Suite de Fibonacci, nombre d'or

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1 Suite de Fibonacci & nombre d’or 1. La suite de Fibonacci. 2. Le nombre d’or, rectangles et spirales. 3. Formule de Moivre et applications. 4. Interprétations combinatoires. 5. Propriétés arithmétiques. 6. Propriétés algébriques. 7. Série génératrice. 8. Suites associées. 9. Polynômes ou q-nombres de Fibonacci. 10. Propriétés optimales. 11. L’anneau Z[ϕ] des entiers de Dirichlet. 12. Numération fibonaccienne de Zeckendorf. 13. Suite de Fibonacci universelle. 14. Suite de Fibonacci aléatoire. 15. Le nombre d’or en géométrie. 16. Le nombre d’or en analyse. 17. Le nombre d’or en analyse p-adique. … Poèmes fibonacciens et autres friandises… A Jean-Marc Lapierre, dit Billy Pierre-Jean Hormière __________ « Puiser une eau nouvelle dans les puits anciens… » Frédéric II de Hohenstaufen Introduction 0 , 1 , 1 , 2 , 3 , 5 , 8 , 13 , 21 , 34 , 55 , 89 , 144 , 233 , 377 , 610 , 987 , … Cette suite d’entiers naturels, appelée « suite de Fibonacci », est l’une des plus célèbres suites d’entiers naturels. Elle porte le nom du mathématicien italien Leonardo Bonacci, dit Bigollo, dit Fibonacci (1175 - ca 1250), qui l’a introduite en 1202 dans son Liber Abaci, mais elle avait été considérée bien plus tôt, par le mathématicien indien Pingala (environ 200 av J.-C.). Elle a pour premiers termes 0 et 1, ensuite chacun de ses termes est la somme des deux précédents. Comme l’observe très justement Edouard Lucas, qui l’a longuement étudiée, la suite de Fibonacci est le premier exemple connu de suite récurrente : ses termes ne sont pas définis par une formule, mais par un processus, un algorithme. C’est pourquoi elle a joué un rôle fondateur dans l’histoire des mathématiques. Elle est répertoriée sous le numéro A000045 dans l’Encyclopedia On line of Integer Sequences (en abrégé OEIS), encyclopédie des suites d’entiers mise en ligne en 1995 par le mathématicien Neil Sloane. Une autre suite d’entiers : 2 , 1 , 3 , 4 , 7 , 11 , 18 , 29 , 47 , 76 , 123 , 199 , 322 , 521 , 843 , … dite « suite de Lucas », possède la même propriété : chaque terme est la somme des deux précédents, mais, à la différence de la suite de Fibonacci, elle a pour premiers termes 2 et 1. Elle est répertoriée sous le numéro A000032 dans l’OEIS.

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Suite de Fibonacci & nombre d’or 1. La suite de Fibonacci.

2. Le nombre d’or, rectangles et spirales.

3. Formule de Moivre et applications.

4. Interprétations combinatoires.

5. Propriétés arithmétiques.

6. Propriétés algébriques.

7. Série génératrice.

8. Suites associées.

9. Polynômes ou q-nombres de Fibonacci.

10. Propriétés optimales.

11. L’anneau Z[ϕϕϕϕ] des entiers de Dirichlet.

12. Numération fibonaccienne de Zeckendorf.

13. Suite de Fibonacci universelle.

14. Suite de Fibonacci aléatoire.

15. Le nombre d’or en géométrie.

16. Le nombre d’or en analyse.

17. Le nombre d’or en analyse p-adique.

… Poèmes fibonacciens et autres friandises…

A Jean-Marc Lapierre, dit Billy

Pierre-Jean Hormière __________

« Puiser une eau nouvelle dans les puits anciens… »

Frédéric II de Hohenstaufen Introduction

0 , 1 , 1 , 2 , 3 , 5 , 8 , 13 , 21 , 34 , 55 , 89 , 144 , 233 , 377 , 610 , 987 , …

Cette suite d’entiers naturels, appelée « suite de Fibonacci », est l’une des plus célèbres suites d’entiers naturels. Elle porte le nom du mathématicien italien Leonardo Bonacci, dit Bigollo, dit Fibonacci (1175 - ca 1250), qui l’a introduite en 1202 dans son Liber Abaci, mais elle avait été considérée bien plus tôt, par le mathématicien indien Pingala (environ 200 av J.-C.). Elle a pour premiers termes 0 et 1, ensuite chacun de ses termes est la somme des deux précédents. Comme l’observe très justement Edouard Lucas, qui l’a longuement étudiée, la suite de Fibonacci est le premier exemple connu de suite récurrente : ses termes ne sont pas définis par une formule, mais par un processus, un algorithme. C’est pourquoi elle a joué un rôle fondateur dans l’histoire des mathématiques. Elle est répertoriée sous le numéro A000045 dans l’Encyclopedia On line of Integer Sequences (en abrégé OEIS), encyclopédie des suites d’entiers mise en ligne en 1995 par le mathématicien Neil Sloane. Une autre suite d’entiers : 2 , 1 , 3 , 4 , 7 , 11 , 18 , 29 , 47 , 76 , 123 , 199 , 322 , 521 , 843 , …

dite « suite de Lucas », possède la même propriété : chaque terme est la somme des deux précédents, mais, à la différence de la suite de Fibonacci, elle a pour premiers termes 2 et 1. Elle est répertoriée sous le numéro A000032 dans l’OEIS.

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Ces deux suites sont liées au nombre d’or ϕ = 2

51+ et à son conjugué ϕ = ϕ’ = 2

51− ,

qui sont les deux solutions, l’une positive, l’autre négative, de l’équation x2 − x − 1 = 0.

ϕ et ϕ’ vérifient les relations : ϕ + ϕ’ = 1 , ϕ.ϕ’ = − 1 , ϕ − ϕ’ = 5 .

ϕ et ϕ sont les raisons des deux suites géométriques (λn) possédant elles aussi la propriété de

Fibonacci : λn+2 = λn+1

+ λn .

Au début du 17ème siècle, Johann Kepler et Albert Girard ont affirmé que les quotients de deux nombres de Fibonacci consécutifs tendent vers le nombre d’or ϕ (en anglais : golden ratio).

Ces suites et ces nombres ont été maintes fois étudiés depuis le 13ème siècle. On les rencontre en effet dans de nombreux problèmes arithmétiques, combinatoires, géométriques, et même dans la nature, Johan Kepler ayant remarqué dès 1611 leur intervention en phyllotaxie (mode de croissance de certains végétaux). Dans ce chapitre, nous allons étudier quelques-uns de ces problèmes. Par extension, les mathématiciens ont donné le nom de Fibonacci à des objets liés à la suite éponyme : des suites de polynômes, de matrices, de mots, ainsi que des figures géométriques, rectangles et spirales... Sujet rebattu, mais d’une grande richesse : c’est à une promenade mathématique à travers l’algèbre, l’analyse et la géométrie que le lecteur est convié.

Chaque paragraphe a sa cohérence interne (cela entraîne quelques redites), mais certains sont plus difficiles, abstraits ou savants que d’autres. Puisse chacun y trouver son compte. Chacun ? Voire… Cette étude s’adresse à des lecteurs candides, naïfs adeptes des mathématiques dites « pures ». Qu’ils ne s’attendent pas à trouver ici des considérations sur « comment trader avec les niveaux de Fibonacci », « retracement de Fibonacci en trading », etc. Je suppose que, lorsqu’ils ont appris qu’il y avait un « nombre d’or », les spéculateurs de tout poil ont pris le mot au pied de la lettre et se sont dit : « Y’a du pognon à s’faire ! ». Le « golden boy » compte sur le « golden ratio » pour se faire des « golden balls ». Comme a dit un grand ponte toulousain bardé de certitudes et de décorations, après s’être targué de ne maîtriser que la règle de trois : « L’économie est une science exacte ! ». Exacte au service de qui, that is the question, mais laissons-là ces polichinelles et revenons aux héros de cette saga : Pythagore, Euclide, Pingala, Fibonacci, Dürer, Kepler, Girard (un parpaillot !), Cassini, de Moivre (itou !), Dirichlet, Lamé, Dzierzon (un prêtre polonais excommunié !), Lucas, Wythoff, Beatty, Zeckendorf (un militaire belge !), Wall, Julia Robinson (juste ciel, une femme !), Jones, sans oublier les incontournables Lewis Carroll et Ramanujan…

Fils de Guglielmo Bonacci, marchand et notaire de la république maritime de Pise, Leonardo est né vers 1175, au moment de l’érection de la fameuse tour1. C’est au retour de ses voyages à Bougie, en Afrique du Nord, et tout autour de la Méditerranée, qu’il publie, en 1202, son premier livre, un

1 La construction de la tour débuta le 9 août 1173. En 1178, les trois premiers étages sont construits, mais la construction est interrompue car la tour penche déjà. La construction des étages supérieurs, au dessin corrigé, s’échelonnera entre 1272 et 1372.

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Traité de calcul, ou Liber abaci, dans lequel il introduit en Occident les chiffres indo-arabes, les jugeant plus pratiques que les chiffres romains. Ce livre commence par ce récit :

« Nommé scribe public et établi par sa patrie à la direction de la douane de Bougie pour défendre les intérêts des marchands pisans qui y affluaient, mon père, ayant compris l’usage et la commodité que j’en tirerais plus tard, me fit venir, encore enfant, auprès de lui, et pendant quelques jours me fit demeurer là à apprendre l’abaque. Lorsque, par un enseignement admirable, je fus introduit dans l’art [du calcul] par les neuf chiffres indiens…

Les neuf chiffres indiens sont les suivants :

9 8 7 6 5 4 3 2 1

C’est pourquoi, avec ces neuf chiffres, et avec ce signe 0, qui s’appelle zephirum en arabe, on écrit tous les nombres qu’on veut. »

Un mathématicien capable d’inscrire son travail dans l’espace et le temps ne peut être qu’un grand esprit ! Ah, que j’aurais aimé assister à l’entrevue de Fibonacci et de Frédéric II, à Pise, en juillet 1226 ! 2 Merci à mon ami Jean-Pierre Jouvinroux pour sa patiente relecture.

1. La suite de Fibonacci. 1.1. Définition.

Théorème et définition : Il existe une unique suite (Fn)n∈N d’entiers naturels satisfaisant aux

conditions : F0 = 0 , F1 = 1 , ∀n ∈ N Fn+2 = Fn+1 + Fn . On la nomme suite de Fibonacci. Les entiers figurant dans cette suite sont appelés nombres de Fibonacci 3.

Cette suite est croissante, et même strictement croissante pour n ≥ 2.

Il en résulte que Fn ≥ n – 1 pour n ≥ 2. Mais cette minoration est grossière, car l’écart entre deux

nombres de Fibonacci consécutifs tend lui aussi vers l’infini, en vertu de Fn+1 − Fn = Fn−1. Nous reviendrons sur ce sujet au § 3. Introduisons dès maintenant une suite voisine de la suite de Fibonacci, la suite de Lucas.

Théorème et définition : Il existe une unique suite (Ln)n∈N d’entiers naturels satisfaisant aux

conditions : L0 = 2 , L1 = 1 , ∀n ∈ N Ln+2 = Ln+1 + Ln . On la nomme suite de Lucas. 1.2. Programmation.

La suite (Fn) est préprogrammée par Maple, dans le package « combinat », mais on peut la programmer « à la main », soit par une récurrence simple, soit par un appel récursif, mais il faut alors faire appel à l’option « remember » pour éviter de recalculer plusieurs fois le même nombre. > with(combinat); > fibonacci(6);

8 > [seq(fibonacci(n),n=0..25)];

0 1 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144 233 377 610 987 1597 2584 4181 6765, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[

10946 17711 28657 46368 75025, , , , ]

> fibo:=proc(n)

2 Cette rencontre est évoquée par Ernst Kantorowicz, bien sûr, mais anssi par l’excellent Pierre Boulle, qui en fait un récit vivant et vibrant dans son petit livre L’étrange croisade de l’empereur Frédéric II. 3 Terminologie due à Edouard Lucas (1842-1891).

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4

> local k,L,a,b,c;a:=0;b:=1; > if n=0 then L:=[a];elif n=1 then L:=[a,b]; > else L:=[a,b];for k from 2 to n do c:=a+b;a:=b;b:=c;L:=[op(L),c];od;fi;print(L);end; > fibo(20);

[ ], , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,0 1 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144 233 377 610 987 1597 2584 4181 6765

> f:=proc(n) > option remember; > if n=0 then 0 elif n=1 then 1 > else f(n-2)+f(n-1);fi;end; > f(6);

8 > [seq(f(n),n=0..25)];

0 1 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144 233 377 610 987 1597 2584 4181 6765, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[

10946 17711 28657 46368 75025, , , , ]

Nous verrons dans la suite d’autres algorithmes de programmation, sans chercher à épuiser le sujet.

Remarque : Si l’on oublie de faire appel à l’option « remember » dans l’appel récursif, combien de

calculs doit-on faire ? Notons Cn le nombre d’opérations nécessaires pour calculer Fn.

On a C0 = C1 = 0 car F0 et F1 sont donnés ; puis Cn+2 = Cn+1 + Cn + 1 (une addition).

Du coup Cn+2 + 1 = Cn+1 + 1 + Cn + 1, et, par récurrence, Cn = Fn+1 – 1.

Le temps de calcul de Fn est supérieur à Fn ! Et pour cause, on calcule deux fois Fn−2, etc. Mieux vaut alors programmer une simple récurrence en n additions. 1.3. Prolongement à Z.

Si on l’applique aux entiers négatifs, la formule Fn+2 = Fn+1 + Fn, qui s’écrit aussi Fn = Fn+2 − Fn+1 permet de calculer rétroactivement de proche en proche les Fn pour n < 0 :

… , − 55 , 34 , − 21 , 13 , − 8 , 5 , − 3 , 2 , − 1 , 1 , 0 , 1 , 1 , 2 , 3 , 5 , 8 , 13 , 21 , 34 , 55 , …

Théorème et définition : Il existe une unique suite (Fn)n∈Z d’entiers relatifs satisfaisant aux

conditions : F0 = 0 , F1 = 1 , ∀n ∈ Z Fn+2 = Fn+1 + Fn .

On la nomme Z-suite de Fibonacci. Elle vérifie ∀n ∈ Z F−n = (−1)n+1

.Fn .

Preuve : Le prolongement à Z se montre par récurrence descendante.

F−1 = F1 − F0 = 1, et, si l’on connaît Fn+2 et Fn+1 , on connaît Fn = Fn+2 − Fn+1 .

Démontrons que ∀n ∈ N F−n = (−1)n+1

.Fn par récurrence double. C’est vrai pour n = 0 et 1. Si c’est vrai aux rangs n et n + 1, alors

F−(n+2) = F−n − F−n−1 = (−1)n+1

.Fn − (−1)n+2

.Fn+1 = (−1)n+3

.( Fn + Fn+1 ) = (−1)n+3

.Fn+2 .

Théorème et définition : Il existe une unique suite (Ln)n∈Z d’entiers relatifs satisfaisant aux

conditions : L0 = 2 , L1 = 1 , ∀n ∈ Z Ln+2 = Ln+1 + Ln .

On la nomme Z-suite de Lucas. Elle vérifie ∀n ∈ Z L−n = (−1)n.Ln .

1.4. Interprétation matricielle.

Matriciellement, la suite de Fibonacci vérifie

[0

1

FF ] = [ 0

1 ] et [1

2

+

+

n

n

FF ] =

0111 [

n

n

FF 1+ ] .

Notons A =

0111 ∈ M2(Z), matrice inversible, d’inverse A

−1 =

−1110 .

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5

Proposition 1 : ∀n ∈ Z [n

n

FF 1+ ] =

0111 n [

0

1

FF ] =

0111 n [ 0

1 ] .

Preuve : par récurrence sur n.

Corollaire 1 : ∀n ∈ Z

0111 n

=

+

1

1

nn

nn

FFFF .

Preuve : La proposition précédente fournit la première colonne de An.

La deuxième colonne est An.[ 1

0 ] = An.A

−1.[ 0

1 ] = An−1

.[ 01 ] = [

1−n

n

FF ] .

Corollaire 2 : ( formules de J.-D. Cassini, 1680 )

∀n ∈ Z Fn+1.Fn−1 – Fn2 = (−1)

n ∀n ∈ Z Fn+1

2 − Fn+1.Fn – Fn2 = (−1)

n

Preuve : La deuxième formule se déduit aussitôt de la première. Une récurrence est possible, mais mieux vaut passer au déterminant dans le corollaire précédent.

Corollaire 3 : ∀n ∈ N Fn+1 = 2

)1(452 nnn FF −++

et nnF )1(452 −+ ∈ N.

Preuve : Reprenons la formule de Cassini ∀n ∈ N Fn+12 − Fn+1.Fn – Fn

2 − (−1)

n = 0.

Il suffit de résoudre cette équation du second degré d’inconnue Fn+1.

De plus nnF )1(452 −+ = 2 Fn+1 – Fn est bien un naturel.

Remarque : cette formule a pour seul intérêt de donner une relation de récurrence à un terme de (Fn), relation non linéaire, compliquée et peu commode.

Proposition 2 : ∀(m, n) ∈ Z×Z Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1.

Preuve : On peut fixer m et faire une récurrence sur n, mais le plus simple est d’écrire que

Am+n

= Am

.An.

−++

+++

1

1

nmnm

nmnm

FFFF =

+

1

1

mm

mm

FFFF

+

1

1

nn

nn

FFFF

Il suffit alors d’identifier le terme situé sur la 1ère ligne 2ème colonne.

Remarque : voici une autre démonstration de la proposition 2.

Exercice 1 : On se place dans Q[X].

1) Démontrer que, pour tout n Xn ≡ Fn X + Fn−1 ( mod X

2 – X – 1 )

2) On note T l’opérateur de décalage, qui à la suite x = (xn) associe la suite T(x) = (xn+1).

Quelle est l’image par T2 – T – I de la suite de Fibonacci ?

En déduire ∀(m, n) ∈ Z×Z Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1.

3) Soit P(X) = ∑+∞

=0

.k

kk Xa ∈ Q[X]. Quel est le reste de la division de P(X) par X

2 – X – 1 ?

En déduire une cns de divisibilité de P(X) par X2 – X – 1.

4) En déduire ∀n ∈ Z Fn+10 = 11.Fn+5 + Fn.

Exercice 2 : Démontrer que pour tout n ≥ 0, F2n = ∑=

n

kk

kn FC0

. et F2n+1 = ∑=

+

n

kk

kn FC0

1. .

Exercice 3 : Soit An,p = (Fi+j−2)1≤i≤n,1≤j≤p. ∈ MR(n, p). Quel est le rang de An,p ? Trouver son image, son noyau.

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Exercice 4 : Calculer les déterminants tridiagonaux d’ordre n suivants :

110...01............0....110......1110...011

−−

,

110...01............0....110......1110...012

−−−

.

Exercice 5 : Calculer les déterminants des matrices ( Fi+j−2 )1≤i,j≤n et ( F|i – j| )1≤i,j≤n .

Solution : Le premier est nul sauf pour n = 2. Notons Dn le deuxième.

Si l’on fait Ln → Ln − Ln−1 − Ln−2 , la n-ème ligne devient (0, 0, …, 0, 0, −2).

Si l’on développe selon la dernière ligne, on voit que Dn = −2.Dn−1 pour n ≥ 2.

Comme D1 = −1, il vient par récurrence Dn = (−1)n−1

2n

pour n ≥ 1.

Exercice 6 : On considère la forme quadratique q(x) = ∑∑=

−+=

n

ijji

n

ji xFx

12

1

.. sur Rn.

Rang, signature, décompostion en carrés ? Natures des hyperquadriques q(x) = 0, q(x) = c. 1.5. Interprétation géométrique de la formule de Cassini.

Arrêtons-nous un instant sur la formule de Cassini : ∀n ∈ N Fn+12 − Fn+1.Fn – Fn

2 = (−1)

n

Elle signifie que les couples (x, y) = (Fn+1, Fn) satisfont l’équation diophantienne de Fermat :

x2 − x.y – y

2 = (−1)

n .

Nous reviendrons sur cette équation au § 11.

Géométriquement, la formule signifie que les points Mn = (Fn+1, Fn) se trouvent alternativement sur

l’une ou l’autre des coniques de centre O, x2 − x.y – y

2 = 1 et x

2 − x.y – y2 = − 1 .

Ces coniques sont des hyperboles, car elles ont pour équations

( x − ϕ.y )( x − ϕ’.y ) = 1 et ( x − ϕ.y )( x − ϕ’.y ) = – 1,

et mêmes asymptotes y = x / ϕ et y = x / ϕ’.

Les points Mn s’éloignent à l’infini sur une ou l’autre branche de ces deux hyperboles, de telle sorte

que la droite OMn tende vers l’asymptote y = x / ϕ. On voit donc géométriquement que la suite

(Fn+1 / Fn) tend en spirale vers le nombre d’or ϕ, pente de cette asymptote.

> with(combinat):with(plots): > phi:=(1+sqrt(5))/2:phi1:=(1-sqrt(5))/2: > a:=plot([x/phi,x/phi1],x=-3..10,y=-5..5,color=black ): h1:=implicitplot(x^2-x*y-y^2=1,x=-3..10,y=-5..10,co lor=green, thickness=2,numpoints=2000): h2:=implicitplot(x^2-x*y-y^2=-1,x=-3..10,y=-5..10,c olor=blue, thickness=2,numpoints=2000): r:=n->display(plot([x,fibonacci(n),x=0..fibonacci( n+1)]), plot([fibonacci(n+1),y,y=0..fibonacci(n)])): R:=display([seq(r(n),n=1..5)]): display(a,h1,h2,R,axes=normal);

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7

Théorème : La suite (n

n

FF 1+ ) tend vers le nombre d’or ϕ, les deux suites (

n

n

FF

2

12 + ) et (12

2

−n

n

FF ) étant

adjacentes.

Nous allons donner deux preuves de cet important résultat ; nous en verrons d’autres par la suite.

Première preuve : Notons qn = n

n

FF 1+ . Il découle de la formule de Cassini que qn

2 − qn − 1 = 2

)1(n

n

F−

.

Donc qn2 − qn − 1 → 0. On en déduit ( qn

− 21 )

2 → 45 . Comme qn ≥ 1 , qn

− 21 →

25 . cqfd.

Plus précisément, si l’on note εn = 2

)1(n

n

F−

, il vient qn = 2

451 nε++ , qui tend vers 2

51+ en spirale.

Les suites (q2n) et (q2n+1) sont adjacentes.

Variante : Soustrayons qn2 − qn − 1 = 2

)1(n

n

F−

et ϕ2 − ϕ − 1 = 0.

Il vient : qn − ϕ = )1.(

)1(2 −+

−ϕnn

n

qF , donc | qn − ϕ | =

)1.(1

2 −+ϕnn qF ≤ 2

1nF

.

Deuxième preuve, sans recours à la formule de Cassini :

Notons que q1 = 1 , qn+1 = 1 + nq

1 = f(qn), où f(x) = 1 + x1 . Suite récurrente classique !

Comme f(]0, ϕ[) = ]ϕ, +∞[ et f(]ϕ, +∞[) = ]1, ϕ[, on a ∀m ≥ 0 1 ≤ q2m+1 < ϕ < q2m .

Comme ( f o f )(x) – x = 1

1²+

+−−x

xx , ( f o f )(x) – x est du signe de ϕ − x sur R+.

Donc on a 1 ≤ q2m+1 < q2m+3 < ϕ < q2m+2 < q2m .

La suite (q2m+1), croissante majorée par ϕ, tend vers un réel α, point fixe > 0 de f o f : c’est ϕ.

La suite (q2m), décroissante minorée par ϕ, tend vers un réel β, point fixe > 0 de f o f : c’est ϕ.

Ainsi les deux suites (q2m+1) et (q2m) sont adjacentes de limite ϕ.

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8

Plus élémentairement encore, soustrayons qn+1 = 1 + nq

1 et ϕ = 1 + ϕ1 .

Il vient qn+1 − ϕ = nq

1 − ϕ1 =

n

n

qq

.ϕϕ−

. Cela implique | qn+1 − ϕ | = n

n

q

q

.ϕϕ−

≤ ϕϕ−nq

.

D’où | qn − ϕ | ≤ 1

1

−n

ϕ. De plus qn+1 − ϕ et qn − ϕ sont de signes opposés.

Enfin, voici une quatrième approche, basée sur l’identité : ')(

)(ϕϕ

−−

xfxf

= ϕϕ'

'ϕϕ

−−

xx

laissée au lecteur.

Du coup, par récurrence 'ϕ

ϕ−−

n

n

qq

= ( ϕϕ' )n−1

.'1

1ϕϕ

−−

= ( ϕϕ' )n

.

Comme ( ϕϕ' )n

→ 0 en changeant de signe, (qn) tend ver ϕ en zig-zag.

> with(plots): > f:=x->1+1/x;p:=plot(f(x),x=0..4,0..4,thickness=2,co lor=red): q:=plot([1,x],x=0..4,color=black):v:=plot([1,y,y=0. .2],color=blue): > a:=1:b:=0:L:=[]:for n from 0 to 6 do L:=[op(L),[a,f(a)],[f(a),f(a)]];a:=f(a):od: G:=listplot(L,color=blue):display(p,q,v,G,axes=no rmal);

Comme | f’(x) | ≤

94 sur [q3, +∞[ , f est contractante sur cette demi-droite et la convergence est

géométrique.

Si j’en crois E. Lucas 4, c’est Albert Girard qui a le premier trouvé la limite du quotient Fn+1 / Fn , dans la dernière annotation des livres V et VI de l’Arithmétique de Diophante 5. Selon d’autres

4 Théorie des nombres, p. 3 et 4. Albert GIRARD (Saint-Mihiel 1595 – Leyde 1632) est né dans le duché de Lorraine. Membre de l’église réformée, il s’exile aux Pays-Bas, s’inscrit à l’Université de Leyde à 22 ans, où il étudie les mathématiques. Excellent musicien, il joue du luth de manière professionnelle. Ingénieur militaire dans l’armée du prince d’Orange Frédéric-Henri de Nassau, il étudie les fortifications, et traduit plusieurs ouvrages sur ce sujet, du français en flamand, et vice-versa. À sa mort, on rendra hommage davantage à l’ingénieur qu’au mathématicien. Pourtant, Girard a aussi fait d’importants travaux en algèbre, trigonométrie et arithmétique. En 1626 il a publié

Page 9: Suite de Fibonacci, nombre d'or

9

sources, ce résultat aurait été trouvé plus tôt, par Johannes Kepler, en mai 1608. Kepler ou Girard ont-ils vraiment démontré ce résultat ? En analyse, les démonstrations rigoureuses sont venues longtemps après les énoncés.

Remarque : Considérons plus généralement les suites récurrentes homographiques

z0 ∈ C , zn+1 = 1 + nz

1 .

Pour éviter les problèmes de définition, mieux vaut compléter le plan C par un point à l’infini ∞ et

poser z0 ∈ C, zn+1 = f(zn), où f(z) = 1 + z1 pour z ≠ 0 , f(0) = ∞ et f(∞) = 1.

h devient alors une bijection du plan complété C ∪ ∞ dans lui-même. L’orbite de 0 sous l’action de f et de ses itérées est

… , −1+n

n

FF =

1−−

n

n

FF , …, −

32 , −

21 , −1 , 0 , ∞ , 1 , 2 ,

23 ,

35 ,

58 , …,

n

n

FF 1+ , …

En utilisant la correspondance matrices-homographies (voir chapitre sur les nombres complexes),

zn =

0111 n

.z0 =

+

1

1

nn

nn

FFFF .z0 =

10

01

+

++

nn

nn

FzFFzF .

Il est facile de voir que si n ≠ 0 l’homographie fn n’a pas d’autres points fixes que ϕ et ϕ’.

Si z0 ≠ ϕ’ , la suite (zn) tend vers ϕ quand n → +∞ ; si z0 = ϕ’ , elle est constante. Ainsi ϕ est un point fixe attractif, ϕ’ un point fixe répulsif. Lorsque n → −∞, c’est le contraire qui se passe.

Cela découle aussi de ')(

)(ϕϕ

−−

zfzf

= ϕϕ'

'ϕϕ

−−

zz

, qui implique par récurrence 'ϕ

ϕ−−

n

n

zz = ( ϕ

ϕ' )n.

'0

0

ϕϕ

−−

zz .

La session Maple ci-dessous montre bien ce phénomène en visualisant la suite (zk) pour –n ≤ k ≤ n.

> with(plots): > F:=(x,y)->((x^2+y^2+x)/(x^2+y^2),-y/(x^2+y^2)); G:=(x,y)->((x-1)/(x^2+y^2-2*x+1),-y/(x^2+y^2-2*x+1) ); > Iter:=proc(a,b,n) > local L,k,P,Q; > L:=[[a,b]];P:=(a,b);Q:=(a,b); > for k from 1 to n do P:=F(P);Q:=G(Q);L:=[[Q],op(L), [P]];od;end; > Pol:=(a,b,n)->listplot(Iter(a,b,n),color=COLOR(RGB, rand()/10^12, rand()/10^12, rand()/10^12),thickness=2); > display(Pol(1,1,5),Pol(2,1,5),Pol(2,-1,5),Pol(0,1, 5),Pol(0,-1,5));

un traité de trigonométrie où sont utilisées pour la première fois les abréviations sin, cos, tan. Il y donne aussi une belle formule sur l’aire des triangles sphériques. En algèbre, il a traduit les œuvres de Stevin en 1625. Il fut aussi le premier à donner la définition récurrente de la suite de Fibonacci : Fn+2 = Fn+1 + Fn. Il a trouvé les relations coefficients-racines d’un polynôme, et fut l’un des premiers à pressentir le théorème fondamental de l’algèbre : C est algébriquement clos. 5 L’Athénienne montra sa gêne à Diophante…

Page 10: Suite de Fibonacci, nombre d'or

10

Et, puisqu’on en est là, notons que les images sphériques de ϕ et ϕ’ sur la sphère de Riemann Σ sont diamétralement opposées. La distance cordale de ϕ et ϕ’ est donc 2 :

k(ϕ, ϕ’) = )²'1²)(1(

'.2

ϕϕϕϕ++

− = 2.

Quant à la médiatrice de (ϕ, ϕ’) pour la distance k, c’est le cercle d’Apollonios

)²1²)(1(

.2

ϕϕ++

−z

z =

)²'1²)(1(

'.2

ϕϕ++

−z

z ou | z – ϕ | =

'²1²1

ϕϕ

++

| z – ϕ’ | ou | z – ϕ | = ϕ | z – ϕ’ |

1.6. Le paradoxe de Lewis Carroll.

Avant de poursuivre notre propos, faisons une petite parenthèse récréative. Examiner attentivement les deux figures ci-dessous. De ces découpages faut-il déduire que 64 = 65 ? De deux choses l’une : soit nous sommes en présence d’un avatar du redoutable paradoxe de Banach-Tarski, soit nous sommes en présence d’une british et ingénieuse entourloupe…

Le lecteur s’apercevra sans peine que ce paradoxe repose sur une interprétation légèrement erronée

de la formule de Cassini Fn+1.Fn−1 – Fn2 = (−1)

n . Perfide Albion !

Page 11: Suite de Fibonacci, nombre d'or

11

1.7. Etude de la matrice A.

Nous avons vu que la suite (Fn) est liée aux puissances de la matrice A =

0111 .

Etudions cette matrice avec les méthodes du cours d’algébre linéaire.

Cette matrice A a pour polynôme caractéristique det(A – X.I ) = X2 – X – 1 = ( X – ϕ )( X − ϕ’ ).

Elle a deux valeurs propres réelles distinctes, donc elle est diagonalisable dans M2(R). Les vecteurs propres associés à ϕ et ϕ’ sont (ϕ, 1) et (ϕ’, 1) resp. Ils sont orthogonaux ; cela n’est pas suprenant, car A est symétrique réelle.

Si P =

11'ϕϕ , P

−1.A.P =

'00ϕ

ϕ . Par conséquent, P−1

.An.P =

n

n

'00

ϕϕ

et An = P.

n

n

'00

ϕϕ

.P−1

.

De cela on déduit au passage la formule de Moivre Fn = 5

'nn ϕϕ −, sur laquelle nous reviendrons.

Si l’on se place dans le repère propre uOv, le système dynamique discret linéaire Xn+1 = A.Xn

devient Un+1 =

'00ϕ

ϕ .Un , i.e. un = ϕn.u0 , vn = ϕ’

n.v0.

Notons au passage que un.vn = (−1)n

u0.v0 , autrement dit on saute alternativement de l’hyperbole

u.v = u0.v0 à l’hyperbole u.v = − u0.v0.

L’axe v = 0 est appelé « variété instable », car lorsque v0 = 0, un = ϕn.u0 , vn = 0. Le point Un

s’éloigne à l’infini.

L’axe u = 0 est appelé « variété stable », car lorsque u0 = 0, un = 0, vn = ϕ’n.v0 . Le point Un tend en

colimaçon vers (0, 0).

Si U0 n’est sur aucun des axes, Un s’éloigne à l’infini, et tend vers l’asymptote v = 0.

Remarque : La matrice A est dilatante dans une direction propre, contractante dans une autre. On dit que c’est une matrice « hyperbolique ».

> with(plots); > phi:=(1+sqrt(5))/2:phi1:=(1-sqrt(5))/2: > r:=(u,v)->listplot([seq([phi^k*u,phi1^k*v],k=-3..4) ],color=maroon); h:=k->plot(k/u,u=-3..3,v=-3..3,thickness=2): > display(r(1/2,0),r(1/2,1/2),h(1/4),r(1/2,-1/2),h(- 1/4),r(-1/2,-1/2),r(-1/2,1/2));

Page 12: Suite de Fibonacci, nombre d'or

12

Itérations dans le repère propre de la matrice A

1.8. Une loi de groupe sur les couples (Fn, Fn+1).

L’exercice suivant établit que les couples (Fn, Fn+1), où n décrit Z, forment un groupe monogène

engendré par le couple (F0, F1) pour une certaine loi.

Exercice 6 : En considérant l’application (a, b) → a.I + b.A =

+

abbba , démontrer que R

2, muni de

la loi (a, b) * (c, d) = (ac + bd, ad + bc + bd), est un monoïde commutatif, et que la forme

quadratique : q : (a, b) → a2 + ab – b

2 est un morphisme de monoïde de (R

2, *) dans (R, ×).

Quelles sont les puissances de (F0, F1) pour la loi * ?

En déduire que (Fp−1, Fp) * (Fq−1, Fq) = (Fp+q−1, Fp+q).

Démontrer que les éléments inversibles du monoïde (R2, *) sont les couples (a, b) tels que q(a, b) ≠

0. Quelles sont les puissances positives et négatives de (F0, F1) pour la loi * ?

Remarque : On aurait aussi pu considérer l’application (a, b) → a + b.ϕ de Z2 dans Z[ϕ]. Tout ceci

s’éclairera lors de l’étude de l’anneau Z[ϕ] et de son groupe des unités (i.e. des inversibles) au § 11. 1.9. Formules sommatoires.

(1) ∀n ≥ 0 F0 + F1 + … + Fn = Fn+2 – 1

(2) ∀n ≥ 1 F1 + F3 + … + F2n−1 = F2n

(3) ∀n ≥ 1 F2 + F4 + … + F2n = F2n+1 − 1

(4) ∀n ≥ 1 F1 – F2 + F3 – F4 + … + F2n−1 – F2n = 1 – F2n−1

(5) ∀n ≥ 1 F1 – F2 + F3 – F4 + … + F2n−1 – F2n + F2n+1 = 1 + F2n

(6) ∀n ≥ 1 F1 – F2 + F3 – F4 + … + (−1)n−1

.Fn = 1 + (−1)n−1

.Fn−1

(7) ∀n ≥ 1 ∀x ∈ C − ϕ, ϕ’ ∑=

n

k

kk xF

0

= ²1

211

xxxFxFx nnn

n

−−−− ++

+

(8) ∀n ≥ 1 F12

+ F22

+ … + Fn2

= Fn.Fn+1

Preuve : Evitons les récurrences et privilégions les preuves par télescopage :

F1 + F2 + … + Fn = ( F3 – F2 ) + ( F4 – F3 ) + … + ( Fn+2 – Fn+1 ) = Fn+2 – F2 = Fn+2 – 1.

F1 + F3 + … + F2n−1 = ( F2 – F0 ) + ( F4 – F2 ) + … + ( F2n – F2n−2 ) = F2n – F0 = F2n

(3) se déduit de (1) et (2). (4) et (5) se déduisent de (2) et (3). (6) unifie (4) et (5). (7) découle de :

( 1 – x – x2

).(∑=

n

k

kk xF

0

. ) = ∑=

n

k

kk xF

0

. −∑=

+n

k

kk xF

0

1. −∑=

+n

k

kk xF

0

2. = ∑=

n

k

kk xF

0

. −∑+

=−

1

11.

n

k

kk xF −∑

+

=−

2

22.

n

k

kk xF

= F0 + F1.x – F0.x2 + ∑

=−− −−

n

k

kkkk xFFF

221 ).( – ( Fn + Fn−1 ) x

n+1 – Fn.x

n+2

= x – Fn+1.xn+1

– Fn.xn+2

.

Notons que (1) et (6) découlent de (7) en faisant x = 1, puis x = − 1.

(8) se montre par récurrence : F12

= F1.F2 et, si F12

+ F22

+ … + Fn2

= Fn.Fn+1

alors F12

+ … + Fn2

+ Fn+12

= Fn.Fn+1 + Fn+12 = Fn+1.( Fn + Fn+1 ) = Fn+1.Fn+2 .

mais on peut aussi l’établir par télescopage :

F12

+ F22

+ … + Fn2

= F1 ( F2 – F0 ) + F2 ( F3 – F1 ) … + Fn ( Fn+1 − Fn−1 ) = Fn.Fn+1 − F1.F0

Page 13: Suite de Fibonacci, nombre d'or

13

Preuve visuelle de la formule F1

2 + F2

2 + … + Fn

2 = Fn.Fn+1

Cette preuve consiste à empiler des carrés Cn de côté Fn selon principe E-N (Est-Nord)de façon que

C1 = [0, 1]×[0, 1] R1 = [0, 1]×[0, 1]

C2 = [1, 2]×[0, 1] R2 = R1 ∪ C2 = [0, 2]×[0, 1]

C3 = [0, 2]×[1, 3] R3 = R2 ∪ C3 = [0, 2]×[0, 3]

C4 = [2, 5]×[0, 3] R4 = R3 ∪ C4 = [0, 5]×[0, 3]

C2k = [F2k−1, F2k+1]×[0, F2k] R2k = R2k−1 ∪ C2k = [0, F2k+1]×[0, F2k]

C2k+1 = [0, F2k+1]×[F2k, F2k+2] R2k+1 = R2k ∪ C2k+1 = [0, F2k+1]×[0, F2k+2].

L’aire du rectangle Rn est Fn+1×Fn. Elle est la somme des aires de C1, C2 , …, Cn .

La même figure montre géométriquement que Fn+1 et Fn sont premiers entre eux.

Exercice 7 : Démontrer que la somme de dix termes consécutifs de la suite de Fibonacci est égale à 11 fois le septième terme. Généraliser.

Solution : Il s’agit de vérifier que pour tout n ∈ N Fn + Fn+1 + … + Fn+10 = 11.Fn+6. Cela peut se vérifier de mille et mille façons.

Exercice 8 : Calculer les sommes :

F0 + F3 + … + F3n , F1 + F4 + … + F3n+1 , F2 + F5 + … + F3n+2 .

On trouvera resp. 2

123 −+nF,

233 +nF

et 2

143 −+nF.

Page 14: Suite de Fibonacci, nombre d'or

14

2. Le nombre d’or, rectangles et spirales.

Les chiffres dansent quand le nombre dort ( Homogène, 3,1416 avant J.-C. )

Jacques Prévert

2.1. Le nombre d’or est irrationnel…

Le nombre d’or ϕ = 2

51+ et son conjugué ϕ = ϕ’ = 2

51− , dénommés en hommage à l’architecte

grec Phidias, sont les deux solutions, l’une positive, l’autre négative, de l’équation x2 − x − 1 = 0.

Elles vérifient les relations : ϕ + ϕ’ = 1 , ϕ.ϕ’ = − 1 , ϕ − ϕ’ = 5 .

L’irrationalité de ϕ et ϕ’ peut se démontrer arithmétiquement ainsi :

Supposons x2 − x − 1 = 0 avec x =

ba , b ∈ N*, a ∈ Z, a ∧∧∧∧ b = 1. Alors a

2 − ab − b

2 = 0.

De a2 = ( a + b ) b , on déduit b | a

2 ; comme b ∧∧∧∧ a

2 = 1, b = 1.

De b2 = ( a − b ) a , on déduit a | b

2 ; comme a ∧∧∧∧ b

2 = 1, a = ±1.

Donc x = ±1, ce qui est impossible.

Autre approche. Reprenons la majoration précédemment trouvée | qn − ϕ | = |n

n

FF 1+ − ϕ | ≤ 2

1nF

.

Si l’on avait ϕ = ba , où a, b ∈ N*, alors | b.Fn+1 – a.Fn | ≤

nFb .

La suite d’entiers naturels | b.Fn+1 – a.Fn | tendrait vers 0, donc elle serait nulle à partir d’un certain

rang, ce qui signifie que (n

n

FF 1+ ) serait stationnaire. Or ce n’est pas le cas !

Mais on peut aussi démontrer cette irrationalité au moyen d’un algorithme présenté par Euclide et remontant sans doute à une époque intermédiaire entre Pythagore et Platon : l’anthyphérèse.

Définition : Les nombres réels a et b > 0 sont dit commensurables si a/b ∈ Q, incommensurables si a/b ∉ Q.

Considérons deux nombres réels a et b > 0.

Soit G = Z[a, b] = x = ma + nb ; m ∈ Z, n ∈ Z le sous-groupe additif de R engendré par a et b.

Posons a0 = max(a, b) , b0 = min(a, b) , c0 = a0 – b0 .

a1 = max(b0, c0) , b1 = min(b0, c0) , c1 = a1 – b1 .

a2 = max(b1, c1) , b2 = min(b1, c1) , c2 = a2 – b2 .

Théorème d’Euclide : On a l’alternative suivante : i) L’algorithme s’arrête au bout d’un nombre fini d’itérations si et seulement si a et b sont commensurables. Le groupe additif G est alors monogène, et engendré par α. ii) L’algorithme se poursuit indéfiniment si et seulement si a et b sont incommensurables. La suite

(ak) tend alors en décroissant vers 0, et le groupe G est dense dans R.

Appliquons ce théorème au couple (a0, a1) = (Fn+1, Fn) (n > 1).

a0 = Fn+1 , a1 = Fn , a2 = Fn+1 − Fn = Fn−1 , a3 = Fn − Fn−1 = Fn−2 , … , ak = Fn−k+1 , …,

an = F1 = 1, an+1 = F0 = 0. L’algorithme s’achève et α = 1. Donc Fn+1 / Fn ∈ Q (ce n’est pas une

surprise !) et Z[Fn+1 , Fn] = Z, donc Fn+1 et Fn sont premiers entre eux.

Appliquons ce théorème au couple (a0, a1) = (ϕ, 1).

a0 = ϕ, a1 = 1, a2 = ϕ − 1 = ϕ1 , a3 = 1 − ϕ

1 = 21

ϕ , a4 = ϕ1 − 2

1ϕ = 3

1ϕ , …, ak = 1

1−kϕ , …

Page 15: Suite de Fibonacci, nombre d'or

15

L’algorithme se poursuit indéfiniment, donc ϕ est irrationnel. 2.2. … mais constructible à la règle et au compas.

Construire à la régle et au compas 5 = ²2²1 + , ϕ, ϕ’ et toutes leurs puissances est bien facile.

Construction à la règle et au compas de ϕϕϕϕ et 1/ϕϕϕϕ

Construction à la règle et au compas de ϕϕϕϕ et ϕϕϕϕ’ 2.3. Courbes cerclées.

Dans le plan euclidien, nous appellerons « courbe cerclée » une courbe plane formée d’une réunion finie ou infinie d’arcs de cercle et de segments, d’un seul tenant (i.e. connexe par arcs).

Exemples : Un triangle, un polygone, sont des courbes cerclées.

L’image d’une courbe cerclée par une similitude est une courbe cerclée. L’image d’une courbe cerclée C par une inversion de pôle A ∉ C est une courbe cerclée.

Page 16: Suite de Fibonacci, nombre d'or

16

Exemples de courbes cerclées

Le dessin de gauche est dédié aux touristes qui ont besoin de kérosène détaxé pour s’envoyer en l’air6. A droite, une roue de Reuleaux ; dans mon chapitre sur les Roues on trouvera d’autres exemples de roues cerclées. Le chapitre sur la Rectification montre que toute courbe régulière peut être approchée localement (et sans doute globalement) par une courbe cerclée. 2.4. Spirale de Fibonacci.

Nous allons décrire un pavage du plan, en forme de spirale, obtenu en juxtaposant des carrés de

côtés Fn, et une spirale obtenue en mettant bout à bout des quarts de cercles inscrits dans ces carrés.

On part du carré C1 = [0, 1]×[1, 2] de côté F1 = 1, et l’on construit d’abord une « spirale de carrés » selon le principe S-E-N-O (Sud-Est-Nord-Ouest). On construit successivement :

♣ le carré C2 = [0, 1]×[0, 1] de côté F2 = 1 au Sud de C1.

et le quart de cercle de centre (1, 1) de rayon F2 = 1 inscrit dans ce carré.

♦le carré C3 = [1, 3]×[0, 2] de côté F3 = 2 à l’Est de R2 = C1 ∪ C2 = [0, 1]×[0, 2]

et le quart de cercle de centre (1, 2) de rayon F3 = 1 inscrit dans ce carré.

♥ le carré C4 = [0, 3]×[ 2, 5] de côté F4 = 3 au Nord de R3 = R2 ∪ C3 = [0, 3]×[0, 2]

et le quart de cercle de centre (0, 2) de rayon F4 = 3 inscrit dans ce carré.

♠ le carré C5 = [−5, 0]×[0, 5] de côté F5 = 5 à l’Ouest de R4 = R3 ∪ C4 = [0, 3]×[0, 5]

et le quart de cercle de centre (0, 0) de rayon F5 = 5 inscrit dans ce carré.

♣ le carré C6 = [−5, 3]×[−8, 0] de côté F6 = 8 au Sud de R5 = R4 ∪ C5 = [−5, 3]×[0, 5]

et le quart de cercle de centre (3, 0) de rayon F6 = 8 inscrit dans ce carré.

♦le carré C7 = [3, 16]×[−8, 5] de côté F7 = 13 à l’Est de R6 = R5 ∪ C6 = [–5, 3]×[−8, 5]

et le quart de cercle de centre (3, 5) de rayon F7 = 13 inscrit dans ce carré.

♥ le carré C8 = [–5, 16]×[5, 26] de côté F8 = 21 au Nord de R7 = R6 ∪ C7 = [–5, 16]×[−8, 5]

et le quart de cercle de centre (–5 , 5) de rayon F8 = 21 inscrit dans ce carré.

♠ le carré C9 = [−39, –5]×[−8, 26] de côté F9 = 34 à l’Ouest de R8 = R7 ∪ C8 = [–5, 16]×[−8, 26]

et le quart de cercle de centre (–5, –8) de rayon F9 = 34 inscrit dans ce carré.

6 Réflexion de l’un d’eux, à son retour de Birnanie, en pleine pandémie, en février 2020 : « La Birmanie, c’est beau. On a bien mangé ! ». Cette réflexion hautement métaphysique aurait pu faire un excellent sujet de philo pour le bac 2020. Car il faut le savoir : le Touriste aime le Beau, le Bon et le Bien. Il aime le Beau ? Il préfère les pagodes birmanes aux cohortes de rohingas misérables. Il aime le Bon ? Il préfère le tournedos Rossini cuit à point au pangolin mal cuit. Le Bien ? Il ne doute pas que son argent financera les démocrates birmans… à condition qu’il n’y ait pas de manifs pendant son séjour, car les manifs ça fait désordre ! Tristes tropiques !

Page 17: Suite de Fibonacci, nombre d'or

17

2.5. Spirales d’or.

Rapportons le plan euclidien à des axes orthonormés Oxy, et introduisons le « rectangle d’or » de longueur ϕ et de largeur 1, de sommets ABCD, où A(1/ϕ,0), B(1/ϕ, 1), C(−1, 1) et D(−1, 0). Si F(0, 1/ϕ), les rectangles ABCD et BFOA sont semblables. Les droites (AC) et (OB) se coupent à angle droit en un point Ω appelé « œil de Dieu » (que les monothéistes ne crient pas au sacrilège, il s’agit du Dieu des mathématiques, Apollon pytha-goricien). Considérons la similitude S de centre Ω, de rapport ϕ et d’angle π/2.

Je dis que T = S−1

envoie le rectangle ABCD sur le rectangle OABF, et le segment [AC] sur le segment [OB]. Si l’on veut obtenir présenter plus commodément les choses, mieux vaut changer de repère, prendre

pour origine l’œil de Dieu O = Ω et placer le rectangle d’or R0 en biais.

La similitude S = Sim(O, ϕ, π/2) est alors donnée :

en complexes par : Z = S(z) = iϕ.z , et en cartésiennes par : [ YX ] =

00ϕ

ϕ [ yx ].

Notons T = S−1

= Sim(O, 1/ϕ, −π/2) la similitude inverse, qui est 1/ϕ-contractante.

Notons A0(1, 0), Ak = Sk(A0), k ∈ Z, la suite de ses itérés par S.

Les points Ak se situent à l’intersection des axes xOy et de la spirale logarithmique d’équation

polaire r = θme , où m = πϕln2

, qui est globalement invariante par S.

Le rectangle R0 a pour sommets :

A−1(0, ϕ’ = −1/ϕ) , A0(1, 0) , A1(0, ϕ) , B0(−1, 1) .

où B0 est l’orthoprojection de A−1 sur la droite (A1A2). Il a pour aire 2ϕ − 1. .

Pour tout k ∈ Z, notons Rk = (Ak−1, Ak, Ak+1, Bk) le rectangle image de par Sk.

Page 18: Suite de Fibonacci, nombre d'or

18

Les points Bk se situent tous sur la spirale logarithmique d’équation polaire r = C θme ,

où m = πϕln2

et C = 2 2/3−ϕ , qui est aussi globalement invariante par S.

Le rectangle C0 a pour sommets :

A−2(−1/ϕ2, 0) , B−1(1/ϕ, 1/ϕ) , A1(0, ϕ) , B0(−1, 1) .

Il a pour aire 3 − ϕ.

Lorsque k tend vers +∞, la suite de rectangles (R−k) et la suite de carrés (C−k) tendent vers O pour

la distance de Hausdorff. De plus, ∑+∞

=−

0

)(k

kCAire = ( 3 − ϕ ).∑+∞

=021

kkϕ = … = 2ϕ − 1 = Aire(R0).

Exercice : Justifier ce calcul et établir que U+∞

=−

0kkC = R0 – O.

