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Document généré le 14 sep. 2018 19:40 Management international Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques Marielle A. Payaud et Alain Charles Martinet Volume 14, numéro 2, hiver 2010 URI : id.erudit.org/iderudit/039547ar DOI : 10.7202/039547ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) HEC Montréal and Université Paris Dauphine ISSN 1206-1697 (imprimé) 1918-9222 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Payaud, M. & Martinet, A. (2010). Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques. Management international, 14(2), 31–51. doi:10.7202/039547ar Résumé de l'article Parmi les nombreuses pratiques de stratégies de responsabilité sociale, l’une requiert un engagement fort de l’entreprise sur le territoire, c’est-à-dire de ses compétences, de sa gouvernance et de son management : la RSE-BOP (Martinet, Payaud, 2008a, 2008b, 2009). La RSE-BOP est inspirée de « La base de la pyramide » (« Bottom of the pyramid ») de Prahalad (2004) qui désigne les 4 milliards d’individus disposant de moins de deux dollars par jour et qui suggère aux entreprises de reconsidérer ce faible pouvoir d’achat et de s’intéresser à ces nouveaux consommateurs. L’article esquisse un cadre conceptuel destiné au management stratégique de projets d’entreprise s’inscrivant dans une telle perspective. Ainsi, il présente la RSE-BOP comme une forme avancée de la RSE et une voie pour l’aide au développement des pays les plus pauvres, développe les fondements théoriques du cadre conceptuel et les conditions de mise en oeuvre d’une RSE-BOP. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter en ligne. [https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique- dutilisation/] Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. www.erudit.org Tous droits réservés © Management international / International Management / Gestión Internacional, 2010

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Document généré le 14 sep. 2018 19:40

Management international

Stratégies RSE-BOP et Soin des CommunautésHumaines. Concepts et Propositions Génériques

Marielle A. Payaud et Alain Charles Martinet

Volume 14, numéro 2, hiver 2010

URI : id.erudit.org/iderudit/039547arDOI : 10.7202/039547ar

Aller au sommaire du numéro

Éditeur(s)

HEC Montréal and Université Paris Dauphine

ISSN 1206-1697 (imprimé)

1918-9222 (numérique)

Découvrir la revue

Citer cet article

Payaud, M. & Martinet, A. (2010). Stratégies RSE-BOP et Soindes Communautés Humaines. Concepts et PropositionsGénériques. Management international, 14(2), 31–51.doi:10.7202/039547ar

Résumé de l'article

Parmi les nombreuses pratiques de stratégies de responsabilitésociale, l’une requiert un engagement fort de l’entreprise sur leterritoire, c’est-à-dire de ses compétences, de sa gouvernanceet de son management : la RSE-BOP (Martinet, Payaud, 2008a,2008b, 2009). La RSE-BOP est inspirée de « La base de lapyramide » (« Bottom of the pyramid ») de Prahalad (2004) quidésigne les 4 milliards d’individus disposant de moins de deuxdollars par jour et qui suggère aux entreprises de reconsidérerce faible pouvoir d’achat et de s’intéresser à ces nouveauxconsommateurs. L’article esquisse un cadre conceptueldestiné au management stratégique de projets d’entreprises’inscrivant dans une telle perspective. Ainsi, il présente laRSE-BOP comme une forme avancée de la RSE et une voiepour l’aide au développement des pays les plus pauvres,développe les fondements théoriques du cadre conceptuel etles conditions de mise en oeuvre d’une RSE-BOP.

Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des servicesd'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vouspouvez consulter en ligne. [https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/]

Cet article est diffusé et préservé par Érudit.

Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Universitéde Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pourmission la promotion et la valorisation de la recherche. www.erudit.org

Tous droits réservés © Management international /International Management / Gestión Internacional,2010

Dansl’éventaildesstratégiesderesponsabilitésocialede l’entreprise à but lucratif (RSE), la RSE-BOP

sembleconstituerlaformeactuellementlaplusavancée.

Cette forme d’exercice de R.S.E. renvoie aux obser-vationsempiriquesdeC.K.Prahalad (2004) [1].L’auteursuggère aux firmes multinationales de s’intéresser aux 4milliardsd’individusdisposantdemoinsde2dollarsparjour–qu’ilidentifiecommeétantlabasedelapyramide,soit «bottom of the pyramid», B.O.P. – et propose uneesquissedeconceptualisationpourguiderunefirmedési-reusedes’engagerdanscettevoie.Cespopulationsnepeu-ventdevenirconsommateurspotentielsquesiunepolitiqued’innovation radicale est poursuivie. Une nouvelle enve-loppeprix/performancedoitêtreconçueafindediviserpar

dixetparfoisdeuxcentsleprixd’unproduit/servicecom-parableenOccident;desinnovationsradicalesdeproduitsetméthodesdedistribution,desréagencementsdecompé-tencesdesopérateurs,desprogrammesde formation,desinterfacesproducteurs/distributeurs/clients totalement iné-ditessontindispensablespourredessinertotalementlesys-tèmed’activitéset lerendreéconomiquementviabledansdescontextesàtrèsfaiblepouvoird’achat,infrastructuresdéficientes,pratiqueslocalesdecorruption…

Lescaslesplusfréquemmentcitésconstituentàcejourdavantage une base d’investigation que des résultats pro-bantstantqu’àlaviabilitédesexpériencespourlesinitia-teursquepourlaréductiondelapauvretédespopulationslocalesconcernées.Lesdiscussionsacadémiquesquis’en-

Résumé

Parmi les nombreuses pratiques de stra-tégies de responsabilité sociale, l’unerequiertunengagementfortdel’entreprisesurleterritoire,c’est-à-diredesescompé-tences,desagouvernanceetdesonmana-gement : laRSE-BOP (Martinet,Payaud,2008a, 2008b, 2009). La RSE-BOP estinspirée de «La base de la pyramide»(«Bottom of the pyramid») de Prahalad(2004)quidésigne les4milliardsd’indi-vidusdisposantdemoinsdedeuxdollarspar jouretquisuggèreauxentreprisesdereconsidérer ce faible pouvoir d’achat etdes’intéresseràcesnouveauxconsomma-teurs.L’articleesquisseuncadreconcep-tueldestinéaumanagementstratégiquedeprojets d’entreprise s’inscrivant dans unetelleperspective.Ainsi,ilprésentelaRSE-BOPcommeuneformeavancéedelaRSEetunevoiepour l’aideaudéveloppementdes pays les plus pauvres, développe lesfondements théoriques du cadre concep-tuel et les conditions de mise en œuvred’uneRSE-BOP.

Mots clés: stratégieRSEBOP,pauvreté,communautéslocales,ONU

AbstRAct

Initiated by Prahalad (2004), “Bottom ofPyramid(BOP)Strategies”needprobably,oneofthehighestdegreesofinvolvementif we consider the large range of corpo-rate social responsibility and responsive-ness practices in the last years (Martinet,Payaud, 2008a, 2008b, 2009). Such verycomplex projects require radical innova-tions and very deep attention and care tocopewithterritoriesandlocalcommunitiesspecificities.

Theaimofthisarticleistoformulateacon-ceptualframeworkandasetofinterrelatedpropositionsforthestrategicmanagementof“BOP”ambitiousprojects.Undertheseguidelines, it seems possible to achieveboth thegoalsof thefirmand thehumancommunitiesdevelopmentonthelongrun.

Keywords: “BOP Strategies”, poorness,humancommunitiesdevelopment,U.N.O.

Resumen

Entre las numerosas prácticas de estra-tegias de responsabilidad sociall, unarequiere un compromiso fuerte de laempresa,desuscompetencias,desubuengobiernoydirecciónenlosterritoriosyenlas comunidades humanas : la RSE-BDP(Martinet, Payaud, 2008a, 2008b, 2009).LaRSE-BDPseinspirade«Labasedelapirámide»(«Bottomofthepyramid»)dePrahalad (2004) que designa a los 4.000millones de individuos que disponen demenosdedosdólaresaldíayquesugierea las empresas que se interesen por esaspoblacionespobres.Elartículoesbozaunmarco conceptual destinado al manage-mentestratégicodeproyectosempresaria-lesqueseinscribenentalperspectiva.Así,A. Martinet presenta la RSE-BDP comouna formaavanzadade laRSEyunavíapara impulsar el desarrollo de los paísesmás pobres, desarrolla un marco concep-tualy sus fundamentos teóricosasí comounsistemadepropuestasgenéricasparalaformaciondeestrategiasRSE-BDP.

Palabras claves: estrategia RSE BDP,pobreza, comunidades locales, desarrollohumano

Stratégies RSE-bOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques

MaRIELLE a . PayaUD aLaIn CHaRLES MaRTInET1

EURISTIK – Université Jean-Moulin de Lyon EURISTIK – Université Jean-Moulin de Lyon

1. Le présent article a été principalement développé par MarielleA.Payaudàpartir deACMartinet,MAPayaud,RevueFrançaisede

Gestion,vol.34(180),2008(pourlataxonomie),etRevuedel’Organi-sationResponsable,vol.4(1),2009(pourlecadreconceptuel).

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gagent semblent privilégier le raisonnement économiqueclassique, comme l’illustre la controverse récente entreKarnani (2007)[2]etPrahalad lui-même(parcourrierenfévrier 2008). Le premier met en doute la possibilité detellesbaissesdeprixenneparvenantpasàimaginerl’am-pleur d’une innovation radicale. Ce constat inspire deuxvoiesderecherche.Premièrement,desanalysesempiriquesextrêmement fines sur le contenu des expériences et leurévaluation économique, sociale et écologique; deuxième-ment,laconceptualisationdecesactivitéscommedesinno-vationsstratégiquesmajeures.Cequisignifielaconceptiond’un système stratégique complet, incluant la totalité dusystème d’offre, le réseaude créationdevaleur, la façondont les compétences stratégiques de l’entreprise doivententrerensynergieaveclesressourcesetsavoirslocaux.

Le présent article constitue le deuxième volet d’untriptyque.Lepremier s’est attaché àbâtir une taxonomiedes formesderesponsabilitéssocialespratiquéescesder-nières années qui a permis de dégager la stratégie RSE-BOPcommelaformejugée laplusavancéeactuellement(Martinet, Payaud, 2008a; Martinet, Payaud, 2009). Cedeuxième volet présente une modélisation heuristiqueconstituée d’un schéma directeur pour un managementstratégiqueRSE-BOPetd’unsystèmepropositionnel,quidéveloppe tout à la fois les fondements théoriques et lesprincipalesconditionsdemiseenœuvre.Letroisièmevolet,quifaitl’objetd’unerechercheencoursd’installation,s’at-tacheraàmettreàl’épreuveetàaffinercettemodélisationparletruchementderecherchescliniquesetderecherches-interventionssurplusieurssitesdedéploiementdestraté-giesRSE-BOP.

Cet article présente, en première section, la stratégieRSE-BOPcommeuneformeavancéedelaRSEquipeutêtreauservicedel’aideaudéveloppementdeshommeslesplusdémunis.En seconde section, l’articledéveloppe lesappuis théoriquesquiviennentconforter lespropositions,etqui s’opposentpresqueen toutpoint au«managementhors-sol»àprétentionuniversellepromuparlecapitalismefinancier et l’enseignement véhiculé dans de trop nom-breuxprogrammesdeMBA(Mintzberg,2005);etensuite,lesconditionsrequisespourundéveloppementauthentiquedes communautés locales de façon à éviter les dérives etles récupérations comme leur transformation en marchésolvable ou en purs consommateurs. La viabilité de cesstratégieset leurcontributioneffectiveà la luttecontre lapauvreté supposent au contraire que ces communautés etcesindividuspuissentjouerdesrôlesmultiples,développerleurs capacités (Sen, 1999) et couvrir leurs coûts d’exis-tence(Perroux,1986):consommateurs,certes,maisaussiproducteurs,distributeurs,porteursdesavoirs.Bref,deres-pecter leurcomplexitéet leurrichesseanthropologiqueetculturelleplutôtquedelesconstituerenhomoœconomicus.

