emmenantavecmoi.—Encoreunedernièrechose.—Jedoisavoirpeur?Jerisenrefermantlaportedel’appartement.—Non,etçavateplaire,aucundoutelà-dessus.Elle plisse les yeux enme regardant tout en remontant le couloir vers l’ascenseur. Elle ne pourra
jamaisdevinerlasurprisequil’attend,maisdelavoiressayeraledondemefairerire.Onentredansl’ascenseuretj’appuiesurleboutondudernierétage.Quandledingrésonne,ellemesuitdeprèsetjelavoisécarquillerlesyeuxquandellevoitlapiscinenousfaisantface.Jepassemesbrasautourdesatailleendéposantunbaisersursanuque.
—Onpeutréserverenplus.Tupourrasmêmetebaignertoutenue.J’aihâtedevoirça.Ellemedonneuncoupdecoudemefaisantreculerenriant,maiscen’estpasencorecequejesuis
venu luimontrer. Je l’entraine vers la droite où une grande rangée de transats ont été alignés. Je luidésignel’und’euxd’ungestedemain.
—Assistoi.—Tucroisquec’estlemoment?Jeposemesmainssursesépaulesenlaforçantàs’asseoir.—J’aidit.Assistoi.Elleobtempèreetallongeses jambespendantquejem’installeàcôtéd’elle.Ellemeregardeavec
amusementetjepasseunbrasautourdesesépaulesenposantmonindexsoussonmenton.—Lèvelesyeuxmapuce.Ellelèvesonregardversleplafondenverrenoussurplombant.Quandjevoislesétoilessedessiner
sursesprunelles,moncœursegonfleàlapenséequim’atoutdesuiteenvahiquandj’aiposémoi-mêmelesyeuxdessus.Jeposeunbaiseraucreuxdesonoreilleenmurmurant:
—Toi.Moi.Etlesétoiles.
Chapitre40
Livie
J’ailetournisaprèscettejournéepleined’émotion,maisjedoisbienavouerquec’estl’excitationquiprédomine.MoietEthandansnotrepropreappartement.Monsourirenem’apasquittédepuisqu’onestrentré,mêmesi le faitqu’il est faitun tel achat sansm’enparleravant,m’aunpeueffrayé. Ilm’aditqu’onprendraitnotretemps,jecroisqu’ilacomprisqueJennyjoueungrandrôledansmavie,maisilvabienfalloirquejemelanceunjour.Sespetitesmaniesvontsurementmemanquer,maispassesattitudesde petitemaman qui nemanque jamais deme faire rire.Ou peut-être un peu quandmême. Je profitequ’Ethannousaiabandonnépourprendreunedouche,etm’installesurlecanapéàcôtédemafutureex-colocataire.Elleportesonverredevinàlabouche,sourireencoin.
—C’estGregquivaêtrecontentdisdonc.Unsoupirm’échappe.OnenareparléavecEthanetavonsprislasagedécisiondeneplusattendre.—Onvaluidire.Dèsqu’ilreviendra.Ellehochelatêteetreposesonverresurlatableavantdesetournerversmoi.—Alors,tuvasm’abandonner?Jepouffederire.—C’estàcinqminutesàpiedJenny.Jeviendrais tellementsouventquetuneterendrasmêmepas
comptequej’aidéménagé.Elleposesonbrassurledossierducanapéenrépondant:—Ilyaintérêt.Maistuvasmemanquerquandmême.Magorgese serre. Jeme rendscompteàcet instantcombien j’adorecette fillequia fait irruption
dansma vie comme un cheveu sur la soupe. Je ne regretterai jamais d’avoir croisé sa route dans unmomentaussidursoit-il.Jejetteuncoupd’œilendirectionducouloirpourm’assurerqu’Ethanesttropoccupépournousentendre,maislesondel’eaurésonneassezpourquenosvoixsoientcouvertesalorsjedécidedemelancer.
—Jenny…Jenesaispasavecquienparleralors…jepeuxteparlerdequelquechose?Elle hoche la tête. Je prendsmon courage à demain et ose énoncerma plus grande crainte à voix
haute.—J’aipeurde…denejamaisêtrecapablede…deluifairel’amour.Jemesenscomplètementnul,maistantpis.Biensûronapartagédesmomentsplusqu’agréableset
Ethannecessedemerépéterqu’iln’irapasplusvitequejem’ensenscapable,maisserais-jeunjourapte à lui donner ce qu’il attenddemoi ? Ilméritemieuxque ça. Jennypenche la tête sur le côté enplissantlesyeux.
—Tuveuxdirequevousdeux….Jeluifaisnondelatête.Ellesembled’abordsurpriseetsemetàéclaterderire.Jeluidonneunetape
surl’épaule,stresséàl’idéequ’Ethanpuisseentendrenotreconversation.Jemerenfoncedansmonsiègecomprenantquejen’obtiendraispasd’aidedesapart.
—C’estbon,oublieça.Sonrires’estompeunpeutroplentementàmongoûtetjelavoisessuyerseslarmesaucoindeses
yeux.
—Excuse-moiLivie,maislesmurssontfinstusaisalorsjem’étaisdit…Jem’enfonce encore plus dansmon fauteuil. L’idéemême que Jenny est pu nous entendrememet
soudainencoreplusmalàl’aisequecen’étaitdéjàlecas.Jevaispeut-êtremedéciderunpeuplusviteque prévu à emménager avec Ethan tout compte fait. Quand je me rends compte qu’elle est devenuesoudaintrèssilencieuse,j’oseunregardverselle.Elleaperdusonsourireetfixel’écrandetélévisiondevantnousd’uneexpressionquejen’aijamaisvuesursonvisage.Celam’interpelled’uncoupetjemeredresse.
—Jenny?Elle ne quitte pas l’écran et ferme les yeux. Ses poings se serrent sur ses genoux et j’essaie de
comprendrecequisepasse.—J’aimiscinqansàaccepterl’idéequ’unhommemetouchedenouveau,dit-elleenrouvrantles
yeux.Lecoupauventrequejeressensquandjecomprendscequecelasignifieestindescriptible.Unretour
en arrière de trois ans sematérialise devantmes yeux alors que tout prend enfin un sens.Elle savait.Avantmêmequejeneluiavouecequej’avaisvécu,elleavaitcompris.Et jemesuissouventposélaquestion.Comment?Commentavait-elleputdeviner?Elletournelatêteversmoi,alorsqu’aucunmotnesemblevouloirsortirdemabouchesouslechocdecettedéclaration.
—J’avais15ans,jerevenaisd’unebaladeavecdescopines.J’aivouluprendreunraccourciparcequej’étaisenretardetquej’allaismefaireengueulerparmamère.J’évitaistoujourscetterue,elleétaitsombreetmedonnaientdessueursfroides.
Jerestesilencieuse.Jesuisparfaitementbienplacépoursavoirquequandonselancedanscegenredediscours,lapatienceestdemiseetqu’onabesoindeprendretoutnotretempspourtrouverlesmotsadéquats.
