REVUE DE PRESSE

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– 1 – Revue de presse de l’inauguration, Compiègne, 23 février 2008

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revue de presse de l'ouverture du Mémorial de l'internement et de la déportation, Compiègne-Royallieu.

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Revue de presse de l’inauguration, Compiègne, 23 février 2008

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Nathaniel Herzberg 23 février 2008

Un mémorial de l'internement inauguré à Compiègne

« J’ai coupé au dernier départ et j'espère bien ne pas être du prochain. Je suis ici avec des gens très bien et gentils : communistes, gaullistes, royalistes, curés, nobles, paysans – c’est une salade extraordinaire. » Écrite par le poète Robert Desnos à sa compagne Youki, cette courte phrase semble résumer le quotidien du camp de concentration de Royallieu-Compiègne.

De 1942 à 1945, quelque 45 000 personnes, de nationalités, de religions, de conditions et d'opinions différentes ont transité par cette ancienne caserne, avant leur déportation vers l’Allemagne et la Pologne. La ville de Compiègne a décidé de leur rendre hommage en ouvrant, samedi 23 février, sur les lieux mêmes de leur détention, le Mémorial de l’internement et de la déportation.

Faire vivre cette histoire relève du défi à l’heure des polémiques et compétitions mémorielles. Pour l’historien Christian Delage, cheville ouvrière du projet, l’objectif est clair : « Favoriser la réunion des mémoires, qui jusqu’ici se tenaient souvent à distance les unes des autres. »

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C’est qu’en trois ans, Royallieu a connu des usages distincts. À son

ouverture, les Allemands y internent les otages désignés pour être fusillés le moment venu. Ce sont des résistants, souvent communistes, des hommes pour la plupart. Pendant quelques mois, Royallieu reçoit aussi des juifs. De Compiègne partent, en mars et juin 1942, les deux premiers convois de victimes françaises de la Solution finale.

Faire parler le sol

Avec l’ouverture du camp de Drancy, en région parisienne, Royallieu retrouve sa fonction de camp politique. Vingt-six trains partent vers l’Est, dont celui dit des « Tatoués », qui conduira Desnos et une grande partie de ses compagnons vers la mort. Pendant ce temps-là, d’autres détenus – Américains, Britanniques... – utilisés comme monnaie d'échange par les nazis, y attendent plus calmement la fin de la guerre.

Et puis il y a Compiègne, lieu de la signature des deux armistices, en 1918 et en 1940. Compiègne et son régiment de transmission, qui, après la guerre et jusqu’en 1995, a continué à occuper la caserne. C’est cette histoire longue et diverse que les concepteurs du projet ont tenté de privilégier. « En faisant parler le sol et les murs », précise l’architecte, Jean-Jacques Raynaud.

Une fois passé le nouveau bâtiment d’accueil, le sol en béton concassé intègre les matériaux d’époque. Dans les trois baraques conservées, les documents sont souvent projetés sur des murs nus, débarrassés des dernières couches de peinture. Ils sont peu nombreux, car avant de partir, les nazis ont détruit toutes les archives. Mais la scénographie et le recours à de nombreux témoignages donnent vie au parcours.

Car là résidera la difficulté : faire vivre ce lieu qui attend 40 000 visiteurs la première année. L’enjeu financier servira de test pour d'autres : d’ici à 2011, les camps de Drancy, Rivesaltes, Gurs et les Milles devraient à leur tour ouvrir au public. Mémorial de l’internement et de la déportation, Camp de Royallieu, 2-bis avenue des Martyrs de la liberté, Compiègne (Oise). Ouvert de 10 heures à 18 heures. Fermé le mardi. De 2,5 € à 5 €.

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Édouard Launet 25 février 2008

Royallieu, lieu de mémoire

Depuis le week-end dernier, la France compte un nouveau lieu de mémoire, d’une puissante efficacité : le Mémorial de l’internement et de la déportation. À Compiègne (Oise), le camp de Royallieu, créé en 1913, fut durant la dernière guerre le centre de regroupement des internés résistants, avant leur déportation vers les camps nazis (Buchenwald dans une large majorité des cas). Entre 1942 et 1944, 40 000 personnes y ont transité - dont Robert Antelme, Robert Desnos, Jorge Semprún… 17 400 ne sont pas revenues.

Choix

À l’époque, le camp de seize hectares était en périphérie de la ville, au milieu des champs. Après guerre, ses vingt-quatre bâtiments furent récupérés par l’armée française, qui y logea une base aérienne puis un régiment de transmission. Le souvenir des événements tragiques s’est quelque peu estompé au fil du temps, tandis que Compiègne s’étendait jusqu’à englober le camp. Un vague monument de la déportation était inauguré dans les années 70 en bordure du camp, mais rien de plus.

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Quand l’armée a libéré les lieux à la fin des années 90, s’est posé le problème de l’entretien de la mémoire d’un endroit central dans l’histoire française de la déportation. Le choix a été fait de ne garder que trois des bâtiments, et de concéder le reste à la pression immobilière et commerciale : une ZAC se développe aujourd’hui à l’emplacement des bâtiments détruits.

Dans ce qui a été conservé vient d’être élaboré un mémorial, à la scénographie à la fois sobre et discrète, et d’autant plus poignante : une réussite. Les bâtiments ont été rendus à leur nudité ; les murs grattés laissent apparaître les traces de peinture des années 40 et des redécorations successives. Les sols, débarrassés des linoléums et autres cache-misère, sont ceux qu’ont connus les internés. À partir de ces éléments bruts, où architecte et scénographe (Jean-Jacques Raynaud) se sont interdits toute tentative de re-création, a été dessiné un parcours historique (conçu par Christian Delage, historien et réalisateur) qui serpente dans deux des bâtiments.