La stratégie RSE-bOP : une forme avancée de la RSE et une voie pour l’aide au

développement humain.

Saufàpréconiserdespartenariatspublic/privénotammentavecdesONG internationales in situ, ou à encourager lemécénat,lestravauxsurlaresponsabilitésocialefontrare-mentcasdel’extrêmepauvretédespaysenvoiededéve-loppement.Ainsi,lorsqueladétressedesPEDestassociéeàlaRSE,l’exercicedelaresponsabilitéserésumeleplussouventaudon,àlasubventionfinancièrephilanthropique.Pratiques évidemment utiles et indispensables, mais quiméritentd’êtrecomplétéesparuneRSEdavantage impli-quéeoùlesentreprisesapporteraientplusqu’uneressourcefinancière,maisdescompétencesstratégiquesadaptéesauxbesoinsdespopulationsdémunies.

lA Rse-bop mobilisée pouR l’Aide Au développement

La RSE et la pauvreté

Rares sont les publications sur la responsabilité socialede l’entreprisequinementionnentpas la théoriedespar-ties prenantes afind’étayer la raisond’êtrede ce champ.Pourtant,raressontcellesquisoulignentl’effetdéfinitifquepeutavoirlechoixd’unedéfinitiondelanotionde«partieprenante»surlapolitiquederesponsabilitésocialemenéeparuneentreprise.Outrequel’entrepriseesttroppeusou-vent considérée comme étant elle-même constellation departiesprenantes,s’ajoutelapropensiondeschercheursetpraticiensàidentifierlespartiesprenantesenexcluantlesdynamiquesdelasociétécivileelle-même.Car,àdécom-posercelle-cienunitésélémentaires«quipeutaffecterouêtreaffectéparlaréalisationd’objectifsorganisationnels»(Carroll et Buchholtz, 2000), l’on oublie que l’entreprisen’est pas seulement «en marché» mais «en société»(Martinet,1984).Adistinguerlespartiesprenantesinternesetexternes(CarolletNäsi,1997),primairesetsecondaires(Clarkson,1995),ouen7catégories(Mitchelletal.,1997),l’onoublieque l’entreprisepeut avoirun rôle au-delàdecespérimètressouventimplicitementnationaux.Araison-nerenimpacts,leplussouventnégatifs,l’entrepriseestvuedavantage en pollueur plus ou moins payeur que commeentrepreneursocialpotentiel.Araisonnerencalculstatiquel’onoubliequel’entreprisepeutdavantageréfléchirsares-ponsabilitéencapacitésstratégiquesetlesdéployerenjeuxpositifs(Martinet,1981).Saufàdéployerdespartenariatsavec des associations ou autres organisations à rayonne-mentinternational,laresponsabilitésocialedesentreprisessetourneleplussouventversdespartiesprenantesdirectesenutilisantquerarementsescompétencesstratégiques.

Dans lespaysoù le tissuéconomiquen’estpasdéve-loppé, ni organisé, les territoires ne bénéficient pas desobligationsderesponsabilitésocialedesentreprises.Ainsi,lesterritoiresetleshabitantsdespayslespluspauvresse

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retrouvent exclusd’uneactivité économique structurée etpérenne.

Une orientation de RSE : le Rapport Mondial  sur le Développement Humain du PNUD 2003.

Chaqueannée,lePNUDréaliseunrapportsurdesthéma-tiquesdifférentes,celuide2007/2008aparexemplepourthème«laluttecontrelechangementclimatique:unimpé-ratif de solidarité humaine dans un monde divisé», celuide 2004 : «La liberté culturelle dans un monde diversi-fiée»,etc.Celuide2003dontletitreest:«LesobjectifsduMillénairepourledéveloppement:unpacteentrelespayspour vaincre la pauvreté humaine» est le plus pertinentpouruneproblématiquedeRSEambitieuse,d’autantquelaplupartdesobjectifssontàhorizon2015(voirtableau1).

Ce rapportd’unegrandeclarté,documentéet subtile-ment construit est accablant tant les objectifs paraissentinsaisissablesparleurampleur.Cependant,sixorientationssontsuggérées(chapitres3à8):i)Surmonterlesobstaclesstructurelsàlacroissance(Situationgéographique,exiguïtédesmarchés,coûtdeséchanges,gouvernance locale,); ii)Uneactionpubliqueraisonnéeenfaveurdelasantéetdel’instruction; iii) Le financement privé dans les secteursde la santé, de l’éducation et de l’eau; iv) Quand l’ac-tion publique préserve l’environnement; v) Mobiliser lespopulations pour la réalisation des objectifs; vi) L’actionpublique,etnonlacharité:Commentlespaysrichespeu-ventcontribueràlaréalisationdesobjectifs?

Cecidit,le«secteurprivé»estleplussouventassociéaux nouvelles technologies (informations et communica-tions)qu’ildoitmettreàlaportéedetous.Or,ennepréci-santpassuffisammentouenn’identifiantpassuffisammentquelsacteursdisposentdesleviersd’action,ouenréduisantainsi laportéedesacteurs, lesorientationssuggéréesper-dentenopérationnalitéetd’autresnesontpasenvisagées.

Àcôtédenombreusesautres,l’exerciced’uneRSE-BOPpeutêtrel’unedesorientationsàadopter,enrépondanttantauxObjectifsduMillénairepourleDéveloppementqu’auximpératifs des entreprises économiques et/ou sociales. Ilestd’ailleursfrappantdevoirlegroupeDanoneconfirmernotrepositionenfaisantexplicitementréférenceauPNUDdanssondernierrapportRSE.

Des réponses apportées par la RSE-BOP

Lerôleet leseffetsdelaRSE-BOPviennentquestionnerlespréjugéssurlapauvretéetlasuspiciond’unecontribu-tionprivéeàluttecontrelapauvreté.

LeprixNobeldelaPaix,MuhammadYunus,aainsidûdéconstruiredenombreuxpréjugéspourmettreenplacesesprojetsdemicro-crédits:«lespauvresnesontpascapablesde s’en sortir, ne savent pas travailler en équipe, déciderpareux-mêmes,gérerunprêt,lacertitudequelameilleureformededéveloppement,c’estl’aideapportéeàdesprojetscentralisés,degrandeampleuretentreprisparlesgouver-

nements…».Yunus rétorque que «La pauvreté n’est pascréée par les pauvres». Or, les exemples de pratiques deRSE-BOPmontrent l’envie, lavolonté, lacapacitédecespopulationsdémuniesàs’impliquersurleurterritoire.

LaRSE-BOPrépondenpartieàchacundesObjectifsduMillénaire touten intégrant laplupartdesorientationssuggéréesparleRapportMondial.Dèslorsquelabasedelapyramideconcerne lapauvreté (moinsdedeuxdollarspar jour) et l’extrême pauvreté (moins de un dollar parjour),–soitrespectivement2,8milliardsdepersonneset1,2milliardsdepersonnes,4milliardsdepersonnesautotal–,lesentreprisesquis’engagentdansunetelleresponsabilitésociale visent prioritairement les besoins fondamentaux :ellescontribuentauxObjectifsduMillénaireliésàlasanté,àlamortalitéinfantile,àlafaim,àlamalnutrition,etc.Parailleurs, la RSE-BOP nécessitant d’habiter vraiment lesterritoires,d’intégrerlapopulationauxprocessusdevente,dedistribution(…),favorisel’implicationdespopulationsà la formationd’uneéconomie locale, comme le requiertune orientation du Rapport Mondial, et par-là permet degénéreruneactivitééconomique intégrée.Lasollicitationdes populations passe par une formation, une éducation,unapprentissagetantdesmoyenstechniques,quedesprin-cipesdegestion,uneconsommationraisonnéedesmatièrespremières comme des produits finis. Economiquement etsocialement,noussavonscombienlerôledesfemmesestimportant dans le développement d’éco-systèmes de cespays;lespratiquesdeRSE-BOPmontrentquelesfemmessont leplus souvent impliquéesdans lesprojetsdes sites(lesGrameenladiesauBangladesh,lesdaniladiesetdani-grandma enAfrique du Sud, le réseau de distribution deHLL, les techniciennes de Aravind…); ces expériencespositivesmontrentcombien l’exercicedece typedeRSEpeut contribuer à la promotion de l’égalité des sexes, àl’autonomisation des femmes et en conséquence à l’aug-mentationdurevenufamilial.Lespayspauvressouffrentleplussouventdeproblèmesstructurelssubstantiels,commele rappelle le Rapport Mondial (Chap.7 : 133) : une trèslourde centralisation des structures et des pouvoirs, et/ouundespotismedécentralisé, lacorruption, lanon-implica-tiondescitoyensàladéfinitiondesbesoinsprioritaires…Lacomplexitédelasituation,commeladifficultédetraite-mentdetelsproblèmesdegouvernanceetdemanagementnesauraientêtresous-estimées.Maisl’apportpotentieldelaRSE-BOPnepeutêtreignoré.Ladécentralisationpermetnotamment des réponses rapides et précises aux besoinslocaux, des mesures correctives, une responsabilité desacteurs locaux, de fait plus concernés et donc davantageimpliqués.LaRSE-BOPpermetselonZaoual (2005)unegouvernance«située»ouencastrée;parunsystèmederela-tionsetdecroyancespartagées,cetencastrementpermetdemieuxintégrerlesacteurslocaux.Ainsi,ladécentralisationparlesiteencréant,multipliant,étendantdesdémocratieslocales,peutpallierpartiellement l’insuffisancededémo-cratienationale.Lapopulationdémunie,parfoisoubliéepar

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TabLEaU 1

Résumé des Objectifs du Millénaire pour le Développement

Objectifs Cibles

1. Fairedisparaître  l’extrêmepauvretéet  lafaim

Cible1:réduiredemoitié,entre1990et2015,laproportiondelapopulationdontlerevenuestinférieuràundollarparjour.

Cible2:réduiredemoitié,entre1990et2015,laproportiondelapopulationsouffrantdelafaim.

2. Garantiràtousune  éducationprimaire

Cible3:D’ici2015,donneràtouslesenfantspartoutdanslemonde,lesmoyensd’acheveruncyclecompletd’étudesprimaires.

3. Promouvoir  l’égalitédessexeset  l’autonomisationdes  femmes

Cible4:Eliminerlesdisparitésentrelessexesdanslesenseignementsprimaireetsecondaired’ici2005sipossible,etàtouslesniveauxd’enseignementsen2015auplustard.

4. Réduirelamortalité  desenfants

Cible5:Réduirededeuxtiers,entre1990et2015,letauxdemortalitédesenfantsdemoinsde5ans.

5. Améliorerla  santématernelle

Cible6:Réduiredetroisquartsd’ici2015letauxdemortalitématernelle.

6. CombattreleVIH  SIDA,lepaludisme  etd’autresmaladies

Cible7:D’ici2015,enrayerlapropagationduVIH/SIDAetcommencerd’inverserlatendanceactuelle.

Cible 8 : D’ici 2015, enrayer la propagation du paludisme et d’autres grandes maladies, etcommencerd’inverserlatendanceactuelle.

7. Assurerladurabilité  desressources  environnementales

Cible 9 : Intégrer les principes du développement durable dans les politiques nationales etinverserlatendanceactuelleàladéperditiondesressourcesenvironnementales.

Cible 10 : D’ici 2015, réduire de moitié le pourcentage de la population privée d’un accèsrégulieràl’eaupotable.