Quant à la spirale d’or, elle est la réunion des quarts de cercles Γk de centres Ak, limités par

Bk+1Bk+2. A noter que le point asymptote O est à distance finie de A0, en ce sens que

U+∞

=−Γ

0kk a une longueur totale finie égale à

2π ( ϕ + 1 ) ϕ−3 .

Voici une feuille de calculs Maple montrant ces figures :

> with(plots):phi:=(1+sqrt(5))/2; > a:=k->I^k*phi^k;b:=k->a(k)*(-1+I); xa:=k->Re(a(k));ya:=k->Im(a(k)); xb:=k->Re(b(k));yb:=Im(b(k));A:=k->[xa(k),ya(k)];B: =k->[xb(k),yb(k)]; > z:=(k,t)->a(k)+exp(I*t)*(b(k+1)-a(k)); x:=(k,t)->Re(z(k,t));y:=(k,t)->Im(z(k,t)); > p:=k->plot([x(k,t),y(k,t),t=0..Pi/2],color=gold,thi ckness=2): q:=k->listplot([A(k-2),B(k)],color=blue): >LA:=listplot([seq(A(k),k=-4..8)],color=black,thickn ess=2): > display(LA,seq(p(k),k=-4..5),seq(q(k),k=-4..5));

Page 19: Suite de Fibonacci, nombre d'or

19

> with(plots):phi:=(1+sqrt(5))/2;m:=2*ln(phi)/Pi; > a:=k->I^k*phi^k;b:=k->a(k)*(-1+I); xa:=k->Re(a(k));ya:=k->Im(a(k));xb:=k->Re(b(k));yb: =Im(b(k)); A:=k->[xa(k),ya(k)];B:=k->[xb(k),yb(k)]; > z:=(k,t)->a(k)+exp(I*t)*(b(k+1)-a(k)); x:=(k,t)->Re(z(k,t));y:=(k,t)->Im(z(k,t)); > p:=k->plot([x(k,t),y(k,t),t=0..Pi/2],color=gold,thi ckness=2): > sp1:=polarplot(exp(m*t),t=-4..4*Pi,color=blue): sp2:=polarplot(sqrt(2)*phi^(-3/2)*exp(m*t),t=-4..4* Pi,color=green): > LA:=listplot([seq(A(k),k=-4..8)],color=red): LB:=listplot([seq(B(k),k=-4..7)],color=violet): > display(sp1,sp2,LA,LB,seq(p(k),k=-4..5));

Page 20: Suite de Fibonacci, nombre d'or

20

3. Formule de Moivre et applications.

3.1. Premiers résultats sur la croissance de la suite (Fn).

Les exercices suivants permettent de préciser la vitesse de croissance de la suite (Fn) :

Exercice 1 : Résoudre les équations Fn = n , Fn = n2

.

Solution : Une récurrence facile montre que Fn > n pour n ≥ 6 et Fn > n2 pour n ≥ 13.

Dès lors il n’y a qu’un nombre fini de tests. On trouve : Fn = n ⇔ n ∈ 0, 1, 5 Fn = n

2 ⇔ n ∈ 0, 1, 12

Exercice 2 : Trouver la limite de la suite (nFn ) .

Solution : On vient de noter que Fn > n2 pour n ≥ 13.

Ou bien noter que nFn =

nFFFF nn 011 ... −++− − et conclure par Cesaro.

Exercice 3 : Trouver les progressions arithmétiques à 3 et à 4 termes dans la suite (Fn)n∈N

Exercice 4 : 1) Démontrer que ∀n ≥ 1 (23 )n–2

≤ Fn ≤ 2n–1

.

2) Plus généralement, soient ρ et ρ’ deux réels tels que 0 < ρ < ϕ < ρ’ (où ϕ est le nombre d’or).

Démontrer que ∃λ, µ > 0 ∀n ≥ 1 λ.ρn ≤ Fn ≤ µ.ρ’

n .

3) Démontrer, toujours élémentairement, que les suites (Fn) et (ϕn) sont semblables.

Preuve : 1) se montre par récurrence sur n.

Pour n = 1, elle s’écrit : (23 )–1

= 32 ≤ F1 = 1 ≤ 2

0 = 1.

Pour n = 2, elle s’écrit : (23 )0

= 1 ≤ F2 = 1 ≤ 21 = 2.

Supposons-la vraie aux rangs n et n + 1, i.e. (23 )n–2

≤ Fn ≤ 2n–1

et (23 )n–1

≤ Fn+1 ≤ 2n.

Additionnons ! Il vient : (23 )n–2

+ (23 )n–1

≤ Fn+2 ≤ 2n–1

+ 2n.

Or (23 )n–2

+ (23 )n–1

= (23 )n–2

( 1 + 23 ) = (

23 )n–2

25 > (

23 )n–2

49 = (

23 )n

Et 2n–1

+ 2n = 2

n–1 ( 1 + 2 ) = 2

n–1.3 < 2

n–1.4 = 2

n+1.

2) Soient ρ et ρ’ deux réels tels que 0 < ρ < ϕ < ρ’ .

Supposons trouvés deux réels λ, µ > 0 tels que λ.ρ ≤ F1 = 1 ≤ µ.ρ’ et λ.ρ2 ≤ F2 = 1 ≤ µ.ρ’

2 ,

et démontrons que ∀n ≥ 1 λ.ρn ≤ Fn ≤ µ.ρ’

n .

La relation est vraie pour n = 1 et 2. Supposons-la vraie aux rangs n et n + 1.

Alors par addition : λ.ρn ( 1 +.ρ ) ≤ Fn+2 ≤ µ.ρ’

n (1 +.ρ’ ).

On conclut via ρ2 < 1 + ρ et 1 + ρ’ < ρ’

2.

Reste à trouver λ et µ… Il suffit de choisir λ = min( ρ1 ,

²1ρ ) et µ = max(

'1ρ ,

'²1ρ ).

3) Supposons trouvés deux réels λ, µ > 0 tels que λ.ϕ ≤ F1 = 1 ≤ µ.ϕ et λ.ϕ2 ≤ F2 = 1 ≤ µ.ϕ2

.

Une récurrence facile montre que ∀n ≥ 1 λ.ϕn ≤ Fn ≤ µ.ϕn

. D’où la conclusion.

Exercice 5 : Montrer que les nombres de Fibonacci forment un ensemble de densité nulle, en ce sens

que : lim N→+∞ N1 card n ; Fn ≤ N = 0.

Page 21: Suite de Fibonacci, nombre d'or

21

3.2. Formule de Moivre.

Cette formule exprime les suites de Fibonacci et de Lucas comme combinaisons linéaires des suites

(ϕn) et (ϕ’

n). Le mieux pour démontrer ce résultat est de faire appel au cours d’algèbre linéaire.

Théorème 1 : Les suites réelles (xn)n∈Z vérifiant ∀n ∈ Z xn+2 = xn+1 + xn forment un sous-espace

vectoriel S de FFFF(Z, R) = RZ, de dimension 2, autrement dit un plan vectoriel.

Cet espace est stable par l’opérateur de décalage : si x = (xn) est élément de S, T(x) = (xn+1) aussi.

Pour que x = (xn) et y = (yn) forment une base de ce plan, il faut et il suffit que 11

00

yxyx ≠ 0.

Preuve : La première assertion est facile. Les deux autres découlent de ce que Φ : x → (x0, x1) est une bijection linéaire de S sur R×R.

Corollaire 1 : Les suites (Fn) et (Ln), resp. (ϕn) et (ϕ’

n), resp. (Fn) et (Fn+1) forment une base de S.

Si x = (xn) est élément de S,

∀n ∈ Z xn = Fn−1.x0 + Fn.x1 = (x1 − 20x ).Fn +

20x .Ln =

''01

ϕϕϕ

−−xx

.ϕn +

'. 10

ϕϕϕ−−xx

.ϕ’n.

Remarque : Considérons l’opérateur de décalage T : (xn)n∈Z → (xn+1)n∈Z dans FFFF(Z, R) = RZ.

Pour qu’une suite (xn) soit élément de S, il faut et il suffit qu’elle appartienne à Ker( T2 – T – I ).

Le petit théorème des noyaux affirme alors que :

S = Ker( T2 – T – I ) = Ker( T – ϕ.I ) ⊕ Ker( T – ϕ’.I ).

Or Ker( T – ϕ.I ) est la droite vectorielle engendrée par la suite (ϕn), Ker( T – ϕ’.I ) la droite

engendrée par la suite (ϕ’n). On retrouve une partie des résultats précédents.

Corollaire 2 : ∀n ∈ Z ϕn = Fn−1 + ϕ.Fn , ϕ’

n = Fn+1 − ϕ.Fn = ϕ’.Fn + Fn−1.

Preuve : cela découle du corollaire 1 appliqué aux suites (ϕn) et (ϕ’

n).

Corollaire 3 : ∀(m, n) ∈ Z×Z Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1.

Preuve : Fixons m et considérons la suite de terme général xn = Fm+n .

Elle est élément de S. La formule ∀n ∈ Z xn = Fn−1.x0 + Fn.x1 conclut.

Corollaire 4 : ∀(p, q, r) ∈ Z×Z Fp Fq+r − (−1)r Fp−r.Fq = Fp+q.Fr .

Elle s’écrit aussi : ∀(p, q, r) ∈ Z×Z Fp Fq+r + (−1)p Fr−p.Fq = Fp+q.Fr .

Preuve : Fixons p et q, et considérons la suite de terme général xr = Fp Fq+r + (−1)p Fr−p.Fq

Elle est élément de S. La formule ∀r ∈ Z xr = Fr−1.x0 + Fr.x1 conclut, car :

x0 = Fp Fq + (−1)p F−p.Fq = 0

x1 = Fp Fq+1 + (−1)p F1−p.Fq = Fp Fq+1 + Fp−1.Fq = Fp+q en vertu du corollaire 2.

A noter que le corollaire 3 généralise le corollaire 2 (faire r = 1) et en découle.

Corollaire 5 : Formule de Catalan 7.

∀(p, q) ∈ Z×Z Fp2 − Fp−q.Fp+q = (−1)

p–q Fq

2 .

Preuve : Faire r = p – q dans le corollaire 3.

7 Eugène Catalan (Bruges, 1814 - Liège, 1894), un de mes mathématiciens préférés. Les polytechniciens de gauche sont des oiseaux rares, et ceux qui restent à gauche des oiseaux très rares...

Page 22: Suite de Fibonacci, nombre d'or

22

Corollaire 6 : ∀n ∈ Z Fn+2.Fn+1.Fn−1.Fn−2 = Fn4 – 1.

Preuve : il découle de la formule de Catalan que :

Fn+1.Fn−1 = Fn2 − (−1)

n–1 F1

2 = Fn

2 − (−1)

n–1 .

Fn+2.Fn−2 = Fn2 − (−1)

n–2 F2

2 = Fn

2 − (−1)

n–2 .

Il suffit de multiplier ces deux identités.

Exercice : Démontrer les identités :

∀n ∈ Z Ln = Fn−1 + Fn+1 ∀n ∈ Z Ln = Fn−3 + Fn+3.

Théorème 2 : formule de Moivre (1718).

∀n ∈ Z Fn = ''

ϕϕϕϕ

−− nn

= 5

'nn ϕϕ − , Ln = ϕn

+ ϕ’n .

Preuve : Cela découle du corollaire 1 du théorème 1.

Certains auteurs attribuent cette formule à Simson (1753), d’autres à Euler (1765), voire (et c’est le cas le plus fréquent) à Binet (1843), mais cette dernière attribution est peu crédible, Lagrange ayant publié un traité sur les suites récurrentes en 1775.

Corollaire 1 : Fn = 5

nϕ + o(1) ∼∼∼∼

5

nϕ et Ln = ϕn

+ o(1) ∼∼∼∼ ϕn quand n → +∞.

Fn = −5

'nϕ + o(1) ∼∼∼∼ −

5

'nϕ et Ln = ϕ’

n + o(1) ∼∼∼∼ ϕ’

n quand n → −∞.

Preuve : Fn = ''

ϕϕϕϕ

−− nn

= 5

'nn ϕϕ − =

5

nϕ( 1 – (−1)

n.ϕ’

2n ) , etc.

Corollaire 2 : Les suites (n

n

FF 1+ ) et (

n

n

LL 1+ ) tendent vers le nombre d’or ϕ quand n → +∞.

Elles tendent vers ϕ’ quand n → −∞.

La convergence de la première suite est rapide, car :

|n

n

FF 1+ − ϕ | =

nn F.1

ϕ ∼∼∼∼ n25

ϕ et |n

n

FF 1+ − ϕ | ≤ 2

1nF

.

Cela découle du corollaire 2 du théorème 1 : |n

n

FF 1+ − ϕ | = |

n

n

F'ϕ

| = nn F.

1ϕ et Fn ≤ ϕ.Fn ≤ ϕn

.

Corollaire 3 : La suite (n

n

FL ) tend vers 5 quand n → +∞, vers − 5 quand n → −∞.

Corollaire 4 : Pour tout n ≥ 0, Fn est l’entier le plus proche de 5

nϕ.

Preuve : | Fn − 5

nϕ | = |

5

'nϕ| =

5

)'( nϕ− ≤

51 <

21 .

A noter que Fn est alternativement plus grand et plus petit que 5

nϕ selon que n est impair ou pair.

> Digits:=100;phi:=fsolve(x^2-x-1=0,x,x = 0..2); := Digits 100

φ 1.618033988749894848204586834365638117720309179805762862135448622\ :=

705260462818902449707207204189391137

> [seq(round(phi^n/sqrt(5)),n=0..25)];

Page 23: Suite de Fibonacci, nombre d'or

23

0 1 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144 233 377 610 987 1597 2584 4181 6765, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[

10946 17711 28657 46368 75025, , , , ]

Exercice 1 : A tout entier N > 2 on associe l’entier n = G(N) tel que Fn ≤ N < Fn+1 .

Montrer que G(N) = ϕlnlnN + O(1).

Exercice 2 : Démontrer que pour tout n > 0, 51 nn /1−ϕ ≤ Fn ≤

51 nn /1+ϕ .

Exercice 3 : Démontrer que (∀n) 2n.Fn = 2∑

+∞

=

+

0

12 5.k

kknC ( somme à support fini ).

Proposition 3 : ∀n ∈ Z Fn+1 = 21 ( Fn + Ln ) et Ln+1 =

21 ( 5.Fn + Ln )

Preuve : Les suites (Fn+1) et (Ln+1) sont éléments de S, donc combinaisons linéaires de (Fn) et (Ln). Il suffit de leur appliquer le corollaire 1 du théorème 1.

Notons que Fn et Ln ont même parité. En divisant par 2 on reste dans Z.

Matriciellement, les suites de Fibonacci et Lucas vérifient :

[0

0

LF ] = [ 2

0 ] et [1

1

+

+

n

n

LF ] =

21

1511 [

n

n

LF ] .

ce qui fournit un nouveau mode de calcul récurrent des deux suites. Retrouvons au passage :

Corollaire : La suite (n

n

FL ) tend vers 5 quand n → +∞, vers − 5 quand n → −∞.

Preuve : Notons n

n

FL = rn. Il découle de la prop 3 que rn+1 =

1

1

+

+

n

n

FL =

nn

nn

LFLF

++5 =

15

++

n

n

rr

Et nous voilà ramenés à une brave suite récurrente classique...

Proposition 4 : ∀n ∈ Z F2n = Fn.Ln et L2n = Ln2 − 2 (−1)

n .

F2n+1 = 21 ( F2n + L2n ) =

21 ( Fn.Ln + Ln

2 − 2 (−1)

n )

et L2n+1 = 21 ( 5.F2n + L2n ) =

21 ( 5 Fn.Ln + Ln

2 − 2 (−1)

n )

Preuve : Les deux premières formules découlent du théorème 2, les deux suivantes du théorème 3.

Proposition 5 : Pour tout n ∈ N 5.Fn2 − Ln

2 = 4 (−1)

n+1 .

Preuve : Par récurrence sur n. Pour n = 0, 5.F02 − L0

2 = − 4. Si la propriété est vraie au rang n,

5.Fn+12 − Ln+1

2 = [ Fn+1 Ln+1]

−1005 [

1

1

+

+

n

n

LF ]

= [ Fn Ln] 21

1151

−1005

21

1511 [

n

n

LF ] .= [ Fn Ln]

1005 [

n

n

LF ]

= − ( 5.Fn+12 − Ln+1

2 ) = 4 (−1)

n+2 .

Remarque : Cela reste vrai pour n ∈ Z. Ainsi les couples (Ln, Fn) se trouvent alternativement sur

l’une ou l’autre des hyperboles x2 − 5 y

2 = 4 et x

2 − 5 y

2 = − 4. Nous retrouverons cela au § 11.

Dans le même ordre d’idées, mentionnons ce résultat que nous aurions pu signaler plus tôt :

Proposition 6 : ∀n ∈ Z F2n−1 = Fn−12 + Fn

2 , F2n = Fn+1

2 − Fn−1

2 .

Formule qu’on peut résumer en : ∀n ∈ Z Fn = F[n/2]+12 − (−1)

n.F[(n−1)/2]

2 .

Page 24: Suite de Fibonacci, nombre d'or

24

Preuve : F2n−1 = Fn−12 + Fn

2 découle de Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1.

F2n = F2n+1 − F2n−1 et appliquer la formule précédente. .

Les Fn sont alternativement des sommes et des différences de deux carrés. On en déduit que F2n est congru à 0, 1 ou 3 modulo 4. Quant aux sommes de deux carrés…

Exercice : Calculer et simplifier Fn3 , Fn

4 et Fn

5 à l’aide de la formule de Moivre.

3.3. Algorithme de récurrence binaire.

Les formules de la prop 4, jointes à F0 = 0, L0 = 2, fournissent un calcul par récurrence binaire des

suites (Fn) et (Ln). Grâce à cet algorithme, on peut calculer Fn et Ln sans calculer tous les prédécents, avec un algorithme de compexité O(ln n).

FL:=proc(n) option remember;local m;if n = 0 then [ 0,2]; elif type(n,odd)=true then [1/2*(FL(n-1)[1]+FL(n-1)[2]),1/2*(5*FL(n-1)[1]+FL(n -1)[2])] else m:=iquo(n,2);[FL(m)[1]*FL(m)[2],FL(m)[2]^2 - 2 *(-1)^m];fi;end; FL(19);FL(39);FL(100);FL(200);

[ ],4181 9349

[ ],63245986141422324 [ ],354224848179261915075792070839848372253127 280571172992510140037611932413038677189525,[

627376215338105766356982006981782561278127 ]

Au fond, ce n’est pas surprenant, car l’algorithme d’exponentiation binaire d’Al Kashi de calcul de

xn dans un monoïde est de complexité O(ln n).

Or calculer Fn revient à calculer An ou B

n, où A =

0111 et B =

21

1511 .

Voici cet algorithme :

Exercice : Soit E un monoïde multiplicatif, de neutre e. 1) Montrer que la fonction Φ : (x , n) ∈ E×N → xn ∈ E est caractérisée par les formules :

Φ(x , 0) = e ; Φ(x , 2m) = Φ(x , m)2 ; Φ(x , 2m + 1) = x.Φ(x , m)

2 .

2) On considère l’algorithme suivant (en langage Maple) : alkashi : = proc(x, n) local m, y, z ; m : = n ; y : = 1 ; z : = x ; while m ≠ 0 do if type(m , odd) then y : = y.z fi ; m : = iquo(m , 2) ; z : = z.z ; od ; print(y) ; end ; Que calcule cet algorithme ? Combien d’opérations nécessite-t-il ?

Remarque : comment Maple calcule les nombres de Fibonacci ? Pour le savoir, il suffit de taper : with(combinat) ; interface(verboseproc=2) ; eval(fibonacci) ;

Page 25: Suite de Fibonacci, nombre d'or

25

3.4. Longueur des nombres de Fibonacci.

Théorème : Pour tout k ≥ 1, le nombre de nombres de Fibonacci ayant k chiffres en base 10 est égal à 4 ou 5.

Autrement dit, si FFFF = 0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89, 144, …

card (FFFF ∩ [10k−1

, 10k [ ) = 4 ou 5.

De fait, FFFF ∩ [1, 10 [ = 1, 2, 3, 5, 8

FFFF ∩ [10, 100 [ = 13, 21, 34, 55, 89

FFFF ∩ [100, 1000 [ = 144, 233, 377, 610, 987

FFFF ∩ [1000, 10000 [ = 1597, 2584, 4181, 6765

Preuve. Partons de : ∀n ≥ 2 Fn−1 ≤ Fn ≤ 2 Fn−1.

On en déduit successivement : 23 Fn ≤ Fn+1 = Fn + Fn−1 ≤ 3 Fn−1.

25 Fn ≤ Fn+2 = Fn+1 + Fn ≤ 5 Fn−1.

28 Fn ≤ Fn+3 = Fn+2 + Fn+1 ≤ 8 Fn−1.

2

13 Fn ≤ Fn+4 = Fn+3 + Fn+2 ≤ 13 Fn−1.

221 Fn ≤ Fn+5 = Fn+4 + Fn+3 ≤ 21 Fn−1.

Pour k = 1 et 2, nous avons vu que card (FFFF ∩ [10k−1

, 10k [ ) = 5.

Supposons que card (FFFF ∩ [10k−1

, 10k [ ) = 4 ou 5, et notons Fn−1 le plus grand nombre de Fibonacci

de cette tranche. On a donc Fn−1 ≤ 10k − 1 < 10

k ≤ Fn .

Du coup, Fn+3 ≤ 8 Fn−1 ≤ 8 ( 10k − 1 ) < 10

k+1 − 1.

Par conséquent Fn , Fn+1 , Fn+2 , Fn+3 ⊂ [10k, 10

k+1 [

De plus, Fn+5 ≥ 221Fn ≥

22110

k > 10

k+1 .

Par conséquent Fn+5 ∉ [10k, 10

k+1 [ L’incertitude porte uniquement sur Fn+4. CQFD

Remarque : les inégalités ci-dessus se généralisent en 2

3+kF .Fn ≤ Fn+k ≤ Fk+3.Fn−1.

Cela découle aisément de Fn+k = Fk+1.Fn + Fk.Fn−1. > with(combinat):with(plots): > alias(f=fibonacci):p:=n->length(f(n)): > listplot([seq([n,p(n)],n=0..100)],thickness=2,color =violet,axes=NORMAL);

Nombres de chiffres des 100 premiers nombres de Fibonacci

Page 26: Suite de Fibonacci, nombre d'or

26

3.5. Fonction de Fibonacci.

La suite de Fibonacci peut être prolongée à R de bien des façons, mais a-t-elle un prolongement « naturel » ? Examinons la formule de Moivre :

∀n ∈ Z Fn = ''

ϕϕϕϕ

−− nn

= 5

'nn ϕϕ − =

5

)1( nnn −−− ϕϕ .

La fonction n → (−1)n se prolonge à R ou C naturellement si l’on observe que :

(−1)n = e

inπ = cos(nπ) + i.sin(nπ) = cos(nπ).

Du coup, on peut définir une fonction (−1)x = e

ixπ , et introduire deux fonctions :

F(x) = 5

)1( xxx −−− ϕϕ ≡

5

).cos( xx x −− ϕπϕ − i

5

).sin( xx −ϕπ.

Re F(x) = 5

).cos( xx x −− ϕπϕ.

Ces deux fonctions, l’une à valeurs complexes, l’autre à valeurs réelles, prolongent toutes deux la

suite (Fn), c’est-à-dire la fonction n → Fn,

Elles sont de classe C∞

et vérifient ∀x ∈ R F(x + 2) = F(x + 1) + F(x).

On peut les considérer à bon droit comme des prolongements naturels, et les nommer « fonctions de Fibonacci ». Et l’on pourrait également prolonger la suite de Lucas, et généraliser à ces fonctions pas mal d’identités déjà trouvées. J’ignore si cela a beaucoup d’intérêt.

Visualisons-les avec Maple : > with(plots):phi:=(1+sqrt(5))/2:F:=x->(phi^x-phi^(-x )*cos(Pi*x))/sqrt(5);

:= F → x − φx φ

( )−x( )cos π x

5

> L:=[];for n from 0 to 15 do L:=[op(L),simplify(F(n) )]:od;print(L);

[ ], , , , , , , , , , , , , , ,0 1 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144 233 377 610

> plot(F(x),x=-7..7,thickness=2,color=blue);

> G:=x->-sin(Pi*x)*phi^(-x)/sqrt(5);

:= G → x −( )sin π x φ

( )−x

5

> plot([F(x),G(x),x=-5..5],thickness=2,color=maroon,a xes=normal);

Page 27: Suite de Fibonacci, nombre d'or

27

4. Interprétations combinatoires de la suite de Fibonacci.

4.1. Les fameux lapins de Fibonacci.

Dans son Liber abaci, Fibonacci pose et résout un problème anodin sur la reproduction des lapins. Pouvait-il penser que cet exercice assurerait sa célébrité ? Car, derrière ces mathématiques récréatives, on peut voir l’un des premiers modèles de dynamique des populations animales. « Quot paria coniculorum in uno anno ex uno pario germinentur », demande-t-il, autrement dit : « Combien de couples de lapins proviennent d’un même couple en une année ? » Mettons cette idée en forme. Une population de lapins est observée aux instants 1, 2, 3, 4, … qui correspondent à des mois. On suppose qu’elle obéit aux lois suivantes : a) A l’instant 1, il y a une paire de lapereaux. b) Les lapins nés à l’instant n ne commencent à procréer qu’à l’instant n + 2. Ils procréent des couples de lapereaux. c) Tous les lapins sont immortels.

Les lapins de Fibonacci

Théorème de Fibonacci : Le nombre de couples de lapins à l’instant n est Fn. En particulier, au

bout d’un an, il y a F12 = 144 couples de lapins.

En effet, aux instants 1 et 2, F1 = F2 = 1, puisque le premier couple ne peut procréer qu’au 2ème mois.

F3 = 2, car le couple s’est reproduit à l’instant 1. Pour tout n, Fn+2 = Fn+1 + Fn , car aux couples vivants au (n + 1)-ème mois il faut adjoindre ceux qui ont été conçus à l’instant n.

La formule de Moivre montre que ce modèle de population animale suit une croissance exponentielle.

Page 28: Suite de Fibonacci, nombre d'or

28

Au fond, il s’agit d’un système dynamique avec retard y(n+1) – y(n) = y(n–1), analogue à l’équation différentielle avec retard y’(t) = y(t – 1).

Un autre modèle de reproduction des lapins est fourni par la suite dite de Jacobsthal. Sachant qu’un couple de lapins donne naissance à deux nouveaux couples chaque mois et que chaque couple commence à engendrer à partir du deuxième mois suivant sa naissance, on demande le nombre total de couples au n-ième mois.

Exercice : Suite de Jacobstahl.

Il s’agit de la suite récurrente J0 = 0 , J1 = 1 , Jn+2 = Jn+1 + 2Jn.

1) Calculer les premières valeurs de cette suite. La reconnaître dans l’OEIS.

2) Démontrer qu’elle a pour fonction génératrice ∑+∞

=0n

nnXJ = ²21 XX

X−−

3) En déduire que Jn = 3

)1(2 nn −−, que Jn+1 = 2

n − Jn et que Jn+1 = 2

n∑

=

−n

kk

k

0 2)1(

= (−1)n∑

=−

n

k

kk

0

2)1( .

4) Démontrer que Jn+1 est le nombre de façons de paver un rectangle 3××××n avec des tuiles 1××××1 et 2××××2. 4.2. La reproduction des hyménoptères.

Te voilà hors de l’alvéole, Petite abeille de ma chair, Je suis la ruche sans parole Dont l’essaim est parti dans l’air.

Cécile Sauvage, L’Âme en bourgeon

Si les hypothèses du modèle de reproduction animale proposé par Fibonacci peuvent paraître arbitraires, la reproduction des hyménoptères met en jeu de manière plus naturelle les nombres de Fibonacci. Les hyménoptères sont un ordre d’insectes, de la sous-classe des ptérygotes, de la section des néoptères et du super-ordre des endoptérygotes. Des représentants communs de cet ordre sont les abeilles, les guèpes, les fourmis et les frelons, présents sur tous les continents sauf l’Antarctique. Le mode de reproduction des abeilles, et plus généralement des hyménoptères, a été découvert vers 1835 par un apiculteur et naturaliste de Silésie, le prêtre polonais Jan Dzierzon (1811-1906). Ce dernier a publié ses découvertes en 1845, elles ont été confirmées expérimentalement plus tard. Jan Dzierzon a découvert que les abeilles se reproduisent par parthénogénèse arrhénotoque facul-tative8 : un mâle (ou faux bourdon) est issu d’un œuf non fécondé, une femelle d’un œuf fécondé la parthénogénèse arrhénotoque n’engendre que des individus mâles . Les femelles ont ainsi le privilège, presque unique dans la nature, de pouvoir à volonté donner naissance à des mâles ou à des femelles. Le lien avec les nombres de Fibonacci est le suivant. Un mâle n’a qu’un seul géniteur, une femelle, une femelle a deux géniteurs, un mâle et une femelle. Du coup, un mâle a deux « grands-parents », un mâle et une femelle, une femelle a trois « grands-parents », deux femelles et un mâle. Un mâle a donc trois aïeux, une femelle en a cinq, etc. Mettons cela en forme :

8 La parthénogenèse arrhénotoque donne une descendance uniquement composée de mâles. Cependant, il y a formation d’une femelle si l’œuf est fécondé ; c’est donc une parthénogenèse facultative et l’espèce possède des individus des deux sexes ; on la rencontre chez les insectes. La parthénogenèse thélytoque donne une descendance uniquement composée de femelles ; c’est la plus fréquemment rencontrée dans la nature, elle est obligatoire et constante. Les femelles sont diploïdes. Il peut même y avoir absence totale de mâles dans l’espèce, comme chez les Cnemidophorus ou lézards à queue en fouet, seul cas connu chez les vertébrés. Cependant, s’il y a apparition de mâles de manière cyclique à une période de l’année, la parthénogénèse devient deutérotoque ; il y a alors production de mâles et de femelles ; c’est le cas chez les crustacés, les amphibiens ou encore les rotifères.

Page 29: Suite de Fibonacci, nombre d'or

29

Théorème de Dzierzon : Un hyménoptère mâle a Fn+1 ancêtres à la n-ème génération, Fn−1 mâles et

Fn femelles. Un hyménoptère femelle a Fn+2 ancêtres à la n-ème génération, Fn mâles et Fn+1 femelles.

Preuve par récurrence sur n ≥ 1. C’est vrai pour n = 1. Si le résulat est vrai au rang n, alors a) Un hyménoptère mâle a, à la (n + 1)-ème génération :

Fn mâles (les pères des Fn femelles)

Fn−1 + Fn = Fn+1 femelles (les mères des Fn−1 mâles et des Fn femelles).

En tout, Fn + Fn+1 = Fn+2 ancêtres. b) Un hyménoptère femelle a, à la (n + 1)-ème génération :

Fn+1 mâles (les pères des Fn+1 femelles)

Fn + Fn+1 = Fn+2 femelles (les mères des Fn mâles et des Fn+1 femelles).

En tout, Fn+1 + Fn+2 = Fn+3 ancêtres. Cqfd.

Remarque : Nous approfondirons ce sujet lors de l’étude des mots de Fibonacci (§ 13). Nous établirons alors un lien avec le dénombrement proposé au § 4.7. 4.3. Lien avec les diagonales du triangle de Pascal.

Les nombres de Fibonacci sont des sommes de coefficients binômiaux.

Théorème 3 : Pour n ≥ 1, Fn = 1 + 12−nC + 2

3−nC + 34−nC + … = ∑

−=+ 1nqp

pqC = ∑

−≤≤−−

210

1nk

kknC = ∑

∈−−

Zk

kknC 1 .

Dans cette troisième expression, la convention de nullité des coefficients binomiaux implique que la somme est à support fini.

Preuve : Par récurrence sur n.

Pour n = 1, ∑=+ 0qp

qpC = 1 = F1 . Pour n = 2, ∑

=+ 1qp

pqC = 1 = F2 .

Si l’on admet que Fn = ∑−=+ 1nqp

pqC et Fn+1 = ∑

=+ nqp

pqC , alors

Fn+2 = Fn+1 + Fn = ∑ −k

kknC + ∑ −−

k

kknC 1 = ∑ −

k

kknC + ∑ −

−k

kknC 1 = ∑ −

−− +k

kkn

kkn CC )( 1 = ∑ −+

k

kknC 1 .

Preuve combinatoire, utilisant la prop 3. 4.4. Comment vider un tonneau …

Théorème 4 : Pour tout n ≥ 0, Fn+1 est le nombre de façons de vider un tonneau de n litres avec un pot de 1 litre et un pot de 2 litres, ou de parcourir n mètres en faisant des bonds de 1 mètre ou de 2

Page 30: Suite de Fibonacci, nombre d'or

30

mètres. Il revient au même de dire que c’est le nombre de façons de paver un rectangle 1×n avec des dominos 1×1 ou 1×2.

Fn+1 = card xkU

1≥= (x1, …, xk) ∈ 1, 2

k ; x1 + … xk = n .

Preuve : Notons An l’ensemble de droite. Il est réunion des

A(n, k) = x = (x1, …, xk) ∈ 1, 2k ; x1 + … + xk = n .

Si x est élément de A(n, k), on a k ≤ n ≤ 2k. Par conséquent, A(n, k) = ∅ pour k > n, et le cardinal

cherché est fini. Notons an le cardinal de An.

Si n = 1, A1 = (1) et a1 = 1. Si n = 2, A1 = (1, 1), (2) et a2 = 2.

Pour vider un tonneau de n + 2 litres, on peut − soit commencer par un pot de 1 litre : il reste n + 1 litres à vider. − soit commencer par un pot de 2 litres : il reste n litres à vider.

Par conséquent an+2 = an+1 + an. On conclut que an = Fn+1 par récurrence.

Autre preuve, plus analytique :

A(n, k) = x = (x1, …, xk) ∈ 1, 2k ; x1 + … xk = n est en bijection avec

A’( n, k) = y = (y1, …, yk) ∈ 0, 1k ; y1 + … + yk = n − k , qui a kn

kC − éléments.

Par conséquent, an = ∑+∞

=1

),(k

kncardA = ∑≤≤ nkn

kncardA2/

),( = ∑≤≤

nkn

knkC

2/

= Fn+1 en vertu de la prop 2.

Remarque : on peut retrouver la formule Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1 à l’aide de cette interprétation combinatoire. Il y a deux façons de parcourir m+n–1 mètres en faisant des bonds de 1 ou 2 mètres :

• Soit on parcourt m mètres, puis n – 1 metres : Fm+1.Fn possibilités. • Soit on parcourt m – 1 mètres, puis on fait un bond de 2 mètres, puis on parcourt n – 2 mètres :

Fm.Fn−1 possibilités. 4.5. Pavages d’un rectangle par des dominos.

Théorème 5 : Fn+1 est le nombre de façons de paver un rectangle 2×n avec des dominos 2×1.

Preuve : Notons An le nombre cherché.

On a A1 = 1, A2 = 2 (deux dominos horizontaux, ou deux dominos verticaux),

et pour n ≥ 3, An = An−1 + An−2 .

En effet, au bout du rectangle, dont la longueur est placée en position horizontale : • soit on pose un domino vertical, et alors il reste à paver un rectangle 2×(n−1), • soit on pose deux dominos horizontaux, et alors il reste à paver un rectangle 2×(n−2).

Page 31: Suite de Fibonacci, nombre d'or

31

Une récurrence facile permet de conclure que An = Fn+1.

« Fibonacci tilings »

On peut aussi montrer qu’il y a autant de façons de paver un rectangle 2×n avec des dominos 2×1. que de façons de paver un rectangle 1×n avec des dominos 1×1 ou 1×2.

Pavons un rectangle 1×n avec des dominos 1×1 ou 1×2. Complétons les dominos 1×1 par des dominos verticaux 2×1, et plaçons sous chaque domino 1×2 un autre domino 1×2. On obtient un pavage du rectangle 2×n avec des dominos 2×1, et cette correspondance est bijective. 4.6. Somme d’entiers impairs.

Tout entier n ≥ 1 peut s’écrire comme somme d’entiers impairs, ne serait-ce que n = 1 + … + 1. Il y a 1 façon d’écrire 1 et 2 comme somme d’entiers impairs : 1 = 1, 2 = 1 + 1. Il y a 2 façons d’écrire 3 comme somme d’entiers impairs : 3 = 1 + 1 + 1 = 3. Il y a 3 façons d’écrire 4 comme somme d’entiers impairs : 4 = 1 + 1 + 1 + 1 = 1 + 3 = 3 + 1. Il y a 5 façons d’écrire 5 comme somme d’entiers impairs : 5 = 1 + 1 + 1 +1 + 1 = 1 + 1 + 3 = 1 + 3 + 1 = 3 + 1 + 1 = 5. Il y a 8 façons d’écrire 6 comme somme d’entiers impairs : 6 = 1 + 1 + 1 + 1 + 1 + 1 = 1 + 1 + 1 + 3 = 1 + 1 + 3 + 1 = 1 + 3 + 1 + 1 = 3 + 1 + 1 + 1 = 3 + 3 = 1 + 5 = 5 + 1 .

Théorème 6 : Fn est le nombre de façons d’écrire n comme somme d’entiers impairs

Preuve : Nous avons montré en 1.8. que la suite (Fn) satisfait aux relations :

∀n ≥ 1 F2n = F1 + F3 + … + F2n−1 et F2n+1 = F2 + F4 + … + F2n + 1

Ces relations, jointes à F1 = 1, caractérisent la suite (Fn)n≥1.

Or, si l’on note Gn le nombre de façons d’écrire n comme somme d’entiers impairs, la suite (Gn)n≥1.

possède les mêmes propriétés. En effet,

G2n = G1 + G3 + … + G2n−1 selon que l’on écrit 2n = (2n – 1) + … ou (2n – 3) + … ou 1 + …

G2n+1 = G2 + G4 + … + G2n + 1 selon que l’on écrit 2n+1 = 2 + … ou 4 + … ou 1 + … ou (2n + 1).

Autre solution : Il s’agit de montrer que

Fn = card ykU

1≥= (y1, …, yk) ∈ N

k ; (2y1 + 1) + … + (2yk + 1) = n .

Notons B(n, k) = y = (y1, …, yk) ∈ Nk ; (2y1 + 1) + … + (2yk + 1) = n

= y = (y1, …, yk) ∈ Nk ; y1 + … + yk =

2kn− .

Or, « on sait que » card B(n, k) = 21

2

kn

knC−

−+ . d’où :

Page 32: Suite de Fibonacci, nombre d'or

32

card U1

),(≥k

knB = ∑≥1

),(k

kncardB = ∑≥

−+1

21

2k

kn

knC = ∑ −−p

ppnC 1 = Fn.

4.7. Nombres de mots sans 11.

Fn+2 est le nombre de mots de longueur n composés de 0 et de 1, et n’ayant pas deux 1 consécutifs.

Ainsi, F6 = 8, car il y a 8 tels mots :

0000 , 0001 , 0010 , 0100 , 1000 , 0101 , 1010 , 1001.

Théorème 7 : Pour n ≥ 1, Fn+2 est le nombre de mots de longueur n composés de 0 et de 1, et n’ayant pas deux 1 consécutifs.

Fn+2 = card m = (m1, …, mn) ∈ 0, 1n ; ∀i (mi, mi+1) ≠ (1, 1) .

Preuve : Notons Mn = m = (m1, …, mn) ∈ 0, 1n ; ∀i (mi, mi+1) ≠ (1, 1) .

M1 = (0), (1) a 2 = F3 éléments. M2 = (0, 0), (0, 1), (1, 0) a 3 = F4 éléments.

Soit m = (m1, …, mn+2) ∈ Mn+2 . De deux choses l’une :

− soit mn+2 = 0. Alors m = (m1, …, mn+1, 0) = (m’, 0), où m’ = (m1, …, mn+1) décrit Mn+1.

− soit mn+2 = 1. Alors m = (m1, …, mn, 0, 1) = (m’’, 0, 1), où m’’ = (m1, …, mn) décrit Mn.

Donc card Mn+2 = card Mn+1 + card Mn. On conclut par récurrence.

Corollaire 1 : Pour n ≥ 1, Fn+2 est le nombre de mots de longueur n composés de 0 et de 1, et n’ayant pas deux 0 consécutifs.

Preuve : il suffit d’échanger les lettres 0 et 1.

Corollaire 2 : Fn est le nombre de mots de longueur n composés de 0 et de 1, commençant par 1 et n’ayant pas deux 1 consécutifs :

Fn = card m = (1, m2, …, mn) ∈ 0, 1n ; ∀i (mi, mi+1) ≠ (1, 1) .

Preuve : On peut déduire ce résultat du précédent, car un tel mot s’écrit

m = (1, 0, m3, …, mn) , où (m3, …, mn) ∈ 0, 1n−2

et ∀i (mi, mi+1) ≠ (1, 1).

Définition : Nous dirons qu’un entier naturel est fibbinaire si son développement binaire ne contient pas deux 1 adjacents (ou consécutifs).

La suite des nombres fibbinaires est répertoriée A003714 dans l’OEIS. Voici ses premiers termes :

0 , 1 , 2 , 4 , 5 , 8 , 9 , 10 , 16 , 17 , 18 , 20 , 21 , 32 , 33 ,

Proposition 8 : Pour tout n ≥ 1, il y a Fn nombres fibbinaires dans la tranche [2n−1

, 2n[.

Parmi eux, Fn−1 sont pairs, Fn−2 sont impairs.

Preuve : La première application découle de ce que l’application

(1, m2, …, mn) ∈ 0, 1n → 2

n−1 + m2, 2

n−2 + … + mn ∈ [2

n−1, 2

n[

est bijective. La deuxième découle de ce que, si n est fibbinaire, 2n est fibbinaire et pair, et si n est fibbinaire et pair, 2n + 1 est fibbinaire impair.

Corollaire : La densité de l’ensemble des nombres fibbinaires est nulle.

Preuve : La proportion de nombres fibbinaires dans la tranche [2n−1

, 2n[ est 12 −n

nF .

Elle tend vers 0. On conclut par sommation et encadrement.

Remarque : Ces résultats seront utilisés plus tard pour démontrer une partie du théorème de Zeckendorf, et réinterpréter la reproduction des hyménoptères (§ 12 et 13). Les nombres fibbinaires

Page 33: Suite de Fibonacci, nombre d'or

33

se rencontrent naturellement quand on superpose l’arbre de Sosa inversé et l’arbre de Sosa-Dzierzon ; celui-ci est en quelque sorte inclus dans celui-là, et les nombres fibbinaires sont les numéros des ancêtres de Sosa inversé qui seraient aussi des ancêtres de Sosa-Dzierzon. Autrement dit, les nombres fibbinaires répondent à cette angoissante question :

Que deviendrait mon arbre généalogique si subitement je devenais une abeille Que deviendrait mon arbre généalogique si subitement je devenais une abeille Que deviendrait mon arbre généalogique si subitement je devenais une abeille Que deviendrait mon arbre généalogique si subitement je devenais une abeille ????

Cherchons maintement le nombre de mots de longueur n composés de 0 et de 1, et n’ayant pas deux

1 consécutifs, ni trois 0 consécutifs. Notons An ce nombre. Les premières valeurs sont :

A1 = 2 , A2 = 3 , A3 = 4 , A4 = 5 , A5 = 7 , A6 = 9 , …

Pour trouver une formule de récurrence, il faut creuser la question.

Notons xn, resp. yn, zn, le nombre de tels mots finissant par 10, resp. 01, 00.

• Un mot finissant par 10 donne un mot finissant par 100 ou 101.

• Un mot finissant par 01 donne un mot finissant par 010.

• Un mot finissant par 00 donne un mot finissant par 001.

Donc xn+1 = yn , yn+1 = xn + zn , zn+1 = xn. et An = xn + yn + zn .

Un calcul finit par donner An+3 = An+1 + An. Joint à A0 = A1 = 2 , A2 = 3 , on peut calculer (An).

Cette suite est répertoriée dans l’OEIS, et appelée suite de Padovan (décalée).

Voici ce qu’en dit Maple :

> p:=x^3-x-1;Digits:=4;S:=solve(p=0);fsolve(p=0);eval f(S); plot(p,x=-2.5..2.5,thickness=2);

:= p − − x3 x 1 1.325

, ,1.325 + -.6624 .5625I − -.6624 .5625I

> rsolve(a(n)=a(n-2)+a(n-3),a(0)=2,a(1)=2,a(2)=3,a) ;

∑ = _R ( )RootOf − + + 1 _Z2 _Z3

lim

→ z _R−

( ) − z _R ( ) + + 2 2 z z2

− + + 1 z2 z3

1_R

n

_R

> rsolve(a(n)=a(n-2)+a(n-3),a(0)=2,a(1)=2,a(2)=3,a, 'genfunc'(z)); R:=(2+2*z+z^2)/(1-z^2-z^3);series(R,z=0,13);

− + + 2 2 z z2

− + + 1 z2 z3

2 2 z 3 z2 4 z3 5 z4 7 z5 9 z6 12 z7 16 z8 21 z9 28 z10 37 z11 49 z12 + + + + + + + + + + + + + ( )O z13

> A:=rsolve(a(n)=a(n-2)+a(n-3),a(0)=2,a(1)=2,a(2)=3 ,a,'makeproc'); > print([seq(A(n),n=0..17)]);

[ ], , , , , , , , , , , , , , , , ,2 2 3 4 5 7 9 12 16 21 28 37 49 65 86 114 151 200 > galois(p);

, , , ,"3T2" "S(3)" "-" 6 ,"(1 3)" "(2 3)"

Page 34: Suite de Fibonacci, nombre d'or

34

Le polynôme P = x3 – x – 1 a une racine réelle α ≈ 1,3247 et deux racines complexes conjuguées β

et β de module < 1 en vertu de αβ β = 1. Du coup An = λαn + µβn

+ ν β n = λαn

+ o(1).

Tous calculs faits, λ = 2α2 + 3α + 2. Et An+1 / An → α.

La suite de Padovan se rencontre aussi dans les enroulements en spirales de triangles équilatéraux. 4.8. Ensembles sans répétitions.

Théorème 9 : Pour n ≥ 1, Fn+2 est le nombre de parties de 1, 2, …, n ne contenant pas deux entiers consécutifs.

Preuve : Notons Cn le nombre de parties de 1, 2, …, n sans répétitions.

On a C1 = 2 = F3 : ∅ et 1. Et C2 = 3 = F4 : ∅, 1, 2. Soit A une partie sans répétition de 1, …, n+2. • Si elle contient n+2, elle ne contient pas n+1 donc elle est de la forme B ∪ n+2, où B est une partie sans répétition de 1, …, n. • Si elle ne contient pas n+2, elle est une partie sans répétition de 1, …, n+1.

Donc Cn+2 = Cn + Cn+1 . On conclut aussitôt.

Autre preuve : Associons à toute partie A de 1, 2, …, n sa fonction indicatrice m = (m1, …, mn) ∈

0, 1n . C’est un n-uplet de 0, 1 ne contenant pas deux 1 consécutifs, et la correspondance A →

m est bijective. 4.9. Dénombrement de permutations.

Pour tout n ≥ 1, on note SSSSn le groupe symétrique (ou groupe des permutations) de 1, 2, ..., n .

Théorème 9 : Le nombre de permutations σ ∈ SSSSn telles que ∀i | σ(i) − i | ≤ 1 vaut Fn+1.

Preuve : Notons An ce nombre. On a A1 = 1 et A2 = 2. Je dis que An+2 = An+1 + An .

En effet, soit σ ∈ SSSSn+2 telle que ∀i | σ(i) − i | ≤ 1.

• Si σ(n+2) = n+2, alors σ induit une permutation σ’ ∈ SSSSn+1 telle que ∀i | σ’(i) − i | ≤ 1.

• Si σ(n+2) = n+1 et σ(n+1) = n+2, σ induit une permutation σ’ ∈ SSSSn telle que ∀i | σ’(i) − i | ≤ 1.

• Si σ(n+2) = n+1 et σ(n+1) = n, alors nécessairement σ(n) = n−1, σ(n−1) = n−2, et de proche en proche σ(3) = 2, σ(2) = 1, σ(1) = 2, ce qui est impossible.

Par conséquent, An+2 = An+1 + An . Une récurrence conclut aussitôt.

On peut retrouver ce résultat au moyen des propriétés du déterminant, ou du permanent.

En effet, il est facile d’établir que le déterminant d’ordre n Dn =

110...01............0....110......1110...011

−−

est égal à Fn+1.

Or si l’on applique la formule det A =∑∈ nS

nnaaσ

σσσε ),(1),1( ...).( à cette matrice, on trouve justement An.

Mais il est clair aussi que An = per

110...01............0....110......1110...011

. Il reste à utiliser les résultats de l’exercice suivant.

Exercice : Si A = (aij) ∈ Mn(R), on appelle permanent de A : per A = ∑∈ nS

nnaaσ

σσ ),(1),1( ...

Page 35: Suite de Fibonacci, nombre d'or

35

( c’est la même formule que le déterminant, mais sans les signatures ε(σ) ). On appelle permanent de

n vecteurs x1, ..., xn de Rn, le permanent de la matrice dont les colonnes sont x1, ..., xn.

1) Montrer que (x1, ..., xn) → per(x1, ..., xn) est une forme n-linéaire symétrique sur Rn.

2) Montrer que per A = per tA . 3) Enoncer et démontrer un théorème de développement du permanent selon la j-ème colonne, resp. la i-ème ligne d’une matrice. 4) Enoncer et démontrer une propriété du permanent d’une matrice trigonale par blocs.

5) Pour σ ∈ SSSSn, on note M(σ) = (δi,σ(j)) la matrice de la permutation associée à σ.

Vérifier que si B = M(σ).A.M(τ), alors per A = per B.

6) Combien y a-t-il de permutations σ ∈ SSSSn telles que ∀i | σ(i) − i | = 1,

resp. telles que ∀i | σ(i) − i | = 2 ?

7) Calculer avec Maple le nombre de permutations σ ∈ SSSSn vérifiant ∀i | σ(i) − i | ≤ 2, pour n ≤ 10, resp. telles que ∀i | σ(i) − i | = 0 ou 2, pour n ≤ 10. Fabriquer un problème sur le sujet. 4.10. Jeu du solitaire.

Exercice : 1) Des trous sont creusés en les 37 points (x, y) ∈ Z×Z, tels que |x| + |y| ≤ 4 et max(|x|, |y|) ≤ 3.

Soient T l’ensemble de ces points, et T0 l’ensemble T−(0, 0). Représenter ces ensembles.

Des billes sont placées en chacun des 36 trous de T0. Une bille placée en (x, y), si elle est voisine de la bille de droite (x+1, y), et si le trou (x+2, y) est vide, peut sauter par-dessus sa voisine (x+1, y) et venir se placer en (x+2, y) ; la bille placée en (x+1, y) est alors escamotée. Et la même règle s’applique vers la gauche, vers le haut et vers le bas.

2) On note A =

0111 la matrice carrée d’ordre 2 à coefficients dans Z/2Z.

Vérifier que A2 + A + I = 0 et en déduire que A

3 = I.

