Sociétés secrètes au Moyen Âge revue201

download Sociétés secrètes au Moyen Âge revue201

of 36

Transcript of Sociétés secrètes au Moyen Âge revue201

tre philosophe aujourdhui

Sagesse

Vie et mort

du parfait catharePhilosophies

Lamiti philosophiqueCivilisations

Lidal chevaleresque des TempliersPsychologie

Lducation des sensRencontre avec...

Michel Danino

DOSSIER

Socits secrtes au Moyen-geRevue de Nouvelle Acropole n201 4 Numro de novembre-dcembre 2007

Penser Vouloir AgirCOURS DE PHILOSOPHIEScompares

dOrient et dOccident.Accessible tous. Facile et convivial.www.nouvelleacropole.org

tre philosophe aujourdhuiN 201 novembre-dcembre 2007 4

NOTRE COUVERTURE : Les Templiers

Nouvelle Acropole Revue n201 - ISSN 0396-7387 - Dpt lgal novembre 2007. dit par la Fdration Franaise des Nouvelle Acropole, association franaise rgie par le dcret loi du 1er juillet 1901 Sige social Administration : La Cour Ptral, D941, 28340 Boissy-ls-Perche Rdaction 6, rue Vronse 75013 Paris - 01 42 50 08 40 Internet : http://www.nouvelleacropole.org Directeur de Publication : Fernand SCHWARZ - Rdacteur en chef : Isabelle OHMANN - Secrtariat de rdaction : Marie-Agns LAMBERT - Maquette : Sylvie COTS ET Caroline LAFITTE - Crdit photo : Nouvelle Acropole - Impression : Gabel. Prix de vente : 4 - Reproduction interdite sans autorisation. http://www.revue-acropolis.com

Sommaire5 Editorial La journe mondiale de la philosophiePar Fernand SCHWARZ

Prochain numro Parution janvier 2008

N 202 : Les contes, une voie dveil

6

6 Socit Peut-on pratiquer la paix dans une socit de violence ?Par Fernand SCHWARZ

8 Sciences Latome, une histoire sans finPar Ramon SANCHIS

D O S S I E R

11 Art et symbolisme La fentre de TomarPar Isabelle OHMANN

14

12 Civilisations Rituels dinitiation dans lOrdre du TemplePar Pascal CROSNIER et Jean-Pierre LUDWIG

14 Civilisations Lidal chevaleresque des templiersPar Pascal CROSNIER et Jean-Pierre LUDWIG

16 Sagesse Vie et mort du parfait catharePar Marie-Agns LAMBERT

18

18 Psychologie Lducation des sensPar Laura WINCKLER

20 Rencontre avec Michel Danino, lInde de nulle partPar Laura WINCKLER

23 La page de Calliope Laurat du concours 2006 24 Philosophies Lamiti, une vertu philosophiquePar Olivier LARRGLE

20

26 Philosophie vivre Lexprience et la rnovationPar Dlia STEINBERG GUZMAN

28 Question philo Quest-ce que le respect ?Par Lonie BEHLERTan-Pierre LUDWIG

26

30 lire 34 Agenda expositions

3

Abonnez-vous la revue

tre

phil

osop

he a ujo

urd

hui

Vie et m du parf ort ait cath are Ph Lamit i philoso phique Civilis ations Lida l chevale des Te resque mpliersogie ilosop hies

Sagess

es

ec Miche l Danin o

Renco

Lduca tion de sntre av

Psychol

sens

1 an 20

Revue de No uvelle Num Ac ro de novemb ropole n 20 re-dc embre 1 4 2007

Socit ER au Mo s secrte s yen- ge

DOSS

I

5 NABONNEZ-VOUS !Coupon dcouper ou recopier sur papier libre

Acropolis est une revue philosophique indpendante. Elle dveloppe une rflexion contemporaine sur la vie et sur lindividu, ancre dans les philosophies et les sagesses traditionnelles. Elle se veut libre de toute publicit. Sabonner ou abonner un ami lui permet de continuer exister.Acropolis est aussi sur internet : www.nouvelleacropole.org Vous pourrez y consulter les articles de votre choix. Sur www.revue-acropolis.com consultez la revue acropolis au format pdf.

Nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prnom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .............................................................. Code postal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tl . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse e-mail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Prochain numro N 202

Les contes, une voie dveilSocit : Linsertion dans la socit par le conte Sagesses : Il tait une fois les contes Psychologie : Linterprtation des contes Et parmis nos rubriques : Sant : Lme et la sant du corps Philosophies : La beaut peut-elle sauver le monde ?

10 numros /2 ans + 1 dossier spcial = 38 Je joins mon rglement de 20 (1 an) ou 38 (2 ans) par chqueJe mabonne pour 5 numros / 1 an + un dossier spcial * = 20 bancaire ou postal, lordre de NOUVELLE ACROPOLE Abonnez-vous la revue Acropolis. A remplir (ou recopier sur papier libre) et renvoyer au centre Nouvelle Acropole le plus proche de chez vous ; ou Revue Acropolis FDNA - 6 rue Vronse, 75013 Paris.Tarifs valables pour lUE pour dautres destinations, nous consulter.

*

Vers dors de Pythagore

ou

Les Templiers

au choix

sortie le 1er janvier 2008 - Prix du N: 4

EditorialLa journe mondiale de la philosophiee 15 novembre 2007 nous clbrerons la sixime journe mondiale de la philosophie sous lgide de lUNESCO. Comme il est naturel, Nouvelle Acropole soutient activement cette action par une participation dans plus de ses deux cents centres travers le monde. Il a fallu attendre le dbut du XXIme sicle pour que se produise une prise de conscience, au niveau mondial, de limportance de la philosophie dans la dfense des liberts et du dveloppement de lindividu en tant que citoyen. Par ses valeurs et sa dmarche, la philosophie est la mieux place pour encourager lindividu dans le dveloppement dun comportement de volontariat civil, social et humanitaire. Nouvelle Acropole, nous avons pu le constater. Nos groupes de volontariat tmoignent dans le monde de la capacit de la philosophie mettre en action lhomme dans des comportements nobles qui lhonorent. La jeunesse trouve ainsi une rponse son besoin didal, ayant le sentiment dtre utile et, en mme temps, de se construire soi-mme. Loin dtre dsutes, les coles de philosophie pratiques sont un atout dans nos socits en devenir. Lhistoire nous dmontre que lorsque la philosophie ne peut pas tre librement pratique, lorsque les visions du monde ne peuvent pas tre confrontes, que les individus ne sont pas encourags penser par eux-mmes, cest la culture en tant que telle qui saffaiblit. Et lobscurantisme et la violence prennent le pas. Ce numro prsente un dossier sur lhistoire et la vision dun certain nombre de groupes qui durent cacher une partie de leurs enseignements et de leurs pratiques, cause du dogmatisme de leur poque et la difficult dtre un penseur libre. On se rend compte, avec le recul du temps, que ces groupes auraient pu ventuellement fconder et enrichir davantage leurs socits si on les avait laisss sexprimer, ce que nous constatons dailleurs avec les Templiers, par rapport luvre presque inconnue du grand public quils ont russi raliser au Portugal, notamment dans la ville de Tomar. La plupart des socits secrtes connues le sont devenues parce quelles neurent pas lenvironnement adquat pour sexprimer et non parce quelles voulaient a priori le devenir. Leur qute vritable ntait pas celle du secret mais celle du mystre. Et dans son processus de dvoilement des mystres que porte chacun, il ny a pas de meilleure dmarche que la philosophiePar Fernand Schwarz Prsident de la Fdration Franaise Des Nouvelle Acropole

L

5

Socit

Peut-on pratiquer ladans une socit de

violence ?Par Fernand Schwarz

paix

DEPUIS TOUJOURS, LES HOMMES SE BATTENT POUR LA PAIX. QUEST-CE QUE LA PAIX ? EST-ELLE SIMPLEMENT LA PRSERVATION DU CADRE DE VIE OU LE RSULTAT DUN TRAVAIL SUR SOI PERMETTANT DTRE CONFIANT ET SEREIN FACE LA VIE ET AUX AUTRES ?u latin pax, la paix dsigne habituellement un tat de calme ou de tranquillit ou une absence de perturbation, dagitation ou de conflit. Elle est universellement considre comme un idal auquel tout le monde aspire. La paix permet de vivre la libert dans le calme.

D

promouvoir la paix dans le cadre social et de lexiger.

Assumer les conflitsPour Hobbes, la paix implique de se battre pour elle, pour faire cesser les conflits. Cela suppose que les deux parties assument le conflit, cest--dire acceptent leur part de responsabilit et cherchent une solution durable. Mais pour arriver cela, il faut sortir de la tendance animale dans laquelle le conflit se rgle par la force (la force autoritaire et autocratique du souverain, du tyran, du despote ou de la masse), la fuite ou, au contraire, par lintimidation. Les socits les plus volues ont toujours eu recours la loi pour grer un conflit dintrt ou de violence. Mais beaucoup didologies se fondent sur la notion de force, parfois de faon paradoxale, au nom du droit ou du respect des droits.

La paix est laffaire de tousPour Cicron, la prservation du cadre de vie permet de vivre en toute libert. Si ce cadre est menac, si la libert est en danger, alors il faut sortir de son confort personnel, se battre et militer dans la rue pour la paix. Si on ne le fait pas, lespace social perd sa tranquillit et la violence envahit la socit. Ce dfi est celui de lpoque romaine : exercer sa libert dans un cadre o rgne lharmonie des relations sociales entre citoyens, grce un intrt collectif et social, ce qui est la clef de la dfinition du citoyen. La perte du modle de citoyen et de lexercice des droits et devoirs du citoyen peut attirer la violence en socit. Un des devoirs du citoyen est justement de

La paix, un tat instituerPour quune socit soit vritablement humaine, elle doit se soucier de lpanouissement rel des

6

hommes, pour quils exercent leur libert et quils puissent agir par rapport eux-mmes et aux autres, et progresser. Pour cela, ltat doit institutionnaliser la paix par des lois, des rgles, des critres dautolimitation des uns et des autres, sous peine dassister un tat de violence permanent. La scurit ne dpend pas uniquement de labsence de rapports dhostilit. Il faut aller au-del des rgles de simple tolrance et tre capable de vivre ensemble, de tisser des liens les uns avec les autres, de cultiver la paix sociale. Si ces liens sont distendus, la paix ne sera plus pratique et chacun restera chez soi. Dans le meilleur des cas, les uns ne seront pas hostiles aux autres mais on aboutira une paix arme. La violence apparat non pas cause des problmes socio-conomiques mais cause de la perte des valeurs morales et de la disparition du droit. On ne rsout pas la violence par de simples mesures socio-conomiques. On nachte pas la paix, on la partage.

tte froide devant les vnements et repousser ses craintes. Ce qui implique, du point de vue individuel, se matriser soi-mme, et du point de vue collectif, dialoguer, changer et vivre ensemble pour ne pas sombrer dans la violence aveugle. picure prcise que si les institutions humaines visent raliser le bien de la nature, cest--dire confrer aux hommes la scurit et la confiance, leur uvre est limite et se confine au domaine des biens matriels et artificiels. Les biens matriels, les honneurs, un bon cadre social ne sont pas suffisants pour que la paix soit durable et que la confiance puisse tre partage. La paix ne dpend donc pas du seul pouvoir politique.

la paix au niveau individuel et promouvoir des valeurs de solidarit et de paix sociale au niveau collectif. Do lnorme importance dinstitutionnaliser la paix.