Cible 11 : Parvenir d’ici 2020, à améliorer sensiblement la vie d’au moins 100 millionsd’habitantsdetaudis.

8. Mettreenplaceun  partenariatmondial  pourledéveloppement

Cible 12 : Instaurer un système commercial et financier plus ouvert, fondé sur des règles,prévisible et non discriminatoire, ce qui implique un engagement en faveur de la bonnegouvernance,dudéveloppementetdelaluttecontrelapauvreté,aussibienàunniveaunationalqu’international.

Cible 13 : Subvenir aux besoins spécifiques des pays les moins avancés, ce qui supposel’admission en franchise et hors contingents de leurs exportations, un programme renforcéd’allègementdeladetteetl’annulationdeladettepubliqueaudéveloppementplusgénéreuseauxpaysquidémontrentleurvolontédeluttercontrelapauvreté.

Cible14:SubvenirauxbesoinsspécifiquesdespaysenclavésetdespetitsEtatsinsulairesendéveloppement(…).

Cible15:EngagerunedémarcheglobalepourréglerleproblèmedeladettedesPEDpardesmesuresnationalesetinternationalespropresàrendrecetendettementsupportableàlongterme.

Cible16:EncoopérationaveclesPED,imagineretappliquerdesstratégiesdenatureàcréerdesemploisproductifsdécentspourlesjeunes.

Cible17 :Encoopérationavec les laboratoirespharmaceutiques,proposerdesmédicamentsessentielsaccessiblesàtousdanslesPED.

Cible18:Encoopérationaveclesecteurprivé,mettreàladispositiondetouslesbienfaitsdesnouvellestechnologies,notammentcellesdel’informationetdescommunications;

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lesgouvernantsdecespayspeutretrouveruneexistenceetunrôledecitoyenpluriel.

objet et pRojet de lA modélisAtion

L’objectif : une modélisation heuristique

Larechercheenstratégied’entreprises’estpersuadéequelaseulefaçondefairescienceconsistaitàmultiplierl’éta-blissement de relations causales élémentaires «siA alorsB»,touteschoseségalesparailleursbiensûr.C’estpour-tantundomaineoùcettedernièreclausevidelargementdesonsensles«lois»ainsiétablies.Nombreusessontlesvoixautorisées (Hamel, 1998;Whittington, 2004 entre autres)qui se sontmanifestées cesdernières annéespourprovo-quer un changement radical que les conventions domi-nantesparviennentmalheureusementàcontenir.

Cen’estcependantpasunhasardsilestravauxquiontmarquéledemi-siècledelacourtehistoiredelarechercheen stratégie sont presque tous des modélisations heuris-tiques:Harvard,Ansoff,BCG,McKinsey,Porter,HameletPrahalad…L’impactconsidérabledePortertientaux3«frameworks» (Les 5 forces, l’avantage concurrentiel, lediamant)qu’il apatiemmentdéveloppésavantd’enargu-menter l’adéquation aux questions stratégiques (Porter,1991).

Un«framework»–quenousappelonsicimodélisationheuristique – consiste à identifier les éléments pertinentsdansunproblèmecomplexe,àconstruireleursrelations,àfourniruneprocédurederaisonnementpouraffinerleques-tionnementendynamique.

Unmodèle«siAalorsB»nécessiteune forte réduc-tionanalytique,lasélectionetlamesuredevariablesetderelationssimplesqu’ilconvientdevaliderstatistiquement.

Au contraire, une modélisation heuristique associe etarticuledenombreusesvariables,introduitdesparamètresenfluxetdesfiguresthéoriquesquiguident,amplifientetdonnent plus de sûreté intellectuelle dans la constructionde diagnostics stratégiques et amplifient l’imagination deréponsesappropriéesdansunesituationd’actioncomplexe.

L’épistémologie : la réévaluation de la raison pratique et de l’aide à la conception

Al’opposédel’illusoireneutralitédupositivismedétachédesterrains,cetypedemodélisationchercheàproduiredes«savoirsd’action» (Martinet,2007a)ennecraignantpasdetravaillersurl’articulationd’élémentsthéoriquesquelepremierinciteaucontraireàdisjoindre.

Ensesituant«inconcreto»,encherchantàfairesens«ex ante» pour des décideurs confrontés à une situa-tioncomplexeetmal structurée, ce typede connaissanceparticipe de la réévaluation de la raison pratique tropsouventdédaignéeensciencessociales,auprofitd’expli-

cationspointillistesou,aucontraire,d’interprétationstropgénérales.

Il s’agit ici de rapprocher la recherche des pratiquesmanagériales,d’enadopterlescontraintesetlesexigencespourleurfournirdesappuisconceptuels,des«moteursdeconception» appropriés à des genres de situation, à descatégoriesd’entrepriseouàdestypesdeproblématiques.

Lesquestionsstratégiquesnerelèventgénéralementpasd’une démarche de résolution de problème bien identifiéoù la techniquepermetdedonner lasolutionoptimale. Ils’agit,aucontraire,debienconstruireleproblèmedanssonétendueetsacomplexité,delemettreenscèneavantquedelemettreenactes.«Messieurs,dequois’agit-il?»insistaitdéjà le Maréchal Foch! Pour ce faire, les «frameworks»peuvent… au passage… utiliser un modèle «si A alorsB». Mais ils doivent viser bien au-delà, aider à structu-rer la situation en couvrant les principales dimensions etvariablessusceptiblesdefaireproblème.

De tellesmodélisations sontnécessairement engagéespuisqu’elles orientent la construction des problèmes etdonc lesactionssusceptiblesd’endécouler.Lechercheurne doit pas craindre les valeurs et l’éthique qui colorentsesmodélisationsàconditiondelesexpliciterclairement.Iciparticulièrement, laconvictionque lesgrandsgroupesinternationaliséspeuventparticiperaudéveloppementlocaldesterritoiresoùilss’implantent,spécialementceuxoccu-pés par des populations très pauvres.A la condition exi-geantedevouloirco-construirecedéveloppementaveclespartiesprenanteslocalessanslesréduireàunrôleunique– consommateur ou main d’œuvre – mais au contraire,en instaurant des dynamiques d’apprentissage réciproqueambitieuses.

En un mot, il s’agit de combiner épistémique, prag-matique et éthique, c’est-à-dire connaissance, action etconscience.

Danslesdomainesmilitaires,géopolitiques,thérapeu-tiques…lesbonsstratégistesadmettentquelastratégienepeutsesaisirdelacomplexitédessituationsqu’elleentendfaire évoluer qu’en adhérant au principe dialogique ou àsesdiversesmodalités:leparadoxe,ladialectique,larai-son contradictorielle… (Luttwack, 1989; Poirier, 1987;Charnay, 1990; Wunenberger, 1990). A quelques excep-tionsprès (Martinet,1991;Koenig,1996;Phelizon,1998dans la littérature francophone), ce principe peine à êtrepleinement reconnu en management stratégique, encoreinféodéàlalogiquebinaire.

Une bonne façon de conjuguer épistémique, pragma-tique et éthique consiste à se situer dans une systémiqueago-antagoniste, proposée initialement par Bernard-Weil(1988, 2002) et développée et expérimentée longuement(Martinet,1991,1997;Claveau,Martinet,Tannery,1998;Martinet,Payaud,2006).Eneffet,toutesituationpratiquecomplexeamènelestratègeàdevoirpenseretrégulersurla durée des bipolarités en tension – délibéré/émergent,

36 Management international / International Management / Gestión Internacional, 14 (2)

vision/circonstances,autonomie/interdépendance;centrali-sation/décentralisation…–ensegardantdevouloirimpo-ser un pôle unique qui deviendrait alors pathologique etgénérateurdeblocages

La méthode : privilégier la recherche-clinique  et l’immersion de longue durée

La construction d’une telle modélisation en managementstratégiquepassenécessairementpardesétudescliniqueset,sinécessaire,parderecherche-intervention.Ils’agiteneffetdes’appuyersurdesmomentscompréhensifs(plutôtqu’explicatifs)pourproduiredeseffortsdeconception,viades concepts fondamentaux judicieusement choisis.C’estcettemiseentension,cenouvelago-antagonismeentreduparticulier etdes concepts englobantsquipermetdepro-duireuncadregénérique(etnondegénéraliser)quiseraàmême,dansdessituationsproches,d’amplifieretd’assu-rerleraisonnementdesacteurs.Déjà,toutendénonçantlescientisme,Hayek(1953)affirmait:«unesciencesocialefécondeestunesciencedecequin’existepasencore».

Le contenu : la prise en compte d’un oublié de la recherche en management stratégique, le territoire

Larechercheenmanagementstratégique,contrairementàlastratégiemilitaire,n’accordepasauxterritoires,àleurgéo-graphie,leurtopographie,leurhistoire,leurculture…l’at-tentionqu’ilsméritentcomtetenudeleurimportancedanslespratiquesd’entreprise.Ellepréfèreretenirunterritoirethéoriqueeteuphémiséensous-traitantauxspécialistesdelogistiqueoudemanagementinterculturell’analysefinedesesspécificités.

Porterestl’undeschercheursenstratégielesplussen-siblesàcettedimensionmaisilrestemarquéparlalocali-sationcommeported’accèsauxfacteursdeproductionet/ouauxmarchés,ets’intéressemoinsàlal’habitationdecesterritoiresendehorsducasparticulierdesdistricts indus-triels(Porter,1998).

Uneentrepriseàresponsabilitésocialeavancéecherchejustementàs’insérerdanslessociétésetlesterritoiresoùellesedéploie,àseconsidérer«ensociété»etnon«enmar-chés»,àhabitervraiment sesenvironnements.La théoriedespartiesprenantescommelesrecherchessurlesréseauxsociaux et l’encastrement (Granovetter, 1985) montrentcombienilyalàsourcesdeperformancesdurables.

Il ne peut pourtant y avoir d’entreprise durable et dedéveloppementsoutenablequ’à laconditiondedésencas-trerlescritèresdegestiondel’idéologieducourttermismevoiredel’instantanéitéinstalléeparlesmarchésfinanciers,lesNTICetuncertainmarketing.Cequinecondamnepasauretouràlanatureouàl’écologieprofondemaisinviteà

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Rappel de la taxonomie2

Letableau2présenteunrepéragedespratiquesderespon-sabilitésocialedesentreprisesdecapitaux.LesstratégiesdeR.S.E.sontplusoumoinsprésentesetengagéesselonlanaturemêmedel’entreprise.Ainsi,lescolonnesidenti-fientdesformesdeR.S.E.croissante,allantdel’entreprise«Friedmanienne» à l’entreprise sociale. La première nepratiquepas et ne souhaite paspratiquer unequelconqueresponsabilité sociale autre que de maximiser la richessedesactionnairesselonlacélèbreinjonctiondumonétaristedeChicago,sadevise«profitforprofit».LasecondefaitdelaR.S.E.saraisond’êtremême.Cettetaxonomieoffreunebasepourdiscuterl’évolutiondecesstratégies,lepassaged’unecatégorieàuneautreetleslimitesdelaconvergenceentre les engagements les plus avancés et «l’entreprisesociale». Celle-ci émerge théoriquement depuis quelquesannées à partir de la définition du gouvernement britan-nique«Uneentreprisesocialeestuneactivitécommercialeayantessentiellementdesobjectifssociauxetdontlessur-plussontprincipalementréinvestisenfonctiondecesfina-litésdanscetteactivitéoudanslacommunautéplutôtqued’être guidés par le besoin de maximiser les profits pourdesactionnairesoudespropriétaires»(DTI,2002,p.13inDefourny,2006).

