Sous le capot du « mild hybrid » - Innovation REVIEW · 2017-01-25 · un véhicule à traction...

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« Ce marché est en train d’exploser, surtout en Chine et en Europe », constate Michel Forissier, le directeur R&D du pôle système de propulsion chez Valeo. Il est parmi les premiers à s’en réjouir, et pour cause : sur le mild hybrid, l’équipementier français peut légitimement se revendiquer pionnier, ce qui le met en position de force pour profiter de l’engouement des constructeurs. « Mild hybrid » ? Inventé par Honda, le terme désigne, pour faire simple, l’ajout d’une propulsion électrique sur un véhicule à traction thermique (essence ou diesel), avec des niveaux de puissance électrique inférieurs à ceux déployés dans les berlines « full hybrid » - comme la Toyota Prius -, mais supérieurs à l’électrification autorisée par la batterie traditionnelle de 12 V. Trois composants sont nécessaires : un moteur électrique avec un onduleur, un convertisseur de tension 48V/12V et, bien sûr, une batterie de 48 V. Le moteur générateur récupère l’énergie perdue lors du freinage, qui est stockée dans la batterie additionnelle pour une propulsion électrique d’appoint et d’autres applications comme le parking automatisé. « Certaines topologies de mild hybrid permettront aussi de maintenir en tout-électrique (mais non d’atteindre) une vitesse de 70 km/h sur du plat », ajoute Jean-Daniel Mettetal. Il est Global Technical Manager chez Bosch, autre équipementier très actif sur les composants de ce type de propulsion. « LE MEILLEUR COMPROMIS COÛT-CONSOMMATION » Si le mild hybrid a été expérimenté par Honda sur du 100 V à la fin des années 90, puis par General Motors avec 42 V, c’est finalement sur du 48 V qu’il se développe, avec, à court terme (2017-2018), une topologie (ou architecture) facilement implantable : un alterno-démarreur à courroie remplace le traditionnel alternateur de manière à assurer une double fonction de générateur et de moteur. « C’est l’architecture P1, la plus simple, qui reprend celle que nous avions lancée en 2004 pour le Stop and Start », explique Michel Forissier. Elle se retrouve à la fois dans l’offre Hybrid4All que Valeo avait présentée dès 2012, et dans celle développée par Bosch, ce dernier prévoyant sa disponibilité en 2017. « C’est le meilleur compromis coût- consommation, avec une implantation assez simple », estime Jean Daniel Mettetal. De quoi atteindre les nouveaux objectifs réglementaires. Initialement, l’hybride à 48 V répond à un objectif principal : le respect de la réglementation sur les émissions de CO 2 , et en particulier les 95 gr imposés pour 2020 en Europe. « Cette exigence se traduit par une consommation de 4 litres au 100 km en moyenne. Or, ce n’est tout simplement pas possible sans électrification », explique Michel Forissier. Certes, mais quel type d’électrification choisir : totale, hybride rechargeable, ou hybride mild ? Sur les grosses berlines, les constructeurs ont privilégié le « full hybrid », avec ou sans recharge, associé à des hautes tensions (300 V). Trop cher pour les segments B et C, qui constituent l’essentiel du marché européen et pour lesquels jusqu’à 15 % de réduction d’émission CO 2 est possible avec le mild hybrid. Avec 20 modèles qui seront lancés entre 2016 et 2020, la motorisation hybride à 48 V a le vent en poupe. L’hybridation douce permettra non seulement une réduction d’émissions de CO 2 , mais aussi l’«leFtriFation des FoPSosants Fl«s d’une Yoiture 7ous les «quiSePentiers sont sur la brèche, avec des atouts divers. TEXTE : THIBAULT LESCUYER. PHOTOS : DR. ENQUÊTE I TRANSPORTS TERRESTRE Sous le capot du « mild hybrid » Continental : moteur mild hybrid en architecture P2. AVEC LES TOPOLOGIES P2 ET P3, LE MOTEUR ÉLECTRIQUE PEUT ÊTRE PLACÉ À L’ENTRÉE OU DANS LA BOÎTE DE VITESSES. D’OÛ MOINS DE FROTTEMENTS ET PLUS DE RENDEMENT. CE QUI PERMET DE DIMINUER LES ÉMISSIONS DE CO2 DE 3 À 5 % PAR RAPPORT À LA TOPOLOGIE P1. Valeo : alterno- démarreur à courroie 48 V. CONSTRUCTEURS ET ÉQUIPEMENTIERS ACCÉLÈRENT « Avec une intensité de 300 à 400 ampères et une tension de 48 V, nous sommes inférieurs à la haute tension réglementaire (60 V), ce qui épargne des contraintes de sécurité coûteuses, notamment sur les câblages. Mais nous pouvons délivrer des puissance de 15 à 20 kW, soit 20 à 30 ch », ajoute Michel Forissier. Ces puissances permettent d’offrir une force de traction importante tout en ouvrant un horizon pluriel d’électrification quand les topologies sont optimisées. Pas étonnant, dans ce contexte, que le mild hybrid concentre autant d’efforts chez les équipementiers et les constructeurs. Depuis 2014, les annonces se sont multipliées, de Delphi, qui fournira Honda en 2017, à Continental et Renault, sans oublier les marques allemandes ou encore PSA, qui a présélectionné Continental, Bosch et Valeo pour sa future offre Hybrid Eco. Face à cette bousculade, Valeo et Bosch peaufinent leurs « roadmap » du 48 V. Facile à implanter, la topologie P1 de type Stop and Start n’est en effet qu’une première étape, qui présente des limitations quant au potentiel de récupération d’énergie de freinage. Autre inconvénient de cette topologie : en propulsion électrique, la courroie continue de tourner et le Continental : moteur mild hybrid GTC2. l INNOVATION REVIEW l HS COMPÉTITIVITÉ INDUSTRIELLE HS COMPÉTITIVITÉ INDUSTRIELLE l INNOVATION REVIEW l

