Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les...

30
Février 2017 Responsabilité des entreprises et droits de l’homme dans un monde en mutation Engagements et actions des entreprises en faveur des droits de l’homme : analyse des enjeux-clés

Transcript of Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les...

Page 1: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

Février 2017

Responsabilité des entreprises et droits de l’homme dans un monde en mutation

Engagements et actions des entreprises en faveur des droits de l’homme : analyse des enjeux-clés

Page 2: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

Sommaire

Introduction 3

Principaux constats 6

Contexte 8

Aperçu des performances des entreprises sur la thématique des droits de l’homme

� Observations générales 9

� Hétérogénéité des approches des entreprises en matière de droits de l’homme 11

� Disparités géographiques 15

� Spécificités sectorielles 15

� Cartographie des controverses 17

� Classement des entreprises : 30 meilleures performances 18

Exemples de bonnes pratiques 20

Exemples de controverses 23

Conclusion 26

Page 3: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

3

Introduction

Fouad Benseddik

Directeur des Méthodes et des Relations

Institutionnelles

Cette nouvelle étude de Vigeo Eiris est issue de notre méthodologie exclusive d’analyse et de notation, Equitics© développée en 2003. Elle porte sur près de 3200 entreprises cotées dans 35 pays.

Nous considérons que le respect, la promotion des droits de l’homme, tels qu’ils sont définis par les standards internationaux1, ainsi que la prévention de leurs violations (par omission, négligence ou complicité), sont au cœur de la responsabilité sociale des entreprises. Ce postulat a été réaffirmé par les ‘Principes Directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme’, entérinés par les résolutions du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies du 6 juillet 2011 et du 27 juin 20142.

La prise en compte des droits humains fondamentaux concerne toutes les entreprises et l’ensemble de leur chaîne de valeur, de leur maisons-mères à leurs filiales en passant par leurs sous-traitants, ainsi que les apporteurs de capitaux, investisseurs et gestionnaires d’actifs. Chaque échelon, qu‘il s’agisse du conseil d’administration, du département juridique, des structures en charge du capital humain, des achats, des questions relatives au développement durable ou de la communication, est concerné par l’intégration du respect des droits de l’homme à la stratégie de l’entreprise, et dans ses opérations..

Le respect des droits de l’homme n’est pas optionnel. Il constitue, en effet une responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du respect des droits de l’homme dans sa stratégie et ses opérations peut avoir un impact significatif sur sa sécurité juridique et sur sa capacité à maîtriser les risques qui peuvent affecter sa réputation, la cohésion de son capital humain et son efficacité opérationnelle. La considération stratégique et opérationnelle portée au respect des droits de l’homme peut considérablement impacter la capacité d’une entreprise à protéger et développer son capital immatériel et à créer de la valeur de façon acceptable et durable.

Un des enjeux pour l’acceptabilité sociale de la mondialisation, et qui est paradoxalement un des moins étudiés, concerne l’engagement des entreprises à rendre compte de leurs politiques, de leurs risques et de leurs progrès en matière de droits humains. La mondialisation représente une opportunité sans précédent d’universaliser le respect des droits humains fondamentaux et leur application sur les lieux de travail et dans la société au sens large. En revanche, leur méconnaissance peut non seulement menacer la cohésion sociale interne des nations mais aussi mettre en péril le soutien des opinions publiques à la globalisation de l’économie et leur confiance dans les entreprises.

Cette étude évalue le degré d’engagement des entreprises cotées à travers le monde et leurs actions en faveur de la protection des droits humains

1 Les résolutions 17/4 du 6 juillet 2011 (A/HRC/RES/17/4) et 26/22 du 15 juillet 2014 (A/HRC/26/ L.1) du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU

2 Les résolutions 17/4 du 6 juillet 2011 (A/HRC/RES/17/4) et 26/22 du 15 juillet 2014 (A/HRC/26/ L.1) du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU

Page 4: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

4

fondamentaux3 , des droits du travail4, et de la non-discrimination des salariés, dans leurs opérations et à travers leur chaîne d’approvisionnement. Elle identifie les firmes les plus engagées dans chacune des catégories de droits sous revue. Cette recherche met en relief les bonnes pratiques observées, et illustre l’importance de l’adoption d’une approche stratégique qui s’appuie sur des processus managériaux clairement définis. Elle souligne également des disparités régionales et spécificités sectorielles. De plus, elle rend compte des risques d’impacts négatifs sur l’image, sur l’organisation, sur les opérations, et sur la sécurité juridique d’une entreprise quand celle-ci néglige les droits de l’homme. Il apparaît en effet que plus d’une entreprise multinationale sur cinq fait face à au moins une allégation (accusations, campagne ou procédure judiciaire) liée au non-respect des droits de l’homme.

Les droits de l’homme ne sont pas une notion abstraite. D’un point de vue managérial, les droits humains représentent tout, à la fois, un risque matériel et un vecteur de progrès pour sauvegarder et améliorer en continu la performance des entreprises, ainsi que pour donner un sens et un contenu positifs à la mondialisation.

3 Tel que le droit à l’égalité et à la dignité ; le droit à la sécurité ; la prévention de la torture et tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant ; la liberté de religion, d’opinion et d’expression ; le droit à la vie privée : les droits des peuples autochtones par exemple.

4 Tel que le respect de la liberté syndicale et du droit à la négociation collective.

Page 5: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

5

Les entreprises doivent rendre compte de leurs engagements en faveur du respect de tous les droits de l’homme sans exception, tels que définis dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, les Conventions et Recommandations de l’OIT, ainsi que des textes plus récents comme les Principes Directeur de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme entérinés par les résolutions du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies de juin 2011.

Cette étude met l’accent sur l’analyse des quatre facteurs de responsabilité sociale suivants :

� La prévention des violations, le respect et la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales : droit à l’égalité et à la dignité, droit à la sécurité, droit à la vie, droit de propriété, droit à la liberté d’expression, liberté d’opinion, prévention contre la torture et autres traitements inhumains, cruels, et dégradants, droits des populations indigènes, etc.

� La prévention des violations, le respect et la promotion de la liberté syndicale et du droit à la négociation collective : prévention des abus, non-discrimination à l’encontre des salariés syndiqués, facilitation de l’exercice de leur droits, délivrance de l’information nécessaire aux représentants du personnel, respect du droit de grève.

� L’interdiction et la prévention de toute forme de discrimination sur le lieu de travail et la promotion de la diversité : formulation d’engagements clairs et d’objectifs pour accroître la diversité, identification des catégories d’employés les plus vulnérables et des principaux facteurs de risques, prévention et sensibilisation, promotion active de la diversité, mise en place d’un système de plaintes et mesures disciplinaires le cas échéant, collecte d’indicateurs chiffrés.

� La prévention des violations et la prise en compte du respect des droits de l’homme par les fournisseurs et sous-traitants : prévention, évaluation des risques concernant le travail des enfants, le travail forcé, non-discrimination, les questions de santé et de sécurité, des salaires décents, des heures de travail, etc., et promouvoir l’amélioration de leur performance en ce sens (support, formation).

Page 6: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

6

Principaux constatsLe score mondial moyen issu de la notation par Vigeo Eiris de près de 3200 entreprises multinationales en matière de respect des droits humains est de 32 (sur une échelle de 0 à 100). Il est inférieur au score moyen issu de la précédente étude publiée par Vigeo en 2012, qui était de 37/100. Cette baisse s’explique, d’une part, par la stagnation des engagements des entreprises cotées dans les pays industrialisés, et, d’autre part, par l’intégration à l’univers sous revue d’entreprises aux performances moins avancées, généralement cotées sur les marchés de pays émergents.