Parailleurs,lesstratégiesdeR.S.E.pouvantimpliqueruneplusoumoinsgrandevariétéd’acteurs,departiespre-nantes, les lignes énumèrent les catégoriesdepartenairespossibles.Cettetaxonomiemetdoncenjeulenombre,lavariétéetledegréd’implication,d’interactionetd’engage-mentréciproqueentrelespartiesprenantesetl’entreprise.Les degrés d’implication et d’engagement sont d’ailleurstraitéssouslaformed’échelledanslalittératuredespartiesprenantes, comme celle présentée par Friedman et Miles(2007)surlabasedestravauxdeArnstein(1969).

Entre l’entreprise «Friedmanienne» et l’entreprisesociale, nous avons identifié quatre autres types de pra-tiquesdeR.S.E.:1)laR.S.E.«cosmétique».Celle-cifaitétat de pratiques légères de la R.S.E., comme celles quiremplissentlesconditionslégalesdel’article116delaloifrançaisesurlesNouvellesRéglementationsEconomiques(NRE) stipulant l’obligation pour les sociétés cotées defournir des informations sur les conséquences sociales,territoriales et environnementales de leurs activités dansleur rapport annuel.2)LaR.S.E. annexeoupériphériqueprésente des actions qui montrent une R.S.E. impliquée.OnpeutcependantdistingueruneR.S.E.annexeoupéri-phérique d’une R.S.E. intégrée. Par R.S.E. périphérique,nousentendonsdesactionsqui,toutenétantsignificatives,n’ontpasdeliendirectavecl’activitédel’entreprise.3)La

2. Pour plus de détails, voir : MartinetA.C., Payaud M.A., (2008),«Formes de RSE et Entreprises Sociales. Une Hybridation desStratégies»,Revue Française de Gestion,n°180,Janv-Fév.

Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 37

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Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 39

R.S.E.qualifiéed’intégréeestrévéléeparsaprésencedansun tableau de bord équilibré, par exemple le «balancescorecard» (Kaplan, Norton), ou mieux, le «sustainabi-lity scorecard» proposé par le cabinet KPMG. Même sil’onpeutcritiquerl’utilisationsouventdescendantedecetoutil de pilotage, il n’en demeure pas moins qu’il inciteles managers à mieux comprendre les dimensions de laperformance.Dès lorsqu’on intègre lesdimensionsde laR.S.E. au tableau de bord, les indicateurs financiers sontpartiellementcontrebalancéspardesindicateurs«sociaux»et peuvent signifier une performance «globale» et pour-quoipas«durable».Deplus, laR.S.E. intégréeconcernedes actions en relation avec les activités de l’entreprise,c’est-à-direprochesducœurdemétier.Enfin,laquatrièmequi est l’objet principal de cet article, la RSE-BOP, plusoumoinsprochedelasuggestiondeC.K.Prahalad(2004).Les populations du bas de la pyramide des revenus nepeuventdevenirconsommateurspotentielsetacteurséco-nomiques que si une politique d’innovation radicale estpoursuivie.Unenouvelleenveloppeprix/performancedoitêtreconçueafindediviserpardixetparfoisdeuxcentsleprixduproduit/servicecomparableenOccident(Opérationdelacataracteà25$parAravindenIndecontre2500$à8000$auxEtats-Unis;prothèsesdesmembresposéespour35$parJaipurFootenAsie…);desinnovationsradicalesdeproduitsetméthodesdedistribution,desréagencementsdecompétencesdesopérateurs,desprogrammesdeformation,des interfaces producteurs/distributeurs/clients totalementinédites sont indispensablespour redessiner totalement lesystème d’activités et le rendre économiquement viabledansdescontextesàtrèsfaiblepouvoird’achat,infrastruc-turesdéficientes,pratiqueslocalesdecorruption…LescasévoquésparPrahaladfontétat,bienau-delàdelafournitureà bas prix de produits et services de qualité, de transfor-mations sociales et d’éco-systèmes locauxde créationderichesseprofondémentrenouvelésparl’actionstructurantedel’entrepriseconcernée.

Laméthodologieutiliséepourbâtirlataxonomieavaitconsisté à explorer de nombreuses sources secondaires(rapportsd’experts,d’observatoires,rapportséconomiqueset sociaux d’entreprises, articles de presse, sites inter-net).LaplusgrandediversitédespratiquesdeRSEavaitété recherchée et non, bien évidemment, une quelconquehomogénéité ou représentativité statistique. Le repéragedespartenaires(nombre,type),l’identificationdesactions,deleurportée,dulieudemiseenœuvreetladuréedelacoopérationconstituentdesdonnéesobjectivesetdesmar-queurssignificatifsdel’éventaildespratiquesobservablesrecueillies, notamment grâce à l’important travail d’en-quêteréalisépar leréseauIMS-EntreprendrepourlaCité(siteinternetetouvragede2007).Lataxonomienequalifiepasune entreprise dans son ensemblemais distinguedestypesd’actiondeRSE.Ainsi,certainesentreprisespeuventsetrouverdansplusieurscolonnes.

Architecture générale

LesystèmedemanagementstratégiqueRSE-BOPquenousavonsproposé(Martinet,Payaud,2008b;Martinet,Payaud,2009)peutêtrereprésentéparleschémasuivant.

Le schéma directeur (Figure 1) est composé de cinqblocs:1)Intentionstratégiquepréciselastratégiecorporatedéfinienotammentparlechoixd’uneformulestratégique;2)Clientsetmarchéexplicitelepositionnement;3)Systèmed’offre indique la mise en cohérence des propositions deproduit;4)Réseaudevaleursidentifielaconstellationdespartenariatsetrelationset5)Compétencesstratégiquesestuneévaluationdesressourcesetcompétencesàmaintenir,acquérir,développer,etc.L’intérêtdeceschémadirecteurest de ne pas dissocier les blocs, mais de les considérerensemble,avecleursinterdépendances.

On peut parler de meta-innovation (Hamel, 2000) oud’innovation-enveloppe(Claveau,Martinet,Tannery,1998)pourdésignerlaruptureopéréedansceschémaderéférence.Lemodèlestratégiqueconceptualiseetarticulelesystèmequirelieaminimal’orientationstratégique,lesressources-clés,l’interfaceaveclesclientsetleréseaudevaleurquesechoisitetqueconstruit l’entreprise.Ilconstitueuneinno-vationderupturemajeurequandildémultiplielepotentieldecréationdevaleurenjouantsurunenouvelleefficacitépour les clients, une singularisation forte de l’entreprise,une cohérence accrue des ressources et des accélérateursdeperformances(Hamel,2000).DesmodèlesstratégiquesbienconnuscommeIkea,Microsoft,Dell,Sephora…ontpossédécesqualitéssurdesduréesplusoumoinslongues.Detelscasillustrentlesautqu’ontsuopérercesentreprisesenreconfiguranttoutàlafoisleursystèmed’offreetlesys-tèmed’usagedesclients.Maisl’effectivitéetladuréedesavantages concurrentiels qu’elles ont su ainsi construirereposentlargementsurlesprocessusquileurconfèrentdesavantagesliésauxressourcesetcompétences,ainsiquedesavantagesliésauxpartenariats(Martinet,2001).

Le schéma directeur et les propositions ci-dessousmettent en évidence la combinaison singulière qu’opèrelastratégieRSE-BOPentrel’avantageconcurrentiel(AC)entendu au sens usuel, les avantages liés aux ressourceset compétences (AR)dont certaines sont inédites et liéesaux innovations radicales requises et les avantages liésauxpartenariats(AP)queconfèreuneinsertionenprofon-deuretimaginativesurlesterritoiresetauseindespopu-lations locales. Les fortes mises en tension qu’opère unetelle stratégie, lecaractère syncrétiquede lacombinaisonAC*AR*AP, sont susceptibles d’entrer en synergie pourenclencher des bouclages récursifs bénéficiant à chaqueélémentdelacomposition.

40 Management international / International Management / Gestión Internacional, 14 (2)

Le système propositionnel : fondements théoriques et conditions de mise en œuvre.

Apartirduschémadirecteur(Figure1)etpourchacundesblocs,despropositionsontétéidentifiées.Pourl’ensembledespropositions, lesfondements théoriquessontexposés,pourchacuned’elle,desconditionsdemiseenœuvreontétérepérées.

les fondements théoRiques

Nous avons dit plus haut que l’architecture générale(Figure1)devaitêtrecomprisedanssonensemble,ilsuffi-raitdedissocierlesblocspourqu’elleperdeenpertinenceetendensité;delamêmemanière,sidesfondementsthéo-riquespeuventêtrerepéréspourchacundesblocs(commeparexemple,l’approchefondéesurlesressourcesetcom-pétencespourleblocCompétencesStratégiques),ilseraiterronédelesdistinguerblocparblocetdeperdrelacohé-

renceet laphilosophiegénérales.Cequi justifie lemoded’exploitationretenu.

L’entreprise est «en société» et non pas seulement«en marché» (Martinet, 1984). Ainsi, ses actions sontcontraintesethabilitéespardesstructuressocialesenmou-vement,sesactivitéssontencastréesdansdesterritoires,et,dès lors, elle est un ensemble de parties prenantes parmid’autres.Lesimplicationsd’unetelleconceptionsuggèrentde mentionner la théorie de la structuration de Giddens(1984, 1987), l’encastrement de Granovetter et, avant luiPolanyi, (1944) ainsi que la théoriedespartiesprenantesbiensouventréféréeàFreeman(1984).

Alanotiondestructureassociéegénéralementauxcri-tèresderéalité,derigiditéetde«fixité»,Giddensproposedesubstituerleconceptdestructurelcommeensembledecritères virtuels, actualisés lors de la mise en œuvre desactions et activités effectives des entités sociales indivi-duelles et collectives. Le structurel est donc l’ensembledesrèglesetdesressourcesquel’acteurengagedemanière

FIGURE 1

Schéma directeur pour un management stratégique RSE-bOP

Intention Stratégique- Ambition et buts-Formule stratégique- Stratégie générique

Réseau de Valeur- Fournisseurs- Sous-, Co-traitants- Alliances - Co-développeurs- Distributeurs

Compétences Stratégiques- Compétences centrales- Compétences périphériques- Aptitudes- Actifs, ressources

Système d’Offre- Eventail- Localisation- Distribution- Stratégie marketing

OffresConcurrentes

Clients et Marché- Usage- Segments- Accès Architecture

et management stratégique

AC

AR

AP

AC = Avantages ConcurrentielsAR = Avantages liés aux ressources et compétencesAP = Avantages liés aux partenariats

Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 41

récursive. Les lois, règles, règlementations sont autantd’éléments qui façonnent les actions des entreprises, les-quellesagissenten interactionavec lesautrespartiespre-nantes. Les décisions et les activités menées au nom del’entreprise contraignent et habilitent en même tempsqu’ellessontcontraintesethabilitéespardifférentsacteurset institutions.Cesprocessusengagent l’hommedans sesmultiplesrôlesetexpliquentlesspiralesvertueusesouper-versesquisedéveloppentparfoiscommecelaaétéévoquéplushaut.

Lathéoriedespartiesprenantesconceptualiseundiri-geantauserviced’un intérêtsupérieurde l’entreprisequiimplique un rôle de composition et d’arbitrage entre lesintérêts et attentes des diverses parties prenantes et quitraduisent donc toujours des choix politiques et éthiques(Martinet,1984;Mercier,2001).

