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Sommaire Edito Collège communal de la Ville de Mons Avant-propos Xavier Roland L’abstraction géométrique en Belgique après 1945 Denis Laoureux I. L’Union fait la forme Laura Neve II. Vers le minimalisme III. Le réel en souvenir IV. En marge de la toile V. L’art comme bien commun VI. L’art au quotidien Orientation bibliographique Colophon et remerciements

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Sommaire

Edito Collège communal de la Ville de Mons

Avant-propos Xavier Roland

L’abstraction géométrique en Belgique après 1945 Denis Laoureux

I. L’Union fait la forme Laura Neve

II. Vers le minimalisme

III. Le réel en souvenir

IV. En marge de la toile

V. L’art comme bien commun

VI. L’art au quotidien

Orientation bibliographique

Colophon et remerciements

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Edito

Ces dernières années, le BAM a montré son engagement en faveur de l’art abstrait, et plus précisément de l’abstraction lyrique. Que ce soit Christian Dotremont, Pierre Tal Coat, Antoine Mortier ou encore Serge Poliakoff, ces artistes ont tous occupé les cimaises montoises. Les publications accompagnant ces expositions sont aujourd’hui considérées comme des ouvrages de référence.

Le catalogue que nous publions à l’occasion de l’exposition Abstractions géométriques belges. De 1945 à nos jours pourrait bien intégrer cette même catégorie d’ouvrages incontournables. Notre ambition est de remettre en lumière l’abstraction géométrique, mouvement majeur de l’histoire de l’art éclipsé de la scène artistique belge ces dernières années. Cette exposition offre, pour la première fois, une vue d’ensemble de la création belge active dans l’abstraction géométrique, avec pas moins de quarante artistes nationaux, dont des personnalités aussi diverses que Jo Delahaut, Pol Bury ou encore Marthe Wéry, et plus de cent septante œuvres présentées sur les deux niveaux du BAM.

Le foisonnement des groupes qui se succèdent depuis 1945 révèle une démarche artistique animée par un véritable projet collectif fondé sur des valeurs sociales. Le titre des différentes sections en témoigne : L’union fait la forme ou encore L’art comme bien commun. Dans cet état d’esprit, il n’est dès lors pas surprenant de voir ces artistes intervenir directement dans l’espace public ou s’immiscer dans le quotidien avec des objets usuels.

Fin connaisseur de l’art belge, Thomas Neirynck avait acquis de très nombreuses œuvres issues de l’abstraction géométrique. Elles enrichissent désormais les collections du BAM grâce à une mise en dépôt de la Fondation Roi Baudouin. Les cimaises de cette exposition leurs ont été largement ouvertes.

La mise en valeur de ce moment singulier de l’art permet d’ancrer davantage encore le BAM dans une démarche prospective au service de la création belge. Soucieuse d’offrir aux visiteurs des expositions uniques, l’équipe du BAM a travaillé en étroite collaboration avec Laura Neve, Commissaire de l’exposition. Nous tenons à saluer ici l’excellence du travail accompli. Ce projet n’aurait également jamais pu voir le jour sans le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles, que le Collège communal de la Ville de Mons tient à remercier.

LE COLLEGE COMMUNAL DE LA VILLE DE MONS

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Avant-propos

Il était temps. L’abstraction géométrique en Belgique avait besoin d’une relecture l’inscrivant dans un continuum historique de 1945 à nos jours. Il s’agit ici d’un premier « essai » sur un courant artistique sans doute incompris et dont la manière persiste chez nombre d’artistes contemporains. Les surfaces apparemment lissées de toute émotion rassemblées ici sous le vocable « d’abstraction géométrique » semblent aller à contre-courant de nos sociétés actuelles ; hyperréalistes. Qu’est-ce donc qui anime depuis tant de générations ces artistes à peindre, à sculpter ou à mettre en œuvre de cette façon les matières sensibles qui nous entourent ? Concrètement, nous observons au fil des années que toute excitation rétinienne n’aboutit qu’à une persistance des couleurs et des formes. Plus encore, aucune image simulacre, aucune référence historique et nulle trace d’un geste quelconque n’émane de la vision de l’œuvre ; du moins rien qui ne puisse l’inscrire dans un espace-temps donné. Cette forme d’ascétisme renonce à toute imagerie visuelle, considérée comme superflue. Ainsi, la plupart d’entre eux laissent peu de chance à l’émergence visuelle d’une voie de traverse qui mélangerait plein-vide, visible-invisible, passé-futur. L’épuration de la matière conduit à des surfaces où strictement rien ne se retranche à l’arrière d’une masse ou d’une forme comme totalement mise à plat. La tentation se fait jour de dire que l’œuvre est ailleurs. En recherchant la raison sincère à l’arrière de ces surfaces dénudées, l’esprit découvre des matières, des formes et des couleurs assemblées dans un espace sous le contrôle de la raison. Cette lecture, toute en surface, permet à tout le moins d’esquisser un système d’interprétation des signes qui s’impose face à une impossible mise en perspective des matières picturales. Dans ces œuvres, la face cachée – subjective – reste en effet latente et sans interprétation possible. Seule règne la sur-face visible. Il y a là matière à contradiction. Bien que nous nous réjouissions de pouvoir affirmer ici que l’esprit se détache de toute allégeance à un quelconque effet de transcendance, il n’en demeure pas moins que la vue de ces œuvres suscite réflexion et spiritualité.

Autant l’architecture que l’écriture d’une telle exposition participent à l’enjeu de ce projet conçu dès l’origine comme une « œuvre totale » qui rompt les frontières entre œuvre d’art et objet du quotidien, entre espace muséal et espace public. Comment faire pour que le visiteur ne s’y perde ? Ni absolument scientifique, ni totalement historique, ni purement esthétique, le propos de l’exposition se situe plutôt à la croisée de chacune de ces approches. Grâce à une intégration in situ de Jean Glibert, l’architecture sera elle-même tout entière incluse dans le processus, évitant d’un étage à l’autre toute discontinuité du parcours muséologique.

Cet esprit de géométrie, Thomas Neirynck en a fait l’un des axes forts de sa collection, centrée sur l’art belge. Pour cette exposition, ce n’est pas moins d’une vingtaine d’œuvres qui ont été conviées par Laura Neve, dévoilant de la sorte un nouvel aspect de cette très riche collection.

Xavier Roland

Responsable du Pôle muséal

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Non illustré

L'abstraction géométrique en Belgique après 1945

Denis Laoureux (Université libre de Bruxelles)

Marquée par un héritage symboliste qui a prolongé la fin-de-siècle jusque 1918, la Belgique n'a pas été un territoire propice à l'épanouissement de l'abstraction qui naît et se développe, au début des années 1910, hors du monde classique. Certes, Vassili Kandinsky expose en 1913 à Bruxelles, à la Galerie Georges Giroux... mais l'événement est sans lendemain : James Ensor, Fernand Khnopff, George Minne, William Degouve de Nuncques sont alors au zénith de leur carrière. Après 1918, l'expressionnisme flamand dominé par Constant Permeke et le surréalisme qui s’est formé autour de René Magritte laisseront peu de place à la Plastique pure. Celle-ci constitue la contribution belge au constructivisme international. Mais l'avant-garde ne prend pas et, à partir de 1925 déjà, les peintres arrêtent leur activité ou se réorientent progressivement, comme Marcel-Louis Baugniet, vers le design.

La situation des peintres abstraits actifs après 1945 est tellement différente que cette nouvelle et seconde génération ne doit en aucun cas être vue comme le prolongement naturel de la première. Et pour cause : l'abstraction, singulièrement dans sa veine géométrique, fait alors l'objet d'une reconnaissance qui touche autant le monde institutionnel officiel que le public, la critique et les collectionneurs. Le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles a joué, dans l'institutionnalisation de l'art abstrait, un rôle largement international, qui culmine par ailleurs avec l'Expo'58. Son Directeur général, Pierre Janlet, est lui-même amateur d'art moderne et d'abstraction géométrique en particulier. Janlet est à l'origine de la Galerie Aujourd'hui. Celle-ci succède en 1953 au Séminaire des Arts fondé en 1945 par Luc Haesaerts et Robert Giron. Avec ses trois salles repensées par Constantin Brodzki pour l'architecture et Corneille Hannoset pour la scénographie, la Galerie Aujourd'hui fut, durant une dizaine d'années, une plateforme extrêmement dynamique1. Cette assise institutionnelle a été accompagnée par des initiatives privées. La Jeune Peinture belge (1945-1949), l'Association pour le progrès intellectuel et artistique en Wallonie – l’APIAW – constituée en 1944 à l’initiative du Liégeois Fernand Graindorge, et l’Antwerps Genootschap voor Schone Kunsten créée en 1946 par le collectionneur Carlo Van den Bosch, organiseront de nombreuses expositions d’art abstrait, tout en assurant la diffusion de l’art international.

Après 1945, l'abstraction jouit d'une reconnaissance publique et privée qui crée un horizon d'attente plus que favorable pour la jeune génération d'artistes revendiquant son droit à une peinture libérée de tout devoir de référence au monde visible. C'est donc en toute logique que, parallèlement à l'émergence d'une nouvelle génération de peintres, de grandes collections prennent corps peu à peu, comme celles de Fernand Graindorge et de Thomas Neirynck2 à laquelle la présente exposition rend hommage. Dans le même temps, des revues voient le jour, comme Quadrum qui constitue, de 1956 à 1966, une tribune particulièrement au fait des tendances les plus innovantes de l'art abstrait.

En dépit de la reconnaissance que l'abstraction géométrique a connue dès après la Seconde Guerre mondiale, on doit bien constater aujourd'hui, avec le recul, que peu d'études de synthèse et peu d'expositions ont été consacrées à cet art et à ceux qui le pratiquent3. Le surinvestissement de la critique dans l'étude de Cobra (1948-1951) et de ses prolongements a eu pour conséquence involontaire de minimiser la place de l'abstraction géométrique et, dès lors, de livrer une vision biaisée de l'histoire de l'art en Belgique après 1945. Certes, bien des artistes ont fort heureusement fait l'objet d'une ou plusieurs expositions rétrospectives. Mais de nombreuses zones d'ombres demeurent et, avant cette exposition et le catalogue qui l'accompagne, aucune vue d'ensemble n'avait été consacrée au développement de l'abstraction géométrique.

1 Sur la Galerie Aujourd'hui et sur la personne de Janlet, voir l'article de F. Hespel, « Aperçu de la réception de l'art moderne en Belgique après la guerre », Quadrum. Revue internationale d'art moderne (1956-1966), Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, 2007, p. 26-30. 2 Sur ces deux collections, voir Fernand Graindorge 1903-1985. Collectionneur et mécène. Donation à la Communauté française de Belgique, Liège, Musée de l'Art wallon, 2009 et D. Laoureux, Cobra passages. Collection Thomas Neirynck, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 2008. 3 Citons toutefois P. Roberts-Jones, La peinture abstraite en Belgique 1920-1970, Bruxelles, Crédit communal, 1996 ; M. Draguet, D'Ensor à Broodthaers. Un siècle de peinture en Belgique, White Public Relations Co., 2000 ; D. Laoureux, L'art abstrait en Belgique (1910-2010), Bruxelles, Fonds Mercator, 2010.

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Les années Jeune Peinture belge (1945-1949) et après

La Jeune Peinture belge (1945-1949) est une association sans but lucratif fondée le 4 août 1945. Elle a pour objectif de créer les conditions nécessaires au retour d'un dynamisme artistique miné par les années de guerre. "Quelles que soient les joies de la liberté, auxquelles se mêle hélas le souvenir des êtres perdus, ces années furent celles d'une respiration enfin retrouvée, d'un nouvel apprentissage de la parole, de la manière de se mouvoir"4. Rassemblant des jeunes peintres qui ne se reconnaissent ni dans l’animisme ni dans le surréalisme, à l'heure où Cobra n’existe pas encore, la Jeune Peinture belge s’est assignée une fonction essentiellement logistique. Elle bénéficie d’un réseau de partenaires institutionnels prestigieux et d’un système de financement issu du monde privé. Un Conseil d’administration est mis sur pied, de même qu’un jury organisant la sélection des œuvres pour les expositions nationales et internationales. Des critiques d’art apportent à l’entreprise le soutien de leur plume. Administrée avec soin et détermination par René Lust, la Jeune Peinture belge n’est pas une avant-garde abstraite, même si elle conduit la plupart de ses membres à l'abstraction. Elle est plutôt un cadre, une structure offrant aux peintres les moyens matériels d’exposer en Belgique et à l’étranger. Ceci explique pourquoi il n’y a pas de « manifeste » de la Jeune Peinture belge, contrairement à Cobra qui verra le jour en 1948, mais des statuts déposés au Moniteur belge.

C'est dans ce contexte qu'il revient à Jo Delahaut d’avoir présenté à Bruxelles en 1947, et à Oxford l’année suivante, des compositions qui constituent les premiers tableaux abstraits peints et exposés en Belgique après la Seconde Guerre mondiale. Le fait est important, même s'il est passé à peu près inaperçu à l'époque. L'engagement de Delahaut pour l'abstraction géométrique est à la fois immédiat et radical. Il se fonde sur la négation de toute référence à la réalité. L'artiste partage en cela les postulats esthétiques de son ami Auguste Herbin. Dans un premier temps, Delahaut assimile la peinture abstraite à la mise en place d'une architecture visuelle composée de lourdes lignes noires droites. Celles-ci constituent un réseau linéaire qui délimite l'expansion des formes dans une construction picturale dont la stabilité exprime le besoin d'un monde en équilibre. Comme Herbin, Delahaut ne cessera d'explorer les relations multiples entre la forme et la couleur pour ériger la géométrie en rhétorique visuelle caractérisée par l’éloquence, la clarté, la raison.

Delahaut n'est pas le seul membre de la Jeune Peinture belge à pratiquer l'art abstrait dans l'immédiat après-guerre. On songe ici à Mig Quinet, plus âgée, il est vrai, que la plupart des membres du groupe de la Jeune Peinture belge qu'elle cofonde par ailleurs. Pour diverses raisons, les tableaux abstraits de Quinet ne seront exposés qu'en 1953, au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles5. Contrairement à Delahaut, Quinet ne rejette pas le réel. Elle part d'un objet, ou d'une scène qu'elle choisit pour sa qualité cinétique : un cirque, un carrousel, une roue, un trio à cordes... Intériorisé, analysé, déconstruit mentalement, le réel est alors transposé en plans géométriques colorés articulés par un réseau linéaire formant une structure kaléidoscopique. L'objet est ramené à une trame géométrique. Il prend la forme d'une architecture lumineuse virtuellement animée par un mouvement rotatif généré par le motif du cirque, de la roue ou du carrousel. La géométrie prend ainsi une qualité cinétique qui trouvera son plein aboutissement dans le développement ultérieur de l'Optical Art.

Ce processus de création laisse percevoir que la voie conduisant à l'abstraction résulte d'une lente métamorphose intérieure du monde environnant dont les limites se trouvent ainsi élargies, dilatées, reculées. La nature est transformée par l'imagination avant de s'incarner dans la peinture à travers une configuration plastique conservant le souvenir lointain, imperceptible, de son origine pourtant située dans le réel. Envisager la peinture abstraite non pas comme une négation du visible, mais comme un élargissement poétique de la réalité est une orientation que la plupart des peintres issus de la Jeune Peinture belge vont emprunter.

Ce "passage de la ligne", selon la formule utilisée par la critique d'époque pour désigner l'adhésion à l'abstraction, se fait, pour la plupart des peintres, autour de 1950. Le lyrisme de la palette issu du fauvisme se conjugue alors à un sens cubiste de la structure pour détacher progressivement la représentation de ses liens au réel, pour soustraire cette représentation au poids de l'objet dans le but d'assimiler l'image à l'épiphanie d'un

4 P. Roberts-Jones, « La Jeune Peinture belge ou les quelques mousquetaires », in La Jeune Peinture belge, Bruxelles, Crédit communal, 1992, p. 11. 5 J'ai expliqué ces raisons dans Mig Quinet. Abstraction faite, Anvers, Pandora Publishers, 2013, p. 67-82.

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mouvement lumineux. Des œuvres comme Architecture (1949), Plaza Prado (1955) de Gaston Bertrand, mais aussi Les Oiseaux prisonniers (1949) de Mig Quinet, ou encore Sérénité bleue (1952) et Solstice d'été (1955) de Marc Mendelson, sont l'expression de ce processus poétique de transformation intérieure du réel où la nature se métamorphose pour prendre corps dans l'image sous la forme d'une structure lumineuse en mouvement.

Poétique de l'angle et dynamique de groupes dans les années 1950

L'approche introspective du réel amène la plupart des membres de la Jeune Peinture belge à franchir la ligne de l'abstraction autour de 1950. Mais une autre sensibilité se développe dans le même temps. Elle prend appui sur la notion de forme calibrée à la couleur qui la constitue. Cette approche n'a rien d'une célébration poétique de la nature. Au contraire, elle postule que l'art abstrait est un langage visuel autonome, exonéré de tout devoir de référence au monde visible et disposant de sa logique visuelle propre. Dans ce schéma, la forme se présente comme un module géométrique que le peintre agence à l'intérieur d'une composition où elle se répète pour former une série dans laquelle des variations de taille et de couleur sont introduites.

Delahaut joue ici un rôle clé, tant au niveau de l'élaboration de ce type de peinture que de la promotion de l'abstraction à travers une dynamique associative. Plusieurs groupes d'artistes se constituent au fil des années 1950 et 1960. En organisant des expositions, ces associations assurent une visibilité à ceux qui, comme Jean Rets, Kurt Lewy, Mig Quinet, Francine Holley ou Victor Noël, s'engagent dans cet esprit de géométrie que Jo Delahaut cherchera aussi à répandre dans la société à travers l'architecture et l'art décoratif. Delahaut s'impose également comme un théoricien du langage de l'art abstrait qu'il assimile à une rhétorique régie par des lois différentes de celles qui caractérisent la peinture figurative. Le groupe Art abstrait se constitue en 1952 autour de sa peinture et de sa personne. Georges Collignon, Georges Carrey, Pol Bury, Léopold Plomteux, Jan Saverys, Jan Burssens et Hauror en font partie. Ils sont rejoints en 1954 par Jean Rets, Francine Holley, Kurt Lewy et Guy Vandenbranden. L'ensemble est actif jusque 1956. En quatre années d'existence, Art abstrait a multiplié les expositions tant en Belgique qu'à l'étranger, avant d'imploser au terme de dissensions internes opposant les tenants d'une stricte géométrie et ceux qui s'attachent au lyrisme de la matière. Avec Maurits Bilcke et Jean Séaux, Delahaut lance en 1956 le groupe Formes6. Plusieurs critiques, tels que Jean Dypréau et Léon-Louis Sosset, apportent le soutien de leur plume à ce groupe dont les activités se limitent, en fait, à trois expositions auxquelles s’ajoute un album de sérigraphies publié en 1956. En 1960, Formes cède la place à Art construit dont les activités contribuent à la réhabilitation de la Plastique pure des années 1920. Éphémère lui aussi, le groupe Art construit reste en activité jusque 1964. Sa dissolution ménage un espace pour la création, en 1965, du groupe D47. Avec l’arrivée de Delahaut en son sein, D4 devient Geoform qui sera actif jusque 1971.

Les peintres regroupés au sein de ces formations élaborent des œuvres érigeant la clarté du plan coloré et l’approche sérielle de la forme en alternative à la gestualité de l’abstraction lyrique. Pour eux, la peinture découle moins d'un processus d'élargissement des limites du réel qu'elle ne sert de lieu de recherche formelle sans aucun rapport avec le monde visible. Ceci ne signifie pas que la peinture se retranche dans une tour d'ivoire. Au contraire. Nombre de peintres adhérant à l'abstraction géométrique ont plaidé pour une application sociale du langage plastique qu'ils avaient expérimenté picturalement. Les bas-reliefs placés par Delahaut au pied des immeubles de la cité de Droixhe, près de Liège, en sont l'expression8. Triangles, croissants de lune, trapèzes constituent des modules géométriques angulaires que l'artiste agence pour donner corps à des compositions vives, dynamiques, équilibrées, de nature à s'intégrer aux structures architecturales des édifices publics.

La peinture géométrique s'apparente à une rhétorique visuelle dont le principe fondamental réside dans les combinaisons entre trois éléments essentiels du vocabulaire plastique dont disposent les peintres : la ligne, la forme et la couleur. La ligne est un paramètre remplissant diverses fonctions. Courbe, elle joue un rôle dynamogène en provoquant un effet visuel rotatif. Droite, elle se fait architecturale en divisant le plan du tableau pour créer des surfaces agencées les unes par rapport aux autres. Son épaisseur peut varier, de même que sa direction, de sorte à créer des effets sonores et des effets de rythmes donnant à la peinture une dimension

6 Le groupe Formes rassemble Pol Bury, Kurt Lewy, Jean Rets, Georges Collignon, Guy Vandenbranden, Ray Gilles, Francine Holley, Victor Noël, Van der Auwera, Paul Van Hoeydonck et Van Marcke 7 Fondé en 1965, D4 comptait les peintres suivants : Emiel Bergen, Gilbert Decock, Henri Gabriel, Victor Noël et Marcel-Henri Verden. 8 Sur cet aspect, voir la contribution de L. Neve, « Delahaut engagé et visionnaire », in Jo Delahaut, www.koregos.org, article mis en ligne le 16 septembre 2013.

