Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en...

21
La démence n’est pas seulement causée par la maladie d’Alzheimer 3 Kenneth Rockwood, M.D., M.P.A, FRCPC Diagnostic et prise en charge de la démence à corps de Lewy 4 Ron Keren, M.D., Psy, FRCPC Questions d’ordre pratique sur la DLFT 12 Sultan Darvesh, B.Sc., M.Sc., Ph.D., FRCPC Donnez-moi une chance! J’ai besoin plus de temps! 17 France Cloutier, Ph.D. Révélations, expériences et réflexions personnelles d’une proche aidante au sujet de la maladie d’Alzheimer 20 Roberta Bedard Les médecins de famille ont un rôle important à jouer dans le programme Sécu-Retour 22 La Société Alzheimer du Canada d Alzheimer Volume 8, numéro 2 Juin 2005 Revue canadienne de la maladie Lisez la revue en ligne à l’adresse suivante : www.stacommunications.com/ adreview.html Par Renée Forestall

Transcript of Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en...

Page 1: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

La démence n’est pas seulement causée par la maladie d’Alzheimer 3Kenneth Rockwood, M.D., M.P.A, FRCPC

Diagnostic et prise en charge de la démence à corps de Lewy 4Ron Keren, M.D., Psy, FRCPC

Questions d’ordre pratique sur la DLFT 12Sultan Darvesh, B.Sc., M.Sc., Ph.D., FRCPC

Donnez-moi une chance!J’ai besoin plus de temps! 17

France Cloutier, Ph.D.

Révélations, expériences et réflexions personnelles d’une proche aidante au sujet de la maladie d’Alzheimer 20

Roberta Bedard

Les médecins de famille ont un rôle important à jouerdans le programme Sécu-Retour 22

La Société Alzheimer du Canada

d’AlzheimerVolume 8, numéro 2 Juin 2005

Revue canadienne de la maladie

Lisez la revue en ligne à l’adresse suivante :

www.stacommunications.com/

adreview.html

ParRe

née

Fore

stal

l

Page 2: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

SUR LA PAGE COUVERTUREThe Plan, par Renée ForestallRenée Forestall a produit l’œuvre The Plan lorsqu’elle était artiste résidente à la Memory Clinic, du Centre dessciences de la santé Reine-Élizabeth II, de Halifax (Nouvelle-Écosse). Elle a eu l’idée de nommer sa peinture The Planpour nous démontrer que chaque individu a des projets de vie. Par contre, ce n’est pas le cas avec les patients atteintsde la maladie d’Alzheimer, car ils n’ont pas la même facilité que nous, à se représenter en tant que futurs individuscompétents, à cause de leur incapacité mentale. On peut remarquer sur cette peinture que l’auteure nous illustre ladifférence marquante entre la planification d’un avenir incertain et l’expérience de la démence en stade avancé.Toutefois, elle veut nous laisser savoir qu’il y a quelque chose qui unit le moment de joie d’un avenir tant espéré etcelui d’un pur plaisir (sans penser au futur), tout en reflétant le précieux moment présent!

2 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

PRÉSIDENT Peter N. McCracken, M.D., FRCPCMédecin en gériatrieGlenrose Rehabilitation HospitalCodirecteur, Département de gériatrieProfesseur de médecineUniversité de l’AlbertaEdmonton (Alberta)

Paul J. Coolican, M.D., CCFP, FCFPMédecin de famille, St. Lawrence Medical ClinicMorrisburg (Ontario)Membre du personnel médicalWinchester District Memorial HospitalWinchester (Ontario)

Shannon Daly, inf. aut., M. Sc. inf.Infirmière clinique spécialisée en gériatrieGrey Nuns Community Hospital & Health CentreEdmonton (Alberta)

Howard Feldman, M.D., FRCPCProfesseur de médecineDépartement de neurologieUniversité de la Colombie-BritanniqueDirecteur, UBC Alzheimer Clinical Trials UnitVancouver (Colombie-Britannique)

Serge Gauthier, M.D., C.M., FRCPCProfesseur de neurologie et de neurochirurgie,de psychiatrie et de médecine, Université McGillCentre d’études McGill sur le vieillissementMontréal (Québec)

Bernard Groulx, M.D., C.M., FRCPCPsychiatre en chef, hôpital Sainte-Anne-de-BellevueProfesseur agrégéUniversité McGillCentre d’études McGill sur le vieillissementMontréal (Québec)

Nathan Herrmann, M.D., FRCPCProfesseur agrégé, Université de TorontoChef, Service de gérontopsychiatrieSunnybrook Health Science CentreToronto (Ontario)

Peter Lin, M.D., CCFPDirecteur médicalUniversité de TorontoHealth & Wellness CentreScarborough (Ontario)

Kenneth J. Rockwood, M.D., M.P.A., FRCPCProfesseur de médecine, Université DalhousieGériatre, Capital District Health AuthorityHalifax (Nouvelle-Écosse)

Steve Rudin, M. Éd., MSPHDirecteur nationalSociété Alzheimer du CanadaToronto (Ontario)

Copyright 2005 STA HealthCare Communications inc.Tous droits réservés. Ce document est publié par STA HealthCare Communications inc. Les opinions expriméesdans ce document sont celles des auteurs et elles ne reflètent pas nécessairement celles de l’éditeur. Les médecins doivent tenir compte de l’état de chaque patient etdoivent consulter les monographies de produit officiellement approuvées avant de poser un diagnostic, de prescrire un traitement ou d’appliquer un procédé d’après lessuggestions faites dans ce document, enregistrement n° 40063348.

Le comité de rédaction examine en toute liberté les articles publiés dans cetterevue et est responsable de leur exactitude. Les annonceurs n’exercent aucune influence sur la sélection ou le contenu des articles publiés.

Nous aimerions avoir de vos nouvelles!La rédaction encourage les lecteurs de la Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer à lui écrire. Toute correspondance doit être adressée à laRevue canadienne de la maladie d’Alzheimer, 955, boul. Saint-Jean, bureau 306, Pointe-Claire (Québec) H9R 5K3. Nous acceptons également les lettrespar télécopieur au (514) 695-8554 ou par courriel à l’adresse suivante : [email protected] y inscrire un numéro de téléphone nous permettant de communiquer avec vous durant le jour. Nous nous conservons le droit de modifier les lettres pour des raisons de longueur ou de clarté.

Paul F. BrandDirecteur de la publication

Russell KrackovitchDirecteur de la rédaction,projets spéciaux

Riley DenverRédacteur en chef

Karine Blanchard GagnéRédactrice-réviseure,projets spéciaux

Donna GrahamCoordonnatrice de la production

Dan OldfieldDirecteur de la conception graphique

Jennifer BrennanServices administratifs

Barbara RoyAdjointe aux services administratifs

Robert E. PassarettiÉditeur

Équipe de rédaction

COMITÉ DE RÉDACTION

Page 3: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

É D I T O R I A L

Autrefois, le terme « maladie d’Alzheimer » était sous-utilisé et aujourd’hui, il fait partie du vocabulairepopulaire; c’est-à-dire qu’il est courant de dire : « Nem’en veuillez pas si j’ai oublié votre nom, c’est seule-ment mon Alzheimer qui me joue des tours ». Ainsi, ilest important de mentionner que la démence n’est passeulement causée par la maladie d’Alzheimer. Ce pointest bien illustré dans le présent numéro de la Revuecanadienne de la maladie d’Alzheimer.

Le Dr Ron Keren nous rappelle l’importance cruciale dela démence à corps de Lewy (DCL; page 4). Cette maladieest un trouble pour lequel il y a des choses à faire (p.ex.,inhiber la cholinestérase) et à ne pas faire (p.ex., traiterprécocement la maladie avec des antipsychotiques), lorsquenous sommes en présence d’une personne âgée victimed’hallucinations ou plus particulièrement d’une personnesans antécédents de maladie psychiatrique. En fait, les avan-tages de l’inhibition de la cholinestérase peuvent être sispectaculaires et les effets des antipsychotiques si catas-trophiques, en raison de la sensibilité aux neuroleptiques,qu’il vaut probablement mieux considérer les personnesâgées victimes d’hallucinations comme étant atteintes d’unedémence à corps de Lewy jusqu’à preuve du contraire.

Le Dr Sultan Darvesh nous transporte dans le mondede la caractérisation tortueuse de la dégénérescencelobaire fronto-temporale (DLFT; page 12). Il nous en pro-pose trois sous-types, bien qu’il connaisse que cette caté-gorisation ne s’applique pas nécessairement à tout lespectre du groupe fascinant des troubles en question. LaDLFT est cliniquement et pathologiquement hétérogèneet, selon le processus pathologique auquel elle estsoumise, sa description peut se prêter à des profils decompétition. En effet, d’un côté les patients peuvent semettre en retrait, regimber à l’idée de prendre des initia-tives et avoir un comportement moteur faible. De l’autrecôté, ils peuvent parler fort, se montrer bavards, hyper-actifs et à l’aise. Le Dr Darvesh se montre à bon droit pré-cautionneux au sujet de la pharmacothérapie, même si, àmon avis – et ici, en l’absence de données issues d’essaiscomparatifs, je me permets de prendre toute la libertééditoriale dont je dispose – les inhibiteurs spécifiques durecaptage de la sérotonine, en particulier le citaloprame oula sertraline, donnent couramment une réponse adéquate.

On trouvera aussi dans le présent numéro un rappel duDre France Cloutier, selon qui l’expérience quotidiennepeut être utile pour comprendre l’expression de la maladie

chez nos patients (page 17). En tant que Québécoisefrancophone de souche, elle décrit son expérience anglo-phone de chargé de cours post-doctoral. En fait, elle étudieavec moi. Elle est trop modeste pour observer qu’elle aobtenu un prix subventionné par AstraZeneca et par lesInstituts de recherche en santé du Canada, en tant que pre-mière lauréate de la compétition organisée par la SociétéAlzheimer du Canada. Elle était la récipiendaire d’unebourse de recherche post-doctorale. En outre, même si jepeux attester que la recherche en anglais ne semble pasêtre une expérience frustrante du point de vue extérieur, jepeux facilement imaginer la frustration qu’elle a puressentir en essayant de comprendre une langue assez peufamilière. L’année dernière, j’ai donné un exposé à ungroupe de collègues francophones à Montréal et il portaitsur les idées délirantes : un sujet qui m’intéresse beaucoup.Après la série des premières diapositives en français, jeleur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard,mais j’ai décidé de m’exprimer à nouveau en anglais.Comme je l’ai mentionné, je me préoccupais beaucoup dusujet et je ne pouvais pas me résoudre à balbutier commeun enfant durant mon exposé.

Dans la dernière tranche de sa remarquable série deréflexions en tant que proche aidante, Roberta Bedardnous démontre comment nos propres expériences peuventnous aider à poser, du moins, les bonnes questions au sujetde la maladie d’Alzheimer (page 20). Comment se fait-il,en effet, que certains patients aient des moments de luci-dité, en reconnaissant les visages, en étant capables deparler et en faisant preuve de jugement, s’ils ont perduapparemment ces aptitudes en cause? Cette possibilitéremet en question la compréhension que nous avons euejusqu’à présent au sujet de l’évolution pathologique dansle domaine de la démence.

Il s’agit là de questions importantes. La DCL était undiagnostic clinique avant d’être un diagnostic patho-logique, et la DLFT constitue de nos jours une difficulté àsurmonter à cause de son apparente hétérogénéité. Cesdémences nous enseignent la valeur de l’observation clini-que et soigneuse, et il en sera ainsi pour un certain tempsencore, étant donné qu’elles ne seront jamais entièrementsusceptibles de se prêter à un modèle animal. Les pertesqu’elles entraînent témoignent souvent des atouts quenous chérissons le plus, en tant qu’êtres humains, et nousrappellent le privilège que nous avons de soigner lespatients atteints.

