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Sous la direction de : Cécile Clergeau Auteur : Guillaume Cato 1 INSTITUT D’ADMINISTRATION DES ENTREPRISES REORGANISATION DANS UNE ENTREPRISE PUBLIQUE EN MUTATION

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Sous la direction de : Cécile ClergeauAuteur : Guillaume Cato

1

INSTITUT D’ADMINISTRATION DES ENTREPRISES

REORGANISATION DANS UNE ENTREPRISE PUBLIQUE EN MUTATION

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Sommaire

CHAPITRE INTRODUCTIF.............................................................................3

CHAPITRE 1 : ANALYSE CONTEXTUELLE DE LA POSTE.......................5

CHAPITRE 2 : PROBLÉMATIQUE D’UNE RÉORGANISATION AU SEIN D’UNE ENTREPRISE DE SERVICE PUBLIC....................................................28

CHAPITRE 3 LA RÉORGANISATION EST ELLE POSSIBLE DANS CE BUREAU DE POSTE ?......................................................................................55

CHAPITRE CONCLUSIF.............................................................................81

ANNEXES.....................................................................................................83

BIBLIOGRAPHIE..........................................................................................91

TABLE DES ILLUSTRATIONS.....................................................................92

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Chapitre

Introductif

L’objet de ce mémoire est essentiellement organisationnel.

Question (très simple) : quel est l’objectif de la réorganisation ? Une seule

personne le sait ?

Surtout, ce mémoire n’est plus une comparaison entre 2 organisations. Mais

plus sur les capacités, le sens, le contexte, la façon, etc. dont est opéré le

changement au sein de l’entreprise et plus spécifiquement le bureau de poste de

Nantes Bretagne. Nous allons de plus en plus vers un mémoire d’analyse puis

d’anticipation organisationnelle ? Avec en thèmes : la gestion de projet comme

principe du changement (dans la volonté surtout mais peu dans la pratique), le

management public, la résistance aux changements, les facteurs de

contingence, la perception/vision des choses par différentes parties vision

« classique » des cadres alors que le terrain très interactionnistes / « lewinien »

=> décalages importants dans tous ces domaines. Ce mémoire devrait

davantage s’appuyer (par rapport aux premiers développements) sur la

sociologie des organisations plutôt que sur des « colonnes de chiffres ».

Cependant nous devons procéder à une analyse systémique pour mieux

appréhender le processus de réorganisation que connaît le bureau de Poste de

Nantes Bretagne. Un peu d’histoire, en 1991, l’institution « PTT » (Postes et

Télécommunication) se scinde en deux et permet aux deux entités de devenir

des entreprises autonomes de droit public. Cette première restructuration permet

à l’entreprise nouvellement crée de pouvoir modifier ces méthodes de

management.

IMPORTANCE DE LA VISIBILITE DU PROJET !!!!

Définition de quelques notions

Dualité dans le fonctionnement (mi-privé mi-public)

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Restructuration, processus, organisation

Description du métier, de l’activité et quelques éléments du jargon employé

Dépendance du CTC, différents types de tri, les QL, la zone couverte, les

moyens, les services « annexes »

Méthodologie et description des entretiens

Petit point méthodologie et rapide description des entretiens passés

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Chapitre 1 :

Analyse contextuelle de La Poste

Introduction au chapitre

Ce premier chapitre a pour objectif de définir l’environnement dans lequel le

groupe La Poste et le bureau évoluent. Ce chapitre est organisé en trois parties.

La première partie sera une description du travail tel qu’il s’organise sur le

terrain. Ce premier point a son importance car la réorganisation devrait changer

la façon actuelle dont le travail est effectué et pourrait aussi changer sa

répartition. En effet, les modifications du nombre de tournées et des secteurs

auront un impact sur le travail des préposés.

De plus ce sera l’occasion pour moi de vous définir quelques éléments de

vocabulaire ou de jargon, des acronymes.

Dans la deuxième et troisième partie nous analyserons la composition de

l’environnement qui a un rôle essentiel pour la compréhension de la formation

des organisations. Nous procéderons donc à deux diagnostics distincts.

Le premier sera externe, où nous aborderons principalement des questions

juridiques et de marchés.

Le second traitera des caractéristiques internes du groupe. Nous verrons en

détail, par l’étude des éléments théoriques, la structure employée dans

l’entreprise et dans le bureau que nous étudions. Nous pourrons discuter de

quelques attributs chiffrés sur la population du centre courrier observé. Mais

nous irons au delà en observant des particularités d’ordre social et

psychologique, qui nous seront nécessaires plus tard pour comprendre entre

autres les phénomènes de résistance aux changements ou encore les sources

de blocages organisationnels. Pour chacun de ces diagnostics nous

distinguerons un niveau national et un niveau local.

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I. Description et place du bureau dans la chaîne de

distribution

Les activités du bureau

L’établissement de Nantes Bretagne appartient à la division financière du

groupe. Les locaux sont donc partagés entre les services financiers et l’activité

courrier de l’entreprise. La branche courrier dépend de deux autres entités, la

DOTC1 pour les fonctions administratives et le CTC0 pour la production du

service.

Les DOTC sont au nombre de 41 et sont des centres de contribution aux

résultats du Courrier. Leurs responsabilités territoriales couvrent toutes les

fonctions : commercial, production, ressources humaines, gestion,

communication, etc. C’est le niveau pivot de la décentralisation et de la

responsabilité territoriale du courrier. Cet établissement a un rôle de support,

mais nous reviendrons sur ses attributions plus précisément dans la dernière

partie de ce chapitre lors de la détermination et de la description de la structure

du bureau que nous étudions.

Nous pouvons scinder en deux niveaux la présentation de l’activité de

distribution, le premier est globale avec tous les services annexes ou parallèles à

celui que nous étudions (Figure 1 : schéma général de la distribution ). Puis un

deuxième niveau qui est davantage détaillé pour le service de distribution des

« ménages ».

Le CTC d’Orvault fournit et réceptionne le courrier des bureaux de Poste de tout

le département de Loire-Atlantique. En matière de distribution il existe une

distinction entre plusieurs niveaux de mécanisation du tri : le TG0 1 qui est le

niveau le plus élémentaire est effectué par ville et code postal ; le TG 2 qui

effectue une première différentiation par secteur géographique du bureau; le

TG3 permet de différencier le courrier par tournée ; enfin le TG 4, qui est le tri le

plus évolué, permet de classer les plis dans l’ordre des tournées. Tous les

matins (sauf le dimanche), un camion fait deux à trois aller-retour entre le CTC et 1 Directeurs Opérationnels Territoriaux Courrier0 Centre de Traitement du Courrier0 Tri Global

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le bureau. Le courrier est d’abord pris en charge par des services dits

« annexes » de la distribution. Il s’agit d’une fonction de manutention qui a pour

attribution de décharger les camions et d’amener le courrier aux services de

distribution des « ménages » et du « cedex ». Le cedex est une autre entité de la

distribution qui s’occupe exclusivement d’entreprises recevant de grandes

quantités de courrier ou des boîtes postales. Ensuite, la « brigade »0 de

préposés affine le courrier de type TG 1 et 2. En parallèle il existe une « cabine

des recommandés »0 qui s’occupe des objets suivis (avec des codes barres).

Enfin, précisons que le bureau ne distribue aucun paquet.

Figure 1 : schéma général de la distribution du bureau

Etudions désormais en détail le service de distribution des ménages. Il ne

concerne que le centre ville de Nantes avec le code postal 4400. Le découpage

de cette zone géographique est effectué en 8 « secteurs ». Chaque secteur est

composé de deux fois cinq tournées ou « quartiers lettres », pour 10 titulaires et

2 PTC0. Les titulaires ont un jour tournant de repos par semaine, dit de cycle.

Concrètement, un facteur qui est en congé le lundi sera de repos le mardi de la 0 Terme pour désigner une équipe constituée d’environ 4 à 6 personnes dédiées à effectuer

un tri de type « TG 3 ». Il existe une brigade pour les ménages et pour le cedex.0 Espace semi-clos au sein du bureau, elle est commune pour la distribution ménage et le

service des collectes, le service du cedex possède la sienne.0 A demander.

