SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

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RÉFORME DES SYSTÈMES ÉDUCATIFS ET RÉFORMES CURRICULAIRES : SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS AU SUD DU SAHARA RAPPORT FINAL DU SÉMINAIRE-ATELIER LIBREVILLE, GABON, 23 AU 28 OCTOBRE 2000 «POLITIQUE DE REFONDATION CURRICULAIRE, PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE, RÉALITÉS LOCALES ET DÉFIS DU XXI e SIÈCLE » COMMISSION NATIONALE GABONAISE POUR L’UNESCO BUREAU INTERNATIONAL D’ÉDUCATION BIE

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RÉFORME DES SYSTÈMES ÉDUCATIFSET RÉFORMES CURRICULAIRES :

SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS AU SUD DU SAHARA

RAPPORT FINAL DU SÉMINAIRE-ATELIERLIBREVILLE, GABON, 23 AU 28 OCTOBRE 2000

«POLITIQUE DE REFONDATION CURRICULAIRE,PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE,

RÉALITÉS LOCALES ET DÉFIS DU XXIe SIÈCLE»

COMMISSION NATIONALE GABONAISE POUR L’UNESCOBUREAU INTERNATIONAL D’ÉDUCATION

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BIE

«Dossiers» de Perspectives en 2001 — Volume XXXI

No 1, mars 2001: La réforme de l’enseignement secondaire

No 2, juin 2001: Le constructivisme en éducation

No 3, septembre 2001: Apprendre à vivre ensemble au vingt et unième siècle

No 4, décembre 2001: L’autonomie de l’école et évaluation

Tarifs annuels d’abonnements :

❏ Particuliers et institutions de pays développés, 180 francs français(numéro simple: 60 FF)

❏ Particuliers et institutions de pays en développement, 90 francs français(numéro simple: 30 FF)

Toute correspondance concernant les abonnements à Perspectives doit être adressée à: Jean De Lannoy,

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Perspectives,s’adresser à: BIE, PUB, Case postale 199, 1211 Genève 20, Suisse; courrier électronique:

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revuetrimestrielle

d’éducation comparée

PERSPECTIVESpubliée par le Bureau international d’éducation,

Case postale 199, 1211 Genève 20, Suisse

La table des matières la plus récente de la revue peut être consultée sur Internet :

http://www.ibe.unesco.org

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RÉFORME DES SYSTÈMES ÉDUCATIFSET RÉFORMES CURRICULAIRES :

SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS

AU SUD DU SAHARA

RAPPORT FINAL DU SÉMINAIRE-ATELIERLIBREVILLE, GABON, DU 23 AU 28 OCTOBRE 2000«POLITIQUE DE REFONDATION CURRICULAIRE,

PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE,RÉALITÉS LOCALES ET DÉFIS DU XXIe SIÈCLE»

Responsable de la publication: John Aglo

COMMISSION NATIONALE GABONAISE POUR L’UNESCOBUREAU INTERNATIONAL D’ÉDUCATION

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Table des matières

Introduction,par Ouri Sanou, Cheikh Diakhate et Catherine Nkie, page 3

PARTIE I: PRÉSENTATION

● Le XXIème siècle et le système éducatif du XIXème, par Cecilia Braslavsky, page 8

● Réforme des systèmes éducatifs et réformes curriculaires: situation dans les Etats-membresreprésentés,par John Aglo, page 12

PARTIE II: RAPPORTS NATIONAUX SUR LA REFONDATION CURRICULAIRE ETLE PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE

● Bénin,par Djibril M. Debourou et François Mahougbé Labe, page 24

● Burkina Faso,par B. Didier Kam et Ouri Sanou, page 30

● Congo,par Joachim Mandavo et Marie Joseph Mallali-Youga, page 35

● Gabon,par l’Institut pédagogique national et Éric Dodo-Bouguendza, page 40

● Mali, par Sahaloum Ould Youba et Mamadou Sissima, page 47

● République Centrafricaine,par Abel Koulaninga, André-Edgar Benam, Philippe Hoornahert et Alphonse Mabingui, page 50

● Sénégal,par le Cheick Diakhate, Serigne Fall et Souleymane N’Diaye, page 58

● Tchad,par Abderamane Koko et Goloun Dewa, page 64

● Togo,par Jean Adama Nyame et Yao Nuakey, page 71

PARTIE III: LES CONTRIBUTIONS THÉMATIQUES

● Une éducation appropriée aux peuples autochtones d’Amérique latine,par José Marin, page 78

● Articulation entre documents de politiques éducatives, programmes et manuels:l’enseignement des valeurs universelles par John Aglo, page 87

● Politique sectorielle et réforme curriculaire,par Mohamed Radi, page 92

● La problématique du développement du curriculum: le cas sénégalais,par Souleymane N’Diaye, page 95

ANNEXES

1. Motions de remerciement,page 1112. Discours d’ouverture,page 1123. Discours de clôture,page 1144. Liste des participants,page 115

© 2001. Bureau international d’éducation, Case postale 199, 1211 Genève 20, Suisse. www.ibe.unesco.org

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Du 23 au 28 octobre 2000, s’est déroulé à Libreville,le Séminaire-atelier sur le thème : «Politique de refon-dation curriculaire, processus de développement curri-culaire, réalités locales et défis du XXIème siècle ».

Co-organisé par le Ministère gabonais de l’éducationnationale et le Bureau international d’éducation (BIE)de l’UNESCO, l’atelier a regroupé une cinquantaine departicipants, tous techniciens du curriculum et prove-nant des neuf pays suivants : Bénin, Burkina-Faso,Congo, Gabon, Mali, République Centrafricaine,Sénégal, Tchad et Togo.

La première journée a été consacrée à l’enregistre-ment des participants et à l’organisation du déroule-ment des travaux.

La cérémonie d’ouverture, présidée par André Mba-Obame, Ministre de l’éducation nationale du Gabon,porte-parole du Gouvernement, est intervenue le 24octobre à 10 heures, et a été ponctuée par trois allocu-tions. Il s’est agi de celles du Secrétaire général de laCommission nationale gabonaise pour l’UNESCO, de laDirectrice du BIE et du Ministre de l’éducation nationa-le du Gabon.

Dans son discours d’ouverture, le Ministre de l’édu-cation nationale a souhaité la bienvenue à tous les parti-cipants et à tous les encadreurs, remercié le BIE etexprimé sa gratitude aux organisateurs, avant de rappe-ler l’objectif majeur de l’atelier, à savoir le partaged’expériences. Il a ensuite rappelé toute l’importanceque le Gabon accorde à la rénovation des curricula etles actions entreprises par ce pays en la matière. Il asouhaité que les conclusions qui ressortiront des tra-vaux aillent dans le sens de la collaboration avecl’UNESCO, notamment la création d’un réseauBIE/Afrique sur les curricula. Avant de déclarer ouvertle Séminaire-atelier, il a affirmé la disponibilité de laRépublique Gabonaise à abriter le siège d’un tel réseau,s’il venait à être créé.

Dans son allocution, le Secrétaire général de laCommission nationale pour l’UNESCO, Jean-MarieVianney Bouyou, a souhaité la bienvenue à tous, rappelétoutes les concertations préalables qui ont abouti à l’or-ganisation de l’atelier, renouvelé l’espoir que le BIE etle Gabon placent dans l’atelier et exprimé le vœu quecet atelier marque le début d’une nouvelle forme decoopération avec le BIE.

La Directrice du BIE, Cécilia Braslavsky, a quant àelle attiré l’attention des participants sur les défis duXXI ème siècle aux plans politique, économique et cultu-rel et préconisé la conciliation entre défis globaux etdéfis locaux comme moyens d’humaniser la globalisa-tion. Elle s’est ensuite référée au Forum de Dakar surl’Education pour justifier la position de l’UNESCO enmatière d’éducation, qui ne se résume pas seulement àl’éducation pour tous, mais qui veut la meilleure éduca-tion qui soit pour tous.

Après l’annonce de la composition du bureau duSéminaire par le Ministre, les participants ont adopté laprogramme de travail et procédé à la désignation desmodérateurs des différentes séances de travail. Lebureau était composé comme suit :● Président : Patrice Ondo-Mba (Gabon) ;● Vice-président : Souleymane N’Diaye

(Sénégal) ;● Rapporteur général : Ouri Sanou (Burkina-Faso) ;● Rapporteurs adjoints : Cheikh Diakhate (Sénégal) et

Cathérine Nkie (Gabon)

En guise d’introduction aux travaux de l’atelier, laDirectrice du BIE a présenté son institution à traversson historique, ses missions et ses objectifs. Il est res-sorti de cette présentation que le BIE (créé en 1925)est plus ancien que l’UNESCO. Par ailleurs, le BIEdispose des données les plus importantes sur l’éduca-tion. Les lignes d’action actuelles du BIE sont les sui-vantes:

1. l’organisation du dialogue politique à travers laConférence internationale sur l’éducation ;

2. la plate-forme et l’observatoire sur les contenus etméthodes d’éducation ;

3. la formation des capacités transversales (communi-cation, négociation, etc.) ;

4. l’accompagnement d’assistance à travers un réseaud’experts.

Les travaux proprement dits se sont articulés autour dequatre axes :1. les contributions des pays participants ;2. les contributions thématiques ;3. les séances de concertation;4. modalités de coopération.

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Introduction

Ouri Sanou, Cheikh Diakhate et Cathérine Nkie

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I. LES CONTRIBUTIONS DES PAYS

Ces séances ont été l’occasion pour chaque pays partici-pant de présenter son expérience en matière de reformedu système éducatif et de développement des curricula.Les différentes contributions, toutes très riches et trèsconstructives, ont permis d’établir un certain nombre deconstats parmi lesquels il convient de citer :1. La qualité, le coût et la pertinence des systèmes édu-

catifs sont des problèmes communs à tous les pays ;2. Chacun des pays a formulé de grandes orientations

pour son système éducatif ;3. Tous les pays possèdent une expérience en matière

d’utilisation des langues nationales dans l’enseigne-ment ;

4. Dans la plupart des pays, la priorité est accordée àl’éducation de base dans les réformes ;

5. Les partenaires techniques et financiers sont àquelques exceptions près les mêmes pour l’ensembledes pays ;

6. Chaque pays est présentement engagé dans un pro-cessus de réforme curriculaire, mais tous n’en sontpas au même stade ;

7. Dans tous les pays, les réformes découlent générale-ment de la volonté politique.

Les débats, qui ont suivi ces présentations, ont tournéautour des points suivants :● Les critères de choix des langues nationales à intro-

duire dans l’enseignement, ainsi que le statut de ceslangues ;

● Les problèmes didactiques liés à l’utilisation de ceslangues (méthodologie, matériel didactique) ;

● L’option de l’approche curriculaire (par les contenus,par les objectifs, par les compétences) ;

● L’insuffisance de l’expertise locale ;● La formation des enseignants, ainsi que leur rôle

dans les réformes ;● L’implication des partenaires (techniques, financiers,

sociaux, etc.) ;● Le concept même de compétence ;● La question de l’évaluation dans l’approche par les

compétences.Il ressort de tout ce qui précède que, tant au niveau descontextes qu’à ceux de procédures de reforme et de pres-cription, les pays font face à des problèmes communs, àdes problèmes spécifiques et à des problèmes mineurs.

Au titre des problèmes communs, les points suivantspeuvent être énumérés :1. La situation économique des Etats ;2. La forte dépendance des Etats vis-à-vis de l’extérieur ;3. La formation initiale et continue des enseignants ;4. L’introduction des langues nationales.Au titre des problèmes spécifiques, les points suivantsont été notés:1. Les situations politiques des Etats ;2. La polysémie du concept d’éducation de base ;3. L’expérimentation des curricula par rapport à la rapi-

dité des changements.

Comme problèmes mineurs, les points suivants ont étéretenus:1. La prise en compte dans les réformes des nouvelles

technologies de l’information et de la communica-tion (NTIC) ;

2. Les conséquences des options curriculaires ;3. Les enjeux communautaires face aux enjeux mon-

diaux.

II. LES CONTRIBUTIONS THEMATIQUES

Ces contributions, faites à travers quatre exposés présen-tés respectivement par Mohamed Radi, Chef de laSection politique et Plan d’actions nationaux àl’UNESCO, John Aglo, chargé du programme Afriqueau BIE, José Marin, Professeur à l’Université de Genèveet Souleymane N’Diaye, ancien fonctionnaire del’UNESCO, spécialiste des curricula, ont porté sur lesthèmes suivants :1. Politique sectorielle et réforme curriculaire ;2. Articulation entre politiques éducatives, pro-

grammes et manuels : enseignement des valeursuniverselles ;

3. Relations entre utilisation des langues nationales etrevalorisation des cultures nationales ;

4. Problématique du développement du curriculum.Le premier de ces thèmes a fait ressortir certainsaspects-clés que toute réforme du système doit néces-sairement aborder, ainsi que les étapes de l’approchesectorielle.

Le deuxième exposé a été le compte-rendu d’uneétude commanditée par le BIE et qui a porté sur les pro-grammes et manuels scolaires du Gabon, du Mali, duSénégal et du Togo.

Quant au troisième exposé, il a mis l’accent sur larelation étroite qui existe entre l’utilisation des languesnationales et la revalorisation des cultures nationales.

Le quatrième exposé a permis aux participants debénéficier de la riche expérience en matière d’élabora-tion du curriculum au Sénégal de Souleymane N’Diaye,ancien fonctionnaire de l’UNESCO.

III. LES SEANCES DE CONCERTATION

Elles ont concerné trois aspects :1. L’identification des besoins en matière de réforme

curriculaire ;2. La possibilité de mise en place d’un réseau

BIE/Afrique sur les curricula ;3. Les modalités de coopération entre les Etats partici-

pants et le BIE.En ce qui concerne le premier aspect, les lignes d’actionci-après ont été retenues :● l’assistance technique du BIE ;● la création d’un réseau d’échanges ;● la formation de spécialistes des curricula ;● l’organisation de rencontres périodiques ;● l’appui matériel et financier du BIE aux Etats.

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Pour ce qui est de la création d’un réseau d’échanges, leprincipe a été unanimement accepté par les participants.Par ailleurs, ceux-ci ont souhaité que dans les pays oùexistent des Instituts pédagogiques nationaux, ces struc-tures soient les points d’encrage du réseau.

IV. MODALITES DE COOPERATON ENTRE LES PAYS ET LE BIE

Les axes de coopération retenus concernent en priorité :1. La formation en développement du curriculum ;2. Les données sur l’éducation ;3. Le développement des curricula ;

4. La formation en planification, les manuels scolaireset l’évaluation des apprentissages ;

5. La conduite des études sur l’éducation.

Par ailleurs, les participants ont souhaité que le BIE soitleur interprète auprès des autres organismes del’UNESCO, pour leurs besoins en relation avec les com-pétences de ces organes.

La cérémonie de clôture, placée sous la présidencede S.E.M. André Mba-Obame, Ministre gabonais del’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement,est intervenue le 27 octobre 2000.

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PARTIE I :

PRÉSENTATION

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I. GRANDES TENDANCES DU DEVELOPPEMENT MONDIAL ACTUEL

Les processus d’internationalisation et de globalisation,qui débutèrent au XVème siècle, poursuivent leur expan-sion à un rythme qui, peu de temps en arrière encore,aurait semblé inimaginable. De manière générale, degrandes tendances caractérisent le développement mon-dial actuel, à la fois sur les plans économique, social etculturel, à travers tous les continents et affectant toutesles populations.

1. Les tendances économiques

On compte six processus économiques actuellement àl’œuvre à travers le monde :1. la diminution du volume de travail disponible et

même nécessaire pour satisfaire les besoins de basedes sociétés ;

2. la diminution du volume de travail dans le secteurindustriel, et l’augmentation des emplois dans le sec-teur des services ;

3. la diminution des emplois formels et l’augmentationdes emplois informels ;

4. l’évolution toujours plus rapide du profil desemplois, notamment de la demande de compétencesspécifiques ;

5. la modification de l’échelle de la vie professionnelledu niveau local vers le niveau national, voire mêmeinternational ;

6. les bonnes opportunités de travail sont aujourd’huicelles qui amènent à agir et à penser à la fois.

Sur le plan du secteur éducatif, ces nouvelles tendanceséconomiques réunies confrontent l’éducation à deux défismajeurs : celui de l’objectif que l’éducation souhaite sedonner et celui des moyens dont l’éducation dispose pourréaliser l’objectif en question. Ainsi, la question principaleest de savoir s’il est encore nécessaire, possible ou mêmesouhaitable que l’éducation se concentre sur la transmis-sion des connaissances dites de base et qu’elle prépare lesjeunes à un monde du travail, alors que ce dernier n’appa-raît plus en mesure d’absorber la nouvelle main-d’œuvreformée année après année?

Au cours des dix dernières années, l’opinion domi-nante veut que l’éducation ne se consacre plus exclusi-

vement à la problématique de la transmission desconnaissances de base et de la préparation à la vie acti-ve. En fait, l’idée qui gagne progressivement du terrainest celle d’une éducation globale de la personnalité.Dorénavant, l’éducation tout en devant préparer les indi-vidus à une série d’activités, dont le travail productif,veillera aussi à s’attacher à certaines questions, tellesque la créativité culturelle et l’harmonie d’une vie defamille et sociale, ainsi que la préparation à une alter-nance de divers types d’activités qui se succéderont aulong de chaque existence individuelle.

L’éducation peut-elle encore être pensée en termesde formation pour le travail, de spécialisation et defilières ? La réponse se doit d’être négative. En effet, ilsemble de plus en plus que l’Education pour tous doiveformer à la fois à l’action et à la réflexion. Au lieu depréparer l’individu à exercer une activité bien définie,l’éducation doit de manière croissante préparer l’indivi-du à apprendre tout au long d’une vie. Ce ne seraqu’ainsi que chaque individu pourra faire face à l’an-goisse de devoir toujours changer et s’adapter à descontextes en perpétuel changement.

2. Les tendances sociales

Une des caractéristiques les plus complexes, auxconséquences pour le moins imprévisibles, qui découledu développement économique actuel est l’aggravationdes inégalités sociales existantes et l’apparition denouvelles inégalités. Ces dernières donneront forcé-ment lieu à une marginalisation croissante des défavo-risés qui verront en la violence la seule forme de réac-tion.

Il n’est pas réaliste de considérer que ces inégalitéspeuvent être renversées par des décisions prises dans lesecteur de l’éducation. Pourtant, il serait important dedévelopper des structures curriculaires et des processuséducationnels qui prétendent donner les mêmes oppor-tunités de formation à tous les jeunes, quelle que soitleur origine socio-économique. Malheureusement, forceest de reconnaître dans la réalité le renforcement del’importance des conditions de naissance.

Un net renforcement des inégalités est égalementobservable à l’intérieur des différents groupes profes-sionnels. Traditionnellement, l’éducation formelle

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Le XXIème siècleet le système éducatif du XIXème

Cecilia Braslavsky

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était basée sur la croyance que les travailleurs manuelsdevaient être exclus de la formation intellectuelle etque les intellectuels ne nécessitaient pas d’un appren-tissage dans le travail manuel et physique. Or, cettetendance, tout en correspondant à une réalité écono-mique datant des XIXème et XXème siècles, ne reflète pasla situation actuelle. En effet, les progrès scientifiqueset technologiques récents ont eu pour effet progressifde modifier la nature des emplois. Alors que les éco-nomies du XIXème siècle faisaient appel à des forma-tions différenciées et distinctes, les individus étaientpréparés soit au travail manuel, soit au travail intellec-tuel.

Plus récemment, le progrès technologique et scienti-fique a transformé la nature des emplois à pourvoir dansle sens d’une diminution des postes manuels, remplacéspar l’automatisation de larges secteurs de l’économie,alors qu’ailleurs des structures très traditionnelles conti-nuent à subsister. Afin d’assurer une meilleure qualité devie, l’exigence va de manière croissante aller dans lesens d’une formation intellectuelle solide et d’une capa-cité aussi solide que renouvelable à résoudre des pro-blèmes. Ceci signifie que l’enseignement au niveausecondaire devra inclure des composantes humanistes ettechnologiques, ainsi que des opportunités de formationdans l’art de la résolution des problèmes. Ce n’estqu’une combinaison de composantes d’enseignementqui permettra aux jeunes de penser et d’agir de manièreappropriée.

Au niveau de l’éducation, ces tendances socialesposent le défi du renforcement de l’enseignement desvaleurs. Il faut que nous comprenions tous qu’une répar-tition inégale et arbitraire des chances met en danger lasurvie de chacun.

3. Les tendances culturelles

Traditionnellement, le principe de tout système éducatifétait de « transmettre la culture des générations adultesaux générations plus jeunes ». Cette conception estbasée sur l’hypothèse de stabilité et d’homogénéitéentre les générations. C’est-à-dire, sur le principe queles générations plus jeunes ne possèdent pas de culturepropre et acceptent sans résistance les règles desadultes.

L’hypothèse de telles stabilité et homogénéité seretrouve également au sein d’une même génération. Ilest en effet admis que la jeunesse est culturellementhomogène, et que les seules différences notées sont denature biologique ou dues aux distinctions sociales.Ceci implique aussi en parallèle que la culture desadultes, ainsi que les caractéristiques de la production etla structure des connaissances sont des données stablesdans le temps.

Dans les faits, de nombreux pays font de plus en plusfréquemment l’expérience de l’émergence et du renfor-cement des jeunes cultures à travers la production et laconsommation d’activités en dehors de l’école. L’échecde l’école est de ne pas avoir su s’adapter aux caractéris-

tiques de ces nouveaux groupes et secteurs sociaux quifréquentent l’école. L’école n’a pas non plus fait preuvede considération suffisante à l’égard des demandes etdes besoins, ni même à l’égard de cette culture propre-ment dite. Ceci sont autant de facteurs explicatifs del’abandon scolaire et de mauvaises performances d’ap-prentissage.

En résumé, il est important de relever que les jeunesne constituent pas un groupe homogène, mais qu’ilsreprésentent des individus aux intérêts et aux exigencestrès diversifiés. Le droit à l’éducation doit être en essen-ce le droit de cultiver une identité propre.

La réalité étant celle du changement et de l’hétéro-généité, chaque génération possédera une culture propreet présentera une grande diversité. Les caractéristiquesde production et les structures de connaissances ne peu-vent donc être considérées comme étant immuablesdans le temps.

En conclusion, l’éducation se trouve donc aujour-d’hui placée devant le défi d’accepter la condition desujet des enfants et des jeunes, d’accepter et même depromouvoir la diversité; tout en veillant à enseigner àapprendre.

II. LE « SENS » DE L’EDUCATION AU XXI ème SIECLE

De manière générale, on peut dire que le défi en cedébut du XXIème siècle pour l’éducation est la formationde compétences nécessaires pour dégager de meilleuressolutions aux problèmes anciens et nouveaux, connus etinconnus, en veillant à la mise à jour des connaissanceset en pleine conscience des conséquences à court,moyen et long termes.

Une compétence est une «aptitude à l’action baséesur un savoir, combiné avec une conscience des consé-quences de cette action». Par opposition à un savoir, àdes valeurs ou à des capacités compartimentés, les com-pétences incluent aussi savoir comment être, commentpenser et comment apprendre, comment faire et com-ment vivre ensemble. Les mêmes compétences peuventêtre acquises à travers différents contenus, méthodolo-gies et modèles institutionnels.

L’amélioration des compétences fait appel à l’accèsaux opportunités éducationnelles et à des environne-ments éducationnels favorables. Les compétences elles-mêmes doivent être évaluées, et si possible mesurées. Ilpeut être suggéré que, à la lueur des tendances mon-diales observées, les populations doivent pouvoir béné-ficier de quatre conditions propices et nécessaires audéveloppement de ces compétences :1. un nombre adéquat d’années d’une éducation de

qualité ; 2. la garantie d’un environnement favorable à l’appren-

tissage ; 3. l’identification et l’acception préalables d’un certain

savoir de base à être enseigné ; 4. et idéalement, l’intégration par la société d’un vécu

démocratique.

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III. TENDANCES DES REFORMES EN COURS A LA LUMIERE DES DEFIS ACTUELS

1. En termes de structures des réformes

Aux XVIII ème, XIX ème et XXème siècles, la structure de touteréforme de l’éducation était horizontale, la structure étaitcelle d’une « pyramide pour la pyramide ». En ce début deXXI ème siècle, la structure d’une réforme propre à unesociété caractérisée par la mobilité permanente et multidi-rectionnelle serait plutôt une structure en cercles. Une tellestructure se mettra en place par étapes, avec chaque étapecorrespondant à une étape spécifique dans la vie de chaqueindividu.

Pour les siècles passés mentionnés ci-dessus, lastructure des réformes prise au sens vertical laissaitapparaître des filières correspondant aux différents sec-teurs de l’économie de la société industrielle moderne, àsavoir aux secteurs primaire, secondaire et tertiaire. Enrevanche, pour le XXIème siècle, la structure verticale detoute réforme est envisagée en termes de différenciationssuccessives et non de filières, afin d’accueillir et de pro-mouvoir les identités différentes sans aggraver les inéga-lités sociales existantes. Ainsi, et à titre d’exemple, laformation pour l’emploi sera complémentaire et s’articu-lera en modules.

2. En termes de qualité

En termes de qualité du curriculum, la tendance desréformes de par le passé était clairement rigide et procé-dait par niveau et par filière de système. A l’avenir, latendance des réformes de la qualité du curriculum serade s’orienter par rapport au niveau des acquis.

Pour ce qui relève de la qualité des contenus par lepassé, les contenus étaient intégrés à l’école primaire,différenciés par «discipline académique» au niveau dusecondaire. Dorénavant, les contenus seront de manièrecroissante intégrés et différenciés tout au long de l’en-fance et de la jeunesse (disciplines, ateliers, projets,etc.).

Du point de vue des méthodologies, la transmissiondes contenus et des habilités était précédemment mesu-rée, alors qu’aujourd’hui on opte plutôt pour l’évaluationde la «construction» des capacités, à savoir de l’utilisa-tion du savoir dans un contexte précis.

Et finalement, l’évaluation portant anciennement surles acquis au sens des contenus et des habilités s’attachedorénavant aux compétences, au sens de capacités.

3. En termes de gestion

L’examen des tendances de réformes dans le domaine deleur gestion interne et externe illustre également leschangements en cours. La gestion interne de la réformeavait précédemment pour fonction de contrôler des processus préétablis, dans un rapport d’institution à gou-vernement. A l’avenir la gestion interne des réformessera axée sur la promotion de la capacité institutionnelleà apprendre, selon un rapport inter-institutionnel. Les

institutions compteront non plus uniquement les gouver-nements à leur compte, mais aussi les universités.

De même, alors que la gestion externe des réformesse faisait dans le passé avec l’aide de la famille au niveaude l’école primaire, et avec l’aide des entreprises auniveau secondaire, une diminution du poids des entre-prises a pu être observée au cours des dernières années.A l’avenir, la gestion externe des réformes sera prise encharge par la communauté, par la famille et par les entre-prises. Il est important de noter que l’acception de la«famille» et de l’«entreprise» sera définie au cas parcas.

IV. TROIS QUESTIONS OUVERTES

Actuellement, trois débats majeurs se partagent l’avenirque l’éducation devra se donner :1. quels sont les contenus privés par opposition aux

contenus publics que l’éducation cherche à définir ? 2. quel est le lieu le plus adéquat pour dispenser l’édu-

cation: les institutions spécialisées à cet effet ou dansle lieu de vie, à la maison ?

3. faut-il privilégier des systèmes nationaux, individuelsou un système international qui se voudra universel ?

V. QUELQUES TENSIONS A L’OEUVRE DANSLES PROCESSUS DE REFORMES DE L’EDUCATION

Il convient de porter l’attention sur les tensions à l’œuvredans les processus de réformes de l’éducation et qui s’ar-ticulent à la fois sur le terrain politique, sur le terrainidéologique, à l’intérieur du système et des écoles, et,enfin, entre les systèmes politiques idéologiques et éducatifs.

Sur le terrain politique, différentes positions se dessinent et s’affrontent. C’est ainsi que les partisans duconsensus s’opposent aux partisans de l’efficacité.Quelle formule est meilleure pour le changement ?Celle qui regroupe l’accord et qui recueille le soutien detous les acteurs impliqués ou celle qui, au risque dedéplaire à une minorité, a pour priorité d’être diligenteet performante ?

Et puis, il semblerait aussi que « critique » et«action» ne partagent pas le même camp. La questionest ici de savoir si le changement est plus aisémentamené par une réflexion, un débat, une négociation ouplutôt si le seul vrai changement est celui qui empirique-ment tente de se valider, au risque de l’échec.

Finalement, une tension existe aussi entre partisansd’une unité nationale groupée et porteuse de la réformepar opposition à des changements au gré des demandeset des besoins, et qui vaudraient par leur pertinencelocale.

Ces débats sont difficilement résolus sur le terrainpolitique, mais les tensions qui se manifestent sur le ter-rain idéologique semblent encore plus périlleuses. Eneffet, il est quasi impossible de trancher quand il s’agitde savoir s’il vaut mieux privilégier la science par oppo-

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sition à l’esprit, ou inversement. De même, dans quellephilosophie faut-il s’inscrire ? Dans celle de l’épistémo-logie, science de la connaissance ou dans la pédagogie,science de l’éducation ? Enfin, la primauté revient-elle àl’autonomie d’action et de pensée ou à la responsabilitéconjointe, partagée ?

A l’intérieur du système et des écoles, d’autres dis-cussions âpres ont lieu quand on se demande notammentsi la préséance doit revenir à l’expérience ou plutôt à lacompétence dans la formulation et la mise en œuvred’une réforme éducationnelle. L’expérience ne s’opposepas seulement à la compétence, mais aussi à la capacitéinnovatrice. Néanmoins, la capacité innovatrice ne setrouve pas pour autant davantage représentée dans lecamp des professionnels spécialisés en éducation quedans celui des professionnels chevronnés chez qui lesens pratique prévaut sur les notions théoriques à proposde l’enseignement.

Finalement, on observe que lorsque les systèmespolitiques idéologiques et les systèmes éducatifs se ren-contrent, d’importantes difficultés surgissent sur le ter-rain de la communication. Chaque camp, idéologique etpolitique d’un côté et éducatif de l’autre, parle sonpropre langage et a une perception du temps différenteen termes de la notion d’urgence et de la gestion ducalendrier. Et évidemment, les besoins et les motivationssont très différents, ce qui se traduit en détriment pourtoute tentative d’apporter un changement utile etconstructif.

Ce qui est affligeant, considérant les temps, lesbesoins et les intérêts de chaque acteur séparément, c’estqu’un réel changement dans le sens d’une améliorationqui tiendrait compte et reflèterait les tendances mon-

diales actuelles semble impossible. En effet, toute tenta-tive de changement dans un sens progressif et appropriéest voué à l’échec et aboutit inexorablement à la conser-vation du système du XXème siècle.

Dans les pays pauvres, d’autres problématiques sup-plémentaires viennent se greffer sur ces questions déjàdélicates. Dans ces pays qui connaissent des difficultéséconomiques plus prononcées, on recueille des discoursdifférents selon que l’on traite avec des fonctionnairesou des consultants. Sur cette différence de discours et depriorités vient s’attacher l’origine des ressources prove-nant soit des caisses nationales propres, soit d’institu-tions de coopération internationale ou d’autres pays,pour lesquels le terrain éducationnel est fécond en possi-bilités d’influence.

VI. CONCLUSION

Comme il a été démontré plus haut, une réforme qui seveut à la hauteur des exigences et des attentes du XXIème

siècle devra être capable d’aller au-delà des oppositionstraditionnelles. Il est évident que tout changementimplique une nouvelle direction inconnue et donc moinsconfortable que celle mise à l’épreuve par la pratique.

Le monde de l’éducation possède les moyens de sedonner un projet d’avenir digne. La question n’est doncpas une question de possibilités d’action ou d’opportu-nités de changement. La question concerne bien plus lavolonté de changer, de vivifier et de permettre au mondede l’éducation de revivre. Tout changement porte la pro-messe d’un renouveau, d’une renaissance, tout commetoute réforme contient en elle l’abandon nécessaire dece qui est connu et entraîne donc une perte.

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I. INTRODUCTION

II. LES PROBLÈMES DES SYSTÈMES ÉDUCATIFS

1. La nature des problèmes● Problèmes liés au contexte● Problèmes d’ordre qualitatif● Faiblesse des rendements interne et externe.● Insuffisance de matériels didactiques ● Insuffisance numérique et sous-qualification du per-

sonnel d’enseignement, d’encadrement pédagogiqueet administratif

● Problèmes de structures et d’infrastructures

2. Les préoccupations des États-membres

3. Les recherches de solutions: les mécanismes demobilisation et les États généraux

III. LES TENTATIVES DE SOLUTIONS : LESRÉFORMES GLOBALES DES SYSTÈMES ÉDU-CATIFS ET LES RÉFORMES CURRICULAIRES

1. Options ou orientations politiques fondamentalesservant de support éthique et politique à l’entrepri-se de réforme

2. Les mesures juridiques3. Les plans de développement de l’éducation et les

organes de pilotage des réformes4. La réforme curriculaire

● L’introduction des langues nationales comme matièreet à terme comme médium d’enseignement dans cer-tains des États-membres

● L’étude du milieu● L’introduction des nouvelles matières et les innova-

tions pédagogiques● Les approches curriculaires

IV. LES DIFFICULTÉS INHÉRENTES AUXRÉFORMES

1. Les difficultés liées aux contextes économiques etfinanciers et à la trop grande dépendance des Etatsvis à vis de l’extérieur

2. Les difficultés inhérentes à la mise en œuvre desréformes

3. Les difficultés liées à l’introduction des languesnationales ou maternelles

V. LES PERSPECTIVES D’AVENIR

1. La possibilité de mise en place d’un réseauBIE/Afrique sur les curricula

2. L’identification des besoins en matière de réformecurriculaire

3. Les modalités de coopération entre les Etats parti-cipants et le BIE

VI.SYNTHÈSES ET ORIENTATIONS

N.B. Les citations dans cet article ont été tiré des textesoriginaux remis par les participants et pas nécessaire-ment à partir des textes publiés dans cet ouvrage.

Réforme des systèmes éducatifs et réformes curriculaires :situation dans les États-membres représentés

John Aglo

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I. INTRODUCTION

Le séminaire-atelier de Libreville a conduit à mettre enrelief deux aspects importants de leurs systèmes éduca-tifs de neuf Etats-membres d’Afrique au sud du Sahara.Il a donc permis :● de faire l’inventaire de certains des problèmes que

connaissent les systèmes éducatifs des Etats-membres représentés ; et,

● de rendre compte des tentatives de solutions envisagées à travers les politiques de réforme dansces Etats-membres pour faire face à ces problèmes.

II. LES PROBLEMES DES SYSTEMES ÉDUCATIFS

De nombreuses communications ont présenté les pro-blèmes des Etats-membres dans le domaine de l’éducationen insistant sur leur nature, en montrant de quelles manièresles autorités s’en sont préoccupées, et les différentesdémarches et mécanismes de recherches de solutions.

1. La nature des problèmes

Les problèmes des systèmes éducatifs sont indisso-ciables des contextes historique, politique et socio-économique des Etats. Ils se posent par rapport à la qua-lité de l’éducation, aux rendements interne et externe dusystème éducatif, à l’accès aux matériels didactiques, àla formation du personnel d’enseignement et d’encadre-ment, aux chances d’accès à la scolarisation, aux disposi-tions de pilotage stratégique et de gestion de l’éducation,et aux structures d’accueil. Il s’agit ainsi de problèmesqui gravitent autour de la question de la qualité de l’édu-cation et qui, en même temps, font de cette question unsujet central. De l’aptitude à résoudre ces problèmesdépend en vérité la pertinence des systèmes éducatifs.

Problèmes liés au contexteLes travaux font remonter l’origine des difficultés queconnaissent les systèmes éducatifs au fait historique queconstitue la colonisation. Dès lors, l’affirmation selonlaquelle «Le Burkina Faso, a accédé à l’indépendance(…), à l’instar d’autres pays de l’Afrique francophonesubsahérienne, en héritant d’un système éducatif peudéveloppé», faite par la délégation burkinabé, n’est pasun point de vue isolé ni déplacé.

Problèmes d’ordre qualitatifLe contexte historique, tel que défini, avait une caractéristique idéologique précise. Il avait engendré :● Une école sélective, étrangère aux préoccupations,

aux réalités et aux besoins des populations.On le notedans le texte présenté par la délégation centrafricaine :malgré «l’accession de la plupart des pays africains auSud du Sahara à l’indépendance, l’école africaine [ estdemeurée ] une copie conforme, une suite logique dumodèle étranger. Le système d’enseignement, inspiréde l’Europe, n’a pas subi de modification majeure etreste inadapté aux réalités des pays africains».

● Une école orientée vers la formation des agents d’exé-cution au service d’une administration aux intérêtsorientés vers l’extérieur.«Les systèmes éducatifs afri-cains émanant des régimes colonialistes étaient conçuspour former des agents d’exécution, servant la plupartdu temps de courroie de transmission entre les admi-nistrés (population analphabète) et l’administrateur(colonisateur et son substitut). L’enseignement dispen-sé ne répondait naguère aux besoins de l’apprenant etne prenait jamais en compte les réalités socio-économico-culturelles du milieu de l’apprenant». (cf.la présentation de la délégation togolaise).

● Une école faisant trop peu de place à la créativité, àl’imagination, au développement de l’autonomie dela réflexion. «L’enseignement dispensé tendait àcoloniser psychologiquement, culturellement l’ap-prenant. Il tendait à maintenir les scolarisés dans unmimétisme destructeur. Cet enseignement ne per-mettait pas aux scolarisés de développer l’esprit critique et la créativité afin de réaliser leur poten-tiel» (cf. la présentation de la délégation togolaise).

Une conséquence de cet héritage est la forte dépendancedes systèmes éducatifs concernés vis-à-vis de l’étranger.Une autre conséquence de cet héritage est l’absenced’un lien très fort entre l’école et le milieu de vie, entrel’école et la vie. Comme le fait remarquer la délégationbéninoise : «L’école n’a pas enseigné à lire la réalitédynamique qui nous entoure. La morale d’incitation àl’action transformatrice et à la manifestation de l’espritde créativité fait défaut dans notre système éducatif»(cf. la présentation de la délégation béninoise).

Faiblesse des rendements interne et externeLa faiblesse du rendement interne s’explique par l’aban-don et le redoublement, celle du rendement externe, par ladifficulté qu’éprouvent les personnes scolarisées à s’insé-rer convenablement dans la vie active, à intégrer leurmilieu, à s’adapter à leur environnement social et écono-mique. Cette situation fait de l’école «une véritablefabrique de chômeurs» (cf. la présentation de la déléga-tion béninoise). On observe pour un grand nombre depays ce que Mohamed Radi a observé pour le Gabon. Onassiste à une coexistence du « chômage de diplômés uni-versitaires » avec une « pénurie » « d’enseignants, en par-ticulier de professeurs de mathématique et de français ».

Insuffisance de matériels didactiquesDans tous les Etats-membres représentés, le systèmeéducatif est confronté à une insuffisance de manuels, àune absence d’ouvrages et d’équipements pédagogiques(ateliers technologiques, laboratoires). D’une façongénérale, on assiste à l’absence d’une politique rigou-reuse du livre scolaire et du matériel didactique.

Insuffisance numérique et sous-qualification du personneld’enseignement, d’encadrement pédagogique et administratifEn plus d’une insuffisance numérique du personneld’enseignement et d’encadrement, les Etats ont à gérer

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une insuffisance de la qualification des enseignants dansla didactique de leur discipline, une insuffisance enmatière de formation initiale et continue des ensei-gnants, et en expertise locale.

Problèmes de structures et d’infrastructures

Il apparaît alors que la forte dépendance des Etats vis-à-vis de l’extérieur constitue à la fois un problème dusystème éducatif et une source des problèmes. Cettedépendance et la situation économique des Etats-membres ne peuvent d’ailleurs pas être dissociées.Comme corollaires de cette double situation, apparais-sent des problèmes d’infrastructures et d’équipe-ments.

● Problèmes d’accès à la scolarisation. Les Etatssont confrontés à la question du déséquilibre entrel’offre et la demande sociales d’éducation, entreles milieux urbains et les milieux ruraux, entre lessexes. Ils ont aussi à faire face à la faiblesse dutaux d’alphabétisation dans le sous-secteur non-formel.

● Manque de dispositions de pilotage stratégique etde gestion de l’éducation. L’administration del’éducation est caractérisée par la faiblesse desfonctions de planification stratégique, de rechercheet de gestion pédagogique, de gestion administrati-ve et financière, de déficience du système d’infor-mation, d’absence de planification éducative, lemanque d’études et de recherche-action sur lesoptions de politique éducative et sur les aspectspédagogiques, de manque de coordination intra etintersertorielle.

● Problèmes liés aux structures d’accueil. L’effectifd’élèves par maître est très élevé. Cela engendre desclasses pléthoriques.

A ces déficiences endogènes (institutionnelles) s’ajou-tent des déficiences exogènes qui ont des effets néfastes

sur l’aptitude et la capacité des enfants à l’apprentissa-ge. Il s’agit des conditions difficiles de vie et de scolari-sation des élèves, leurs conditions de vie sociale, sani-taire et nutritionnelle. Tous ces problèmes et ceux quiprécèdent constituent des préoccupations très impor-tantes pour les Etats.

2. Les préoccupations des Etats-membres

La volonté de résoudre ces problèmes va devenir centra-le aux préoccupations des Etats-membres qui vont poserpour les systèmes éducatifs les objectifs suivants:● l’adéquation de la formation à l’emploi ;● l’adaptation de l’école au milieu en développement ;● la rentabilité interne et externe de l’école ;● l’égalité des chances à tous les citoyens sans discri-

mination de genre, d’origine sociale, d’ethnie, derace, de religion ou de nationalité ;

● la scolarisation universelle: «l’éducation pour tous»Conscients de l’importance à accorder à ces questions,les pouvoirs publics ont décidé d’inscrire l’examen desdifficultés des systèmes éducatifs et la mise en œuvredes remèdes dans un cadre de mobilisation générale: cesont les États généraux.

3. Les recherches de solutions: les mécanismes demobilisation et les États généraux

L’éducation étant conçue dans tous les Etats-membresconcernés comme une affaire de toutes les citoyennes etde tous les citoyens, les autorités ont initié des consulta-tions générales. Pour la plupart des pays, ces consulta-tions ont été appelées : Les États généraux de l’éduca-tion ou les États généraux de l’éducation et de laformation (Tableau 1).

Les États généraux ont mis en évidence avec unecertaine insistance la nécessité qu’il y a d’établir un lienfort entre l’éducation ou la formation et l’emploi. De cesÉtats généraux, il est ressorti en même temps et de

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TABLEAU 1: États généraux, leurs dates et leurs appellations spécifiques dans les Etats-membres

BENIN 1990 États généraux de l’éducation

BURKINA FASO 1994 États généraux de l’éducation et de la formation

GABON 1983 États généraux de l’éducation et de la formation

MALI 1989 États généraux de l’éducation

REP. CENTRAFRICAINE 1994 États généraux de l’éducation et de la formation

SENEGAL 1981 États généraux consacrés à l’éducation (EGEF)

TCHAD 1994 États généraux de l’éducation nationale

TOGO 1992 Les États généraux de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique

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manière prépondérante surtout l’exigence et l’urgenced’entreprendre des réformes des systèmes éducatifs oude les ajuster.

III. LES TENTATIVES DE SOLUTIONS:LES REFORMES GLOBALES DES SYSTEMES EDUCATIFS ET LES REFORMES CURRICULAIRES

Deux exigences ont suivi les États généraux : il s’agitd’une part de l’adoption des plans pour servir de supportà la réforme et d’autre part d’un cadre juridique régis-sant cette réforme. Ces deux dispositions supposent uneprise de position en faveur de certaines orientationséthiques et politiques claires et précises.

1. Options ou orientations fondamentales servant desupport éthique et politique à l’entreprise de réforme

Les options les plus caractéristiques sont les suivantes :● la décentralisation ;● l’orientation de l’éducation vers les réalités locales

et les besoins des populations ;● l’introduction des langues nationales comme matière

et à terme comme médium d’enseignement dans cer-tains des Etats-membres ;

● l’articulations des sous-secteurs formels et informelsconçus comme complémentaires ;

● l’entrée dans la réforme par les curricula et l’accent misde plus en plus sur la pédagogie par les compétences.

Ces options ne sont pas toutes explicites pour tous lespays. Elles sont toutes formellement énoncées dans lesplans de réformes des Etats-membres, dont l’entreprisede réforme est récente. Cette volonté de décentralisationpolitique n’implique pas une autonomie totale de l’éco-le. Afin que l’école continue à assurer son rôle de pro-moteur d’unité nationale, l’école africaine des régionsconcernées reste encore assez centralisée. Toutefois, unegrande importance est accordée à l’opinion des collecti-vités locales. Elles sont consultées de plus en plus et trèslargement. Elles deviennent, plus que jamais, des parte-naires à part entière du système éducatif, et sont mêmeappelées dans certains cas à s’investir autant que faire sepeut dans la gestion et la conduite de la vie de l’école.Elles deviennent à ce titre des acteurs privilégiés au ser-vice de la décentralisation et de la déconcentration.

La décentralisation de l’éducation est le transfert auxcollectivités locales des responsabilités importantes enmatière d’éducation. La déconcentration consiste àmettre en place des structures qui facilitent la promotiond’une plus grande efficacité dans les prises de décisionset leur exécution. La décentralisation et la déconcentra-tion sont accompagnées d’une véritable volonté d’adap-tation des contenus enseignés aux réalités locales, auxbesoins des populations et aux exigences climatiques,topologiques, alimentaires et aux mœurs des popula-tions locales. Au Sénégal par exemple, la composante debase du curriculum comporte un socle prioritaire, unifiéet obligatoire du savoir, savoir-faire et du savoir-être

nécessaire à la formation de tout sénégalais. Ce socle estestimé à 75% et un contenu flexibilisé constitué decontenus régionaux, départementaux et locaux visant àrépondre à des besoins spécifiques de développement (ilest estimé) à 25%. Au Mali, la décentralisation de l’édu-cation est sous-tendu par une volonté formellementénoncée de décentralisation politique.

Dans les faits, le lien entre la formation et l’emploi oul’auto-emploi est devenu un impératif dont les différentssystèmes éducatifs sont obligés de tenir compte. Cettesituation donne l’impression que l’objectif principal del’éducation et de la formation est l’emploi. Toutefois, dansles principes, l’école africaine, comme l’a souligné ladélégation sénégalaise, «vise à permettre à chaque indivi-du de développer ses propres potentialités, sa créativité etson esprit critique pour son épanouissement et son bon-heur personnels ; elle doit aider chaque individu à se com-porter en citoyen imbu des valeurs de démocratie, de paix,de justice sociale, de progrès, mais aussi devenir un pro-ducteur utile». D’après la délégation béninoise, laDéclaration de politique éducative et de stratégie sectoriel-le du Bénin précise que «l’école béninoise devra désor-mais former des hommes [et des femmes] sans cesse per-formant dotés d’esprit d’initiative, ayant le goût de larecherche, capable de s’auto-employer, de créer desemplois et de contribuer efficacement au développementdu Bénin».

2. Les mesures juridiques

Les États généraux ont conduit pour la plupart des États-membres à adopter et à promulguer des lois d’orienta-tion de l’éducation. Elles avaient pour objectifs l’accompagnement institutionnel de la réforme. LeTableau 2 donne un aperçu de la situation dans les diffé-rents Etats-membres.

3. Les plans de développement de l’éducation et lesorganes de pilotage des réformes

Les différentes réformes ont eu à se doter de plansnécessaires à leur conduite. La tendance majoritaire esten faveur des plans décennaux (Tableau 3).

Le pilotage du plan et la mise en œuvre de la réfor-me ont été confiés, selon les États, à un organe centralou à plusieurs organes agissant conjointement et defaçon complémentaire.

4. La réforme curriculaire

Tous les Etats-membres représentés sont à l’heureactuelle engagés dans un processus de réforme curricu-laire. Ils n’en sont pas tous cependant arrivés au mêmeniveau. L’examen du processus dans l’ensemble despays fait ressortir deux tendances. Pour certains desEtats-membres, «la réforme de l’éducation n’est plussynonyme de bouleversement immédiat des structures etdes contenus mais le résultat d’un ensemble d’innova-tions et de rénovations pour répondre aux insuffisancesconstatées au niveau du système éducatif». Ce point de

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vue est celui du Burkina Faso et est partagé dansd’autres pays. Toutefois, le point de vue de la grandemajorité des Etats-membres représentés correspond à lavision suivante énoncée par les représentants du Tchad.«Il ne s’agit donc pas d’un toilettage des anciens pro-grammes. Il s’agit bien d’un travail de refondation d’unnouveau programme». Dans les faits, la mise en œuvredes nouveaux programmes se fait suivant les mesures etles formes que préconisent la tendance précédente. Celas’illustre bien par les expériences togolaises, sénéga-laises et maliennes.

Néanmoins, quelles que soient les caractéristiquesparticulières de la réforme de chaque Etat-membre

représenté, la priorité est accordée à l’éducation de basedans la plupart des pays. De la même façon, les grandesorientations formulées pour les différents systèmes édu-catifs se rejoignent sur de nombreux points. L’un despoints sur lesquels la plupart des systèmes éducatifs desEtats-membres représentés se rejoignent est l’introduc-tion des langues nationales.

L’introduction des langues nationales comme matière età terme comme médium d’enseignement dans certainsdes États-membresLa dichotomie langue(s) officielle (s)/langue(s) nationa-le(s) est toujours présente dans les Etats-membres repré-

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TABLEAU 3 : Les plans éducatifs et leurs organes de pilotage dans les différents Etats-membres

BENIN 1991 janvier Document cadre de Politique Educative

BURKINA FASO 1999 Juillet PDDEB (2000-2009) Plan décennal de développement de l’éducation de base

CONGO Termes de référence pour la réforme du système éducatif congolais

GABON

MALI PRODEC Programme décennal de développement de l’éducation

REP. CENTRAFRICAINE PNDE Plan national de développement de l’éducation

SENEGAL PDEF (2000-2010) Plan décennal de l’éducation et de la Formation

TCHAD 1990 Stratégie EFE Stratégie d’éducation et de formation en liaison avec l’emploi

TOGO 1975 mai La réforme de l’enseignement au Togo

TABLEAU 2 : Les mesures juridiques dans les différents États-membres

BENIN

BURKINA Loi no. 13/96/ADP Loi d’Orientation de l’Education 9/5/96

CONGO Loi 25-95 du 17/11/95 Réorganisation du système 17/11/95éducatif en Rép. Du Congo

GABON Loi 16/66 Organisation générale de l’enseignement 9/8/66de la Rép. Du Gabon

MALI Loi No. 99-046 Loi d’Orientation sur l’éducation 28/12/99

REP. CENTRAFRICAINE Loi 97.014 du 10/12/97 Orientation de l’éducation 10/12/97

SENEGAL Loi no. 91-22 du 16/02/91 Loi d’Orientation de l’éducation nationale 16/2/91

TCHAD Le Plan d’Orientation «Le Tchad vers l’an 2000» /91

TOGO Ordonnance No. 16 La Réforme de l’enseignement du Togo 6/5/75du 6/05/75

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sentés. Mais, une très forte prise de conscience de l’importance et même de l’utilité pédagogique oupsychopédagogique des langues nationales est la carac-téristique fondamentale de la plupart des politiques deréforme. D’après la délégation sénégalaise, l’école nou-velle au Sénégal est envisagée entre autres comme «uneécole ouverte sur le milieu, intégrant l’apprentissage deslangues nationales et le travail productif pour mieuxsécuriser l’enfant en l’enracinant d’abord dans sa cultu-re nationale».

Pour les représentants du Burkina-Faso: «Les languesnationales qui ont été utilisées comme langues d’ensei-gnement ont été valorisées parce qu’elles ont fait la preu-ve qu’elles pouvaient véhiculer des connaissances scienti-fiques universelles». «Elles ont mis les enfants à l’aise etont valorisé leur culture. De même, toutes les languesnationales ont été valorisées, chacun tirant dans sa culturedes informations intéressantes pour tout (exploitation desproverbes, contes, devinettes, coutumes)».

D’après la délégation gabonaise, «le Gabon a com-pris que promouvoir et enseigner ses langues constituentplutôt une abondance, un enrichissement de plusieurscultures gabonaises». Le slogan du Ministère de l’Edu-cation Nationale est « l’enseignement de nos langues estle seul facteur de consolidation de la relation identitéculturelle et identité nationale». Ce sera, sans contredit,par les langues nationales que nous espérons donner auxjeunes gabonais une éducation efficace. «A la suited’une bonne campagne de sensibilisation qui a durédeux ans, le Gabon a démontré que le fait de promou-voir ses langues n’entraîne pas pour conséquence immé-diate les conflits. Il y a conflits lorsqu’il y a conflit d’in-térêt dans tout message».

Ces différents points de vue sont partagés par plu-sieurs autres délégations. Aux yeux des décideurs despolitiques éducatives des Etats-membres représentées, ilexiste un autre élément qui rivalise d’importance avecles langues nationales. C’est l’étude du milieu.

L’étude du milieu Toutes les délégations ont montré que leur système édu-catif porte un grand intérêt au milieu et surtout au liennécessaire entre école et milieu. Selon la délégationsénégalaise, l’école sénégalaise se définit aussi commeune «école ouverte sur le milieu», «assurant une forma-tion qui lie l’école à la vie, la théorie à la pratique, l’en-seignement à la production». La délégation gabonaise afait remarquer que le 8ème séminaire des Inspecteursrégionaux du pays tenu en 1979 appelait à une réformequi permettrait d’orienter «l’enseignement primairepour qu’il devienne un facteur de développement et [de]former le futur citoyen par des programmes en prisedirecte avec les réalités de la vie dans le milieu».D’après la délégation togolaise, «l’étude du milieu n’estni une matière, ni une discipline à enseigner. Elle est uneméthode d’enseignement. Elle est un support efficacepour favoriser d’une part la connaissance du milieu etd’autre part l’action sur le milieu en vue de sa transfor-

mation dans le sens des besoins et de la vision de l’hom-me». Elle sert «à la fois comme principe et cadreméthodologique».

L’introduction des nouvelles matières et les innovationspédagogiquesL’une des caractéristiques des programmes d’études estl’introduction de nouvelles disciplines surtout dans l’en-seignement secondaire. Cette introduction s’est faite trèssouvent sous l’impulsion des organismes internatio-naux. Presque tous les États ont introduit dans leurs pro-grammes à un moment donné, certaines des disciplinessuivantes : l’éducation en matière de population (EMP),l’éducation environnementale, l’éducation à la vie fami-liale, l’éducation pour la santé, l’éducation civique,l’éducation aux droits de l’homme, l’éducation artis-tique, l’initiation aux nouvelles technologies, etd’autres. D’après les délégations du Burkina Faso, duGabon, de la République Centrafricaine et du Congo,l’introduction de ces nouvelles matières a nécessité desréaménagements des horaires d’enseignement, une for-mation des enseignants à leur utilisation, l’organisationdes séminaires de sensibilisation et une diffusion desprogrammes ainsi introduits.

Certaines des matières introduites sont enseignéesen tant que disciplines distinctes et évaluées commetelles. C’est le cas de l’éducation civique au BurkinaFaso pour laquelle les méthodes préconisées sont essen-tiellement les méthodes actives : études de cas, simula-tion, appel à un invité, recherche documentaire, discus-sion, jeu de rôle,brainstorming, etc. L’évaluation utilisedes QCM [questions à choix multiples], des tests d’atti-tude, des échelles numériques, etc.

