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IUFM de l’Académie de Montpellier Site de Montpellier MASSALSKY Nadia Rôle de l’enseignant en production d’écrit au cycle 2 : un étayage ou des étayages ? Domaine d’apprentissage : langage écrit Elèves de grande section et de CP Ecole maternelle « Les Carriérettes » de Mudaison Ecole élémentaire Jean Sibelius de Montpellier Tuteur de mémoire : Catherine Dupuy Assesseur : Yves Soulé Année universitaire 2008-2009

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IUFM de l’Académie de Montpellier

Site de Montpellier MASSALSKY Nadia

Rôle de l’enseignant en production d’écrit

au cycle 2 : un étayage ou des étayages ?

Domaine d’apprentissage : langage écrit

Elèves de grande section et de CP

Ecole maternelle « Les Carriérettes » de Mudaison

Ecole élémentaire Jean Sibelius de Montpellier

Tuteur de mémoire : Catherine Dupuy

Assesseur : Yves Soulé

Année universitaire 2008-2009

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Résumé :

L’objet de ce mémoire est d’observer et d’analyser les conduites d’étayage de

l’enseignant dans des situations de production d’écrit au cycle 2. Cette analyse s’appuie

sur les fonctions d’étayage proposées dans le modèle de J.S. Bruner, auxquelles se

rajoutent d’autres paramètres issus de l’examen de ma propre pratique.

Summary :

The aim of the present work is to observe and analyse effective teacher

scaffolding in the production of written text on the 2nd cycle. This analysis is based on

scaffolding functions proposed by J.S. Bruner and on other parameters extracted from

my own practical experience.

Mots-clés :

Etayage - fonctions d’étayage - production d’écrit - cycle 2 - dictée à l’adulte - atelier

d’écriture.

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Mention et opinion motivée du jury

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Remerciements

La production de cet écrit n’a pu aboutir que grâce à un étayage assidu, pour lequel je

remercie :

Catherine Dupuy ma tutrice, pour son aide dans le « maintien de l’orientation », qui m’a

permis de mener à terme ce travail.

Olivier Halet qui « contrôle si bien mes frustrations », pour sa patience et ses relectures.

Marion Ané pour « l’enrôlement » au travail et l’aide technique.

Enfin je remercie Ghislaine Deltor, maîtresse de grande section et Céline Mazeyrie,

maîtresse de CP ainsi que leurs élèves qui se sont gentiment prêtés à mes expérimentations

pédagogiques.

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SOMMAIRE

Introduction ……………………………………………………………… 1

1- Cadre théorique et institutionnel ……………………………………. 2

1-1 La notion d’étayage …………………………………………… 2

1-1-1 L’apport de J.S. Bruner …………………………………… 2 1-1-2 L’apport de Claude Le Manchec :

évolution de l’étayage de Bruner……………………………… 3

1-2 Les pratiques langagières écrites …………………………………… 4

1-2-1 Oral et écrit …………………………………………………… 4 1 2-2 Lecture et écriture …………………………………………… 5 1-2-3 Le modèle de Hayes et Flower …………………………………… 5

1-3 Ecrire au cycle 2 …………………………………………………… 6

1-3-1 Quelle place dans les programmes ? …………………………… 6 1-3-2 Les dispositifs …………………………………………………… 8

2- Présentation des situations : éléments méthodologiques …… 10

2-1 Contexte général …………………………………………………… 10 2-2 Dispositifs et déroulement …………………………………………… 11 2-2-1 Dictée à l’adulte en grande section …………………………… 11 2-2-2 Atelier d’écriture au CP …………………………………… 12

3- L’étayage de l’enseignant : observation et analyse ………… 15

3-1 Les invariants : les fonctions d’étayage de Bruner …………………… 15 3-1-1 Enrôlement ………………………………………………… 15 3-1-2 Réduction des degrés de liberté …………………………… 17 3-1-3 Maintien de l’orientation …………………………………… 18 3-1-4 Contrôle de la frustration ………………………………… 20 3-1-5 Signalisation des caractéristiques déterminantes de la tâche 21 3-1-6 Démonstration ou présentation des modèles ………………… 22 3-2 Analyse a posteriori du geste professionnel d’étayage ………… 23 3-2-1 Les difficultés d’interprétation du modèle de Bruner …..…….. 23 3-2-2 Mon rôle d’étayage : réussites et difficultés …………………… 24 3-2-3 Pour améliorer mes pratiques d’étayage ……………………… 27

Conclusion …………………………………………………………………… 29 Bibliographie Annexes

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INTRODUCTION

C’est l’année dernière, lors de la préparation au concours de professeur des écoles, que

j’ai été sensibilisée aux fonctions d’étayage de Bruner, dans le cadre d’analyses

d’interventions orales d’enseignants. Etant peu face à une classe, je n’en mesurais pas

réellement la portée. Toutefois, ce modèle m’interpellait. La formulation semblait donner à

l’enseignant une toute puissance et en même temps une grande responsabilité : que penser en

effet d’un maître qui, pour venir en aide à ses élèves, pourrait à son gré « contrôler leur

frustration »? De même pour les autres fonctions du modèle telle que la « réduction des

degrés de liberté » ou la « signalisation des caractéristiques déterminantes de la tâche ». Ce

modèle me paraissait étonnamment ambitieux pour parvenir à décrire des interventions orales,

avec tout ce qu’elles comportent d’imprévu, d’aléatoire et d’unique.

Mon stage groupé, effectué au Maroc dans une classe de CM1 et au cours duquel j’ai

mis en place une séance de réécriture collective d’un texte produit par l’un des élèves, a été le

point de départ d’un questionnement sur l’étayage que j’ai pu mener.

Pour approfondir le sujet, j’ai par la suite mis en place d’autres situations similaires.

L’une sur le lieu de mon stage filé en grande section, et l’autre, lors d’interventions

ponctuelles dans une classe de CP. Mon objectif était que ces situations aboutissent à une

production d’écrit, nécessitant un étayage ciblé de ma part.

A partir de ces expériences, j’essaierai donc, dans le présent document, d’apporter des

éléments de réponse à la question suivante : en quoi le modèle de Bruner permet-il d’analyser

les conduites d’étayage de l’enseignant dans des situations de production d’écrit au cycle 2 ?

J’apporterai tout d’abord un éclairage théorique sur les notions d’étayage et d’écriture.

A la suite de quoi, j’analyserai mes pratiques, dans un premier temps à partir du modèle de

Bruner, puis en apportant des réflexions complémentaires issues de mes observations.

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1-Cadre théorique et institutionnel

1-1 La notion d’étayage

1-1-1 L’apport de J.S. Bruner

En 1976, le psycholinguiste américain Jérôme S Bruner, dans un article intitulé « le rôle

de l’interaction de tutelle dans la résolution de problème1 » décrit les moyens par lesquels un

adulte vient en aide à un enfant nécessairement moins expert que lui. Pour la clarté de la

description, le propos de J.S. Bruner porte sur une tâche particulière. Il s’agit pour des enfants

d’âge moyen 4 ans, de réaliser une construction en trois dimensions à l’aide de blocs de bois.

La tâche, suffisamment complexe, nécessite le soutien d’un adulte, en l’occurrence d’une

tutrice. J.S Bruner postule que le processus d’étayage ne se limite pas pour l’adulte à prendre

en charge les éléments de la tâche qui excèdent les capacités des enfants. Selon leur âge,

Bruner observe différentes interventions de la part de la tutrice : intervention directe ou

démonstration, intervention verbale, rappel. Ces observations amènent J.S. Bruner à conclure

sur la présence de différentes fonctions du tutorat lors du processus de soutien. Ces fonctions,

appelées « fonctions d’étayage », sont généralisables à toute situation d’instruction. J.S

Bruner en distingue six :

L’enrôlement : la première tâche du tuteur est d’engager l’intérêt et l’adhésion des enfants

envers les exigences de la tâche.

Réduction des degrés de liberté : ceci implique une simplification de la tâche par réduction du

nombre des actes constitutifs requis pour atteindre la solution. Le tuteur qui soutient comble

les lacunes, et le débutant résolve ce qui est à sa portée.

Maintien de l’orientation : les débutants, face à la difficulté de la tâche, ont tendance à

s’éloigner du but. Le tuteur doit maintenir leur quête du but défini, soit de façon explicite, soit

de façon détournée en captant leur intérêt.

Signalisation des caractéristiques déterminantes : le tuteur, en précisant les caractéristiques

pertinentes de la tâche, informe l’enfant de l’écart entre ce qu’il produit et le résultat attendu.

Il doit ensuite faire comprendre à l’enfant ces écarts.

Contrôle de la frustration : afin de ne pas décourager l’enfant, la tâche ne doit pas paraître

trop éprouvante. Le tuteur ne doit pas hésiter à minimiser la portée des erreurs que pourrait

1 J.S. BRUNER, Le développement de l’enfant : savoir faire, savoir dire, PUF, 1983.

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faire l’enfant, ni à exploiter tout autre moyen pour l’encourager. Le risque majeur, est de créer

une forte dépendance de l’enfant à l’égard du tuteur.

Démonstration ou « présentation de modèles » : le tuteur « imite » sous une forme stylisée un

essai de solution tenté par l’élève, dans l’espoir que celui-ci l’ « imite » en retour sous une

forme mieux appropriée. Pour cette dernière fonction, et concernant la tâche décrite, Bruner

précise que l’apparition de l’imitation d’une action chez l’enfant, intervient alors qu’il a déjà

compris l’enjeu de cette action dans la résolution de problème.

Les six fonctions d’étayage décrites ci-dessus, sont communément utilisées aujourd’hui pour

décrire des pratiques de classe au cours desquelles l’enseignant tient le rôle du tuteur.

L’étayage observé étant essentiellement verbal, certains manuels de didactique des disciplines

proposent une grille d’observation basée sur ces six fonctions, plus particulièrement lorsqu’il

s’agit d’analyser des séances de langage oral en maternelle.

1-1-2 L’apport de Claude Le Manchec : évolution de l’étayage de Bruner

Dans son article intitulé « L’étayage langagier2 », c’est bien dans des situations

d’apprentissage oral en classe, pour lesquels différents dispositifs sont proposés, que Claude

Le Manchec distingue différentes formes d’étayage : l’étayage affectif, l’étayage langagier et

l’étayage cognitif.