Moins de 4% des entreprises (3,66%) affichent des engagements couvrant l’ensemble des catégories de droits de l’homme relevant directement de leur responsabilité, telles que définies par les conventions des Nations-Unies, les ‘Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme’ approuvés par le Conseil des Droits de l’homme des Nations-Unis dans sa résolution 17/4 du 16 juin 2011, les Conventions de l’OIT, et les principes directeurs de l’OCDE de 2011.

Comme dans notre étude de 20121, la thématique des droits de l’homme arrive en troisième position des thématiques ESG sur lesquelles les entreprises rapportent le plus, après les questions de gouvernance et de comportement sur les marchés, mais devant les questions environnementales, sociétales et de ressources humaines.

Les scores moyens obtenus sur chacun des quatre thèmes sous revue varient de 29/100 à 35/100. Comme en 2012, la ‘liberté syndicale et le droit de négociation collective’ est le thème sur lequel les entreprises s’engagent et communiquent le moins.

Les entreprises choisissent, sur un mode défensif, les catégories de droits sur lesquelles elles s’engagent :

� Les trois-quarts (73%) des entreprises notées formulent des engagements détaillés et exhaustifs en faveur de la non-discrimination de leurs salariés. Parmi les motifs de discrimination qu’elles entendent combattre, elles mettent en avant les discriminations liées au genre, à la nationalité, à la religion, à l’âge ou au handicap.

� La moitié des entreprises (50%) affirme s’engager à respecter les droits des travailleurs leur chaîne d’approvisionnement, et citent le plus fréquemment la santé et la sécurité au travail , l’élimination du travail des enfants, la prohibition du travail forcé et la non-discrimination des salariés.

� Moins de la moitié des entreprises (47%) s’engage à respecter les droits fondamentaux de la personne : le droit à la vie privée est le plus souvent cité (52%); à l’inverse le droit à la sécurité des personnes, les droits des peuples indigènes ou la liberté d’expression sont les moins fréquemment mentionnés.

� Seules 16% des entreprises s’engagent à respecter la liberté syndicale et le droit de négociation collective; et parmi elles peu affirment agir contre la discrimination à l’encontre des travailleurs syndiqués ou s’assurer que les travailleurs peuvent exercer leurs droits de représentation de façon effective.

1 http://www.vigeo-eiris.com/en/2012/09/03/what-measures-are-listed-companies-taking-to-protect-respect-and-promote-human-rights/

Page 7: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

7

L’examen détaillé des scores révèle des comportements contrastés selon les régions, les pays et les secteurs :

� Neuf des dix pays où les entreprises affichent les meilleurs scores sont des pays européens :

� La France (48/100) se situe en pôle position, suivie de la Suède (42/100), de l’Espagne (41/100), de la Finlande (39/100) et du Danemark (39/100).

� A l’inverse, les pays où les entreprises enregistrent les scores les plus faibles sont majoritairement des pays considérés comme émergents, avec des systèmes législatifs et des contrôles réglementaires moins protecteurs des droits fondamentaux au travail

� Parmi les 30 entreprises affichant les performances les plus avancées sur les thématiques de droits de l’homme, 29 sont européennes (96,6%), contre 24 en 2012 (80%)

� Le groupe des entreprises réalisant les performances les plus avancées est hétérogène : on y trouve des banques de développement qui, dans leur activité de financement de projet, se basent sur un référentiel de prévention et d’évaluation de risques des violations des droits humains, et des entreprises qui, en raison de la nature de leurs activités et de leurs produits, et de la complexité de leur chaîne d’approvisionnement, sont fortement surveillées et exposées à l’intervention des organisations syndicales et/ou des associations de consommateurs ou de la société civile au sens large: c’est le cas des entreprises du secteur du luxe et des cosmétiques, de l’édition, du secteur forestier, et du secteur des mines et de la métallurgie.

Comme en 2012, plus de 20% des entreprises sous revue ont fait l’objet d’au moins une controverse (critique, allégation, procédure judicaire, condamnation etc.) :

� Le degré de sévérité de ces controverses est considéré comme ‘élevé’ ou ‘critique’ pour un tiers d’entre elles.

� Dans 43% des cas, les entreprises n’ont manifesté aucune réaction. A l’inverse, elles se sont montrées proactives en adoptant des mesures correctrices permanentes et en dialoguant avec des parties prenantes dans 3% des cas.

� Les secteurs faisant face au plus grand nombre d’allégations sont les banques, le secteur alimentaire et les entreprises minières et métallurgiques.

� Dans un tiers de cas, les faits répertoriés se sont déroulés aux Etats-Unis, où les cas d’abus sont plus volontiers traduits devant les tribunaux.

Page 8: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

8

ContexteLes Principes Directeur de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme de 2011 réaffirment la responsabilité, qui incombe aux entreprises de procéder à des diligences raisonnables en matière de droits de l’homme, de même que les 17 Objectifs du Développement Durable1 adoptés au Sommet de l’ONU en septembre 2015, et entrés en vigueur le 1er janvier 2016, s’adressent directement aux entreprises.

Au niveau national, plusieurs Etats mettent en place des législations spécifiques obligeant les entreprises à rendre compte de leurs engagements en matière de droits de l’homme. En mars 2015, le Royaume-Uni a adopté sa Loi sur l’Esclavage Moderne2. En France, le Parlement a adopté le 21 février 2017 la loi sur le Devoir de Vigilance3 pour les entreprises multinationales employant plus de 5000 salariés en France et 10 000 salariés à l’étranger. Cette loi institue l’obligation d’un devoir de diligence permettant de prévenir les impacts négatifs qu’elles peuvent avoir sur les droits de l’homme dans leurs chaînes d’approvisionnement. En décembre 2016, les Etats-Unis ont lancé un plan d’action national sur la conduite responsable des entreprises (Responsible Business Conduct), axé sur les thématiques de la transparence, de la corruption, des droits de l’homme, droits des populations indigènes, droits des travailleurs, et droits à la propriété pour les entreprises opérant à l’étranger.

De nombreuses initiatives sectorielles (ex : ‘Voluntary Principles4 on Security and Human Rights’ pour les entreprises de l’industrie extractive, ou la ‘Electronics Industry Citizenship Coalition’ dans la chaîne d’approvisionnement des entreprises du secteur électronique, etc.) ont vu le jour pour répondre aux défis en matière de droits de l’homme.

Parmi elles, lancé en 2014, le Corporate Human Rights Benchmark (CHRB5) qui est une coalition multi parties prenantes constituée de 8 organisations. La méthodologie du CHRB est le résultat d’une vaste consultation de deux ans, réalisée dans le monde entier auprès de nombreuses parties prenantes : des représentants de 400 entreprises, gouvernements, organisations de la société civile, investisseurs, académiques et experts juridiques. Les résultats du premier benchmark du CHRB seront dévoilés en mars 2017. Vigeo Eiris a fourni la recherche pour élaborer ce benchmark, issu de la méthodologie spécifique au CHRB.

On note une attention croissante des acteurs de la société civile et des ONG (ex : Business and Human rights, Oxfam6, Friends7 of the Earth, etc) à l’égard des entreprises.

Plusieurs réseaux d’affaires aident les entreprises à gérer les enjeux liés au respect des droits de l’homme, tels que le Danish Institute for Human Rights8, la Global Business Initiative9 on Human Rights, ou the Institute for Human Rights & Business10 or Shift11.