UnestratégiededéveloppementRSE-BOPnepeutpasnepasconsidérerl’entreprisefocalecommeunepartiepre-nanteauseind’unflorilègedepartiesprenantes;chacuneadoncdesobligationsenversl’autre,toutesdoiventdéve-lopper un tissu relationnel solide, fiable, réciproque dansletempspourfaciliterlaconcrétisationdecesobligationséthiquesetmorales.Danscecadre, la théoriedespartiesprenantes et la notion d’encastrement (Polanyi, 1944;Granovetter, 1985, 1992) ne peuvent pas être disjointes,dèslorsquetoutesdeuxaccordentunrôlesignificatifàlarelation,l’échange,l’interaction,laréciprocitéetlarécur-sivité dans l’action économique. Granovetter propose deconsidérer les relations économiques et les organisationscomme le résultat d’actions individuelles étayées sur desréseaux sociaux qui à leur tour orientent l’action, cetteconceptionrejointdonclathéoriedelastructuration.Selonlui,l’actionéconomiqueestaussisocialeetfaitintervenird’autrescritèress’appuyantsurlerelationnel,laloyautéetlesvaleursinterviennent;lanotiond’encastrementestdonccompatibleaveclathéoriedespartiesprenantes.Lesinsti-tutionséconomiquessontdesconstructionssociales;lefac-teurd’efficiencecertes,maisaussilesréseauxderelationspersonnellesdéterminentlasolutionadoptée.Ainsi,lesins-titutionssont leproduitd’unmélanged’actionsfinaliséesmisesenœuvrepardesréseauxcomplexesd’acteurs.Lescomportementset les institutionséconomiquessont,pourGranovetter, tellement contraints par la configuration desrelationssocialesencours,qu’ilestimpossibledelescom-prendreindépendammentdelasphèresociale.Ilrejointparlàlanotiondestructureldelathéoriedelastructuration.

L’entreprise se retrouve en position de développerdes relations avec des parties prenantes-partenaires, pourconstruireensembledesjeuxcoopératifsàsommepositive.L’encastrement,quantàlui,seprésentecommeunprincipederéalité,iln’yapasdetransactionpurementmarchandequinesoitunphénomèneencastré,c’est-à-direquinesoitpas liéeouquinerésultepasderelationssociales,cultu-relles...ToutestratégieRSE-BOPappelleaucontrairedes

outilsetdesdispositifsprofondémentréencastrésdanslescontexteslocaux.

Lastructurationde l’encastrementdes transactionsdepartiesprenantes-partenairesnécessitequechacunedéve-loppedescapacitésdynamiques (Teece,PisanoetShuen,1997). Puisque celles-ci désignent le renouvellementcontinu des compétences visant une congruence avec unenvironnement, tout à la fois économique, social, territo-rial, écologique, sectoriel… Les capacités dynamiquesconstruisent une capacité de résilience qui passe par desprocessus d’apprentissage individuel, collectif, complet,évolutionnisteetstructurant(Payaud,2005a,2005b).Cettecapacitéderésilienceestunprocessusquipermetdecréerunéquilibraged’intérêtsentrepartiesprenantes,etnondesseulspropriétaireset/oudirigeants.Cerenouvellementdescompétencesrépondcertesàuncritèredesurvie,maisdesurviedurablequisuggèredesatisfairedesdemandespoli-tique,sociale,écologique,maisbienévidemmentaussiéco-nomiqueetfinancière.

L’identification, la construction et l’appropriation decompétencespassealorspar l’apprentissageorganisation-nel (Dodgson, 1993). L’apprentissage organisationnel estuneréponseàlanécessitéd’ajustement.Ilyalàunconceptdynamiqueetintégrateurquirelieplusieursniveauxd’ana-lyse : l’individu, les petits groupes et l’entreprise selonCrossan, Lane etWhite (1999), et dans le cadre de l’en-treprisedurable,lespartiesprenantes.Decefait,ilpermetderevoirlanaturedelacoopérationdesorganisations.Sil’apprentissage est généralement considéré comme étantunecompétencedel’entreprise,l’intérêtrésideplusparti-culièrement dans le mécanisme de transfert qui permet àl’apprentissageindividueldedevenirapprentissageorgani-sationnel, et réciproquement (Kim,1993).Ainsi, la capa-citédynamiquenaîtdelamanifestationstructurantedetroiscatégoriesdecompétences:lescompétencesindividuelles,lescompétenceslocalesetlescompétencesglobalesquisontàlafoisinter-organisationnellesetintra-organisationnelles.Lepassaged’unecompétenceàl’autreintègreàlafoislasimple boucle («single-loop learning») : apprentissageadaptatifparlequelonréagitauxchangementsenadaptantson action; la double boucle («double-loop learning») :l’atteinte des objectifs nécessite une remise en cause desschémas d’action de l’organisation; et le deutero-appren-tissage:apprendreàapprendre(ArgyrisetSchön,1978).Nonaka&Takeushi (1995)affirmentque leprocessusdeconnaissanceorganisationnelleserésumedansl’élargisse-mentd’uneconnaissanceindividuellepardesexpériencesnouvelles,suiviparlepartaged’expériencesvécuesauseind’ungroupe,puisparlaconceptualisationetlacristallisa-tion de ces expériences : création d’un nouveau conceptet sa concrétisation. L’apprentissage est complet dès lorsqu’ileststructurant,c’est-à-direqu’ilvient,ici,compléter,ajouterdesconnaissancesetdespratiquesàl’ensembledespartiesprenantes-partenaires,devenantainsiunenouvellebasedecompétencesaméliorablepartous.Lesrelationset

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lessavoirsdeviennentainsiindissociablesetnécessairesàl’activitécollective(Hatchuel,2005).

Selon Kim (1993), ce sont soit les modèles mentauxindividuels, soit les modèles mentaux partagés qui affec-tent l’interaction de l’apprentissage individuel et de l’ap-prentissageorganisationnel.Ainsi,pourquedesprocessusd’apprentissagepuissentavoir lieuentre lesorganisationsetlesterritoires,lesmodèlesmentauxdesorganisationsetdesacteursdesterritoiresdoiventêtresuffisammentconnusparlesacteursdeterraindechacunedespartiesprenantesafin que tous puissent construire des intérêts sécants. Ladialectique entreprise/territoire n’est certes pas nouvelle(Dupuy,1985;Pailliart,1992).Lemaintienet l’organisa-tiondecettedialectiquepermettentlaconsolidationd’inté-rêtscommuns,quisemanifestenttrèsclairementlorsqueladurée,laconfianceetlaqualitédesrelationssetraduisentparuneappropriationdesspécificitésdesterritoires.SelonparexempleOffner(1992)lesréseauxnesauraientignorerlesterritoires.Qu’ilsdoiventcompteraveclepolitique,leconsommateur, le salarié, et autrespartiesprenantesdontlesancrageslocauxconstituentpourchacundescaractéris-tiquessubstantielles.Dèslorslesentreprisesdoiventmana-ger le territoire : lereconnaîtreet leconnaître, l’informeretl’écouter;maisaussi«ménagerleterritoire»(Martinet,1984):composeravecladiversité,intégrerlamultiplicitédes échelles géographiques, adapter la norme à la règlelocale.

Ainsi,l’entreprisedoitapprendredelapopulation,elledoit s’imprégner des spécificités et assembler des com-pétences locales, intégrer les subtilités culturelles et lesparticularitésquifontquecemarchésedistinguedeceluides pays riches. L’entreprise peut ici être comprise à lamanièredesgéographesoùelleoccupeuneplaceoriginaleentreladimensionlocaleduterritoireetladimensionglo-balede l’économie.L’entreprise transforme les territoiresàtraversl’ensembledesfluxmatérielsethumainsqu’ellegénère.Elleagitcommeunvecteurmajeurdesmutationséconomiques,socialesetspatialesdumondecontemporain(Daviet,2005).L’entrepriseestl’«undesgrandsacteursdel’espace»(Brunetetalii,1992).

Les habitants intégreront en retour l’entreprise à leurquotidien parce qu’elle répondra parfois à un besoin, leplus souvent à des nécessités vitales (revenu, produit debase…).LespopulationsysontnaturellementincitéescarmalheureusementcommelementionneYunus(1997)àpro-posdumicro-crédit«Lechoixestdramatiquementsimple:ou(ladame)emprunteàGrameen,ouellevoitmourirsesenfants».

Ainsi,entrepreneurslocaux,populationlocaleetentre-prisepeuventconstruiredesrelationsriches,économiquesmaisaussisociales,culturelles;cettecoalitiond’individusetd’organisationenchâsséedansunsystèmesocio-écono-mique local crée«une communauté», au sensdePeredoet Chrisman (2006). Ces auteurs développent le conceptd’«entreprise fondéesur lacommunauté»–Community-

based enterprise, CBE –, et y voient une stratégie soute-nabledudéveloppementlocaldespayspauvres.Eneffet,leslimitesdesactionsmenéesparlesEtats,ONGouautresinstitutionspourdiminuerlapauvreté,leconceptd’entre-prisefondéesurlacommunautéprôneuneformed’entre-preneuriat enracinée dans une culture locale, un capitalsocialetnaturel.Selonlesauteurs,c’estcetenracinementquifaitsouventdéfautauxpolitiquesjusque-làengagées.

La communauté, ici, ne se définit pas seulement parune agrégation de personnes qui partagent des objectifsdeproduction;lacommunauté,etdoncsesmembres,par-tagent égalementune localitégéographique,un territoire,une culture, des caractéristiques éthniques éventuelle-ment…Grâceàcetteproximitégéographique,maisaussiune proximité d’intérêts et de moyens, la communauté aunrôled’entrepreneurcollectif.Sesmembressontàlafoispropriétaire,manageretemployéd’uneorganisationcrééeensemblepourrépondreàcequi,dupointdevuedel’entre-priseestuneactivitééconomiquesocialementresponsableet,pourlespopulationslocales,unesourcedeproduitsetderevenusaccessiblesetrécurrents.Achargepourtousdes’engagerdansdenouvellesrèglesdujeuetdefaire«lesparissurstructuresneuves»quePerrouxplaçaitàlabasedetoutdéveloppement.Cettepluralitéderôlesquepeuventjouerlespopulationslocalesestdenatureàlimiterleseffetsnégatifsouperversdel’élargissementdumarchédel’entre-priseauxpauvres(positiondominantedel’entreprisevis-à-visdesproducteurslocaux),telsquelescraintRenouard(2007).

les conditions de mise en œuvRe

Ces conditions s’adressent aussi bien aux «entrepreneurssociaux» soucieux de mettre en œuvre, qu’aux critiques,carellespermettentdenepasfaireglisserlesenjeuxdelaRSE-BOPversdesperspectivesmoinsresponsablesetdesepréserverdesdéviancesdecettepratique.

LerôleetleseffetsdelaRSE-BOPnepeuventêtresim-plifiés,niréduitsàunchevaldeTroieducapitalisme.Aucontraire,elledoitassurerlapriseencomptedesdommagescollatérauxliésparexempleàlapositiondominanted’unemultinationale vis-à-vis des autres producteurs locaux(Renouard,2007).LaRSE-BOPn’estpas«l’ennemiedelarévolution»–critiquesouvententendueparMuhammadYunuslorsdelamiseenplacedesmicro-crédits–carellenedépossèdepasl’indigènedesondésespoir,desarageet/oudesonidéalrévolutionnaire,iln’estpasréduitàunsimpleconsommateurgourmandavidededépensesmatériellesousuperficielles.Enfin,laRSE-BOPn’estpasqu’uneactivitéàcharges,elledoitdégagerdesrésultatspourperdurerdansletempscommesurdesterritoires.

Des exemples de pratiques de RSE-BOP illustrentchaque bloc de propositions ou des propositions particu-lièresafindemieuxensaisirlecontenu,lesimplicationsetlesréflexionsmenéespardesentrepreneurssociaux.Ainsi,

Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 43

seizeexemplestousissusdesourcessecondairesetextraitssoitdel’ouvragedePrahalad(2004),soitduréseauIMS-EntreprendrepourlaCité(livreetsiteinternet),soitderap-ports économiques et sociaux d’entreprises, concrétisentlesconditionsdemiseenœuvre.

Propositions 1 : Intention Stratégique

P.1.1. La conception RSE-BOP concerne directement la mission et les buts fondamentaux assignés à l’entreprise ou au moins à l’une de ses entités.

