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14 Revue Marocaine de Rhumatologie FMC Syndrome des jambes sans repos : une affection méconnue ? Restless legs syndrome : an underrecognized disease ? Ghita Sqalli Houssaini, Latifa Tahiri, Fatima Zahra Abourazzak, Taoufik Harzy Service de Rhumatologie, CHU Hassan II, Fès - Maroc. Résumé Le syndrome des jambes sans repos (SJSR) est une affection neurologique chronique, qui se manifeste par des symptômes sensorimoteurs touchant préférentiellement les membres inférieurs, survenant au repos, temporairement soulagés par le mouvement et majorés la nuit. Sa prévalence augmente avec l’âge et les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes. Son diagnostic est clinique. Bien que la majorité des cas de SJSR sont primaires ou idiopathiques, des formes secondaires de SJSR ont été décrites dans un certain nombre de situations médicales comme la grossesse, ou pathologiques comme les carences martiales avec ou sans anémie, l’insuffisance rénale terminale et les neuropathies périphériques. Le SJSR est souvent méconnu et sous diagnostiqué ce qui a pour conséquence une mauvaise prise en charge de cette affection. Une meilleure connaissance de ce syndrome est indispensable pour entreprendre un traitement ciblé et efficace. Mots clés : Syndrome des jambes sans repos ; Diagnostic ; Traitement. Abstract The restless legs syndrome (RLS) is a chronic sensori-motor disorder characterized by a complaint of an irresistible urge to move the legs. This urge can often be accompanied by pain or other unpleasant sensations, it either occurs or worsens with rest, particularly at night, and temporarily improves with activity. RLS prevalence increases with age, and women are more frequently affected than men. Diagnosis is made based on clinical symptoms. Although RLS is mainly idiopathic, several clinical conditions have been associated with it, mainly pregnancy, iron deficiency with or without anemia, end-stage renal disease and peripheral neuropathy. RLS is often underdiagnosed and there is a clear need for complementary education to improve the accurate diagnosis of RLS. Indeed, a better knowledge of this syndrome is a prerequisite to prompt an appropriate therapeutic management. Keywords : Restless legs syndrome; Diagnosis; Treatment. Rev Mar Rhum 2013; 26: 14-9 Le syndrome des jambes sans repos (SJSR) est un trouble neurologique sensitivomoteur fréquent et souvent non diagnostiqué, s’accompagnant de troubles du sommeil. Il se caractérise par des sensations désagréables affectant préférentiellement les membres inférieurs et s’accompagnant d’un besoin impérieux de les bouger pour soulager les symptômes [1]. Ces troubles sont accentués au repos. Ils surviennent principalement le soir ou la nuit. Il est souvent accompagné de mouvements périodiques des jambes (MPJ). La sévérité des symptômes varie beaucoup entre des troubles occasionnels et des symptômes sévères survenant toutes les nuits [1,2]. Le SJSR peut être idiopathique (primaire) ou symptomatique (secondaire) lorsqu’une cause favorisante est identifiée. Sa physiopathologie est mal connue. Son diagnostic repose sur l’interrogatoire du malade. La décision d’instaurer un traitement doit être dictée par la sévérité des symptômes et du handicap fonctionnel du patient. QUELLE EST LA PRÉVALENCE DU SJSR ? La prévalence du SJSR dans les pays occidentaux varie entre 3,9 et 24 % de la population générale adulte [3,4]. Elle augmente avec l’âge. Le SJSR se manifeste généralement au milieu de l’âge adulte. Mais, les symptômes peuvent apparaître dès l’enfance ou à l’adolescence [5]. Les femmes sont plus touchées que les hommes avec des estimations de prévalence allant de 5,2 Disponible en ligne sur www.smr.ma Correspondance à adresser à : K. Nassar Email : [email protected]

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Revue Marocaine de Rhumatologie

FMC

Syndrome des jambes sans repos : une affection méconnue ?Restless legs syndrome : an underrecognized disease ?

Ghita Sqalli Houssaini, Latifa Tahiri, Fatima Zahra Abourazzak, Taoufik Harzy

Service de Rhumatologie, CHU Hassan II, Fès - Maroc.

RésuméLe syndrome des jambes sans repos (SJSR) est une affection neurologique chronique, qui se manifeste par des symptômes sensorimoteurs touchant préférentiellement les membres inférieurs, survenant au repos, temporairement soulagés par le mouvement et majorés la nuit. Sa prévalence augmente avec l’âge et les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes. Son diagnostic est clinique.