CTC

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semaine suivante, etc. Un PTC remplace le titulaire dont c’est le repos de cycle,

il donc 5 tournées à connaître. Par ailleurs le service dispose de facteurs dit

« rouleurs » qui ont pour mission de remplacer les absents hors des repos de

cycle, ces préposés ne dépendent d’aucun secteur en particulier et doivent

connaître beaucoup de tournées différentes.

Pour le moment, la vacation d’un facteur commence à six heures du matin et

finit à 13 heures. Toutefois, il existe désormais des facteurs qui effectuent des

tournées en binômes le matin (de 8h30 à 12h30), puis ils sont affectés au

service de collecte en entreprise de l’après midi (15h45 à 18h15). Un facteur est

amené à exécuter plusieurs tâches. La première est de répartir le TG 2 sur les

tournées de son secteur, cette tâche est collective et s’appelle la « ventilation ».

La seconde opération est cette fois ci individuelle, le facteur trie son courrier

dans l’ordre de son parcours, on dit alors qu’il « table sa tournée ». Par ailleurs

les préposés doivent s’occuper personnellement de leurs recommandés et des

réexpéditions de courrier. Une fois tous ces travaux effectués le facteur peut

commencer sa tournée. Le temps de tournée est relativement homogène entre

les différents parcours. Il inclut aussi ce qu’ils appellent un « haut le pied », c’est

le temps qu’il faut pour arriver au premier point de distribution.

II. Des contraintes externes qui évoluent rapidement

Par ailleurs, l’environnement de La Poste connaît des modifications de plus

en plus rapides et importantes. La pression d’éléments, qui sont indépendants

de sa volonté, remet en cause la stabilité à laquelle l’entreprise est habituée.

Cependant, suite aux entretiens que j’ai passés, tous les échelons hiérarchiques

semblent déjà sensibilisés à ces évolutions. D’ailleurs, la direction est

visiblement prompte à communiquer sur la concurrence croissante, les efforts

supplémentaires à fournir pour y faire face, à se féliciter du « chemin parcouru »,

par exemples.

II.1) Au niveau national

Quelques chiffres sur l’activité courrier au sein du groupe

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Source : SYCI, 2002

NB : lettres = lettres + lettres

recommandées + valeurs déclarées

Courrier publicitaire = postimpact +

postréponse + annuaires + catalogues

Autres = franchises postales + plis de

services

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Pour le moment, les services courriers de La Poste restent la source

principale de ses revenus : 58% de son chiffre d’affaire avec 11,24 millions. Une

autre caractéristique intéressante à souligner : les particuliers représentent à

peine 5% de l’activité en envois de courrier du groupe. Il nous montre une

double dépendance qui pèse pour le groupe La Poste. La première dépendance

est donc par rapport au fait que les entreprises représentent la quasi totalité de

l’activité de la branche. La seconde est vis à vis du marché du courrier qui

connaît une évolution structurelle : le volume de courrier diminue dans toutes les

catégories hormis celle de la publicité. Le tableau ci-dessous montre les

évolutions par catégories d’objets sur le marché du courrier. Comme nous

pouvons le noter, le marché du courrier publicitaire est le seul qui offre à la

branche courrier une perspective de croissance.

Tableau 1 : Evolution du trafic adressé en 2002

Ces premiers éléments sont déterminants pour comprendre la logique qui va

animer la future réorganisation. Cela se traduira par une volonté de développer

la part des ménages dans l’activité courrier, tout en continuant à privilégier les

entreprises qui restent la première source de revenus du groupe. Mais cela

pourrait aussi se traduire par une diversification des activités du groupe et dans

ce cas des arbitrages pourraient amener à une redistribution des moyens aux

dépends de l’activité courrier. Ce type de phénomène se manifeste

Type de courrier2002

(en millions d'objets)Evolution / 2001 (en pourcentage)

Lettres 6530 -1,1

Ecopli 4830 -1,3

Publicité 4436 +1,6

Presse 1902 -2,7

Autres 692 -6,2

Total 18390 -0,9

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généralement par une forme de concurrence entre les différentes activités de

l’entreprise pour obtenir le plus de moyens possibles.

L’aspect juridique

Le premier point qu’il nous faut développer est l’aspect juridique et de

régulation du marché postal en France. Ce marché est sous la responsabilité de

l’ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des

Postes) qui a pour objectif de libéraliser et de réglementer les marchés français

en matière de moyens de communication. Cette institution possède un pouvoir

de sanction et peut saisir le conseil de la concurrence. La volonté de

libéralisation est issue de la politique de l’Union Européenne qui souhaite un

marché postal unique. En conséquence, le monopole dont bénéficiait La Poste

jusque dans les années 90 n’est plus compatible avec les directives

européennes.

La première directive cadre0 fut énoncée en 1997, elle donne naissance aux

autorités de régulation dans les Etats membres de l’Union et fixe des objectifs de

services universels et de transparence. Néanmoins la notion de service universel

ne couvre plus autant celle de service public. Pour l’Union Européenne, le

service universel est défini comme un service minimum (ou de base) dans un

environnement concurrentiel. Concrètement, La Poste et ses homologues

européens perdent certaines de leurs obligations. Par exemple en matière de

colis supérieurs à 20kg, l’entreprise peut se réserver le droit de ne plus distribuer

un paquet de cette tranche de poids.

La seconde directive0 date de 2002 et spécifie un calendrier de libéralisation du

marché postal. Au premier janvier 2009 l’Union Européenne prévoit que le

marché du courrier soit totalement concurrentiel. Cependant l’ARCEP impose un

certain nombre de contraintes sur le groupe La Poste. Nous pouvons citer par

exemple : une obligation contractuelle pour l’entreprise de s’engager à fournir un

service universel. Par ailleurs, le groupe n’est libre de modifier ses tarifs que

dans une certaine mesure fixée par l’autorité de régulation. A l’heure actuelle La

Poste se retrouve en situation de monopole (régulé) avec une frange

0 N° 97/67/CE0 N° 2002/39/CE

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concurrentielle puisque de nouveaux entrants ont fait leur apparition depuis

2002. A l’horizon 2009 la firme devrait être l’opérateur dominant du marché

français mais sans pouvoir monopolistique.

Les modifications du marché et analyse

Le changement structurel du marché est la première caractéristique à

prendre en compte pour comprendre le changement organisationnel qui va

suivre. En effet les situations de monopole public et de firmes en concurrence ne

font pas appel aux mêmes logiques et pratiques sur le terrain. Mais nous

développerons ce point lors du diagnostic interne de l’entreprise pour les

pratiques actuelles et dans le troisième chapitre pour celles à venir.

Pour analyser les modifications que connaît le marché du courrier nous

combinons deux approches : celles de M. Porter0 qui analyse la structure

concurrentielle des marchés par la mise en évidence des cinq forces

concurrentielles qui s’y exercent et l’approche « SCP » (Structure Comportement

Performance). Pour illustrer les mécanismes que nous allons détailler, l’annexe

n°1 reprend les éléments de l’analyse de Porter et montre les interactions entre

ces différents paramètres.