Des entreprises sociales naissent ex nihilo avec unemissionetdesbutssociaux,d’autresentreprisesnaissentdel’initiatived’uneentrepriseéconomique,maisdontlamis-sionestd’êtresociale.Danslesdeuxcasdefigure,laviabi-litééconomiqueestposée.Decefait,lanaturedel’activitédel’entrepriseoudel’unedesesentitésestconçueàpar-tirdescaractéristiquesdescommunautés,despopulationslocalesconcernées,desbesoinsparfaitementidentifiéssurlesterritoires.

P.1.2. Elle s’inscrit dans le cœur de métier de l’entreprise où elle puise le type de produits offerts et des compétences centrales.

Le fait que l’activité BOP s’inscrive dans le cœur demétierdel’entreprisesignifiequelasatisfactiondesbesoinspasseparl’activitésupportdel’entreprise,parsescompé-

tences.Ils’agitd’uneconditionveto,absolue,nécessaireetnonnégociable,soitquecetteactivitépréexiste,soitqu’ellesoitcrééedefaçonadhoc.

Le  cas  de  l’entreprise  sociale  The  Bakery. Lamissionsocialedecetentrepreneurfrançais,Alexisde Ducla, est de former les plus pauvres – lesIntouchables–aumétierdelaboulangerie(P.1.1.)considéré comme de l’artisanat de luxe en Inde,grâceàuneécoledeboulangeriefrançaiseouverteà Chennai. La production est vendue à des cafésdeluxedelaville,aulycéeaméricain,etdansdesboulangeriesimplantéesdansdesquartiersprivilé-giésen Inde.Ces individus,exclusdusystèmedecastes qui régit la société indienne, n’ont accès àaucune formation, aucune protection. A la fin decette formation, lesélèves issusdesbidonvillesetcampagnesprétendentàdespostesdansdesgrandshôtelsinternationauxoùlesindividusdecastesnesontpasfavorisés.

Sources:aujourdhuilinde.com

Le  cas  de  l’entreprise  économique  CEMEX,fabricantinternationaldeciment,auMexique.Cetteentreprisea lancéleprojet«PatrimonioHoy»quipermet aux pauvres d’acheter des services et desmatériauxdeconstructionpouraméliorerleurhabi-tat. «Pour Cemex, ce programme est à la fois un

TabLEaU 3

Les fondements théoriques d’une intention stratégique RSE-bOP

IntentionStratégique

ClientsetMarché

Systèmed’OffreRéseaude

ValeursCompétencesStratégiques

Théoriedelastructuration

Encastrement

Entreprise«géographique»

Socioéconomiedelaproximité

Apprentissage

ApprochesfondéessurlesR&C

Réseaux

Approchebaséesurlescommunautés

Théoriedespartiesprenantes-partenaires

Entrepreneuriatsocial

Innovation

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instrumentderecherchedeprofitetdecontributionsociale (P.1.1. et P.1.2.). Les principaux objectifssont les suivants :donnernaissanceàuneactivitésourced’avantagesconcurrentiels(P.1.1);représen-teruneoptionaccessiblepourlesfamillespauvresàlarecherched’unemeilleurequalitédevieàtraversl’améliorationdeleurhabitatenleurproposantducimentetdesmatériauxdebonnequalité(P.3.2.)àdesprixabordablesetfixes(pasdefluctuationdesprix) (P.3.3.); permettre aux pauvres d’accéder aucrédit(parlebiaisd’avancesdematériaux)(P.3.3.);positionner Cemex comme une entreprise socia-lement responsable (P.1.1.); construire du capitalsocial(P.1.1.)».

Source:Prahalad,2004;195

Propositions 2 : Formule et Stratégie Générique

P.2.1. La conception RSE-BOP peut s’inscrire dans la formule stratégique de l’entreprise

P.2.2. La conception RSE-BOP peut inviter à un changement de formule stratégique.

Proposéen1980parTregoeetZimmermanauxUSA,leconceptdeforcemotriceaétédéveloppéauplanacadé-miqueparMartinet(Martinet,1984,1999)souslelibellédeformule stratégique.Ce concept préfigurait les approchesfondées sur les ressources (Barney, 1991; Black et Boal,1994;Conner,Prahalad,1996)toutenoffrantuncaractèreopératoire et synthétique. Rappelons que la formule stra-tégiqueconstituelecœurdelastructurestratégiqued’uneentrepriseetdésignesa logiquedominantededéveloppe-mentqu’ilestsuggérédesuivresuruneduréesuffisammentlongue(Johnson,1987).Selonlalogiquechoisie,sontainsiclairement identifiés, l’éventail des produits et des mar-chés à venir, les capacités et compétences fondamentalesnécessaires, les orientations stratégiques cohérentes. Laformulestratégiquedel’activitéexercéedanslespaysBOPpeutsoitsuivrelaformulestratégiquedel’entreprisefocale(GrameenDanoneFoods,Hewlett-Packard),soitemprun-teruneautreformulestratégique(Cemex,bloc1).

Cas  de  la  société  Grameen  Danone  Foods. Leprojetdecetteentrepriseestnédelarencontrededeux hommes, Franck Riboud P-DG de DanoneetMuhammadYunusPrixNobeldelaPaix.Deuxhommesquipartagentunemêmeidéesurledéve-loppement des populations démunies. Cette expé-rience est relatée sous les termes suivants dans lerapportéconomiqueetsocial:«elleafficheuntripleobjectif:développerunyaourtàfortevaleurajoutéenutritionnellepourlesenfantsetaccessibleauxpluspauvres(…),améliorerlesconditionsdeviedelacommunautéencréantdesemploiset,enfin,proté-gerl’environnementetéconomiserlesressources.»etd’ajouterunquatrièmeobjectif«Cetteentreprise

viseaussilarentabilitéafind’inscriredansladuréecestroisobjectifs».(P.2.1.)

Source:rapportéconomiqueetsocialDanone2007.

Le  cas  Hewlett-Packard. Son programme Worlde-Inclusion qui a pour objectif d’inventer et d’in-tégrer des technologies, produits et e-services quipermettrontd’apporterlessolutionsdontontréelle-mentbesoinlespayslesplusdémunis,encollabora-tionavecdespartenaireslocaux.(P.2.1.)

Source:IMS-EntreprendrepourlaCité.

P.2.3. La stratégie générique est une différenciation de rupture par un très haut rapport valeur/prix à coûts faibles.

Prahalad(2004)rappelleque«silamargeunitaireestsouventpeuélevée,l’intérêtdesinvestisseurspourlesmar-chésdelabasedelapyramideestmotivéeparlaperspec-tived’ydévelopperdesactivitésdevolume,assortiesd’unrisquelimitéetderetoursélevéssurcapitauxemployés.».La RSE-BOP passe par un cumul de conditions de miseenœuvreàlafoisstratégiquesetorganisationnelles:per-formance/prix,volumed’activité,solutionstechnologiquesinnovantes hybrides et développement durable respectantl’environnement (Les cas Danone et Aravind Eye CareSystembloc6,Cemexbloc1).

Propositions 3 : Clients et marchés

P.3.1. La stratégie RSE-BOP répond prioritairement à des besoins fondamentaux (Maslow) : alimentation (Danone, voir P.5.2., Unilever P.4.), logement (Cemex bloc 1, Lafarge), transport, santé (Sanofi-Aventis, Procter & Gamble), énergie (EdF, Suez P.5.1.), accès aux biens fondamentaux.

A hiérarchie des besoins de l’homme, on peut asso-cierdenombreuxauteurs,dontlesplussouventcitéssontMaslow, Perroux et Sen. La pyramide de Maslow identi-fie lesbesoinsphysiologiques, la sécurité, l’appartenanceetamour,l’estimedesoietd’autrui,etlapossibilitédeseréaliser.Perroux(1986)développeles«coûtsdel’homme»qu’ildécomposeen1)besoinsquiassurentà lapersonnel’équilibrephysiqueetmental;2)lesbesoinsquiassurentà la personne une vie intellectuelle et morale; et 3) lesbesoinsquipermettentdeprocurerà lapersonne le loisirminimumsanslequelestimpossiblelaconsciencedesoi.Enfin,nouspouvonsfaireréférenceàSenquitravailleéga-lementlanotiondebesoinsfondamentauxsousletermede«fonctionnements» comme étant « les différentes chosesqu’unepersonnepeutaspireràfaireouàêtre(…)depuislesplusélémentaires-senourrirconvenablement-jouirdela libertéd’échapperauxmaladiesévitables- jusqu’àdesactivitésoudesétatstrèscomplexes-participeràlaviedelacollectivité,jouird’unebonneestimedesoi…».

Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 45

Voyons quelques exemples dans le tableau 4 danslequelilestpossibledecomparerlastructurededépensesdeconsommationliéesàl’alimentationetlesdépensesnonalimentairesdesménagesdansquelquesEtats.

Unemanièreplusprécisedepercevoiretdesaisir lesbesoinsfondamentauxestdes’intéresseràlarépartitiondesdépensesdeconsommationdesménages–dontletableau5relatel’exemplebrésilien–etainsid’adapterletyped’offreaux priorités des pays concernés. Malheureusement, cesdonnéesnesontpastoujoursaccessibles,etmêmelaplu-partdutempsinexistantes.

Le cas EdF. «LegroupeEdFproposeleprogrammeACCESS(accèsàl’énergie)dansdeszonesruraleséloignées des réseaux électriques du Maroc, duMalietdel’AfriqueduSud».

Le cas Procter & Gamble.«Legroupealancé,en2000,PUR(PurifierofWater),une solution inno-vantedetraitementdel’eau,simpled’utilisationetaccessibleauxpopulationsàbasrevenus.»

Le  cas  Unilever. «Dans le cadre du programmeNEP (Nutrition Enhancement Programme),Unileveralancéen2000auGhanaleselAnapurnaenrichieniode,ladéficienceeniodeétantrespon-sablede retardsdedéveloppement etdemortalitéinfantiledanslesPED».

Source:IMS-EntreprendrepourlaCité.

P.3.2. Elle s’adresse à des populations et/ou des segments de clientèle à très faible pouvoir d’achat.

Les consommateurs BOP n’ont pas d’épargne, n’ontjamaisfaitdedemandedecrédit,nedisposentpasdereve-nus réguliers ou déclarés. Pour toutes ces raisons, ils nepeuventaccéderauxfinancementsoffertsparlesétablisse-mentsfinanciersclassiques.Auxentreprisesd’imaginerdesmoyensetaccèsdefinancementsinnovants.

Le  cas  de  Casas  Bahia. En 2002, la populationbrésilienne s’élevait à 176 millions d’habitants,dont 84% appartenaient au BOP. 70% des clientsde Casas Bahia – une des plus grandes enseignesde ladistributiondedétail brésilienne, spécialiséedansl’électronique,l’électroménageretl’ameuble-ment–n’ontpasderevenusofficielsouréguliers.Cettepopulationconsacre2,9%desesdépensesauxmeubles,4,7%auxappareilsménagers.Lesventesfinancéesparcrédits’élèventà90%duvolumetotaldeventes.Pourvendreàcettepopulationdémunie,l’entreprise a notamment conçu un système definancementinnovant.Unlivretpermetauxclientsdepayerenpetitsversementséchelonnés–de1à15mois–, ilnepeutêtreapprovisionnéquedanslesmagasinsdel’enseigne,uneadressepermanentesuffitàcontracterunprêtpourunachatinférieurà600réals;au-delàdecettemêmesomme,lalimiteducréditestaffectéeauclientsurlabased’unrevenutotal,officielounonofficiel,de sonactivitéetdesesdépensespardesanalysteseninterne.Lorsquelesclientsviennentaumagasinpayerleuréchéance,unenouvellelimitedecréditestfixéeetlevendeuralapossibilitéderéaliseruneventecroiséeentrantdanscettenouvellelimite.Leprocessusd’éducationdesclientsestundesélémentscléspourlamaîtrisedutauxd’impayés.

