Seur a Habit Er 2013

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Habiter le Grand Paris / AIGP 2 / saison 1 Le logement en Ile-de-France, une "bombe à retardement" équipe SEURA SEURA équipe

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Habiter le Grand Paris / AIGP 2 / saison 1

Le logement en Ile-de-France,une "bombe à retardement"

équipe SEURA

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Habiter le Grand Paris / AIGP 2 / saison 1

Le logement en Ile-de-France, une "bombe à retardement"

Paris - mars 2013

équipe SEURA

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sources Aphaville/Seura

SEURA architectesF.Bougnoux J. M.Fritz D.Mangin

E. Roncen M.H.Simonpoliarchitectes associés

J. M. FritzM. Girodo

Gares

A.Garès

paysages/risques/économie créative

Aménageurs

E. Bérard

F. BougnouxJ.P. TraisnelEco-logique(s)

OLMP. Coignet

M. TalagrandPaysagistes

M. Reghezza-Zitt

La MachineF. Delarozière

Economiecréative

Economie immobilière

V. Renard3FP.BrideyP.Paulot

réative

AAmméénnaaggeeuurrss

e

prospectives économiques

CVLJ. Le GrelleProspective commerce

B.MarzloffSociologie

NTIC Mobilité

TETRAS. BrunetProspective

logement

S.LoewDéveloppement

urbain anglo-saxon

AlphavilleF. MonjalProspectiveprogramme

projet

Y.Laffoucrièrepolitique du logement

IdF

R.Dorval public / privé

AIGP

Cons

eil sc

ientifi

que

E

David ManginArchitecte urbaniste

mandataire

1 à 2 experts

OLMP. Coignet

M Ta

Y. BeltrandoGouvernance

Urbanisme réglementaire

Démocratie locale

gouvernance/mobilité

Y.CrozetEconomiste transports

E. CharmesDynamiques résidentielles

M.Schwartze- Rodrian

label Grand Paris

L. DablancLogistique

Mobili

tés, urbanisme, transports

Marc Wiel

4

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Le logement, une "bombe à retardement"Seura/David Mangin + Marc Wiel ........3Seura/David Mangin + Marc Wiel ........3

(dé)mesures et (dé)croissancesDu bon usage de la rente foncièreDu bon usage de la rente foncièreMarc Wiel ........15Marc Wiel ........15

Tout ne viendra pas des garesTout ne viendra pas des garesYves Crozet ........27Yves Crozet ........27

L'aménagement de nos moyens L'aménagement de nos moyens Vincent Renard ........43Vincent Renard ........43

fonciers (in)visibles, fonciers (in)accessibles : mythes et réalitésSi la question du logement se jouait au-delà de la Francilienne?Si la question du logement se jouait au-delà de la Francilienne?Eric Charmes ........41Eric Charmes ........41

L’espace agricole : réserve foncière L’espace agricole : réserve foncière versus réserve alimentaire ? réserve alimentaire ?Marion Talagrand + Philippe Coignet ........55Marion Talagrand + Philippe Coignet ........55

Les centres commerciaux, "locomotives" ou freins du renouvellement urbain?Les centres commerciaux, "locomotives" ou freins du renouvellement urbain?Jérôme Legrelle + Nicolas Douce ........75Jérôme Legrelle + Nicolas Douce ........75

Les risques : effets domino et effets de levierLes risques : effets domino et effets de levierMagali Reghezza-Zitt ........87Magali Reghezza-Zitt ........87

quels outils d'aménagement pour la métropole?Pour des SPL d'intérêts métropolitainsPour des SPL d'intérêts métropolitainsEric Bérard + Rémi Dorval + Alain Garès Eric Bérard + Rémi Dorval + Alain Garès ......103......103

Le logement du Grand Paris : le point de vue d'un bailleur social. Le logement du Grand Paris : le point de vue d'un bailleur social. Pierre Paulot - 3F ......111Pierre Paulot - 3F ......111

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sources Aphaville/Seura

sources David Mangin/Seura6

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Communes, Paris-métropole, Etat et Région

partagent l'objectif de construction de 70000

logements par an. Aujourd'hui, il se construit moins

de 40000 logements par an. Ce faible niveau de

production traduit une situation bloquée notamment

par :

- une rente foncière élevée qui rend les terrains

inaccessibles dans les zones denses

- des coûts de sorties inaccessibles, 80% des

ménages n'ont pas les revenus suffi sants pour devenir

propriétaires

- des investissements concentrés sur les

infrastructures de transports

- un retrait des maires bâtisseurs, même dans

des intercommunalités effi caces, le maire est seul

responsable du permis de construire

- une faiblesse des outils et des compétences

d'aménagement dans les communes de moins de

30000 habitants

Ces blocages produisent une situation

insoutenable; un "immobilisme résidentiel", un

inconfort dans les déplacements quotidiens, des

inégalités sociales et territoriales et, à court terme,

une dégradation de la compétitivité de la région-

capitale, car les entreprises cherchent à réduire les

déplacements domicile/travail et les jeunes actifs

renoncent à venir ou à rester dans une région où le

logement est hors de leur portée.

Le logement, une "bombe à retardement"Seura/David Mangin + Marc Wiel

Notre contribution, dans cette première étude,

plutôt que de développer un nouveau grand plan

pour la mégapole ou des analyses territoriales

ciblées, s'est plutôt attachée à poser les questions

du logement à l'échelle métropolitaine en abordant

la problématique foncière à travers stratégies,

tactiques et outils, et plus précisément: les modes de

régulation du foncier, les conditions d'accessibilité

à des fonciers trop accessibles ou (in)visibles et

les outils d'aménagement adaptés à des politiques

urbaines de logements.

Nous nous sommes interrogés sur la pertinence

des raisonnements, qui induisent et soutiennent

les conséquences des investissements en

infrastructures sur le développement économique,

et la production de logements. Il faut mobiliser

l'essentiel des moyens pour redynamiser et orienter

la rente foncière vers la production de logements

près des emplois et optimiser les rabattements sur

les réseaux existants.

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du bon usage de la rente foncièreLe blocage dans la production de logement,

est avant tout une question d'aménagement, c'est-

à-dire qu'elle relie des questions fi nancières et des

questions foncières, les communes seules n'ont ni les

moyens fi nanciers, ni techniques pour répondre aux

objectifs de production de logements; une nouvelle

gouvernance intercommunale et métropolitaine

permettrait d'organiser des péréquations

fi nancières entre les territoires de la métropole

et de coordonner les politiques de transports et

d'aménagement.

Les travaux de J.Friggit montrent que la question

du coût des logements n’est pas seulement liée au

déséquilibre de la demande et de l’off re et que c'est

aussi une question macro-économique, celle

de la rente foncière. Les investissements publics

(dans les transports et les équipements) ont jusqu’à

présent participé au renchérissement de cette rente.

La liaison du RER A et de la Défense produit une

concentration de bureaux et de leur valeur mais elle

a aussi renforcé celle du foncier de l’Ouest parisien.

Elle demande toujours plus d’investissement public

pour pallier les problèmes d’accessibilité. Les

investissements dans les projets d’aménagements

pourraient être arbitrés en fonction de leur utilité

métropolitaine au regard de la question principale :

comment remédier à la pénurie de logements ?

Une autorité métropolitaine, à défi nir, devrait

organiser des péréquations fi nancières locales

et métropolitaines pour pallier les inégalités

territoriales scandaleuses. On imagine alors que

les entreprises contribueraient aux investissements

dans les transports en fonction des déplacements

qu’elles généreraient. Cela permettrait, d’une part,

de contribuer à l’édifi cation d’un réseau à l’échelle

métropolitaine, d’autre part, de promouvoir la

mobilité locale et l’émergence de bassin de vie.

La mise en œuvre de cette stratégie nécessite

une nouvelle donne institutionnelle pour des

intercommunalités compétentes en matière de

transport, politique fi scale et aménagement.

tout ne viendra pas des garesYves Crozet relativise les eff ets attendus du

Grand Paris Express (GPE) sur le développement

économique de l’Ile-de-France. Il propose une

stratégie d’optimisation du réseau existant articulée

autour de la desserte des aéroports, des grandes gares

et des gares déjà saturées. En eff et, le modèle des

gares japonaises n’est pas pertinent pour toutes les

gares du GPE, notamment lorsqu’elles sont loin de

la zone dense. La rentabilisation et la dynamisation

de l’économie autour de ces gares nécessiteraient un

fort affl ux migratoire vers la région parisienne depuis

d'autres territoires.

Il fait écho à Jean-Pierre Orfeuil dans la voie

de l’optimisation de la mobilité francilienne tout

mode, le renforcement du maillage local doit être

considéré avec le même égard que la construction

du réseau du GPE. Celui-ci ne devant être réalisé que

progressivement si on ne veut pas créer des sections

non rentables et hypothéquer des ressources pour

l'aménagement et le logement. Cela engage à fondre

les fi nancements de la création et de la rénovation

du réseau dans un "pot commun" et renouveler

la contribution des entreprises, des particuliers et

des collectivités au transport. En d’autres termes,

l’amélioration de l’off re de transport francilienne passe

par une réorganisation de la politique tarifaire, de

la fi scalité et de la gouvernance articulées avec les

ambitions d’une politique foncière.

Notre équipe, forte de ses expertises, et de ses

expériences a voulu aussi aller plus loin dans ce qu'il

est convenu d'appeler "les fonciers invisibles". Aussi

après avoir rappelé les 6 grands marchés fonciers

"révélés" de l'Adef, nous avons tenté d'explorer,

avec lucidité, les diffi cultés et les eff ets de leviers

souhaitables pour rendre ces fonciers invisibles plus

accessibles.

(dé)

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au-delà de l'A104, des fonciers trop accessibles...

L’approche macro-économique des mécanismes

de la rente est modérée par une réaction de Vincent

Renard, pour qui il faut eff ectivement défi nir la

stratégie d'aménagement de nos moyens, dans laquelle

la mise sur le marché de nouveaux fonciers, facilement

mobilisables dans les secteurs périurbains, peut aussi

jouer un rôle dans la production d'une nouvelle off re

de logement. Et Eric Charmes a tenté d'évaluer,

au-delà de l'idée de densifi cation, les eff ets et les

modalités de l'urbanisation de fonciers qui resteront

très attractifs, autour des bourgs et des villages

proches des stations RER, au-delà de la Francilienne.

En eff et, 80% de la baisse de la production entre

1980 et 2000 de logement est liée à la baisse de la

construction dans la grande couronne. Les causes

de ce malthusianisme sont multiples : l’émiettement

de la structure institutionnelle (1281 communes dont

85% de moins de 2000 habitants), l’exercice local de

la compétence d’urbanisme, la lutte contre l’étalement

urbain, et la prépondérance de l’interdiction sur

l’incitation renforcent le phénomène de clubbisation.

Cela nécessite des processus opérationnels pour

rééquilibrer les pouvoirs locaux et métropolitains,

et mettre en projets les territoires de la deuxième

couronne pour défi nir des qualités d’une nouvelle

off re de logement péri-urbaine plus proche de la

nature, plus accessible mais surtout plus concentrée

près des bourgs et des villages.

les espaces agricoles, réserves alimentaires vs. réserves foncières

Dans les faits et au-delà des pétitions de principe

sur l'agriculture urbaine, l'espace agricole est mal

aimé et surtout méconnu. Marion Talagrand et

Philippe Coignet analysent les diff érentes situations

métropolitaines de l'agriculture pour mieux

comprendre son fonctionnement, les eff ets spéculatifs

sur les terrains agricoles et les transformations en

cours.

Les politiques et les dynamiques de

remembrement ont conduit les exploitations

à s'agrandir toujours plus. Les fi lières se sont

spécialisées sur les grandes cultures céréalières ou de

protéagineux. Les agriculteurs regroupés au sein de

coopératives vendent l'essentiel de leur production

sur les marchés spéculatifs mondialisés. L'agriculture

s'adapte au marché et à la pression foncière, de

plus en plus mobile. Les espaces agricoles se

déterritorialisent.

Pourtant, cette situation n'est pas une fatalité,

il existe dans la région des lieux de résistance et de

renouveau pour une agriculture reterritorialisée.

Elle émerge à travers la promotion de circuits

courts ou semi-longs, cela passe par des initiatives

de contractualisation entre producteurs et

consommateurs (AMAP, Ruche qui dit oui,

cueillette...). Elles sont parfois soutenues pas des

institutions publiques comme à Villarceaux (95),

Montesson (78) ou encore pour le fameux Triangle

Vert (91).

Cette meilleure connaissance de l'agriculture et

la prise en considération de cette activité comme une

fonction métropolitaine, au sens plein du terme, sont

des points d'appui : pour construire une nouvelle

représentation, y compris cartographique, plus

fi ne de l'agriculture, défi nir des territoires et des

fi lières économiques, et territorialiser l'agriculture à

plusieurs échelles locales, métropolitaines ou extra-

régionales.

fonc

iers

(in)

visb

les/

fonc

iers

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)ace

ssib

les

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les zones inondables, de l'effet domino à l'effet de levier

La constructibilité des zones inondables est

aussi sujette à controverses. Magali Reghezza Zitt

redéfi nit les aléas liés aux inondations en Ile-de-

France; elle distingue 3 niveaux de vulnérabilités

et montre comment la prise en charge du risque,

inéluctable, peut-être un puissant levier pour le

renforcement du fonctionnement de la métropole.

"Th e Big One", l’inondation centennale, est

chaque année de plus en plus probable, elle pourrait

même être plus importante que prévue. Dans le

Grand Paris, l’impact de l’inondation se mesure

au-delà de la zone d’immersion. L’inondation

serait longue, plusieurs semaines avant la décrue, et

stagnante, car produite par la remontée des nappes.

Ce phénomène rsique de mettre en péril les réseaux

souterrains d’alimentation (eau potable, électricité,

gaz...) mais aussi les réseaux de transports souterrains

existants et à venir. Cette rupture probale des réseaux

critiques met en évidence la vulnérabilité de la

région parisienne. Elle impose de penser le risque

d’inondation au-delà du secteur des plus hautes

eaux connues et des PPRI émiettés pour mettre au

point une stratégie de résilience métropolitaine.

Celle-ci peut-être un levier pour l’organisation

des quartiers en bord de Seine, le renforcement de

«l’image » du Grand Paris métropole durable, et le

développement d’une ingénierie du risque appuyée

sur un territoire. C’est-à-dire, par exemple, montrer

comme à New-York, que même sans métro, la

Défense peut rouvrir deux jours seulement après la

catastrophe.

l e s c e n t r e s c o m m e r c i a u x " locomot ives" ou f re ins au renouvellement urbain

Les grandes emprises commerciales sont souvent

identifi ées comme un foncier facilement mobilisable.

Jérôme Legrelle et Nicolas Douce analysent les

possibilités de mutation des fonciers commerciaux

en s'appuyant sur la redéfi nition des proximités

commerciales sous la pression du e-commerce, et

de la saturation du marché. Ils proposent des pistes

d'actions pour organiser le commerce et la grande

distribution à des échelles intercommunales ou

régionales et accompagner la transformation des

sites actuels, à partir d'une réfl exion sur la création

de valeurs. Cet enjeu touche évidemment les grands

centres commerciaux régionaux placés sur les rocades

mais aussi les nationales de sorties de la capitale.

des Sociétés Publiques Locales d'intérêts métropolitains

Trois acteurs de la construction et de

l'aménagement Eric Bérard, Rémi Dorval et Alain

Garès proposent un outil adapté au pilotage politique

et aux échelles des secteurs d'aménagement dans

la région. Il est articulé avec les propositions de

réorganisation de la gouvernance envisagée par Marc

Wiel. La Société Publique Locale (SPL) introduite

par une loi spécifi que concernant les sociétés

d’aménagement de 2006 (création des SPLA),

complétée en 2010 (création des SPL). Cette structure

de droit privé est considérée comme l’extension des

services de la collectivité pour laquelle elle peut être

désignée aménageur, sans mise en concurrence. La

SPL semble particulièrement adaptée pour devenir

la structure opérationnelle de mise en œuvre des

Opérations d'Intérêts Métropolitains (OIM) ou

des Contrats de Développement Territoriaux

(CDT), ou tout autre projet issu d’une coopération

intercommunale ou métropolitaine. Elle doit

disposer de fonds propres suffi sants pour avoir les

moyens d’une politique foncière et immobilière

à l’échelle de ces projets (750 à 2000ha). Dans le

maquis des opérateurs d’aménagement entre les

SEM locales, en concurrence, et les EPA de la région

parisienne, les moyens devront être redéployés selon

les thématiques pour s’articuler avec ce nouvel outil

de l’aménagement. Ces SPL pourraient être le lieu

d’une coopération renforcée entre les acteurs publics

et privés de l’aménagement pour passer d’une

culture de l’aménagement réglementé en ZAC à

un aménagement de projets.

fonc

iers

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fonc

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les

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construire plus, le point de vue du groupe 3F

Pierre Paulot (directeur de l'architecture - I3F)

apporte le témoignage d'un bailleur social, quant

aux tendances et évolutions de la construction de

logement social en Ile-de-France. L’action des

bailleurs est une exception française. Ailleurs en

Europe, ce sont surtout les programmes d’aide à

la personne qui sont privilégiés. Ces opérations

de logements interrogent la question des échelles

pertinentes par rapport à la ville. L'adaptabilité et

la mutabilité demandent de la cohérence entre les

structures foncière et de gestion; le contraire d’un

macrolot technique. L’échelle raisonnée de l’opération

est aussi un facteur d’intégration et d’adaptation au

quartier, aux mutations technologiques. La limitation

de la dépendance automobile implique une réduction

de la demande de stationnement, en imaginant que la

programmation et la conception des stationnements

doit être réversible, les hauteurs sous-plafond,

l’intégration en super-structure sont des éléments

déterminants le potentiel de leur mutabilité. La

question des rez-de-ville est primordiale. Elle

participe de l’intégration urbaine des logements.

Même s'ils ne peuvent pas toujours accueillir

commerces ou activités, ils peuvent être l’étage d’une

innovation typologique pour accueillir logements en

duplex, traversants ou transitoires, logements étudiants

par exemple. Enfi n l’acceptation de la construction

des logements sociaux dans tous les quartiers de la

mégapole doit s’articuler avec une réfl exion sur les

outils de représentation de la planifi cation urbaine.

Des PLU en 3 dimensions seront des bons outils de

concertation, de compréhension et d’acceptation du

projet, facteurs clés pour la réussite d’une opération.

Pour assurer la production des 70 000 logements

dont 35 000 logements sociaux, 3F propose de fi xer

aux aménageurs des objectifs de production de

foncier comme indicateurs d’une politique foncière

à l’échelle mégapolitaine.

en conclusion

En promouvant la question du logement,

autrement que comme une question purement

quantitative et exclusivement sociale, on pourra en

faire la question stratégique métropolitaine première.

Dans la démarche du Grand Paris, un certain

consensus a fait, jusqu’à présent, de la question de

la mobilité, la principale question métropolitaine,

celle à partir de laquelle il convenait de décliner

les autres, en particulier en donnant une priorité

à l’urbanisation autour des gares. La question

de la mobilité est évidemment importante tant

économiquement que socialement. Mais elle n’est pas

première car pour l’essentiel, les problèmes résultent

de notre incapacité à résoudre celle du logement,

laquelle renvoie à l’absence de régulation politique

de la dynamique qui tendanciellement modifi e

l’agencement urbain, la disposition spatiale des

ménages et des entreprises.

Or cette dimension stratégique de la question

du logement et son incidence sur toutes les autres

crises entremêlées (économique, environnementale,

gouvernance) n’a pas été perçue. Si bien que pour

démêler le problème contemporain du développement

de l’Ile-de-France on n’a pas tiré le bon bout de la

fi celle, et, en poursuivant de cette façon, on risque

donc bien de nouer encore un peu plus fort le

nœud formé par ces crises multiples. La question

du logement serait depuis toujours une simple

question d’intendance… et non pas d’orientation

stratégique. Le logement, restons sérieux, est

aujourd'hui une question purement locale…. Aussi

est-elle est toujours évoquée comme une question

quantitative, pour laquelle il faut trouver des trous

à boucher (agricoles, friches, terrains inondables

etc…) dans le tissu urbain. Les questions nobles,

vitales, stratégiques, sont à l’évidence les questions

du développement économique et de la mobilité qui

lui est étroitement liée. Nous, nous pensons que c’est

l’inverse, ou plutôt que c’est devenu l’inverse.

quel

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Page 12: Seur a Habit Er 2013

sources David Mangin/Seura

3. rendre accessible les quartiers anciens et nouveaux, aux segments d’activités et de services métropolitains

4. renforcer les transports en commun sur les segments quand le niveau de rentabilité des investissements en infrastructures est atteint.

1. aujourd’hui, peu de grands pôles économiques, une immobilité résidentielle accrue, des déplacements longs pour accéder à l’emploi

2. Une stratégie : créer des pôles d’emplois diversifi és, rattachés à des bassins d’habitat

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Page 13: Seur a Habit Er 2013

Notre actuelle dynamique des territoires repose

sur quelques données simples. L’Etat, au travers

du schéma d’aménagement de Delouvrier fi t de la

question du desserrement de l’emploi son objectif

stratégique principal. Les villes nouvelles et la

Défense furent les vecteurs de ce desserrement. On

en attendait une moindre pression foncière, et une

gestion de la mobilité moins insoluble. Ce ne fut

pas le cas. L’emploi, en se spécialisant, est resté

relativement concentré - métropolisation oblige -

quand le logement, en se spécialisant également,

se dispersait. La demande de mobilité croissait

naturellement avec le déménagement urbain que

cette dynamique impliquait. Un savant découpage

des départements devait contenir la pauvreté dans

ses murs. Mais tout se dérégla. La bulle immobilière

rendit inaccessible l’ouest aux couches moyennes qui

de ce fait débordèrent de Paris vers les départements

limitrophes les plus populaires (gentrifi cation).

Mais on garda la prétention de concentrer l’emploi

métropolitain sans lui faire payer le coût de cette

concentration. Nous sommes maintenant avec

des territoires qui veulent tous de l’emploi (d’où

l’attente messianique d’un métro supposé distribuer

la manne de l’emploi) mais qui ont une toute autre

attitude vis-à-vis de l’habitat. Soit ces territoires sont

(trop souvent) rétifs à l’accueil de logements nouveaux

(ouest et périurbain), soit ils sont spatialement

bloqués (Paris et une partie de la première couronne),

soit ont des moyens trop limités pour organiser cet

accueil… Blocage à ne surtout pas débloquer par la

seule mobilité facilitée.

Désigner les lieux de la densifi cation où

l’emplacement des nouvelles gares dont il faudrait

urbaniser ou re-urbaniser l’environnement ne

suffi t donc pas. Il faut mutualiser les moyens de

l’aménagement et garantir une cohérence entre

emploi et habitat suffi sante pour ne pas faire de la

mobilité facilitée un vecteur d’incohérence urbaine

aggravée.

C’est ainsi que la question du logement est passée

du statut de question locale à celle, avec l’aménagement,

de question métropolitaine. Certes il faut développer

la contractualisation entre les niveaux territoriaux

mais beaucoup moins entre les communes et l’Etat

qu’entre les intercommunalités et la Région. Et il

faut bien les moyens de la contractualisation donc

un dispositif qui fournit des aides inégales pour

accueillir les logements sociaux (accession et locatif ),

certaines activités prioritairement selon les lieux, et

fournir les moyens de l’aménagement aux terrains les

mieux placés malgré leur coût. Le marché n’opérera

pas ces régulations de lui-même. Les grands plans

viendront avec et après.

Si le pôle métropolitain est la ruse pour empêcher

de créer une règle du jeu nouvelle (ou en limiter

l’importance) susceptible d’activer une confrontation

entre le niveau local renouvelé (intercommunalités

assez grandes pour fédérer le développement des

communes) et le niveau métropolitain (Région

appuyée par l’Etat et non l’inverse), nous aurons tout

simplement compromis l’avenir.

Nous proposons donc d'ouvrir des questions

vives qui demandent surtout de changer de points

de vue sur l'enchaînement des eff ets et des causes

à l'heure de la (dé)croissance. Il faut passer d'un

urbanisme en "ré" (ré-nover, ré-habiliter) vers

des projets en "dé" ((dé)valoriser, (dé)placer, (dé)

fricher...) qui off rent options et processus, et inverser

les priorités. Le "comment faire ?" en période de (dé)

investissements, c'est d'abord cela.

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sources David Mangin/Seura

(dé)mesures et (dé)croissancesDu bon usage de la rente foncièreDu bon usage de la rente foncièreMarc Wiel Marc Wiel ........15........15Tout ne viendra pas des garesTout ne viendra pas des garesYves Crozet Yves Crozet ........27........27L'aménagement de nos moyens L'aménagement de nos moyens Vincent Renard Vincent Renard ........37........37

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sources David Mangin/Seurasources David Mangin/Seura

2000 - 2010

Chacun chez soi

1970-2000

le grand «chassé-croisé» /

C.Guilluy

1- desserement vers les

villes nouvelles

2- regroupement familial

dans les cités

3-"gentrifi cation" partielle

de l’Est Parisien

4- «lotissements» de 3ème

couronne

16

Page 17: Seur a Habit Er 2013

comment coordonner les réponses aux crises du logement, de la mobilité, et de la gouvernance ?

Cette crise est grave. Elle n’est pas seulement grave

pour les gens non logés, mal logés, ou qui peuvent

se plaindre du coût trop élevé de leur logement

(comme l’a bien montré les travaux de la fondation

Abbé Pierre), elle est aussi grave du fait de ses

conséquences environnementales. Ce sont en eff et,

au moins partiellement, les mêmes causes qui

provoquent la crise du logement et qui génèrent

une périurbanisation trop émiettée. L’accessibilité

insuffi sante aux logements ou aux emplois de son

choix allonge les temps de déplacements et donc exige

des investissements en infrastructures nouvelles de

transports. Enfi n la majoration du coût du logement

et du coût des transports pour les particuliers aura

pour conséquence pour les entreprises un coût du

travail majoré pour les entreprises ce qui nuira à

l’attractivité économique de l’Île-de-France, et en

déséquilibrera la structure sociale. De même que les

subprimes en Amérique ont déstabilisé le monde,

la non résolution de la crise du logement en Île-

de-France peut déstabiliser l’économie francilienne

et donc probablement aussi, in fine, l’économie

nationale.

La démarche du Grand Paris de ces dernières

années a modifi é chez de nombreuses personnes la

compréhension des problèmes et donc le jeu entre

les acteurs. Son point de départ était juste. En 2008

il fallait eff ectivement développer un peu plus de

préoccupations programmatiques dans le SDRIF et

penser ce dernier un peu plus comme une ouverture

au Monde. Mais très vite la question du transport1,

pourtant très liée à la question du logement comme

à celle de la gouvernance en Île-de-France, a pris le

dessus, s’est autonomisée, et est devenu l’objet fétiche

du renouveau de la région-capitale. Evidemment on

a un problème de transport. 40% des actifs franciliens

habitent à plus de 30 minutes de leur travail et ce n’est

pas la conséquence de la périurbanisation. Il suffi rait

qu’il n’y ait plus que 30% dans ce cas pour qu’il n’y ait

plus de problème de transport, du moins en matière

de congestion2. Trente minutes, ce n’est pas très

ambitieux. C’est déjà une durée très supérieure à la

moyenne des temps de trajet pour aller au travail en

province… Mais ceci n’est pas possible fi nancièrement

en donnant une totale liberté de s’installer où chacun

veut, puis de chercher à mieux desservir les ménages

et entreprises en transport collectif. Il convient de

concevoir des mécanismes d’incitation, de régulation,

mieux « intégrés » entre le transport et l’urbanisme.

Il faut donc comprendre la démarche développée ici

comme susceptible de faire baisser et non augmenter

la demande de déplacements3. Or elle passe par une

autre politique des déplacements et par une réforme

suffi samment radicale du fi nancement du logement

et de l’aménagement.

On ne retient trop vite de cette crise du

logement que les prix des logements sont élevés

parce que la production de logements nouveaux est

insuffi sante (on produit eff ectivement en gros un

peu plus de la moitié des besoins) et cela du fait

(théoriquement) du manque de terrains constructibles

1. Le Grand Paris, sortir des illusions, approfondir les ambitions, par Jean Pierre Orfeuil et Marc Wiel, éditions Scrineo 2012

2. Il resterait en eff et à garantir un niveau de service plus satisfaisant sur de nombreuses relations encore mal desservies par les transports collectifs3. cf.contribution de Yves Crozet

Du bon usage de la rente foncière.Marc Wiel

17

Page 18: Seur a Habit Er 2013

et qu’il faut donc encourager la densifi cation autour

des futures gares pour les uns ou mieux organiser

la périurbanisation pour les autres. Je pense que

le diagnostic est incomplet et oublie de se référer

suffi samment à la formation de la rente immobilière

(qui se répercute sur la rente foncière) et qui empêche

l’accession normale à la propriété des primo accédants.

Si nous réintroduisons la rente immobilière dans la

compréhension du fonctionnement du marché du

logement (en la prenant comme une cause et non plus

que comme une conséquence) on peut comprendre

comment le système institutionnel actuel n’est pas

adapté à la résolution de cette crise, car il ne met pas

spontanément en place le système de redistribution

spatiale de l’argent public nécessaire pour contrarier

les méfaits de cette rente immobilière, donc la

pénurie immobilière, une demande excessive en

déplacements, la ségrégation, l’atonie de l’emploi,

etc….

comprendre la contribution de la formation de la rente immobilière à la crise.

Les travaux de Jacques Friggit ont montré que,

en marché stabilisé (la précision est importante

et signifi e que l’approche suivie est délibérément

macroéconomique et non microéconomique), le

prix moyen des logements suivait les revenus des

habitants de la même unité territoriale formée par

ceux qui partagent, en gros, les mêmes emplois.

Je pense que nous n’avons pas tiré tout le profi t de

cette « découverte »… fi nalement assez triviale. Les

logements sont plus chers dans les agglomérations

dont les habitants sont plus riches. Cela veut dire que

dans deux agglomérations diff érentes les gens n’ont

pas des modes de vies assez diff érents les uns des

autres pour ne pas consacrer (en gros et en moyenne)

la même part de leur revenu à leur habitat plutôt

qu’à d’autres usages ou à d’autres consommations…

Cela parait marqué au coin du bon sens. Cela veut

dire que, si le marché fonctionne normalement,

n’est pas trop contraint pour une raison ou pour

une autre, les prix du logement résultent plus d’une

approche macro économique que microéconomique.

Il peut y avoir pénurie de logements, ce n’est pas

elle qui fera montrer sensiblement les prix. Dans

un marché dit « stabilisé » (sans à coup notoire en

matière démographique ou sur le plan de l’emploi)

la hiérarchie du parc de logement fera que les

moins fortunés occuperont les logements les moins

convoités et s’il en manque, ceux qui ne sont pas

à la rue cohabiteront plus tardivement chez leurs

parents où s’entasseront un peu plus… C’est la raison

qui justifi e des logements sociaux dont la fonction

sera de donner à ces ménages un habitat décent (et

dont le jeu du marché n’induira pas spontanément

la construction). Les travaux de la fondation Abbé

Pierre sont explicites et ne font pas l’erreur d’imputer

le prix des logements à la pénurie. Car en tout état

de cause les ménages les moins fortunés, condamnés

à se serrer la ceinture, ne seront jamais assez riches,

même s’ils sont nombreux pour interférer dans la

compétition des plus riches pour l’espace et peser sur

les prix à l’achat des logements de ces plus riches. Il

ne leur restera que la voie (la voix ?) politique pour

s’exprimer. On ne peut comparer le marché d’un bien

durable, non déplaçable et qui obéit à une sélection

hiérarchique entre les catégories sociales, à un marché

d’un bien non durable, déplaçable, et rigoureusement

interchangeable entre ses utilisateurs (par exemple

des fruits).

Bien que ce raisonnement macroéconomique

soit imparable l’opinion se réfère naturellement

au raisonnement microéconomique habituel4.

L’absence d’un nombre de logements suffi sants5

expliquerait le prix des terrains et des logements.

Cette mauvaise lecture n’est pas sans conséquence.

Elle va privilégier une approche physique des

problèmes d’urbanisme et empêcher d’intégrer une

approche fi nancière6. D’où un déploiement du zèle

4. Le raisonnement microéconomique reste utile pour comprendre par exemple l’écart entre le montant des loyers privés et celui des loyers publics par exemple, ou pour expliquer comment les ménages arbitrent entre la qualité de l’accessibi-lité et l’environnement social du logement.5. Pénurie bien réelle comme l’a fort bien mis en évidence la fondation de l’abbé Pierre.6. Cette diffi culté ne résulte pas seulement d’une ignorance économique. Elle correspond implicitement au rejet d’une marchandisation excessive des sols. Le sol comme l’air et l’eau sont estimés des biens communs. La rente immobilière est associée à un enrichissement sans cause et la concentration urbaine comme

un moyen commode de s’enrichir individuellement (spéculer). Entre le statu quo qui rechigne à égratigner le droit inviolable à la propriété et le principe de

18

Page 19: Seur a Habit Er 2013

à trouver des terrains à urbaniser et un manque

de zèle suffi sant pour mettre en œuvre de circuits

fi nanciers nouveaux en particulier pour mutualiser

le coût de l’aménagement des opérations jugées

les mieux placées… C’est ce déplacement de

l’analyse que nous voudrions opérer ici pour rendre

possible un déplacement de l’action collective. Il faut

des terrains certes mais il faut surtout de l’argent

pour équilibrer un nombre suffi sant d’opérations

suffi samment bon marché pour accueillir une

diversité de type de logements. Donc il faut savoir

à qui prendre cet argent, comme il faut savoir à qui

le donner prioritairement et sous quelles conditions.

Alors seulement commencerons-nous à sortir de

l’incantatoire. Cela va amener à concevoir plus

fi nement qu’actuellement une territorialisation des

aides au logement et à l’aménagement, corrigeant ce

que les dynamiques de marché ne pourront jamais

corriger d’elles mêmes. Pour l’instant la mobilité

sert de seule variable d’ajustement et donc fi nit par

majorer quand même la demande d’investissement

public, car son effi cacité n’est que temporaire, les

ménages et entreprises se relocalisant et re-saturant

les infrastructures. Nous resterons dans l’impuissance

tant que les communes qui ont simultanément à la

fois les terrains et l’argent pour les équiper ne seront

pas assez nombreuses pour construire à la place des

« autres communes ». Ces autres communes sont

celles qui ont l’argent mais pas les terrains ou les

terrains mais pas l’argent. C’est même pour cette

raison que l’on a inventé l’intercommunalité il y a

plus de cinquante ans, laquelle ne s’est développée

suffi samment qu’en Province. En Ile-de-France il

faut inventer les circuits fi nanciers de substitution à

ce retard institutionnel. C’est ce qui permettra par la

suite le comblement de ce retard.

Finalement, le raisonnement macro économique

est pertinent pour expliquer la valeur et l’évolution

moyenne de la rente immobilière (ce que la valeur

d’un bien doit à son contexte, à sa localisation)

dans chaque grand secteur de la Région, alors que

municipalisation des sols il peut y avoir de nombreuses positions intermédiaires. Mais on ne les trouvera et les légitimera que si on ne surestime pas l’aptitude du marché à réguler de lui-même le processus, si on ne continue d’ignorer que le manque logement est une résultante logique, à défaut d’être normale, mais du droit de propriété dans une société aussi nombreuse que disparate socialement.

le raisonnement microéconomique permettra lui

d’expliquer surtout comment s’ajuste les localisations

résidentielles au sein de ces mêmes grands secteurs.