L’introduction de ces nouvelles disciplines a permisla mise en évidence du concept de discipline d’accueil.Par exemple, au Burkina Faso, «l’éducation en matièrede population n’est pas enseignée comme discipline,mais ses contenus et ses méthodes sont intégrés dans desdisciplines d’accueil que sont : le français, les languesvivantes, les sciences naturelles, les mathématiques, lessciences physiques, la philosophie».

Une autre caractéristique des systèmes éducatifs desEtats-membres représentés est l’expérimentation denouvelles pratiques pédagogiques. Le Burkina Faso, leSénégal et le Mali, par exemple, connaissent au titre desinnovations pédagogiques, une ou plusieurs des pra-tiques pédagogiques ci-dessous énoncées :● les classes multigrades ;● les classes à double flux ;● les écoles satellites ;● les centres d’éducation de base non formelle.

Les approches curriculairesDu point de vue méthodologique, les processus dedéveloppement des curricula sont passés de la pédago-gie par le contenu à la pédagogie par l’objectif. Unenouvelle tendance très active, encore limitée à certainsÉtats, se dégage et se renforce progressivement en

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faveur de la pédagogie par la compétence. Cette derniè-re apparaît comme se substituant à la pédagogie parl’objectif ou la complétant. Les pratiques disciplinairesclassiques ont toujours cours, mais l’interdisciplinaritéfait du chemin et est prônée avec enthousiasme. Sa pra-tique commence à se concrétiser dans des domaineslimités. Elle se sert de l’étude du milieu comme un sup-port essentiel. Si elle tarde à se généraliser, c’est parceque son enracinement dans la formation des formateurset son accompagnement matériel et logistique fontdéfaut.

Les réformes curriculaires au Sénégal et au Bénin, leprojet de réforme curriculaire au Gabon préconisent uneapproche systémique. Pour Souleymane Ndiaye, l’ap-proche systémique oblige l’enseignant de s’informer ausujet :● du contexte national, de ses variables écologiques,

humaines, économiques, culturelles, information-nelles, etc. ;

● des cibles: les apprenants - qui sont-ils ? quels sontleurs antécédents ? que désirent-ils apprendre ?

● de l’école: du programme actuel, de ses aspects posi-tifs, de ses lacunes ;

● des orientations prioritaires du Plan National dedéveloppement ;

● des démarches analytiques qui conduiront à remédierà l’insuffisance de la pertinence, de la flexibilité et dela cohérence, à organiser de manière méthodique desateliers et des séminaires, à appliquer selon les cir-constances une approche disciplinaire, inter ou pluri-disciplinaire, à consulter ou utiliser des personnes-ressources.

IV. LES DIFFICULTES INHERENTES AUX REFORMES

Les difficultés que connaissent les réformes des sys-tèmes éducatifs et celles du curriculum en Afrique peu-vent être regroupées en deux catégories.

1. Les difficultés liées aux contextes économique etfinancier et à la trop grande dépendance des Etatsvis-à-vis de l’extérieur

Dans la mise en œuvre des réformes, les Etats-membresreprésentés sont confrontés à de nombreuses difficultés.La première conséquence de cette situation est l’abandonde fait du processus de réforme. Le point de vue de ladélégation centrafricaine résume la situation d’en-semble. «Beaucoup de réformes ont échoué faute definancement. Les difficultés sont dues à l’appauvrisse-ment du pays, à l’endettement de l’Etat vis-à-vis des ins-titutions financières internationales, à des mesures decontraintes imposées par la Banque mondiale et le FMI.L’application sectorielle de l’ajustement structurel nesuffit pas à constituer une réforme des systèmes éduca-tifs. Elle ne fait qu’accélérer leur paralysie».

Les difficultés de la mise en œuvre du plan de laréforme au Togo, telles qu’elles ont été présentées par les

représentants de cet Etat-membre, apparaissent commeune illustration concrète du point de vue précédent. «En1974 le Togo nationalise la Compagnie Togolaise desMines du Bénin (CTMB). A partir de cette nationalisa-tion, l’économie togolaise devenait florissante, et uneannée plus tard la Réforme de l’Enseignement et del’Education au Togo était promulguée. Le Togo avait lesmoyens de sa politique. Ainsi, la mise en œuvre de laRéforme ne posait–elle pratiquement pas de problèmesaux Autorités. Beaucoup de structures prévues ont puêtre matérialisées. Mais à partir de 1980, les prix desphosphates ont commencé à chuter et les Institutions deBretton Woods commencèrent aussi à imposer lesProgrammes d’ajustement structurel suite à la grandecrise financière conjoncturelle, aux pays en développe-ment dont le Togo. La mise en œuvre de la Réforme acommencé à connaître des difficultés».

«A partir du moment où le Togo, à l’instar des autrespays en voie de développement, est soumis au régimedrastique des Programmes d’ajustement structurel, ladémocratisation de l’école lui devenait quasimentimpossible. Il fallait surseoir :● au recrutement et à la formation des personnels d’en-

cadrement, d’enseignement et administratif ;● à la création et à la construction de nouvelles écoles

ou établissements scolaires ;● à l’équipement en mobilier et en matériels scienti-

fiques des établissements ;● à la dotation en matériels didactiques etc. desdits éta-

blissements scolaires.»«La croissance rapide des effectifs et le déclin

économique et surtout financier du pays ont entraîné lesecteur éducatif, à l’instar des autres secteurs, dans unecrise aggravée ces dernières années».

«Le taux de scolarisation qui avait atteint en 1980,71 % est descendu en 1993 à 62,2 % et est remonté en1997 à 72,9 %».

«Sur le plan du financement du secteur de l’éducation,l’Etat a connu des problèmes. Si le financement a progres-sé entre 1980 et 1989 passant de 12,5 milliards en 1979-1980 à 22,2 milliards en 1988 – 1989, cette progressionest moins évidente depuis 1990. La part du budget del’éducation dans le budget de l’Etat est passée de 22,4 %en 1990 à 18,6 % en 1998 avec un seuil critique de 15,8 %en 1995. Les dépenses publiques ordinaires du primaireen % du PIB chute de 1,7 % en 1990 à 1 % en 1999. Cettetendance s’explique par plusieurs raisons :● Les restrictions budgétaires liées aux programmes

d’ajustement structurel ;● La crise socio-politique ayant entraîné la suspension

des aides multilatérales● La dévaluation du franc CFA intervenue en janvier

1994.»De ces deux observations des délégations centrafricaine ettogolaise, il résulte que quelles que soient les qualitésintrinsèques des plans de réforme du point de vue de leurconception, leur succès au regard de la mise en œuvredépend des facteurs qui leur sont extérieurs. Pour les pays

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d’Afrique au Sud du Sahara, ce sont le plus souvent lesfacteurs d’ordre économique (telle que la détériorationdes termes de l’échange), et financier (telle que la déva-luation du franc CFA), aggravés par la trop grande dépen-dance des Etats vis-à-vis de l’étranger et du rôle, souventdéfavorable à terme des pressions des institutions finan-cières internationales.

Même si cette catégorie des difficultés qui viennentd’être évoquées reste celle qui détermine primordiale-ment la réussite de la mise en œuvre des plans de réfor-me, force est d’indiquer qu’elle ne constitue pas la seulecatégorie des difficultés qui pèsent sur les réformes.D’autres types de difficultés sont à signaler.

2. Les difficultés inhérentes à la mise en œuvre desréformes

Les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de laréforme en République du Bénin sont, d’après les repré-sentants de cet Etat-membre, «la lourdeur administrati-ve», «la non disponibilité des fonds au moment oppor-tun», «la peur du changement», le «poids du vécu desenseignants», les «mouvements du personnel ensei-gnant», «l’insuffisance du niveau académique desenseignants, l’insuffisance des effectifs d’enseignantsqualifiés», le recours à des «répétiteurs à domicile nonformés», les «classes à grands groupes», l’insuffisanceet l’inadéquation du mobilier scolaire, le «morcellementdu temps scolaire». Pour la délégation du Burkina Faso,parlant plus spécifiquement de la réforme des pro-grammes de mathématiques, les «difficultés rencontréesse situent au niveau du manque de formation pédago-gique initiale des enseignants et dans l’incapacité deslibraires de la place à répondre à la demande des nou-veaux manuels écrits et édités par la Direction desInspections et de la Formation des Personnels del’Education».

3. Les difficultés liées à l’introduction des languesnationales ou maternelles

L’utilisation des langues nationales à l’école a connudans certains pays une certaine réticence.

Avant 1997, on a toujours pensé que le fait de pro-mouvoir les langues gabonaises pourrait gêner ce que le politique appelle « l’unité nationale». Nouscomprenons aisément et surtout sans peine un tel senti-ment de crainte de vivre des oppositions nationales. Cesrésistances ont été dépassées. Mais, l’introduction deces langues dans l’enseignement pose encore des diffi-cultés. Certaines de ces difficultés sont relatives auxcritères de choix des langues nationales à introduiredans l’enseignement, ainsi qu’au statut de ces langues.De plus, dans la plupart des cas, comme le font remar-quer les représentants du Burkina Faso à propos del’une des réformes qui n’a pas pu aboutir, l’introductiondes langues nationales dans le système éducatif n’a pasété accompagnée d’une politique de réhabilitation et derevalorisation de ces langues dans les autres secteurs.

L’Etat n’a initié « aucune action pour leur valorisationdans l’administration (impression de documentsbilingues : cartes d’identité, actes de naissance, fiched’impôt, patente etc…; possibilité de mettre lesadresses en langues nationales pour les envois postaux,etc …).

A ces difficultés s’ajoutent les problèmes didac-tiques liés à l’utilisation de ces langues (méthodologie,matériel didactique), la formation des enseignants, ainsique leur rôle dans les réformes. A ce sujet, le point devue exprimé par la délégation du Burkina Faso à proposde l’une des précédentes réformes du pays résume l’avisde la plupart des délégations. «Il faut noter aussi que lerapport coût / formation dans la réforme était très élevé.Malgré les sommes investies, tous les maîtres n’ont pasété initiés à la transcription des langues nationales; lematériel de production octroyé aux écoles est demeuréinsuffisant, si bien qu’avec la fin du projet, d’énormesdifficultés se seraient présentées pour les écoles. Fautede pouvoir acquérir du matériel pour la production, cetteactivité serait vouée à l’échec ou demeurerait insigni-fiante».

V. LES PERSPECTIVES D’AVENIR

Les représentants des Etats-membres au Séminaire-ate-lier de Libreville, à travers leurs différents vœux et sou-haits relayés en partie par leur motion adressée àl’UNESCO, ont apprécié, avec une satisfaction notoire,la nouvelle orientation de l’UNESCO. Car, à leurs yeux,en faisant du contenu et des méthodologies de l’éduca-tion un domaine d’intervention spécifique d’un de sesInstituts et en chargeant ce dernier du renforcement descapacités dans ce domaine, l’UNESCO, par le biais duBureau international d’éducation (BIE), inaugure unenouvelle orientation. Cette dernière va être à nouveaud’une très importante contribution pour les États afri-cains. Ils espèrent que l’action de l’Organisation, tout ens’inscrivant dans la perspective de l’éducation universel-le, de «la meilleure éducation pour tous tout au long dela vie» s’organise en activités concrètes et pratiques pre-nant appui sur les données du terrain, et visant entreautres exigences, l’amélioration de la qualité et de lapertinence des systèmes éducatifs. Pour que ces actionssoient efficace en Afrique, les représentants des Etats-membres à ce séminaire-atelier encouragentl’UNESCO à poursuivre ses efforts tout en mobilisantses partenaires au profit d’un réseau B.I.E/ Afrique dontla mise en place est vivement souhaitée. En vue de laconduite des activités dudit réseau dans un proche futur,les participants après concertation ont formulé leurssouhaits et recommandations dans trois domaines.

1. La possibilité de mise en place d’un réseauBIE/Afrique sur les curricula

Le principe de la création d’un réseau d’échanges a étéunanimement accepté par les participants. Ils ont sou-haité que les Instituts pédagogiques nationaux ou les

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structures remplissant les fonctions analogues soient lespoints d’encrage du réseau.

2. L’identification des besoins en matière de réformecurriculaire ;

Les participants souhaiteraient de la part du BIE :● l’assistance technique ;● la création d’un réseau d’échanges ;● la formation de spécialistes des curricula ;● l’organisation de rencontres périodiques ;● l’appui matériel et financiers aux Etats.

3. Les modalités de coopération entre les Etats partici-pants et le BIE

Les axes de coopération retenus concernent en priorité :● la formation en développement du curriculum ;● les données sur l’éducation ;● le développement des curricula ;● la formation en planification, manuels scolaires et

évaluation des apprentissages ;● la conduite des études sur l’éducation.Par ailleurs, les participants ont souhaité que le B.I.E.soit leur interprète auprès des autres instituts, divisionset secteurs de l’UNESCO, en ce qui concerne leursbesoins relevant des compétences de ces organes.

VI. SYNTHESES ET ORIENTATIONS

Pour donner aux participants une approche plusgénérale et plus théorique de la problématique desréformes, certaines des interventions ont été consa-crées à des présentations d’ordre thématique. Ellesavaient pour objet d’enrichir les discussions avec desapports théoriques de nature conceptuelle, technique,ou comparative.

Ainsi, dans la présentation intitulée «Politique secto-rielle et réforme curriculaire», Mohamed Radi, Chef dela Section des politiques et plans d’action nationaux à laDivision des Politiques et stratégies du Secteur del’Education, UNESCO, a présenté succinctement : lesdifférentes causes possibles conduisant les États à entre-prendre des réformes en matière d’éducation, les aspectsdu système éducatif sur lesquels peut porter l’élaborationd’une politique et d’un programme de réforme, lesobjectifs poursuivis à travers la réforme de chacun de cesaspects et les modes de coopération et les formes d’as-sistance auxquels les États peuvent avoir recours dansleur entreprise de réforme, et l’approche de réforme encinq étapes que propose l’UNESCO aux Etats-membreset qui s’appuie sur le «leadership national» et « la parti-cipation». En s’appuyant sur cette approche, M. Radi aexposé une analyse de la situation du système éducatifdu Gabon.

Dans un texte intitulé «Articulation entre politiqueséducatives, programmes et manuels : l’enseignement desvaleurs», John Aglo, Chargé du programme Afrique duB.I.E., a présenté le résultat partiel d’une étude qu’ilconduit dans quatre pays d’Afrique. Il a montré que le

premier des résultats de cette étude est une adéquateprise en compte des réalités des systèmes éducatifs etdes attentes des Etats-membres dans l’ordre du jour duséminaire–atelier de Libreville.

Du point de vue technique, l’étude a montré que l’en-treprise d’une recherche sur les politiques éducatives, lesprogrammes d’études, le contenu des manuels au regardde l’enseignement des valeurs, se heurte à des difficultésd’ordre épistémologique. Les États concernés étant tousengagés dans des politiques de réforme, tout résultatauquel on aboutirait en examinant leurs programmes ouleurs manuels ne peut avoir qu’un caractère très provi-soire. Néanmoins, l’étude a permis de rendre compte desprogrès qui se font en vue de l’amélioration de la qualitédu contenu de l’éducation dans les Etats-membresconcernés. Elle a permis de suivre l’évolution de certainsdes documents et textes depuis les indépendances, et ànoter que les politiques éducatives, les programmes etles manuels, bien qu’affectés par les réalités difficilesauxquelles les États sont confrontés, reflètent, selon lesépoques de leur élaboration, les exigences dominantesde la communauté internationale en matière de valeurs etd’idéaux énoncés.

José Marin, Professeur à l’Université de Genève,dans un texte intitulé «Une éducation appropriée auxpeuples autochtones d’Amérique Latine» a montréqu’une éducation interculturelle est à la fois une expé-rience et un facteur d’une démocratie vraie. C’est un ins-trument privilégié de revalorisation des savoirs tradition-nels. Cette présentation, bien que partant de l’expériencehistorique américaine et surtout sud-américaine, ouvredes perspectives à l’Afrique au sud du Sahara, où, mêmesi la réalité sociale reste toujours multiculturelle, le pro-blème de l’interculturel n’est pas encore formellementprésent dans les systèmes scolaires.

L’apport de ce texte se situe sur le plan conceptuel.Un regard particulier a été porté sur les concepts d’iden-tité, d’altérité et sur leur relation mutuelle, ainsi que surle concept de culture. Les caractéristiques de l’éducationinterculturelle, l’apport de l’éducation interculturellepour un monde en mutation, le rôle culturellement des-tructeur de toute éducation du type monoculturel ont étéaussi examinés.

Souleymane N’Diaye, ancien fonctionnaire del’UNESCO et spécialiste des curricula, s’appuyant surles responsabilités qu’il a exercées à la tête des cellulestechniques d’élaboration des curricula et sur sa très richeexpérience dans le domaine des réformes, a donné uneprésentation des articulations conceptuelles et tech-niques d’un processus de réformes. Se fondant sur lecontexte sénégalais, l’analyse met à jour les grands axesde ce processus. Les présupposés philosophiques, poli-tiques, les repères, les points d’ancrage et les directives,le cadre institutionnel et législatif, les grands axes de laphilosophie éducative, les différentes problématiques,les différentes composantes d’un curriculum, les diffé-rentes orientations par rapport aux préoccupations inter-nationales ont été exposés d’un point de vue à la fois

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théorique et technique, avec des illustrations puiséesdans l’expérience sénégalaise.

Il apparaît à travers les travaux de ce Séminaire-ate-lier que beaucoup d’efforts et de moyens ont été consen-tis par les États dans leur volonté d’améliorer leur systè-me éducatif. Les résultats atteints ne reflètent pourtantpas cet engagement.

Il n’est pas toujours exact d’attribuer les échecs etles difficultés que connaissent les États dans leurvolonté de réformer leur système éducatif au manquede savoir–faire technique et de compétence. Une gran-de part de ces échecs peut être attribuée à la pauvreté.C’est ce qui est traduit par le point de vue suivant pré-senté par Souleymane Ndiaye : «Au lieu de privilégierces signes de croyance en soi et de volonté de priori-ser les stratégies qui libèrent culturellement et écono-miquement un peuple, on a souvent prêté plus d’atten-tion aux innovations en vogue dans les pays du Nord,parce que, assuré que dans le train qui les amène lefinancement extérieur et l’assistance technique serontdu voyage».

En effet, dans un contexte de grandes difficultés éco-nomiques et financières, les États africains n’ont plus lamaîtrise de leur propre politique éducative et les projetsdes partenaires au développement, tant des relationsbilatérales que multilatérales, ne sont pas nécessaire-ment et toujours motivés par l’intérêt unique des Étatsqu’ils comptent aider. Le caractère changeant et fluc-

tuant des projets et le fait que les États les acceptentmalgré eux, contraints par les besoins, n’aident pas nonplus à la mise en œuvre constante, suivie et rigoureusede ces projets.

C’est à ce niveau que le rôle de l’UNESCO apparaîtimportant. Les concepts de «leadership national» et de«participation» sur lesquels l’Organisation appuie sonapproche d’élaboration des politiques et des pro-grammes de réforme et de développement de l’éduca-tion pourraient être d’une grande contribution pour lesÉtats. Ces derniers pourraient s’en servir pour renforcer,face à toute forme de pression, leur autonomie et leursexigences marquées par leurs propres besoins, leurspropres valeurs et représentations, dans la conception, lamise en œuvre, le suivi et l’évaluation de leur politiquede réforme.

La mise en place des réseaux qui commence àprendre forme sous l’impulsion du BIE, permettraitaux politiques de réforme de s’appuyer sur des acteursayant une rigoureuse connaissance des réalités locales,une politique de terrain, une expérience et un savoir-faire en adéquation avec les besoins des populationsconcernées. Elles permettrait aussi aux États d’organi-ser et de gérer avec efficacité les échanges d’expé-riences et de compétences dans un cadre qui encoura-gerait et renforcerait la coopération Sud–Sud, tout enrefondant et en réajustant celle qui existe présentemententre le Nord et le Sud.

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PARTIE II :

RAPPORTS NATIONAUXSUR LA REFONDATION CURRICULAIRE

ET LE PROCESSUS DEDÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE

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I. INTRODUCTION

La République du Bénin a été, depuis son accession à lasouveraineté internationale en 1960, secouée par descrises sociales. La plus grave et la plus décisive fut cellede 1989 qui conduit à la tenue de la « Conférence desForces Vives de la Nation » en février 1990. Le projet desociété issu de cet important forum historique prescrit,entre autres, de doter le pays d’un système éducatif dequalité.

Le Ministère en charge de l’éducation nationale, enapplication de cette recommandation, réunit en octobre1990 les Etats généraux de l’éducation. A la lumière desconclusions de ces Etats généraux de l’éducation, et surla base des résultats de l’audit du Ministère de l’éduca-tion nationale et d’un certain nombre d’études secto-rielles réalisées sur le système éducatif, leGouvernement adopta en janvier 1991 le «Document-cadre de politique éducative». Ce document marqual’engagement du système éducatif dans un programmede réforme.

Le présent article développera les quatre points sui-vants :● une analyse sommaire de la situation actuelle de

l’éducation au Bénin; ● une brève description du programme de réforme du

système éducatif; ● la réforme de l’enseignement primaire ; et,● les conséquences de la réforme sur l’encadrement

scolaire.

II. ANALYSE SOMMAIRE DE LA SITUATIONACTUELLE DE L’EDUCATION AU BENIN

Les caractéristiques de notre époque et ses tendancesdéterminantes exigent de l’élève et de l’étudiant qu’ilsdéveloppent des compétences diverses afin de gérer aumieux leur avenir politique, économique, social et cultu-rel dans un environnement essentiellement instable etcomplexe sur les plans local, national et international.

Le constat est que les jeunes élèves en fin de cycle neperçoivent pas les notions du temps qui s’écoule et ni del’espace comme des biens précieux qu’ils ont l’obliga-tion permanente de gérer avec rigueur pour leurs propressanté et survie. La lacune que constitue le manque de

réflexe et de rigueur dans la gestion s’observe chezl’adulte à l’égard des ressources et dans les relations decoopération. L’école n’a pas enseigné à lire la réalitédynamique qui nous entoure. La morale d’incitation àl’action transformatrice et à la manifestation de l’espritde créativité fait défaut dans le système éducatif duBénin.

Il importe donc de revoir le système éducatif qui enbien des points est dépassé, pour l’adapter aux nouvellesexigences et le rendre plus performant du point de vue del’efficacité tant interne qu’externe. Tenir compte de toutcela, c’est cultiver dès le cycle primaire l’imagination, lacréativité, le recours à la résolution de problème, la capa-cité de se prendre en charge et l’aptitude à réagir defaçon adéquate face à une situation nouvelle.

III. BREVE DESCRIPTION DU PROGRAMME DE REFORME DU SYSTEME EDUCATIF

Dans la perspective d’apporter des solutions aux pro-blèmes soulevés, il est apparu nécessaire d’engager lesystème éducatif béninois dans un vaste mouvement deréforme qui touche les ordres d’enseignement à la foisprimaire, secondaire général, secondaire technique etprofessionnel et enfin supérieur. Un «Document-cadrede politique éducative» fixant les grandes orientations aété adopté, de même que la «Déclaration de politiqueéducative et de stratégie sectorielle» qui précise que«l’école béninoise devra désormais former des hommessans cesse performants dotés d’esprit d’initiative, ayantle goût de la recherche, capables de s’auto-employer, decréer des emplois et de contribuer efficacement au déve-loppement du Bénin».

1. Les objectifs fondamentaux de la nouvelle politiqueéducative

La nouvelle politique éducative fixe les objectifs fonda-mentaux suivants :● favoriser l’égalité des chances pour tous ; ● renforcer la qualité de l’enseignement ; ● réhabiliter l’appareil institutionnel ; ● assurer la formation à l’auto-emploi ; ● réguler les flux à tous les niveaux ; ● maîtriser les coûts de l’éducation.

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Bénin

Djibril M. Debourou et François Mahougbé Labe

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2. Les mesures retenues

Un certain nombre de mesures ont été retenues. Il s’agitnotamment :1. de renforcer les moyens pédagogiques et didactiques

et d’actualiser les programmes d’études en vue degarantir un apprentissage efficace du savoir et dusavoir-faire nécessaires et utiles pour une insertionproductive des élèves et des étudiants dans la vieactive. A cet effet, des études ont été réalisées, y compris celles portant sur les facteurs contribuant àl’amélioration de la qualité et au rendement desenseignants ;

2. d’appliquer une sélection renforcée à l’entrée dechaque cycle. L’examen du CEP servira à la fois decertificat de fin d’études primaires et de concoursd’entrée au Collège secondaire général sur la base dela moyenne dans les matières fondamentales, àsavoir le français et le calcul. Le nombre de nouveaux collégiens est déterminé par la capacitéd’accueil des établissements d’enseignement secon-daire. L’entrée à l’enseignement secondaire tech-nique se fera uniquement sur concours pour les titulaires du CEP, justifiant du niveau de la deuxièmeannée de l’enseignement secondaire. Tout en cou-ronnant le premier cycle du secondaire, le BEPCsera un instrument de sélection. L’admission auxétudes supérieures dépendra des résultats auBaccalauréat et, pour certaines filières, elle serasubordonnée à la réussite à un concours ;

3. de renforcer les structures de formation et de recy-clage existantes et de mettre en place de nouvellesstructures pilotes destinées à accueillir, en vue deleur insertion socio-professionnelle à court oumoyen terme, des élèves qui seront en situationd’échec scolaire ;

4. d’établir un lien entre la performance des enseignants et leur progression dans la carrière, cequi nécessitera un renforcement de la formationcontinue et de l’inspection, une gestion perfor-mante du personnel, ainsi qu’une analyse fine desstructures de l’éducation par rapport aux tâches àaccomplir;

5. de renforcer les capacités de planification et demanagement du système éducatif:● en mettant en œuvre des recommandations del’audit de management qui servira à rationaliser lesstructures et les procédures au sein du Ministère de1’éducation nationale ; ● en élaborant une carte scolaire afin de parvenir àune meilleure répartition des enseignants et desimplantations scolaires ;● en renforçant les capacités de planification prévi-sionnelle, par l’usage systématique du modèle desimulation financière déjà réalisé et l’améliorationde l’appareil statistique ;● en informatisant les fiches/ écoles qui sont à labase des statistiques scolaires en vue de permettre la

mise au point d’un tableau de bord dynamique etanalytique du système éducatif ;● en mettant en place des procédures transparentesde préparation et d’exécution budgétaires, ce quiimpliquera l’élaboration d’une nouvelle nomenclatu-re budgétaire et le renforcement en moyens matérielset humains des structures de gestion budgétaire etfinancière, y compris la gestion du personnel ;

6. d’élaborer une politique détaillée visant à rendre dis-ponibles les livres scolaires à des prix raisonnables ;

7. d’encourager la création d’établissements privés.Les modalités de création desdits établissementsseront étudiées et feront partie d’une stratégiedétaillée. En particulier, il pourrait s’agir d’établisse-ments de formation professionnelle, conçus pourorienter et préparer les sortants d’un cycle donné à lavie active.

IV. LA REFORME DE L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE

La mise en œuvre de la reforme n’a pas connu le mêmerythme dans les différents ordres d’enseignement. Al’enseignement primaire, elle est très avancée.L’enseignement secondaire général est en train d’emboî-ter le pas au primaire et l’enseignement secondaire tech-nique et professionnel vient de mettre au point un document cadre d’orientation de la formation profes-sionnelle. A l’Université Nationale du Bénin, l’auditvient d’être terminé.

Les transformations entreprises concernant les struc-tures, les personnels, les curricula et la pédagogie sontdavantage perceptibles à l’enseignement primaire quedans les autres ordres d’enseignement. Ceci découle dufait que l’enseignement primaire constitue pour le Béninla priorité des priorités.

1. Le processus proposé pour la réforme de l’ensei-gnement primaire

Le programme de réforme de l’enseignement primaire aété conçu et élaboré suivant une approche systémique. Ilest activé au moyen de quinze plans d’actions pourréduire les incohérences constatées et optimiser lesrésultats. Ces plans d’actions couvrent trois domaines :1. le volet «Pédagogie» qui regroupe les programmes

d’études, la formation des enseignants, les manuelsscolaires et matériels didactiques, le réseau docu-mentaire, 1’évaluation des apprentissages et l’orien-tation scolaire ;

2. le volet «Planification» qui regroupe la carte scolai-re, l’augmentation des chances d’accès, l’école dequalité fondamentale et le système d’information ;

3. le «Volet institutionnel» qui s’intéresse au processusbudgétaire, à l’organisation, aux ressourceshumaines, à la formation administrative, à 1’équipe-ment et à la viabilité financière et à la participationdu public.

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Le plan d’action «Réforme des programmes d’études»et les quatre autres plans d’action du volet « Pédagogie »sont imbriqués. La mise en œuvre de la réforme des pro-grammes d’études est fondée sur l’application de larecherche-action qui permet de confronter les théorieséducatives élaborées au vécu pédagogique. Ce mouve-ment dialectique, théorie- pratique, perçu dans ce pland’action est le moteur des succès enregistrés.

Le plan de gestion de ces programmes d’études seprésente dans le tableau 1.

La méthodologie d’implantation de ces programmesd’études a suivi les étapes suivantes:1. Constitution de l’équipe nationale de conception et

formation de ses membres. Cette équipe comportedes inspecteurs de l’enseignement primaire et del’enseignement secondaire, des professeurs de l’en-

seignement secondaire général, des conseillers péda-gogiques, des directeurs d’école, des enseignants etenseignantes. Les professeurs d’université sont detemps à autre consultés sur des questions ponc-tuelles.

2. Choix des écoles expérimentales. Elles sont aunombre de trente (30) équitablement réparties dansles six départements (cinq par département) ;

3. Elaboration de documents fondamentaux portant sur:● Le profil souhaité pour l’élève à la fin de l’école pri-

maire (mars 1994) et révisé en juin 1998 ;● Les valeurs de l’école béninoise : de l’excellence à la

culture (mai 1995) ;● Les nouveaux programmes d’études de l’enseigne-

ment primaire : fondements, approches et stratégies(juin 1999) ;

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TABLEAU 1 : Plan de gestion des programmes d’études

Niveaux Responsables Tâches/ responsabilités

1. Ministère de l’éducation Cabinet ● Supervisionnationale Cellule de généralisation ● Coordination Pilote du plan d’action

des nouveaux programmes d’étudesDPPD/ INFREDEP

2. Equipe nationale Pilote du plan d’action et son équipe● Conception et élaboration des projets de programmes

● Planification et coordination des activités relatives à l’expérimentation et à la généralisation des nouveaux programmes

● Formation des équipes départementales

● Suivi des activités relatives aux programmes

3. Equipes d’encadrement DDE ● Organisation des équipes départementales (DDE) d’animation

C/ SEP ● Supervision et formation des équipes 3 IEP de formation

● Organisation/ Expérimentation● Organisation/ Généralisation

4. Equipes de formation (C.S) IEP ● Formation des Directeurs d’écoles,CP des enseignantsD/ EcolesEnseignants

5. Ecoles IEP ● Mise en œuvre de l’expérimentationCP ● Mise en œuvre de la généralisationRUP ● PerfectionnementD/ EcolesEnseignants

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4. Élaboration de projets de programmes d’études etleur expérimentation :

● CI - CP (août - septembre 1994) ;● CE1 - CE2 (juillet - août - septembre 1995) ;● CM1 (juin - juillet - août 1996)● CM2 (juin - juillet - août 1997).

5. Formation des maîtres et directeurs des écoles expé-rimentales, des conseillers pédagogiques et des ins-pecteurs ;

6. Mise en œuvre, suivi et évaluation de l’expérimenta-tion des nouveaux programmes d’études ;

7. Production de manuels, cahiers d’activités et desplanches pédagogiques adaptés ;

8. Mise au point d’un système d’évaluation conformeaux nouveaux programmes d’études ;

9. Amélioration progressive et finalisation des nou-veaux programmes d’études ;

10. Généralisation progressive puis totale des nouveauxprogrammes d’études suivant le calendrier ci–après :

CI : 1999 - 2000 CP : 2000 – 2001CE1 : 2001 – 2002 CE2 : 2002 - 2003CM1 : 2003 - 2004 CM 2 : 2004 - 2005

2. Les fondements et les caractéristiques des nou-veaux programmes d’études

Les fondements des nouveaux programmes d’études Dans les orientations devant inspirer l’action éducative,le Ministère en charge de l’éducation nationale a misl’accent principalement sur les valeurs que l’école béni-noise doit cultiver, sur les finalités qu’elle doit pour-suivre et aussi sur les éléments du profil à dégager (com-pétences recherchées) de l’élève à la fin du cycleprimaire.

Ces finalités trouvent leur référence dans lesmodèles psychocognitif et sociocognitif. Le modèlepsychocognitif valorise le processus d’apprentissage, lemode inductif, les représentations et les conceptions del’élève, les conflits cognitifs. Le modèle sociocognitifmet l’accent sur la dimension culturelle, l’environne-ment social, le milieu ambiant, les déterminants sociauxde la connaissance.

Deux approches ont été privilégiées par les nou-veaux programmes d’études. Il s’agit de l’approchesocioconstructiviste et de l’approche cognitiviste. Uncertain nombre de formules pédagogiques (stratégies)s’inspirant de ces approches ont été également retenues.Il s’agit notamment de la résolution de problème et dudéveloppement de projets.

La conception de l’apprentissageLes mutations du monde actuel imposent à l’école lavocation de définir les habiletés et les attitudes néces-saires pour préparer la jeune génération à la vie. Pourcette préparation à la vie, quelques principes de la psy-chologie cognitive, de l’épistémologie et des pédagogiesnouvelles ont été identifiés. Ces principes servent à pré-

ciser les conditions nécessaires pour un apprentissagesignificatif et durable de la part de l’élève. En effet :● on apprend avec les autres;● tout le monde n’apprend pas de la même façon ni au

même rythme; ● l’apprentissage requiert une activité de la part de la

personne qui apprend;● une personne apprend à partir de ses représentations;● une connaissance ou une habileté apprises sont utili-

sables dans tous les contextes;● un bon apprenant maîtrise sa démarche d’apprentis-

sage;● on apprend mieux lorsqu’on est dans un environne-

ment stimulant;● on apprend lorsque les apprentissages proposés ont

un sens et qu’on leur accorde de la valeur;● on apprend en créant.

Sur la base de ces principes généraux, les responsablesde la réforme des programmes d’études ont privilégié laconception de l’apprentissage qui, concrètement, faitrecours aux trois phases importantes de l’acte d’appren-tissage :

1. «Introduction». C’est la phase de l’éveil du désird’apprendre, de la mise en branle des pro-cessus mentaux des élèves, de l’activation de leurssavoirs ;

2. «Réalisation». C’est la phase du passage desconnaissances préalablement acquises aux nouveauxsavoirs et l’intégration de ces derniers;

3. «Retour et projection». A cette phase ont lieu :● un retour sur ce qui a été appris et sur les

démarches utilisées pour apprendre ;● un réajustement (consolidation) ou un enrichisse-

ment des apprentissages réalisés;● un énoncé des idées sur ce qu’on peut faire avec ce

qu’on a appris.

La conception de l’apprentissage ainsi caractérisée,davantage respectueuse des façons d’apprendre desélèves, remet fondamentalement en cause le rôle del’enseignant et l’ensemble de la vie de l’école. Elle aaussi un effet direct sur le type de programmes d’études,le choix des contenus de formation et leur prise encompte dans un guide pédagogique.

Les caractéristiques des nouveaux programmes d’étudesA la différence des programmes antérieurs qui prennentsurtout en compte des contenus notionnels à enseigner,les nouveaux programmes d’études sont fondés sur descompétences décomposées en capacités et habiletés queles élèves ont à construire et à développer.

Les orientations qui guident la réforme des pro-grammes d’études ont conduit les concepteurs à repen-ser la pertinence de la multitude des programmes quiexistaient auparavant. En 1993 la décision fut prise deregrouper par intégration en six (6) champs de forma-tion les vingt-deux (22) disciplines en application à l’en-seignement primaire. Les six champs de formation rete-

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Page 29: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

nus sont: le français, la mathématique, l’éducation scien-tifique et technologique, l’éducation sociale, l’éducationartistique et l’éducation physique et sportive.

Les nouveaux programmes d’études sont conçus etélaborés suivant une approche systémique. Ce sont desprogrammes par compétences, des programmes àmatières et à savoirs intégrés. Ce sont des programmes-guides qui fournissent des informations à l’enseignantpar rapport à son travail.

Trois catégories de compétences sont retenues :1. les compétences transversales d’ordres intellectuel,

méthodologique et social ;2. les compétences transversales liées à l’expérience de

la vie ;3. les compétences par champ de formation (ou compé-

tences disciplinaires).Le programme d’études est une composante du curricu-lum. Pour qu’il soit appliqué, un certain nombre deconditions doivent être réunies. Nous retiendrons icitrois de ces conditions. Elles concernent :1. la formation des enseignants ; 2. le matériel didactique ;3. l’évaluation des apprentissages des élèves.

Le perfectionnement de l’ensemble des acteurs del’école du Bénin a fait l’objet d’un vaste mais réalisteprogramme. Les inspecteurs, les directeurs, lesconseillers pédagogiques, les enseignants sont tous desapprenants au regard de la réforme. Ils sont formés,chacun selon leurs besoins et leurs fonctions en conte-nus de formation nécessaires (connaissances, habiletés,attitudes et stratégies) pour réussir respectivement leurmission.

Le matériel didactique élaboré est mis à la disposi-tion des enseignants et des élèves. Aux enseignants, ilpropose des situations d’apprentissage à offrir auxélèves pour les aider à construire les contenus de for-mation précisés dans un ou plusieurs programmes don-nés selon les orientations privilégiées et des indicationsd’ordre pédagogique. Aux élèves, il présente des activi-tés d’apprentissage qui respectent l’esprit du ou desprogrammes d’études concernés. Depuis la généralisa-tion des nouveaux programmes d’études à la rentréescolaire 1999 – 2000, les manuels, cahiers d’activités etguides de mathématique et de français, les guides desautres champs de formation du CI et du CP ont étéconçus, rédigés, édités et imprimés entièrement auBénin.

Les équipements nécessaires pour que les élèvesapprennent en agissant sont constamment mis à la dispo-sition des enseignants, et les pistes leur sont fourniespour en trouver ou en construire d’autres. Les élèves, lesparents et la communauté sont mis à contribution à ceteffet. Ils ont, de ce fait, l’occasion de se familiariser avecdes principes et procédés propres à la technologie endonnant un sens à l’école.

L’évaluation des apprentissages des élèves est uneautre composante importante de la réforme. Elle s’in-tègre au processus d’apprentissage, se fait dans le res-

pect des fondements et orientations qui sous-tendent laconception d’apprentissages privilégiée. Une attentionparticulière est consacrée à la congruence entre les ins-truments de mesure et la conception d’apprentissage.

4. Difficultés rencontrées

Les difficultés rencontrées sont liées notamment :● à la lourdeur administrative ;● à la non-disponibilité des fonds au moment opportun;● à la peur du changement ;● au poids du vécu des enseignants ;● aux mouvements du personnel enseignant ;● à l’insuffisance du niveau académique des ensei-

gnants ;● à l’insuffisance des effectifs d’enseignants qualifiés ;● aux répétiteurs à domicile non-formés ;● aux classes à grands groupes ;● au mobilier insuffisant et souvent inadéquat ;● au morcellement du temps scolaire.

V. LES CONSEQUENCES DE LA REFORME SUR L’ENCADREMENT SCOLAIRE

Des changements importants s’opèrent actuellementdans la définition du rôle du chef d’établissement. A uneépoque à laquelle sont gérés les anciens et les nouveauxprogrammes, le problème de mise à niveau des direc-teurs d’écoles se pose. En effet, il importe qu’ils puissentjouer le rôle de superviseur pédagogique vis-à-vis desmaîtres qui appliquent les nouveaux programmesd’études et vis-à-vis de ceux qui continuent d’appliquerles programmes en extinction.

Les exigences croissantes rattachées au rôle de direc-teur sont liées à l’introduction d’innovations susceptiblesd’ouvrir l’école sur la vie et de lui imposer la collabora-tion avec les parents et la communauté entière. Les exi-gences relèvent aussi du partage de pouvoir qui doits’opérer entre le directeur et ses collaborateurs, entrel’école et le milieu. Elles découlent enfin des nouvellesattitudes qu’un directeur d’école doit adopter. En effet, ilne se contentera plus de viser les fiches pédagogiques deses adjoints, mais devra constamment faire preuve d’ou-verture d’esprit, se montrer de façon permanente entre-prenant et se révéler comme un homme de dialogue et deconcertation.

Le modèle le plus efficace est celui d’un réseau dedéveloppement professionnel à long terme. Les direc-teurs en tant que piliers de la réforme supporteraient lesenseignants pour leur permettre de s’approprier les nou-veaux programmes d’études. Ils se donneraient une soli-de formation didactique et administrative pour agircomme personnes- ressources dans l’école et de la cir-conscription scolaire. On facilitera les rencontres d’en-seignants des écoles et unités pédagogiques pour leurpermettre de partager leurs expériences et pour favoriserla réflexion sur leur enseignement, les approches, lesméthodes et formules pédagogiques.

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Page 30: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

VI.CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Nous sommes actuellement dans un contexte où l’an-cien système n’a pas vraiment disparu du point de vuede l’organisation pédagogique.

Quand on s’inscrit dans la problématique de change-ment, on comprend aisément la peur de l’inconnu quihabite certains enseignants, parents d’élèves et autresusagers de l’école.

A l’enseignement primaire, la généralisation desprogrammes d’études qui a atteint le cours préparatoire(CP) à la rentrée 2000-2001 va se poursuivre progres-sivement. Au secondaire, elle va se renforcer, et ausupérieur, elle pourra démarrer sans délai pour établirl’articulation entre les trois ordres d’enseignement etgarantir la continuité. Les actions de formation iront ense renforçant pour mieux outiller les enseignants. Laproduction de matériels didactiques va se poursuivre

également tout en veillant à l’adéquation entre les prin-cipes directeurs des programmes d’études et ces maté-riels didactiques.

La réforme des programmes d’études en cours auBénin se veut l’occasion de bâtir ensemble une école quiregarde l’avenir. Une telle école prête attention à ce quesont les jeunes, les respecte et vise le succès de tous.Pour se donner du sens, elle sait allier des éléments dethéorie à des éléments pratiques, et sollicite la contribu-tion des élèves à leur apprentissage. Il faut être patient,les effets réels ne se feront sentir que plus tard. Il s’agitaujourd’hui de donner de l’espoir aux jeunes en ce quiconcerne leur avenir. Cet espoir se concrétisera quandl’ensemble du personnel éducatif - administrateurs sco-laires, inspecteurs, conseillers pédagogiques, directeursd’écoles, enseignants - , et les parents d’élèves et enfin lacommunauté toute entière seront déterminés à transfor-mer l’école au quotidien.

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Liste des sigles utilisés

BEPC Brevet élémentaire du premier cycleCE1 Cours élémentaire première année (3ème année)CE2 Cours élémentaire deuxième année (4ème année) CI Cours d’initiation (1ère année)CEP Certificat d’études primairesCM1 Cours moyen première année (5ème année)CM2 Cours moyen deuxième année (6ème année)CP Conseiller pédagogiqueCP Cours préparatoire (2ème année)C/SEP Chef service enseignement primaireD/ école Directeur école DDE Directeur départemental de l’éducationDEP Directeur de l’enseignement primaireD/INFRE Directeur de l’Institut National pour la Formation et la Recherche en EducationDPP Directeur de la programmation et de la prospectiveIEP Inspecteur de l’enseignement primaireRUP Responsable d’unité pédagogique UP Unité pédagogique

Page 31: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

I. INTRODUCTION

Le Burkina Faso, à l’instar de nombreux autres pays afri-cains, possède une certaine expérience en matière deréforme du système éducatif, notamment des pro-grammes d’enseignement.

En effet, dès le lendemain des indépendances, uneréflexion fut amorcée quant au rôle de l’école dans leprocessus d’émancipation et de développement de lasociété voltaïque d’alors. Depuis, pas moins de cinq ten-tatives de réformes ont touché soit la structuration del’école, soit les contenus d’enseignement ou les deux à lafois, certaines modérées, d’autres plus radicales.

Si cette situation traduit le souci permanent des res-ponsables du système quant au devenir de l’école, elleaffecte aussi le système éducatif dans son ensemble, etles politiques curriculaires en particulier.

II. HISTORIQUE DES REFORMES AU BURKINA FASO

1. La situation de l’éducation au moment de l’indé-pendance

Le Burkina Faso, anciennement dénommé Haute-Volta aaccédé à l’indépendance le 5 août 1960, héritant, toutcomme d’autres pays d’Afrique francophone sub-sahérienne, d’un système éducatif peu développé.

Sur un plan structurel, il peut être globalement ditque l’organisation du système éducatif de l’époque nedifférait pas fondamentalement de celle que le paysconnaît aujourd’hui. En effet, le système éducatif étaitcaractérisé par un enseignement préscolaire rudimentai-re, un enseignement du premier degré comportant troiscours de divisions chacun (six années scolaires), unenseignement secondaire général à deux cycles (celui duBEPC et celui correspondant au Baccalauréat), un ensei-gnement secondaire technique préparant aux CAP, unenseignement normal pour la formation des enseignantsdu 1er degré (cours normaux). L’enseignement supérieurne pouvait être acquis qu’à l’étranger.

Les programmes, tout en se voulant complets,n’étaient pas adaptés aux réalités économique, sociale etculturelle du pays. Il y avait donc une nécessité urgentede refondre le système en fonction des objectifs de déve-loppement du pays.

2. Tentatives de réformes pendant la décennie 1960-1970

La grande préoccupation des pays africains au lende-main des indépendances était d’ouvrir l’accès à l’éduca-tion à un nombre croissant d’enfants. La démocratisationde l’éducation étant perçue comme la condition principa-le du développement d’une vraie démocratie, la confé-rence d’Addis-Abeba (1961) fixa à l’horizon de 1980 laréalisation de la scolarisation universelle dans tous lespays participants.

Aussi en Haute-Volta de l’époque, comme partoutailleurs, la décennie des années 60 fut marquée par desefforts pour l’expansion de l’éducation de base et pourl’accroissement de la rentabilité interne de cette éduca-tion.

3. La réforme de 1979 à 1984

En 1972, la question d’une possible réforme de l’ensei-gnement basée sur les résultats d’une enquête auprès despopulations fut abordée. En 1974, suite à la déclarationprésidentielle en faveur du développement communau-taire comme projet de société, le projet de réforme appe-lé «Education pour le développement communautairerural» fut proposé.

Au travers de nombreux séminaires et conférences,d’importantes données obtenues par consensus furentdégagées. Ces données furent ensuite utilisées par laDirection de la planification pour élaborer en 1975-1976le Dossier initial de la réforme du système éducatif.

Le nouveau système proposé tranchait avec le systè-me existant tant dans ses objectifs que dans sa structure.Les trois objectifs principaux suivants avaient été identifiés:1. la démocratisation du savoir pour une éducation de

masse; 2. la liaison entre l’éducation et la production, c’est-à-

dire entre l’acte d’apprendre et celui de produire; 3. la revalorisation du patrimoine culturel avec l’intro-

duction des langues nationales à l’école, le dévelop-pement d’une culture nationale authentique, et lacréation de groupes artistiques.

La mise en place de la réforme appela la création decadres institutionnels. L’Institut national d’éducation

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Burkina Faso

B. Didier Kam et Ouri Sanou

Page 32: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

(INE) devint donc l’Institut pour la réforme et l’actionpédagogique (IRAP), chargé de la mise en œuvre de laréforme.

Un cadre financier fut instauré, alimenté par unapport du Gouvernement de 746 millions de francs CFAde 1976 à 1983. Le PNUD et l’UNESCO apportèrentégalement leur contribution pour sept ans (1976 – 1983)arrêté à 2.530.000 dollars US, puis prolongé jusqu’en1986 pour un montant total de 3 millions dollars US.

En mai 1979, le Premier Ministre annonça le démar-rage de l’expérimentation pour la rentrée d’octobre. Autotal, soixante et une écoles expérimentèrent la réformedans son volet consacré au cycle d’enseignement debase ; et trois villages dans la zone moréphone l’appli-quèrent pour le volet de la réforme consacré aux centresd’éducation pré-scolaire. En 1983-84, une semi-généra-lisation de la réforme fut décidée.Alors que les premières classes expérimentales en étaient àleur cinquième année, le Conseil national de la révolutionmit fin à cette réforme le 14 septembre 1984. En raison decet arrêt, il ne fut pas possible d’évaluer la réforme del’éducation de 1979-84 dans son ensemble, étant donnéque son cycle ne fut jamais achevé. Mais un systèmed’évaluation interne permit néanmoins de dégager cer-taines conclusions. Il en ressorti que la réforme telle qu’el-le avait été expérimentée, n’avait pas donné satisfaction.

Plus fondamentalement, le suivi de cette expérimen-tation dégagea deux principes majeurs:1. le maître est un pilier dans la réussite de toute inno-

vation dans l’éducation et doit par conséquent êtreimpliqué dès le départ ;

2. la sensibilisation des parents est primordiale afind’influer sur le changement de mentalité. Il s’agit defaire d’eux les collaborateurs des enseignants.

4. La réforme de 1986: l’«Ecole révolutionnaire bur-kinabé»

Le 4 août 1983 un régime révolutionnaire s’instaura enHaute-Volta avec pour ambition d’édifier une société nou-velle. Selon son texte fondamental, le Discours d’orienta-tion politique (DOP), la société nouvelle exigeait uneécole nouvelle pour former le type d’hommes exigé par larévolution. Cette nouvelle école se devait nationale, réalis-te, populaire, démocratique, ouverte, productive et révolu-tionnaire, en un mot au service du peuple.

Sur le plan structurel, l’école révolutionnaire burki-nabé était conçu à trois cycles principaux: le cycle pré-scolaire, le cycle des métiers et le cycle de la rechercheet de l’invention. Sur le plan financier, on tint comptepour la réalisation de l’école nouvelle des coûts liés à laconstruction et à l’équipement des classes, des coûts deproduction, et des coûts de recyclage et de formation dupersonnel enseignant. Le coût pour l’application de laréforme fut évalué à 32.067.901.000 Francs CFA auniveau fondamental, à 18.996.719.136 Francs CFA auniveau polytechnique. Ainsi, sans tenir compte des coûtsdu préscolaire et du cycle de la recherche et de l’inven-tion qui ne purent être évalués, le démarrage de l’école

révolutionnaire en 1986 nécessitait plus de 78 milliardsde Francs CFA, ce qui représentait un coût dispropor-tionné par rapport aux moyens du pays.

Contrairement à la réforme de 1979 à 1984, cetteréforme ne prévoyait pas de phase d’expérimentation. Laréforme devait débuter en octobre 1986 au cycle fonda-mental. Toutefois, après avoir fait l’objet de larges dis-cussions au niveau de toutes les instances et structures, ledocument du projet de réforme fut finalement rejeté.

III. LE SYSTEME EDUCATIF EN VIGUEUR AU BURKINA FASO

1. Les grands axes de la réforme actuelle

Pour la première fois dans l’histoire du pays, des Etatsgénéraux de l’éducation et de la formation se tinrent du5 au 10 septembre 1994 à Ouagadougou. Leurs travauxinspirèrent l’Assemblée Nationale dans l’adoption de laLoi d’orientation de l’éducation, le 9 mai 1996. De cetteloi se dégagent les grandes orientations qui constituentles grands axes de la réforme actuelle du système éduca-tif burkinabé.

Sommairement, les grands axes rejoignent les pointssuivants. Premièrement, l’enseignement est envisagé detelle sorte que chaque niveau d’enseignement est termi-nal et se suffit à lui-même. En ce qui concerne plus spé-cifiquement les différents niveaux d’enseignement, lapriorité en matière d’éducation sera accordée à l’ensei-gnement primaire. L’enseignement primaire, qui sedéveloppera tout en sauvegardant sa qualité, poursuivrale but de la scolarisation universelle, avec pour objectifsnumériques un taux de scolarisation de 60% en l’an2000 et 100% en l’an 2010.

Pour ce qui est de l’enseignement secondaire, l’accentsera mis sur l’expansion de l’enseignement technique, lecontrôle des effectifs, la formation et l’encadrement péda-gogique des enseignants, l’équipement et l’entretien desétablissements. Au niveau supérieur une ré-allocation desressources financières aura pour but de permettre uneamélioration de la qualité des enseignements et l’éléva-tion du niveau de la recherche scientifique. Les capacitésd’accueil des établissements devront être respectées. Et,la décentralisation sera mise en œuvre.

La promotion des langues nationales dans l’enseigne-ment se poursuivra. La recherche scientifique appuieracette politique. L’école s’ouvrira davantage sur son envi-ronnement et les partenaires d’éducation seront associésà sa gestion. L’Etat encouragera et appuiera ses parte-naires dans le développement de l’éducation préscolaire.

Finalement, en lieu et place d’une réforme du systè-me éducatif qui s’avérerait très onéreuse, l’introductiongraduelle d’innovations et de rénovations dans le systè-me éducatif est préconisée.

Ainsi, la réforme de l’éducation n’est plus synonymede bouleversement immédiat des structures et des conte-nus, mais le résultat d’un ensemble de mesures pourrépondre aux insuffisances constatées au niveau du sys-tème éducatif.

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Page 33: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

2. La réforme au niveau de l’enseignement primaire

La situation de l’éducation de base au Burkina Faso estpréoccupante. En effet, le taux de scolarisation est bas(environ 41 % en 1999), la qualité laisse à désirer (taux deredoublement et d’abandon élevés, de succès au CEPfaible), et le sous-système manque d’équité (taux de scola-risation des filles plus bas que celui des garçons et mau-vaise fréquentation au niveau des filles scolarisées ; fortesdisparités géographiques). Le taux national d’alphabétisa-tion n’était que de 26% en 1997 ; et les problèmes de ges-tion du système se posent, notamment aux plans financieret humain. Par ailleurs, on constate une perte de confiancedes populations en l’école. Ce sont là autant de défis àrelever pour améliorer la situation de l’éducation de base.

Par le passé, conformément aux grandes orientationsqui préconisaient les innovations et les rénovationscomme moyens de réformer le système, le ministèreavait introduit un certain nombre d’innovations pédago-giques. Pour relever les défis actuels, le Gouvernement aadopté en juillet 1999 un Plan décennal de développe-ment de l’éducation de base (PDDEB) pour la période2000 – 2009. Ce plan est une des recommandations desEtats généraux de l’éducation et s’inspire du plan straté-gique de développement de l’éducation.

Véritable instrument de réforme et de développementdu sous-système, ce plan s’articule autour de quatre pro-grammes :1. expansion, amélioration de la qualité et de la perti-

nence ; 2. intensification et amélioration de la qualité des

actions d’alphabétisation ; 3. amélioration des capacités de planification ;4. amélioration des capacités de gestion du système.

Les objectifs généraux englobent l’accroissement del’offre d’éducation de base et la réduction des disparitésde genre entre régions et entre situations socio-écono-mique des élèves ; ainsi que l’amélioration de la qualité,de la pertinence et de l’efficacité de l’éducation de base,parmi d’autres. Le plan décennal s’exécutera en troisphases dont la première durera quatre ans et les deuxautres trois années chacune. Il s’inscrit dans l’objectifglobal de développement du pays qui est la lutte contrela pauvreté, objectif auquel il veut contribuer par la for-mation de ressources humaines adéquates.

Il ressort de l’analyse du texte de la réforme que lanécessité de réforme de l’éducation de base découledonc à la fois de la situation dans laquelle se trouve lesystème éducatif et des tendances du changement mon-dial en cours. Ceci se traduit par l’introduction de disci-plines d’enseignement, telles que l’éducation pour lapaix, l’éducation relative aux problématiques de l’envi-ronnement, de la démocratie et du SIDA. En résumé,cette tendance démontre la nécessité d’une éducation enmatière de population.