La structure du marché

La menace pour La Poste de voir de nouveaux entrants est importante

malgré la présence de barrières à l’entrée du marché. La première difficulté pour

un concurrent potentiel est la fidélité des consommateurs vis à vis de l’opérateur

historique. A titre d’exemple nous pouvons citer le cas d’EDF qui n’a pas perdu

de façon massive des clients lors de l’ouverture à la concurrence du marché de

l’électricité pour les entreprises et qui reste le leader sur ce marché. La seconde

barrière est un important besoin en capitaux pour entrer sur le marché du

courrier, si l’on fait exception de petits opérateurs qui sont positionnés sur les

courses expresses. L’investissement dans une flotte de véhicules (ou sa

location) ainsi que les machines et entrepôts de tri représentent une demande

en capitaux conséquente. La troisième barrière (à court terme) est de l’ordre de

la réglementation. Les opérateurs concurrents de La Poste doivent demander

0 PORTER M., Competitive Strategy, 1980

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l’accord de l’ARCEP, qui délivre avec parcimonie des licences pour s’implanter

en France. De plus, toutes les tranches de poids ne sont pas encore ouvertes à

la concurrence car à l’heure actuelle les plis de moins de vingt grammes restent

une exclusivité pour La Poste. Enfin, le marché du courrier n’est pas dans une

phase de croissance importante0. Il connaît même sur certains produits une

récession (sur les lettres en particulier). Toutefois le marché offre un bon

potentiel sur les segments des paquets, grâce à la croissance du commerce

électronique, sur les plis express (de type Chronopost) et enfin pour la publicité

(adressée ou non).

Malgré cela les nouveaux entrants disposent d’un certains nombre de facilités

pour s’installer sur le marché français. Tout d’abord, les investissements sont

globalement récupérables sur ce secteur d’activité. En effet être un opérateur

courrier ne nécessite pas de brevets ou de licences spécifiques pour exercer

dans ce métier. Dans le même ordre d’idée la formation et les compétences

utilisées dans cette activité ne sont pas longues à acquérir, l’effet d’expérience

est donc assez rapide. Si la majorité des investissements matériels (véhicules,

matériel informatique, bâtiments) peuvent être redéployés, le principal risque se

situe sur les machines liées au tri des plis et des paquets.

C’est pourquoi l’opérateur historique possède des avantages concurrentiels par

rapport aux nouveaux arrivants. Le premier de ses atouts est en matière de coût

car La Poste dispose d’importantes économies d’échelle ce qui lui confère un

avantage par les prix. De plus le groupe possède des ressources financières,

humaines et logistiques élevées. Cela offre à l’entreprise des possibilités de

réorganisation et redéploiement conséquentes qui pourront lui permettre de

s’adapter à la demande du marché. Enfin le maillage sur le territoire est très

important, ce qui lui permet d’atteindre potentiellement toute la population

française. Néanmoins, la taille de la structure interne de la Poste ne lui accorde

pas une capacité d’adaptation rapide par rapport à des opérateurs de plus petite

taille qui eux peuvent être beaucoup plus réactifs et flexibles.

Le nouveau média qu’est l’Internet change les moyens de communiquer

et commence depuis quelques années à créer une forte concurrence aux plis de

courriers classiques (en particulier sur les tranches de plus faible poids). Les

entreprises qui proposent désormais des facturations via courriels sont de plus 0 Voir la figure n°1

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en plus nombreuses, c’est le cas d’Orange par exemple. De plus l’Internet n’est

pas seulement un produit de substitution sur le segment du courrier, il l’est aussi

sur celui de la publicité. En termes publicitaires on peut aussi noter le

changement juridique concernant les marques de grande distribution qui peuvent

désormais être des annonceurs à la télévision et délaisser en partie le vecteur

de communication qu’est la publicité non adressée. D’autant plus que ce type de

publicité est de plus en plus mal perçu par les ménages français.

En parallèle, nous pouvons constater que le pouvoir de négociation des

clients est modifié, aussi bien en termes qualitatifs que de prix. En effet d’après

une étude de l’ARCEP0, les clients (entreprises et particuliers) souhaitent un

niveau de qualité irréprochable tout en ayant des délais de distribution très

courts. Aussi, 92% des français accordent de l’importance à la rapidité

d’acheminement du courrier0. Que ce soit lorsqu’ils envoient des courriers ou

lorsqu’ils en attendent. Si la qualité se détériore un client n’hésitera pas à

changer d’opérateur courrier ou porter réclamation dans le meilleur des cas.

Avec le développement du commerce électronique, les clients sont sensibles à

la possibilité d’avoir des services supplémentaires comme : la traçabilité des

paquets et des lettres, la réception en bon état ou encore la possibilité d’assurer

les envois.

Les produits de substitution sont nettement moins chers en termes relatifs.

Certaines entreprises qui procèdent à des envois en nombre proposent même

des réductions à leurs propres clients lorsqu’ils ne souhaitent plus recevoir de

facture papier. De plus, les clients ne sont pas captifs d’un opérateur, le coût de

transfert étant pratiquement nul. En outre, aujourd’hui le marché est faiblement

différencié, mais cette tendance devrait s’inverser afin que les opérateurs aient

un avantage concurrentiel. De fait la concurrence se fait essentiellement par les

prix. Enfin la transparence en termes de prix pratiqués, exigée par l’ARCEP,

donne la possibilité aux clients de mieux faire jouer la concurrence entre les

firmes. Tous ces éléments nous permettent de dire que le pouvoir de négociation

des clients du courrier est en forte augmentation.

En ce qui concerne les fournisseurs nous pouvons constater une relative

neutralité. La Poste bénéficie de faibles de coûts de récupération. En effet son

0 Voir annexe n10 Source : étude BVA 2006 – lors d’une campagne de publicité du groupe

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parc automobile est en « leasing »0, c’est à dire une location et un entretien à

grande échelle. Seules les machines de tri sont pratiquement irrécupérables.

L’activité de distribution du courrier n’a que faiblement besoin de consommables.

Cependant l’activité est dépendante du niveau du prix des hydrocarbures, mais

ceci est une variable applicable à tous les opérateurs de marchés et largement

indépendante du fait de La Poste.

Le comportement : les stratégies du secteur

Le marché du courrier s’inscrit pour le moment dans une logique de

domination par les coûts. Les opérateurs doivent donc chercher à optimiser leurs

processus pour obtenir des économies d’échelles et rechercher les effets

d’expérience. Ceci implique donc un contrôle des coûts et une réduction des

frais généraux. Les organisations doivent avoir une efficience optimale.

Précisons que l’efficience est le rapport entre les moyens et les résultats.

Nous l’avons déjà établi, les attentes des clients ont changé et l’enjeu de la

qualité va devenir aussi essentiel que celui du prix pratiqué. De fait, la tendance

du marché est à la différenciation qui peut se décliner en trois catégories.

La première différentiation est faite sur les produits. Les opérateurs commencent

à multiplier des produits avec des caractéristiques de plus en plus étoffées

(traçabilité, délai de livraison garantie, assurances, emballages sur mesure,

etc.). Mais aussi, les services annexes mis à disposition de la clientèle vont

rentrer en concurrence, en ce qui concerne la Poste nous pouvons citer des

initiatives telles que la « veille canicule », la vente de calendriers, services à la

personne (programme Genius lancé courant 2007), etc.

La seconde différentiation est sur l’image de marque dont les opérateurs vont se

doter. Dans le cas de La Poste il s’agit de mettre l’accent sur les notions de

« confiance » et « d’accompagnement au quotidien ». Pour illustrer ce point de

vue voici un des derniers slogans en date qui est « La confiance a de l’avenir ».

Enfin la troisième différentiation à faire son apparition se situe au niveau du

réseau de distribution. La Poste dispose d’un fort maillage de bureaux sur toute

la France (tous ne distribuent pas du courrier), mais ces points de distribution

doivent correspondre aux attentes des clients, en particulier pour les points de

retraits des colis. Nous pouvons citer les relais de la Redoute (qui ne servent pas

0 Location et entretien du parc automobile par un organisme tiers.

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qu’à ce distributeur par correspondance) ou le réseau Kiala et récemment La

Poste a lancé ses propres points de retraits 24h/24 et 7j/7 (Cityssimo).

A l’heure actuelle le positionnement stratégique du groupe La Poste est sur le

bas et milieu de gamme, en ce qui concerne le haut de gamme c’est sa filiale

Chronopost qui occupe cette position sur le marché. Son objectif est de proposer

des produits de masse (ce qui correspond à son obligation contractuelle) sans

différence de prix selon le lieu de prise en charge de l’envoi ou de destination.