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« Ce marché est en train d’exploser, surtout en Chine et en Europe », constate Michel Forissier, le directeur R&D du pôle système de propulsion

chez Valeo. Il est parmi les premiers à s’en réjouir, et pour cause : sur le mild hybrid, l’équipementier français peut légitimement se revendiquer pionnier, ce qui le met en position de force pour profiter de l’engouement des constructeurs.« Mild hybrid » ? Inventé par Honda, le terme désigne, pour faire simple, l’ajout d’une propulsion électrique sur un véhicule à traction thermique (essence ou diesel), avec des niveaux de puissance électrique inférieurs à ceux déployés dans les berlines « full hybrid » - comme la Toyota Prius -, mais supérieurs à l’électrification autorisée par la batterie traditionnelle de 12 V. Trois composants sont nécessaires : un moteur électrique avec un onduleur, un convertisseur de tension 48V/12V et, bien sûr, une batterie de 48 V. Le moteur générateur récupère l’énergie perdue lors du freinage, qui est stockée dans la batterie additionnelle pour une propulsion électrique d’appoint et d’autres applications comme le parking automatisé.

« Certaines topologies de mild hybrid permettront aussi de maintenir en tout-électrique (mais non d’atteindre) une vitesse de 70 km/h sur du plat », ajoute Jean-Daniel Mettetal. Il est Global Technical Manager chez Bosch, autre équipementier très actif sur les composants de ce type de propulsion.

❚ « LE MEILLEUR COMPROMIS COÛT-CONSOMMATION » Si le mild hybrid a été expérimenté par Honda sur du 100 V à la fin des années 90, puis par General Motors avec 42 V, c’est finalement sur du 48 V qu’il se développe, avec, à court terme (2017-2018), une topologie (ou architecture) facilement implantable : un alterno-démarreur à courroie remplace le traditionnel alternateur de manière à assurer une double fonction de générateur et de moteur. « C’est l’architecture P1, la plus simple, qui reprend celle que nous avions lancée en 2004 pour le Stop and Start », explique Michel Forissier. Elle se retrouve à la fois dans l’offre Hybrid4All que Valeo avait présentée dès 2012, et dans celle développée par Bosch, ce dernier prévoyant sa disponibilité en 2017. « C’est le meilleur compromis coût-consommation, avec une implantation assez simple », estime Jean Daniel Mettetal. De quoi atteindre les nouveaux objectifs réglementaires.Initialement, l’hybride à 48 V répond à un objectif principal : le respect de la réglementation sur les émissions de CO2, et en particulier les 95 gr imposés pour 2020 en Europe. « Cette exigence se traduit par une consommation de 4 litres au 100 km en moyenne. Or, ce n’est tout simplement pas possible sans électrification », explique Michel Forissier. Certes, mais quel type d’électrification choisir : totale, hybride rechargeable, ou hybride mild ? Sur les grosses berlines, les constructeurs ont privilégié le « full hybrid », avec ou sans recharge, associé à des hautes tensions (300 V). Trop cher pour les segments B et C, qui constituent l’essentiel du marché européen et pour lesquels jusqu’à 15 % de réduction d’émission CO2 est possible avec le mild hybrid.

❚ Avec 20 modèles qui seront lancés entre 2016 et 2020, la motorisation hybride à 48 V a le vent en poupe. L’hybridation douce permettra non seulement une réduction d’émissions de CO2, mais aussi l’ le tri ation des o osants l s d’une oiture ous les qui e entiers sont sur la brèche, avec des atouts divers. TEXTE : THIBAULT LESCUYER. PHOTOS : DR.

ENQUÊTE I TRANSPORTS TERRESTRE

Sous le capot du « mild hybrid »

Continental : moteur mild hybrid en architecture P2.

AVEC LES TOPOLOGIES P2 ET P3, LE MOTEUR ÉLECTRIQUE PEUT ÊTRE PLACÉ À L’ENTRÉE OU DANS LA BOÎTE DE VITESSES. D’OÛ MOINS DE FROTTEMENTS ET PLUS DE RENDEMENT. CE QUI PERMET DE DIMINUER LES ÉMISSIONS DE CO2 DE 3 À 5 % PAR RAPPORT À LA TOPOLOGIE P1.

Valeo : alterno- démarreur à courroie 48 V. ❚ CONSTRUCTEURS ET ÉQUIPEMENTIERS ACCÉLÈRENT

« Avec une intensité de 300 à 400 ampères et une tension de 48 V, nous sommes inférieurs à la haute tension réglementaire (60 V), ce qui épargne des contraintes de sécurité coûteuses, notamment sur les câblages. Mais nous pouvons délivrer des puissance de 15 à 20 kW, soit 20 à 30 ch », ajoute Michel Forissier. Ces puissances permettent d’offrir une force de traction importante tout en ouvrant un horizon pluriel d’électrification quand les topologies sont optimisées. Pas étonnant, dans ce contexte, que le mild hybrid concentre autant d’efforts chez les équipementiers et les constructeurs. Depuis 2014, les annonces se sont multipliées, de Delphi, qui fournira Honda en 2017, à Continental et Renault, sans oublier les marques allemandes ou encore PSA, qui a présélectionné Continental, Bosch et Valeo pour sa future offre Hybrid Eco. Face à cette bousculade, Valeo et Bosch peaufinent leurs « roadmap » du 48 V.Facile à implanter, la topologie P1 de type Stop and Start n’est en effet qu’une première étape, qui présente des limitations quant au potentiel de récupération d’énergie de freinage. Autre inconvénient de cette topologie : en propulsion électrique, la courroie continue de tourner et le

Continental : moteur mild hybrid GTC2.