Source:Prahalad,2004.

TabLEaU 4

Répartition en % des dépenses liées à l’alimentation

France Burkina 

Faso 

Guinée- 

BissauNiger

Alimentation  19,2% 33,9% 61,5% 43,6%

Hors alimentation 

80,8% 66,1% 38,5% 56,5%

source : Biaka Tedang, 2006

TabLEaU 5

La répartition des dépenses des ménages brésiliens

Répartitiondesdépensesen%

Boissonsetalimentation 32%

Logement 18%

Autres 16%

Santé 10%

Transports 8%

Habillement 6%

Appareilsménagers 4%

Voyagesetloisirs 3%

Meubles 2%

Education 1%

Source : Prahalad, 2004

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P.3.3. Elle oriente la construction de moyens novateurs permettant l’accès direct de ces clients aux produits et/ou services de l’entreprise.

La conception de produits et services BOP ne s’en-tend pas seulement dans l’acception de «produits finis»,elledoitaussiengloberl’accèsdirectquipeutprendredif-férentes formes. En effet, selon que nous avons affaire àdesbiensdurables,desservices,l’accèsdirectpeutêtreuneformation,unusage,uncomportement,unfinancement,unmodededistribution,etc.Enfonctiondel’activitéetdelapopulation,ilfauts’assurerqu’iln’yaitpasd’entrave,au-delàdurevenu,d’ordreculturel,géographique…et/ouliéeàlanatureduservice.

Cas  de  Lafarge. Bertrand Collomb, Président deLafarge témoigne : «Au Brésil, notre partenariatavec Habitat for Humanity nous a amenés à faireunedistribution largementplusatomiséequedansnos pays, où l’unité de livraison du ciment est lapaletteetoùilestimpossibled’acheteruniquementquelquessacs.Danscepays,comptetenudescarac-téristiqueslocales,nousdisposonsaucontraire,decamionspourfaire‘latournéedulaitier’etdéposerquelquessacsdanslespetitspointsdedistribution»

Source:IMS-EntreprendrepourlaCité.

Propositions 4 : Système d’offre

P.4.1. L’offre est concentrée sur un produit et/ou service primaire.

Enréalité,l’offredoitseconcentrersurunproduitouun nombre très limité de références de produits et/ou deservices.L’entreprisenedoitpascéderàladifférenciationdesproduits,niàlagadgétisation,niàunmarketingsophis-tiqué. Le produit, malgré son très faible nombre de réfé-rences,doitassurersonauto-promotion.Ainsi, lecourantd’affairesseraentretenuparunrapportqualité/prixetunestabilité du produit plutôt que par une obsolescence pro-gramméedesproduits.

P.4.2. La localisation est totalement ou largement intégrée; Fournisseurs, sous-traitants, distributeurs, clients… doivent pouvoir constituer progressivement un « éco-système d’activités ».

Lesystèmed’offredoitlimiteraumaximumlescoûtsd’acheminement des approvisionnements, de la distribu-tion, de transport des clients comme des employés. Lesterritoires sont souvent vastes, les sites séparés par desroutes difficiles, voire inexistantes, ou des zones déser-tiques.Chaquelocalisationdoitfabriquersonéco-systèmed’activités.

Le cas Lafarge India.«L’entrepriseestsituéedansdesrégionsruralesoùleniveauderevenuestbasetlapopulationmarquéeparl’illettrismeetlemanquedequalification.Enraisonducontexteéconomique,

Lafarge et d’autres entreprisesmanufacturières nepeuvent pas fournir des emplois à tous les chô-meursdescommunautéslocales,cequientraînedesconflitsentrelesdeuxparties.LafargeIndiaadécidédeformer600jeuneschômeursrurauxàlamaçon-neried’ici2008(100en2004)etd’assurerauxcan-didatsuntauxd’embauchede25%aucoursdeleurformationchezunconstructeurouun fournisseur.Lescourssontévaluésetcertifiésparl’InstitutdesIngénieurs,uneinstitutionréputéedansledomainetechnique. Pour compléter le projet, Lafarge offreauxcandidatsdiplômésunepetitesommed’argentainsiqu’unkitd’outilsdemaçonnerie.Celapermetdepromouvoirl’unedesmeilleuresméthodespourformerunstagiaireàlamaçonneriemoderneen30jours.Enguisede travauxpratiques, lescandidatsdoiventconstruireunesalledeclassedansunvil-lage.Dessalariésvolontairesjouentparlasuiteunrôle de guide durant un an pour les candidats quiauront réussi, en lesorientantdans leur recherched’unemploisignificatif.

Les constructeurs et les fournisseurs cherchentdésormaisàemployerlesdiplômésissusduprojetsur leurs chantiers. 70 % des candidats au départdevraienttrouverunemploiaprèslaformation.Laréussiteetlesbénéficesdeceprojetontétéplébis-cités à la fois en Indeet sur leplan international.Le Conseil mondial des entreprises pour le déve-loppement durable (WBCSD) l’a salué commeun exemple de bonne pratique. L’Education andResearch Institute, une ONG indienne renommée,l’adésignécommel’unedescinqplusbellesillus-trationsdelaresponsabilitésocialed’entrepriseenInde.»

Source:http://www.lafarge.fr

P.4.3. La distribution constitue un facteur stratégique majeur. Elle doit généralement faire l’objet d’innovations radicales, notamment dans les pays où les réseaux de transport sont défaillants.

P.4.4. La stratégie marketing combine des prix très bas, une qualité satisfaisante, une promotion directe empruntant les liens de l’éco-système et minimisant le budget marketing global.

La réflexion sous-jacente à ces deux propositions estquel marketing pour des besoins fondamentaux? Quelcontenupourles«4P»?

DansunelogiquedeRSE-BOP,laréflexiondes«4P»est totalementdifférentede celle encore exercéedans lespaysriches;ces«4P»sontrepenséspourintégrerl’indigènedanssesqualitésd’hommepluriel:consommateur,citoyen,distributeur,vendeur,transporteur…toutessatisfaitespourencourager la duplication de chacune de ces expériencessur les sites. Le produit, on l’a vu, ne doit pas subir des

Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 47

élargissements ou approfondissements de gamme, le prixdevantêtreadaptéaupublicdémuninécessiteunerefontedelalogistique,deladistribution,commedelaforcecom-merciale.Lesinnovationsneconcernentpasseulementlesproduits, mais les processus qui permettent d’accéder auclientetd’intégrerleclient.

Le cas de HLL.Cettefilialed’UnileveracrééenIndeduseliodéquineperdpassateneureniodependant le stockage, le transport et la cuisine etdiffuse seulement l’iode lors de l’ingestion d’ali-ments cuits. Ciblant traditionnellement les mar-chésurbains,HLLpouvait s’enorgueillird’undesmeilleurssystèmesdedistributiondupays.Maislesresponsablesdelasociétécomprirenttrèsvitequ’ilsnepourraientpasaccéderauxvillagessituésdansleszonesreculéesenutilisantlesmêmesméthodes.HLL initia donc un programme dans lequel cesont les femmes des villages imparfaitement cou-verts par le système qui distribuent les produitsdugroupe (P.4.3.).Leprogramme,baptiséShakti,offre aux femmes de devenir entrepreneurs. (…)Ce canal supplémentaire de distribution permettraàtermedeservirunmarchéde200à300millionsdepersonnes.Eneffet,cetteinnovationquerepré-sentel’utilisationducapsulagepourprotégerl’iodecontenudansleselaétébrevetée.Unileverestentrain de la déployer dans d’autres pays touchésparleTroubleDuàlaCarenceenIode(TDCI),auGhana,Côted’IvoireetauKenya.

Source:Prahalad(2004)

Le cas Sanofi-Aventis.Legroupe«amisenplaceen2002unestructuredédiéeàlacompréhensiondela situation et des attentes des populations dému-nies, ainsi qu’à l’élaboration de plans d’actions.L’engagement du groupe s’exprime concrètementpar une politique de prix adaptée (P.4.4.) et desefforts en matière de recherche : le programmeImpact Malaria de Sanofi-Aventis (P.4.1.) (…).S’appuyant sur une équipe de 15 personnes etreprésentant un budget d’environ 8 millions d’eu-rosen2006,ceprogrammemetenplaceunepoli-tiquedeprixpourfavoriserunmeilleuraccèsauxmédicaments contre le paludisme, une démarchedeformationetd’informationdetouslesmaillonsde lachaînedesoinset la recherchedenouveauxtraitement antipaludiques. Au niveau des prix, leprogramme pratique une politique de vente d’an-tipaludiquespar lescircuitspublicsàprixcoûtant(P.4.3.). Dans des circuits de pharmacies privées(P.4.3.), il développe une politique tarifaire diffé-renciéeàl’aideduprogrammeCAP(carted’accèsauxantipaludiques).D’autrepart,conscientqu’unemeilleureaccessibilitéauxmédicamentsnepermet-trapasdebattreefficacementlepaludismesansuneréelle politique d’information, le groupe mène de

nombreusesactions,tantauprèsdesprofessionnelsdelasantéquedespopulations,pourlesformerautraitementdupaludismeetàlaprévention».

Source:IMS-EntreprendrepourlaCité

Propositions 5 : Le réseau de valeurs

P.5.1. L’« éco-système d’activités » doit présenter des relations denses et proches (physiquement, culturellement…) entre acteurs.

Les relations denses et proches doivent engendrerune efficience économique, une préservation écologiquequidiminuent les coûts sociaux supportéspar les acteursdes populations locales. Plus les relations sont denses etproches(culturellement,socialement,…),pluslesystèmed’activitépeutêtreconsidérécommeunéco-système,pluslavaleurcrééeestpotentiellementforte.

Le cas Suez. Lydec,filialedugroupeauMaroc,amisenplacedès1998,unpartenariatinnovantaveclesautoritéslocalesdeCasablancaetlapopulationpourélectrifier120bidonvilles,soit30000foyers.«la distribution de l’électricité s’est effectuée parblocs d’une vingtaine de ‘baraques’. Chaque blocaéluunreprésentantpourgérerson‘réseausecon-daireprivé’:coordonnerlaréalisationdestravaux,lamaintenanceet ladistributionauxbénéficiaires.Cette personne, signataire d’un contrat collectifavecLydecaunomdesfamillesqu’ellereprésente,reçoit également la facture de consommation glo-baleetrépartitlemontantsurlabasedesconsom-mationsrelevéessurdescompteursindividuels.Auseinde l’entreprise,deséquipesdédiéesàce seg-mentdeclientèleassurentlacoordinationetl’ani-mationduréseaudesintervenantsdeterrain.Unedeleursmissionsconsisteàcomprendrelesusagesdeshabitantsenmatièred’accèsfrauduleuxàl’énergieetàévaluer lesdépensescorrespondantàcespra-tiques,pourmieuxadapterl’offredel’entrepriseàleursattentesetbesoins.Demême,afinderéduirelesrisques,Lydecencouragel’implicationcomplèteetlaparticipationdeshabitantsdansl’élaborationetlagestionquotidienneduprojet.Enfin,l’entrepriseaadaptésapolitiquedesprixderaccordementauxhabitantsdecesbidonvilles».Denouvellessolida-ritéssontnées:«Lesfamilleslespluspauvresontété aidées par les autres familles pour financer lebranchement (Dans61,1%descas)oupourpayerleurfacture(43,1%descas).Demême,lesconsom-mations électriques des infrastructures collectivesinstalléesdanslesblocsontétéprisesenchargeparlesfamillesdublocconcerné(41,7%descas)».