La pratique de la prudenceLes philosophes de lAntiquit classique ont dmontr que lantidote de la violence est la pratique de la prudence, la petite sagesse ou la sagesse pratique. (1) Cest la capacit danticiper, de prvoir, dagir sur soi et sur les autres, dans une perspective de promotion de la paix sociale, de lquilibre et de lharmonie de ltre. Tout acte imprudent dveloppe la violence car il obit la raction et pas lanticipation. Pour tablir un gouvernement durable, il faut travailler avec anticipation, sous peine de tout refaire chaque fois. Ceci implique de matriser ses pulsions, de travailler sur sa propre violence et dagir pour lavenir et non court terme, eu gard ce quon attend de nous. Il faut avoir confiance dans lavenir. Si dans des lieux difficiles (les banlieues) une minorit est capable de redonner la confiance et montrer lexemple, dapporter un havre de paix et un certain savoir, petit petit des noyaux de confiance se reforment. Les organisations bases uniquement sur la force et la violence sautodtruisent rapidement par ce mme phnomne de violence. Il faut apprendre travailler par petits noyaux. Ainsi, si la paix suppose de se dpasser soi-mme, cest par lhomme que passe le processus de paix. LUnesco indique dans son prambule que cest dans lesprit des hommes que naissent les guerres, cest dans leur esprit quil faut riger les dfenses de paix. Et la violence cdera le pas la paix(1) Voir article paru dans revue 198 La philosophie, une rponse la violence de Fernand Schwarz

La formation du philosopheAucune institution mondiale, nationale ou rgionale ne peut maintenir la paix. Elle ne peut que sanctionner et na aucun moyen de linstitutionnaliser, comme en tmoigne lOrganisation des Nations Unies. De mme, les institutions politiques et sociales sont limites pour apporter la paix aux individus. Dans le meilleur des cas, le pouvoir politique peut promouvoir des coles de philosophie la manire classique, qui pratiquent la philosophie, pour aider les individus travailler sur eux-mmes, dvelopper un certain nombre doutils et de techniques et trouver la paix lintrieur deux-mmes. Nous sommes tous responsables des violences engendres dans la socit. Certains sont les agents objectifs (les casseurs), dautres les complices, en restant ct du problme et en se donnant bonne conscience. La philosophie atemporelle peut donner des cls prcises et totalement exprimentes sur le sujet. La proccupation du philosophe est donc la formation des individus pour quils puissent travailler pour

La confiance et la srnit face la viePour picure, Il faut tre serein et confiance face la vie et la mort. La confiance mne ltat de sagesse. Son corollaire est ltat de paix galenismus. Ltude de la nature et de ses lois permet dapprendre et dacqurir une certaine sagesse qui donne ltat de paix. Ce sont nos craintes, nos doutes et nos angoisses qui nous font quitter ltat de paix. Il faut voir les choses comme elles sont, accepter la vrit, tout en restant positif. partir de cet instant, on peut progresser.

Avoir confiance en soi et les autresVivre en paix, pour vivre ensemble, suppose confiance en soi et dans les autres. Il faut pouvoir garder la

7

Sciences

LatomePar Ramn SANCHIS

une histoire sans fin

LA DCOUVERTE DE LATOME A SUSCIT DE NOMBREUSES RECHERCHES, REPOUSSANT SANS CESSE LES LIMITES DE LA SCIENCE, DU CONNU ET DE LINFINIMENT PETIT.

e mot atome choisi pour nommer les petites units constitutives de la matire signifie, tymologiquement, sans parties. Cependant, avec le temps on a dcouvert que latome tait form son tour par des particules plus petites. Ltude des plus petits replis de la matire, commence au dbut du XIXme sicle avec John Dalton. Selon lui, les diffrents composs chimiques proviennent du regroupement de plusieurs atomes (quil appelle

L

molcules) appartenant des lments distincts et intervenant dans les mmes proportions. Ce sont donc les combinaisons de diffrents atomes qui donnent lieu la grande diversit de substances ou matriaux, comme deux atomes dhydrogne et un atome doxygne forment une molcule deau stable. Latome est, partir de ce moment, ncessaire pour expliquer le comportement de la matire. Mais il est

8

trs mconnu car on ne dispose que de modles thoriques non confronts la ralit.

Le premier modleLe premier modle bas sur certaines vrifications exprimentales est propos en 1911 par E. Rutherford. En testant les impacts provoqus par lmission de particules radioactives contre une fine feuille dor, il prouve que seul un petit nombre de ces particules passe travers la feuille et que la plupart du temps elles rebondissent dans des directions diverses. Il dmontre que ces rejets pareils ceux produits par le choc des boules de billard sont causs par de fortes rpulsions lectriques mais aussi par une concentration de masse importante. Ainsi apparat lexistence dans latome dune rgion dense (le noyau), charge positivement et comprise dans un espace infrieur un billionime de centimtre (10-12 cm).Les composantes de latome Rutherford suppose lexistence de certaines particules charges ngativement, appeles lectrons, qui tournent en formant des orbites autour du noyau la manire dun mini systme solaire. Ceci donne lieu ainsi un modle lectriquement stable et quilibr, avec un rayon qui ne dpasse pas un cent millionime de centimtre (10 -8 cm) pour la majorit des atomes. Toutefois, lexistence certaine des atomes ne sera pas dmontre avant 1905, date laquelle A. Einstein ralise ses tudes sur le mouvement dit brownien. En observant le mouvement de certaines particules de pollen dissoutes dans leau, il comprend que les trajectoires irrgulires de ces particules sont dues aux chocs avec les molcules deau invisibles. Il parvient ainsi une formule mathmatique qui reflte fidlement leur comportement

apparemment chaotique. Plus tard, on dcouvre des particules dune certaine masse charges positivement (protons) et dautres particules, de masse similaire au proton, mais sans charge, appeles neutrons. Chaque atome dispose donc dun nombre similaire de neutrons et de protons concentrs dans le noyau, et dlectrons en orbite autour du noyau soumis lattraction lectrostatique des protons. Les atomes : combinaisons stables et instables On a ensuite class les atomes des diverses substances en cherchant reconnatre leurs composants et en les plaant dans un tableau priodique. On a donc dcouvert des combinaisons stables mais galement dautres lments instables qui ont parfois une vie phmre car ils se dsintgrent lentement en mettant des particules radioactives. Un atome radioactif comme, par exemple, le radium ou luranium, quil sagisse de radioactivit naturelle ou quelle soit stimule par une nergie externe, met vers lextrieur et en phases successives certaines particules (appeles , et ) jusqu ce quil se convertisse en un atome plus stable ncessitant moins dnergie pour maintenir son tat dquilibre.

modle particulier de chaque atome. La cration de la lumire Selon le modle de Bohr, les lectrons les plus proches du noyau seraient davantage soumis lattraction de celui-ci que les lectrons (plus libres) des orbites autorises externes. Quand les lectrons passent dune orbite suprieure une orbite infrieure, ils mettent une quantit similaire dnergie qui peut se traduire par lmission de lumire (photons) et dautres radiations lectromagntiques. Par contre, quand les lectrons sautent dune orbite infrieure une orbite suprieure, latome absorbe la lumire. tant donn quil ny a pas deux atomes ayant le mme modle orbital, lmission de radiations se fait, pour chacun deux, sous forme dune certaine quantit dnergie et dune couleur qui leur est propre. Cest leur empreinte digitale que lon peut capter par un instrument appel spectroscope. Orbites circulaires et elliptiques des lectrons A. Sommerfeld, en 1915, apporte la vision dorbites lectroniques non seulement circulaires mais aussi elliptiques. Les lectrons, en plus de tourner autour du noyau, tournent sur leur propre axe dans un mouvement appel spin. Selon W.E Pauli, chaque orbite autorise de latome contient un nombre prcis dlectrons qui le rendent stable (par exemple, deux sur la premire orbite). Un atome dont les orbites externes ne sont pas compltes peut ragir avec un autre atome pour former un nouveau compos chimique en cdant ou en partageant certains atomes de la dernire orbite, appels lectrons de valence, donnant naissance aux molcules grce ces enchanements.

Modle orbitalEn 1912, le Danois N. Bohr considre que les lectrons peuvent se trouver sur plusieurs orbites autorises, situes des distances variables par rapport au noyau. Ces distances prcises, qui donnent lieu des orbites stables, sont une caractristique de chaque lment chimique. Chaque lment possde un nombre prcis de protons et dlectrons ainsi quun quilibre de forces attractives ou rpulsives entre eux, qui fixe une place dtermine aux lectrons sur les diffrentes couches, et qui dtermine le

Modle ondulatoireLes nouvelles ides sur le phnomne

9

Sciencesondes - particules exprimes par L. De Broglie, qui associent toute particule une onde ont permis aux physiciens allemands W. Heisenberg et E. Schrdinger, en 1925 et, plus tard, P. Dirac en 1928 de fixer les principes de la conception ondulatoire de latome. Ainsi llectron nest pas simplement une simple particule. Il se comporte comme une onde (semblable aux ondes acoustiques ou londulation sur la superficie dun lac) dont la vibration, la frquence et lamplitude peuvent tre dfinies. Peut-tre que les lectrons sont les deux la fois onde et particule et selon les circonstances une des deux proprits se manifeste plutt que lautre. Parfois, les lectrons auront un aspect dense dans notre monde physique et dautres moments, ils seront une simple radiation dans un monde nergtique. Le principe dincertitude Avec le dveloppement de la physique quantique, Heisenberg introduit un nouveau paradoxe dans la science. Selon son clbre principe dincertitude, on ne peut observer une particule sans laltrer. En tentant de mesurer exactement la position dune particule, on modifie sa vitesse et vice et versa. Il est toutefois possible deffectuer ce type de mesure mais on ne peut mesurer simultanment les deux caractristiques. Schrdinger propose alors un modle de probabilits pour latome puisque, si la position exacte dune particule ne peut tre fixe exactement, on peut la connatre en termes de probabilits. Dans le cas dun lectron en orbite autour dun noyau atomique, il y a une probabilit plus importante quil se trouve dans un endroit dtermin plutt quun autre sur son orbite. On peut savoir o cette particule se trouverait probablement mais pas o elle se trouve exactement. dcouverte en 1932 dans les rayons cosmiques. Actuellement, on considre que toute particule possde son antiparticule, except le photon qui est lui-mme sa propre antiparticule. Dans le noyau, les particules de charges gales ont tendance se repousser. Cest pourquoi la force qui les maintient unies dans un espace si rduit doit tre exceptionnellement intense comme la dit H. Yukawa en 1935. Par ailleurs, cette force entre deux particules ne se transmet pas de manire traditionnelle mais travers laction dune autre particule du noyau appele le mson.

Incertitudes et probabilitsAinsi, on ne peut pas dire que llectron soit une simple particule ayant une position prcise mais on peut dire quil pourrait se trouver avec une grande probabilit dans certaines orbites symtriques, appeles orbitales, pouvant adopter des formes circulaires, elliptiques, lenticulaires, torodales (1) En termes ondulatoires, on dira que llectron a une grande probabilit de se trouver dans un lieu gomtrique qui est comme un nuage dense et dy avoir aussi sa charge lectrique concentre bien quil puisse se trouver dans nimporte quel autre endroit de latmosphre atomique. Il y a certaines limites quil convient daccepter, puisque les incertitudes et les probabilits sont plus nombreuses que les certitudes.