Écrans

Cette partie du camp ressuscitée est le support d’une évocation de la vie in situ ainsi que de la politique allemande d’occupation, dont Royallieu fut un élément cardinal (ce fut le seul camp sous contrôle direct de l’armée allemande). Frise historique à base de textes brefs, écrans nourris d’archives, projections de films sur les murs et de cartes géographiques sur le sol, dessins et photos amènent peu à peu, de salle en salle, vers l’issue tragique : une trentaine de convois ferroviaires, partant vers les camps d’extermination. Dans la dernière pièce, sept écrans diffusent des documents non montés, tournés lors de la libération des sept camps où furent déportés les internés de Royallieu. Enfin, gravés en grosses lettres sur un ultime mur, les chefs d’inculpation dont ont dû répondre les responsables du camp de Compiègne lors de leur procès : « Meurtres et massacres, exécution d’otages, tortures de civils, déportation et internement de civils dans des conditions inhumaines».

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Ixchel Delaporte 23 avril 2008

« Sol de Compiègne, sol de mémoire… » Inauguré le 23 février 2008, le Mémorial de l’internement et de la déportation propose un parcours parallèle sur la vie du camp de Royallieu et sur le contexte national de la Seconde Guerre.

Un long mur blanc aux allures de bunker s’étend sur l’avenue des Martyrs-de-la-Liberté à Compiègne (Oise). Derrière ce mur, un espace sobre et élégant abrite une petite librairie depuis laquelle on aperçoit, derrière de larges vitres, un des anciens bâtiments du camp de Royallieu (*). Il y a deux mois, on inaugurait ce mémorial de l’internement et de la déportation. Le parcours historique s’étend sur deux des bâtiments conservés. Autour gravitent la chapelle, le tunnel d’évasion, le mur des noms et le jardin de la mémoire. Pourquoi un mémorial dans le camp de Royallieu ? Parce que plus de 45 000 personnes y sont passées. Parce que c’est l’un des plus importants camps de transit en France à partir duquel les Allemands ont déporté des prisonniers politiques, pour beaucoup communistes, civils et juifs confondus. Le premier convoi français part le 27 mars 1942 du camp de Royallieu. « Ce qui s’est passé à Royallieu entre 1941 et 1944 renvoie simultanément à la politique d’occupation allemande, aux rapports entre Vichy et les Allemands, mais aussi aux conflits du pouvoir nazi, entre le centre (Berlin) et la périphérie (le commandement militaire allemand en France), comme entre l’armée allemande et la Gestapo », analyse Christian Delage, historien, responsable du parcours historique.

L’un des plus importants camps de transit en France

Sur les murs des douze salles aménagées, c’est la variété des documents et leur mise en perspective qui prime. Pas de parcours chronologique, mais un va-et-vient entre l’histoire du camp et l’histoire de la France occupée entre 1942 et 1944. Compiègne fut le théâtre des deux grandes guerres. La première salle impose une mise en scène originale et audacieuse. L’histoire se répète avec le wagon de Compiègne. Deux photos projetées sur les murs se font face. D’un côté, le wagon dans lequel l’armistice a été signé par le maréchal Foch en pleine forêt de Rethondes, à Compiègne, le 11 novembre 1918. De l’autre, le même

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wagon, vingt-deux ans plus tard, dans lequel Hitler fait asseoir le général Huntzinger pour signer l’armistice, le 22 juin 1940.

À l’instar du wagon de Compiègne, le camp a une longue histoire qui commence en 1913. D’abord caserne militaire, puis hôpital d’accueil des blessés de la Première Guerre mondiale, le camp de Royallieu est récupéré par la Wehrmacht en juin 1940 et devient « un camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs », puis un « camp de détention de police allemande », plus communément appelé Frontstalag 122. Ce sera le premier et unique camp installé sur le sol français sous la tutelle directe de l’occupant. En juin 1941, les premiers internés sont des Russes, arrêtés à la suite de l’invasion par l’armée allemande de l’Union soviétique. Un mois plus tard, ils sont rejoints par des « politiques », résistants communistes, socialistes et syndicalistes arrêtés en zone occupée.

Le parcours ne joue pas l’exhaustivité. Mais s’appuie sur les films documentaires de propagande « non explicite », sur les coupures de journaux et autres lettres officielles, nationales et locales. La France pétainiste choisit la collaboration et organise la chasse aux communistes et aux juifs. Dans la salle consacrée aux « droits de l’occupant », une carte de France dessinée sur le sol coupe le pays en deux. Les voyages du maréchal - Pétain se font dans le Sud, zone non occupée. Une façon de faire oublier la ligne de démarcation. Pour le reste, c’est l’Allemagne qui détermine les règles. À Compiègne, les prisonniers parviennent à glisser quelques lettres à leur famille jusqu’en septembre 1943, par le biais d’une infirmière de la Croix-Rouge, Germaine Pourvoyeur. Lorsque la répression se radicalise, elle parvient aussi à recueillir les noms des fusillés. Une voix grave venue du plafond attire l’oreille du visiteur. Ce sont les témoignages audio de deux rescapés, Jean-Jacques Bernard et le grand rabbin Hirschler, sur les rafles de Paris (1941) et de Marseille (1943).

