Symposium Cancer du rectum, huit ans après les RPC: qu’est-ce qui change vraiment ?

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Colon Rectum (2013) 7:264-266 DOI 10.1007/s11725-013-0496-4 RÉSUMÉ / ABSTRACT 5 Adénocarcinome du rectum : indication du traitement néoadjuvant L. Maggiori Service de chirurgie colorectale, pôle des maladies de l’appareil digestif, hôpital Beaujon, Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris‑VII (Denis‑Diderot), France Correspondance : [email protected] Les dernières recommandations françaises pour la prise en charge du cancer du rectum ont été publiées en 2007 [1]. Ces recommandations proposaient la réalisation d’un traitement néoadjuvant pour tout adé‑ nocarcinome du bas ou du moyen rectum classé T3–T4 et/ou N+ à l’issue du bilan morphologique. En ce qui concerne les modalités de ce traitement néoadjuvant, deux stratégies étaient proposées, en fonction de la marge de résection circonférentielle prévisible. En cas de marges supérieures à 1 mm, la réalisation d’une radiothérapie exclusive était en effet retenue, alors qu’une radiochimiothérapie était proposée aux patients avec une marge de 1 mm ou moins. Cependant, depuis 2007, plusieurs données sont venues modifier quelque peu ce paysage… La première de ces données est que l’association radio–chimio‑ thérapie permet une amélioration du contrôle local chirurgical par rapport à la radiothérapie seule comme l’ont bien montré les études de Bosset et al. [2] et de Gerard et al. [3]. Ces essais ont en effet montré que l’ajout d’une chimiothérapie concomitante à une radio‑ thérapie longue permettait de diminuer le taux de récidive locale à cinq ans de 17,1 % dans le groupe radiothérapie seule à 8,7 % dans le groupe radiochimiothérapie [2]. Cette donnée implique qu’une chimiothérapie doit être associée à la radiothérapie dans la grande majorité des cas où un traitement néoadjuvant est indiqué. Son corollaire est une franche diminution des indications du schéma court de radiothérapie. La deuxième donnée concerne l’intérêt du traitement néoad‑ juvant pour les tumeurs du haut rectum. En l’absence de bénéfice du traitement néoadjuvant pour ces patients dans l’essai hollandais [4], cette stratégie était en effet initialement sujette à débat. Les recommandations de 2007 proposaient cependant de discuter cette stratégie pour les tumeurs localement avancées. En 2008, l’essai de Braendengen et al., publié dans le Journal of Clinical Oncology [5], a confirmé que la radiochimiothérapie pouvait avoir un inté‑ rêt chez certains patients sélectionnés. En effet, chez des patients avec un cancer T4 du haut rectum, cette étude montrait que le taux de résection R0 était de 67 % chez les patients avec radiothérapie seule contre 84 % après radiochimiothérapie néoadjuvante. Cette étude a amené un grand nombre de centres à revoir le dogme de la contre‑indication au traitement néoadjuvant pour les cancers du haut rectum et à proposer une radiochimiothérapie pour les patients porteurs d’un adénocarcinome localement très évolué (T4). Cette stratégie est maintenant proposée dans les recommandations émises par l’Institut national du cancer (INCa). Enfin, l’importance des taux observés de réponse tumorale à la radiochimiothérapie, pouvant conduire à un taux de réponse complète tumorale atteignant 27 % dans certaines études, pourrait conduire à élargir les indications du traitement néoadjuvant chez certains patients sélectionnés, présentant une tumeur T2 du très bas rectum imposant initialement une amputation abdominopérinéale. Dans cette situa‑ tion, une réponse tumorale satisfaisante pourrait en effet permettre de réaliser une chirurgie curative avec conservation sphinctérienne. Les études sur le sujet sont cependant en cours, et aucune donnée à ce jour ne valide cette attitude en dehors de protocole. Références 1. Portier G (2007) Recommendations for clinical practice. Thera‑ peutic choices for rectal cancer. How should neoadjuvant therapies be chosen? Gastroenterol Clin Biol 31(Spec n o 1):1S23–S33, 1S89–S91 2. Bosset JF, Collette L, Calais G, et al (2006) Chemotherapy with pre‑ operative radiotherapy in rectal cancer. N Engl J Med 355:1114–23 3. Gerard JP, Conroy T, Bonnetain F, et al (2006) Preoperative radiotherapy with or without concurrent fluorouracil and leuco‑ vorin in T3–4 rectal cancers: results of FFCD 9203. J Clin Oncol 24:4620–5 4. van Gijn W, Marijnen CA, Nagtegaal ID, et al (2011) Preoperative radiotherapy combined with total mesorectal excision for resec‑ table rectal cancer: 12‑year follow‑up of the multicentre, rando‑ mized controlled TME trial. Lancet Oncol 12:575–82 5. Braendengen M, Tveit KM, Berglund A, et al (2008) Randomized phase III study comparing preoperative radiotherapy with chemora‑ diotherapy in nonresectable rectal cancer. J Clin Oncol 26:3687–94 6 Chirurgie du cancer du rectum L. Maggiori Service de chirurgie colorectale, pôle des maladies de l’appareil digestif, hôpital Beaujon, Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris‑VII (Denis‑Diderot), France Correspondance : [email protected] Les dernières recommandations françaises pour la prise en charge du cancer du rectum ont été publiées en 2007 [1]. Si les critères de qualité et les types d’intervention à réaliser (exérèse optimale du mésorectum avec 5 cm de marge sous la tumeur pour les cancers du haut rectum, exérèse totale du mésorectum avec 1 cm de marge distale pour les tumeurs du bas et du moyen rectum, marge circonférentielle supé‑ rieure à 1 mm, 12 ganglions dans le curage) n’ont pas fondamentale‑ ment évolué depuis ces dernières recommandations, plusieurs points ont été largement modifiés par les résultats d’études récentes. Symposium Cancer du rectum, huit ans après les RPC : qu’est‑ce qui change vraiment ? © Springer‑Verlag France 2013