La démence n’est pas seulementcausée par la maladie d’Alzheimerpar Kenneth Rockwood, M.D., M.P.A, FRCPC

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 3

Page 4: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

4 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Il y aurait fallu beaucoup de temps avant que l’on associe les premiers

signes de la maladie de Parkinson(MP), en 1817, avec ceux des corps deLewy qui furent diagnostiqués durantplusieurs années dans le tronc cérébraldes patients atteints de la MP. Ainsi, lescorps de Lewy auraient pu être considé-rés comme étant la cause principale dela démence, car ils étaient définishistologiquement dans le cortex. Toutd’abord signalées par Friederich Lewyen 19121, ces inclusions cellulairesintracytoplasmiques ont longtemps étéperçues comme les signes histopatho-logiques de la MP. Il est intéressant denoter que James Parkinson, celui quidécrit les symptômes de la maladie por-tant son nom, croyait que le déclincognitif ne faisait pas partie de la MP2.Friederich H. Lewy, en 1923 (environun siècle plus tard), a fait un rapport sur54 des patients atteints de la MP quiprésentaient des aliénations mentales,mais il n’a pas mentionné la cause decette affection3. En 1933, Brain a fait unrapport, que l’on retrouve dans sonexemplaire intitulé Diseases of theNervous System4, portant sur le fait queles patients atteints de la MP ne présen-tent pas nécessairement un déclin

cognitif. La démence peut se mani-fester chez ces patients si le processuspathologique diffus implique d’autresparties du cerveau. Enfin, en 1961,Okazaki et ses collaborateurs5 ontdémontré que deux patients, atteints dela démence, des troubles de comporte-ment et des troubles moteurs, présen-taient des inclusions cellulaires auniveau du cortex cérébral qui ne peu-vent être distinguées des corps deLewy, comme nous avons observésdans la MP.

Les rapports portant sur les corpsde Lewy avec atteinte corticale,étaient plutôt rares à cause de la mau-vaise qualité des épreuves d’imageriedu cortex que produisaient les tech-niques traditionnelles de colorationde l’époque. Par contre, à partir desannées 70, de nouvelles techniques encoloration se sont développées et leschercheurs ont pu découvrir que laprotéine ubiquitine permettait auxcorps de Lewy avec atteinte corticalede s’implanter et qu’elle causait ainsila démence. En 1989, Gibb affirmaitque : « … dans le cortex cérébral, lecorps de Lewy peut être plus souventassocié à la démence avant qu’il nesoit identifié6 ». Depuis, on a décou-

Diagnostic et prise en charge de ladémence à corps de LewyLa démence avec corps de Lewy (DCL) est un dérèglement qui touche les fonctionscognitives complexes, psychiatriques et neurologiques, et qui peut s’avérer une situationconflictuelle pour les patients mêmes ainsi que le personnel soignant et les cliniciens. LaDCL, considérée la deuxième cause de démence la plus neurodégénérative, doit être biendiagnostiquée et traitée par les cliniciens. Dans cet article, nous allons faire le point sur lesfonctions pathologiques et cliniques de la DCL tout en discutant de la prise en charge de cedérèglement.

par Ron Keren, M.D., Psy, FRCPC

Le Dr Keren est directeur declinique à l’Université HealthNetwork et au centre WhitbyMental Health, et professeuradjoint à l’Université de Toronto.

Page 5: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

vert un grand nombre de termes dif-férents pour décrire le déclin cognitifcausé par les corps de Lewy. Plusieursde ces termes représentent la relationentre le corps de Lewy et la maladied’Alzheimer. Ainsi, on retrouve lestermes suivants : variante à corps deLewy de la maladie d’Alzheimer(MA), MA avec corps de Lewy for-tuits, MA qui présente des altérationsde la MP (on prétend que la MA étaitla maladie prédominante), tandis queles termes dont; la démence sénile ducorps de Lewy, la démence corticaleau corps de Lewy, la démence à corpsde Lewy au niveau cérébral et lamaladie diffuse de corps de Lewy,nous laissent supposer que la maladieprédominante était connue sous lenom des corps de Lewy avec atteintecorticale.

En 1996, la fédération interna-tionale a instauré le terme « démence àcorps de Lewy » (DCL) dans la littéra-ture et a mis en vigueur les critèresconsensuels du diagnostic clinique etpathologique7. De nos jours, on utilisele terme de « la deuxième cause com-mune de démence neurodégénérative »chez les gens plus âgés.

Les synucleinopathies et lestroubles de corps de LewyL’apha-synucléine est une protéine nor-male, de structure synaptique, qui inter-vient dans la production de la vésicule.Les synucleinopathies appartiennent àun sous-ensemble de troubles neu-rodégénératifs ayant en commun unepathologie et d’où les agrégats fibril-laires insolubles de l’alpha-synucléinepeuvent s’accumuler à la fois dans lesneurones et les cellules gliales. Onretrouve dans les troubles de corps deLewy (la DCL et la MP) des agrégatsqui s’accumulent dans les corps deLewy. De plus, dans l’atrophie multi-systématisée (AMS), on trouve lesagrégats dans les inclusions cytoplas-

miques gliales. Les corps de Lewy sontcomposés de neurofilaments, de la pro-téine cristalline et ubiquitine, en plus del’apha-synucléine8. Grâce aux anticorpsde l’alpha-synucléine, immunisant lescorps de Lewy, il a été possible demieux visualiser la maladie de corps deLewy.

La DMP et la DCLLa démence de la maladie de Parkinson(DMP) et la DCL ont deux domainescommuns; les symptômes cliniques etla neuropathologie9. On constate queles patients atteints de la MP viventassez longtemps pour y développer laDMP (Figure 1). Des études longitu-dinales, menées chez des patientsatteints de la MP10, démontrentqu’après que les symptômes moteursont été perçus, 78 % des patientsprésentaient dix ans plus tard, enmoyenne, des critères de la démencetirés du « manuel diagnostique et statis-tiques des troubles mentaux, troisièmeédition révisée », (DSM-IIIR). En plus,à l’autopsie, on observe que l’atteintecorticale des corps de Lewy étaitendommagée chez ces patients et qu’ilsprésentaient une fluctuation cognitivevariable et des hallucinations visuelles.On a posé un critère de diagnostic vala-ble pour la DCL, mais ce n’est pas le

cas pour la DMP. De plus, il n’y a pasde critère pathologique défini pour lesdifférencier. Les critères consensuels dela DLC ont mis sur pied un programmearbitraire d’une durée d’une année pourdistinguer la DCL de la DMP. Enmoins d’une année, on peut confirmerla DCL par la présence de la démencedans les syndromes parkinsoniens etlorsque le phénomène dure plus d’uneannée, on peut alors affirmer la DMP7.D’après les critères consensuels, mêmesi la DMP et la DCL représentent diffé-remment la même maladie sous-jacente, elles sont de plus en plus consi-dérées comme deux entités dansl’ensemble de la maladie au lieu dedeux maladies distinctes.

La DCL avec la MALe diagnostic pathologique de la DCLne peut empêcher la présence deplages et de dégénérescences commeon peut l’observer dans la MA. Eneffet, la plupart des patients atteints dela DCL sont aussi atteints de la MA.Le degré de la MA, surtout au niveaudes dégénérescences neurofibrillaires,peut affecter la présentation cliniquede la DCL et aider à comprendrepourquoi la DCL n’est pas aussi sou-vent reconnue cliniquement. Dans unbilan établi par Merdes et ses collabo-

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 5

Figure 1

Prévalence de la démence chez les patients atteints de la MP aucours d’une période donnée9

La p

réva

lenc

e cu

mul

ativ

e de

la d

émen

ce (%

)

9080706050403020100

Ligne de base 4e année 8e année

Page 6: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

rateurs11, 89 des 98 patients (91 %)présentaient de la DCL à l’autopsie etconformaient aux critères de la MAdéfinis par le CERAD (Consortium toestablish a Registry for Alzheimer’sDisease). De plus, les patients, étantpris avec une faible dégénérescencedu fardeau de la MA ( n = 24), mani-festaient plus d’hallucinationsvisuelles que les patients étant prisavec une forte dégénérescence (33 %,n = 66). Ainsi, la précision du diag-nostic clinique de la DLC était maxi-male chez les sujets atteints d’unefaible dégénérescence (75 %) queceux atteints d’une forte dégénéres-cence (39 %). On est venu à conclu-sion, dans cette étude, que le degréconcomitant de la dégénérescence dela MA avait une grande influence surles caractéristiques cliniques de laDCL et la précision du diagnostic.

Le diagnostic clinique de laDCLEn 1996, une réunion internationale aété tenue dans le but d’améliorer lescritères consensuels du diagnostic dela DCL7. Le CERAD a décrit troiscaractéristiques essentielles cliniquesde la DCL, outre les caractéristiquesprincipales de la démence : les halluci-nations visuelles récurrentes, les fluc-tuations cognitives avec variations etles caractéristiques motrices spon-tanées du syndrome parkinsonien.Pour que la DCL soit probable audiagnostic, il faille qu’il y ait présencede deux caractéristiques essentiellestandis qu’une DCL soit possible audiagnostic, il faille qu’une des carac-téristiques essentielles soit présente.Le CERAD nous décrit aussi un nom-bre de caractéristiques cliniques quisoutiennent le diagnostic de la DCL,comme par exemple; les chutes

fréquentes, la syncope, les évanouisse-ments transitoires, la sensibilité neuro-leptique, les délires systématisés et leshallucinations dans d’autres modali-tés. En 1999, une deuxième con-férence de consensus a été tenue et lespersonnes responsables ont ajouté àcette liste deux autres aspects dont letrouble de comportement en sommeilparadoxal ainsi que la dépression12. Onconstate que des antécédents de crisesou les signes de maladie physique, oude tout autre trouble cérébral, suffi-sants pour intervenir au niveau de laperformance cognitive, sont desaspects moins fréquents dans le diag-nostic de la DCL (Figure 2). La spéci-ficité du diagnostic est assez élevée sil’on tient compte de ces critères.Cependant, la sensibilité peut êtregénéralement faible si on a omis d’uti-liser les critères consensuels du dia-gnostic (Tableau 1). McKeith et sescollaborateurs12 proposaient d’amé-liorer la précision du diagnostic parl’utilisation de méthodes standardiséesde façon à identifier les fluctuations età mesurer l’atrophie de la portion dulobe temporal médian par l’IRM(imagerie par résonance magnétique),même si son importance est inférieuredans la DCL que la MA. De plus, ilssuggéraient de réduire le transporteurd’activité de la dopamine dans le stria-tum, représenté par le FP-CIT-SPECTdans la DCL et non dans la MA.

Les caractéristiquescliniques de la DCLOn constate sur une échelle de temps,que les hommes atteints de la DCL etâgés entre 50 et 83 ans sont un peuplus privilégiés que les femmes, et quetemps de survie moyen de ces patientsest similaire à celui de la MA.Cependant, quelques patients courentun risque plus élevé de mourir de cetteaffection dès les deux premièresannées d’apparition des symptômes13.

6 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Figure 2

La démence à corps de Lewy: Critère du diagnostic clinique12

Caractéristiques principales• La fonction cognitive progressive perd de l’importance pour ainsi intervenir

au niveau de la fonction professionnelle et sociale.• Les troubles de la mémoire prononcés ou rémanents ne se manifestent pas

nécessairement dans les premiers stages, mais il est évident qu’ilsprogressent dans la plupart des cas.

• À l’examen, on constate que les pertes d’attention, l’aptitude de portionfrontale et sous-corticale, et l’habileté visuelle spatiale sont très prononcées.

Caractéristiques essentielles • Fluctuations cognitives avec variations prononcées de l’attention et de la

vigilance• Hallucinations visuelles récurrentes généralement bien formées et détaillées.• Caractéristiques motrices spontanées du syndrome parkinsonien.