—Ilasurgidevantmoietm’amenacéavecuncouteau.J’aicommencéàcrieralorsilm’afrappéetacommencéàenfoncerlalamesousmagorge.Iladitquesijenedisaisrienilmelaisseraitpartir.
L’idée même que Jenny, cette femme sûre d’elle et toujours souriante ai dû affronter ce genre dechosesestcommeunsautdanslevide.Jamaisjen’auraispuimaginerunechosepareille.
—Ilm’avioléetm’alaisséeàmoitiéconscientesurleborddutrottoir.Jenemerappellemêmepascommentj’aifaitpourrentrerchezmoi.
Ellesetournecomplètementversmoi,sonregardd’unetristessedouloureuse.—Jesuisdésolé,jemurmurenesachantcequel’onestcensédiredansunmomentpareil.Ellefaitungestedelamainensecouantlatête.Commesitoutçan’étaitrien.— Tu as vu ma mère ? Elle est très croyante alors quand je me suis rendu compte que j’étais
enceinte…Unhoquetdesurprisefranchitmeslèvres.C’estencorepirequecequejecroyais.Tomberenceinte
desonvioleur…J’aientendudesrécitsàcesujetàmesréunions,maisjeneconnaispasvraimentsespersonnes.Savoirquec’estarrivéàcettefemmequej’admireauplushautpoint…
—Elle a refusé que j’avorte, mais il fallait sauver les apparences… alors elle a pris toutes lesdécisionspourmoietadécidéd’éleverKilliancommesonfils.Jeledétestaisaudébuttusais,cequ’ilreprésentait…ducoup,jel’ailaisséfaire.
—Killian?Killianesttonfils?jedemandeprisedecours.Ellehochelatête.—Ellel’élèvecommesonproprefilsetonneluiajamaisriendit.J’aireprislecoursdemavie,
passémondiplômed’infirmière.Quandjemesuisrenducomptedemonerreur…Ilétaittroptard.J’aitentédeparleràmamère, jevoulaisqueKillian sacheetqueça soitmoiqui l’élève, j’étais samèreaprès tout.Mais… Elle m’a fait réaliser à quel point ça allait bouleverser Killian. Et elle à raison,commentluiexpliquertoutça?Luidirequ’ilestlefruitd’unviol?Etqu’onluiamentitoutesavie…
Ellelaisseéchapperunelarmequ’elleessuiedoucement.Jen’aijamaisvuJennypleurer,jamaisen3ansquejelaconnais.Etjenesaisvraimentpascommentréagiràcetinstant.
—Bref,toutçapourtedire…Çaprenddutemps,ilfaudradelapatienceetdutemps,maistuverras,çaira.
Je repense à Killian, à toutes ses après-midi passées ensemble. Son expression douce quand ellel’observeetjevoisàquelpointelleaimesonfils.Ellel’aimetellementquejen’arrivepasàimaginerladouleurqu’elledoitressentirdelelaisserrepartiràchaquefois.Unepenséemerevientsoudain,unsujetqu’elleasavammentdétournéladernièrefoisquej’aitentédel’aborderavecelle.
—Jenny…quandtu…tuasrencontréEthan…Cettepenséeabeauêtreencoredouloureuse,jem’efforcedenepasyrepenserencontinuant:—Ethanm’aditquetudéprimaistouteseuleaubardesonhôtel…Elletenteunsourireenrépondant—Certainsjourssontplusdursqued’autres.Jemerappelleparfaitementdecettejournée.Onavaitpassél’après-midiavecKillian.Jecomprends
soudainlebesoindesortiretdesechangerlesidéesmêmesi j’auraispréféréqueçanesoitpasavecEthan.Ladouleurseranimedansmoncœuret jebaisse lesyeux,honteused’avoircegenredepenséeaprèscequevientdemeconfierJenny.Ellem’attrapelamainendisant:
—Livie.Sij’avaissu…jamaisjenet’auraisfaitça.Jerelèvelatêteparfaitementconscientedeça.—JesaisJenny.Jesourisavantd’ajouter:—Etpuisjel’aiengueulé,ilauraitpuaumoinstediresonprénom!Elleéclatederire.C’estagréabledevoirqu’onpeutenfinenparlersanssedisputer.—Ohqueoui.Jen’auraisjamaisfaitçaaprèsavoirvucetatouage!TouslesEthanpeuventallerse
planquer!Ellelèveundoigtavantd’ajouter:—PourHaydenparcontre,sij’étaistoi,jememéfierais…Cettefoisc’estàmontourd’éclaterderire.SacréHayden.Elleselèveets’étireavantdemefaire
face.—Entoutcas,net’inquiètepas.EtsijesaisunechoseLivie,c’estquecethomme,donneraissavie
pourtoi,alorsfais-luiconfiance.Ellecommenceà s’éloigneralorsque je réfléchisà toutcequ’ellevientdemedire,mais s’arrête
avantdeseretourner.Sonregards’estadoucietelledit:—J’espèrequ’unjourjetrouveraisquelqu’unquimeregardecommeilteregardeLivie.Negâchez
pascequevousavezpourdesfioritures.Tun’imaginespascombiencequevousavezestprécieux.Quandelledisparait enprenant ladirectionde sa chambre, jenepeuxnier combien elle a raison.
MêmesimarelationavecEthanmedonnesouventletournis,jesaisquejenepourraisjamaisfaireunecroixsurcethomme.Jeme lèveet rentredansmachambre.Je le trouvedevantmacommode le tiroirouvertdevantlui.Jerefermelaportederrièremoimerassurantd’avoirplanquémespilulesloindecettechambre. Et je prends une décision. J’arrête tout. Il n’a pas besoin de le savoir et s’il venait àl’apprendre,ilnemelepardonneraitpas.Ilestencoretempspourqu’iln’ensacherienetjevaism’endébarrasseravantqu’ilneserendecomptedemonerreur,d’avoirétoufferladouleuravecdesdroguesartificielles.Jegarderaiscesecrettoutcommelaraisonquim’apoussécejour-lààm’enfuirquandtoutabasculéetquej’aicomprisquejedevaism’éloignerdemonpèrelepluspossible.Ilsetourneversmoiensouriant:
—TuveuxbienmefaireunepetiteplacepourmesaffairesLivie?C’estlebordeldansmonsacet…—Prendstoutelaplacequetuveux,jelecoupe.
Quandjevoislesourirequ’ilaffiche,j’ail’impressiondeluiavoirpromislalune.Jepouffederireetm’avancevers lui.Jedéposeunbaisersurseslèvresenposantmesmainssursontorseetquandjevoisl’étincelledanssesyeux,jecomprendsàlaperfectioncequevoulaitdireJenny.Personnenem’ajamais regardé comme Ethan me regarde. Nous partageons un lien si unique et précieux qui me faitréaliserquesijedoism’abandonnercorpsetâmeàunhommeunjour,jenesouhaitepersonned’autrequelui.
