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IUFM DE BOURGOGNE Concours de recrutement : professeur des écoles RESPONSABILISER LES ELEVES : POURQUOI ET COMMENT ? BERGER Marie-Laure Directeur de mémoire : Mr DUBOIS « Une nouvelle citoyenneté ne sera possible que si on passe du pouvoir des adultes sur des enfants assistés à un système où les relations s’établissent entre des acteurs autonomes et responsables, une nouvelle citoyenneté, c’est-à-dire ouverte, en marche, en élaboration permanente, une citoyenneté adaptée à une civilisation planétaire, multiraciale, pluraliste, qui, pour vivre, devra apprendre et construire en même temps la coéducation par la coopération. » Mazurier, C et Thiaudière, C, 1989, 30 2005 Numéro de dossier : 0362322D

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IUFM DE BOURGOGNE

Concours de recrutement : professeur des écoles

RESPONSABILISER LES ELEVES :

POURQUOI ET COMMENT ?

BERGER Marie-Laure

Directeur de mémoire : Mr DUBOIS

« Une nouvelle citoyenneté ne sera possible que si on passe du pouvoir des adultes sur des enfants assistés à un système où les relations s’établissent entre des acteurs autonomes et responsables, une nouvelle citoyenneté, c’est-à-dire ouverte, en marche, en élaboration permanente, une citoyenneté adaptée à une civilisation planétaire, multiraciale, pluraliste, qui, pour vivre, devra apprendre et construire en même temps la coéducation par la coopération. »

Mazurier, C et Thiaudière, C, 1989, 30

2005 Numéro de dossier : 0362322D

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SOMMAIRE

1ERE PARTIE : DE LA NAISSANCE D’UNE REFLEXION RESPONSAB LE A L’ELABORATION D’UN MODE DE FONCTIONNEMENT 4

1) Des élèves acteurs 5

2) Développer une attitude responsable face à une situation : la proposition de solutions… 6 • Apprendre à se répartir les tâches 6 • Les règles en EPS 7 • Le débat au cycle 3 9 • L’élaboration des règles de vie au sein d’une classe marocaine 9

3) Des traces écrites et des propositions équitables pour tous 11 • Institutionnaliser leurs propositions 11 • Responsabilité des élèves par rapport à l’ensemble d’un groupe. 11

2EME PARTIE : UN DISPOSITIF EN PERPETUELLE EVOLUTION… 13

1) Favoriser l’égalité des chances de chacun face à une situation 13

2) Un retour régulier sur les règles établies 14

3) La prise de responsabilités : des situations formatrices 16

4) Un dispositif en perpétuelle évolution 17 • Un réajustement régulier en EPS 17 • Des compléments réguliers 18

CONCLUSION 19

BIBLIOGRAPHIE 20

ANNEXES I

RESUME

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INTRODUCTION Il m’a été permis, lors de différentes interventions dans des écoles, de pouvoir observer assez fréquemment le recours par l’enseignant à la délégation de responsabilités à certains élèves. Ces attributions pouvaient prendre des formes variées : de manière directive, c'est-à-dire gérées par l’enseignant lui-même, ou bien des situations dans lesquelles les enfants étaient partie prenante dans cette répartition. C’est une grande difficulté pour l’enseignant de gérer ces espaces de discussion car il fait face à une situation d’improvisation, il ne peut rien prévoir de ce qui va se passer. Cependant, comme le stipulent les programmes, il est indispensable de permettre aux élèves d’avoir ces espaces de communication, et permettre l’élaboration de certaines règles. La responsabilisation même de l’élève fait partie du projet global d’éducation à la citoyenneté, en tant que formation du futur citoyen qu’il est amené à devenir. Il s’agit alors de se demander comment mettre en place des situations favorisant des prises effectives de responsabilité par les élèves ? Cette responsabilisation pouvant prendre des formes très diverses, il s’agit de se demander quelles sont les formes les plus favorables à la fois à la construction de savoirs par les élèves, et à la construction des élèves en tant que futurs citoyens. La notion de responsabilisation fait partie du grand domaine du vivre ensemble et plus particulièrement de l’éducation à la citoyenneté. En effet, l’élève est un citoyen en devenir, qui sera amené à être un adulte responsable et impliqué dans la gestion de la société dans laquelle il vivra. Le recours à une analyse de situations, à des propositions émanant des élèves eux-mêmes quant à une organisation claire et définie, utilisant des statuts accompagnés de prérogatives (droits et devoirs), peut être un moyen original et efficace pour aborder les notions de responsabilisation, de respect. Il peut également l’être sur un autre plan qui est celui de l’apprentissage civique, du fonctionnement de notre société et de la transmission de nos valeurs républicaines. Ce moyen n’est bien entendu pas le seul. L’école étant une microsociété, participer à l’élaboration du fonctionnement de leur propre classe permettrait aux élèves, en termes d’apprentissage, de mieux cerner le fonctionnement de notre système (élections, fonctionnement local avec la mairie, mais aussi au niveau de l’Etat, notamment sur les différents pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire) et donc d’en accepter certains principes. En effet, l’enseignant représente au sein de la microsociété « école » à la fois les trois pouvoirs, ce qui peut expliquer le sentiment d’injustice des élèves et rendre plus difficile pour eux l’acceptation de responsabilités dévolues. Quant à la mise en place de ces pratiques pédagogiques, elle peut être très diverse. L’on peut aussi bien avoir recours à une pédagogie traditionnelle, au sein de laquelle l’enseignant joue un rôle primordial puisque c’est lui qui est au centre des décisions, que l’on peut décider de faire participer les élèves à l’élaboration et à la distribution de ces responsabilités. Les enseignements qu’on peut tirer de ces situations ne sont peut-être pas les mêmes et il s’agit de se demander quelles mises en place peuvent s’avérer bénéfiques à la fois pour les apprentissages des élèves et pour leur apprentissage des responsabilités, dans le cadre de leur éducation à la citoyenneté.

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La question du recours à des responsabilités étant intimement liée à la transmission de nos valeurs républicaines, il est intéressant alors de se demander si de telles pratiques peuvent être mises en place dans des pays se référant à des valeurs pour partie distinctes, tels que le Maroc par exemple. Dans la première partie de ce mémoire, je m’attacherai davantage à étudier les situations dans lesquelles les élèves sont amenés à se prendre en charge, à s’impliquer dans la gestion d’une situation, et pour lesquelles ils sont obligés de s’organiser en attribuant des responsabilités à l’un ou plusieurs d’entre eux. Devront alors être prises en compte par les élèves les notions d’écoute, de respect d’autrui, de divergence de point de vue, des valeurs de vivre ensemble. Il s’agit souvent, à la base, de problèmes organisationnels qui seront posés aux élèves. On pourra noter que certaines situations s’avèrent plus responsabilisantes que d’autres, il faudra alors se demander pourquoi. Les difficultés majeures rencontrées par les élèves seront relevées et analysées dans le but d’une meilleure pratique ultérieure. La seconde partie du mémoire sera davantage axée sur l’analyse de leurs pratiques par les élèves eux-mêmes et les remédiations qu’ils ont proposées. En effet, un travail d’auto-analyse par les élèves les conduit à mieux se comprendre et à mieux cerner une situation. C’est pourquoi dans les différentes mises en situations que j’ai effectuées, je me suis attachée à organiser une discussion sur leur pratique, et à effectuer un retour et une discussion régulière des dispositifs mis en place.