Le raisonnement microéconomique est plus pertinent

pour expliquer, comme pour une agglomération de

province (dont le marché sera naturellement par sa

plus faible taille suffi samment unifi é) les écarts à cette

moyenne dans chaque grand secteur. En donnant

assez de place au raisonnement macroéconomique

on comprend que c’est le mécanisme de la formation

de la valeur de la rente immobilière, et l’inertie de

son évolution, qui amplifi e la pénurie de logement

et non l’inverse. Dés lors on peut aussi comprendre

que la périurbanisation éparpillée est très diffi cile à

contrarier même si on construit assez de logement

au total. On ne la limitera seulement, que si l’on off re

une alternative fi nancière aux ménages pour qu’ils

ne se péri-urbanisent pas, et si, en même temps, on

ne favorise pas les déplacements habitat travail (en

voiture comme en transports collectif ) au même

niveau que les déplacements interurbains. De même

on comprendra mieux, comme nous le verrons ci-

après, l’impact négatif de la bulle immobilière sur

l’ensemble de la dynamique spatiale d’aménagement

(spécialisation sociale et fonctionnelle plus forte,

alourdissements fi nanciers de toutes les politiques

publiques correctrice des choix de localisation

des particuliers). Approfondissons donc d’abord

la notion de formation de la rente immobilière

(pourquoi les prix ne dépendent pas de la pénurie) et

examinons ses méfaits, car cela va nous mettre sur les

pistes des circuits fi nanciers à inventer.

les composantes de la rente immobilière moyenne et en un lieu.

Comme J. Friggit l’a judicieusement montré, un

logement aura un prix au mètre carré proportionnel

aux ressources des ménages d’un grand secteur

de la région (de l’ordre, en échelle d’espace, aux

départements actuels de première couronne). Ce

rapport n’est pas intangible ; il peut varier dans la

longue durée et donc lentement, soit parce que le

coût proprement dit de la production des logements

se renchérit ou soit parce que les franciliens modifi ent

19

Page 20: Seur a Habit Er 2013

leur structure de consommation (par exemple

préfèrent partir plus en vacances que dans d’investir

dans leur habitat). Mais ces deux raisons ne vient pas

brusquement et ne peuvent expliquer l’envolée des

prix du logement de la dernière décennie.

Plusieurs facteurs peuvent venir perturber cette

belle corrélation prix /revenus qui voudrait que le

prix au m2 francilien ne refl ète que l’écart de revenu

moyen entre l'Ile-de-France et la Province

La conjoncture économique mondiale pourra

inciter certains ménages (ou certains grands

investisseurs mais ce n’est pas le cas semble-t-il) à

plus investir dans l’immobilier (acheter plus grand

ou mieux placé pour leur propre usage ou pour

louer malgré le relativement faible rendement de

la location) du fait qu’on craint l’évolution de la

bourse. Ce souci de placement fi nancier peut plus

aff ecter l’Île-de-France et/ou certains territoires dans

l’Île-de-France. La facilité du crédit peut amplifi er

ce comportement. On rentre alors dans une bulle

immobilière momentanée mais plus ou moins longue

selon la conjoncture mondiale et l’attractivité de la

bourse. Apparemment la décrue s’est fait attendre

mais elle a commencé, tout en étant encore très loin

des prix du point de référence d’avant bulle (1998).

Dans le même esprit, une attractivité touristique

supplémentaire peut venir ajouter à une demande

d’habitat supplémentaire à celle émanant des

personnes qui travaillent dans la région. De façon

générale les secteurs les plus convoités subiront

plus nettement que les autres les eff ets de la bulle

immobilière.

Ces trois composantes (revenus des ménages,

attractivité touristique et conjoncture favorable au

placement dans l’immobilier )7 forment l’essentiel

de la valeur moyenne de la rente. Il y a une dernière

7. Qui aff ectent diff éremment les territoires. Pour affi ner notre propos on ajoutera les processus de valorisation de certains secteurs dont la logique ne peut totalement être assimilée à une logique de placement boursier. La Seine Saint Denis et le Val de Marne, par exemple, ont connu un rattrapage du ratio prix sur revenu des appartements qui renvoie à la logique spatiale du processus de gentrifi cation (débordement des couches moyennes supérieures sur la frange des communes limitrophes de Paris, et au dynamisme économique des certains territoires de ces départements qui, dans la décennie récente ont accueillis plus de construction neuves que les autres).

composante, très minoritaire sur le total mais qui

(hors bulle immobilière, par exemple en 1998) fait

la diff érence entre Paris et la province. Elle est liée

au fait que dans une très grande agglomération, une

trop forte discordance entre le parc de logement et

les emplois là où les emplois sont les plus concentrés,

comme c’est le cas en Île-de–France dans l’ouest

parisien et son prolongement sur les Hauts-de-

Seine, va simultanément allonger les trajets habitat

travail et majorer la rente immobilière.

Au total nous voyons bien que la rente immobilière

moyenne n’a pas besoin de la pénurie pour être

expliquée. La rente immobilière commandant

l’existence de la rente foncière8. la périurbanisation

ne sera réductible que si le péage routier a un rôle

dissuasif et surtout si quelqu’un fi nance la rente

immobilière des espaces agglomérés au profi t des

nouveaux accédants. A défaut nous aurons, comme

actuellement, à la fois beaucoup de périurbanisation

et une production de logement insuffi sante du fait

que cette périurbanisation n’est pas le projet de tous.

Certains y renonceront en acquérant dans l’ancien

ou en restant locataires plus longtemps. C’est cette

situation, installée depuis plusieurs décennies, que la

bulle immobilière vient durcir.

La rente en un lieu s’écartera de la moyenne d’un

grand secteur selon les écarts d’accessibilité, le souci

de pouvoir rester « entre soi » de la part de certaines

catégories sociales, ou des préférences manifestées

pour bénéfi cier de ce qu’on appelle généralement les

aménités urbaines et qui recoupent le plus souvent

ce que les urbanistes appellent la qualité urbaine ou

l’urbanité.

Naturellement la représentation courante de la

formation de la rente immobilière se fera à partir

de la petite échelle comme s’il s’agissait d’une

agglomération de province dont le marché est

naturellement unifi é en raison de sa petite taille.

On dira que la rente immobilière enregistre donc

des avantages relatifs aux aménités urbaines. Que la

collectivité doit payer des terrains qu’elle a contribué

à valoriser. C’est plus vrai à l’intérieur de chaque

8. Au travers la méthode dite du calcul à rebours.

20

Page 21: Seur a Habit Er 2013

grand secteur de l’Ile-de-France mais moins vrai

entre les secteurs de l’Ile-de-France. La diff érence

entre les secteurs va surtout venir du fait que l’habitat

et les emplois des riches s’attirent mutuellement et

que le logement comme « placement » n’a pas le

même intérêt partout. Il faut donc une régulation

qui contrarie et encadre le jeu des marchés à la

grande échelle, c’est à dire à l’échelle régionale, et

qui complète les dispositifs purement réglementaires

(comme la défi nition du droit des sols). Il faut une

péréquation fi nancière métropolitaine qui n’est pas

inscrite dans la structure institutionnelle actuelle. Au

contraire le dispositif institutionnel actuel encourage

le processus de blocage de l’urbanisation. Il y a bien

un dispositif métropolitain pour gérer la mobilité

mais pas de dispositif métropolitain pour corriger

les inconvénients des logiques de localisation des

investisseurs (ménages ou entreprises). Le Grand

Paris doit inventer le dispositif capable de

contrarier ce déséquilibre. C’est ce déséquilibre

qui nuit fi nalement à l’attractivité économique de

la région. Nous vivons encore sur le mythe que le

transport est aff aire collective et l’habitat aff aire

locale. C’est pour cela que crise de la mobilité, du

logement et de la gouvernance sont étroitement

imbriquées.

les méfaits de la rigidité à la baisse de la rente immobilière.

Le méfait principal sera d’abord de renchérir les

politiques publiques compensatoires de nos choix

de localisation : déplacements, habitat social, aides à

l’accession, politique de la ville, besoins nouveaux en

équipements de proximité, restauration des espaces

publics, politiques foncières etc….

L’inélasticité de la rente immobilière à la pénurie

locale et sa grande sensibilité à la conjoncture

internationale aura pour eff et d’amplifi er la

concentration ou la dispersion de certains emplois

et de certains logements. Ce simple eff et spatial

renforcera le coût des politiques publiques de

déplacement.

Prenons un exemple. Dans la situation actuelle

on subventionne (de diverses façons) un emploi

supplémentaire à la Défense sans lui faire payer ce

qu’il induit en transport ou, via la majoration de la

rente immobilière, ce qu’il coûte en logement sociaux

supplémentaires. Il y a par exemple 40% de plus de

logements sociaux en Île-de-France qu’en province

(proportionnellement à la population) alors que les

franciliens sont 40% plus riches que les provinciaux.

La rente immobilière en empêchant l’accession à

la propriété, sans que les investissements en locatif

privé le compensent, crée le besoin de plus de locatifs

sociaux. On pourra conduire un raisonnement

analogue pour la politique de la ville.

L’excès de concentration d’emploi (par rapport

à l’habitat proche) ne va pas impacter que la

demande de déplacement, mais aussi le besoin

de logements sociaux ou de crédits publics pour

la politique de la ville, ou encore pour éponger les

défi cits d’aménagement de nouvelles opérations

d’urbanisme9. On retrouve d’ailleurs de cette façon

l’intuition de l’urbaniste Bernardo Secchi d’éviter

l’excès de concentration (à la grande échelle) de

certaines polarités d’emploi en cherchant plus à

susciter des centralités disposées linéairement, sur

un réseau de transport maillé, lui même pas trop

hiérarchisé.

comment assurer une production suffi sante de logements et contrarier les méfaits du mode de formation de la rente immobilière?

Nous examinerons successivement, comment

fi nancer l’accession à la propriété et sous quelles

conditions, et comment fi nancer l’urbanisation

(donc l’aménagement) puis les dimensions

politiques de ces mesures. Nous n’examinerons pas la

9. Et pour cette raison j’ai proposé (cf .op.cité) le principe général (qui réclamera beaucoup de temps à se mettre en place car on ne bouleverse pas d’un coup les habitudes prises, fussent elles critiquables) de taxer le choix de loca-lisation en proportion des couts des politiques publiques induits par ces choix de localisation. Cette perspective de long terme pourrait contrarier les eff ets pervers de l’actuelle organisation institutionnelle. Celle-ci, par construction en quelque sorte, organise tout un système de péréquation qui revient à faire payer les renchérissements de politiques publiques à ceux qui n’en sont pas la cause mais parfois les victimes

21

Page 22: Seur a Habit Er 2013

sources M.Wiel

POLITIQUE DES MOBILITESEffets négatifs dans la durée, des surinvestissements routiers rapides et des sous investissements TC de proximité en périphérie des décennies antérieures. Tarifi cation des TC et absence de péage encourage la périurbanisation

POLITIQUE D’URBANISMEParti spatial (ville nouvelle+

Défense) devenu inadapté à gouvernance (décentralisation). Planifi cation ineffi cace car trop réglementaire et pas assez pré

opérationnelle ni cohérente avec la fi scalité.

CONTEXTE GENERALMondialisation + fi nanciarisation = délocalisation + métropolisation +tertiarisation +… 2 bulles immobilièresModes de vies : plus d’autonomie et plus d’individualisme = plus de concurrence et moins de sécurité qui infl uent sur les comportements

Localisations non maitrisées ni régulées fi scalement…provoquent:- une crise du logement (prix/confort) -une crise de la mobilité (temps, cout, confort)…réagissant sur l’attractivité (coût du travail, qualité résidentielle) de la métropole pour des politiques publiques correctrices des choix de localisation (habitat, transport, foncier, politique de la ville environnement, etc..) plus coûteuses et moins performantes

POLITIQUE D’AMENAGEMENT ET DU LOGEMENTPas de régulation fi nancière métropolitaine pour avantager les opérations spatialement opportunes dans un contexte de rente immobilière croissante qui contrarie la dimension sociale des politiques du logement (locatif et accession).Pas de mesures anti rétention foncières et un régime des participations pouvant contrarier les exigences de diversifi cation de l’habitat. Déconnexion de l’aide à l’accession sociale et des localisations, au contraire PTZ péri-urbanisant

GOUVERNANCEDécentralisation inadaptée à Île-de-FranceCrise du leadership métropolitain (Paris, Region, Etat)Communalisme récurrent.Intercommunalités insuffi santes (bridées par l’existence des départements en première couronne). Organisation transport trop concentrée/Organisation aménagement trop émiettée.

22

Page 23: Seur a Habit Er 2013

question du fi nancement du logement social, qui est

certainement aussi un problème important mais dont

les supporters sont déjà à notre avis assez nombreux

pour ne pas nous intéresser spécifi quement à ces

problèmes. Il en est de même de ce que nous appelons

classiquement la politique foncière qui appelle des

mesures nouvelles permettant des anticipation dans

l’acquisition des sols (portage foncier) et des mesures

fi scales associée (dissuasion de la rétention foncière).

comment fi nancer l’accession à la propriété des primo accédants?

L’Etat est pour l’instant le principal fi nanceur.

Les mesures contenues dans le bouclier fi scal (lors du

mandat présidentiel précédent) ont fait long feu. Les

entreprises y contribuent également (un peu) via le

1%. L’Etat a dans le passé surtout toujours voulu faire

« du chiff re » (maximiser le nombre de logements

construits à l’échelle nationale) ce qui veut dire que

ses aides à l’accession donnaient surtout priorité à

l’emploi dans le bâtiment. Le PTZ s’accordait bien

avec cet objectif. Il a alimenté la périurbanisation.

Après le Grenelle il serait judicieux de raisonner

diff éremment. La périurbanisation n’est pas un

mal en soi10 mais exige (pour l’avenir) qu’elle soit

mieux encadrée, surtout si les autres solutions pour

construire en zone agglomérée sont jugées trop

coûteuses ou insuffi samment effi caces eu égard aux

préférences des ménages. Et même dans ce cas on

n’aidera que les secteurs périurbains susceptibles de

permettre aux ménages dans le futur de s’adapter plus

facilement aux problèmes énergétiques de demain.

Même si l’Etat, depuis quelque temps, concentre

plus ses aides sur l’Ile-de-France,, on ne doit pas trop

compter sur l’Etat. Outre son incapacité fi nancière

durable l’Etat représente une solidarité fi nancière

province /Ile-de-France qui n’a sans doute pas lieu

10. Eric Charmes défend l’idée que le sort du développement de l’Ile de France est peut-être au delà de la Francilienne. Il veut rappeler que ces territoires font partie de la métropole et peuvent légitimement réclamer de pouvoir améliorer leur organisation. Mais nous avons changé d’époque et leur contribution au déve-loppement de l’Île-de- France dépendra beaucoup de l’impossibilité politique et fi nancière de prévoir ce développement dans d’autres territoires. Ceci dit il a raison de signaler qu’il serait dommageable de le laisser croire si ce n’est pas vrai. La mesure fi nancière des objectifs de resserrer un peu l’urbanisation sur l’agglomération parisienne actuelle doit être vérifi ée.

d’être ici. Les franciliens doivent, selon moi, fi nancer

les aides à l’accession à la propriété qui les concernent.

Qu’est ce qu’est devenue l’accession à la propriété ?

Un droit d’accès à la rente immobilière. C’est doute

pour cela que les nouveaux accédants continuent

à s’endetter de plus en plus malgré les prix. On

peut alors penser que le club11 des bénéfi ciaires

de la rente immobilière puissent autofi nancer

son élargissement. On taxerait la progression de

la rente immobilière des propriétaires12 (et non les

plus values qui supposent transaction) dépassant un

seuil de revenu imposable, proportionnellement à la

progression de la rente immobilière moyenne dans

le secteur considéré de la région. Pour les logements

achetés avant 1998 la progression de cette rente

démarrerait à cette date et s’il est acheté après

1998 la progression partirait de la date d’achat. La

progression de la rente viendrait rendre possible

l’extension du nombre de propriétaires. Au-delà des

aides que l’Etat met déjà dans la primo accession, on

peut imaginer l’existence d’un fonds qui collecte des

ressources auprès des propriétaires franciliens et les

redistribuent auprès des primo accédants dans le but

de leur permettre de diff érer le remboursement de la

part du coût du logement qu’ils achètent, expliquée

par sa localisation. Ainsi réduirait-on l’obligation de

se péri-urbaniser sans en empêcher la préférence. A

la limite (dans certains cas) le fonds serait remboursé

à la revente du bien ou à sa transmission aux héritiers.

L’Etat pourrait d’autant mieux concentrer ses

moyens sur l’aide au locatif social. Ce fonds pourrait

être géré en collaboration avec les représentants

des associations de propriétaires (analogie avec le

dispositif de fi nancement de l’ANAH).

Toutefois cette aide rendant possible le diff éré

du fi nancement de la rente immobilière par les

primo accédants devrait n’être distribué de façon

prioritaire qu’aux candidats à des opérations dont

la localisation et le programme sont optimales pour

rapprocher emploi et actifs. Chaque sous territoire

11. Le fi nancement de l’ANAH obéit déjà cette logique12. Rappelons les chiff res établis par Joseph Comby qui évalue à 500 milliards d’euro (France entière) le montant de la valorisation des biens immobiliers liés à la bulle depuis 19998. Si cette bulle se dégonfl e le besoin de fi nancement diminue ‘et des moyens plus classiques devraient suffi re.

23

Page 24: Seur a Habit Er 2013

représentatif de la conception de l’Etat et de la

Région de ce que devrait être les périmètres futurs de

l’intercommunalité aurait un objectif de logements

neufs à construire suivant son contexte en matière

de déplacement et le déséquilibre entre les emplois

de son territoire et l’habitat de son territoire. La

possibilité pour une opération publique ou privée

d’être labélisée comme susceptible de recevoir ces

prêts serait à la base d’une négociation globale entre

les promoteurs et la Région (ou l’autorité régionale

du logement).

comment fi nancer l’urbanisation ?

L’autre volet de mes propositions concerne

la création d’une contribution régionale à la

diminution de la charge foncière des opérations pour

faciliter la diversifi cation des programmes d’habitat

ou la relocalisation d’entreprises.

Une autorité régionale cogérée par la région

et les intercommunalités distribuerait des moyens

fi nanciers pour permettre aux opérations privées

ou publiques plus coûteuses mais bien placées de

pouvoir accueillir un programme socialement et

fonctionnellement diversifi é. Ces moyens fi nanciers

proviendraient de plusieurs sources.

L’Etat pourrait y contribuer pour pouvoir en

contrepartie faire valoir son exigence de localisation

privilégiée des logements locatifs sociaux dans

l’utilisation de ce fonds.

Les entreprises (contrairement au fond

précédent dont les moyens émanent des ménages),

dont la localisation renchérit par leur excès

de concentration les politiques publiques des

collectivités, verraient leur taxation locale majorée

(par exemple le Versement Transport). On peut aussi

l’indexer sur la longueur des trajets des salariés

(cf la proposition de Jean Pierre Orfeuil). Il s’agit

d’inciter les entreprises à bien se localiser pour

minimiser l’élévation de la rente immobilière ou

plus généralement compenser le coût public qu’elles

induisent. Cet argent pourra pour partie faciliter la

relocalisation des entreprises en comblant le défi cit

d’opérations ciblant des activités. Les représentants

des entreprises participeraient à la gestion de ce fonds

que l’on pourrait appeler « fonds de mutualisation des

défi cits des opérations d’aménagement ».

L’autre source de fi nancement de ce fonds

proviendrait des collectivités locales (communes,

intercommunalités et départements) qui ne

construisent pas suffi samment (qu’elles ne le veulent

pas ou qu’elles ne le peuvent pas) par rapport à des

objectifs assignés qui intégreraient la réduction des

discordances locales (à moins de trente minutes) entre

emploi et parc de logement. On considérerait qu’un

pourcentage de la DGF est aff ecté à cette mission

collective d'accroître l’ensemble du parc de logement

et de repositionner l’emploi. Les communes qui y

contribuent suffi samment ou dont le potentiel fi scal

est trop faible (après péréquation) seraient exonérées

de cette contribution. Les autres alimenteraient ce

fonds à concurrence de la part de DGF supposée

répondre à cet objectif commun. Il servirait à

compenser les défi cits des opérations qui, bien que

bien placés dans certains cas mais aussi parce qu’elles

sont bien placés dans d’autres cas, sont plus coûteuses

à monter du fait de la rente foncières locale, de besoin

de dépollution ou d’accès à des réseaux techniques.

La région optimiserait l’allocation des ressources de

ce fonds aux diverses opérations candidates.

Il nous paraîtrait judicieux d’accompagner cette

facilité nouvelle pour monter des opérations par un

changement d’optique concernant les participations

justifi és par les dépenses liés les équipements de

proximité. On peut imaginer que ces équipements

de proximité relèvent du fi nancement normal, c'est-

à-dire par les contribuables des communes ou des

intercommunalités13 dont font partie ces opérations.

Il faut surtout que les collectivités puissent dans

ce cas emprunter à long terme. Il s’agit de ne pas

hypothéquer la capacité de négocier la diversité des

types d’habitat avec les promoteurs par des exigences

de charge foncière trop élevée. Le projet d’agence

pour le fi nancement des projets à long terme des

13. Cf les analyses de Joseph Comby consultable sur : www.comby-foncier.com et en particulier son article intitulé « qui doit payer l’urbanisation? ».

24

Page 25: Seur a Habit Er 2013

collectivités en facilitant la prise en charge fi nancière

des équipements de proximité devrait faciliter un

assainissement des relations public/privé.

Des territoires seraient aidés de cette façon pour

accueillir plutôt de l’emploi14, d’autres pour accueillir

plutôt de l’habitat. Ces aides rendraient possible les

opérations les plus utiles collectivement dans une

approche intégrée c'est-à-dire prenant le contre pied

de la solution d’investir toujours prioritairement

dans l’amélioration de la mobilité.

Néanmoins cette reforme ambitieuse pourrait

devenir aussi un puits sans fond pour les collectivités

si les relations entre les propriétaires des terrains

et la puissance publique n’étaient pas également

assainie. Il conviendrait de mettre en place des

mesures minimales pour empêcher la rétention

foncière (et reconstituer des réserves foncières).

Diverses mesures pourraient y pourvoir (exemple

de la taxe sur le foncier non bâti) et nous n’avons

pas de raison d’en préférer plus l’une plus que l’autre.

Mais cette rétention étant supposé réduite il faudra

également pouvoir conduire avec les propriétaires

privés des négociations sur la base de ce que les

professionnels du foncier appellent « le compte

à rebours ». La valeur d’un terrain se déduit d’un

calcul qui tient compte d’un prix de vente possible

des biens construits diminués d’un certain nombre

de sujétions diverse (dépollution, raccordement à

des équipements, marges bénéfi ciaires, taxes, coût

de construction etc...). Contrairement à l’immobilier

où les transactions eff ectués récemment aux alentour

sont un repère intéressante, deux terrains ne peuvent

pas prétendre avoir la même valeur du fait de

leur localisation avant de savoir le programme de

construction visé. Cette situation est indéniablement

un facteur de blocage (ou de ralentissement) de

l’urbanisation. Les propriétaires peu pressés de

vendre se refuseront souvent de raisonner par la

méthode du compte à rebours. Si on les rend plus

pressés de vendre d’une manière ou d’une autre, il

faut simultanément les avertir assez tôt de la vraie

14. Les opérations nouvelles d’habitat devront certes intégrer des activités mais se feront plus couramment sur des zones d’activités parfois partiellement en

friches et où certaines activités nécessiteraient redéploiement

valeur de leur bien (selon le programme). Cela veut

dire également que la défi nition du droit du sol

devra éclairer les variantes de programme possible,

au moins sur certains secteurs stratégiques, pour

pouvoir annoncer l’ordre de grandeur du prix

envisageable. La planifi cation urbaine doit donc

incorporer des préoccupations pré-opérationnelles

et rendre possible de travailler avec les représentants

des propriétaires pour clarifi er les données de la

transaction à faire aboutir pour pouvoir construire.

les dimensions institutionnelles de ces propositions.

C’est l’ensemble du fi nancement de

l’urbanisation qu’il nous faut reconstruire pour

débloquer la situation parisienne sans rêver à des

projets de transports trop lourds fi nancièrement mais

inappropriés à la réalité des raisons du blocage de

l’urbanisation. Les pistes suggérées ici réclameraient

des simulations fi nancières à l’échelle régionale, car ce

sont elles qui en défi nitive crédibiliseront la nécessité

de plus ou moins s’appuyer sur une périurbanisation

mieux organisée pour éviter de continuer de bloquer

l’urbanisation de l’Ile-de-France comme cela se fait

depuis plusieurs décennies. La quantité d’espace

constructible dans les Plu, comme le montant des

investissements transports ne sont plus les bonnes

variables à utiliser pour le savoir.

Cette recomposition du fi nancement

de l’urbanisation accompagnera la reforme

institutionnelle qui fait actuellement l’objet des

réfl exions en cours dans le cadre de l’association Paris-

Métropole. Contrairement à la province, en Île-de-

France, le développement de l’intercommunalité, qui

est certes indispensable, ne sera pas suffi sant pour

débloquer l’urbanisation. En Province la commune

est le local et l’intercommunal le métropolitain.

En Île-de-France, la commune est le micro-

local et l’intercommunalité est elle ce que nous

désignons par le local en province. Même grosse

l’intercommunalité pourra faire du localisme, c'est-à-

dire, parfois, jouer contre l’intérêt métropolitain. On

a bien besoin d’un pouvoir métropolitain régulateur

25

Page 26: Seur a Habit Er 2013

qui suppose évidemment une bonne collaboration

entre l’Etat et la Région. Mais on peut concevoir

ce pouvoir métropolitain plus comme travaillant

avec les intercommunalités (même grandes pour

devenir plus effi caces) que contre elles. C’est sans

doute l’intérêt d’un cheminement suffi samment

lent de la réforme institutionnelle (à laquelle Paris

Métropole réfl échit) afi n de mettre en place des

pratiques de collaboration entre les institutions

avant de concevoir une nouvelle répartition des rôles

de chaque niveau institutionnel.

Il est nécessaire de disposer de deux scènes de

négociation, articulées entre elles, rassemblant les

collectivités locales. La première (le pouvoir local

en voie de constitution) rassemble les communes et

les intercommunalités correspondant aux bassins

d’emplois locaux (de l’ordre de la moitié des

départements de première couronne). Le deuxième

(le pouvoir métropolitain, actuellement déséquilibré

par la priorité accordée au transport) devra préciser

les objectifs quantitatifs et quantitatifs de départ

pour chaque bassin d’emploi local (un secteur de

la Région où l’ambition sera de relier tous les lieux

d’emplois et tous les actifs résidents en moins de 30

minutes en TC, et donc des territoires plus petits

que les départements de petite couronne). Les

collectivités de ces bassins précisent leurs besoins

fi nanciers pour mener à bien ces objectifs. Suivant

les moyens dont le pouvoir métropolitain disposera,

ce pouvoir optera pour aider sélectivement chaque

bassin d’emploi local (qui aura un jour vocation à

devenir le territoire d’une communauté urbaine).

On peut imaginer que ne disposant pas d’assez

de moyens pour hisser la construction neuve

dans la partie agglomérée de l’Île-de-France, elle

puisse décider de soutenir une périurbanisation

mieux canalisée, n’exigeant pas d’investissement

de transport trop coûteux. La région sera alors en

mesure de montrer les conséquences à terme de

l’insuffi sance des fi nancements et éventuellement

susciter la révision à la hausse des contributions

fi scales réclamées à chacun.

Nos propositions tendent à montrer la nécessité

d’avoir le schéma d’aménagement de nos moyens

et non l’inverse. Il faut eff ectivement partir du

projet pour mieux planifi er, mais exclusivement du

projet «fi nançable», ce qui exige de savoir qui paye,

en partant des ressources limitées des collectivités.

Sinon la vision à long terme et les moyens à court

terme ne se rejoindront jamais. Or il faut cet exercice

pour que le fi nancement de l’urbanisation soit

reconnu comme une priorité collective. Sinon les

égoïsmes locaux seront les plus forts et se pareront

de la dernière idéologie à la mode pour justifi er de

ne pas participer à l’eff ort collectif.

26

Page 27: Seur a Habit Er 2013

Idées clés :

- la formation de la rente immobilière

moyenne dans une partie d’une grande

métropole est mieux expliquée par une

approche macroéconomique. Elle est liée à trois

composantes: au contexte économique aux

revenus des ménages, et l'accessiblité du bassin

d'emploi. Cette dernière composante est plus

importante en ile de France . C’est le niveau élevé

de la rente qui engendre la pénurie de logement

et non l’inverse.

- une primauté excessive des investissements

public pour une mobilité rapide renforce

l'attractivité de certains territoires mais ne

compense par d’autres investissements publics

dans l’aménagement, elle renchérit l’ensemble

des politiques publiques. Il vaut mieux réserver

la vitesse à certains fl ux métropolitains plutôt

qu’a l’ensemble des pendulaires

- la régulation optimale de l’agencement

urbain passe par le croisement d’une fi scalité

des localisations, - faire payer la concentration

comme l’éparpillement - et de la mobilité -

péage routier, tarifi cation TC diff érenciée et

diff érenciation des vitesses - de façon adaptée

aux types de déplacements - proximité, bassin

d’emploi, métropolitain.

- cette fi scalisation des localisations et des

mobilités rend possible une redistribution

sélective des aides provenant d’un pouvoir

métropolitain aux diverses intercommunalités

pour leur permettre de réaliser leurs projets les

plus conformes à l’intérêt métropolitain.

- l’éventuelle future réforme institutionnelle

redéfi nissant périmètres et compétences sera le

produit de ces nouvelles règles du jeu associant

pouvoir métropolitain et intercommunalités.

27

Page 28: Seur a Habit Er 2013

sources David Mangin/ Seura28

1/ "toile inter urbaine"

autoroutes et nationales, radiales et concentriques

2/ "grande boucle"

TGV interurbains (150 km/h) de pôle à pôle

40 km de ligne nouvelle / 6 nouvelles gares

réalisation 2020/2030

3/ rocades TC/VP

optimiser les pôles / lignes existantes

coûts et délais réduits

4/ maillages intermédiaires :

maillage TC : rocade métro, lignes tangentielles BHNS, avenues métropolitaines ...

1

2

3

4

Page 29: Seur a Habit Er 2013

Tout ne viendra pas des garesYves CrozetNote d'analyse réalisée pour le compte de la CCI Paris Ile-de-France - novembre 2012

72 gares réparties au long des 130km d’un

nouveau réseau de métro automatique, tel est en

résumé le contenu du Grand Paris. En plaçant les

gares au cœur de ce projet, ses promoteurs ont voulu

insister sur la dimension spatiale de leur ambition

politique de dynamisation de la métropole parisienne.

Comme le montrent les missions de la Société du

Grand Paris, nous ne sommes pas seulement en

présence d’un projet de transport. L’objectif central

est l’aménagement du territoire et la maîtrise du

développement que devraient entraîner la création de

nouvelles gares et la croissance de l’activité de gares

déjà existantes. Nous nous interrogerons donc dans

les lignes qui suivent sur le rôle des gares dans un

réseau de transport collectif principalement destiné

à la mobilité quotidienne. Comment s’assurer de la

performance des gares ? Quelles sont les conditions

de leur succès et quelles en seraient les implications

pour les entreprises ?

Pour répondre à ces questions, nous

commencerons par rappeler le rôle que joue la

mobilité dans la dynamique métropolitaine en

soulignant un certain couplage entre croissance

économique et mobilité, couplage (1). Puis nous

nous intéresserons aux implications de ce couplage

qu’il ne faut pas confondre avec une causalité.

Peut-on vraiment attendre un rebond de croissance

provoqué par une amélioration de la mobilité ? Et

comment cette dernière sera-t-elle impactée par les

contraintes liées au développement durable ? (2). Ce

tour d’horizon des principaux enjeux du Grand Paris,

analysé à travers le prisme des gares, nous conduira

à préciser les conclusions que l’on peut en tirer pour

les entreprises (3).

la mobilité au cœur de la dynamique métropolitaine

D’après les résultats de l’enquête nationale

transport-déplacements (ENTD), la mobilité des

personnes a continué à progresser en France entre

le milieu des années 1990 (date de la précédente

ENTD) et les années 2007-2008. La distance

moyenne parcourue est passée en un peu moins de 15

ans de 36,3 à 40km par jour et par personne de plus

de 6 ans. Sur ce total, la mobilité locale est passée

de 21,6 à 23,8km par jour et par personne alors que

la mobilité à grande distance a progressé de 14,7 à

16,2km. Au total la mobilité locale représentait en

2007-2008 8700 km par et par personne contre 5894

km pour la mobilité à longue distance. La mobilité

totale, soit 14 594 km, a progressé de 10% en un peu

moins de quinze ans. Ce mouvement doit bien sûr

être relié à la croissance économique comme nous y

invite la notion de couplage. Plus le niveau de vie

progresse, plus s’allongent les distances parcourues.

Une analyse rétrospective conduite par A. Schafer

(2009) sur l’ensemble des pays du monde pour la

période 1960-2000 a même conduit cet auteur à

envisager une élasticité positive de 1 entre mobilité et

29

Page 30: Seur a Habit Er 2013

vers un réseau de voies rapides apaisées et multimodales

30

p

les boulevards et avenues métropolitaines

Page 31: Seur a Habit Er 2013

croissance économique : pour chaque accroissement

de 1% du niveau de vie, il y aurait une croissance de

1% de la mobilité !

En reprenant les données françaises rappelées ci-

dessus, nous observons que l’élasticité n’est pas de 1

mais de 0,4 puisque la mobilité a cru de 10% alors

que la croissance du PIB/tête atteignait 25%. Nous

observons donc bien un couplage, mais moins net

que pour les décennies passées. Il est possible que

dans quelques décennies, notamment sous la pression

des contraintes liées au développement durable,

la croissance économique s’accompagne d’une

très faible croissance de la mobilité des personnes.

Cela s’explique par le fait que la croissance de la

mobilité, et notamment celle de la mobilité locale,

se heurte à l’impossibilité d’accroître indéfi niment

les vitesses de déplacement. Or les gains de vitesse

sont indispensables pour obtenir l’allongement des

distances parcourues à budget temps de déplacement

constant. D’ailleurs, à regarder plus en détail les

résultats de l’ENTD, on se rend compte que la

mobilité locale n’a pas progressé en France pour les

actifs ou pour les scolaires. Par contre elle a crû de

plus de 40% pour les retraités qui ont plus de temps

disponible et peuvent également choisir les heures

creuses pour leurs déplacements. Nous découvrons

ainsi que le couplage n’est pas une loi universelle

s’appliquant à tous, en tous lieux et en tout temps. La

dilatation des espaces-temps de notre vie quotidienne

(Crozet & Joly 2004) se réalise sous conditions. La

première de ces conditions est la hausse du revenu,

mais elle n’est pas la seule. Il est aussi nécessaire que

des gains de vitesse soient possibles. La mobilité

se développe donc d’autant plus que, d’une part le

coût monétaire du déplacement ne pèse pas trop

par rapport au revenu et que d’autre part le budget

temps de transport (BTT) reste dans des volumes

acceptables.

La question du BTT doit être abordée en

rappelant qu’il est très rigide à la baisse mais

beaucoup moins à la hausse ce qui implique les deux

tendances suivantes.

Lorsque des gains de vitesse sont off erts, les

usagers des transports ne réduisent pas leur budget

temps, ils augmentent les distances parcourues. Il y

a donc un réinvestissement des gains de temps dans

une consommation accrue d’espace pour la simple

raison que ce réinvestissement off re des opportunités

nouvelles de choix de localisation résidentielle,

d’emploi, d’activités de loisirs etc. C’est pourquoi dans

son discours tenu en avril 2009 pour le lancement

du Grand Paris, le président Sarkozy n’a pas été bien

inspiré en annonçant que le nouveau métro allait

permettre de réduire de 30 mn par jour le BTT des

Parisiens. Off rir un métro plus rapide aux habitants

du Grand-Paris revient à leur off rir des opportunités

nouvelles dont ils vont évidemment se saisir non pas

en réduisant le BTT quotidien mais en allongeant la

portée des déplacements.

Ce phénomène est encore plus évident en région

parisienne où les enquêtes spécifi ques menées dans la

région constatent un BTT moyen de 90 minutes par

jour contre 60 à Lyon ou à Bordeaux. Si les Parisiens

acceptent un BTT plus élevé que dans les autres

agglomérations, c’est du fait de l’importance et de

la diversité des off res de l’agglomération parisienne.

