sciences et mathématiques à l´école - hepl.ch · géométrique Elisabeth Stierli et Chantal...

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PRISMES / REVUE PÉDAGOGIQUE HEP / N O 6 / MAI 2007 | PRISMES / REVUE PÉDAGOGIQUE HEP / NO 2 / AVRIL 2005 PRISMES / REVUE PÉDAGOGIQUE HEP / N O 6 / MAI 2007 SCIENCES ET MATHÉMATIQUES À L´ÉCOLE CONNAÎTRE COMPRENDRE ORDONNER LE MONDE

Transcript of sciences et mathématiques à l´école - hepl.ch · géométrique Elisabeth Stierli et Chantal...

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prismes / revue pédagogique hep / no 2 / avril 2005prismes / revue pédagogique hep / no6 / mai 2007

sciences et mathématiques à l´écoleconnaître

comprendre

ordonner

le monde

•  edito   

Valoriserlesdisciplinesscientifiquesle comité de rédaction, avec la collaboration de Jean-Christophe decker  3

•  � | pourquoi les sCienCes a l’eCole ?

Enseignerlessciences.Oùestleproblème?paul avanzi   4

Faut-ilsupprimerlessciencesàl’école?André Giordan  8

Descléspourl’intelligencedumondephilippe Barraud   ��

«Apprivoise-moi!»ditlerenard:uneapprochedelaconnaissancedel’environnementen �2enseignementspécialiséDenisBaeriswyl   

L’enfantchercheuraujourd’hui,citoyenresponsabledemainCharles-Etienne Vullioud   �6

  De la physique ? Faut-il aujourd’hui encore, enseigner la physique au gymnase en dehors des �9 

options ? eric lindemann 

Laformationd’ingénieuretl’enseignementdessciencesPierre-André Besse   23

  La dimension épistémologique en didactique des sciences Jean-Claude noverraz  27

StandardsdeformationpourlessciencesnaturellesenSuisse:unprogrès?François Gingins 32

•  2 | maThemaTiques eT sCienCes

  Lesmathématiquesfont-ellespartiedessciences?Pierre-Marie Pouget 36

Faut-ilenseignerlesdisciplinesscientifiquesàl'école?Armin Kressmann  4�

•  3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase

Activitémathématiqueaucycleinitialoucommentintroduirelanotionderégularité 42géométriqueElisabeth Stierli et Chantal Tièche Christinat 

  Pourquoi les maths à l’école ? Pour simplifier la vie ? stéphane Clivaz  46

Lesmathsetmoi valérie uhlmann, lucile Franz, lilly Khamsy  49

TransitionsecondaireI–secondaireIIenmaths:undialogueStéphane Clivaz et Michel Deruaz 51

Et chez vous les maths, ça va comment ? Chantal Tièche Christinat 54

ComparaisonVaud–Fribourgpourlesheuresdemaths Michel Deruaz 59

•  4 | approChe de l’environnemenT

Cen’estpasauxenfantsd’éduquerleursparentsMarguerite Schlechten Rauber 61

Enseignerlessciencespourrespecterl’environnementJean-Michel Favez  64 

•  enCore…

DeuxétudiantsErasmusenéconomieàlaHEPVaudClaude Othenin-Girard  65 

•  des ressourCes…

L’Espace des InventionsValentine Lugrin  67 

LecentrePro NaturadeChamp-Pittet(VD)Régine Clottu 68

•  Coup  de Cœur  : présenTaTion de livres  69 

•  aBonnemenT   

  Prochainnuméro,contactsetsiteweb,cafépédagogique  71

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Pourcesixièmenuméroéclosauprintemps,

davantagecentrésurdesquestionsdidactiques,

Prismesabordel’enseignement des mathémati-

ques et des sciences.Commeàproposdel’art à

l’école,onpeuts’interrogersurl’utilitédeces

disciplines.C’estlaraisondelaquestionposée

parlapremièrepartiedecenuméro:Pourquoi

les sciences à l’école ?

Plusieursauteurssontplutôtnégatifsconcer-

nantl’apportdel’enseignementdessciences.

Onalesentimentd’avoirfaitfausserouteen

considérantcesbranchescommesemblablesaux

autres.Onsetrouvefaceàdesparadoxes:favo-

riserletâtonnementexpérimentaletauboutdu

compte,évalueretsanctionnerquandmême;

mettreenvaleurlerôledel’erreur,maismalgré

toutsesentirentantqu’enseignantinvestide

lamissiondefaireréussirlesélèves.Contraire-

mentàlacourseeffrénéeàl’efficacité,typique

denotresociété,nefaudrait-ilpasaborderl’en-

seignementdessciencesenlaissants’exprimerla

curiositéetl’espritdedécouverte,ladémarche

derechercheetl’éveilàl’environnement?

Maiscommentseproduitcetteévolutionqui

découragelesélèves?

Si,chezlesjeunesélèves,onrencontreune

fraîcheur,unenthousiasmeetunecuriositépour

participerauxactivitésscientifiquesetpourdé-

couvrirl’environnementquilesentoure,plu-

sieursauteursmentionnentquecetteattitude

positiveatendanceàs’éroderaufildutemps.

Est-ceparcequelecontenudevientplusardu

etmoinsludique?Cesdisciplinesdeviennent-

elletropaustèresoutropabstraites?Est-ceen

lienavecledéveloppementdel’enfantquise

transformeenadolescent?Eneffet,lesbesoins

desélèvesdiffèrentenfonctiondeleurâge.Les

pluspetitsseposentsouventdesquestionssur

lescausesdesphénomènesqu’ilsobservent.A

l’âgedelafindelascolaritéoudugymnase,

lesjeunesonttendanceàavoirdesinterroga-

tionsphilosophiques,etsouventlessciencesne

leurdonnentpasderéponse.Certainsélèves

seclassentalorsdanslacatégoriedesnulsen

mathsouensciences,enayantunemauvaise

imagedeleurscapacités,surtoutencoredes

jeunesfilles!

Danslesdeuxpremiersarticlesintroductifs,

lesauteursessaientd’identifierlescausesde

cesdifficultésetdedonnerdespistesdetravail.

Puisdeséclairagesintéressantssontapportés

surlafaçonderendrelaphysiqueaccessibleà

desélèvesdel’enseignementspécialisé.Dans

unelignesimilaire,uneréflexionestproposée

surdesdémarchesd’enseignementdelaphysi-

queàdesélèveslittérairesaugymnase.L’auteur

nes’arrêtepasalorsàl’idée(ouaupréjugé!)

qu’ilpuisseexisterdesprofilsdescientifiques,

demathématiciens,oudelittéraires!

Pleinfeusurladidactique,auprèsdesjeunes

élèvestoutd’abord,quiontbesoind’expéri-

menterpourcomprendredesnotionsdecapa-

cité,oupourréaliserunerecettedepetitspains,

etsurl’épistémologiedessciencesdansunarti-

clequinousproposeuneapprocheméthodique

appuyéeparlarecherche.Surunplanpluslarge,

HarmoS sciences naturelles, projetd’harmonisa-

tiondel’écoleobligatoire,mèneactuellement

unerecherchedegrandeenvergureauniveau

suissepourélaborerdesstandardsnationauxde

formation.

Pourinterrogerlelienentresciencesetma-

thématique,unphilosophedonnesonpointde

vueetintroduitunepartieconsacréeauxma-

thématiques.

Aucycle initial,unedémarcheoriginale

présenteuneséquencedidactiqueengéomé-

trieavecdesaspectsliésàl’espaceetàlanu-

mération.Deplusapparaîtunecollaboration

fructueuseentredeuxétudiantesetdeuxpro-

fesseuresformatrices.Danslescyclesprimaires,

l’enseignementdesnouveauxmoyensdema-

thématiquessemblenepasavoiratteintencore

lesniveauxattendus:c’estcequeprésentela

rechercheMathéval,quis’interrogeaussisur

lasignificationdesrésultatsetsurdesmesures

possiblesderemédiations.AusecondaireI,une

réflexionintéressantesuggèrequelesmathé-

matiquespourraientsimplifierlavie.Puis,lors

dupassagedusecondaireIaugymnase(phase

délicatecommetoutetransitionenmilieusco-

laire!),lesauteursproposentdeprivilégierl’or-

ganisationderencontresentreenseignantsde

mathspourfavoriserledialogue.

Uneapprocherespectueusedel’environne-

mentcomplètecenuméroparlaprésentation

duRéseau-écoles de sensibilisation à la gestion

des déchets,quiannoncepourPrismes 7unap-

portpluscompletsurl’Educationaudévelop-

pementdurable.

AvecencoredesidéesderessourcesPrismes 6,

commesesaînés,présenteunegrandevariétéde

contributionsetderéflexionscritiquesqui,nous

l’espérons,permettrontundébatconstructif.

le comité de rédaction

Avec la collaboration

de Jean-Christophe Decker

valoriser les disCiplines sCienTiFiques

dans la première parTie, nous aBordons la quesTion iConoClasTe: FauT-il enseigner les sCienCes à l’éCole ? prismes essaie ainsi de sus-CiTer la réFlexion sur la désaFFeCTion des BranChes sCienTiFiques, sur l’imporTanCe d’un raisonnemenT auTonome, de la CréaTiviTé eT des CompéTenCes CiToYennes pour lire le monde. Tous les seCTeurs de la FormaTion sonT ConCernés, du CYCle iniTial à l’epFl.

enseigner les sCienCes :  où esT le proBlème ?

1

Isabellen’aimepaslessciences,commemoi

jen’aimaispaslesfraisesavantd’yavoirgoûté.

Ladifférence,c’estquepourgoûterunefraise,

ilsuffitdelamettredanssabouche,tandisque

pourgoûterauxsciences,c’estpluscompliqué.

Plustard,pourcuisinerunbondessertaux

fraises,Isabelledevras’entraîner,recommencer,

apprendrebeaucoupdetechniquessouvent

trèsétrangèresauxfraises,maisl’anticipation

dugoûtdecedessertqu’elleadéjàgoûtéest

unemotivationimportante.Ilserabienmoins

évidentdemotiverIsabellepoursurmonterles

nombreusesdifficultésliéesàlapratiquedes

sciencesexpérimentales.

Poureffleurerenquelqueslignescettevaste

question,jeproposeunessai1enquatreparties:

La curiosité - Les sujets qui motivent les élè-

ves - Les sujets nécessaires pour « lire le monde » -

Alors quoi faire ?

la curiosité

Sijedevaisneretenirqu’unargumentpour

cetarticle,ceseraitcertainementcelui-là.La

questionlaplusimportantequ’unmaîtredoit

seposeràl’issued’uncoursdesciencesest:«La

curiositédesélèvesa-t-elleétéstimulée?A-t-elle

augmenté?»Sioui,l’essentielestfait,sinonla

leçonestratée…etj’enairatébeaucoup!

Selonl’âgedesélèves,ondevraitplutôtpar-

lerdelibérer leur spontanéitéquedestimuler

leur curiositécarcettedernièreexistedavan-

tagequ’iln’yparaît.

Audébutdesannéesnonante,àlarecherche

d’unerédactiondeprogrammeintelligible,Jean-

ChristopheDeckeretmoi-même,encetemps-là

conseillerspédagogiques,avionsproposéune

sériede30à40questionsquelesélèvespour-

raienteux-mêmesseposerafinderendreplus

intéressantes(plusattractives)desnotionsscien-

tifiquessouventardues,parexemple:«D’où

vientlevent?Commentattrape-t-onunema-

ladie?Aquoiserventlesfleurs?Commentfonc-

tionneunphotocopieur?Pourquoiunœufde

truitedonnenaissanceàunetruite?…»

J’ai,depuislors,systématiquementutilisé

untelcataloguedequestionspourprésenter

lesobjectifsdel’enseignementdessciences

expérimentalesàmesnouvellesclasses.Cela

permetd’évaluerlacuriositédesélèvesparfois

impatients–etparfoisaussiindifférents–de

connaîtrelaréponseàtelleoutellequestionet

surtoutd’enrajouterd’autresquilesintéressent.

Ilestimportantdemesurercettecuriositécar

elleestsouventmuseléepardespréjugés,parla

peurde«direfaux»oude«poserunequestion

bête».Celapermetaussidesituerd’entréeet

clairementleslimitesqu’ilfaudramettreàson

enseignementpouréviterdes’embarquerdans

desnotionshorsdeportéedesélèves.

les sujets qui motivent les élèves

Ilnes’agitpasicidetomberdansladéma-

gogie.

Ondoitbienadmettrequelessujetsintéres-

santsquipourraientutilementservirdesup-

portspouraborderlesgrandsthèmesdespro-

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grammessontsinombreuxqu’aucunedotation

horairenepermetd’espérerlestravaillertous.

Ilestdoncpertinentdechoisird’abordceuxqui

stimulentnaturellementl’attentiondesélèves.

J’aid’ailleursconstatéquelorsquelesiphonde

l’intérêtestamorcé,ilpermetdetraiterdes

questionsquisontressentiescommetotalement

rébarbativessionlesaborded’emblée.

Lessujetsquimotiventlesélèvessontceux

quiconcernentleurviequotidienne,parexem-

plecequiestliéauxmaladiesquilestouchent

eux-mêmesouleursproches–aufonctionne-

mentet/ouauxdangersdesappareilsquilesen-

tourent–aucomportementdesanimauxqu’ils

apprécient–auxdébatsqui,selonleurâge,les

intéressent(économiesd’énergie,pollution,li-

béralisationducannabis…).

L’objectiondelacontrainteduprogramme

estlancinante,maisc’estunfauxproblème.

Lorsquelesleçonssontconditionnéesparles

intérêtsdesélèvesetqueleurattentionestàun

bonniveau,lanécessitédesedonnerdesoutils

pourabordercesquestions(ouundeleursas-

pects)estnaturelleetlelienavecleprogramme

(sicedernierestraisonnable!)l’esttoutautant.

Ceuxquiontdel’expériencesaventdequoije

parle,maisvoicitoutdemêmeunexemple:

On souhaite savoir comment utiliser en Suisse

des guirlandes de Noël achetées aux USA où el-

les sont prévues pour fonctionner avec un cou-

rant alternatif de 110 volts ; on peut aisément

construire, d’abord expérimentalement, puis par

un modèle plus quantitatif, une séquence d’en-

seignement qui aboutit à la loi d’Ohm, un pilier

classique des cours sur l’électricité. L’application

effective aux guirlandes est possible, mais on

veillera à mettre les élèves en garde et à les in-

former sur le respect des règles de sécurité qu’il

est de toute manière très utile d’aborder !

les sujets nécessaires pour « lire le monde » 2 

Comprendreetcommuniquercorrectement

dansnotreenvironnementestcertainement

l’objectifleplusimportantdelaformationsco-

laire.Pourledomainedessciencesexpérimenta-

les,cettemissionestd’uneimportancemajeure,

carelledevraitdonnerlescompétencespour

réagirintelligemmentfaceauxdéfisdel’envi-

ronnementnaturelettechnique.

LasciencedudébutduXXIesiècleestbasée

surunnombrelimitédeconceptsfondamentaux

(moinsdedixàmonavis)quisontparfoistrès

récents;lecodegénétique,parexemple,estun

conceptquiarévolutionnélabiologieetqui

n’estguèreplusâgéquel’auteurdeceslignes…

J’encitequelquesuns:

• lestypesd’interactiondelamatière(pesan-

teur–électromagnétisme–forcesnucléai-

res…);

• lastructureparticulairedelamatière;

• lecodegénétiqueetlathéoriedel’évolution;

• lesprincipesdeconservation,notammentde

lamatièreetdel’énergie;

• la«méthodescientifique».Mêmesicette

notionestparfoisàgéométrievariable,elle

recèlenéanmoinsunsoclederigueuretde

référenceàl’expériencequilarendincon-

tournabledansuncoursdesciences.

Onnedevraitjamaisoublierdeciteraussi

desquestionsquin’ontpasencorederéponse

ouquisonthorsdudomained’applicationdes

sciencesexpérimentales:

• Dieuexiste-t-il?

• Quelleestl’originedel’Universetquedevien-

dra-t-il?

• Qu’est-cequelavieetexiste-t-elleseulement

surlaTerre?

• Presquetouteslesquestionsquicommencent

par«Pourquoi…?»

alors quoi faire ?

Uneséquenceédifiantetiréedujeutélévisé

intitulé«Quiveutgagnerdesmillions?»mon-

treuncandidathésiterpoursavoirsic’estla

LuneouleSoleilquitourneautourdelaTerre.

Lecandidatdemandel’aidedupublicquivote

enmajoritépourleSoleil.Cetteanecdoteest

éclairantepourplusieursraisons:

1 Cepublicestformédepersonnesquiont

certainementétéàl’école,pourlaplupart

enFrance,unpayssansdouteparmilesplus

instruits.AndréGiordandécritbiencephé-

nomènequiconsisteàapprendrecommeune

poésieuneconnaissancequin’estpasancrée

dansunsystèmederepèressolidesetquisera

doncrapidementoubliéeetremplacéeparla

représentationnaturelleconfirméeparl’ob-

servation:c’estbienleSoleilquinoustourne

autour.

2 Latélévision,mêmesiellenousoffredespro-

grammesaffligeants,ajugéquec’étaitune

questionpassiévidente.Danscejeu,onne

demandepascombiendepattesontlespou-

lesparexemple.

3 Lecandidatseseraitprobablementplusfaci-

lementrappeléqueGaliléeaétéjugépour

avoirprétenduquec’étaitlaTerrequitour-

naitautourduSoleiletiln’apasétécapable

demettresesconnaissancesencohérence;

lacultureestcompartimentée.Nikeestune

marquedechaussures,maisquifaitlelien

avecladéessegrecqueAthénaNiké3,repré-

sentéecommeunedivinitéailée,capablede

sedéplaceràgrandevitesse,symboledela

victoire?

Ilyaunequinzained’années(déjà!)M.Rafel

Carreras,scientifiqueconnuenSuisseromande

surtoutpoursesqualitésdevulgarisateurdans

lesmédias,donnaitrégulièrementdesconfé-

rencessurl’actualitédessciences.Cesexposés,

donnésauCERNetàl’originedestinésauxjour-

nalistes,ontrapidementconnuungrandsuccès

etunpublicdetoutâgevenaitchaquemois

remplirunauditoiredeplusieurscentainesde

placespournonanteminutesdevoyageàtra-

versl’actualitédelarecherchescientifiquede

l’infinimentgrandàl’infinimentpetit.Laqua-

litédecesconférencesétaitextraordinaire!

Alaquestion«quelestvotresecretpour

préparerdesconférencessiintéressantes?»il

avait,avecmodestieetunecertaineréticence

auxrecettes,répondupartroisprincipesqueje

vousredonneicitelsquejelesaiadaptésàla

pratiquedemonenseignement,toutenespé-

rantnepasenavoirtrahil’esprit.

Le premier principeconsisteàdéfinirlesmots

qu’onemploie.Ilnes’agitpasdedonnerune

définitionrigoureuse,maisd’endonnerautant

quepossibleetdedireensuitelaquelleserauti-

liséedanslaleçonquisuit.Cettemanièrede

fairepermet,silesdéfinitionssontrédigéesà

partird’undialogueaveclesélèves,dedéceler

touteunesériedereprésentations4etd’élimi-

nerd’embléebonnombredemalentendus.Il

arrivequecetteopérationprenneplusieursle-

çonsàcausedunombreetdel’importancedes

questionsqu’ellesoulève;celamontrequeles

élèvesn’étaientpasprêtspourl’explicationtelle

qu’onvoulaitladonner…

Le deuxième principeconsisteàréduireses

ambitionsàl’essentiel.Ils’agit,plutôtqued’ap-

porterlascienceauxélèves,d’essayerdeleur

enleverlapeurqu’ilsontdenejamaisparvenir

àycomprendrequelquechose.Eneffetl’idée

quelessciences,commelesmathématiques

d’ailleurs,sontréservéesàunnombrerestreint

d’élusquiont«labossedesmaths»(oul’équi-

valentensciences)estencorebienrépandue.

Onconstatequelorsquelesélèvesontpris

confiance,çavapresquetoutseul.

Le troisième principeestleplussimpleetle

plusdifficileàappliquer.Ils’agitdesavoirre-

nonceràaborderdessujetsquinesontpasàla

portéedesélèves.

Onpourraitajouterbiendesélémentsavant

deprétendreavoirépuisélesaspectsdidacti-

quesdel’enseignementdessciences.Sansles

développer,j’enciteraiquelques-unsparmiles

plusimportants:

• Situerledéveloppementdesmodèlesdansle

cadredel’histoiredessciences.

• Mettreenévidenceles limitesduchamp

d’applicationdessciencesexpérimentalesqui

nesontpas–etn’ontjamaisprétenduêtre

–capablesderépondreàtouteslesattentes

del’humanité.

• Développerlesoutilsmathématiquesenfonc-

tion,plutôtqu’enprévision,desbesoins;

• Répondre,autantquepossible,àuneques-

tionenrenvoyantàuneexpérienceplutôt

qu’àuneformule.

• Accorderuneattentionconstanteetsoute-

nueàlarigueurdanslesméthodesdetravail

intégrantlesnotionsd’incertitudedemesure,

d’ordredegrandeuretdeprécisiondansl’ob-

servation.

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• Commencerparlamodélisationauniveau

qualitatifdesphénomènesobservésavant

d’aborder lamodélisationquantitative

mathématique.

Pourenveniràlaquestionposéeparletitre

decettedernièrepartie,lapremièrechoseà

faire,c’estcertainementde revoir nos ambitions

à la baisse en quantité et à la hausse en qualité.

Jeveuxdireparlàqu’ilnesertàriend’aborder

desnotionscomplexessilesbasesnesontpas

solidesetqu’ilnesertàriend’accumulerdes

connaissancessiellesnesontpasrattachéesà

d’autresconnaissances,oumieux,àuneouplu-

sieursexpériencespersonnelles.

Ondevraitaussise méfier de l’implicite.Pour-

quoiserait-ilévidentquelorsqu’ondessineune

flècheautableaunoirl’élèvesauradécoderseul

s’ils’agitd’uneflèche,d’unvecteur,d’uneforce,

d’unevitesse,d’uneaccélération,d’unepression,

d’unetrajectoireousimplementd’unlienentre

deuxchosesquelemaîtreanotéessurcemême

tableauetqu’ilveutmettreenrelation?Sion

yréfléchit,l’élèvequidécodespontanémentet

correctementdevraitdavantagenousétonner

queceluiquis’égareparcequ’illuimanquede

l’information.Demander systématiquement aux

élèves de reformulercequiaétéexpliquéper-

metdedécelerbiendeslacunesetyremédier

prendbeaucoupdetemps,maisc’estdutemps

bieninvesti.

L’ambitiond’unmaîtreestcertainementune

bonnechose,maiselleestnéfastelorsqu’elle

semanifestefaceauxcollèguesplutôtqueface

auxélèves.Ilm’esteneffetarrivéàplusieurs

reprisesdeconstaterquelarédactiondesques-

tionsd’examen,parexemple,estdavantage

conditionnéeparlavolontéd’êtrereconnupar

sescollèguesqueparlesoucide vérifier si les

bases sont solidement acquises par les élèves.Il

estvraiquec’estmoinsspectaculairedevérifier

lesbases,maistellementplusimportant!

Partager ses expériences, ses craintes, ses

échecs et ses succès avec ses collèguesestune

pratiquequisembleaugmenter,maisquiest

encoretroprare.Onpeutcertainementcom-

prendrequelagestiond’untempspleinavec

lescontrainteshoraireset l’augmentation

destâchesadministrativesrendlesmoments

d’échangesdifficilesàplanifier,maiscelaen

vautvraimentlapeine.Deséchangesouverts

permettentdedésamorcerlescraintescertaine-

mentcompréhensibles–maistoutaussicertai-

nementinfondées–denepasêtreàlahauteur

desattentesdescollègues,duchefdefileou

deladirection,demontrerqu’onadeslacu-

nesdanssespropresconnaissances–cequiest

forcémentlecasdansundomainecommeles

sciences–etd’êtreprisenflagrantdélitd’avoir

enseignéquelquechosedefaux(cequiarrive

forcément,maispeutdurersionnecommuni-

quepasassez!).

Mettre les élèves en contact avec l’expérience

de la réalité.

Celapeutseréaliserdeplusieursmanières:

• lestravauxpratiques;

• lessortiessurleterrainpourl’observationde

lanature;

• lessortiespourvisiterdesexpositionsoudes

musées;

• levisionnementd’émissionsdetélévision,des

documentairesdidactiquesoudesexpérien-

cesfilméesparcequ’impossiblesàréaliser

dansuneécole;

• lalectured’articlesdepressesurl’actualité

pourendécoderl’aspectscientifique;

• faireintervenirenclasseunepersonnequi

travailledansundomaineenrelationavecle

sujetétudié(parexempleuningénieurd’une

usined’aluminiumpourexpliquerlesproblè-

mesàrésoudrepourobtenircemétalàpartir

deminerai,etc’estencoremieuxsionpeut

allersurplace…).

L’enseignementdessciencesauneresponsa-

bilitéimportantedanslaformationdesjeunes,

carlasociétéabesoind’uneproportionaussi

importantequepossibledecitoyennesetdeci-

toyenscapablesderaisonnerdemanièreauto-

nome,etsurtoutderésisteràlapensée magique

quiprendbientropd’ampleurdanslediscours

desresponsableséconomiquesetpolitiques.Par

pensée magique,j’entendsl’argumentationqui

consisteàremplacerunfaitvérifiéexpérimen-

talementparl’affirmationd’uneconvictionsin-

cèreetprofondecapable,parsaseulesincérité

etprofondeur,demodifierlaréalité.

Cen’estcependantpaslafoiquidéplaceles

montagnes,c’estlatectoniquedesplaques!

paul avanzi

biologiste de formation, d’abord enseignant

au secondaire I, puis conseiller pédagogique

pour l’enseignement de la physique, il a

enseigné au secondaire II avant de prendre la

direction du Gymnase de Chamblandes, à Pully

(VD). Il est co-auteur de plusieurs ouvrages sur

la physique et la chimie.

1 DéfinitionduPetitRobert:«Ouvragelittéraireenprose,de

facturetrèslibre,traitantd’unsujetqu’iln’épuisepas.»2 Lemondenaturelettechniquequinousentourenousoffre

quotidiennementdessourcesd’étonnementetdequestion-

nement.L’hommeforgespontanémentdesréponsesàces

questions;cesréponsessonttrèssouventerronéesmaiscohé-

rentesetdifficilesàremettreenquestion.L’aptitudeàlirele

mondenaturelettechniquequinousentoureavecdesbases

scientifiquessolidesestunecompétenceprécieusequenous

devonsessayerdedéveloppercheznosélèves.3 LaVictoiredeSamothrace,célèbrestatueexposéeauLouvre,

estunereprésentationd’AthénaNiké;onpeutaussirappeler

qu’unerépliqueenréductiondecettestatueornelesbou-

chonsdelacalandredesRollsRoyce.4 Ilfauticicomprendreletermede«représentations»ausens

définidanslespublicationsd’AndréGiordan,professeurau

Laboratoirededidactiqueetd’épistémologiedessciences–

LDES<www.ldes.unige.ch>–del’UniversitédeGenève.

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? FauT-il supprimer les sCienCes à l’éCole ?

FauT-il supprimer  les sCienCes à l’éCole ?

Puisquevotrerevuemedemandes’ilfaut

supprimerlessciencesàl’école,jerépondrais:

oui!Oui,sanshésiter.Oui,sinousnechangeons

pasrapidementl’approchedessciences,notam-

mentausecondaire…Etjerépondraisainsien

tantquescientifiquepur et dur(jefusdansune

premièreviespécialisted’endocrinologieetde

neurophysiologie)etentantqu’épistémologue

dessciences.Biensûr,unetelleréponsevacho-

quermescollèguesenseignants,surtoutceux

quiréalisentnombred’innovationsmotivantes

ouceuxquiauquotidientententdefairelepro-

grammeaumieuxavecleplusdesérieuxpossi-

ble.Jem’enexcuseparavanceauprèsd’eux.Si

jeproposeunetelleréponse,cen’estpaspour

lesprovoqueroulesoffenser,cen’estpasnon

pluspour«casserduprof»commelefontpar-

foislespolitiquesoulesjournaux;c’estaunom

delajeunegénération.Nonseulementnousne

leurapprenonspasgrand-choseensciences,en

toutcaspasl’essentiel,maissurtoutnouslesen

dégoûtons…

Monjugementtrèsdirect,peut-êtretrop,

estlefruitd’unensembled’évaluationsdecet

enseignement.Eneffet,quereste-t-ilchezles

jeunes,ycomprischezceuxquiontréussiune

scolaritédébouchantsurunematurité?Qu’ont-

ilsréellementappris?Entermesdeconnaissan-

cesbiensûr,maiségalemententermesdedé-

marchesoud’espritscientifique?Qu’enfont-ils

ensuitesurunplanpersonnel,professionnelou

surunplancitoyen,faceauxenjeuxdenotre

société?

Chaqueannée,nousorganisonsàl’université

destestssurleniveaudesétudiantsensciences,

deuxansaprèslamaturité.Lesrésultatsnelais-

sentaucuneplaceaudoute;entoutcas,ilsnous

interrogentfortement.Prenonsl’ADNenbiolo-

gie,unsujetlargementenseignéetfortement

médiatisé.Deuxàtroisansaprèslamaturité,on

constatequelesétudiantsn’ontretenuqu’une

vagueimagededoublehélice.Cepeudesavoir

n’estpasopératoire,lesconfusionssontmul-

tiplesentregènes,chromosomesetADN;de

mêmelesliensaveclafabricationdesprotéines

sontpeuévidents(voirschémaci-joint).

Evaluationportantsur:qu’est ce qu’un gène ? (étudiantsuniversitédeGenève)

Enphysique,ilssesouviennentdequelques

formules,demêmequ’enchimie.Toutefois

leursignification,leurdomained’application

leursontlargementinconnus.Ainsiilleurest

difficilededistinguerforce,énergie,travailet

puissance.Etlesobstaclessontpartout,àcom-

mencerdanslesniveauxd’organisationdela

matière.Iln’estpasraredetrouverdescellules

danslesatomesoucesderniersdanslesparti-

culesélémentaires!

Alalimite,cesquestionsdeconnaissances

nesontpaslesplusgraves.Cequichagrineen

premierestsurtoutlesentimentd’ennuietde

désintérêtquiressortdeleursentretiens.L’en-

seignementdessciencestelqu’illeuraétépra-

tiquédécourage,voiredégoûtelaplupartdes

jeunes.Nombred’heuresdecourssontjugées

«rébarbatives»,voire«imbuvables»…L’acqui-

sitiond’unedémarcheproprementscientifique

estévacuéeauprofitdel’apprentissagededé-

finitionsetdeprocédésstandards1.Ilsdisenty

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apprendre«desformulestoutesfaites»audé-

trimentd’uneréflexionpersonnelle.Ilsyaccu-

mulentdes«sommesdedétails,mais…onne

comprendrien»2.

Bref,l’enseignementestjugé«tropobscur»:

c’estune«sciencecoupéeduréel»etquin’in-

troduitpasaux«modesdepenséepouraffron-

terlemondededemain».«Onn’yapprendpas

lesrepèrespournotreépoque».Dèslors,ladé-

motivations’installeet…lesmêmeserreursse

perpétuentdelamaternelleàl’université.

Plusgraveencore,l’éducationscientifique

estjugéecommeunefabriqued’exclusions:

denombreuxadolescentsetjeunesadultesne

voientenellequ’unfacteurdesélectionsco-

laire,parl’échec,aumêmetitrequelesmathé-

matiques.

des étudiants en chute libre

Riend’étonnantalorsquelenombred’étu-

diantsdanslesbranchesscientifiquessoitpar-

toutendiminution.EtpasseulementenSuisse…

Laphysiquedevientlabranchelaplussinistrée:

enAllemagne,onconstateunediminutionde

moitiédesinscriptionsenphysiqueen10ans,

enFrance,moins12%chaqueannée.EnGran-

de-Bretagne,lasituationdevientfranchement

alarmanteetlerenouvellementdeschercheurs

n’estplusassuré.

Pourtant,lestrèsjeunesenfantsaimentles

sciencesetsontenthousiastes.Observonslesuc-

cèsdesactivitésdedécouverteextra-scolaires

etautresfêtescommelesminiU,lesminiLabs,

lesNuits de la scienceàGenève,l’Espace des in-

ventionsàLausanne…Quesepasse-t-ilensuite?

Lesenquêtes,réaliséesenEurope,montrentque

lessciencesfontaujourd’huipartiedesmatières

scolaireslesmoinsappréciées.L’écolenepeut

certespastoutexpliqueràelleseule.Ellevitles

conséquencesd’unmouvementplusgénéral.La

sciencenefaitplusrêver;lesicônespopulaires

nesontplusEinsteinouPasteur3.Lacroyance

dansunlienindéfectibleentreprogrèsscien-

tifiqueetprogrèshumains’esteffondrée.Les

découvertes,notammentdansledomainedes

biotechnologiesetdelamédecine,continuent

aumêmerythmequedanslasecondemoitié

duXXesiècle,toutefoislesentimentqu’elles

améliorentlaviedesgensetlesprotègentde

lanatureetdescatastrophesrecule.

Aujourd’hui,lessciencessemblentd’abord

servirunecertaineformed’économiedeprofits;

lesargumentsenleurfaveursontfortement

entachésdecompétitivitéindustrielleaveugle

dansuneéconomiedemarchémondialisée.Ces

opinionsdéfavorablessontparticulièrement

présentesdansledomainedelaphysiqueetde

lachimie,ettrèssouventassociéesauxgrandes

catastrophesrécentes:Tchernobyl,Bophal,le

sangcontaminé,lavachefolle,l’amiante,etc.

EnSuisse,l’imagedelasciencepourlamajeu-

repartiedelapopulationdevienttotalement

paradoxale.Lessciencessontautantconsidérées

commesourcesdeprogrèsquedechômageou

deterreurs,etlesscientifiques,saufraresexcep-

tions,animéstantparlavolontédepartagerle

savoirquepardesvelléitésdedomination.De

fait,laneutralitéetl’indépendancedescher-

cheurssontfortementremisesencause.Ilest

vraiqu’aucoursdecestrentedernièresannées,

lesscientifiques–saufexceptionsnotables–se

sonteux-mêmesisolés;marginalisésparlesmé-

dias4,ilssesontcoupésdelasociétéetdela

culture.Leretourdessuperstitions,larecherche

d’explicationssimplesetrassurantesfaceàla

complexitédumondesontlependantdurecul

delaforceexplicativedelascienceetdel’ad-

hésioncollectiveàsestravaux.Cetteabsencede

réflexionetdedébatauseindelacommunauté

scientifiqueafavoriséledéveloppementdel’ir-

rationalité5.

des solutions sont possibles

Apartirdececonstat,peut-êtretropsévère

maisbienréel,quepourrait-onfairepourque

l’enseignementscientifiquerépondemieuxàses

objectifs:transmettreàlafoisdessavoirsetde

lacultureetpermettredeformerdescitoyens

éclairés?Certes,ilnepeutyavoirderemède

miracle,celasesaurait…Toutefoisrienn’est

perdu,notammentsil’ontravailledeconcert

etdefaçoncroiséedansplusieursdirections.

D’abord,ils’agitdetenterdechangerlama-

nièredetransmettre.Certainsenseignantsplai-

dentpouruneplaceplusgrandefaiteàl’expé-

rimentation,d’autrespourleprojet,ledéfi,le

jeu,l’histoire,lesliensentrescienceetsociété,

lerecoursauxtechniquesdel’informationetde

lacommunication(lesfameusesTIC)ouencore

l’interventiondirectedechercheursdansles

classes…Presquetouss’accordentsurl’impor-

tancedeladémarcheexpérimentale,notam-

mentautraverslapratiquedelaMain à la pâte

oudesonprolongementromandPenser avec

les mains,uneapprochequelesanglo-saxons

privilégientdepuisunetrentained’annéesavec

lapédagogiedeshands on.

Nousnevoudrionspasfreinerlesenthou-

siasmes!Lerecoursàl’expériencesemblein-

dispensable,maisnosrecherchesendidactique

montrentleslimitesdel’expérimentationseule.

Deplus,unedériveimportantepeutexister:on

confondsouventactivitéetapprentissage.Ap-

prendredessciencesimpliquequel’élèvenesoit

passeulementactif(avecsesmains)maisaussi

auteur (avecsatête)6!Deplus,seull’élèvepeut

apprendre;lorsqu’onneprendpasencompte

lesconceptionsdesapprenants,celles-cipersis-

tentetmêmepeuventserenforcer.Illuifaut

élaborerunnouveausavoirmaisaussi,enmême

temps,déconstruireceluiqu’ilmaîtrisaitdéjà.

Ilapparaîtdonc importantdepartirdes

élèves(cequ’ilssont,cequ’ilssavent,cequ’ils

croientsavoir,cequ’ilsignorent).L’analysede

cesconceptionspermetsurtoutdeprendre

consciencedesobstaclesquiempêchentl’élabo-

rationdessavoirs.Seulement,partirdesélèves

neveutpasdireyrester!Bienaucontraire,le

rôledel’enseignantrestecapital,quoiquein-

direct.Unenvironnement didactiquecomplexe

misàsadispositionparl’enseignantoul’équipe

d’enseignantsestleseulàmêmedepouvoirle

motiver,l’interpelleretl’accompagner.

C’estpourcetteraisonquel’ontenddeplus

enplusàfaireentrerlesélèvesdansdesdé-

marchesd’investigations,enlesplaçantfaceà

dessituationsquitoutàlafoisnourrissentet

contredisentleursconceptions.Celan’empêche

enaucunemanièredesmomentsdestructura-

tionoudeprésentationparl’enseignantlui-

même.Lesélèvesnepeuventtout(re)construire

pareux-mêmes;découvrirenpermanenceserait

égalementunnon-sensparpertedetempset

pardistanceavecl’approchescientifique.Letra-

vailsurlalittératureprendaumoins80%du

tempschezunchercheur.Deplus,l’enseignant

peutfairepartagerdirectementunintérêtou

unepassion,ilpeutêtreunrepèrepermanent.

Beaucoupresteàfaireàceniveau…Appren-

dredessciencesestunprocessuscomplexeet

paradoxalsurtouslesplans;uneseuleméthode

restetropréductrice,l’enseignantdoitpouvoir

jongleravecplusieurs.Laformationdesensei-

gnantsestainsià(re)penser.Apprendre,cen’est

jamaisajouterdesfaitssupplémentairescomme

lepensaitl’écoleduXIXesiècle;apprendredes

sciences,c’estchangerderegardsurlemonde.

quels contenus ?

Aupréalable,cequiapparaîtprioritaireest

deréfléchirrapidementsurlescontenuset

donclesprogrammesdel’enseignement.Quel-

quespropositionspeuventêtreavancéesqui

mériteraientd’êtrediscutéeslepluslargement

possible.Actuellementlescurriculumsenusage

danslescantonsrestentautocentrés;ilsontété

définisdefaçoncorporatisteàl’intérieurdu

petitmondedesscientifiques.Ilssedéclinent

enchimie,biologie,physique,décomposéeelle-

mêmeenoptique,thermodynamique,mécani-

que,etc.Celuidesjeunesesttoutautre,ilest:

environnement,pollution,nouvellestechnolo-

gies,clonage,manipulationgénétique,santé,

histoiredel’univers,développementdurable,

éthique…

Aussifaudrait-ilseposersérieusementet

autrement(àl’intérieurdelafamilledesscien-

tifiques,maispasseulement)laquestiondes

contenus.Dequelssavoirslejeunedoit-ilpou-

voirdisposerpouraborderunmondecomplexe,

aléatoire,incertain?Etcommentlesscienceset

lestechnologies–quel’onoublietotalement

enSuisse–peuvent-ellesycontribuer?Des

pansentiersdesavoirsdevenusindispensables

commel’analysesystémique,lapragmatique7

oucommelesconceptsd’organisation,derégu-

lations’avèrentalorsabsentsdel’école…C’est

lesensmêmedel’enseignementdessciencesqui

estenjeu.

Ensuite,nefaudrait-ilpasenvisagerlepro-

grammenonpascommeunesommed’énoncés,

deloisoudedétailsàmémoriser,maiscomme

unmoyendequêter,decomprendreetdemo-

biliser?Celaétant,onnepeutnierqu’ilreste

desconnaissancesàapprendre.Lecontenudes

programmesnedevrait-ilpasêtredéfinitoute-

foisenprivilégiantunsavoirorganiséenlieu

etplaced’unsavoirdiscret,uneorganisation

problématiséeplutôtqu’unecollectiondedé-

tailstraitéssuperficiellement?Quelquesgrands

conceptspourraientservird’organisateursde

lapensée;cesbases(énergie,matière,infor-

mation,temps,espace,organisation,mémoire,

régulation,identité…)fédéreraientlesmultiples

informations.Ellespermettraientauxjeunesde

serepéreretderenouvelerleurimaginaire.

Enallantauboutdeceraisonnement,la

prioritén’estplusd’enseignerlessciencespour

elles-mêmes,maisautraversdessciencesetdes

techniquesd’introduirechezl’apprenantune

disponibilité,uneouverturesurlessavoirs,une

curiositéd’allerverscequin’estpasévidentou

familier8.S’approprierdesdémarchesdepensée

prendalorsuneplaceprépondérante.L’individu

doitpouvoirmettreenœuvreàcôtédesdé-

marchesexpérimentales(observationetclassi-

ficationcomprises),desdémarchessystémiques

oupratiquerlamodélisation,l’argumentation

etlasimulation.