Les quarksPeu peu, le noyau dvoile ses secrets et on dcouvre dautres particules comme les fermions, bosons, hadrons, pions, muons, neutrinos La dcouverte graduelle de particules qui en contiennent dautres dans le dernier quart du XXme sicle, dont la plupart se dsintgrent pour donner naissance dautres, amne penser quil existe une structure interne de ces particules. Elles sont composes dautres particules appeles quarks qui sont considres comme les briques de la matire et actuellement comme les causes de la force forte. Actuellement, on est parvenu photographier certains atomes grce des microscopes lectroniques, devenant ainsi, une ralit constate. Ncessaire pour expliquer le comportement de la matire, ltude de la plus petite des particules a subi de nombreuses transformations grce la recherche scientifique et son histoire continue

Les anti-particulesPourtant, les lectrons ne sont pas les seules particules que lon peut trouver dans les chelles les plus petites de la matire. Dirac a dit que mathmatiquement il est ncessaire que chaque particule ait son antiparticule pour maintenir lquilibre des charges dans la matire. Ainsi, on pense quil doit exister une particule de masse gale celle de llectron mais de charge contraire. On appelle cet anti-lectron positron, particule

10

Dossier

La fentre de TomarPar Isabelle Ohmann

AU XII SICLE QUE TOMAR DEVIENT LA CAPITALE DES TEMPLIERS. BTI LINTRIEUR DE LENCEINTE DU CHTEAU DES TEMPLIERS, LE COUVENT DU CHRIST EST CLBRE POUR SA FENTRE MANULINE.ME

CEST

vec ses lignes ondoyantes qui stendent dans lespace, la fentre de Tomar est limage de la puissance du Portugal, conqurant des mers et propagateur de la foi. Cest ainsi que lon voit un personnage (un capitaine ?) qui soutient bout de bras deux mts ou piliers, autour desquels senroulent des algues, des coraux et des cordages, allusion vidente au monde maritime et aux Grandes Dcouvertes. Aux extrmits, deux sphres armillaires (1) encadrent le blason de Manuel 1er et la croix vide de lOrdre du Christ qui rappellent aussi que Tomar fut lavant-poste chrtien de la Reconquista. Mais derrire ces affirmations de puissance, la fentre de Tomar porte un message symbolique sur la destine.

A

sacr du temple. La corde symbolise aussi la ncessit de contrler ses nergies infrieures.

Les quatre lmentsEn observant bien la fentre, on peut dcouvrir en bas, une figure nigmatique coiffe dun chapeau (le capitaine), de laquelle partent les racines dun chne, dont le dveloppement est la fentre elle-mme. La fentre est donc un arbre, structure en quatre lments. En bas, le monde physique, la terre, o larbre plonge ses racines. Ensuite la corde marine dlimite le monde psychologique, le monde des eaux, symbolis par le cheval, comme celui de Posidon qui, dans la mythologie grecque, reprsente les eaux psychiques. Tout en haut, dans la rosace, sexprime le souffle divin dans le mouvement des ailes tournoyant dans lembrasement.

Le parcours de lhommeCe sont les deux piliers qui lencadrent qui donnent le sens de cette ralisation. Sur le pilier de gauche, au sommet, les anges symbolisent ltat de lhomme accompli. De lautre cot, un hros, ressemblant Hercule, montre que lhomme doit guerroyer pour parvenir cet idal daccomplissement. Au dessous, sur la colonne de gauche, la chane parfaite symbolise la perfection, tandis que sur la colonne de droite, la ceinture signifie la ncessit de lajustement pour les hommes. gauche, des racines coupes sont reprsentes, tandis qu droite elles plongent profondment dans la terre, rappelant que le monde des hommes est ancr dans la matire. Le monument lui-mme est entour dune corde qui spare le monde souterrain du monde suprieur, mais aussi le sacr du profane, dlimitant ainsi lespace

Un ge dorDe lautre ct du mur, sur la face nord du chur manuelin, pendant exact de la figure coiffe dun chapeau, une autre figure nigmatique est situe dans un nud de corde en forme de cur ou de caduce et au milieu de racines darbre, mais dun arbre sec cette fois-ci. Ceci nous rappelle le symbolisme de la divine Comdie qui parle de larbre sec qui va reverdir et refleurir, symbole largement employ dans la Renaissance italienne. De mme les rois portugais de lge des dcouvertes pensaient revivre un ge dor, poque qui voyait refleurir la civilisation(1) Assemblage de cercles figurant les mouvements apparents des astres et au centre desquels un globe reprsente la terre.

11

Civilisations

Rituels dinitiationdans lOrdre du Temple

Pascal Crosnier et Jean-Pierre Ludwig

CHARGS DE PROTGER LES PLERINS SUR LA ROUTE DE LA TERRE SAINTE, LES CHEVALIERS DE LORDRE DU TEMPLE OU TEMPLIERS, HABITS PAR UN PROFOND IDAL, MENAIENT UNE DMARCHE INITIATIQUE, PRNANT LE RETOUR LHUMANIT ET LA DIGNIT DE LHOMME, DANS UN MONDE BARBARE, SECOU PAR LES GUERRES.

ans une socit mdivale marque par la division tripartite des rles entre les hommes qui prient (oratores), les hommes qui produisent (aratores), et les hommes qui se battent (bellatores) (1), les chevaliers de lOrdre du Temple remplirent les trois la fois : entrs dans lOrdre pour servir le Christ, ils sengageaient dfendre les lieux saints par les armes. Devant pourvoir leur approvisionnement, il leur fallait tre aussi cultivateurs, leveurs, tout autant que btisseurs.

D

le lien individuel qui permet dtre en harmonie avec soi-mme ; le lien social qui permet de vivre en bonne intelligence avec son entourage ; et le lien cosmique qui permet de vivre le sacr et le sentiment dappartenance spirituelle. Les Pauvres chevaliers du Christ, dsigns par saint Bernard de Clairvaux comme la nouvelle milice du Christ, seront rapidement appels les Chevaliers du Temple. Ils crrent quelque neuf mille commanderies rparties dans les provinces dEurope.

Les trois liens de lindividuPar leur formation et lapplication des rgles de discipline, les Templiers sengageaient dvelopper les trois liens de lindividu :

La milice du ChristCes hommes qui consacraient leur vie Dieu taient galement des guerriers. Do le nom de milice. Comme le disait saint Bernard, leur combat est double, sur terre et

dans le ciel. Cette double nature sera symbolise par le sceau des Templiers, deux chevaliers montant un mme destrier et galement dans les couleurs du gonfanon baucent, ltendard noir et blanc qui reprsente la dualit du monde. Cette double mission, terrestre et cleste qui relie les contraires, en cherchant transcender la dualit, caractrise la dmarche initiatique qui allie travail intrieur et travail extrieur. En travaillant sur euxmmes et anims par un profond idal, les Templiers pensaient rendre le monde plus humain. Cette milice est appele milice du Christ, en rfrence ltre illumin et ralis, le Kristos cosmique qui a atteint ltat de sagesse, comme son quivalent oriental le Bouddha.

12

DossierLes Chevaliers du TempleLes hommes de la milice du Christ furent aussi les chevaliers du Temple et double titre. Dun point de vue matriel, ils furent logs leurs dbuts dans les ruines du Temple de Salomon. Mais il sagissait surtout pour eux de construire le Temple lintrieur deux-mmes. Dans toute dmarche initiatique, le corps de lhomme (symbole du temple de Dieu) est le rceptacle, le temple qui hberge lesprit humain comme un temple de pierres peut le faire pour lesprit divin. Ce nest pas le corps physique qui nous rapproche de Dieu, mais notre construction intrieure subtile qui lui est potentiellement semblable.

Les baisers impudiquesUn autre lment, largement comment lors du procs est lexistence des baisers impudiques ou souffles du bas dont Rabelais a fait allusion dans ses uvres et auxquels le nophyte devait se soumettre. Les souffles du bas sont en relation avec la matire, dont on extrait aprs de nombreuses transformations alchimiques la matire premire philosophique, destine devenir la pierre philosophale. Le premier baiser, appliqu sur la base de lpine dorsale, tait li aux souffles de la matire brute, et luvre au noir. Le baiser sur le ventre, sige de la transformation des choses, tait li luvre au blanc. Le baiser sur la bouche symbolisait le passage luvre au rouge, la bouche tant le point le plus lev o peut aboutir le souffle purifi qui devient la voix divine. Par ce rituel initiatique, le nophyte ou nouveau chevalier devait comprendre que sa rception ne signifiait pas quil tait parvenu au sommet mais, au contraire, que tout allait commencer et quil devait partir du bas pour slever.

Initiation et doctrineLinitiation lintrieur de lOrdre du Temple, prsente des similitudes avec celles qui furent appliques dans les coles de mystres de lAntiquit. Le candidat tait trs vraisemblablement soumis des preuves (lies aux quatre lments) et devait galement dvelopper des qualits telles que lhumilit, la charit et lamour de lidal. Aprs avoir t accept, il tait introduit puis dment averti des tribulations auxquelles il sexposait ; aprs avoir promis de les supporter avec fermet et obissance, il tait admis dans lOrdre. Il recevait une corde quil devait toujours porter la ceinture sous ses vtements et qui symbolisait le lien avec lOrdre et lengagement pris de se sparer des forces malignes extrieures.

Le BaphometLun des secrets les plus nigmatiques des Templiers fut celui du Baphomet. Il sagissait dune tte qui, selon les minutes du procs, avait un aspect diabolique (aspect dun chien) et que les dignitaires taient supposs adorer. Sortie de son contexte rituel, elle fut qualifie didole et de reprsentation dmoniaque, arrivant ainsi figurer parmi les accusations principales. Le Baphomet symbolise lombre cl dans les crmonies initiatiques des coles de mystre. Il reprsentait les tentations intrieures et extrieures que chaque individu devait affronter et dpasser, dans sa recherche de perfectionnement et de sagesse, avant de devenir chevalier. Il rappelait alors que seul un tre purifi pouvait entrer dans le temple de la sagesse. De ces diverses accusations dont les Templiers furent victimes, le simple bon sens ne peut faire croire que des individus prts abandonner leurs richesses et offrir leur vie pour la dfense de leurs idaux, seraient capables de raliser des pratiques contraires leurs principes mmes. On ne peut quadmirer ces hommes qui uvrrent toute leur vie par leur comportement redonner lhomme son humanit et sa dignit(1) G. Dumzil, Jupiter-Mars,Quirinus, Essai sur conception indo-europenne de la socit et sur les origines de Rome, ditions Gallimard 1941 Texte ralis partir du Dossier Spcial Les Templiers, une chevalerie initiatique de Pascal Crosnier et Jean-Pierre Ludwig, ditions Nouvelle Acropole, 2006, 6

L homme ralisDurant le procs, il a t reproch aux Templiers de renier la croix lors des rites dintgration. On ne sait pas exactement la raison de cette pratique qui ne figure pas dans les textes dorigine. Pourtant, lun des symboles rattach aux Templiers est la croix. Elle reprsente le cube droul sur luimme, la matire, le support, la partie mortelle et putrescible des choses. La croix est lie aux quatre lments alchimiques infrieurs. Le Christ sur la croix symbolise le cinquime lment, lesprit, principe mme de lhumain, le mental suprieur qui dynamise le quaternaire infrieur en lhomme, le principe spirituel dominant les quatre lments matriels alchimiques . Le chiffre cinq, que lon retrouve dans les rosaces de nombreuses glises, reprsente lhomme ralis. Il symbolise le microcosme, rplique chelle rduite du grand univers naturel et divin. Le sens profond du symbole de la croix fut peu peu perdu, et on en vint reprsenter un Christ souffrant, voire une croix sans rien dautre.