Performance et synthèse

La Poste s’enorgueillit de voir progresser ses résultats financiers. Son chiffre

d’affaire augmente régulièrement et le résultat net s’améliore. En parallèle le

ratio d’endettement de la firme tend à diminuer. Mais le groupe reste très

dépendant de l’activité du courrier qui est le secteur où les produits de

substitution et la concurrence seront des contraintes de plus en plus importantes

dans les années à venir.

La structure du marché de La Poste est en plein bouleversement, de par

l’ouverture à la concurrence de grands opérateurs historiques européens

(anglais et allemand en particulier) mais aussi de par l’implantation toujours plus

grande d’Internet comme produit de substitution du courrier, même si Internet

offre de nouveaux débouchés pour le secteur des paquets. Ces changements

vont inévitablement modifier la performance de la branche courrier du groupe,

qui, pour maintenir ou augmenter son niveau de performance, va devoir changer

son comportement.

Première chose, la firme va devoir composer avec de nouveaux arrivants qui

vont pouvoir s’installer grâce à une déréglementation rapide et des coûts

d’entrée récupérables, même s’il faut d’importantes réserves de capitaux pour

s’installer sur le marché français, ou composer des « joint-ventures » et ce

malgré les barrières précédemment énoncées.

D’autre part, la croissance du marché du courrier est en baisse en volume mais

pas en valeur : l’expansion des courriers express, paquets, objets « tracés »

offrent une meilleure valeur ajoutée. Il est à noter aussi que si le trafic diminue

en volume le poids moyen des lettres, lui, augmente. Au niveau local cela se

traduira par de nouvelles contraintes pour les agents de La Poste.

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Dans cette logique il apparaît évident qu’une réorganisation des schémas de

production est nécessaire pour faire face aux attentes des clients mais aussi

pour être davantage compétitif. C’est selon cette logique que nous analyserons

la réorganisation du centre courrier de Nantes Bretagne et examinerons la

pertinence des changements par rapport aux changements de types externes et

aux objectifs nouvellement fixés.

II.2) A l’échelle locale

Le point que nous allons à présent développer peut paraître relativement

marginal à l’échelle de la réorganisation à venir, pourtant il est essentiel pour

comprendre l’importance de certaines contraintes auxquelles l’encadrement du

bureau de Poste devra faire face. De plus ce sera l’occasion de faire apparaître

des premiers décalages entre la direction régionale et la perception du terrain

par les membres de l’encadrement du bureau de Poste étudié.

La distribution du courrier de la ville de Nantes est partagée en quatre bureaux

de Poste : Bretagne (44000), Rollin (44100), Beaulieu (44200) et Eraudière

(44300). La zone géographique qui nous intéresse est assez restreinte mais très

dense en logements, bureaux et commerces. Chacune de ces catégories a des

attentes particulières et n’a donc pas les mêmes critères perçus de la qualité de

service. Certaines catégories d’habitants (dans les environs de rue Crébillon)

vont souhaiter un lien social important avec leur facteur. Ce sera le cas des

personnes âgées, qui pourront être sensibles aux services à la personne qui

devraient être prochainement lancés (cf. infra I.1). Tandis que dans des quartiers

tels que Malakoff l’image du facteur n’est pas la même et la seule chose que l’on

attend de lui est la distribution du courrier. Les commerces ou les bureaux sont

particulièrement sensibles à la rapidité de traitement de la distribution. Les

moindres retards ou mouvements de grève sont généralement très mal perçus.

La ville de Nantes connaît une croissance de sa population. Les ensembles

d’immeubles sont de taille plus importante qu’auparavant, donc un point de

remise signifie plus de clients. Le bureau de Poste va devoir composer avec de

nouvelles constructions telles que celle de la rue de Crucy (145 logements, plus

les bureaux et commerces) ou celle de l’îlot Boucherie (34 logements et des

commerces). Par ailleurs certains immeubles du centre ville sont vétustes et ne

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permettent pas toujours de distribuer le courrier dans des conditions optimales

de performance. A titre d’exemple nous pouvons citer des boîtes aux lettres non

conformes aux standards prescrits, l’absence d’ascenseur, d’interphones, etc.

Par ailleurs la circulation de l’agglomération nantaise a connu aussi des

changements importants. Des portions du centre ville sont moins accessibles

pour les voitures. Cet élément pourra s’avérer être un avantage : des facilités

pour les facteurs piétons ou à vélo mais aussi un inconvénient pour les facteurs

voitures qui apportent un support logistique pour les collègues non munis d’un

véhicule. Mais il appartient à l’encadrement du bureau de négocier avec la

mairie pour des facilités d’accès aux voitures du service à des zones interdites

aux automobiles.

De plus, la société Adrexo a récemment annoncé son implantation dans la

ville de Nantes pour la distribution de courrier adressé, en plus des secteurs

qu’elle couvrait déjà (publicité, collectes). La concurrence est donc déjà présente

dans l’environnement proche du bureau et plus seulement basé sur des

intentions ou un niveau national. Cette nouvelle a par ailleurs déclenché une

forme de contestation particulière au sein du bureau. En effet, des affichettes de

cette entreprise ont été disséminées dans quelques endroits du bureau et ravivé

certaines tensions quant aux conditions de travail. Car l’offre d’emploi promet

une « rémunération motivante » pour un travail intéressant. De plus les

interrogations liées à la vision du service public ont été ranimées. Ces deux

revendications ont fait l’objet d’une récente grève des facteurs, uniquement de

la distribution du « Grand Nantes (4 bureaux), le samedi 24 mars 2007. Nous

redévelopperons cet aspect lors des « contraintes locales » et l’étude de l’effectif

du bureau.

L’équipe de direction locale doit considérer des caractéristiques particulières

liées à cet environnement direct du bureau. Or celles ci ne sont généralement

pas prises en compte par les lignes hiérarchiques supérieures. Par exemple, la

notion de « haut le pied » (dans le jargon du bureau) qui sous-entend le fait

qu’un facteur ne distribue pas de lettre dès sa sortie du bureau. Il peut y avoir

une durée conséquente de son temps de travail consacrée à son déplacement

entre le premier ou dernier point de distribution et le bureau. Du fait de toutes

ces caractéristiques, les décalages peuvent être parfois sensibles avec ce qui

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est programmé par la DOTC 44/85. Elle utilise un logiciel de simulation de

tournée qui obtient des résultats parfois incohérents avec les réalités du terrain.

Nous développerons ce point ultérieurement dans le diagnostic interne et la

façon dont les tournées sont construites et la place que peut prendre les

fonctions administratives et de planification dans la structure de l’entreprise.

III. Une organisation qui évoluera ?

Nous venons de le démontrer, l’environnement de La Poste connaît des

modifications importantes et ce dans des dimensions parfois différentes. Or,

selon les principes énoncés par les auteurs de la théorie de la contingence tels

que Burns et Stalker0, pour surmonter les changements de son contexte une

organisation doit pouvoir être plus souple et adopter un système de gestion plus

« ouverte » à ces éléments sur lesquels elle n’a pas de prise. Les directions

nationales, puis locales de La Poste ont donc décidé de prendre les devants de

l’évolution du contexte en annonçant dans différents média (journaux internes,

réunions, courriers, etc.) leur intention de faire face à leur environnement qui

évolue rapidement, en fonction de leur périmètre d’action, cela va de soi.

III.1) Une stratégie nationale

Dans une vision à moyen ou long terme, l’ambition du groupe est de devenir

un leader européen de la prise en charge du courrier en profitant de la

libéralisation des marchés imposée par l’Union Européenne. Cela va se traduire

sur le terrain par une modification de l’esprit et de l’image de l’entreprise qui doit

assurer avant tout la satisfaction des clients. L’objectif est clairement axé sur la

légitimité et l’image de marque de la firme. Au niveau local ceci passe par des

politiques liées à la qualité des services rendus aux clients. Ceci explique

pourquoi le groupe communique beaucoup et par des moyens très divers au

niveau national. L’entreprise est rapide à démontrer ses efforts ou ses objectifs.