Caractéristiques de soutien• Chutes fréquentes• Syncope• Évanouissements transitoires• Délires systématisés• Hallucinations dans d’autres modalités• Trouble du comportement en sommeil paradoxal (REM sleep)• Dépression

Caractéristiques moins fréquentes• Antécédents de crises• Signes de maladie physique ou tout autre trouble cérébral pour intervenir au

niveau de la performance cognitive.

Page 7: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

Ainsi, les caractéristiques cliniques dela DCL se divisent en trois catégories :fonction cognitive, fonction psychia-trique et fonction neurologique.

La fonction cognitive. On observeque le déclin de la fonction cognitive estpratiquement toujours identifiée commeun aspect repère de la DCL. Plusieursétudes menées ont analysé les fonctionsneuropsychologiques de façon à pou-voir distinguer la fonction cognitive dela DCL et celle de la MA. Collerton etses collaborateurs14 ont rédigé un bilansystématisé et ont complété une méta-analyse pour ainsi conclure que la DCLpourrait être conceptuelle en tant quedémence de type visuel-perceptif et detype attentionnel-effectif. Une étude,menée par Shimomura et ses collabora-teurs14, a démontré dans la DCL laprésence d’un trouble déséquilibré auniveau de l’habileté visuelle-perceptiveet visuo-constructive par rapport à lapréservation de la fonction de lamémoire. Pour des propos cliniques,dans une étude, on a comparé les pen-tagones d’intersection avec la perfor-mance des tests de mémoire à courtterme et on s’est rendu compte que lesatteintes précoces pourraient aider àdifférencier les patients qui sont atteintsde la DCL de ceux qui sont atteints de laMA16.

On remarque que les fluctuationsde la fonction cognitive peuventchanger avec le temps (les minutes,les heures et même les jours) et peu-vent se manifester chez 50 % à 75 %des patients12. Les fluctuations ne setrouvent pas uniquement dans laDCL. Par exemple, comparativementaux fluctuations dans la MA, on adécouvert que l’ampleur, des fluctua-tions dans la DCL, paraissait plusprononcée. On a ainsi décrit la cogni-tion variable dans la DCL commeétant spontanée, périodique, de qua-lité passagère et pouvant être unrisque d’interruption dans le flux

continu de la conscience ou de l’at-tention17. « L’opinion d’un expert »ayant une fidélité interjuges peuélevée est considérée comme étant lemodèle idéal pour déterminer lesfluctuations18. Il s’ensuit que lescliniciens ont grandement de la diffi-culté à définir les fluctuations de lafonction cognitive, comparativementaux autres aspects essentiels mêmeavec l’aide des critères actuels, àcause de sa faible sensibilité dans lediagnostic de la DCL. Dans le deu-xième atelier de la DCL, on a recom-mandé dans un rapport de se servirde questionnaires, de journal relatantles observations tirées d’une bonnesource, de procédures psycho-métriques spécifiques et de tâchesassistées par ordinateur qui sont sen-sibles à l’attention12. Le grouped’étude de Fernan et ses collabora-teurs19 a conçu une échelle affichantles fluctuations de 19 sections (19-item Fluctuations Composite Scale).Les quatre sections de cette échellequi permettent aux cliniciens de dif-férencier les patients atteints de laDCL de ceux atteints de la MA sontles suivantes; somnolence diurne etléthargie, sommeil diurne d’unedurée d’au moins deux heures,déconnexion de la réalité durant delongues périodes et épisodes dedésorganisation dans la capacité deréagir avec rapidité. On constate quetrois de ces quatre sections se mani-

festaient chez 63 % des patientsatteints de la DCL et chez 12 % despatients atteints de la MA, résultantainsi un score de 83 % des valeursprédites du diagnostic de la DCL.

La fonction psychiatrique. Dansla fonction psychiatrique précoce etprononcée, on retrouve les symp-tômes cliniques suivants; les forteshallucinations visuelles, les délires,l’apathie ainsi que l’anxiété. Cessymptômes se manifestent très tôtdans l’évolution de la DCL. De plus,ils persistent dans la maladie, mais ilspermettent de différencier la DCL desautres démences (voir Tableau 2). Onrapporte qu’environ les deux tiers despatients présentaient de fortes hallu-cinations visuelles multicolores etcomplexes aux images muettes (asso-ciées aux gens ou aux animaux), etmarquaient des similitudes aveccelles de la DMP. Les individus peu-vent réagir à leurs hallucinations avecamusement, apathie ou une grandepeur13. Les patients, manifestant deshallucinations visuelles et auditives,présentaient au mini-examen de l’étatmental (MMSE) un score plus élevéde 20 et démontraient une DCL plusforte20. Les preuves de la littératurepsychopathologie révèlent que leshallucinations sont associées auproblème de la surveillance conti-nue21 et qui les portent à confusionentre leurs images mentales et leurperception22. Ainsi, la mauvaise iden-

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 7

Tableau 1

La sensibilité et la spécificité d’une DCL probable en tenantcompte des critères cliniques consensuels13

Référence Sensibilité (%) Spécificité (%)

Mega et coll. 75 % 79 %Holmes et coll. 22 % 100 %Luis et coll. 57 % 90 %Verghese et coll. 61 % 84 %McKeith et coll. 83 % 95 %Lopez et coll. 23 % 100 %

Page 8: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

tification des délires se produitgénéralement dans la DCL20. Par con-tre, la dépression est un symptômeprésent dans la DCL ainsi que laDMP, et il est associé à la gravité dessymptômes moteurs20. Une meilleurecompréhension de ces méchanismes,servant de base aux diverses carac-téristiques neuropsychiatriques de laDCL, permettra de développer destraitements inoffensifs et efficaces.

La fonction neurologique. Des don-nées révèlent que plus de 70 % despatients sont atteints du syndromeparkinsonien et éprouvent en plus de labradykinésie, de la rigidité musculaire etdes troubles lors de la démarche (ce sontles caractéristiques les plus com-munes)23. Les signes extrapyramidauxsont présents chez 25 à 50 % des patientsau moment du diagnostic, tandis que laplupart des patients vont développés dessymptômes moteurs à mesure que lamaladie progresse et que plus de 25 %des patients ne vont pas les développer23.On pense que les patients atteints de laDCL démontrent une grande instabilitéposturale et une impassibilité du visagesans toutefois présenter davantage detremblements13. Dans une étude de pers-pective clinicopathologique, on a cons-taté que l’absence de signes extrapyra-

midaux était la cause manquante la plusfréquente dans le diagnostic de la DCL24.Le taux d’évolution des symptômesmoteurs dans la DCL est semblable àcelui dans la MP.

Le TCSP et la DCLLe trouble du comportement en som-meil paradoxal (TCSP : de la signifi-cation anglaise Rapid-eye movement(REM) sleep behaviour disorder) estune parasomnie avec une absenced’atonie musculaire caractéristiquedu sommeil paradoxal, qui entraînecomme conséquences des rêvesmémorisés et effrayants du comporte-ment moteur simple ou complexe13,25.Le TCSP a été associé avec la DCL,la MP, la paralysie supranucléaireprogessive (PSP) et la AMS (atrophiemultisystématisée) et non avec la MAou la démence fronto-temporale25. LeTCSP précède le développement dusyndrome parkinsonien ou celui de ladémence en années et même dedécennies, chez les patients atteintsde la DCL, la MP ou de la AMS25.Boeve et ses collaborateurs26 ont pro-posé de rajouter le TCSP aux carac-téristiques essentielles de la DCL,compte tenu de sa forte association etsa spécificité élevée avec la DCL.

Le dysfonctionnementautonome dans la DCLLes anomalies autonomes sont encoreplus connues chez les patients atteintsde la DCL que chez les patientsatteints de la MA ou de ceux du mêmegroupe d’âge13. Dans une étude decohorte, on a comparé 30 patientsatteints de la DCL et 35 patientsatteints de la MA. Des résultats ontdémontré que 77 % des patientsatteints de la DCL et 55 % despatients atteints de la MA présentaientquelques formes d’instabilité neuro-vasculaire (par exemple; l’hypoten-sion orthostatique ou l’hypersensibili-té du sinus carotidien)27. Dans unecohorte clinicopathologique portantsur 29 patients atteints de la DCL, ona conclu que 28 patients présentaientquelques formes de dysautonomie,d’incontinence urinaire (le symptômele plus fréquent à 97 %) et de consti-pation (le deuxième symptôme le plusfréquent à 83 %). On a remarqué quel’hypotension épisodique et la réten-tion urinaire se présentaient à un tauxde 28 %, que l’hypotension sansprésence de syncope démontrait unrésultat de 66 % et qu’une augmenta-tion légérement élevée affichait untaux de 72 %28.

8 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Tableau 2

Une comparaison des symptômes cliniques entre la DCL et la MA13

Démence à corps de Lewy Maladie d’Alzheimer

À la présentation (%) Jamais (%) À la présentation (%) Jamais (%)

Démence 82 (40-100) 100 100 100Fluctuations 58 (8-85) 75 (45-90) 6 (3-11) 12 (5-19)Hallucinations Visuelles 33 (11-64) 46 (13-80) 13 (3-19) 20 (11-28)Hallucinations auditives 19 (13-30) 19 (0-45) 1 (0-3) 4 (0-13)Dépression 29 (7-75) 38 (12-89) 16 (9-38) 16 (12-21)Syndrome parkinsonien 43 (10-78) 77 (50-100) 12(5-30) 23 (19-30)Chutes 28 (10-38) 37 (22-50) 9 (5-14) 19 (11-24)Sensibilité neuroleptique 61 (0-100) 15 (0-29)

Ce tableau démontre la marge de variations moyenne. Ces données sont basées sur 261 cas de patients atteints de la MA et sur 190 cas de patientsatteints de la DCL. Elles ont été confirmées par le diagnostic de l’autopsie.

Page 9: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

La sensibilité neuroleptiqueTous les patients âgés sont sujetsaux effets de type extrapyramidaldes neuroleptiques. On a observéque les patients atteints de la DCLétaient particulièrement sensibles àces agents, les neuroleptiques atyp-iques. McKeith et ses collabo-rateurs29 ont reporté que 50 % des patients atteints de laDCL ayant pris des neuroleptiques,ont eu des réactions de vive sensi-bilité dont le déclin cognitif, lesyndrome parkinsonien, la somno-lence et les caractéristiques du syn-drome neuroleptique de formemaligne (SNM). Ces réactions pro-duisent une augmentation de troisniveaux de mortalité, sans toutefoisété en rapport avec la posologie.Ballard et ses collaborateurs30 ontreporté aussi les réactions de vivesensibilité des neuroleptiques chez 29 % des patients atteints de laDCL. Ils ont constaté que 47 % despatients ont pris des neuroleptiquesatypiques et que toutes les réac-tions sont survenues dans les deuxpremières semaines d’une nouvelleprescription de neuroleptiques oude changement de la posologie.Dans un essai ouvert, on a décou-vert que le syndrome parkinsoniense manifestaient davantage avec larispéridone et l’olanzapine qu’avecla clozanpine et la quétiapine31.

Le diagnostic différentielLes diagnostics différentiels princi-paux sont la MA, la démence vascu-laire, la DMP, la PSP, la AMS, ladégénérescence corticobasale et lamaladie à prion13.

La prise en chargeBarber et ses collaborateurs32 proposentune démarche en quatre étapes de laprise en charge de la DCL : établir undiagnostic précis et opportun, identifier

la nature des problèmes clés reliés auxsymptômes (la fonction cognitive, lafonction psychiatrique et la fonctionmotrice ainsi que les répercussions surles aidants), ainsi qu’aux interventionsnon pharmacologiques et pharma-cologiques.

