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Université Ibn Tofail Faculté des Langues, des Lettres et des Arts Module : Analyse du discours Niveau : S5 linguistique Repères théoriques II Approches de l’analyse du discours

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Université Ibn TofailFaculté des Langues, des Lettres et des ArtsModule : Analyse du discours Niveau : S5 linguistique

Repères théoriques

II

Approches de l’analyse du discours

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Actuellement, le vocable discours désigne non seulement le discours oral mais aussi le texte écrit:

Il s'applique aux énoncés oraux et écrits produits dans une situation déterminée sous l’influence de facteurs

extralinguistiques complexes (facteurs sociaux, idéologiques, culturels…).

Le discours peut être considéré comme un prolongement de la linguistique.

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Le discours a aussi un prolongement dans la grammaire textuelle (la dimension transphrastique du discours/ trans = préfixe

du latin trans, au-delà, exprimant l’idée de changement, de traversée (Larousse)).

Il renvoie aussi à d'autres concepts comme « cohérence discursive » et « cohérence textuelle » qui résultent de la

combinaison d'une pluralité de structures transphrastiques réalisées dans des conditions de communication particulières.

Par conséquence, le discours (verbale et non verbale) est défini comme toute production d'énoncés accompagnés de leurs

circonstances de production et d'interprétation. Dès lors, l’objet de l’analyse du discours n’est plus ce que dit l’énoncé et le

texte, mais la façon dont ils le disent.

Du point de vue de la pragmatique (entre autres disciplines et approches), dont l’analyse du discours puise ses outils, le

discours/texte a des origines diverses qui dépassent celles d’origine linguistique.

Dans cette optique, le texte tout comme le discours consiste à combiner et à utiliser des énoncés pour réaliser des actes

sociaux.

Ainsi, le discours remplit-il trois fonctions :

- une fonction propositionnelle (ce que disent les mots) ;

- une fonction illocutoire (ce que l'on fait par les mots : féliciter, reprocher, ordonner, interroger....). Cette fonction permet

d'établir une relation entre les interactants ;

- une fonction perlocutoire (ou l’intention) dont l’objectif est d’agir ou chercher à agir sur l'interlocuteur.

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Compte tenu de ce qui précède, le discours est considéré par les théoriciens de l'énonciation et de la pragmatique comme

un ensemble d’énoncés envisagés dans leur dimension interactive, leur pouvoir d'action sur autrui, leur ancrage dans une

situation d'énonciation dont les paramètres sont : l'énonciateur, l'allocutaire, le moment et le lieu de l'énonciation.

Selon Dominique Maingueneau ‹‹tout discours peut être défini comme un ensemble de stratégies d'un sujet dont le produit

sera une construction caractérisée par des acteurs, des objets, des propriétés, des événements sur lesquels il s'opère…››.

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Les différentes approches en analyse du discours

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L'approche énonciative

L'intérêt accordé à l'énonciation s'explique par l'extension de l'objet même de la linguistique.

La prise en compte de tous les phénomènes liés aux conditions de production du discours apparaît comme pertinente pour

la compréhension du fonctionnement de la langue.

À l'origine de cette approche, Émile Benveniste qui :

1- propose une définition de l'énonciation : « mise en fonctionnement de la langue par un acte individuel d'utilisation » ;

2- sous-tend cette définition par une théorie générale des indicateurs linguistiques (pronoms personnels, formes verbales,

déictiques spatiaux et temporels, modalisateurs…) par le biais desquels le locuteur s'inscrit dans l'énoncé.

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Benveniste parle d’ «appareil formel de l'énonciation », qui permet le passage de la langue au discours.

Ainsi, selon lui, il suffirait à l’analyste d’être attentif à un acte par lequel le discours est produit pour se rendre compte que le

locuteur est le paramètre essentiel dans la mise en fonctionnement de la langue.

En d’autres termes, ‹‹Le locuteur s'approprie l'appareil formel de la langue et il énonce sa position de locuteur par des indices

spécifiques d'une part, et au moyen de procédés accessoires de l'autre ››.

L'appareil formel de l'énonciation contient les éléments d'ancrage des relations intersubjectives. ‹‹Dès qu'il(l’énonciateur) se

déclare locuteur et assume la langue, il implante l'autre en face de lui(...), postule un allocutaire(...). Ce qui, en général,

caractérise l'énonciation est l'accentuation de la relation discursive au partenaire, que celui-ci soit réel ou imaginé, individuel

ou collectif››.

Le sujet parlant : est le producteur effectif de l'énoncé, un être physique qui n'est pas réalisé dans l'énoncé lui-même

(Maingueneau).

Locuteur : il représente la personne à qui on impute la responsabilité d'un énoncé. Selon Ducrot, il est désigné par les

marques de la première personne.

Enonciateur : C'est l'instance qui accomplit l'acte illocutoire, c'est-à-dire qui prend la responsabilité de l'intention exprimée

par cet acte.