L’étayage affectif : il est destiné à mettre l’enfant en confiance afin qu’il ose s’exprimer.

L’adulte, par une communication verbale et non verbale adaptée crée et maintien l’envie de

communiquer même chez les plus timides. Ceci s’apparente aux fonctions « d’enrôlement » et

de « contrôle de la frustration » de Bruner.

L’étayage langagier : l’adulte pourra prendre en charge une partie du discours, intervenir par

diverses formes d’interaction et techniques d’animation. Claude Le Manchec distingue deux

types d’interactions, la reformulation et la relance, qui toutes deux relèvent du feed-back. Par

techniques d’animations, C. Le Manchec entend les questions ouvertes, qui incitent à

raconter, expliquer, argumenter, et la dénégation : « tu crois qu’il va comprendre si tu ne lui

dis que ça ? »

L’étayage cognitif : cette forme d’étayage s’éloigne du modèle de Bruner dans la mesure où,

pour C. Le Manchec, le langage oral devient objet d’étude. Ici, l’adulte amène l’enfant à

2 C. LE MANCHEC, L’étayage langagier, <www.crdp-strasbourg.fr>

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réfléchir sur les moyens communicationnels et linguistiques de mieux se faire comprendre, ce

qui peut être utile pour préparer une dictée à l’adulte.

C. Le Manchec apporte un éclairage nouveau sur l’étayage, en préconisant, notamment

par la relance et les techniques d’animation, un échange, une « conversation » entre l’adulte et

l’enfant. Cet aspect « humanise » encore davantage le rôle de l’adulte. Il propose également

des formes d’étayage résolument tournées vers des pratiques orales de classe. Pour autant, les

fonctions de Bruner balayent plus largement le champ d’intervention de l’enseignant, et

prennent davantage en compte les processus cognitifs des élèves. C’est donc le modèle de

Bruner qui servira de référence dans l’observation de mes pratiques.

1-2 Les pratiques langagières écrites

Ecrire est une activité complexe faisant appel à des compétences multiples qui

interagissent, et la plupart d’entre elles sont communes à la lecture. Le terme « écrire »

renvoie à des conceptions et à des pratiques pédagogiques différentes : composition française,

rédaction, expression écrite, production d’écrit, geste graphique, écriture… L’activité d’écriture appelle une double tâche d’invention et d’encodage, c'est-à-dire de

transcription graphique et orthographique.

Pour mieux cerner ce qui intervient dans l’écriture, il est utile de revenir sur les liens qu’elle

entretient avec les deux autres activités langagières que sont l’oral et la lecture.

1-2-1 Oral et écrit

Ecrit et oral possèdent des points communs puisque tous deux s’inscrivent dans une

perspective de communication en utilisant le langage. Cependant, c’est par l’oral que l’enfant

entre dans le langage, et c’est grâce à l’oral que la compétence rédactionnelle doit être

travaillée. Pour Jacques Fijalkow3, l’apprenant s’appuie sur du connu dans tout apprentissage.

Il est donc préférable de lui proposer des situations dans lesquelles la langue parlée est

utilisée. Par ailleurs, pour mener à bien un projet d’écriture, on prend appui sur un travail oral

préalable, pour discuter des contenus possibles. Ce sont aussi les échanges oraux qui

permettent aux jeunes enfants d’ordonner les éléments retenus ou encore de les dicter à

l’adulte.

3 J. FIJALKOW, Entrer dans l’écrit, Magnard, 1993

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L’entrée dans l’écrit se fonde donc sur des connaissances de la langue parlée, même si

une différence fondamentale persiste entre oral et écrit : l’écriture relevant d’une situation de

communication différée, pour un destinataire absent, cela nécessite de la part du scripteur, une

attitude de décentration.

1-2-2 Lecture et écriture

Longtemps ces deux activités et leur enseignement étaient séparés, alors que les liens

entre lecture et écriture sont multiples. Ces deux activités sont liées par la nature de la

communication qu’elles instaurent : une communication différée dans laquelle l’émetteur et le

destinataire du message ne sont pas en présence. Par ailleurs, écrire nécessite d’être le lecteur

de ses propres productions, afin de réviser et de construire le texte. Le code alphabétique

utilisé est identique puisque lire et écrire concernent tous deux la langue écrite.

Pour Jacques Fijalkow, l’écriture est une aide à la lecture, puisque cherchant à retranscrire

l’oral, l’enfant travaille les correspondances grapho-phonétiques. L’écriture a alors pour

fonction d’être un outil d’analyse de la langue. La lecture, par les textes travaillés, fournie la

source de connaissances nécessaire à partir de laquelle l’analyse peut se faire. Lecture et

écriture ont donc des fonctions différentes pour un apprentissage unique, celui de la langue

écrite. J. Fijalkow rappelle le risque de travailler l’écriture avant la lecture. En effet, les

enfants risqueraient de s’enfermer dans un code inventé, personnel et erroné qui les mettraient

en difficulté en lecture, face au code normé. J. Fijalkow préconise en fait de mener lecture et

écriture de concert dès le début de l’entrée dans l’écrit.

1-2-3 Le modèle de Hayes et Flower

Ce modèle décrit les processus en œuvre lors de l’écriture. Hayes et Flower4 distinguent trois

ensembles :

- L’environnement de la tâche qui comprend tout élément extérieur pouvant influencer la

performance de l’auteur du texte : destinataire, enjeu, sujet, cadre social…

- La mémoire à long terme qui comprend les connaissances initiales du rédacteur.

- Les processus rédactionnels : la planification, la mise en texte, la révision et le contrôle.

° la planification : elle active en mémoire les connaissances nécessaires à la production

écrite envisagée. Elle les organise et les met en cohérence avec le but visé.

4 A. CABRERA, M. KURZ, Produire des écrits, cycle 2, BORDAS, 2002

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° la mise en texte : les propositions issues de la planification sont transformées pour

donner une production linguistique correcte par le processus de la mise en texte.

° la révision : elle permet de vérifier la production et comprend toute activité de retour

sur le texte. Elle porte sur la pertinence des formes linguistiques et sur la correction

syntaxique et lexicale.

° le contrôle : ce processus guide la mise en œuvre des trois processus rédactionnels

précédents et gère le déroulement de l’activité et le passage d’un processus à un autre.

Ainsi, écrire sous-entend un certain nombre d’opérations qui se succèdent ou se

combinent. A l’école, l’écriture, en lien avec la lecture est le véritable enjeu du cycle 2 auquel

les programmes officiels consacrent une large place.

1-3 Ecrire au cycle 2

1-3-1 Quelle place dans les programmes ?

Dans les programmes de 1995, il est déjà question de « mettre au premier rang

l’apprentissage de la langue française orale et écrite5 », qu’il convient de répartir dans une

nouvelle organisation de la scolarité, par cycles pluriannuels. « Apprendre à parler et à

construire son langage, s’initier au monde de l’écrit » est l’intitulé d’un des cinq domaines

d’activité de l’école maternelle. Une initiation à la culture écrite est préconisée, conduite dans

des activités d’ « interprétation » et de production de texte avec l’aide d’un adulte secrétaire

ou en situation autonome. L’initiation à la production de texte se fait donc en dictée à l’adulte,

collective ou en petits groupes, et concerne tous les types de texte. Les premiers exercices

d’écriture autonome par copie, copie différée ou invention sont encouragés, ainsi que la

production d’ « objets écrits », associant le texte et l’image.

Au cycle des apprentissages fondamentaux, le terme d’ « expression écrite » est employé pour

désigner les productions d’écrit exploitées pour leur fonction d’expression, de communication

ou de mise en mémoire. Les textes sont dictés à l’adulte puis produits de manière autonome.

Les exigences requises concernent aussi bien le fond (mobilisation des idées, choix d’une

progression, pertinence des termes choisis) que la forme (qualité de l’expression et de la

présentation).

5 MEN, Programmes de l’école primaire, CNDP, 1995

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Dans les programmes de 2002, les élèves à la fin de l’école maternelle, doivent être

« familiarisés avec la langue de l’écrit et la littérature6 ». La dictée à l’adulte est là aussi

préconisée, dans le contexte d’un « projet d’écriture ». Par la dictée à l’adulte, l’enfant prend

conscience de l’acte d’écriture de l’adulte, et que sa parole est fixée par cet acte.

La découverte du fonctionnement du code écrit est également un objectif important. Tout

d’abord pour comprendre que les caractéristiques d’un mot écrit sont en relation avec ses

caractéristiques orales, ensuite pour prendre conscience que l’écrit est composé de mots

séparés, et enfin pour approcher la correspondance entre unités sonores et unités graphiques.

L’écriture autonome est également encouragée, mais à travers un répertoire constitué dans les

différents moments de la vie de classe. Les programmes de 2002 parlent ici d’ « atelier

d’écriture ».

Au cycle 2, les élèves apprennent à écrire de manière autonome des textes courts,

essentiellement narratifs ou explicatifs7. L’étayage de l’enseignant reste important,

notamment en ce qui concerne la phase de mobilisation des connaissances précédant la

rédaction. Le maître doit accompagner l’effort de chaque enfant. Si l’écriture autonome est un

objectif du cycle 2, la dictée à l’adulte reste un moyen privilégié pour la mise en mot des

textes produits.

Dans les programmes de 20088, le grand domaine d’activité de l’école maternelle intitulé

« découvrir l’écrit » comprend deux sous domaines : « se familiariser avec l’écrit » et « se

préparer à apprendre à lire et à écrire ». La familiarisation avec le français écrit se fait à

travers la rencontre de textes lus par l’enseignant. Les enfants contribuent par ailleurs à

l’écriture de textes grâce à la dictée à l’adulte. Ce dernier leur fait prendre conscience des

exigences syntaxiques et lexicales d’un texte écrit.

Au cours préparatoire, les élèves s’entraînent à écrire seuls des mots déjà connus, et

apprennent à rédiger de manière autonome un texte court. L’organisation des idées, le choix

du vocabulaire, la construction des phrases et l’orthographe sont des exigences requises.

La lecture des programmes montre une volonté persistante au fil des années de lier,

comme le préconise J. Fijalkow, l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. La nécessité

d’avoir recours à la dictée à l’adulte est affirmée, et l’écriture autonome est encouragée.