La réforme est née d’une volonté politique du gou-vernement traduisant une préoccupation majeure despopulations pour le système éducatif. La Loi d’orienta-

tion de l’éducation fait de l’éducation de base une priori-té, introduit les langues nationales et de nouvelles disci-plines d’enseignement, et s’inscrit ainsi dans la mouvan-ce actuelle du changement mondial, donnant ainsi suite àla conférence de Jomtien.

3. La réforme de l’enseignement au niveau secondaire

Les innovations à ce niveau d’enseignement s’appuientsur les grandes orientations énoncées plus haut, notam-ment le caractère terminal de chaque niveau, l’améliora-tion de la qualité de l’enseignement et le caractère gra-duel de l’introduction des innovations.

Les innovations revêtent plusieurs aspects :● l’introduction de nouvelles disciplines dans l’ensei-

gnement (éducation en matière de population, éduca-tion civique, éducation technologique) ;

● la réforme ou la rénovation des curricula pour lesrendre conformes aux grandes orientations ;

● la mise au point de nouveaux outils d’évaluation etde nouvelles approches pédagogiques (approchemodulaire dans l’enseignements technique, pédago-gie des grands groupes).

Finalement, des études s’attacheront à enrichir les pro-grammes de l’enseignement technique et à les ouvrir aumonde du travail.

IV. ARTICULATION ENTRE LA REFORME DES CURRICULA ET LE DEVELOPPEMENT CURRICULAIRE

1. Situation au niveau de l’enseignement primaire

Les objectifs assignés au système éducatif burkinabé parles textes officiels figurent dans la Loi d’orientation del’éducation en ses articles 6, 7 et 8 et dans ses décrets demise en œuvre, dont le PDDEB.

Les programmes actuellement en usage ont été éla-borés selon une démanche déductive des finalités, buts etobjectifs du système éducatif tels qu’édictés par la Loid’orientation constituent le point de départ. Cela a per-mis de retenir huit domaines d’apprentissage. Pour cha-cun de ces domaines, un but a été défini. Et des objectifsgénéraux traduisant chaque but ont été élaborés. A partirde chaque objectif général, les objectifs spécifiques per-mettant de l’atteindre ont été conçus, ainsi que les dispo-sitions pédagogiques et les procédures d’évaluation.

Ces programmes ont été élaborés par une commis-sion nommée par arrêté ministériel et appuyée par deuxexperts nationaux.

2. Situation au niveau de l’enseignement secondaire

Introduction de nouvelles disciplines d’enseignementEn guise d’illustration, trois disciplines parmi cellesrécemment introduites, seront passées en revue. Il s’agitde l’Education en matière de population (Emp), del’éducation civique et de l’initiation technologique.

Depuis 1976, date à laquelle se tint un séminaire desensibilisation des cadres de l’Etat à Bobo-Dioulasso, le

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Page 34: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

Burkina Faso s’est engagé, avec l’aide du FNUAP et del’UNESCO, dans le processus d’introduction de l’Empdans son système d’éducation.

La stratégie adoptée a été de sensibiliser le public-cible (enseignants, élèves, parents), de former des for-mateurs et des enseignants, d’élaborer des curricula etdu matériel didactique, de lancer une phase d’expéri-mentation, d’en assurer le suivi et l’évaluation, et finale-ment de généraliser la démarche.

Les objectifs visés par l’introduction de l’Emp auBurkina sont de responsabiliser les individus et les col-lectivités en développant le sens de la responsabilité vis-à-vis des phénomènes de population, et en changeant lesattitudes et les comportements. Plus spécifiquement, ils’agit d’améliorer la qualité de la vie dans les domainesde la santé, de l’habitat et de l’environnement ; de pro-mouvoir la vie familiale et la condition de la femme.

La Direction de l’éducation en matière de population(Demp) a été chargée de la mise en oeuvre de cette inno-vation. Elle est financièrement appuyée par les parte-naires au développement (FNUAP), en plus de l’effortconsenti par le Burkina.

Les acteurs de l’introduction de l’Emp au secondairesont les formateurs de formateurs de l’Emp (principale-ment des inspecteurs de l’enseignement secondaire); lesprofesseurs du secondaire formés en Emp; et la commis-sion nationale des programmes de l’enseignementsecondaire.

Les programmes et contenus de l’Emp ont été élabo-rés par les sous-commissions des programmes. L’Empn’est pas enseignée comme discipline, mais ses contenuset méthodes sont intégrés dans d’autres disciplines d’ac-cueil telles que le français, les langues vivantes, lessciences naturelles, les mathématiques. L’introduction del’Emp concerne toutes les classes du secondaire. Lesouvrages du maître ont été écrits par des nationaux et édi-tés notamment avec l’appui de l’UNESCO et du FUNAP.Ils sont disponibles à un prix modique. Il convient cepen-dant de relever la difficulté de reproduction en nombre eten quantité suffisante du matériel didactique qui résultede la modicité des moyens matériels et financiers.

La phase de généralisation toujours en cours, inter-venue après une expérimentation réussie, a pu avoir lieugrâce à la formation de la quasi totalité des professeursen exercice et à l’introduction de l’Emp dans les pro-grammes de formation initiale des professeurs à l’Ecolenormale supérieure de Koudougou. Elle s’appuie sur destextes (arrêtés) pris par le Ministère en charge de l’en-seignement secondaire.

Les méthodes actives (centrées sur l’élève) qui favo-risent l’activité et la recherche collective, la résolutiondes problèmes, sont préconisées et ce, au vu des objec-tifs visés par l’Emp. L’évaluation doit porter sur lesconnaissances, certes, mais davantage sur les aptitudeset les attitudes et comportements traduisant un engage-ment en rapport avec le thème traité.

La deuxième parmi ces nouvelles disciplines d’en-seignement est l’éducation civique. La question de sa

réintroduction dans l’enseignement secondaire s’estposée en 1984, peu de temps après l’avènement de larévolution. Cependant, au vu de la délicatesse de laquestion sur le plan politique, elle ne fut suivie d’aucuneffet. Cela est d’autant plus compréhensible que la for-mation à l’idéologie révolutionnaire était à l’ordre dujour! Suite au drame de Sapouy le 13 décembre 1998qui entraîna le décès du journaliste Norbert Zongo et deses trois compagnons, la rue s’enflamma. Les jeunesscolaires, inspirés par des organisations de la sociétécivile posèrent des actes mettant à nu l’insuffisance deformation civique de la jeunesse burkinabé. Un Conseilde cabinet réuni le 2 mars 1999 créa une commissioninterministérielle comprenant les ministères chargés dessecteurs sociaux pour se pencher sur la question de l’in-troduction de l’éducation civique.

Les finalités assignées à l’éducation civique sont lessuivantes :● développer chez les jeunes le sens de l’intérêt géné-

ral, le respect de la loi et des valeurs et l’amour de lapatrie ;

● faire des jeunes des citoyens éclairés sur les droits etdevoirs fondamentaux garantis par la Constitution ;

● faire comprendre aux jeunes les règles de la viedémocratique et de leurs fondements, la connaissan-ce des institutions et de leurs racines historiques, lerespect des droits de l’homme et des libertés fonda-mentales, le refus de toute forme d’exclusion, lavolonté de vivre ensemble, la culture de la paix, de latolérance, de la solidarité et de la justice ;

● promouvoir les valeurs traditionnelles positives et laprotection de l’environnement ;

● permettre aux jeunes de répondre à leur propre exi-gence de liberté et de justice, de respect de soi et desautres et de faire face de manière responsable auxproblèmes et aux défis de notre temps.

Conformément à ces finalités, des programmes d’éduca-tion civique ont été élaborés. Outre les programmes, desstratégies de mise en œuvre et de mobilisation des res-sources ont été élaborées.

Au niveau du Ministère en charge de l’enseignementsecondaire, la Direction des inspections et de la formationdes personnels de l’éducation (DIFPE) est chargée de lamise en œuvre de l’introduction de l’éducation civique.

La démarche retenue recouvre plusieurs étapes: del’organisation de séminaires nationaux regroupant desmembres des sous-commissions de programmes, à l’or-ganisation de la formation des enseignants sur descontenus spécifiques, des professeurs du secondaire(professeurs d’histoire et de géographie notamment) et àla formation initiale des professeurs à l’Ecole normalesupérieure de Koudougou, à la sensibilisation du per-sonnel administratif des établissements secondaires, enpassant par l’organisation de voyages et de formations àl’étranger. D’un point de vue matériel, une documenta-tion en quantité et en qualité est mise à la disposition desenseignants. L’étape consacrée au suivi et à l’évaluationconstitue la dernière étape de la démarche.

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L’éducation civique sera enseignée en tant que disci-pline distincte et évaluée comme telle. Les méthodespréconisées pour l’enseignement de l’éducation civiquesont essentiellement les méthodes actives, telles que lesétudes de cas, la simulation, l’appel à un invité, la dis-cussion ou le jeu de rôles. L’évaluation utilise des QCM,des tests d’attitude, des échelles numériques.

Pour ce qui est de sa mise en œuvre, l’enseignementdes nouveaux programmes d’éducation civique est effec-tif à la rentrée scolaire 2000-2001, au premier cycle dusecondaire. Les difficultés récemment vécues sont liées àla perturbation du calendrier scolaire 1999-2000. Le voletfinancier quant à lui est pris en charge par le ProjectEnseignement Post-Primaire (PEPP) dont la réforme descurricula est l’un des domaines d’intervention.

La troisième discipline d’enseignement nouvellementintroduite constitue une vraie innovation. Il s’agit del’initiation technologique. Cet enseignement sera expéri-menté dans trois collèges d’enseignement général avantd’être généralisé, et vise à faciliter le passage des élèvesde l’enseignement général à l’enseignement technique.En plus, il aidera à réduire le déséquilibre entre enseigne-ment général et enseignement technique et professionnelau profit de ce dernier. La nouvelle discipline sera finan-cée par le projet pour l’enseignement post-primaire.

Réforme des curricula des disciplines existantesEtant donnée la décision prise par l’AssembléeNationale à travers la Loi d’orientation de l’éducation,selon laquelle chaque niveau d’éducation doit constituerun tout (c’est-à-dire être conçu pour répondre auxbesoins aussi bien des élèves qui mettent fin à leursétudes à la fin d’un cycle donné que de ceux qui conti-nuent dans le cycle suivant), tous les programmesd’études secondaires doivent être réformés dans leursstructures et dans leurs contenus. Le processus de réfor-me des programmes des disciplines suivant à peu près lemême schéma, nous décrivons celui des mathématiques.

Depuis l’indépendance du pays en 1960 et jusqu’en1990, les programmes de mathématiques en vigueurétaient quasiment identiques aux programmes françaisdes années 1960. Les mathématiques apparaissentcomme la discipline modulant la réussite ou l’échec desélèves et posent la question de leur utilité. Il s’en suit unerupture entre l’attente de la société et la nature desconnaissances mathématiques dispensées.

La réforme des programmes de mathématiques appe-lée de tous les vœux par les enseignants, encadreurspédagogiques et parents d’élèves devait donc améliorerla qualité de l’enseignement et des apprentissages enmathématiques, à l’aide de la définition de nouveauxcontenus et de la mise à disposition de nouveaux docu-ments didactiques.

En 1989, un projet dénommé «Projet français-mathé-matiques» (PFM) fut mis en place reprenant pour objec-tifs ceux énoncés ci-dessus, en plus d’autres ayant trait àl’enseignement du français dont la maîtrise conditionneles apprentissages en mathématiques. La cellule «mathé-

matiques» du PFM était chargée de la réforme. Elle étaitdirigée par un inspecteur de mathématiques burkinabé etcomprenait cinq conseillers pédagogiques, professeurscoopérants français et quatre professeurs burkinabé.

La démarche utilisée fut d’actualiser les contenus àpartir des travaux de réflexion menés par les professeursde mathématiques en 1989, en prenant en compte lesacquis du primaire (cas du calcul, de la géométrie, etc),les actes des séminaires sous-régionaux. Ensuite, les pro-jets de programmes par classe furent rédigés, contenantles objectifs, la méthodologie, et l’évaluation. Enfin, desdocuments destinés aux professeurs (guides méthodolo-giques) et aux élèves (exercices) furent produits. La for-mation des professeurs expérimentateurs serait assuréepar le biais de séminaires-ateliers. On expérimenteraitensuite le nouveau programme et les documents produitspar les professeurs expérimentateurs formés, pour ensuiteen faire un suivi et une évaluation, avant de passer à laformation de tous les enseignants aux nouveaux pro-grammes et de généraliser la réforme. Un suivi-évalua-tion des nouveaux programmes était prévu afin d’assurerl’amélioration des matériels didactiques.

Les difficultés rencontrées au moment de la mise enœuvre se situent au niveau du manque de formationpédagogique initiale des enseignants. Par ailleurs, leslibraires de la place sont dans l’incapacité de répondre àla demande des nouveaux manuels écrits et édités par laDirection des inspections et de la formation des person-nels de l’éducation.

La question de la disponibilité des manuels a étérésolue aujourd’hui grâce au projet pour l’enseignementpost-primaire. Quant à la question de la formation desenseignants, leurs formations initiale et continue sontsupposées soulever les difficultés subsistantes.

En conclusion, des évaluations ont été conduites surl’atteinte des objectifs et sur les perceptions des ensei-gnants du secondaire en mathématiques sur les nouveauxprogrammes. Outre la satisfaction de leur ouverture et deleur modernité, elles révèlent les difficultés liées auxgrands effectifs des classes qui rendent difficile l’applica-tion des méthodes préconisées centrées sur l’apprenant.

V. CONCLUSION

Le Burkina Faso a expérimenté plusieurs types deréformes de son système éducatif, sans pour autant avoiratteint tous ses objectifs. La plupart d’entre elles n’ont àvrai dire pas été évaluées ou ne sont pas allées à leurterme pour diverses raisons.

Le choix des innovations et des rénovations est lefruit d’un consensus national sanctionné par une loi. Lesréformes actuelles s’effectuent donc dans un cadre poli-tique accepté par tous et mettent en exergue le partena-riat.

Certes, des risques existent quant à la capacité desinnovations à changer fondamentalement la nature dusystème éducatif, si la volonté politique qui a prévalu àleur adoption venait à s’émousser. Néanmoins la voiechoisie semble la plus sûre aux yeux des burkinabé.

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I. INTRODUCTION

Depuis plusieurs années, les perspectives de développe-ment socio-économique sont au centre de multiplesdébats tant au niveau national qu’international. Il seraitaujourd’hui irresponsable de fermer les yeux sur lesdéfis que pose le processus de développement du mondecontemporain. Ce dernier n’a pas d’égal dans le passé,car il s’articule en fonction des conditions spécifiquescaractérisées par des contradictions déchirantes sur lesplans à la fois socio-politique, économique et culturel.Les interrogations sur le futur du monde, portant dansun premier temps essentiellement sur les limites de l’en-vironnement physique, ont rapidement dû aller au-delàde cette première problématique pour embrasserd’autres facteurs importants du développement, en parti-culier ceux liés à l’éducation.

Les facteurs qui stimulent les débats sur l’éducationproviennent d’une part de la nature même de l’éducationqui vise l’avenir et le prépare. L’éducation est appelée àcontribuer aux efforts de l’homme et de la société dansleur marche vers cet avenir. Quelle société l’hommeaspire-t-il créer ? Et quel homme pour cette société ?D’autre part, il est généralement admis que l’éducationest d’un intérêt universel. Elle concerne tous : l’indivi-du, la collectivité, l’humanité tout entière et elle est pourtous les âges et sexes, pour tout l’homme et tout homme.L’éducation est universelle aussi de par le fait qu’elleconcerne à la fois les activités professionnelles etsociales, le temps libre, la vie dans toute son ampleur etce, tout au long de la vie. Personne ne peut être neutre àl’égard de l’éducation, ni la société, ni les classessociales qui la composent.

Enfin, l’éducation est non seulement un objectif fon-damental, mais aussi un moyen de favoriser l’établisse-ment des relations d’un type nouveau dans la commu-nauté internationale. Il n’est donc pas surprenant quetous les pays attachent une grande importance à la poli-tique éducative et à l’amélioration des contenus d’ap-prentissages lorsqu’ils établissent des plans pour accélé-rer leur développement.

Après 40 ans d’indépendance, le bilan du systèmeéducatif congolais montre que l’action politique menéen’a pas donné entière satisfaction aux besoins de lanation. Au regard de ce bilan, une nouvelle politique

éducative doit être dégagée, en vue d’améliorer la quali-té de l’éducation par la pertinence des apprentissages. Ils’agit de garantir à la population congolaise un environ-nement indispensable au développement socio-écono-mique dont la science et la technologie sont des outilsindispensables.

II. EVOLUTION DE LA POLITIQUE GLOBALE DE L’EDUCATION

1. Orientation et objectifs

La décennies des années 60 fut marquées au Congo parla nationalisation de l’enseignement (en 1965). Lesconséquences de cet événement furent le départ massifdes enseignants missionnaires, l’appel à l’assistancetechnique étrangère, le recrutement des enseignants nonqualifiés ; entraînant une crise au sein du système édu-catif congolais.

A partir de 1970, et jusqu’en 1988, le gouvernement,fort de la prise de conscience de l’importance de l’édu-cation, tenta de remédier à cette crise. C’est ainsi quedurant cette période, un colloque de l’enseignement futorganisé qui conduit à la reforme de l’école du peuple.Les principes de cette réforme étaient la démocratisa-tion, la gratuité, la laïcité et la professionnalisation del’école. Le système fut stratifié en niveaux préscolaire,fondamental I, fondamental II, cycle secondaire (avecles écoles secondaires d’enseignement et les centressecondaires de formation professionnelle), et cyclesupérieur (avec les instituts et les facultés).

L’absence d’un cadre juridique de base organisantL’Ecole du peuple occasionna par voie de conséquenceun ensemble de correctifs successifs qui, en dépit detout, n’ont pas permis la maîtrise du projet. Les consé-quences de cette politique éducative mal conçue furentle taux de redoublement le plus élevé d’Afrique, ladégradation de la qualité de l’enseignement, une inadé-quation entre la formation et l’emploi, le chômage, et larétention dans le système.

Suite à la tenue du colloque bilan sur l’enseigne-ment, différentes mesures virent le jour de 1988 à 1990.Celles-ci consacrèrent l’abandon officiel du projetL’Ecole du peuple, la réduction du taux de redoublementpar classe, la rationalisation de la gestion du systèmeéducatif. Par ailleurs, la loi de 1990 rendit obligatoire

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Congo

Joachim Mandavo et Marie Joseph Mallali-Youga

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la cotisation des parents d’élèves. Ceci impliqua la fin de la gratuité et la restauration de l’exercice privé del’éducation.

Pour la période depuis 1990 et jusqu’à ce jour, ilimporte de retenir que la loi de 1995 ne contient pas detextes d’application. En l’absence de ces derniers, legouvernement adopta le 4 octobre 1996 des termes deréférence pour la réforme du système éducatif congolais.

2. Politique de formation des formateurs

Un constat sur la formation des formateurs fait appa-raître les points de faiblesse suivants : une absence d’ex-pression véritable des besoins en matière de formateurss’appuyant sur une planification rigoureuse et unmanque de maîtrise du système de formation.

Les conséquences de cet état des faits entraînent enpremier lieu un recrutement abusif des vacataires. Onrelève en outre un sous-emploi de certains professeurs(histoire–géographie), l’inexistence de certaines filièresdans les centres de formation de formateurs, l’absencede formation des enseignements spécialisés dans l’ensei-gnement des enfants handicapés, l’inadéquation entre laformation acquise et les programmes en application dansles établissements scolaires, la fermeture des Ecolesnationales d’instituteurs.

3. Financement du système éducatif

Sur le plan international, le système éducatif congolaisbénéficie de l’octroi de prêts de la Banque mondiale, dedons et d’aides de la part de l’UNICEF, du FNUAP, duPRIMTAF et de l’UNESCO. De plus, la Coopérationfrançaise met à la disposition du système éducatif despersonnes ressources.

Sur le plan national, une grande partie du finance-ment de l’Etat est consacré au payement des salaires desenseignants ; très peu de dépenses bénéficient au voletpédagogique.

4. Politique de recherche en éducation

En termes de politique de recherche en éducation, il fautmalheureusement déplorer une insuffisance quantitativeet qualitative de chercheurs, l’absence de prise en comp-te des résultats de recherche effectuée par les étudiantsde l’Ecole nationale supérieure, une trop grande confian-ce accordée aux experts étrangers, et l’insuffisance desmoyens alloués.

5. Politiques sectorielles de l’éducation

Le secteur du préscolaire compte cinquante-trois centresde l’Etat, dits préscolaires. Ce secteur se développedavantage dans les centres urbains.

En ce qui concerne le secteur du primaire, il estencourageant de noter que presque tous les enfants d’âgescolaire vont à l’école et que le taux de scolarisation estsupérieur à 100%. Néanmoins, il existe une dispropor-tionnalité entre les besoins en éducation et les services

offerts. En effet, le nombre de salles de classes est insuf-fisant; les classes sont pléthoriques; il existe des classesmultigrades; on note une insuffisance de tables-bancs etune absence de matériels didactiques. De plus, il fautsouligner la baisse de la qualité de l’enseignement, due àde mauvaises pratiques pédagogiques, à un taux d’échecde 30 à 40 % et à un taux d’abandon de 10%, ainsi qu’àl’absence d’expérimentation et d’évaluation desméthodes.

Le secteur du secondaire compte environ 170.000élèves, dont 90% suivent l’enseignement général et 10%l’enseignement technique. Ce secteur de l’éducation secaractérise regrettablement par la caducité des pro-grammes, l’absence de professeurs des sciences, l’absen-ce de laboratoires et de matériels didactiques.

6. Secteur de l’éducation spécialisée

L’éducation spécialisée a pour objectif d’assurer l’inser-tion et la réinsertion socio-professionnelle des enfants endanger, afin qu’ils puissent pleinement participer au pro-cessus de développement national. On déplore dans lesecteur de l’éducation spécialisée l’insuffisance de struc-tures, de moyens pédagogiques et financiers, et de for-mateurs ; ainsi que des difficultés pour des élèves titu-laires du BEPC ou du BEMT de poursuivre leurs étudesau lycée ; et l’absence de filières de formation de forma-teurs dans les instituts ou écoles de formation.

III. RENOVATION DES CURRICULA

En l’absence d’une politique de réforme globale tous lesprogrammes ont été rénovés. Deux principes directeursont guidé notre démarche : le principe du bien fondé et leprincipe d’équilibre.

1. Le principe du bien fondé

L’idée première est que l’éducation ne se développe pasdans l’absolu et qu’elle ne peut pas être isolée de sonenvironnement socio-économique, politique et culturel.Elle est donc influencée par le contexte national et inter-national.

Pour l’étude du contexte national, il convient deprendre en compte trois aspects de la problématique: lechoix de société, les rapports qu’entretient la sociétécongolaise avec l’éducation, et enfin, le type de l’éduca-tion pour la société congolaise de demain.

En ce qui concerne le choix de société, les objectifmajeurs sont d’une part la réduction des inégalités dansla société congolaise, et, d’autre part, la possibilité d’as-surer les besoins essentiels de la grande majorité de lapopulation, de préserver la diversité, entre autres, cultu-relle. En résumé, tout enfant vivant sur le territoire de laRépublique du Congo a droit, sans distinction d’origine,de nationalité, de sexe, de croyance, d’opinion ou de for-tune à une éducation qui lui assure le plein développe-ment de ses aptitudes intellectuelles, artistiques, moraleset physiques ainsi que sa formation civique et profes-sionnelle.

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Pour ce qui relève des rapports entre société et édu-cation, il paraît évident que l’éducation est extrêmementinfluencée par les pratiques sociales, économiques etpolitiques. C’est la société qui détermine le systèmeéducatif, l’école devant contribuer à résoudre les pro-blèmes de la société. L’éducation étant adaptée à lasociété qui la détermine, elle peut contribuer aux grandschangements. C’est elle qui prépare le terrain pour l’in-troduction de ces changements et qui est à la fois uneforce d’équilibre et de déséquilibre de la société.

Pour ce qui a trait au type d’éducation, il peut êtredit, dans la plupart des cas, que l’éducation est le refletéconomique ou politique d’un pays. Cependant, l’écoleest une institution assez particulière. En effet, ses objec-tifs sont définis en fonction des besoins futurs, mais éga-lement en fonction de tous les facteurs politiques et éco-nomiques.

C’est ainsi que chaque niveau d’enseignement, dupréscolaire au secondaire, se voit assigner une fonctionparticulière. L’éducation préscolaire doit assurer ledéveloppement intellectuel, moral et physique de l’en-fant et lui donner l’occasion d’exercer ses capacités etaptitudes par la manipulation, le jeu, les exercices d’ob-servation et la prise en charge de certaines tâches. Elledoit par ailleurs renforcer chez lui le sens de l’ordre etde la régularité. L’enseignement primaire, quant à lui,dispense les savoirs, les compétences et les valeurs per-mettant la poursuite des études au secondaire. Il doitassurer à l’enfant l’acquisition de la lecture, de l’écritu-re, du calcul, des notions scientifiques élémentaires debase et aussi des notions d’éducation civique et moraleet l’initier au travail productif, à l’éducation physique etesthétique. Le premier cycle de l’enseignement secon-daire général vise l’élargissement et l’approfondisse-ment de la formation générale donnée par l’enseigne-ment primaire en vue de l’élévation des connaissancesthéoriques et pratiques nécessaires à la poursuite ulté-rieure des études. Le deuxième cycle de l’enseignementsecondaire a pour objectif la poursuite des études supé-rieures. Son développement doit répondre aux besoinsen personnels qualifiés.

Pour l’enseignement secondaire du premier cycle,les éléments de profil de sortie ont été élaborés. C’estainsi qu’on attend de la part des élèves sortant des col-lèges d’enseignement général qu’ils soient en mesurede:● comprendre, communiquer de manière satisfaisante

à l’oral et à l’écrit dans la langue d’enseignement ;● lire et comprendre tout support de lecture simple et

communiquer oralement et par écrit dans la premièrelangue étrangère ;

● comprendre les phénomènes physiques écono-miques, humains de son milieu immédiat, du Congoet de l’Afrique (particulièrement de l’AfriqueCentrale ) ; tout en ayant une vue globale sur la géo-graphie de l’Europe, de l’Amérique, de l’Asie etl’Océanie ;

● situer l’histoire des peuples dans le temps;

● connaître les principaux évènements des peuples dumonde et leurs conséquences sur les plans politique,économique, et social, ainsi que les grands progrèsde l’humanité et leur impact dans les sociétéshumaines ;

● maîtriser les éléments de base de l’activité mathéma-tique à un niveau élémentaire, ce qui impliquenotamment la réalisation des mesures, des tracés ettous les calculs courants liés aux besoins de la viesociale ;

● procéder aux expériences scientifiques simples sus-ceptibles de mettre en évidence certains faits impor-tants et de déceler leurs causes ;

● reproduire un objet, une situation sous forme de des-sin (d’art et industriel ), de schéma ou de graphique ;

● connaître les caractères essentiels de la nature vivante;● comprendre l’environnement et contribuer à sa pro-

tection et à sa restauration ;● expliquer scientifiquement les phénomènes naturels,

y compris les phénomènes géologiques, météorolo-giques, sociaux et économiques, afin de lutter contredes préjugés et des superstitions ;

● promouvoir sans cesse ses connaissances et compé-tences par l’effort personnel ;

● témoigner du respect pour les traditions nationalespositives (dans la morale, les arts, la culture, la poli-tique);

● animer un spectacle public ;● combattre les stéréotypes discriminatoires sexistes ;● pratiquer l’EPS pour le bien de la santé et les sports

pour la promotion sportive ;● organiser et utiliser convenablement les connais-

sances acquises, planifier son action et travailleravec méthode ;

● s’adonner à toutes sortes de travaux manuels et tech-niques, aux travaux d’entretien, de réparation voirede fabrication dans les domaines suivants : agricultu-re, techniques générales, menuiserie, maçonnerie,électricité... ;

● maîtriser les techniques agricoles élémentaires,organiser et gérer correctement les activités produc-tives ;

● lutter contre les mentalités et les préjugés négatifssur le travail manuel ;

● respecter les lois de l’état et manifester une attitudepositive pour les institutions de la République ;

● exercer et défendre les droits et libertés dans sonmilieu (famille, école, quartier ) ;

● promouvoir la solidarité dans la communauté envi-ronnante en participant efficacement aux activités degroupe et en recherchant le succès collectif ;

● gérer de manière responsable sa sexualité ;● s’armer de bonnes méthodes de travail, de la

confiance en soi et de l’effort de dépassement à touteépreuve ;

● favoriser l’unité dans la diversité ;● respecter, protéger et entretenir ses propres biens,

ainsi que les biens publics et privés ;

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Pour une bonne prise en compte du contexte internatio-nal, il faudra œuvrer en faveur de l’établissement d’unnouvel ordre éducatif où les systèmes éducatifs se déve-lopperont dans des conditions d’égalité, d’échange libred’expériences nationales ; de développement des pro-grammes minimums (PMC), du respect des conventions.

2. Le principe d’équilibre

Pour un meilleur équilibre de ces nouveaux curricula,trois éléments essentiels ont été pris en compte :● les aspects conceptuels ; ● les innovations ; ● les grands contenus.Les aspects conceptuels ont porté sur les pointssuivants : tradition et innovation, exigence de la techno-logie, le facteur socio-culturel, et une approche parobjectif.

Pour ce qui est de la tradition et de l’innovation, il vade soi que toute innovation et tout changement doiventêtre contrôlés, et justifiés par une analyse approfondiedes besoins réels de rénovation, ainsi que des résultatsprévisibles avant d’être diffusés.

Par exigences de la technologie, on entend toutes lesexigences accrues et renouvelables posées par la techno-logie à l’enseignement et qui doivent être détectées enamont afin qu’elles puissent être intégrées à temps dansles curricula. L’identification des connaissances de basedes programmes scolaires constitue le noyau de connais-sances fondamentales des sciences. Autour de ce noyausera regroupé les connaissances non durables qui reflè-tent les besoins du présent.

En termes de prise en compte du facteur socio-cultu-rel, l’éducation devrait développer chez l’individu lacapacité de saisir le réel, d’entreprendre, et de risquer.Tous les curricula élaborés ont pris en compte les élé-ments du milieu environnant de l’enfant.

L’approche par objectifs est la méthode qui a étéappliquée depuis le primaire. Elle a pour but de décloi-sonner le savoir, en apprenant aux enfants à découvrirpar eux-mêmes le cheminement de la connaissance.

En ce qui concerne l’introduction des innovations, troisproblèmes majeurs ont été rencontrés :1. la résistance à l’innovation ; 2. la formation des enseignants ; 3. les manuels à utiliser. L’étalement des enseignements de génétique, de repro-duction, d’immunologie allant de la classe de seconde àla classe de terminale a été difficilement accepté par lesinspecteurs de biologie, contrairement aux enseignantsde la même discipline. Il paraît donc également nécessai-re avant la mise en œuvre de ces nouveaux curricula deformer de manière systématique tous les enseignants. Lemanuel est le support essentiel pour la mise en œuvred’un curriculum. La production des fascicules peut per-mettre de pallier au manque de manuels.

A côté des disciplines classiques (histoire-géogra-phie, mathématiques, français, etc.) de nouveaux conte-nus éducatifs ont été développés. Il s’agit de :● l’éducation pour la paix ;● l’éducation pour l’environnement ; ● l’éducation en matière de population et à la vie fami-

liale (EMP/EVF) ; ● l’éducation civique et morale ; ● l’initiation à la production ; ● l’économie familiale et domestique ;● la santé de la reproduction et la santé sexuelle.

IV. PRESENTATION DES PROGRAMMES

1. Programmes du cycle primaire

Les particularités des programmes du cycle primairessont que, premièrement, ils sont tous formulés par objec-tifs ; deuxièmement, les curricula sont en expérimenta-tion depuis cinq ans ; et que finalement, de nouveauxmodules ont été introduits. Parmi ces derniers, citonsl’éducation civique et morale, l’hygiène et la santé,l’éducation pour la paix, l’initiation à la production,l’économie domestique et familiale.

Les curricula du primaire sont regroupés en champsd’étude qui se présentent dans le Tableau 1. En termes dela matière couverte, retenons plus particulièrement que

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TABLEAU 1. Les champs d’étude du primaire

ClassesChamps d’étude CP1 CP2 CE1 CE2 CM1 CM2Français + + + + + +Mathématiques + + + + + +Education physique + + + + + +Activités d’éveil + + +Education pour la paix + + + + + +Education civique et morale + + + + + +Sciences et technologie + + +Hygiène et santé + + + + + +Economie familiale et domestique + + +Initiation à la production + + +Histoire-géographie + + +

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le curriculum consacré à l’hygiène et à la santé intègreles aspects liés à l’hygiène du milieu, la santé de lareproduction et la santé sexuelle, le VIH/SIDA ; et quele curriculum d’éducation pour la paix a été élaboré àpartir du document commun de l’UNESCO. Le curricu-lum des sciences et technologies, quant à lui, prend encompte les champs spécifiques liés aux sciences de lanature, la physique, et la chimie .

2. Programmes du cycle secondaire

La réécriture des programmes de l’enseignement secon-daire s’est faite à partir des curricula d’Education enMatière de Population et d’Education à la VieFamiliale(EMP/EVF). L’objectif du projet était decontribuer à l’amélioration du système éducatif congo-lais par l’introduction des méthodologiques nouvellescentrées sur l’apprenant.

V. LES ETAPES DU PROCESSUS DE L’ELABORATION DES CURRICULA EVF/EMP

La première étape consiste en une enquête socio-cultu-relle en vue de déterminer les besoins en formation(parents, élèves, enseignants). Ensuite, dans un deuxiè-me temps, sont définis les domaines, les thèmes et lessous-thèmes de manière conceptualisée. Ce n’est qu’en-suite que sont arrêtés les objectifs et les contenus d’ap-prentissages. Le choix des disciplines d’accueil (fran-çais, biologie, éducation civique et morale, géographie,philosophie) est effectué avant que ne débute l’étapepropre à l’expérimentation dans quatre collèges etquatre lycées.

Une étape importante est celle de l’évaluation, quipermet de formuler d’éventuels objectifs générauxabsents.

En dernier lieu, intervient l’étape dite de l’intégra-tion. Celle-ci comporte deux difficultés, liées d’une partau fait que les programmes existants ont été écrits parcontenus, et d’autre part au fait que l’intégration neporte que sur cinq disciplines. Pour une intégration har-monieuse, il a donc fallu procéder à une relecture et uneréécriture de l’ensemble des programmes.

Comme il a été mentionnée plus haut, les particulari-tés de ces curricula sont qu’ils ont été écrits par objectifset que le module consacré à l’éducation civique et mora-le, ainsi que le module sur l’écologie figurent dans toutau long du cycle secondaire. Les modules tels que l’im-munologie, la génétique, la reproduction sont introduitsdès la classe de seconde ; et ceux de géologie et d’écolo-gie au collège sont introduits à partir de la classe desixième.

Actuellement, les besoins existants se situent auxniveaux de la formation de rédacteurs des curricula, del’expertise pour l’analyse des curricula élaborés et lesconditions de leur mise en expérimentation, et à celui del’appui à leur mise en œuvre.

VI.CONCLUSION

La mise en œuvre d’un curriculum comporte troisgrands défis. Afin de rencontrer ces défis, il faut assurerla formation des maîtres, doter les établissements dematériels didactiques indispensables et mettre en placedes outils d’évaluation et de suivi.

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I. INTRODUCTION

De 1960 à 1980, le développement de l’éducation enAfrique a été marqué par une croissance des effectifsglobaux des trois degrés d’enseignement qui a été plusforte que dans toute autre région du monde. Sur le planqualitatif, les efforts de réforme des systèmes éducatifsont été remarquables, malgré l’insuffisance générale desrésultats obtenus.

Conscient du rôle essentiel de l’éducation dans l’épa-nouissement de l’être humain, l’État gabonais a promul-gué, le 9 août 1966, la loi 16/66 portant Organisationgénérale de l’enseignement dans la République du Gabonqui stipule que «l’enseignement doit assurer la formationphysique, intellectuelle, morale et civique du futurcitoyen. Il doit contribuer à l’unité nationale et à la cohé-sion sociale, grâce à une information et une documenta-tion réciproque avec tous les autres corps de l’État».

Dès les années 1970, il s’est avéré que les redouble-ments, les abandons et les retards scolaires progressaientde manière exponentielle, dénotant ainsi de l’inefficacitédu système éducatif. C’est en vue d’améliorer la qualitédu système éducatif que les États généraux de l’éduca-tion et de la formation furent convoqués et se tinrent du 17 au 23 décembre 1983. En septembre 2000, uneréflexion de grande envergure fut suscitée sur l’échecscolaire, en particulier sur le redoublement.

D’une façon générale, on admit que l’amélioration dela qualité de l’enseignement devait passer par :1. la transformation de l’école primaire en une structure

privilégiant les valeurs et les technologies tradition-nelles, ainsi que le travail manuel ;

2. l’instauration d’un tronc commun d’études du premiercycle secondaire, destiné à élever le niveau d’instruc-tion et de culture générale, avant spécialisation;

1. la révision systématique des programmes à tous lesniveaux, en vue du renforcement de l’enseignementscientifique et technologique, et d’une meilleureadaptation au marché de l’emploi.

A travers ces souhaits, les finalités de l’école gabonaisenouvelle pouvaient déjà être décelées, à savoir :1. le développement global harmonieux de l’enfant et

de l’adulte;2. l’intégration sociale et culturelle;

3. la contribution à l’unité nationale;4. la réussite du parcours scolaire et la maîtrise de

compétences professionnelles.Ces objectifs ayant été adoptés par le Chef de l’État et leConseil des ministres, mandat fut donné aux techniciensdu Ministère de l’éducation nationale et, plus précisé-ment, à ceux de l’Institut pédagogique national, de déve-lopper des curricula adaptés.

Ayant défini le terme «curriculum» comme un«ensemble structuré des expériences d’enseignement etd’apprentissage, planifiées et offertes sous la directiond’une institution scolaire, en vue d’atteindre des butséducatifs prédéterminés», une démarche de développe-ment curriculaire conséquente a suivi. C’est cettedémarche qui va faire l’objet du présent développementet qui prendra en revue l’enseignement primaire, puisl’enseignement secondaire général, et enfin, l’enseigne-ment technique et professionnel. Une présentation de lapolitique et de l’organisation linguistiques sera aussi éla-borée, motivée par une des caractéristiques particulièresdu Gabon : son multilinguisme.

II. LE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE ENENSEIGNEMENT PRÉSCOLAIRE ET PRIMAIRE

L’année 1983 s’est clôturée par les États généraux del’éducation et de la formation qui ont posé de solidesjalons pour une réforme fondamentale du système édu-catif gabonais. On souhaitait construire une société atta-chée à l’idée de nation, de justice sociale, d’égalité deschances, de liberté, de compréhension internationale, depaix. On souhaitait également former des hommes d’ac-tion, pleinement épanouis, conscients de leurs responsa-bilités, tolérants, réconciliés avec eux-mêmes et leur his-toire.

Tous les ordres d’enseignement allaient être touchéspar la réforme, y compris le préscolaire. C’est ainsiqu’en juillet 1984, la loi 10/84 portant Définition etOrganisation Générale de l’Éducation Préscolaire futpromulguée, et que le décret du 10 février 1987 en fixales modalités d’application. Pour les enfants de moins detrois ans, les activités d’éducation et d’éveil devaient sefonder sur des finalités pédagogiques telles que l’accep-tation de l’enfant tel qu’il est, et le développement de laconfiance qui donne envie de grandir et d’apprendre.

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Gabon

Institut pédagogique national et Eric Dodo-Bouguendza1

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Pour les enfants de trois à cinq ans, les activités d’édu-cation et d’éveil devaient se fonder sur des programmesintégrant les aspects relatifs à la connaissance du corps,au développement sensori-moteur, à la prise deconscience de soi et de l’environnement, à l’acquisitiondu langage, à la créativité, au développement du raison-nement et de la conscience sociale. L’usage de la languematernelle devait être développé.

Les programmes de l’enseignement préscolaire fai-saient partie des annexes au décret et ils n’ont pas,depuis, fait l’objet d’une réforme en profondeur commecela a été fait pour ceux de l’enseignement primaire.Toutefois, lors du Conseil des ministres du 4 août 1999,le Ministère de l’éducation nationale, dans la recherchede solutions visant l’amélioration du rendement internedu système éducatif, a obtenu du Gouvernement l’ac-cord de développer l’enseignement pré-primaire surl’ensemble du territoire national.

Quant à l’enseignement primaire, il devait désormaisviser à l’étude du milieu en vue de sa transformation,grâce à l’alphabétisation fonctionnelle à partir de l’envi-ronnement social, économique, géographique, culturelet technique de l’enfant. Les programmes devaientrépondre aux réalités gabonaises, tenir compte de lapsychologie de l’enfant et placer ce dernier au centre deses apprentissages.

Donc, en 1984, suite aux États généraux, une com-mission du Ministère de l’éducation nationale composéede représentants de l’IPN, ainsi que des membres duprojet UNESCO/GABON a apporté des précisionsquant aux finalités de l’enseignement primaire. Cetordre d’enseignement devait assurer :1. la formation d’une personne épanouie aux plans

physique, moral, civique et intellectuel;2. une formation ouverte aux sciences et aux tech-

niques, en tenant compte des expériences des tech-nologies traditionnelles;

3. une formation favorisant la justice sociale et le déve-loppement endogène;

4. une formation valorisant l’identité culturelle, enintégrant l’éducation artistique traditionnelle et enliant l’enseignement aux réalités de l’environne-ment;

5. une complémentarité entre une formation théoriqueet ses applications manuelles et pratiques en vue dela transformation du milieu.

C’est à partir de ces finalités que s’est amorcé le déve-loppement curriculaire de l’enseignement primaire. Ona d’abord adopté une approche dite « par objectifs » etcentrée sur l’élève. Ensuite, on a défini le profil de sortiede l’enfant gabonais à la fin du cycle primaire. Ce profilde sortie fut ensuite traduit en objectifs généraux et spé-cifiques à atteindre par l’enfant dans les domaines deslangues, des mathématiques, des disciplines d’éveil etde l’éducation physique. Des performances, observableset évaluables, sur les plans des savoirs, des savoir-faireet des savoir être, ont été déterminées. Un volume horai-re global a été alloué. Les contenus notionnels néces-

saires pour atteindre les objectifs visés se sont ajoutés etla nature des situations d’apprentissage appropriéess’est précisée.

En juillet 1990, le Directeur général des enseigne-ments et de la pédagogie présentait au Ministre de l’édu-cation nationale les programmes officiels de l’école pri-maire.

Toutefois, en 1994, ayant constaté, à l’usage, que cesprogrammes étaient trop volumineux et peut-être mêmeun peu trop ambitieux, l’Institut pédagogique national aremanié certains objectifs généraux et spécifiques et aprocédé à un élagage des contenus. Parallèlement à cestravaux, on procéda à la révision des programmes deformation initiale des enseignants et on élabora desmodules de perfectionnement au regard de la lecture, dela géométrie et de l’éveil scientifique.

De plus, des innovations pédagogiques, à savoirl’éducation en matière de population, l’éducation envi-ronnementale et l’éducation artistique, se sont ajoutées.Un réaménagement des horaires d’enseignement s’estimposé. La production d’outils didactiques s’est égale-ment avérée nécessaire. Du matériel pédagogiquedevrait bientôt être conçu pour les programmes d’éduca-tion environnementale, d’éducation artistique et d’édu-cation en matière de population.

Jusqu’à présent, on a appliqué à l’enseignementprimaire les programmes révisés en 1994. Mais, devantla persistance de l’illettrisme et devant le taux de chô-mage toujours élevé, le Ministre actuel de l’éducationnationale a donné mandat à l’Institut pédagogiquenational, en mai 2000, de redynamiser cet ordre d’en-seignement.

Pour mener à terme le projet de redynamisation del’enseignement primaire, de grands défis doivent êtrerelevés. Parmi les plus pressants, citons :1. la formation de cadres d’éducation à l’élaboration et

à l’évaluation des programmes; 2. la formation à la rédaction de manuels scolaires;3. la mise à disposition du matériel et d’équipement

indispensables au travail de rédaction ordinateurs etphotocopieurs;

4. la mise en place d’un service d’imprimerie à l’IPNafin de reproduire et de diffuser, en quantité suffi-sante, les documents demandés par les enseignantset par les partenaires d’éducation que sont lesparents;

5. l’ouverture au changement de pratiques pédago-giques et administratives;

6. une décentralisation des pouvoirs.

III. LE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE EN ENSEIGNEMENT SECONDAIRE GÉNÉRAL

Malgré les recommandations des États généraux del’éducation et de la formation de 1983, force est deconstater qu’aujourd’hui encore les programmes d’en-seignement du Gabon restent très proches des pro-grammes français d’avant 1990, et tiennent insuffisam-ment compte des réalités sociales, culturelles et

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économiques du pays. Cette situation s’explique en par-tie par la validité de plein droit accordée à notre bacca-lauréat, mais de plus en plus remise en cause.

Néanmoins, certains programmes du secondairegénéral ont été réaménagés pour répondre aux exigencesde l’école gabonaise. C’est le cas notamment du pro-gramme d’éducation civique qui fut remanié en 1991.

A partir de 1992, avec l’appui de la coopération fran-çaise, un projet d’harmonisation des programmes desenseignements secondaires entre tous les pays franco-phones d’Afrique et de l’Océan Indien s’est progressive-ment mis en place.

Depuis octobre 1997, le projet ARCHES (Appui auxRecherches pour la Contextualisation et l’Harmonisationdes Enseignements Secondaires) a apporté un soutiendans quatre disciplines: français (HPF), mathématiques(HPM), sciences de la vie et de la terre (HPSVT),sciences physiques et technologie (HPSPT).

Ce projet, auquel le Gabon participe activement,répond aux orientations du Ministère de l’éducationnationale gabonais, largement exprimées dans les actesdes États généraux de l’éducation et de la formation. Ils’agit de mettre l’élève en situation d’activité, d’assurerune réelle continuité entre les cycles, de mettre en œuvredes programmes raisonnables dans leurs contenus et exi-geants, sur le plan de la formation scientifique, et enfin,de recourir résolument à l’environnement de l’élève et àla richesse de son milieu, tout en prenant en compte les évolutions technologiques, économiques, sociales etculturelles.

Les objectifs de ce projet ont été définis pourrépondre aux exigences d’intégration régionale expri-mées par les pays participants. Au bout de trois annéesde mise en œuvre, les résultats sont concluants.

Le Gabon doit aussi apporter sa contribution à l’en-semble des pays. En effet, il est chargé de l’harmonisa-tion des programmes de mathématiques pour l’enseigne-ment technique et professionnel. En sciences physiques,la démarche adoptée n’est pas la même pour le premieret le second cycle. Au regard du premier cycle, les dispa-rités entre les pays étaient trop importantes pour obtenirun consensus. Une première réflexion est en cours sur le« Collège en Afrique », dont les outils seront développésci-dessous. Au regard du second cycle, après adoption dela matrice commune des contenus, chaque pays partici-pant s’est vu attribuer une partie du programme pourlaquelle il devait construire le référentiel, rechercher etmettre en œuvre les méthodes d’apprentissage adaptéesau contexte.

Le Gabon s’est vu confier le thème «Optique en ter-minale» et a dû franchir toutes les étapes proposées.Après validation par le comité scientifique et le séminai-re, des fiches pédagogiques élaborées par le «chantier»alimentent une base de données interafricaine mise à dis-position de tous les pays par CD-ROM ou sur le siteInternet. Ce travail a permis de constituer dans chaquepays une équipe d’auteurs et pourra servir de base àl’élaboration de manuels le moment venu.

Le programme d’éducation en matière de populationa pour sa part fait l’objet d’un processus de développe-ment curriculaire, dont il est intéressant de faire mention.La mission d’identification et d’évaluation des besoinsen matière de population du FNUAP de novembre 1987a donné lieu, en 1992, à l’ambitieux projet d’intégrerl’éducation à la vie familiale dans les programmes sco-laires. C’est-à-dire d’y intégrer les notions de santé,d’éducation sexuelle, d’environnement, de famille et denutrition. L’éducation en matière de population devaitêtre intégrée dans les disciplines classiques ou êtreenseignée comme discipline à part entière.

Le cadre institutionnel mis en place, le Directeurnational du projet fut désigné et des cadres des différentsdépartements ministériels furent affectés au projet,constituant ainsi la Cellule technique permanente (CTP).Dès lors, les bases de l’implantation de l’éducation enmatière de population au Gabon étaient jetées. Lesétapes suivies furent les suivantes:1. l’analyse de la situation;2. l’identification des problèmes de population ;3. la sélection et l’organisation des contenus ; 4. l’examen des programmes et des manuels scolaires,

et l’intégration des contenus ;5. l’élaboration des matériels didactiques ;6. la validation des curricula et des matériels didac-

tiques ; 7. formation des enseignants expérimentateurs et des

encadreurs pédagogiques ;8. la pré-expérimentation et l’expérimentation9. l’évaluation de l’expérimentation. Les résultats de l’évaluation ont montré que la structura-tion des curricula et l’utilisation de certains supportsdidactiques qui les accompagnent, rendent la tâche del’enseignant plus aisée. Par ailleurs, les élèves se sontmontrés plus intéressés par ces cours que par le passé.Ce changement est tributaire des stratégies d’enseigne-ment et d’apprentissage préconisées par les curricula. Eneffet, l’objectif de l’innovation pédagogique de l’Empétait de mettre l’élève en action et en interaction avecson environnement; c’est une pratique pédagogique quidonne du sens au savoir et qui rapproche l’école des réa-lités vécues quotidiennement par les apprenants.

Par ailleurs, on constate que beaucoup d’efforts ontété déployés pour redynamiser l’enseignement secondai-re général. Un des grands défis qui se pose à toutes disci-plines de cet ordre d’enseignement est de rénover lescurricula des collèges.

Une approche curriculaire, prenant en compte lesprogrammes, mais qui intégrerait aussi l’organisation del’école, la gestion du temps, la certification et les rela-tions avec l’environnement, semble la mieux désignée.En effet, la construction des curricula ne peut se faireque par une approche systémique, permettant ainsi deprendre en compte les dimensions philosophique, poli-tique, économique, scientifique, sociale et culturelle.

Parler d’approche curriculaire, c’est penser en termesd’un ensemble d’expériences d’enseignement et

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d’apprentissage planifiées pour répondre à des finalitésbien identifiées, entre autres, le rôle du Collège et leprofil de sortie de l’élève.

Certaines orientations ont déjà été données par cer-tains pays d’Afrique. Reprenant l’idée qu’il faut mettreen place des méthodes et des moyens adaptés aux condi-tions locales, le Gabon a ouvert un chantier pédagogiquepour le premier cycle, où toutes les disciplines serontappelées à travailler ensemble. D’autres axes de travailont également été préconisés, tels l’interdisciplinarité, ledéveloppement de compétences, le développement deméthodes de travail, une pédagogie centrée sur la réussi-te de l’élève, la diversification des parcours pour respec-ter la double finalité du collège.

IV. L’ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL

Lors des États généraux de 1983, les délégués avaientaffirmé que: «... l’éducation doit donner aux individusles connaissances et les aptitudes nécessaires pourqu’ils puissent jouer leur rôle de citoyens et de produc-teurs.» On avait alors constaté que «l’enseignement pro-fessionnel, tel qu’il existe, ne répond pas aux besoins denotre appareil productif.» Les délégués avaient aussiinsisté pour que la formation professionnelle acquière lanoblesse requise et ils souhaitaient y voir un relèvementconséquent de niveau.

En novembre 1988, un Comité, présidé par le délé-gué ministériel auprès du Ministre de l’éducation natio-nale, se penchait sur la réorganisation de l’enseigne-ment technique et professionnel. Son analyse a portésur l’adéquation formation-emploi, sur le rendementinterne de l’enseignement technique et professionnel,sur les conditions pédagogiques de cet ordre d’ensei-gnement, et enfin, sur les conditions humaines et maté-rielles qui y prévalaient. Plusieurs constatations etrecommandations ont été consignées dans un rapportgénéral.

Dans son document de juillet 1993, intitulé«Réforme de l’enseignement technique et professionnel- Cadre organisationnel», la Direction de l’enseigne-ment technique et professionnel soulignait le soucid’améliorer la qualité de la formation dans les établisse-ments de l’enseignement technique et professionnel,tout en veillant sur une adéquation formation-emploi.On a fait valoir l’importance d’envisager la réforme entenant compte des perspectives de développement éco-nomique. On a souligné aussi l’évolution excessivementrapide des techniques. On a mentionné le besoin d’actualisation des méthodes d’enseignement. On aénoncé l’intention ferme de proposer aux élèves unenseignement à la fine pointe de l’actualité technolo-gique.

En 1995 et en 1996, deux documents ont été élabo-rés par la sous-commission chargée de préparer les pro-positions relatives à la réforme de l’enseignement technique et professionnel. Ces documents furent adop-tés en séance plénière par la Commission chargée de la

réorganisation de l’enseignement technique et profes-sionnel, présidée par le Directeur général des enseigne-ments et de la pédagogie de l’époque.

Lorsque la décision fut prise de procéder à une réfor-me en profondeur des programmes de l’enseignementtechnique et professionnel, deux mots caractérisaient lesystème de formation professionnelle: fragilité et ineffi-cacité.

De graves insuffisances avaient été observées et unplan de redressement fut proposé. La Commission pro-posait que la refonte curriculaire s’articule autour del’implantation d’un régime pédagogique adapté auxbesoins diversifiés de formation, de la création d’un dis-positif de pilotage du système par la Direction de l’en-seignement technique et professionnel (DETP), du renforcement de l’autonomie des établissements, d’ajus-tement des conditions et des moyens de formation etenfin, de formation des formateurs et des personnelsd’encadrement. Sur le plan pédagogique, deux orienta-tions étaient ainsi décrites:1. le nouveau régime pédagogique doit être souple et

flexible pour permettre à l’élève d’accumuler lemoins de retard possible dans son cheminement sco-laire ;

2. le processus éducatif doit être fragmenté en unitésd’apprentissage qui correspondent à des habiletésnécessaires à l’exercice professionnel.

Les membres de la Commission avaient aussi précisé lesassises sur lesquelles allait s’appuyer le développementcurriculaire en enseignement professionnel. Finalement,les objectifs opérationnels qui allaient guider le déve-loppement curriculaire furent déterminés. II s’agissaitde :1. découper les programmes de formation en unités

élémentaires d’apprentissage ;2. concevoir des modules transmettant des valeurs,

telles que l’autonomie, la polyvalence, le goût dutravail bien fait, l’adaptation, le respect de l’éthiqueprofessionnelle, le sens des responsabilités ;

3. traduire le programme en objectifs de comporte-ments perçus comme essentiels à l’exercice dumétier ;

4. assurer la complémentarité des rôles entre le systèmescolaire et le milieu de l’entreprise ;

5. développer une pédagogie du projet industriel ou deservices ;

6. procurer, aux personnes concernées, l’informationrelative aux méthodes d’enseignement et au nouveausystème d’évaluation basé sur une organisationmodulaire de la formation.

Avant d’entreprendre le développement des curricula del’enseignement professionnel, il a fallu se référer auxfinalités de la réforme de l’enseignement technique etprofessionnel. Celles-ci étaient de :1. réduire le taux d’échec scolaire ;2. satisfaire les besoins de l’environnement socio-

économique ;3. garantir une main d’œuvre qualifiée ;

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4. former des professionnels polyvalents capables des’adapter aux exigences des progrès technologiques.