Source:IMS-EntreprendrepourlaCité

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P.5.2. L’encastrement des acteurs dans les réseaux locaux fait qu’ils peuvent tenir simultanément plusieurs rôles : distributeur, consommateur, fournisseur, formateur, etc.

L’éco-systèmeetl’encastrementoffrentdespossibilitésaccruesàlapopulationlocaledetenirdesrôlesquinesau-raientseréduireàunedimensionforcedetravail.Au-delàde la création de valeur, des jeux à somme positive sus-ceptiblesdedécoulerdelaprécédenteproposition(P.5.1.),l’encastrement des acteurs dans les réseaux leur offre lapossibilitéd’augmenter leurpotentialité, d’accroître leurscapacités,ausensdeSen.

Le  cas  Danone. En développant un nouveau sys-tèmededistribution,l’entrepriseacréédesemploisetdefaitagénérédesimpactssociauxpositifssurleterritoire(P.5.1).Troispaysbénéficientàl’heureactuelledecemodèlededistributionsociétal.Les«daniladies» en Afrique du Sud, les «Grameenladies» au Bangladesh et les «cruceros» auMexique.Dès2005,lesdaniladiesdistribuaientunyaourtconçupourrépondreauxbesoinsnutrition-nels des enfants (P.3.1.) et accessible financière-ment.Lesdaniladiessontdesfemmesauchômagequi vendent le produit en faisant du porte-à-portedanslestownships(P.5.2.),encadréespardesdani-grandma, femmes de la township dont le niveaud’éducation est plus élevé. En 2007, l’expérienceest renouvelée au Bangladesh. Les cruceros quivendent lesproduitsDanoneMexiquedans la rueobtiennent l’équivalent du SMIC Mexicain ainsiqu’unecouverturesocialepour32yaourtsvendus.

Source : rapport économique et social Danone2007,p.56.

Propositions 6 : Compétences et Ressources Stratégiques

P.6.1. Les capacités stratégiques sont à co-construire entre l’entreprise et les populations locales en mobilisant les pouvoirs et les relations sis sur le territoire ainsi que les compétences (globales et locales) de l’entreprise.

L’entreprise se trouve en tension (Hamel et Prahalad,1994)danslesensoùlesdéfisàreleverrévèlentunedis-proportionentrelasituationprésenteetlefutursouhaité.Lavolontédemobiliserlessavoir-faireetsavoirslocauxainsique lessystèmesrelationnelspousse l’entrepriseànepassecontenterdetransféreret/ouappliquersescompétenceshabituellesàuncontextenouveau,maisàinnoverencom-binantet transférant lescompétences localesauxsiennes.De ces innovations, découlent des capacités stratégiquesaccruespourl’entreprise.

P.6.2. Le financement des investissements initiaux peut justifier une ingénierie spécifique (à vocation socialement responsable) au niveau de la tête de groupe, en collaboration ou non avec des acteurs globaux (ONG…)

Ici,l’idéeestdenepastraiterleproblèmecommeunematriceBCGdansunpremiertemps.Eneffet,lorsquel’ac-tivitééconomiquelocalequiémaned’uneentreprisecapita-listiquecotéen’estpasassurée,ilestjudicieuxdeconcevoirunfinancementdesinvestissements,quidupointdevuedesinvestisseurs comme des évaluateurs (agences, audit…),relèvedeniveauxdecritèresdifférentsdel’activitéd’ori-ginedugroupedanssonensemble.Ainsi,sil’activitéBOPnedégagepasderésultatssuffisants,ellepeutêtrecircons-criteàuneopérationlimitée,obéissantàsaproprelogiqueetàsespropresexigencesdesurvieetdeviabilitéminimalequ’ontl’habitudedesupporterlesentreprisessociales.Si,aucontraire,l’activitéBOPmontresescapacitésetqu’ellerejointentermesdeperformanceslesstandardsdugroupe,elle peut à terme intégrer l’activité du groupe dans sonensemble.

Le  cas  Danone.Communities.  Du succès deGrameen Danone Foods (P.2.1.) est venue l’idéede promouvoir «cette nouvelle grande idée d’uneéconomiesocialeetinnovante».LeprojetDanone.Communities est composé d’une SICAV et d’unFCPR.EnsponsorisantceprojetDanoneseconsti-tueunecommunautéd’investisseursetd’épargnantsintéressésparl’expansiondenouveauxmodèlesdedéveloppement.

Source : rapport économique et social Danone2007,p.55.

P.6.3. La conception, la construction, le fonctionnement, la maintenance des équipements s’inscrivent dans une logique d’éco-système industriel et empruntent le plus possible les savoirs, les techniques, les matériaux locaux renouvelables.

Cette proposition souligne l’obligation à respecter lesite, le territoireet toutcequi lecompose.Ainsi, l’entre-priseveilleàl’utilisationraisonnéedumatériaulocal,ànonseulementminimiser l’empreinteécologiquemaisaussiàcontribuer, si possible, à la gestion des ressources écolo-giques,àajuster la tailledeséquipementssanscéderà latentationdeséconomiesd’échellequineprennentpasencomptelescoûtscachésécologiquesetsociaux,maiséga-lement à co-construire, anticiper, prévoir une autonomielocaleenformantlapopulationlocaleàlamaintenancedesappareils,àlarénovationdesbâtimentsouautresphasesdesuiviquidécoulentdel’activitéBOP.

Stratégies RSE-BOP et Soin des Communautés Humaines. Concepts et Propositions Génériques 49

P.6.4. Les processus et systèmes d’approvisionnement, de production et de distribution sont conçus et fonctionnent de façon à habiter les territoires en mobilisant le plus possible les ressources humaines locales.

EncohérenceaveclespropositionsP.4.2.etP.4.3.,l’en-sembledesprocessusd’approvisionnement,deproductionetdedistributionmobilise lepluspossible les ressourceshumaines locales dans leurs différents rôles et s’efforced’habiterlesterritoiresenprofondeuretdansladurée,defaçon respectueuse plutôt que de céder à la tentation del’exploitationmonodimensionnelledeshommesoudesres-sourcesnaturelles.

P.6.5. La conception des produits et/ou services s’appuie sur un ago-antagonisme entre compétences globales (tête de groupe), locales (unités) et indigènes (population).

La conception des produits et services ne résulte nid’une logiqued’imposition,nid’unepureadaptationauxgoûtslocaux,maislescompétences,savoir-faireindigènessetrouventmisentensionaveclessavoir-fairedugroupeetdesfilialeslocalesdemanièreàinnoveraumaximumtoutenétantcohérentaveclapropositionP.2.3.

P.6.6. Les processus d’apprentissage visés sont réciproques et récursifs : enrichissement des compétences locales et indigènes sur les compétences globales; enrichissement de ces dernières par les compétences locales et indigènes. Ces processus sont susceptibles à terme d’enrichir les compétences du groupe.

Lemanagementdescompétencess’efforcedefavoriserlesprocessusd’apprentissagecomplet,structurant,habili-tant(Payaud,2005a),ilsdoiventêtreréciproquesetrécur-sifsauxdifférentsniveauxde l’organisationdemanièreàaugmenterlescapacitésdel’ensembleetladynamiquedel’innovation.Encasderéussitedecesprocessusd’appren-tissage,lescompétencescentralesdugroupesontsuscep-tiblesd’êtreenrichiesetdéployéessurd’autresterritoires,parcequ’ilsgénèrentdescompétencestransférables,oudessavoir-fairegénériques.

Le  cas Aravind  Eye  Care  System.Aravind EyeCareSystemarévolutionnél’ophtalmologiedepuisla détection des patients nécessitant une prise encharge, jusqu’au processus qui préside l’inter-vention, en passant par les consultations, dans unpaysoùmoinsd’un tiersde lapopulationaaccèsà des infrastructures sanitaires correctes : l’Inde.Quelques chiffres concernant l’activité d’AravindEyeCareSystem:200000opérationsparan,60%despatientssefontopérergratuitement,40%payentuntarifbas,uneinterventioncoûteentremoinsde50à100dollars(contre2600et8000dollarsauxEtats-Unis), le prix de vente de sa propre lentilleinteroculaireestde5dollars(contre200auxEtats-Unis), un niveau de qualité supérieur aux normes

internationales.Les1500campsd’ophtalmologieitinérantssontunmoyend’éduquerlesgenssurlessoins des yeux, un moyen d’accéder aux patientsquiontbesoind’êtreopérésetsontconduitsparlesentrepriseslocales,lesONGprésentesetlesécoles(P.6.1.).Destechniciennessontdesjeunesfemmesrecrutées sur place (P.6.4.), elles sont forméesexclusivementauxsoinsophtalmologiquesparl’en-treprise(P.6.5),ets’occupentdesphasespréetpost-opératoires,etdessuivis(P.6.3.).AravindEyeCareSystem a su conserver l’infrastructure locale desvillages,toutenlesdotantd’équipementsmodernes(P.6.3).AravindEyeCareSystemintègredésormaisdes activités de recherche, de fabrication de petitoutillage,deformationetdetélémédecine(P.6.6.).

Source:Prahalad(2004)

Conclusion

Pour radicalesqu’elles soient les innovations exigéespardesstratégiesRSE-BOPnerelèventpasdelapureutopiecomme l’illustrent les cas cités, tous caractérisésparunecertaineviabilitééconomiqueetunecontributionsignifica-tiveauxcommunautés locales.Ellessupposentcependantunprojetexigeant,durableettenaceainsiqu’unecapacitéàs’affranchirdel’orthodoxieetdesconventionsouthéoriesenusage.D’ailleursYunusacoutumededire:«Nousavonsregardécommentfonctionnaientlesautresbanquesetnousavonsfaitlecontraire».

Pourlechercheurenmanagementstratégique,l’hétéro-doxieconsisteiciàposerquesonchamppeutcontribueràlaluttecontrel’extrêmepauvretéviauneconceptionstraté-giqueexigeantedelaRSE.Jusqu’icilemanagementstraté-giqueapeunourrilesréflexionssurl’économiesocialeousolidaireensecantonnantàuneconceptionconventionnelleet restrictive de la performance (la valeur actionnariale).Pourtant, la recherche de valeurs partenariales, la théoriedes parties prenantes, le développement durable… sontautantde«petitspas»quicontribuentàélargirl’espacededécision et d’opérations de l’entreprise et à suggérer descritèresdegestionplusnombreuxetplussubtils.

Au-delàencore,lacriseactuelleinterrogedirectementlesgrandesentreprisesquantàleurresponsabilitédanslesgrandsproblèmesdumonde.Lefaitque4milliardsd’indi-vidusdisposentdemoinsdedeuxdollarsparjourconstitueuneinvitationlancinanteàinnover.

Fondéd’abordsurl’observationdequelquescasorga-nisés en taxonomie, puis sur la proposition d’un cadreconceptuel provisoire mais d’emblée synthétique, le pré-sentarticleélaboreunschémadirecteuretdespropositionslogiquementcohérentesàmêmedeguiderlaconceptiondeprojets stratégiques ainsi orientés.Une tellemodélisationheuristiquen’apasvocationàêtrevalidéeempiriquementselonunprotocole standard.Ellen’ad’intérêtquesi elle

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suggèreetorientedesfluxderecherche,guideetsécurisedes projets d’action, ouvre le champ des possibles quantauxvoiesetmoyensdeluttecontrel’extrêmepauvretéets’exposeàlamiseàl’épreuveetàlacritique.

La RSE-BOP ne peut constituer évidemment qu’uneréponsepartielleetlocaleetnesauraitsesubstitueràdespolitiques nationales et supranationales d’aide au déve-loppement. Mais l’ampleur du problème et son caractèreinsoutenablepourtouthommeresponsableinvitentànepaslesnégliger.

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