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1ère PARTIE : de la naissance d’une réflexion responsable à l’élaboration d’un mode de fonctionnement

Les élèves ont beaucoup de choses à dire, mais pour cela il faut leur en donner les moyens. Les principes de la pédagogie coopérative reposent sur une conception des droits et des devoirs issue de la Déclaration des Droits de l’Enfant. Le principe est de considérer l’enfant comme un futur citoyen, en pleine construction, et donc à qui il faut laisser la possibilité de se construire et non pas seulement de reproduire un fonctionnement vu chez les adultes. Il faut pour cela « que l’on ait créé les conditions [favorables lui] permettant de se révéler » (Mazurier, C et Thiaudière, C, « Pour une Pédagogie Coopérative d’Education », 1989, OCCE, 28). Ce sont ces espaces de discussion, d’analyse permettant la mise en place d’une autogestion par les élèves que j’ai tenté de mettre en place afin de permettre une responsabilisation de ces futurs citoyens. « Le Projet Coopératif d’Education […] vise à créer [...] une démocratie qui permette aux hommes de gérer leur vie, d’autogérer, ensemble, leur pays et leur production. » (Animation et Education, n°75/76, 1986, intitulé : le Projet Coopératif d’Education) Les règles de fonctionnement étaient souvent élaborées sans participation de la part de élèves, bien que cela soit en plein changement. « Les enfants sont souvent placés en situation de respecter et d’appliquer des règles qu’ils ne comprennent pas, et surtout qu’on ne cherche pas à leur faire comprendre » (Mazurier, C et Thiaudière, C, « Pour une Pédagogie Coopérative d’Education », 1989, OCCE, 28). Ce livre ayant été écrit en 1989, les progrès pédagogiques ont permis de développer ces situations de responsabilisation de l’enfant citoyen, et désormais, dans la plupart des écoles et selon les directives du Ministère de l’Education Nationale, les règles et règlements intérieurs des écoles sont élaborés avec l’aide des enfants et tiennent compte de leurs remarques. Dans cette première partie, nous allons nous attacher aux différentes situations qui ont été proposées aux élèves, en nous demandant pourquoi ce sont ces situations-là qui ont été choisies, ce qu’elles apportaient de plus, et surtout ce qu’elles permettaient de développer chez les élèves dans le cadre des nouveaux programmes. L’application de ces situations a été effectuée, d’une part chez des élèves de cycle 3, dans une classe multi niveaux de 17 élèves issus d’un milieu rural, occasionnellement à des élèves de CP, dans une classe de 24 élèves en milieu périurbain, puis à des élèves de CE2 dans une classe marocaine. Dans ce dernier cas, il ne s’agit alors pas de faire référence aux nouveaux programmes, puisqu’ils diffèrent d’un pays à l’autre, mais de s’intéresser, comme le souhaite toute société, à la formation la plus adaptée qui permettrait de former des individus responsables et autonomes.

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1) Des élèves acteurs

L’école est un lieu où l’élève, en parallèle aux apprentissages, apprend à se socialiser, « un lieu où l’on s’instruit en se socialisant et où l’on se socialise en s’instruisant » (Prairat, Questions de discipline à l’école, p.81). Ainsi, comme le souligne Eirick Prairat, on ne saurait demander à un élève d’être « en classe, […] un individu soumis à qui n’est concédé aucune possibilité d’expression et d’autonomie, [et] hors de celle-ci […] un sujet responsable qui saurait argumenter et décider en toute autonomie » (Prairat, Questions de discipline à l’école, p 36). C’est pourquoi ce dernier propose de mettre en place des situations où l’élève s’implique davantage, où il est acteur. De même, la pédagogie coopérative propose une organisation de l’école par eux et pour eux. C’est dans ce sens que j’ai tenté d’orienter ma pratique, des situations où les élèves sont impliqués dans la gestion d’activités. En allant dans ce sens et dans le cadre de l’éducation à la citoyenneté, j’ai proposé différentes situations pour lesquelles les élèves relevaient d’eux-mêmes un dysfonctionnement et étaient amenés à proposer des solutions. Ils étaient donc partie prenante dans la création et le bon fonctionnement de la situation ultérieure. Cela implique une responsabilité de leur part, dans la mesure où la réussite future dépendait de leurs propositions. Ainsi, en parallèle aux apprentissages, ils apprenaient à s’autogérer et donc à être responsables. Or, comme le mentionnent Christian Mazurier et Claude Thiaudière dans « Pour une méthode coopérative d’éducation », « chaque enfant doit trouver son utilité pour être concerné dans un groupe ». Ainsi, leur implication au sein d’une activité dépend de l’utilité qu’elle aura aux yeux des enfants. C’est pourquoi j’ai mis en place des dispositifs qui concernaient la gestion de la classe au cours de différentes activités. C’est le cas, par exemple, lors d’une séance d’EPS. Les enfants d’une classe de cycle 3 sont très motivés en ce qui concerne l’EPS, et c’est une matière qu’ils affectionnent tout particulièrement. Je leur présente un nouveau jeu apparenté au hand-ball, mais cependant je ne leur fournis pratiquement aucune indication d’arbitrage ni de règles à respecter. La partie commence et, très rapidement, les élèves se heurtent au manque d’arbitrage et de règles précises. J’invite les élèves à recommencer la partie depuis le début, mais les mêmes problèmes resurgissent. Je propose alors aux enfants de se réunir dans la salle de débat afin de discuter des problèmes rencontrés et d’essayer de les résoudre. La discussion s’engage et les élèves échangent différentes remarques et propositions. En analysant cette situation, on se rend compte que les enfants sont très engagés dans la résolution de ce problème, car il s’agit d’une matière qu’ils apprécient, et qu’ils souhaitent pouvoir pratiquer dans les meilleures conditions. C’est donc dans l’intérêt de chacun de trouver des solutions viables, qui satisfassent tout le monde, afin que le jeu puisse reprendre. Ainsi, parce que c’est pour eux, les enfants sont impliqués, et parce que c’est d’eux que viennent les solutions, ils se sentiront davantage investis d’une responsabilité. Avec cette même classe, je propose des séances de débat d’une demi-heure, comme le mentionnent les nouveaux programmes. Cependant, en ce qui concerne le déroulement de ces séances, je ne donne que quelques informations permettant de lancer l’activité. Je leur propose de discuter de la validité d’une proposition en tant que débat ou non, à savoir, est-ce un sujet discutable avec des prises de position possible, ou s’agit-il seulement d’une remarque. Puis je leur demande de garder une trace écrite de leur discussion en choisissant un ou une secrétaire de séance chargé de noter tout ce qui se dit. Ces mêmes règles sont appliquées par l’enseignante en temps normal avec cette classe. La première séance peut alors commencer. Les élèves choisissent un sujet et ils désignent une élève de CM2 pour remplir la fonction de secrétaire.

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Au bout de quelques minutes seulement, la secrétaire lève le ton pour se faire entendre car elle n’a pas le temps de noter tout ce qui se dit, et, les autres élèves parlant tous en même temps, elle n’a pas le temps de voir qui dit quoi. Les autres enfants lui proposent de parler plus doucement et le débat reprend. Mais au bout de quelques minutes, le même problème survient de nouveau. Les élèves me demandent alors de modifier le mode de fonctionnement du débat. Ainsi, parce que les élèves sont pris dans une activité qui rencontre quelques soucis de fonctionnement, ils cherchent tous à essayer de résoudre le problème. Les élèves s’avèrent tous intéressés et soucieux du bon fonctionnement du dispositif, c’est pourquoi chacun s’investit dans la recherche de solutions. Ils sont alors des élèves acteurs de leurs apprentissages, dans la mesure où ils sont responsables de ceux-ci et en développant leur capacité de gestion d’un groupe dans une activité. Au cours de ces différentes séances, on laisse la possibilité aux enfants de discuter du bon fonctionnement d’une activité, et éventuellement de le remettre en cause et de proposer des solutions. Cependant, il faut toutefois faire très attention de ne pas mélanger les situations où les élèves sont en mesure de discuter une répartition ou une décision prise par l’enseignant, ces moments-là doivent être clairement indiqués, de situations imposées par l’enseignant seul et que l’élève doit apprendre à respecter. Ainsi, les moments d’analyses, de discussions et de propositions des élèves seront indiqués par l’enseignant et clairement délimités.