En collaboration avec les partenaires des coopérationscanadienne et française, de nombreux efforts ont étédéployés pour examiner en profondeur les programmesde l’enseignement professionnel existants et pour propo-ser les changements majeurs qui s’imposaient.

La première étape fut donc de déterminer des filsconducteurs pour les nouveaux programmes. Dans undeuxième temps, un choix d’approches éducatives quiguideraient toutes les interventions de développementcurriculaire s’imposa : une approche relative à la person-ne en apprentissage, une approche relative à l’élabora-tion des programmes de formation et une approche rela-tive à l’organisation des programmes.

Tous ces postulats ayant été posés, les techniciens sesont mis au travail. Ils ont d’abord adopté un plan dedéveloppement curriculaire par étapes successives :1. procéder, pour chaque métier, à une analyse de la

situation de travail ;2. rédiger les orientations ou les buts de la formation

projetée ;3. identifier les diverses compétences à développer ;4. traduire les compétences en une liste de modules ;5. rédiger des fiches-programmes, des fiches d’évalua-

tion et des fiches pédagogiques pour tous les modules:formation générale et formation spécialisée;

6. proposer un nouveau régime pédagogique et un devisd’implantation ;

7. procéder à la validation des programmes avant l’application ;

8. appliquer les programmes dans des établissementspilotes ;

9. assurer le suivi et l’évaluation des programmes encours d’application.

Les six premières étapes des travaux de développementcurriculaire, engagés depuis bientôt trois ans, sont encours d’achèvement. Durant la première année, tous lesconseillers pédagogiques de l’enseignement techniqueet professionnel furent invités à participer activement àdes sessions plénières bi-hebdomadaires. La deuxièmeannée du développement curriculaire a, quant à elle,surtout été consacrée à la rédaction des documentsd’accompagnement des programmes: les fiches-modules, les fiches d’évaluation et les fiches pédago-giques.

Quant à cette troisième année, elle est consacrée auparachèvement de travaux entourant une application pro-chaine des programmes, à savoir :1. la rédaction d’un nouveau régime pédagogique;2. l’élaboration d’un plan de formation des formateurs

et des administrateurs; 3. la confection d’outils didactiques et administratifs.

Le développement curriculaire ne s’arrête pas à l’étaped’élaboration des documents de programmation et desoutils didactiques et administratifs. En effet, d’autresétapes, importantes et cruciales, telles que la validation,l’application, ainsi que le suivi et l’évaluation des nou-

veaux curricula doivent être nécessairement franchies,avant que ne soient définitivement établis les pro-grammes dans les institutions.

L’un des plus grands défis liés à la validation du programme est sans doute d’obtenir un consensus sur lenouveau régime pédagogique et sur les textes d’applica-tion qui doivent accompagner les documents de programmation. En effet, les programmes élaborés enenseignement professionnel le sont, sur le plan organisa-tionnel, selon une approche modulaire ; et, sur le planpédagogique, selon une approche basée sur des compé-tences à acquérir. L’approche modulaire, par exemple,suppose la promotion par module. La moyenne annuellene sert plus de base pour passer en classe supérieure. Surle plan organisationnel, cela suppose que des modes etdes outils de gestion fort différents de ceux qui existentdéjà doivent être développés. Et cela suppose surtout queles pratiques de tous les acteurs du système éducatif semodifient.

D’importants défis attendent les acteurs des nou-veaux programmes au regard de l’application du pro-gramme. Ces défis concernent surtout l’aspect de la for-mation des enseignants, du personnel d’encadrementministériel, et l’aspect de la construction et l’aménage-ment des locaux adaptés.

Le suivi et l’évaluation du programme comportentquant à eux au moins trois grands défis. On devra, dèsl’application, disposer d’un devis d’évaluation compor-tant les objets et les critères qui serviront à apprécier laqualité du programme et disposer d’outils permettantd’apprécier, à l’interne comme à l’externe, le déroule-ment de l’implantation du programme et la qualité de laformation dispensée. Il faudra mettre à la disposition desétablissements les moyens matériels et financiers per-mettant une atteinte optimale des résultats escomptés dela formation professionnelle. Enfin, il faudra s’assurerles moyens permettant de publier les programmes et lematériel didactique et de les diffuser à tous les établisse-ments, en plusieurs exemplaires.

V. LE CAS DE LA POLITIQUE MULTILINGUE DE L’EDUCATION

1. Le contexte multilingue du Gabon

Le Gabon est un pays multilingue qui ne possède pas delangue dominante, hormis sur le plan régional. On ydénombre actuellement environ 64 parlers1, parmi lesinnombrables langues bantoues et pygmées. Sur le plande l’éducation, la catégorisation retenue distingue lalangue officielle, c’est-à-dire le français, et les languesinternationales (anglais, espagnol, allemand, portugais,italien et arabe), enseignées aux niveaux secondaire etsupérieur.

Depuis les Etats généraux de l’éducation nationale en1983, le Gabon s’engage en faveur de ses langues. Le butcardinal visé est d’une part la sauvegarde des culturesgabonaises par l’entremise des langues, et d’autre partl’insertion de ces langues dans l’éducation. Depuis 1987,

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le Gabon s’efforce de mettre en place une politique lin-guistique qui contribuerait au développement de seslangues nationales, aux côtés de la langue française.

Au cours des dernières années, la linguistique, scien-ce qui étudie le langage et les langues, s’est répandue auGabon, au point que le nombre de personnes intéresséespar l’enseignement des langues gabonaises progresseannuellement. Des structures de recherches en linguis-tique se créent avec pour objectif de «penser les languesgabonaises».

2. Les problèmes linguistiques liés à l’éducation auGabon

Bien que seul le français ait le statut de langue véhicu-laire, bon nombre de jeunes Gabonais scolarisés ne maîtrisent pas le français, en raison de l’absence d’uneéducation de base efficace en français. Par ailleurs, lenombre de jeunes ayant pour langue maternelle le fran-çais croît dans les capitales provinciales et départemen-tales, alors que dans les villages, le français garde encore le statut de seconde langue véhiculaire. Malgréles récentes tendances, globalement, les langues gabo-naises restent davantage parlées que le français.

C’est pour ces raisons que le Ministère de l’éduca-tion nationale a reçu pour mission de mettre en placeune politique linguistique efficace pour la promotion etl’enseignement des langues nationales. Les mauvaisrésultats enregistrés dans l’enseignement du françaisaujourd’hui à tous les niveaux ne peuvent-ils pas trouverleur réponse dans la mauvaise maîtrise de cette languechez les enseignants et les enseignés ?

3. Pour ou contre l’intégration des langues nationalesdans l’enseignement ?

La question du pour et du contre l’intégration deslangues nationales dans l’enseignement constitue lesocle de la politique linguistique au Gabon. Avant 1997,le fait de promouvoir les langues gabonaises était consi-déré comme risquant de gêner la soi-disante «uniténationale» et de créer des oppositions nationales. A lasuite d’une bonne campagne de sensibilisation de deuxans, le Gabon a compris que promouvoir et enseignerses langues constituent plutôt une abondance, un enri-chissement de plusieurs cultures gabonaises. Ceci estreflété dans le slogan du Ministère de l’éducation natio-nale: «l’enseignement de nos langues est le seul facteurde consolidation de la relation identité culturelle et iden-tité nationale».

4. La politique et l’organisation linguistiques pourl’éducation

Une Commission interministérielle, avec pour missionde reprendre les travaux et d’analyser la réflexion surla loi d’Orientation nationale de l’éducation dans ledessein d’accorder une place basique à la pratique deslangues gabonaises, a été mise en place en février1997.

La réflexion actuelle du Ministère de l’éducationnationale repose sur une politique et une organisationlinguistiques générales d’utilisation de toutes leslangues dominantes régionalement. Aussi, une premièreapproche, voire un premier accès sera d’enseigner ceslangues selon cinq zones.

La situation des langues gabonaises dans le systèmeéducatif peut se résumer pour l’an 2000 en termes de cequi a été accompli et de ce qu’il reste à réaliser.

Ce qui a été déjà faitLes acquis à ce jour sont les suivants :1. l’enseignement des langues gabonaises se fait à titre

expérimental à partir des manuels d’apprentissage dela Fondation Raponda-Walker. Il ne s’agit pour l’ins-tant que d’une initiative privée et non gouvernemen-tale;

2. une formation post-maîtrise est donnée à des étu-diants à l’Ecole normale supérieure de Libreville,qui en est à sa deuxième promotion;

3. une filière «langues nationales» a été créée depuisl’année académique 1999-2000 au Département dessciences du langage de l’Université Omar Bongo.Elle prépare les étudiants au concours de l’Ecolenormale supérieure pour la formation post-maîtriseen «langues nationales»;

4. un alphabet scientifique des langues gabonaises etune orthographe des langues gabonaises ont été éla-borés;

5. un Département des langues nationales a été créé àl’Institut pédagogique national. Ce département tra-vaille actuellement sur l’élaboration des manuelsdidactiques et a pour objectif de réfléchir sur l’ensei-gnement des langues nationales comme languematernelle et sur celui des langues nationalescomme langue non maternelle;

6. une association des enseignants du primaire et dusecondaire pour les langues nationales a été mise enplace. Elle servira de relais entre l’Institut pédago-gique national et les élèves dès la rentrée des classes2000-2001 ;

7. le Ministère de l’éducation nationale et la Radionationale ont mis sur pied une émission hebdoma-daire de sensibilisation sur les langues gabonaisesintitulée «Nos langues, notre culture»;

8. une réflexion est menée pour la mise en place d’unmodule de langues nationales dans les Ecoles nor-males d’instituteurs pour l’année académique 2001-2002 et pour l’élaboration de guide d’auto-formationet d’auto-perfectionnement des instituteurs.

Ce qui reste à faireIl reste encore à :1. installer des clubs de jeunes orientés vers des « jeux

et pédagogie des langues gabonaises », avec l’aidede l’association des enseignants du primaire et dusecondaire de langues nationales ;

2. appliquer expérimentalement les matériels didac-tiques dans des classes témoins ;

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3. évaluer les personnels d’encadrement et les matérielsdidactiques ;

4. rencontrer les syndicats du secteur éducation pours’assurer de leur collaboration ;

5. organiser la semaine pour l’« Ecole en langues natio-nales » ;

6. insister sur l’élaboration d’un projet de loi pour défi-nir le statut des langues nationales, une fois la pro-duction de matériels didactiques achevée ;

7. assurer à l’Institut pédagogique national les moyensmatériels pour la conception et la réalisation de maté-riels didactiques.

VI.CONCLUSION

Dans la réalisation de ses activités de refonte curriculai-re, l’Institut pédagogique national a toujours visé unobjectif d’importance certaine : l’amélioration de la qua-lité de l’enseignement. Une approche curriculaire de laformation constitue un facteur-clé qui influe de façondécisive sur la qualité des enseignements et des appren-tissages.

En termes de la définition des composants fonda-mentales d’une bonne politique et d’une bonne organisa-tion linguistique pour l’éducation de base au Gabon, leMinistère de l’éducation nationale veille à la réalisation

sans précipitation de l’élaboration des manuels enlangues gabonaises, de la formation des enseignants delangues nationales. Au regard des progrès effectués dansla promotion et l’intégration des langues nationales dansle système éducatif depuis trois ans, il serait fâcheux des’arrêter en si bon chemin.

De fait, le Ministère de l’éducation nationale consti-tue un des socles sur lequel reposent l’espoir et le sou-hait des gabonais de voir leurs langues enseignées. C’estpourquoi, deux axes principaux d’exécution ont été pri-vilégiés pour la réussite de la réforme du système éduca-tif dans son ensemble : la formation et l’élaboration dematériels didactiques.

Notes

1 Eric Dodo-Bounguendza, Conseiller technique duMinistère de l’éducation nationale est chargé de l’in-tégration des langues nationales dans le système éducatif.

2 Kwenzi-Mikala, J.T., L’identification des unités-langues bantous gabonaises et leur classificationinterne in Muntu 8. CICIBA-Présence Africaine,p. 54-64.

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I. INTRODUCTION

Le système éducatif tel qu’il existe actuellement au Malidoit être refondé. En effet, l’enseignement demeure tropcentralisé et ne touche qu’une faible partie des enfantsen âge d’aller à l’école. Il est urgent qu’il prenne encharge les aspirations des couches sociales défavorisées.

Le processus d’élaboration des grandes orientationsde la politique éducative au Mali constitue une illustra-tion du changement qui s’est produit au moment de lapréparation du Programme décennal de développementde l’éducation (PRODEC). En effet, ce document mar-qua la prise en compte des préoccupations des popula-tions, à travers une démarche participative qui privilégiala concertation et le dialogue avec tous les partenaires.Le Programme décennal de développement de l’éduca-tion, adopté par le Gouvernement, est l’émanation d’unconsensus national.

II. LE PROGRAMME DECENNAL DE DEVELOPPEMENT DE L’EDUCATION

Dans le but de réussir une refondation de l’enseigne-ment, le Programme décennal de développement del’éducation s’inscrit dans la politique de décentralisa-tion. Il est admis que, pour réussir une gestion décentra-lisée de l’éducation, il faut que la refondation reconnais-se l’importance des facteurs suivants:● la complémentarité des rôles des différents parte-

naires ; ● la redéfinition des rôles ; ● la décentralisation technique des activités éduca-

tives.Le diagnostic pouvant être établi actuellement est révé-lateur d’un système éducatif peu performant. Il s’endégage la nécessité de bâtir une école non seulementréformée et rénovée, mais aussi et surtout refondée dansson ensemble.

1. Les axes de la réforme

Face à cette double exigence de corriger les insuffi-sances constatées et de mettre en place une politiqueéducative propice à la pérennisation d’un système édu-catif de qualité, onze axes prioritaires ont été dégagés.Ces onze axes traduisent l’option du Mali pour une

école performante et démocratique dans un contextedécentralisé et couvrent les points suivants :1. une éducation de base de qualité pour tous ;2. un enseignement professionnel adapté aux besoins

de l’économie ;3. un enseignement secondaire et technique rénové et

performant;4. un enseignement supérieur de qualité adapté aux

besoins prioritaires et aux coûts maîtrisés ;5. une utilisation des langues maternelles dans l’ensei-

gnement formel concomitamment avec le français ;6. une politique du livre et du matériel didactique opé-

rationnel;7. une politique soutenue de formation des ensei-

gnants;8. un partenariat véritable autour de l’école ;9. une restructuration et un ajustement institutionnel

nécessaire à la refondation du système éducatif ;10. une politique de communication centrée sur le dia-

logue et la concertation avec tous les partenaires ;11. une politique de financement soutenue, rééquilibrée,

rationnelle et s’inscrivant dans la décentralisation.

2. Les résultats attendus

Cette refondation du système éducatif, en partant desonze points énumérés ci-dessus, devrait donner lieu auxrésultats attendus suivants :1. l’amélioration de la qualité de l’enseignement des

apprenants;2. la maîtrise des coûts de formation notamment dans

le secondaire et le supérieur;3. la correction du déséquilibre de scolarisation entre

régions, entre zones urbaines et rurales, entresexes;

4. l’amélioration de la gestion des flux au secondaire etau supérieur;

5. l’utilisation des langues maternelles dans l’enseigne-ment formel concomitamment avec le français ;

6. la responsabilisation des services régionaux etsub-régionaux par rapport aux prises de décisionconcernant leur circonscription ;

7. le renforcement de la capacité institutionnelle desstructures déconcentrées chargées de la mise enœuvre;

47

Mali

Sahaloum Ould Youba et Mamadou Sissima

Page 49: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

8. la répartition des coûts récurrents entre l’État, les col-lectivités et les communautés, notamment le finance-ment de l’entretien des équipements et des locaux;

9. la participation des communautés à la gestion del’école;

10. l’amélioration de la formation des formateurs;11. l’encouragement de la participation du secteur privé

dans le financement de l’éducation.

3. Les mesures envisagées en vue de refonder le sys-tème éducatif

Il est établi qu’aucun pays ne peut prétendre à un déve-loppement durable sans un système éducatif performantcapable de s’adapter aux changements de plus en plusfréquents auxquels il faut faire face. Conscient de cetteréalité et des insuffisances constatées, le Gouvernementdu Mali entend adopter une série de mesures permettantun redressement irréversible de la situation. Ce sontentre autres des mesures d’ordre général, communes àtous les ordres et types d’enseignement.

Le principe de base est faire de l’école le point dedépart autour duquel le schéma pour le développementdu système éducatif est bâti. La reconnaissance de lacomplémentarité des actes des différents partenaires apermis la clarification des rôles et des responsabilités dechacun. Le partenariat constitué a été l’espace de concer-tation où tous les acteurs concernés par le développe-ment de l’école ont apporté leur contribution positive auretour de la tranquillité dans l’espace scolaire. Parailleurs, il est vital d’instaurer et de nourrir un dialoguepermanent avec et entre les partenaires à chaque phasede mise en ouvre du programme à travers l’information,la communication et la mobilisation de tous les acteursautour du programme.

Les mesures à entreprendre concerneront entreautres :1. la mise en oeuvre d’un nouveau schéma institutionnel;2. la mise en oeuvre d’un plan de communication;3. la mise en oeuvre d’un véritable partenariat ;4. l’amélioration des conditions de travail des ensei-

gnants.

Mesures sur le plan institutionnel

L’ensemble des mesures que le Département responsableau sein du ministère entend adopter en vue de la refonda-tion du système éducatif passe préalablement par larestructuration institutionnelle. Ce sont donc de nou-velles structures qui seront créées et l’ensemble destextes relus de manière à les rendre conformes aux nou-velles orientations de la politique éducative que leDépartement entend lui donner à travers :1. la mise en place d’une structure pour accompagner la

décentralisation ;2. l’identification des compétences à transférer ;3. l’information et la sensibilisation des partenaires de

l’école ;4. la mobilisation des communautés à travers une

communication appropriée et soutenue ;

5. l’élaboration de plans régionaux et sub-régionaux ;6. la création d’un cadre de recrutement des enseignants

des collectivités territoriales ;7. l’appui à la mise en oeuvre de la décentralisation

dans les communes à travers certaines communes;8. l’amélioration de la qualité de la formation et des

conditions de travail.

Mesures pour la coordination et l’exécution du PRODECEn matière de coordination et d’exécution du program-me, le Gouvernement se propose de faire exécuter le pro-gramme par les services centraux et les services décon-centrés du Ministère de l’éducation. La Celluletechnique du PRODEC aura la charge du suivi de laréforme pour la durée de la première phase. Elle a égale-ment pour mission de procéder pendant la phase transi-toire, à travers l’appropriation de la réforme à l’ensembledes membres du cabinet, des services centraux et desservices déconcentrés.

Mesures portant sur la refondation des curriculaLes programmes d’études, tels qu’ils existent actuelle-ment, ne permettent pas de doter les apprenants de com-pétences utiles à la vie. Le nouveau Cadre générald’orientation du curriculum de l’enseignement fonda-mental va permettre de centrer le système éducatif surles besoins individuels des apprenants, aidant chacun àrecevoir une éducation adaptée à sa propre vie et à sapropre communauté.

Ce cadre précise les finalités de l’enseignement fon-damental; il donne des directives par rapport aux pro-grammes d’études, divisés en domaines de formation etchamps disciplinaires définis en termes de compétences,objectifs et contenus. Le Cadre général donne desconsignes par rapport au calendrier scolaire et à l’emploidu temps; il donne des directives par rapport au matérielpédagogique (matériel didactique et manuel scolaire); ilprescrit l’emploi d’une pédagogie active et demande unedescription des situations d’apprentissage (activités etprojets des élèves); il commande la mise en place denouvelles pratiques d’évaluation.

Dans le Cadre général d’orientation du curriculum,les objectifs assignés au système éducatif malien sont :1. de faire acquérir à l’apprenant, au niveau de chaque

ordre d’enseignement, des compétences lui permet-tant de s’insérer dans la vie active ou de poursuivreses études;

2. de doter l’apprenant des instruments de l’expressionet de la communication parlée, écrite, graphique etsymbolique ; de développer ses capacités de compré-hension, d’analyse, de raisonnement formel et derésolution de problèmes;

3. d’amener l’apprenant à analyser, apprécier et exploi-ter l’histoire et la culture de son pays, les caractéris-tiques principales de son organisation politique,sociale et économique et de l’informer des potentiali-tés et des perspectives de développement dans uncontexte de mondialisation;

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4. de développer les capacités de l’apprenant à planifieret à organiser ses apprentissages et son perfectionne-ment culturel, en lui fournissant les outils de base deson propre travail intellectuel autonome.

III. CONCLUSION

Le développement du curriculum se fait selon uneapproche participative. C’est ainsi qu’au niveau structu-rel, il est créé une Unité centrale de développement descurricula et ses démembrements aux niveaux régional etsubrégional. Toutes les couches socioprofessionnellessont partie prenante dans le processus devant conduire à

l’élaboration du nouveau curriculum et précisémentpour la formulation des compétences à faire acquériraux apprenants.

La stratégie de développement du curriculum pré-voit, selon une interaction entre le niveau national et leniveau régional et subrégional, le schéma suivant :● rédaction; ● mise à l’essai ;● validation;● implantation.

Le futur curriculum prévoit des compétences discipli-naires, transversales et de vie.

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Page 51: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

I. INTRODUCTION

La gestion du système éducatif centrafricain a souffert,ces dernières années, de nombreuses carences. Lesstructures éducatives ont vu leurs performances s’userconsidérablement, sans aucune possibilité de régénéra-tion. Des orientations, partielles ou parcellaires ont étébien souvent définies à court terme et mal suivies. Al’absence de visions stratégiques s’ajoute l’affaiblisse-ment des capacités de gestion des structures de concep-tion des politiques et d’exécution. Les ressourceshumaines ont considérablement perdu leur qualité etleur efficacité.

Cette dégradation du système éducatif prend d’annéeen année une dimension inquiétante, réduisant la possi-bilité de la majorité des jeunes Centrafricains d’envisa-ger l’avenir avec assurance et détermination à la fin deleur cursus scolaire. Face à la gravité de la situation, degrandes orientations ont été initiées. L’adoption de la Loi97.014 du 10 décembre 1997 portant orientation del’éducation constitue l’élément essentiel des grandesmesures prises pour arrêter la dérive du système éducatifen République Centrafricaine.

La grande nouveauté dans l’approche curriculaire,c’est le principe que l’attention est portée sur les appre-nants, et non plus sur les enseignants. Le système tradi-tionnel privilégie l’enseignant, qui focalise l’attention etdistribue un savoir absolu. Le système curriculaire privilé-gie l’apprenant qui devient le centre et l’enjeu de tout sys-tème d’apprentissage. L’enseignant est l’accompagnateur.

II. LES PRINCIPAUX AXES DE LA REFORME

1. Brève présentation des caractéristiques fondamen-tales de la réforme

Les présupposés de la réforme Pour mener à terme la réforme du système éducatifnational, le pays doit :● aborder avec assurance et sérénité les défis du 3ème

millénaire;● réconcilier l’école avec le développement; les acteurs

doivent connaître leurs rôles, tout en étant assurésdes bénéfices qu’ils tireraient de l’action commune;

● consentir des sacrifices nécessaires pour rendre lesystème plus efficace et efficient ;

● entreprendre une action vigoureuse en vue de pro-mouvoir le système d’éducation et de formation parl’entremise du Plan national de développement del’éducation (PNDE) ;

● s’engager dans la voie d’une réforme en profondeurdu système éducatif pour qu’il soit apte à assurerpleinement ses missions.

Les objectifs de la réformeAvant d’établir de nouveaux programmes d’enseigne-ment, et de déterminer la méthode ou le matériel à utili-ser, le système s’est fixé pour objectifs les points sui-vants :● la promotion de l’enseignement technique et profes-

sionnel ;● le développement de l’enseignement scientifique en

insistant sur l’enseignement scientifique des filles ;● la promotion de l’enseignement supérieur en vue de

disposer des ressources humaines, seuls agents d’undéveloppement durable et véritable ;

● l’expansion rapide de l’enseignement de base pouraccélérer et fortifier le processus de développement.Cette expansion doit être liée à l’amélioration de laproduction scolaire. Il importe que l’enseignement debase trouve à partir des contenus renouvelés d’autresfinalités que le seul accès aux ordres d’enseignementsupérieur, tout en conservant néanmoins cette voca-tion ;

● l’éducation doit diffuser les idéaux de paix, de tolé-rance, et de solidarité et contribuer à l’enracinementdes valeurs démocratiques. Elle doit combattre, parson implantation et son action, l’ignorance et la pau-vreté. Elle doit donner à chaque individu ou grouped’individus la possibilité d’une promotion personnel-le ou collective ;

● la promotion d’un développement humain durable, laprotection de l’environnement, l’affermissement del’unité nationale, ainsi que la cohésion sociale grâceà un système éducatif performant.

Les justifications de la réformeEn dépit de multiples tentatives de réformes interve-nues en République Centrafricaine, l’Etat n’est pas par-venu à introduire des changements significatifs dansl’organisation et le contenu de 1’enseignement public

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République Centrafricaine

Abel Koulaninga, André-Edgar Benam, Philippe Hoornahert et Alphonse Mabingui

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hérité de la colonisation. Il continue à explorer les pos-sibilités d’une meilleure adaptation du système éduca-tif aux impératifs du développement et aux réalitésnationales.

D’une manière générale, les maux qui gangrènent lesystème sont :1. un système organisationnel profondément altéré,

provenant du fait que les orientations souvent défi-nies à court terme sont loin d’être exécutées faute desuivi. Par ailleurs, on déplore un affaiblissement descapacités de gestion des structures, de conception depolitiques et d’exécution, ainsi que le faible niveaude ressources financières. Les systèmes de produc-tion et d’information sont complètement inefficaceset l’infrastructure éducative est souvent victimed’actes de vandalisme.

2. un système éducatif disfonctionnel, en raison dufait que le système connaît une instabilité de pilo-tage quasi permanente. Le cycle préscolairedemeure embryonnaire et démuni. Les cycles fon-damental I et II s’érodent de la faiblesse des infra-structures, de l’indigence des ressources humaineset du niveau croissant de la population scolaire. Lecycle supérieur est confronté aux mêmes pro-blèmes.

Ces profondes distorsions minent le système, l’appau-vrissent et réduisent considérablement ses capacités àrépondre à la résolution des grands défis du pays.L’incapacité du système à exploiter le puissant atout lin-guistique qu’est la langue nationale ne facilite pas lapromotion chez les apprenants, de certaines valeurshumaines, et ne privilégie pas certains types de compor-tements nécessaires à l’épanouissement individuel etcollectif.

Les procédures du cursus scolaire et universitairesont loin de garantir la qualité des bénéficiaires des ser-vices scolaires. Très sélectives, elles concourent plutôtau gaspillage des populations scolaires. Les taux élevésd’échecs, de déperdition, de chômage et la qualité deplus en plus altérée des résultats constituent des préoc-cupations majeures.

La situation est encore plus critique en ce quiconcerne l’éducation non-formelle. Le secteur manqued’initiatives. L’essentiel des activités est l’apanage desONG. Ce sont bien souvent des programmes de forma-tion des adultes établis par des groupes religieux.Beaucoup reste à faire pour élargir les bases de l’alpha-bétisation fonctionnelle.

Les orientations à promouvoirFace à la gravité de la situation, des grandes orientationsont été retenues par l’adoption de la Loi 97.014 du 10décembre 1997. Elle introduit de notables modificationsdans l’organisation et le fonctionnement du système etaccentue les chances de la meilleure communicationpossible entre les acteurs, avec la reconnaissance offi-cielle de deux langues de travail : le Sango et leFrançais.

Les acteurs du système d’éducation et de formationL’un des facteurs déterminant du développement del’éducation est l’implication totale et effective desacteurs du système. L’Etat doit partager son assistanceavec tous ceux qui sont impliqués dans l’action éducati-ve. Ces acteurs sont nombreux, interviennent de maniè-re significative et peuvent être rassemblés en fonctiondes catégories suivantes :● Les apprenants (les élèves) à travers leurs associa-

tions sont les premiers bénéficiaires de l’action édu-cative; ils sont également le noyau vers lequelconvergent les efforts de tous les autres partenaires ;

● Les parents: les associations des Parents d’Elèves(APE) jouent un rôle de première importance danstoute décision concernant l’action éducative. Lafamille est la première salle de classe et l’enfantpasse plus de temps à la maison qu’à l’école ;

● Les enseignants: Ils sont incontournables et consti-tuent « la courroie de transmission » de l’acte consti-tutif ;

● Les institutions de l’Etat : l’éducation nationale etles autres départements ministériels s’imposent pourune meilleure rentabilité des ressources financièresdisponibles, tant au plan national qu’international.

Parmi les partenaires institutionnels de l’Etat, on comp-te, outre le Ministère de l’éducation nationale, lesMinistères de la fonction publique et de l’emploi, dudéveloppement rural, des travaux publics, de la justice,de l’administration du territoire ; les collectivitéslocales ; l’Assemblée nationale ; les partenaires institu-tionnels internationaux qui apportent une assistancematérielle, technique ou financière ; les confessions reli-gieuses, dont le rôle fut jadis important dans l’œuvre descolarisation et qui doivent à tout prix être à nouveauassociées à l’action éducative. Il y a aussi les ONG, dontcertaines assurent de remarquables actions d’éducationet d’alphabétisation surtout en milieu rural. LesAssociations d’anciens élèves sont aussi des partenairesà mobiliser autour de l’école pour expliquer les pro-blèmes d’éducation et de formation à la société civile.Les opérateurs économiques ont une contributionimportante à donner, non seulement par leur assistancefinancière ou matérielle, mais aussi dans la définitiondes objectifs éducatifs. En effet, trop souvent, l’écoleCentrafricaine ne s’est pas souciée du renforcement deses liens avec le monde du travail. Ceci explique engrande partie l’inadéquation à l’emploi. Les opérateurséconomiques doivent désormais être associés à laréflexion sur les programmes et les cursus de formationet l’évaluation de ceux-ci. Leur contribution en faveurde l’encadrement des stagiaires et le financement desétablissements de formation professionnelle serontd’autant plus généreux qu’ils se sentiront véritablementconcernés par le développement du système éducatifnational. A compter également parmi les partenaires ins-titutionnels de l’Etat, les médias nationaux et privés quisont aussi sollicités pour contribuer au dialogue nationalautour de l’école. Enfin, les syndicats des personnels de

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l’éducation nationale sont des partenaires dont la partici-pation active au dialogue national est requise. Ceci per-mettra de créer un véritable climat consensuel autour dessolutions à retenir face aux multiples problèmes du sys-tème éducatif.

2. Analyse succincte de la réforme par rapport à sespropres objectifs

Les divers constats négatifs effectués depuis plusieursannées et plus récemment encore, celui réalisé à l’occa-sion des Etats généraux de l’éducation et de la forma-tion, ont conduit à la nécessité d’une nouvelle politiqueen vue de résoudre la crise persistante du système.

A cet effet, le cadre stratégique du PNDE est uneréponse globale à l’ensemble des problèmes identifiés etreconnus du système. Il permet, pour chacun des objec-tifs majeurs, de mettre en place une stratégie d’en-semble, avec des résultats à atteindre et des activités àmener à court, moyen et long terme pour les réaliser. Ils’organisent autour des quatre objectifs supérieurs sui-vants:1. la qualité ; 2. l’efficacité ; 3. l’accessibilité ; 4. l’équité.

StructureLa scolarité est organisée par niveau d’enseignement :1. l’enseignement préscolaire ;2. l’enseignement fondamental I ;3. l’enseignement fondamental II ;4. l’enseignement secondaire général ;5. l’enseignement technique, professionnel et agricole ;6. l’enseignement supérieur : recherche scientifique et

technique ;7. l’éducation non-formelle ;8. les établissements spécialisés pour handicapés.

LanguesPar le passé, le français était choisi comme langue d’en-seignement à tous les ordres d’enseignement. Après lareconnaissance du Sango comme langue officielle, leSango et le français devinrent les deux langues d’ensei-gnement en République Centrafricaine. L’enseignementen Sango est introduit au préscolaire et dans le cycle fon-damental I en l’an 2000. Une politique rationnelle d’uti-lisation de ces deux langues officielles dans les servicesde l’Etat est promue pour soutenir leur usage dans l’en-seignement.

Production de matériels didactiquesLa réussite scolaire ne sera jamais effective, si l’ambi-tion de donner un manuel scolaire à chaque élève n’estpas réalisée. Il y a une nécessité de concevoir desmanuels scolaires, de diversifier ou créer les circuits dedistribution du livre, d’appuyer les réseaux de biblio-thèque et de soutenir le secteur de l’éducation au niveaudu pays. En effet, les importations de matériels didac-

tiques et de manuels scolaires coûtent excessivementcher. Malheureusement, l’INR.AP et IDIFAMADI, deuxservices importants de l’éducation nationale, dont le rôleest de concevoir et produire les matériels didactiques, nesont pas opérationnels faute de crédits de fonctionne-ments. La Loi d’Orientation n’a pas pris en compte laproduction et la diffusion de matériel didactique. Ilconvient également de noter une insuffisance au niveaude la planification, de la prévision et de l’évaluation desprogrammes et projets du PNDE : par exemple, de 2001à 2005, il est prévu la construction de combien d’écolesau fondamental I et II, combien d’enseignants seront for-més ou recyclés ?

La pertinence du texte de la réforme et ses insuffisances Le texte de la réforme du système éducatif Centrafricainserait un excellent outil de travail, si son contenu étaitrespecté et mis en pratique d’une manière concrète. Lesobjectifs sont bien définis, et un accent particulier estmis sur la rénovation des structures à tous les niveauxd’enseignement. Cependant, il n’y a aucun projet sus-ceptible de créer ou de maintenir les établissements spé-cialisés formant aux technologies modernes (informa-tique, Internet), dont l’évolution se fait aujourd’hui à unrythme accéléré. Il faut préparer le pays à l’utilisation dela technologie qui se mondialise.

Difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de laréforme Toute réforme est une entreprise de longue haleine qui sefait par étapes et nécessite surtout de moyens financierspour une concrétisation optimale. Bon nombre deréformes ont échoué faute de financement. Les difficul-tés sont dues à l’appauvrissement du pays, à l’endette-ment de l’Etat vis-à-vis des institutions financières inter-nationales, à des mesures contraignantes imposées par laBanque mondiale et le FMI. L’application sectorielle del’ajustement structurel ne suffit pas à constituer uneréforme du système éducatif. Elle ne fait qu’accélérerleur paralysie.

Stratégies et méthodes de mise en œuvreIl convient en premier de relever les acquis. En effet, laLoi portant sur l’Orientation de l’Education a été adop-tée et promulguée. Le Comité de suivi des recommanda-tions des Etats généraux de l’éducation et de la forma-tion a été mis en place; et le Plan national dedéveloppement de l’éducation (PNDE) a été élaboré. Acourt terme, on a assisté à une mobilisation des res-sources aux niveaux national et international et à la miseen place de structures de gestion et d’exécution du Plannational. A long terme, une évaluation du PNDE est pré-vue.

Dispositions concrètes d’amélioration du texte et desrésultatsIl est envisagé d’adapter et d’actualiser le texte de laréforme au regard des modifications dues à l’évolution

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du temps. Une possible retouche des stratégies est éga-lement prévue dans le but d’infléchir les résultatsescomptés. Parmi les mesures en vue de promouvoir lesréussites, les dispositions suivantes ont été retenues:1. la mise en synergie des différentes commissions de

travail mises en place ;2. la coordination des activités ;3. le partenariat avec les ONG nationales et internatio-

nales ;4. l’implication des programmes intéressés ;5. l’évaluation à mi-chemin ;6. l’ajustement des stratégies et méthodes d’approche.

3. Programmes élaborés ou prévus par le texte poursoutenir la réforme

Les instructions officielles définissent pour chaqueordre d’enseignement les méthodes d’enseignement etles connaissances essentielles qui doivent être acquises.

L’enseignement préscolaire Le programme a pour bases :● l’exercice physique ;● les activités ludiques ;● l’esprit de créativité ;● l’initiation artistique ;● les activités d’éveil .● La finalité est de préparer l’enfant à vivre en harmo-

nie avec son environnement.

L’enseignement fondamental I L’école nouvelle doit s’inspirer de la philosophie desanciennes écoles de promotion collective (EPC), afin derendre les produits du système plus opérationnels et aptesà s’intégrer dans leur milieu. Le programme comprend:● l’éveil scientifique et technique ;● les activités productives ;● l’éducation à la santé et à l’environnement ;● l’éducation morale et l’éducation civique ;● l’éducation culturelle et artistique ;● la participation des coopératives scolaires, en vue

d’apprendre à l’enfant à se prendre en charge et às’intéresser à son environnement par le travail com-munautaire et manuel. Ceci développera en l’enfantle sens des responsabilités ;

● l’introduction du Sango ;● la création des centres spécialisés pour les enfants de

la rue en vue d’une meilleure insertion sociale ; ainsique la création et la maintenance des structures d’ac-cueil pour les élèves ayant échoué leur passage ensixième ;

● le recyclage et la formation permanente des ensei-gnants fonctionnaires et agents communaux (maîtres- parents) ;

● la formation à distance ;● la création des classes pilotes ;● l’obligation pour chaque élève d’avoir un « livre »

scolaire qui permettra de le suivre tout au long de sascolarité ;

● la réinsertion des primes d’engagement auxmeilleurs élèves pour susciter l’émulation.

L’enseignement fondamental IILes points et caractéristiques principaux de ce niveausont les suivants :● la revalorisation du concours d’entrée en sixième en

le rendant plus sélectif en vue de permettre la forma-tion des futurs cadres moyens et supérieurs de lanation dans les trois filières définies par la Loi de1997 relative aux enseignements général, techniqueet agricole ;

● le maintien du livret scolaire en vue de suivre l’élève;● la lutte contre les pratiques de recrutements complai-

sants ;● la révision des programmes de formation en intro-

duisant, dès la classe de sixième, des enseignementsscientifiques et techniques ;

● l’introduction du travail productif et la vulgarisationdu travail manuel ;

● la réintroduction des cours de morale et d’instructioncivique ;

● la mise en place des tests psychologiques au niveaudes classes de 5ème, 3ème en vue d’une meilleure orien-tation des élèves ;

● la prise de mesures concrètes pour la formation deprofesseurs en adéquation avec les nouveaux pro-grammes ;

● La modernisation de l’enseignement de l’anglais ;● le recrutement des professeurs vacataires, soumis à

une sélection plus rigoureuse et suivi d’une forma-tion pédagogique obligatoire ;

● l’application du texte régissant le transfert d’unélève à l’établissement public et vice-versa ;

● l’admission dans les établissements, assujettie à untest.

L’enseignement secondaire généralLes points et caractéristiques principaux de ce niveausont les suivants :● la prise de mesures incitatives pour encourager les

élèves à s’orienter dans les filières scientifiques (sys-tème d’internat ou semi-internat) ;

● la révision des programmes en mettant l’accent surles matières scientifiques même dans les séries litté-raires ;

● la mise en place des tests psychologiques au niveaudes classes de seconde et de terminale ;

● la réinstauration du Baccalauréat probatoire en clas-se de première, afin d’améliorer le niveau des futursbacheliers ;

● la révision des conditions d’accès à l’Ecole normalesupérieure en privilégiant les critères d’excellence.Pour ce faire, des mesures incitatives (bourses sub-stantielles, contrat d’intégration) seront mises enplace ;

● la réhabilitation ou la création, ainsi que la mainte-nance des laboratoires dans les lycées à vocationscientifique ;

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Page 55: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

● la réhabilitation ou la création de bibliothèques et deterrains de sport. A cet effet, des archivistes, docu-mentalistes et bibliothécaires seront formés ;

● la construction de clôtures autour de tous les établis-sements pour une meilleure protection ;

● la création de classes pilotes.

L’enseignement technique et professionnelLes points et caractéristiques principaux de ce niveausont les suivants :● la révision du programme en fonction des besoins

exprimés par le marché de l’emploi ;● la création ou la suspension de certaines filières ; ● la création d’un Baccalauréat de séries E (mathéma-

tique et technique) pour la formation des ingénieurs.Les titulaires du baccalauréat des séries F devrontêtre orientés dans les filières de BTS ;

● la révision des statuts des établissements d’enseigne-ment technique et professionnel, en vue de permettreun partenariat simple avec les opérateurs écono-miques ;

● une série de mesures allant dans le sens d’une plusgrande autonomie des établissements dans le cadrede la décentralisation et l’adaptation à l’environne-ment ;

● l’encouragement et la systématisation du partenariatentre l’enseignement technique et professionnel et lesecteur privé ; le développement de relations complé-mentaires avec les centres de formation profession-nelle des divers départements ministériels. Dans cebut, le Comité national de l’enseignement techniqueet professionnel existant sera réhabilité ;

● le versement d’une partie des taxes d’apprentissageaux établissements d’enseignement technique et pro-fessionnel et la mise en place d’un budget substantield’équipement et de fonctionnement en faveur desditsétablissements. Certaines filières de ces centresdevront être maintenues et valorisées en fonction desétudes locales de marché du travail et d’emploi. Lesformations dans ces centres seront prises en chargeconjointement par l’éducation nationale et les parte-naires économiques bénéficiaires de ces formations ;

● le Collège d’enseignement technique féminin(CETF) forme les élèves ayant terminé la classe de5ème au Brevet d’études techniques (BTS), les élèvespossédant le BEPC ou BET, et des jeunes filles dansle domaine de l’économie familiale. Cette disciplinevise à aider individus et groupes à résoudre les pro-blèmes de la vie en société. Le recrutement dans cecentre devra faire l’objet d’une sélectionrigoureuse ;

● la création d’une école hôtelière et touristique pour laformation de guides et d’agents de voyages, deshôtes et des restaurateurs ;

● la création d’une Ecole professionnelle des eaux etforêts pour la formation de gardes forestiers et detechniciens de la pêche, ainsi que d’agents de lutteanti-braconnage ;

● la révision et l’actualisation du cadre juridique relatifaux établissements privés de formation profession-nelle pour résoudre les problèmes de l’adéquationformation - emploi.

Le secteur informelIl est prévu que le Lycée technique, en collaborationavec l’ex-ONIFOP, étudie et définisse à court terme unprogramme de formation ponctuelle à l’adresse des«Boubanguéré» qui peuvent s’organiser en coopérative.

Des centres d’insertion de jeunes seront créés sur leterritoire national, à l’instar de l’école communautaire dela Nana-Gribizi, en projet dans le cadre de la micro-pla-nification soutenue par l’UNICEF.

L’enseignement supérieurLes points et caractéristiques principaux de ce niveauconcernent surtout la réactualisation des recommanda-tions des Etats généraux de l’enseignement supérieur de1987 sur le rôle de l’université dans le développementnational en vue de leur application. Plus particulière-ment, les mesures retenues prévoient :● la création des filières professionnelles courtes (DES,

BTS, etc) ;● la professionnalisation des filières, soit en formation

initiale, soit en formation continue, en partenariatavec les secteurs productifs qui devront jouer un rôleplus important dans la définition des politiques deformation ;

● le développement des activités de production généra-trice de ressources financières. Pour ce faire, desmoyens financiers seront mis à la disposition des ins-tituts de technologie, en vue de créer des ateliers etdes juniors entreprises ;

● l’apprentissage de l’anglais sera rendu obligatoiredans tous les secteurs de l’Université ;

● la mise en place, si les conditions le permettent entermes de ressources humaines qualifiées et adé-quates, de maîtrises semi-professionnalisées ;

● afin de garantir la qualité des services d’enseignementet de rechercher les recrutements des enseignants, lesautorités doivent passer obligatoirement par la com-mission de recrutement et d’avancement des ensei-gnants par le conseil d’Université. Les ressortissantsdes pays africains et malgaches devront faire validerleurs diplômes et leurs grades par le CAMES. D’autrepart, les enseignants sont appelés à se perfectionnerpar la formation pédagogique et par la recherche.Pour ce faire, on encouragera leur participation à desséminaires, colloques, et stages de recherche;

● le principe du congé sabbatique sera adopté, et géréconjointement par le chef d’établissement et le recto-rat ;

● l’âge de retraite des enseignants de l’université serafixé à 65 ans au moins ;

● l’Université bénéficiera d’une autonomie financièreet administrative. Cette autonomie permettra, entreautres, le choix des principaux responsables par voieélective ;

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● la recherche et le développement seront privilégiés,en encourageant le partenariat avec les structures derecherche existantes ;

● De ce fait, la notion d’acropole qui fait appel à lafois à la recherche, à la formation et à la productiondans un espace donné, doit être renforcée. Le domai-ne agro-pastoral et minier devra bénéficier d’uneformation supérieure. L’installation des diplôméssera favorisée par l’octroi de crédits au vue de pro-jets viables ;

● les sujets de mémoire des étudiants seront orientésvers des questions touchant au développement pourcréer une adéquation entre recherche et développe-ment ;

● les structures, l’enrichissement des collections et lamodernisation du fonctionnement de la bibliothèqueseront développées pour les étudiants Un coursd’initiation à la bibliothèque sera institué pour lesétudiants ;

● l’Université sera associée à la conception des projetsde développement du pays ;

● le développement sur le terrain des enseignants seraencouragé, ainsi que l’accès des étudiants aux sortiespédagogiques.

● une collaboration entre l’Université et l’ENAM seraétablie, en vue de préparer les futures structuresrégionales.

4. Adéquation entre les besoins des populations et laréforme face aux changements mondiaux

Réalité locale et besoins des populations Les programmes de développement de la réforme desdifférents ordres d’enseignement se trouvent en parfaiteadéquation avec les besoins des populations face auxchangements mondiaux. Il faut inventer ou créer unmodèle d’école qui privilégie l’enseignement fonda-mental, technique et professionnel ; une nouvelle écoletournée vers la professionnalisation et l’emploi. Il fautadapter l’enseignement et la formation à la réalité desbesoins du développement

L’éducation de base doit favoriser les apprentissagesfondamentaux et l’insertion des jeunes dans la vie acti-ve. La nouvelle école doit cesser d’être la copie confor-me de l’école étrangère qui enseigne peu de savoir-faireutile et qui, dans la majorité des cas, ne débouche plussur l’emploi.

Manifestation des grandes tendances du contexte mondialLe texte de la réforme du système éducatif est en harmo-nie avec les grandes tendances du changement mondial.Dans la Loi portant orientation de l’éducation, la RCAreconnaît que l’enseignement est obligatoire pour tousles enfants de deux sexes de l’âge de six à 16 ans. Elle aadhéré au fameux slogan onusien de l’«Education pourtous en l’an 2000». Dans la loi de l’orientation, toutcomme pendant la conférence de Jomtien surl’Education pour tous en mars 1990, il s’est dégagé unaccord pour favoriser une expansion rapide de l’ensei-

gnement de base dans le but d’accélérer et de fortifier leprocessus de développement dans les pays défavorisés.Par ailleurs, de plus en plus, on parle de l’introductionde l’informatique et de l’Internet dans l’enseignement etla formation. Les recommandations de Séoul et deBudapest sur l’enseignement technique et professionnel,ainsi que la science sont pris en compte.

Défis dérivés de ces tendancesAprès l’accession de la plupart des pays africains au Suddu Sahara à l’indépendance, l’école africaine était unecopie conforme, une suite logique du modèle étranger.Le système d’enseignement, inspiré de l’Europe, n’a passubi de modifications majeures et est resté inadapté auxréalités des pays africains. C’est également ce qui s’estproduit en République Centrafricaine. Il en résulte lanécessité d’inventer un nouveau modèle d’école adaptéeà l’enseignement du pays et qui réponde aux besoinslocaux, au développement. Cette nouvelle école doit demanière croissante orienter sa formation vers l’emploi etla profession. La priorité est donc accordée à l’éduca-tion de base, à l’enseignement de la science et de latechnologie. En République Centrafricaine, l’accent estmis sur la formation scientifique et technologique desjeunes filles. Bref, l’éducation et la formation doiventêtre adaptées aux réalités de chaque pays africain et auxnouvelles technologies mondiales.

Situation comparée des dispositions avec les réalitéslocalesLes dispositions prises rencontrent les attentes et lesconditions réelles des populations centrafricaines. Ellesprennent en compte l’environnement socioculturel despopulations et leur fournissent les moyens matériels etintellectuels adéquats leur permettant de présider à leurpropre destinée, de se prendre en charge et d’être utilesdans la société. Les objectifs assignés à chaque ordred’enseignement, depuis la maternelle jusqu’à l’enseigne-ment supérieur, illustrent clairement le rapport qui existeentre les dispositions de la réforme et les réalités locales.

Actualisation de la réforme aux nouvelles donnes mon-dialesLa réforme du système éducatif centrafricain est d’ac-tualité. Elle prend en compte les nouvelles donnes mon-diales et les défis actuels. Les valeurs à enseigner pour yfaire face sont nombreuses. Parmi celles-ci, on peutciter :● Les Droits de l’Homme, la citoyenneté et leurs

contenus d’enseignement respectifs qui sont indisso-ciablement liés. Ainsi la pratique démocratique a faitson entrée à l’école ;

● Les droits et les devoirs de chaque individu doiventintégrer la nouvelle éducation de base et parcourirl’éducation tout a long d’une vie. Cette conceptionconduira à un remaniement de la structure classiquede l’enseignement en le désinstitutionnalisant. Enmettant l’éducation à la portée de tous, on appelle àune révision des contenus et méthodes d’apprentis-sage ;

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● Mondialisation et éducation : les nouvelles technolo-gies contribuent à faire de l’éducation un instrumentqui non seulement permet d’accéder au champ mon-dial caractérisé par la compétition, mais qui permetégalement d’y participer avec profit en en prévenantles effets pervers ;

● La solidarité internationale: les rapports inégaux surle plan économique nécessitent des assistancesmutuelles entre les pays nantis et les pays pauvres.L’éducation devra être conçue de manière à dévelop-per la coopération et l’entraide internationales ;

● Education et bonne gouvernance: la bonne gestionde la chose publique devra s’apprendre dès l’école.Le contenu de l’éducation devra être conçu demanière à préparer les futurs responsables à la pra-tique démocratique ;

● Tolérance et culture de la paix: le développement dela compréhension internationale reste l’une desvaleurs contribuant au règlement des conflits et aumaintien de la paix. La République Centrafricaineavait introduit dans les écoles les «Ambassadeurs dela Paix» chargés de maintenir la paix dans les écoles,les quartiers et les arrondissements ;

● Education et environnement : en 1996, l’éducationenvironnementale fut introduite dans les program-me scolaires, suite à des séminaires de sensibilisa-tion et de formation des enseignants. Des modèlesde fiche pédagogique ont été élaborés pour per-mettre aux enseignants de transmettre efficacementcette matière;

● Education à la vie familiale.

III. L’ARTICULATION ENTRE LA REFORME DES CURRICULA ET LE DEVELOPPEMENT CURRICULAIRE

1. Objectifs assignés à l’éducation par la réforme.

Les objectifs assignés à l’éducation par la réforme sontau nombre de quatre. Il s’agit:1. D’améliorer la qualité du système éducatif;2. De renforcer l’efficacité du système éducatif;3. D’étendre l’accès au système éducatif;4. D’assurer l’équité dans le système éducatif.

Chacun des objectifs est découpé en objectifs straté-giques à partir desquels ont été proposés des résultats etactivités, des programmes et projets. Des objectifs ontaussi été assignés spécifiquement à chaque ordre d’en-seignement.

2. Stratégie d’élaboration des programmes et desmanuels

Pour la mise en œuvre des programmes du PNDE, plu-sieurs stratégies ont été mises en place. Celles-ci concer-nent :1. la mise en place d’une commission et l’établissement

du bilan-diagnostic de l’adaptation des programmesaux réalités locales ;

2. l’élaboration de programmes adaptés;

3. l’expérimentation et la mise en œuvre des pro-grammes adaptés ;

4. le suivi et l’évaluation de la mise en oeuvre des pro-grammes.

Les difficultés rencontrées sont toujours d’ordre finan-cier et matériel.

3. Résultats attendus par rapport à la pédagogie choisie

Les résultats attendus par rapport à la pédagogie parobjectifs sont nombreux:● l’amélioration et le développement de tous les ordres

d’enseignement, et leur adaptation aux réalités locales;● une bonne formation des enseignants ; qualification

du personnel d’encadrement pédagogique et du per-sonnel d’appui administratif ;

● le suivi des apprenants et la planification de l’activitépédagogique du personnel, des ressources maté-rielles, financières et informationnelles ;

● l’adaptation de l’enseignement aux réalités natio-nales et aux défis du développement ;

● le recyclage, l’encadrement, la rémunération, la pro-tection des enseignants et le recyclage du personneld’appui ;

● l’adaptation des textes d’appui aux programmes, à lagestion du personnel, à la gestion financière, maté-rielle, informelle, aux règlements scolaires ;

● une meilleure efficacité des services financiers, de lagestion matérielle et informationnelle ;

● l’augmentation de la capacité d’accueil des différentsordres d’enseignement, de l’effectif du personnel ensei-gnant et du personnel d’encadrement, de l’effectif dupersonnel enseignant et du personnel d’encadrement,de la capacité de mobilisation des ressources maté-rielles, financières, informationnelles et humaines;

● un apprentissage plus efficace.

4. Méthodes et stratégies du développement des curricula

Le développement des curricula se résume au schémapar étapes suivant:1. les finalités de l’éducation ;2. les objectifs généraux et spécifiques ;3. les apprenants sont les élèves : il conviendra de tenir

compte de leurs aspirations, de leurs besoins, et deleurs aptitudes ;

4. les contenus sont déterminés en fonction des pro-grammes et des intérêts des élèves ;

5. les méthodes sont choisies en fonction des objectifs,des contenus, et du niveau de la classe ;

6. les moyens didactiques, dont on conditionnera lechoix et l’usage ;

7. les formes ou modes d’organisation de l’apprentissa-ge : en classes, en groupes, ou en cercles ;

8. le lieu de l’apprentissage : dans les salles de classe,les bibliothèques, les laboratoires ;

9. l’évaluation des performances en fonction des objec-tifs; les instruments et techniques à choisir ou à éla-borer ;

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10. les modalités d’articulation entre apprentissage for-mel, non formel et informel ;

11. l’auto-évaluation de l’activité didactique.Le choix de la réforme des programmes par le systè-

me des curricula abandonne ainsi les anciens programmesqui n’étaient que des «listings» proposant des contenusinadaptés et un sommaire plus ou moins complet.

Le système curriculaire prend en compte l’ensembledes différents paramètres qui entrent dans la composi-tion d’un programme; les apprenants, mais aussi leurenvironnement (social, économique, culturel...), lestenants et aboutissants de toute formation spécifique, lesbesoins des populations, les débouchés, les profils d’en-trée et de sortie. Bref, la réforme propose des pro-grammes adaptés à chaque secteur d’activité et à chaquegroupe-cible donné.

5. Mode d’organisation de l’apprentissage

Les programmes élaborés selon le système des curriculasont plus performants, parce que les stratégies utiliséespour leur élaboration ainsi que les pédagogies spéci-fiques (pédagogie par objectifs, active...) prennent réel-lement en compte les problèmes posés par l’apprentissa-ge et la formation. Une fois le choix fait, la stratégie del’approche curriculaire exige plusieurs directions derecherche. Ces directions s’orientent selon :● les objectifs généraux et objectifs opérationnels ; ● les profils des apprenants ; ● l’environnement social, culturel, économique ; ● les profils de sorties ; ● les contours des programmes ;● le mode d’apprentissage ;● les profils et la formation des enseignants ;● l’élaboration des manuels et documents didactiques ;● le choix de pédagogies appropriées ;● l’interdisciplinarité, afin d’établir un pont entre les

disciplines enseignées, en permettant une circulationdynamique des idées entre enseignants et apprenants.

