Retour à la réalité pour le marché obligataire · même semblé saisir le marché obligataire...

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LA COURBE DE RENDEMENT François Dupuis, vice-président et économiste en chef Mathieu D’Anjou, économiste principal Benoit P. Durocher, économiste principal Francis Généreux, économiste principal Hendrix Vachon, économiste principal Desjardins, Études économiques : 514-281-2336 ou 1 866-866-7000, poste 5552336 [email protected] desjardins.com/economie NOTE AUX LECTEURS : Pour respecter l’usage recommandé par l’Office québécois de la langue française, nous employons dans les textes et les tableaux les symboles k, M et G pour désigner respectivement les milliers, les millions et les milliards. MISE EN GARDE : Ce document s’appuie sur des informations publiques, obtenues de sources jugées fiables. Le Mouvement des caisses Desjardins ne garantit d’aucune manière que ces informations sont exactes ou complètes. Ce document est communiqué à titre informatif uniquement et ne constitue pas une offre ou une sollicitation d’achat ou de vente. En aucun cas, il ne peut être considéré comme un engagement du Mouvement des caisses Desjardins et celui-ci n’est pas responsable des conséquences d’une quelconque décision prise à partir des renseignements contenus dans le présent document. Les prix et les taux présentés sont indicatifs seulement parce qu’ils peuvent varier en tout temps, en fonction des conditions de marchés. Les rendements passés ne garantissent pas les performances futures, et les Études économiques du Mouvement des caisses Desjardins n’assument aucune prestation de conseil en matière d’investissement. Les opinions et les prévisions figurant dans le document sont, sauf indication contraire, celles des auteurs et ne représentent pas la position officielle du Mouvement des caisses Desjardins. Copyright © 2018, Mouvement des caisses Desjardins. Tous droits réservés. TABLE DES MATIÈRES Faits saillants et éditorial .................................... 1 Politiques monétaires Réserve fédérale .... 3 Banque du Canada .... 4 Banques centrales d’outre-mer ........................ 5 Marché des titres à revenu fixe États-Unis ............. 6 Canada ..................... 7 Provinces .............. 8 Tableaux Taux directeurs ................................................ 9 Marché des titres à revenu fixe ........................ 9 Calendrier des banques centrales ...................10 FAITS SAILLANTS f Le taux américain de dix ans affiche maintenant à son tour une tendance haussière claire qui l’a amené au-dessus de 2,85 %. La poussée des taux obligataires reflète en premier lieu un fort ajustement à la hausse des attentes des investisseurs concernant l’évolution des taux directeurs. f Les bonnes conditions économiques devraient inciter les dirigeants de la Réserve fédérale à effectuer trois hausses de 25 points des taux directeurs en 2018, dont une à la réunion qui se conclura le 21 mars. f Les niveaux des taux obligataires américains nous paraissent maintenant appropriés par rapport à l’environnement économique et financier. La poursuite d’un resserrement graduel de la politique monétaire américaine devrait amener les taux de deux ans et de dix ans respectivement aux environs de 2,60 % et de 3,20 % à la fin de 2018. f La Banque du Canada devra poursuivre la remontée graduelle de ses taux d’intérêt directeurs en 2018 et en 2019. La prochaine hausse pourrait être décrétée au printemps, si l’évolution des risques demeure favorable. f Nous continuons d’anticiper que l’évolution des taux obligataires au Canada sera similaire à celle observée aux États-Unis. Le taux canadien de dix ans devrait ainsi terminer l’année aux environs de 2,75 %. Deux tendances importantes ont marqué les marchés obligataires en 2017. La première est l’amélioration de l’environnement et des perspectives économiques qui a convaincu la Réserve fédérale (Fed) de poursuivre la remontée de ses taux directeurs, et même à commencer à réduire la taille de son bilan. Plusieurs autres banques centrales ont adopté progressivement un ton plus positif et la Banque d’Angleterre ainsi que la Banque du Canada ont à leur tour amorcé un resserrement monétaire en seconde moitié d’année. Sans surprise, cela a entraîné une augmentation marquée des taux d’intérêt de court terme alors que, par exemple, le taux américain de deux ans a augmenté de près de 90 points de base sur l’ensemble de 2017. Cette tendance défavorable pour le marché obligataire a toutefois été compensée durant la majeure partie de 2017 par un aplanissement marqué de la courbe de rendement alors que les taux obligataires de long terme ont refusé de suivre la tendance des taux de court terme. Une nouvelle période de faiblesse de l’inflation durant l’été a contribué à ce phénomène en nourrissant une fausse perception que le relèvement des taux directeurs américain tirait à sa fin. Le problème pour le marché obligataire est que tout indique que la première tendance du resserrement des politiques monétaires se poursuivra en 2018 alors qu’un aplanissement supplémentaire de la courbe de rendement paraît peu probable puisque les craintes d’une inflation trop faible commencent à faire place à des risques de surchauffe économique. La légère tendance haussière des taux obligataires américains de long terme s’est ainsi accélérée en janvier et une certaine panique a même semblé saisir le marché obligataire le 2 février lorsque les données américaines sur le marché du travail ont fait état d’une accélération de la croissance des salaires. Le taux américain de Retour à la réalité pour le marché obligataire ÉTUDES ÉCONOMIQUES | 13 FÉVRIER 2018 GAGNANT DU TITRE DU MEILLEUR PRÉVISIONNISTE - CANADA #1 BEST OVERALL FORECASTER - CANADA

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LA COURBE DE RENDEMENT

François Dupuis, vice-président et économiste en chef • Mathieu D’Anjou, économiste principal Benoit P. Durocher, économiste principal • Francis Généreux, économiste principal • Hendrix Vachon, économiste principal

Desjardins, Études économiques : 514-281-2336 ou 1 866-866-7000, poste 5552336 • [email protected] • desjardins.com/economie

