Standards ouverts et logiciels libres

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions Observatoire Technologique Centre des technologies de l’information République et Canton de Genève P. Genoud, G. Pauletto 30 septembre 2005 Observatoire Technologique Centre des Technologies de l’Information République et Canton de Genève CP 2285, 1211 Genève 2, Suisse http://www.geneve.ch/ot/ [email protected] 1

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Document de clarification des notions liées aux logiciels libres et aux standards ouverts.

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Standards ouverts et logiciel libreClarification des notions

Observatoire TechnologiqueCentre des technologies de l’information

République et Canton de Genève

P. Genoud, G. Pauletto

30 septembre 2005

Observatoire TechnologiqueCentre des Technologies de l’InformationRépublique et Canton de GenèveCP 2285, 1211 Genève 2, Suissehttp://www.geneve.ch/ot/

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Table des matières

1 Introduction 5

2 Interopérabilité 5

3 Logiciel libre 7

3.1 Le modèle open source . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

3.2 Les communautés open source . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

3.3 Catégories de logiciel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

3.3.1 Domaine public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

3.3.2 Propriétaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

3.3.3 Shareware / Freeware . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

3.3.4 Commercial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

3.3.5 Logiciel libre (Free Software) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

3.3.6 Open Source . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

3.3.7 Licences doubles ou multiples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

3.4 Perspectives open source dans le secteur public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

4 Les standards ouverts 12

4.1 Définitions et critères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

4.2 Degré d’ouverture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

5 Organismes de normalisation 19

6 Standard ouvert vs logiciel libre 21

7 Politiques gouvernementales 22

7.1 Belgique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

7.2 Brésil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

7.3 Danemark . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

7.4 États-Unis, Massachusetts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

7.5 France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

7.6 Norvège . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

7.7 Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

7.8 Royaume-Uni . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

7.9 Suisse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

7.10 Union Européenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

8 Domaine de l’éducation et de la recherche 30

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9 Conclusions 33

Révisions

Version Date / auteurs Objet de la révision0.1 2005-02-18 / pge Version initiale0.2 2005-06-17 / gip Ajout section logiciel libre0.3 2005-07-04 / pge, gip Ajout autres sections0.4 2005-07-15 / pge, gip Avant relecture finale0.9 2005-07-21 / pge, gip Pour soumission à la direction du projet

0.91 2005-09-05 / pge, gip Modifications après retour de la direction du projet1.0 2005-09-30 / pge, gip Après validation par la direction du projet

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1 Introduction

Au cours de l’année 2004, plusieurs signaux ont été émis affirmant la volonté de l’administration genevoisede se tourner d’ici 2009 d’une part vers le logiciel libre, mais aussi et surtout vers les standards ouverts. Desdéclarations dans ce sens ont d’abord été émises en interne1, puis relayées dans les médias locaux (jour-naux2 3, télévision4) et également reprises par le site Web de l’IDABC5 (site de la Commission Européennedédié à l’échange de données entre les administrations).

Ces annonces suscitent, et vont susciter des réactions, que ce soit au niveau des collaborateurs de l’ad-ministration genevoise, des représentants des autres cantons et de la Confédération ou des entreprisesinformatiques partenaires. Les informations fournies sont plus ou moins bien comprises et appréciées parles différents acteurs concernés. Elles suscitent de nombreuses questions auxquelles il faudra répondreclairement et rapidement si l’on entend atteindre efficacement les objectifs visés.

Un travail de clarification est donc nécessaire et est à l’origine du projet « Standards Ouverts et LogicielLibre » (SOLL) confié conjointement à l’Observatoire Technologique (OT) par la Direction Générale du Centredes technologies de l’information de l’État de Genève (CTI), par la Direction Informatique de l’Université deGenève et par le Partenariat de l’OT.

Les notions de logiciel libre et de standard ouvert ne sont pas aussi bien comprises qu’on pourrait l’imaginer,même au sein de la communauté informatique. Cela tient d’une part au fait que ces concepts sont relative-ment nouveaux. D’autre part, les définitions que l’on en donne varient selon les auteurs ou les communautésconcernées, surtout en ce qui concerne l’aspect plus ou moins restrictif des critères que doivent respecterles logiciels et les standards pour être qualifiés de libres et d’ouverts respectivement.

Il est donc important de définir précisément ces notions afin qu’il ne subsiste pas d’ambiguïté dans lesesprits, que ce soit en interne ou en externe à l’entreprise ou à l’organisation concernées. Ce documentreprend ainsi les définitions communément proposées dans la littérature. Il met en évidence les interpréta-tions et les implications relatives aux différentes définitions d’une même notion, ceci afin de permettre auxmandants du projet SOLL d’en proposer leur propre acception en toute connaissance de cause. La notiond’interopérabilité est développée en préambule, car elle constitue le concept de base autour duquel viennentnaturellement s’articuler les standards ouverts et le logiciel libre. Un chapitre est également consacré à laclarification des relations que l’on peut pressentir entre logiciel libre et standards ouverts.

Certains gouvernements se sont déjà clairement positionnés par rapport au logiciel libre et aux standardsouverts. Nous proposons dans ce document une brève description de quelques politiques gouvernementalesqui illustrent les diverses manières d’aborder cette problématique et qui peuvent servir de référence dans cedomaine. Enfin, un recensement de quelques initiatives phares dans le milieu académique est égalementproposé.

2 Interopérabilité

Comme le souligne un récent document de travail de la Commission Européenne6, l’administration électro-nique n’est pas une simple administration traditionnelle à laquelle on aurait ajouté l’Internet. Elle recouvrel’utilisation de nouvelles technologies en vue de transformer les administrations publiques et d’améliorerradicalement les contacts avec leurs clients (citoyens, entreprises ou autres administrations).

Ces transformations passent notamment par un décloisonnement des divers services et départements del’administration, dans la mesure où cela respecte les lois en vigueur et la sphère privée des citoyens. Mais

1Vers les Standards Ouverts, Echo No 1, CTI, Automne 2004.2Article du Matin, 17 novembre 2004.3Article de la Tribune de Genève, 24 novembre 2004.4Reportage TSR Journal des Régions, 15 décembre 2004.5Geneva moves towards open standards, http://europa.eu.int/idabc/en/document/3528 et

Geneva to switch to open source by 2009, http://europa.eu.int/idabc/en/document/3601, Sitede l’IDABC (Interoperable Delivery of European eGovernment Services to public Administrations, Businessesand Citizens), Novembre 2004.

6Interconnecter l’Europe : l’importance de l’interopérabilité des services de l’administration électronique,document de travail des services de la Commission Européenne, 2003.

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une transversalité croissante ne va pas sans poser des problèmes, à la fois techniques et organisationnels,lorsqu’il s’agit de faire communiquer entre eux les différents systèmes d’information concernés.

Les technologies peuvent faciliter la communication et le partage de l’information pour autant qu’elles soientinteropérables. L’interopérabilité se situe alors au cœur du rapprochement des services des administrationspubliques. Elle désigne ici la capacité qu’ont les technologies de l’information et de la communication ainsique les processus qu’elles soutiennent à échanger des données et à permettre le partage de l’information etde la connaissance. Elle garantit ainsi la pérennité des données et leur accessibilité dans le futur. Elle consti-tue donc une exigence fondamentale pour développer une administration en ligne efficace, performante etpérenne. Plus généralement, elle doit être considérée comme un élément clé des architectures actuelles,qu’elles soient techniques, applicatives ou métier.

La Commission Européenne a parfaitement intégré ces enjeux et a lancé le programme IDABC7 (Interope-rable Delivery of European eGovernment Services to Public Administrations, Businesses and Citizens) afinnotamment d’encourager et de faciliter l’échange d’informations et de connaissances entre les secteurs pu-blics des différents pays de l’Union Européenne.

Le document de travail de la Commission Européenne insiste sur la nécessité de considérer l’interopérabilitécomme un problème global. En effet l’interopérabilité passe d’abord par la réorganisation des processusadministratifs et par la nécessité d’inclure la notion de partage de l’information. On considère ainsi troisaspects fondamentaux liés à l’interopérabilité des systèmes d’information :

1. L’interopérabilité organisationnelle qui concerne principalement la modélisation des processus mé-tiers dans le but de prendre en compte la collaboration entre services qui n’ont pas les mêmes struc-tures organisationnelles et qui ne gèrent pas des processus similaires. Pratiquement, il s’agit de s’as-surer que les processus pourront être facilement intégrés les uns aux autres et exploités par d’autresutilisateurs. L’interopérabilité organisationnelle a notamment pour objectif de prendre en compte lesbesoins des utilisateurs en proposant des services accessibles, aisément identifiables et orientés verseux. Cela passe par la nécessité de rendre la complexité organisationnelle des services transparentepour les utilisateurs.

2. L’interopérabilité sémantique qui garantit que le sens exact des informations échangées peut êtrecompris par toute application qui n’a pas été conçue initialement dans ce but. L’interopérabilité séman-tique facilite l’agrégation et la réutilisation d’informations hétérogènes (de par leur nature ou leur modede création) et participe ainsi de manière essentielle à la valorisation du patrimoine informationneld’une organisation. Cela va donc beaucoup plus loin que la simple connexion de différentes sourcesd’information, l’objectif plus fondamental étant de faciliter le passage de l’information à la connais-sance. La prise en compte de l’interopérabilité sémantique passe concrètement par une nécessaireréflexion sur la réutilisabilité et la standardisation des données, par l’utilisation de métadonnées quirenseignent sur le contexte lié à la création des données et par la mise en œuvre de technologiesXML conçues pour répondre à cette problématique.

3. L’interopérabilité technique concerne les aspects liés à la connexion des systèmes et des servicesinformatiques. Cela touche des domaines aussi variés que la définition d’interfaces et de standardsouverts, l’intégration des données, la couche middleware, la présentation et l’échange d’informations,l’accessibilité ou les services de sécurité. Le référentiel NPT8 (Nouvelles Plateformes Technologiques)réalisé par l’Observatoire Technologique du canton de Genève propose quelques pistes pour prendreen compte et mesurer l’interopérabilité technique d’une solution informatique.

Prendre en compte les aspects techniques de l’interopérabilité est donc nécessaire mais pas suffisantlorsque l’on désire atteindre une interopérabilité effective. Les notions d’interopérabilité sémantique et or-ganisationnelle sont tout aussi importantes, si ce n’est plus. Lorsque l’on entend définir une politique dans ledomaine, il est essentiel de ne pas considérer l’interopérabilité comme une question uniquement technique.

Une telle vision de l’interopérabilité la positionne comme un problème politique (stratégie et réglementation).Un certain nombre de pays européens l’ont bien compris et l’ont inscrit dans leur agenda. Cela se traduitnotamment par la mise en œuvre d’un cadre commun d’interopérabilité sur le modèle de ce qui a déjà été

7Site Web du programme IDABC lancé par la Commission Européenne http://europa.eu.int/idabc/en/home.

8Référentiel Nouvelles Plateformes Technologiques, P. Genoud et G. Pauletto, Observatoire Technolo-gique, Centre des technologies de l’information du canton de Genève, 2003, http://www.geneve.ch/ot/.

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réalisé par la France9, l’Allemagne10, le Royaume-Uni11, la Belgique12 ou l’Union Européenne13.

Un cadre commun d’interopérabilité peut être défini comme un ensemble de politiques, denormes, de conseils et de directives décrivant comment des organisations s’accordent, ou de-vraient s’accorder, pour échanger informations et processus.

C’est donc un instrument dynamique qui doit pouvoir s’adapter à l’évolution des technologies, des normeset des besoins métiers dans les domaines concernés. Chacun des cadres communs d’interopérabilité men-tionnés ci-dessus correspond à des situations et des besoins différents. Mais ils représentent, à divers titres,des modèles de référence parfaitement réutilisables. Tous reflètent la prise de conscience croissante du faitque l’interopérabilité des systèmes d’information des institutions gouvernementales constitue une conditionpréalable indispensable si l’on désire mettre en place un secteur public plus compétitif et orienté vers lesservices aux citoyens.

L’approche retenue dans les exemples mentionnés ci-dessus part de principes de base (impératifs straté-giques) comme l’accessibilité, l’éthique, la sécurité ou la transversalité que l’on retrouve dans le référentiele-Société proposé par l’Observatoire Technologique du canton de Genève14. Les administrations et les gou-vernements prennent en outre conscience de la valeur stratégique de l’information qu’ils créent et qu’ilsgèrent au quotidien, ce qui amène naturellement à revendiquer une plus grande maîtrise de leurs systèmesd’information. C’est donc logiquement que la notion d’indépendance vis-à-vis des fournisseurs constitue unprincipe de base également mis en avant.

Nous verrons ci-dessous que les standards ouverts et le logiciel libre viennent répondre de façon très na-turelle à ces impératifs stratégiques. L’Union Européenne ainsi qu’un certain nombre de gouvernementsplacent d’ailleurs ces notions au cœur de leur stratégie.

3 Logiciel libre

Les technologies appartenant au domaine dit du logiciel libre ou « open source » sont présentes depuis uncertain nombre d’années, mais le concept n’a pris de l’ampleur dans le monde informatique que depuis peuavec notamment le succès du système d’exploitation Linux. Le logiciel libre présente des facettes multiples :c’est en partie un phénomène très médiatisé, mais aussi et surtout un mouvement social, une définition delicence et un modèle de développement. La section suivante présente une perspective très partielle de cesujet qui mériterait un éclairage bien plus conséquent. Mais la littérature consacrée au logiciel libre abondeet le lecteur trouvera sans difficulté une publication de référence. Pour n’en citer qu’une, nous mentionneronsle récent livre blanc Organisations et logiciels libres15 qui permet une première approche du secteur à la foispour un néophyte, ou un approfondissement pour un lecteur déjà averti.

En 1984, la Free Software Foundation16 a introduit la notion de free software, traduit en français par logiciellibre. Malheureusement, le terme anglais « free » signifie aussi bien libre que gratuit ce qui a causé beaucoupde confusion dans les esprits.

9CCI — Cadre commun d’interopérabilité des systèmes d’information publics, Agence pour Déve-loppement de l’Administration Électronique, France, Septembre 2003, http://www.adae.gouv.fr/rubrique.php3?id_rubrique=41.

10SAGA — Standards and Architectures for e-Government Applications, KBSt unit, Ministère Fédéral del’Intérieur, Allemagne, Décembre 2003, http://www.kbst.bund.de/-,182/SAGA.htm.