Enfinilapparaîtimportantd’introduireles

sciencesetlestechnologiesdansleursdimen-

sionssociales9.Ils’agitde«fairepasser»l’idée

quecesapprochessontunemerveilleuseaven-

turehumaineaveclesrisquesqu’ellesprésen-

tentencore,leursréussites,leurséchecs,leurs

perspectives.Etcelaautraversdeleurshistoires,

cellesdesgrandesrévolutionsscientifiques,de

l’évolutionauxmutationsgénétiques,latec-

toniquedesplaques…etdeshommesquien

ontétélesacteurs(Copernic,Newton,Lavoisier,

Mendel…).Danslemêmetemps,unregardcri-

tiquesurlessavoirsmaniésdevientégalement

unenécessité.Uneréflexionsurlascience,sur

lesliensentresavoirsscientifiques,cultureet

société,ouencoreentresavoirsetvaleursest

toutaussiimportantequelessavoirseux-mê-

mes.Onpourraitparexemples’interrogeravec

desubstantielsbénéficessurlesréponsesqu’ap-

portentlestechniquesousurleurslimites(té-

léphoneportable,OGMouthérapiesgéniques,

parexemple).

Làencore,l’énigme,lacuriositédesélèves

peuventêtrecultivéesetmisesàprofit.L’im-

portantestdefairecomprendrequesilepro-

grèsdesconnaissancesestinéluctable,ilpeut

êtrelong,douloureux,toujoursconflictuel…

quesondéveloppementn’estpastotalement

indépendantdel’idéologiedumomentoudes

valeursdominantes.

andré giordan

ancien instituteur et enseignant au secondaire,

Il est actuellement professeur à l’université de

Genève, directeur du Laboratoire de didacti-

que et d'épistémologie des sciences. Il préside

par ailleurs la Commission internationale de

Biologie et éducation ; il est expert Sciences et

société pour le 7ème plan de la

Commission européenne.

quelques repères bibliographiques

Surlesprogrammes:A.Giordan(2002).Une autre école pour

nos enfants ?Delagrave.

Surl’apprendre:A.Giordan(2004).Apprendre ?Belin.

GiordanetG.DeVecchi(1987).Les origines du savoir. Delachaux

Pourlaformationdesenseignants.

G.DeVecchietA.Giordan(nouvelleéditionaugmentée,2002).

L’enseignement scientifique, comment faire pour que « ça mar-

che » ?Delagrave.A.Giordan,JetFGuichard(nouvelleédition,

2002).Des idées pour apprendre.Delagrave.

Surl’éducationdesplusjeunes:M.CantoretA.Giordan(nou-

velleédition,2002).Les sciences à l’école maternelle.Delagrave.

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A.Giordan(1999).Une didactique pour les sciences expérimen-

tales.Belin.

Surl’éducationàl’environnement:A.GiordanetS.Souchon

(2007).Une éducation pour l’environnement en direction du

développement durable.Delagrave.

1 Ilsontl’impressionquel’enseignementsous-estimeles

connaissances,l’expérienceetleurscapacitésdejeunesen

leurprésentantlesphénomèneshorsdesconditionsréelles

danslesquellesilsseproduisent.Poureux,«ils’intéresseplus

àlanotequ’ausavoir»…2 Ilsontlesentimentqu’onleurfaitfairedessciencespour

elles-mêmes.L’enseignementleurparaîtrépondreàdes

questionsquinesontpaslesleurs…maissurtoutavancedes

savoirssurdesquestionsquinesontmêmepasposées!3 Lapertedeconfiancedanslasciencemaisaussiledévelop-

pementdecomportementsanti-scientifiquesetderejetpar

l’opinionpubliquesonttoutefoismoinsmarquésenSuisse

quedansd’autrespayseuropéens.4 Lesscientifiquesetlasciencesesontpeuàpeucoupésde

leurscontemporains,fauted’avoirconduituneréflexionsuf-

fisammentapprofondiesurlesimplicationsphilosophiques,

éthiques,voiremétaphysiques,dessavoirsetdesdémarches

scientifiques.Lacrisedesvocationsscientifiqueschezlesjeu-

nesn’estcertainementpassanslienaveclescritiquesparfois

radicalesdontlascienceestl’objetetcontrelesquelleselle

sedéfendpeuoumal.5 Noscontemporainsontainsidumalàaccepterl’idéequela

«véritéexiste»maisqu’ellen’estpasintangibleetqu’elle

évolue.6 Souvent,cetypedepratiques’avèreêtreunenseignement

frontalindirect…7 Leprojetn’estplusseulementd’apprendreàrésoudredes

problèmes,maisd’aborddesavoirclarifierunesituationpour

parveniràlesposercorrectement.Enlamatière,l’élèvedoit

s’apercevoirqu’ilpeutyavoirplusieurssolutionsetpasseu-

lementune,quechacuneestcontextualisée,qu’ilpeutnepas

yavoirdesolutiondutoutouquelessolutionssontpiresque

lesproblèmes.Leplusimportantestalorslaquestionplus

quelaréponse…8 L’attitudedel’apprenantestplusimportantequelesconnais-

sancesfactuellesqu’ilpourraitengranger.Celles-cidevien-

nentviteobsolètesfaceàl’évolutionpermanentedeces

domaines.Ilimportedonc,avanttout,deformerdescitoyens

aptesàdébattredesenjeuxsociaux,desespritsouvertscapa-

blesdes’interrogersurlemondeousureux-mêmes.9 Ladimensionpersonnelledelasciencenedoitpasêtreélu-

déevulaplacequ’elletientauquotidiendanslesobjetsà

disposition,danslasantéouledéveloppementdurable.Mais

égalementfairesentirquelasciencepeutêtreégalement

undomained’épanouissement,desatisfaction,deplaisir

voiredebonheurpersonneldechercheràconnaîtreparsoi-

même…

Enseignerlesdisciplinesscientifiquesàl’école?

Voilàquirésonnecommeuneévidence!Car

nousvivonsunesituationparadoxale:alorsque

lascienceetlatechniqueoccupentuneplace

toujoursplusgrandedansnotreviequotidienne,

noussommesdemoinsenmoinsarméspour

comprendrecetenvironnementtechnologique

–etdonctoujoursplusdépendantdeceuxqui

saventetdétiennentainsiunpouvoir.

C’estvrai,l’écoleestl’objetdepressionsinouïes

pourqu’onyenseignetoutetn’importequoi,

enfonctiondesbesoinsdelasociété,voiredes

carenceséducativesdesparents—enplusdes

formationsdebase,biensûr!Maisforceestde

constaterquedansledomainedelascience

etdelarecherche,l’ignoranceestimmenseet

donneparfoislevertige:or,commentpeut-on

évoluerdansunmondeauquelonnecomprend

rien?Etcommentpourrait-ons’enémerveiller,

sionenignorelacomplexité?

Cela nous fait penser à cette question —

authentique!—d’unefemmerentrantdenuit

dusupermarché,etquidemandeàsonmari,

enposantlessacsàlacuisine:«Aufait,c’est

quoicespetitsmachinslumineuxdansleciel?»

Interrogezlesgensautourdevous,etvousver-

rezquequelquesoitledomaineconsidéré,le

niveaudesconnaissancesestextrêmementbas.

Enseignerlesdisciplinesscientifiquesàl’école,à

touslesélèvesindépendammentdeleurorien-

tationfuture,c’estleurdonnerlesoutilsindis-

pensablesàl’intelligencedumonde,etmieux

encore,lesmoyensdes’enémerveiller!

philippe Barraud 

journaliste (et astronome amateur), Cully

Comme dans les numéros préCédenTs, nous rYThmons la leCTure par de Brèves réFlexions qu’onT Bien voulu nous proposer diver-ses personnes en répondanT à la quesTion des sCienCes eT des maThémaTiques à l’éCole. Ces Fils rouges sonT signalés par un peTiT BaTeau qui évoque un parCours dans l’univers des maThéma-Tiques eT des sCienCes naTurelles.

des Clés pour  l’inTelligenCe du monde

nous avons pensé inTéressanT de plaCer iCi la réFlexion de denis BaeriswYl sur les sCienCes en ensei-gnemenT spéCialisé, eT non JusTemenT dans une ruBrique spécialisée, parCe que l’auTeur donne un relieF TouT parTiCulier aux Thèmes évoqués dans CeTTe parTie, Comme si Ces élèves en grandes diFFi-CulTés aidaienT à dévoiler mieux enCore l’imporTanCe de l’enseignemenT des sCienCes !

« apprivoise-moi ! » diT le renard : une approChe de la ConnaissanCe de l’envi-ronnemenT en enseignemenT spéCialisé

Contexte de la réflexion

Dansuncontextedepédagogiespécialisée,la

variétédessituationsdesélèvesdéfielescompé-

tencesprofessionnelles:troublesducomporte-

mentoudelapersonnalité,déficienceintellec-

tuelle,infirmitémotrice,etsouventl’association

decesdifficultés.Cequiunitcesélèvesrelève

in fined’unedifficultéàprendreencomptele

mondequilesentoure.Au-delàdeleursbesoins

immédiats,cesenfantspeinentàrechercherce

quin’estpasdirectementperceptible,derrière

lesphénomènesetlesévénements.Leurmoti-

vationestaccaparéepardesnécessitésbasiques

quotidiennes,affectives,sécuritaires,directe-

mentvécues.

Quellesraisonsdèslorspourunedidactique

delaconnaissancedel’environnement?avec

quellesintentions?Làsejouentdesimpératifs

quidébordentlargementles«sciences».Ils’agit

plutôtd’apprendreuneculturequifavoriseune

formedesécuritéàêtreaumonde,enpropo-

santàl’élèvedesoutilsintellectuelsquiluiper-

mettentd’observeretdesortiruntantsoitpeu

deladevinettequeluiposesonenvironnement.

Ilseraamenéàconstruireunecompréhension

decequil’entoure,àstructurersesconnaissan-

cespourenfaireunmoyendebien-être:enbref

àaugmentersaconsciencedeschosesafinde

pouvoirapprivoiserlemonde.

apprivoiser la science…

Pasvraimentsimpledesynthétiserundiscours

portantsurl’enseignementdessciencesenpé-

dagogiespécialisée.Cetenseignementprésente

uneprofondeurqu’ilestillusoiredevouloirré-

sumer.Cependant,pouvons-nouséchapperà

uneréflexionquinesebornepasàladidacti-

que,maisvachercherlesraisonsdel’acted’en-

seignement?Quelquesélémentspermettront

peut-êtredecomprendrecequisejouederrière

laleçondesciencedansuncontextespécialisé.

Làoùjustementnousrelevonsdeslacunesdu

bagagedeconnaissances,desdéficitsdestraté-

giesd’apprentissage,desdifficultéspours’inté-

resserausavoir,unepertedesensgénéralisée,

croit-on.

 … pour apprivoiser le monde 

Sil’onadmetquelesphénomènesetlesévé-

nementsnaturelssontrégispardesloisetque

nouspouvonslesconnaître,lascienceestalors

lasommedeceslois.Maislascienceestautant

laconnaissancedesphénomènesetévénements

naturelsquelaméthodeelle-mêmequitend

ànouslesrendreconnus.Uneméthodede

connaissancequi,sielleétaitobjective,précise,

vérifiableetpourquoipasuniverselle,permet-

traitladéfinitionvraiedesloismentionnées

ci-dessus.

Onsaitàquelpointilestdifficileausavant

(cetailleursoùs’élaborelaconnaissance)d’ac-

céderàcetteobjectivitéetàcettevérité.Ainsi,

ladidactiquedessciences,entreloisnaturelles

etméthodesdedécouvertedeceslois,laisseun

largechampdidactiqueàdisposition.

Cequicaractériselasciencepourraits’expri-

« ainsi se crée une seconde nature où il n’est 

plus demandé à l’homme d’être lui-même, mais 

d’être ce qu’on attend de lui qu’il soit. »

henri hartung�

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? « apprivoise-moi ! » diT le renard : une approChe de la ConnaissanCe de l’environnemenT en enseignemenT spéCialisé

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merparunetentatived’objectivitéetderatio-

nalité.L’accèsàlaculturescientifiqueforgedu

mêmecoupl’accèsàunerationalitéquifait

souventdéfautauxélèvesdel’enseignement

spécialisé,rationalitéquis’apparenteàunedis-

ciplinerigoureusederegardportésurlemonde.

Maislasciencen’estpas,encesens,unemétho-

deuniversellebiendéfinie.Deplus,l’acquisition

delaconnaissancenesefaitjamaisentoute

neutralité;émotions,étataffectif,l’accompa-

gnenttoujours.L’individuporteuneméthode

quiluiressemble.

deux et deux quatre. répétez ! dit le maître. 

mais voilà l’oiseau lyre…

Donnerplaceàl’enseignementdessciences

danslecontextedel’enseignementspécialisé

estunegageurepourquisouhaitequelesélè-

vesapprofondissentlesloisdelanature.Leurs

aspirationsetleurdisponibilités’oriententdans

laplupartdessituationsversd’autresintérêts.

Souventemportésparleursdifficultés,lesélè-

vesprêtentdavantageattentionàleurrelation

avecl’entouragequ’àlaconnaissancedeceder-

nieretmoinsencoreàl’environnementnaturel

danslequelilsbaignent.Lesdémarchescom-

munesd’enseignementdessciencesperdent

deleurimpact,lesélèvesneretiennentpas

lesconnaissancesabordées,s’endétournent

etcréentainsiunclimatd’enseignementdiffi-

cile.Pourdirebref:ilsnesontpasattirésetle

laissentvoir.J’entendsalorsfréquemmentdire

qu’ilsnesontpasmotivés.Cequiestévidem-

mentréducteur.Ilsnesontpasmotivés,certes,

maispourcetobjetprécissurlequelnoussou-

haiterionsqu’ilssefocalisent.Ilssontmotivés

pourautrechose,quiéchappeàlamatièreen-

seignéeetsouventàl’enseignant.

Quidalorsdessciences?devons-nousfaire

l’impassecommec’estsouventlecas?Pasné-

cessairement:ils’agitpeut-êtred’agirpourleur

donneruneplaceàpeinedécalée,aumoins

parl’approche,afindecentrerlamotivation

desélèves.Lamotivationessentielle,ditFreud,

consisteàfuirledéplaisir.Prenons-leaumot.Si

lesélèvess’échappentdessciences,c’estpeut-

êtrequ’ilsn’ytrouventaucunplaisir.Cequiles

inciteàallervoirailleurs,parlafenêtredansle

meilleurdescas,ducôtédel’oiseaulyre.

mais pourquoi des « leçons de choses » ?

Connaîtrepermetdetordrelecoupàl’incom-

préhensiondumonde,àposerdesjalonscomme

autantdebéquillessurlesquelless’appuyerpour

fairefaceàlacomplexitédenotreenvironne-

ment.Chacunpeutimaginerdansqueldéséqui-

libresesituentcesélèves,dansquellesangoisses

ilssedébattent,euxquin’ontquesipeud’em-

prise,demaîtrisesurlemonde,surleshommes,

euxquidisposentdesipeudeconnaissancesque

leurenvironnements’apparenteàunegigantes-

quedevinetteàlaquelleilsrépondentauhasard

tantôtparouiettantôtparnon.

L’objetdelascience(danslesensdesomme

deloisnaturelles)esteneffetdécritparKant

commeunprolongementdirectdel’objetperçu,

uneextensiondelaperceptiondel’objetau-

delàduréeldirectementsensible.Uneconscien-

cedel’objetélargiepardesconnaissancessub-

tiles,uneconsciencequepeutavoirl’élèvedu

mondequil’entoure.

Maispouruneconscience,laconnaissance

desfaitsnepeutsuffire.Elledoitêtredoublée

d’unecompétenced’observerlemondeetdese

questionner,d’unepart,ainsiqued’unecom-

pétencestratégiquederecherchederéponses

d’autrepart.Lasommedeconnaissancesfac-

tuellesrestantensecondplan,nondénuéede

sens,certes,maisinsuffisantepourundévelop-

pementdurabledesélèves.

Làsesitueexactementl’enjeudel’enseigne-

mentdessciencesenpédagogiespécialisée.Ce

quiestnécessaireàl’élève,c’estlapossibilité

d’unereprésentation,lareconnaissanced’une

réalitéquipeutêtreobservéeplusloin,plusen

profondeurqueledirectementperçu.Ils’agit

del’opportunitéquenousluioffronsdese

construiredesoutilsluipermettantdesesituer

danscetensemble.L’éradicationpartiellede

l’insécuritéoffreunepossibilitédes’installer,un

tantsoitpeu,dansunprocessusquidépassela

survie,parceque«l’ignorancepeutengendrer

lapeur–etlapeurestfuneste2»,parceque

connaître,c’estenleveràl’inconnuunepartde

sadimensionmystérieusedoncpotentiellement

dangereuse,ouaumoins,c’estcroirequel’on

peutsavoird’oùvavenirledanger.

« L’enseignement des sciences n’est habituel-

lement pas conçu comme devant permettre l’ac-

quisition d’une culture, mais comme un moyen

de connaître des faits. Dans ces conditions, il

ne s’agit pas tant de former à une méthode, de

montrer la réalité objective du monde physique

et l’intelligibilité de ses lois, d’expliquer le dé-

terminisme de celui-ci, que de faire connaître

un ensemble de faits : connaissances factuelles

dont les contenus divers n’ont pas de sens en

eux-mêmes, mais seulement par l’usage qui en

sera fait plus tard, et où la mémorisation et le

respect de la parole du maître jouent un rôle

essentiel. »3

Cesmotsrésonnentencoreplusfortàl’esprit

del’enseignantspécialisé:lesélèvesnesontpas

enmesured’accéderàlamémorisationsouhai-

tée.Est-cepourcelaquenouspouvonsoublier

l’enseignementdessciences?

Oncomprenddoncquecetenseignement

contientautantunedimensioninstructivequ’une

dimensionformative:ils’agitdeformerdesin-

dividuscapablesdedécouvertes,decontribuer

audéveloppementdeleuresprit,limitantainsi

leurdépendanceenversquelquesautresdeleur

entouragequienseraientcapablesàleurplace.

du sens… pour se jeter vers la connaissance

Laquestionseportealorssurlesraisonsqui

permettentdeconstruiredesstratégiesd’ap-

prentissage.Etdanslecontextedelapédagogie

spécialisée,ceserad’abord,maisquin’yadéjà

pensé,lanotiondeplaisir.Sicesélèvesnetrou-

ventpasdeplaisiràcequiestpourbeaucoupévi-

dent–lacuriositéenverslemonde,l’anticipation

ouencorelegoûtdel’effort–ilsletrouveront

danscequiserapprocheauplusprèsdeleursin-

térêtsdirects:ladimensionaffective,lesaspects

relationnelsdoncsociauxdirectementpercepti-

bles.Makarenkorelevaitquel’hommeabesoin

d’unbutréjouissant.Etpourtousleshommes,

l’aventureporteuntelbut.Proposerauxélè-

vesdevivreuneaventure,particulièrementaux

élèvesenproieàdesdifficultés,c’estouvrirune

portesignifiantepoureuxversdesapprentissa-

gespossibles.Quelejeunesoitpartieprenante

d’uneintention,qu’ilfasseleprojetd’apprendre,

voilàleterraindel’enseignant:quel’élèvese

projetteversunobjetdeconnaissance.

L’objetdeconnaissanceestenlui-mêmeune

abstractiondifficilementsignifianteàlapre-

mièreapproche.Sil’actionenestuneclé,en-

corefaut-ilquecefairesoitliéaffectivementau

sujet.Qu’ilpuissel’investird’unrôlequiprend

placedanssesbesoinsévidents,leplaisir,l’affec-

tivité,larelationàl’autrepouraccéderparlui

àlaconnaissance.

Decetteproblématiqueestnéelaproposition

d’unedidactiquedelaconnaissancedel’envi-

ronnementpourl’enseignementspécialisé.

« physique apprivoisée » : on ne voit bien 

qu’avec le cœur…

Lechercheurdoits’aventurer,parlapensée,

dansdesdomainesoùnuln’avaitpénétréavant

lui,croit-il.C’estunleurrebiensûr,maischa-

cun,prisparl’aventure,acceptelejeu.L’élève,

commelesavant,abesoind’éprouvercesenti-

mentd’exploration,d’invention,pouraccéder

aumerveilleuxdumonde.L’émerveillementa

cecideparticulier,entresurpriseetadmiration,

qu’ilinciteàpoursuivrelarelationavecl’objet

pourl’apprivoiser,enconnaîtreplusquelare-

présentationdirectementsensible.Nousavons

besoind’aimerl’objetpourledécouvrir.

L’impulsionpourdévelopper«Physiqueappri-

voisée»estvenued’abordd’uneformededé-

sarroi.Unjour,unenseignantestvenuaucentre

deressourcespédagogiquesposerunproblème

formuléainsi:«Jeveuxtravaillerl’érosiondes

montagnesavecmesélèves,maisilsnecompren-

nentrienauxtabellesquejeleurmontredans

lelivrequejeleurpropose…»J’aiperçudans

cetappelun« Je-enseignant»surprésent,ma-

gistral,agissantfaceàdesélèvesdontlatâche

serésumaitàcomprendreundiscoursetdesta-

belles.L’adulteproposaitsonprojetdetravailler

l’érosion,traitéparsesmoyens.Celasignifie-t-il

queleprojetsoitdéraisonnable?Pasforcément!

Questiondeméthode,ouplutôt,dedidactique.

Uneaffaired’artetdemanière…

Fabriquer...

Laphysiqueimprègnelequotidienetilest

possibledel’approcherdemanièreenthousias-

mantepourautantquel’onadmettequece

n’estpasdansleslivressavantsqu’ellesecache.

Ellenécessiteuneapprochequifasseimmé-

diatementsenspourl’enfant,quipasseparune

implicationaffectivedansleréel,dépassantla

manipulationetl’expérimentation.Ladémar-

chede«Physiqueapprivoisée»proposelafabri-

cationd’unobjetdontlesphénomènesseront

parlasuiteétudiés.Toucherlesobjetsnesuffit

pas,l’élèvedoitpouvoirjoueraveceuxpourles

appréhender,danslesensd’entreteniravecle

mondeunerelationactive,concrète,avantde

prendreletempsderéfléchirauxphénomènes

au-delàdel’apparence.Luiproposerderéflé-

chirplutôtquedemémoriser,àluijustement

quiaimeréfléchir,maisdontlapenséen’estpas

lanôtreetsefondesurd’autresprémisses.

Admettantquelesélèvesdecesecteursont

pourlaplupartencoreancrésdansuneappro-

checoncrète,jeremarquequ’ilsontbesoin

d’appuyerleurréflexionsurl’objetnonseule-

mentmanipulé,maisplusencoreinvestiaffecti-

vement.Cettepossessiondel’objetestproposée

souslaformed’untempsdefabrication,d’ap-

propriationdel’objet.

Pourcetteraison,lemomentatelier de fabri-

cationestconsidéréicicommesourced’intérêt,

demobilisationmentalepourl’élèvequiàpartir

decetinvestissementvaaborderlesaspectsplus

formelsdelaphysique.

reformuler : le créé crée le créateur. 

Pourpenser,inventeretdécouvrir,l’êtrehu-

mainabesoindetemps,d’inspirationetd’ac-

tion.Lapenséeintelligentenesertpasqu’à

mémoriser,maisàinvestirlesavoir,àthéoriser,

modéliserlesconceptsfavorisantainsil’enten-

dement,c’est-à-direlaconsciencedeschoses.

C’estparlapensée,l’actionmentale,que

l’élèvedéveloppesafacultéd’abstractionet

structuredessavoirssurlabasedesinforma-

tionsrécoltées.

Ilinsèrelesdécouvertesdansunréseaude

connaissanceslogiquementorganisé.Orlesca-

tégorieslogiques,relativesselonsondévelop-

pement,sontlesinstrumentsàl’aidedesquels

ilorganisesavieetsereprésentelemondede

l’expérience.Làestdoncl’essentieldela«leçon

descience»enenseignementspécialisé,puisque

cettedimensionexprimejustementunaspect

particulierdeladifficultéd’apprendre.

Cettemiseenjeudelarationalitédel’élève

s’avèreprimordialepourluipermettreunere-

lativemaîtrisesurl’environnement,pourqu’il

puisseéluciderunbrinladevinettemonumen-

taledumonde.Elleconsistesurtoutenune

tentativedemodélisationapteàreprésenterles

phénomènes.Maisj’ajoute:pourl’élèveetnon

pourl’enseignant.Dansl’idéed’unapprivoise-

mentdelaphysique,lamodélisationrestecelle

del’élèveparcequec’estcellequ’ilpeutadmet-

tre.Ellecorrespondàsondéveloppementetà

sapossibilitédeconceptualisationàunmoment

donné.Perfectible,oui,maisconstruitedansla

perspectived’unsavoirmoinsrelatif,enphase

avecsondéveloppementfutur.L’hommesecrée

parlacréationdesobjetsetdesidées.

Concrètement,lareformulationdel’expé-

rienceprocèdeendeuxtempsdistincts:

• D’aborddire,décrire,expliquer.Laconfronta-

tionàlapenséedel’autrepermetderepenser

laconstructionetlesdécouvertes,d’élaborerdes

connaissances,deconceptualiseretd’abstraire

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? « apprivoise-moi ! » diT le renard : une approChe de la ConnaissanCe de l’environnemenT en enseignemenT spéCialisé

Danslamarmiteàvapeur,ilyadel’eaudanslefonddelamarmite.Celle-cichauffe.L’eaubout.Elles’évapore.Lavapeurdonnedelapression,c’est-à-direellepoussedetouslescôtés.Lavapeurmontejusqu’aucouvercle.Elles’échappeparlestrousdubouchon.

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desloisduréel.L’élèveestconfrontéàsesques-

tions,àlaposed’hypothèses,àlarecherchede

solutions,àl’explicitationdesesactions.Ilsort

desroutinesetquestionnesespositions,ses

actions,sesreprésentations.Ildevientréflexif.

• Ensuiteuneformalisationdelaréflexion.

Lareformulationprendtoutsonsensau

momentoùlesujetélaboredestracesdépas-

santlesparolesetmédiatisablesdansun

processussocialdeproductiond’informa-

tions.Ceretourauconcretpermetderelire

l’expérience,cetteoccasionderelecturequi

consolidantladémarched’apprentissage;

• Endéfinitive,c’estbiendudéveloppementde

l’élèvequ’ilestquestionàl’école.Sesituer

danslemonde,sequestionneretchercher

desréponses,incarnerlessavoirs.Aunensei-

gnantquiremarqueque«Physiqueapprivoi-

sée»prenddutempsetque«çadonneun

peul’impressionquetunefaispasceque

tudois4»,jerépondsqu’ilréduitsafonction–

justementcequ’ildevrait–àuneidéed’ac-

cumulationdeconnaissancespréconstruites

mémorisables.Qu’ilplacedecôtélanoblesse

desonrôlesocialquiestl’acquisitionparles

élèvesd’uneculturepermettantàchacun

d’exploreretdes’expliquerlemondedans

uneperspectived’autonomisation.

«Physiqueapprivoisée»seprésentecommeune

approchepragmatiqueenphasessuccessives:

• implication:fabricationl’objet,enprendre

possession;

• interrogation:observationdel’objet,ques-

tionnementautourdesphénomènesquilui

sontliés;

• réflexion:reformulationdesloismisesainsi

enévidence;

• médiatisation:structurationdessavoirs.

Ilestévidentquecettesuiteprend du temps.

Maisselonquelleréférence?cequiimporte,

c’estledéveloppementdesélèves,leurforma-

tion.Etpourcela,nousavonsdetoutemanière

besoindetemps.

denis Baeriswyl

professeur formateur à la HEP, responsable

notamment du projet « Physique apprivoisée »

Pourensavoirplussur«Physiqueapprivoisée»:

voirlesitehttp://hep-vd.educanet2.ch/physapp

oulaprésentationrapideenformatpdf:

http://hep-vd.educanet2.ch/physapp/docs/resume.pdf

Pourunexempledereformulationmédiatisée:

http://hep-vd.educanet2.ch/physapp/classes/schenk/diabato/

index.htm

1 In Ces princes du management,Fayard1970,p.45.2 FedericoMAYOR,directeurgénéraldel’UNESCO,«Quelbilan

pourlascience»,in EncyclopædiaUniversalis2005.3 EvrySCHATZMAN,membredel’AcadémiedesSciences,direc-

teurderecherchesémérite.«Lestatutdelascience»,inEncy-

clopædiaUniversalis2005.C’estnousquisoulignons.4 http://hep-vd.educanet2.ch/physapp/kesako/19effet/effet-

mem.htm#vecu2

Bateauvudeprofiletvud’enhautdessinéparNasratAvecuntuyauenplastiqueilfautaspirerdel’eaudansletubeenroulé.Lesdeuxboutsdutubeenroulésontplongésdansl’eau.Onenlèveletuyauenplastique,l’eaurestedansletubeenroulé.Onallumelabougie,laflammefaitchaufferletubeetl’eauàl’intérieurcommenceàbouillir.Ilfautattendreunmoment.Quandl’eauesttrèschaudeellesetransformeenvapeur.L’eauchaufféepressepartout,ellesortparlesdeuxboutsdutuyau.Ensortantellepoussel’eauquiestdehors,c’estcequifaitavancerlebateau.

mettre un enfant dans la peau d’un chercheur

Unepetitephrasepeutparfoisdéclencher

cetteposture.Eneffetétudierletemps,dema-

nièretraditionnelle,n’estpasintéressantpour

desélèvesde4eet5eannées.Maiscommencer

par«unchrono-virusainfectétoutesnosmon-

tresquivontbientôts’arrêter,àtoiavecton

équipedelabodefabriquerunnouvelappareil

àmesurerletemps»donnedusensetimplique

l’enfantdanssarecherche.

Lesétudiantsfonctionnentcommelesélè-

ves.Leurdire«amenez-moidusucrepourmon

café»n’éveillepasleurcuriosité.Maisleurap-

porterunebetteraveetleurdire«fabriquez-

moidusucrepourmoncafé»prenduneautre

tournure.

Uneapprocheintéressanteestlasituation-

problème,quimetlesélèvesfaceàundéfi.

Parexemple,aborderl’étudedel’eauparune

formulecomme«l’eauestconstituéedemo-

léculesforméesdedeuxatomesd’hydrogène

etd’unatomed’oxygène(H2O)»rebuteles

élèves.Leurdemander«peux-tufaireflotter

uneagrafetrombone?»apporteraàl’enfant

lesmêmesconnaissances,maisparunedémar-

chepleinedesensoùildeviendraunvéritable

acteur.Toujoursàproposd’eauchezlespetits,

veillonsàcequeledéfiaitdusensetdébouche

surunevéritableapprochescientifique.Plutôt

qued’aborderlecycledel’eaudemanièrefron-

taledemandonsleur:«Vaut-ilmieuxsedoucher

ousebaigner,etpourquoi?»Lespluspetits

n’ayantaucunenotiondecapacité,leursrépon-

sess’étendentde5à500litres,ilfautleurfaire

acquérirdesprérequis.Lespréliminairesconsis-

tentenunéchangepourleurfairedécouvrir

commentmesurerlacapacitéd’unrécipient.

Onvoitunélèveboireàlabouteilleetl’on

profitedeluidemanderquellequantitéaété

bue.«Unlitre,plusd’unlitre,moinsd’unlitre?

Est-cequeleberlingotdelaitcontientplusou

moinsquecettebouteille?»:desquestionsqui

lesencouragentàentreprendredesmanipu-

lations,letransvasementdel’undansl’autre.

Lorsquelanotiondelitreestàpeuprèsacquise

partouslesélèves,onpeutreveniràlaquestion

deladouche.

Onpeutenchaîneravecunenouvelleactivité,

menéeavecdesélèvesdupremiercycleprimai-

re:viderlafontainedelacouretcompterle

nombredeseauxnécessaires.Lesélèvesdécou-

vrentdemanièreannexequ’ilsnepeuventpas

porterlebidontoutseuletquel’eauaunpoids.

Pourlefonddubassin,onreprendleberlingot

etlegobelet.Celanesemblepastrèsmathéma-

tique,maisàforcedemanipulations,onpeut

établircombiendebidons,deberlingotsetde

gobeletssontcontenusdanslafontaineetse

rapprocherainsidelanotiondecapacité.Ils

reprendrontl’exercicechezeuxpourmesurer

l’eauutiliséepourleurdouche.

«Quandvousvousdouchez,pouvez-vousme-

surerl’eauquis’écoule?non.Alorsprenezune

douchedanslabaignoire,caronpeutlafer-

meravecunbouchonsansrisquequel’eaune

s’écoule.»Encouragerlesélèvesàécoperl’eau,

aprèsleurdoucheavecunberlingot,puisun

gobeletetennoterlerésultat.

Aprèscettedécouverte,ilnes’agitpasde

traiterlaquestiondemanièreréductrice,mais

d’élargirensuiteleshorizonsdesenfants,par

exempleparlaprojectiond’unfilmsurl’eau

dansleSahel.Laconsommationdel’eauconcer-

nedonctoutlemonde,etmontreàl’enfant

qu’ilappartientàunmondetrèsdiversifiéoù

ilnevitpasseul.Voilàlespremierspasd’une

approchecitoyennedessciences.Etudierlesdif-

férentsétatsdel’eaulesintéresseraplustard.

exploiter le potentiel des élèves

Ils’agitdedécouvrircequel’enfantsaitdéjà,

etpartirdelàpourexploitercepotentielsou-

ventbeaucoupplusimportantquecequel’on

croitcommunément.

Lorsd’unedemesanimationsdanslespetites

classes,j’aiétéfairedupainavecdesélèvesde

premièreannéeprimaire.J’aialorsapportéaux

élèvesunballonbiencroustillant.C’étaitleur

l’enseignemenT de disCiplines Telles que la géographie, les sCienCes naTurelles ou l’hisToire appa-raîT dès le CYCle de TransiTion. les élèves des années préCédenTes aBordenT Ces maTières de Façon gloBale sous la Forme d’aCTiviTés d’éveil eT de connaissance de l’environnement 1. le Témoignage qui suiT propose quelques exemples de démarChes ConduiTes lors d’animaTions dans des Classes de Jeunes élèves, ainsi qu’une réFlexion gloBale sur l’éduCaTion à l’environnemenT.

l’enFanT CherCheur auJourd’hui, CiToYen responsaBle demain

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? l'enFanT CherCheur auJourd'hui, CiToYen responsaBle demain

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référencepourlamatinée,aveclarecomman-

dationd’engarderaumoinsunpetitmorceau

jusqu’àmidi.

Jeleuraidemandé:«Qu’allons-nousfaire,

destartines,delacuisine,dupain?OK,par

groupesdetrois,faitesvotrerecettepuispassez

àmonmagasinpourrecevoirlesingrédients».A

cetâge,ilsontdelapeineàécrire:ilspouvaient

doncaussidessinerleurrecetteoum’expliquer

leurintention.

Lesrecettesontétéparfoisrenégociées–par

exemple,iln’yavaitpasd’œuf–etlesquantités

demandéesontétéunpeuredimensionnées.Ils

memontraientavecleursmainslesquantités

nécessaires.Unélèveademandédelalevure,

parcequesonpapaenmetdanslapâteàpizza.

Unélèveademandéunebalance.Ilaplacéle

ballonsurlabalance,puisilm’ademandéde

lafarinejusqu’auniveauatteintparl’aiguille,

lorsqueleballonsetrouvaitsurleplateau.Un

deuxièmeélèvem’aditqu’ilfallaitquel’aiguille

n’atteignepaslemêmeniveaucarildevaitmet-

treautrechose.

Voilàdespotentielsd’élèvesdepremièrean-

née.C’estsuper,maislesaurait-ondécouvertssi

lamaîtresseleuravaitsimplementdonnéunere-

cetteàsuivrecommedanslaplupartdescas?

J’aicuitlesballons,carj’aiestiméquec’était

uneétapetropdélicatepoureux.Ilsontensuite

dûcomparerlesaspects,goûtsettexturesdu

ballonduboulangeravecleursréalisations.Je

leuraid’aborddonnélesballonspas terribles,

pâteuxetfades,puisunballonsaléqu’ilsont

beaucoupaiméetilsontréaliséqu’ilfallait

mettredusel,maispastrop.Ensavourantle

dernierballon,ilsontdécouvertl’importancede

lalevure.Avecuneéprouvettecontenantdela

farine,del’eauetdelalevureetcouverted’une

baudruche,nousavonsobservélegonflement

decelle-cisousleseffetsdugazproduitparla

fermentation.Apartirdecesexpériencesetde

cescomparaisons,legroupeaélaborélarecette

dupainidéal.Finalement,unerecettedepâte

pourtresseaététestéepourréaliserunlapin

dePâques.

Tisser des liens avec son environnement et 

découvrir les subtilités de sa complexité

Dehors,jelaissed’abordlesélèveslibresde

jouer,dedécouvrirspontanémentl’environne-

mentàleurgrépourqu’ilscréentunlienaffectif

aveclemilieu,puisjelesmetsaudéfiderésou-

dreunequestion.Lesrecherchesensciencesde

l’éducationontdémontrél’importancedesliens

affectifsquisetissentàtraverslaconstruction

d’unecabane,d’unerencontreavecunanimal

ouunvégétal.Eneffet,pourleschercheurs,ces

relationsaffectivesinfluencentpluslesattitu-

desetlescomportementsdesenfantsvis-à-vis

deleurenvironnementquedesimplessavoirs.

Ceslienssegraventtrèstôtdansleurmémoire,

souventàpartirdepremièresémotionsvécues.

Donc,ilsdoiventd’abordjouer,tissercesliens.

Lanatureetl’environnementsontdeslieux

trèscomplexes.L’hommelesdétruit,lesprotège

etfinalementlesgère.Pourquoi?Chaqueélève

doitidentifierdeseffetsproduitsparl’êtrehu-

mainsursonmilieu.Ilfautcréerdesattitudes

derechercheousimplementinterpellerl’enfant

surcertainscomportements.Laréflexionquien

découledoitaboutiràlacompréhensiondesac-

tionsdel’hommesursonmilieu.Unemanchette

peutenfournirlesujet:«Unloupabattuen

Valais»:parqui?pourquoi?Ouencore«LaVe-

nogepolluéepardupurin!»

Cesmomentsderéflexionsontàdévelopper

danslesclasses.Fairepasserunmessageprend

dutemps.Vouloirtraiterlaquestiondel’eau

ensixpériodesestunleurre.Laconnaissance

del’environnementn’estpasunedisciplinesco-

lairecommeuneautre.Ilfautsavoirprendrele

tempsnécessairepourréaliserdesprojetsqui

motiventlesélèvestoutenrépondantàleurs

questions.

Uneenseignanteaconduitunprojetsurla

coccinelle,dansuneclasseducycleinitial.Au

coursd’unejournéeportes ouvertes,lesélèves

ontprésentéauxparentsdiversatelierssurlecy-

cledelacoccinelle,sanourritureetsurtoutont

faitdécouvrirquecespetitsinsectesmigraient…

Quilesavait?Certainementpaslesparents.Ils

leurontfournidesexplicationsetontréalisé

desdémonstrations.Voilàlameilleureévalua-

tiondecetravailpourlesinconditionnelsde

cetaspect…

quelles compétences pour enseigner la connais-

sance de l’environnement ?

Fairedécouvrirquenousappartenonsàun

toutestundesobjectifsessentielsdelaconnais-

sancedel’environnement.L’approchesystémi-

quequidoitnousfairecomprendretoutesles

relationsentrelesujetétudiéetsoncontexte

estdoncunoutilimportantpouryparvenir.

DansnotreinstitutionàlaHEPVaud,lemo-

duleConnaissance de l’environnementestà

chevalsurl’Unitéd’enseignementetderecher-

che2Mathématiques et Sciencesetl’Unitéd’en-

seignementetderechercheSciences humaines,

cequiréponddéjàenpartieàlaquestion.En

effet,ilfautanalysercetenvironnementavec

unregarddespécialisteoùl’espritcritiquedo-

mine.Maisdeplus,lescientifiquedoitsesoucier

d’uneapprocheglobale,unedespréoccupa-

tionspartagéed’ailleursparHarmoS3,maisqui

jusqu’àmaintenantestsouventignoréedans

l’enseignementdessciencesetdelaconnais-

sancedel’environnement.Parexemple,onvoit

souventdesenseignantstravailleravecleurs

élèvesunfruitdemanièredétaillée,plutôtque

d’étudierlesfruitsavecl’idéedeleurproduction,

deleurtransport,deleurprixetfinalementde

leurimpactsurlasanté.Lenerfdelaguerreest

l’économie.Lesélèvesdoiventcomprendreque

chaquechoixaunprix,àplusoumoinslong

terme,pasuniquementenprofitsfinanciers,

maisunprixpourl’environnement,pourlapaix

danslemonde,pourledéveloppementdurable

denotreplanète.Desétudiantesontsensibilisé

desélèvesde5eetde6eannéesaucommerce

équitable,surlabased’achatetdeventede

bananes.Ellesontpréparéunjeudepiste,avec

despostes«transport,prixdeproduction,prix

deventeenSuisse,revenusdesproducteurs,des

intermédiaires,descommerçants…».

Pourrésumer,travaillonsaveclesétudiants

cetteapprocheglobaleainsiquelesspécifici-

tésdessciencesetdelaCE,afinqu’ilssoient

plusefficacespourdonnerladimensiondu

développementdurableàleurenseignement.

Parexemple,concernantlagénétique,l’ensei-

gnantfaitdécouvrirettransmetdesprincipes

fondamentaux(structuredel’ADN,etc.),mais

quelquespériodesplustard,lesélèvesnesavent

riendelatransgenèse4,pourtantlabasedes

manipulationsgénétiquesetdesorganismes

génétiquementmodifiés(OGM).Ilsnesauront

pasquellepositionprendrelorsd’unevotation.

L’écoledoitdoncjouerunrôleimportantet

aborderlesaspectsd’utilité.C’estàceniveau-

làquelessciencesduchercheurrejoignentles

préoccupationsducitoyen.

Passerunmessagescientifiqueetglobalde-

mandedutemps.Sijereviensàmonexemple

delabetterave,jepeuxdirequ’aprèstroisdemi-

journées,nousétionsencoreloindusucre.Il

fautdescompétencesscientifiques,ilfautdu

couragepourlefairepasser,etilnes’agitque

del’approchescientifique.Ilfautaussiêtre

cohérent.Eneffet,l’écoledoitfairepasserun

messageenvironnementalenalliantlegesteà

laparole.Luttercontreletabagismeenallu-

mantuneclopeaprèsl’autre,cen’estpascré-

dible.Fairedesdiscoursmuscléssurl’économie

d’énergieetlaisserlesnéonsalluméstoutela

journée,laisserdesrobinetsouvertsinutilement,

nel’estpasnonplus.