NOTE AUX LECTEURS : Pour respecter l’usage recommandé par l’Office québécois de la langue française, nous employons dans les textes et les tableaux les symboles k, M et G pour désigner respectivement les milliers, les millions et les milliards. MISE EN GARDE : Ce document s’appuie sur des informations publiques, obtenues de sources jugées fiables. Le Mouvement des caisses Desjardins ne garantit d’aucune manière que ces informations sont exactes ou complètes. Ce document est communiqué à titre informatif uniquement et ne constitue pas une offre ou une sollicitation d’achat ou de vente. En aucun cas, il ne peut être considéré comme un engagement du Mouvement des caisses Desjardins et celui-ci n’est pas responsable des conséquences d’une quelconque décision prise à partir des renseignements contenus dans le présent document. Les prix et les taux présentés sont indicatifs seulement parce qu’ils peuvent varier en tout temps, en fonction des conditions de marchés. Les rendements passés ne garantissent pas les performances futures, et les Études économiques du Mouvement des caisses Desjardins n’assument aucune prestation de conseil en matière d’investissement. Les opinions et les prévisions figurant dans le document sont, sauf indication contraire, celles des auteurs et ne représentent pas la position officielle du Mouvement des caisses Desjardins. Copyright © 2018, Mouvement des caisses Desjardins. Tous droits réservés.

TABLE DES MATIÈRESFaits saillants et éditorial .................................... 1Politiques monétaires

Réserve fédérale .... 3 Banque du Canada .... 4Banques centrales d’outre-mer ........................ 5

Marché des titres à revenu fixeÉtats-Unis ............. 6 Canada ..................... 7Provinces .............. 8

TableauxTaux directeurs ................................................ 9Marché des titres à revenu fixe ........................ 9Calendrier des banques centrales ...................10

FAITS SAILLANTS

f Le taux américain de dix ans affiche maintenant à son tour une tendance haussière claire qui l’a amené au-dessus de 2,85 %. La poussée des taux obligataires reflète en premier lieu un fort ajustement à la hausse des attentes des investisseurs concernant l’évolution des taux directeurs.

f Les bonnes conditions économiques devraient inciter les dirigeants de la Réserve fédérale à effectuer trois hausses de 25 points des taux directeurs en 2018, dont une à la réunion qui se conclura le 21 mars.

f Les niveaux des taux obligataires américains nous paraissent maintenant appropriés par rapport à l’environnement économique et financier. La poursuite d’un resserrement graduel de la politique monétaire américaine devrait amener les taux de deux ans et de dix ans respectivement aux environs de 2,60 % et de 3,20 % à la fin de 2018.

f La Banque du Canada devra poursuivre la remontée graduelle de ses taux d’intérêt directeurs en 2018 et en 2019. La prochaine hausse pourrait être décrétée au printemps, si l’évolution des risques demeure favorable.

f Nous continuons d’anticiper que l’évolution des taux obligataires au Canada sera similaire à celle observée aux États-Unis. Le taux canadien de dix ans devrait ainsi terminer l’année aux environs de 2,75 %.

Deux tendances importantes ont marqué les marchés obligataires en 2017. La première est l’amélioration de l’environnement et des perspectives économiques qui a convaincu la Réserve fédérale (Fed) de poursuivre la remontée de ses taux directeurs, et même à commencer à réduire la taille de son bilan. Plusieurs autres banques centrales ont adopté progressivement un ton plus positif et la Banque d’Angleterre ainsi que la Banque du Canada ont à leur tour amorcé un resserrement monétaire en seconde moitié d’année. Sans surprise, cela a entraîné une augmentation marquée des taux d’intérêt de court terme alors que, par exemple, le taux américain de deux ans a augmenté de près de 90 points de base sur l’ensemble de 2017.

Cette tendance défavorable pour le marché obligataire a toutefois été compensée durant la majeure partie de 2017 par un aplanissement marqué de la courbe de rendement alors que les taux obligataires de long terme ont refusé de suivre la tendance des taux de court terme. Une nouvelle période de faiblesse de l’inflation durant l’été a contribué à ce phénomène en nourrissant une fausse perception que le relèvement des taux directeurs américain tirait à sa fin.

Le problème pour le marché obligataire est que tout indique que la première tendance du resserrement des politiques monétaires se poursuivra en 2018 alors qu’un aplanissement supplémentaire de la courbe de rendement paraît peu probable puisque les craintes d’une inflation trop faible commencent à faire place à des risques de surchauffe économique. La légère tendance haussière des taux obligataires américains de long terme s’est ainsi accélérée en janvier et une certaine panique a même semblé saisir le marché obligataire le 2 février lorsque les données américaines sur le marché du travail ont fait état d’une accélération de la croissance des salaires. Le taux américain de

Retour à la réalité pour le marché obligataire

ÉTUDES ÉCONOMIQUES | 13 FÉVRIER 2018

GAGNANT DU TITRE DU MEILLEURPRÉVISIONNISTE - CANADA

#1 BEST OVERALLFORECASTER - CANADA

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2FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

dix ans a ainsi bondi à plus de 2,85 %, un sommet depuis 2014 (graphique 1).

Le niveau actuel des taux paraît appropriéLa poussée des taux américains de dix ans d’environ 2,00 % en septembre dernier à plus de 2,85 % a certainement été rapide. À notre avis, elle représente toutefois un ajustement tout à fait approprié. À la fin de l’été dernier, le marché obligataire semblait encore se nourrir de l’illusion que rien n’avait changé et que l’environnement de faible inflation et de politiques monétaires ultra-accommodantes serait toujours présent. Plusieurs voyaient même l’aplanissement de la courbe de rendement comme un signe de récession qui forcerait les banques centrales à recommencer bientôt à assouplir leur politique monétaire.

Les statistiques économiques envoyaient cependant un message tout à fait inverse qui n’a fait que continuer de s’amplifier depuis. La croissance économique mondiale a été solide dans les pays avancés au cours des derniers trimestres et les perspectives économiques demeurent excellentes alors que la croissance mondiale pourrait atteindre 3,8 % en 2018, la plus forte depuis 2011 (graphique 2). Dans cet environnement économique déjà très favorable, le passage d’une importante réforme fiscale à Washington en fin d’année a forcé le marché obligataire à réaliser que les risques d’une surchauffe devenaient plus importants à court terme que ceux d’une récession. La récente accélération des salaires américains a amplifié ces craintes.