13

Sagesses

Lidal chevaleresque

des TempliersPar Jean-Pierre Ludwig et Pascal Crosnier

SI, EN OCCIDENT, LE MOYEN-GE A T LPOQUE LA PLUS MARQUE PAR LIDAL CHEVALERESQUE, CEUX QUI LONT SANS CONTESTE LE MIEUX INCARN SONT LES CHEVALIERS DU TEMPLE, QUI ONT TENT DE FAIRE RGNER LORDRE ET LHARMONIE ET DVELOPP LA FRATERNIT.ortement structur et hirarchis, le Temple tait compos dhommes aux responsabilits et obligations trs diverses, anims par un mme idal chevaleresque, qui fut lorigine du dveloppement du Temple en Chevalerie secrte - ou sotrique - et qui finira par ne rpondre qu sa seule autorit.

F

La chevalerie, un tat desprit, une vocationLa chevalerie, avant et au-del de toute institution, est un tat desprit. On devient chevalier par nature, par vocation ou par ncessit et non par la naissance ou lhritage. Devient chevalier celui qui a la volont dincarner un rle : tre un lien, une source dquilibre entre le clerg et ltat, le pouvoir spirituel et le pouvoir laque, latemporel et le temporel.

mises aux changements et aux humeurs de lhistoire. Pont entre le monde visible et linvisible, il permet la forme dincarner le principe spirituel sur terre. Bien que semblable au militaire par laspect, il en diffre par le but : sa vocation combattante nest pas au service dune autorit matrielle et temporelle, elle nest que le moyen dassumer sa fonction.

Un rle social permanentDans la socit mdivale, le chevalier assume un rle social permanent. Il sert lglise dans ltat. Le jour o, lglise deviendra un tat analogue aux royaumes, la chevalerie se constituera en ordres, plus ou moins autonomes qui, pour rester fidles leur vocation chevaleresque, chercheront rduire le plus possible toute relation hirarchique avec le clerg officiel. Ainsi, le chevalier templier servira lOrdre avant de servir lglise. Le Temple, en tant quentit indpendante, deviendra peu peu un tat dans ltat avec ses propres objectifs politiques et conomiques, son savoir, son thique et ses techniques.

Le chevalier, pont entre le visible et linvisibleLe chevalier a pour mission et ncessit dtre garant, sur le plan matriel, du principe spirituel. Il est le justicier par excellence. Son code se veut thique et non moral, cest--dire quil tend reflter les lois naturelles universelles, et non sou-

14

DossierLes trois unitsLidal templier consistait raliser les trois units : - Unit de pouvoir : par un Empire confdral, ou alliance des peuples libres organiss en noblesse populaire. - Unit de savoir : par la mathse des sciences. Tout comme la fraternit, la mathse des sciences exprime le refus de toute discrimination : accepter lautre et son savoir. - Unit damour : par la fraternit universelle. Lunit dans le monde La notion dempire exprime, pour les Templiers, la volont de faire partager, travers diffrents modes dexpression possibles, une mme vision spirituelle du monde. Il sagit dun empire spirituel, synonyme de totalit et non de totalitarisme, et qui sattache respecter les modes culturels propres chaque individu, chaque peuple : au-del des diffrences formelles, les hommes se rejoignent dans lunit du Sacr, dans un esprit de fraternit et dacceptation de lautre sans prjug ni haine. travers les neuf mille commanderies (dont deux mille en France) installes partout en Europe comme au Moyen-Orient, la mme loi unissait tous les Templiers, quelque soit le pays, la culture et la langue. Le Temple fut lorigine de la Hanse (ligue commerciale des cits dAllemagne du nord) et de la premire lettre de change, systme conomique international qui lui permettait deffectuer des oprations de change entre ses nombreux comptoirs. Les Templiers protgeaient les pauvres qui, installs sur le territoire dune commanderie, ntaient plus soumis aux exigences des seigneurs locaux. Lunit des principes La volont des Templiers dunir les hommes entre eux dpassait largement les limites de la foi chrtienne. Ce qui compte avant tout, cest le rattachement une dmarche spirituelle, et peu importe la manire, cest--dire la religion, travers laquelle cette dmarche sexprimera. Lenseignement du Temple puise ici la source de la pense traditionnelle en rappelant lexistence immuable dun principe originel, le mythe, source de toute chose et des lois universelles, hors de lhistoire, du temps et de lusure. Toutes les religions temporelles, ou religions rvles, sont donc issues dun principe unique qui peut sappeler religion naturelle. Puisque toutes les formes, comme toutes les religions, se valent, et que lhomme doit bien en choisir une pour mener sa qute spirituelle, les Templiers choisirent de vivre en religion chrtienne. En ces sicles dintolrance, cela ne pouvait que leur faciliter la tche. Lunit en lhomme La chevalerie mdivale consiste principalement en linitiation de lindividu et en lorganisation dune aristocratie militante recrute sur les seuls critres du dsintressement, de la loyaut et de lhonneur. Par initiation, il faut entendre le processus par lequel un homme, plac dans une attitude dveil, se pose la question des dimensions spirituelles convenant sa nature dme, ses certitudes profondes, la faon dont il se situe lui-mme, volontairement, dans la socit et dans lHistoire. Lhomme prend ainsi conscience de sa vocation. Au cours dun apprentissage, il va prouver ses forces et mesurer lenvergure possible de son action. Ainsi, il choisit volontairement le rle quil va effectivement jouer. la notion de vocation succde alors celle de mission. Lhomme veill cherchera naturellement lenvironnement dans lequel il devra se former, acqurir une spiritualit et un comportement lui permettant une collaboration fconde avec dautres, ses frres, pourvus dune destine analogue la sienne. Il choisira la chevalerie sil se conditionne pour un militantisme de garde du sacr et de dfense des principes. la suite dpreuves passes avec succs, liniti sintgrera dans un courant traditionnel qui le soumettra un rite de rception et de conscration. Une communaut fraternelle, un ordre, dispensera alors un enseignement spcial, un ensemble cohrent de techniques spirituelles destines aider liniti dans sa propre construction sans pour autant labandonner la solitude. Ainsi, le chevalier initi se caractrisera par une prsence, un rayonnement, une capacit spirituelle et denseignement. tre accompli il pourra ainsi trouver lunit en lui et dans le monde et accomplir sa missionTexte extrait du Dossier Spcial, Les Templiers, une chevalerie initiatique, Pascal Crosnier et Jean-Pierre Ludwig, dition Nouvelle Acropole, 2007, 6

Une nouvelle chevalerie est apparue sur la terre [ ]. Cest une milice dun genre nouveau, inconnue aux sicles passs, destine mener sans relche un combat double, tantt contre des adversaires de chair et de sang, tantt contre les esprits de malice rpandus dans les airs. [] Le chevalier est vraiment sans peur et sans reproche qui revt en mme temps son me de la cuirasse de la foi et son corps dune cte de maille. Sous sa double armure, il ne craint ni homme ni diableExtrait de louange de la nouvelle chevalerie de Bernard de Clairvaux Hugues de Payns, fondateur de lOrdre des Templiers.

15

Sagesses

Viedu

et

mortPar Marie-Agns Lambert

parfait cathareME

SICLE EST MARQU PAR LA DOCTRINE CATHARE DONT LES ADEPTES SE CONSIDRENT COMME DES DISCIPLES DES APTRES, ADOPTANT LE MODE DE VIE, LES RITES ET LES SACREMENTS. LEUR IDAL EST VOU UNE RECTITUDE DE VIE SANS FAILLE, POUR PERMETTRE LEURS SEMBLABLES DE RETROUVER LE CHEMIN DE LA FUSION AVEC DIEU.

LE DBUT DU XI

linstar de lglise catholique, les adeptes du mouvement cathare taient conduits spirituellement par un clerg issu dun petit nombre de personnes les plus dtermines : les bons hommes ou les parfaits. (1) la tte du clerg, des vques, lus parmi les parfaits, administraient le consolamentum aux mourants, ainsi que le consolamentum dordination, assists des diacres. Les diacres prsidaient surtout loffice religieux appel servicium ou apparelhamentum et y distribuaient les pnitences.

Devenir parfait : un long cheminementPour devenir parfait ou parfaite, le croyant subissait une priode pro-

batoire de un trois ans. Ce noviciat tait ncessaire pour vrifier la solidit de la vocation. Lors de la crmonie du consolamentum dordination, il affirmait ensuite publiquement son engagement. Les bons hommes imposaient alors leur main droite sur lui pour lui transmettre lEsprit-Saint. De simple croyant, il devenait alors un parfait. Il recevait la vture et tait alors habilit prcher loraison dominicale aux croyants et pratiquer le consolamentum (2). Le parfait avait pour rgle de vie de ne plus pcher sinon il retombait dans lobligation de sincarner nouveau. Il lui appartenait donc de travailler assidment et simultanment dans les trois directions qui le rapprocheront de Dieu : la louange

du Trs-Haut par la prire et la liturgie, le dtachement du corps par lascse et certains exercices, et le service aux croyants par son action dans le monde.

Sous le signe de lapostolat et du consolamentumLa prdication et le sermon constituaient lune de leurs principales tches. Ctait un moyen de faire des adeptes et de collecter des fonds pour lglise cathare. Le parfait pouvait pratiquer le consolamentum des mourants pour assurer la bonne fin par le pardon des pchs et la runion de lme et du corps, favorisant lincarnation dans un corps plus spirituel.