11E-GIF — e-Government Interoperability Framework, Office of the e-Envoy, Royaume-Uni, Avril 2004,http://www.govtalk.gov.uk/schemasstandards/egif.asp.

12BELGIF — BELgian Governement Interoperability Framework, Belgique, http://www.belgif.be13EIF — European Interoperability Framework for Pan-European eGovernment Services, IDABC, Com-

mission Européenne, 2004, http://europa.eu.int.14Référentiel e-Société, P. Genoud et G. Pauletto, Observatoire Technologique, Centre des technologies

de l’information du canton de Genève, 2002, http://www.geneve.ch/ot/.15Organisations et logiciels libres, Diane Revillard, Diemark SARL, France, Septembre 2005, http://

www.diemark.net/.16FSF — Free Software Foundation, http://www.fsf.org/.

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Il serait faux de penser que parce qu’un logiciel est gratuit, il est libre. Il serait également erroné de croireque parce que son code source est disponible, un logiciel est libre ou encore gratuit.

Le terme open source est également apparu plus récemment, en grande partie, pour éviter ce malentenduet dédramatiser les débats entre les tenants du logiciel propriétaire et du logiciel libre, en amenant une vueplus pragmatique et moins philosophique.

Nous détaillons ici les définitions aussi bien de logiciel libre que de open source et leur différences de phi-losophie. Pour la suite de ce rapport les deux termes sont utilisés comme synonymes ce qui est aujourd’huilargement reconnu par les communautés d’usagers et de développeurs.

Un logiciel est protégé par le droit d’auteur17. L’auteur d’un programme peut choisir de protéger son œuvrepar une autre licence lui permettant de modifier les droits et devoirs donnés par défaut. La règle de discrimi-nation est la suivante :

L’appartenance d’un logiciel à une catégorie (libre, propriétaire, etc.) est établie grâce à la licencesous laquelle le logiciel est distribué.

Les catégories de licences les plus fréquemment rencontrées sont explicitées ci-après. Une présentationdétaillée de cette problématique est donnée ailleurs18.

3.1 Le modèle open source

On peut définir la notion de modèle open source comme l’ensemble des principes et des bonnes pratiquesrégissant le développement, le déploiement et le support de ce type de logiciel. Au cœur de ce modèleon retrouve le mouvement open source dont la préoccupation majeure est de protéger les privilèges desutilisateurs plutôt que celui des auteurs19. dans ce domaine.

3.2 Les communautés open source

Le modèle open source s’appuie sur des communautés de développeurs qui travaillent en mode collaboratifà une échelle souvent planétaire. Les membres de ces communautés proviennent de tous les horizons :milieu académique, petites sociétés de service, passionnés du développement logiciel ou, plus récemment,poids lourds du monde informatique qui se sont positionnés dans ce domaine. Ces membres jouent souventdes rôles multiples au sein de leur communauté et se sentent très concernés par la réussite ou l’échec duprojet auquel ils participent.

La communauté rassemblée autour d’un projet substitue au concept traditionnel de propriété la notion deservice. Puisqu’aucune entité ne possède le logiciel, personne ne peut le contrôler, même si un petit groupede développeurs fait office de leaders du projet. Si l’orientation donnée à un projet open source ne corres-pond pas aux aspirations d’une partie des membres de la communauté, le projet peut se scinder en unautre projet distinct (forking). Cette dynamique conduit à la création d’un écosystème de projets au seinduquel s’effectue une véritable sélection naturelle favorisant les projets de qualité qui répondent le mieuxaux besoins des utilisateurs. La taille de la communauté associée à un projet constitue en principe un bonindicateur de sa vitalité et de sa qualité.

17Loi fédérale sur le droit d’auteur et les droits voisins, Titre 2, Article 2, Paragraphe 3, « Les programmesd’ordinateurs (logiciels) sont également considérés comme des œuvres. » http://www.admin.ch/ch/f/rs/231_1/a2.html.

18Guide de choix et d’usage des licences de logiciels libres pour les administrations, et L’analyse dé-taillée des licences, ADAE, France, Décembre 2002, http://www.adae.gouv.fr/article.php3?id_article=172,Licences Open Source, Annexe du rapport du projet Nouvelles Plateformes Technologiques, P. Genoud etG. Pauletto, Observatoire Technologique, Centre des technologies de l’information du canton de Genève,Juin 2003, http://www.geneve.ch/ot/.

19Open-Source Solutions Will Restructure the Software Industry, Mark Driver, Gartner Group, Février2005.

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3.3 Catégories de logiciel

3.3.1 Domaine public

Les logiciels dans le domaine public ne sont pas protégés par des droits d’auteur. Ils sont explicitementdéposés dans le domaine public par leur(s) auteur(s), car par défaut, tout programme est protégé par lecopyright attribué automatiquement à son auteur. Pour un logiciel dans cette catégorie toute modification estpossible, mais il peut basculer vers une autre licence à tout moment. De plus, rien ne garantit que le codesource soit disponible.

3.3.2 Propriétaire

Le logiciel propriétaire est le modèle auquel l’industrie est encore aujourd’hui le plus souvent confrontée :son utilisation, sa redistribution ou sa modification sont interdites, ou exigent une autorisation spécifique. Lesdroits de propriété sont détenus par la société qui le distribue ou par son auteur. Le code source peut êtremis à disposition ou non, mais sa protection reste garantie par le droit d’auteur et la propriété intellectuelleappartient au fournisseur du programme.

3.3.3 Shareware / Freeware

La catégorie shareware / freeware est souvent confondue à tort avec l’open source. Un logiciel freewareest un logiciel gratuit qui permet l’utilisation et la redistribution de l’exécutable ; les codes sources ne sontgénéralement pas fournis et la modification n’est pas autorisée. Cette catégorie n’a en général pas de réelpoint commun avec l’open source, mise à part dans certains cas, la gratuité. Un logiciel shareware estun freeware limité dans le temps qui devient payant une fois une date limite ou un nombre d’utilisationsdépassés.

3.3.4 Commercial

Il faut également savoir qu’un logiciel commercial est un produit vendu par une entreprise dans le but de réa-liser un profit. Cela n’est pas incompatible avec la notion de logiciel libre : les sociétés commerciales commeRedHat, Novell et Mandriva en sont la preuve. Ces entreprises commercialisent des solutions open source ety ajoutent de la valeur en offrant des services tels que le packaging, l’intégration, le support ou la documen-tation. A contrario, il existe également des logiciels non commerciaux qui ne sont pas dans la catégorie dulogiciel libre. Il devient de plus en plus important d’utiliser le vocabulaire adéquat pour éviter les ambiguïtéscomme par exemple éviter d’utiliser l’adjectif « commercial » pour qualifier un logiciel « propriétaire ».

3.3.5 Logiciel libre (Free Software)

Selon la Free Software Foundation, un logiciel est considéré comme libre si sa licence garantit à l’utilisateurles quatre libertés suivantes qu’elle numérote de zéro à trois :

0. La liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages.

1. La liberté d’étudier le fonctionnement du programme et de l’adapter aux besoins. Pourceci l’accès au code source est une condition requise.

2. La liberté de redistribuer des copies, donc d’aider son voisin.

3. La liberté d’améliorer le programme et de publier des améliorations, pour en faire profitertoute la communauté. Pour ceci l’accès au code source est une condition requise.

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La licence GNU General Public License (GPL) concrétise ces quatre libertés sous la forme d’une licencejuridique20.

Une particularité de la licence GPL est le copyleft, qui impose que les mêmes conditions se transmettentpour les œuvres dérivées. Ceci assure qu’un objet sous licence GPL reste indéfiniment couvert par cettemême licence lors de modifications. D’autres licences que la GPL possèdent cette même propriété.

Il existe un effort d’adaptation de cette licence au droit français avec la création de la licence CeCILL21.

3.3.6 Open Source

L’Open Source Initiative définit pour sa part le concept de logiciel open source en 10 points :

1. Redistribution libre : La licence ne doit pas restreindre la vente ou la distribution du logiciel libreintégré dans un autre logiciel contenant des programmes de différentes origines. La licence ne doitpas exiger de compensation en échange de cette intégration.

2. Code source : Le programme doit inclure le code source, et doit autoriser la distribution du codesource comme de l’exécutable compilé. Quand une forme quelconque du produit est distribuée sansle code source, il doit être clairement indiqué par quel moyen il est possible d’obtenir le code source,pour une somme qui ne doit pas excéder un coût raisonnable de reproduction, ou en le chargeantgratuitement via Internet. Le code source doit être la forme privilégiée par laquelle un programmeurmodifie le programme. Un code source délibérément confus est interdit. Les formes intermédiaires decode source, telles que celles résultant d’un pré-processeur ou d’un traducteur, sont interdites.

3. Travaux dérivés : La licence doit autoriser les modifications et les travaux dérivés, et doit permettreleur distribution dans les mêmes termes que la licence du logiciel d’origine.

4. Intégrité du code source de l’auteur : La licence peut restreindre la distribution du code sourcemodifié seulement si elle autorise la distribution de fichiers patchs avec le code source, dans le but demodifier le programme à la compilation. L’auteur peut ainsi garantir l’intégrité de son code source dansle processus de diffusion successive du logiciel. La licence doit explicitement permettre la distributionde logiciels obtenus à partir du code source modifié. La licence peut exiger que les travaux dérivésportent un nom ou un numéro de version différents du logiciel d’origine.

5. Absence de discrimination envers des personnes ou des groupes : La licence ne doit pas êtrediscriminante à l’encontre de personnes ou de groupes de personnes.

6. Absence de discrimination envers des domaines d’activité : La licence ne doit pas restreindreni interdire l’usage du logiciel à un quelconque domaine d’activité. Par exemple, il ne peut interdirel’usage du logiciel dans le cadre d’une activité professionnelle, ou en exclure l’usage pour la recherchegénétique.

7. Distribution de licence : Les droits attachés au programme doivent s’appliquer à tous ceux à qui ilest distribué sans qu’il leur soit besoin de se conformer à des termes de licence complémentaires.

8. La licence ne doit pas être spécifique à un produit : Les droits attachés au programme ne doiventpas dépendre du fait que le programme fait partie d’un logiciel en particulier. Si le programme estséparé du logiciel dans lequel il est intégré, et utilisé ou distribué selon les termes de la licence, toutesles parties à qui le programme est redistribué doivent avoir les mêmes droits que ceux accordés avecle logiciel dans lequel il est intégré à l’origine.

9. La licence ne doit pas imposer de restrictions sur d’autres logiciels : La licence ne doit pasimposer de restrictions sur d’autres logiciels distribués avec le programme sous licence. Par exemple,la licence ne doit pas exiger que les autres programmes distribués sur le même support physiquesoient aussi des logiciels libres.

10. La licence doit être neutre par rapport à la technologie : Aucune disposition de la licence ne doitdépendre d’une technologie ou d’une interface particulières. Par exemple, on ne peut pas obliger unutilisateur à décharger le logiciel uniquement depuis un site Web dans le but d’afficher de la publicité.

La figure 1 présente quelques catégories de licences en regard des libertés accordées.

20Le texte complet de la licence GNU GPL est donné sur http://www.fsf.org/licensing/licenses/gpl.html.

21Voir le site Web dédié à CeCILL, http://www.cecill.info/.

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Figure 1 – Types de licences et libertés.

3.3.7 Licences doubles ou multiples

Les lois régissant le droit d’auteur permettent à ceux-ci de publier leurs œuvres simultanément sous plusieurstypes de licences. Ceci rend possible de différencier les contrats de licence appliqués selon le modèle queles utilisateurs veulent (ou parfois doivent) adopter. Cette pratique est désignée par le terme anglais (duallicensing).

Ceci permet également d’envisager un modèle économique pour la distribution du logiciel. D’une part, uneutilisation à but commercial et/ou lucratif est régie par un contrat de licence propriétaire payante, alors que,d’autre part, une projet de logiciel libre peut intégrer exactement le même logiciel gratuitement en utilisantune licence open source et gratuite.

Ce type de modèle est, par exemple, utilisé par la société MySQL fournissant la base de données du mêmenom ou encore par TrollTech qui maintient la librairie de construction d’interface utilisateur Qt.

Par ailleurs, plusieurs organisations développant du logiciel libre recourent à ce même artifice en panachantdes licences du monde open source afin de faciliter l’intégration de composants propriétaires ou de permettreune réutilisation plus large dans la sphère commerciale. Les projets les plus connus utilisant des licencesmultiples de type libre sont OpenOffice.org, Perl et Mozilla.

3.4 Perspectives open source dans le secteur public

L’intérêt du secteur public pour l’open source est aujourd’hui indéniable, en particulier parce qu’il met enœuvre des standards ouverts, qu’il brise les positions de lock-in et qu’il permet une plus grand adaptabilitéaux besoins particuliers22.

Les motivations essentielles avancées par les gouvernements sont une meilleure maîtrise de leurs propressystèmes d’information, une plus grande neutralité dans le choix de vendeurs de solutions ainsi qu’uneouverture vers les entreprises et les citoyens désirant ou devant interagir avec les administrations.

De plus, on peut également voir un intérêt sociétal global car le modèle même du logiciel libre est fondé surle partage des connaissances et la réutilisation des composants. L’accessibilité des solutions open sourceest garantie pour tous : autres organismes du secteur public, entreprises privées, organisations non gouver-nementales, association ou simples citoyens.

Par ailleurs, le développement économique local pour les sociétés de services informatiques peut être favo-

22Pour une analyse plus détaillée de ces sujets voir aussi :Perspective Open Source, Rapport final du projet Nouvelles Plateformes Technologiques, P. Genoud et G.Pauletto, Observatoire Technologique, Centre des technologies de l’information du canton de Genève, Juin2003, http://www.geneve.ch/ot/Le logiciel libre dans les administrations, Annexe du projet Nouvelles Plateformes Technologiques, P. Genoudet G. Pauletto, Observatoire Technologique, Centre des technologies de l’information du canton de Genève,Juin 2003, http://www.geneve.ch/ot/.

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risé lors de l’adoption de technologies open source.

Les solutions open source les plus mûres sont aujourd’hui encore celles touchant aux serveurs d’infrastruc-ture : web, messagerie, serveurs de fichiers et d’imprimantes, ainsi que le système d’exploitation du serveurlui-même. Plus récemment, les bases de données propriétaires classiques ont-elles aussi vu apparaître desalternatives libres crédibles.

L’argumentation fondée uniquement sur une motivation de coûts est aujourd’hui dépassée : une analyse,souvent très onéreuse, ne permet généralement pas de discriminer clairement une solution propriétaire etune solution open source équivalente. Les administrations ont dans la plupart des cas compris que lesenjeux se situent au-delà du débat unidimensionnel du coût financier, même si celui-ci reste un élément dedécision non négligeable.