3) A toute partie finie F de T on associe ∆(F) = ∑∈

+

Fyx

yxA),(

.

a) Montrer que la somme ∆(F) reste constante au cours du jeu.

b) Montrer que ∆(T0) est la matrice nulle.

c) Déduire de ce qui précède qu’il est impossible de terminer la partie avec une seule bille, ni avec deux billes voisines.

Solution : La solution proposée passe par les puissances de la matrice

0111 , c’est-à-dire par les

nombres de Fibonacci, mais cela ne se voit pas car on raisonne modulo 2.

Page 36: Suite de Fibonacci, nombre d'or

36

2) A2 =

0111

0111 =

1110 , donc A

2 + A + I = 0 , puis A

3 − I = ( A – I )( A

2 + A + I ) = 0.

3) a) ♣ Si une bille placée en (a, b) saute par-dessus la bille voisine placée en (a+1, b), la somme

∆(F) = ∑∈

+

Fyx

yxA),(

= Aa+b

+ Aa+1+b

+ S , où S est la somme de tous les autres termes, devient :

∆(F’) = Aa+2+b

+ S . Or Aa+b

+ Aa+1+b

= Aa+2+b

, car I + A = A2 .

♦ Si une bille placée en (a, b) saute par-dessus la bille voisine placée en (a−1, b), la somme

∆(F) = ∑∈

+

Fyx

yxA),(

= Aa+b

+ Aa−1+b

+ S , où S est la somme de tous les autres termes, devient :

∆(F’) = Aa−2+b

+ S . Or Aa+b

+ Aa−1+b

= Aa−2+b

, car I + A−1

= A−2

.

♥ Si une bille placée en (a, b) saute par-dessus la bille voisine placée en (a, b+1), la somme

∆(F) = ∑∈

+

Fyx

yxA),(

= Aa+b

+ Aa+b+1

+ S , où S est la somme de tous les autres termes, devient :

∆(F’) = Aa+b+2

+ S . Or Aa+b

+ Aa+b+1

= Aa+b+2

, car I + A = A2

.

♠ Si une bille placée en (a, b) saute par-dessus la bille voisine placée en (a, b−1), la somme

∆(F) = ∑∈

+

Fyx

yxA),(

= Aa+b

+ Aa+b−1

+ S , où S est la somme de tous les autres termes, devient :

∆(F’) = Aa+b−2

+ S . Or Aa+b

+ Aa−1+b

= Aa−2+b

, car I + A−1

= A−2

. Ainsi, la somme ∆(F) reste constante au cours du jeu : c’est un invariant matriciel.

b) Or ∆(T0) est la matrice nulle, car on peut partitionner T0 en réunion de triplets consécutifs horizontaux ou verticaux, par exemple comme l’indique la figure. Au cours du jeu, cette somme reste constante. On ne pourra jamais obtenir une seule bille, où qu’elle

se place, car I, A et A2 sont non nulles.

Remarques : 1) Il n’en est pas de même si l’on enlève à T les quatre trous (±2 , ±2). 2) Une variante consisterait à donner un invariant numérique, en se plaçant dans le corps quotient

F4 = F2[X]/(X2 + X + 1) = 0, 1, a, b , a et b étant les racines de X

2 + X + 1, c’est-à-dire les

nombres d’or sur F2, et en considérant : δ(F) = ∑∈

+

Fyx

yxa),(

.

4.11. Un jeu de morpions.

Exercice : 1) N pions distincts (xi, yi)1≤i≤N sont disposés dans Z×−N. Un pion, placé en (x, y), s’il est voisin du pion de droite (x+1, y), et si (x+2, y) n’est pas occupée par un pion, peut sauter par-dessus son voisin (x+1, y) et venir se placer en (x+2, y) ; le pion (x+1, y) est alors escamoté. Et la même règle s’applique vers la gauche, vers le haut et vers le bas.

Page 37: Suite de Fibonacci, nombre d'or

37

Montrer que, quoi qu’il arrive, un pion ne peut jamais dépasser l’ordonnée 5. Montrer qu’on peut atteindre l’ordonnée 5.

[ Indication : Soit ϕ le nombre d’or, solution > 0 de l’équation ϕ2 − ϕ − 1 = 0 ; appelons « énergie »

d’une partie finie C de Z×−N le réel E(C) = ∑∈

+−

Cyx

yx

),(

ϕ ; majorer E(C) et étudier comment elle varie

au cours du jeu. ]

2) N pions distincts (xi, yi)1≤i≤N sont disposés sur Z×Z. Si on leur applique la règle ci-dessus, que dire de la configuration finale ?

Solution : [ Exercice communiqué par Raphaël Cerf ; cf. aussi RMS octobre 2012, R 510 p. 78-86 ] 4.12. Fibofactorielles et coefficients fibonômiaux.

Certains fibofanatiques ont inventé (est-ce bien raisonnable ?) des factorielles et des coefficients binomiaux fibonacciens. Présentons ces curiosa.

Pour tout n ≥ 1, on définit la fibofactorielle de n par ffib(n) = F1.F2 …. Fn .

La suite (ffib(n)) est répertoriée A003266 dans l’OEIS. Elle a pour première valeurs : 1 , 1 , 2 , 6 , 30 , 240 , 3120 , 65520 , 2227680 , …

Proposition (« fiboStirling ») : ffib(n) ∼∼∼∼ 2/

2/)1(

5n

nn +ϕP( 2

1ϕ− ), où P(x) = ∏

+∞

=−

1

)1(k

kx .

Preuve : Il suffit de noter qu’en vertu de la formule de Moivre

ffib(n) = 2/

2/)1(

5n

nn +ϕ ∏=

−−

n

kk

k

12 ))1(

1( ϕ .

Pour 1 ≤ k ≤ n−1, on définit les coefficients fibonomiaux :

Fibonomial(n, k) = [ kn ] =

)().()(

knffibkffibnffib

− = 1

1

......

FFFF

k

knn +− . On convient que [ 0n ] = [ n

n ] = 1.

Eux aussi sont répertoriés dans l’OEIS, qui sait tout, sous le numéro A010048. Ils forment un triangle de Fibopascal : 1 1 1 1 1 1 1 2 2 1 1 3 6 3 1 1 5 15 15 5 1 1 8 40 60 40 8 1

On constate qu’on obtient des entiers : le produit de k nombres de Fibonacci consécutifs est divisible par le produit des k premiers. Cela découle par récurrence de la proposition laissée au lecteur :

Proposition : [ kn ] = Fk+1 [ k

n 1− ] + Fn−k−1 [ 11

−−

kn ].

Page 38: Suite de Fibonacci, nombre d'or

38

5. Propriétés arithmétiques de la suite de Fibonacci.

Dans ce paragraphe, nous revenons à la suite de Fibonacci originelle. 5.1. Propriétés de divisibilité.

La formule : ∀(m, n) ∈ Z×Z Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1 a une importante conséquence :

Fm+n appartient au sous-groupe (qui est aussi l’idéal) de Z engendré par Fm et Fn .

∀(m, n) ∈ Z×Z Fm+n ∈ Z[Fm , Fn].

De plus, la relation F−n = (−1)n+1

.Fn implique Z[F−n] = Z[Fn] .

Proposition 1 : Pour tout n, Fn et Fn+1 sont premiers entre eux.

Preuves :

1ème

preuve : Par récurrence sur n. F0 = 0 et F1 = 1 sont premiers entre deux.

Si Fn et Fn+1 sont premiers entre eux, il en est de même de Fn+1 et Fn+2 car si d divise Fn+1 et Fn+2 il

divise Fn+1 et Fn = Fn+2 − Fn+1 .

2ème preuve : l’algorithme d’Euclide de calcul du pgcd de Fn+1 et Fn donne comme restes Fn−1 , …,

F2 = 1, puis 0. Les quotients sont tous égaux à 1. Le dernier reste non nul est 1.

3ème preuve : la formule de Cassini Fn+1.Fn−1 – Fn2 = (−1)

n implique aussitôt le résultat.

4ème preuve : 1 = F1 ∈ Z[Fn+1 , F−n] = Z[Fn+1 , Fn]. cqfd.

Proposition 2 : Pour tout n ∈ Z et tout q ∈ Z, Fn divise Fnq .

Preuve : par récurrence sur q. C’est vrai pour q = 0 ( car Fn divise 0 ).

Supposons la propriété vraie au rang q. Fn(q±1) ∈ Z[Fnq, F±n] = Z[Fnq, Fn] = Z[Fn]. Cqfd.

Application à la factorisation des nombres de Fibonacci.

La proposition précédente facilite la factorisation des nombres de Fibonacci.

On sait que F25 divise F50 qui divise F100. > with(combinat);alias(F=fibonacci); > F(25);A:=ifactor(F(25));

75025

:= A ( ) 5 2 ( ) 3001 > F(50);iquo(F(50),F(25));B:=ifactor(B);

12586269025 167761

:= B ( ) 11 ( ) 101 ( ) 151 > F(100);iquo(F(100),F(50));C:=ifactor(C);

354224848179261915075 28143753123

:= C ( ) 3 ( ) 41 ( ) 401 ( ) 570601 > A*B*C;

( ) 3 ( ) 5 2 ( ) 11 ( ) 41 ( ) 101 ( ) 151 ( ) 401 ( ) 570601 ( ) 3001

Corollaire : Pour tout n > 0 et ≠ 4, Fn est premier ⇒ n est premier.

Preuve : Supposons n composé. Alors n s’écrit n = a.b, avec a ≥ 2 et b ≥ 2. Si n est ≠ 4, l’un des entiers a ou b est > 2, par exemple a.

En vertu de la prop 2, Fa divise Fn. Si Fn est premier, Fa = Fn, donc a = n : impossible !

Page 39: Suite de Fibonacci, nombre d'or

39

L’implication est fausse pour n = 4, car F4 = 3 est premier et 4 n’est pas premier.

La réciproque est fausse : 2 est premier, mais F2 = 1 n’est pas premier ;

19 est premier, mais F19 = 4181 = 37×113 est composé9 ;

31 est premier, mais F31 = 1346269 = 557×2417 est composé, etc.

> with(combinat);with(numtheory); > for k from 1 to 20 do p:=ithprime(k):x:=fibonacci(p):print([p,x,ifactor(x )]);od;

[ ], ,2 1 1 [ ], ,3 2 ( ) 2 [ ], ,5 5 ( ) 5

[ ], ,7 13 ( ) 13 [ ], ,11 89 ( ) 89

[ ], ,13 233 ( ) 233 [ ], ,17 1597 ( ) 1597

[ ], ,19 4181 ( ) 37 ( ) 113 [ ], ,23 28657 ( ) 28657

[ ], ,29 514229 ( ) 514229 [ ], ,31 1346269 ( ) 557 ( ) 2417

[ ], ,37 24157817 ( ) 73 ( ) 149 ( ) 2221 [ ], ,41 165580141 ( ) 59369 ( ) 2789

[ ], ,43 433494437 ( ) 433494437 [ ], ,47 2971215073 ( ) 2971215073

[ ], ,53 53316291173 ( ) 953 ( ) 55945741 [ ], ,59 956722026041 ( ) 353 ( ) 2710260697 [ ], ,61 2504730781961( ) 555003497 ( ) 4513

[ ], ,67 44945570212853( ) 269 ( ) 1429913 ( ) 116849 [ ], ,71 308061521170129( ) 46165371073 ( ) 6673

Remarque : On ignore s’il existe une infinité de nombres de Fibonacci premiers. En octobre 2015, le

plus grand nombre de Fibonacci premier connu était F81839.

Théorème de Lucas (1876) : Le pgcd de deux nombres de Fibonacci est un nombre de Fibonacci.

Plus précisément : pgcd(Fa , Fb ) = Fpgcd(a, b) .

Preuve : Notons d = pgcd(a, b).

Il découle de la prop. 2 que Fd divise Fa et Fb. Par conséquent Fd divise pgcd(Fa, Fb).

En vertu de l’identité dite de Bézout, ∃(p, q) ∈ Z×Z d = ap + bq.

Du coup Fd ∈ Z[Fap , Fbq] ⊂ Z[Fa , Fb].

Fd s’écrit Fd = A.Fa + B.Fb, donc est multiple de pgcd(Fa , Fb). CQFD !

Corollaire 1 : Si a ≠ 2, a | b ⇔ Fa | Fb .

Corollaire 2 : ppcm(Fa , Fb) | Fppcm(a,b). Et pgcd(a, b) = 1 ⇒ Fa.Fb | Fab .

Corollaire 3 : On peut extraire de la suite (Fn) une suite dont les termes sont deux à deux étrangers.

9 Ainsi, 19 est le plus petit nombre premier > 2 tel que le nombre de Fibonacci correspondant soit composé. C’est aussi le numéro d’un virus aimablement transmis par une espèce animale pour limiter la prolifération des arrogants bipèdes, et diligemment véhiculé par ces consommateurs compulsifs de kérosène détaxé que l’on nomme « touristes ». Soyons bien certains que les compagnies aériennes seront copieusement renflouées avec l’argent des pauvres qui ne prennent pas l’avion, afin que les riches et les bobos puissent ramener encore plus vite le prochain virus.

Page 40: Suite de Fibonacci, nombre d'or

40

Il suffit de considérer une suite extraite de la forme (Fn(k)), où (n(k)) est une suite d’entiers premiers

entre eux deux à deux, par exemple la suite (pk) des nombres premiers.

Remarque : La suite de Lucas n’a pas d’aussi belles propriétés. Pour tout n, Ln et Ln+1 sont premiers

entre eux, mais 3 divise 6, alors que L3 = 4 ne divise pas L6 = 18. Donc pgcd(F3, F6) ≠ Fpgcd(3, 6) .

Exercice : Nombres de Fibonacci et sommes de carrés.

Démontrer que, pour tout n, F2n+1 est somme de deux carrés. En déduire que ses diviseurs premiers sont égaux à 2 ou congrus à 1 ( mod 4 ).

Solution : La formule Fm+n = Fm+1.Fn + Fm.Fn−1 implique F2n+1 = (Fn+1)2 + (Fn)

2 .

Si p est impair et divise une somme de deux carrés premers entre eux, p ≡ 1 ( mod 4 ). Cela découle des propriétés des entiers de Gauss. 5.2. Congruences modulo 5, 25, etc.

Cinq yeux aux cinq regards vous êtes mes 5 couilles Ce chiffre fatidique a charmé ma cervelle Et les têtes coupées dont les yeux sont hagards Ont plus fait pour mon cœur que l’amour des pucelles

Robert Desnos, Portraits automatiques

En raison de leur lien avec le nombre d’or, les nombres Fn et Ln ont partie liée avec le nombre 5, car la formule de Moivre implique aussitôt, après développement binomial :

Proposition 1 : Pour tout n ,

2n Fn = 2 ∑

kimpair

kknC 2

1

5. = 2 ( 1nC + 3nC 5 + 5nC 52 + …).

2n Ln = 2 ∑

kpair

kknC 25. = 2 ( 1 + 2nC 5 + 4nC 5

2 + 6nC 5

3 + …).

Corollaire 1 : Pour tout n , Fn ≡ 2n.3n ( mod 5 ) et Ln ≡ 2.3

n ( mod 5 )

(Fn) est 20-périodique, et (Ln) 4-périodique modulo 5. De plus Fn ≡ 0 ( mod 5 ) ⇔ 5 | n.

Preuve : raisonnons modulo 5. Il découle de la prop précédente que :

2n Fn ≡ 2n ( mod 5 ), donc Fn ≡ 2n3

n ( mod 5 ) et 2

n Ln ≡ 2 ( mod 5 ), donc Ln ≡ 2.3

n ( mod 5 ).

On conclut aussitôt.

Corollaire 2 : Pour tout n , Fn ≡ 2n ( 5 n3 + 10 n

2 + 10 n + 1 ) 13

n ( mod 25 )

Ln ≡ ( 5n2 – 5n + 2 ) 13

n ( mod 25 )

(Fn) est 100-périodique, et (Ln) 20 périodique modulo 25. De plus Fn ≡ 0 ( mod 25 ) ⇔ 25 | n.

Preuve : raisonnons mod 25.

2n Fn = 2 ( n +

6)2)(1( −− nnn

5 ) ( mod 25 ) et 2n Ln = 2 ( 1 +

2)1( −nn

5 ) ( mod 25 )

Or l’inverse de 2 est 13 et l’inverse de 6 est –4. On termine le calcul sans peine.

De plus 25 | Fn ⇔ 25 | 2n ( 5 n3 + 10 n

2 + 10 n + 1 ) 13

n ⇔ 25 | n,

car 25 est premier avec 2, 13 et 5 n3 + 10 n

2 + 10 n + 1.

Corollaire 3 : Pour tout n , Fn ≡ 2.63n ( 120.n

5 + 50.n

4 + 55.n

3 + 60.n

2 + 91.n ) ( mod 125 )

Ln ≡ 2.63n ( 100.n

4 + 25.n

3 + 40.n

2 + 85.n + 1 ) ( mod 125 )

(Fn) est 500-périodique, et (Ln) 100 périodique modulo 125. De plus Fn ≡ 0 ( mod 125 ) ⇔ 125 | n.

Page 41: Suite de Fibonacci, nombre d'or

41

Preuve : raisonnons mod 125. Comme ½ = 63 mod 125, il vient :

Fn ≡ 2.63n ( n + 5.3nC + ²5.5nC ) = 2.63

n ( n + 5

6)2)(1( −− nnn

+ 2524.5

)4)(3)(2)(1( −−−− nnnnn)

= 2.63n ( n + 5

6)2)(1( −− nnn

+ 524

)4)(3)(2)(1( −−−− nnnnn )

= 2.63n ( 120.n

5 + 50.n

4 + 55.n

3 + 60.n

2 + 91.n ) mod 125.

Ln ≡ 2.63n ( 1 + 5.2nC + ²5.4nC ) = 2.63

n ( 1 + 5

2)1( −nn

+ 2524

)3)(2)(1( −−− nnnn )

= 2.63n ( 100.n

4 + 25.n

3 + 40.n

2 + 85.n + 1 ) mod 125.

On a ϕ(125) = 100 et 63100

≡ 1 (mod 125) en vertu du théorème d’Euler.

De plus on constate que 63 est exactement d’ordre 100 dans le groupe (Z/125Z)*.

De plus 125 | Fn ⇔ 125 | 2.63n ( 120.n

5 + 50.n

4 + 55.n

3 + 60.n

2 + 91.n ) ⇔ 125 | n ,

car 125 est premier avec 2, 63 et 120.n4 + 50.n

3 + 55.n

2 + 60.n + 91.

Théorème 2 : Si p est un nombre premier ≠ 5, p divise Fp−1 ou Fp+1.

Preuve : reprenons la formule 2p Fp = 2 ∑

kimpair

kkpC 2

1

5. = 2 ( 1pC + 3pC 5 + 5pC 52 + …).

Comme p divise les kpC pour 1 < k < p, 2p Fp ≡ 2. 2

1

5−p

( mod p ).

Comme 2p ≡ 2 ( mod p ) ( petit théorème de Femat ), Fp ≡ 2

1

5−p

( mod p ).

La formule de Cassini Fp+1.Fp−1 – Fp2 = (−1)

p et le petit théorème de Fermat donnent

Fp+1.Fp−1 = Fp2 + (−1)

p ≡ 15 −p + (−1)p ≡ 0 ( mod p ).

Remarque : c’est faux pour p = 5, qui ne divise ni F4 = 3, ni F6 = 8.

Exercice : Soit ϕ = 2

51+ le nombre d’or. [x] désigne la partie entière du réel x.

Etudier la suite [ϕn]. Etudier les trois derniers chiffres du développement décimal de [ϕn

].

Solution : Notons ϕ’ = 2

51− ≈ − 0,618… le conjugué de ϕ.

On sait que la suite de Lucas, Ln = ϕn + ϕ’

n vérifie : L0 = 2 , L1 = 1 , Ln+2 = Ln+1 + Ln .

Cette suite est à valeurs entières.

Pour n > 0, 0 < ϕ’2n

< 1, donc [ϕ2n] = L2n − 1 ; c’est encore vrai pour n = 0, car [ϕ0

] = 1 = L0 − 1 .

Pour n ≥ 0, −1 < ϕ’2n+1

< 0, donc [ϕ2n+1] = L2n+1 .

Conclusion : pour tout n, [ϕ2n] = L2n − 1 , [ϕ2n+1

] = L2n+1 .

En clair :

n 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15

Ln 2 1 3 4 7 11 18 29 47 76 123 199 322 521 843 1364

[ϕn] 1 1 2 4 6 11 17 29 46 76 122 199 321 521 842 1364

On peut unifier les résultats précédents en écrivant [ϕn] = Ln −

2)1(1 n−+

.

On en déduit que la suite wn = [ϕn] est telle que (wn+2 − wn+1 − wn) est 2-périodique.

Page 42: Suite de Fibonacci, nombre d'or

42

Au final, wn+4 − wn+3 − 2.wn+2 + wn+1 + wn = 0 , w0 = 1 , w1 = 1 , w2 = 2 , w3 = 4.

Il reste ensuite à étudier cette suite modulo 1000, ou plutôt modulo 8 et modulo 125, avec les techniques de l’exercice précédent. Mais on peut aussi faire appel à Maple.

> w:=proc(n) option remember; > if n=0 then 1; elif n=1 then 1; elif n=2 then 2; elif n=3 then 4; > else w(n-1)+2*w(n-2)-w(n-3)-w(n-4);fi;end; > L:=[]:for n from 0 to 30 do L:=[op(L),w(n)]:od:prin t(L);

1 1 2 4 6 11 17 29 46 76 122 199 321 521 842 1364 2206 3571 5777 9349, , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[

15126 24476 39602 64079 103681 167761 271442 439204 710646 1149851, , , , , , , , , ,

1860497]

> a:=proc(n) option remember; > if n=0 then 1; elif n=1 then 1; elif n=2 then 2; elif n=3 then 4; > else a(n-1)+2*a(n-2)-a(n-3)-a(n-4) mod 8;fi;end; > A:=[]:for n from 0 to 30 do A:=[op(A),a(n)]:od:prin t(A);

[ ], , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,1 1 2 4 6 3 1 5 6 4 2 7 1 1 2 4 6 3 1 5 6 4 2 7 1 1 2 4 6 3 1 > b:=proc(n) option remember; > if n=0 then 1; elif n=1 then 1; elif n=2 then 2; elif n=3 then 4; > else b(n-1)+2*b(n-2)-b(n-3)-b(n-4) mod 125;fi;end; > B:=[]:for n from 0 to 103 do B:=[op(B),b(n)]:od:pri nt(B);

1 1 2 4 6 11 17 29 46 76 122 74 71 21 92 114 81 71 27 99 1 101 102 79 56, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[

11 67 79 21 101 122 99 96 71 42 114 31 21 52 74 1 76 77 29 106 11 117 4, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

121 1 122 124 121 121 117 114 106 96 77 49 1 51 52 104 31 11 42 54 96, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

26 122 24 21 46 67 114 56 46 102 24 1 26 27 54 81 11 92 104 71 51 122, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

49 46 96 17 114 6 121 2 124 1 1 2 4, , , , , , , , , , , , ]

> ilcm(12,100); 300

Maple montre que la suite (wn) est 12-périodique modulo 8, et 100 périodique modulo 125. Par conséquent, elle est 300-périodique. 5.3. Congruences et périodicités.

Proposition 1 : Pour tout entier N, chacune des suites (Fn) et (Ln) est périodique pure modulo N. La

période fondamentale de (Ln) divise celle de (Fn).

Preuve : Considérons l’application F : (x, y) → (y, x + y) de Z/NZ×Z/NZ dans lui-même Comme l’ensemble Z/NZ×Z/NZ est fini, les itérés de (0, 1) ou de (2, 1) par F forment une suite périodique à partir d’un certain rang, dans Z/NZ×Z/NZ.

Mais on a mieux : l’application F est une permutation de l’ensemble Z/NZ×Z/NZ. Par conséquent, les itérés de (0, 1) ou de (2, 1) par F forment une suite périodique pure dans Z/NZ×Z/NZ.

De plus pour tout n, Ln = 2.Fn+1 – Fn . Donc si (Fn) est p-périodique, (Ln) également.

Corollaire : Dans le système décimal, ou tout autre système de numération, la suite des chiffres des unités des nombres de Fibonacci est périodique, de même la suite des deux derniers chiffres, celle des trois derniers chiffres, etc.

Preuve : Si b est la base du système de numération, il suffit de raisonner modulo bn.

Exercice 1 : Calculer en base 2 les premiers termes de la suite de Fibonacci. En déduire ses périodes modulo 2, modulo 4 et modulo 8.

> with(combinat):alias(F=fibonacci): > for n from 0 to 14 do convert(F(n),binary);od;

0

Page 43: Suite de Fibonacci, nombre d'or

43

1 1 10 11 101 1000 1101 10101 100010 110111 1011001 10010000 11101001

101111001

Par conséquent la période modulo 2 est 3, modulo 4 est 6, modulo 8 est 12.

Exercice 2 : 1) Ecrire un programme affichant, pour tout N, la période modulo N de la suite (Fn). 2) Déterminer la progression arithmétique de raison minimale dont aucun terme n’est un nombre de Fibonacci. 3) Déterminer une progression arithmétique de la forme ak + b, a ∧∧∧∧ b = 1, k ∈ N, dont aucun terme n’est un nombre de Fibonacci.

Solution : [W. Sierpinski, exercices 3-66 et 3-67] Le programme ci-dessous affiche, pour tout N, le triplet [N, T, L], où T est la période modulo N, et

L la liste des restes des Fn modulo N. > with(combinat):alias(F=fibonacci); > restesmod:=proc(N) > local k,T,L;L:=;T:=1;while irem(F(T),N)<>0 or ire m(F(T+1),N)<>1 do T:=T+1; od; > for k from 0 to T do L:=op(L),irem(F(k),N); od;[N ,T,L]; end; > for N from 2 to 20 do restesmod(N);od;

[ ], ,2 3 ,0 1 [ ], ,3 8 , ,0 1 2

[ ], ,4 6 , , ,0 1 2 3 [ ], ,5 20 , , , ,0 1 2 3 4

[ ], ,6 24 , , , , ,0 1 2 3 4 5 [ ], ,7 16 , , , , , ,0 1 2 3 4 5 6 [ ], ,8 12 , , , , ,0 1 2 3 5 7

[ ], ,9 24 , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 6 7 8 [ ], ,10 60 , , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

[ ], ,11 10 , , , , , ,0 1 2 3 5 8 10 [ ], ,12 24 , , , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 7 8 9 10 11

[ ], ,13 28 , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 10 11 12 [ ], ,14 48 , , , , , , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13

[ ], ,15 40 , , , , , , , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 [ ], ,16 24 , , , , , , , , , ,0 1 2 3 5 7 8 9 11 13 15

[ ], ,17 36 , , , , , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 8 9 12 13 14 15 16 [ ], ,18 24 , , , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 10 13 15 16 17

[ ], ,19 18 , , , , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 11 13 15 16 17 18 [ ], ,20 60 , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19

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On constate que les deux progressions arithmétiques de raison minimale ne contenant aucun nombre de Fibonacci sont 8k + 4 et 8k + 6 Si l’on impose la condition a ∧∧∧∧ b = 1, on trouve 11k + 4, 11k + 6, 11k + 7 et 11k + 9.

Proposition 2 : Pour tout entier N, G0(N) = n ∈ Z ; N | Fn est un sous-groupe additif de Z, dont

l’ordre divise la période de la suite (Fn) modulo N.

Preuve : N | F0 = 0. De plus, N | Fm et N | Fn impliquent N | Fm+n car Fm+n ∈ Z[Fm , Fn] ⊂ Z[N].

Enfin, la relation F−n = (−1)n+1

.Fn implique Z[F−n] = Z[Fn] .

La deuxième assertion découle de ce que, si TN est la période de (Fn) modulo N,

TN.Z = n ∈ Z ; Fn ≡ 0 (mod N) et Fn+1 ≡ 1 (mod N)

est un sous-groupe de G0(N) = n ∈ Z ; N | Fn = n ∈ Z ; Fn ≡ 0 (mod N) .

Notations : pour tout entier N > 0, nous noterons T(N) la période fondamentale de la suite (Fn)

modulo N, T0(N) le plus petit entier > 0 tel que N | Fn , et τ(N) = T(N)/T0(N).

La suite (T0(N)) est référencée A001177, et la suite (T(N)) A001175 par l’OEIS, qui répertorie également plusieurs de ses sous-suites. Si j’en crois Jean-Marc Lapierre et l’OEIS, l’étude complète de ces suites est encore un problème ouvert, donnant lieu à des conjectures, car on ne connaît pas

de formule simple et générale donnant T0(N) et T(N). Nous allons ici commencer cette étude.

Proposition 3 : T0(N) | T(N) ≤ N2. Pour tout nombre premier p, T0(p) ≤ p + 1.

La première assertion découle de card(Z/NZ×Z/NZ) = N2 ; la seconde, du théorème 2 du § 5.2.

Pour calculer T0(N) et T(N), il y a deux méthodes :

1) La méthode directe, élémentaire et facilement programmable, consiste à attendre la première occurrence de 0, ou du couple de restes (0, 1).

T0(N) = min k > 0 , Fk ≡ 0 (mod N) et T(N) = min k > 0 , Fk ≡ 0 et Fk+1 ≡ 1 (mod N)

On peut recourir aux algorithmes de Floyd ou de Brent, qu’on trouvera dans Michel Demazure, Cours d’algèbre, (Cassini), p. 31 à 33. Voici quelques tableaux de valeurs :

N 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19

T0 (N) 1 3 4 6 5 12 8 6 12 15 10 12 7 24 20 12 9 12 18

T (N) 1 3 8 6 20 24 16 12 24 60 10 24 28 48 40 24 36 24 18

N 10 100 1000 10000 100000

T0(N) 15 150 750 7500 75000

T(N) 60 300 1500 15000 150000

N 2 4 8 16 32 64 128 256 512

T0(N) 3 6 6 12 24 48 96 192 384

T(N) 3 6 12 24 48 96 192 384 768

Ces résultats suggèrent quelques conjectures…

2) Une méthode plus profonde, Lorsque N = p est premier, on se place dans le corps Z/pZ, et on peut calculer la suite de Fibonacci dans Z/pZ au moyen de la méthode de l’équation caractéristique. Il resterait à étudier le cas où N est un nombre primaire, avant de passer au cas général. Proposition 4 : Si M et N sont deux entiers > 0,

T0(M ∨∨∨∨ N) = T0(M) ∨∨∨∨ T0(N) et T(M ∨∨∨∨ N) = T(M) ∨∨∨∨ T(N).

Page 45: Suite de Fibonacci, nombre d'or

45

Preuve :

n | T0(M ∨∨∨∨ N) ⇔ M ∨∨∨∨ N | Fn ⇔ M | Fn et N | Fn ⇔ T0(M) | n et T0(N) | n ⇔ T0(M) ∨∨∨∨ T0(N) | n.

n | T(M ∨∨∨∨ N) ⇔ M ∨∨∨∨ N | Fn et M ∨∨∨∨ N | Fn+1 – 1 ⇔ M | Fn et N | Fn et M | Fn+1 – 1 et N | Fn+1 – 1 ⇔ T(M) | n et T(N) | n ⇔ T(M) ∨∨∨∨ T(N) | n.

Corollaire : Si M et N sont deux entiers > 0, M | N ⇒⇒⇒⇒ T0(M) | T0(N) et T(M) | T(N).

Remarque : les fonctions T0 et T ne sont pas multiplicatives ; on le voit en prenant M = 3, N = 4..

Nous allons maintenant indiquer calculer T(p) et T0(p) pour quelques nombres premiers, à l’aide de méthodes abstraites. Commençons par p = 2 et p = 5.

Proposition 5 : Les suites (Fn) et (Ln) sont égales modulo 2, et 3-périodiques. Fn et Ln sont pairs ssi

n est multiple de 3. En clair, T(2) = T0(2) = 3, τ(2) = 1.

Preuve : Raisonner modulo 2 est bien facile, aussi la méthode suivante est un peu pédante.

L’équation caractéristique r2 – r – 1 = 0 est sans racines dans Z/2Z, mais elle a deux racines

distinctes, a et b, dans le corps de scindage F4 = Z/2Z[X]/(X2 – X – 1) = 0, 1, a, b ,

de caractéristique 2, et à 4 éléments, de ce polynôme.

On a, pour tout n : Fn = an + b

n. Rappelons qu’ici b = a

2. et a est d’ordre 3

Cette suite est 3-périodique en vertu du petit théorème de Fermat relatif à F4 .

De plus, Fn = an + b

n = 0 ⇔ a

n = 1 ⇔ 3 | n.

Proposition 6 : La suite (Fn) est 20-périodique modulo 5, la suite (Ln) est 4-périodique modulo 5. Fn

est divisible par 5 ssi n est multiple de 5. En clair, T(5) = 20, T0(5) = 5, τ(5) = 4.

Preuve : Nous avons déjà établi cela au § 5.2. Retrouvons-le autrement.

Dans Z/5Z, l’équation caractéristique r2 – r – 1 = 0 a 3 comme racine double.

Du coup Fn = (an + b).3n et Ln = (cn + d).3

n . Après calculs, Fn ≡ 2n.3

n et Ln ≡ 2.3

n (mod 5).

Comme 34 = 1, la suite (Fn) est 20-périodique, et la suite (Ln ) est 4-périodique modulo 5.

Plus précisément, Fn ≡ 0 (mod 5) ⇔ 5 | 2n.3n ⇔ 5 | n, donc T0(5) = 5.

Et Fn ≡ 0 (mod 5) et Fn+1 ≡ 1 (mod 5) ⇔ 5 | 2n.3n et 5 | 2(n+ 1)3

n+1 − 1

⇔ 5 | n et 5 | 2(n+ 1)3n+1

− 1 ⇔ 5 | n et 5 | 2.3n+1

− 1 ⇔ 5 | n et 5 | 3n − 1 ⇔ 5 | n et 4 | n.

Corollaire : La suite (Fn) est 60-périodique mod 10. Fn est divisible par 10 ssi n est multiple de 15.

En clair, T(10) = 60, T0(10) = 15, τ(10) = 4.

Preuve : Il suffit d’appliquer la prop 1 aux prop 2 et 3.

Venons-en aux nombres premiers p ≠ 2 et 5, et rappelons le résultat suivant :

Proposition 7 : Soi p un nombre premier ≠ 2 et 5. i) 5 est un carré dans Z/pZ si et seulement si p ≡ 1 ou 9 (mod 10) ii) 5 n’est pas un carré dans Z/pZ si et seulement si p ≡ 3 ou 7 (mod 10)

Preuve : Ces équivalences découlent aisément de la loi de réciprocité quadratique, mais il y a sans doute une preuve plus simple. No matter…

Cas où 5 est un carré dans Z/pZ, i.e. p ≡≡≡≡ 1 ou 9 (mod 10)

Ecrivons 5 = δ2. L’équation caractéritique x

2 – x – 1 = 0 a deux racines ω =

21 δ+ et ϖ =

21 δ−

dans Z/pZ, et l’on a nF = ϖωϖω

−− nn

et nL = ωn + ϖn

.

Page 46: Suite de Fibonacci, nombre d'or

46

Fn ≡ 0 (mod p) ⇔ p | Fn ⇔ nF = 0 ⇔ ωn = ϖn

⇔ (ω/ϖ)n = 1 ⇔ (−ω2

)n = 1

Fn ≡ 0 (mod p) et Fn ≡ 1 (mod p) ⇔ nF = 0 et 1+nF = 1 ⇔ ωn = ϖn

et ωn+1 − ϖn+1

= ω − ϖ

⇔ ωn = ϖn

et ωn = 1 ⇔ ωn

= 1.

Théorème 8 : Si p ≡ 1 ou 9 (mod 10), T0(p) est l’ordre de −ω2, T(p) est l’ordre de ω dans (Z/pZ)*.

Du coup T0(p) | T(p) | p – 1.

Corollaire 1 : Les suites (Fn) et (Ln) sont 10-périodiques modulo 11. Fn est divisible par 11 ssi n est

multiple de 10. En clair, T(11) = T0(11) = 10, τ(11) = 1.

Preuve : Dans Z/11Z, on a 5 = 42 = 7

2, et Fn ≡ 3.( 8

n – 4

n ) et Ln ≡ 8

n + 4

n (mod 11).

En vertu du petit théorème de Fermat, (Fn) et (Ln) sont 10-périodiques modulo 11.

Plus précisément 11 | Fn ⇔ 11 | 3.( 8n – 4

n ) = 3.4

n ( 2

n – 1 ) ⇔ 11 | 2

n – 1 ⇔ 10 | n,

car l’ordre de 2 dans (Z/11Z)* est 10. Donc T0(11) = 10. On en déduit que T(11) = 10.

Corollaire 2 : Les suites (Fn) et (Ln) sont 18-périodiques modulo 19. Fn est divisible par 19 ssi n est

multiple de 18. En clair, T(19) = T0(19) = 18, τ(19) = 1.

Preuve : Dans Z/19Z, on a 5 = 92 = 10

2, ω = 15, ϖ = 5,

Fn ≡ 2 ( 15n – 5

n ) et Ln ≡ 15

n + 5

n (mod 19).

En vertu du petit théorème de Fermat, (Fn) et (Ln) sont 18-périodiques modulo 19.

T0(19) est l’ordre de − ω2 = 3 qui vaut 18. Donc T0(19) = 18. On en déduit que T(19) = 10.

Cas où 5 n’est pas un carré dans Z/pZ, i.e. p ≡≡≡≡ 3 ou 7 (mod 10)

L’équation caractéritique x2 – x – 1 = 0 a encore deux racines ω =

251+ et ϖ =

251−

dans l’extension quadratique Z/pZ[ 5 ], qui est un corps de caractéristique p, à p2 éléments, le

corps de scindage du polynôme X2 – X – 1 sur Z/pZ.

Et l’on a derechef nF = ϖωϖω

−− nn

et nL = ωn + ϖn

.

Fn ≡ 0 (mod p) ⇔ p | Fn ⇔ nF = 0 ⇔ ωn = ϖn

⇔ (ω/ϖ)n = 1 ⇔ (−ω2

)n = 1

Fn ≡ 0 (mod p) et Fn ≡ 1 (mod p) ⇔ nF = 0 et 1+nF = 1 ⇔ ωn = ϖn

et ωn+1 − ϖn+1

= ω − ϖ

⇔ ωn = ϖn

et ωn = 1 ⇔ ωn

= 1

Théorème 9 : Si p ≡ 3 ou 7 (mod 10), T0(p) est l’ordre de −ω2, T(p) est l’ordre de ω dans

Z/pZ[ 5 ]*. Du coup, T0(p) | T(p) | p2 – 1. Et T0(p) ≤ p + 1 en vertu du 5.2..

Corollaire 1 : Les suites (Fn) et (Ln) sont 8-périodiques modulo 3. Fn est divisible par 3 ssi n est

multiple de 4. En clair, T(3) = 8, T0(3) = 4, τ(3) = 2.

Preuve : 5 = 2 n’est pas un carré dans Z/3Z. Dans le corps de scindage à 9 éléments

K = F9 = Z/3Z[X]/(X2 – X – 1) = Z/3Z[ 5 ] , ω =

251+ = 2(1 + 5 ) et ϖ =

251− = 2(1 − 5 )

On a Fn = ϖωϖω

−− nn

et Ln = ωn + ϖn

.

Comme K* a 8 éléments, ω8 = 1 et (Fn) et (Ln) sont 8-périodiques modulo 3.

Plus précisément ω2 = ω + 1, ω4

= −1, ω8 = 1, donc ω est bien d’ordre 8 : T(3) = 8.

Comme −ω2 est d’ordre 4, T0(3) = 4.

Page 47: Suite de Fibonacci, nombre d'or

47

Corollaire 2 : La suite (Fn) est 24-périodique mod 6. Fn est divisible par 6 ssi n est multiple de 12.

En clair, T(6) = 24, T0(6) = 12, τ(6) = 2.

Corollaire 3 : Les suites (Fn) et (Ln) sont 16-périodiques modulo 7. Fn est divisible par 7 ssi n est

multiple de 8. En clair, T(7) = 16, T0(7) = 8, τ(7) = 2.

Preuve : ∆ = 5 n’est pas un carré dans Z/7Z. Dans le sur-corps à 49 éléments K= F49 = Z/7Z[ 5 ].

ω = 2

51+ = 4(1 + 5 ) , ϖ = 2

51− = 4(1 − 5 ) , Fn = ϖωϖω

−− nn

et Ln = ωn + ϖn

..

Comme K* a 48 éléments, ω48 = 1, et on constate même que ω16

= 1.

En effet ω2 = ω + 1 , ω4

= 3ω + 2 , ω8 = 6 = − 1 , donc ω16

= 1

Ainsi (Fn) et (Ln) sont 16-périodiques modulo 7. De plus −ω2 est d’ordre 8, donc T0(7) = 8.

Corollaire 4 : La suite (Fn) est 48-périodique mod 14. Fn est divisible par 14 ssi n est multiple de

24. En clair, T(14) = 48, T0(14) = 24, τ(14) = 2.

Il doit être possible de programmer cette discussion avec Maple et de calculer les T(p) et T0(p), puis

les T(N) et T0(N) lorsque N est quadratfrei. 5.3. Compléments et conjectures.

Sur ma chair vient ta nuit concave, Anaxagore ; Et l’éternel me chante, approche ou souvenir, Un poème d’hier, un poème à venir : « Tes disciples ardus le savaient, Pythagore... »

Jose Luis Borges, La nuit cyclique

Jean-Marc Lapierre est allé bien plus loin, concernant les valeurs prises par les fonctions T et T0 sur les nombres primaires. Il a abordé les conjectures de Wall-Sun-Sun, mais je m’arrête là.

Proposition : Pour tout k ≥ 1, T(2k) = 3×2

k−1.

Ce résultat est établi dans la note de Jean-Marc Lapierre.

Proposition (ou conjecture ?) : Pour tout k ≥ 1, T(5k) = 2

2×5k.

Ce résultat est vrai pour les premières valeurs, mais j’ignore s’il est vrai ou si c’est une conjecture.

Corollaire : T(10) = 60, T(100) = 300, et, pour tout k ≥ 3, T(10k) = 2

k−1×3×5k .

Cela découle des deux résultats précédents, sous la réserve ci-dessus.

Théorème de Donald D. Wall (1960) : Si p est un nombre premier, on a l’alternative :

soit T(p2) = T(p) , soit T(p

2) = p.T(p).

De plus, s’il existe un Fn tel que p divise Fn et p2 ne divise pas Fn, alors T(p

2) = p.T(p).

Conjecture 1 : Si p est un nombre premier, il existe un Fn tel que p divise Fn et p2 ne divise pas Fn,

Cette conjecture se vérifie facilement pour les petites valeurs de p :

Si p = 2, F3 = 2 est divisible par 2, non par 4.

Si p = 3, F4 = 3 est divisible par 3, non par 9.

Si p = 5, F5 = 5 est divisible par 5, non par 25.

Si p = 7, F8 = 21 est divisible par 7, non par 49.

Si p = 11, F10 = 55 est divisible par 11, non par 121.

Page 48: Suite de Fibonacci, nombre d'or

48

Si p = 13, F7 = 13 est divisible par 13, non par 169.

Conjecture 2 : Si p est un nombre premier, le premier nombre de Fibonacci Fn > 0 tel que p divise

Fn est tel que p2 ne divise pas Fn,

Si la conjecture 2 est vraie, alors la conjecture 1 l’est aussi, et, dans le théorème de Wall, on a

toujours T(p2) = p.T(p).

5.4. Suite de Fibonacci et triplets pythagoriciens.

Dans son livre sur Pythagore, Pierre Brémaud signale que la suite de Fibonacci fournit une suite infinie de triplets pythagoriciens, c’est-à-dire de triplets (a, b, c) d’entiers > 0 tels que

a2 + b

2 = c

2 .

En effet, si l’on considère quatre nombres de Fibonacci consécutifs Fm, Fm+1, Fm+2, Fm+3,

le triplet (am , bm , cm) = ( Fm × Fm+3 , 2 × Fm+1 × Fm+2 , (Fm+1)2 + (Fm+2)

2 )

est pythagoricien pour m ≥ 1.

Cela découle de ce que am = Fm × Fm+3 = ( Fm+2 − Fm+1 ) × ( Fm+2 + Fm+1 ) = (Fm+2)2 − (Fm+1)

2 .

On en déduit aussitôt que am2 + bm

2 = cm

2 .

Les triplets obtenus ne sont pas tous primitifs. Plus précisément, le pgcd de am , bm , cm vaut 1 ou 2.

En effet, si p premier divisait am , bm , cm, c’est-à-dire (Fm+2)2 − (Fm+1)

2 , (Fm+2)

2 + (Fm+1)

2 et

2×Fm+1×Fm+2 , il diviserait 2(Fm+2)2 , 2(Fm+1)

2 et 2Fm+1Fm+2 ; si p était impair, il diviserait Fm+2

et Fm+1 ; or ces nombres sont premiers entre eux.

Un examen de parité montre que pgcd(am , bm , cm) = 2 si 3 divise m, 1 sinon ; autrement dit, dans la liste obtenue, deux triplets sur trois sont primitifs.

Si l’on note Fibo(m) =

m

m

m

cba

, alors : Fibo(0) =

220

et Fibo(m+1) =

2/312/11112/112/1

Fibo(m).

On en déduit que : Fibo(1) =

543

et Fibo(m+3) =

984874441

Fibo(m).

Cette matrice joue un rôle important dans l’étude générale des triplets pythagoriciens. Je renvoie à mon chapitre sur le sujet.

Page 49: Suite de Fibonacci, nombre d'or

49

6. Propriétés algébriques des suites de Fibonacci.

« Alain ne comprenait rien à l’algèbre. Moi non plus. Mais pour l’aider, et que ses devoirs de vacances ne nous séparassent pas longtemps, je repris mes anciens cours. »

Pierre Herbart , L’Âge d’or

Soient (M, ∗) un monoïde, a et b deux éléments de M. On nomme suite de Fibonacci générale toute

suite (un)n∈N d’éléments de E vérifiant : u0 = a , u1 = b , ∀n ∈ N un+2 = un+1 ∗ un .

Soient (G, ∗) un groupe, a et b deux éléments de G. On nomme suite de Fibonacci générale toute

suite (un)n∈Z d’éléments de E vérifiant : u0 = a , u1 = b , ∀n ∈ Z un+2 = un+1 ∗ un .

Remarque : si l’on remplace la loi un+2 = un+1 ∗ un par la loi un+2 = un ∗ un+1 , il suffit de se placer dans le monoïde (ou le groupe) opposé.

Exemples :

1) Dans (N, +), la suite décalée (Fn−1) = ( 1, 0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, … )

ainsi que toutes les suites tronquées : (Fn+7) = ( 8, 13, 21, 34, 55, … ), etc.

2) Dans (N, +), la suite de Lucas (Ln) = ( 2, 1, 3, 4, 7, 11, 18, 29, 47, 76, … ).

3) Dans (Z, +), toutes les suites tronquées de (Fn), telles que

(Fn−8) = ( − 21 , 13 , − 8 , 5 , − 3 , 2 , − 1 , 1 , 0 , 1 , 1 , 2 , 3 , 5 , 8 , 13 , 21 , 34, … )

4) Dans (Z××××Z, +), les suites (Fn, Fn+1) et (Ln, Ln+1) sont des suites de Fibonacci, qui vérifient :

(Fn+2, Fn+3) = (Fn, Fn+1) + (Fn+1, Fn+2) , (F0, F1) = (0, 1) , (F1, F2) = (1, 2)

(Ln+2, Ln+3) = (Ln, Ln+1) + (Ln+1, Ln+2) , (L0, L1) = (2, 1) , (L1, L2) = (1, 3)

5) Dans (R, +) ou (Q[ 5 ], +), les suites (ϕn) et (ϕ’

n), où ϕ est le nombre d’or et ϕ’ son conjugué.

Plus généralement, dans un anneau A, si x est un élément tel que x2 = x + 1, x est inversible et la

suite (xn)n∈Z est une suite de Fibonacci.

En particulier, dans l’anneau M2(Q), la matrice A =

0111 vérifie A

2 = A + I, donc (A

n) n∈Z est une

suite de Fibonacci.

6) Dans le monoïde additif (PPPP(R), +), la suite de segments [Fn, Fn+1] est une suite de Fibonacci, en

ce sens que [Fn, Fn+1] + [Fn+1, Fn+2] = [(Fn+2, Fn+3]. A noter que [F0, F1] = [0, 1], [F1, F2] = 1.

7) Dans (N, ××××), la suite ( 2 , 3 , 2.3 , 2.32

, 22.3

3 , 2

3.3

5 , 2

5.3

8 , … ).

Elle est donnée par un = 12 −nF nF3 .

8) Dans (Z/2Z, +), la suite (0, 1, 1, 0, 1, 1, …) et plus généralement (a, b, a + b, a, b, a + b, … ). On constate que ce sont des suites 3-périodiques. Ce résultat subsiste dans tout groupe vérifiant ∀x x + x = 0 .

9) Dans (Z/3Z, +), la suite (0, 1, 1, 2, 0, 2, 2, 1, 0, 1, 1, 2, 0, … ) est 8-périodique et 4-antipériodique. Plus généralement (a, b, a + b, a + 2b, 2a, 2b, 2a + 2b, 2a + b, 0, a, b, a + b, …) est 8-périodique, et 4-antipériodique. Ce résultat subsiste dans tout groupe additif vérifiant ∀x x + x + x = 0 .

10) Soit M = Mo(0, 1) le monoïde des mots à deux lettres 0, 1, muni de la concaténation. Partant des mots 1 et 0, on obtient une suite de Fibonacci de mots :

m0 = 1 , m1 = 0 , m2 = 01 , m3 = 010 , m4 = 01001 , m5 = 01001010 , etc.

Page 50: Suite de Fibonacci, nombre d'or

50

Nous étudierons plus tard sur cette importante suite de mots.

Dans la suite, un monoïde ou un groupe additif seront toujours supposés commutatifs.

Proposition 1 : i) Soient (M, +) un monoïde additif, (un)n∈N une suite de Fibonacci générale.

On a : ∀n ∈ N un = Fn−1.a + Fn.b .

ii) Soient (G, +) un groupe additif. (un)n∈Z une suite de Fibonacci générale.

On a : ∀n ∈ Z un = Fn−1.a + Fn.b .

Preuve : 1) se montre par récurrence double.

Si n = 0, u0 = a = F−1.a + F0.b . Rappelons que F−1 = 1. Si n = 1, u1 = b = F0.a + F1.b .

Si un = Fn−1.a + Fn.b et un+1 = Fn.a + Fn+1.b , alors

un+2 = un+1 + un = ( Fn + Fn−1 ).a + ( Fn+1 + Fn ).b = Fn+1.a + Fn+2.b . cqfd

2) En vertu de 1), on a déjà ∀n ∈ N un = Fn−1.a + Fn.b .

Si un = Fn−1.a + Fn.b et un+1 = Fn.a + Fn+1.b , alors

un−1 = un+1 − un = ( Fn − Fn−1 ).a + ( Fn+1 − Fn ).b = Fn−2.a + Fn−1.b . cqfd

Remarques : Ce résultat subsiste dans des monoïdes ou des groupes non commutatifs, pourvu que a et b commutent.