L’inflation sera déterminante pour la suite des chosesComme nous le disions en septembre dernier, une révision à la hausse des anticipations de resserrement monétaire aux États-Unis pour se rapprocher du rythme de resserrement signalé par les dirigeants de la Fed justifie amplement le retour des taux américains de dix ans plus près de 3 % que de 2 %. Après cet ajustement, la question est de savoir à quoi il faut s’attendre pour la suite des choses. À notre avis, c’est l’évolution de l’environnement économique qui sera cruciale puisqu’elle déterminera le rythme auquel les banques centrales poursuivront leur resserrement monétaire.

Alors que tout indique que la croissance économique restera solide au cours des prochains trimestres, il faut s’attendre à continuer à observer une tendance haussière sur l’ensemble des taux d’intérêt. Les anticipations des investisseurs concernant l’évolution des politiques monétaires et l’inflation nous paraissant maintenant raisonnables (voir page 6), une poussée beaucoup plus haute des taux obligataires à court terme ne serait toutefois pas justifiée par des facteurs fondamentaux. Pour le moment, le mot d’ordre pour les banques centrales demeure un resserrement monétaire graduel et limité, et la récente remontée des taux de long terme représente une raison de plus pour ne pas précipiter les choses, en particulier du côté canadien.

Dans ce contexte, nous avons peu modifié nos prévisions de taux d’intérêt et jugeons toujours qu’une hausse totale de 0,75 % des taux directeurs américains et canadiens demeure le scénario le plus probable cette année. Elle devrait s’accompagner d’une hausse supplémentaire relativement modeste des taux obligataires de long terme. De véritables signes de surchauffe économique et d’une flambée de l’inflation au-dessus des niveaux ciblés dans les pays avancés viendraient toutefois changer la donne et ouvriraient la porte à une nouvelle poussée des taux obligataires.

François Dupuis, vice-président et économiste en chef

Mathieu D’Anjou, CFA, économiste principal

GRAPHIQUE 2 La croissance de l’économie mondiale devrait continuer de s’accélérer

Sources : Banque mondiale, Consensus Forecasts et Desjardins, Études économiques

Croissance du PIB réel mondial – selon la parité du pouvoir d’achat

Variation annuelle en %

2,5

3,0

3,5

4,0

4,5

2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

Prévisions de Desjardins

GRAPHIQUE 1 La courbe des taux américaine a fortement augmenté depuis la fin de l’été et a récemment cessé de s’aplanir

Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

Courbes des taux fédéraux américains

En %

0,50

1,00

1,50

2,00

2,50

3,00

3,50

3 m

ois

2 an

s

5 an

s

10 an

s

30 an

s

Courbe actuelle Fin 2017 Fin août 2017

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3FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

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Sans surprise, les dirigeants de la Fed ont opté pour une augmentation de 25 points des taux directeurs en décembre dernier. Ainsi, après une unique hausse en 2015 et une autre en 2016, la Fed a accéléré la normalisation de ses taux au cours de l’année dernière. On s’attend à ce que cette cadence annuelle de trois hausses se poursuive en 2018. Le départ de Janet Yellen et l’arrivée de Jerome Powell à la tête de la banque centrale américaine ne devraient pas changer la donne. Déjà gouverneur, Jerome Powell s’est toujours montré solidaire des récentes décisions du comité de politique monétaire de la Fed. Il en demeure néanmoins que la mouture 2018 de ce comité amenée par le roulement annuel des membres votants semble un peu plus hawkish que celle de 2017. Par exemple, les deux membres qui s’étaient dissociés de la hausse de décembre (préférant un statu quo) ne voteront pas cette année.

Dans ces circonstances, la Fed pourrait se montrer plus encline à éventuellement signaler une accélération du rythme des hausses que de le ralentir. Il faut dire que la conjoncture économique américaine (et mondiale) est favorable. La confiance des ménages et des entreprises est élevée et le marché du travail continue de faire des gains. Le taux de chômage est même tombé à un niveau qui devrait générer davantage de pressions salariales (graphique 3). Les baisses d’impôts décrétées en décembre s’ajoutent à ce contexte positif et ont amené une révision haussière de nos prévisions de croissance économique pour 2018

et 2019. Du même souffle, en stimulant une économie déjà vigoureuse, elles risquent aussi d’exacerber certaines pressions inflationnistes.

Pour le moment, l’inflation demeure toutefois assez modeste. C’est aussi le cas pour la croissance des salaires, bien que la tendance soit évidemment à la hausse, une situation normale à ce stade du cycle économique. Les marchés ont fait grand cas de l’accélération de la variation annuelle du salaire horaire moyen à 2,9 % en janvier, le rythme le plus élevé depuis 2009 (graphique 4). Il faut toutefois se méfier des soubresauts des chiffres mensuels liés aux salaires. Si l’on regarde davantage les employés non cadres, la tendance demeure très stable, voire décevante. On remarque même une décélération récente dans le cas de l’indice de croissance des salaires de la Fed d’Atlanta (cet indice se base sur la médiane plutôt que sur la moyenne). S’il faut éviter de tirer des conclusions rapides sur les mouvements subits des salaires et même des prix, les pressions inflationnistes devraient quand même se montrer de plus en plus présentes. Ainsi, les variations de prix se rapprocheront de la cible officielle de 2 % de la Fed, une situation souhaitée par Jerome Powell et ses collègues. Ils voudront cependant surveiller de près les risques d’une accélération plus aiguë.

Réserve fédérale (Fed)Au tour de Jerome Powell

PRÉVISIONSLes bonnes conditions économiques devraient inciter les dirigeants de la Fed à effectuer trois hausses de 25 points des taux directeurs en 2018, dont une à la réunion qui se conclura le 21 mars. Si l’effet positif des baisses d’impôts sur la croissance est plus important que prévu ou si l’accélération des salaires se poursuit, la Fed pourrait éventuellement augmenter le rythme des hausses de taux directeurs.