16

DossierLe dtachement et la prsence au mondeJusquen 1209, dbut de la perscution cathare, le parfait restait facilement reconnaissable par ladoption dune tenue uniforme, une barbe et des cheveux longs, des habits de couleur noire, un bonnet ou une toque ronde, et une ceinture laquelle tait accroch lvangile de Jean. Aux premires heures de la perscution, le parfait rasera la barbe, coupera les cheveux et shabillera comme ses contemporains, avec une prfrence pour le bleu sombre. Les parfaits travaillaient pour vivre ; ils taient mdecins, vanniers ou tisserands et surtout commerants. lorsque la menace de brler sur le bcher deviendra certitude. Les parfaits et les parfaites incarnrent une rectitude de vie sans faille, soutenue par une foi inconditionnelle en un idal surnaturel, consacrant leur vie apostolique permettre leurs semblables de retrouver le chemin de la fusion avec Dieu. Leur attitude hroque face au bcher contribuera, en faire pour la postrit, des tres exceptionnels(1) Nom donn par lInquisition de lglise catholique aux Cathares qui dsigne le parfait hrtique, achev, complet. (2) Unique sacrement la fois baptme, pnitence, ordination, extrme-onction, qui sadministre par imposition des mains et transmet lEsprit-Saint. Article rdig partir de larticle Vie et mort du parfait cathare, publi dans la revue de Nouvelle Acropole n 138

Un corps rgulier vou la prire et lascseLa vie communautaire des parfaits tait ponctue de nombreuses prires pour tous les actes de la vie et ceux du jour et de la nuit. la prire, qui fortifiait lme, sajoutaient des saignes frquentes et des jenes rigoureux. La moindre faute tait loccasion de sinfliger des jours de jene supplmentaires. Les parfaits et les parfaites soumettaient leurs gestes et leurs paroles un contrle de tous les instants, vitant ainsi de fausser la vrit ou de mentir par inattention. La rgle de continence absolue ne subissait aucune dfaillance. Celui qui avait commis une incartade la rgle se punissait lui-mme de diverses manires : par le jene, par la prire, en effectuant un grand nombre de gnuflexions. Tous les mois, une confession publique avait lieu, assortie de pnitences collectives. Quand le parfait avait commis un pch de chair ou de dlation (pch contre lEsprit), il devait recommencer lensemble de son initiation, tout en simposant de terribles mortifications. Il devait ensuite attendre que lensemble des croyants accepte de le rintgrer dans ses droits. Parfois, le pardon nintervenait qu lapproche de la mort.

Promettez-vous que, dsormais, vous ne mangerez ni viande, ni ufs, ni fromages, ni graisses et ne vous nourrirez que de poisson et dhuile, que vous ne mentirez pas, que vous ne jurerez pas, que vous ne livrerez votre corps aucune luxure, que vous nirez jamais seul quand vous pourrez avoir un compagnon, que vous ne dormirez jamais sans braies et sans chemise, et que vous nabandonnerez jamais votre foi par crainte de leau, du feu ou de tout autre genre de mort ?Engagement solennel du Parfait au moment du consolamentum dordination

La question de lenduraAvant tout acte quotidien, la rgle impose au Parfait tait de rciter un Pater. Aprs avoir reu le consolamentum, si un parfait moribond ne pouvait rciter la prire, il renonait manger, demandant tous ceux qui le servaient de ne plus le nourrir. Cette rgle stricte appele lendura, controverse pouvait tre assimile une non-assistance, alors que les religions enseignent que le vouloir vivre tout prix, enchane lme au corps. Dans lesprit cathare, lendura permettait de rejoindre la vraie vie, priode defforts soutenus pour tendre vers la perfection. Rgle de vie malgr tout exceptionnelle, lendura sera surtout pratique par les cathares, au moment de la perscution,

Senhor Dieus, tot poderos, a vos coman larma el cors. Senher, vos me gardatz de pecar et de falhar et de autra pecada et de la mieua meteissa, et de fals testimoni, e mamenatz a bona fin. Seigneur Dieu, tout-puissant, je vous confie mon me et mon corps. Seigneur, gardez-moi de pcher et de faillir et du pch dautrui et du mien aussi, et du faux tmoignage, et me menez bonne fin.Prire hrtique du Comte de Foix, cit dans le registre de Linquisition

17

Psychologie

Lducation des senslallgorie de la LicornePar Laura Winckler

CE NEST QU LA FIN DU XIX SICLE QUE LON SINTRESSE AUX FAMEUSES TAPISSERIES DES DAMES LA LICORNE, CRES AU XV SICLE. ON SACCORDE DIRE QUELLES REPRSENTENT LES CINQ SENS, DONT LDUCATION PERMET DE SLEVER DU MONDE PHYSIQUE VERS LE MONDE SPIRITUEL, DVEILLER LES SENS DE LME.ME ME

duquer les sens, cest passer de la sensualit, o lros (1) se rduit au plaisir passager et la recherche dune jouissance goste et narcissique, lveil dune sensibilit plus subtile qui ne saura pas se contenter des mets frelats, mais apprendre apprcier les aliments les plus raffins, les parfums les plus dlicats, les sons les plus subtils.

L ducation des sens, un processus de transmutationLes tapisseries de la Dame la Licorne donnent un merveilleux exemple de cette ducation des sens qui se subliment progressivement travers un processus de transmutation. On peut ordonner les six images en allant depuis les sens les plus concrets jusquaux plus subtils : le toucher, le got, la vue, lodorat et finalement louie. Aprs les cinq sens, la tapisserie prsente une image

plus abstraite, o la Dame est dbout devant une tente avec la devise : mon seul dsir. Il manquerait deux images (auxquelles fait allusion George Sand), o lon verrait la Dame sur le trne et pour finaliser luvre, la Dame avec deux Licornes. La Dame, comme allgorie de lme, symbolise aussi la dualit du mental, reprsent par la double Vnus : Pandemos ou terrestre, le mental pratique, analytique et Ourania ou cleste, le mental synthtique ou universel. Les deux ne font quun dans la ralit mais, ils semblent, tel le miroir de psych, regarder soit vers les dsirs de la matire, soit vers les lumires de lesprit. Dans la progression des sens est voqu le triomphe de lme sur la matire.

Du toucher au tactDans la scne du toucher, il sagit de passer du toucher au sens du tact, qui permet de savoir se situer en

18

Dossiertoute circonstance, en adoptant lattitude juste dans le moment juste, par la pratique de la devise rien de trop. Avoir du tact, cest comprendre et sadresser chacun, de faon quil puisse aussi nous comprendre. La Dame tient dune main, ltendard quadrangulaire du Lion, et de lautre, la corne de la Licorne. Son attitude est ferme, presque martiale. Elle voque la volont de matriser la matire, en se librant des chanes qui attachent encore les autres animaux de la tapisserie. se le lac du mental apais, refltant la ralit des hautes cimes sans dformation. Le regard amoureux de la Licorne et de la Dame peut sinterprter comme lme contemplant lesprit suprieur. juste place et lme, la Dame, se donne lesprit travers la musique.

Le dtachementLa sixime tapisserie prsente la Dame, se dpouillant de ses joyaux quelle dpose dans un coffre port par sa servante. Elle a fait le choix de renoncer aux sens, devant une tente qui porte la devise mon seul dsir. La dcision est prise de se dtacher et le seul dsir qui reste est celui de la Sagesse et de la communion de lme (psych) avec lesprit (nos). Ces tapisseries symbolisent le mariage sacr (hirogamie) de lme et de lesprit.

De lodorat lintuitionDans la tapisserie de lodorat, on parvient la sublimation de lodorat qui est la capacit davoir du nez, donc de sentir, de percevoir en finesse une situation donne, au-del des formes et des paroles. Cest possder lart de dcouvrir ce qui est apparemment cach, presque comme un pouvoir divinatoire. Cest aussi faire alliance avec lair et les parfums ; cest tre attentif ce quemporte et apporte le vent, et larme quexhalent tous les tres. Lodorat veille lintuition. La Dame tisse une couronne de fleurs, dont le parfum est respir par un petit singe qui hume, une une, les fleurs dans une corbeille. Le singe peut symboliser lintuition, le pont qui conduit vers lesprit.

Du got au bon gotDans la tapisserie du got, il sagit de passer du got sensoriel un sens plus large du got, ce qui demande daffiner ses perceptions, pour dcouvrir la juste mesure, les harmoniques et les correspondances qui accordent au mieux formes et couleurs dans le monde objectif. Nanmoins, le got peut slargir jusquau bon got. Cest alors la facult intrieure de percevoir et de goter le beau, en le distinguant du laid et de labsurde. Il est vident que, grce au bon got, la vie a une autre saveur. La Dame extrait des fruits du calice (du Graal), quelle remet un oiseau quelle nourrit, pour habituer loiseau de son mental dguster des fruits plus subtils.

Des sens physiques aux sens plus subtilsduquer les sensations, cest ainsi parvenir voir au-del des apparences, veiller les sens de lme. Au fur et mesure que lon apprivoise les sens, derrire chaque sens extrieur se dvoile un sens intrieur, plus subtil, qui permet de transmuter les sensations en sentiments, apprenant se relier de faon harmonieuse avec soi-mme et lautre, sous toutes ses manifestations. Le frisson phmre de lmotion se transmute en sentiment durable par lamour du Beau, du Bon et du Juste. Le but de cette ducation est de passer du toucher au sens du tact ; du got au bon got ; de voir regarder ; dentendre couter ; de humer avoir du flair, pour que la sensibilit bien duque puisse conduire vers la libert des fausses impressions des sens, ce quexprime la sixime tapisserie de la Licorne(1) Amour primordial, force primordiale de cohsion Voir article paru dans revue 188 Amour platonique, amour sexuel de Dlia Steinberg Guzman et lAmour dans le Banquet de Platon de Marie-Agns Lambert et Louisette Badie

De loue lattention fineLa tapisserie de loue prsente ce sens sublim qui permet de passer dentendre couter. Souvent on entend les paroles comme des gouttes de pluie, mais est-ce que lon coute au-del des mots ? Il y a une grande distance entre entendre et couter ; couter, cest prter attention ce quon entend. Porter attention aux sons, savoir les distinguer au point de savoir les interprter comme des formes particulires de langage et dexpression, ne peut tre le fruit que dune attention fine. Dans le visage de la Dame et de sa servante, lme et sa conscience, se reflte la paix de lesprit, comme si elles entendaient la musique des sphres, le chant des anges. La coiffe de la Dame est comme un panache qui voque une flamme. Le Lion et la Licorne sont au repos et ils esquissent un sourire de plaisir. Toute chose est sa

De la vue la vision intrieureDans la tapisserie de la vue, pour passer de la vue physique la vision juste, il faut transformer le voir en regarder ; fixer sa conscience et se concentrer fermement, pour se relier dme me avec ce que lon observe. Savoir voir avec attention est une manire de dcouvrir, de se livrer linvestigation, de pntrer au-del des formes et des apparences avec les yeux intrieurs ; cest connatre, comprendre, avoir une vision juste. La Dame contemple limage de la Licorne dans un miroir qui symboli-

19

Rencontre avec

Michel DaninoAux origines de la civilisation indienne

Le mythe aryen est-il un canular de lhistoire ?Propos recueillis par Laura Winckler

DANS SON OUVRAGE RUDIT ET PASSIONNANT, LINDE ET LINVASION VENUE DE NULLE PART : LE DERNIER REPAIRE DU MYTHE ARYEN, PARU AUX DITIONS LES BELLES LETTRES, MICHEL DANINO DMONTE LE MYTHE DE LINVASION ARYENNE EN INDE ET NOUS RVLE LES RACINES DUNE CIVILISATION BIEN PLUS ANCIENNE ET COMPLEXE QUE CE QUE LON AVAIT SOUPONN, EN APPORTANT UN NOUVEAU REGARD SUR LES ORIGINES DES VEDAS ET DE LA CULTURE INDIENNE.Acropolis : Quel est votre itinraire personnel et do est n votre intrt pour la richesse civilisatrice de lInde ? Michel Danino : Jhabite en Inde depuis trente ans, o jai t attir par Sri Aurobindo et Mre. Pour vivre cette dmarche plus intgralement, jai voulu tudier cette civilisation, sa pense, sa spiritualit, son histoire. La dmarche indienne tend spiritualiser la vie, y compris les arts, les sciences, larchitecture et les techniques : si le monde est divin, toute activit peut tre fondamentalement sacre. Voil qui ma sembl tre un programme intressant ! A. : Comment sest construit partir du XIXme sicle le mythe de linvasion aryenne en Inde ? M.D. : Ce mythe aryen provient dune interprtation errone du Rig-Vda (1). On voit des ryas (2) invoquer leurs divinits afin de vaincre des peuples de lombre, des dmons. Or les Indianistes europens de la moiti du XIXme sicle, notamment Max Mller, qui commencrent publier des traductions du Rig-Vda pour la premire fois en Europe, choisirent dy lire une histoire raciale. Les ryas devenaient une race blanche aux cheveux blonds, les dmons de race noire tant les autochtones. Lon simaginait que ces ryas, renomms Aryens, taient venus dAsie centrale et avaient migr en mme temps vers lInde et lEurope. Cela expliquait cette parent linguistique indniable

