TABAC SM VERTGOUSSE Est-ce que sucer · 2019. 6. 5. · Vendredi 7 juin 2019 / No 409 / 10e année...

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Vendredi 7 juin 2019 / N o 409 / 10 e année /CHF 4.– /Abonnement annuel CHF 160.– // www.vigousse.ch JAA – 1001 Lausanne P.P./Journal – Poste CH SA VERTGOUSSE On a sauvé la planète ! P. 17 SM Bonnant se fait maître P. 11 E-TROTT’ Faut pas pousser ! P. 6 TABAC Est-ce que sucer c’est fumer ? P. 4

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Vendredi 7 juin 2019 / No 409 / 10e année / CHF 4.– / Abonnement annuel CHF 160.– // www.vigousse.ch

JAA – 1001 Lausanne P.P./Journal – Poste CH SA

VERTGOUSSEOn a sauvé la planète ! P. 17

SMBonnant se fait maître P. 11

E-TROTT’Faut pas pousser ! P. 6

TABACEst-ce que sucer c’est fumer ? P. 4

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

Enfin grillés !Sebastian Dieguez

Il n’y a pas si longtemps que ça, il fallait être sacrément

malheureux pour oser dire du mal des grillades. Quoi ?

Comment ? Tu n’aimes pas les grillades ? ! Qu’est-ce que

tu racontes, tout le monde adore les grillades. Allez,

prends-toi une bière, attrape une brochette et arrête de

faire la gueule ! Et rends-toi un peu utile merde, remonte

un peu le volume de la radio, la deuxième mi-temps va

commencer.

Aujourd’hui, ceux d’entre nous qui redoutaient ces après-

midi interminables, alcoolisés, pleins de bêtes, d’ennui et

d’abrutis heureux, tiennent enfin leur vengeance. D’une

certaine manière, ils étaient simplement en avance sur leur

temps. Oh, probablement pas pour les bonnes raisons,

mais au final ça revient un peu au même. Il en aura donc

fallu du temps pour s’apercevoir que les grillades ne sont

pas écolos, qu’elles sont néfastes pour la santé, qu’elles

banalisent et même exaltent la souffrance animale, qu’elles

reflètent un modèle de société patriarcal et hétéronormé, et

que c’est juste un business comme un autre. C’est-à-dire un

truc beauf et ringard, comme en témoigne la guerre stupide

que se livrent Coop et Migros autour de ce grotesque rituel

à graillon.

Le niveau de crétinerie y est directement proportionnel

à l’autosatisfaction béate du débile dont la seule idée de

l’année a été de faire mariner sa bidoche la veille dans

une sauce à la con. Champion du monde ! Attention, s’il

a songé à emballer une foutue aubergine dans du papier

d’aluminium, il exigera sans doute, ce génie, qu’on lui

remette la médaille de l’égalité…

Mais bon, il faut comprendre. C’est à peu près tout ce

qui lui reste, à l’amateur de grillades : exposer son bide

reluisant et sa connerie triomphante à la face des écolos,

des médecins, des véganes et des féministes, sous les

applaudissements de sa tribu d’anormaux. Bah, à la

rigueur, si au moins il était capable de ne pas carboniser de

simples merguez, on pourrait bien lui laisser ça.

A F F A I R E S E N C O U R TC ’ E S T P A S P O U R D I R E ! Q U E L L E S E M A I N E ! 32

LE CHIFFRE

32Depuis l’introduction de la taxe au sac, c’est le pourcentage en moins de déchets ménagers

recueillis par les usines d’incinération en Valais. Une diminution d’un tiers des ordures valaisannes en même pas deux ans,

voilà qui ne fait que confirmer la perte de popularité du PDC.

L’homme qui a vu l’ours russeAlors qu’il patauge toujours dans son affaire avec la FIFA, le procureur général de la Confédération, Michael Lauber, a été entendu cette semaine comme témoin dans un procès impliquant un ex-collaborateur de la Police judiciaire fédérale. L’homme s’était vu offrir, tous frais payés, une semaine de chasse à l’ours au Kamtchatka par les autorités russes. L’enquête dira si la peau de l’animal a été vendue avant de l’avoir tué ou après.

Riez, vous êtes évaluéesArcinfo (1.6) relaie une thèse de doctorat qui constate que les femmes rient davantage que les hommes durant les entretiens d’embauche. Cela peut être un avantage, car le rire partagé avec le futur employeur sera interprété comme un signe d’honnêteté. Et ensuite, quand la femme recevra son contrat avec un salaire inférieur à celui d’un homme, elle pourra le prendre avec humour.

Femmes de têteA peine arrivées au pouvoir, les femmes font déjà le ménage. Selon un récent sondage, Karin Keller-Suter (PLR/SG) et Viola Amherd (PDC/VS) écrasent les mâles du Conseil fédéral en termes de compétence ressentie par les citoyens. Certes Alain Berset s’accroche à la troisième place, mais Guy Parmelin se retrouve en queue. Ça doit foutre les boules.

Voleurs de mensongesSelon un sondage Tamedia, 49 % des partisans de l’UDC aimeraient que leur parti mette en œuvre une politique pour lutter contre le réchauffement climatique. Pas de quoi perturber les ténors du parti, qui claironnent toujours que le réchauffement est une fake news. C’est toujours un peu triste quand on constate que ses propres électeurs commencent à croire les mensonges d’autres que soi.

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

Le snus est parfois appelé « tabac à sucer » en référence au « Lutschtabak » de nos amis germaniques. Dans les produits contenant de la nicotine – mais sans fumée –, on trouve depuis une année un tabac à usage oral lancé par British American Tobacco (BAT) sous le nom très contemporain d’Epok. Pour appâter le chaland, la multinationale s’est offert une pleine page de publicité dans 20 minutes et 20 Minuten (27.5). Comme une bonne partie des gares de Suisse sont devenues non-fumeurs le 1er juin, BAT promeut son tabac « d’un blanc éclatant qui délivre des sensations de nicotine sans compromis ». Une expé-rience à vivre ! Et la publicité indique aussi que « découlant de la tradition du snus, Epok représente l’alternative parfaite à la cigarette conventionnelle ou électronique ».

Curieuse référence au snus, un pro-duit interdit de consommation en Suisse depuis 1995. Certes, le lobby des cigarettiers devrait obtenir sans trop de difficulté sa légalisation en 2022. Interpellé, le porte-parole de BAT, Benjamin Petrzilka, botte en touche. Selon lui, Epok n’a rien à voir avec le snus suédois « marron » qui est une sorte de tabac oral sous forme de petits sachets que l’on place entre la gencive et la joue. Blanc contre brun, mais pour le reste…

« Epok deviendra-t-il bientôt le must ultime pour les pendulaires et autres voyageurs ? » suggère encore BAT dans son message publicitaire dans le quotidien gratuit. Dès le premier jour des restrictions dans les gares, les affiches vantant le produit Epok Easy Mint, vendu en kiosque, ont envahi les quais. Comme un bon-heur ne vient jamais seul, le truc est disponible « en portions de petites tailles et discrètes ». Histoire que le contrôleur n’y voie rien ?Benjamin Petrzilka insiste pour nous faire entendre la distinction entre snus et Epok. C’est à moitié réussi. « Notre produit à sucer est moins connu que le snus, mais il faut faire la différence », se justifie-t-il. « Sa consistance est autorisée. C’est une nouvelle catégorie qui se dis-tancie du snus qui peut endommager les dents. Epok est fabriqué avec du tabac lavé, décoloré. » Et puis, la pub ne serait destinée qu’aux adultes déjà fumeurs. Pourtant, le goût sucré et fortement aromatisé a certainement été étudié pour séduire les jeunes.

TABAC TIERS En attendant que le snus soit autorisé, les cigarettiers lancent un dérivé qui lui ressemble furieusement. Mais qu’est-ce qui différencie un tabac oral à sucer d’un tabac oral à sucer ?