Le logiciel libre dépasse aujourd’hui très largement un phénomène de mode passager. Le support profes-sionnel s’organise et de grandes, moyennes et petites entreprises offrent aujourd’hui leurs compétencesdans le domaine. Des projets open source d’envergure se fédèrent autour de communautés organisées quiont un mode de fonctionnement et une feuille de route clairs relativement aux produits qu’ils développent età leur processus de gestion. Le modèle même du logiciel libre est robuste aux changements économiques,car le produit ne dépend plus d’un seul acteur, mais d’un écosystème qui lui permet de vivre et d’évoluer.Les références d’utilisation de solutions open source au sein des administrations et des entreprises sont deplus en plus fréquentes, même si le domaine est encore jeune et les expérimentations souvent en cours.

4 Les standards ouverts

Comme le relève M. Erkki Liikanen23, commissaire européen chargé des entreprises et de la société del’information :

« Les standards ouverts sont un élément essentiel de la mise au point de solutions interopérableset abordables pour tous. En outre, ils stimulent la concurrence en établissant des conditions tech-niques égales pour tous les acteurs du marché, ce qui se traduit par des réductions de coût auprofit des entreprises et, en définitive, des consommateurs. »

Cette déclaration reflète le large consensus que l’on note actuellement autour des aspects positifs liés à lanotion d’ouverture. Il est cependant important d’examiner précisément quelle signification, quelles implica-tions et quelles limitations y sont associées.

Du point de vue des organismes étatiques et para-étatiques, l’ouverture constitue une qualité premièrelorsque l’on désire développer une relation tournée directement vers les citoyens et les entreprises. Ellegarantit un accès large et équitable aux services proposés. Dans ce contexte, l’ouverture implique que lesservices publics garantissent un accès aux applications au travers de technologies variées qui n’imposentaucune plateforme, aucun système d’exploitation ni aucun matériels particuliers24.

L’utilisation de standards ouverts participe naturellement à cette notion d’ouverture avec pour vocation derépondre à des objectifs stratégiques tels que :

– Maximiser l’indépendance des utilisateurs en augmentant leur liberté d’action, en évitant de leur im-poser des décisions technologiques et en prévenant les phénomènes de lock-in de la part des four-nisseurs informatiques.

– Assurer que tous les acteurs soient au même niveau en ce qui concerne l’utilisation de ces standards,ce qui favorise l’innovation (faible coût d’entrée sur le marché).

– Contribuer à la maîtrise et à la flexibilité des systèmes informatiques en garantissant leur interopéra-bilité.

23Journée mondiale de la normalisation, 14 octobre 2003, http://europa.eu.int/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/03/1374&format=HTML&aged=1&language=FR&guiLanguage=fr.

24How Open Can Europe Get ?, Open Forum Europe, Novembre 2004, http://www.openforumeurope.org.

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– Amener à une bonne gestion des coûts via une diminution du prix des licences due à une augmen-tation de la concurrence. L’utilisateur peut ainsi choisir le composant logiciel présentant le meilleurrapport qualité/prix.

– Garantir un meilleur équilibre entre stabilité et innovation car aussi bien l’orientation que la vitessed’évolution d’un standard ne peuvent être imposées par un seul acteur.

– Favoriser la pérennité de l’information puisque l’accès à celle-ci n’est plus lié à un fournisseur infor-matique ou à un produit particuliers.

– Améliorer l’échange et l’accessibilité à l’information.

– Capitaliser sur le savoir en favorisant la valorisation des données et des informations.

– Réduire la fracture numérique en plaçant les standards ouverts au rang de biens communs de l’hu-manité (gratuits, libres d’accès et de droits).

Pour un développement détaillé de la plupart des points ci-dessus on peut se référer à l’article de ErikSliman25 qui propose un intéressant business case de la contribution des standards ouverts à l’économienumérique. A un autre niveau, le livre blanc du programme OSOSS26 lancé par le gouvernement néerlandaisconstitue une illustration de la façon de positionner certaines des contributions énoncées ci-dessus en regarddes objectifs stratégiques gouvernementaux.

Michael Totschnig27 complète ce tableau en ajoutant deux points particulièrement importants en terme devision sociétale :

« En comparaison avec les standards fermés et propriétaires, les standards ouverts présententdeux caractéristiques essentielles qui ont des conséquences importantes sur la possibilité d’unespace public numérique. D’une part, leur définition et leur évolution constituent les enjeux d’undébat public dans lequel peuvent intervenir un grand nombre d’acteurs concernés ; d’autre part,comme leur utilisation ne peut être contrôlée par un seul acteur, tout acteur qui veut les intégrer àde nouveaux produits peut se les approprier. Cependant, en tant que biens collectifs, ils n’appar-tiennent à personne dans le sens où aucun acteur ne peut profiter plus qu’un autre de la valeurajoutée générée par l’adoption publique d’un standard. »

Il ne faut pas négliger ces enjeux politiques et sociaux auxquels peuvent répondre les standards ouverts.Les rapports entre l’administration et les citoyens sont en effet en train de changer. Ces derniers, dans unsouci de transparence des institutions, revendiquent toujours plus vivement la possibilité de pouvoir accéderaux standards mis en œuvre. Or seul le processus d’élaboration d’un standard ouvert permet de prendre encompte valablement les intérêts de la société civile.

4.1 Définitions et critères

La notion de standard ouvert reste cependant un concept relativement flou qu’il est important de clarifier.Nous en donnons donc ci-dessous les définitions les plus communément utilisées afin de mieux comprendreles différents points de vue concernés et de pouvoir ainsi en dégager celle qui semble la mieux adaptée àla vision des différents partenaires de l’OT. Les notions générales de norme et de standard ont quant à ellesdéjà été clarifiées ailleurs28 et nous n’y reviendrons pas ici.

Rappelons cependant que l’on distingue en général deux types de standards : ceux créés par le marché (defacto) et ceux validés par un organisme de normalisation (de jure).

25Business Case for Open Standards, Erik Sliman, Mai 2002, http://www.openstandards.net/.26Programme for open standards and open source software in government, ICTU, Pays-Bas, 2004, http:

//www.ososs.nl/.27Les standards ouverts de l’informatique et l’espace public numérique, Michael Totschnig, Université

du Québec à Montréal, Canada, 2001, http://commposite.uqam.ca/2001.1/articles/totsch.html.

28Normes et standards ouverts, Annexe du rapport du projet Nouvelles Plateformes Technologiques, Pa-trick Genoud et Giorgio Pauletto, Observatoire Technologique, Centre des technologies de l’information ducanton de Genève, Juin 2003, http://www.geneve.ch/ot/.

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Un standard de facto est introduit par un acteur du marché et s’établit de lui-même comme le oul’un des standards dominants sans l’aval d’un organisme officiel de standardisation.

Un standard de jure est établi par un organisme officiel de standardisation.

Un standard de jure est habituellement le résultat d’un consensus entre les différents membres d’un orga-nisme officiel de standardisation qui est la plupart du temps composé à la fois de membres provenant d’ins-titutions publiques et d’acteurs du marché. Les processus de standardisation de ce type peuvent prendre untemps jugé excessif par certains mais ils ont le grand mérite de présenter un agenda très prévisible.

Lorsque l’on parle de standard ouvert, c’est souvent par opposition au standard propriétaire. Il est alorsquestion de savoir dans quelle mesure les restrictions d’usage placées par le propriétaire du standard sontimportantes. Dans ce cas les propriétaires du standard sont ceux qui, au travers de leur savoir-faire et/oude la mise en application de brevets et de droits de propriété intellectuelle sont à même de décider qui peututiliser le standard et à quel prix. L’évolution du standard est également de leur ressort.

Un standard propriétaire est caractérisé par le fait qu’il est la propriété de quelqu’un qui y met(ou peut y mettre) des restrictions d’usage et d’accès.

Il est important de noter qu’un standard n’est en général jamais complètement fermé, ce qui irait à l’encontrede sa diffusion. Le propriétaire choisit en fait le degré d’ouverture qu’il accorde à son standard afin d’optima-liser ses bénéfices. Plus le standard est diffusé et plus il est attractif pour l’utilisateur, mais plus le revenu parutilisateur (en terme de licences) a tendance à baisser.

Dans cette logique d’opposition au standard propriétaire, le gouvernement français, au travers de la LCEN29

définit un standard ouvert comme suit :

« On entend par standard ouvert tout protocole de communication, d’interconnexion ou d’échangeet tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques etsans restriction d’accès ni de mise en œuvre. »

En France on fait souvent référence à cette définition, même si elle manque selon nous de précision carelle n’aborde qu’une partie seulement des caractéristiques importantes liées à l’ouverture des standards.On y élude en effet les aspects liés au processus de validation par un organisme officiel de standardisationqui prennent une dimension essentielle lorsque l’on raisonne en termes d’indépendance et d’évolution dustandard.

Une définition beaucoup plus complète des standards ouverts à laquelle on se réfère fréquemment est cellede Bruce Perens30 qui propose une perspective axée utilisateur et basée sur les six principes ci-dessous.Pour concrétiser la mise en œuvre de chacun de ces principes, une liste de meilleures pratiques (dontcertaines sont mentionnées ici) est proposée par l’auteur.

1. Disponibilité : l’accès et l’implémentation des standards sont ouverts à tous.

– Le bon usage veut que la description et l’implémentation de référence d’un standard ouvertsoient disponibles gratuitement en téléchargement sur Internet.

– Chaque projet devrait être capable de fournir une copie sans frais excessifs.

– Les licences attachées à la documentation des standards ne doivent restreindre aucune partied’implémenter ce standard en utilisant quelque type de licence que ce soit.

29 LCEN — Loi pour la confiance dans l’économie numérique, Loi 2004-575 du 21 juin 2004, article 4,chap. Ier, titre Ier, http://www.foruminternet.org/documents/lois/lire.phtml?id=733.

30Open Standards Principles and Practice, Bruce Perens, http://perens.com/OpenStandards/Definition.html.

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– Le bon usage veut que les licences des plateformes de référence d’une application soient com-patibles avec toutes les formes de licences, libres ou propriétaires.

2. Maximiser le choix de l’utilisateur final : les standards ouverts créent un marché équitable etcompétitif pour l’implémentation des standards. Ils ne lient pas les clients à un vendeur (ou un groupede vendeurs) particulier.

– Les standards ouverts doivent donc permettre une large gamme d’implémentations, que ce soitdans des projets métiers, académiques ou publiques.

– Ils doivent supporter des solutions couvrant une large gamme de prix.

3. Pas de droits d’auteur : les standards ouverts sont libres de frais et de droits d’auteur. Seule l’émis-sion d’un certificat de conformité par l’organisme de standardisation peut impliquer des frais.

– La licence des brevets contenus dans des standards doit être libre de droits et non discrimina-toire.

4. Pas de discrimination : les standards ouverts et les organismes qui les administrent ne doivent pasfavoriser une implémentation plutôt qu’une autre pour une raison autre que la conformité techniquede l’implémentation. Les organismes de certification doivent fournir le moyen de faire valider desimplémentations à coût nul. Ils doivent également fournir des services de certification étendus.

5. Extension ou sous-ensemble : les implémentations de standards ouverts peuvent être étenduesou proposées sous forme de sous-ensembles. Cependant les organismes de certification peuventrefuser de certifier des sous-ensembles d’implémentations et peuvent imposer des exigences sur desextensions (voir Pratiques de prédateurs).

6. Pratiques de prédateurs : les standards ouverts peuvent recourir à des termes de licence qui lesprotègent contre des tactiques du type « englober / étendre ». Les licences attachées au standardpeuvent exiger la publication d’informations de référence pour les extensions, et une licence pour lacréation, la distribution et la vente de software qui est compatible avec ces extensions. Un standardouvert ne peut cependant pas interdire des extensions.

Selon Ken Krechmer31, la notion de standard ouvert peut être appréhendée en combinant les trois perspec-tives différentes que l’on peut en avoir, selon que l’on se place du point de vue du créateur du standard, decelui qui l’implémente ou de celui qui l’utilise. Chaque perspective est naturellement guidée par des consi-dérations très différentes.

1. Les organismes de standardisation qui représentent les créateurs de standards considèrent queces derniers sont ouverts si leur élaboration suit les principes de séances ouvertes, de décisions parconsensus et de processus clairement définis.

2. Les organismes qui implémentent un standard le considèrent comme ouvert lorsqu’il sert leursmarchés, lorsque son coût est nul, lorsqu’il n’empêche pas une innovation future, lorsqu’il ne rendpas obsolètes leurs implémentations précédentes et lorsqu’il ne favorise pas un concurrent.

3. Les utilisateurs de l’implémentation d’un standard le considèrent comme ouvert lorsque plusieursimplémentations (provenant de différentes sources) de ce standard sont disponibles, lorsque les im-plémentations de ce standard fonctionnent partout où nécessaire, lorsqu’elles sont supportées duranttout le cycle de vie des services utilisés et lorsque de nouvelles implémentations souhaitées par lesutilisateurs sont compatibles avec les plus anciennes.

Il est important de considérer ces trois points de vue afin de bien comprendre les attentes des différentsacteurs concernés. La combinaison de ces trois perspectives se traduit selon Krechmer dans dix droitsassociés à la notion de standard ouvert :

1. Séance ouverte : le processus de développement des standards est ouvert à tous.

2. Consensus : les intérêts de chacun sont discutés et pris en compte de manière équivalente.

3. Processus clairement définis : des processus de vote et de recours peuvent être utilisés pourrésoudre un problème.

4. Droits de propriété intellectuelle ouverts : ils sont disponibles pour tous les implémenteurs.

5. Diffusion mondiale : pour des capacités données, un standard unique au niveau mondial.

31The Meaning of Open Standards, Ken Krechmer, Hawaii International Conference on System Sciences,Janvier 2005, http://www.csrstds.com/openstds.html.

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6. Modifications ouvertes : toutes les modifications sont présentées et approuvées par un forum fonc-tionnant selon les cinq droits précédents.

7. Documentation ouverte : la documentation des standards comme de leurs avant-projets sont faci-lement accessibles, que ce soit pour leur implémentation ou pour leur utilisation.

8. Interfaces ouvertes : les interfaces doivent supporter des migrations et permettre un avantage pro-priétaire mais les interfaces standardisées ne doivent être ni cachées ni contrôlées.

