Russia Beyond The Headlines 2015 11 2 lf all

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fr.rbth.com Distribué avec Parmi les autres partenaires de distribution : The Daily Telegraph, The New York Times, The Washington Post, La Repubblica, etc. CE CAHIER DE HUIT PAGES EST ÉDITÉ ET PUBLIÉ PAR ROSSIYSKAYA GAZETA (RUSSIE), QUI ASSUME L’ENTIÈRE RESPONSABILITÉ DE SON CONTENU Visions de la Russie Mercredi 25 novembre 2015 Terrorisme : face à un même défi, un même combat Olga Kisseleva a imaginé Urban DataScape, une installation multimédia interactive sur les problématiques liées à l’espace urbain, qu’elle expose sur les berges de la Seine en prévision de la Conférence sur le changement climatique. PAGE 8 Après avoir accueilli les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, le village montagnard de Krasnaïa Poliana joue la carte d’une destination touristique toutes saisons. PAGE 7 Conséquence de la dévaluation du rouble et de l’embargo alimentaire, des entreprises se tournent vers la production locale pour satisfaire la demande croissante d’ingrédients haut de gamme. PAGE 6 ARTISTE ET MILITANTE POUR LE CLIMAT DESTINATION « LA SUISSE RUSSE » LA TRUFFE DE CRIMÉE ET LA MORILLE DE SIBÉRIE S’INVITENT GLEB FEDOROV RBTH Pour réduire les risques du réchauffement climatique, la Russie va devoir élaborer d’urgence des programmes régionaux d’adaptation. La Conférence de Paris pourrait lui fournir un encouragement et un appui en ce sens. DOSSIER La COP21 pourrait guider la politique environnementale de la Russie pour les années à venir mélangée à la boue, a déferlé sur les localités voi- sines. À Krymsk, la ville la plus éprouvée, le niveau de l’eau a augmenté de sept mètres. La violente crue qui a commencé à trois heures du matin a pris au dé pourvu non seulement la population, mais aussi les autorités qui ont d’ailleurs été reconnues coupables : le système d’alerte n’a pas fonctionné, alors que les ca- nalisations et le lit de la rivière Adagoum ne pou- vaient absorber de si grands volumes d’eau. Trois ans plus tard, une équipe de chercheurs russes et allemands a prouvé qu’un autre responsable était à l’origine de cette anormale et tragique montée des eaux : le climat. Dans un article publié en juillet dernier par le magazine Nature Geoscience, les scien- Changement climatique : il faudra s’adapter tifiques ont fait la liaison entre l’inondation de Krymsk et l’élévation de la température des couches supérieures de la mer Noire, de deux degrés depuis 1984. Les données scientifiques indiquent clairement la nécessité pour les villes de s’adapter au change- ment climatique. Toutefois, seule Saint-Pétersbourg peut se vanter pour l’instant de disposer d’un plan approprié. Adoptée cette année, la Stratégie climatique de Saint- Pétersbourg a été élaborée au cours de quatre années sur la base de l’expérience de la Finlande, du Dane- mark, de la Grande-Bretagne et de l’Inde. SUITE EN PAGES 2 ET 3 Les inondations de juillet 2012 sur la côte russe de la mer Noire, les plus désastreuses de l’histoire du pays, ont fait 171 morts. Les régions montagneuses du territoire de Krasnodar ont enregistré jusqu’à cinq mois de précipitations en deux jours. Le ni- veau des rivières est brusquement monté et l’eau, Forte émotion dans la population russe après les attentats de Paris. Gerbes, bougies et icônes ont été déposées en masse devant l’ambassade de France à Moscou, alors que la Russie avait aussi été frappée. LIRE EN PAGES 4 ET 5 À lire en ligne La restructuration consentie comme une solution pour sauver l’économie du pays. DETTE UKRAINIENNE : LA RUSSIE ASSOUPLIT SA POSITION FR.RBTH.COM/542119 VOTRE SOURCE FIABLE D’ACTUALITÉS ET D’ANALYSES SUR LA RUSSIE * 83 % des lecteurs font confiance à rbth.com pour recueillir les avis d’experts russes sur les grandes questions. 81 % des lecteurs estiment que rbth.com fournit des informations et des analyses allant au-delà de la couverture dans les autres médias. 77 % des lecteurs estiment que le site de RBTH s’adresse au grand public, et pas seulement à un lectorat spécialisé concernant la Russie. * Statistiques basées sur un sondage public effectué le 15 mars 2015 sur le site de RBTH. Rendez-vous sur un réseau en ligne mondial à l’accent russe : fr.rbth.com CORBIS/EAST NEWS TASS

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Distribué avec

Parmi les autres partenaires de distribution : The Daily Telegraph, The New York Times, The Washington Post, La Repubblica, etc.

C E C A H I E R D E H U I T PAG E S E S T É D I T É E T P U B L I É PA R R O S S I Y S K AYA G A Z E TA ( R U S S I E ) , Q U I A S S U M E L ’ E N T I È R E R E S P O N S A B I L I T É D E S O N C O N T E N U

Visions de la Russie

Mercredi 25 novembre 2015

Terrorisme : face à un même défi, un même combat

Olga Kisseleva a imaginé Urban DataScape, une installation multimédia interactive sur les problématiques liées à l’espace urbain, qu’elle expose sur les berges de la Seine en prévision de la Conférence sur le changement climatique.PAGE 8

Après avoir accueilli les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, le village montagnard de Krasnaïa Poliana joue la carte d’une destination touristique toutes saisons.PAGE 7

Conséquence de la dévaluation du rouble et de l’embargo alimentaire, des entreprises se tournent vers la production locale pour satisfaire la demande croissante d’ingrédients haut de gamme. PAGE 6

ARTISTE ET MILITANTE POUR LE CLIMAT

DESTINATION « LA SUISSE RUSSE »

LA TRUFFE DE CRIMÉE ET LA MORILLE DE SIBÉRIE S’INVITENT

GLEB FEDOROVRBTH

Pour réduire les risques du réchauffement climatique,

la Russie va devoir élaborer d’urgence des

programmes régionaux d’adaptation. La Conférence

de Paris pourrait lui fournir un encouragement et un

appui en ce sens.

DOSSIER La COP21 pourrait guider la politique environnementale de la Russie pour les années à venir

mélangée à la boue, a déferlé sur les localités voi-sines. À Krymsk, la ville la plus éprouvée, le niveau de l’eau a augmenté de sept mètres. La violente crue qui a commencé à trois heures du matin a pris au dé pourvu non seulement la population, mais aussi les autorités qui ont d’ailleurs été reconnues coupables : le système d’alerte n’a pas fonctionné, alors que les ca-nalisations et le lit de la rivière Adagoum ne pou-vaient absorber de si grands volumes d’eau.Trois ans plus tard, une équipe de chercheurs russes et allemands a prouvé qu’un autre responsable était à l’origine de cette anormale et tragique montée des eaux : le climat. Dans un article publié en juillet dernier par le magazine Nature Geoscience, les scien-

Changement climatique : il faudra s’adaptertifiques ont fait la liaison entre l’inondation de Krymsk et l’élévation de la température des couches supérieures de la mer Noire, de deux degrés depuis 1984. Les données scientifi ques indiquent clairement la nécessité pour les villes de s’adapter au change-ment climatique. Toutefois, seule Saint-Pétersbourg peut se vanter pour l’instant de disposer d’un plan approprié.Adoptée cette année, la Stratégie climatique de Saint-Pétersbourg a été élaborée au cours de quatre années sur la base de l’expérience de la Finlande, du Dane-mark, de la Grande-Bretagne et de l’Inde.

SUITE EN PAGES 2 ET 3

Les inondations de juillet 2012 sur la côte russe de la mer Noire, les plus désastreuses de l’histoire du pays, ont fait 171 morts. Les régions montagneuses du territoire de Krasnodar ont enregistré jusqu’à cinq mois de précipitations en deux jours. Le ni-veau des rivières est brusquement monté et l’eau,

Forte émotion dans la population russe après les attentats de Paris. Gerbes, bougies et icônes ont été déposées en masse devant l’ambassade de France à Moscou, alors que la Russie avait aussi été frappée.

LIRE EN PAGES 4 ET 5

À lire en ligne

La restructuration consentie comme une solution pour sauver l’économie du pays.

DETTE UKRAINIENNE : LA RUSSIE ASSOUPLIT SA POSITION

FR.RBTH.COM/542119

VOTRE SOURCE FIABLE D’ACTUALITÉS ET D’ANALYSES SUR LA RUSSIE *

83 % des lecteurs font confiance à rbth.com pour recueillir les avis d’experts russes sur les grandes questions.

81 % des lecteurs estiment que rbth.com fournit des informations et des analyses allant au-delà de la couverturedans les autres médias.

77 % des lecteurs estiment que le site de RBTH s’adresse au grand public, et pas seulement à un lectorat spécialisé concernant la Russie.

* Statistiques basées sur un sondage public effectué le 15 mars 2015 sur le site de RBTH.Rendez-vous sur un réseau en ligne mondial à l’accent russe : fr.rbth.com

CORBIS/EAST NEWS

TASS

Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le Figaro

DOSSIER2Mercredi 25 novembre 2015

ENVIRONNEMENT

RUSSIA BEYOND THE HEADLINES (RBTH) PUBLIE 37 SUPPLÉMENTS DANS 29 PAYS POUR UN LECTORAT TOTAL DE 30 MILLIONS DE PERSONNES ET GÈRE 22 SITES INTERNET EN 17 LANGUES.