Bien que la majorité des cas de SJSR sont primaires ou idiopathiques, des formes secondaires de SJSR ont été décrites dans un certain nombre de situations médicales comme la grossesse, ou pathologiques comme les carences martiales avec ou sans anémie, l’insuffisance rénale terminale et les neuropathies périphériques.

Le SJSR est souvent méconnu et sous diagnostiqué ce qui a pour conséquence une mauvaise prise en charge de cette affection. Une meilleure connaissance de ce syndrome est indispensable pour entreprendre un traitement ciblé et efficace.

Mots clés : Syndrome des jambes sans repos ; Diagnostic ; Traitement.

AbstractThe restless legs syndrome (RLS) is a chronic

sensori-motor disorder characterized by a

complaint of an irresistible urge to move the legs.

This urge can often be accompanied by pain or

other unpleasant sensations, it either occurs

or worsens with rest, particularly at night, and

temporarily improves with activity. RLS prevalence

increases with age, and women are more frequently

affected than men. Diagnosis is made based on

clinical symptoms.

Although RLS is mainly idiopathic, several clinical

conditions have been associated with it, mainly

pregnancy, iron deficiency with or without anemia,

end-stage renal disease and peripheral neuropathy.

RLS is often underdiagnosed and there is a clear

need for complementary education to improve

the accurate diagnosis of RLS. Indeed, a better

knowledge of this syndrome is a prerequisite to

prompt an appropriate therapeutic management.

Keywords : Restless legs syndrome; Diagnosis; Treatment.

Rev Mar Rhum 2013; 26: 14-9

Le syndrome des jambes sans repos (SJSR) est un trouble neurologique sensitivomoteur fréquent et souvent non diagnostiqué, s’accompagnant de troubles du sommeil. Il se caractérise par des sensations désagréables affectant préférentiellement les membres inférieurs et s’accompagnant d’un besoin impérieux de les bouger pour soulager les symptômes [1]. Ces troubles sont accentués au repos. Ils surviennent principalement le soir ou la nuit. Il est souvent accompagné de mouvements périodiques des jambes (MPJ). La sévérité des symptômes varie beaucoup entre des troubles occasionnels et des symptômes sévères survenant toutes les nuits [1,2]. Le SJSR peut être idiopathique (primaire) ou symptomatique (secondaire) lorsqu’une cause favorisante est identifiée. Sa

physiopathologie est mal connue. Son diagnostic repose sur l’interrogatoire du malade. La décision d’instaurer un traitement doit être dictée par la sévérité des symptômes et du handicap fonctionnel du patient.

Quelle est lA pRévAlenCe du sJsR ?

La prévalence du SJSR dans les pays occidentaux varie entre 3,9 et 24 % de la population générale adulte [3,4]. Elle augmente avec l’âge. Le SJSR se manifeste généralement au milieu de l’âge adulte. Mais, les symptômes peuvent apparaître dès l’enfance ou à l’adolescence [5]. Les femmes sont plus touchées que les hommes avec des estimations de prévalence allant de 5,2

disponible en ligne sur

www.smr.ma

Correspondance à adresser à : K. Nassar

Email : [email protected]

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Syndrome des jambes sans repos : Une affection méconnue ?

à 27,6 % chez les femmes et de 2,3 à 20,2 % chez les hommes [3,4]. Les études épidémiologiques suggèrent l’intervention de facteurs ethniques pour expliquer les différences observées dans les chiffres de prévalence, les caucasiens étant les plus touchés.

Quelles sont les hypothèses physiopAthologiQues ?

La physiopathologie du SJSR est très complexe et fait intervenir différentes structures cérébrales. Il serait la conséquence d’un dysfonctionnement de la boucle sensorimotrice à différents niveaux d’intégration [6]. L’efficacité des traitements dopaminergiques suggère l’implication du système dopaminergique descendant qui a un effet inhibiteur au niveau de la corne postérieure de la moelle [7,8]. C’est ce contrôle inhibiteur des afférences sensitives qui serait déficient, expliquant l’apparition de troubles sensitifs variés corrigés partiellement par le mouvement. Il en résulte une hyperexcitabilité médullaire prédominant au niveau lombosacré, à l’origine des mouvements périodiques durant l’éveil. Le sommeil entraîne une libération médullaire physiologique qui serait accentuée dans le SJSR, à l’origine des mouvements périodiques durant le sommeil lent.