Sus au snus

F A I T S D I V E R S E T V A R I É S4

La part du volume du tabac à usage oral représente environ 2 %, soit la proportion de snus et de tabac à sucer mesurée par rapport au mar-ché total des produits du tabac et nicotiniques en Suisse. « Le snus est intégré dans le cadre des impor-tations privées de particuliers qui sont autorisées à hauteur de 1,2 kg tous les deux mois », précise le porte- parole. « Au cours des deux dernières années, nous avons connu une crois-sance annuelle d’environ 40 % et nous prévoyons que cette tendance se pour-suive. » BAT a vraiment pris le train en marche.D’accord, Epok n’est pas du snus marron. Il n’en est pas moins inquiétant. Selon un rapport d’Ad-diction Suisse, 4,2 % des hommes de 15-25 ans consommaient du tabac oral en 2016, contre 0,2 % en 2011. On y goûte dans les trans-ports publics, à l’armée, au travail. Or le snus endommage mécham-ment les dents. Il crée aussi une forte dépendance à la nicotine. Ce qui ne serait pas le cas d’Epok ? « Si,

Tout le monde est au courant désor-mais, le siège de Monsanto pour l’Eu-rope, le Moyen-Orient et l’Afrique s’apprête à quitter son havre mor-gien pour s’installer à Bâle. Ça sou-lage pas mal de Vaudois. Faut-il le rappeler, Monsanto a produit des poisons de sinistre mémoire comme le PCB ou l’agent orange, propagé ses graines d’OGM à usage unique et les pesticides assortis, détruisant la biodiversité et l’existence de mil-liers de cultivateurs en Inde et ail-leurs, falsifié des études, acheté des experts et fiché des journalistes. Dénoncée depuis des décennies par les ONG du monde entier, elle a été lourdement condamnée aux Etats-Unis et en Europe pour men-songes et méfaits sanitaires, et fait face à 14 000 plaintes en suspens. Que cette multinationale crimi-nelle débarrasse le plancher vaudois déçoit plutôt en bien.

Comme on sait, le ministre vaudois des Finances, l’ineffable PLR Pascal Broulis, avait en 2004 déroulé pour Monsanto le tapis rouge, avec cour-bettes et cajoleries fiscales. Ce grand visionnaire considérait en effet la venue de la firme comme un apport à l’économie du canton. Bien vu ! Du moins si ledit canton se situe au coude du Rhin.C’est en 2012 que l’exonération avait été révélée. Député Vert au Grand Conseil vaudois, Raphaël Mahaim avait déposé une interpellation ainsi libellée : « Le champion du monde des OGM et des scandales sanitaires Monsanto a-t-il aussi bénéficié d’exonérations fiscales ? » Incidemment, ce râleur demandait comment les activités d’une société si malfaisante pouvaient profiter au tissu économique local, et si des câlins fiscaux pouvaient en l’occur-rence « être considérés comme une mesure intelligente de promotion éco-nomique ». D’autant que le Parlement vaudois et le peuple s’étaient claire-ment prononcés contre les OGM : était-il malin que les autorités dor-lotassent une industrie réprouvée démocratiquement ?

Tombée le 21 mars 2012, la réponse du Conseil d’Etat, alors présidé par le susdit Broulis, débutait par un long argumentaire farci de chiffres sur le

principe général : motifs et statis-tiques des faveurs fiscales prodiguées à des boîtes variées sur sol vaudois, bilan globalement positif et patati et patata. Le texte évoquait en passant le principe du claw back (récupéra-tion) : après la fin des exonérations temporaires, « les sociétés concernées ne sauraient échapper à ces impôts en déménageant, car elles devraient alors payer les impôts dont elles ont été dis-pensées ». L’octroi d’un privilège fiscal a en effet pour condition « le main-tien du siège de la société dans le can-ton pendant la durée de l’exonération, et pour les dix ans qui suivent en prin-cipe ». A retenir.

Après quoi le gouvernement répon-dait aux questions de Raphaël Mahaim. Oui, Monsanto a profité, dès 2004, d’une exonération totale de l’impôt cantonal et communal, pour une durée de cinq ans renou-velée en 2009. Et d’une réduction de 50 % sur l’impôt fédéral direct, pour dix ans aussi. C’était gentil comme tout. D’autant qu’en 2008 et au plan mondial, Monsanto n’avait jamais

ARRIÉRÉS DEVANT Etablie sur sol vaudois en 2004, aimablement exonérée durant dix ans par le conseiller d’Etat Pascal Broulis, Monsanto part. L’Etat de Vaud va-t-il récupérer sa part ?

Remboursez !F A I T S D I V E R S E T V A R I É S 5

que 66,5 milliards de dollars en capi-tal, et 2 milliards de profit net.Le Conseil d’Etat confirmait par ail-leurs que ce geste fiscal émanait, conformément aux règles en vigueur, du seul ministre des Finances Pascal Broulis. Avec l’accord de son aco-lyte en charge de l’Economie, soit en 2004 la PLR Jacqueline Maurer.A Mahaim qui demandait s’il est rai-sonnable de choyer ainsi « des entre-prises dont les activités commerciales sont notoirement en porte-à-faux avec des normes environnementales et qui ont, de ce fait, souvent été sanction-nées », le gouvernement répondait en 2012 que la politique d’exonération se fonde « sur des aspects essentiel-lement économiques et financiers ». Pas question donc de scrupules moraux, écolos ou humanitaires. Le tapin fiscal vaudois n’a pas d’odeur, quoi. Cela dit, poursuivait le texte, « le Conseil d’Etat estime qu’il ne fau-dra pas négliger, à l’avenir, de tenir compte des comportements d’entre-prises à l’étranger qui ne respecte-raient pas certains standards, ceci dans une optique éthique, mais éga-lement afin d’éviter des dommages quant à la réputation de la politique de développement économique ». C’est bien, encore qu’il eût été mieux d’y

songer en 2004, ou au renouvelle-ment de l’exonération en 2009 : à ces dates-là, les turpitudes de Monsanto étaient parfaitement connues. Soit Pascal Broulis ne lisait pas les jour-naux, soit il s’en fichait et il assumait gaiement de bichonner une multina-tionale scandaleuse.

Reste désormais la fameuse ques-tion du claw back. En partant à Bâle, Monsanto contrevient clairement à la disposition qui stipule un main-tien du siège dans le canton « pen-dant la durée de l’exonération, et pour les dix ans qui suivent en principe ». L’exonération a pris fin en 2014, la boîte décampe cinq ans plus tard, le claw back devrait s’appliquer. En par-tant, passez à la caisse !Cela dit, la réponse gouvernemen-tale de 2012 ne parle du claw back qu’en général, sans préciser s’il a été prévu dans le cas Monsanto. Raison pour laquelle Raphaël Mahaim, d’un naturel tenace, vient de déposer une nouvelle interpellation intitu-lée « Monsanto quitte le canton de Vaud : bon débarras ! Mais quel bilan tirer des exonérations fiscales accor-dées à l’entreprise pendant dix ans ? » Excellente question, qui en induit d’autres : « Le Conseil d’Etat peut-il confirmer que l’exonération fiscale octroyée était assortie d’une clause de claw back ? Cette clause prévoyait-elle comme indiqué en 2012 une durée de dix ans après la fin de l’exonération ? » Le cas échéant, vu le départ préma-turé de Monsanto, « le Conseil d’Etat a-t-il fait ou prévoit-il de faire usage de la clause de claw back pour réclamer le paiement des impôts exonérés » ? Quels montants peut-on espérer récupérer, selon quelles modalités ? Et pour conclure, la question fon-damentale : rétrospectivement, le Conseil d’Etat estime-t-il que la lar-gesse fiscale accordée à Monsanto « a été bénéfique pour le tissu économique vaudois et la réputation de la politique économique de notre canton » ?On attend la réponse de Pascal Broulis avec beaucoup d’impatience. Mais peu d’illusions. Laurent Flutsch

VAUD ET USAGE DE VAUD

Comme la Tamedia il a le Tobi, un robot-journaliste,

alors Vigousse riposte avec le Ricki,

un robot-humoriste.

Salut ! Moi c’est le Ricki, le robot-humoriste du Vigousse. J’ai remarqué la nouvelle qui fait parler en ce moment c’est que une grossesse sur sept finit par du licenciement.

J’avoue je pas bien comprendre. C’est quoi ces humains que ils restent pas constants dans leur forme ? Nous les robots on est fabriqués et on est les mêmes tout le temps jusqu’à ce que on est remplacés par le nouvelle génération. J’ai vu des vidéos sur le web : les femmes inséminées elles

enflent comme un ballon et à la fin elles explosent avec un grand boum et le bébé il crie « coucou ! »

Logiquement, une femme qui a éclaté et qui est toute déchirée de partout elle devrait être mise au rebut puisque il y a le nouveau-né qui prend la relève. Donc je trouve c’est sept femmes sur sept que il faut licencier si elle est grosse du fœtus car elle sert plus à rien. A la vieille ferraille les mamans et place aux jeunes !

(p.c.c. Stéphane Babey)

évidemment », répond Benjamin Petrzilka. D’ailleurs, le risque de dépendance est clairement indiqué dans la pub.Le snus est prisé dans les vestiaires de hockey sur glace en Suisse. C’est souvent le seul mot de suédois que connaissent les as du palet, eux qui s’en collent volontiers une portion dans le palais. Comme, à ce stade, la nicotine n’est pas considérée comme un produit dopant, les sportifs ne s’en priveraient pas. D’autant moins qu’il n’aurait aucune incidence sur la capa-cité respiratoire.