Tandis qu’à court terme, l’organisation doit répondre aux exigences nouvelles du

marché et du « terrain ».

0 Travaux publiés en 1961 sur l’adéquation structure / environnement des entreprises

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Pour y parvenir les dirigeants ont à leur disposition une structure hybride

entre la sphère publique et privée qui les oblige à négocier leurs projets, mais la

décision finale leur revient. Cependant il semble évident que la réorganisation

appliquée à chaque bureau s’inscrit dans une logique de maintien de position

dominante sur le marché français mais aussi dans la préparation à une

éventuelle privatisation, ce « spectre » revient d’ailleurs dans les entretiens. Mais

c’est aussi la possibilité de pénétrer de nouveaux marchés dans les pays de

l’Union Européenne, en bénéficiant de la nouvelle législation en la matière. En

matière de communication la direction possède des relais puissants : journaux

internes (« Tempost » ou «Facteurs), lettres d’information (du directeur de

l’établissement et du président de l’entreprise), le site Internet, etc. Ces différents

média mettent généralement l’accès sur des outils modernes, de gestion ou

techniques, mis en place aux quatre coins de la France.

III.2) Une organisation standardisée …

Pour décrire l’organisation actuelle, nous allons utiliser la métaphore de la

« machine »0, employée par Morgan Gareth, dont les composants sont

substituables facilement et le rendu est homogène et linéaire. Mais cette

machine, comme on me l’a confié en entretien, doit être bien « huilée » et ne

supporte pas les « grains de sable ».

Dans la situation initiale, l’organisation se situe dans donc une vision

« classique » de la gestion, qui est largement décrite dans les écrits d’auteurs

tels que  Mintzberg0 qui expose la structure dans son ensemble. Par ailleurs un

auteur comme F.W. Taylor0 quant à lui évoque et prône le principe de « machine

technique » ou H. Fayol0 la « machine administrative».

Une structure de type mécaniste

0 Images de l’organisation, DeBoeck Université, 19970 Henry Mintzberg, né le 2 septembre 1939 à Montréal, universitaire et consultant canadien

en sciences de gestion, auteur internationalement reconnu d'ouvrages de management.0 Frederick Winslow Taylor (1856 - 1915) était un ingénieur américain pionnier dans

l'organisation scientifique du travail, qui est la base de la révolution industrielle du XXe siècle.0 Henri Fayol (1841-1925) ingénieur, puis dirigeant français le plus connu de l'Organisation

scientifique du travail (O.S.T.) inspiré par les travaux l'américain Frederick Winslow Taylor.

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Sommet Stratégique

LignesHiérarchiques

Centre Opérationnel

Technostructure

Source : MINTZBERG H., Le management, Editions Organisation, 2004

Support

20

L’activité de distribution du courrier requiert beaucoup de stabilité et

d’efficacité. De fait la structure de la Poste et la façon dont le travail doit être

accompli sont nécessairement rigides. Pour comprendre la façon dont le bureau

de Poste est structuré nous allons utiliser une des typologies de Mintzberg :

l’organisation mécaniste, qui décrit très bien la situation. La structure est

composée de cinq éléments (cf. Figure 2 : schéma de la structure mécaniste selon

Mintzberg).

Figure 2 : schéma de la structure mécaniste selon Mintzberg

Le contexte actuel du bureau et de la Poste correspond exactement à la

description de Mintzberg sur les organisations mécanistes, à savoir une

entreprise très ancienne dont les processus n’ont pratiquement pas évolué

depuis des décennies, un environnement jusque là stable et simple de

monopole. Une telle organisation possède des caractéristiques très particulières,

telles qu’un faible besoin de formation car les tâches du processus sont simples

et standardisées mais non automatisées. Le sommet stratégique concentre tous

les pouvoirs en termes de décisions et de planification stratégique. Ce qui

nécessite donc de donner de l’importance à la technostructure et aux bureaux

d’études des procédés, qui regroupent : des statisticiens, des comptables, des

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contrôleurs de gestion, des cadres qualité, etc. De plus les lignes hiérarchiques

sont généralement nombreuses et faiblement intégrées au centre opérationnel,

comme a pu le décrire Taylor avec l’exemple des « cols blancs » (ingénieurs) et

« cols bleus » (ouvriers).

La question du contrôle est donc essentielle dans ce type d’organisation, il se fait

généralement sous forme de supervision directe et le but est d’enlever toute

zone d’incertitude au sein de la structure de l’entreprise. Dans la pratique ces

éléments sont très pertinents en ce qui concerne le bureau de Nantes Bretagne,

c’est la technostructure, incarnée par la DOTC 44/85, qui planifie et crée les

tournées en dehors de toute considération du centre opérationnel du bureau. Il

se charge aussi de prescrire les standards de distribution d’un pli, par exemple

une lettre recommandée doit être distribuée en une minute et trente secondes.

La charge de travail est évaluée uniquement par des données statistiques, faites

périodiquement et interprétées par des logiciels de gestion. Même en matière de

réorganisation c’est la technostructure qui délègue des experts et des conseillers

pour assister le chef de projet, en l’occurrence le directeur d’établissement. En

ce qui concerne les compétences ou les qualifications requises, elles sont

généralement très faibles. Le meilleur levier d’efficacité à long terme est

l’expérience et la routine des agents, surtout lorsque l’on sait que la formation

n’est pas le point fort de l’organisation. En effet tous les cadres que j’ai pu

rencontrer m’ont fait part d’un manque en la matière. Enfin, en terme de lignes

hiérarchiques, l’organisation actuelle dispose de trois lignes distinctes pour la

distribution du courrier ménage: le chef d’établissement, quatre cadres répartis

en deux catégories : courrier et production qui sont assignés en fonction du

découpage en secteurs géographiques du centre ville de Nantes (cf. annexes 3

et 4).

Une segmentation des tâches et des fonctions

Ce paragraphe suit la logique de F.W Taylor de segmentation des tâches et

de parcellisation du travail.

Par exemple, à la fin des années 90, La Poste a accompli une réorganisation

majeure dans la distribution du courrier. L’entreprise a procédé à une séparation

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des métiers de distribution avec la création de la division Coliposte, qui possède

ses propres fonctions : financières, ressources humaines, marketing, production,

etc. Et il en va de même pour les activités financières et parfois de guichet. La

séparation est totale désormais entre tous les métiers de La Poste. Dans notre

objet d’étude il suffit de voir les difficultés d’accès que l’on peut rencontrer pour

se déplacer d’une division à une autre, sachant que l’activité des colis a été

délocalisée depuis quelques années. Ces difficultés sont encore plus grandes

parfois pour communiquer entre les différentes fonctions de l’entreprise. Dans

les entretiens que j’ai pu passer avec le responsable qualité et un « CAPRO », 0

pour eux, il n’existe pas de réelle synergie en matière de communication et

d’échange d’information. En particulier avec le service commercial ou même

celui des ressources humaines.

Par ailleurs, le bureau emploie des fiches postes pour chaque métier et

position de travail. Elles sont valables pour l’ensemble des sites en France et

elles sont disponibles sur l’Intranet de l’entreprise. Ces fiches sont très détaillées

sur les fonctions, le niveau de responsabilité et même parfois (selon le métier)

des minutages sont prescrits pour certaines tâches. Cet élément s’inscrit

pleinement dans une vision taylorienne du travail et une « Organisation

Scientifique du Travail ».

L’administration de l’entreprise passe avant le terrain

Si l’on reprend les développements de Fayol en la matière, l’une des

fonctions primordiales de l’entreprise est la fonction administrative. Elle doit

prédominer les autres en planifiant, organisant, dirigeant et contrôlant le travail

(logique « PODC »). Ce seraient les éléments essentiels pour assurer la réussite

d’une entreprise. La prescription du travail est donc très importante et ne doit

pas laisser beaucoup de marge de manœuvre. Ces principes seraient d’ordre

« naturel » et donc indiscutables pour les préposés de l’organisation. Cette

fonction est particulièrement développée au sein de l’organisation générale de

l’entreprise avec la DOTC mais aussi au sein du bureau comme nous allons

pouvoir le constater dans le paragraphe suivant.