Les interventions non pharma-cologiques. Ce type d’interventionsn’a pas été examiné avec méthodejusqu’à présent. Cependant, ces inter-ventions non pharmacologiques sontla base de la prise en charge cliniquemême si elles sont limitées par lestraitements pharmacologiques. Il peutêtre utile de renseigner les patients etles aidants sur la nature du trouble etde les assister dans la procédure àsuivre. De plus, on traite les fonctionsmotrices par l’assistance aux déplace-ments et la physiothérapie.

Les IchE. Le traitement paragents cholinergiques serait avan-tageux pour les patients atteints de laDCL qui présentent d’importantsdéficits cholinergiques au niveau du

cortex, du tronc cérébral, des noyauxdu cerveau antérieur basal ainsi quedans les récepteurs post-synaptiques,corticaux et muscariniques. En effet,dans un essai ouvert sur les inhibi-teurs de la cholinestérase (les IchE :le donépézil, la rivastigmine et lagalantamine) ont prouvé un bienfaitclinique dans les domaines cognitifset du comportement33-36. Dans uncompte rendu rédigé, à partir del’interrogatoire de neuf patientsatteints de la DCL qui sont traitésavec du donépézil, on a remarquéque les hallucinations ont diminuéchez huit patients. Cependant, trois

patients présentaient une aggrava-tion des symptômes moteurs37.

Dans un essai clinique aléatoireet multicentrique sur la rivastig-mine38, on appuie les découvertesdes essais ouverts démontrant leursbienfaits dans les résultats cognitifset du comportement. Il a été prouvéque la rivastigmine diminue defaçon significative les symptômespsychiatriques essentiels de la DCL(l’apathie, l’anxiété, les délires etles hallucinations). Il y avait deuxfois plus de patients, traités tantavec la rivastigmine que le placebo,qui se présentaient comme des réac-teurs cliniques et qui démontraientune amélioration de 30 % à partirde la ligne de base, relativementaux symptômes de comportement.De plus, la rivastigmine produit uneffet bénéfique sur les fluctuationsde l’attention tout en évaluant lesfonctions de temps de réactionsautomatiques39. On n’a constatéaucune aggravation des symptômes

moteurs et on a considéré l’in-nocuité et la tolérabilité commeétant favorables.

Les IchE sont considérés commele traitement de première intentionpour les symptômes cognitifs et psy-chiatriques de la DCL, en dépit despreuves limitées en essais cliniquesaléatoires et du risque de réactionsélevé de la sensibilité neuroleptique.Toutefois, en plus des effets gastro-intestinaux connus de ce produit phar-maceutique, les cliniciens devraientêtre mis au courant de la possibilitéd’aggravation des symptômes moteurset autonomiques. Il est évident que les

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 9

Tous les patients âgés sont sujets aux effets de typeextrapyramidal des neuroleptiques. On a observé que les

patients atteints de la DCL étaient particulièrementsensibles à ces agents, les neuroleptiques atypiques.

Page 10: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

essais cliniques aléatoires doiventdans l’avenir établir à la fois l’effica-cité et l’innocuité de ces produitspharmaceutiques pour le traitement dela DCL.

Autres médicamentsLes preuves sont limitées dans le

traitement du syndrome parkin-sonien. L’efficacité de la lévodopa(l-dopa) sur les symptômes moteursde la DCL n’a pas été encore déter-minée et encore moins dans la MA13.La l-dopa peut aggraver les halluci-nations chez les patients atteints dela DCL, et remettre en question les

cliniciens pour qu’ils trouvent unéquilibre entre l’augmentation de lafonction et l’aggravation de la psy-chose.

On a suggéré à la fois la clona-zépam et la mélatonine dans letraitement du trouble de comporte-ment en sommeil paradoxal40.

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 11

Références :1. Lewy FH. Paralysis agitans. I: Pathologische

anatomie. In: Handbuch der Neurologie III.Springer Press , Berlin, Germany, 1912,920–33.

2. Parkinson J. An essay on the shakingpalsy. Reprinted in: Critchley M (ed.):James Parkinson, 1755-1824: A BicentaryVolume of Papers Dealing WithParkinson’s Disease. MacMillan Press,London, England,1955, p. 218.

3. Gibb WRG, Poewe WH. The centenary ofFriederich H. Lewy 1885-1950. NeuropatholAppl Neurobiol 198; 12217-221.

4. Brain R. The parkinsonian syndrome. In:Brain R (ed.): Diseases of the NervousSystem. Oxford University Press, London,England 1933, 538–50.

5. Okazaki H, Lipkin LE, Aronson SM. Diffuseintracytoplasmic ganglionic inclusions (Lewytype) associated with progressive dementiaand quadraparesis in flexion. J NeuropatholExp Neurol 1961; 20:237–44.

6. Gibb WRG, Luthert PJ, Janota I, et coll.Cortical Lewy body dementia: clinical fea-tures and classification. J Neurol NeurosurgPsychiatry 1989; 52:185–92.

7. McKeith IG, Galasko D, Kosaka K, et coll.Consensus guidelines for the clinical andpathologic diagnosis of dementia with Lewybodies (DLB): report of the consortium on DLBinternational workshop. Neurology 1996;47:1113–24.

8. Marti MJ, Tolosa E, Campdelacreu J. Clinicaloverview of the synucleinopathies. Mov Disord2003; 18(Suppl 6):S21-7.

9. McKeith IG, Mosimann UP. Dementia withLewy bodies and Parkinson’s disease.Parkinsonism Relat Disord 2004; 10(Suppl1):S15-8.

10. Hughes TA, Ross HF, Musa S, et coll. A 10-year study of the incidence of and factorspredicting dementia in Parkinson’s disease.Neurology 2000; 54:1596-602.

11. Merdes AR, Hansen LA, Jeste DV. Influenceof Alzheimer pathology on clinical diagnos-tic accuracy in dementia with Lewy bodies.Neurology 2003; 60(10):1586-90.

12. McKeith IG, Perry EK, Perry RH. Report ofthe second dementia with Lewy body inter-national workshop: diagnosis and treatment.Consortium on Dementia with Lewy Bodies.Neurology 1999; 53(5):902-5.

13. McKeith IG, Mintzer J, Aarsland D, et coll.Dementia with Lewy bodies. Lancet Neurol2004; 3(1):19-28.

14. Collerton D, Burn D, McKeith I, et coll.Systematic review and meta-analysis showthat dementia with Lewy bodies is a visual-perceptual and attentional-executive demen

tia. Dement Geriatr Cogn Disord 2003;16(4):229-37.

15. Shimomura T, Mori E, Yamashita H, et coll.Cognitive loss in dementia with Lewy bodiesand Alzheimer’s disease. Arch Neurol 1998;55:1547-52.

16. Cormack F, Aarsland D, Ballard C, et coll.Pentagon drawing and neuropsychological per-formance in dementia with Lewy bodies,Alzheimer’s disease, Parkinson’s disease andParkinson’s disease with dementia. Int J GeriatrPsychiatry 2004; 19(4):371-7.

17. Bradshaw J, Saling M, Hopwood M, et coll.Fluctuating cognition in dementia with Lewybodies and Alzheimer’s disease is qualitativelydistinct. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2004;75(3):382-7.

18. Mega MS, Masterman DL, Benson DF, et coll.Dementia with Lewy bodies: reliability andvalidity of clinical and pathologic criteria.Neurology 1996; 47(6):1403-9.

19. Ferman TJ, Smith GE, Boeve BF, et coll. DLBfluctuations: specific features that reliably differ-entiate DLB from AD and normal aging.Neurology 2004; 62:181-7.

20. Ballard C, Holmes C, McKeith I, et coll.Psychiatric morbidity in dementia with Lewybodies: A prospective clinical and neu-ropathological comparative study withAlzheimer’s disease. Am J Psychiatry 1999;156(7):1039-45.

21. Bentall RP, Baker GA, Havers S. Realitymonitoring and psychotic hallucinations.British Journal of Clinical Psychology 1991;30:213-22.

22. Barnes J, Boubert L, Harris J, et coll. Realitymonitoring and visual hallucinations inParkinson’s disease. Neuropsychologia 2003;41:565-74.

23. Mckeith IG. Dementia with Lewy bodies. BrJ Psychiatry 2002; 188:144-7.

24. McKeith IG, Ballard CG, Perry R, et coll.Prospective validation of Consensus criteria forthe diagnosis of dementia with Lewy bodies.Neurology 2000; 54(5):1050-8.

25. Schenck C, Mahowald M. REM sleep behav-ior disorder: clinical, developmental, andneuroscience perspectives 16 years after itsformal identification in SLEEP. Sleep 2002;25:120–38.

26. Boeve B, Silber M, Ferman T, et coll.Association of REM sleep behaviour disorderand neurodgenerative disease may reflect onunderlying synucleopathy. Mov Disod 2001;16:622-30.

27. Ballard C, Shaw F, McKeith, et coll. Highprevalence of neurovascular instability inneurodegenerative dementias. Neurology1998; 51(6):1760-2.

28. Horimoto Y, Matsumoto M, Akatsu H, et coll.Autonomic dysfunctions in dementia withLewy bodies. J Neurol 2003; 250(5):530-3.

29. McKeith IG, Fairbaim A, Perry FT.Neuroleptic sensitivity in patients with seniledementia of Lewy body type. BMJ 1992;305:673-78.

30. Ballard C, Grace J, McKeith IG. Neurolepticsensitivity in dementia with Lewy bodies andAlzheimer’s disease. Lancet 1998;351(9108):1032.

31. Jacoby R (ed.): Psychiatry in the Elderly, thirdedition. Oxford University Press, London,2002, p. 550.

32. Barber R, Panikkar A, McKeith IG. Dementiawith Lewy bodies: diagnosis and manage-ment. Int J Geriatr Psychiatry 2001; 16(Suppl1):S12-8.

33. Minett TS, Thomas A, Wilkinson LM. Whathappens when donepezil is suddenly with-drawn? An open label trial in dementia withLewy bodies and Parkinson’s disease withdementia. Int J Geriatr Psychiatry 2003;18(11):988-93.

34. Grace J, Daniel S, Stevens T, et coll. Long-termuse of rivastigmine in patients with dementia withLewy bodies: an open-label trial. Int Psychogeriatr2001; 13(2):199-205.

35. Samuel W, Caligiuri M, Galasko DR, et coll.Better cognitive and psychopathologicresponse to donepezil in patients prospec-tively diagnosed as dementia with Lewybodies: a preliminary study. Int J GeriatrPsychiatry 2000; 15:794.

36. Edwards KR, Hershey L, Wray L. Efficacy andsafety of galantamine in patients with demen-tia with Lewy bodies: a 12-week interimanalysis. Dement Geriatr Cogn Disord 2004;17(Suppl 1):40-8.

37. Shea C, MacKnight C, Rockwood K. Donepezilfor treatment of dementia with Lewy bodies: acase series of nine patients. Int Psychogeriatr1998; 10(3):229-38.

38. McKeith IG, Del Ser T, Spano, et coll. Efficacyof rivastigmine in dementia with Lewy bodies:a randomised, double-blind, placebo-con-trolled international study. Lancet 2000;356(9247):2031-6.

39. Wesnes K, McKeith IG, Ferrara R, et coll.Effects of rivastigmine on cognitive functionin dementia with Lewy bodies: a random-ized placebo-controlled international studyusing the cognitive drug research comput-erised assessment system. Dement GeriatrCogn Disord 2002; 13:183-92.

40. Boeve BF, Silber MH, Ferman TJ. Melatonin fortreatment of REM sleep behavior disorder in neu-rologic disorders: results in 14 patients. SleepMed 2003; 4(4):281-4.