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musicale. La forme, quant à elle, est vue comme un module conçu pour être répété en vue de former une série au sein de laquelle elle évolue en se transformant au gré de variations de couleur, de taille, de position. Si les cercles et les arrondis ne sont pas évacués, c'est toutefois la forme angulaire qui prédomine et trouve dans la communication graphique de l'Expo'58 sa plus célèbre application. Le triangle est sans doute l'emblème formel de l'abstraction géométrique dans la Belgique des années 1950. La couleur est liée à la forme qu'elle incarne. Pour un peintre, il s'agit de trouver le timbre chromatique correspondant à la forme qu'il module à l'intérieur d'une suite agencée dans l'espace du tableau. En explorant les combinaisons infinies permises par les relations entre ces trois paramètres plastiques, les peintres mettent en place un univers visuel caractérisé par une constante mutation : la forme est une séquence au sein d'une série.

Au sortir des années 1950, cette question du mouvement de la forme dans une structure sérielle se pose avec acuité. Les réponses à cette question, toutefois, divergent. Certains peintres évacuent le principe de répétition pour se concentrer sur une seule forme magnifiée en signe immobile. C'est le début du minimalisme. D'autres, en revanche, maintiennent le concept d'exploration sérielle de la forme en valorisant le mouvement virtuellement inclus dans la dynamique de la modulation. Mettre la forme en action est une option esthétique qui amène ces artistes à envisager de (se) sortir du tableau pictural qui est, forcément, statique.

Sortir du tableau de chevalet : la forme en mouvement

La problématique d’une notion aussi abstraite que celle du mouvement a largement préoccupé les artistes du XXe siècle, et cela dès la naissance des avant-gardes dans les années 1910. Elle resurgira dans le contexte de l’abstraction géométrique des années 1950 qui considère la forme comme une séquence insérée dans le flux d’un processus évolutif. Dans un tableau abstrait des années 1950, une forme géométrique est une séquence, un rythme dans une composition. Elle s'inscrit à l'intérieur d'une série au sein de laquelle elle évolue et se déplie dans la diversité de ses variations de taille et de couleur.

Cette approche sérielle de la géométrie a posé le fondement conceptuel des recherches cinétiques des années 1960 et 1970. On trouve ainsi une dynamique modulatoire dans la peinture de Luc Peire. Ce dernier utilise le caractère séquentiel d’une trame linéaire verticale évoluant selon un rythme irrégulier fait de dilatations et de contractions. Pol Bury mise, quant à lui, sur la tectonique de surfaces colorées pour suggérer un mouvement caractérisé par la lenteur. Les premiers plans mobiles créés par Bury en 1953 découlent ainsi d’une logique picturale. Ils arrachent les formes géométriques à la planéité de la peinture pour les mettre réellement en action par l’usage d’un moteur.

Cette volonté d’exprimer le mouvement conduit à une remise en question de la peinture de chevalet. En effet, le caractère bidimensionnel et statique de l’image peinte va à l’encontre des effets cinétiques recherchés. Il s’agit alors de redresser les formes perpendiculairement au plan du tableau. On peut dire que l'abstraction géométrique en peinture contient, en cela, le germe de son propre dépassement. Celui-ci conduit aux reliefs que l’on voit apparaître à partir des années 1960. Le relief dialogue avec la lumière pour créer un mouvement d’ombres provoquées par des formes en relief. Jo Delahaut et Jean Rets, mais aussi Gilbert Swimberghe, Paul Van Hoeydonck, Guy Vandenbranden, Jean Dubois et Francis Olin composent ainsi avec la verticalité des formes dont la disposition utilise la lumière pour créer des zones d’ombre en mouvement. Ce travail en trois dimensions conduira plus tard certains artistes, comme Mark Verstockt, à la sculpture.

Ce dégagement de la peinture trouve une expression dans le Nord du pays, à Anvers, au sein du groupe G-58 qui rassemble des artistes tels que Dan Van Severen, Walter Leblanc, Bert De Leeuw, Cel Overberghe. Éclectique par les membres qu’il fédère, G-58 entend restaurer un climat d’avant-garde dans le Nord du pays. Fédéré autour de la Hessenhuis d’Anvers, il a notamment organisé, en 1962, l’exposition Anti-peinture. Walter Leblanc y expose ses Torsions. Celles-ci occupaient l’artiste depuis 1959. Elles se constituent de lamelles en plastiques placées de façon torsadée dans une structure sérielle. Un même élément est systématiquement répété. Seule sa position est modifiée par un mouvement rotatif presque imperceptible. Le spectateur ne prend la mesure de ce mouvement hélicoïdal qu’en longeant horizontalement l’œuvre. Il modifie ainsi la lumière environnante, et contribue donc à l’existence même de l’œuvre. Anti-peinture est symptomatique du changement des postulats esthétiques dans l’art contemporain, changement que relaiera, en 1979, l'exposition Inzicht/Overzicht présentant une vue de la création actuelle de l'époque où la peinture n'est présente qu'à travers Marthe Wéry.

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Minimalismes

La pratique du relief et l'expression du mouvement ont contribué à réduire l'hégémonie de la peinture parmi les disciplines artistiques. L'apparition de nouvelles catégories artistiques trouvera un cadre au sein du groupe G-58. Mais G-58 a également favorisé le développement d'une abstraction minimaliste. Celle-ci place la peinture de Dan Van Severen en dialogue avec l’orientation que Delahaut donne à sa recherche au début des années 1960. En Belgique, le minimalisme naît du besoin de ralentir le rythme inhérent au principe de modulation formelle qui régit l’abstraction géométrique des années 1950. Il ne s’agit plus de peindre la progression d’une forme en devenir dans un système évolutif. La forme est isolée, arrêtée et agrandie. Elle s’immobilise, sa couleur s’intensifie et gagne en espace pour devenir un signe unique dont la seule présence condense toutes les significations attachées à l’œuvre. Monumental, le signe dépasse virtuellement les limites de la toile. Le bord du châssis devient, dès lors, un point de tension. Le hors champ s’affirme ainsi comme une donnée majeure que nombre d'artistes, comme Bram Bogart, Delahaut et Van Severen, intègrent à leur propos.

Le développement du minimalisme est aussi une réaction à l’internationalisation de l’expressionnisme abstrait picturalement fondé sur l’implication complète du peintre dans l’acte. Il s’agit, dans un schéma minimaliste, de réduire l’intervention artistique à l’essentiel. La monumentalité du signe est une réponse à la négation de la forme incluse dans la pratique même de l'abstraction lyrique. Amédée Cortier, Gilbert Decock, Léon Wuidar, Dan Van Severen, forment ainsi une nouvelle génération constituée autour de ces principes, et qui renouvelle la pratique de l’art construit à travers la valorisation d'une forme essentielle, absolue et disposant, surtout, d'une considérable fortune critique dans l'histoire de l'art abstrait : le carré.

La dilatation du signe finira par déboucher sur un investissement total de la surface par la couleur. Les champs chromatiques dépouillés du minimalisme des années 1960 contiennent une aspiration au monochrome. Libérée du lien qui l'attachait à la forme, la couleur apparaît, dans ce schéma, comme une force en mouvement. Le cadre est un lieu symbolique puisqu'il limite l'expansion de la couleur. La superposition de toiles monochromes par Jean-Jacques Bauweraerts est l'expression de la volonté de rendre, par la monochromie, la couleur à son énergie première. Les monochromes que Bram Bogart réalise dans les années 1970 témoignent également du débordement de la couleur au-delà du cadre. Dans ces tableaux, les bords s’enflent au fur et à mesure qu’ils accueillent les surplus de matière issus d’un travail de dépouillement partant de l’intérieur de la composition. Ce travail d’épuration de la matière trouve dans les monochromes blancs peints dans les années 1960 par Cel Overberghe une application remarquable. La monochromie blanche a ceci de singulier qu’elle redouble la couche de préparation posée sur la toile de lin. En effet, le tramage de la toile transparaît, ici et là, dans la couche monochrome de peinture blanche, comme pour mettre en scène le seuil ultime de la peinture, le degré précédant la transformation du tableau en objet.

Ce degré zéro de la peinture est aussi au cœur du projet de Marthe Wéry. Abstraction et minimalisme se croisent dans cette œuvre qui évoluera vers le monochrome. Habitée par l’idée de montrer un travail en cours, Wéry s’attache plutôt à mettre en scène le processus de conception de la peinture. La texture revêt, dans son travail, une importance toute particulière. En effet, la peinture est appliquée sur la surface du support comme si les pigments frétillaient au contact de l’air auquel ils parviennent au terme d’une longue et lente remontée des profondeurs de la couleur. Dans d’autres œuvres, la ligne redouble le cadre pour poser plastiquement la question de la limite inhérente à la peinture de chevalet. Cette question trouvera une réponse dans l’installation de surfaces monochromes mises en tension les unes avec les autres de sorte à constituer une structure conçue en rythme avec l’espace qui la détermine et dans lequel elle se cristallise.

Perspectives actuelles

À partir des années 1960, la redéfinition des postulats esthétiques ouvre l’art à de nouvelles formes d’expression mettant en crise les disciplines académiques. La peinture éprouve alors quelques difficultés à tenir le haut du pavé dans l’évolution de la scène artistique qui opère une transition des Beaux-Arts vers les arts plastiques, de l’art moderne à l’art contemporain. La dématérialisation de l’œuvre d’art par les tendances conceptuelles, la valorisation de l'objet issue de la réception du ready-made, l'importance première accordée au corps dans la performance ont contribué à situer la peinture dans une position de quasi-illégitimité. Il faudra attendre les années 1980 pour que la peinture retrouve des couleurs. Pour les peintres, cette décennie constitue alors le cadre chronologique d’un triple repositionnement de leur discipline.

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D’une part, les propriétés tactiles de la peinture sont à nouveau placées au premier plan. En Belgique, une phalange d’artistes contribue au mouvement européen de retour à une peinture expressionniste riche en effets de facture. Philippe Vandenberg, Marc Maet, Michel Frère, Karel Dierickx, Yves Zurstrassen renouent ainsi avec un hédonisme matiériste et gestuel. Cette approche du tableau n'interdit pas un goût pour la géométrie. En témoigne la série que Zurstrassen consacre, au début des années 2000, aux formes géométriques carrées et rectangulaires obtenues par un processus de décollage de formes prédécoupées dans du papier et insérées dans la trame des couches picturales.

D’autre part, avec des plasticiens tels que Mark Verstockt, Philippe Van Snick, Bernard Villers, Georges Meurant, Dirk Verhaegen, Serge Gangolf ou encore Félix Hannaert, on assiste à un retour de l'art construit dans une orientation proche de la veine Neo-Geo qui se développe sur la scène new-yorkaise des années 1980 : codes inspirés par le minimalisme, radicalité géométrique des compositions, répétition d’une même forme dans la logique d'une série, sens de la monochromie. Parallèlement à cette tendance et confirmant celle-ci, une phalange de peintres se met en place au fil des six numéros de la revue MESURES art international, qui paraît entre 1988 et 1995. Des vétérans tels que Marcel-Louis Baugniet et Jo Delahaut participent à ce projet emmené par Léon Wuidar, Jean-Jacques Bauweraerts, Jean-Pierre Husquinet et Jean-Pierre Maury. Ce dernier partage avec Émile Lanc et Guy Vandenbranden le projet de conférer à la peinture un sentiment de mouvement. En prolongeant un art construit hérité de Delahaut, MESURES art international apparaît comme l'extrême terme de la seconde abstraction apparue dans l'immédiat après-guerre.

Enfin, le monochrome est également investi et renouvelé. Michel Mouffe part du châssis dont il reprend l’ossature pour animer la surface de la toile, comme s’il s’agissait de dévoiler picturalement les forces internes sur lesquelles la peinture se construit. Cette force interne, pour Pieter Vermeersch, est essentiellement le fait de la couleur appliquée dans un jeu de nuances à la fois réelles, bien visibles, mais presque imperceptibles, presque impossibles à déceler. D'autre part, Marthe Wéry, Tapta, Marie-Jo Lafontaine, Willem Cole, revisitent le monochrome en investissant le lien entre peinture et espace. Le monochrome est ici un art déployé en trois dimensions. En utilisant le sol comme un dispositif scénographique, la peinture s’émancipe de son adhésion traditionnelle au mur. Cette approche environnementale est par ailleurs au centre des recherches plastiques d'autres artistes. On songe ici à Pál Horváth, mais également à une jeune génération d'artistes au sein de laquelle on peut citer Greet Billet et Delphine Deguislage. L’espace est alors une composante essentielle puisque le champ de vision constitue le principe même de la structure artistique. Les modalités de perception de l’œuvre d’art sont ainsi pleinement intégrées aux travaux les plus récents de la génération actuelle. Car, en effet, les œuvres « installées » modifient le regard du spectateur. L’installation abstraite dialogue avec l’espace dans lequel elle prend corps pour transformer la contemplation en déambulation. Le temps est inévitablement convoqué par ce type de dispositif où la spatialité de l’œuvre se mêle à la durée nécessaire pour parcourir cette œuvre.

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Laura Neve I. L’UNION FAIT LA FORME À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, l’abstraction apparaît aux artistes belges comme une voie vers la liberté d’expression, mise à mal pendant la période d’occupation. Elle bénéficiera incessamment, pour plusieurs décennies, d’une position de premier ordre sur la scène artistique belge et internationale. Au préalable, sa raison d’être nécessite d’être plaidée auprès du public. La pluralité des sensibilités selon lesquelles elle se déploie – lyrique et géométrique9 – constitue une entrave supplémentaire à son succès immédiat. Le caractère cérébral de l’abstraction géométrique lui imposera davantage de faculté de persuasion pour séduire une audience encore sous l’influence de la tradition figurative. Ainsi, pendant près de cinquante ans, des artistes exposent, théorisent et publient de concert au nom de l’abstraction géométrique. Dans ce contexte, Jo Delahaut est le premier à s’engager dans la défense infatigable du courant, dont il s’inscrit dès 1947 comme le chef de file (fig. 1). Alors que ses compères de la Jeune Peinture belge mûrissent leur lent passage à l’abstraction, Delahaut opte irréversiblement pour une abstraction radicale, suite à sa rencontre avec Auguste Herbin, en 1946, au Salon parisien des Réalités Nouvelles (fig.2). Herbin, avec qui Delahaut se lie d’amitié, marquera les esprits d’une génération d’artistes belges en quête d’un modèle. L’admiration de Delahaut à l’égard du peintre français sera rendue publique en 1960, dans la revue Art construit, par le truchement d’un texte intitulé Herbin mon ami10. En exposant ses œuvres géométriques dès 1947, Delahaut consacre le retour d’une tendance disparue pendant l’entre-deux-guerres, celle-là même qui allait s’épanouir pendant le reste du XXe siècle : l’abstraction géométrique. Le choix esthétique de Delahaut et de ses disciples se pose comme un postulat de rigueur dont l’enjeu est d’apporter structure et équilibre à une société en manque de repères : « je pense, mais je me trompe peut-être, que je cherche ainsi à exprimer mon souhait d’un certain ordre dans un monde de désordre »11 ; « en cette époque de crise, de révolution permanente, de remise en question continue, la fonction de l’abstraction consiste sans conteste à retrouver le principe ordinateur »12.

Ainsi, le dynamisme du mouvement conduira à la mise sur pied de nombreux cercles et alliances artistiques, en majorité initiés par Delahaut, prônant l’expansion d’un langage basé sur les formes géométriques et les couleurs pures, affranchies de leur rôle de représentation. Après l’expérience avortée de la Jeune Peinture belge à laquelle il manquait une unité de pensée, Art abstrait13 est créé en 1952 par Delahaut (fig.3), Pol Bury (fig.4), Georges Carrey, Georges Collignon, Jean Milo, Léopold Plomteux et Jan Saverys. Il se positionne clairement en faveur de l’abstraction, sa seule particularité étant de rassembler des artistes ayant opté pour cette forme d’art en plein essor, qu’ils

9 On distingue en effet deux tendances majeures au sein de l’abstraction belge qui apparaît au sortir de la Seconde Guerre mondiale. L’une, l’abstraction géométrique, est fondée sur un principe d’ordre et de rigueur. L’autre, l’abstraction lyrique, est gestuelle et spontanée. CoBrA (1948-1951) est en Belgique l’un des mouvements représentatifs de ce deuxième courant. 10 J. Delahaut, « Herbin mon ami », in Art construit, n°2 (Auguste Herbin 1882-1960), Liège, avril 1960, n.p. 11 ID., cité dans X., « Jo Delahaut, ou les souvenirs d’un abstrait », in : Le Vif-L’Express, Bruxelles, n°45, novembre 1990, p.74. 12 ID., « L’art abstrait et le monde », in Artribune, 1er novembre 1980, p.10, cité d’après J. Delahaut, Écrits, réunis par Claude Goormans et Philippe Roberts-Jones, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 2003, p.139. 13 Pour de plus amples informations, voir Autour du groupe Art abstrait (1952-1956). Un essai de géographie esthétique: Les abstractions constructives 1945-1964, Ramet-Flémalle, Centre wallon d’art contemporain de la Communauté française La Chataigneraie, 18 octobre – 16 novembre 1986.

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défendent contre l’assise des esthétiques conservatrices tel que le postanimisme14. D’autres artistes se rallient au fur et à mesure à l’aventure, dont Kurt Lewy (fig.5), Jan Burssens, Francine Holley, Guy Vandenbranden (fig.6), Jean Rets et Ray Gilles (fig.7), à l’issue de laquelle on compte dix-neuf membres. Ensemble, ils défendent un art qui « […] puise dans l’essence même de la spiritualité et de la sensibilité et non dans les éléments et les rythmes de la nature extérieure, brute et perceptible par les sens »15. Le cercle est soutenu par quelques personnalités extérieures dont les critiques Jean Séaux et Maurits Bilcke, qui se feront dès lors les fidèles alliés des artistes géométriques. À l’instar de nombreux cercles, Art abstrait s’appuie sur des publications. Deux éditions des Cahiers du groupe Art abstrait voient le jour, l’une en 1952, la seconde en 1953. Du reste, les expositions demeurent le moyen le plus efficace pour diffuser leurs idéaux. Le groupe expose de 1952 à 1956 une à sept fois par an, en Belgique dans plus de dix lieux différents et à l’étranger à Édimbourg, Toulon, Paris, Stanleyville, Aachen, Rome, Mulheim et Milan. Dissous en 1956, il est divisé dès 1954 entre les tenants de l’abstraction géométrique, qui sont majoritaires, et ceux de l’abstraction lyrique. La rupture est précipitée par Delahaut, qui refuse de poursuivre plus longuement une collaboration hétéroclite. À l’origine, les artistes œuvrent réunis pour donner un souffle nouveau à la scène artistique belge de l’immédiat après-guerre. Les préoccupations divergent cependant rapidement, scindant le champ d’action de l’art abstrait en deux. En effet, l’ordonnance d’un mode de pensée comme le « style » n’est pas compatible avec le besoin de libérer le geste pictural du « cri »16.

Par conséquent, en 1956, Delahaut (fig.8), Séaux et Bilcke fondent le groupe Formes, qui se concentre plus particulièrement et définitivement sur l’art abstrait géométrique. En dehors des fondateurs, les membres sont Rets (fig.9), Vandenbranden, Holley (fig.10), Lewy, Van Hoeydonck (fig.11), Gilles, Stella Vanderauwera (fig.12), Noël (fig.13) et Van Marcke. L’année de sa création, le groupe publie un cahier accompagné de dix sérigraphies des cinq premiers artistes mentionnés et rassemblant des textes de Pierre Bourgeois, Charles De Maeyer, Jean Dypréau et Léon-Louis Sosset. Chargé du texte principal, ce dernier vante les mérites de l’abstraction au sens large, encore soumise à la critique. Et à lui d’affirmer qu’elle « […] appartient au présent et lance ses antennes dans le futur […], posséd[ant] les vertus capables de stimuler l’intelligence novatrice »17. Sosset distingue néanmoins deux tendances : la première, un « […] ordre lyrique, qui englobe […] les impulsions du tempérament, les perceptions de l’instinct, les caprices de l’imagination […] [et l’autre,] un art de géomètre et de logicien […] qui fait du calcul son aliment et de l’étude de la forme son objet »18. C’est bien la seconde que le groupe entend valoriser, dont on peut découvrir les créations au Cercle éducatif Jean Jaurès à Morlanwelz en 1956, à la Galerie Accent à Anvers en 1957 – deux expositions auxquelles se joint Bury - et à Düsseldorf en 1958.

Poursuivant leur combat en faveur de l’abstraction géométrique, Delahaut, Séaux, Bilcke et Vandenbranden (fig.14) fondent, en 1960, en l’honneur d’Auguste Herbin, le cercle Art construit, accompagnés de Lewy (fig.15), Noël, Rets (fig.16), Van Hoeydonck

14 Le postanimisme est le prolongement de l’animisme, mouvement figuratif qui existe pendant l’entre-deux-guerres et dont la source d’inspiration principale est la vie quotidienne de l’être humain, préservée des réalités politiques et sociales. À ce sujet, voir : La Jeune Peinture belge : 1945-1948. Bruxelles, Crédit communal, 25 septembre – 22 novembre 1992. 15 X., Art Abstrait, Cahier n°1, 1952, n.p. 16 Selon la formule employée par Michel Seuphor pour différencier les deux types d’abstraction, auteur de l’ouvrage Le style et le cri. Quatorze essais sur l’art de ce siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1965. 17 L.-L. Sosset, « De l’art abstrait », in P. Bourgeois, C. De Maeyer, J. Dypréau, e.a., Art abstrait-Formes, 1956, n.p. 18 Loc.cit.