9. Usage ouvert : les implémenteurs doivent pouvoir s’assurer objectivement de la conformité de leurimplémentation. De leur côté les utilisateurs doivent avoir la garantie qu’elle répond à leurs besoins.

10. Suivi du support : les standards sont supportés jusqu’à ce que l’intérêt des utilisateurs cesse, et nonjusqu’à ce que l’intérêt des implémenteurs diminue.

On retrouve un certain nombre des critères énoncés par Perens. Mais le fait de tenir compte des pointsde vue des créateurs et des implémenteurs de standards en donne une vision plus pragmatique. Krechmery introduit également la notion de processus d’élaboration ouvert. Il a ainsi comparé les principaux orga-nismes de standardisation selon ces dix critères. Aucun n’obtient la note maximale. Selon lui, jusqu’à ceque chaque organisme de standardisation indique clairement lesquels de ces dix critères il soutient et dansquelle mesure, la notion de standard ouvert ne restera qu’un slogan publicitaire.

Entre la définition succincte de la LCEN française et celles relativement complexes mais plus complètesproposées par Perens ou Krechmer il y a donc de la place pour des propositions intermédiaires, à la fois plussimples à mettre en œuvre et à communiquer. On citera ici deux définitions qui nous semblent pertinenteset qui vont dans ce sens. Celle proposée par le service gouvernemental belge Fedict32, et celle de l’EIF, lecadre commun d’interopérabilité33 de la Commission Européenne.

La définition de Fedict s’appuie sur les notions de spécification ouverte et de spécification libre pour définirun standard ouvert.

Une spécification ouverte doit être gratuite, disponible en ligne et suffisante pour développerune implémentation complète.Une spécification libre doit être ouverte et ne doit pas comprendre de restrictions juridiques (àl’exception de « licences open source ») qui compliquent la diffusion et l’utilisation.Un standard ouvert est une spécification libre et doit être approuvé par une organisation destandardisation indépendante.

Comme schématisé à la figure 2, cette définition permet de distinguer très directement les différents cas.

Le standard PDF par exemple, qui est parfois présenté (à tort) comme un standard ouvert, y apparaît commeune spécification ouverte mais propriétaire. Elle est en effet la propriété de la société Adobe qui en contrôlel’évolution. On y retrouve les éléments clés liés à la notion d’ouverture comme l’accès gratuit à la spéci-fication, la liberté d’usage et l’adoption par une organisation indépendante et ouverte. Cette définition seconcentre sur les aspects jugés comme essentiels liés à l’ouverture du standard mais n’est pas aussi com-plète que celles proposées par Perens ou Krechmer.

Avec le même souci de simplification, la Commission Européenne énonce une définition très similaire ins-pirée de celle en vigueur aux Pays-Bas (voir la section 7). Ainsi, selon l’EIF, un standard peut être qualifiéd’ouvert si :

32Directives et recommandations pour l’usage de standards ouverts et/ou spécifications ouvertes dansles administrations fédérales, Jean Jochmans et Peter Strickx, Gouvernement fédéral de Belgique, 2003,http://www.belgium.be.

33EIF — European Interoperability Framework for Pan-European eGovernment Services, IDABC, Com-mission Européenne, 2004, http://europa.eu.int.

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Figure 2 – Des standards propriétaires aux standards ouverts (selon Fedict).

1. Il est adopté et maintenu par une organisation à but non lucratif. Son développement sefait sur la base d’une procédure décisionnaire ouverte disponible à toutes les parties inté-ressées (par consensus ou à la majorité par exemple).

2. Il a été publié et sa spécification est disponible soit gratuitement, soit à un coût nominal. Ildoit être permis à chacun de le copier, de le distribuer et de l’utiliser soit gratuitement, soità un coût nominal.

3. La propriété intellectuelle, c’est-à-dire les brevets éventuels, de tout ou partie du standardest cédée irrévocablement sur une base libre de royalties.

4. Il n’y a aucune contrainte à sa réutilisation.

On y voit apparaître la notion de réutilisation du standard. Par contre la référence au fait que la spécifi-cation soit suffisante pour développer une implémentation complète n’y apparaît pas. On y introduit enfinla notion de coût nominal (synonyme de faible) qui peut prêter à interprétation et donc à confusion. Cettedernière notion est en effet relativement floue et n’entre d’ailleurs pas dans les critères proposés par BrucePerens. Lorsqu’un gouvernement ou une administration propose l’utilisation d’un standard ouvert à quelquesdizaines ou centaines de milliers de ses citoyens, cette notion de coût nominal peut amener des contraintesfinancières fortes selon l’interprétation qu’on lui donne.

La simplicité de la définition de l’EIF a par contre le mérite de faciliter sa mise en œuvre et sa communication.Dans la mesure ou elle a été émise au niveau européen et qu’on s’y réfère dans plusieurs pays (la Norvègeet les Pays-Bas notamment, voir la section 7), on peut supposer qu’elle constituera, en Europe du moins,une définition de référence de la notion de standard ouvert.

4.2 Degré d’ouverture

Plusieurs standards se situent dans une zone grise entre standards propriétaires et standards ouverts. Ainsiles définitions proposées ci-dessus ne devraient pas être vues comme une exigence stricte pour qu’un

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standard puisse être qualifié d’ouvert. Dans la pratique ces définitions devraient plutôt fournir les paramètresd’évaluation à utiliser pour qualifier le degré d’ouverture du standard étudié.

La figure 3 illustre cette notion de zone grise. Quelques standards y sont sommairement positionnés en fonc-tion d’une part de la facilité d’accès à leurs spécifications et d’autre part du degré d’ouverture de l’organismequi l’a validé. Le schéma ne présente que deux des critères liés à la notion de standard ouvert. Si l’on s’entenait à ces deux critères uniquement, le standard ouvert idéal se situerait dans la zone en haut à droite dugraphique.

Figure 3 – Degré d’ouverture d’un standard.

L’exemple du coût nominal introduit dans la définition de l’EIF est illustratif. Le développement et la mainte-nance d’un standard efficace impliquent souvent des frais importants de la part du sponsor de ce standard.Ces coûts ne sont pas couverts si le standard peut être utilisé gratuitement, sauf au travers de la vente deproduits ou de services dérivés. La gratuité est donc une qualité idéale que l’on peut attendre d’un standardouvert mais qui se heurte à une vision pragmatique des choses. Dans de nombreux cas, on ne peut ainsipas s’attendre à ce que le standard ouvert idéal n’existe que parce qu’il correspond à un besoin exprimé.D’un autre côté, il est évident que la gratuité est un pré-requis nécessaire (mais pas suffisant) lorsque l’onconsidère des implémentations de logiciels libres qui doivent par essence pouvoir être redistribuées gratui-tement.

On se trouve alors face à deux cas de figure. Soit l’on propose, comme l’EIF, une définition laissant unemarge d’interprétation qui permet de prendre en compte la zone grise autour du standard ouvert idéal. Maison y perd alors en terme de clarté de la définition puisque un certain nombre de termes peuvent être sujets àinterprétation. Soit l’on suit une approche similaire à celle du gouvernement danois34 qui donne une définitiondu standard ouvert dans sa forme la plus pure (propriétés fondamentales que l’on désire promouvoir) et quimet en œuvre une politique de standardisation pragmatique. Cette approche laisse une certaine marge demanœuvre par rapport à cet idéal en incluant le degré d’ouverture du standard dans les critères d’évaluation.

34Definition of open standards, National IT and Telecom Agency, Ministry of Science, Technology andInnovation, Danemark, Juin 2004, http://www.itst.dk/.

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Joel West35 a étudié cette notion de degré d’ouverture et propose un certain nombre de dimensions per-mettant d’apporter une métrique lors de l’évaluation d’un standard. On peut les résumer au travers des 3questions suivantes.

1. QUI : Qui a accès au standard ?

2. QUOI : Dans quel(s) but(s) le standard est-il ouvert ?

3. COMMENT : Quel est l’accès donné au standard ?

La figure 4 présente un tableau constituant un point de départ pour l’élaboration d’une telle métrique.

Figure 4 – Questions permettant d’évaluer le degré d’ouverture d’un standard (selonWest).

5 Organismes de normalisation

Cette section recense les principaux consortiums et organismes de standardisation œuvrant dans le do-maine des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Cette liste n’est naturellementpas exhaustive. Les consortiums et organismes recensés ici travaillent à l’élaboration de standards que l’onpeut considérer à divers degrés comme ouverts.

AFNOR Association Française de Normalisation. http://www.afnor.fr/

– Normalisation dans le domaine des technologies de l’information http://forum.afnor.fr/

ANSI American National Standards Institute. http://www.ansi.org/

ATIS Alliance for Telecommunications Industry Solutions. http://www.atis.org/

35What are Open Standards ? Implications for Adoption, Competition and Policy., J. West, Standards andPublic Policy Conference, Chicago, USA, Mai 2004, http://www.cob.sjsu.edu/west_j.

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CEN Comité Européen de Normalisation. http://www.cenorm.be/

Dublin Core Dublin Core Metadata Initiative, Groupe engagé dans le développement de standards de mé-tadonnées. http://dublincore.org/

ECMA European association for standardizing information and communication systems. http://www.ecma-international.org/

ETSI European Telecommunications Standards Institute. http://www.etsi.org/

FreeStandards.org The Free Standards Group. http://www.freestandards.org/

ICTSB Information & Communications Technologies Standards Board. http://www.ictsb.org/

IEC International Electrotechnical Commission. http://www.iec.ch/

IEEE Institute of Electrical and Electronics Engineers. http://www.ieee.org/

IETF Internet Engineering Task Force. http://www.ietf.org/

ISO Organisation Internationale de Normalisation. http://www.iso.ch/

ITU The International Telecommunication Union. http://www.itu.int/

JCP Java Community Process. http://jcp.org

Liberty Alliance Liberty Alliance Project. http://www.projectliberty.org

LSB Linux Standard Base. http://www.linuxbase.org/

NIST National Institute of Standards and Technology. http://www.nist.gov/

– Le sous-domaine ITL : Information Technology Lab. http://www.itl.nist.gov/

OASIS Organization for the Advancement of Structured Information Standards. http://www.oasis-open.org/

– Liste de tous les standards de base associés aux technologies Markup Language. http://xml.coverpages.org/coreStandards.html

– Une introduction à ces standards. http://xml.coverpages.org/library.html

ODMG Object Data Management Group. http://www.odmg.org/

OMA Open Mobile Alliance. http://www.openmobilealliance.org/

OMG Object Management Group. Organisation internationale dont le but est de produire et de maintenirdes spécifications pour des applications interopérables. http://www.omg.org/, notamment :

– CORBA (Common Object Request Broker Architecture). http://www.corba.org/

– UML (Unified Modeling Language). http://www.uml.org/

– MDA (Model Driven Architecture). http://www.omg.org/mda/

OpenGroup The Open Group. http://www.opengroup.org/

OSGi Open Services Gateway Initiative. http://www.osgi.org/

RosettaNet Open e-business process standards. http://www.rosettanet.org/

TCG Trusted Computing Group. https://www.trustedcomputinggroup.org/

UDDI.org Universal Description, Discovery, and Integration. http://www.uddi.org/

VoiceXML Voice XML Forum. http://www.voicexml.org/

W3C World Wide Web Consortium. http://www.w3.org/

– La liste de la cinquantaine de recommandations émises par le W3C. http://www.w3.org/TR/#Recommendations

– Ainsi que les domaines d’activités correspondants. http://www.w3.org/Consortium/Activities

– Méthodes de travail du W3C par Alain Michard (en français). http://www.editions-eyrolles.com/livres/michard/w3c-present.asp

WS-I Web Services Interoperability Organization. http://www.ws-i.org/

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6 Standard ouvert vs logiciel libre

Les chapitres précédents montrent combien les fondements des standards ouverts et des logiciels libressont basés sur des objectifs et des modes de fonctionnement similaires. Mais ces deux concepts différentmalgré tout : schématiquement, les standards ouverts concernent le contenu et l’échange d’information alorsque le logiciel libre ne relève que de l’accès au code source.

Comme le souligne Jack Verhoosel36, les développeurs de logiciels libres implémentent volontiers des stan-dards ouverts pour deux raisons. La première est que l’utilisation de standards propriétaires va à l’encontredes principes d’ouvertures et d’interopérabilité qui sont prônés par la communauté du libre et qu’ils n’ontaucun intérêt à lier les utilisateurs à leurs développements. La seconde concerne les coûts et les licencesd’utilisation éventuels des standards propriétaires qui vont à l’encontre de certaines licences open source.

Il n’y a d’ailleurs pas toujours incompatibilité entre logiciel libre et standards propriétaires, pour autant queceux-ci soient publiquement accessibles, gratuits et libres d’utilisation. A l’inverse il est possible et mêmesouhaitable qu’un logiciel propriétaire implémente sans aucune restriction des standards ouverts. Ceci dé-pend fortement des conditions concurrentielles prévalant sur le marché.

En principe la communauté open source préconise l’usage des standards ouverts. Mais ce n’est pas for-cément la règle. Cela peut provenir du fait qu’un standard ouvert potentiellement utilisable est incomplet,immature, de qualité insuffisante ou simplement qu’il n’existe pas. C’est parfois aussi tout bonnement liéau manque de maturité de la communauté de développeurs concernée par rapport à l’utilisation des stan-dards ouverts. Les spécialistes réunis lors de la conférence de Scottsdale37 tenue récemment sur le sujet,estiment qu’il y a encore un travail de sensibilisation à effectuer auprès de la communauté open source afinde la pousser à mieux implémenter les standards ouverts.

« Le logiciel libre fait face à des défis importants, mais non insurmontables, dans son évolutionactuelle. En tête de liste on retrouve les préoccupations liées à la propriété intellectuelle, à lanécessité de fournir des options de support et d’intégration aux usagers (et de les convaincre qu’ilssont fiables) et de gérer le risque tout en maximisant l’utilité des logiciels. Les standards (ouverts)proposent un outil efficace pour apporter une réponse à plusieurs de ces préoccupations. »

Les logiciels libres auraient alors le double mérite d’implémenter des standards ouverts et de constituer unemétrique pour la qualité de ces standards. En effet un standard devrait de manière générale être pensé etconçu en considérant son implémentation future. Mais quel que soit son degré d’ouverture, il ne démontresa réelle utilité que dans la mesure où l’on peut se référer à des implémentations certifiées et accessibles.A ce niveau le lien entre logiciel libre et standards ouverts est manifeste car il est difficile de cacher l’implé-mentation d’un standard lorsque le code source est ouvert. Comme la communauté open source implémentegénéralement des solutions interopérables aussi conformes que possible aux standards ouverts, les logicielslibres de bonne qualité peuvent alors constituer des implémentations de référence accessibles.