Page 11: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

12 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

La dégénérescence lobaire fronto-temporale (DLFT) regroupe des

pathologies qui se manifestent par destroubles du comportement et/ou du lan-gage. Arnold Pick a été le premier àdécrire le cas d’un patient qui souffraitde trouble du langage. L’examen macro-scopique du cerveau a mis en évidenceune atrophie des lobes frontaux et tem-poraux1. L’examen au microscope arévélé la présence d’inclusions intracy-toplasmiques (« corps de Pick ») et deneurones sphériques (nommés « cel-lules de Pick »)2,3. Onari et Spatz ontappelé ce trouble « maladie de Pick » (enfaisant référence au nom allemand :Picksche Krankheit)4. On croyait quecette entité était rare. Manchester etLund ont toutefois proposé une descrip-tion clinique et pathologique d’ungroupe de troubles neurodégénératifsqu’ils ont désigné par le terme suivant :la « démence fronto-temporale »5. Ilsétaient d’avis que cette pathologie étaitplutôt répandue, surtout chez les sujetsâgés de moins de 65 ans. Neary et sescollaborateurs ont établi des critères

consensuels pour diagnostiquer laDLFT6. De plus, ils ont défini trois sous-types de la DLFT : la démence fronto-temporale (DFT), l’aphasie progressivenon fluente et la démence sémantique.La DFT est, selon ces auteurs, carac-térisée sur le plan clinique par une altéra-tion du comportement. L’aphasie pro-gressive non fluente était auparavantappelée « aphasie progressive pri-maire »7. Autrefois, la démence séman-tique était décrite comme un trouble car-actérisé par la perte de la connaissancesémantique8. Cependant, il faudrait pré-ciser davantage la nosologie, les critèrescliniques et neuropathologiques de cesentités. Par exemple, on a suggéré quetous ces troubles, y compris la DFT,l’aphasie progressive non fluente, ladémence sémantique, la dégénérescencecortico-basale et d’autres pathologies,présentent des caractéristiques cliniques,neuropathologiques et génétiques ayantun domaine commun. Il faudrait, parconséquent, regrouper ces entités sous leterme de « complexe de Pick »9,10. Enoutre, on a suggéré que le terme de la

Questions d’ordre pratique sur la dégénérescence lobaire fronto-temporaleLa dégénérescence lobaire fronto-temporale regroupe plusieurs pathologies neurodégénérativesdont les manifestations cliniques et les caractéristiques neuropathologiques sont hétérogènes. Ily a trois sous-types de dégénérescence lobaire fronto-temporale ; la démence fronto-temporale,l’aphasie progressive non fluente (aphasie progressive primaire) et la démence sémantique. Desauteurs croient que ces trois sous-types seraient des entités distinctes. Plusieurs mutationsgénétiques, plus particulièrement celle de la protéine tau sur le chromosome 17, ont été reliées àcette affection.

par Sultan Darvesh, B.Sc., M.Sc., Ph.D., FRCPC

Dr Darvesh est neurologue auxdépartements de médecine(neurologie et gériatrie),d’anatomie et de neurobiologie. Il est professeur agrégé àl’Université Dalhousie à Halifax,en Nouvelle-Écosse.

Page 12: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

« démence fronto-temporale », dési-gnant à la fois la démence frontale etl’aphasie progressive primaire, seraittrop confondu, et qu’une distinctiondevrait être apportée à cause de certainssignes et symptômes distincts11.Néanmoins, les critères consensuelsactuels présentent un cadre de référenceraisonnable pour l’évaluation et la priseen charge de ces patients.

Caractéristiques de ladégénérescence lobairefronto-temporaleconsidérées comme ungroupeOn estime qu’environ 25 % des per-sonnes atteintes de démence avantl’âge de 65 ans souffrent de DLFT12.La DLFT survient à une fréquencesemblable chez les hommes et lesfemmes, et la durée moyenne de lamaladie est d’environ huit ans. Il estestimé que, dans près de la moitié deces cas, ces patients auraient un parentatteint de ce trouble de premier degré13.

Caractéristiques de ladémence fronto-temporaleLes patients atteints de démence fronto-temporale (DFT) peuvent être classésen trois sous-groupes. Dans le premiersous-groupe, on inclut les sujets quimanifestent d’une manière prédomi-nante la désinhibition, l’inattention etl’hyperactivité. Dans le second, lessujets manifestent surtout de l’apathieet un retrait social, alors que dans letroisième, on observe un comportementritualisé et stéréotypé. On observe aussiparfois que les habitudes alimentaires

de ces patients sont modifiées. Parexemple, ils démontrent une hyperora-lité et une préférence pour certains ali-ments dont les sucreries. Ces patientspeuvent également négliger leurhygiène personnelle, être agités, impul-sifs, irritables, agressifs, avoir un com-portement hypersexuel et afficher unedésinhibition sexuelle. Un faible pour-

centage de ces patients est égalementatteint de la maladie du neuronemoteur.

Sur le plan de la neuro-imagerie,on observe parfois une atrophie dulobe frontal et/ou du lobe temporal àl’IRM. On a également décrit unehypoperfusion des régions frontaleet/ou temporale à l’imagerie SPECT(Single Photon Emission ComputedTomography) : tomographie d’émis-sion monophotonique14.

À l’examen neuropathologique,les patients qui manifestent un com-portement désinhibé, impulsif, anti-social et stéréotypé présentent engénéral une atteinte du cortex orbito-frontal. En présence de déficits de laplanification et de l’organisation, onnote surtout une atteinte du cortexpréfrontal dorsolatéral, tandis que lessujets qui manifestent de l’apathieprésentent une atteinte des régions

médiane, frontale et antérieure de lacirconvolution cingulaire15.

Caractéristiques de l’apha-sie progressive non fluente(Aphasie progressive primaire)Bien que l’aphasie progressive soitconnue depuis environ 100 ans16,17,Mesulam a décrit ce trouble de façon

plus détaillée sous le nom « aphasieprogressive primaire » et il a aussiélaboré d’autres critères diagnos-tics7,11,18. Au cours des deux premièresannées, on note chez ces patients untrouble de début insidieux et uneaphasie progressive, fluente ou nonfluente, une anomie, un agramma-tisme, des distorsions paraphasiqueset phonémiques, et parfois un déficitde compréhension. Au cours del’évolution de la maladie, ces sujetsont de la difficulté à répéter, à lireet/ou écrire. En revanche, ils ne mani-festent pas d’apathie ni de désinhibi-tion pertinentes. La mémoire récenteet la fonction visuospatiale sontpréservées. On observe parfois uneacalculie, une apraxie idéomotrice etde la persévération. Après deux ans,tous les domaines cognitifs peuventêtre altérés, mais le trouble du lan-gage demeure prédominant et s’ag-

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 13

On estime qu’environ 25 % des personnes atteintes dedémence avant l’âge de 65 ans souffrent de DLFT12. La

DLFT survient à une fréquence semblable chez les hommeset les femmes, et la durée moyenne de la maladie est

d’environ huit ans.

Page 13: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

grave plus rapidement. Chez la plu-part de ces patients, on découvre uneatteinte focalisée du lobe frontalgauche.

Les caractéristiques neuropatho-logiques les plus fréquentes de ce trou-ble sont une perte neuronale, une glioseet une spongiose des couches superfi-cielles du cortex, bien que des auteursaient décrit la présence de corps de Picket de cellules de Pick dans certainscas19. Dans de très rares cas, on a signa-lé les caractéristiques pathologiques dela maladie d’Alzheimer (MA)20.

Caractéristiques de ladémence sémantiqueWarrington a été le premier à décrirela démence sémantique8. Les patientsatteints de ce trouble ne comprennentplus le sens des mots et ils ont des dif-ficulté dans les tests d’appellation etde compréhension. Ils ont égalementde la difficulté à reconnaître lesobjets. Parfois, la fonction de répéti-tion est préservée, surtout pour trou-ver les mots justes. De même, certainspatients continuent de pouvoir lire etécrire, sous dictée toutefois. Ilsemploient parfois des mots demanière idiosyncratique. On note parailleurs l’absence de distorsions para-phasiques et phonémiques (p. ex.«mentir » au lieu de « manteau »),mais la présence de paraphasiessémantiques (p. ex. « crayon » au lieu

de « craie »). Ces patients sont engénéral conscients de leur trouble. Oncroit que cette forme d’aphasie estcausée par une perte de la mémoiresémantique. Chez ces patients, onpeut aussi observer de la difficulté àreconnaître les visages (la proso-pagnosie) parfois accompagnée d’uneagnosie associative, c’est-à-dire qu’ilsont de la difficulté à reconnaître lesobjets. Les sujets, qui souffrent dedémence sémantique, ont préservé lamémoire épisodique, contrairementaux patients atteints de MA. En

général, ils ne manifestent pas detrouble de l’orientation et ils peuventréférer les événements récents, tout enayant parfois de la difficulté à se rap-peler d’événements antérieurs.

Les examens de neuro-imageriemettent parfois en évidence unehypoperfusion dans un lobe tempo-ral ou dans les deux à la tomogra-phie d’émission monophotonique(SPECT)21. L’atrophie du lobe tem-poral est beaucoup plus marquée eton observe en général une atteinteasymétrique; le lobe temporalgauche étant le plus atteint.

Aspects génétiques de ladégénérescence lobairefronto-temporaleOn estime que 38 % à 45 % de tousles cas de DLFT sont héréditaires13, et

dans 80 % à 90 % de ces cas, il peuty avoir une transmission autosomiquedominante. Des auteurs ont décrit desmutations du gène codant pour la pro-téine tau sur le chromosome 1722. Laprotéine tau est présente dans lecerveau sain, et on croit qu’elle joueun rôle important dans la préservationdu cytosquelette du neurone et dansle transport axonal. Dans les famillesporteuses d’une mutation tau, l’ex-pression du phénotype de la maladievariait selon les membres de lafamille. Par exemple, différents mem-bres de la famille souffraient de trou-bles psychiatriques, de troubles decomportement (retrait social,alcoolisme, hyperreligiosité et hyper-sexualité), de démence, de parkinson-isme et d’amyotrophie23,24. En outre,les membres de la famille pouvaientprésenter un trouble du langage pré-dominant, tandis que d’autres souf-fraient de parkinsonisme25.

Aspects neuropathologiquesde la dégénérescencelobaire fronto-temporaleLes anomalies neuropathologiques sontdécouvertes surtout dans les lobesfrontal et temporal, et elles peuvent êtresymétriques ou asymétriques. On noteparfois une perte de neurones, unegliose et une spongiose dans lescouches superficielles du cortexcérébral26-28. Chez des sujets atteints dela maladie Pick, on note des neuronessphériques (cellules de Pick) et desinclusions intraneuronales, argyro-philes, ubiquitine-positives et tau-positives (corps de Pick). Sur le planneurochimique, on a décrit une atteinteà la fois des voies sérotoninergiques etdes voies catécholinergiques29.

14 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Les caractéristiques neuropathologiques les plus fréquentesde ce trouble sont une perte neuronale, une gliose et unespongiose des couches superficielles du cortex, bien que desauteurs aient décrit la présence de corps de Pick et decellules de Pick dans certains cas.

Page 14: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

Traitementpharmacologique de ladégénérescence lobairefronto-temporaleLes voies sérotoninergiquesinterviennent dans certains syn-dromes comportementaux, par exem-ple l’apathie, la dépression et l’im-pulsivité. Par conséquent, desmédicaments comme la fluvoxamine,la fluoxétine, la paroxétine et la ser-traline, qui augmentent le tonus séro-toninergique, ont été employés chezces patients. Ces agents ont eu deseffets variables sur ces symptômes30-32.Du fait qu’on avait suggéré de réduirele tonus dopaminergique, on a tentéde traiter ces patients par labromocriptine, un agoniste des récep-teurs dopaminergiques D-1 et D-2.Le rôle des inhibiteurs sélectifs durecaptage de la sérotonine (ISRS) etdes agonistes dopaminergiques doittoutefois être évalué de façon plusapprofondie.