—Fais-moil’amourEthan.
Chapitre41
Ethan
3ansplustôt
Livie:17ans
Ethan:20ans
Greg:22ans
Jesorsdugarage.Ceboulotmefoulesboules,j’enairaslebol,maispastroplechoix.Jeprendslaroutepourrentrerchezmoi,maissurlaroutejevoisLivieencentre-villetouteseule.Jem’arrêtesurlebas-côtéetlarejoinsenquelquesenjambées.Ellenem’apasvu,elleestdedos.Jeposeunemainsursahancheetluichuchoteal’oreille.
—Salutlaplusbelle.Ellesursauteenseretournantetmepousse.—Ethan!Arrêteonpourraitnousvoir!Ouibahpourquoipas, jecommenceàenavoirplusqueras leboldemecachercommeçapourla
voir,maiselleneveutrienentendre.—Ohc’estbonLivie,çaneseraitpassiterribleElleregardeautourd’ellecommesielles’attendaitàcequeGregouunespionarméallaitdébarquer
sansprévenir.Jesouffleetmepasseunemaindanslescheveux.—Bon,jevoulaisjustesavoir,j’aifiniplustôt,tuveuxvenirchezmoi?Ellereportesonattentionsurmoietsourit.Enfin,ilétaittemps.Ellehochelatêteetjeluiattrapela
mainpourrejoindrelavoiture,maisellemel’arrache.J’enaitellementmarredetoutça.D’accord,Gregnevapassauterauplafond,maiselleapprochedeses18ansdansquelquessemainesmaintenant,onnevapassecacherjusqu'ànos30ans.Jeluiouvrelaportièreetellegrimpe.Onrejointmonappartementensilence.Çam’aénervéqu’ellemerejettecommeça,maisonadéjàeucetteconversationàmainterepriseetàchaquefoisellefinitparfairelagueulepouruntempsindéterminé.J’aienviedepasserunebonnesoirée,etçaaplutôtmalcommencé.Jevaisdoncdevoirarrondir lesangles.Jeposemamainsursongenoualorsqu’elleregardelepaysagetournéverssavitre.
—Excuse-moiLiv,nefaitpaslagueules’ilteplaitEllesetourneversmoi—Situcroisqueçamefaitplaisir.Sileschosespouvaientêtredifférentes,jeleferais,maisc’est
commeça.JeneveuxplusenparlerEthan,jet’aiditquec’étaitcommeçaetc’esttout.SalecaractèreàlaconcetteLivie.—OKc’estbon,jem’excuse,jenerecommenceraisplusd’accord?Jusqu’àcequej’arriveàtefairechangerd’avis.Ellehochelatêteaumomentoùjemegaresurle
petit parking en face de chezmoi.On sort et je gardemesmains dans les poches. Plus que quelquesmètresetjepourraislatoucher.Onpasselaporteetjelaclaqueenlapoussantcontrecelle-ci.
—Etmaintenant,jevaisavoirledroitdet’embrasser?Elle me fusille du regard. Je l’attrape derrière la nuque et plaque ma bouche sur la sienne. Je
l’embrasse encore et encore sans pouvoir m’arrêter. Et je compte bien l’embrasser toute la soirée àdéfaut d’autres choses. Je dois bien avouer que je commence à trouver le temps long, mais dès quej’essaied’allerunpeuplusloin,elleesttellementtenduequejedevineaisémentqu’elleappréhendeplusquederaison.Saufqu’onestinterrompueparcefoutuportabledemerdequisonne.
Jesoufflequandelles’arrachedemaboucheetposeunpoucesurseslèvres—T’esobligéderépondre?Elleregardesonécranetdéglutit.—Oui,je…jedoisrépondre.Elles’écarteetdécroche.Jeluifaissignequejefilesousladouche.Elleacquiesceetjemeprécipite
danslasalledebain.Jenel’aijamaisrevu.
Chapitre42
Livie
Quand les mots franchissent mes lèvres, je sais que tout ira bien. Parce que ça sera avec lui. Ilécarquillelesyeuxalorsquelasurprisedemonaveusedessinesursestraits.
—Tu…Quoi?Jepouffederiredevantsaréactionenpassantmesmainssoussontee-shirt.Lasensationdesapeau
contrelamiennemerappellequejeneveuxpersonned’autrequelui.Ilattrapemespoignetspourarrêtermongeste.
—TuenessûreLivie?Jeveuxdire…neteforcepas,onpeutattendremapuce,jeneveuxpas…Jeperdsmonsourire.Unedemescraintesestentrainderenaitre.Etsijeledégoutais?—Tuneveuxpas?Ilrestesansréactionalorsjerajouteenbaissantlesyeux:—Jetedégoute.Ilsecouelatêteenposantundoigtsousmonmentonpourmereleverlatête.—NedispasdebêtiseLivie.Jeveuxsimplementêtresûrequec’estcequetuveux.Nelefaispas
pourmoi.Jeveuxquetuenaiesenvieautantquemoij’enaienvie.Sesmotsmerassurentetmedonnentl’assurancedontj’avaisbesoinpourluidire:—J’enaienvie.Àunecondition.Jenepeuxm’empêcherderepenseraujouroùjel’airevupourlapremièrefois.—NecoucheplusjamaisavecJennyIlfermelesyeuxtandisquejelescruteenpartiecoupabledeluidireçaàunpareilmoment.—Iln’yaurapluspersonned’autrequetoiLivie.Àpartird’aujourd’hui,c’esttoietpersonned’autre,
répond-ilenrouvrantlesyeux.Monsourirereprendplace.Jesoulèvesontee-shirtqu’ilsedébarrassecomprenantquejesuisbien
décidé à neplus laissermonpassédictermavie.Lesbattements demoncœur s’accélèrent alors quej’observelabeautédecethommemerappelantquec’estmoiqu’ilachoisi.Jenesaispascequej’aibienpufairepourlemériter,maisjecomptebienprofiterdechaquemomentdemavieaveclui.Oudumoins,tantqu’ilvoudrademoi.Ildéboutonnemonchemisierunparunavantdelefaireglissersurmesépaules.Lenœuddansmonventrecommenceàpointerleboutdesonnez,maisjemeforceàl’ignorer.Sonsourires’agranditquandilattrapemonmédaillontoujoursautourdemoncouquejenequitteplus,etilydéposeunbaiser.
—Jet’aimeLivie.—Jet’aimetellementEthan.Tunepeuxmêmepasimaginer.Iln’asurementpasconsciencedetoutl’amourquejeluiporte.—Jecroisbienquesiaucontraire,répond-ilenriant.Quandmeslèvrespartentàlarencontredessiennes,toutmoncorpsrépondàl’appel.Jesaisquece
momentestimportantetquec’estungrandpaspournous.Jefaisglissermesdoigtssursesabdosavantd’ôter le premier bouton de son jean. Ilm’attrape lesmains et les remonte autour de son cou enmesusurrantentredeuxbaisers.