0 Cadres de Production : assimilés jusque là à des chefs d’équipe

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III.3) … pour des contraintes locales

Nous venons d’énoncer quelques principes théoriques et pratiques qui vont

nous permettre de mieux cerner les logiques qui pour le moment définissent

l’organisation du bureau de Poste étudié.

Les caractéristiques d’un effectif qui évolue

Caractéristiques chiffrées

Avant la restructuration de 2007, l’effectif du bureau était de 250 personnes

et de 220 ETP0 parmi lesquelles figurent environ 60 facteurs, la population qui

concerne principalement l’objet de l’étude. L’établissement est doté d’une

fonction UGRH0 qui fera l’objet d’une délocalisation dans les locaux de la DOTC

44/85. Le risque de déplacer cette fonction est de segmenter encore davantage

la structure. En outre, le bureau possède quelques caractéristiques notables

exposées par le directeur d’établissement (décrites lors d’un entretien effectué le

20 février 2007) : la première est le statut des individus, majoritairement des

fonctionnaires. Deuxième élément notable, l’effectif s’est fortement féminisé au

cours des années 2000. Cette caractéristique pourrait être une contrainte pour

des travaux qui vont être de plus en plus extérieurs, en effet la mécanisation

accrue du tri permettra d’allonger le temps de tournées des facteurs et donc le

volume de courrier qu’ils distribueront sera plus élevé. La troisième

caractéristique concerne l’âge des postiers. L’effectif est largement composé par

une tranche d’âge comprise entre 45-60 ans, mais aussi par une tranche d’âge

plus jeune (20 - 35 ans), tous de droit privé. La tranche d’âge la moins

représentée dans le bureau est celle des 35 - 45 ans.

Caractéristiques sociales et comportements du groupe

Si en matière de chiffres nous avons pu repérer certaines tendances dans la

population du bureau, en matière des origines sociales les constatations sont

plus éclectiques.

0 Equivalent Temps Plein0 Fonction qui s’occupe de transmettre les feuilles de présence, les embauches, démissions,

etc. du bureau à l’instance GRH de la DOTC.

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La première distinction importante étant une séparation des facteurs entre le

statut de fonctionnaire et d’agents contractuels (partagés entre contrats en CDI,

CDD ou intérimaires). Cette première observation est à l’origine d’une vision de

l’entreprise différente entre les deux groupes. Le premier groupe étant plus

réfractaire aux évolutions liées aux questions de service public (cf. chapitre 2,

I.2) alors que le second groupe peut être plus enthousiaste à l’idée de se voir

proposer de l’autonomie et des responsabilités accrues (entretien avec N.

Raveleau). Une provenance sociale variée (des bac + 2/3), des gens qui n’ont

connu que La Poste. Une certaine vision de leur métier, la place du relationnel.

Attachement très fort à la tournée (seuls les jeunes ou les rouleurs sont prêts à

faire des ventes de quartier lettre). Globalement, d’après les entretiens que j’ai

eus, les préposés sont conscients que l’environnement dans lequel ils vivent

évolue mais ils n’acceptent pas la façon dont le changement peut être conduit :

les lenteurs d’exécution, les façons de communiquer (généralement tardives et

trop « simplistes »), les normes et valeurs qui sont imposées, etc.

Enfin à la Poste, malgré une standardisation des tâches qui demeure

importante, il existe une forte culture du « on dit ». En effet, si la communication

ne s’effectue que dans le sens sommet stratégique, lignes stratégiques puis

centre opérationnel, sans remontée d’information. Par ailleurs, les échanges

entre les membres du centre opérationnel sont nombreux. Pour s’en convaincre

voici plusieurs exemples.

Le premier concerne la formation qui est très orale et dépend très fortement de

la subjectivité du formateur. Il va transmettre sa vision du travail au remplaçant, il

va donner son avis sur l’encadrement et indiquer comment il envisage

l’organisation.

Deuxième exemple : lors des pauses du personnel, les discussions qui

concernent le bureau ou les actions de collègues et de chefs peuvent être

nombreuses. Concrètement dans cette étude, les conversations des facteurs

nous révèlent que 9 à 14 tournées seraient supprimées alors que rien d’officiel

n’a été annoncé.

Des relations ambigües avec les syndicats

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Pour le directeur d’établissement, les syndicats lors de cette réorganisation

seraient davantage focalisés sur les échéances des élections professionnelles. Il

semble sceptique sur leurs revendications qui seraient très générales : sur le

service public, les salaires, en particulier. Il comprend mal la politique du « siège

vide » du syndicat majoritaire, la CGT, qui ne participe plus aux comités

paritaires.

Pour les syndicats, leur absence à des réunions de direction s’expliquerait

par un manque de pouvoir pour faire valoir leurs idées. En effet, d’après ce que

l’on a bien voulu m’expliquer, lors des comités paritaires la direction a pour

obligation de convoquer les syndicats. Mais, lors des votes sur différentes

propositions en cas d’égalité dans le nombre de voix, le débat est déplacé dans

une autre instance qui ne réunit que des membres de la direction, qui eux

prennent une décision finale.

De plus l’horizon de projection n’est pas partagé. En effet lorsque que je

demande l’avis à un représentant CGT sur la réorganisation actuelle, il ne voit

pas de quoi je parle, par contre il est conscient de « la prochaine» qui elle est

largement détaillée dans tous les petits journaux du groupe (le projet « Facteurs

d’Avenirs). La direction entretient une relation qui tient plus de la consultation

que de la négociation avec les syndicats.

Il existe donc un climat de défiance entre la direction (du bureau et de la

DOTC) et les syndicats du bureau qui peut s’expliquer en grande partie par un

manque de communication entre les deux parties. Par exemple, l’encadrement

se contente du minimum légal en matière de communication les réunions avec

les syndicats. Il n’existe pas de volonté de les intégrer dans les évolutions et de

fait nous pouvons avoir l’impression que les syndicats s’inscrivent « contre

l’entreprise » qui n’est pas suffisamment à leur écoute.

Une organisation de forme pyramidale

Avant que la réorganisation ne soit mise en place, les relais hiérarchiques

sont nombreux et se caractérisent par une concentration des pouvoirs. Une

distinction dans l’encadrement est faite entre les cadres courriers et les

« CAPRO », leurs missions et responsabilités sont différentes. Comme le

montrent les organigrammes de l’annexe 3 et 4, l’organisation fait état de quatre

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cadres courrier et de dix CAPRO. Nous pouvions pressentir cette tendance à

avoir des relais hiérarchiques importants dans le bureau de poste (cf. II.2). Nous

pouvons dénombrer un responsable (en ne comptant que les quatre cadres de

production) pour 15 personnes. Dans la prochaine organisation, les lignes vont

être quasiment identiques pour moins de préposés. En l’absence de chiffres

officiels nous ne pouvons faire que des projections sur le ratio futur. De sources

non officielles on parle de 9 à 14 suppressions de postes soit un ratio de 9,2 à

10,2 facteurs par responsable.

Au sommet des organigrammes, nous retrouvons le chef d’établissement, Mr

Terrien qui fut mon interlocuteur privilégié dans mes recherches. Il incarne la

passerelle entre le bureau et les instances régionales (DOTC 44/85) et fait figure

de « chef de projet » dans la réorganisation qui est en train de s’opérer. Le

responsable du centre courrier est assisté par un cadre qualité, Mr Luquet.

Conclusion du chapitre 1

La description détaillée de la procédure de distribution du courrier est

importante pour connaître l’importance des préposés que nous étudions. Ce sont

eux qui délivrent le service final, ils dépendent fortement d’une multitude de

maillons d’une longue chaîne. Leur fonction est donc double : assurer la

satisfaction finale des clients et prendre en charge les défauts (éventuels) des

éléments de production inférieurs. Le bureau de Poste a le statut d’entité de

production uniquement et ne regroupera plus aucun service de support d’ici

septembre 2007.