2) Développer une attitude responsable face à une situation : la proposition de solutions…

Les élèves de primaire étant considérés comme de futurs citoyens, ceux-ci seront amenés à gérer la société future, gérer des groupes, des situations, et devront pour cela avoir une attitude responsable par rapport à l’ensemble de cette société. C’est ce qu’avancent les partisans en faveur de la pédagogie de projet, c’est d’apprendre aux enfants à s’autogérer. Or il s’agit d’une attitude responsable que celle de proposer des solutions pour améliorer une situation donnée, et c’est dans cette optique que certaines activités sont proposées aux élèves.

• Apprendre à se répartir les tâches

Il s’agit toujours des élèves de cycle 3 d’une classe multiniveaux en milieu rural. Ces derniers sont mis en situation problème : en sciences, ils ont un temps imparti pour effectuer différentes tâches. Le temps laissé à leur disposition est volontairement trop court et ne leur permettra pas d’accomplir toutes les tâches souhaitées. Ils travaillent par groupe de trois, un élève de CE2, un élève de CM1 et un élève de CM2. Ils doivent lire un ensemble de documents concernant les déchets ménagers (sans dessin ni illustration ludique), écrire un résumé de 5 lignes concernant ces documents, et faire un schéma explicatif simple. On suppose alors que les élèves voudront tous écrire ou faire le schéma, mais que peu seront intéressés par la lecture de documents. Je m’attend à ce que les élèves ne se répartissent pas les tâches afin de gagner du temps mais qu’ils s’intéressent tous à l’activité la plus ludique : le schéma. Les élèves sont laissés en autonomie durant 20 minutes, puis un bilan est effectué avec une moitié de classe (cette activité fonctionne en alternance avec une activité de chant, cela permet plus d’implication de la part de l’enseignant quant au bilan qui est effectué), puis avec l’autre moitié de la classe. Seul un groupe a eu le temps de tout faire. Les autres élèves se posent la question de savoir comment ils ont fait. Je guide alors la réflexion des élèves en leur demandant de réfléchir à la façon dont ils auraient pu s’y prendre pour réussir aussi.

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Les remarques émergeant prioritairement concernent une question de niveau : les CM2 lisent et écrivent plus vite, il aurait fallu qu’ils lisent tout puis qu’ils expliquent aux autres membres de leur groupe. Les difficultés qui ont pu être rencontrées concernent des élèves qui voulaient tout faire et ne laissaient pas d’activité aux autres. Dans certains groupes, les conflits et le refus de travailler en groupe avec certains de leurs camarades ont été un frein à cette activité. Le groupe ayant réussi tout le travail expose a posteriori leur technique : ils se sont partagé les documents à lire, ont échangé oralement des contenus de chaque écrit, puis se sont partagé les tâches, l’écriture allant au CM2 (celui-ci écrivant plus vite) sous la dictée d’un autre élève, le troisième s’occupant du schéma. En analysant cette activité, on peut donc dire que certains élèves ont déjà su avoir un comportement responsable et ont appris à déléguer, à se partager les tâches. Cependant, ce n’est pas le cas de la plupart des élèves. Il s‘agirait peut-être de formaliser les remarques ayant été faites concernant le travail de groupe et la délégation des tâches afin de pouvoir réitérer ce type de situation plusieurs fois (même modèle de fonctionnement) à différents moments dans l’année et de pouvoir induire ce type de raisonnement à l’avenir chez ces élèves. Toutefois il ne m’a pas été permis de renouveler l’expérience avec ces élèves par manque de temps. Il aurait été intéressant de voir si les stratégies mises en place avaient évolué.

• Les règles en EPS

Développer la responsabilité des élèves c’est aussi leur laisser l’opportunité de gérer des situations, de proposer un nouveau mode de fonctionnement sur lequel reposeront leurs apprentissages. Pour cela, il faut alors laisser les enfants face à des situations relativement peu cadrées, afin que ceux-ci puissent y greffer leurs propositions. On considère que les propositions devront naître de l’analyse d’une situation, une analyse claire et objective. C’est dans ce but que j’ai proposé des séances d’EPS en lien avec des débats. Je demande à ce que trois équipes soient composées, libre choix est laissé aux élèves pour la composition de celles-ci. Seul le but du jeu est annoncé aux élèves : aller marquer dans le camp adverse, par le biais de dribles ou de passes. Les limites du terrain et des cages sont matérialisées par des plots. J’annonce 4 minutes de jeu, en précisant que je ne m’occuperais que du temps de jeu. Aucune remarque n’est faite par les élèves, le jeu peut donc commencer. Deux équipes s’affrontent. A plusieurs reprises, il y a quiproquo, altercations dues à des contacts, et contestation des points marqués. A chaque difficulté rencontrée, les élèves se tournent vers moi et me demandent de trancher. Je réponds alors que mon rôle est de m’occuper du temps de jeu, ce dont je m’acquitte, mais pas de décider pour eux. La situation est de plus en plus tendue, les élèves grognent et s’attaquent les uns les autres. Certains élèves refusent de prendre part au jeu, car ils ne trouvent pas justes les décisions prises par les autres. J’écourte le jeu de 30 secondes, note le score et lance le deuxième match. Les mêmes comportements sont observés, cependant, en plus, les élèves spectateurs prennent partie pour les uns ou pour les autres. Le score est inscrit bien que contesté, et le troisième match est enfin lancé. Après avoir noté le dernier score, un classement est établi et nous rentrons dans la salle de bibliothèque (cette salle est utilisée pour les débats, la musique, les arts visuels et toutes les activités qui ne nécessitent pas d’être à sa place).

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Les élèves apparaissent tous excédés et il y d’énormes tensions, d’autant plus qu’il s’agit déjà d’une classe qui a des difficultés à vivre ensemble. Le but de l’activité était de faire prendre conscience aux élèves de la nécessité de définir des règles et des responsabilités à des individus dans certaines situations. Je cherchais implicitement à suggérer aux élèves de proposer des changements, comme la mise en place de règles supplémentaires et de rôle d’arbitre. Je ne pensais pas que la situation serait aussi tendue et j’aurais peut-être pu cadrer un peu plus le jeu. Chaque classe étant unique, je pense qu’il s’agit pour l’enseignant de mesurer la situation. Je propose alors aux élèves de discuter de la situation de jeu qu’ils viennent de vivre. J’ai proposé aux enfants de nous installer dans la salle de débat et de faire des propositions afin d’améliorer l’organisation de la séance d’EPS suivante. Tous les élèves parlent en même temps et se critiquent les uns les autres. Je propose donc de faire un relevé des dysfonctionnements en écrivant au tableau les remarques des élèves. Les élèves ont du mal à cerner ce qui n’allait pas, « c’est un peu tout » me disent-ils. Je décide donc d’attaquer le problème sous un autre angle et leur demande quelles sont les solutions qu’ils proposeraient pour améliorer la situation de jeu. Je note au tableau les propositions des élèves. Il s’agit davantage de proposer aux élèves une analyse de leur propre pratique et la mise en place d’un dispositif afin de remédier à une situation-problème. Les propositions émanant directement des élèves, ils prennent ainsi conscience de la nécessité de se gérer et d’imposer des règles. Ils mettent en jeu par ce biais leur responsabilité et apprennent à s’engager dans des projets et à les respecter jusqu’au bout. Ils ont alors la responsabilité d’un bon déroulement de séance pour la fois suivante. Je m’attendais à ce que les propositions restent timides et ne soient pas approuvées de tous. En réalité, il y a eu beaucoup de propositions qui ont été difficiles à canaliser et il a fallu que j’intervienne afin de pouvoir en garder des traces (au tableau). Sinon, les propositions étaient entendues par une partie seulement de la classe, étant donné le bruit et ne pouvaient donc être discutées et approuvées par tous. Voici la liste des propositions faites par les élèves :