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Colon Rectum (2013) 7:264-266DOI 10.1007/s11725-013-0496-4

RÉSUMÉ / ABSTRACT

5Adénocarcinome du rectum : indication du traitement néoadjuvantL. MaggioriService de chirurgie colorectale, pôle des maladies de l’appareil digestif, hôpital Beaujon, Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris‑VII (Denis‑Diderot), FranceCorrespondance : [email protected]

Les dernières recommandations françaises pour la prise en charge du cancer du rectum ont été publiées en 2007 [1]. Ces recommandations proposaient la réalisation d’un traitement néoadjuvant pour tout adé‑nocarcinome du bas ou du moyen rectum classé T3–T4 et/ou N+ à l’issue du bilan morphologique. En ce qui concerne les modalités de ce traitement néoadjuvant, deux stratégies étaient proposées, en fonction de la marge de résection circonférentielle prévisible. En cas de marges supérieures à 1 mm, la réalisation d’une radiothérapie exclusive était en effet retenue, alors qu’une radiochimiothérapie était proposée aux patients avec une marge de 1 mm ou moins. Cependant, depuis 2007, plusieurs données sont venues modifier quelque peu ce paysage…

La première de ces données est que l’association radio–chimio‑thérapie permet une amélioration du contrôle local chirurgical par rapport à la radiothérapie seule comme l’ont bien montré les études de Bosset et al. [2] et de Gerard et al. [3]. Ces essais ont en effet montré que l’ajout d’une chimiothérapie concomitante à une radio‑thérapie longue permettait de diminuer le taux de récidive locale à cinq ans de 17,1 % dans le groupe radiothérapie seule à 8,7 % dans le groupe radiochimiothérapie [2]. Cette donnée implique qu’une chimiothérapie doit être associée à la radiothérapie dans la grande majorité des cas où un traitement néoadjuvant est indiqué. Son corollaire est une franche diminution des indications du schéma court de radiothérapie.