LES SUPPLÉMENTS ET CAHIERS SPÉCIAUX SUR LA RUSSIE SONT PRODUITS ET PUBLIÉS PAR RUSSIA BEYOND THE HEADLINES, UNE FILIALE DE ROSSIYSKAYA GAZETA (RUSSIE), ET DIFFUSÉS DANS LES QUOTIDIENS INTERNATIONAUX SUIVANTS: • LE FIGARO, FRANCE • LE SOIR, BELGIQUE• THE DAILY TELEGRAPH, GRANDE-BRETAGNE • HANDELSBLATT, ALLEMAGNE • EL PAÍS, ESPAGNE • LA REPUBBLICA, ITALIE • NOVA MAKEDONIJA, MACÉDOINE • NEDELJNIK, GEOPOLITIKA, SERBIE • LE JEUDI, TAGEBLATT, LUXEMBOURG • THE WASHINGTON POST, THE NEW YORK TIMES,

FOREIGN POLICY, INTERNATIONAL NEW YORK TIMES ET THE WALL STREET JOURNAL, ÉTATS-UNIS • THE ECONOMIC TIMES, THE NAVBHARAT TIMES, INDE • MAINICHI SHIMBUN, JAPON • HUANQIU SHIBAO, CHINE • LA NACION, ARGENTINE • EL PAÍS, CHILI • EL PERUANO, PÉROU •

EL PAÍS, MEXIQUE • FOLHA DE S.PAULO, BRÉSIL • EL OBSERVADOR, URUGUAY • LA RAZON, BOLIVIE • JOONGANG ILBO, JOONGANG SUNDAY, CORÉE DU SUD • GULF NEWS, AL KHALEEJ, ÉMIRATS ARABES UNIS • AL-AHRAM, ÉGYPTE • THE NATION, PHUKET GAZETT, THAÏLANDE •

THE AGE, SIDNEY MORNING HERALD, AUSTRALIE.  COURRIEL : [email protected]. POUR DE PLUS AMPLES INFORMATIONS, CONSULTER FR.RBTH.COM. LE FIGARO EST PUBLIÉ PAR DASSAULT MÉDIAS, 14 BOULEVARD HAUSSMANN 75009 PARIS. TÉL: 01 57 08 50 00. IMPRESSION : L’IMPRIMERIE, 79, RUE DE ROISSY 93290 TREMBLAY-EN-FRANCE. MIDI PRINT 30600 GALLARGUES-LE-MONTUEUX. DIFFUSION : 321 101 EXEMPLAIRES (OJD PV DFP 2011)

ADAPTATION FORCÉE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

Cette Stratégie défi nit – pour la pre-mière fois en Russie – les moyens de prévenir les risques et d’adapter la ville au changement climatique, notamment aux inondations, étant donné que d’ici à 2100, le niveau de l’eau dans le golfe de Finlande pourrait monter d’un mètre, rendant inefficaces les systèmes actuels de protection de la ville. Or, il n’existe toujours pas de plan d’adaptation ni pour Moscou, qui a subi une vague de chaleur en 2010, ni pour les régions extrême-orientales, qui ont vécu en 2013 la plus grande inondation depuis un siècle, ou encore pour l’Arctique qui, en raison du réchauffement et de l’érosion de la côte, perd tous les ans un territoire qui fait huit fois la taille de Saint-Marin.Le plan national adopté en 2011 est resté lettre morte, car il a été remis pour ma-térialisation au ministère russe du Dé-veloppement régional, qui a ensuite été dissous, rappelle Vladimir Tchouprov, res-ponsable du département Énergie de Greenpeace Russie. Désormais, les ré-gions doivent compter sur elles-mêmes.

Une « pause » de 10 à 15 ansEntre-temps, la grande différence entre l’accord qui devrait être signé dans le cadre de la Conférence de Paris sur le climat (COP21) et le Protocole de Kyoto est de déplacer l’accent pour le faire pas-ser de la baisse des émissions de gaz à effet de serre à l’examen des moyens de s’adapter au climat en mutation. De ce point de vue, le sommet de Paris est d’ac-tualité pour la Russie où l’adaptation n’en est encore qu’à ses débuts.Cependant, d’après Alexeï Kokorine, di-recteur du programme Climat et Éner-gie du WWF Russie, l’intérêt principal du sommet résidera moins dans l’élabo-ration d’un programme en vue de limi-ter les émissions (les débats sur le pro-blème se sont poursuivis sans relâche ces dernières années, sans aboutir), que dans l’importance des ressources qui seront débloquées par les grandes économies à destination des pays les plus vulnérables au réchauffement climatique, et dans quels délais elles pourront être fournies.Selon les experts, l’enjeu est de 100 mil-liards de dollars d’ici à 2020. En d’autres termes, Paris « signifi e une pause de 10 à 15 ans dans une baisse réelle des émissions ‘compensée’ par une aide importante aux pays faibles », ex-

plique Alexeï Kokorine. Les pays déve-loppés s’arrangeront pour faire peser le fardeau fi nancier sur les entreprises pri-vées, tandis que les pays pauvres tente-ront d’obtenir un maximum de ressources publiques.Étant donné que la Russie fait partie d’un groupe intermédiaire de pays assez dé-veloppés pour ne pas prétendre à une aide fi nancière, mais pas assez forts pour devenir donateurs, elle ne sera pas à l’ordre du jour du sommet. Mais le défi pour Moscou sera de déterminer com-ment s’intégrer à un processus de déve-loppement à faible empreinte carbone sans pour autant détraquer une machine économique qui dépend fortement des secteurs énergétiques traditionnels.Les engagements que le pays se dit prêt à prendre ont de quoi impression-

ner – la Russie promet d’ici à 2030 de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre de 25% à 30% par rapport à 1990. Mais ils signifi ent en fait que d’ici à la date butoir, il est peu probable que le pays réduise ses émissions, vu que celles-ci sont d’ores et déjà moins importantes qu’en 1990. Les écologistes prévoient que la Russie poursuivra sur la même voie, en encourageant dans la mesure du pos-sible l’adaptation d’une part, et de l’autre, le développement des énergies vertes qui ne fournissent pour l’instant qu’environ 1% de l’électricité du pays.

Le tournant « vert »Il importe de souligner que les autori-tés ont conscience de la réalité incon-tournable du changement climatique. Lors de l’Assemblée générale des Na-

tions unies, Vladimir Poutine, qui a confi rmé qu’il participerait au sommet de Paris, a placé cette question parmi les plus importantes auxquelles est confrontée l’humanité.Le chef du département écologique au ministère russe du Développement éco-nomique, Vladimir Maximov, confi rme que depuis la signature par Vladimir Poutine du décret sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2013, la réponse au défi du réchauffement cli-matique n’est plus au point mort dans le pays. Mais la résolution que l’État manifestera dans le développement de l’énergie verte et des dispositions d’adaptation dépendra dans une large mesure des résultats du sommet de Paris et de la décision de signer ou de ne pas signer l’accord envisagé.

YANA PTCHELINTSEVAPOUR RBTH

La fonte du pergélisol serait

irréversible, selon les chercheurs

russes. Les études menées sur le

plateau de l’Arctique et sur le continent

tendent à le prouver.

EFFET DE SERRE Le cercle vicieux des émissions massives de gaz

Source de gaz à l’effet de serre, les lacs thermokarstiques ont depuis peu com-mencé à s’agrandir. Sur les images sa-tellites, certaines de ces masses d’eau formées par la fonte du pergélisol et riches en carbone sont méconnaissables par rapport à leur état d’il y a quelques années, et, à certains endroits, les zones côtières se sont décalées de 65 mètres en deux ou trois ans seulement. Ce phénomène fait depuis plus de vingt ans l’objet d’étude de scientifi ques de l’Université d’État de Tomsk (Sibérie). La recherche est menée dans la région subarctique de la Sibérie occidentale.

Les lacs sibériens, accélérateurs de problèmes climatiques majeurs

« C’est dans l’eau que le carbone orga-nique des sols, également appelé tourbe, se transforme en dioxyde de carbone (CO2) le plus rapidement, indique Ser-gueï Kirpotine, directeur du centre de recherches BioKlimLand à l’Univer-sité de Tomsk. La Sibérie subarctique est recouverte à plus de 80% de lacs thermokarstiques, mais ni l’ampleur du fl ux de dioxyde de carbone ni la composition chimique de l’eau n’ont encore été évaluées ».Lors de l’étude, les chercheurs ont dé-couvert que les petits lacs – ceux d’une surface inférieure à 300 mètres carrés, littéralement indétectables par satel-lite et ne figurant sur aucune carte – émettent beaucoup plus de gaz à effet de serre que les lacs plus éten-dus. La toundra sibérienne compte des millions de ces lacs minuscules. En rai-son de leur taille négligeable, ils n’étaient pas du tout comptabilisés dans

les modèles d’échange de carbone jusqu’à récemment.La fonte croissante du pergélisol en Sibérie occidentale fait craindre aux scientifi ques que les grands lacs ther-mokarstiques ne se décomposent en une multitude de petits lacs. « Cela pourrait provoquer une hausse majeure des gaz à effet de serre et une dissolu-tion des émissions organiques de car-bone dans les rivières et l’océan Arc-tique », explique M. Kirpotine.

Une situation encore plus inquiétante au largeLe processus en cours sur le plateau continental arctique est un problème encore plus inquiétant que les lacs ther-mokarstiques. Les scientifi ques d’une autre université de Tomsk ont étudié ces changements et noté que les émis-sions de carbone sous la forme de mé-thane (CH4) et de dioxyde de carbone

UNE ÉVOLUTION MESURABLE

La vitesse moyenne du réchauff ement par décennie en Russie est de 0,42 degré (1976-2014). Dans l’Arc-tique, cet indice est de 0,66 degré (1985-2014).

À savoirEn chiffres

7 années sur les dix les plus

chaudes en Rus-sie depuis 1936 ont été enregis-trées au XXIème siècle.

Inondations à Tosno, dans l’oblast de Leningrad, en avril 2013.

En ligne

Journal d’une exploratrice de l’Arctiquefr.rbth.com/541553

du territoire russe sont dans la zone du pergélisol.