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moteur thermique de faire du bruit. Première amélioration possible : placer le générateur électrique au niveau de la boîte de vitesses et non de la courroie, ce que les spécialistes appellent une topologie P2 ou P3. « Le moteur électrique peut être placé à l’entrée de la boîte de vitesses, ou même dans celle-ci. Il en découle moins de frottements et plus de rendement qu’avec une architecture P1 », détaille Michel Forissier. Plus chère et plus complexe, cette topologie permet de diminuer les émissions de CO2 de 3 à 5 % supplémentaires par rapport au P1. Elle est annoncée pour 2019 par Valeo et vers 2020-2025 par Bosch. L’autre grand intérêt de la tension 48 V est de disposer d’une puissance embarquée suffisante pour électrifier toute une série de composants. Cela sera le cas à court terme pour les compresseurs de suralimentation électrique, sur des voitures sportives et en complément du traditionnel turbo : dans ce registre, c’est encore Valeo qui ouvre le bal, en équipant le nouveau SQ 7 (SUV diesel) d’Audi. Mais d’autres éléments plus classiques sont aussi concernés : compresseurs pour la climatisation, ventilateurs de refroidissement ou résistance de chauffage, autant d’éléments dont l’électrification est désormais possible.Confrontés à cette montée en tension globale et à l’arrivée de Delphi et Continental, les deux équipementiers européens dévoilent leurs cartes. « Pour les alterno-démarreurs nécessaires au mild hybrid P1, une des forces de Valeo est d’être le leader du marché avec ses usines d’alternateurs à Etapes et Shanghai », indique tout d’abord Michel Forissier, avant de préciser que Valeo développe déjà des compresseurs 48 V. Bosch, de son côté, met en avant ses compétences distinctives en électronique de puissance et sa présence sur la production des batteries électriques. L’équipementier travaille notamment sur une batterie compact 48 V

lithium-ion, qui sera proposée pour la récupération d’énergie de freinage. « Nous avons aussi développé des compétences sur les modes de refroidissement à huile qui pourront avoir un intérêt pour le moteur électrique s’il est intégré dans la boîte de vitesses », ajoute Jean Daniel Mettetal. De quoi affronter Continental, qui s’est allié avec le spécialiste des roulements Schaeffler et dont l’offre hybride Gasoline Technology Car sort des lignes de production cette année. Quant à Delphi, au vu des annonces récentes (fourniture de système hybride mild pour Honda) et de son portefeuille d’offres, il se positionne plus comme un architecte des systèmes électriques que comme un fournisseur de composants.

❚ UN « TROISIÈME ÉTAGE » À LA FUSÉE DU MILD HYBRIDIl est certain que l’aventure du mild hybrid ne s’arrête pas à la montée en tension 48 V installée sur la courroie ou sur la boîte de vitesses. Il y a aussi un « troisième étage » à la fusée du mild hybrid, selon Michel forissier : c’est l’architecture P4, celle que les spécialistes en topologie moteur appellent « l’architecture parallèle ». Elle consiste à généraliser un moteur électrique sur le train arrière, dans la suite des premières réalisations sur les 4 x 4. Sur le papier, l’intérêt est clair : plus la machine est proche de la roue, plus la récupération de l’énergie de décélération est importante. Trois grandes applications possibles en découlent, d’après l’équipementier français. « Nous pourrons optimiser la récupération d’énergie, mais aussi construire un 4 x 4 électrique et des petites urbaines tout-électrique en 48 V », anticipe Michel Forissier. Encore faudra-t-il que le poids du système électrique ne plombe pas les calculs. En mild hybrid aussi, une approche holistique est nécessaire.

Valeo : compresseur de suralimentation électrique 48 V.

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N°95 I J U IN - J U I L L E T-AOÛ T 2016 l I N NOVAT ION RE V I E W l 67

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« Le lithium-ion est là pour un siècle. Le lithium-air ? C’est très élégant d’un point de vue fondamental, mais c’est une fumisterie », estime Jean-Marie

Tarascon, professeur au Collège de France à la chaire Chimie du solide et énergie et créateur au sein du CNRS du Réseau de recherche sur le stockage électrochimique de l’énergie (RS2E). Compte tenu des verrous technologiques, il ne voit pas cette alternative arriver sur le marché avant quarante ou cinquante ans. Le jugement est moins sévère pour le lithium-soufre, pour lequel il existe des prototypes avec une densité de 350 W/h et qui pourrait éclore commercialement dans dix ou quinze ans. Mais une conclusion s’impose, si l’on écoute ce spécialiste mondial de l’électro-chimie : à court et moyen termes, l’innovation concrète sur les batteries pour voitures électriques sera incrémentale et concernera le Li-ion. Tous les fabricants de cellules de batterie y travaillent, bien sûr. Et les constructeurs automobile ? La plus grosse diffi culté à laquelle ils font face n’est pas tant technologique que stratégique : il s’agit de miser sur le(s) bon(s) fournisseur(s), au singulier ou au pluriel, et sur un type de partenariat capable d’apporter un avantage technologique, ou de prix.Dans une voiture électrique, la batterie pèse lourd. Littéralement : 400 kilos pour celle du nouveau fl euron électrique de General Motors, la Bolt. Elle pèse aussi lourd dans la compétitivité globale du véhicule. Et c’est ainsi que les grands fournisseurs de batteries pour l’industrie électronique sont devenus des partenaires clés pour les « carmakers ». LG Chem, Samsung HDI, Panasonic sont désormais aussi incontournables que Bosch, Valeo ou Continental. Mais entre Toyota, qui possède à 80 % son usine de batteries, Nissan, qui porte une joint venture avec NEC, et General Motors ou Renault, qui misent sur LG Chem sans créer de société commune, les stratégies d’alliance avec les fabricants de batteries sont radicalement différentes. Tandis

que les choix technologiques convergent vers le lithium-ion.