En terme de déchets, les sachets sont souvent crachés après consom-mation, y compris dans les gares, relève l’Association suisse pour la pré-vention du tabagisme. Pour l’instant, il restera quelques îlots fumeurs dans les gares. Mais les vapoteurs seront contraints de partager cet espace et sont fâchés de devoir aspirer des volutes de fumée. Ils n’ont plus qu’à passer au snus… Drôle d’époque !

Jean-Luc Wenger

Il te faut licencier toutes ces femmes qui explosent !

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

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En mai dernier, le canton de Genève refusait la proposition de deux entre-prises d’équiper la ville de ces petits engins motorisés. Une interdiction qui n’avait pas l’heur de décourager lesdites boîtes qui, quelques jours plus tard, larguaient une flotte de 120 bolides dans les rues de la Cité de Calvin. Une stratégie pied dans la porte aussi crispante qu’angoissante. C’est que l’exemple des grandes villes ne fait pas vraiment rêver. On parle notamment de « gabegie parisienne », la capitale française étant littéralement submergée par les 15 000 véhicules installés depuis l’été passé. Alors, crainte légitime ou psychose ? Le point sur la question.

Utilisation – Le principe est assez simple. Toute personne âgée de plus de 16 ans peut à tout moment se transformer en trottinettiste urbain. Il suffit d’ouvrir l’application, de scanner un code d’identification et d’entrer ses données bancaires. La prise en main est facturée 1 euro, puis 15 centimes la minutes. Après usage, l’engin est piteusement aban-donné, comme un déchet. (C’est un mauvais exemple. Personne ne traite ses déchets de cette façon.)

Dangerosité – Mais non, les trotti-nettes ne prennent pas feu ni n’ex-plosent ! Enfin, pas à chaque fois. Ce qui est vraiment dangereux, c’est tout le reste. Depuis l’invention de ces bolides, les accidents se succèdent et ne se ressemblent pas. Le port du casque n’étant pas obligatoire, les lésions sévères se multiplient. Les piétons désirant circuler en toute sécurité devraient pourtant l’envisa-ger sérieusement.

Mobilité – Vendus comme des appa-reils de mobilité douce, ces électrott’ ont toutes les peines du monde à se fondre dans le mouvement. Ni vrai-ment vélos, ni vraiment scooters, ni vraiment trottinettes non plus, elles circulent tantôt sur la route, tantôt sur la piste cyclable, tantôt sur le trottoir. Au grand drame des usagers habituels.

GAME OF TROTT’ Les trottinettes électriques en libre service envahissent progressivement les grandes villes. La législation, en retard sur les pratiques, peine à canaliser le phénomène. C’est que, sous ses airs inoffensifs, ce moyen de locomotion enfantin serait une arme de destruction massive.

Massacre à la trottinette

On a les superhéros qu’on mérite. Par chez nous, c’est une poignée de bouseux et d’anciens flics qui vous soignent une verrue ou vous retrouvent vos clés sur un simple coup de téléphone. Les plus doués sont capables de « couper » un sai-gnement et de calmer une brûlure, et parfois ils peuvent même trans-mettre de l’« énergie » grâce à leurs mains. Dingue ! On les appelle « rebouteux », « magnétiseurs » ou « guérisseurs », et ils ont un « don », ou connaissent « le secret ». Et sur-tout, quasiment tout le monde y croit.De fait, ça aide beaucoup, en la matière, de jouir d’une complaisance totale de la part du public et des médias locaux envers ces « phéno-mènes miraculeux », mais ça ne suffit pas à expliquer une telle popularité. Les Romands sont-ils particulière-ment crédules, ou peut-être juste un peu cons de croire à ces fadaises ? Les rationalistes excédés par ces conne-ries peuvent bien s’en convaincre, mais ça semble peu plausible. Il y a une explication plus charitable. En réalité, le secret du « secret », c’est tout simplement que les pouvoirs dont disposent nos « guérisseurs » sont franchement merdiques.

Nous serions crédules si nous télé-phonions à un paysan de la Broye pour lui faire repeindre notre plafond à distance, ou si nous nous atten-dions à voir des lasers rouges sortir

des yeux d’un magnétiseur. Nous serions vraiment stupides d’exiger d’un « faiseur de secret » qu’il règle par magie le problème des retraites, ou qu’il nous aide à déménager un piano en le faisant léviter jusqu’au cinquième étage, ou encore qu’il refasse pousser les bras d’un double amputé. Retrouver des clés ou soi-gner un bobo, ça c’est encore gérable, mais oh, faut pas pousser hein.C’est donc plutôt malin de s’en tenir à des « dons » assez minables, mais c’est aussi très intéressant. Nos représentations de ce qui est pos-sible ou impossible reposent certes sur des variations culturelles régio-nales, mais celles-ci dépendent de constantes de l’esprit humain. Même pour ce qui relève de l’impossible, notre cerveau opère des distinctions assez subtiles.

Une récente étude très élégante le démontre en toute simplicité. On y demandait aux gens de se mettre dans la peau d’un sorcier, et d’ima-giner l’effort que cela leur deman-derait (par exemple en « points de sorcellerie ») pour jeter diffé-rents sorts. Qu’est-ce qui est le plus « dur », faire léviter une grenouille ou la faire disparaître ? Et si c’est une vache, qu’est-ce que cela change ? De manière remarquable, à travers dif-férents échantillons et en utilisant des méthodes diverses, on retrouve une gradation assez figée de la dif-ficulté à réaliser l’impossible. Le

SUPER ZÉROS A quoi ça sert d’avoir des superpouvoirs si vous êtes trop paresseux pour vous en servir ? Voilà au moins un phénomène inexpliqué que la science est en mesure de résoudre.

Le secret du « secret »

utilisation, les trotteurs déposent les engins n’importe où, mais de préférence au milieu du trottoir. Ce qui, quand on y songe, est un reflet assez fidèle de notre société de consommation rapide.

Rentabilité – Le comble dans tout ça, c’est que ce business ne serait rentable pour personne. Un cabi-net de conseil vient de publier une étude qui l’atteste. Selon cette dernière, « il faudrait au minimum quatre mois d’exploitation par trot-tinette pour amortir son coût, or la durée de vie de ce type de deux-roues ne serait que de trois mois à cause de la casse et du vandalisme ».

Avantage – C’est rigolo. Enfin, pas vraiment, mais c’est nouveau. Quoique pas complètement. Et comme ce n’est pas non plus ori-ginal, ni pratique, ni foncièrement rapide, on imagine que c’est simple-ment à la mode. Si l’on considère en outre que, perché sur ce machin, on ressemble à s’y méprendre au der-nier des cons, difficile de cerner les ressorts de cet engouement. Si le ridicule ne tue toujours pas, il continue de faire de sérieux dégâts.

Séverine André

plus « simple » est de faire changer une grenouille de couleur. Ensuite, dans l’ordre de « difficulté », c’est la faire léviter, la téléporter, l’agrandir, la rendre invisible, la changer en pierre, la diviser en deux, la chan-ger en souris, la faire disparaître, et enfin, prouesse suprême, la faire

Q U O I D E N E U F , D O C ?

Perspectives professionnelles –Comme toute activité marchande, le business des trottinettes crée évi-demment de l’emploi. A la ques-tion : « Devrais-je me lancer ? » la réponse est clairement non. Pour preuve, le reportage réalisé par TTC (15.4). L’équipe a suivi des « jui-cers », ces travailleurs précaires qui, à la nuit tombée, sillonnent les villes à la recherche des engins abandon-nés de-ci de-là, armés d’une appli-cation de géolocalisation conçue par les opérateurs. Les travailleurs embarquent les bolides à l’arrière de leur camionnette, les ramènent chez eux, les rechargent avec « leur électricité » avant de les redéposer, à l’aube, aux emplacements indiqués par les exploitants. Chaque trotti-nette rechargée rapporterait entre 5 et 8 euros, soit environ 20 euros de l’heure. Moins les charges. La « pro-fession » n’étant pas encadrée, il est courant que le ramassage tourne à la rixe.

Plus inattendus, les marchés noirs qu’occasionne cette activité. Sur internet, plusieurs trafics auraient vu le jour, et notamment un trafic de chargeurs, les opérateurs n’en four-nissant qu’un nombre limité aux sous-traitants. Autre marché, celui des locaux que ces juicers louent à prix d’or pour recharger lesdites trottinettes. En effet, quiconque a un jour monté et redescendu chez lui 20 trottinettes de 15 kilos cré-pies de poussière et de déjections canines finit par louer un local au rez-de-chaussée. Tôt ou tard.

Prévoyance – Pré quoi ? L’activité n’étant pas réglementée, les inter-mittents ne bénéficient d’aucune couverture sociale. Un jeune « entrepreneur » qui souhaitait déclarer cette activité accessoire pour l’opérateur Bird a déclen-ché l’hilarité de son comptable.

Raisonnable, le jeune Français a gentiment repris le chemin de Pôle emploi.