6 MEN, Qu’apprend-on à l’école maternelle ?, CNDP, 2002 7 MEN, Qu’apprend-on à l’école élémentaire ?, CNDP, 2002 8 MEN, Horaires et programmes d’enseignement de l’école primaire, SCEREN, 19 juin 2008

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Notons que le rôle de l’enseignant, qui nous intéresse dans ce mémoire, est très explicité dans

les programmes de 2002, et beaucoup moins dans les autres.

Il convient maintenant de présenter brièvement les deux dispositifs préconisés par les

Instructions officielles pour mettre en place des situations de production d’écrit au cycle 2.

1-3-2 Les dispositifs

La dictée à l’adulte :

Le principe de la dictée à l’adulte est le suivant9 : gérer en interaction entre adulte et

enfants la mise en forme d’un texte en déchargeant l’enfant de tout travail graphique et

orthographique. L’adulte ne doit ni transcrire tout fidèlement, ni transformer le message oral

en écrit élaboré. Il doit rendre explicite le travail d’énonciation, un des effets de la dictée à

l’adulte étant de faire changer les enfants de registre d’énonciation. Une autre fonction de

l’exercice est de lever les mystères sémantiques du texte écrit puisque les enfants en sont les

auteurs et l’ont donc forcément compris.

Le rôle de l’enseignant est fondamental puisqu’il est à la fois le scribe, le premier récepteur du

texte, et un soutien permanent de l’effort langagier de l’enfant.

Ses interventions sont multiples : il doit dire ce qu’il écrit, demander à l’enfant de ralentir son

débit, demander des explications sur le contenu. Il doit manifester son embarras devant la

forme de l’énonciation, proposer certaines corrections et enfin relire, en cours et en fin

d’activité.

Comme on le constate, l’étayage de l’adulte est ici intrinsèque au dispositif.

L’atelier d’écriture :

Le principe de l’atelier d’écriture est de proposer un cadre pour travailler la langue,

l’écriture. A l’école, le groupe d’élève sous la conduite de l’enseignant produit des textes

selon quatre étapes10 :

- le lancement : une situation d’écriture est proposée à l’aide d’une consigne, d’un inducteur.

- la production : c’est le temps de l’écriture du texte, y compris sa révision.

- la communication : les auteurs lisent à l’ensemble du groupe ce qu’ils ont produit.

9 A-M. CHARTIER, C. CLESSE, J. HEBRARD, Lire, Ecrire, Produire des textes, Tome 2, HATIER, 1998 10 A. CABRERA, M. KURZ, Produire des écrits, cycle 2, BORDAS, 2002

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- les réactions : le groupe réagit à la lecture des auteurs, ce qui peut entraîner des

modifications du texte.

Lors des deux dernières étapes, l’enseignant est médiateur des échanges et sollicite des

remarques constructives.

Les éléments abordés dans cette première partie apportent un éclairage théorique, afin

d’organiser des situations d’enseignement et d’apprentissage de l’écriture au cycle 2. Dans ce

qui suit, ma pratique sera observée et analysée plus particulièrement sous l’angle de mon rôle

d’étayage auprès des élèves.

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2 – Présentation des situations : éléments méthodologiques

2-1 Contexte général

La première situation est née de ma volonté de comparer ma pratique en CM1 évoquée

dans l’introduction, avec celle qu’un enseignant peut mener à un tout autre niveau du cursus

scolaire. J’ai donc profité de ma présence tous les lundis en stage filé dans une école

maternelle de Mudaison, pour mener auprès d’une classe de grande section des séances de

dictée à l’adulte. L’école de Mudaison accueille des enfants issus de milieux moyens ou aisés.

La classe de grand est encadrée par une enseignante expérimentée qui intègre pleinement sa

pratique autour du projet d’école « Les mots pour le dire », axé en priorité sur le langage.

Ces séances se déroulent l’après midi pendant le temps de repos de ma classe des petits. Il a

été convenu avec l’enseignante des grands que je prendrai un groupe de cinq élèves pendant

trois lundis, à raison d’une demi-heure à chaque fois.

Le projet de production d’écrit est mené à partir de l’album « L’apprenti loup » de Claude

Boujon.

La deuxième situation se déroule dans une classe de CP de Montpellier au cours du

deuxième trimestre. J’ai souhaité compléter mes pratiques de classe en menant des ateliers

liés à la production d’écrit. L’enseignante, pour la septième année responsable d’une classe de

CP, maître formateur titulaire du CAFIPEMF, intègre la production d’écrit dans un dispositif

d’apprentissage de la lecture proposé par Gérard Chauveau.

L’enseignante est présente dans la classe, et je m’associe à des pratiques qu’elle met

régulièrement en place avec ses élèves. Plus particulièrement, en production d’écrit

l’enseignante propose un lanceur qui peut être issu d’un support littéraire ou pas. Les élèves

doivent produire un texte court à partir de ce lanceur, et pour résoudre les problèmes qu’ils

rencontrent liés au difficultés d’encodage de certains mots, ils font appel à l’enseignante ou

utilisent l’affichage de la classe. Je me suis rendue dans la classe plusieurs fois à partir du

mois de février, afin d’étayer un groupe d’élève lors de ces moments en atelier. Lorsque cela a

été possible, les séances ont été enregistrées.

La situation vécue auprès des élèves de grande section vient apporter des éléments

indispensables pour mon mémoire, mais elle a un caractère artificiel dans la mesure où elle a

été élaborée dans ce sens, devenant ainsi un espace d’expérimentation pédagogique. Les

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élèves me connaissent en tant qu’adulte référent de l’école, même si je ne me retrouve face à

eux en situation d’apprentissage que lors de ces moments, le lundi après-midi. Quand aux

élèves de CP, je ne suis pas seule avec eux, et ma présence dans la classe est ponctuelle. Mais

ces élèves ont l’habitude de voir des stagiaires en formation dans leur classe, et s’adaptent

tout à fait à ma présence. Par ailleurs, ils sont familiarisés avec le type de travail que nous

effectuons ensemble, et là, c’est à moi de m’adapter.

2-2 Dispositifs et déroulement

2-2-1 Dictée à l’adulte en grande section

L’activité proposée aux élèves de grande section consiste à inventer collectivement la

fin de l’histoire « L’apprenti loup ».

Ces séances recouvrent essentiellement deux grands domaines de compétences préconisées

par les programmes : « s’approprier le langage » et « découvrir l’écrit », et plus

particulièrement les compétences suivantes :

« - raconter en se faisant comprendre une histoire inventée

- prendre l’initiative de poser des questions ou d’exprimer son point de vue

- écouter et comprendre un texte lu par l’adulte

- produire un énoncé oral dans une forme adaptée pour qu’il puisse être écrit par

l’enseignant »

Le dispositif mis en place pour assurer la production d’écrit est la dictée à l’adulte, selon le

canevas suivant :

Séance 1 :

- explication de la séquence

- lecture du début de l’album

- questions de compréhension

- prise de note au tableau en dictée à l’adulte des idées sur les évènements qui pourraient

arriver à la suite de l’histoire.(Annexe 1)

Séance 2 :

- rappel de la première séance

- lecture du début de l’album

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- lecture des productions de la séance précédente (réécrites au tableau)

- réécriture du fond et de la forme en dictée à l’adulte. (Annexe 2)

Séance 3 :

- Copie du texte sur une affiche par l’enseignant et illustration par les enfants

- Recherche d’un titre pour la fin inventée.

Les séances se déroulent dans une salle utilisée pour les réunions et qui est également

mise à disposition du maître E. Les conditions sont en fait idéales pour mener ce travail

car le groupe que je prends en charge est isolé du reste de la classe. D’une part le lieu est

repéré par les élèves comme un espace où l’on fait un travail particulier avec la maîtresse

Nadia, d’autre part la salle, au calme, équipée d’un tableau noir et de petits canapés,

représente un environnement adapté aux tâches de lecture, d’écoute et d’ écriture que

requiert le dispositif de dictée à l’adulte.

Après la séquences menée avec le deux groupes, une séance est prévue pour la

présentation de l’histoire et des différentes versions (y compris celle de l’auteur) à la

classe.

2-2-2 Atelier d’écriture au CP

Ces séances de production d’écrit au CP diffèrent de la précédente à plusieurs égards.

Tout d’abord, si la passation des consignes se fait collectivement, chaque élève doit ensuite

trouver et rédiger individuellement le texte qu’il doit écrire.

Il ne s’agit pas, comme dans la situation précédente de rechercher une cohérence

littéraire par rapport à un début d’histoire. Si l’activité mise en place ici est une activité

d’écriture, elle implique nécessairement un encodage, qui induit des compétences liées à la

conscience phonologique et au déchiffrage. En effet, avec l’aide de l’enseignant, les élèves

vont repérer et lire sur l’affichage de la classe les mots qui contiennent les sons qu’ils

souhaitent retranscrire dans leur production.

Cet atelier diffère de ce que qu’on entend généralement par atelier d’écriture. En effet, il

s’agit souvent de se mettre d’accord collectivement sur la ou les phrases à écrire et ensuite de

rechercher individuellement la retranscription du message. Ainsi le type de problème que se

posent les enfants est relativement limité puisque qu’ils ont la même tâche à résoudre.

L’atelier peut être ponctué de mises en commun lorsqu’un élève a trouvé l’écriture d’un mot,

mais également de confrontations en cas de désaccords sur l’écriture d’un même mot. Ici,

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chaque enfant ayant son propre message, il est difficile voire impossible de mutualiser.

L’étayage de l’enseignant devient une tâche périlleuse, mais j’y reviendrai.

Si l’on se réfère aux programmes 2008, ces séances recouvrent les compétences

suivantes :

«Ecriture : - choisir et écrire de manière autonome des mots simples en respectant les

correspondances entre lettres et sons.

Lecture : - connaître le nom des lettres

- connaître les correspondances entre les lettres et les sons dans les graphies simples

- lire aisément les mots étudiés et les mots outils. »

Pendant ma présence, sur plusieurs séances, chaque élève a produit deux écrits, à partir de

deux lanceurs différents. Pour le premier écrit, je n’ai participé qu’à l’étayage d’un petit

groupe. Pour le deuxième, j’ai également introduit le lanceur auprès du groupe classe. Ces

lanceurs, issus des expériences de classe précédant ma venue, ont été choisis par l’enseignante

titulaire.