❚ L’INTÉGRATION VERTICALE DE TOYOTA Première illustration avec Toyota. Lorsqu’il a créé la joint venture Primearth avec Panasonic, en 1996, pour fabriquer les cellules de batteries de la Prius, Toyota a misé sur la technologie nickel métal hydrure (NiMH), moins coûteuse que le Li-ion. Aujourd’hui, Toyota contrôle 80 % du capital de Primearth, ce qui refl ète une stratégie d’intégration verticale unique chez les constructeurs. Rappelons que le seul autre carmaker propriétaire de sa propre usine de cellules, Daimler, a terminé cette activité fi n 2015 et se limite désormais à assembler des cellules achetées à Samsung HDI, Panasonic et plus récemment pour la Smart, LG Chem.Qu’en est-il du choix technologique de Toyota ? La dernière version de sa Prius, dévoilée fi n 2015, est la première à pouvoir embarquer une batterie Li-ion. « Ils en sont presque venus à s’excuser de ne pas avoir basculé plus tôt vers le Li-ion », remarque un spécialiste du domaine. Le Li-ion est désormais fabriqué dans l’usine de Primearth pour les besoins exclusifs de Toyota. Mais cette unité restera-t-elle compétitive ? « Le coût reste le driver, et pour le réduire, il y a trois options : le volume de production, une chimie meilleure, plus dense en énergie, ou optimiser la fi n de vie de la batterie », souligne Jean-Marie Tarascon. Du point de vue du volume, l’intégration verticale peut être un handicap, puisque l’usine Primearth ne profi te pas du volume d’achats des autres constructeurs. Elle ne profi te pas, en l’état, du marché de stockage stationnaire, contrairement à la « giga factory » de Panasonic et Tesla.

❚ L’ALLIANCE SINGUL!ÈRE DE GM ET LG Contrairement aux constructeur nippons, General Motors n’a pas créé d’entreprise commune avec un fabricant de batteries. Pour son nouveau fl euron tout électrique, la

❚ L’impact des batteries sur la compétitivité d’une voiture électrique est considérable. Les constructeurs n’ont d’autre choix que de créer des partenariats avec les fournisseurs. Partenariat fort ou faible, contrôle capitalistique ou joint venture, les stratégies diffèrent. Analyse. TEXTE : THIBAULT LESCUYER. PHOTOS : DR.

Chevrolet Bolt EV.

Batteries de voitures électriques

LES CHOIX STRATÉGIQUES ENTRE ALLIANCES ET TECHNOLOGIES

DANS UNE VOITURE ÉLECTRIQUE, LA BATTERIE PÈSE LOURD, TANT EN MASSE QUE DANS LA COMPÉTITIVITÉ GLOBALE DU VÉHICULE. C’EST POURQUOI LES FOURNISSEURS DE BATTERIES SONT DEVENUS DES PARTENAIRES CLÉS POUR LES CARMAKERS.

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… Chevrolet Bolt, le choix stratégique est celui d’une alliance singulière. La Bolt, qui concurrence le dernier modèle de Tesla, concrétise en effet un « projet commun de recherche et de planification » non capitalistique, mais technologiquement très riche, entre GM et LG.Sous le capot de la « Chevie » Bolt se niche une batterie dernier cri en Li-ion, assemblage de 288 cellules Li-ion, capable de créer 200 ch et d’une autonomie jusqu’à 320 km.Rappelons que toute batterie est constituée de modules assemblés à partir de cellules (anode, cathode et électrolyte) qui en sont la brique élémentaire. Contrairement aux cellules utilisées par Tesla, celles de la Bolt ne sont pas au format cylindrique 18650, mais « prismatiques », ce qui se traduit par une forme aplatie qui supporte mieux la chaleur.Depuis 2009, GM dispose d’un laboratoire dédié aux systèmes de batteries : c’est le Global Battery Systems Laboratory installé dans le Michigan, à Warren. Agrandi en 2013, il permet sur 85 000 m2 de tester des centaines de cellules et de packs, d’effectuer des benchmarks et de construire des prototypes. GM dispose aussi d’une usine d’assemblage pour la batterie de son modèle hybride, la Spark. Mais c’est en Corée que les batteries de la Bolt seront fabriquées et assemblées, sur une ligne de production que LG Chem a modernisé pour la Bolt. Le partenariat avec LG est vaste. Le coréen fournira aussi toute une série d’équipements de la Bolt : système de compression pour l’air conditionné, onduleur, infotainment, entre autres. Ce qui fait de LG le co-constructeur de la Bolt sans que LG Chem en pâtisse pour fournir les constructeurs Renault, Volvo, Daimler et Hyundai.

❚ JOINT-VENTURE : LA VOIE DU MILIEU EN QUESTIONEntre un partenariat non capitalistique et une intégration verticale à la Toyota, la joint-venture est la voie du milieu qui a été historiquement choisie par Nissan et Honda, au Japon. Elle ne se révèlera gagnante que si elle crée une différenciation technologique. Mais aujourd’hui, le modèle des joint-venture pose question. Nissan est le deuxième