Charles-etienne vullioud

professeur formateur à la HEP Vaud,

biologiste naturaliste, spécialiste de la

didactique des sciences naturelles et de la

connaissance de l’environnement.

1 Laconnaissancedel’environnement(CE)estunebranche

quiétudiel’environnementpendantlespremièresannées

delascolarité.Elleconsisteenuneapprocheglobaledu

milieuetsestructureentroisdomaines:ledomainespatial,

ledomainetemporeletledomainescientifique.(Cf.:plan

d’étudesvaudois:2006)2 Depuisaoût2006,laHEPVauds’estorganiséeautourd’Uni-

tés d’Enseignement et de Recherche(UER).Leurrôleestde

réunirdescompétencesdeformateursautourdedisciplines

didactiquesoutransversalespourconsoliderlesrecherches

etlesenseignementsciblés.3 LeprojetHarmoS(Harmonisationdelascolaritéobligatoire

enSuisse)faitpartiedepuis2001desprioritésdelaConfé-

rencesuissedesdirecteurs.Cf.articledeFrançoisGinginset

all.,danscenuméro.4 Transformationvolontairedupatrimoinegénétiquenaturel.

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? l'enFanT CherCheur auJourd'hui, CiToYen responsaBle demain

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Triste constat

Pasbesoindesondagespointusoud’audits

dispendieuxpours’enrendrecompte…ilest

assezévidentquelesanciensGymnasiensqui

n’ontpassuiviunevoiescientifiqueont,pres-

quetous,unsouvenirlamentabledeleurscours

dephysique.Questionnez-lesdonc!Queleur

reste-t-il?Lesouvenird’unfatrasdeformules

mathématiquesindigestes,d’exercicesinabor-

dables,defastidieux«pompages»derapports

delaboratoire,riendecompréhensible,rien

d’abordablequipuissesusciterl’intérêtdecreu-

serunpeu;quantàl’espoird’entendreévoquer

unaspect«fun»ou«cool»…n’ypensonspas!

Etdeplus,celamentosedéclinedesdeux

côtésdupupitre:silesélèvessetrouventvite

dépassés,dépités,découragés,lesenseignants

decesclassessontpeuàpeuécœurés,perplexes

etdésarmésenfaced’élèvesdontlamajorité,

mêmeaniméea prioridelameilleurevolonté

dumonde,aétéirrémédiablementacculéeàdé-

crocher,àabandonner.Parailleurs,jesuspecte

ceslamentationsd’êtred’autantplusaiguësque

l’enseignementaétéplustraditionnel…

Plustristeconstatencore,cesquinzederniè-

resannées,commepourleréchauffementcli-

matique,onapusentirunenetteaccélération

deladégradationdelasituation;jenevaispas

merisqueràprétendreque«leniveaubaisse»,

laréponsefacileesttropconnue:lesensei-

gnantss’enplaignentdepuisAristote!Pourle

réchauffementplanétaireaussi,onentenddire

qu’ilyatoujourseudesgazàeffetdeserre

dansl’atmosphère…

S’ilnerestevraimentquedetelssouvenirs

etaucunsavoir-faireutile(oublionslessavoir-

être!),osonsalorsavouerunindéniableéchec

ettentonsd’entirerquelquesconséquences…

Ya-t-ilunremède?Nevaudrait-ilpasmieux

abandonnertoutsimplementcetenseigne-

ment?Leréserveràceuxquichoisissentune

orientationquiexigeraplustarddesconnaissan-

cesoudessavoir-faireenphysique?End’autres

termes,vaut-illapeined’enseignerencorecette

brancheàtoutlemonde?

Cespériodesneseraient-ellespasbeaucoup

mieuxutiliséessiellesétaientdestinéesàensei-

gnerquelquechosed’utile?

Vousreprendrezbienunetranched’orthogra-

phe,non?oupeut-êtreundoigtd’informatique?

Avouons-leetregardonslaréalitéenface,

l’abandondelaphysique,pourunemajoritéde

cesélèves,estdéjàdanslesfaits.Ilestd’ailleurs

tacitementadmis,parlecorpsenseignantlui-

même,qu’ilyasuffisammentdedisciplinesplus

généreusespourcompensercetteingrateetin-

compréhensiblebêtenoiredesnonscientifiques.

Lapestesoitdelaphysiqueetdesphysiciens!

mais pourquoi donc ?

Maisqu’adoncfaitcettemalheureusephy-

siqueauxdieuxdespotachespourmériterune

imageaussidéplorable?Aucuneautrebranche

neluifaitconcurrenceaupalmarèsdelamé-

fianceetdel’antipathie;peut-êtrel’allemand,

enplusatténuéetaveclequeljemesensun

peucomplice…Silecumuldedeuxsignesné-

gatifsdonnevraimentunplus,nedevrions-nous

pasdonnerlaphysiquedanslabellelanguede

Gœthe?J’imaginel’effroiprovoquéparcette

épouvantableperspective.

Foindecesbadineries,tentonsuneexplication,

de la phYsique?  FauT-il enCore enseigner la phYsique au gYmnase en dehors des opTions?

« The most incomprehensible thing about nature 

is that nature is comprehensible »

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? de la phYsique ? FauT-il enCore enseigner la phYsique au gYmnase en dehors des opTions ?

uneprudenterecherchedesoriginesdecepetit

désastre.(Petitcar,jelerappelle,ceproposne

concerne«que»lesélèvesditsnonscientifiques

etuneseulediscipline).

Forceestdeconstaterqu’ilyadescauses

intrinsèquesàlabranche:pourfairevéritable-

mentdelaphysiqueilfautmaîtriseruncode,

lelangagemathématique,etpratiqueravecri-

gueuruneméthodequinelaisseaucuneplace

auxintuitionsspontanées,auxémotionsouaux

sentiments.Orlespauvrescollégiensdébarquant

enpremièreannéedugymnasenesontpaspré-

parésàça.

Concernant lamaîtrisede l’outilmathé-

matique,j’oseaffirmerque,leplussouvent

aujourd’hui,cesélèvesnemaîtrisentpaslessim-

plesproportions,voientlespourcentagescom-

meunenotionbiennébuleuse,sontdépassés

parlesmanipulationsalgébriquesélémentaires,

peinentàl’utilisationcorrectedeleurcalcula-

trice…pourneciterquelespathologieslesplus

handicapantes.

Pourcequiestdesaptitudesàlaméthode

etàsarigueurlogique,lafortetendancede

lapédagogieofficiellededélaisserlaméthode

déductivepourmettrelesdeuxpiedsdansle

mêmesoulierdeladémarcheinductiveafi-

nalementdesconséquencesgraves:capacités

deraisonnementappauvries,confusionentre

causeseteffets,voiremêmeentrehypothèses

etconclusions.Parailleurs,lessentiments,émo-

tionsetintuitionssontabondammentvalorisés,

cequipermetunmeilleurépanouissementdes

élèves,succèsindéniablequ’ilfautsaluer,mais

quineprédisposepasàl’attitudenécessaire-

menthumble,systématiqueetpatientedela

démarchescientifique.

N’oublionspasnonpluslesdéficiencesno-

toiresenfrançais,surtoutdanslaconnaissance

etlarigueurduvocabulaire(laissonspudique-

mentl’orthographedecôté!),quiempêchent

souventlabonnecompréhensiond’unedonnée,

d’unénoncéoud’unprincipe…

Depluslesévaluationsnepeuventappor-

teraucunestimulationtantl’importancedela

brancheestfaibleàl’aunedesnotes;elletend

mêmeverszéro.Ayonsladécencedenepas

comparerlepoidsdelaphysiqueavecceluide

certainesdisciplinesréputéespayantes.

Bien,asseztirésurl’écoleactuelle!Ellen’est

pastouteseulesurlebancdesaccusés;notre

sociétécontemporaineestaussilourdementen

cause.

Laphysiqueestrébarbativeetingrateparce

quepourpasserlecapducode,dulangage,

commed’ailleurspourentraînerlaméthode,il

fautaccepterundrill,unapprentissagerépétitif

etfastidieuxquiprendleplussouventlaforme

delonguessériesd’exercices.Or,aujourd’huice

genred’effortestdévalorisé,unetelledémar-

chen’estplusàlamode,ledrilletlarépétition

sontregardésavecméfianceetsuspicioncomme

appartenantàunepédagogiesuspecteetcadu-

que.Partoutdansnotresociétédesrésultats

positifsetsatisfaisantssedoiventd’êtreacquis

rapidementetdemanièredirecte.Nilarigueur

dansladémarche,nilafinessedel’analysen’ont

unegrandecote,onpréfèrelesraccourcisetles

jugementssommaires.Ensomme,avecnotre

physique,nousramonscomplètementàcontre-

courantdelamodedutemps.

Sil’onpeuttrouverdesoriginesdumalaise

dansl’écoleelle-mêmeainsiquedanslasociété

d’aujourd’hui,onnepeutpassersoussilence

descausespurementpédagogiques;jepense

iciàdesfaçonsdefairetotalementinadaptées

quimalheureusementsontdespratiquestrop

courantes.

Certes,toutprofesseuresttentéderepro-

duireunenseignementsemblableàceluiqu’ila

lui-mêmevécuousubi.Lemaîtrequicommence

sacarrière,lui-mêmerécentétudiantscientifi-

que,mettratoutnaturellementsurpiedun

courstrèsclassiquequ’ilallégerauntantsoit

peupourépargnerlemanquede«dispositions

scientifiques»decepublic.Etnousvoicisurles

railsd’unenseignementformalisteetdupro-

grammestandard!Celuiqu’onavécuendébut

d’Universitéetquicommenceparcetteaffreuse

cinématique…àelletouteseuleunépouvantail

fortefficace!Ledébutantquej’étaiss’estaussi

fourvoyésurcemauvaischeminquiconsisteà

faireaveclesnonscientifiquesunesortedephy-

siqueunpeu«soft»…nonsansquelquesdégâts,

j’ensuisconscient.

Evoquercescoursinappropriésmefaittou-

jourspenseràJulesVallèsqui,dansL’enfant,dé-

critcommentleslycéensdesonépoqueétaient

condamnésàlatortureinutiledelaversifica-

tionlatine…Iln’estpastendrenonplusavec

l’inadaptationdesaformation,Vallès,quidé-

dicacera,quelquesannéesplustard,Le bache-

lier : A ceux qui, nourris de grec et de latin, sont

morts de faim.Dommagequecertainsprofsde

physiquepersistentàfaireencoredelaversifi-

cationlatine…

Jesuisprofondémenttouchéparlasouf-

francedecespauvresélèvesqu’oncondamne

àpeinersurunsolfègerébarbatifalorsqu’ils

pourraientvibreretprendremêmeduplaisirsi

onleurfaisaitécouterlamusique.

des remèdes ?

Aprèscettesombreesquissedescausesdu

malaise,ilfautessayerdetrouverdesremèdes.

Latentationpremière,commeunesortede

réflexeconditionnéd’enseignant,estdereven-

diquerunedotationhoraireplusimportantequi

compenseraitlapénibilitédel’apprentissagede

laphysique.Ilestpeuprobablequeceremède

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soitefficace,c’estsurtoutunrêveabsurdevoué

às’évanouirdevantdesprétentionsidentiques

venantd’autresdisciplines.Letemps,s’ilestdi-

latéchezEinstein,estplutôtcomprimédansles

grilleshoraires.

Alorsaulieudesemorfondreenregrettant

lesneigesd’antan,trouvonsdenouvellesstra-

tégies,repensonsprofondémentlesobjectifsde

cescours-là.Ilestàmonavisnécessaired’aban-

donnerl’espoirillusoired’amenercesélèvesà

fairevraimentdelaphysiquepureetdure,il

seraitplusjudicieuxetplusréalistedes’appli-

queràleurmontrercequ’estcettebranche,ce

quesontsesméthodes,toutenapportantdes

élémentsindispensablesdeculturegénérale

scientifique.

End’autrestermesils’agitdefaireunmini-

mumdesolfègeetd’écouterunmaximumde

musique…onpourraitdireaussiunminimum

degrammairepourunmaximumdelittéra-

ture!Laissonstomberl’encyclopédiquepro-

grammepropédeutiqueetrestreignons-nous

àunoudeuxdomainesexemplaires.Eneffet,

aucunchapitren’estvraimentindispensable;

quelavantagepourunjuristedemaîtriserla

loid’OhmoucellesdeKirchhoffquirégissent

lescircuitsélectriques?pourquoiunéconomiste

devrait-ilsavoirutiliserlaloid’Ampèreetcal-

culerlechampmagnétiqued’unsolénoïde?un

futurlicenciéensciencespolitiquesdoit-ilvrai-

mentêtrecapabledecalculerunetrajectoire

balistique?Allonsdonc!

Parcontre,montrercommentondécouvre

uneloiphysique(peuimportelaquelle),com-

mentons’ensert,quellessontseslimites,puis

commentsedéveloppeetprogresselaconnais-

sanceenscience,ça,jeletrouveindispensable

etfaisantpartied’uneculturegénéraledebase.

End’autrestermes,ilfautparlerbeaucoupplus

deladémarche,desidéesfondamentalesqui

sontessentiellementsimplesetnécessitenttrès

peudemathématiques(Einsteindixit);cessons

detropbidouillernoschèresformules…

Jen’enprêchepaspourautantuneconver-

sionàlavulgarisation,iln’estpasquestionde

transformerlecoursdephysiqueenspecta-

clesludiquesouenséancesdevidéo.Avecles

moyensmultimédiaàdispositionaujourd’hui,

lestentationsdedérapagesonttrèsfortes;je

croiscependantqu’ilexiste,entreunephysique-

vulgarisation-spectacleetunephysique-ennui-

formules,unespaceassezlargepourexplorer

plusieursvoiesintéressantes,souventardues,

certes,maispraticablesetquipermettentde

faireentendreunpeulamusique.

deux pistes

Aucoursdemacarrièrej’aidéfrichédansce

créneauquelquespistesvariées;avecdessuc-

cèsdivers,maisquim’ontconvaincuchaque

foisqu’ilvautlapeined’innovermêmepour

s’aventurerdansdesenseignementspastrès

orthodoxes.Jemeborneraiàdécrireicideux

expériencesquej’aitrouvéesparticulièrement

fructueusesetquiontétéapprofondies.

Pourmefaireentendreparunpublicplutôt

littéraire,j’aichoisideparcourirl’histoirede

l’astronomieetdesafille,lamécanique.En

abandonnantlepluspossibleleformalismema-

thématiqueetenplongeantvolontairementle

proposdansunbaintrèsculturel,j’aimissur

pieduncoursquiaprisd’abordlaformed’un

polycopiéetquis’estensuitemuéenlivre1.

Lapremièrepartieestconsacréeàlades-

criptiondesaspectsetdesmouvementsqu’une

simpleobservationvisuellepermetdedécouvrir

dansleciel.Cesdonnéespermettentalorsdese

formerunereprésentationdumondequinous

entoure,unmodèle,disentlesphysiciens.Modè-

lequidoitexpliquer,justifiercequ’onobserve

etêtrecapabledeprévisions.Onestlàaucœur

duprocessusd’acquisitiondelaconnaissanceen

physique.Lesélèvespeuventicifairel’exercice

deseforgereux-mêmesleurproprereprésen-

tationdumonde…quispontanémentvaêtre

géocentrique:uneTerreimmobileavecunSoleil

etuneLunequiluitournentautour.Sil’onaf-

finelesobservationsenintroduisantlesmouve-

mentsplanétaires,lemodèlevademanderdes

raffinementsquivontluifaireressembleraux

modèlescosmologiquesdel’Antiquitéquisont

exposésensuite.Cequiillustrelafaçonsaccadée

dontévoluelaconnaissancescientifique.

Dansladeuxièmepartieonvoittoutd’abord

commentlaphysiqueintuitiveetspontanée

d’Aristoteconfirmeledogmedel’immobilité

delaTerreparlasimpleobservationdelaverti-

calitédelachutedescorps.Onpeutsuivreaussi

l’évolutiondesmodèlesantiquesetcomprendre

pourquoil’hypothèsehéliocentriqued’Aristar-

quedeSamosetdeCopernicétaitsidifficile

àaccepteràuneépoqueoùaucunargument

scientifiquen’étaitlàpoursoutenirlemouve-

mentdelaTerre.AveclesennuisdeGaliléeet

lessilencesdeDescartesquin’osepublierLe

Monde,onmontrecommentlesprogrèsdela

sciencesontdépendantsducontextephiloso-

phiqueethistoriqued’uneépoque.

Leprinciped’inertiepeutensuiteêtreamené

endouceur,grâceauxavatarsetauxcritiques

médiévalesdelamécaniquearistotélicienne.Ce

quiconstitueunénormeprogrèsparrapportà

l’actedeviolencepédagogiqueperpétréchaque

foisque,commeleveutlatradition,onpara-

chutesanspréalablelesloisdeladynamiquede

Newtonquisontsicontrairesausenscommun.

Latroisièmepartieducoursprésentedema-

nièresimplel’émergencedelamécaniquerela-

tivisteetlacosmologied’aujourd’hui.

Cepanoramadesconceptionsdel’Univers

depuisAristotejusqu’aubigbangprésente

defortscaractèresd’interdisciplinaritéavecla

philosophieetl’histoire,ilsusciteainsid’inté-

ressantsthèmespourlesTravauxdeMaturité.

Debonnesrésonanceslittérairespeuventêtre

crééesaussiparlalecturedetexteshistoriques

commeleDialogodeGalilée,qu’onpeutex-

ploiterpourdesjeuxderôle,ouLa Lettre phi-

losophique sur Descartes et NewtondeVoltaire,

dontlaverved’unsuperbefrançaisdisparune

peutmanquerdetoucher.

Auxtravauxpratiquesilestnécessairede

repensercomplètementlesobjectifsdesex-

périencesfondamentalescommelachutedes

corpsetlemouvementbalistiquepourlessituer

dansunedimensioncosmologique:laTerreen

mouvementdevientlebateauquiavancealors

qu’onlâcheunobjetduhautdesonmât…et

tantpispourlatroisièmedécimaledelavaleur

del’accélérationdelapesanteur!

L’astronomieetsonhistoiresontutiliséesici

commeappasetsontd’unegrandeefficacité

pourproduirel’étincelledecuriositéquiconsti-

tuelepremierpasdanslaluttecontrel’illet-

trismescientifiqueendémique.

Dansunregistretrèsdifférentetbeaucoup

plusorthodoxe,j’aimissurpieduncoursde

physiquenucléaireentroisparties:constitution

dunoyau,radioactivitéeténergienucléaire2.

Cesujetexemplairepermetnonseulementune

intéressanteapprochehistorique,maisaussi

d’aborderdesconnaissancesmodernes,acqui-

sesauXXesiècle.

Iloffredeplusunequantitéimpressionnante

d’applicationsrencontréesdanslasociétéac-

tuelleetquiconstituentdespointsd’accrocha-

geoudescentresd’intérêt.Citonsenvrac:les

problèmesd’irradiation(naturelleparleradon

deshabitationsouartificiellecommedansl’in-

dustriealimentaire),lestechniquesd’imagerie

oudethérapiedelamédecinenucléaire,les

méthodesdedatations,lescentralesélectronu-

cléaires,etc.Toutescesapplicationsintéressent

ettouchent,carellesconcernentaujourd’hui

chaqueindividudanssonquotidien.

C’estaussiuneoccasiond’aborderlesgrands

problèmesénergétiquesd’aujourd’huiavecles

espoirsimmensessuscitésparlesfuturescentra-

lesàfusionoudefairecomprendrepourquoila

maîtrisetechnologiquedel’enrichissementde

l’uraniumconstitueunenjeumajeurdel’actua-

litégéopolitiquecontemporaine.

Ladémarcherévèlel’importancedesimpli-

cationsdelasciencesurlemondecontempo-

rain,etl’enseignantquitraitedecesujetpeut,

chaquesemaine,menerenclasseunediscussion

baséesuruneactualitéliéeaunucléaire,fraî-

chementextraitedesmedia.Lecôtétechnique

delamatièrepermetl’acquisitiondesavoir

fairedecalculsnumériques,l’entraînementà

l’utilisationd’unitésetdeleurspréfixes,ladé-

couverte(oupeut-êtreunapprofondissement

pragmatique)desloisexponentielles.Sil’onala

possibilitédefairedestravauxpratiquesdansle

domaine,onpourrarévélerl’aspectaléatoiredu

phénomènederadioactivitéetentraînerl’utili-

sationd’outilsstatistiquesélémentaires.

Onlevoit,uncoursdephysiquenucléaire

peutêtreaussirichederelationsétroitesavec

lemondecontemporainquedetechnicités.Ila

uncaractèreplusquantitatifqueladémarche

décriteprécédemmentmaisilconstituetoutde

mêmeunapportessentielàuneculturegéné-

ralescientifique.

quelques remarques encore…

C’estmacompassionprofondepourlema-

laisedecesélèvesnonscientifiques,leplussou-

ventouvertsetcurieux,quim’adonnél’énergie

deremettreprofondémentenquestionl’appro-

chetraditionnelleetd’entreprendrel’immense

travailpersonnelexigéparlesdémarchesdé-

critesci-dessus.

Alaquestionplacéeenexerguej’aidoncune

réponse:oui,onpeutenseignerlaphysiqueà

desélèvesnonscientifiques,maisledéfipéda-

gogiqueesttelqu’ilfautd’unepartadapterses

objectifsdanslesensquej’aiindiquéetd’autre

partréservercescoursauxenseignantslesplus

expérimentés,lespluscapablesd’adaptation.

Or,traditionnellement,c’esttoutlecontraire

quisepratiquepuisquecesontplutôtlesdé-

butantsqu’onenvoiesefairelesdentsdevant

cesclasses!

Voilà…

Encoreuneconfidencepourcellesetceux

quim’ontsuivijusqu’auboutdecesréflexions:

quandjepenseàcesélèvessirebutésparlaphy-

sique,«j’ailarage»,commedisentaujourd’hui

lesadolescents,etj’auraisvouluexprimertout

çaplusvigoureusement;laformed’unlongmo-

nologueincantatoire,unesortedecriàlaLéo

Ferrésurfonddemusiquedéjantéem’aurait

convenu…maisledomainedemescompéten-

cesnes’étendmalheureusementpasjusque

danscescontrées-là.

eric lindemann

ancien maître de physique au

Gymnase et membre de la Commission

Romande de Physique

Pourtouscommentaires,questionsouapostro-

phes:[email protected]

1 Mécanique, une introduction par l’histoire de l’astronomie,

EditionsDeBœck,1999.2 Physique nucléaire, Cours et exercices,Fasciculeéditéparla

CommissionRomandedePhysique.

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? de la phYsique ? FauT-il enCore enseigner la phYsique au gYmnase en dehors des opTions ?

Dansl'Univers,toutcorpsattiren'importe

quelautrecorpsavecuneforceproportion-

nelleauproduitdeleursmassesetinverse-

mentproportionnelleaucarrédeladistance

quilessépare.

cequis'exprimeplussimplementparlarelation

mathématique:

G estuneconstantedelaproportionnalitéappe-

léelaconstante universelle de gravitation.

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L’EPFLavocationdeformerdesingénieurset

desscientifiquesdehautniveau,répondantau

mieuxauxbesoinsdenotresociété.Tantl’indus-

triequelescentresderecherchesediversifient,

secomplexifientets’internationalisent.Pour

répondreàleursattentes,laformationd’ingé-

nieurdoitsanscesses’adapter.Laréformedes

étudesàl’échelleeuropéenne,introduisantune

découpedelaformationendeuxétapes,leba-

cheloretlemaster,apourobjectifsuneplus

grandesouplesseetunemobilitéaccrue.Dans

lebutdemieuxcomprendrelesenjeuxdufutur

etlepositionnementdesétudesàl’EPFL,ilest

importantdeconnaîtrecertainescaractéristi-

quesdelaréformeencours.Lesgymnasiensve-

nantàl’EPFLsontdésormaisconfrontésàcette

nouvellestructure.

les nouveaux cursus epFl

Lebachelorapportelesbasesscientifiques

ettechniquesquipermettrontànosétudiants

d’aborderleurmasteravectouslesatoutsné-

cessaires.Al’EPFL,lesétudesbachelorsont

conçuesdefaçongénéraliste;onparleausside

formationpolytechnique.Ellesnesontpaspen-

séespourouvrirdirectementlaportesurune

profession,maisbienpluspourpermettreune

mobilitédanslechoixdumaster.Cettemobi-

litéadeuxcomposantes.D’abord,lebachelor

s’ouvresurunemobilitégéographique.Dans

lefutur,unétudiantpourrafairesonbachelor

dansuneuniversitéetpoursuivresesétudesde

masterdansuneautreinstitution.Ensuite,la

découpebachelor/masterpermetunemobilité

thématiqueettransdisciplinaire.Moyennant

quelquescoursderattrapage,l’étudiantpeut

fairesonmasterdansunedisciplinevoisinede

celledesonbachelor.Al’EPFL,seulel’obten-

tiondumaster(correspondantànotreancien

diplôme)conduitautitred’ingénieuretouvre

lechemindumondedutravail.

Aubachelor,lerecrutementdenosétudiants

estprincipalementaxésurlaSuisse.Cependant,

unepromotionrenforcéedanstoutelafranco-

phonieestencours.Auniveaumaster,l’EPFL

attireunnombrecroissantd’étudiantsinter-

nationaux,laplupartchoisispourl’excellence

deleursprestationsauniveaubachelor.L’an-

glaisestdéjàfortementutilisécommelangue

d’étudeaumaster.Cetteévolutionrépondaux

besoinsd’internationalisationetdemobilité

tantestudiantinequeprofessorale.Defaçon

générale,lavenued’étudiantsétrangersren-

forcelamulticulturalitéducampus.

Dansl’optiquedel’enseignementaugymna-

se,lespointssuivantsdoiventparticulièrement

êtrerelevés:

• Laplupartdenosétudiantsentrantaubache-

lorsontenpossessiond’unematuritécanto-

nale.Laqualitédel’enseignementdesscien-

cesetdesmathématiquesdanslesgymnases

estdoncunepréoccupationimportantede

l’EPFL.

• LapremièreannéeEPFLapportelesbases

scientifiquesprofondes.Elleposepassable-

mentdedifficultésàdenombreuxétudiants

etagitsouventcommeunfiltre.Unebonne

formationscientifiqueaugymnasefacilitela

réussiteendébutd’EPFL.

• L’ingénieuroulechercheurdoits’intégrer

dansnotresociété.Saculturegénérale,ses

connaissancesenlangues(français,allemand,

anglaisenparticulier),sescapacitésàstructu-

rersapenséeetsesécritssontégalementde

premièreimportance.

la FormaTion d’ingénieur eT l’enseignemenT  des sCienCes

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? la FormaTion d'ingénieur  eT l'enseignemenT des sCienCes

• LesjeunesSuissesrencontrentdesétudiants

sélectionnésprovenantd’institutionsétran-

gères,principalementfrancophoneseteuro-

péennesauniveaubachelor,etinternationa-

lesaumaster.

Derécentesstatistiques,effectuéessurles

gymnasiensenpossessiondesnouvellesmatu-

rités,ontmisenévidenceuntauxd’échecélevé

àlapremièretentativedel’examenpropédeu-

tiquedepremièreannée.Cetauxestparticuliè-

rementinquiétantpourtousceuxquin’ontpas

suivilesmathématiquesrenforcées.Plusieurs

indicesconvergentverslanécessitédemieux

étayerl’enseignementdessciencesetdesma-

thématiquesdanslesgymnasesetdelerendre

plusattractif.L’enjeuestdetaille:ils’agitd’in-

téressernosjeunesàdesmétierstechniqueset

scientifiques,deleurdonnerunbonniveaude

connaissancedansdesdisciplinesjugéesardues,

toutenmaintenantuneexcellenteformation

générale.Nousn’avonsmalheureusementpas

desolutiontoutefaiteàceproblème,maisnous

aimerionspartagerquelquesréflexions,deloin

nonexhaustives,surcesujet.

Nousallonsdansunpremiertempsnouspen-

chersurlesqualitésrequisesd’unboningénieur

etsurlaplaceetlareconnaissancequenotre

sociétéluiréserve.Nousanalyseronsensuiteles

activitésderecherchescientifiquepourmieux

cernerleprocessusdedécouverteetd’appren-

tissageetvoircommentnouseninspirerpour

l’enseignement.Finalement,nousévoquerons

certainsliensentrelessciencestechniqueset

mathématiquesetlesautresdomainesd’ensei-

gnementgymnasial.

les qualités d’ingénieur

Paressence,unchercheurscientifiqueavo-

cationd’interrogeretdecomprendrelanature.

L’ingénieur,lui,tireprofitdesesconnaissances

pourtransformersonenvironnementselon

certainsobjectifs.Danstouslescas,lacurio-

sitéconstitueunequalitéprimordiale.Cette

forcedel’espritpousselechercheurànepasse

contenterderéponsestoutesfaites,àcompren-

drelesdétailsd’unévénement,àrattacherun

résultatétonnantàl’ensembledesonsavoir.La

curiositéincitel’ingénieurànepasconsidérer

lanaturecommeunétatdefait,àchercherà

latransformeretàfabriquerdesproduitsuti-

lesàl’ensembledelasociété.Lacuriositéva

depairavecl’ouverture d’espritquipermet

d’accepteretdediscutersurdesbaseslogiques

touteproposition,aussiétonnantesoit-elle.Un

fondementdelasciencemodernefutdedouter,

commeDescartes.

Uneautrequalitéessentiellerésidedansla

passion.Ellemotivelechercheurdanssesacti-

vitéssouventarduesetlaborieuses.Saint-Exu-

pérydisait:«Situveuxconstruireunbateau,ne

rassemblepasdeshommespourallerchercher

dubois,préparerdesoutils,répartirlestâches,

allégerletravail,maisenseigneauxgenslanos-

talgiedel’infinidelamer.»Unregarddansnos

laboratoiressuffitpournousconvaincrequela

scienceetlatechniquepeuventpassionner.

Pourconcevoirdenouveauxproduitsl’in-

génieurdoitêtrecréatifetimaginatif.Celane

veutpasdirequ’ilapprendtoutdelui-même,

maisqu’unecompréhensionprofondedetout

undomaineluipermetparfoisdefairelepas

décisifaubonmoment.

Pourpouvoircréer,uningénieurdoitpossé-

derdelargesconnaissancesetunbonsavoir-

faire.Ildoitsurtoutdigérercesconnaissances

etlesintégrerlesunesauxautres.Unetêtebien

faiteestpréférableàunetêtebienpleine.Le

raisonnement structuréluipermetderassem-

blersesconnaissances,delesrelierentreelles

pourobteniruntissudensesurlequelilpourra

construireetcréer.

Lemondeetlascienceévoluentrapidement.

Ilestillusoiredecroirequel’onpeutdominer

dessujetspointuspourlerestedesacarrière.Il

convientdeseformersanscesse.Enrevanche,les

basesacquisesaucoursdesétudesvoussuiventou

vousfontdéfauttoutaulongdevotrecarrière.

Letravailsolitaireadisparu,l’ingénieurap-

partientàungroupe.Sesqualitéshumaines et

socialesluipermettentdetravaillerenéquipe,

degérerdesprojetsetdecomprendrelesbe-

soinsdesclients.Parsesactivités,l’ingénieur

peutengendrerdesimpactsfavorablesounui-

sibles.Illuiappartientdoncdesuivreunedé-

marcheéthiqueforte.

Toutescesqualitéss’acquièrentprogressive-

mentaucoursdelaformation.D’oùl’intérêt

delespartagerleplustôtpossible.Maispour

qu’ellestrouventunterrainfertile,ilconvient

des’arrêteruninstantsurlapassiondesjeunes

pourlatechniqueetlessciences.

le prestige perdu 

AuXXesiècle,latechniqueaenvahiettrans-

forménotresociété.Lesappareilsménagers,

l’automobile,latélévision,letéléphonepor-

table,l’ordinateurontchangénotrefaçonde

vivre.Nosactivitéslesplusdiversesregorgent

deproduitsindustrielsetdetechnique.Para-

doxalementonnoteundésintérêtdesjeunes

pourlesmétiersscientifiques.Laprofession

d’ingénieurasemble-t-ilperdudesonprestige.

Pourquoi?

Lapassiondesjeunespourlatechniques’ex-

primesousuneautreforme,commeentémoi-

gnel’engouementpourlesconsolesdejeu,les

gadgetsélectroniques,oulescooterleplusper-

formant.L’attraitpourlessciencesetlatechni-

queestdoncheureusementtoujoursvivace.Par

contre,nosadolescentssemblentsecomporter

plusenutilisateursqu’enconstructeurs.Ilsre-

flètentainsil’évolutiondenotresociété:qui

peutencoreréparerlui-mêmesavoiture?Nos

produitssontdevenusdesboîtesnoiresquel’on

apprendàutiliserde l’extérieur.Ilyatrenteou

cinquanteans,ilétaitprestigieuxpourunjeune

dedésosserunvélomoteuretdeletransformer.

Est-cetoujourslecasaujourd’hui?

Legrandpubliccroitàunecomplexitétech-

niquegrandissantedenosproduitsdetousles

jours.Ilsecontentedoncd’apprendreàles

utiliser,sansavoirlacuriositédelescompren-

dre.Enfait,untravailimportantdel’ingénieur

consisteàsimplifieraumaximumunproduit,ce

quiaugmentesafiabilitéetdiminuesoncoût.

Al’heureactuelle,destechniquestrèsdiversi-

fiéessontutilisées,maislaplupartdesproduits

prisséparémentsontsimplesàcomprendre.Il

convientderemettreenlumièrelacréativité

delatechniqueettoutel’ingéniositéqu’elle

rassemble.

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Toutproduitpeutêtreutilisépourlemeilleur

oupourlepire.Toutemauvaiseutilisationfait

tachesurleprestigedel’ingénieuretfinale-

mentsurlamotivationdenosjeunesàselancer

danscesmétiers.Undiscoursouvertetcritique

surlesdérivespotentielles,ouparfoisréelles,

estprimordial.

interroger, découvrir et modéliser

Quelssontdonclesprocessusdedécouverte

quiforgentcettecréativitéetstimulentlacapa-

citéd’innovation?Ilsprésententdenombreuses

similitudesaveclesprocessusd’apprentissageet

doncavecl’enseignementdessciences.

Unjeunechercheurquidébuteunprojet

dansleslaboratoiresdel’EPFLdoitd’abord

sefamiliariseraveclamatière.Illefaitsousla

conduited’unprofesseuretdecollaborateurs

expérimentés,quileguidentetl’instruisent.La

matièrescientifiquefaitpartied’untoutqui

s’acquiertetseconstruitd’unemanièrelogique,

cohérenteetstructurée.

L’expérimentationfaitpartiedujeu.Elle

sertàconfrontersonsavoiraveclaréalitéet

àinterrogerlanature.Cesontsouventlesré-

sultatssurprenantsquiaiguisentlacuriositéet

lacréativitéduchercheuretquidébouchent

surdesnouveautés.Encorefaut-ilquel’ex-

périmentateuraitunebasedeconnaissances

suffisantepourlesremarqueretentirerprofit.

Lechercheurdevraensuitefairepreuvedeté-

nacitépourvérifier,analyseretmodéliserdans

ledétailsesrésultats.Samaîtrisedulangage

etdestechniquesmathématiquesainsiqueson

savoir-faireexpérimentaljouentunrôlecentral

danssonsuccès.

Ceprocessusemployéenrecherchedevrait

nousinspirerpourl’enseignementdessciences

etdesmathématiques.Dequoisuggérerquel-

quespistes:

• Lesétudesscientifiquesnécessitentderatta-

cherlesconnaissancesentreellespourformer

untoutlogiqueetcohérent.Leraisonnement

logiquedoitsetravaillerdèsledébutdel’en-

seignementdessciences,etpeut-êtreausside

laphilosophie.Latendancedeplusenplus

généraliséeàl’utilisationdefichesdisparates

nevapasdanscesens.Deslivresdebasepour-

raientêtreuneaideutile.Pourlesmêmesrai-

sonsdecohérence,ilestimportantdesavoir

résoudredesexercicescomplexes,mélangeant

lenouveausujetavecdelamatièretraitée

précédemment.Sansoublierdecultiverl’in-

tuitionpardetelsexercices.

• Lesélèvesdoiventdominerunsujetavantde

pouvoirs’attaqueravecsuccèsaudomaine

suivant.Lessujetsbienacquispourrontalors

êtreportésàleurlimitesansrisquedeconfu-

sion.Danscettephased’apprentissage,des

exercicesdedrill semblentincontournables.

• L’introductiond’unnouveausujetnécessite

unemotivation.Pourquoichangerdemodèle

tantquel’ancienn’estpasprisendéfaut?

Confronterunélèveàuneexpériencesur-

prenanteaideàaiguisersonattentionetsa

curiosité.Ils’agitlàd’uneapprocheinductive.

Parexemple,laviedetouslesjoursapprend

àl’élèvequelachuted’unebilledeplombest

nettementplusrapidequecelled’uneplume.

Lamêmeexpérience,faitedanslevide,per-

metuneremiseencausedumodèleintuitif.

L’expérimentationen directdevantlaclasse

requiertunegrandemaîtrisedelapartde

l’enseignant.Maiscetteprisederisqueest

enrichissanteetefficace.

• Lamodélisationposeproblèmedanslespre-

mièresannéesd’apprentissagedessciences,

carlelangagemathématiquesouffreencore

delacunes.Desmodèlestrèssimplifiéspeu-

ventnéanmoinsapparaîtreprogressive-

ment.Ilnoussembleimportantquel’élève

apprenneàreconnaîtrelestermesmathé-

matiquesetàlesinterpréterphysiquement.

Ildevraitégalementréussiràreconnaîtreles

similitudesentredeuxmodèles.Parexemple,

ladescriptiondumouvementrectiligneet

celledelarotationd’uncorpssurlui-même

sontsemblables,lemomentd’inertierempla-

çantlamasse.

• Lamodélisationestardue,maiselleaun

but:elleviseàl’universalitéetpermetde

prédirelerésultatdenouvellesexpériences.

Ladescriptiondecasisolésestunepremière

étapedansl’apprentissagedessciences.Elle

doitabsolumentsecompléterparunegéné-

ralisation.

• Lesétudiantsontdegrandesdifficultésàse

concentrerlongtempssurunsujet.Leraison-

nementlogiqueetlacohérenceintrinsèque

auxsciencesposedesexigencesidéalespour

exercercettecapacitéessentielledansbien

desdomaines.

• Demêmequ’unjeunedoctorantestsuivipar

undirecteurdethèse,l’élèveabesoind’être

guidédanssonapprentissage.Néanmoins,

l’apportpersonneldel’élèvedoitêtremis

enévidence.Leplagiatconstitueundanger

permanent.Ilvioleunerègled’éthiquefon-

damentale!Ornousvoyonstropdetextes

banalisésdanslesquelsapportspersonnelset

copiessontmélangéssansréférencesclaires.

penseurs multidisciplinaires

L’enseignementdessciencesmisesurlacohé-

renceetleraisonnementlogique.Lamodélisa-

tionetlelangagemathématiquepermettentde

construireunegénéralisation.Encontactavec

l’expérimentationetlatechnique,l’étudedes

sciencesfaciliteledéveloppementdelacuriosi-

téetdel’ingéniosité.Toutescescaractéristiques

sontprofitablesdansd’autresdomainesd’étu-

des.Lesexposésorauxetlarédactiondetextes

nécessitentnonseulementunebonnemaîtrise

delalangue,maiségalementunestructuration

logiqueetunbonraisonnement.Lesmotsde

Boileaurestentd’actualité:«Cequiseconçoit

biens’énonceclairementetlesmotspourle

direarriventaisément.»Souvenons-nousque

lesgrandspenseursdel’histoireétaientdes

savantsmultidisciplinaires,devéritablespoly-

techniciens.LéonarddeVinciétaitartisteetin-

génieur.Nombredephilosophes,commePascal

ouDescartes,ontmarquélessciencesnaturelles

deleursempreintes.Commeensciences,l’œu-

vredesgrandspenseursreposesurdesprincipes

fondamentaux(des«idéesclaires»chezDescar-

tes)etsurdesdéductionslogiques.

Conclusions : initiatives prises par l’epFl

Faceauxexigencesd’unecarrièred’ingénieur

quis’exprimeforcémentdansuncontexteinter-

nationaltrèscompétitif,lesétudiantsdel’EPFL

doiventacquérirdetrèsnombreusescompéten-

ces.Leurréussitedépenddoncétroitementde

l’enseignementmathématique,scientifiqueet

techniquedonnélorsdesétudessecondaires.

L’EPFLvamettreenplaceunecellulegymnase

pourrenforcersacollaborationaveclesétablis-

sementssecondairesetcontribueràunestra-

tégieinnovantefaceauxnombreuxdéfisévo-

quésici.Afind’apporterrapidementquelques

réponses,l’EPFLadéjàmisenœuvreplusieurs

actions.Ainsi,touslesnouveauxétudiantsde

l’EPFLreçoiventlabrochureintitulée«Savoir-

faireenmathématiquespourbiencommencer

àl’EPFL».Quantaumodule«PolyMaths»,il

complèteraleCoursdeMathématiquesSpé-

ciales(CMS).D’uneduréed’unsemestre(au

printemps),ilpermettraauxétudiantsquien

ressententlebesoindesepréparerdemanière

optimaleàl’entréeenpremièreannée.Parson

engagement,l’EPFLtientàdémontrerqu’elle

attachelaplushauteimportanceàsamission

deformerlesscientifiquesetlesingénieursqui

relèverontlesgrandsdéfisliésàl’avenirdeno-

tresociété,denotreenvironnementetdeno-

treéconomie.Elleentendàcetégardtravailler

étroitementaveclesétablissementssecondaires

pourfavoriserleparcoursdesélèvesversdes

étudespassionnantesetstimulantes,etversun

succèsprofessionnellégitime.

pierre-andré Besse

décanat bachelor/master, chargé de

cours en Microtechnique, EPFL

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? la FormaTion d'ingénieur  eT l'enseignemenT des sCienCes

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Lesdidacticiensdessciencesoriententpeut-

êtreplusquejamaisl’enseignementversdes

objectifsdenatureépistémologique.Ilsde-

mandentauxenseignantsdesepréoccuper

del’imagedelasciencequ’ilsdonnentàleurs

élèvesetd’initiercesderniersauxdémarches

scientifiques.Pourquoinepassecontenterde

leurfaireapprendredescontenus,dessavoirs,

dusavoirfaire?