6. Place accordée à l’approche interdisciplinaire dessujets

Suite aux recommandations formulées lors des Etatsgénéraux de l’éducation et de la formation organisées enRépublique Centrafricaine en juin 1994, le Ministre del’éducation nationale, en coopération avec l’UNESCO,a décidé de mettre en application un programme expéri-mental basé sur l’éducation aux droits de l’homme et àla culture de la paix.

Ce programme, destiné aux élèves des cycles pré-scolaire, primaire et secondaire, a pour but de préparer

les jeunes, porteurs des innovations et des valeurs dedemain, à affronter les grands défis du XXIème siècle quesont : la famine, la guerre, la dégradation de l’environ-nement et la perte de la dignité humaine.

Ainsi, grâce au système des écoles associées regrou-pant au niveau nationa1 26 établissements scolaires,dont 19 du cycle primaire et 7 du secondaire, les ensei-gnants ont réussi à introduire des éléments instructifsdans les différentes matières, visant à éveiller l’engage-ment des jeunes et à les encourager à prendre conscien-ce des problèmes mondiaux. Le projet vise également àstimuler l’imagination et la créativité des enseignants etdes élèves, afin d’enrichir la pédagogie liée à l’éduca-tion aux droits de l’homme, à la paix et à la protectionde l’environnement, selon les approches multidiscipli-naires et interdisciplinaires.

Il convient de noter qu’en décembre 1998, leMinistre de l’éducation nationale a organisé un séminai-re-atelier de formation, afin de permettre aux ensei-gnants de préparer un certain nombre de matérielsdidactiques. Ces deniers apporteront aux élèves desconnaissances précises et les encourageront à acquérirles savoirs, afin qu’ils puissent décider et agir avecmaturité.

Bibliographie

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Centre international d’études pédagogiques. 1999. Ledroit à l’éducation: vers de nouveaux contenuspour le XXIè siècle. Revue internationale del’éducation (CIEP, Sèvres, France), n° 24,partie 1, décembre.

Kraevskij, L.Y., et al. 1985. La théorie du contenu desprogrammes d’enseignements en URSS. Paris,UNESCO. 127 p.

Marger, R.I. 1977. Comment définir des objectifs péda-gogiques. Paris, Édition Bordas. 131 p.

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——. 1999. Plan national de développement de l’édu-cation 2000-2001. Bangui. 144 p.

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Rassekh, S. ; Vaideanu, G. 1987. Les contenus de l’édu-cation. Paris, UNESCO. 311 p.

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Page 59: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

I. INTRODUCTION

En guise d’introduction à ce survol de la réforme de l’en-seignement élémentaire au Sénégal, il peut d’entrée enêtre retenu que cette réforme a démarré en réalité dès ledébut des années 1980. Au-delà de ses multiples facettes,elle est caractérisée par le fait qu’elle a été traversée toutau long de son développement par un souci permanentd’évolution vers une approche curriculaire. De ce fait, leSénégal aujourd’hui envisage la mise à l’essai d’un nou-veau curriculum de l’école de base dont le contenu pres-criptif a été largement préparé par les phases antérieures:classes, écoles pilotes dans le cadre du concept d’écolenouvelle ; et, plus récemment, depuis 1998, progressionvers une approche curriculaire définie en fonction descompétences.

II. APERÇU SUR LE PROJET D’ECOLE NOUVEL-LE AU SENEGAL

A l’issue des Etats Généraux consacrés à l’éducation et àla formation (EGEF) en 1981, de nouvelles missionsdécoulant du consensus national ont été assignées ausystème éducatif national, afin que l’école Sénégalaisedevienne :● une école nationale et démocratique, au service du

peuple ;● une école ouverte sur le milieu, intégrant à la fois

l’apprentissage des langues nationales et le travailproductif pour mieux sécuriser l’enfant en l’enraci-nant d’abord dans sa culture nationale ;

● une école laïque et tolérante, intégrant l’éducationreligieuse ;

● une école visant chez l’enfant le développement dusavoir (connaissances), du savoir–faire (aptitudes etcompétences) et du savoir-être (attitudes), pourgarantir l’épanouissement de l’enfant dans un mondeen perpétuelle mutation.

Pour traduire ces vœux exprimés lors de ces impor-tantes assises, le Ministre de l’éducation nationale, parl’intermédiaire de la Direction de la réforme de l’édu-cation et la formation (DREF) a décidé d’élaborer etd’expérimenter de nouveaux programmes. Ceux-ciseraient déclarés en conformité avec la philosophiegénérale du projet d’école nouvelle défini par les Etatsgénéraux.

Un cadre expérimental comportant divers élémentsfut mis en oeuvre. Il convient de souligner qu’il s’agitd’une expérience et non d’une expérimentation. En effet,les critères devant guider l’évaluation terminale et unschéma-type doublé de justification des choix opérés nefurent pas définis au préalable.

L’Institut national d’étude et d’action pour le déve-loppement de l’éducation (INEADE) fut chargé d’opéra-tionnaliser ce projet, ce qui consista à introduire touteune panoplie d’innovations d’ordres institutionnel, struc-turel et pédagogique. Ces innovations feront l’objet duprésent développement.

1. Caractéristiques des contenus des nouveaux pro-grammes définis pour l’école nouvelle

Elaborés par différentes commissions spécialisées, lesnouveaux programmes ont les caractéristiquessuivantes :● une nouvelle orientation pédagogique, à savoir l’en-

trée en pédagogie par les objectifs;● une révision de la notion de programme devant

désormais être approchée sous l’angle de profit, àl’issue de chacune des différentes étapes (3) du cyclefondamental de l’école nouvelle;

● une intégration de la formation pratique comme acti-vité de formation;

● une intégration de certaines disciplines (histoire, géo-graphie, sciences) dès la première étape (CI - CP);

● les nouveaux programmes visent une meilleureréconciliation de l’école avec son environnement etconcernent toutes les disciplines d’enseignement.

2. Le cadre expérimental des nouveaux programmes

Le dispositif expérimental arrêté par les experts a identi-fié cent classes, choisies dans les dix régions administra-tives du Sénégal. Ces classes, appelées «classespilotes», durent mettre en application ces programmespilotes expérimentaux à partir de l’année scolaire1987/88. Ceci se déroula sous la supervision de la DREFet avec l’accompagnement technique et méthodologiquede l’INEADE, chargé d’introduire les innovations néces-saires pour marquer les changements attendus.

Les classes pilotes étaient réparties de la manière sui-vante:

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Sénégal

Cheick Diakhate, Serigne Fall et Souleymane N’Diaye

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● 25 classes de cours d’initiation (CI); ● 25 classes de cours élémentaire 1ère année (CE1); ● 25 classes de cours élémentaire 2 ème année (CE2); ● 25 classes de petite section pour l’éducation présco-

laire.

Le choix des maîtres et des classes a été opéré par lecorps de contrôle, à partir de critères de compétences,d’expérience et de dévouement aux idéaux de l’écolenouvelle.

On veilla également à une répartition représentativeentre milieux urbain et rural.

Enfin, on choisit, à côté des classes pilotes devantappliquer les nouveaux programmes, des classes ditestémoins travaillant sur les anciens programmes.

3. Les documents pédagogiques de mise en oeuvre

Deux documents fondamentaux ont été élaborés pouraccompagner les nouveaux programmes, permettantainsi au personnel désigné d’accomplir la tâche qui leurétait dévolue. Il s’agit du guide pédagogique pour lesclasses pilotes et du programme pour les classes pilotes.

Ce dispositif d’accompagnement a été complété parun programme de manuels scolaires élaborés à partird’un programme éditorial national dès 1989, couvrantainsi les besoins des classes élémentaires (cf. le pro-gramme éditorial de l’INEADE 1988 – 1990). Lesdocuments fondamentaux (guide et programme) rappel-lent les finalités de l’action éducative et les missions del’école, en particulier au niveau de l’éducation présco-laire. Des indications pédagogiques y figurent égale-ment, à l’attention des enseignants.

Les documents mentionnent aussi l’organigrammedu cycle fondamental et fournissent les horaires concer-nant les différentes disciplines.

Le guide méthodologique renseigne sur les objectifsgénéraux, spécifiques et opérationnels relatifs à chacunedes disciplines tout en édictant un certain nombre deconseils méthodologiques à suivre. Les objectifs péda-gogiques à atteindre par les élèves à la fin de chacunedes différentes étapes ont été définis au niveau du docu-ment des programmes des classes pilotes, à la fin dechacune des différentes étapes, à l’aide d’un inventaired’items.

4. Les séminaires préparatoires de mise en oeuvre

Un premier séminaire d’information et de sensibilisa-tion a été organisé pour les membres des corps decontrôle de l’école élémentaire et de l’éducation présco-laire (2 et 3 septembre 1987 - ENDR - THIES). Ceséminaire a permis aux inspecteurs de réfléchir sur lesinnovations introduites par ces nouveaux programmes etsur les problèmes soulevés par leur application.

Un deuxième séminaire de sensibilisation et de for-mation à l’endroit des directeurs et des maîtres désignéspour expérimenter les nouveaux programmes s’estdéroulé du 30 septembre au 3 octobre 1987 à Saly(Mbour). II devait assurer une bonne initiation à la péda-

gogie par les objectifs (PPO) qui constitue le référentielméthodologique des nouveaux programmes.

Enfin, un séminaire visant les mêmes objectifs queceux cités plus haut a été organisé à Dakar pour les acteursqui n’avaient pu participé aux deux premiers séminaires.

5. Les stratégies d’application des nouveaux pro-grammes

L’application concerne essentiellement les tâches decoordination, d’encadrement et de suivi relatif à la miseen oeuvre des nouveaux programmes dans les classespilotes. La coordination nationale de l’expérimentationfut assurée par la DREF.

Au niveau régional, un coordonnateur régional futdésigné et une cellule départementale de suivi consti-tuée. L’encadrement et le suivi revinrent aux inspecteursdésignés et aux directeurs impliqués, avec l’appui despersonnes-ressources présentes aux niveaux local etnational (INEADE, Ecoles de Formation).

Les interventions s’opéraient sous forme de séancesd’animation pédagogique, de visites de classes et d’or-ganisation systématique de stages stratifiés.

III. ANALYSE CRITIQUE DE LA REFORME

Cette phase peut être circonscrite essentiellement entrois axes :1. les objectifs ;2. les stratégies de mise en œuvre ;3. les résultats tirés de la première phase (qui a duré

deux ans).L’absence d’un schéma d’évaluation terminale signaléeplus haut conduit à limiter notre analyse aux deux pre-mières années sur lesquelles porta une évaluation àmi-parcours. Sans prétendre aller en profondeur dansl’analyse des acquis et des limites de l’expérimentation,nous nous contenterons de retenir quelques grandesidées ou lignes fortes dégagées lors de la première éva-luation d’étape opérée par une équipe de spécialistes àl’INEADE, après deux ans de mise en oeuvre des inno-vations introduites par la Réforme.

1. Les objectifs de mise en oeuvre

La clarté et la pertinence des objectifs de la Réforme ontété confirmées dans une conclusion tirée de la premièreévaluation. En effet, dans le document de synthèse, onpeut lire que «(l)a majorité des maîtres, directeurs, ins-pecteurs, déclarent que l’encadrement et le suivi organisésrespectivement par l’INEADE et les comités régionaux etdépartementaux sont efficaces et ont aidé de manièrepositive au déroulement de l’expérimentation, ce qui sup-pose une perception claire par les acteurs des objectifs etde la ligne d’orientation tracée par la Réforme.»

2. Les stratégies de mise en oeuvre

L’analyse porte essentiellement sur l’instrumentation dela réforme, sous son volet pédagogique.

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Le rapport signale que les documents pédagogiquesque sont le guide pédagogique et les nouveaux pro-grammes ont facilité l’expérimentation. En effet, ils ontpermis la diffusion de nouvelles techniques et d’indica-tions méthodologiques efficaces.

Toutefois, des améliorations relatives à l’opération-nalisation des items, à la gestion du temps et à l’ap-proche modulaire y sont vivement souhaitées. Parailleurs, y sont également suggérés des indices d’amé-lioration, pour ne pas dire de remise en cause de laréforme, notamment avec l’introduction du paramètreconsacré à la gestion des innovations. La formationdes maîtres fait également l’objet de commentaires critiques.

3. Les résultats et les acquis de la réforme

Les résultats scolaires des élèves constituent le pointfocal de l’évaluation des résultats. Les conclusions tiréesdes tests menés à cet effet indiquent que le niveau desélèves des classes pilotes n’est pas inférieur à celui desélèves des classes témoins (ou classes traditionnelles).Au contraire, il semble que le niveau des élèves desclasses pilotes soit légèrement supérieur. Aussi, lesélèves des classes pilotes ont acquis de nouveauxsavoirs; par contre, l’acquisition de nouveauxsavoir-faires paraît moins évidente.

Concernant le développement de l’innovation, lamajorité est favorable à la poursuite de l’expérimenta-tion, mais seule une infime minorité est acquise à sagénéralisation. Ainsi, une série de propositions a été for-mulée pour un développement plus efficace de l’innova-tion, qui soit davantage en rapport avec la formation.Une meilleure formation est exigée pour les acteurs etles animateurs, à savoir les inspecteurs, les directeurs etles maîtres des classes pilotes.

IV. QUELQUES PROBLEMATIQUES SOULEVEESPAR LA REFORME

Sous ce registre, notre analyse portera sur les change-ments nés de la réforme en rapport avec les réalitéslocales d’une part ; et avec l’environnement pédagogiqueen évolution, d’autre part.

1. Réforme et réalités locales

Au titre des innovations institutionnelles, la mise enoeuvre de la réforme a introduit, entre autres innovationsinstitutionnelles, la création à la base de structureslocales chargées de faciliter et de pérenniser le projet.Parmi celles-ci, signalons :● la cellule école-milieu ;● la coopérative scolaire ; ● l’équipe pédagogique.Ce sont là des instruments indispensables à la gestion duprojet sous ses multiples formes. Ces structures qui s’imbriquent constituent des sphères de conception etd’exécution, de prise en compte des besoins réels despopulations locales. Décentralisation, participation,

responsabilisation sont les concepts permettant à laréforme de s’articuler par rapport aux réalités locales.

Le projet d’école, véritable creuset de compétences,est une manifestation concrète de l’école nouvelle,tirant toute sa substance et ses ressources desdites ins-tances.

2. Réforme et environnement pédagogigue

L’année 1987 marqua le début de l’expérimentationdes nouveaux programmes dans les classes pilotes.Ceci conduisit les concepteurs à visiter de nouveauxdomaines dans le champ éducationnel pour mettre enoeuvre la pédagogie par objectifs (PPO). Par ailleurs,les maîtres furent initiés à la maîtrise de nouvellestechniques d’enseignement et d’apprentissage :approche modulaire, gestion des grands groupes, péda-gogie par alternance travail productif, etc. L’année1987 a été également celle du lancement du program-me éditorial national, en tant que stratégie d’accompa-gnement, comme l’avaient recommandé les Etatsgénéraux.

La conception et l’élaboration de nouveaux manuelsadaptés aux réalités locales sénégalaises (collection, Sidiet Rama) est marquée par la spécificité suivante: lesmanuels sont élaborés à partir de corpus de programmesanciens et nouveaux.

Néanmoins, le fait le plus marqué reste la mise surpied d’un partenariat actif au sein de la communautééducative par l’instauration de la cellule école-milieu(CEM) dans certaines écoles appliquant les pro-grammes pilotes. La cellule école-milieu a été un fac-teur déterminant pour l’élaboration du projet d’école en1987.

Mais, en 1991, notre réforme a opéré un saut qualita-tif et quantitatif pour passer de l’entité de classe piloteàcelle d’école pilote, marquant ainsi l’intégration d’unetechnologie éducative.

En résumé et de façon schématique, notre projet deréforme, tel qu’il apparaît à travers l’école-pilote intro-duit des changements selon les deux axes d’innovationsprésentés ci-dessous.

2.1. Les innovations d’ordre structurel notamment liées à:

● L’organisation des instances chargées du pilotage :

– Cellule de coordination nationale de la réforme(DPRE - INEADE - DEPEE) ;

– Commission nationale d’étude et de concertation etde suivi (CNECS) ;

– Commission nationale du programme ;– Comité de pilotage (aux niveaux régional et départe-

mental).

● L’organisation de l’école :

– classes à double flux avec activités intra et extramuros ;

– cours multigrades dans les zones déshéritées ;– classes pilotes appliquant les nouvelles techniques

d’enseignement et d’apprentissage.

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Page 62: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

2.2. Les innovations pédagogiques en rapport avec:

● Les contenus enseignés :

– nouveaux programmes formulés en items fondés surla pédagogie par objectifs (P.P.O) ;

– l’enseignement des langues nationales ;– l’introduction de la formation pratique comme nou-

velle discipline de formation.

● Les approches et techniques pédagogiques :

– la PPO comme entrée en pédagogie ; – l’évaluation des apprentissages à partir des critères

définis ;– l’approche modulaire;– la pédagogie par alternance (PPA) ;– la pédagogie des grands groupes ;– la pédagogie par projet (PPP) ;– les techniques d’intégration, d’enseignement et de

production grâce au projet d’école.

● Les nouveaux supports didactiques :

– conception et réalisation de supports didactiques àpartir de matériaux locaux;

– conception de manuels scolaires adaptés par uneunité éditoriale locale en partenariat avec les acteursdu terrain.

Conformément à ce qui se dégage du présent développe-ment, la réforme du système éducatif s’est déployéeselon un schéma, une planification. Tout au long de sonprocessus, elle a procédé à une intégration progressiveet opportune de nouveaux concepts ou de contenus,selon les derniers résultats de recherches. Elle est doncrestée flexible et ouverte, ce qui lui a permis de franchirles résistances propres à toute action de réforme.

Cependant, notre schéma expérimental ne saurait taireses difficultés inhérentes à toute recherche, notamment enrapport avec le milieu local. Tantôt c’est la dimension ins-titutionnelle qui prend le pas, tantôt c’est le volet pédago-gique. Pour ne pas privilégier l’une par rapport à l’autre,nous avons préféré procéder à un recentrage des objectifssur l’enfant, qui représente in fine la seule raison d’être duprojet. A ce titre, la pertinence des apprentissages doitnous préoccuper en premier lieu.

Au plan pédagogique, les démarches participative etintégrative de savoirs nous intéressent également. C’estpourquoi, en attendant les résultats d’une évaluation plusglobale du projet, nous préférons, à partir d’indices tirésdu terrain, dégager de nouvelles pistes de réflexion ou derecherche pour parer à certaines dérives de projets.

Cet axe de recherche, centré sur l’organisation descontenus, nous ouvre la piste des nouveaux curriculaqui, en réalité, ne sont rien d’autre qu’une réorganisa-tion du savoir, du savoir-faire et du savoir-être, déjà défi-nis lors de la première phase de notre réforme.

V. PROCESSUS D’ELABORATION DES CURRI-CULA AU SENEGAL (à partir de 1998)

Les programmes scolaires constituent le référentiel debase de la réforme. Le projet d’élaboration des curricula,

initié par le ministère de l’éducation nationale pour lesbesoins d’une éducation de base, s’inscrit dans la mêmedynamique que celle du nouveau programme évoquéjusqu’ici. Néanmoins, le processus s’avère plus com-plexe, sensible et délicat. Toutefois, il n’existe pas dedichotomie, ni de contradiction entre les deux projets,mais bien plus une complémentarité. L’un alimentel’autre tout en l’enrichissant.

Dans notre développement, nous rappelleronsquelques conclusions tirées des premiers résultats deconcertation nationale sur les nouveaux curricula. Cesderniers servent de cadre d’action pour notre école debase pour la décennie en cours (2000 - 2010).

Nous évoquerons ainsi trois points essentiels : pre-mièrement, la justification de la rénovation des pro-grammes; deuxièmement, la méthodologie d’élabora-tion des curricula; et enfin, troisièmement, laproblématique des curricula (manuels scolaires).

1. Justification de la rénovation des programmes encours

La rénovation des programmes (anciens et pilotes) envigueur dans notre système éducatif trouve sa justifica-tion dans la conception et la mise en oeuvre d’un pro-gramme fondamental pour notre éducation de base,conformément aux recommandations issues des ren-contres de Jomtien et de Harare.

Un tel projet cherche à contribuer à l’améliorationsignificative et efficace de la satisfaction des besoinsfondamentaux, en tenant compte des mutations interve-nant dans les différents secteurs de la vie. Un projet derénovation curriculaire est donc la version enrichie denotre modèle d’école nouvelle. La construction d’uncurriculum représente par conséquent une traductionconcrète de cette préoccupation.

Pour rendre les programmes (anciens et nouveaux)plus pertinents, les apprentissages des élèves ont étéorientés vers des acquis fonctionnels, permettant desatisfaire les besoins fondamentaux. En d’autres termes,il convient désormais de donner du sens à l’éducation debase.

Bref, l’école doit jeter les bases d’une éducationdurable, en vue de favoriser l’épanouissement individuelet collectif.

2. Méthodologie d’élaboration des curricula

Matérialisé par des livrets programmes rendus aujour-d’hui disponibles, le projet d’élaboration des curriculacapitalise les acquis des innovations pédagogiques àl’œuvre dans les écoles pilotes. Il s’appuie sur la péda-gogie du projet, la pédagogie par alternance et la péda-gogie par objectifs tout en dépassant celles-ci grâce àl’adoption d’une «pédagogie de l’intégration» qui meten relief l’approche par compétence à partir de situa-tions-problèmes. Ceci relève donc d’une réorganisationdes différents éléments structurants de l’éducation debase à prendre en compte pour marquer l’unité de

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Page 63: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

celle–ci. En effet, les finalités, les objectifs, les contenus,les méthodes et les techniques d’enseignements, ainsique les matériels didactiques entretiennent dans le projetd’étroits liens de cohérence.

Les regroupements et les mises en relation concer-nent aussi bien les niveaux et les formes d’éducation queles langues retenues, les domaines et activités d’appren-tissage des programmes en vigueur et en cours d’expéri-mentation ou de généralisation.

Enfin, les programmes curriculaires ont été réali-sés avec la participation étroite des principaux acteursde notre système éducatif. Une vaste mobilisationsociale autour d’un programme a créé une offre deressources susceptible de poursuivre tout au long duprocessus d’élaboration et de mise en oeuvre du pro-jet. Ainsi, l’approche participative qui sous-tend leprogramme doit pouvoir garantir sa dynamique devalidation interne et externe.

Dans le même ordre d’idées, l’accompagnementscientifique et technique et, plus tard, la mise à l’essaisur le terrain ou l’expérimentation sont prévus pour unemise à l’épreuve plus efficace des nouveaux produits.

L’esquisse du programme s’est déroulée en 3 phases :1. la phase exploratoire a permis de mettre en place les

structures de gestion du projet, d’identifier les diffé-rentes ressources et contraintes, de dégager le cadreconceptuel permettant de procéder au diagnostic dusecteur ;

2. la phase de collecte des données confiée aux com-missions techniques disciplinaires, qui ont procédé àla critique des programmes et des manuels existantsavant de dégager de nouvelles compétences et desobjectifs pour les nouveaux programmes ;

3. le traitement des données réalisé par un comité d’har-monisation et de rédaction des nouveaux pro-grammes en étroite collaboration avec le comité depilotage et l’accompagnement technique et scienti-fique.

L’esquisse des programmes s’est achevée par un partagedu produit avec les différents acteurs nationaux permet-tant ainsi d’arriver à une validation interne des proposi-tions à élaborer avec les régions. Ce nouveau curriculumsera mis à l’essai à compter de l’année 2000 - 2001. Lesprogrammes qui seront mis à l’essai dans le cadre de lanouvelle approche curriculaire prennent en compte demanière plus systématique les « compétences de vie cou-rante » liées à la citoyenneté, à l’environnement, à lasanté et à l’économie domestique.

3. Elaboration des programmes et conception desmanuels scolaires

La rénovation des programmes, initiée dans le cadre del’école nouvelle, a donné lieu à la définition des pro-grammes pilotes. II s’agissait, dans ce projet, d’amé-liorer les contenus d’enseignement en rapport avec lecontexte local d’alors et en rapport avec les défis mon-diaux. Cela a conduit à une revue des anciens pro-grammes et manuels en vue d’en corriger les distor-

sions ou encore afin de les enrichir de concepts nou-veaux.

La réalisation des objectifs de la réforme sous cetangle a permis d’intégrer le développement d’une véri-table politique éditoriale nationale. Cette dernière a per-mis les résultats suivants :● l’élaboration de nouveaux manuels adoptés aux réali-

tés locales ;● la couverture de notre système en manuels scolaire

dans l’ensemble des disciplines fondamentales ;● la diffusion de certaines techniques pédagogiques à

travers la conception et l’élaboration de nos manuels.

Aujourd’hui, avec l’avènement du nouveau cadreconceptuel qu’est le curriculum, le Sénégal est à mêmede s’inscrire dans la dynamique actuelle, en puisantdans son expérience du projet Education IV. La mêmelogique d’articulation est d’ailleurs à l’œuvre. La ques-tion centrale à laquelle il convient de répondre aujour-d’hui est : quel nouveau manuel pour une approche cur-riculaire ?

Si les fonctions classiques, voire essentielles d’unmanuel scolaire demeurent la transmission de connais-sances, force est de reconnaître qu’aujourd’hui, face auxnouveaux défis, un recentrage des besoins sociaux s’im-pose. Une structuration d’un manuel plus opérant devraitdonner un autre profit, prenant en compte la demandesociale traduite en terme de contenus, de programmes etbâtie selon le cadre logique.

Références

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—— 1989. Analyse critique des nouveaux programmesdans les classes pilotes Enseignement Elémentaireet Education Préscolaire. Dakar, INEADE. 86p.

—— 1985. Mise en place dune politique de classe àdouble flux et de classe à cours multiples : analysedes possibilités et modalités d’une utilisationintense des ressources humaines. Dakar, INEA-DE. 93 p.

Herzoc, Jhon. R Détermination du niveau des classes àdouble flux et des classes témoins : année scolaire1984 –1985. Dakar, INEADE.

Herzoc, Jhon. R. 1984. Pour l’introduction d’un systèmede classes à cours multiples Bans l’enseignementélémentaire au Sénégal.Dakar, INEADE. 378 p.

Institut national d’étude et d’action pour le développe-ment de l’éducation (Sénégal). Rapport de l’éva-luation d’étape du FDS Bans 24 écoles desrégions de Diourbel - Louga – Tamba. Novembre1999. Dakar, INEADE. 59 p.

Institut national d’étude et d’action pour le développe-ment de l’éducation/SEDER. 1997.ProjetSNERS: l’Evaluation du rendement pédagogiquedu français dans l’enseignement primaire: les

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Page 64: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

résultats au CM2 rapport final.Dakar, INEADE.56 p.

Institut national d’étude et d’action pour le développe-ment de l’éducation/SEDER. 1988. ProjetSNERS: l’Evaluation du rendement pédagogique

des mathématiques dans l’enseignement primai-re, les résultats et commentaires au CM2. Dakar,INEADE. 152 p.

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Demande sociale

EVALUATION

OBJECTIFS

Compétence de base

Support /situation/domaine

Domaine d’activité

1 2 3 4

Page 65: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

I. INTRODUCTION

Le Gouvernement de la République du Tchad a inscrit lavalorisation des ressources humaines au premier rang deses priorités. Le Plan d’orientation «le Tchad vers l’an2000», adopté en 1991, marque la volonté duGouvernement de satisfaire le droit légitime des citoyensà l’éducation et à la formation, dans la perspective del’accès à l’emploi rémunéré ou à l’auto-emploi, commel’un des axes majeurs de sa politique de développement.Cette politique s’est matérialisée par la tenue àN’Djaména les 7 et 8 novembre 1990 de la consultationsectorielle consécutive à la Table Ronde de Genève III,au cours de laquelle le Tchad a proposé à ses partenairestechniques et financiers de conduire, d’ici la fin dusiècle, une nouvelle politique de valorisation des res-sources humaines sous la forme d’une stratégie dénom-mée Stratégie d’Education et de Formation en liaisonavec l’Emploi (EFE).

La Stratégie EFE vise l’amélioration qualitative etquantitative du système d’éducation et de formation àfinalité d’emploi. La priorité a été accordée à l’éducationde base (enseignement élémentaire à l’alphabétisationdes adultes), à l’enseignement technique et la formationprofessionnelle. Cette priorité n’est pas synonyme d’ex-clusivité, c’est pourquoi il est prévu l’amélioration de laqualité des enseignements et des apprentissages à tousles niveaux.

Depuis la mise en exécution de la Stratégie EFE àpartir de 1991, et plus particulièrement la réunion depositionnement des partenaires techniques et financiersen juin 1993, le secteur de l’éducation et de la forma-tion a enregistré des résultats fort appréciables parendroits. A l’occasion de la tenue de la IVème TableRonde de Genève sur le Tchad, le Gouvernement a pro-cédé à une évaluation de la Stratégie EFE qui a toute-fois aussi relevé que certains taux de réalisation desobjectifs initiaux restent encore faibles. Plusieurs rai-sons ont été évoquées pour expliquer ces résultats.L’insuffisance de financement de certains sous-pro-grammes (notamment l’enseignement technique et laformation professionnelle ainsi que l’enseignementsupérieur et la recherche) a été identifiée comme raisonmajeure des difficultés constatées à mi-parcours dans lamise en œuvre de la Stratégie EFE.

Partant des orientations contenues dans le documentde base «Options stratégiques de développement 1998-2000» présenté à la IVème Table Ronde de Genève etdans la perspective de la réunion sectorielle de suivi surl’éducation et la formation de janvier 2000, leGouvernement a proposé à ses partenaires un réajuste-ment des sous-programmes de la Stratégie EFE. Ceréajustement tiendra compte à la fois des conclusions deson évaluation et des résultats de huit études théma-tiques réalisées récemment. A cet égard, deux docu-ments fondamentaux ont été préparés : le premier docu-ment a établi le diagnostic de la situation du secteur del’éducation et de la formation et énoncé des stratégiesde développement du secteur pour les cinq prochainesannées (2000-2004) ; et le second a présenté un pro-gramme d’actions couvrant la période indiquée, il estconstitué de sept composantes d’un coût global estimé à156 milliards de Francs CFA.

II. LA REFORME DU SYSTEME EDUCATIF TCHADIEN

1. Evolution des années 60 à nos jours

L’école tchadienne dans sa forme actuelle a connu plu-sieurs tentatives de réformes visant à la rendre plus per-formante et mieux adaptée aux réalités du pays.

En 1962, les programmes ont été revus en termes de«tchadisation» des contenus, suite à l’indépendance dupays en 1960.

En 1966, la ruralisation de l’enseignement a été déci-dée par le Gouvernement. Cette ruralisation consistait àintroduire, en plus des matières prévues dans les pro-grammes de 1962, des activités ayant trait au monderural et au civisme. Très vite tournée en dérision, la rura-lisation de l’enseignement s’est éteinte deux ans seule-ment après son lancement.

Dans la même année, l’Assemblée Nationale votaune loi portant réforme du système éducatif. Dans cecadre, le Tchad essaya à titre expérimental, un nouveauprogramme d’enseignement visant l’intégration de l’en-fant dans son milieu.

Entre 1966 et 1972, un programme de réforme del’enseignement primaire fut animé par le Groupe deRecherche Pédagogique (GRP), un service du Ministèrefrançais de la coopération. Il se déroula en trois axes:

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Tchad

Abderamane Koko et Goloun Dewa

Page 66: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

1. la rénovation de l’enseignement du français commelangue étrangère;

2. l’introduction de «l’étude du milieu» pour amenerles enfants à s’interroger sur leur environnement;

3. la rénovation de l’enseignement des mathématiquesavec en particulier, l’introduction de la logique oumathématique moderne.

L’idée globale de cette reforme était de développer laliaison entre la production agricole et l’éducation. Maiscette réforme, au lieu de favoriser la promotion des tra-vaux pratiques à l’école, a plutôt insisté sur le dévelop-pement de la langue française parlée. Ce projet de réfor-me se solda en échec en 1972.

En 1973, à la demande du Gouvernement tchadien,une commission conjointe Tchad-FAC-UNESCO-UNI-CEF s’est réunie à Fort-Lamy (actuel N’Djaména) pourétudier les possibilités de mettre en place un systèmeéducationnel à la fois rentable et adapté aux réalitéssocio-économiques du pays. Les réflexions de cettecommission ont abouti à la création de l’InstitutNational des Sciences de l’Education (INSE) en 1975.La mission de l’INSE est de «préparer et d’assurer laréforme de l’enseignement».

En 1978, un nouveau système d’éducation a été ins-titué par voie d’ordonnance qui dit que «le but principaldu système éducatif est de faire acquérir aux individuset aux collectivités nationales et locales des informa-tions, des savoirs, des comportements, des attitudes, descompétences et des valeurs pouvant les rendre capablesd’assurer le développement et leur bien-être comptetenu de l’orientation politique et sociale du pays». Cetteréforme n’aura pas lieu à cause de la guerre civile inter-venue en 1979.

En 1990, le Gouvernement tchadien adopte une nou-velle politique éducative dénommée Stratégied’Education et de Formation en liaison avec l’Emploi(Stratégie EFE). La Stratégie comporte une série demesures visant le développement du secteur d’éducationde 1990 à l’horizon 2000. Parmi le train de mesuresédictées, la rénovation des programmes de l’enseigne-ment figure en bonne place. A partir de la même année,des innovations pédagogiques sont introduites dans lesystème éducatif à titre expérimental dans le but deprendre en compte les problèmes du monde contempo-rain dans les programmes scolaires. Ces innovationsportent sur l’éducation environnementale, la population,la santé et les droits de l’homme.

En 1994, les Etats généraux de l’éducation nationaletenus du 19 au 29 octobre 1994, à N’Djaména, recom-mandèrent la rénovation des programmes.

En avril 1997, le Ministère de l’éducation nationale acréé, par arrêté N°126/MEN/SE/DG/DEE/97, du 22 avril1997, une commission nationale et des commissionslocales de rénovation des programmes de l’enseigne-ment élémentaire. La commission nationale a mis enplace quelques sous-commissions disciplinaires qui onttravaillé sur les programmes du cours préparatoire pre-mière année.

Aucune de ces tentatives n’a donné des résultatssatisfaisants. La question de la rénovation des pro-grammes demeure entière. C’est dans ce contexte que leMinistre des enseignements de base, secondaire et del’alphabétisation a désigné quelques cadres pour uneconcertation sur la rénovation des programmes de l’éco-le de base.

2. La réforme actuellement en vigueur

Les principaux axes de la réforme La réunion sectorielle EFE de novembre 1990, au coursde laquelle le Tchad a présenté une politique d’éduca-tion et de formation, répond à deux orientations fonda-mentales:1. une stratégie à but qualitatif visant l’amélioration du

rendement du système par la revitalisation des struc-tures d’éducation et de formation existantes ;

2. une stratégie à but quantitatif visant une expansionmodérée des effectifs scolaires et universitaires,mais permettant d’assurer le continuel ajustement del’accroissement démographique aux réalités écono-miques et socio-culturelles du pays.

Les caractéristiques fondamentales de la réformeLe présupposé de départ est que les systèmes éducatifsdes pays africains situés dans la région subsaharienneont en commun certaines caractéristiques dont unefaible efficacité interne et externe ; d’énormes disparitésentre sexes, régions et couches sociales; la rigidité desappareils d’enseignement et de formation; l’inadéqua-tion des formations aux besoins de l’économie; et, uneinsuffisance des ressources financières, humaines etmatérielles dans un contexte de forte pression démogra-phique.

Les solutions préconisées pour supprimer ces distor-sions n’ont pas donné de résultats spectaculaires.L’expansion quantitative a pris le pas sur la qualité del’éducation, les taux d’analphabétisme sont toujours éle-vés, les disparités fortes et la misère croissante.

Il n’existe de remède magique. Il faut revoir les stra-tégies de développement des ressources humaines et lescadrer dans un plan de développement national, en par-faite cohérence avec les contraintes budgétaires et envi-ronnementales, ainsi qu’avec la capacité d’absorption etde gestion du pays. Selon cette logique, convaincu que«des femmes et des hommes instruits et en bonne santésont, non seulement la ressource fondamentale à la basede l’accroissement et de la production, mais égalementla conscience novatrice qui permet la maîtrise de lascience, le progrès et partant, le développement», leTchad a inscrit, à l’instar des autres nations du monde,le développement des ressources humaines commel’une de ses priorités.

La politique d’éducation et de formation conçue àcet effet met un accent particulier sur les relations dusystème éducatif et de formation et le système de l’em-ploi. Dans ce cadre, la formation professionnelle, posté-rieure et complémentaire au processus éducatif est éga-

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Page 67: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

lement traitée comme un droit et source de sa réalisationpersonnelle par l’exercice d’un emploi qualifié. A partirdes acquis de l’enseignement élémentaire, le systèmedoit mettre en place des formations qui préparent lesadolescents et les adultes aux connaissances générales ettechniques nécessaires à l’exercice de nombreuses pro-fessions. La formation et le perfectionnement profes-sionnel, fonctionnent en modalités de transition versl’emploi ou l’auto-emploi, répondant aux impératifsd’insertion au marché du travail, tant formel que non for-mel, urbain et rural.

La stratégie proposée repose essentiellement sur unepolitique de concertation tripartite entre l’Etat, lesemployeurs et les travailleurs au sein des institutionsattachées à la valorisation des ressources humaines. A cetitre, l’ensemble du dispositif de formation technique etprofessionnelle doit assurer une fonction d’interfaceentre l’appareil national d’enseignement général et lemonde de l’emploi.

La politique d’éducation et de formation, qui s’ins-crit dans le cadre global de la lutte contre la pauvreté,sous-tend le programme d’action, sur la période 2000-2004, et présenté en janvier 2000. L’objectif général estd’assurer la promotion des ressources humaines parl’éducation et la formation, afin de créer les conditionspermettant aux populations de jouer effectivement leurrôle de moteur dans le processus de développementsocio-économique du pays. L’accent est mis sur l’en-seignement de base (primaire, alphabétisation) et à l’in-térieur les écoles communautaires, puis sur l’enseigne-ment technique et la formation professionnelle. A cessous-secteurs prioritaires s’ajoutent l’enseignementsecondaire général, l’enseignement supérieur et lesous-secteur consacré à la culture, la jeunesse et lessports.

Trois objectifs spécifiques correspondant aux troisaxes stratégiques de la politique d’éducation et de forma-tion ont été définis par sous-secteur :1. améliorer l’accès à l’éducation et à la formation ;2. améliorer les conditions d’enseignement et d’appren-

tissage ;3. renforcer les capacités institutionnelles de planifica-

tion, de gestion et de pilotage.

Les partenaires impliqués dans la réformeLe processus EFE mobilise les partenaires dont les rôlesrespectifs sont les suivants:● L’Etat définit les grandes orientations et élabore les

stratégies sectorielles qui impliquent les partenairesintérieurs (patronat, syndicats, associations deparents d’élèves (APE), organisations non gouverne-mentales (ONG), collectivités locales, bénéfi-ciaires…), les partenaires extérieurs (bailleurs defonds bilatéraux et multilatéraux) ;

● Le PNUD, en qualité de coordonnateur de toutes lesconsultations sectorielles, maintient le dialogue etfournit l’assistance technique et financière dans lecadre d’un appui institutionnel ;

● L’UNESCO et le BIT dispensent une assistance tech-nique dans le cadre du programme d’appui institu-tionnel du PNUD. Le service allemand pour le déve-loppement (DED) apporte également son appuitechnique au programme.

L’exécution du programme d’action incombe aux direc-tions techniques des ministères concernés. Les structuresnationales contribuent, selon leurs vocations respectiveset leurs capacités propres, à l’élaboration et à l’exécutiondes plans de formation. Pour leur part, les associationsdes parents d’élèves (APE), et les communautés localesqui assurent déjà 95% des frais de fonctionnement (horssalaires) des établissements, continuent à poursuivre,voire intensifier, leur contribution au développement dusystème éducatif. Les nombreuses ONG situées sur leterritoire national sont, en raison de leur approche parti-cipative au niveau des bénéficiaires, davantage impli-quées dans l’exécution des travaux de constructions sco-laires entreprises et apportent un appui précieux ausous-secteur EFE, selon leurs domaines d’intérêt.

Les organes de pilotage de la réformeLe dispositif de pilotage et de suivi de la stratégie et duprogramme national EFE mis en place par décret prési-dentiel de décembre 1993, est constitué d’un ensemble àtrois étages, comprenant :1. une instance politique : le Comité National pour

l’Education et la Formation en liaison avec l’Emploi(CONEFE) ;

2. une structure de soutien: le Secrétariat Exécutif(SE) ;

3. trois organes techniques: l’Observatoire del’Education, de la Formation et de l’Emploi (OBSE-FE) et le Fonds National d’Appui à la FormationProfessionnelle et la Cellule de Concertation et deCoordination (CCC).

Les rôles respectifs de ces organes sont définis commesuit :

Le CONEFE est une instance politique de décision etde coordination, chargée de formuler les orientations etles programmes selon les priorités fixées par leGouvernement. Il doit donc mobiliser les partenaires ins-titutionnels et sociaux ; organiser la concertation des par-tenaires; opérer les arbitrages stratégiques et budgé-taires. Le CONEFE se réunit deux fois l’an en sessionordinaire. Il est placé sous la tutelle du Ministère de laPromotion Economique et du Développement qui enassume la présidence.

Le SE a pour fonctions de coordonner le fonctionne-ment du réseau EFE ; de programmer et superviser lesactivités de l’OBSEFE et du FONAP; d’assurer la cohé-sion et le fonctionnement efficace du dispositif ; d’exécu-ter d’importantes activités d’interface qui doivent favori-ser l’approbation des processus EFE par les institutionsnationales concernées; de s’impliquer dans les négocia-tions budgétaires et de suivre l’exécution correcte desengagements du Gouvernement en termes de contrepartieet de charges récurrentes ; de veiller à l’allocation consé-quente de ressources au budget du sous-secteur.

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Page 68: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

L’OBSEFE est un instrument technique du CONE-FE, placé sous l’autorité du Secrétaire Exécutif. A cetitre, il doit assurer l’interface entre le marché du travail,l’appareil éducatif et les sous-systèmes de formationprofessionnelle. Il dispose d’un Comité de Pilotage (CP)et d’un Groupe Opérationnel d’Appui (GOA) composédes directeurs et des cadres issus des services techniquesimpliqués dans le Programme EFE.

Le FONAP est le second instrument technique duCONEFE, placé sous l’autorité du Secrétariat Exécutif.A ce titre, et en vertu de sa qualité d’établissementpublic doté de la personnalité juridique et de l’autono-mie financière, il doit contribuer au financement du pro-gramme de formation professionnelle et d’apprentissa-ge, répondant aux priorités fixées par le Gouvernementà travers le CONEFE. Il est doté d’un ComitéTechnique (CT) et d’un Conseil de Gestion Tripartite(CGT), composés respectivement des cadres et desreprésentants des pouvoirs publics, du patronat et dessyndicats.Rattachée au Secrétariat Exécutif du CONEFE, laCellule de Concertation et de Coordination (CCC) apour mission de mettre en synergie toutes les ressourcesdisponibles dans les différents sous-systèmes d’ETFP,afin de satisfaire les besoins en main-d’œuvre qualifiéedes secteurs socio-économiques, d’une part, et d’inser-tion professionnelle des groupes cibles dévalorisés,d’autre part.

Les autres partenaires sont les APE constituées, dif-férents représentants de la société civile, dont les syndi-cats ; les artisanats et le patronat.

Brève analyse de la réformePour atteindre les deux buts fixés (quantitatif et qualita-tif), le processus stratégie EFE focalise ses efforts sur ledéveloppement de cinq composantes. Il s’agit entreautres de :1. la Formation Initiale et Continue (FIC) des person-

nels enseignant et d’encadrement afin de satisfaireles besoins de perfectionnement et d’adaptation desenseignants aux nouveaux programmes, manuels,méthodes et modalités des classes multigrades ;

2. la rénovation des programmes d’enseignement, afinde rendre les apprentissages scolaires plus perfor-mants et mieux adaptés au projet de société natio-nal;

3. le matériel didactique : la dotation des élèves et desmaîtres en matériels scolaires sera augmentée defaçon significative. Le choix des titres des manuelsest coordonné avec la rénovation des programmes ;

4. les infrastructures scolaires : les salles de classeseront construites ou réhabilitées en étroite collabo-ration avec les parents d’élèves et les communautéslocales ;

5. les appuis institutionnels : à tous les niveaux du sys-tème, la gestion administrative et l’encadrementpédagogique seront renforcés (formation, organisa-tion et dotation en moyens roulants.

La Stratégie EFE tire son fondement du Plan d’orienta-tion «le Tchad vers l’an 2000»et des recommandationsde la Conférence mondiale sur «l’Education Pour Tous àl’horizon 2000», tenue en mars 1990 à Jomtien(Thaïlande). Son élaboration est basée sur une largeconcertation entre les partenaires intérieurs et extérieurs.

Les priorités ainsi retenues sont reflétées par desactions dans le domaine de l’éducation de base (cycleélémentaire et alphabétisation des adultes) et sur la for-mation professionnelle ; le renforcement de la politiqued’encouragement des initiatives communautaires ; lapromotion de la scolarisation des filles ; des efforts par-ticuliers en faveur des zones déshéritées, notamment àdéficit vivrier chronique ; l’augmentation progressive dela part des dépenses d’éducation dans le budget nationalet la diversification du financement vers le secteur privé.

Conformément aux dispositions de la Constitution,le Gouvernement s’engage à traduire dans les faits l’op-tion du bilinguisme en rendant obligatoire l’enseigne-ment des deux langues officielles (français et arabe)dans tous les établissements scolaires du Tchad. LeGouvernement mène également une politique de valori-sation de 120 autres langues nationales réparties en 12grands groupes dont trente huit (38) sont utilisées enalphabétisation fonctionnelle.

Il convient de souligner les points forts du texte de laréforme qu’il faudra néanmoins consolider, à savoir :● une meilleure connaissance des responsabilités entre

les différents partenaires ;● la création de bonnes conditions de travail de tous

les partenaires impliqués dans la réforme ;● l’augmentation sensible du taux brut de scolarisa-

tion, (46% à 67%) ; ● la dynamisation du mécanisme de pilotage en l’éten-

dant à tous les Directeurs Généraux des départe-ments ministériels impliqués ;

● le renforcement des capacités institutionnelles deplanification, de gestion et de pilotage ;

● le renforcement de l’équité en créant les conditionsde scolarisation massive des filles et des enfants deszones déshéritées ;

● le renforcement du système d’inspection et de suivipédagogique en renforçant les compétences du per-sonnel d’encadrement ;

● le développement modéré de l’alphabétisation fonc-tionnelle en créant des centres d’alphabétisation eten les dotant de moyens adéquats.

Toutefois, il reste du chemin à parcourir en particulierpour remédier aux faiblesses actuelles qui sont d’unepart le fait que depuis la tenue en 1994 des EtatGénéraux de l’éducation nationale, la rénovation desprogrammes n’a pas jusqu’ici commencé et les manuelsscolaires continuent d’être achetés de l’extérieur. Parailleurs, il est déploré que la qualité de l’enseignementne se soit pas notablement améliorée.

Les difficultés concrètes qui ont été rencontrées sesont situées sur le plan de la mobilisation des partenaires

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Page 69: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

financiers; de la déficience de certains sous-programmes(plis précisément ceux consacrés à l’enseignementsecondaire, l’enseignement supérieur, la culture, la jeunesse et les sports). Enfin, la mise en route de l’élabo-ration des programmes tarde à se réaliser.

Quelques mesures concrètes ont été prises pour corri-ger les points faibles tout en consolidant les points forts.C’est ainsi que la réunion sectorielle sur l’éducation et laformation de janvier 2000 a été l’occasion de faire lebilan de la Stratégie EFE : des mesures concrètes ont été

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1. Le plan d’action élaboré en avril 1999

N° Axes stratégiques Action à mener Echéance

1 Obtention d’un accord minimal - Rappel des acquis : accord dans un document Du 01-05-1999 sur la réalisation des curricula. à présenter au MEN au 30-06-1999

- Réunion du MEN avec les Directeurs pour une large information- Réunion regroupant MEN et autres départements impliqués et à impliquer, plus les partenaires socio-économiques

2 Installation d’une organisation - Réalisation des différents textes existants Du 26-04-1999ou leur refonte (CNPEB) au 01-05-1999Coordination

3 Installation d’une organisation - Relecture des textes juridiques y afférents Du 31-05-1999au 31-10-1999

4 Appui technique et scientifique - Début des travaux et échanges avec le CEPEC Début des travaux- CEPEC/International et l’Université Internationale de Langue Arabe 01-11-1999- Autres Khartoum, Bamako, Dakar ; poursuite des travaux

- Installation d’un Secrétariat Permanent etautonome

5 Liaison avec les IEB, AP, écoles Identification des IEB, AP, classes et maîtres Du 01-04-2000expérimentales - Evaluation et réajustement au 30-04-2000

6 Voyages d’études Choix des lieux Du 01-09-1999- Intérieur A la fin des activités- Extérieur (Lyon-Bamako-Dakar)

7 Budget Différentes rubriques:- Expertises- Formation- Etudes et recherches- Voyages et missions- Equipement et fournitures- Rapports- Personnel d’appui- Fonctionnement- Traduction- Duplication et ventilation

8 Sources de financement Lister ces sources de financement et leur adresser des demandes de financement :Coopération Française, IDA, BID, 7ème FED,PFIE, FNUAP, UNICEF, ISESCO, GTZ (PEB),ACCT, ACDI, CONFEMEN, CONEFE,PNUD, CONFEJES Tchadienne, TAIWAN-Gouvernement, UNESCO, Coopération Suisse etc.

Page 70: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

prises pour consolider les acquis et corriger les fai-blesses.

Par ailleurs, le mécanisme de pilotage a été amélioréau deuxième niveau, en impliquant les directeurs géné-raux des Ministères en charge de l’éducation et de laformation. Un comité technique de suivi de la réunion aété créé en mai 2000, par un arrêté du Premier Ministre.Ce comité est chargé, entre autres, de valider les pro-grammes et projets du secteur et de veiller à la cohéren-ce des interventions par rapport au programme d’actionà l’horizon 2004.

III. ARTICULATION ENTRE LA REFORME DES CURRICULA ET LE DEVELOPPEMENT CURRICULAIRE

Si le Tchad a pu clairement mettre au point le texted’orientation politique en matière d’éducation, l’élabo-ration des curricula qui devrait aussitôt en découler pié-

tine. La raison principale à cette inertie est que laCommission nationale de rénovation des programmescréée par arrêté n° 126/MEN/SE/DG/DEE/97 du 22 avril1997 n’est pas pleinement opérationnelle.

Des tentatives de rénovation des programmes amor-cées en 1966 et poursuivies jusqu’aux Etats généraux del’éducation nationale d’octobre 1994, n’ont pas donnédes résultas satisfaisants. La question de rénovation desprogrammes demeure donc entière.

C’est dans ce contexte que le Ministère de l’édu-cation nationale a désigné en avril 1999 quelquescadres pour une concertation sur la rénovation desprogrammes. Cette concertation a débouché surquelques axes stratégiques susceptibles de relancer leproblème de rénovation des programmes de l’écolede base.

La réunion de concertation adopta les axes straté-giques et le plan d’action ci-dessous, ainsi que l’ap-

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FIGURE 1. L’approche systémique des curricula

Choix politique

Demande socio-économique

Apports des innovations(PFIE, EvF/EmP)

Objectifs, contenus,méthodes

Participation des communautés villageoises

ou urbaines

Organisation, classe-école,environnement

Propositions scientifiqueset didactiques

Pratiques scolaires envigueur I.0.

Quels élèves former ?Quels profils de compétence ?

Construction du curriculumprogression, cycle, module

- Evaluation du curriculum - Evaluation des élèves (diagnostic formatif)

Orientations philosophiques

Attentes socio-culturelles

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proche qui se veut systémique, comme l’illustre letableau ci-dessous, dans le cadre de la rénovation desprogrammes.

IV. CONCLUSION

Depuis l’accession du Tchad à l’indépendance en 1960,le problème de l’adaptation du système éducatif, héritéde la colonisation, s’est toujours posé. Des tentatives deréformes des programmes scolaires et de leur contenuont été certes amorcées, mais elles n’ont pas donné lesrésultats attendus.

C’est seulement en 1990, au lendemain de laConférence mondiale sur l’Education pour tous deJomtien en Thaïlande que la Stratégie d’Education et de

Formation en liaison avec l’Emploi (EFE) a été adoptée.Elle a été consolidée par les Etats généraux de l’éduca-tion nationale, tenus en octobre 1994, et les dispositionspertinentes de la constitution du Tchad, adoptée en 1996.

Lors de la préparation de la IVème Table Ronde deGenève sur le Tchad, la Stratégie EFE a été évaluée :des résultats certes positifs ont été enregistrés, mais desdifficultés subsistent encore et elles ont été identifiéeset analysées par sous-programmes. En tant que proces-sus itératif, cette stratégie intègre les éléments évolutifsdu système d’éducation et de formation en corrigeantles faiblesses et en consolidant les forces afin derépondre aux attentes des partenaires internes etexternes.

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I. INTRODUCTION

Le système éducatif du Togo est déterminé par deuxgrandes orientations:1. la réforme de l’enseignement décrétée en 1975; 2. la Politique nationale du secteur de l’éducation et de

la formation définie en décembre 1993. Dans la première, le Gouvernement affirmait sa volontéde rendre l’école accessible à tous les enfants âgés de 2à 15 ans, rentable et adaptée aux besoins nationaux.Dans la deuxième, le Gouvernement, face auxcontraintes du secteur, et conformément aux objectifs ducadre macro-économique de 1997 – 98, s’engageait àmettre en œuvre une stratégie globale de l’éducation etde la formation. Cette dernière vise surtout à améliorerl’efficacité interne et externe du système éducatif, enaccordant une attention particulière à l’enseignementprimaire.

II. LA REFORME DE L’ENSEIGNEMENT DE 1975

1. Contexte général

Le Togo connut successivement trois colonisationseuropéennes. Durant la période allemande (1884-1913),la langue Ewé s’affirma au travers de son utilisationcomme langue d’enseignement. La colonisation anglai-se (1913-1919) imprégna l’éducation du pragmatismeanglo-saxon, et favorisa le développement des valeurssociales spécifiques à chaque groupe ethnique domi-nant. La longue période française (1919-1960) contribuaau développement de la scolarisation dans les régionsintérieures et à l’implantation du français comme langueunique d’enseignement, reléguant les langues nationalesau dernier plan. A l’indépendance du Togo en 1960,l’école portait l’empreinte des intérêts politiques et éco-nomiques de la métropole. Très vite, la révision ou larefondation des curricula s’imposa aux nouvelles autori-tés du pays, car les faiblesses de l’école n’étaient quetrop visibles.

De 1960 à 1975, des efforts furent entrepris pouraccroître les effectifs dans les classes. Les grandesconférences, dont celle d’Addis-Abeba en 1961 enmatière d’éducation dans la sous-région, invitèrent lesautorités des pays à développer des stratégies opération-nelles.

En novembre 1969, le Rassemblement du peupletogolais, un parti unique, fut fondé. En matière d’éduca-tion et de formation il était inscrit aux priorités duGouvernement que l’école devait « (...) constituer unsystème dynamique au service du développement natio-nal tout en permettant la libération de dynamisme inem-ployés ainsi que la familiarisation avec les exigences dela productivité ». Ceci appela une réforme de l’ensei-gnement.

A cet effet, on créa, le 13 juillet 1970, le Conseilsupérieur de l’éducation, avec des attributions admi-nistratives et pédagogiques, et on le chargea de laréorganisation du système d’enseignement et d’éduca-tion.