� Les arbitres

� il faut des arbitres : un arbitre dans chaque équipe un arbitre dans l’équipe opposée pour défendre les intérêts : cette proposition est très largement discutée, les élèves décident donc de voter. Il y a 6 voix pour et 8 voix contre, cette proposition est donc abandonnée. � doivent être plus sévères, et faire plus attention � doivent parler fort pour se faire entendre (sinon on n’entend rien) : il leur faut un sifflet.

� Les joueurs

� Ne pas se toucher, se rentrer dedans, se pousser, se marcher sur le pied � Ceux qui ne sont pas contents jouent quand même (les « mauvais joueurs ») ou bien ils sont éliminés � Il faut des chasubles colorées pour se reconnaître � Elimination des joueurs s’ils ne respectent pas les règles � Ne pas tricher � Jouer en équipe : il faut faire la passe à tous les joueurs pour que le point compte (sinon il y

en a qui n’ont jamais la balle) � Le capitaine d’équipe doit être juste (pas de « vendu »)

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En analysant cette situation, on peut noter que la période de discussion s’est avérée très riche. Tous les élèves ont participé, même les plus timides. Leur implication dans l’amélioration d’une situation de jeu était réelle. L’activité a permis de développer leur sens critique face à une situation, des comportements. Il leur a fallu raisonner et proposer des règles permettant une meilleure gestion du jeu, ils sont donc responsables du bon déroulement de la séance à venir au cours de laquelle ils devront mettre en place leurs propositions.

• Le débat au cycle 3 Dans la même optique, des séances de débats sont soumises aux enfants. Les élèves de cette classe pratiquent régulièrement le débat et en connaissent donc déjà certaines règles. Leur organisation habituelle consiste à tirer au sort dans une boîte à chaussures un sujet qui sera traité lors du débat. Il y a un ou une secrétaire chargé(e) de noter ce qui se dit lors de la séance afin de pouvoir en conserver une trace écrite. L’enseignant a pour habitude de rappeler que l’on doit s’écouter les uns les autres et ne pas tous parler en même temps. Au début de cette première séance en ma compagnie, je n’ai ajouté aucune contrainte supplémentaire. Un élève a tiré un sujet. D’un commun accord avec tous les élèves, le sujet choisi a été abandonné car il n’était pas considéré comme un véritable sujet de débat, il n’y avait pas matière a discussion. Il a fallu plusieurs pioches avant d’obtenir un sujet qui prêtait matière à débat. Le sujet en question relatait l’histoire d’une rencontre entre deux hommes, dont un était affaibli du fait qu’il était porteur de la mucoviscidose. Les deux hommes finissaient par se battre et l’homme malade mourait à la suite à un coup reçu. Je m’attendais à ce que les élèves prennent tous la parole en même temps et que ça rende difficile le travail de la secrétaire. En effet, au bout de quelques minutes, le son monte et les élèves parlent en même temps. La secrétaire leur demande alors de ralentir car elle n’a pas le temps de tout noter. Je suis alors intervenue en leur demandant quelles pourraient être les solutions qui permettraient de réguler le taux de paroles. Plusieurs propositions émergent : lever le doigt avant de parler, c’est la maîtresse qui désigne celui qui parle, dire son prénom avant de prendre la parole. C’est à ce moment-là que j’ai proposé aux enfants de mettre en place un ou une présidente de séance qui serait chargé de donner un bâton de parole. Il a fallu expliquer aux enfants ce qu’était un bâton de parole, ce qu’il représentait, puis le débat a repris après avoir désigné le président. Le débat s’est alors trouvé plus coupé, comme interrompu dans son élan, mais en même temps beaucoup approfondi dans les réflexions. Il aurait peut-être été plus judicieux de laisser tester leurs propositions par les élèves et d’observer ensuite qu’il était toujours difficile de prendre la parole ou de prendre note, et de leur suggérer de donner d’autres propositions plutôt que de leur donner directement la solution. En effet, faire participer les enfant dans l’élaboration d’activités implique une mise en pratique de leurs propres propositions. La difficulté majeure que peuvent rencontrer les enseignants, c’est qu’ils avancent en terrain inconnu, ils ne peuvent prévoir à l’avance quelles seront les propositions des élèves, la façon dont se déroulera leur séance ; seul le point de départ est connu, pas le point d’arrivée.

• L’élaboration des règles de vie au sein d’une classe marocaine

En effet, si la responsabilisation des élèves apparaît dans les programmes français, elle est aussi un objectif de nombreux programmes étrangers. C’est pourquoi responsabiliser les enfants était également mon objectif lors de mon stage effectué dans une classe marocaine de CE2.

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Lors de mon premier jour d’enseignement dans une classe de CE2 au Maroc (intitulée CE3 là-bas), le déroulement des séances s’est avéré relativement difficile, du fait d’une organisation générale peu cadrée et d’un fonctionnement assez différent du système français traditionnel. En effet, les prises de parole des élèves n’étaient pas organisées, ils parlaient tous en même temps, et des situations entre les élèves perturbaient le bon fonctionnement de la classe. C’est pourquoi je décidais, dès le lendemain, de prendre un temps de réflexion avec les enfants afin de leur demander leur ressenti quant à cette première journée, et de voir si les dysfonctionnements avaient été repérés par les enfants. Il a donc fallu les inviter à analyser leur propre comportement de la veille, et les aider à mettre des mots dessus. « Qu’avez-vous pensé de notre première journée ? Trouvez-vous qu’elle s’est bien passée ? Quelque chose vous a-t-il gêné ? » Les élèves m’ont tout d’abord répondu que la journée s’était bien passée. En effet, aucun événement marquant n’a eu lieu. Afin de ne pas se contenter d’un ressenti des élèves, je les invité à réfléchir à la construction des cours. « Qu’avez-vous pensé des cours en eux-mêmes, le fonctionnement est-il le même que d’habitude ? Tout a-t-il bien marché ? » La plupart des élèves ont fait remarqué que le fonctionnement était quelque peu différent mais que rien dans l’ensemble ne différait radicalement. Cependant, quelques élèves ont dit qu’ils n’avaient pas tout entendu, qu’il y avait eu trop de bruit. J’ai seulement répété ce que les élèves m’avaient dit sans rien ajouter d’autre. C’est alors que d’autres élèves ont ajouté qu’il y avait des élèves qui se battaient et que cela les avait dérangé pour suivre les cours. Puis on m’a dit que, étant donné que tous les élèves parlaient en même temps, on ne comprenait pas toujours ce qui était dit, voire que certains élèves criaient et que ça leur cassait les oreilles. J’ai donc décidé de partager mon tableau en deux et de noter dans la colonne de gauche toutes les remarques concernant ce qui avait rendu la classe impossible. Après avoir listé toutes les remarques, je leur demandais de caractériser une telle école, d’essayer de me trouver un adjectif qui la décrirait le mieux. Malgré un temps de réflexion, les élèves ne faisant aucune proposition, je décide de proposer « l’école infernale ». Etant donné que le français est leur deuxième langue, il faut alors leur expliquer ce que j’entends par « infernale ». Je leur propose ensuite de mettre en face de toutes leurs remarques des solutions à ces problèmes, ce qu’il conviendrait de faire. Pour commencer, plusieurs élèves me proposent les mêmes phrases mais en employant la tournure négative. J’en écris quelques unes, puis je leur demande de me proposer de nouvelles phrases et non des tournures négatives. Les propositions sont assez longues à venir mais une fois que les élèves ont bien compris ce qu’il s’agissait de faire, une foule de propositions émergent. Je leur demande alors quel titre ils pourraient donner à cette partie. « Une école où tout se passe comme c’est écrit au-dessous, comment pourriez-vous la caractériser ? Comment est-elle cette école ? » Les élèves me proposent : une école « agréable ». Ces deux feuilles vont alors constituer notre règlement de classe (cf.annexes III, IV, VII et VIII). Les enfants ont donc dû opérer un retour sur les comportements gênants de la veille et les nommer afin de pouvoir les répertorier. Le même travail est effectué avec le deuxième groupe l’après-midi. Une affiche différente est faite pour chaque groupe, en fonction de ce qui m’a été dicté.