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(fig.17), Jacques Moeschal et Ferdinand Vonck. C’est Bilcke d’abord et Delahaut ensuite qui en assument le secrétariat. Le cercle est à l’origine d’une revue du même nom, qui ne publie que deux numéros, dont l’un des deux est entièrement consacré à Herbin. Parallèlement, d’autres groupes se revendiquent de cette appellation « art construit » à Milan, Zurich, Hambourg, Amsterdam ou encore Zagreb. En effet, l’importance de la mouvance géométrique s’accroît et se défend, même si son étendue est freinée par l’abstraction gestuelle qui fait fureur, particulièrement en France. À plusieurs reprises, Art construit expose aux côtés d’artistes étrangers de même tendance ; en 1960 successivement, de février à juin, au Musée d’Ixelles à Bruxelles, au Musée d’Art wallon à Liège et au Groeningen Museum de Bruges.

Art construit se sépare en 1964, ce qui permet la mise sur pied de Geoform. Le groupe préexistait depuis 1965 sous le nom de D4 et rassemblait Emiel Bergen, Gilbert Decock (fig.18), Henri Gabriel (fig.19), Victor Noël (fig.20) et Marcel-Henri Verdren. En mai 1966, Delahaut est sollicité au sein du groupe ; c’est à cette occasion qu’il est renommé. Il définit alors de manière plus engagée son orientation esthétique. Geoform organise une à deux expositions par an, de 1966 à 1968, avant de disparaître en 1971. Le catalogue de l’exposition Geoform. Hommage à Vantongerloo, qui se tient en 1966 à la galerie Montjoie à Bruxelles et en 1967 aux galeries Le Disque rouge à Bruxelles et Kontakt à Anvers, est commenté par Maurits Bilcke et Robert Rousseau et comprend des sérigraphies originales des artistes-membres. Il rappelle le rôle prépondérant des pionniers de l’avant-garde19, qu’ils louent pour avoir été « […] chercher dans les structures mêmes de l’esprit humain les schèmes créateurs que leur refuse désormais le monde extérieur »20. Geoform expose encore à Bruges au Korrekelder en 1967 et à Rotterdam en 1968.

La plupart des groupes de défense de l’abstraction géométrique voient le jour dans la capitale, malgré qu’ils accueillent des artistes originaires de la Belgique toute entière. Cependant, des initiatives similaires ont lieu en Flandre, parmi lesquelles le cercle gantois Plus, fondé en 1966 par Yves De Smet et qui compte Amédée Cortier (fig.21), Willy Plompen et Jan Van den Abbeel. Si le groupe se conçoit comme une fédération constructiviste, sa principale raison d’être est le plaidoyer qu’il constitue en faveur des relations entre art et environnement et du dépassement de la peinture de chevalet21. Il s’essouffle en 1968 mais est succédé en 1969 par Plus-Kern – Centrum voor Konstruktieve Vormgeving, également animé par De Smet et son épouse Jenny Van Driessche. En tant que lieu d’exposition, Plus-Kern devient une importante plate-forme pour l’abstraction géométrique en Flandre, poursuivant les objectifs de diffusion d’un art pluridisciplinaire et social défendu initialement par Plus. En Wallonie également, le cercle Art concret en Hainaut est constitué en 1973 par Jean Dubois (fig.22) et Francis Dusépulchre (fig.23), réunissant en outre André Goffin, Victor Noël, Marcel-Henri Verdren, Jacques Guilmot (fig. 24) et Michel Renard, rejoints par René Huin en 1975. L’intention est de « mettre en valeur l’une des directions de l’art contemporain qui, en Hainaut, n’a jamais occupé la place qu’elle mérite »22. Sous la bannière d’un terme défini comme un art délesté du réel, ils exposent jusqu’en 1979, à commencer par l’exposition

19 Notons que c’est à Delahaut que l’on doit la reconnaissance tardive des premiers abstraits belges – Victor Servranckx, Marcel-Louis Baugniet, Pierre-Louis Flouquet, Karel Maes, Josef Peeters, etc. –, qui leur consacre deux expositions, en 1954 à la galerie Saint-Laurent à Bruxelles et en 1959 au Hessenhuis d’Anvers. 20 M. Bilcke et R. Rousseau, Geoform. Hommage à Vantongerloo, s.l.,1967, n.p. 21 Pour quelques informations supplémentaires, lire L. Pil, « Le groupe Plus », in E. Pil (dir.), Amédée Cortier. Le cœur de la couleur. L’œuvre abstrait 1961-1975, Gand, Ludion, 2007, p.62-64. 22 Les membres sont cités dans « Un groupe est né “Art concret en Hainaut”», in Le Journal de Charleroi et Indépendance, 26 mai 1973, n.p.

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d’inauguration en 1973 au Palais des Beaux-Arts de Charleroi, suivi de deux expositions en 1974, l’une au Musée des Beaux-Arts de Mons (le BAM) - Delahaut est alors l’invité d’honneur - et la suivante à la Maison de la Culture Les Chiroux à Liège. L’exposition de 1976 se déroule au Cercle artistique de Tournai, tandis que la dernière et ultime manifestation a lieu à la Maison de la Culture de Namur, en 1979. Robert Rousseau, qui rédige le pamphlet du catalogue du Musée des Beaux-Arts de Mons, félicite les artistes du groupe d’avoir choisi cette voie difficile, avec laquelle « […] on n[e] triche pas. Point de passages vaporeux, de "sfumati" roublards, d’effets de matière enjôleurs. Aucun "sujet" susceptible de détourner l’attention par une référence culturelle, littéraire ou politique […] »23.

Jusqu’à la fin des années 1980, des initiatives militantes en faveur de l’abstraction géométrique existent puisqu’en 1988 la revue MESURES art international24 est étrennée par Delahaut (fig.25), Marcel-Louis Baugniet (fig.26), Jean-Jacques Bauweraerts (fig.27), Jean-Pierre Husquinet (fig.28), Jean-Pierre Maury (fig.29), Victor Noël et Léon Wuidar (fig.30). Le collectif rassemble des artistes de trois générations différentes, la première étant représentée par Baugniet, la seconde par Delahaut et Noël et la dernière, encore en plein développement, par les quatre autres. La revue, qui donne naissance, de 1988 à 1994, à six numéros, est entièrement dédiée à la « mouvance construite », terme élu par Maury pour désigner toutes les formes d’abstraction géométrique et ses dérivés, que les artistes-membres clament toujours en devenir à travers le monde25. Comme son titre l’indique, la revue aspire à un rayonnement international. Les artistes participants entendent prendre la plume pour défendre leur mouvement sans attendre que les critiques d’art s’y attèlent. Ils ouvrent leurs pages à ceux qui en art se rallient à la cause de la raison, quel que soit leur titre ou leur nationalité. De nombreuses personnalités mettent ainsi leur savoir au service de cette entreprise. Concrètement, Maury est responsable de la coordination générale, Wuidar se charge du graphisme et Husquinet de l’édition de la revue et de l’impression des sérigraphies dont est doté chacun des numéros. Ils apportent ainsi, tous à leur manière, une contribution à cette revue autofinancée dont l’orientation est discutée lors de réunions chez Delahaut. La publication est présentée à l’occasion d’expositions particulières des membres ou d’évènements consacrés à plusieurs revues d’esprit construit, tels que l’hollandaise PRO et la britannique Constructivist Forum26. Relevons par exemple les quatre éditions de Carte blanche à Mesures en 1990 à la galerie Cogeime à Bruxelles et Aspects actuels de la Mouvance construite internationale en 1993 et 199427, qui regroupe plus de septante artistes, issus de quatorze pays différents, œuvrant en faveur de l’abstraction géométrique. Nous l’aurons compris, rien qu’à l’échelle de la Belgique, ils sont très nombreux à se consacrer à cette tendance depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les diverses coalitions intergénérationnelles de plasticiens et d’hommes de lettres se

23 R. Rousseau, Art concret en Hainaut, Mons, Musée des Beaux-Arts, 9 février – 3 mars 1974, n.p. 24 À ce propos, voir M. Massart, L’art abstrait contemporain en Belgique à travers la revue MESURES art international (1988-1994), Mémoire de fin d’études présenté sous la direction du Prof. Denis Laoureux, Université libre de Bruxelles, 2012. 25 Le premier numéro de MESURES art international présente la revue comme une publication « […] vouée à rendre compte de la vivacité et de la verdeur de l’art d’esprit construit, seule mouvance artistique résolument nouvelle qui, née à l’aube du siècle, en aura traversé la quasi totalité, devenant indiscutablement historique et demeurant indéniablement actuelle – toujours patiemment développée et toujours en évolution ». X., MESURES art international, n°1, juin 1988, p.1. 26 Notons que MESURE art internationale est la seule revue francophone qui défend l’art construit à la fin des années 1980. 27 L’exposition a lieu au Musée des Beaux-Arts de Verviers, au Centre de la Gravure et de l’image imprimée de La Louvière, au Centre Culturel Jacques Franck à Bruxelles et à l’Internationaal Cultureel Centrum d’Anvers.

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découvrant des affinités de pensée, de part et d’autre du pays, témoignent tout au moins du dynamisme et de la vitalité du mouvement abstrait géométrique. Si l’existence des groupes est un témoignage historique éminent, l’activité du courant ne s’y limite pas. Bon nombre d’artistes plus solitaires, mais pas moins influents, sont à considérer, dont nous découvrirons le travail au cours du développement de ces pages. II. VERS LE MINIMALISME Au cours des premières années d’activité de l’abstraction géométrique, la toile est un lieu d’exploration des multiples possibilités d’agencements formels, où se réalisent d’infinies combinaisons chromatiques. Malgré le riche potentiel de renouvellement que représente cette abstraction, nombreux sont ceux qui, au sortir des années 1950, évoluent vers plus de simplicité et de dépouillement. Ils éliminent le superflu pour parvenir à l’essentiel, qu’ils estiment plus percutant. L’enjeu est également d’agrandir le format afin d’occuper plus ambitieusement l’espace par le prisme de la couleur, avec l’espoir d’éveiller davantage les sens du spectateur. Dès les années 1960, l’abstraction géométrique flirte ainsi avec le Minimal Art, qui occupe le devant de la scène artistique américaine. L’exemple de Delahaut est en ce sens révélateur ; en 1960, l’artiste renonce à ses compositions sérielles surchargées au profit de formes uniques appelées « signes » ou de deux ou trois plages de couleurs à l’état pur, dont les limites ne sont pas posées. Les toiles intitulées Hors Limite, Immense incertain ou Étendue confirment cette aspiration à élargir le champ matériel de la toile. Au fil de sa carrière, Delahaut épure sa grammaire visuelle, atteignant dans les années 1980 un point de non retour où la toile est réduite à une forme colorée ou à un trait de pastel sur fond blanc, tels que dans Poster blue (fig.31) ou Ouvert (fig.32). « La simplicité des moyens exclut les équivoques. Plus les moyens sont simples, plus le langage est clair, plus la chose exprimée prend force et relief. La complication engendre brouillard et confusion »28 déclare l’artiste sans ambages. Le dépouillement dont il fait preuve va de pair avec la fonction méditative qu’il attribue à son travail, par l’intermédiaire duquel il espère permettre au spectateur d’accéder à l’apaisement psychique. Cet attachement à l’aspect méditatif de l’art est caractéristique des œuvres abstraites géométriques qui se situent à l’orée du minimalisme. Parmi elles, celle de Victor Noël, qui emprunte une voie similaire à celle de Delahaut. Plutôt que de se proliférer, dès 1960, la forme s’étend ; la couleur s’intensifie. Yin Yang (fig.33) révèle ce parti pris à son paroxysme, son titre renvoyant par ailleurs à l’intérêt de Noël pour la philosophie chinoise et les principes d’équilibre et d’harmonie. À partir de 1975 plus que jamais, ses œuvres, reliefs pour la plupart, s’expriment avec une très grande économie de moyens, fondées sur l’imbrication de deux formes identiques de couleurs pures.

Avec dix ans de décalage, l’œuvre d’Amédée Cortier suit le même processus d’épuration, et tend également, selon l’aveu de l’artiste, à « […] susciter chez les hommes un sentiment de bien-être »29. Une quiétude métaphysique qu’inspire le caractère élémentaire et fondamental des éléments picturaux choisis par l’artiste. La simplification de son langage, qu’il base, par souci d’objectivité, sur le nombre d’or, le mène à explorer, dès 1970, les possibilités du monochrome : un pas que beaucoup d’artistes n’entendent pas franchir. Dans ses polyptyques où, comme chez Barnett Newman, des bandes noires délimitent et intensifient les zones colorées (fig.34), Cortier

28 J. Delahaut, EF, Bruxelles, Chez l’auteur, 1985, cité d’après J. Delahaut, Écrits, op.cit., p.36. 29 A. Cortier, cité dans E. Pil (dir.), op.cit., p.20.

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porte la couleur à son intensité maximale, à laquelle il confère « une existence propre »30, une autonomie d’action. Le peintre s’efforce d’unifier forme et couleur, de destituer la première de sa fonction privilégiée pour la rendre tributaire de la seconde. Ce que ses propos corroborent : « Je veux rendre la couleur si pure et si intense que le spectateur puisse en quelque sorte se satisfaire de la seule couleur »31. L’intensité des plans colorés, quoique conservés à l’échelle humaine, rapproche l’art de Cortier du Hard Edge et du Colourfield Painting et d’artistes tels que Ellsworth Kelly ou Mark Rothko, qu’il ne découvre néanmoins qu’au début des années 1970, lorsque sa voie est tracée. Cortier entend s’exprimer au-delà du cadre confiné de la peinture, espérant conquérir l’espace à l’aide de la couleur et autoriser ses tableaux à faire corps avec la paroi et son environnement. Une sensibilité à l’architecture et à l’œuvre totale qui lui est peut-être apprise de son activité parallèle de peintre en bâtiment.

La relation de l’art à l’espace concerne considérablement les artistes minimaux. L’exemple de Marthe Wéry est symptomatique. Si l’artiste débute par une période géométrique qui subit l’influence de Mondrian (fig.35), elle acquiert rapidement un style pictural personnel, dans le registre du monochrome sériel (fig.36). Sa rencontre avec le Minimal Art en 1972 (Newman, Kelly, Noland) l’incite à déconstruire la forme qui s’assimile peu à peu au fond, à se débarrasser de l’approche traditionnelle pour entamer un dialogue avec le lieu d’exposition. « La peinture américaine m’a confrontée à des notions fondamentales différentes, des notions d’échelle, d’étalement »32, précise-t-elle. Dans l’œuvre de Wéry, la hiérarchie relative à la composition, propre à la tradition picturale européenne, s’est évaporée : le principe du all-over américain a séduit l’artiste. Wéry conserve un attachement au geste et à la performance du processus de création, même si sa trace n’est pas perceptible. Au fil du temps, la couleur gagne en importance, ceci conduisant à une annihilation de la forme. Comme chez Cortier, elle s’estompe pour ne faire qu’un avec la surface colorée. La peinture repose dès lors sur ses qualités intrinsèques : la planéité de la surface et la couleur. L’œuvre de Wéry prétend à une tension picturale sans borne, d’autant plus forte qu’elle est obtenue avec des moyens rudimentaires.

Cet objectif correspond précisément à celui poursuivi par les artistes associés au minimalisme, qu’ils soient les précurseurs ou leurs héritiers. C’est le cas de Jean-Jacques Bauweraerts par exemple, qui s’exprime avec des reliefs extrêmement minimaux, souvent monochromes, avec une nette préférence pour la couleur rouge (fig.37). Le lien qui unit les membres de MESURES art international au Minimal Art se doit d’être souligné. En effet, ils sont nombreux à se découvrir des convergences de pensée avec des artistes tel que Sol LeWitt, qui collabore d’ailleurs à la revue et pour qui Bauweraerts remplit le rôle d’assistant à l’occasion de son exposition Wall Drawings au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris en 1987. Chez Bauweraerts, Mark Verstockt (fig.38) ou Félix Hannaert (fig.39), la forme n’a pas été soumise, comme chez Delahaut, Noël ou Cortier, à un principe de simplification progressive. Issus d’une génération distincte, ils embrassent, eux, d’emblée une carrière qui oscille entre abstraction géométrique et art minimal. Ce dont ne se cache pas Hannaert : « Très rapidement s’imposa à moi la nécessité de n’utiliser dans ma création qu’un minimum de moyens, un matériau et des formes d’expression simples, presque rudimentaires, avec la conviction que cela

30 Ibid., p.8. 31 ID., cité dans W. Derave, « Amédée Cortier: “De muren moeten schilderijen worden”», in De Standaard, 21 décembre 1967, cité d’après E. Pil (dir.), op.cit., p.10. 32 M. Wéry, cité dans Marthe Wéry, La Haye, Haags Gemeentemuseum, 16 novembre 1986 – 15 janvier 1987 ; Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, 13 février – 29 mars 1987, p.82.

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correspondait à ma nature »33. L’artiste conçoit son travail comme un outil pour atteindre la sérénité, à l’encontre du fatras qui caractérise le monde actuel. C’était déjà ce à quoi aspirait Delahaut, soucieux d’apporter à l’être humain un temps d’arrêt dans sa course journalière propice à la réflexion poétique. En revanche, bien que l’œuvre du peintre invite à la méditation et se propose de contribuer à l’élévation de l’esprit, ses formes ne sont pas associées à un contenu symbolique. De même, si l’œuvre de Cortier tend vers l’immatériel de par le sentiment de profondeur que sa couleur procure, celle-ci ne revêt aucun caractère sacré. Trop attachée à la matière, l’œuvre de Wéry n’a pas plus d’ambition mystique. La démarche de Noël est néanmoins plus ambiguë. Son œuvre renie à priori l’allégorique, mais les mots inscrits par l’artiste en 1996 sur l’un de ses projets consacrés au motif cruciforme interpellent : « Symbolisme de la croix : la verticale, homme debout ; l’horizontale, l’homme couché, la mort ou l’être en germe, la matière »34. Le symbolisme formel est cependant une composante assumée de la peinture de Dan Van Severen (fig.40 et fig.41), qui s’exprime par des formes archétypales faisant figure de leitmotivs − à savoir la croix, le losange, le carré, le cercle et l’ovale −, auxquelles l’artiste octroie une valeur iconique. Au gré du temps, l’œuvre de Van Severen s’affirme dans la plus extrême sobriété. L’artiste récuse l’autonomie de la peinture et compte bien doter ses formes d’un contenu spirituel destiné à permettre au spectateur une expérience mystique qui inspire l’ascèse. Ce retour aux sources est une clé d’accès à la transcendance, affranchie de l’agitation et des préoccupations du monde moderne. Gilbert Decock élabore lui aussi, au travers d’un dialogue entre le cercle et le carré, une symbolique de la forme, révélatrice du lien métaphysique qui relie l’homme à l’univers (fig.42 et fig.43). Il s’y applique par le biais d’un vocabulaire élémentaire, n’ayant eu de cesse de le simplifier entre le début des années 1960 − moment auquel il adopte une abstraction géométrique pure − et la fin des années 1980, caractérisées par une peinture de type fondamental. Et de déclarer : « Je considère cette tendance à la sobriété comme un progrès […] »35. Quoique moins présente, cette dimension immatérielle a également été relevée dans l’œuvre de Gilbert Swimberghe. Admirateur de la capacité d’Ad Reinhardt et de Sol LeWitt à révéler la pureté de la forme, il s’engage, dès 1969, dans la voie du minimalisme monumental. À l’instar de Decock qui limite sa palette aux variations de gris, noirs et beiges, Swimberghe privilégie une gamme de couleur de plus en plus réduite, qui tend vers la monochromie. Après une période rose suivie d’une période jaune, Swimberghe trouve refuge dans les nuances qui séparent le jaune du vert, ce dont témoigne Évolution 5 (fig.44). Ses formes tétragonales suggèrent un sentiment de spatialité, que Swimberghe explore plus explicitement avec ses reliefs achromes. Il renonce, en 1984, à procurer cette illusion de tridimentionalité ainsi qu’aux formats imposants, au profit d’une œuvre destinée à susciter un état contemplatif et d’accalmie intérieure.

La quête d’une expression méditative et spirituelle éloigne notamment les Belges du Minimal Art, qui prône une consécration totale de l’autonomie de l’objet. S’ils partagent avec celui-ci le recours aux formes élémentaires et la tendance à la

33 F. Hannaert en conversation avec S. Meurant, dans Félix Hannaert. Dessins & peintures, Bruxelles, Hannaert Félix Éditeur, 2011, p.20. 34 ID., cité dans V. Formery, Hommage à Victor Noël 1916-2006, Tournai, Éditions Culture Tournai, 2006, p.21. 35 « Gilbert Decock. Een gesprek met Jaak Fontier », in De Periscoop, 2e année, n°5, mars 1977, p.1 et 9, cité d’après J. Fontier, Gilbert Decock : Catalogue raisonné des sculptures, reliefs, intégrations spatiales et joaillerie, Bruges, J.P. De Paepe Éditions, 2003, p.27.