Enfin, les entreprises reçoivent une attention grandissante de la part des investisseurs,

1 http://www.un.org/sustainabledevelopment/sustainable-development-goals/

2 http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2015/30/contents/enaced

3 “Sous-traitance” : la loi sur le “devoir de vigilance’ des entreprises adoptée” - Le Figaro - 21/02/2017

4 http://www.voluntaryprinciples.org/

5 https://business-humanrights.org/en/corporate-human-rights-benchmark

6 https://www.oxfam.org/en/our-commitment-human-rights

7 http://www.foeeurope.org/

8 https://www.humanrights.dk/

9 http://www.global-business-initiative.org/

10 https://www.ihrb.org/

11 http://www.shiftproject.org/

Périmètre de l’étude

3 189 entreprises cotées

38 secteurs

35 pays (en Europe, Amérique du Nord, Asie Pacifique, et dans les pays émergents)

Période d’évaluation : 09/ 2014 - 09/ 2016

Page 9: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

9

dans le cadre de leur stratégie ISR, et adoptent à cet effet diverses approches d’exclusions normatives ou éthiques, ‘best-in-class’, d’engagement avec les entreprises, de politiques de vote sur les questions ESG, ou d’investissement dans des fonds thématiques.

Aperçu des performances des entreprises en matière de droits de l’homme

Le score mondial moyen alloué par Vigeo Eiris aux entreprises multinationales sur l’ensemble du domaine relatif au respect des droits humains est de 32/100, inférieur à celui de l’étude de 2012 (37/100). Cette baisse s’explique, d’une part, par une stagnation des engagements en matière de droits de l’homme des entreprises issues de pays industrialisés. D’autre part, l’univers de notation de Vigeo Eiris intègre désormais les entreprises cotées sur les marchés des pays émergents, où les exigences règlementaires en matière de droits de l’homme sont généralement plus limitées.

Moins de 4% des entreprises (3,66%) sous revue affichent un niveau d’engagement couvrant de façon tangible l’ensemble des catégories de droits de l’homme relevant directement de ses responsabilités, telles que définies par les standards internationaux.

D’un point de vue global, le reporting des entreprises en matière de droits de l’homme est limité. L’examen détaillé des scores révèle des comportements contrastés selon les catégories de droits, les secteurs et les régions.

Parmi les six thèmes ESG du référentiel d’analyse de Vigeo Eiris, les droits de l’homme sont la troisième thématique RSE dont les entreprises rendent compte le plus, après les sujets de gouvernance et de comportement sur les marchés. La thématique des droits de l’homme reçoit davantage d’attention que les enjeux environnementaux dans leur reporting, malgré l’impact croissant du changement climatique sur les entreprises, et la transition de celles-ci vers une économie bas carbone.

Sur les quatre facteurs de durabilité sous revue, les scores moyens par catégorie de droit varient de 29/100, pour le respect des droits du travail, à 35/100, pour le respect des droits humains fondamentaux dans la société; cet intervalle de scores reflète un manque d’engagement de la part des entreprises en matière de droits de l’homme, et des efforts insuffisants dans le déploiement de processus leur permettant de limiter les risques d’abus ou de complicité.

Comme en 2012, la liberté syndicale et le droit à la négociation collective est la catégorie sur laquelle les entreprises communiquent le moins dans leurs rapports de développement durable, codes de conduite et rapports d’activité, avec un taux d’information disponible de 34%.

Le score moyen des entreprises sur le thème du respect des droits de l’homme dans la chaîne d’approvisionnement est également limité (30/100), avec un taux d’information disponible de 48%.

Page 10: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

10

35

2933

30

Human Rights

Labour Rights

Non-Discimination

Human Rights in supply chain

Perfromance par facteur de responsabilité sociale (/100)

En moyenne, la performance des entreprises en matière de respect et de promotion des droits humains fondamentaux est supérieure à celle constatée sur les autres catégories de droits de l’homme, avec un score moyen de 35/100 (toujours considéré comme «limité»), et un taux d’information disponible de 53%12.

À titre de comparaison, les entreprises semblent communiquer davantage sur le respect et la promotion de la non-discrimination et de la diversité au travail, avec un taux d’information disponible de 59% (et un score moyen de 33/100).

12 Par exemple le droit à la sécurité ; le droit à la vie privée ; la prévention de la torture et tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant ; le droit à la liberté d’expression ; les droits des populations autochtones

Page 11: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

11

Hétérogénéité des approches des entreprises en matière de

droits de l’homme

Les entreprises semblent sélectives sur les catégories de droits humains ou de droits du travail sur lesquelles elles décident de s’engager.

� C’est en faveur de la non-discrimination, que les entreprises s’engagent le plus : 84% d’entre elles font référence (11%) ou formulent des engagements détaillés et exhaustifs (73%) sur la prévention des discriminations à l’égard de ses salariés.

Parmi les motifs de discrimination que les entreprises entendent combattre, le genre (86.7%), la nationalité (82.9%), la religion (75.6%), l’âge (71.5%) et le handicap (70.0%) sont les catégories de droits que les entreprises mettent en avant au sein de leurs politiques de non-discrimination.

Non discrimination : thèmes sur lesquels les entreprises

s’engagent le plus

86,7%

82,9%

75,6%

71,5%

70,0%

58,8%

34,0%

33,4%

31,9%

28,5%

25,2%

12,4%

Genre

Race / ethnicité / nationalité

Religion

Age

Handicap

Orientation sexuelle

Discrimination dans les politiques d'emploi (recrutement / promotion / licenciement)

Responsabilités familiales (y compris concernant la grossesse)

Origine sociale

Discrimination dans les conditions de travail (temps de travail / formation /rémuneration / sécurité sociale)

Opinions politiques

Conditions médicales sensibles (ex : SIDA)

Page 12: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

12

Respect des droits humains fondamentaux : thèmes

sur lesquels les entreprises s’engagent le plus

Le respect des droits humains fondamentaux de la personne est la catégorie de droits sur laquelle les entreprises affichent le plus d’engagements après le thème de la non-discrimination. En effet, 70% des entreprises font référence (23%) ou formulent des engagements tangibles (47%) en faveur du respect des de droits de l’homme et des standards internationaux.

Le respect du droit à la vie privée est le plus souvent cité dans les engagements formulés par les 52% des entreprises qui s’engagent sur ce sujet ; les entreprises en question appartiennent principalement aux secteurs des télécommunications, de l’informatique, des matériels technologiques, de l’industrie pharmaceutique et des banques. Les entreprises concernées s’engagent aussi en faveur de la prévention des traitements cruels, inhumains ou dégradants (18.7% des entreprises) ; le droit à la sécurité personnelle (8.5%) ; et le droit à la propriété (5.6%).

Les autres thèmes mis en avant par les entreprises incluent le droit des patients au consentement libre, préalable, et informé (secteurs Pharmaceutique et Biotechnologie), le droit à la liberté d’expression (secteur de l’Edition), et la non-discrimination des clients (secteurs des Banques et des Services Financiers).

8.1% des entreprises s’engagent explicitement en faveur du respect des conventions internationales et des initiatives sectorielles en matière de droits de l’homme, et 34.5% s’engagent pour prévenir toute complicité de violation des droits de l’homme.

52,2%

34,5%

18,7%

8,1%

8,5%

7,7%

6,8%

5,6%

5,0%

4,5%

4,2%

3,5%

Respecter le droit à la vie privée

Prévenir la complicité dans les violations aux droits de l'homme

Prévenir les traitements cruels, inhumains ou dégradants

Engagé en faveur de conventions ou initiatives internationales

Droits de peuples indigènes

Respect du consentement préalable, libre et éclairé des patients

Respect du droit à la sécurité personnelle

Respect du droit à la propriété and à la réinstallation

Respect des standards en matière de droits de l'homme

Respect de la liberté d'expression

Respect du droit à la non-discrimination des clients

Prévenir les violations des droits de l'homme liées à l'utilisation des forces de sécurité

Page 13: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

13

64% des entreprises affirment respecter les droits de l’homme et du travail dans leur chaîne d’approvisionnement. Alors que 50% des entreprises affichent des engagements de principe détaillés, seules 14% font référence de façon exhaustive aux catégories de droits associées.