67%

En chiffres

EPA

3Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le Figaro Mercredi 25 novembre 2015

DOSSIER

Émissions de gaz à eff et de serre en Russie

La Russie se classe au quatrième rang mondial en termes d’émissions de gaz à eff et de serre, derrière la Chine, les États-Unis et l’Inde. Le pays s’engage à réduire ses émissions, d’ici à 2030, de 25 à 30% par rapport au niveau constaté en 1990. Selon les dernières données disponibles, en 2012, la Russie est parvenue à diminuer ses émissions de près de 31% par rapport à 1990. Toutefois, il convient de noter qu’après une baisse importante enregis-trée à la fi n des années 1990, le taux des émissions a recommencé à grimper au début des années 2000. Ceci s’explique par la forte croissance économique ayant marqué la première décennie du XXIème siècle, accompagnée de l’augmentation du nombre de véhicules (l’émission de CO2 par les automobiles a été multipliée par 2,5 de 2001 à 2011) et le développement du secteur des hydrocarbures.

exercent déjà un impact signifi catif sur le climat de la Terre.« Il y a cinq ans, nous avons découvert que les émissions massives de méthane qui se produisent dans les mers de l’Arc-tique de l’ouest représentent à peu près le double des émissions dans l’ensemble des océans du monde », indique Igor Semiletov, géochimiste à l’Institut océa-nologique du Pacifi que et à l’Univer-sité polytechnique de Tomsk.En 2014, une équipe internationale de chercheurs dirigée par M. Semiletov est partie pour l’océan Arctique à bord du brise-glace scientifi que Oden. Les chercheurs ont été les premiers à exa-miner les eaux du plateau de l’Arctique de l’ouest externe à une profondeur de plus de 45 mètres. Les scientifi ques ont

découvert que les émissions de carbone sur le plateau étaient beaucoup plus intenses que prévu. Jusqu’à plusieurs milliers de grammes de méthane par mètre carré sont émis au quotidien, ce qui montre que le pergélisol sous-ma-rin de l’Arctique a été sévèrement dé-gradé. Quelque 700 « trous de mé-thane » de ce type, chacun d’une taille allant jusqu’à 800 mètres de diamètre, ont été retrouvés sur le plateau.« Nous trouvons de plus en plus de preuves qui confi rment notre hypothèse sur le rôle prédominant du plateau continental de la Sibérie dans le chan-gement de l’équilibre terrestre en mé-thane aujourd’hui et au cours des 400 dernières années au minimum », conclut Igor Semiletov.

Premier producteur mondial d’énergies fossiles et quatrième émetteur de gaz à effet de serre (GES), la Russie se devait d’être présente à Paris pour le sommet de la COP21. Et pour cause : 90% de l’énergie produite en Russie vient du carbone (pétrole, charbon et gaz), 82% de ses rejets de GES sont générés par la production énergétique et cette der-nière constitue 70% de ses exportations. Compte tenu du poids du secteur éner-gétique dans l’activité du pays, difficile de passer rapidement à une économie dé-carbonée car cela impliquerait de revoir toute la conception et la struc-ture de la fi lière énergétique russe. C’est un peu comme si l’on demandait à la France de s’affranchir du nucléaire du jour au lendemain.

Décalage entre la Russie et l’UEPour Alexandre Nekrassov, directeur exécutif de l’Association des entreprises françaises pour le développement de l’efficacité énergétique et la sécurité éco-logique (U4E), la structure de la fi lière énergétique russe, axée sur le pétrole, le charbon et le gaz, explique le « dé-calage entre l’approche de l’Union eu-ropéenne qui prône un mixage énergé-tique [fossile-renouvelable, ndlr] et celle de la Russie qui se concentre sur l’op-timisation de l’efficacité énergétique ».Fin 2008, un rapport de la Banque mon-diale estimait que l’optimisation de la totalité de la fi lière énergétique permet-trait à la Russie d’économiser jusqu’à 45% de sa consommation totale d’éner-

COP21 : comment concilier des objectifs divergents

Pollution industrielle à Moscou.

C’est dans l’eau que le carbone organique des sols se transforme en dioxyde de carbone le plus rapidement.

gie primaire (avant transformation). L’ampleur des pertes constitue tout de même la consommation annuelle d’éner-gie primaire d’un pays comme la France.C’est dans cet esprit qu’en 2009, Dmi-tri Medvedev, à l’époque président de la Fédération de Russie, a promulgué une loi sur l’efficacité énergétique dont l’objectif était de réduire d’au moins 40% par rapport à 2007 les émissions polluantes d’ici à 2020. Ses cibles : l’électroménager, l’immobilier et le sec-teur public au sens large. Une poli-tique qui a produit des résultats grâce aux « contrats d’efficacité énergétique », ceux-ci favorisant le fi nancement des investissements dans les technologies propres par les économies d’énergie qu’elles permettent de réaliser.

Message compris dans l’industrie« Le géant de l’aluminium Rusal est ainsi parvenu à diviser par deux sa consommation énergétique », fait re-marquer Alexandre Nekrassov. Le pro-blème, c’est que ces incitations ne sont pas assez utilisées par le secteur pétro-lier, tout comme les collectivités locales, qu’il s’agisse des transports, de l’éclai-rage public ou encore de l’immobilier. « L’innovation comporte un risque. Même si le système fonctionne, les élus locaux ne souhaitent pas forcément l’as-sumer devant leurs électeurs », pour-suit le directeur d’U4E.En fi n de compte, il pourrait y avoir un décalage entre la baisse réelle des émis-sions et les objectifs annoncés à l’hori-zon 2020. « Il n’y pas d’incitation éco-nomique : ni taxe carbone, ni marché du carbone ou encore une combinaison des deux, ce qui fait que l’État n’est pas en mesure de contraindre les entreprises à réguler leur intensité carbone [quan-tité de CO2 émise relative à leur crois-sance, ndlr] », déplore Vladimir Tchou-prov, responsable du département Énergie de Greenpeace Russie.

Les énergies renouvelables restent marginales en RussieQuant au renouvelable, il estime qu’« il arrive tard et au mauvais moment ». En effet, outre qu’il va à l’encontre de l’équilibre budgétaire, la faiblesse ac-tuelle du prix du baril n’incite pas à investir dans l’alternative que consti-tuent les énergies renouvelables. « Le prix du pétrole est bas et les prix de l’énergie aussi par rapport à la situa-tion internationale », poursuit l’expert de Greenpeace, pour qui les énergies renouvelables restent marginales en Russie puisqu’elles ne constituent que 1% de la production électrique du pays, contre 5% en Chine, 7% aux États-Unis et de 25% à 40% en Allemagne, selon les conditions météorologiques.Accroître les subventions ou les inci-tations étatiques, qu’il s’agisse du re-nouvelable comme de l’efficacité éner-gétique, « semble difficile compte tenu des difficultés actuelles de l’économie », ajoute Vladimir Tchouprov, « sachant que la priorité des autorités reste la maîtrise de l’infl ation et la stabilisa-tion des taux d’intérêt ».

Une énergie trop bon marchéAlexeï Kokorine, directeur du pro-gramme Climat et Énergie du WWF Russie, estime pour sa part que si cer-tains grands groupes investissent dans

l’efficacité énergétique, la question reste secondaire pour les petites et moyennes entreprises. « L’instabilité du cadre légal et fi scal, ainsi que les différences de mises en application régionales, em-pêchent les PME de se projeter au-de-là de quelques années. C’est la raison pour laquelle elles négligent l’efficaci-té énergétique, qui se mesure sur le long terme, regrette l’expert. En soi, les idées développées par les autorités sont bonnes, mais compte tenu des pro-blèmes rencontrés dans leur mise en œuvre, les buts sont inaccessibles ». Une opinion partagée par Vladimir Tchouprov, pour qui « une incitation économique, comme la hausse des prix de l’énergie, est nécessaire pour sortir du statu quo actuel ».D’où l’importance de la présence à Paris de Vladimir Poutine, plus au plan in-térieur qu’international, estiment les défenseurs russes de l’environnement. Elle signale aux régions l’intérêt que le pouvoir central porte au réchauffe-ment et, par conséquent, à l’améliora-tion de l’efficacité énergétique. Alexandre Nekrassov résume les en-jeux : « c’est une étape importante pour le dialogue entre les groupes russes et internationaux. J’attends de cette COP21 qu’elle permette d’entériner un programme de solutions sur lesquelles nous pourrons travailler ».

LOUIS BONAVENTUREPOUR RBTH

De l’aveu des écologistes, l’application

de la loi russe de 2009 sur l’efficacité

énergétique reste trop complexe. Le

statu quo perdurera à défaut de la mise

en place d’un mécanisme contraignant

les entreprises à investir. La COP21

pourrait déboucher sur des solutions.

ENVIRONNEMENT La structure de la filière énergétique russe reste axée sur les fossiles

1 9% des res-sources hydriques

mondiales sont concentrées en Russie. À ce jour, l’énergie hydrau-lique fournit 21 % de la production russe d’électricité.

2  La Russie possède un potentiel

énorme de pro-duction d’énergie éolienne (jusqu’à 30% des besoins nationaux en électricité).

3  L’éner-gie solaire est sous-

exploitée. Mais la croissance du photovoltaïque pourrait être mul-tipliée par 25 de 2016 à 2020.

POINTS CLÉSSUR LES ÉNERGIES ALTERNATIVES

3

FR.RBTH.COM/TECH

In

As PhCh El

Pa

BiEs Me

InINTERNET

ASTROPHYSICSPHYSIQUE

CHIMIE

ÉLECTRONIQUEBIOLOGIE

PALÉONTOLOGIE

INGÉNIERIE

ESPACEMÉDECINE

MALADIES OCULAIRES :

POURQUOI DES ÉTRANGERS

VIENNENT SE SOIGNER EN

RUSSIE

fr.rbth.com/168289

CE DONT PARLENT

LES COSMONAUTES

fr.rbth.com/383145

DIX AVIONS ENTRÉS

DANS LA LÉGENDE

DE L’AVIATION

RUSSE

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En ligne

La Russie n’échappera pas à la construction durablefr.rbth.com/32107

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ALENA REPKINA

SHUTTERSTOCK/LEGION-MEDIA TATIANA POSPELOVA

4Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le FigaroMercredi 25 novembre 2015

INTERNATIONAL & POLITIQUE

Un avion de combat Sukhoï Su-30 russe sur la base militaire de Hmeimim (Lattaquié, Syrie).

SERGUEÏ BALMASSOV POUR RBTH

La Russie a remporté quelques succès

tactiques en Syrie. Toutefois, les

ressources militaires actuellement

engagées sont insuffisantes pour

porter un coup sévère à l’État

islamique, estiment les experts.

OPÉRATION MILITAIRE EN SYRIE La Russie a intensifié ses frappes contre les positions de l’État islamique

Le 17 novembre, suite à la confi rmation officielle de l’attentat contre l’avion А321, la Russie a fortement intensifi é son acti-vité en Syrie. Le nombre de bombarde-ments menés par les forces aériennes russes a augmenté et la puissance de ces bombardements a doublé avec l’utilisa-tion de missiles de croisière contre les terroristes de l’ État islamique (EI, orga-nisation terroriste interdite en Russie) et, pour la première fois, le recours aux bom-bardiers stratégiques à long rayon d’ac-tion. Les frappes russes visaient les pro-vinces d’Alep et de Deir ez-Zor, ainsi que Raqqa, la capitale non officielle de l’EI.