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monumentalité, les européens restent attachés à la singularité et au savoir-faire artisanal. Certes, d’aucuns revendiquent, dans le sillage d’Herbin, une neutralité artistique, une objectivité du langage et un effacement de la personnalité du peintre. Mais à cela ils opposent un processus de création et des matériaux artisanaux et uniques, à l’inverse de Donald Judd ou de Carl André qui optent pour une dépersonnalisation technique absolue où l’individualité disparaît dans le mode d’exécution industriel. Wéry fera subir une impersonnalisation à son œuvre à partir de 1994, utilisant volontiers des planches de bois industrielles qu’elle associe à des toiles peintes. Toutefois, nonobstant une tendance au sérialisme et au principe de répétition, la fabrication n’est pas industrielle mais bien manuelle, jusqu’à l’exécution de ses couleurs, qu’elle applique en couches successives, ce qui procure à ses toiles une subtilité toute personnelle, qui témoigne de sa jouissance de la matière. Ainsi, dès l’aube des années 1960, bien que les formes géométriques, auxquelles certains concèdent une valeur métaphorique, demeurent primordiales, une importance de plus en plus grande est accordée à la couleur. Elle s’épanouit dans sa nouvelle fonction, non plus représentative mais émotionnelle. La trace du geste est oblitérée mais une sensualité persiste incontestablement, de même qu’un frémissement de la couche picturale. Les œuvres s’adressent tout autant à l’œil qu’à l’intellect, et ne demandent aucunes connaissances préalables pour être appréciées ; à chacun d’entendre son propre discours. III. LE RÉEL EN SOUVENIR À l’inverse de l’envolée lyrique, la forme pure se conçoit comme une expression totalement émancipée d’un quelconque rapport au réel ; elle prend appui sur les seuls éléments picturaux. La voie du minimalisme ne fait que consolider cette propension. Delahaut est catégorique : « Si la peinture veut conserver ses caractères intrinsèques, il est indispensable qu’elle rompe fermement avec toute dictature de la réalité. Je crois que la peinture, par elle-même, sans référence avec quoi que ce soit, ne s’appuyant que sur les vertus de ses composantes, possède assez de ressources et de puissance, pour ne pas devoir chercher ailleurs ses moyens d’expression et ses sources d’inspiration »36. Le critique d’art Léon Degand étend pour sa part cette définition à toutes les formes d’abstraction : « La peinture abstraite est celle qui ne représente pas les apparences visibles du monde extérieur, et qui n’est déterminée, ni dans ses fins, ni dans ses moyens, ni dans son esprit, par cette représentation. Ce qui caractérise donc, au départ, la peinture abstraite, c’est […] l’absence du rapport de transposition, à un degré quelconque, entre les apparences visibles du monde extérieur et l’expression picturale »37. Cela étant, le réel préside bel et bien à la réalisation de certaines œuvres abstraites, et géométriques de surcroît. C’est sur cette caractéristique que repose la réputation d’un Gaston Bertrand. Ceci lui vaudra les reproches de ses pairs plus radicaux, comme en témoigne la suivante déclaration de Guy Vandenbranden, qui se remémore ses erreurs de jeunesse, quand il peignait « [d]ans le style de Bertrand, c[‘est]-à-d[ire] une abstraction partant d’un motif figuratif. Je sais maintenant que ce n’est pas de

36 J. Delahaut, Définitions d’une peinture, Louvain-la-Neuve, Musée 2, Institut Supérieur d’Archéologie et d’Histoire de l’Art, 1979, p.50. 37 L. Degand, Langage et signification de la peinture en figuration et en abstraction, Paris, Éditions de l’architecture d’aujourd’hui, 1956, p.95.

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l’abstraction véritable, mais rien qu’une réduction de lignes »38. Au cours de sa carrière, Bertrand virevolte entre l’abstraction, qu’il pratique dès 1948, et la figuration qu’il ne délaisse jamais totalement. Et mis à part de 1949 à 1953 où il s’essaye à un style géométrique pur, l’artiste maintient toujours, dans ses abstractions géométriques, un lien avec le monde visible. Malgré son goût pour le paysage, c’est avant tout

l’architecture − essentiellement publique − qui inspire Bertrand, dont il schématise et

réinterprète les formes au gré de sa propre sensibilité. Une décantation progressive du réel que l’artiste qualifie de « géométrisation du figurable »39. Certaines œuvres se placent clairement comme une charnière entre abstraction et figuration (fig.45), tandis que d’autres, comme Plaza Prado (fig.46) ou Florence géométrique (fig.47), ne laissent plus que deviner le lien ténu qui les relie à la réalité tangible, le titre étant à cet égard bien souvent l’élément le plus dénonciateur40. Ceux-ci témoignent des lieux où l’artiste puise son inspiration, lors de ses voyages en Italie, en Espagne ou en France. L’Italie et Florence occupent un statut particulier dans l’imaginaire de Bertrand, la chapelle funéraire des Médicis, qu’il découvre en 1953, ayant constitué une véritable révélation esthétique, qui donnera naissance à une longue série d’œuvres déclinant ce thème. Bertrand intériorise ces lieux pour en livrer une image très personnelle, cherchant « par un mensonge [à] exprimer la vérité, par la transformation sensible du réel, [à] atteindre l’irréel ou la vraie vérité »41.

Le voyage est également une source d’inspiration inépuisable pour Marc Mendelson. La Catalogne est à l’origine d’un choc visuel en 1953, qui conditionnera le reste de sa production. Elle devient non seulement son lieu de villégiature privilégié, mais surtout l’une de ses sources d’inspiration majeures. Les ciels et les mers de ces paysages ensoleillés suscitent l’émotion de l’artiste, une nature qu’il fragmente et géométrise jusqu’en 1956, pour ensuite se mouvoir dans les confins du matiérisme. Solstice d’été (fig.48) évoque l’étendue des paysages maritimes espagnols aux couleurs flamboyantes, qui ne sont pas sans rappeler les joyeuses abstractions de Juan Miró. Louis Van Lint s’inscrit dans une démarche analogue à celle de Bertrand et de Mendelson lorsqu’il pratique une abstraction géométrique de 1953 à 1956 (fig.49), nourrie par les impressions que lui laissent le paysage naturel. Pendant ces trois années, l’artiste s’éloigne momentanément du style lyrique et gestuel auquel il est attaché. Contrairement à d’autres pour lesquels le passage à l’abstraction se fait sans détour, Van Lint, comme Bertrand et Mendelson, l’atteint par un lent processus de

schématisation des éléments du réel − ce que Léon Degand surnomme le « passage de la

ligne » −, qu’il apprend notamment de Brusselmans et de la Jeune Peinture française. La

peinture devient dès lors un espace de liberté où l’artiste traduit sa vision de la nature en un jeu plastique à la subjectivité totalement assumée. Qu’elle soit lyrique ou géométrique, l’approche de Van Lint ne constitue pas une rupture avec le monde extérieur. Ce qui suit peut être perçu comme une profession de foi : « Extraire de la nature, et de chaque chose l’élément décoratif, et le traduire en langage poétique »42. Tanks à Pernis (fig.50) est un exemple substantiel, réalisé dans le cadre d’une commande

38 G. Vandenbranden en conversations avec P. Mertens et M. Van Jole, dans M. Van Jole, E. Van Bruynder, Guy Vandenbranden : Un demi-siècle de constructivisme, Snoeck, 2006, p.43. 39 G. Bertrand, cité dans S. Goyens de Heusch, Gaston Bertrand, Anvers, Fonds Mercator, 1997, p.224. 40 Notons que l’usage des titres est assez révélateur du degré de radicalité des artistes à l’égard de la non-figuration. Les titres à connotation figurative sont proscris des abstraits géométriques purs et durs. 41 G. Bertrand, cité dans R.-L. Delevoy, La Jeune Peinture belge, Paris ; Bruxelles, Éditions Formes, 1946, p.9. 42 L. Van Lint, cité dans R.-L. Delevoy, op.cit., p.9.

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reçue par la filiale belge de Shell, qui invite sept artistes belges à visiter les centrales pétrolières de Pernis (Hollande), de Wandre (région liégeoise) et de Gand, afin qu’ils en fassent le sujet de leurs toiles. Bertrand, Mendelson et Roger Dudant figurent parmi les artistes sélectionnés pour ce travail, rendu public en juin 1955 au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles à l’occasion de l’exposition L’Industrie du Pétrole vue par des artistes 43.

Dudant, cadet du trio issu de la Jeune Peinture belge a, quant à lui, fait du paysage industriel son motif de prédilection. Il s’éloigne ainsi de la figuration en géométrisant avec une audace croissante les vues ferroviaires et industrielles du Hainaut. Au cours des années 1960, avec des œuvres comme le Port (fig.51), la référence visuelle est encore perceptible, mais cette dernière se dissous pour ne plus se dévoiler dans les toiles des années 1980 (fig.52), qui illustrent avec acuité cette intériorisation du paysage que la brume a envahi afin de ne laisser place qu’au mystère et au silence du lieu. Cependant, comme le constate Léon-Louis Sosset, « si émancipée soit-elle du registre descriptif, de ses détails anecdotiques et de ses contingences pittoresques, jamais la peinture [de Dudant] ne reste à l’écart des structures et des dispositions du réel. C’est le paysage qui en constitue la référence inspiratrice et le support fondamental – un paysage sereinement décanté dans les transmutations de la sensibilité et de l’esprit […] »44, dont l’artiste offre une vision résolument singulière. Pour la réalisation de ses Structures imaginaires (fig.53), série qu’il entame au début des années 1980, Émile Lanc s’imprègne également de l’architecture industrielle. Elles évoquent les poutrelles métalliques des ponts, grues et usines désaffectées qui l’accompagnent sous forme de photographies dans son atelier. Si l’on en croit Madeleine Vandenhove, « […] il n’y a aucune tentative de figuration mais utilisation d’un réel comme vocabulaire pour l’abstraction »45. Le jeu de droites qui en résulte tire sa force de l’esthétique brute qui est celle de l’architecture fonctionnelle. Plus contemporaine, l’abstraction géométrique de Félix Hannaert découle également d’un intérêt pour l’architecture, celui-ci étant particulièrement sensible aux constructions de verre, serres ou verrières d’usines. S’il traduit d’abord son attachement par le biais de la figuration, Hannaert ne retient in fine que l’armature de ces lieux, qu’il transpose en un jeu de verticales et d’horizontales entrecroisées (fig.54). L’artiste a délaissé la profondeur, à laquelle il préfère une vue frontale qui prend l’allure d’un quadrillage. Comme il le fait lui-même remarquer, « le sujet, finalement, s’est totalement évaporé pour aboutir à une abstraction, différente cependant de l’abstraction pure des années 20 avec le "Purisme" et "De Stijl"» 46. Hannaert dépouille le sujet, dont il ne conserve que la charge poétique, révélant sa propre perception du monde. Il est indéniable que l’architecture appelle bon nombre d’artistes abstraits géométriques à la création. Luc Peire constitue un contre exemple, davantage ému par l’être humain, qu’il se plait à schématiser de 1953 à 1957. Cette décantation progressive, qui se cristallise depuis l’expressionnisme jusqu’à la géométrie, trouve son origine dans le voyage que le peintre effectue au Congo en 1952-1953, où il se prend d’affection pour les courbes des femmes watutsi du Katanga. Les silhouettes se métamorphosent peu à peu en lignes verticales, dont Peire fera son motif unique et original. En 1956, dans

43 L’exposition rassemble soixante et un peintres, originaires de six pays différents. Il est intéressant de noter que cette exposition sera contestée par une série d’artistes, qui publient un tract en 1956 dénonçant la collaboration de leurs confrères à l’industrie capitaliste du pétrole : Toutes ces dames au salon, juillet 1956, Collection privée. 44 L.-L. Sosset, Roger Dudant, Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, 3 - 14 novembre 1962, n.p. 45 M. Vandenhove, « Les dessins d’Émile Lanc », in Structures imaginaires : Dessins et tapisseries d’Émile Lanc, Bruxelles, Galerie La Main, 25 mars – 30 avril 1981, n.p. 46 F. Hannaert en conversation avec S. Meurant, dans Félix Hannaert, op.cit., p.42-43.

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Voorjaarslicht (fig.55), ne subsiste de la représentation humaine que le cercle de la tête, le corps étant déjà réduit à une verticale. Angola (fig.56), dont le titre rappelle son voyage africain, n’incarne plus que la quintessence de l’être, entouré d’un bleu profond, évocateur du déploiement d’un espace infini. L’artiste renonce au réalisme pour ne révéler que l’état métaphysique de l’être, amorçant dès lors une réflexion sur le devenir de l’homme : « Je dirai que j’ai débuté en m’appuyant sur un contenu anecdotique, puis j’ai évolué vers une recherche plastique qui m’a conduit vers un contenu spirituel »47 ; « La verticale me suffit. Elle rejoint ma conception de la vie. Elle est pour moi aussi une élévation de l’esprit, une élévation et une libération »48 confie l’artiste, contrairement à l’horizontale, qui renvoie selon lui à l’état passif et mortuaire. (fig.57)

À l’encontre du radicalisme que l’on octroie généralement à Amédée Cortier, ce dernier sera également conduit à l’abstraction par le biais d’une décantation grandissante du visible. Dès les années 1970, son œuvre est émancipée de cette réalité à laquelle il s’efforce de tourner le dos, mais Cortier n’est pas arrivé à ce résultat séance tenante. Il n’a pas, comme Delahaut, fait table rase du passé en brûlant ses toiles figuratives dans l’intention de repartir sur des bases intactes. Ainsi, Cortier fait son entrée sur la scène artistique dans les années 1940 avec des paysages expressionnistes. En 1950 et 1951, il adopte l’abstraction mais la fuit promptement, se consacrant, au cours des années 1950, essentiellement à des portraits et des natures mortes de type cubiste, au sein desquelles il remplace peu à peu les objets par des formes géométriques. Il adhère ensuite une nouvelle fois à l’abstraction à l’aube des années 1960. « Les objets sont rigoureusement épurés jusqu’à devenir ce que Cortier appelle des "faits picturaux"»49 précise Lut Pil. Bien que les formes ne s’appuient bientôt plus que sur leurs qualités intrinsèques (fig.58), elles conservent jusqu’à un certain point le souvenir de cette réalité qui fut « abstraite ». Au fil du temps, la couleur gagne en importance, au détriment de la forme, ce qui le mènera, nous l’avons vu, au monochrome. Enfin, même chez ceux qui prétendent ne plus rien devoir à la réalité quotidienne, tel que Delahaut, le lien au réel n’est pas nul. En premier lieu parce que l’œil aura tendance à voir des formes reconnaissables là où l’artiste n’a pas voulu en mettre, ce que Sosset estime jadis regrettable : « Ce qui déroute le profane, n’est-ce pas d’abord cette physionomie insolite, sinon absurde que l’œuvre revêt lorsqu’il s’obstine à la déchiffrer, à l’analyser, à l’expliquer selon les anciennes normes de la figuration ? Cette constatation est si vraie que, chaque fois qu’il prend la peine d’examiner un tableau contemporain − si accompli soit-il dans sa conception et dans sa technique − le spectateur s’attache comme à un hâvre [sic] de grâce à la moindre allusion représentative, à la moindre réminiscence d’objet qu’il discerne »50. S’il ne s’agit plus aujourd’hui de légitimer l’existence de l’abstraction comme Sosset s’y consacre en 1956, ce phénomène n’est pas totalement obsolète. Ensuite, à certaines occasions, on ne pourra nier le degré de mimétisme qui persiste, notamment dans la silhouette humaine (fig.59) et la cible (fig.60) que signe successivement Delahaut. Il est vrai que ce genre de réalisations fait figure d’exception dans la production de l’artiste. Elle dénonce néanmoins la mince frontière qu’il existe entre les formes géométriques picturales et celles du monde réel. Si elles sont familières, c’est qu’elles sont omniprésentes, tant dans la société faite de droites et de volumes que

47 L. Peire, cité dans G. Xuriguera, Luc Peire, Paris, O.G.C. Michele Broutta, 1984, p.24. 48 ID., texte (Paris, 14 décembre 1982) composé de fragments du texte de la conférence Luc Peire : Forme-Espace-Intégration, Université de Valence, 15 février 1980, cité d’après J. Peire-Verbruggen, Les Ateliers de Luc Peire, Gand ; Amsterdam, Ludion, 2001, n.p. 49 E. Pil (dir.), op.cit., p.44. 50 L.-L. Sosset, « De l’art abstrait », op.cit., n.p.

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dans la nature et le cosmos. Ce n’est pas insignifiant si l’abstraction géométrique est influencée par l’architecture, cela souligne au contraire la parenté visuelle qui les unit. Malgré ses déclarations irrévocables, c’est justement parce que la géométrie fait référence au monde moderne et qu’elle est intuitivement reconnaissable par tous que Delahaut en fait son mode d’expression. Et d’étayer : « Tout est bâti selon les normes géométriques, une abstraction constante dont l’esprit ne peut se passer »51. L’œuvre de Delahaut n’est donc pas plus coupée du monde que celle de Bertrand, Van Lint ou Peire, le lien qui l’y rattache étant simplement exprimé par une voie plus indirecte. IV. EN MARGE DE LA TOILE À peine quelques années après le renouveau de l’abstraction, les artistes se voient tentés d’échapper au cadre traditionnel de la peinture ; attirés par la dimension spatiale, ce phénomène conduira à l’apparition de nouveaux médiums. Les premiers signes de mutation apparaissent au début des années 1950, moment où Delahaut et Bury s’exercent au relief et publient, avec les critiques Jean Séaux et Karel N. Elno, le manifeste du Spatialisme (1954)52. Ce dernier prêche « une nouvelle expression plastique qui dépasse les notions de surface et d’espace telles qu’on a pu en faire jusqu’ici l’expérience »53. Il est aussi question d’envisager le temps et le mouvement comme des composantes de l’œuvre. Appliquant ce précepte, Delahaut réalise, dès 1950, des reliefs achromes (fig.61). Le défi est relevé : au gré du déplacement du visiteur, l’œuvre se métamorphose. Les ombres des formes en relief prolifèrent tant au sein de l’œuvre que sur les cimaises, ce qui engendre inexorablement un questionnement sur la relation de l’œuvre à son espace de présentation : celle-ci n’est plus un objet solitaire mais s’intègre à un ensemble spatial. Au cours des années 1950 et 1960, le relief − et particulièrement blanc sur blanc − est très prisé des artistes géométriques, séduits par les variations d’ombre et de lumière qu’il suscite. En 1963, l’exposition Forum 63 à l’Abbaye St Pierre de Gand se propose de mettre cette réalité en lumière. À titre d’exemple, Jean Rets signe un certain nombre de reliefs blancs dotés de petites touches de couleurs (fig.62). En 1955, l’artiste s’interroge déjà : « […] la peinture de chevalet est-elle vraiment compatible avec l’abstraction ? »54. Le format discret du relief ne satisfait pas amplement ses ambitions : Rets vise son intégration à la surface murale. Guy Vandenbranden est également l’auteur d’une série de reliefs achromes en 1963, réalisant par ailleurs des reliefs colorés dans un esprit similaire (fig.63), qui apparaissent comme des toiles dont on aurait simplement sailli les formes. Le nom de Gilbert Swimberghe est encore davantage associé aux reliefs achromes (fig.64 et fig.65), dont il fait sa spécialité entre 1962 et 1983, des œuvres par l’intermédiaire desquelles il expérimente les vibrations de la lumière sur la couleur blanche. Dans sa peinture bidimensionnelle, ce dernier suggère la troisième dimension par le truchement de l’illusionnisme. Ainsi, le relief est pour l’artiste un moyen de pousser ses préoccupations spatiales plus loin. Paul Van Hoeydonck s’y emploie également, adoptant dès 1959 le plexiglas au détriment de la surface plane (fig.66). Ce matériau novateur est apprécié pour ses qualités de conducteur de lumière, permettant une multitude d’ombres portées et d’effets lumineux. Plus occasionnellement, l’artiste se consacre aux collages en trois

51 J. Delahaut, Miettes d’écritures, Bruxelles, La Pierre d’Alun, 1987, cité d’après J. Delahaut, Écrits, op.cit., p.61. 52 P. Bury, J. Delahaut, K.-N. Elno, J. Séaux, « Le Spatialisme », Bruxelles, 1954, cité d’après J. Delahaut., Écrits, op.cit., p.149-151. 53 Ibid., p.150. 54 J. Rets, cité dans Les Beaux-Arts, Bruxelles, décembre 1955, cité d’après Autour du groupe Art abstrait (1952-1956)., op.cit., p.22.

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dimensions (fig.67), riches en nuances d’ombre et de lumière. Van Hoeydonck s’explique dans le Dimanche Presse à l’occasion de son exposition intitulée Œuvres lumière au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles en 1961 : « Oui, je sais que sous certains angles mes tableaux ne sont pas perceptibles. C’est exactement l’effet recherché […] »55. L’artiste s’en remet donc au spectateur, à qui il revient de trouver l’angle de vue le plus adéquat. Les reliefs de Van Hoeydonck sont également présentés en 1960 à l’exposition Monochrome Malerei à Leverkusen, qui insiste sur l’importance du monochrome en art et de la couleur blanche en particulier. Yves Klein et Lucio Fontana, à qui l’on doit le Manifesto bianco (1946), sont de la partie, mais aussi quelques Belges tels que Walter Leblanc et Mark Verstockt. L’évènement est suivi, en 1966, d’une autre exposition internationale à cet égard révélatrice : weiss auf wiess (blanc-sur-blanc) à la Kunsthalle de Berne. Force est de constater que le monochrome est en vogue. Le blanc, symbole de lumière, d’immatériel et d’infini, occupe donc une place de choix dans l’histoire de l’abstraction géométrique, et ce dès 1918, avec le carré blanc sur fond blanc de Malevitch. Il acquiert une valeur positive, emblème d’avant-garde et de modernité. Il est en outre le plus propice à la réfraction de la lumière et aux effets optiques qui en découlent. Le noir n’évoque pas moins cette notion d’infini, permettant également de jongler avec l’intensité des ombres. Francis Olin met aussi bien son talent au service du relief blanc que du noir (fig.68). Avec eux, l’artiste procure un sentiment de profondeur qui dépasse celui auquel la perspective picturale pouvait prétendre. Ils recèlent également des effets cinétiques, dégageant une vibration naturelle permise grâce aux propriétés de la lumière s’infiltrant entre les excroissances du bois. Le blanc et le noir ne sont pas les seules couleurs − ou plutôt non couleurs − élues par les artistes férus de reliefs monochromes. Jean Dubois a quant à lui une prédilection pour le bleu (fig.69), qu’il marie volontiers à de légers tracés blancs ou colorés. Si le blanc est à priori plus favorable aux jeux d’ombre et de lumière, Dubois parvient sans encombre à créer l’illusion de la troisième dimension, grâce aux ombres portées que provoquent ces formes saillantes. Ces dernières laissent supposer leur prolongation hors du cadre, inscrivant l’œuvre au cœur du milieu qui l’entoure.