Les thématiques les plus fréquentes dans les engagements formulés sont : la santé et la sécurité des travailleurs (73.7%) ; l’abolition du travail des enfants (67.7%) ; la non-discrimination (64.8%) ; l’abolition du travail forcé (64.5%) ; la liberté syndicale et le droit à la négociation collective (51.0%) ; la rémunération décente (49.5%) ; et « le temps de travail décent » (45.8%).

Les droits humains dans la chaine d’approvisionnement

: thèmes sur lesquels les entreprises s’engagent le plus

73,7%

67,7%

64,8%

64,5%

51,0%

49,5%

45,8%

15,8%

35,6%

Santé et Sécurité

Abolition du travail des enfants

Non-discrimination

Abolition du travail forcé

Liberté syndicale et droit à la négociation collective

Salaires décents

Horaires de travail décents

Approvisionnement responsable (de minerais et/ou à partir de zones de conflit)

Autres droits (ex : interdiction de travail sous conditions illégales avec un focus sur lestravailleurs migrants, prévention du traitement cruel, dégradant et inhumain, etc.)

Page 14: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

14

Les droits des travailleurs : thèmes sur lesquels les

entreprises s’engagent le plus

48% des entreprises évoquent en termes généraux « le respect des droits des travailleurs », mais elles ne sont que 16% à se référer explicitement à la liberté syndicale et au droit à la négociation collective.

Parmi les entreprises qui rendent compte de leurs engagements sur cette thématique en faveur de la liberté syndicale et du droit à la négociation collective :

� Près d’un tiers (29.5%) mentionne explicitement les conventions C87, C98, et C135 de l’OIT

� 22.2% des entreprises s’engagent pour la prévention des discriminations commises à l’encontre des représentants des employés

� 14.9% des entreprises s’engagent à informer ses salariés, et à leur permettre d’exercer leurs droits dans des conditions adéquates

Concernant les efforts réalisés par les entreprises dans la prévention des violations et la promotion des droits de l’homme :

� 67% des entreprises communiquent sur les mesures mises en place pour combattre la discrimination ;

� 48% des entreprises décrivent des processus en place permettant l’intégration des thématiques relatives aux droits de l’homme dans leur chaîne d’approvisionnement ;

� 37% rendent compte des mesures liées au respect des droits de l’homme dans la société ;

� 10% communiquent sur les mesures prises en faveur du respect de la liberté syndicale et du droit à la négociation collective des travailleurs

� Les mesures décrites portent le plus souvent sur la cartographie des risques, ou des initiatives de sensibilisation.

On observe le développement de mesures proactives parmi les entreprises issues de secteurs particulièrement exposés à des risques d’abus ou de violations des droits de l’homme (notamment dans les secteurs des mines et de la métallurgie, forestier, du tabac, du luxe et des cosmétiques, de l’édition, ou des télécommunications). Ces secteurs ont mis en place des initiatives et outils permettant aux entreprises d’exercer leur contrôle (due diligence) afin d’évaluer, prévenir et remédier aux violations en matière de droits de l’homme.

100%

100%

29,5%

25,1%

22,2%

14,9%

Respect et protection de la liberté syndicale

Respect et protection du droit à la négociation collective

Soutien explicite aux Conventions C87, C98, et C135 de l'OIT, ou textesinternationaux similaires sur les droits syndicaux

Respect et protection des représentants de salariés pendant l'exercice de leur mandat

Prévenir la discrimination des représentants des employés

Garantir l'exercice effectif des droits syndicaux sur le lieu de travail

Page 15: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

15

Disparités géographiques et classement par pays Neuf des dix pays où les entreprises recueillent les meilleurs scores sont des pays européens.

La France arrive en tête du classement en matière de respect des droits de l’homme au sens large. Cette avance était observable avant même l’instauration des obligations juridiques en termes de reporting social et environnemental depuis la loi Grenelle II (2010). Les protections des droits des travailleurs et du droit syndical, issues du droit social français, expliquent ce positionnement avancé.

Parmi les 10 des pays dont les entreprises recueillent les scores les plus élevées, les pays nordiques (Suède, Finlande, Danemark, Norvège) sont leaders, en même temps que l’Espagne, les Pays Bas, l’Allemagne, l’Italie, et le Royaume-Uni. Ces pays ont des législations protectrices et un cadre juridique en conformité avec les standards internationaux et les Conventions de l’OIT. On y observe également un fort activisme des parties prenantes face au comportement des entreprises. De plus, le marché de l’investissement responsable (IR) dans ces pays est généralement plus mature que dans d’autres régions. L’opinion des agences de notation extra-financière et les stratégies IR des fonds de pension et des fonds mutuels ont une influence croissante sur la formalisation des engagements RSE des entreprises cotées.

Spécificités sectorielles

Près de trois-quarts des entreprises obtiennent un score « limité », compris entre 30 et 40/100,

Le groupe des entreprises réalisant les performances les plus avancées est hétérogène. Le secteur des banques de développement se classe en première position. Ces banques suivent les lignes directrices de la Société Financière Internationale (SFI) pour le financement de projets dans les pays en développement. Elles sont en principe tenues d’évaluer les impacts sur les droits de l’homme des projets qu’elles financent (respect des droits des populations indigènes, bonnes conditions de travail etc.). En tant qu’entités supranationales, les banques de développement sont également soumises à un contrôle élevé.

Le secteur du luxe et des cosmétiques arrive en seconde position. Les droits sociaux (contrats, revenus, santé, prévention des mauvais traitements, protection sociale), et la non-discrimination sont des thématiques clés pour les entreprises de ce secteur, en particulier dans leur chaîne d’approvisionnement.

Le secteur de l’édition occupe la troisième position, les entreprises de ce secteur devant assurer le respect de la propriété intellectuelle et le droit à la vie privée dans une ère digitale, marquée par des risques croissants de piratage, et de surveillance des données personnelles.

Page 16: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

16

5440

393838

3737

3636

3535353535

343434

3333323232323131313131

3030292929292929

2824

Development Banks

Luxury Goods & Cosmetics

Publishing

Specific Purpose Banks & Agencies

Forest Products & Paper

Chemicals

Tobacco

Electric & Gas Utilities

Waste & Water Utilities

Telecommunications

Building Materials

Electric Components & Equipment

Mining & Metals

Technology-Hardware

Beverage

Software & IT Services

Banks

Broadcasting & Advertising

Automobiles

Insurance

Pharmaceuticals & Biotechnology

Energy

Transport & Logistics

Supermarkets

Health Care Equipment & Services

Heavy Construction

Mechanical Components & Equipment

Aerospace

Business Support Services

Oil Equipment & Services

Hotel, Leisure Goods & Services

Financial Services - General

Food

Home Construction

Travel & Tourism

Industrial Goods & Services

Specialised Retail

Financial Services - Real Estate

Page 17: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

17

Cartographie des controverses

Comme en 2012, plus de 20% des entreprises sous revue font l’objet d’au moins une controverse (critique, allégation, procédure judicaire, condamnation etc.).

Le degré de sévérité de ces controverses est considéré comme «élevé» ou «critique» pour un tiers d’entre elles .

Les 1 122 controverses liées au non-respect des droits de l’homme représentent 10.9% de l’ensemble de controverses répertoriées par Vigeo Eiris dans sa base de données Equitics© (10 317 au total).