L’Union Européenne38 présente à cet égard le logiciel libre comme un modèle de développement idéal pours’assurer que les standards ouverts peuvent être correctement mis en œuvre et intégrés. Le cadre com-mun d’interopérabilité européen relève que : « Les logiciels libres sont, par leur nature, des spécificationspubliquement accessibles et l’ouverture de leur code source, promeut un débat ouvert et démocratique surles spécifications, ce qui les rend à la fois plus robustes et interopérables. En tant que tels, le logiciel librecorrespond aux objectifs du présent programme et devrait être évalué et considéré favorablement aux côtésd’alternatives propriétaires. »

D’un autre côté, il est essentiel que les organismes de standardisation comprennent et acceptent les prin-cipes du logiciel libre. Le monde du libre aurait alors tout à y gagner. Certains comme Lawrence Rosen39

36Open Standards and Open Source Software : Similarities and Differences, J. Verhoosel, Entschede,Pays-Bas, http://www-i4.informatik.rwth-aachen.de/~jakobs/Interop/Verhoosel.pdf.

37Conference « Open Source, Open Standards : Maximizing Utility While Managing Exposure », 12-14Septembre 2004, Scottsdale, USA, http://www.thebolingroup.com/OSOSAnalysis.pdf

38EIF — European Interoperability Framework for Pan-European eGovernment Services, IDABC, Com-mission Européenne, 2004, http://europa.eu.int.

39Lawrence Rosen, http://www.rosenlaw.com/.

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proposent même une redéfinition de la notion de standard ouvert afin de faciliter l’alignement des deuxcommunautés. C’est principalement au niveau des droits de propriété intellectuelle et de gratuité que lesdéfinitions actuelles peuvent en effet poser problème.

7 Politiques gouvernementales

Plusieurs gouvernements ont déjà pris position sur l’adoption des standards ouverts et du logiciel libre. Cespositions sont parfois très différentes et couvrent une large palette allant d’une non entrée en matière, à unevolonté politique très affirmée en passant par une attitude agnostique.

La section suivante résume les prises de position gouvernementales qui nous paraissent les plus intéres-santes dans ce domaine. Cette liste n’est bien entendu pas exhaustive et évolue continuellement. Un recueilde liens est également disponible sur le site de l’IDABC40.

Le Center for Strategic and International Studies produit un document41 qui recense dans un tableau sy-noptique les politiques, les recommandations et les textes de loi considérés au niveau des administrationsnationales, régionales et locales sur la planète.

Voici notre analyse en date du mois de juillet 2005.

7.1 Belgique

Le Conseil des Ministres du 25 juin 2004 a approuvé les directives et recommandations aux services publicsfédéraux pour l’usage de standards, de logiciels d’application et de logiciels libres, faits sur mesure42 :

« Pour les nouveaux systèmes informatiques, les services publics fédéraux utiliseront désormais exclusive-ment des standards ouverts et/ou spécifications ouvertes pour les formats de données et les protocoles decommunication lors de l’archivage, de l’échange et de la communication de données électroniques. Pour lesapplications existantes qui, lors de l’archivage, de l’échange ou de la communication de données électro-niques à des parties externes, n’utilisent pas encore de standards ouverts et/ou de spécifications ouvertes,pour les formats de données et les protocoles de communication, les services publics fédéraux lanceront etachèveront une migration conformément à un planning convenu lors de la fixation de chaque standard ou-vert et/ou spécification ouverte. Les administrations fédérales disposeront des droits de propriété pour toutlogiciel fait sur mesure. Ce logiciel sera fourni en code source et sans droit de licence. Les services publicsfédéraux pourront mettre ce logiciel à la disposition d’autres services publics en tant que logiciel libre. »

La stratégie 2005 du gouvernement belge est décrite par Peter Vanvelthoven, Secrétaire d’État à l’Informa-tisation de l’État43. Le point 3.4 stipule clairement que toute nouvelle application informatique utilisera desstandards ouverts et que les applications existantes devront être migrées progressivement vers ceux-ci. Laliste des standards ouverts utilisés par l’État sera rassemblée au sein du Cadre Fédéral Belge d’Interopera-bilité en concertation avec les Communautés et Régions.

De plus, le texte continue sur la position face au logiciel libre : « Les logiciels libres doivent être sérieusementpris en compte au sein de l’administration fédérale. Quelques services publics ont déjà commencé à migrerd’un environnement de logiciels propriétaires vers un environnement de logiciels libres. Fedict suivra cesprojets pilotes et évaluera les résultats et formulera des recommandations pour l’ensemble de l’administra-tion. »

Le service gouvernemental Fedict44 définit la notion de standard ouvert comme : « une spécification gratuite,

40Section du site Web du programme IDABC consacrée au logiciel libre : http://europa.eu.int/idabc/en/document/1677/471.

41CSIS — Center for Strategic and International Studies, 13 décembre 2004, http://www.csis.org/tech/OpenSource/0408_ospolicies.pdf.

42Standards et Logiciels, Chancellerie du Premier Ministre — Conseil des Ministres, Belgique, 2004,http://www.belgium.be/eportal/application?pageid=contentPage&docId=35409.

43Note stratégique 2005, Secrétaire d’État à l’Informatisation de l’État, Peter Vanvelthoven, Belgique, 2005,http://www.belgium.be/eportal/application?pageid=contentPage&docId=36796.

44Fedict a pour tâche d’initier, d’élaborer et d’accompagner des projets d’e-government pour l’administra-

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disponible en ligne, suffisante pour développer une implémentation complète, qui ne doit pas comprendre derestrictions juridiques (à l’exception de « licences open source ») qui compliquent la diffusion et l’utilisationet qui doit être approuvée par une organisation de standardisation indépendante45. »

Cette définition est similaire à celle de la Commission Européenne, mais ne fait notamment pas intervenir lesnotions d’organisation de standardisation indépendante à but non lucratif, avec des procédures de décisionouvertes et la mise à disposition gratuite et irrévocable des droits de propriété intellectuelle contenus dansle standard. En revanche, elle précise bien que l’implémentation doit être possible ce qui ne ressort pasclairement de la définition européenne.

Le gouvernement belge a défini un cadre commun d’interopérabilité46 dans lequel il concrétise sa visionrelative au logiciel libre et aux standards ouverts. La consultation de ce référentiel est largement ouverte(même aux contributions externes) dans le but de définir les standards techniques à travers un wiki 47 qui enpermet la mise à jour continue.

7.2 Brésil

Le président brésilien, Luís Inácio Lula da Silva, a donné le mandat le 29 octobre 2003 à l’Institut Natio-nal de Technologie Informatique (ITI) de planifier, coordonner et implémenter les projets du gouvernementconcernant le logiciel libre48 (article 1).

Le ITI intègre le Comité Exécutif du Gouvernement Électronique, lequel coordonne le Comité Techniqued’Implémentation du Logiciel Libre du Gouvernement Fédéral49.

Dans son plan stratégique de mai 2004, le comité Exécutif du Gouvernement Électronique précise d’entréeque « le logiciel libre doit être utilisé comme une ressource stratégique » (page 8).

La position du gouvernement brésilien face aux technologies de l’information est clairement une vision trèslarge de développement économique et social, ainsi que de diminution de la fracture numérique. Le 18 juin2004 Sérgio Amadeu da Silveira, directeur de l’ITI, déclarait : « Nous n’optons pas pour un produit, nousoptons pour un modèle de développement et d’utilisation de logiciel. C’est une décision politique, et j’insistesur ce point, fondée sur une raison économique — une réduction du paiement de royalties. Cette décisionaugmente aussi l’autonomie technologique du Brésil et renforce notre intelligence collective. »

La plupart des sites web gouvernementaux brésiliens utilisent des composants libres et le gouvernementimpose aux organismes d’état ou aux compagnies privées bénéficiant de financements gouvernementauxde développer et d’éditer leurs logiciels sous licence libre GNU/GPL50.

Un autre point intéressant est que le gouvernement préfère le logiciel libre pour éviter la gestion coûteuseles licences de produits propriétaires ou le risque de piratage qui le mettrait également face à des coûts etdes poursuites judiciaires possibles.

Microsoft a proposé une version moins coûteuse, mais amputée de plusieurs fonctionnalités de Windows XP(baptisée Windows Starter Edition) au Brésil. Toutefois, cette option a été finalement écartée par le gouver-nement brésilien. La décision a été très largement influencée par le rapport commandé par le gouvernementà Walter Blender, directeur exécutif du MIT MediaLab (Massachussets Institute of Technology), qui a chau-dement recommandé l’usage des logiciels libres de bonne qualité qui sont, selon lui, plus intéressants que

tion fédérale. Il dépend des services publics fédéraux et de programmation dans le cadre des technologiesde l’information et de la communication http://www.belgium.be/eportal/application?pageid=indexPage&navId=9513.

45Directives et recommandations pour l’usage de standards ouverts et/ou spécifications ouvertes dansles administrations fédérales, Jean Jochmans et Peter Strickx, Gouvernement fédéral de Belgique, 2003,http://www.belgium.be.

46BELGIF — BELgian Governement Interoperability Framework, http://www.belgif.be.47Un wiki est un site web dynamique dont tout visiteur peut modifier les pages à volonté. Pour plus d’infor-

mation voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Wiki.48Voir le site du Gouvernement brésilien, http://www.governoeletronico.gov.br/

governoeletronico/index.html.49Software Livre, Gouvernement du Brésil, http://www.softwarelivre.gov.br/.50Brazil : Free Software’s Biggest and Best Friend, Todd Benson, The New-York Times, 29 mars 2005,

http://www.nytimes.com/2005/03/29/technology/29computer.html.

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les versions propriétaires limitées.

7.3 Danemark

Le gouvernement danois (Ministère des sciences et technologies, et de l’innovation) a adopté le 13 juin 2003une stratégie relative à l’utilisation de logiciels dans le but d’accroître la concurrence du marché du logicielet d’augmenter la qualité et la cohérence des produits logiciels déployés dans le secteur public51. Cettestratégie est déclinée selon une série de principes :

1. Valeur monétaire : Le principe gouvernant le choix, l’approvisionnement et l’utilisation de logicielsdans le secteur public est la recherche de la valeur maximale, fondée sur une approche coûts/bénéfices,indépendamment du fait d’utiliser du logiciel propriétaire ou libre.

2. Concurrence, indépendance et liberté de choix : Une concurrence effective est un pré-requis es-sentiel pour un marché du logiciel compétitif et diversifié. Les distributeurs de logiciel doivent pouvoirse concurrencer à « armes égales » et les barrières d’entrée doivent être éliminées.

3. Interopérabilité et flexibilité : La priorité doit être donnée aux logiciels qui sont construits de façonmodulaire et qui peuvent s’interconnecter avec d’autres types de programmes et de systèmes. Cecipermet d’assurer que les modules du système logiciel peuvent être changés ou modifiés indépen-damment et ainsi augmenter la flexibilité et permettre la réutilisation.

4. Développement et innovation : Le secteur public doit être ouvert aux nouvelles méthodes d’approvi-sionnement et de développement de logiciel. En particulier, il existe un besoin de tester de nouvellesméthodes comme celles de développement du logiciel libre afin de les évaluer et d’en mesurer lesavantages et les inconvénients à large échelle dans le cadre des administrations publiques.

Pour soutenir ces objectifs stratégiques, les activités suivantes sont lancées :

– Développer une signature numérique publique basée sur une solution open source.

– Développer une analyse du coût total de possession (Total Cost of Ownership).

– Démarrer des projets pilotes dans les administrations centrales, régionales et locales.

– Suivre l’usage de standards ouverts et la définition d’un format de document ouvert.

– Élargir le marché du logiciel pour le secteur public.

– Favoriser la collecte et la dissémination de l’information.

Un travail conséquent de standardisation des informations est entrepris. Ces résultats enrichissent un ré-férentiel XML afin de soutenir l’ensemble de la démarche. Le projet est nommé Infostructurebase52 et sonobjectif est de déterminer des standards pour l’échange de données en interne ainsi qu’entre les autoritésgouvernementales, le public et les entreprises. La standardisation est une étape nécessaire vers l’utilisationet la réutilisation des données sur le long terme en s’assurant de l’absence de blocage (lock-in) dans desoutils propriétaires ou des formats non documentés.

La méthodologie de standardisation adoptée est très intéressante. Elle laisse des groupes d’utilisateurs,appelés communautés de pratique, définir les standards relatifs à leurs métiers en collaboration avec lesinformaticiens. Le rôle de ces communautés de pratique est de classifier et clarifier les termes et conceptsutilisés lors d’échanges d’informations ainsi que leurs besoins d’interopérabilité en créant des définitionsstandard d’objets informationnels. Ces standards sont ensuite proposés à un comité XML qui revoit, accepteet publie les résultats. Ces résultats forment une base de référence pour le groupe de travail technique quiest ensuite chargé de rédiger les schémas XML correspondants.

Ceci permet de réconcilier les architectures métier et technique. D’une part, les communautés de pratiquedéfinissent les concepts, la terminologie, les significations et les associations ainsi que les manières detravailler avec l’information. D’autre part, ces inputs sont intégrés dans les schémas par les informaticiensqui, eux, n’ont pas toujours une compréhension complète du domaine ou un ressenti exact de l’importancedes relations spécifiques au métier.

51ICA Country Report, Danemark, 2003, http://e.gov.dk/english/results/2003/benchmarking_ica_country_report_denmark_2003/index.html.

52OIO — Infostructurebase, Danemark, http://isb.oio.dk/Info/Standardization/Standardization.htm.

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7.4 États-Unis, Massachusetts

Le gouvernement de l’État du Massachusetts a publié le 13 janvier 2003 deux documents concernant saposition vis-à-vis des standards ouverts et du logiciel libre.

Le premier53 exige l’utilisation de standards ouverts comme critère sélectif lors de la création, de l’acquisitionou de la refonte d’applications informatiques afin d’assurer que les investissements dans les technologiesde l’information soient consacrés à des solutions suffisamment interopérables pour satisfaire aux exigencesmétier de ses départements et servir au mieux le public.

L’État du Massachusetts propose la définition suivante du standard ouvert : « Une spécification qui est dis-ponible publiquement, développée par une communauté ouverte et confirmée par un organisme de norma-lisation. »

Le second document54 concerne l’acquisition de logiciels et stipule que les solutions doivent être sélection-nées selon la valeur mesurée au-delà du pur aspect financier.