C’estunequestionquinousestparfoisposée

etcelamêmedelapartdeformateursd’ensei-

gnants.Nousallonstenterdedonnerdesélé-

mentsderéponsesdupointdevuedeladidac-

tiquedessciences.

Pourrésumernotrepropos,nousdironsd’em-

bléececi:lesconnaissancesàenseignersontin-

séparablesdesprocessusparlesquelsellessont

élaboréestantauseind’unecommunautéque

danslatêted’unapprenant.Apprendre,c’est

construiredusavoir.C’estdonc,nousleverrons,

entrerdansdesdémarchespropresauxscien-

ces.Répondreàcettequestionestl’occasion

deprécisercequ’estpournousunmodèleso-

cioconstructivisted’apprentissage.Voyonscela

d’unpeuplusprès.

point de vue psychologique : contextualisation 

des apprentissages

Lecaractèrecontextualisédesconnaissances

estlargementadmisaujourd’hui.Enpsychologie

cognitive,onparledecognition située.Selon

cettethéorie1,lecomportement,l’actionetla

penséenepeuventsecomprendrequedansleur

contexted’élaboration.Lecontexteestconsti-

tutifdesconnaissances,dontildétermineàla

foislesconditionsd’activationetleslimitesde

validité.Cettethéoriecognitiveestenaccord

aveclestravauxrelatifsàlanotionde«situation

didactique»qui,selonGuyBrousseau2,inclut

«l’ensembledescirconstancesdanslesquellesse

trouvel’élève,lesrelationsquil’unissentàson

milieu,l’ensembledesdonnéesquicaractérisent

uneactionouuneévolution».

Conséquence

Dansl’enseignementdessciences,lecontexte

impliquelesobjetsetphénomènesquelesa-

voirvisédécritousurlesquelscesavoiropère.

L’approchecognitivistequenousévoquonsici

fournitunfondementauxactivitéspratiques

(les travaux pratiques de sciences)dontl’utilité

estlargementreconnueparlesenseignants.

Dansce«milieudidactique»,l’élèvepeuttes-

terlamanièredontcesobjetsetphénomènes

répondentàsessollicitations.Cesinteractions

induisentunedémarchederecherche :l’élève,

plusoumoinsexplicitement,posedeshypothè-

sesetlessoumetàvalidation.Placerl’élèvedans

dessituationsd’apprentissage,c’estdoncd’une

certainemanièrelerendrechercheur.Cepoint

devuepsychologiquedonnedéjàunpremier

élémentderéponseànotrequestion.

premier point de vue épistémologique   : une 

nature de la science mal connue

Lesconceptionsépistémologiquescontem-

porainesprésententledéveloppementdela

connaissancescientifiquecommeunphénomè-

nedynamique.Aulieud’imagineruncorpusde

connaissancesstableauquels’ajouteprogres-

sivementdelaconnaissancenouvelle,lesépis-

témologuescontemporains3nousconduisent

àimagineruncorpusentransformationeten

complexification.Laconstructiondusavoirest

vuecommeunprocessussocialetlacertitude

scientifiqueconçuecommelerésultatd’un

consensushistoriquementsituéetévolutif.Un

certainrelativismeestacceptébienquedes

la dimension  épisTémologique  en didaCTique des sCienCes

epistémologie

Nousemployonsépistémologiedanslesenssui-

vant:ensembledeconnaissancesquiserappor-

tentàlanaturedelascienceetdusavoirscien-

tifique,àlamanièredontlesavoirscientifique

seconstruit,auxdémarchesetauxoutilsmisen

œuvreparlesscientifiques.

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? la dimension épisTémologique en didaCTique des sCienCes

balisesexistent,quipermettentd’opposerscien-

ceetnon-science.Onadmetqu’aucuneexpé-

riencenepeutprétendreaustatutd’expérience

cruciale,cequin’empêchepasquelestestsex-

périmentauxdestinésàconfirmerouàréfuter

deshypothèsesdemeurentessentielsdansles

démarchesconduitesparlesscientifiques.

Or,cespointsdevuecontemporainsnesont

quepartiellementintégrésparlesélèvesetles

enseignantsactuels.Denombreusesrecherches

montrentquedesvisionsnaïvescœxistentavec

desconsidérationsplusréalistes.EnzioRo-

letto4,parexemple,résumeainsiunerecherche

conduiteauprèsdefutursenseignants:

« Les aspects concernés sont la nature et le

statut des connaissances scientifiques, les dé-

marches pour les atteindre, les critères de dé-

marcation entre science et non-science, les re-

lations entre science et vérité, etc. Une certaine

hétérogénéité des points de vue est retrouvée

selon les aspects traités. La majorité des sujets

partage un point de vue empiriste, quant à la

nature des connaissances scientifiques; réaliste

quant à leurs objets; inductiviste quant à leurs

démarches ; relativiste et contextualiste quant

à leur statut. En outre, les sujets accordent très

peu d’importance à la dimension sociale des

sciences et aux aspects créatifs de l’activité des

scientifiques. » (P.11)

D’autrepart,ilestétabliquelamanièredont

onconduitl’élèvedansdesactivitésd’appren-

tissagesous-tenduneconceptiondelascience

quidétermine,aumoinsenpartie,lareprésen-

tationqu’enal’élève.

Dansleurouvrage5consacréauxconceptions

épistémologiquesdelycéensde17ans,Marie

Larochelle&JacquesDésautelsnousdisent:

« En somme, l’image de la science serait tribu-

taire, dans cette optique, de sa facture scolaire

et d’une certaine philosophie de l’enseignement.

En effet, et les études qui le démontrent foison-

nent (…), non seulement y néglige-t-on la plu-

part du temps les exigences bien particulières de

la production du savoir scientifique, mais égale-

ment celles de son appropriation cognitive. (…)

Le savoir scientifique, en contexte scolaire (…)

a donc un caractère impersonnel et ne suscite

chez les étudiants qu’un engagement cognitif

passif : ceux-ci ne formulent ni leurs questions

et problèmes de recherche, ni les termes de l’in-

vestigation que la résolution de ces problèmes

requiert, ni les critères de sa fiabilité et de sa

validité. » (P.17)

Cettecitationillustrebienàquelpointles

préoccupationsépistémologiquesetdidactiques

sontliées.

Danscemêmeouvrage,MarieLarochelle&

JacquesDésautelsrelatentuneexpériencequi

montrequesil’ondonneàceslycéensl’occa-

siondeconduirepareux-mêmesunerecherche

scientifiqueauthentique,ilsarriventàunhaut

degrédeconceptualisationdel’objetétudiéet,

simultanément,leurconceptiondelascience

devientplusfineetpertinente.

Avecdeuxcollègues,nousavonsconduit

unerecherche6quipermetdeconclurequeles

conceptionsd’élèvesâgésde14-15ans,àpro-

posdelanaturedelascienceetdeladémar-

chescientifique,sontpartiellementmodelées

parl’enseignementquileurestprodigué.Nous

avonseneffetpumettreenévidencel’effet

d’unenseignementpermettantauxélèvesde

construiredusavoirautraversdedémarches

s’inspirantdecellesdeschercheurs.Aprèsdeux

ansd’untelenseignement,lesconceptions

épistémologiquesdesélèvesdestroisclasses

concernéesontpuêtrecomparéesàcelledesix

classestémoinayantreçuunenseignementdes

sciences«traditionnel».Nousavonségalement

réaliséuneexpériencedanslaquelleuneclasse

aétéassimiléeàunecommunautéscientifique

etplacéedevantunevraiequestion,c’est-à-dire

unequestiondontl’enseignantneconnaissait

paslaréponse.Laclasseétaitdiviséeendeux

équipesquiconduisaientchacunesarecherche

etquidevaientcommuniquerpourtenterde

produireuneréponsecommune.Nousavonspu

mettreenévidenceuneévolutiondesconcep-

tionsdesélèvesàproposdelascienceetdela

démarchescientifique.

Conséquence

Lepointdevueépistémologiquequenous

venonsdeprésenterconfirmelelieninextrica-

pris

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blequiexisteentrelamanière«efficace»d’ap-

prendreetlestatutépistémologiquedusavoir

visé.L’enseignantaainsiunedoubleresponsa-

bilitéépistémique:enconduisantsonenseigne-

mentdemanièreàcequesesélèvesévoluent

versunevision«correcte»delanaturedela

science,illeurpermetdeconstruiredessavoirs

pertinents.

Onaiciundeuxièmeélémentderéponseà

notrequestion.

second point de vue épistémologique : l’impor-

tance de la modélisation

Lesconceptionsépistémologiquescontem-

porainesprésententlaconnaissancescientifi-

quecommeunensembleorganisédeprincipes

métaphysiques,dethéoriesetdemodèles.La

notionmêmedefaitestrelativisée:iln’existe

pasdefaitabsolupuisquecen’estqu’autravers

d’unethéoriequiluidonnesensetsimultané-

mentd’unereconnaissancesociale,qu’unfait

existe.Lesavoiropératoire,celuiquipermet

l’actionetlescomportementsadéquats,estlar-

gementconstituédemodèles.C’estcesavoirqui

doitêtreconstruitavecetparlesélèves.Deux

remarquessontàfaireici:lestatutdemodèle

dessavoirsenseignésestsouventcachéauxélè-

vessibienquecesavoirrevêtàleursyeuxunca-

ractèredogmatiqueetfigé.Lesconceptionsdes

élèves,aumomentoùl’onabordel’étuded’un

nouveaudomaine,constituentenelles-mêmes

desprémodèlesqu’ilfautprendreencompte.

Pourappuyercepropos,nousciteronsJean-

LouisMartinand7:

«Pour ceux que préoccupe l’éducation scienti-

fique des jeunes, la question des rapports entre

concret et abstrait, formel, celle de l’articulation

entre expérimental et théorique, passe par la

prise en compte des modèles, du rôle que nous

voulons leur faire jouer, de la manière dont ils

peuvent être appropriés.

(…) Surtout, l’insatisfaction ressentie devant

un enseignement dogmatique où les modèles

sont présentés comme des évidences non ques-

tionnées, non rattachées à des problèmes, le

rejet par les élèves de ce dogmatisme, la criti-

que destructrice l’année suivante de ce qu’on a

introduit (atome de Bohr), incitent à réfléchir

sur la manière dont on pourrait enseigner et

faire apprendre la modélisation, c’est à dire la

construction, l’adaptation, l’utilisation des mo-

dèles.»(P.1dudocumenttéléchargeable)

Conséquence

Enseignerlessciencesnepeutdoncseréduire

àenseignerdesfaits.Construiredusavoir,c’est

essentiellementmodéliser,c’estrendrelesélè-

vesconscientsdecequ’estunmodèleetc’estles

initieràlamodélisation.Onvoitlàuntroisième

élémentderéponseànotrequestion.

point de vue didactique : le modèle allostérique 

d’apprentissage

Onconsidèregénéralementqu’ilyaune

formed’isomorphismeentrelamanièredont

lesavoirseconstruitautraversdesgénérations

etlamanièredontilseconstruitdanslatête

d’unapprenant.Cesconsidérationssurl’appren-

tissagetrouventbiensûrunfondementdans

toutcequ’ontapportéaudébutdusièclepassé

JeanPiagetetGastonBachelardnotamment.

Durestelanotiond’obstacleépistémologique

estbienprésentedanslesdiscoursactuelsdes

didacticiens.

Nousavonsfaitallusionci-dessusauxconcep-

tionsdesélèves.CommeleditAndréGiordan8:

(…) tout savoir maîtrisé se situe tout à la fois

dans le prolongement des acquis antérieurs qui

fournissent le cadre de questionnement, de

référence et de signification, et dans le même

temps en rupture avec eux, du moins par détour

ou transformation du questionnement.

En fait, tout apprentissage réussi est un chan-

gement de conceptions. (…)

Toute acquisition de connaissances procède

d’activités complexes d’élaboration d’un appre-

nant confrontant les informations nouvelles et

ses connaissances mobilisées et produisant de

nouvelles significations plus aptes à répondre

aux interrogations ou aux enjeux qu’il perçoit.»

(Pageinternet)

Avecson«modèleallostérique»d’apprentis-

sage,AndréGiordannousproposeuneméta-

phoreparlaquelleilcomparelesmécanismes

deconstructiondusavoirauxmécanismesde

développementdecertainesprotéines.Celles-

ciseconstruisentenchangeantdeformeetde

fonctionsousl’actiondumilieuetenoffrant

ainsidessitessurlesquelsdenouvellesmolécules

peuvents’associeràunexistanttransformé.

Conséquence

Pourassurerlesapprentissagesdesesélèves,

l’enseignantdoitaccéderàleursconceptionset

savoircontrôlerl’évolutiondecesconceptions.

Ildoitpouvoircréeretgérerdessituationsqui

vontpermettrecetteévolution.Lesconsidéra-

tionsvisantl’efficacitédidactique(faireaccéder

lesélèvesàdesconnaissancesquipuissentêtre

réinvesties)rejoignenticilesconsidérations

épistémologiquesportantsurlesmécanismes

deconstructiondusavoirscientifique.

Nouspouvonsvoiriciundernierélémentde

réponseànotrequestion.

Concrétisation didactique

�  définir des compétences attendues des élèves

Fixerdescompétencesetpréciserlessitua-

tionsquiservirontàtestercescompétencesest

unmoyendes’assurerquelesavoirconstruit

estopératoire,quecesavoirpeutêtreréinvesti

dansdessituationsconcrètes(larecontextualisa-

tionproposéeparlespsychologuescognitifs).

Ils’agitaussideprendreencomptelesobjec-

tifsgénérauxlistéssousl’étiquette«compéten-

cesvisées»danslepland’étudesvaudois(PEV),

objectifstelsque«Pratiquerunedémarchede

typescientifiqueàpartird’unesituationfaisant

problème(aller-retourentrequestion,hypothè-

se,expérience,essai,erreur,débatscientifique)»

ou«Fairefonctionnerunmodèlepourélaborer

desprévisionsoufairedescalculsàpartirde

conditionsdéfinies».

Annoncerauxélèvesquellescompétences

sontattenduesd’euxetleurdonnerdèsque

possibleuneidéedessituationsdanslesquelles

cescompétencesdevrontsemanifester,c’est

leurpermettredesemettreenprojet,c’estaus-

siindirectementpermettreauxparentsd’être

associéauprojetscolaire.

2  approcher les contenus de manière intégrée 

et interdisciplinaire

Cetteexigencerelèveégalementdelarecher-

chedusens.Nousproposonsdeprofiterdetou-

teslesoccasionspossiblesd’intégrerentreeux

descontenusd’enseignement(listéssansliens

danslePEV).

• Premierexemple:anatomieetfonctionne-

mentdel’œil(biologie,physiologie),loi des

lentilles(physique),naturedelalumièreet

couleurs(physique).

• Secondexemple:bilanénergétique(physi-

que),digestion(chimie),assimilation(biolo-

gie)–toutcelasousl’étiquettecommunede

métabolisme.

Acelailfautajoutertouteslesoccasionsde

travaillerdemanièreinterdisciplinairesurdes

projetsquipermettentd’atteindresimultané-

mentdesobjectifsdéfinispardisciplinesdansle

PEV.Ilyenaentrelessciencesetpratiquement

touteslesdisciplinesscolaires.

3  structurer les séquences d’enseignement

Ilestimportantqu’uneséquenced’enseigne-

mentsoitstructuréedemanièreàfaireapparaî-

trelesétapesdeconstructiond’unsavoir(voir

encadré).Celapermetdeclarifierlesdifférents

contratsdidactiquesquisesuccèdentaucours

delaséquence.

Ilesteneffetimportantquelesélèvessachent,

parexemple,quedanslaphase de conceptua-

lisation,leserreursqu’ilscommettentsontles

bienvenues.Ceserreurspeuventeneffetêtre

l’expressiondeconceptionslégitimes,maisqui

doiventêtreremisesencause.C’estdanslapha-

sedeconceptualisationquel’enseignantproblé-

matiselesavoiretc’estàl’issuedecettephase

qu’uneinstitutionnalisationpeutavoirlieu.

Leplussouvent,lesélèvesnesontpasprêts

àseconfrontersansautreauxtâches,problè-

mesoudéfisquileursontproposésenvuede

lesconduiredansuntravaildeconceptuali-

sation.Illeurmanqueunréférent empirique,

unensembled’expériencesetdesavoir-faire.

C’estpourquoinousconsidéronsqu’unephase

d’immersiondoitgénéralementêtrevécuepar

lesélèvesavantlaphasedeconceptualisation.

Cettephase d’immersionaaussicommefonc-

tiondepermettreàl’enseignantd’accéderà

certainesconceptionsdesélèvesetdesusciter

leurcuriosité.

Laphased’exploitation-recontextualisation,

troisièmeselonnotremodèle,estcelledesréin-

vestissements,del’entraînement,desévalua-

tionsformativesetdel’évaluationsommative.

4  rendre les élèves chercheurs

Ilesttrèssouventpossibledelaisserlesélèves

chercherunestratégie,uneloi,un«truc»qui

leurpermettederésoudrel’énigme,derelever

ledéfiquileurestadressé.Nousinsistonssur

lefaitquel’aboutissementdecetterecherche

n’estpasessentiel.

Trèssouvent,ilesttoutsimplementimpossi-

bleauxélèvesdeconstruirelesavoirvisé.Les

obstaclessonttropimportants.Cequiestessen-

tiel,c’estla«dévolution»(voirencadrép.31)

réussieduproblèmeauprèsdesélèves,cequi

valesrendreattentifsàlasolutiondonnéepar

l’enseignantouparunmédia,cequivafaire

qu’ilsvontrecevoircettesolutioncommeun

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? la dimension épisTémologique en didaCTique des sCienCes

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«cadeau»etqu’ilsvontsel’approprierpourla

mettreenœuvre.

5  donner de la place à l’idée de modèle

Lestatutdemodèledusavoirconstruitdoit

êtreexplicitepourlesélèves.Deplus,ilyades

occasionsdanslesquellesonpeutconfronterles

élèvesauxlimitesd’unmodèle,voireàlané-

cessitédel’amélioreroumêmedeleremplacer

parunautre.Au-delà,onpeutproposeraux

élèvesdeconstruireeux-mêmesdesmodèles

quipourrontrendrecompted’unensemblede

phénomènesobservables.

6  Jouer avec les interactions sociales

Ungrandnombrededynamiquessontpos-

siblesauseind’uneclasseouentredifférentes

classes,quipermettentdefavoriserlesappren-

tissagesetdemettrel’accentsurladimension

socialedelaconstructiondusavoir.Onpeut

créerdesgroupesderechercheetlesfairecom-

muniquer,onpeutfaireinteragirdesclassesou

desdemi-classes,créerdesdébats,préparerdes

communications.Lestâchesassignéesauxgrou-

pespeuventtantôtreleverdelacoopérationet

tantôtreleverdelacompétition.

Onpeutaussisortirdel’écoleetmettreles

élèvesaucontactd’experts(l’opticienduquar-

tier,legarde-faune…).

7  inclure des éléments d’histoire des sciences

Ilestpossible,dansunedémarchepédagogi-

que,d’incluredesdocumentsfaisantétatd’épi-

sodesd’histoiredessciencesdanschacunedes

troisphasesd’uneséquenced’enseignementdé-

critesci-dessus.Detelsdocumentspeuventen

effetparticiperdel’immersiondesélèvesdans

unthèmedonné,ilspeuventêtredeséléments

d’uneproblématisation,ilspeuventaussiservir

àconstruireunesituationdemiseenœuvre

d’unecompétence.

Desdocumentshistoriquespeuventcontri-

bueràlamiseenévidenced’obstaclesépisté-

mologiques.Ilspeuventcontribueràdémystifier

lascienceetlesscientifiquesendonnantaux

élèvesunemeilleureconsciencedelamanière

dontlesavoirseconstruit.Ilpeutêtretoutàfait

profitable,parexemple,defairelireauxélèves

quelqueschapitresdelivres,telque:Lentin,J.-P.

(1994).Je pense donc je me trompe - Les erreurs

de la science de Pythagore au Big Bang. Paris :

AlbinMichel.

Jean-Claude noverraz

professeur formateur à la HEP Vaud.

Il est membre du réseau d’Epistémologie

et de Didactique des Sciences de

l’Université de Genève, dirigé par

le professeur André Giordan

1 Voirparexemplelapagetecfa.unige.ch/staf/staf-g/nova/

staf15/theo.htmldusiteInternetTECFAdelaFacultéde

PsychologieetdesSciencesdel’Educationdel’Université

deGenève,pagedurlaquelleontrouveunrésumésurla

«cognitionsituée»etquidonnedesréférences.

Voiraussicequ’enditJonnaertsurhttp://www.ibe.unesco.

org/cops/Competencies/observ_critiq.pdf.2 Brousseau,G.(1998).Théorie des situations didactiques.Gre-

noble:LapenséeSauvage,p.279.3 Unouvrageprésentedemanièresynthétiquelesapportde

KarlPopper(1902-1994),ImreLakatos(1922-1974),Thomas

Kuhn(1922-1996)etPaulFeyerabend(1924-1994).Ils’agit

de:Chalmers,A.(1991).La fabrication de la science. Paris:

LaDécouverte.4 Roletto,E.(1998).La science et les connaissances scientifi-

ques : points de vue des futurs enseignants.Aster,26,11-30.

Paris:INRP.5 Larochelle,M.,Desautels,J.(1992),Autourdel’idéede

science-itinérairescognitifsd’étudiants,Québec:Lespresses

del’UniversitéLaval&Bruxelles:DeBœckUniversité.6 Noverraz,J.-C.,Parisod,J.M.,Chabloz,B.(2006).L’idéede

sciencechezdesécoliersdusecondaireenlienavecl’ensei-

gnementreçu.Formationsetpratiquesd’enseignementen

questions,RevuedesHEPdeSuisseromandeetduTessin,4,

305-334.Neuchâtel:CDHEP.7 Martinand,J.-L.(1998).Introduction à la modélisation. Confé-

rencedonnéeàl’E.N.S.deCachan.Actesdel’Universitéd’été.

Paris:INRP(Conférencetéléchargeableàl’adresse:http://

www.inrp.fr/Tecne/Rencontre/Univete/Tic/Pdf/Modelisa.pdf).8 Giordan,A.(2006)Lesnouveauxmodèlespourapprendre

-Modèleallostériqued’apprentissage,http://www.ldes.unige.

ch/publi/rech/depConstruct/depConstruct.htm

Giordan,A.(1988)Apprendre!DébatsParis:Belin.

dévolution

Processusdidactiquequiconduitunélèveàs’ap-

proprierunproblème.Plusgénéralement,selon

GuyBrousseau,c’estun« processus par lequel

l’enseignant (…) cherche à ce que l’action de

l’élève ne soit produite et justifiée que par les

nécessités du milieu et par ses connaissances,

et non par l’interprétation des procédés didac-

tiques du professeur. La dévolution consiste

pour l’enseignant, non seulement, à proposer

à l’élève une situation qui doit susciter chez lui

une activité non convenue, mais aussi à faire

en sorte qu’il se sente responsable de l’obten-

tion du résultat proposé, et qu’il accepte l’idée

que la solution ne dépend que de l’exercice des

connaissances qu’il possède déjà. L’élève accepte

une responsabilité dans des conditions qu’un

adulte refuserait puisque s’il y a problème puis

création de connaissance, c’est parce qu’il y a

d’abord doute et ignorance. C’est pourquoi la

dévolution crée une responsabilité mais pas une

culpabilité en cas d’échec ».

(Glossaireenligne:http://dipmat.math.unipa.

it/~grim/Gloss_fr_Brousseau.pdf)

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? sTandards de FormaTion pour les sCienCes naTurelles en suisse : un progrès ?

sTandards de FormaTion pour les sCienCes  naTurelles en suisse : un progrès ?

harmos (harmonisation de l’école obligatoire)

ParmilesobjectifsgénérauxduprojetHar-

moS,laCDIP(conférencesuissedesdirecteurs

cantonauxdel’instructionpublique)aopté

pourl’élaborationdestandardsnationaux

deformation.Elleadonnémandatàquatre

consortiums(langues1et2,mathématiques

etsciencesnaturelles)d’élaborerdesstandards

deformation,reposantsurlaconstructiond’un

cadrederéférencedisciplinaireetsurlades-

criptiondeniveauxprogressifsdecompétences.

Lesstandardsadoptésillustrerontavecprécision

lesniveauxdebasequetouslesélèvesdoivent

aumoinsavoiratteintsàlafindela2e,dela

6eetdela9eannéescolaire.Ilsinfluenceront

durablementlesfutursplansd’étudesdestrois

régionslinguistiques.Lestestsélaborésser-

virontàfixerlesstandardsdebaseet,parla

suite,permettrontunerégulation(monitorage)

dusystèmescolairesuisse.

Conception et fonctions de standards de formation

Lesstandardsdeformationconcrétisentles

objectifsgénérauxdeformation,souslaforme

d’unmodèle de compétencesquireprésente

lesaspects,lesexigencesetlesprogressionsdes

compétences(Klieme,2003).Centréssurune

conceptiondidactiquesystématiquedeladis-

cipline,ilssontcontraignantspourtoussousla

formedestandardsminimaux(debase),régu-

liersoumaximaux.LaCDIPaoptépourdesstan-

dardsdebase,alorsquel’Allemagneachoisides

standardsréguliers(Regelstandards)nedevant

êtreatteintsquepar50%desélèves.

SelonKlieme(2003),lesstandardsdeformation:

• sontconçusenseréférantàdesobjectifsgéné-

rauxdel’éducationetentransposantlesappren-

tissagesscolairesenexigencesconcrètes;

• fixentlescompétencesquelesélèvesdoivent

avoiracquisesoudéveloppéesàlafindecer-

tainesannéesscolaires;

• transposentlesobjectifsdel’éducationenexi-

gencesconcrètes:lescompétencesexigées;

• s’appuientsurdesmodèlesdecompétences

quifournissentauxenseignantsunsystème

deréférencepourleuragirprofessionnel;

• conduisentàunequalitédelaformation

comparabledanslesrégions;

• rendenttransparentslesobjectifsetlesexigen-

cesdel’écolepourlesélèvesetlesparents;

• sontdesfondementspourmesureretévaluer

lesrésultatsdesapprentissagesauniveaudu

systèmeetdesécoles;

• permettentlarégulation(monitorage)dela

formation,l’évaluationdel’enseignementet

sondéveloppement.

«Lescaractéristiquesdestandardsdeforma-

tiondequalitéreposentsurunlienétroitavec

ladiscipline,surunefocalisationsurundomai-

ne-noyaudeladiscipline,surlapossibilitéd’ac-

cumulerdesapprentissages,suruncaractère

obligatoirepourtous,surunedifférenciation

desniveauxdecompétences,surlaclartéde

laformulationetsurl’applicabilitégrâceàdes

ressourcesetàdesinvestissementsréalistes.»

(Klieme,2003).

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le modèle de compétences pour les sciences 

naturelles

Lespremièresréflexionsautourdumodèle

de compétencespourlessciencesnaturelles

seréfèrentàla«scientificliteracy»(Bybee,in

Gräberetal.,2002),auxstandardsdéveloppés

auxEtats-Unis(National-Research-Council,1996),

auCanada(CMEC,1997),auRoyaume-Uni,en

Ecosse,enAllemagneetenBelgiqueetàl’ex-

pertisedeKlieme(2003).Elless’appuientéga-

lementsurlesévaluationsinternationalesdes

systèmesscolaires:PISA,TIMSSetIGLU1.Cemo-

dèle de compétencestientcomptedel’analyse

des plans d’études de sciences naturelles pour la

Suisse(Szlovak,2005),duplan d’étude cadre ro-

mand(PECARO)etdediversespublicationsdans

lesdomainestransversauxdel’éducationàla

santé,àl’environnementetaudéveloppement

durable.Deplus,ilpuisesesfondementsdans

lesrecherchesendidactiquedessciences2.

Parsciences naturelles+,nousentendonsune

extensiondelaformationscientifiquedebase

quiprendencomptelesaspectsdelasignifi-

cationdessciencesnaturellesdansuncontexte

social,parexempledesthèmesspécifiquesde

notreépoque,telsquel’environnement,les

conséquencesdelatechniqueetlespréoccupa-

tionsdel’éducationàlasantéetaudéveloppe-

mentdurable3.

Voiciladéfinitiondescompétencesadoptée

parlaCDIPcommeréférencecommuneaupro-

jetHarmoS(d’aprèsWeinert,inKlieme,2003):

« Les capacités et les aptitudes cognitives dont

l’individu dispose ou qu’il peut acquérir pour ré-

soudre des problèmes précis, ainsi que les dispo-

sitions et les capacités motivationnelles, volitives

et sociales qui s’y rattachent pour pouvoir utili-

ser avec succès et responsabilité les résolutions

de problèmes dans des situations variables. »

Lemodèle de compétencesconcrétisel’orienta-

tionfondamentale,lesdimensions,lesdomaines

etaspectsdelaformationetdel’apprentissage

dansunediscipline.Ildécritlesdomainesd’action

(capacitésethabiletés),lesdomainesthématiques

etlesniveauxd’exigencepouruneformationde

basedansladiscipline(Labudde,2006).

Lemodèle de compétences(voirschémaci-

dessous)seprésentesouslaformed’unematrice

tridimensionnellecomportantlesdomainesd’ac-

tions,lesdomainesthématiquesetlesniveaux.

modèle de compétences en sciences naturelles+ 

(schéma)

Ledomained’actionsDévelopper l’intérêt

et la curiositéestuneattitudefondamentale

desapprenantsensciences.Cetteattitude

devraitêtredéveloppéedanstoutapprentis-

sagescientifique,maiselleneferapasl’objet

d’uneévaluation.Lesdomainesd’actions2à

7représententlescompétencesàdévelopper

particulièrement.Travailler en autonomieest

undomainedemétacognition.Ils’agit,pour

l’élève,deprendreconsciencedesesméthodes

detravailetderéfléchirsurlesprocéduresetles

démarchesqu’ilutilise.

Lemodèle de compétencesdessciencesna-

turellesserapporteauxobjectifsgénérauxde

ladisciplineetserviraàdéfiniretlégitimer

lesniveaux,respectivementlesprocéduresde

tests.Ilreprésentedesprocessusscientifiques

d’étapesetdecheminementsverslesavoiret

lesavoir-faire.C’estaussiunlienentrelesob-

jectifsabstraitsetlescollectionsconcrètesde

situations/exercices.Ilprendsesracinesdans

lesdidactiquesdessciencesnaturellesetles

connaissancespsycho-pédagogiques.Ilassure

unespécificationdesperformancescognitives

àplusieursniveaux.Lesdomaines,dimensions

etdegrésdescompétencesysontprécisés,afin

delesévaluerempiriquementpardessituations/

exercices(Labudde,2006).

Lesdomainesdecompétencessontscindésen

compétencespartielles,développéesci-dessous

àtitred’exemplepourledomained’actions

Classer, structurer et modéliser:

Lesdomainesthématiquessontcaractérisés

pardeslignesdirectricesdécritessousformede

conceptsfondamentauxetdenotionsclédiffé-

renciéespourlesdegrés2,6et9.Cesdomaines

nesontpasconçuscommeunelisteexhaustive

dethèmes,maisilsdoiventdonneruncadre

grossierauxcontenus.Ainsinoussouhaitons

éviteruncataloguedematières,quidevrait

êtredéfiniplustardlorsdel’élaborationdes

plansd’études.

Alapagesuivante,l’exempledudomaine

Planète Terre.

Domaines d’actions

1 Développerl’intérêtetla

curiosité

2 Questionneretexaminer

3 Exploiterlesinformations

4 Classeretstructurer

5 Apprécieretévaluer

6 Développerettransposer

7 Communiqueretéchanger

8 Travaillerenautonomie

Domaines thématiques

1 PlanèteTerre

2 Forceseténergie

3 Communication:

réguleretcoordonner

4 Matières

5 Plantesetanimaux

6 Milieux

7 Hommeetsanté

8 Nature,sociétéet

technique–perspectives

niveaux de compétences

situations/exercices pour un domaine thématique avec des exercices couvrant trois domaines d'actions

Domained’actions

Classer,structurer etmodéliser

Compétences partielles

• Collecter, comparer, structurerdes objets, des caractéristiques de phénomènes, des situations naturelles et des applications technologiques;• Analyser, relier, mettre en réseau (pensée systémique) des objets, des phénomènes et des situations;• Développer, situer et ordon-ner: développer et/ou reconnaî-tre des modèles, des régularités, des concepts et en faire usage pour expliquer.

� | pourquoi les sCienCes à l‘éCole ? sTandards de FormaTion pour les sCienCes naTurelles en suisse : un progrès ?

niveaux

Lesniveauxdumodèle de compétences des

sciencesnaturelles,montrentlesdifférenteséta-

peslorsdel’acquisitiondescompétences.Cha-

queniveaudecompétenceestcaractérisépar

desprocessusetdesdémarchescognitivesd’une

qualitéprécise,quelesélèvessontcapablesde

maîtriseràcedegré,maisnonàdesdegrésin-

férieurs(Klieme,2003).Dansunpremiertemps,

nousavonsrecherchéunegradationdanscha-

cunedescompétencespartiellesformulées

sousformed’uneprogressiond’exigences(voir

l’exempleci-dessous).Ensuitenousavonsdéfini

desniveauxpourchacunedescompétences.

Lesstandardsdeformationsontd’aborddé-

critsennommantlescompétencesquelesélè-

vesdoiventatteindreàlafind’uncertaindegré

scolaire.Lesstandardsdéterminentunniveau

decompétenceprécis,icil’exigenceminimale

àlaquelletouslesélèvesdoiventsatisfaire:ces

standardsdebasesontenquelquesorteune

norme.C’estpardestâches(situations/exercices)

etprocédésdetestsquenousallonsrecueillir

desdonnéesfondamentales.Notremission

consiste,àcetteétape,àcréerunesériede

testsayantpourbutdevalidernotremodèle

de compétences.

Parcesstandardsdeformation,nousentrons

dansunenouvelleculturedessituationsd’ap-

prentissageetd’exercicespourl’enseignement.

Laformulationentermesdecompétencesa

desconséquencessurlaconceptiondel’en-

seignement.Lecontrôleneporteplussurdes

fragmentsdesavoirsinertesetreproductibles

àcourtterme,maissurlesaptitudesdesélèves.

Celasignifiequel’ondoitpromouvoirl’inté-

grationdesconnaissancesetdesaptitudesdans

l’enseignement.

des tests

Différentstypesd’exercicessontàl’étude,

ils’agitdetestspapieretcrayon,testsexpé-

rimentauxoutestsd’opportunitésd’apprentis-

sage.Cesdiversesformesdetestsexigentdes

conditionstrèsdifférentesdemiseenœuvre.

Lespluscomplexesnepourrontpasfairel’ob-

jetd’untestdevalidationàgrandeéchelle,car

cesontdestestsdirigéspardesopérateurs,qui

nepeuventêtrepassésquedansunnombrede

classesrestreint.

Nousdéploieronsuntestdevalidationpa-

pier/crayonauniveaunationalauprèsd’un

échantillonde12’000élèvesauxdegrés6et9

enmai2007.Cetest,identiquepourlesquatre

consortiums,estdirigéparlaCDIP.Nousprépa-

reronsdestestsdirigésde2eannée,quisecom-

poserontde3situationspapier/crayonet2si-

tuationsexpérimentalesquenousferonspasser

dansunevingtainedeclasses.Nousreviendrons

en6eeten9eavecdestestsexpérimentauxet

dedécouverteauprèsd’unéchantillond’une

vingtainedeclasseschacun.Desplans(design)

detestsnouspermettentunevued’ensemble

dessituations/exercicesàproduire4.

Domainethématique

PlanèteTerre

Lignes directrices

• éléments et phénomènes naturels sur Terre, les sphères de la Terre• phénomènes météorologiques, observation du temps, climat, zones paysagères naturelles• roches, sols; les paysages et la Terre se transforment (forces naturelles, genèse des roches)• événements naturels, dangers naturels • Terre - soleil - univers, espace et temps

Concepts fondamentaux,Notions clé

2e• éléments naturels - lumière, air, eau, roches autour de nous, transition nuit-jour, • observations de météo simples

6e• représentation de l’espace, de la Terre• éléments naturels, cycle de l’eau, formation des roches• éléments de météo, événements naturels et leurs dangers chez nous (eau, neige, vents)

9e• représentations de l’espace, du temps • cycles naturels “immuables” • rotation et révolution terrestres à l’origine des climats • biomes et écosystèmes • gravitation (mouvements et action de l’eau)• risques naturels: global – local • modèles explicatifs du monde

Réunir des indices,objets et matériauxpour les comparer etles classer selon descritères individuelsou ordinaires

(critères/catégoriespurement formels)

Réunir et identifierdes indices, objets etmatériaux pour lesclasser selon descritères ordinaires ouselon des critèresscientifiques prescrits

(critères/catégoriesformels etfonctionnels)

Réunir, identifier etchoisir des indices,objets et matériaux;les classer selon descritères/catégoriesscientifiquesdéveloppés enautonomie et lescomparer

(critères/catégoriesformels, fonctionnels etprocéduraux)

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Pardesprocéduresdetestsadéquates(mesu-

respsychométriques),lesniveauxdecompéten-

cesatteintspeuventêtresaisis.L’interprétation

desrésultatsdonneradesinformationssurla

validitédumodèle de compétencesetdesni-

veauxpréconisés.Cesconditionspréalablessont

indispensablespouruneutilisationdetestsdans

larégulationdusystèmeéducatif,àl’imagede

PISA(ŒCD,2004),del’évaluationdel’école(vé-

rifierquel’établissementatteintsesobjectifspé-

dagogiques)oududiagnosticindividueletdu

besoinensoutienpédagogiquenécessaire.

processus transparent pour Harmos sciences

naturelles+

Leconsortiumdesciencesnaturellesatenu

às’assurerlacollaborationd’enseignantsdans

ceprocessusd’élaborationdumodèle de com-

pétences.Trenteenseignantesetenseignants

desdegrés2,6et9participentauprojeten

critiquantlestextespréparésparlesexperts,

souventenseignantseux-mêmes.Ilsélaborent

dessituations/exercicesetpilotentcellesdes

experts.Cetaller et retourentreleconsortium

etlespraticiensviseàgarantiruneadéquation

dumodèle de compétencesàlapratiquedes

enseignantsetauxélèves.

L’organisationdeséancesdeprésentation

duprojetdansquatrerégions(Zurich,Berne,

Lausanne,Bellinzone)apermisd’ouvrirledé-

batsurlesstandardsetlescompétencesetde

recueillirdenombreusesremarquesetsugges-

tionsquiontpuêtreintégréesdanslemodèle

de compétences.Alasuitedecesremarques,

nousavonsretiréundomained’actionsetpas-

séde10à8domainesthématiques.Lesconte-

nusdesdomainesthématiquesserontencore

adaptés.

Deplus,HarmoS sciences naturellesestpré-

sentéàdenombreuxcongrèsetassemblées.Il

faitl’objetdeplusieurspublicationsetarticles.

Cettedémarchedevraitcontribueràune

meilleureacceptationdesstandardsaumo-

mentdeleurintroductiondansl’institution

scolaire.

les standards en sciences naturelles. un progrès ?

L’enseignementdessciencesnaturellesdevrait

profiterdecetterecherchepourdonnerune

meilleurestructureàladiscipline.Cettecolonne

vertébralerenforcéeseretrouveradoncdans

lesplansd’étudesrégionaux.Lessciencesna-

turellessedotentainsid’uneréflexionetd’une

validationdescompétencesenéducationscien-

tifique.L’ouvertureauxdomainestransversaux

deséducationsàlasanté,àl’environnementet

audéveloppementdurableestintégrée.

Ledéveloppementdestandardsdeforma-

tionestunexercicepermanentd’équilibrisme

dupointdevuedeladidactiquedeladiscipline.

Lesremisesenquestionreviennentsanscesse:

jusqu’oùpeut-on,doit-on,ose-t-ons’engager?

Oùetquandlescontradictionsdeviennent-el-

lestropimportantesparrapportànospropres

représentationsdidactiquesetpédagogiques?

Maistous,nousallonsdevoirtravailleravecles

standardsdeformation.

Cesontlespoliticiensetl’autoritéscolaire

quichoisirontcesstandardsdeformationsurla

basedelapropositiondesexperts,paslesensei-

gnants,nilesdidacticiensoulesformateurs.En

qualitéde«participants»,nouspouvonsnous

efforcer,danslecadreduprojetHarmoS,d’éta-

blirdesfondementssolidementétayés.Nous

nousappuieronssurl’expérienceaccumulée

ainsiquesurlaconnaissancequenousavons

desélèves,desdegrés,dudéveloppementde

l’enseignement,desmodesd’apprentissages,de

ladidactiquedeladisciplineetducontextegé-

néraldelaformation.Lesstandardsnesontpas

lapanacée.Cependant,avecdesenseignants

motivés,desmoyensd’enseignementscadréssur

lesdémarchespréconiséesparlesplansd’études

etuneformationinitialeetcontinueenharmo-

nieaveclemodèle de compétences,lesespoirs

sontpermis.

François gingins 5

enseigne actuellement à la HEP Vaud et au

Gymnase de Beaulieu à Lausanne.