—DoucementLivie.Jeveuxprendremontempspourtedéguster.
Je pouffe de rire. Cet homme a un véritable problème avec la nourriture, mais je ne peux lui envouloir en sachantdansquelle circonstancenousnous sommes rencontrés. Je sensmes joues chauffer,maisilnemelefaitpasremarquer,mêmesijedoutequeçaluiaitéchappé.Ilmesoulèveetj’entouremesjambesautourdeluileserrantcontremoiavantdemeposerdélicatementsurlelit.Ilposeunemainsurmajoueenmurmurant.
—Tuessibelle.Moncœursegonfleetmelaissesansvoixquandilmeditdeschosescommeça. Il faitglisserma
jupelelongdemesjambesavantderemonterdesbaiserssurmescuissessoussonregardquis’intensifiechaquesecondeunpeuplus.Chacundesesbaisers,chacunedesescaresses,faitnaîtreundésirenmoiquejemesuislongtempsinterdit.Ilenlèvesonjeangardantcommesimplebarrièresonboxer,alorsquesa langue se mêle à la mienne, mes mains arpentant son corps comprenant que ce désir n’a rien demalsain. J’ai enviede lui, enviede cethommeque j’aimeplusquemaproprevie.Complètementnuedevant son regard intense, jeme laisseallerquandsa langues’aventureentremes lèvresme ramenanttoujoursauxsouvenirsdesmeringues.Cettepremièrefoisquim’afaitsipeuretquejemesuispourtantautorisé,sanscomprendrequenosviesétaientdéjàscelléesl’uneàl’autre.Lachaleurmontedansmonventrequejenerejettepluscommeunechoseinterdite.Quandjesensl’orgasmearriver,jerésisteencoreunpeucommeunautomatisme.Ilresserresesmainssurmeshanches,accélérantlemouvementquinemedonnepluslechoix,laissantlessensationsm’envahir.Quandjereviensàmoi,ilremontesesbaiserssurmonventre,avantdemordillerundemesseinsaccompagnésd’unclind’œilquimefait rireavantdes’emparerdemabouche.C’estquelquechosed’étrangel’idéedesentirmongoûtsurseslèvres,maisjenepréfèrepastropypenser.Mesmainsdescendentdanssondos,tandisqu’ilfrottesonérectioncontremoiavecplusdevigueur.Quandjebaisse le tissubiendécidéà luioffrirmoncorps, ilpasseunbrasautourdemataillememurmurantàl’oreille.
—Jet’aime.Jet’aimetellementLivie.Jesoupiredebonheurenfermantlesyeuxuninstantsoussesmotsdoux.Ilremontesamainsurma
cuisseenlarelevantautourdelui,ladeuxièmelarejoignantrapidement.Ils’arrêtesoudain,traverséparunepensée.
—Jedoismettreunecapotemapuce.Des flashsme reviennent, le son de cet étui résonant dansma chambre d’enfant. Je secoue la tête
soudainpaniquée:—Non.Jen’yarriveraispasEthan.Quandj’entends…cebruit…Jebaisselesyeux,honteusedecequejetentedeluifairecomprendre.Jesenssesdoigtssecrisper
autourdemoietquandjeleregardedenouveau,sonvisages’estdurci.—JevaislebuterLivie,jetejureje…Unelarmem’échappeetjemurmure:—Iln’envautpaslapeine.Ilbalayelalarmes’écoulantsurmajoue—D’accord.J’aitoujoursmisdescapotes…tuprendslapiluleLivie?Jehochelatête.—Alorsonvafairesans,accepte-t-ilensedébarrassanttotalementdesonboxer.Jefermelesyeuxenlesentantsiprèsdemonentrée,toutenappréciantsesmotsdouxqu’ilsusurreà
monoreille.Quandjelesensentrerenmoi,monsoufflesecoupealorsqu’uneodeurfamilièrem’envahit.Sonodeur,unmélanged’after-shaveetdejenesaisquoimedonnant lanausée.J’essaiederevenirauprésent,prisonnièreentrel’hommequim’abrisétoutemonenfanceetl’hommequimemurmurecombienilm’aime.Jemesenscoupableensentantsoncorpssemouvoirenmoialorsquejesuis incapablederessentirquoiquecesoit,coupédetouteémotion.
—PutainLiv…
Sacadenceaccélèreetunsanglotm’échappemeretenantde luidired’arrêter,quandjecomprendsque je serais incapable de lui donner plus qu’un corps vide. Quand samain se pose surma joue, jesecouelatêtesentantsonregardsurmoi,alorsquemeslarmessemblentneplusvouloirs’arrêter.
—Livie,regarde-moi,dit-ildoucement.Jemedécideàaffrontersonregard,nesachantàquoim’attendre.Vient-ildecomprendreàquelpoint
jesuisbrisé?Ilsouritdoucementencaressantmesjoueset jenecomprendspaspourquoiiln’estpasencorepartidevantcespectacle.
—ToutvabienLivie.Cen’estpasgrave.Jerestesilencieuse,nesachantquoirépondre.Ilfroncelessourcilsensepinçantleslèvrescomme
s’ilréfléchissaitavantdesouriredenouveau.—Pourquoitut’esenfuilapremièrefoisqu’ons’estembrassé?Jesuisplusquesurprisedurevirementqueprennentlesévènements.—Tumedemandesça…maintenant?Ilhochelatêtel’airbiendécidé,toujoursimmobile.Bon…Sic’estcequ’ilveut…—J’ai…J’aieupeur…jenem’yattendaispaset…jenesavaispascommentréagir.Jecroyaisque
tutemoquaisdemoiquandtumedisaistoutesseschoses.Il souritdeplusbelle faceàmaconfidence.Combiende foism’a-t-il fait rougir enmemurmurant
discrètementdesmotsqu’ilsemblaitamusédemedire?J’ai toujourscruqu’il jouait,mêmesi jesaisaujourd’hui depuis sa confidence, qu’il me voit plus que ce que je croyais depuis l’épisode desconfitures.
—Ettun’asrientrouvédemieuxquedeteservirdeJeffersonpourtevenger?Jepouffederireetcomprendssoudainlamanœuvrealorsquetousmesmusclessemblentsedétendre.—Tut’esrétracté.J’étaisencolère.Illèvelesyeuxaucielenrâlant.—T’espartiencourant!J’aicruquet’allaistoutbalanceràGreg!Nosriresemplissentlapiècequandjeluidis:—PauvreJefferson,tunel’aspasraté.C’estpeudeledire.Etaprèsça,ilchangeaitmêmedetrottoirquandilmevoyait.Ethanpouffederire
enrépondant.—Ilauraitmieuxfaitdelafermer.Je n’ai pas le temps d’analyser ses paroles, que je le sens se renfoncer en moi, tout le reste
disparaissantautourdenous.Ilgardenosregardsliésl’unàl’autreetjedevinequ’ils’assuredecettemanièreque jeneflancheraispascette fois-ci. Ilpasseunemainsousmesfesses,meserrantplus fortcontreluialorsquejelesensplusloinenmoi.Lasensationdechaleurreprendplace,alorsquejenelequittetoujourspasdesyeux.Sesmouvementssemblentréguliersetcalculés.Jenepeuxm’empêcherdemedirequ’ilseretientsurement,maisquandsamainglissesurmonventreavantdecaressermonboutonsensible, jebasculelatêteenarrièrealorsqueleplaisirm’envahit.Ilaccélèrelerythmedéposantdesbaiserssurmagorge.