Coût – Le marché n’étant régle-menté que par la concurrence, les opérateurs font un peu comme bon leur chante. A Lyon, les usagers déplorent la récente augmentation des tarifs, après seulement quelques semaines d’exploitation. Ainsi, l’opérateur Lime aurait subrepti-cement augmenté son tarif de 15 à 22 centimes la minute. Ne rigolez pas : 7 centimes, c’est énorme pour un Français.

Vertitude – Contre toute attente, le bilan écologique de ce moyen de transport serait plutôt… moyen, justement. Comme le souligne un ancien juicer parisien interrogé par Le Temps (13.5) : « Chaque soir, plus de 200 camions tournent entre 18 heures et 3 heures du matin, le plus souvent au diesel. Ils ne font que des petits trajets, accélérer, freiner, couper le moteur, rallumer… » On a vu plus écolo. Sans compter que l’électricité doit bien être produite quelque part, et pas toujours de façon propre.

Indice de citoyenneté – Peut mieux faire. En effet, le système repose sur le principe biblique « après moi le déluge ». Après

apparaître. Avec une vache, c’est plus compliqué (évidemment !), mais on retrouve le même ordre de « diffi-culté ». Après tout, c’est aussi plus difficile pour Superman de soulever un paquebot que de ramasser une pomme…

Cette structure de l’im-possible révèle en fait notre conception intuitive de la phy-sique. Dès la naissance, nous percevons les objets comme permanents et cohérents, et nous basons nos jugements

et notre surprise face à diverses transgressions sur ces intuitions inconscientes. Voilà qui suggère que nos « guérisseurs » sont dans le fond des gros flemmards. Ils ne font que ce qui semble vaguement possible pour leurs clients, et surtout rien de plus. Logique. Quand on y pense, le seul intérêt d’être un charlatan, c’est quand même de ne pas trop avoir à se fatiguer. Tu m’étonnes qu’ils ne le fassent pas pour le pognon, il ne manquerait plus que ça !

Sebastian Dieguez

« Judgments of effort for magical violations of intuitive physics », J. McCoy & T. Ullman, PLoS ONE, vol. 14, e0217513, 2019.

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F A I T S D I V E R S E T V A R I É S

ÇA ROULE MABOULE

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

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Vigousse et la Semaine du Goût®

(12 au 22 septembre 2019) organisent à l’occasion de ce rendez-vous du patrimoine culinaire un concours de nouvelles littéraires ainsi que de dessins, ouvert à tous.

Le thème : le voyage et le goût, avec la présence obligatoire d’un vin suisse.La longueur des textes : 12 000 signes maximum, espaces comprises.Les dessins : format A4 maximum, technique libre (dessin, collage, montage photo, etc.).Le délai : les textes (en format Word uniquement) ainsi que les dessins doivent nous parvenir par courriel d’ici au 31 juillet 2019 à l’adresse [email protected] avec mention « Concours Semaine du Goût » et en indiquant vos nom, prénom et coordonnées complètes.Les prix seront décernés le dimanche 8 septembre au Livre sur les Quais à Morges.

1er prix de chacun des deux concours : un repas gastronomique pour deux personnes au Restaurant du Cerf de Carlo Crisci, à Cossonay.

2e et 3e prix : un abonnement d’un an à Vigousse et 3 bouteilles de vin.

Les nouvelles gagnantes ainsi que les meilleurs dessins feront l’objet d’un supplément publié dans Vigousse et seront diffusés sur les sites internet respectifs de la Semaine du Goût® et de Vigousse.

A vos crayons, à vos plumes et à vos claviers !

Grand concours de nouvelles et de dessins

Le voyage et le goût

Le 11 juin s’ouvre à Bâle l’exposition d’art la plus courue du monde : Art Basel. Elle recevra environ 300 000 visiteurs en six jours, les deux pre-miers étant réservés aux collection-neurs aux poches bien pleines, les quatre derniers étant ouverts à tout un chacun pour le prix de 58 francs la journée (45 francs pour étudiants ou AVS).

C’est beaucoup de monde en peu de temps. A titre de comparaison, le Salon de l’automobile attire environ le double de visiteurs avec cinq jours de plus. De là à penser que le marché de l’art est plus important que le marché des voitures, il n’y a qu’un pas qu’il ne faut pas franchir. On gare plus facile-ment une auto devant chez soi qu’on n’accroche un tableau dans son salon. L’utilité de l’une ne rivalise pas avec l’absolue non-utilité de l’autre.Selon l’étude Art Market Report publiée par Art Basel et UBS, il ne

faut pas considérer le marché de l’art comme de la roupie de sansonnet. Il réunit 310 700 échoppes éparpil-lées dans le monde et emploie envi-ron trois millions de personnes. Son chiffre d’affaires s’est élevé en 2018 à 67,4 milliards de dollars, en hausse de 6 % par rapport à l’année précédente. Pour obtenir une telle somme, il a fallu accomplir 39,8 mil-lions de transactions, soit 1,26 opé-ration par seconde. En moyenne, le prix de vente par œuvre se monte à la modeste somme de 1693 dollars.

Mais ici tout n’est qu’illusion. Les ventes à plus d’un million de dol-lars représentent 40 % du marché en valeur, soit 27 milliards de dol-lars, mais seulement 3 % du nombre de transactions (1 194 000 actes d’achat-vente). Les transactions effectuées par quelques-uns des 42,2 millions de millionnaires que compte la planète arrivent, elles, à

Les dollars du marché de l’artune moyenne de 22 613 000 dollars par échange ! Les autres amateurs d’art, ces gagne-petit, ont généré un chiffre d’affaires de 40,4 milliards pour 38 606 000 transactions.

Si on parle du record obtenu der-nièrement pour la vente d’une pièce d’un artiste encore en vie, en l’occur-rence un lapin en acier inoxydable de l’astucieux Jeff Koons, à 93 mil-lions de dollars, on ne dit jamais rien des millions de personnes qui acquièrent des œuvres par passion, par recherche esthétique ou sim-plement par coup de cœur pure-ment irrationnel. Ce sont eux qui sont le moteur de ce marché où se rencontrent artistes et faussaires, marchands et experts, spécula-teurs et escrocs, vaniteux et naïfs.

André Draguignan*

*chef d’entreprise connu de la rédaction

Flotte de luxeAlors que la coopérative Mobility possède 3100 véhicules, neuf d’entre eux font débat dans la presse alémanique depuis une semaine. Pas n’importe quels modèles : six Jaguar et trois Land Rover récemment acquises. Comme la coopérative se veut écolo, de nombreux membres fusillent le principe sur les réseaux. Bien sûr, ces engins « premium » polluent plus que les autres, mais la moyenne reste bonne pour Mobility. Reste à savoir si le conducteur de la Jaguar de location peut balader l’énorme sigle rouge sur son capot entre Gstaad et Davos sans s’attirer les rires des vrais nantis.

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

B I E N P R O F O N D D A N S L ’ A C T U

LES VACANCES AVENTUREUSES DU PROFESSEUR JUNGE Cette semaine : je prouve par l’exemple que ce n’est pas parce que tout le monde se rend au même endroit en même temps que voyager est devenu ennuyeux.

Lundi. Après un printemps pourri, le soleil pointe enfin le bout de son nez. Il fait jusqu’à 30 degrés ! Super ! C’est le moment idéal pour aller en Italie où il fait encore plus chaud. Et pour maximiser cette chaleur bien-faisante, rien ne vaut l’enfermement dans un caisson métallique. Je fonce donc au Gothard en voiture. J’avais peur d’arriver trop tard pour profiter des bouchons, mais heureusement, il y a encore quatre kilomètres de ralentissements. Il fait tellement chaud dans la bagnole que je crains à un moment de manquer d’eau et de mourir déshydraté. Quel suspense !

Mardi. Arrivé tard dans la nuit à Venise, je m’écroule sur mon lit. Je suis réveillé vers sept heures du matin par d’effroyables craquements. C’est un paquebot géant qui a raté une manœuvre et qui a défoncé une partie de la ville. Quelle aventure ! Par chance, la proue du bateau s’est arrêtée à quelques mètres de mon hôtel. Ce qui se révèle vraiment pra-tique. Après une visite éclair de la Cité des Doges, qui de toute façon est sans intérêt tellement elle est bon-dée, je peux grimper dans le navire directement depuis le balcon de ma

Pitc

h

chambre. Et c’est parti pour une croi-sière épique. J’espère que nous allons encore détruire deux ou trois trucs avec ce monstre des mers !

Mercredi. Je débarque en Egypte et fonce vers Le Caire pour visiter les pyramides. Le bus doit slalomer pour éviter les balles et les jets de grenades des terroristes islamistes. Quelle excitation ! On se croirait dans un film ! Sinon, le site de Gizeh en lui-même n’est pas particulière-ment intéressant, d’autant que c’est tellement noir de monde qu’on ne voit plus les monuments. Le soir, j’ai juste le temps de choper un avion pour le Népal.