Exemple : Dans M2(Q), si A =

0111 , on retrouve A

n = Fn−1.I + Fn.A =

+

1

1

nn

nn

FFFF

Notons Fibo(N, M) l’ensemble des suites de Fibonacci générales (un)n∈N à éléments dans M,

Fibo(Z, M) l’ensemble des suites de Fibonacci générales (un)n∈Z à éléments dans M,

Corollaire 1 : Les suites de Fibonacci générales à éléments dans N forment un sous-monoïde additif

de FFFF(N, N). C’est le monoïde engendré par les suites (Fn−1) et (Fn).

Corollaire 2 : Les suites de Fibonacci générales à éléments dans Z forment un sous-groupe additif

de FFFF(N, Z). C’est le sous-groupe engendré par les suites (Fn−1) et (Fn).

Corollaire 3 : Les suites de Fibonacci générales à éléments dans un corps K forment un sous-espace

vectoriel de FFFF(N, K) de dimension 2. C’est le plan engendré par les suites (Fn−1) et (Fn).

Pour que deux suites u = (un)n∈N et v = (vn)n∈N forment une base de Fibo(N, K), il faut et il suffit

que 11

00

vuvu ≠ 0.

Exemples :

1) Les suites (Fn) et (Ln) forment une base de Fibo(N, K), pour tout corps de caractéristique ≠ 2. En revanche, dans un corps de caractéristique 2 elles sont identiques.

2) Les suites (ϕn) et (ϕ’

n) forment une base de Fibo(N, R) et de Fibo(N, Q[ 5 ]).

Lorsque K = R, nous avons déjà abordé ces sujets au § 3.

Proposition 2 : Soit (M, +) un monoïde additif, (an) une suite d’éléments de M, (un) une suite

vérifiant ∀n ∈ N un+2 = un+1 + un + an .

Alors ∀n ≥ 2 un = Fn−1.u0 + Fn.u1 + Fn−1.a0 + Fn−2.a1 + … + F1.an−2 + F0.an−1.

Preuve : par récurrence sur n.

NB : Lorsque M = C ou K, corps commutatif, on peut aussi montrer cela par série génératrice.

Corollaire : Si ∀n ∈ N un+2 = un+1 + un + a ,

Page 51: Suite de Fibonacci, nombre d'or

51

Alors ∀n ≥ 2 un = Fn−1.u0 + Fn.u1 + ( Fn+1 – 1 ).a.

7. Série génératrice de la suite de Fibonacci. 7.1. Séries formelles.

Proposition 1 : Dans l’anneau Q[[X]] des séries formelles on a

∑+∞

=0

.n

nn XF = ²1 XX

X−− et ∑

+∞

=0

.n

nn XL = ²1

2XX

X−−

Preuve : ( 1 – X – X2

).∑+∞

=0

.n

nn XF = X + ∑+∞

=

+++ −−

0

212 ).(

n

nnnn XFFF = X.

( 1 – X – X2

).∑+∞

=0

.n

nn XL = 2 – X + ∑+∞

=

+++ −−

0

212 ).(

n

nnnn XLLL = 2 – X.

Remarque : ( 1 – X – X2

).(∑=

n

k

kk XF

0

. ) = X – Fn+1.Xn+1

– Fn.Xn+2

.

Cette formule permet de retrouver plusieurs résultats antérieurs :

Corollaire 1 : ∀n ∈ N Fn = ''

ϕϕϕϕ

−− nn

= 5

'nn ϕϕ − , Ln = ϕn

+ ϕ’n .

Preuve : par décomposition en éléments simples :

∑+∞

=0

.n

nn XF = ²1 XX

X−− =

)'1)(1( XXX

ϕϕ −− = 51 (

Xϕ−11 −

X'11ϕ− ) =

51 ∑

+∞

=−

0

).'(n

nnn Xϕϕ

∑+∞

=0

.n

nn XL = ²1

2XX

X−−

− = Xϕ−1

1 + X'1

1ϕ− = ∑

+∞

=+

0

).'(n

nnn Xϕϕ

et il reste à identifier.

Corollaire 2 : ∀n ≥ 0 F0 + F1 + … + Fn = Fn+2 – 1 .

Preuve : Passons par les séries génératrices,

∑+∞

=++

00 )....(

n

nn XFF = X−1

1²1 XX

X−− .

∑+∞

=+ −

02 ).1(

n

nn XF = ∑

+∞

=+

02.

n

nn XF −∑

+∞

=0n

nX = ²

1X ∑

+∞

=

++

0

22.

n

nn XF −∑

+∞

=0n

nX = ²

1X

(∑+∞

=0

.n

nn XF − X ) −∑+∞

=0n

nX

= ²

1X

(²1 XX

X−− − X ) −

X−11 .

Il suffit de vérifier que les deux seconds membres sont égaux.

Corollaire 3 : ∀n ≥ 1 F1 – F2 + F3 – F4 + … + (−1)n−1

.Fn = 1 + (−1)n−1

.Fn−1

Preuve :

∑+∞

=− −++−

001 ).)1(...(

n

nnnn XFFF = (∑

+∞

=−

0

.)1(n

nn X )(∑+∞

=0

.n

nn XF ) = X+1

1²1 XX

X−− .

Changeant X en – X, il vient : ∑+∞

=−++−

010 ).)1(...(

n

nnn XFFF = X−1

1²1 XX

X−+

− .

Donc ∑+∞

=

−−++−1

121 ).)1(...(

n

nnn XFFF = X−1

1²1 XX

X−+ .

Page 52: Suite de Fibonacci, nombre d'or

52

∑+∞

=−

−−+0

11 ).)1(1(

n

nn

n XF = X−11 + ∑

+∞

=−

−−0

11 .)1(

n

nn

n XF = X−1

1 + X∑+∞

=

−−

−−0

11

1 .)1(n

nn

n XF

= X−1

1 + X (X1− + ∑

+∞

=

−−

−−1

11

1 .)1(n

nn

n XF ) = X−1

1 − 1 − ²1

²XX

X−+ .

Il reste à vérifier que X−1

1²1 XX

X−+ =

X−11 − 1 −

²1²XX

X−+ , ce qui est facile.

Proposition 2 : ∀n ≥ 1 Fn = ∑−=+ 1nqp

pqC = ∑

−≤≤−−

210

1nk

kknC = ∑

∈−−

Zk

kknC 1 .

Preuve : ∑+∞

=0

.n

nn XF = ²1 XX

X−− =

²)(1 XXX+− = X∑

+∞

=+

0

²)(m

mXX = X∑∑+∞

=

+

=0 0

.m

kmm

k

km XC

= X∑∑+∞

=−

0

).(n

n

k

kkn XC = ∑∑

+∞

=

+−

0

1).(n

n

k

kkn XC = ∑∑

+∞

=−−

11 ).(

n

n

k

kkn XC .

La théorie des séries formelles permet de rendre ce calcul rigoureux. Voir mon chapitre sur le sujet.

Dans le paragraphe suivant, nous utiliserons la méthode des séries génératrices. 7.2. Séries entières.

Proposition 3 : Les séries entières ∑+∞

=0

.n

nn zF et ∑+∞

=0

.n

nn zL ont pour rayon de convergence 1/ϕ = |ϕ’|.

∀z ∈ C , |z| < 1/ϕ ∑+∞

=0

.n

nn zF = ²1 zz

z−− et ∑

+∞

=0

.n

nn zL = ²1

2zzz

−−− .

Corollaire : ∑+∞

=0 2nnnF = 2 , ∑

+∞

=0 2nnnL = 6.

Proposition 4 : Les séries entières ∑+∞

=0

.!n

nn znF et ∑

+∞

=0

.!n

nn znL ont pour rayon de convergence +∞ et :

∀z ∈ C ∑+∞

=0

.!n

nn znF =

5

'zz ee ϕϕ − et ∑

+∞

=0

.!n

nn znL = zeϕ + ze 'ϕ .

Corollaire : ∑+∞

=0 !n

n

nF =

5

'ϕϕ ee − , ∑

+∞

=0 !n

n

nL = ϕe + 'ϕe .

Proposition 5 : expressions intégrales de Fn. 7.3. Séries divergentes.

Ce paragraphe fait référence à mon chapitre sur les séries divergentes.

Formellement, ∑+∞

=+

02

nnF = ∑

+∞

=+

01

nnF + ∑

+∞

=0n

nF , ce qui s’écrit : ∑+∞

=0n

nF − 1 = ∑+∞

=0n

nF + ∑+∞

=0n

nF ,

De même, ∑+∞

=+

02

nnL = ∑

+∞

=+

01

nnL + ∑

+∞

=0n

nL , ce qui s’écrit : ∑+∞

=0n

nL − 3 = ∑+∞

=0n

nL − 2 + ∑+∞

=0n

nL .

∑+∞

=+−

02)1(

nn

nF = ∑+∞

=+−

01)1(

nn

nF + ∑+∞

=−

0

)1(n

nnF s’écrit ∑+∞

=−

0

)1(n

nnF + 1 = −∑+∞

=−

0

)1(n

nnF + ∑+∞

=−

0

)1(n

nnF = 0,

et idem pour les nombres de Lucas. Certes, ces quatre séries divergent, mais :

Proposition 6 : S’il existe un procédé sommatoire (G, S) qui les rende convergentes, alors :

∑+∞

=0n

nF = ∑+∞

=0n

nL = − 1 (G) ; ∑+∞

=−

0

)1(n

nnF = − 1 (G) ; ∑+∞

=−

0

)1(n

nnL = 3 (G).

Page 53: Suite de Fibonacci, nombre d'or

53

C’est aussi ce que l’on trouve en faisant z = 1 et z = −1 dans les identités

∀z ∈ C , |z| < 1/ϕ ∑+∞

=0

.n

nn zF = ²1 zz

z−− et ∑

+∞

=0

.n

nn zL = ²1

2zzz

−−− .

On objectera que, ni 1, ni −1, ne vérifient la condition |z| < 1/ϕ. Qu’à cela ne tienne, on a :

Proposition 7 : Au sens du prolongement analytique :

∑+∞

=0n

nF = ∑+∞

=0n

nL = − 1 (PA) ; ∑+∞

=−

0

)1(n

nnF = − 1 (PA) ; ∑+∞

=−

0

)1(n

nnL = 3 (PA).

Remarque : en revanche, ces séries ne sont pas sommables au sens de Borel. 7.4. Retour aux suites récurrentes.

Exercice : Soit (Fn) la suite de Fibonacci définie par F−1 = 1, F0 = 0, Fn+2 = Fn+1 + Fn.

1) On considère l’application u : a = (an) ∈ RN

→ b = (bn) ∈ RN

définie par :

b0 = − a0 , b1 = − a0 – a1 et ∀k ≥ 2 bk = ak−2 – ak−1 – ak .

Démontrer que u est un isomorphisme. Expliciter la bijection réciproque.

2) Démontrer que u laisse stable le sous-espace R(N)

des suites nulles à partir d’un certain rang, mais que l’endomorphisme induit, noté v, n’est pas un isomorphisme.

Plus précisément, démontrer que b = (bn) ∈ Im v ⇔ ∑+∞

=0kkkbF = 0 et ∑

+∞

=−

01

kkk bF = 0.

Solution :

1) L’application u est linéaire, et bijective, car si b = (bn) ∈ RN

, il existe une unique suite a = (an)

∈ RN

vérifiant : b0 = − a0 , b1 = − a0 – a1 et ∀k ≥ 2 bk = ak−2 – ak−1 – ak .

C’est la suite récurrente linéaire affine définie par :

a0 = − b0 , a1 = b0 – b1 et ∀k ≥ 2 ak = ak−2 – ak−1 – bk .

Un calcul récurrent permet de deviner que

an = − F1.bn + F2.bn−1 − F3.bn−2 + ... + (−1)n+1

.Fn+1.b0

formule que l’on peut ensuite vérifier par report.

2) Si les ak sont nuls à partir d’un certain rang, il en est de même des bk. L’endomorphisme induit v est injectif, comme restriction d’un endomorphisme injectif.

Considérons l’application w : b = (bn) ∈ R(N)

→ (∑+∞

=0kkkbF , ∑

+∞

=−

01

kkk bF ) ∈ R

2.

v w

Démontrons que Im v = Ker w, autrement dit que R(N)

→ R(N)

→ R2 est une suite exacte.

Notons que les formes linéaires f : b = (bn) ∈ R(N)

→ ∑+∞

=0kkkbF = b1 + b2 + 2b3 + 3b4 + 5b5 + …

et g : b = (bn) ∈ R(N)

→ ∑+∞

=−

01

kkk bF = b0 + b2 + b3 + 2b4 + 3b5 + …

sont libres de sorte que Ker w est un sous-espace de codimension 2 de R(N)

.

Soit (en) la base canonique de R(N)

. On constate que v(en) = sn, où sn = − en − en+1 + en+2 .

f(sn) = − Fn − Fn+1 + Fn+2 = 0 et g(sn) = − Fn−1 − Fn + Fn+1 = 0.

Par linéarité, Im v ⊂ Ker w.

Réciproquement, soit b = (bn) ∈ R(N)

telle que ∑+∞

=0kkkbF = ∑

+∞

=−

01

kkk bF = 0.

Page 54: Suite de Fibonacci, nombre d'or

54

Supposons les bk nuls à partir du rang n + 1, autrement dit .

b1 + b2 + 2b3 + 3b4 + 5b5 + … + Fn.bn = 0

b0 + b2 + b3 + 2b4 + 3b5 + … + Fn−1.bn = 0

Le vecteur (b0 , b1 , … , bn) appartient à un sous-espace de Rn+1

de codimension 2, donc de dimension n – 1. Ce sous-espace contient les vecteurs (−1, −1, 1, 0 … , 0) (0, −1, −1, 1, 0 … , 0) (0, 0, −1, −1, 1, 0 … , 0) … (0, …, 0 −1, −1, 1) qui forment une famille libre de n – 1 vecteurs.

Par égalité des dimensions, (b0 , b1 , … , bn) est combinaison linéaire des vecteurs (−1, −1, 1, 0 … , 0) (0, −1, −1, 1, 0 … , 0) (0, 0, −1, −1, 1, 0 … , 0) … (0, …, 0 −1, −1, 1)

donc la suite b = (bk) ∈ R(N)

est combinaison linéaire des suites s0, …, sn−1.

Remarque : cet exercice est une pure et simple imposture, car j’ai soigneusement effacé son origine exacte. Il s’éclaire si on a recours aux séries formelles en 1), aux polynômes en 2).

En effet, RN

n’est autre que l’espace des séries formelles R[[X]].

Alors u : ∑+∞

=0k

kkXa → ∑

+∞

=0k

kk Xb = ( X

2 – X – 1 ) ∑

+∞

=0k

kkXa

est l’opéraeur de multiplication par X2 – X – 1, qui est une série formelle inversible. Son inverse

met en jeu la suite de Fibonacci. En effet on démontre (voir chapitre sur Séries formelles) que :

²1

1XX−− = ∑

+∞

=+

01

k

kk XF . On en déduit aussitôt que

1²1

−−XX = ∑

+∞

=+

+−0

11)1(

k

kk

k XF

Par ailleurs, R(N)

n’est autre que le sous-espace des polynômes R[X].

Alors v : P = ∑+∞

=0k

kkXa → Q = ∑

+∞

=0k

kk Xb = ( X

2 – X – 1 ) ∑

+∞

=0k

kkXa

est l’opérateur de multiplication par X2 – X – 1,

Im v n’est autre que l’idéal des polynômes multiples de X2 – X – 1.

Comment reconnaître que le polynôme Q = ∑+∞

=0k

kk Xb est divisible par X

2 – X – 1 ?

Il est divisible par X2 – X – 1 ssi son reste euclidien est nul.

Or ce reste est : ∑+∞

=−

01

kkk bF + (∑

+∞

=0kkkbF )X. Je laisse cela en exercice au lecteur.

Comme on voit, le polynôme X2 – X – 1 ne joue en réalité qu’un rôle mineur, on pourrait fabriquer

autant d’exercices que l’on veut de cette façon.

8. Suites associées à la suite de Fibonacci.

« Allons ! Encore un dernier petit calcul et on s’en va ! »

Dans ce paragraphe, nous allons étudier diverses suites associées à la suite de Fibonacci. La plupart sont référencées dans l’Encyclopédie OEIS.

8.1. Sous-suites périodiques.

Notons E l’espace vectoriel des suites à éléments complexes, T l’opérateur de décalage et F le plan

vectoriel Ker( T2 – T – I ) engendré par la suite de Fibonacci et une quelconque de ses associées.

Commençons par étudier les suites (F2n) et (F2n+1).

(F2n) = (0, 1, 3, 8, 21, 55, 144, …) et (F2n+1) = (1, 2, 5, 13, 34, 88, …)

sont référencées sous les numéros resp. A001906 et A001519 dans l’Encyclopedie OEIS. On peut les étudier par diverses méthodes.

Page 55: Suite de Fibonacci, nombre d'or

55

1ère méthode : la suite (Fn) apppartient au noyau de T2 – T – I, mais aussi de tous les P(T), où P est

un polynôme multiple de X2 – X – 1, qui est son polynôme minimal ponctuel.

Notant par abus T = TF l’endomorphisme induit par T dans F, on a T = T2 – I dans F,

donc T2 = ( T

2 – I )

2 , i.e. T

4 – 3T

2 + I = 0.

Ainsi la suite de Fibonacci vérifie Fn+4 − 3.Fn+2 + Fn = 0

Et en particulier F2n+4 − 3.F2n+2 + F2n = 0 et F2n+5 − 3.F2n+3 + F2n+1 = 0

2ème méthode : F2n = 5

'22 nn ϕϕ − et F2n+1 =

5

' 1212 ++ − nn ϕϕ sont combinaisons linéaires des suites (ϕ2n

),

(ϕ’2n

), donc appartiennent au noyau de :

( T − ϕ2 )( T − ϕ’

2 ) = ( T – 1 − ϕ )( T – 1 − ϕ’ ) = T

2 – 3T + 1.

3ème méthode : par séries génératrices

∑+∞

=0

.n

nn XF = ²1 XX

X−− implique, en séparant les parties paires et impaires

∑+∞

=0

22 .

n

nn XF = 4²21

²XX

X−− et ∑

+∞

=

++

0

1212 .

n

nn XF = 4

3

²21 XXXX−−

−.

Donc ∑+∞

=02 .

n

nn XF = 221 XX

X−− et ∑

+∞

=+

012 .

n

nn XF = 221

1XX

X−−

− .

Proposition 1 : Les suites (F2n) et (F2n+1) sont récurrentes linéaires et obéissent resp. aux formules :

w0 = 0 , w1 = 1 , ∀n ∈ Z wn+2 – 3.wn+1 + wn = 0.

w0 = 1 , w1 = 2 , ∀n ∈ Z wn+2 – 3.wn+1 + wn = 0.

Etudions plus généralement les suites (Fqn+r)n , où 0 ≤ r < q.

La seconde méthode est de loin la plus facile.

Fqn+r = 5

' rqnrqn ++ −ϕϕ est combinaison linéaire des suites (ϕqn

), (ϕ’qn

), donc appartiennent au noyau

de : ( T − ϕq )( T − ϕ’

q ) = T

2 – Lq.T + (−1)

q+1 , où (Lq) est la suite de Lucas.

Proposition 2 : Les suites (Fqn+r)n , où 0 ≤ r < q, sont récurrentes linéaires d’ordre 2 et obéissent

aux formules : w0 = Fr , w1 = Fq+r , ∀n ∈ Z wn+2 – Lq.wn+1 + (−1)q+1

.wn = 0.

Remarque : on peut aussi retrouver cela à l’aide de la 1ère méthode, mais c’est un peu plus abstrait.

Il s’agit de chercher un polynôme anulateur de Tq. Soit P un tel polynôme, Q(X) = P(X

q).

On veut que P(Tq) = 0 et que X

2 – X – 1 divise P.

Ecrivons P(X) = ( X2 – X – 1 ).Q(X).

8.2. Suites obtenues comme produits.

Les suites récurrentes linéaires à coefficients constants sont exactement les combinaisons des suites

(P(n)λn), où P est un polynôme et λ un complexe. Il en résulte que le produit au sens usuel de deux

suites récurrentes linéaires à coefficients constants l’est aussi. En voici quelques exemples.

Etudions la suite (Fn2).

Il découle de la formule de Moivre que Fn2 =

5)1(2'22 nnn −−+ϕϕ

.

La suite (Fn2) est combinaison linéaire des suites (ϕ2n

), (ϕ’2n

) et ((−1)n), donc appartient au noyau

de P(T), où T est l’opérateur de décalage et

Page 56: Suite de Fibonacci, nombre d'or

56

P = ( X − ϕ2 )( X − ϕ’

2 )( X + 1 ) = ( X – 1 − ϕ )( X – 1 − ϕ’ )( X – 1 ) = X

3 – 2X

2 − 2X + 1.

Proposition 3 : La suite (Fn2) est récurrente linéaire d’ordre 3 et obéit aux formules :

w0 = 0 , w1 = w2 = 1 , ∀n ∈ N wn+3 – 2.wn+2 – 2.wn+1 + wn = 0.

Etudions la suite (Fn.Fn+1) des aires des rectangles d’or.

Cette suite, répertoriée A001654 dans l’OEIS, a pour premières valeurs : 0 , 1 , 2 , 6 , 15 , 40 , 104 , 273 , 714 , 1870 , …

Il découle de la formule de Moivre que Fn.Fn+1 = 5

)1(' 1212 nnn −−+ ++ ϕϕ.

La suite (Fn.Fn+1) est également combinaison linéaire des suites (ϕ2n), (ϕ’

2n) et ((−1)

n), donc

appartient au noyau de Q(T), où Q = ( X − ϕ2 )( X − ϕ’

2 )( X + 1 ) = X

3 – 2X

2 − 2X + 1.

Proposition 4 : La suite (Fn.Fn+1) est récurrente linéaire d’ordre 3 et obéit aux formules :

w0 = 0 , w1 = 1 , w2 = 2 , ∀n ∈ N wn+3 – 2.wn+2 – 2.wn+1 + wn = 0.

Etudions la suite (F0.F1 + … + Fn.Fn+1) des sommes cumulées des aires des rectangles d’or.

Cette suite, répertoriée A064831 dans l’OEIS, a pour premières valeurs : 0 , 1 , 3 , 9 , 24 , 64 , 168 , 441 , 1155 , …

Proposition 5 : La suite an = F0.F1 + … + Fn.Fn+1 vérifie :

a0 = 0 , a1 = 1 , a2 = 2 , a3 = 9 , an+4 = 3.an+3 – 3.an+1 + an

an = Fn+12 − 1 si n est impair, an = Fn+1

2 si n est pair

Etudions la suite (Fn3).

Il découle de la formule de de Moivre que Fn3 =

55

')'(3)(3 33 nnnn ϕϕϕϕ −−+−−.

La suite (Fn3) est combinaison linéaire des suites (ϕ3n

), (ϕ’3n

), ((−ϕ)n), ((−ϕ’)

n), donc appartient au

noyau de R(T), où R = ( X − ϕ3 )( X − ϕ3

)( X + ϕ )( X + ϕ’ ) = X4 – 3X

3 – 6X

2 + 3X + 1.

Proposition 5 : La suite (Fn3) est récurrente linéaire d’ordre 4 et obéit aux formules :

w0 = 0 , w1 = w2 = 1 , w3 = 8 , ∀n ∈ N wn+4 – 3.wn+3 – 6.wn+2 + 3.wn+1 + wn = 0.

On pourrait étudier de même les suites (Fn.Fn+1.Fn+2), etc.

Proposition 6 : ∀n ∈ N Fn+2.Fn+1.Fn−1.Fn−2 = (Fn)4 – 1.

Preuve : Nous avons déjà démontré cette identité. On peut ici noter que les deux membres sont des suites récurrentes linéaires d’ordre 4 et vérifier l’identité pour n = 0, 1, 2 et 3.

Exercice : Polynôme caractéristique, diagonalisation de la matrice A =

−−

221

21

110

...............

...

...

nnn

n

n

FFF

FFFFFF

∈ Mn(R).

Rép. : χA(X) = Xn – ( F2n−1 – 1 ).X

n−1 − ( Fn

2 – a ).X

n−2 avec a = 0 si n est pair, 1 si n est impair.

8.4. Suites de Fibonacci perturbées.

Considérons la suite définie par u0 = a , u1 = b , un+2 = un+1 + un + c

On constate aussitôt que un+2 + c = un+1 + c + un + c.

Par conséquent, (un + c) est une suite de Fibonacci, et il découle du §6 que

Page 57: Suite de Fibonacci, nombre d'or

57

un + c = ( a + b ).Fn−1 + ( b + c ).Fn , donc un = ( a + b ).Fn−1 + ( b + c ).Fn − c

Considérons maintenant la suite définie par u0 = 0 , u1 = 1 , un+2 = un+1 + un + (−1)n.

Ses premiers termes sont : 0 , 1 , 2 , 2 , 5 , 6 , 12 , 17 , 30 , 46 , 77 , 122 , 200 , 321 , 522 , … Elle est répertoriée dans l’OEIS sous le numéro A181716 .

Proposition 7 : Cette suite peut aussi être définie par :

u0 = 0 , u1 = 1 , u2 = 2 , un+3 = 2un+1 + un.

Elle est liée à la suite de Fibonacci par la formule :

∀n ∈ N un = Fn + Fn−2 + (−1)n .

En particulier un = .2

15− ϕn + (−1)

n + o(1).

Enfin ∑+∞

=0

.n

nn Xu = ²)1)(1(

²2XXX

XX−−+

+

Preuve : Notons T l’opérateur de décalage.

Alors ( T2 – T – I )(u) = v, où v est la suite (−1)

n, qui appartient au noyau de T + I.

Donc ( T + I )( T2 – T – I )(u) = 0, autrement dit ( T

3 – 2T – I )(u) = 0.

La seconde formule peut se démontrer en posant un = xn + (−1)n .

On observe alors que x0 = −1 , x1 = 2 , xn+2 = xn+1 + xn .

Or la suite ( Fn + Fn−2 ) vérifie ces propriétés. Le reste est laissé en exercice.

Autre approche, par séries génératrices :

Notant U = ∑+∞

=0

.n

nn Xu , il vient ( 1 – X – X2

).U = u0 + (u1 – u0).X + (u2 – u1 – u0).X2 + …

= X + X2 – X

3 + X

4 − … = X +

XX+1

² = XXX

++

1²2 , d’où ∑

+∞

=0

.n

nn Xu = ²)1)(1(

²2XXX

XX−−+

+ , etc.

Considérons la suite définie par v0 = 0 , v1 = 1 , vn+2 = vn+1 + vn + 2

)1(1 n−−.

Autrement dit vn+2 = vn+1 + vn si n est pair , vn+1 + vn + 1 si n est impair.

Ses premiers termes sont : 0 , 1 , 1 , 3 , 4 , 8 , 12 , 21 , 33 , 46 , 77 , 122 , 200 , 321 , 522 , … Elle est répertoriée dans l’OEIS sous le numéro A074331.

Proposition 8 : Cette suite peut aussi être définie par :

v0 = 0 , v1 = v2 = 1 , v3 = 2 , vn+4 = vn+3 + 2vn+2 − vn+1 − vn.

Elle est liée à la suite de Fibonacci par la formule :

∀n ∈ N vn = Fn+1 − 2

)1(1 n−+ = Fn+1 − 1 si n est pair , Fn+1 si n est impair.

Sa série génératrice est ∑+∞

=0

.n

nn Xv = ²)1)(1)(1( XXXX

X−−−+ .

Preuve : laissée en exercice. Nous retrouverons cette suite plus tard.

Remarque : Plus généralement, on peut étudier les suites un+2 = un+1 + un + pn, où (pn) est une suite périodique.

Page 58: Suite de Fibonacci, nombre d'or

58

Considérons maintenant la suite (xn) définie par : x0 = 0 , x1 = 1 et xn+2 = xn+1 + xn + Fn.

Calculons xn, et donnons-en un équivalent.

La suite (xn) est caractérisée par x0 = 0 , x1 = 1 et xn+2 − xn+1 − xn = Fn , ou encore par

x0 = 0 , x1 = 1 , x2 − x1 − x0 = 0 , x3 − x2 − x1 = 1 ,

xn+4 − xn+3 − xn+2 − xn+3 + xn+2 + xn+1 − xn+2 + xn+1 + xn = 0.

ou encore par x0 = 0 , x1 = 1 , x2 = 1 , x3 = 3 , xn+4 − 2.xn+3 − xn+2 + 2.xn+1 + xn = 0.

Au fond, si T est l’opérateur de décalage qui à la suite (zn) associe (zn+1), on a

u ∈ Ker ( T2 − T – I ) et x ∈ Ker ( T

2 − T – I )

2 = Ker (T − ϕ.I)

2 o (T − ϕ’.I)

2 , donc

xn = ( an + b ).ϕ n + ( cn + d ).ϕ’

n .

Tous calculs faits :

xn = 55

nϕ( 3n + 3 − nϕ ) −

55

'nϕ( 3n + 3 + nϕ’ ) = nFn .

533 + − 1.

5 +nFn .

Avec Maple : > R:=rsolve(x(n+4)-2*x(n+3)-x(n+2)+2*x(n+1)+x(n)=0,x(0)=0,x(1)=1,x(2)=1,x(3)=3 ,x(n));

R225

5

−21

− 1 5

n

− 1 5

− +

85

45

5 ( ) + n 1

−21

− 1 5

n

( ) − 1 5 2− + :=

225

5

−21

+ 1 5

n

+ 1 5

− −

85

45

5 ( ) + n 1

−21

+ 1 5

n

( ) + 1 5 2 + +

Remarque : 1) On peut aussi utiliser les séries formelles A = ∑≥0n

nn XF et B = ∑≥0n

nnXx .

(1 − X – X2).A = X et (1 − X – X

2).B = X + X

2.A, donc A =

²1 XXX−− et B = A + X.A

2.

Il reste à décomposer en éléments simples les fractions A et B. 2) Les deux suites précédentes se généralisent sans peine aux suites récurrentes vérifiant P(T)(u) = v, où v est elle-même suite récurrente linéaire à coefficients constants Q(T)(v) = 0. Car alors (P.Q)(T)(u) = 0, etc. La situation est analogue à celle des équations différentielles linéaires P(D)(y) = f, où f est une exponentielle-polynôme. 8.5. Suite de Fibonacci du second ordre.

Etudions la suite (xn) définie par : x0 = 0 , x1 = 1 et xn+2 = xn+1 + xn + Fn .

(xn) = ( 0, 1, 1, 3, 5, 10, 18, 33, 59, 105, 185, … )

Cette suite est référencée A010049 dans l’OEIS, qui note que xn est le nombre de décompositions de n+1 en sommes de termes ne contenant pas de 1. Ainsi 6 s’écrit 6 = 4 + 2 = 3 + 3 = 2 + 4 = 2 + 2 + 2 ; en tout 5 décompositions.

Cette suite (xn) est caractérisée par x0 = 0 , x1 = 1 et xn+2 − xn+1 − xn = Fn , ou encore par

x0 = 0 , x1 = 1 , x2 − x1 − x0 = 0 , x3 − x2 − x1 = 1 ,

xn+4 − xn+3 − xn+2 − xn+3 + xn+2 + xn+1 − xn+2 + xn+1 + xn = 0.

ou encore par x0 = 0 , x1 = 1 , x2 = 1 , x3 = 3 , xn+4 − 2.xn+3 − xn+2 + 2.xn+1 + xn = 0.

Au fond, si T est l’opérateur de décalage qui à la suite (zn) associe (zn+1), on a

x ∈ Ker ( T2 − T – I )

2 = Ker (T − ϕ.I)

2 o (T − ϕ’.I)

2 , donc

Page 59: Suite de Fibonacci, nombre d'or

59

xn = ( an + b ).ϕn + ( cn + d ).ϕ’

n .

Tous calculs faits :

xn = 55

nϕ(3n + 3 − nϕ) −

55

'nϕ(3n + 3 + nϕ’) = nFn .

533 + − 1.

5 +nFn .

Avec Maple : > R:=rsolve(x(n+4)-2*x(n+3)-x(n+2)+2*x(n+1)+x(n)=0,x(0)=0,x(1)=1,x(2)=1,x(3)=3 ,x(n));

R225

5

−21

− 1 5

n

− 1 5

− +

85

45

5 ( ) + n 1

−21

− 1 5

n

( ) − 1 5 2− + :=

225

5

−21

+ 1 5

n

+ 1 5

− −

85

45

5 ( ) + n 1

−21

+ 1 5

n

( ) + 1 5 2 + +

Remarque : On peut aussi utiliser les séries formelles A = ∑≥0n

nn XF et B = ∑≥0n

nnXx .

On a ( 1 − X – X2

).B = X + X2.A, donc B = A + X.A

2, avec A =

²1 XXX−−

Il reste à décomposer en éléments simples les fractions A et B. 8.6. Suites obtenues par convolution.

Nous allons maintenant étudier la suite obtenue par convolution avec elle-même de la suite de Fibonacci. Elle est répertoriée A001629 sur l’OEIS.

Proposition 9 : La suite Sn = ∑≤≤

−nk

knk FF0

. est récurrente linéaire, et peut être définie par :.

Sn+4 = 2Sn+3 + Sn+2 – 2Sn+1 – Sn , S0 = S1 = 0 , S2 = 1 , S3 = 2.

De plus, pour tout n Sn = 51−n .Fn +

52n .Fn−1 =

511 −+ +− nnn nFFnF

.

Preuve : La méthode des séries génératrices est ici indiquée :

∑+∞

=0

.n

nn XS = (∑+∞

=0

.n

nn XF )2 = (

²1 XXX−− )2

= 432²21²

XXXXX

++−−

Du coup, ( 1 – 2X – X2 + 2X

3 + X

4 )∑+∞

=0

.n

nn XS = X2

.

La relation de récurrence linéaire en découle. Pour montrer la seconde formule, notons que

∑+∞

=0

.n

nn XnF = X∑+∞

=

0

1.n

nn XnF = X.D(²1 XX

X−− ) =

²)²1(

3

XXXX−−

+

∑+∞

=−

01.

n

nn XnF = ∑

+∞

=−

11.

n

nn XnF = ∑

+∞

=

++0

1.)1(n

nn XFn = X. (∑+∞

=0

.n

nn XnF + ∑+∞

=0

.n

nn XF )

= ²)²1(

² 4

XXXX

−−+

+ ²1

²XX

X−−

Il suffit de vérifier que les séries génératrices des deux membres sont égales.

> F:=X/(1-X-X^2);

:= FX

− − 1 X X2

> DF:=simplify(X*diff(F,X));

Page 60: Suite de Fibonacci, nombre d'or

60

:= DFX ( ) + 1 X2

( )− + + 1 X X22

> simplify(1/5*(DF-F)+2*X/5*(DF + F));

X2

( )− + + 1 X X22

Remarques : 1) Sn est le nombre des éléments de tous les sous-ensembles de 1, 2, …, n – 1 ne

contenant pas d’entiers consécutifs. Ainsi S5 = 10, car 1, 2, 3, 4 a 8 sous-ensembles convenables ∅ , 1 , 2 , 3 , 4 , 1, 3 , 1, 4 , 2, 4 , qui contiennent en tout 10 éléments.

2) La suite (nFn) est répertoriée A045925. 3) Plus généralement, la convolée de deux suites récurrentes linéaires est récurrente linéaire. 8.7. Suite « de Tribonacci ».

Etudions la suite (xn) définie par : x0 = 0 , x1 = 1 , x2 = 1, et xn+3 = xn+2 + xn+1 + xn .

(xn) = ( 0 , 1 , 1 , 2 , 4 , 7 , 13 , 24 , 44 , 81 , … )

Cette suite est référencée A000073 dans l’OEIS.

Exercice : Série génératice de cette suite ? Limite de la suite (xn+1/xn) ?

On considère la matrice A =

010111100

. Etudier la suite de ses puissances.

On définit aussi des suites de « Tétranacci » (A073817), « Pentanacci » (A074048), etc.

9. Polynômes de Fibonacci, ou q-nombres de Fibonacci. 9.1. Qu’est-ce que le q-calcul ?

En combinatoire, un q-analogue d’un nombre, d’une identité ou d’un théorème, est une généra-lisation de ce nombre, de cette identité ou de ce théorème, impliquant un nouveau paramètre q, ou indéterminée, qui se spécialise en le nombre, l’identité ou le théorème originels lorsque l’on fait q = 1 ou lorsque l’on fait tendre q vers 1.

Ainsi, le q-analogue de l’entier naturel n est le polynôme [n]q = 1 + q + … + qn−1

= qqn

−−11

.

Le q-analogue de la factorielle n! est le produit [n]q! = [1]q . [2]q … [n]q .

Et l’on peut définir des coefficients q-binomiaux, ou coefficients binomiaux de Gauss. Ces extensions se rencontrent notamment lors du dénombrement de sous-espaces vectoriels d’un espace vectoriel sur un corps fini (q est alors un nombre primaire). En analyse, on peut définir une q-exponentielle, une q-fonction Gamma, une q-intégrale, ou intégrale de Jackson, etc. 9.2. q-nombres de Fibonacci.

Voici les q-nombres de Fibonacci et de Lucas (X et q sont ici interchangeables). Lorsque q = 1, on retrouve les nombres habituels.

Définition 1 : On nomme suite de Fibonacci polynomiale la suite de polynômes de Z[X] donnée

par F0(X) = 0 , F1(X) = 1 , Fn+2(X) = X.Fn+1(X) + Fn(X).

Fn(X) est appelé n-ème polynôme de Fibonacci, Fn(q) est appelé n-ème q-nombre de Fibonacci,

On nomme suite de Lucas polynomiale la suite de polynômes de Z[X] donnée par

Page 61: Suite de Fibonacci, nombre d'or

61

L0(X) = 2 , L1(X) = X , Ln+2(X) = X.Ln+1(X) + Ln(X).

Ln(X) est appelé n-ème polynôme de Lucas, Ln(q) est appelé n-ème q-nombre de Lucas.

Proposition 1 : i) Les polynômes Fn(X) ont tous leurs coefficients dans N.

ii) Pour n ≥ 1, Fn(X) est un polynôme de degré n – 1 et unitaire.

iii) Pour n ≥ 1, Fn(X) est un polynôme pair si n est impair, impair si n est pair.

iv) Fn(0) = 0 si n est pair, 1 si n est impair.

v) Fn(1) = Fn.

vi) Pour tout n ≥ 0, Ln(X) = 2.Fn−1(X) + X.Fn(X) ( avec la convention F−1(X) = 1 ).

Proposition 2 : Variations de Fn.

Si n est impair, Fn est pair, décroit puis croit, et est à valeurs ≥ 1, Fn(0) = 1 étant son minimum.

Si n est pair > 0, Fn est impair, croissant, et nul en 0.

Proposition 3 : Pour n > 0, )()(1

XFXF

n

n+ = X +

X

XX

1...1

11

++

+ où il y a n – 1 barres de fraction.

Proposition 4 : ∀n ∈ N [)()(1

XFXF

n

n+ ] =

011X n [

)()(

0

1

XFXF ] =

011X n [ 0

1 ] .

Corollaire 1 : ∀n ≥ 1

011X n

=

+)()()()(

1

1

XFXFXFXF

nn

nn .

Corollaire 2 : ∀n ≥ 1 Fn+1(X).Fn−1(X) – Fn(X)2 = (−1)

n .

Corollaire 3 : ∀m ≥ 0 ∀n ≥ 1 Fm+n(X) = Fm+1(X).Fn(X) + Fm(X).Fn−1(X) .

Exercice : Démontrer que Fn(X).et Fn+1(X) sont premiers entre eux, et que

pgcd(Fm(X), Fn(X)) = Fpgcd(m,n)(X).

Proposition 5 : Si q > 0, la suite ()()(1

qFqF

n

n+ ) tend vers le q-nombre d’or : ϕq = 2

4²++ qq.

Proposition 6 : Dans C[X][[T]] et C[X] [ 4²+X ][[T]] on a les identités : .

∑+∞

=0

).(n

nn TXF = ²1 TXT

T−− =

'1ϕϕ− (

Tϕ−11 −

T'11ϕ− ) =

'1ϕϕ− ∑

+∞

=−

0

).'(n

nnn Tϕϕ

∑+∞

=0

).(n

nn TXL = ²1

2TXT

XT−−

− = Tϕ−1

1 + T'1

1ϕ− = ∑

+∞

=+

0

).'(n

nnn Tϕϕ

où ϕ = 2

4²++ XX et ϕ’ = 2

4²+− XX .

Corollaire : Fn(X) = 4²

1+X

[ (2

4²++ XX )n − (

24²+− XX )n

]

Ln(X) = (2

4²++ XX )n + (

24²+− XX )n

Remarques : 1) Il s’agit d’une expression dans C[X] [ 4²+X ]. On aurait pu retrouver cela à l’aide de la théorie des suites récurrentes linéaires. 2) Les polynômes de Fibonacci sont liés aux polynômes de Tchebychev de seconde espèce.

Page 62: Suite de Fibonacci, nombre d'or

62

3) Si l’on prolonge à Z la suite (Fn(X)) à l’aide de la même formule de récurrence, on constate que

F−n(X) = (−1)n+1

Fn(X)

Les coefficients de Fn(X) sont les coefficients binomiaux situés sur la n-ème transervale du triangle de Pascal :

Proposition 7 : Pour n ≥ 1,

Fn(X) = Xn–1

+ 12−nC X

n–3 + 2

3−nC Xn–5

+ 34−nC X

n–7 + … = ∑

−≤≤

−−−−

210

121 .

nk

knkkn XC .

Preuve : Cela peut se démonter par récurrence double,

ou bien en partant de ∑+∞

=0

).(n

nn TXF = T ∑+∞

=+

0

2)(k

kTXT et en identifiant.

Corollaire : Pour n ≥ 1, Fn = 1 + 12−nC + 2

3−nC + 34−nC + … = ∑

−≤≤−−

210

1nk

kknC = ∑ −−

k

kknC 1 .

Il suffit de faire X = 1 dans la prop 7.

Proposition 8 : Factorisations.

F2n(X) = X ∏−

=+

1

1

)²cos4²(n

k nkX π et F2n+1(X) = ∏

= ++n

k nkX

1

)12

2²cos4²( π .

Corollaire : Fn = ∏−≤≤

+211

)²cos41(nk

nkπ = ∏

−≤≤

+211

)2cos23(nk

nkπ .

Les polynômes de Fibonacci sont préprogrammés dans Maple :

> with(combinat):for n from 0 to 10 do fibonacci(n,x) ;od; 0 1 x + x2 1

+ x3 2 x + + x4 3 x2 1

+ + x5 4 x3 3 x + + + x6 5 x4 6 x2 1

+ + + x7 6 x5 10 x3 4 x + + + + x8 7 x6 15 x4 10 x2 1

+ + + + x9 8 x7 21 x5 20 x3 5 x

Exercice : On nomme polynômes de Fibonacci à deux indéterminées la suite de polynômes de Z[X,

Y] définie par F0(X, Y) = 0 , F1(X, Y) = 1 , Fn+2(X, Y) = X.Fn+1(X, Y) + Y.Fn(X, Y).

1) Programmer le calcul de ces polynômes. 2) Trouver diverses identités les concernant. Liens avec les suites de Fibonacci et Jacobstahl ? 3) Série génératrice ? Factorisation ?

Page 63: Suite de Fibonacci, nombre d'or

63

10. Propriétés optimales de la suite de Fibonacci. La suite de Fibonacci possède des propriétés optimales. Nous en mentionnons ici deux, mais il y en a d’autres, liées à l’étude des radicaux superposés. 10.1. Le théorème de Lamé 10.

Commençons par rappeler l’algoritthme d’Euclide de calcul du pgcd de deux entiers a et b > 0:

Si b = 0, poser d = a. Sinon, considérons l’algorithme :

a = r0 , b = r1

r0 = r1.q1 + r2 0 < r2 < r1 On ne peut avoir indéfiniment ri ≠ 0 ,

r1 = r2.q2 + r3 0 < r3 < r2 sans quoi (ω(ri)) serait une suite infinie . . . . . . . . . . . . . . . . strictement décroissante d’entiers naturels

ri−2 = ri−1.qi−1 + ri 0 < ri < ri−1 c’est impossible en vertu du principe de . . . . . . . . . . . . . . . . descente infinie de Fermat.

rn−2 = rn−1.qn−1 + rn 0 < rn < rn−1 Il y a donc un dernier reste non nul, rn.

rn−1 = rn.qn rn+1 = 0

Montrons que d = rn est un pgcd de a et b. En effet : • Si x divise a et b, x divise r2 = r0 − r1.q1 , puis r3 = r1 − r2.q2 et par récurrence descendante, il divise tous les rk, donc d. • Inversement, d divise rn et rn−1, donc rn−2 = rn−1.qn−1 + rn et par récurrence ascendante, il divise tous les rk, donc b puis a.

Le nombre n d’itérations est une fonction du couple (a, b), que nous noterons L(a, b). Nous prolongeons L à N×N en convenant que L(a, b) = 0 si a ou b = 0.

Proposition 1 : La fonction L : N×N → N satisfait aux conditions : (I) ∀a ∈ N L(a, 0) = 0. (II) ∀(a, b) ∈ N×N* L( a, b) = L(b, a mod b), où a mod b désigne ici le reste euclidien de a par b.

Proposition 2 : Pour n ≥ 2, L(Fn+2, Fn+1) = n.

Si a > b > 0 et si d = pgcd(a, b), alors a ≥ d.Fn+2 et b ≥ d.Fn+1.

Si a > b > 0 et L(a, b) = n, alors a ≥ Fn+2 et b ≥ Fn+1.

Théorème de Lamé (1845) : Le nombres d’itérations de l’algorithme d’Euclide nécessaires pour calculer le pgcd de deux entiers naturels a et b vérifiant a > b > 0 est majoré par 5 fois le nombre de chiffres décimaux du plus petit de ces deux nombres.

Je renvoie à Naudin Quitté, Algorithmique algébrique (p. 133-134) et Demazure, Cours d’algèbre (p. 25-29). 10.2. Suite de Fibonacci et théorie de la recherche.

Je renvoie ici à l’excellent passage du petit livre de N. Vorobiev (p. 183) que m’avait signalé jadis mon collègue statisticien Jean-Claude Deville. Ah ! l’heureux temps où les Editions de Moscou popularisaient à bas prix les mathématiques soviétiques pour les classes populaires des pays occidentaux, en espérant qu’elles votent communiste ! Et elles votaient communiste, alors. Le monde était simple, en ce temps-là.

10 Gabriel Lamé (Tours, 1795 – Paris, 1870) avait démontré, en 1839, le grand théorème de Fermat pour n = 7. Il prétendra l’avoir démontré en 1847, mais… Lamé a fait beaucoup d’autres choses.

Page 64: Suite de Fibonacci, nombre d'or

64

11. L’anneau Z[ϕϕϕϕ] des entiers de Dirichlet. Ces mille questions Qui se ramifient N’amènent, au fond, Qu’ivresse et folie ;

Arthur Rimbaud

Nous allons maintenant étudier les propriétés arithmétiques du plus petit sous-anneau de Q contenant le nombre d’or ϕ, noté Z[ϕ], et au passage nous résoudrons les équations diophantiennes de Fermat (dites aussi de Pell-Fermat) :

a2 + ab − b

2 = 1 (1) et x

2 − 5y

2 = 1 (2)

et trouverons les entiers relatifs de la forme a2 + ab − b

2 ou de la forme x

2 − 5y

2 .

Ce problème est très voisin du problème des deux carrés 11, et l’anneau Z[ϕ] a une arithmétique très proche de celle de l’anneau Z[i] des entiers de Gauss. Ces deux anneaux sont en effet euclidiens, mais il y a entre eux une différence : alors que le groupe des unités de Z[i] est fini, a 4 éléments : Z[i]* = 1, i , – 1, – i , nous allons voir le groupe des unités de Z[ϕ] est infini. 11.1. Prolégomènes et paralipomènes.

L’identité ∀(x, y) ∈ R2 x

2 + x.y − y

2 = ( x +

2y

)2 − 5.(

2y

)2 = ( x + y.ϕ )( x + y.ϕ’ ) (3).

montre que résoudre (1) revient à chercher les points à coordonnées entières d’une hyperbole d’asymptotes x = ± y.ϕ.

Si (a, b) ∈ Z2 est solution de (1) avec b pair, alors (x, y) = ( a +

2b ,

2b ) est solution de (2).

Si (x, y) ∈ Z2 est solution de (2), alors (a, b) = (x – y, 2y) ∈ Z

2 est solution de (1).

Ainsi, la résolution de (2) est une conséquence de la résolution de (1), car les solutions de (2) sont en bijection avec une partie de celles de (1).

Proposition 1 : L’ensemble E des entiers relatifs de la forme n = x2 − 5y

2 , où (x, y) décrit Z

2, est

une partie infinie de Z, stable par multiplication, ne contenant aucun entier n ≡ 2 ( mod 4 ), ni aucun entier n ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ) et tel que – E = E.

Preuve : E est infini puisqu’il contient tous les carrés de Z (faire y = 0). La stabilité par multiplication découle de l’identité de Brahmagupta :

( x2 − 5y

2 ) ( u

2 − 5y

2 ) = ( xu + 5yv )

2 − 5( xv + yu )

2 (4)

Raisonnons modulo 4 : n = x2 − 5y

2 ≡ x

2 − y

2 = ( x − y )( x + y ) ( mod 4 )

Ce nombre est, soit impair (si x et y n’ont pas même parité), soit divisible par 4, sinon.

Raisonnons modulo 5 : x2 − 5y

2 ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ) ⇒ x

2 ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ), ce qui est impossible, si

l’on dresse la table des carrés modulo 5..

Enfin, − E = E découle de – 1 = 22 − 5.1

2 ∈ E par exemple.

Proposition 2 : L’ensemble F des entiers relatifs de la forme n = a2 + ab − b

2, où (a, b) décrit Z.

2,

est une partie infinie de Z, stable par multiplication, ne contenant aucun entier n ≡ 2 ( mod 4 ), ni aucun entier n ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ), et telle que − F = F.

Preuve : F est infini car il contient tous les carrés de Z et leurs opposés (faire b = 0 puis a = 0). La stabilité de F par multiplication découle de l’identité :

( a2 + ab − b

2 ) ( c

2 + cd − d

2 ) = x

2 + xy − y

2 (5)

où x = ac + bd , y = ad + bc + bd.

11 Voir mon chapitre sur les Théorèmes des deux, trois et quatre carrés.

Page 65: Suite de Fibonacci, nombre d'or

65

Cette identité peut se vérifier directement ou se déduire, avec un peu d’huile de coude, de celle de Brahmagupta et de (3).

L’impossibilité de a2 + ab − b

2 ≡ 2 ( mod 4 ) se montre par examen de tous les cas dans Z/4Z.

Ou encore : a2 + ab − b

2 ≡ 2 ( mod 4 ) ⇒ a

2 + ab − b

2 ≡ 0 ( mod 2 )

⇒ a et b sont pairs ⇒ a2 + ab − b

2 ≡ 0 ( mod 4 ) .