2. Processus d’élaboration de la réforme de 1975

A la suite des déclarations d’intentions du parti, uneconsultation nationale fut organisée par les cadres duMinistère de l’éducation nationale auprès d’un échan-tillon de la population (1000 personnes) en vue derecueillir leurs attentes. Des commissions procédèrent àl’analyse des données recueillies pour faire émerger lesgrandes tendances concernant les priorités de l’éduca-tion et de la formation du type de citoyen à former. Enréférence aux grandes orientations définies par le partiunique d’une part, et d’autre part en prenant les besoinset les attentes exprimés par les populations, la commis-sion ministérielle élabora un projet de réforme scolaireet le soumit aux gestionnaires de l’action éducative pourvalidation. Par la suite, le projet de réforme fut présentépar le Ministre de l’éducation nationale auGouvernement réuni en Conseil des ministres présidépar le Chef de l’Etat, président fondateur du partiunique.

3. Finalités et objectifs généraux de la réforme de1975

La réforme, promulguée par ordonnance présidentiellen° 16 du 6 mai 1975, était accompagnée de mesurespolitiques, administratives et pédagogiques nécessairesà sa mise en œuvre. Elle se proposait de former uncitoyen à l’esprit critique, capable de s’adapter aisémentà toutes les situations nouvelles, plein d’initiatives etapte à agir sur le milieu pour le transformer.

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Togo

Jean Adama Nyame et Yao Nuakey

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La réforme se donnait comme option fondamentalela mise en place d’une école démocratique, offrant àchaque enfant sans distinction les mêmes chances d’ac-cès à l’école. Certains principes généraux furent ainsiarrêtés dont:● l’obligation et la gratuité de l’école pour tous les

Togolais âgés de 2 à 15 ans;● l’introduction des langues nationales dans les pro-

grammes scolaires;● la mixité de l’école dans les ordres et les niveaux du

système éducatif ; ● la réintégration de la jeune fille-mère à l’école en vue

de la promotion de la scolarisation des filles.

La formation intégrale de l’individu visée impliquait laprise en compte des priorités suivantes :● l’épanouissement intégral de la personne humaine ; ● l’enracinement de l’élève dans son milieu ; ● la participation active de l’élève au processus de

développement de la communauté ; ● l’intégration sociale harmonieuse dans la vie de la

communauté.La réforme entendait promouvoir un ensemble devaleurs en rupture avec celles transmises par l’écolecoloniale qui avaient conduit au déracinement cultureldes formés. Les valeurs étaient donc liées :● au renforcement de l’identité culturelle ; ● au développement chez l’élève du sens de responsa-

bilité individuelle et collective, et du sens de la justi-ce sociale et de la solidarité nationale ;

● à une véritable initiation culturelle, au sens completdu terme, de chaque individu.

La Réforme définit trois objectifs généraux:1. rendre l’école démocratique; 2. promouvoir une école rentable; 3. promouvoir une école adaptée au contexte socio-

économique.

4. Structure de la réforme de 1975

L’école dite nouvelle est divisée en quatre degrés :1. l’enseignement du premier degré (le préscolaire et le

primaire); 2. l’enseignement du second degré (des classes de

sixième aux classes de troisième, et l’enseignementtechnique);

3. l’enseignement du troisième degré (des classes deseconde aux classes terminales) ;

4. l’enseignement du quatrième degré (écoles del’Université et instituts supérieurs).

5. Les curricula issus de la réforme de 1975

La réforme entra en vigueur à la date de sa promulgationle 6 mai 1975. Paradoxalement, les nouveaux pro-grammes et instructions officielles conformément auxorientations du parti ne furent élaborés et diffusés parune commission nationale que cinq ans plus tard, enavril 1980. A l’analyse, il ressort que ces programmesavaient été développés suivant l’approche disciplinaire.

Au niveau primaire, l’enseignement comprenait troisdomaines de disciplines:1. langues et littérature (langues nationales et français); 2. mathématique et calcul ; 3. les disciplines d’éveil à dominances intellectuelle et

esthétique. A ces derniers s’ajouta «l’étude du milieu», conçue defaçon transversale en tant que principe et cadre méthodo-logiques pour favoriser l’intégration des divers contenusà transmettre.

Les curricula avaient le mérite de spécifier pourchaque discipline retenue, les éléments suivants : défini-tion, objectifs généraux et spécifiques pour les cours pré-paratoire, élémentaire et moyen, ainsi que les principes,la méthodologie, et l’évaluation.

Quelques stratégies d’enseignement et activités d’ap-prentissage furent indiquées de façon globale pour toutesles disciplines. Elles s’adressaient aux centres d’intérêtet aux thèmes de chaque cours et non aux contenus,comme il aurait été souhaitable.

Comme le préconisait la réforme, les programmesdevaient accorder une place privilégiée à la connaissancedu milieu immédiat, comme base pour l’élargissementdes connaissances vers le monde extérieur. Ainsi conçue,l’étude du milieu n’était ni une matière, ni une disciplineà enseigner. Elle était une méthode d’enseignement.

Le livret bleu des programmes n’a pas défini unepolitique claire en matière d’évaluation. Néanmoins lesinstructions officielles recommandaient des interroga-tions écrites et orales, des devoirs surveillés, des compo-sitions trimestrielles. Les notes de ces dernières étaientconsignées dans les livrets scolaires. En 1976, un exa-men de fin de cycle primaire (CEPD) fut institué, suppri-mant désormais le concours d’entrée en sixième (1èreannée du cycle secondaire).

III. ANALYSE DES FORCES ET FAIBLESSES DESCURRICULA ISSUS DE LA REFORME DE 1975

La présente analyse critique sommaire sera centrée surles grandes composantes communes des curricula(objectifs, contenus, méthodes et évaluation) et sur lesconditions particulières de la mise en œuvre de ces curri-cula.

1. Analyse critique des composantes des curricula

Du point de vue des objectifs, on retiendra que lesconcepteurs des curricula ont opté pour le principe du«globalisme» à l’école primaire, mais n’ont pas aumoment de l’élaboration des curricula respecté ce princi-pe. Sinon, en effet, ils n’auraient pas identifié en guise decentres d’intérêt des thèmes, mais des profils de sortie.Or, ces derniers sont totalement absents dans les pro-grammes.

Dans les programmes, les contenus d’enseignementsont présentés sous forme de thèmes ou de découpagesau sein d’une discipline. Les thèmes sont structurés auniveau des cours soit pour la semaine, soit pour le mois

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ou le trimestre, sans qu’ils figurent en relation apparenteavec des objectifs clairement définis. La question est :que vise-t-on essentiellement à travers ces contenus ? Etcette question pose en outre le problème de la pertinencede ces contenus. Les contenus sont organisés de façonlinéaire et non de façon interdisciplinaire comme le pré-conisait pourtant la réforme: «l’interdisciplinarité sedoit de règle à tout moment. Cela signifie qu’aucunediscipline n’est isolée et ne suffit à elle-même. Les diffé-rents disciplines prendront appui les unes sur les autresdans un esprit de globalité qui caractérise la vie elle-même.»

Par ailleurs, les instructions officielles relatives auxprogrammes insistent sur le fait que: «L’enfant sera lepropre artisan de son savoir». Beau principe, mais celane peut se réaliser qu’avec des expériences d’apprentis-sage appropriées, pertinentes et significatives.Malheureusement, les programmes ne mentionnent pasclairement les activités d’apprentissage au niveau desdisciplines. Tout semble se résumer aux «exercicesd’application et aux devoirs». Or, une définition desactivités d’apprentissage en séquences ou unités d’ap-prentissage avec l’identification de l’apprenant-cible, del’objectif d’apprentissage, des comportements nouveauxattendus, des conditions de leur réalisation et de seuil deperformance aurait été beaucoup plus utile aux maîtrespour la conduite des leçons.

Les nouveaux programmes développent clairementau niveau de chaque matière d’enseignement les prin-cipes méthodologiques et la méthodologie d’enseigne-ment. La grande méthodologie (méthodologie englo-bante) préconisée par la réforme de 1975 est l’étude dumilieu. «Les nouveaux programmes doivent être essen-tiellement pratiques et axés, de ce fait, sur la connais-sance du milieu». Bref, « l’étude du milieu doit contri-buer à rapprocher l’école et le milieu, l’école et la vie».

Les instructions officielles insistent sur l’importancedu contrôle des acquisitions des élèves au niveau dechaque matière. Les instruments de mesure privilégiéssont les exercices d’application et les devoirs. Les prin-cipes d’adaptation de progressivité, de variété et demotivation doivent guider le maître dans le choix desexercices et des devoirs. Les questions cruciales quel’on doit se poser encore ici concernent la pertinence etla validité des instruments privilégiés. Ces derniers nesemblent-ils pas convenir aux seuls objectifs de connais-sances ? Comment les maîtres parviennent-ils à mesurerles habiletés (savoir-faires), les attitudes et les valeursvisés chez les élèves ? En l’état, les contrôles ne portentdonc que sur des acquisitions isolées et non sur descompétences de synthèse. L’action éducative doit offriraux enfants l’occasion et le moyen de découvrir leurspouvoirs et de les mettre en œuvre. Il s’agit donc essen-tiellement et progressivement d’organiser ces pouvoirscréateurs, de veiller à ce qu’ils n’en viennent pas às’exercer «à vide» entraînant lassitude et désintérêt,d’aider ces enfants à se doter d’instruments permettantun nouveau progrès.

Dans la réalité, la mise en œuvre de la réforme s’estréduite à produire les programmes puis à les diffuserdans les écoles pour application. Le nombre d’exem-plaires remis aux écoles était limité au point où lesenseignants ne pouvaient en disposer individuellement.Le miracle souhaité devait intervenir au travers de l’ac-tion des maîtres dont on avait néanmoins surestimé ledegré de motivation et la capacité d’adaptation.Ajoutons que les mesures incitatives au bénéfice du per-sonnel enseignant pour garantir la réussite de la réformen’ont été réalisées.

En conclusion, tout semble avoir été mis en placedans l’euphorie générale déclenchée et orchestrée par leparti, dans la précipitation et la panique, car les pro-grammes étaient attendus depuis 1975. Aucune stratégieglobale n’a été définie, les ressources humaines, maté-rielles et financières n’ont pas été mobilisées pour assu-rer un changement planifié de la réalisation.

Dans la pratique pédagogique quotidienne desmaîtres, comment les nouveaux programmes ont-ils étéintroduits? Le soin fut laissé aux directeurs d’école d’as-surer un encadrement rapproché des maîtres. En 1970,on institua le colloque des inspecteurs de l’enseigne-ment primaire en fin d’année scolaire. Les inspecteursétaient également invités à animer des conférencespédagogiques à l’intention des maîtres au niveau deleurs inspections pédagogiques respectives. Les thèmesdéveloppés portaient sur le contenu des programmes.

Au niveau du cabinet ministériel, le Secrétariat per-manent du Conseil supérieur de l’éducation était chargédu suivi de la réforme et du développement des pro-grammes dans les écoles.

Replacés dans le contexte historique de leur élabora-tion par des cadres non formés à la méthodologie dedéveloppement du curriculum, les programmes d’ensei-gnement du premier degré ont indubitablement desmérites en dépit des lacunes certaines que l’on peut faci-lement relever. Ce que l’on déplore dans la mise enœuvre de la réforme, c’est que les maîtres – non tou-jours qualifiés à souhait – ne bénéficièrent pas des aidesnécessaires pour introduire des changements tangiblesdans la pratique de la classe conformément aux instruc-tions officielles.

IV. ELEMENTS POUR LA REFONDATION DUCURRICULUM DE L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE AU TOGO.

1. Les nouvelles orientations en matières d’éducation

Plan d’action national d’Education pour tous (1991)Après la Conférence mondiale sur l’Education pour tous(EPT) tenue à Jomtien en mars 1990, le Togo a initié enaoût 1991 un séminaire de mobilisation de divers parte-naires sociaux autour des thèmes ou centres d’intérêtretenus lors de la conférence. Au terme du séminaireune plate-forme d’actions prioritaires à entreprendre futélaborée. Les objectifs d’Education pour tous définis àJomtien et opérationnalisés en plans triennaux d’inves-

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tissement publics ou en programmes d’action à réaliseront été intégrés dans le document de politique sectorielleélaboré en 1993.

Les Etats généraux de l’éducation, de la formation et dela recherche scientifique (mai 1992)Le Ministre de l’éducation nationale et de la recherchescientifique déclarait à l’inauguration de la rencontre cequi suit :«Le processus de démocratisation engagé depuis lors,bref, tout ce cheminement vers un Etat de droit, ne sau-rait en aucune façon aboutir, s’il ne s’appuyait, sur unsystème éducationnel entièrement rénové, qui sache pré-parer le citoyen togolais à assumer ses responsabilitésen homme libre.»

Les Etats généraux de l’éducation et de la formationdevaient « examiner, analyser, évaluer » l’école dans sonfonctionnement, ses résultats (rendement), ses relationsavec la société globale, avec le monde.

La recommandation relative à l’actualisation de laréforme de 1975 fut présentée en ces termes :

« Bien qu’il soit reconnu à la Réforme de 1975 unepertinence indéniable, les Etats généraux recommandentla mise sur pied d’une commission d’actualisation de laRéforme, commission qui tiendra compte de l’évolutionde l’environnement pédagogique, économique, socio-culturel, national et international ».

La Déclaration de politique sectorielle de l’éducation(1993)Cette déclaration s’inscrit dans l’esprit de Jomtien et tra-duit la volonté du Togo de poursuivre une plus grandejustice sociale.

Tout en tenant compte des contraintes financières,matérielles, institutionnelles et humaines, la politiquesectorielle maintient les trois objectifs prioritaires déjàdéfinis dans la réforme de 1975. Pour atteindre chacunde ces objectifs, l’Etat entend entreprendre des actionsurgentes et bien ciblées, retenues dans une requête definancement rédigée par le Togo et soumise à la Banquemondiale. Il s’agit du Projet d’appui à la gestion del’éducation (PAGED).

Le Projet d’appui à la gestion de l’éducation (PAGED)1995 – 2001Conçu en 1990, initialement sous forme d’assistancetechnique de la Banque mondiale au redressement dusecteur de l’éducation, le PAGED a subi une nouvelleorientation en 1992, afin de pouvoir couvrir l’ensembledes problèmes dont souffre le secteur à la suite de lacrise socio-politique vécue par le pays. Le projet com-porte deux volets :1. l’amélioration de la qualité de l’école ; 2. l’amélioration de la gestion du système scolaire. La composante «formation continue des enseignants etécole de qualité» constitue l’innovation du projet, carcette composante vise deux objectifs: la formation desenseignants en cours d’emploi; et l’amélioration de laqualité de l’enseignement, dans le sens du management(leadership) de l’ensemble du personnel enseignant aux

innovations pédagogiques dans les écoles. Cette compo-sante devra également apporter un appui logistique àtoutes les écoles primaires du pays.

Le Projet FAC – ÉducationEn juin 1996, un projet de coopération entre le Togo et leComité directeur du Fonds d’aide et de coopération(FAC) fut signé pour le secteur prioritaire de l’éducation.Le projet FAC «Education Togo» comporte quatre com-posantes:1. un appui institutionnel ; 2. un appui à la formation et à l’auto-formation ; 3. l’adaptation et la professionnalisation des

formations ; 4. un appui aux réseaux d’information et de communi-

cation.

Le Programme du nouveau gouvernement en matièred’éducation (septembre 1996)

Dans la présentation de son programme à l’AssembléeNationale, le Premier Ministre a insisté sur une rénova-tion profonde du système éducatif. Tout en souscrivantaux objectifs de démocratisation et de sensibilisationpréconisés par la réforme de 1975, il a déclaré que, songouvernement s’attachera à consacrer ses efforts à :● l’aménagement de l’environnement scolaire ;● le renforcement de la gestion de l’offre en éducation ;● l’accroissement de l’offre en éducation ;● l’instauration d’une politique active de formation

professionnelle.Le gouvernement entend «relever le défi éducatif et culturel» à travers une politique hardie en matière d’édu-cation et de formation. La politique de développementdu secteur éducatif visé par le gouvernement tend àmettre l’accent sur l’enseignement primaire en vue d’at-teindre un taux net de scolarisation de 80 % d’ici l’an2000 à 2010.

2. Nécessité de changer l’école

En dépit des progrès notoires qui ont été réalisés sur leplan éducatif par l’Etat, la situation actuelle n’offreguère de raison d’être satisfait. Les signes de déclin sontévidents. Le problème majeur provient de ce que l’ac-croissement des effectifs scolaires dépasse largement lacapacité de l’économie nationale à subvenir aux besoinsdu système éducatif. Mais, on peut distinguer plusieursautres de difficultés.

Tout d’abord, les moyens dont dispose le Togo enmatière d’éducation sont inadéquats, tant du point de vuedes impératifs économiques que des répartitions budgé-taires.

En second lieu, l’augmentation des effectifs sco-laires a pour conséquence qu’une bonne partie des éta-blissements du primaire et du secondaire ne constituentguère plus qu’une façade d’enseignement. On y trouvedes classes surchargées, sans équipement ni de matérielpédagogique adéquat. Plus grave encore que l’incom-pétence des enseignants, est leur perte de prestige. Eneffet, tandis qu’ils jouissaient autrefois d’un statut

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enviable dans la société et que leur profession étaitrecherchée, les enseignants constituent aujourd’hui uncorps fatigué et désenchanté parfois relayé par desjeunes diplômés non formés pédagogiquement et nonmotivés.

En troisième lieu, l’égalité de chances est encoremal répartie, au niveau des régions, des préfectures etdes sexes, où les statistiques scolaires affichent des dif-férences notoires.

La confiance du public dans l’enseignement s’estétiolée en même temps que la qualité du systèmed’éducation nationale. Les jeunes diplômés des écolesprimaires et secondaires ont de plus en plus du mal à trouver un emploi dans le secteur moderne. Commeles postes que ces jeunes convoitent se trouvent enville, les mouvements migratoires vers les zonesurbaines deviennent partie intégrante des problèmes àrésoudre.

A la lumière des taux de redoublement et de pro-motion actuels dans le primaire, sur 1000 élèves ins-crits au CP2 en 1994 – 1995 seuls 43 d’entre euxauront leur certificat de fin d’études primaires (CEPD)au bout des 6 ans de scolarité normale, seuls 230 autresélèves auront le leur en 7 ou 8 ans et 727 quitteront lesystème sans aucun diplôme. Ces réalités alarmantesposent le problème crucial de l’amélioration de l’éffi-cacité interne et externe de l’école.

A la rentrée 1999 – 2000 , le Ministère de l’éduca-tion nationale et de la recherche a introduit dans l’en-seignement primaire deux importantes innovations: ladouble vacation et l’organisation de l’école en sous-cycles. Le double flux ou double vacation vise àaccroître le nombre de places disponibles à l’écolesans créer de graves contraintes budgétaires (équitésociale) et à réduire le ratio maître – élèves (il s’agit dele stabiliser autour de 50 élèves par classe). Quant àl’organisation de l’école en sous-cycles, elle permetd’éviter les ruptures liées au cloisonnement et à lafragmentation des cours scolaires. L’école primairecomporte désormais trois sous-cycles.

L’implantation de ces innovations dans l’enseigne-ment passe obligatoirement par la refondation des pro-grammes issus de la réforme de 1975 qui sont restésgénéralement lourds du point de vue du volume descontenus à apprendre par mémorisation et en mêmetemps redondants sur plusieurs années. Les pro-grammes comportent en outre beaucoup d’élémentssuperflus.

3. Nouvelles tendances en théorie de développementdu curriculum

Surtout en Afrique subsaharienne, les récentes initia-tives en vue d’améliorer la qualité de l’enseignementprimaire, y compris celles financées par les institutionsinternationales, ont généralement tendance à s’appuyersur des réformes de la politique d’éducation nationale.Ces réformes visent à modifier la durée du cycle de l’enseignement primaire, la langue d’instruction, la

structure administrative du système, la formation sur letas des instituteurs, et les matières enseignées.

Les réformes sont fondées sur l’hypothèse qu’ilsuffit d’avoir une politique et de fournir (quelquefois)ce dont les écoles ont besoin pour modifier la pratiquede la classe des enseignants. Néanmoins, les investis-sements massifs dans cette optique ont produit desrésultats décevants.

Les récents projets financés par la Banque mondia-le dans plus de 25 pays de l’Afrique subsahariennesont orientés dans une nouvelle perspective. Désormaisles efforts ne sont plus centrés sur les intrants (équipe-ments scolaires pratiques d’administration du système)mais sur le « rôle central de l’école individuelle ». Lesdirectives visant à améliorer la qualité de l’enseigne-ment-apprentissage se fondent entre autres sur l’hypo-thèse que:«L’Ecole, en tant que système social et les interactionsentre les éléments qui constituent cet élément ont uneinfluence significative sur l’apprentissage des élèvesqui va bien au-delà de l’impact individuel des intrantsfournis à l’école». (Heneveld, 1994.)

Il s’agit donc d’identifier, d’analyser et d’agirdirectement au sein de l’école sur les facteurs détermi-nants de l’amélioration des apprentissages des élèves.Dans cette perspective, dans quel sens rénover le curri-culum dans l’enseignement primaire pour espérer amé-liorer la qualité de l’apprentissage des élèves dans lesécoles togolaises ?

Le curriculum, tel que nous le concevons, s’inspiredes principes qui coïncident avec ceux déjà définis parArnould Clausse (1973) pour un enseignementrénové : principes de focus, de contexte, de scolarisa-tion d’individualisation, de séquence et de significa-tion.

Le profil de l’élève à la sortie de l’éducation debase est donc constitué par un ensemble de connais-sances, d’habiletés et d’attitudes centrées sur les pointsfocaux suivants :● apprendre à lire, écrire, compter et communiquer.

Ces savoirs fondamentaux seront toujours néces-saires ;

● apprendre à penser, à analyser, à synthétiser, àacquérir le sens critique, le sens du travail métho-dique et discipliné, la capacité de recueillir et d’in-terpréter l’information ;

● acquérir « l’art de vivre» c’est-à-dire tout ce quitouche aux dimensions personnelle, sociale, etéthique de la vie.

Que devraient savoir les jeunes à la fin du cycle pri-maire? Que devraient-ils savoir faire et savoir être?Telles sont les questions fondamentales au cœur de larecherche de l’efficacité de l’école. Elles orientent etconditionnent l’action éducative des instituteurs. Lesdeux problèmes essentiels à résoudre désormais seposent en termes clairs et limpides: commentapprendre aux élèves à penser? Comment lesmotiver ?

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Dans la réforme de 1975, l’étude du milieu est fortement recommandée. Nous la réitérons dans laméthodologie de l’enseignement rénové, car il n’y apas d’enseignement valable sans un milieu, un contex-te, un problème qui mobilisent la volonté. La motiva-tion n’est pas le résultat d’un processus déclenché dudehors, mais la conséquence d’une signification quel’élève découvre à propos d’un enseignement que l’onlui donne, d’une activité d’apprentissage qu’on lui pro-pose de faire. Toute leçon, disait déjà Dewey, doit êtreune réponse.

Le curriculum rénové doit être considéré comme unchangement introduit dans le système social qu’estl’école. Ce changement revêt deux formes essentielles:rénovation ou innovation. La rénovation selon Marmozest une remise à neuf sans bouleversement dans la conti-nuité de ce qui existait précédemment. Elle maintient unsystème en régénérant ses structures internes et en luicommuniquant un nouveau souffle. Selon Hamelinel’innovation introduit une rupture avec le mode de fonc-tionnement en vigueur.

Concernant le mode approprié de renouvellement ducurriculum, la recherche a beaucoup tiré parti du modèleplus général dit de «recherche et développement» quipréconise le modèle «RED» (review – evaluate – deve-lop). Ce modèle conjugue mieux la contribution du per-sonnel enseignant et des écoles avec la contribution desorganes centraux en matière d’éducation. Le partage desresponsabilités constitue un facteur déterminant dans lerenouvellement du curriculum.

La refondation, en tant qu’activité novatrice du curri-culum peut s’orienter dans l’une ou l’autre des perspec-tives suivantes: innovation de la gestion de l’élaboration,enrichissement du contenu, amélioration de la qualitédes instruments et des stratégies d’enseignement, défini-tion de profils de sortie. Ce qui est essentiel c’est deconsidérer désormais le curriculum comme un facteurdéterminant la qualité de l’école, facteur sur lequel onpeut agir pour améliorer la formation des élèves dans lesens de l’accroissement de la qualité et l’efficacité.

V. CONCLUSION

Dans la plupart des pays en voie de développement, il ya peu d’exemples de refondation curriculaire réussiedans le système éducatif.

Ce manque de réussite s’explique en partie par lefait que les projets de programmes sont souvent telle-ment «expédiés» qu’il n’est pas possible d’envisagerune évaluation sérieuse. Il est très fréquent de constaterdans le cadre des activités pédagogiques que générale-ment les finalités (options fondamentales, priorités etvaleurs) ne sont pas traduites en buts (profils de for-més). Quant aux buts, ils sont rarement formulés entermes d’objectifs spécifiques (connaissances, compé-tences, attitudes).

L’élaboration de profil de sortie se trouve au cœur duprocessus général d’amélioration de l’efficacité de l’école.

C’est bien à partir des objectifs en termes de compor-tements observables que l’on sélectionne les contenus etles stratégies d’enseignement, que l’on choisit et organi-se les activités d’apprentissage, et que l’on détermine lesinstruments d’évaluation.

C’est dire qu’élaborer un profil de sortie réaliste etfonctionnel de l’apprenant à la fin du cycle primaireapparaît désormais comme un passage obligé de l’amé-lioration de l’efficacité de l’école. Plus encore, il repré-sente le pilier du curriculum rénové.

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PARTIE III:

LES CONTRIBUTIONS THÉMATIQUES

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I. INTRODUCTION

À la fin du XXème siècle, les peuples autochtones reven-diquent leur droit à l’autonomie, et à l’autogestion deleurs territoires ancestraux par le biais de la revalorisa-tion de leurs langues et cultures. Ceci est un mouve-ment d’une profonde signification, en vertu duquel sontréaffirmées les connaissances, les savoirs et les modesd’apprentissage autochtones. Ce fait devient trèsimportant dans plusieurs régions du monde.L’éducation constitue le véhicule par lequel toutes cesdemandes sont canalisées avec une approche bilingueet interculturelle en Afrique, en Asie, en Océanie, enAmérique latine, ainsi qu’en Amérique du Nord (Gale,1995; Godenzzi, 1996; Lewin, 1995; Lipka & Stairs,1994; Pridmore, 1995; Rostkowski, 1973; Singh, 1995;Teasdale, 1994). Les peuples autochtones tiennent leurnom du fait qu’ils ont été les premiers occupants d’uneterre ou d’un territoire donné (Teasdale, 1994). En1993, les Nations Unies déclarèrent la décennie despeuples autochtones.

En Europe, les programmes officiels d’éducationsont confrontés à l’existence de minorités nationales etethniques, à des populations immigrantes, ainsi qu’àdes populations itinérantes; c’est le cas des tziganes,principalement dans les pays de l’Europe de l’Est(Jäggi, 1988; Janodet & Ferreira, 1992; Liégeois,1994). Les approches interculturelles dans l’éducationen Europe sont souvent destinées aux seuls étrangers. Ildevient pourtant nécessaire d’abandonner la place mar-ginale que cette approche occupe de façon à assumer ladiversité socioculturelle et linguistique comme finalitéde l’éducation (Allemann-Ghionda, 1999; Perez, 1998;Perregaux, 1994). D’ailleurs, Gasché (1999) affirmeque «l’éducation interculturelle doit intéresser tous lespays qui abritent des populations minoritaires à carac-téristiques sociales, religieuses, linguistiques et cultu-relles qui les différencient d’une société, religion,langue ou culture qui prétendent être représentatives dela nation, en tant que mythe unificateur prôné par l’État» (p. l ).

Dans le contexte de l’Amérique latine, la questioncentrale qui anime ici notre réflexion est de savoir comment imaginer une éducation appropriée auxpeuples autochtones, à partir d’une approche intercultu-

relle. L’éducation qui est appropriée est une éducationaux programmes planifiés et réalisés conjointement avecles Indiens, en fonction de leurs intérêts et à partir desassociations et fédérations indigènes. Il s’agit de leurpermettre de renforcer leurs identités et leur rendre lestatut de sujets de leur propre histoire, ce dont ils ont étési longtemps privés.

Actuellement, dans la grande majorité des pays oùvivent ces peuples, les institutions scolaires de l’éduca-tion officielle, monolingues et par essence monocultu-relles, se trouvent confrontées au défi de savoir commentgérer cette diversité linguistique et culturelle. Nouscroyons que l’éducation interculturelle peut devenir lefondement de programmes qui mettent en valeur leslangues et les cultures autochtones, en les associant auxperspectives de la culture occidentale à travers l’échan-ge. Dans certains cas, le respect des langues et cultures adéjà été pris en compte par une politique éducative quifacilite l’intégration démocratique des minorités eth-niques dans les sociétés multiculturelles. L’éducation aun rôle très important en ce qui concerne la défense desdroits des peuples autochtones et la politique de leurdéveloppement économique, social et culturel.

La première partie de notre article est consacrée àune brève introduction théorique concernant les peuplesautochtones et leur dimension culturelle et historiquedans le contexte latino-américain. Nous aborderons, endeuxième partie, l’étude des programmes d’éducationbilingue et interculturelle conçus à partir des années 80dans différents pays de l’Amérique latine. Comme on nepeut pas parler d’approche interculturelle sans faire réfé-rence à la dimension politique sous-jacente aux pro-grammes éducatifs officiels imposés par les États-Nations, nous les envisagerons en rapport avec ladiversité culturelle et linguistique brimée et avec le rôlede l’école associée à cette politique d’assimilation desminorités ethniques.

II. DIMENSION HISTORIQUE DU CONTEXTEINTERCULTUREL

Nous sommes le produit de différents métissages surve-nus au cours de l’histoire des civilisations (Laplantine &Nouss, 1997). Ce processus s’est développé dans lecadre d’une énorme diversité écologique de laquelle est

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Une éducation appropriéeaux peuples autochtones d’Amérique latine

José Marín

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issue la diversité culturelle malgré l’appartenance del’homme à une seule espèce biologique (Langaney, VanBlijenburgh & Sánchez-Mazas, 1992). Dans cette pers-pective, toute prétention de pureté biologique est insen-sée, chacun de nous possédant une histoire génétiqueunique. L’histoire des sociétés humaines est associée àl’histoire des migrations, aux contacts culturels sourcede multiples influences. Ces rencontres ont été à carac-tères divers: soit refus et confrontations, soit échangespacifiques et apprentissages mutuels. Les cultures sesont construites et modifiées dans des contextes dyna-miques. Autant les collectivités que les individus, en tantque participants aux interactions de leur histoire, soumisà ses influences et à ses conditionnements multiples, ontfaçonné leurs identités de façon multiple.

Actuellement le processus de mondialisation del’économie, ainsi que la révolution technologique descommunications et de l’information, multiplient lescontacts entre les peuples dans plusieurs domaines.Cependant, bien que l’ordre néo-libéral facilite le libretrafic des marchandises, il impose des barrières aulibre transit des personnes: la planète devient un «villa-ge» aux multiples clivages à l’échelle mondiale(Chomsky & Dietrich, 1998; Forrester, 1996; Hallak,1998; Hobsbawm, 1999; Oman, 1996; Ramonet,1997). Au-delà des intérêts géopolitiques des groupeshégémoniques, nous vivons tous - six milliards d’êtreshumains - sous le même ciel et dans la même «mai-son». La question devient comment faire pour vivreensemble ? Comment faire pour nous respecter et pro-fiter mutuellement de nos diversités ? Telle est ladimension interculturelle de l’histoire humainecontemporaine (Demorgon, 1998; Demorgon &Lipianski, 1999).

Le mode même de développement des sociétéscontemporaines devient interculturel dans des contextesbien différents: décolonisations, guerres, génocides,crises économiques, migrations, formation de blocsrégionaux, construction européenne, mondialisation,mutations et clivages socio-économico-culturels, chô-mage et exclusion. Ces contextes associent le tragique àla complexité où s’articulent le local et le mondial avecla perte des certitudes passées (Hess, 1998).

III. L’APPROCHE INTERCULTURELLE ENTRE IDENTITE ET ALTERITE

L’espace interculturel engage à une réflexion de base envue d’imaginer une pédagogie appropriée aux sociétésmulticulturelles. La communication se construit alorssur la base du respect de la diversité et permet de déve-lopper une perception du monde, en tant que lieu histo-rique dont l’exploration nous est donnée en partage. Lefait de reconnaître et de respecter l’existence de l’altéri-té nous oblige à réfléchir aux questions afférentes à laqualité de ces rapports. Cette réflexion touche à la socié-té, à ses clivages et à l’école en tant qu’institution inter-médiaire entre l’État et la société - en tant que médiatri-ce de la diversité culturelle et linguistique.

Chaque culture construit sa propre vision du mondeet peut prétendre à la considérer comme universelle dansune perspective ethnocentrique. «Cette mise au centrede sa propre culture est basée sur une observation desanthropologues: les cultures sont autocentrées; chacuneprocède d’un modèle de départ par rapport auquel sesreprésentations et ses valeurs sont justifiées», commel’affirmait Camilleri (1993, p. 35).

L’implication sociale de notre vie quotidienne, etl’interaction des uns avec les autres mettent en questionnos identités. Cette mise en question engendre une insé-curité qui empêche une dynamique interculturelle. Onpeut donc imaginer la difficulté qu’il y a pour que ladécentration indispensable rencontre une réflexioninterculturelle, tenant compte de la complexité de la réa-lité et des exigences éthiques qui accompagnent laréflexion. On ne peut pas se restreindre à la lutte contreles préjugés, l’intolérance, l’ethnocentrisme, le nationa-lisme et le racisme. On ne peut pas non plus se contenterde la seule approche descriptive et comparative sans se«compromettre» dans la recherche des mécanismes quiprésident au respect de la pluralité de nos sociétés: lesentiment de sécurité mutuelle en est sans doute le pointde départ.

Les approches interculturelles sont applicables dansplusieurs domaines à partir de l’histoire de la rencontrede l’identité et de l’altérité - du dialogue entre soi-mêmeet les autres, dans une perspective qui permette la recon-naissance de ce qui est commun à tous. Cette approchepermet d’imaginer l’existence d’autres formes de per-ception des connaissances et d’interprétation de la réali-té. La démarche interdisciplinaire utilisée par l’approcheinterculturelle permet la rencontre des multiples visagesde la société et de leur complémentarité, en vue d’uneintégration participative.

Actuellement, certaines conceptions sont véhiculéespar l’ethnocentrisme colonial sous forme de «vérités»:l’existence des races, la hiérarchisation biologique etculturelle par exemple. Or, tous les êtres humains appar-tiennent à la même espèce alors que chacun est différentde l’autre. Cette diversité n’est pas un défaut, mais untrait déterminant qui préserve l’espèce humaine entière.Le décalage socio-économique entre les individus et lespeuples ne se justifie ni biologiquement, ni culturelle-ment (Marín, 1994a).

IV. LE CONCEPT DE CULTURE

Le concept de culture permet une meilleure compréhen-sion de la nature humaine. L’individu est le produit del’interaction entre son héritage naturel avec le milieuculturel dans lequel il a été socialisé. II est issu d’unvaste processus d’accumulation de connaissances, selonles différences de chances et d’expériences qui fontl’histoire de sa vie. Chacun de nous devient le fruit descontextes culturels dans lesquels il est capable de sereconnaître et sur lesquels il construit son identité -contextes riches et dynamiques, à partir desquels ilessaye de s’adapter constamment.

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Si la culture peut constituer une ressource très pré-cieuse pour notre émancipation, elle peut aussi être unobstacle insurmontable - une sorte de camisole de force -selon l’utilisation que nous en faisons. La culture peutdevenir la négation de l’individu. Si nos cultures sont desportes ouvertes au développement humain, en mêmetemps elles peuvent constituer des pièges.L’ethnocentrisme sur lequel chaque culture essaye des’appuyer est une affirmation identitaire exacerbée quiproduit des effets pervers et justifie des inégalités detoutes sortes, dans les rapports des uns avec les autres.

La culture se traduit sous forme de traditions et decomportements qui s’expriment par des systèmes desymboles, des codes, des valeurs, des techniques. Tout ceprocessus fonde les identités. C’est dans ce «contexte dedépart» que les individus peuvent «négocier» constam-ment les influences, les apprentissages, le partage oul’imposition d’autres contraintes culturelles avec leurpropre histoire quotidienne. C’est ici que se nouent lesliens entre l’individu et sa culture d’origine confrontée àdes interactions qui dépassent largement tout déterminis-me culturel. Nous parlons de la culture au pluriel au-delàde toute classification hiérarchique. Chaque peuple sepose des questions sur le sens de la vie, de la mort, de lasanté, de ses rapports avec la nature et de la transmissionde ses connaissances dans ces différents domaines; il sepose aussi la question du «comment» les transmettre.

1. Un monde en mutation

Alors qu’actuellement la mondialisation de l’économiecontrôle aussi le domaine de l’information et des com-munications, nous vivons les contraintes d’une culturede masse. Ce processus se traduit par l’affaiblissementéconomique et politique des États-Nations. Parallèle-ment, il permet l’émergence d’un réveil des identités culturelles, en tant qu’expression d’une résistance à cettehégémonie, et favorise, entre autre, la création de pro-grammes éducatifs alternatifs en Amérique latine(Gasché, 1998a).

En Europe, un double mouvement revendicatif semanifeste. D’une part, certaines régions se considèrentopprimées par un État centralisateur et revendiquent lesdroits à leur langue et leur culture dans les institutionséducatives et culturelles: c’est le cas, entre autres, desCatalans en Espagne et des minorités nationales hon-groises en Roumanie. D’autre part, certaines régionsrecourent parfois à des stratégies violentes, dès que leursaspirations sont associées à une demande d’indépendan-ce politique comme c’est le cas des nationalistes basquesen Espagne et des Corses en France (Ferrer, 1998;Gasché, 1998b; Perez, 1998; Salvi, 1973). Un deuxièmemouvement revendicatif au niveau européen est celui despopulations d’immigrés qui cherchent à perpétuer leurshéritages religieux, linguistique et culturel dans leurnouveau pays de résidence.

Dans un cadre semblable, des conflits appelés «inter-ethniques» ont surgi à la suite de la disparition del’URSS et ont donné lieu à des conflits armés: c’est le

cas de la lutte pour l’indépendance en Tchétchénie et auDaghestan, ainsi qu’en Asie Centrale et au Caucase.L’exemple le plus dramatique des tensions provoquéespar le non-respect de la diversité religieuse, linguistiqueet culturelle de la part d’un nationalisme extrémiste, semanifeste dans le drame de la purification ethnique:celui qui a suivi l’éclatement de la Fédération yougosla-ve (Serbie, Bosnie et Croatie) au début des années 90 etdernièrement celui vécu entre les Serbes et les Kosovars,et entre les Kosovars et les Tziganes (Derens, 1999).Cependant, le cas des Kurdes de Turquie est à remar-quer: il relativise le discours de ceux qui prétendentdéfendre les droits de l’homme en Yougoslavie, tout enlaissant la Turquie effectuer son propre nettoyage eth-nique. Les intérêts économiques et géopolitiques pri-ment ici sur toute priorité «humanitaire» (Picard, 1991).

La situation contemporaine est donc caractérisée demultiples mutations. L’approche interculturelle récupèrelà sa propre dimension historique: au-delà de sa problé-matique éducative, psychologique et migratoire, elleaide à mieux comprendre la nécessité du respect de ladiversité, de la pluralité et de la difficile gestion de ladémocratie. Dans ces conditions, l’approche intercultu-relle permet de mieux se comprendre pour vivreensemble. Une décentration culturelle permanente, entant que travail quotidien sur soi-même (donc aussi sur lemonde extérieur) reste la seule possibilité de gérer uneapproche interculturelle propre à entamer un véritabledialogue des cultures.

2. L’école et les populations autochtones dans les Amériques

Dans les deux Amériques l’école officielle est tributairedu modèle occidental. Dès le XIXème siècle l’école estinstituée simultanément à la création des Républiques.Au XXème siècle, cette éducation officielle et les pro-grammes d’alphabétisation des adultes essayent d’accen-tuer l’implantation des valeurs étrangères aux culturesautochtones. Malgré leur résistance, l’Occident a imposésa vision du monde, sa langue et sa culture (Montoya,1990).

En Amérique du Nord - comme partout ailleurs -l’école obligatoire provoque des résistances qui s’expri-ment par le refus explicite de l’école de la part des chefsindiens eux-mêmes. Ainsi en 1744, dans un passage deson autobiographie,Tatanga Mani(Indian Story), com-mentait l’éducation qu’il avait reçue chez les hommesblancs de la manière suivante:

Oh oui ! Je suis allé à l’école des hommes blancs, j’ai appris àlire leurs livres de classe, les journaux et la Bible. Mais j’aidécouvert à temps que ce n’était pas suffisant. Les peuples civi-lisés dépendent beaucoup trop de la page imprimée. Je metournai vers le livre du Grand Esprit qui est l’ensemble de sacréation. Vous pouvez lire une grande partie de ce livre en étu-diant la nature. Vous savez, si vous prenez tous vos livres et lesétendez sous le soleil en laissant, pendant quelque temps, lapluie, la neige et les insectes accomplir leur œuvre, il n’en res-tera plus rien. Mais le Grand Esprit nous a fourni la possibilité,

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à vous et à nous, d’étudier à l’université de la nature, les forêts,les rivières, les montagnes, et les animaux dont nous faisonspartie (Mc Luhan, 1971, p. 110).

Pour l’ensemble des peuples autochtones desAmériques, la culture est considérée comme le produitdes rapports étroits qu’entretient l’homme avec la natu-re. La nature y est considérée comme un système vivantduquel l’homme fait partie (Descola, 1986; Gasché,1999; Marín, 1996; Montoya, 1990; Narby, 1995).

En 1970, désireux de prendre en main leurs propresaffaires au moyen de l’«American Indian Mouvement»(AIM), les Amérindiens des États-Unis décident d’orga-niser un système d’enseignement parallèle à celui desécoles du Bureau des affaires indiennes, qui leur sem-blent trop orienté vers l’histoire, la culture et les valeurseuropéennes (Rostkowski, 1973). En effet, par assimila-tion forcée, les enfants étaient expédiés de force dansdes écoles éloignées des réserves où il leur était interditde parler leur langue. On les contraignait à se couper lescheveux et à s’habiller comme les blancs; cela troubleencore les mémoires aujourd’hui.

En imposant le système d’éducation de la sociétémajoritaire, ne risquait-on pas de tourner le dos à l’héri-tage indien ? En raison d’un passé lourd de souvenirs,l’éducation est demeurée longtemps synonyme de«désindianisation» pour les peuples autochtones. Leurvolonté étant renforcée par leur résistance culturelle,certains Indiens se sont orientés vers un autre systèmescolaire: les écoles de survie où l’enseignement des lan-gues indiennes, longtemps interdit, est maintenant assu-ré dans de nombreux établissements scolaires (Lipka &Stairs, 1994; Rostkowski, 1973). Le principe du respectde la nature chez les Indiens est en rapport avec lesmouvements écologistes actuels, qui essayent de fairepression pour que cet enseignement ait sa place enmilieu scolaire.

Ailleurs que sur le continent américain, nous avonsl’exemple des peuples autochtones d’Océanie (en parti-culier les polynésiens de Hawaii et de NouvelleZélande) et les Aborigènes d’Australie qui ont subi desbouleversements considérables de par le colonialisme etqui continuent d’être agressés par les puissantes forcesd’uniformisation culturelle que représentent les sociétésindustrielles dominantes. Même lorsque les peuplesindigènes sont numériquement et politiquement domi-nants, leurs valeurs et leurs traditions culturelles sontmenacées.

Selon Teasdale (1999), des solutions commencent àémerger de certaines cultures autochtones. Les condi-tions socioculturelles varient énormément et desapproches qui «marchent» dans un contexte peuvent nepas convenir à tel autre. Toutefois, les tendances qui sui-vent sont certainement importantes:1. Il est indispensable que les peuples autochtones

aient vraiment la liberté de prendre leurs propresdécisions concernant l’éducation. Ils ont parfaite-ment le droit d’avoir pleine et entière propriété etautorité, non seulement sur l’éducation, mais sur

toutes les institutions, sociales, politiques, écono-miques, qui influencent directement leurs vies.

2. La langue est cruciale pour la survie culturelle, et lespeuples autochtones devraient bénéficier du soutienle plus entier pour faire revivre, pour maintenir oupour développer leurs langues, en particulier lorsquede telles initiatives sont nourries par la communauté,et pas seulement par l’école.

3. Les groupes autochtones devraient obtenir la libertéde repenser l’école en fonction de leurs propres para-mètres culturels. Ils devraient disposer de ressourcesqui leur assurent la possibilité de choisir desmodèles de scolarisation favorisant le développe-ment linguistique et culturel.

4. Tout en reconnaissant les droits culturels desgroupes autochtones, les éducateurs non autochtonesdevraient rejeter la supposition que la connaissanceoccidentale serait plus valable ou plus légitime queles autres connaissances. Ils devraient affirmer queles cultures de la connaissance locale ont le droit dejouer un rôle significatif à l’intérieur des écoles etdes autres institutions d’éducation.

5. Les enseignants, conseillers et gestionnaires nedevraient pas dispenser la connaissance, mais la par-tager, en recourant à une approche «qui consiste ànégocier du sens, et dans laquelle les incompatibili-tés entre les deux systèmes d’apprentissage sontrepérées et analysées.» (Teasdale, 1999, p.17).

V. DE L’ALPHABETISATION BILINGUE A L’APPROCHE INTERCULTURELLE DANS LE CONTEXTE LATINO-AMÉRICAIN

Les peuples autochtones d’Amérique latine comptentapproximativement 50 millions de personnes; cespeuples font partie de la configuration historique et cul-turelle du continent. En conséquence, ils ont un rôle àjouer dans l’avenir de la culture et de l’éducation deleurs peuples.

Une alphabétisation en castillan et en portugais a étédéveloppée par les jésuites pour évangéliser les indi-gènes, dans le cadre du territoire des Missions auParaguay et au Brésil au XVIIIèmesiècle. Dans ce contex-te, des cours d’éducation bilingue ont été donnés, desgrammaires et des dictionnaires des langues autochtones(tupi-guarani) ont été conçues. II y a une similitude avecles missions protestantes fondamentalistes nord-améri-caines de l’Institut linguistique d’été (InstitutoLinguistico de Verano, ILV): alphabétisation limitée à latraduction en castillan et en portugais de textes reli-gieux, et conversion des indigènes à une religion occi-dentale, dans le but d’une politique d’assimilation. Au-delà de l’intention des missionnaires, l’alphabétisationréalisée au cours de cette période a permis l’implanta-tion précoce d’un système d’éducation bilingue (cas-tillan-guarany) au Paraguay, système qui se poursuit denos jours.

Les rapports entre les colonisateurs et les peuplesautochtones ont provoqué des conflits de pouvoir. La

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condition d’une véritable relation interculturelle ne pou-vait pas être remplie: il a donc fallu beaucoup de tempset de souffrances pour reconnaître une dignité aux indi-gènes et à leur culture (Amodio, 1993).

En Amérique latine nous avons affaire à des popula-tions autochtones - minoritaires en Colombie ou mino-rées au Guatemala - qui, alimentées par les revendica-tions politiques face aux États-Nations, sont en train dese constituer en différentes organisations. Elles revendi-quent un certain degré d’autonomie de leurs territoires etaspirent à prendre sous leur contrôle direct la gestion deleurs ressources naturelles et démographiques et de leursaffaires civiles: l’éducation, la santé et la commercialisa-tion de leurs produits (Gasché, 1998a).

Dès 1971, le mouvement indien a ainsi permis dedéfinir une orientation radicalement nouvelle dans ledomaine de l’éducation. Depuis le début du siècle, émer-geait en Amérique du Sud une pensée politique où l’éco-le devenait un véhicule important du changement social.Le marxisme d’origine européenne a été repris et adaptéaux réalités de l’Amérique latine. Au Pérou, José CarlosMariategui, écrivait avant 1930, l’ouvrage Thèmes del’éducation dans lequel il présentait l’éducation commel’axe de la pensée économique et politique. Plus récem-ment, au Brésil, Paulo Freire publia en 1970 Pédagogiede l’opprimé dans laquelle il développe sa réflexion surl’éducation populaire. Son innovation éducative estconçue en tant qu’instrument de libération de l’individuet de changement fondamental de la société (Dasen &Marín, 1996).

Les premiers programmes d’éducation bilingue sesont développés avec l’alphabétisation des peuples indi-gènes en 1937 au Mexique, et plus tard, dans les années50 dans plusieurs pays d’Amérique Latine. Ils ont étéprincipalement réalisés par les missionnaires nord-amé-ricains du protestantisme fondamentaliste de l’ILV. Cetteinstitution religieuse a eu, à cette époque, une couvertureacadémique qui lui a permis de signer des accords avecles gouvernements; ceux-ci ont trouvé dans les mission-naires d’excellents supporters de leur politique «d’inté-gration nationale» destinée au contrôle politique, écono-mique et culturel des indigènes. En réalité, cettepolitique s’est réduite à une simple assimilation dans lecadre d’un modèle politique d’État-Nation incapable dereconnaître la diversité culturelle et linguistique danschaque pays. L’alphabétisation proposée est centréeprincipalement sur l’imposition du castillan ou du portu-gais comme langues officielles et la traduction enlangues indigènes des textes de la culture occidentale etdu Nouveau Testament - ceci afin de faciliter l’évangéli-sation, objectif fondamental de l’ILV (Marín, 1992).

En Amérique latine, au niveau officiel, les indigènessont considérés comme un obstacle au développement etau progrès du pays. Ils sont l’expression de cultures«arriérées» qui font barrière à la modernisation. La pro-blématique indigène a été construite principalement surune double situation d’oppression des peuples autoch-tones: l’exploitation économique d’une part et la discri-

mination raciale, linguistique et culturelle d’autre part(Albo & D’Emilio, 1990; Chioldi, 1990; Mayer, 1987;Montoya, 1998; Rodriguez, Masferrer & Vargas Vega,1983; Varese, 1985, 1987; Zuñiga, Ansión & Cueva,1987; Zuñiga, Pozzi-Escot & López, 1991). Quelle est laplace des indigènes dans le présent et le futur écono-mique, social et culturel de ces pays ? Cette questionimportante nous fait comprendre que la dimension poli-tique de l’éducation a une grande importance dans l’his-toire des peuples.

Au début des années 70, les fédérations indigènesrevendiquent la reconnaissance de leurs territoires et dudroit à leurs langues ainsi que la revalorisation de leurscultures. C’est à cette époque qu’une alternative éducati-ve s’est développée dans la perspective de contrer lapolitique d’assimilation de l’État.

Dans les années 80, une autre innovation prend del’ampleur en Amérique latine: les programmes d’éduca-tion bilingue et interculturelle. Ceux-ci cherchent àrendre l’école plus adaptée aux peuples indigènes de cecontinent. Tous ces projets sont développés par deséquipes multidisciplinaires (anthropologues, linguistes,pédagogues, psychologues, ingénieurs agronomes etforestiers, biologistes etc.), par des institutions universi-taires, des organisations religieuses, et des organisationsnon gouvernementales (ONG), par la coopération inter-nationale en association avec les syndicats et fédérationsindigènes.

Dans le cas particulier de l’Amazonie péruvienne, lepremier programme d’éducation bilingue et intercultu-relle est développé en 1975, comme projet de revalorisa-tion des langues et des savoirs des cultures indigènes.L’idée du respect des droits de ces peuples à leurs identi-tés est prise comme point de départ d’une politique d’in-tégration démocratique à l’intérieur d’une société multi-culturelle, caractéristique de plusieurs États d’Amériquelatine.

La participation des organisations indigènes à cesprogrammes permet d’ouvrir le débat sur le problèmerelatif à la possession de leurs territoires - programmessans lesquels ces sociétés sont condamnées à l’extinction(AIDESEP / ISP Loreto / PFMB, 1998; Gasché, 1989,1998a/b).

Dans le cas de la région andine sud-américaine, leProgramme de formation en éducation interculturellebilingue pour la région andine (PROEIB ANDES), desti-né à développer l’éducation interculturelle bilingue(EIB), à travers la formation de ressources humaines et àdévelopper la recherche a été créé à Cochabamba en1996. Ce programme est le produit des accords conclusen 1995 entre le gouvernement de la République fédéraleallemande et le Gouvernement bolivien. Sont associés àce programme la coopération technique allemande(GTZ), et pour la Bolivie, l’Université majeur de SanSimón à Cochabamba, centre d’études supérieures situédans une des régions indigènes Quechua de la Bolivie.Actuellement le PROEIB-ANDES, conçu au début pourla région andine bolivienne quechua et aymara, s’adresse

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aux populations indigènes amazoniennes de la Bolivie,et aux autres populations autochtones du Chili et duNord de l’Argentine. Le programme PROEIB-ANDESparticipe avec d’autres institutions au réseau des pro-grammes d’éducation bilingue et interculturelle enÉquateur, au Pérou et en Colombie. Ses activités sontsoutenues par le Bureau régional d’éducation pourl’Amérique et les Caraïbes (OREALC), par l’UNESCO,par le Fond des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF)et par l’Institut de la coopération ibéro-américaine (ICI).

Ces dernières années les gouvernements latino-amé-ricains ont pris conscience de cette réalité, et ils ontconsenti quelques concessions et reconnu certainsdroits. Les revendications politiques concernent aussil’éducation, et nous assistons au développement dediverses initiatives à ce sujet (Amadio, 1990; Amadio &López,1993; Gasché, 1998a/b; Godenzzi, 1996; López,1990).

Actuellement, au Mexique, les Indiens du Chiapasluttent pour conquérir leur droit à leurs territoires et unecertaine autonomie vis-à-vis de l’État mexicain. Ils pro-posent de construire une école destinée à mettre envaleur leurs langues et leurs cultures. (Campa Mendoza,1999; Diaz Polanco, 1997).

Ces programmes ne se limitent pas aux seuls pays oùla population indigène est importante (Mexique,Guatemala, Équateur, Pérou et Bolivie) mais s’adressentaussi aux pays, comme la Colombie et le Chili, qui ontune plus faible proportion de population indigène.L’approche interculturelle développée dans les pro-grammes d’éducation bilingue et interculturelle s’inscritcomme l’axe principal de la réponse à la question desavoir comment construire une éducation appropriéeaux peuples autochtones d’Amérique latine. Or, ce défise pose dans le sens du respect de la diversité culturelleet linguistique, en vue des programmes éducatifs déve-loppés par les États-Nations.

Ces peuples deviennent sujets de leur propre histoi-re, après avoir été des objets de la politique d’assimila-tion forcée et imposée par les États-Nations. Constituésen fédérations et soutenus par des ONGs, exigeant lerespect de leur droit aux territoires qu’ils occupentdepuis des siècles, ils aspirent à une éducation capablede revaloriser leurs langues et leurs cultures: une éduca-tion apte à répondre à leur réalité écologique et auxbesoins de leur vie quotidienne.

L’approche interculturelle, dans le contexte latino-américain, ne se limite pas à une simple approche théo-rique. Elle développe aussi un cadre de recherchesactives et participatives aux réalités concrètes, telle quel’élaboration des programmes d’éducation bilingue etinterculturelle. (Gasché, 1989, 1998a/b; Godenzzi,1996; Montoya, 1990). Par cette approche, il ne s’agitpas d’enfermer les individus dans leurs identités cultu-relles sous prétexte de les libérer de l’universalisme etde la standardisation culturelle, mais de construire unnouveau paradigme basé sur les échanges, tout en res-pectant la dignité de chacun – celle-ci étant basée sur la

valorisation, la reconnaissance et le respect mutuel auxniveaux social, économique, politique, religieux et cul-turel. Dans le cas des peuples autochtones, le respect despersonnes qui appartiennent à une culture déterminéeparaît fondamental.