Quant au périmètre de ces controverses :

� 51% d’entre elles portent sur la violation de droits fondamentaux (droit à la vie privée, droit de propriété, droits des populations indigènes, droit à la sécurité, liberté d’expression etc.) ;

� 11% des cas concernent des atteintes à la liberté syndicale (menaces, licenciement abusifs, non respect du droit de grève etc.) ;

� 21% des cas sont liés à des discriminations sur le lieu de travail (portant sur le genre, les conditions de santé, la nationalité, etc.) ;

� 17% des controverses portent sur des abus commis au sein de la chaîne d’approvisionnement (travail des enfants, travail forcé, mauvaises conditions de travail etc.)

Dans 43% des cas répertoriés, les entreprises n’ont pas réagi aux controverses. Dans 41.5% des cas, les entreprises ont conclu des accords à l’amiable, et dans 12.5% des cas, elles ont mis en place des mesures correctives. Enfin, dans 3% des cas, elles se sont montrées proactives (en dialoguant avec des parties prenantes et en adoptant des mesures correctives permanentes).

Le secteur des banques est sujet au plus grand nombre de controverses (84), principalement liées à son implication dans le financement de projets controversés.Le secteur alimentaire arrive en seconde position (avec 83 controverses), car régulièrement exposé à des allégations concernant les droits des peuples indigènes, les droits à la propriété, la discrimination des salariés, et le respect des droits humains et droits des travailleurs dans la chaîne d’approvisionnement. Le secteur des mines et de la métallurgie se hisse au troisième rang, avec 73 controverses ; ce secteur fait souvent face à des controverses liées à des déplacements forcés de populations locales et un recours abusif aux forces de sécurité.

Dans un tiers des cas, les faits répertoriés se sont déroulés aux Etats-Unis (396), où les abus (discriminations, atteintes à la liberté syndicale, violations des droits tels que le droit de propriété, le droit à la sécurité etc.) sont plus volontiers traduits devant les tribunaux.

Page 18: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

18

Les entreprises les plus avancées : classement des 30 leaders

Parmi les 30 entreprises affichant les meilleures performances sur les thématiques de droits de l’homme, 29 sont européennes (96,6%), contre 24 en 2012 (80%).

20% de ces entreprises opèrent dans le secteur des services d’électricité et de gaz, un secteur qui doit accorder une attention particulière aux risques d’abus sur les sites de grands projets (barrages hydroélectriques, sites d’exploration pétrolière et gazière), notamment dans des pays ayant un cadre juridique peu protecteur des droits des travailleurs et des droits de la personne. Ce secteur est exposé à des enjeux sensibles en matière de droits de l’homme (ex : expropriations forcées sans négociation préalable ou indemnisation compensatoire, violence des forces de sécurité, etc.). Les entreprises de ce secteur ont généralement mis en place des processus dédiés à ces enjeux spécifiques.Les entreprises financières représentent 30% des meilleurs performers et sont issues de secteurs tels que les banques de développement, les banques, les services financiers, etc.. Dans le cadre de leurs politiques de financement, les institutions financières évaluent les politiques ESG des entreprises de leurs portefeuilles, et notamment leurs capacités à prévenir les risques d’abus concernant les droits sociaux et droits fondamentaux des parties prenantes impactées par les projets financés. À ce titre, elles suivent généralement les lignes directrices des Principes de l’Équateur pour le financement de projets, et mettent également en place des outils dédiés au déploiement des Principes Directeurs de l’ONU pour les entreprises et les droits de l’homme, tels que les outils de reporting de l’Initiative Financière du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEP FI). Ces entreprises sont également fortement exposées à la surveillance et l’intervention d’ ONG comme BankTrack ou Oxfam.

De façon générale, les entreprises qui obtiennent les meilleures performances partagent une même capacité à identifier les risques et les opportunités liées à la gestion efficace de leurs enjeux en matière de droits de l’homme. Elles sont conscientes des impacts que ces derniers peuvent avoir sur leur réputation, leur efficacité opérationnelle, la cohésion de leur capital humain et leur sécurité juridique. Par conséquent, elles formulent des politiques visibles et exhaustives, et sont transparentes sur niveaux de responsabilité associés aux enjeux identifiés. Elles coopèrent et dialoguent avec des parties prenantes et déploient des procédures de due diligence (ex: cartographie des risques, mesures correctives, actions de contrôle). Elles publient également des indicateurs de performance chiffrés et font preuve de transparence à la fois sur les controverses auxquelles elles font face (ex : critiques, campagnes de boycott, procès, sanctions et condamnations) et sur les procédures en place pour y remédier.

Page 19: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

19

Nom Pays Secteur Score(/100)

Red Electrica Corporación Espagne Services publics d'électricité et de gaz 85E.on Allemagne Services publics d'électricité et de gaz 81Groupe PSA France Automobiles 81Foncière des Régions France Services financiers - Immobilier 80Umicor Belgique Industrie chimique 79La Banque Postale France Banques 79Norsk Hydro Norvège Mines et Minerais 78Engie France Services publics d'électricité et de gaz 77Carrefour France Grande distribution 76L'Oreal France Biens de luxe et cosmétiques 76Gas Natural Espagne Services publics d'électricité et de gaz 75Telefonica Espagne Télécommunications 75Gecina France Services financiers - Immobilier 75Terna Italie Services publics d'électricité et de gaz 75Kreditanstalt für Wiederaufbau Allemagne Banques et agences à but spécifique 74BT Group Royaume-Uni Télécommunications 74European Investment Bank Luxembourg Banques de développement 74Sodexo France Hôtels, biens et services liés aux loisirs 73Endesa Espagne Services publics d'électricité et de gaz 72Amundi France Services financiers - Généralistes 72A2A Italie Services publics d'électricité et de gaz 72Vallourec France Mines et Minerais 71Orange France Télécommunications 71Linde Allemagne Indutrie chimique 70Merck Allemagne Produits pharmaceutiques et biotechnologie 69Munich Re Allemagne Assurances 69Crédit Foncier France Banques 69STMicroelectronics Pays-Bas Matériel technologique 69Agence Française de Développement France Banques et agences à but spécifique 69African Development Bank Tunisie Banques de développement 69

Page 20: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

20

Exemples de bonnes pratiques

Le groupe pharmaceutique GlaxoSmithKline communique publiquement sur ses positions concernant les sujets relatifs aux droits de la personne tels que la recherche sur les technologies de clonage et la recherche sur les cellules souches, la diversité biologique et les essais cliniques dans les pays en développement. Il collabore avec l’institut de recherche sur les cellules souches de Harvard sur ces questions. Le Comité de direction de la gouvernance médicale et l’administrateur en chef sur les questions médicales veillent à ce que les systèmes de gouvernance relatifs à ces sujets soient normalisés et identifient tout nouveau risque. Les protocoles développés pour les essais cliniques sont examinés par un comité d’éthique indépendant. Enfin, le comité directeur en charge de la thématique de droits de l’homme (droit de la personne) de GSK communique les grandes orientations de l’entreprise, et supervise leur déploiement pour s’assurer que l’entreprise respecte ses engagements.