La deuxième donnée concerne l’intérêt du traitement néoad‑juvant pour les tumeurs du haut rectum. En l’absence de bénéfice du traitement néoadjuvant pour ces patients dans l’essai hollandais [4], cette stratégie était en effet initialement sujette à débat. Les recommandations de 2007 proposaient cependant de discuter cette stratégie pour les tumeurs localement avancées. En 2008, l’essai de Braendengen et al., publié dans le Journal of Clinical Oncology [5], a confirmé que la radiochimiothérapie pouvait avoir un inté‑rêt chez certains patients sélectionnés. En effet, chez des patients avec un cancer T4 du haut rectum, cette étude montrait que le taux de résection R0 était de 67 % chez les patients avec radiothérapie seule contre 84 % après radiochimiothérapie néoadjuvante. Cette étude a amené un grand nombre de centres à revoir le dogme de la contre‑indication au traitement néoadjuvant pour les cancers du haut rectum et à proposer une radiochimiothérapie pour les patients porteurs d’un adénocarcinome localement très évolué (T4). Cette stratégie est maintenant proposée dans les recommandations émises par l’Institut national du cancer (INCa).

Enfin, l’importance des taux observés de réponse tumorale à la radiochimiothérapie, pouvant conduire à un taux de réponse complète tumorale atteignant 27 % dans certaines études, pourrait conduire à élargir les indications du traitement néoadjuvant chez certains patients sélectionnés, présentant une tumeur T2 du très bas rectum imposant initialement une amputation abdominopérinéale. Dans cette situa‑tion, une réponse tumorale satisfaisante pourrait en effet permettre de réaliser une chirurgie curative avec conservation sphinctérienne. Les études sur le sujet sont cependant en cours, et aucune donnée à ce jour ne valide cette attitude en dehors de protocole.

Références

1. Portier G (2007) Recommendations for clinical practice. Thera‑peutic choices for rectal cancer. How should neoadjuvant therapies be chosen? Gastroenterol Clin Biol 31(Spec no 1):1S23–S33, 1S89–S91

2. Bosset JF, Collette L, Calais G, et al (2006) Chemotherapy with pre‑operative radiotherapy in rectal cancer. N Engl J Med 355:1114–23

3. Gerard JP, Conroy T, Bonnetain F, et al (2006) Preoperative radiotherapy with or without concurrent fluorouracil and leuco‑vorin in T3–4 rectal cancers: results of FFCD 9203. J Clin Oncol 24:4620–5

4. van Gijn W, Marijnen CA, Nagtegaal ID, et al (2011) Preoperative radiotherapy combined with total mesorectal excision for resec‑table rectal cancer: 12‑year follow‑up of the multicentre, rando‑mized controlled TME trial. Lancet Oncol 12:575–82

5. Braendengen M, Tveit KM, Berglund A, et al (2008) Randomized phase III study comparing preoperative radiotherapy with chemora‑diotherapy in nonresectable rectal cancer. J Clin Oncol 26:3687–94

6Chirurgie du cancer du rectumL. MaggioriService de chirurgie colorectale, pôle des maladies de l’appareil digestif, hôpital Beaujon, Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris‑VII (Denis‑Diderot), FranceCorrespondance : [email protected]

Les dernières recommandations françaises pour la prise en charge du cancer du rectum ont été publiées en 2007 [1]. Si les critères de qualité et les types d’intervention à réaliser (exérèse optimale du mésorectum avec 5 cm de marge sous la tumeur pour les cancers du haut rectum, exérèse totale du mésorectum avec 1 cm de marge distale pour les tumeurs du bas et du moyen rectum, marge circonférentielle supé‑rieure à 1 mm, 12 ganglions dans le curage) n’ont pas fondamentale‑ment évolué depuis ces dernières recommandations, plusieurs points ont été largement modifiés par les résultats d’études récentes.