Malgré les confusions qui peuvent exister, l’on peut dire qu’il y a une nette distinction entre le sujet parlant, le locuteur et

l'énonciateur. Le sujet parlant, être empirique, produit effectivement l'énoncé. Le locuteur, quant à lui, parle dans le même

sens que le narrateur raconte ; mais il ne présente pas toujours les événements, les attitudes de son point de vue, dans la

mesure où il a souvent recours à l'énonciateur dont il présente le point de vue.

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L'approche communicationnelle

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Appréhender un discours et en saisir l'intention, ne consiste pas à extraire ou restituer des informations pour les intégrer à ce

que l'on connaît déjà. C'est plutôt identifier la fonction de cette information dans la situation de discours où elle est

produite.

Le schéma de la communication selon Jakobson est à l'origine de l'approche communicationnelle ou fonctionnelle. Son

hypothèse consiste à synthétiser les échanges sociaux sous la forme d’un schéma de communication construit à partir des

paramètres présents dans un acte de communication :

l'émetteur, le destinateur, le contexte, le canal de transmission, le code linguistique et le message réalisé.

À ces six éléments Jakobson associe six principales fonctions : la fonction référentielle, la fonction émotive, la fonction

conative, la fonction phatique, la fonction poétique, la fonction métalinguistique.

Il précise, par ailleurs, qu’il serait difficile de trouver des messages qui remplieraient seulement une de ces fonctions. La

diversité des messages réside non dans la prédominance de l’une ou l’autre fonction, mais dans la hiérarchie qui peut exister

entre celles-ci.

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L'approche conversationnelle

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La sociolinguistique considère le langage comme activité d'interaction sociale. L’analyse conversationnelle s’inscrit dans

cette conception qui a vu le jour aux États-Unis. L’avènement de l’analyse conversationnelle est le résultat de la rencontre

de trois grands courants de recherche : l'interactionnisme symbolique, l'ethnographie de la communication et

l'ethnométhodologie.

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L'interactionnisme symbolique :

Il peut être défini comme l'étude des échanges individuels en tant que comportement symbolique résultant d'un processus

d'interaction sociale.

Ce courant né dans les années quatre-vingts est à l'origine d’un ensemble de recherches microsociologiques qui abordent les

mécanismes de l'interaction au cours desquels se construit, se négocie et se modifie la réalité sociale. En d’autres termes, les

faits sociaux ne sont pas considérés comme des produits extérieurs aux pratiques sociales, mais comme des procès que les

acteurs réalisent journellement.

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L'ethnographie de la communication:

il s’agit d’un courant de pensée qui étudie plus particulièrement les relations entre le langage et les contextes sociaux de sa

réalisation.

En plus de la notion de compétence linguistique de Chomsky, Hymes développe la notion de compétence communicative

qui permet au locuteur de produire des énoncés adaptés aux contextes sociaux.

L'ethnographie de la communication met en avant deux types de compétences : la compétence qui permet de produire des

phrases grammaticalement correctes et celle qui permet de produire des phrases socialement admises.

La compétence qui permet de produire des phrases socialement admises se réalise en fonction :

-de la compétence linguistique dont dispose le locuteur appartenant à une « communauté donnée de parole »;

-des types discursifs plus ou moins codifiés ;

-des règles d'interprétation permettant d’attribuer une valeur communicative à des éléments linguistiques dans un contexte

social donné ;

-des normes qui structurent les interactions.

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L'ethnométhodologie des conversations quotidiennes:

Elle porte sur le sujet social, créateur de l'acte communicatif, à travers ses savoirs, ses représentations et ses stratégies

discursives pour atteindre un objectif communicatif.

Elle ne porte pas sur un acte de langage isolé, mais sur les suites interactionnelles à travers les compétences mises en œuvre

dans la perspective d'un processus de réalisation des activités conversationnelles entre les membres d'une société.

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La polyphonie chez Bakhtine :

Bakhtine jugeait inconcevable l'analyse de la langue comme un système abstrait. Le rejet de la conscience individuelle de

l'énonciation et l'adoption du concept de « dialogisme » l’amènent à faire de l'interaction verbale l'élément central de toute

théorie portant sur le langage.

La polyphonie a été introduite par Bakhtine dans ses recherches sur la littérature (les romans de Dostoïevski), où plusieurs

«voix» s'expriment sans qu'aucune ne soit dominante.

Les linguistes ont exploité cette notion, en particulier Ducrot qui rend compte des multiples cas où celui qui produit

matériellement l'énoncé n’en prend pas toujours la responsabilité. Ducrot distingue sujet parlant, locuteur et énonciateur. Le

sujet parlant est un être empirique, l'individu qui énonce physiquement l'énoncé; le locuteur est un être de discours,

l'instance à qui est attribuée la responsabilité de l'énoncé.

Dans un cadre plus large, on intègre à la problématique polyphonique des phénomènes d'ordre textuel comme le pastiche,

la parodie, le proverbe ...