GRAPHIQUE 4 L’accélération récente du salaire horaire moyen n’est pas très convaincante

Sources : Bureau of Labor Statistics, Réserve fédérale d’Atlanta et Desjardins, Études économiques

Variation annuelle en %

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

3,5

4,0

4,5

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

Salaire horaire moyen – tous les employés Salaire horaire moyen – employés de production Indice de la Réserve fédérale d'Atlanta

GRAPHIQUE 3 Le taux de chômage américain est tombé sous son niveau non inflationniste

CBO : Congressional Budget Office Sources : Bureau of Labor Statistics, CBO et Desjardins, Études économiques

En %

3

4

5

6

7

8

9

10

11

1990 1995 2000 2005 2010 2015 2020

Taux de chômageTaux de chômage naturel selon CBO

Prévisions de Desjardins

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES

4FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

Après avoir connu une croissance exceptionnelle à l’hiver et au printemps 2017, la progression de l’économie canadienne est descendue à un rythme plus soutenable à compter de la mi-2017. Ainsi, le PIB réel a augmenté de 1,7 % (à rythme annualisé) au troisième trimestre et nos plus récentes projections indiquent que le quatrième trimestre pourrait également se solder par une hausse légèrement inférieure à 2 %. Pour 2018, la croissance du PIB réel devrait demeurer au-dessus de son potentiel (évalué à environ 1,4 % par la BdC) et se maintenir aux alentours de 2 % tout au long de l’année.

En outre, la demande intérieure reste très vigoureuse. Les dépenses de consommation progressent de façon soutenue grâce notamment à un marché du travail vigoureux et une confiance élevée des ménages. Le marché de l’habitation a connu un sursaut à l’automne. Les investissements des entreprises recommencent à croître.

La vive croissance du PIB réel des derniers trimestres a entraîné une résorption des capacités excédentaires de production, qui seraient maintenant pratiquement disparues. La valeur moyenne des deux mesures de la BdC concernant l’écart entre la production et son plein potentiel n’était que de -0,2 % au troisième trimestre de 2017. Rappelons que celle-ci se situait à -2,0 % il y a un peu plus d’un an. Selon nos projections, cet écart

traversera prochainement en territoire positif et pourrait atteindre +1,2 % à la fin de 2019.

La disparition des capacités excédentaires est aussi observable avec d’autres mesures. Selon un sondage de la BdC mené auprès des entreprises, le nombre de répondants signalant qu’ils éprouveraient des difficultés à répondre à une augmentation inattendue de la demande a augmenté significativement au cours des derniers trimestres (graphique 5). Du côté du marché du travail, le taux de chômage est descendu considérablement pour atteindre en décembre dernier un creux historique datant de 1976 (correspondant au début de l’enquête sur la population active). Plus important encore, le taux de chômage est passé depuis plusieurs mois sous son niveau d’équilibre (NAIRU), ce qui laisse croire que les pressions haussières sur les salaires pourraient devenir de plus en plus importantes (graphique 6). Les croissances annuelles de la rémunération hebdomadaire moyenne et du salaire horaire moyen se sont d’ailleurs accélérées récemment.

Dans ces conditions, les pressions inflationnistes devraient s’intensifier au cours des prochains mois. Le taux annuel d’inflation totale, qui est resté dans la zone inférieure de la fourchette cible de la BdC depuis 2012, pourrait s’accélérer et rejoindre en 2018 la cible médiane (2 %) de façon durable.

Banque du Canada (BdC)Les capacités excédentaires de production sont disparues

PRÉVISIONSÀ 1,25 %, le taux cible des fonds à un jour est encore très expansionniste. Or, avec la disparition des capacités excédentaires de production, l’économie canadienne n’a plus besoin d’autant de soutien. La BdC devra donc poursuivre la remontée graduelle de ses taux d’intérêt directeurs en 2018 et en 2019. Rappelons que la BdC estime que le taux neutre se situe entre 2,50 % et 3,50 %. Ainsi, la prochaine hausse pourrait être décrétée au printemps, si l’évolution des risques demeure favorable.

GRAPHIQUE 6 Le taux de chômage est très bas d’un point de vue historique au Canada

Sources : Statistique Canada, Organisation de coopération et de développement économiques et Desjardins, Études économiques

Taux de chômage

En %

5,5

6,0

6,5

7,0

7,5

8,0

8,5

9,0

2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

Mesure officielle

Taux d'équilibre (NAIRU)

GRAPHIQUE 5 Les pressions sur les capacités de production s’intensifient au Canada

Sources : Banque du Canada et Desjardins, Études économiques

Pourcentage des entreprises

En %

010203040506070

2007 2009 2011 2013 2015 2017

Ayant de sérieuses difficultés à répondre à une hausse inattendue de la demandeAyant quelques difficultés à répondre à une hausse inattendue de la demande

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5FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

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BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE (BCE)

La vigueur de l’économie européenne laisse croire que les pressions inflationnistes pourraient augmenter. Pour l’instant, la BCE indique vouloir poursuivre ses achats de titres au moins jusqu’en septembre, mais il pourrait devenir de plus en plus difficile de garder ce cap. Des dirigeants de la BCE ont laissé entendre que le discours officiel pourrait changer pour mieux refléter l’amélioration de l’économie. La principale ombre au tableau est l’appréciation de l’euro (graphique 7). Le taux de change s’est approché de 1,25 $ US récemment, ce qui pourrait se traduire par une révision à la baisse des prévisions d’inflation de la BCE en mars. Tout pris en compte, notre scénario mise sur la poursuite des achats de titres à hauteur de 30 G€ jusqu’en octobre. Nous prévoyons ensuite un arrêt complet des achats et une période de statu quo d’environ six à neuf mois avant que la BCE ne commence à hausser ses taux d’intérêt directeurs.