Renforcement des moyens ?Les experts émettent des avis globale-ment positifs sur la campagne des forces aériennes russes, précisant toutefois qu’elle reste d’une amplitude insuffisante pour causer des dommages sérieux au sein de l’EI. « Les actions de l’aviation militaire russe sont très efficaces, mais leur modeste intensité n’a permis de rem-porter que des succès tactiques », explique Konstantin Sivkov de l’Académie des pro-blèmes géopolitiques et ancien chef de l’un des bureaux de l’état-major russe. « Cette situation témoigne de l’insuffi-sance des forces. Les dernières frappes menées par les missiles de croisière et les raids de l’aviation à long rayon d’action visent à remédier à cette situation ». M. Sivkov estime que pour porter un « coup véritablement mortel » à l’EI, Mos-

Une action efficace mais insuffisante

ALEXEÏ TIMOFEÏTCHEVRBTH

Les attentats de Paris et l’explosion de

l’Airbus A321 dans le Sinaï devraient

déboucher sur une convergence des

efforts de Paris et de Moscou contre

les menaces de l’organisation terro-

riste. Le point sur la situation en Russie.

TERRORISME Moscou reconnaît un attentat dans la destruction du vol à destination de Saint-Pétersbourg

Le 12 novembre, l’État islamique (EI, organisation terroriste interdite en Rus-sie) a publié une vidéo dans laquelle il avertit la Russie. Très bientôt, le sang coulera à fl ot, dit le message chanté en russe. Les experts estiment que l’EI pré-sente une menace réelle pour la Russie, mais appellent à ne pas la surestimer, même après les événements tragiques récents.

Talons d’Achille éventuelsLes observateurs soulignent deux « ta-lons d’Achille » dans la sécurité du pays. Depuis le confl it tchétchène au début des années 1990, le Caucase du Nord est la région russe la plus instable. Pour les experts, les liens entre l’EI et les com-mandos caucasiens sont évidents. Il y a environ un an, les terroristes de l’EI ont déclaré leur intention de « libérer » cette région, notamment la Tchétchénie, pour y créer un « califat islamique ». Au-jourd’hui, « même les dirigeants des pe-tites bandes du Caucase russe ont fait allégeance à l’EI », confirme Sergueï Gontcharov, président de l’Association des anciens combattants de l’unité anti-terroriste d’élite Alfa.Cependant, les forces de l’ordre maî-trisent assez efficacement les extrémistes dans la région dotée d’un système de lutte anti-terroriste. Ivan Konovalov, di-recteur du Centre de la conjoncture stra-tégique, souligne qu’aucun attentat n’a été commis depuis près de deux ans au Daghestan, l’une des républiques les plus instables du Caucase russe jusqu’à une époque récente. Il précise que les ser-vices spéciaux et les dirigeants de chaque république travaillent à la prévention des attentats. « L’EI comprend que s’il tente une opération d’envergure, il sera immédiatement mis sous pression par les autorités locales », commente l’ana-lyste.Les frontières Sud du pays sont un autre point faible de la Russie pour de nom-breux experts. M. Gontcharov explique que les services de sécurité et le contrôle aux frontières dans des pays comme le Turkménistan et l’Ouzbékistan laissent à désirer : « les terroristes pourraient fa-cilement pénétrer dans notre pays ». Pour autant, la situation n’est pas alar-mante. La Russie n’a pas de frontière directe avec ces pays, alors que la fron-tière la plus longue, celle avec le Ka-zakhstan, est contrôlée. Par ailleurs, avant de rejoindre l’Asie centrale, les combat-tants devront traverser la Turquie, l’Ar-ménie et la Géorgie, « ce qui n’est pas aussi simple que l’on pourrait croire », estime Alexeï Fenenko, de l’Institut des problèmes de sécurité internationale de l’Académie des sciences de Russie.

Les aéroports, les gares et les centrales nucléaires…Une attention particulière est actuelle-ment accordée par les forces de l’ordre aux grandes villes de la partie euro-péenne de la Russie. Ce sont elles qui pourraient être ciblées en premier lieu par les islamistes cherchant à donner la plus grande résonance à leurs actions, indiquent les spécialistes. Les points les plus vulnérables dans les villes sont les

La Russie a confirmé mardi 17 novembre que le crash de l’A321 dans le Sinaï égyptien, qui a fait 224 morts le 31 octobre, était un attentat. Sur la photo : épave de l’appareil.

transports publics, les gares et les aéro-ports. Les extrémistes pourraient éga-lement s’attaquer aux oléoducs et gazo-ducs, à toutes sortes d’entrepôts et aux centrales nucléaires.Pour prévenir les attaques, les services spéciaux se concentreront pour l’instant sur l’identifi cation des cellules terroristes et des centres de recrutement. Le travail de renseignement sera renforcé, estiment les observateurs. Il est en outre essentiel d’accentuer les contrôles des migrants. La Russie accueille de nombreux res-sortissants des pays d’Asie cen-trale – 3,6 millions en 2014, selon le Ser-vice fédéral des migrations. Certains d’entre eux pourraient être liés à l’EI. « L’objectif sera d’identifi er les personnes suspectes en amont, dès les premières étapes », précise Mikhaïl Alexandrov, du Centre de l’analyse militaire et politique.Par ailleurs, le cas récent de Varvara Ka-raoulova, étudiante dans une des meil-leures universités de Russie et accusée d’avoir tenté de rejoindre les rangs de l’EI, prouve que les partisans des extré-mistes peuvent se recruter dans un en-vironnement social inattendu – dans la capitale prospère de la Russie, plutôt que dans le Caucase du Nord instable. « Nous avons une expérience suffisante

pour répondre à ces défi s et menaces », indique le ministre russe de l’Intérieur, Vladimir Kolokoltsev. Les experts confi r-ment que les services spéciaux du pays sont assez bien préparés pour les mis-sions anti-terroristes. Leurs méthodes diffèrent de celles employées par les ser-vices spéciaux occidentaux. Plus préci-sément, les forces de l’ordre russes passent plus de temps sur le terrain, dans les « points chauds », tandis que les Amé-ricains, par exemple, « sont trop friands de technologies », selon Ivan Konovalov.

Rapprochement avec la FranceAprès les attentats tragiques récents, une collaboration dans la lutte anti-terro-riste se dessine entre la France et la Rus-sie. La visite cette semaine du président François Hollande à Moscou en est la preuve. Dans le contexte de sa rencontre avec Vladimir Poutine, les experts attirent l’attention sur la réaction de la société et de la presse russes aux attaques du 13 novembre. Ivan Konovalov souligne que les Russes ont fait preuve de com-passion malgré les différends qui, depuis un an et demi, défi nissent les relations entre la Russie et les pays occidentaux. La réaction de la société a été d’autant plus vive que la Russie a récemment été

victime, elle aussi, d’un attentat islamiste contre l’Airbus dans le Sinaï, rappelle l’analyste.

Une menace extérieure plus qu’intérieure Les experts appellent à ne pas suresti-mer l’ampleur de la menace que pré-sente l’EI. Ils précisent que, pour cette organisation terroriste, la Russie repré-sente le contraire d’un adversaire com-mode. Les islamistes ne peuvent comp-ter sur un réel soutien complice à l’intérieur du pays, tout en étant assu-rés que toutes les forces de l’ordre seront mobilisées pour les combattre. À ce titre, ce n’est pas un hasard s’ils ont frappé la Russie hors de ses frontières en s’at-taquant à un avion en Égypte. Toutefois, de nouvelles attaques de ce type ne peuvent être exclues.Par ailleurs, Alexeï Fenenko estime que les principaux dangers présentés par l’EI sont liés à l’éventuelle déstabilisation de la Turquie, qui, à son tour, déstabilise-rait l’ensemble du Caucase et renforce-rait l’État islamique en Afghanistan. Dans ce dernier cas, une explosion est à craindre au Tadjikistan, qui garde en-core des traces de la guerre civile san-glante du milieu des années 1990.

cou devrait faire passer le nombre d’avi-ons impliqués dans l’opération à 150-200, au lieu des 95 actuels.L’opération russe contre l’EI en Syrie a commencé le 30 septembre. À ce jour, elle implique un groupe d’aviation mixte, posté sur la base aérienne de Hmeimim (ouest) et composé de 46 avions et 24 hé-licoptères, ainsi que de 25 bombardiers stratégiques et 7 navires de combat af-fectés à la Marine russe qui effectuent des tirs de missiles depuis la mer Cas-pienne. Depuis le début de l’intervention, l’aviation russe a effectué plus de 1 600 missions contre des cibles terroristes. Les bases russes en Syrie sont couvertes par des moyens de défense aérienne, dont les systèmes de défense antimissile à courte portée Pantsyr-S1 et moyenne por-tée Buk-M2. Ils devraient dissuader les terroristes de tenter d’utiliser des avions civils, indique Saïd Aminov, rédacteur en chef de la revue Vestnik PVO, qui pré-cise que ces armements ne constituent pas une menace pour l’aviation alliée des pays de l’OTAN. « Il n’y a pas de [sys-tèmes de missiles sol-air, ndlr] S-400 sur ces bases. Nous en avons trop peu pour nous permettre de découvrir la Russie. Quant à la "découverte" de certains com-

posants des S-400 en Syrie, notamment la nouvelle station radar, celle-ci est au-tosuffisante et ne fait pas partie du S-400. Elle sert à rapidement détecter les cibles aériennes », explique-t-il.

En appui aux forces terrestresAlexandre Ermakov, expert militaire du Conseil russe des Affaires internationales, précise à son tour que grâce au soutien aérien russe, l’armée syrienne a pu pas-ser à l’offensive. « Bien qu’elle [l’offen-sive, ndlr] soit plus lente que souhaité, la reconquête des territoires occupés par les terroristes inspire l’optimisme. Le Commandement de la Fédération de Rus-sie estime que l’opération de l’armée sy-rienne au sol est globalement efficace, mais est quelque peu déçu par son rythme », nuance M. Ermakov. Konstantin Sivkov considère que pour réussir, l’opération doit impliquer « l’ar-mée de terre iranienne, qui compte en-viron 100 000 à 120 000 hommes, mais aussi les forces aériennes ». Par ailleurs, « outre la Syrie, des frappes doivent être effectuées en Irak, afi n d’empêcher l’en-nemi de créer des "zones protégées" », affirme l’expert. Spécialiste de l’arabisme, le chercheur Dmitri Evstafi ev estime qu’à ce stade, la campagne militaire russe ne vise pas à apporter un appui-feu direct aux troupes syriennes, mais à « permettre à [Bachar] el-Assad de souffler pour compléter, re-former et dûment préparer de nouvelles troupes et à contester la supériorité, dé-sormais évidente, des combattants ter-roristes en matière de CCC (Command, Control, Communications). De ce point de vue, l’opération est tout à fait réussie. [...] Effectivement, ce serait bien de l’in-tensifi er, du moins pour une courte pé-riode, mais ça, c’est une décision poli-tique », conclut l’expert.