Dans le SJSR idiopathique, l’hypothèse d’une dégénérescence des voies dopaminergiques descendantes prenant origine dans le noyau A11 a été proposée mais reste à confirmer [9].

La carence martiale joue un rôle central dans la survenue et l’aggravation du SJSR [10].

Le SJSR est une maladie polygénétique. Les études de liaison ont mis en évidence plusieurs variants mais le phénotype très variable du SJSR au sein d’une même famille mais aussi entre les familles rend difficile la mise en évidence des variants génétiques responsables de la maladie [11]. Ces dernières années, il a été démontré une association du SJSR avec 3 variants géniques : MEIS1, BTBD9, MAP2K5/LBXCOR1.

CoMMent FAiRe le diAgnostiC de Ce syndRoMe ?

Le diagnostic du SJSR est un diagnostic exclusivement clinique qui repose sur l’interrogatoire du malade. Les signes cliniques nécessaires au diagnostic ont été revus lors d’un groupe de consensus international mais ne prennent en compte que les signes sensorimoteurs [12]. Quatre critères sont essentiels au diagnostic et doivent être tous présents pour porter le diagnostic :

1- Un besoin impérieux de bouger les membres (le plus souvent les jambes) habituellement accompagné ou causé par des sensations désagréables, pénibles au niveau des jambes.

2- Le besoin de bouger et les sensations désagréables commencent ou s’aggravent lors des périodes de repos ou d’inactivité, en position assise ou couchée.

3- Ces symptômes sont partiellement ou totalement soulagés par le mouvement (marche, étirement) au moins tant que dure le mouvement.

4- Ils s’aggravent ou ne surviennent que le soir ou la nuit.

Les sensations désagréables peuvent être décrites par les patients comme des sensations d’agacements, de tiraillements et d’impatiences, parfois de décharges électriques, voire de douleurs, de brûlures dans 20 % des cas environ.

En raison de la relative faible spécificité (84 %) de ces 4 critères le groupe qui a établi le consensus international a ajouté des critères additionnels [12] :

- La présence d’antécédents familiaux : L’existence d’un SJSR chez les apparentés du premier degré est retrouvée dans plus de 60 % des cas dans plusieurs études.

- La réponse positive au traitement à la L-DOPA ou aux agonistes dopaminergiques, à faibles doses [13] : Ce test thérapeutique peut donc être utilisé comme test diagnostique dans les cas difficiles.

- L’existence de mouvements périodiques des membres le soir à l’éveil ou au cours du sommeil : Les mouvements périodiques des jambes (MPJ) sont des mouvements involontaires, de triple flexion du membre, prédominant dans la partie distale (orteils, pied voire jambe) qui sont bien différents des mouvements volontaires réalisés par les malades pour lutter contre les sensations désagréables. Ils sont retrouvés chez 80% des sujets atteints de SJSR. Mais, ils ne sont pas spécifiques puisqu’ils sont retrouvés dans d’autres maladies (notamment respiratoires) et chez des sujets asymptomatiques. Et on a les signes cliniques associés qui portent sur l’évolution du SJSR qui est variable, mais typiquement chronique et souvent progressive, aussi sur les troubles du sommeil fréquents chez les malades les plus sévères et sur l’examen clinique et neurologique normal dans les formes idiopathiques.

CoMMent AppRéCieR lA sévéRité du sJsR ?

L’appréciation de la sévérité du SJSR est importante pour

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G. Sqalli et al.

la mise en route et la conduite d’un traitement. Il existe 2 échelles cliniques validées de sévérité du SJSR. Une échelle internationale, l’IRLSSG Rating scale [14] qui est un autoquestionnaire de 10 questions qui permet de classer les malades en 4 groupes selon que le syndrome est de sévérité légère (score 1 à 10), moyenne (score 11 à 20), sévère (score 21 à 30) ou très sévère (score 31 à 40) (Tableau1) et l’échelle du groupe de John Hopkins [15] qui définit 3 stades de sévérité selon l’heure d’apparition des symptômes :

- Minime : Signes cliniques au coucher ou la nuit.

- Modérée : Signes cliniques à partir de 18H.

- Sévère : Signes cliniques avant 18H ou au cours de la journée.