En raison du déficit cholinergiquequi caractérise la MA, on emploie lesinhibiteurs de la cholinestérase pourtraiter les symptômes de cette mala-die33. Il n’existe pas de donnéesprobantes à l’appui de l’utilité desinhibiteurs de la cholinestérase dansle traitement de ce trouble, même sil’on a décrit des déficits des mar-queurs cholinergiques chez dessujets atteints de DLFT34.

La prise en charge nonpharmacologique de ladégénérescence lobairefronto-temporaleLa prise en charge de ces patients doitinclure des stratégies axées sur lecomportement et il importe d’en-

seigner aux aidants naturels lesmesures à prendre pour atténuer lestroubles du comportement observésdans ces formes de démence (le com-portement exploratoire de l’environ-nement, la désinhibition, l’agressivité,l’hyperoralité, la négligence de l’hy-giène personnelle, et le piètre juge-ment). Au niveau de la prise en chargecomportementale, l’aidant doit tenirun journal relatant les troubles decomportement en y décrivant le typede trouble, la gravité et les circon-stances qui pourraient déclencher cetrouble. Ce journal facilite l’indivi-

dualité des interventions et la créationd’objectifs réalistes; une conditionessentielle à une prise en charge nonpharmacologique et efficace35,36. Lacréation d’un environnement structuréou l’élimination des facteursdéclencheurs sont des exemples destratégies appropriées. Il importeaussi de voir à la sécurité du patient.Par exemple, il pourrait être néces-saire d’empêcher le patient de con-duire un véhicule, de prendre desdécisions financières importantes, carces situations se présentent comme unfardeau pour l’aidant. À cet égard, lesmesures d’enseignement à l’intentiondes aidants et les groupes d’entraideont une importance vitale. La prise encharge la plus efficace, à l’instar desautres maladies chroniques, dans laDLFT, est l’approche multidisci-plinaire. Elle est dirigée par une

équipe de médecins, d’infirmières,d’ergothérapeutes, de physiothéra-peutes, de travailleurs sociaux,d’orthothérapeutes et d’autres profes-sionnels paramédicaux.

ConclusionLe terme « dégénérescence lobairefronto-temporale » regroupe destroubles hétérogènes qui se mani-festent par une gamme d’anoma-lies, allant d’un syndrome dysexé-cutif, au trouble sémantique et autrouble du langage. Les signescliniques et neuropathologiques de

la DLFT peuvent chevaucher lessignes de d’autres affections (parexemple, ceux de la maladie duneurone moteur). Les facteursgénétiques comme les mutations dugène codant pour la protéine tau,sur le chromosome 17, semblentexpliquer en partie le fondementbiologique de ces troubles. Il sem-ble par ailleurs difficile d’attribuerà la mutation d’un seul gène lesdiverses manifestations cliniquesobservées chez ces patients. Desrecherches plus poussées devrontêtre menées pour décrire plus pré-cisément les caractéristiques clin-iques, neuropathologiques et géné-tiques pour faire progresser la con-naissance de cette maladie et pourétablir des critères diagnostiquessatisfaisants en vue d’améliorer laprise en charge de ces patients.

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 15

On estime que 38 % à 45 % de tous les cas de DLFT sonthéréditaires13, et dans 80 % à 90 % de ces cas, il peut y

avoir une transmission autosomique dominante.

Page 15: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

16 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Références1. Pick A. Uber die Beziehungen der

senilen Hirnantropie zur aphasie.Prager Medizinishe Wochenscrift 1892;17:165-7.

2. Alzheimer A. Uber eigenartigeKrankheitsfalle des spateren Alters.Zeitscrift fur die GesamteNeurologie und Psychiatrie 1911;4:356-85.

3. Altman E. Uber die umschriebeneGehirnatrophie des spateren Alters. ZNeurol Psychiatr 1923; 83:610-43.

4. Onari K, Spatz H. AnatomischeBeiträge zur Lehre von der Pickschenumschriebene-Grosshirnrinden-Atrophie (‘Picksche Krankheit’).Zeitschrift für die Gesamte Neurologieund Psychiatrie 1926; 101:470-511.

5. The Lund and Manchester Groups.Clinical and neuropathological criteriafor frontotemporal dementia. J NeurolNeurosurg Psychiatry 1994; 57:416-8.

6. Neary D, Snowden JS, Gustafson L, etcoll. Frontotemporal lobar degenera-tion: a consensus on clinical diagnosticcriteria. Neurology 1998; 51:1546-54.

7. Mesulam MM. Slowly progressiveaphasia without generalized dementia.Ann Neurol 1982; 11:592-8.

8. Warrington EK. The selective impair-ment of semantic memory. Q J ExpPsychol 1975; 27:635-57.

9. Kertesz A, Munoz D. Pick’s disease,frontotemporal dementia, and pickcomplex: emerging concepts. ArchNeurol 1998; 55:302-4.

10. Kertesz A. Pick’s complex and FTDP-17. Mov Disord. 2003; Suppl 6:S57-62.

11. Mesulam MM. Primary progressiveaphasia. Ann Neurol 2001; 49:425-32.

12. Mann DMA, Neary D, Snowden JS.Chromosome 17 and frontotemporaldementia. In: Gauthier S andCummings JL (eds.): Alzheimer’sDisease and Related Disorders Annual.Martin Dunitz Ltd, United Kingdom,2000, pp. 27-55.

13. Chow TW, Miller BL, Hayashi VN, et

coll. Inheritance of frontotemporaldementia. Arch Neurol 1999; 56:817-22.

14. Miller BL, Ikonte C, Ponton M, et coll.A study of the Lund-Manchesterresearch criteria for frontotemporaldementia: clinical and single-photonemission CT correlations. Neurology1997; 48:937-42.

15. Cummings JL. Principles of neuropsy-chiatry: towards a neuropsychiatric epis-temology. Neurocase 1999; 5:181-8.

16. Sérieux P. Sur un cas de surdité verbalepure. Rev Med 1893; 13:733-50.

17. Rosenfield M. Die partielleCrosshirnatrophie. J Psychol Neurol1909; 14:115-30.

18. Mesulam MM. Primary progressiveaphasia—a language-based dementis.N Engl J Med. 2003; 349:1535-42.

19. Kertesz A, Hudson L, Mackenzie IR, etcoll. The pathology and nosology ofprimary progressive aphasia.Neurology 1994; 44:2065-7202.

20. Galton CJ, Patterson K, Xuereb JH, etcoll. Atypical and typical presentationsof Alzheimer’s disease: a clinical, neu-ropsychological, neuroimaging andpathological study of 13 cases. Brain2000; 123:484-98.

21. Garrard P, Hodges JR. Semanticdementia: clinical, radiological andpathological perspectives. J Neurol2000; 247:409-22.

22. Wilhelmsen KC, Lynch T, Pavlou E, etcoll. Localization of disinhibition-dementia-parkinsonism-amyotrophycomplex to 17q21-22. Am J HumGenet 1994; 55:1159-65.

23. Lynch T, Sano M, Marder KS, et coll.Clinical characteristics of a family withchromosome 17-linked disinhibition-dementia-parkinsonism-amyotrophycomplex. Neurology 1994; 44:1878-84.

24. Rosen HJ, Lengenfelder J, Miller B.Frontotemporal dementia. Neurol Clin2000; 18:979-92.

25. Foster NL, Wilhelmsen K, Sima AA, etcoll. Frontotemporal dementia and

parkinsonism linked to chromosome17: a consensus conference. AnnNeurol 1997; 41:706-15.

26. Brun A. Frontal lobe degeneration ofnon-Alzheimer type: I.Neuropathology. Arch Gerontol Geriatr1987; 6:193-208.

27. Brun A. Frontal lobe degeneration ofnon-Alzheimer type revisited.Dementia 1993; 4:126-31.

28. Mann DMA, South PW, Snowden JS, etcoll. Dementia of frontal lobe type:Neuropathology and immunohisto-chemistry. J Neurol NeurosurgPsychiatry 1993; 56:605-14.

29. Anderson IM, Scott K, Harborne G.Serotonin and depression in frontallobe dementia. Am J Psychiatry 1995;152:645.

30. Hope RA, Allman P. Hyperphagia indementia: fluvoxamine takes the bis-cuit. J Neurol Neurosurg Psychiatry1991; 54:88.

31. Hoehn-Saric R, Lipsey JR, McLeod DR.Apathy and indifference in patients onfluvoxamine and fluoxetine. J ClinPsychopharmacol 1990; 10:343-5.

32. Swartz JR, Miller BL, Lesser IM, et coll.Frontotemporal dementia: treatmentresponse to serotonin selective reup-take inhibitors. J Clin Psychiatry 1997;58:212-6.

33. Rockwood K, Darvesh S. Cholinergicdrugs for Alzheimer’s disease. In: GrayJ, (ed.): Drug Advances. RemedicaPublishing, London UK, 2003, pp.159-77.

34. Sparks DL, Markesbery WR. Alteredserotonergic and cholinergic synapticmarkers in Pick’s disease. Arch Neurol1991; 48:796-9.

35. Gordon J, Powell C, Rockwood K.Goal attainment scaling as a measureof clinically important change in nurs-ing home patients. Age Ageing 1999;28:275-81.

36. Talerico KA, Evans LK. Responding tosafety issues in frontotemporal dementias.Neurology 2001; 56(11 Suppl 4):S52-55.

Lectures suggérées1. Constantinidis J, Richard J, Tissot R. Pick’s

disease. Histological and clinical correla-tions. Eur Neurol 1974; 11:208-17.

2. Edwards-Lee T, Miller BL, Benson DF, etcoll. The temporal variant of frontotempo-ral dementia. Brain 1997; 120:1027-40.

3. Hodges JR, Patterson K, Oxbury S, etcoll. Semantic dementia. Progressivefluent aphasia with temporal lobe atro-phy. Brain 1992; 115:1783-1806.

4. Neary D, Snowden JS, Mann DM. Theclinical pathological correlates of lobaratrophy. Dementia 1993; 4:154-9.

5. Rahman S, Sahakian BJ, Hodges JR, etcoll. Specific cognitive deficits in mildfrontal variant frontotemporal demen-tia. Brain 1999; 122:1469-93.

Page 16: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 17

L’année dernière, j’ai séjourné dans une immersion en anglais.

Ce fut pour moi toute une expérience,car ma langue maternelle est lefrançais. Je me suis rendue compteque je me débrouillait tant bien quemal avec cette seconde langue, mais,je ressentissait une sorte de frustra-tion intérieure et un sentiment d’infé-riorité face à l’apprentissage de cettelangue, comme peuvent aussi ressen-tir les personnes atteintes de la mala-die d’Alzheimer (MA).

Premièrement, vous ne pouvez pasvous imaginer comment parfois il est

difficile pour moi d’exprimer ce que jeveux dire. Les mots me manquent et aumoment qu’ils me viennent finalementà l’esprit, ils sortent de ma bouchecomme un rythme saccadé et non celuid’un rythme harmonieux. Lorsque queje suis fatiguée, je m’aperçois que lesmots viennent encore plus lentement àmon esprit et que je les prononce toutaussi au ralenti. La plupart du temps, jeparle par circonlocutions pour m’ex-primer. Je sais le mot que je veuxprononcer en français, naturellement,mais soit que je ne le connais pas bienen anglais ou soit que je ne m’en rap-pelle tout simplement pas. Ainsi, c’esten choisissant d’utiliser d’autres typesde mots, dont les mots impropres, quej’ai pu m’exprimer en tout temps enanglais. Pour quiconque qui lit cet arti-cle, je sais que vous n’allez pas tout desuite comprendre exactement ce que jeveux dire.Veuillez juste me donner unpeu de temps pour me clarifier. Ce n’estpas que je suis une idiote, bien qu’ilm’arrive à l’occasion de me sentir de lasorte, c’est que le mot que je cherche neme vient pas si facilement à l’esprit.Maintenant, je peux comprendre com-ment il peut être difficile pour les per-sonnes atteintes de la MA de s’ex-primer.