La Russie est aussi dans le collimateur de l’État islamique

En ligne

À Moscou, le vibrant hom-mage des Russes ordinaires fr.rbth.com/540661

Les fl eurs, bou-gies et icônes disposées avec soin aux abords de l’ambassade de France à Moscou constituaient une pile impression-nante de sept à dix mètres de lon-gueur et quatre à cinq m de largeur. Les Moscovites ont affi ché leur solidarité dans des messages écrits à la main :  « Prions pour la France », « Non à la guerre », « Je suis Paris », « Sois fort, Paris, la Rus-sie sera toujours proche de toi ».

Un vibrant

hommage

En chiffres

58 Appareils russes, dont 12 avions d’attaque au sol Su-25SM, 12 bom-bardiers Su-24M, 6 bombardiers polyvalents Su-34, 4 chasseurs Su-34SM et 24 hélicoptères étaient basés en Syrie au début de l’opération.

12 avions supplé-mentaires, dont 8 bombardiers polyvalents Su-34 et 4 chasseurs Su-27, ont été déployés en Syrie fi n novembre.

AP

REUTERS

5Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le Figaro Mercredi 25 novembre 2015

OPINIONS

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INVERSION DES PRIORITÉS

FACE AU TERRORISME, UNE POSSIBLE UNION SACRÉE

FEDOR LOUKIANOVPOLITOLOGUE

GUEORGUIBOVTPOLITOLOGUE

Président du Conseil pour la politique étrangère et la poli-tique de défense

Rédacteur en chefdu magazineRousski mir

L’année 2015 est marquée par une horrible symétrie : elle a com-mencé par un attentat contre le journal hebdomadaire satirique

Charlie Hebdo et elle fi nit par les ré-centes attaques de Paris, les plus tra-giques de l’histoire du terrorisme en France. En somme, la France est habi-tuée à la violence politique en tant que foyer de nombreuses révolutions, d’une décolonisation douloureuse, de mouve-ments gauchistes et de rébellions d’im-migrants. Ce qui bouleverse aujourd’hui, c’est une misanthropie ouverte et dé-monstrative de « l’ennemi » : ni reven-dications, ni slogans, simplement des meurtres. Le terrorisme pur, uniquement pour semer la peur et briser la volonté.Mais, fait paradoxal, ces attentats s’ins-crivent difficilement dans la notion de terrorisme qui, dès le début du XXIème siècle, s’est transformée en un cliché des plus répandus. George W. Bush, alors qu’il était à la Maison blanche, a tenté de rassembler la communauté interna-tionale sous la bannière de la lutte contre « le terrorisme international », ce der-nier devant remplacer le rôle de mal universel que jouait le communisme so-viétique. Ce fut un échec, car il s’est ra-pidement avéré que cette notion recou-vrait différentes formes de terrorisme, chacune ayant ses racines et ses causes. Identiques en apparence, elles sont le produit de la mondialisation et de l’ou-verture dans le domaine de la commu-nication, qui permet aux extrémistes sur différents continents de se copier les uns les autres sans jamais se parler. En d’autres termes, il n’existe pas de moyen commun de venir à bout du ter-rorisme, ce qui signifi e qu’il ne peut y avoir de « coalition mondiale ».Ce qui se passe aujourd’hui ne peut sans

Après la série d’attentats en France, la Russie et l’Occident sont contraints de reconnaître un fait : nous avons un ennemi

commun, le terrorisme international, et tout spécialement l’État islamique [EI, interdit en Russie, ndlr]. Cet ennemi doit être vaincu par des efforts communs. Les autres désaccords doivent être repous-sés au deuxième, voire au troisième plan.La Russie a déclaré que le crash de son Airbus A321 en Égypte avait été provo-qué par un attentat à bord, ce qui per-met au président du pays, Vladimir Pou-tine, d’affirmer, désormais devant l’Occident également, que « la cause des Russes en Syrie est juste ». La « vengeance » pour la disparition de 224 passagers de l’avion est devenue une affaire de principe nationale. Le président a promis de punir les criminels, en rap-pelant l’article 51 de la Charte de l’ONU qui prévoit « le droit naturel de légitime défense ». La Russie promet, pour la pre-mière fois de son histoire, une récom-pense de 50 millions de dollars pour des informations qui aideront à capturer les terroristes. Bien que Poutine ait évoqué avec pru-dence les notions de « vengeance » et de

La coordination des opérations entre Moscou et l’Occident se fera plus étroite après les attentats de Paris et le sommet du G20 »

En élargis-sant l’espace de sécurité au détriment de l’espace de liberté, le 13 novembre est de nature à légitimer la droitisation latente »

«

«

« châtiment », son porte-parole, Dmitri Peskov, a été plus direct, en disant que les services secrets avaient reçu l’ordre précis d’« éliminer » tous ceux qui ont trait à cet attentat. Soit sans jugement. D’ailleurs, le rappel de l’article 51 et le ton du discours du président ont fait clai-rement comprendre à l’opinion russe que cette « punition » serait semblable à l’opé-ration lancée par les services secrets is-raéliens qui avaient traqué dans diffé-rentes régions du monde et éliminé, sans complexités judiciaires, les terroristes palestiniens complices de la prise en otage et de la mort de sportifs israéliens aux Jeux olympiques de Munich en 1972.Quelles seront les conséquences de la re-connaissance officielle d’un attentat par Moscou ? Il est peu probable que la Rus-sie décide de couper les liaisons aériennes avec les autres pays présentant une me-nace terroriste élevée. Bien que formu-lée par certains députés russes, j’estime que cette mesure extraordinaire ne se-rait prise que dans le cas où le danger terroriste monterait d’un cran. En ce qui concerne la Syrie, l’augmen-tation du nombre de frappes contre les terroristes ne débouchera pas sur une opération terrestre avec la participation

de troupes russes dans ce pays. Un front anti-terroriste commun ne se profi le pas non plus. Mais la coordination des opé-rations entre Moscou et l’Occident de-viendra plus étroite après les attentats de Paris et le sommet du G20 en Turquie, où le dossier a été examiné dans un contexte qualitativement nouveau. À la lumière des nouveaux dangers dont l’Oc-cident et la Russie ont pris conscience, leurs relations sont aujourd’hui meilleures qu’elles ne l’avaient été il y a un an.Ainsi, Moscou intensifi era ses frappes contre les positions de l’EI tout en s’abs-tenant de coups contre les forces qui constituent pour l’Occident la fameuse « opposition modérée ». Toutefois, la Rus-sie n’a pas réussi pour l’instant à obte-nir de la part de l’Occident la liste des sites contrôlés par les groupes qu’il consi-dère comme « modérés » afi n de ne pas les bombarder. Ce qui témoigne d’un ni-veau extrêmement bas de confi ance entre les parties. Pour autant, la coordination devient d’ores et déjà plus étroite concer-nant ceux que les deux parties estiment nécessaire de frapper. La première preuve en est le coup porté contre la « capitale » de l’EI en Syrie, Raqqa, par les forces spatiales de Russie

doute pas être qualifi é de terrorisme au sens propre du mot. Le groupe extré-miste État islamique [EI, interdit en Russie, ndlr], est le symptôme d’une fracture systémique au Proche-Orient. La région se transforme en un énorme cratère qui ne cesse d’engloutir des pays et des populations entiers tout en cra-chant une lave mortelle.La question n’est plus vraiment de sa-voir s’il sera possible de vaincre l’EI et ses structures militaires grâce à des opé-rations armées, même menées en com-mun. Depuis l’expérience de la présence soviétique en Afghanistan jusqu’aux tentatives américaines en matière de reconstruction institutionnelle (« nation building »), que ce soit en Afghanistan, en Irak ou en Lybie, il est évident que les victoires militaires ne solutionnent rien. La recomposition d’un État est un objectif quasiment impossible à réali-ser pour les acteurs internationaux. Et voici que fl eurissent, sur les ruines des systèmes étatiques précédents, les formes les plus archaïques d’organisation de la vie politique.Toutefois, ce n’est pas en édifi ant des murs et des barrières qu’on s’en mettra à l’abri. L’effondrement proche-orien-tal engendre une nouvelle grande mi-gration qui enraye la machine politique européenne. Le problème majeur, c’ est la divergence des trajectoires entre les États et les sociétés.À la tragédie de Charlie Hebdo, les Fran-çais ont répondu par une manifestation de solidarité et d’union, concrétisée par une marche contre la xénophobie qui a rassemblé des millions de personnes. Ceux qui quittaient vendredi 13 no-vembre le Stade de France ciblé par les terroristes, ont entonné La Marseillaise spontanément. C’était impressionnant

et cela prouve que la société réalise tout le sérieux du moment sans pour autant désespérer. Mais elle attend de l’État qu’il la défende et la protège.Avec ce « vendredi noir », le Rubicon est vraisemblablement franchi. Tout comme le 11 septembre 2001 a marqué un tournant de la politique américaine vers la sécurisation en élargissant l’es-pace de sécurité au détriment de celui de liberté, le 13 novembre 2015 est en mesure de « légitimer » la droitisation latente de la politique européenne. Peu importe le nombre de voix que totali-seront les partis de droite, car dans la situation actuelle, c’est l’électorat mo-déré qui se déplacera vers la droite.Ce qui se répercutera inévitablement sur la structure et l’évolution de l’Union européenne. L’afflux de réfugiés l’été et l’automne derniers a fait apparaître des lézardes sur l’axe nord-sud et encore plus sur l’axe est-ouest. On a constaté avec étonnement qu’il n’existait pas de politique commune sur la migration, l’un des problèmes les plus aigus qui inquiètent la société, même si dans

d’autres domaines, l’uniformisation et l’harmonisation ont permis de faire de grands progrès. L’incompréhension des Européens or-dinaires à l’égard des tâches et des ob-jectifs de la structure toujours plus com-plexe de l’UE n’a fait que croître, ce qui était déjà le cas. Les électeurs en étaient restés à des notions nationales, tandis que les élites raisonnaient au niveau paneuropéen et surtout dans la logique administrative et bureaucratique propre à la Commission européenne. Jusqu’à un moment donné, il était possible de concilier les deux. Mais l’horreur de la vague de violences qui a déferlé sur Paris risque de bouleverser défi nitivement les priorités. Et dans ce cas-là, ou bien les politiques devront amorcer un tournant à droite, pour tenir compte des aspira-tions et des préoccupations de la socié-té, ou bien les idéaux d’intégration de-vront être imposés de force, ce qui signifi era un recul par rapport au pa-radigme démocratique existant jusqu’ici.