Enfin, 4 étant inversible modulo 5 :

a2 + ab − b

2 ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ) ⇔ 4a

2 + 4ab − 4b

2 ≡ 3 ou 2 ( mod 5 )

⇔ (2a + b)2 − 5b

2 ≡ 3 ou 2 (mod 5) ⇒ (2a + b)

2 ≡ 3 ou 2 (mod 5). Impossible !

Enfin, − F = F découle de – 1 ∈ F par exemple.

Proposition 3 : Les ensembles E et F sont égaux. Et n ∈ F ⇒ 4n ∈ E.

Preuve : 1) L’inclusion E ⊂ F est facile. Soit n ∈ E, n = x2 − 5y

2 , où (x, y) décrit Z

2.

Si l’on pose b = 2y et a = x – y , alors n = ( a + 2b )

2 − 5.(

2b )2

= a2 + ab − b

2 ∈ F.

2) L’inclusion F ⊂ E est plus retorse. Soit n = q(a, b) = a2 + ab − b

2, où (a, b) décrit Z

2.

Si b est pair, pas de souci : n = ( a + 2b )

2 − 5.(

2b )2

∈ E.

Pour traiter les autres cas, notons que n = q(a, b) = − q(b, a + b) = q(a + b, a + 2b).

Si b est impair et a impair, − n = q(b, a + b) ∈ E, donc n ∈ E.

Si b est impair et a pair, n = q(a + b, a + 2b) ∈ E.

3) n = a2 + ab − b

2 ⇒ 4n = ( 2a + b )

2 − 5b

2 ⇒ 4n ∈ E ; mais ceci découle aussi de 4 ∈ E = F

Sans doute pourrait-on poursuivre cette étude à l’aide de subtiles et laborieuses méthodes de descente infinie de Fermat, mais nous allons plutôt suivre les algébristes du 19ème siècle, Gauss, Dirichlet, Kummer et Dedekind, en introduisant des anneaux de nombres naturellement liés aux problèmes à résoudre. « Naturellement »…, du moins, depuis leurs travaux ! 11.2. Les anneaux de nombres.

« Pour résoudre les problèmes, il faut les laisser se dissoudre dans une marée montante de théories générales. »

Alexandre Grothendieck

Proposition 4 : Q[ 5 ] = α = x + y 5 ; (x, y) ∈ Q2

est un sous-corps de R, et une sous Q-algèbre de dimension 2. Il admet deux automorphismes, l’identité et la conjugaison

σ : α = x + y 5 → α = x − y 5 .

Les éléments de Q[ 5 ] sont des nombres algébriques de degré 1 (s’ils appartiennent à Q) ou 2.

Si y ≠ 0, le polynôme minimal de α = x + y 5 sur Q est

( X – α )( X – α ) = X2 − 2xX + x

2 – 5y

2.

Exemple : ϕ et ϕ’ = ϕ sont deux éléments de Q[ 5 ], ayant pour polynôme minimal X2 – X – 1.

Définition 1 : Si α = x + y 5 ∈ Q[ 5 ], on appelle trace de α, T(α) = α + α = 2x, norme de α,

N(α) = α.α = x2 – 5y

2.

Exemple : Si α = a + bϕ, où (a, b) ∈ Q×Q, T(α) = 2a + b , N(α) = a2 + ab − b

2.

Proposition 5 : La trace est une forme Q-linéaire, la norme est multiplicative :

i) ∀(α, β) ∈ Q[ 5 ]2 N(α.β) = N(α).N(β)

ii) ∀α ∈ Q[ 5 ] N(α) = 0 ⇔ α = 0.

Page 66: Suite de Fibonacci, nombre d'or

66

Ce sont resp. la trace et le déterminant de la matrice

xyyx 5 ∈ M2(Q) canoniquement associée à α.

Avant de poursuivre notre course folle, cherchons les éléments de norme ±1 dans Q[ 5 ].

Proposition 6 : Eléments de norme 1 dans Q[ 5 ].

(x, y) ∈ Q×Q ; x2 – 5y

2 = 1 = (

1²51²5

−+

tt ,

1²52

−tt ) ; t ∈ Q ∪ (1, 0) .

(x, y) ∈ Q×Q ; x2 – 5y

2 = −1 = (2

1²515²5

−+−

ttt ,

1²514²5

−−+−

ttt ) ; t ∈ Q ∪ (2, 1) .

(a, b) ∈ Q×Q ; a2 + ab – b

2 = 1 = (

1²1²−−

+tt

t , 1²

2²−−

+tt

tt ) ; t ∈ Q ∪ (1, 0) .

(a, b) ∈ Q×Q ; a2 + ab – b

2 = − 1 = (

1²21−−

−ttt ,

1²1²

−−−−tt

t ) ; t ∈ Q ∪ (0, 1) .

Preuve : Il s’agit d’obtenir des paramétrisations rationnelles des points d’une conique (en l’occurrence des hyperboles). Les points isolés s’obtiennent en faisant t = ∞. Pour cela il suffit de couper la conique par une droite passant par l’un de ses points. Maple fait cela très bien :

> solve(x^2-5*y^2=1,y=t*(x-1),x,y); solve(x^2-5*y^2=-1,y-1=t*(x-2),x,y);

, , = y 0 = x 1 , = x + 5 t2 1

− + 1 5 t2 = y 2t

− + 1 5 t2

, , = x 2 = y 1 , = x 2 − + 5 t2 5 t 1

− + 1 5 t2 = y − + − 1 5 t2 4 t

− + 1 5 t2

> solve(a^2+a*b-b^2=1,b=t*(a-1),a,b); solve(a^2+a*b-b^2=-1,b-1=t*a,a,b);

, , = a 1 = b 0 , = a + t2 1

− − + 1 t t2 = bt ( ) + 2 t

− − + 1 t t2

, , = b 1 = a 0 , = a −− + 1 2 t

− − + 1 t t2 = b − + t2 1

− − + 1 t t2

Proposition 7 : Z[ϕ] = α = a + b.ϕ ; (a, b) ∈ Z2

est un sous-anneau intègre de Q[ 5 ]. Ses éléments sont appelés entiers de Dirichlet.

De plus Z[ 5 ] = α = x + y 5 ; (x, y) ∈ Z2

= α = a + 2b.ϕ ; (a, b) ∈ Z2

est un sous-anneau intègre strict de Z[ϕ]. La conjugaison σ induit un automorphisme involutif de chacun de ces anneaux, noté encore σ.

Si α = a + b.ϕ , σ(α) = a + b.ϕ’ = a + b ( 1 − ϕ ) = a + b − b.ϕ .

Si α = x + y. 5 , σ(α) = a − b 5 .

Exemples : 1) Pour tout n ∈ N, ϕn est élément de Z[ϕ]. Nous avons déjà noté que ϕn

= Fn−1 + Fn.ϕ. Cette formule s’étend à n ∈ Z, car ϕ est un élément inversible de Z[ϕ], d’inverse –1 + ϕ.

2) Pour tout n ∈ N, exprimer 5 n dans Z[ϕ].

Exercice : en notant que ϕm+n = ϕm

.ϕn , quelle formule retrouve-t-on ?

Deux remarques savantes :

1) Les anneaux intègres Z[ϕ] et Z[ 5 ] ne sont pas isomorphes, car l’équation x2 – x – 1 = 0 a 2

solutions dans le premier, 0 dans le second (nous verrons dans la suite que le premier est principal,

et pas le second). Cependant, ils ont même corps des fractions, à savoir Q[ 5 ].

Page 67: Suite de Fibonacci, nombre d'or

67

2) Les éléments de Z[ϕ] sont les « entiers » du corps Q[ 5 ], en ce sens que ce sont les éléments de ce corps dont le polynôme minimal est à coefficiens dans Z.

Soit en effet α = x + y 5 ∈ Q[ 5 ] tel que X2 − 2xX + x

2 – 5y

2 ∈ Z[X].

Alors 2x ∈ Z et x2 – 5y

2 ∈ Z, donc 4x

2 – 5(2y)

2 ∈ Z, donc 5(2y)

2 ∈ Z,

Ecrivons y = qp

( p ∧∧∧∧ q = 1 ). On a q2 | 20.p

2 . Comme p

2 ∧∧∧∧ q

2 = 1, q

2 | 20, donc q = 1 ou 2.

Ainsi 2x et 2y ∈ Z. Posons alors x = 2a et y =

2b , où a et b ∈ Z. Alors

4²5² ba − ∈ Z.

− Si b est pair, a est pair. Alors α = x + y 5 ∈ Z[ 5 ] ⊂ Z[ϕ].

− Si b est impair, b2 ≡ 1 ( mod 4 ), donc a

2 ≡ 1 ( mod 4 ) et a est impair.

Alors α = x + y 5 ∈ Z[ϕ]. Réciproque facile. Ce phénomène, qui a donné bien du fil à retordre aux algébristes du 19ème siècle, est propre à tous les

corps quadratiques Q[ d ], où d ≡ 1 (mod 4). Dans ces corps, l’anneau des « entiers » n’est pas

Z[ d ], mais Z[2

1 d+ ].

Définition 2 : Pour tout élément α = a + b.ϕ ∈ Z[ϕ], on appelle :

• norme de α l’entier relatif N(α) = α.α = a2 + a.b − b

2

• stathme de α l’entier naturel w(α) = | N(α) |.

Exemple : si α = x + y 5 ∈ Z[ 5 ], N(α) = x2 − 5y

2 , w(α) = | x

2 − 5y

2 | ( et T(α) = 2a + b )

Proposition 8 : La norme N vérifie :

i) ∀(α, β) ∈ Z[ϕ]2 N(α.β) = N(α).N(β)

ii) ∀α ∈ Z[ϕ] N(α) = 0 ⇔ α = 0.

Cette proposition permet de retrouver les identités de Brahmagupta (4) et (5) du § 11.1.

Exercice : On munit l’ensemble Z×Z de l’addition usuelle et d’une multiplication définie par : (a, b).(c, d) = (ac + bd, ad + bc + bd)

1) En utilisant la correspondance (a, b) ∈ Z×Z → a + bϕ ∈ Z[ϕ], démontrer que, pour ces deux lois, Z×Z est un anneau commutatif et intègre, et que σ : (a, b) → (a + b, −b) est un automorphisme involutif de cet anneau. Que vaut le produit (a, b).σ(a, b) ? 2) Démontrer que (0, 1) est un élément inversible de cet anneau, et calculer ses puissances, positives et négatives.

Exercice : Démontrer que l’anneau Z[ϕ] est isomorphe à l’anneau des matrices de la forme

+babba , où (a, b) décrit Z×Z. Quelles sont les puissances de

1110 ?

11.3. Unités de Z[ϕ], théorème de Lucas.

Rappelons que si A est un anneau, on note A* le groupe multiplicatif des éléments inversibles de A, appelés aussi, traditionnellement, « unités » de A.

Proposition 9 : ∀α ∈ Z[ϕ] α ∈ Z[ϕ]* ⇔ N(α) = ±1. Z[ϕ]* + = α ∈ Z[ϕ]* ; N(α) = 1 est un sous-groupe de Z[ϕ]*.

Z[ 5 ]* = Z[ϕ]* ∩ Z[ 5 ].

Preuve : Soit α ∈ Z[ϕ]. α est inversible dans Z[ϕ]* ss’il existe β ∈ Z[ϕ] tel que α.β = 1. Alors N(α).N(β) = 1. N(α) est un élément inversible de Z donc N(α) = ±1. Réciproquement, si α ∈ Z[ϕ] vérifie N(α) = ±1, alors α.σ(α) = ±1, donc α est inversible dans Z[ϕ] et a pour inverse ± σ(α).

Page 68: Suite de Fibonacci, nombre d'or

68

Z[ϕ]* + = α ∈ Z[ϕ]* ; N(α) = 1 est un sous-groupe de Z[ϕ]* comme noyau du morphisme N : Z[ϕ]* → ±1.

L’inclusion Z[ 5 ]* ⊂ Z[ϕ]* ∩ Z[ 5 ] est immédiate. Réciproquement, si α ∈ Z[ϕ]* ∩ Z[ 5 ],

l’inverse de α dans Z[ϕ] est ± σ(α). Il appartient à Z[ 5 ]. Cqfd.

Exemple : α = 13 – 8ϕ est élément de Z[ϕ]* car N(α) = (13 – 8ϕ)(13 – 8ϕ’) = 1

L’inverse de α est 13 – 8ϕ’ = 5 + 8ϕ.

Théorème 10 : Unités de Z[ϕϕϕϕ]. Les éléments de Z[ϕ]* sont les éléments de la forme α = ε.ϕn où ε ∈ +1,−1 et n ∈ Z.

Le groupe multiplicatif Z[ϕ]* est isomorphe au groupe additif Z/2Z×Z.

Preuve : Elle repose sur trois lemmes.

Lemme 1 : ∀ε ∈ +1,−1 (∀n ∈ Z) ε.ϕn ∈ Z[ϕ]* .

Il suffit de vérifier que −1 et ϕ sont éléments de Z[ϕ]* .

Lemme 2 : Il n’existe pas d’élément α ∈ Z[ϕ]* tel que 1 < α < ϕ.

Preuve : Posons α = x + y.ϕ tel que 1 < α < ϕ. Alors −1 < σ(α) = ± α−1 < 1.

1 < x + y.ϕ < ϕ

−1 < − x − y ϕ < 1

Additionnons 0 < y 5 < ϕ + 1, d’où y = 1.

Reportons 1 < x + ϕ < ϕ , donc 1 − ϕ < x < 0. Impossible !

Lemme 3 : Soit α ∈ Z[ϕ]*. ∃ε ∈ +1,−1 (∃n ∈ Z) ϕn ≤ ε.α < ϕn+1.

Preuve :

Concluons ! Soit α ∈ Z[ϕ]* et (ε, n) ∈ +1,−1×Z tel que ϕn ≤ ε.α < ϕn+1.

Alors 1 ≤ ε.α.ϕ−n < ϕ. En vertu du lemme 2, on a nécessairement ε.α.ϕ−n

= 1, donc ε.α = ϕn. QED

Il est alors aisé de démontrer que l’application F : (ε, n) ∈ (−1, +1,×)×(Z, +) → ε.ϕn ∈ Z[ϕ]*

un isomorphisme de groupes.

Corollaire : Unités de Z[ 5 ].

Les éléments de Z[ 5 ]* sont les α = ε.ϕ3n = ε.( 2 + 5 )3n où ε ∈ +1,−1 et n ∈ Z.

Le groupe multiplicatif Z[ 5 ]* est isomorphe au groupe additif Z/2Z×Z.

Preuve : Tout revient à savoir quand ϕn est élément de Z[ 5 ].

Or ϕn = Fn−1 + ϕ.Fn . Il appartient à Z[ 5 ] ssi Fn est pair i.e; ssi 3 | n. Cqfd.

Théorème 11 (Lucas, 1876) :

a) Les solutions (a, b) ∈ Z2 de l’équation a

2 + ab − b

2 = ± 1

sont les couples ± ( Fn−1, Fn) , où n décrit Z.

ou encore les couples ± (Fn, Fn+1) et ± (Fn+1, −Fn) , où n décrit N.

b) Les solutions (a, b) ∈ Z2 de l’équation a

2 + ab − b

2 = + 1.

sont les couples ± ( F2n−1, F2n) , où n décrit Z.

ou encore les couples ± ( F2n−1, F2n) où n ≥ 1 et ± (F2n+1, −F2n) où n décrit N.

c) Les solutions (x, y) ∈ Z2 de l’équation x

2 − 5.y

2 = ± 1.

Page 69: Suite de Fibonacci, nombre d'or

69

sont les couples ± ( F3n−1 + 23nF ,

23nF ) , où n décrit Z.

d) Les solutions (x, y) ∈ Z2 de l’équation x

2 − 5.y

2 = + 1.

sont les couples ± ( F6n−1 + 26nF ,

26nF ) , où n décrit Z.

Preuve : a) (a, b) ∈ Z2 est solution de l’équation a

2 + ab − b

2 = ± 1

ssi α = a + b.ϕ ∈ Z[ϕ]* , i.e. ssi α = ± ϕn = ± ( Fn−1 + ϕ.Fn ) où n ∈ Z.

Cela équivaut à (a, b) = ± ( Fn−1, Fn ) où n ∈ Z.

b) (a, b) ∈ Z2 est solution de l’équation a

2 + ab − b

2 = + 1

ssi α = a + b.ϕ ∈ Z[ϕ]* et N(α) = 1, i.e. ssi α = ± ϕn = ± ( Fn−1 + ϕ.Fn ) où n ∈ Z. et N(± ϕn

) = 1.

Or N(± ϕn) = N(ϕ)

n = (−1)

n = 1 ssi n est pair.

Cela équivaut à (a, b) = ± ( F2n−1, F2n ) où n ∈ Z.

c) (x, y) ∈ Z2 est solution de l’équation x

2 − 5.y

2 = ± 1.

ssi α = x + y 5 = x − y + 2y.ϕ est élément de Z[ 5 ]* = Z[ϕ]* ∩ Z[ 5 ].

ssi (x − y , 2y) = ± ( Fn−1, Fn ) où n décrit Z. Or Fn est pair ssi 3 | n. On conclut aussitôt.

d) Même argument qu’en c) avec en plus N(α) = 1, c’est-à-dire 2 | n.

Corollaire : a) Les solutions (x, y) ∈ Z2 de l’équation x

2 − 5.y

2 = ± 4.

sont les couples ± (Ln , Fn) où n décrit Z.

b) Les solutions (x, y) ∈ Z2 de l’équation x

2 − 5.y

2 = + 4.

sont les couples ± (L2n , F2n) où n décrit Z.

Preuve : a) Soit (x, y) ∈ Z2 tel que x

2 − 5.y

2 = ± 4. x et y ont alors même parité.

Posons α = 2

5yx+ =

2yx−

+ yϕ. C’est un élément de Z[ϕ] tel que N(α) = ± 1., donc c’est une

unité de cet anneau. En vertu de ce qui précède, α = ± ϕn = ± ( Fn−1 + ϕ.Fn ) où n ∈ Z.

Par conséquent (2

yx−, y.) = ± ( Fn−1, Fn ) et (x, y) = ± (Ln , Fn)

Pour b), remplacer n par 2n. 11.4. L’anneau Z[ϕϕϕϕ] est euclidien.

Filles des nombres d’or, Fortes des lois du ciel, Sur nous tombe et s’endort Un dieu couleur de miel.

Paul Valéry, Charmes

Théorème 12 : Soient α et β deux éléments de Z[ϕ] avec β non nul. Il existe au moins un couple (θ, ρ) d’éléments de Z[ϕ] tels que α = β.θ + ρ avec | N(ρ) | < | N(β) |.

En d’autres termes, l’anneau Z[ϕ] est euclidien pour le stathme α ∈ Z[ϕ] → | N(α) | ∈ N.

Preuve : Le résultat à prouver s’écrit βα = θ + β

ρ , avec | N(β

ρ) | = |

)()(

βρ

NN | < 1

où l’on a prolongé la fonction N à Q[ 5 ]. Cela découle aussitôt du :

Lemme : ∀ζ ∈ Q[ 5 ] ∃κ ∈ Z[ϕ] | N(ζ − κ) | < 1.

Page 70: Suite de Fibonacci, nombre d'or

70

Preuve : Posons ζ = X + Y 5 et κ = x + yϕ = x + 2y

+ 2y 5 , où (X, Y) ∈ Q×Q et (x, y) ∈ Z×Z.

On a | N(ζ − κ) | ≤ ( X − x + 2y

)2 + 5 ( Y −

2y

)2 .

Pour tout Y ∈ Q on peut choisir un entier y tel que | 2Y – y | ≤ ½ ,

puis un entier x tel que | X − x + 2y

| ≤ ½. Alors | N(ζ − κ) | ≤ 41 +

165 =

165 < 1. CQFD.

Remarque : Le couple (θ, ρ) n’est pas unique, mais cela n’a pas d’importance.

Par suite, tous les résultats du chapitre sur les Anneaux euclidiens s’appliquent à Z[ϕ]. C’est un anneau principal, qui possède des théories du pgcd (algorithme d’Euclide, identité de Bzout), du ppcm, et vérifie un théorème fondamental de l’arithmétique : tout élément non nul se décompose de façon essentiellement unique comme produit de facteurs premiers. Comme le groupe multiplicatif Z[ϕ]* a une infinité d’éléments, tout élément de Z[ϕ] a une infinité d’associés.

La recherche des éléments premiers de Z[ϕ] est facilitée par le :

Lemme 1 : Dans Z[ϕ], β | α ⇒ N(β) | N(α).

Conséquence immédiate de la multiplicativité de N.

Lemme 2 : Soit α ∈ Z[ϕ]. Alors N(α) est premier dans Z ⇒ α est premier dans Z[ϕ].

Preuve : Si N(α) est premier, il est ≠ ±1, donc α n’est pas inversible. De plus, β | α implique N(β) | N(α), donc N(β) = ±1 ou N(β) = ±N(α). Dans le premier cas, β est inversible, dans le second cas, il est associé à α. Cqfd

Exemples d’éléments premiers dans Z[ϕ].

1) 5 = 2ϕ − 1 est premier dans Z[ϕ]. En effet N( 5 ) = −5 est premier.

2) 2 est premier dans Z[ϕ]. En effet, N(2) = 4. Si β | 2, N(β) | 4, donc N(β) = ±1, ±2 ou ±4. Le cas N(β) = ±2 est impossible en vertu de la prop 2 du § 11.1,

3) 2 + ϕ et 2 + ϕ = 3 − ϕ sont premiers, car N(2 + ϕ) = N(2 + ϕ ) = 5 est premier.

4) 11 et 19 sont premiers dans Z, mais ne sont pas premiers dans Z[ϕ], car

11 = 42 – 5 = ( 4 + 5 )( 4 − 5 ), produit de diviseurs stricts de 11

et ces diviseurs stricts, 4 + 5 et 4 − 5 , sont premiers dans Z[ϕ] car de norme 11..

19 = ( 4 + 3ϕ )( 4 + 3ϕ ) = ( 4 + 3ϕ )( 7 − 3ϕ ) produits de diviseurs stricts de 19, et premiers itou.

Ces exemples montrent qu’un nombre p, premier dans Z, n’est pas forcément premier dans Z[ϕ]. Lesquels restent premiers, lesquels ne le sont pas ? C’est l’objet du :

Théorème 13 : classification des nombres premiers de Z. Les nombres premiers p de Z se répartissent en trois catégories :

(I) p = 5 se factorise dans Z[ϕ] : 5 = ( 5 )2 ; on dit qu’il est ramifié.

(II) Si p est premier et tel que p ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ), il reste premier dans Z[ϕ] ; on dit qu’il est inerte.

(III) Si p est premier tel que p ≡ 1 ou 4 ( mod 5), alors il existe π ∈ Z[ϕ] tel que p = N(π) = π.π , où

π et π sont premiers dans Z[ϕ] et non associés ; on dit que p est décomposé.

Preuve : Le cas (I) a déjà été traité.

(II) Si p est premier tel que p ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ) et si β | p, alors N(β) | N(p) = p2, donc

N(β) = ±1, ± p ou ± p2

. Le cas N(β) = ± ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ) est impossible en vertu de la prop 2 du § 11.1.

Par conséquent, N(β) = ±1 ou ± p2, ce qui signifie que β est inversible ou associé à p.

Page 71: Suite de Fibonacci, nombre d'or

71

(III) Soit p premier et tel que p ≡ 1 ou 4 ( mod 5 )

En vertu de la loi de réciprocité quadratique, 5 est un carré dans Fp = Z/pZ.

Cela signifie qu’il existe c ∈ Z tel que c2 ≡ 5 ( mod p ), i.e. p | c

2 – 5 = ( c + 5 )( c − 5 ) .

Si p était premier dans Z[ϕ], il diviserait c + 5 ou c − 5 dans cet anneau.

Donc il existerait α = a + bϕ tel que c ± 5 = p ( a + bϕ ), i.e. c ± (2ϕ − 1) = p ( a + bϕ )

On en déduirait ± 2 = p.b, ce qui est impossible !

En conclusion, p ,n’est pas premier dans Z[ϕ]. Il s’écrit p = α.β, où α et β ne sont pas inversibles.

En passant à la norme, on voit que nécessairement N(α) = N(β) = p.

Mais alors p = αα , ce qui signifie que β = α . Et α est premier en vertu du lemme 2 ci-dessus.

Pour parachever la preuve, il reste à montrer que α et α ne sont pas associés.

Supposons α = ε.α , où α = a + bϕ et ε = ± ( Fn−1 + Fn.ϕ ) est une unité.

Alors p = αα implique α2 = p.ε. On en déduit p | a

2 + b

2 et p | b.(2a + b) dans Z.

− Si p divise b, il divise a, donc il divise α dans Z[ϕ], ce qui est impossible.

− Si p divise 2a + b, posons 2a + b = pq. Alors p divise a2 + b

2 = 2a

2 − 2apq + p

2q

2 ,

donc p divise 2a2. Donc il disive 2a, donc il divise b, puis a. Impossible ! CQFD

Théorème 14 : inventaire des éléments premiers de Z[ϕϕϕϕ]. Les éléments premiers de Z[ϕ] se répartissent en trois catégories, à associés près :

(I) 5 ; (II) les nombres p ∈ Z premiers dans Z et tels que p ≡ 2 ou 3 ( mod 5 ) (III) les éléments π tels que N(π) = ± p, où p est un nombre premier de Z tel que p ≡ 1 ou 4 (mod 5).

Preuve : Nous savons que tous ces éléments sont premiers dans Z[ϕ]. Il reste à montrer que ce sont

les seuls. Si α est un élément premier de Z[ϕ], il divise N(α) = αα qui est un élément de Z. Cet entier relatif se décomposé en facteurs premiers dans Z, puis dans Z[ϕ], du type mentionné dans le théorème 9. En vertu du lemme d’Euclide, α est égal à l’un de ses facteurs premiers. CQFD.

Théorème 15 : Soit n un entier relatif non nul. Pour qu’il soit de la forme

n = a2 + ab – b

2 , où (a, b) ∈ Z×Z,

il faut et il suffit que, pour tout diviseur premier p de n congru à 2 ou 3 ( mod 5 ), l’exposant de p dans la factorisation de n soit pair.

Preuve : La condition est suffisante.

Supposons que n se factorise en n = 5h

121

mp … rmrp2 1

1nq … sn

sq

où p1, …, pr ≡ ± 2 ( mod 5 ) et q1, … , qs ≡ ± 1 ( mod 5 )

Alors 5, 21p ,…, 2rp , q1, … , qs sont éléments de F.

On conclut par stabilité de F par multiplication (§ 11.1).

La condition est nécessaire. Si n = a2 + ab – b

2 , où (a, b) ∈ Z×Z, alors

n = N(α) = αα où α = a + bϕ ∈ Z[ϕ].

On peut conclure en décomposant α en facteurs premiets dans Z[ϕ].

α = 5 h1

1mp … rm

rp 11nπ … sn

sπ , où p1, …, pr ≡ ± 2 ( mod 5 ) et N(πj) = qj ≡ ± 1 ( mod 5 )

Alors α = 5 h1

1mp … rm

rp 1

1n

π …sn

sπ , et on fait le produit.

Corollaire : Soit n un entier relatif non nul. Pour qu’il soit de la forme

n = x2 – 5y

2 , où (x, y) ∈ Z×Z,

Page 72: Suite de Fibonacci, nombre d'or

72

il faut et il suffit que, pour tout diviseur premier p de n congru à 2 ou 3 ( mod 5 ), l’exposant de p dans la factorisation de n soit pair.

Cela découle de l’égalité des ensembles E et F observée dans le § 11.1.

Remarque : Toutefois, Maple sait résoudre l’équation diophantienne x2 – 5y

2 = n, alors qu’il ne sait

pas résoudre l’équation diophantienne a2 + ab – b

2 = n. On peut bien sûr le programmer.

11.5. L’anneau Z[ 5 ] n’est ni euclidien, ni principal, ni factoriel.

Z[ 5 ] est un sous-anneau de Z[ϕ]. On pourrait croire qu’il hérite de ses propriétés, qu’il est euclidien, donc principal, donc factoriel. Il n’en est rien. Autant l’anneau Z[ϕ] est intéressant, autant

le sous-anneau Z[ 5 ] est peu intéressant. Comme le note fort justement wikipedia, cet anneau « est trop petit pour y faire convenablement de l’arithmétique. Comprendre quels étaient les bons ensembles de nombres à prendre en compte est un des difficultés rencontrées par les mathématiciens du 19ème siècle », conduisant Dedekind à la notion d’entiers (d’un corps de nombres) algébriques. Nous nous contentons ici de le constater.

Nous appelons ici élément premier ou irréductible de Z[ 5 ] tout élément non nul et non inversible qui n’est divisible que par les inversibles et les associés.

Proposition 16 : Dans l’anneau Z[ 5 ], tout élément non nul s’écrit comme produit d’éléments premiers.

Preuve : Cela se démontre par récurrence sur le stathme w(α).

Théorème 17 : L’anneau Z[ 5 ] n’est ni euclidien, ni principal, ni même factoriel.

Preuve :

Lemme 1 : Dans Z[ 5 ], β | α ⇒ N(β) | N(α).

Conséquence immédiate de la multiplicativité de N.

Lemme 2 : Soit α ∈ Z[ 5 ]. Alors N(α) est premier dans Z ⇒ α est premier dans Z[ 5 ].

Preuve : Si N(α) est premier, il est ≠ ±1, donc α n’est pas inversible. De plus, β | α implique N(β) | N(α), donc N(β) = ±1 ou N(β) = ±N(α). Dans le premier cas, β est inversible, dans le second cas, il est associé à α. Cqfd

Lemme 3 : 2 et 1 + 5 sont premiers dans Z[ 5 ] et non associés.

Preuve : En effet, N(2) = 4. Si β | 2, N(β) | 4, donc N(β) = ±1, ±2 ou ±4. Le cas N(β) = ±2 est impossible en vertu de la prop 1 du § 11.1,

Même raisonnement pour 1 +5 dont la norme vaut – 4.

Enfin, ils ne sont pas associés car 1 +5 n’est pas multiple de 2.

Concluons !

1) L’anneau Z[ 5 ] n’est pas principal.

Considérons ℑ = α = x + y 5 ; x ≡ y ( mod 2 ) = α = 2a + b + b 5 ; (a, b) ∈ Z×Z .

Je dis que ℑ est un idéal de Z[ 5 ], c’est l’idéal engendré par 2 et 1 +5 , mais il n’est pas

principal, car si l’on avait ℑ = (α), alors α diviserait 2 et 1 + 5 , donc α serait inversible et ℑ =

Z[ 5 ] .

Page 73: Suite de Fibonacci, nombre d'or

73

2) L’anneau Z[ 5 ] ne vérifie pas l’identité de Bezout.

2 et 1 + 5 sont premiers entre eux dans Z[ 5 ]. Or il est facile de montrer qu’il n’existe pas de

couple (α, β) dans Z[ 5 ] tel que 2α + ( 1 + 5 )β = 1.

L’identité de Bezout n’est pas satisfaite Z[ 5 ]..

3) L’anneau Z[ 5 ] n’est pas factoriel.

De plus 2 divise – 4 = ( 1 + 5 )( 1 − 5 ). Si l’anneau Z[ 5 ] était factoriel, en vertu du lemme

d’Euclide, 2 diviserait 1 + 5 ou 1 − 5 . Or il ne divise ni l’un ni l’autre. .

En fait – 4 admet deux factorisations distinctes dans Z[ 5 ] :

– 4 = ( 1 + 5 )( 1 − 5 ) = – 2.2. alors qu’il admet une factorisation unique dans Z[ϕ], à savoir : – 4 = – 2.2.

– 4 = ( 1 + 5 )( 1 − 5 ) est une décompsotion intermédiaire, car 1 + 5 = 2ϕ , 1 − 5 = 2ϕ’.

De même 4 admet deux factorisations distinctes dans Z[ 5 ] : 4 = 2.2 = ( 3 + 5 )( 3 − 5 )

mais dans Z[ϕ], 4 = ( 3 + 5 )( 3 − 5 ) est une décomposition intermédiaire, car

3 + 5 = 2(1 + ϕ), où 1 + ϕ est un inversible.

La situation est compliquée, mais les calculs dans Z[ 5 ] s’éclairent si l’on se place dans un anneau

plus grand et euclidien. Rien à voir avec l’arithmétique de Z[ 5− ] qui pose des problèmes bien plus difficiles (cf l’excellent Que sais-je n° 571 de Jean Itard sur les Nombres premiers, chap 7). 11.6. Maple sait parfaitement tout cela…

Je découvre avec retard que Maple dispose d’un programme de factorisation des entiers des corps

quadratiques Q[ d ] lorsque ces anneaux sont euclidiens.

with(numtheory):with(combinat):alias(phi=(1+sqrt(5) )/2):alias(F=fibonacci) > for n from 1 to 20 do print(n,factorEQ(n,5));od;

,1 1 ,2 ( ) 2 ,3 ( ) 3

,4 ( ) 2 2

,5 ( ) 5 2

,6 ( ) 2 ( ) 3 ,7 ( ) 7

,8 ( ) 2 3

,9 ( ) 3 2

,10 ( ) 2 ( ) 5 2

,11 − ( ) + 3 2 5 ( ) − 3 2 5

,12 ( ) 2 2 ( ) 3 ,13 ( ) 13

,14 ( ) 2 ( ) 7

,15 ( ) 3 ( ) 5 2

,16 ( ) 2 4

,17 ( ) 17

Page 74: Suite de Fibonacci, nombre d'or

74

,18 ( ) 2 ( ) 3 2

,19 − ( ) + 1 2 5 ( ) − 1 2 5

,20 ( ) 2 2 ( ) 5 2

> for n from 1 to 20 do factorEQ(F(n),5);od; 1 1

( ) 2 ( ) 3

( ) 5 2

( ) 2 3

( ) 13 ( ) 3 ( ) 7 ( ) 2 ( ) 17

− ( ) 5 2 ( ) + 3 2 5 ( ) − 3 2 5

− ( ) + 6 5 5 ( ) − 6 5 5

( ) 2 4 ( ) 3 2

( ) 233

− ( ) 13 ( ) + 4 3 5 ( ) − 4 3 5

( ) 2 ( ) 5 2 ( ) + 9 2 5 ( ) − 9 2 5 ( ) 3 ( ) 7 ( ) 47

( ) 1597

− ( ) 2 3 ( ) 17 ( ) + 1 2 5 ( ) − 1 2 5 ( ) 37 ( ) 113

( ) 3 ( ) 5 2 ( ) + 3 2 5 ( ) − 3 2 5 ( ) + 2 3 5 ( ) − 2 3 5 > factorEQ(89619530,5);

( ) 2 ( ) 5 2 ( ) 7 2 ( ) + 3 2 5 ( ) − 3 2 5 ( ) 13 ( ) + 1 16 5 ( ) − 1 16 5 11.7. Groupes des formes quadratiques entières q(x, y) = x

2 + xy – y

2 et q’(x, y) = x

2 – 5y

2 .

Considérons la forme quadratique entière :

q(x, y) = x2 + xy – y

2 = [x y]

−12/12/11 [ y

x ] . = [x y] .H.[ yx ] .

et cherchons les transformations linéaires [ yx ] →

dcba [ y

x ] à coefficients dans Z qui conservent

cette forme quadratique. Si l’on note X = [ yx ] , H =

−12/12/11

et M =

dcba

,

cela revient à chercher les matrices M ∈ M2(Z) telles que ∀X ∈ Z2

tX.H.X =

tX.

tM.H.M.X

ou encore telles que tM.H.M = H.

Passant au déterminant, on voit aussitôt que det M = ± 1. Ces matrices sont éléments de Gl2(Z).

Proposition 18 : Les matrices M ∈ M2(Z) telles que tM.H.M = H forment un sous-groupe G

+ de

Gl2(Z). G+ est un sous-groupe du groupe G des matrices M ∈ Gl2(Z) telles que

tM.H.M = ± H.

Exemple : Les matrices S =

0110

et A =

1110 sont éléments de G.

La matrice S engendre un groupe cyclique à 4 éléments, isomorphe à Z/4Z.

Page 75: Suite de Fibonacci, nombre d'or

75

La matrice A engendre le groupe monogène des matrices An =

+

1

1

nn

nn

FFFF

, où n décrit Z.

On notera que S et A vérifient toutes deux tM.H.M = − H, mais det S = 1, det A = – 1 .

Commençons par étudier le sous-groupe Γ de Gl2(Z) engendré par ces deux matrices.

Théorème 19 : Le sous-groupe Γ de Gl2(Z) engendré par les matrices S et A est formé :

• des matrices ± An = ±

+

1

1

nn

nn

FFFF

, où n décrit Z.

• des matrices ± S.An = ±

0110

+

1

1

nn

nn

FFFF

= ±

−−−

+

nn

nn

FFFF

1

1 , où n décrit Z.

Preuve : Γ contient − I = S2 , donc Γ’ = ± A

n ; n ∈ Z ∪ ± S.A

n ; n ∈ Z .

Comme Γ’ contient S et A, il suffit de montrer que c’est un sous-groupe.

Or S.A =

−−

1011 , donc (S.A)

2 = I. On en déduit successivement, en vertu de S

−1 = − S, que :

S.A.S.A = I , S.A.S = A−1

, S.A.S−1

= −A−1

, (S.A.S−1

)n = S.A

n.S

−1 = (−1)

n.A

−n ,

Et au final : S.An = (−1)

n.A

−n.S , S.A

n.S = (−1)

n+1.A

−n .

Cela revient à dire que (∀n) ( S.An )

2 = (−1)

n+1.I , ce qui découle aussi de la formule de Cassini.

Du coup ( ± S.An )

−1 = ± A

−n.S

−1 = − ( ± A

−n.S ) = − ( ± S.A

−n ).

Γ’ est stable par M → M−1

. Reste à montrer la stabilité par produit ;

Am

.An = A

m+n ; S.A

m.A

n = S.A

m+n ;

S.Am

.S.An = (−1)

n.S.A

m.A

−n.S = (−1)

n.S.A

m−n.S = (−1)

m+1.A

n−m.

D’où Am

.S.An = (−1)

m.S.A

n−m. Cqfd.

Corollaire 1 : Le sous-groupe de Γ formé des matrices de déterminant 1 est formé :.

• des matrices ± A2n

= ±

+

122

212

nn

nn

FFFF

, où n décrit Z.

• des matrices ± S.A2n

= ±

−−−

+

nn

nn

FFFF

212

122 , où n décrit Z.

Corollaire 2 : Le sous-groupe Γ+ de Γ formé des matrices conservant q est formé :

• des matrices ± A2n

= ±

+

122

212

nn

nn

FFFF

, où n décrit Z.

• des matrices ± S.A2n+1

= ±

−−+

++

122

2212

nn

nn

FFFF

, où n décrit Z.

Théorème 20 : Les groupes G et Γ sont égaux ; les groupes G+ et Γ+

sont égaux.

Preuve : Il suffit de démontrer que G+ = Γ+

.

Soit M =

dcba

∈ G+

⇔ [ a2 + ac – c

2 = 1 , b

2 + bd – d

2 = − 1 , 2ab + bc + ad – 2 cd = 1 ]

Notons α = a + cϕ , β = b + dϕ .

a2 + ac – c

2 = 1 ⇔ α = a + cϕ = ε.ϕ2m

= ε.[ F2m−1 + F2m.ϕ ] ( ε = ±1 , m ∈ Z ).

b2 + bd – d

2 = −1 ⇔ β = b + dϕ = ε’.ϕ2n+1

= ε.[ F2n + F2n+1.ϕ ] ( ε’ = ±1 , n ∈ Z ).

Page 76: Suite de Fibonacci, nombre d'or

76

De la condition (*) 2ab + bc + ad – 2 cd = 1 va découler une relation supplémentaire.

Supposons ad – bc = 1.

Alors (*) s’écrit ab + ad – cd = 1, ou encore, en y réfléchissant, α. β = 1 – ϕ = ϕ .

Reportons ! Il vient : ε.ϕ2m.ε’. ϕ 2n+1

= ϕ , c’est-à-dire ε.ε’.ϕ2m.ϕ 2n

= 1,

Ou encore ε.ε’.ϕ2m−2n = 1, donc ε = ε’ et m = n. En conclusion, M = ± A

2n = ±

+

122

212

nn

nn

FFFF

.

Supposons ad – bc = −−−−1.

On pourrait faire un calcul analogue en considérant cette fois α .β, mais il est plus simple de noter

que si det M = − 1 et M conserve q, alors det(S−1

.M.A−1

) = 1 et S−1

.M.A−1

conserve q.

Par conséquent S−1

.M.A−1

= ± A2n

et M = ± S.A2n+1

. Cqfd.

Puisque nous en sommes là, intéressons-nous d’abord à la forme quadratique entière :

q(x, y) = x2 – 5 y

2 = [x y]

−5001 [ y

x ] .

et cherchons les transformations linéaires [ yx ] →

dcba [ y

x ] à coefficients dans Z qui conservent

cette forme quadratique. Si l’on note X = [ yx ] , J =

−5001

et M =

dcba

,

cela revient à chercher les matrices M ∈ M2(Z) telles que ∀X ∈ Z2

tX.J.X =

tX.

tM.J.M.X

ou encore telles que tM.J.M = J.

Passant au déterminant, on voit aussitôt que det M = ± 1. Ces matrices sont éléments de Gl2(Z).

Proposition 21 : Les matrices M ∈ M2(Z) telles que tM.J.M = J forment un sous-groupe H

+ de

Gl2(Z). H+ est un sous-groupe du groupe G des matrices M ∈ M2(Z) telles que

tM.J.M = ± J.

Cherchons ces matrices par un calcul direct :

M =

dcba

∈ G ⇔ [ a2 – 5c

2 = 1 , b

2 – 5d

2 = − 5 , ab – 5 cd = 0 ]

Comme il est impossible de 5 divise a, 5 disive b. Posons b = 5b’.

Alors a2 – 5c

2 = 1 , d

2 – 5b’

2 = 1 , ab’– cd = 0.

Or a2 – 5c

2 = 1 ⇔ a + c 5 = ε ( 2 + 5 )

2m , ε = ± 1, m ∈ Z

d2 – 5b’

2 = 1 ⇔ d + b’ 5 = ε’ ( 2 + 5 )

2n , ε’ = ± 1, n ∈ Z

Et ab’– cd = 0 ⇔ ( a + c 5 )( d – b’ 5 ) ∈ Z. ⇔ m = n, après un rapide examen.

En conclusion a + c 5 = ε ( 2 + 5 )2m

= ε ϕ6m = ε ( F6m−1 + F6m.ϕ ) ε = ± 1, m ∈ Z

d + b’ 5 = ε’ ( 2 + 5 )2m

= ε’ ( F6m−1 + F6m.ϕ ) ε’ = ± 1, m ∈ Z .

Théorème 22 : H+ =

'00ε

ε

+

+

22

25

26

166

6616

mm

m

mmm

FFF

FFF ; ε = ±1, ε’ = ± 1, m ∈ Z .

Page 77: Suite de Fibonacci, nombre d'or

77

Et l’on a H =

'00ε

ε

+

+

22

25

23

133

3313

mm

m

mmm

FFF

FFF ; ε = ±1, ε’ = ± 1, m ∈ Z .

Exercice : Démontrer que

+

+

22

25

23

133

3313

mm

m

mmm

FFF

FFF =

2152 m

et

+

+

22

25

26

166

6616

mm

m

mmm

FFF

FFF =

94209 m

Conjectures : Au vu de ces résultats, je pense que les groupes G et H ne sont pas isomorphes. Il serait intéressant de disposer de présentations de chacun d’eux. Je pense que G admet pour présentations

< s, a ; s4 = e , (sa)

2 = e , a.s

2 = s

2.a >

ou encore < s, t ; s4 = e , t

2 = e , s

2.t.s

2 = t >

et je crois que H a une présentation différente, mais je laisse ces conjectures à l’examen du lecteur. 11.8. Le grand théorème de Fermat pour n = 5.

A Yannick Nézet-Seguin

Le 11 juillet 1825, Peter Gustav Lejeune Dirichlet 12 (1805-1859), âgé de vingt ans, fit une conférence devant l’Académie des sciences de Paris, au cours de laquelle il démontra le grand théorème de Fermat pour n = 5. Peu après, il compléta sa preuve et Adrien Marie Legendre (1752-1833) l’acheva: On savait le théorème vrai pour n = 4 et Euler l’avait démontré pour n = 3. Les travaux de Dirichlet ont donné un nouvel essor à la théorie algébrique des nombres.

Théorème (Dirichlet-Legendre) : L’équation de Fermat x5 + y

5 = z

5 n’a pas de solution en entiers

x, y, z non nuls.

Pour cela, ils ont étudié l’anneau des entiers du corps cyclotomique Q[ 5/2 πie ], entiers que l’on peut à

bon droit nommer « entiers de Dirichlet ». Cet anneau contient Z[ϕ], et est lui-aussi euclidien. On trouvera une étude du corps Q[ 5/2 πie ] au § 14, et une preuve de ce résultat dans D. Duverney

(Théorie des nombres, § 10.6. p. 133-134). 11.9. Les nombres de Fibonacci forment un ensemble diophantien.

Le concept d’ensemble diophantien a été introduit par la mathématicienne américaine Julia Bowman Robinson (1919-1985) en vue de résoudre le 10ème problème de Hilbert : existe-t-il un programme d’ordinateur applicable à toute équation diophantienne et qui, au bout d’un nombre fini d’opé-rations, conclut si l’équation est résoluble ou non ? La réponse est négative, comme l’a montré en 1970 le soviétique Youri Matijasevitch (né en 1947).

Définition 3 : Un ensemble S ⊂ N est dit diophantien s’il existe un polynôme P(y, x1, …, xn) à n+1 variables à coefficients dans Z tel que :

(∀a ∈ N) a ∈ S ⇔ l’équation P(a, x1, …, xn) = 0 a au moins une solution (x1, …, xn)∈Nn .

12 L’Europe ne date pas d’aujourd’hui, et j’ai toujours plaisir à rappeler que Gustav Lejeune Dirichlet, qui succéda pendant trop peu de temps à Gauss à Göttingen, était le beau-frère du compositeur Felix Mendelssohn (1809-1847), ayant épousé sa sœur Rebecca Mendelssohn (1811-1858), et le grand-oncle du mathématicien Kurt Hensel (1861-1941), l’inventeur des nombres p-adiques, Fanny Mendelsshon (1805-1847) ayant épousé le peintre et graveur Wilhelm Hensel (1794-1861). En résumé, il est conseillé de lire ce paragraphe en écoutant la Symphonie écossaise de Mendelssohn, soit dans l’interprétation romantique de Christoph von Dohnanyi, soit dans l’interprération juvénile de Yannick Nézet-Seguin.

Page 78: Suite de Fibonacci, nombre d'or

78

P(a, x1, …, xn) = 0 est appelée une définition diophantienne de S.

Proposition 1 : Soit Q(y, x1, …, xn) un polynôme à n + 1 variables à coefficients dans Z.

L’ensemble S des valeurs ≥ 0 prises par le polynôme Q lorsque y, x1, …, xn décrivent N est diophantien.

Preuve : Soit P(a, y, x1, …, xn) = a – Q(y, x1, …, xn).

Alors a ∈ S ⇔ ∃(y, x1, …, xn) ∈ Nn+1

P(a, y, x1, …, xn) = 0

Proposition 2 (H. Putnam, 1960) : Soit S un ensemble diophantien. Il existe un polynôme Q(y, x1,

…, xn) à coefficients dans Z tel que S est exactement l’ensemble des valeurs ≥ 0 prises par le

polynôme Q lorsque y, x1, …, xn décrivent N : S = Q(Nn+1

) ∩ N

Preuve : Soit P = 0 une définition diophantienne de S.

Considérons le polynôme Q(y, x1, …, xn) = ( y + 1 ).[ 1 − P(y, x1, …, xn)2

] − 1.

Soit a ∈ N. S’il existe des entiers naturels y, x1, …, xn tels que Q(y, x1, …, xn) = a,

Alors ( y + 1 ).[ 1 − P(y, x1, …, xn)2

] − 1 = a , donc y + 1 divise a + 1 et a + 1 ≤ y + 1.

Donc y + 1 = a + 1 et y = a. Du coup, P(y, x1, …, xn) = 0.

Réciproquement, s’il existe des entiers naturels x1, …, xn tels que P(a, x1, …, xn) = 0, alors,

Q(a, x1, …, xn) = ( a + 1 ).[ 1 − P(a, x1, …, xn)2

] − 1 = a .

Définition : Un tel polynôme Q est appelé une représentation diophantienne de S.

Soit alors FFFF = Fn ; n ∈ N = 0, 1, 2, 3, 5, 8, 13, … l’ensemble des nombres de Fibonacci.

Proposition 3 : L’ensemble FFFF est diophantien, et admet pour représentation diophantienne le

polynôme de degré 9 : Q(y, x) = ( y + 1 ).[ 1 − ((x2 + xy – y

2)2 − 1)

2 ] − 1.

Preuve : Considérons le polynôme P(a, x) = ( a2 + ax – x

2 )2 − 1.

Soit a un naturel. Dire qu’il existe x ∈ N tel que P(a, x) = 0

équivaut à dire qu’il existe x ∈ N tel que a2 + ax – x

2 = ± 1.

ou encore que (a, x) = (Fn−1, Fn) pour n ≥ 1 ou (a, x) = (1, 0). ou encore que a appartient à l’ensemble FFFF . L’ensemble FFFF est donc bien diophantien, et il découle de la prop 2 que Q en est une représentation diophantienne.

Théorème (James–P. Jones, 1975)13 : Le polynôme de degré 5 A(x, y) = y.[ 2 − ( x2 + xy – y

2 )2 ]

vérifie A(N×N) ∩ N = FFFF , et même A(Z×N) ∩ N = FFFF.

Il est une autre représentation diophantienne de l’ensemble FFFF. Feuille de calculs Maple :

> Q:=(Y+1)*(1-((Y^2+Y*X-X^2)^2-1)^2)-1;

:= Q − ( ) + Y 1 ( ) − 1 ( ) − ( ) + − Y2 Y X X22

12

1

> [degree(Q),degree(Q,X),degree(Q,Y)]; [ ], ,9 8 9

13 James P. Jones est actuellement (2020) professeur émérite à l’Université de Calgary, spécialiste de : logique mathématique, théorie de la récursion, indécidabilité, équations diophantiennes, Dixième problème de Hilbert, et théorie des nombres.