L’interculturalité est conçue comme fondement d’unprojet démocratique à l’intérieur des politiques éduca-tives; elle imprègne la société et la démocratise dans lesens le plus large. Sa référence est associée aux pro-grammes éducatifs, en vue de renforcer les identitéspropres aux peuples indigènes du continent américain(Arratia, 1994). Pour certains, le concept d’intercultura-lité représente avant tout la relation entre une cultureindigène et la culture occidentale. Gasché (1999) affir-me que: «L’éducation indienne chez les peuples autoch-tones d’Amérique Latine, vue dans la perspective plusgénérale d’une éducation interculturelle bilingue, dépas-se aujourd’hui la problématique concernant les indi-gènes» (p. 1).

L’approche interculturelle peut aider à un véritabledialogue entre ethnies et nationalités et peut corriger lasituation actuelle de discrimination, dépendance etsoumission. En Amérique latine dans les années 80, ila été question de l’éducation biculturelle. Actuelle-ment, le choix se porte sur une éducation inter-culturelle (Jung, 1992, p. 62-65). Selon Godenzzi(1996), cette approche dans le contexte d’Amériquelatine tient compte de certains faits que peuvent êtrerésumés comme suit:● la perspective de l’approche interculturelle est de

constituer des rapports équitables en termes écono-miques, sociaux, politiques et culturels;

● le passage à une situation d’égalité est issu d’un pro-cessus de négociation sociale au cours duquel lesparticipants, surtout les peuples autochtones les plusmarginalisés, arrivent à construire leur autonomie età définir leurs droits en tant que citoyens.

Dans ce cadre théorique on peut concevoir l’éducationinterculturelle comme une proposition pédagogique àpartir d’un contexte politique donné, cherchant à orien-ter les acteurs éducatifs à répondre à la subordinationimposée par les systèmes de connaissances et desvaleurs de la culture dominante. La situation espérée faitréférence à des relations pédagogiques et des dialogueséquitables où s’articulent, de façon créative, les diverssystèmes de connaissances et de valeurs.

Brandão (1991) suggère deux démarches pour abor-der l’analyse de l’interaction des cultures, celle de typesocio-politique, centrée sur le pouvoir et celle de typesymbolique, centrée sur le savoir. La première démarcheconsidère la culture comme l’ensemble des réponsesaux besoins de sa reproduction et de son organisationsociale, en tant qu’instrument de ce pouvoir qui légitimel’ordre social existant. La culture se transforme pour sereproduire. La deuxième démarche envisage la culturecomme une création solidaire autour d’un consensus,qui permet d’arriver à des accords sur la significationdes codes et du sens du monde. Ces deux démarches

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existent actuellement; elles font mention des points clésà prendre en compte pour la recherche et l’applicationpratique de l’approche interculturelle.

La tendance dominante des États-Nations latino-américains s’inscrit dans le cadre des politiques néo-libérales qui sont imposés par les mythes du progrès etdu développement économique de la pensée uniquehégémonique. Dans cette perspective, nous assistons à lanégation et à la destruction arbitraire des traditions cultu-relles, ce qui érode la dignité et les droits fondamentauxdes personnes et des peuples autochtones. Cette mondia-lisation de l’économie ne possède pas de projet de socié-té humaine. Des réponses concrètes aux défis contempo-rains du respect de l’environnement et de la dignitéhumaine me paraissent indispensables.

Dans le contexte latino-américain, il faut imaginer lacréation de projets capables de répondre aux besoinsfondamentaux des secteurs populaires. En Amériquelatine, l’interculturalité est une réponse en construction,encore limitée à l’éducation «destinée aux indigènes».En Europe, nous avons mentionné que, pour le moment,elle est destinée aux seuls étrangers; il devient pourtantnécessaire d’abandonner la place marginale qu’elle y oc-cupe et d’assumer la diversité socioculturelle et linguis-tique comme finalité de l’éducation (Allemann-Ghionda,1999).

VI. CONCLUSION

L’approche interculturelle latino-américaine est déjàassociée aux politiques sociales et éducatives, en tantque référence dans le débat pédagogique, dans la forma-tion et la création des programmes et du matériel didac-tique. L’axe «éducation et démocratie» constitue undébat obligé. Cette approche est considérée comme lefondement d’une école appropriée à la diversité culturel-le et linguistique de chaque pays, une école capable demettre en valeur et de coordonner les différents apportsdes cultures existantes.

L’interculturalité n’est pas la simple transmission deprogrammes; elle permet l’articulation des approchesdifférentes aux connaissances nouvelles, au profit d’uneconstruction globale élaborée ensemble autour d’unmême sujet. En fait, elle enrichit les programmes del’ensemble des originalités de chaque culture, de l’acti-vité interculturelle vécue (Howard-Malverde, 1996).Appliquée au domaine de l’éducation, une approche dela réalité observable par les différentes cultures impliquel’étude des conditions de la transmission de savoirs dansdifférents types d’apprentissages. L’étude transversale del’éducation, au sens le plus large, permet de mieux com-prendre et mettre en valeur l’éducation traditionnelle,formelle et informelle dans leur complémentarité.

Comment imaginer la collaboration d’enseignantsformés à l’Université occidentale avec des spécialistesindigènes dans leur langue et leur culture en vue d’éla-borer les contenus d’un programme éducatif intercultu-rel? Comment éviter le risque d’une imposition descontenus déjà tout faits ? Comment coordonner les expé-

riences vécues en vue d’un partage des Bavoirs dans cedialogue entre cultures ? Ceci reste à réaliser.

II est possible d’imaginer une approche intercultu-relle à travers la radio diffusant en langues indigènes etparticipant à la socialisation familiale. II est aussi pos-sible de développer ces programmes au niveau interna-tional. Les expériences en Bolivie et en Équateur sontune bonne démonstration de la mise en pratique del’interculturalité, tant au niveau linguistique que cultu-rel (Albo & D’Emilio, 1990; Albo, 1995; Amadio,1989, 1990; Amadio, Varese & Picon, 1987;Chuqimantari & Quishpe, 1996; Howard-Malverde,1996; Moya, 1990).

La décentration culturelle paraît une étape incontour-nable. Ce préalable se traduit par un refus des préjugés etun changement d’attitude; elle évite la reproduction desschémas mentaux de catégorisation et de hiérarchisationdes valeurs. Elle correspond à un effort constant de semettre à la place de l’autre pour essayer de comprendreles points communs qui nous rassemblent, en tant quemembres de la seule espèce humaine. Le rôle de sociali-sation de l’école pourrait être efficace dans une stimula-tion de la décentration culturelle.

Créer les conditions qui nous permettent de vivreensemble, avec nos différences, devrait former un déficollectif. En effet, à partir d’une réflexion interculturelledes stéréotypes et des préjugés, il est possible deconstruire ensemble les savoirs nécessaires aux besoinsprésents et d’imaginer les réponses aux défis futurs. Lespeuples autochtones en tant qu’ensemble de sociétésmulticulturelles des différentes régions d’Amérique lati-ne trouveront nécessairement dans la richesse de leurdiversité les matériaux nécessaires à une constructionsociale démocratique respectueuse de la dignité humai-ne. Les questions soulevées par le problème des peuplesautochtones du continent américain peuvent éclaireraussi celles rencontrées sur d’autres continents, dontl’Europe confrontée au défi de l’intégration de ses mino-rités nationales ou ethniques.

Notes

1. Populations autochtone, chiffres approximatifs:Argentine 1,5%; Bolivie 59,2%; Brésil 0,2%;Colombie 2,2%; Costa Rica 0,8%; Chili 5,7%; ElSalvador 2,3%; Équateur 33,9%; Guatemala 59,7%;Honduras 3,2%; Mexique 12,5%; Nicaragua 8%;Panama 6,8%; Pérou 36,8%; Venezuela 1,5%.(Zimmermann,1995; Gleich,1989).

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I. INTRODUCTION

L’objectif de la présente étude est de s’interroger sur laplace et l’importance accordées aux valeurs dites univer-selles dans les documents de politique éducative, les pro-grammes d’enseignement et les manuels scolaires desquatre Etats-membres suivants: le Gabon, le Mali, leSénégal et le Togo. L’expression de «valeurs univer-selles» renvoie généralement à un ensemble d’idéauxmoraux prônés dans le concert des nations et qui serventde contenu référentiel pour la communauté internationalesous l’auspice des Nations Unies. Certaines de cesvaleurs sont : la tolérance, le respect des autres et de l’en-vironnement, la paix et la non-violence, le vivre-ensemble, la compréhension mutuelle entre les peuples,l’égalité entre les peuples, les genres et les personnes, etc.

II. LES APORIES DE LA PRÉSENTE ÉTUDE

D’entrée de jeu, la présente étude, consacrée à l’articula-tion entre document de politiques éducatives, programmeset manuels, pose des difficultés qui ne sont pas sans affec-ter la méthode d’analyse et même le plan du travail prévu.Des difficultés apparaissent lorsque notre problématiqueest saisie au niveau d’un même Etat-membre, tout commelorsqu’elle est abordée au niveau de l’ensemble des quatreEtats étudiés: Gabon, Mali, Sénégal et Togo.

1. L’écart de temps entre les documents de référencedes différents pays

La première difficulté d’ordre méthodologique que pose cetteétude se situe au niveau de la comparaison des politiques édu-catives et des programmes des quatre pays impliqués.

Entre la loi gabonaise n° 16/66 du 9 août 1966, por-tant l’Organisation générale de l’enseignement dans laRépublique du Gabon et la loi n° 99-046/ du 28décembre 1999, portant loi d’orientation sur l’Educationau Mali, trente-trois ans se sont écoulés. Comment est-ilconcevable d’envisager une comparaison dans une tellesituation? L’écart entre les deux textes suffit à découra-ger toute tentative à ce sujet.

2. L’articulation dans le temps entre les différentstypes de documents d’un même Etat-membre

Au niveau national et suivant le plan de travail annoncé,l’hypothèse serait celle d’une antériorité logique et chro-

nologique des textes de politique éducative sur les pro-grammes et d’une précédence chronologique des pro-grammes sur les manuels. L’hypothèse est partiellementvérifiée pour le Gabon et le Togo, elle ne l’est pas du toutpour le Mali et elle ne l’est qu’imparfaitement pour leSénégal. La loi d’orientation sur l’éducation au Mali estentrée en vigueur le 28 décembre 1999, les programmesdu 1er et 2e cycle de l’enseignement fondamental aux-quels nous avons eu accès datent respectivement de 1994et 1990 ; et les manuels de lecture de la collectionDzoliba que nous avons pu avoir entre les mains ont étéédités entre octobre 1994 et décembre 1997. Le Sénégala promulgué, le 16 février 1991, une loi d’orientation del’éducation nationale. De nouveaux programmes tenantcompte de la politique de réforme en cours sont envigueur depuis octobre 1999. Les manuels de lecture dela collection Sidi et Rama édités au 3e trimestre 1999sont inspirés des nouveaux programmes. Il reste cepen-dant que d’autres manuels en usage ne sont pas enconformité avec les nouveaux programmes et ne s’accor-dent donc pas clairement avec l’esprit de la réforme quiles inspire. A titre d’exemple, il convient de signaler lemanuel d’histoire, 2e étape et celui de géographie, 2e

étape, cours élémentaire, Ineade/Edicef 1996 ; le manuelde français, cours élémentaire, 1995 ; le manuel d’éduca-tion environnementale à l’école élémentaire, intituléPour mieux vivre au Sahel, 1998, PFIE/Sénégal. Il y amême des ouvrages antérieurs à la loi d’orientation de1991 qui sont toujours en usage. Le manuel intitulé,Langage, livre du maître 1ère étape,INEADE, 1990, enest un exemple.

3. Les raisons

L’explication de cet état de fait est qu’une profonderéforme du système éducatif impliquant une refondationcurriculaire est en cours d’expérimentation au Sénégal etau Mali. Les programmes d’octobre 1999, qui, auSénégal, sont élaborés en tenant compte des exigencesde la réforme n’ont pas encore été généralisés. Ils sontintroduits dans le système à côté des anciens pro-grammes qu’ils remplaceront progressivement, si la miseà l’essai est concluante. Au Mali, les programmes etmanuels conformes à l’esprit de la réforme n’étaient pasencore validés à la fin du premier trimestre de 2000.

Articulation entre documents de politiques éducatives, programmes et manuels:l’enseignement des valeurs universellesJohn Aglo

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Au Togo et au Gabon, l’antériorité des textes de poli-tiques éducatives (loi portant organisation de l’enseigne-ment, document officiel présentant la réforme de l’ensei-gnement) sur les programmes et celle des programmessur les manuels sont plus manifestes. La loi n°16/66 por-tant Organisation Générale de l’Enseignement dans laRépublique du Gabon, encore en vigueur à la fin du pre-mier trimestre de 2000, date du 9 août 1966.L’ordonnance promulguant l’Ecole Nouvelle au Togo estdu 6 mai 1975. Les programmes de l’enseignement du 1er

degré du Togo datent des années 1980. Les programmesdu Gabon qui nous ont été communiqués sont de 1990.Toutefois, force est de reconnaître que l’antériorité desprogrammes sur les manuels n’est pas toujours évidente.Ainsi, au Gabon, un manuel de français du CE1 date de1989 alors que le programme est de 1990. Le Togo et leGabon, eux aussi, manifestent de façon explicite leurvolonté d’engager de nouvelles réformes.

Cette situation transitoire dans laquelle se trouvent lessystèmes éducatifs des Etats-membres directement concer-nés par cette analyse a une incidence sur la disponibilité, lacollecte et le rassemblement du matériel sur lequel va porterl’étude. Certains documents susceptibles d’intéresser cetteétude ne sont pas accessibles parce qu’ils sont encore pourla plupart au statut de documents de travail. Les administra-tions nationales ne s’en séparent donc pas volontiers ou nesouhaitent pas leur divulgation en l’état. Des manuels delecture de certains pays, élaborés conformément aux exi-gence de la réforme, n’étaient pas encore validés aumoment où nous en avions besoin. Il n’y a en définitive quele Sénégal et le Togo pour lesquels notre étude a pu dispo-ser de matériel conséquent en vue d’un examen cohérent.

Les divers constats faits plus haut ne sont pas motivéspar l’intention de montrer qu’il existerait une incohérenceentre textes de politiques éducatives, programmes etmanuels. Ils nous indiquent plutôt que la recherche d’unerelation entre les objectifs éthiques et axiologiques mani-festés dans les textes de politiques éducatives, les pro-grammes et les manuels ne pourraient aboutir à des résul-tats très satisfaisants à l’heure actuelle. Si on tenait àrechercher la relation existant entre les objectifs des poli-tiques éducatives, les programmes et les manuels, la ques-tion qui devrait la mettre en évidence ne devrait se poser nidans l’ordre que nous avons prévu, ni dans les termesenvisagés. Dès lors, à la question de savoir s’il existe unearticulation entre politique éducative, les programmes etles manuels, la réponse de toute évidence est que l’heuren’est pas à une telle interrogation. Il faut entendre par làque la question ne saurait se poser, compte tenu de lasituation de réforme dans laquelle les Etats-membresconcernés se trouvent engagés ou de la volonté de réformequ’ils manifestent. Cette double situation s’imposecomme sous-jacente à toute réponse à ce questionnement.

Une telle étude, pour être rigoureuse et dense, devrapar ailleurs se doter de moyens appropriés en ressourceshumaines nécessaires, en matériels diversifiés et entemps suffisant. Elle ne peut être précipitée, ni être hâti-vement conduite.

III. L’ÉTUDE DES VALEURS D’APRÈS L’OPTIQUE DE LA PRÉSENTE ÉTUDE

Malgré les problèmes d’ordre épistémologique posés parcette étude, il reste que non seulement elle a commencé,connaissant ainsi un début d’existence, mais encore, elle apermis de dégager des centres d’intérêts pertinents. Ceux-ci mettent en évidence la prise en compte de certainesvaleurs, dites universelles, dans les textes de politiqueséducatives. Ces valeurs se manifestent comme des objec-tifs éthiques relayés ou non dans les programmes etmanuels. Elles permettent alors de poser avec pertinencela problématique de l’articulation du contenu axiologiquedes systèmes éducatifs de certains Etats-membres avec lesgrandes valeurs éthiques et humanistes. Ces dernières sontdéfendues dans le cadre du courant de progrès contempo-rain et nécessitent d’être prises en charge en vue d’uneadéquate «adaptation du contenu de l’éducation aux défisdu XXIe siècle».

Il est important d’attirer d’ores et déjà l’attention sur lefait qu’il n’est pas question ici d’une évaluation et encoremoins d’une analyse de type pédagogique. Il ne s’agitdonc pas d’examiner si les objectifs prévus, d’un point devue strictement pédagogique, ont été atteints, ou si lesoutils pédagogiques mis en œuvre dans un projet détermi-né ont été opérationnels ou continuent à l’être. Il s’agitplutôt de rechercher si les matériaux, les plans, les pro-grammes et les manuels utilisés dans des systèmes éduca-tifs concernés font place à des exigences éthiques. Il s’agitaussi d’évaluer dans quelle mesure ils véhiculent des idéeset des valeurs relatives au bien-être, au développement, àla paix, à la protection de l’environnement, à l’épanouisse-ment de l’humain, à la protection de la vie et de la nature,à la tolérance, à la nécessité de vivre ensemble pour le plusgrand bien de l’humanité. De ce point de vue, deux docu-ments nous servent de référence immédiate :1. le rapport à l’UNESCO de la Commission interna-

tionale sur l’éducation pour le vingt et unième siècle,présidée par Jacques Delors, intitulé L’éducation, untrésor est caché dedans, Paris, Éditions Odile Jacob,UNESCO, 1996;

2. le programme-cadre du BIE intitulé L’adaptation ducontenu de l’éducation aux défis du XXIe siècle,Genève, BIE, juin 1998.

Sur ces bases, la place et l’importance accordées dans lestextes de politiques éducatives, dans les programmes etdans les manuels aux valeurs universelles, telles que lapaix, la tolérance, le respect de l’autre et de l’environne-ment, le vouloir vivre ensemble (en apprenant à travailleren équipe, à écouter les autres), la compréhension dumilieu économique, social et politique seront étudiées, àl’échelle locale, nationale, régionale et internationale.

IV. LES VALEURS UNIVERSELLES DANS LES TEXTES DE POLITIQUE ÉDUCATIVE ET LES PROGRAMMES

Ces valeurs dites universelles apparaissent comme desfinalités et des objectifs recherchés, et même comme des

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thèmes à valeur pédagogique, dans les documents deprogrammes. Elles figurent aussi en préambule des ins-tructions officielles.

Ainsi, parmi les grands objectifs assignés à «l’EcoleNouvelle» par la réforme de l’enseignement au Togofigurent:● «la réhabilitation des langues et des valeurs cultu-

relles positives» ;● la préparation de l’apprenant à la vie et non seule-

ment au diplôme ;● l’adaptation des productions de l’école aux besoins

du développement rapide du pays, au milieu en déve-loppement ;

● l’égalité des chances à tous les citoyens, aux fillescomme aux garçons ;

● la confiance en soi ;● le sens de la liberté ;● la «connaissance du milieu» ;● l’esprit enraciné dans les réalités togolaises et afri-

caines ;● apprendre à être et à faire ;● la lutte contre le sous-développement ;● l’autodiscipline ;● l’institution de l’éducation post-secondaire et perma-

nente pour tous ;● la formation de l’esprit critique ;● la formation d’un citoyen ouvert d’esprit capable de

s’adapter aisément à toutes les situations nouvelles,plein d’initiative et apte à agir sur le milieu pour letransformer ;

● l’interdisciplinarité.

L’éducation nationale, au sens de la loi no. 91-22d’Orientation de l’éducation nationale au Sénégal a pourbut, entre autres, de «former des hommes et des femmescapables de travailler efficacement à la construction dupays». Elle porte un intérêt particulier aux problèmes éco-nomiques, sociaux et culturels rencontrés par le Sénégaldans son effort de développement, et garde le souciconstant de mettre les formations dispensées en relationavec ces problèmes et leurs solutions. L’éducation natio-nale sénégalaise se charge par conséquent :● de promouvoir les valeurs dans lesquelles la nation se

reconnaît, c’est-à-dire la liberté, la démocratie pluralis-te, le respect des droits de l’homme, la dévotion au biencommun, le respect des lois et les règles de la vie socia-le, le sens de la justice de l’équité et du respect mutuel ;

● de faire acquérir la capacité de transformer le milieuet la société, et d’ aider chacun à épanouir ses poten-tialités ;

● de développer l’enseignement des langues nationaleset des cultures africaines ;

● d’ouvrir l’esprit aux valeurs de civilisation.Dans les Grandes orientations de la politique éducative auMali on lit que: «la 3e République, convaincue que la paixest une condition sine qua non pour le développementhumanitaire durable, opte pour une éducation et une cultu-re de la paix». Elle stipule le droit à l’éducation commedroit fondamental dans sa Constitution. Elle opte égale-

ment pour l’édification d’une société démocratique, soli-daire et juste, qui a choisi la décentralisation. Elle accordeune priorité au développement des ressources humaines àtravers des valeurs culturelles maliennes, tournées vers desvaleurs universelles, une éducation à la citoyenneté, lacapacité de promouvoir le développement socio-politique,économique et culturelle du Mali. Elle insiste sur «l’im-portance du rôle et de la place des communautés et des col-lectivités décentralisées pour réaliser un changement pro-fond, pour refonder son système d’éducation». Elledemande que «les communautés s’approprient l’école»,que l’école soit «conforme à leurs aspirations», que l’éco-le réponde à «leurs besoins vitaux de développement»,que l’école fasse «partie de leur vie de tous les jours» etqu’elle soit «intégrée à l’environnement socio-culturel».

La loi n° 99-046 du 28 décembre 1999 portant Loid’orientation sur l’éducation au Mali précise que «lesystème éducatif malien a pour finalité de former uncitoyen patriote et bâtisseur d’une société démocratique,un acteur du développement profondément ancré dans saculture et ouvert à la civilisation universelle, maîtrisantles savoir-faire populaires et apte à intégrer les progrèsscientifiques, techniques et à la technologie moderne».

Ces textes mettent l’accent sur l’importance :● d’une société démocratique respectueuse de la paix

et des droits fondamentaux de l’homme et ducitoyen ;

● de la protection de l’environnement ;● de l’utilisation dans l’enseignement des langues

maliennes ;● de doter l’apprenant d’une capacité d’analyse, d’ap-

préciation et d’exploitation de la culture de son pays,des caractéristiques principales de son organisationpolitique, sociale et économie et d’information surdes potentialités et des perspectives de développe-ment dans un contexte de mondialisation, et de luipermettre d’acquérir l’apprentissage de la vie encommun, du travail en équipe et des bienfaits de lacoopération.

Pour les Etats-membres indiqués, la plupart de cesvaleurs sont reprises dans les documents d’éducationnationale, les programmes et les instructions officielles àla fois comme des objectifs à atteindre à travers l’écoleet comme supports indispensables de celle-ci. Dès lors, àla question de savoir si les objectifs s’articulent avec leprogramme, la réponse s’annonce ici positive.

Aussi bien dans les textes de politiques éducativesque dans les programmes et dans les manuels, lorsquecela est pertinent, il convient de noter que certainesvaleurs font l’objet d’une insistance particulière. Onpourrait citer par exemple :● la prise en compte du milieu, des besoins des popula-

tions, des besoins du développement des pays;● la réhabilitation ou la promotion des langues natio-

nales et des valeurs culturelles africaines;● la formation d’un citoyen épanoui sachant faire

usage de l’esprit critique, ayant confiance en lui,plein d’initiative, apte à agir sur le milieu et la

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société pour les transformer, acquis aux valeurs deliberté, de démocratie, de la vie en commun, res-pectueux des droits humains, de l’environnement,soucieux de la paix, recherchant le bien commun,le respect des lois et des règles de la vie sociale, lajustice, l’équité, l’égalité entre les citoyens, le res-pect mutuel, tolérant, ancré dans les cultures afri-caines et ouvert aux autres civilisations, et capablede s’adapter à toutes les situations nouvelles ycompris la mondialisation ou les mutations rapidesdu monde contemporain;

● l’importance du rôle et de la place des communautéset des collectivités.

D’une façon générale, ces axes seront exploités dans lesmanuels.

V. LES VALEURS DANS LES MANUELS

L’idée d’entraîner la perception des apprenants « face auxréalités quotidiennes de leur environnement physique etsocial afin de les aider à affronter les difficultés de la vie »est dominante dans les programmes. Elle va caractériseressentiellement l’organisation thématique des manuels.

Ainsi, mon sixième livre de lecture, manuel de lectu-re des élèves des cours moyen 2e année au Togo estorganisé en trois parties :1. la culture et la tradition ; 2. la vie active ; 3. le retour à la nature.

La première partie regroupe les thèmes, tels que la lectu-re, la famille, l’école, la patrie, loisirs et spectacles, àl’écoute du monde, voyages et transports. La deuxièmepartie comprend la santé, le commerce, les usines etmétiers, au village – à la ville. La troisième partie com-prend les phénomènes naturels, les activités agricoles,les paysages, les animaux, la chasse et la pêche.

Le manuel de lecture Sidi et Rama du cours moyen2e année du Sénégal est organisé en 11 thèmes, à savoirl’école, les grands sentiments, les moyens d’informa-tion, la ville et le village, traditions et cultures, santé ethygiène, l’environnement, histoires d’hier et d’aujour-d’hui, l’artisanat et l’industrie, sports et loisirs, l’exa-men d’entrée en 6e.

Certaines des préoccupations du Rapport Delors etdu programme-cadre du BIE sont reflétées aussi biendans les programmes qu’au travers des thèmes énoncésdans les manuels. Si l’on s’arrêtait aux thèmes telsqu’ils ont été énoncés, il est même possible d’affirmerque cette prise en compte des nouvelles préoccupationsde l’éthique internationale contemporaine est totale.

Mais à la lecture des manuels, par exemple, il appa-raît que l’exploitation pédagogique de cette prise encompte varie dans le temps et se renforce avec unetransformation qualitative progressive. Cette prise encompte oscille entre deux pôles :1. un pôle alliant l’éthique et la pédagogie ;2. un pôle plus traditionnel ou plus proprement péda-

gogique.

L’exploitation strictement pédagogique met l’accentsur l’acquisition des connaissances. L’exploitation alliantl’éthique et la pédagogie met l’accent sur le caractère pra-tique, l’utilité directe, la vie quotidienne et l’environne-ment social et économique. La manifestation la plusremarquable du deuxième pôle se trouve dans la collectionSidi et Rama, et particulièrement dans le livre de lecturedu cours moyen 2e année. Dans ce manuel, la plupart destextes étudiés ne sont plus destinés à l’acquisition de lalangue. Ils ne sont plus une collection destinée à servirseulement de support pédagogique avec des objectifs abs-traits et éloignés des réalités des enfants. Ils sont une véri-table leçon pratique de la vie, prenant appui sur « la pra-tique de l’étude du milieu », encourageant « l’espritd’initiative », alliant rigoureusement « l’école à la vie, lathéorie à la pratique, l’enseignement à la production ». Ici,l’exploitation se situe au moins aux trois niveaux suivants:1. l’acquisition de la connaissance ; 2. la mise en scène de la vie, de la vie quotidienne et

des problèmes y afférents ; 3. la mise en œuvre directe par le texte ou le reflet dans le

texte de certains des objectifs de la politique éducative.

Depuis le titre des textes «A la maison communautai-re», «L’Union fait la force», «Passons à la pratique»,«un geste humanitaire», etc., jusqu’au contenu de cha-cun d’eux se déploie une leçon pratique de la vie. Y sontillustrés les vertus et les exigences morales fondamen-tales, la démonstration du travail en équipe, l’implica-tion de la communauté toute entière dans le projet édu-catif par les apports conjugués de l’expérience dechacun. Si dans les anciens manuels, dont ceux d’histoi-re, on pouvait, par exemple, assister à l’éloge du guer-rier, il n’est, dans les nouveaux textes, nulle part fait uneapologie de la guerre, de la haine, du rejet de l’autre. Aucontraire, le combat pour le droit des enfants, le rôle desenfants dans leur apprentissage, la haine de la guerre, lasolidarité et la paix trouvent une illustration fascinanteavec une mise en scène fort convaincante dans une pers-pective où les enfants eux-mêmes sont des acteurs,chaque fois qu’ils en ont la possibilité.

VI.CONCLUSION

Il ressort de cette étude, que les Etats considérés ici s’ef-forcent remarquablement d’apporter une améliorationqualitative au contenu de leurs programmes d’enseigne-ment et de leur manuels scolaires d’une façon généraleet surtout au regard de l’enseignement des valeurs.

Si des difficultés sont à signaler, elles ne se situeraientpas au niveau des politiques éducatives et encore moins deleur mise en œuvre, mais plutôt dans la transmission dumessage pédagogique de l’enseignant à l’apprenant.Même à celle à cette échelle, ne sont en cause, ni la bonnevolonté des enseignants, ni la qualité des programmes,mais les conséquences concrètes de la pauvreté sur la viede l’école. Le décalage naturel qu’il y a entre le curricu-lum formelet le curriculum réelest ici renforcé par leseffets de la pauvreté, et profondément la qualité et la

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consistance du curriculum caché. Les difficultés écono-miques et financières des Etats rendent pénibles les condi-tions matérielles de vie des enseignants, des élèves. Ellesrendent aussi chronique le manque d’équipement, d’infra-structures scolaires et de personnel qualifié et en nombresuffisant. L’ensemble de ces difficultés peuvent entraînerqu’un curriculum formel qualitativement au point nedébouche pas sur la formation qualitative espérée. Or, laprésente étude ne s’est intéressée qu’au curriculumformel. De ce point de vue, elle ne saurait fournir que desindicateurs. Pour une approche plus adéquate, l’interactionentre les différents facteurs intervenant dans les systèmeséducatifs devra être prise en compte même dans une étudequi vise spécifiquement l’enseignement des valeurs.

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92

I. INTRODUCTION

Le présent article a pour objectif d’établir le lien entrereforme sectorielle et reforme curriculaire. Plus particu-lièrement, la question de la nécessité de la reforme auGabon sera développée. Néanmoins, dans un premiertemps il convient d’examiner, d’un point de vue théo-rique, l’origine des réformes éducatives en général ; ainsique les liens qui existent entre les différentes compo-santes de la réforme éducative.

II. ENJEUX ET CARACTERISTIQUES DES REFORMES CURRICULAIRES

1. Les différentes causes des réformes

Toute réforme se base, à l’origine, sur le constat d’undysfonctionnement grave du système éducatif par rap-port aux besoins et aux aspirations socio-économiques etculturelles d’un pays donné. L’invocation de la nécessitéd’une réforme sera révélatrice de l’urgence à corriger lesdéséquilibres et à rétablir l’adéquation du système édu-catif par rapport aux attentes de la société.

Selon les pays, les efforts d’adaptation du systèmepourront avoir trois types de finalités :1. l’adaptation aux exigences du développement écono-

mique (besoins divers en main d’œuvre qualifiée) ; 2. l’adaptation à l’évolution socioculturelle de la socié-

té (prise en compte des considérations linguistiques,promotion de l’accès à l’éducation des minorités, ins-truction civique ou religieuse, initiation à la démo-cratie et aux droits humains, etc.) ;

3. l’adaptation aux progrès scientifiques et technolo-giques.

A titre de fondement ou de finalité d’une réforme, lesprincipes d’équité, d’unification systémique, de diversi-fication linguistique ou culturelle pour obtenir la paixpeuvent également être invoqués.

2. Les aspects du système éducatif touchés par uneréforme

L’élaboration d’une politique et d’un programme deréforme porte généralement sur une diversité d’aspectsdu système éducatif que l’on peut ramener synthéti-quement à trois domaines. Ces derniers sont les sui-vants :

1. l’accès à l’éducation ; 2. la qualité de l’éducation ; 3. le management de l’éducation.

La refondation (également appelée réforme ou harmoni-sation) curriculaire relève essentiellement du domaine dela qualité du système éducatif à réformer. Mais, ellen’est pas sans relation avec les autres aspects, dévelop-pés plus bas.

La réforme souhaitée peut concerner un domaineparticulier, ou plusieurs domaines simultanément. Laprofondeur ou degré de changement désiré, peut aussivarier en fonction de l’état du système et des prioritésdégagées par les autorités nationales (sous l’impulsionde partenaires techniques et financiers ou suivant lapropre initiative du pays).

Il convient d’examiner, pour chacun des troisdomaines identifiés précédemment, à savoir l’accès àl’éducation, la qualité de l’éducation et le managementde l’éducation, quelles peuvent être les raisons objec-tives d’entreprendre des reformes.

3. Les objectifs, les actions et les moyens caractéris-tiques d’une réforme du système éducatif

Dans le domaine de l’accès à l’éducation, les réformesviseront à réaliser davantage d’équité et/ ou d’efficaci-té. Il pourra s’agir, par exemple, de corriger les déséquilibres en matière de scolarisation et de réussiteaux examens de fin de cycle ; ou les déséquilibresentre milieux urbain et rural, entre les deux sexes; ouencore entre groupes ethno-linguistiques et culturels,etc.

Pour résoudre le problème de l’accès à l’éducation,la réforme peut toucher, par exemple, la structure du sys-tème, en optant pour la réduction ou l’allongement ducycle d’éducation de base ou pour la création de nou-velles branches ou de filières de formation dans le post-fondamental. Selon le cas, il peut être question decontrôle et de gestion des flux par le biais de l’informa-tion et l’orientation, au moyen d’examen de niveau ou deconcours de sélection.

Dans le domaine de la qualité de l’éducation, laréforme peut porter sur deux catégories de facteurs. Lapremière catégorie est celle des facteurs institutionnels,tels que le curriculum, (c’est-à-dire les contenus, les

Politique sectorielle et réforme curriculaire

Mohamed Radi

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méthodes pédagogiques et les moyens didactiques); lespersonnels d’enseignement et d’encadrement pédago-gique et administratif ; et l’organisation scolaire(rythmes scolaires et carte scolaire). Il existe une rela-tion de cause à effet «évidente» entre ces différents fac-teurs.

La deuxième catégorie de facteurs est celle des fac-teurs individuels qui ont trait aux conditions de vie et descolarisation des élèves; notamment à leurs conditionsde vie socio-sanitaires et nutritionnelles.

Les réformes dans le domaine du pilotage straté-gique et de la gestion visent à soutenir le processus deréforme consacré à l’accès et à la qualité au traversd’une amélioration des capacités nationales en manage-ment du système éducatif. Il s’agit généralement d’ac-croître les compétences et de donner à l’appareil admi-nistratif de l’éducation les moyens d’assurer uneutilisation rationnelle des ressources humaines, phy-siques et financières.

Les actions de réforme dans ce domaine portent surtrois aspects :1. le renforcement des compétences des décideurs, des

cadres techniques et des gestionnaires du système; 2. la réorganisation de l’appareil institutionnel de pilo-

tage du système au niveau central et/ou régional etlocal;

3. la modernisation des méthodes de planification stra-tégique et de gestion.

Les moyens à disposition sont:1. l’amélioration du système d’information; 2. le recours à l’outil informatique; 3. la simplification et le contrôle des procédures de

gestion administrative et financière.

Pour élaborer un projet de réforme articulé de façoncohérente, différentes approches sont possibles. Legouvernement peut gérer le recours à la réforme sansl’aide de partenaires techniques et financiers extérieurs.Ou alors, il peut choisir de s’appuyer sur leur savoir-faire, utiliser leur expertise et/ou leurs ressources finan-cières. Les approches adoptées par les pays ou parte-naires ont évolué dans le temps, mais elles s’inspirentmajoritairement de la démarche développée parl’UNESCO.

4. L’approche préconisée par l’UNESCO:participation et « leadership» national

Aujourd’hui, UNESCO propose une approche sectoriel-le et un processus d’élaboration des politiques et de pro-grammes de réforme, ainsi qu’un processus de dévelop-pement de l’éducation qui s’appuient sur le leadershipnational et la participation. Cinq étapes principales ontété arrêtées:1. le recueil et le traitement des données chiffrées et

documentaires; 2. l’analyse sectorielle; 3. la formulation des politiques et des stratégies de

mise en œuvre;

4. l’élaboration des programmes d’action; 5. l’élaboration des plans d’opération et la mise au

point du dispositif de pilotage de mise en œuvre, desuivi et d’évaluation.

La dernière étape, consacrée à l’évaluation, renvoie audébut du cycle d’élaboration des politiques et pro-grammes de réforme.

Les options arrêtées pour l’accès à l’éducation auxdifférents niveaux ont un impact certain sur la qualité del’enseignement. Inversement, les choix qualitatifs,notamment les exigences d’apprentissage, ne sont passans effet sur l’écoulement des flux. Les capacités deplanification stratégiques en amont, et celles relatives àla gestion du système en aval, jouent un rôle détermi-nant dans le processus de conception et de mise enœuvre du curriculum tout comme dans l’ensemble de lapolitique éducative.

5. Autres conceptions de réforme de l’éducation

Les agences ou institutions de financement proposentdes démarches plus ou moins proches, mais avec desdifférences liées au mandat spécifique de chacuned’entre elles (Banque mondiale, banques régionales,USAID, Coopération anglaise etc.). Pour ce qui relèvede l’approche de la Banque mondiale, cette dernièrepropose ce qu’elle appelle un Sector-wide approach(SWAP), suivi d’un Sector investment programme(SIP). Les partenaires bilatéraux, quant à eux, ont nor-malement tendance à privilégier les aspects linguis-tiques et culturels dans le processus d’appui et d’élabo-ration des politiques et stratégies de réforme. Or, ceux-cisont des éléments qui touchent directement le curricu-lum.

A la lumière du développement d’ordre général ci-dessus, le cas concret de la réforme au Gabon représenteune illustration intéressante.

III. ANALYSE DU SYSTEME EDUCATIF AU GABON

En reprenant un à un les trois domaines définis précé-demment et en relevant pour chacun d’entre eux les élé-ments pertinents qui appellent des mesures de réforme,les conclusions suivantes peuvent être dégagées dans lecas spécifique du Gabon.

1. Etat des lieux du système éducatif gabonais

La question de l’accès à l’éducation au Gabon

En ce qui concerne la question de l’accès à l’éduca-tion, il apparaît qu’en dépit de la loi instituant l’obliga-tion scolaire jusqu’à l’âge de 16 ans, bon nombre d’en-fants quittent l’école prématurément (leur nombre estestimé actuellement à plus de cent mille individus). Parailleurs, la proportion des redoublements reste très éle-vée (33% en 1995-1996) et se traduit par un taux brutde scolarisation de 150% (taux net 95%). Dans lesecondaire, le taux de redoublement est de 25% en

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moyenne . Et le taux brut de scolarisation dans le pre-mier cycle est de 50%. On note l’existence de fortesdisparités régionales dans la répartition des ressourcesd’accueil et d’encadrement, ainsi qu’un taux d’échecextrêmement élevé au baccalauréat et dans l’enseigne-ment supérieur, malgré l’accès quasiment généraliséaux bourses d’études.

La question de la qualité de l’enseignement gabonais

Pour ce qui est de la qualité, il y a manifestement ungrand décalage entre le curriculum prescrit, le curricu-lum pratiqué en classe et les résultats atteints par lesélèves. Ce déphasage est dû aux déficiences endogènes(institutionnelles) et exogènes qui ont des répercussionsnéfastes sur la capacité d’apprendre des enfants. Lesdéficiences institutionnelles principales sont:● la faible efficacité interne fait que 40% des élèves

du premier degré atteignent la sixième année; ● le taux d’admission parmi les élèves des classes

d’examen de CM2, 3ème et Terminale, sont de 31%(37% en 1998), 48% et 33% en 1995-1997 ;

● l’effectif d’élèves par maître varie de 53 à plus de100. La sous-qualification des maîtres est estimée à45% de l’effectif total ;

● la volonté d’introduire l’enseignement des languesnationales dans le secondaire est manifeste ;

● il y a nécessité de diversifier les filières du secondai-re pour assurer la formation professionnelle ;

● l’enseignement des sciences doit être développé envue de résorber notamment le déficit en enseignants

● on constate un taux de chômage de diplômés universi-taires aux côtés d’une pénurie d’enseignants, en parti-culier de professeurs de mathématique et de français ;

● la définition d’une politique du livre scolaire en parti-culier et du matériel didactique en général est urgente.

Les déficiences individuelles principales dues aux fac-teurs exogènes sont les suivantes:● la sous-alimentation et la malnutrition ; ● l’absence de soins de santé primaire ; ● l’analphabétisme des parents ; ● le problème de transport à Libreville ; ● l’enclavement de certaines localités rurales.

La management de l’éducation au Gabon

En termes du pilotage stratégique et de la gestion, onrelève que l’administration de l’éducation se caractéri-se par la faiblesse des fonctions de planification straté-gique, de recherche et de gestion pédagogique, maisaussi de gestion administrative et financière. On déplo-re l’absence d’une politique éducative clairement for-mulée et les déficiences du système d’information;ainsi que l’état encore embryonnaire de la carte scolai-re. La préparation et l’exécution budgétaires se trou-vent en déphasage par rapport aux réalités et auxbesoins de fonctionnement du système. La gestion dupersonnel est archaïque. Enfin, il y a absence de plani-fication éducative. Par ailleurs, peu d’études et de

recherche- action aussi bien sur les options de politiqueéducative que sur les aspects pédagogiques ont étémenés. Il existe un manque de coordination à la foisintra et intersectorielle.

2. La réforme du système éducatif au Gabon

Au Gabon, une prise de conscience de la nécessité de laréforme a eu lieu. Toutefois, le processus d’élaboration aà peine été amorcé.

Le Gouvernement a souhaité l’appui technique del’UNESCO dans ce domaine. La coopération entaméea permis d’esquisser le contour d’un projet qui com-porte une première évaluation de la politique éducati-ve en vigueur et qui ouvre quelques portes deréflexion sur les évolutions futures et les orientationsde réforme. Il propose un calendrier et des modalitésde travail et de collaboration avec les partenaires exté-rieurs, ainsi qu’une évaluation financière du coût desactivités d’élaboration du programme de réforme. A cestade, la validation et le financement du projet restentà être confirmés, avant le passage à la phase de la poli-tique et du programme d’action qui en découle.

IV. CONCLUSION

En guise de synthèse, il peut être retenu que la questiondu curriculum occupe une place centrale dans un projetde réforme national. La refondation curriculaire a desimplications multiples en termes de politique linguis-tique et culturelle. En outre, elle entraîne des consé-quences sur la mobilisation et la planification desmoyens humains, physiques et financiers. C’est pour-quoi toute refondation curriculaire doit s’insérer dansune vision globale du devenir du système éducatif.L’ampleur des dysfonctionnements, des déséquilibreset des disparités que connaissent les systèmes éducatifsde certains pays africains conduit à la nécessité d’uneréforme fondamentale qui touche aussi bien le curricu-lum que les autres composantes du système éducatif.L’intérêt de l’idée de réforme réside dans le fait qu’elleoffre l’occasion d’une remise à plat de tous les aspectsdu système. C’est l’occasion de bâtir une nouvelle poli-tique, dont les options seront articulées entre elles etrépondront aux besoins et aspirations nationales.

Plus les autorités nationales retarderont l’échéance del’engagement véritable dans la voie de la réforme, plus lesproblèmes s’aggraveront. Il n’est plus possible aujour-d’hui de réformer les systèmes éducatifs profondémentatteints par simples retouches isolées et partielles. On nepeut plus faire l’économie d’un projet de réforme quiintègre l’ensemble des mesures dans une vision sectoriel-le, et qui s’appuie sur une programmation rigoureuse desactions et des moyens pour en réussir la mise en œuvre.

Note

1. Chef de la Section des politiques et plans d’action natio-naux / Division des politiques et stratégies du Secteur del’éducation/UNESCO, Paris, France.

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I. LE CONTEXTE NATIONAL SENEGALAIS

1. Introduction

Le Sénégal est, en Afrique, un des premiers pays coloni-sés par la France, bénéficiaire d’une scolarisation enfrançais. Mais, en dépit des distinctions qu’il a accumu-lées avec l’implantation de la première école normaled’instituteurs à Saint-Louis, puis à Gorée, d’une univer-sité de prestige et de structures diversifiées de formationde cadres, le pays n’est scolarisé qu’à 68%.

En matière de gestion de son système éducatif, ilest confronté à des disparités entre les régions, à desrendements médiocres à tous les niveaux d’études, àl’incapacité de son enseignement technique et profes-sionnel à s’adapter aux besoins du pays en matièred’emploi, à une surpopulation au niveau de l’universi-té, notamment des facultés de droit et de lettres encomparaison avec les filières susceptibles de formerdes techniciens correspondant aux secteurs primairesdu développement.

Pour tenter de remédier à de telles insuffisances, lesGouvernements qui se sont succédés depuis les indépen-dances de 1960, ont entrepris plusieurs réformes.Toutefois, peu d’entre elles étaient bien préparées, ouconstruites autour d’axes fondamentaux, de palierssolides.

Depuis les États généraux de l’éducation et de la for-mation (1981), salués comme l’alternance politiquerécente et comme un témoignage de sagesse, aucuneréforme n’a été menée selon les exigences d’un partena-riat enrichissant, accordé à un suivi organisé.

Au contraire, il a manqué, aux réformes recensées de1962 à 1998, des points d’ancrage nécessaires, comme laprise en compte d’une base curriculaire unificatrice desréalités régionales et locales dans un pays diversifié, auregard de son climat et de sa couverture végétale, de sapopulation multiculturelle, pluri-ethnique et plurilingue.

Au lieu de privilégier ces signes de croyance en soi etde volonté de prioriser les stratégies qui libèrent culturel-lement et économiquement un peuple, on a souvent prêtéplus d’attention aux innovations en vogue dans les paysdu Nord, parce que assuré que dans le train qui lesamène, le financement extérieur et l’assistance techniqueseront du voyage.

2. Rétrospective portant sur les orientations et conte-nus de programmes (1962 – 1979)

Divers réformes et tentatives de relancer l’éducation sesont succédés depuis quarante ans. Ces évènements onteu lieu a des intervalles de plus en plus rapprochés ; audébut des années soixante tous les dix ans ; aux annéesquatre-vingt-dix, presque annuellement. Il serait abusifet mensonger de penser et de dire que ces réformes nenous ont rien laissé comme idées fécondes et capacitésd’inventer. Néanmoins, la balkanisation du continent,le tutorat exercé par l’assistance technique et l’insuffi-sance de ressources en recherche-action n’ont pas per-mis jusqu’ici d’avoir les moyens de procéder à des dia-gnostics approfondis, de déterminer les politiqueséducatives en dosant les niveaux d’inculturation etd’acculturation.

Il est impératif de donner un contenu aux professionsde foi que sont celles de l’enseignement, en ce quiconcerne l’édification d’une école où l’on apprend àapprendre et entreprendre, à se débrouiller dans n’impor-te quelle situation pour résoudre ses problèmes dans uneperspective de développement intégré et durable.

3. Les interrogations à ce jour

Comment formuler la problématique d’un système édu-catif qui ne serait pas une mauvaise copie de celui duNord ? Quelles interrogations peuvent traduire la pertede confiance des populations qui ne croient plus à lacapacité de l’école de devenir un moyen de promotionsociale ? Comment rendre le sentiment qu’ont les ensei-gnants que la distribution actuelle des savoirs et dessavoir-faires ne permet plus aux élèves d’observer enprofondeur les réalités qui les entourent, de comprendrele monde, de connaître les autres en vue de les respecter,les tolérer dans leurs différences d’origine, de langue etde culture dans un cadre de vie égalitaire et démocra-tique ? Comment faire en sorte que l’accès à l’instructionn’incite l’enfant à rompre avec les activités productivesdans son milieu, avec le mode de vie de sa communautéde base ? Comment concevoir une nouvelle stratégied’organisation des programmes, de nouvelles pratiquespédagogiques, afin qu’elles contribuent à l’enracinementdu sujet dans son terroir, au développement d’uneconscience citoyenne, à la capacité des Sénégalais de

La problématique du développementdu curriculum: le cas sénégalais

Souleymane N’Diaye

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résoudre leurs problèmes existentiels sans adopter dessolutions faciles d’oisiveté et paresse, de délinquance etsans croire aux mirages de l’émigration ?

II. EDUCATION ET CHANGEMENTS DE SOCIETE

Le Sénégal, à l’image de tous les pays du monde, estobligé de changer pour partager les défis et enjeux denotre époque. Ceux-ci encouragent à faire face auximpératifs en matière de développement, à renoncer àcompter sur l’aide extérieure pour résoudre les pro-blèmes, à sélectionner les traditions pour se débarrasserde certaines pesanteurs, à partager avec les autres les cul-tures d’ouverture, à dominante scientifique et technolo-gique, les stratégies de lutte contre la pauvreté, l’igno-rance et la maladie.

Dans le but d’avancer dans cette direction, il esturgent de se doter d’une nouvelle perspective de la vie etde l’évolution, d’un nouveau regard sur l’école, ses pro-grammes, la transmission de ses savoirs et savoir-faires,son rôle dans la transformation du milieu.

Sous la loupe, la réforme sénégalaises des program-me révèle que dans la recherche de qualité les dimen-sions suivantes ont été insuffisamment prises en comp-te:1. Jusqu’ici la définition du rôle de l’école a été abordée

davantage en termes de capacités intellectuelles, dedonnées cognitives au regard de résultats attendusdans des examens de fin cycle organisés autourd’épreuves de connaissances. Or, il conviendraitd’instaurer des tests de compétences fondamentales,transversales et disciplinaires qui mesureraient avecrigueur des savoirs, savoir-faires et savoir-êtres. Dufait que les évaluations formatives ont été mal organi-sées et sont de fait incapables de révéler les aptitudestechniques, esthétiques et les capacités et non révé-lées du sujet, la notion de réussite a été au départ malabordée par l’école. L’environnement n’est jamaisintervenu pour essayer d’aider les maîtres à refonderles apprentissages et le système d’évaluation, afin defavoriser, en même temps que le flux des élèvesentrant dans les lycées et collèges, l’orientation desautres ayant échoué aux examens vers les secteurs dela productivité, parce qu’ayant des potentialités dansles apprentissages «pratiques».

2. Au Sénégal, les réformes passées en revue ont portéprincipalement sur les contenus/apprentissages. Ellesn’ont pas abordé globalement toutes les dimensionsd’un curriculum, de manière systémique, ce quiaurait signifié qu’aucune composante du système nepeut être développée, améliorée sans être accordée àla valorisation des autres.

3. Ces réformes n’ont pas dégagé en préambule commepostulat un certain nombre d’outils conceptuels:structuration, techniques de montage, traitement dechaque composante, prise en considération des parti-cularités locales, indicateurs et descripteurs de quali-té etc. Elles n’ont pas réussi à mobiliser les parte-naires concernés dans un espace semi-autonome afin

d’assurer à tous la liberté de penser, d’agir et des’engager à leur gré.

4. Elles auraient dû, chaque fois que l’âge et le niveaude compréhension des bénéficiaires le permettent,les informer au sujet des objectifs et modalités deleur formation.

5. Elles ont maintenu les systèmes traditionnels d’éva-luation sommative en décalage fréquent avec les dif-férentes natures d’apprentissage incluses dans lesprogrammes.

III. REPERES, POINTS D’ANCRAGE ET DIRECTIVES

Dans un pays très politisé comme le Sénégal, qui recon-naît à la fois le multipartisme et la pluralité syndicale, iln’est plus possible d’introduire une réforme sans qu’ellefasse l’objet d’un débat national. Il a donc fallu satisfai-re à l’exigence de présenter à l’opinion publique engénéral, aux enseignants en particulier, le diagnosticauquel nous avons adhéré, en attendant un approfondis-sement ultérieur, de donner une idée de nos repères, denos intentions en matière de démarches heuristiques, deprise en compte de contraintes nationales d’ordre social,économique et culturel, de la nécessité pour nous defaire appel à l’Unesco pour être initiés dans l’ingénieriede la construction des curricula.

1. Le référentiel sénégalais

Nous avons donc constitué un référentiel où on pouvaitnoter les indications de cette nature:

Le cadre institutionnel et législatif

● définition et délimitation d’un cadre institutionnel etlégislatif par une citation d’articles de la Loi fonda-mentale (Constitution) relative aux droits à l’éduca-tion, à la laïcité, à la création des écoles privées, etc.;

● extrait des lois en vigueur: la Loi d’orientation(1991) et la Loi sur la décentralisation (1996).

Les grands axes de philosophie éducative● extraits de la Lettre de Politique éducative sectorielle;● fidélité aux Etats généraux de 1981 et aux recom-

mandations issues de sa session d’évaluation (1997).

Référence aux engagements pris à des niveaux suprana-tionaux pour partager avec les autres les impératifs del’évolution du monde

● orientations adoptées à l’issue des conférences deJomtien (1990) sur l’éducation de base, d’Alma Altaà propos de l’éducation environnementale et Bejingen ce qui concerne la promotion féminine ;

● conventions adoptées en relation avec l’UNESCO ausujet des stratégies nouvelles en éducation, deslangues nationales (Zimbabwe), de l’enseignementsupérieur, dans le cadre de la CONFEMEN, desconférences régionales, dont l’une des dernières aformulé des recommandations sur l’éducation à lapaix, aux droits de l’homme et à la démocratie.

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Notre référentiel conceptuel a été à la fois ouvert et incitatif

Il a puisé les éléments suivants dans les recommanda-tions des Etats généraux de l’éducation et de la forma-tion:● l’exigence de confier à une «structure unique de pilo-

tage» (recommandations n° 7 et 19) la conceptiond’un référentiel méthodologique qui précise lesobjectifs, stratégies, actions majeures, l’échéancier etles modalités de suivi et d’évaluation des réformes;

● la promotion de l’hygiène et de la santé dans etautour de l’école;

● le soutien accru aux actions de recherche de supportsdidactiques, à une nouvelle politique de l’édition sco-laire (recommandation n° 8) ;

● la création d’un Institut des langues nationales etl’introduction des langues nationales dans le systèmeéducatif (recommandation n° 8) ;

● la promotion de l’éducation non formelle, comptetenu du fait que notre pays a une vocation essentielle-ment agricole, pastorale et halieutique (recommanda-tion n° 13).

A ces référents nous avons dû ajouter et intégrer lesinterrogations propres sur les exigences du développe-ment, sur la surcharge des programmes, sur l’échec scolaire, sur la dégradation du professionnalisme desenseignants, sur la gestion du temps scolaire et du tempslibre des enseignés.

Dans un pays économiquement pauvre, où la morta-lité est élevée et l’encadrement médical insuffisant, oùseulement un enfant sur deux va à l’école, où l’eaupotable et l’électricité ne sont disponibles que dans lesvilles, un pays qui importe l’essentiel de son alimenta-tion, le curriculum ne peut être qu’une réponse globale àdes priorités de plusieurs natures (Figure 1).

2. Options transmises aux Commissions techniquesau titre de directives structurelles et pédagogiques

Se fondant sur les recommandations du Colloque deSaint-Louis (1995), le Comité de pilotage a orienté lescommissions techniques vers les aspects suivants:● l’intégration entre le formel et le non formel ;● la priorisation des processus pédagogiques par rap-

port aux contenus.

FIGURE 1. Quel curriculum ?

QUEL CURRICULUM

Socioculturel

nationaleculturel

Scolaire :pratiques et habitudesprogrammes envigueurquestionnement dunon-formel

Scientifique :contenussavoirs expertsconnaissancefondamentales

Philosophique :valeursconception de lavie

Politique :charteorientationslois

Economique :demandesocioéconomiquebesoins dedéveloppement

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Le Comité de pilotage a pris des initiatives pour arbitrerdes débats divisant les collègues sur plusieurs questions,dont les suivantes:● les bases taxonomiques: il a fallu, à l’occasion d’un

séminaire (ITPIS), confectionner une base de com-promis qui sert depuis de la didactique de référence àtous ;

● la nature des compétences, en unifiant le langage eten évitant d’entrer dans le détail des capacitésnotionnelles (l’atelier de français a mis beaucoup detemps pour s’accorder sur ce sujet).