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Le premier de ces points concerne le délai entre le traitement néo‑adjuvant (si celui‑ci est réalisé) et le traitement chirurgical. Les RPC de 2007 proposaient en effet de réaliser le traitement chirurgical cinq à six semaines après la fin de l’irradiation [1]. Plusieurs études rétros‑pectives publiées depuis ont toutefois suggéré qu’une augmentation de ce délai pouvait conduire à une augmentation du taux de réponse tumorale. Un essai randomisé français, GRECCAR 6, est en cours d’inclusion et permettra de répondre définitivement à cette question en comparant des malades opérés sept semaines après irradiation à des malades opérés 11 semaines après irradiation.

Le second point fondamental concerne la voie d’abord chirurgicale. En effet, aucune donnée prospective spécifique concernant la laparos‑copie pour la prise en charge du cancer du rectum n’était disponible au moment des dernières RPC. Depuis, deux études ont été publiées sur le sujet. La première de ces études, le COREAN trial [2], qui incluait 340 patients, rapportait une faisabilité excellente de la prise en charge laparoscopique du cancer du rectum avec un taux de conversion de 1,2 % et des taux de morbidité postopératoire similaires entre les groupes laparotomie et laparoscopie. De plus, dans cette étude, l’exa‑men anatomopathologique ne présentait pas de différence entre les deux groupes. Plus récemment, l’étude COLOR II incluait 1 103 can‑cers du rectum, 739 opérés par laparotomie et 364 opérés par laparos‑copie [3]. COLOR II confirmait les excellents résultats en termes de faisabilité de la laparoscopie et suggérait même un possible avantage par rapport à la laparotomie en termes de durée de reprise de l’alimen‑tation et de durée d’hospitalisation. Toutefois, à ce jour, aucune donnée concernant les résultats oncologiques à long terme de la laparoscopie pour la prise en charge du cancer du rectum n’est disponible.

7Place du traitement local dans le cancer du rectumY. PanisService de chirurgie colorectale, pôle des maladies de l’appareil digestif, hôpital Beaujon, Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP–HP), université Paris‑VII (Denis‑Diderot), FranceCorrespondance : [email protected]

Les dernières recommandations françaises pour la prise en charge du cancer du rectum ont été publiées en 2007, et une des questions faisait référence à la place du traitement local dans cette indication [1]. Que disait ce texte datant maintenant d’un peu plus de six ans ?

Les recommandations retenues par le groupe de travail étaient, mot pour mot, les suivantes : la sélection d’une tumeur pour une exé‑rèse locale se fait sur les données du toucher rectal et de l’EER, plus performante que le toucher rectal pour l’évaluation préopératoire de l’extension de la tumeur dans la paroi rectale (T1 vs T2) et de l’exten‑sion ganglionnaire (grade C), d’autant que l’utilisation de sondes de 15 MHz et plus permet de préciser le degré d’infiltration muqueuse et sous‑muqueuse (m+ sm1 versus sm2+ sm3). Le groupe de travail retient comme indication possible d’une exérèse locale les tumeurs uTIS ou uT1 N0. Bien qu’il n’y ait pas dans la littérature de données sur la taille maximale de la tumeur, le groupe de travail recommande de ne réaliser une exérèse transanale que pour des tumeurs inférieures à 3 cm dans leur plus grand diamètre. L’exérèse locale est le plus souvent réalisée par voie transanale, mais aussi par microchirurgie endoscopique, notamment pour les tumeurs du moyen et haut rectum, techniquement inaccessibles. La mortalité est nulle et la morbidité plus faible (10 %) par rapport à la chirurgie d’exérèse rectale (niveau de preuve 4). L’exérèse par mucosectomie endoscopique est réservée aux tumeurs intramuqueuses. L’exérèse doit être monobloc, macroscopi‑quement complète, passant en zone de muqueuse macroscopiquement saine. Elle doit intéresser en profondeur toute l’épaisseur de la paroi du rectum. Elle doit être adressée à l’anatomopathologiste épinglée sur un support rigide. Il est recommandé que le degré d’envahissement