Accroître de 10 à 15 minutes le BTT domicile travail

permet à un Francilien d’accroître signifi cativement

le nombre d’opportunités accessibles. Par exemple en

trouvant un logement plus adapté à son budget ou

off rant pour le même prix plus de surface habitable.

Ainsi, en matière de mobilité, la notion clé est

celle d’eff et rebond. Dès que l’on off re une baisse du

coût et/ou une hausse des vitesses de déplacement,

les usagers s’en saisissent pour étendre la portée de

leurs déplacements, et cela est encore plus manifeste

lorsque les opportunités sont nombreuses dans la

zone concernée. Devons-nous en conclure qu’il est

toujours bénéfi que pour l’usager et pour la collectivité

d’avoir accès à une mobilité plus rapide et moins

coûteuse ? Est-ce une perspective durable ?

31

Page 32: Seur a Habit Er 2013

32

les prévisions (optimistes) de développements urbains : immobilier actif et résidentiel...

sources Alphaville d'après SGP

Page 33: Seur a Habit Er 2013

peut-on croire à un rebond durable de croissance fondé sur un regain de mobilité ?

Le projet du Grand-Paris s’inscrit dans une

logique volontariste visant à dynamiser la croissance

économique en France en général et dans la région

parisienne en particulier. Deux arguments clés

viennent soutenir cette idée.

La première est que les conditions de transport

se sont plutôt dégradées dans la région parisienne

depuis une vingtaine d’années. La congestion routière

ne s’est pas réduite alors même que des phénomènes

de saturation se sont multipliés dans les transports

collectifs, accompagnant, sur certaines lignes, une

évidente dégradation de la qualité de service. La

saturation se manifeste aussi dans plusieurs gares,

pour les trains et autres RER, mais plus encore pour

les passagers. Il en résulte un coût accru de la mobilité

et donc une moindre fl uidité du marché du travail.

La seconde s’inscrit dans la logique des « wider

economic eff ects » développée par l’économiste

anglais Venables (2006). Cet auteur insiste pour que

les investissements en infrastructure privilégient les

zones où la productivité est déjà élevée car cela peut

y attirer des nouveaux actifs provenant de zones où

la productivité est structurellement moins forte. De

même que la croissance des 30 glorieuses en France

a été le fruit du transfert vers l’industrie d’actifs

provenant d’un milieu rural où la productivité était

faible, de même l’accroissement de l’emploi dans la

région parisienne profi terait à la fois à la zone et,

par eff et de structure, à la France entière puisque le

PIB de l’Ile-de-France représente un quart du PIB

français.

En mettant face à face ces deux « bonnes raisons

» de faire le Grand Paris, découvre que le projet de

Grand Paris doit être évalué à l’aune de ces deux

critères : permettra-t-il une plus grande fl uidité des

déplacements et un développement signifi catif de

l’emploi ?

Pour répondre à cette question, il faut éviter de

transformer le couplage croissance - mobilité en

causalité, surtout si c’est pour enfourcher l’idée très

répandue, mais fausse, selon laquelle tout surcroît de

mobilité serait une source de croissance économique.

Il est vrai que l’enrichissement s’est historiquement

traduit par une demande accrue de mobilité, plus

précisément par une demande de vitesse du fait d’une

valeur du temps qui augmente. Plus on est riche et

plus le temps devient rare. Mais la causalité ne doit

pas être renversée, les gains de vitesse ne créent pas

de la richesse. Les « eff ets économiques élargis » dont

parle Venables sont conditionnels. Ils supposent

qu’une main d’œuvre nouvelle soit associée à des

capacités de production inutilisées, ou nouvellement

installées. C’est l’investissement productif qui prime,

pas les infrastructures de transport. La séquence

basique de la croissance économique c’est quand

l’investissement dans les capacités de production

(capital et ressources humaines) autorise une

croissance accrue, laquelle conduit à une demande

de gains de temps. La séquence inverse n’existe pas

comme le montre l’exemple de l’Espagne qui traverse

une crise profonde alors même qu’elle dispose d’un

excellent réseau routier et autoroutier et du réseau

de lignes à grande vitesse le plus étendu d’Europe !

Le généreux dimensionnement de ses infrastructures

de transport n’est pas un substitut à un appareil de

production trop peu diversifi é et trop centré sur le

bâtiment.

Il faut donc se défi er du fétichisme des

infrastructures qui ne peuvent rien à elles seules.

Cela ne signifi e pas bien sûr que nous ne devons rien

faire en France et plus particulièrement en Île-de-

France. Mais il faut se demander si l’off re de vitesse

accrue d’un métro automatique de 130km est bien

la bonne réponse aux questions qui se posent pour

les prochaines décennies. Quels sont en eff et les

besoins de l’Ile-de-France en matière de mobilité ?

Est-ce à ces besoins que répondent le projet de métro

automatique et ses 72 gares ?

• Le premier besoin, ici comme ailleurs (que

l’on pense au réseau routier ou aux lignes ferroviaires

hors Île-de-France) est la maintenance du réseau

existant et au moins le maintien de la qualité de

service pour les déplacements actuels impliquant

33

Page 34: Seur a Habit Er 2013

34 sources Alphaville d'après SGP

les développements tendanciels de l'activité économique

Page 35: Seur a Habit Er 2013

Paris et la première couronne. Ce doit être la

première ambition, d’autant que le réseau actuel

connaît en plusieurs points des prolongements de

lignes de métro, souvent connectées à de nouvelles

lignes de tramway, qui vont mécaniquement

alourdir la pression des usagers en heure de pointe.

Notons que les améliorations off ertes par les lignes

de tramway ne sont pas fondées sur des gains

sensibles de vitesse, mais sur le confort, la fi abilité,

la fréquence, la régularité... Le long de ces nouvelles

lignes, la problématique clé n’est pas celle des gares,

mais celle de la densifi cation résidentielle le long de

la ligne. Avec ces projets, les responsables politiques

ont choisi d’off rir aux habitants une plus grande

accessibilité non pas fondée sur la vitesse mais sur

la densité et l’interconnexion des réseaux. C’est un

choix cohérent qui fait de la densifi cation l’objectif

central car c’est cette dernière qui donne du sens aux

investissements en transport collectif.

Le second besoin est l’amélioration des lignes

RER et de la connexion avec la seconde couronne . Là

encore des projets existent, qui visent à dé-saturer les

lignes A et B, et certaines gares centrales parisiennes,

par exemple en prolongeant la ligne EOLE vers la

Défense. Le projet de métro automatique du Grand

Paris doit pour partie aider à résoudre certains de

ces problèmes puisqu’il comporte quelques tronçons

radiaux comme le prolongement de la ligne 14 au

Nord (St Ouen) et au Sud (Orly). La mise en place

d’une liaison rapide entre les aéroports parisiens et

le centre de Paris est nécessaire et centrale dans le

projet. C’est elle qui a poussé en avant la question de

la vitesse dès les premières réfl exions sur le Grand

Paris. Mais faut-il généraliser aux déplacements de la

mobilité quotidienne cette appétence pour la vitesse

des voyageurs à revenus élevés qui descendent d’un

avion ?

Cela n’a de sens que si cette vitesse ne se traduit

pas par un simple allongement des portées de

déplacement qui n’aurait rien de durable, ni pour

l’environnement (émissions de C02, consommation

d’espace…), ni pour le budget des habitants, ni pour

celui de la collectivité. Ainsi, ce qui ne serait pas

durable serait un simple desserrement de la ville sous

forme de transfert de population interne à la région

parisienne, au bénéfi ce de la Seconde Couronne. Si

ce scénario-là devait se réaliser, alors le Grand Paris

serait en contradiction avec les eff orts entrepris

depuis de nombreuses années pour mieux irriguer et

donc pour densifi er la Première Couronne.

Ce qui est donc en jeu avec le Grand Paris,

comme le souligne l’accent mis sur les gares, est le

développement d’une urbanisation maîtrisée et

conforme aux projections démographiques françaises

des 30 ou 40 prochaines années. Or c’est là que le bât

blesse car la population totale de la France en 2050

ne sera pas très supérieure à celle d’aujourd’hui. Pour

que l’ensemble du réseau de métro automatique du

Grand Paris ait un sens, et pour que cela ait sur la

croissance économique les impacts élargis annoncés

par Venables, il faudrait envisager une migration

importante vers l’agglomération parisienne au

détriment de plusieurs autres régions françaises. Si

ce mouvement migratoire n’avait pas lieu, beaucoup

de gares périphériques du Grand-Paris resteraient

sous-utilisées.

enjeux et impl icat ions du développement des gares pour les entreprises

Le détour analytique a été un peu long mais il

était nécessaire pour que la problématique des gares

échappe aux simples vœux pieux associés à quelques

traits de crayon sur une carte. Les entreprises ne

doivent pas se laisser prendre aux charmes des grands

projets qui mélangent choix pertinents et occurrences

impossibles. Il faut faire le départ entre les deux en

se souvenant qu’il n’y a pas plus de baguette magique

avec les gares qu’avec les infrastructures de transport.

Le modèle qui fait rêver, celui des gares japonaises, ne

s’applique en Île-de-France que dans les situations

de forte densité. De même que ce n’est pas la mobilité

qui fait la croissance mais la croissance qui fait la

mobilité, de même c’est la densité qui détermine le

fonctionnement de la gare et non la gare qui suscite

de la densité. Sur la base de cet indispensable rappel,

on peut distinguer diff érentes catégories de gares

35

Page 36: Seur a Habit Er 2013

parisiennes pour lesquelles des questions cruciales se

posent. C’est sur cette base qu’il faut ensuite aborder

les gares du Grand Paris en particulier.

Parmi les gares parisiennes, une première

catégorie doit retenir notre attention, celle des gares

existantes et déjà très actives, voire saturées. Sans

le projet du Grand Paris et plus encore avec, ces

gares vont connaître dans les prochaines années des

problèmes récurrents de congestion, pour la simple

raison que la multiplication des améliorations et

extensions du réseau suscite immédiatement une

demande nouvelle. Dans sa partie la plus dense,

le réseau de transport en commun de la région

parisienne connaît ce que l’on a appelé le paradoxe de

Downs pour les réseaux routiers : toute off re nouvelle

et pertinente attire une demande nouvelle qui sature

en quelques années l’infrastructure. Ce sont donc ces

points de congestion qu’il faut traiter prioritairement.

Une seconde catégorie concerne les connexions

avec les trains à grande vitesse. Le développement

en cours des lignes nouvelles nous rappelle que

les phénomènes de saturation les plus aigus se

manifestent dans les gares (stockage des trains,

nombre de voies et de quais, espace pour les fl ux de

voyageurs). Là encore, avec ou sans le Grand Paris,

ces points de congestion sont prioritaires.

En ce qui concerne les aéroports, une meilleure

connexion avec Paris est nécessaire mais la question

qui se pose est bien de savoir si les fl ux qui y sont

associés peuvent être mêlés ou non aux déplacements

de la mobilité quotidienne. La réponse est peut-être

diff érente pour Orly et Roissy, mais la question doit

être traitée de façon à ce que les questions propres

à la desserte des aéroports soient confondues avec

celles de la mobilité quotidienne.

Une fois rappelées ces trois priorités générales, on

se rend compte que les 72 gares du projet du Grand

Paris ne peuvent être mises sur un pied d’égalité. Il

suffi t pour dessiller nos yeux de regarder quelle est

aujourd’hui la densité d’emplois et d’habitants à

proximité des dites gares.

Là où la densité est déjà forte, comme par

exemple au Sud de Paris, le long de l’ex projet Orbital,

il y a de vraies opportunités de développement,

lequel doit être pensé dans un espace déjà urbanisé.

Les entreprises et les ménages ont déjà et auront

plus encore intérêt à se localiser à proximité de ces

gares, mais ce sont des zones où la rente foncière est

déjà élevée. Ce que doivent faire les entreprises ici

est d’inciter la collectivité à récupérer d’une façon ou

d’une autre cette rente foncière. La substitution d’un

impôt foncier au versement transport serait une idée

à creuser.

Mais dès que le réseau du Grand Paris s’éloigne

de la Première Couronne, et que les gares sont

programmées dans des zones de faible densité, le

doute doit par principe l’emporter sur l’acte de foi.

S’il existe eff ectivement quelques gares qui pourront

être le lieu d’une véritable dynamique urbaine

accompagnée de densifi cation, elles se comptent

sans doute sur les doigts d’une seule main. Plutôt

que d’espérer être parmi ces « happy few »,», il est

nécessaire de s’interroger sur la masse de population

et d’emplois qui serait nécessaire pour assurer une

véritable urbanisation autour de chacune de ces

gares. On se rend alors très vite compte que chacun

espère attirer à lui des emplois et des habitants que

les autres convoitent également. Or, si le jeu n’est

pas à somme nulle, le nombre d’habitants va croître

en Île-de-France, il n’est pas pour autant à somme

démesurément positive.

conclusion

Face aux ambitions du Grand Paris, les

chefs d’entreprise doivent avoir la même prudence

que dans la gestion de leurs propres aff aires où ils

savent que le « wishful thinking » est risqué. Ils savent

bien qu’il ne suffi t pas d’un projet de transport pour

développer en Île-de-France une nouvelle « Silicon

Valley ». La prudence commande donc de distinguer

ce qui semble pertinent de ce qui l’est moins. Pour

y parvenir, les différentes composantes du projet

de Grand Paris doivent être regardées séparément,

d’autant que même si les financements étaient

36

Page 37: Seur a Habit Er 2013

Idées clés :

- il n'existe pas de lien mécanique entre

accroissement des vitesses de déplacements dans

le système et (dé)croissance économique

-le potentiel total de développement autour

des 72 gares du grand 8 surévalue largement la

dynamique de la démographie de l'île de France

- la stratégie du grand 8 doit permettre de

mieux relier les aéroports et les gares à grandes

vitesses aux territoires de la métropole, permettrre

de décongestionner les gares régionales saturées

- l'amélioration du système des déplacements

dans la mégapole passe par un décloisonnement

des fi nancements des infrastructures entre

nouveaux projets et optimisation des réseaux

existants tout mode confondus

assurés, il va de soi que la réalisation serait phasée. Il

y a fort à parier que pour ce qui concerne la mobilité

quotidienne des Franciliens, la priorité sera donnée

aux zones déjà densément peuplées. Les parties les

plus périphériques du projet sont tout sauf assurées

de voir le jour, d’autant que l’on espère les fi nancer

en récupérant une rente foncière qui risque de ne

pas être à la hauteur des espérances. Du point de

vue des payeurs de taxes que sont les entreprises, la

réponse logique au projet de Grand Paris se situe sur

le terrain de la fi scalité. Puisque ce projet s’appuie

beaucoup sur l’idée de capitalisation foncière, il faut

le prendre au mot et demander qu’il s’accompagne

d’une substitution d’une taxe foncière modernisée au

versement transport. Qui a parlé de compétitivité et

de coût du travail ?

37

Page 38: Seur a Habit Er 2013

sources Seura/ADEF38

délaissés d'infrastructure

/ autour de l'A86

au bord des fl euves

/ Nogent-sur-Marne

emprise ferroviaire

/ Vaires-sur-Marne

grands ensembles sur dalle

/ Bobigny

aires commerciales

/ Rosny II

la hauteur

/ le cours de Vincennes

1

2

3

4

5

6

1

2

3

4

5

6

terrains naturels ou

agricoles achetés pour une

utilisation agricole ou

forestière

0,5 à 2 € / m²

terrains naturels

ou agricoles achetés pour un

usage de bien-être ou de loisir

3 à 20 €/m²

terrains naturels ou

agricoles achetés pour être

aménagés et urbanisés

25 à 300 €/m²

nouveaux terrains à bâtir

300 à 800 €/m²

terrains urbains à

recycler (terrains bruts du

renouvellement urbain)

droits à bâtir en

renouvellement urbain

les 6 marchés fonciers d'après V.Renard/J.Comby

Page 39: Seur a Habit Er 2013

L'aménagement de nos moyens Vincent Renard

Les trois crises; logement, transport et foncières,

sont entremélées et interagissent, il n’aurait guère

de sens de vouloir les réduire « par silos » , pour

employer un mot à la mode. Un mot tout de même

pour dire que les prix fonciers et immobiliers sont

d’une certaine façon une cristallisation de cette crise

globale, la politique menée doit avoir non pour objet

premier mais pour conséquence observable une

modération de ces prix.

Par contre le parallèle avec la crise des

«subprime» aux USA trouve sa limite. La pratique

du «mortgage» et le comportement des banques, à

l’origine de cette crise, n'apparaît pas en France.

Le lien entre urbanisme et transport, Marc

Wiel a déjà beaucoup écrit là-dessus. Et en eff et

la focalisation sur le GPE biaise complètement

le raisonnement. Mais c’est aussi l’occasion

de remettre à sa place la fausse bonne idée du

fi nancement de l’infrastructure par les plus values

foncières qu’il génère. D’abord la fi gure juridique

n’existe pas en droit français. D’autre part elle

induirait un biais problématique par la corrélation

entre le choix du tracé et la maximisation de ce type

de fi nancement. On sait déjà qu’une grande partie

des 72 gares ne générerait guère d’urbanisation

ni de développement économique, ce mode de

fi nancement ne pourrait qu’accentuer les inégalités

entre les territoires. Ce point est en parfaite

cohérence avec le développement sur la contribution

de la formation de la rente immobilière à la crise.

Ce n’est pas en eff et la pénurie qui explique le prix

des logements. Ceci posé, l’hypothèse est faite d’un

marché stabilisé, on peut penser que les marchés

seront de plus en plus cycliques, induisant des

comportements de « market timing » dans lesquels

les acteurs jouent sur les phases des cycles, limitant

la portée du raisonnement.

Sur la mécanisme de production de la rente,

sur le plan microéconomique, pour produire beaucoup

de terrain bien placés et pas cher ( le paradis foncier),

on ne peut se contenter du raisonnement du

type «off re foncière», assouplissons la contrainte

réglementaire, l’off re augmentera et le prix baissera.

L’histoire et la comparaison internationale montre

l’échec récurrent de ces politiques . Particulièrement

dans le cas du Grand Paris, la seule stratégie effi cace

en la matière est de passer à une planifi cation

urbaine de type proactif volontariste, à commencer

par un schéma directeur qui remplisse les fonctions

qui lui sont assignées par les textes. Et, comme le

suggère Eric Charmes , d’étendre le raisonnement

au-delà de la francilienne…

La transparence des marchés serait ici

un prérequis évident, il reste beaucoup de travail à

faire, elle pourrait contribuer utilement à limiter

l’eff et cliquet dans la baisse des prix post bulle. Et

surtout une mutualisation des moyens au niveau

métropolitain, incluant la dimension foncière.

C’est plus largement aff aire de territorialisation des

politiques du logement.

Je ne peux que souscrire aux principes qui

sous tendent les propositions sur le fi nancement de

l’urbanisation. Cette question est en eff et cruciale,

les procédures traditionnelles d’aménagement sont

largement en panne. Ceci posé, à moins d’une

révolution fi scale induite par les lois à venir, lois

Lebranchu, loi Dufl ot II et surtout loi de fi nances

pour 2014, les propositions paraissent complexes à

mettre en œuvre, entre les opérateurs, les collectivités

de tous niveaux et les propriétaires fonciers. Et

mesurer que les aides puissent conduite à une hausse

des prix récupérée par les propriétaires.

Au niveau du grand Paris, il faut un

«schéma d’aménagement de nos moyens » et non

l’inverse.

39

Page 40: Seur a Habit Er 2013
Page 41: Seur a Habit Er 2013

sources David Mangin/Seura

fonciers (in)visibles, fonciers (in)accessibles : mythes et réalitésSi la question du logement se jouait au-delà de la Francilienne?Si la question du logement se jouait au-delà de la Francilienne?Eric Charmes Eric Charmes ........41........41L’espace agricole : réserve foncière L’espace agricole : réserve foncière versus réserve alimentaire ? réserve alimentaire ?Marion Talagrand + Philippe Coignet .Marion Talagrand + Philippe Coignet ........55.......55Les centres commerciaux, "locomotives" ou freins du renouvellement urbain?Les centres commerciaux, "locomotives" ou freins du renouvellement urbain?Jérôme Legrelle + Nicolas Douce .Jérôme Legrelle + Nicolas Douce ........75.......75Les risques: effets domino et effets de levierLes risques: effets domino et effets de levierMagali Reghezza-Zitt Magali Reghezza-Zitt ........87........87

Page 42: Seur a Habit Er 2013

ponctuée des villes nouvelles, des bureaux, Universités,

La Francilienne est

la Nouvelle Frontière

et d'hôtels et des pôles touristiques: aéroport de Roissy, logistiques, aérodromes ,Disney…

«  prise en écharpe  » des forêts métropolitaines (Forêt d’Armainvilliers, de Sénart, de Saint Germain, de Montmorency)

sources Seura42

Page 43: Seur a Habit Er 2013

Si la question du logement se jouait au-delà de la Francilienne?Eric Charmes

Les territoires périurbains sont l’une des clés

de la question du logement en Ile-de-France. Ils

ne représentent certes que 15 % de la population

de l’aire urbaine de Paris (et encore une partie de

ces territoires incluent des villes telles que Meaux

ou Rambouillet), mais ils couvrent une large part

du territoire avec 1385 communes, soit 77 % des

communes de l’aire urbaine de Paris (aire urbaine qui

aujourd’hui dépasse largement les limites de l’Ile-

de-France, sauf en Seine-et-Marne). Ces territoires

sont très faiblement urbanisés et constituent donc

une importante réserve pour des extensions urbaines.

Ces réserves sont exploitées, mais on construit

actuellement beaucoup là où il ne faudrait pas le

faire, c’est-à-dire dans les secteurs les plus ruraux et

les plus éloignés du centre de Paris, et on construit

en revanche peu, voire très peu, dans les secteurs les

mieux situés, où la demande est la plus forte et où

l’accessibilité est la meilleure.

Pour surmonter ce problème, on verra qu’il

convient de réviser les discours sur le périurbain.

Celui-ci est non sans raison considéré comme le

lieu de l’étalement urbain et il apparaît porteur de

pathologies qui menacent la durabilité des villes.

Ces menaces sont réelles, mais elles sont quelque

peu surestimées : tout bien considéré, le périurbain

ne pose pas particulièrement plus de problèmes que

les autres territoires qui composent les villes. Même

l’artifi cialisation est un problème exagéré, au moins

sur le plan quantitatif. L’enjeu est moins de réduire

quantitativement l’artifi cialisation que d’organiser

qualitativement l’urbanisation. On peut continuer à

construire des maisons individuelles, si celles-ci sont

à moins de 10 minutes en vélo de gares. Simplement,

cela suppose une planifi cation et une coordination

des projets d’aménagement que l’Ile-de-France, et à

fortiori l’aire urbaine de Paris, n’ont pas les moyens de

mettre en œuvre. Une métropole peut diffi cilement

se planifi er et s’aménager avec une juxtaposition de

centaines de règlements d’urbanisme qui se décident

dans des conseils municipaux élus par quelques

centaines d’habitants. De fait, 85 % des communes

de la couronne périurbaine de Paris comptent moins

de 2000 habitants. On pourra faire tous les plans

et élaborer tous les projets que l’on voudra pour le

Grand Paris, rien de signifi catif ne se fera sans traiter

cette question.

la périurbanisation en Ile-de-France : une source de production de logements qui a fortement perdu de sa vigueur sans que le renouvellement urbain ne prenne le relais

On peut distinguer deux fi lières de production

de logements : l’une, que l’on peut dire intensive,

est dominée par l’habitat collectif et la densifi cation

d’espaces déjà urbanisés ; l’autre, que l’on peut dire

extensive, est dominée par l’habitat individuel et par

l’artifi cialisation d’espaces non urbanisés. La fi lière

intensive prédomine dans les pôles urbains, tandis

que la fi lière extensive domine dans les couronnes

périurbaines. Or, dans ces dernières, en Ile-de-

Idées clés :

- 80 % de la baisse du rythme de construction

neuve entre le début des années 1980 et le milieu

des années 2000 s’explique par la baisse en grande

couronne (dont le territoire est pour l’essentiel

périurbain)

- un renouvellement urbain qui ne prend pas

le relais

43

Page 44: Seur a Habit Er 2013

44

Page 45: Seur a Habit Er 2013

France, la production de logements s’est largement

réduite (du moins si on les considère à périmètre

constant). Ainsi, alors qu’entre 1982 et 1990, la grande

couronne (qui représente approximativement les

territoires périurbains) participait pour trois-quarts à

la progression du parc de résidences principales, elle

ne contribue plus que pour la moitié entre 1999 et

2006 (voir tableau ci-contre).

Cette évolution du parc est largement liée à la

baisse de la construction de logements neufs. Entre

1982 et 1990, la production annuelle en grande

couronne est passée de 31 600 à 19 100 logements,

soit une baisse de 12 500 logements. Dans le même

temps, en Ile-de-France, on a construit en moyenne

54 500 logements par an entre 1982 et 1990, contre

38 600 entre 1999 et 2006. Ainsi, près de 80 % de

la baisse du nombre de logements construits vient

de la grande couronne ! Et tout laisse à penser que

la baisse de la production de logements en grande

couronne n’est pas terminée.

Même si ces chiff res ne permettent pas d’aller

suffi samment dans le détail, ils laissent penser que

la fi lière de production de logement par extension

urbaine (qui domine en grande couronne) s’est

largement réduite quand, en parallèle, la fi lière de

production de logement par renouvellement urbain

(dominante en première couronne et plus encore à

Paris) n’a pas pris le relais. Bien au contraire, si on

accepte de prendre le nombre de constructions neuves

à Paris et en première couronne comme indicateur du

renouvellement urbain, sa dynamique s’est aff aiblie :

ainsi, à Paris et en première couronne, la production

annuelle est passée de 22 900 logements entre 1982

et 1990 à 19 500 entre 1999 et 2006.

L’enjeu des règlements d’urbanisme et la responsabilité des communes

Quelles sont les causes de cette réduction de la

contribution de la grande couronne ? Certainement

pas la rareté du foncier. Les communes périurbaines

de l’Ile-de-France, localisées pour l’essentiel en

grande couronne, sont très peu urbanisées. Dans 85

% des cas, ces communes sont rurales au sens où leur

agglomération principale compte moins de 2000

habitants. Ces communes off rent de larges espaces

non bâtis et beaucoup sont extrêmement bien

placées. Autour de la francilienne, de larges portions

du territoire sont dominées par l’agriculture (voir

photo ci-dessous).

Pourquoi ces espaces ne sont-ils pas bâtis,

malgré une pression foncière et immobilière intense

? S’agit-il de rétention foncière comme on le dit

souvent ? Dans les discours actuels sur la nécessité

de libérer du foncier1 en eff et, l’acteur clé est souvent

présenté comme le propriétaire spéculateur, qui

attend la meilleure opportunité pour vendre et qui

ce faisant fait obstacle à la circulation marchande

des biens fonciers. Ces comportements existent

incontestablement, mais on peut faire l’hypothèse

qu’en Ile-de-France, la priorité n’est pas de libérer

le foncier des griff es des propriétaires. Il est d’abord

à libérer du carcan réglementaire dans lequel il est

enserré par des citadins désireux de préserver leur

cadre de vie.

Dans les territoires périurbains, et

particulièrement ceux de l’Ile-de-France, les

1. Charmes E., 2007, « Le Malthusianisme foncier », Etudes foncières, n° 125, janvier-février, pp. 12-16

Wiel M. (Coord.), 2002, Les Raisons institutionnelles de la périurbanisation, Paris, rapport pour la DRAST et le PREDIT

Idées clés :

- les territoires périurbains sont avant tout

composés de communes très résidentielles.

85 % des communes périurbaines d’Ile-de-

France comptent moins de 2000 habitants. Ces

communes, soucieuses de préserver leur cadre de

vie, ont des règlements très malthusiens

- pour redynamiser la production de

logement en grande couronne, il faut questionner

ce malthusianisme

45

Page 46: Seur a Habit Er 2013

Taux de croissance du nombre de logements par commune dans les Yvelines en 1999 et en 2010.

La baisse générale du taux est très nette dans ce département devenu globalement très malthusien. La croissance

ne reste signifi cative que sur le territoire de l’OIN de Saclay et au nord. Il est à noter qu’à l’échelle de la France, les

productions de logements en 1999 et en 2010 ont été très proches (cartographie : Eric Charmes, données INSEE et IAU

Ile-de-France, cartes réalisées avec Cartes & Données, Arctique)

46

Page 47: Seur a Habit Er 2013

politiques sont dominées par le malthusianisme

foncier. Parmi les nombreuses communes de moins

de 2000 habitants, deux profi ls se dessinent : les

communes éloignées, les plus rurales, qui s’ouvrent

volontiers à l’urbanisation, pour redynamiser l’école

ou pour bénéfi cier de plus-values foncière (les enjeux

sont couramment de l’ordre du million d’euros

par ha pour les propriétaires concernés). Mais ces

ouvertures à l’urbanisation se font précisément là où

il est le moins pertinent de le faire, loin du cœur de la

métropole. A tel point qu’aujourd’hui, ces ouvertures

se font pour l’essentiel hors des limites de l’Ile-

de-France. Seul le front est de la périurbanisation,

encore inclus dans les limites de la Seine-et-Marne,

fait exception.

Les petites communes périurbaines les plus

proches de l’agglomération de Paris tendent pour

leur part à se fermer à l’urbanisation. Ces communes

deviennent de véritables clubs résidentiels avec des

habitants avant tout soucieux de préserver leur cadre

de vie, cadre de vie dont les qualités principales sont

la faible densité et l’abondance d’espaces non bâtis2.

Ces demandes se traduisent par des règlements

d’urbanisme souvent très malthusiens. Ainsi,

beaucoup de communes périurbaines bien placées

dans la région Ile-de-France perdent des habitants

et demeurent très peu urbanisées. Si le marché jouait

librement, elles se densifi eraient et seraient quasi

intégralement urbanisées. Les éventuelles pratiques

de rétention foncière n’auraient été que des obstacles

temporaires.

Il apparaît donc que l’un des enjeux clés pour

revitaliser la production de logements en grande

couronne est de mettre en question le malthusianisme

foncier inscrit dans les PLU de nombreuses

communes périurbaines. Il ne s’agit évidemment

pas ici de plaider en faveur d’une déréglementation

urbaine, comme certains libéraux le font en mettant

en avant le modèle de Houston. Il s’agit plutôt de

réfl échir aux conditions d’élaboration des règlements

et à leurs enjeux et à la confrontation des intérêts

locaux et métropolitains.

2. Charmes E., 2011, La ville émiettée. Essai sur la clubbisation de la vie urbaine, Paris, PUF.

un malthusianisme local qui trouve des relais à l’échelle métropolitaine et qui entretient l'étalement urbain

Les règlements d’urbanisme sont pour

l’essentiel élaborés à un niveau local en fonction

d’enjeux locaux. Il faudrait donc changer l’échelle

à laquelle sont déterminés les PLU. Ceci étant, un

tel changement serait loin de suffi re. C’est que les

politiques malthusiennes se chevillent bien aux

impératifs associés à la ville durable et à la ville

compacte, portés par l’Etat et les gouvernements

métropolitains. Beaucoup de communes périurbaines

reprennent à leur compte ces impératifs et légitiment

la limitation de leur croissance par la nécessité de

lutter contre l’étalement urbain. D’une manière

générale, la société valorise de plus en plus les maires

« protecteurs », respectueux de l’existant et plus

particulièrement des espaces naturels, au détriment

des maires « bâtisseurs », engagés dans une logique

progressiste, favorisant le développement de leur ville

par le logement et l’emploi. Refl et de cette situation,

la question qui préoccupe aujourd’hui le plus la

recherche urbaine dans les pays les plus riches est

moins la « growth machine » que les « no-growth

coalition ». Et ici, l’égoïsme NIMBY est loin d’être

seul en cause. Ainsi, les discours environnementaux

et plus particulièrement ceux sur l’étalement urbain

favorisent une restriction de la croissance.

Idées clés :

- un repli des « maires bâtisseurs » au profi t

des « maires protecteurs »

- des malthusianismes qui favorisent

l’étalement des aires urbaines

- 40 % des communes de l’aire urbaine de

Paris (en 2010) se trouvent hors de l’Ile-de-

France

47

Page 48: Seur a Habit Er 2013

sources google earth

Typologie des communes selon l’IAURIF.

Les communes « rurales », au sens statistiques, sont en fait presque toutes périurbaines en 2010, du fait d'un espace aggloméré

principal de moins de 2000 habitants.

Des espaces extrêmement bien placés mais peu urbanisés. En Seine-et-Marne, près du terminus nord du RER B, Mitry-Claye

(au nord-ouest sur le cliché).

48

Page 49: Seur a Habit Er 2013

Pour autant, la restriction de la croissance se fait

de manière désordonnée, étant mise en œuvre à des

échelles très locales en fonction d’intérêts très locaux.

Preuve de ce manque de coordination globale, le

blocage des constructions de logement à proximité

des agglomérations est loin de limiter l’étalement

urbain3. Au contraire, il le renforce en repoussant

plus loin le front de l’urbanisation. Les ménages qui

cherchent à acquérir une maison individuelle neuve

restent nombreux ; ne trouvant pas de logement dans

les premières couronnes périurbaines, ils prospectent

plus loin. Ils rencontrent alors des communes rurales

souvent très intéressées à les accueillir et à ouvrir pour

ce faire des terrains agricoles à l’urbanisation. Les

accédants modestes à la propriété vont ainsi chercher

à plus de 100 km de Paris la possibilité d’acquérir un

logement (généralement une maison) qui répond à

leur projet (voir à ce sujet sur le site de France 5, le

« webdocu » de Robert Genoud, « La vie rêvée des

pavillons » tourné à Bray-sur-Seine).

En tout état de cause, comme le montre la fi gure

ci-après , l’aire urbaine de Paris s’est signifi cativement

étendue entre 1999 et 2010. Celle-ci est passée de

1584 à 1796 communes.

cesser de se focaliser sur la lutte contre l’étalement urbain et passer du quantitatif au qualitatif

Dans le périurbain comme ailleurs, la production

de logement peut se faire par densifi cation. On

peut ainsi promouvoir la transformation de certains

quartiers pavillonnaires en quartiers d’habitat

collectif par des procédures de type ZAC. On peut

également promouvoir leur densifi cation sans mettre

en cause leur caractère pavillonnaire (par exemple par

les démarches de type BIMBY).

Mais l’un des mécanismes centraux de la

production de logements périurbains réside dans

l’ouverture de terrains nouveaux à l’urbanisation, le

3. Floch J-M. et Lévy D., 2011, « Le nouveau zonage en aires urbaines de 2010. Poursuite de la périurbanisation et croissance des grandes aires urbaines », Insee Première, n° 1375, octobre

plus souvent à destination de quartiers pavillonnaires.

Ce mécanisme se heurte à diverses injonctions qui

ont envahi le débat public et les discours politiques

sur la ville et l’aménagement et qui reposent sur

l’idée que la maison individuelle et la ville peu dense

sont les ennemis de la ville durable. Ces discours

sont largement discutables voire invalides, qu’il

s’agisse de consommation d’énergie dans le bâtiment

(les économies se font d’abord dans les techniques

constructives et l’habitat individuel est très plastique

et adaptable) ou de l’impact de la mobilité (ce que la

densité fait gagner dans la mobilité quotidienne, elle

peut le reperdre dans la mobilité de loisir comme l’a

confi rmé la thèse récente d’Hélène Nessi).