Nous avons sollicité de l’UNESCO une documentationappropriée pour nous enrichir au sujet des manièresd’enseigner moins tout en apprenant plus, d’introduiredes démarches libérales dans des classes à gros effectif.

Nous avons aussi adressé aux membres desCommissions une invitation à:● rendre les programmes moins encyclopédiques ;● assortir à la pédagogie par objectifs une relation avec

des compétences et capacités à déterminer ;● concevoir des profils d’étapes et un profil de sortie de

cycle ;● réaménager l’organisation du travail scolaire de

manière à rendre possible le recours à la disciplinari-té et à l’interdisciplinarité ;

● introduire dans le dispositif programmatique uneremédiation des déficits recensés par les projetsPASEC et SNERS chargés de l’évaluationformative ;

● considérer l’école comme un espace ouvert à la com-munauté éducative des alphabétiseurs et des anima-teurs culturels ;

● penser à la continuité des études, mieux organiserl’articulation entre l’élémentaire et le moyen, imagi-ner des passerelles entre l’école et les projets alterna-tifs.

IV. PROBLEMATIQUE DU CHANGEMENT:JUSQU’OÙ ALLER DANS LA CONSTRUCTION DU CURRICULUM ?

Parvenu à un certain niveau de maîtrise du diagnostic etobligé de choisir entre plusieurs dimensions dans la voiedu changement, le pouvoir en place inévitablementconduit à faire le choix entre trois pratiques dans lesréformes:1. introduire des innovations dans les programmes ; 2. décider d’une refondation du système ;3. promouvoir une rénovation des composantes du cur-

riculum.

1. Innover?

Les innovations sont des changements limités dans lamesure où elles n’ont pas pour effet de bouleversertoutes les composantes du système.

Elles exigent une nouvelle approche pédagogique(par exemple, dans l’enseigenement du français, privilé-gier l’oral avant l’écrit, une approche globale ou mixte),

le recyclage du personnel, une production et le recours àde nouveaux instruments d’évaluation.

La mise en œuvre dans le passé d’innovations nom-breuses et non coordonnées (étude du milieu non éclatéeen sciences, français langue seconde, mathématiquesmodernes etc.) dans des écoles pilotes au Sénégal, dontles performances ne se distinguaient pas de celles desautres écoles, n’a pas amélioré la qualité de l’enseigne-ment.

2. Refonder ?

La refondation conduit à tout raser, à reconstruire l’édi-fice scolaire, à remanier les programmes et lesméthodes, le profil de l’enseignant, système d’évalua-tion, et, dans certains cas, à changer de médium linguis-tique. Elle se décline en termes de ruptures.

La Guinée de Sékou Touré est l’exemple que l’oncite souvent pour illustrer le passage brutal d’un typed’école à un autre. Les caractéristiques de la refondationguinéenne étaient la suppression du français et son rem-placement par les langues locales, la transformation del’école en cellule de production, la priorité de l’idéolo-gie sur la liberté d’opinion et d’expression du personnel.

3. Rénover ?

La rénovation consiste, au regard du diagnostic opéré,d’appliquer un traitement combiné qui concilie trois élé-ments:1. supprimer ce qui est archaïque, inopérant et généra-

teur d’échec ;2. réaménager ce qui n’est pas suffisamment opération-

nel ;3. introduire ce qui manque et qui peut générer plus de

performance.

La rénovation procède d’une démarche de compromis etde régulation. En optant, par exemple, pour une utilisa-tion combinée du français et des langues nationales, lesconcepteurs du nouveau curriculum sénégalais ont choi-si de rénover plutôt que de refonder ou innover.

V. LES COMPOSANTES D’UN CURRICULUM

1. Typologie: un schéma parmi d’autres

En observant la Figure 2, il est facile d’y reconnaître lescomposantes suivantes:1. une composante d’idéation, de détermination des

objectifs généraux et opérationnels (A), en prévoyantle traitement de plusieurs catégories d’apprenants (B);

2. une composante d’organisation des contenus d’appren-tissage qui mène à l’élaboration d’un programme (C);

3. une composante méthodologique qui revient à savoircomment faire passer les contenus, changer demanière d’enseigner et de former, en fonction duniveau de la classe, des déficits à combler, des résul-tats attendus (D) ;

4. une composante «moyens» qui appelle la mise à ladisposition des élèves des supports écrits (manuels)

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ou non écrits (planches scientifiques, globes ter-restres), des outils pour les manipulations, les expé-riences, les travaux pratiques etc. (E). Le problème leplus fréquemment rencontré est celui de l’absence demoyens adaptés et en quantité suffisante.

5. le schéma de Wheeler fait de l’articulation entre leformel et le non formel un élément isolé: nous ne le

suivrons pas dans ce traitement. Cette question seraexaminée dans le point (D), parmi les approches etdémarches qui conviennent dans les situations d’ap-prentissage (F);

6. la composante «évaluation» est incontournable :avant la leçon (évaluation des prérequis), au coursdes activités pédagogiques (évaluation des perfor-

FIGURE 2. Les composantes d’un curriculum

Idéal de l'éducation = finalité des finalités

Finalités de l'éducation

Objectifs généraux et opérationnels (A)

Auto-évaluation del'activité didactique*

Modalités d'articulationentre apprentissageformel, non-formel etinformel (I)

Evaluation desperformances en fonctiondes objectifs; instrumentset techniques à choisir ou àélaborer (H)

Elève et groupe d' élèves :aspirations, besoins, surdoués,rattrapage, etc. (B)

Contenus :déterminés enfonction desprogrammes desintérêts des élèvesetc. (C)

Méthodes : choisiesen fonction desobjectifs, contenus,niveau de la classe,etc. (D)

Moyens didactiques :choix et dosageconditionnés (E)

Les formes ou modesd'organisation del'apprentissage :classes ou groupes,cercles, etc. (F)

Lieu d'apprentissage :salle de classe,bibliothèque,laboratoire, etc. (G)

Contexte de l' apprentissage = contenus latents ou implicites (J) + qualité de la vie scolaire,styles pédagogiquesSource : Wheeler, D., 1974.

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mances, découverte des lacunes) et à la fin desapprentissages (évaluation des profits tirés de l’ap-prentissage, critères de certification) (H) ;

7. nous présenterons la dernière composante commeportant sur tout ce qui peut placer le maître et lesélèves dans de bonnes conditions de travail: un espa-ce fonctionnel et incitatif, suffisamment de tempspour travailler, un établissement pourvu d’eau,d’électricité, d’un terrain de sport, d’une biblio-thèque, acquis à la diversification des modèles d’ac-quisition, aux facilités dans l’intercommunicationmaîtres- élèves, élèves- élèves, etc. (G)

La notion de curriculum n’étant pas encore suffisam-ment assimilée dans nos pays francophones à cause decelle de programme, nous avons usé de beaucoup depatience et de l’appui de Charles Delorme du CEPEC deLyon pour en rappeler le contenu et tout ce qu’on peut entirer, afin de:● faire en sorte que notre projet éducatif apporte une

réponse à nos interrogations au sujet de la société quenous voulons promouvoir, les valeurs que nous vou-lons conserver, les enrichissements dont nous vou-lons bénéficier pour que l’école devienne un instru-ment de progrès et que les élèves puissent aborder lefutur avec des capacités d’adaptation ;

● développer chez l’élève les capacités cognitives, leshabiletés et les comportements qui font de lui unsujet équilibré ;

● nous appuyer sur les ressources de l’éducation, decompétences acquises dans le formel et le non formelpour participer au progrès scientifique universeld’une part, et investir en aptitudes dans la transfor-mation de notre milieu, dans des stratégies de déve-loppement intégré et durable ;

● développer des pédagogies spécifiques, commecelles qui visent à lutter contre la dégradation denotre environnement, celles œuvrant en faveur de lapromotion de la femme, de la réduction de la mortali-té et de l’amélioration du cadre de vie des popula-tions ;

● réorganiser la vie en milieu scolaire, afin qu’elledevienne plus attrayante, que les apprentissages ydeviennent plus fonctionnels, que les enseignantssoient plus motivés et que les populations aientdes raisons de donner assistance et appui au systè-me.

2. Récapitulatif des composantes et préparation des activités

Si l’élément premier et fondamental a été l’élaborationde nouveaux programmes, nous avons très tôt identifiéles autres composantes à traiter, les orientations à leurfixer, la documentation à exploiter et les acteurs pres-sentis pour aider le Comité de pilotage dans sa mis-sion.

En plus des programmes ci-après, Tableau 2 présenteles six autres composantes de notre curriculum de l’édu-cation de base.

3. Le Livret- Programme- Horaire (LPH)

Dans la logique de Jomtien 1990

En août 1995, le Comité scientifique, devenu Comitéde pilotage, reçu comme directive de chercher à remé-dier à l’inadaptation des contenus éducatifs, à la diver-sité des innovations pédagogiques et structurelles, àl’imprécision du profil de l’enseignant polyvalent, auxpertes de temps découlant de la journée continue et desclasses alternées en élaborant des programmes désor-mais:● plus pertinents ;● flexibles ;● intégrés ;● référés aux besoins éducatifs fondamentaux ;● équilibrés entre la théorie et la pratique.

Anticipant sur le traitement de la composante formation,le colloque dans sa recommandation relative aux curri-cula nous demandait de:● mieux cerner le profil de l’enseignant polyvalent ;● sensibiliser les enseignants au sujet de la maîtrise

des activités communautaires et de la nécessité deflexibiliser les contenus-apprentissages ;

● imprimer à l’éducation une ligne d’action fondée surdes besoins fondamentaux communs (au plan natio-nal) et des besoins spécifiques (propres aux régionset à certaines catégories bénéficiaires) ;

● les familiariser avec la pratique du «vivreensemble».

Il s’imposait au Comité de pilotage de se faire conseilleret aider par une équipe polyvalente pour élaborer unplanning sur le moyen terme, conduire une stratégie pro-gressive et cohérente, instituer des commissions spé-ciales pour examiner les situations non prioritaires (parexemple, l’enseignement facultatif de l’arabe sensibleaux populations de certaines régions), travailler avec lesmoyens de bords.

Nos entrées dans la rédaction du programme

Le premier séminaire-atelier tenu en décembre 1996 etmarqué par une forte participation des projets nova-teurs nous a permis, dès le départ, d’aller en guerrecontre les entrées par le contenu, sans pour autantnégliger la matière, contre la pratique isolée des théo-ries d’avant-garde et d’accorder plutôt notre préférenceà une entrée combinant, par les processus actifs, lamise en relation entre le contexte économique, social,culturel et l’action éducative scolaire, para et périsco-laire.

Ceci fit apparaître la nécessité d’une approchesystémique qui oblige l’enseignant de s’informer ausujet:● du contexte national, de ses variables écologiques,

humaines, économiques, culturelles, information-nelles etc.

● des cibles, à savoir les apprenants: qui sont-ils ?quels sont leurs antécédents ? que désirent-ilsapprendre ?

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● de l’école: du programme actuel, de ses aspects posi-tifs, de ses lacunes ;

● les orientations prioritaires dans le Plan national dedéveloppement;

● des démarches analytiques qui conduiront à remédierà l’insuffisance de la pertinence, de la flexibilité et dela cohérence; à organiser de manière méthodolo-gique des ateliers et séminaires; à appliquer selon lescirconstances une approche disciplinaire inter ou plu-ridisciplinaire; à consulter ou à utiliser des personnes– ressources.

Dans une situation de bonne gouvernance, toutes cesprécisions pourraient être fournies et incluses dans uncahier de charges.

4. Modalités introduites dans la confection

Une approche de flexibilité

Parmi les idées force que nous avons développées, nouscomptons celle de la structuration des programmes en:1. la constitution d’un noyau, un socle unificateur de

l’éducation de base qui contient tout ce que la classed’âge 6-12 ans doit acquérir comme connaissances,capacités et comportement dans un pays qui se veutUNI dans sa diversité. Ce socle est prévu pour cou-vrir 75 % des apprentissages ;

2. l’introduction dans les apprentissage d’une approcheflexible, d’une dose de souplesse dans la pratique del’observation, de l’écologie, l’adaptation à la vie éco-

TABLEAU 1. Récapitulatif des étapes de conception et de réalisation du Livret-Programme dans le curriculum del’éducation de base au Sénégal

1. Clarification du concept au travers des relations entreses composantes dans un processus plus actif d’ap-prentissage et d’une nouvelle approche de la perfor-mance et de la réussite:

● Adoption de référentiels ;● Élaboration d’une base taxonomique.

2. Définition d’un cadre conceptuel et d’un processusd’élaboration de curriculum :

● Modèle de curriculum:a) les composantes; b) les variables (écoles élémentaires, alphabétisa-tion ou projets alternatifs) ;

● Référentiel :a) universel ; b) africain;c) interne.

● Finalités et objectifs ;

● Stratégie : approche PPO + compétences ;

● Résultats attendus : profils d’étape et de sortie decycles.

3. Conception et production de la composante Livret-Programme :

● Choix des structures : 75% socle national et 25%éléments adaptés aux régions et localités ;

● Approche disciplinaire puis restructuration etrecadrage autour de :a) compétences transver-sales et fondamentales ; b) grands axes de la poli-tique dans le pays,

4. Poursuite et élaboration du Livret-Programme autourdes savoir, de savoir faire et savoir être sélectionnés:

● Prise en considération de facteurs nationaux etlocaux d’amélioration des performances;

● Appui scientifique et technique des partenaires;

● Planification de rencontres avec des instances devalidation.

5a. Développement et affinement des contenus/apprentissages:

● Examen des problèmes de langues d’enseigne-ment;

● Distribution des crédits horaires;

● Validation scientifique et pédagogique au coursd’un séminaire-atelier.

5b. Préparation de l’expérimentation:

● Adoption d’un schéma expérimental;

● Exercices de simulation;

● Recyclage de maîtres appelés à tenir les classesexpérimentales.

5c. Mise en place d’un Comité de suivi de l’expérimen-tation.

6. Planification de la phase expérimentale. Planificationde l’élaboration des autres composantes:

● Formation initiale et continue ;

● Supports didactiques – édition de manuels ;

● Évaluation formative et certification ;

● Conditions de travail des enseignants et desélèves ;

● Agenda de réunions – désignation des chefs degroupe ;

● Validation au fur et à mesure de livraison des pro-duits.

Page 103: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

102

TABLEAU 2. Récapitulatif des composantes et préparation des activités. 1

ACTIVITÉS

1. Adaptation de la formation initiale etcontinue aux nouveaux contenus et àla nouvelle méthodologie adoptée

2. Expériences pédagogiques avec lespartenaires au sujet de l’enseigne-ment en langues Nationales

3. Amélioration de l’equipement didac-tique

ORIENTATIONS

● Réforme du programme des EFI etdes Plans d’action en formationcontinue;

● Implantation de structures de perfec-tionnement dans les académies;

● Organisation du flow-up des établis-sements de formation

● Amélioration des outils pédago-giques existants ;

● Production ou choix de supportsdidactiques ;

● Adoption d’un schémaexpérimental ;

● Formation des maîtres de classespilotes ;

● Élaboration de guides méthodolo-giques.

● Adaptation des manuels aux orienta-tions nouvelles du curriculum ;

● Réduction de la pénurie en manuels ;● Recherche de supports d’auto-forma-

tion pour l’élève.● Création d’un environnement plus

lettré, susceptible d’inciter les élèvesà pratiquer plus de lecture ;

● Définition des axes d’une nouvellepolitique éditoriale avec l’appui de laCONFEMEN, de l’ACCT et des pay-sans.

DOCUMENTATION

● Tests et études du pôle de formationcontinu sous l’égide de la DEPEE ;

● Cahiers de charges du maître, dudirecteur d’école, de l’inspecteur ;

● Carnet de préparation d’une rentrée ;● Bulletins d’inspection proposés à

l’expérimentation.

● Documentation susceptibles d’êtrerassemblée par :

— La DAEB ;— Le centre de ressources ;— L’UNAL ;— Les chercheurs et producteurs de

manuels ;— Le mouvement associatif.

● Documentation disponible :— à l’UCP ;— à l’INEADE ;— à la DEPEE ;— à la DAEB ;— au MDEBLN.

ACTEURS ASSOCIÉS

● DEPEE, centre de ressources ;● INEADE ;● EFI ;● pôles régionaux de formation ;● IGEN.

● DEPEE ;● INEADE ;● DAEB ;● EFI ;● IFAN ;● CLAD ;● ONG ;● chercheurs privés ;● organismes de coopération bi et mul-

tilatérale ;● CNOAP ;● centre de ressources.

● INEADE ;● CLAD ;● IREMPT/UCAD ;● DAEB ;● centre de ressources ;● rédacteurs privés de manuels ;● représentants de la profession des

libraires ;● organismes de coopération bi et mul-

tilatérale ;● Corporation de libraires.

Page 104: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

103

1. Cette idée, concretisée par l’existence de cellules d’écoles-milieu, équipes pédagogiques, etc., a été reprise pour être investie dans la mise en oeuvre du Plan Décennal (1998-2008)

ACTIVITÉS

4. Adaptation de procédures et d’instru-ments d’évaluation formative et som-mative des élèves, des maîtres et desformateurs en alphabétisation

5. Redistribution éventuelle des créditshoraires (déjà amorcée)

6. Développement d’un nouveau parte-nariat—d’une nouvelle gestion del’école1

ORIENTATIONS

● Recherche de moyens pour mieuxévaluer les compétences et les capa-cités reconnues comme fondamen-tales dans les curricula réaménagés ;

● Pratique du bilinguïsme: leçons d’es-sai;

● Stratégies de la flexibilité : mise aupas de divers types.

● Refonte des épreuves du CEPE et duCFEE en vue de la prise en compte :

— des langues nationales ;— du renfoncement du non formel dans

les écoles.

● Prise de mesures visant à éviter lestemps perdus et augmenter le tempseffectif de travail scolaire annuel ;

● Redistribution des crédits horaires envue de faire de la place aux languesnationales, de mieux réaliser les tra-vaux pratiques liés au développement;

● Dans le cas où la journée continue etle double flux seraient maintenus,mieux occuper le temps libre desélèves et des enseignants.

● Implication réelle des partenairesdans la préparation des :

— PRDE ;— PDE ;— CEM ;— Mise en place des coopératives ;— Fonctionnement des tables de

concertation.

DOCUMENTATION

● Rapport du PASEC et du SNERS ;● Études du PAPA et du PAPS sur l’ef-

ficacité des programmes ;● Guide pédagogique BREDA sur

l’EPD.

● Production d’un séminaire sur lesujet (1996) ;

● Rapport du concultant requis pour lareprise de l’enquête sur la journéecontinue ;

● Étude de cas : CDF, ECB.

● Documentation adoptée à l’issue dela Biennal de l’ADEA ;

● Étude à commander; contributionCONGAD.

ACTEURS ASSOCIÉS

● INEADE ;● DEPEE, DAEB ;● consultant en évaluation ;● UNESCO ;● Spécialistes désignés par les projets

d’alphabétisation ;● ENS.

● Gouverneurs de régions ;● DEPEE, INEADE ;● IA, IDEN ;● Fédération des APE ;● syndicats ;● un économiste ;● un sociologue.

● CNOAS, APE, CONGAD ;● Syndicats ;● Chefs de projets ;● Ministère de l’intérieur ;● DEPEE, DAEB.

Page 105: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

104

nomique, sociale et culturelle régionale et locale. Cevolet flexible peut prendre en charge 25 % desapprentissages. Il doit être organisé dans un cadreépistémologique qui garantit le respect de la rigueurscientifique.

Cette approche de la flexibilité dans le respect desnormes peut s’appliquer à l’observation du milieu phy-sique, la botanique, la biologie, de l’économie, à l’intro-duction des langues nationales (une langue dominantepar région ou bassin culturel).

La pratique de cette flexibilité a été précédée d’unemonographie de chaque région, sous la présidence duGouverneur adjoint chargé du développement, avec laparticipation des services techniques de l’agriculture,l’élevage, la culture, la jeunesse, entre autres. Ceci a per-mis à la base du pays de dégager ce que chaque régionattend de l’école, d’organiser dans une perspective inter-active la sélection des contenus, la diversité des instru-ments didactiques et la contribution du secteur dansl’élaboration des Programmes régionaux de l’éducation(PRDE).

Element récapitulatif : Relevé des contributions desAcadémies au sujet des 25% (Séminaire- atelier des 2 et3 avril 1998 à Dakar, locaux PAPA)

Une stratégie de resserrement et de cadrage qui a abouti:● à la contraction d’une volumineuse production disci-

plinaire des ateliers (étude du milieu, français,mathématiques, éducation nutritionnelle et sanitaire,langues nationales, arabe, projets novateurs et pro-motion de la femme) de 800 pages environ. Le res-serrement a ramené cette production à près de centcinquante pages;

● à deux types de regroupement (Tableau 3):

Tronc commun de thèmes

- lot prioritaire- approche disciplinaire- connaissances et aptitudes de base

Disciplines dedéveloppement

Le crédit

3/4

1/4

FIGURE 3. La thématique

● la réduction de l’encyclopédisme du programme parl’investissement des savoirs, savoir-faires et savoir-êtres dans des domaines d’investissement suscep-tibles de rendre l’éducation fonctionnelle au servicedu développement, et susceptibles de relier l’école àla vie et de faire entrer la vie dans l’école.

5. Durée et structuration des apprentissages

Au Sénégal, la durée de l’enseignement élémentaire esten principe de six ans, extensibles jusqu’à huit, avecdeux redoublements autorisés. Ces redoublements sontobservés surtout dans l’étape finale des cours moyens.

L’attention des concepteurs du curriculum a étéattirée sur la volonté du ministère de réduire les redou-blements, notamment dans les premières et dernièresannées du cycle. La deuxième motivation était celle derendre l’école plus performante, en combinant desapproches de maîtrise et une pratique du contrôle surlesquels nous reviendrons au point VI du présentarticle.

La consigne donnée aux commissions techniques aété d’organiser sur les six années,l’enchaînement descontenus de manière à prêter attention:● au début de la scolarité aux antécédents du sujet: a-t-

il fréquenté une garderie, une école maternelle ? quelest le niveau culturel dans sa famille ? souffre-t-ild’un handicap ?

● à des profils d’étapesCI-CP: étape I CE 1 et CE2 : étape IICM1-CM2 : étape III

A chacune de ces étapes correspond une compétencetransversale à viser.

Page 106: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

105

1. Environnement 2. Santé etalimentation

3. L'eau et sonutilisation

4. Economielocale

5. La terre et sonexploitation

6. héritage culturel

7. Educationtraditionnelle et

modernité

8. Frontières etproblèmes

transfrontaliers

Classement par niveau d'intérêt

Connaître ma région

Histoire et

FIGURE 4. Connaître ma région

Domaine Sous-domaines Activités

Étude du milieu ● Initiation scientifique et 1. Science ;technologique ; 2. Technologie ;

● Histoire et géographie ; 3. Histoire ;● Morale et éducation civique ; 4. Géographie ;● Éducation environnemental 5. Morale ;

et à la vie familiale. 6. Éducation civique ;7. Éducation environnementale ;8. Éducation en matière

de population.

Apprentissages instrumentaux ● Mathématiques 1. Arithmétique ;2. Géometrie ;3. Mesures.

● Langues 1. Communication/lecture et écriture ;

2. Communication/expressionet production orale ;

3. Communication expressive et production écrite ;

4. Fonctionnement de la langue :grammaire/ conjugation/orthographe.

TABLEAU 3: Le regroupement de la matière en domaines; le regroupement des domaines en sous-domaines ; et leregroupement des sous-domaines en activités ou disciplines

Page 107: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

106

FIGURE 5. Schéma intégrateur

DOMAINESTAXONOMIQUES

SAVOIR SAVOIR-FAIRE SAVOIR-ETRE

Apprentissages instrumentaux Social Economique Culturel Moral et civique

Besoins éducatifsfondamentaux

Besoins d'amélioration de laqualité de la vie

Besoins d'acquisition decapacités productives

Besoins d' identité et deculture endogène fécondés pardes apports extérieurs

Besoins d'équilibre moral etcivique

● Parler, lire, écrire dans leslangues d' enseignement(français, languesnationales) ;

● Sciences d'observation ;● Activités d' eveil;● Minimum de connaissance

dans les arts et latechnologie ;

● L' information.

● Santé et hygiène du corps,de l' alimentation, del' habitat, du village, duquartier;

● Les vaccinations, luttecontre les grandesendémies ;

● Protection del' environnment;

● Éducation à la vie familialeet en matière de population ;

● Santé, travail et repos ;● Éducation et formation.

● L' eau;● Les intrants économiques :

- Agro-économie(activités agricoles,pastorales,technologiques);

- La pêche ;- Le bétail et son

entretien;● Amélioration de la

productivité locale ;● L' artisanat et son évolution

vers la modernité ;● Commerce et industrie;● Notion de développement

durable à éclater enparadigmes.

● Utilisation de nos languesnationales comme languesd' enseignement ;

● Partage de fonctions decommunication et deconquête de la science et dela technologie entre lalangue maternelle et lalangue seconde ;

● Valeurs, traditions etcoutumes au regard duprogrès ;

● Chants et danses de cheznous ;

● Les jeux et le sport ;● Le théâtre ;● Littérature orale et écrite.

● Respect des anciens ;● Solidarité communautaire ;● Paix et tolérance ;● Citoyenneté responsible ;● Civisme.

Page 108: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

107

VI.L’APPROCHE QUALITE

Parmi les paramètres à prendre en considération dansl’élaboration d’un curriculum figure nécessairement ledispositif à mettre en place pour lutter contre l’échec etpour maximiser les performances.

La qualité du programme se mesure au regard de sixindicateurs:1. la pertinenceassure une adéquation entre les appren-

tissages et les besoins fondamentaux de l’apprenantet de son milieu. Elle renvoie à la nécessité d’articu-ler les acquis des composantes et sous-composantesdu système, l’environnement actuel et les change-ments qui s’annoncent ;

2. la cohérencecrée une harmonie entre les contenusd’apprentissage, en dépit de leur souplesse ;

3. la flexibilité vise à prendre en considération la diver-sité physique, climatique, économique, ethnique, lin-guistique, ainsi que les variables introduites dans lescontenus- matières ;

4. l’efficacité sera fondée sur la concentration, sur descompétences transversales et des capacités discipli-naires foncières, sur des rendements internes et

externes, bien au-dessus de la moyenne dans les dif-férentes étapes et à la fin du cursus scolaire ;

5. la faisabilité consiste à s’assurer de la possibilitépour les chefs d’établissements, les enseignants et lesélèves de travailler dans de bonnes conditions endépit des contraintes, obstacles et handicaps, parceque disposant de toutes les ressources susceptiblesd’assurer la réussite ;

6. 1’efficiencese mesure au regard de bons rendementsqui croissent et qui durent sans coûts élevés, avec,comme fertilisants essentiels, l’intérêt des élèves, lamotivation des enseignants, l’appui du milieu envi-ronnant et la capacité des dirigeants de réaliser lesplans d’action formulés en termes de qualité et debonne gestion.

Nous avons pris en considération tous les facteurs deréussite proposés par Ward Heneveld comme structu-rants de l’efficacité et tous les déterminants d’une péda-gogie active, à savoir: des objectifs clairs et opérationna-lisés, des activités hiérarchisées à la suite d’uneséquence de motivation, une diversité des méthodes auregard des situations d’apprentissage et des difficultés; la

FIGURE 6. Enchaînement des unités d’apprentissage

ES

E

EF

EF

Prérequis 1

Prérequis 2

Prérequis 3

Prérequis n

Unité 1

E

Unité 3

Unité n

T0T1 T2 T3 T4 Tmax

E

P1

Unité terminale

- fin

- fin

Unité 2

Page 109: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

108

diversification et la fréquence des exercices, et l’évalua-tion assortie au besoin de remédiations.

Au travers des composantes déjà citées, on acquiertdes moyens d’entrevoir des conditions propices de seréférer à des indicateurs de qualité.

Sénégal a saisi l’opportunité de la préparation duPlan décennal de l’Éducation et de la Formation (PDEF1998-2008) pour y insérer des objectifs, des stratégies etdes financements portant sur:● le remaniement des programmes selon une approche

par les compétences ;● des stratégies d’intégration entre le formel et le non

formel ;● un dispositif d’amélioration de la formation initiale

et continue ;● un dispositif d’adaptation des supports didactiques ;● des procédures et instruments nouveaux d’évaluation

formative et certificative ;● la gestion des rythmes scolaires et des horaires.Il est fréquent que l’amélioration de la qualité butte surun obstacle bien connu : les pénuries en mobilier, l’in-suffisance des supports didactiques, la formation incom-plète du personnel. Ce dernier obstacle est plus significa-tif que les autres et son traitement doit être considérécomme une priorité. Ceci met à jour la nécessité de don-ner plus d’appui aux établissements de formation (ENSet EFI) et aux pôles de formation continue.

VII. ADOPTION D’UN SCHEMA EXPERIMENTAL

1. Le processus

En suivant les Conseils de Charles Delorme du CEPECde Lyon, nous nous sommes entendus sur un scénariod’expérimentation qui ne serait pas linéaire, mais plutôtspiralaire et moins coûteux que les précédents. Nousavons fixé à quatre ans la phase de cette expérimenta-tion.

● Scénario linéaireL’expérimentation se déroule progressivement selon lesannées scolaires et les années d’études (Tableau 4).

● Scénario combinatoire

Ce scénario comporte des avancées, des moments de sta-bilisation, voire de correction.

D’Hainault appelle « évaluation extemporanée », la suc-cession des ajustements et réajustements nécessaires duprogramme, des stratégies éducatives et l’améliorationde tous les outils d’accompagnement de l’expérimenta-tion du curriculum.

2. La validation

Tout ce qui est conçu, au titre de l’élaboration du curri-culum, doit être validé à plusieurs niveaux:1. Traitement pédagogique des observations faites sur

le Livret- Programme- Horaire (LPH), au niveau duComité scientifique ;

2. Validation scientifique et pédagogique de l’ensembledes produits réalisés autour des composantes du cur-riculum par un conseil élargi, en présence des unitéscentrales du MEN et de tous les inspecteursd’Académies et des IDEN ;

3. Validation institutionnelle en Conseil interministé-riel: annulation des anciens textes et publication pararrêtés des nouveaux programmes ;

4. Validation finale: présentation des produits, destextes réglementaires et de tout l’appareillage péda-gogique aux autorités, aux bailleurs de fonds, àtoutes les communautés qui ont vécu avec leMinistère de l’éducation nationale (MEN) l’aventuredu réaménagement du curriculum.

VIII. DIFFICULTES RENCONTREES

Des difficultés se sont manifestées à plusieurs niveaux,tout au long de cet effort de formulation et deréflexion.

Au début, il a fallu vaincre l’incompréhension de lapart de certains institutionnels qui n’ont pas encore

Années scolaires Année d’études

An 1 1 ère A 1ère

An 2 2ème A étape

An 3 1ère A 2ème

An 4 2ème A étape

An 5 1ère A 3ème

An 6 2ème A étape

Années scolaires

Année d’études A1 A2 A3 A4 A5 A6 A7 A8 A9

1ère étape 1 Année * + ▲ ❍

2 Année * + ▲ ❍

2ème étape 1 Année * + ▲ ❍

2 Année * + ▲ ❍

3ème étape 1 Année * + ▲ ❍

2 Année * + ▲ ❍

* = expérimentation; + = évaluation; ▲ = extension; ❍ = généralisation

TABLEAU 4. Scénario de combinaison progressive des opérations

Page 110: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES

109

acquis une «culture du partenariat» et qui ont boudél’idée de voir un Comité de Pilotage exercer ce qu’ilsconsidéraient comme une de leurs attributions.

Ensuite, il a fallu essuyer la perte de temps précieuxpour concilier parmi les universitaires les différents pointsde vue sur les théories de l’apprentissage, leur tendance àprivilégier le nouveau langage de la didactique. Il a aussifallu ménager un temps d’adaptation parmi les ensei-gnants d’un niveau moyen qui n’étaient pas suffisammentdisposés à prendre en compte ce qui se passe dans uneclasse, souvent pléthorique et mal équipée.

Le manque de moyens, surtout de personnel et del’outillage nécessaire pour les saisies et la distributiondes documents a représenté une autre difficulté majeure.

Dans un pays où il y a deux ou trois ministères del’éducation, la tendance de l’un à ignorer ce qui est faitsous la responsabilité de l’autre a dû être contrecarréeénergiquement.

Finalement, un retard mis parfois à clarifier la posi-tion de l’État sur des questions sensibles a ralenti les tra-vaux. Ceci a affecté, par exemple, l’introduction deslangues nationales, étant donné la place du français dansle pays et ses relations extérieures.

IX. BILAN DE L’EXPERIENCE SENEGALAISE DEREAMENAGEMENT DU CURRICULUM

Il est utile à ce stade de saluer les accomplissements, desouligner les efforts en cours et de rappeler les investis-sements qui demeurent à être faits.

1. Ce qui est acquis

● Expérience dans la conceptualisation d’un curricu-lum et sa division en composantes;

● Elaboration d’un cadre conceptuel;● Traitement de sujets de recherche- action: un accord

sur les notions de compétences et capacités, sur unenouvelle manière d’appréhender la réussite;

● Une manière de faire travailler plusieurs catégoriesd’acteurs pour concevoir un projet éducatif multidi-mensionnel;

● La pratique du resserrement, du cadrage, de la consti-tution de domaines, sous-domaines et activités;

● Adoption du Livret- Programme;● Organisation de son expérimentation;● Preuve de civisme des enseignants, chercheurs et

autres acteurs: leur participation dans les ateliers etséminaires à un taux de présence de 80%;

● Amorce de relations partenariales à valoir à l’occa-sion d’autres réformes.

2. Ce qui est en cours de réalisation

Le traitement des composantes suivantes:

● Formation initiale et continue dans le formel et lenon formel;

● Adaptation des matériels didactiques et nouvellepolitique éditoriale;

● Elaboration de procédures et instruments plus fonc-tionnels formative et sommative, nouvelle politiquede la supervision pédagogique ;

● Début de l’installation d’un observatoire ;● Achèvement de la définition de la place des langues

nationales dans un bilinguisme positif ;● Harmonisation plus poussée du formel et du non for-

mel;● Conception et installation de passerelles entre les

écoles ordinaires et communautaires;● Augmentation du flux de passage du 1er au 2ème degré.Un Comité inter-états est constitués pour la réalisationde ces tâches.

3. Ce qui reste à faire● Activités portant sur les progressions● Poursuite du travail amorcé au sujet du bilinguisme

(français/ langues nationales)● Poursuite du travail amorcé en ce qui concerne l’ara-

be;● Plan cadre d’amélioration du cadre de la vie scolaire;● Remobilisation des partenaires en vue de la poursuite

de l’élaboration du curriculum ;● La validation technique, sociale et institutionnelle en

temps opportun de chaque composante;● Une campagne de communication étalée sur toute la

durée de l’expérimentation afin de maintenir l’état demotivation des enseignants ; de faire acquérir par lesparents le sens de leurs devoirs vis-à-vis de l’école ;de les rendre aptes à formuler des jugements objec-tifs au sujet de la réussite ; de développer le partena-riat école-milieu ; d’améliorer la politique du moinsd’Etat.

Page 111: SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS PERSPECTIVES
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111

MOTION DE REMERCIEMENT A L’UNESCO

● Considérant le grand Programme I de l’UNESCO envue de donner un nouvel élan à la rénovation des sys-tèmes éducatifs, de façon à ce que l’Education pourtous devienne une réalité, et ce, tout au long de la vie;

● Considérant l’adhésion et l’appui de l’UNESCO à lacréation d’un réseau B.I.E/ Afrique, en vue du ren-forcement de la coopération multilatérale, et del’amélioration de la qualité et de la pertinence dessystèmes éducatifs africains;

● Considérant les objectifs spécifiques du réseau B.I.E/Afrique comme autant d’actions et d’opportunités enfaveur du développement des compétences et de lacapitalisation des acquis;

● Considérant l’importance stratégique du réseauB.I.E/ Afrique pour la participation de la communau-té internationale dans sa lutte pour l’éducation uni-verselle et la promotion d’une culture de l’excellen-ce;

Nous, participants du Comité des experts du Séminaire-atelier pour la «Politique de refondation des curricula,processus du développement curriculaire, réalités localeset défis du XXIèmesiècle», tenu à Libreville les 24, 25, 26et 27 Octobre 2000,● Remercions l’UNESCO et la Directrice du B.I.E.

pour leur engagement et leur soutien en faveur de ladétermination de l’Afrique d’aller de l’avant, surtoutdans le domaine de l’éducation, comme une voie sûrevers le XXIème siècle,

● Apprécions hautement leur appui technique et finan-cier pour la tenue du présent Séminaire-atelier et leurdemandons de poursuivre leurs efforts tout en mobi-lisant leurs partenaires au profit du réseau B.I.E/Afrique.

Libreville, le 27 octobre 2000Les participants

MOTION DE REMERCIEMENT AU PEUPLE, AUGOUVERNEMENT GABONAIS ET AU PRESIDENTDE LA REPUBLIQUE GABONAISE

● Considérant l’engagement du Gouvernement de laRépublique gabonaise en faveur de la rénovation deson système éducatif, dans la perspective, d’enrepenser les finalités, d’en améliorer la qualité et lapertinence grâce à des réformes conçues de façonglobale avec la participation de tous les partenairesconcernés;

● Considérant la politique du Gouvernement en matiè-re d’amélioration du système éducatif;

● Considérant d’une part, la pertinence de la «Politiquede refondation des curricula, processus de dévelop-pement curriculaire, réalités locales et défis duXXI ème siècle», et d’autre part, l’utilité de la créationd’un réseau B.I.E/Afrique;

● Considérant les conditions favorables dans lesquellesle présent Séminaire-atelier s’est tenu, et leséchanges fructueux qui en ont résulté;

Nous, participants du Comité des experts du Séminaire-atelier de Libreville pour la «Politique de refondationdes curricula, processus de développement curriculaire,réalités locales et défis du XXIème siècle», exprimonsnotre profonde gratitude au peuple gabonais, auGouvernement et au Président de la République gabonai-se pour l’accueil chaleureux et fraternel dont nous avonsbénéficié, exhortons le Gouvernement de la Républiquegabonaise à poursuivre ses efforts pour la mise en placedu réseau B.I.E/Afrique.

Libreville, le 27 octobre 2000Les participants

Annexe 1:Motions de remerciement

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Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement,Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurset Chefs des Missions diplomatiques, Madame laDirectrice du Bureau international de l’éducation,Mesdames et Messieurs les représentants des Orga-nisations internationales et interafricaines, Mesdames etMessieurs les partenaires du développement et de l’édu-cation, Mesdames et Messieurs, les experts des paysamis, honorables invités, Mesdames et Messieurs,

C’est pour moi un insigne honneur et un grand plaisirde vous souhaiter la bienvenue dans notre pays à l’occa-sion de ce Séminaire- atelier sur «la politique de refon-dation curriculaire, le processus de développement curri-culaire, les réalités locales et les défis du XXIème siècle».

Je voudrais tout d’abord remercier Madame laDirectrice du Bureau international d’éducation pour saprésence parmi nous et surtout pour l’aide substantielleet variée de son Centre international d’éducation compa-rée dans l’organisation de ce Séminaire- atelier.

Je voudrais également exprimer ma gratitude à tousles organismes tant nationaux qu’internationaux qui ontpermis la tenue du présent Séminaire- atelier, particuliè-rement à l’UNESCO pour son concours matériel et sonappui moral.

Enfin, vous me permettrez de remercier tous les par-ticipants pour avoir répondu à notre invitation. Nous ensommes très sensibles.

Ce Séminaire-atelier, qui s’inscrit dans le cadre desexpériences des différents pays présents à ces assises enmatière de réforme curriculaire, de stratégies mises enplace dans le but d’améliorer nos systèmes éducatifs,nous permettra de faire une évaluation des résultats desactions, en vue de faire le point du travail accompli et dedégager les perspectives d’avenir sur la base d’une ana-lyse critique des acquis actuels.

Cette rencontre d’aujourd’hui aura donc pour objec-tif principal le partage de l’entreprise de réformesmenées dans chacun des pays ici présents, ainsi que leurmise en œuvre.

Notre pays, le Gabon, est de ceux qui, aujourd’hui enAfrique, attachent une importance capitale à la rénova-tion ou à la reconstruction des curricula et l’école debase. Aujourd’hui, l’idée de curriculum cadre avec lavolonté de «mettre à plat» ou «à découvert» les vues quiorientent la décision ou la structuration de l’école à tra-

vers les programmes, les horaires, les communautés vil-lageoises et urbaines, ainsi que les bailleurs de fonds.Aussi, le curriculum devient cardinal pour accéder à laquestion de l’évolution de l’école. Sur ces entrefaites, ildevient opportun de considérer des nouveaux aiguillagespolitiques, à l’instar des lois, pour soutenir politique-ment l’école de base. A cet égard, il nous faudra tenircompte de la dimension économique de nos systèmeséducatifs et du contexte de développement pourconnaître une école pratique et réalisable.

Parler de curriculum, c’est aussi regarder la compé-tence acquise à l’école. Cette compétence doit actuelle-ment permettre à l’élève de résoudre des situations- pro-blèmes de vie, en tenant compte du développement deson pays. Elle doit non seulement lui servir, mais aussiservir à son pays.

En cette période où l’accent est mis sur la refonda-tion des curricula qui engage bien sûr les enseignants, lesinspecteurs, les parents, les élèves, mais aussi nous, lesdécideurs, il est de notre responsabilité d’y adhérer forte-ment tout en faisant, bien entendu, preuve de lucidité.

C’est pour marquer tout l’intérêt que nous accordonsà la politique et à la refondation curriculaire que leGouvernement gabonais poursuit sans relâche ses effortsdans la rénovation et la reconstruction des curricula etl’école de base, parmi lesquelles nous pouvons citer lamise en œuvre des programmes de l’école élémentaire.

En effet, sur le plan pédagogique, les programmes del’école élémentaire ne constituent plus de simples cata-logues de connaissances à transmettre. Ils sont devenusdésormais de véritables outils d’apprentissage hiérarchi-sés, conçus selon une approche curriculaire et reflètentles finalités et orientations données par les Etats géné-raux de l’éducation et de la formation, tenus endécembre 1983 à Libreville. Ils définissent le profil desortie de l’élève à chaque palier, les objectifs généraux etspécifiques à atteindre, indiquent les contenus et lesméthodes à développer pour leur réalisation.

Cette révision des programmes a eu pour corollaire laconception de nouveaux auxiliaires didactiques tels queles manuels scolaires. Aussi, l’école de base dispose-t-elle maintenant, à tous les niveaux, d’un livre de fran-çais, et d’un livre de mathématiques accompagnés defichiers. L’éducation à l’environnement et l’enseigne-ment des sciences de l’observation ne sont pas en reste

Annexe 2:Discours d’ouverture Prononcé le 24 octobre 2000 par S.E.M. André Mba-Obame, Ministre de l’éducation nationale,porte-parole du Gouvernement du Gabon

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avec la publication d’un cahier d’écologie et la parutiond’un livre de sciences, tous deux de niveau cours élé-mentaire, dont l’objectif est d’initier les enfants à larecherche, de susciter leur curiosité et de développer leuresprit de créativité.

La réinsertion de l’éducation civique, comme disci-pline obligatoire et autonome dans notre système éduca-tif, a conduit nos chercheurs à repenser les programmesrelatifs à cette matière. A cet égard, dans l’école de base,cet enseignement intègre actuellement des matières,telles que la morale, l’hygiène, le code de la route etl’instruction civique naguère séparées...

Des cahiers d’activités sont disponibles depuis 1994-1995 et ont valorisé cet enseignement en favorisant lacompréhension des réalités mouvantes actuelles.

C’est donc en conformité avec cette volonté d’œu-vrer pour la qualité et la pertinence des actions d’éduca-tion que mon département mène des réflexions et prenddes initiatives dans le sens de créer les conditions favo-rables à l’atteinte de cet objectif. Aussi, je me réjouis quecette idée ait fait son chemin et ait rencontré l’assenti-ment de Madame la Directrice du B.I.E., de co-organiseravec nous ce Séminaire-atelier, avec la participationd’experts venus d’horizons divers.

Je voudrais terminer en rappelant ici la foi qui animemon pays dans l’avenir des politiques et refondationscurriculaires en Afrique, comme en témoigne notre pré-sence à cet important Séminaire-atelier. Le présent

Séminaire-atelier devrait nous permettre de répondreaux interrogations et aux préoccupations des uns et desautres en matière de politique et refondation curriculai-re, afin de mieux affronter les défis du XXIème siècle.Relever ces défis au XXIème siècle demande une prise deconscience et exige un usage judicieux des nouvellestechnologies de la communication, une expertise de hautniveau pour le nécessaire accompagnement conceptuel,méthodologique et instrumental des processus de chan-gement et la garantie du niveau scientifique.

Persuadé que votre réflexion sera sereine et féconde,je forme le vœu ardent que les conclusions de ceSéminaire-atelier s’inscrivent de manière décisive dansle cadre du renforcement de la coopération en matièrede politique et de refondation des curricula entre lespays africains, avec - pourquoi pas ? - la création d’unréseau B.I.E-Afrique, avec l’implication des commis-sions nationales UNESCO et autres partenaires del’éducation, chargés de suivre ces échanges. A cet effet,je puis vous assurer que le Gouvernement gabonais neménagera aucun effort pour abriter le siège dudit réseau.

Sur ce, je déclare ouverts les travaux du Séminaire-atelier sur «la politique et la refondation curriculaire,processus de développement curriculaire, réalitéslocales et défis du XXIème siècle».

Je vous remercie.

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Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Chefs desMissions diplomatiques, honorables invités, Mesdameset Messieurs,

Vous voici au terme de vos travaux, après cinq joursd’intense réflexion, de large concertation menées dansune atmosphère sereine de dialogue, d’engagement et deresponsabilité. Ce faisant, vous avez situé ces travauxdans leur véritable dimension, à savoir rassembler lemeilleur de vos compétences pour échanger, partagervos expériences, pour confronter vos points de vue, lesharmoniser, et exprimer des orientations nouvelles et dessolutions innovatrices à nos préoccupations et aux diffi-cultés que nous connaissons dans le développement denos systèmes éducatifs.

Je me réjouis de constater à travers le rapport généralque vous venez d’adopter que l’option qui vous a servi decadre de travail, c’est-à-dire la politique et la refondationcurriculaire a été suffisamment circonscrit. En effet, lethème du Séminaire-atelier qui s’achève aujourd’hui atraité de «la politique de refondation curriculaire, proces-sus de développement curriculaire, réalités locales et défisdu XXI ème siècle». Il s’agit pour nous d’un problème pré-occupant portant sur la conception même de l’éducation,de ses contenus et de ses finalités, de ses structures, desvaleurs qu’elle inculque et l’esprit dans lequel elle est dis-pensée. Vous avez mis en évidence et analysé lucidementet sans complaisance les éléments susmentionnés.

Vous avez souligné, entre autres, la nécessité d’éviterune rupture entre les différents niveaux d’enseignementnotamment entre l’enseignement pré-primaire, primaire,secondaire et supérieur, les difficultés générées par lesrapports enseignants-enseignés, l’inadéquation forma-tion-emploi, l’établissement de passerelles entre le for-mel et le non-formel, l’introduction de nouvelles techno-logies de la communication, la culture de la paix,l’enseignement de nos langues nationales dans le systè-me éducatif et les rapports Etat-Monde.

Vous avez su identifier les défis du XXIème siècle quinous attendent. Vous avez suscité des interrogations quinous interpellent. Vous avez su exprimer les angoisses quinous étreignent. A cet effet, le Séminaire-atelier deLibreville a apporté une contribution très appréciable endiscutant des esquisses de solutions et en dégageant desperspectives d’avenir. Désormais, il appartient à chaqueEtat, à chaque institution, d’opérer le choix idoine en

tenant compte de ses particularités et de mettre en place lesstructures opportunes. Nul ne doute de notre déterminationd’oeuvrer pour une rénovation, une reconstruction, voireune refondation de nos systèmes éducatifs pour participerau développement économique et social de nos pays, etd’apporter notre contribution au village planétaire.

Vos conclusions, il faut s’en féliciter, reflètent votrecapacité d’apporter à la politique de refondation curricu-laire non seulement des solutions appropriées, mais sur-tout une méthodologie critique et objective.

Vos réunions de concertation ont permis de jeter lesbases d’un réseau sur lequel reposeraient les échangesd’informations, d’idées et d’expériences dans le desseind’améliorer la qualité de nos systèmes éducatifs. J’ai laconviction que, dans cette oeuvre collective, les pointsfocaux sous-régionaux et le point focal régional, c’est-à-dire le comité de coordination, qui assureront désormaisles coordinations générales, accompliront cette impor-tante mission.

Il s’agit d’un édifice commun qui nécessite que cha-cun apporte sa pierre et que chacun soit animé du mêmesouci de bien faire. La taille et le nombre de nouveauxprojets nous l’imposent. Et le temps nous est compté, vula demande de plus en plus croissante de nos populationsscolaires. Comme je vous l’ai dit dans mon allocutiond’ouverture, le Gabon, mon pays, est disposé à abriterledit réseau.

Aux représentants du Bureau international de l’éduca-tion, à l’UNESCO et à tous nos partenaires au développe-ment, je vous réitère mes vifs remerciements pour votresoutien à l’amélioration du système éducatif. J’ai l’entièreconviction que nous devons réellement travailler avecvous pour que vos contributions multiformes nous per-mettent toujours d’améliorer nos systèmes éducatifs.

Avant de vous souhaiter un bon retour dans vos paysrespectifs, je tiens à nouveau à vous féliciter pour lesrésultats positifs auxquels vous êtes parvenus, grâce ausérieux et à la franchise qui ont caractérisé vos débatscombien riches et féconds.

C’est sur ces mots que je déclare clos les travaux duSéminaire-atelier de Libreville sur «la politique et larefondation curriculaire, processus de développementcurriculaire, réalités locales et défis du XXI ème siècle».

Je vous remercie.

Annexe 3 :Discours de clôture, Prononcé le 27 octobre 2000 par S.E.M. André Mba-Obame, Ministre de l’éducation nationale,porte-parole du Gouvernement du Gabon

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François Mahougbé LABEMinistère de l’éducation nationale et de la recherchescientifiqueInstitut nationale pour la formation et la recherche enéducation (INFRE)B.P. 200PORTO-NOVOBENIN

Djibril DEBOUROU MAMA06 BP [email protected]

Bè Didier KAMDirecteur des inspections et de la formation des person-nels de l’éducation (DIFEP)01 BP 1456 OUAGADOUGOUBURKINA FASO

Ouri SANOUDirecteur général de l’Institut pédagogique du Burkina (IPN)03 BP 7043 OUAGADOUDOU 03BURKINA [email protected] ou [email protected]

M. Marie Joseph YOUGAM MALLALIDirecteur de la planification scolaire et universitaireREPUBLIQUE DU CONGO

M. Joachim MANDAVODirecteur de l’Institut national de recherche et d’actionpédagogiquesREPUBLIQUE DU CONGO

Eric DODO-BOUNGUENDZACabinet du MinistreB.P. [email protected]

Michel MBOUMI MOUELEYDirecteur général des enseignements et de la pédagogieMinistère de l’éducation nationaleB.P. 06LIBREVILLEGABON

Cathérine NKIEDirectriceIPNB.P. 813LIBREVILLE GABON

Sahaloum Ould YOUBBADirecteur général IPNB.P. 1583BAMAKOMALI

Mamadou SISSIMAIPNB.P. 1583BAMAKOMALI

Abel KOULANINGASecrétaire général Commission nationale centrafricaine pour l’UNESCOMinistère de l’éducation nationaleB.P. 1583BANGUIREPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

André-Edgar BENAM Chargé de missionMinistre de l’éducation nationaleB.P. 98BANGUIREPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Annexe 4:Liste des participants

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Cheikh DIAKHATEDirecteurInstitut national d’étude et d’action pour le développe-ment de l’éducation (INEADE)Bld. Martin Luther KingB.P. 11228DAKARSENEGAL

Serigne FALLConseiller technique n°1Ministre de l’alphabétisation, de l’enseignement tech-nique et de la formation professionnelle,Building Administratif

5ème étage, pièce [email protected]

Souleymane N’DIAYEB.P. 5483DAKARSENEGAL

Abderamane KOKOSecrétaire exécutifComité interministériel pour l’éducation, la formation enliaison avec l’emploi (CONEFE) B.P.777NDJAMENATCHAD

Goloun DEWAChef de service du suivi pédagogique et de la formationS/c M. Abderamane KokoCONEFEB.P. 777NDJAMENATCHAD

Adama NYAMEDirecteur de Cabinet Ministère de l’éducation nationaleet de la rechercheB.P. 398 LOME TOGO

Yao NUAKEYProfesseur Institut national des sciences de l’éducation (INSE),B.P. 8138LOME TOGO

José del Carmen MARÍN GONZALES1, square du Vieux-Chêne1224 Chê[email protected]

Mohamed RADIUNESCO 7 place de Fontenoy75352 PARIS 07 [email protected]

John AGLOChargé du Programme AfriqueBureau international d’éducationCase postale 1991211 Genève [email protected]

Cecilia BRASLAVSKYDirectriceBureau international d’éducationCase postale 1991211 Genève [email protected]

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RÉFORME DES SYSTÈMES ÉDUCATIFSET RÉFORMES CURRICULAIRES :

SITUATION DANS LES ÉTATS AFRICAINS AU SUD DU SAHARA

RAPPORT FINAL DU SÉMINAIRE-ATELIERLIBREVILLE, GABON, 23 AU 28 OCTOBRE 2000

«POLITIQUE DE REFONDATION CURRICULAIRE,PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT CURRICULAIRE,

RÉALITÉS LOCALES ET DÉFIS DU XXIe SIÈCLE»

COMMISSION NATIONALE GABONAISE POUR L’UNESCOBUREAU INTERNATIONAL D’ÉDUCATION

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BIE

«Dossiers» de Perspectives en 2001 — Volume XXXI

No 1, mars 2001: La réforme de l’enseignement secondaire

No 2, juin 2001: Le constructivisme en éducation

No 3, septembre 2001: Apprendre à vivre ensemble au vingt et unième siècle

No 4, décembre 2001: L’autonomie de l’école et évaluation

Tarifs annuels d’abonnements :

❏ Particuliers et institutions de pays développés, 180 francs français(numéro simple: 60 FF)

❏ Particuliers et institutions de pays en développement, 90 francs français(numéro simple: 30 FF)

Toute correspondance concernant les abonnements à Perspectives doit être adressée à: Jean De Lannoy,

Service des abonnements UNESCO, Avenue du Roi 202, 1190 Bruxelles, Belgique.

Tél. : (32) 2 538.43.08; Fax: (32) 2 538.08.41

Courrier électronique:[email protected]

Internet: http://www.jean-de-lannoy.be

Pour un complément d’information et des renseignements concernant d’autres versions linguistiques de

Perspectives,s’adresser à: BIE, PUB, Case postale 199, 1211 Genève 20, Suisse; courrier électronique:

[email protected]

revuetrimestrielle

d’éducation comparée

PERSPECTIVESpubliée par le Bureau international d’éducation,

Case postale 199, 1211 Genève 20, Suisse

La table des matières la plus récente de la revue peut être consultée sur Internet :

http://www.ibe.unesco.org