Dernière salle du premier bâtiment : « l’internement à Royallieu ». Le poète Robert Desnos, détenu à Royallieu, résume l’ambiance du camp en quelques lignes : « J’ai coupé au dernier départ et j’espère bien ne pas être du prochain. Je suis ici avec des gens très bien et gentils : communistes, gaullistes, royalistes, curés, nobles, paysans. C’est une salade extraordinaire. » De tous les

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réseaux, de toutes les régions et de tous les milieux… Dans le camp A, les politiques et les résistants sont relativement libres de leurs mouvements. Au fond du camp : les juifs. À partir de février 1942, un décret officialise la création du « camp des juifs », à Compiègne, « aux fins de déportation » et « comme otages pour l’application ultérieure de mesures de représailles ».

Des conférences étaient organisées dans des baraques

Sur la vie quotidienne du camp, les archives débordent. Dessins, cours prodigués aux internés, gravures, chants, programmes de concerts… Les internés politiques du camp A mettent en place, entre l’été 1941 et novembre 1943, sous la houlette du doyen communiste Georges Cogniot, rédacteur en chef de l’Humanité depuis 1937, « une véritable politique culturelle ». Des conférences d’anglais, de philosophie politique, d’histoire, de lettres ou de sciences étaient organisées dans les baraques.

Dans le second bâtiment, l’essentiel du parcours concerne la déportation et les camps de concentration. Sept écrans pour sept destinations principales : Dachau, Auschwitz, Mauthausen, Buchenwald, Ravensbrück, Neuengamme et Sachsenhausen. Des témoins, comme Marie-Claude Vaillant-Couturier, Edmond Michelet ou Maurice Choquet, racontent sur des documents filmés le voyage et les conditions de vie des camps de concentration. Le projet du mémorial, porté par l’agglomération de la région de Compiègne depuis 1993, a atteint son objectif : « La création du Mémorial, rappelle l’historien Christian Delage, participe à l’évolution de l’histoire et de la mémoire françaises de l’internement et de la déportation, en favorisant la réunion des mémoires qui, jusqu’ici, se tenaient souvent à distance les unes des autres. » Mémorial de l’internement et de la déportation. Camp de Royallieu, 2 bis, avenue des Martyrs-de-la-Liberté, 60200 Compiègne. Ouvert tous les jours, de 10 heures à 18 heures sauf le mardi. Tél. : 03 44 96 37 00. (*) Du nom d’une ancienne abbaye royale.

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Sophie Flouquet 28 mars 2008

« Un mémorial de l’internement et de la déportation vient d’ouvrir ses portes à Royallieu »

Un mur de béton clair, enchâssant deux monuments aux morts plus anciens, s’étire le long de l’avenue des Martyrs de la Liberté. Quelques ouvertures ménagent des vues sur les trois baraquements rescapés de l’ancien camp de rétention de Royallieu. Là, dans le « Frontstalag 122 », situé à 3 km de la gare de Compiègne (Oise), plus de 40 000 personnes ont été internées par les Allemands entre 1941 et 1944. L’ancienne caserne militaire, construite en 1913, était devenue l’un des 200 camps destinés à l’emprisonnement des résistants et Juifs. Plusieurs convois en sont partis vers les camps de la mort, dont celui dit des « tatoués » du 27 avril 1944 qui emmena par erreur à Auschwitz-Birkenau 1 700 résistants – le camp n’était destiné qu’aux Juifs, dont le poète Robert Desnos, mort d’épuisement en 1945 lors de la libération du camp de Terezin où il avait été transféré.

Royallieu a été l’un de ces camps, où les prisonniers n’étaient qu’en transit. Dès la fin de la guerre, l’armée française s’est réinstallée dans les lieux qu’elle n’a quittés qu’en 1997. Les vingt hectares ont été cédés à la ville avant d’être rasés pour faire place à une opération d’urbanisme en cours. Seuls trois bâtiments ont été sauvés : ils abritent désormais le Mémorial de l’internement et de la déportation. Restait à écrire l’Histoire à partir de ce lieu, en gardant en tête la formule de l’historien Pierre Nora : « La mémoire divise, l’Histoire rassemble ». Côté architecture et scénographie, un concours a désigné en 2005 Jean-Jacques Raynaud qui avait déjà participé à la conception de la scénographie de l’Historial de la Grande Guerre à Péronne (Somme). Contraint par un budget de 4 millions d’euros pour un site de 2 hectares, celui-ci a opté pour la modestie. Hormis la sobre façade, qui permet une mise à distance avec la ville et héberge les espaces d’accueil, son intervention est discrète. L’architecte a, en effet, privilégié une démarche remettant à nu les murs et les sols de la caserne, en enlevant plutôt qu’en ajoutant, tout en conservant les différentes stratifications, graffitis ou fresques d’époques. Une attitude similaire a été adoptée pour la mise en valeur d’un tunnel d’évasion, découvert de manière fortuite, et protégé par une cabane en bardage de métal.