Source: http://www.gsk.com/

La compagnie minière Rio Tinto a mis en place un cadre de travail spécifique visant à accroître ses connaissances, à s’engager avec les communautés potentiellement impactées par son activité, et à mettre en place des programmes mutuellement bénéfiques pour les deux parties. Dans ses engagements, l’entreprise dit appliquer les normes de référence telles que les normes de performance en matière de durabilité environnementale et sociale de la Société Financière Internationale (IFC) et affiche son soutien à la déclaration sur les peuples Indigènes et l’industrie minière, édictée par le Conseil International pour les secteurs minier et métallurgique. L’entreprise a rédigé un guide destiné à ses employés et dirigeants pour les sensibiliser aux impacts sociaux pour les communautés et populations locales liées à son activité, qui aborde notamment la questions des déplacements de populations et relocalisations. Elle consulte les populations locales en vue d’assurer la préservation de leur héritage culturel, et s’assure que ces dernières aient accès aux informations nécessaires et à une expertise indépendante leur permettant d’émettre un consentement préalable, libre et informé avant toute conclusion d’un accord conformément à la norme de performance 7 de l’IFC.

Source: www.riotinto.com

Critères de notation :

“Droits humains fondamentaux de la personne dans la société”

Page 21: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

21

Danone est l’un des premiers groupes à avoir signé un accord cadre international avec l’IUF (Union Internationale des Travailleurs de l’Alimentation). Un représentant permanent de l’IUF travaille chez Danone et veille à ce que l’accord soit bien mis en œuvre, conjointement avec les représentants du personnel. Danone assure un suivi des questions liées à la liberté syndicale et au droit à la négociation collective en collectant des rapports sociaux auxquels sont soumises ses filiales. A l’échelon local, des systèmes d’alerte sont en place pour que les syndicats puissent joindre l’IUF si nécessaire. Des audits internes portant sur le dialogue social sont diligentés, ainsi que des audits externes occasionnels. Des visites sont également organisées conjointement par l’IUF et Danone au sein des différentes unités pour s’assurer que les employés connaissent les conventions et textes applicables et leur mise en œuvre. Les filiales sont encouragées à offrir à leurs salariés les conditions nécessaires pour élire des représentants du personnel et garantir l’indépendance de ces derniers.

Sources : www.danone.com, www.iuf.com

En 2012, La Banque Postale a signé avec les organisations syndicales une convention collective sur le dialogue social. L’entreprise offre aux représentants du personnel des moyens financiers, des formations et des supports de communication (intranet, panneaux d’affichage, brochures) pour leur permettre d’exercer leurs droits et de tenir les salariés informés. La banque encourage ses employées à participer aux élections des représentants du personnel et comité d’entreprise.

Source : www.labanquepostale.com

BNP Paribas a signé un accord sur l’égalité professionnelle avec le Comité d’Entreprise Européen (CEE) et deux fédérations syndicales européennes (UNI et FECEC). L’entreprise s’est fixé l’objectif de promouvoir l’accès à 30% de femmes dans les comités exécutifs d’ici 2020. Le Comité de Diversité du groupe est composé de 35 membres. BNP Paribas rapporte divers exemples d’actions de sensibilisation, notamment l’organisation d’une Semaine de la diversité dans divers pays (Belgique, Corée, Etats-Unis, Singapour, France), ainsi que des formations dispensées, notamment aux managers, dans divers sites et branches d’activités. La banque collecte les indicateurs relatifs à la diversité et assure un monitoring des différences salariales hommes/femmes. Des systèmes d’alertes et de sanctions disciplinaires sont prévus en cas d’abus par rapport au respect des droits humains.

Des accords collectifs ont été signés pour une bonne insertion des travailleurs handicapés et, dans certaines régions, des politiques de recrutement de minorités ethniques sont en place. L’entreprise souhaite que 85% de ses employés puissent prendre des congés maternité et paternité payés (contre 74% en 2015) et elle entend négocier un accord collectif sur ce sujet en 2017.

Source : https://group.bnpparibas

Critères de notation :

“Droit à la liberté syndicale et droit de négociation collective”

Critère de notation :

“Non Discrimination”

Page 22: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

22

En 2015, Deutsche Telekom s’était fixé pour objectif de conduire des audits sociaux couvrant 75% de ses volumes d’approvisionnement, contre 54% en 2012. L’entreprise demande à ses sous-traitants de remplir un certain nombre de conditions concernant les thèmes suivants : liberté syndicale et droit de négociation collective, abolition du travail des enfants, abolition du travail forcé, conditions de santé et sécurité, salaires décents, heures de travail et respect des droits fondamentaux. Préalablement à tout contrat, les sous-traitants doivent remplir un questionnaire incluant des données sociales. DT a également mis en place un programme de soutien pour aider ses sous-traitants à mettre en œuvres des bonnes pratiques sur les questions sociales. L’entreprise conduit des audits sociaux en partenariat avec huit autres entreprises du secteur des télécommunications. Il s’agit d’une initiative conjointe pour mener des audits sociaux et environnementaux dans leur chaîne d’approvisionnement.

Source : www.telekom.com/en

L’entreprise de cosmétiques Henkel est signataire du Code de Conduite intersectoriel de l’Association Allemande de Gestion des Matériaux, des Achats et de la Logistique, et exige de ses fournisseurs qu’ils en respectent les principes ou qu’ils se conforment à un Code de Conduite comparable. Henkel conduit des audits et évalue les risques auxquels ses fournisseurs peuvent être confrontés (en fonction de leurs secteurs et emplacements), via des questionnaires sur leurs standards sociaux. Des programmes de formation leurs sont également offerts de façon régulière. De plus, dans une perspective d’amélioration de la qualité de vie des fermiers dans les régions cultivant l’huile de palme, Henkel soutient les petits propriétaires agricoles et les petits exploitants. L’entreprise est transparente sur les résultats de ses audits et déclare avoir provoqué une rupture de contrat avec l’un de ses fournisseurs après avoir constaté des pratiques contraires aux principes d’éthique de l’entreprise.

Source: www.henkel.com

Critère de notation :

“Droits de l’homme dans la chaîne d’approvisionne-ment”

Red Electrica, fournisseur d’électricité et de gaz, a signé un accord avec le ministère de la Santé, des Services Sociaux et de l’Egalité en 2014 pour promouvoir l’accès aux femmes à des fonctions managériales et leur présence dans les comités exécutifs. L’entreprise soutient le projet ‘Promociona’, initié par la confédération espagnole des entreprises, qui promeut l’accès des femmes à des postes à responsabilité, et a créé à cet effet en 2015, en interne, un observatoire sur le leadership féminin.

Source: www.ree.es/en

Page 23: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

23

Exemples de controverses

Le 15 novembre 20161, deux associations de défense des droits de l’homme (SHERPA et le Centre Européen pour les Droits Constitutionnels et les Droits de l’Homme) ont porté plainte contre le cimentier Lafarge (désormais Lafarge Holcim), pour «financement du terrorisme», «complicité de crimes contre l’humanité», «complicité de crimes de guerre», «mise en danger d’autrui» et d’autres infractions connexes. Onze anciens salariés syriens de Lafarge Cement Syria (LCS) se sont joints à cette plainte, reprochant à l’entreprise d’avoir mis leur vie et leur sécurité en péril. Quelques mois plus tôt, le 21 juin 2016, le journal Le Monde rapportait que la cimenterie du groupe à Jalabiya, (nord de la Syrie), avait indirectement financé les djihadistes de l’EI en payant des taxes à des intermédiaires de l’organisation Etat islamique entre 2013 et 2014, afin d’assurer la continuité de la production pendant la guerre.

Dans un communiqué2, l’entreprise a réagi et affirmé que lorsque le conflit s’est approché de la zone de l’usine, la sûreté et la sécurité des salariés était sa priorité absolue, tandis que la fermeture du site était étudiée. Ce dernier a fermé en septembre 2014.