Premier lanceur : la classe a fait une sortie au planétarium de Montpellier au cours de laquelle

plusieurs animations ont été menées. L’enseignante écrit le lanceur au tableau « Ce que j’ai

aimé au Planétarium … » et rassemble les élèves, afin d’expliquer la consigne et de collecter

quelques premières idées. Cette étape permet aux plus démunis d’avoir des éléments de

réponse.

Deuxième lanceur : pendant des séances antérieures de littérature, intitulées « Apprendre à

comprendre une histoire », la maîtresse a lu l’album « Les cinq frères chinois » de Virginie

Soffer. Les élèves pendant ces séances répondent aux questions, font des hypothèses,

confrontent leurs avis au sujet de l’histoire.

Avant l’atelier de production d’écrit, je rassemble les élèves devant moi et leur donne le

lanceur suivant, en rapport avec l’intrigue de l’histoire étudiée : « Vous souvenez-vous des

pouvoirs des cinq frères dans l’histoire ? » Les élèves s’en rappellent et les citent. « Et si

vous aussi vous pouviez avoir un pouvoir magique, lequel aimeriez vous avoir et pour faire

quoi ? » Des enfants donnent quelques exemples, puis tous partent à leur table et se mettent au

travail. Ils peuvent utiliser l’affichage de la classe pour résoudre les problèmes d’écriture ou

demander de l’aide à l’enseignante.

Il est d’usage dans ces pratiques d’écrire au crayon à papier pour pouvoir gommer et rectifier.

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Notons que pour ce lanceur, l’enseignante leur a précisé qu’à ce moment de l’année, elle

voulait qu’ils produisent un texte plus long : non une phrase comme précédemment, mais

plusieurs. (Annexe 3)

Chaque production a fait l’objet de deux séances. Les stratégies des élèves sont très

différentes pour répondre à la consigne. Certains écrivent beaucoup sans se soucier des

normes de retranscription, d’autres écrivent très peu et semblent buter sur chaque syllabe,

avec la peur de ne pas retranscrire correctement les sons. La deuxième séance permet pour les

premiers de revenir sur certains mots mal transcrits mais dont la réécriture est à leur portée

avec un étayage adapté, et pour les seconds de trouver une aide à l’encodage, mais aussi de

retrouver leur idée et la globalité de leur projet d’écriture.

Notons que pour le deuxième lanceur, beaucoup d’élèves avaient bien répondu à la première

partie de la consigne « quels pouvoirs magiques », mais n’avaient pas expliqué pourquoi. La

deuxième séance a permis de mieux cibler cette partie de la consigne.

Afin de finaliser le projet, l’enseignante tape les productions en rétablissant la norme

orthographique et syntaxique. Elle utilise une police correspondant à l’écriture cursive, et

donne à chaque élève sa version qu’il recopiera en suivant le modèle sur son cahier de

production d’écrit.

Après avoir présenté les dispositifs mis en place, il est temps de se centrer sur mes

pratiques et mon rôle d’étayage auprès des élèves.

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3- L’étayage de l’enseignant : observation et analyse

Observons à présent ce que ces différentes situations ont de commun, du point de vue du

rôle d’étayage de l’enseignant, avec une analyse à posteriori de mes interventions et des

ajustements possibles.

3-1 Les invariants : les fonctions d’étayage de Bruner

Les différentes fonctions de l’étayage décrites par Bruner sont nécessaires à l’activité des

élèves, quelle que soit la tâche proposée. Observons et analysons mes interventions dans les

différentes situations selon les fonctions d’étayage proposées par J.S. Bruner. Les situations

sont présentées dans cette partie non plus de façon chronologique mais dans l’ordre de niveau

des différentes classes (grande section, CP). L’analyse se fera notamment à partir de

retranscriptions des interactions orales. Mes interventions sont notées en caractère gras.

L’analyse se fera sur des éléments de corpus choisis dans l’une ou l’autre des séances selon la

pertinence (Annexe 4).

3-1-1 Enrôlement

L’enrôlement se produit en début de séquence lors de la présentation du projet, mais

également au début de chaque séance, lorsqu’il faut rappeler les objectifs et le vécu collectif

ou individuel.

Dictée à l’adulte en grande section

- M : Il y a juste une petite astuce : je ne vais pas lire toute l’histoire - E : Après faudra…qu’on apprenne à la lire ? - M : Non pas encore, vous apprendrez à lire l’année prochaine. Alors je vais vous lire l’histoire mais pas la

fin. Et vous, je vais vous demander là tous ensemble, d’essayer d’inventer une fin. Qu’est-ce qui pourra se passer après ? Moi je vais m’arrêter, et puis alors on va copier les idées, moi je vais les écrire au tableau, et puis on va essayer de travailler pendant trois fois, pour écrire, vous allez écrire, vous allez me dicter les phrases. Pour écrire des phrases, je pense que c’est moi qui vais le faire. Mais par contre, c’est vous qui allez chercher ce qu’il faut écrire, vous allez inventer la suite. Et moi, je serai comme une secrétaire. Quand nous aurons fini d’écrire l’histoire on ira dans la classe pour la raconter à tout le monde avec la fin que vous aurez inventée.

Lecture de l’album par la maîtresse jusqu’à : « Les animaux de la forêt vinrent voir le prisonnier. Ils n’avaient plus peur de lui. »

- M : Je m’arrête là. Il y a une suite mais je ne montre pas les images, et je ne lis pas la suite. - E : Ha, moi je sais !...

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- M: Voilà ce que je vous propose : vous vous rappelez le livre sur lequel on a travaillé « les cinq frères chinois »

- E : oui - M : Ça parle de quoi ? - E : De cinq frères, qui avaient des pouvoirs. - M : Oui. Quels étaient ces pouvoirs ? - E : Y en avait un qui pouvait passer à travers… - E : Un qui ne pouvait pas être brûlé - M : Un qui ne pouvait pas être brûlé. - E : Un qui pouvait avaler toute la mer en une seconde. - M : Ca on ne sait pas. Un qui pouvait avaler toute l’eau de la mer. - E : Y en avait un qui pouvait pas respirer. - M : Qui ne pouvait pas respirer ? Qui pouvait effectivement retenir sa respiration indéfiniment.

Indéfiniment ça veut dire tout le temps. - E : Un qui pouvait allonger ses jambes. - M : Un qui pouvait allonger ses jambes…et le dernier ? Qui je n’ai pas entendu ? N’Famadi ? - E : Il avait le cou en fer il pouvait pas être décapité. - M : Maintenant j’aimerais que vous, vous essayiez d’imaginer, si vous étiez comme l’un des frères

chinois, qu’est ce que vous aimeriez avoir comme pouvoir ? Mais pas forcément la même chose qu’eux ! Ca serait même mieux si on trouvait d’autres idées. Vous avez une idée ? T’as des idées toi ?

- E : Oui - M : Qu’est ce que tu aimerais toi ? - E : Moi j’ai envie d’être une fée et d’avoir des pouvoirs

Plusieurs enfants sont interrogés… M : Alors vous avez le droit d’écrire un seul pouvoir ou des tas de pouvoirs…mais ce que j’aimerais bien aussi, c’est que vous expliquiez pourquoi vous aimeriez avoir ce pouvoir là. Pour faire quoi en fait. Plus vous expliquez des choses et mieux c’est ! Ca marche ?

- E : Oui !

Dans cet exemple, je présente effectivement au groupe d’enfants le contenu des séances.

J’insiste surtout sur les modalités du dispositif en décrivant mon rôle et le leur. La tâche est

présentée comme une coopération, où l’enseignant prend en charge l’aspect technique de

l’écriture. Ceci est important pour mettre à l’aise les élèves. En revanche j’évoque peu les

finalités du projet (raconter à la classe) et de façon tardive dans la formulation de la consigne.

Par ailleurs il aurait fallu expliciter aux élèves la nécessité de la prise de note : garder en

mémoire pour ne pas perdre le fil de l’histoire que l’on invente, dans la séance en cours et

également pour les séances suivantes. J’aurais pu également les interroger sur la pratique

qu’ils avaient de la dictée à l’adulte. C’est effectivement un dispositif qu’ils connaissent, et à

plusieurs reprises dans la séance, lorsque je leur demande ce que j’écris, certains enfants

commencent à épeler des mots. Si la tâche particulière d’inventer la fin d’une histoire est

nouvelle pour eux, ils auraient pu en revanche à partir de leur expérience, deviner leur rôle et

le mien à la simple consigne : « nous allons inventer et écrire au tableau la fin de l’histoire ».

Atelier d’écriture au CP

Ici la fonction d’enrôlement correspond au moment où le lanceur est donné aux élèves,

moment qui est à différencier de la passation de la consigne. Les exigences de l’enseignante

sur les attendus, quant à la longueur de la production font également partie de cette fonction.

Pour l’illustrer, le passage choisi est celui du deuxième lanceur.

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Dans cette situation, la consigne est donnée à la classe entière. La consigne fait le lien

avec des séances de littératures bien repérées des enfants puisqu’elles se passent dans un lieu

particulier, sur la mezzanine de la classe. Le regroupement de la classe entière permet de faire

le lien avec ce moment vécu de tous et permet également par le questionnement de

l’enseignante de faire émerger des propositions qui peuvent donner des idées aux plus

démunis. En effet, l’objectif premier ici n’est pas d’exploiter les compétences narratives des

élèves mais de résoudre des problèmes liés à l’écriture de mots et de phrases. Les élèves, en

écoutant les propositions des autres, sont déchargés en quelque sorte de cette difficulté, et peu

importe si plusieurs élèves souhaitent écrirent la même idée. On voit bien ici, comment le rôle

de l’étayage dépasse la fonction d’enrôlement et anticipe sur le contrôle de la frustration, autre

fonction de l’étayage. Par ailleurs, le rôle de l’enseignant est aussi de favoriser le co-étayage

grâce à l’échange et au questionnement. Même si ce co-étayage n’est pas explicité aux élèves

et donc peut-être pas vécu comme tel, il est néanmoins mis en scène par l’enseignant.

3-1-2 Réduction des degrés de liberté

Il s’agit pour l’enseignant de prendre en compte une partie de la tâche pour aider

l’enfant à résoudre le problème qui lui est posé.