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3) Des traces écrites et des propositions équitables pour tous

• Institutionnaliser leurs propositions En effet, il est important de concrétiser les propositions des élèves afin qu’elles aient une valeur à leurs yeux. En effet, faire des propositions, analyser une situation juste pour l’analyse n’est pas le but, car, comme je l’ai déjà mentionné, les élèves ne s’impliquent que s’il y a une véritable utilité liée à l’activité. C’est pourquoi leurs propositions doivent être institutionnalisées. Lors de mes séances d’EPS, le règlement proposé par les élèves était relu avant chaque séance afin de se le réapproprier, puis rediscuté et modifié à la fin de chaque séance. De même, le règlement de la classe élaboré à l’aide des propositions des enfants a été présenté sous forme d’affiche et accroché au mur de la classe, afin qu’il prenne toute sa valeur de règlement officiel. En revanche, le fait de ne pas avoir institutionnalisé les remarques faites à la suite des séances de sciences quant à la répartition des tâches, fait que cette séance n’a pas eu la valeur d’auto-analyse qu’elle aurait dû avoir aux yeux des élèves. En effet, j’aurai dû étendre ces remarques à l’ensemble des activités de classe, et peut-être les écrire quelque part afin de les décontextualiser et donc de les généraliser. Un travail ultérieur rappelant l’utilité de ces remarques aurait été important afin de démontrer l’utilité de cette analyse. Il apparaît donc essentiel, avec du recul, de montrer aux enfants l’importance de leurs remarques et de leur implication dans la gestion de leur travail afin de maintenir leur intérêt.

• Responsabilité des élèves par rapport à l’ensemble d’un groupe.

La responsabilité d’un individu et sa capacité à gérer une situation se mesure principalement par rapport à autrui. C’est l’interaction entre les individus qui permet de valider ou d’invalider un comportement responsable. Etre responsable c’est aussi prendre en compte toutes les parties et respecter des décisions. Aussi, il est important de mettre en place des situations où les dysfonctionnements sont plus ou moins apparents, afin que tous les élèves puissent les remarquer et prendre part aux propositions et à l’organisation future .D’autre part, il me parait essentiel de toujours maintenir des situations d’expression, d’échanges entre les élèves pour élaborer des solutions, cela évite d’une part le monopole de l’enseignant quant aux solutions à proposer, et cela permet d’autre part à l’enfant de s’inscrire dans un modèle de groupe. En effet, les décisions adoptées ne se font pas uniquement pour quelques élèves mais pour l’ensemble de la classe et doivent donc satisfaire l’ensemble du groupe classe. L’enseignant reste toujours présent et peut guider certaines discussions mais il ne doit en aucun cas imposer des solutions. Les élèves sont ainsi amenés à opérer le cheminement suivant : ils pratiquent une activité, relèvent des dysfonctionnements, en font un bilan et notent les difficultés rencontrées, proposent des solutions afin d’améliorer la situation, les notent sur feuille, puis mettent en pratique lors d’une deuxième séance, et enfin analysent leurs comportements, le respect des solutions proposées. Ils apprennent ainsi à gérer une situation de façon autonome, en étant responsables du bon déroulement de leurs apprentissages.

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Quelques-unes des activités proposées sont inspirées des situations analysées par Francis Imbert. C’est à chaque fois ce souci d’équité, de respect, d’écoute de l’autre qui a été le centre de mes préoccupations lors de toutes les activités précédemment citées. La plupart des situations ont été appliquées dans des classes de cycle 3, cependant, en adaptant quelque peu certaines situations, celles-ci sont applicables dès le cycle 1. C’est le cas par exemple de la situation concernant les métiers, l’organisation de la classe (chaque métier utile dans l’organisation de la classe est répertorié, puis selon un calendrier défini avec les élèves, certains élèves sont responsables tour à tour d’un métier). Chaque élève sera amené a être responsable de l’appel, des « nounours », de la météo, du goûter etc… Après la mise en place des dispositifs proposés par les élèves, le plus important reste de revenir régulièrement sur ces dispositifs afin qu’ils ne soient pas figés, qu’ils évoluent. Le plus important pour les élèves est de prendre conscience qu’aucun dispositif n’est infaillible, n’est parfait, et que son but est d’évoluer en même temps que les élèves eux-mêmes et leurs pratiques. C’est ce que j’ai tenté de mettre en place lors de mes stages et dont l’analyse se trouve dans la deuxième partie de ce mémoire.

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2ème PARTIE : un dispositif en perpétuelle évolution…

La participation à l’élaboration de règles et de responsabilités est une chose, mais pouvoir dépasser ce stade en analysant les situations vécues dans le but d’améliorer le fonctionnement va au-delà et permet une évolution constante des responsabilités. L’enfant apprend alors à remettre en question la pratique de ses camarades et surtout à se remettre lui-même en question, ce qui est beaucoup plus compliqué. Après avoir pris part à l’élaboration, il doit apprendre à respecter les responsabilités établies, que ce soit les siennes ou celles des autres. C’est l’ensemble de ces deux choses qui amènent l’enfant à se responsabiliser. C’est en tout cas ce que stipulent les programmes en incitant à développer chez l’enfant l’exercice de sa responsabilité, en prenant bien soin de distinguer ses droits de ses devoirs (ce qu’il peut faire de ce qu’il doit faire ou qu’il est interdit de faire). En établissant, collectivement, en groupe ou individuellement, un corpus de règles à appliquer, l’élève se créé du même coup un ensemble de devoirs à respecter. C’est donc une analyse de la séance avec le recul et le rappel des règles qui étaient à respecter qui va permettre à l’élève de se situer par rapport au cadre qui lui était donné. Il faut alors laisser à l’élève une marge de manœuvre (quelques séances à chaque fois suivies d’une analyse de son comportement) afin qu’il puisse réajuster son activité par rapport à celle qu’il s’était préalablement fixée. Les modifications que les élèves ont proposées touchent à la fois à des problèmes de citoyenneté, tels que le respect des règles établies, le respect d’autrui, l’égalité de tous, mais également à des problèmes relevant de l’organisation de leur projet et de la praticabilité, de la viabilité de celui-ci.