20

entre le sanscrit et les langues europennes, qui ensemble forment la majeure partie de la famille linguistique indo-europenne. Mais du coup, la civilisation indienne, largement fonde sur la culture vdique, navait plus ses origines en Inde. A. : Les Britanniques ont-il ainsi affirm que lInde a t civilise par les Aryens ? M.D. : Disons quils se sont servis de cette thorie de linvasion aryenne, selon laquelle les Aryens, arrivs en Inde vers 1500 ans av. J.-C. (date arbitrairement fixe par Max Mller), y ont apport les Vdas, le sanscrit, et lordre social des castes. La colonisation britannique ntait quune nouvelle vague aryenne destine runifier la grande famille aryenne. Ctait une des faons de lgitimer linvasion britannique en Inde. A. : Comment les Britanniques ont-il faits pour tenir les rnes ? M.D. : Ils dfinirent les castes de faon beaucoup plus dure quelles ne ltaient en ralit, transformant chaque communaut en caste. Puis ils dcrtrent que les castes suprieures taient aryennes, les autres descendant des autochtones. Dans une variante, ces autochtones avaient reflu vers le Sud sous le choc de la conqute aryenne : cela permettait de diviser Nord et Sud, en sappuyant sur lappartenance des langues du sud la famille dravidienne : une langue diffrente devenait la preuve dune culture et dune race diffrentes ! A. : Do les Aryens venaient-ils ? M.D. : Selon moi, il ny a jamais eu de peuple aryen. Pendant un sicle, on les a cherchs partout, en Asie centrale, en Iran, en Russie, dans les rgions arctiques, nor-

diques, ou en Allemagne. Les Allemands se sont appropris cette descendance, salimentant de la thorie dun linguiste suisse, A. Pictet, qui crivait en 1859 que la race aryenne tait sortie laube des temps des rgions brumeuses dAsie centrale pour accomplir leur destine de conqurir le monde. Dans son Essai sur lingalit des races, le comte J.A. de Gobineau ajoutait que la ligne germanique, la plus purement aryenne, dgnrait immdiatement si elle se mlangeait dautres souches. Ces thories devinrent lun des principaux ingrdients de la cration dune identit allemande : racialement suprieure, elle avait une mission quasi divine vis--vis des autres peuples. Lorsque Hitler est arriv, le terrain tait parfaitement prpar. Contrairement ce qui est souvent dit, il na pas plus cr le mythe de la race aryenne que celui de son temprament guerrier et conqurant ; il la seulement mis en application. Tant la linguistique que lindianisme europen du XIXme sicle ont une lourde responsabilit dans la cration de ces idologies. Aprs leffondrement du nazisme, elles ont partiellement reconnu leurs fautes. A. : Qui a repris ces idologies du mythe aryen ? M.D. : En Europe, des groupements de droite, et en Inde, plutt de gauche : par exemple, les historiens de lcole dominante dhistoriographie marxiste tiennent beaucoup linvasion aryenne. Lorsque larchologie a confirm quil nexistait aucune preuve de larrive dune autre culture 1500 ans av. J.-C., ils ont substitu migration invasion : les Aryens agressifs, conqurants, sont devenus des nomades paisibles venus se fondre dans les populations indiennes. Toutefois, ils tiennent ce que la civilisation ne soit pas dorigine autochtone : les brah-

manes (la caste suprieure, prtresse) demeurent des envahisseurs ! En fait, ils alimentent les idologies de la division en reprenant les thmes coloniaux. Les vanglistes chrtiens parlent aussi ce langage aux tribus et aux basses castes indiennes, pour mieux les convertir : quoi de mieux que le passage au christianisme pour affirmer son rejet de limposition de la culture des envahisseurs aryens, cest--dire lhindouisme ! A. : Quelle serait lorigine de la culture vdique et son lien avec la civilisation de lIndus Sarasvati ? M. D : Rien nindique qu lorigine, la culture vdique soit trangre lInde. Le Rig-Vda ne mentionne que le nord-ouest de lInde et ne parle pas de conqurants venus dailleurs. Les Dasyus ne sont pas des tribus la peau sombre, mais des dmons : ils vivent dans lobscurit, dans la nuit, dans des cavernes au fond de la montagne. Les spcialistes font aujourdhui une interprtation mythologique et non historique des conflits entre ryas et Dasyus. La civilisation de lIndus-Sarasvat (3) a fleuri entre 2600 et 1900 av. J.-C. Antrieure la date hypothtique de larrive des Aryens, elle sest retrouve qualifie de pr-aryenne et non vdique. Mais il est probable que la culture vdique ait t contemporaine ou mme antrieure cette civilisation, dont la culture est plutt une synthse entre la culture vdique et la culture populaire du nord-ouest de lInde cette poque. A. : Quelle preuve archologique apporte la rivire Sarasvat ? M.D. : La civilisation dite de lIndus ntait pas limite cette rgion : au sud, elle avait de nombreux sites au Gujarat, et lest, des centaines jusque dans ltat du

21

Rencontre avecHaryana, qui touche Delhi. La plupart sont situs le long dune rivire aujourdhui disparue (ou de ses affluents), dont on a retrouv le lit assch, large de six huit kilomtres : il se nomme la Ghaggar-Hakra, mais un de ses affluents est encore aujourdhui appel Sarasvat. Par ailleurs, la Sarasvati est mentionne soixante-dix fois dans le Rig-Vda : elle forme la limite orientale du Pays des Sept Rivires (SaptaSindhu), et lhymne Nadstuti la situe entre la Yamun et la Sutlej, prcisment l o se trouve la valle assche de la Ghaggar-Hakra. Larchologie a tabli que cette rivire sest assche vers ou avant la fin de la phase urbaine de la civilisation de lIndus, cest--dire avant 1900 av. J-C. Comment les Aryens auraient-ils donc pu chanter, dans le Rig-Vda, les louanges dune Sarasvati puissante et imptueuse quatre huit sicles plus tard, alors quelle tait assche depuis longtemps ? Si lon part du fait que la culture vdique sest dveloppe sur le sol indien, sans invasion aryenne, il ny a plus de contradiction. A. : Quest-ce que la civilisation indienne peut apporter lOccident dracin et dboussol du dbut du XXIme sicle ? M.D. : Puisque la nature, lunivers, dont nous faisons partie, sont sacrs, il ne sagit pas de dominer, conqurir, exploiter : il faut apprendre vivre, cooprer, sharmoniser avec ce qui nous entoure, prendre les fruits que nous offre la nature mais sans dtruire la base sur laquelle nous vivons. Cette philosophie de Gaa, en Grce, reprise par des mouvements cologistes est tout fait lattitude hindoue face lunivers. Cela peut sembler utopique, mais de penser que la socit humaine puisse continuer sur sa lance actuelle est beaucoup plus irraliste et irrationnel : on ne peut poursuivre indfiniment la destruction des cycles et des ressources de la plante, sans rien donner en retour. Pour lHindou, il ny a pas de conqute de la Nature, ni de foss entre Nature et divinit. Pas davantage entre humanit et divinit : lInde apporte un art de vivre ensemble, de respect de lautre, qui, autant que soi, est la reprsentation dune divinit ; diverses techniques, yogas ou autres, permettent de la redcouvrir, et cela a t la grande concentration de la culture indienne. Il semble bien que ce monde ait peu davenir si la nature humaine reste enracine dans lego avec ses dsirs de pouvoir et ses avidits insatiables(1) Le plus ancien des quatre Vdas (1000 1500 ans av. J.-C. selon les dates conventionnelles, avant 3000 selon Michel Danino), compos de 1028 hymnes consacrs diverses divinits, dont Agni, dieu du feu, Indra, Mitra-Varuna, etc. (2) lorigine, titre de Rishis ou de personnages nobles dans la littrature vdique (rya veut dire noble). (3) Harappa est la premire ville dcouverte, suivie de Mohenjo-daro. Pour consulter les articles de lauteur sur internet : http://www.micheldanino.voiceofdharma.com

Michel Danimo, LInde de nulle part, 422 pages, 25 Survivances de la Civilisation de lIndus dans lInde actuelle

Le sceau de Mohenjodaro, avec une divinit assise en posture de yoga, entoure de puissants animaux sauvages, prfigure le culte de Shiva, toujours vivant. Les rituels du feu de cette priode sont les prcurseurs de la pratique actuelle du havan dans les maisons hindoues. Dautres caractristiques communes des deux priodes sont : la pratique du culte des arbres, le symbole de la svastika lentre des maisons, et les manires de saluer et de faire les asanas. Exactement comme aujourdhui, lusage rituel de conques, pour verser des oblations, ou pour souffler, ont t rvls. Les morts, comme de nos jours, taient brls ou enterrs la tte oriente au nord, sans grande pompe. La continuit est aussi dans la technique : la prservation des poids et mesures, le coulage du bronze, lurbanisme, la proportion des rues, la mesure des briques, qui se retrouvent dans la civilisation de lIndus et du Gange, lune tant hritire de lautre.

22

La page Calliope

Concours de posie Calliope

CHAQUE ANNE, LASSOCIATION NOUVELLE ACROPOLERCOMPENSE LE MEILLEUR POME DU CONCOURS DU CERCLE DE POSIE CALLIOPE. EN 2006, SUR LE THME DE LA NATURE, CEST UN CANDIDAT DE LA VILLE DE STRASBOURG, AURLIEN MORDRET, QUI A REMPORT LE CONCOURS. NOTER QUE POUR LA TROISIME ANNE CONSCUTIVE, LE LAURAT DU CONCOURS EST ORIGINAIRE DE STRASBOURG !

Aujourdhui cest lhiver, que la place soit nette Aujourdhui cest lhiver, lhiver aux blanches mains. Je me revois jadis, longeant ces blancs chemins, Traverser ces bocages nivels de neige Qui chuinte au joug des chausses, naturel solfge. Une feuille en sous-bois, telle un vieux parchemin Vacille et tourbillonne, ou vermeille ou carmin. Leau ne coule plus, fige quelle est dans son pige De glace. Gel, givr le joyeux mange ! Mais quest donc devenu ce blanc immacul ? Depuis combien de sicles sen est-il all ? Et pourquoi ? Et comment? Le crachin nous crase Fermez les yeux pendant que crve la plante, Amassez votre argent de ces forts quon rase, Vitrifiez- moi tout a, que la place soit nette !Aurlien Mordret

XIe concours de posie Calliope

Thme 2007 : lAmourDate de remise des pomes avant le 31 dcembre 2007Rglement sur le site internet : http ://cercle-poesie-calliope . org ou par email : [email protected] ou par courrier : Cercle Calliope/Concours de posie FDNA 6, rue Vronse - 75013 Paris renvoyer avant le 31 dcembre 2007 avec le nom et ladresse du participant, son adresse email.