Page 79: Suite de Fibonacci, nombre d'or

79

> expand(Q);

1 Y8 4 Y3 X 2 Y2 X2 4 Y X3 4 Y7 X 2 Y6 X2 8 Y5 X3 5 Y4 X4 8 Y3 X5− − + − − − − + + − 2 Y2 X6 4 Y X7 4 Y4 X 2 Y3 X2 4 Y2 X3 4 Y8 X 2 Y7 X2 8 Y6 X3 5 Y5 X4 − + + − − − − + + 8 Y4 X5 2 Y3 X6 4 Y2 X7 2 Y X4 Y X8 2 Y4 2 X4 X8 2 Y5 Y9 − − + + − + + − + −

> collect(Q,X);

( )− − Y 1 X8 4 ( ) + Y 1 Y X7 2 ( ) + Y 1 Y2 X6 8 ( ) + Y 1 Y3 X5 ( ) + Y 1 ( ) + 5 Y4 2 X4 + − − + ( ) + Y 1 ( ) + 4 ( ) − Y4 1 Y 4 Y5 X3 ( ) + Y 1 ( ) − 2 ( ) − Y4 1 Y2 4 Y6 X2 + +

4 ( ) + Y 1 ( ) − Y4 1 Y3 X ( ) + Y 1 ( ) − 1 ( ) − Y4 12

1 − + −

> collect(Q,Y);

Y9 ( )− − 1 4 X Y8 ( )− − 4 X 2 X2 Y7 ( )− + 2 X2 8 X3 Y6 ( ) + + 8 X3 5 X4 2 Y5− + + + + ( ) + − − 5 X4 2 4 ( ) − X4 1 X 4 X5 Y4 + ( )− − + − 4 ( ) − X4 1 X 4 X5 2 ( ) − X4 1 X2 4 X6 Y3 +

( ) − + 2 ( ) − X4 1 X2 4 X6 4 ( ) − X4 1 X3 Y2 ( ) + − 4 ( ) − X4 1 X3 1 ( ) − X4 12

Y + +

( ) − X4 12

> fibo:=proc(n) > local s,a,x,y;s:=; > for x from 0 to n do > for y from 0 to n do > a:=subs([X=x,Y=y],Q);if a>=0 then s:=s union a;fi ;od;od;print(s);end; > fibo(10);fibo(50);fibo(100);fibo(150);

, , , ,0 1 2 3 5 , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 13 21

, , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 13 21 34 55 , , , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89

> P:=Y*(2-(X^2+X*Y-Y^2)^2);

:= P Y( ) − 2 ( ) + − X2 X Y Y22

> [degree(P),degree(P,x),degree(P,Y)];

[ ], ,5 0 5 > expand(P);

− − + + − 2 Y Y X4 2 X3 Y2 X2 Y3 2 X Y4 Y5

> collect(P,X);

− − + + + Y X4 2 X3 Y2 X2 Y3 2 X Y4 Y ( ) − 2 Y4

> collect(P,Y);

− + + − + Y5 2 Y4 X Y3 X2 2 Y2 X3 ( ) − 2 X4 Y > fibo2:=proc(n) > local s,a,x,y; > s:=; > for x from 0 to n do > for y from 0 to n do > a:=subs([X=x,Y=y],P);if a>=0 then s:=s union a;fi ;od;od;print(s);end; > fibo2(10);fibo2(50);fibo2(100);fibo2(150);

, , , , ,0 1 2 3 5 8 , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 13 21 34

, , , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 , , , , , , , , , , ,0 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144

Page 80: Suite de Fibonacci, nombre d'or

80

12. Numérotation fibonaccienne de Zeckendorf. Nous allons aborder ici les propriétés additives 14 des nombres de Fibonacci :

0 , 1 = 1 , 2 , 3 , 5 , 8 , 13 , 21 , 34 , 55 , 89 , 144 , 233 , 377 , .. ;

Tout entier naturel est somme de nombres de Fibonacci, mais est-il somme de nombres de Fibonacci distincts deux à deux ? Parmi ces sommes, y en a-t-il une plus intéressante que les autres ? En creusant ces questions, le médecin militaire philomathe belge Edouard Zeckendorf est tombé en 1952 sur un très intéressant théorème. 12.1. Réprésentations additives, exemples et premiers résultats.

Définitions 1 : On dit que m ∈ N admet une représentation fibonaccienne, ou F-représentation,

si l’on peut écrire : m = ∑+∞

=+

02.

iii Fa , où (∀i) ai ∈ 0, 1.

Si k = max i ; ai = 1 , on note m = Fib ak ak−1 … a0 une telle représentation.

On appelle représentation de Zeckendorf, ou Z-représentation de m une F-représentation telle

que : (∀i) (ai, ai+1) ≠ (1, 1), i.e. ai.ai+1 = 0.

On note m = Zeck ak ak−1 … a0 ou ak ak−1 … a0 = Zeck(m) une telle Z-représentation.

On convient que 0 a pour F-représentation 0.

Exemple 1 : 30 = 21 + 5 + 3 + 1 = Fib 1001101. En revanche, 1001101 n’est pas une Z-représentation de 30, car 5 et 3 sont deux nombres de Fibonacci consécutifs ; mais 1010001 en est une, car 30 = 21 + 8 + 1.

Exemple 2 : représentations fibonacciennes de 37. Il s’agit d’exprimer 37 comme sommes de nombres à l’aîde de 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34

37 = 34 + 3 = Fib 10000100

37 = 34 + 2 + 1 = Fib 10000011

37 = 21 + 13 + 3 = Fib 1100100

37 = 21 + 13 + 2 + 1 = Fib 1100011

37 = 21 + 8 + 5 + 3 = Fib 1011100

37 = 21 + 8 + 5 + 2 + 1 = Fib 1011011

Aucune représentation ne peut commencer par 13 ou un nombre inférieur, car 1 + 2 + 3 + 5 + 8 = 19 et 19 + 13 < 37

37 a donc 6 F-représentations, mais une seule Z-réprésentation, la première : 37 = Zeck 10000100

Exemple 3 : représentations fibonacciennes de 100. Exprimons 100 comme sommes de nombres à l’aîde de 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89

100 = 89 + 8 + 3 = Fib 1000010100

100 = 89 + 8 + 2 + 1 = Fib 1000010011

100 = 89 + 5 + 3 + 2 + 1 = Fib 1000001111

100 = 55 + 34 + 8 + 3 = Fib 110010100

100 = 55 + 34 + 8 + 2 + 1 = Fib 110010011

14 A certains égards, ce § est plus élémentaire que les précédents, et peut être lu indépendamment. Il renvoie cependant aux § 4.7.

Page 81: Suite de Fibonacci, nombre d'or

81

100 = 55 + 34 + 5 + 3 + 2 + 1 = Fib 110001111

100 = 55 + 21 + 13 + 8 + 3 = Fib 101110100

100 = 55 + 21 + 13 + 8 + 2 + 1 = Fib 101110011

100 = 55 + 21 + 13 + 5 + 3 + 2 + 1 = Fib 101101111

Aucune réprésentation ne commence par 34 ou un nombre inférieur, car 1 + 2 + 3 + 5 + 8 + 13 + 21 = 19 et 19 + 13 < 37.

100 a 9 F-représentations, mais une seule Z-réprésentation, la première : 100 = Zeck 1000010100

Proposition 1 : Tout entier naturel m admet au moins une F-réprésentation.

Preuve : Démontrons ce résultat par récurrence forte sur m.

Cela est vrai pour m = 0, 1 = F2, 2 = F3, 3 = F4. Supposons le théorème acquis pour tout k < m, avec m ≥ 2

La suite (1 = F2, F3, F4, F5, …) étant strictement croissante, il existe un entier k ≥ 0, d’ailleurs

unique, tel que Fk+2 ≤ m < Fk+3. Alors 0 ≤ m − Fk+2 < Fk+3 − Fk+2 = Fk+1 < m.

Par hypothèse de récurrence, m’ = m − Fk+2 admet une F-représentation :

m’ = ∑+∞

=+

02.

iii Fa , où (∀i) ai ∈ 0, 1.

Nécessairement, ai = 0 pour i ≥ k. Donc m = Fk+2 + ∑−

=+

1

02.

k

iii Fa . Cqfd.

Remarque : à la vérité, si m = ∑=

+

k

iii Fa

02. , avec ak = 1, alors on a seulement Fk+2 ≤ m < Fk+4.

12.2. Le théorème de Zeckendorf.

Lemme 1 : σn ≡ [ ]∑

=+−

2/

022

n

kknF = Fn+3 − 1 et Sn ≡ ∑

=+

n

kkF

02 = Fn+4 − 2 .

Preuve : La première identité se montre par télescopage. Notons n = 2q + r , r = 0 ou 1.

σn ≡ Fr+2 + Fr+4 + … + Fn + Fn+2

= ( Fr+3 − Fr+1 ) + ( Fr+5 − Fr+3 ) + … + ( Fn+1 − Fn−1 ) + ( Fn+3 − Fn+1 ) = Fn+3 − Fr+1 .

Or Fr+1 = F1 ou F2 = 1. Le deuxième somme (déjà rencontrée au § 1) aussi, car :

Sn ≡ F2 + F3 + … + Fn+1 + Fn+2 = ( F4 − F3 ) + ( F5 − F4 ) + … + ( Fn+4 − Fn+3 ) = Fn+4 − F3 .

Théorème 2 (Zeckendorf) : Tout entier m admet une unique représentation de Zeckendorf :

m = ∑+∞

=+

01.

iii Fa , où (∀i) ai ∈ 0, 1 et (ai, ai+1) ≠ (1, 1), i.e. ai.ai+1 = 0.

Nous allons démontrer ce résultat par analyse et par synthèse.

a) Analyse. Soit m = ak ak−1 … a0 une Z-représentation de m ( ak = 1 ).

Démontrons que Fk+2 ≤ m < Fk+3 par récurrence forte sur k.

Si k = 0, m = a0 = Zeck 1 = F2 . Si k = 1, m = a1 a0 = Zeck 10 = F3.

Supposons le théorème vrai pour pour l < k.

Soit alors m = ak ak−1 … a0 = 10 ak−2 … a0 une Z-représentation de m ( ak = 1 ).

On a Fk+2 ≤ m et m − Fk+2 = ∑−

=+

1

02.

k

iii Fa .

Page 82: Suite de Fibonacci, nombre d'or

82

Si tous les ai sont nuls, alors m − Fk+2 = 0 et m = Fk+2 .

Sinon, soit l = max i ; i < k et ai = 1 . Alors ∑−

=+

1

02.

k

iii Fa = ∑

=+

l

iii Fa

02. ∈ [Fl+2 , Fl+3[

par hypothèse de récurrence. Donc m − Fk+2 < Fl+3 ≤ Fk+1 et m < Fk+2 + Fk+1 = Fk+3 . CQFD.

Lemme 2 : Si m = ∑=

+

k

iii Fa

02. = Zeck ak ak−1 … a0 ( ak = 1 ), alors Fk+2 ≤ m < Fk+3 .

b) Notons S l’ensemble des suites a = (ai) à éléments dans 0, 1, à support fini, et ne contenant pas deux 1 consécutifs. Ordonnons S pour l’ordre lexicographique (inverse) défini par :

a = (ai) < b = (bi) ⇔ ∃p bp = 1 , ap = 0 , ∀i > p bi = ai.

Lemme 3 : L’application F : a = (ai) ∈ S → m = ∑+∞

=+

02.

iii Fa ∈ N

est strictement croissante, et injective.

Preuve : Supposons a = (ai) < b = (bi). Soit p tel que bp = 1 , ap = 0 et ∀i > p bi = a i.

Après simplification, F(b) – F(a) = ∑=

+

p

iii Fb

02. − ∑

=+

1

02.

p

iii Fa > 0,

car, en vertu de la prop 1, ∑−

=+

1

02.

p

iii Fa < Fp+2 ≤ ∑

=+

p

iii Fb

02. .

L’injectivité de F découle de ce que l’ordre lexicographique sur S est total. Il en résulte que chaque entier m admet au plus une Z-réprésentation.

c) Démontrons que tout entier m admet une unique Z-représentation.

1ère méthode. Nous allons déduire l’existence de l’unicité. Notons Sk l’ensemble des suites a = (ai) à éléments dans 0, 1, à support fini, ne contenant pas

deux 1 consécutifs, et telles que ak = 1 et ∀i > k ai = 0.

L’application induite F : a = (ai) ∈ Sk → m = ∑=

+

k

iii Fa

02. ∈ [Fk+2 , Fk+3[ est une injection strictement

croissante. Or nous savons (§ 4.6, cor. 2 de la prop. 6) que card Sk = Fk+1 = Fk+3 – Fk+2.

Il en résulte que F induit une bijection de Sk sur [Fk+2, Fk+3[, donc, par recollement, F est une bijection de S sur N.

2ème méthode : Par récurrence forte.

Pour m = 0 ou 1, pas de problème. Soient m ≥ 2, et k l’unique entier tel que Fk+2 ≤ m < Fk+3 .

0 ≤ m − Fk+2 < Fk+3 − Fk+2 = Fk+1. Par hypothèse de récurrence, on peut écrire

m − Fk+2 = ∑−

=+

2

02.

k

iii Fa , où il n’y a pas deux ai consécurifs égaux à 1.

12.3. Exemples et commentaires.

Exemples 1 : Z-représentations de 272 et 1953. 15 Ecrivons les nombres de Fibonacci consécutifs 1 2 3 5 8 13 21 34 55 89 144 233 377 610 987 1597 2584

233 ≤ 272 < 377. Donc 272 = 233 + 39.

34 ≤ 39 < 55. Donc 39 = 34 + 5.

15 Cette année-là fut un grand cru, et ce n’est pas Khrouchtchev qui me contredira.

Page 83: Suite de Fibonacci, nombre d'or

83

Donc 272 = 233 + 34 + 5 = F13 + F9 + F5 = Zeck 100010001000.

1597 ≤ 1953 < 2584. Donc 1953 = 1597 + 356.

233 ≤ 356 < 377. Donc 356 = 233 + 123.

89 ≤ 123 < 144. Donc 123 = 89 + 34.

Donc 1953 = 1597 + 233 + 89 + 34 = F17 + F13 + F11 + F9 = Zeck 1000101010000000.

Exemples 2 : Z-représentations de σσσσn et de Sn .

La Z-représentation de σn ≡ [ ]∑

=+−

2/

022

n

kknF = Fn+3 − 1 est elle-même. σn = Zeck 101010…

Elle contient n+1 chiffres valant alternativement 0 et 1.

La Z-représentation de Sn ≡ ∑=

+

n

kkF

02 = Fn+4 − 2 = σn+1 − 1 = Zeck 1010... – 1 est moins simple.

Si n est impair, σn+1 se terminé par 1, donc Sn ≡ Zeck 1010... 100 ( n + 2 chiffres ) .

Si n est pair, σn+1 se terminé par 0, mais 10 – 1 = 2 – 1 = 1 = 01, donc

Sn = Zeck 1010... 101001 ( n + 2 chiffres ) .

Exemples 3 : Z-représentations des premiers entiers. La suite des Z-représentations des entiers est répertoriée A014417 dans l’OEIS. 0 1 10 100 101 1000 1001 1010 10000 10001 10010 10100 10101

m Somme de Fibonacci non consécutifs Z-représentation 0 ∅ 0 1 F2 1

2 F3 10

3 F4 100

4 F4 + F2 101

5 F5 1000

6 F5 + F2 1001

7 F5 + F3 1010

8 F6 10000

9 F6 + F2 10001

10 F6 + F3 10010

11 F6 + F4 10100

12 F6 + F4 + F2 10101

13 F7 100000

14 F7 + F2 100001

15 F7 + F3 100010

16 F7 + F4 100100

17 F7 + F4 + F2 100101

18 F7 + F5 101000

19 F7 + F5 + F2 101001

20 F7 + F5 + F3 101010

21 F8 1000000

22 F8 + F2 1000001

Page 84: Suite de Fibonacci, nombre d'or

84

Autre présentation des choses : Ecrivons la suite des entiers naturels en base 10, suivis de leurs développements binaires : 0 , 1 , 2 , 3 , 4 , 5 , 6 , 7 , 8 , 9 , 10 , 11 , 12 , 13 , 14 , 15 , 16 , … 0, 1, 10, 11, 100, 101, 110, 111, 1000, 1001, 1010, 1011, 1100, 1101, 1110, 1111, 10000, … Dans la première ligne, ne gardons que les nombres « fibbinaires », c’est-à-dire dont le développement binaire ne contient pas deux 1 consécutifs : 0 1 2 4 5 8 9 10 16 17 18 20 21 0 , 1 , 10 , 100 , 101 , 1000 , 1001 , 1010 , 10000 , 10001 , 10010 , 10100 , 10101 , … La suite de ces entiers est répertoriée A003714. A chacun des entiers que nous venons d’écrire associons leurs développements fibonacciens :

0 = F0 , 1 = F2 , 10 = F3 , 100 = F4 , 101 = F4 + F2 , 1000 = F5 , 1001 = F5 + F2 , 1010 = F5 + F3 , etc.

dans lesquels on a supprimé F1, qui fait double emploi avec F2.

On constate que l’on obtient tous les entiers naturels, rangés dans l’ordre croissant. 12.5. Dégré, valuation, sexe ( fibonaccien ! ) d’un entier. Eurêka ! (Archimède)

Définition : Si m = Zeck ak ak−1 … a0 ou ak ak−1 … a0 = Zeck(m) (ak = 1) est la Z-représentation de m > 0, nous appellerons :

• degré de m deg(m) = max i ; ai = 1,

• valuation de m val(m) = min i ; ai = 1,

• sexe (fibonaccien) de m S(m) = a0 ∈ 0, 1

Cette dernière dénomination n’a rien de fantaisiste ; elle s’éclairera dans la suite. Naturellement S(m) = 1 ⇔ val(m) = 0.

Exemples :

6 = Zeck 1001 deg(6) = 3, val(6) = 0, S(6) = 1 ( eh oui, 6 est masculin ! )

19 = Zeck 101001 deg(19) = 5, val(19) = 0, S(19) = 1

20 = Zeck 101010 deg(20) = 5, val(20) = 1, S(20) = 1

Fk+2 = Zeck 100 … 0 deg(Fk+2) = val(Fk+2) = k, S(Fk+2) = 1 si k = 0, 0 sinon.

Fk+3 − 1 = Zeck 101010… deg(Fk+3 − 1) = k, val(Fk+3 − 1) = 1 si k est impair, 0 si k est pair

S(Fk+3 − 1) = 0 si k est impair, 1 si k est pair.

Proposition 1 : deg(m) = k ⇔ m ∈ [Fk+2, Fk+3[ .

Proposition 2 : Si m = Zeck ak ak−1 … a2 0 1, alors m − 1 = Zeck ak ak−1 … a2 0 0.

Si m = Zeck ak ak−1 … 0 ah = 1 0 0 0 … 0, on a

m − 1 = Zeck ak ak−1 … 0 0 ah−1 = 1 1 0 1 0 1 0… .

Proposition 3 : La fonction S est caractérisée par les conditions suivantes : i) S(0) = 0, S(1) = 1.

ii) ∀k ∈ N ∀m ∈ [Fk+2, Fk+3[ S(m) = S(m − Fk+2).

Autrement dit ∀m ∈ N S(m) = S(m − Fk+2), où k = deg(m).

Preuve : au fond, cela revient à dire que m = Zeck ak ak−1 … a0 et m − Fk+2 = Zeck ak−1 … a0

ont même chiffre des unités, donc même sexe.

Proposition 4 : S(m − 1) = 0 si val(m) est paire, 1 si val(m) est impaire.

Page 85: Suite de Fibonacci, nombre d'or

85

Cela découle de la proposition 2. 12.6. Un résultat statistique.

Cet exercice évalue la longueur moyenne et le nombre moyen de 1 dans une Z-réprésentation.

Exercice : Soient z(m) le nombre de chiffres de la Z-représentation de m, c(m) le nombre de 1 qu’elle contient, et d(m) le nombre de chiffres du développement décimal de m.

a) Donner un équivalent simple de z(m) ; en déduire la limite de la suite ()()(

mdmz

).

b) Calculer ∑+< 2

)(nFm

mc , et en déduire une suite semblable à ∑<Nm

mc )( quand N → +∞.

Solution : a) Equivalent de z(m), longueur de la Z-représentation de m..

z(m) = k + 1 ⇔ Fk+2 ≤ m < Fk+3. Par conséquent : z(m) = p ⇔ Fp+1 ≤ m < Fp+2.

On en déduit m = 5

1+pϕ + o(1), donc ln m = (p + 1).ln ϕ + O(1) ∼ p.ln ϕ

Si d(m) est le nombre de chiffres du développement décimal de m,

d(m) = [ log10 m ] = log10 m + O(1) ∼ )10ln()ln(m

.

Conclusion : z(m) ∼ )ln()ln(

ϕm

et )()(

mdmz

→ )ln()10ln(

ϕ .

b) Evaluation du nombre moyen de 1 contenus dans la Z-réprésentation d’un entier.

Soit Sn = ∑+< 2

)(nFm

mc , nombre de 1 figurant dans les écritures fibonacciennes de 0, 1, …, Fn+2 – 1.

Notons Tk = [Fk+2, Fk+3[ et tk = ∑∈ kTx

xc )( . On a Sn = t0 + t1 + … + tn−1 .

Or les numérations fibonacciennes des x ∈ Tk se déduisent de celles des x ∈ [0, Fk+1[ en rajoutant

« 10 » devant. Donc tk = Fk+1 + Sk−1 pour tout k ≥ 0 ,avec la convention S−1 = S0 = 0.

On en déduit Sk+1 = Sk + Sk−1 + Fk+1 pour tout k ≥ 0 ,avec la convention S−1 = S0 = 0.

Les premières valeurs de Sn sont : 0, 1, 2, 5, 10, 20, 38, 71, 130, 235, 420, …

L’OEIS reconnaît aussitôt la suite A001629.

Notant T l’opérateur de décalage, ( T2 – T – I )(S) = T

2(F)

Donc ( T2 – T – I )

2(S) = ( T

2 – T – I )( T

2(F) ) = T

2 ( T

2 – T – I )(F) = 0

Du coup Sn = ( an + b ).ϕn + ( cn + d ).ϕ’

n.

Tous calculs faits, on trouve :

Sn = −50

55+ .ϕn +

1051+ ( n + 1 ).ϕn

+ 50

55+− .ϕ’n +

1051− ( n + 1 ).ϕ’

n

Bien entendu, on aurait pu aussi recourir aux séries génératrices.

On en déduit une suite semblable à UN = ∑<Nm

mc )( quand N → +∞.

Si Fn+2 ≤ N ≤ Fn+3, alors Sn+2 ≤ UN ≤ Sn+1. Or Sn ∼ 10

51+ n.ϕn .

Par conséquent, les suites (Sn) et (Sn+1) sont semblables à (n.ϕn).

(UN) est semblable à (n.ϕn).

Page 86: Suite de Fibonacci, nombre d'or

86

Or Fn+2 ≤ N ≤ Fn+3 et la formule de Moivre impliquent que N est semblable à ϕn, et ln N à n.lnϕ .

Conclusion : La suite (UN) est semblable à N.ln N. 12.7. Théorèmes de Wythoff et Beatty.

En 1907, le mathématicien hollandais Willem Abraham Wythoff (1865-1939) a proposé et étudié un jeu voisin du jeu de Nim. En 1926, le mathématicien canadien Samuel Beatty (1881-1970) a généralisé le lemme de Wythoff.

On note [x] la partie entière du réel x.

Définition : Pour tout réel x > 0, on nomme suite de Beatty de x, la suite B(x) = ([nx])n∈N*

et ensemble de Beatty de x l’ensemble Ex = E(x) = [nx] ; n ∈ N* .

Exemples :

1) Si x est rationnel, écrivons x = qp

( p, q entiers > 0 premiers entre eux ).

Alors [(n + q)x] = [nx + p] = [nx] + p.

Soit n = kq + r ( 0 ≤ r < q ) la division euclidienne de n par q. Alors [nx] = [qrp ] + kp.

Notons Ar = [qrp ] + p.N pour 1 ≤ r ≤ q – 1, Aq = p + p.N. Alors B(x) = U

qr

rA≤≤1

.

2) Les suites B(ϕ) = ([nϕ])n∈N* et B(ϕ2) = ([nϕ2

])n∈N* sont respectivement appelées suites de Wythoff inférieure et supérieure, et référencées A000201 et A001950 dans l’OEIS.

B(ϕ) = ( 1, 3, 4, 6, 8, 9, 11, 12, 14, 16, 17, 19, 21, 22, 24, 25, 27, 29, 30, … )

B(ϕ2) = ( 2, 5, 7, 10, 13, 15, 18, 20, 23, 26, 28, 31, 34, 36, 39, 41, 44, 47, … )

La seconde suite se déduit de la première, car [nϕ2] = [nϕ + n] = [nϕ] + n.

La formule [x + y] = [x] + [y] + 0 ou 1, valable pour tous réels, implique aussitôt :

[(n + 1)ϕ] = [nϕ] + 1 ou 2 et [(n + 1)ϕ2] = [nϕ2

] + 2 ou 3 resp.

> phi:=(1+sqrt(5))/2: > wi:=n->evalf(floor(n*phi));ws:=n->wi(n)+n; > WI:=[seq(wi(n),n=1..24)];WS:=[seq(ws(n),n=1..24)];

WI 1. 3. 4. 6. 8. 9. 11. 12. 14. 16. 17. 19. 21. 22. 24. 25. 27. 29. 30. 32. 33., , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[ :=

35. 37. 38., , ]

WS 2. 5. 7. 10. 13. 15. 18. 20. 23. 26. 28. 31. 34. 36. 39. 41. 44. 47. 49. 52., , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[ :=

54. 57. 60. 62., , , ]

Théorème de Wythoff (1907) : Les ensembles Eϕ = [n.ϕ] ; n ∈ N* et Eϕ² = [n.ϕ2] ; n ∈ N*

forment une partition de N*.

Théorème de Beatty (1926) : Soient a et b deux réels > 1. Les deux propriétés sont équivalentes :

i) N* est réunion disjointe de Ea et Eb ;

ii) a ∉ Q , b ∉ Q et a1 +

b1 = 1.

Le théorème de Wythoff est un corollaire du théorème de Beatty : ϕ et ϕ2 sont deux irrationnels > 1

tels que ϕ1 +

²1ϕ = 1.

Page 87: Suite de Fibonacci, nombre d'or

87

Lemme 1 : Soit x un réel > 0. L’application b : n ∈ N* → [nx] ∈ N est croissante.

Elle est surjective ssi x < 1. Elle est injective ssi x ≥ 1. Elle n’est donc jamais bijective.

Preuve : L’application b est croissante comme composée des deux fonctions croissantes

n ∈ N* → nx ∈ R+ et x ∈ R+ → [x] ∈ N .

Supposons x < 1. L’application b est surjective, i.e. pour tout k ∈ N, il existe n tel que [nx] = k,

autrement dit k ≤ nx < k + 1, ou encore xk ≤ n <

xk 1+ .

Il suffit de prendre pour n le plafond de xk si k > 0, et n = 1 pour k = 0.

Supposons x ≥ 1. L’application b n’est pas surjective, car elle ne prend pas la valeur 0.

Si x ≥ 1, b est strictement croissante, car b(n+1) = [(n + 1)x] = [nx] + [x] + 0 ou 1 ≥ [nx] + 1 ou 2 ; elle est donc injective. Réciproquement, si b est injective, elle est strictement croissante 0 ≤ b(1) < b(2) < … < b(m) < ….

On en déduit aussitôt m – 1 ≤ b(m) ≤ mx. Donc m

m 1− ≤ x . Faisant tendre m vers +∞, il vient 1 ≤ x.

Lemme 2 : Pour tout réel x ≥ 1, l’ensemble de Beatty Ex a pour densité naturelle 1/x en ce sens que

la fonction fx(m) = card Ex ∩ [1, m]. vérifie limm→+∞ mmfx )(

= x1 .

Preuve : L’application b est strictement croissante. Je dis que xm − 1 ≤ fx(m) <

xm 1+ .

Soit en effet k = fx(m). C’est le plus grand entier tel que [kx] ≤ m ,

autrement dit, c’est l’entier tel que [kx] ≤ m < [(k + 1)x] .

On en déduit que kx < [kx] + 1 ≤ m + 1 et m ≤ (k + 1)x .

Du coup, x1 −

m1 ≤

mmfx )(

< mxm 1+ . On conclut par le lemme des gendarmes.

Théorème de Beatty : Soient a et b deux réels > 1. On a l’équivalence des propriétés suivantes :

i) N* est réunion disjointe de Ea et Eb ;

ii) a ∉ Q , b ∉ Q et a1 +

b1 = 1.

Preuve :

i) ⇒ ii) Si N* est réunion disjointe de Ea et Eb , la densité de N* est la somme des densités naturelles

de Ea et Eb (lemme facile à prouver), donc a1 +

b1 = 1.

Si l’un des deux nombres a ou b est rationnel, l’autre aussi. Ecrivons a = qp

et b = sr .

Alors [qra] = qra = pr = psb = [psb], donc Ea et Eb ne seraient pas disjoints.

ii) ⇒ i) Démontrons d’abord que Ea et Eb sont disjoints.

Supposons qu’il existe k ∈ Ea ∩ Eb. Ecrivons k = [ma] = [nb] Alors ma ≤ k < ma + 1 et nb ≤ k < nb + 1. a et b étant irrationnels on a ma < k < ma + 1 et nb < k < nb + 1.

Donc m < ak < m +

a1 et n <

bk < n +

b1

Additionnons ces inégalités ! Il viendrait m + n < k < m + n + 1, ce qui est impossible.

Démontrons que Ea ∪ Eb = N*. Soient k ∈ N*, m et n les entiers tels que ma ≤ k ≤ (m + 1)a et nb ≤ k ≤ (n + 1)b . Autrement dit m = [k/a] , n = [k/b] .

Page 88: Suite de Fibonacci, nombre d'or

88

Si k n’appartient pas à Ea , alors ma < k < (m + 1)a − 1, donc m < ak < m + 1 −

a1 ,

Si k n’appartient pas à Eb , alors nb < k < (n + 1)b − 1 , donc n < bk < n + 1 −

b1 .

Additionnons ! Il viendrait m + n < k < m + n + 1. Impossible ! CQFD.

Corollaire : Le seul réel θ > 1 tel que les ensembles Eθ et Eθ² forment une partition de N* est ϕ.

Voici un autre exemple illustrant le théorème de Beatty, a = 2 et b = 2 + 2 .

> a:=sqrt(2);bi:=n->evalf(floor(n*a));bs:=n->bi(n)+2* n; > BI:=[seq(bi(n),n=1..26)];BS:=[seq(bs(n),n=1..24)];

BI 1. 2. 4. 5. 7. 8. 9. 11. 12. 14. 15. 16. 18. 19. 21. 22. 24. 25. 26. 28. 29., , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[ :=

31. 32. 33. 35. 36., , , , ]

BS 3. 6. 10. 13. 17. 20. 23. 27. 30. 34. 37. 40. 44. 47. 51. 54. 58. 61. 64., , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[ :=

68. 71. 75. 78. 81., , , , ]

12.8. De Wythoff à Zeckendorf.

Considérons les ensembles de Beatty :

E(ϕ) = 1, 3, 4, 6, 8, 9, 11, 12, 14, 16, 17, 19, 21, 22, 24, 25, 27, 29, 30, …

E(ϕ2) = 2, 5, 7, 10, 13, 15, 18, 20, 23, 26, 28, 31, 34, 36, 39, 41, 44, 47, …

Théorème : Les deux ensembles translatés :

E(ϕ) – 1 = 0, 2, 3, 5, 7, 8, 10, 11, 13, 15, 16, 18, 20, 21, 23, 24, 26, 28, 29, …

E(ϕ2) – 1 = 1, 4, 6, 9, 12, 14, 17, 19, 22, 25, 27, 30, 33, 35, 38, 40, 43, 46, …

forment une partition de N. Les éléments de E(ϕ) – 1 sont les entiers naturels dont la représentation

de Zeckendorf se termine par 0, les éléments de E(ϕ2) – 1 sont les entiers naturels dont le

représentation de Zeckendorf se termine par 1.

Preuve :

Nous allons exprimer la Z-répresentation de [nϕ]−1 et [nϕ2] – 1 à l’aide de celle de n.

Lemme 1 : Pour tout k, Fk.ϕ = Fk+1 − ϕ’k et Fk.ϕ

2 = Fk+2 − ϕ’

k.

Ecrivons n = ∑+∞

=+

02

iii Fa = Zeck ak ak−1 … a0 = Zeck ak ak−1 … ah 0 … 0 la Z-représentation de n > 0.

où k = deg(n) et h = val(n) sont resp. le plus grand et le plus petit indices tels que ai = 1.

nϕ = ∑+∞

=

++ −

0

23 )'(

i

iii Fa ϕ = ∑

+∞

=+

03

iii Fa − R et nϕ2

= ∑+∞

=

++ −

0

24 )'(

i

iii Fa ϕ = ∑

+∞

=+

04

iii Fa − R

où R = ∑+∞

=

+

0

2'.i

iia ϕ . Comme nϕ est irrationnel, ce reste R est non nul.

De plus | R | < 1 car | R | < ∑+∞

=

+

0

2'

i

iϕ = '1

'²ϕ

ϕ+ = 1.

Et enfin je dis que R est du signe de ah.ϕ’h+2

= ϕ’h+2

, donc R > 0 si h est pair, R < 0 si h impair.

En effet R = ϕ’h+2

+ ∑+∞

+=

+

2

2'.hi

iia ϕ et |∑

+∞

+=

+

2

2'.hi

iia ϕ | < ∑

+∞

+=

+

2

2'

hi

iϕ = '1

)'( 4

ϕϕ+

− +h

= | ϕ’|h+2

. Donc :

Lemme 2 : [nϕ] = ∑+∞

=+

03

iii Fa et [nϕ2

] = ∑+∞

=+

04

iii Fa si val(n) est impaire,

Page 89: Suite de Fibonacci, nombre d'or

89

[nϕ] = ∑+∞

=+

03

iii Fa − 1 et [nϕ2

] = ∑+∞

=+

04

iii Fa − 1 si val(n) est paire.

Les deux lemmes suivants découlent du lemme 2 et du § 12.2.

Lemme 3 : Si val(n) = h est impaire,

[nϕ] − 1 = ∑+∞

=+

03

iii Fa − 1 = … ah+2 0 0 1 0 1 … 0 1 0 ( h + 3 chiffres exprimés )

[nϕ2] − 1 = ∑

+∞

=+

04

iii Fa − 1 = … ah+2 0 0 1 0 1 … 0 1 0 1 ( h + 4 chiffres exprimés )

Lemme 4 : Si val(n) = h est paire,

[nϕ] − 1 = ∑+∞

=+

03

iii Fa − 2 = … ah+2 0 0 1 0 1 … 0 1 0 0 ( h + 3 chiffres exprimés )

[nϕ2] − 1 = ∑

+∞

=+

04

iii Fa − 2 = … ah+2 0 0 1 0 1 … 0 1 0 0 1 ( h + 4 chiffres exprimés )

Concluons ! Il découle des lemmes 3 et 4 que, pour tout n, S([nϕ] − 1) = 0, S([nϕ2] − 1) = 1.

Par conséquent, E(ϕ) – 1 ⊂ S−1

(0) E(ϕ2) – 1 ⊂ S

−1(1)

Mais, réciproquement, si m est un entier tel que S(m) = 0, m est de la forme [nϕ] − 1.

Si m est un entier tel que S(m) = 1, m est de la forme [nϕ2] − 1.

On a redémontré au passage le théorème de Wythoff.

Page 90: Suite de Fibonacci, nombre d'or

90

13. Suite de Fibonacci universelle. 13.1. Suite de Fibonacci dans un monoïde libre.

Soit M = Mo(a, b) le monoïde des mots à deux lettres a, b, muni de la concaténation notée .. Rappelons que M est l’ensemble des suites finies à éléments dans a, b, y compris la suite vide, notée e. Plus généralement, soit M un monoïde libre à deux générateurs, a et b. Partant des mots a et b, on obtient une suite de Fibonacci de mots :

m0 = a , m1 = b , m2 = ba , m3 = bab , m4 = babba , m5 = babbabab , mn+2 = mn+1 * mn.

Lorsque a = 1, b = 0, on obtient la suite :

m0 = 1 , m1 = 0 , m2 = 01 , m3 = 010 , m4 = 01001 , m5 = 01001010 , etc.

Définition 1 : Une telle suite de mots est appelée suite de Fibonacci universelle.

L’explication de cette terminologie vient de la propriété suivante :

Théorème 1 : Soient (E, ∗) un monoïde quelconque, u0 et u1 deux éléments de E, (un) la suite de

Fibonacci associée. Si f est le morphisme de monoïdes M → E tel que f(a) = u0 et f(b) = u1, alors

∀n ∈ N f(mn) = un.

Preuve : immédiate par récurrence.

Ainsi, toutes les suites de Fibonacci sont des images de la suite de Fibonacci universelle par un morphisme de monoïde. Ce théorème a de très nombreuses applications :

Corollaire 1 : i) La longueur de mn est Fn+1.

ii) Le nombre de b dans mn est Fn. iii) Le nombre de a dans mn est Fn−1.

Preuve : Plutôt que de démontrer cela par récurrence, mieux vaut appliquer le théorème précédent :

i) Soit L le morphisme M → (N, +) tel que L(a) = L(b) = 1. L n’est autre que l’application qui à un mot associe sa longueur.

En vertu du théorème précédent, (L(mn)) est la suite de Fibonacci (1, 1, 2, 3, …), c’est à dire (Fn+1).

ii) Soit B le morphisme M → (N, +) tel que B(a) = 0, B(b) = 1. B n’est autre que l’application qui à un mot associe le nombre de b qu’il contient.

En vertu du théorème précédent, (B(mn)) est la suite de Fibonacci (0, 1, 1, 2, 3, …), c’est à dire (Fn).

iii) Soit A le morphisme M → (N, +) tel que A(a) = 1, A(b) = 0. A n’est autre que l’application qui à un mot associe le nombre de b qu’il contient.

En vertu du théorème, (A(mn)) est la suite de Fibonacci (1, 0, 1, 1, 2, 3, …), c’est à dire (Fn−1).

Corollaire 2 : Soient (E, +) un monoïde commutatif, noté additivement, (un)n∈N une suite de

Fibonacci à éléments dans E. On a : ∀n ∈ N un = Fn−1.u0 + Fn.u1 .

Preuve : Il suffit d’appliquer le théorème précédent au morphisme F : M → E défini par F(a) = u0,

F(b) = u1. Au mot m il associe A(m).u0 + B(m).u1, avec les notations précédentes.

Le corollaire 1 conclut.

Corollaire 3 : mn+1 se déduit de mn par l’opérateur de codage Φ, dit codage de Fibonacci, qui change a en b et b en ba (1 en 0, 0 en 01).

Preuve : Ici encore, plutôt que de démontrer cela par récurrence, appliquons le théorème précédent.

Considérons le morphisme Φ : M → M défini par Φ(a) = b , Φ(b) = ba ( Φ(1) = 0 , Φ(0) = 01 )

Ce morphisme vérifie Φ(m0) = m1 et Φ(m1) = m2.

Page 91: Suite de Fibonacci, nombre d'or

91

Par suite, à la suite de Fibonacci universelle (mn), il associe la suite de Fibonacci décalée (m1, m2,

m3, … ). Par conséquent Φ(mn) = mn+1.

Autres propriétés des mots de Fibonacci mn :

• Pour tout n > 0, mn commence par 0 et, pour n > 1, par 01.

• Pour tout n, m2n finit par 01, m2n+1 finit par 10.

• Pour tout n, mn ne contient pas deux 1 consécutifs, ni trois 0 consécutifs.

Les deux premières assertions sont faciles. La troisième se montre par récurrence : elle est vraie pour n = 0, 1 et 2. Si elle est vraie aux rang n et n + 1 ( n > 1 ), alors :

mn+2 = mn+1.mn ne contient pas deux 1 consécutifs, car mn+1 et mn n’en contiennent pas et mn commence par 0.

mn+2 = mn+1.mn ne contient pas trois 0 consécutifs, car mn+1 et mn n’en contiennent pas et il est

impossible que mn+1 finisse par 00 et mn commence par 0, ni que mn+1 finisse par 0 et mn commence par 00.

• Pour tout n ≥ 2, le mot mn contient Fn+1 – 1 couples de lettres consécutives, dont :

Fn−1 couples 01 , Fn−1 − 2

)1(1 n−+ couples 10 , Fn−2 −

2)1(1 n−−

couples 00 , 0 couples 11.

Ainsi, le mot m7 = 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0

contient F8 = 21 lettres, F8 – 1 couples de lettres consécutives, 8 = F6 couples couples 01,

8 = F6 − 2

)1(1 7−+ couples 10 , 4 = F5 −

2)1(1 7−−

couples 00 , 0 couples 11.

En effet, notons N01(n) le nombre de couples 01 figurant dans mn, etc., il vient :

N01(n +2) = N01(n + 1) + N01(n)

N10(n + 2) = N10(n + 1) + N10(n) + 0 si n est pair , + 1 si n est impair

N00(n + 2) = N00(n + 1) + N00(n) + 1 si n est pair , + 0 si n est impair.

Les conditions initiales et le § 5.4. permettent de conclure.

• Pour tout n ≥ 2, si on enlève les deux dernières lettres de mn, qui sont alternativement [1, 0] et [0, 1], on obtient un mot palindrome.

• Les mots mn+2 = mn+1.mn et mn.mn+1 ne diffèrent que par leurs deux dernières lettres, qui sont simplement échangées.

Considérons le mot suivant Mn = 0.m0. ….mn de longueur 1 + F1 + … + Fn+1 = Fn+3.

Son image par Φ est Φ(Mn) = 0.1.m1. ….mn+1 = 0.m0. ….mn+1 = Mn+1, de longueur Fn+4.

Proposition : Pour tout n ≥ 0, Mn = mn+2.

Preuve : Par récurrence sur n. M0 = 01 = m2. Si Mn = mn+2, Mn+1 = Mn.mn+1 = mn+2.mn+1 = mn+3.

Considérons la suite m’0 = 1 , m’1 = 0 , m’2 = 10 , m’n+2 = m’n.m’n+1 .

et σ l’opérateur de symétrisation, qui lit les lettres de droite à gauche.

Proposition : Pour tout n ≥ 0, m’n = σ(mn).

Preuve : Par récurrence sur n. m’0 = 1 = σ(m0), m’1 = 1 = σ(m1).

Si m’n = σ(mn) et m’n+1 = σ(mn+1), alors :

m’n+2 = m’n.m’n+1 = σ(mn).σ(mn+1) = σ(mn+1.mn) = σ(mn+2).

Page 92: Suite de Fibonacci, nombre d'or

92

13.2. Quelques programmes Maple.

Voici deux procédures Maple : > fibo:=proc(n) > option remember; > if n = 0 then 1 > elif n = 1 then 0 > else cat(fibo(n-1),fibo(n-2));fi;end; > for n from 0 to 10 do mf(n);od;

1 0 01 010

01001 01001010

0100101001001 010010100100101001010

0100101001001010010100100101001001 0100101001001010010100100101001001010010100100101001010

01001010010010100101001001010010010100101001001010010100100101001001\

010010100100101001001

> MF:=proc(n) > option remember; > if n=0 then [1] > elif n=1 then [0] > else [op(MF(n-1)),op(MF(n-2))]: > fi:end; > for k from 0 to 8 do MF(k);od;

[ ]1 [ ]0

[ ],0 1 [ ], ,0 1 0

[ ], , , ,0 1 0 0 1 [ ], , , , , , ,0 1 0 0 1 0 1 0

[ ], , , , , , , , , , , ,0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 [ ], , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0

[ ], , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1

13.3. Le mot infini de Fibonacci.

Pour n > 1, chaque mot mn+1 commence par le précédent mn, on sent que la suite (mn) « tend » vers une suite limite infinie, en un sens à préciser. Le cadre des espaces métriques permet de donner un sens précis à cette notion de convergence.

Soit E = 0, 1N l’ensemble des suites u = (un) à éléments dans 0, 1. Pour tout couple (u, v) ∈ E2,

notons k(u, v) = min n ; un ≠ vn si u ≠ v et k(u, v) = + ∞ sinon, et d(u, v) = 2−k(u,v).

Théorème 2 : (E, d) est un espace ultramétrique (c’est-à-dire vérifiant (D1), (D2) et d(u, w) ≤ max(d(u, v), d(v, w)), complet, et même compact.

On peut plonger M dans E, en identifiant un mot m = (x0, …, xn−1) ∈ M à l’ensemble A(m) des

suites u = (un) à éléments dans 0, 1 qui commencent par m.

Page 93: Suite de Fibonacci, nombre d'or

93

Alors la distance du mot m à E est d(m, E) = d(A(m), E) = 2−n. C’est aussi la distance de Hausdorff de A(m) à E.

Soit Φ : E → E l’application qui, à une suite u = (un), associe la suite obtenue en remplaçant 1 par 0 et 0 par 01. Ainsi u = ( 1, 0, 0, 1, 1, 0, 1, ...) devient Φ(u) = ( 0, 0, 1, 0, 1, 0, 0, 0, 1, 0, ... ).

Théorème 3 : L’opérateur Φ est injectif. Son image est l’ensemble des suites v = (vn) à éléments

dans 0, 1 telles que v0 = 0 et ne contenant pas deux 1 consécutifs.

Φ est ½-contractant : ∀(u, v) ∈ E2 d(Φ(u), Φ(v)) ≤

2),( vud

.

Preuve : Commençons par le plus important, la fin. Si u = v, la majoration va de soi.

Sinon, soit k = k(u, v), supposons pour fixer les idées uk = 0, vk = 1.

u = (u0, …, uk−1, 0, … ) Φ(u) = (Φ(u0), …, Φ(uk−1), 0, 1, …)

v = (u0, …, uk−1, 1, … ) Φ(v) = (Φ(u0), …, Φ(uk−1), 0, …)

Par conséquent, les Φ(ui), i < k, étant des mots de longueurs 1 ou 2, k(Φ(u), Φ(v)) ≥ k + 1. cqfd. Pour montrer l’injectivité, examiner les 4 cas possibles :

u = (u0, … uk−1, 0, 0, … ) v = (u0, …, uk−1, 1, 0, … )

u = (u0, … uk−1, 0, 0, … ) v = (u0, …, uk−1, 1, 0, …)

u = (u0, … uk−1, 0, 1, … ) v = (u0, …, uk−1, 1, 0, …)

u = (u0, … uk−1, 0, 1, … ) v = (u0, …, uk−1, 1, 1, …)

L’image de Φ, moins importante, est laissée au lecteur en exercice.

Il suffit d’appliquer le théorème de point fixe de Picard-Banach pour obtenir le :

Théorème 4 : Il existe une unique suite a à éléments dans 0, 1 telle que a = Φ(a). On l’appelle mot infini de Fibonacci.

a = (an)n∈N = ( 0, 1, 0, 0, 1, 0, 1, 0, 0, 1, 0, 0, 1, 0, 1, 0, 0, 1, … )

Peu importe la suite initiale b. Les itérées de b par Φ commencent par 0, 01, 010, 01001, etc.

Le suite a est bien la limite de la suite de mots (mn), après le susdit16 plongement de M dans E. Car

la suite (A(mn)) est une suite décroissante de compacts de E, dont la limite au sens de Hausdorff est son intersection ; et cette intersection est le singleton (a).

Le mot infini de Fibonacci est répertorié A003849 dans l’OEIS de Neil Sloane. C’est l’une des suites emblématiques de la théorie de la complexité.

Il découle aussitôt de ce qui précéde que pour tout n ≥ 1, mn = ( a0, a1, …, 11−+nF

a ).

La relation mn+2 = mn+1 * mn s’écrit

( a0, a1, …, 13−+nF

a ) = ( a0, a1, …, 12−+nF

a ,a0, a1, …, 11−+nF

a ).

La suite (an) vérifie a0 = 0, a1 = 1 et ∀k ∈ [0, Fn+1[ kFna ++2

= ka .

Ou encore : ∀k ∈ N ∀m ∈ [Fk+2, Fk+3[ ma = 2+− kFm

a .

Nous retrouvons-là une propriété déjà rencontrée… On en déduit :

Théorème 5 : Pour tout n, na = S(n). ( na ) est la suite des sexes des entiers naturels, c’est-à-dire la suite des chiffres des unités de leurs représentations de Zeckendorf.

16 J’ai bien écrit « susdit », Yannick ! Tu as l’esprit mal tourné !

Page 94: Suite de Fibonacci, nombre d'or

94

Théorème 6 : La suite a = (an) est la concaténée des mots (0, m0, m1, m2, … , mn, … ).

Preuve : Il suffit de vérifier que cette suite est un point fixe de l’opérateur Φ.

Or Φ(0, m0, m1, m2, … , mn, …) = (0, 1, m1, m2, m3, … , mn+1, …)

= (0, m0, m1, m2, m3, … , mn+1, …).

Par unicité du point fixe, a = (0, m0, m1, … , mn, … ) CQFD

Cela découle aussi de la formule déjà notée (0, m0, m1, m2, … , mn) = mn+2.

Théorème 7 : Le nombre des mots de longueur n extraits du mot de Fibonacci est n + 1.

Nous ne démontrerons pas ce résultat, mais le vérifierons pour les premières valeurs. Il y a 2 mots de longueur 1 : 0 et 1. Il y a 3 mots de longueur 2 : 01, 10 et 00. Il y a 4 mots de longueur 3 : 010, 100, 001 et 101 (on sait que les mots 111, 110, 011, et 000 ne sont pas possibles). Il y a au plus 5 mots de longueur 4 : 0100, 1001, 0010, 0101 et 1010. Car 010 donne 0100 ou 0101, 011 donne forcément 0110, 001 donne 0010 et 101 donne 101, En vertu du fait qu’il n’y a pas deux 1 consécutifs, ni trois 0 consécutifs.

Il reste à vérifier que ces 5 mots figurent dans un mn assez grand.

NB : Les mots de longueur n extraits du mot de Fibonacci n’ont pas deux 1 consécutifs, ni trois 0 consécutifs. Nous avons dénombré ces mots au § 4.7. Il y en a plus de n +1. Apparemment ils ne figurent pas tous dans le mot de Fibonacci. 13.4. Retour sur la reproduction des hyménoptères. « Une famille, c’est un papa et une maman ! »

La Manif pour tous

Avant d’aborder les hyménoptères, commençons par définir la « numérotation de Sosa inversée » 17, féministe en quelque sorte, de nos ancêtres directs : 1) Le numéro 1 est attribué à l’individu racine, que nous supposerons de sexe masculin. 2) Le numéro 2 est attribué à sa mère, le numéro 3 à son père. Plus généralement, si un individu a le numéro n, sa mère a le numéro 2n, son père le numéro 2n + 1. Si l’on note 1 le sexe masculin, 0 le sexe féminin, les sexes des ancêtres directs d’un homme, rangés dans la numérotation de Sosa inversée, sont donc : 1 0 1 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 1 0 1 0 1 etc. Ainsi, le Sosa’(2) est la mère, le Sosa’(6) la grand-mère paternelle, etc.

17 La numérotation de Sosa attribue en fait le numéro 2 au père, le numéro 3 à la mère. Plus généralement, si un individu a le numéro n, son père le numéro 2n, sa mère le numéro 2n + 1. Nous l’avons ici inversée, ce qui revient à effectuer sur l’arbre généalogique une symétrie d’axe vertical, pour la clarté de l’exposé.