Quelles sont les ConséQuenCes du syndRoMe des JAMbes sAns Repos ?

a- somnolence diurne

L’importance de la privation chronique de sommeil devrait logiquement induire une somnolence diurne. Or, il existe dans le SJSR un hyperéveil qui serait un symptôme primaire de la maladie [16]. Par ailleurs, lorsque la somnolence diurne excessive (SDE) est présente chez les femmes atteintes de SJSR, elle serait associée à un risque de mortalité plus élevé [17].

b- Asthénie

L’asthénie est essentiellement secondaire aux troubles du sommeil.

c- Trouble déficit de l’attention avec hyperactivité (tdAh)

Le TDAH est retrouvé non seulement chez les enfants, comme cela est classique, mais aussi chez les adultes. Un mécanisme physiopathologique commun faisant intervenir le système dopaminergique pourrait être en cause.

d- Répercussions cognitives

Les répercussions cognitives de l’insomnie, notamment les troubles de l’attention, de la concentration et de la mémoire sont moins importantes chez les sujets atteints de SJSR que chez les sujets chroniquement privés de sommeil [18].

e- troubles psychologiques et psychiatriques

Les sujets ayant un SJSR ont plus de risque d’avoir des troubles psychologiques et psychiatriques, anxiété et dépression, et cette probabilité augmente avec la sévérité du syndrome.

f- Risque cardiovasculaire

Le SJSR serait associé à un risque cardiovasculaire [19]. Cette relation est peut-être due aux éveils nocturnes notamment lorsqu’ils dépassent 30 minutes ou encore aux MPJ qui entraînent une élévation de la pression artérielle systolique et diastolique d’autant plus marquée que le sujet est âgé et que la maladie est ancienne.

existe-t-il des étiologies Qui FAvoRisent l’appaRiTion de ce syndRome?

a- syndrome des jambes sans repos idiopathique La grande majorité des cas de SJSR sont idiopathiques, avec des formes à début précoce (avec histoire familiale dans 60 à 90 % des cas et à base génétique) et des formes tardives, d’évolution plus sévère.

FMC

1. Quelle est votre appréciation du désagrément provoqué par le SJSR ?1 : faible ; 2 : moyen ; 3 : désagréable ; 4 : très désagréable

2. Dans quelle mesure avez-vous besoin de bouger ?1 : faible besoin ; 2 : moyen ; 3 : grand besoin ; 4 : très grand besoin

3. Dans quelle mesure le désagrément s’améliore-t-il quand vous bougez ?1 : totalement ; 2 : moyennement ; 3 : légèrement ; 4 : aucune

4. Dans quelle mesure votre sommeil est-il perturbé ?1 : faiblement ; 2 : moyennement ; 3 : fortement ; 4 : très fortement

5. Dans quelle mesure êtes-vous fatigué(e) ou somnolent(e) ?1 : un peu ; 2 : moyennement ; 3 : fatigué(e) ; 4 : très fatigué(e)

6. Quelle est, pour vous, la gravité de votre SJSR dans son ensemble ?1 : pas très grave ; 2 : moyennement ; 3 : grave ; 4 : très grave

7. Quelle est la fréquence de votre SJSR ?1 : quelques jours par mois ; 2 : plusieurs jours par mois, 3 : au moins 5 jours par semaine ; 4 : tous les jours

8. Combien de temps durent vos symptômes ?1 : moins d’une heure ; 2 : 1 à 3 heures ; 3 : 3 à 8 heures ; 4 : plus de 8 heures

9. Quelle est l’influence du SJSR exercé sur votre quotidien ?1 : faible ; 2 : moyenne ; 3 : grande ; 4 : très grande

10. Quelle est l’influence du SJSR sur votre humeur ?1 : faible ; 2 : moyenne ; 3 : grande ; 4 : très grande

Appréciation de la sévérité des troubles- Très sévère : 31 à 40 points- Sévère : 21 à 30 points- Moyenne : 11 à 20 points- Légère : 1 à 10 points- Aucun : 0 point

Tableau 1 : Echelle internationale de sévérité du syndrome des jambes sans repos (SJSR). IRLSSG Rating scale

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b- syndrome des jambes sans repos secondaire

Les formes secondaires sont associées à certaines maladies comme le diabète, l’insuffisance rénale sévère, la carence martiale (avec ou sans anémie), les neuropathies et radiculopathies, les myélopathies, les maladies neurodégénératives dont la maladie de Parkinson et les maladies rhumatologiques comme la polyarthrite rhumatoïde et la fibromyalgie.