Bon connaisseur des milieux de

l’enseignement des sciences, il participe

activement au renforcement de l’éducation au

développement durable.

peter labudde

professeur de didactique des sciences

à la Deutschsprachige Pädagogische

Hochschule, Bern

marco adamina

professeur de didactique des sciences

à l’école primaire à la Deutschsprachige

Pädagogische Hochschule, Bern

Bibliographie 6: 

CDIP(2004).Projet HarmoS – Appel d’offres pour le développe-

ment de modèles de compétences.Berne,Conférencesuissedes

directeurscantonauxdel’instructionpublique(CDIP).

Giordan,A.(1999).Une didactique pour les sciences expérimen-

tales.Belin:Paris.

Klieme,E.etal.(Eds.)(2003).Le développement de standards

nationaux de formation : une expertise.Bonn:Bundesministe-

riumfürBildungundForschung.

Rœgiers,X.(2004).L’école et l’évaluation.DeBœck.Bruxelles.

Labudde,P.&Adamina,M.(2004).Offerte HarmoS Naturwis-

senschaften.Bern:PHBern.

1 PISA,ProgrammforInternationalStudentAssessment

TIMSS,TrendsinInternationalMathematicsandScience

Study.

IGLU,InternationaleGrundschul-Lese-Untersuchung2 Cf.Giordan,Rœgiers,Labudde,Hammann,Spörhase-Eich-

mannetautres.3 Cf.STES:Science-Technology-Environment-Society;CMEC,

1997.4 Unexemplepourla9eannéeestdisponiblesurlesitede

Prismes :www.hep.vd.ch/publications.5 NousremercionslesmembresduconsortiumHarmoS sciences

naturelles,sanslesquelscetarticlen’auraitpuvoirlejour.En

plusdesauteurs,ceconsortiumpeutcomptersurlescompé-

tencesdeL.Bazzigher(PHZH),B.Bringold(PHBE),P.Gigon

(HEP-BEJUNE),B.Jaun(PHBE),A.Jetzer(PHZH),B.Knierim

(PHBE),S.Metzger(PHZH),C.Nidegger(SREDGE),P.-Y.Theu-

rillat(HEP-BEJUNE),M.Vetterli(PHZH),U.Wagner(PHBE),C.

Weber(PHNW),A.Zeyer(UniZH).6 UnebibliographiepluscomplètesetrouvesurlesitedePrismes

2

Unesolidetraditionphilosophique,repré-

sentéenotammentparlacritiquekantienneet

certainscourantsqu’elleainspirésjusqu’ànos

jours,affirmequelesmathématiquessontémi-

nemmentunescience.

Egalementphysicien,lephilosopheEmma-

nuelKantcherchaitàsaisirlesconditionsdepos-

sibilitéa priorid’uneconnaissancetellequela

physiquenewtonienne.Acetteépoque,même

enAngleterre,lessavantsécriventenlatin.Isaac

NewtonintitulesathéoriePhilosophiae natura-

lis principia mathematica.Laphysiques’appelle

encore«philosophienaturelle».Sesprincipes

sontmathématiques.Kantprécisequelesdis-

ciplinesdépourvuesdeprincipesdenaturema-

thématiquenesauraientêtredessciences.

Bienquececontextenesoitpluslenôtre,il

présented’étroitsliensaveccequenousconsta-

tons:danstouteslesacadémiesdessciencesdu

monde,ilexisteunesectiondemathématiques.

Loindenepasyapparaîtrecommeunescience,

ellessontmêmesouventconsidérées,envertu

deleurrigueuretdeleurobjectivité,commela

scienceexemplaire.

Ilnesemblepasdouteuxquelesmathémati-

quessoientunescience.Ilsuffitcependantde

poserlaquestionunpeuautrementpourque

naisseledébat,voirelapolémique:les mathé-

matiques sont-elles une science naturelle ?

Lesspécialistesdesneurosciencestiennentles

mathématiquespouruneinventiondel’esprit

humain.Unefoisqu’ilacrééunsystèmeàl’aide

dequelquesprincipes,lemathématicienexplore

etdécouvrelespropriétésdusystème,incon-

nuesaumomentdesacréation.

Maislorsquenoussommesséduitsparl’or-

dredel’univers,noussommesenclinsàcroire

quelesmathématiqueslerégissentetqu’elles

préexistentànotreesprit,qu’onlesdécouvre

commeintelligibilitédelanature(langagede

DieuourefletdumondedesIdées).

Cesdeuxvisionsdesmathématiquesontfait

l’objetd’undébatcélèbreentredeuxprofes-

seursduCollègedeFrance,lemathématicien

AlainConnes,prixCrafoord,médailleField,

etlespécialistedesneurosciencesJean-Pierre

Changeuxquiramènelesmathématiquesàune

constructionneuronale.

Lesmathématiquessont-ellesune découverte

depropriétésdelanature?Lesnombresimagi-

nairesouleséquationsdifférentiellesexistaient-

elles,parexemple,quandlaterreseformait,ily

a4,5milliardsd’années?Sont-ellesl’objetd’une

sciencenaturelleoubienunemagnifiqueinven-

tiondenotreesprit?LedébatentreConneset

Changeuxn’apportaaucunélémentderéponse,

chacuncampantsursaposition.

L’idéequelesmathématiquesnesontpasune

sciencenaturelleapparaîttrèsfortementchezle

physicienaméricainEugèneWigner,prixNobel

dephysique,quiaécritunarticlecélèbresur

lapuissancedéraisonnabledesmathématiques.

Ellessont,commeleditunautrephysicienthéo-

ricienaméricain,MurrayGell-Mann,prixNobel

luiaussi,unediscipline«supranaturelle»:elles

englobentetsurplombentlessciencesdelana-

ture;ellesneleurappartiennentpas.

Nouspouvonscependantrétorquerquela

géométrieestdirectementissuedel’observation

delanature.Endenombreuxaspects,sondé-

veloppements’apparenteàceluidelaphysique.

Laconstructiondesfiguresgéométriquesavec

desinstrumentscommelecrayon,larègle,le

compas,représenteunedémarcheexpérimen-

taletypique.Maisl’onn’auraaucunepeineà

nousrépondreque,depuisFrançoisViète,Pierre

deFermatetRenéDescartes,lescourbes,lessur-

faces,lesvolumessontdevenusdeséquations.

les maThémaTiques  FonT-elles parTie des sCienCes ?

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| 37

Nousvoyonsainsilagéométriesefondreau

seindesmathématiques.Ilestpossibledefaire

observericiquelaphysiquethéoriquesefond

égalementaumilieudesmathématiques.Son

casn’estpassidifférentdeceluidelagéomé-

trie.Dira-t-onpourautantqu’ellenerelèvepas

dessciencesdelanature?

Lesmathématiquesconstituentpourlesscien-

cesdelanature,enparticulierpourlaphysique,

le moyen et la mise en forme de leurs raison-

nements.L’algèbreetl’analysesontnécessaires

pourpratiquerlessciences.Enretour,n’est-ce

pasaucontactdessciencesdelanatureque

lesmathématiquesontétéamenéesàrésoudre

lesproblèmesquilesontfaitprogresserdema-

nièresignificative?

Nuldoutequelagéométrienaîtdenotre

volontédedécrirelesfigures,leslignes,lessur-

facesetlesvolumesquenousrencontronsdans

lanature,quelecalculdifférentieletintégrala

étécréépourlesbesoinsdelamécanique,que

Fourrierdéveloppasadécompositionensérie

pourrésoudreleproblèmedelapropagation

delachaleur…

Néanmoins,ilnemanquepasaujourd’huide

mathématiciensquirevendiquentl’autonomie

desmathématiques«pures»,quisedéveloppent

horsdessciencesnaturelles.D’autresobjectent

quecesmathématiqueslovéessurleurmouve-

mentinternesontloind’êtreaussifécondesque

cellesquirésolventlesgrandsproblèmesdela

physique.

Quelpartiprendredanscedébatquidivise

lesmathématicienseux-mêmes?Notreinten-

tiondedéfendreunepositionjustifiablenous

obligeraàundiscoursplusdirectementinformé

parladémarchemathématiqueelle-même.

les mathématiques aux côtés de la physique.

Nouspartonsdu fait observablequelesmathé-

matiquesont une genèse,qu’ellesnereposent

passurdesaxiomescompriscommedesvérités

inconditionnelles,maisqu’ellesseconstruisent

àl’aided’uneaxiomatisationquileurpermette

d’évoluerduconcretversl’abstrait.

Lesmathématiquesontunegenèsequis’en-

racinedanslepsychismedenotreespèce.Nous

lesdécouvronsébauchéesdanslesformesles

plusfamilièresdelanotiond’espace,depoint,

dedroite,d’objet,degroupededéplacements,

detemps,denombreentier,avantdes’enex-

traireparlesvoiesdel’axiomatisationjusqu’aux

niveauxlesplusabstraitsoùellesjouissentd’un

statutautonome,quin’équivautpasàunecom-

plèteindépendanceenverslasituationconcrète

dedépart1.

L’observationdudéveloppementdelanotion

denombrechezl’enfantnousconfirmera.Nous

sommestoutd’abordfrappésparsonappari-

tiontardiveetparsadifficultéàsedégagerde

sessupportsintuitifs.Lenombre«trois»,par

exemple,resteassociéàlasensationdupouce,

del’indexetdumajeurtendusdanslaposition

démonstrativequel’onsait;àl’actedepronon-

cerl’unaprèsl’autrelesmots:un,deux,trois;

ausouvenird’ungroupedetroisobjets;etplus

tardausondumottrois,àl’imagevisuelledes

signes3ouIII,etc.Cen’estquepetitàpetit

quel’espritenabstraitl’idéedunombrepur,en

laissantdecôtétoutcequinerelèvepasdesa

fonctionénumérative.Quipourraitd’ailleurs

affirmerquelanotionabstraitecontinueraità

subsister,silesupportconstantduconcretve-

naitàluifairedéfaut?

Ilestencoreplusinstructifderemonterplus

hautdansledéveloppementdesfacultésmen-

talesdel’enfant,jusqu’avantlemomentoùla

notionde«deux»paraîts’êtredistinctement

précisée.Ilsemblebienquelaconceptionde

l’unitéenoppositionaveclapluralitéaccompa-

gneetcouronnel’effortd’abstractionquimène

àlaconceptiondel’unitédel’objetàtravers

lamultiplicitédesesaspectsetdesimpressions

quis’yrapportent.D’autrepart,pourquel’ob-

jetpuisseêtreidentifiéaveclui-mêmedansses

déplacements,oumalgrélesdéplacementsde

l’enfantquil’observe,ilfautqu’ilpuisseêtre

localiséparrapportàcelui-ci.Ilfautdoncque

l’enfantpossèdedéjàlespremiersélémentsde

songroupeexpérimentaldedéplacements.

Ensomme,nouspouvonsdistinguerdansle

développementdel’enfantunstadetrèsprimi-

tifoùnil’oppositionavant-après,nilanotion

del’objet,nilanotiondelapluralité,nilano-

tiondel’espacenesontencoresortiesdeleurs

limbes.Enliaisonintimelesunesaveclesautres,

dansunegenèseassezlente,ellessedégagent

etseconstituent,donnantnaissanceenmême

tempsàlanotiond’objet,d’unitéetdeplura-

lité;auxformesintuitives2dutempsetdel’es-

pace;àl’idéedel’ordredesuccessiontemporel

etdelaconfigurationspatiale.

Nousnousapercevonscombienlagenèse

d’unenumérationestunphénomènecomplexe!

Finalement,lenombreapparaîtaustadeintuitif

commeuncaractèreportéparl’espritdansun

ensembletrèscomplexed’impressionsplusou

moinsnettementperçues,résultantdel’action

del’objetsurlesujetetdel’emprisedusujetsur

l’objet.Cecaractèreestunifiantetschématisant,

etadmirablementappropriéauxfinsdel’action.

Ilestcomparableàtouteautrequalitésensible,

tellequegrand,jaune,oupesant.Ungroupe

d’objetsàlaqualité«trois»,parexemple,com-

mel’und’euxapeut-êtrelaqualité«rouge»ou

lapropriété«d’êtretransparent».

Enunmot,lenombre,danssasignification

primitiveetdanssonrôleintuitif,estunequa-

litéphysiquedegroupesd’objets.Apartirde

cettesignificationconcrète,lanotiondunom-

breévolue,parl’axiomatisation,versunabstrait

endevenir.

Nousnousdémarquonsainsideceuxquijusti-

fientlesconstructionsmathématiquesparlalo-

gique.Eneffet,l’axiomatisationapourobjetde

décrireunprocessusd’abstractionetd’énoncer

systématiquementlesnotionsquel’espritdoit

accueilliroudefaireapercevoircellesqu’ildoit

éliminer.Lalogiqueconsistealorssimplementà

parlerunelangueefficace,àemployerlesmots

etàmettreenmouvementslesassociations

d’idéesquiconviennentaubutàatteindre.Mais

siépuréequesoientnosabstractions,l’exercice

delapenséenesauraitsepasserdesnombres

prisdansleursensordinaire.Parexemple,pour

pouvoirparlerderelationlogique,ilfautqu’ily

aitdeuxélémentsaumoinsàrelier,lanotionde

sommemettroisnombresenrelation,etainsi

desuite.

Lorsquenouslisonsdansunouvragedema-

thématiques:«Axiome1:L’undeceséléments

seradésignéparlesymbole1etappeléun»,il

estclairquelemot«un»neprendpasdeux

foislamêmesignification.Lasecondefois,nous

entendonsun-logique,tandisquelapremière

foissonemploinedépasseguèrelasphèrede

l’intuitif.Riennes’opposeàcequelesdeux

senssubsistentl’unàcôtédel’autre.Pourquoi

lepremierforméneservirait-ilpasàévoquer

lesecond?

Nousobservonsqueleconceptdenombre

n’estpasdonnéunefoispourtoutesavecun

sensimmuable.Laformeabstraiten’élimine

paslaformeintuitive.Evidemment,leschoses

changentdutoutautoutsil’oncomprendles

axiomescommedesvéritésinconditionnelleset

quel’onprétendfournirparl’axiomatisation

l’essencemêmedunombre,sorted’objetéter-

nel.Maislesaxiomesnesuffisentpasàfournir

àeuxseulsunedéfinitioncomplètedesnotions

surlesquellesilslégifèrent.Lesaxiomesquifont

intervenirlesnotionsdestructureetderelation

logiquesnesauraientfaireexception,carces

notionsnenoussontpasplusinnéesqueles

notionsdedroiteoudenombre.Ellesdoivent,

ellesaussi,êtreabstraitesd’uncertainensemble

dedonnéesplusoumoinsconcrètes.Direque

nouspouvonscirconscrireledomainedesma-

thématiquesàl’étudedesrelationsdestructure,

c’estsoutenirl’idéequelaformepureexiste

endehorsetau-delàdesesréalisations;c’est

supposerquelesstructuressontdesobjetséter-

nels;c’estadmettrequeleurconnaissancenous

estdirectementaccessible…Lesmathématiques

n’ontplusdegenèse!

 le mythe de la rigueur absolue

Laperspectivequenousadoptonsparsouci

d’ouvertureàl’expérienceabolitlemythede

larigueurabsolueauquelPoincaréestencore

enchaînélorsqu’ilécritdansLa Science et l’Hy-

pothèse :

« La possibilité même de la science mathémati-

que semble une contradiction insoluble. Si cette

science n’est déductive qu’en apparence, d’où

lui vient cette parfaite rigueur que personne

2 | maThémaTiques eT sCienCes les maThémaTiques FonT-elles parTie des sCienCes ?

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ne songe à mettre en doute ? Si, au contraire,

toutes les propriétés qu’elle énonce peuvent se

tirer les unes des autres par les règles de la lo-

gique formelle, comment la mathématique ne

se réduit-elle pas à une immense tautologie ? Le

syllogisme ne peut rien nous apprendre d’essen-

tiellement nouveau et, si tout devait sortir du

principe d’identité tout devrait aussi pouvoir s’y

ramener. Admettra-t-on que les énoncés de tous

ces théorèmes qui remplissent tant de volumes

ne soient que des manières détournées de dire

que A est A ? »

Lepointculminantdecetteinféodationau

mythedelarigueurabsoluesetrouvedansla

dernièrephrasedecepassagedulivrequenous

citons:

« Quelle est la nature du raisonnement mathé-

matique ? Est-il réellement déductif comme on

le croit d’ordinaire ? Une analyse approfondie

nous montre qu’il n’en est rien, qu’il participe

dans une certaine mesure de la nature du rai-

sonnement inductif et que c’est par là qu’il est

fécond. Il n’en conserve pas moins soncaractère

derigueurabsolue.»

Maislesmathématiquesontundoubleversant,

nousdittrèsjustementLéonBrunschvicgdans

L’Expérience humaine et la Causalité physique :

« La mathématique unit rationalité et objec-

tivité comme des fonctions solidaires et récipro-

ques qui ne peuvent se séparer l’une de l’autre,

parce que, contrairement au double rêve du

réalisme dogmatique, la rationalité ne peut se

transcender dans l’absolu d’une raison, dans la

pure évidence, pas plus que l’objectivité dans

l’absolu d’un objet, dans l’appréhension immé-

diate. »

Lacrisedesfondementsdesmathématiques,

lesgrandesmuesdelaphysique,audébutdu

XXesiècle,nouscontraignent,sinousvoulons

bienenprendreacte,ànousdébarrasser«du

fantômed’uneraisonquiseraittranscendante

aucoursdelapenséemathématique».Lafiction

delarigueurabsolueséparelesmathématiques

deleursréalisations,aulieudeselimiteràne

paslesréduireàcelles-ci.Elleenfaitununivers

àpart,quitientenlui-même,reposantsurses

basespurementrationnelles.Maiscetidéal,qui

coupelesmathématiquesdetoutenracinement

danslepsychismehumainetdeleurgenèseà

partirdesformesintuitivesdelaconnaissance,

lesramèneàuneimmensetautologie.S’ilya

unemoraleàtirerdel’entreprisehilbertienne

d’axiomatisationformelledelagéométrie,elle

tiendraitdanscetteformuledumathématicien

RenéThom:« Pour accéder à la pure rigueur

dans le raisonnement mathématique, il faut tra-

vailler sur des symboles vides de sens ».L’onaura

évacuélepsychologismecontrelequelFregeet

sesépigonessesontélevésavectantdevigueur,

maisl’onauraégalementrendulesmathémati-

quesinsignifiantes.

mathématiques et construction du réel

Enplaçantlesmathématiquesauxcôtésde

laphysique,danslessciencesnaturelles,ilnous

fautpréciserquecessciencesseconfrontentà

uneréalitémédiatiséeparnosréférentiels,com-

med’ailleursl’ensembledenosconnaissances.

Cessonsd’imaginerquenosvuesportentsur

desréalitésobjectivesdéjàtoutesconstituéesen

dehorsdenous!IlfutréservéàKantdemettre

àjour,parsonanalysedesnotionsd’espace,de

temps,desubstance,decausalité,quecequi

formelaconnaissanceestfonctiond’unestruc-

tureinhérenteàl’espritquiveutconnaître.

Cettedécouverteéquivautdansl’ordremental

àladécouverted’uneloinaturelledansl’ordre

physique.Elleestloind’avoirépuisésesvertus

critiques!

Surlaquestiondel’a priori,ledéveloppe-

mentdessciencesainfirmélathéoriedeKant.

Laportéedesadécouvertefondamentalen’en

demeurepasmoinsentière.L’évolutionactuelle

dessciences,mathématiquescomprises,lacor-

robore.Ilsetrouvepourtantquel’oncontinue

souventd’imaginerunesphèreabstraite,celle

desmathématiquespures,oùlavéritéestabso-

lue.Onparlefréquemmentencesensdel’appli-

cationducalculauxsciencesnaturelles.Etl’on

setrouveincapabled’expliquerenvertude

quoicetteapplicationestpossibleetsiefficace.

CommentlesmilliersdepagesdecalculdeLe

Verrieront-ellesbienpuameneràladécouverte

2 | maThémaTiques eT sCienCes les maThémaTiques FonT-elles parTie des sCienCes ?

deNeptune?Mais,siaulieud’avoird’uncôté

desmathématiquespures,intangiblesdansleurs

structureslogiquesfondamentales,etdel’autre

uneréalitéphysiquedéjàtouteconstituée,nous

avons,commenouslesoutenons,desmathé-

matiquesd’oresetdéjàimplicitementàl’œuvre

danslaconstitutionfamilièredumondephysi-

que,lemystèredisparaît.Eneffet,dèslorsque

nouscherchonsàpréciserdesformesdenotre

connaissanceintuitive,nousintroduisonsunsys-

tèmederepèresaussiinvariablesetaussiserrés

quepossible,parrapportauxquelslesvariations

desdonnéessensiblespeuventêtre«objective-

ment»appréciées:c’estlecheminquimène

directementàl’abstractionmathématiqueet

àlamesure!Lesabstraitsmathématiques,les

conceptsdenombre,dedroiteoudepointsont

encontinuitéaveclesdonnéesintuitivesdont

ilsontétéextraits.

Lesmathématiquessontàlafoisdécouverte

etinvention.Nousn’inventonspaslesformesde

laconnaissanceintuitivedeladroiteoudunom-

breentier,nousnedécouvronspasnonplusune

réaliténaturellequineporteraitpaslamarque

denosstructuresmentales.Nousnesommespas

enfermésdansl’alternative:oubienlesmathé-

matiquessontunedécouvertedespropriétésde

lanatureoubienellessontuneinventionde

notreesprit.Lesdeuxaspectss’entrelacentet

lesfrontièresentrelesmathématiquesetlaphy-

siquenesontpasnettementtranchéesdepart

enpart.Eneffet,rienn’estexpérimentablequi

nesoitcalculableetrienn’estsignifiantauplan

del’abstractionmathématique,siellesecoupe

desesréalisationsdanslessciencesnaturelles.

Cescomplémentaritésrejaillissentsurlesformes

denosconnaissancesintuitivesetlesrectifient,

lecaséchéant.

Conséquences pédagogiques au niveau des 

écoles primaires et secondaires

Lesprêtés-rendusauseindessciencesnatu-

rellesentrelesmathématiquesetlaphysique,

maisaussilachimie,labiologie,laissentressortir

la tendance propre des mathématiquesversla

rigueurdesconstructionsabstraites,sanspour

autantquelefilnesecasseavecleversantde

leursapplications.Ilsmettentégalementenévi-

dencela tendance propre de la physique, de la

chimie, de la biologieverslesphénomènesdits

«naturels»,sansquelelienneserompeavecle

pôledelamodélisationetdel’abstrait.

Apartirdelà,l’enseignementdessciences

danslesécoles,lescollègesetlesgymnases

(lycées)doittenircomptedesdeuxdirectives

suivantespouréviterdesconflitsbienconnus

desmilieuxpédagogiques:

a Ilestexcludevoirdanslesmathématiquesl’ar-

chétypedessciencesnaturellesetderéduire

l’étudedelaphysiqueàdesexercicesde

mathématiques.Ilimportederespecterlaten-

dancepropredechaquescience,saspécificité.

Chacuneouvrel’espritàuneméthodologie

caractéristiqueduva-et-viententre«observa-

tion/théorie/expérimentationetobservation

durésultatdel’expérimentation».

bAl’inverse,ilesthorsdequestionderamener

lesmathématiquesauseulbagagenécessaire

auxcoursdephysiqueetdesautressciences,

commesiellesn’étaientqu’unoutilpour

mesurer,calculer,fabriquerdesformules

rigoureuses.Lesmathématiquess’appuient

sur leconcret,nonavant toutpourdes

motifsdidactiques,maisessentiellementpour

seconstruiredeseuild’abstractionenseuil

d’abstraction.Leva-et-viententre«obser-

vation/théorie/expérimentationetobserva-

tiondurésultatdel’expérimentation»leur

estintrinsèque.Lemathématicienetphilo-

sophesuisseFerdinandGonsethaélaboré3

patiemmentetavecunegranderigueurcri-

tiquecetteméthodologieouvertedesmathé-

matiques,quilesraccordeàl’ensembledes

sciencesnaturelles,oùellesmanifestentleur

tendance propre.

Nousterminonsensachantavoirbousculédes

préjugés,suscitédesréactions,maisavecl’es-

poirdedonnerenviederéfléchirplusàfond

surlethèmedel’éducationscientifiquedes

enfantsetdesadolescents,àl’écoleprimaire,

aucollège,augymnase.Nousdisons«éduca-

tion»,carilnes’agitpastantd’enseignerdes

formulesmathématiquesquedefaireaimerla

science,d’enfairecomprendrelasignification

profonde.Danscecadre,ilestnécessaired’en

évoquerl’histoire,avecsestâtonnements.«Vous

necomprenezpasbienladifférenceentreato-

mesetmolécules?Rassurez-vous,leschimistes

lespluséminents,DaltonetAvogadro,sesont

disputéspendantdesdécenniesautourdeces

deuxconcepts!»

pierre-marie pouget

docteur en philosophie et ancien enseignant

de philosophie au gymnase de Nyon

1 Lesrelationslogiquesàleurniveauleplusabstraitnesont

pasdesstructuresdéfinitivesetultimes,àpartirdesquelles

touteslesmathématiquesseraientdéductibles.Lesmathé-

matiquessontpluscomplexesquecelaetdéjouentlesten-

tativeslogicistes,puisqu’aucunsystèmeformelnepeutse

justifierlui-même,sansentraînerlacréationd’unautre.2 Par«formesintuitives»,nousentendonscellesdenotre

connaissancefamilière,quotidienne,susceptibled’évoluer,

d’êtreréviséesouslapressiond’uneconnaissancepluséla-

borée.Ellesplongentleursracinesdansl’organique.L’ondit

aussi«connaissancenaïve»,cequineveutpasdireinefficace

ettoutesimple.Elleestaucontraireappropriéeauxfinsde

l’actionetcomplexe.3 TitresdesprincipauxouvragesdeF.Gonsethsurcesujet:Les

fondements des mathématiques, Mathématiques et réalités,

Philosophie mathématique, Qu’est-ce que la logique ? La

Géométrie et le problème de l’espace.

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Aupremierabord–scientifiquequejesuis,bio-

logisteetthéologien–laquestionm’alaisséper-

plexe:maisqu’est-cequ’ilsfontàl’école,com-

mentremettreenquestionunetelleévidence?

Jedevaisreprendremesespritsetchercherle

frontpolémique.Cetteinterrogationconcerne-

t-elleledevoir(faut-il?),l’enseignement(des

sciences,enoppositionàl’expérimentationpar

exemple),lascienceenelle-mêmeousonensei-

gnementàl’école?Enfin,l’hypothèseàlaquelle

jesuisarrivéestunecompréhensionrestrictive

duconceptdescience,réduitàsonsensocci-

dentalmoderne:faut-ilenseignerles«scien-

ces»,sous-entendulessciencesdelanature,la

connaissancedelanaturedeschoses?Doncune

remiseenquestiondelamathématique,dela

physique,delachimieoudelabiologie?Quelle

aberration!S’ilfallaitréduirel’enseignementà

deuxoutroisbranches,lamathématiqueou

laphysiquemathématiquedevraitaumoinsy

figurer.

Apprendreàapprendre,àpenseretàjuger,à

savoirmettreenbonnerelationlesoi,lesautres

etlemonde,pourmoi,c’estlatâchedel’école,

pédagogiqueetéducative,qu’onleveuilleou

non.

Pourpouvoirnaître avec,ilfautconnaîtreles

objetsaveclesquelsnoussommescensésnaître,

grandir,vivreetmourir(mieuxquecensésserait

sensés,parcequedusensils’agitfinalement,le

sensquejedonneàmavie).L’artdeconnaître

estlascience,etsonacquisitionsefaitparl’ex-

périenceetl’enseignement,lamiseensignes

etsymboles,c’est-à-direunlangagecommun

quipermetdeprendreconscience,depenser,

decommuniquer,voiredecommunier:avecsoi-

même,autruietlemonde.Les«sciences»font

lascience,avecles«lettres»etles«sciences

humaines».Toutunchacunenabesoinpour

comprendre,voireconstruirelemondequiest

lesien,saLebenswelt,lemondedanslequelil

vitetquilefaitvivre.J’espère–surtoutcomme

théologienetpasteur–quec’estlascienceque

vousvoulez,àl’école.Ajoutez-yl’artetlecorps;

jem’occuperaidureste,enaccordavecvous.

armin Kressmann

biologiste moléculaire, théologien,

pasteur et éthicien

FauT-il enseigner les  disCiplines sCienTiFiques  à l’éCole ?

3FlorenceMilanietChloéJonzier,deuxétu-

diantesdelaHEPVaudau4esemestredeleur

formation,planifientuneséquenced’enseigne-

mentdemathématiques,relevantdudomaine

del’espace,poursixélèvesdedeuxièmeannée

d’uneclassedecycleinitial(CIN).Troismoments

d’enseignementsontprévusàceteffet.Pourdé-

marrerlaséquence,ellesdécidentderaconter

unehistoireauxenfants:

Jérémy travaille dans un très grand et très

beau magasin de jouets. Il y en a de toutes sortes

et de toutes les couleurs, des peluches, des pou-

pées, des jeux… Jérémy, lui, s’occupe de ranger

les voitures. Il fait très attention, car son patron

aime que tout soit bien rangé, sinon il se fâche.

Il ne peut pas placer les voitures dans n’importe

quel ordre. Comme c’est bientôt Noël, la vitrine

du magasin doit être magnifique. Seulement,

Jérémy s’embrouille: il a besoin d’aide ! Voilà la

règle que son patron lui a demandé de suivre : tu

dois mettre à la suite deux voitures rouges, puis

une voiture jaune et une voiture verte ; tu dois

ranger toutes les voitures de la même manière!

Durantledéroulementdel’activité,Chloéet

Florenceontremarquéqueleséchangesdans

lesgroupesetentrelesgroupesétaienttrès

productifs.Voiciquelquesdémarchesd’élèves

qu’ellesontobservéesaucoursdelapremière

phasedelasituation.

Lesélèves:

1 fabriquentuneseulesuite;

2 placenttouslesvéhiculesauhasard;

3 alignentlesvéhiculesselonlarègleetlesran-

gentsousformedetableau,

RRJV,

RRJV,

RRJV;

4 ordonnentlesvéhiculesselonlarègleenune

ligne,RRJV,RRJV,RRJV,RRJV;

5 posentunepremièresériedansl’ordreprescrit

etunedeuxièmedansl’ordreinverse:RRJV,

VJRR.

Danslamiseencommun,chaquegroupe

exprimelesprocéduresutiliséespourrésoudre

leproblème.Lesstagiaires,enreprenantl’une

d’elles,placentunevoiturejauneetdemandent

a la suiTe de l’arTiCle de pierre-marie pougeT, voiCi une parTie Consa-Crée aux maThémaTiques. la diFFiCulTé de l’aBsTraCTion, la néCes-siTé de se siTuer dans son environnemenT, la ConsTruCTion d’ouTils pour ordonner sa Compréhension du monde, sonT auTanT d’as-peCTs qui ConCernenT l’enseignemenT des maThémaTiques. du CYCle iniTial (Cin) au gYmnase, en passanT par le primaire eT le seCondaire i, les maThémaTiques aCCompagnenT les parCours sColaires des élèves. le rôle de la didaCTique esT primordial pour Favoriser non seulemenT l’apprenTissage lui-même, mais aussi, de Façon plus pro-Fonde, l’aTTiTude FaCe à la disCipline pour dissiper si possiBle le sen-TimenT que les maThs, C’esT Trop Compliqué…

aCTiviTé maThémaTique  au Cin ou CommenT  inTroduire la noTion de  régulariTé géoméTrique 

pris

mes

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da

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 / m

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007

| 43

auxélèvesdepoursuivrelasuite.Puis,pourclore

lamiseencommun,ellesproposentauxélèves

detrouverunmoyeninfailliblepourrangerles

voituresenl’absencedupatronetpourserap-

pelerlarègledescouleurs.Unélèvedessineune

premièrevoitureautableau,maiscelaprenddu

temps.Unautreélèveproposedesymboliser

larègleavecdesrondsdecouleurs.Cemême

jour,unprolongementàl’activitéestproposé

auxenfants:àtourderôle,ilsvontjouerlerôle

dupatronetdonnerunerèglederangement

inéditeàleurscamarades.

une semaine plus tard…

ChloéetFlorenceannoncentauxélèvesqu’ils

vontànouveaujoueraveclesvoituresetrappel-

lentl’histoiredeJérémy.Ellesprécisentquela

règlesymboliséeavecdesrondsdecouleursest

notéeautableau,puisellescommuniquentora-

lementlesconsignesdelanouvellesituation.

1 Chaquegroupededeuxreçoitunebandede

papieroùsontdessinéesdescasessymboli-

santdesplacesdeparc,

2 vousdevezchercherlà-basquatrevoituresrou-

gesetlesplacersurlabandedepapier.Une

foisposéesvousnepouvezpluslesbouger,

3 ensuitevousallezchercherlesvoituresjaunes

etvouslesplacezsurlabande,

4 lorsquevousavezparquélesvoituresjaunes,

vousallezchercherlesvertesetvouslespla-

cezaussisurlabandedepapier.

Nosdeuxstagiairesrelèventquecettesitua-

tioncréeuncertainnombrededifficultéset

qu’ellessontobligéesdeproposerdesrelances

pourquelasituationévolueseloncequ’elles

avaientprévu.Ques’est-ilpassé?

Lesélèvesposenttouteslesvoituresrouges

colléeslesunesauxautres;ainsi,lorsqu’ilsvont

chercherlesvoituresjaunes,ilsnesaventpas

combienenprendre.Dececonstatnaîtlapre-

mièrerelancedesenseignantes:« Vous devez

prendre le bon nombre en fonction de la règle

donnée pour ranger les voitures. »

Lesélèvesprennentalors4voituresjaunes,

lesplacentàcôtésdesrougesetfontdemême

aveclesvertes.Lorsqu’ilscomparentlarègle

avecleurrangement,ilsremarquentquel’or-

dren’estpascorrect.Ilsdécidentalorsd’enle-

vertouteslesvoituresdelabandedepapier

etrecommencent.Commeilsont4voitures

dechaquecouleur,ilsréitèrentleurerreur.Les

enseignantestententunenouvellerelanceen

lescontraignantàposerd’abordlesrougeset

àenvisagercequ’ilfautfairepourplacerles

autresvoituresenrespectantl’ordredelasuite.

Latâcheestdifficileetsembletropéloignéede

leurscompétences.

ChloéetFlorencetententmalgrétoutdefaire

réussirlatâche.Constatantquelesélèvessont

perdus,ellesdécidentd’abandonnerl’activitéet

réunissentlesélèvespourunemiseencommun

oùellesvontmontrerétapeparétapecomment

s’yprendrepourréussirl’exercice.

Peudetempsavantlesvacancesdefind’an-

née,pourterminerlaséquence,lesdeuxen-

seignantesproposentauxélèvesuneactivité

papier-crayon,quireprendlamêmesuitede

couleursavecdesguirlandesdeNoël.Troisguir-

landessontàcompléter:lapremièrecommence

pardeuxboulesrouges,ladeuxièmeparune

boulejauneetlatroisièmeparunebouleverte.

Lesélèvesréussissentbiencettefiche:ilsse

trouventenprésenced’unerègleconnue,sym-

boliséeetinscritesurlaficheetpeuventdonc

s’yréférerrégulièrement.L’observationdes

élèvesindiqueunenouvellefoisquedespro-

céduresoriginalessontutiliséespourcomposer

lesguirlandes.Pourcompléterlaguirlande,les

élèvesontréaliséunedémarchetermeàterme,

etsesontréférésàlasymbolisationdelarègle.

Ilsontainsitousterminélafiche…

Commentaires didactiques de la séquence

L’activitéchoisieetdéveloppéeparlesétu-

diantess’estavéréepluspassionnantequeprévu

lorsdel’analyse a priori.

Danslasituationinitiale,ladévolutiondu

problèmepasseparunmédiateur(ici:l’histoire

deJérémy),qui,selonladéfinitiondeBrousseau,

estl’acteparlequell’enseignantconfieàl’élè-

velaresponsabilitéd’unesituationd’appren-

tissagedanslaquelleunsavoirmathématique

estenjeu.Lasituationproposéeparnosdeux

stagiairesmetlesélèvesenprésenced’unehis-

toirecontenantlasourceduproblèmeetd’un

matériel1constituédediversvéhiculesdeplu-

sieurscouleursdontcertainssontdesvoitures

rouges,jaunesetvertes.

Latâchedévolueestlerangementdesvé-

hiculesselonunesuiterépétitiveoùl’onpeut

isolerunmoduleconstituédequatrevoitures

selonunordredecouleursdéterminé.Chloéet

Florencedécidentdeneriendire,niàpropos

desactionsàconduirepourréussirl’activité,ni

surl’utilisationdesvéhiculesrestants.

Lasuiteordonnéerouge-rouge-jaune-vert

doitêtrerépétéeautantdefoisquelematé-

rielàdispositionlepermet.Unesuiterépétitive

s’apparenteaussidupointdevuedudomaine

del’espaceàunefriseobtenuepartranslation

d’unmotif2.Cetravailsurlessuitesetsurla

reproductionrégulièred’unerègledonneà

l’élèvelapossibilitédeplanifierdifférentes

démarchesafind’obtenirunrésultatquipeut

êtreanticipé,puisvalidé.C’estaussil’occasion

pourlesenseignantesdedemanderauxélèves

d’expliquerleursdémarchesconcrètementdans

desmomentsdemiseencommun.

L’activitéprévuen’estpasnouvelledansle

cadredesactivitésmathématiquesproposées

auxenfants.Elles’inscritdansuneréflexionsur

lesrégularitésetéventuellementsurlesnotions

deproximitéetdefrontières.Enobservantles

régularités,lejeuneélèvepeutétablirdesliens

numériques(chaquesuiteaquatrevoitures,

dontdeuxrouges,unejauneetuneverte)et

organisel’espace.Lesdeuxvoituresrougespré-

cèdentlavoiturejaune,quielle-mêmeprécède

lavoitureverte,àconditionquel’onsesitue

surunelignegauche droite.Or,volontairement

etaucontrairedesenfilagesdeperlesquiim-

posentunordreunique,l’activitéproposée

peutégalements’effectuerselonl’ordredroite

gaucheet,danscecas-là,l’ordreestinversé.En

effet,avantlesdeuxrougesdumodèle,l’élève

peutsedire:«Jevaisdevoirposerunvert,et

ensuiteunjauneetensuitedeuxrouges.»

a propos des démarches des élèves

Danslecasdelapremièredémarche(cf.dé-

butdecetarticle),lesenseignantessontinterve-

nuespourrelancerl’activité,ensoulignantque

touteslesvoituresdevaientêtrerangées.

Pourlesdémarches2,3et4,unproblèmesur-

vientaumomentoùlenombredevoituresest

insuffisantpourfabriquerunesériecomplète.

Certainsélèvesdécidentalorsdelesmettretou-

tesàlasuitesanssesoucierdelarègle,d’autres

denepasentenircompte.Ilsjustifientlanon-

priseenconsidérationduresteendisantqu’il

estimpossibledelesrangeretderespecterla

série;certainsvéhiculesneprendrontdoncpas

placedanslavitrine.

Lenombrechoisidevéhicules,nepermettant

pasd’appliquerentièrementlarègle,provoque

desdiscussionsstimulantesentrelesélèves:ils

verbalisentlescontraintesdelasituation,véri-

fientleurrangement,validentleursolutionet

lajustifient.

Dansladémarche5,lesélèvesposentles

voituresdansl’ordreinverseenprocédantde

manièresimilaireàd’autresactivitésmathéma-

tiquesvécuespeuavantenclasse.

Danslamiseencommun,unephasedefor-

mulationdesdémarchesdemandéeàchaque

groupepermetauxenseignantesuneforme

d’institutionnalisation,puisqu’ellesdemandent

auxélèvesdetrouverunmoyenpourrangerles

voituresetdeserappelerlarègledescouleurs.

Cefaisant,lesstagiairesopérationnalisentle

passagedel’actionàlareprésentationiconi-

que(dessinerlesvoitures),puissymbolique(les

représenterpardesrondsdecouleur),passage

dontonconnaîtl’importancepourl’enseigne-

mentaucycleinitial.

Lorsduderniermomentdecemêmejour,en

donnantàtourderôleunerègleàuncamarade,

lesélèvesonttissédesliensentreproductionet

compréhensiond’unereprésentationécrite.

Unesemaineplustard,ladeuxièmephase

del’activitédidactiqueintroduitdenouvelles

contraintesetmetenjeuplusieursvariables

didactiques.Silasuitetravailléerestequantà

elleinvariable,lasituation problèmeproposée

prendencompteàlafoisdesaspectsliésàla

logiquedesensembles,audomainenumérique

etàl’organisationdel’espace.Eneffet,lesélè-

ves,pourréussir,doiventplacerdansunpremier

tempslesquatrevoituresrougesenrespectant

l’ordredescouleursRRJVdelasérie.Lamiseà

dispositiond’unebandedepapierdehuitcases

metenjeul’organisationdel’espaceetlanéces-

sitédelaisserdeuxcasesvidesaprèsavoirposé

lesdeuxélémentsrouges.

L’exigencecognitivedelatâcheestimportan-

te,lesrelancess’avèrentdifficiles.Lerappelde

larègleostensiblementsymboliséeautableau,

bienqu’importantpourlavalidationdesréso-

lutionsobtenuesparlesélèves,n’amènepasde

nouvellesprocédures.

Dansuneperspectivedidactique,ladifficulté

degérerl’activitéetdelaconduireàsonterme

soulignel’importancedel’analysea priori dela

tâcheetavecelle,lapriseencomptedupoidset

dujeudesvariablesentreelles.Dèslorssaisirla

naturedeserreursdesélèvesdevientprimordial

R R R R

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase aCTiviTé maThémaTique au Cin ou CommenT inTroduire la noTion de régulariTé géoméTrique

pris

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danslagestiondelatâcheetdansleréajuste-

mentdesobjectifsprévus.Danslescommentai-

resdidactiquesdesnouveauxmoyensd’ensei-

gnementdemathématiques3,onpeutlire:«Il

fautrappelerquelesconceptsnes’enseignent

pasetque,dansledomainedeladécouvertede

l’espaceenparticulier,ilseraitvaindechercher

àleshiérarchiser.Deplus,iln’estpaspossiblede

savoiroùenestchaqueenfant,individuellement,

danslaformationdecesconcepts».