BANQUE D’ANGLETERRE (BoE)

La BoE a commencé un resserrement monétaire en novembre dernier. Malgré les craintes entourant le Brexit, l’économie britannique fait plutôt bien et l’inflation avoisine les 3 % depuis plusieurs mois (graphique 8). La BoE explique cette forte inflation surtout par la dépréciation passée de la livre et par les prix plus élevés du pétrole. En même temps, elle prévoit l’apparition d’un déséquilibre inflationniste entre l’offre et la demande, ce qui retardera le retour à la cible d’inflation de 2 %. D’autres hausses de taux d’intérêt seront nécessaires, mais la BoE indique que le resserrement monétaire sera graduel et limité. La prochaine hausse de taux devrait avoir lieu au printemps. Par la suite, une autre hausse pourrait être décrétée à l’automne, mais l’approche de la concrétisation du Brexit nous incite à croire que la BoE préférera alors opter pour la prudence.

BANQUE DU JAPON (BoJ)

Le Japon a été épargné par la tendance haussière des taux obligataires observée un peu partout dans le monde. La BoJ garde le cap avec sa cible d’environ 0 % pour le taux obligataire japonais de dix ans (graphique 9). Pour y arriver, elle doit encore acheter une grande quantité de titres. Malgré la meilleure performance de l’économie nipponne, l’inflation tarde à atteindre sa cible de 2 %. L’inflation se situe actuellement à 1,1 %, mais elle tombe à 0,4 % si l’on exclut l’effet des prix de l’énergie et des aliments frais. La BoJ indique par ailleurs qu’elle ne souhaite pas retirer ses mesures d’assouplissement avant que la cible soit dépassée durablement. Nous ne prévoyons donc pas de changement à la politique monétaire nipponne pour cette année.

GRAPHIQUE 7 L’appréciation de l’euro pourrait limiter les pressions inflationnistes

Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

$ US/€

1,00

1,05

1,10

1,15

1,20

1,25

1,30

1,35

1,40

1,45

2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

Taux de change eurolandaisMoyenne mobile 200 jours

Banques centrales d’outre-merLa BCE va-t-elle devancer la fin de son programme d’achat de titres?

GRAPHIQUE 9 La Banque du Japon parvient à maintenir le taux de dix ans à près de 0 %

Taux obligataire japonais de dix ans

En %

-0,3

-0,2

-0,1

0,0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

2015 2016 2017 2018

Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

GRAPHIQUE 8 L’inflation se maintient aux alentours de 3 % au Royaume-Uni

Taux d’inflation au Royaume-Uni

En %

-1

0

1

2

3

4

5

6

2007 2009 2011 2013 2015 2017

IPC totalIPC excluant aliments et énergie

IPC : indice des prix à la consommation Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

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6FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

OBLIGATIONS AMÉRICAINES

Le taux américain de dix ans affiche maintenant à son tour une tendance haussière claire qui l’a récemment amené au-dessus de 2,85 %. Les taux de plus court terme ont aussi poursuivi leur remontée, reflétant entre autres la poursuite du resserrement monétaire américain en décembre, mais la pente 10/2, qui était descendue à 50 points de base au tournant de l’année, est récemment remontée aux environs de 75 points.

La poussée des taux obligataires américains au cours des derniers mois reflète en premier lieu un fort ajustement à la hausse des attentes des investisseurs concernant l’évolution des taux directeurs américains. À la fin de l’été dernier, le marché jugeait que la faiblesse de l’inflation convaincrait la Réserve fédérale (Fed) de faire une longue pause dans son resserrement monétaire et anticipait que le taux effectif des fonds fédéraux dépasserait à peine 1,40 % à la fin de 2018 (graphique 10).

Les dirigeants de la Fed n’ont toutefois fait preuve d’aucune hésitation à poursuivre leur resserrement monétaire durant l’automne et ils qualifient même maintenant la croissance

américaine de solide. Les baisses d’impôts représentent une raison de plus d’être convaincu que la remontée graduelle des taux directeurs américaine se poursuivra en 2018. Tout indique que l’arrivée du nouveau président de la Fed, Jerome Powell, qui a officiellement remplacé Janet Yellen au début février, aura très peu d’impact sur l’évolution à court terme de la politique monétaire alors qu’il semble partager le consensus des autres dirigeants. Dans ce contexte, les attentes des investisseurs sont ainsi revenues beaucoup plus près des prévisions médianes des dirigeants de la Fed qui laissent entrevoir trois hausses de 0,25 % des taux cibles des fonds fédéraux en 2018, suivies de deux autres en 2019.

La chute soudaine des Bourses américaines au début de février a aussi démontré qu’il ne fallait plus s’attendre à voir les banques centrales changer leur discours dès qu’un risque apparaît ou que les Bourses connaissent quelques difficultés. Les autorités monétaires sont bien conscientes que la volatilité sur plusieurs marchés a été étrangement basse en 2017 et que le prix de plusieurs actifs financiers est actuellement très élevé. À moins qu’un choc financier n’affecte les perspectives économiques de façon durable, il faut ainsi prévoir que l’évolution des Bourses aura peu d’impact sur les prochaines décisions des banques centrales et sur le marché obligataire.

La question est maintenant de savoir si la Fed pourrait accélérer le rythme, en particulier en signalant dès la rencontre de mars qu’il faut prévoir quatre hausses des taux directeurs en 2018. À première vue, le contexte économique pourrait clairement justifier un tel signal. Il faut toutefois être conscient que, jusqu’à maintenant, c’est principalement la faiblesse persistante de l’inflation qui a préoccupé les dirigeants de la Fed. L’accélération des salaires dans les dernières statistiques d’emplois n’est qu’un chiffre parmi plusieurs autres (voir page 3) et pour le moment rien n’indique que l’économie américaine fait face à de fortes pressions inflationnistes. Il faut aussi se rappeler que les prévisions des dirigeants de la Fed laissent entrevoir que le taux neutre d’équilibre est seulement d’environ 2,75 % et que

Marché des titres à revenu fixeLe risque d’une poussée supplémentaire des taux semble assez limité

PRÉVISIONSAprès le récent ajustement, les niveaux des taux obligataires américains nous paraissent appropriés par rapport à l’environnement économique et financier. La poursuite d’un resserrement graduel de la politique monétaire américaine devrait amener les taux de deux ans et de dix ans respectivement aux environs de 2,60 % et de 3,20 % à la fin de 2018.