—C’estçaLivie,laisse-toiallermapuce.Nos langues s’accordent au rythme de nos corps, nous unissant l’un à l’autre. Mes halètements
s’intensifientnepouvantmeretenir.Chaqueparcelledemapeauvibreàchacundesespassages.Jesensleplaisirserapprocherenmêmetempsquel’angoissequecelaprovoqueenmoi.
—Laisse-toiallermapuce.Tuenasledroit,murmure-t-ilàmonoreille.C’est comme s’il pouvait deviner mes pensées noircies par les souvenirs douloureux.Mais à cet
instant,jedécidedenepasyprêterattention,luiobéissantalorsquejelaissel’orgasmemetraverserdepartenpart.Ilaccélèrelacadenceets’abandonneàsontouravantdelaissersatêteretombersurmonépaule.
Je reprendsmon souffle, nospoitrines respectives se soulevant à l’unisson et jememets à rire. Ilhausseunsourcilenseredressant.Toutuntasdesouvenirsmereviennent,maisdesbonscettefois-ci.Jeposemamainsursajoueenl’observant.Jel’aimetant.Cethommequineserendsurementpascomptequ’ilajouéunrôleessentieldansmavie.S’iln’avaitpasétélà,jen’auraispaseulaforcedecontinueràmeleverlematin,àsourire,àvivre.ToutessesjournéesoùjesuppliaisGregd’allerjoueraveceuxpournesurtoutpasmeretrouvertouteseuleaveclui.Noscrisesdefourireànosconcoursdegâteauxridicule.Chacundesesmomentssonttatouésàmêmemonâmecommeuneempreinteindélébile.Etjechériscejour.Lejouroùj’aiaperçucepetitgarçonessayantderamasserleplusdefruitspossibledanscepauvretee-shirttoutdéchiré.Cepetitgarçonquim’atouchédèsquenosregardssesontcroisés.
Jet’aime.Desmotsque je lui répète,maisquimesemblent tellementfaiblesfaceà l’intensitédessentiments
quejeluiporte.Jeneluidispasquequandilestreparticejour-là,j’aipasséplusieursjoursàl’attendresous lepoirierespérantqu’il revienne.J’attendais jouraprès jour,alorsqu’ilsemblaitneplusvouloirrevenir.
13jours.Ilamis13joursàrevenir.Etunsoir,enrevenantdel’école,ilétaitlà.Assissurleperroncommes’il
hésitait à entrer. Il a levé la tête enme voyant et je suis resté à l’observer à côté demaman enmedemandants’iln’allaitpaspartirencourant.Sesyeuxsemblaient tellement tristes.Aussi tristeque lesmiens.Jemesuisassiseàcôtédeluietmamanasubitementditqu’ilfallaitqu’elleailledirebonjouràlavoisine.Jelasoupçonneunpeud’avoirorchestrétoutça,mêmesiellen’enajamaisparlé.Onestrestéassis unmoment. Ilme jetait des coups d’œil rapide, alors que je ne pouvais pasm’empêcher de leregarder.Voyantqu’ilnediraitrien,jemesuislevéetjeluiaiditenouvrantlaportedelamaison:
—Jetepariequejemangeplusdegâteauxquetoi.Ilasouri.C’étaitlapremièrefoisquejelevoyaissourire,etilarépondu:—Aucunechance.Çaaétéledébutdetout.Iln’aplusjamaishésitéàreveniraprèsça.Ildéposeunbaisersurmonnezendisant:—Maisqu’est-cequisepassedanscettetête?J’aimeraisbienlesavoirdesfois.Jel’embrasseavantderépondre:—MerciEthan.Mercid’êtreentrédansmavie.
Chapitre43
Ethan
Le jour est levé depuis un moment alors que je remonte ma main sur son sein en lui mordillantl’épaule.Sontatouagesousmesyeux,c’estunevisiond’ellequiresteragravéesurmarétinetandisquejem’enfonceplusloinenelle,insatiabledesoncorps.Jenepeuxm’empêcherdemedirequecequ’ellem’aoffertestinestimable.Lapeurquej’aievudanssesyeuxquandelleaperdupied,j’aicomprisàcetinstanttoutel’ampleurquetoutcelaimpliquaitetjen’aipaspum’empêcherderepenseraumatinoùjel’aiabandonnédanscettesalledebain.Jenepourraisjamaismelepardonneralorsqu’elleavaitbesoindemoiplusqu’àn’importequelautremoment.Etjel’ailaisséeaffronterçaseule.
—Jet’aimeLivie.Cesontdesexcusessilencieuses,j’ensuisconscient.Soncorpssetend,maisrefusedes’abandonner,
encore.J’accélèrelerythmeenintensifiantmescaressespourl’yaiderquandellelachepriseavantdemelaisseralleràmontour.Jedéposeundernierbaisersursanuque,avantqu’ellenesetournesur ledos.
—Tuasdestrucsdeprévusaujourd’hui?Parcequej’aiquelquesidéesquiimpliquentuniquementtoietmoidanscelit,jeluipropose.
Elle pouffe de rire, alors que j’étais parfaitement sérieux. Elle me pousse avant de se lever enrevêtantunpetitpeignoirquejeluiarracheraisvolontiers.
—Pourcommencerunp’titdej.J’aifaim.Elles’éloignedelachambrem’abandonnantetjemeréjouisdepouvoirmeréveillerchaquematinà
sescôtés.Jenepouvaispasrêvermieuxquesesmoments,cetinstantoùj’ouvrelesyeux,alorsqu’elledortencoreetsemblesiapaisé.Jedécideàmeleveretlarejoinsdanslacuisineautéléphone.JevoisunmotdeJennyposésurlebar.
«Partiplustôtqueprévu,onsevoittoutàl’heurelesamoureux.Pasdebêtises»Jelèvelesyeuxauciel.DrôledenumérocetteJenny,mais jedoisbienavouerqueje l’aimebien.
ElleaétélàpourLivieetjenepeuxquel’aimerpluspourça.Livieraccrocheetposeletéléphonesurleplandetravail.