Dictée à l’adulte en grande section

Le dispositif de dictée à l’adulte induit en lui-même une prise en charge par

l’enseignant des difficultés de la tâche, puisque c’est lui qui retranscrit par écrit ce qui est dit.

Mais au-delà de la transcription, il s’agit d’une transposition du langage oral en un langage

écrit, avec par moment des ajustements, liés la norme de ce dernier.

- M : Attend, tout à l’heure tu m’as pas dis ça. Tu m’as dis « est ce que tu seras gentil avec nous » alors là ils parlent, ils parlent les animaux. Quand on parle on met des guillemets ça s’appelle. Est-ce que… je t’écoute Nino, tu…

- M : Le loup….saute sur…c’est un petit mot que vous connaissez. - E : Mouton ? - M : Un mot pour remplacer chasseur. Ecoutez ça va venir. Le chasseur s’approche du trou et

tombe dans le piège. Le loup saute sur… - E : Le monsieur - M : Je vais vous aider je crois. Vous allez tout de suite comprendre. Je vais le dire, d’accord, je

vous aide. Le chasseur s’approche du trou et tombe dans le piège. Le loup saute sur LUI. - E : Ha !

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Ici, dans le premier exemple, je choisis de prendre en charge la norme d’écriture du dialogue,

en explicitant l’emploi des guillemets.

Un autre exemple montre comment, lors de la deuxième séance axée sur la réécriture du

premier jet, j’introduis le substitut pronominal « lui », après avoir tout de même essayé de le

faire émerger des élèves.

Atelier d’écriture au CP

Pour des élèves de CP, l’écriture de mots relève de la résolution de problèmes. Ils

s’agit pour eux soit de retranscrire le son tels qu’ils l’entendent (« j’aimerais » pourrait

s’écrire « jèmeré), soit, pour ceux qui ont intégré que les mots ne s’écrivent pas forcément

comme ils se prononcent, de demander à l’enseignant dans quel mot du répertoire connu de la

classe on retrouve la même retranscription du son.

Un système d’affichage avec des mots écrits et leur image est pour les élèves une aide dans la

retranscription des sons. Ainsi, [wa], c’est le [wa] de « oiseau », [e], c’est le [e] de épée…

Pour écrire « j’aimerais », plusieurs difficultés se présentent : segmentation, transcription de

« ai », transcription d’un deuxième « ais » avec la marque du conditionnel. Je choisis donc

d’épeler la terminaison sans explication particulière. Pour écrire « être », qui après

vérification ne figure pas sur les affichages de la classe, j’oriente l’enfant sur le mot qui

comprend le même son.

La prise en charge de l’enseignant concerne ici des aspects de la tâche identiques à ceux que

doivent résoudre les élèves.

3-1-3 Maintien de l’orientation

Le maintien de l’orientation consiste pour l’enseignant à s’assurer que l’enfant ne

s’écarte pas du but assigné par la tâche. Ses interventions peuvent se décliner de plusieurs

- E1 : « J’aimerais »… - E : Alors là c’est difficile. A la fin de mot c’est pas un é après le [ r ] c’est A-I-S , ça c’est difficile.

« J’aimerais ». Après qu’est ce que tu veux écrire ? - E1 : Ben j’écris « j’aimerais être l’homme invisible » - M : « Etre », alors est ce qu’on l’a dans les mots appris « être » - E1 : Non - E2 : Il y est pas - M : Il y est pas alors je vais vous aider. C’est le [ ] de tête. - E2 : E …e…accent chapeau ? - M : Oui

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façons : rappel des finalités de l’échange, récapitulation des échanges, incitation à

l’anticipation, mise en relation avec ce qui est dit.

Dictée à l’adulte en grande section

Ce groupe d’élève bon parleur, ne s’écarte pas des finalités de la tâche au sens où ils

sont toujours dans la volonté de trouver des idées pour inventer la fin de « L’apprenti loup ».

En revanche à certains moments ils perdent la cohérence de l’histoire, notamment lorsqu’il

s’agit de respecter la chronologie des événements ou le rôle des différents protagonistes de

l’histoire. Dans le passage ci-dessus, j’interviens de façon tranchée pour rappeler ce qui a été

décidé auparavant : le loup mange le chasseur.

Par ailleurs de nombreuses fois, je récapitule le fil de l’histoire soit en lisant mot à mot

ce qui est écrit au tableau, soit en relatant en d’autres termes les différentes actions.

Dans cet extrait, afin de maintenir et même de guider les élèves vers un choix de

vocabulaire adapté à la description d’une action soudaine, je n’hésite pas à mimer la scène et à

solliciter davantage l’imagination des enfants. L’étayage dépasse alors le champ du verbal

pour une communication non verbale qui sollicite probablement l’activation d’images

mentales visuelles. Cette démarche semble efficace pour la narration liée à l’action ou à

l’enchaînement d’actions.

Atelier d’écriture au CP

Comme précédemment, le maintien de l’orientation ne concernait pas pour le groupe

d’élèves concernés un recentrage sur la globalité de l’activité. Les cinq élèves sont restés dans

- E1 : Il croque…le lapin - M : Ha non ! On change pas l’histoire attention ! On a dit le chasseur il s’approche du trou

et tombe dans le piège…et puis on a dit le loup le mange. Qu’est ce qu’il pourrait faire le loup ?

- E2 : Il s’approche du chasseur et il le mange

- M : …On l’a déjà dit il s’approche. Comment il est ce loup ? Je suis le loup et Mathilde c’est le chasseur. Je vois un chasseur devant moi et j’ai très faim. Est-ce que je vais m’approcher comme ça (je marche lentement) ?

- E : Non - M : Et non, imaginez la scène… - E : Il court le chasseur - M : Il sont tout les deux dans le trou…le chasseur est juste à côté de lui - E : Il saute sur lui - M : Ha ! Là, déjà on voit mieux l’action. Le loup… - E : Saute sur le chasseur

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la tâche qui leur était proposée, tâche dont ils connaissent les enjeux. Le maintien de

l’orientation lors de ces ateliers d’écriture pouvait s’opérer à deux niveaux différents de la

tâche

- aider l’enfant à garder en mémoire le contenu sémantique de son message

- aider l’enfant à persister dans sa recherche de transcription de mots

L’étayage de ce point de vue m’est apparu assez difficile, car étant donné le dispositif en

place, il y avait autant d’orientations à maintenir que d’enfants, et ce dans un même cadre

espace-temps. L’absence de corpus illustre cette difficulté. J’avais le sentiment, pendant

l’atelier, mais également à posteriori en écoutant l’enregistrement des séances, de devoir

répondre à de nombreuses sollicitations de toutes parts, sans pouvoir trouver une consigne ou

un conseil qui aurait fait sens pour tout le groupe.

3-1-4 Contrôle de la frustration

La fonction de contrôle de la frustration permet d’éviter que les difficultés rencontrées

ne se transforment en échec et n’entraînent un sentiment de démotivation par rapport à la

tâche. L’enseignant essaie de préserver les conditions propices à la bonne réalisation de la

tâche, conditions qui passent nécessairement par une mise en confiance des élèves.

Dictée à l’adulte en grande section

Atelier d’écriture au CP

3-1-4 Signalisation des caractéristiques déterminantes et démonstration

Selon Bruner, la fonction de contrôle de la frustration peut s’exercer en rectifiant ou en

complétant les énoncés de l’enfant. Elle s’apparente dans ce cas à la réduction des degrés de

liberté. Dans l’extrait ci-dessus, le contrôle de la frustration s’exerce par des encouragements :

« oui ! », « c’est beaucoup mieux ! »

Atelier d’écriture au CP

En écoutant les enregistrements des séances d’atelier d’écriture, je n’ai pas relevé

d’intervention de ma part pouvant s’apparenter à cette fonction d’étayage. C’est probablement

- M : Alors comment on dit quand il est là et il va… - E : Il s’approche ? - M : Oui ! Alors regardez on avait : « le chasseur il vient il regarde dans le trou et maintenant, on a le

… » - E : Chasseur - E : Le chasseur - E : S’approche - M : S’approche de quoi ? - E : S’approche du trou !

- M : C’est beaucoup mieux !

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regrettable lors d’une tâche aussi difficile pour des CP, mais je pense que c’est révélateur des

difficultés que j’ai rencontrées pour être disponible et donc efficace face à la diversité des

demandes. Le contrôle de la frustration des élèves est sans doute d’autant plus aisé que

l’enseignant gère lui-même ses propres difficultés et frustrations, et se rend donc disponible

pour un rôle qui dépasse la simple validation d’une réponse.

3-1-5 Signalisation des caractéristiques déterminantes

La signalisation des caractéristiques déterminantes de la tâche consiste à attirer l’attention des

élèves sur les éléments pertinents de celle-ci.

Dictée à l’adulte en grande section

Dans le premier exemple, je rappelle aux élèves que la finalité de la tâche nécessite la

prise en compte des exigences de l’écrit. Je fais l’hypothèse qu’en grande section avec leur

maîtresse, ils ont déjà travaillé sur ce thème puisqu’ils font des dictées à l’adulte. J’insiste sur

le terme « livre » qu’ils connaissent. Par ailleurs je les informe que je suis consciente de la

difficulté de ma demande mais que ce n’est pas inaccessible. Ceci me permet également de les

recentrer sur ce travail particulier que nous faisons ensemble le lundi après-midi. Je pense que

pour ce groupe de bons parleurs, ce genre de relance est plutôt motivante.

Dans le deuxième exemple, on retrouve le rappel des caractéristiques de la tâche, dans

le sens d’une écriture qui doit être comprise par le destinataire : « …dire ça de façon

simple », « comment on pourrait écrire et expliquer…parce qu’après l’histoire on va la lire

aux autres ». La mention « pour de vrai » est superflue et inappropriée dans le sens ou on

- E : Il vient. - M : On enlève « il ». Mais oui ! Est-ce qu’on a besoin de dire le chasseur il vient ? Ca on le dit quand

on discute, mais dans le livre, on écrit pas comme ça, là on va essayer d’écrire, on va essayer de parler un peu à la manière des livres. C’est difficile ce que je vous demande. C’est un vrai travail ! Alors Mathilde je crois qu’elle a raison. Au lieu de dire le chasseur il vient, tout simplement, on va dire le chasseur…

- E : Vient ! Vient regarder dans le trou - M : Voilà… par exemple.