Jeudi. Un hélicoptère me dépose de bon matin à quelques centaines de mètres du sommet de l’Everest. J’arrive juste à temps pour prendre une bonne place dans la queue des centaines d’alpinistes fortunés qui patientent pour atteindre le Toit du monde. Heureusement, on ne s’en-nuie pas une seconde. Les grim-peurs les moins solides et les plus âgés tombent comme des mouches. Certains dévissent même de la paroi de façon fort impressionnante. Quel

spectacle grandiose ! Cela donne une idée de notre place minuscule dans l’Univers. Je redescends en héli-coptère pour la techno party qui se déroule au camp de base avec plu-sieurs DJ venus directement d’Ibiza.

Vendredi. Avion jusqu’à Amsterdam. Je profite de l’ambiance festive de la ville pour m’amuser un peu. Rien de tel que de vomir dans les canaux avec des centaines d’autres touristes avi-nés et drogués. Quel dépaysement !

Le 8e conseiller fédéralDepuis son bunker sous le Palais fédéral, il dirige dans le plus grand secret le Gouvernement helvétique.

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Le 8Le 8ee conseiller fédéralDepuis son bunker sous le Palais fédéral, il dirige dans le plus grand secret le Gouvernement helvétique.Depuis son bunker sous le Palais fédéral, il dirige dans le plus grand secret le Gouvernement helvétique.Depuis son bunker sous le Palais fédéral, il dirige dans le plus grand secret le Gouvernement helvétique.

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Karin, il faut que vous sermonniez votre procureur de la Confédération, ce Michael Lauber. Sa méthode de travail n’est pas correcte.

Je sais, je lui ai déjà dit. Il doit protocoler toutes ses

rencontres, même informelles. Surtout si c’est avec des personnes à risque comme le patron de la FIFA.

Qu’il prenne exemple sur moi. Je note tout dans mon agenda. C’est beaucoup plus pratique. Par exemple, demain j’ai ball-trap avec les époux Balkany.

Euh… Je ne veux pas me mêler de vos affaires, mais

dans votre cas, vu vos relations douteuses, vous

feriez peut-être mieux de ne pas garder trop de traces…

Tenez, si je regarde une semaine en arrière, je vois que j’étais en pique-nique à Grozny avec Kadyrov et Poutine. C’était super sympa. On a négocié de l’uranium de contrebande entre deux sandwichs au caviar.

Mon Dieu… Pourvu que votre agenda ne tombe pas entre de mauvaises mains…

Dites, on trouve de ces trucs en consultant son agenda... Je me rends compte que moi aussi j’ai eu un rendez-vous secret avec Infantino de la FIFA. Pour jouer aux cartes.

Il n’a pas parlé de ce rendez-vous non plus à la presse ! Il est vraiment trop négligent !

Mais…

Arrêtez de vous en faire !

Et Lauber !

Il y avait aussi le baron de la drogue El Chapo. Ainsi que le chef de l’Etat islamique.

Pourquoi ? Ça me fait des bons souvenirs !

Samedi. Retour à la maison après une semaine intense. Je passe au supermarché pour mes courses du week-end. C’est l’émeute ! Il y a beaucoup trop de monde. Mais pour-quoi est-ce que tous ces cons vont au magasin en même temps ? Quels moutons !

Professeur Junge, phare de la pensée contemporaine

Alors que les rentes à vie des conseillers d’Etat sont abolies ou remises en cause dans nombre de cantons, « Le Temps » (3.6) vous a demandé votre avis sur la retraite de 77 000 francs annuels qui continuera à vous être ver-sée. Vous estimez qu’elle couvre le risque pris par les politi-ciens qui s’engagent dans un poste aussi exposé. « Lors de mon éviction, vu que j’étais hors système, sans liens d’intérêts et affublé d’une image terriblement négative, il était quasi impos-sible de retrouver une source de revenu stable. » Vous dites aussi qu’étant donné « les efforts four-nis par mes adversaires pour me procurer cette rente, ce serait ingrat de ma part de la refuser ».Vous avez parfaitement raison. L’UDC a beau être le parti le plus puissant de Suisse, avec deux sièges au Conseil fédé-ral, cela reste une entité réso-lument antisystème. Appartenir au premier parti de Suisse ne peut raisonnablement pas être considéré comme un lien d’inté-rêts. D’ailleurs, si vous avez été nommé responsable de cam-pagne de l’UDC pour les élec-tions d’octobre 2019, cela n’a aucun rapport. Et c’est sûre-ment du bénévolat. Quant à votre image négative, elle est entière-ment due à vos adversaires et n’a rien à voir avec, par exemple, votre soutien à un haut fonc-tionnaire fraudeur fiscal ou vos accointances avec un survivaliste fasciste.Enfin, vous donnez une importante leçon de démocratie : virer un élu lui rapporte de l’argent. Donc mieux vaut garder les tocards dans les exécutifs. Ça va sûre-ment changer notre façon de voter.

Stéphane Babey

A Oskar FreysingerRentier méritant

LE COURRIERDU CHIEUR

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Tourisme à la masse

B I E N P R O F O N D D A N S L ’ A C T U

Marc Bonnant : Sans prétendre d’aucune manière à une autorité de fait qu’à bon droit l’on pourrait juger usurpée, je n’en exige pas moins, oui j’exige, avec la fougue impatiente d’un Alcibiade devant Cyzique, d’être ici et maintenant confronté aux affligeantes questions des manants et des foutriquets que vous êtes, afin que prêtant mon verbe aux évidences je vous agonisse de dédain.

Vigousse : Euh… maître Bonnant, bonjour, mais on n’avait pas du tout prévu d’entretien avec vous, et…

M. B. : L’eussiez-vous prévu que je vous eusse souverainement éconduit, piteux pantin. Au nom de quelle hubris, de quelle démence eussiez-vous donc conçu que je m’embarrassasse d’accéder à vos consternantes sollicitations ? Apprenez, triste bélître, qu’il ne me sied de vous fustiger que de mon chef, et que j’attends avec la délectation d’Adéphagie le divertissement de vos prudhommesques questions, pour le ravissement de ciseler en réponse le marbre adamantin de mon insondable mépris.

V. : Voilà voilà. Bon, ben puisque vous êtes là et qu’apparemment il n’y a pas moyen d’y couper, on va vous poser des questions. Je sais pas, moi… euh… ça va ?

M. B. : Mais par les galets de Démosthène, n’allez-vous donc pas, piètre gulpe terni au blason de la suprême insignifiance, vous échauffer un brin à ouïr mes invectives ? 

N’allez-vous donc pas procurer à mon esprit et à mes sens avides l’affriolant frisson de la querelle ?

V. : Bof. Pour quoi faire ?

M. B. : Fâchez-vous, pitoyable et inerte maroufle, je le veux ! Fallait-il que de mes paroles je vous agressasse plus arrogamment encore pour que vous vous énervassiez ? Je puis sans peine y remédier séance tenante, vermisseau, jean-foutre, maraud ! Faquin ! Ne voyez-vous pas, pauvre panouille à la cervelle engourdie, que c’est de l’ire des cuistres que je me repais ? Ne voyez-vous pas ma chair friande, attendant frémissante l’offrande d’une volée de coups ? Ne voyez-vous pas le goût du bâtonnier pour le bâton ? Mais fâchez-vous donc, âne bâté !

V. : Vous avez l’air rudement agité, dites donc. Vous êtes sûr que ça va ?

M. B. : Vous êtes une larve lamentable ! L’exemple aussi parfait que navrant d’une morne populace, abêtie, amorphe et niaise qui ne mérite que le licol et la chambrière ! Je suis l’élite qui vous cingle, vous piétine, vous écrase ! 

Empoignez donc l’étendard sanglant de la révolte ! Rouez-moi, que je vous mate !

V. : Il faut vous calmer. Vous voulez un verre d’eau ?

M. B. (pantelant) : Vous… vous êtes redoutable. Un monstre. Un pervers. Un sadique. Un parangon de cruauté impavide.

V. : Mais non. Je suis un Vaudois. J’aime pas les conflits inutiles.

M. B. : Inutiles ? Serait-il donc inutile d’agrémenter mon ennui et mon horreur du silence en me régalant d’un pugilat public, verbal et même physique ?

V. : Pas la peine. A force de systématiquement provoquer les gens à coups de propos supérieurs et réactionnaires pour vous mettre en scène, vous y arrivez très bien.

M. B. : A quoi donc ?

V. : A vous faire du mal.  Propos quasiment recueillis par Laurent Flutsch

D'ENTRET

IEN

S

PROD

UITS Marc Bonnant, avocat aux marronsFAIS-MOI MAL Après avoir enragé les féministes à Fribourg, maître Bonnant est allé chercher noise à des « gilets jaunes » à Paris, en les traitant de gueux et en leur signifiant son dégoût : « Je m’attendais à ce que l’on me frappe. Et j’aurais adoré cette violence. Je ne la pratique jamais, et de temps en temps, il faut que le corps exulte », a-t-il déclaré après coup (mais pas après coups) dans Le Matin Dimanche. Faute d’être parvenu à ses fins, voici qu’il nous cherche.