Exemple: quand on énonce un proverbe, on part du principe que son énoncé est attesté par une autre instance, la « Sagesse

des nations», que l’on actualise dans sa parole et dont on participe indirectement en tant que membre de la communauté

linguistique.

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Dans la théorie de Bakhtine, la question du dialogue (dialogisme) suppose que tout discours, quelle qu'en soit la nature, se

présente comme une reprise-modification, consciente ou pas, de discours antérieurs.

Ces relations interdiscursives découlent du fait que toute forme de conscience ou de connaissance empruntent la voie

discursive, de telle manière que chaque discours ‹‹(...) répond à quelque chose, il réfute, il confirme, il anticipe sur les

réponses et les objections potentielles, cherche un soutien (...) ››.

Autrement dit, ‹‹la véritable substance de la langue n'est pas constituée par un système abstrait de formes linguistiques ni par

l'énonciation-monologue isolée, ni par l'acte psychophysiologique de sa production, mais par le phénomène social de

l'interaction verbale, réalisée à travers l'énonciation et les énonciateurs ››.

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L'approche sociolinguistique:

La sociolinguistique est considérée comme un champ de recherche qui aborde les divers usages linguistiques dans une

communauté linguistique.

Son objet d'étude s'applique à des phénomènes très variés : les fonctions et les usages du langage dans la société, la maîtrise

de la langue, l'analyse des discours, les représentations que les communautés ont de leur(s) langue(s), la planification et la

standardisation linguistiques…

Elle considère que l'objet de son étude ne doit pas être tout simplement la langue comme système de signes ou de règles.

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L'analyse automatique (informatique) du discours:

Introduite par Michel Pêcheux (1969), elle se propose de rattacher les discours à l'idéologie de leur époque. Grâce au

stockage des données sur ordinateur, un travail d'analyse automatique des constantes sémantiques et des formations

« imaginaires » est réalisé.

Actuellement, avec le développement de l’informatique, cette approche a connu un évolution importante. En effet, elle

dépasse le cadre étroit de la fréquence des occurrences des composantes principales pour s’intéresser aux réseaux

associatifs qui se tissent entre les mots dans les textes.

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L'approche pragmatique :

Les concepts de la Pragmatique empruntent plusieurs voies. C’est pourquoi elle est loin d’être une discipline indépendante et

unifiée. Les chercheurs ne sont pas unanimes sur une délimitation claire et précise de ses hypothèses et sa terminologie.

Néanmoins, la Pragmatique constitue un croisement interdisciplinaire pour les linguistes, les logiciens, les sémioticiens, les

philosophes, les psychologues et les sociologues.

- Le concept d'acte de langage: parler c'est agir sur autrui. Cette conception met en avant les effets que les discours

peuvent exercer sur les locuteurs-auditeurs. A ce niveau l'attention est centrée sur la dimension interactive et

interactionnelle que toute production langagière présuppose : définir les actes de langages en caractérisant le contexte de

l ’échange et en déterminant quelle proposition est exprimée par un énoncé donné.

- Le concept de contexte : c'est la situation concrète dans laquelle le discours est émis; il englobe toutes les variables que

sont : l’espace, le temps, l'identité et la nature des relations qui lient les partenaires.

- Le concept de performance : il s’agit de la réalisation de l'acte de langage en contexte, tout en ayant présent à l’esprit

que la compétence des locuteurs (savoirs partagés, règles grammaticales…) s'y actualise.

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L'approche sémiotique :

Elle découle de la convergence de deux courants de pensée : la sémiologie née du projet de Ferdinand De Saussure et de la

sémiotique qui s'est constituée en discipline avec Peirce.

La sémiotique discursive est aussi une sémiotique de l’énonciation conçu comme l’acte qui donne lieu à l’ensemble

signifiant du discours et aux conditions de sa cohérence.

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Bibliographie indicative :

Adam J.-M., La linguistique textuelle, 3ème édition, Paris, Armand Colin. 2011.

Maingueneau Dominique, « L'analyse du discours ». In: Repères pour la rénovation

de l'enseignement du français à l'école élémentaire, n°51, 1979. Analyse des discours.

pp. 3-27.

----------------------------------, Eléments de linguistique pour le texte littéraire, Paris,

Bordas, 1990.

----------------------------------, Pragmatique pour le discours littéraire, Paris, Bordas,

1990.

----------------------------------, Les termes clés de l'analyse du discours, Paris, Seuil,

1996.

----------------------------------, L’énonciation en linguistique française, Paris, Hachette

Supérieur, 1999.

----------------------------------, Discours et analyse du discours, Paris, Armand Colin,

2017.

Beaco J-C et Darot Mirielle, Analyses de discours. Lecture et expression, Paris,

Hachette/Larousse, 1984.

Vion Robert, La communication verbale. Analyse des interactions, Paris, Hachette

Supérieur, 1992.

Alpha Ousmane BARRY, Les bases théoriques en analyse du discours,

https://www.infoamerica.org/teoria_articulos/discurso01.pdf.