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Sur cette enveloppe est venu se greffer le discours historique, conçu par Christian Delage, enseignant-chercheur à l’Université Paris 8 et à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Toutes les archives du camp ayant été détruites en 1944 par les Allemands, celui-ci a œuvré à partir du matériau collecté par la Fondation pour la Mémoire de la Déportation et la Mairie de Compiègne. Le parcours débute par une mise en perspective des armistices de 1918 et de 1940, qui ont eu tous deux pour cadre le wagon de la clairière de Rethondes, dans la forêt de Compiègne, ramené ensuite à Berlin par Hitler, comme symbole de la revanche. Sobre et pédagogique, évitant le registre de l’empathie même si l’émotion est inévitable, le propos vise à « sensibiliser de manière distanciée ». Les documents parlent souvent d’eux-mêmes, tel ce reportage d’un photographe allemand réalisé lors d’une rafle sur le Vieux port de Marseille, en 1943, où encore cette salle où sont réunis quelques dessins d’anciens internés. Quand ceux des Américains sont réalisés d’un trait relativement apaisé, ceux du Juif ukrainien Gotko sont exécutés d’une mine plus acérée et emprunts d’une profonde noirceur. Seule la dernière salle a fait l’objet d’une intervention architecturale prononcée. Un mur de refend y a été découpé à la scie pour former sept piliers, comme les sept camps d’extermination évoqués, au recto, par des images terribles filmées par les Américains lors de leur découverte, au verso, par des récits de déportés. Ainsi de cet extraordinaire témoignage d’Edmond Michelet – résistant qui deviendra ministre – racontant aux soldats américains avec énergie et dans un anglais parfait les conditions de détention à Dachau.

Si la multiplication de ces lieux de mémoire risque d’être posée d’ici peu – l’ancien camp de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) accueillera en 2010, sur plus de quarante hectares, un projet de Mémorial de l’internement piloté par l’architecte Rudy Ricciotti –, l’équipe de maîtrise d’œuvre de Royallieu a su éviter de nombreux écueils, privilégiant le travail sur la mémoire au devoir de mémoire.

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François-Guillaume Lorrain

21 février 2008

Le Mémorial de Compiègne

C’est un moment clé dans l'histoire de la déportation en France. Le

mémorial qui est inauguré le 23 février au camp de Royallieu, à l’entrée sud de Compiègne, remet en lumière un lieu méconnu et pourtant central : placée dès l’origine sous commandement allemand, cette ancienne caserne, redevenue après la guerre propriété de l'armée jusqu'en 1997, fut en effet le second camp français en importance après Drancy : 40 000 personnes y furent déportées entre 1942 et 1944 (67 000 le furent de Drancy) et c'est de là, le 27 mars 1942, que partit le premier convoi français de juifs, 1 043 personnes acheminées vers Auschwitz.

Royallieu marque donc la transition entre une politique de répression – le

camp fut d’abord un réservoir d’otages pour des représailles – et une politique d’extermination. Ce camp réunit aussi deux mémoires, jusque-là distinctes et successives dans l’histoire de la guerre : la mémoire juive (2 000 juifs furent déportés de Compiègne) et la mémoire résistante. Car c’est d’ici que partirent de nombreux prisonniers politiques, dont les résistants Robert Desnos (ses lettres à sa femme Youki en témoignent), Jorge Semprun et Robert Antelme (sa compagne Marguerite Duras, dans « La douleur », consacre des pages bouleversantes à son séjour à Compiègne).

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Réalisé par l’architecte Jean-Jacques Raynaud, à qui l’on doit le musée Jean-

Moulin, ce mémorial, installé dans les deux anciens bâtiments, regroupe, sous l’égide de quelques-uns des meilleurs historiens, textes, documents, films et enregistrements audio.

En attendant les mémoriaux des camps des Milles et de Rivesaltes, prévus

pour 2009 et 2011, le travail pédagogique qui n’a pu être accompli à Drancy est enfin réalisé ici, à Compiègne.

Valérie Peiffer 8 Janvier 2009

Compiègne - Un lieu unique

La caserne de Royallieu est devenue « camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs » en 1941. « Quarante-cinq mille personnes y ont transité entre 1941 et 1944. C’est de là que partit pour l’Allemagne le premier train français de juifs, le 27 mars 1942, suivi par un deuxième, le 5 juin 1942. Vingt-six autres convois de politiques et de résistants quittèrent Royallieu pour les camps allemands », raconte Gérard Le Goff, directeur du Mémorial.

La partie historique du musée débute par des images des signatures des deux

armistices de 1918 et 1940, démonstration impeccable de l'utilisation des médias par Hitler. Suit la présentation de la collaboration et du système répressif. Le parcours s’achève avec les images américaines lors de la libération des camps de la mort et celles du procès de Nuremberg.

La force de ce lieu tient dans le mélange entre le travail des historiens et les

témoignages enregistrés des anciens internés. Des récits qui montrent la diversité des origines de ces derniers et la disparité de leurs conditions de détention. Être interné dans la partie du camp réservée aux prisonniers de guerre, dans celle des juifs ou encore dans celle des civils étrangers n’impliquait pas le même quotidien. « Il nous a fallu du temps pour comprendre les différences qui apparaissaient dans les témoignages », se souvient Gérard Le Goff. Ce musée, qui évite le piège de la sensiblerie, ne néglige pas pour autant l’intime. Le visiteur découvre les lettres envoyées via le circuit officiel, écrites en allemand pour passer la censure, mais aussi les missives officieuses adressées par les

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prisonniers à leur famille sur des supports improbables comme du papier toilette, ou encore des dessins réalisés par des artistes internés. « Au départ, nous n'avions rien à montrer , se souvient Gérard Le Goff. Depuis l’ouverture, d’anciens prisonniers ou leur famille ont accepté de nous confier leurs lettres et autres objets. Nous espérons que cela continuera, afin d’enrichir ce parcours de la mémoire. »

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Compiègne : inauguration d'un Mémorial de l'internement et de la déportation

Un mémorial de l’internement et de la déportation a été inauguré samedi à

Compiègne en présence notamment du président du Sénat Christian Poncelet, sur le site du camp de Royallieu où près de 45 000 personnes ont été internées pendant la Seconde Guerre mondiale. Après avoir déposé une gerbe au pied du monument aux morts voisin, M. Poncelet a effectué une visite du mémorial.