Calliope est le cercle de posie de lassociation Nouvelle Acropole, cr en hommage son fondateur Jorge Livraga, pote et philosophe.

23

Philosophies

LAmiti

en philosophiePar Olivier Larrgle

DANS NOTRE POQUE DE TURBULENCE, LAMITI RESTE UNE VALEUR SRE ET INDISPENSABLE POUR BIEN MENER SA VIE. COMME UN PHARE, ELLE NOUS INDIQUE LE CHEMIN SUIVRE POUR DEVENIR NOUS-MMES ET VIVRE PLEINEMENT LES RELATIONS HUMAINES.e mot ami provient du latin amicus, qui lui-mme dcline de amare aimer. Les ds sont jets. Aimer, voil ce que nous demande la relation damiti ! Aimer est la vertu des amis disait Aristote.

L

Comment lamiti se dclineDoux mot ami La varit de tes sentiments, lharmonie de ton son, sont-ils les garants de la vie heureuse ? Lamiti est indispensable une vie russie disait Dmocrite. Amiti, nest-ce pas toi qui ft sortir Achille de sa torpeur lorsquil apprend la mort de son ami Patrocle ? Ami, nest-ce pas la magie du mot que doit prononcer Gandalf, le magicien blanc, dans le Seigneur des Anneaux, pour que la porte de la Morya souvre ? Alors, il est reconnu comme le chef lgitime par tous et laventure de la communaut peut se poursuivre. Lui, le mage doit tre aussi un ami

Lamiti nest-ce pas lessence mme de la fraternit qui lie les chevaliers de la table ronde autour du roi Arthur ? Ami, nest-ce pas toi qui inspire le cri de ralliement des mousquetaires : Tous pour un, un pour tous !. Ami, nest-ce pas le cri qui fait cho aux oreilles du Petit Prince pour voyager sur Terre ? Les hommes nont plus le temps de rien connatre, ils achtent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il nexiste point de marchands damis, les hommes nont plus damis, si tu veux un ami, apprivoise moi.

L amiti spirituelleAmi, serais-tu cet indicible que certains sages nomment lami spirituel, le bien aim, qui unit le Soi au moi, le matre au disciple? Arthur en plein dsarroi ninvoque t-il pas Merlin en ces termes : Merlin, toi mon ami, jai besoin de toi. Est-ce toi, que lon nomme le matre intrieur, qui

24

chaque jour, comme le renard avec le Petit Prince, mapprivoise un peu plus, afin que je devienne moimme ? Toi, lami spirituel, es-tu le protagoniste de cette relation intime, qui pacifie mon me lorsquelle est en dsaccord avec elle-mme ? Lamiti nest possible qui si lon est dabord son propre ami. Celleci, consiste clarifier son me et lorienter vers le Bien disait Platon. Ami et amiti spirituelle signent ce fragment damour mystrieux, cet irrationnel indescriptible, qui ont su relier Socrate et Platon, picure et Mnce, Plotin et Porphyre, Marpa et Milarepa, Castiglione et Raphal, Montaigne et La Botie, Ramakrishna et Vivekananda, St Exupry et Lon Werth, et bien dautres encore, connus et inconnus ? Lamiti est une tincelle du mystre divin disait Platon. Une vie sans aimer, une vie sans ami, une vie sans saimer, quoi bon

porte, aubergiste ? Celui-ci raconte lhistoire, ce quoi lhomme rpond : Combien te dois-je ? Ainsi, se vivait lamiti chez les Pythagoriciens. Elle tait mre dune fraternit qui allait au-del du concept de vie et de mort. Les coles qui succderont au Muse, comme lAcadmie de Platon, le Lyce dAristote, le Jardin dpicure resteront fidles ce concept de lamiti. tel point, quelle sera le ciment invisible, de leur difice et la garantie de leur longvit. Plus tard, Cicron le Romain, imprgn de littrature grecque, dira : Ceux qui tent lamiti la vie, tent le soleil lUnivers.

L amour et lamitiLe plus souvent nous tombons amoureux sous lemprise de lamour-eros, lamour concupiscence. Le dsir-passion agit en nous, comme une force dattraction, qui dforme la ralit en jetant des voiles illusoires, sur nos rapports amoureux. Par contre, lorsque nous voluons dans notre rapport amoureux cet amour-eros se convertit en amour-philia qui, pour Jean Guitton est la racine mme de lamiti. Lamour-eros peut envoter ltre humain que nous sommes, et profitant de nos faiblesses, il enfante des maux nuisibles tels que : la jalousie, la possession, la tyrannie du moi, la perte identitaire par attachement fusionnel, la dpendance, la rciprocit base sur la recherche dintrts. Par contre, lamour-philia, baign par le sentiment de lamiti ne connat pas ces maux. Car lamiti stablit sur des fondations spirituelles, ce nest plus un instinct. Cest un sentiment qui spanouit par la fidlit et la durabilit, audel de nos impulsions binaires et animales. Lamiti respire la grandeur et la libert. Elle se reconnat par notre capacit de faire coexister lamour avec la libert intrieure.

Cest elle qui vient au service de lamour-eros pour lui apporter un autre regard. Mais lamour-philia besoin de lamour-eros. Toute amiti a besoin de signe attestant lamour (un geste, un cadeau, une attention, une considration) et tout amour a besoin damiti pour traverser les preuves, et vivre la durabilit. Philia et eros se nourrissent lun lautre pour llvation de lamour. Le psychologue franais Ignace Lepp (3) a remarqu que les couples qui naissent dune longue amiti durent plus longtemps que ceux qui se forment aprs le coup de foudre. Il a observ que les couples qui vivent ensemble comme de bons amis se soutiennent mutuellement, et leur amiti garde sa dimension rotique et sexuelle. (1)

Amiti et agapAinsi, grce lamiti, lhomme, personnage social, connat une des conditions du bonheur. Il a vaincu une forme dgocentrisme et de repli sur soi. Il peut vivre le dsintressement. Aimer un ami intensment, cependant avec un pur dtachement tre constant dans lamiti et dans laide dsintresse disait le philosophe indien Sri Ram. (4) Petit petit, il peut slever vers la plus belle des amitis celle de lamour agap qui aux dires de Platon est le Bien par excellence, car il ne dsire que le bien de tous les humains. Cet amour charit, cet amour compassion serait-il source de lesprance ?(1) Anselm Grn : Philosophe chrtien allemand n en 1945, auteur de Petites mditations sur le mystre de lamiti, ditions Albin Michel, 2004 (2) Isabelle Ohmann et Florence Chauvet, Vers dors de Pythagore, ditions Nouvelle Acropole, 2007 (3) Ignace Lepp : Psychologue franais 19081966. (4) Sri Ram : Philosophe indien mort en 1973.

L amiti dans les coles de philosophiePour les Grecs qui sont le peuple de lamiti par excellence, selon Anselm Grn(1), seuls ceux qui aspirent la vertu peuvent se lier damiti. Labsence damiti est nuisible lme disent-ils ! Pythagore, linventeur du mot philosophe, dit que lamiti est la mre de toutes les qualits. Choisis pour ton ami, lami de la vertu ; cde ses doux conseils, instruistoi par sa vie. (2) Son cole de philosophie, Le Muse, en sera la fidle reprsentante. Un jour, un Pythagoricien sur le point de mourir, ne pouvant rgler laubergiste qui laccueillait, demande inscrire un symbole sur sa porte. Il y grave une toile cinq branches, symbole dappartenance lcole pythagoricienne. Les annes passent, un homme rentre dans lauberge et pose la question : Qui a inscrit ce symbole sur ta

25

Philosophie vivre

Exprience et rnovationPar Dlia Steinberg Guzman

COMMENT TIRER AU MIEUX PARTI DE LEXPRIENCE ? SUFFIT-IL DE SE RFRERUNIQUEMENT CE QUE NOUS GARDONS EN MMOIRE ? QUE FAUT-IL GARDER ET QUE FAUT-IL CHANGER ? DLIA STEINBERG GUZMAN SINTERROGE SUR LE SENS DE LEXPRIENCE POUR UN DISCIPLE DE LA SAGESSE.

P

laton disait que les cheveux blancs sont signe de vieillesse et pas toujours de sagesse. De la mme faon, la vieillesse nest pas toujours signe dexprience. Pas plus que lamertume que laissent gnralement les annes face des vnements mal assimils. Non plus que la mfiance que provoquent les situations comprises sous langle de lgosme. La vritable exprience doit produire le bonheur propre une rnovation permanente.

Avancer sur le chemin de sagesseEn ralit, celui qui acquiert de lexprience sait que, sans esprit de rnovation, il ne pourra continuer avancer sur ce chemin de sagesse. Lexprience nest pas statique, elle est lessence mme de la Vie, et nous conduit prcisment continuer de lavant, en construisant autour de nous et vers le haut avec des matriaux toujours plus nobles, plus parfaits. Comme toujours, les enseignements de Jorge Livraga (1) nous aident voir cette relation entre

lexprience et la rnovation. La rnovation nest pas changement mais raffirmation de ce qui est valable, dpassement des expriences qui ne sont plus ncessaires, changement doutils et revitalisation gnrale de lensemble et de chacun dentre nous. Voici donc plusieurs points intressants ajouter tout ce qui prcde.

Revitalisation de lensemble et de chacun dentre nousNous avons tudi les trois types

26

de karma (2) : le karma personnel, le karma individuel et le karma collectif. Il est facile de mettre ces types de karma en relation avec des types similaires dexprience. Il y aura ainsi des expriences personnelles, individuelles et collectives. Les expriences personnelles et individuelles vont avec ce que nous savons de lexprience personnelle, ce quon apprend force derreurs sans aucune direction et ce que nous adoptons comme fruit mr des Matres et des Sages qui nous ont prcds. Les expriences collectives sont celles que nous vivons dans des groupes, petits ou grands ; depuis notre famille, notre noyau damitis, la ville dans laquelle nous nous trouvons, jusquau monde en gnral. La revitalisation des expriences individuelles et collectives En partant du fait que nous admettons le chemin discipulaire comme valable pour notre Moi suprieur (3) , nous mettrons laccent sur les expriences individuelles ou discipulaires qui affectent lme et les expriences collectives. Cest dans ces cadres quil faut introduire une revitalisation gnrale. Revitaliser, cest donner davantage dnergie, davantage de force, davantage dlan vers le futur en sappuyant sur le socle du pass valable. Mais il est vident que nous narriverons pas une revitalisation de lensemble si chacun dentre nous ne se soucie pas de la sienne en premier lieu. La revitalisation personnelle Nous avons besoin de nous renouveler chaque matin, de promouvoir llan vital dans la mesure o nous laissons de ct les malheurs prsums qui nous enlvent notre nergie. Nous avons besoin dallumer le feu de lenthousiasme chaque jour, en nous rappelant que chaque difficult, chaque contrarit, est une preuve quil nous faut surmonter. Et, que je sache, aucune preuve ne se surmonte travers la mauvaise humeur ou le chagrin. De cette faon, nous collaborerons activement ce que lensemble, notre entourage, petit ou grand, participe notre rnovation.

dante. Cest ce qui meut lHistoire vers son vritable Destin. Cest la fondation qui subsiste en dpit des alternances cycliques, comme fil de Vie unissant toutes choses. Nous avons besoin daffirmer et de raffirmer, de consolider mille et une fois ce qui est valable pour lindividu et pour lensemble.