En février 20153, une enquête judiciaire menée suite au décès de 40 civils lors d’un acte terroriste perpétré sur le siège de l’entreprise énergétique Statoil à Amenas (Algérie) a révélé plusieurs failles dans le système de sécurité de l’entreprise. Cette dernière a réagi de façon transparente. Les constats de l’enquête externe ordonnée par le Conseil d’Administration après l’attaque ont été rendus publics et intégrés à la procédure interne de gestion des risques et de préparation aux situations d’urgence.

1 ‘L’ONG Sherpa porte plainte contre Lafarge pour le financement du terrorisme’, Le Monde, 15/11/2016 and ’Comment le cimentier Lafarge a travaillé avec l’Etat islamique en Syrie’, Le Monde, 21/06/2016

2 ‘Précision de LafargeHolcim sur ses opérations en Syrie’, Communiqué de presse de LafargeHolcim, 21/06/2016

3 ‘In Amenas murders: coroner points to security flaws at Algerian gas plant’, The Guardian, 26/02/2015

Controverse sur :

“Respect des droits de la personne dans la société”

Page 24: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

24

En octobre 2016, Samsung a été fortement critiquée par le Confédération Internationale des Syndicats4 (CIS) après la divulgation d’un document à usage interne révélant diverses tactiques managériales agressives afin d’empêcher la formation de syndicats. Un mois plus tôt, un rapport de la formation syndicale internationale IndustriALL dénonçait les politiques moyenâgeuses de l’entreprise et décrivait diverses pratiques comportant des atteintes à la liberté syndicale, des salaires très bas, des conditions de travail non sécurisées, des heures supplémentaires forcées, du travail informel ou encore de l’esclavage moderne.

Dans le secteur Automobile, Mercedes Benz US International, filiale de Daimler a été jugée coupable de violation de la Loi Nationale sur les Rapports Syndicaux (National Labour Relations Act5) par la Cour d’Appel des Etats-Unis. L’entreprise avait interdit à ses salariés de diffuser des publications à caractère syndical, et illégalement inclus dans son ‘guide de l’employé’ une clause prohibant la formation syndicale. En réaction à l’allégation, Daimler a expliqué que la représentation syndicale était le choix des salariés de l’entreprise et que Mercedes-Benz US International (MBUSI) devait se montrer neutre, précisant toutefois que le ‘guide de l’employé’ de MBUSI, bien que n’interdisant pas la communication syndicale, n’avait pas de règles explicites à ce sujet. L’entreprise rapporte que le problème a été résolu dans la version 2014 du guide distribué aux équipes.

En mai 2015, une délégation d’employés en provenance des Etats-Unis, d’Afrique du sud, d’Australie et de Colombie a assisté à l’Assemblée Générale annuelle de l’entreprise minière Glencore, en Suisse6. Conjointement avec l’organisation syndicale internationale IndustriALL, les employés ont exposé divers cas de violations des droits des travailleurs. Plus tôt, en novembre 2014, un réseau mondial des employés de Glencore avait été lancé à Sao Paulo pour dénoncer la brutalité et le non-respect des droits des salariés et des syndicats dans les divers sites de l’entreprises7. Les pratiques dénoncées comprenaient, entre autres, le fait d’empêcher des travailleurs de rejoindre leurs lieu de travail, le renvoi de travailleurs après un grève, des menaces de morts.

4 ‘Global reach of Samsung’s medieval practices revealed in new report’ , International Trade Union Confederation, 05/10/2016

5 ‘Mercedes’ Alabama Workers Have Right to Organize in Plant, Appeals Court Rules’, Industry Week, 03/10/2016

6 ‘Unions deliver strong message to Glencore shareholders’, IndustriALL, 07/05/2015

7 ‘IndustriALL targets Glencore for anti-union behavior’, Mines and Communities, 20/11/2014

Controverse sur :

“Respect de la liberté syndicale et du droit de négociation collective”

Page 25: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

25

Au mois d’avril 2016, un juge fédéral a approuvé une procédure d’action collective à l’encontre du géant pharmaceutique Merck & Co Inc8 pour rémunération insuffisante de ses représentantes commerciales. Les requérantes estimaient que les dommages occasionnés s’élevaient à 250 millions de dollars. L’entreprise est accusée d’avoir systématiquement accordé à ses représentantes commerciales des rémunérations inférieures à celles de leurs homologues masculins, de leur avoir refusé des promotions et d’avoir exercé des pratiques de harcèlement sexuel. Les salariées enceintes ou ayant des enfants auraient été incitées à quitter l’entreprise. Réagissant à cette décision, Merck a indiqué que ces accusations étaient sans fondement et a rappelé son engagement en faveur de l’égalité des chances pour tous ses employés.

Au mois d’avril 2015, Helmerich & Payne a accepté de payer 59,000 dollars à un ancien salarié l’ayant traduit devant la Commission américaine pour l’Egalité des Chances sur le lieu de travail (Equal Employment Opportunity Commission). Le requérant affirmait avoir été licencié pour avoir utilisé une prescription de médicaments pour des douleurs dorsales. Il accusait l’entreprise d’avoir entrepris de façon illégale des examens médicaux et enquêtes sur les incapacités de travail de ses employés. Réagissant à ce verdict, l’entreprise a accepté de modifier ses politiques écrites et les rendre conforme au Disability Act américain, de conduire des formations sur sa nouvelle politique et d’afficher une note rendant compte de la présente décision9.

En mars 2016, faisant suite à la publication d’un rapport du centre de recherche et media indépendant DanWatch sur l’industrie du café au Brésil, Nestlé et Jacobs Douwe Egberts ont admis qu’il était possible que le café qu’elles se procuraient au Brésil provenait d’une plantation sur laquelle les travailleurs étaient victimes d’esclavage10. Le rapport de DanWatch établissait en effet que les travailleurs n’étaient pas ou très peu payés, étaient obligés de vivre sur des tas d’ordures et buvaient l’eau aux côtés des animaux. Nestlé a admis ne pas connaître précisément l’origine du café qu’elle achetait au Brésil.

En juillet 2016, un rapport publié par SACOM (Student and Scholars Against Corporate Misbehaviour) mentionnait des abus à l’encontre de salariés travaillant chez des sous-traitants chinois des enseignes Gap, H&M et Zara11. D’après le rapport, ces salariés étaient obligés de travailler un nombre d’heures excessif afin de remplir des délais de livraison extrêmement serrés et disproportionnés, et ce, en échange de salaires très bas. De plus, ils étaient exposés à des produits chimiques toxiques, des poussières de coton, et autres substances dangereuses sans équipement de protection approprié. Réagissant à ce rapport, Gap a admis, qu’après avoir mené sa propre enquête, les faits relatés étaient avérés. Pour remédier à ces problèmes, Gap et ses sous-traitants ont mis en place des plans d’action avec échéancier. L’entreprise et ses homologues ont également décidé de travailler conjointement avec ces sous-traitants et de conduire des visites de suivi afin de s’assurer que les problèmes identifiés soient bien résolus.

8 ‘Merck sex discrimination case could be collective action: judge’, Reuters, 27/04/2016

9 ‘Helmerich & Payne to Pay $59,000 to Settle EEOC Disability Discrimination Suit’, EEOC Press Release, 22/04/2015

10 ‘Nestlé admits slave labour risk on Brazil coffee plantations’, The Guardian, 02/03/2016

11 Reality Behind Brands’ CSR Hypocrisy: An Investigative Report on China Suppliers of ZARA, H&M, and GAP’, SACOM Website, 19/07/2016

Controverse sur :

“Non Discrimination et égalité”

Controverse sur :

“Respect des droits de l’homme dans la chaîne d’approvisionne-ment”

Page 26: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

26

ConclusionLes droits de l’Homme sont une thématique-clé de responsabilité sociale, mais elle demeure peu appréhendée parmi les engagements des entreprises et dans la littérature sur leur responsabilité sociale. La négligence ou l’incapacité des entreprises à faire face efficacement aux défis que soulèvent le respect, la protection et la promotion de ces droits sont susceptibles non seulement de ternir leur image, mais de mettre aussi en cause leurs activités opérationnelles, leur accès aux financements ou leur maintien sur les marchés.