L’inauguration s’est également déroulée en présence du présentateur de télévision Michel Drucker, dont le père Abraham avait été interné dans le camp de Royallieu.

Construite en 1913, la caserne de Royallieu avait été transformée en 1941 par la Wehrmacht « en camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs » puis en « camp de détention de police allemand ».

Jusqu’en août 1944 y transitera une population très hétéroclite, en majorité des politiques et des résistants, pour beaucoup communistes, qui venaient de prisons de toute la France, mais aussi des juifs et des étrangers (Russes, Américains... arrêtés dans l’Hexagone).

Les internés n’y resteront pour la plupart pas plus d’un mois, avant d’être déportés vers les camps d'extermination. Certains sont désignés comme otages dans le cadre des mesures de représailles prises par les Allemands lors de meurtres d’officiers nazis.

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Un « mur des noms » restitue leur identité aux internés, dont le mémorial

rend compte des conditions de vie à travers des enregistrements sonores, des lettres, des dessins, des gravures, des photos d’époque ou des films.

Le mémorial évoque aussi les déportations et les sept camps nazis où ont été envoyés les internés de Compiègne, dont 17 400 ne sont pas revenus, morts pendant leur transport ou dans les camps.

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Marion Gris Mars 2008

Mémoire et émotion

LE MEMORIAL DE L'INTERNEMENT ET DE LA DEPORTATION Le 23 février 2008, le Mémorial de l'internement et de la déportation ouvrait ses portes à Compiègne (Oise). Le lieu de mémoire a pris place sur le site historique, là où 45 000 hommes ont transité entre 1941 et 1944, afin d’être déportés vers les camps de concentration. 17 400 d’entre eux ne sont jamais revenus. Visite.

Compiègne c’est la ville des armistices, avec sa forêt et son célèbre wagon. Depuis des décennies, on oublie le premier camp d’internement français placé sous l’autorité allemande. Aujourd’hui, le préjudice est réparé. Le Mémorial permet de comprendre comment les Allemands sont passés d’une vague de répression à une politique de déportation. Mais au moment où le débat sur le devoir de mémoire fait rage, l’inauguration est passée presque inaperçue aux yeux du gouvernement.

Les officiels absents L’inauguration s’est faite en présence de M. Poncelet, président du Sénat. Le seul « politique » à avoir répondu présent, dans un contexte de polémique sur le devoir de mémoire peu avant l'inauguration. Une controverse où le président de

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la République, Nicolas Sarkozy, affirmait sa volonté de « confier » aux enfants de CM2 la mémoire d’un des 11 000 enfants juifs de France victimes du génocide nazi. Un projet qui a beaucoup fait réagir historiens, psychologues et enseignants. Aujourd’hui, cette proposition sera remaniée. Une mission de consultation lancée par le ministre de l’Éducation Xavier Darcos présentera ses travaux courant avril. Le travail de mémoire pourrait être confié à une classe entière plutôt qu’à un seul élève.

Des baraquements au Mémorial En 1993, Édouard Balladur, Premier ministre de l’époque annonce la fermeture du 51e régiment de transmissions de Compiègne. Une décision est prise à la ville, garder le patrimoine historique et en faire un mémorial. Ces bâtiments militaires datent de 1913 et tour à tour ils se sont transformés en caserne, hôpital d’évacuation et camp d’internement allemand dès le début de la Seconde Guerre mondiale. Le Frontstalag 122 verra passer des prisonniers politiques et constituera aussi une réserve d'otages.

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Aujourd’hui, les lieux sont passés entre les mains de Jean-Jacques Raynaud, architecte et scénographe qui a souhaité « faire parler les murs ». Le style est épuré, très sobre. Tout réside dans la simplicité des matériaux utilisés : le verre, le béton et la pierre. Dans les baraquements de ce camp pour éléments ennemis actifs, les murs et les sols sont nus. Mais la simplicité n'est pas forcément synonyme de rudimentaire. Les nouvelles technologies, très présentes, se marient aux lieux, écrans plats noirs dans les salles, projections au sol et surtout la modernité de l’audioguide, grâce auquel la visite se décharge de tout parcours imposé. Un gros atout pour le Mémorial, car l’ambiance y reste calme, propice au recueillement pour les familles de déportés, et garde le visiteur dans l'intimité. Les boîtiers sont utilisés comme des télécommandes en interaction avec les écrans et les capteurs disposés dans chaque salle. Si l’on veut tout écouter et tout lire il faut passer de 15 à 20 minutes par salle, à raison de 10 salles, soit 2h30 minimum de visite.

Devoir de mémoire

Le Mémorial a été élaboré depuis l’origine du projet avec la Fondation nationale pour la mémoire de la déportation et tout le travail de mémoire a été fait par Christian Delage. Cet historien souligne la difficulté pour mettre en oeuvre le Mémorial, et les trop rares images du camp à l'époque de l’internement. « Le but des documents est de créer les moyens de comprendre ce qui s'est passé sans faire de spectacle. » À Royallieu, c’est 120 anciens dont la mémoire est évoquée à travers des lettres, photos et documents provenant des familles. Avant de battre en retraite, les Allemands ont vraisemblablement détruit tous les documents du camp de Royallieu.