Page 95: Suite de Fibonacci, nombre d'or

95

Arbre généalogique de Sosa inversé

Cherchons à comprendre qui est le Sosa’(26). En binaire, 26 = 11010. Le Sosa’(26) est la mère du père de la mère de mon père. Il suffit de lire l’écriture binaire de 26 de droite à gauche. Notons au passage que les ancêtres féminins sont les ancêtres ayant un numéro pair. Le pair est féminin, l’impair est masculin : la symbolique est respectée. En somme, cet arbre généalogique de Sosa inversé fournit une illustration pédagogique vivante et naturelles du développement binaire d’un entier naturel.

« Un bon croquis vaut mieux qu’un long discours »

Napoléon Bonaparte 18

Venons-en maintenant aux abeilles. Nous avons évoqué au § 4.2. la parthénogénèse arrhénotoque des abeilles découverte en 1835 par Jan Dzierzon. Nous allons définir ce que j’appellerai la « numérotation de Sosa-Dzierzon » des ancêtres d’une abeille-mâle ou faux bourdon. Rangeons ces ancêtres directs en énumérant les femelles avant les mâles. 1 a pour ancêtres : 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 0100101001001 etc. Ils sont numérotés 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 … … … 33 etc. Un mâle a une mère, trois grands-parents, cinq aïeux, huit bisaïeux, etc. mais surtout, on reconnaît la suite de Fibonacci universelle ! Et pour cause, puisque 1 provient de 0 et 0 de 01.

Théorème 8 : La suite mn est la liste des sexes des ancêtres de la n-ème génération d’un hymé-

noptère mâle. La suite mn+1 est la liste des sexes des ancêtres de la n-ème génération d’un hymé-noptère femelle.

Du coup, nous retrouvons la propriété démontrée au § 4.2.

Corollaire : Un hyménoptère mâle a Fn+1 ancêtres à la n-ème génération, Fn−1 mâles et Fn femelles.

Un hyménoptère femelle a Fn+2 ancêtres à la n-ème génération, Fn mâles et Fn+1 femelles.

18 Lequel Napoléon a ajouté aussitôt : « Le problème avec les citations trouvées sur internet, c’est qu’il est très difficile de savoir si elles sont authentiques ou pas. »

Page 96: Suite de Fibonacci, nombre d'or

96

Arbre généalogique de Sosa-Dzierzon d’une abeille mâle

Examinons bien attentivement cet arbre généalogique. Considérons par exemple l’ancêtre numéro 27, le Sosa-Dzierson(27) de l’abeille-mâle. Il est de sexe masculin, il est le père de la mère de la mère du père de la mère de la mère de l’abeille-mâle. Si on lit les sexes des ascendants en partant du bas, on trouve 1001001. C’est précisément la représentation de Zeckendorf du nombre 27.

De plus, la partition mystérieuse du § 12.

E(ϕ) – 1 = 0, 2, 3, 5, 7, 8, 10, 11, 13, 15, 16, 18, 20, 21, 23, 24, 26, 28, 29, …

E(ϕ2) – 1 = 1, 4, 6, 9, 12, 14, 17, 19, 22, 25, 27, 30, 33, 35, 38, 40, 43, 46, …

s’éclaire d’un coup.

E(ϕ) – 1 = 0, 2, 3, 5, 7, 8, 10, 11, 13, 15, 16, 18, 20, 21, 23, 24, 26, 28, 29, … est l’ensemble des numéros des ancêtres femelles,

E(ϕ2) – 1 = 1, 4, 6, 9, 12, 14, 17, 19, 22, 25, 27, 30, 33, 35, 38, 40, 43, 46, …

est l’ensemble des numéros des ancêtres mâles !

Quant au mot de Fibonacci:

a = (an)n∈N = ( 0, 1, 0, 0, 1, 0, 1, 0, 0, 1, 0, 0, 1, 0, 1, 0, 0, 1, … )

on le voit de deux façons sur cet arbre :

• il est la limite de la suite de mots mn donnant les sexes des ancêtres de la n-ème génération.

• mais il est aussi, en rajoutant 0 devant, la suite des sexes des ancêtres de Sosa-Dzierzon.

Cet arbre généalogique de Sosa-Dzierzon fait un lien extrêmment éclairant entre la numérotation de Zeckendorf et les ancêtres d’une abeille.

LLLLe terme d’indice n du mot de Fibonacci serait le sexe de mon ne terme d’indice n du mot de Fibonacci serait le sexe de mon ne terme d’indice n du mot de Fibonacci serait le sexe de mon ne terme d’indice n du mot de Fibonacci serait le sexe de mon n----ème ancêtre si ème ancêtre si ème ancêtre si ème ancêtre si

subitement je devenais une abeillesubitement je devenais une abeillesubitement je devenais une abeillesubitement je devenais une abeille ! Idée sésuisante, par ces temps de confinement…! Idée sésuisante, par ces temps de confinement…! Idée sésuisante, par ces temps de confinement…! Idée sésuisante, par ces temps de confinement…

Page 97: Suite de Fibonacci, nombre d'or

97

Tout cela demande à être justifié.

Je laisse cela au lecteur, et préfère placer sous ses yeux du lecteur ce pur chef d’œuvre.

Georges de La Tour, Le nouveau né (1645)

Page 98: Suite de Fibonacci, nombre d'or

98

13.5. Une interprétation géométrique du mot de Fibonacci.

Le mot de Fibonacci a une interprétation géométrique simple et surprenante.

Dans le quart de plan R+×R

+ , traçons les demi-droites horizontales hn : y = n et verticales vn : x =

n, où n décrit N, ainsi que la demi-droite D : y = ϕ.x, x ≥ 0.

Comme ϕ est irrationnel, D ne rencontre N×N qu’au point O = (0, 0),

Elle coupe donc alternativement les droites hn et vn. Lorsqu’un point mobile se déplace sur D en partant de O, on note 0 lorsqu’il rencontre une droite horizontale, 1 lorsqu’il rencontre une droite verticale. Le mot obtenu est le mot de Fibonacci 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 … > with(plots): > phi:=(1+sqrt(5))/2; > v:=n->plot([n,y,y=0..16]):h:=n->plot([x,n,x=0..10]) : d:=plot(phi*x,x=0..10,thickness=2,color=blue): > display(seq(v(n),n=0..10),seq(h(n),n=0..16),d);

Démontrons ce que nous voyons.

Notons (Mn)n≥1 la suite des points où la demi-droite D rencontre le quadrillage, à partir de O.

Le point où D coupe l’horizontale hp est Hp = (p/ϕ, p)

Le point où D coupe la verticale vq est Vq = (q, qϕ)

Page 99: Suite de Fibonacci, nombre d'or

99

Théorème 9 : Pour tout n ≥ 1, Hn = M[nϕ] et Vn = M[nϕ²] .

Preuve : Considérons la suite strictement croissante de réels :

1 < ϕ < 2 < 3 < 2ϕ < 4 < 3ϕ < 5 < 6 < 4ϕ < 7 < 8 < 5ϕ < 9 < 6ϕ < 10 < … 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16

et les points d’ordonnées correspondantes sur la demi-droite D.

Les nombres orange sont les éléments de E(ϕ), les nombres bleus les éléments de E(ϕ2).

La deuxième ligne donne quelques abscisses correspondantes. Il suffit ensuite de lire :

M1 = H1, M2 = V1, M3 = H2, M4 = H3, M5 = V2, M6 = H4,

M7 = V3, M8 = H5, M9 = H6, etc.

Corollaire : La suite (h, v, h, h, v, h, v, h, h, …) donnant

l’appartenance des points Mn à une horizontale ou une verticale, coïncide avec le mot de Fibonacci.

Théorème 10 : Le n-ème élément du mot de Fibonacci est donné par l’expression analytique :

an = [(n + 2) ρ] − [(n + 1) ρ]

= 2 + [(n + 1) ϕ] − [(n + 2) ϕ]

où ρ = 2 – ϕ et [ . ] désigne la fonction partie entière.

Preuve : Vérifions que les deux expressions de an sont identiques. [(n + 1) ρ] = [(n + 1) (2 – ϕ) ] = 2(n + 1) + [ − (n + 1) ϕ ] [(n + 2) ρ] = [(n + 2) (2 – ϕ) ] = 2(n + 2) + [ − (n + 2) ϕ ] Donc

[(n + 2) ρ] − [(n + 1) ρ] = 2 + [−(n + 2) ϕ] − [−(n + 1) ϕ]

Or, si x ∉ Z [ – x ] = 1 – [x] . Comme est irrationnel, (n + 2) ϕ et (n + 1) ϕ ∉ Z. Donc

2 + [−(n+2) ϕ] − [−(n+1) ϕ] = 2 + 1 – [(n+2) ϕ] − 1 + [(n+1) ϕ] = 2 + [ (n+1) ϕ] − [ (n+2) ϕ] .

Quant à l’affirmation principale, elle découle du théorème 9 et de la figure.

> phi:=(1+sqrt(5))/2:r:=2-phi: > a:=n->floor((n+2)*r)-floor((n+1)*r);

:= a → n − ( )floor ( ) + n 2 r ( )floor ( ) + n 1 r > L:=[seq(a(n),n=0..55)];

L 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,[ :=

0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 0 1 0 1 0 0 1 0 1 0 0, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ]

Page 100: Suite de Fibonacci, nombre d'or

100

14. Suite de Fibonacci aléatoire.

On nomme ainsi la suite donnée par X1 = 1 , X2 = 1 , Xn+2 = ± Xn+1 ± Xn , où les deux ± 1 sont tirés à pile ou face et indépendaamment.

Autrement dit : [2

1

XX ] = [1

1] et [12

1

+

+

n

n

XX ] =

±± 1110 [

1+n

n

XX ] .

Si l’on note An =

±± 1110 ∈ M2(Z) cette matrice aléatoire,

[2

1

+

+

n

n

XX ] = An An−1 … A1 [

2

1

XX ] = Mn [

2

1

XX ]

La matrice Mn décrit une promenade aléatoire dans le sous-groupe de Gl2(Z) engendré par :

A =

1110 , B =

−1110 , C =

− 11

10 et D =

−− 1110 .

Tous ces sujets me dépassent, et je renvoie le lecteur aux travaux de Hillel Fürstenberg (qui a reçu le prix Abel en 2020), Harry Kesten, Divakar Viswanath, Benoît Rittaud, etc.

Je me contenterai de noter que :

1) Les 4 matrices

±± 1110 ont mêmes normes subordonnées aux normes ||x||1 et ||x||∞, à savoir 2, et

même norme de Frobenius 3 .

Par suite ||| Mn |||1 ≤ 2n et ||| Mn |||∞ ≤ 2

n. Et c’est sans doute pour cela que ces grands matheux

considèrent la racine n-ième de cette norme.

2) Pour tout n, | Xn | ≤ Fn.

3) Xn a même parité que Fn : impair, impair, pair, impair, impair, pair, etc..

Page 101: Suite de Fibonacci, nombre d'or

101

15. Le nombre d’or en géométrie.

Elle donne envie de vivre …Elle donne envie de vivre …Elle donne envie de vivre …Elle donne envie de vivre …

La beauté est un mystère en pleine lumière. Il y a beaucoup de mystères autour de nous. Les uns, comme l’origine et la mort, sont sombres, opaques, effrayants. Les autres sont légers et gais. On dirait presque transparents. La beauté est un mystère qui danse et chante dans le temps et au-delà du temps. Depuis toujours et à jamais. Elle est incompréhensible. On a essayé de l’expliquer. Le plus souvent en vain. A coups de chiffres et de mécanismes. Le nombre d’or. La symétrie et la dissymétrie. Des influences. Un code. Une culture. Des rapports, des contrastes, des souvenirs, des surprises. Le hasard, comme toujours, et la nécessité. Pourquoi un temple est-il beau ? Pourquoi une musique est-elle belle ? Pourquoi un être est-il beau ? Pourquoi un livre est-il beau ? (…)

La beauté est un secret que tout le monde a connu. Elle est très loin d’être recherchée et admirée sans réserve. Les gens sérieux en parlent avec dédain et légèreté. Tout un pan de l’art moderne se moque bien de la beauté et se vanterait plutôt, pour une raison ou pour une autre, de l’ignorer ou de la mépriser. Les fous, les grands naïfs, les amants, les poètes attardés, les mathématiciens surtout la cultivent et la vénèrent. Elle est l’espérance même. Elle donne envie de vivre.

Jean d’Ormesson, De la beauté Un jour je m’en irai sans en avoir tout dit

Le nombre d’or se rencontre dans plusieurs problèmes géométriques liés au pentagone et au décagone réguliers. Ces résultats étaient connus des géométres grecs les Grecs aimaient la beauté ! Nous proposons ici sur ce sujet deux exercices et un problème plus ambitieux. 15.1. Constructions élémentaires. Exercice 1 : construction élémentaire Soit P un pentagone convexe régulier dont les sommets sont notés ABCDE dans le sens trigo-nométrique. « Régulier » signifie, rappelons-le, que les côtés sont égaux AB = BC = CD = DE = EA, et que les angles intérieurs ABC, BCD, CDE, DEA, EAD, sont égaux. 1) Que valent les angles intérieurs ? 2) Démontrer que l’isobarycentre O des points ABCDE est situé sur la médiatrice commune de [EB] et de [CD], et que celle-ci passe par A. 3) Démontrer que le pentagone P est inscriptible dans un cercle de centre O. 4) En déduire l’existence d’un tel pentagone, et son unicité à similitude près.

5) Des résultats précédents, déduire la relation : 1 + 2 cos5

2π + 2 cos5

4π = 0 .

Montrer que cos5

2π et cos5

4π sont solutions d’une équation du second degré que l’on formera.

En déduire les valeurs de cos5

2π et cos5

4π , puis celles de cos5π .

Démontrer que ABAC = ϕ , où ϕ est le nombre d’or.

6) Soit AA’BB’CC’DD’EE’ un décagone convexe régulier de centre O, ADGJCFIB le décagone

étoilé. Démontrer que AOAB' = ϕ et que

'AAAO = ϕ.

Solution 1) La somme des angles intérieurs d’un polygone convexe de n côtés est (n – 2)π.

Page 102: Suite de Fibonacci, nombre d'or

102

Par conséquent, la somme des angles intérieurs d’un pentagone convexe est 3π.

Chacun des angles intérieurs d’un pentagone régulier vaut donc 5

3π .

2) Les triangles ABC et AED sont isocèles en B et E resp., et égaux. Par conséquent, AC = AD. On l’appelle diagonale du pentagone. Les triangles BAE et CAD sont isocèles en A, et la bissectrice intérieure de l’angle BAE est également celle de CAD. Donc les médiatrices de [BE] et [CD] coïncident et passent par A. Soit O l’isobarycentre du pentagone : O = Bar( (A, 1), (B, 1), (C, 1), (D, 1), (E, 1) ) = Bar( (A, 1), (I, 2), (J, 2) ), où I est le milieu de [BE] et J celui de [CD] Comme A, I et J sont alignés, le point O appartient à la médiatrice commune de [BE] et [CD].

3) En particulier, OB = OE. Par permutation, OA = OB = OC = OD = OE, Le pentagone P est inscriptible dans un cercle de centre O.

Chacun des triangles AOB, BOC, COD, DOE, EOA est isocèle en O, d’angle au sommet 5

2π .

4) Pour construire un pentagone régulier, il suffit donc de se donner un point O, de tracer un cercle de centre O, de fixer un point A sur ce cercle, et de considérer les points B, C, D et E déduits par

rotations de centre O et d’angles 5

2π , 5

4π , 5

6π et 5

8π .

5) Si l’on projette la relation OA + OB + OC + OD + OE = 0 sur l’axe OA, on trouve sans

peine : 1 + 2 cos5

2π + 2 cos5

4π = 0 .

En vertu de la relation cos5

4π = 2 cos2

52π − 1, il vient 4 cos

2

52π + 2 cos

52π − 1 = 0.

Ainsi c = cos5

2π est solution de l’équation du second degré : 4 c2 + 2 c − 1 = 0.

Comme cos5

8π = cos5

2π (pourquoi ?), on a aussi : 1 + 2 cos5

4π + 2 cos5

8π = 0 .

Par conséquent, c’ = cos5

4π est l’autre solution de l’équation 4 x2 + 2 x − 1 = 0.

On en déduit c, c’ = 4

51+− , 4

51−− .

Comme c’ < 0 < c, on conclut que cos5

2π = 4

51+− , cos5

4π = 4

51−− .

On en conclut que ABAC = ϕ .

6) Nous avons noté AA’BB’, etc. les sommets du décagone régulier afin de conserver les notations précédentes.

AOAB' = 2.sin

103π = 2 cos

102π = 2 cos

5π = ϕ

'AAAO =

10sin.21

π =

104cos.2

1π =

52cos.2

1π =

'1ϕ− = ϕ. Cqfd.

Exercice 2 : deux constructions du pentagone régulier

Dans cet exercice nous proposons deux constructions à la règle et au compas du pentagone régulier ABCDE à partir du segment AB.

Première construction. En voici les étapes :

Page 103: Suite de Fibonacci, nombre d'or

103

1) Choisir un demi-plan limité par la droite (AB) et y rester. 2) Compléter le segment AB en un carré AA’B’B. 3) Soit I le milieu de [AB]. Le cercle (I, IA’ = IB’) recoupe la droite (AB) en F et G resp. 4) Les cercles (A, AB) et (B, BF) se recoupent en E. 5) Les cercles (B, BA) et (A, AG) se coupent en C. 6) Les cercles (A,AG) et (B, BF) se coupent en D. Je dis que ABCDE est un pentagone convexe régulier de côté AB.

Deuxième construction, attribuée à Albrecht Dürer (1471-1528). 1) Des points A et B pris comme centres, on trace deux cercles de rayon AB. Ils se coupent en F. 2) De F comme centre, on construit le cercle passant par A et B. Il recoupe les cercles précédents en G et H, et la médiatrice de [AB] en K 3) Les droites (GK) et (HK) recoupent les deux cercles initiaux en C et E respectivement. 4) Je dis que EABC sont les quatre sommets du pentagone cherché. Le cinquième sommet D s’en déduit aisément en intersectant convenablement les cercles (E, EA) et (C, CB).

Le pentagone ABCDE a tous ses côtés égaux. Mais est-il régulier ?

Page 104: Suite de Fibonacci, nombre d'or

104

Solution Première construction.

Tous les points considérés sont situés dans un même demi-plan délimité par la droite (AB).

IF = IG = IA’ = IB’ = 25 AB.

Par conséquent, BF = BI + IF = (21 +

25 )AB = ϕ.AB.

Le point E vérifie AE = AB et BE = ϕ.AB = BF (diagonale du pentagone régulier), par conséquent E est bien l’intersection des cercles (A, AB) et (B, BF). De même, C est l’intersection des cercles (B,BA) et (A, AG). Enfin, AD = BD = ϕ.AB, comme diagonales du pentagone régulier. Par conséquent, D est l’intersection des cercles (A, AG) et (B, BF).

Conclusion : la construction proposée est juste. .

Deuxième construction.

La construction est élégante, mais nous allons démontrer que la réponse est négative. Pour cela, nous allons passer par les nombres complexes, et noter a, b, c, d, etc., les affixes des points A, B, C, D, etc. Nous allons prendre B = O comme origine et poser AB = 1, à homothétie près.

De sorte que le cercle (B, BA) est le cercle unité d’équation z.z = 1.

Ainsi a = – 1 , f = – 21 – i

23 = j

2 , k = i + f = i + j

2 , g = – 1 + f = – 1 + j

2 .

Page 105: Suite de Fibonacci, nombre d'or

105

Nous allons calculer l’affixe c du point C, en intersectant la droite (GK) et le cercle unité (B, BA). Dans le chapitre « Géométrie plane et nombres complexes », nous avons établi que la droite GK a

pour équation 111kgzkgz

= 0, soit 111

1²²1jijz

jijz+−+−

++−.= 0.

Après développement et simplifications, on trouve : 2z – 2 i z+ ( 1 – i )( 3 – 3 ) = 0.

Il faut couper cette droite avec le cercle unité z. z = 1, il vient :

2 z2 + ( 1 – i )( 3 – 3 ) z – 2 i = 0 (*).

Aucune des solutions de cette équation ne vérifie z5 = 1.

Il est en effet facile de démontrer que les polynômes

A = 2X2 + ( 1 – i )( 3 – 3 ) X – 2 i et B = X

5 – 1 ( ou X

4 + X

3 + X

2 + X + 1 )

sont premiers entre eux. Facile… du moins avec Maple !

> A:=2*X^2+(1-I)*(3-sqrt(3))*X-2*I;B:=X^4+X^3+X^2+X+1 ; gcdex(A,B,X,'U','V');U,V;

:= A + − 2 X2 ( ) − 1 I ( ) − 3 3 X 2 I

:= B + + + + X4 X3 X2 X 1 1

12

( )− + + − 10 7I 4 I 3 6 3 X3

− + 26 15 3

14

( )− + + − 11 15I 9 I 3 7 3 X2

− + 26 15 3− −

14

( ) − + 9 3 − 15 11I 7 I 3 X

− + 26 15 3

12

− + + − 7 10 I 6 I 3 4 3

− + 26 15 3 − − ,

− ( )− + + − 10 7 I 4 I 3 6 3 X

− + 26 15 3

+ − − 36 7 I 4 I 3 21 3

− + 26 15 3

Cela suffit à conclure, mais nous allons faire mieux ! Posant z = exp(iθ), et prenant la partie réelle de (*), il vient :

cos(2θ) + 2

33− ( cos θ − sin θ ) = 0

Posons α = θ − 4π , il vient : sin(2α) =

233− cos α , d’où sin α =

2233− .

Ainsi, le point C a pour affixe c = exp(iθ), où θ = Arcsin2233− +

4π .

Maple démontre que θ ≠ 5

2π , mais que l’écart est faible :

> A:=evalf(arcsin((3-sqrt(3))/(2*sqrt(2)))+Pi/4); := A 1.250247059

> B:=evalf(2*Pi/5); := B 1.256637062

> evalf((B-A)*180/Pi); .3661202029

Voici une solution plus élémentaire, sans passer par les complexes. Notons L = (GC) ∩ (AB) et considérons le triangle LBC.

On connaît la relation L

BCsin

= B

CLsin

= C

LBsin

.

Or BC = 1 , L = 4π , LB =

21 + 1−

23 . D’où sin C = LB.sin L = (

23 −

23 )

22 =

2623 − .

B = 4

3π − Arcsin2

623 − ≈ 108,3661201° , convertie en degrés, au lieu de 108 ° exactement.

Page 106: Suite de Fibonacci, nombre d'or

106

15.2. Nul n’est censé ignorer Galois…

Problème 3

On se propose d’étudier le plus petit sous-corps K de C contenant le complexe ω = exp5

2 πi .

0) Démontrer que ce corps contient le corps Q.

A. Première partie.

1) Soit P(X) = X5 – 1 ∈ C[X]. Factoriser P dans C[X].

2) Factoriser P(X) dans R[X] sous forme trigonométrique.

3) Soit Φ(X) = X4 + X

3 + X

2 + X + 1. Résoudre l’équation Φ(z) = 0 en posant w = z + 1/z.

4) En déduire une nouvelle factorisation de P(X) dans R[X], puis les rapports trigonométriques :

cos5πk , sin

5πk , tan

5πk ( 1 ≤ k ≤ 4 ) . Montrer que tan

5π . tan

52π . tan

53π . tan

54π = 5.

5) Calculer cos152π et sin

152π .

6) Comment construire à la règle et au compas le pentagone régulier de sommets ωk ( 0 ≤ k ≤ 4 ) ?

7) Déduire des résultats précédents que le rapport du périmètre d’une étoile à cinq branches au

périmètre du pentagone régulier circonscrit est égal au nombre d’or ϕ = 2

51+ .

B. Deuxième partie.

8) Démontrer que le polynôme Φ(X) est irréductible dans Q[X].

9) En déduire que ∀A ∈ Q[X] A( ω) = 0 ⇔ Φ divise A.

10) On note E = x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

; a, b, c, d ∈ Q .

a) Montrer que E est un sous-espace vectoriel de C considéré comme Q-espace vectoriel.

b) Démontrer que BBBB = ( 1, ω, ω2, ω3

) est une base de E.

c) Démontrer que E est un anneau intègre.

11) Montrer que E est un corps, par deux méthodes :

a) En considérant, pour x ≠ 0, l’application mx : y ∈ E → x.y ∈ E.

b) En utilisant l’irréductibilité de Φ(X) dans Q[X]. Comparer E et K .

12) Exemple.

a) Trouver deux polynômes A et B dans Q[X] tels que A.Φ + B.Φ’ = 1.

b) Calculer ( 4.ω3 + 3.ω2

+ 2.ω + 1 )−1

dans la base BBBB.

13) Représentation matricielle de E.

a) Soit x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

∈ E. Exprimer la matrice M(x) de l’endomorphisme mx de E dans la base BBBB.

b) En déduire que l’ensemble des matrices

−−−−−−−−−−−−

bacbdcdbcadbcbdcdabbccdda

, où a, b, c, d décrivent Q, est une

sous-algèbre commutative de M4(Q), et un corps.

Page 107: Suite de Fibonacci, nombre d'or

107

14) Groupe de Galois de K. Soit (G, o) le groupe des automorphismes de corps de K .

a) Soit s un élément de G. Vérifier que s(ω) ∈ ω , ω2 , ω3

, ω4 .

b) Montrer que G a quatre éléments.

c) Soit σ l’élément de G défini par σ(ω) = ω2. Montrer que G est cyclique ; quelle est sa table ?

d) Matrices des éléments de G relativement à la base BBBB ?

e) Quels sont les sous-groupes de G ?

15) Trace.

a) Calculer deux polynômes U et V de Q[X] tels que ( X – 1 ).U + ( X3 + X

2 + X + 1 ).V = 1.

b) Pour tout x ∈ K , on pose S(x) = x − σ(x) et T(x) = x + σ(x) + σ2(x) + σ3

(x).

Montrer que Im T = Ker S = Q et Ker T = Im S.

16) Norme. Pour x ∈ K , on pose N(x) = x.σ(x).σ2(x).σ3

(x).

a) Montrer que N(x) ∈ Q et que ∀x, y ∈ K N(x.y) = N(x).N(y).

b) En déduire un nouveau mode de calcul de x1 lorsque x ∈ K−0.

17) Sous-corps de K.

a) Vérifier que ∀x ∈ K σ2(x) = x , conjugué du complexe x.

b) Montrer que K ∩ R = a + b 5 ; a, b ∈ Q .

c) Soit L un sous-corps de K , distinct de Q et K . Montrer que dimQ L = 2, puis que

L* = s ∈ G ; ∀x ∈ L s(x) = x est un sous-groupe à deux éléments de G. En déduire L.

18) a) Montrer que M(ω) est diagonalisable dans M4(K ), puis que M(x) est diagonalisable dans

M4(K ) pour tout x ∈ K .

b) En déduire T(x) = tr M(x), puis N(x) = det M(x). ___________

Corrigé du problème : le corps cyclotomique R5(Q) A Alain Genestier, qui depuis bien longtemps a dépassé le maître…

On se propose d’étudier le plus petit sous-corps K de C contenant le complexe ω = exp5

2 πi .

0) Ce corps K contient le corps Q, comme tout sous-corps de C, d’ailleurs.

Car un sous-corps contient 0, 1, 2, 3, … , donc N par récurrence, puis −1, −2, −3, …, car c’est un sous-groupe, donc il contient Z. Et enfin il contient les p/q, c’est-à-dire Q.

A. Première partie : un peu de trigonométrie.

1) Factorisons P = X5 – 1 dans C[X].

Il vient P(X) = ∏∈

−5

)(Uz

zX = ( X – 1 )( X − ω )( X − ω2 )( X − ω3

)( X − ω4 ) .

2) Factorisons P dans R[X]. En regroupant les racines conjuguées, il vient :

P(X) = ( X – 1 )( X2 – 2X.cos

52π + 1 )( X

2 – 2X.cos

54π + 1 )

3) Le polynôme cyclotomique ΦΦΦΦ = X4 + X

3 + X

2 + X + 1.

Page 108: Suite de Fibonacci, nombre d'or

108

L’équation Φ(z) = 0 est réciproque. Si l’on pose w = z + z1 , il vient : z

2 +

²1z

+ z + z1 + 1 = 0,

d’où w2 + w – 1 = 0 , puis w =

251±− ; notons au passage que w = 2.cos

52π ou 2.cos

54π .

Il reste à résoudre w = z + z1 , i.e. z

2 – w.z + 1 = 0. On a : ∆ =

251m− .

D’où z = 21 [

251±− ± i

255± ] .

Avec Maple : > Phi:=X^4+X^3+X^2+X+1;irreduc(Phi);alias(omega=RootO f(Phi)); factor(Phi,omega);solve(Phi=0,X);

:= Φ + + + + X4 X3 X2 X 1 true ω

( ) + + + + X 1 ω ω2 ω3 ( ) − X ω2 ( ) − X ω3 ( ) − X ω

− + + 14

14

514

I 2 + 5 5 − − + 14

14

514

I 2 − 5 5, ,

− − − 14

14

514

I 2 − 5 5 − + − 14

14

514

I 2 + 5 5,

4) Nouvelle factorisation de P dans R[X].

P(X) = ( X – 1 )( X2 +

251+− X + 1 )( X

2 +

251+ X + 1 )

= ( X – 1 )( X2 + ϕ’.X + 1 )( X

2 + ϕ.X + 1 )

Par conséquent, pour des raisons de cygne (et de signe)

cos5

2π = 4

51+− , sin5

2π = 21

255+ , cos

54π = −

451+ , sin

54π =

21

255− .

Comme 5π et

54π sont supplémentaires, ainsi que

52π et

53π , on complète le tableau :

K 0 1 2 3 4 5

Cos5πk

1 4

51+ 4

51+− 4

51− −4

51+ − 1

Sin5πk

0 21

255−

21

255+

21

255+

21

255−

0

Tan5πk

0 525− 525+ − 525+ − 525−

0

On en déduit que : tan5π . tan

52π . tan

53π . tan

54π = ( 5 – 2 5 )( 5 + 2 5 ) = 5.

Cette formule peut être obtenue autrement :

Φ(1) = 5 = ( 1 − ω )( 1 − ω2 )( 1 − ω3

)( 1 − ω4 ) = 16. sin

5π . sin

52π . sin

53π . sin

54π

Φ(−1) = 1 = ( 1 + ω )( 1 + ω2 )( 1 + ω3

)( 1 + ω4 ) = 16. cos

5π . cos

52π . cos

53π . cos

54π

5) Calculons cos152π et sin

152π .

152π =

3π −

5π , donc cos

152π =

851+ +

43

255− et sin

152π = 3

851+ −

41

255− .

Page 109: Suite de Fibonacci, nombre d'or

109

6) Hommage à mon papa.

7. Nombre d’or et périmètres.

Notons B le périmètre du pentagone régulier enveloppe convexe de ( 1, ω, ω2, ω3

, ω4 ), A le

périmètre de l’étoile à cinq branches inscrite dans ce pentagone ( 1, ω2, ω4

, ω, ω3).

AB = ω

ω−−1.5

²1.5 = | 1 + ω | = 2.cos

5π = 2.

451+ =

251+ CQFD.

B. Deuxième partie.

8) Le polynôme cyclotomique ΦΦΦΦ est irréductible dans Q[X]. Maple l’affirme aussitôt… Voici deux méthodes fort distinctes.

1ère idée : Dans R[X], Φ(X) = ( X2 – 2cos

52π .X + 1 ).( X2

– 2cos5

4π .X + 1 )

a 4 diviseurs unitaires : 1 , X2 – 2cos

52π .X + 1 , X

2 – 2cos

54π .X + 1 et Φ(X).

Or aucun des polynômes X2 – 2cos

52π .X + 1 , X

2 – 2cos

54π .X + 1 n’appartient à Q[X], car

cos5

2π = 4

15− , cos5

4π = −4

51+ et 5 n’appartiennent pas à Q.

On en déduit que Φ n’a que deux diviseurs unitaires dans Q[X] : il est irréductible.

2ème idée : montrer directement qu’on ne peut écrire Φ = A.B, avec A ∈ Q[X] unitaire de deg 1 ou 2.

• A n’est pas de degré 1, autrement dit Φ n’a pas de racine rationelle p/q, (p, q) ∈ Z×N* , p ∧ q = 1.

On aurait en effet p4 + p

3q + p

2q

2 + pq

3 + q

4 = 0, donc q divise p

4 et p divise q

4, donc q = 1, p =

±1 ; or ±1 n’est pas racine de Φ.

• A n’est pas de degré 2, autrement dit on ne peut écrire

Φ = ( X2 + aX + b )( X

2 + cX + d ) , où (a, b, c, d) ∈ Q

4.

Page 110: Suite de Fibonacci, nombre d'or

110

Identifiant, il viendrait a + c = 1, b + ac + d = 1, ad + bc = 1, bd = 1. Donc c = 1–a , d = 1/b , puis

a/b + b(1−a) = 1 permet de tirer a en fonction de b : b = ±1 ou a = b

b+1 . Reportant ces valeurs

dans b + ac + d = 1, on obtient que b annule un polynôme. Or on montre comme précédemment que ce polynôme n’a pas de racines rationnelles. Le cas b = ±1 est également impossible.

Compléments : i) Il y a une 3ème idée, subtile mais byzantine, que je garde pour moi.

ii) L’irréductibilité de Φ découle aussi du critère d’Eisenstein, ou du théorème de Gauss relatif à l’irréductibilité sur Q de tous les polynômes cyclotomiques.. iii) E est une Q-algèbre de dimension 4, et un corps, obtenu au moyen de deux extensions quadra-

tiques successives, comme le montre la 1ère idée ci-dessus : Q ⊂ Q[ 5 ] ⊂ E, et dimQ E = 4 par mutiplicativité des dimensions.

9) Une première conséquence : Montrons que ∀A ∈ Q[X] A( ω) = 0 ⇔ Φ divise A.

Le sens ⇐ est facile : si A = B.Φ, A(ω) = B(ω).Φ(ω) = 0.

Le sens ⇒ l’est moins. Φ étant irréductible, si Φ ne divise pas divise A, Φ est premier avec A.

Alors (Bézout) il existe U et V dans Q[X] tels que 1 = A.U + Φ.V.

Substituant ω à X, il vient 1 = 0. Impossible.

Remarque : autre présentation. Φ étant irréductible est le polynôme minimal de ω sur le corps Q, c’est-à-dire le générateur unitaire de l’idéal annulateur de ω.

10) Première étude de E = x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

; a, b, c, d ∈ Q .

a) E est un sous-espace vectoriel de C considéré comme Q-espace vectoriel.

C’est en effet VectQ( 1, ω, ω2, ω3

).

b) Montrons que BBBB = ( 1, ω, ω2, ω3

) est une base de E.

Supposons a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

= 0, où a, b, c, d ∈ Q .

Introduisons le polynôme A(X) = a + b.X + c.X2 + d.X

3 . De deux choses l’une :

• Soit A est premier à Φ. Alors (Bézout) il existe U et V dans Q[X] tels que 1 = A.U + Φ.V.

Substituant ω à X, il vient 1 = 0. Impossible.

• Soit Φ divise A. Mais alors, pour des raisons de degré, A = 0 et a, b, c, d sont nuls. Cqfd

c) Montrons que E est un anneau intègre.

Comme ω5 = 1, il est clair que le produit de deux éléments de E appartient à E.

Comme E est déjà un sous-groupe et 1 ∈ E, E est un sous-anneau de C.

Et il hérite de l’intégrité de C.

11) E est un corps.

a) 1ère méthode, assez fumiste : Considérons, pour x ≠ 0, l’application mx : y ∈ E → x.y ∈ E. Cette application est Q-linéaire et injective, en vertu de l’intégrité de E. Comme E est de dimension finie, elle est bijective, et ∃y ∈ E x.y = 1. C’est dire que x est inversible.

b) 2ème méthode, plus profonde.

Soient x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

un élément non nul de E, A(X) = a + b.X + c.X2 + d.X

3 .

Si Φ divise A, pour des raisons de degré, A = 0 et a, b, c, d sont nuls ; impossible.

Donc A est premier à Φ. Alors (Bézout) il existe U et V dans Q[X] tels que 1 = A.U + Φ.V.

Substituant ω à X, il vient 1 = A(ω).U(ω), donc 1/x = U(ω).

Si R est le reste euclidien de U par Φ, il vient 1/x = R(ω). Cqfd. Cette méthode de calcul de 1/x est fondée sur l’algorithme d’Euclide étendu.

Page 111: Suite de Fibonacci, nombre d'or

111

Il découle de ceci, par double inclusion, que E = K .

12) Exemple.

> Phi:=x^4+x^3+x^2+x+1;DPhi:=diff(Phi,x);

:= Φ + + + + x4 x3 x2 x 1

:= DPhi + + + 4 x3 3 x2 2 x 1 > gcdex(Phi,DPhi,x,'A','B');A;B;

> alias(omega=RootOf(Phi));evala(1/(4*omega^3+3*omega ^2+2*omega+1)); ω

− + 15

ω15

ω2

13) Représentation matricielle de E.

a) Soit x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

∈ E.

L’endomorphisme mx de E a pour matrice M(x) =

−−−−−−−−−−−−

bacbdcdbcadbcbdcdabbccdda

dans la base BBBB.

b) L’application x ∈ E → mx ∈ LLLL(E) est un morphisme injectif d’algèbres, car

mx+y = mx + my , ma.x = a.mx , mx.y = mx o my , m1 = idE et mx = 0 ⇒ x = 0.

Comme u ∈ LLLL(E) → Mat(u, BBBB) ∈ M4(Q) est un isomorphisme d’algèbres, par composition, on voit

que l’ensemble des matrices

−−−−−−−−−−−−

bacbdcdbcadbcbdcdabbccdda

, où a, b, c, d décrivent Q, est une sous-algèbre

commutative de M4(Q), et un corps.

14) Groupe de Galois de K. Soit (G, o) le groupe des automorphismes de corps de K .

a) Soit s un élément de G.

Si x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

∈ E , s(x) = a + b.s(ω) + c.s(ω)2 + d.s(ω)

3 ,

car s laisse fixe chaque rationnel. De plus Φ(s(ω)) = s(Φ(ω)) = 0 , donc s(ω) ∈ ω , ω2 , ω3

, ω4 .

b) Montrons que G a 4 éléments. Le raisonnement précédent montre que G a au plus 4 éléments.

Si s(ω) = ω , s = s1 est l’identité e.

Si s(ω) = ω2 , s = s2 : x = a + b.ω + c.ω2

+ d.ω3 ∈ E → a + b.ω2

+ c.ω4 + d.ω ∈ E.

Si s(ω) = ω3 , s = s3 : x = a + b.ω + c.ω2

+ d.ω3 ∈ E → a + b.ω3

+ c.ω + d.ω4 ∈ E.

Si s(ω) = ω4 , s = s4 : x = a + b.ω + c.ω2

+ d.ω3 ∈ E → a + b.ω4

+ c.ω3 + d.ω2

∈ E.

Ces applications sont linéaires, bijectives, et telles que sk(1) = 1.

De plus : sk(ωp) = ωkp

, donc sk(ωp+q

) = sk(ωp).sk(ω

q) et par bilinéarité sk(x.y) = sk(x).sk(y)

c) Le groupe G est cyclique.

Soit σ = s2 l’élément de G défini par σ(ω) = ω2.

On a : (σ o σ)(ω) = ω4 , (σ o σ o σ)(ω) = ω8

= ω3 et (σ o σ o σ o σ)(ω) = ω16

= ω.

Autrement dit, σ2 = s4 , σ

3 = s3 , et G = e , σ , σ2

, σ3 .

1 − 145

x − + 15

x15

x2

Page 112: Suite de Fibonacci, nombre d'or

112

d) Matrices des éléments de G relativement à la base BBBB .

I =

1000010000100001

, Σ =

−−−−

0100011011000101

, Σ2 =

−−−−

0110101000100011

, Σ3 =

−−−−

1010100011001001

.

e) Sous-groupes de G.

Le groupe G étant cyclique à 4 éléments, admet trois sous-groupes e, e, σ2 et G.

15) Trace.

a) Trouvons deux polynômes U et V de Q[X] tels que ( X – 1 ).U + ( X3 + X

2 + X + 1 ).V = 1.

> gcdex(X-1,X^3+X^2+X+1,X,'U','V');U;V; 1

Maple donne U = −43 −

21 X −

41 X

2 , V =

41 .

b) Pour tout x ∈ K , posons S(x) = x − σ(x) et T(x) = x + σ(x) + σ2(x) + σ3

(x).

Je dis que Im T = Ker S = Q et Ker T = Im S.

On peut procéder matriciellement : S a pour matrice

−−

1100021011100100

, T a pour matrice

−−−

0000000000001114

.

> with(linalg): > S:=matrix(4,4,[0,0,1,0,0,1,1,-1,0,-1,2,0,0,0,1,1]); T:=matrix(4,4,[4,-1,-1,-1,0,0,0,0,0,0,0,0,0,0,0,0]) ; > colspan(T);kernel(S);

[ ], , ,4 0 0 0 [ ], , ,1 0 0 0

> kernel(T);colspan(S); , ,[ ], , ,1 0 0 4 [ ], , ,0 1 0 -1 [ ], , ,0 0 1 -1 , ,[ ], , ,0 0 -1 1 [ ], , ,0 1 -1 0 [ ], , ,1 1 2 1

Mais la solution la plus profonde passe par T o S = S o T = I − σ4 = O et − S o U(σ) + T o V(σ) = I.

Des premières égalités on déduit : Im T ⊂ Ker S , Im S ⊂ Ker T. De la seconde, on déduit : Ker S ⊂ Im T , Ker T ⊂ Im S.

Enfin, si x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

, T(x) = 4.a – b – c – d.

16) Norme. Pour x ∈ K , on pose N(x) = x.σ(x).σ2(x).σ3

(x).

a) Montrons que N(x) ∈ Q et que ∀x, y ∈ K N(x.y) = N(x).N(y).

La deuxième relation est évidente. La première découle de ce que σ(N(x)) = N(x).

Or les seuls éléments de K tels que σ(x) = x sont les rationnels, en vertu de 14.b).

b) Nouveau mode de calcul de 1/x lorsque x ∈ K−0 .

Si x est un élément non nul de K , on écrira x1 =

)()().²().( 3

xNxxx σσσ

.

17) Sous-corps de K.

a) Je dis que ∀x ∈ K σ2(x) = x , conjugué du complexe x.

En effet si x = a + b.ω + c.ω2 + d.ω3

, σ2(x) = a + b.ω4

+ c.ω3 + d.ω2

= x .

− − − 34

14

X2 12

X14

Page 113: Suite de Fibonacci, nombre d'or

113

b) Montrons que K ∩ R = a + b 5 ; a, b ∈ Q .

K ∩ R = Ker( I − σ2 ) n’est autre que le « corps fixé » de σ2

.

Ker( I − Σ2 ) = x = a + c.( ω2

+ ω3 ) ; (a, c) ∈ Q×Q = x = a + 2c.cos

54π ; (a, c) ∈ Q×Q

= a + b 5 ; a, b ∈ Q = Q[ 5 ], en vertu du calcul de cos5

4π mené en 4).

c) Soit L un sous-corps de K , distinct de Q et K .

En vertu de la formule de multiplicativité des dimensions 4 = dimQ K = dimQ L × dimL K .

On en déduit dimQ L = dimL K = 2.

L* = s ∈ G ; ∀x ∈ L s(x) = x est un sous-groupe de G (groupe « fixateur » de L ).

L = Q[θ] = a + b.θ ; (a, b) ∈ Q×Q , où θ est de degré 2 sur Q.

K = L [ζ] = c + d.ζ ; (c, d) ∈ L×L , où ζ ∈ K−L est de degré 2 sur L.

(1 , θ , ζ , θ.ζ) est une Q-base de K .

ζ a un polynôme minimal sur L de degré 2 : (X − ζ).(X − ζ’), et L* = e, τ , où τ(ζ) = ζ’.

Ainsi, L* est un sous-groupe à deux éléments de G ; ce ne peut être que e , σ2 .

Donc L ⊂ Q[ 5 ] et L = Q[ 5 ] par égalité des dimensions.

Ainsi Q ⊂ Q[ 5 ] ⊂ K sont les seuls sous-corps de K .

18) Enfin les valeurs propres !

a) La matrice M(ω) =

−−−−

1100101010011000

a pour polynôme caractéristique Φ (c’est d’ailleurs la matrice-

compagnon de Φ). Elle a donc pour valeurs propres ω, ω2, ω3

et ω4. Comme Φ est scindé dans K [X]

et que ces nombres sont distincts, M(ω) est diagonalisable dans M4(K ) :

∃P ∈ Gl4(K ) P−1

.M(ω).P = diag(ω, ω2, ω3

, ω4) .

Comme M(x) = a.I + b.M(ω) + c.M(ω)2 + d.M(ω)

3 , M(x) est diagonalisable dans M4(K ) et

P−1

.M(x).P = diag(x, σ(x), σ3(x), σ2

(x)) .

b) On en déduit aussitôt que T(x) = tr M(x) et N(x) = det M(x).

Exercice : théorème de Dedekind.

Soient x, y, z, t ∈ K . Montrer que si ∀u ∈ K x.u + y.σ(u) + z.σ2(u) + t.σ3

(u) = 0 ,

alors x = y = z = t = 0.

Exercice : théorème de Hilbert.

Soit x ∈ K . Pour u ∈ K on pose f(u) = u + x.σ(u) + x.σ(u).σ2(u) + x.σ(u).σ2

(u).σ3(u).

1) Montrer ∃u ∈ K f(u) = y ≠ 0.

2) Montrer l’équivalence N(x) = 1 ⇔ ∃y ∈ K−0 x = )(y

yσ .

Page 114: Suite de Fibonacci, nombre d'or

114

Récréation amoureuse… Dans un palais, soie et or, dans Ecbatane,

De beaux démons, des Satans adolescents, Au son d’une musique mahométane, Font litière aux Sept Péchés de leurs cinq sens.

Paul Verlaine, Crimen Amoris Le lecteur connaît La ronde, d’Arthur Schnitzler. Cette pièce en dix dialogues met en scène tour à tour la fille et le soldat, le soldat et la femme de chambre, la femme de chambre et le jeune homme, le jeune homme et la jeune femme, la jeune femme et le mari, le mari et la grisette, la grisette et l’homme de lettres, l’homme de lettres et l’actrice, l’actrice et le comte, le comte et la fille… Belle introduction aux propriétés du décagone régulier, ou du groupe cyclique Z/10Z !

A l’instar de Schniztler, plaçons cinq insectes amoureux aux sommets d’un pentagone régulier, chacun étant attiré par son voisin (Oui, je sais, 5 étant un nombre impair, les partisans de la Manif pour tous vont encore râler : après la parthénogénèse, voilà qu’il leur faut maintenant avaler une nouvelle couleuvre… Ah ! quel martyre !), et regardons-les évoluer. Leurs déambulations forment en termes savants un « système dynamique discret » fort bien décrit par cette figure que j’emprunte à Robert Vinvent (Géométrie du Nombre d’or, p. 62). Comment cela va se terminer, je vous le laisse à deviner…

> with(plots): > pentagone:=(r,h)->listplot([seq([r*cos(2*k*Pi/5+Pi/ 2+h*Pi/20), r*sin(2*k*Pi/5+Pi/2+h*Pi/20)],k=0..5)],thickness=2, color=COLOR(RGB, rand()/10^12, rand()/10^12, rand() /10^12)); > display(seq(pentagone(0.9^k,k),k=0..20),axes=none );

Page 115: Suite de Fibonacci, nombre d'or

115

16. Le nombre d’or en analyse. Nous aurons l’amour Dedans tous nos problèmes Et tous nos discours Finiront par « Je t’aime ! » Vienne vienne alors Vienne l’Âge d’or !

Léo Ferré

Nous allons indiquer ici quelques expressions du nombre d’or en analyse, sans approfondir le sujet. 16.1. Développement décimal.

> phi:=(1+sqrt(5))/2;evalf(phi,100);

:= φ + 12

12

5

1.618033988749894848204586834365638117720309179805762862135448622705\

260462818902449707207204189391138

Application : conversion approchée des miles en kilomètres.

Un mile vaut 1,60934 kilomètre, qui est grosso modo égal à ϕ. Comme Fn+1/Fn ≈ ϕ, 5 miles valent à

peu près 8 kilomètres, 8 miles valent 13 kilomètres, Fn miles valent à peu près Fn+1 kilomètres, 16.2. Algorithme quadratique.

Nous avons vu que la suite (qn), définie par q1 = 1 , qn+1 = 1 + nq

1 = f(qn), où f(x) = 1 + x1 ,

qui n’est autre que qn = n

n

FF 1+ , converge en spirale, à vitesse exponentielle, vers le nombre d’or.

La méthode de la tangente de Newton de résolution de x2 – x – 1 = 0 va permettre d’accélérer la

convergence. Considérons en effet la suite récurrente :

c0 = 2 , cn+1 = cn − 121

2

−−−

n

nn

ccc

= 121

2

−+

n

n

cc

= F(cn) , avec F(x) = 1212

−+

xx

.

> with(plots):f:=x->x^2-x-1:F:=x->(x^2+1)/(2*x-1): > g:=plot(f(x),x=-0.7..2.1,thickness=2): T:=c->[[c,0],[c,f(c)],[F(c),0]]: > B:=listplot([op(T(2)),op(T(F(2))),op(T(F(F(2))))],t hickness=2, color=blue):display(g,B);

Page 116: Suite de Fibonacci, nombre d'or

116

Théorème 1 : La suite (cn) tend en décroissant vers ϕ, de telle sorte que cn+1 − ϕ ≤ 21 (cn − ϕ)

2.

Preuve : Il est facile d’établir que F est croissante sur [ϕ, +∞[ et vérifie ∀x ≥ ϕ ϕ ≤ F(x) ≤ x.

On en déduit que (cn) est décroissante, minorée par ϕ.

Elle tend vers un nombre α ≥ ϕ vérifiant α = α − 1212

−−−

ααα

, qui n’est autre que ϕ.

De plus, cn+1 − ϕ = 121

2

−+

n

n

cc

− ϕ = 12)( 2

−−n

n

cc ϕ

≤ 12)( 2

−−ϕ

ϕnc ≤

21 (cn − ϕ)

2.

Corollaire : Pour tout n, 0 < cn − ϕ < 12 1

21

−+n .

En effet, 0 < c0 − ϕ = 2 − ϕ < 21 et en reportant 0 < c1 − ϕ < 32

1 , 0 < c2 − ϕ < 721 ,

et ainsi de suite par récurrence. La convergence est très rapide, le nombre de décimales exactes double à chaque itération, comme le montrent ces calculs :

> c:=2:for n from 1 to 6 do c:=F(c):[c,evalf(c,100)]; od; 53

1.6666666666666666666666666666666666666666666666666666666666666666\,

66666666666666666666666666666666667

3421

1.619047619047619047619047619047619047619047619047619047619047619\,

047619047619047619047619047619047619

1597987

1.6180344478216818642350557244174265450861195542046605876393110\,

43566362715298885511651469098277608916

35245782178309

1.6180339887499890970472967792907250532408395686746003436610 \,

69205516756346321848736795376597167803099

1716768017756510610209857723

1.618033988749894848204586838338166878717703891187710 \,

377694114386726135731548613408928010848234917071

407305795904080553832073954251728825683549488150424261

1.61803398874989484820458683436563811772\,

0309179805762869192919556391568827541984553077171804724988946

La condition initiale importe peu, pourvu que c0 > ½ (si c0 < ½, la suite tend vers ϕ’). Cependant le

choix de c0 = 2 s’avère très judicieux, car alors on constate que la suite (cn) est une suite extraite de

la suite (qn), plus précisément :

Proposition 2 : Pour tout n , cn = 12 +nq = 1

1

2

12

+

+ +

n

n

F

F .