Ce chapitre nous a permis de poser les bases de notre étude en énonçant les

contraintes principales auxquelles la structure doit faire face. Nous sommes

effectivement en présence d’une organisation calquée sur le fonctionnement

d’une machine. Or l’une des caractéristiques essentielles de son bon

fonctionnement, c’est à dire un environnement de marché stable, est

profondément remise en cause. Le sommet stratégique de l’entreprise semble

s’être saisi de ce besoin de changement.

Cependant les contraintes internes sont principalement liées aux ressources

humaines. La population des facteurs est singulière au niveau de ses

comportements de groupes, avec un fonctionnement très oral, un attachement

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historiquement fort à un système de normes et de valeurs en ce qui concerne la

perception de leur travail et de l’organisation elle-même. Cette caractéristique

importante peut être la base de difficultés de la réorganisation.

De plus, la multiplication des statuts des préposés n’est pas sans poser des

difficultés de gestion, entre les fonctionnaires, les contractuels, les personnes qui

dépendent de deux services ou les temps partiels.

Enfin, la segmentation fonctionnelle de l’entreprise et celle du bureau pourraient

s’avérer être un autre frein important à un changement organisationnel qui

semble pourtant nécessaire.

Pour mieux interpréter les difficultés auxquelles le bureau va faire face et que

nous venons d’énoncer, nous allons étudier les théories liées à ce contexte très

particulier.

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Chapitre 2 :

Problématique d’une réorganisation au sein d’une

entreprise de service public

Introduction du chapitre :

Ce chapitre s’inscrit dans le prolongement du premier, même s’il est

davantage fondé sur des éléments théoriques. Cependant cet

approfondissement est essentiel pour mieux comprendre et analyser les

éléments qui ont été relevés sur le terrain lors de l’enquête et surtout les débuts

de l’application de la réorganisation.

En effet, restructurer une entreprise n’est jamais aisé d’autant plus lorsque

ceci a lieu dans une entreprise du secteur public. De plus, la réorganisation

s’articule autour de deux grandes logiques de gestion, qui sont le management

public et la gestion par projets. Ces conceptions imposent des contraintes qui

peuvent être parfois antagonistes. Le management public est un domaine très

particulier qui renvoie à des notions de budgétisation, efficience, efficacité en

termes économiques ou encore de légitimité et d’un système de normes et

valeurs, etc. que l’on ne retrouve pas dans la sphère privée. Mais lorsqu’on parle

d’organisme public il faut aussi considérer les volontés de l’Etat et parfois de la

classe politique en la matière.

La gestion de projet quant à elle s’articule autour de principes tels que la

planification, la structuration du projet, d’outils de gestion spécifiques. Les

différences se situent essentiellement sur des éléments de type culturel. En effet

la communication dans la sphère publique n’est généralement pas suffisante et

les capacités d’évolution sont faibles. Alors que la gestion de projet nécessite

l’inverse, une communication rapide, transparente et transversale avec des

facultés d’adaptation élevées.

D’autres thèmes seront abordés. Ce chapitre sera l’occasion d’approfondir

les fondements et surtout les critiques liées à des structures de types

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mécanistes mais aussi d’étudier les phénomènes bureaucratiques et les jeux de

pouvoirs au sein des organisations et les prolongements « socio-

organisationnels ».

Enfin, en synthèse, nous pourrons énoncer une problématique pour la

réorganisation qui nous suivons. Celle-ci s’articulera donc autour des premières

constatations faites dans le premier chapitre et étoffée des prolongements

théoriques que nous allons faire dans ce chapitre où la question essentielle

sera : « Comment l’organisation peut elle concilier autant de paramètres

différents et aboutir à une structure optimale ? »

Tout d’abord, commençons par les apports contemporains sur les structures

mécanistes.

I. Contraintes et limites des structures « mécanistes »

Nous le savons, le bureau tel qu’il est organisé aujourd’hui se situe sous une

forme de « machine ». Or, d’un point de vue théorique, ce type d’organisation

comporte des contraintes importantes et est souvent critiqué pour ses

pesanteurs.

I.1) Des fondements dépassés par les événements

Il existe les cinq éléments, d’après Taylor, sur lesquels repose une

organisation mécaniste.

La première condition est d’exécuter des tâches simples pourtant La Poste

souhaite enrichir le contenu du travail pour proposer davantage de services et de

personnalisation aux clients.

Ensuite, l’organisation doit se situer dans un environnement stable ce qui est de

moins en moins le cas dans notre étude, comme nous l’avons démontré dans le

premier chapitre.

Autre élément, les services proposés doivent durer dans le temps. Or l’entreprise

compte s’adapter à toutes les évolutions des demandes des consommateurs.

Cet objectif est donc contradictoire avec ce critère.

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Le seul principe qui reste cohérent avec la structure mécaniste est le facteur de

précision qui doit être important. La prescription élevée du travail et la volonté

nouvelle d’amélioration de la qualité devraient y contribuer.

Enfin dernier point, les éléments humains de la « machine » sont considérés

comme obéissants et se comportent toujours comme il est prévu. Cette

caractéristique est très contestable d’un point de vue théorique mais aussi

d’après nos constats initiaux.

I.2) Les inconvénients d’une structure mécaniste

Etant donné le fait que la cohérence entre la structure et les facteurs de

contingences ne correspondent plus, l’organisation telle qu’elle est risque

d’apporter beaucoup de difficultés à l’entreprise et au bureau en particulier.

En premier lieu, ces structures sont faiblement adaptées pour intégrer de

nouvelles innovations, qu’elles soient techniques ou organisationnelles. Par

conséquent des adaptations telles que la certification qualité ou la gestion par

projets, voulues par le sommet stratégique, seraient donc difficilement

applicables sur l’organisation telle qu’elle est. Cette incompatibilité s’explique par

l’approche parcellaire d’un système mécaniste alors que la gestion par

processus (imposée dans une ISO 9001) ou la gestion par projet se fondent sur

une logique holistique0. Cependant La Poste pourra t’elle se permettre de rester

dans cette configuration organisationnelle ?

Dans une organisation mécaniste ce n’est pas seulement l’activité de production

qui est standardisée, mais toutes les fonctions de supports fonctionnent sur la

même logique. Ce phénomène occasionne des problèmes de communication

étant donnée une parcellisation des responsabilités.

Ces structures sont par définition rigides alors que la nécessité d’avoir

davantage de flexibilité dans la structure semble inévitable. Or la volonté

d’employer davantage les « fiches postes » ou de les enrichir pour les adapter à

la réorganisation risquerait de l’alourdir.

Autre contrainte : d’après Morgan Gareth, dans l’approche mécaniste la passivité

et la dépendance deviennent « institutionnelles » ce qui engendre une

0 Qui relève de l'holisme, qui s'intéresse à son objet comme constituant un tout.

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« apathie », une « insouciance » et un manque de fierté qui devient « général »

dans l’organisation.

Pour Mintzberg0, il existe un danger lorsque les fonctions se spécialisent

fortement. Car ensuite les différents services entament des luttes pour obtenir le

plus de moyens ou de pouvoir discrétionnaire. Cela se traduirait par une forme

de compétition, étant donné que « les humains resteront toujours irrationnels ».

Enfin, dans ces structures il est possible d’observer un nivellement par le bas

des capacités des individus atténuées par la machine organisationnelle. Les

préposés « gaspillent souvent plusieurs heures par jour à effectuer un travail

qu’ils n’aiment pas et auquel ils n’attachent aucune valeur, et l’entreprise perd la

contribution intelligente et créatrice dont la plupart des travailleurs sont capables

si on leur en donne la possibilité »0.