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La visite/ Extérieur

Dès l’entrée, on fait face au mur des déportés. 40 000 noms. Tous gravés sur un mur de verre. Des noms historiquement connus dont la liste n'est pas exhaustive. Le chiffre global doit être autour de 45 000 personnes. Les premières déportations se sont déroulées les 27 mars et 5 juin 1942, et les premiers résistants partirent vers l'Est en juillet 1942. « Il y avait de gros départs de 1 500 à 2 000 personnes », se souvient André Bessière, ancien déporté. Une fois passé le nouveau bâtiment d'accueil, le sol se fait plus rugueux : on foule alors la partie historique du camp. Un sol caillouteux, élaboré avec des matériaux recyclés et concassés qui proviennent des bâtiments de Royallieu. Dans le jardin de la mémoire, des voix résonnent, celles de comédiens qui relatent l’histoire de déportés. Et au loin on aperçoit la surprenante reproduction des « Hommes chiens ». En l’espace d’une seconde, les Allemands sont encore là. Brève illusion, ce n’est qu’une reproduction d'une photo sur une plaque de verre. Sinistre souvenir de ces gardiens qui hanteront à jamais le jardin de Royallieu, propice maintenant au recueillement. Enfin, tout au fond du jardin, des archéologues ont mis au jour deux tunnels d'évasion, d'où des sorties illégales et collectives ont réussi en juin 1942 et 1944.

La visite/Intérieur

Dix salles, avec pour fil conducteur une frise placée à mi-hauteur des murs. Des vidéos où les images sont projetées sur les murs ou au sol, comme la symétrie des armistices de 1918 et 1940. L'ensemble du site est à la fois un objet de mémoire et un lieu d'exposition qui met en scène la stratification de l'histoire.

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Dans la chambrée, l’architecte M. Raynaud a voulu évoquer la densité, sans aucun objet, juste à l’aide de traces au sol et sur les murs. Sur ces murs, seules des photos de prisonniers sont projetées. De rares clichés pris par les soldats de la Wehrmacht au camp de Romainville. M. Bessière se souvient et raconte son histoire : « À 17 ans, je faisais partie du mouvement de libération Nord. Mon réseau a été infiltré alors j'ai fui. J’ai été identifié et arrêté à la frontière espagnole. Interné à Perpignan, il y a eu un simulacre d’exécution et j’ai été interné à Compiègne. Ici j’étais sous le régime de la prison allemande à l'intérieur d'une prison française. » Mais André Bessière sera déporté par le malheureusement célèbre « convoi des tatoués » : « Un convoi qui partait directement à Auschwitz, une fois arrivés nous étions tatoués. Apparemment c’était une erreur car c’était un camp réservé aux juifs, alors nous avons été dispatchés et je me suis retrouvé à Buchenwald. » Dans la dernière salle, sept colonnes symbolisent les sept camps où étaient envoyés les internés de Royallieu. D'un côté des colonnes, les images des camps en noir et blanc défilent, de l'autre, des témoignages vidéo de survivants émeuvent profondément. « Je suis là pour témoigner et ce Mémorial est une vraie reconnaissance », admet M. Castellanos, un des 250 Américains internés à Royallieu, la casquette vissée sur la tête. Comme ces lieux, il sera marqué à jamais. La ville de Compiègne est la seule à proposer un tel mémorial en France. L’histoire y est contée dans toute sa brutalité et l’implantation sur les lieux mêmes renforce encore cette double perspective d’émotion et d’authenticité. Un mélange qui a vraisemblablement donné des idées. Le camp d'internement et de déportation des Milles, près d’Aix-en-Provence, va aussi être transformé en mémorial. Les travaux débuteront à la fin de l’été. Les internés y étaient moins nombreux, aux alentours de 10 000, quatre fois moins qu’à Royallieu.

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CHEMINS DE MÉMOIRE Printemps 2008

Sur le site de l’ancien camp d’internement de Royallieu, un mémorial a

ouvert ses portes en février dernier. Lieu d’histoire, il rappelle les faits et les replace dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale et de la politique de répression et d'extermination nazie. Lieu de mémoire, il rend hommage à toutes celles et ceux qui y furent détenus avant d’être déportés en Allemagne et en Pologne ou fusillés comme otages.

En 1939, la caserne de Royallieu près de Compiègne dans l'Oise sert d'hôpital militaire avant d'être transformée en juin 1940 par les Allemands en un camp où ils rassemblent des prisonniers de guerre français et britanniques. En 1941, ils en font un « camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs » répondant à l'appellation officielle de Frontstalag 122, qui devient par un décret du 30 décembre 1941 un « camp de détention de police allemand ». Résistants, militants syndicaux et politiques, Juifs, civils pris dans des rafles, ressortissants étrangers..., ils seront plus de 45 000 à transiter par là avant d'être déportés vers les camps de concentration et d'extermination nazis. « J’ai coupé au dernier départ et j’espère bien ne pas être du prochain. Je suis ici avec des gens très bien et gentils : communistes, gaullistes, royalistes, curés, nobles, paysans – C’est une salade extraordinaire », écrit à sa compagne le poète Robert Desnos interné le 20 mars 1944. Répit de courte durée. Un train de la mort

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l’emmènera le 27 avril vers Flöha en Saxe et le typhus aura raison de lui le 8 juin 1945 à Terezin. C’est du camp de Royallieu que part, le 27mars 1942, le tout premier train de déportation quittant le sol français. Il emporte vers Auschwitz plus d'un millier de Juifs, de même que le suivant le 5 juin. Un troisième convoi majoritairement composé d’otages communistes et syndicalistes quitte Compiègne le 6 juillet. Royallieu devient ainsi un camp de transit avant la déportation de détenus qui sont en majorité des politiques et des résistants.