Anoterencorequedurantlessemainesentou-

rantlesséquencesd’enseignement,lesélèvesont

pus’entraîneràconstruiredessuitesrégulières

avecunjeules perlesoùlematérielestconstitué

decartesmodèlesdedifficultésgraduelles,d’un

supportetdesperlesàenfilerpourreproduire

et/oupoursuivredessuitesrégulières.

Accumulerdesexpériences,devoirprendre

encomptedifférentesvariablesconjointement,

seconfronteràunerègleécritesontautantde

situationsquelesenfantsdelaclassedeChloé

etFlorenceontpuvivre.Or,aucycleinitial,

l’expérienceparl’élèveestlefondementdela

constructionetdelastructurationdel’espace.

Notreoptionestdoncdesoutenirquelesélèves

viventetaccumulentdesexpériencesgéométri-

quesvariées,enfonctionducontexteetcela

toutaulongducycle.Lapropositiondeplan

d’étudesenmathématiquesaucycleinitiallare-

prendavecleconceptd’éducationmathémati-

queetscientifique4etretienttroiscompétences

privilégiéesàdévelopper5.

SelonCerquetti-AberkaneF.&BerdonneauC.6,

«fairedesmathématiques,c’estavanttoutdans

unpremiertempsdonneràl’enfantl’occasion

d’agir,etultérieurementl’ameneràréfléchir

sursesactions».Pourillustrercepropos,Chloé

etFlorence,aprèsunephased’action(mani-

pulationdesvoitures),passentàunephasede

verbalisationenproposantàchaquegroupede

réfléchirsurlesmotsqu’ilpourraitutiliserpour

expliquerauxautrescommentilfaitpourranger

lesvoitures.

en guise de conclusion

NousavonsrencontréChloéetFlorenceàtrois

reprises.Lapremièrefoisavantledémarragede

laséquence,oùnousleuravonsproposédiverses

activitésd’enseignementrelevantdudomaine

mathématiquedel’espaceettransmisdesdocu-

mentsleurpermettantdechoisiretdepréparer

unesituation problème.Aprèslamiseenœuvre

pratiquedelapremièresituation,ellesnousont

racontécequis’étaitpasséenclasse,etnous

avonsdéterminéensemblequelquespistespour

lasuitedelaséquence.Untroisièmeentretien

nousapermisdeprécisercertainsélémentsdela

situation,derevenirsurlesapprentissagesetde

discuteravecnosdeuxinterlocutricesduprojet

d’article.Entrelesdifférentsmomentsd’ensei-

gnementetderencontres,lesdeuxstagiaires

nousontenvoyéparécritlapréparationdeleur

séquence,lerécitdecequis’estréellementpas-

séenclasse,desidéesdevariablesetdevarian-

tespourdifférencierl’enseignementetquelques

pistesd’analyse.Toutescesinformationsnous

ontétéprécieusespourcommenterlaséquence

d’enseignementetnoustenonsàremercierFlo-

renceetChloépourleurinvestissement.

Cetteexpériencedeformationetdecollabo-

rationsoulignel’importanced’uneapproche

didactiqueplurielledanslacompréhensiondes

gestesprofessionnels.Eneffet,lesconnaissan-

cesdesphénomènesdidactiques,entreautres

lathéoriedessituationsetleconceptdecontrat

didactiquedéveloppésparBrousseau7,nousper-

mettentd’analyserlesséquencesd’enseigne-

mentetdeproposerdespistesauxétudiantes

demanièreformatrice.Lecadrederéférence

etd’analysedéterminéparlesprofesseureset

l’engagementdesétudiantesdansletravailde

planificationetdemiseenœuvrerendentl’ar-

ticulationentrethéorieetpratiqueparticulière-

mentformatrice.

elisabeth stierli 

professeure formatrice, HEP Vaud

Chantal Tièche Christinat

professeure formatrice, HEP Vaud,

Institut de pédagogie spécialisée (IPS)

en collaboration avec Florence milani,

Chloé Jonzier

étudiantes HEP

1 Matériel:desvéhiculesrouges,vertsetjaunes+quelquesavions

etlocomotivesdemêmescouleurs.2 Boule,F.(2001).Questions sur la géométrie et son enseigne-

ment.Paris:NathanPédagogie.«Unefriseestunpavageà

unedimension.Elleestdonccaractériséeparunmotifetune

translation.»(p.127)3 GagnebinG.&al.(1998).Apprentissage et enseignement des

mathématiques: commentaires didactiques sur les moyens d’en-

seignement pour les degré 1 à 4 de l’école primaire.COROME,

p.145.4 Aeschbacher,F.,Carrard,C.,Stierli,E.,Tièche,C.(2006).Proposi-

tion de plan d’études mathématiques au cycle intial. Neuchâtel:

IRDPetmandatDGEO.5 Lapremièreréfèreàlacompétenceàsereprésenteretàrésou-

dredessituations problèmesenconstruisantetenmobilisantdes

notions,desdémarchesetdesconnaissancesproto-scientifiques

–del’ordredubalbutiementscientifique–etscientifiques.

Lasecondecompétenceconcerneledéveloppementdelapen-

séelogico-mathématiqueenétablissantdesrelationsentre

différentesactionsetconnaissancesetenpermettantl’élabo-

rationd’unraisonnementmathématiqueinductif,déductifet

créatif.

Latroisièmeconcentresonattentionsurlacommunicationet

surl’acquisitiond’unlangagemathématiqueafindefamilia-

riserl’élèveàcommuniquerdansunlangageappropriéses

procéduresderésolutionetsesrésultats.6 Cerquetti-Aberkane,F.&Berdonneau,C.(1994).Enseigner les

mathématiques à la maternelle.Paris:Hachetteéducation.7 Brousseau,G.(1996).«Fondementsetméthodesdeladidac-

tiquedesmathématiques»,in Didactique des mathématiques.

Lausanne:DelachauxetNiestlé.

pourquoi les maThs  à l’éCole ?  pour simpliFier la vie ?

DanssonouvragePourquoi des mathémati-

ques à l’école 1,RolandCharnayaffirmesansam-

bages:«Quandlesmathématiquesenseignées

àl’écolepermettentdesimplifierainsilaviede

l’élève,plutôtquedelaluicompliquer,ellesse

rapprochentdesvraiesmathématiques.»

Voilàquitranchecurieusementavecune

conceptioncommunedesmathématiques«qui

compliquentlavie».Voilàquiremetenques-

tionbiendescoursdemathsdonnésouenten-

dus.Etpourtantcetteidéedecomplicationde

laviedel’élèvepourraitexpliquerbeaucoupde

frustrationsoudedéceptions.Envoiciquelques

exemples.

1 Noussommesentroisième.Lamaîtressea

expliquéettravaillélasoustractionencolonnes

parempruntsetdonneàfaireàdomicileune

fichecomportantvingtsoustractionsdutype:

ou encore

Bienentendu,lebutestlouableetlesélèves

vontabondammenttravaillerlesdifficultésdes

retenuesenprésencede0.Toutefoislatech-

niqueimposéeiciestbeaucoupmoinsefficace

quecequecertainsappellentla«techniquede

lasommelière».Commelorsquecelle-cirendla

monnaiesuruncaféà3fr20onpeutfaireici,

oralementouparécrit:

374 : 6 pour aller à 380

20 pour aller à 400

600 pour aller à 1000

Donc il faut 626 pour aller de 374 à 1000.

Sionexaminel’effetdecegenred’exercice,il

estassezévidentquelesélèvesvontconsidé-

rerl’algorithmedelasoustractioncommeune

complicationetnoncommeuneaideàrésoudre

desproblèmesoudescalculsdefaçonplussim-

plequ’aveclesmoyensdecalculréfléchidont

ilsdisposaientauparavant.Cecisansparlerdes

blocagesausujetduzéro2!

2 Noussommesenhuitième.L’enseignanta

commencéàtravaillerlecalcullittéralainsique

larésolutiond’équationsdupremierdegré.

Assezrapidement,afindeprésenterl’utilisa-

tiondecenouveloutil,ilproposeunproblème

classique:

Un marchand fait trois foires.

A la première, il double son argent, puis

dépense 30 pistoles.

A la deuxième, il triple son argent, puis

dépense 54 pistoles.

A la troisième, il quadruple son argent puis

dépense 72 pistoles.

Il lui reste alors 48 pistoles.

Combien de pistoles avait-il au départ?

L’enseignant,aprèsavoirlaissésesélèvesréflé-

chir,construitaveceuxlarésolutionalgébrique

classique:

Quantitédepistolespossédéeaudépart:

x

Quantitérestanteaprèslapremièrefoire:

2x-30

Quantitérestanteaprèsladeuxièmefoire:

((2x-30)·3)-54

Quantitérestanteaprèslatroisièmefoire:

((((2x-30)·3)-54)·4)-72

Onsaitparailleursqu’illuireste48pistoles.

Onadoncl’équationàrésoudre:

((((2x-30)·3)-54)·4)-72=42

1000

- 374

1000000

- 539201

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase pourquoi les maThs à l'éCole ? pour simpliFier la vie ?

pris

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da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

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L’enseignantselanceensuitedanslarésolution

del’équationautableau.Ilindiqueégalement

lessimplificationspossiblesàchaqueétape.Il

arrivefinalementaurésultat.

Unemainselèvealors…

Elève—Maism’sieur,moij’aitrouvé29sans

fairetouscestrucs!

Prof—Ouibiensûr,onpeutessayeraubolet

tâtonner,maisçapeutêtrelongsi…

Elève—Non,j’aisimplementfaitàl’envers!

Alafinilluireste48.Justeavantiladépensé

72,doncilavait48+72,donc120.Avantila

quadruplé,doncilavait30.Etainsidesuiteet

j’arriveà29.

Unmurmureparcourtlaclasse.Presquetous

lesélèvesn’ontpassuivilesexplicationsdeleur

camarade,maisplusieursvoixs’élèventpour

confirmer:c’estbienplussimple!

L’enseignantchoisitdedemanderàl’élève

d’expliquerànouveausaméthodeàlaclasse

etconclut:«C’estunebonneidéeeticic’est

assezsimple.Jevousdemandetoutefoisd’uti-

liserl’algèbrepourrésoudrelesproblèmesque

jevaisvousdonner,carautest…»

Iciencore,lenouveloutilestpourlesélèvesun

moyenimposéqui«compliquelavie».Certes,

unebonnepartied’entreeuxaccepteracette

contrainteetseplieraàcetypederésolution.

Toutefoiscetoutilresterafondamentalement

étrangerpourlaplupartdesélèvesetserarapi-

dementoublié.

Onpourraitmultiplierlesexemplesdeproblè-

mesà résoudre par voie algébriquequiserésol-

ventplussimplement,pourdesélèves,sansutili-

serd’algèbre.Onpourraitàcesujetexaminerles

testsproposésauxélèvesdehuitième.Pourma

part,j’aifaitl’exerciceàpartird’unmanueld’al-

gèbre3.Surlesquarante-huitpremiersproblè-

mesdes«Rudimentsdel’algèbre»,trente-cinq

peuventserésoudrepardesméthodessouvent

plussimplesquelecalculalgébrique;plussim-

plespourl’élèvetoutaumoins,sachantl’in-

vestissementàconsentirpourpasserauniveau

d’abstractionsupérieurqueconstituel’algèbre.

Faut-ildèslorss’étonnerquepourbonnom-

bred’élèves,ycomprisdanslavoieconduisant

auxétudeslongues,l’algèbrenedevienneja-

maisunlangageutilisable?Faut-ils’étonner

quelesprofsdegymnasesseplaignentd’une

incompétencegravedeleursélèvesàeffectuer

desopérationsélémentairesdecalcullittéral4?

Cesdeuxexemplessontpeut-êtreunpeucari-

caturaux.Ilssontpourtantàlafoisauthentiques

etrécurrents.Ilnes’agitpasicid’affirmerque

touteslesnotionsmathématiquespeuventêtre

présentéessouslejourd’outilsquisimplifientla

vie.Ilresteparfoisnécessaired’apprendreune

techniquedontlavéritableutiliténeseravisible

queplustard.Ceseraitparexemplelecasdu

calculfractionnairequi,dansnotreculturedéci-

male,n’apporteguèredesimplification,maisqu’il

fautmaîtriserdansledomainenumériqueavant

del’utiliserdanslechamplittéral.Cependantilest

souhaitableden’utiliserl’argumentce sera utile

plus tardqu’endernièreextrémitéetd’expliquer

lepluspossiblequandetcommentlaconnaissan-

ceenquestionprendratoutesasignification.

Nombreusessontlesinjonctionsquiincitent

lesenseignantsàprésenterlesnotionsetoutils

mathématiquesdansl’optiquepréconiséepar

Charnay.Ellessemblentvenirtantdelarecher-

cheendidactiquedesmathématiques5que

delaformationinitialeetcontinuedesensei-

gnants.Maisellessontaussitrèsprésentesdans

lesplansd’étudesetdanslesméthodologiesac-

compagnantlesmoyensd’enseignement.Quel-

quescitations:

« A l’école, l’élève apprend les mathématiques

lorsque le maître le met en situation de déve-

lopper ses multiples facultés pour vivre toutes

les phases d’une activité de recherche et engen-

drer ainsi les attitudes qu’exige une démarche

scientifique. » 6

«L’action finalisée est source et critère du sa-

voir […]. Les techniques, notions ou outils parti-

culiers se construisent au cours des périodes de

recherche, où leur utilisation se révèle fonction-

nellement nécessaire.» 7

«On se propose maintenant de poser des

questions avant que d’avoir enseigné la manière

d’y répondre […] d’attendre le moment où [les

connaissances] se révèlent nécessaires, où elles

deviennent fonctionnelles, où elles prennent du

sens.» 8

Pourtantforceestdeconstaterquecesinjonc-

tionsconvergentesnesontdeloinpastoujours

suiviesparlesenseignantesetlesenseignants

dansleurspratiquesquotidiennesetquelesno-

tionssontsouventintroduiteshorsdespériodes

derechercheoùleurutilisationserévèlefonc-

tionnellementnécessaire.Cebrefarticlenepeut

évidemmentpasexplorerlesraisonsdecettedif-

ficultéd’implantation.Notonstoutefoisqu’on

entendsouvent,delapartdesenseignants,le

reprocheque«cettemanièred’enseignerest

tropcompliquée»ouencoreque«cejargonde

pédagogueesttropcompliqué».Onsetrouve

ainsidevantleparadoxed’untyped’enseigne-

mentquiveutquelesmathématiquesapparais-

sentàl’élèvecommeunoutilde«simplification

delaviedel’élève»,maisquiseprésenteaux

enseignantscommeunfacteurdecomplication

deleurenseignement.Ceparadoxeinterpelle

didacticiens,formateursetauteursdemoyens

d’enseignement.Sapriseencompteestnécessai-

reàunevéritableimplantationdesréformesen

coursdansl’enseignementdesmathématiques.

L’implantationdecesréformesestd’autant

plusdifficileque,pourbeaucoupd’enseignants,

deparents,maisaussid’élèves,l’applicationmé-

caniquedetechniquesmathématiquesstandar-

diséesestlamanièrelaplusefficacedesimplifier

l’usagedesmathématiques.Cetteopinionest

souventfondéesurl’observationdesrésultats

àcourttermeetleschercheurseux-mêmessont

loind’êtreunanimes.Faceàl’injonctiond’étu-

diantesetd’étudiants:«maisdites-nous,quelle

est,selonlarecherche,laméthoded’enseigne-

mentdesmathématiqueslaplusefficace»,je

suisobligé,entantqueformateur,derappe-

lerlarelativitédescritèresd’efficacitédansles

recherches.J’insisteégalementsurlanécessité

pourunenseignantdeposséderdanssabesace

unegrandevariétéd’outilsafindepouvoir

choisirleplusappropriépourenseignertelle

notionàtelleclasse,celuiquiauralameilleure

efficacitépourunesituationdonnée.Cenesera

pasforcémentl’approchepédagogiqueoudi-

dactiquelaplussimple,ceneserapasforcé-

mentcellequipermettraauxélèvesd’obtenir

àcourttermelesmeilleursrésultatsdansune

épreuvecommune,maiscedevraitêtrecellequi

permettralemieuxauxélèvesd’acquérirdes

connaissancesmobilisablesdanslasuitedeleur

«viemathématique»,cellequileurpermettra

defairedesmathématiques,d’apprendreles

mathématiques.

C’estpeut-êtrelerôledeladidactiquedes

mathématiques,commelesouligneBrousseau:

« Une des fonctions de la didactique pour-

rait être alors […] de contribuer à mettre un

frein, enfin, à un processus qui consiste à trans-

former le savoir en algorithmes utilisables par

des robots ou des humains sous-employés et à

diminuer la part de réflexion noble dans tou-

tes les activités humaines pour en faire dévolu-

tion à quelques-uns. Pour sacrifier au dieu de

la soi-disant efficacité, l’enseignement prête

son concours aujourd’hui à la réduction algo-

rithmique et à la démathématisation. J’espère

profondément que la didactique pourra com-

battre cette dépossession et cette déshumani-

sation. » 9

Ainsilesoucidel’introductiondeconnaissan-

cesmathématiquesenlienimmédiatavecleur

utilisationdanslarésolutiondeproblèmesper-

metdefaireserencontrerdeuxpréoccupations

souventconsidéréescommeantagonistes:celle

d’enseignerlesmathématiquessanssebornerà

larépétitiondefichesoud’exercicestechniques

etcelledefaireacquérirauxélèvesunevérita-

bleculturemathématique,pour«l’honneurde

l’esprithumain10».Rapprochercesdeuxpréoc-

cupations,c’estaussi,pourparaphraserChar-

nay,rapprocherlesmathématiquesscolairesdes

vraiesmathématiques!

stéphane Clivaz

professeur formateur à la HEP

et enseignant au secondaire I

1 Charnay,R.(1996).Pourquoi des mathématiques à l’école ?

Paris:ESFéd.,p.75.2 VoirparexempleGuedj,D.(2005). Zéro ou les cinq vies d’Aé-

mer : Roman.Paris:R.Laffont.3 L’excellentouvrageL’algèbre mode d’emploideGérard

CharrièreétaitutiliséenVSBjusqu’àl’arrivéedesnouveaux

moyensromandsMathématiques7-8-9.Lesproblèmesalgé-

briquessimplessontplacésdansunchapitre22intitulé«Les

rudimentsdel’algèbre».4 Voirdanscenumérol’article«TransitionsecondaireI-secon-

daireIIenmaths:undialogue».5 Voirparexempleleconceptdesituationadidactique,de

contratdidactique,demilieu,etc.danslathéoriedes

situationsdeGuyBrousseau.Unedéfinitionsimpledeces

conceptspeutsetrouverentreautresàl’adresse:

http://perso.orange.fr/daest/guy-brousseau/textes/Glossaire_

Brousseau.pdf6 PEV2006,CYP.7 Fondements2et4desConceptions d’ensemble de la collec-

tion Mathématiques 1P-4P,citésdansBrêchet,M.,Calame,

J.-A.,&Chastellain,M.(2003).«Structureetorganisation.»

In Mathématiques 7-8-9(pp.27-28).Lausanne:CIIP-LEP.8 Gagnebin,A.,Guignard,N.,&Jaquet,F.(1998).Apprentis-

sage et enseignement des mathématiques, commentaires

didactiques sur les moyens d’enseignement pour les degrés

1 à 4 de l’école primaire.Lausanne:Corome.9 Brousseau,G.(1989).«Utilitéetintérêtdeladidactiquepour

unprofesseurdecollège.»Petit X, 21,p.68.10 Dieudonné,J.A.(1987).Pour l’honneur de l’esprit humain :

Les mathématiques aujourd’hui.Paris:Hachette.

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase pourquoi les maThs à l'éCole ? pour simpliFier la vie ?

pris

mes

 / r

evu

e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 49

un grand merCi aux Trois élèves du gYmnase de nYon qui onT Bien voulu éCrire un peTiT moT sur leur véCu aveC les maThs! 

les maThs eT moi

Lesmathsetmoi,cen’estpastoujoursune

grandehistoired’amour,çaavanceplutôtpar

déclics.En7e,jenecomprenaisdécidémentpas

pourquoiunx2etunxnepouvaientpass’addi-

tionnerjusqu’àcequeleprofm’expliquelemême

exerciceavecdespommesetdespoiresetquece

soitl’illumination.Ensuitevintlamiseenéviden-

ce(mêmeaveclespommesetlespoires,onpeut

mettrelatigeenévidence),puisdescalculsplus

compliqués,leséquationsparamétriquesetcom-

pagnie.Lesparamètres,c’étaitencoreunautre

problème.Déjàquelesxfaisaientpeur,onsere-

trouvaitmaintenantavecdesa,desboumême

desm.Seulement,auboutdequelqueslignesde

calculsontombaitparfoissurunefractionénorme

oùtouts’annulaitetoùilnerestaitfinalement

qu’unchiffre(quicorrespondaitavecunpeude

chanceàceluiécritàlafindulivredanslesso-

lutionsauxexercices)etça,c’étaitgénial.Mais

puisqu’enmathsquandiln’yenaplus,ilyena

(toujours)encore,onrajoutaitàtoutcelaunpeu

detrigo,desπetj’enpasse.Aufildutempson

serendcomptequetoutcequel’onaapprisse

rejoint,quetoutesceschosesabstraitesforment

bienquelquechosesionaunevued’ensemble.

Là,jepensaisavoirunepetiteidéedecequesont

lesmaths…jusqu’àcequ’arrivel’algèbrelinéaire,

sorted’OVNIdanslepaysage,oùl’onpasse15

minadémontrerque1·u=u.Çafaisaitlong-

tempsquejenem’étaispasretrouvéefaceàun

sujetquineressembleàrien,oùtoutcequipa-

raîtlogiquenel’estplus.Aprèsunebonnedose

destressavantletest,lefameuxdéclicestenfin

arrivéetcettealgèbrequimeparaissaitinsurmon-

tablen’estpeut-êtrepasdevenueévidente,mais

entoutcascompréhensible.Jen’airiendeparti-

culiercontrelesmaths:àpartirdecemoment-là,

c’estbien,maisjusqu’audéclic,c’estduretilfaut

parfoiss’accrocheretpasseruneheureànerien

réussirpourfinalementcomprendre.C’estparfois

décourageant,maisfranchement,quandleprof

donnelerésultatdelaracinede243encomp-

tantsurlesdoigtspendantqueles16autresélè-

vesmettentplusdetempsàtapoterlecalculsur

leurmachineàcalculer,ilfautdirequeçadonne

quandmêmeenvied’aimerlesmaths.

virginie uhlmann

Lesmathématiquesetmoi,çafait10.Enfait,

jesuissilamentablequej’ajouteraisencoreune

fois10.C’est-à-dire1000...

Beaucoupdegensdemonentouragepen-

sentquemeslacunesenmathsvontmenuire

unjour.

Aucontraire!Chaquepersonneabesoin,pour

sonbien-êtreoupoursasérénitédetrouverun

peudetempspourméditer.Maisdansnotre

société,faitedestress,peudegensontencore

cettechance.Ehbienmoi,oui!Grâceauxma-

thématiques!Troisfoisparsemaine,durantmes

coursdemaths,j’ailetempsdepenseràtoutes

sortesdechoses;àmavie,àmonavenir,àmes

enviesmaisaussiaufonctionnementduméta-

bolismedelafourmirougeounoire(carilest

trèsdifférent)ousurlafindel’humanité.Enfin,

touteslesquestionsexistentielles.Etcelapen-

dantquemescamaradesdeclassesecassentla

têtepourmultiplierouadditionnerdeslettres...

Nonmais,c’estn’importequoi!Commentpeut-

onéprouverunintérêtpourdeschosesaussi

subjectives,irréellesetsurtoutinutiles!

Etlorsquel’onal’audacedeposerauxprofes-

seurslafameusequestionqu’ilsdétestenttous:

«çanousserviraàquoi?»,ceux-cinousrépon-

dent,sansrire,quecelanousaiderasil’onveut

construireunpont.

Etbien,moi,assiseaufonddelaclasse,je

ricane,carmonavenirest,grâceàcesirrempla-

çablescoursdemaths,déjàbiendéfini:avecces

lettresquevous,vousmultipliez,moijeferai

despoèmesetdurantmontempslibre,j’étu-

dierailesfourmisrouges!

lucile Franz

25janvier2004.Jesuisfaceàlafeuilled’ins-

criptionaugymnasedeNyon.Onmedemande

dechoisir,denoircirdespetitescases.Jem’ar-

rêtedevantl’uned’elle,ellemedonnel’occasion

demepousseràtravaillerdur.Jeveuxvoirce

quec’est,essayer.Alors,enpensantàsurpasser

manaturefainéanteet,sanspenserauxautres

matièresquiallaientmedonnerdufilàretordre,

j’aicochélacasefatidique.Ilétaittardlesoir,et

naïvement,jel’admets,jevenaisdem’inscrire

enmaths renforcées.

Pourcertains,cettedécisionéquivaudraitàun

suicidescolairemaisdansmoncas,celaressem-

blaitplutôtàundéfi.N’oublionspasquecette

époqueétaitmarquéeparDame Innocence ;je

n’avaisque15ansetpourmoiunradianétait

unrongeur.

Letempsaidant,jemesuislaisséefascinerpar

ununiversderigueuretderationalité.Avecun

soinrelatif(carl’onnepeutsedéfairedupéché

deParessesiaisément),j’aiassimilélesrèglesqui

régissentlemondedel’Abstrait.Aufildescours,

jemesuisaventuréed’unpasparfoischancelant

deplusenplusloindanslalogique,larationa-

litéetmêmequelquefois,dansl’irrationalité.

Souvent,deséclairsdecompréhensionbrefset

vifsmefoudroientet,danscesinstants,jetou-

cheauplaisirsiparticulierdel’apprentissage:le

nirvanadelaBonne Réponse.

Troisansaprès«lacochefatidique»,ladistan-

cequimeséparedel’arrivéetendvers0.Mon

périplemathématiquetouchebientôtàsafinet

monannéescolaireaussi.Lesquestionssubsis-

tentmaisjesaisqu’ilmeresteencorebeaucoup

àapprendre,àdémontreretàcalculer.Malgré

tout,unequestionm’obsèdeplusquelesautres:

àquoiressembleunradianencage?

lilly Khamsy

3e année maturité, Gymnase de Nyon

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase les maThs eT moi

pris

mes

 / r

evu

e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 5�

le TexTe qui suiT aBorde la quesTion de la TransiTion enTre le seCondaire i eT le seCondaire ii.  prismes a déJà TraiTé CeTTe ThémaTique dans son premier numéro. nous avions alors mis en évidenCe Trois pôles essenTiels TYpiques des siTuaTions de TransiTion en milieux sColaires: les aspeCTs relaTion-nels, le Cadre soCial eT les quesTions liées à la didaCTique. C’esT ClairemenT dans le Champ de Ce Troi-sième poinT que les deux auTeurs de CeT arTiCle s’inTerrogenT sur la TransiTion en maThémaTiques. sTéphane Clivaz eT miChel deruaz sonT enseignanTs eT FormaTeurs à la hep vaud. le premier Forme à l’enseignemenT des maThs au seCondaire i eT enseigne au Collège de l’elYsée. le seCond donne des Cours de didaCTique des maThémaTiques au seCondaire ii eT enseigne au gYmnase de nYon. ils parTa-genT le même Bureau à la hep eT CeTTe proximiTé esT l’oCCasion de nomBreux dialogues au suJeT de la TransiTion en maThémaTiques. le TexTe qui suiT esT une reConsTiTuTion, inéviTaBlemenT réduCTriCe, d’une de Ces ConversaTions. CeT arTiCle, par sa Forme vivanTe, esT un momenT de réFlexion sur CeTTe quesTion, qui, nous l’espérons, sera suivi par d’auTres approFondissemenTs.

TransiTion seCondaire i – seCondaire ii en maThs : un dialogue

Michel Deruaz–Leniveaubaisse,cetteaffir-

mationestvieillecommelemondeoupresque.

Onpeutprobablementlafairecoïncideravecles

débutsdel’enseignementpuisqu’onlaretrouve

déjàchezPlaton.Jesuisdoncbienconscient

quesijeveuxdiscourirdanscettedirection,il

mefaudraunpeuargumenterpourquel’on

m’écoute.Depuisquelquesannées,certains

gymnasesfontpasserauxélèvesquiarrivent

enpremièreannéeuntest1pourévaluerleur

niveau.Alalecturedesrésultatsdecetest,les

impressionsquej’aienclassesontvérifiées;un

certainnombred’élèvesarrivesanspeineàré-

pondreauxquestionposées.Jeregrettemême,

pourunepartied’entreeux,qu’ilssetrouvent

enniveaustandard,ilsprogresseraientcertaine-

mentmieuxenniveaurenforcé,plusstimulant

pourceuxquiontdelafacilité.Malheureuse-

mentd’autres,tropnombreuxpourquel’on

n’enparlepasetpourlesquelsjem’inquiète

beaucoup,ontdegrandesdifficultéslorsqu’ils

doiventrésoudredesexercicesquifontinter-

venirunpetitpeudecalculalgébrique.Lesexi-

gencesminimalesont-ellesbaissésurcespoints

précisausecondaireI?

Stéphane Clivaz–SansremonteràPlaton,je

saisque,lorsdemapremièreséancedecoordi-

nationentrecollègeetgymnaseilyapresque

quinzeans,cetypedeconstatationsétaitdéjà

àl’ordredujour…Deplus,encequiconcerne

lepland’étudesdusecondaireI,lesexigences

n’ontpasbaissé.Certeslasectionscientifique

adisparu,cen’estd’ailleurspasunedécision

dusecondaireI,maispourlecoursde baseles

compétencesàacquérirenfindeneuvièmesont

sensiblementlesmêmesqu’en1991.Ainsi,situ

leveuxbien,parlonsplutôtd’unniveauquise-

raitinsuffisantplutôtqued’unniveauquibaisse.

Prenonsquelquesexemplesafindevoirsimes

impressionsdefindeneuvièmecorrespondentà

tesobservationsdedébutdusecondaireII.Cela

nouspermettrapeut-êtredemieuxcomprendre

certainsécartsetdetravailleràlescombler…

Michel Deruaz–Pourcommencer,cen’est

malheureusementpasparcequeleniveaubais-

saitdéjàilyaunequinzained’annéesqu’ilne

peutplusbaisseraujourd’hui!Silesexigences

n’ontpasbaisséausecondaireI,commentex-

pliques-tulesrésultatsquisuivent.Lorsdutest

quenousavonsfaitpasserdansdesclassesde

premièreannéedel’écoledeMaturité,nousar-

rivonsàuntauxderéussitemoyeninférieurà

50%pourleséquationsquisuivent:

4x+5=x-1

x(3x -6)=0

x2+4x+4=0

x2-2x=3

Jepensequetuconviendrasvolontiersavec

moiqu’ilestdifficiled’atteindrelesobjectifs

duprogrammeavecdesélèvesquiontdetelles

difficultésquiexistentdepuislongtemps,c’est

vrai.Cequiestinquiétant,c’estleurfréquence

quimesembledeplusenplusélevée!

Stéphane Clivaz–Bigre!Jepensequetout

profde9VSBobtenantdetelsrésultatsserait

complètementcatastrophé!Detelleséquations

sontdesélémentsdebasedela8-9VSB.Jecite

lePEV2:Résoudre une équation du premier

degré (8VSG-VSB, 9VSO), du deuxième degré

(9VSG-VSB).

Demême,jepourraisciterbeaucoupd’exer-

cicespermettantdetravaillercescompétences

danslesnouveauxmoyensd’enseignementro-

mandsMathématiques 7-8-9 3.Alors,comment

expliquerdetelsrésultatsqui,effectivementin-

terrogentlesecondaireI?Ilmesembled’abord

qu’ilestaujourd’huiplusfaciled’obtenirson

 -x + y = 33x - y = -5

certificatenayantpresquecomplètementlaissé

tomberunediscipline.Unepartiedesélèvesqui

reçoiventleurcertificatontdéjà,àcemoment-

là,desrésultatsinsuffisantsenmaths.Contrai-

rementàcequisepassaitaudébutd’EVM,on

peutobtenirautomatiquementsoncertificat,

mêmeavecun1,75demaths!Onapeut-être

vouluainsidiminuerlenombrederedouble-

ments,maissansinstituerdesmesuresd’aide

immédiatesetmassivespourlesélèvesendif-

ficultédansunediscipline.Cesconstatations

n’expliquentprobablementpastout.

Ilyavisiblementunedéperditionentrelafin

dela9eetledébutdugymnase.L’effet vacances

peutcertainementêtreinvoqué,maissicesno-

tionssemblentacquisesenfinde9e,etqu’elles

nesontplusspontanémentmobilisablestrois

moisplustard,celametencauselasoliditéde

leuracquisitionenfinde9e!Ilyadoncungros

travailàrevoirpourvéritablementatteindreles

objectifsduPEV!Auvudesquelquesobserva-

tionsquej’aipufaire,jenepensepasquele

calculalgébriquenesoitpasassezentraîné.Par

contreiln’estprobablementpasassezutilisé

etlesélèvesmanquentdereculsurcetoutilen

arrivantaugymnase.

Michel Deruaz–Jepeuxbienentendrece

dernierargumentpourlecalculalgébrique,

maislesrésultatssontanaloguesenobservant

d’autreschapitresquisonteuxtravaillésdepuis

la7e.Parexemple,pourlecalculavecdesfrac-

tions,lorsdumêmetestnousavonsobservéun

tauxderéussitemoyend’àpeine50%auxques-

tionsci-dessouspourtantélémentaires:

Stéphane Clivaz–Là,jesuispresquemoins

surpris.Lesfractionssontunsujetdélicatàfaire

passer,ouplusprécisémentunenotiondifficile

àimplanterdurablementchezlesélèves.Dans

notrecultureeuropéennecontinentale, le

calculfractionnaireestpeuutiliséauquotidien.

Lareprésentationdécimaleestsuffisantepour

presquetouslesusages.Ainsi,lorsqu’en7eles

fractionssontvéritablementétudiées,etque

surtoutoneffectuedesopérations,onobserve

desobstacleschezlesélèves.Maisonremarque

surtoutdegrandesdifficultésdanslesmoyens

d’enseignementetpourleursutilisateursàtrou-

verdessituationsdanslesquellescesopérations

aveclesfractionspuissentêtrevraimentutilisées

etentraînées.Defait,laplupartdutemps,onse

borneàdessériesd’exercicesdedrilletàquel-

quespetitsproblèmesdanslesquelsl’utilisation

desfractionsn’apastoujoursbeaucoupdesens.

Decettemanière,lesélèvessontcertescapables

d’effectuerenfindechapitrelescalculsquetu

mentionnes.Néanmoins,ilestindispensable

d’effectuerunbrefrappelàchaqueréappari-

tionducalculfractionnaire.Jediraismêmeque,

pourcequiconcernelesecondaireI,onpourrait

presquesepasserdesfractions!

Michel Deruaz–Jem’enrendsbiencompte.

Jesoupçonnemêmequedanscertainescircons-

tances,parsoucid’efficacitéàcourtterme,on

secontente,pourcetypedechapitre,tantau

secondaireIqu’ausecondaireII,demoinsque

leminimum.Deplus,l’introductiondelacalcu-

latricearendulecalculàl’aidedesdécimaux

plusconvivial.Lesfractionsontainsiperduleur

attractivitépourlecalculnumérique.C’estpeut-

êtreaussilemomentdesignalerque,silesla-

cunesaveclecalculdesfractionsdatentdéjàde

quelquesannées,nousobservonsaujourd’hui

desdifficultésàmanipulerlesnombresnégatifs,

surtoutlorsqu’ilfautlessubstitueràunelettre.

L’ordredesopérationsn’estalorspasmaîtrisé

etpeut-êtrequelesanciensmodèlesdecalcu-

latricesnesontpastotalementétrangersàces

difficultés.Jepense,maisjereconnaisquecela

nedoitpastoujoursêtrefacile,qu’ilestdela

responsabilitédusecondaireIdetravaillerdans

uneperspectiveàlongterme.Decepointde

vue,etpourenrevenirauxfractions,onima-

ginefacilementquellespeuventêtrelesdifficul-

tésd’unélèvequinemaîtrisepaslesfractions

numériqueslorsqu’ildoitpasserauxfractions

littérales.Ilmesemble,parexemple,etsans

vouloirdonnerdeleçons,quel’onpeutmain-

teniréveillélecalculaveclesfractions,enen

introduisantdanslesexercicesquiconcernent

d’autreschapitrescomme,parexemple,lecalcul

algébriquedontnousvenonsdeparler.Après

unepremièrephased’introductiondesconcepts

etdesformulesquileursontassociés,ilmepa-

raîttoutàfaitenvisageabledeglisserquelques

cœfficientsfractionnairesdanslesénoncés.

Stéphane Clivaz–Jesuisdetonavissurlefait

dereprendreplusieursfoisunmêmesujet,même

sic’estparfoisquelquepeuartificiel,quecesoit

pourl’entraîner,commepourlecalculfraction-

naire,oupourledévelopper,commedanslecas

desformulesdecalcullittéral.C’estd’ailleursce

quiestdemandéparlepland’étudesetcequi

estpermisparlesmoyensd’enseignementMa-

thématiques 7-8-9.Cesouvragessuiventl’élève

duranttroisansetpermettentderevenirplu-

sieursfoissurunmêmeproblèmeavecdesoutils

deplusenplusperformants,desoutilsquiper-

mettentderésoudreceproblèmedeplusenplus

simplement.C’estégalementlecasengéométrie

oùl’onpassedelaconstructiondefiguresàla

descriptiondeleurspropriétésetàlaconstruc-

tionderaisonnementsetdedémonstrations,en

particulierdansunesériedeproblèmesintitulée

«del’observationàladéduction».

Michel Deruaz–Cesujetestdélicat.Ilfaut

faireattentionànepasréduireladémonstra-

tionàl’énumérationd’unesuited’arguments

observéssurunefigureouailleurs.Pourdé-

montrer,ilfautêtrecapabled’isolerdeshypo-

thèsesetuneconclusionetdereconstruirele

cheminementdéductifquipermetdepasser

deceshypothèsesàcetteconclusion.Ils’agit

làdel’essencemêmedesmathématiques.Ilne

suffitpasderenverserlaboîtedupuzzlesur

latableetd’alignerlespiècessurcelle-cipour

êtreconsidérécommeunexpertenpuzzle!Des

cheminementsdecetypepeuventalorsêtreuti-

lisésparlesélèvesdansd’autrescontextes.C’est

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase TransiTion seCondaire i – seCondaire ii en maThs : un dialogue

pris

mes

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e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 53

possiblebienévidemmentdanslecoursdema-

thématiques,parexemplepourmettreenplace

desstratégiesefficacesetsystématiquespour

résoudredesproblèmes,maisaussietsurtout

horsducontextemathématiquepourtenirun

discoursargumentatifcohérent,quecesoità

l’écoleouàl’extérieurdecelle-ci.

Stéphane Clivaz–Ilyalàunévidentchan-

gementdansl’enseignementdelagéométrie

hypothético-déductive.Cecisemarqueenpar-

ticulierdanslerenouvellementdesmanuelsde

géométrie.Laconstructionaxiomatiquetentée

àl’époquedel’usagedulivredeDelessert4n’est

plusfaiteaujourd’hui.Nousavonsconstaté

quelesélèvesavaientdegrossesdifficultésà

observerlespropriétésd’unefigureavantde

construireunevéritabledémonstration,ou,pour

utilisertacomparaison,àrecueillirlespiècesdu

puzzleavantdelereconstituer.C’estlaraison

pourlaquellenousmettonsbeaucoupd’atten-

tionàconstruirecepassagedel’observationà

ladéduction,enparticulierenfaisantdécouvrir

despropriétésnonévidentesetpouvantdon-

nerl’occasiond’undébat,d’uneargumentation.

Celle-cidoitdevenirdeplusenplusélaborée.

Cecisefaitsoitsurdesdémonstrationsassezsim-

ples(trianglesisométriques,trianglessemblables,

théorèmesmétriques),soitsurdespreuvesplus

complexes(doubledémonstrationdelieuxgéo-

métriquesenoptionspécifiquemaths-physique).

Jetiensd’ailleursàsignalerquedesactivitésde

cetypesontégalementprésentesausecondaireI

dansledomainenumériqueoualgébrique!

Michel Deruaz–Personnellement,jeregret-

tecettemutation.J’entendsvolontiersqueles

méthodesaxiomatiquesduDelessertn’étaient

accessiblesqu’àuntroppetitnombred’élèves

maisjesuisconvaincuque,surlefond,ladé-

marcheétaitlabonnepourdesélèvesàpartir

de13-14ans,enl’allégeantbienévidemment.

D’autrepart,ilnefautpasoublierqu’enma-

thématiques,leproblèmeoulecontexten’est

souventqueleprétextepourtravaillerladé-

marche.C’étaitlecasaveclagéométrieaxioma-

tiquedontbeaucoupn’ontpasvouluadmettre

l’importancepourlaformationdel’espritscien-

tifiqueenraillantcertainsthéorèmesinutilesou

évidentsquel’ons’évertuaitàdémontrer.C’est

aussilecasavecl’étudedeséquationsparamé-

triquesqui,bienqueleurutilitédirectesoit

discutable,ontunrôleformateuressentielau

niveaudeladémarchescientifiquequ’ellesper-

mettentdetravailler.