- M : Tu veux dire qu’ils sont tous les uns derrière les autre ? - E : Oui - M : Et qu’ils se tirent tous par la queue - E : Oui comme un train - M : Alors comment on pourrait le dire ça de façon simple ? Brouhaha - M : Chut, il y a Yohan qui essaie de me faire une explication. Moi j’aimerais savoir comment on

pourrait écrire et expliquer…parce qu’après l’histoire on va la lire aux autres - E : Ho ! - M : Ha ben nous on est entrain d’écrire la suite…pour de vrai ; faudra que ce soit écrit comme dans

un livre

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n’écrit ni pour de vrai ni pour faire semblant : on écrit. Mais c’était sans doute de ma part sur

le moment, une manière de formaliser la tâche, de lui donner de l’importance et de solliciter

l’application des enfants. Cela, toujours dans le but d’être compris du destinataire.

J’aurais pu faire de façon plus explicite ce rappel de l’enjeu de la production d’écrit, en disant

par exemple : « Nous allons écrire ce que vous me racontez, de façon à ce que les autres

élèves de la classe le comprennent quand on leur lira. »

Atelier d’écriture au CP

La production d’écrit se déroule en plusieurs étapes, dont la phase de planification. Ici

je rappelle à l’élève cette étape. Sa réponse « j’ aimerais bien être invisible » correspond dans

sa formulation aussi bien à une norme orale qu’à une norme écrite. Je valide donc sa réponse

et anticipe sur la suite de son écrit en adéquation avec la consigne de l’enseignante.

Par ce rappel à la fois de la nécessité de planifier, qui est bien une caractéristique spécifique

de la tâche d’écriture, et par cette demande de justification du choix du « pouvoir » qui est elle

une caractéristique de la consigne, mon intervention correspond à la fonction proposée par

Bruner de signalisation des caractéristiques déterminantes de la tâche.

3-1-6 Démonstration ou présentation des modèles

Pour Bruner cette fonction s’apparente à une imitation « normée » par l’enseignant

des interventions de l’enfant, de façon à ce qu’il s’approprie en retour la version améliorée de

sa production. Mises à part les interventions de reformulations pour la dictée à l’adulte et de

présentation du mot écrit pour les ateliers d’écriture, je ne vois pas à quoi pourrait

s’apparenter cette fonction dans les situations décrites.

Bilan intermédiaire :

Un premier bilan permet de constater qu’effectivement, à partir d’une grille

d’interprétation qui est celle de Bruner, il est possible de retrouver dans mes interventions

auprès des élèves lors de séances de production d’écrit, les grandes fonctions d’étayage, que

- M : Quels pouvoirs tu aimerais avoir et pour quoi faire ? Alors il faut déjà avoir dans sa tête, une idée de la phrase qu’on va écrire.

- E : J’aimerais bien être invisible - M : Ha ben voilà ! « j’aimerais bien être invisible » et après tu nous expliqueras pourquoi.

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ce soit dans une situation de dictée à l’adulte en grande section ou dans une situation d’atelier

d’écriture au CP.

Mais le fait de pouvoir considérer que l’étayage a bien eu lieu sous différentes formes,

n’exclue pas les difficultés que j’ai pu rencontrer sur le terrain.

Par ailleurs le traitement des corpus d’après Bruner fait apparaître également que ce modèle –

comme tout modèle- a aussi ses limites. Celles-ci sont d’ordre méthodologique, mais leur

analyse permet d’envisager des améliorations effectives de l’étayage, face aux élèves.

3-2 Analyse à posteriori du geste professionnel d’étayage

3-2-1 Les difficultés d’interprétation du modèle de Bruner

L’utilisation d’un modèle présente certes l’avantage de guider l’observation, mais pose

également des problèmes méthodologiques et théoriques qu’il est important de mentionner.

Des fonctions d’étayages aux effets plus ou moins observables :

Toutes les fonctions d’étayages ont pour objectif de soutenir l’élève dans son effort de

résolution de problème. Mais si elles sont toutes nécessaires, il s’avère qu’on ne peut pas

toujours dans l’analyse d’un corpus, en mesurer les effets sur la progression des élèves, effets

eux-mêmes mesurés souvent, à tord ou à raison par la progression de la tâche. Une fonction

comme la « réduction des degrés de liberté » par la prise en charge des éléments de la tâche, a

des répercussions visibles sur l’avancée de la production. Le « contrôle de la frustration », est

lui difficilement mesurable, à deux niveaux. Tout d’abord parce qu’il est difficile d’observer

que ce sont bien les encouragements ou autres interventions de ce type qui font avancer la

production, et ensuite parce que, en matière de frustration, domaine intime de la personne, le

contrôle ne peut être que relatif.

La difficulté est de savoir si on observe un réel étayage ou bien des intentions d’étayages.

Cependant, les intentions d’étayage si elles ne sont pas suffisantes sont nécessaires.

Interaction des fonctions :

Lorsqu’il m’a fallu prélever des éléments de corpus représentatifs des différentes

fonctions d’étayage, je me suis confrontée à un problème de choix En effet des fonctions

telles que « l’enrôlement » et le « contrôle de la frustration » sont proches, plaçant

l’enseignant dans un rôle bienveillant, motivant ses élèves. J’ai rencontré la même difficulté

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pour différencier la « réduction des degrés de liberté » et la « présentation de modèles »,

donnant à l’enseignant un rôle directif et transmissif.

Des fonctions générales qui ne tiennent pas compte des spécificités de la tâche :

Un modèle est forcément une généralisation de différents constats. D’autre part, nous

avons vu dans la première partie, que Bruner décrit les différentes fonctions d’étayage à partir

d’une tâche de construction, donc très différente des situations que j’ai mises en place. Bien

sûr, comme nous l’avons vu, le modèle de Bruner permet une observation des conduites

d’étayage de l’enseignant. Mais j’aurais sans doute pu l’utiliser de la même façon pour

analyser l’étayage lors de séances en sciences. La spécificité de la production d’écrit n’est pas

représentée, et pour cela il faudrait se pencher davantage sur les enjeux cognitifs de la tâche.

On peut faire l’hypothèse que l’on n’aide pas un élève de la même manière pour modifier son

registre d’énonciation lors du passage de l’oral à l’écrit et pour élaborer une hypothèse

scientifique.

Ces difficultés sont d’ordre méthodologiques, mais renvoient à la nature des fonctions

et aux différents statuts que peut prendre l’enseignant dans son rôle d’étayage plus ou moins

directif ou bienveillant.

Voyons maintenant ce que je retire de ma pratique pédagogique de point de vu de

l’étayage.

3-2-2 Mon rôle d’étayage : réussites et difficultés

A posteriori et globalement, j’ai le sentiment d’avoir été plus à mon aise, en proposant

un étayage plus efficace dans la situation de dictée à l’adulte en grande section. Je peux faire

plusieurs hypothèses face à ce constat.

L’appropriation de la situation :

Tout d’abord, le projet mené en grande section était personnel, de sa conception à sa

réalisation en passant par le choix de l’album. En CP, en revanche, l’atelier de production

d’écrit était ritualisé pour les élèves et leur enseignante, mais pas pour moi. Il m’a demandé

une adaptabilité qui a pu parasiter ma disponibilité auprès des élèves.

Le contexte spatio-temporel

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Accueillir un petit groupe d’enfant en dehors de la classe pendant une durée

déterminée et de façon régulière, même sur seulement trois séances permet de cadrer les

séances dans une dimension spatio-temporelle rassurante à la fois pour les élèves et pour

l’enseignant. Nous avions rendez-vous pour un travail précis, les élèves étaient disponibles

pour ce travail, et cela m’a permis de me conforter dans mon rôle, y compris pour l’étayage.

Avec les élèves de CP, mes interventions auprès du groupe étaient perturbées par

l’atmosphère sonore du reste de la classe, ce qui c’est ressenti sur la qualité de mon étayage.

En effet, pour résoudre les problèmes liés à l’écriture d’un mot, je demandais aux élèves de

les prononcer, de les articuler, ou je le faisais moi-même, et ce travail phonologique nécessite

une écoute accrue , donc du silence. Le cadre de la classe s’imposait cependant, car les

enfants utilisaient l’affichage pour produire leur écrit.

De plus, le dispositif mis en place pour la dictée à l’adulte me permettait des allers-retours au

tableau et vers les élèves. Cette occupation de l’espace, me permettait de capter davantage

l’attention et de m’ « imposer » afin d’orchestrer la séance.

La nécessité de placer ma voix à une certaine fréquence pour solliciter tout le groupe lorsque

j’étais au tableau, participe aussi de la mise en scène. Ces éléments permettent probablement

un étayage plus efficace puisqu’ils sont révélateurs de l’aisance de l’enseignant.

Un projet plus ou moins fédérateur :

A plusieurs égards, le projet lié à la dictée à l’adulte concerne le collectif. D’abord le

groupe d’élève qui travaille à partir d’un album commun « L’apprenti loup ». A partir de cette

référence commune, la suite de l’histoire a été élaborée à partir des idées de chacun et de leur

confrontation. Mon rôle a été d’aider à la prise de décision afin qu’émerge un écrit collectif

cohérent. Par ailleurs, au delà du dispositif, il s’agissait au final de lire l’histoire devant toute

la classe. Le rôle d’étayage est plus facile pour l’enseignant quand il s’inscrit dans un projet

unique, pour lequel les élèves sont motivés. La fonction de maintien de l’orientation par

exemple est dans ce cas plus aisée. En revanche, au CP, il m’était difficile de prendre en

charge la diversité des demandes, uniques pour chaque production.

Par ailleurs, il s’agissait d’un travail personnel, mais je ne sous estime pas dans cette tâche le

poids du contrat didactique, sans doute plus prégnant ici qu’en grande section. En effet, les

enjeux autour de la lecture et de l’écriture sont forts au CP, et la tâche était difficile. Je fais

donc l’hypothèse que la motivation qui pousse les élèves à s’appliquer sur leur travail

d’écriture personnel n’est pas de même nature que celle qui leur permet d’inventer ensemble

une histoire. Dans le premier cas, face à une motivation externe des élèves, les fonctions

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d’enrôlement et de maintien de l’orientation sont essentielles, mais également difficile à

assurer, alors qu’avec les grandes sections, l’adhésion au projet étant immédiate et durable,

cela me facilitait mon rôle d’étayage.