Il est nécessaire de considérer au minimum : le coût total de possession sur la durée de vie de la solution,l’adéquation aux besoins métier, la stabilité, la performance, la scalabilité, la sécurité, les exigences demaintenance, les risques légaux, la facilité de d’adaptation et la facilité de migration.

Toutes les alternatives incluant en particulier, les logiciels propriétaires, les logiciels libres ainsi que leslogiciels dont le code est partagé entre les administrations doivent être examinées.

La position de cet état a eu une grande visibilité médiatique. Les déclarations de ses représentants, le CIOPeter J. Quinn et le Secrétaire d’État Eric Kriss55 ont poussé Microsoft à négocier et à proposer une version« moins fermée » du format XML des fichiers MS Office.

L’état du Massachussets a pris position sur les formats de données et identifie le OASIS Open DocumentFormat comme le standard choisi pour les applications bureautiques56. Depuis le 21 septembre 2005, leformat OpenDocument est l’un des standards de données référencés par leur modèle de référence techniquequi catalogue les standards officellement adoptés57.

Au niveau fédéral américain, l’Office of Management and Budget recommande que les agences gouver-nementales aient des politiques d’acquisition de logiciels « neutres quant aux technologies et aux fournis-seurs. »

7.5 France

L’Agence pour le Développement de l’Administration Électronique58(ADAE) met à disposition des ministèreset des services un guide de choix et d’usage des licences de logiciels libres pour les administrations. Ceguide recommande de privilégier l’utilisation de la licence GNU GPL pour les développements en logicielslibres réalisés par ou pour les administrations. Il préconise également une démarche qui s’appuie sur lecode des marchés publics. L’ADAE a aussi largement soutenu l’information sur les solutions de logiciel libre

53Enterprise Open Standards Policy, Commonwealth of Massachusetts, Massachusetts, USA, 13 janvier2004, http://www.mass.gov/Aitd/docs/policies_standards/openstandards.pdf.

54Enterprise Information Technology Acquisition Policy, Commonwealth of Massachusetts, Mas-sachusetts, USA, 13 janvier 2004, http://www.mass.gov/Aitd/docs/policies_standards/itacquisitionpolicy.pdf.

55Une retranscription officielle des commentaires informels donnés lors de la confé-rence de presse http://www.mass.gov/eoaf/open_formats_comments.html etleur traduction en français http://formats-ouverts.org/blog/2005/01/21/255-traduction-du-texte-officiel-du-massachussets-sur-les-formats-ouverts.

56Déclaration de Peter Quinn du 29 août 2005 sur le site du http://www.mass.gov/Aitd/ et in-formations sur le site de News.com Massachusetts to adopt ’open’ desktop http://news.com.com/2102-1012_3-5845451.html.

57Voir le document Enterprise Technical Reference Model Version 3.5 http://www.mass.gov/Aitd/docs/policies_standards/etrm3dot5/etrmv3dot5informationdomain.pdf page 18.

58ADAE - Agence pour le Développement de l’Administration Électronique, http://www.adae.gouv.fr/.

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à travers ses publications et colloques59.

Notons également que depuis la rédaction du guide du choix de licences, le CEA, le CNRS et l’INRIA ontélaboré CeCILL60, la première licence reprenant les principes de la GNU GPL et qui définit les principesd’utilisation et de diffusion des logiciels libres en conformité avec le droit français.

A travers l’ADAE, le gouvernement propose de créer et développer une plate-forme de services destinée auxorganismes publics, visant le développement des technologies de l’information et de la communication. L’undes objectifs est de mettre en place un entrepôt d’informations pour la diffusion de la connaissance relativenotamment aux méthodes, aux chartes et aux guides et d’en assurer la gestion. Il s’agit par ailleurs de pro-poser un espace de développement collaboratif qui sera également un point d’entrée pour le référencementdes logiciels et des composants réutilisables.

L’un des résultats de cette démarche est AdmiSource61, une plate-forme collaborative proposée à l’ensembledes administrations françaises pour leurs développements de logiciels libres. Chacun est le bienvenu pourutiliser, participer et contribuer à la hauteur de ses intérêts. Ce portail permet de fédérer et partager lesdéveloppements réalisés par les administrations françaises en leur offrant un outil de gestion de projet ouvertet collaboratif.

Un démarche très similaire est proposée par l’ADULLACT62, une association sans but lucratif, dont l’objectifest de soutenir et coordonner l’action des administrations et des collectivités territoriales pour promouvoir,développer, mutualiser et maintenir un patrimoine commun de logiciels libres utiles aux missions de servicepublic63.

On peut également citer la loi 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique(LCEN), qui précise une définition de standard ouvert dans son article 4 : « On entend par standard ouverttout protocole de communication, d’interconnexion ou d’échange et tout format de données interopérable etdont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d’accès ni de mise en œuvre. »

Au cours d’une interview dans l’émission de Stéphane Paoli sur France Inter le 26 mai 2004, l’ancien premierministre Jean-Pierre Raffarin a brièvement évoqué l’idée que l’administration française pourrait utiliser deslogiciels libres au lieu d’acheter des logiciels propriétaires. Seul l’aspect économique a été invoqué : M. Raf-farin veut « faire en sorte que les communications inter-administrations passent par internet et l’utilisationdes logiciels libres. » Il juge ainsi qu’il y aurait plus de 100 millions d’euros à économiser.

7.6 Norvège

Dans son plan stratégique pour le gouvernement électronique eNorway200964 le ministre norvégien de lamodernisation, Morten Andreas Meyer, a annoncé que le secteur public devra utiliser des standards ou-verts dans ses systèmes informatiques : « Les formats propriétaires ne seront plus acceptables dans lescommunications entre les citoyens et le gouvernement. »

Le calendrier suivant est proposé65 :

– D’ici 2006, un ensemble de standards administratifs et de gestion devront être établis pour les échangesde données et de documents.

– D’ici 2006, tous les services du secteur public devront avoir établi des plans pour l’introduction destandards ouverts, d’architecture orientée services et de logiciels libres.

– D’ici 2008, tous les échanges de données et de documents du secteur public devront satisfaire lesstandards administratifs et de gestion.

59Réutilisation des logiciels et bouquet du libre, http://www.adae.gouv.fr/spip/rubrique.php3?id_rubrique=33.

60Voir le site Web dédié à CeCILL, http://www.cecill.info/.61Voir le site Web http://admisource.gouv.fr/.62ADULLACT — Association des Développeurs et des Utilisateurs de Logiciels Libres pour les Adminis-

trations et les Collectivités Territoriales, http://adullact.net/.63AdmiSource et ADULLACT.net utilisent d’ailleurs le même outil libre GForge http://www.gforge.

org/.64Voir http://europa.eu.int/idabc/en/document/4415/194 et http://www.odin.dep.no/

mod/english/bn.html.65Voir http://europa.eu.int/idabc/en/document/4403/469.

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

– D’ici 2008, tous les formulaires publics devront reposer sur une interface commune.

– D’ici 2009, tous les nouveaux systèmes informatiques et de communication du secteur public devrontutiliser des standards ouverts.

La définition de standard ouvert suit exactement celle de l’Union Européenne. Le logiciel libre est présentécomme un modèle de développement idéal pour s’assurer que les standards ouverts peuvent être mis enœuvre, d’une part, et ainsi testés et intégrés, d’autre part. Les avantages de coût ne sont pas marqués, maispermettent une meilleure maîtrise des systèmes dans leur ensemble.

On peut aussi rappeler que la Norvège n’a pas renouvelé un contrat la liant avec un fournisseur de techno-logies propriétaires afin de permettre plus de concurrence de la part d’autres technologies et une ouvertureplus grande du côté du logiciel libre66.

7.7 Pays-Bas

Les Pays-Bas ont mis en place le programme OSOSS67 pour encourager l’utilisation des standards ouvertset faire connaître le logiciel libre. Les trois principaux buts visés par ce programme sont :

1. La réalisation d’un catalogue de standards ouverts recommandés.

2. L’introduction d’un modèle de licence pour le logiciel au niveau gouvernemental.

3. La mise en place d’une plateforme d’échange de logiciels entre les différentes parties du gouverne-ment.

La définition de standard ouvert adoptée par les Pays-Bas est à l’origine de celle proposée par l’Union Eu-ropéenne. Il en va de même en ce qui concerne son attitude face au logiciel libre. La position est donc uneadoption forte des standards ouverts dans les systèmes d’information gouvernementaux et la considéra-tion claire des alternatives offertes par le logiciel libre pour la mise œuvre pratique de ceux-ci. Le logicielpropriétaire classique reste une option pour autant que le respect des standards soit complet.

La politique des Pays-Bas en matière de logiciels libres a notamment pour but de favoriser l’émergence d’uneéconomie locale liée au développement de logiciels libres. Ce terreau favorable a contribué à la naissanced’initiatives comme l’AvMA68 qui est une structure indépendante mise sur pieds récemment et dont les butssont d’appréhender les changements stratégiques pour les régions du nord de la Hollande et de stimulerla croissance et l’emploi dans ces régions. Étant donné l’accroissement de la popularité des solutions opensource aussi bien dans le entreprises que dans les administrations, on peut s’attendre à une augmentationde la demande de services dans ce domaine et une diminution des dépenses. L’AvMA s’attend ainsi à uneaugmentation d’environ 500 postes de travail sur les trois prochaines années et à ce que les PME et lesadministrations locales puissent économiser une part importante de leur dépenses en utilisant des solutionsopen source.

L’AvMa a mis sur pied une task force et un centre d’information sur l’usage du logiciel libre qui a pourobjectif d’assurer que les conditions d’adoption du logiciel soient favorables aux entreprises, en termesd’utilisation de solutions et de services à disposition. Pour y parvenir cette task force propose toute unepalette d’initiatives comme la clarification des notions légales afférentes, l’encouragement d’échange deconnaissances dans le domaine, le développement de profils de compétences et l’abaissement des barrièrespour l’utilisation de logiciels libres.

7.8 Royaume-Uni

Le bureau Office of the e-Envoy dépendant du Office of Government Commerce a publié le 15 juillet 2004un document69 présentant la politique de l’administration britannique relative au logiciel libre. Les pointsprincipaux en sont les suivants :

66Norway Says No Way to Microsoft, Wired News, 16 juillet 2002, http://wired-vig.wired.com/news/business/0,1367,53898,00.html.

67OSOSS — Programme for Open Standards and Open Source Software in Government, Pays-Bas,http://www.ososs.nl/index.jsp?alias=english.

68Voir l’annonce sur le site de l’IDABC http://europa.eu.int/idabc/en/document/4401/469.69Open Source Software Use within UK Governement, Office of the e-Envoy, Royaume-Uni, 2002, http:

//www.ogc.gov.uk/sdtoolkit/reference/ogc_library/procurement/OSS-policy.pdf.

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

– Le Gouvernement britannique considérera les solutions open source aux côté des solutions pro-priétaires dans les approvisionnements informatiques. Les contrats seront adjugés sur la base del’optimisation des ressources (value for money ).

– Le Gouvernement britannique utilisera uniquement des produits pour l’interopérabilité qui implémententdes standards et des spécifications ouvertes dans tous les futurs développements informatiques.

– Le Gouvernement britannique cherchera à éviter le lock-in propriétaire dans les produits et les ser-vices informatiques.

– Le Gouvernement britannique considérera l’obtention des droits complets du dit code logiciel ou demodifications de logiciels commerciaux (Commercial Off The Shelf ) qu’il commande si cela permetd’obtenir une meilleure allocation des ressources.

– Le Gouvernement britannique explorera plus à fond les possibilité d’utiliser l’open source commemodèle par défaut pour le logiciel R&D financé par le Gouvernement.

Les appels d’offres du Office of Government Commerce seront modifiés pour tenir compte de ces nouveauxéléments.

Le 28 octobre 2004 l’Office of Government Commerce a publié un rapport70 sur les projets pilotes en opensource au sein de l’administration. Le conclusions principales du rapport sont notamment :

– L’open source est actuellement une alternative viable pour la majorité des utilisateurs du gouverne-ment.

– L’interopérabilité n’est plus maintenant un problème majeur.– L’open source peut générer des économies significatives, particulièrement en conjonction avec la

consolidation des serveurs et en allongeant la durée d’utilisation du matériel.– Les décisions devraient se fonder sur une appréciation globale des besoins futurs, en tenant compte

des coûts totaux de possession, et en considérant aussi bien les solutions propriétaires que les solu-tions open source.

Le Cabinet Office à travers GovTalk définit un ensemble de schémas et de standards appelé e-GIF71 (e-Government Interoperability Framework). Le but de ce cadre d’interopérabilité est de permettre aux secteurspublics et privés ainsi qu’aux autres participants intéressés de mettre au point et d’utiliser des politiqueset des standards facilitant la réalisation d’un gouvernement en ligne connecté de façon transverse et inter-opérable. Les structures gouvernementales sont tenues d’utiliser et de mettre en œuvre des technologiesadhérant à ces standards.

Le e-GIF définit les architectures techniques et les spécifications qui gèrent les flux d’informations dans l’ad-ministration et le secteur public. Celles-ci couvrent l’interconnexion, l’intégration des données, l’accès auxservices en ligne et la gestion du contenu. Actuellement la version 6.1 du e-GIF contient l’architecture géné-rale, la gestion, l’implémentation et les prescriptions, tandis que l’architecture technique et les spécificationssont contenues dans le Technical Standards Catalogue (TSC). Ces documents sont disponibles en ligneouvertement et gratuitement sur le site mentionné plus haut.

Plusieurs critères sous-tendent les choix des spécifications e-GIF :1. L’interopérabilité2. Le soutien du marché3. La scalabilité4. L’ouverture : les spécifications doivent être documentées et disponibles publiquement5. L’internationalisation des standards : la préférence est donnée aux standards avec la plus large accep-

tation, donc les standards internationaux sont préférés aux standards européens qui sont eux-mêmespréférés aux standards britanniques.

7.9 Suisse

L’Unité de Stratégie Informatique de la Confédération Helvétique72 (USIC) a publié en février 2004 un docu-ment présentant sa position vis-à-vis du logiciel open source (OSS) :

70Voir sur le site du Office of Government Commerce http://www.ogc.gov.uk/index.asp?id=58&app=press_release.asp&process=full_record&recordid=84.

71E-GIF, e-Government Interoperability Framework, GovTalk, Royaume-Uni,http://www.govtalk.gov.uk/schemasstandards/egif.asp.