Un lieu pour se souvenir

Les recherches menées par la Fondation pour la mémoire de la Déportation

auprès du bureau des archives des victimes des conflits contemporains du Service historique de la défense ont permis de répertorier le départ, entre 1942 et 1944, de vingt-six grands convois, auxquels il faut ajouter une douzaine de petits convois. Soit au total, avec les deux premiers convois de déportés juifs, quarante convois. Le camp servant de réserve d’otages, d’autres internés sont fusillés dans les forêts alentour quand une mesure de représailles est décidée. C’est à eux tous qu'est dédié le mémorial de l’internement et de la déportation qui vient d’être aménagé sur une partie de l’ancien camp par la ville de Compiègne en partenariat avec la Fondation pour la mémoire de la Déportation, le ministère de la défense (direction de la mémoire, du patrimoine des archives, SGA/DMPA), le Conseil régional de Picardie, le Conseil général de l’Oise, la Fondation du patrimoine et la Caisse des dépôts et consignations.

L’historien et réalisateur Christian Delage a élaboré le parcours historique. L’architecte et scénographe Jean-Jacques Raynaud a conçu le lieu. Le résultat est tout en sobriété tant par les matériaux de construction utilisés – verre, béton, pierre, que par la mise à nu en leur état d'origine des sols et des murs dans les trois bâtiments conservés sur les vingt-cinq existants et la scénographie fondée sur l'image et le son.

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Printemps 2008

Compiègne : Le Mémorial de l’internement et de la déportation Le 23 et le 24 février a été inauguré le Mémorial de l’internement et de la déportation de Compiègne autour des trois bâtiments conservés du camp de Royallieu. Le Mémorial de la Déportation est un lieu d’histoire, de mémoire et un lieu d’exposition. Le Mémorial a été créé par la ville de Compiègne en partenariat avec l’État, le département de l’Oise, la région Picardie, la Fondation du patrimoine, la Caisse de Dépôts et consignations et sous l’égide de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation. Le sénateur de l’Oise et maire de Compiègne Philippe Marini, passionné d’histoire, a souligné tous les efforts accomplis depuis 1993 qui ont présidé à la naissance de ce mémorial. Le parcours historique a été conçu par l’historien Christian Delage. Un architecte scénographe, Jean-Jacques Raynaud, a eu la maîtrise d’œuvre, assisté de bureaux techniques. Dans la mémoire des deux guerres mondiales, Compiègne évoque la signature des deux armistices de novembre 1918 et de juin 1940, la gloire et l’humiliation. Dans la caserne de Royallieu construite en 1913 (16 hectares), l’armée allemande rassemble en 1940 des soldats français et britanniques. Puis la Wehrmacht transforme en 1941 Royallieu en un « camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs », le « Frontstalag 122 ». La plupart des archives du camp ont été détruites par l’armée allemande en 1944. Des recherches entreprises depuis 2000 ont permis de rassembler des documents. « Ils révèlent la complexité des rapports et des multiples enjeux liés à l’existence du camp », comme l’écrit Christian Delage. La plupart des 45 000 internés dont les noms figurent à l’entrée n’y ont fait que transiter avant d’être transférés massivement vers les camps nazis de concentration et d’extermination. C’étaient surtout des politiques résistants (beaucoup communistes, mais aussi des internés civils russes, américains, etc.) et des juifs. Le premier convoi part de Royallieu le 27 mars 1942 conduisant un millier de juifs vers Auschwitz-Birkenau. 29 convois ont déporté 39 559 personnes soumises en Allemagne au travail forcé. Le Mémorial permet de comprendre comment les Allemands sont passés d’une politique de répression, marquée par des fusillades d’otages, à une politique de déportation, y compris raciale.

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Les documents présentés dans le parcours proviennent des autorités allemandes et françaises, mais aussi des œuvres, des écrits – des billets griffonnés jetés par-dessus les barbelés – des récits des prisonniers. La présentation chronologique et comparative est illustrée sur les murs des salles que l’on a décapés pour retrouver la trace originelle de 1940. Une frise court tout le long des salles, nourrie par les documents, éclairée par des films diffusés sur écrans LCD, illustrée de témoignages sonores, parfois hors frise. Des lettres de prisonniers à leurs familles sont regroupées dans des tables virtuelles sur deux écrans qu’il suffit d’effleurer et de choisir pour entendre. Face à l’entrée se dresse le mur des noms des 40 000 déportés. Un jardin de la mémoire permet de faire entendre ou de lire des voix des internés à travers des objets, des stèles de verre, des photographies de gardiens, des chaises de métal, mémoire fugitive, fragmentée, de tunnels d’évasion. Nous disposons avec le Mémorial d’un outil de travail sur l’internement très éclairant et très émouvant, très sobre, respectueux de la mémoire des prisonniers, des déportés. 17 400 ne sont pas revenus.

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Katrin Hondl

23 février 2008

Erinnerungskultur in Frankreich. Zur Eröffnung des Museums

« Mémorial de l'internement et de la déportation » in Compiègne.