Désireux de placer la création au-delà de l’espace restreint du tableau, les artistes entendent donc intégrer l’environnement, y déborder, en somme se l’approprier. L’intention est de placer plus efficacement leur travail au sein de la société. Dans un registre distinct, c’est également le but poursuivi par Marthe Wéry avec ses monochromes (fig.70), conçus en osmose avec l’architecture. Chaque œuvre, qui prend l’allure d’une installation, est pensée in situ, c’est-à-dire en fonction du lieu où elle sera appréciée. L’absence de cadre participe à ce refus de distanciation entre l’œuvre et son contexte de présentation. Cette réflexion pousse l’artiste à explorer différents procédés d’accrochages, alternant par exemple, au sein d’une même œuvre, un accrochage traditionnel avec un « non accrochage », ce qui signifie qu’elle appuie ni plus ni moins les toiles contre la cimaise. À certaines occasions, les œuvres sont couchées sur le sol, ou s’étendent du mur au centre de la pièce. Wéry questionne ainsi les conditions de présentation de la peinture, un geste qui implique sa désacralisation mais consiste avant tout en une prise de possession de l’espace, à la manière d’une sculpture monumentale. Pál Horváth ne se prive pas d’exploiter sans entraves la richesse de cette relation étroite entre le médium pictural et sculptural. La forme volumétrique jaillit d’une surface plane (fig.71) ou côtoie le tableau dans le cadre d’un ensemble bipartite peinture-sculpture, un concept baptisé « parallèle ». L’œuvre de Francis Dusépulchre se situe également à la

55 P. Van Hoeydonck, cité d’après J. Ceuleers, Paul Van Hoeydonck, Merksem, Pandora Publishers, 2011, p.247.

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frontière entre sculpture et peinture. Admirateur de Fontana, celui-ci assoie sa réputation sur des plaques de masonite monochromes blanches, bleues ou rouges, qu’il entaille à l’aide d’une scie. Il travaille également, dès 1979, sur base du fil, qu’il place dans des caisses sculpturales ou murales en plexiglas, notamment intitulées Luminance[s] (fig.72). Le terme fait référence à la fibre optique, dont Dusépulchre fait usage dès 1983, qui anime des effets lumineux déjà tacites. L’artiste se joue du spectateur, introduisant quelques ombres tronquées parmi les légitimes, elles-mêmes ombres courbes de fils droits. Des fils qui se détachent de leur plan pour occuper l’espace plus franchement, devenant Vibrations - Conversations avec celui qui la contemple (fig.73).

Les cubes en plexiglas de Mark Verstockt se fondent similairement sur un principe de transparence, l’artiste engageant, par ailleurs, un dialogue entre les vides et les pleins, réduits à des armatures noires. L’objet a le don de brouiller la perception de l’espace d’autrui (fig.74). Notons que les effets de transparence en ont intéressé plus d’un. Pensons à Hilde Van Sumere, dont le matériau favori, le marbre de Carrare, est particulièrement enclin à la translucidité. L’artiste varie les épaisseurs, laissant la lumière éparse se faufiler là où la matière s’affine, au travers d’une forme géométrique placée au centre de la sculpture (fig.75). Plus proche dans le temps, Bob Van der Auwera base de même ses recherches sur les relations entre le vide et le plein. Si, dans les années 1950 et 1960, de nombreux artistes parviennent à la sculpture par un élargissement de la définition picturale, Van der Auwera, avant tout sculpteur au sens traditionnel du terme, gagne pour sa part la paroi tardivement, avec des sculptures murales telle que A long Story (fig.76), « où le vide – élément prédominant – est fractionné, découpé, comprimé, tendu ; où la distribution des intervalles sera transformée par le moindre déplacement du regard »56. Guidé par un intérêt pour les notions spatiales, Van der Auwera oriente ses recherches sur les jeux d’ombres provoqués par ses structures d’acier, le matériau qu’il affectionne. Le travail de Jean-Pierre Scouflaire (fig.77) est à mettre en parallèle, autre exemple où la sculpture ronde-bosse se prend pour un tableau. Évoquées précédemment, les notions temporelles et cinétiques sont corollaires aux œuvres précitées. Les effets produits par l’action de la lumière et les ombres déterminées par la position du spectateur induisent assurément un mouvement suggestif. Certains artistes feront de cette caractéristique le fondement de leurs travaux, se frottant dès lors au domaine de l’art optique. Comme en témoigne la production de Victor Vasarely, le médium pictural permet à lui seul de créer d’infinies vibrations. C’est également par la peinture que Jean-Pierre Maury façonne le mouvement, notamment avec son illustre série sur le motif de la croix (fig.78). En revanche, Henri Gabriel, qui s’intéresse à l’art optique dès la fin des années 1950 et qui se consacre bientôt entièrement aux recherches sur la lumière et le mouvement, use de divers matériaux inédits pour favoriser leur mise en œuvre. En 1960, il réalise ses premiers travaux à base de papier buvard, qu’il superpose par couches et perfore, avec l’intention de provoquer de riches illusions d’optique. Rythmes (fig.79), manufacturé à l’aide de tissu plastique, donne à voir un résultat analogue. Dès 1964, Gabriel signe des œuvres appelées optico-spatiales ou optico-cinétiques, tels que des mobiles suspendus en bois, en aluminium ou en plexiglas, en attente d’un brin de vent pour se mouvoir inopinément. L’artiste développe ses théories dans son manifeste optico-cinétique en

56 B. Van der Auwera, cité dans La surface sculpturale, Bruxelles, Atelier 340, 22 septembre – 16 décembre 1984, p.262.

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1966, un an après la création du cercle D4, qui renvoie aux quatre dimensions qui interagissent dans ses travaux. À l’occasion de l’exposition du groupe à la galerie Saint-Laurent à Bruxelles en 1965, Jean Coquelet dira de Gabriel qu’il « […] dégage le tableau de sa contrainte traditionnelle de portion de surface quadrangulaire appliquée sur le mur »57.

De toute évidence, c’est ce à quoi les artistes aspirent au cours des années 1960 : renouveler le champ de la peinture traditionnelle par l’exploration de nouveaux modes d’expression. Ces derniers seront regroupés sous l’appellation « surface sculpturale » lors d’une exposition en 1984 à l’Atelier 340 à Bruxelles. Elle dépasse ainsi le clivage qui sépare la peinture de la sculpture ronde-bosse. Avant la lettre, l’exposition Anti-peinture, organisée par le G58 au Hessenhuis d’Anvers en 1962, se posait comme un acte fort de remise en cause de l’hégémonie de la peinture, clamant la volonté d’en offrir une vision élargie. Elle se positionne en outre contre l’art informel. Van Hoeydonck figure parmi les participants, mais c’est Walter Leblanc, fer de lance de l’art optique en Belgique, qui en est l’un des principaux organisateurs. Il définit « l’anti-peinture » comme suit : « terme regroupant des œuvres de diverses tendances ayant dépassé le stade de la peinture normale ; tableaux qui par des phénomènes optiques et physiques envahissent l’espace sans être de la sculpture ; ayant une autre dimension elle se mesure en variations, mouvements, vibrations, lumière »58. L’ « anti-peinture » − ou la « surface sculpturale » − entend reproduire l’illusion de la troisième dimension sans passer par le trompe-l’œil de la perspective. À chacun son moyen pour y parvenir. En 1959, Leblanc a l’originalité de choisir la « torsion », désormais emblématique de son travail. L’artiste débute avec une série de Twisted Strings réalisée grâce à des fils de coton torsadés blancs sur fond blanc. Il a ensuite recours à des bandes de polyvinyle bicolores sur fond coloré appelées Torsions (fig.80) ou Mobilo-Static (fig.81). Parallèlement, il fait de ses torsions de réelles sculptures (fig.82), comme s’il en avait simplement extrait l’une d’entre elles de ses œuvres murales. L’œuvre de Leblanc regorge de pièges visuels dus au mouvement des formes provoqué par la lumière, qui devient un « matériau » en soi. Le spectateur est appelé à participer à un processus de création en évolution constante, l’expérience se voyant sans cesse renouvelée selon l’angle de vue adopté. Leblanc a donc des conceptions artistiques bien précises, qu’il défend activement au moyen de ses écrits et de ses collaborations internationales. C’est ainsi qu’en 1962, il intègre Nouvelles Tendances, une association fondée un an plus tôt en Yougoslavie et qui regroupe des artistes de plusieurs nationalités se consacrant aux recherches sur le monochrome, l’art optique et cinétique. À travers l’Europe, de multiples groupes voient le jour avec le même mot d’ordre, dans le cadre desquels les artistes font fi des frontières pour fédérer leurs efforts : Zero en Allemagne, Nul aux Pays-Bas, T et N en Italie, GRAV et Equipo 57 en France. Ils collaborent à l’occasion de nombreuses expositions dont l’une des plus mythiques est sans conteste Anti-peinture, mais aussi sa grande sœur Vision in motion, motion in vision, orchestrée conjointement par Bury, Van Hoeydonck, Tinguely et Spoerri en 1959 au même Hessenhuis d’Anvers.

Il est fort à penser qu’un mouvement émane des œuvres de Leblanc. Cependant, celui-ci n’est qu’illusion. L’art cinétique, dont les recherches se développent parallèlement à celles de l’art optique, s’en distingue par le réel mouvement qu’il engendre. Bury apparaît comme la figure de proue de ses manifestations belges. Suite à

57 J. Coquelet, « Henri Gabriel », in D4, Bruxelles, Galerie Saint-Laurent, 14 juillet – 4 septembre 1965, n.p. 58 W. Leblanc, « Anti-peinture », in W. Van den Bussche, A. Adriaens-Pannier, W. Leblanc, e.a., Walter Leblanc. Catalogue raisonné, Gand, Ludion, 1997, p.27.

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sa découverte des mobiles d’Alexander Calder, l’artiste abandonne la peinture dès 1953 pour créer ses premiers Plans mobiles. Dans ses ultimes huiles sur toiles, les formes refusent déjà l’immobilité. Deux ans plus tard seulement, il participe à l’exposition fondatrice du courant cinétique Le Mouvement à la galerie Denise René à Paris. Dès 1957, Bury introduit un moteur électrique à ses œuvres, lui préférant ensuite les aimants ou le système hydraulique. Les formes géométriques − ou reptiliennes − se déplacent lentement sur des panneaux de bois (fig.83) ou des sculptures monumentales (fig.84). Dans ces créations, le temps occupe plus que jamais un rôle majeur. Bury le prévoit lent et aléatoire, ce qui leur confère une dimension de mystère. Les œuvres du sculpteur poussent la recherche cinétique, annoncée dans la production picturale sérielle des années 1950, à son apothéose. Elles s’inscrivent dans le prolongement des premières expériences spatiales entamées à cette époque, dont l’enjeu est d’outrepasser l’apanage de la peinture de chevalet et d’élargir la pratique des médiums. Ces dernières sont révélatrices d’un désir des artistes de faire usage de matériaux inédits et témoignent d’une foi en l’avenir, en la science et le progrès de la technique − mis à l’honneur lors de l’exposition universelle de 1958 −, synonymes d’un renouveau à la fois artistique et social. En outre, elles laissent présager la dématérialisation de l’art, qui trouvera son aboutissement dans l’art conceptuel. V. L’ART COMME BIEN COMMUN De la détermination des artistes à interroger et envahir l’espace découle logiquement leur attachement à l’art public. Ce dernier, dont ils font un sujet de réflexion prioritaire, rejoint leurs intérêts à de multiples niveaux. C’est en premier lieu un moyen d’avoir plus d’impact en s’exprimant par le monumental, tel que Guy Vandenbranden en fait l’aveu : « Je me sens de plus en plus attiré par l’architecture, c’est la seule issue : des œuvres de grande envergure. Cela, les peintres de chevalet ne le peuvent pas »59. Ensuite, l’architecture moderne s’accorde on ne peut mieux à leur travail, ceci expliquant leur attirance réciproque. Reprenons les mots de Jaak Fontier pour exprimer cette convergence de sensibilité : « La relation entre le constructivisme et l’architecture moderne a toujours été particulièrement étroite. Tant l’art constructiviste non figuratif que l’architecture recourent à des formes géométriques primaires et à la mesure, la proportion, la relation, le rythme et la couleur »60. Enfin, l’art public correspond aussi et surtout aux préoccupations sociales des artistes61. Par son essence même, l’art public est étranger au marché de l’art et ne peut exister que par la volonté réunie de plusieurs acteurs œuvrant ensemble, portés par un idéal de société. En Belgique, à la peinture d’histoire patriotique et commémorative du XIXe siècle, qui a longtemps rempli une fonction éducative et contribué à la construction de l’identité belge, se substitue au lendemain de la Seconde Guerre mondiale une nouvelle forme d’art public à vocation sociale. Alors que cette expression artistique prenait place au XIXe et au début du XXe siècle dans les bâtiments de prestige, elle investit à présent des lieux à haute fréquentation populaire. L’art, et en particulier l’art public, est une façon parmi d’autres, en Belgique comme ailleurs, de surmonter les suites du traumatisme généré par le

59 G. Vandenbranden en conversations avec P. Mertens et M. Van Jole, op.cit., p.51. 60 J. Fontier, op.cit., p.31. 61 Notons que le nombre limité de ces pages ne nous permet d’évoquer qu’une infime partie des projets entrepris. De plus, il ne s’agira pas de détailler les créations mais davantage de les envisager comme témoins d’un rêve et de son étendue, ceci par l’intermédiaire des études et maquettes conçus par les artistes désireux de mettre leur talent au service de la société qui est la leur.

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conflit dans une société en reconstruction. L’envie de lier l’art et la vie s’impose donc parmi les artistes d’après-guerre, l’idée maîtresse étant de le rendre accessible à toutes les classes sociales, posant en parallèle la question du rôle de l’artiste dans la société. Marqués par la pensée de théoriciens à l’instar de Bourdieu ou de Marx, et par l’idéologie véhiculée par le constructivisme russe, De Stijl ou encore le Bauhaus, ils récusent la simple fonction décorative de l’art qu’ils veulent au contraire à finalité éthique et sociale. Ce souhait de redonner à l’art public une plus grande présence se manifeste officiellement en Belgique dès 1947 − date de la promulgation de la loi Masereel62 −, d’abord modestement et s’accentuant à partir du milieu des années 1950. Animé par l’idée d’améliorer le cadre de vie et de travail de ses citoyens et de permettre aux couches sociales les moins favorisées un certain accès à la culture, l’Etat incorpore l’art au processus de reconstruction. Enfin, concrètement, il s’avère que l’architecture fonctionnaliste initiée par Le Corbusier et les espaces urbains qu’elle a générés dans les années 1950 et 1960 ont peu à peu été ressentis par la majorité comme froids et sans personnalité. Cet urbanisme sera même fort contesté à partir des années 1970, accélérant la tendance qui existait déjà dans certaines administrations de palier les défauts de ces espaces urbains en y apportant davantage de convivialité.

Après 1918, la première génération avant-gardiste belge avait déjà des ambitions d’art total. La revue 7 Arts (1922-1929) et son équivalent flamand Het Overzicht (1921-1925) se font alors les défenseurs de la Plastique pure et de l’architecture moderniste, dont le désir était de soumettre l’œuvre abstraite à l’architecture et à la décoration intérieure. Bien plus tard, c’est pour valoriser ce même principe que groupe Espace voit le jour en 1953 autour d’un manifeste qui rassemble une trentaine d’artistes, plasticiens, architectes, urbanistes, ingénieurs et critiques d’art réunis63. Ceux-ci entendent « […] défendre l’instauration de tout fait plastique appliqué à la vie quotidienne en étroite relation avec l’architecture »64. Ils préconisent « […] un Art qui s’inscrive avec décision dans l’Espace en répondant aux nécessités fonctionnelles et à tous les besoins de l’homme compris comme une réalité sociale »65. Le manifeste, qui constitue une réflexion pointue sur l’aménagement de l’espace public de la Cité et de ses différents acteurs, prône essentiellement une collaboration entre les disciplines artistiques, et avant tout entre les plasticiens et les architectes. Dans un esprit contigu, le manifeste du Spatialisme66 est signé en 1954, pour qui «[l]’art doit participer à la vie quotidienne, s’incorporer dans le décor journalier et aider de la sorte l’homme à se dégager du passé et à s’accorder au présent »67, en résumé : améliorer ses conditions d’existence. À cette fin, les signataires considèrent le langage formel abstrait géométrique comme le plus approprié. Parmi les membres du groupe Espace, Delahaut, Bertrand et Van Lint68 auront − plus ou moins − l’occasion de mettre en pratique leurs croyances. Notamment,

62 La loi Masereel est une réglementation fédérale qui prévoit l’intégration d’œuvres d’art au sein des grands travaux d’infrastructure. 63 V. Bourgeois, G. Dedoyard, L. de Koninck, e.a., « Manifeste du groupe Espace en Belgique », in Architecture 53, n° 7, février 1953, p. 265, cité d’après J. Delahaut, Écrits s, op.cit., p.151-153. 64 Loc.cit. 65 Loc.cit. 66 P. Bury, J. Delahaut, K.-N. Elno et J. Séaux, op.cit., p.149-151. 67 Ibid., p.151. 68 Il n’est pas sans intérêt de savoir que lorsque Van Lint adhère à l’abstraction géométrique en 1953, c’est spécifiquement dans un souci de concordance avec l’architecture : « […] ce problème m’avait assez bien préoccupé. J’y ai beaucoup réfléchi me disant que nous allions incontestablement vers des formes et des couleurs plus pures, plus dépouillées, plus architectoniques qui allaient bien s’inscrire, mieux s’intégrer dans ces constructions modernes ». L. Van Lint dans un entretien avec P. Roberts-Jones, dans P. Roberts-Jones, Van Lint et le poème conquis, Bruxelles, Ministère de la Communauté française, 1983, p.130.

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en 1962, Bertrand reçoit une commande pour un panneau décoratif pour l’Institut royal du Patrimoine artistique à Bruxelles, pour l’une des salles du restaurant, aujourd’hui déplacé dans la salle de conseil (fig.85 et 86). Delahaut sera le plus actif dans ce domaine, intervenant dans des écoles et bâtiments communaux ou des logements sociaux. Accompagnant son travail d’artiste, ses écrits constituent de surcroît un véritable plaidoyer en faveur de l’intégration. Delahaut estime primordial de développer la sensibilité artistique de chacun, et ceci dès l’enfance. Pour y parvenir, il compte sur le pouvoir des formes élémentaires et des couleurs vives, en lesquelles il voit des qualités attrayantes. Sa première œuvre murale, aujourd’hui détruite, date de 1956 et se situe au Foyer Montagnard à Montigny-sur-Sambre (fig.87), un ensemble de cent vingt habitations sociales construit par l’architecte Victor Bourgeois. Les conceptions de ce dernier, qui participe à l’aventure du groupe Espace, rejoignent en effet celles du peintre69. En 1957, Delahaut intègre également, avec ses confrères Jean Rets, Pol Bury et Georges Collignon, un relief sur le site de Droixhe, logement social de type « nouvelle cité » bâti au nord de Liège sur le modèle de la Cité Radieuse de Le Corbusier, entre 1951 et 1970, par les architectes du groupe E.G.A.U. Delahaut intervient à plusieurs occasions dans sa commune de résidence, Evere (fig.88). Mentionnons encore la mosaïque murale qu’il réalise pour la piscine du Palais des Sports de Butgenbach en 1987 (fig.89). Sa composition murale la plus spectaculaire demeure celle du métro bruxellois, inaugurée en 1975 à la station Montgomery. Elle voit le jour dans le cadre de l’initiative prise dès 1969 pour décorer le réseau souterrain de la ville de Bruxelles. Le travail entrepris reste une tentative unique de rassemblement d’une telle quantité d’œuvres dans la ville. Sur cinquante-huit stations de métro, trente-sept sont décorées par les travaux de cinquante-deux artistes différents, témoignant de la diversité de l’art belge. Ainsi, un certain nombre d’artistes abstraits géométriques prennent part au projet, parmi lesquels Gilbert Decock, Roger Dudant, Jean Glibert, Francis Olin, Jacques Moeschal, Luc Peire, Pol Bury, Guy Vandenbranden (fig.90), Hilde Van Sumere (fig.91), Walter Leblanc (fig.92 et fig.93) et Jean Rets (fig.94 et fig.95). Notons que l’œuvre de Rets en place ne correspond pas au projet initial de l’artiste, qui est appelé à reconsidérer ses ambitions faute de budget (fig.96).