de la sous‑muqueuse (sm1, 2, ou 3) soit précisé dans le compte rendu anatomopathologique. La résection endoscopique par la technique de mucosectomie, sous réserve qu’elle soit faite monobloc, est un traite‑ment possible pour les tumeurs TIS ou T1sm1. Après exérèse locale d’une tumeur comportant des facteurs histopronostiques défavorables, il est préférable de réaliser une exérèse rectale complémentaire dont les résultats en termes de survie sont supérieurs à ceux de la chirurgie de rattrapage pour récidive (grade C). Cette exérèse rectale complé‑mentaire est recommandée en présence des critères suivants : exérèse incomplète du fait de l’envahissement de la tranche de section ; enva‑hissement en profondeur de la couche profonde de la sous‑muqueuse (T1sm3) ou de la musculeuse (T2) ; présence d’emboles vasculaires et/ou lymphatiques (grade C). Après exérèse locale d’une tumeur rec‑tale T1 de bon pronostic (sm1, bien différenciée, sans emboles vei‑neux ou lymphatiques), ni la radiothérapie ni la radiochimiothérapie n’améliorent le contrôle local et la survie. Inversement, après exérèse locale d’une tumeur T1 à haut risque de récidive, la radiothérapie et la radiochimiothérapie améliorent le contrôle local, le taux de récidives locales devenant inférieur à 20 % (grade C). Il est cependant recom‑mandé de privilégier une exérèse rectale d’emblée ou complémentaire immédiate dont les résultats sont meilleurs. Pour les tumeurs envahis‑sant la partie moyenne de la sous‑muqueuse (T1sm2), le groupe ne peut recommander d’attitude standard, les différentes options (surveil‑lance ou exérèse rectale complémentaire) devant être discutées au cas par cas en RCP et avec le patient.

Finalement quoi de neuf depuis ces recommandations ? On aurait envie de répondre rien… ou presque.

En effet, les indications restent les mêmes : tumeur Tis ou T1sm1, voire sm2 (en fonction des comorbidités). Dès le stade sm3 (ou plus), il faut proposer d’emblée une proctectomie complémentaire du fait du risque d’atteinte ganglionnaire. Enfin, aucun traitement adjuvant (radiochimiothérapie) ne fera mieux que la proctectomie immédiate, et non pas uniquement en cas de récidive.

La seule nouveauté finalement est le développement de la tech‑nique de microchirurgie endoscopique par voie transanale (TEM) qui a clairement démontré sa supériorité par rapport à la voie transanale traditionnelle, tant en termes de résection piecemeal, que de résection R1, et de récidive locale dont les taux sont tous significativement infé‑rieurs grâce à la TEM par rapport à l’exérèse transanale [2].

Références

1. Bretagnol F (2007) Recommendations for clinical practice. The‑rapeutic choices for rectal cancer. What is the place of local treat‑ment? Gastroenterol Clin Biol 31(Spec no 1):1S63–S74

2. Moore JS, Cataldo PA, Osler T, Hyman NH (2008) Transanal endoscopic microsurgery is more effective than traditional tran‑sanal excision for resection of rectal masses. Dis Colon rectum 51:1026–30

8Comment prendre en charge les cancers du rectum avec métastases hépatiques synchrones ?S. BenoistService de chirurgie digestive et oncologique, CHU de Bicêtre, F‑94275 Le Kremlin‑Bicêtre, France

Le cancer du rectum avec métastases hépatiques synchrones regroupe un large éventail de présentations cliniques. Chez les malades ayant un cancer du rectum avec métastases hépatiques synchrones, la stratégie thé‑rapeutique va dépendre du site et de l’extension de la tumeur du rectum, et de l’extension de la maladie métastatique hépatique et extrahépatique.

Dans la majorité des cas, les métastases hépatiques ne sont pas résécables, et dans cette situation le premier objectif du traitement est

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de prolonger la survie et de préserver la qualité de vie. Les différentes options thérapeutiques comportent une chimiothérapie, une radiochi‑miothérapie ou encore une chirurgie première du cancer du rectum. Aucune étude contrôlée n’a comparé ces différentes approches. La prise en charge de ces malades repose en première intention sur l’ad‑ministration d’une chimiothérapie en l’absence de symptômes ou de complications liés à la tumeur primitive. En cas de symptômes ou de com‑plications liés au cancer du rectum, la radiochimiothérapie est efficace chez plus de 80 % des malades avec un taux de complications inférieur à 10 % et représente l’option thérapeutique privilégiée.