Article initialement publié sur le site de ROSSIYSKAYA GAZETA

immédiatement après la déclaration de Poutine sur la « punition ».Pour ce qui est d’une opération terrestre, certains experts estiment impossible de vaincre l’EI autrement, indiquant que les forces du président syrien Bachar el-As-sad et des Kurdes sont insuffisantes, mais la situation est bien plus compliquée. L’EI, qui accorde une attention soutenue aux sourates de la période mecquoise dans sa propagande et son « idéologie », dé-sire livrer « une dernière et décisive ba-taille » terrestre aux « forces de Rome », soit à l’Occident. Une bataille qui, selon une prophétie de l’islam, doit avoir lieu aux environs de la cité syrienne de Dabiq, proche de Raqqa. Si cette interprétation des intentions de l’EI est juste, les at-taques de Paris et l’attentat contre l’Air-bus russe sont un défi , une « invitation à la bataille » de la part des fanatiques. Si cette « invitation » reste sans réponse, il y en aura d’autres. C’est la confi rma-tion que nous sommes confrontés au-jourd’hui au défi le plus sérieux lancé à la civilisation moderne par les fanatiques et les obscurantistes. Pour l’instant, l’exa-men de cette réponse est entravé par des débats sur des sujets qui, dans l’actuelle situation, sont tout à fait secondaires.

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DMITRI DIVINE

6Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le FigaroMercredi 25 novembre 2015

ÉCONOMIE

Une mesure qui devrait inciter les fabricants étrangers à produire en Russie et entraîner une baisse des prix d’achat

KIRA EGOROVARBTH

Le gouvernement russe entend

promouvoir la fabrication locale des

produits pharmaceutiques, ce qui joue

en faveur des producteurs étrangers

implantés en Russie.

PRODUITS PHARMACEUTIQUES Entrée en vigueur d’une mesure visant à diminuer radicalement les importations

En mai 2015, le premier ministre russe Dmitri Medvedev a demandé au gou-vernement d’enclencher un processus de substitution aux importations dans le secteur pharmaceutique. Cette nouvelle politique devrait principalement jouer en faveur des sociétés étrangères qui dis-posent déjà d’unités de fabrication en Russie, pensent les acteurs du marché.« Pour les entreprises étrangères déjà im-plantées dans le pays, cela promet un retour sur investissement plus rapide, et celles qui n’ont pas encore d’usine en Rus-sie vont être poussées à y relocaliser leur production », estime Viktor Dmitriev, di-recteur général de l’Association russe des producteurs pharmaceutiques (ARPP).

Pour la fabrication maison Pour la fabrication maison des médicaments vitauxdes médicaments vitaux

Aujourd’hui, pratiquement toutes les en-treprises pharmaceutiques de renommée mondiale ont une représentation en Rus-sie. En revanche, seules quelques-unes peuvent se vanter d’avoir des usines en province. C’est le cas de certains géants du marché comme le groupe français Sanofi , le suisse Novartis, AstraZeneca (Suède/Grande-Bretagne) et Novo Nor-disk du Danemark.

Vers un rééquilibrageD’autres grands noms comme l’améri-cain Pfi zer et l’allemand Bayer cherchent depuis longtemps des partenaires russes par l’intermédiaire desquels ils pour-raient localiser en partie ou totalement leur production. Les autorités russes ont fi xé à 90% la part des médicaments « vitaux » et « im-portants » (ceux que le gouvernement achète dans le cadre des programmes sociaux) qui devraient être de produc-tion russe en 2018, contre 65% au-jourd’hui.

Selon le Service fédéral russe de la sta-tistique Rosstat, la part des médicaments russes sur le marché national représente 55% de l’assortiment mais seulement 20% en valeur monétaire. Dans le même temps, la consommation de médicaments innovants sur le mar-ché russe est constituée à 90% de pro-duits importés.

Des retombées positives diversesDans ces conditions, de telles mesures gouvernementales « vont inciter les pro-ducteurs étrangers à localiser leur pro-duction en Russie et mener à une baisse des prix d’achat et de vente des médi-caments au détail », pense Viktor Dmi-triev. « C’est un choix qui a déjà fait ses preuves au Japon, par exemple, pays qui a adopté ces mesures il y a plusieurs an-nées. Et comme nous sommes actuelle-ment sous le coup de sanctions, c’est la meilleure décision tant du point de vue politique qu’économique et réglemen-taire », commente-t-il.

Les sociétés étrangères qui produisent déjà en Russie envisagent de leur côté l’avenir avec confi ance. « Nous voyons dans cette stratégie de substitution aux importations des possibilités supplémen-taires d’étendre nos activités en Russie, en coopération avec les compagnies lo-cales », estime Thibault Crosnier Leconte, directeur général de Sanofi Pasteur (fi -liale de Sanofi spécialisée dans les vac-cins) en Russie.En particulier, le producteur français prévoit de lancer la production, en Rus-sie, de son fameux vaccin pour les en-fants dans les usines de la société russe Nanolek à Saint-Pétersbourg – les dé-tails du contrats ont été fi xés lors du Forum économique que cette ville avait accueilli en juin 2015. Aujourd’hui, un enfant sur huit en Russie est vacciné à l’aide d’un produit de Sanofi .« Cette localisation de la production a aussi des conséquences positives sur le plan social, dans la mesure où elle ren-dra nos vaccins accessibles à tous les enfants russes », ajoute M. Leconte. Sa-nofi Pasteur prévoit de lancer ce proces-sus de localisation en 2016 en commen-çant par un transfert de savoir-faire et de systèmes de contrôle-qualité. Le transfert de technologies est prévu pour 2019. L’usine de Saint-Pétersbourg devrait produire jusqu’à 10 millions de doses chaque année, « ce qui permettra de satisfaire pleinement la demande de ce vaccin en Russie », affirme M. Leconte.La Russie est un marché attractif pour les sociétés pharmaceutiques étrangères qui produisent des médicaments par syn-thèse chimique, pense M. Dmitriev. « Nous avons la force de production et les cerveaux pour y arriver. De plus, les entreprises étrangères s’ouvrent, grâce à la Russie, des débouchés vers l’Union économique eurasiatique et la CEI [Communauté des États indépendants, ndlr] – un marché de 250 millions de personnes », ajoute-t-il. Malgré tout, de nombreuses sociétés étrangères spécialisées dans les biotech-nologies pourraient y réfl échir à deux fois avant de s’implanter en Russie. « La production en elle-même est complexe, peut prendre des semaines, et le marché russe se révéler trop petit. Cela ne sera pas rentable pour tout le monde », conclut Viktor Dmitriev.

TATIANA BAKOURSKAÏARBTH

L’offre de qualité se développe

rapidement, sans pour autant satisfaire

pleinement – pour l’instant – l’immense

appétit des Russes pour les ingrédients

haut de gamme.

AGROALIMENTAIRE Des entrepreneurs russes se précipitent dans la brèche ouverte par l’embargo sur les aliments européens

En 2013, Natalia Novitskaïa a monté sa propre entreprise et s’est lancée dans la culture de champignons rares. À la demande des restaurants moscovites, sa société, Russian Mushrooms, impor-tait des champignons gastronomiques d’Europe et, parallèlement, mettait en place un réseau de cueilleurs en Rus-sie. « Au départ, nous voulions nous spécialiser dans la truffe, dont il existe plus de dix sortes différentes, et en four-nir la totalité à la restauration de Mos-cou », raconte Natalia, qui était autre-fois directrice des ventes d’une maison d’édition.Ses projets ont changé en 2014 avec l’entrée en vigueur de l’embargo ali-mentaire. Il a fallu se réorienter entiè-rement vers la livraison de truffes noires de Crimée et de morilles coniques de Sibérie. Dans ce nouveau contexte, « notre clientèle s’est élargie, car les chefs se sont vus contraints de chercher des substituts », explique Natalia. L’embargo alimentaire a été un tour-

Truffe de Crimée ou morille de Sibérie ?

nant pour de nombreuses petites et moyennes entreprises russes capables de répondre à la demande de produits de qualité qui s’était formée dans le pays. Les restaurateurs, les grossistes et les consommateurs se sont tournés vers les producteurs locaux en mesure de pro-poser une bonne alternative aux im-portations, allant de la viande et du lait aux produits gastronomiques.Les éleveurs sont gagnants. Selon l’in-dice national de production industrielle, au cours des neuf premiers mois de 2015, la production de viande en Russie a aug-menté de 14% et celle de fromage de 23% par rapport à la même période de

l’année précédente. Ces nouvelles condi-tions ont nettement profi té aux secteurs agraires en vogue, tels que les fermes écologiques. « Le volume des ventes de viande et de lait de notre ferme a aug-menté de 35 à 40% cette année », af-fi rme Elena Boutko, gérante du projet TsarPripas, marque commerciale de la ferme écologique Zaretchié située près de Moscou. « Nous attribuons cette crois-sance à deux facteurs : la diminution de l’offre et l’intérêt grandissant pour les produits écolo ».Zaretchié a ouvert en 2011 et, depuis, est devenue la plus grande ferme éco-logique en Russie. L’exploitation s’étend sur cinq hectares et compte 3 000 têtes de bétail (dont la race bovine Aberdeen-Angus, célèbre pour sa viande marbrée) et 5 000 volailles, dont les traditionnels canards, poules et oies, mais également des dindes et des cailles. La ferme en-visage un service de livraison de viande dans les restaurants moscovites.