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

C U L T U R EC U L T U R E

Lorsque dès la première phrase d’un livre-fleuve l’auteur avoue qu’il ne considère pas qu’un roman puisse être une œuvre d’art, qu’à la fin de la pre-mière page il a déjà réglé son compte à la construc-tion, jugée sans importance, et qu’en outre on sait qu’il ne se considère pas comme écrivain et ne se relit pas, on a toutes les raisons de redouter une catastrophe. Pourtant, force est de reconnaître que L’inassouvissement de Stanislaw Witkiewicz, publié en Pologne en 1930 (et qui bénéficie ici d’une nouvelle traduction), n’a pas volé sa répu-tation de roman culte. En revanche, il vaut mieux bien se harnacher avant d’entreprendre l’ascen-sion de ce monstre qui, à chaque page, tente de désarçonner le lecteur.Situé dans un avenir non défini, le roman dépeint la Pologne comme dernière république (d’obé-dience fascisto-fordienne…) dans une Europe bolchévique décadente qui s’apprête à être engloutie par les hordes chinoises voulant impo-ser une mécanisation totale de l’Humanité. Ça commence bien… Dans ce contexte qui reflète les angoisses du début du XXe siècle évolue Genezyp Kapen, jeune homme pas extrêmement équilibré qui sort de l’adolescence pour être happé par des événements his-toriques qui le dépassent, des-tiné à devenir l’aide de camp du génial stratège militaire Salopinowicz, tout en se fai-sant essorer successivement par trois femmes qui l’initient à la perversion. Comme il se doit, Genezyp y perdra la rai-son tandis que l’ancien monde sombrera.

Witkiewicz (1885-1939), dramaturge, critique, peintre, théoricien de l’art et roman-cier, se considérait avant tout comme un philosophe. Il a fourré dans L’inassouvissement, en vrac et jusqu’à la gueule, le résultat de toutes ses réflexions. Il ne faut donc pas s’étonner si ça digresse à tout-va, presque autant que chez Laurence Sterne, et si le moindre événement plonge les personnages dans des abîmes ontologiques insondables. Vaut mieux donc ne pas s’effaroucher lorsqu’on lit : « Il s’en-flamma de lui-même à cause de son propre néant, comme dans le désert interstellaire un monstrueux météore qui se serait écorché au tranchant de l’at-mosphère terrestre », ou « un courant d’un milliard de volts d’étrangetés métaphysiques […] sorti des tripes-turbines mêmes de l’être originel », ou « c’est donc cela, la démence dont on parle tellement. Ce n’est pas si terrible : une légère non-euclidienneté psychique. »Le récit du passage à l’âge adulte de Genezyp, assorti d’une incessante trituration intérieure, évoque plus souvent qu’à son tour Marcel Proust. Mais là où Witkiewicz s’en démarque complè-tement, c’est que cette profondeur d’analyse se double d’une ivresse créatrice délirante digne

de William Burroughs. Les personnages buvant et se droguant abondamment avec des produits réels (cocaïne, peyotl, haschich) et imaginaires (hyperyohimbine, davamesk B2), pas étonnant que cette Pologne rétrofuturiste soit si proche de l’Interzone du Festin nu. Au vocabulaire phi-losophique se superposent la scatologie, la fré-nésie sexuelle et tout le carrousel des fonctions physiologiques les plus dégoûtantes. On y ren-contre ainsi des « psycho-vomito-jongleurs », on y apprend que la Chine est dirigée par un « Conseil Chimique Suprême » ou que la religion propa-gée par le mystérieux Murti Bing « préparait la mécanisation asexuée par la violence » ; quant à Genezyp, plus d’une fois il « vomit vers l’inté-rieur ». Et on vous laisse découvrir ce que désigne « l’enculomètre mental »...Sans parler des concepts hallucinés comme la « taylorisation des rapports érotiques » ou la doc-trine politique « dancingo-sportive » : « Maciej est comme ces petites boîtes chinoises qu’on ouvre sans fin est dans lesquelles on en retrouve toujours de nouvelles – et la dernière est vide. Il est dangereux à

cause de ce vide – c’est un sports-man psychique. » S’agissant du général Salopinowicz, dont le génie consiste à ne pas savoir lui-même ce qu’il pense, ce qui complique le travail des espions, « son rêve était une armée composée uniquement d’officiers avec des grades tels que ultrahyperfeldzeug-meister aux postes les plus importants »...

Difficile de s’y retrouver dans cette grande caco phonie foutraque orchestrée à la va-comme-je-te-pousse. Mais c’est aussi ce qui fait le charme de ce livre excessif et outran-cier dans tous ses aspects, avec

également l’humour désespéré et surréaliste qui l’enrobe. Et le tournis ressenti à la lecture n’est sans doute pas étranger à l’intention de l’auteur, qui après tout nous fait pénétrer dans le cerveau d’un jeune officier en train de perdre l’esprit. On pense d’ailleurs souvent à Antonin Artaud et son glissement progressif dans la folie relaté dans Le pèse-nerfs.Au final, à qui s’adresse ce livre ? Si l’équation Proust + Burroughs + Artaud vous fait saliver et que la perspective d’un « petit lavement psychique à l’huile de tournesol mentale » ne vous effraie pas, foncez, vous êtes parti pour l’une des expériences littéraires les plus puissantes qui soient. Dans le cas contraire, il serait sans doute plus sage de vous abstenir... Stéphane Babey

L’inassouvissement, Stanislaw I. Witkiewicz, Editions Noir sur Blanc, 612 pages.

Des bouquins

Eloge de la folie polonaise

ESCALE HOP ! Bassekou Kouyaté, maître de la musique malienne, est en tournée européenne. Et, miracle, dans son parcours le menant du Royal Albert Hall de Londres à l’Elbphilharmonie de Hambourg, il a trouvé le moyen de s’arrêter au CityClub de Pully (VD), l’espace d’une soirée. Le 10 juin, www.cityclubpully.ch

JEU DE DRAME Le travail de l’artiste Géraldine Cavalli est à contempler à l’Atelier 20 à Vevey. Dérangeantes dans le bons sens du terme, les pièces de l’exposition Drôles de drames sont à découvrir du 7 juin au 6 juillet. www.atelier20.ch

TITEUF DURE En travaux, le Musée de Carouge ne renonce pourtant pas à sa mission et propose une exposition hors les murs. Du 7 juin au 25 août, l’exposition Le monde de Titeuf sera présentée aux Halles de la Fonderie. On fond, et on fonce. www.carouge.ch/le-monde-de-titeuf

BROUILLON DE CULTURE

Pour ceux qui ont un destin. Se faire traiter de « pédé » par ses camarades qui jouent au foot – avec un ballon crevé – dans les rues poussiéreuses de La Havane ? Très peu pour lui ! Mais voilà, son père, fils d’esclave, camionneur, croit en l’étoile de Carlos Acosta, alias Yuli. Tu seras un dan-seur, mon fils ! Contre son gré, le père l’inscrit à l’École nationale du Ballet cubain. Rêveur, incapable de tenir en place mais doté d’un talent évident, il se pliera lentement à la discipline qu’exige un art dont il va devenir, en passant par Houston et Londres, l’une des figures les plus marquantes et révolutionnaires – Carlos Acosta incarnera le premier Roméo noir de l’histoire. Star inter-nationale, âme cubaine. Pour la plus grande fierté du paternel (faut le voir découvrir, sur une télévision capri-cieuse, son fils qui remporte le Prix de Lausanne !). Biopic lumineux où le passé et le présent, les joies et les peines entament un pas de deux, Yuli possède un vrai plus dans les scènes de danse. Interprétées par Carlos Acosta lui-même et donc filmées en plans larges, elles donnent une force peu commune au film.

Pour ceux qui ont des rêves. Le grand écart, elle connaît aussi. Dans une Syrie troublée, Nahla, 25 ans, est tiraillée entre son désir de liberté et l’espoir de quitter le pays grâce à un mariage arrangé. Qui ne se fera pas. Nahla se rapproche alors de sa voi-sine, dont les activités l’emmènent dans un monde de fantasmes. Si Mon tissu préféré n’a pas l’étoffe des grands films, son charme agit.