Le dispositif :

La dictée à l’adulte, par les modalités qu’elle impose se prête particulièrement bien à

un étayage oral de l’enseignant. Il fait partie du dispositif, puisque la production d’écrit

n’émergera à partir des propositions des enfants, qu’après un travail de reformulation des

énoncés oraux. Dés le départ, l’étayage est la condition même de l’existence de l’activité.

Pour l’atelier d’écriture, après la phase d’enrôlement, la production d’écrit pouvait démarrer

tant bien que mal sans mon aide.

La tâche en elle-même :

Inventer la suite d’une histoire sollicite l’imagination et les compétences narratives de

chacun. Nous avons tous plus ou moins de faciliter à cela et ce n’est pas une compétence

exclusive au champ scolaire. Il n’existe pas de bonne ni de mauvaise réponse à partir du

moment ou la cohérence du récit est maintenue. Dans ce contexte, propice aux échanges,

l’enseignant se pose naturellement comme médiateur.

Lorsqu’il s’agit d’écrire ses propres phrases, la tâche est ardue pour des élèves de CP. Je ne

me prononcerais pas sur leur représentation de la tâche, mais de mon côté je l’ai perçue du

point de vue de la norme et n’ai pas suffisamment mis les élèves en situation de recherche.

Une seule réponse étant attendue, il m’arrivait de la donner, en épelant le mot recherché. Les

possibilités d’aide de ma part se limitaient à donner plus ou moins d’indices sur le mot

recherché. Des interventions qui variaient donc par leur nombre mais peu par leur nature.

Mon rôle était ici beaucoup plus transmissif. En d’autres termes, et pour reprendre ceux de

Bruner, la nature de la tâche m’incitait avec les élèves de CP à réduire sans doute plus que

nécessaire leur degré de liberté.

Les ressources personnelles de l’enseignant par rapport à la tâche :

Avec les élèves de grande section, je n’ai pas hésité à mimer certaines scènes et à les

faire participer, afin de faire émerger dans la narration un vocabulaire propre à l’action. Une

façon comme une autre de les aider, qui n’était pas prévue, mais qui s’est avérée efficace,

certainement parce que j’étais à mon aise dans ce type de « mise en scène ».

Avec les élèves de CP, les seules ressources à ma portée étaient celles des

connaissances scolaires, celles-là même que les élèves étaient sensés acquérir.

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3-2-3 Pour améliorer ma pratique d’étayage

Au-delà des différents constats sur ma pratique relatés précédemment, il me paraît

intéressant de dégager quelques paramètres qui viendraient compléter les propositions de

Bruner, et surtout rendre plus efficient mon rôle d’étayage pour de futures expériences.

La dimension expressive verbale ou non verbale de l’étayage

La posture physique, les regards, les intonations de la voix de l’enseignant enrichissent

l’étayage verbal d’autant plus qu’on à faire à un auditoire d’enfants, très sensibles à tous les

signaux non verbaux. Cette dimension, qui se justifie surtout en dictée à l’adulte, est à garder

en tête lors de préparations de séances de ce type. Elle participe à l’enrôlement et au maintien

de l’orientation.

Prendre en compte l’hétérogénéité des élèves

Cette dimension n’est pas évoquée par Bruner car la tâche qu’il analyse se déroule lors

de séances individuelles, dans un tête-à -tête enfant – tuteur. L’adulte adapte son étayage aux

compétences de l’enfant qui se présente devant lui. Mais le rôle de l’adulte se complique lors

de séances collectives. Lorsque le collectif poursuit un but commun, comme dans le cas de la

dictée à l’adulte, l’enseignant qui connaît les capacités langagières de ces élèves peut valoriser

la parole des « petits parleurs », soit en posant des questions à leur portée, soit en valorisant

leurs interventions si minimes soient-elles. Ceci nécessite de gérer la prise de parole des

« bons » et « petit parleurs », au risque de susciter pour les uns et les autres un « maintien de

la frustration ».

Lorsque le collectif est davantage une somme d’investissements personnels comme pour

l’atelier d’écriture, l’étayage n’est pas pour autant facilité. Certaines fonctions d’étayage

peuvent sans doute servir tout le groupe comme l’enrôlement ou le maintien l’orientation.

Mais on imagine un « contrôle de la frustration » ou une réduction des degrés de liberté »

adaptée à chaque enfant.

Favoriser le co-étayage :

Le modèle de Bruner a été élaboré à partir d’une situation duelle dans laquelle

l’enseignant expert amène son savoir à l’enfant novice. On peut imaginer, en lien avec la

dimension d’hétérogénéité précédemment citée, un dispositif qui mettrait les élèves en

interaction. Au cycle 2 cependant, on peut penser que l’enseignant reste très présent, comme

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médiateur d’un co-étayage, ce qui implique d’autres compétences de sa part. Ces situations de

co-étayage pourraient favoriser une compréhension mutuelle des enjeux de l’activité.

Le partenaire du co-étayage peut être aussi l’outil qui sert à la validation du travail,

comme par exemple l’affichage de la classe ou le répertoire. Ces outils étaient en partie

présents lors de mon expérimentation, mais je pense que c’est un point à approfondir, qui

mérite une vraie réflexion sur ce qu’il est pertinent de mettre à disposition des élèves.

L’utilisation de ces outils doit sans doute faire l’objet d’un réel apprentissage, et on retrouve

dans cette anticipation le rôle d’étayage de l’adulte.

Ces propositions émergent en fait d’un contexte que Bruner n’avait pas pris en compte

initialement pour ces observations, celui de la classe. L’élargissement du modèle aux

situations de classe nécessite aussi de la part de l’enseignant, un élargissement de ses

compétences en amont ou pendant les séances.

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CONCLUSION

Le modèle de Bruner est une référence pour qui veut étudier les pratiques d’étayage de

l’enseignant. Dans ce mémoire j’ai choisi d’analyser mes pratiques d’étayage dans deux

situations de production d’écrit au cycle 2 mettant en jeu des dispositifs différents : dictée à

l’adulte et atelier d’écriture. Il s’avère après observation et analyse, que les fonctions

d’étayage de Bruner sont effectivement présentes dans mes pratiques.

Cependant, en m’appuyant sur les difficultés mais aussi les satisfactions que j’ai pu

rencontrer, il apparaît que le contexte de la classe et du collectif, pose des contraintes que le

modèle de Bruner n’avait pas prises en compte.

Ainsi, ce travail m’a amené à élargir mon point de vue sur d’autres dimensions de

l’étayage de l’enseignant qu’il me paraît important de garder à l’esprit dans des situations de

production d’écrit : la dimension expressive verbale ou non verbale de l’étayage, la prise en

compte de l’hétérogénéité des élèves et le fait de favoriser le co-étayage.

Je pense et j’espère que ce travail sur les gestes professionnels, éclairera ma pratique

future d’enseignante lorsque je prétendrai aider mes élèves en production d’écrit. Reste que

l’activité d’écriture est un exercice difficile, je peux sincèrement en témoigner ici, en posant

ce point final.

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ANNEXES ANNEXE 1 : texte produit par les élèves de grande section à l’issue de la

première séance.

ANNEXE 2 : texte révisé à l’issue de la deuxième séance ANNEXE 3 : productions d’écrit des élèves de CP ANNEXE 4 : retranscription des séances (extraits)

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ANNEXE 1

Les animaux n’ont plus peur du loup. Les animaux partent.

Le chasseur, il vient, il regarde dans le trou.

Le chasseur tombe dans le trou et après le loup le mange.

Le mouton, les lapins et l’écureuil ont vu la queue du loup qui

dépassait du trou.

Les animaux lui demandent : « Est-ce que tu pourras être gentil

avec nous ? Sinon tu resteras dans le trou jusqu’à des milliers

d’années ! »

- « Je ne vous ferai plus peur ! ».Tous les animaux se mettent à la

queue leu leu et attrapent la queue de celui qui est devant. Le

lapin qui est devant attrape la queue du loup. Le lapin, l’écureuil

et le mouton tirent pour remonter le loup. Ils sont tous contents de

jouer avec lui.

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ANNEXE 2

Les animaux repartent tranquillement dans la forêt. Un chasseur

s’approche du trou et tombe dans le piège. Le loup saute sur lui, et

le croque. Le mouton, les lapins et l’écureuil ont entendu crier le

chasseur. Ils font demi-tour et retrouvent le loup tout seul.

Les animaux lui demandent :

- « Est-ce que tu pourras être gentil avec nous? Sinon, tu

resteras dans le trou jusqu’à des milliers d’années ! »

- « Je ne vous ferai plus peur ! » dit le loup.

Tous les animaux se mettent à la queue leu leu et attrapent la

queue du loup. Le lapin, l’écureuil et le mouton tirent pour

remonter le loup

Depuis cette aventure, ils sont tous contents de jouer avec lui.

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ANNEXE 3

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ANNEXE 4 Dictée à l’adulte séance 1

- M Il y a juste une petite astuce : je ne vais pas lire toute l’histoire - Après faudra…qu’on apprenne à la lire - M Non pas encore, vous apprendrez à lire l’année prochaine. Alors je vais vous lire l’histoire

mais pas la fin. Et vous, je vais vous demander là tous ensemble, d’essayer d’inventer une fin. Qu’est-ce qui pourra se passer après. Moi je vais m’arrêter, et puis alors on va copier les idées, moi je vais les écrire au tableau, et puis on va essayer de travailler pendant 3 fois, pour écrire, vous allez écrire, vous allez me dicter les phrases. Pour écrire des phrases, je pense que c’est moi qui vais le faire. Mais par contre, c’est vous qui allez cherchez ce qu’il faut écrire, vous allez inventer la suite. Et moi, je serai comme une secrétaire.