Fromages et charcuterie : le défiLa chute brutale du rouble fi n 2014 a obligé les restaurants moscovites à éco-nomiser sur les fournitures. Les cham-pignons rares onéreux ont été aban-donnés en premier dans tous les cas. « Avant la dévaluation du rouble, nous vendions en moyenne 10 kg de truffes

par semaine ; aujourd’hui, au mieux, on est à 2 kg », dit Natalia Novitskaïa.Pour pallier le ralentissement, il a fallu rechercher de nouvelles solutions. Rus-sian Mushrooms a alors commencé à proposer aux restaurants des denrées moins coûteuses. « Notre succès du mo-ment est la girolle noire, utilisée par tous les restaurants moscovites. Nous avons en outre inventé et lancé un nou-veau produit – la pomme de pin salée et marinée », dit fi èrement Natalia.Bien que l’embargo ait poussé les pe-tites entreprises à activement rempla-cer les importations, la demande en fa-veur de certains types de produits n’est pas entièrement satisfaite. « La chose vraiment difficile à remplacer, ce sont les fromages et la charcuterie. Même si certains font des produits de qualité, les volumes restent trop modestes », es-time Eldar Kibirov, copropriétaire du restaurant moscovite RED. Ainsi, au printemps 2015, la ferme Za-retchié a commencé à produire son propre jambon selon une procédure ac-célérée. Aujourd’hui, il se vend au dé-tail sur Internet au prix de 280 roubles (4 euros) pour 100 gr. Un prix très rai-sonnable qui devrait séduire les palais frustrés par l’embargo. Et qui sait ? Un jour, peut-être, le jambon de Moscou sera-t-il prisé à l’étranger.

L’entreprise de Natalia Novitskaïa alimente Moscou en truffes noires de Crimée.

des médicaments vitaux devront être produits en Russie en 2018, contre 65% aujourd’hui.

90%

En chiffres

Avec la dégringo-lade du rouble, les matières pre-mières russes ont gagné en popula-rité chez les étran-gers. Aujourd’hui, de très nombreux agents d’achat arpentent la Sibé-rie et la région du lac Valdaï (oblast de Novgorod), indique Nata-lia Novitskaïa, directrice géné-rale de Russian Mushrooms. « Des Chinois et des Turcs, des Allemands comme des Français ar-rivent et rachètent tout, peu importe le prix », précise la dirigeante d’entreprise.

Les produits

locaux cotés

Découvrez notre projet spécial

Cap sur le marché russeUn guide du monde des affaires franco-russe, où des entrepreneurs

français vous dévoilent les détails du climat économique et partagent leur expérience de l’activité commerciale en Russie.

TASS

SERVICE DE PRESSE

7Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le Figaro Mercredi 25 novembre 2015

RÉGIONS

NADEJDA GREBENNIKOVAPOUR RBTH

Devenue célèbre grâce aux Jeux

olympiques d’hiver de Sotchi, Krasnaïa

Poliana est une destination très prisée

des touristes que la chute du rouble

retient ou amène en Russie.

VILLÉGIATURE Sports de montagne en toutes saisons sur les pentes d’un des sites les plus pittoresques du Caucase du Nord

Plein à craquer, le train rouge vif Las-totchka (Hirondelle) quitte le quai de la dernière station de la côte pour prendre d’assaut la montagne. Le rapide monte facilement la pente, accélère sans bruit sur la voie construite spécialement pour les Jeux olympiques d’hiver de 2014 et met le cap sur Krasnaïa Poliana. Trois quarts d’heure après le départ de Sotchi, il arrive dans ce paradis montagnard des amateurs d’activités en plein air. Pres-sés par les guides locaux, les touristes se dispersent dans les trois stations de vacances : Gorki Gorod, Gazprom et Roza Khoutor.La terrasse d’observation offre une vue imprenable sur le réseau de pistes de ski, le centre de biathlon et le réseau de routes et d’hôtels des trois stations. On dirait une ville européenne – c’est du moins la façon dont s’imaginent la Suisse les Russes qui ne sont jamais allés dans ce pays. De décembre à mars, la foule de touristes y est très dense. Les restau-rants dressent des listes de clients une semaine à l’avance, tandis que les hôtels affichent « Complet » plusieurs mois avant la haute saison.Toutefois, de mai à novembre, les hôtels de luxe restent vides, de même que leurs spas et centres de bien-être, leurs ma-gnifi ques restaurants, leurs pubs en vogue et leurs centres commerciaux avec salles de cinéma et parcs aquatiques. Les tou-ristes estivaux sont des visiteurs d’un jour qui veulent se reposer à la mon-tagne sans trop débourser.

Sentiers de montagneHomme assez jeune au corps musclé et au regard perçant, Vatchagan Assatrian, originaire de Guelendjik (200 km de Sotchi), rêve de déménager dans les mon-tagnes. Pour le moment, il hésite entre Krasnaïa Poliana et la Suisse. Vatchagan est un grand amateur de ran-données périlleuses. « C’est la première fois que je viens à Roza Khoutor. J’es-saie de repérer les sentiers pour monter à pied. Je veux demander l’aide d’un guide local parce qu’hier, à la station voisine de Gorki Gorod, je n’ai pas pu trouver le chemin pour redescendre », raconte-t-il.Roza Khoutor et Gorki Gorod, situées sur la même crête, sont réputées pour offrir des vues à vous couper le souffle. Elles attirent surtout les amateurs de promenades tranquilles. Un selfi e dans une cabine du téléphérique constitue la distraction favorite des visiteurs de ces stations.Les touristes plus audacieux peuvent emprunter des itinéraires menant à des sommets aux appellations un peu go-thiques, telles que Pyramide noire ou Po-teau de pierre. Il y a cinq ans, ces sen-tiers étaient accessibles à tous, mais

Destination « la Suisse russe »

aujourd’hui, il n’est possible de s’y lan-cer qu’en compagnie d’un guide.Cependant, Krasnaïa Poliana accueille aussi ceux qui ne redoutent pas de mal-mener leurs pieds et leurs épaules sous le poids de leur sac à dos. Ils ne sont pas nombreux et dès qu’ils descendent du train, ils se dirigent vers le téléphérique de Gazprom. Cette station est limitrophe de la réserve du Caucase avec ses énormes étendues de forêts vierges et ses pâtu-rages en haute montagne.C’est un territoire unique en son genre et l’une des plus grandes réserves de fo-rêts en montagne d’Europe, dont la plus grande partie n’a jamais été touchée par l’activité de l’homme. Il n’est pas rare d’y rencontrer, même sur des itinéraires populaires et dans des stations touris-tiques fréquentées, des animaux sau-vages, des lièvres et des écureuils mais aussi des chamois et des ours.Cette année, les randonnées dans la ré-serve sont devenues tellement populaires que des refuges ont été ouverts pour les marcheurs « du dimanche ». Désormais,

il est possible de partir en montagne muni de son seul porte-monnaie.

Eldorado des skieursOlga et Anatoli Sidorov sont venus de la région de Mourmansk (nord-ouest de la Russie). Cette année, ils font partie des « touristes paresseux » : ils seront bien-tôt parents et ne sont pas venus pour faire du sport. D’un œil incrédule ils scrutent les environs, suspendus au-des-sus des pistes sans neige sur leur télé-siège. S’ils sont satisfaits de leur séjour, ils reviendront en hiver.« Nous faisons du ski et du surf des neiges depuis plusieurs années tant à Khibiny où nous habitons qu’en Finlande voi-sine », raconte le couple. Mais après la chute du rouble, les voyages à l’étranger sont devenus trop chers, ce qui a amené ces amateurs de sports d’hiver à Kras-naïa Poliana.« Nous avons testé les télésièges. Ils sont confortables et montent assez vite, ce qui signifi e des fi les d’attente pas trop lon-gues, poursuivent les époux. Les pistes

1 - Des skieuses immortalisent l’instant avant la descente. 2 - Vue sur Krasnaïa Poliana. 3 - La station de ski Roza Khoutor.

Où se restaurer

L’auberge

Trikoni

propose une cuisine cau-casienne et euro-péenne à des prix raisonnables (environ 30€ par personne). Elle a obtenu leCertifi cat d’excellence de TripAdvisor.

1

2 3

Patinoire ouverte, entrée libre. Tous les

soirs, les visiteurs pourront admirer le ballet sur glace « Le Lac des Cygnes ».

La plus grande piste de luge de

Russie : 7 mètres de hauteur, 100 mètres de longueur. Laissez-

vous porter par le vent !

Restaurant central pour

enfants

Un manège animé.

1

2

7

8

9

36

5

4

Hôtel M

oskva

Rue Okhotn

y Ryad

Okhotny Ryad

Place du

Manège

Place d

e la R

évoluti

on

Place de la Révolution

Exposition-marché de Noël en forme de

carte de la Russie. Au centre, un sapin de Noël de 17 mètres

brille de tous ses feux.

T RAV E L 2 MO S COW. COM

Le plus grand magasin

de Noël du pays

Autour de la patinoire, une zone

restauration : des plats appétissants pour

tous les goûts.

semblent intéressantes et très diversi-fi ées ».Au sommet des montagnes, à une alti-tude d’environ 2 300 mètres, l’automne règne en maître. Le soleil éblouit, mais ne réchauffe presque plus et les visiteurs remettent leurs écharpes et leurs capu-chons pour se protéger du vent violent. Comme c’est souvent le cas à la mon-tagne, le temps se détériore en l’espace de quelques minutes, un front orageux arrivant du nord. Le ciel noir est déchi-ré par des éclairs et l’écho du tonnerre résonne sur les rochers. Les touristes s’em-pressent de prendre les derniers selfi es sur fond de trombes d’eau et retournent en courant au téléphérique.Plus le temps dans les montagnes se dé-grade, plus les sportifs sont heureux, car l’humidité et le froid sont pour eux les précurseurs des chutes de neige à venir. Encore quelques jours et les pentes se couvriront d’une épaisse couche de pou-dreuse, réveillant Krasnaïa Poliana de son songe d’été et la plongeant dans le tourbillon touristique d’hiver.

La Foire des régions de Russie :

cadeaux de Noël, souvenirs, sucreries - toutes les couleurs de la saison venues des quatre coins du pays.

La plus grande boule de Noël du pays. À l’intérieur de cette

gigantesque décoration d’un diamètre de 17 mètres, un spectacle

multimédia vous attend.