Les artistes du métro précités ont chacun accompli d’autres œuvres d’art public, dont il nous est impossible de dresser la longue liste. Certains furent plus sollicités que d’autres, comme Jacques Moeschal. Son œuvre la plus célèbre est très certainement le Signal d’Hensies (1972-1974) (fig.97), situé à la frontière franco-belge comme le symbole de l’amitié entre les états limitrophes. La sculpture en béton – matériau que l’artiste est le premier à utiliser dans le domaine de la sculpture monumentale belge –, haute de cinquante-sept mètres, constitue une véritable prouesse technique pour l’époque. La Flèche du génie qu’il construit pour l’Expo’58 l’était déjà, répondant particulièrement bien à ses convictions relatives à une collaboration intelligente entre l’artiste, l’architecte et l’ingénieur. Bury qui, rappelons-le, cosigne le Spatialisme, reçoit également de nombreuses commandes dans le monde entier, principalement appelé à la réalisation de fontaines. C’est ainsi qu’en 1980, il achève une fontaine pour le Musée Guggenheim de New York (fig.98). Parmi ses nombreuses interventions sur le territoire belge, la sculpture Capteur de ciel (fig.99), qui trône sur le rond-point devant la gare de La Louvière, est l’une de ses dernières puisqu’il décède l’année de sa construction, en 2005. La composition murale que l’artiste conçoit pour la maison de l’architecte Charles

69 Victor Bourgeois développe ses théories sur l’intégration de l’art à l’architecture et sur le rôle primordial de la couleur dans V. Bourgeois, L’architecte et son espace, Bruxelles, Éditions Art et Technique, (Coll. Sept Art), 1952.

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Carlier à Liège (fig.100) − cofondateur de l’association d’architectes E.G.A.U. et membre du groupe Espace −, mérite d’être citée car plus méconnue du public. La contribution des artistes à l’architecture ne se limite donc pas à l’espace public mais s’étend occasionnellement à la sphère privée. Les exemples de décoration de maisons particulières sont néanmoins assez rares. Ce qui l’est moins, nous l’avons mentionné, ce sont les interventions dans des ensembles immobiliers de grande envergure, construits à l’image des théories urbanistiques de Le Corbusier et qui touchent un public de condition modeste. En dehors de nos frontières, la décoration murale de Francine Holley (1978) s’inscrit dans cette démarche, couvrant le mur du hall d’entrée de la tour Helsinki, érigée dans le cadre de l’opération Italie XIII dans le treizième arrondissement de Paris (fig.101).

Luc Peire réalise lui aussi de nombreuses œuvres d’art public, en Belgique et en France, faisant de l’intégration l’une de ses préoccupations majeures. Il signe dans ce domaine une production qui se situe à la frontière avec l’architecture. En 1982, il revêt par exemple, dans un travail titanesque, le sol de la place Georges Pompidou de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée (fig.102). En Belgique, il conçoit notamment, en 1992, la façade de l’hôpital universitaire de Leuven (fig.103). L’œuvre constitue une claire accroche visuelle dans la ville mais fait avant tout référence à la stature verticale de l’homme, qui se bat contre la maladie. D’autres ont destiné leurs œuvres aux hôpitaux, afin d’apporter un semblant de gaieté aux patients. À titre d’exemple, Delahaut et Wuidar composent en 1981 des lambris pour le CHU du Sart-Tilman, un bâtiment construit par l’architecte Charles Vandenhove, qui collabore avec le plus jeune à plusieurs reprises. Notons que Sol LeWitt et Daniel Buren se joignent également à l’entreprise. Wuidar réitérera l’expérience puisqu’un an plus tard il intègre ces mêmes lambris, dans d’autres couleurs, au home pour enfants d’Esneux. Celui-ci porte également une attention toute particulière à l’intégration de l’art à l’architecture qui, « […] contrairement à la peinture, rencontre tous les problèmes liés à notre existence, des problèmes formels, des problèmes techniques et des problèmes éthiques »70 estime-t-il. En 1987, il publie Autour de l’architecture71, qui regroupe l’essentiel de ses interventions. Outre l’hôpital universitaire, l’artiste est l’auteur de plusieurs œuvres sur le site du Sart-Tilman, où l’art est largement valorisé, sur les bâtiments, mais aussi sur le campus extérieur, tel un Musée en Plein Air. L’œuvre de Wuidar qui retient notre attention se présente comme une terrasse-labyrinthe située entre le Rectorat et l’Institut de Psychologie, conçue comme un lieu de recueillement à l’image du dédale de la pensée humaine. Un dessin préparatoire pour le cube central du labyrinthe révèle un détail de cette œuvre faite toute de noir et blanc (fig.104). Les artistes géométriques de la seconde génération d’après-guerre reprennent donc le flambeau du combat en faveur de l’intégration des arts entrepris par leurs prédécesseurs. C’est ainsi que Jean-Pierre Maury qui, accompagné de Wuidar, s’associe à ses aînés Delahaut et Baugniet pour la mise sur pied de la revue MESURES art international, hérite également de ceux-ci du goût pour la synthèse des arts. Il coopère notamment à plusieurs reprises avec l’architecte Pierre Corbisier, qui lui propose en 1983 de placer une œuvre dans le Centre Sportif et Culturel de Neufchâteau (fig.105). Le choix de Corbisier n’est pas inconsidéré : « […] nous, architectes, sommes souvent attirés par les peintres abstraits, par le jeu de la géométrie, le jeu des volumes qui sont, de toute évidence, fort proches de nos

70 L. Wuidar, Léon Wuidar. Conversation avec Ben Durant, Gerpinnes, Éditions Tandem, 2007, p.27. 71 ID., Autour de l’architecture, Bruxelles, Éditions Lebeer Hossmann, 1987.

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conceptions »72. Marqué par les théories du Bauhaus, Pál Horváth n’est pas moins actif dans la promotion de l’art urbain et des divers projets qu’il imagine pour embellir les espaces de vie communs. Parmi les quelques sculptures monumentales dont il peut se prévaloir, La Couleur du Nord, construite en 1996 devant la gare du Nord de Bruxelles, ne passe pas inaperçue : haute de dix mètres, ce sont principalement ses couleurs vives, dont l’artiste fait un usage permanent, qui attirent le regard du passant (fig.106).

Si de nombreuses initiatives furent concrétisées, d’autres sont restées à l’état de projet. L’un des plus ambitieux était celui d’habiller le noyau de béton de cent quarante-cinq mètres de haut qui abrite les batteries d’ascenseurs de la Tour des Finances à Bruxelles. Un concours est organisé en 1991 dans le cadre duquel quinze artistes proposent une solution alliant créativité et technique. Francis Dusépulchre reçoit le premier prix, tandis que Moeschal obtient le second. Les autorités ne dégageront cependant jamais les fonds nécessaires pour démarrer la construction de ce projet prometteur, que Dusépulchre avait baptisé A Tower for Europe (fig. 107). Fin utilisateur de la fibre optique, l’artiste avait imaginé des zones lumineuses s’échappant des fentes de l’acier une fois la nuit tombée, faisant écho aux lumières nocturnes de la capitale. Malgré cette déconvenue, l’activisme de Dusépulchre dans la défense de ses rêves d’art public porte ses fruits, notamment à la Maison de la Culture Vauxhall à Nivelles et dans la station de métro des Beaux-Arts de Charleroi. D’autres propositions, qui nécessitaient pourtant des moyens plus modestes que celui de la Tour des Finances, n’ont pas non plus abouti, telle qu’Horizontale (fig.108), une sculpture que Bob Van der Auwera destinait à un mur de la rue de Haerne à Etterbeek. Le projet est élaboré dans le cadre du concours Art public/Lieux publics organisé en 1989 à l’initiative de la Communauté française et de la Fondation Roi Baudouin, avec l’intention de faire de l’art un acteur de rénovation et de revalorisation des espaces urbains et ruraux à travers les régions francophones de Belgique.

Si, aux yeux des artistes, les projets d’art public ne sont pas suffisamment nombreux, les collaborations sont fécondes au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Certes, les aspirations de ces derniers revêtent un caractère utopique qui a contrarié leur mise en œuvre à plus grande échelle. Il est néanmoins avéré que les multiples projets réalisés ont contribué à l’embellissement des cités belges ; des œuvres que tout un chacun côtoie dans ses déplacements quotidiens. Leur impact sur le moral des citoyens est certain, même lorsque qu’il demeure inconscient. Aujourd’hui encore, dans un contexte bien entendu divergent de celui qui caractérise l’après-guerre, des idées sont en germe, dont nous verrons les aboutissements dans la société de demain. VI. L’ART AU QUOTIDIEN Il apparaît donc indéniable que l’art abstrait, malgré qu’il soit souvent perçu comme répondant à la formule de « l’art pour l’art », est au contraire considéré par ses acteurs comme un outil destiné à faire évoluer la société, à concourir au bien-être d’autrui et à diminuer les inégalités sociales. Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous assistons à la volonté des artistes d’intégrer l’art au décor journalier et de le rendre accessible à la majorité. Ceci en le plaçant dans l’espace public, mais aussi dans la vie privée de chacun, par l’intermédiaire de l’artisanat, du design ou de techniques de reproduction d’œuvres d’art à grande échelle. Cette idée s’inscrit dans la continuité de mouvements qui ont

72 P. Corbisier, cité dans « Les arts intégrés à l’espace architectural », in Mots de passe (dossier inséré), n°2, février 1984, p.38.

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jalonnés l’histoire de l’art tels que Arts and Crafts, De Stijl, le Bauhaus, ou encore le constructivisme russe. Dès le début des années 1950, la revalorisation de l’artisanat et la question du « multiple » constituent des préoccupations particulièrement répandues parmi les artistes. La sérigraphie est une des techniques largement exploitées, en ce qu’elle permet, avec d’autres − pensons au succès de l’affiche −, de fournir au grand nombre un accès plus aisé à l’art. Ces approches se situent idéalement dans la lignée des deux manifestes du Spatialisme et du groupe Espace, qui défendent tous deux le concept d’un art qui participe à la vie quotidienne. Les signataires contestent la hiérarchie entre les arts et la notion d’arts dits « majeurs », bataille qui en Belgique trouve son origine avec Les XX et La Libre Esthétique73. Ils engagent les artistes à tirer parti de l’outil industriel et de son évolution, dans l’espoir de contribuer à réduire l’écart social et culturel qui sépare l’artiste du grand public. Le Spatialisme est sans équivoque : « L’unicité de l’œuvre est un préjugé qu’il faut abandonner, de manière à faire disparaître toutes les spéculations arbitraires qui en font une jouissance réservée à une classe minoritaire de la société »74. La solution envisagée est la suivante : l’œuvre d’art doit devenir un bien de consommation, sans pour autant perdre sa qualité en chemin. Cette idée suscite l’engouement à l’époque, comme en témoignent les trois éditions du Salon national du Meuble social moderne organisées entre 1955 et 1957 par le Musée des Arts décoratifs et de l’Esthétique industrielle de Gand, aujourd’hui connu sous le nom de Design museum Gent (fig.109 et fig.110). Elles ne sont autres que des foires aux meubles où les fabricants belges présentent leur production répondant à la vision moderne et sociale du mobilier, qui se veut à la fois esthétique, pratique et éthique.

Quelques années plus tôt, en 1950, l’a.s.b.l. Formes Nouvelles75 avait été fondée sur base de ces mêmes préceptes. L’association, qui pérennise ses activités jusqu’en 1960, a un grand retentissement jusqu’au lendemain de l’Expo ’58. La structure est présidée par Axel Lemesre les six premières années, succédé dans cette fonction par le critique Léon-Louis Sosset, tandis que le rôle de vice-président est assumé par Marcel-Louis Baugniet. Il incombe à son secrétaire l’architecte Éric Lemesre la tâche la plus astreignante. Parmi les membres, figurent Delahaut, Emiel Bergen, Lucien Kroll, Jos Léonard, Kurt Lewy, Victor Noël, Victor Servranckx, Émile Souply, Willy Van der Meeren et Emiel Veranneman. L’association fait appel à une large diversité de techniques et rassemble majoritairement des peintres, des décorateurs et des architectes, mais aussi des artisans et des publicitaires. L’intention est d’encourager le développement des « formes nouvelles » dans l’habitat et de réconcilier l’art et l’industrie, principes qui ne sont pas sans rappeler ceux du Werkbund par exemple76. Des initiatives comparables se développent en France (Formes Utiles), en Suisse (Die Gute Form), aux États-Unis (For Modern Living) et aux Pays-Bas (Goed Wonen). Formes Nouvelles se positionne ainsi comme un intermédiaire entre les artistes et les industriels, afin de soutenir la production à grande échelle d’objets de qualité à des prix démocratiques. Elle lie des contacts privilégiés avec des grands magasins et firmes parmi lesquels la très active Tubax. Elle s’engage enfin à faire la promotion des membres dans la presse − elle possède d’ailleurs un petit journal −, tel qu’annoncé dans la lettre d’adhésion : « Nous

73 Fondé en 1883 par Octave Maus, Les XX est un cercle artistique bruxellois au rayonnement international, qui soutient tant les arts décoratifs que les beaux-arts. La Libre Esthétique lui succède, active quant à elle de 1894 à 1914. 74 P. Bury, J. Delahaut, K.-N. Elno et J. Séaux, op.cit., p.149. 75 À ce propos, voir : M. Guyaux, Formes Nouvelles (1950-1960) – Une question de mobilier, La Cambre Architecture (I.S.A.C.F.), Mémoire de fin d’étude, sous la direction du prof. Pablo Lhoas, 2002-2003. 76 Le Deutscher Werkbund, cofondé en 1907 à Munich par Henry Van de Velde, est une association d’artistes et d’industriels qui prône une collaboration plus active entre les arts et l’industrie, afin de donner un meilleur développement à l’artisanat.

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vous signalons principalement notre action dans la presse belge et étrangère en vue de faire connaître les œuvres de créateurs modernes belges »77. Pour familiariser un nouveau public aux arts décoratifs et au mobilier contemporain, le collectif organise conférences et séminaires, mais propose avant tout sa production à l’occasion de nombreuses expositions. À titre d’exemple, citons Logis ’50 (1950), prise en charge par l’Office provincial des Artisanats du Brabant et dont l’objectif principal est de mettre le design à la portée de tous. Dans un grand chapiteau près de la Porte de Namur, elle présente des prototypes d’artistes, d’artisans et d’industriels, destinés à être produits en série et proposés à prix abordable. Il est question d’éduquer les masses au goût moderne et de répondre à leurs besoins. Formes Nouvelles expose aussi à l’étranger, notamment à Paris en 1953 et à New York en 1954. Le succès de l’association n’est pas des moindres puisqu’en 1955 elle compte plus de quatre cent adhérents.

Baugniet est l’un des piliers de la structure. Précurseur de l’abstraction en Belgique, celui-ci avait abandonné la Plastique pure au début des années 1930 faute d’une audience pour se reconvertir dans le domaine du design. Convaincu du caractère fonctionnaliste de l’esthétique géométrique, il transpose les formes de ses peintures aux objets d’art appliqué. Les paroles de Sosset méritent d’être citées en regard de cette thématique : « Que les formes issues de l’abstraction ou inventées dans son ambiance, soient pour l’architecture un excitant, les exemples ne manquent pas pour le démontrer. Qu’elles reçoivent, dans l’esthétique industrielle, une signification concrète, la configuration des engins de locomotion, des machines, des outils, des ustensiles domestiques même le prouve. Qu’elle possède une incidence déterminante sur les transformations du mobilier et de ses accessoires dépouillés de leurs parasites soi-disant ornementaux, il n’y a que les aveugles pour le contester »78. L’union des arts est chère à Baugniet, qu’il prône déjà par l’entremise de la revue 7 Arts, notamment par la publication d’un texte intitulé Le Beau ? L’Utile ?, où il plaide la notion selon laquelle « […] l’utilité est une première condition de beauté »79. En 1927, l’artiste ouvre une boutique de décoration rue d’Arenberg à Bruxelles, L’intérieur moderne, rebaptisé Baugniet & Cie dès son déménagement boulevard de Waterloo en 1930, nom qu’il conserve jusqu’en 1972. Dans son catalogue commercial de 1956, le designer présente ses produits, réalisés selon les principes de l’Industrial Design, soit des objets créés par un artiste ou un artisan mais destinés à devenir des prototypes en vue d’une fabrication en série. Confiant, il ajoute : « Associés à l’architecture, ils engendreront de nouveaux rapports humains, une nouvelle vie sociale » 80. Dans ce magasin, Baugniet propose également les objets d’autres artistes, tels que les émaux de Lewy (fig.111), personnalité bien connue depuis les années 1920 pour le travail de l’émail. En 1958, Baugniet occupe un stand à l’exposition universelle, où il propose un ensemble de mobilier pour un bureau, dont le projet est présenté dans l’exposition que cet ouvrage accompagne (fig.112). Baugniet réalise bon nombre de projets de ce type, assurant la fonction d’architecte d’intérieur en parallèle à celle de designer. Au cours de sa carrière, il confectionne une large variété d’objets, de la table à la lampe (fig.113), en passant par le plateau (fig.114). Il pratique également la céramique à de multiples reprises. C’est ainsi

77 Lettre d’Éric Lemesre à Jo Delahaut devenu membre de Formes Nouvelles, Bruxelles, 14 juillet 1952, Musée de Louvain-la-Neuve, Archives du groupe Art abstrait, donation Serge Goyens de Heusch. 78 L.-L. Sosset, op.cit., n.p. 79 M.-L. Baugniet, « Le Beau ? L’Utile ? », in 7 Arts, n°20, 20 février 1924, cité d’après Art et tapis. Tradition et renouveau en Belgique, Gand, Museum voor Sierkunst, 26 mars – 29 mai 1988, n.p. 80 ID., cité dans B. Durant, S. Goyens de Heusch, F. Safin-Crahay, e.a., Marcel-Louis Baugniet, dans le tourbillon des avant-gardes, Liège, Bruxelles, Dexia, 2001, p.120.

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qu’aux alentours de 1950, il collabore notamment avec l’Atelier de Céramique de Dour, qui vise à promouvoir l’art de la céramique par la revalorisation de l’artisanat. Baugniet expose les porcelaines (fig.115) et autres objets de vaisselle (fig.116) qu’il fabrique dans ce cadre sous l’égide de Formes Nouvelles, à Oslo à New York en 1954 et, la même année, à l’exposition Table garnie à Bruxelles. À la fin des années 1980 et au début des années 1990, alors que l’artiste a délaissé les arts appliqués pour reprendre les pinceaux, il signe encore un service à café en porcelaine de Limoges (fig.117), un bougeoir (fig.118) et un tapis conçu dans le cadre de l’exposition Art et Tapis, pour laquelle vingt et un artistes dont Bertrand, Vandenbranden, Peire (fig.119), Decock et Verstockt créent un tapis. La diffusion de ces objets reste néanmoins modeste – environ une dizaine d’exemplaires − et acquise par une clientèle privilégiée, au grand désespoir de Baugniet qui, dans les années 1950, va jusqu’à Moscou pour défendre en vain son projet de production en masse auprès du directeur de l’Institut soviétique du Design.

Delahaut rejoint lui aussi l’association Formes Nouvelles en 1952, dont la philosophie correspond à ses convictions, qu’il défend à l’aide de nombreuses publications. Il crée, plus tardivement toutefois, un nombre non négligeable d’objets de tous types parmi lesquels céramiques (fig.120-121), foulards (fig.122), reliures (fig.123) et bijoux (fig.124-125). Notons que le bijou a suscité l’intérêt de beaucoup d’artistes, se prêtant parfaitement aux formes géométriques. Pensons notamment au cinétique Gabriel (fig.126-127), à la sculpteur Van Sumere (fig.128), à Decock (fig.129-130) et à Bertrand (fig.131). Là encore, il s’agit soit d’exemplaires uniques soit d’objets produits en petite quantité. En revanche, Willy Van der Meeren atteindra l’objectif auquel Baugniet aspirait depuis trois décennies. À la fois membre du groupe Espace et de Formes Nouvelles, Van der Meeren est aussi bien connu comme architecte que comme designer de mobilier en tous genre (fig.132 et fig.133). Les architectes de l’après-guerre caressent l’idée d’une synthèse des arts et par conséquent s’intéressent fréquemment au mobilier et à sa relation à l’architecture. Sobres et fonctionnels, ses meubles sont les premiers en Belgique à être réellement produits en série et dont les matériaux − essentiellement le bois et l’acier − sont assez économiques et faciles à traiter pour les rendre abordables. C’est suite au concours Jeune décoration, organisé en 1951 par Formes Nouvelles et soutenu par À l’Innovation, que Van der Meeren a l’occasion d’entamer une carrière de renom. Celui-ci, de même qu’Emiel Verranneman qui acquiert également une réputation dans le domaine du design belge (fig.134), ne remporte pas le prix mais attire l’attention avec ses créations novatrices. Van der Meeren devient rapidement la mascotte de Formes Nouvelles, aménageant de nombreux appartements témoins indiquant au consommateur comment agencer son propre espace. En 1952, c’est avec un fac-similé de l’un de ces appartements que l’architecte représente Formes Nouvelles au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles. L’association en aménage également une série dans l’unité d’habitation Ieder Zijn Huis, qu’il construit en 1960 à Evere, où Delahaut incorpore d’ailleurs une céramique murale (fig.135). À cette époque, l’événement le plus mémorable de Formes Nouvelles fait déjà partie du passé : Le Nouvel habitat, organisé en 1953 au Kiel, un bâtiment anversois dû aux architectes Renaat Braem, Hendrick Maes et Viktor Maeremans, avait attiré près de soixante-cinq mille visiteurs.