1941 richtet die Wehrmacht in einer Kaserne bei Compiègne das Lager Royallieu ein, das « Frontstalag 122 ». Ein Durchgangslager – die letzte Station vor der Deportation für mehr als 40.000 Menschen. Indem sie an alle Opfer der brutalen Repressionspolitik der deutschen Besatzer in Frankreich erinnert überwindet die Ausstellung im Memorial von Compiègne jahrzehntelange Gräben der Erinnerungskultur.

Der Blick zurück beginnt mit der Geschichte eines Eisenbahnwagons: Jenes Salonwagens, in dem im Wald von Compiègne zwei folgenreiche Waffenstillstände geschlossen wurden: am 11. November 1918 zwischen dem Deutschen Reich und den Entente-Mächten Frankreich, Großbritannien und den USA und am 22. Juni 1940 zwischen dem Dritten Reich und Frankreich.

Ein Jahr später, im Juni 1941, richtet die Wehrmacht in einer Kaserne bei Compiègne das Lager Royallieu ein, das « Frontstalag 122 ». Ein Durchgangslager – die letzte Station vor der Deportation für mehr als 40.000 Menschen. André Bessière, heute 82 Jahre alt, war einer von ihnen.

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Es ist, als ob ich die Klingel zum Appell wieder hören würde. Wir rannten

dann alle in die Gänge. Ich sehe hier in der Gedenkstätte auch viele bekannte Gesichter wieder. Ich war ja drei Monate lang hier. Wir kamen in kleinen Gruppen von 15 oder 20 im Lager an. Jeden Tag kamen Neue. Und jede Woche gab es einen Abtransport.

André Bessière, der als Mitglied der Résistance verhaftet worden war, verließ das Lager Royallieu am 27. April 1944 – in einem Konvoi von 1700 Häftlingen, Richtung Auschwitz. Nur 833 von ihnen kamen wieder zurück.

Was vorher geschah und wie es dazu kommen konnte – das ist das Thema der Dauerausstellung in der Gedenkstätte von Royallieu. Von Historikern bisher erstaunlicherweise kaum erforscht, veranschaulicht die Geschichte des « Frontstalag 122 » die Komplexität und Vielfalt der Ereignisse, die die Zeit der deutschen Besatzung Frankreichs geprägt haben. Etwa die Rolle des Vichy-Regimes, das die Deutschen von Anfang an tatkräftig unterstützte, insbesondere mit der vorauseilenden Ausgrenzung von Juden und Freimaurern.

Die Ausstellung zeigt das zum Beispiel mit einem Comic, in dem diese als 'Krankheitserreger der französischen Nation' bezeichnet werden. Zu sehen ist auch das berühmt-berüchtigte Foto, auf dem der Polizeichef des Vichy-Regimes, René Bousquet grinsend mit dem SS-Mann Bernhard Griese posiert.

Indem sie an alle Opfer der brutalen Repressionspolitik der deutschen Besatzer in Frankreich erinnert – Widerstandskämpfer, Juden, aber auch Amerikaner und Russen - sowie eben auch an die Beihilfe der französischen Kollaborateure – überwindet die Ausstellung im Memorial von Compiègne die Gräben, die die Erinnerungskultur in Frankreich jahrzehntelang geprägt haben. Der Historiker Christian Delage, der die Ausstellung konzipiert hat: on einem gewissermaßen positiven Geschichtsbild in der Nachkriegszeit – als die Resistance-Kämpfer im Mittelpunkt standen – kam man zu einem in Anführungszeichen « negativen » Geschichtsbild, wo man eher die Frage stellte, wie Frankreich mit Deutschland zusammengearbeitet hat – durch politische Entscheidungen nach der Niederlage von 1940, die die Beteiligung Frankreichs an der « Endlösung » vorbereiteten. Heute aber sind die historischen Voraussetzungen gegeben, dass diese unterschiedlichen Erinnerungskulturen sich begegnen – und ob man will oder nicht – hier in Compiègne begegnen sie sich.

Christian Delage plädiert für « Erinnerungsarbeit », die er von der « Erinnerungsplicht » unterscheidet, wie sie gerade Frankreichs Staatspräsident Sarkozy gefordert hat. Delage hält nichts von der Idee des Präsidenten, dass

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französische Grundschulkinder Patenschaften für Holocaust-Opfer übernehmen sollen: Dieses moralische Gebot ist nicht haltbar. Erinnerung basiert auf Freiwilligkeit – und das heißt sie muss kritisch, distanziert, analytisch sein – keine verordnete affektive Erinnerung.

Der französische Erinnerungskultur-Kampf geht also weiter: In einem Appell, den das Magazin Nouvel Observateur gerade veröffentlicht hat, warnen Intellektuelle und Historiker unter anderem vor einem « schäbigen Wettstreit der Opfer » um ähnlich spektakuläre Aufmerksamkeit, wie sie Sarkozys Patenschaften-Idee für ermordete jüdische Kinder fordert.

Der Staatspräsident ist unter dessen weiter in Sachen Erinnerungskultur unterwegs. Gestern zum Beispiel eröffnete er im Pariser Invalidendom ein sogenanntes « Historial », eine multi-mediale Ausstellungshow über Leben und Wirken des General de Gaulle. In Erinnerung an, so Sarkozy, den « großen Mann » des freien Frankreich.

Die Gedenkstätte in Compiègne wird heute ohne den Staatspräsidenten eröffnet – er wird dort erst am 11. November erwartet – am 90. Jahrestag des Waffenstillstands von 1918.