La grossesse peut être un facteur déclenchant ou très aggravant de SJSR.

De nombreux médicaments peuvent aggraver ou révéler un SJSR (Tableau 2).

Quels sont les diAgnostiCs diFFéRentiels ?

a- devant les troubles du sommeil

- Un syndrome anxieux parfois associé au SJSR.

- Un trouble obsessionnel-compulsif (rituels du coucher, ruminations nocturnes…).

- Des troubles de l’hygiène du sommeil (TV, travail…) mais parfois engendrés par un SJSR.

b- devant les douleurs des membres inférieurs :

- Troubles d’origine vasculaire : artérite ou insuffisance veineuse.

- Douleurs neuropathiques mais les 2 pathologies peuvent être associées.

- Akathisie des neuroleptiques.

- Painful legs and moving toes.

- Les crampes nocturnes.

Quelle stRAtégie théRApeutiQue pRoposeR ? (tAbleAu 3)

La décision d’instaurer un traitement doit être dictée par la sévérité des symptômes et du handicap fonctionnel du patient.

1- traitement des causes susceptibles de déclencher ou d’aggraver un syndrome des jambes sans repos - La carence en fer : L’administration de fer oral est recommandée quand le taux de la ferritine est inférieur à 45–50 µg/l ou quand le coefficient de saturation de la transferrine est inférieur 20%. La ferritine est contrôlée après

Syndrome des jambes sans repos : Une affection méconnue ?

1. Exclure les formes secondaires et traiter la maladie sous-jacente si possible (par exemple, carence en fer)2. Instaurer une bonne hygiène de sommeil, éliminer les médicaments pouvant aggraver le SJSR3. Limiter le traitement pharmacologique aux patients avec des critères diagnostics précis et des symptômes cliniquement significatifs4. Considérer l’âge, les maladies concomitantes5. Évaluation précise de la sévérité des symptômes pour juger ultérieurement de l’efficacité du traitement6. Patients avec des symptômes légers : L-DOPAPossibilité de prise discontinue (entre 50 et 400 mg) si symptômes intermittentsSi symptômes diurnes : 50 à 100 mg 1 heure avant le début présumé des symptômes (par exemple avant un voyage ou avant dialyse)7. Patients avec SJSR modéré à sévère, ou ayant développé des symptômes d’augmentation sous L-DOPA : Agonistes dopaminergiques (une prise unique le soir ou deux prises par jour)Pramipexole (Sifrol®) : 0,09–0,54 mg/jourRopinirole (Adartrel®) : 0,25–2 mg/jour8. Manifestations douloureuses : gabapentine 300–2400 mg/jour, prégabaline (Lyrica®) 75–300 mg/jour.9. Si pas de réponse : opioïdesOxycodone (Oxycontin®) : 5–20 mg/jourTramadol : 50–150 mg/jour

Tableau 3 : Stratégie thérapeutique : un algorithme pour la prise en charge du syndrome des jambes sans repos (SJSR)

- Neuroleptiques

Classiques (antagonistes des récepteurs D2)

Atypiques : rispéridone, olanzapine

- Antidépresseurs

Tétra/tricycliques

Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (fluoxétine, sertraline, paroxétine, escitalopram, citalopram)

Autres (venlafaxine, miansérine, mirtazapine, duloxétine)

- Antisécrétoires antagonistes des récepteurs H2 (cimétidine, ranitidine)

- Antiémétiques antagonistes de la dopamine (métoclopramide)

- Antihistaminiques sédatifs (diphenhydramine)

- Xanthines

- Lithium

- Interféron-alpha

- Zonisamide (antiépileptique qui, à des doses élevées, peut inhiber la dopamine)

- Analgésiques non-opioïdes (qui peuvent contenir de la caféine)

Tableau 2 : Médicaments associés au développement ou à l’aggravation d’un syndrome des jambes sans repos

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trois mois de traitement, puis tous les 3–6 mois, jusqu’à obtenir des valeurs de ferritine > 50 µg/l et un coefficient de saturation de la transferrine supérieur à 20 %.

- L’identification et l’arrêt, si possible, des médicaments qui peuvent aggraver ou induire un SJSR (Tableau 2).