72USIC — Unité de Stratégie Informatique de la Confédération, Suisse, http://www.isb.admin.ch/.

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

« [. . .] trois options stratégiques ont été retenues pour la stratégie OSS :

– Égalité de traitement des OSS et des CSS [ndr : Closed Source Software] : lors de l’évaluation delogiciels, les OSS et CSS doivent être analysés selon des principes identiques, tels ceux qui présidentdéjà à l’acquisition de logiciels dans l’administration fédérale. Une vérification ne se fera qu’en cas debesoin réel. Un soutien financier des OSS n’est en principe pas prévu.

– Réutilisation de logiciels développés en interne : il faut chercher à réutiliser les logiciels développésau sein de l’administration fédérale et examiner leur diffusion à d’autres administrations publiques deSuisse. Il faut examiner de cas en cas dans quelle mesure on peut utiliser le concept OSS ou un mo-dèle de licence un peu moins contraignant, ceci compte tenu des risques en matière de responsabilitéet des droits existants.

– Élaboration de conditions requises pour l’utilisation des OSS : l’analyse de la situation a montré que,dans plusieurs secteurs, certaines conditions devaient être remplies si l’on veut garantir le succès dela mise en œuvre d’OSS. »

Les conditions requises, mentionnées dans le dernier point, touchent essentiellement à :

1. La standardisation, c’est-à-dire, la qualification formelle d’un produit pour qu’il puisse être mis enœuvre au sein de l’administration.

2. L’organisation du support par des équipes existantes ou externes (il est précisé qu’un centre de com-pétences open source ne sera pas mis en place).

3. La formation et la certification sur les logiciels open source qui est envisagée.

4. La rentabilité des solutions informatiques.

5. Les aspects juridiques (conditions de licences de logiciels adoptés ou développés).

Le document définit les standards ouverts ainsi :

« Les standards ouverts ne sont pas des produits standards mais des protocoles ou procédés techniques quine sont pas propriétaires mais relèvent du domaine public. Ils sont élaborés par des comités de normalisationofficiels ou officieux (cf. exemples ci-après). Une norme du domaine public se doit de remplir les conditionssuivantes :

– La norme est publiée et peut être utilisée gratuitement ;

– La documentation s’y rapportant est publiée ;

– Une certification par un comité de normalisation peut être soumise à émoluments ;

– Les normes du domaine public et leurs comités de normalisation ne favorisent aucune implémentationen dehors du critère du standard technique ;

– L’approbation doit émaner d’un comité de normalisation bénéficiant d’un large soutien (p. ex. IETF,W3C, IEEE, ETSI, UIT, ISO) ;

– La norme sera révisée selon les nécessités. »

Dans ce même document l’USIC exprime sa position relative à l’utilisation des standards ouverts :

« L’administration veut utiliser des logiciels qui supportent les standards ouverts, de manière à garantir autantque possible une interopérabilité à long terme avec d’autres produits et à conserver une liberté de choix dansl’utilisation des moyens informatiques (éviter des dépendances). Les standards ouverts sont particulièrementimportants dans le domaine des formats d’enregistrement, de transfert et d’archivage des données. De telsformats doivent si possible être décrits en XML. »

La Confédération ne prend par contre pas parti quant à l’adoption de logiciel libre ou propriétaire : « [. . .] iln’existe aucune raison de favoriser ou de désavantager a priori les OSS par rapport aux CSS. En effet, ilapparaîtra de cas en cas si, et dans quel domaine, la mise en œuvre d’OSS s’impose et fait ses preuves. Cen’est pas à la stratégie OSS d’intervenir à ce niveau. »

Les quatre critères retenus pour évaluer un logiciel sont les suivants (dans l’ordre mais sans pondération) :(1) Besoins des utilisateurs (fonctionnalités) ; (2) Rentabilité ; (3) Sécurité ; (4) Qualité.

Le logiciel doit également s’intégrer dans l’architecture cible et il s’agit de prendre en compte « les consé-quences à long terme d’une éventuelle dépendance par rapport à des fournisseurs de logiciels, résultant deplusieurs facteurs (position dominante sur le marché, formats de données établis mais propriétaires, etc.)dont on désire s’affranchir. »

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

L’USIC est également à l’origine du projet eVanti.ch73 par lequel la Confédération s’efforce de rassembleret de communiquer des informations sur les projets informatiques d’administration en ligne. Le but est d’ac-croître à court terme et à peu de frais le nombre d’applications de l’administration en ligne réalisées, etd’alléger ainsi les charges bureaucratiques pour la population, l’économie et l’administration elle-même. Leprojet eVanti.ch se propose également d’intensifier les échanges d’expériences et la collaboration entre lesacteurs de l’administration en ligne au niveau suisse, et de faire apparaître des synergies.

L’association eCH74 vise le développement et l’adoption de normes de l’administration en ligne en Suisse.Elle publie sur son site les normes qu’elle recommande et notamment le document SAGA.ch qui reprendcertaines normes se fondant sur celles tirées du cadre d’interopérabilité allemand SAGA.de.

Bien que plusieurs des normes proposées par eCH soient des standards ouverts au sens de la CommissionEuropéenne, il n’y est pas fait explicitement mention dans les documents correspondants.

7.10 Union Européenne

La position de l’Union Européenne (UE) repose sur la notion d’interopérabilité et l’adoption de standardsouverts.

Selon l’UE, un standard est dit ouvert seulement s’il satisfait aux 4 conditions suivantes :1. Il est adopté et maintenu par un organisation à but non lucratif et son évolution est gérée par une

procédure de décision ouverte (accès à toute partie intéressée, décisions par consensus ou majorité,etc.)

2. Il est publié et le document de la spécification est disponible gratuitement ou à un coût nominal ; toutle monde doit également pouvoir le copier, le distribuer et l’utiliser gratuitement ou à un coût nominal.

3. La propriété intellectuelle (p. ex. brevets) de tout ou partie du standard doit être mise à disposition defaçon irrévocable et libre de royalties.

4. Il n’y a aucune contrainte à sa réutilisation.La recommandation au niveau de l’interopérabilité technique est le recours systématique aux standards ou-verts. En ce qui concerne les logiciels libres, le cadre commun d’interopérabilité européen75 mentionne :« Les logiciels libres utilisent généralement et aident à la définition de standards ouverts et de spécificationspubliquement accessibles. Les logiciels libres sont, par leur nature, des spécifications publiquement acces-sibles et l’ouverture de leur code source, promeut un débat ouvert et démocratique sur les spécifications,ce qui les rend à la fois plus robustes et interopérables. En tant que tels, le logiciel libre correspond auxobjectifs du présent programme et devrait être évalué et considéré favorablement aux côtés d’alternativespropriétaires. »

On peut également mentionner le projet COSPA76 financé par un programme de l’UE. Le consortium analyseles effets de l’introduction de standards ouverts et de logiciel libre dans les administrations européennes.

D’autre part l’UE pratique une veille active sur cette problématique. Le programme IDABC a lancé à ceteffet le Open Source Observatory77 dont la mission est de regrouper et diffuser les meilleures pratiquesconcernant l’utilisation du logiciel libre et des standards ouverts.

8 Domaine de l’éducation et de la recherche

L’intérêt du monde de l’éducation pour le logiciel libre n’a fait que croître ces dernières années. L’open sourcen’a eu jusqu’ici qu’une place relativement modeste dans un secteur qui a, par ailleurs, donné naissance à

73Projet eVanti.ch, USIC - Unité de stratégie informatique de la Confédération, Suisse, http://www.evanti.ch/.

74Associassion eCH, Suisse, http://www.ech.ch/.75EIF — European Interoperability Framework for Pan-European eGovernment Services, IDABC, Com-

mission Européenne, 2004, http://europa.eu.int.76Projet COSPA, Consortium for Open Source in Public Administration, Union Européenne, http://www.

cospa-project.org/.77Open Source Observatory, IDABC, Commission Européenne, http://europa.eu.int/idabc/en/

chapter/452.

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une partie significative des projets libres. La vision générale dans le secteur éducatif est aujourd’hui plusambitieuse et envisage le logiciel libre comme une réelle alternative pour soutenir ses missions critiques.

Les moteurs de cette tendance plus récente sont multiples. Citons, entre autres, les pressions sur les bud-gets, les changements de politiques de prix et/ou de licences de la part des fournisseurs vis-à-vis du mondede l’éducation, les demandes du corps enseignant et des étudiants, les objectifs des politiques gouverne-mentales et la mutualisation de solutions du secteur de l’éducation. Il faut ajouter à cela, une vision pluslarge, qui est celle de la science et de la culture ouvertes et de la participation active des écoles et desuniversités à la société de la connaissance.

Une étude intéressante et complète sur le sujet a été publiée par le programme de développement desNations Unies de la région Asie et Pacifique78.

Les besoins informatiques des institutions éducatives sont divers, en fonction notamment du niveau d’édu-cation, du type de cours délivrés et du financement à disposition. Toutefois, les besoins d’infrastructuressont souvent relativement invariants par rapport aux points précédents. Les serveurs de fichiers et d’impri-mantes, les serveurs web et de messagerie ont généralement une très grande maturité dans le monde opensource79. Ils sont souvent même déjà utilisés dans l’organisation sans que cela soit mis en avant comme unprojet d’intégration de logiciel libre.

L’avancement dans ce domaine est donc pour l’instant essentiellement réalisé à travers le développementet la mise en œuvre de projets concrets comme les briques d’infrastructure mentionnées ci-dessus ou desolutions métier présentées plus bas. Cette approche semble donc différente de celle adoptée par les étatsqui vise, elle, à donner des signaux au niveau d’une politique globale. Cette manière de procéder est pro-bablement aussi propre à la culture académique qui jouit d’une plus grande liberté et hétérogéneité queles administrations. Il faut noter que la visibilité extérieure des politiques informatiques existant au niveauéducatif est sans doute également moindre ce qui peut influencer une vue externe sur ce domaine.

Parmi les solutions métiers open source mises en évidence dans ce secteur, les applications de type e-learing et les solutions de portails sont souvent citées en exemple. Nous en présentons quelques aspectsdans cette section. Nous mentionnons, par la suite, un exemple de logiciel open source scientifique large-ment utilisé dans le monde académique. Puis, nous abordons des notions plus larges de contenu ouvert etde science ouverte.

Le e-learning est l’une des premières applications pour laquelle le monde de l’éducation a pris le pari deréaliser des solutions open source. Les organisations mettant en œuvre ces projets envisagent que cetteapproche non seulement diminuera les coûts et les libérera d’un lock-in des fournisseurs, mais aussi, plusfondamentalement, affirmera clairement leur responsabilité quant à la manière de délivrer l’instruction.

Parmi plusieurs projets open source de e-learning, on peut mentionner Sakai80, Dokeos81, Claroline82, Moo-dle83, ILIAS84, qui servent déjà de plateforme pour plusieurs centaines d’institutions académiques ou autresorganisations.

Ces initiatives stimulent très fortement les fournisseurs de solutions propriétaires à soutenir des environne-ments plus modulaires, plus ouverts et permettant une intégration de contenus hybrides. Comme mentionnéprécédemment, les communautés académiques non seulement les adoptent, mais participent aussi active-ment au développement des solutions libres. Par ailleurs, cette tendance favorise l’émergence de standardsouverts dans le domaine et le soutien de ceux-ci par les fournisseurs de solutions propriétaires.

Dans le cadre des portails, on peut citer l’exemple de uPortal85, un projet visant principalement le mondeuniversitaire. Le projet uPortal est issu des activités de JA-SIG86, un groupe d’intérêt d’utilisateurs de monde

78Free/Open Source Software — Education, Tai Wonoi Tong, 2004, Asia-Pacific Development InformationProgramme, http://www.iosn.net/education/foss-education-primer/

79Quelques exemple sont des outils comme SAMBA www.samba.org/ pour les serveurs de fichierset imprimantes, Apache pour les serveurs web www.apache.org/, Sendmail http://www.sendmail.org/ IMP/Horde http://www.horde.org/imp/ pour les emails

80http://www.sakaiproject.org/81http://www.dokeos.com/82http://www.claroline.net/83http://moodle.org/84qhttp://www.ilias.de/ios/index-e.html85http://www.uportal.org/86http://www.ja-sig.org/

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de l’éducation pour les technologies Java. Il s’agit d’un framework permettant de produire et gérer un portailde campus basé sur des technologies Java et XML/XSL. Son développement est conduit par plusieursinstitutions membres de JA-SIG et le code est utilisable et redistribuable librement87. Il est en productiondans plus d’une soixantaine d’universités et en évaluation dans au moins autant d’institutions.

Pour donner un aperçu d’un projet plus spécifique à une discipline, prenons le cas du logiciel statistiqueopen source R. L’exemple est intéressant car il est utilisé aussi bien dans les sciences pures que dans lesdisciplines quantitatives en sciences économiques, géographie, médecine, etc.

Le projet R88 est né vers la fin des années 90 au département de statistique de l’Université d’Auckland.Les deux auteurs initiaux, Robert Gentleman et Ross Ihaka, s’inspirent du langage d’analyse statistique Sprincipalement développé durant les années 70 par John Chambers des Bell Labs89. Une implémentationcommerciale de S, nommée S-Plus, voit également le jour et inclut une documentation étoffée, des fonction-nalités plus étendues et du support. En 1995, Gentleman et Ihaka décident de rendre libre R et commencentà recevoir des corrections et des améliorations de la part de la communauté scientifique. Dès 1997, ungroupe se forme pour assurer le développement du projet et, en 2002, une fondation est créée pour assurersa continuité. John Chambers est aujourd’hui lui-même membre de cette fondation.

Le logiciel R est construit comme une boîte à outils qui permet à différentes autres disciplines de l’utilisercomme moteur d’analyse statistique.

Dans le domaine de la bioinformatique, le projet BioConductor 90 fondé par l’école de médecine et celle desanté publique de Harvard propose d’analyser et de mieux comprendre les données extraites du génomehumain.

L’initiative NetEpi91 regroupe des chercheurs dans le domaine de l’épidemiologie et de la santé publique.Elle propose une collection d’outils d’analyse ouverts mis en œuvre dans l’environnement R.

L’analyse de données spatiales et les systèmes d’information géographiques sont des sujets qui connaissentune forte expansion depuis plusieurs années. Bien que des systèmes libres (GRASS92) ou propriétaires(ArcGIS93) existent pour représenter et explorer les données géographiques, il est souvent nécessaire deprocéder à une analyse statistique plus fine. Le projet RGeo94 propose tout un ensemble d’outils permettant,par exemple, d’intégrer la visualisation de GRASS ou de ArcGIS et les analyses de R.