Nous continuons d’anticiper que l’évolution des taux obligataires au Canada sera similaire à celle observée aux États-Unis. Le taux canadien de dix ans devrait ainsi terminer l’année aux environs de 2,75 %. Le risque d’un élargissement significatif des écarts de taux entre les États-Unis et le Canada nous paraît toutefois plus élevé que la probabilité d’une forte réduction de ces écarts.

GRAPHIQUE 10 La Réserve fédérale a regagné beaucoup de crédibilité au cours des derniers mois

Sources: Datastream, Bloomberg et Desjardins, Études économiques

Fonds fédéraux effectifs

En %

0,00

0,50

1,00

1,50

2,00

2,50

3,00

2015 2016 2017 2018 2019 2020

Prévisions médianes des dirigeants de la Réserve fédérale

Taux implicite selon les contrats à terme

Au début septembre

Aujourd’hui

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7FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

ÉTUDES ÉCONOMIQUES

plusieurs jugent que le taux neutre de court terme est encore plus bas. Dans ce contexte, une accélération du resserrement monétaire ne serait appropriée que si la Fed juge nécessaire de mettre rapidement en place une politique monétaire restrictive. À notre avis, elle sera patiente avant de franchir ce pas, attendant au moins d’être convaincue que le déflateur des dépenses de consommation remontera durablement au-dessus de la cible de 2 % (graphique 11).

En décomposant le taux américain de dix ans entre sa partie réelle et la compensation pour l’inflation, on voit que l’augmentation récente s’est appuyée sur les deux composantes (graphique 12). D’autres remontées graduelles, mais limitées, des taux réels sont à prévoir au cours des prochains trimestres alors que le resserrement de la politique monétaire se poursuivra. L’augmentation des anticipations d’inflation pourrait toutefois tirer à sa fin si, comme nous le prévoyons, l’inflation se stabilise aux environs de 2 %.

Un risque pour le marché obligataire serait une remontée importante de la prime du terme qui refléterait un désir accru des investisseurs d’être compensés pour les risques liés à la détention d’une obligation de long terme. Cette prime a fortement reculé

l’an dernier, descendant significativement au-dessous de zéro, et une légère remontée a été observée récemment (graphique 13). La forte augmentation des déficits américains et la réduction de la détention d’obligations par les banques centrales pourraient certainement justifier d’autres hausses de la prime du terme, surtout dans un contexte de volatilité accrue sur les marchés. Cependant, dans un monde de taux obligataires extrêmement bas au niveau international, il y a peu de risques de voir la prime du terme aux États-Unis exploser pour retourner rapidement près des niveaux qui prévalaient il y a quelques années. L’appétit de plusieurs investisseurs pour des titres offrant un rendement supérieur à l’inflation devrait aussi limiter la hausse de la prime du terme.

OBLIGATIONS FÉDÉRALES CANADIENNES

Les taux obligataires canadiens ont aussi fortement augmenté depuis la mi-décembre (graphique 14). Les nombreuses hésitations exprimées par les dirigeants de la Banque du Canada (BdC) au courant de l’automne avaient convaincu les investisseurs que le resserrement monétaire débuté à l’été 2017 avait fait place à une longue période de pause, ramenant le taux canadien de dix ans aux environs de 1,85 %. Le

GRAPHIQUE 11 L’inflation demeure faible aux États-Unis

Sources : Bureau of Economic Analysis et Desjardins, Études économiques

Déflateur des dépenses de consommation

Variation annuelle en %

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017

Total Excluant aliments et essenceGRAPHIQUE 13 Une remontée graduelle et limitée de la prime du terme semble plus probable qu’une explosion dans le contexte actuel

Sources : Réserve fédérale et Desjardins, Études économiques

Prime du terme d’une obligation américaine fédérale de dix ans

En %

-1

0

1

2

3

4

5

6

1962 1967 1972 1977 1982 1987 1992 1997 2002 2007 2012 2017

GRAPHIQUE 12 La compensation pour l’inflation sur les obligations américaines de dix ans se situe à un niveau relativement normal

TIPS : Treasury Inflation Protected Securities Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

Obligations fédérales américaines

En %

-1

0

1

2

3

4

5

6

2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018

Taux nominal de dix ansTaux réel de dix ansInflation anticipée selon les TIPS GRAPHIQUE 14

Après une pause automnale, les taux obligataire canadiens ont recommencé à augmenter

Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

En %

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

JANV. AVR. JUIL. OCT. JANV. AVR. JUIL. OCT. JANV.

2 ans 10 ans

2016 2017

Taux des obligations fédérales canadiennes

2018

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES

8FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

des niveaux actuels. Il y a toutefois un risque significatif que ces écarts se creusent vers la mi-année si la Fed signalait son intention d’accélérer son resserrement monétaire, une décision que n’imiterait pas nécessairement la BdC.