2- traitements non pharmacologiques

- Une bonne hygiène de sommeil, avec des heures de coucher et de lever régulières.

- Une activité physique régulière et modérée.

- Les bains chauds et les massages.

- L’Eviction du café, le chocolat, la nicotine et les repas lourds le soir.

3- traitements pharmacologie

a- Agents dopaminergiques :

Plus de 90 % des patients répondent, totalement ou partiellement, à ces médicaments, bien que cette réponse ne se maintienne pas nécessairement à long terme. Ils améliorent les manifestations sensitives et la composante motrice, en général avec des posologies beaucoup plus faibles que celles utilisées dans la maladie de Parkinson.

l-dopA

La dose quotidienne habituelle varie entre 50 et 250 mg, en prise unique, 30 min à 1 heure avant l’heure du coucher. On commence par 50 mg de L-DOPA, la dose pouvant être augmentée par la suite jusqu’à l’obtention de l’effet optimal ou la dose maximale de 400 mg. Deux problèmes limitent l’intérêt de l’utilisation de la L-DOPA en première intention pour le traitement chronique du SJSR : les phénomènes de rebond (la résurgence de la symptomatologie en fin de dose, durant la nuit ou dans la matinée) et les phénomènes d’augmentation (la nécessité d’augmenter les doses car les symptômes apparaissent de plus en plus tôt dans la soirée). L’indication principale de la L-DOPA dans le traitement du SJSR est son utilisation ponctuelle (à la demande) [20].

Agonistes dopAMineRgiQues

Le traitement de choix du SJSR [21]. Deux agonistes dopaminergiques disposent de l’AMM en France pour le traitement symptomatique du SJSR idiopathique modéré à sévère (score > 10 à l’échelle de sévérité IRLSSG) : Le ropinirole (sous la dénomination d’Adartrel®) : La dose initiale recommandée est de 0,25 mg (1 comprimé dosé à 0,25 mg), une fois par jour pendant deux jours. Si cette

dose est bien tolérée, elle sera augmentée à 0,5 mg/jour jusqu’à la fin de la première semaine, puis si nécessaire à 1 mg/jour la deuxième semaine. La dose peut ensuite être augmentée de 0,5 mg par semaine sur les deux semaines suivantes, jusqu’à atteindre une dose de 2 mg/jour. Et le pramipexole (Sifrol®) : La dose initiale recommandée est de 0,09 mg (1/2 comprimé de Sifrol® dosé à 0,18 mg), à prendre une fois par jour 2 à 3 heures avant le coucher. Si cette dose s’avère insuffisante, elle peut être augmentée tous les 4 à 7 jours, jusqu’à la dose maximale de 0,54 mg par jour.

b- Antiépileptiques :

Aucun de ces médicaments n’a l’AMM en France pour cette indication. Ils peuvent constituer un traitement intéressant, en particulier dans les formes « douloureuses » ou quand les symptômes surviennent tôt dans la journée.

Le plus utilisé est la gabapentine à des posologies allant de 300 à 2400 mg/jour [22]. La prégabaline (Lyrica®) semble aussi efficace [23].

c- Opiacés :

Ces médicaments ne disposent pas de l’AMM en France pour cette indication. Ils sont utilisés seulement comme médicaments de deuxième intention, en particulier, pour des cas résistants aux agonistes dopaminergiques ou pour des patients ayant développé une augmentation, à des posologies souvent assez élevées.

d- Benzodiazépines :

Leur efficacité pourrait être en rapport avec un effet d’induction du sommeil plus qu’un effet direct sur le SJSR. La plus étudiée est le clonazépam (Rivotril®), qui à doses de 0,5 à 2 mg/jour, le soir est efficace sur les symptômes du SJSR et améliore les paramètres du sommeil [24].

ConClusion

Le SJSR est souvent sous diagnostiqué. Il faut savoir rechercher ce syndrome par un interrogatoire précis. Le traitement s’impose lorsque la symptomatologie retentit sur la qualité de vie et le sommeil. Les SJSR secondaires sont le plus souvent améliorés par le traitement de la maladie sous-jacente. Les agents dopaminergiques représentent les traitements de première intention.

déclaRaTion d’inTéRêT

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt.

RéFéRenCes

FMCG. Sqalli et al.

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Syndrome des jambes sans repos : Une affection méconnue ?