Supraconductivité

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BENMERZOUK SARAH 2GI-2 1 Les supraconducteurs A très basses températures, les propriétés électriques et magnétiques de certains matériaux tels le plomb, le mercure ou certains oxydes changent radicalement. Ces matériaux deviennent supraconducteurs : ils n’opposent plus aucune résistance au passage du courant électrique et expulsent les champs magnétiques. Ce phénomène, découvert il y a cent ans, est une manifestation particulièrement marquante de la physique quantique à l’échelle humaine : les nombreux électrons du matériau se regroupent dans une même onde quantique qui s’étend sur de très grandes distances. Aujourd’hui la supraconductivité est un domaine de recherche extrêmement actif, qu’il s’agisse d’élucider les mécanismes qui en sont à l’origine, de concevoir de nouveaux matériaux supraconducteurs ou d’étendre le champ des applications déjà nombreuses. Elle permet aussi de réaliser des lévitations spectaculaires. LES SUPRACONDUCTEURS ET LEURS FASCINANTES PROPRIÉTÉS Une fois refroidis à très basses températures, certains matériaux deviennent supraconducteurs. Non seulement ils se mettent à conduire le courant électrique de façon parfaite, mais en plus, ils font léviter les aimants. Cent ans après sa découverte, la supraconductivité reste une grande énigme et un des enjeux essentiels des sujets de recherche les plus étudiés dans les laboratoires de la physique moderne, autant pour sa compréhension du côté fondamental que pour ses nombreuses applications. De nouvelles familles de supraconducteurs ont été récemment découvertes aux propriétés remarquables, et sont au cœur des recherches actuelles. La supraconductivité est aussi étudiée à l’échelle du nanomètre, ou sous des formes analogues, dans des gaz ultra froids, ou dans de l’hélium superfluide. Autant de sujets au cœur de l’actualité scientifique. Certains pourraient changer le monde dans le futur, du stockage d'énergie aux ordinateurs quantiques. Le froid : Un facteur essentiel Le mercure est le métal où pour la première fois la supraconductivité a été observée. Pour cela, il a fallu le refroidir jusqu’à -269°C, très près du zéro absolu. Le meilleur des supraconducteurs actuellement connu ne le devient qu’en dessous de -135°C. La physique des supraconducteurs est donc intimement liée au domaine des très basses températures auquel on accède en utilisant des techniques de refroidissement liées aux liquides cryogéniques comme l’azote ou l’hélium liquide, ou d’autres méthodes toujours plus sophistiquées.

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Les supraconducteurs

A très basses températures, les propriétés électriques

et magnétiques de certains matériaux tels le plomb,

le mercure ou certains oxydes changent

radicalement. Ces matériaux deviennent

supraconducteurs : ils n’opposent plus aucune

résistance au passage du courant électrique

et expulsent les champs magnétiques.

Ce phénomène, découvert il y a cent ans, est une

manifestation particulièrement marquante de

la physique quantique à l’échelle humaine : les

nombreux électrons du matériau se regroupent dans

une même onde quantique qui s’étend sur de très grandes distances.

Aujourd’hui la supraconductivité est un domaine de recherche extrêmement actif, qu’il s’agisse

d’élucider les mécanismes qui en sont à l’origine, de concevoir de nouveaux

matériaux supraconducteurs ou d’étendre le champ des applications déjà nombreuses. Elle permet aussi

de réaliser des lévitations spectaculaires.

LES SUPRACONDUCTEURS

ET LEURS FASCINANTES

PROPRIÉTÉS

Une fois refroidis à très basses températures,

certains matériaux deviennent supraconducteurs.

Non seulement ils se mettent à conduire le courant

électrique de façon parfaite, mais en plus, ils font

léviter les aimants. Cent ans après sa découverte, la supraconductivité reste une grande énigme et un

des enjeux essentiels des sujets de recherche les plus étudiés dans les laboratoires de la physique

moderne, autant pour sa compréhension du côté fondamental que pour ses nombreuses applications. De

nouvelles familles de supraconducteurs ont été récemment découvertes aux propriétés remarquables, et

sont au cœur des recherches actuelles. La supraconductivité est aussi étudiée à l’échelle du nanomètre,

ou sous des formes analogues, dans des gaz ultra froids, ou dans de l’hélium superfluide. Autant de

sujets au cœur de l’actualité scientifique. Certains pourraient changer le monde dans le futur, du

stockage d'énergie aux ordinateurs quantiques.

Le froid : Un facteur essentiel

Le mercure est le métal où pour la première fois la supraconductivité a été observée. Pour cela, il a

fallu le refroidir jusqu’à -269°C, très près du zéro absolu. Le meilleur des supraconducteurs

actuellement connu ne le devient qu’en dessous de -135°C. La physique des supraconducteurs est donc

intimement liée au domaine des très basses températures auquel on accède en utilisant des techniques

de refroidissement liées aux liquides cryogéniques comme l’azote ou l’hélium liquide, ou d’autres

méthodes toujours plus sophistiquées.

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La supraconductivité, c'est à quelle température ?

On observe aujourd'hui la supraconductivité que lorsqu'il

fait plus froid que le plus froid des endroits sur la terre :

L’explication

La théorie BCS : Il faudra attendre plus de 40 ans après la

découverte de la supraconductivité pour que trois

physiciens, Bardeen, Cooper et Schrieffer, parviennent

enfin à trouver la bonne explication de la supraconductivité dans les métaux, en 1957. Ils proposent

dans un modèle théorique (appelé depuis « BCS ») que les

électrons se regroupent par paire, et forment ensemble une onde

collective de nature quantique. La nature de cette onde collective

permet de comprendre toutes les propriétés des supraconducteurs et

de prévoir le comportement de leurs grandeurs caractéristiques. Cette

théorie BCS a été depuis vérifiée par de nombreuses expériences

dans les métaux et les alliages.