1) Favoriser l’égalité des chances de chacun face à une situation

Dans des situations laissant aux élèves la possibilité de mettre en place des dispositifs, il faut s’assurer que ces dispositifs ne soient pas en faveur de certains élèves et au détriment d’autres. En effet, une discussion après avoir mis en pratique ces activités permet de recentrer les intérêts collectifs et peut-être d’éviter de laisser des élèves de côté. C’est ce qui a été fait après les séances d’EPS avec la classe de cycle 3. Les plus forts dans ce type de jeu s’étaient distingués et imposés au profit d’élèves plus discrets. Il était donc nécessaire de savoir si tous les élèves s’avéraient satisfaits de cette situation, et pour cela j’ai organisé une discussion. La discussion a eu lieu dans la salle de débat. Lorsque j’ai demandé si tous étaient satisfaits de ce qu’ils avaient mis en place, les réponses ont été plutôt timides. Les enfants les moins timides, souvent les mêmes que ceux qui s’imposaient lors du jeu, clamaient à haute voix le bon fonctionnement, tandis que des élèves discrets avaient plutôt les réflexions suivantes : « bof », « je sais pas ». Je leur proposais donc de reprendre la liste des règles et responsabilités à respecter et de donner leur avis point par point. Ils devenaient alors acteurs dans leur discussion et je m’effaçais.

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Le point le plus contesté a été celui concernant le jeu en équipe : des élèves se sont plaints de ne pas avoir touché la balle durant tout le match. Les meneurs leur ont alors rétorqué qu’ils étaient nuls et que s’ils leur avaient envoyé la balle, ils auraient perdu à coup sûr. Les élèves de CM2 ont alors rappelé aux meneurs que l’envoi des balles à tous les joueurs faisait partie des règles établies et qu’ils se devaient de les respecter sous peine d’exclusion du jeu. Ainsi, le fait d’avoir des élèves de plusieurs niveaux a permis de réaffirmer certaines règles par le biais des plus grands, garants ici des règles qu’ils s’étaient fixées. De même, le respect concernant les contacts entre les joueurs a été rappelé. Plus discuté encore, le rôle de l’arbitre a été redéfini, précisé, et les devoirs de celui-ci lui ont été rappelés. En effet, la plupart des élèves avaient noté que l’arbitre désigné avait été influençable, pas toujours équitable, et ne savait pas toujours se faire respecter. Les élèves ont alors proposé de nommer un arbitre en chef parmi l’équipe d’observateurs, et des arbitres suppléants pour le conforter dans ses choix si nécessaire. On peut donc dire que ces élèves ont su faire évoluer leur dispositif afin de l’ajuster au mieux à leur pratique, même si le début de la discussion a été difficile. Les failles de leur précédent dispositif ont été relevées et corrigées. C’est en construisant l’autocritique de leurs propositions précédentes et en acceptant de les modifier que ces élèves ont fait preuve de responsabilité. Ainsi, en parallèle aux apprentissages relatifs à l’EPS concernant les jeux d’opposition collective, cette situation socialisante a été utilisée à des fins de responsabilisation. Il est apparu, dans cette situation, qu’en plus d’un souci d’équité, il était nécessaire de revenir sur le respect des règles proposées par les élèves, d’apprendre à s’y tenir, ou bien d’analyser pourquoi elles ne sont pas forcément applicables.

2) Un retour régulier sur les règles établies

En effet, j’ai pu constater que lorsque des propositions avaient été faites concernant l’élaboration de règles de fonctionnement, il était indispensable lors des séances suivantes de les rappeler. Ceci dit, il est encore plus intéressant de proposer aux élèves d’en prendre conscience en discutant en fin de séance de ce qui a marché ou non. Cela permet aux élèves une auto-analyse de leurs comportements, afin de développer leur sens critique vis-à-vis d’eux-mêmes. C’est justement cette remise en question qui pose problème chez les enfants (et même encore chez certains adultes), c’est d’accepter la critique face à leur comportement ou leur réaction dans telle ou telle situation. Lors de la séquence d’EPS et du débat pratiqué avec les élèves de cycle 3, il est apparu récurrent que les règles établies n’étaient pas respectées. En effet, des règles telles que la touche obligatoire du ballon par tous les élèves d’une même équipe avant de marquer le point avaient tendance à être oubliées par les élèves meneurs dans ce jeu et pour qui le souci primordial était de marquer. Finalement, les autres élèves étant agacés, ils ont proposé de mettre en place des aides pour l’arbitre afin de le soutenir dans ces décisions, de l’aider à faire respecter toutes les règles. Le fait d’avoir à faire à plusieurs personnes en ce qui concerne les règles du jeu était plus impressionnant, et donc incitait davantage au respect de celles-ci. Ainsi, les élèves ont su faire évoluer leur dispositif en permettant un rappel et une application plus rigoureuse des règles par le biais de l’augmentation du nombre de personnes chargées de ce respect.

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Lors d’une séquence d’arts visuels avec des élèves de CP, le même problème a été rencontré, mais davantage sur un plan matériel. En effet, lorsque l’on fait de la peinture, et qui plus est avec des élèves de cycle 2, il apparaît indispensable d’établir des consignes de déroulement afin d’éviter les catastrophes. Il avait été établi, avec l’aide des enfants, quelques règles simples et brèves contribuant au bon déroulement de la séance. Les consignes étaient les suivantes :

- mettre la feuille de dessin au milieu du papier journal, sur sa table - tenir le pot de peinture avec une main quand on trempe son pinceau dedans (gestuelle pour

montrer aux enfants) - égoutter son pinceau sur les bords du pot en tenant bien celui-ci avant de peindre - toujours faire attention à son pot de peinture, le laisser au milieu de la table

Au cours de la première séance, un élève a renversé son pot de peinture avec son coude car le pot était au bord de la table, et lorsqu’il s’est retourné, il a heurté le pot. Le travail de tous les autres élèves en a été stoppé, puisqu’il a fallu nettoyer. Lors de la séance suivante, les règles étaient affichées, mais un accident de pot de peinture similaire au premier s’est produit. Lorsque j’ai demandé aux élèves ce qu’il aurait fallu faire ils m’ont répondu que l’élève en question aurait dû relire les consignes, mais eux-mêmes étaient incapables de me les rappeler. C’est pourquoi je leur ai suggéré de les relire ensemble afin de se les réapproprier. Lors de la dernière séance, ils m’ont alors demandé spontanément de relire et de montrer ensemble ce qu’il était conseillé de faire, ce que nous avons fait, et aucun accident de peinture n’a été à déplorer au cours de cette séance. Ainsi, les enfants ont su analyser leurs manques et, par un rappel régulier de ce qui a été établi, ont mis en place un déroulement pour pallier à ces manques. Une telle analyse suppose que les enfants reconnaissent qu’ils ont besoin de répéter les consignes, ce qui implique déjà un travail sur eux. Le respect des règles établies par les élèves leur donne également une valeur officielle. En effet, si ces propositions ont été faites c’est qu’il y avait une raison, c’était dans le but d’améliorer une situation. C’est pourquoi il est important d’essayer de les respecter, pour montrer qu’elles ont une valeur et des conséquences sur la vie de la classe. C’est le cas notamment avec le règlement de classe créé avec les élèves de CE2 au Maroc. En effet, ce règlement étant né d’une situation ayant posé problème à tous, il était important que ces règles soient prises en compte afin de permettre un climat de travail plus propice. Or, dès le lendemain de sa proposition, ce règlement avait été oublié, et les règles semblaient ne plus exister. C’est pourquoi j’ai proposé aux enfants de discuter ensemble de ce problème, voyant que les mêmes difficultés que celles du premier jour commençaient à se poser. Je leur ai demandé pourquoi nous avions écrit ceci, quel était son but. Les enfants ont su me rappeler que c’était pour permettre des conditions de travail favorables, que cela permettait de mieux s’entendre tous ensemble. Je leur ai demandé s’ils avaient fait attention à respecter ce règlement ce jour-là, et si non, je leur ai demandé pourquoi. C’est alors qu’ils m’ont dit qu’ils avaient oublié. Je leur ai proposé de trouver une solution qui permettrait de résoudre ce problème. Les élèves ont soumis l’idée de nommer un responsable de règlement qui serait chargé de faire respecter le règlement, de punir. J’ai retenu leur proposition tout en expliquant que l’on n’était pas obligé d’aller jusqu’à la punition, que l’on se contenterait de nommer un responsable de règlement qui serait chargé de nous informer chaque fois que le règlement ne serait pas respecté. Les élèves à qui ont été confiées ces missions ont eu du travail la première semaine, avec des rappels réguliers, puis de moins en moins au fil des semaines. Ainsi, les élèves avaient réussi à s’approprier leur dispositif, tout en effectuant quelques changements.