Chez les malades ayant des métastases hépatiques résécables, une prise en charge à visée curative doit être envisagée, et la stra‑tégie thérapeutique doit permettre de traiter tous les sites tumoraux de façon appropriée. De nombreuses options peuvent être discutées aussi bien en ce qui concerne l’administration des traitements préopé‑ratoires (radiothérapie, radiochimiothérapie et chimiothérapie) que la séquence chirurgicale optimale (stratégie simultanée du cancer du rec‑tum ou chirurgies séparées). Ces différentes approches thérapeutiques n’ont été que peu évaluées et jamais comparées. Dans cette situation, le bilan préthérapeutique précis de la maladie vise notamment à identi‑fier le site tumoral le plus menaçant qui doit être traité en priorité sans compromettre le traitement optimal de l’autre site tumoral. Compte tenu du large éventail de présentations cliniques et des nombreuses options thérapeutiques qui peuvent être proposées, il n’est pas possible de définir une attitude standardisée convenant à tous les malades. Une discussion pluridisciplinaire doit être envisagée dès le début de la prise en charge de ces malades.

9Quelle est la place des traitements adjuvants après la chirurgie ?S. BenoistService de chirurgie digestive et oncologique, CHU de Bicêtre, F‑94275 Le Kremlin‑Bicêtre, France

En 2006, les RPC recommandaient qu’après l’intervention le dossier du patient devait être discuté en réunion de concertation disciplinaire et que pour le cancer du haut rectum, la décision d’un traitement adjuvant se fasse selon les mêmes critères que pour un cancer du côlon. Cela reste bien sûr d’actualité, ce, d’autant que les essais récents MOSAIC et C07 du NASBP ayant établi les standards de chimiothérapie pour le cancer du côlon autorisaient l’inclusion des cancers du haut rectum.

Pour les cancers du moyen et du bas rectum ayant été opérés après un traitement néoadjuvant, peu de données nouvelles permettent de modifier radicalement les RPC de 2006. En effet, à ce jour, il n’existe toujours pas de preuve irréfutable de l’intérêt d’une chimiothérapie adjuvante dans le cancer du rectum, et deux options à savoir l’absten‑tion thérapeutique ou la chimiothérapie restent possibles. Néanmoins, un certain nombre de données permettent d’affiner le choix des trai‑tements. Tout d’abord, il a été montré qu’en cas de traitement néo‑adjuvant, le stade après traitement (ypTNM) était plus prédictif des résultats oncologiques à distance que le stade avant traitement. Seul ce stade après traitement (ypTNM) doit être pris en compte pour la décision d’un traitement adjuvant, et en particulier un stade III avant traitement ne peut être un argument pour réaliser une chimiothérapie adjuvante. De plus, il a été montré qu’une chimiothérapie adjuvante pouvait améliorer la survie sans récidive chez les malades ayant une bonne réponse au traitement néoadjuvant, mais à la seule condition que leur tumeur soit classée ypN+ et que le traitement néoadjuvant soit une radiothérapie seule, ce qui n’est que très rarement le cas actuel‑lement [1]. Enfin, des données très récentes présentées à l’ASCO en 2013 permettent de préciser un peu plus le type de chimiothérapie adjuvante qui pourrait donner les meilleurs résultats à long terme. Tout d’abord, l’actualisation de l’essai de phase III de l’EORTC 22921