constructeur, après Toyota, à avoir investi le business des batteries, en créant avec DEC le fabricant de cellules AESC (Automotive Energy Supply Corporation), en 2007. Détenu à 51 % par Nissan, il fabrique et assemble au Japon et aux Etats-Unis les batteries du constructeur. On retrouve des cellules Li-ion à structure plate (laminée) et des cathodes en manganèse. Technologie gagnante ? Les Nissan Leaf équipées de cellule AESC sont le modèle électrique rechargeable le plus vendu au monde. Oui, mais depuis 2015, les rumeurs d’un double sourcing de la Leaf, à AESC et LG Chem, vont bon train. Et l’alliance avec Renault ne profite pas aux volumes d’AESC.AESC, qui concentre quelque 500 employés au Japon, n’a pas réussi à être fournisseur de la Zoé de Renault (dont la puissance est moindre que la Leaf) et ne bénéficiera pas d’un effet d’échelle comparable aux autres grands fabricants. En juillet 2015, Carlos Ghosn avait surpris en déclarant : « Nous considérons que le meilleur fournisseur de batteries est actuellement LG. » Renault a choisi LG Chem pour sa Zoé, et AESC doit se contenter de la Kangoo Electric. Rien n’indique, en outre, que la prise de participation de Renault dans Mitsubishi crée un effet de volume pour AESC.L’exemple de Honda est aussi celui d’une ouverture à la concurrence de sa co-entreprise. En 2009 l’entreprise a créé la joint-venture Blue Energy avec son compatriote, fabricant de batteries, GS Yuasa. Or, depuis peu, Panasonic équipe plusieurs modèles du japonais. Alors, les joint-venture entre un carmaker et un fabricant de batteries ont-elles du plomb, ou du lithium, dans l’aile ? Si elles ne réussissent pas à se battre sur le volume, elles ne survivront que via des innovations créant un avantage concurrentiel. Par exemple, en codéveloppant des électrodes enrichies, qui en silicium (pour l’anode), qui en nickel, manganèse et cobalt (NMC) pour la cathode. « Les nouvelles générations de matériaux en NMC ont un gros potentiel, avec des densité d’énergie augmentées de 30 à 40 % », précise Jean-Marie Tarascon. Des innovations que les constructeurs attendent au tournant.

Nissan LEAF, batterie actuelle. Nissan LEAF, nouvelle version 2016.

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Depuis la Google Car, la conduite 100 % automatique est jugée crédible par la plupart des constructeurs automobiles. L’attrait pour la

conduite automatique se traduit par l’arrivée de nouveaux acteurs, comme Nvidia, surtout connu comme fournisseur majeur du « gaming », avec ses cartes graphiques ultra-puissantes. « Les processeurs graphiques GPU (Graphic Processor Units), qui sont notre technologie clé, se révèlent extrêmement performants pour le deep learning », explique Bea Longworth, de Nvidia. Or, le deep learning, ou apprentissage profond, sera au cœur de la conduite totalement automatique. A la base, Nvidia, comme ses concurrents Renesas et Xilinx, « ce n’est que le support, la partie hardware, cartes et interfaces pour accueillir des algorithmes d’apprentissage très coûteux en temps de calcul », explique Fawzi Nashashibi. Directeur de recherche et responsable de l’équipe Robotics, Intelligent Transportation Systems (RITS) à l’Inria, il est spécialiste de l’intelligence artifi cielle appliquée à la conduite automatique terrestre. Mais Nvidia se positionne de plus en plus sur la partie software, notamment pour la détection d’obstacles. Parallèlement, l’entreprise, basée à Santa Clara, cible les constructeurs automobiles pour leurs besoins en outils de simulation ou pour les applications graphiques d’infotainment, à l’instar d’Audi, qui a décidé d’embarquer ses processeurs Tegra X1 dans sa nouvelle Audi 8 d’ici à 2018.L’apprentissage profond appliqué à la conduite autonome a de nombreux domaines d’applications possibles : à terme, il permettra de créer des « comportements » de conduite automatique qui auront été appris par la machine, par exemple à partir des habitudes de conduite de l’utilisateur. Mais avec Nvidia, le premier domaine d’application est du

domaine de la « computer vision » : modéliser et identifi er des données provenant de caméras et autres capteurs en temps réel, notamment pour détecter des obstacles et planifi er les bonnes décisions de conduite automatique. Au sein de l’intelligence artifi cielle (IA), le « deep learning », aussi appelé « machine learning », désigne des méthodes d’apprentissage permettant une prise de décision en temps réel. « Le deep learning permet à une machine d’apprendre par l’expérience. Il utilise à la fois la reconnaissance visuelle, par des caméras de bord, et la compréhension des images pour agir de façon appropriée. Par exemple, en ville, ralentir lorsque la porte d’une voiture garée s’ouvre, et faire un écart », illustre Bea Longworth. « Dans une voiture automatique, il y a quatre macro-tâches : la perception, la modélisation, la planifi cation-décision et enfi n l’action », décrypte Fawzi Nashashibi. L’apprentissage profond, tel qu’il est proposé par Nvidia, intervient surtout sur le volet perception, avec les sous-tâches de détection des obstacles, et sur la partie modélisation.

❚ VOLVO, PIONNIER EN EUROPE POUR LES TESTS AVEC PX2La plateforme Drive PX2 est le dernier outil lancé par Nvidia, après une première version PX à destination des concepteurs de véhicules automatiques. « Il s’agit d’une plateforme de développement ; PX2 n’est pas destinée à être installée sur des grandes séries », prévient Béa Longworth, avant de préciser que son coût avoisine les 10 000 dollars. Le premier constructeur européen à tester PX2 sera Volvo, pour 100 voitures de test qui rouleront dans la région de Göteborg. « Volvo sera pionnier en Europe », précise la représentante de Nvidia, sans dévoiler la part d’intelligence artifi cielle qui sera testée en Suède. Mais elle insiste sur le fait que Nvidia travaille de plus en plus sur la partie software, que ce soit la

❚ Au CES 2016 de Las Vegas, le fournisseur de cartes graphiques Nvidia a présenté sa plateforme PX2 destinée aux concepteurs de voitures autonomes. Quel peut être l’apport de Nvidia et, plus largement, de l’apprentissage profond pour accoucher d’une voiture 100 % automatique ? Décryptage avec l’un des spécialistes de l’Inria, directeur de l’équipe-projet Robotics, Intelligent

rans ortation ste s TEXTE : THIBAULT LESCUYER. PHOTOS : DR.