Si ce type de succès n’est pas remporté par les artistes plasticiens avides de diversifier leur palette de médiums, cela n’empêche pas les représentants de la génération suivante de réitérer ces expériences. La vision de Jean-Pierre Maury et de Léon Wuidar à l’égard de la synthèse des arts aura probablement été nourrie des contacts réguliers qu’ils entretiennent avec Delahaut et Baugniet. Parmi d’autres, Maury

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réalise des céramiques et une version de l’objet aussi fonctionnel que décoratif qu’est la montre (fig.136). D’autre part, Wuidar fait des arts appliqués l’une de ses plus florissantes activités. Également pratiquée par son allié de MESURES art international Jean-Jacques Bauweraerts, la reliure occupe une place de choix dans la production de l’artiste (fig.137). À tel point qu’il se verra reprendre le flambeau de la collaboration entamée par Delahaut avec la Bibliotheca Wittockiana − qui fait de la reliure artistique sa spécialité −, autour de leurs collections des éditions La Pierre d’Alun (fig.138). Par ailleurs, la collaboration de Wuidar avec l’architecte Charles Vandenhove est fructueuse, à la fois dans le domaine de l’intégration et dans celui du mobilier. Ainsi, en 1995, Vandenhove se sert d’un dessin de l’artiste pour recouvrir une table qu’il produit à une vingtaine d’exemplaires pour le restaurant du Balloir à Liège (fig.139). Wuidar décore en outre des objets ludiques tels que des bocaux à chiques, des planches à tartiner (fig.140) ou encore des jeux de cartes (fig.141), qui poussent le principe de démocratisation de l’art à son point culminant. Les moyens utilisés par les artistes pour rendre l’art accessible sont éclectiques. Bob Van der Auwera a pour sa part trouvé une solution adaptée à son travail : l’usage de matériaux peu onéreux tel que le coton pour la réalisation de bijoux ou de foulards, se servant de l’oxydation de l’acier pour créer des formes à l’allure géométrique. Dans le cadre du boîtier pour catalogue qu’il achève en 1994, le tissu et l’acier qui l’a oxydé sont réunis en un même et unique objet (fig.142).

À travers ces initiatives, les artistes espèrent lier art et vie quotidienne, jusqu’à les rendre indissociables. C’est une préoccupation qui concerne jusqu’à la peinture : « Je voudrais faire quelque chose qui soit comme la vie elle-même et qui ainsi deviendrait de l’art »81 déclare Amédée Cortier, dont nous connaissons les monochromes dévorant leur lieu d’exposition. Wuidar abonde en ce sens : « En tant que peintre, je constate que mon activité n’est pas terminée au sortir de l’atelier, mais que toute ma manière de vivre en est le prolongement. Ce que j’enseigne, ce que je lis, ce que je rédige n’est pas moins important pour moi que le tableau que je peins »82. Il est certain que les tentatives avortées ne sont pas rares et que le public ciblé ne répond pas toujours présent. Toutefois, des artistes tels Baugniet ou Delahaut ont le mérite d’avoir contribué au développement du design industriel moderne, même si ses aboutissants actuels s’éloignent de leur projet initial. Au-delà du design, l’incidence de l’abstraction géométrique touche de multiples domaines, comme le souligne Maury : « Il faut bien considérer que la mouvance construite a indéniablement forgé le langage plastique de la civilisation où nous vivons aujourd’hui, il faut voir le mobilier, le design, l’architecture, la typographie, la publicité, l’habillement...»83. Malgré qu’elle demeure encore trop souvent méconnue du public, le rayonnement de l’abstraction géométrique et de ses extensions n’est donc pas dérisoire. Héritière de l’avant-garde, sa singularité repose notamment sur son caractère pluridisciplinaire et sur sa foi en une société plus équitable, où l’art occupe la place qui lui revient. Après les balbutiements et déceptions rencontrés dans les années 1920, l’abstraction géométrique aura finalement su s’imposer en Belgique, portée par une génération pleine d’enthousiasme et de vigueur. Au gré des décennies, elle aura conquis de nombreux esprits, dont beaucoup n’ont pas été mentionnés, qui poursuivent aujourd’hui encore dans cette voie riche en perspectives.

81 A. Cortier, cité dans W. Derave, op.cit., p.64. 82 L. Wuidar, op.cit., p.29. 83 J.-P. Maury, La Revue MESURES art international et la mouvance construite, texte de la conférence donnée devant la Classe des Beaux-Arts de l’Académie royale de Belgique, p.7.

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Légendes des illustrations Chapitre I : L’union fait la forme (fig.1) Jo Delahaut, Sans titre, 1947. Encre de Chine sur papier, 29 x 23,5 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.2) Auguste Herbin, Oui, 1951. Huile sur toile, 100 x 81 cm, Donation Maurice Duvivier, propriété de la Communauté française, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Vincent Everarts © SABAM 2014 (fig.3) Jo Delahaut, Stridence, 1955. Huile sur toile, 79 x 64 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.4) Pol Bury, Composition 53, 1953. Huile sur toile, 100 x 60 cm, Musée des Beaux-Arts, Liège (BAL) G © photo : Musée des Beaux-Arts, Liège (BAL) © SABAM 2014 (fig.5) Kurt Lewy, Composition n°115, 1953. Huile sur toile, 67,5 x 57 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers M © photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.6) Guy Vandenbranden, Composition, 1956. Huile sur toile, 40 x 50 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers M © photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.7) Ray Gilles, Composition, 1953. Huile sur panneau, 122 x 190,5 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers P © photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.8) Jo Delahaut, Cristal, 1956. Huile sur toile, 65 x 100 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.9) Jean Rets, Antagone, 1957. Huile sur toile, 125 x 95 cm, Collection Belfius Banque G © Photo : Hugo Maertens © SABAM 2014 (fig.10) Francine Holley, Mezzo, 1953. Huile sur toile, 86 x 80 cm, FIBAC G

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© photo : Cédric Verhelst © Tous droits réservés (fig.11) Paul Van Hoeydonck, Sans titre, 1958. Acrylique sur papier, 47 x 47 cm, Collection privée M © photo : Milo profi fotographie © SABAM 2014 (fig.12) Stella Vanderauwera, Composition, 1954. Huile sur toile, 80,5 x 99,5 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers P © photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.13) Victor Noël, Sans titre, 1957. Huile sur unalit, 81,5 x 66,5 cm, Collection André Le Bozec, Paris P © photo : Pascal Gérard © Tous droits réservés (fig.14) Guy Vandenbranden, Sans titre, 1960. Huile sur toile, 159,5 x 139 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.15) Kurt Lewy, Composition n°205, 1963. Huile sur toile, 116 x 90 cm, FIBAC G © photo : Cédric Verhelst © Tous droits réservés (fig.16) Jean Rets, Ugoll, 1959. Huile sur toile, 80,5 x 120,5 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers G © Photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.17) Paul Van Hoeydonck, Composition, 1958. Huile sur toile, 81,5 x 100 cm, Collection privée G © photo : Victor Bentley © SABAM 2014 (fig.18) Gilbert Decock, Naos, 1964. Huile sur toile, 80 x 115 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.19) Henri Gabriel, Ligne brisée, 1960. Papier buvard teinté, diam. : 40 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.20) Victor Noël, Composition, s.d. Huile sur panneau, 100 x 67 cm, Propriété de l’ État belge, en dépôt au Musée Ianchelevici, La Louvière M

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© Photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.21) Amédée Cortier, Sans titre, s.d. Gouache sur papier, 68,5 x 57 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Brice Vandermeeren © Tous droits réservés (fig.22) Jean Dubois, Composition, s.d. Huile sur toile, 100 x 123 cm, FIBAC M © Photo : Cédric Verhelst © Tous droits réservés (fig.23) Francis Dusépulchre, Tensions sereines, s.d. Acrylique sur masonite, 105 x 111 x 5 cm, Collection de la Ville de La Louvière M © Photo : Brice Vandermeeren © Frédéric Dusépulchre (fig.24) Jacques Guilmot, Sculpture 7, 1970. Petit granit, 73 x 105 x 26 cm, Collections Ville de Mons, inv.880 P © Photo Lefrancq. Mons © Tous droits réservés (fig.25) Jo Delahaut, Douze carrés, 1988. Huile sur toile marouflée sur bois, 24 x 18 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.26) Marcel-Louis Baugniet, Construction au carré jaune, 1984. Huile sur métal, 49 x 34 cm, Collection A. Waedemon-Baugniet M © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.27) Jean-Jacques Bauweraerts, Sans titre, 1987-1989. Huile sur toile, 129,5 x 186 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.28) Jean-Pierre Husquinet, Sans titre, 1994. Acrylique sur toiles, (3x) 120 x 30 cm, Collection de l’artiste P © photo : Studio Dedée photographie © SABAM 2014 (fig.29) Jean-Pierre Maury, 16N, déstructuration intuitive, 1986. Acrylique sur toile, 165 x 119 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.30) Léon Wuidar, Sans titre, 1988. Huile sur toile, 100 x 75 cm, Atelier de l’artiste P

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© Photo : Léon Wuidar © SABAM 2014 Chapitre II : Vers le minimalisme (fig.31) Jo Delahaut, Poster blue, 1985. Huile sur toile, 195 x 155 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.32) Jo Delahaut, Ouvert, 1984. Pastel et huile sur toile, 100 x 73 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.33) Victor Noël, Yin Yang, 1990. Peinture, émail et multiplex, 110 x 110 cm, Collection de la Province de Hainaut, en dépôt au BPS 22, Charleroi M © Photo : G.G.A.C.H. Raymond Saublains © Tous droits réservés (fig.34) Amédée Cortier, Drieluik blauw, 1973. Acrylique sur toiles, (3x) 80 x 70 cm, Collection privée G © Photo : Brice Vandermeeren © Tous droits réservés (fig.35) Marthe Wéry, Sans titre, ca. 1968-1970. Acrylique sur panneau, 84 x 84 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Barbara Gross M © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.36) Marthe Wéry, Sans titre, 1983. Acrylique sur toile, (6x) 80 x 30 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Triangle bleu G © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.37) Jean-Jacques Bauweraerts, Monochrome ponceau n°14, 1993. Acrylique sur toiles, 102 x 102 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.38) Mark Verstockt, Compositie, 1963. Huile sur toile, 194,5 x 115 cm, C&MV Collection M © Kim Rothuys © SABAM 2014 (fig.39) Félix Hannaert, Sans titre, 1994. Huile sur toile de lin, (2x) 59,8 x 59,8 cm, Collection de l’artiste P © Photo Luc Schrobiltgen

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© Tous droits réservés (fig.40) Dan Van Severen, Compositie met twee vierkanten, 1964-1966. Huile et tempera sur toile, 130 x 97 cm, Mu.ZEE, Oostende G © Photo : AD-Art, Sint-Amandsberg © SABAM 2014 (fig.41) Dan Van Severen, Blauwe compositie, 1969. Huile sur toile, 162 x 130 cm, Collection S.M.A.K., Stedelijke Museum voor Actuelle Kunst, Gent M © Photo : Dirk Pauwels © SABAM 2014 (fig.42) Gilbert Decock, Uzes, 1970. Huile sur toile, 72 x 72 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.43) Gilbert Decock, Sangita, 1980. Huile sur toile, 100 x 100 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © © Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.44) Gilbert Swimberghe, Évolution 5, 1976. Huile sur panneau, 120 x 120 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers G © photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés Chapitre III : Le réel en souvenir (fig.45) Gaston Bertrand, Sans titre, s.d. Crayon et pastel sur papier, 51,5 x 75 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.46) Gaston Bertrand, Plaza Prado, 1955. Huile sur toile, 61 x 81 cm, Collection privée, Namur M © Photo : Béatrice Powis de Tenbossche © SABAM 2014 (fig.47) Gaston Bertrand, Florence géométrique, 1972. Huile sur toile, 195 x 97 cm, Fondation Gaston Bertrand, Bruxelles (ektachrome) G © photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.48) Marc Mendelson, Solstice d’été, 1955. Huile sur toile, 81,5 x 105 cm, Musée Royal des Beaux-Arts d’Anvers G © Lukas-Art in Flanders vzw, photo Hugo Maertens © SABAM 2014

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(fig.49) Louis Van Lint, Sans titre, 1954. Huile sur toile, 197 x 123 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Patrick Derom (ektachrome) G © photo : Vincent Everarts © SABAM 2014 (fig.50) Louis Van Lint, Tanks à Pernis, 1955. Huile sur toile, 64,5 x 79 cm, FIBAC M © Photo : Cédric Verhelst © SABAM 2014 (fig.51) Roger Dudant, Port, 1965. Huile sur toile, 87,5 x 128,5 cm, Collections Ville de Mons, inv.780 M © Photo Lefrancq.Mons © Tous droits réservés (fig.52) Roger Dudant, Sans titre, 7.4.80, 1980. Huile sur toile, 65 x 100 cm, Donation S. Goyens de Heusch, Musée de Louvain-la-Neuve M © photo Jean-Pierre Bougnet © Tous droits réservés (fig.53) Émile Lanc, Structures imaginaires, ca.1980. Acrylique sur papier marouflé sur toile, 179 x 134,5 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.54) Félix Hannaert, Sans titre, 2007. Acrylique, alkyde et huile sur toile de lin, 90 x 90 cm, Collection de l’artiste M © Photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.55) Luc Peire, Voorjaarslicht, 1956. Huile sur toile, 81,5 x 100 cm, Mu.ZEE, Oostende G © Photo : AD-Art, Sint-Amandsberg (fig.56) Luc Peire, Angola, 1976. Huile sur toile, 46 x 65 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.57) Luc Peire, Graphie 1135, 1973. Peinture sur formica, 42,5 x 83 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.58) Amédée Cortier, Sans titre, 1965. Huile sur toile, 100 x 66 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés

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(fig.59) Jo Delahaut, Sans titre, 1962. Huile sur toile, 195 x 130 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.60) Jo Delahaut, Sans titre, 1963. Huile sur toile, 144 x 94,5 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 Chapitre III : En marge de la toile (fig.61) Jo Delahaut, Géométrie active, 1961. Acrylique et éléments en bois sur panneau, 56 x 71 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.62) Jean Rets, Sans titre, ca.1976. Huile et éléments en bois sur panneau, 125 x 93 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.63) Guy Vandenbranden, Relief abstrait, 1965. Peinture sur bois, 37,5 x 31 cm, FIBAC P © Photo : Cédric Verhelst © SABAM 2014 (fig.64) Gilbert Swimberghe, Sans titre, ca.1969. Peinture sur bois, 39 x 39 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Brice Vandermeeren © Tous droits réservés (fig.65) Gilbert Swimberghe, Sans titre, 1971. Peinture sur bois, 34 x 34 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.66) Paul Van Hoeydonck, Composition, 1961. Plexiglas sur panneau, 26 x 24,5 cm, FIBAC P © Photo : Cédric Verhelst © SABAM 2014 (fig.67) Paul Van Hoeydonck, Composition, 1958. Collage en trois dimensions, verre, 49 x 48 cm, FIBAC P © Photo : Cédric Verhelst © SABAM 2014

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(fig.68) Francis Olin, Sans titre, s.d. Peinture et éléments en bois sur panneau, 110,5 x 110,5 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.69) Jean Dubois, Composition abstraite, s.d. Acrylique sur bois, 82 x 82 cm, Collection de la Ville de La Louvière G © Photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.70) Marthe Wéry, Peinture Montréal, 1984. Acrylique sur toile, (4x) 200 x 80 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Micheline Szwajcer G © Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.71) Pál Horváth, Module H/1 rencontre n°3, 1973. Gouache sur carton collé sur mdf, éléments en reliefs, 119,5 x 119,5 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons M © Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.72) Francis Dusépulchre, Luminance, 1984. Peinture cellulosique sur masonite et fibre optique, caisse en plexiglas, 121 x 101 x 15,5 cm, Collection privée P © Brice Vandermeeren © Frédéric Dusépulchre (fig.73) Francis Dusépulchre, Vibrations-Conversations, 2007. Laque acrylique sur panneau bacquélisé fibres de carbone, 223 x 120 x 120 cm, Collection privée M © Brice Vandermeeren © Frédéric Dusépulchre (fig.74) Mark Verstockt, Kubus, 1985. Plexiglas, 25 x 25 x 25 cm, FIBAC P © Photo : Cédric Verhelst © SABAM 2014 (fig.75) Hilde Van Sumere, Het onwezenlijke, 1983. Marbre de Carrare, 58 x 48 x 35 cm, Collection privée P © Photo : Nicolas Lemmens Studio © SABAM 2014 (fig.76) Bob Van der Auwera, A long Story, 2011. Acier oxydé, 37,5 x 30,5 x 10 x 10 cm et 37,5 x 30,5 x 9 cm, Collection de l’artiste M © Photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.77) Jean-Pierre Scouflaire, Autoportrait, 2008. Acier galvanisé, (3x) 30 x 30 x 30 cm, Collections Ville de Mons, inv.2008.3 P © Photo : Jacky Lecouturier

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© Tous droits réservés (fig.78) Jean-Pierre Maury, Soft ink, 1988. Encre sur carton, 29 x 29 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons P © Photo : Philppe De Formanoir © Tous droits réservés (fig.79) Henri Gabriel, Rythmes, 1964. Tissu plastique sur contreplaqué, 95 x 115 cm, Galerie Quadri, Bruxelles G © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.80) Walter Leblanc, Torsions P.F.324, 1963-1968. Bandes de polyvinyle bleu et noir sur fond noir, 40 x 40 cm, Collection Fondation Roi Baudouin, Fonds Thomas Neirynck, en dépôt au BAM, Mons G © Photo : Philppe De Formanoir © SABAM 2014 (fig.81) Walter Leblanc, Mobilo-Static, 1960. Bandes de polyvinyle rouge et bleu sur fond rouge et bleu, 100 x 100 x 5 cm, Fondation Nicole et Walter Leblanc, Bruxelles M © Photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.82) Walter Leblanc, Torsions, 1965. Acier laqué rouge et bleu, 200 x 15 x 0,4 cm, Belgacom Art (ektachrome) P © Photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.83) Pol Bury, Huit sphères, douze cubes et cinq cylindres sur un plan, ca.1967. Huile sur bois et moteur électrique, 72,4 x 72,1 x 19 cm, Galerie Patrick Derom M © Photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.84) Pol Bury, Quarante-neuf boules de même couleur sur un plan incliné mais surélevé, 1966. Bois, liège, fils de nylon et moteur électrique, 186 x 60,5 x 113 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Patrick Derom G © SABAM 2014 Chapitre V : L’art comme bien commun (fig.85) Gaston Bertrand, Projet pour le panneau mural de l’IRPA, 1962. Tempera sur Steinback, 54,7 x 37,4 cm, Fondation Gaston Bertrand, Bruxelles (ektachrome) G © photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.86) Gaston Bertrand, Composition, 1962. Huile sur toile, 334 x 497 cm, Institut royal du Patrimoine artistique, Bruxelles P © KIK-IRPA, Bruxelles © SABAM 2014

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(fig.87) Jo Delahaut, Sans titre, ca.1956. Peinture murale (détruite), Foyer Montagnard (architecte Victor Bourgeois), Montigny-sur-Sambre M © Archives d’Architecture Moderne, Bruxelles (fig.88) Jo Delahaut, Projet pour une décoration murale pour un bassin de natation à Evere (non réalisé), s.d. Collage sur carton, 40 x 104 cm, Archives Jacqueline Delahaut M © photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.89) Jo Delahaut, Projet pour la céramique murale de la Piscine du Palais des Sports à Butgenbach, ca.1987. Peinture sur carton, 32,6 x 55 cm, Archives Jacqueline Delahaut G © photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.90) Guy Vandenbranden, Compositie - projet pour le vitrail de la station de métro Gare de l’Ouest à Bruxelles, 1982. Dessin sur carton, 30 x 110 cm, Collection Région Bruxelles-Capitale G © photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.91) Hilde Van Sumere, Driehoek in beweging - projet pour la sculpture de la station de métro Ossegem à Bruxelles, 1982. Marbre de Carrare, 69 x 57 x 35 cm, Collection Région Bruxelles-Capitale M © photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014

(fig.92) Walter Leblanc, Archétypes - projet pour les haut-reliefs de la station de métro Simonis à Bruxelles, 1984. Fils de coton et latex blanc sur toile de coton, 80 x 155 cm, Collection Région Bruxelles-Capitale G © photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.93) Walter Leblanc, Archétypes, 1986. Acier corten et bois, Station de metro Simonis, Collection Région Bruxelles-Capitale G © Photo : Alain Demets © SABAM 2014 (fig.94) Jean Rets, Ortem - projet pour la céramique murale de la station de métro Arts-Lois, 1976. Huile sur bois, 40 x 55 cm, Collection Région Bruxelles-Capitale G © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.95) Jean Rets, Ortem, 1976. Céramique murale émaillée, 320 x 440 cm, Station de métro Arts-Loi, Collection Région Bruxelles-Capitale M © Photo : Alain Demets © SABAM 2014