Lecture de l’album par la maîtresse jusqu’à : « Les animaux de la forêt vinrent voir le prisonnier. Ils n’avaient plus peur de lui. »

- je m’arrête là. Il y a une suite mais je ne montre pas les images, et je ne lis pas la suite. - Ha, moi je sais ! - Qu’est-ce que tu sais ? - En fait, d’abord il était petit, après il grandi, - oui - après les animaux ils lui ont fait peur - non c’est lui qui a fait peur - c’est lui qui a fait qui faisait peur aux animaux - après après le loup il a fait peur aux animaux, il est tombé dans le trou - mais il le savait pas que c’était… qu’il était un loup lui - il voulait faire exprès - alors, attendez, attendez, ça c’est après, au début, qu’est-ce qui se passait quand il faisait

peur………………..

---------------

- Il leur demande s’il sera gentil, et a… et après, si le loup il dit qu’ils seront toujours ami, et ben après,

ils le ressortent le loup. - Alors là je tient l’idée ; Ecoutez bien . On va voir comment on va l’écrire ; les animaux tu m’as

dit, demandent - Au loup, s’il sera gentil avec eux - Je t’écoute ; les… - Animaux - Les animaux - Oui - Leur demandent : est ce que tu pourras être - Alors, leur, LUI demandent…lui demande - Si il sera - Attend tout à l’heure tu m’as pas dis ça. Tu m’as dit « est ce que tu sera gentil avec nous » alors là

ils parlent, ils parlent les animaux. Quand on parle on met des guillemets ça s’appelle. Est-ce que… je t’écoute Nino, tu

- Est-ce que tu pourras être gentil avec nous - Est-ce que tu pourras - Etre gentil

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- C’est Nino qui me dicte. Etre - Gentil - Avec - Avec - Moi - Nous - Avec nous. Est-ce que tu pourras être gentil avec nous ? Il faut qu’il comprenne le loup que sinon

il va rester dans le trou ; Alors attendez : les animaux lui demandent : est ce que tu pourras être gentil avec nous, sinon

- Tu vas rester dans le trou Dictée à l’adulte séance 2

- Alors est-ce qu’on a besoin de dire le chasseur tombe dans le trou. - Non ! Tombe dans le piège - Alors le chasseur s’approche du trou et… - Et tombe dans le piège - D’accord… (la maîtresse écrit) Et après qu’est ce qui se passe ça on le garde - Il le mange - Alors on va donner un peu plus de suspens à l’action. Imaginez qu’on doit écrire la scène pour un

film. Au lieu de dire le loup le mange.,.qu’est ce qu’il va faire le loup - Il va le manger - Il croque le lapin - Ha non on change pas l’histoire attention ! On a dit le chasseur il s’approche du trou et tombe

dans le piège…et puis on a dit le loup le mange. Qu’est ce qu’il pourrait faire le loup - Il s’approche du chasseur et il le mange - On l’a déjà dit il s’approche. Comment il est ce loup. Je sui le loup et Mathilde c’est le chasseur.

Je vois un chasseur devant moi et j’ai très faim. Est-ce que je vais m’approcher comme ça (je marche lentement)

- Non - Et non, imaginez la scène… - Il court le chasseur - Il sont tout les deux dans le trou…le chasseur est juste à côté de lui - Il saute sur lui - Ha ! ha là, déjà on voit mieux l’action. Le loup - Saute sur le chasseur - Saute sur Mathilde - Non pas sur Mathilde, c’était un exemple. Il saute sur… - Le chasseur ! - Est-ce qu’on va répéter le chasseur ? écoutez bien : le chasseur s’approche du trou et tombe dans

le piège. Le loup… - Saute sur le chasseur- - Et on répète le chasseur ? le chasseur s’approche du trou et tombe dans le piège, le loup saute sur

le chasseur ? Ca va pas. On va pas répéter chasseur . Comment on va faire ? - Le loup….saute sur…c’est un petit mot que vous connaissez. - Mouton ? - Un mot pour remplacer chasseur. Ecoutez ça va venir. Le chasseur s’approche du trou et tombe

dans le piège. Le loup saute sur… - Le monsieur - Je vais vous aider je crois. Vous allez tout de suite comprendre. Je vais le dire d’accord je vous

aide. Le chasseur s’approche du trou et tombe dans le piège. Le loup saute sur LUI. - Ha !........................

---------------

- Regarde dans - Le trou - Regarde dans le trou. Est-ce qu’elle va bien cette phrase : le chasseur il vient, il regarde dans le

trou ? - Oui - Vous croyez qu’on peut écrire comme ça ?

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- Le chasseur vient - Ha ! on avait écrit le chasseur, il vient, il regarde dans le trou. Et là Mathilde elle me dit « le

chasseur vient ». Qu’est ce qu’on enlève ? - Il vient - On enlève il. Mais oui ! Est-ce qu’on a besoin de dire le chasseur il vient. Ca on le dit quand on

discute, mais dans le livre, on écrit pas comme ça, là on va essayer d’écrire, on va essayer de parler un peu à la manière des livres. C’est difficile ce que je vous demande. C’est un vrai travail ! Alors mathilde je crois qu’elle a raison. Au lieu de dire le chasseur il vient, tout simplement, on va dire le chasseur…

- Vient ! Vient regarder dans le trou - Voilà par exemple - Est-ce que vous voyer la différence : la première fois….. Alors au lieu de dire « vient regarder dans le trou » imaginez-le ce chasseur. Il voit le trou la- bas, qu’est ce qu’il fait d’abord ? - Il regarde - Avant - Il marche près du piège - Sur la pointe des pieds - Alors comment on dit quand il est là et il va… - Il s’approche ? - Oui ! Alors regardez on avez : le chasseur il vient il regarde dans le trou et maintenant, on a le - Chasseur - Le chasseur - S’approche - S’approche de quoi ? - S’approche du trou ! - C’est beaucoup mieux ! le chasseur s’approche du trou… Alors on avait : le chasseur il vient il

regarde dans le trouL le chasseur tombe dans le trou et après le loup le mange. On avait tout ça. Maintenant, on a, le chasseur s’approche du trou…

- Et tombe dans le trou el le loup le mange Atelier d’écriture

- Ce que la maîtresse a demandé qui peut le rappeler ? Quelle est consigne ? - Elle a demandé qu’on imagine d’avoir des pouvoirs - Quels pouvoirs tu aimerais avoir et pour quoi faire. Alors il faut déjà avoir dans sa tête, une idée

de la phrase qu’on va écrire. - J’aimerais bien être invisible - Ha ben voilà ! « j’aimerais bien être invisible » et après tu nous expliqueras pourquoi. - J’aimerais être… - Alors « j’aimerais », comment on va l’écrire - Alors J - J majuscule car c’est le début de la phrase - Heu « j’aimerais être comme »…j’y arrive pas - Tu vas essayer : j’aimerais - C’est comme ça « aimerai », ça s’accroche, Est-ce que ça s’accroche ? - oui - E c’est le « é » de… - « épée » - C’est le « ai » de lait - Comment on écrit « rêve » ? - R - R - C’est tout - Non, après c’est le e de « tête » - J’aimerai, c’est le é de « lait » - Le « v » c’est comment déjà ? - Oh tu le sais le « v » - J’ai me RR - Oui attache le c’est le même mot. Voila

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- J’aimerais - Alors là c’est difficile ; A la fin de mot c’est pas un é après le r c’est a-i-s, ça c’est difficile.

« J’aimerais ». Après qu’est ce que tu veux écrire ? - Ben j’écris « j’aimerais être l’homme invisible » - « Etre », alors est ce qu’on l’a dans les mots appris « être » ? - Non - Il y est pas - Il y est pas alors je vais vous aider. C’est le e de « tête » - E …e…accent chapeau - Oui - On accroche ou… - C’est un autre mot alors on accroche pas ; et après là pour la fin du mot je vous aide pas c’est

facile : ê-tre, être - J’aimerais êtttrrre - Dis-le : être - Etre - Etre . Voilà écoute bien ce que tu dis - Etrrrr - « Mon rêve le pus chère »…c’est ça ? - Oui - « Le pu chère » ? « Pu » ? - Oui - P-U ça fait pu. C’est ça que tu veux écrire le pu chère ? - Plus - Non il a pas écrit plus, il a écrit pu - Oui mais c’est deux mots « plus » et « chère » c’est deux mots - … - Dites quand vous m’écrivez « j’aimerais », « j’aime » on a appris « aimer » alors que ce soit

j’aime bien ou j’aimerais ça commence comment le é - Ai - Ai ! - Mon rêve le plus cher - Oui alors ces mots ils sont pas ensembles…c’est d’être êtree on entend le e. Vas-y continu…être

on pourrait le mettre dans les mots à apprendre - J’écris ai ? - C’est quoi tout le mot - « Vé » - Non tout le mot - C’est Végéta mais je sais pas comment ça s’écrit - Qu’est ce que ça veut dire quoi Végéta ? - Végéta c’est dans… - Alors c’est un nom, Végéta, c’est le nom d’un personnage ? - Oui - Alors qu’est ce qu’il faut mettre au début d’un mot quand c’est un nom ? - Vé ? - Ouais, mais la lettre il faut l’écrire comment quand c’est un nom ? - Ai ? - Ha ! Une majuscule ! - Hé oui ! - Comment ça s’écrit « j’ai aimé » ? - « J’ai aimé » ? Viens me montrer - Comment t’écris « parce que » ? Fais voir comment t’écrit « parce que » ? - Ma-ma-mi-lla - « Une fée » c’est comme ça ? - Oui mais il manque une lettre, que tu connaît pas. Tu peux pas savoir ça s’entend pas. C’est une

lettre qu’on entend pas, c’est « e ». Après le é il y a un e. - « Parce que » - Alors il faut…c’est ça mais c’est un autre mot - Qui… - Qui - C’est … - C’est comme « quatre » - Q ?

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- A là c’est parce qu’il y a une liaison ; on l’entend pas ce n…enfin on l’entend mais on l’écrit pas… « homme » il y a une lettre muette. C’est le h et après tu peux trouver tout seul

- O - o-o un o - Oui et après - M - Oui, et il y a un autre m… « un homme ».. A la fin c’est pas fini - Encore un « n » ? - Non - Un « m »? - Non…qu’est ce que tu entends ?

Alors cette fée. . « J’aimerais être une fée qui » ? « Qui a » c’est ça ? - Qui a des - « Des » tu sais l’écrire - « Invisible » Romain…c’est le in de lapin - I-n ! i-n ! - C’est un autre mot Romain. C’est un autre mot « invisible ». Il faut un espace ……………………