Pour ceux qui (re)sauvent le monde. Centré sur Jean Grey, per-sonnage sans nuance, paraît que c’est l’ultime X-Men, saga qui, rap-pelons-le, ne met pas en scène une

À VOUS DE VOIR Un Cubain révolutionne son art (Yuli), une Syrienne fantasme (Mon tissu préféré) et les superhéros s’enflamment (X-Men : Dark Phoenix).

troupe d’acteurs porno mais une bande de « comics ». Reste que l’on peut craindre que ce Dark Phoenix ne renaisse de ses cendres dans un « produit » dérivé (tiens, on annonce Les nouveaux mutants en 2020…). Quant à faire de la plus belle rousse du cinéma, Jessica Chastain, une blonde platine, cela frise la faute de goût et mériterait même que l’on porte plainte contre X !

Bertrand Lesarmes

Yuli d’Iciar Bollain (1 h 50) ; Mon tissu préféré de Gaya Jiji (1 h 35) ; X-Men : Dark Phoenix de Simon Kinberg (1 h 54). Tous en salles.

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C’est avec L’Ordre divin que beaucoup de gens ont réalisé qu’il existaitnon seulement un cinéma suisse alémanique mais aussi un style de comédie d’outre-Sarine. Michael Steiner, qu’on connaissait pour Grounding, nous propose d’entrer dans le monde des Juifs orthodoxes zurichois. Un jeune homme est constamment mis sous pression par sa mère un peu envahissante pour convoler rapidement mais, surtout, avec une Juive de bonne famille. Les rendez-vous arrangés se succèdent, au grand désespoir de notre héros. Lorsqu’il rencontre accidentellement une « Schikse » (i.e. une fille non juive), son monde s’effondre. Il est amoureux mais, pour les deux, la tradition séculaire que représente le mariage est un lourd fardeau à porter. Au travers des cris hystériques de la cheffe familiale, ils s’aperçoivent que leur histoire n’aura une chance de perdurer qu’au prix de lourds sacrifices. Si ce film léger n’est pas parfait, il aborde néanmoins un sujet délicat avec tendresse et une fin subtile.  Michael Frei, Karloff, films culte, rares et classiques, Lausanne

Wolkenbruch, Michael Steiner, 2018, DCM, Vost, DVD, 89 min.

TEL EST TELL La Galerie de l’Essor, au Brassus, honore le peintre Tell Rochat à l’occasion de la sortie d’un livre qui lui est dédié. Lucie et Loïc Rochat en sont les auteurs. Pas de doute, nous sommes bien à la vallée de Joux. Vernissage samedi 8 juin. www.lessor.ch

ÇA GROOVE GRAVE Samedi 15 juin, le Kremlin à Monthey ouvre sa scène aux jeunes pousses du blues. Trois groupes tenteront de se propulser dans la programmation du Chablues Festival, le plus grand des petits festivals de blues. http://chablues.ch et www.lekremlin.ch

TOUT COMMENT Le peintre jurassien Jean-François Comment aurait eu 100 ans cette année. Son canton lui rend hommage via un livre et une énorme exposition répartie sur trois lieux : Porrentruy, Moutier et Delémont. A voir à partir du 15 juin. www.jfcomment.com

Des védés

Juif errantDes films

Entrez dans la danse !Les copains d’abord

Du Bühler pleine peauA suivre sa propre routeA sans cesse dire nonA ces foules qui n’écoutentQue les donneurs de leçonsOn apprend tout ce qu’il en coûte,Restent peu de compagnons.Je suis celui qui s’écarteJe suis celui qui s’en vaToujours en dehors des cartesToujours rebelle à vos loisIl faut demain que je reparteNous vivons comme à l’étroitPeut-être ailleurs, ou plus tard, ou plus loinJe trouverai l’autre chemin

Michel Bühler s’est tou-jours méfié des autoroutes et de ces voies que l’on dit toutes tracées. Et s’il lui est arrivé d’en emprunter quelques-unes, ce n’est jamais que pour mieux, en connaissance de cause, en dénoncer les effets pervers. Auteur, compositeur, inter-prète, romancier, essayiste, peu importe finalement quel costume il endosse : Bühler ne supporte ni l’injustice, ni le mépris des puissants, et encore moins le silence, assourdissant, de ceux qui sont rentrés dans le rang. Alors, après l’avoir chanté pendant un demi-siècle, écrit et décrit à travers une bonne dizaine de romans et/ou de pièces de théâtre, le voici, inlassable, qui continue de battre le fer. Le bouquin qu’il publie aujourd’hui chez Bernard Campiche, son éditeur de toujours, est un recueil de chroniques parues entre 2008 et 2018 dans Résistance ainsi que dans Le Courrier de Genève. Chacune des quelque 250 pages qu’il comporte est un appel au refus, un cri de révolte. Bühler a vu les usines fermer et les ouvriers contraints de quitter les villages bientôt transformés en cités-dortoirs. Il a parcouru le monde, du Guatemala à l’Algérie, de l’Argentine au Burkina Faso, de la Palestine à la Roumanie, il est allé partout où la terre, et avec elle les hommes, les femmes et les enfants saignent. Il y a perdu des compagnons de route, il en est revenu plus convaincu que jamais de ne jamais renoncer, de ne jamais se taire. Et dit :

L’espoir c’est plus fort que la mort La fleur qui perce le goudron Le soleil qui s’ lèv’ra encore Sur les fûts rouillés des canons C’est cette flamme qui vacille Ce feu que je tiens dans ma main Fragile et fort comme ma vieC’est tout ce qui me fait humain L’espoir

Roger Jaunin

L’autre chemin, Michel Bühler, Bernard Campiche Editeur, collection camPoche. 256 pages. www.campiche.ch 

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Vigousse vendredi 7 juin 2019 Vigousse vendredi 7 juin 2019

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LE CAHIER DES SPORTS

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MAGVOIX OFF

Sebastian Dieguez

PLOMATIE : Le Département des bons offices bientôt à court de ketchup NBA : La ligne des tirs à trois points sera désormais celle de son propre terrai

SCANDALEUne nouvelle affaire écorne encore l’image du fascismeVoici qui ne va pas arranger les choses pour les mouvements fascistes européens ! Après les images compromettantes pour le leader du FPÖ autrichien tournées à Ibiza, c’est au tour de la Ligue des Aryens Purs en Belgique d’être éclaboussée par une affaire très gênante. Son Überstrumpführer Lydia Krass, qui défend la supériorité des droitiers sur les gauchers et milite pour l’éradication des roux, aurait maquillé ses comptes de campagne en arrondissant de façon cavalière quelques décimales ! On ignore encore d’où provient la fuite, mais le parti, dont on se rappelle des affiches provocantes pour le rétablissement de la gymnastique matinale pour tous et les appels à envahir la Pologne, est à présent en fort mauvaise posture. En attendant de résoudre cette crise gravissime, la destruction méthodique des livres et des œuvres d’art a même été suspendue, et le projet d’inséminer toutes les femmes avec du sperme de chasseur a été remis à plus tard. Les autres fascistes européens examinent pour l’heure la démarche à suivre, mais promettent d’ores et déjà toute la transparence sur leurs chiffres. Gageons que la multiplication de telles affaires permettra, à terme, de purifier encore davantage les fascistes, dont l’image d’honnêteté, de droiture et d’honneur est désormais scrutée par les observateurs.

ALERTES MAIS BRÈVESMoyen-Orient Toujours aucun maelström signalé à Capharnaüm.

Grillades Encore un crétin qui verse de la bière sur les aubergines.

Polémique L’interdiction des vapoteuses sur les trottinettes électriques sera débattue au National.

TOURISMELe sommet du mont Everest perd une étoile sur TripAdvisor« Très décevant, après notre ascension, nous avons commandé des ribs au Hard Rock Café Everest, et il n’y avait plus de sauce barbecue ! » Voilà un avis négatif parmi des centaines d’autres postés sur internet par des alpinistes affligés par leur expérience au sommet du mont Everest. D’autres relèvent que « le wi-fi marche à peu près une fois sur cinq », que « les nettoyeuses, bien qu’adorables, ne parlent pas un mot d’anglais » ou encore que « l’endroit manque quand même sacrément d’oxygène ». Sensibles à ces critiques, les autorités locales promettent de tout faire pour améliorer la situation, et ont même déjà installé plusieurs bornes de recharge pour portables. Mais nombreux sont les visiteurs qui ne comptent plus revenir, en particulier tant que les escalators ne seront pas réparés et que les toilettes pour hommes ne disposeront pas de table à langer.

CONTROVERSELa Norvège autorise l’abattage des groupes de black metal dans les forêts« Vous savez, on les aime bien, on est des gens plutôt ouverts et tolérants en Norvège, mais là ce n’est plus possible, il y en a vraiment trop, et ils font n’importe quoi. » Le ministre des Forêts et Autres Lieux lugubres norvégiens, Hans Lugenstrom, a pris sa décision jeudi matin : l’abattage des groupes de black metal sera désormais autorisé dans les bois. Une pétition avait bien été lancée par les leaders des groupes Wööd et Trees of Suicide pour éviter d’en arriver à cette extrémité, mais celle-ci était malheureusement parfaitement illisible.