Concernant l’artifi cialisation des sols, des chiff res

alarmants circulent. Un département disparaissait au

début des années 2000 tous les 10 ans. Actuellement,

le rythme serait d’un département tous les 7 ans4. Ces

chiff res sont largement trompeurs car ils invitent à

extrapoler des dynamiques qui ne dureront pas. Si

on prend le ratio de mètres carrés artifi cialisés par

habitant du périurbain et qu’on l’applique à la France

entière, on augmente la surface artifi cialisée de

l’ordre d’un point seulement, en passant de 9 % à 10

% à l’échelle nationale. Ce chiff re peut surprendre,

mais en appliquant ce ratio, on ne périurbanise pas

seulement la France urbaine, mais aussi la France

4. Agreste, 2009, « Des territoires de plus en plus artificialisés. La maison individuelle grignote les espaces naturel », Agreste-primeur, n° 219, janvier

Idées clés :

- les politiques se focalisent à tort sur

des objectifs de réduction quantitative de

l’artifi cialisation

- il faut organiser les ouvertures à

l’urbanisation plutôt qu’il ne faut les interdire.

- dans ce cadre, il faut s’interroger sur

l’émiettement plutôt que sur l’étalement.

- il faut aussi s’interroger sur l’éloignement

des accédants modestes à la propriété

49

Page 50: Seur a Habit Er 2013

L'accroissement des aires et pôles urbains de Paris au sens de l'INSEE.

50

Page 51: Seur a Habit Er 2013

Idées clés :

- sortir d’une appréhension du périurbain

comme pathologie. L’enjeu est d’aménager le

périurbain

- cet aménagement ne passe pas par la seule

promotion de la densité, mais par l’organisation

planifi ée du territoire sur une longue durée, avec

une articulation entre urbanisation et réseaux de

transports collectifs

- mettre en place des obligations de faire pour

contrer le malthusianisme des communes

rurale. Or si la périurbanisation étale les villes, elle

densifi e le rural…

En Ile-de-France, d’après les données Teruti-

Lucas, le taux d’artifi cialisation est de l’ordre de 21 %

avec environ 2500 km² de sols artifi cialisés (données

2010). Prenons un scénario extrême, que beaucoup

jugeraient catastrophique, en supposant que,

pendant les 20 prochaines années, 30 000 maisons

individuelles soient construites chaque année sur

des parcelles de 500 m². Si on multipliait par deux

les surfaces ainsi urbanisées pour tenir compte des

infrastructures, des commerces, des équipements

(espaces verts compris) et des lieux d’emploi, on

obtiendrait une augmentation certes importante de

la surface artifi cialisée (de l’ordre d’un quart), mais

cela conduirait à un taux d’artifi cialisation de l’ordre

de 26 %. Un taux qui resterait très inférieur au taux

actuel d’artifi cialisation des Pays-Bas dans leur entier.

Celui-ci atteint en eff et 37 % .

Il ne s’agit pas ici de prendre position en faveur

d’une artifi cialisation massive. Il s’agit avant tout de

souligner qu’on ne saurait faire de la limitation de

l’artifi cialisation un objectif absolu et non négociable

des politiques d’aménagement. En réalité, le

problème actuel n’est pas tant le contrôle quantitatif

de l’ouverture de terres non bâties à l’urbanisation,

que la maîtrise qualitative de la localisation des

nouvelles ouvertures à l’urbanisation. Actuellement,

comme on l’a vu celles-ci se font à très grande

distance de Paris (en partie en conséquence des

restrictions aux ouvertures à l’urbanisation près du

cœur de la métropole). Cela produit un éloignement

et un émiettement néfastes.

Pour les accédants modestes à la propriété,

l’éloignement veut dire étirement des trajets. Il accroît

les distances parcourues quotidiennement et donc

les consommations d’énergie dans les transports.

L’enjeu n’est pas seulement environnemental, il est

aussi social. Les accédants à la propriété du lointain

périurbain ont typiquement des revenus mensuels

de l’ordre de 2500 € / mois. Or un éloignement de

seulement 10 km pour deux actifs peut représenter

un surcoût de l’ordre de 200 € par mois.5

Par ailleurs, l’urbanisation est très émiettée :

comme indiqué plus haut, 85 % des communes

périurbaines ont moins de 2000 habitants et leur

territoire est largement dominé par l’agriculture ou

par les espaces naturels. Cet émiettement permet aux

périurbains de jouir d’un cadre de vie rural mais, à

surface artifi cialisée égale, il est particulièrement

problématique. En eff et, il démultiplie les contacts

entre l’agriculture et les activités urbaines, et il

favorise la rupture des corridors écologiques.

Il faut donc reprendre le débat sur l’artifi cialisation

et la volonté de réduire cette dernière sur des

bases seulement quantitatives. Le problème est

moins l’artifi cialisation des sols que l’organisation

de la croissance urbaine. Où et comment se fait

l’urbanisation ?

5. Charmes E., 2010, « Faut-il lutter contre l'étalement urbain ? », entretien avec Stéphane Fuzesséry et Nathalie Roseau, Laviedesidees.fr

51

Page 52: Seur a Habit Er 2013

aménager le périurbain plutôt que d’en faire une pathologie des métropoles.

Les discours actuels sur l’étalement urbain

tendent à faire du périurbain un état pathologique

des viles. L’objectif serait la résorption de cette

pathologie et le retour à un état normal où une ville

dense et compacte ferait face à un espace à la ruralité

retrouvée. Pour des raisons développées ailleurs par

nous et d’autres (Martin Vanier notamment), cet

objectif a peu de chances d’être atteint. Le périurbain

est un état durable d’une large part du territoire

français et notamment des espaces qui entourent les

métropoles.

Dans ce cadre, l’enjeu est de sortir du discours

appréhendant le périurbain comme une pathologie.

Il faut en faire un espace à aménager. Nous pouvons

ici rependre une des conclusions tirées par Martin

Vanier, Romain Lajarge et Stéphane Cordobès d’un

travail prospectif sur le périurbain : « Le problème

posé par la périurbanisation n’est pas tant l’étalement

urbain et le caractère insoutenable de la « ville » qu’il

fait advenir ; c’est l’absence, ou la grande faiblesse, du

projet territorial qui la déploie et la gouverne ici et là,

ou, dit autrement, la défaite du politique qu’elle sous-

entend » (2010, p. 22)6.

Cela ne veut pas dire qu’il faut considérer le

périurbain comme un état abouti de l’organisation

des territoires, erreur que font certains thuriféraires

actuels du périurbain, comme emportés par leur

élan. Les territoires périurbains soulèvent de

nombreux problèmes, à commencer par celui de leur

émiettement qui est à la fois leur principal attrait

pour leurs habitants et l’une des principales sources

de leurs diffi cultés.

Dans ce cadre, l’enjeu est d’aménager les couronnes

périurbaines en favorisant leur organisation autour :

1 - de centralités majeures (villes nouvelles, villes

6. Cordobès S, Lajarge R. et Vanier M, 2010, « Vers des périurbains assumés. Quelques pistes stratégiques pour de nouvelles régulations de la question périurbaine », Territoires 2040, n°2, pp. 21-32.

Vanier M. 2011, « Le périurbain comme projet », metropolitiques.net

de plusieurs dizaines de milliers d’habitants intégrées

dans l’orbite de Paris, telles que Rambouillet, Meaux,

etc. ).

2 - de lignes structurantes de transports

ferroviaires en suivant une logique de corridor de

développement, mais en sortant de la logique des

lignes radiales, (tout en sachant que, comme le

rappelle utilement Yves Crozet dans ce volume, tout

ne viendra pas des gares et que le transport ferroviaire

n’est qu’un levier qui prend sens dans le cadre d’un

projet d’aménagement).

3 - des bourgs et petites villes qui parsèment

le périurbain (dès 3000 habitants, un bourg peut

constituer une centralité qui structure un bassin de

vie local).

Le travail sur cette structuration du territoire est

au moins aussi important que la seule recherche de

la densité ou que la lutte contre l’étalement urbain.

Ainsi, des recherches en cours d’Antoine Brès,

prolongées avec Xavier Desjardins montrent bien

que, dans le périurbain, l’usage des transports en

commun n’est pas seulement aff aire de densité, mais

aussi d’organisation du territoire7. La comparaison

de l’Allemagne et de la France le prouve : la

planifi cation sur une longue durée de l’articulation

de l’urbanisation, même à faible densité, et des

réseaux de transports collectifs fait la diff érence.

Autrement dit, on peut continuer à construire des

maisons individuelles si celles-ci sont à moins de

10 minutes en vélo de gares ferroviaires ; si les voies

qui conduisent aux gares sont équipées pour des

déplacements à pied et à vélo ; et si les équipements

(à commencer par les écoles) sont concentrés autour

des gares.

En dehors de cela, on ferait beaucoup en rendant

cyclables les départementales qui relient les villages

périurbains aux bourgs où se trouvent les collèges8.

7. Desjardins X., 2007, Gouverner la ville diff use. La planifi cation territoriale à l ’épreuve, Th èse de doctorat sous la direction de Francis Beaucire, Université Paris I.

Bres A., Mariolle B. et Delaville D., 2011, Les fi gures d'une éco-mobilité périur-baine entre intermodalité obligée et densité dispersée. Le Carré Picard au fi ltre de l'accessibilité durable, rapport pour le PUCA.8. Le Gal Y, 2010, « Promouvoir la marche et le vélo grâce à un plan de modération

52

Page 53: Seur a Habit Er 2013

D’une manière générale, et contrairement aux

idées reçues, les périurbains eff ectuent beaucoup

de déplacements sur des distances courtes et ces

déplacements pourraient être eff ectués en vélo ou

à pied si les voies de circulation n’étaient pas quasi

exclusivement aménagées selon une logique routière.

On ferait également beaucoup en développant des

modes de transports collectifs adaptés à la faible

densité (avec le covoiturage qui connaît actuellement

une forte croissance, ou avec le transport à la demande

dont l’intérêt a été prouvé dans de nombreux

contextes).

redistribuer les pouvoirs d’urbanisme à l’échelle des aires urbaines : une nouvelle frontière pour les coopérations intercommunales

Plus encore que dans les agglomérations, le

gouvernement des espaces périurbains est fragmenté.

L’aire urbaine de Paris compte 1 385 communes

périurbaines sur un total de 1 796 (1 281 pour la

région Ile-de-France). Si certaines sont parfois

des villes importantes (Meaux, Rambouillet,

Fontainebleau, etc.), 85 % d’entre elles comptent

comme on l’a déjà dit moins de 2 000 habitants. Et

c’est à cette échelle que se décide pour l’essentiel les

contenus des PLU.

Dans le périurbain plus qu’ailleurs, un changement

d’échelle pour la planifi cation et l’aménagement

s’impose. Comment une région métropolitaine de

premier plan peut-elle être aménagée et planifi ée

dans un contexte où les pouvoirs d’urbanisme sont

entre les mains de près de 1 800 maires (1281

pour l’Ile-de-France) qui tirent leur légitimité d’un

corps électoral composé en moyenne de quelques

centaines d’électeurs ? La réponse à cette question

est une des clés essentielle du problème que pose

aujourd’hui le Grand Paris, pour ne pas dire la clé

essentielle. Comme on vient de le voir avec le cas de

l’Allemagne, l’enjeu clé est la coordination entre les

transports et l’urbanisation, autant que la lutte contre

des vitesses », Ville Rail et Transports, n° 510, décembre.

l’artifi cialisation ou la densifi cation. Mais comment

organiser cette coordination quand l’urbanisme est

pour l’essentiel régulé à l’échelle villageoise, qui plus

est dans les territoires à fort potentiel ?

Une solution, vers laquelle la loi sur le Grand Paris

s’est orientée, est le recours à l’autorité de l’Etat, au

travers notamment des Opérations d’intérêt national.

Mais cette perspective a de fortes limites, dans un

contexte où la foi en l’intérêt général s’est largement

érodée, où la démocratie locale a le vent en poupe

et où l’Etat a peu de moyens fi nanciers (et même

humains) mobilisables. L’enjeu est plutôt de faire

coopérer les municipalités dans un contexte où il n’est

pas question de remettre en cause les prérogatives des

élus locaux à brève échéance (ceci d’autant moins que

ces prérogatives, dans le périurbain, répondent à des

attentes fortes et sont cohérentes avec les discours sur

la démocratie de proximité).

Idées clés :

- l’Ile-de-France compte 1281 communes qui

chacune contrôle règlementairement les usages

de leur territoire. Un changement d’échelle

s’impose, dans le périurbain plus qu’ailleurs.

- des communautés de communes dont le rôle

peut être signifi catif pour organiser les polarités

élémentaires du périurbain

- reconnaître au périurbain un droit à exister

et une identité propre

- construire des espaces de coopération

politique entre les pôles urbains et les communes

périurbaines

- l’échelle de la région Ile-de-France est

particulièrement pertinente, mais il faut garder

à l’esprit les limites de la région sont largement

dépassées par la périurbanisation.

53

Page 54: Seur a Habit Er 2013

Sur ce plan, on peut considérer avec intérêt les

intercommunalités qui se sont développées dans

le périurbain et notamment les communautés de

commune. La carte intercommunale est certes

particulièrement complexe en Ile-de-France mais

dans le périurbain on observe une structuration

autour d’unités d’une dizaine de communes (en

Seine-et-Marne, en 2012, les EPCI comprenait

11 communes en moyenne). Or, à cette échelle, les

territoires périurbains peuvent commencer à se

structurer avec une hiérarchisation plus accentuée

de l’urbanisation, polarisée plus nettement par des

bourgs et petites villes. En tout état de cause, l’échelle

des intercommunalités périurbaines correspond

à celle des communes allemandes, du moins dans

le territoire étudié par Antoine Brès et Xavier

Desjardins.

Ceci étant, comme en Allemagne, les projets

périurbains devront être encadrés aux échelles

métropolitaines, par exemple pour organiser

l’articulation entre réseaux de transports et

urbanisation. C’est sans doute sur ce terrain qu’il

sera le plus diffi cile d’avancer sans imposer aux

communes et aux intercommunalités l’autorité d’un

échelon supérieur.

Il est diffi cile ici de faire des propositions

concrètes, car l’enjeu est avant tout celui d’une prise

de conscience politique. En toute hypothèse, il ne

sera pas possible de dialoguer avec les territoires

périurbains et de construire des projets avec eux sans

leur avoir reconnu une légitimité à être et sans être

pour cela sorti des discours faisant du périurbain un

espace pathologique. Cela implique notamment de

reconnaître une identité spécifi que au périurbain

comme tiers espace entre ville et nature, puis, sur

cette base, de développer des projets d’aménagement

propres au périurbain (voir Vanier).

Ensuite, il faudra construire des espaces de débat

métropolitain incluant les communes périurbaines.

La région Ile-de-France semble ici une échelle

pertinente, mais il faut noter que l’aire urbaine de

Paris déborde aujourd’hui très largement de l’Ile-de-

France, puisque 40 % des communes de cette aire ne

font pas partie de la région. C’est ainsi hors de l’Ile-

de-France que se joue une part importante de l’avenir

de la métropole parisienne. D’une manière ou d’autre

donc, l’Etat devra rester dans le jeu.

54

Page 55: Seur a Habit Er 2013

55

Page 56: Seur a Habit Er 2013

Les nappes de 5 à 10 hectares

ressemblent parfois à des

secteurs.

l'enclavement progressif du territoire par pièces de 5 à 10 ha : l'eff et arlequin

Formes introverties / nature

L’eff et de l’Arlequin : le mitage

par nappes de 5 à 10 ha

provoque l’enclavement des

pièces agricoles (3e couronne)

Le territoire devient une

addition d’enclaves de 5 à 10

hectares.

sources David Mangin/Seura56

Page 57: Seur a Habit Er 2013

L’espace agricole :réserves foncières versus réserves alimentaires ?Marion Talagrand + Philippe Coignet

L’accroissement de 4,4 millions d’habitants en

Ile-de-France entre 1954 et 2011 (pour atteindre

11,7 millions) s’est traduit à la fois par la densifi cation

des pôles urbains existants et par la mutation

progressive d’espaces agricoles en périphérie des villes

en quartiers de logements et d’activités complétés

par un réseau d’infrastructures sans précédent. La

relation ville-agriculture qui nous intéresse ici peut

être ainsi mesurée en trois temps :

- la conquête, de l’urbain sur l’agricole

- l'acceptation, ou la tolérance, entre les deux

systèmes

- la réciprocité, chacun a besoin de l’autre

pour exister et vivre mieux.

Actuellement, la disparation d’hectares se fait

à un rythme un peu moins soutenu (1300 ha/an)

qu’entre 1950 et 2000 (2000 ha/an), les 578 000 ha de

terres en cultures restantes sont soumis à d’intenses

pressions, grâce à des mesures de protections et

d’intérêts de la part de plusieurs acteurs de l’échelle

européenne à celles de l’agriculteur et de l’habitant.

Dans le cadre de l’Atelier du Grand Paris, trois

questions majeures doivent être posées au regard de

la problématique du logement en Ile-de-France :

1. Peut-on appréhender la question du

foncier agricole à l’échelle du Grand Paris ?

2. L’agriculture est-elle un "ingrédient" du

projet métropolitain ?

3. En combinant ces deux questions : quel

«dessein agricole métropolitain » ?

57

Page 58: Seur a Habit Er 2013

sources IAURIF58

Page 59: Seur a Habit Er 2013

Nous essaierons de répondre à ces questions à

travers un portrait de l’agriculture francilienne et

des tendances majeures aujourd’hui, puis en étudiant

4 cas particuliers qui démontrent des dynamiques

émergentes de « reterritorialisation » de l’agriculture.

Enfi n la troisième partie propose quelques pistes de

réfl exion méthodologique pour appréhender à la fois

globalement et localement la problématique de la

relation agriculture – habitat.

Dans cette première partie, nous dressons un état

des lieux synthétique de la situation agricole dans

l’espace métropolitain francilien :

- Quelles sont les caractéristiques de

l’agriculture francilienne (en termes d’inscription

spatiale, de typologies d’exploitations, de produits et

de fi lières) ?

- Quelles sont les relations qui existent

entre la ville et l’agriculture (relations spatiales,

fonctionnelles et sociales) et comment elles ont

évolué ?

- Comment se caractérise plus précisément le

lien entre foncier et agriculture ?

paysages et fi lières

Si l’agriculture de l’Ile-de-France s’organise

traditionnellement en fonction des grandes unités

géographiques que sont les plateaux, vallée et

coteaux, il est curieux de voir que l’Atlas agricole

et rural édité par l’IAU et la DRIAF surimpose à

cette cartographie une typologie en fonction de la

distance avec l’espace urbain aggloméré. Il distingue

ainsi les paysages agricoles périurbains1 situés dans

une couronne entre continuum urbain et continuum

agricole. Cette ceinture correspond peu ou prou

à la ceinture verte du SDRIF. La SAFER estime

qu’environ 40% des surfaces agricoles se situent dans

ces zones. C’est l’espace le plus « actif » pour ce qui

concerne les mutations foncières. La majeure partie

du foncier agricole y est consommée et l’on sait que le

total de la surface agricole urbanisée en Ile-de-France

entre 1982 et 1999 s’élève à 2350 ha annuellement.

En 2001, le prix moyen des terres agricoles libres à la

1. Atlas rural et agricole de l’île de France, DRIAF-IAURIF, 2004

vente se situe à 5 490 €/ha en Ile-de-France (contre

410 €/ha en France métropolitaine).

Les grandes cultures dominent le paysage

agricole francilien : les céréales et les oléo-

protéagineux occupent plus de 60 % de la surface

agricole utile (SAU) et 70% des exploitations

franciliennes font de la grande culture. La présence

d’autres cultures, voire d’élevages, est résiduelle, « elle

est plus souvent la marque du passé que celle d’une

réelle diversifi cation de l’agriculture francilienne ».

Les grandes exploitations sont largement

majoritaires en lien avec la l’omniprésence des

grandes cultures. 75% d’entre elles ont une

taille moyenne de 136ha. La taille moyenne des

exploitations n’a cessé d’augmenter depuis les années

70 tandis que le nombre d’agriculteurs n’a cessé de

décroître. « Cette course à l’agrandissement a connu

une accélération depuis le recensement de 1988 ». Le

phénomène est lié à la reprise des terres libérées lors

de cessations d’activité par des agriculteurs en place

qui agrandissent leur exploitation. Ces évolutions

expliquent que le fermage soit le mode d’exploitation

le plus répandu.

Le débouché de la production est structuré par

un réseau de coopératives implantées en Ile-de-

France mais aussi dans les régions voisines. Celles-ci

écoulent 70 % des céréales et oléo-protéagineux.

Les agriculteurs y livrent leurs récoltes et peuvent

aussi y acheter leurs intrants (semences, engrais,

produits phytosanitaires…). Depuis le début du

20ème siècle, on assiste à un transfert progressif

des établissements agro-alimentaires de Paris vers

la petite couronne et la grande couronne. Trois

facteurs de localisation expliquent cette migration :

éloignement des riverains, coût du foncier, desserte

routière et ferroviaire.

La vente aux grossistes et négociants, implantés

entre autres sur le marché d’intérêt national (MIN)

de Rungis, est un débouché important pour les

producteurs franciliens de produits frais. 25% des

ventes régionales de légumes se fait sur le MIN et

la quasi-totalité des espèces produites dans la région

59

Page 60: Seur a Habit Er 2013

Les vulnérabilités de l'agriculture dans le Grand Paris

60

Page 61: Seur a Habit Er 2013

sources P.Coignet + M.Talagrand

61

Page 62: Seur a Habit Er 2013

sont représentées sur ce marché. Ce système mis en

place dans les années 50, s’est substitué à un ensemble

de fi lières de distribution plus locales.

Des formes de diversifi cation des fi lières de

distribution s’organisent cependant. Ainsi, plus

de 20% des agriculteurs franciliens pratiquent la

vente directe (marchés ou ferme) et une trentaine

d’exploitants ont mis en place une activité de

cueillette.

l’agriculture périurbaine entre m i t o y e n n e t é ( s p a t i a l e ) e t indépendance (fonctionnelle)

Cette situation présente, brossée à grands traits,

résulte de transformations de l’espace agricole depuis

plus de 40 ans et qui ont recomposé les relations qui

existaient entre ville et agriculture.

Traditionnellement, l’agriculture de l’Ile-de-

France était fortement liée à son territoire à diff érents

degrés. La diversité de la géographie francilienne

off re en eff et des valeurs climatiques et pédologiques

naturellement propices à des cultures et des modes

d’exploitation variés. L’agriculture diversifi ée selon

les terroirs (plateau, coteau et vallées) et riche en

produits frais (arboriculture, maraîchage, élevage)

trouve des débouchés directs sur le marché urbain

local. Dans ce contexte d’intégration économique,

les agriculteurs sont des fi gures reconnues dans les

communes rurales qui entourent la ville.

Un renversement de cette situation s’est opéré

progressivement au cours des 40 dernières années2.

D’un rapport d’interdépendance, on est passé à un

rapport distancé à diff érents degrés, entre :

- l’agriculture et le substrat géographie:

: la modernisation a permis de limiter le facteur

pédologique. Elle a conduit à une homogénéisation

des cultures et une simplifi cation des paysages

agricoles.

2. M. Mazoyer et L. Roudart, Histoire des agricultures du monde, Points Seuil, 2002, (Voir plus particulièrement les chapitres 10 : la deuxième révolution agri-cole des Temps Modernes et chapitre 11 : crise agraire et crise générale).

- l’agriculture et la ville : les débouchés

de l’agriculture ont évolué. La part nourricière

s’est rétractée au profi t de cultures industrielles

ou à destination animale. Les fi lières se sont ainsi

aff ranchies du marché urbain local pour s’inscrire

dans des fi lières de transformation et de distribution

régionales, nationales et parfois internationales.

- l’agriculteur et les terres : les exploitations

se sont considérablement agrandies et les exploitants

ont été amenés à cultiver des terres éloignées de leur

espace d’appartenance sociale et aff ective.

- l’agriculteur et les habitants : la diminution

du nombre d’agriculteurs et leur part très aff aiblie

au sein des communes agricoles a conduit à un

aff aiblissement des liens entre agriculteurs et

population locale. Plus largement, l’agriculture est

souvent dévalorisée dans les médias par sa capacité à

polluer les sols, à trop utiliser les ressources naturelles

comme l’eau et a nourri un questionnement sur le

bien-fondé du modèle agricole productiviste.

L’agriculture « péri-urbaine » peut-être ainsi

défi nie comme une agriculture en situation de

mitoyenneté avec la ville mais qui n’entretient pas (ou

que faiblement) des liens fonctionnels avec l’espace

urbain.

62

Page 63: Seur a Habit Er 2013

une agriculture de plus en plus mobile ?

Cette distanciation de l’agriculture vis-à-vis de

la ville se décline diff éremment selon les situations,

d’enclavement, de contact avec la zone agglomérée

ou d’éloignement.

Dans l‘espace péri-urbain stricto-sensu (tel que

défi ni dans l’Atlas agricole et rural de l’Ile-de-France

i.e une couronne de plusieurs km de diamètre entre

l’espace aggloméré et le continuum des grandes

plaines agricoles), l’enclavement et le fractionnement

créés par les extensions urbaines et infrastructurelles

engendrent des diffi cultés d’exploitation pour

les agriculteurs. De surcroît, l’instabilité de

l’environnement engendre une précarité de l’activité.

L’agriculteur a développé une hyper-adaptabilité

à l’espace péri-urbain en développant des stratégies

de mobilité à diff érentes échelles spatiales et

temporelles qui jouent avec les contraintes et les

incertitudes attachées à l’environnement où elle

s’inscrit.

- La pratique généralisée de la culture

céréalière annuelle (disparition de l’élevage,

de l’arboriculture et diminution constante du

maraîchage) et l’intégration au système cultural de

mises en jachères permettent de moduler le plan de

culture quasi annuellement.

- L’exploitation est le plus souvent

constituée de l’agrégation de surfaces discontinues.

Elle ne forme pas une entité d’un seul tenant ni ne

recouvre une propriété unique. Ces confi gurations

agricoles rendent possible une adaptation aux

transformations spatiales de l’environnement. Elle

permet la migration progressive de l’activité en

réponse à l’avancée du front urbain notamment à

l’occasion de cessations d’activités et de successions.

- Certains agriculteurs développent des

stratégies économiques et patrimoniales à des

échelles extra-régionales voire européennes et

internationales (organisation des fi lières sur des

bassins agricoles vastes, déconnectés des aires

urbaines ; investissements patrimoniaux dans

d’autres régions agricoles).

L’exploitant agricole a dû s’adapter à son nouvel

environnement périurbain instable et concurrentiel

et est devenu plus mobile : mobilité de son lieu de

vie, mobilité de ses terres, mobilité pendulaire entre

lieu de résidence et lieu de travail, mobilités de ses

productions inscrites dans des circuits toujours plus

longs.

Il ressort également que si le foncier demeure

l’indispensable support de la production agricole,

il n’est qu’un outil parmi d’autres outils que sont le

matériel, le capital fi nancier… La valeur économique,

sociale et symbolique qui lui est attachée n’est plus

aussi forte qu’elle le fût.

Dans ce contexte, on peut se demander si

l’agriculture peut être un outil de garantie et de

sécurisation foncière ou, inversement, quel outil

de sécurisation foncière permettrait de stabiliser

l’agriculture ? On peut également se demander quelles

modalités de coopérations territoriales permettraient

de garantir la préservation du foncier et asseoir la

pérennité de l’agriculture dans cet environnement

périurbain facteur de vulnérabilité ?

63

Page 64: Seur a Habit Er 2013

Marcoussis

Coubron

Montesson

Chaussy

0 1 2 Km

0 1 2 Km

0 1 2 Km

0 1 2 Km

0 500 m

0 500 m

0 500 m

0 500 m

Les vulnérabilités de l'agriculture dans le Grand Paris

la Bergerie de Villarceaux (95)

la plaine de Montesson (78)

Coubron (78)

sources P.Coignet + M.Talagrand/IAURIF/google earth64

Page 65: Seur a Habit Er 2013

lieux de résistance et de renouveau

Dans cette deuxième partie, nous décrivons

quelques situations où la protection d’une certaine

partie de l’agriculture permet de résister à la pression

urbaine et d’établir des liens avec la ville. Ces

situations sont des cas particuliers et ne sont pas

forcément représentatives d’une tendance à grande

échelle en Ile-de-France, ni a priori reproductibles.

Mais elles ne sont pas sans enseignement sur les

questions à considérer pour mieux appréhender

l’agriculture dans l’espace métropolitain.

Ce que l’on voit émerger et ce dont on parle

notamment dans le cadre des débats sur le Grand

Paris (ce qui ne se voit pas sur les cartes)

Au-delà des tendances confi rmées précédemment

et qui ont fondamentalement transformé l’espace

agricole francilien (régression de la surface

agricole, fractionnement et perte de la diversité,

remembrement), d’autres enjeux ont émergé qui

interrogent fortement le rôle assigné à l’agriculture

péri-urbaine. De nombreux auteurs3 ont décrit les

attentes sociales nouvelles adressées à l’agriculture

à la fois comme cadre de vie et comme source de

notre alimentation.

Dans l’espace péri-urbain, le citadin dont la

sensibilité paysagère est souvent nourrie par un

imaginaire rural ancien, demande à l’agriculture de

participer à l’édifi cation d’un cadre de vie répondant

à ses aspirations d’espace de loisir, de liberté et de

nature (Enquête sur la perception de l’espace rural par

les habitants de l’espace rural francilien – IAURIF

2003). Dans l’ensemble de la société, une demande

de protection environnementale et une exigence de

qualité et d’authenticité des produits est adressée

à l’agriculture. Dans cette perspective, il ne s’agit

donc pas seulement de limiter la consommation de

foncier agricole mais d’assigner à l’agriculture un rôle

spécifi que répondant à ces attentes sociales plurielles.

Les traductions à l’échelle francilienne de ces

mouvements de fond portés principalement par

3. B. Hervieu et J. Viard, Au bonheur des campagnes, L’Aube, La Tour d’Aigues, 2001.

la société civile et trouvant écho dans certaines

«localités » sont diverses.

- une approche de sécurisation foncière a été

déclinée par la planifi cation et la réglementation) et

de nombreux outils opérationnels de maîtrise foncière

(ENS / PRIF / ZAP, zone agricole protégée…).

- plus récemment des outils méthodologiques

d’appréhension des conditions de viabilité

économique de l’agriculture ont été élaborés

notamment par l’IAU (approche fonctionnelle des

espaces ouverts).

- impulsés par les professionnels et des

mouvements citoyens, des réseaux liant citadins

et agriculteurs ont été mis en place. Ce sont

notamment les fameuses AMAP qui développent les

circuits courts pour les produits frais non transformés

principalement (pas d’intermédiaire entre producteur

et consommateur).

- enfi n, les programmes agri-urbains sont

des projets de territoire structurés autour de

l’agriculture entendue comme espace et activité. A

l’initiative croisée des professionnels, collectivités et/

ou associations locales, ils se concrétisent sous forme

d’aménagements à moyen et long termes, de gestions,

de programmes et de partenariats. La Région IDF

recense 10 projets agri-urbains en 2005.

Quatre situations sont décrites ci-dessous et

choisies en fonction de leur distance à Paris ce qui

implique une plus ou moins grande exposition à

la pression de l’urbanisation ainsi que des atouts

diff érenciés pour établir des liens avec la ville.

en situation enclavée

Dans ces deux situations, l’agriculture subit

directement les pressions urbaines et est fortement

fragilisée (enclavement et accessibilité difficile /

concurrence avec d’autres usages tels les pratiques de

loisirs ou pratiques informelles et mal contrôlées /

surface en deçà de la taille critique défi nie par l’IAU).

La Plaine de Montesson (78) est un territoire

65

Page 66: Seur a Habit Er 2013

La Carte des Chasses, une représentation des activités agricoles: sylviculture, prairies, champs cultivés, réserves de gibiers, parcs… l'exemple du plateau de Saclay 1820.

Carte IGN (2009) et photo aérienne masquent les modes d'exploitation des espaces agricoles

sources IGN66

Page 67: Seur a Habit Er 2013

resté ouvert à moins de 20 km du centre de Paris au

cœur d’un méandre de la Seine. Elle est caractérisée

par une forte identité culturelle, historique et

économique :

- Production maraîchère et une activité

encore fonctionnelle et pérenne ;

- Positionnement sur l’axe historique de

Paris avec en horizon La Défense et St-Germain.

Son équilibre est cependant menacé par la pression

urbaine (le front urbain ne cesse d’avancer depuis 20

ans et de réduire l’espace agricole), le morcellement

par les infrastructures (projet d’échangeur de l’A114)

et des pratiques peu maîtrisées induites par la

situation d’arrière de ville (décharge, extraction…).

Plusieurs acteurs, professionnels et

institutionnels, se sont rejoints dans l’objectif de

préserver l’agriculture de la Plaine. Depuis près de

20 ans, un projet se construit peu à peu à travers

diff érentes actions émanant des agriculteurs et des

collectivités (intercommunalité et Conseil Régional

et Région) :

- La sécurisation foncière à travers

l’identifi cation de la Plaine au SDRIF de 1994,

puis la mise en place successive d’un périmètre de

préemption au titre des ENS et d’un PRIF ;

- La consolidation des conditions

techniques d’exploitation ;

- Le développement de liens fonctionnels

avec l’environnement urbain mitoyen

(développement de la vente directe mais aussi

revalorisation du site pour des activités de loisir et

de tourisme).

Coubron (93), cette commune du Nord-

Est est située à 20 km de Paris et inscrite dans

la ceinture verte de Paris, ancienne ceinture

maraichère. Uniquement desservie par des routes

départementales, elle ne recense que 4500 habitants

sur une surface de 478 hectares, soit 10 habitants/ha.

L’habitat majoritairement individuel contraste avec

les ensembles collectifs de Villepinte et de Clichy-

sous-Bois situés de part et d’autre de Coubron.

La spécifi cité de cette commune est de n’être

bâtie que sur 1/3 de sa surface. Le deuxième tiers est

occupé par les boisements et le dernier tiers par une

agriculture maraichère. Suite au départ à la retraite

des 2 agriculteurs de la commune, l’agence des

espaces verts de l’Ile de France a racheté les terrains

et permis à un seul agriculteur de gérer l’ensemble des

terres et de vendre les produits localement.

Grâce à une diversifi cation des produits (élevage,

vignes, arboriculture, prairies sèches, maraichage…)

et la future mise en œuvre d’une ferme pédagogique,

les terrains exposés au Sud garantissent à la

commune de conserver son aspect rural et de

contenir partiellement la mutation des terres. Un

projet d’aménagement prévoit cependant une zone

d’activités de 6 hectares, des logements individuels

et un EPHAD. Cette mutation doit être l’occasion

d’amorcer une nouvelle manière d’habiter (répétition

des pavillons ? nature et typologie des jardins ?

qualités des limites avec les terres agricoles ?), non

loin du futur Grand Paris Express à moins de 2km.

en situation « péri-urbaine »

En situation « péri-urbaine », continuum urbain

et continuum agricole interfèrent. L’agriculture

est sous forte pression mais le plus souvent encore

en contact avec les plateaux et plaines agricoles

périphériques.

Le Triangle Vert (91), situé à moins de 25 km

de Paris, au milieu des zones fortement urbanisées

du nord-ouest de l’Essonne (Courtaboeuf, les Ulis,

Longjumeau, Massy...), le territoire du projet du

Triangle Vert, crée en juin 2003, représente un

peu plus de 4 800 ha, ceinturé de grands axes de

communication (A10, N20, N104). Il est relativement

épargné par l’urbanisation dense, mais compte

près de 30 000 habitants. Derrière cette situation

enclavée apparaît un territoire attractif, fondé sur une

répartition équilibrée entre : agriculture 40 % ; forêt

26 % ; espaces urbanisés 24 % ; divers 10 %.

Ce “ triangle vert ” est occupé par des espaces

naturels riches (pôle naturel majeur des Buttes du

67

Page 68: Seur a Habit Er 2013

Projet agri-urbain du Triangle Vert

sources P.Coignet + M.Talagrand68

Page 69: Seur a Habit Er 2013

Hurepoix, dont la forêt départementale du Rocher

de Saulx, grands parcs, bords de l’Yvette, vallées du

Rouillon et de la Salmouille, coteaux boisés etc.) et

surtout de vastes espaces agricoles (pour une Surface

Agricole Utile de 1 716 ha), cultivés principalement

par des exploitations au siège local.