Stéphane Clivaz–Lechoixaeffectivement

étéfaitdetravaillerleraisonnementdéductif

deplusieursmanières:activitésderecherche,

débatsentreélèves,constructionsdedémons-

trations…Cecidoitsefairedansplusieursdo-

mainesetavectouslesélèves,aumieuxdespos-

sibilitésdechaquegroupe.Celaditnousdevons

donnerauxélèveslesplusavancéslapossibilité

d’allerencoreplusloindansledéveloppement

deleurcapacitéderaisonnement.Celaestfait

d’unepart,commejelementionnais,enoption

spécifiquesurleslieuxgéométriquesousurles

équationsparamétriques.Celadevraitêtrefait

d’autrepartendifférenciantlesactivitéspropo-

séesetenpoussantcertainsélèvesàallerplus

loindanslarigueurdel’argumentation.Ace

proposlesmoyens7-8-9ecomprennentplu-

sieursactivitéstrèsstimulantes.

Cependantcettegestiondifférenciéedel’en-

seignement,enparticulierpourlesélèveslesplus

demandeurs,estd’uneutilisationcomplexe!

Defait,j’aibeaucoupréponduàtesremarques

eninvoquantlescontenusdupland’étudesetdes

moyensd’enseignement,alorsqu’enfait,cequi

importec’estcequisepasseeffectivementdans

lesclasses!Leproblème,c’estquenousavons

fortpeud’informationsàcesujet.Lesuiviscien-

tifiquedel’introductiondesnouveauxmoyens5

s’estarrêtépourl’heureen4e.Ilmesembledonc

indispensablequedesrecherchessoientcondui-

tespoursavoircommentlesmathématiquessont

enseignéesdanslesdegréssuivants.

Michel Deruaz–Jenepeuxquepartagerton

avissurcedernierpoint,ausecondaireIcomme

ausecondaireII.Jepensequelesrésultatsd’une

tellerecherchenouspermettraient,ànous,for-

mateurs,demieuxpréparernosétudiantsàce

quilesattendsurleterrain.Ilfauttoutefoisêtre

attentifàunechose:sil’onveutquecettedémar-

chesoitcompriseetacceptéeparlesenseignants,

doncutileetutilisable,ilnefautenaucuncas

qu’ellepuisseêtreconfondueavecunquelcon-

queprocessusdecontrôle,peut-êtreluiaussiné-

cessairemaisfondamentalementdifférenttant

danssonapprochequedanssesobjectifs.

Stéphane Clivaz–Pourconclure,ilsemblerait

doncquenoussoyonsd’accordssurlesobjectifs

àatteindre,surl’étatinsatisfaisantdelasitua-

tionetsurlescausesstructurelles.

Michel Deruaz–Nouscommençonsparcontre

àdivergersurcellesquisontpropresàl’ensei-

gnementdesmathématiques,etdoncsurles

remèdes.Cen’estqu’enconnaissantmieuxles

pratiquesenclasses,ainsiqu’enencourageantle

dialogueentrelesdiversacteurs,qu’onpourra

améliorerlasituationactuelle.Parexemple,le

gymnasedeNyon,commed’autres,organiseré-

gulièrementdesrencontresdécentraliséesentre

maîtresdemathsdelarégion.Detellesrencon-

trespourraientdébouchersurlaconstitutionde

véritablesgroupesdetravail…

stéphane Clivaz

Professeur formateur à la HEP et

enseignant au secondaire I

michel deruaz

Professeur formateur à la HEP et

enseignant au secondaire II

1 Untestd’entréeesteffectuédanscertainsgymnasespour

évaluerlescompétencestechniquesdesélèvesenmathé-

matiquesendébutdepremièreannée.Ilalieu,enprincipe

danstouteslesclasses,lorsdelapremièresemainedecours,

sansêtreannoncé.Ilestensuitecorrigéetrenduauxélèves.

Cetestpermetdoncauxélèvesdeprendreconsciencede

lanécessitééventuelledecomblerleurslacunes,parexem-

plelorsdecoursd’appuisfacultatifsproposésparcertains

gymnases.Ilpermetaussiauxmaîtresdereprendrecertains

chapitres.Cetestnecomptedoncpasdanslamoyennede

l’élève,iln’estquetrèspartiellementreprésentatifdupro-

grammedusecondaireIetdusecondaireII.Ilneprétendpas

nonplusêtreunemesurescientifiqueduniveaudesélèves,

toutefoisilrévèlecertainssymptômesdontnousdiscutons

icietqu’ilseraitsouhaitabled’étudierplusfinement.2 Pland’édudesvaudois.(2006)DFJ/DGEO.disponiblesur

http://www.vd.ch/fr/themes/formation/scolarite-obligatoire/

plan-detude-vaudois/partie7-9,15.5.3 Brêchet,M.,Calame,J.-A.,&Chastellain,M.(2003).Mathé-

matiques 7-8-9.Lausanne:CIIP-LEP4 Delessert,A.(1960).Géométrie plane.Lausanne:SPES.5 Voirl’articledeChantalTiècheChristinatdanscenumérode

Prismes.

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase eT Chez vous les maThs, ça va CommenT ?

eT Chez vous les maThs, ça va CommenT ?apporTs eT quesTions issus des Travaux de reCherChe ConCernanT les moYens romands d’enseignemenT des maThémaTiques de pre-mière à quaTrième année primaire

Commechercheureensciencesdel’éducation,

jesuisfréquemmentconfrontéeàcettequestion

poséeentitrelorsderéunionsnationalesvoire

internationales,touchantàl’enseignement.In-

variablementlesréponsesquej’yapportesont

multiples,diverses,etjechoisisdeporterl’ac-

centsurlesélèves,surlemaîtreousurlemoyen

d’enseignement,affichanttantôtpessimisme,

tantôtoptimisme.Monhumeurpersonnelle

n’estpourriendanslavalsed’hésitationsvoire

danslescontradictionsquicaractérisentmesré-

ponses.Eneffet,cettedisparitéapparenteprend

sasourcedanslesdeuxétudesscientifiques,ri-

chesenenseignements,menéesparl’Institutde

rechercheetdedocumentationpédagogique

(IRDP)àNeuchâteletdontj’aimeraisfairepar-

tagerladiversité.Maisavantdecomposercet

inventaire,jevaispasserrapidementenrevue

quelquesélémentsrelatifsaucontenuetaux

fondementsdel’enseignementactuel.

le contenu de l’enseignement en bref

Danslescantonsromands,lafindu20esiècle

acoïncidéaveclacréationdedeuxgénérations

demanuels,lespremiersdestinésauxdegréspri-

mairesdelapremièreàlaquatrièmeannéeetles

secondsdestinésausecondaireI,delaseptième

àlaneuvièmeannée,ainsiqu’autoilettagedes

manuelsdelacinquièmeetdelasixièmeannée.

Eneffet,danslesannées1990,lesinstancespoli-

tiques,professionnellesetscientifiques,enraison

del’obsolescencedesmanuelsd’enseignement,

ontconviéchercheurs,mathématiciens,didacti-

ciensetenseignantsàœuvrerdansl’interdisci-

plinaritépourcréerunmatérield’enseignement

quiprenneencomptelestravauxrécentspubliés

danscedomaine(C.TiècheChristinat,1999).Les

modificationsetlesnouveautésintroduitesdans

lesmoyensd’enseignementdesdegrésprimai-

ress’effectuentsurtroisplans:lecontenuma-

thématique,lathéoriedel’apprentissageetla

didactiquedesmathématiques.

Misàpartl’abandondel’enseignementdes

mathématiquesfondésurlathéorieensembliste,

àlasuiteduconstatd’unprocessustranspositif

tropimportantetd’unchapitretrèscontroversé

portantsurlanumérationenbasesdifférentes

de10,lecontenumathématiqueduprogramme

estquantàluipresqueinchangé.Lesaspects

numériques,commel’étudedunombreetdu

champconceptuel,del’additionetdelamul-

tiplication,restentcentraux;lesaspectsliésàla

mesure,àl’espaceetauxformesgéométriques

acquièrentunpoidsplusimportantqu’aupara-

vant.

Lesoptionspédagogiquess’inscriventdansla

continuitédesapprentissagesconstructivistes

précédemmentmisenplaceautourdel’action,

del’erreuretdeladifférenciation,ets’enrichis-

sentd’uneorientationsocioconstructivisted’ins-

pirationvygostkienne1,soulignantl’importance

delamédiationverbaleetdelaconstruction

socialedanstoutapprentissagecognitifvisantà

lamaîtrisedeconceptsscientifiques(Vergnaud,

1999).Leurapplicationenclassenécessiteun

travaildegroupesetdonneàlaparoleetaux

interactionslangagièresentrepairsunaspect

primordial.

Leslignesdirectricesdel’approchedel’en-

seignement/apprentissagedesmathématiques

seréfèrentauxtravauxrécentsdesdidacticiens

français(CharnayetMante,1996;Vergnaud,

1991)quiaccordentàlarésolutiondeproblè-

mesunrôleessentieletincontournable.

Lesprincipesinscritsdanslaméthodologie

articulententreeux:

pris

mes

 / r

evu

e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 55

• lesfinalitésdel’enseignementdesmathéma-

tiques:acquérirdesdémarchesdepensée;

• lesdémarchesd’apprentissage:confronter

l’élèveàdessituationsproblèmesoùilren-

contredevéritablesobstaclesàsamesure;

• lesconceptsdedéveloppement:lapensée

mathématiques’élaborelonguement;

• lestechniquesderésolution.

L’ensembledecespropositionsrecouvreles

recommandationsofficiellesdescantonsen

matièred’enseignementdesmathématiques

(CDIP;1998).

Lathéoriedessituationsdidactiques(Brous-

seau,1996),dontnousretiendronsenparticulier

lesprincipesdedévolution et d’institutionnali-

sation 2,constituelefondementdel’innovation.

Ladévolutionestl’acteparlequell’enseignant

parvientàamenerl’élèveàprendrelarespon-

sabilitéduproblèmeetdesarésolution(situa-

tionadidactique).CommelerappelleKusniak

(2005),ilexigeégalementdel’enseignantqu’il

excluedesesinterventionscellesquionttraità

lasolution.Ceprincipeengendreunesériede

règles,dontlescommentairesméthodologiques

quiaccompagnentlesmoyensd’enseignement

sefontpartiellementl’écho.SelonBrousseau,

l’institutionnalisationquiattribueàcertaines

connaissancesunstatutofficieldesavoir,est

indispensable,carelleassurelepassaged’une

connaissanceliéeaucontexteàuneconnais-

sancedétachéeducontexte.End’autrester-

mes,cedeuxièmeprincipepermetàl’élèvede

reconnaître«cequidoitêtreconsidérécomme

importantetcequiestsecondaire,cequ’ilest

décisifdesavoirfaireetcequiestaccessoire»

(Johsua&Dupin,1993,p.256).

Comment ça va ?

Enguisederéponseàcettequestionposée

dès1997,annéedel’introductionprogressive

danslesclassesdesmoyensd’enseignementac-

tuels,deuxévaluationsromandesportantsurles

quatrepremiersdegrésprimairesontvulejour

etontlivréleursanalysesetleursconclusions

en2003et2005.

1 Unsuivilongitudinalapourfonctiond’ap-

préhenderlesadaptationsentreprisesparles

enseignantsdansleursclasses(TiècheChristi-

natetDelémont,2005).Cetteétudesedécline

endeuxparties:uneobservationbiannuelle

deleçonsdemathématiquesdansdesclasses

desseptcantonsromandsetunerécoltediver-

sifiéedeproposportantsurl’innovationetses

conséquences(entretiensréguliers,question-

nairesremisauxenseignantsvisitésetdiscus-

sionsorientéesentrecollèguesd’unmême

établissement).Lesgestesprofessionnels,les

adaptationsintroduitesdanslapratique(acti-

vitésmathématiques,déroulementdesleçons,

organisationgénéraledutravail),ainsique

lesrenseignementscollectéssurlesattitudes

àpartirdesdiscoursdesenseignants,consti-

tuentlesdonnéesanalyséesparcetteétude.

2 Unbilandescompétencesenmathématiques

desélèvesaprès4annéesd’utilisationdes

moyens(2P:passationmai2002;4P:passa-

tionmai2004)estnomméMathéval(Anto-

nietti,2003et2005).Cetteenquêtecomporte

deuxvolets:desépreuvesmathématiques

établiespourdesélèvesde2Petde4Petun

questionnairedestinéauxmaîtresdesclasses

testées,afindemettreenévidencedesliens

plausiblesentrelescompétencesdesélèveset

lespratiquesdécritesparlesenseignants.

Lesdeuxrecherchesprennentencompteles

changementsdidactiquesintervenusdansl’en-

seignement/apprentissageetlesinterrogent.Il

s’ensuitdesitemsmathématiquesbaséssurla

résolutiondeproblèmes,mettantenœuvredes

champsétudiésetinscritsaupland’étudesainsi

quedescompétencestransversales.

Touteslesdonnéesobtenuessontrecueillies

surl’ensembleduterritoireromand;cellesdu

suivipermettentl’analysede197observations

enclassesdepremièreàquatrièmeannéespri-

mairesetd’entretiensuniquesourépétésde

58enseignants.L’échantillondeMathévalest

constituéde140classes.Chaquetitulairede

classearempliunquestionnairerelativement

similaireàceluiremisauxenseignantsdesclas-

sesobservéeslongitudinalementetquiporte

surlamiseenœuvredesmoyensd’enseigne-

ment.Endeuxièmeannéeprimaire,lesélèves

avaientseptproblèmesindividuelsetquatre

problèmesàrésoudreenduosetenquatrième

année,lesproblèmesétaientaunombrede14

parélève.Autotal,1912et2252épreuvesont

étéanalysées.

quelques résultats 

Lescompétencesobtenuesparlesélèvessont

révélatricesdel’étatdeleursconnaissancesin-

dividuellesquisontdépendantesdel’enseigne-

mentdispensédanslaclasse.Ellespermettent

d’évaluerl’intensitédel’influencedumoyen

d’enseignementutilisé.Maisils’agitégalement

d’observerd’autresfacteursdontnousavonsla

traceparlesdonnéesdesquestionnairesoupar

lesuivilongitudinaldanslesclasses.Parmiceux-

cinousretenonsenparticulierlesvariablesétu-

diéesdansMathévalquisemblentdéterminer

partiellementdumoinslesrésultats,ainsique

lesattitudesetlesgestesprofessionnelsadoptés

parlesenseignants.

des résultats intrigants…

Lesrésultatsdesélèvesdedeuxièmeetde

quatrièmeannéesprésententunetendance

opposée.Mathéval 2Ppermetd’affirmerque

lesconnaissancesnécessairesàlarésolution

desproblèmesrelevantdudomainenumérique

sontassimilées.Ainsi,dénombrerunecollection,

comparerdesnombresentiers,reconnaîtrela

valeurpositionnelledeschiffres,résoudredes

problèmessimplesenrecourantàdesécritures

additivesetsoustractivessontdescompétences

quelesenfantsenfindedeuxièmeannéeont

acquisesmajoritairement.Cesrésultatsdémon-

trentlesoinetl’attentionportésparlesmaîtres

etmaîtressesàcedomaineetauxconnaissan-

cesarithmétiques.Enfindequatrièmeannée,

lesélèvesobtiennentdesrésultatsfaiblesdans

ledomainenumériqueetparviennentdiffici-

lementàlarésolutioncorrecteetaboutiedes

problèmesposés.

Dansledomainedel’espace,lesrésultatsob-

tenusendeuxièmeannéesontnettementmoins

satisfaisantsqueceuxdudomainenumérique

alorsqu’enquatrièmeannée,lesconnaissances

nécessairesàlarésolutiondeproblèmesrelevant

dudomainedel’espacesontmobilisablespour

beaucoupd’élèves.Faut-ilyvoiruneffetliéau

typedeproblèmesposésdansl’évaluation,ce

quelaisseraientsupposerlesauteurslorsqu’ils

soulignent:«Ilestpossiblequelestâchesque

nousavonsproposéessoientplusendécalage

aveclesproblèmesdesnouveauxmoyensque

cellesquenousavonsutiliséespoursonderle

domainenumérique.»(Antonietti,2003,p.69)?

Ouserait-ceuneffetliéaumoyenlui-mêmeet

enparticulieràlaplanificationdesactivitéset

desmodules,ainsiqu’aunombred’activitéspré-

vues?Lesquestionnairesetlesentretiensportent

àpenserquelaplanificationdesenseignements

conformémentau«filrouge»conduitàn’abor-

derlescontenusliésàl’espaceetàlagéométrie

qu’aucoursdudeuxièmesemestredeladeuxiè-

meannée.Ainsi,lesélèvestestésendeuxième

annéeprimaireauraientmoinstravaillécetype

deproblèmes,peufamilierspoureux,etsese-

raientmoinsinvestisdanscedomaine.

… presque agaçants

Malgréunmoduleintitulé«desproblèmes

pourapprendreàconduireunraisonnement»,

dontlesenseignantsdetouslesdegrésdisent

apprécierlesactivités,desitemsquifontappel

àdesnotionsélémentairesdelogique,nesont

réussisquetrèsmoyennement,voiredanscer-

tainscasfaiblement.Parailleurs,laprogression

attenduedesrésultatsentre2Pet4Psetrouve

malmenéeparlesrésultatsdeMathéval 4P. Par-

milessixproblèmesquiontétéprésentésdans

lesdeuxépreuves,deuxitemsrelevantdudo-

mainedelalogiquepourlepremieretexigeant

unepartitionnumériquesimplepourledeuxiè-

menepermettentpasdeconstaterunprogrès

significatifnidanslaréussite,nidanslesprocé-

duresderésolution.Deplusunesituationpro-

blèmerelevantdel’additionconnaîtunechute

dutauxderéussiteenquatrièmeannée.Effet

decontratdidactique?manquedematuritéco-

gnitive?absenced’activitésdecetypedansles

classes?Silesdonnéesnepeuventapporterde

réponsesdéfinitivesàcesquestions,lesanalyses

qualitativesindiquenttoutefoisquelesélèves

posentdescalculsetqueleurssolutionssontin-

suffisammentsoutenuespardesreprésentations,

desdessinsoudesschémas.

Dansunautreregistre,Mathévalmontreque

ladifférencederéussiteentregarçonsetfilles

tendàs’installer.Endeuxièmeannée,cette

différencen’existaitpas,alorsquedèslaqua-

trième,lescompétencesdesgarçonss’avèrent

légèrementsupérieuresàcellesdesfilles.Onsait

parailleurs,grâceauxétudesdePISAauprèsdes

élèvesde15ans(CIIP,2003),quececlivages’ap-

profonditaucoursdelascolarité.Or,ilaurait

étésouhaitablequedesnouveauxmoyens,qui

plusestappréciésparlesmaîtresetlesélèves,

puissentveniràboutdececlivagedésormais

classiqueetpréoccupant.

des résultats inquiétants… 

Afind’évaluerl’atteintedesobjectifsinscrits

danslepland’études,etàdéfautd’unecompa-

raisonfiableavecd’anciennesdonnées,Mathé-

val aétablilorsdel’épreuvedestinéeauxélèves

de4Pun«seuildecompétence»,correspondant

auniveaudesélèvesayantatteintcequiest

nommédanslePlancadre« horizon de dévelop-

pement »(Antonietti,2005,p.108),conférant

ainsiuncaractèrenormatifàcetteétude.Ilfaut

précisercependantqueceseuilnecorrespond

pasauxattentesminimalesfixéesparlePlan

d’étudescadreromand,quidéterminentcequi

devraitêtreacquisparchaqueélève.

Lesrésultatsmontrentquelesobjectifsmi-

nimauxétablisparlesexpertssontatteintspar

seulementtroisélèvessurdix;letauxderéus-

sitefixéaumoyendesdocumentsofficielspar

lesjugesestainsiplusbasqu’espéré.Lasévérité

desjugesquiontprocédéàdeuxestimations

successivesdutauxderéussiteattendupour

chaqueproblèmedeMathéval 4Pn’affecteni

lavaleur,nilesérieux,nilagravitédesrésultats

obtenus.

Lesrésultatsobtenusparlesélèvesde4P

étonnentetdéconcertentlecorpsenseignant

quiengrandemajoritéaccordesaconfianceà

cesmoyensetcompensedanssapratiqueles

faiblessesqu’ilapurepérer.L’analysequalita-

tiveattestededémarchessouventastucieuses

entreprisesparlesélèves,maisquin’aboutissent

pastoujoursàunesolutionadéquate.Beaucoup

d’élèvespersistentàcroirequetoutproblème

serésoutparuncalcul.Cesrésultatsindiquent

untiraillement,unconflitentreunedémarche

originaleetunevolontéd’appliquerunedé-

marchecanonique,valoriséeparl’entourage.

Toutefois,cesnuancesnegommentguèrela

faiblessedesrésultatsobtenus,nil’inquiétude

qu’ilsnousinspirent.

 … et invariablement récurrents

Lapriseencomptedevariablesindividuelles

etcontextuelleséclairecesrésultats.Lesélèves

nonseulementsontdifférentslesunsdesautres,

maisnebénéficientpastousdumêmeenviron-

nementscolaireetextrascolaire,malgrél’uti-

lisationd’unmoyend’enseignementcommun.

L’étudeMathévalmontreque,paradoxalement,

plusl’élèveestâgépourledegréscolairequ’il

accomplit,moinsilestperformant.Laraisonest

àmettreaucompteduredoublement,cequi

montreunefoisdeplusquecettemesuren’a

pasl’effetremédiateurescompté.Eneffet,les

élèvesquiétaientendifficultéavantdedoubler

lesonttoujoursaprès.

L’originedesélèves,lalanguematernelle

et leniveausocio-économiqueconstituent

euxaussidesfacteursdedifférenciation.Ainsi,

l’enseignementdesmathématiquesdèslede-

gréprimairesemontreperméableàcesfacteursne possèdent pas les

compétences minimalespossèdent les compétences minimales

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase eT Chez vous les maThs, ça va CommenT ?

pris

mes

 / r

evu

e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 57

quiinterviennenttrèstôt,voiretroptôtdans

lecursusdel’élève.Deplus,àconsidérerlesré-

sultatsdesenquêtesinternationalesadressées

auxélèvesde15ans(parexemple,PISA2003),

l’enseignementneparvientpasàdiminuerleur

impact.Aucontrairemême,unfacteurliéau

lieudescolarisationvientsegrefferàceux-ci.

Eneffet,lescompétencesmathématiquesob-

servéesdépendentégalementducantondans

lequellesélèvessontscolarisés.Danstousles

cantons,laproportiond’élèvessesituantau-

dessousduseuilfixéparlesexpertsestmajo-

ritaire.Onconstatecependantdesdisparités

entrelescantons.Cesdifférencesinterrogent

etnécessitentdesexplicationsquelesauteurs

deMathévalontcherchées.

Lesfacteurssocio-démographiquesnepeu-

ventêtreinvoquéspuisque«lemodèlestatis-

tiqueconstruitpermetd’identifierl’apport

spécifiquedechaquecantonindépendamment

desfacteurssocio-économiques».Parcontre,la

tailledelaclasse,l’expériencedel’enseignantet

sondegréd’intérêtpourlesnouveauxmoyens

influencentégalementlescompétencesdes

élèvesdemanièresignificative.Defaitl’effet

maîtreetl’effetclassetendentàseconfondre.

Ainsilasélectiondesactivitésparl’enseignant

estfonctionnonseulementdesonexpérience

etdesongoûtpourlesmathématiques,mais

aussidesprocessusd’apprentissagequ’ilfavo-

risepoursaclasse.Chacun,commelesouligne

Delémont(2005),enseigneàsapropremanière,

cequipeutsetraduireentreautrespardesper-

formancesinégalesdanslesclasses.

Silesclassementscantonauxconfortenteux

aussilesrésultatsobtenusdansd’autresévalua-

tionsromandes,ilsdevraientnouscontraindre

àréfléchirauxremédiationsinstitutionnelles

nécessairespourquel’égalitédeschancesdes

élèvessoitaumoinsindépendantedesonlieu

dedomicileetunpeumoinsdépendantede

l’expérienceprofessionnelledesenseignants.

des résultats passionnants…

L’étudelongitudinale,enparticulierl’analyse

delagestiondidactiqueetdesentretiensmenés

auprèsdesenseignants,fournitquelquespistes

explicativesdescompétencesobtenuesetinter-

pelleformateursetdidacticiens.

Lesobservationsenclassemontrentladif-

ficultédegérerladévolutionetlasituation

adidactique.Lesépisodesderésolutionsde

problèmestousdegrésconfondusn’illustrent

qu’imparfaitementlaphased’actiontelleque

décritedanslathéoriedidactique.Lesélèves

netravaillentseuls,sansrelancedumaître,

quedurantuncourtmomentdel’activitéde

résolution.Lesenseignantssoutiennentetap-

puientlarésolutionencourspardesrelances

etdesvalidations,etlesélèvesattendent,voire

demandentcetappui.Ainsiilsembledifficile

pourl’enseignantdedéléguerlaresponsabilité

duproblèmeàl’élève.Enphasesdetests,tels

queMathévall’aproposé,lesélèvesnereçoi-

ventaucuneindicationdeleurenseignant.Le

problèmeleurestentièrementdévolu.Or,les

résultatsmoyennementsatisfaisantsdansledo-

mainenumériquelaissententrevoiruneabsence

decontrôledelaréponseparl’élève,contrôle

qui,danslaclasse,sembleraitessentiellement

prisenchargeparlemaître.

Lacomplexitéàconduirelaphasedemiseen

communquipermetauxélèvesdemettreen

motslesprocessusdepenséeestsoulignéepar

lesenseignantsaussibiendanslesquestionnai-

resdeMathévalquelorsdesentretiens.L’impor-

tanceaccordéeparlesmoyensd’enseignement

àlaverbalisationconstitueunepierred’achop-

pementpourdiversesraisonsévoquéeslorsdes

entretiensetvisiblesdanslesobservations.L’ac-

cèsimparfaitaulangageoraletécritdecertains

élèvespousselesenseignantsàmettreenplace

despratiquesdifférenciées,parfoisprochesdes

anciensmoyens,quiévitentlerecoursàlalan-

gued’enseignement.D’autresenseignantsvont

consacrerunmomentàlareformulationdupro-

blème,àsacontextualisation,afind’assurerl’ac-

cèsaucontenuverbal.Letempsimpartiàcette

tâcheestparfoisplusimportantqueprévuetle

tempsderésolutions’entrouveraccourci.

Lorsqued’autresdifficultéssurgissent,les

enseignantssemblentdepréférencechanger

lesmodalitésd’apprentissageplutôtquejouer

surlesvariablesdidactiquesenmaintenantle

cadreméthodologique.Uneplusgrandefami-

liarisationaveclecadreépistémologiquepour-

raitprogressivementpermettreauxenseignants

d’entrerdanscetypededémarche.Laforma-

tiondesenseignantsdevraitleurpermettrede

comprendreetdefavorisercetteapproche.Les

attitudesdégagéeslorsdesentretiensmon-

trentquelesfondementsdidactiquesnesont

pastoujourspartagésparlesenseignants.Or

nousavonsdéjàsoulignéci-dessusquel’expé-

riencedumaîtrejoueunrôleimportantdans

lesperformancesdesélèves.Ilenestdemême

encequiconcernelesattitudesetl’adhésionau

moyend’enseignement.

 … et très importants 

Ladifficultédedonneruneplaceréelleàla

transmissiondessavoirsseconfirmedansla

perceptionparlesenseignantsd’unchange-

mentdeconceptiondumétier.Plusieursmaî-

tresetmaîtressesseconsidèrenttransformés

enanimateursd’activitésetdejeuxetnonen

enseignants.Lesuivilongitudinalconfirmela

gêneressentieetmontrequelaphase d’insti-

tutionnalisation,bienqueplusvisibleenqua-

trièmeannéeprimairequ’endeuxième,semble

peuinvestieenfréquenceetentempsparles

enseignants.Ladifficultédeprévoirletemps

nécessaireàlarésolution,lescontraintesdues

FR

JU

VS

BE

NE

GE

VD

-80 -60 -40 -20 20 40 600

Taux [%]

audécoupagehoraireouauxorganisations

didactiquesmisesenplace,l’amalgameentre

phasedeformulationetd’institutionnalisation,

laréductiondelaphase d’institutionnalisationà

l’évaluationdelaréponseproposéesontautant

defacteursexplicatifsquipourraientdécouler

directementdelanouveautéetdel’absencede

routinesenseignantes.Lesformationssuivieset

l’accompagnementmisenplacen’ontpastou-

joursétéjugéssuffisants;nombreuxsontles

maîtresetmaîtressesquisesontlancésseuls

danscetenseignement.

en guise de réponse

Chez nous, les mathématiques… ça va… un

peu… beaucoup… passionnément… pas du

tout… aurais-jeenviedeconclurepeusérieu-

sement.

Lesdeuxétudessusmentionnéessoulignent

lesdifficultésqu’untelenseignementengen-

dreetlesclivagesqu’ilproduitetreproduit

àsoninsu.Ledilemmedel’enseignantetle

paradoxedeladévolutionpointentdefaçon

presqueimpertinente.L’instinct éducatifselon

lequelréussirestimportant–etquil’estdans

unecertainemesure–entraînel’enseignantà

faireréussirl’élèveet,parconséquent,croit-il,

àéviterl’erreurouàéviterquecelle-cineper-

dure.Lesmoyensd’enseignement/apprentissa-

geenvigueurenSuisseromandereposentsur

uneconceptionquirappellequelesnouvelles

connaissancesetsavoirss’élaborentàpartirdes

erreurs.Dèslors,enseignerparaîtconstituerun

dilemme.Lesenseignantsdesdegrésprimaires

quenousavonsinterrogéssontconfrontésàce

paradoxe,difficileparfoisàrelever:permettre

etencouragerlaréussitesanspourautantdé-

nigrerl’erreur.Leurartestdanscettepuissante

alchimiequiconsisteàtrouverdesactivitésqui,

toutenfaisantobstaclesauxconnaissancesdes

élèves,permettentd’enconstruiredenouvelles

sansinduirededémotivation.

dr. Chantal Tièche Christinat 

professeure formatrice à la HEP Vaud

Bibliographie 3

Antonietti,J.-P.(éd.).(2003).Evaluation des compétences en

mathématiques en fin de 2ème année primaire : résultats de la

première phase de l’enquête Mathéval.Neuchâtel:Institutde

rechercheetdedocumentationpédagogique(IRDP)(03.2).

Antonietti,J.-P.(éd.).(2005).Evaluation des compétences en

mathématiques en fin de 4ème année primaire : résultats de la

deuxième phase de l’enquête Mathéval.Neuchâtel:Institutde

rechercheetdedocumentationpédagogique(IRDP)(05.3).

Brousseau,G.(1996).Fondements et méthodes de la didactique

des mathématiques.In:J.Brun(Ed.):Didactiquesdesmathéma-

tiques.Lausanne:DelachauxetNiestlé.

Bru,M.(2002).«Pratiquesenseignantes:desrecherchesà

conforteretàdévelopper.»RevueFrançaisedePédagogie,

138,63-73.

Vergnaud,G.(1999):«Onn’ajamaisfiniderelireVygotskiet

Piaget.»InY.Clot(éd.).AvecVygotski(pp.55-68).Paris:La

Dispute.

1 RéférenceàLevVygotski,pédagogueetpenseurrusse.

L’œuvredeVygotskiaétédisponibleenfrançaisdansles

années1980.Depuis1985,datedeparutiondel’éditionfran-

çaisedePensée et LangageetdeVygotski aujourd’hui,de

nouveauxouvragesetarticlesdeVygotskiontététraduits

ousontencoursdetraduction.

Ilnousproposelanotiondezone proximale de développe-

ment,quitoucheàlamédiationpédagogiqueetàl’origine

socialedudéveloppementmental.Onpeutdirequelazone

proximalededéveloppementsesitueentreledéveloppe-

mentactuelquimarquecequ’unindividumaîtrisedéjà

seuletlaprochaineétapedesondéveloppementpourpeu

qu’uneinteractionsociale(avecunadulteoudespairs)soit

initiée.2 Pourlesnotionsdeladévolution et de l’institutionnalisation,

voirdanscenumérol’articledeJean-ClaudeNoverraz.3 UnebibliographiepluscomplètesetrouvesurlesitedePrismes.

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase eT Chez vous les maThs, ça va CommenT ?

pris

mes

 / r

evu

e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 59

Dansnotrepays,l’instructionpubliqueest,

pourdesraisonshistoriquessurlesquellesnousne

reviendronspasdanscetarticle,decompétence

cantonale.Depuisquelquesannées,onobserve

unefortepressionsurlemondepolitiquepour

redéfinirlefédéralisme,enparticulierpourtout

cequitoucheàl’école.EnSuisseromandeavec

PECAROousurleplansuisseavecHarmoS,les

cantonssemettentautourd’unetablepourdé-

finirdesobjectifscommunsdanslesprogrammes

del’écoleobligatoire.Pourlepost-obligatoire,les

titresdélivréssontfédéraux;quesesoientpour

lesCFCetlesmaturitésprofessionnellesoules

EcolesdematuritéetlesEcolesdeculturegéné-

rale.Celan’empêchepourtantpasd’importantes

disparitésdansl’organisationdelascolarité.

Pourcequiconcerneplusparticulièrement

lesmathématiques,lesmoyensd’enseignement

sontcommunsauxcantonsromandspourl’école

primaire(1-6).Depuispeu,ilslesontaussipour

l’écolesecondaireobligatoire(7-9).Malgrécela,

desenquêtesrécentescommeMathéval(2005)en

4eannéeouPISA(2003)en8eannéemontrent

desgrandesdifférencesentrelesrésultatsdes

élèvesdescantonsromands.Onobserveenpar-

ticulierquesilesélèvesfribourgeoisobtiennent

lesmeilleursrésultatsdanslesdeuxétudes,les

vaudoissetrouventaumieuxenavant-dernière

position,trèsloinderrièrelesfribourgeois.

Auvudetoutcela,ilnousasembléintéressant

decomparerlafréquencedespériodesdema-

thématiquesdanslesgrilleshorairesdescantons

deFribourgetdeVaud,celadudébutdel’école

primaireàlafindugymnase.Lechoixdeces

deuxcantonsnousaétédictéparlesimportants

écartsmentionnésci-dessusmaisaussiparleur

proximitégéographique,cequilesad’ailleurs

encouragésàconstruireungymnasecommunà

Payerneetquilesinciterapeut-êtreàenvisager

descollaborationsanaloguesauniveaudel’école

obligatoire.

Comparaison vaud-FriBourg  pour les heures de maThs

Tableau du nombre de périodes hebdomadaires de mathématiques

Canton de vaud    Canton de Fribourgecole primaire et cycle de transition  année  ecole primaire

4.5+0.51 1 5.5

4.5+0.5 2 5.5

4.5+0.52 3 5.5

4.5+0.5 4 5.5

5 5 5.5

53 6 5.5

    30     Total    33

ecole secondaire obligatoire          Cycle d’orientation 

64 5 4 7 4 5 6

5 6 4 8 5 5 6

5 5 4 9 5 5 6

  �6  �6  �2  Total   �4  �5  �8

  ecole de maturité     ecole de maturité

StandardRenforcé StandardRenforcé

4 4 1 4

3 4 2 5 4

4 6 3 4 3

3ansseulement 4 5 4

  ��  �4  Total  �8  �5

Voiesecondaireàoption

Voiesecondairegénérale

Voiesecondairebaccalauréat

Classesprégymna-siales

Classesgénérales

Classesàexigencesdebases

Cetableaumontrequelesélèvesfribourgeois

suiventbeaucoupplusdecoursdemathémati-

quesquelesvaudois.Ilnemetpourtantpasen

évidencel’entierdecettedifférence.Eneffet,il

netientpascomptedufaitque,pendantl’école

obligatoire,lespériodessontde50minutesen

terrefribourgeoisealorsqu’ellesnesontquede

45minutesdanslecantondeVaud.Letableau

quisuitpermetdecomparerlenombred’heu-

res(60minutes)demathématiquessuiviespar

lesélèvespendantlesdifférentesphasesdeleur

scolarité.Pourétablircetableau,noussommes

partisduprincipeque,danslesdeuxcantons,

lesélèvesserendentàl’écolependant37semai-

nesparannéejusqu’àlafindelascolaritéobli-

gatoireet35semainesaugymnase.Cesvaleurs

sonttiréesdesloisscolairespourl’écoleobliga-

toireetdelaréalitévaudoisepourlegymnase.

Sicelle-cidevaitêtredifférentedanslecanton

deFribourg,celaneferaitprobablementqu’ac-

centuerlesdifférencesobservées!

Tableau du nombre total d'heures de mathématiques suivies

Canton de vaud  Canton de Fribourgecole primaire et cycle de transition  année  ecole primaire

833 1–6 1018

ecole secondaire obligatoire  Cycle d’orientation 

444 444 333 7–9 432 463 555

  ecole de maturité     ecole de maturité

StandardRenforcé StandardRenforcé

289 368 10–13 473 394

Voiesecondaireàoption

Voiesecondairegénérale

Voiesecondairebaccalauréat

Classesprégymna-siales

Classesgénérales

Classesàexigencesdebases

Cetableaumontre,enparticulier,qu’unélève

fribourgeoisasuiviàlafindesonécoleprimaire

185heuresdemathématiquesdeplusqueson

voisinvaudois.Cedernierdevraitdoncsuivre

unesemaineetdemiesupplémentaired’école,

consacréeuniquementàl’étudedesmathéma-

tiques,àlafindechaqueannéescolairepour

arriveraumêmetotalquel’élèvefribourgeois!

Cesobservationssevérifientaussiàl’écolese-

condaire,saufpourlavoiegénéraleoùl’écart

n’estquede19heures.Danslesautresvoies,

lejeuneVaudoissuitunecentained’heuresde

mathématiquesdemoinsqueleFribourgeois,

cequifaitqu’ildevraitlàaussisuivre,àlafin

dechaqueannéescolaire,plusd’unesemaine

supplémentaired’écoleconsacréeuniquement

auxmathématiquespourcomblerladifférence.

Acestade,nousobservonsquedepuisledébut

desascolarité,unélèvefribourgeoisavecun

profilnonscientifiquequientreauGymnasede

Payerneaurasuivi285heuresdemathémati-

quesdeplusquesoncollèguevaudoismaisqu’il

entreraluien1eannéealorsquelevaudois

entreradirectementen2eannée!Leconstatest

identiquepourl’Ecoledematuritéoùunélève

fribourgeoissuitaussiunecentained’heures

demathématiquesdeplusquesonhomologue

vaudois.Autermedesascolarité,cettediffé-

rencereprésenteprèsde400heuresou16se-

mainesdemathématiquesàpleintempspour

obtenirlamêmeMaturitéfédérale!Poursavoir

sicettedifférenceestuniquementdueaufait

quelesélèvesfribourgeoissuiventglobalement

plusd’heuresd’écolequelesvaudois,ilfaut

aussicomparerlaproportiondesheuresd’école

consacréesauxmathématiques.

1 Lagrillehoraireprévoitpendantlesdeuxpremièresannéesde

scolarité4.5périodesdemathématiquesetnoussommespar-

tisduprincipequ’enmoyenne,1des2périodesd’appuipar

semaineétaitconsacréeauxmathématiquesetqu’elleconcernait

lamoitiédesélèves.2 Lagrillehoraireprévoitpourlesannéestroisetquatre4ou5pério-

desdemathématiquesaulibrearbitredesétablissements.Nous

avonsdoncprisunemoyenneetcomptél’appuicommeci-dessus.3 Lagrillehoraireprévoitdesniveauxdemathématiquessaufsi

l’établissementpossèdeunprojetpédagogiquequinelesper-

mettepas.Danslapratique,lesniveauxsontquasiinexistants!4 Ycompris1périodededessingéométrique.Lesétablissements

ontlapossibilitédesupprimer1périodedemathématiquesau

profitdel’option...

proportion des périodes de mathématiques pendant la scolarité

Canton de vaud    Canton de Fribourgecole primaire et cycle de transition  année  ecole primaire

17.05% 1–6 20.37%

ecole secondaire obligatoire  Cycle d’orientation 

16.67% 16.67% 12.50% 7–9 14.50% 15.54% 18.65%

  ecole de maturité     ecole de maturité

StandardRenforcé StandardRenforcé

11.70%14.43% 10–13 13.33%11.36%

Voiesecondaireàoption

Voiesecondairegénérale

Voiesecondairebaccalauréat

Classesprégymna-siales

Classesgénérales

Classesàexigencesdebases

3 | les maThs du CYCle iniTial au gYmnase Comparaison vaud-FriBourg pour les heures de maThs

Cetableaunousmontreque,pourl’Ecole

dematurité,ladifférences’expliqueparune

grillevaudoisebeaucouppluslégère,neserait-

cequeparl’absenced’unequatrièmeannée.

Onnepeutpasfairelamêmeconstatationpour

l’écoleobligatoirepuisquelepoidsrelatifdes

mathématiquesyestluiaussiplusimportant

danslecantondeFribourg.

michel deruaz

professeur formateur à la HEP Vaud et

enseignant au Gymnase de Nyon

pris

mes

 / r

evu

e pé

da

go

giq

ue 

hep

 / n

o 6

 / m

ai 2

007

| 6�

4

Aucoursdestroisdernièresdécennies,les

«ruclons1»ontprogressivementdisparuau

profitdedéchetteries.Cetteévolutionnes’est

pasfaitesanspeine.Elleresteinsuffisantepour

fairefaceàl’augmentationtrèsrapidedesdé-

chetsetdeleurimpactàlongtermesurl’envi-

ronnementnaturelethumain.Depuis1995,le

Réseau-écoles de sensibilisation à la gestion des

déchetss’estpeuàpeuétendudunordVaudois

àpresquetoutelaRomandie.Ilintervientsur

mandatdesespartenairesdanslesécoles.La

revuePrismess’estmiseàl’écoutedeceréseau

etaassistéàuneséanced’animationdansune

classed’Ecublens.

Anne Monnet 2, tu es responsable pédago-

gique du Réseau-écoles 3 depuis 2002. Peux-tu

nous rappeler l’origine de ce Réseau ?