Les méthodes quantitatives utilisées dans la finance sont devenues très spécialisées et font aujourd’huiun large recours à des notions de calcul pointues. Le projet Rmetrics 95 implémente avec R une largepartie des algorithmes utilisés communément dans le monde des ingénieurs financiers, comme l’analysedes séries temporelles, les modèles de risque, les valeurs extrêmes, l’évaluation des options, la compositionde portefeuilles, etc.

Ces exemples ne représentent que quelques uns des outils disponibles librement sur le web dans la biblio-thèque des paquetages de R96. Ainsi, R devient un outil de base non seulement pour la recherche statistiqueacadémique, mais aussi pour l’enseignement et l’industrie.

La question de l’utilisation de logiciel libre comme base dans l’éducation est souvent soulevée.

Dans une perspective plus large, la logique de l’open source s’applique aussi à d’autres domaines. Onpeut noter actuellement une convergence entre la philosophie sous-jacente au monde du logiciel libre, cellede la science et celle de l’accès à la connaissance. Il s’agit d’un mouvement de culture plus général ausein, notamment, de la recherche académique qui met en place l’accès aux recherches de façon ouverte et

87Notons qu’à ce jour la licence de uPortal n’est pas officiellement reconnue par l’Open Source Initiative.88http://www.r-project.org/89En 1999 Chambers gagne avec S le prestigieux Software System Award de l’Association of Computing

Machinery (quelques gagnants précédents sont Unix, TCP/IP, Java, TEX et le World-Wide Web). Voir http://www.acm.org/awards/ssaward.html.

90http://www.bioconductor.org/91http://www.netepi.org/92http://grass.itc.it/93http://www.esri.com/94http://sal.uiuc.edu/csiss/Rgeo/95http://www.itp.phys.ethz.ch/econophysics/R/96http://cran.r-project.org/

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gratuite, comme dans le projet Public Library of Science97.

Les cursus éducatifs comprennent de plus en plus des cours de technologies de l’information et de program-mation. L’importance d’une formation sur des concepts portables d’un produit à l’autre est le garant d’unepérennité de l’éducation reçue. Les écoles, instituts et universités perçoivent cet aspect et utilisent de plus enplus des solutions open source. Elles permettent non seulement un bon apprentissage, mais réduisent aussiles risques de piratage, diminuent la charge financière des études et évitent la création d’une dépendancepar rapport à un produit propriétaire donné. De plus, l’accès au code source du logiciel offre un avantagecertain pour étudier son fonctionnement dans les cours plus avancés. L’émergence des applications opensource dans les entreprises et les administrations créera aussi une demande de personnel formé à cestechnologies dans les années à venir.

La motivation première des chercheurs reste toujours la reconnaissance de leurs pairs dans le milieu aca-démique. Cela passe généralement par le le système de publication des revues scientifiques. Ce derniersemble s’être dénaturé au cours du temps, puisque toute la chaîne de valeur — depuis la recherche, enpassant par l’évaluation, pour finir par l’abonnement — est créée par le monde académique, alors que lesmaisons d’édition s’en sont arrogées les droits de propriété intellectuelle et les profits. Le web et l’accès ou-vert à l’information et à la connaissance ont mis en évidence ce hiatus. L’ouverture permet non seulement derendre les travaux de recherche plus visibles et ainsi plus faciles d’accès, mais aussi de mettre une pressionsur le modèle économique actuel.

Les contenus de cours, principalement dans le domaine universitaire, sont aujourd’hui largement mis àdisposition sur le web. Le MIT est souvent cité comme exemple grâce à ses initiatives Open Courseware98,DSpace99 et Open Knowledge Initiative100 qui ont fait des émules dans d’autres universités et écoles101.

Tous ces éléments enrichissent les axes présentés dans la Déclaration de Berlin en 2003 sur l’accès ouvertdans les sciences102 qui prend ainsi un sens beaucoup plus concret.

Le monde de l’éducation évolue plus que jamais vers un objectif de science ouverte, d’accès ouvert etd’excellence reconnue dans la société, grâce notamment à la logique d’accès libre au code source, auxcontenus et in fine à la connaissance.

9 Conclusions

L’adoption des standards ouverts et du logiciel libre doit être vue comme un processus global dont le butest de favoriser l’interopérabilité et la flexibilité des systèmes d’information dans un souci d’indépendance.L’ouverture des standards et des logiciels représente un aspect essentiel, mais elle ne constitue qu’un desparamètres à prendre en compte lors de leur évaluation. D’autres points doivent également être étudiés,comme par exemple :

– Leur diffusion

– Leur maturité

– La réelle nécessité de leur mise en œuvre dans le domaine concerné

– Leurs qualités techniques intrinsèques

– Leur réel degré d’interopérabilité

– La qualité des implémentations

– L’existence et l’accès à l’implémentation des standards ouverts

97http://www.plos.org/. Voir aussi, par exemple, Directory of Open Access Journals http://www.doaj.org/ pour une liste des journaux en accès ouvert ; IDEAS et RePec http://ideas.repec.org/pour la recherche en économie ; PubMedCentral http://www.pubmedcentral.nih.gov/ et BioMed-Central http://www.biomedcentral.com/ pour le domaine de la santé ; arXiv.org http://arxiv.org/ pour les pré-publications en mathématique et physique.

98http://ocw.mit.edu/99http://www.dspace.org/

100http://www.okiproject.org/101http://en.wikipedia.org/wiki/Opencourseware102http://www.zim.mpg.de/openaccess-berlin/berlindeclaration.html

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

– La crédibilité du sponsor ou de la communauté de développement (en terme de maintenance etd’évolutivité)

Le choix de définitions de référence pour les notions de standards ouverts et de logiciel libre constitue unepremière étape indispensable à toute initiative dans le domaine. Mais les standards ouverts et le logiciel libresont des éléments amenés à terme à évoluer et/ou à être remplacés. Cette nature dynamique impose unedémarche adaptée qui passe notamment par :

– Une veille active sur le sujet,

– La prise en compte des architectures informatiques existantes,

– Une mise en œuvre claire et cohérente en regard de la politique choisie (directives, métrique, etc.),

– Un mode de fonctionnement (principe d’organisation) adapté, tenant compte notamment du niveaud’implication des différentes structures concernées,

– L’implication, au sein de l’organisation, d’une structure à même de porter une telle démarche et d’engarantir l’évolution et la cohérence.

Parmi les différentes définitions des standards ouverts présentées dans ce document, celle proposée parl’Union Européenne103 constitue une référence intéressante à plus d’un titre :

– Elle retient les critères essentiels parmi ceux avancés par Krechmer et Perens.

– Ce n’est certes pas une définition du standard ouvert idéal mais elle a en contrepartie le mérite dupragmatisme.

– Elle est claire et concise ce qui en facilite la communication.

– Elle émane de la Commission Européenne qui en constitue un sponsor fort. Elle constituera trèsprobablement une définition de référence au niveau européen.

De même, la définition du logiciel libre peut suivre celle établie par l’Open Source Initiative (OSI) qui fait leplus souvent référence en la matière. Par ailleurs, l’OSI qualifie les licences proposées le plus fréquemmentdans le monde open source et regroupe leurs définitions.

Il s’agira ensuite d’adopter une politique claire au niveau des standards ouverts et du logiciel libre, étape àlaquelle ce document doit contribuer. Comme le relève un récent article de Forrester Research104, une telledémarche est essentielle si l’on désire que les options choisies ne restent pas lettre morte. Les réponsesaux questions ci-dessous doivent aider à élaborer une telle politique.

Quels sont les motivations ayant guidé ces choix ?

Il est évident que la décision de se tourner vers les standards ouverts et le logiciel libre répond à un ouplusieurs objectifs stratégiques clairement identifiés et mentionnés dans les sections précédentes. L’un deces objectifs a été mentionné systématiquement : il s’agit de préserver l’indépendance de l’informatique del’organisation dans un souci de sécurité et de pérennité. Cela passe par la mise en œuvre d’une architectureouverte à même de réconcilier les impératifs stratégiques et la réalité opérationnelle des différents métiers del’administration genevoise. Toutefois, la notion d’indépendance par rapport à un fournisseur est un conceptqui demande à être explicité. De plus, d’autres motivations fortes peuvent être avancées. Dans un souci detransparence il est important de se positionner par rapport à ces motivations potentielles. Cette démarchedevrait également permettre de mieux faire le lien entre vision stratégique et réalité du terrain.

Dans quels cas envisage-t-on le recours aux standards ouverts ?

On l’a vu à la section 4, la notion de standard ouvert peut être comprise de manière plus ou moins restrictive.La définition adoptée aura donc une influence directe sur les choix associés. Une fois ce choix effectué, ilsera judicieux de se positionner par rapport aux types d’interopérabilité (sémantique et technique) impactéespar les standards ouverts. Il est important de se déterminer sur les domaines concernés par l’adoption destandards ouverts ainsi que sur les critères liés au choix des solutions envisagées.

103EIF — European Interoperability Framework for Pan-European eGovernment Services, IDABC, Com-mission Européenne, 2004, http://europa.eu.int.

104Business Cases For Using Open Source Software, J.R. Rymer et J. Giera, Forrester, 29 novembre 2004.

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

Et au logiciel libre ?

Les annonces faites jusqu’ici par l’administration genevoise ne mentionnent le logiciel libre que comme unealternative au niveau du poste de travail. Cela signifie-t-il qu’on va l’utiliser dans ce domaine uniquement ouenvisage-t-on également de le mettre en œuvre dans des domaines où il est beaucoup plus mûr et où il adéjà fait ses preuves comme pour les serveurs Web (Apache), les serveurs d’application (Tomcat), ou lesbases de données (MySQL), par exemple ? Ce point est important car il répond au même objectif stratégiqued’indépendance par rapport à un fournisseur.

De manière plus générale, considère-t-on le logiciel libre comme une simple alternative aux solutions pro-priétaires ou veut-on être plus directif ? Quels types de solutions va-t-on privilégier et selon quels critères ?Qu’en est-il des choix liés aux applications métiers ?

Rappelons enfin que derrière la notion de logiciel libre se cache pour de nombreux développeurs toute une« philosophie » liée à la conception des programmes, à leur évolution et au partage des expériences. Veut-onfavoriser ce mode de développement ou ne considère-t-on le logiciel libre que sous son aspect fonctionnel ?

Quels seront les domaines touchés par les choix pressentis ?

Il est évident que les points ci-dessus requièrent une concertation avec les différents acteurs concernés,dans un souci de pragmatisme et d’efficacité. Il est donc important d’évaluer très tôt quels seront les impactsdes choix pressentis, que ce soit au niveau du métier, des utilisateurs, de l’organisation, de l’exploitation oude l’architecture technique.

Quelles sont les pistes permettant d’aller de l’avant ?

L’adoption des standards ouverts et du logiciel libre doit être envisagée comme un processus progressif quidemandera un effort continu et qui doit se concevoir sur la durée. Mais le « voyage » commence aujourd’huidéjà. Un certain nombre de mesures touchant à l’organisation, à la formation ou aux technologies peuventêtre envisagées dans le but de faciliter l’appropriation et la mise en œuvre de standards ouverts et/ou delogiciels libres. On peut mentionner notamment :

– Le lancement d’une campagne d’information et de sensibilisation ciblées et adaptées sur le sujet.Outre la diffusion d’un éventuel livre blanc, cela peut prendre la forme d’articles, de présentations oud’un site Web dédié à cette problématique.

– La poursuite d’une veille active sur le sujet et l’intensification des contacts établis en Suisse et àl’étranger avec des structures ayant entamé une démarche similaire.

– Une réflexion sur la manière d’aider les utilisateurs et de lever les obstacles à la mise en œuvrede standards ouverts et de solution open source. On rappellera ici que les standards ouverts nese limitent pas aux standards techniques mais qu’ils prennent également beaucoup d’importanceau niveau métier, surtout dans le but de résoudre des problèmes d’interopérabilité sémantique. Demême, le logiciel libre peut être envisagé comme un simple outil logiciel, mais aussi comme un modede développement et de partage avec une communauté.

– Le recensement des solutions et des compétences existantes au sein du partenariat de l’OT dans ledomaine du logiciel libre. Ce point fait déjà explicitement partie des objectifs du projet SOLL à réaliserjusqu’à la fin 2005.

– Le recensement des sites pilotes potentiels sur lesquels appuyer la politique choisie.

– La mise en œuvre d’un processus d’évaluation des standards et des logiciels libres (définition d’unemétrique, gestion des exceptions, etc.).

– La création d’un catalogue des standards ouverts recommandés ou celle d’un catalogue des stan-dards ouverts utilisés avec succès ailleurs, comme le font déjà les Pays-Bas ou la Belgique.

– La participation active ou comme observateur de l’OT ou de l’un de ses partenaires à des forums inter-nationaux de standardisation (comme par exemple OASIS, consortium très impliqué dans la créationde standards d’échanges métiers) et dans les communautés open source.

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Standards ouverts et logiciel libre Clarification des notions

Quelle est la position des partenaires de l’OT à ce sujet ?

Certains partenaires de l’OT ont déjà pris en compte les standards ouverts et le logiciel libre dans leuragenda (Université de Genève, Ville de Genève, CERN105). D’autres sont très intéressés par cette démarcheou sont susceptibles de l’être.

Le défi est d’importance et il serait opportun d’associer au maximum les différents partenaires potentiels auprojet SOLL afin d’avancer sur des bases communes aussi larges que possibles. Le message sera d’autantplus fort et percutant. Une vision commune permettra également des synergies entre les différents acteurs,ceci d’autant plus que l’on s’engage ici dans un monde de partage et d’ouverture. Ainsi, plus la massecritique des acteurs engagés dans un tel processus est importante, plus les potentialités sont riches etprometteuses. Dans cette optique et de façon similaire, on peut imaginer associer à la démarche certainsacteurs du tissu économique local qui peuvent valablement y contribuer.

Notons pour terminer que le projet SOLL ne se situe que dans sa phase initiale. Certains points n’ont doncpas encore pu être étudiés de manière suffisamment approfondie. On relèvera particulièrement la nécessitéde mieux explorer les aspects touchant à la propriété intellectuelle et plus particulièrement aux brevets, ainsique le modèle de rémunération des organismes de standardisation (comme celui du W3C106 par exemple).

105CERN — Centre Européen de Recherche Nucléaire. http://www.cern.ch/.106W3C Patent Policy, http://www.w3.org/Consortium/Patent-Policy.

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