Les orientations du projet du Triangle Vert sont

les suivantes :

- assurer le maintien et le développement de

l’agriculture, pérenniser la destination agricole des

sols et minimiser les contraintes d’origine urbaine

pesant sur cette activité.

- valoriser et mettre à profi t la proximité

urbaine. Elle ne doit plus être considérée comme

une menace ni un handicap, mais favoriser le

développement d’activités économiques et sociales

nouvelles, liées à la proximité de la ville et adressées

à ses habitants.

- faire reconnaître la valeur

environnementale, culturelle, paysagère et

récréative du territoire, en permettre la connaissance

afi n d’en assurer le respect et d’en encourager le partage.

L’accent est mis sur l’explication de l’agriculture aux

citadins et sur l’intégration de l’agriculture au projet

urbain des communes. Il s’agit aussi de prendre en

compte les enjeux environnementaux, en favorisant

une agriculture respectueuse de la ressource en eau,

des paysages, et de l’environnement (faune, fl ore).

En situation « ouverte »

Les plateaux agricoles ne sont pas directement

soumis à la pression urbaine. Les développements

des bourgs ponctionnent des surfaces mais celles-ci

restent fonctionnelles.

La Bergerie de Villarceaux, Chaussy (95), est

attenante au château éponyme et est située à environ

70 km du centre de Paris dans le PNR du Vexin

Français. Elle a été modernisée dans les années

70 (remembrement, abandon de la polyculture au

profi t d’une céréaliculture sans partage). Un projet

d’urbanisation dans les années 80 a vu le jour puis a

fi nalement été abandonné. Le château a été racheté

par la Région dans les années 90 et la ferme confi ée

à la fondation C.L. Meyer qui investit depuis pour

mettre en place un nouveau système agricole.

Sur 20 ans, a été opérée la transition d’un modèle

conventionnel vers un modèle durable grâce à

diff érents aménagements de l’espace :

- réintroduction de l’élevage (le cycle de

rotation prairies et cultures permet de ne pas utiliser

d’intrants extérieurs et artifi ciels) ;

- fractionnement du parcellaire et introduction

de haies (la recréation d’une vie biologique et d’une

chaîne alimentaire garantissent la protection des

cultures des insectes prédateurs) ;

- mise en place d’agroforesterie (il s’agit

de cultures étagées, le plus souvent céréaliculture

et arboriculture, qui permettent d’augmenter les

rendements moyens à l’hectare par comparaison avec

un système juxtaposé ;

- développement de circuits courts (vente

directe) et de circuits « semi-longs » (structuration

d’une fi lière territoriale et régionale).

enseignements et perspectives ?

Ce que l’on voit émerger à travers ces exemples,

c’est une forme de « reterritorialisation » de

l’agriculture (Ph. Lacombe, 2002 et M. Calame,

2008). Nous proposons trois pistes de réfl exion - non

exhaustives - pour mieux appréhender la question

agricole métropolitaine et reconsidérer le foncier

comme ressource alimentaire et lieu de pratiques

de loisirs et non plus simple réserve foncière4. Nous

considérerons successivement trois enjeux de :

- connaissance de l’espace agricole

périurbain et de partage de cette connaissance ;

- reconnaissance des fonctions plurielles

de ces territoires agricoles du périurbain et de

sécurisation de leur espace d’assise ;

- réinscription de la fonction nourricière

de l’agriculture dans l’organisation de l’espace

métropolitain et à l’agenda de sa gouvernance.

4. Ph. Lacombe, L’agriculture à la recherche de ses futurs, Datar, Editions de L’aube, 2002

69

Page 70: Seur a Habit Er 2013

Ferme de la Haute Borne, propriété de la ville de Paris,, dans la Plaine de Pierrelaye

sources P.Coignet + M.Talagrand70

Page 71: Seur a Habit Er 2013

Nous accompagnons ces réfl exions de quelques

références historiques parfois très lointaines qui

ne sont pas à interpréter comme l’expression d’une

nostalgie mais plutôt comme une invitation à ressaisir

des héritages pour inventer des solutions nouvelles.

représenter l’agriculture

A travers ces exemples, se joue, la reconstruction

d’une réalité agricole articulée à des fonctions

plurielles et nourrie par des imaginaires divers.

Une volonté partagée s’exprime à diff érentes niveaux

citoyens et politiques en vue de favoriser les pratiques

agricoles (même sur des parcelles de taille modeste),

de recréer des liens avec les habitants et de garantir

une certaine qualité des espaces ouverts, moins

coûteuse que la mise en place d’une trame verte.

Pour autant, les outils de représentation de ce

qu’est l’agriculture périurbaine sont assez limités.

Est privilégiée l’approche statistique et foncière

(outils issus des Chambres d’agriculture) tandis

que la réalité sensible, ou la « géographicité » (C.

Brand et S. Bonnefoy, 2011) de l’agriculture sont peu

appréhendées. Les projets émergeant conduisent

à dessiner l’espace en transformation dans une

perspective cognitive et méthodologique. De

nouvelles cartes sont produites qui donnent à voir,

à connaître et à comprendre. Mais ces cartes restent

fragmentaires.

Dans une perspective d’appréhension d’ensemble

de l’espace agricole périurbain, se pose la question

d’établir à grande échelle, une cartographie «sensible

et objective » montrant à la fois la réalité concrète

et à l’échelle parcellaire de ce qu’est l’agriculture

et le système socio-économique de cette activité. Il

s’agirait à la fois de :

- déconstruire les visions citadines de

l’agriculture qui oscillent entre vision négative de

l’agriculture hyper-productive et représentations

idylliques d’une agriculture rurale disparue (en Ile de

France);

- assembler les connaissances, portant sur

l’espace « ouvert » du Grand Paris et renouveler les

représentations et les imaginaires pour reconstruire

une vision partagée.

délimiter, borner, marquer: de nouveaux « domaines agricoles »

On voit émerger, à travers ces exemples, de

nouveaux périmètres agricoles. Ces périmètres ne se

défi nissent pas par l’unité de la propriété, ni celle de

l’exploitation ou de la culture ou encore celle du «

substrat géographique » et des conditions naturelles

qu’il off re. Elles se défi nissent par une hybridation

complexe entre des:

- formes de culture diversifi ées (réinvention

de la polyculture) ;

- liens usagers et fonctionnels entre la ville

et l'agriculture (approvisionnement en produits

frais, accueil d’activités de loisir citadin, gestion

des espaces naturels intersticiels, aménagement des

espaces ouverts pour permettre des usages mixtes…);

- modalités de propriété, d’exploitation et

de gestion du sol plurielles mais encadrées par une

gouvernance unifi ée et institutionnalisée (avec le

plus souvent une maîtrise publique foncière partielle

mais structurante).

Nous y voyons une sorte de « domaines agricoles»,

forme contemporaine et actualisée des domaines

historiques, assis sur une identifi cation à la fois

géographique, économique et culturelle locale. Leur

dimension (de quelques centaines à quelques milliers

d’hectares) vérifi e une taille critique déterminante en

termes de lisibilité et de fonctionnement.

A cela se combine des formes de mise en valeur

du sol (moins volatiles que ne l’est la grande culture

annuelle) et engageant un retour sur investissement

de moyen, long terme. Le maraîchage, l’arboriculture,

l’élevage réintroduits supposent des aménagements

pérennes de l’espace (haie, chemin…) et assurent une

identifi cation des paysages.

D'autres époques ont vu l’invention de formes

71

Page 72: Seur a Habit Er 2013

Transports des produits de l'agriculture. à la fi n du moyen-âge in Fernand Braudel, l'identité de la France, éd Flammarion, Paris 1999

72

Page 73: Seur a Habit Er 2013

de « domaines » liés à la recomposition des relations

économiques entre ville et agriculture et des relations

politiques entre paris et la banlieue. Rappelons ainsi

l’expérience des champs d’épandages de la Ville de

Paris situés dans les Plaines de l’Ouest parisien.

Avant que la pollution des sols par les métaux

lourds issus des déchets urbains ne soit suspectée

puis vérifi ée, ces espaces agricoles étaient conçus

comme des lieux d’innovation et d’expérimentation.

Ils s’organisaient pour partie en « domaines » : les

pépinières de la ville de Paris à Achères, la ferme de

la Haute Borne à Pierrelaye et Méry-sur-Oise. Ces

domaines étaient caractérisés par une unité foncière

en l’occurrence détenue par la Ville de Paris.

considérer toutes les échelles des liens nourriciers ville – agriculture

On voit émerger, à travers ces exemples, le

développement de nouveaux liens fonctionnels

entre ville et agriculture notamment à travers

les circuits courts dont le succès repose sur

la convergence de plusieurs attentes sociales

(reconstitution de l’imaginaire rural de la ceinture

maraîchère, exigence de qualité et de traçabilité des

produits, recherche de sécurité alimentaire, recréation

du lien social…)5.

Ceux-ci portent principalement sur une petite part

de l’alimentation (les produits frais principalement

maraîchers et animaux). Mais, une grande partie de

l’approvisionnement de la ville repose sur le stock, la

conservation et l’acheminement de denrées (c’est en

lien avec l’évolution de ces techniques que la grande

ville s’est développée).

Parallèlement à ces dynamiques locales, des

réfl exions émergent à un niveau institutionnel et

scientifi que, sur la gouvernance alimentaire des

métropoles (Hungry-City, 2012)6. La compréhension

5. Caroline Brand et Serge Bonnefoy, « L’alimentation des sociétés urbaines : une cure de jouvence pour l ’agriculture des territoires métropolitains ? », et M. Poulot, « Des arrangements autour de l ’agriculture en périurbain : du lotissement agricole au projet de territoire », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environne-ment [En ligne], Volume 11 Numéro 2 | septembre 2011

des liens fonctionnels et nourriciers entre ville et

agriculture conduisent à envisager une structuration

des fi lières à diff érents rayons d’action ( Johaness

Wiskerke, et Gille Billen, 2012):

- les circuits courts : ils consistent en un

lien direct entre producteur et consommateur

et concernent un rayon réduit autour de la ville

(mitoyenneté agriculture / ville) 7;

- les circuits semi-longs : ils consistent

en des fi lières production, transformation et

consommation organisées à l’échelle d’un territoire

et sans intermédiaires et concernent donc dans le

cas du Grand Paris, un rayon élargi dépassant les

limites de la Région mais n’excédant pas celles des

régions agricoles voisines.

Structurer des fi lières à diff érents rayons

d’action, c’est organiser la sécurité alimentaire des

villes mais c’est aussi structurer l’espace péri-urbain

à diff érentes échelles et maîtriser indirectement

le foncier en consolidant et territorialisant les

économies agricoles.

conclusion

Les documents et références étudiées mettent en

relief des plans d’actions et des outils qui concernent

la mise en valeur de certains produits agricoles, la

relation avec les habitants, la création de nouvelles

centralités agricoles (via des fermes pédagogiques)

pour accueillir un nouveau public urbain, la mise

en place de zones qui délimitent et protègent des

espaces ouverts8.

Mais peu abordent concrètement à l’échelle de

la parcelle, la relation entre espace bâti et agricole

qui est le sujet de tensions entre les diff érents

6. A. De Biasi, D. Pujol, Les programmes agri-urbains : un partenariat entre agri-culteurs et collectivités, un nouveau mode de gouvernance, IAURIF-DRIAF, 20057. Hungry City « un premier rendez-vous international autour de la gouvernance alimentaire des régions urbaines » 6-7 décembre 2012, Conseil régional d’Ile-de-France, Paris et notamment Gilles Billen, « Paris et les campagnes qui la nourrissent : le passé, le présent et l ’avenir » et Johaness S.C. Wiskerke, Wageningen University (Pays-Bas), « Construire des chaînes d’approvisionnement alternatives »8. M. Poulot, « Résurgences paysagères et nouvelles économies agricoles dans le périurbain francilien », publié dans « Projets de paysage » : URL : http://www.projetsdepaysage.fr/fr/resurgences_paysageres_et_nouvelles_economies_agri-coles_dans_le_periurbain_francilien

73

Page 74: Seur a Habit Er 2013

sources P.Coignet + M.Talagrand

le bassin agricole (gris clair) dépasse largement le bassin francilien ( gris foncé)

74

Page 75: Seur a Habit Er 2013

Idées clés :

- l'agriculture est structurée par des caractères

géographiques et des fi lières économiques

- l'économie agricole s'est déterritorialisée

sous l'eff et de la mondialisation du marché

agricole et de la spéculation foncière sur les

terrains agricoles parfois très accessibles

- la déprise agricole n'est pas une fatalité

des circuits courts et des partenariats entre

agriculteurs, citoyens et institutions sécurisent

des espaces agricoles urbains

- l'agriculture francilienne est méconnue,

des nouvelles cartes sont nécessaires pour mieux

raconter ses fi lières, ses territoires

- une politique agricole urbaine renforce la

vocation économique de l'agriculture, stabilise le

foncier, et relie des espaces habités/urbanisés et

des espaces ouverts/cultivés

acteurs. Peut-on ainsi imaginer une méthode/

charte… qui développe un certain nombre de

dispositifs pour mieux gérer la relation ville/

agriculture et appréhender le « comment faire » du

développement périurbain :

- le rôle du jardin et de sa limite avec l’espace

agricole.

- continuités et accès

- espace boisé et haies existantes comme

interface

- co-visibilité et hauteur bâtie

- typologies végétales de l’espace périurbain

- ….

Par ailleurs, la question d’une gouvernance

à l’échelle métropolitaine-cf. l'article de Marc Wiel

– pour orchestrer et coordonner ensemble les

diff érentes actions sur la défense/mise en valeur de

l’agriculture et en relation avec les développements

urbains autour des gares, des zones périurbaines et

des villes nouvelles doit être maintenant posée.

75

Page 76: Seur a Habit Er 2013

sources CVL/Seura76

De 1991 à 2000.

Nouvelles connections aux TC et développements lisés au 'tout-voitures', mais une baisse de la construction

De 2001 à 2012.

Un retour au modèle de distribution historique : des nouveaux projets sans desserte TC, notamment depuis 5 ans.

Avant 1975.

Les précurseurs : un mode de développement fondé sur les grands axes de fl ux voitures

De 1976 à 1990.

Les pôles historiques connectés et des pôles majeurs sont créés en lien avec les stations de TC, sans conviction du côté des opérateurs

Page 77: Seur a Habit Er 2013

Les centres commerciaux, "locomotives" ou freins du renouvellement urbainJérôme Legrelle + Nicolas Douce

un modèle génét iquement consommateur de foncier :

Les centres commerciaux, et plus généralement

les zones commerciales ont été et demeurent

fortement consommateurs de foncier. Cette

situation est liée à la fois aux principes qui ont guidé

le développement de la distribution en France, mais

aussi à ceux qui ont dicté la conception du magasin

«idéal ».

En eff et, les principes qui dirigent la conception

d’un magasin idéal sont portés par l’idée (vérifi ée)

que les clients n’aiment ni monter, ni descendre

les niveaux, et que le plain-pied est la meilleure

solution. Il en résulte un étalement d’autant plus

important, que la forme du local répond elle-même

à des caractéristiques de formes géométriques

contraignantes, ne favorisant pas l’optimisation des

coeffi cients d’emprise au sol.

De plus, le développement des centres

commerciaux s’est fait sur le postulat que la taille

était l’un des moteurs de l’effi cacité commerciale. Le

principe du « tout sous le même toit » lancé par les

hypermarchés a été largement repris par les centres

commerciaux, phénomène accentué jusque dans les

années 2000, avec la création de « fl agships », où le

gigantisme était synonyme de puissance (Saturn,

IKEA, …). Les raisons de ce modèle s’appuyaient

sur les objectifs suivants :

- pouvoir exprimer l’off re la plus large possible

afi n d’off rir un choix des plus vaste,

- attirer des clientèles importantes et variées

(le mass market),

- créer des fl ux denses, réguliers et récurrents,

garants des performances commerciales du site.

De tels objectifs ont conduit à la conception de

grands magasins, aux premiers rangs desquels on

retrouve les hypermarchés, couvrant des surfaces

pouvant dépasser les 20 000 m² de plancher

(Carrefour à Portet-sur-Garonne et Villiers-

en-Bière, Auchan Vélizy-Villacoublay,…). Mais

autour de ces machines à trafi c, se sont rapidement

agglomérés d’autres magasins apportant une off re

complémentaire, renforçant ainsi la dynamique des

zones commerciales en question. Le corollaire fut le

développement de la plupart des zones commerciales

que nous connaissons aujourd’hui, soit sous une

forme organisée et structurée (le centre commercial)

soit sous une forme « aléatoire » (les parcs d’activités

commerciales).

La consommation foncière a été d’autant plus

importante, que ces développements se sont fait

sur des espaces périurbains, sans réelles contraintes

urbaines. Construit pour attirer de loin (les

premières zones de chalandise étaient calculées à une

heure, voir au-delà !), il fallait inévitablementdes

nappes de parkings gigantesques pour accueillir

tous ces clients, nappes elles-mêmes fortement

consommatrices de foncier. C’est l’ensemble de ces

principes qui a conduit au développement de ces

ensembles commerciaux,en périphérie et parfois

même en milieu urbain ou péri-urbains, ancrées par

des moyennes surfaces du type supermarché s’étalant

sur plusieurs milliers de m² (Bobigny, Boissy 2, …)

En synthèse, le modèle de développement des

centres commerciaux des dernières décennies, s’est

fait en France, au moyen de consommation de

foncier en abondance :

77

Page 78: Seur a Habit Er 2013

Stratégie de mutation progressive d'une zone commerciale en faubourg urbain

l'arrivée de transports en commun

des équipements voire des logements

des nouveaux logements et des commerces

des nouveaux commerces

sources David Mangin/Seura78

Page 79: Seur a Habit Er 2013

- parce que développé en milieu péri urbain,

non contraint,

- parce que conçu pour accueillir des fl ux

venants de loin, nécessitant des parkings en quantité

(entre 3 et 5 places par 100 m² de SHON construite),

- parce que l’attractivité était fondée sur

le moteur de l’off re la plus large et plus diversifi ée

possible,

- parce qu’ancrée par des grandes et moyennes

surfaces.

la simple contestation ou remise en cause du modèle, peut-elle suffi re à engendrer des changements ?

Le débat sur cette consommation immodérée

de foncier conduit à questionner cette forme de

développement. Mais est-ce bien réaliste de vouloir

poser cette question, sans toucher aux fondements

même du commerce et sans nuire à l’activité

commerciale qui concentre à la fois des enjeux

économiques, urbains et mêmes sociaux ?

Cette remise en cause est tout d’abord portée

par un certain rejet plus ou moins subjectif de cette

forme de distribution :

- raisons architecturales : massacre des entrées

de villes,

- raisons environnementales : contre le

principe de l’usage des véhicules et des déplacements

longs,

- raisons idéologiques : rejet du modèle censé

représenter une société de consommation qui serait

révolu,

- consommation désordonnée et excessive du

foncier.

Cependant, plus appuyées par des ressentis

et des points de vues souvent idéologiques, niant

la nécessité d’une organisation effi cace de la

distribution répondant aussi à des attentes et

habitudes des consommateurs, ces discours n’ont

et n’auront que peu d’eff ets sur les soit disant

responsables de ces situations : ils se heurtent aux faits

et aux réalités issues de nos besoins et envies auxquels

est censée répondre ce mode de distribution. Il suffi t

de prendre en considération les chiff res suivants pour

mesurer la puissance de ce modèle.

- un hyper peut drainer jusqu’à 100 000

passages caisse/jour,

- un hyper réalise plusieurs dizaines, voire

quelques fois centaines de millions d’euros de

- chiff re d’aff aires,

- un centre commercial génère plusieurs

centaines de millions d’euros de chiff re d’aff aires,

- les 4 Temps : 40 millions de visiteurs, Rosny

2 : 18 millions de visiteurs,

- la voiture représente toujours le mode d’accès

privilégié au grand commerce : au mieux,hors Paris,

la part des transports en commun ne dépasse pas ¼

de l’accès des clients, et représente encore moins en

termes de chiff re d’aff aires.

Toute modifi cation physique de ces ensembles,

par récupération de foncier, limitations des emprises

parkings, … se heurtera d’abord aux contraintes

fi nancières qui ne manqueront pas d’apparaître,

en remettant en cause l’équilibre économique

de ces systèmes qui profi tent non seulement

aux distributeurs, mais aussi aux foncières ou

propriétaires, comme aux collectivités !

Elles se heurteront aussi à des contraintes

juridiques et réglementaires lourdes (par quel droit

forcer à l’application de nouvelles règles sur de

l’existant ?). Enfi n, l’organisation juridique de la

plupart de ces ensembles en multi ou copropriété

complexifi e singulièrement la conduite de projets,

devant être nécessairement porté par une vision

commune (on reviendra plus loin sur ces éléments

essentiels).

Non, le modèle qui prédomine n’est pas mort,

et il continue même de se développer ! Les derniers

programmes ouverts (Le Millénaire), ceux qui vont

ouvrir (Villeneuve-la-Garenne), ou encore ceux qui

sont en projet, consomment des emprises foncières

toujours aussi importantes ; même l’augmentation

signifi cative du coût des fonciers n’a pas ralenti sa

79

Page 80: Seur a Habit Er 2013

sources CVL/Seura80

situation :

- CA en M€

- copropriété

- bâti

- off re / demande

densifi cation extension

diversifi cation fonctionelle

sur sol

sous-sol

même sol

mutation (vente) ou transfert

Scénarios pour créer de la valeur pour plus de mixité fonctionelle

Page 81: Seur a Habit Er 2013

consommation, restant pour les promoteurs de ces

projets, à la fois nécessaires au fonctionnement des

sites créés, et toujours aussi avantageux par rapport à

la valeur créée. La raréfaction du foncier disponible

peut induire la construction de stationnement en silo

ou en infra mais le fait est, qu’au vu du coût de tels

aménagements, les opérateurs privilégient dès que

possible, les parkings en surface qui consomment

d’autant plus de foncier.

Ceci étant dit, la situation est-elle pour autant

fi gée et la question de la récupération, ou à tout le

moins, d’un meilleur usage de foncier des centres

commerciaux doit-elle être totalement écartée ? La

réponse est la aussi, négative. Les commentaires

faits plus haut démontrent simplement que l’usage

du foncier est directement corrélé au mode de

fonctionnement du commerce, et que par conséquent,

toute évolution passera par un changement de

paradigme, une modifi cation des moteurs du

commerce.

la modif ication des critères de conception des centres commerciaux est en cours

Le changement est en marche, et ce de manière

structurelle et forte. Les ressorts du commerce

moderne sont en train de se modifi er en profondeur

sous l’eff et conjugué de plusieurs événements.

Souvent conçus hors des villes, ces ensembles

sont aujourd’hui « ensevelis » par l’urbanisation

galopante, et doivent répondre à des zones de

chalandise primaire qui se sont renforcées

La puissance d’attraction de ces sites se réduit

fortement sous l’eff et conjugué de moindre recours

à la voiture et à la limitation des déplacements

motorisés, densifi cation des m² commerciaux, avec

pour corollaire l’accroissement,l"off re (et donc de

la concurrence), laquelle réduit mécaniquement

l’eff et d’attraction d’un site et pose la question de

la taille optimum à avoir, la perte de puissance des

locomotives, tels que les hypers ou autres moyennes

surfaces (FNAC, Saturn,…).

Le-commerce vient concurrencer le centre

commercial sur son terrain, avec une off re plus large

et facilement accessible

Le développement du multi-canal permet aux

enseignes de démultiplier leurs points de contacts

avec le consommateur : les grands sites deviennent

un canal parmi d’autres.

La crise impacte la consommation et vient

renforcer la pression sur les rendements; l’apparition

des premières vacances sur des durées longues

(structurelles ?) fait craindre l’apparition de friches

commerciales.

Les modes de consommation ont évolué avec la

remise en cause, réelle, par le consommateur du site

unique où faire ses courses : il y va moins souvent, il

utilise d’autres canaux, il s’y rend de plus en plus en

transport en commun.

-La notion de proximité revient en force :

proximité géographique, proximité d’idée ou de

goût (naissance des communautés), proximité par

des services dédiés, proximité par le mcommerce

(smartphones)….

- …

D’où ce constat qui petit à petit s’impose, et

qui génère un début de recherche de solutions : le

modèle construit sur le principe du tout sous le

même « grand » toit n’est plus pertinent, et s’il

l’était encore, il n’est plus dominant et ses bases sont

menacées. La question pour les distributeurs et les

enseignes n’est plus d’attirer le chaland, mais d’aller

à sa rencontre, d’où l’émergence de l’omnicanal, qui

favorise l’éclatement des points de ventes, en dur

comme virtuel, pour « coller », aller au devant du

consommateur. « Où je veux, quand je veux, comme je

veux ». Le modèle dominant doit s’adapter et laisser

de la place pour d’autres formes de distribution.

81

Page 82: Seur a Habit Er 2013

Le système est donc en train de s’inverser, ou à tout

le moins de se diversifi er au profi t du consommateur

qui redevient maître du jeu. La crise économique

qui aff ecte la consommation a cette vertu de mettre

en exergue cette donnée, et permet d’eff ectuer un

tri sévère entre les centres commerciaux. A terme,

cette tendance pourrait être fatale pour ceux d’entre

eux qui n’auront pas su évoluer et/ou résister. Il faut

remarquer que nous n’en sommes plus à imaginer

des risques, mais bien dans le constat. On citera

pour exemple, les quelques sites bien connus, en proie

à ces diffi cultés et devant initier des restructurations

lourdes pour tenter de se repositionner sur le marché

: Bobigny 2, Boissy 2, SQY Ouest à Saint Quentin

en Yvelines, Domus à coté de Rosny 2…

Même les derniers centres sortis de terre

récemment, peinent à trouver leur place (le

Millénaire, à Aubervilliers). L’omni-canal vu par une

enseigne Le client au centre du réseau d’Altaréa-

Cogedim

vers un redimensionnement des centres au profi t de la proximité (des proximités)

L’ensemble des points évoqués plus haut

montre que la puissance liée à la taille s’estompe, ce

phénomène ayant déjà touché les enseignes elles-

mêmes, lesquelles ont commencé à revoir leur concept

sur des dimensions plus restreintes, en même temps

qu’elles se rapprochent de leurs clients : (grande

distribution dans l’alimentaire : Carrefour, Casino,.. ;

dans l’équipement de la maison : But, Conforama,…

; Culture loisir : FNAC,… ). Les conséquences de

cette double tendance de rapprochement vers le client,

et de réduction de surfaces, doivent naturellement

ouvrir des possibilités pour libérer du foncier et en

tous cas, minimiser la consommation de ce dernier

et notamment sur tous nouveaux projets :

- le besoin en parkings est limité par la

recherche d’une clientèle de proximité avec un

moindre usage de la voiture, et l’utilisation plus facile

des TC,

- les surfaces nécessaires sont adaptées et

réduites, pour répondre à une demande plus ciblée,

- la génération et la captation des fl ux sont

optimisées par la densifi cation et la mixité des

fonctions regroupées en un endroit ou une zone

dédiée.

L’intégration urbaine et la mixité sont donc

à retrouver ou peut-être même à réinventer,

pour mettre en place les « nouveaux ressorts

» de l’attractivité : limitation des emprises aux

stricts besoins, tout en renforçant l’attractivité

par la diversité de l’off re au sens large (culturelle,

administratives, services…), le tout en lien avec

la diversité de la population et sa densité. Ainsi

apparaît de plus en plus « nécessaire et utile » le

développement de programmes intégrés pouvant

cumuler diverses fonctions, comme celles du

commerce et de l’habitation, et/ou de bureau.

Ce faisant, si la démultiplication des points de

commerces réduira leur impact en termes d’emprise

foncière et de création de parkings, avec un meilleur

usage du foncier et une plus grande densifi cation,

cela impliquera néanmoins de se poser la question du

bon maillage du territoire (proximité) et de la bonne

répartition de cette off re commerciale. L’échelle du

territoire à retenir pour observer, apprécier et décider

des bons équilibres est sans doute plus large que celle

de la commune, tant l’intégration et la densité du

tissu urbain est forte en Région Parisienne et qu’une

vision globale s’impose. En synthèse, les évolutions

structurelles de l’off re commerciale conduisent à

la remise en cause du postulat de l’importance de

la taille, au profi t de celui de la proximité, sous des

formes les plus variées. Cela doit naturellement

conduire l’off re commerciale à :

- faire un meilleur usage du foncier (moindre

consommation, intégration et plus de densité),

- favoriser une meilleure répartition du

territoire, plus équilibrée,

- assurer une meilleure planifi cation et

anticipation des besoins, pour privilégier l’équilibre

entre les diff érentes polarités

82

Page 83: Seur a Habit Er 2013

les contraintes financières et les rigidités administratives et juridiques peuvent–elles contraindre ou altérer ce processus ?

Les prémices de ce processus d’évolution vers des

centres plus denses et off rant une certaine proximité

n’est pas un phénomène totalement nouveau : il s’est

amorcé depuis quelques années, avec certaines villes

qui donnent les premiers exemples de ce qu’il est

possible de réaliser.

Argenteuil a ainsi permis, en 2001, la réalisation

d’un programme mixte, associant bureaux,

logements, commerces (29 000 m²) et parkings.

Boulogne Billancourt avec l’opération des Passages

est un bel exemple d’intégration urbaine et de mixité

d’usage ; plus récemment Th ionville a vu son centre-

ville bénéfi cier d’un projet de cette nature. Demain,

ce sera Annemasse avec un projet intégré, off rant

logements, commerces, bureaux et loisirs sur des

emprises foncières réduites et densifi ées, sans pour

autant avoir dénaturé le coeur de ville. Conçus dans

la cadre de projets urbains souvent initiés par la ville

et au travers de procédures ad hoc telles que les ZAC,

ces projets ont pu émerger, parfois après de longues

périodes de gestation et de multiples diffi cultés qui

ont pu décourager en chemin nombre d’opérateurs,

quand ce n’est pas la conjoncture économique qui y

a mis un terme.

Cependant, que peut–il en être dès lors

qu’il s’agit de reconfi gurer, et réadapter des sites

existants ? La captation de ce foncier, pour en

optimiser l’usage, n’est-elle pas de ce fait un

objectif, illusoire, plus ou moins voué à l’échec ?

En préalable, un constat simple s’impose : dès

lors que le site considéré « fonctionne », il sera très

diffi cile, sinon impossible économiquement, de « libérer

» du foncier à un prix qui ne soit exorbitant et qui

rende, par exemple, une opération de logements

économiquement viable ; ceci tout simplement, parce

que le rendement fi nancier du commerce (et donc

sa valeur) est dans cette hypothèse, très largement

supérieur à celui du logement. Autrement dit, ce

n’est que lorsque le commerce est en diffi culté que la

valeur de l’immobilier qui l’abrite diminue fortement,

et qu’il devient possible d’imaginer une meilleure

valorisation. Mais cette condition nécessaire n’est

pas suffi sante et va souvent se heurter aux coûts

de transformation à mettre en oeuvre, pour «

reconstruire » un nouveau programme que ce soit

en totalité ou partiellement.

Le cas de Bobigny 2 est à cet égard

particulièrement édifi ant quant aux diffi cultés

rencontrées et aux obstacles à surmonter, pour

envisager une évolution du site. Ce centre souff re,

malgré une localisation qui présente de nombreuses

qualités, de faibles performances et une vacance qui

a fi ni par devenir quasi structurelle. Ses parkings

sont trop importants, et très faiblement utilisés. Les

propriétaires en sont conscients depuis plusieurs

années et plusieurs projets de restructuration lourde

ont été étudiés. La ville est même entrée au sein de

la copropriété pour tenter d’infl uer sur le cours des

choses et favoriser la transformation du site. Les

deux principaux obstacles à la mise en oeuvre d’un

projet qui réadapterait le site à son environnement

sont d’une part la diffi culté à trouver un équilibre

fi nancier à l’opération, et d’autre part la structure

juridique de la propriété.

En eff et, l’équilibre fi nancier passe d’abord par

l’augmentation des droits à construire et donc la

densifi cation du site, pour du commerce ou d’autres

fonctions. Les coûts sont donc limités aux contraintes

liées à la mise en oeuvre de la densifi cation, sans perte

signifi cative de m² commerciaux. Mais déjà, ce simple

processus de rajouter des m² est particulièrement

complexe et coûteux à mettre en oeuvre et nécessite

un potentiel de commercialisation et de valorisation

à même de rentabiliser l’opération.

La structure juridique de la copropriété oblige

à trouver un accord unanime sur le projet à mettre

en oeuvre : un seul regard sur la diversité de ces

copropriétaires permet de comprendre qu’il s’agit

là d’une mission quasi impossible, car l’intérêt

d’un grand distributeur (Immochan) n’est pas celui

de la ville (Bobigny), ni celui d’un investisseur

83

Page 84: Seur a Habit Er 2013

institutionnel (La Française), ni celui d’une foncière

spécialisée (Unibail-Rodamco)…

Derrière ces notions fi nancières et de propriété,

se pose la question de la nécessaire conduite de

projet qui doit pouvoir être menée, dans la mesure

du possible, dans un cadre réglementaire, juridique

et décisionnel le plus simple possible : la maîtrise

du foncier et de l’actif est aussi sans doute l’une

des clés pour pouvoir mener à bien ces opérations.

Pour en arriver là, pour tous les sites qui, comme

celui de Bobigny 2, gagneraient à être restructuré

commercialement, il faudrait sans doute imaginer

de nouveaux outils non seulement réglementaires,

mais aussi opérationnels qui permettent de prendre

le contrôle des opérations et surtout de les mener à

bien :

- le projet serait défi ni en fonction de ce qui

correspond le mieux à l’intérêt général,Bobigny 2

- la contrepartie des droits à construire

additionnels donnerait droit à la puissance public à

impulser et conduire le cas échéant l’opération (on

peut espérer que cette seule menace soit suffi samment

convaincante, pour ne pas en arriver là…),

Ainsi, la mise en oeuvre, à défaut d’être assurée

par les propriétaires, pourrait être prise en charge par

des équipes spécialisées.

Il y a donc tout un champ d’investigation à mener,

pour défi nir les conditions juridiques et les moyens

opérationnels de cette mise en oeuvre. Partant du

principe, que ces mouvements de transformation

ne se feront que dès lors que l’économie du projet

sera trouvée (diminution de la valeur commercial du

site favorisant sa mutation vers d’autres fonctions

et création de droits à construire), il n’y aura lieu

de mobiliser, le cas échéant, que des ressources

opérationnelles dans un cadre juridique qui reste à

imaginer.

Il faut enfi n noter que les leçons tirées de

l’exemple de Bobigny, valent aussi pour les sites situés

en entrée de ville, comme c’est le cas pour Montigny-

Lès-Cormeilles, comme pour ceux constitués d’un

grand hypermarché et d’une galerie avec des hectares

de parkings. Dans ce dernier cas, suivant l’intégration

urbaine ou non du site, une densifi cation devra être

compatible (en harmonie ?) avec l’environnement

avec les diffi cultés d’intégration habituelles

d’autres fonctions sur des parkings commerciaux :

accessibilités et confl its d’usage, commercialisation

de logements donnant sur des parkings et/ou des

zones logistiques...

Au-delà de toutes ces considérations, Il est

essentiel de bien garder en mémoire qu’avec le

commerce, il est impossible de décréter les choses

pour qu’elles se mettent en place et encore moins,

pour que cela fonctionne. Comme cela a été déjà

évoqué, le point de départ des réfl exions sur la

mutation du foncier, passe par la prise en compte

d’une situation commerciale dégradée, et ou par la

possibilité d’une création de valeur : autrement dit,

une possibilité de sortie par le haut.

ce mouvement de restructuration affectera-t-il tous les formats commerciaux de la même façon ?

Force est de constater que tous les formats

commerciaux rayonnants ne sont pas égaux

face à ces évolutions profondes des modes de

consommation.