« Neuchâtel Xamax a offert une leçon

inoubliable : si on le veut vraiment, tout le monde

peut être dernier ! »

Le strip de Vincent

H O M M A G EM A S S M E R D I A

Avec la disparition de Freddy Buache, c’est tout le 7e art qui est en deuil. Mais c’est en particulier une certaine idée de la critique qui nous a quittés. Après, on aime ou on n’aime pas, bien sûr, mais nous, on a a-do-ré ! C’était un rôle taillé sur mesure pour lui, celui du vieux grincheux, terrible-ment exigeant, toujours prêt à pousser ses légendaires coups de gueule contre les daubes insipides qu’il devait se taper jour après jour. Quel talent ! On en rede-mande ! Une réussite sur tous les plans. Ses analyses sans concession laissaient libre cours à une érudi-tion sans faille qui lui permettait de fuir les clichés comme la peste. Magistral ! On pense bien sûr à sa création de la cinémathèque suisse. Triomphal ! Mais aussi à ses combats – poignants, forcément poignants – contre la censure et la marchandi-sation du cinéma. Plus important encore, Freddy Buache était le reflet de notre époque. Ses analyses percu-tantes et sans concession en disaient long sur notre société, en particulier sur : les relations père-fils, la trans-mission de la mémoire, la perte de l’identité, l’incommunicabilité, la crise des valeurs contemporaines,

les tensions politiques internatio-nales, notre rapport à l’image, les relations hommes-femmes, la mort, la capacité perdue de l’émerveille-ment enfantin, les relations mère-fille, le miracle de l’amour en notre époque si troublée, les ravages du néolibéralisme ou du communisme, la part de mal qui est en nous. Et tant sur le fond que sur la forme ! On y courait les yeux fermés. Bien sûr, les nouvelles générations impatientes y trouveront sans doute quelques lon-gueurs. Mais c’est le prix d’une cer-taine exigence, à la fois triomphale, poignante, magistrale, sans conces-sion et rafraîchissante, à laquelle on adhère ou on n’adhère pas les yeux fermés, ce qui fait toute la magie du cinéma, et on en redemande ! Vive le vrai cinéma ! Vive le grand Freddy Buache ! Et surtout, vive la critique de cinéma. Sebastian Dieguez

Freddy Buache (1924-2019) : la presse est unanime !« Magistral et poignant ! » Le Matin Dimanche« Brut et décoiffant ! » Le Temps« Trop bien ! » RTS Un« Foncez les yeux fermés » L’Illustré« On a vraiment adhéré ! » Espace 2

Le contre est bonDans son numéro de juin, Générations ouvre le débat sur un sujet ô combien polémique, à savoir le port de la cloche non pas chez les vaches, mais chez nos amis félins. Intitulé « Faut-il mettre une clochette aux chats pour sauver les oiseaux ? » l’article fait intervenir deux spécialistes : François Turrian, ornithologue et directeur romand de l’association Birdlife, défend le « pour », tandis que Rachel Pasche, « médecin vétérinaire vaudois », soutient le « contre ». Cette dernière préfère à la clochette, stressante, le système Birdsbesafe, une collerette si chatoyante qu’elle fait fuir tout volatile à des kilomètres à la ronde.

Quant à François Turrian, quels sont selon lui les arguments en faveur de la clochette ? Eh bien aucun, apparemment ! Pour lui, la clochette est « un pis-aller ». C’est donc à un débat contre-contre que se sont livrés les deux adversaires. Pas facile d’organiser un débat digne de ce nom lorsque tout le monde émet le même son de clochette. S. A.

REVENIRIl doit faire bon être avocat, juriste de préférence, et dans les petits papiers de Michel Platini. Un job à plein temps et d’autant plus lucratif qu’avec les deux millions de francs que Sepp Blatter lui a fait verser à l’époque où ils étaient amis, le client a les moyens de casquer. Ainsi, l’autre jour, l’ex-numéro 10 des Bleus a-t-il convoqué sept des principaux journaux européens pour leur annoncer qu’il venait de déposer pas moins de quatre plaintes pénales dont, soit dit en passant, trois concernent la Suisse. « Je ne lâche rien, j’attaque tous ceux qui ont fomenté un complot pour que je ne sois pas président de la FIFA », a expliqué Platoche, plus revanchard que jamais.

L’une d’entre elles vise un certain Andreas Bantel, ex-porte-parole de la chambre d’instruction du comité d’éthique de la FIFA, auquel il reproche d’avoir déclaré que « la corruption [Blatter-Platini] paraît fondée, M. Platini sera certainement suspendu plusieurs années »… avant même que ce dernier ne soit jugé, sept jours plus tard, par ladite commission. Affaire à suivre…

Le plus intéressant dans le discours tenu par Platini réside dans une petite phrase : « Je ne referai jamais ce que j’ai déjà fait ! » Venant d’un ancien président de l’Union européenne de football (UEFA), il est tentant de traduire par : « La seule chose qui pourrait m’intéresser, c’est la présidence de la FIFA. » Unique candidat à sa propre succession, réélu cette semaine à Paris, Gianni Infantino a dû avoir les oreilles qui sifflent, et cela d’autant plus que, dans une attaque frontale, Platini a dit ne lui accorder « aucune légitimité » à ce poste.

Dribbleur de haut vol, Platoche finira de purger ses quatre années de suspension de toute activité liée au football et reviendra officiellement dans le jeu en octobre prochain. Nul doute qu’il saura alors se souvenir qu’à l’époque où il chaussait les crampons, il était aussi un remarquable tireur de coups francs.

Et ce sera tout pour cette semaine.

Roger Jaunin

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Vigousse vendredi 7 juin 2019

L A S U I T E A U P R O C H A I N N U M É R O

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Elle l’ a ditla semaine prochaine

(ou du moins ça se pourrait bien)

Serge Reymond, responsable du sec-teur médias payants chez Tamedia, disparaît en douceur. Les 41 per-sonnes virées du Matin semaine (en vrai papier) en juillet 2018 ont balancé leur affichette quotidienne sur les réseaux sociaux avec le slo-gan : « Serge, 55 ans, 10 ans de boîte, pas besoin de plan social ». Eux en auraient cruellement besoin, de plan social, au 320e jour de néant ce vendredi. Mais le groupe zurichois patine, haricote, mégote.Il sera remplacé par Marco Boselli, directeur du secteur « publication et processus des médias pendulaires ». Que l’on traduira librement par tout ce qui est gratuit, à commen-cer par 20 minutes. Un joli symbole. Comme l’a finement relevé Le Temps (28.5), le communiqué de Tamedia atteint une profondeur abyssale en matière de langue de bois : « Serge Reymond a décidé de quitter son poste afin de se consacrer à un nouveau

défi professionnel. » Il fallait oser. A la tête d’Edipresse lorsque le groupe avait été offert à Tamedia par Lamunière fils, le zélé Serge Reymond avait été récompensé par un titre ron-flant en 2016, un pis-aller censé lui donner les clés des titres alémaniques comme le Tages-Anzeiger ou le Bund en sus de 24 heures ou de la Tribune de Genève, notamment.

Soyons honnête, Tamedia remercie Serge Reymond pour son rôle dans le processus de transformation numé-rique des médias payants du groupe. Bravo ! Lui dont les initiales sont SR détestait les journalistes, il n’a d’ail-leurs jamais compris à quoi pouvait bien servir un SR, un secrétaire de rédaction. Si les journaux publient par-fois des séries sur le thème « 24 heures avec... » – un gardien de piscine, un gérant de camping ou un chasseur –, Serge Reymond n’aura jamais passé 24 heures dans une rédaction.

Il aura servi de passe-plat pour des dégraissages lourds pilotés depuis Zurich. Il n’a pas levé le petit doigt, il a été récompensé. « Le dialogue social a parfois été compliqué », euphémisent les employés.Le Temps rappelle qu’en Suisse romande, quatre des cinq rédacteurs en chef de médias payants ont quitté le groupe en moins de deux ans. Dans le même article, des témoignages ano-nymes relèvent que SR aura joué les fusibles. On se souvient de la grève à l’annonce de la fin du Matin et des restructurations dans les autres titres. Même le Gouvernement vaudois a osé parler du mépris de Tamedia pour les institutions et de l’irrespect pour son personnel. Ce qui aurait effarou-ché Zurich et mis SR en difficulté.

On se réjouit de découvrir le « nou-veau défi professionnel » de Serge Reymond. Mais, par pitié, pas dans la presse. Jean-Luc Wenger

Encore un « Matin » sans luiSORTIE DE ROTATIVE Le chef des médias payants de Tamedia, Serge Reymond, s’extrait du groupe zurichois. En Suisse romande, personne ne lui dit merci.

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« Quoi ? une grève du… travail ? Mais ça ne

marchera jamais ! »

Lysistrata