Je me souviens quand j’allais àl’épicerie, j’avais de la difficulté à com-

mander des produits frais : « J’aimeraisavoir de la salade de chou cru, s’il vousplaît! », m’adressais-je au commis. Ilme demanda de lui répéter ma com-mande. Je lui disait à nouveau, mais ilme redemandait de me répéter, car ilétait tout confus avec mon accent :« Est-ce que vous avez dit de la saladede chou cru? », me questionna-t-il.J’étais tellement fâchée de me répéter.Maintenant, je peux en rire, mais je nepouvais pas en rire à ce moment-là et àbien y penser, je ne ressens pas lebesoin d’en rire présentement. Alors, jeme dis à moi-même :« Qu’est-ce qu’il y a de mal avec ceque je dis? ». Je suppose qu’il meposait cette question à cause de monfort accent français. Ainsi, si nousétablissons un parallèle entre ma situa-tion et celle des personnes atteintes dela MA, on peut s’apercevoir commentil peut être frustrant pour ces gens deleur demander de se répéter. Du faitque l’on ne comprend pas toujours cequ’ils disent, on continue de leurdemander : « Qu’est-ce que vous avezdit? », « Pourriez-vous répéter? ». Lesdemandes des patients atteints de laMA peuvent leur sembler tout aussiclaires et évidentes que la mienne.Dans ma situation, je sais que monproblème était mon accent, maisimaginez comment il peut être frus-

Donnez-moi une chance! J’ai besoin plus de temps!Les patients atteints de la maladie d’Alzheimer ont de la difficulté à communiquer avec lespersonnes de leur entourage. Cette difficulté à communiquer avec les autres se produit égalementà l’apprentissage d’une nouvelle langue. Dre France Cloutier nous affirme cette comparaison touten y mentionnant la façon dont les patients atteints de la maladie d’Alzheimer doivent êtretraités, et en nous décrivant les soins et les moments d’attention dont ils ont tant besoin.

Par France Cloutier, Ph.D.

Dre Cloutier travaille à l’unité derecherche de gériatrie del’Université Dalhousie à Halifaxen Nouvelle-Écosse.

Page 17: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

18 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

trant pour les patients atteints de la MAde ne pas savoir pourquoi les gens lesquestionnent sans cesse.

Il y a autre chose : lorsque les gensme posent des questions, cela meprend plus de temps à leur répondre.On dirait que les mots s’inscriventdans ma tête comme des énigmes etque je dois les déchiffrer inconsciem-ment. Après avoir déchiffré les mots,je pense lentement à ma réponse, etaprès tout ce travail, je dois prononcercorrectement les mots. À force dem’attendre, les gens passent à uneautre question. Soyez patient!

Ce n’est pas que je suis une idiote,il me faut seulement un peu plus detemps pour passer au travers de ceprocessus complexe. Donnez-moi une

chance en tant que personne qui a de ladifficulté à apprendre l’anglais et n’ou-bliez pas de faire de même avec lespersonnes atteintes de la MA, car euxaussi se débrouillent à leur façon pourcommuniquer. À propos, je peuxressentir l’impatience des gens à monégard surtout lorsque je parle lente-ment, mais qu’est-ce que je peux yfaire? Il y a des jours qui sont meilleursque d’autres. N’est-ce pas de mêmechez les personnes atteintes de la MA?Ces gens passent de bonnes journées etdes fois, il y a des journées où ils peu-vent être confus. Ils peuvent très bienressentir notre impatience dans le tonde notre voix ou par nos gestes.

Je suis fatiguée de me démenerchaque jour pour parler l’anglais et moncerveau n’est plus capable d’emma-gasiner des informations supplémen-taires. Par la suite, je ne suis plus capa-ble d’entendre ce que les gens disent.Dans mon monde imaginaire, on diraitque c’est comme un rideau qui se baisseou une porte qui se ferme pour de bon.Je me déconnecte tout simplement du

monde. Ainsi, cette situation que j’aivécue, pourrait se présenter chez lesgens atteints de la MA.

Je crois que nos problèmes person-nels peuvent mener facilement à la soli-tude. En tant qu’apprentie de la langue,j’ai ressenti cette solitude, lorsque, parexemple, les gens autour de moi parlenttrès vite ou qu’ils utilisent des mots quine me sonnent pas familiers. Quelquesfois, ils rient, contrairement à moi quin’arrive pas à comprendre leur humour.Je ne sens pas que je fais partie desleurs. Mon monde est simplement dif-férent du leur. Il en est peut-être ainsiavec les personnes atteintes de la MA.Ces personnes sont la plupart du tempsdans un autre monde, et il est évidentque nous ne pouvons pas vivre cette

expérience même si nous vivonsquelque chose de similaire.

Enfin, je ne suis pas toujours à monmeilleur à cause de la barrière linguis-tique. D’après moi, je pourrais parlerdavantage et être plus alerte de monenvironnement si je pouvais parlerfrançais. Il est difficile d’exprimer notrefrustration et encore une fois, je peuxétablir cette difficulté entre ma situationet celle des personnes atteintes de laMA. Ces gens ont fait un grand pas pourprendre leurs vies en main et pour s’ex-primer avec leur langage. Nous nedevrions pas oublier que nous avons descapacités visuelles et auditives avancéescomparativement à ces gens. De cettefaçon, nous pourrions tenir en ligne decompte l’histoire de leur vie.

Si étrange que cela puisse paraître,mon expérience à l’immersion anglaisem’a permis de me rapprocher des per-sonnes atteintes de la MA. Elles viventdes problèmes complexes en communi-quant. Ce n’est pas qu’elles sontdénuées d’intelligence, au contraire,c’est qu’elles ne sont pas capables de

s’exprimer ou de communiquer commenous. Par contre, cette incapacité decommuniquer n’est pas de la mêmenature que la mienne, car j’ai desraisons différentes des leurs. En tant quetravailleuse de la santé, suite à cetteexpérience, je me suis sensibilisée à lasituation des personnes atteintes de laMA. Est-ce que je leur donne plus detemps à déchiffrer ce que je leur ai dit?Est-ce que je parle trop rapidement?Est-ce que j’utilise les bons mots pourqu’elles comprennent? Est-ce que jeprends en considération leur conditionphysique? Comme par exemple; ont-elles faim elles aussi ou sont-elles sim-plement fatiguées? Est-ce que je mefâche ou je deviens impatientelorsqu’elles prennent du temps à merépondre? C’est pourquoi, je pense à cesquestions :« Pourquoi devrais-je m’inquiéter?, Detoute façon, ces personnes ne compren-nent pas! ». Est-ce que je comprendsleur tristesse du fait que ces personnessont incomprises? Est-ce que je leurdonne vraiment une chance?

Je me souviens de mes premièressemaines lorsque j’ai parlé l’anglais, carj’étais tellement fatiguée et fâchée à la finde la journée. J’espère ne pas oubliercomment je me sentais, de façon à avoirde la compassion pour les personnesatteintes de la MA. Comme nous avonsobservé, il est probable que les émotionsque j’ai vécues soient semblables à cellesde l’expérience des personnes atteintesde la MA. Cependant, la différence laplus importante entre moi et ces gens, estque je me suis améliorée avec le temps etque je suis même fière de moi-même.Mon expérience fut temporaire con-trairement à celle de ces gens qui sedétériore. Ils perdent non seulement lanotion de fierté sinon leur amour-propre.

L’auteure tient à remercier BobJohnston pour ses commentairesutiles sur les versions antérieuresde cet article.

Je crois que nos problèmes personnels peuvent menerfacilement à la solitude.

Page 18: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

20 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Une expérience perturbanteJe ne sais pas comment commencer cetarticle, mais j’aimerais vous dire ce quim’est arrivé de troublant aujourd’hui etce qui m’a amené à ne point répondreaux questions que l’on m’a posées.

Au centre de soins, il y a une rési-dente vraiment gentille. Elle est trèsvieille, très mince, très petite, mais toutsimplement adorable. La peau de sonvisage est recouverte de fin duvetdémontrant ainsi les traces du temps.Je ne me sens pas à l’aise de l’appelerpar son vrai prénom, alors j’ai décidéde la nommer Sarah Jane pour cet arti-cle. Ses grands yeux bleus ont dévelop-pé des cataractes, alors quelques foiselle me demande : « Est-ce bien toiRoberta? ». Quand je lui dis que c’estbien moi, puis elle me répond : « Bien!Pourrais-tu me dire ce que je devraisfaire? » Donc, tout dépendamment dequel côté je lui fais face, je lui disqu’elle irait à la salle à manger ouqu’elle irait dans sa chambre. Elleavancerait alors avec sa marchette pourse rendre où bon je lui disais d’aller.

Quelques fois, Sarah et moi discu-tions. Elle a des histoires intéressantesà conter, car son mari et elle étaientdes missionnaires dans le nord de laprovince. C’est une bonne causeuse etj’aimais passer du temps avec elle tan-dis que mon mari dormait.

À chaque jour, lorsque je prenaisl’ascenseur, elle me disait : « BonjourRoberta ». Dans la salle à manger, àl’heure des repas, elle me demandait cequ’elle pourrait faire : « Devrais-jerester ici et attendre? », « Vont-ils m’ap-porter bientôt mon repas? », « Penses-tuqu’ils vont me donner du café? » Aprèstoutes ces questions, elle comptait vrai-ment sur ce que j’allais lui répondre.« Merci Roberta », me disait-t-elle.

Aujourd’hui à l’heure du souper, safille, dont je n’avais jamais eu lachance de rencontrer, et une infirmièrese tenaient à côté de sa table. « VoiciRoberta », disait Sarah Jane.

Je suis restée bouche bée. Je nesavais pas qu’elle ne pouvait pas recon-naître les personnes, ni même les mem-bres de sa propre famille. Je ne savais

qu’elle n’avait pas reconnu quelqu’undepuis quelques temps déjà. Elle n’étaitpas capable de reconnaître les infir-mières ni même le personnel soignantet elle ne pouvait pas se souvenirqu’elle les avait déjà vus auparavant.

« Vous lui avez fait tout un effet »,me disait sa fille, « elle ne reconnaîtplus personne maintenant ».

Jusqu’à présent, elle me reconnaît,car elle me demande des nouvelles demon mari Ray, en l’appelant par sonprénom, et elle a de bonnes conversa-tions avec moi. Je sais que ses facultéssont affaiblies et qu’une pension lui estversée. Je n’avais aucune idée qu’elle nepouvait pas entretenir des rapports avecles autres comme elle le fait avec moi.D’une certaine façon, elle et moi avionstouché un sujet qui nous liait davantage.Les autres ne la considéraient pascomme une personne lucide, car d’aprèsleur interaction avec elle, tout en luidonnant de l’amour, du respect et de lagentillesse, ils n’avaient pas réussi àconverser avec elle. D’après eux, elle nepouvait pas le faire.

Roberta Bedard est une aidante naturelle pour son mari atteint de la maladie d’Alzheimer(MA). Elle a écrit de nombreux articles humoristiques et touchants sur son expériencepersonnelle, et elle a gentiment accepté que nous fassions paraître ses articles dans laRevue canadienne de la maladie d’Alzheimer. Ses écrits permettent aux lecteurs departager son parcours d’aidante, donnent un aperçu très humain de la maladie etstimulent la réflexion sur le sens profond de la vie et de l’amour.