Les titres corporatifs et provinciaux canadiens n’ont pas été épargnés par la forte augmentation des taux d’intérêt des derniers mois. Ils ont tout de même bien performé d’un point de vue relatif, alors que les écarts de crédit ont continué de reculer jusqu’à tout récemment (graphique 15). La remontée des primes lors de la chute boursière du début février a été relativement contenue. La forte tendance baissière des écarts de crédit combinée à l’aplanissement de la courbe de rendement ont permis à l’indice Univers obligataire FTSE/TMX Canada d’afficher un rendement intéressant de 2,5 % pour l’ensemble de 2017, malgré l’amorce surprise d’un resserrement monétaire au pays. Le contexte économique solide devrait favoriser le maintien de primes de crédit relativement faibles cette année. Étant donné le niveau extrêmement bas des primes de crédit et la remontée de la volatilité, même sur le marché obligataire (graphique 16), il ne faut toutefois pas s’attendre à observer une nouvelle baisse importante des écarts de crédit.

marché avait ignoré le ton généralement positif du communiqué de la rencontre du début décembre en interprétant la mention de circonspection (cautious en anglais) comme un signal que le statu quo se poursuivrait. Le gouverneur Poloz a toutefois prononcé un discours plus positif à la mi-décembre qui, entre autres, niait la notion que l’utilisation du terme circonspection signalait une politique monétaire inchangée. Il comparait ainsi la notion de prudence pour une banque centrale à la conduite automobile plus lente et attentive dans une tempête de neige. De nombreuses statistiques économiques canadiennes très fortes, dont une poussée spectaculaire de l’emploi à la fin de 2017 et une enquête auprès des entreprises encourageante pour l’investissement et signalant des capacités excédentaires pratiquement épuisées, ont fini de convaincre les investisseurs que le resserrement monétaire se poursuivrait au commencement de 2018.

La BdC a ainsi annoncé une troisième hausse de 0,25 % de ses taux directeurs le 17 janvier dernier. De plus, elle a ajusté la conclusion de son communiqué d’une façon qui signale plus clairement que d’autres augmentations sont à prévoir. En décembre, elle écrivait : « Quoique des taux d’intérêt plus élevés soient probablement nécessaires avec le temps […] », alors qu’en janvier elle notait : « Quoique l’on s’attende à ce que les perspectives économiques justifient des taux d’intérêt plus élevés avec le temps, il sera probablement nécessaire de maintenir un certain degré de détente monétaire […] ». La BdC jugeant que son taux directeur neutre se situe entre 2,50 % et 3,50 %, la nouvelle mention semble indiquer que d’autres hausses de taux sont à prévoir. Les dernières prévisions de la BdC faisant état d’une croissance solide à la fin de 2017 et au premier trimestre de 2018, nous croyons maintenant que, si les risques, particulièrement ceux liés aux renégociations de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), n’augmentent pas trop, une nouvelle hausse des taux directeurs canadiens devrait être annoncée dès la rencontre d’avril. Notons toutefois que la BdC signale qu’elle continuera d’agir de façon prudente et que sa politique monétaire demeurera fortement influencée par les statistiques économiques.

Comme aux États-Unis, nous anticipons ainsi une hausse graduelle des taux directeurs canadiens au cours des prochains trimestres. Les gestes de la BdC demeureront plus difficiles à prévoir que ceux de la Fed, étant donné la réticence des autorités monétaires canadiennes à utiliser des indications prospectives. Cela pourrait encore entraîner une certaine volatilité sur le marché canadien cette année. On peut toutefois penser que la BdC tentera de limiter cette volatilité, entre autres en modifiant sa politique monétaire seulement lors de la rencontre trimestrielle qui s’accompagne d’un Rapport sur la politique monétaire. Deux autres hausses de 0,25 % des taux directeurs pourraient ainsi être décrétées cette année, soit en avril et en octobre. L’évolution similaire des politiques monétaires des deux côtés de la frontière laisse entrevoir que les écarts entre les taux obligataires américains et canadiens devraient demeurer près

GRAPHIQUE 15 Il serait surprenant que les écarts de crédit descendent beaucoup plus bas

Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

Écart de rendement par rapport à l’indice obligataire fédéral FTSE TMX Canada

En %

0,50

0,70

0,90

1,10

1,30

1,50

1,70

1,90

2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

Obligations corporativesObligations provinciales

GRAPHIQUE 16 La volatilité devrait demeurer plus élevée sur les marchés qu’en 2017

Sources : Datastream et Desjardins, Études économiques

Indices de volatilité

Indice

40

60

80

100

120

5

10

15

20

25

30

35

40

JANV. AVR. JUIL. OCT. JANV. AVR. JUIL. OCT. JANV.

Marché boursier – VIX (gauche) Marché obligataire – MOVE (droite)

Indice

2016 2017 2018

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9FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

ÉTUDES ÉCONOMIQUES

T1 T2 T3 T4 T1p T2p T3p T4p T1p T2p T3p T4p

États-UnisFonds fédéraux 1,00 1,25 1,25 1,50 1,75 2,00 2,00 2,25 2,50 2,50 2,75 2,75

CanadaTaux des fonds à un jour 0,50 0,50 1,00 1,00 1,25 1,50 1,50 1,75 2,00 2,00 2,25 2,25

Zone euroTaux de refinancement 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,05 0,25 0,25 0,50

Royaume-UniTaux de base 0,25 0,25 0,25 0,50 0,50 0,75 0,75 0,75 0,75 0,75 0,75 0,75

JaponPrincipal taux directeur -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10 -0,10

p : prévisionsSources : Datastream et Desjardins, Études économiques

TABLEAU 1Taux d'intérêt directeurs

FIN DE PÉRIODE EN %

2017 2018 2019

T1 T2 T3 T4 T1p T2p T3p T4p T1p T2p T3p T4p

ÉTATS-UNISBons du Trésor

3 mois 0,76 1,03 1,06 1,39 1,65 1,80 1,85 2,10 2,30 2,35 2,55 2,60Obligations fédérales

2 ans 1,24 1,37 1,49 1,88 2,20 2,30 2,40 2,60 2,70 2,80 2,90 3,005 ans 1,92 1,88 1,92 2,19 2,60 2,70 2,80 2,95 3,05 3,10 3,15 3,2010 ans 2,40 2,30 2,33 2,41 2,90 3,00 3,05 3,20 3,25 3,30 3,35 3,4030 ans 3,02 2,84 2,86 2,74 3,20 3,30 3,35 3,50 3,55 3,60 3,65 3,70