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On peut donc dire qu’un retour régulier sur leurs propositions permet aux élèves d’avoir une attitude plus responsable en respectant un dispositif établi collectivement.

3) La prise de responsabilités : des situations formatrices

Le fait d’établir par eux-mêmes un mode de fonctionnement donne confiance aux enfants, les incite davantage à participer et stimule leur intérêt. Ça les responsabilise en les rendant acteurs de leurs apprentissages. Lorsque des rôles sont définis afin de participer au bon fonctionnement d’une activité, ceux-ci s’accompagnent de droits et de devoirs que l’élève s’engage alors à respecter. Occuper de tels postes sont des situations on ne peut plus responsabilisantes aux yeux des élèves dans la mesure où ils ont une place à tenir, un statut reconnu par les autres élèves. C’est pourquoi il est important que tous les élèves, à un moment où à un autre, occupent ce genre de poste. Ils apprennent ainsi à être les garants d’une situation, à être responsables. C’est ce que j’ai tenté de mettre en place avec les élèves de CE2 au Maroc. Compte tenu du temps perdu à aller chercher les cahiers, à distribuer ou à ramasser des copies, à chercher des mots dans le dictionnaire, ou encore à faire l’appel dans une classe où je ne connais pas les élèves, je leur ai demandé de m’aider. « Comment pourriez-vous m’aider ? Que pourrait-on faire ? ». Les enfants m’ont proposé de lister toutes les activités qui pourraient être déléguées, et de les attribuer à un élève. Je listais donc au tableau les « métiers » (cf.annexes 5 et 6). Nous avons alors entamé une discussion concernant la répartition de ces activités. Les élèves m’ont proposé de donner une activité à un élève, et ce pendant toute la durée de mon séjour, c’est-à-dire trois semaines. Je leur ai répondu que si l’on choisissait cette solution, tous n’auraient pas quelque chose à faire. Ils m’ont proposé de changer tous les jours, je leur ai aussitôt demandé depuis combien de temps nous avions commencé, et de réfléchir si nous avions le temps tous les jours de procéder à la répartition des tâches puis de travailler. Les élèves ont alors proposé d’attribuer une tâche à un élève chaque semaine. Il y a sept tâches différentes, par conséquent, tous les élèves passeront au cours des trois semaines (cf.annexes I, II, V et VI). Lors de la première semaine, je décide d’attribuer la lourde tâche de responsable de règlement à une élève sage et disciplinée. Elle s’acquitte parfaitement de sa tâche. Mais au moment de l’attribution des tâches lors de la deuxième semaine, je décide d’attribuer cette lourde responsabilité à un élève qui justement ne respecte jamais le règlement et s’avère plutôt indiscipliné. C’est alors que je vois le comportement de cet élève changer radicalement. Investi d’une responsabilité et garant du bon fonctionnement de la classe, il s’avère être responsable et le respect du règlement lui tient à cœur. Ainsi, lui accorder un statut de responsable a été bénéfique et a modifié son comportement. Lors de la dernière semaine, je décide de nommer responsable du règlement un autre élève assez agité, mais ces nouvelles responsabilités ne modifieront pas son comportement. Ainsi, on peut donc dire que l’attribution de responsabilités importantes à un élève agité peut tendre à le responsabiliser. On peut supposer que c’est un élève qui doit être motivé et impliqué dans les situations de classe pour qu’il reste attentif. En revanche, on ne peut pas affirmer que de donner des responsabilités à un élève tendra toujours à le responsabiliser, ce n’est pas toujours vrai, mais cela peut y contribuer. Les élèves de ces deux classes de CE2 ont été très impliqués et attentifs quant à l’attribution et au respect de ces tâches, ce qui prouve leur intérêt dans la gestion de leur classe, de leurs apprentissages.

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4) Un dispositif en perpétuelle évolution

Savoir remettre en question, c’est aussi savoir analyser des situations, et savoir apporter des modifications en vue d’améliorations. En effet, il apparaît essentiel de faire prendre conscience aux enfants que ce qu’ils peuvent créer ou proposer n’est pas infaillible ni forcément parfait, mais qu’il est important de savoir revenir dessus pour le compléter, le modifier, l’améliorer. C’est ce que je me suis efforcée de faire lors des séquences prévues à cet effet.

• Un réajustement régulier en EPS Il s’agit des séances d’EPS et de débat mises en place avec les élèves de cycle 3. Trois équipes sont composées et, sur proposition des élèves faite lors de la séance précédente, les trois équipes devront se doter d’un chef d’équipe qui sera alors chargé de défendre les intérêts de l’équipe chaque fois que cela sera nécessaire. Ce dernier sera également responsable de la gestion de l’équipe (éventuels conflits, attribution de tâches spécifiques…). Mon aide est sollicitée et, dans un premier temps, je les laisse essayer de trouver un chef d’équipe qui satisfasse tout le monde, puis devant l’impossibilité des élèves de trouver une solution, je les aiguille vers un choix par vote avec le plus grand nombre de voix. Les chefs d’équipe sont ainsi désignés, et le jeu est lancé. Mon hypothèse est qu’il y aura une meilleure gestion des équipes que lors des séances précédentes et je suppose qu’il s’agira d’un travail d’équipe, les joueurs coopérant les uns avec les autres sous la direction des chefs. On peut supposer que le fait d’avoir élu eux-mêmes leurs capitaines stimule leur participation et le respect des règles. Or il n’en est rien. Quelques élèves, meneurs habituellement, n’ont pas été élus par leurs camarades et refusent catégoriquement de prendre part au jeu. Les autres élèves éprouvant des difficultés dans le jeu décident alors de revoir l’élection de leur capitaine et nomment alors les élèves qui refusaient de jouer. Le jeu reprend et les nouveaux capitaines s’avèrent très directifs avec leurs coéquipiers, cependant le jeu fonctionne. En somme, on peut donc dire que la distribution des rôles par les élèves seuls peut s’avérer dangereuse pour un fonctionnement équitable dans une classe car les élèves les plus forts s’imposeront face aux autres. Il serait bon de mettre en place un débat en prolongement de cette séance afin de discuter de leur pratique, de l’analyser et d’en proposer des remédiations possibles. C’est ce qui sera fait dans cette classe, l’analyse de cette activité se trouve dans la seconde partie du mémoire concernant l’auto analyse de leur pratique par les élèves. Cependant, on constate qu’une telle situation a été viable et a même très bien fonctionné en dépit des inquiétudes de l’enseignant et l’on pourrait alors se demander si les élèves, tout du moins ceux de cette classe, n’ont pas besoin d’un minimum d’encadrement pour les guider. Il s’agit en effet d’une classe qui a pour habitude un fort guidage dans les situations et leurs difficultés à s’autogérer en sont un exemple.