—Gregestrevenu.Ilattendaitquejel’appellepourpasser.Houlaonl’aéchappébellesurcecoup,encoreunpeuetonsefaisantprendrelamaindanslesac.—OnluiditLivie.Elle hoche la tête en se laissant tomber sur le tabouret. Quand je vois son expression, l’angoisse
qu’elleaitchangéed’avismerevient,maiselledit:—Laisse-moiluidireEthan.Jesecouelatêteenm’installantàcôtéd’elle.—NonLivie,onlefaitensemble.Ellesouffleavantd’ajouter:— J’ai peur Ethan. J’ai peur quemalgré le fait qu’il sache ce qui s’est passé, il n’est pas laissé
derrièreluisesmauvaiseshabitudes.Je reste silencieux. J’ai encore dumal avec tout ça. Je ne comprends pas commentGreg ai pu le
laisserfaire,maisc’estladernièrechoseàdireàcemoment,alorsqu’elleajoute:
—Papa…étaitunmanipulateur.Tu l’asvucommemoi.Tout lemonde l’adorait. IlmenaçaitGregquandje…
Elle ferme les yeux et je pose unemain sur sa cuisse pour la rassurer, je ne vois pas quoi faired’autre. Cet homme est pire qu’unmonstre et je ne pourrais jamais effacer ce qu’elle a enduré. Ellerouvrelesyeuxetreprends:
—Ilnousafaitsouffrir.Ils’estservideGregpouravoir toujoursunpouvoirsurmoi.Mêmesi jedétestaisGregparmomentdejouersonjeu,jeneluienvoulaispastotalement,carjesavaisquetoutétaitma faute. Si je t’ai toujours tenu tête pour ne rien dire à Greg, c’est parce que je savais que s’ill’apprenait…iliraittoutraconteràpapa.
Çanefaitqueconfirmerlescraintesquisedessinaientàmonesprit.CemecestobsédéparLivie.Etjesuisrassuréqu’ilnesachepasoùLiviesetrouveencomprenantça.J’espèresimplementavoirraisond’avoirfaitconfianceàGregàcesujet.
—Dans la lettreque je luiai laisséecesoir-là, je luiaiaffirméques’il s’enprenaitàGreg…jeraconteraistout.C’étaitjustepourluifairepeur,mais…jecroisqueçaaeusoneffet.
Quandellerelèvelesyeuxversmoijeresserresamaindanslesmiennes—ToutsepasserabienLivie.Jenelelaisseraispluss’enprendreàvous.Ellehochelatêteetpartenfilerdesvêtements.Ouaisvautmieuxquejefassepareil,çaneseraitpas
trèsmalin.Quandonentendfrapperàlaporte,ellesoupire:—Bon,etbienquandilfautyaller…Ellepartouvriralorsquejesorstroistassesduplacardavantd’yverserunebonnerasadedecafé.Je
medisquej’auraismieuxfaitd’ymettreundécontractantmusculairepourGregquandjelesposesurlebar.Lablaguemefaitriretoutseulaumomentoùlesdeuxfranginsreviennentdel’entrée.Gregal’airunpeurenfrogné,maisaveclaroutequ’ilvientdesetaper,jenepeuxpasluienvouloir.Jem’assisfaceàluitandisqueLivieprendplaceàcôtédelui.Ellemetdeladistanceentrenous.C’estpeut-êtremieux,maisj’aimeraisqu’ilsoitdemeilleurehumeurpourluidirecequ’onaàluiannoncer.
—Alors tume l’as ramené en un seulmorceau ? je lui demande en repensant à notre dernièreconversationtéléphonique.
SouritEthan,çafinirabienparledétendre.Ilmesouritplusquenécessaireetsetourneverssasœur.—Ethanaunemoto, tusavais?Unegrossecylindrée,pasn’importequoi,et ily tientcommeàla
prunelledesesyeux.Elle se tourneversmoiensouriant, jevoulais lui faire la surprise, jem’imaginaisdéjà l’emmener
faireuntour.Sij’aiprisgoûtàcepetitpasse-tempsdurantsonabsence,jecomptebienluifairepartagermonamourdelavitesse.
—Non,ilnem’ariendit,répond-ellesanssedébarrasserdesonsourire.J’attrapematasseetcachemonsourireenbuvantunegorgée.Elleetmoisurmonpetitbijou,quelle
visionintéressante.Gregseretourneversmoi.—Ilytientvraiment,vraimentbeaucoupàcemachin.Autantque…Cemachin ? Non, c’est un bijou, unemerveille de la nature, pas unmachinmon pote. Il semble
réfléchiretajoute:—Autantquejetiensàtoipetitlapin.Cetteconversationestétrangeetj’aimeraisavoiruneréponseàmaquestion,tandisqu’ilmefixeavec
intensitéaveccedrôledesourire.—Alors,elleestoù?Ilsemetàrire.BonOK,j’aidumalàsuivrecequilefaitrireainsi.Jem’apprêteàinsisterquandil
poseunemainsurlebarlepoingserré.—ArrêtedeflippercommeçaEthan,ellevabien.J’enaiprisleplusgrandsoin.Lespotessontfaits
pourçanon?Onprendsoindesaffairesdel’autre,onsesoutientencasdecoupdure,onnebaisepaslasœurdesonmeilleurpote…
Jemanquedem’étrangleravecmoncafé.Jemetapeletorseentoussantbruyammentavantdereleverlatêteverslui.Ohputain.Jejetteuncoupd’œilàLiviequiestdevenutouteblanche.EtGregquinemequittepasduregard.L’évidenceestlà.Ons’estfaitchoperetenbeauté.JerepenseaumotqueJennynousalaissécematin.IladûdébarqueravantqueLivielerappelle.Ilgardeunputaindesourirenarquoissursonvisage,avantd’ajouteravecnonchalance.
—Alors,quoideneufpendantmonabsence?Il boit une gorgée de son café comme si de rien n’était. J’ai beau avoir tenté d’imaginer comment
j’allais lui annoncer ça, je ne trouve plus un mot à prononcer devant son attitude détachée. Livieheureusementreprendlafaceets’adresseàlui.
—Gregeuh…est-ceque…est-cequ’onpeutparler?Ilsetourneverselle.—TuvoisLivie,venantdetoi,çanem’étonnemêmepas.Combiendefoisjet’aisurprisàrougirou
àbaragouinercommeunepetiteconnequandil…—Unepetiteconne?lecoupecettedernièreenécarquillantlesyeux.Ilricaneensepenchantverselle:—Parfaitement…princesse.Àpeinea-t-ilprononcésaréponse,qu’ellelegiflesiviolemmentquesatêtefaitunquartdetour.On
dirait que ça s’annoncemal. Enmême temps, il ne l’a pas volé, comment peut-il la provoquer de lasorte?J’hésiteàintervenir,çan’ajamaisétéfacileentrecesdeux-làmêmesij’avouequejepensequ’ilméritaitamplementcettebaffe,j’espèreaufondqueçanevapasenvenimerleschoses.