En ligne

Les Solovki, un archipel de spiritualité dans le Grand Nord russefr.rbth.com/483537

GETTY IMAGES

TASS(2)

Durant les fêtes de la fin d’année, le centre de la capitale russe se transforme en un gigantesque royaume enchanté. Du 18 décembre au 10 janvier, la fête ne cesse pas une seconde. Cet hiver, Moscou accueille le festival Voyage dans le monde de Noël. À cette occasion, 36 emplacements festifs vont garnir la carte de la ville. Les visiteurs pourront assister à des pièces de théâtre, flaner sur des marchés animés et faire des découvertes gastronomiques typiques. Les principales manifestations se dérouleront dans le « Triangle d’or » : Place du Manège - Rue Okhotny Ryad - Place de la Révolution.

8Supplément de Rossiyskaya Gazeta distribué avec Le FigaroMercredi 25 novembre 2015

CULTURE

Pour retrouver Urban DataScape, rendez-vous sur les Berges de Seine, à proxi-mité du pont de la Concorde (arrêt bus et RER C “Musée d’Orsay”). Du 4 au 10 dé-cembre, l’œuvre sera présentée au Grand Palais dans le cadre de l’expo-sition Solutions COP21.

Le programme du Festival de Honfl eur refl ète les tendances du cinéma russe tel qu’il a évolué en 2015 : il rajeunit et voit arriver de plus en plus de débu-tants, tandis que l’initiative dans la réa-lisation de fi lms d’auteur revient sou-vent aux femmes. Si la production nationale récente ne compte pas de chef d’œuvre, Honfl eur affiche plusieurs fi lms sincères et intel-ligents sur les grands problèmes de nos jours. Des dix réalisations en compéti-tion, six sont l’ œuvre de jeunes cinéastes qui se lancent dans l’exploration artis-tique, mais n’oublient pas de traduire les intérêts de la génération qui a gran-di en Russie post-soviétique.Le problème de la migration clandes-tine, qui inquiète aujourd’hui l’Europe et la Russie, chamboule l’âme, tel un cri de détresse, dans le fi lm de la néo-phyte Daria Poltoratskaya, Adieu Mos-kwabad. Il étale au grand jour l’insup-portable climat d’humiliation que

CINÉMA

Perles du nouveau cinéma russe à Honfleursubissent les Tadjiks à la recherche, dans un Moscou morose, d’un abri et d’un sa-laire. Le sujet des travailleurs migrants, ces gens d’autres religions ou d’autres traditions qui changent l’image cultu-relle du pays, est l’un des plus débattus en Russie, ce qui explique son intérêt pour les jeunes réalisateurs. Dans les fi lms Foyer, doux foyer d’Alexandre Bassov, Elle de Larissa Sadilova et Norveg d’Aliona Zvantsova (ce dernier est en compétition), il est examiné du point de vue des « intrus » traités par les au-tochtones comme des sous-hommes.Autre nom du nouveau cinéma russe, celui de Victor Dement, réalisateur de La Trouvaille, qui, tout comme Léviathan d’Andreï Zviaguintsev et Les Nuits blanches du facteur Alexeï Triapitsyne d’Andreï Kontchalovsky, traduit un sen-timent d’isolement dans l’air raréfi é d’un pays gigantesque. Le fi lm nous reporte dans une région du Grand Nord dont le silence menaçant est très bien reproduit

par le directeur de la photographie, An-dreï Naïdionov. Le héros, un garde-pêche, est l’unique représentant du pouvoir dans une petite localité dont il dicte les règles qui en régissent la vie selon son idée de la loi et de la morale. Ce drame est celui d’un homme qui ne trouve plus sa place dans la société, mais qui, tentant de sau-ver un enfant abandonné dans la forêt, change d’attitude envers ses semblables.Frère Deyan, de Bakour Bakouradzé, exigera du spectateur de savoir lire les nuances jusque dans le silence de l’image : c’est du cinéma d’auteur, un monde où l’on entre lentement et dif-fi cilement. Il n’est pas donné au spec-tateur de comprendre immédiatement qu’il a affaire à un drame concernant un tyran jadis tout puissant qui déci-dait du sort de populations et d’entités étatiques entières, mais qui aujourd’hui est un vieillard poltron redoutant la vengeance. Le fi lm est basé sur l’his-toire du général serbe Ratko Mladic ac- VALERY KITCHINE, POUR RBTH

cusé de génocide, qui a réussi à échap-per à la justice pendant quinze ans. Parmi les réalisateurs connus : Alexandre Kott, dont le drame Insight a été primé aux festivals de Berlin et de Tokyo. Le fi lm illustre une tendance nouvelle pour le cinéma russe puisqu’il s’intéresse, une fois n’est pas coutume, au sort des han-dicapés.La fantasmagorie Orléans d’Alexeï Prochkine, dans la catégorie Hommages, met en scène le Diable, véritable exé-cuteur dans une ville de province peu-plée d’habitants malhonnêtes. De cette tragi-comédie, tournée d’après le scé-nario du maître de la dramaturgie russe Iouri Arabov, il est très facile de tirer un parallèle avec le roman de Mikhaïl Boulgakov, Le Maître et Marguerite.Pour nombre de fi lms actuels, des fes-tivals comme celui de Honfl eur fi gurent parmi les rares moyens de se frayer un chemin vers le spectateur exigeant. La Russie voit certes rajeunir son cinéma, mais aussi son public qui place trop souvent, hélas, les fi lms au niveau d’une bouteille de Pepsi et d’un paquet de pop-corn.

ELLÉA TCHETOVPOUR RBTH

La COP21 s’annonce aussi comme une

plateforme de mobilisation artistique

dont le but est d’appréhender la

complexité des défis climatiques via

des approches créatives.

ART NUMÉRIQUE Au service de la planète bleue

Invitée sur les Berges de Seine dans le cadre d’ArtCOP21, un programme-re-lais des meilleures initiatives cultu-relles visant à sensibiliser sur le climat en marge du sommet de l’ONU, Olga Kisseleva porte une réfl exion moderne sur les enjeux climatiques et les pro-blématiques liées à l’espace urbain.

Un code-barres géant pour « naviguer » dans tout ParisL’artiste russe a imaginé Urban Da-taScape, une installation multimédia interactive qui oscille entre le réel et le virtuel. Conçue en forme de code Datamatrix monumental, l’ œuvre per-met, une fois scannée via un smart-phone, de se connecter à une sorte de « paysage des données » offrant aux promeneurs la possibilité de naviguer virtuellement dans tout Paris.Pionnière dans cette dimension de l’art numérique, Olga Kisseleva explore ici le « langage parisien », au travers des couleurs et codes artistiques de la ville. Composée de cubes en bois recyclés, l’œuvre est un clin d’œil aux impres-sionnistes, et pas seulement parce qu’elle est exposée à côté du Musée

Olga Kisseleva, une artiste russe engagée pour le climat

explique Olga Kisseleva. L’objet dans sa fonction représente, au-delà de sa présence plastique, un labyrinthe sym-bolique. Or, le rôle de l’art dans la so-ciété est de nous faire sortir de ce laby-rinthe ».À la fois ludique et visuelle, l’installa-tion est une « pièce militante » qui a pour rôle de sensibiliser la population aux enjeux climatiques et environne-mentaux. L’artiste ne doute pas d’avoir choisi la bonne méthode pour favori-ser une prise de conscience du public. « Le langage numérique que j’utilise est aussi celui que tout le monde parle au quotidien », précise-t-elle à RBTH.

Derrière le numérique, l’humain Ce qui intéresse Olga Kisseleva et qui se refl ète dans ses œuvres, ce sont les problématiques auxquelles est confron-tée la société. L’environnement, les nou-velles technologies et leur impact, mais aussi l’histoire et les sciences sont au-tant de préoccupations contemporaines dont elle s’empare.Dans sa démarche et sa quête artis-tiques, elle expérimente beaucoup, en

repoussant les limites qui séparent l’art de représentations purement maté-rielles. Ayant choisi de s’exprimer à travers des installations interactives où l’inspiration se nourrit des médias et de la science, Olga Kisseleva dispose d’une palette très variée faisant no-tamment appel à l’Internet, la réalité virtuelle et d’autres techniques de com-munication. L’artiste explique ainsi son choix : « avec les nouveaux outils qu’il a ac-quis, l’homme a accéléré le processus évolutif dans de nombreux domaines, notamment celui de la destruction de la nature. Mais dans le même temps, ces mêmes outils nous permettent de déployer notre intelligence pour repen-ser notre relation à la nature et la re-construire ». Une démarche artistique à la fois scientifi que et intuitive, qui s’aventure au-delà d’une pensée binaire.Olga Kisseleva expose régulièrement en France et Russie. Sa prochaine ex-position, Self Organisation, explorera le monde de l’après-pétrole. Elle sera présentée en décembre au musée d’art contemporain Garage, à Moscou.

d’Orsay. Les pixels de bois en exposi-tion sont une version moderne du poin-tillisme, courant artistique issu du néo-impressionnisme.

Questionnement urbain et art militantGrâce à des onglets qui permettent de trier les diverses informations (histo-riques, écologiques, économiques) en trois volets, Paris, Monde et Web, l’œuvre-application devient autant un champ de connaissances qu’un espace de questionnement sur la multiplica-tion des données informatiques, leur fonction et la place de l’art dans le monde d’aujourd’hui.« Les données dévoilées sont reliées aux thématiques de la COP21 : on y retrouve des informations réelles sur le climat, l’écologie, la qualité de l’air et de l’eau et les émissions de CO2 en temps réel,

Olga

Kisseleva

Diplômée de l’Académie d’art et d’industrie Stiglitz de Saint-Péterbourg, elle s’installe en France au milieu des années 1990. Maître de confé-rences à l’Univer-sité Paris 1-Pan-théon Sorbonne, elle est fondatrice du laboratoire Art & Science qui joue un rôle pionnier dans le domaine de la création contem-poraine et de la recherche.

BIOGRAPHIE

Dans le cadre du Festival du cinéma russe de Honfleur, la Galerie Danielle Bourdette (5 quai Saint-Étienne) accueille une exposition photo de Georgy Rozov, Le Métro de Moscou.

EN LIGNE

Entretien avec le président du jury, Stéphane Freiss fr.rbth.com/533767

Info pratique

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