Dpassement dexpriences qui ne sont plus ncessairesLes expriences constituent les chelons dune grande chelle. Cela na pas de sens de saccrocher un des degrs du fait que nous y avons atteint une certaine assurance et un certain confort. Continuer est une obligation. Surmonter chacune des difficults que nous prsente la Vie avec sa matrise, pour affronter de nouvelles preuves. Tout ce statisme est contraire la rnovation et, par consquent, la vritable exprience. Si nous recourons aux enseignements de La Voix du Silence (4), nous verrons quil faut tuer le souvenir des expriences passes. Ce souvenir morbide, dautocomplaisance est ce qui nous attache lchelon sur lequel nous sommes.

Changement doutilsNous disposons tous au moins de quatre vhicules dexpression : un corps, la vitalit qui lanime, la psych et le mental. Mais nous nutilisons pas toujours ces outils. Certains sont utiliss au mieux ; dautres commencent tout juste souvrir un passage dans notre conscience. Il est temps demployer davantage notre mental rflexif, intelligent et capable de discerner, en laissant un peu de ct la fatigue des motions ngatives. Il est temps de revitaliser notre nergie pour la mettre au service de nobles idaux, en laissant un peu de ct lattachement un corps qui, videmment, nest pas notre vritable Moi. Il est temps de nous dcouvrir nous-mmes. De nous connatre mieux, pour connatre ainsi les dieux et lunivers. Ce nest quainsi que nous servirons pleinement notre idal(1) Jorge Livraga : philosophe, fondateur de Nouvelle Acropole (2) loi de cause effet qui rgit tout individu et toute chose (3) Esprit, Soi. (1) La Voix du Silence, Hlna Ptrovna Blavatsky, ditions Adyar N.D.L.R. : Le chapeau et les intertitres et sous-titres ont t rajouts par la rdaction Texte extrait de Lexprience, comment mieux tirer parti de ce que nous vivons, Dlia Steinberg Guzman, ditions Nouvelle Acropole, 2007

Raffirmation de ce qui est valableLe valable nest pas ce qui nous plat ou nous satisfait a priori. Ce qui est valable est ce qui est bon pour la ruche et pour labeille, au dire des classiques. Cest lexprience dmontre par les Matres, celle quils nous offrent gnreusement pour nous aider surmonter nos difficults avec rapidit et une souffrance minime. Cest ce qui favorise notre volution ascen-

27

Question philo

Quest-ce que

le respect ?Par Lonie Behlert

LE TERME DE RESPECT EST TRS SOUVENT EMPLOY DE NOS JOURS ET SEMBLE TRE UNE VERTU PRNE PAR TOUS AU POINT DE DEVENIR UNE NOTION PASSE-PARTOUT. MAIS QUEN EST-IL RELLEMENT DU RESPECT ?n peut tre amen confondre deux notions, respect et tolrance. Pourtant elles ne signifient pas la mme chose et ne se Cest situent pas au mme niveau : le dans lhomme, dans respect se situe au-del de la sa raison et dans sa libert tolrance et la transcende.

O

Le respect, a sapprend ?Oui, le respect sapprend. Nous devons tre duqus au respect car cela ne vient pas naturellement (sinon aucune situation ne nous mettrait jamais hors de nous, aucune diffrence ne nous choquerait). Le respect est avant tout un tat douverture soi-mme et aux autres, un tat dcoute attentive et dynamique, qui ne se contente pas de contempler la chose qui est diffrente ou trange comme un lment exotique ou ornemental mais de comprendre, intrinsquement, ses lois de fonctionnement.

qui constituent sa dignit, quil faut fonder les principes Tolrance et respect, quelle diffrence ? du respect de lautre, non dans une divinit. En effet, comme nous lindiqueLuc Ferry

sa dfinition de base, la tolrance est le fait de ne pas interdire ou exiger, alors quon le pourrait et dsigne de fait la libert qui rsulte de cette abstention, alors que respecter signifie prendre une chose, une situation ou un tre en totale considration et donc ne pas se situer sur le terrain de la simple et molle acceptation, de la dsinvolture et de la ngligence. Gthe a fort bien compris le lien troit qui unit ces deux notions : la tolrance ne devrait tre quun tat transitoire. Elle doit mener au respect.

Le respect commence par soi-mmeAinsi faut-il commencer par se respecter soi-mme, bien se connatre Mme et se corriger en consquence dans la solitude, ne dans le but de samliorer. dis ni ne fais rien de blPlus la connaissance de mable.Apprends te respecter nous-mme sera profonde beaucoup plus devant ta et stable, plus le respect propre conscience que dont nous ferons preuve devant autrui envers autrui sera authenDmocrite tique et actif.

Accepter et aller vers ce qui drangeEffectivement, la tolrance est la premire tape sur le chemin de la connaissance et de la comprhension, car au moins, lorsquon tolre quelque chose ou quelquun, on ne le rejette pas ; on apprend laccepter. Le respect exige daller plus loin encore sur le chemin de lacceptation. Il exige de sortir de lindiffrence, de cesser daccepter de faon passive pour aller vers la connaissance de ce qui diffre de nous, de ce qui est nouveau, atypique, voire drangeant au premier abord. Car lhomme qui se prtend respectueux respecte avant tout ce quil comprend et avec quoi il est en accord (par habitude ou croyance). Mais quen est-il de son soidisant respect lorsquil se heurte ses propres limites ? Ainsi nous prnons tous le respect sans tre ncessairement respectueux ni respectables

Du respect lamourLe respect envers nous-mme et autrui nous amne lamour, qui est sa forme exacerbe. Comme lcrit Khalil Gibran : Celui qui, par quelque alchimie sait extraire de son cur, pour les refondre ensemble, compassion, respect, besoin, patience, regret, surprise et pardon cre cet atome quon appelle lamour. Passons donc de la tolrance au respect et du respect lamour comme loiseau qui slve dans les airs et voit le monde avec davantage de hauteur ; et si le voyage ne se fait pas en un jour, il est bon de sen remmorer rgulirement les tapes et den faire un refrain cher notre cur

28

N176 Dossier : La qutede luniversel : Alexandrie

N177 Dossier :Le temps des cathdrales

N178 Dossier :Le priple du hros

N179 Dossier :Splendeurs de lAsie centrale

N180 Dossier :Itinraires de lau-del

N181

Dossier : Sagesse gyptienne

N182 Dossier :Les civilisations disparues

N183 Dossier :Les visages du Sacr

N184 Dossier :Masculin / Fminin

N185 Dossier :LInde spirituelle (puis)

N186 Dossier :Les Arts martiaux

N187 Dossier :La vie des plantes

N188 Dossier :Philosophies de lAmour

N189 Dossier :Le retour du Moyen-Age

N190 Dossier : Rites etcroyances dimmortalit

N191

Dossier : Les nigmes du temps

N192 Dossier :Anges et dmons

N193 Dossier :Alchimie et mtamorphoses

tre philosophe aujourdhui

Quest-ce que la philosophie ? Comment devenir philosophe ? La philosophie une contre-culture ? Philosophies dhier, philosophies daujourdhui Nouvelle Acropole, 50 ans de philosophie dans le monde

DOSSIER

200

Le retour de la philosophieRevue de Nouvelle Acropole n 200 6 Numro de Septembre-octobre 2007

N194 Dossier :Lgypte symbolique

N195 Dossier :Nos anctres et nos origines

N196 Dossier :Lesprit de la Renaissance

N197 Dossier :Les puissances de lme

N198/199

Dossier :

N200 Dossier :Le retour de la philosophie

La destine dans la Grce antique

tre philosophe aujourdhui

Sagesses

Vie et mort du parfait catharePhilosophies

Lamiti philosophiqueCivilisations

Lidal chevaleresque des TempliersPsychologie

Commandezles numros disponibles !NUMROS DISPONIBLES BON DE COMMANDE

Lducation des sensRencontre avec

Michel Danino

DOSSIER

Socits secrtes au Moyen-ge

N201 Dossier :Socits Secrtes au Moyen-ge

Revue de Nouvelle Acropole n 201 4 Numro de novembre-dcembre 2007

Nom . . . . . . . . Prnom . . . . . . Adresse . . . . . ............ Ville . . . . . . . . . Code postal . . Tl . . . . . . . . . . Adresse e-mail

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

. . . . . . . .

Je commande le(s) numros(s) suivant(s)......................................................

Prix du numro : 4 (frais de port compris ) soit . . . . . . n x 4 = . . . . . . . . . . Chque bancaire ou postal lordre de Nouvelle Acropole, renvoyer FDNA, revue Acropolis, 6, rue Vronse 75013 Paris. (offre valable uniquement en France mtropolitaine), ou au centre Nouvelle Acropole le plus proche de chez vous.Conformment la loi Informatique et Libert du 6.01.1978, vous disposez dun droit daccs et de rectification des donnes qui vous concernent.

NUMRO SPCIAL

lire

Socits secrtes du Moyen-geQuelques livres lire...Les Templiers, une chevalerie initiatiquePascal CROSNIER et Jean-Pierre LUDWIG ditions Nouvelle Acropole, Collection Les Dossiers spciaux, 99 pages, 6

Les Dossiers Spciaux

mrement rflchie et prpare. Parlant arabe, il a eu accs des documents indits et des archives secrtes, et a pu dresser un tableau prcis de cet ordre depuis son origine orientale jusqu sa fin, controversant les documents officiels. Inspirs dune chevalerie spirituelle orientale, on les a accus de collusion avec les musulmans et leur grande habilet financier en a fait des ennemis. Aprs la dfaite de St Jean dAcre, tout se met progressivement en place pour les dtruire..

croient en lexistence de deux mondes, lun bon et lautre mauvais. Ils se considrent comme des disciples des aptres. Ils seront dmoniss, perscuts et anantis sur le bcher.

Histoire secrte de lInquisitionDe Paul III Jean-Paul II Peter GODMAN ditions Perrin, 342 pages, 21

Les Templiersune chevalerie initiatiquePascal Crosnier et Jean-Pierre Ludwig

Les catharesditions Nouvelle Acropole

Des pauvres chevaliers du Christ, ctoyant les mystres du Temple de Salomon, aux navigateurs portugais de lOrdre du Christ, lorigine des grandes dcouvertes de la Renaissance, les Templiers ont marqu leur poque par leur originalit. Dpositaire plus que probable des antiques savoirs tout autant que de la rvlation christique, cette confrrie initiatique et sotrique a profondment marqu pendant plusieurs sicles, notre civilisation occidentale, drangeant fortement lglise qui a dissous lordre et brl les membres les plus minents.

Anne BRENON Albin Michel, 292 pages, 9,50

Lexploration des archives du Vatican sur cinq sicles permet de dcouvrir lhistoire de lInquisition romaine, et ses mthodes pour dbusquer les hrtiques. Parmi les inquisiteurs, le cardinal Bellarmin qui a offici