A l’échelle microscopique, la physique quantique nous apprend que

dans un métal, les électrons se comportent comme des ondes

périodiques étalées sur plusieurs atomes indépendantes les unes des

autres. Dès qu’un défaut se présente, ou que l’un des atomes du

réseau cristallin vibre, ces ondes sont perturbées. A très basse

température, quand un métal devient supraconducteur, ses électrons

s’associent par paire. Toutes les paires d'électrons se superposent

alors les unes aux autres pour former une seule onde quantique qui

occupe tout le matériau. Cette onde tout à fait particulière devient insensible aux défauts du matériau :

ils sont trop petits pour freiner l’ensemble de l’onde. La résistance électrique a disparu.

L’idée centrale de la théorie BCS repose sur la nature quantique des électrons. Dans un métal, les

électrons sont des ondes. Chacun de ces électrons est relativement indépendant et suit son propre

parcours sans trop se soucier des autres électrons. Dans un supraconducteur, une grande partie de ces

électrons se rassemble pour former une grande onde collective. En quantique, on parlera de fonction

d’onde quantique macroscopique, ou encore de condensat. Une fois formée, cette onde collective

impose à chacun de ses participants d’avancer à la même vitesse. Dans un métal, un électron individuel

est facilement dévié par un défaut comme un atome trop gros. Mais dans le supraconducteur, ce même

électron ne pourra être dévié que si, au même moment, tous les autres électrons de l’onde collective

sont déviés de la même manière. Le défaut atomique est bien incapable de faire cela, et l’onde n’est

donc plus déviée, donc plus freinée : elle superconduit !

Les matériaux supraconducteurs

K. Onnes découvre la supraconductivité dans le mercure mais il se rend vite compte que d’autres

métaux comme l’étain, le plomb ou l’aluminium sont aussi supraconducteurs. En fait, plus de la moitié

des éléments de base de la classification périodique sont supraconducteurs si on les refroidit

suffisamment. Dans certains cas, il faut en plus appliquer une pression sur le matériau.

Les chimistes et les physiciens ont travaillé à inventer ou tester des matériaux supraconducteurs pour

améliorer leurs performances : des supraconducteurs à moins basse température donc à température

critique plus élevée, ou bien qui résistent à des champs magnétiques plus élevés ou à des courants

électriques plus forts. Ces matériaux sont la plupart du temps artificiels et synthétisés en laboratoire :

ils n’existent pas à l’état naturel.

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On distingue parfois les « supraconducteurs

classiques » et les « nouveaux supraconducteurs »

selon qu’ils supraconduisent à basse température ou

moins basse température. Mais il n’y a pas

vraiment de frontière et cette définition est floue.

Une autre classification possible repose sur le

mécanisme à l’origine de la supraconductivité : les

supras « classiques » obéissent à la théorie BCS,

alors que les « nouveaux » n’y obéissent pas ou

bien la question n’est pas encore tranchée.

On parle aussi parfois de « supraconducteurs à haute température critique», ce qui désigne en général

les cuprates, les supraconducteurs les plus « chauds », mais ce que les physiciens appellent « haute

température » reste ici inférieur à -135°C !

Parmi les supraconducteurs classiques, les plus utilisés à ce jour sont des alliages de la famille A15,

notamment le NbTi (alliage de niobium et titane) supraconducteur sous 9 kelvins (-264°C) et résistant

jusqu’à 15 teslas ou le plus performant et plus cher Nb3Sn (alliage de niobium et étain)

supraconducteur sous 18 kelvins (-255°C) et résistant à des champs jusqu’à 30 teslas. Ce sont ces

alliages qui sont par exemple utilisés dans les IRM.

Le magnétisme

Les aimants produisent des champs magnétiques et

possèdent des pôles. Dès qu’on s’écarte de l’aimant, le

champ décroît fortement, et ne vaut plus qu’un centième

de tesla à quelques centimètres de l’aimant. Plus l’aimant

est grand, moins vite le champ décroit quand on s’en

écarte.

L’aimant tire son magnétisme de ses électrons. Un

électron porte en effet lui-même un tout petit aimant

quantique, appelé spin. Si les spins de certains électrons dans un matériau s’alignent tous parallèlement,

l’effet de tous ces petits aimants s’ajoute et on obtient un vrai aimant. Certains matériaux ne sont pas

des aimants mais se collent aux aimants, comme l’acier ou le fer. On les appelle « magnétiques ». Cela

vient de ce qu’au cœur de ces matériaux, il y a là aussi des spins parallèles comme dans un vrai aimant,

mais seulement par domaines. Les domaines n’étant pas parallèles entre eux,

l’aimantation totale est nulle. Par contre, quand on approche un aimant de ce

matériau magnétique, tous les domaines se remettent parallèles entre eux et

parallèles à l’aimant, et le matériau devient à son tour un aimant.

Pour produire un champ magnétique, on peut aussi utiliser une bobine de fil

métallique dans laquelle on fait passer un courant électrique. Ce courant va

induire un champ magnétique orienté perpendiculairement à la bobine. Les

supraconducteurs peuvent servir à faire de telles bobines et à produire ainsi des champs magnétiques

encore plus élevés que les meilleurs des aimants. C’est ainsi par exemple que fonctionnent les

bobines d’IRM d’hôpital, où le champ vaut 1 tesla. On sait actuellement faire des champs magnétiques

jusqu’à plusieurs dizaines de teslas en laboratoire.