Voitures autonomesCONDUIRE AUTREMENT

GRÂCE AU DEEP LEARNINGLa plateforme Drive PX2 lancée par Nvidia

fusion des données ou la cartographie de l’environnement. Et même, depuis peu, sur les algorithmes.Jusqu’à présent, la conception des algorithmes d’apprentissage est l’apanage de laboratoires comme le RITS et d’équipes de programmeurs appointés par les constructeurs et leurs fournisseurs. La nouveauté est que Nvidia prévoit d’ajouter un jeu d’applications (d’algorithmes industrialisés) clé en main, dont la plupart utilisent les méthodes de classifi cations des Deep Neural Networks (DNN). « Nous avons une équipe en interne qui fait du développement et qui a travaillé par exemple sur notre projet DAVE2 en utilisant un modèle de Deep Neural Networks », explique Béa Longworth.DNN ? « C’est l’une des trois grandes méthodes pour classifi er des données, avec Adaptive Boosting et les supports vector machine », explique Fawzi Nashashibi. Les DNN et les modèles de Covolutional Neural Networks (CNN), qui font partie de cette famille, sont particulièrement effi caces pour les tâches de modélisation devant servir à identifi er des objets extérieurs.DAVE2, dont les résultats ont été présentés en avril, est une expérimentation de conduite automatique où la direction (le volant) est assurée par l’ordinateur de bord après avoir été entraînée à la conduite via un CNN. Rien de révolutionnaire au vu des exploits des autres prototypes. Mais cela illustre l’ambition de Nvidia d’être fournisseur de software intelligent. Une ambition à prendre au sérieux, si l’on considère la taille de l’entreprise : 10 000 employés, dont 2 000 rien qu’en Europe, tous secteurs confondus.

❚ L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE AU SERVICE DU TRANSPORTL’équipe-projet RITS regroupe, elle, une trentaine de chercheurs qui se consacrent à la robotique appliquée aux systèmes de transport intelligent depuis de nombreuses années. « Nous ne sommes pas les seuls à travailler sur l’intelligence artifi cielle (IA) au sein de l’Inria », précise Fawzi Nashashibi, qui cite les équipes Willow et Sierra de l’institut. Mais alors que la première s’intéresse à la « computer vision » et la seconde aux applications dans les neuro-sciences et l’économie, RITS se concentre sur le transport. Ce qui fait

de l’Inria une des rares institutions de recherche en France à travailler sur l’automatisation terrestre complète via l’IA - les autres institutions étant le centre de robotique (CAOR) des Mines Paris Tech, l’UTC de Compiègne (Heudyasic), et l’institut Vedecom. Le RITS (ex-Imara) a été pionnier pour la mise en circulation de navettes 100 % automatiques en conditions réelles : c’était en 2011, à La Rochelle, dans le cadre du projet Citymobil. Cinq ans plus tard, le RITS développe et teste des programmes destinés aux constructeurs automobiles ou à leurs fournisseurs. Mais sans utiliser PX et PX2 de Nvidia pour l’instant. « Nous préférons utiliser nos propres plateformes, avec une architecture logiciel développée par la société française Intempora, RT Maps », précise Fawzi Nashashibi. Avec succès, puisque le RITS a déjà effectué plusieurs transferts d’algorithmes à des industriels qui s’appellent Valeo, Akka Technologies, Robosoft et, plus récemment, Tata Motors. Concernant les méthodes de classifi cation pour la modélisation des images, le responsable de RITS se montre plus prudent. « Chaque application peut avoir un modèle de classifi cation optimal. Par exemple, les classifi cateurs de type DNN sont intéressants pour détecter des panneaux de limitation de vitesse. Mais pour détecter des piétons, les classifi cateurs de type adaptive boosting sont souvent plus adaptés, sachant que tout dépend aussi du type de données acquises. »La détection d’obstacles est loin d’être la seule application du deep learning, selon Fawzi Nashashibi. Un autre horizon est celui des comportements de conduite automatique. Conduite sportive, économe, ou zen ? Ces profi ls pourront être programmés, ou personnalisés, par apprentissage profond à partir de la manière de piloter du conducteur. « L’IA sera aussi utile pour décider des actions en cas de défaillance. Quel capteur utiliser si une image n’est plus suffi sante en qualité ? » Deux défi s majeurs se présentent : enfreindre raisonnablement le code de la route, et l’éthique. « L’éthique est très diffi cile à apprendre à une machine », souligne Fawzi Nashashibi. L’esprit de l’utilisateur n’a pas dit son dernier mot.

ENQUÊTE I TRANSPORTS TERRESTRE

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A l’occasion des salons de l’automobile, les « concept-cars » attirent les projec-

teurs, suscitent l’imaginaire, posent question sur les innovations à venir. Purs artifi ces illustrant l’inventivité des designers ? Instruments pour prolonger le rêve de l’automobile ? « Leur premier rôle est de faire rêver. Les constructeurs en profi tent pour tester des nouveaux design auprès du public. Mais ce sont aussi des vitrines technologiques », décrypte le directeur général du pôle de compétitivité Mov’éo, Marc Charlet. Au Mondial de l’Automobile 2016, der-rière la variété de ces inventions, trois

grands axes d’innovation se confi r-ment : l’électrifi cation présente sur 100 % des concept, l’autonomisation et le bien-être à bord. Mais au-delà de ces attendus, plusieurs constructeurs se sont appuyés sur leur concept-car pour dévoiler des choix stratégiques ou marketing. Avec des niveaux de détail variables. Illustrations.