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• Des compléments réguliers

Avec les élèves marocains de CE2, lors des discussions tenues une fois par semaine concernant l’organisation de la classe et le déroulement de celle-ci, de multiples propositions sont faites afin de revenir sur des problèmes rencontrés, ou sur des ajouts à apporter. C’est le cas par exemple de l’appel. Chaque semaine un élève est chargé de faire l’appel et d’indiquer les absents de la classe. C’est alors que, au cours de la première semaine, une élève vient me voir et me demande de revoir le dispositif. En entrant en classe, je lui demande alors de m’expliquer ce qu’elle souhaite voir modifié. Elle me répond qu’habituellement, pour faire l’appel, il faut une feuille d’appel et que, par conséquent, le responsable d’appel, devrait être doté d’une feuille à compléter tous les jours. J’ai pris en compte sa remarque et j’ai construit des feuilles d’appel destinées au responsable en question (cf.annexes IX et X). On peut noter que l’élève a réfléchi à la situation en dehors de l’école, ce qui suppose un intérêt pour cette activité. Elle a su proposer un complément à une situation donnée et donc en provoquer le changement. D’autre part, le fait d’introduire une feuille d’appel tend à matérialiser la tâche de responsable d’appel, et on peut supposer que c’est la matérialisation des différentes tâches qui manque aux élèves. De même, lors de ces séances de discussion, de remise en question du fonctionnement de la classe, il est apparu que certaines règles avaient toujours du mal à être appliquées. Les élèves ont alors proposé d’introduire un système de couleurs qui permettrait de mettre en avant les règles les moins respectées, et celles qui le sont le mieux. Ainsi, il est décidé de mettre une flèche rouge assez voyante en face de la règle la moins respectée chaque semaine, afin de la mettre davantage en valeur, et une flèche bleue en face de la règle qui a été la plus appliquée. Cela inclut donc que les élèves analysent leur propre comportement et soient capables de repérer les difficultés, leurs points faibles, afin d’essayer d’y remédier au mieux. C’est cette capacité à s’auto-analyser qui est difficile pour les élèves, mais leur permet de mieux se connaître et donc de progresser.

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CONCLUSION En conclusion, nous pouvons dire que des situations responsabilisantes sont indispensables pour la formation des élèves en tant que futurs citoyens, pour aiguiser leur sens des responsabilités et leur apprendre à s’autogérer, ce qu’ils seront amenés à pratiquer par la suite. Ces situations responsabilisantes passent par une participation active de l’élève dans l’élaboration de dispositifs, une implication de celui-ci, une construction équitable, reconnue et utile pour l’élève, mais aussi et surtout par une remise en question permanente de ce qui a été fait, une analyse claire et objective de ces dispositifs. Les idées principales dont je me suis inspirée pour la réalisation de ces situations sont extraites des manuels de pédagogie coopérative et institutionnelle, au sein desquelles l’enfant occupe une place prépondérante de coopérateur et de participant actif dans l’acquisition de ses savoirs. « La classe coopérative, en lui permettant d’être en situation active, de faire ses propres expériences, en lui donnant l’information, en partageant les pouvoirs, donne les outils indispensables à l’enfant pour acquérir son autonomie, pour devenir un citoyen adulte capable de se remettre en question et de remettre en question. L’accès au savoir passe par la prise de responsabilités réelles, la maîtrise de la gestion, la construction non linéaire des connaissances, par une relation éducative où l’enfant […]est un producteur, un coopérateur qui prend en charge sa propre formation » («Pour une méthode coopérative d’éducation », p.41). Une telle pratique pédagogique implique de la part de l’enseignant une certaine souplesse dans la gestion de ses activités, et une acceptation de l’imprévu par rapport aux propositions des élèves. L’enseignant ne sait pas par avance quels seront les résultats de la séance, et cela peut parois l’inciter à être plus directif que prévu dans la conduite de séance. C’est une des difficultés majeures que j’ai éprouvée lors de ma pratique et à laquelle il faut que je remédie. De plus, un tel travail, en collaboration avec les élèves, est un travail à long terme, la responsabilisation de ces derniers ne s’effectue pas en une séquence, ni même sur une seule année, mais doit s’étendre à la scolarité entière de l’élève, en adaptant les responsabilités aux capacités des élèves, pas plus qu’ils ne peuvent en supporter, ni trop peu. Il s’agit alors d’avoir une équipe pédagogique en accord sur ce sujet. Progressivement, les enfants s’habituent à prendre en charge leur organisation. L’objectif est d’amener l’enfant à maîtriser toutes les données du travail, de l’organisation de la classe, et à s’organiser lui-même. Il apprend à gérer des situations, proposer des solutions et surtout, à remettre et à se remettre en question, éléments qui feront de lui un individu pensant et responsable. Nous avons vu les comportements de certains élèves évoluer au fil des semaines, il aurait été encore plus intéressant de les voir évoluer sur une année entière, si cela avait été possible. Je pense que la réalisation d’un tel écrit m’a permis d’appréhender le rôle d’enseignant d’un autre point de vue, et a modifié ma pratique vers un enseignement au sein duquel l’élève est encore plus acteur de ses apprentissages. Le futur citoyen qu’il est ne peut pas être le sujet de sa formation mais au contraire « un individu exerçant un engagement et une co-responsabilité dans sa propre formation. […] Comme le disait Platon dans La République, « un homme libre ne doit rien apprendre en esclave ». » (« Pour une méthode coopérative d’éducation », p.94). Je tiens à remercier tout particulièrement les élèves et les équipes pédagogiques des classes avec lesquelles j’ai pu mettre en place ces activités et sans lesquels l’écriture de ce mémoire aurait été impossible.

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Bibliographie :

� ouvrages :

• Eirick PRAIRAT, Questions de discipline à l’école et ailleurs …, collection trames, éditions Eres, 2003.

• Christian Mazurier et Claude Thiaudière, Pour une méthode coopérative de l’éducation, OCCE (Office Central de la Coopération à l’Ecole).

• Qu’apprend-on à l’école maternelle ? , SCEREN

• Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? , SCEREN

• Norbert BABIN, Programmes et pratiques pédagogiques pour l’école élémentaire, Hachette Education.

• Jean-Jacques ROUSSEAU, Du contrat social, éditions GF-Flammarion, 1966.

• Francis IMBERT, Médiations, institutions et loi dans la classe, 1995.

� périodiques :

• « Animation et éducation »

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ANNEXES

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I

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II

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III

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IV

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V

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RESPONSABILISER LES ELEVES : POURQUOI ET COMMENT ?

Résumé : L’école est un lieu de formation de l’élève en tant que futur citoyen responsable et autonome, il s’agit donc de s’interroger sur les pratiques pédagogiques les plus adéquates pour développer ces aptitudes. Il s’agit de se tourner vers les pédagogies coopératives et institutionnelles qui semblent les mieux adaptées, des pratiques où les apprentissages sont faits par et pour les élèves, où les élèves sont acteurs de leurs apprentissages Mots clés :

- Coopération scolaire - Pédagogie institutionnelle - Responsabilité - Autonomie - Relation entre élèves