La carte ci-dessous réalisée par l’IAU IDF

représente les grands pôles commerciaux existant

dans l’agglomération de Paris. Comme on l’a vu

plus haut, le commerce se nourrit de fl ux et si l’on

recoupe cette carte avec le réseau viaire, on peut

constater que si les trois grandes rocades que sont le

boulevard périphérique, l’A86 et la francilienne ont

vu s’implanter des formats de centres commerciaux,

les grandes pénétrantes comme la N7, la N13, la N20,

la D11 et la D14 ont plutôt connu le développement

de parcs d’activités commerciales (zones de « boîtes).

Ces derniers ont été depuis rattrapés par

l’urbanisation et sont desservis par des axes devant

en partie muter vers de véritables urbains qui

84

Page 85: Seur a Habit Er 2013

peuvent induire une réduction des fl ux de véhicules

vers ces parcs. Par ailleurs, l’évolution des modes de

consommation et les premiers impacts observés sur

la distribution indiquent une fragilité de ce modèle

pour un enfrichement qui a déjà débuté. Si des

opportunités foncières peuvent être identifi ées pour

une mutation du commerce vers d’autres fonctions,

certaines de ces zones sont des cibles à privilégier.

L’écueil restera celui de la valeur des actifs

commerciaux sur ces zones, pour des valeurs locatives

potentielles bien supérieures à ce que peuvent payer

de l’activité économique ou du logement, même si

un enfrichement organisé afi n d’abaisser la valeur

globale de certains secteurs et la mise en place de

projets urbains dédiés peuvent contrebalancer cette

diffi culté.

peut-on laisser le mouvement de restructuration s’opérer « naturellement » ?

Il a déjà été répondu par la négative, à cette

question, au regard des contraintes inhérentes à

chaque site.

On peut aussi ajouter que ce processus ne peut

pas se faire naturellement par décantation, car cela

serait trop long et dangereux : si la question de la

mutation n’est réellement posée que lorsque la

situation est critique, ou lorsque la perte de valeur

commerciale, et/ou fi nancière est avérée, le tissu

urbain et social est doute déjà gravement aff ecté,

avec les dégâts collatéraux qui vont avec à savoir

dégradation des lieux et la montée de l’insécurité. Le

sujet dès lors, n’est plus la densifi cation foncière, ou

la récupération de foncier invisible, mais purement

et simplement la requalifi cation urbaine.

Le laisser faire n’est aussi pas possible parce que

toute restructuration comme cela a été déjà dit, doit

être dirigée:

- pour faire converger les diff érents acteurs

(enseignes, bailleurs,…),

- pour s’assurer de bonnes conditions de

portage pendant les conversions ou modifi cations,

- pour pouvoir intervenir au travers des

réglementations, à modifi er et à adapter aux besoins,

- pour vérifi er que ces adaptations intègrent

dans une vision plus large que celle du site lui-même.

L’une des problématiques essentielles

du commerce en Ile-de-France a été celle de

l’absence de document de planifi cation à une

échelle pertinente. En eff et, le SDRIF a jusqu’à

présente été particulièrement peu disert sur la

fonction commerciale tandis que les SCOT ne se

sont que peu développés sans parler des Documents

d’Aménagement Commercial (DAC) qui le sont

moins encore.

Certains territoires d’intervention

d’Etablissements Publics d’Aménagement ont

bénéfi cié d’analyses commerciales poussées, certains

EPCI également mais les initiatives sont globalement

restées relativement isolées. La Ville de paris a eu de

son côté une politique commerciale off ensive et des

positions très tranchées sur certains sites mais avec

des résultats mitigés : volonté de ne plus développer

d’équipement de la personne sur les Champs Elysées

mais désaveu des refus de la CDAC par la CNAC et

le Conseil d’Etat, refus de l’ouverture des magasins

du boulevard Haussmann le dimanche d’où une

évasion vers des pôles situés en périphérie de Paris

(les 4 Temps)…

Le nouveau SDRIF est beaucoup plus explicite

et cohérent avec la réglementation de l’urbanisme

commercial. Le corpus réglementaire dispose

désormais d’une base solide mais doit maintenant

se voir prolongé par la mise en place de Documents

d’Aménagements Commerciaux au sein des SCOT,

déclinés dans les PLU et PLUI. Ce mouvement

prendra toutefois du temps et pose la question de la

capacité des SCOT et EPCI à prendre à bras le corps

la question du commerce à la bonne échelle.

85

Page 86: Seur a Habit Er 2013

sources Seura/AlphavilleCVL86

Rosny 2: quand l'extension du réseau de TC peut servir de leviers de la diversifi cation fonctionnelle

Domus Rosny 2

Station RER E

Rosny-Bois-Perrier

Cités

Cités

UGC

A86

A3

Paris

Page 87: Seur a Habit Er 2013

quelques pistes de réfl exions et de préconisations :

Raisonner à l’échelle du territoire, car la

pérennité de chaque site dépend aussi de la

concurrence et donc du bon maillage.

Identifi er les sites menacés ou trop consommateur

de foncier, ou pouvant être densifi és afi n d’anticiper

les actions susceptibles d’être mises en oeuvre :

faut- il créer un observatoire, un plan directeur à

l’échelle de la région ?

Se doter de compétences, au travers d’un

organisme acteur, coordinateur du mouvement,

capable d’initier et de conseiller les communes pour

mettre en oeuvre tous les outils du changement

: réglementations, les moyens juridiques, moyens

techniques et opérationnels…

Rassembler et mobiliser tous les opérateurs

privés qui, au travers du recensement de ce foncier

invisible (inexploité ou gâché…) pourraient prendre

conscience des enjeux, qui touchent d’abord leurs

propres coeurs de métiers, mais aussi l’ensemble des

autres acteurs et plus généralement notre propre

société.

Défi nir des modes et stratégies d’intervention

dédiés et économiquement viables afi n

d’accompagner les mutations. Un aménageur

pourrait par exemple acquérir un parc de

stationnement dédié à un équipement commercial,

y construire un parking silo de manière à libérer du

foncier pour implanter un bâtiment non commercial

et équilibrer un bilan, puis revendre ceparking silo au

propriétaire initial au prix d’acquisition du foncier.

conclusion

Face aux grandes étendues de stationnement

aérien, souvent basiques et non végétalisés, il peut

apparaître comme tentant de les reconvertir en

totalité ou en partie sur d’autres fonctions dans

une logique de densifi cation urbaine, ceci afi n de

tourner la page de sites commerciaux de périphérie

rattrapés par l’urbanisation. De même, le contexte

économique et les profondes évolutions en matière

Idées clés :

- la grande distribution s'est développée sur

un modèle fortement consommateur de foncier,

largement dépendant du tout automobile sur un

modèle toujours plus grand pour avoir tout sous

le même toit.

- le niveau de la rente foncière et le droit du sol

limitent les interventions publiques volontaires

sur les emprises commerciales

-les deux leviers de la mutation d'un site

commercial sont le ralentissement de son activité

et la création de valeurs

-la mégapole doit se doter d'outils de

régulation de l'immobilier commercial à l'échelle

mégapolitaine

- défi nir des modes et stratégies d’intervention

dédiés, économiquement viables et des

partenariats entre les acteurs citoyens, publics et

privés afi n d’accompagner les mutations des sites

commerciaux

de consommation et de distribution ne rendent pas

impossible dans les prochaines années d’envisager la

fermeture pure et simple de centres commerciaux

qui n’auront pas su s’adapter, ce qui n’a pour l’instant

jamais été le cas en France, d’où une logique à vouloir

les remplacer par d’autres fonctions.

Toutefois, comme on l’a vu, cela ne sera possible

que via une réelle création de valeur économique à

même de convaincre les opérateurs privés de faire

muter des actifs souvent amortis comptablement

via des projets de restructuration complexes et

coûteux. Cela passe nécessairement par le montage

de projets d’ensemble associant la collectivité,

les services de l’état et les opérateurs privés, dans

une logique d’incitation plus que de coercition,

ne serait-ce que parce que les outils et moyens

d’imposer de telles évolutions à un opérateur privé

sont aujourd’hui extrêmement limités pour ne pas

dire presqu’inexistant.

87

Page 88: Seur a Habit Er 2013

neutralise les réseaux de transports

rend impossible la disribution d'eau (en rouge) et d'électricité ( en bleu)

remonte dans les sous-sol (en rouge)

En cas d'inondation de type crue 1910, les nappes saturées et la Seine débordante...

sources M.Reghezza-Zitt/Seura88

Page 89: Seur a Habit Er 2013

Les risques: effets domino et effets de levierMagali Reghezza-Zitt

En France, les inondations menacent près

d’une commune sur trois (dont 300 grandes

agglomérations) , soit un peu plus de 6 millions

d’habitants. C’est donc un risque majeur qui a un

coût très important pour la société : depuis trente

ans, chaque grande inondation a coûté entre 500

millions et 1,5 milliards d’euros. C’est d’ailleurs une

inondation causée par la crue de la Seine et de ses

affl uents qui est susceptible de provoquer en France

métropolitaine la plus grande catastrophe nationale

après un séisme à Nice.

Trop longtemps, l’aménagement de la région

parisienne a négligé l’existence de la menace. La

Seine n’ayant plus connu de crue exceptionnelle

depuis 1955, la conscience du danger s’est peu à peu

aff aiblie, alors même que l’essentiel de l’urbanisation

s’est opéré dans des zones inondables. L’IAU-ID

note ainsi qu’entre 1982 et 2008, près de 1445 ha ont

été urbanisés dans ces espaces . Si désormais le taux

de croissance urbaine y diminue sensiblement, les

projets de renouvellement urbain, en particulier au

centre de l’agglomération, rendent toute son actualité

à l’épineuse question du devenir des espaces à risques.

La forte demande de logements dans un contexte

de pression foncière soutenue, la requalifi cation

d’anciens sites industriels situés en bords de fl euve,

la volonté de rééquilibrer une région urbaine

dans laquelle les inégalités socio-économiques

n’ont cessé de se creuser ou encore la nécessité de

poursuivre une politique ambitieuse d’intégration

à la mondialisation, interrogent l’aménagement de

territoires stratégiques mais inondables.

Face au risque, la tentation est grande de réduire

le débat au dilemme entre développement et sécurité,

comme si le seul choix possible résidait entre le

laisser-faire (n’importe quoi) et le gel des terrains.

Aménager les territoires en « oubliant » le risque

constituerait une véritable bombe à retardement

pour la métropole. Mais refuser par principe

l’occupation des zones inondables provoquerait des

risques économiques, sociaux et environnementaux

tout aussi insupportables pour la société.

À quelles conditions techniques, mais aussi et

surtout sociétales et politiques, peut-on aujourd’hui

occuper des zones inondables et quel est le coût de

cette occupation ? Nous proposons ici un éclairage

afi n de poser les termes du problème.

de l’aléa d’inondation à la paralysie métropolitaine

En temps normal, la Seine atteint 2,50 mètres

au pont d’Austerlitz et les voies sur berges sont

fermées à partir de 3,20 mètres. Une crue centennale

de la Seine, c’est-à-dire une crue qui se produit en

moyenne tous les cent ans ou encore, qui a une

chance sur cent par an de se produire (soit quand

même deux chances sur trois sur une période de 80

ans), correspond à une hauteur d'eau de 8,62 mètres

l'échelle de Paris-Austerlitz, (2400m3/s de débit),

c’est-à-dire à peu près à la ligne d'eau atteinte lors de

la crue de janvier 1910. La période à risque se situe

89

Page 90: Seur a Habit Er 2013

au-delà du PPRI, un nouvelle culture du risque à l'échelle de la mégapole

1 1

12

22

3

3

3

4

4

5 5

5

1 2 3

4 5

quartier d'aff aires

risque fonctionnel

centre historique et musées

risque matériel

quartier résidentiel

risque structurel

centre logistique

risque fonctionnel

infrastructure inondée

risque fonctionnel

rsique structurel

sources M.Reghezza-Zitt/Seura90

Page 91: Seur a Habit Er 2013

entre novembre et mars, mais les crues majeures du

XXe siècle se sont toujours produites en janvier et

février.

Si le pic de crue dure en moyenne sept jours, la

crue elle-même peut durer plusieurs semaines : la

décrue est lente et de nouveaux épisodes pluvieux

peuvent provoquer de nouvelles ondes de crue.

En 1910, l’inondation avait durée 45 jours. À cela

s’ajoute le temps du pompage, séchage et de la remise

en état.

La durée de l’inondation n’est pas un facteur

anodin, car une submersion prolongée cause des

dommages matériels considérables, même si le

niveau d’eau est très bas. Plus largement, c’est tout le

fonctionnement de la première région française qui

va être durablement perturbé.

l’aléa : une inondation qui en cache deux autres

En cas de crue centennale, la région métropolitaine

serait inondée de trois façons diff érentes, sachant que

selon les endroits, les submersions apparaîtront bien

avant la ligne d’eau de 1910.

L’inondation est d’abord liée au débordement

des cours d’eau. L’eau se répand sur la chaussée et

stagne pendant plusieurs jours. Cette stagnation

est à l’origine de nombreux risques car cette eau

turbide et nauséabonde dégrade tout ce qu’elle

touche. Lorsqu’elle se retire, elle laisse derrière elle

un enchevêtrement inimaginable de matériaux

de construction, de gravats, de végétaux en

décomposition, de cadavres d’animaux, mélangés à

des boues qui peuvent être souillées par des produits

toxiques, des hydrocarbures, des métaux lourds, etc .

Cette inondation de surface est accompagnée

d’une inondation souterraine, liée notamment à la

remontée de la nappe alluviale. En temps normal,

la Seine draine la nappe qui alimente le cours d’eau.

Mais l’écoulement s’inverse en période de crue : la

Seine vient alimenter la nappe dont le niveau s’élève.

Plus on s’éloigne du fl euve, plus l’infl uence de la

crue est faible et plus elle est ressentie avec retard

: l’arrivée de l’eau peut ainsi avoir entre dix jours

et trois semaines de retard. Il faut ajouter à cela

d’anciens bras du fl euve qui pourraient se remettre

en eau lors de la crue.

L’eau souterraine a une action très problématique

car elle menace l’équilibre hydrostatique des ouvrages.

L’eau arrache les particules fi nes, très nombreuses

en sous-sol, dans les remblais ou les mortiers,

déchaussant les fondations des bâtiments.

La remontée de la nappe est un phénomène

d’autant plus préoccupant que l’urbanisme souterrain

s’est fortement développé au cours du XXe siècle :

près de huit niveaux sont enterrés sous les pieds

des Parisiens. Ils abritent des caves, des parkings,

mais aussi des ouvrages souterrains tels que les

tunnels et les voies du métropolitain, les égouts, les

canalisations, etc. S’ajoutent des niveaux techniques

enterrés, des salles de réunion, des espaces de

stockages, etc. Le risque est ici très important : on

connaît très mal ces écoulements souterrains. Qui

plus est, la cartographie des sous-sols est rendue très

diffi cile par la multiplicité des formes d’occupation et

des statuts juridiques.

Or, à ces deux types d’inondation s’ajoute

celle provoquée par l’hydrosystème urbain. Les

villes contemporaines ont en eff et développé un

réseau hydrographique artifi ciel : c’est le système

d’évacuation des eaux usées et pluviales. En cas de

fortes précipitations, des galeries directement reliées

à la Seine – les déversoirs d’orage – sont utilisées.

Des « pompes usines », installées en bord de fl euve,

prennent le relais et déversent les eaux de pluie dans le

fl euve. Mais dans le cas d’une crue exceptionnelle, ces

mécanismes de sécurité ne peuvent plus fonctionner.

Le fl euve inonde alors la ville par les égouts. Or, ces

circuits d’évacuation permettent à l’eau de se diff user

très rapidement à tous les niveaux souterrains et de

remonter à la surface, loin du fl euve. Ainsi, en 1910,

le parvis de la gare Saint-Lazare, pourtant situé à

1400 mètre de la Seine, avait été inondé, l’eau s’étant

infi ltrée accidentellement par le puits d’aération d’un

chantier.

91

Page 92: Seur a Habit Er 2013

le Th ames Gateway, Londres, métropolisation et résilience ( d'après S.Beucher)

Le Th ames Gateway a accueilli la plupart des infrastructures des Jeux Olympiques de 2012. Il doit

accueillir plus du quart des besoins en logement du Grand Londres.

Au départ, c’est un projet de développement d'e water front de 38000 ha. Ce territoire est soumis à des risques

de submersions majeurs, avec un danger direct pour la vie des personnes. Selon l'Association des assureurs

britannique, 91% des nouveaux logements projetés sont situés en zone inondable; une inondation majeure dans

le Th ames Gateway pourrait coûter entre 14 et 21 milliards de livres.

Suite aux grandes inondations de 2007, la nécessité d’envisager des constructions résilientes, qui permettent

de réintégrer les locaux moins de trois semaines après un sinistre et non plus seulement résistantes s’impose

progressivement. Le TE2100 est alors lancé : ce programme vise à élaborer une « gestion intégrée des lits majeurs

afi n de trouver un compromis entre leur urbanisation et la prise en compte du risque d'inondation ». Cette stratgéie

off re la possibilité aux citoyens d'acquérir des terrains pour une durée de vingt-cinq ou trente ans. Une ville

durable est une ville qui s’adapte, en un renouvellement permanent: démolition/reconstruction.

Ce projet est désormais intégré aux objectifs de développement durable de la métropole et à la réfl exion sur

les conséquences du changement climatique avec la probable augmentation du niveau de la mer. Il associe des

mesures techniques de protection (surélévation des digues, grande barrière dans l’estuai re) à des mesures

architecturales (augmentation de la résistance des bâtiments) et une redéfi nition des modes de gouvernance

du risque, en particulier des acteurs impliqués. .

sources S.Beucher

92

Page 93: Seur a Habit Er 2013

Par conséquent, la carte des plus hautes eaux

connues ne correspond pas à la carte de risque eff ectif.

La zone impactée est en réalité beaucoup plus vaste

et discontinue que la zone inondée en surface.

un endommagement considérable

La crue ne provoquerait pas de victimes

directes. On peut toutefois craindre les accidents, en

particulier les incendies ou des noyades accidentelles.

On peut également redouter une augmentation de la

mortalité des personnes les plus fragiles et un risque

sanitaire au moment de la décrue.

Les dommages matériels seraient en revanche

considérables. On évalue pour l’instant à 17

milliards d’euros les dommages directs, chiff re qui

semble d’emblée largement sous-évalué puisqu’il ne

prend pas en compte les atteintes aux réseaux. Les

estimations les plus pessimistes prévoient jusqu’à 40

milliards .

Les perturbations fonctionnelles seraient en

outre absolument catastrophiques. Elles aff ecteraient

non seulement la vie quotidienne des populations

mais aussi la vie économique de la première région

française. Selon les estimations, 800000 personnes

seraient directement inondées, 2 millions seraient

privées d’électricité, et 2,7 millions seraient

aff ectées par des coupures d’eau potable. 170000

entreprises seraient touchées, dont 86000 inondées

et 70% du réseau de métro et de RER serait

arrêté pendant 30 à 50 jours . Ces perturbations

fonctionnelles seront essentiellement provoquées par

l’interruption des réseaux dits critiques (eau, énergie,

télécommunication, transports). En cas d’inondation,

ces réseaux seront soit directement atteints, soit

interrompront leur service de façon préventive (les

opérateurs pouvant ainsi non seulement garantir

la sécurité des usagers mais aussi la protection de

l’infrastructure).

L’arrêt ou le fonctionnement en mode dégradé

de ces réseaux aura des conséquences multiples, dans

et hors de la zone inondée :

M.Reghezza-Zitt/Seura

un lent retour à la normal après la crue

Idées clés :

- une crue inéluctable, dont le niveau peut

être supérieur au niveau de référence centennal.

- une situation de crise partiellement

imprévisible.

- la nécessité de distinguer des dommages

matériels, essentiellement situés en zone

inondée, des dommages fonctionnels, qui se

diff usent rapidement à l’ensemble du territoire

métropolitain, voire bien au-delà.

- une région métropolitaine menacée de

paralysie pendant le temps de la crue, mais aussi

de la décrue, soit au moins 45 jours.

- des conséquences décalées dans l’espace

(la paralysie aff ecte les espaces non inondés, les

impacts de la crue se diff usent hors du territoire

francilien) et dans le temps.

93

Page 94: Seur a Habit Er 2013

L’ouragan Sandy à New-York, retour d'expérience

L’ouragan Sandy a frappé New York le 29 octobre 2012, provoquant des inondations, en particulier dans

le sud de Manhattan et dans le métro. C’est la première fois qu’une ville globale est atteinte par une catastrophe

naturelle de cette ampleur. À ce titre, les retours d’expérience de Sandy doivent être examinés avec soins, car

ils nous renseignent sur ce qu’il pourrait advenir en cas de crue centennale dans la métropole parisienne, avec

deux diff érences toutefois : l’inondation a été rapide (et non lente), avec une eau salée (et non douce) qui a

provoqué la corrosion des matériaux.

Quel bilan tirer de Sandy ?

- la gestion de crise, en particulier, l’alerte et l’évacuation ont bien fonctionné, avec une communication

maîtrisée pendant la durée de la crise.

- l’approvisionnement en eau et denrées alimentaires a posé de graves problèmes, dans les quartiers

inondés, mais aussi dans ceux qui étaient privés d’électricité notamment pour les de Manhattan.

- la fourniture énergétique a été très pertubée : électricité et combustibles

- l’inondation des voies de circulation et celle du métro ont provoqué des embouteillages.Manhattan et

Wall Street ont été isolés pendant plusieurs jours, entraînant de lourdes pertes économiques.

- les solutions de protections contre l'inondation du métro se sont révélées insuffi santes et les dégâts

causés très cher ( + 4 Mds€).

- pendant l’inondation, un incendie s’est déclenché dans le Queens détruisant de nombreuses habitations

- les pollutions consécutives à l’inondation sont nombreuses. Elles posent la question des risques

environnementaux et sanitaires.

- la réouverture de la bourse a marqué symboliquement la résilience de la ville et la continuité

d’activité.

- la question de la reconstruction est aujourd’hui posée, avec la destruction de nombreuses habitations

abîmées par l’eau et le métro

sources Reuters

94

Page 95: Seur a Habit Er 2013

- la vie quotidienne sera extrêmement diffi cile

dans la zone inondée, nécessitant l’évacuation d’une

partie populations.

- les populations hors des zones non inondées

connaîtront aussi les eff ets de la crise, avec une vie

quotidienne dégradée pendant plusieurs semaines,

des diffi cultés pour se rendre à leur travail, pour

s’approvisionner en eau potable, denrées alimentaires,

essence, etc.

- la crue entraînera une paralysie plus ou

moins importante de l’activité économique, aussi

bien locale que régionale. Les impacts à l’échelle

nationale seront importants, quoique diffi ciles à

estimer. Les conséquences pour la métropole, à

l’échelle européenne et mondiale dépendront de sa

capacité à se relever rapidement.

Il est aujourd’hui impossible de prévoir l’ampleur

des perturbations : la multiplicité des enjeux et des

territoires ne permet pas de savoir le déroulement

exact de la crise. L’incertitude est un élément

fondamental dans ce type de situation, dont les

gestionnaires doivent tenir compte. Quelle que soit la

fi abilité des scenarii, il existe de nombreux imprévus :

la gestion du risque dans une métropole s’opère ainsi

partiellement à l’aveugle, mobilisant la capacité de

réaction et d’adaptation de chacun.

adapter la gestion du risque en fonction des espaces

Face à cette menace exceptionnelle, les pouvoirs

publics ont mis en œuvre des plans d’action qui se

déclinent en plusieurs volets : prévision, protection,

prévention. Ils répondent à plusieurs objectifs

: diminuer au maximum l’ampleur de l’aléa par

des actions techniques qui permettent de limiter

la hauteur d’eau et prévenir les débordements

; diminuer au maximum les conséquences de

l’inondation lorsqu’il est impossible de l’empêcher

en protégeant les personnes, en préservant les biens

lorsque cela est possible, en maintenant une activité

des infrastructures qui permettent le fonctionnement

de l’agglomération, même en mode dégradé ; assurer

un retour à la normale le plus rapide possible.

des solutions traditionnelles de gestion nécessaires mais insuffi santes

Les mesures de gestion les plus anciennes

conjuguent actions préventives en amont sur l’aléa,

avec en particulier, la construction de lacs réservoirs

et la modifi cation des conditions d’écoulement

(calibrage des berges, creusement des lits, etc.)

et actions de protection des populations et des

biens par des dispositifs techniques (murettes,

digues, batardeaux). Ces solutions off rent un gain

appréciable – à condition qu’elles fonctionnent

toutes, mais ne suppriment pas le risque. Elles

pourraient être complétées par l’augmentation des

capacités de stockage autour du projet de la Bassée,

qui serait là encore toutefois insuffi sant. Par ailleurs,

digues et murettes donnent un sentiment illusoire

de sécurité, qui encourage la perte de conscience du

risque. Or, les ruptures de ces dispositifs linéaires sont

particulièrement dangereuses car elles provoquent

des submersions rapides des espaces qu’elles sont

supposées protéger.

À partir du milieu des années 1990, alors que les

études réalisées par l’Institut interdépartemental des

barrages-réservoirs du bassin de la Seine (IIBRBS)

concluent à la non effi cacité économique de

nouveaux barrages, la loi Barnier instaure un zonage

réglementaire visant à contrôler l’occupation des sols.

Des Plan de prévention des inondations (PPRI)

sont ainsi prescrits avec des fortunes diverses. Leur

effi cacité est aujourd’hui très discutée dans la mesure

où ils sont très peu contraignants en zone déjà bâtie

et qu’ils ont fait l’objet de multiples dérogations

pour les zones à construire. Celles-ci sont autant

de contournements pour continuer légalement

l’urbanisation des secteurs jugés stratégiques pour le

développement métropolitain. Ils ont par ailleurs été

fortement contestés par les populations et les élus.

À l’heure actuelle, le bilan des PPRI est donc très

mitigé. Ils ont indéniablement suscité une prise de

conscience du danger dans les secteurs concernés,

mais ils ont aussi été vus comme une menace pour

les territoires et ont pu parfois servir d’alibi pour

continuer à urbaniser les zones inondables sans

95

Page 96: Seur a Habit Er 2013

prise en compte réelle du danger, alors même qu’ils

devaient permettre de contrôler cette urbanisation.

Des actions visant à réduire la vulnérabilité

matérielle des bâtiments (surélévation,

étanchéisation) ou des réseaux (renforcement de la

robustesse) sont aussi entreprises depuis la fi n des

années 1990 avec, là encore, une grande diversité

de résultats en fonction des acteurs, de leur degré

de sensibilisation aux risques et de leur moyens

fi nanciers.

Quoi qu’il en soit, ces mesures ne sont que

partiellement effi caces. Les pouvoirs publics ont

conscience que l’objectif n’est plus d’empêcher l’aléa

ou d’atteindre un niveau de protection absolu, mais

de s’adapter à un événement que l’on sait inéluctable

pour faire en sorte que la situation de crise ne se

transforme pas en catastrophe et que le retour à la

normale soit le plus rapide possible. Une telle posture

renvoie à une logique de résilience : résister mais

aussi s’adapter pour faire face et rebondir.

Ainsi, le plan de secours de la Zone de défense,

élaboré à partir des années 2000, qui s’inscrit

aujourd’hui dans le dispositif ORSEC, organise

non seulement la protection des Franciliens,

préoccupation fondamentale de la puissance publique,

mais coordonne également la gestion de crise entre

les diff érents acteurs. Ce plan distingue les questions

de sécurité civile (protection des populations,

évacuation, organisation de la vie quotidienne en

conditions dégradées, approvisionnement) des

questions de continuité d’activité qui relèvent des

acteurs privés. La cellule inondation sera appuyée

par les forces civiles et militaires, sachant que les

ressources sont beaucoup moins importantes qu’en

1910 (ainsi, le plan Neptune prévoit le déploiement

de 10000 militaires contre 100000 en 1910). Les

acteurs, privés et publics, sont invités à élaborer leurs

propres plans de secours, en fonction de leurs besoins

et de leurs ressources spécifi ques, pour pouvoir, une

fois l’alerte lancée, faire face de façon autonome à

la crise. La continuité d’activité, pendant et après la

crise, devient pour eux un objectif prioritaire.

du r isque urbain au r isque métropolitain

L’espace francilien a pour particularité de

superposer deux logiques géographiques distinctes

: une logique urbaine, qui renvoie aux pratiques

du quotidien, à l’espace proche et aux relations de

proximité, mais aussi à des fonctions économique

et politiques qui relèvent de la polarisation

traditionnelle des services dans des villes, et une

logique métropolitaine, qui concerne cette fois-ci

l’intégration d’une région urbaine à la mondialisation

et aux systèmes des métropoles internationales. Cette

logique métropolitaine repose sur la concentration/

spécialisation des activités de commandement de

la mondialisation, autour de services dit rares, qui

concernent aussi bien les fonctions fi nancières,

économiques, logistiques, scientifi ques, culturelles,

etc.

La métropolisation de l’espace francilien a eu des

conséquences majeures dans la transformation du

risque : pour un aléa de départ identique, on aura des

conséquences bien plus graves, qui ne peuvent être

imputées uniquement à l’augmentation du nombre

d’enjeux exposés du fait de l’urbanisation.

L’agglomération parisienne est ainsi soumise à

deux risques confondus : un risque urbain classique,

que l’on retrouve dans n’importe quelle ville

française, qui concerne les populations et les biens

directement exposés à la submersion ; un risque

métropolitain, qui a pour caractéristique d’être

ubiquiste (plusieurs territoires sont touchés en même

temps), multiscalaires (une perturbation locale a des

conséquences à l’échelle de l’agglomération, de la

région urbaine, du pays) et largement imprévisible

(on passe du registre du risque, où la probabilité

d’occurrence d’un événement est mesurable et

où des scenarii peuvent être proposés, à celui de

l’incertitude).

Ce risque métropolitain est produit par

la transformation de l’espace consécutive à la

métropolisation. Celle-ci a suscité l’émergence de

pôles, qui concentrent l’ensemble des fonctions

96

Page 97: Seur a Habit Er 2013

stratégiques de commandement politique,

économique, culturel, logistique, etc. Ces pôles,

physiquement éloignés les uns des autres,

fonctionnent en réseau de sorte qu’ils se trouvent

en situation d’interdépendance importante. Ils

commandent en outre des territoires de plus en plus

vastes. Lorsqu’une perturbation les aff ecte, elle va se

propager rapidement à l’ensemble des territoires qui

dépendent d’eaux. Aussi, un aléa au départ localisé

peut-il avoir des conséquences sur des espaces situés

à plusieurs dizaines voire centaines de kilomètres.

La Défense, Rungis, Roissy, le plateau de Saclay,

Marne-la-Vallée, pour ne citer que quelques centres

métropolitains, subiront des perturbations majeures

alors même que ces lieux ne sont pas inondables.

La métropolisation a par ailleurs eu des

conséquences sur l’habiter des populations, de sorte

que le risque métropolitain croise le risque urbain.

Dans la métropole, la généralisation de la voiture

individuelle et des transports en commun ont permis

une dissociation des lieux de résidence, de travail, de

loisirs et de consommation. Dès lors, les individus

plus mobiles, sont aussi plus dépendants des réseaux

de transports. Plus largement, le progrès technique

a permis une amélioration sans précédent des

conditions de vie, qui passe par une forte dépendance

aux réseaux de distribution d’eau, d’énergie, de

télécommunications.

Cette dépendance implique des perturbations

majeures en cas de panne : l’incapacité de l’un de

ses réseaux à assurer son service a des eff ets aussi

bien sur la vie quotidienne que sur les activités

économiques. Que l’origine de la panne soit

volontaire (acte de terrorisme ou de malveillance)

ou accidentelle, qu’il s’agisse des conséquences d’une

tempête, d’une inondation, d’un accident industriel

ou d’une épidémie, le résultat est identique : des

coûts fi nanciers élevés et une désorganisation plus

ou moins importante du corps social, pouvant aller

jusqu’à la paralysie.

Le risque métropolitain est aujourd’hui le plus

diffi cile à appréhender car il ne relève pas des schémas

classiques de gestion : l’objet n’est pas la sécurité civile

mais les pertes matérielles et la continuité d’activité

; les dommages matériels sont certes importants,

mais infi niment moindre que les coûts engendrés

par les perturbations fonctionnelles ; les pertes sont

en partie intangibles et décalées dans le temps ; le

territoire du risque n’est pas celui de l’aléa (ici la zone

inondée) ; les solutions classiques de protection,

prévention et gestion de crise ne sont pas adaptées à

la problématique posée.

des vulnérabilités différenciées selon les enjeux et les territoires

Dans ces conditions, avant même de vouloir

urbaniser les zones inondables (ou interdire leur

urbanisation), encore faut-il savoir à quel risque

elles sont exposées et rappeler que la logique

métropolitaine (et donc les projets d’aménagement

qui visent à développer la métropolisation) produit

du risque hors des zones inondables.

Il est alors nécessaire de qualifi er préalablement le

type d’espace en fonction du risque et des vulnérabilités

qu’il présente, en distinguant les vulnérabilités

matérielles (potentiel d’endommagement matériel,

c’est-à-dire d’atteinte à l’intégrité physique des biens

et des personnes) des vulnérabilités fonctionnelles

(potentiel de perturbations fonctionnelles). Il

faut également souligner qu’il n’est pas nécessaire

d’être matériellement endommagé pour subir ces

perturbations : le réseau RATP n’assurera pas son

service du fait des fermetures préventives et de l’arrête

de l’alimentation électrique ; les entreprises hors

zones inondables ne pourront pas travailler car leurs

employés ne pourront pas se rendre sur le site, etc.

Par ailleurs, les perturbations fonctionnelles peuvent

provoquer des dommages matériels (le court-circuit

qui provoque l’incendie, la panne d’électricité qui

ne permet plus d’alimenter la chaîne du froid et qui

fait que les produits se périment, etc.). La relation

qui unit vulnérabilité matérielle et vulnérabilité

fonctionnelle n’est donc pas linéaire.

Pour expliquer ceci, il faut ajouter un troisième

type de vulnérabilité que nous appellerons «

vulnérabilité structurelle » et qui désigne le potentiel

97

Page 98: Seur a Habit Er 2013

d’endommagement lié à la structure ou à l’organisation

de l’enjeu, du système, du territoire concerné. Ainsi,

si un territoire est fortement d’indépendant d’un

autre territoire, il sera lourdement aff ecté par la

perturbation de ce dernier, même si lui-même n’est

pas directement atteint. Un réseau à la structure

maillée off rira des trajets alternatifs à ses usagers, qui

limiteront considérablement les perturbations en cas

d’atteinte de l’une des stations. Une organisation très

centralisée subira des perturbations considérables si

le centre est endommagé alors qu’une organisation

polycentrique verra la perturbation se diff user

très rapidement, du fait des interdépendances des

éléments qui la composent.

Il est à noter ici que la distinction proposée

s’applique aussi bien à l’échelle du bâtiment

que du quartier, du territoire communal ou de

l’agglomération métropolitaine.

Dans ces conditions, on peut distinguer des

profi ls de territoires, qui présentent des vulnérabilités

particulières et appellent donc un traitement adapté.

Pour déterminer ces profi ls, nous croisons un certain

nombre de critères :

- le gradient de centralité : plus l’espace est

proche du centre de l’agglomération, plus la mixité

fonctionnelle est grande. Ces espaces centraux ont

pour caractéristiques de mélanger des logiques

urbaines et métropolitaines et de présenter des

vulnérabilités multiples.

- le degré d’insertion au processus

métropolitain : plus l’espace est intégré à la

dynamique de métropolisation, plus la vulnérabilité

fonctionnelle est importante.

- le caractère stratégique de l’espace, qui

dépend en partie des fonctions qu’il assure dans la

métropole.

à quelles conditions peut-on urbaniser des zones inondables ?

L’urbanisation des zones inondables en Île-

de-France, et plus largement dans une région

métropolitaine demande donc de changer de logique.