Iltournelatêtelentementverselle.—Jet’avaisditdeneplusjamaismefrapper,ilmesemble.Çavadéraper,jelesens,mêmesijesuiscertainqu’ilneluiferaitjamaisdemal,làilestenpétard,
etjepréfèreintervenir.Jemelèveaumomentoùilluiattrapelepoignet.—Jet’avaisditdeneplusjamaismefrapper!Est-cequejetel’avaisdéjàditLivie ?Jenel’aijamaisvuluihurlerdessusdecettefaçon.Sesyeuxsontsisombresquel’onnedistingue
même plus la douceur des yeux Samantha qu’il portait toujours avec fierté. Je fais le tour du bar etm’interposeentreeux.
—LâchelàGreg.Tutecalmes.Onvaparler,maistutecalmesd’abord.Livietentederetirersonpoignet,mais il laserretropfort.Il tournela têteversmoi.Unregardde
tueuretjesuislacible—Tun’asrienàmediretoi.Lespetitesputesnetesuffisaientplus?Ilafalluquetufourrestaqueue
dansmasœur?Alorslàilvatroploin.J’attrapeLivieetladesserredesonemprise.—VadanslachambreLivie.LivieJohns,l’entêtéedeservice.—Non,c’estbon.Gregje….Écoute-moi…ons’aime,et…Gregsemetàéclaterderire.Illaregarded’unetellefaçonqueçameglacelesang.Sonregardest
froid,mauvais.—Parcequetucroisqu’ilt’aime?Oh,mapauvrepetitesœur,tuesencorepluspitoyablequejele
croyais.Ellemeregardeperdu,effrayéetj’essaiedelaconvaincreànouveauenvoyantqued’essayerdele
résonnervas’avérerencoreplusdifficilequeprévu.—Liv,s’ilteplaitécoute-moipourunefoisetvadanslachambre,jel’implore.Ellehésiteennousregardanttouràtour.Jevoisqu’elleapeur,qu’ellenereconnaitplussonfrèreà
cetinstant.—AlorsLiv,qu’est-cequetuvasfaire?Obéircommelajoliepetitechiennequetues?Papaavait
raisonaprèstout,tun’esqu’unetrainée,crache-t-il.Àcemomentmapatienceaatteintses limites.Jenevaispasl’écoutersansrienfaireluiparlerde
cettefaçon.—TulafermesGreg!Tulafermesoujetejure…Jeserremonpoing.Unmotdeplusetjeluifaisravalertoutessesparolesblessantesenverselle.Il
s’avanced’unpas.—Ouquoi?FrappeEthan,frappejen’attendsqueça.JesenslamaindeLiviesurmonbrasquitentedemefairereculer.J’ailesoufflecourt,sijenel’ai
pasencorefrappéc’estjusteparcequ’elleestlàetillesait.Jemerépètesanslequitterduregardcettefois.
—Livie.Danslachambre.Maintenant.Samainquittemonbrasetj’entendslaporteserefermerderrièremoi.
Chapitre44
Livie
Quiest-il?Etqu’a-t-il faitdemonfrère?Cettepersonnen’estpasmonfrèreetneleserajamais.Monfrèren’auraitjamaisditça.Iln’auraitpasditseschoseshorribles.Cequ’iladitsurpapa…Nonc’estimpossible.
Jetented’écouterderrièrelaportecequisepasse.Jenesaispassij’aibienfaitdeleslaisserseuls,maisGregmefaisaitpeur,vraimentpeuretpendantuninstant…j’aicruvoirpapa.Monpèreestleplusgrandmanipulateurqu’ilm’aitétédonnéderencontrer.Quandonétaitenfamille,avecmaman, ilétaitdouxetattentionné,gentiletserviable.Maisquandjemeretrouvaisseulaveclui,c’étaitunetouteautrehistoire. Si je tentais de lui résister ou de refuser de faire ce qu’il me demandait, son vrai visageapparaissait.Etcen’étaitpasbeauàvoir.
Enplusdem’avoirvolémoninnocence,ilaprisunmalinplaisiràmefairesouffrir.Àmenacerceuxque j’aimais. Il manipulait Greg pour qu’à travers lui, il puisse toujours avoir un œil surmoi.Maisj’aimaismonfrèreetjesavaisquetoutçaétaitmafaute.EtpuisilyaeuEthan.Gregnel’aimaitpasaudébut.Parcequejustementilnefallaitpaslaisserungarçonm’approcher.Pourmeprotégersoi-disant.Mais Ethan a réussi à s’en faire un ami et à gagner sa confiance grâce à leurs petites blagues àmonencontre.Jen’aimaispasçabienétendu,maisdevoirqu’ill’avaitacceptémesoulageait.Etpuisleursblaguesn’étaientjamaisvraimentméchante.
Quandc’estdevenusérieuxavecEthan,jel’aisuppliédenerienraconteràGreg,ilnefallaitsurtoutpas qu’il l’apprenne. Ethan voulait lui dire, il disait que de cacher ça à sonmeilleur ami n’était pascorrect.Maismoijesavais.SiGregl’apprenait,iliraittoutraconteràpapaetsipapal’apprenait…
Jesorsdelachambrequandungrandfracasretentit.GregestsurEthan,làoùdevraitsetrouverlatablebasseenverredeJennyquinecompteplusquedesboutsdeverrerépandusurlesol.Jemefigefaceàcettevisioncauchemardesque.C’estceque jecraignais,mais j’avaisgardé l’espoirdepouvoirfaireentendreraisonàmonfrère.
—BahalorsEthan,c’esttoutcequet’asdansleventre?Jepensaisqued’avoirservidepunching-ballàtamèret’avaitrenduplusendurant.
—Greg!Iln’apasledroit,ilnepeutpasdireça.Celui-ciricaneetserelèveenreculant.Ilsetourneversmoi
alorsqu’Ethanserelèvedifficilement.—Pastrèsobéissantedisdonc.Jecomprendsquepapaesteubesoindemoipourtetenir.Etdireque
leloupétaitdanslabergeriedepuisledébut…Ils’approchedemoi.Sonregardmefaitpeur.Jemesuispréparéaujouroùj’auraisdenouveauà
affrontermonpère,c’estpourçaquejemesuisinscriteaucoursdeboxe.Maislà,devantmonfrère,jesuisincapabledumoindregeste.Ilm’attrapeparlebrasetmetientlanuqueenmechuchotantàl’oreille:
—Est-cequ’ilsaitLiv?Ilsaitquepapat’abaiséavantlui?Monâmeexplose enmillemorceaux s’éparpillant dans toute la pièce.Çanepeut pas être vrai. Il
reculed’uncoupalorsqu’Ethanl’aagrippéparlecolpourlefairetomber.Marespirationestdifficilealorsquej’essaiedetoutbonnementresterenpositionverticale.Ethanm’attrapelevisageenmefixant.
—RespireLivie,qu’est-cequ’ilt’adit?