Les atteintes aux droits de l’homme ne sont pas l’apanage des pays en développement. Parmi les cas de controverses recensés, nombre d’entre eux se sont déroulés dans des pays développés, notamment aux Etats-Unis et en Europe. Ce contraste constat souligne la tendance à la judiciarisation de la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de l’homme dans les pays démocratiques. Il met en évidence, à l’inverse, le déficit d’informations sur les atteintes aux droits humains fondamentaux dans les chaînes d’approvisionnement et dans la plupart des pays émergents.

La minorité d’entreprises qui démontre des engagements avancés a rendu visibles des principes et des objectifs précis, en appui sur des structures responsabilisées. Leurs politiques couvrent tous les sujets matériels compte tenu de la nature et des lieux de leurs activités, incluant leurs chaînes d’approvisionnement. Ces entreprises sont transparentes sur les moyens déployés et leurs procédures de contrôle interne. Elles coopèrent avec leurs parties prenantes externes et impliquent leurs partenaires syndicaux et les délégués élus de leurs collaborateurs dans la construction de la vision et le déploiement de leur démarche de responsabilité sociale. Enfin, elles réagissent publiquement aux controverses dont elles font l’objet et rendent compte de mesures correctrices mises en place le cas échéant.

Les entreprises les plus performantes en matière de prévention des violations adoptent un comportement aussi bien proactif qu’innovant. Elles prennent en compte les droits de l’homme dits de « deuxième » et « troisième » générations, tels que le droit à un environnement sain, le droit à la formation et l’éducation, l’amélioration continue des conditions de travail, la garantie d’un salaire décent et d’une protection sociale étendue, etc. Ces entreprises ont souvent voulu établir des partenariats actifs avec des organisations de défense des droits de l’homme, elles ont mis en place des programmes de sensibilisation à ces sujets, et dispensent des formations à leurs équipes et à leurs dirigeants.

La responsabilité des entreprises en matière de droits de l’homme est de plus en plus clairement consacrée par le droit international, en particulier depuis l’adoption en 2011 des Principes Directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Les Objectifs du Développement Durable (ODD) de l’Agenda 2030 pour le développement durable, adoptés en septembre 2015, consacrent aussi cette responsabilité et fournissent aux entreprises une orientation opérationnelle pour qu’elles contribuent au développement humain.

Page 27: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

27

La thématique des droits de l’homme, selon qu’elle sera ou non davantage et mieux prise en compte par les entreprises, les investisseurs et les pouvoirs publics, va peser sur l’avenir de la mondialisation. Si le sentiment se perpétue que les entreprises négligent les droits de l’homme ou que leur comportement conduit à en abaisser les standards, la menace est réelle que le niveau de soutien et de confiance de l’opinion continue de baisser à l’égard de la globalisation et de la liberté des échanges.

La thématique des droits de l’homme sera aussi de plus en plus au cœur des questions éthiques que soulèvent les évolutions technologiques et scientifiques. Les conséquences sur la dignité et les droits humains fondamentaux engagent la responsabilité des entreprises et leur capacité à prévenir les risques liés au développement des nanotechnologies, des biotechnologies, des technologies de l’information et de la communication, des sciences cognitives et de l’intelligence artificielle.

Page 28: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

28

Méthodologie

La méthodologie de Vigeo Eiris est basée sur un référentiel de normes internationales opposables (ex : Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), Conventions fondamentales et recommandations de l’OIT, Global Compact, Principes directeurs de l’OCDE pour les entreprises multinationales, règlementations de l’Union Européenne,…)

Son cadre d’analyse repose sur trois piliers, au sein desquels les performances des entreprises sont analysées sous plusieurs angles:

� La pertinence des politiques : les entreprises sont évaluées sur la visibilité et la formalisation de leurs engagements, leur exhaustivité et leur portage. Une attention particulière est portée à la chaîne de responsabilités et de supervision associée à ces engagements et à leur intégration dans le mode de gouvernance de l’entreprise.

� La cohérence du déploiement : L’analyse prend en compte les processus mis en place et les moyens alloués par l’entreprise pour traiter un sujet défini, ainsi que les contrôles et systèmes de reporting y afférant.

� L’efficacité des résultats : les résultats des politiques et des mesures adoptées sont évalués sur la base d’indicateurs chiffrés, et prennent également en compte les avis des parties prenantes, et la gestion par les entreprises, des controverses auxquelles elles font face (critiques, poursuites judiciaires, condamnations etc.).

Lors de notre analyse, les entreprises ont été notées sur quatre facteurs de responsabilité sociale relatifs au respect des droits de l’homme sur une échelle de scores comprise entre 0 et 100. En fonction de ces scores, les performances sont qualifiées respectivement de faibles [0-29]; limitées [30-49] ; robustes [50-59] ou avancées [60-100].

Page 29: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

29

Fouad Benseddik

Directeur des Méthodes et

des Relations Insitutionnelles

[email protected]

Cette étude a été réalisée sous la direction :

Auteur :

All rights reserved. Reproduction and dissemination of material in this report for educational or other noncommercial purposes are authorised without any prior written permission from Vigeo SAS provided the source is fully acknowledged. Reproduction of material in this report for resale or other commercial purposes is strictly prohibited without written permission of Vigeo SAS.

Contact presse: Anita Legrand - [email protected]

Valérie Demeure

Responsable de la Recherche Thématique

[email protected]

Contributeurs: Elise Attal, Sofia Benslimane, Sophie César, Virginia Jennings, Jordi Lesaffer, Siyang Lin and Amélie Nun

Pro

duce

d an

d de

sign

ed b

y Vi

geo

SA

S

Page 30: Responsabilité des entreprises et droits de l’homme …...responsabilité fiduciaire pour les dirigeants et administrateurs. La capacité d’une entreprise à rendre compte du

VigeoVigeo Eiris est une agence internationale indépendante de recherche et services ESG (Environnement, Social et Gouvernance) à destination des investisseurs et des organisations privées et publiques. Elle évalue le niveau d’intégration des facteurs de durabilité à la stratégie et aux opérations des organisations, procède à une revue des risques pour l’aide à la décision des investisseurs comme des entreprises.

Vigeo Eiris est structurée en deux départements spécialisés :

� Vigeo Eiris rating propose des bases de données, des analyses sectorielles, des notations, des benchmarks, des screening de portefeuilles, au service de toutes les approches d’investissement éthique et responsable.

� Vigeo Eiris enterprise réalise, pour des organisations de toutes tailles et de tous secteurs, des prestations d’aide à l’intégration et à la valorisation de facteurs ESG à leurs fonctions managériales et à leurs opérations stratégiques et de financement.

Les méthodologies et services de recherche de Vigeo Eiris sont en ligne avec les normes de qualité les plus avancées et sont certifiées ARISTA®. Vigeo Eiris est vérificateur approuvé par le Board du Climate Bond Initiative (CBI). La recherche de Vigeo Eiris est référencée dans plusieurs publications académiques de caractère international.

L’agence, constituée d’une équipe de 200 collaborateurs est implantée à Paris, Londres, Boston, Bruxelles, Casablanca, Milan, Montréal, Santiago & Tokyo. Elle s’appuie sur un réseau de partenaires exclusifs présents sur tous les continents « Vigeo Eiris Global Network ».

Pour plus d’information : www.vigeo-eiris.com