Page 117: Suite de Fibonacci, nombre d'or

117

Cela se déduit par récurrence à l’aide des formules trouvées au § 3.2. Exercice ! 16.3. Développement en série du nombre d’or.

Théorème 3 : ϕ = 1 + 12

)1(

+∞

=

−∑

kk

k

k FF = 1 +

2.11 −

3.21 +

5.31 −

8.51 +

13.81 − …

Preuve : Exprimons (n

n

FF 1+ ) comme suite des sommes partielles d’une série alternée.

n

n

FF 1+ =

1

2

FF + )(

1

1

2 −

+

=−∑

k

k

k

kn

k FF

FF = 1 +

1

211

2

.

−+

=

−∑

kk

kkkn

k FFFFF

= 1 + 12

)1(

−=

−∑

kk

kn

k FF.

Comme la suite (nn FF 1

1+

) tend en décroissant vers 0, la série 12

)1(

+∞

=

−∑

kk

k

k FF converge en vertu du

critère des séries alternées (elle est aussi absolument convergente).

On retrouve derechef la convergence de la suite qn = n

n

FF 1+ .

Or on sait que (qn) tend vers ϕ.

Exercice 1 : Démontrer que 1

1

1 +

−+∞

=∑

nn

n

n FFF = 1, et, pour tout n > 0,

2

1+

+∞

=∑

kknk FF =

1.1

+nn FF.

Exercice 2 : A la suite x = (xn)n≥1 on associe la suite y = (yn)n≥1 = T(x) définie par

∀n ≥ 1 yn = 2

12211 ...

+

+−+++nn

nnnn

FFxFxFxFxF .

Démontrer que cette transformation linéaire est orthogonale, au sens de Polya-Szegö, t. 2, chap. VII, p. 106.

Théorème 4 ( E. Lucas, 1870 19 ) : nFn 20

1∑+∞

= =

257− .

Preuve : Nous allons déduire ce résultat de l’identité ∀x ∈ C |x| < 1 12

2

1 1+

−∑∞+

=n

n

x

x

n

= 2

2

1 xx− .

Formellement en effet 12

2

1 1+

−∑∞+

=n

n

x

x

n

= np

n p

x2)12(

1 0

++∞

=

+∞

=∑∑ = h

h

x2

1∑+∞

= = 2

2

1 xx− .

Cela découle de ce que tout entier pair 2h s’écrit de façon unique 2h = (2p + 1)2n, et de la théorie

des familles sommables.

Autre solution : noter que 12

2

1+

−n

n

x

x = 12

2

1+

−n

n

x

x − 1

1

2

2

1+

+

−n

n

x

x.

Il reste à appliquer cette formule à x = ϕ . 12

2

1+

−n

n

ϕϕ

= nF2.5

1 ( multiplier haut et bas par n2ϕ ).

Or 2

2

1 ϕϕ−

= 1

12−ϕ = ϕ

1 = − ϕ . Cqfd. Ne pas oublier de rajouter 1 au résultat final.

Remarque : On démontre dans Duverney (p. 60) que ∑+∞

=1

1n nF

∉ Q, et même ∉ Q[ 5 ].

19 On n’a pas fait que des conneries, en 1870. On a aussi fait des choses parfaitement inutiles.

Page 118: Suite de Fibonacci, nombre d'or

118

16.4. Développement du nombre d’or en produit infini .

Théorème 4 : ϕ = ∏+∞

=

−+

22 ))1(

1(n n

n

F = ( 1 + 21

1 )( 1 − 221 )( 1 + 23

1 )( 1 − 251 ) ( 1 + 28

1 ) ….

Preuve : Exprimons (n

n

FF 1+ ) comme suite des produits partiels d’un produit infini :

n

n

FF 1+ =

1

2

FF ∏

= −

+n

k kk

kk

FFFF

2 1

1

// = ∏

=

−+n

k k

kk

FFF

22

11. = ∏=

−+

n

k k

k

F22 ))1(

1( , en vertu de la formule de Cassini.

Je sais si quelqu’un a pensé à étudier la fonction F(x) = x∏+∞

=−

1

)1(n nF

x .

16.5. Développement du nombre d’or en fraction continue.

Rappelons que le nombre d’or ϕ est la racine > 0 de l’équation x2 – x – 1 = 0.

Il vérifie donc ϕ = 1 + ϕ1 , autrement dit c’est le point fixe > 0 de l’homographie

f(x) = 1 + x1 =

xx 1+ =

0111 .x , avec la notation matricielle des homographies.

Par suite, il vérifie ϕ = 1 + ϕ1 = 1 +

ϕ11

1+

= 1 +

ϕ11

111

++

= …

Si l’on note f(n)

(x) =

0111 n

.x =

+

1

1

nn

nn

FFFF .x =

1

1

+

++

nn

nn

FxFFxF , alors ϕ =

1

1

+

++

nn

nn

FFFF

ϕϕ ,

mais on tourne un peu en rond, car Fn+1.ϕ + Fn = ϕn+1 et Fn.ϕ + Fn−1 = ϕn

!

Proposition 5 : Le nombre d’or est le seul point fixe > 0 de l’homographie f(n)

(x) = 1

1

+

++

nn

nn

FxFFxF .

En effet, x = f(n)

(x) ⇔ Fn x2 + ( Fn−1 – Fn+1 ) x – Fn = 0.

⇔ Fn x2 − Fn x – Fn = 0 ⇔ x

2 − x – 1 = 0 ⇔ x = ϕ.

Proposition 6 : Le nombre d’or est la limite de la suite :

...111

1111

1

+++

+

Enfin, signalons l’une des deux formules concernant le nombre d’or, découvertes par Srinivasa Ramanujan, et qui figurent dans la fameuse lettre qu’il a envoyée à G. H. Hardy en 1913. Voici en quels termes Hardy commente l’impression que lui firent ces formules, lorsqu’il jeta un œil sur elles. « Je n’avais jamais vu auparavant quelque chose qui s’en approchât, même de loin. Il suffisait d’un coup d’œil pour se rendre compte qu’elles n’avaient pu être écrites que par un mathématicien de tout premeir rang. Elles sont sûrement vraies, car si elles ne l’étaient pas, personne n’aurait pu avoir assez d’imagination pour les inventer. »

Formule de Ramanujan : 2+ϕ − ϕ = 5ϕ − ϕ =

...11

11

6

4

2

5/2

+++

+−

π

π

π

π

ee

ee

.

Page 119: Suite de Fibonacci, nombre d'or

119

Cette formule n’est pas seulement belle, elle est aussi parfaitement inutile. Mais la beauté peut-elle être inutile ? Elle fournit en tout cas d’excellentes approximations du premier membre.

> Digits:=25;phi:=(1+sqrt(5))/2;alpha:=evalf(sqrt(phi +2)-phi); := Digits 25

:= α .284079043840412296028292 > a:=evalf(exp(-2*Pi/5));

:= a .2846095433360292801155687 > b:=evalf(exp(-2*Pi/5)/(1+exp(-2*Pi)));

:= b .2840790419938273387208597 > c:=evalf(exp(-2*Pi/5)/(1+exp(-2*Pi)/(1+exp(-4*Pi))) );

:= c .2840790438404123080539723 > d:=evalf(exp(-2*Pi/5)/(1+exp(-2*Pi)/(1+exp(-4*Pi)/( 1+exp(-6*Pi)))));

:= d .2840790438404122960282918

Ce développement en fraction continue est en fait un cas particuler d’une formule plus générale, la fraction continue de Rogers-Ramanujan, sur laquelle existe toute une littérature 20. 16.6. Nombre d’or et radicaux superposés.

Le nombre d’or ϕ est la racine > 0 de l’équation x2 – x – 1 = 0.

Il vérifie donc ϕ = ϕ+1 , et par conséquent

ϕ = ϕ+1 = ϕ++ 11 = ϕ+++ 111 = etc.

Nous allons démontrer que ϕ = ...1111 ++++ , en ce sens que :

Proposition 7 : Le nombre d’or est la limite de la suite de radicaux :

rn = 1...111 +++ ( n radicaux )

Preuve : Cette suite (rn) est donnée par la relation de récurrence r1 = 1 , rn+1 = nr+1 . Il est facile de montrer qu’elle est croissante, majorée par ϕ, puis qu’elle converge vers ϕ.

Cela découle de ∀x ∈ [1, ϕ] x ≤ x+1 ≤ ϕ.

De plus, la convergence est rapide, car h(x) = x+1 est 22

1 -contractante sur [1, ϕ].

Corollaire 1 : Pour tout ρ > 0, n2842 ... ρρρρ +++ tend vers ρ.ϕ quand n → +∞.

Corollaire 2 : Soit (un) une suite de réels > 0 vérifiant ∃ρ > 0 ∀n un ≤ n2ρ .

Alors la suite de radicaux superposés nuuuu ...210 +++ est convergente.

Preuve : Cette suite est croissante, et majorée. Il reste à conclure via la corollaire 1.

> with(plots): > h:=x->sqrt(1+x);p:=plot(h(x),x=-1..2,thickness=2,co lor=red): bis:=plot(x,x=0..2,color=black,thickness=2): v:=plot([1,y,y=0..h(1)],color=blue): a:=1:b:=0:L:=[]:for n from 0 to 6 do L:=[op(L),[a,h(a)],[h(a),h(a)]];a:=h(a):od: G:=listplot(L,color=blue):display(p,bis,v,G,axes= normal);

20 Cf. notamment Fraction continue de Rogers-Ramajuna (wikipedia) et Rogers-Ramaujan continued fraction (Wolfram Mathworld)

Page 120: Suite de Fibonacci, nombre d'or

120

Proposition 8 : 9 = ...333 86664442 +++ FFFFFFFF .

J’ai trouvé cette formule dans un livre d’exercices redoutables, d’une brutalité mathématique toute poutinienne21. J’imagine que Ramanujan trouverait cette formule évidente et la généraliserait aussitôt avec délices… 16.7. Résultats de transcendance.

Théorème (dit « de Hermite-Lindemann ») : Pour tout nombre algébrique a non nul, le nombre ae

est transcendant.

Ce théorème22 généralise à la fois le théorème d’Hermite sur la transcendance de e, et celui de

Lindemann sur la transcendance de π, car si π était algébrique, eiπ

serait transcendant, or il vaut −1.

Corollaire : Les nombres eϕ et ln ϕ sont transcendants.

La deuxième asserion se déduit du théorème par contraposition.

Théorème 2 : Si (an) est le mot infini de Fibonacci, le réel dont le développement binaire est 0, a0

a1 a2 … , c’est-à-dire x = ∑+∞

=+

012n

nna = [ ]∑

+∞

=1²2

1k

kϕ , est transcendant.

Ce résultat rentre dans un théorème plus général, démontré en 2007 par les français Boris Adamczewski et Yann Bugeaud : les nombres dont les chiffres en une base de numération donnée b sont b-automatiques (c’est-à-dire tels qu’il existe un procédé de calcul ne nécessitant qu’une mémoire finie) sont, soit des nombres rationnels, soit des nombres transcendants. 23 16.8. Formule de Moivre capillitractée.

Dans ce §, nous nous proposons de retrouver la formule de Moivre par la méthode de Laplace.

Considérons la fonction f définie sur R+ par f(s) = Fn pour n ≤ s < n + 1.

Elle vérifie ∀s ≥ 0 f(s + 2) – f(s + 1) – f(s) = 0 , f(s) = 0 pour 0 ≤ s < 1 , f(s) = 1 pour 1 ≤ s < 2.

Soit F(x) = ∫+∞

−0

).( dssfe xs la transformée de Laplace de f(x).

Nous la supposerons définie pour x assez grand.

21 Problèmes d’analyse réelle, de Makarov, Goluzina, Lodkin, Podkorytov (C&M) p. 27. 22 Démontré dans Daniel Duverney, Théorie des nombres (Dunod) § 12.5. 23 Jean-Paul Delahaye, A la recherche des nombres transcendants (Pour la science, juin 2020).

Page 121: Suite de Fibonacci, nombre d'or

121

∫+∞

− +0

).1( dssfe xs = ∫+∞ −−

1

)1( ).( dttfe tx = ex∫

+∞−

1).( dttfe xt = e

x∫

+∞−

0).( dttfe xt = e

x F(x)

∫+∞

− +0

).2( dssfe xs = ∫+∞ −−2

)2( ).( dttfe tx = e2x∫

+∞−

2).( dttfe xt = e

2x ( F(x) − ∫ −

2

1.dte xt )

= e2x

( F(x) + x

ee xx −− −2

) = e2x F(x) +

xex−1

La relation ∫+∞

− −+−+0

)].()1()2([ dssfsfsfe xs = 0 se traduit par :

( e2x

− e2x

− 1 ) F(x) + xex−1

= 0 ,

donc F(x) = x

ex 1−1

12 −− xx ee

= x1

xx

xx

eeee

21)1(

−−

−−

−−−

= 5

1 xe−−( xe ϕ−−1

1 − xe ϕ−−11 ) .

Or considérons la fonction g définie sur R+ par g(s) = rn pour n ≤ s < n + 1.

Elle a pour transformée de Laplace, tous calculs faits :

G(x) = ∫+∞

−0

).( dssge xs = … = )1(

1x

x

rexe

−−

.

Par conséquent F(x) = ∫+∞

−0

).( dsshe xs , où h(s) = 5

'nn ϕϕ − pour n ≤ s < n + 1.

On en induit que, pour tout naturel n, Fn = 5

'nn ϕϕ −.

Pour justifier cela rigoureusement, il faudrait montrer que F(x) est bien défini pour x assez grand (x > ϕ ) et invoquer un théorème assurant l’injectivité de la transformation de Laplace. Bref, il reste du boulot. Méthode capillitractée, sauf pour les afficionados du marquis Pierre Simon de Laplace et les enseignants manquant de bon sens. 16.9. Résultats divers.

Exercice : Démontrer que Arctan1

2

+

+

n

n

FF – Arctan

3+n

n

FF =

4π .

17. Le nombre d’or en analyse p-adique.

« Nobody’s perfect ! »

Joseph Staline

Je suis ignare en analyse p-adique, elle nécessite une longue accoutumance que je n’ai pas, aussi vais-je me contenter d’explorer le sujet. 17.1. Corps et anneaux dorés.

Il y a deux sortes de corps commutatifs K : ceux dans lesquels le polynôme X2 – X – 1 est scindé,

ceux dans lesquels il ne l’est pas. Les premiers seront dits « dorés », les seconds seront dits

« argentés ». Bien entendu, si K est un corps argenté, X2 – X – 1 se scinde dans un sur-corps de K .

Exemples : 1) C, R, A (nombres algébriques sur Q), E (nombres constructibles à la règle et au compas),

Q[ 5 ] sont dorés ; Q , Q[ 2 ] et Q[ 2 , 3 ] ne le sont pas.

2) F2 = Z/2Z n’est pas doré ; F4 est doré ; c’est d’ailleurs le corps de scindage de X2 – X – 1.

Page 122: Suite de Fibonacci, nombre d'or

122

Plus généralement, si K est de caractéritique 2, l’équation du second degré x2 – x – 1 s’écrit aussi

σ(x) = x + 1, où σ : x → x2 est l’endomorphisme de Frobenius de K ; c’est donc une équation

linéaire, donc la question est de savoir si 1 ∈ Im(I + σ).

3) Si p est premier, le corps Fp = Z/pZ est : • doré ssi p = 5 ou p ≡ 1 ou 9 ( mod 10 ) ; • argenté ssi p = 2 ou p ≡ 3 ou 7 ( mod 10 )

4) Les clôtures algébriques ΩΩΩΩp de Fp sont bien entendus dorées.

5) Le palais de Versailles est également doré, car le citoyen Louis XIV aimait le bling bling.

Plus généralement un anneau A sera dit doré s’il existe un élément x ∈ A tel que x2 – x – 1 = 0.

Un tel élément est inversible, d’inverse x – 1.

Proposition : Soient A et B deux anneaux. Si A est doré et s’il existe un homomorphisme d’anneaux f : A → B, alors B est doré. L’anneau A×B est doré ssi chacun des anneaux A et B est doré.

Exemples :

1) Tout anneau de caractéristique 5 est doré. En effet dans un tel anneau x2 – x – 1 = (x – 3)

2 .

2) Si K est un corps doré ayant deux nombres d’or a et b, l’anneau M2(K ) est doré. Ses nombres

d’or forment trois classes de similitude, les classes de

aa0

0 ,

ba0

0 ,

bb0

0 . La première et la

troisième sont des singletons.

3) Si K est un corps doré de caractéristique 5, l’anneau M2(K ) est doré. Ses nombres d’or forment

deux classes de similitude, les classes de

3003 et

3013 . La première est un singleton.

4) Si K est un corps argenté, l’anneau M2(K ) est doré. Ses nombres d’or forment une classe de

similitude, la classe de

0111 , qui est aussi celle de

1110 .

17.2. Remontée modulaire.

Dans ce §, nous allons répondre à la question : quels anneaux Z/pkZ, quels anneaux Z/nZ sont

dorés ? Combien ont-ils de nombres d’or ?

Il découle de ce qui précède que si Z/pk+1

Z est doré, il en est de même de Z/pkZ ; la réciproque est

fausse comme on va le voir pour p = 5.

• Z/2Z n’est pas doré, donc les Z/2kZ non plus.

• Z/5Z est doré, mais Z/25Z ne l’est pas, donc les Z/5kZ ( k ≥ 2 ) non plus.

En effet, s’il existe x ∈ Z tel que x2 – x – 1 ≡ 0 ( mod 25 ), alors x

2 – x – 1 ≡ 0 ( mod 5 ) donc

x ≡ 3 ( mod 5 ). Cherchons x sous la forme x = 3 + 5q et reportons.

Il vient 5 + 25.q + 25.q2 ≡ 0 ( mod 25 ), donc 1 + 5.q + 5.q

2 ≡ 0 ( mod 5 ), ce qui est impossible.

• Si p ≡ 3 ou 7 ( mod 10 ), Z/pZ n’est pas doré, donc aucun des Z/pkZ n’est doré.

• Si p ≡ 1 ou 9 ( mod 10 ), Z/pZ est doré et a deux nombres d’or ; je dis que chacun des anneaux

Z/pkZ est doré et admet exactement deux nombres d’or.

Démontrons cela par récurrence sur k.

S’il existe x ∈ Z tel que x2 – x – 1 ≡ 0 ( mod p

k+1 ), alors x

2 – x – 1 ≡ 0 ( mod p

k ) donc

x ≡ a ou b ( mod pk

), a et b étant les deux solutions de cette seconde congruence.

Page 123: Suite de Fibonacci, nombre d'or

123

Cherchons x sous la forme x = a + q.pk et reportons !

a2 – a – 1 + (2a – 1).q.p

k + q

2.p

2k ≡ 0 ( mod pk+1

)

Nous savons que a2 – a – 1 = A. p

k . (*)

Donc A + (2a – 1).q ≡ 0 ( mod p )

Or (*) implique que 4a2 – 4a – 4 = 4A.p

k , donc ( 2a – 1 )

2 = 5 + 4A.p

k .

Donc 2a – 1 est premier avec p, donc inversible modulo p.

Par conséquent, il existe bien q tel que A + (2a – 1).q ≡ 0 ( mod p ).

Idem si l’on remplace a par b. Chacune des deux solutions modulo pk génère une et une seule

solution modulo pk+1

.

Le théorème des restes chinois permet alors de conclure :

Théorème du nombre d’or : Pour que l’anneau Z/nZ soit doré, il faut et il suffit que les seuls diviseurs premiers de n soient congrus à 1 ou 9 modulo 10, ou 5 mais avec un exposant égal à 1. Le nombre de nombres d’or dans Z/nZ est f(n), où f est la fonction multiplicative donnée par :

f(2k) = 0 , f(p

k) = 0 pour p ≡ 3 ou 7 ( mod 10 ),

f(5) = 1 , f(5k) = 0 pour k ≥ 2 , f(p

k) = 2 pour p ≡ 1 ou 9 ( mod 10 ).

Corollaire : L’anneau des entiers p-adiques Zp est doré ssi p ≡ 1 ou 9 ( mod 10 ).

Maple confirme et concrétise ces résultats : > S:=(p,k)->msolve(x^2-x-1=0,p^k);

:= S → ( ),p k ( )msolve , = − − x2 x 1 0 pk

> S(2,1); > S(3,1); > S(5,1);

= x 3 > S(5,2); > S(7,1); > for k from 1 to 10 do S(11,k);od;

, = x 4 = x 8 , = x 37 = x 85

, = x 37 = x 1295 , = x 10612 = x 4030 , = x 77235 = x 83817 , = x 728021 = x 1043541 , = x 14900509 = x 4586663 , = x 190285048 = x 24073834

, = x 833361691 = x 1524586001 , = x 22054890910 = x 3882533692

> S(13,1); > S(17,1); > for k from 1 to 10 do S(19,k);od;

, = x 5 = x 15 , = x 43 = x 319 , = x 3653 = x 3207 , = x 30643 = x 99679 , = x 1011926 = x 1464174 , = x 33201213 = x 13844669 , = x 268430618 = x 625441122

Page 124: Suite de Fibonacci, nombre d'or

124

, = x 10994891486 = x 5988671556 , = x 175824301966 = x 146863395814 , = x 1437614186930 = x 4693452070872

> N:=38943844473566811703769405;ifactor(N);nops([msol ve(x^2-x-1=0,N)]); := N 38943844473566811703769405

( ) 5 ( ) 11 5 ( ) 19 4 ( ) 29 ( ) 31 3 ( ) 41 2 ( ) 59 ( ) 61 ( ) 71 256

17.3. Corps p-adiques dorés et argentés.

Rappelons que les corps p-adiques Qp sont des sur-corps non dénombrables de Q, de caractéristique nulle, et des complétés de Q pour la distance p-adique, comme R est un complété de Q pour la

distance usuelle. Qp est aussi le corps des fractions de Zp .

> with(padic);P:=x^2-x-1;

:= P − − x2 x 1 > for k from 1 to 20 do [ithprime(k),rootp(P,ithprime (k))];od;;

[ ]2 [ ]3 [ ]5 [ ]7

11 + + + + + + + + + 8 7 11 10 112 7 113 5 114 4 115 8 116 9 117 3 118 ( )O 119, ,[

+ + + + + + + + 4 3 11 3 113 5 114 6 115 2 116 117 7 118 ( )O 119 ]

[ ]13 [ ]17

19 + + + + + + + + + 15 1619 8 192 4 193 11 194 5 195 13 196 6 197 10 198 ( )O 199, ,[

+ + + + + + + + + 5 2 19 10 192 14 193 7 194 13 195 5 196 12 197 8 198 ( )O 199 ]

[ ]23

29 + + + + + + + + + 6 2129 4 292 28 293 14 294 295 28 296 28 297 6 298 ( )O 299, ,[

+ + + + + + 24 729 24 292 14 294 27 295 22 298 ( )O 299 ]

31 + + + + + + + + 19 2431 18 312 30 313 22 315 20 316 29 317 22 318 ( )O 319, ,[

+ + + + + + + + 13 631 12 312 30 314 8 315 10 316 317 8 318 ( )O 319 ]

[ ]37

41 + + + + + + + + + 7 2241 19 412 10 413 28 414 22 415 9 416 25 417 40 418 ( )O 419, ,[

+ + + + + + + + 35 1841 21 412 30 413 12 414 18 415 31 416 15 417 ( )O 419 ]

[ ]43 [ ]47 [ ]53

59 + + + + + + + + + 26 5359 25 592 45 593 36 594 51 595 22 596 5 597 21 598 ( )O 599, ,[

+ + + + + + + + + 34 559 33 592 13 593 22 594 7 595 36 596 53 597 37 598 ( )O 599 ]

61 + + + + + + + + 44 3461 17 612 43 613 59 615 5 616 16 617 52 618 ( )O 619, ,[

+ + + + + + + + + 18 2661 43 612 17 613 60 614 615 55 616 44 617 8 618 ( )O 619 ]

[ ]67

71 + + + + + + + + + 63 4571 57 712 63 713 26 714 65 715 40 716 20 717 16 718 ( )O 719, ,[

+ + + + + + + + + 9 2571 13 712 7 713 44 714 5 715 30 716 50 717 54 718 ( )O 719 ]

Page 125: Suite de Fibonacci, nombre d'or

125

Au vu de ces réponses il semble que Q11, Q19, Q29, Q31, Q41, Q59, Q61, Q71 soient dorés, les autres argentés.

Théorème : Soit p un nombre premier ; le corps Qp est : doré ssi p ≡ 1 ou 9 ( mod 10 ) ; argenté ssi p = 2, 5 ou p ≡ 3 ou 7 ( mod 10 )

Preuve : Cela découle de l’étude faite en 17.2., mais cela rentre dans un résultat général, le lemme

de Hensel. Les nombres d’or, s’ils existent, sont des éléments de Zp, et j’imagine qu’il y a des méthodes de Newton p-adiques pour les approximer de façon efficace. Je renvoie à Yvette Amice, Les nombres p-adiques (Puf) corollaire 2.5.9. p. 61 et Jean-Pierre Serre, Cours d’arithmétique supérieure (Puf), chap II, § 2.

Et maintenant, passons aux choses sérieuses… ____________ « L’économie est une science exacteL’économie est une science exacteL’économie est une science exacteL’économie est une science exacte !!!! »

Page 126: Suite de Fibonacci, nombre d'or

126

Quelques notices biographiques Leonardo Bonacci, dit Bigollo, dit Fibonacci

« On a beau enterrer Pythagore. Le sol qui le reçoit ne portera pas spontanément le fruit mathématique. »

Jean-Toussaint Desanti Fils de Guglielmo Bonacci, marchand et notaire public des douanes pour le compte des marchands de la république maritime de Pise, Leonardo Bonacci naît à Pise vers 1175. Il rejoint son père à Bougie, port de Kabylie et centre commercial et intellectuel, et c’est là qu’il commence sa formation mathématique. Puis il voyage sur tout le pourtour méditerranéen (Egypte, Syrie, Sicile, Provence, Grèce…) pour le compte de son père, et approfondit ses connaissances. A-t-il appris l’arabe ? A-t-il rencontré des mathématiciens arabes, et étudié leurs traités ? C’est plus que probable.

De retour à Pise en 1198, il se surnomme lui-même « Leonardo Bigollo », et publie en 1202 un traité de calcul, le Liber Abaci, dans lequel il introduit les chiffres indo-arabes et la notation algébrique, les jugeant plus pratiques que les chiffres romains utilisés jusque là. Si aucun exemplaire de l’ouvrage de 1202 ne nous est parvenu, une deuxième édition, augmentée, est publiée en 1228, avec une préface rédigée en 1227 et dédiée à Michael Scot. Elle comporte 15 chapitres d’inégales longueurs dont voici les titres :

Chapitre 1 : Sur la reconnaissance des neuf figures indiennes et la manière d’crire tous les nombres Chapitre 2 : Sur la multiplication des nombres entiers Chapitre 3 : Sur l’ddition des nombres Chapitre 4 : Sur la soustraction d’n nombre inférieur à un autre supérieur Chapitre 5 : Sur la division de nombres entiers Chapitre 6 : Sur la multiplication de nombres entiers par fractions Chapitre 7 : Sur l’addition, la soustraction et la division de nombres avec fractions et la réduction de différentes parties à une seule Chapitre 8 : Trouver la valeur d’une marchandise par la méthode principale Chapitre 9 : Sur les changements de valeur d’une marchandise et autres questions similaires Chapitre 10 : Sur les entreprises et leurs membres Chapitre 11 : Sur les conversions monétaires Chapitre 12 : Sur la solution à de nombreux problèmes Chapitre 13 : Sur la méthode « elchataym » (de la double position) et la façon de résoudre la plupart des problèmes mathématiques Chapitre 14 : Sur la façon de trouver des racines carrées et cubiques, sur la multiplication, la division et la soustraction entre elles, et sur le traitement de binomiales et de leurs racines Chapitre 15 : Sur des règles géométriques pertinentes et sur des problèmes d’algèbre et « almuchabala » (w'a-al-muqabalah : élimination de facteurs communs dans les coefficients).

Par la suite, Leonardo publie des traités de comptabilité, de géométrie et d’arithmétique24, et entre en contact avec les intellectuels de la cour de Palerme, maître Dominique, maître Jean de Palerme, Michel Scot. En juillet 1226, alors qu’il prépare, non sans difficultés, la Sixième croisade, l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen est accueilli à Pise. Qu’au milieu de soucis de tous ordres, tant avec la papauté qu’avec les cités lombardes, Frédéric II ait trouvé le temps de se poser et de faire des mathématiques, voilà qui suscite l’admiration des historiens, et la mienne, huit siècles après sa mort... Frédéric a eu plusieurs entretiens avec Leonard sur des questions de théorie des nombres. En souvenir de ces rencontres, Léonard lui dédiera son Liber Quadratorum (Traité des

24 En 1225 il donne 1.22.7.42.33.4. (en base 60) pour une valeur approchée de la racine positive de l’équation

x3 + 2x

2 + 10 x = 20, excellente approximation, mais on ne sait comment il l’obtint.

Page 127: Suite de Fibonacci, nombre d'or

127

nombres carrés) paru vers 1230 25. Nous ne savons rien sur les années ultérieures, si ce n’est qu’en 1241, la République de Pise attribue un salaire annuel de vingt lires au « sage et discret Maître Léonardo Bigollo » (« magister Leonardo discretus Bigollo et sapiens ») en reconnaissance des services rendus à la cité et aux citoyens, en qualité de comptable. Il est sans doute mort peu après.

En résumé, s’il est surtout connu aujourd’hui pour la suite qui porte son nom, Léonard de Pise, dit Bigollo, dit Fibonacci, fut l’un des acteurs majeurs de la Première renaissance européenne, celle du XIIIème siècle, interrompue par la Grande peste du XIVème siècle : il a introduit les mathématiques arabes en Occident. Ce surnom de « Bigollo » que cet Ulysse mathématicien s’est choisi à son retour de voyage, que veut-il dire au juste ? Mon ami Jean-Louis Marrou pense que « bigollo » désigne un bâton courbé avec des crochets pour transporter des seaux d’eau, ou des plateaux de fruits, en équilibrant le poids sur les épaules, une palanche en somme. Léonard aurait transporté l’eau, ou le fruit, mathématique, d’une rive à l’autre de la Méditerranée. Belle et forte image, qui résume en un mot la vie et l’œuvre de ce savant discret, oublié pendant six siècles.

Le père de l’apiculture moderne : Jan Dzierzon Jan Dzierżon (1811 – 1906), intellectuel polonais de Silésie, et prêtre catholique, est surtout connu comme naturaliste et apiculteur. Il a découvert la reproduction asexuée des abeilles, fondé plusieurs sociétés d’apiculture en Silésie et reçu de nombreuses distinctions pour ses travaux scientifiques. Par ses découvertes et ses innovations, il est souvent considéré comme le père de l’apiologie et de l’apiculture moderne. Les ruches actuelles sont dérivées de ses conceptions.

Jan Dzierżon est né dans une vieille famille polonaise de Lowkowitz (Łowkowice). Elève de l’école publique de Lowkowitz, il part en 1822 au lycée de Breslau (Wroclaw). Il en sort en 1830 major de sa promotion et commence des études de théologie, de mathématiques, d’astronomie et d’histoire à l’université. Diplômé de la faculté de la théologie catholique de Breslau, il est ordonné prêtre en 1834, et obtient en 1835 la cure de la paroisse de Karlsmarkt (Karłowice), en Basse-Silésie. Il mène simultanément des recherches sur la vie des abeilles et crée un cercle d’apiculture, qui deviendra plus tard la Société d’apiculture.

En 1868, Dzierżon prend sa retraite de curé. En 1870, le Concile Vatican I énonce le dogme de l’infaillibilité pontificale, soutient le concept de révélation dans le domaine scientifique et s’oppose au panthéisme, au matérialisme et au rationalisme. Jan Dzierżon ne cache pas son opposition au nouveau dogme. Lorsque l’Église catholique demande à chaque prêtre de signer un engagement personnel de loyauté envers les dispositions de Vatican I, il dénonce dans les colonnes de la

25 « Lorsque, ô Seigneur Frédéric, prince très glorieux, maître Dominique m’amena à Pise, aux pieds de Votre Excellence, maître Jean de Palerme, m’ayant rencontré, me proposa la question, qui n’appartient pas moins à la géométrie qu’au nombre, de trouver un nombre carré qui, augmenté ou diminué de cinq, fait toujours naître un nombre carré. [...] Ayant d’ailleurs appris [...] que Votre Majesté avait daigné lire le livre que j’avais écrit sur les nombres, et qu’il Lui plaisait parfois d’entendre les subtilités relatives à la géométrie, je me suis rappelé la question que je viens d’énoncer et qui m’avait été proposée à Votre cour par Votre philosophe. J’en ai pris le sujet, ai entrepris de composer le présent ouvrage, et ai voulu l’intituler Le Livre des nombres carrés ».

Page 128: Suite de Fibonacci, nombre d'or

128

Schlesische Zeitung (Journal de Silésie) le dogme de l’infaillibilité pontificale. Cela lui vaut d’être excommunié le 30 octobre 1873.

Exclu de l’Église catholique, Jan Dzierżon voit ses conditions de vie se détériorer à Karlsmarkt. Aussi décide-t-il en 1874 de retourner dans sa famille, à Lowkowitz. Il y poursuit ses travaux sur les abeilles. À partir de 1885, il vit avec son frère dans une petite maison avec un jardin, menant une vie d’ermite tout en étant reconnu par la communauté scientifique mondiale. Il s’éteint le 26 octobre 1906 à 95 ans, et repose au cimetière de Łowkowice. La maison où il a vécu ses dernières années a été aménagée en musée.

Dès 1835, Jan Dzierżon a émis la théorie selon laquelle le faux-bourdon (abeille mâle) se développerait à partir d’œufs non fécondés, et donc aurait une mère mais pas de père, alors que l’abeille femelle serait, elle, issue d’œufs fécondés. Il met par là-même en évidence le phénomène de la parthénogenèse chez les abeilles. Cette théorie, publiée en 1845, s’est heurtée d’emblée à une opposition farouche et quasi religieuse jusqu’au milieu du XXe siècle. C’était en effet un dogme répandu, jusque dans les milieux scientifiques, que tout être animé se devait d’avoir une mère... et un père. Voilà qui nous rappelle des polémiques récentes…

Dzierżon révolutionne l’élevage des abeilles, publie son propre journal spécialisé sur ce thème et, en 1838, conçoit la première ruche à cadres mobiles, qui permet d’accéder aux alvéoles sans détruire la structure de la ruche. Il établit la distance correcte entre les cadres comme étant d’un pouce et demi du centre d’une barre supérieure au centre de la suivante.. Dans son rucher, il étudie la vie sociale des abeilles et construit plusieurs ruches expérimentales. En 1848, il remplace dans son rucher les bandes de bois pour les barres supérieures mobiles par des cannelures de la taille 8 x 8 mm dans les parois latérales. Ses innovations trouvent rapidement des adeptes en Europe et en Amérique du Nord. En 1854, il découvre le mécanisme de la sécrétion de la gelée royale et son rôle dans le développement des reines.

Les innovations introduites par Dzierżon dans le métier d’apiculteur ont permis de son temps à 400 familles d’avoir leur propre rucher. Mais il a participé également à l’innovation en agronomie, par exemple en introduisant dans son village la culture du lupin. Au total, il a écrit 26 ouvrages scientifiques, et plus de 800 articles, pour la plupart traduits dans d’autres langues ; on retiendra notamment « La nouvelle apiculture améliorée » et « Compléments pour la théorie et la pratique du nouvel apiculteur ».

Un prof de taupe diablement créatif : Edouard Lucas

« Le jeu est indispensable à l’esprit pour qu’il construise ses savoirs. »

Edouard Lucas

Edouard Lucas (1842-1891) naît à Amiens dans une famille modeste (son père est tonnelier). Il fait ses études à l’école des Frères, et reçoit une bourse communale pour étudier au lycée impérial (auj. lycée Louis Thuillier). Il prépare les grandes écoles à Douai et entre à l’Ecole normale supérieure en 1861, sur les conseils de Pasteur, dans la même promotion que Gaston Darboux. Il est reçu second à l’agrégation de mathématiques, derrière celui-ci. À sa sortie de l’Ecole en 1864, il est affecté à l’Observatoire de Paris comme astronome-adjoint, sous la direction de Le Verrier, dont il supporte mal l’autoritarisme ; il démissionne en 1869. Durant la guerre de 70, Lucas sert dans l’artillerie comme officier. Après la défaite, il obtient une chaire de mathématiques spéciales à Moulins de 1872 à 1876 ; c’est là qu’il épouse en 1873 Marthe Boyron. Puis il est nommé à Paris, au lycée Charlemagne (1877-1879 et 1890-1891), et au lycée Saint-Louis (1879-1890).

Edouard Lucas est surtout connu pour avoir énoncé et résolu de nombreux problèmes de combinatoire et théorie des nombres, réussissant avec brio à conjuguer mathématiques sérieuses et jeux mathématiques. Il s’intéresse aux travaux du dessinateur amiénois Edouard Gand (1815-1891) sur la géométrie des satins, et publie une brochure sur les règles à suivre pour construire tous les satins réguliers possibles. En 1873, il établit que la somme des carrés des n premiers entiers est un carré ssi n = 1 ou 24. Il s’intéresse à la suite de Fibonacci (c’est lui qui baptisa "nombres de

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Fibonacci" les éléments de cette suite) et à la suite de Lucas qui lui est associée, et obtint sur ces suites de très profonds résultats ; il démontre en 1876 que pgcd(F(a), F(b)) = F(pgcd(a, b)). Il donne un important et pratique test de primarité des nombres de Mersenne, d’où il découle que le nombre

de 39 chiffres 2127

−1 est premier : la démonstration de ce résultat lui aurait demandé 300 h. de travail. Pour ce faire, Lucas se servit d’un échiquier inspiré des métiers à tisser, et qui travaillait en base 2 ; il collabora avec H. Genaille à la construction d’une machine permettant de tester la primarité des nombres de Mersenne, mais cette machine n’a pas été retrouvée. Il publia Application de l'arithmétique à la construction de l'armure des satins réguliers (1867), Recherche sur l'analyse indéterminée et l'arithmétique de Diophante (1873). Ses Récréations mathématiques (1881) sont un classique du genre, et sa Théorie des nombres (1891) est toujours éditée chez Blanchard. C’est lui qui le premier propose et étudie le problème des tours de Hanoï et le puzzle qui porte son nom.

En 1891, l’Association française pour l’avancement des sciences tient son congrès à Marseille, avec comme thème principal l’hygiène. Lucas y préside les travaux des sections regroupant les mathématiques, la mécanique, la géodésie et l’astronomie. Il y présente des travaux de cryptographie du capitaine Bazeries. Un accident stupide survient au cours d’un dîner, lors d’une excursion des congressistes en Provence : une serveuse laisse échapper une pile d’assiettes ; un morceau de porcelaine blesse Lucas à la joue. Celui-ci saigne abondamment. A son retour à Paris, un érysipèle26 se déclare et l’emporte en quelques jours, à 49 ans. Lucas avait perdu sa femme en 1882 et laissait deux enfants. Il venait de publier le premier volume de sa Théorie des nombres (quatre volumes étaient prévus) et la seconde édition de ses Récréations mathématiques. Delannoy, Laisant et Lemoine furent chargés de ranger ses papiers mathématiques. Un médecin philomathe belge, Edouard Zeckendorf Édouard Zeckendorf (Liège, 1901 – Liège, 1983) était un médecin militaire belge, et philomathe.

Après des études de médecine à l’université de Liège, Zeckendorf obtient son doctoral en 1925 et intègre le corps médical de l’armée belege. De 1930 à 1940, il dirige l’hôpital militaire Saint-Laurent de Liège. A la capitulation de l’armée belge, le 28 mai 1940, il est fait prisonnier, et interné dans des camps d’officiers jusqu’en 1945. En 1949-1950, il dirige la mission belge auprès de la commission des Nations-Unis pour l’Inde et le Pakistan, chargée de l’inspection de la ligne d’armistice. Il prend sa retraite de l’armée en 1957 avec le grade de colonel.

Zeckendorf a participé régulièrement, jusqu’à sa mort, aux réunions mensuelles de la Société royale des sciences de Liège, dont il était membre associé depuis 1957. Entre 1949 et 1978, il a écrit de nombreux articles mathématiques, la plupart publiés dans le Bulletin de la société royale des sciences de Liège. Sa contribution la plus connue est le théorème prouvant l’existence et l'unicité de la représentation d’un entier positif comme somme de nombres de Fibonacci ou de nombres de Lucas non consécutifs. Par exemple, on a : 71 = 55 + 13 + 3 , 1111 = 987 + 89 + 34 + 1. Ce résultat était connu sous le nom de « théorème de Zeckendorf », dès 1952, mais ne fut pubié par son auteur qu’en 1972. Ce théorème a inspiré Paul Braffort (1923-2018), mathématicien et poète oulipien, qui les a utilisés dans son recueil « Mes Hypertropes ». J’avoue être peu sensible à cette poésie-là. L’encyclopédiste des suites d’entiers, Neil Sloane Neil James Alexander Sloane, né en 1939 à Beaumaris, sur l’île galloise d’Anglesey, est un mathématicien britannico-américain.

Ses principales contributions concernent la combinatoire, les codes correcteurs et les empilements de sphères, mais il est surtout connu pour la création et la maintenance de l’Encyclopédie en ligne des suites de nombres entiers. Ce qui était au départ en 1995 une extension internet de son encyclopédie papier et était hébergée par son employeur est devenu une institution de la

26 Maladie infectieuse à streptocoque caractérisée par une inflammation du derme facial.

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communauté mathématique, propriété d’une fondation à but non lucratif pour continuer à être accessible et à s’améliorer après sa mort grâce à ses centaines de contributeurs bénévoles. Elle contient plus de 200000 suites.

Sloane a obtenu un B.A. à l’université de Melbourne en 1960, puis un Ph.D à l’université Cornell en 1967, avec un mémoire intitulé Lengths of Cycle Times in Random Neural Networks et encadré par Wolfgang Fuchs. Sloane est entré aux Labotaroires Bell en 1968 et en est devenu fellow en 1998. Il est aussi fellow de l’IEEE et membre de la National Academy of Engineering. C’est aussi un grand amateur d’escalade et il a coécrit deux guides sur l’escalade dans le New Jersey.

Il a reçu le prix Claude Shannon en 1998 et la médaille Richard Hamming en 2005. En 2008 il est lauréat du prix Robbins pour l’article « The on-line encyclopedia of integer sequences », Notices of the American Mathematical Society, 50:912-915, 2003. En 2013, il a reçu le prix Polya décerné par la Mathematical Association of America, pour son article « Carryless Arithmetic Mod 10 » publié dans The College Mathematics Journal, Vol. 43:1,(2012), 43-50. ____________

Bibliographie

Edouard Lucas : Théorie des nombres, chap XVIII p. 308-221 (Albert Blanchard) G. Hardy & E. Wright : Theory of numbers, p. 140-150 et 223. Waclaw Sierpinski : 250 problèmes de théorie des nombres, p. 22 Louis Comtet : Analyse combinatoire, t. 1, p. 57, n° 31 p. 98. George Polya & Gabor Szegö : Problems and theorems in Analysis, t. 2, p. 106, 138 Jean-Paul Delahaye : La suite de Fibonacci et ses suites (Pour la Science, août 2017) Marius Cleyet-Michaud : Le nombre d’or (Que sais-je n° 1530, 1982) Yvonne et René Sortais : Géométrie de l’espace et du plan (p. 361-386) (Hermann) Robert Vincent : Géométrie du nombre d’or (Chalagam) Patrice Naudin, Claude Quitté : Algorithmique algébrique (Masson, 1992) Donald Knuth : Fundamental algorithms (Addison-Wesley), p. 78-86 G. Godefroy : L’aventure des nombres (O. Jacob), p. 207-208. N. Vorobiev : Caractères de divisibilité, suite de Fibonacci (éd. de Moscou)

Roger Cuculière : Représentation diophantienne des nombres de Fibonacci, bulletin 342 de l’APM, p. 31 à 40 (1984).

Jean-Marc Lapierre : Etude modulaire de la suite de Fibonacci Daniel Duverney : Théorie des nombres (Dunod) Problème de l’X M’ 1980, Problème de Centrale P’ 1982 Alain Zalmanski : Les trésors inépuisables de la suite de Fibonacci (Tangente, janvier 2011)

Georges Ifrah : Histoire universelle des chiffres (Robert Laffont) Wentworth d’Arcy Thompson : Formes et forces Pierre Brémaud : Le dossier Pythagore (Ellipses) Ernst Kantorowicz : L’empereur Frédéric II (Gallimard) Pierre Boulle : L’étrange croisade de l’empereur Frédéric II (Flammarion) Henri Vincenot : Le pape des escargots. Gaston Bachelard : La flamme d’une chandelle (1961) Anthologie de l’OuLiPo (Poésie Gallimard) Paul Braffort : Mes Hypertropes

Encyclopedia universalis : Fibonacci, Hyménoptères, Phyllotaxie, Spirales, Plantefol Wikipedia : Fibonacci, Liber abaci, Liber quadratorum,

Suite de Fibonacci, Nombre d’or, L’anneau des entiers de Q[ 5 ], Fraction continue de Rogers-Ramanujan, Suite de Jacobsthal Jan Dzierzon, Edouard Lucas, Edouard Zeckendorf, Neil Sloane

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Poèmes fibonacciens Le serpent qui danse

Que j’aime voir, chère indolente, De ton corps si beau, Comme une étoffe vacillante, Miroiter la peau !

Sur ta chevelure profonde Aux âcres parfums, Mer odorante et vagabonde Aux flots bleus et bruns,

Comme un navire qui s’éveille Au vent du matin, Mon âme rêveuse appareille Pour un ciel lointain.

Tes yeux, où rien ne se révèle, De doux ni d’amer, Sont deux bijoux froids où se mêle L’or avec le fer.

A te voir marcher en cadence, Belle d’abandon, On dirait un seprent qui danse Au bout d’un bâton.

Sous le fardeau de ta paresse Ta tête d’enfant Se balance avec la mollesse D’un jeune éléphant.

Et ton corps se penche et s’allonge Comme un fin vaisseau Qui roule bord sur bord et plonge Ses vergues dans l’eau.

Comme un flot grossi par la fonte Des glaciers grondants, Quand l’eau de ta bouche remonte Au bord de tes dents,

Je crois boire un vin de Bohême, Amer et vainqueur, Un ciel liquide qui parsème D’étoiles mon cœur !

Charles Baudelaire ( Les Fleurs du mal, Spleen et idéal, XXVIII 27 )

27 Les Fleurs du mal contiennent un autre poème avec alternance d’octosyllabes et de pentasyllabes, L’amour et le crâne (Fleurs du mal, CXVII).

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Je ne sais pourquoi…

Je ne sais pourquoi Mon esprit amer D’une aile inquiète et folle vole sur la mer. Tout ce qui m’est cher, D’une aile d’effroi Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ? Mouette à l’essor mélancolique, Elle suit la vague, ma pensée, A tous les vents du ciel balancée, Et biaisant quand la marée oblique, Mouette à l’essor mélancolique. Ivre de soleil Et de liberté, Un instinct la guide à travers cette immensité. La brise d’été Sur le flot vermeil Doucement la porte en un tiède demi-sommeil Parfois si tristement elle ciie Qu’elle alarme au lointain le pilote, Puis au gré du vent se livre et flotte Et plonge, et l’aile toute meurtrie Revole, et puis si tristement crie ! Je ne sais pourquoi Mon esprit amer D’une aile inquiète et folle vole sur la mer. Tout ce qui m’est cher, D’une aile d’effroi Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?

Paul Verlaine, Sagesse, III. VII De retour de Bougie

Je Suis Parti En bateau Rejoindre mon père, Scribe et directeur de la douane, Dans un comptoir de Kabylie appelé Bougie. Les marchands m’ont appris l’art du calcul avec les neuf chiffres indiens et le signe Arabe Zéphirum. Au retour de mes voyages, J’écrivis ce fameux traité Liber Abaci : Le calcul Rendu Si Simple.

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La palanche

Oui, Tel Ulysse Le Crétois, D’une rive à l’autre De la mer Méditerranée, Tu les as appris et transportés dans ton cerveau, Sur tes épaules de Darwin, ô discret Léonard, nombres, calculs, équations. A ton retour au pied de la tour déjà penchée, Tu t’es surnommé « Bigollo » : Un simple porteur De palanche De fruits Et D’eau.

L’empereur et le mathématicien

Un Jour, A Pise, Mon ami L’empereur Frédéric, Toujours Auguste et philomathe, Me rendit visite afin de se faire expliquer Les chiffres indiens venus d’Orient, ainsi que la reproduction des lapins. « J’ai suivi tes calculs, dit le despote éclairé, Mais, vois-tu, mon pire ennemi, Pour se reproduire, Comment diable Fait-il, Le Pape ? »

La suite de Fibonacci

Un Plus Un font Deux amis Deux plus un, trois frères. Trois plus deux, l’étoile de mer Cinq plus trois font le tour du cube et de l’octogone Huit plus cinq, ô Gérard de Nerval !, ta treizième chimère est encor la première ? Treize plus huit âge tendre et fin de l’éphébie, Vingt-et-un et treize, âge mûr ? Les nombres suivants Dans l’azur Sans fin Se Perdent…

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Spirale d’or

Les Nombres Entiers De la suite De Fibonacci Ont semé tant de théorèmes Modulaires, combinatoires, hyperboliques ! Ils s’enroulent en spirales géométriques obéissant au nombre d’or, Nombre magique et fascinant, qui contient en lui, Dans sa divine proportion, Dit le grand Phidias, L’harmonie Sublime. Du Monde.

Gloire à Jan Dzierzon

La Guêpe, L’abeille, La fourmi, Les hyménoptères Ont vraiment de drôles de mœurs Sexuelles : parthénogénèse arrhénotoque ! La femelle nait d’un œuf fécondé, elle a donc un papa et une maman, Mais un œuf non fécondé donne un mâle sans père. Qu’en pense la manif pour tous ? Des apiculteurs, Jan Dzierzon, Vous fûtes Le Prince.

Erotique arrhénotoque

Le Mâle N’a pas De papa, Mais une maman. La femelle au contraire a deux Géniteurs, maman et papa, hétéros bien sûr ! Les savants nomment cela parthénogénèse arrhénotoque et facultative, Un mâle donc a deux grands-parents et trois aîeux, Cinq bisaïeux, huit trisaïeux… De Fibonacci A Dzierzon Il n’est Qu’un Pas.

Pierre-Jean Hormière

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Georges Seurat, La parade de cirque

Le Fibonnet de Marie-Pierre et ses filles, que j’embrasse