Il ne s’agit plus de prévenir un risque sur un territoire

mais d’intégrer l’existence des risques à la réfl exion

sur le devenir de ce territoire, autrement dit encore,

de ne plus gérer un risque sur un territoire mais de

gouverner un territoire à risques.

Ce changement de logique radical fait passer

l’aménagement d’une impossible quête du « risque

zéro » à la prise en compte d’un risque acceptable

collectivement défi ni et négocié. L’aménagement

doit ici créer les conditions du « vivre avec l’eau » :

il fabrique de nouveaux territoires et transforme les

modes d’habiter.

définir le niveau de r isque acceptable pour chaque territoire

Quel risque la société est-elle prête à admettre?

Quels risques chacun est-il prêt à prendre? Quel

bénéfi ce est attendu en contrepartie? Quel prix est-

on individuellement et collectivement prêt à payer

pour sa sécurité?

On peut poser ici une limite claire, qui est

celle implicitement défi nie par les pouvoirs publics

lorsqu’ils élaborent le dispositif ORSEC inondation.

Lorsque des vies humaines sont en jeu, la puissance

publique a pour devoir de mettre en place des

politiques dites de «sécurité civile» qui traitent les

conséquences négatives du risque et tentent de le

prévenir en amont. Le seuil de risque acceptable n'est

alors pas négociable : il est défi ni socialement par le

principe qui veut que l'État protège la vie humaine et

que tout risque pour les personnes est inadmissible.

Dans ce contexte, il semble par exemple totalement

contre-productif de poursuivre l’urbanisation

des zones inondables à des fi ns de spéculation

immobilière dans des secteurs non stratégiques.

Dans le cas où la vie humaine n’est pas en danger,

98

Page 99: Seur a Habit Er 2013

mobilités, et donc la dépendance à ces réseaux, et

produire des vulnérabilités inutiles et extrêmement

coûteuses.

- enfi n, on peut agir sur la vulnérabilité

structurelle en travaillant selon une démarche

transversale et globale, qui prend en compte

l’organisation spatiale des territoires, les relations

d’interdépendances entre les lieux, leur inscription

dans des systèmes territoriaux plus vastes. Pour

cela, il est nécessaire de penser le risque à l’échelle

du territoire fonctionnel, qui n’est pas défi ni par les

périmètres administratifs classiques mais qui tire sa

cohérence des solidarités entre les diff érents lieux, des

mobilités, des fl ux, des échanges, des spécialisations

et complémentarités qui se dessinent peut à peu à

l’échelle de la région métropolitaine.

Par conséquent, les choix d’aménagement doivent

s’opérer en fonction de la nature des territoires, de

leur exposition directe et indirecte au risque, de

leur rôle dans l’espace urbain et métropolitain. Si

le gel de certains projets d’aménagement aurait

des conséquences extrêmement lourdes pour les

territoires, ces derniers ne peuvent faire abstraction

de l’existence du risque. Celui-ci doit être intégré

systématiquement dans la réfl exion sur le devenir

de la métropole et des espaces urbains, non pas du

point de vue d’une utopique recherche du risque

zéro, qui conduit la plupart du temps à l’incurie et à

la négation du danger, mais à partir d’une logique de

risque acceptable dans laquelle l’aménagement est un

outil qui permet justement d’agir sur les vulnérabilités

matérielles, structurelles et fonctionnelles.

accompagner les mesures techniques d’un dispositif préventif

Si l’urbanisme de zone inondable a connu

d’énormes avancées, l’existence de solutions

techniques permettant d’occuper les zones

inondables doit être impérativement accompagnée

d’un dispositif préventif qui repose sur trois volets :

- l’information des populations, qui demande

d’affi cher le risque et non plus de le cacher ;

- la mise en place d’un dispositif

l'objectif de la gestion est autre. Il s'agit de rechercher

un équilibre, un compromis, entre les avantages

et les inconvénients des prises de risques des

projets collectifs ou individuels de développement

économique, urbain ou encore social. On passe alors

d’une logique de « sécurité civile » à une logique de

« sûreté individuelle » dans laquelle chacun défi nit

le niveau de risque qu’il est prêt à prendre, tout

en respectant le cadre général fi xé à une échelle

collective, à partir de principes éthiques et selon des

modalités démocratiques. La prise de risque doit être

ici calculée et affi chée : elle implique de transférer la

responsabilité de la décision, avec des contreparties

lourdes puisqu’en cas d’inondation, ce sont les

individus, les entreprises ou les communes et non la

société solidaire, qui devront payer les pertes.

adapter l’urbanisme

Dans le cas où la vie humaine n’est pas en danger,

un certain nombre de mesures techniques peuvent

permettre de réduire la vulnérabilité. On peut agir

sur les trois niveaux de vulnérabilité :

- des mesures architecturales peuvent être

appliquées à l’échelle des bâtiments afi n de réduire

sa vulnérabilité matérielle. L’ingénierie propose

désormais de nombreuses solutions techniques,

tant en termes de matériaux résistants à l’eau que

de normes de construction, qui peuvent se révéler

très effi cace en cas de sinistre. Si leur coût peut être

important, leur intégration au cahier des charges

de la construction durable leur permettrait d’être

facilement valorisées en tant que telles. Elles peuvent

aussi être accompagnés de dispositifs ponctuels de

protection, adaptés au niveau des plus hautes eaux

connues pour un territoire donné.

- au-delà du bâtiment, c’est l’ensemble de

l’urbanisme qui doit être repensé pour permettre

de limiter les vulnérabilités fonctionnelles. Une

attention particulière doit être apportée aux

réseaux techniques critiques. Ainsi, implanter des

infrastructures de transport en commun en site

inondable (en surface ou en sous-sol) alors même

que la construction de ces transports va modifi er les

99

Page 100: Seur a Habit Er 2013

organisationnel à l’échelle du territoire, qui permette

en cas de crue de réagir de façon adéquate et de

limiter les dommages ;

- une réfl exion préventive sur l’après-crise, avec

en particulier la question de fonds d’indemnisation

spécifi ques propres aux territoires (problème de

l’assurance et du coût des primes), du nettoyage et de

la reconstruction.

Cette urbanisation « s ous conditions » demande

une fois de plus de changer de culture du risque : les

solutions techniques ne sont qu’un outil au service de

l’aménagement. Elles ne peuvent être un alibi pour

faire n’importe quoi ni donner un illusoire sentiment

de sécurité

gérer le risque selon une logique métropolitaine : de la ville durable à la métropole résiliente

Si le risque est longtemps apparu comme une

contrainte à l’aménagement, il peut - et doit - être

envisagé comme une opportunité, dans la mesure

où la sécurité et la capacité de résilience d’une

métropole sont désormais considérées comme un

avantage comparatif favorable dans la compétition

internationale. La question n’est plus de savoir si l’on

est exposé ou non à un risque, dans un univers rendu

incertain par la globalisation fi nancière, les menaces

environnementales planétaires ou la fi n des équilibres

géopolitiques traditionnels. La métropole, et avec elle

le pouvoir politique et les habitants, doivent montrer

qu’ils capables de faire face à ces incertitudes, de

s’adapter aux mutations rapides des environnements,

de dépasser les perturbations, de se reconstruire si

possible en mieux, en tirant les leçons des crises.

Cet impératif est désormais porté par le

qualifi catif « résilient », qui est présenté comme

une injonction par les instances internationales.

Construire des villes résilientes est un projet

ambitieux, qui ne saurait se limiter à un affi chage

marketing : c’est un défi technique, mais aussi et

surtout politique, qui demande de bâtir une nouvelle

culture du risque. Le risque n’est plus caché : il est

mis en avant.

Affi cher le risque reste en France un impensé

de la gestion et de l’aménagement des territoires,

car l’association d’un risque-territoire est fortement

stigmatisante pour ce dernier. Alors même que la

reconquête des berges de fl euves est devenue un volet

important des projets d’aménagement « durables »,

alors même que ces berges deviennent de plus en

plus attractives du fait des aménités paysagères et

de la qualité de vie qu’elles sont supposées off rir, le

caractère inondable de ces espaces est tu, quand il

n’est pas nié purement est simplement, par crainte de

dégrader l’image du lieu (et donc sa valeur foncière).

Or, d’autres pays ont fait des choix radicalement

opposés, sans voir pour autant l’attractivité des espaces

concernés décliner : personne n’ignore que Tokyo ou

Los Angeles sont soumis à des risques sismiques

majeurs ; New York a su faire face à des attaques

terroristes de grande ampleur et à deux cyclones ;

Londres et la Randstad hollandaise se préparent à des

inondations majeures. Dans tous les cas, l’attractivité

de ces métropoles ne faiblit pas : le risque est affi ché

et la capacité à y faire face est valorisée. La gestion

des risques est intégrée dans une réfl exion plus large

sur la transition écologique, la ville durable, etc.,

les villes devenant des laboratoires grandeur nature

d’innovation. Les techniques développées off rent

une valeur ajoutée aux constructions, participent

à la création d’une image positive des territoires

métropolitains. Elles sont accompagnées de la

mise en place de mobilisations populaires, avec une

implication plus ou moins forte des habitants de

ces territoires, qui contribue à redéfi nir de nouvelles

formes de citoyenneté urbaines. La ville s’adapte,

dans sa dimension matérielle, fonctionnelle mais

aussi organisationnelle et politique.

Défi nir le risque acceptable ne signifi e pas céder

au fatalisme et légitimer l’incurie ; promouvoir à

l’adaptation et redéfi nir les responsabilités de chacun

ne saurait en aucun cas cautionner le désengagement

des pouvoirs publics de leurs missions régaliennes ;

l’objectif de résilience ne doit pas non plus conduire

à conforter, voire à créer, des inégalités entre les

100

Page 101: Seur a Habit Er 2013

Idées clés

- la crue centennale est à l’origine de deux

dynamiques de risque diff érentes : un risque

urbain classique et un risque spécifi que aux

espaces métropolitains fortement intégrés à la

mondialisation.

- les solutions traditionnelles de gestion

permettront d’assurer la sécurité des personnes

et de limiter l’endommagement matériel mais

elles ne sont pas adaptées à la problématique

métropolitaine.

- dans le cas francilien, les solutions

traditionnelles de gestion ont pour objectif non

pas d’empêcher la crise, mais d’y faire face et de la

dépasser le plus rapidement possible.

- la double nature du risque demande de

considérer la spécifi cité des territoires.

territoires et les individus (entre ceux qui seraient

résilients et ceux qui ne le seraient pas).

Le devenir d’un territoire est d’abord un choix

politique : en ce sens, la gouvernance du risque

est un volet de la gouvernance métropolitaine.

Le territoire du risque métropolitain est celui

de la métropole : c’est le territoire réticulaire des

solidarités fonctionnelles entre les diff érents pôles

métropolitains. De fait, il n’existe pas aujourd’hui

d’acteur susceptible de proposer une vision globale

et transversale de la gestion, en particulier, d’articuler

la prise en compte du risque métropolitain et les

projets d’aménagement aux diff érentes échelles. Le

bricolage politico-institutionnel a prévalu en Île-de-

France n’est plus à même de répondre aux défi s des

risques métropolitains, quelle que soit leur origine

(inondation centennale, mais aussi épidémie, panne

ou acte de terrorisme de masse) : trop d’acteurs,

trop d’enjeux, trop de périmètres de compétences

et pas de chef d’orchestre. Si les questions de

sécurité civile sont bien intégrées, avec l’action de la

préfecture de Police à l’échelle de la zone de Défense,

le risque métropolitain n’est envisagé que de façon

parcellaire et presque incidemment. En ce sens, et

pour paraphrase P. Estèbe, la gestion est toujours à la

recherche d’un pilote.

101

Page 102: Seur a Habit Er 2013
Page 103: Seur a Habit Er 2013

quels outils d'aménagement pour la métropole?Pour des SPL d'intérêts métropolitainsPour des SPL d'intérêts métropolitainsEric Bérard + Rémi Dorval + Alain Garès Eric Bérard + Rémi Dorval + Alain Garès ........103 ........103Le logement du Grand Paris: le point de vue d'un bailleur social. Le logement du Grand Paris: le point de vue d'un bailleur social. Sylvie Froissart-Jouhier + Pierre Paulot - I3F Sylvie Froissart-Jouhier + Pierre Paulot - I3F ........111

sources David Mangin/Seura

Page 104: Seur a Habit Er 2013

sortir de "l'urbanisme de la moyenne "

la hauteur, une notion toute relative

sources D.Mangin/Seura104

Page 105: Seur a Habit Er 2013

Des SPL d'intérêt métropolitain Eric Bérard + Rémi Dorval + Alain Garès

Les diff érentes analyses, eff ectuées par les

membres de l’équipe, sur les réponses à apporter à la

crise du logement, la mobilité, l’organisation spatiale

avec les choix stratégiques à faire sur le périurbain,

l’intégration de stratégies publiques/privés pour

accélérer la réalisation des opérations, l’évolution de

la gouvernance pour faire face au défi du Grand Paris,

amènent à se poser la question de la bonne échelle du

projet d’aménagement et les moyens qui pourraient

lui être dédiés pour atteindre les objectifs du projet à

moyen et long terme.

l'aménagement urbain en France:

En France aujourd’hui, une opération d’aménagement

se déroule classiquement en deux séquences

consécutives :

-l’une réglementaire sous maîtrise d’ouvrage

publique de la collectivité (intercommunale, locale,

et Régionale en Idf ) avec la mise en place des SCOT

(+SDRIF en Idf, devant être validé par un décret en

Conseil d'Etat) puis des PLU à partir desquels les

outils opérationnels réglementaires seront déclinés

(permis de construire, lotissement, ZAC PUP….) ;

-l’autre opérationnelle avec la mise en place

d’un opérateur dont le profi l sera diff érent mais

en relation avec la nature, le programme et la taille

de l’opération (propriétaire foncier, monteur-

constructeur, promoteur, lotisseur, SEM, SPL,

EPA…), la réalisation des équipement publics

structurants restant de la compétence de la collectivité

ou de l'Etat dans des cas très précis. Cette situation

entraîne pour les opérations importantes hors OIN

(opération d'intérêt national) la mise en place d’un

aménageur de type SEM ou SPL qui intervient en

général dans le cadre d’une ZAC dont le programme

de construction est défi ni, souvent avec précision et

au périmètre fermé, et dans le cadre d’une vision de

réalisation qui apparaît rigide. Cette tendance à fi ger

le contenu des opérations résulte des interventions

de l’Europe en 2005 qui a placé les opérations

d’aménagement, réalisées par le privé (SEM,

Promoteurs, Aménageurs privés…) sous contrat

avec les collectivités territoriales, dans le secteur

marchand (application du droit de la concurrence)

; l’obligation de mise en concurrence impose de

défi nir précisément l’objet de la consultation, et

par conséquent amène à (trop) préciser en amont

le contenu de l’opération qui de ce fait se trouve

fi gée pour les années à venir. Cette position amène

à un certain conformisme dans la conception et la

conduite des opérations, certes confortable pour des

structures sous fi nancées, adossées à des collectivités

peu imaginatives pour leur développement, alors

que l’outil ZAC permet des pratiques plus diverses

puisqu’il n'entraîne pas obligatoirement le transfert

foncier à l’aménageur et que bien utilisé il peut

permettre de combiner secteur de PUP, intervention

en macro-lot, portage immobilier économique, etc…

Cependant face à la problématique du Grand

Paris ce processus d’aménagement apparaît contraint,

peu dynamique et étriqué car ce sont les conditions

d’aménagement des grands territoires qu’il convient

d’appréhender.

105

Page 106: Seur a Habit Er 2013

une proposition formelle, inspirée des bonnes pratiques provinciales

Penser l’aménagement des grands territoires

c’est d’abord mettre en place une réforme

institutionnelle qui permette un portage politique

de ces projets d’aménagement avec les moyens

fi nanciers correspondants. Marc Wiel et Jean-

Pierre Orfeuil ont exprimé des orientations et

propositions qui vont dans un sens positif, à savoir

créer des intercommunalités (regroupement de

communes et d’intercommunalités) correspondant

aux bassins d’emplois locaux dont les périmètres et

les contenus quantitatifs et qualitatifs seront défi nis

par le pouvoir métropolitain (tel qu'il résultera de

la Loi Lebranchu), maître d’ouvrage du schéma de

développement de l’aire urbaine du Grand Paris.

Ces intercommunalités apparaissent

indispensables et leur articulation avec le niveau

métropolitain nécessaire pour créer une vraie

dynamique opérationnelle, car sans portage politique

local identifi é il n’y a pas de projet d’aménagement.

Pour autant, il ne faut sans doute pas s’attacher

à une défi nition totalement rationnelle de ces

intercommunalités : les bassins d’emplois sont

une notion indicative pour leur périmètre, qui

dépendra en réalité de multiples facteurs liés aussi à

l’histoire locale, aux affi nités, voire aux personnes…

Néanmoins, ce niveau – que Marc Wiel qualifi e

de « local » à l’échelle de la région parisienne,

semble indispensable à une véritable mise en place

opérationnelle de projets d’aménagement.

Ces intercommunalités étant constituées, une

gouvernance des projets d’aménagement pourra

être mise en place. Ces projets d’aménagement

devront couvrir une aire d’action suffi sante pour

intégrer toutes les fonctions urbaines nécessaires

à la réalisation de vrais pôles de vie dans le cadre

d’un développement multipolaire de la « Région

Capitale ». Ainsi de tels territoires de projets qui

peuvent combiner transformation du tissus existant

(transformation de friches industrielles et tertiaires

vielles ZA, résorption de l’habitat insalubre et

rénovation urbaine, évolution des zones commerciales

et tissus pavillonnaires …) et développement

d’opérations urbaines innovantes autour des gares du

réseau « Grand Paris Express » pour répondre aux

besoins, en logements, activités voire équipements

structurants lourds, doivent être dotés d’une maîtrise

d’ouvrage forte s’appuyant sur deux piliers dotés du

professionnalisme correspondant: le premier, un

comité de pilotage stratégique adossé à la collectivité

ayant les pouvoirs fi nanciers et planifi cation ; le

second, la fonction aménageur pour la mise en œuvre

des ouvrages et nouer les partenariats nécessaires aux

interventions immobilières et urbaines complexes.

L’articulation de ces projets par rapport aux

CDT sera à défi nir cas par cas. Dans certains cas, ces

territoires de projet pourront représenter une partie

d’un CDT, dont ils constitueront l’une des formes

de mise en œuvre. Dans d’autres cas, sans doute plus

nombreux, ils peuvent au contraire pallier l’absence de

CDT en proposant néanmoins un véritable dispositif

opérationnel. Cette solution paraît meilleure que la

généralisation des CDT, qui a pu être envisagée, mais

ne semble pas pertinente si l’on souhaite conserver le

caractère relativement exceptionnel du CDT, inscrit

dans sa défi nition même.

La taille de ces territoires de projet est à défi nir

en fonction du contenu du programme prévisionnel

donnant une cohérence urbaine à un bassin de vie,

sachant qu’un objectif global de réalisation sur 15

à 20 ans apparaît raisonnable, si l’on regarde les

programmes de même nature en province (l’Ile

de Nantes, La Route de la Mer à Montpellier,

Euratlantique à Bordeaux,…), c’est la strate 750ha

(correspondant au pôle élargi de la Défense) à 2500

ha (le quart de Paris intra-muros) qui peut apparaître

comme territoire pertinent d’intervention (stratégie

à examiner plus fi nement lors de la défi nition des

premières opérations) ; afi n de réaliser des pôles

secondaires d’équilibre au sein de la métropole du

Grand Paris.

Quel positionnement et quel contenu des

missions pour l’aménageur de ces territoires de

projets?

106

Page 107: Seur a Habit Er 2013

Dans le cadre du Grand Paris il semblerait

souhaitable qu’il y ait un aménageur par

intercommunalité, voire dans certain cas un par

territoire de projet, si une intercommunalité

développait plusieurs projets. L’expérience montre

que l’équipe opérationnelle de l’aménageur, pour être

effi cace, doit se trouver totalement investie dans le

projet et ne pas subir une structure trop lourde.

quelle doit-être la nature juridique de cet aménageur ?

Les collectivités ont le choix entre plusieurs

types de structures pour réaliser leurs opérations

d’aménagement, la Régie Directe avec du personnel

de la collectivité, la SEM, la SPL et dans certains cas

la possibilité de contracter avec l’Etat dans le cadre

d’un OIN. Pour arrêter ce choix plusieurs critères

sont à prendre en compte, et la structure retenue doit

présenter plusieurs caractéristiques :

- une souplesse d’intervention dans le temps,

tant sur le plan du programme que des évolutions

économiques locales, nationales ou internationales

qui ne remettent pas en cause les conditions

d’interventions de la structure,

- une proximité étroite entre la collectivité

maître d’ouvrage et les fi nanceurs des équipements

publics structurants du projet, au premier rang

desquels la Région,

- disposer de fonds propres importants pour

peser sur le volet foncier et immobilier de manière

à favoriser des opérations à vocations économiques

et sociales que le privé ne peut pas toujours fi nancer

seul.

Par son manque de souplesse de gestion la

Régie Directe n’est pas un choix a priori. La SEM,

depuis les contraintes imposées par l’Europe

en 2005 obligeant les collectivités à mettre ces

structures en concurrence pour toutes les opérations

d’aménagement, et, la diffi culté pour celle-ci

de revoir le contenu de leurs missions en cours

d’exécution, est devenue un choix problématique

pour les opérations de grande envergure dont les

aléas programmatiques sont inévitables dans le

temps. Reste la SPL (Société Publique Locale) dont

l’objet principal sera l’aménagement pour assurer la

maîtrise d’ouvrage d’un tel projet. Ce type de société

obéit aux principales règles suivantes :

- son capital est composé d’actionnaires issus

uniquement de collectivités locales et territoriales

(deux actionnaires minimum suffi sent),

- elle est soumise aux règles du droit

commercial bénéfi ciant de toutes les souplesses du

secteur privé pour son fonctionnement ; mais elle

conserve certaines obligations du droit public pour

l’attribution des contrats avec ses prestataires (Décret

du 6 juin 2005)

- elle n’a pas à être mise en concurrence pour

se voir attribuer une opération d’aménagement par

l’un de ses actionnaires.

Ce type de société à été crée en droit français

par une Loi de juin 2011 et est conforme au droit

européen qui la juge «IN HOUSE» c'est-à-dire sous

le contrôle de sa collectivité actionnaire pour qu’elle

puisse être considérée par celle-ci, dans l’attribution

des opérations, comme une extension de ses propres

services, ce qui justifi e qu’elle soit dispensée de mise

en concurrence ; ce type de structure apparaît la

mieux adapté pour développer les projets territoriaux.

Quant aux OIN (Opérations d’Intérêt

National), en général accompagnées de la création

d’une Etablissement Public d’Aménagement, elles

supposent un engagement fi nancier de l’Etat dont

on peut penser qu’il est diffi cilement envisageable

désormais, et qu’il restera en tout état de cause

exceptionnel. Par ailleurs, le portage politique par les

collectivités dans ce dispositif ne se fait qu’au second

degré, même si ces structures sont bien au service du

projet. Nous traiterons leur cas dans le chapitre III

relatif à la prise en compte des structures existantes.

A noter le rapport du CGPC de mai 2008 n° 005690-

01 sur «Les outils de l'aménagement et les conditions

pratiques de leur utilisation » qui compare les SPL,

les SEM et les EPA (ouvrage écrit sous la direction

de Francis Rol-Tanguy et Laurence Daudé).

107

Page 108: Seur a Habit Er 2013

Enfi n, une voie est peut être à explorer avec

un nouveau dispositif, dont la mise en place est

évoquée actuellement dans le cadre de la préparation

de la future loi sur l’urbanisme et l’aménagement,

et qui consisterait à créer une nouvelle catégorie

d’opérations, dénommée OIM « Opérations d’Intérêt

Métropolitain ». Destinée à combler le vide qui existe

entre la ZAC classique et l’OIN, elle permettrait de

lancer, dans les métropoles et à leur initiative, des

opérations de grande envergure, qui ne seraient

pas pour autant des OIN, et qui associeraient la

collectivité, l’Etat et d’autres partenaires éventuels.

Ces opérations seraient inspirées des CDT à la fois

pour leur caractère contractuel et le fait qu’une fois

approuvée, elle emporterait mise en conformité du

SCOT et des PLU. On peut imaginer qu’en retour,

des opérations de ce type soient montées en Ile de

France soit pour mettre en œuvre un CDT, soit pour

pallier à l’absence de CDT dans les secteurs qui n’en

possèdent pas. Il est prévu que de telles opérations

s’appuient sur une SPL, que l’on retrouve donc

comme structure adaptée à ce contexte, pour mettre

en œuvre le projet qu’elles portent.

Un des intérêts majeur de la SPL, au-delà de

ce qui a été dit ci-dessus, est que son partenariat

de base pour tous les projets peut être au minimum

l’Intercommunalité (lieu du projet) et la Région,

acteur majeur du Grand Paris, qui sera associée dans

la société d’aménagement afi n de suivre l’opération.

Elle pourra par ailleurs mandater la société pour

réaliser également les grands équipements qu’elle

fi nance. Ce partenariat Intercommunalité/Région,

qui est certainement une des clés de la réussite du

futur Grand Paris, trouverait donc également sa

traduction opérationnelle dans un dispositif à la fois

suffi samment générique et suffi samment adaptable

pour répondre à toutes les situations.

C'est en tous cas un idéal institutionnel vers

lequel il serait intéressant de tendre à brève échéance.

Concernant la mise en œuvre opérationnelle,

l’article L300-1 combiné avec l’article L300-4 du

code l’urbanisme permet à un projet d’aménagement

d’être mis en oeuvre lorsque la collectivité a défi ni le

contenu et le programme du projet d’aménagement

(article L300-1) et ses conditions de mise en œuvre

(article L300-4) par concession à une structure

d’aménagement y ayant vocation (la SPL crée en

l’occurrence).

Ainsi dés que le programme du projet de

territoire sera arrêté et le périmètre défi ni la structure

d’aménagement pourra intervenir dans le cadre d’une

concession d’aménagement couvrant l’ensemble du

secteur à aménager. Un préalable devra toutefois être

levé à savoir l’étude de la faisabilité fi nancière du

projet au regard de certaines contraintes à examiner

telles que : la pollution des sols, les risques naturels, les

zones sensibles, la dureté foncière, une approche des

coûts en équipements publics structurants ainsi que le

contexte économique de réalisation des programmes

immobiliers ; ces éléments permettront de dresser un

premier cadrage fi nancier à grande échelle pour défi nir

les enjeux fi nanciers de l’opération. Aujourd’hui une

opération d’aménagement d’envergure à un coût qu’il

convient de fi nancer à long terme et qui implique

les collectivités territoriales et leurs délégataires

économiques potentiels.

la nécessité de composer avec les outils existants dans un souci de rapidité de mise en œuvre opérationnelle du Grand Paris

La vision formelle idéale exprimée dans le

chapitre précédent se heurte à la réalité francilienne

: des collectivités parfois très en avance en matière

d'ambition aménageuse (Plaine Commune, la

Défense...), parfois peu habituées aux contraintes

et leviers du développement urbain complexe

(Confl uence, Est 93...). Il y a fort à parier que de

nombreuses années soient nécessaires à l'émergence

de ces intercommunalités de projet, fortes et

structurées, que nous appelons de nos vœux. Les

lois Voynet-Chevènement n'ont-elles pas nécessité

une dizaine d'années pour percoler (avec le succès

que l'on sait!) à travers nos communes franciliennes?

Il est vrai qu'elles étaient fondées sur le concept

de développement durable, insuffi sant à créer du

108

Page 109: Seur a Habit Er 2013

contenu, encore moins du projet...

Il ne faut pas non plus perdre de vue le fait que

les départements de la petite couronne ont tous

développé des SEM (SEM 92, SEQUANO,SADEV

94) très staff ées et compétentes, ayant une taille

suffi sante pour pouvoir répondre à la mise en

concurrence permanente liée à la directive de 2005,

elles vont devoir réfl échir à leur devenir au regard des

enjeux opérationnels de demain.

Enfi n, depuis 50 ans maintenant, l'Etat a tenu à

bout de bras le développement francilien en créant

et garantissant fi nancièrement les EPA (souvent

adossées à des OIN), l'AFTRP (aménageur d'Etat

sans périmètre) et récemment la Société du Grand

Paris.

Concernant la SGP, la possibilité qui lui est

donnée par la loi de juin de 2010 d'être aménageur

(dans un périmètre de 400m autour des gares et

si les collectivités le souhaitent) est un outil de

développement d'une greff e urbaine, certes modeste,

au moment même où le réseau de transport nouveau

sera mis en service. Il ne faut pas négliger ce rôle de

catalyseur de projet de la Société du Grand Paris,

maître d'ouvrage «ensemblier», quelle que soit sa

gouvernance future.

Concernant les EPA, certains portent des

projets dont les enjeux ne sont pas locaux mais

nationaux (La Défense pour l'EPADESA, Saclay

pour l'EPPS, Eurodisney pour l'EPAMARNE ...)

Ces outils pourraient se justifi er également, en écho

aux développements du chapitre précédent, parce

que les collectivités ne sont pas encore structurées

en intercommunalités fortes capables de porter

de tels projets à travers une SPL ou une SEM. Il

est intéressant toutefois de constater que Plaine

Commune, pourtant dans le périmètre d'un EPA,

considère aujourd'hui être assez mature pour s'en

aff ranchir, mais c’est un contre-exemple encore isolé.

Il peut être utile, à ce stade, de constater que

ces structures sous tutelle de l'Etat ont une forte

inertie, de par leurs statuts et leurs personnels ; mais

cette inertie a un côté plus favorable : elle permet

de dépasser les échéances électorales locales quand

l'enjeu est d'importance métropolitaine et qu'il s'agit

de mutations impliquant le temps long (solidarités,

savoirs...) que le monde économique et l'élu local ne

sont pas toujours en mesure d'accompagner dans la

durée. Enfi n, on ne peut que constater, quel que soit

le gouvernement, que ces outils ont une capacité de

résilience hors du commun.

La question principale est donc la suivante: la

gouvernance des EPA doit-elle rester étatique avec

une représentation accrue des collectivités ou doit-

elle laisser la place à une structure de type SPL dans

laquelle la Région et les Intercommunalités seraient

des partenaires majoritaires aux côtés de l’Etat.

En conclusion il faut cependant noter que

presque chaque CDT recoupe le périmètre d'un

EPA développant une thématique forte: ce sont

de toute évidence des acteurs de l'aménagement

incontournables, quelle que soit leur gouvernance

future.

la question de l'implication dès l’amont de la sphère privée :

La gouvernance politique et les conditions

stratégiques de maîtrise d'ouvrage urbaine étant

mises en place, l’aménageur peut structurer des

partenariats publics/privés (c'est sa mission

première) pour engager l’opération en tenant compte

des contraintes fi nancières et de délais de réalisation

des grands équipements d’infrastructures. Selon

la nature des programmes, les situations foncières,

les données économiques du marché immobilier et

l’urbanisme réglementaire applicable au moment

d’engager une sous-opération, tous les outils de

l’urbanisme opérationnel peuvent trouver place

depuis la ZAC, sur des fonciers importants, en

passant par des lotissements, des secteurs de PUP

réalisés par l’initiative privée, les permis de construire

sur des macro-lots, des permis de construire valant

division parcellaire, des montages immobiliers

innovants intégrant des équipements publics à des

programmes privés etc…

109

Page 110: Seur a Habit Er 2013

la maquette, un outil d'étude interactifsources Seura

110

Page 111: Seur a Habit Er 2013

Au-delà des innovations techniques relatives,

par exemple, aux gares du Grand Paris (énergie,

superposition d'ouvrages faisant intervenir de

multiples compétences publiques et privées),

les innovations juridiques et contractuelles qui

permettraient d'intégrer le secteur privé dans

la défi nition de l’aménagement d’un futur pôle

urbain seraient un élément important de l'édifi ce

de construction d'une nouvelle donne en matière

d'aménagement en Ile-de-France.

A cet eff et l’équipe d’étude et de suivi du projet,

sous la responsabilité de la collectivité maître

d’ouvrage, devrait comprendre les techniciens de

l’aménagement public et des représentants du secteur

privé qualifi és pour participer à la réalisation du

projet. Ainsi devraient être présents : les promoteurs

de l’immobilier (logements, secteur tertiaire,

économique…), les investisseurs, les cabinets de

commercialisation, les gestionnaires de services

urbains, les structures économiques et sociales, les

organismes de logement sociaux…. et toute structure

technique susceptible de donner un sens au projet.

L’aménageur devant disposer dans son équipe, outre

les urbanistes et les opérationnels de terrain, d’un

économiste de l’aménagement et d’au moins un

sociologue.

L’ensemble de ces personnes publiques et

privées seraient réunies dans un comité de pilotage,

instance d’étude et de décision sur l’élaboration

et le déroulement du projet ; ce type de structure

(à géométrie variable selon l’état d’avancement

du projet) permettrait d’éviter des relations

contractuelles trop formalisées qui pourraient être

sources de situation contentieuses au moment de

la réalisation des constructions. L’environnement

juridique restant toutefois à mettre au point.

Au côté de l’aménageur, un partenariat public-

privé, constitué dans le cadre d’un comité de pilotage

du projet, comme interface de la collectivité maître

d’ouvrage apparaît être un gage de sécurité et de bon

déroulement des opérations.

Idées clés :

- il est nécessaire de disposer d'un outil

d'aménagement ad hoc, sur lequel pourront

s'appuyer les nouvelles structures de gouvernance

pour des territoires de 500 à 2000ha

- la Société Public Locale d'Aménagement

est une structure de droit privée, défi nie par la loi,

qui permet à une collectivité locale de disposer

d'un aménageur et de conduire, politiquement,

une stratégie foncière et immobilière

- des aménageurs sont néessaires pour mettre

en oeuvre les Contrats de Développement

Territoriaux, les Opérations d'Intérêt

Métropolitain

- les moyens des nombreuses SEM et EPA de

la région parisienne pourraient être redéployés

aux profi ts des SPL

- la SPL peut être un lieu de promotion d'un

urbanisme de projets, une instance partenariale

entre le public et le privé est à inventer

111

Page 112: Seur a Habit Er 2013

cercle d'accessiblité des transporteurs

juxtaposition d'environnements sécurisés

sources.David Mangin/Seura

vs.

vs.

itinéraires urbains privilégiés

accessibilité aux services quotidiens des modes doux

112

Page 113: Seur a Habit Er 2013

Le logement du Grand Paris,le point de vue d'un bailleur social.Pierre Paulot- 3F

3F s’est donné des priorités pour les prochaines

années afi n de répondre au mieux aux besoins

en logement social en Ile-de-France - quelques

orientations stratégiques pour 3F, présentées ici

comme un simple témoignage. De façon à la fois plus

générale et plus spécifi que, trois questions vives sont

développées, qui illustrent la responsabilité de 3F et

du secteur du logement social dans le Grand Paris :

quelle échelle pour une opération de logement social

? quel traitement pour les rez-de-ville ? comment

inscrire le sujet des parkings dans la durée ?

tendances sensibles dans le logement social

Aujourd’hui le modèle français du logement

social fait fi gure d’exception en Europe. En eff et,

en France 60% des ménages sont sous plafond de

ressources PLUS, parmi lesquels 60% sont sous

le plafond PLAI ; les objectifs de production de

logements sociaux sont ambitieux ; les aides à la

pierre et les aides à la personne subsistent même si

elles se réduisent . La tendance est diff érente dans

d'autres pays : les aides à la pierre ont été supprimées

en Suède et en Grande-Bretagne, les logements

HLM ont été massivement vendus en Allemagne

et en Grande-Bretagne, en Allemagne 20% de

la population seulement est éligible au logement

social…. et l’objectif est de démolir 60 000 logements

par an.