❚ CXPERIENCE : L’ESPRIT CITROËN AVANT TOUTUn moteur hybride rechargeable capable d’assurer 60 km en tout élec-trique, une boîte de vitesses auto-matisée à 8 rapports. Rien de très

nouveau chez le dernier concept-car de Citroën ? Un trait distinctif, tout de même, dans le panorama du Mondial 2016 : la Cxperience était le seul concept à avoir choisi le segment des « grandes berlines ». Autre différence, contrairement à leurs homologues des marques allemandes, les stratèges de la marque au chevron n’ont pas pro-fi té du concept-car pour dévoiler des orientations technologiques très dif-férenciantes. Dans la Cxperience, la principale indication relève en fait du marketing : Citroën, malgré la relance de la marque DS sur le premium, n’entend pas abandonner le haut de

ENQUÊTE I AUTOMOBILE DU FUTUR

PROPULSION DU FUTUR  Que nous apprennent les concept-cars ?

gamme. Avec le marché chinois en ligne de mire ? Aucune décision sur le lancement effectif d’une berline Citroën n’a fi ltré.

❚ ÉLECTRIQUE INTELLIGENT (EQ)CHEZ DAIMLERChangement d’orientation avec Daimler. Son concept-car SUV EQ restera incontestablement l’un des plus signifi ants de l’année 2016. Concept ? Pas uniquement, puisque derrière le SUV EQ dévoilé à Paris, Daimler a annoncé une nouvelle sous-marque dédiée à la propulsion électrique, « EQ » et un ensemble de moyens technologiques dédiés. EQ dessine la mobilité du futur « au-delà de l’électrique », une mobilité qui se fera, selon le patron de Daimler Dieter Zetsche, « sur quatre piliers : connectée, autonome, partagée et

électrique ». Et Dieter Zetsche d’ajou-ter : « La génération EQ est la fusion logique de tous ces piliers. » A la fois concept et nouvelle gamme, EQ repose sur plusieurs choix tech-nologiques que Daimler a pris soin de détailler. En termes d’architec-ture, tout d’abord, la nouvelle gamme reposera sur une structure totalement modulaire. Développée spécifi que-ment pour les modèles électriques, l’architecture est « scalable sur tous les aspects du véhicule grâce à un système de building-blocks », dévoile le constructeur. Qui précise aussi la cible de sa performance en propul-sion : une accélération à 100 km/h en 5 secondes, et 500 km d’autono-mie grâce à une batterie électrique de 70 kWh de puissance. Autre précision apportée sur EQ, l’ori-gine de la batterie : celle-ci « provien-dra de la fi liale Deutsche Accumotive », ajoute-t-on chez Daimler. Etonnante précision, alors qu’il s’agit d’un concept ? Rappelons que Daimer s’était différencié en 2009 en créant une fi liale dédiée aux batteries. Après avoir produit ses propres cellules lithium-ion, l’usine allemande s’est recentrée sur l’assemblage des packs, préférant s’approvisionner auprès des fabricants coréens (LG Chem et Samsung) pour le composant de base que sont les cellules. L’annonce que les EQ s’appuieront sur Accumotive donne de la cohérence à la décision, prise six mois plus tôt, d’investir 500 millions d’euros dans cette usine allemande.

❚ FORMULE E « INSIDE », LA TRÉZORLes concept-car servent aussi à mettre en avant des technologies distinctives. C’est le cas de Renault avec son très remarqué concept-car Trézor : ce coupé deux places tout électrique permet à la marque d’af-fi rmer ses ambitions dans l’électrifi -cation sportive, puisqu’il intègre le sytème de rechargement de batterie RESS (Rechargeable Energy Storage System) qu’elle a déployé avec succès pour la compétition des Formule-E. Pur effet de com’ ? Ce n’est pas l’avis de Marc Charlet, le directeur du pôle Mov’éo : « Les technologies issues de la compétition ont un avenir en série, nous l’avons vu avec le turbo et l’in-jection. » Les chaînes de traction élec-triques ayant une marge d’optimisa-tion importante, les développements actuels en Formule E pourraient per-mettre de lever certains verrous. Mais Renault n’a pas souhaité en dire plus sur l’intérêt des RESS pour les véhi-cules de série.Dernier concept marquant, l’I.D concept car de Volkswagen. Comme Daimler, I.D s’appuie sur une plate-forme dédiée, l’architecture modu-laire MEB (Modular Electric Drive) qui avait été présentée au Consumer Electronic Show de Las Vegas en jan-vier. Le concept car I.D, un monospace compact, embarque une motorisation électrique (170 cv) installée au niveau de l’essieu arrière. Autre différence marquante : il sera traduit rapide-ment en véhicule de série, puisqu’un lancement est prévu dès 2020.

Citroën Cxperience.

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La BMW EQ. La Trézor de Renault.

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❚ Ni prototypes ni purs délires de designers, les concept-cars présentent un intérêt au-delà de l’esthétique. Certains sont des révélateurs de choix technologiques, d’autres dessinent des choix stratégiques. Décryptage des concept-cars marquants qui ont été dévoilés au Mondial de l’auto o ile u’ont ils nous a rendre, nota ent sur les a nes de ro ulsion du futur TEXTE : THIBAULT LESCUYER.

l I N NOVAT ION RE V I E W l l I N NOVAT ION RE V I E W ll I N NOVAT ION RE V I E W l HS COMPÉ T I T I V I T É INDUS TR I E L L E HS COMPÉ T I T I V I T É INDUS TR I E L L E l I N NOVAT ION RE V I E W l