Constituésouslaformed’unRéseauromand

en1998,leRéseau-écolesestàl’origineune

actiondecommunicationentrepriseparlaSo-

ciétépourleTri,leRecyclageetl’Incinération

desDéchets(STRID),l’undeshuitpérimètres

vaudoisdegestiondesdéchets.C’esten1995,

quelaSTRIDdécidedelancerunecampagne

éducativeauprèsdesécolesprimairesdeson

périmètre.L’accueildesenseignantsetleré-

sultatdel’opérationserévèlenttrèspositifs.

Ilestalorsdécidéquecetteactionsoitrecon-

duite,aveclesoutienduServicedesEaux,Sols

etAssainissementducantondeVaud(SESA),et

qu’ellesoitégalementproposéeauxautrespé-

rimètresdegestiondesdéchetsducanton.Dès

1998,d’autrespartenairesromandssesontin-

téressésànosprestationsetc’estainsiques’est

constituéunRéseauintercantonalquin’acessé

des’étendredepuis.Nosactivitésdesensibilisa-

tions’inscriventaujourd’huidansunedémarche

pédagogiqueetlaSTRIDestunpartenairedu

Réseauparmid’autres.

Comment le message du Réseau-écoles a-t-il

évolué au cours de ses 10 ans d’existence ?

Jusqu’àprésent,l’accentprincipalétaitporté

surl’importancedutridesdéchetsenvuede

leurvalorisationparlerecyclage:résoudreun

problèmeparunesolutiontechnique.Uneap-

prochequipourraitserésumerenunephrase:

«Situtries,tuastoutcompris.»Nosréflexions

s’oriententmaintenantversuneapprocheplus

progressivequiconduitd’abordl’enfantàpren-

dreconsciencequ’ilestlui-mêmegénérateur

dedéchetsetqueparconséquent,ceux-ci«ne

tombentpasduciel».Lesquestionsquenous

cherchonsàsouleveraveclesenfantssontdu

type:«pourquoiest-cequejeproduisautantde

déchets?commentpuis-jeréduireetmieuxgé-

rermesdéchets?»plutôtqueladiffusiond’un

simple«catéchisme»desbonnesrèglesdutri.

Nousleurdémontrons,parexemple,que

l’incinérationnerésoutpastouslesproblèmes.

DansunpetitpayscommelaSuisse,ellecontri-

Ce n’esT pas aux enFanTs d’éduquer leurs parenTs

dans CeTTe quaTrième parTie, CourTe il esT vrai, nous aBordons la relaTion à l’environnemenT. respeCTer la naTure pour éviTer de se Trouver sous une monTagne de déCheTs, C’esT le déFi que doivenT relever de nomBreuses disCiplines sCienTiFiques. a CeT égard, l’édu-CaTion au développemenT duraBle prend un relieF TouT parTiCulier. Ce suJeT auraiT dû êTre TraiTé dans Ce numéro, mais pour des rai-sons de plaCe, le leCTeur Trouvera un apporT sur CeTTe quesTion dans prismes 7 prévu pour l’auTomne 2007.

bueàdiminuerlevolumedenosdéchetsmais

ellenefait,pourlemoment,quedéplacerle

problèmeailleurs.Notrepoubelledéposéesur

letrottoirlaveilleauradisparulematincomme

parenchantement.Ils’agitalorspournousde

sortirdeslieuxcommuns,deretracerlechemin

delapoubellejusqu’àl’usined’incinération,de

valorisercetravaildans l’ombreetd’observer

cequirésultedel’incinération:descendreset

desmâchefersquidevrontêtreenfouisdansnos

sous-sols,commedansladéchargepourdéchets

stabilisésd’Oulens.

Danslecadredeprojetsd’établissements,

nousavonsproposéauxélèvesdeposerleursdé-

chetsdelarécréationsurunetable.Ensemble,ils

lesontanalysés,ontprisconsciencedesdéchets

qu’ilsproduisentensipeudetemps.Nousavons

comparécettesituationàd’autresmomentsde

lajournéeetàd’autrespériodesdel’histoire.

Sansnierlesprogrèsdenotrecivilisation,sans

penserqu’ilsoitobligatoirementnécessairede

vivrecomme au temps des hommes de Cro-ma-

gnon,nousavonsréfléchiensembleauxpossibi-

litésdediminueretdemieuxgérernosdéchets

avantd’envisagerleurtrietleurrecyclage.

Lesatteintesàl’environnementdoiventêtre

connues.MaisleRéseauévitelesgrandesthéo-

ries,ainsiquetouteculpabilisation.Ilsouhaite

partirprincipalementduconcret,duconnude

l’enfant.Celui-cidoitpouvoirréfléchiràson

environnementprocheetexpérimenterdes

solutionsdesonenvironnementprocheavant

d’allerversd’autresconsidérations.

Quels sont les aspects les plus importants pour

éveiller la fibre sensible, l’âme de chercheur puis

d’acteur de l’enfant en faveur d’un développe-

ment durable ?

Nousnevoulonsenaucuncas«enfoncerun

clou»ouconvaincre,danslesensd’allercontre

lespersonnesmalgréelles,etpartous les

moyens.Nousavonsoptépouruneapproche

réflexivesurnosmodesdefaire,devieetde

consommationenpariantsurl’avenir.Nosani-

mationsvisentlepartaged’uneinformationqui

puissepermettreplustardàchacundefairedes

choixetd’agirenconnaissancedecause.Notre

travailrestecependantbasésurlasensibilisa-

tion.Danslecadred’unprojetd’établissement,

nousavonsplusdetempspourconstruireun

raisonnementouunedémarchescientifique.

Notresouhaitàmoyentermeestdepouvoir

mettrerapidementenplacesuffisammentde

ressourcespourquel’enseignantpuisseanti-

ciperoupoursuivreladémarcheenclasse.Ac-

tuellement,nouscollaboronsdanscesensavec

lesecteurenvironnementduDépartementde

l’instructionpubliquegenevoissurlaconstruc-

tiondeséquencesd’apprentissage-évaluation

ensciencespermettantd’identifierdesentrées,

desexpérimentationsàmettreàlaportéedes

enfantsducycleinitial.

Peux-tu nous citer un exemple?

Enobservantladégradationd’objetsdéposés

dansunenvironnementprochedel’école,l’en-

fantdistingueralesdéchetsproduitsparlana-

turedeceuxissusdematériauxquenousavons

transformés.Enadoptantuneméthodescienti-

fiqued’observationconsistantàpeser,mesurer,

observer,ilferauntravaildeclassificationetde

catégorisation.Ilregarderaensuitedequellefa-

çonlanatures’yprendpourrecyclersespropres

déchetsenobservantlefonctionnementd’un

compost.Desanalogiespourrontêtrefaites

aveclaforêt.Constatantquecertainsobjetsne

sedégradentquetrèslentement,ilcomprendra

d’autantmieuxlaraisonpourlaquellel’homme

doitmettreenplaceuneindustriepour imiter

lanatureafind’éviterd’êtreengloutisousles

déchetsetpourréduirelesimpactsnéfastessur

l’environnement.Ilexpérimenteralui-mêmele

recyclagedupapier,uneactivitéfacilementréa-

lisableenclasse.Ilcomprendrarapidementque

pourpouvoirrecyclerdupapier,ilfautqu’ilsoit

épurédetouslesautresmatériaux,d’oùl’intérêt

dutridesdéchetsquicommenceàémergeret

fairesenspourl’enfant.Voicicequepeutêtreen

trèsraccourcil’exempled’uneapprochepas à pas

quenousexpérimentonsencemomentauprès

destoutpetits,lesressourcespédagogiquesà

leurintentionfaisantcruellementdéfaut.

Anne Monnet, quelle est ta fonction dans le

Réseau ?

J’aid’abordétéanimatricedurantsixmois

danslesclassesgenevoises.Cetteexpériencede

terrainm’apermisdesentircertainesdemandes

etattentesdesenseignants.J’occupemaintenant

lepostederesponsablepédagogique.Matâche

consisteàformeretencadrerl’équiped’anima-

teursetàdévelopperavecleurcollaboration

denouveauxdispositifsdesensibilisation.Je

continueàintervenirenclasseafindegarderun

piedsurleterrainetpourpouvoirtesterdans

lesécoleslesprogrammesquenousélaborons.

Lefeed-backdesenseignantsestpournouspri-

mordial.J’intervienségalementdanslaforma-

tioninitialeetcontinuedesenseignantsauprès

desHEPetdèsceprintempsauprèsduservicede

laformationcontinuedesenseignantsgenevois

danslecadredenotrecollaborationavecleDé-

partementdel’instructionpublique.

Quelles directives pourrais-tu donner pour

l’élaboration de programmes de gestion des

déchets ?

4 | approChe de l'environnemenT Ce n'esT pas aux enFanTs d'éduquer leurs parenTs

pris

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hep

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007

| 63

Ils’agitpournousdeconcevoirdesprogram-

mesavecdescompétencesd’experts,maisen

intégrantlespréoccupationsdesenseignants.

Nousdevonssavoirresteràl’écoutedeleursbe-

soins,ainsiqu’êtreenadéquationaveclespro-

grammesd’études,lesobjectifsd’apprentissage

etlesapprochespédagogiquesenvigueur.

Lagestiondesdéchetsestundomainequi

évoluetrèsrapidement.Nosorduresdevien-

nentdel’or dur,desmatièresbientôtprécieu-

ses:chaquesemaineunnouveauprocédéde

recyclageestinventé;lalégislationévolueelle

aussirapidement.Pensez,ilyapeudetemps

encore,lesorduresnonrécupéréesétaientmi-

sesendécharge,aujourd’hui,onlesincinère

avecdesnormesstrictesréglementantl’épura-

tiondesfumées,lestockagedesscoriesetdes

cendres.Cettesituationnécessiteuneadapta-

tionetunemiseàjourconstantes.

Anne, j’ai assisté à une séance de sensibilisa-

tion dans une classe de deuxième cycle primaire.

Est-ce que vous travaillez avec les élèves de tous

âges ?

Jusqu’àmaintenantnousintervenonsprinci-

palementauprèsdesenfantsde4à12ans,avec

desanimationsspécifiquesetprogressivespour

chaquedegré.Nousavonsdumatérielpourle

secondaire1,quenoustestonsencemoment,

etquiestencoursd’adaptation.Sinosactions

desensibilisationontunimpactgénéralsurla

société,tantmieux.Maislasensibilisationdes

adultesnedoitpasêtrenégligée.Onnepeut

pasdonnerpourmissionàl’écolederésoudre

touslesproblèmesquelasociéténesaitpas

gérer,etfairereposerdesresponsabilitéssur

lesépaulesdesenfants,notammentcelled’édu-

querleursparents.

LestroisR:Réduire, Réutiliser, Revaloriser,

doiventpasserdanslapratiquequotidienne

desconsommateursadultesetenfants.

le pari du développement durable ou de la 

décroissance ?

olivia henchoz, animatrice du réseau-éco-

les, m’accueille dans une classe d’élèves de 9 

à �0 ans au collège neptune à ecublens, tenue 

par anouk meylan. Cette dernière ne s’arrê-

tera pas à cette première séance de sensibi-

lisation. elle entend mener un travail à long 

terme avec ses élèves, leur donner quelques 

habitudes de vie et quelques repères pour leur 

permettre d’apporter plus tard leur contribu-

tion à un développement durable.

OliviaHenchozrassemblelesélèvesdela

classeenuncercleautourd’elle.Pourfaciliter

unecommunicationpersonnalisée,elleleur

demanded’écrireleurnomsurunpetitpa-

pieretdelefixersurleurchandailaumoyen

d’unepinceàlinge.

Toutcommenceàpartirduvécudesenfants,

deleursobservations,deleurvocabulaire:

«Oùmettez-vousvosdéchets?quevont-ils

devenir?…»Lesélèvess’enflammentcomme

lesdéchets:«Ilsvontcramer!»Aucoursde

séquencesinteractives,lesenfantsdécouvrent

progressivementqu’ilnesuffitpasdebrûler

lesordurespourluttercontrelapollution.On

peutaussilesrecycleravantd’envoyerletout

àlastationd’incinération.Ilestpossiblede

sefamiliariseraveclesdéchetsetdelestrier

enfonctiondesrecyclagespossibles.D’autres

déchetsnedoiventpasalleraucentred’in-

cinération,parexemple,lespilespouréviter

qu’ellesn’ylibèrentdesmétauxlourdspol-

luantl’airetproduisantdescendrestoxiques.

Lesenfantsdécouvrentqu’ilfautlesemmurer

dansdubétonpourles«neutraliser»etéviter

deseffetsnégatifssurl’environnement.

Peuàpeu,letrietlesvoiesconduisantau

recyclage,àladestructionparlefeu,ouà

destraitementspluscomplexesdeviennent

unjeupourlesenfants.Larévélationlaplus

marquantepoureuxestladécouvertequele

feunedétruitpastout:ilfautencoretrou-

verunesolutionpourlesdéchetsdenosdé-

chets,soitdesespacesdestockage,telcelui

d’Oulens.Touslesparticipantssepassionnent

pourl’identificationdesdéchetsquinede-

vraientpasêtremisdanslapoubellenoire.

Avecuneaisanceetunintérêtremarquables,

lesgroupesd’élèvess’engagentdansl’analyse

ducyclededifférentsmatériaux.

Lesoutilspédagogiquespréparésparle

Réseau-écolesparlentauxélèvesetsontbien

cibléspourleurâge:lesdéchetsproviennent

desproduitsqu’ilsconsommentrégulièrement.

Lescyclesportentsurdesmatièrestellesque

leverre,lesvégétaux,lepapier,lefer,l’alu-

minium,lestissusetlecuiretlesplastiques

(PET).Plusieursélèvestâtentleurvêtement,

lorsqu’ilsapprennentquelePETrecycléper-

metdeproduiredutissu«polaire».

Lesconsignessonttrèsclairesetparfaite-

mentadaptéesauxcapacitésdesenfants.Les

connaissancesnouvellessontcommuniquées

avecunegrandeaisance.Iln’estjamaisques-

tiond’insisteroud’inculquerunevérité,mais

biendesuivreunedémarche,permettantaux

élèvesdedécouvrirlaréalité:recyclercoûte

deuxfoismoinscherqu’incinérer;lesstocks

denosdéchetsexigentdesemplacementsde

plusenplusdifficilesàtrouver;recyclerper-

mettrad’éviterquelesmatièrespremièresne

s’épuisentunjour.

Spontanément,lesélèvesfontdesproposi-

tionspourproduiremoinsdedéchetsetpour

économiserdesmatièrespremières:alleren

trottinetteouàpiedàl’école,allerdansdes

stationsdeskioùneroulentquedestaxisélec-

triques,prendreletrainpourallerloinaulieu

deprendrechacunsavoiture…Est-ceunpre-

mierpasversunesociétédedécroissancepour

échapperautotalitarismedel’économie4?

marguerite schlechten rauber

  (les notes se trouvent à la page suivante)

Toutd’abord,ilconvientd’avouerquela

questionposéem’afortementsurpristantlaré-

ponseestpourmoiévidente:biensûrqu’ilfaut

enseignerlesdisciplinesscientifiquesàl’école!

Passécepremiermomentd’étonnement,j’ai

cherchédansl’actualitévaudoisecequipouvait

justifierunetellequestionetaipeut-êtreune

tentatived’explication…

Ildevienteneffetdeplusenplusfréquent

d’entendre,venusdestravéesdecertainspartis

politiques,desconseilsqueleursauteurscroient

sansdouteavisés:«Al’école,ilfautquenosen-

fantsapprennentàlire,àécrirecorrectement,à

compterjuste…»

Siheureusementcetteperceptionprimairedu

rôledel’écolen’estpasencorecelled’unemajo-

ritédespoliticiensdececanton,ilestimportant

demontreretd’expliquerl’absoluenécessité

d’ouvrirl’espritdesélèvesàtraversd’autresap-

proches,parlebiaisdematièresquiparaissent

peut-êtreinutilesoufutilesàcertains.Lesbran-

chesscientifiquesfontbienévidemmentpartie

decelles-ci,etjemeréjouisquevotrerevuey

consacreunnuméro:ceserasansaucundoute

unebasederéflexionintéressante,etjel’espère

utilepourcertains…

Enfin,etendehorsdecesconsidérations,s’il

fallaitdonneruneseuleraisondemaintenir

l’enseignementdelascienceparexemple,il

suffitdesepenchersurl’évolutioninquiétante

denotreenvironnement.Apprendreparexem-

pleàconnaîtrelaTerre(etàlarespecter)me

paraîtêtreessentielsil’onveuttenterd’inverser

latendancequel’onconnaîtactuellement.C’est

égalementsansdouteunmoyendecréerles

vocationsdecellesetdeceuxqui,demain,dé-

velopperontpeut-êtrelesénergiesdufutur,qui

inventerontdesmoyensdetransportspropres,

ouencorequitrouverontunvaccincontreune

nouvelleépidémiedévastatrice.

Jean-michel Favez

président du groupe socialiste

au Grand Conseil

enseigner les sCienCes pour respeCTer  l’environnemenT

4 | approChe de l'environnemenT enseigner les sCienCes pour respeCTer l'environnemenT

1 Placeàcielouvertoùl’onsedébarrassaitdesdéchetssans

sepréoccuperdeseffetssurl’environnement.2 AnneMonnetauneformationensciencessocialesets’est

spécialiséeenhistoireagricole.Elleestimequel’agrono-

mieadespointscommunsaveclapédagogiedesdéchets.

Denosjours,l’agriculteurnefaitpasautrechosequede

travailleraveclanature:ilchercheàrefermerlescycles

naturels.Unegestionmodernedenosdéchetsfonctionne

surlemêmeprincipe:réintégrerlamatièredanssoncycle.

D’ailleurs,l’agricultureaétéetresteencoreunebranche

permettantlavalorisationd’ungrandnombredenos

déchets.Lemilieuetlacultureagricolesdonnentbeau-

coupdesensàlaréutilisationetàlarécupération.Après

avoireffectuéuntravaildevulgarisationsurdesprobléma-

tiquesagricolesauprèsd’adolescents,AnneMonnets’est

intéresséeattentivementaucontenudenospoubelles.Elle

areprisenparallèledesétudesensciencesdel’éducation.3 LesenseignantssouhaitantintégrerdesactivitésduRéseau

etrecourirauxoutilspédagogiquesélaboréspeuvent

consultersonsitewww.reseau-ecoles.ch4 Pourapprofondirlaréflexionsurundéfiposéauxhabitants

denotreplanètepourlevingtetunièmesiècle,onpeut

lireledernierlivredeSergeLatouche(2006).Leparidela

décroissance.Paris,Fayard.

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| 65enCore… 

deux éTudianTs erasmus en éConomie à la hep vaud

Comment êtes-vous arrivés à la HEP Vaud?

Eve et GünNousavonsvul’offreErasmussur

desaffichesàl’école,nousavonsparticipéàune

réuniond’informationetreçudesprospectus,

puisnousnoussommesentretenusavecMar-

tineChevalier,enchargedesstagesErasmus

dansnotreécole.

Vuquelespossibilitésétaientépuiséespour

unstageenFrancevoisine,notreinterlocutrice

nousaproposélaSuisseetnousnoussommes

rabattussurcetteoffre.Unecollaborationsem-

bled’ailleurssemettreenplaceentrelaHaute

écoleIselldeLiègeetlaHEPVaud.

Dansnotreclassedeseptétudiantsenécono-

mie,lestagen’estpasintégréaucursushabituel,

autantdirequenoussommesdescobayes,la

voieétaitdoncàouvrir,voireàforcerquelque

peu…

Alors pourquoi avoir choisi un stage Erasmus ?

Eve Pourapprofondirlefrançais,jedemande

doncl’indulgencedulecteurpourmonexpres-

sion!Jevoulaisaussivoirunautresystèmede

formation,m’ouvriràuneautreculture,cela

meparaîtimportantdanscemétier.

GünEts’adapteràunmondeinconnu!

Justement, quelle image aviez-vous de la Suisse

avant de venir ?

GünLesmontagnes,unpaysindépendant.

Surlacarte,unîlotdansl’Europe.

EveUnpaysriche,sansl’Euro!

Et la découverte sur place?

GünLaSuisse,unpayscomparablesurbien

despointsàlaBelgique,entermesdepopula-

tion,desystèmefédéral,devariétésetausside

tensionslinguistiques.MaislaBelgiqueestplus

urbaniséeetindustriellequelaSuissequi,elle,

estplusdéveloppéedansletertiaireavecses

banquesetsesassurances.

EveIci,vousvotezsouventetlesystèmetour-

ne,mêmesilesproblèmesexistentaussi!Les

genssontquandmêmedistants,chacunvaque

àsesaffaires.

Et l’école?

EveDanslesclassesenBelgique,onparle

d’enseignant.Ici,c’estlemaître,alorsquechez

nouscetitreestexclusivementréservéauxavo-

cats.Celaconditionnepeut-êtrelerapportà

l’apprentissage.D’autresdifférencesapparais-

sentcommecelledel’obligationscolairequi

s’étendenBelgiquejusqu’à18ansalorsqu’en

Suisse,elles’arrêteà15ans1.

GünIci,lesystèmespécialiselesélèvesetleur

donnedesqualificationsprofessionnellesplus

tôt2.

EveUneautresurprise,c’estlaprésencede

manuels.EnBelgique,ilsn’existentpasdutout

danslesclasses:l’enseignantconstruitsespro-

pressupports.

Gün Ladifférenceestgrandeaussiquantaux

infrastructures.LepireétablissementenSuisse

seraitbienvuenBelgique.Onn’yverrapassou-

ventdesbibliothèques,detelsmoyensaudio-

visuels,dessallesdesmaîtresoudescafétérias

commenousenavonsdécouvertàLausanne.Il

yacheznouspeud’entretienetdoncdegrands

besoinsderénovationdesbâtimentsscolaires.

EveOui,maisc’estseulementdepuisicique

jem’enrendscompte.EnBelgiqueparcontre,

l’accentestmissurleseffectifscomprissouvent

entre12et18élèvesaumaximum.L’accentest

missurlesmoyenshumainsalorsqu’icicesont

lesmoyensmatérielsquisontfavorisés.

HEP Vaud – Isell Liège: quelle comparaison éta-

blissez-vous ?

Eve et Gün Lacomparaisonn’estpasaisée

cardanslescourssuivisici,notammentenéco-

nomieetdroit,lesautresétudiantssonttous

porteursd’unelicenceuniversitairealorsque

cen’estpaslecaspournous.Ici,lescourssont

centréssurcommentenseignerplutôtquesur

descontenusdisciplinaires.

GünEnBelgique,latendanceestàunensei-

gnementdetypesocioconstructiviste,lesautres

courantsnesontpasexploités.ALausanne,les

autresméthodessontaussiprésentéesetex-

ploitées.

Et dans vos classes ?

EveLesélèvesbelgesposentplusdeques-

tions.LesVaudoissont-ilsplusintrovertis?Est-ce

lefaitdetravailleravecdesmanuelsalorsque

lescourssontpluspersonnalisésenBelgique?

Est-cequelesméthodessontplutôtdetype

transmissif?

Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?

EveUnedifficultéàlaHEPVaudestcelledu

choixdesstagesetdescourssansêtresuffisam-

mentguidé.ChaqueétudiantErasmuspourrait

avoirunétudiantcommeparrain.Ettroismois,

c’estbiencourt,unsemestrecompletserait

idéal.

evelYne dahm eT gün gediK viennenT de Belgique. ils amBiTionnenT d’oBTenir le TiTre de régenTe eT de régenT en sCienCes éConomiques eT en sCienCes éConomiques appliquées. gün aimeraiT par ailleurs oBTenir aussi une liCenCe en sCienCes de l’éduCaTion. ils sonT raTTaChés à la hauTe éCole isell à liège. C’esT dans le Cadre d’un éChange erasmus qu’ils sonT venus à lausanne. 

deux éTudianTs erasmus en éConomie à la hep vaud

GünOui,c’esttropcourt.Etducôtédel’Isell,

lesstagesErasmusdevraientêtreouvertsplus

facilementàtouslesétudiants.

Eve et GünUngrandmomentaétélesémi-

naired’intégrationaumondeprofessionnel

horscadre,àlaTour-de-Peilz.

Enconclusion,nousrecommandonslestage

Erasmus.

propos recueillis par

Claude othenin-girard le 5 avril 2006

[email protected]

Actuellement, Claude Othenin-Girard

enseigne la didactique de l’économie en

formation initiale et continue à la HEP Vaud. Il

enseigne aussi au Gymnase de Chamblandes.

1 Enréalité,danslaplupartdescasl’apprentissagecomplète

laformationjusqu’à18ans,voireau-delàaveclesmaturités

professionnelles.2 Notedel’auteur:Günpenseàlaformationprofessionnelle,

notamment,parl’apprentissage;ilvoyaitcetélémentcomme

unavantagepourlaSuisse.3 Pas«prédigérée»pourlesélèves,ils’agitdedocumentation

officielle.4 Leconcepts’inspireduMonopoly.5 Günad’ailleursajoutéultérieurementàl’entretienrelatéci-

dessuslaremarquesuivante:«DanslecadreduséjourEras-

musetentantquestagiaire,j’aipuconstruireuneépreuve

encomptabilitédanslesclassesde8eannée.Ils’agitd’une

premièreexploitationdemonsujetdetravaildediplôme

quimepermettrad’affinermesrecherchesetlescritères

d’évaluationdescompétences.

Ladifficultémajeureaétéjustementd’établirlescritères

maiségalementdes’adapterauprogrammesuissecontenu

danslePland’EtudesVaudois(PEV)etsurtoutaveclesys-

tèmed’enseignementdelacomptabilité.»

le travail de diplôme d’eve

Quelles sont vos intentions dans le cadre de

votre travail de Diplôme ?

Fairequelquechosequisorteduquotidien

del’école;untravailquidonneauxélèves

l’enviedetravailleretquileurpermettede

révélerleurpersonnalité.

C’est l’ambition de nombreux maîtres, par-

don d’enseignants ! Comment comptez-vous

vous y prendre ?

Enlaissantcréerparlesélèvesunjeude

simulationdecréationd’entreprise.EnBel-

gique,ilyaunebonnedizained’étapesà

franchir.

Est-ce que cette course d’obstacles s’inscrit

dans le programme en Belgique ?

Leprogrammedudeuxièmedegréen

économieprévoit,àlafinducycle,queles

élèvessoientcapablesd’expliquerlesopé-

rationsindispensablesàlacréationd’une

entreprise.

Comment fonctionne votre concept de jeu?

Pourlejeu,deséquipesde4à6élèvessont

constituées.Lejeusecomposede4étapes.

Découvertedesétapesdecréationd’une

entrepriseàpartird’unedocumentation

«brute»–discussiondesidées–proposition

–productiond’unrapport.Créationdela

planche,descartesetdurèglement4.Test

dujeupard’autresgroupes.Evaluationdu

jeuparlesélèves.

Vous avez déjà expérimenté le jeu, quelles

remarques feriez-vous ?

Lesélèvess’investissentplusquecequeje

pensais,ilsretiennentprèsde80%desétapes,

chaquegroupeasapropreapprocheetpro-

duitdesdocumentsoriginaux.L’expérienceest

concluanteetm’encourageàpersévérerdans

cettevoie.

le travail de diplôme de Gün

Quel est le sujet de votre travail de diplôme?

Montravaildediplômeportesurl’évalua-

tiondescompétencesdesélèvesencomp-

tabilité.

Pourquoi avoir choisi ce sujet?

D’aprèscequej’aipuenlireetendiscu-

ter,cettepréoccupationestunenjeumajeur

pourunemeilleureformationdesélèves

maiségalementdanslecursusacadémique

desmaîtresd’économie–cecid’ailleurs

autantenBelgiquequ’enSuisse.

Quelles compétences comptez-vous dévelop-

per ?

Travaillersurdessituationsd’entreprise,

desdocumentscomptablescommedesfactu-

resd’achats,defrais,devente,trier,vérifier,

classer,analyseretenregistrerlesseulsfaits

utilesàlacomptabilité.

Ils’agiticiderendreleplusobjectifpos-

siblelacorrectionàpartird’indicateursfins

quipermettentàl’élèvedesesituerdans

l’apprentissage5.

enCore… deux éTudianTs erasmus en éConomie à la hep vaud

pris

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| 67des ressourCes… 

Destinéauxjeunesdèsseptans,l’Espace des

Inventionsestunlieud’éveilàlascienceetàla

technique,unespacededécouverteetd’expé-

rimentation.Sesactivitésvisentàsensibiliseret

intéresserlesenfantsetlesjeunesauxquestions

scientifiques.Ilaétéouvertendécembre2000

etoccupeunbâtimentuniquedatantdel’Expo-

sitionnationalede1964,sisauparcdelaVallée

delaJeunesseàLausanne.

des expositions

Depuissafondation,l’Espace des Inventionsa

présentéplusieursexpositions,dont4créations

maison.Sapremièreexpositions’intitulaitLa lu-

mière: voir plus loin que le bout de son nez.Des

thèmescommela réfraction, le kaléidoscope

géant, l’ombre et la lumièreétaientabordésde

manièreconcrèteetpratiquegrâceàplusde25

expériencesquelesvisiteurspouvaientmanipu-

lerpourdécouvrirlalumière,soncomportement,

sesapplicationsetses«bizarreries».Actuelle-

mentetjusqu’au6janvier2008,onpeutvoir

l’expositionintituléeFeuille, Caillou, Ciseaux :

à la découverte des matériaux.Lesvisiteursont

lapossibilitédesoupeser,déformer,palperdes

matières(métal,plastique,composite…),deles

testerenlesmanipulantgrâceàdesexpériences

imaginatives,ceciafindemieuxcomprendreles

matériauxetleurspropriétés.

Lesclassespeuventbiensûrvisitercetteex-

position.Deplus,undossierpédagogiqueestà

dispositionsurlesitedel’Espace des Inventions 1

etsurceluid’Ecole-Musée2,afindepréparerles

élèvesavantleurvenue.Desanimateurscompé-

tentsetforméss’efforcerontd’adapterlavisite

àl’âgeetàl’intérêtdesélèves.

le club des petits inventeurs

L’Espace des Inventionsorganiserégulière-

mentdesatelierspourlesenfants:leClub des

petits inventeursproposeauxjeunesdeseptà

douzeansdes’initieràladémarchedel’ingé-

nieurenréalisantdesexpériencesscientifiques

etdesobjetstechniquesqu’ilsramènerontàla

maison.Cesatelierssontorganisésencollabora-

tionavecleCentrevaudoisd’aideàlajeunesse

(CVAJ)etontlieulesmercredisaprès-midi.

pain, science & chocolat

Denombreusesconférencesscientifiquesont

lieuenSuisseromande,maispeusontaccessi-

blesauxenfantsetspécifiquementconçuesen

fonctiondeleursinterrogations.Pain, Science &

Chocolatestuncycledeconférencesdestinéaux

famillesquisedéroulechaqueautomne.Présen-

téparunouplusieursscientifiques,cemoment

interlude – curiositéoffrelapossibilitéàchacun,

petitougrand,deposertoutessesquestions,

puisdeprendreungoûterdansuneambiance

décontractéeetconviviale.L’entréeauxconfé-

rencesPain, Science & Chocolatestlibreetle

goûteroffert.Leprogrammesedéroulegénéra-

lementlesdimanchesenfind’après-midi.

autres activités

Danslebutd’éveillerl’intérêtdesenfantsetdes

jeunespourlascienceetlatechnique,l’Espace

des Inventionscréediversévénementstoutau

longdel’année.LeGrand Concours romand

pour Petits Inventeursinvite,parexemple,les

classesde4et5eannéedeRomandieàinventer

unengintechniquepourrésoudreunproblème.

Lagrandefinaleauralieucetteannéele2juin

2007.

L’Espace des Inventionscollaboreégalement,

chaqueannée,àlaNuitdesmuséesetàd’autres

événementsannuelscommePâKOMUZé.

valentine lugrin

chargée de communication

à l’Espace des Inventions

1 Coordonnéesdel’Espace des Inventions:ValléedelaJeu-

nesse1,1007Lausanne.www.espace-des-inventions.ch

[email protected]él:0213156880Fax:021

31568822 Voiraussilaprésentationd’Ecole-MuséedansPrismes5de

novembre2006,p68:www.ecole-musee.vd.ch

l’espace des inventions

l’éducation à l’environnement, ça s’apprend…

CecentrePro Natura 1estsituéàCheseaux

Noréaz2dansuncadresauvagesurlarivesud

dulacdeNeuchâtel.Lesclassespeuventse

baladeraugrédespasserellesetdeschemins

danslaréserveeteffectuerdesobservationsde

lafauneetdelavégétationtypiquesdecette

zonehumide.Diversesactivitésetexpositions

sontproposées.

Depuisleprintemps2006,lesentierdespa-

pillonsinvitelesdétectivesenherbeàrésoudre

uneénigmepassionnante:«Quiavolélemiel

denosruches?».Cejeudepistecheminede-

puislesruchesdudomaine,traverselesjardins,

suitleslisières,etlongelemarais.

Dèsle24mars2007,castoretombresontà

l’honneur.Uneexpositioninéditeetintrigante,

La rivière dans tous ses états,metenlumièrele

milieudelarivièreetseshabitants,aujourd’hui

enpéril.Jeuxd’adresse,d’observationetactivi-

téssensoriellessontaurendez-vous.Auxcôtés

deFaria la Truiteetd’Hector le Castor,menez

l’enquêteetbaladez-vousaufildel’eaupour

endécouvrirlessecrets.Lepoissonvousinté-

resse:découvrezsamorphologiedanslesmoin-

dresdétails.Lecastorvousattire:entrezdanssa

hutteenempruntantletunnelsouterrainamé-

nagéparcerongeur.Puis,enfilezlecostume

dumartin-pêcheuroudelasalamandrepour

plongerdanslarivière.Desanimationspermet-

tentauxenfantsd’approfondirleursconnais-

sancessurlefonctionnementdececoursd’eau.

UnspectacleaudiovisuelAu fil de l’eau, meten

scènelarivièreetconduitlespectateurtoutau

longducheminqu’elleparcourt.Deplus,le

peintregruérienJérômeGremaud,levendéen

BenoîtPerrotinetsoncollèguesculpteurDomi-

niqueRautureauunissentleurstalentsetoffrent

leursvisionsdelarivièreavecdesregardscom-

plémentairesempreintsd’unegrandesensibilité.

animatura 3

Desanimations,destinéesauxclassesainsi

qu’àtouslesgroupesintéressés,dispensentde

façonludiquedesconnaissancessurlanature

prèsdechezeux.Ellesdurenttroisheureset

sontadaptéesàl’âgeetauxcapacitésdespar-

ticipants.Desanimatricesetdesanimateursont

étéspécialementformésetserendentdansla

régiondesclassesquienfontlademande.Une

mallettepédagogique,pleinedejeuxetdepro-

positionsd’activitéspermetd’éveillerlacuriosité,

l’enthousiasme et l’émotiondesélèvestouten

lesstimulantàjeterunregardcritiquesurla

naturequilesentoure.

Animaturarépondauxattentesdesensei-

gnants.Deplus,lesobjectifsdesanimationss’in-

tègrentdanslesplansd’étudesofficiels.L’année

passée,lesélèvesontétéamenésàdécouvrirles

coursd’eau.Cetteannée,ilsserontconduitssur

lestracesducastor.

et encore…

• Uneplate-formedidactiqued’e-learningpour

partiràladécouvertedescoursd’eauderrière

sonordinateuretmieuxlescomprendredans

lanature.Liendirect:www.liberez-nos-rivie-

res.ch

• Desaidespourl’enseignementetdumatériel

didactiquesurdifférentsthèmesenrapport

aveclaprotectiondelanature,dontunelet-

tred’informationenvoyéetroisfoisparan

auxenseignants.

• UnjournalpourlesjuniorsCroc’nature,pro-

posechaquetrimestreunnumérorichement

illustré,quiabordeunthèmedelanaturepar

exemplel’eau c’est la vie, la nuit, les fourmis

des bois, le renard, le castoretrécemment

l’ombre.Cejournalestuneressourcepour

l’éducationàlanatureetàl’environnement

toutparticulièrementpourlesclassesdejeu-

nesélèves.

régine Clottu

1 Pro Naturafutfondéeen1909souslenomdeLigue suisse

pour la protection de la nature.L’objectifdecettenouvelle

associationconsistaitàouvrirunparcnationalenEngadine.

L’ambitieuxprojetaboutiten1914.EnSuisse,Pro Naturaest

l’associationderéférenceenlamatière.Elleaccueilletoute

personneaimantlanatureetcomprendaujourd’hui100’000

membres.Ellecollaboreàlagestiondeplusde600réserves

naturellesenSuisse.2 LecentrePro NaturadeChamp-Pittet,1400Yverdon-les-

Bains,estouvertdu24marsau4novembre07,dumardiau

dimanchede10hà17h30.www.pronatura.ch/champ-pittet

[email protected]él0244269341.3 Pourplusd’informations,consultezlesitewww.pronatura.

chrubriqueEcole/Jeunesseouécrivezàeducation.environ-

[email protected]él.0244269315.

le CenTre pro natura  de Champ-piTTeT (vd)

des ressourCes… 

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explorer le Ciel esT un Jeu d’enFanT•mireille hartmann(2001).Explorer le ciel est un jeu d’enfant. editions le pommier.

Partiràladécouvertedesplanètes,descomètesetdesétoiles,c’estcequeproposecelivretruffé

d’illustrationsetdeschémasexplicatifs.Ils’adresseauxjeunesélèvesetleurproposedesactivités

variéescomme,parexemple,l’observationin situ(àl’œilnuouauxjumelles…),dessimulationsà

l’aidedemaquettestrèssimples,laréalisationdereprésentationsartistiquescoloréesouencore

lemimedusystèmesolairedansunegrandesalle.Unequantitédedomainesd’apprentissage

sonttouchésparcesactivités:exercicesgraphiques,créationsartistiques,perceptionsvisuelles

etobservation,apprentissagedelalectureparlanécessitédereconnaîtrelesnomsdesplanètes,

structurationdel’espaceetdutemps,etd’autresencore…Deplus,àlafindel’ouvrage,ontrouve

desfichesàphotocopier,illustrantdestravauxdirigésàpartirdesdifférentsthèmes.Maisparces

activitéstrès«concrètes»,lesenfantss’interrogent,découvrent,s’étonnent,admirentetsont

gagnésparunémerveillementdevantl’immensitédel’univers.

régine Clottu

méCanique, une inTroduCTion par l’hisToire de l’asTronomie•eric lindemann(1999).Mécanique, une introduction par l’histoire de l’astronomie.de Bœck, 

Bruxelles.

DanscenumérodePrismes,EricLindemannaprésentélui-mêmesonouvragedanssonarticle

«DelaPhysique?Faut-ilencoreenseignerlaphysiqueauGymnaseendehorsdesoptions?».Qu’on

mepermettededonnericimontémoignagedelecteurlittéraire,quiauraitpudonc,s’ilavaitété

beaucoupplusjeune,bénéficierdesoncoursdephysiquedestinéauxnonscientifiques.Sonvaste

panorama,del’antiquitégrecqueànosjours,suscitetoutd’abordunimmenserespectpourcette

prodigieusehistoiredelaconnaissancerigoureusedumonde,parfoischaotique,toujoursproblé-

matique,toujoursenmarche.Mêmesileprofanenepeutlaregarderquedeloin,ilestfrappé

parlabeautéintellectuelledecetteœuvredueàlacuriositéetàlasouveraineintelligencedes

grands.LalecturepatientedulivredeLindemannprovoqueensuitechezlelittéraireouvertaux

sciencescesentimentaprèstoutdélicieuxd’êtreintelligent !Carl’auteurconduitsonlecteurpas

àpas,enexigeantcertesdeluiuneffort(nulledémagogie,nullefacilité),pourluipermettrede

comprendrecequ’iln’avaitfaitqu’entrevoir.Etl’onnepeutpastaireenfinlestyledel’auteur,

d’uneéléganteclartétouteclassique.C’estdoncàunebelle leçond’intelligenceetd’humilitéque

nousconviel’auteur,leçonquej’aisuivieavecbonheur,regrettantmêmeparfoisd’avoirétéson

collègue,etnonsonélève!

denis girardet

Coup de Cœur :  présenTaTion de livres

Je souhaiTe oBTenir un aBonnemenT à prismes

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l’avenir des enfants et des jeunes.

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impressumComité de rédactionNicolasChristin,RégineClottu,DenisGirardet,Jean-LouisPaley,MargueriteSchlechtenRauber.AveclacollaborationdeJean-ChristopheDecker.responsable éditorialConseildedirectiondelaHEPVaudadresse postale RédactiondePrismes,HEP-InstitutdeformationcontinueAv.deCour33,CP,CH-1014Lausanneadresse électronique du comité de ré[email protected] webwww.hep.vd.ch,rubriquePublicationsmaquette et réalisationAtelierK,Lausannephotographies NicolasChristinP.8Dessinsd’étudiantsUnige/P.14&15DessinsdeNasrat/P.16DessindeChiaraCINPully/P.20&22Illustrationsextraitesdel’ouvrageintitulé:Mécanique,uneintroductionparl’histoiredel’astronomie.EricLindemann.Ed.DeBœck.1999/P.26PhotoEPFL.E.Salathé/P.47Composition.J.Treboux.AVI.9b1.Es.Planta/P.49DessindeVirginieUhlmann.GymnasedeNyon/P.50Dessind’YvanSchneider/P.66Erasme.Gravure/P.67Affi-cheEspacedesInventionsLausanne.PhotoAlainHerzog/P.68Logoetextraitd’illustration.RevueProNaturaJanvier2007/P.69ScanCouverturesdelivres:Explorerlecielestunjeud’en-fant.MireilleHartmannEd.LePommier2001Mécanique,uneintroductionparl’histoiredel’astronomie.EricLindemannEd.DeBœck.1999.Bruxelles.

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lieulepremieroctobre2007de19h30à21h30

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Venezlibrement,bienvenueàtoutesetàtous!

ComitéderédactiondePrismes :

HEP-Institutdeformationcontinue,av.deCour

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Tél:0213160931

Fax:0213162421(mentionPrismes)

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maisvivementsouhaitée.Leséchosd'expé-

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Prismes7:mi-juillet2007

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