La crise du logement est particulièrement

aigüe en France : 14% de la population sous le seuil

de pauvreté en 2010 ; 3,6 millions de personnes

mal logées dont 700 000 sans domicile personnel,

auxquelles s’ajoutent 5 millions de personnes

en situation de fragilité du logement (impayés,

propriétaires en diffi culté… ). En Ile-de-France :

400 000 demandeurs de logements sociaux en 2010

pour une production de 20 000 logements sociaux

par an en moyenne entre 2005 et 2011 et un objectif

d’environ 17 000 à 21 000 logements sociaux par an

pour les prochaines années en Ile-de-France (objectifs

annoncés par le gouvernement, le SDRIF….sur 70

000 logements familiaux à construire par an en Ile-

de-France) ; 62% des ménages franciliens éligibles

au PLAI ou PLUS . Les inégalités territoriales

sont fortes: 10% des communes d’Ile-de-France

concentrent 50% du parc de logements sociaux (1,2

millions de logements sociaux en Ile-de-France qui

représentent 25% du parc). Enfi n en 2013, il devient

fréquent pour les cadres – et plus seulement pour les

employés - de faire 2 à 3 heures par jour de trajet

domicile / travail !

spécificité et orientations pour 3F dans ce contexte

Avec 200 000 logements en patrimoine et un

objectif de production de 3 400 logements familiaux

par an en Ile-de-France d’ici 2015, dont 75% dans

le Grand Paris, 3F a une responsabilité particulière

dans le logement social.

Les priorités portent aujourd’hui sur les points

suivants pour 3F :

- concentrer les eff orts sur la production de

logement collectif, et sur les segments PLUS-

PLAI. La production de logement individuel, de

logement à loyer intermédiaire ou en accession sociale

est utile à titre complémentaire pour répondre à toute

la demande (sous condition de ressource). L’accession

à la propriété doit rester marginale et ne se justifi e

qu’en cas de défaillance du privé, en particulier suite

au retrait des investisseurs institutionnels.

113

Page 114: Seur a Habit Er 2013

Gare de la Garenne Colombes

Fort d'AubervilliersMairie d'Aubervilliers

Neuilly Hôpitaux

Le Perreux-Nogent

Villemomble

Bondy

Bobigny Pablo Picasso

Gare de ColombesStade de France

Neuilly Les Fauvettes

Pont de Bondy

Rosny

Bobigny

Val de Fontenay

VersaillesChantiers

Orsay/Gif

AéroportCh.DeGaulleT2

Fortd'Issy/Vanves/Clamart

Boulogne/PontdeSèvres

Antonypôle

IssyRER

Champignycentre

MaisonBlanche

Palaiseau

ST-Maur

StLazare

KremlinBicêtreHôpital

StQuentinEst

Sevran-Livry

Nanterre

Chelles

T4del'aéoport

Clichy-Montfermeil

VillejuifLouisAragon

StOuenRERCMairiedeStOuen

LesGrésillons

BagneuxM4

Bécon-les-Bruyères

LeBlancMesnil

VitryCentre

Parcdesexpos

LesAgnettes

BoisColombes

OlympiadesVilliers/Bry/Champigny

InstitutGustaveRoussy

LeMesnilAmelot

CEASaint-Aubin

Noisy-Champs

Sevran-Beaudottes

Arcueil-Cachan

PontCardinet

Chevilly3communes

M.I.NPortedeThiais

LaCourneuve-sixroutes

StDenisPleyel

NanterreLaBoule

Aulnay

Satory

LaDéfense

LeBourget-RERB

SaintCloudTransilien

Aéroportd'Orly

Rueil/MontValérien

Créteill'Echat

LeBourgetAéroport

PortedeClichy

MassyOpera

Chatillon-Montrouge

LesArdoines

Massy-Palaiseautgv

TriangledeGonesse

StQuentinUniversité

Rueil

LevertdeMaisons

0 2,5 5 7,510 km

Nombre de logements 3F gérés par commune - zoom Grand Paris

Source : Base patrimoine 2011 au 31/12/201

Nombre de logements 3F en 20111 - 1010 - 5050 - 100100 - 250250 - 500500 - 1 0001 000 - 2 0002 000 - 4 0004 000 - 4 542

Taux SRU < à 20% de logements

le parc immobilier du groupe 3F, dans le Grand Paris par commune sources : 3F

114

Page 115: Seur a Habit Er 2013

- - a fortiori en logement social, rester très

attentif aux sites et aux implantations : la vigilance

reste de mise sur l’étalement urbain, les conditions

d’accès aux transports collectifs et aux équipements,

et même la qualité intrinsèque des sites, la crise

pouvant légitimer la construction sur des terrains

auparavant considérés comme non valorisables

(terrains enclavés, pollués, le long de voies ferrées…)

s’ils sont bien desservis et/ou proches d’un bassin

d’emplois ;

- off rir des surfaces compatibles avec la

capacité fi nancière des locataires (loyer + charges)

: en secteur très dense, 40 m² pour un deux pièces et

60 m² pour un 3 pièces, développer l’off re de petits

logements notamment pour les jeunes travailleurs

(35% de studios et deux pièces), ouvrir à la colocation;

- favoriser les parcours résidentiels et off rir

des produits spécifi ques pour les étudiants ou les

jeunes actifs, les personnes âgées dépendantes, les

personnes en réinsertion ou en grande diffi culté ;

- privilégier la pérennité des matériaux et la

qualité d’usage des logements tout en maîtrisant

les coûts: logements traversants, séjour distributif

pour limiter les circulations vu les contraintes

d’accessibilité, surfaces de rangement y compris hors

SHAB (une cave, ou un cellier fermé sur le palier, sur

le balcon par exemple), isolation acoustique, éclairage

naturel des parties communes ;

- favoriser la capacité d’évolution du bâti

(structure poteaux-poutres, façade « rideau »…),;

veiller à la pérennité des matériaux et des détails ;

penser à l’insertion dans la ville qui se fabrique par

stratifi cation. A titre d’illustration, les HBM font

preuve d’une grande pérennité même s’ils sont peu

évolutifs en termes d’aff ectation et de typologie ;

les bâtiments haussmanniens initialement voués

à l’habitation, supportent des transformations

successives en bureaux, puis à nouveau en logement.

Il importe de bien comprendre les processus de

fabrication pour générer une production non

standardisée à des coûts industriels;

- intervenir aussi sur l’existant, qui

représente 30 années de production pour I3F

au rythme actuel : à l’occasion des travaux de

réhabilitation (mise aux normes, isolation), réfl échir

à l’évolution des typologies, des prestations, à

l’insertion dans la ville. En renouvellement urbain,

on retrouve une échelle plus domestique avec des

démolitions ou des constructions neuves de plots de

20 ou 30 logements ; l’adressage se retourne sur la rue

et non à l’intérieur de la « cité ». La constructibilité

résiduelle sur une grande « escalope » foncière héritée

des années 1960, permet de remodeler un quartier

en rectifi ant la composition urbaine, les alignements,

la densité, les espaces extérieurs, les accès aux

immeubles et le rapport avec les espaces publics, avec

la ville.

construire à la juste échelle

Le logement social doit s’inscrire, parfois même

se glisser dans la ville : c’est un des enjeux de la

commande architecturale pour le bailleur social mais

cela soulève la question de la « juste échelle » pour

une opération de logement social. Elle se regarde à

plusieurs niveaux :

- l’immeuble : de 30 à 50 logements ?

- le quartier : 1/3 de logement social sur des

îlots de 300 logements, soit 100 logements sociaux

maximum

- la résidence sociale ou foyer; vu la typologie

une trop grande simplicité ou monotonie formelle

génèrent une perception négative par rapport à des

programmes qui seraient trop monolithiques ou

répétitifs, l’eff et « Formule 1 ».

Le respect d’une limite en termes d’échelle, de

50 à 60 logements à l’immeuble environ, est une

condition nécessaire pour la qualité d’usage d’un

immeuble de logements. Cette échelle favorise

l’auto-contrôle, des spirales positives d’entraide,

de solidarité. Au-delà au contraire on favorise les

dysfonctionnements et ou on les amplifi e.

Le logement social accueille des populations

défavorisées, souvent dans des communes à taux de

chômage et avec des fragilités socio-économiques

plus fortes qu’ailleurs. C’est pourquoi, a fortiori dans

des territoires diffi ciles, la diversité au sein du parc

nous semble essentielle, mais aussi la mixité entre

115

Page 116: Seur a Habit Er 2013

8585

6464

2727

55

2828

1212

2121

108108

4242

2727

5454

3030

3030

5858

3434

3838

156156

6060

3030

88

1919

1010

7575

1010

252577

2121

120120

203203

88

9595

2323

1313

3030

5555

6262

2424

1212

7070

1414

157157

6060

1212

6464

6565

1515

55

1616

Mairie d'Aubervilliers

Le Perreux-Nogent

Fort d'AubervilliersPont de Bondy

Villemomble

Neuilly Hôpitaux

Gare de la Garenne Colombes Bobigny Pablo Picasso

Gare de ColombesStade de France

Neuilly Les Fauvettes

Bondy

Rosny

Val de Fontenay

Bobigny

VersaillesChantiers

Orsay/Gif

AéroportCh.DeGaulleT2

Fortd'Issy/Vanves/Clamart

Boulogne/PontdeSèvres

Antonypôle

IssyRER

Champignycentre

MaisonBlanche

Palaiseau

ST-Maur

StLazare

KremlinBicêtreHôpital

StQuentinEst

Sevran-Livry

Nanterre

Chelles

T4del'aéoport

Clichy-Montfermeil

VillejuifLouisAragon

StOuenRERCMairiedeStOuen

LesGrésillons

BagneuxM4

Bécon-les-Bruyères

LeBlancMesnil

VitryCentre

Parcdesexpos

LesAgnettes

BoisColombes

OlympiadesVilliers/Bry/Champigny

InstitutGustaveRoussy

LeMesnilAmelot

CEASaint-Aubin

Noisy-Champs

Sevran-Beaudottes

Arcueil-Cachan

PontCardinet

Chevilly3communes

M.I.NPortedeThiais

LaCourneuve-sixroutes

StDenisPleyel

NanterreLaBoule

Aulnay

Satory

LaDéfense

LeBourget-RERB

SaintCloudTransilien

Aéroportd'Orly

Rueil/MontValérien

Créteill'Echat

LeBourgetAéroport

PortedeClichy

MassyOpera

Chatillon-Montrouge

LesArdoines

Massy-Palaiseautgv

TriangledeGonesse

StQuentinUniversité

Rueil

LevertdeMaisons

0 2,5 5 7,510 km

Nombre de logements livrés par commune en 2012 - zoom Grand Paris

Source : DCIF - Janvier 2013

Livraisons 20121 - 2525 - 5050 - 100100 - 203

Taux SRU < à 20% de logements

près de 3000 logements livrés par 3F en 2012 dans le Grand Paris

sources :3F116

Page 117: Seur a Habit Er 2013

logement social et les autres formes de logement, les

statuts des habitants (locataire du logement social,

locataire dans le parc privé,ou propriétaire).

La question doit également être posée lorsque

les bailleurs sociaux envisagent la mise en vente

de leur patrimoine, patrimoine encore constitué

de beaucoup de « cités » ou « résidences », avec un

nombre important de logements : le passage au statut

de copropriété ne protège pas – loin s’en faut ! – des

dérives qui ont pu être observées dans le parc social.

Pour bien aborder cette question cruciale de la

juste échelle, il faut aussi collectivement reconnaître

et défendre les métiers, les compétences de ceux qui

interviennent dans les projets, chacun travaillant

à son échelle : la collectivité locale qui porte un

PLU, l’aménageur qui porte un projet urbain et

aménage des espaces publics, le maître d’ouvrage

qui construit les immeubles. La contribution des

bailleurs sociaux, tant qu’ils exercent leur métier de

maîtrise d’ouvrage, mérite d’être soulignée dans la

mesure où les bailleurs sociaux sont les seuls à exercer

en même temps la fonction de constructeur et de

gestionnaire, la fonction de maître d’ouvrage étant

constamment enrichie par le retour d’expérience de

la gestion (d’où l’intérêt de limiter la réalisation de

logements sociaux en VEFA, et privilégier la maîtrise

rééquil ibrer les programmes de grands ensembles qu i dysfonctionnent

Parmi les interventions destinées à parer aux

dysfonctionnements des grands ensembles, la

démolition au moins partielle des tours ou des barres,

le séquencement des immeubles et le remodelage des

espaces extérieurs (y compris les stationnements),

visent notamment à réintroduire une échelle

domestique. Le nombre de logements desservis par

cage, la longueur de façade à parcourir avant d’entrer

dans le bâtiment, la distance entre la rue et l’accès

à l’immeuble, le nombre de logements par ilôt, le

rapport entre la largeur du trottoir et des voiries…

sont regardés et retravaillés autant que possible.

Prenons l’exemple des tours : une tour peut être

construite, ou réhabilitée - les projets ne manquent

pas actuellement - mais si elle se trouve dans un site

sensible, alors de notre point de vue il faut éviter

une programmation exclusive en logement social. A

Vigneux (91) 3F travaille actuellement sur un projet

de préservation d’une tour 3F existante, en périmètre

ANRU, mais le programme vise sa reconversion en

logement libre et ateliers.

Ces projets de (dé)composition, de réparation

urbaine peuvent permettre aussi de:

- introduire de la diversité fonctionnelle

avec par exemple, la démolition d’un immeuble

de logement social et son remplacement par un

immeuble de logements en accession ou, pourquoi

pas, par des activités économiques. Ex : A Saint-

Maur-des-Fossés, la requalifi cation des logements du

Pont-de-Créteil s’est accompagnée de la revente d’un

reliquat foncier pour l’implantation d’un laboratoire.

- améliorer les liens si besoin, entre le

quartier requalifi é, et son environnement urbain,

par exemple en instaurant le dialogue avec un

secteur pavillonnaire voisin préexistant, ou avec

des équipements de proximité. La mixité peut être

abordée sous l’angle morphologique (introduire des

logements superposés ou en bande, ou des plots en

R+3, aux frontières avec un secteur pavillonnaire) ou

par le statut des occupants (réaliser une opération en

accession sociale ou en libre). A Bobigny, on a par

exemple programmé un immeuble en accession à la

place de logements démolis et création de logements

de morphologie intermédiaire à proximité des

pavillons préexistants. A Carrières-sous-Poissy les

4 foyers sont remplacés par 2 résidences sociales

mais aussi des logements sociaux familiaux, et un

programme de maisons individuelles en accession

libre.

117

Page 118: Seur a Habit Er 2013

préparer la gestion à la bonne échelle et l’évolution de la ville

La mutualisation des équipements et services

urbains permet d'optimiser les coûts d’investissement,

d’abonnement, d’entretien (réseau de chauff age,

traitement de l’eau et des déchets, pourquoi pas les

locaux communs (vélos, poussette…). Elle favorise

la maîtrise des charges pour les locataires mais aussi

la qualité urbaine ou architecturale.

Ceci peut fonctionner à conditions de:

- travailler à la bonne échelle : par exemple

pour les EnR (photovoltaïque, géothermie), travailler

à l’îlot plutôt qu’à l’immeuble ? Pour un réseau de

chauff age : quid si les logements construits, très

performants, sont en nombre insuffi sant pour

atteindre le seuil de rentabilité ?

- rester vigilant sur la complexité de systèmes

innovants, type « smart grid » : raisonner à l'îlot

plutôt qu’au quartier (qui fi nit par générer des

investissements trop massifs sans apporter la fi abilité

totale), tenir compte des réseaux existants ou projetés

(risque de doublons)… et tenir compte aussi des

habitudes ou comportements des habitants ;

- agir en fonction du contexte, de la capacité

de la collectivité ou des habitants à intégrer un

changement ou à mettre en œuvre un projet en

tenant sur la qualité des aménagements, des espaces

publics… nécessité en tous cas de travailler ensemble

pour défi nir la juste échelle et rester effi cace.

Réfl échir à la juste échelle, c’est aussi trouver

les montages simples, qui préservent l’avenir.

Aujourd’hui, trop de montages génèrent des

dysfonctionnements et/ou fi gent la mutabilité à

long terme : les macro-lots -les promoteurs vendent

en prévoyant au mieux des servitudes, sinon une

ASL pour assurer la gestion des espaces extérieurs

collectifs, qui pourraient souvent être en réalité des

espaces publics :

- les VEFA avec imbrication des parties

communes entre un bailleur social et une copropriété

-accès au parking en infrastructure, cages d’escalier…

- les statuts fonciers décalés par rapport aux

traitements et aux usages

- les divisions en volume avec un parking,

pour dissocier la gestion avec celle des logements au-

dessus.

Comment gérer, vendre, mais aussi démolir,

surélever…dans 30 ou 40 ans ?

En règle générale, la recherche de la simplicité

pour la gestion et les mutations, dans l’immédiat

comme à long terme, revient à simplifi er la propriété

du foncier et donc, à favoriser la mixité horizontale

plutôt que la mixité verticale.

le rez-de-ville, un étage pas courant

En tant que constructeur, commercialisateur

ou gestionnaire, il y a lieu de s’interroger sur les

occupations potentielles des rez-de-chaussée :

commerces, activités, équipements mais aussi

logements étudiants par exemple. Il faudrait aussi

regarder le point de vue du passant, dans la ville

quotidienne - avoir une lecture horizontale des

usages, de la perception et de la mixité fonctionnelle

du rez-de-ville. Il ne s’agit plus que de construire,

mais aussi de comment s’inscrire dans la ville, à

travers cette accroche forte qu’est le rez-de-chaussée;

le « pied d’immeuble » du bailleur devient rez-de-

ville du passant.

en secteurs d’aménagement

Le savoir-faire des grands aménageurs ou

collectivités, en ZAC ou en renouvellement urbain,

a sensiblement progressé ces dernières années en

matière de programmation, y compris en tenant

compte d’une phase transitoire où le quartier n’est

pas encore à plein régime :

- études de marché et commercialisation avec

phasage pour l’ouverture des commerces (accueil

des premiers habitants puis montée en puissance

progressive jusqu’à phase de maturité) comme le

pratiquent respectivement la SAEM Val-de-Seine

118

Page 119: Seur a Habit Er 2013

commerces

hall traversant

maison

services / locaux temporaires

Aménagement et la SEMAPA, à Boulogne-ZAC

Seguin et à Paris Rive Gauche ;

- gestionnaire, voire investisseur unique qui

aurait la maîtrise foncière des lots « rez-de-chaussée

» pour des programmations particulières.

- il en va de même pour le dimensionnement

progressif des services et équipements (école, poste…

transports). Les outils existent pour optimiser le

montage et la réalisation de projets de construction

complexes et imbriqués, par exemple la convention

de transfert pour des équipements publics qui

permettent d’avoir une unité de maîtrise d’ouvrage et

maîtrise d’œuvre (3F pour la DASCO et la DFPE de

la Ville de Paris, pour une école et une crèche dans un

immeuble de logements à Clichy Batignolles).

Les secteurs d’aménagement ne constituent pas

dans leur intégralité, des zones fortes d’attractivité

commerciale: on retombe sur la question du

traitement des « rez-de-ville » comme en diff us.

Dans les pôles de centralité commerciale , avec

une forte valorisation économique et en général à

l’échelle de l’immeuble et de la rue ; les questions pour

le constructeur et le gestionnaire vont se concentrer

sur la qualité du traitement de la façade (vitrines

enseignes) et la prise en compte des contraintes

spécifi ques liées à l’activité (terrasse ; livraisons…).

On en revient au rôle de la collectivité pour porter

la programmation commerciale à l’échelle de la ville

et adapter les espaces publics aux usages des rez-de-

ville.

E n d i f f u s , h o r s s e c t e u r s d’aménagement

En dehors de ces pôles, en secteur résidentiel ou

en périphérie, il n'est pas obligatoire de décréter une

aff ectation commerciale ou d’activité (professions

libérales, service, enseignement…). Les aff ectations

en équipement et en logement sont à envisager.

Le rez-de-ville peut contribuer à faire le lien entre

l’immeuble et la ville, entre l’espace public et les source David Mangin/seura

119

Page 120: Seur a Habit Er 2013

logements en étage.

Il peut être intéressant de réfl échir à

l’aménagement et/ou au type de logement : les

anciennes « chambres de bonnes » ne pourraient-

elles pas retrouver une place, pour du logement

transitoire ou de l’hébergement, en rez-de-ville ? Ce

qui suppose de travailler sur l’intimité du logement,

son éclairement, (souvent les stores ou volets des

logements sur rue sont fermés en rez-de-chaussée) le

retrait par rapport à la rue ou au cheminement dans

l’îlot, le traitement des limites entre espace public,

collectif et privatif.

On retrouve la question de l’échelle et de la

mutualisation quand on se penche sur l’importance

prise, en rez-de-ville, par les locaux techniques – du

moins pour de petites opérations en zone très dense,

quand le foncier est découpé en petites parcelles

étroites, à Paris ou à Montreuil par exemple. Ne

faut-il pas chercher à mutualiser les locaux vélos,

poussettes, locaux techniques et ordures ménagères,

ou les installer partiellement au sous-sol ou au 1er

étage, voire à prévoir des dérogations - par exemple

pour les vélos qui peuvent être garés dans la rue à

Paris ? - ou des compensations, comme pour les

stationnements automobiles ?

Le rez-de-ville est plus souvent le produit

de conraiinte technique ou réglementaire subies,

que le fruit d'une réfl exion ou une intention

programmatique déclinée de l'immeuble à la ville.

Le logement à rez-de-chaussée pourrait off rir du

logement temporaire pour étudiants ou saisonniers

ou jeunes actifs, éventuellement en partenariat avec

des associations qui prendraient le bail et trouver les

personnes en recherche de logement temporaire

De même, penser aux transparences vers les

coeurs d’îlot, à des vues sur des espaces libres qui

permet au passant depuis la rue, de percevoir la

profondeur de la parcelle.

le stationnement

La construction de logements dans le Grand

Paris implique les liens entre habitat, bassin d’emploi

et déplacements. Question majeure, pour un

constructeur de logements comme 3F; la desserte, de

la proximité par rapport à une gare ou station avec

passages fréquents, bref le choix d’une implantation

correctement intégrée dans le système de transports

collectif

Ensuite vient la question de l’off re de

stationnement. Il faut savoir qu’en construction neuve

en Ile-de-France, les places de stationnements

livrées par 3F ces dernières années atteignent un

taux de vacance de 29,7%, taux légèrement supérieur

au taux moyen sur l’ensemble du parc 3F. Plusieurs

facteurs entrent en ligne de compte :

- les hypothèses retenues au moment de

la programmation (taux de remplissage ou tarif

de location des parkings) sont optimistes, ce qui

pousse à construire trop de places de stationnement

ou à les louer trop cher par rapport aux besoins ou

capacités des locataires ; en ordre de grandeur, 5

places de stationnements en infrastructure coûtent

l'équivalent d'un logement

- la politique menée par la collectivité impacte

directement sur les comportements des habitants : les

collectivités refusent, ou ne peuvent faute de moyens

coercitifs imposer le stationnement payant sur les

voies publiques ; les espaces extérieurs publics

sont donc utilisés de fait et gratuitement pour le

stationnement. A fortiori lorsque le PLU impose

plus d’une place par logement, une telle politique

induit des dysfonctionnements dans les usages ;

- cette coordination du bailleur social avec la

collectivité locale est d’autant plus importante que

les locataires du parc social n’ont aucune obligation

de louer les places qui leur sont proposées ;

- l’off re existante à proximité de l’opération

en construction neuve : le nombre de places

off ertes, la qualité des produits proposés, la sécurité

dans les parkings, les tarifs pratiqués…. l’off re en

infrastructure, en extérieur (payant ou non), doivent

être analysés avant de programmer la construction

120

Page 121: Seur a Habit Er 2013

des stationnements pour une opération de logements

neufs ; là encore un raisonnement au-delà de l’échelle

du lot s’impose ;

- le contexte urbain de l’opération : on ne peut

raisonner de la même façon en étalement urbain,

ou en secteur ANRU avec les problèmes d’échelle

et de sécurité des parkings existants - et en hyper-

centre. Le PLU parisien qui dispense de créer du

stationnement pour des opérations en-deça de 2000

m² de surface de plancher des constructions (ou

celui de Vincennes, idem en deçà de 12 logements)

peuvent servir de référence pour d’autres communes

ou secteurs de très forte densité.

Le parking silo ou la galette de parking

mutualisée revient dans les débats actuellement :

- le premier avantage est de baisser les

coûts : la mutualisation sur plusieurs opérations de

logements, en termes d’investissement et de gestion

; selon le contexte la gestion unique peut permettre

d’améliorer la sécurité et la qualité globale du

stationnement proposé, donc le taux d’occupation.

- ce raisonnement fonctionne mieux en

première couronne qu’en hyper-centre, où les prix

sont tellement tendus qu’il est plus rationnel de

positionner le stationnement en infrastructure. On

voit d’ailleurs progressivement les derniers parkings

silos disparaître de Paris (vente récente du garage

Mercedes dans le 5ème arrondissement, après la

vente du grand garage du Faubourg Saint-Antoine)

- avec la moindre densité toutefois on

retombe sur des problèmes de sécurité comme dans

beaucoup de parkings silos existants, devenus vacants

(remplacés bien souvent par du stationnement

plus ou moins anarchique en extérieur) et lieux de

rencontre ou de trafi cs.

- attention là aussi à ne pas compromettre

la gestion (ASL entre plusieurs propriétaires,

imbrications pour les parkings mutualisés en

infrastructure de plusieurs bâtiments de logements,

complexité des contrôles d’accès) ni fi ger les

mutations ou changements d’usages, que ce soit au

niveau technique, par exemple en veillant à construire

des niveaux plutôt de 2,50m que de 2,20m, ou foncier

en limitant les imbrications.

- une piste pourrait être de considérer que le

parking silo off re une solution transitoire : oui au

parking silo, mais à condition de pouvoir revenir

facilement et à moindre coût, à un autre usage

(construction en poteau-poutre et hauteur minimale

de 2,50m par niveau) ;

- une autre piste pourrait être d’implanter

des parkings en silo sur les premiers niveaux d’un

immeuble, ce qui fonctionne par exemple au Brésil.

Mais suppose d’être sur un immeuble assez haut

(plus de 30 mètres, pour avoir au moins 7 niveaux

de logements au-dessus), d’investir sur les espaces

extérieurs ou l’espace public et d’y recourir de façon

ponctuelle dans la ville pour préserver la qualité du «

rez-de-ville ».

Idées clés :

- 62 % des ménages franciliens sont éligibles au

logement social PLAI ou PLUS

- des opérations de 50 logements semblent être

la juste échelle pour la construction, la gestion,

l'intégration, la mutation voire l'adaptation des

anciens ou des nouveaux quartiers

- les rez-de-ville, un étage pas courant, des

typologies et des mode d’occupation

- cinq places de stationnement coûtent

l'équivalent d'un logement.

121

Page 122: Seur a Habit Er 2013

Ont collaboré à ce cahier

Eric Bérard, aujourd'hui consultant, a dirigé plusieurs société

d'aménagement dont la SERM, à Montpellier et la SERDCO

à Valence; il a présidé le Club Ville-Aménagement.

Yannick Beltrando architecte urbaniste, après un parcours

au sein de l'APUR notamment comme responsable du pôle

métropole et comme conseiller technique de Pierre Mansat,

il a fondé l'agence Anyoji Beltrando, lauréate du palmarès des

jeunes urbanistes 2012.

Eric Charmes, sociologue urbaniste, directeur de recherche, du

laboratoire Recherches interdisciplinaires ville espaces société

(RIVES) de l’Ecole nationale des Travaux Publics de l’Etat à

Vaulx-en-Velin (69), auteur de La Ville émiettée. Essai sur la

clubbisation de la vie urbaine », Paris, Presses universitaires de

France, Villes rêvées, Villes durables ? avec Taoufi k Souami,

Gallimard, Hors-série Découvertes et La Vie périurbaine face

à la menace des gated communities, Paris, L’Harmattan, coll. «

Villes et entreprises ».

Philippe Coignet, paysagiste dplg dirige l'agence OLM.

lauréate des albums des jeunes paysagistes en 2008. Il a

également enseigné le projet de paysage à l’école polytechnique

de Zurich, à l’école d’architecture de Paris-Malaquais et au

département de paysage à Harvard.

Yves Crozet, enseignant-chercheur à l'IEP Lyon il a dirigé

le Laboratoire de l'Economie des Transports, il anime des

groupes de recherches au Predit, il est aussi membre du

conseil d'administration de RFF.

Nicolas Douce, Convergences CVL accompagne les opérateurs

commerciaux publics et privés dans leurs projets en France

et à l’étranger.

Rémi Dorval, la Fabrique de la Cité, Après avoir occupé

diverses fonctions au sein de Ministère de l’Industrie et du

Ministère des Finances il rejoint le secteur privé devient

Directeur Délégué de VINCI, et Président de la Fabrique de

la Cité.

Alain Garès, après avoir dirigé le SEM Constellation, et

directeur de l'urbanisme de la Commauté Urbaine du Grand

Toulouse, il est aujourd'hui directeur général de la SPLA

Europolia; et président du Club-Ville Aménagement.

Jérôme Legrelle , dirige depuis 2010 la société Convergences-

CVL, spécialisée en urbanisme et immobilier commecial il

a occupé plusieurs à responsabilités au sein d'immobilières

commerciales Carrfour property, Rodamco Europe, LVMH.

David Mangin, architecte dplg. associé-gérant de SEURA

(Florence Bougnoux, Jean-Marc Fritz, David Mangin,

Eurylice Roncen, Mathieu-Hô Simonpoli), il est aussi

professeur des écoles d’architecture et à l'ENPC, membre du

conseil scientifi que du Puca , et Grand Prix de l’Urbanisme

2008, auteur notamment de la Ville franchisée, Paris, la Vilette

Pierre Paulot, architecte est Directeur de l’Architecture,

de l’Aménagement et de l’Environnement de 3F, il y

développe et anime la politique architecturale, urbaine et

environnementale.

Magali Reghezza-Zitt, géographe, maître de conférences

à l’École normale supérieure, elle dirige les études du

département de géographie de l’ENS, auteure de Paris, coule-

t-il?; Paris, Fayard

Vincent Renard, économiste, directeur de recherche au

CNRS spécialisé dans les questions d’ économie foncière

et immobilière, il est co-fondateur avec Joseph Comby de

l’Association des Etudes Foncières, il enseigne actuellement à

l'IEP de Paris et à l’ ENPC.

Mathieu-Hô Simonpoli, architecte dplg et ingénieur EIVP, il

collabore depuis 2005 aux travaux de l'agence SEURA, dont

il est associé.

Marion Talagrand, urbaniste Diup paysagiste dplg, elle

est lauréate des albums des jeunes paysagistes (2007) et du

palmarès des jeunes urbanistes (2008), elle enseigne aussi le

projet à l'IUP et à l'ENSP Versailles.

Marc Wiel est un urbaniste français, il a travaillé dans

plusieurs agences d’urbanisme Rouen , Grenoble c Brest

il est aujourd'hui chercheur et participe à des travaux sur

l’articulation transports urbanisme, il est notamment l'uateur

de La transition urbaine, de la ville pédestre à la ville motorisée.,

Bruxelles, Mardaga et Paris, sortir des illusions approfondir les

ambitions, Paris, Scrineo.

122

Page 123: Seur a Habit Er 2013

en résumé,

1.mobiliser des moyens

- sans attendre l'amélioration ou la création de grands réseaux, créer des logements près

des pôles d'emplois et vice-versa pour réduire les distances domicile/travail

- repérer et mobiliser les fonciers (in)visibles/ (in)accessibles pour des opérations

d'aménagement

- défi nir une nouvelle hiérarchie du réseau francilien et optimiser la tarifi cation en

fonction des modes et des vitesses

- contractualiser la péréquation fi nancière entre intercommunalités et Région

- fédérer des intercommunalités pour partager les responsabilités de la production de

logements et des autorisations de construire

2.réguler des fonciers trop accessibles

- considérer l'A104 comme la "Nouvelle Frontière",

- projeter les développements autour des bourgs et des villages

- organiser des fi lières agricoles urbaines, à travers des circuits courts et des circuits

semi-long

3. rendre accessible des fonciers invisibles

- créer de la valeur sur les parkings des centres commerciaux régionaux de l'A86 et la

francilienne, pour plus de mixité fonctionelle

- élaborer un PPRI du Grand Paris, en sachant que les fonciers submersibles, ne sont

pas forcément les plus risqués

4. construire plus et mieux

- constituer des SPL pour des aménageurs à la mesure des projets de territoires,

- concevoir des rez-de-ville, un étage pas courant, pour accueillir de l'économie

(informelle) et des résidences fl exibles,

- anticiper les évolutions de modes de vie et de la mobilité

- développer les fi lières sèches et la préfabrication.

123

Page 124: Seur a Habit Er 2013
Page 125: Seur a Habit Er 2013

SEURA 69 rue de la Fontaine au Roi

75 011 Pariswww.seura.fr

[email protected]: 01 55 28 14 50

Page 126: Seur a Habit Er 2013

SEURA/ David ManginYannick Beltrando, Mathieu-Hô Simonpoli, Marc WielEric Bérard, Florence Bougnoux, Patrick Bridey, Eric Charmes, Philippe Coignet, Yves Crozet, Laetitia Dablanc, François Delarozière, Nicolas Douce, Rémi Dorval, Jean-Marc Fritz, Alain Garès, Marion Girodo, Jérôme Legrelle, Sébastien Loew, Bruno Marzloff, Pierre Paulot, Philippe Renoir, Eurylice Roncen, Magali Reghezza-Zitt, Michael Schwarze-Rodrian, Vincent Renard, Marion Talagrand// Yves Laffoucrière

Des logements pourquoi, combien, où, comment, pour qui, par qui ? Voilà les questions

auxquelles les diverses contributions de ce cahier, réunies par l’équipe Seura, tentent de

répondre.

La pénurie est un accélérateur des inégalités et un frein pour la compétitivité du Grand

Paris; une « bombe à retardement » (D.Mangin, M.Wiel). Le projet de Nouveau Grand Paris

concentre les financements sur les infrastructures ferroviaires, mésestimant les effets induits

sur la répartition territoriale des emplois, des logements et de la rente immobilière (M.Wiel).

Soyons lucides les villes moyennes, bourgs et villages continueront à se développer, dans

un rayon de 20min en voiture des gares des TER, des RER ou du futur GPE, au-delà de la

Francilienne, cette Nouvelle Frontière de l’Ile de France (E.Charmes).

Sans attendre l'achèvement du Nouveau Grand Paris, nous devons accompagner

l'amélioration de l'accessibilité locale par des investissements immédiats dans la gestion

du réseau ferré et l'adaptation du réseau (auto)routier( Y.Crozet). Mais on ne fera rien sans

adopter une stratégie foncière articulée autour de la régulation des marchés fonciers et

la mise en évidence de leviers inédits pour rendre accessibles des fonciers, qu’ils soient

révélés (V.Renard) ou (in)visibles:création de valeur dans les zones commerciales (N.Douce,

J.Legrelle), nouvelle culture positive du risque métropolitain (M.Reghezza-Zitt), meilleure

connaissance des agricultures métropolitaines qui pourrait stabiliser les destinations des

terrains agricoles (P.Coignet, M.Talagrand).

Cette stratégie foncière, déterminante, n'est pour autant pas la seule réponse à la réalisation

de l'objectif de 70 000 lgt par an. Le temps du projet, les procédures d'urbanisme, les agendas

politiques, les résistances nimby perturbent à la baisse la construction de logements si bien

que l’on n’en construit que 35 000 par an. Des structures d'aménagement ad hoc comme

les SPL (E.Bérard,R.Dorval, A.Garès) pourraient permettre aux nouvelles intercommunalités

de disposer de l'ingénierie nécessaire au renforcement de l'offre de logement et associer

élus, entreprises du BTP, investisseurs publics et privés pour construire des logements neufs,

rénovés ou densifiés. Reste un impératif: les logements, ou mieux, l’habitat doit offrir le droit à

la ville, être connecté aux quartiers, avec des rez-de-ville réinventés et des densités diversifiés

(P.Paulot-3F).

AIGP 2/ SEURA/David Mangin mars, 2013