Pentes5 ans - 3 mois 1,16 0,85 0,86 0,80 0,95 0,90 0,95 0,85 0,75 0,75 0,60 0,6010 ans - 2 ans 1,16 0,93 0,84 0,53 0,70 0,70 0,65 0,60 0,55 0,50 0,45 0,4030 ans - 3 mois 2,26 1,81 1,80 1,35 1,55 1,50 1,50 1,40 1,25 1,25 1,10 1,10

CANADABons du Trésor

3 mois 0,52 0,71 1,00 1,06 1,30 1,50 1,55 1,80 2,00 2,05 2,25 2,25Obligations fédérales

2 ans 0,75 1,10 1,52 1,69 1,90 2,05 2,15 2,35 2,45 2,55 2,60 2,655 ans 1,12 1,40 1,75 1,87 2,15 2,30 2,40 2,55 2,65 2,70 2,75 2,8010 ans 1,62 1,77 2,10 2,04 2,40 2,55 2,60 2,75 2,80 2,85 2,90 2,9530 ans 2,30 2,15 2,47 2,26 2,55 2,70 2,80 2,95 3,00 3,05 3,10 3,15

Pentes5 ans - 3 mois 0,60 0,69 0,75 0,81 0,85 0,80 0,85 0,75 0,65 0,65 0,50 0,5510 ans - 2 ans 0,88 0,67 0,58 0,36 0,50 0,50 0,45 0,40 0,35 0,30 0,30 0,3030 ans - 3 mois 1,78 1,44 1,47 1,20 1,25 1,20 1,25 1,15 1,00 1,00 0,85 0,90

Écarts de taux (Canada–États-Unis)3 mois -0,24 -0,32 -0,06 -0,33 -0,35 -0,30 -0,30 -0,30 -0,30 -0,30 -0,30 -0,352 ans -0,49 -0,27 0,03 -0,20 -0,30 -0,25 -0,25 -0,25 -0,25 -0,25 -0,30 -0,355 ans -0,80 -0,48 -0,17 -0,32 -0,45 -0,40 -0,40 -0,40 -0,40 -0,40 -0,40 -0,4010 ans -0,77 -0,53 -0,23 -0,37 -0,50 -0,45 -0,45 -0,45 -0,45 -0,45 -0,45 -0,4530 ans -0,71 -0,69 -0,38 -0,48 -0,65 -0,60 -0,55 -0,55 -0,55 -0,55 -0,55 -0,55

p : prévisionsSources : Datastream et Desjardins, Études économiques

TABLEAU 2Marché des titres à revenu fixe

FIN DE PÉRIODE EN %

2017 2018 2019

Page 10: Retour à la réalité pour le marché obligataire · même semblé saisir le marché obligataire le 2 février lorsque les données américaines sur le marché du travail ont fait

ÉTUDES ÉCONOMIQUES

10FÉVRIER 2018 | LA COURBE DE RENDEMENT

Date Banques centrales Décision Taux

17 Banque de Corée s.q. 1,5017 Banque du Canada +25 p.b. 1,2522 Banque du Japon s.q. -0,1025 Banque centrale européenne s.q. 0,0025 Banque de Norvège s.q. 0,5031 Réserve fédérale s.q. 1,50

5 Banque de réserve d'Australie s.q. 1,507 Banque du Brésil -25 p.b. 6,758 Banque d'Angleterre s.q. 0,508 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande s.q. 1,758 Banque du Mexique +25 p.b. 7,50

14 Banque de Suède26 Banque de Corée

5 Banque de réserve d'Australie7 Banque du Canada8 Banque centrale européenne8 Banque du Japon

15 Banque de Norvège21 Banque du Brésil21 Réserve fédérale22 Banque d'Angleterre22 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande22 Banque nationale suisse

3 Banque de réserve d'Australie11 Banque de Corée12 Banque du Mexique18 Banque du Canada25 Banque de Suède26 Banque centrale européenne26 Banque du Japon

1 Banque de réserve d'Australie2 Réserve fédérale3 Banque de Norvège

10 Banque d'Angleterre10 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande16 Banque du Brésil17 Banque du Mexique23 Banque de Corée30 Banque du Canada

5 Banque de réserve d'Australie13 Réserve fédérale14 Banque centrale européenne14 Banque du Japon20 Banque du Brésil21 Banque d'Angleterre21 Banque de Norvège21 Banque du Mexique21 Banque nationale suisse28 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande

EMPTY

Janvier

Février

Mars

Avril

Mai

Juin

Calendrier 2018 des réunions des banques centralesDate Banques centrales Décision Taux

2 Banque de Suède3 Banque de réserve d'Australie

11 Banque de Corée11 Banque du Canada26 Banque centrale européenne30 Banque du Japon

1 Banque du Brésil1 Réserve fédérale2 Banque d'Angleterre2 Banque du Mexique7 Banque de réserve d'Australie9 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande

16 Banque de Norvège30 Banque de Corée

4 Banque de réserve d'Australie5 Banque du Canada

13 Banque centrale européenne13 Banque d'Angleterre18 Banque du Japon19 Banque du Brésil20 Banque de Norvège20 Banque nationale suisse26 Réserve fédérale27 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande

* Banque de Suède

2 Banque de réserve d'Australie4 Banque du Mexique

17 Banque de Corée24 Banque du Canada25 Banque centrale européenne25 Banque de Norvège30 Banque du Japon31 Banque du Brésil* Banque de Suède

5 Banque de réserve d'Australie8 Banque d'Angleterre8 Banque de réserve de Nouvelle-Zélande8 Réserve fédérale

15 Banque du Mexique29 Banque de Corée

3 Banque de réserve d'Australie5 Banque du Canada

12 Banque du Brésil13 Banque centrale européenne13 Banque de Norvège13 Banque nationale suisse19 Banque du Japon19 Réserve fédérale20 Banque d'Angleterre20 Banque du Mexique

* Banque de Suède

Juillet

Août

Septembre

Octobre

Novembre

Décembre

NOTE AUX LECTEURS : Certaines banques peuvent décider de modifier les taux entre les réunions prévues. Les simplifications s.q. et p.b. correspondent respectivement à statu quo et points de base. * Dates à venir.