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Et si, pour le gaz carburant, le problème de la poule et de l’œuf (faut-il des stations

d’avitaillement ou des fl ottes de véhi-cules pour amorcer le marché ?) était en passe d’être résolu ? En France, le gaz carburant est longtemps resté sur la double niche des bus urbains et des bennes à ordure, mais depuis 2015, les investissements se multiplient, les stations d’avitaillement ouvrent et la concurrence s’avive. A tous les maillons de la chaîne. Un simple exemple du côté des transporteurs : en juin dernier,

le groupe J. Perrenot a passé à Iveco une commande historique de camions roulant au gaz : 200 tracteurs Stralis GNL (gaz naturel liquéfi é) et 50 por-teurs GNC (gaz naturel comprimé). « Nous sommes partis d’une situation où le réseau d’approvisionnement était quasi inexistant à une situation où la France est le premier marché en Europe », se réjouit Clément Chandon, responsable du développement du gaz pour la zone EMEA chez Iveco.Cet engouement s’explique par la forte autonomie des camions au gaz (1 000

à 1 500 km pour le gaz liquéfi é), par les objectifs transport-climat fi xés par l’Etat, et par la volonté de se désenga-ger du diesel chez les prescripteurs. Du côté des acheteurs publics, Grenoble, par exemple, veut la sortie du diesel en 2020 pour ses bus et à Paris, la RATP prévoit 20 % de bus au biométhane et 80 % de bus électriques. Autre prescripteur majeur, la grande distri-bution : Auchan et Carrefour exigent désormais qu’une partie de leurs trans-porteurs roulent au gaz. Car le gaz car-burant a de nombreux avantages sur le

GAZ CARBURANT La transition s’accélèrepour les poids lourds

ENQUÊTE I AUTOMOBILE DU FUTUR

❚ Moins médiatisée que l’électrique, la propulsion au gaz carburant a le vent en poupe en France, surtout pour le transport de marchandises. Carburant de transition quand il est d’origine fossile, le gaz peut aussi être 100 % renouvelable. TEXTE : THIBAULT LESCUYER.

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diesel : il n’émet presque pas de parti-cules fi nes et de Nox, et il émet environ 15 % de moins de CO2, et même 75 % quand c’est du biogaz. Le tout pour un coût équivalent, voire moins cher, que le diesel grâce à une fi scalité plus avan-tageuse qui compense le surcoût des camions.Stimulé par ces facteurs favorables, c’est tout un jeune écosystème qui entre en action. Il met en musique des installateurs exploitants de sta-tions, comme Axégaz (créée en 2012) et Providiris, des start-up technolo-giques comme Cryopur pour le biogaz, aux côtés de GNVert (groupe Engie) et Air Liquide pour l’avitaillement, de Scania et Iveco chez les fabricants de véhicules. Avec un dernier arrivant, l’Ademe : l’agence d’Etat a lancé un premier appel à projet « Solutions inté-grées de mobilité gaz naturel véhicule (GNV) » en juillet 2016.Parmi tous ces acteurs, l’italien Iveco est un des premiers à avoir misé sur le gaz carburant, et peut se targuer de 60 % de parts de marché en Europe sur les camions roulant au gaz. Pour asseoir cette position, Iveco s’appuie

sur ses usines européennes : usine française d’Annonay pour les bus, et usine espagnole pour les poids lourds. Deux usines où le gaz prend de l’am-pleur : alors qu’en France, sur quelque 1 000 bus produits en 2016, la moitié étaient hybrides ou au gaz, à Madrid le nombre de poids lourds au gaz a été plus que multiplié par deux. Rien qu’un début ? En 2020, Iveco prévoit 3 500 camions au gaz, soit environ 13 % de la production totale. Et autant de moteurs spécifi ques à produire.

❚ LE CURSOR 9 GNV D’IVECO, MOTEUR D’AVENIR « Nos moteurs au gaz sont conçus sur la même base mécanique que nos die-sels, mais ils s’en distinguent sur deux choses essentielles : la partie haute et

le système de dépollution », détaille Clément Chandon, d’Iveco. Un taux de compression plus faible, une injection indirecte, un allumage similaire à l’es-sence et une température plus élevée (de 150°) fondent le cahier des charges de la propulsion au gaz. Il en découle des composants spécifi ques, culasse et alliages haute perfomance. Quant à la dépollution, « un simple cataly-seur suffi t, sans additif et sans fi ltre à particule, ce qui diminue le poids de 200 kilos » précise Clément Chandon. Ces spécifi cités se retrouvent dans le nouveau moteur Cursor 9 GNV, dévoilé cette année et destiné à équiper les camions Stralis NT de l’italien.

❚ L’ÉQUILIBRE GNC-GNLENCORE INCONNU Tous ces moteurs, ainsi que ceux des générations précédentes, sont conçus pour fonctionner indifféremment avec du gaz comprimé (GNC) ou liquéfi é (GNL), la différence se jouant au niveau du réservoir installé sur le camion. GNL ou GNC : l’un va-t-il supplanter l’autre ? Diffi cile à dire, même si la liquéfaction se développe le plus, du fait qu’elle permet une plus grande autonomie en kilomètres et un transport du carburant plus simple. Si les 200 stations ouvertes avant 2014 ne permettaient que le GNC, depuis deux ans cela change. Engie, Air Liquide et les « outsiders » Axegaz et Providiris proposent des stations com-binées GNL -GNC. La poule et l’œuf ne sont plus un problème…

ENQUÊTE I AUTOMOBILE DU FUTUR

BIOMÉTHANE : LA RUPTURE CRYO PUR

L’avenir du gaz carburant passe par le biométhane : issu de la méthanisation des déchets, il offre un bilan CO2 presque parfait. Principale contrainte technique : l’épuration du biogaz en CH4. Plusieurs technologies matures sont disponibles, comme l’épuration membranaire. Mais Cryo Pur, créée en 2015 par le professeur Denis Clodic (Mines ParisTech), a breveté une solution de rupture. Par cryogénie, elle combine l’épuration et la liquéfaction, tout en récupérant le CO2. A la clé, c’est une solide économie en Capex et Opex. L’entreprise a signé son premier contrat en 2016 en Irlande du Nord. Bientôt la France ?

Moteur Iveco Cursor 9.

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