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(fig.96) Jean Rets, Projet pour un relief mural pour le métro (non réalisé), 1975. Acrylique sur bois, 12 x 51,7 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers M © photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.97) Jacques Moeschal, Signal d’Hensies - projet pour la sculpture à la frontière franco-belge, 1972. Métal poli, 40,5 x 12,1 x 2,8 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers M © photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.98) Pol Bury, Maquette pour la fontaine pour le Musée Salomon R. Guggenheim à New York, ca.1980. Peinture sur bois, 17,5 x 66,5 x 27 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Patrick Derom P © Photo : Jean-François De Witte, Bruxelles © SABAM 2014 (fig.99) Pol Bury, Capteur de ciel - maquette pour la sculpture sur le rond-point de la gare de La Louvière, 2004. Acier inoxydable, panneau et moteur électrique, 59 x 69,5 x 69,5 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Patrick Derom M © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.100) Pol Bury, Deux projets pour une décoration murale pour la maison de l’architecte Charles Carlier à Liège, s.d. Huile sur bois, 44 x 33,5 et 44 x 24,5 cm, Collection privée, Courtesy Galerie Patrick Derom G © Photo : Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.101) Francine Holley, Fortissimo - projet pour la décoration murale du hall d’entrée de l’immeuble Helsinki Dalle Italie Paris XIII, 1979. Gouache sur papier, 9,5 x 10,5 cm, Collection privée P © Tous droits réservés (fig.102) Luc Peire, Place carré, 1976-1982. Sol en galets de marbre blanc, imitation ardoise en epoxy et béton, pourtour de béton gris, 620 x 620 m, Place Georges Pompidou, Marne-la-Vallée M © Photo Atelier Luc Peire © Stichting Jenny & Luc Peire, Knokke (fig.103) Luc Peire, Teken U.Z. Gasthuisberg - maquette pour Struktuur/Signaal (1975, non réalisé) et pour l’intégration à l’hôpital universitaire de Louvain (réalisé en 1992), 1975-1992. Huile sur bois, 137 x 76 x 73,5 cm, André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers M © photo : Luc Schrobiltgen © Stichting Jenny & Luc Peire, Knokke (fig.104) Léon Wuidar, Projet pour le cube central du carrelage en forme de labyrinthe du Sart-Tilman à Liège, 1981. Encre de Chine sur papier, 22 x 34 cm, Collection privée M

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© photo : Raymond Delhaye © SABAM 2014 (fig.105) Jean-Pierre Maury, Projet pour la peinture acrylique sur carton marouflé sur panneau d’aggloméré du Centre Culturel et Sportif de Neufchâteau, 1983-1984. Acrylique sur carton, 62 x 91,5 cm, Collection M. et Mme Bruno Corbisier M © photo : Sophie Collette © Tous droits réservés (fig.106) Pál Horváth, La Couleur du Nord – projet pour la sculpture Boulevard Léopold II à Bruxelles, 1996. MDF laqué, 181 x 40 x 40 cm, Collection Belfius Banque P © Photo : Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.107) Francis Dusépulchre, A Tower for Europe - maquette pour l’habillage du noyau de béton de la Tour des Finances à Bruxelles (non réalisé), 1984. Peinture cellulosique sur masonite et fibre optique, 146 x 61 x 11 cm, Collection privée P © Photo : Brice Vandermeeren © Frédéric Dusépulchre (fig.108) Bob Van der Auwera, Horizontale - maquette pour un relief mural rue de Haerne à Etterbeek (non réalisé), 1991. MDF, acier noirci et acier oxydé, 136 x 247 x 31 cm, Collection de l’artiste P © Photo : Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés Chapitre VI : L’art au quotidien (fig.109) Jos De Mey, Affiche Nationaal Salon voor Moderne Sociale Meubelkunst, 1955. Gouache sur papier, 49,8 x 36 cm, Design museum Gent M © Photo Michel Burez © Tous droits réservés (fig.100) Frieda Burssens, Affiche Nationaal salon voor het modern sociaal meubel, 1956. Papier et crayon sur papier, 49,8 x 36 cm, Design museum Gent M © Photo Michel Burez © Tous droits réservés (fig.111) Kurt Lewy, Sans titre, 1955. 10 x 7,5 cm, Émail et cuivre, Galerie Quadri, Bruxelles M © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.112) Marcel-Louis Baugniet, Projet pour un bureau pour l’Expo ‘58, ca. 1958. Gouache et collage sur papier, 47 x 57 cm, Galerie Quadri, Bruxelles G ©Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014

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(fig.113) Marcel-Louis Baugniet, Lampe sur pied, ca.1955. Marbre, métal et papier chinois, 154 x 30 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.114) Marcel-Louis Baugniet, Plateau, ca.1970. Peinture sur coquilles d’œufs et métal, diam. : 26,5 cm, Collection A. Waedemon-Baugniet G ©Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.115) Marcel-Louis Baugniet, Assiettes, 1952. Porcelaine de Dour, diam. : (4x) 19 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.116) Marcel-Louis Baugniet, Verres à eau, 1952. Verrerie de Manage, (2x) 9 x 6 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.117) Marcel-Louis Baugniet, Service à café, 1993. Porcelaine de Limoges, diam. : (6x) 8 cm, diam. : 15 cm, 10 x 9 cm, 14 x 15 cm, Galerie Quadri, Bruxelles M © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.118) Marcel-Louis Baugniet, Révolution constructiviste - bougeoir, 1989. Tôle peinte, 9 x 23 cm, Collection A. Waedemon-Baugniet M © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.119) Luc Peire, Segundo - tapis, 1986. Laine, 240 x 170 cm, Collection privée G © Atelier Luc Peire © Stichting Jenny & Luc Peire, Knokke (fig.120) Jo Delahaut, Assiette, 1986. Céramique, diam. : 30 cm, Collection privée P © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.121) Jo Delahaut, Assiette, 1986. Céramique, diam. : 30 cm, Collection privée P © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.122) Jo Delahaut, Foulard, 1990. Soie, 86 x 86 cm, Collection privée P © Photo Daniel Locus © SABAM 2014 (fig.123) Jo Delahaut, Reliure de l’ouvrage Jo Delahaut, Journal (Fragments) 1978-1979, 1991. Tissu, Jamar rel., 23,5 x 24 cm, Collection privée G

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© Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.124) Jo Delahaut, Pendentif, 1980. Argent, 7 x 5 cm, Collection privée P © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.125) Jo Delahaut, Pendentif, 1984. Argent, 6 x 4 cm, Collection privée P © Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.126) Henri Gabriel, Pendentif, 1965. Plexiglas, argent et cuivre, 10 x 4 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.127) Henri Gabriel, Boucles d’oreille, 1964. Plexiglas, argent et cuivre, 5 x 1,5 cm, Galerie Quadri, Bruxelles M © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.128) Hilde Van Sumere, Râ - pendentif, 1977. Argent, 10,6 x 8 x 0,4 cm, Collection privée G © Photo Daniel Locus © SABAM 2014 (fig.129) Gilbert Decock, Pendentif, 1995. Argent, 6,4 x 6,4 cm, Collection privée M ©Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.130) Gilbert Decock, Pendentif, 1995. Argent, 6,7 x 6,7 cm, Collection privée M ©Photo Brice Vandermeeren © SABAM 2014 (fig.131) Gaston Bertrand, Pendentif, 1971-1974. Or, joaillerie Leysen Frères, 3,5 x 3 cm, Fondation Gaston Bertrand, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.132) Willy Van der Meeren, Armoire à vêtements, 1952. Bois, métal et laque, produit par Tubax, 175 x 81 x 55 cm, Design museum Gent M © Anthony De Meyere © Tous droits réservés (fig.123) Willy Van der Meeren, Chaise, ca.1953. Bois peint et métal noir, produit par Tubax, 80 x 35 x 45 cm, Galerie Quadri, Bruxelles P © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés

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(fig.134) Emiel Veranneman, Armoire, 1978-1979. Laque sur bois, 230 x 160 x 55 cm, Design museum Gent P © Design museum Gent © SABAM 2014 (fig.135) Willy Van der Meeren, Appartement modèle pour l'exposition Le Foyer d'aujourd'hui (1960) dans l'immeuble Ieder Zijn Huis, Evere M © A & D 50 vzw (fig.136) Jean-Pierre Maury, Montre de poignet, 1994. Cuir, métal et plastique, édité par Dreifuss Creative Swiss Watches, Zurich, 24 x 5,5 x 1 cm, Collection de l’artiste P © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés (fig.137) Léon Wuidar, Reliure de l’ouvrage Léon Wuidar, Douze dessins, Liège, Musée Saint-Georges ; Crisnée, Yellow Now, 1979. Box, ivoire végétal et ébène, Véronique Halska rel., 24 x 18 x 0,8 cm, Collection privée G © Photo Léon Wuidar © SABAM 2014 (fig.138) Léon Wuidar, Reliure de l’ouvrage Pierre Courtin et Jean-Pierre Pincemin, Ça est pas du pareil, Bruxelles, La Pierre d'Alun, 2007. Box, Christine Léonard rel., 22,7 x 17,5 x 1,9 cm, Collection privée M © Photo Léon Wuidar © SABAM 2014 (fig.139) Léon Wuidar et Charles Vandenhove, Table, 1995. Bois et émail (dessin de Léon Wuidar sérigraphié), 72 x 85,5 x 85,5 cm, Collection privée P © Photo Léon Wuidar © SABAM 2014 (fig.140) Léon Wuidar, Petit peint, 2003. Peinture vinyle sur bois, 24 x 13,5 x 0,9 cm, Atelier de l’artiste M © Photo Léon Wuidar © SABAM 2014 (fig.141) Léon Wuidar, Jeu de cartes et étui, 2012. Papier plastifié, 9 x 6 x 2 cm, Atelier de l’artiste P © Photo Léon Wuidar © SABAM 2014 (fig.142) Bob Van der Auwera, Boîtier pour le catalogue Prétexte publié à l'occasion de l’exposition du groupe Artes Bruxellae à La Bellone, 1994. Acier et monotype en coton oxydés, 23,2 x 23,7 x 3,5 cm, Collection de l’artiste P © Photo Luc Schrobiltgen © Tous droits réservés

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Extras (fig.143) Bob Van der Auwera, Égaux et différents, 1989. Acier oxydé, 200 x 50 x 50 cm, Collection de l’artiste G © Photo Bob Van der Auwera © Tous droits réservés (fig.144) Pál Horváth, Totem bleu orientable, 1996. Bois d'ayous massif, taillé dans la masse et recouvert de peinture acrylique et d'un vernis protecteur, 310 x 25 x 25 cm, Collection de l’artiste G © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.145) Jo Delahaut, Signe bleu, 1988-2007. Acier peint, 210 x 120 x 50 cm, Galerie Quadri, Bruxelles M © Photo Luc Schrobiltgen © SABAM 2014 (fig.146) Léon Wuidar, Drapeau, 1999. Impression sur polyester, 150 x 200 cm, Atelier de l’artiste G (au début ou à la fin car symbolique d’une identité géométrique) © Photo Léon Wuidar © SABAM 2014

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Orientation bibliographique

Quelques ouvrages généraux et publications d’époque, ceci excluant les monographies d’artistes

- P. Bourgeois, C. De Maeyer, J. Dypréau, e.a., Art abstrait-Formes, 1956. - M. Bilcke et R. Rousseau, Geoform. Hommage à Vantongerloo, s.l.,1967. - Art concret en Hainaut, Mons, Musée des Beaux-Arts, 9 février – 3 mars 1974. - F. Defour, L’art du meuble en Belgique au XXe siècle, de Horta à nos jours, Tielt,

Éditions Lanoo, 1979. - La surface sculpturale, Bruxelles, Atelier 340, 22 septembre – 16 décembre 1984. - Autour du groupe Art abstrait (1952-1956). Un essai de géographie esthétique: Les

abstractions constructives 1945-1964, Ramet-Flémalle, Centre wallon d’art contemporain de la Communauté française La Chataigneraie, 18 octobre – 16 novembre 1986.

- Art Abstrait en Belgique, Fondation pour l’Art belge contemporain, Mons, Musée des Beaux-Arts, 9 avril – 10 mai 1987.

- Aspects actuels de la mouvance construite internationale, Verviers, Musée des Beaux-Arts, mars – avril 1993 ; La Louvière, Centre de la gravure et de l’image imprimée, mai – juin 1993.

- P. Roberts-Jones, La peinture abstraite en Belgique 1920-1970, Bruxelles, Crédit communal, 1996.

- A. de Wasseige, Guide de l’art public, Bruxelles, Fondation Roi Baudouin, 1996.

- Art construit belge [d’hier à demain], La Louvière, Musée Ianchelevici, 19 janvier – 4 mars 2001.

- J.-L. Genard, Les pouvoirs de la culture, Bruxelles, Éditions Labor, (Coll. Quartier Libre), 2001.

- K. J. Geirlandt (dir.), L’art en Belgique depuis 1945, Anvers, Fonds Mercator, 2001.

- F. Bex (dir.), L’art en Belgique depuis 1975, Anvers, Fonds Mercator, 2001.

- Sculpture construite belge [géométries variables], La Louvière, Musée Ianchelevici, 7 mai – 20 juin 2004.

- C. Leblanc (dir.), Art nouveau & design: les arts décoratifs de 1830 à l’Expo 58, Bruxelles, Racine, 2005.

- Abstractions construites en Communauté française de Belgique de 1922 à 1980, Bruxelles, Communauté française de Belgique, 25 mai – 24 juin 2005.

- Abstractions construites en Communauté française de Belgique de 1980 à nos jours, Bruxelles, Communauté française de Belgique, 29 novembre 2006 – 4 janvier 2007.

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- S. Goyens de Heusch, Art belge au XXe siècle. Collection de la Fondation pour l’art belge contemporain. Musée de Louvain-la-Neuve, Bruxelles, Éditions Racine, 2006.

- É. Van Hessche (dir.), Les formes contemporaines de l’art engagé. De l’art contextuel aux pratiques documentaires, Bruxelles, La Lettre volée, 2007.

- D. Laoureux, Cobra passages, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 2008.

- D. Laoureux, L’art abstrait en Belgique (1910-2010). La Collection Dexia, Anvers, Fonds Mercator, 2010.

- M. Palmer, L’art belge, d’Ensor à Panamarenko (1880-2000), Bruxelles, Éditions Racine, 2013.

- J. De Smet (dir.), Modernisme. L’art abstrait et l’Europe, Bruxelles, Fonds Mercator, 2013

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Cet ouvrage est publié à l’occasion de l’exposition Abstractions géométriques belges. De 1945 à nos jours présentée au BAM du 22 mars au 13 juillet 2014.

Cette exposition est placée sous le patronage de la Ministre de la Culture et de l’Audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles, d’Élio Di Rupo, Bourgmestre en titre, de Nicolas Martin, Bourgmestre faisant fonction et de Joëlle Kapompolé, Échevine de la Culture.

CATALOGUE

Auteurs

Laura Neve

Denis Laoureux, Professeur à l’Université libre de Bruxelles

Mise en page et édition

Pandora Publishers....

Coordination

Caroline Dumoulin, chargée de mission – cellule exposition – Pôle muséal de la Ville de Mons

EXPOSITION

Commissariat de l’exposition

Laura Neve

Comité organisateur

Service Pôle muséal - Cellule expositions

Xavier Roland, Responsable du Pôle muséal

Murielle Laurent, Chef de Bureau

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Coordination générale de l’exposition

Caroline Dumoulin, Chargée de mission culturelle

Collaborateurs

Graphisme Yves Denayer – yd* créations graphiques

Scénographie Daphné Schiettecatte

Diffusion Géraldine Simonet

Administration Sandra Urbain

Régie Joanna Karcher et Philippe Poulet, régisseurs, Mario Lunetta, assistant régisseur, Yves Gobert, Djilali Moulay et Antonio Mascolo

Cellule Collections Michel De Reymaeker, Conservateur en chef, Sophie Simon, Conservateur – adjoint et Paul Duquesnoy, restaurateur

Service éducatif Joëlle Laurant et l’équipe du Dynamusée (Delphine Dupont, Benoît Rousseau, Olga Wajda)

Médiation Laurence Herman

Evénementiel Odile Moreau

Gardiennage Medhi Bourgeois assisté de Xavier Vandenborre et l’équipe de gardiens

Remerciements

Cette exposition bénéficie du soutien de la Communauté française de Belgique. À ce titre, nous remercions la Ministre de la Culture et de l’Audiovisuel de la Communauté française de Belgique.

Nous tenons également à adresser notre reconnaissance aux collectionneurs, galeristes, artistes et directeurs d’institutions qui ont contribué, par les prêts consentis, à la réalisation de l’exposition :

A&D 50 vzw

Archives d’Architecture Moderne

Collection Belfius Banque

Collection de la Province de Hainaut – Dépôt B.P.S.22 - Charleroi

Collection Région Bruxelles-Capitale – STIB

Collectie S.M.A.K, Stedelijk Museum voor Actuele Kunst, Gent

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Belgacom Art

Fondation Gaston Bertrand, Bruxelles

Fondation Roi Baudouin

Fédération Wallonie-Bruxelles, Direction du patrimoine culturel

Fondation Walter et Nicole Leblanc, Bruxelles

Design museum Gent

Musée de Louvain-la-Neuve

Institut royal du Patrimoine artistique

Musée Royal des Beaux-Arts d’Anvers

Musée des Beaux-Arts de Liège (BAL)

Musée Ianchelevici, La Louvière

Mu.Zee Oostende

André Garitte Foundation, Bruxelles-Anvers

Archives Jacqueline Delahaut

C & M V Collection

Collection André Le Bozec, Paris

Galerie Patrick Derom

Galerie Quadri, Bruxelles

FIBAC

M. Bob Van der Auwera

M. Henry Bounameaux

M. & Mme Bruno Corbisier

M. Serge Goyens de Heusch

M. Felix Hannaert

M. Pál Horváth

M. Jean-Pierre Husquinet

Stichting Jenny & Luc Peire, Knokke

M. A. Waedemon-Baugniet

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Ainsi que les prêteurs qui ont souhaité garder l’anonymat.

Nous tenons également à remercier les personnes ayant apporté un soutient tout particulier à l’exposition et au catalogue qui l’accompagne, par leurs contributions diverses, précieux conseils, encouragements ou relectures : Ben Durant, Alice Horlait, Denis Laoureux, Maud et Alain Neve, Anthony Spiegeler et Bob Van der Auwera

Droits de reproduction

© SABAM 2014

Marcel-Louis Baugniet, Jean-Jacques Bauweraerts, Gaston Bertrand, Pol Bury, Gilbert Decock, Jo Delahaut, Pál Horváth, Auguste Herbin, Jean-Pierre Husquinet, Walter Leblanc, Marc Mendelson, Jacques Moeschal, Jean Rets, Stichting Jenny & Luc Peire, Knokke, Guy Vandenbranden, Paul Van Hoeydonck, Louis Van Lint, Dan Van Severen, Hilde Van Sumere, Emiel Verranneman, Mark Verstockt, Marthe Wéry et Léon Wuidar.

© Tous droits réservés

Roger Dudant, Francis Dusépulchre, Félix Hannaert, Francine Holley, Victor Noël, Luc Peire, Gilbert Swimberghe, Bob Van der Auwera, Willy Van Der Meeren, Jean-Pierre Maury

© Frédéric Dusépulchre

Nous avons par ailleurs cherché, en vain, les héritiers de certaines œuvres ou documents. Nous les invitons à s’adresser au Pôle muséal de la Ville de Mons.

Crédits photographiques (rajouter numéros de pages)

A & D 50 vzw

AD-Art, Sint-Amandsberg

Atelier Luc Peire

Victor Bentley

Jean-Pierre Bougnet

Sophie Collette

Ph. De Formanoir

Raymond Delhaye

Alain Demets

Design Museum Gent

Jean-François De Witte, Bruxelles

Vincent Everarts

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Pascal Gérard

G.G.A.H Raymond Saublains

KIK-IRPA, Bruxelles

Jacky Lecouturier

Nicolas Lemmens studio

Daniel Locus

Lukas-Art in Flanders vzw

Lefrancq.Mons

Léon Wuidar

Hugo Maertens

Dirk Pauwels

Béatrice Powis de Tenbossche

Kim Rothuys

Luc Schrobiltgen

Studio Dedéé photographie

Bob Van der Auwera

Brice Vandermeeren

Cédric Verhelst

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4e de couverture

À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, l’abstraction belge connaît un renouveau, se déployant selon deux sensibilités distinctes : lyrique et géométrique. Les artistes s’inscrivant dans cette seconde tendance partagent un idéal de structure et de mesure et s’unissent dès le milieu des années 1940 pour défendre leur moyen d’expression basé sur la raison. Les formes géométriques et les couleurs pures en sont les composantes essentielles. Ils entendent en outre contribuer à la reconstruction de leur société, notamment par l’intermédiaire de l’art public. Intégrer l’art au quotidien devient une préoccupation constante, les arts appliqués étant explorés dans ce même but. Un véritable projet social sous-tend leur démarche : mettre l’art à la portée de tous.

Cet ouvrage invite à la découverte de l’abstraction géométrique en Belgique, à travers ses multiples manifestations après 1945. L’interdisciplinarité qui caractérise le mouvement y est mise en exergue, rassemblant des peintures mais aussi des sculptures, du mobilier, de la joaillerie, des textiles et des projets d’œuvres réalisées dans l’espace public. De plus de quarante artistes aussi variés que Jo Delahaut, Pol Bury, Dan Van Severen, Marc Mendelson, Marthe Wéry ou Walter Leblanc, les œuvres sélectionnées proviennent des collections de la ville de Mons et de nombreuses collections institutionnelles et privées. La trame thématique attribuée à ce livre révèle les différentes spécificités de l’un des courants majeurs de l’art belge à l’activité toujours foisonnante, aujourd’hui encore trop souvent méconnu.