montre qu’une chimiothérapie adjuvante à base de 5‑FU ne permet pas d’augmenter la survie globale ou sans récidive [2]. De plus, l’essai français intergroupe R98 montre qu’une chimiothérapie adjuvante par Folfiri n’améliore ni la survie sans récidive ni la survie globale à cinq ans par rapport à une chimiothérapie adjuvante à base de 5‑FU seul chez les malades ayant un cancer du rectum de stade II ou III traité par radiothérapie seule puis chirurgie d’exérèse [3]. Enfin, une étude de phase II coréenne [4] montre qu’une chimiothérapie adjuvante par FOLFOX permettait d’améliorer la survie sans récidive à deux ans par rapport à une chimiothérapie à base de 5‑FU seul chez 320 malades ayant été opérés pour un cancer du rectum après une radiochimiothé‑rapie et dont la tumeur était classée en anatomopathologie ypstade II (ypT3‑4/ypN0) ou III (ypT1‑4/ypN1‑2). Cette différence significative de survie sans récidive persistait en analyse de sous‑groupes pour les ypstades II et III. En conclusion, pour les cancers du moyen et bas rectum ayant été traités par un traitement néoadjuvant, si les ganglions ne sont pas envahis (tumeur ypT1‑3, N0, soit stade I ou II), un trai‑tement postopératoire n’a pas démontré son intérêt et ne semble pas recommandé. En cas d’envahissement ganglionnaire (tous ypN1‑2, soit stade III), une CT postopératoire est à discuter en RCP en fonction des comorbidités et des autres facteurs de mauvais pronostic : ypT4, nombre de ganglions envahis, résection R1, emboles vasculaires, engainement périnerveux, absence d’exérèse totale du mésorectum. La CT proposée sera plutôt une chimiothérapie associant le 5‑FU et l’oxaliplatine (FOLFOX ou Xelox) qui semble plus efficace qu’une chimiothérapie à base de 5‑FU seul.

Pour les malades n’ayant pas reçu de traitement néoadjuvant (pTNM), aucune donnée nouvelle ne permet de modifier ou d’affiner les recommandations des RPC 2006. En l’absence d’envahissement ganglionnaire (pT1‑3 N0) et de marge positive (R0), soit stades I ou II, un traitement adjuvant n’a pas démontré son intérêt et n’est pas recommandé. En cas de tumeur pN1‑2, un traitement standard ne peut être recommandé. Les options sont l’abstention thérapeu‑tique, la chimiothérapie ou la radiochimiothérapie et doivent être discutées en réunion de concertation pluridisciplinaire. Néanmoins, dans cette situation, l’indication d’une radiochimiothérapie n’est que rarement retenue en particulier en raison de sa toxicité digestive. En cas d’exérèse R1 ou R2, une radiochimiothérapie postopératoire est recommandée. Néanmoins, en cas d’exérèse R1, une chimiothérapie seule peut être discutée étant donné qu’il semble que les récidives observées après une récidive R1 sont plus souvent de type métasta‑tique que locale.

Références

1. Collette L, Bosset JF, den Dulk M, et al (2007) Patients with cura‑tive resection of cT3–4 rectal cancer after preoperative radiothe‑rapy or radiochemotherapy: does anybody benefit from adjuvant fluorouracil‑based chemotherapy? A trial of the European Organi‑sation for Research and Treatment of Cancer Radiation Oncology Group. J Clin Oncol 25:4379–86

2. Bosset JF, Calais G, Mineur L, et al (2013) Preoperative radio‑therapy in rectal cancer: impact of chemotherapy on the outcome. Long‑term results of the randomized 22921 phase III trial of EORTC. J Clin Oncol 31 (suppl; abstr 3560)

3. Delbado C, Ychou M, Zawadi A, et al (2013) 5‑FU/LV with or without irinotecan in patients with resected stage II–III rectal can‑cer. Final analysis of R98 intergroup study. J Clin Oncol 31 (suppl; abstr 3542)

4. Hong YS, Nam BH, Yung KY, et al (2013) Adjuvant chemothe‑rapy with oxaliplatin/5‑fluorouracil/leucovorin (FOLFOX) versus 5‑fluorouracil/leucovorin (FL) in patients with locally advanced rectal cancer after preoperative chemoradiotherapy followed by surgery. A randomized phase II study (The ADORE). J Clin Oncol 31 (suppl; abstr 3570)