Dans le présent article…Suite à une « expérience perturbante », Roberta nous explique de quelle façon elle n’a paspu répondre aux nombreuses questions de sa nouvelle amie.P

er

sp

ec

tiv

es

Chapitre 7par Roberta Bedard

Révélations, expériences et réflexions personnelles d’une proche aidante ausujet de la maladie d’Alzheimer

20 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

Page 19: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

Après cette aventure, je me suismise à penser à ces questions; Est-cepossible que certains patients atteintsde la maladie d’Alzheimer pourraientêtre « ici », au centre de soins, sansque personne ne le sache? Cette ques-tion me donne des frissons, juste à ypenser. Ils doivent tellement souffrirdans leur incapacité de ne pouvoirpoint reconnaître leurs êtres chers.Cela doit être tellement dur d’êtrepris dans cette situation. Est-ce unesituation exceptionnelle? Était-ce uncoup de chance que Sarah et moiavions pu être connectées? Est-ce unesituation unique? Comment pouvait-elle me reconnaître et point lesautres? Qu’ai-je fais par mégardepour ainsi produire une découvertecapitale dans le domaine de larecherche médicale? Est-ce que cecoup de chance peut se produire chezd’autres personnes?

Il y a tellement de questions dansma tête et je n’ai point trouver deréponses. Les idées filent à touteallure dans ma tête, car je veux trou-ver une solution. Je ne savais pas quequelques patients pouvaient nousrépondre si on pouvait seulementtrouver la bonne clé. J’aimerais avoirune sorte d’esprit qui pourrait reculerdans les pensées, mais je n’ai pas cegenre de capacité mentale. Ce soir,lorsque je m’apprêtais à partir du cen-tre de soins, je me suis arrêtée à laporte de sa chambre et lui ai dit : « Jem’en vais maintenant. Je dois mepréparer à souper et me coucher ».Elle m’a tendu les bras de son lit :« Je veux un câlin ». Je me suispenchée vers son lit et elle m’aentouré délicatement le cou avec sespetits bras fragiles: « Je vais prier cesoir pour toi ma chère », me disait-elle, « Je t’aime bien! ».

Veuillez lire le chapitre 8, « Leperdre », dans le prochain numérode la Revue canadienne de la mala-die d’Alzheimer.

Troisième colloque canadien sur la démenceDu 27 au 29 octobre 2005À l’hôtel Westin OttawaOttawa, Ontario

Le troisième colloque canadien sur la démence réunit les principauxexperts, spécialisés dans la recherche sur la démence, pour pouvoiréchanger des idées au point de vue international et multidisciplinaire. Ce colloque sera réparti sur deux jours et demi, et un nombre deréunions, d’ateliers et de présentations visuelles seront présentés à l’ordredu jour, de façon à promouvoir la participation active et l’interactionentre les collègues.

Ce colloque est parrainé par l’Académie canadienne de psychiatriegériatrique, la Société canadienne de neurologie, la Société canadienne degériatrie et le Consortium des centres canadiens de la recherche cognitiveclinique.

Points saillants du programme

• A Beta directed therapies for Alzheimer’s diseaseDr Peter St. George-Hyslop (Université de Toronto)

• Debate : Treatment of Behaviour in Dementia with AtypicalAntipsychotics : Benefits Outweigh RisksDr Nathan Herrmann (Université de Toronto)Dre Jiska Cohen-Mansfield (Université George Washington)Dr Clive Ballard (Université de Newcastle upon Tyne)

• Caregiver Interventions in Dementia Dre Mary Mittelman (Université New York, Faculté de médecine)

• What is Vascular Dementia?Dr Gustavo Roman (Université du Texas)

Résumés demandés!

Partager votre savoir en recherche avec vos collègues en exposant vosrésumés aux présentations visuelles, qui auront lieu au Troisièmecolloque canadien sur la démence. Vous pouvez trouver sur le site duTroisième colloque canadien sur la démence de l’information et desformulaires d’inscription : www.ccd2005.ca

Pour de plus amples informations et pour s’inscrire à ce colloque, veuillezvisiter le site Internet au www.ccd2005.ca

Le Troisième colloque canadien sur la démence tient à remercier toutparticulièrement Janssen-Ortho Inc., Novartis Canada, Pfizer Canada etLundbeck Canada pour leur support financier, car ce colloque a étérendu possible grâce à une subvention éducative sans restrictions de cescompagnies.

Ne manquez pas cet évévement important!Inscrivez-vous maintenant!!

Page 20: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

22 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer

La Société Alzheimer du Canada (SAC) mettait en œuvre, il y a 10 ans, un programme dont les per-

sonnes atteintes de la maladie d’Alzheimer (MA) oud’une affection connexe avaient grandement besoin. LaSAC avait créé, en collaboration avec la Gendarmerieroyale du Canada (GRC), Santé Canada et le Procureurgénéral adjoint, un registre permettant d’identifier lespersonnes à risque de s’égarer lorsqu’elles quittent leurdomicile.

Dix ans plus tard, le registre d’errance Alzheimer –aujourd’hui intitulé Sécu-RetourMC – est devenu un pro-gramme efficace et bien établi, rendant ainsi un précieuxservice aux Canadiens.

« Le programme Sécu-Retour est tout aussi pertinentaujourd’hui qu’il y a 10 ans, et peut-être encore plus, enraison du nombre croissant de personnes atteintes de laMA ou d’une affection connexe », explique StephenRudin, le directeur général de la SAC. « Tant que nousn’aurons pas découvert une cure ou un moyen deprévenir les symptômes de la maladie, les Canadiensapprécieront la tranquillité d’esprit que leur apporte ceregistre. »

Pour souligner le 10e anniversaire de Sécu-Retour – leregistre d’errance Alzheimer, et grâce à un nouveaufinancement, le registre porte un nouveau nom et exposeune nouvelle présentation. Il est aussi doté des meilleuresressources pour aider les établissements de santé, lescorps policiers et les équipes de recherche et de sauve-tage à intervenir auprès des personnes, atteintes de la MAou d’une affection connexe, qui se sont égarées.

Nouveau matériel de formationCe nouveau matériel comprend deux ressources de forma-tion : un nouveau DVD de formation pour la police intitulé

La maladie d’Alzheimer : une ressource pour la police etles équipes de recherche et de sauvetage; un guide del’animateur-formateur et un guide du participant y sontinclus. L’autre ressource est intitulée RECHERCHE; unmanuel préparatoire d’urgence et un guide de planificationpour des organismes tels les établissements de soins delongue durée qui prennent soin de personnes atteintes de laMA ou d’une affection connexe. Ces ressources ont étéréalisées en collaboration entre les corps policiers et leséquipes de recherche et de sauvetage, et ce partout au pays.Ce DVD et le matériel imprimé qui l’accompagne aiderontà former les policiers qui pourraient être appelés à faireface à des situations impliquant des personnes atteintes dela MA ou d’une affection connexe. Le manuel a pour butd’aider les professionnels des soins de santé lorsqu’unepersonne dont ils prennent soin, s’égare.

Selon Rudy Gheysen, le directeur du Collège depolice de l’Ontario : « le Collège de police de l’Ontarioest fier d’avoir participé avec la SAC, à élaboration desnouvelles ressources de formation, et d’avoir appuyéainsi le programme Sécu-Retour. Ce programme est unecombinaison gagnante pour tous les policiers du Canada.Ce matériel de formation permettra aux policiers d’inter-venir plus efficacement et de venir en aide aux personnestrès vulnérables de notre société ».

Le rôle des médecins de familleBien que les nouvelles ressources élaborées pour le pro-gramme Sécu-Retour visent à rendre cet outil plus effi-cace et utile, les médecins de famille ont également unrôle à jouer dans la réussite du programme.

En effet, le médecin de famille est, en général, la pre-mière personne avec qui la famille entre en contact lorsd’un diagnostic de MA ou d’une affection connexe. Les

Les médecins de famille ont un rôleimportant à jouer dans le programme

Sécu-Retour

Des nouvelles de la Société Alzheimer du Canada

Page 21: Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer...Après la série des premières diapositives en français, je leur ai demandé de se montrer indulgents à mon égard, mais j’ai décidé

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer • 23

médecins de famille devraient encourager les quelques420 000 Canadiens âgés de plus de 65 ans atteints de MAou d’une affection connexe à s’inscrire au programmeSécu-Retour. On estime, en effet, qu’environ 20 à 60 % deces personnes vont s’égarer un jour ou l’autre après avoirquitté leur domicile. Par ailleurs, des études ont démontréqu’il est vital de retrouver une personne égarée le plus rapi-dement possible pour réduire ainsi le risque de blessure oude mort. En ce moment, il y a 18 500 Canadiens qui sontinscrits au programme.

La SAC encourage donc les cliniciens à renseigner lespatients et leurs proches au sujet du programmeSécu-Retour et à leur remettre la brochure gratuite por-tant sur l’inscription. Il est important qu’ils leurexpliquent aussi les avantages de ce programme.

« Sécu-Retour est un programme des plus utiles et unetrès belle réussite canadienne », affirme Dre CaroleCohen, directrice clinique au Sunnybrook and Women’sHealth Sciences Centre. « Ce programme est pertinentpour toutes les personnes atteintes de démence, peuimporte le type de démence, qui sont à risque de s’égarerlorsqu’elles quittent leur domicile. Il est facile des’inscrire au programme et cette démarche devrait êtrerecommandée lors de l’élaboration du plan de la prise encharge pour toutes les personnes souffrant de démence ».

À propos du programmeDu fait que les personnes atteintes de la MA ou d’unemaladie connexe perdent progressivement leur aptitude àreconnaître les endroits familiers et qu’elles ont de la dif-ficulté à se rappeler de leur nom et de leur adresse, lespersonnes inscrites au programme Sécu-Retour portentun bracelet; indiquant qu’elles souffrent d’un trouble demémoire et que l’on doit communiquer avec la police sicette personne semble perdue. Lorsqu’une personneinscrite au programme est désorientée ou confuse, lespoliciers peuvent l’identifier grâce au numéro inscrit surle bracelet et aux renseignements personnels fournis dansla base de données confidentielle de la police.

Le registre sauvegarde les noms ainsi que d’autresrenseignements personnels pertinents des personnesinscrites dans une base de données à laquelle seuls lespoliciers du Canada et des États-Unis ont accès.

Il y a des frais d’inscription unique de 25 $ quiincluent un bracelet et des cartes d’identité avec un

numéro d’identification, et un livret pour l’aidant. Parconséquent, les personnes qui s’inscrivent n’ont pra-tiquement rien à perdre en ajoutant leur nom à la banquede données. Elles ont toutefois tout à gagner, si jamaiselles avaient besoin de ce service un jour.

Pour obtenir des brochures pour vos patients ou pourobtenir de plus amples renseignements sur le registred’errance Alzheimer; Sécu-Retour, veuillez communi-quer avec la Société Alzheimer de votre région ou com-poser le numéro sans frais 1 800 816-8816 ou visitez lesite Internet de la SAC à l’adresse suivante :www.alzheimer.ca.

La Société Alzheimer du Canada est un organisme desanté à but non lucratif qui se consacre à aider les per-sonnes touchées par la maladie d’Alzheimer. La Sociétéoffre de l’aide et des programmes éducatifs aux person-nes atteintes de la maladie d’Alzheimer et à leurs aidantsnaturels. Elle subventionne également la recherche envue de découvrir les causes de la maladie, de trouver unremède et d’améliorer les soins. La Société se composed’un bureau national, de dix bureaux provinciaux et deplus de 140 organismes locaux à travers le pays.

Pour plus de renseignements sur la maladied’Alzheimer et les autres démences connexes, sur lesprogrammes et les services de la Société Alzheimer etsur ce que vous pouvez faire pour aider, commu-niquez avec le bureau local de la Société ou visitezson site Web (www.alzheimer.ca) ou composez lenuméro suivant : 1 800 616-8816.