Jesecouelatêteincapabledeprononcersesmots.GregricaneetEthanseretourneversluienlepointantdudoigt:—Qu’est-cequetuluiasdit!Gregmeregardetoujoursaveccesouriremalsainens’accoudantàsesgenouxassisàmêmelesol.—Jemedemandaissiellet’avaitmisdanslaconfidenceavantquetulasautes.Çaneteposepasde
problèmedepasserendeuxièmemain?QuandjevoisEthansejetersurGreg,jemelaissetomberàgenouxmelaissantalleràladouleurde
cettescène.Lesdeuxhommesquicomptentleplusdansmaviesedéchirentsansquejenetrouveaucunmotpourmettrefinàtoutça.JedoismeressaisiretlorsquejerelèvelesyeuxenvoyantEthanfrapperGreg,jemerelèveenpuisantdansmesdernièresforces.
—Ethan,non!Ils’arrêtedanssongeste,setournantenpartieversmoi.Gregenprofitepourluiasseneruncoupde
pieddansleventreleprojetantcontrelemur.Maisquandtoutcetaccèsdeviolenceva-t-ilcesser?JemeprécipiteversEthantombéausol.Sonvisage,sonbeauvisageestabimédescoupsqueGregluiainfligés,alorsqu’ilgrimaceunemainsursescôtes.Maisavantquejepuisseluidemandercommentilva,jesenslamaindeGregmeserrerlebraspourm’obligeràmerelever.Sonregardemplidecolèremeterrorise plus que je ne le voudrais et sans prononcer un mot, ni me lâcher, il fait volte-face enm’entrainantaveclui.Onfranchitlaportealorsquej’essaiedecomprendrecequ’ilcomptefaire.
—Greg.Calme-tois’ilteplait.D’accord,jen’auraispasdûtefrapper,mais…Jen’aipasréfléchi,maisquandj’aientendulesurnomquemedonnaitpapatoutensachantl’effetque
çaauraitsurmoi…ilmepoussedanslacabined’ascenseuravantd’appuyersurlebouton—FERME-LA!OK.RespireLivie,ilesténervéetabesoindesecalmer.JevoisEthanarriverversnousaumoment
oùlesportessereferment.—GREG!crie-t-il.Iln’apaseuletempsdefranchirlesportestandisquel’ascenseuramorcesadescente.Jenesuispas
sûredeceque jesuiscenséfaire,mais jedoisessayerdecomprendrecequisepassedans la têtedeGregpourtenterdelecalmer.Sijel’ailaisséfairetoutessesannées,c’étaitàcausedelapeurquepapam’inspirait,maisaujourd’hui,ilestloinetjenelaisseraispasGregmecontrôlercommeill’afaitalorsque j’ai tout quitté pour m’échapper de son contrôle constant. Le visage de Greg est fermé de touteexpressionmiseàpartlacolèrequisemblel’habituer.Ilresserresamainsurmonbrasm’arrachantuneplaintededouleurquand lesportes s’ouvrent.Onavancedans lehall avantde sortir sur le trottoir aumilieudelafoulequiarpentelesruesdansuneattitudetantôtpressée,tantdétendue,ignoranttotalementl’angoissequim’étreint.
—Oùtum’emmènesGreg?—Jeteramèneàlamaison,prononce-t-ilenjetantuncoupd’œilautourdenousavantdetraverser
larue.Quandjecomprendslesensdesesmots,jetentedem’échapperàsaprise.Àlamaison.Jeneconnais
qu’unemaisonàcejouretc’estchezJenny.Jedevinedoncdequellemaisonilparle,et ilesthorsdequestionquejeposedenouveauunpiedàCover-road.
—Greg,non!Nemeramènepasje…Ils’arrêtedevantunevoitureetouvrelaportière.Ensentantsamaindesserrerlégèrementmonbras,
j’enprofitepourmedébattreetéchapperàsapriseenreculantd’unpas.Ilmefusilleduregardetjefaisvolte-facepourm’éloignerde luicomprenantqu’àcet instant, jenepeuxpas lui faireconfiance. Ilesttropaveugléparsacolère.J’aperçoisEthanfranchirleseuildel’immeubleetmeprécipiteversluiencourantdeplusbelle,espérantqueGreglaisseratomber.
—LIVIE!
Quand je vois Ethan courir à ma rencontre en hurlant, je ne comprends pas tout de suite. C’estseulementquandj’entends lecrissementdespneusetque je tourne la têtevers lavoiturearrivantversmoiàviveallurequejeréalise.Jen’aipasletempsdumoindregestequandjesenslechoc.Ladouleursemêle à une impression de voler et une deuxième salve de douleurme transperce quandmon corpsretombesur lebitume. J’entendsdescris,desvoix,beaucoupdevoix,et le sondesvoituresquand lavoixd’Ethanrésonneàcôtédemoi.
—Livie…Livienon.J’ouvrelesyeuxalorsquec’estcommesionavaitbriséchacundesosdemoncorps.Ethansemble
paniquéàtraverslestachesnoiresquisedessinentdevantmesyeuxetjedevinequec’estaussigravequejel’imaginais.Illèvelesyeuxetsemetàhurler.
—UNEAMBULANCE!APPELEZUNEAMBULANCE!Savoixestpaniquéeetjesenssamainserrerlamienne.Mavisionsebrouilledeplusenplusalors
queladouleurdevientplussupportable,l’obscuritémehappantàelle.Ilsepencheversmoi,unemainsurmajoueetjedevinequec’estpeut-êtreladernièrefoisquejepeuxobserversesémeraudes,alorsjemurmure:
—Jet’aimeEthan.Ilsecouelatête,leslarmescoulantsursesjoues.Jenel’aivupleurerqu’uneseulefoisdepuisque
nousnousconnaissonsetc’étaitlejourdelamortdemaman.Cettepenséem’apaise,merappelantquejenevaispastarderàlarejoindre.
—NonLivie,jetel’interdis.Nefermepaslesyeuxmapuce,nemelaissepas.Mespaupièressontdevenuestroplourdesetjemelaisseallerenluimurmurant:—ToutirabienEthan.Jen’aiplusmal.Quand j’entendsmonprénomfranchirdenouveauses lèvres, cen’estplusqu’unmurmure lointain,
alorsquetouteladouleurdisparait.
Asuivre…
RemerciementsToutd’abordjetiensàremercierceluisansquirienn’auraitétépossible.L’homme,monEthan,qui
partagemavieetmesupportedepuisplusieursannées.Merciàtoiquim’aencouragéetnem’ajamaislâchédanscettebelleaventure.
Ensuite,jetiensàremercierJennifer,Sabrina,Elisabethtoutparticulièrementquiontsum’encouragerquandjemeposaisencoretellementdequestions!Vosencouragementsontétéd’unegrandeaide!
Sansoublier lesauteurset rencontresviaFacebookquiontété làpourrépondreàmesnombreusesquestions.
Auxlecteursquim’ontdécouvertsurWattpadetontapprisàconnaitreEthanetLiviesurcettejolieplateformepleinedesurprise.
Enfin,àvouslecteursquiavezprisletempsdemelire,enespérantavoirréussiàvoustransporteràtraversmonlivre.
Merciàtoutesettousetrendez-vouspourleTome2pourlasuitedeToi.Moi.Etlesétoiles.