II. Spécificités du management public et relations de

pouvoir

Les organisations publiques ont une culture généralement très différente de

ce que l’on peut rencontrer dans le privé. La perception des notions de marchés,

de satisfaction du client et du traitement des demandes est souvent très

divergente. De fait les priorités en termes de management ne sont pas les

mêmes.

II.1) Des leviers d’actions spécifiques à privilégier …

Pour déterminer où se situe l’enjeu principal nous allons utiliser une approche

empruntée à Bartoli A0, voir la Figure 3 : triangle de la performance dans une

entreprise de service public. La priorité donnée à l’heure actuelle par l’Etat est la

performance dans les services publics, en termes de rentabilité et contrôle des

coûts mais aussi de qualité, donc aux résultats globaux qu’obtiennent les

organisations. La Poste ne déroge pas à ce qui fait désormais la règle dans les

organismes publics. Cette approche, à la fois théorique et pratique, explique

pourquoi depuis plusieurs années les moyens du bureau sont revus à la baisse,

0 Luttes de pouvoir au sein des organisations0 MORGAN G., Images de l’organisation, DeBoeck Université, 19970 Le management dans les administrations publiques

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Efficacité Efficience

Budgétisation

Source : BARTOLI A., Le management dans les organisations publiques

32

cette année cela se caractérise essentiellement en termes d’effectifs. Tandis que

les objectifs définis sont de plus en plus exigeants, aussi bien en termes

quantitatifs que qualitatifs, ils font état de critères plus stricts par rapport aux

moyens employés. Les logiques de maximisation de la rentabilité, de la

satisfaction des clients et de minimisation des coûts, des délais, etc. ont

récemment fait leur apparition dans le secteur public. La nouvelle structure devra

améliorer son efficacité et son efficience.

Figure 3 : triangle de la performance dans une entreprise de service public

En utilisant cette grille de lecture nous allons pouvoir souligner où

l’encadrement va focaliser les priorités. A l’heure actuelle, dans les organismes

publics, l’atteinte des objectifs fixés prend une place de plus en plus importante.

La notion d’efficacité

Comme le montre la Figure 3 : triangle de la performance dans une entreprise de

service public, l’efficacité dépend de l’écart constaté entre les objectifs qui sont

fixés et les résultats obtenus. Rappelons que les objectifs fixés à l’entreprise

sont liés à la stratégie nationale du groupe mais aussi par les pouvoirs publics,

en ce qui concerne l’obligation contractuelle de service universel ce qui sous

entend plusieurs hypothèses sous-jacentes.

La première est d’avoir une cohérence par rapport aux moyens du bureau, la

hiérarchie (à tous les échelons) doit être consciente des enjeux stratégiques et

donc ceci renvoie au concept d’appropriation.

La seconde est de définir la mission ou la vocation du service que l’on rend et la

question du lien social voulu donc, d’une manière générale, la proximité

Résultats

MoyensObjectifs

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souhaitée par rapport aux clients. Enfin, il faut savoir ce que l’on entend par

performance et la typologie des outils utilisés.

La méthode ordinairement employée pour définir les besoins en main-

d’œuvre est la GPEC (Gestion Prévisionnelle des Effectifs et des Compétences)

et c’est ce qui devrait être appliqué dans un bureau de Poste comme celui de

Nantes Bretagne. En effet, les calculs et les outils statistiques sont généralement

très employés dans les organismes publics.

En théorie dans notre étude, les calculs des besoins en main-d’œuvre sont la

combinaison d’éléments statistiques. D’abord les observations des volumes de

courrier de façon hebdomadaire et annuelle. Ensuite, les modes opératoires sont

très prescrits, chaque tâche ou opération est minutée cependant ces calculs sont

pour l’essentiel effectués dans les instances de direction ou les

« technostructures »0.

Les conclusions des résultats sont imposées à l’encadrement local en tant

qu’objectif. Comme le montre la , l’utilisation d’une telle méthode dans la

restructuration actuelle est très pertinente car elle prend en compte l’analyse

d’éléments multiples qui vont influencer le changement à venir.

Or la GPEC ne se contente pas de calculer les emplois nécessaires puisqu’elle

tient compte aussi en amont des objectifs stratégiques et d’un certains nombre

d’éléments de contingence. Par ailleurs cette méthode fait un état des lieux de

ce que l’organisation possède en matière de ressources humaines, en effectif et

en compétences. Une fois les étapes d’hypothèses, d’analyses et de calculs

effectuées, l’organisation procède à un constat des écarts entre les besoins et ce

qui est disponible. Pour gérer ces différences, en matière de ressources

humaines, les leviers d’actions sont relativement simples. Dans le cas que nous

observons, les décalages se situeraient sur un effectif jugé en surnombre et des

compétences en matière de sensibilisation à la gestion de la qualité, de

communication qui doivent être améliorées. En toute logique, les actions qui vont

être explorées seront d’affecter l’effectif en surnombre sur des activités en déficit

dans le bureau, ou dans d’autres instances de la région. Ou encore ne pas

procéder au remplacement de préposés partant à la retraite, voire en cas de

surnombre trop important, préparer un plan de préretraites.

0 Telles que définies par Mintzberg. Voir chapitre 1.

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(2) Hypothèses d’évolution démographique et autres (données sociales internes)

Source : GILBERT P., La gestion prévisionnelle des ressources humaines, La Découverte, 2006

Ressources HumainesA l’horizon T + N

- volume- compétences acquises

Besoins en emploisA l’horizon T + N

- volume - compétences requises

Objectifs stratégiques

Politiques d’ajustement- affectation (mobilité, recrutement, départs)- développement (formation, parcours professionnel …)- affectation et organisation du travail

(3) Hypothèses et transformation des emplois

(1) Analyse environnement et facteurs internes : marchés, produits, technologies, situation financière, situation sociopolitique

Diagnosticd’écarts

34

Figure 4 : schéma de la GPEC

D’après les premières anticipations du directeur d’établissement le bureau

serait en situation de sureffectif par rapport aux besoins futurs compte tenu du

fait que nous connaissons l’analyse de l’environnement (1) et les hypothèses

d’évolution (2) et celles des transformations0 (3). Mais la direction reste évasive

sur la partie du « diagnostic des écarts ».

La principale variable d’ajustement employée est celle de l’affectation et

particulier celle des départs. En effet, dans notre cas, dès le mois d’octobre

2006, sept postes de facteurs n’étaient pas remplacés dans l’optique de cette

réorganisation. Parallèlement, le bureau incite des agents à la mobilité et

certains facteurs sont déjà réaffectés dans d’autres établissements de

l’entreprise, en particulier dans des centres de tri. Les deux autres variables

0 Chapitre1 et la description des évolutions du métier par rapport à une mécanisation accrue.

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d’ajustement sont en cours d’élaboration, par le biais de la communication

interne du groupe, ou en cours d’application. En particulier pour le

développement des individus où un vaste programme de promotions internes est

prévu à l’horizon 2008 – 2010. Mais nous analyserons plus en détail ces actions

lors du chapitre trois et surtout nous étudierons si cette méthode de la GPEC est

effective sur le terrain.

La notion d’efficience

En substance il s’agit de faire plus avec moins, ce qui correspond très bien à

la situation actuelle du bureau que nous étudions. La volonté est d’améliorer la

qualité et la productivité mais avec moins de préposés.

Par ailleurs, la notion d’efficience est généralement difficilement perçue par

les acteurs qui la confondent avec la logique de rendement et donc par raccourci

à celle de « profit ». Dans tous les cas cette notion doit être différenciée de celle

d’efficacité. L’efficience risque d’avoir un impact important sur la résistance au

changement dans notre service de distribution car elle sera interprétée comme

une contrainte supplémentaire forte, d’autant plus qu’elle ne fait pas partie des

valeurs traditionnelles de l’entreprise. Il en résulterait un refus d’une hausse de

la productivité et des cadences imposées ou même de l’application de

référentiels qualité. Les risques d’une mauvaise efficience ce sont des

gaspillages : en ressources humaines pour l’essentiel et un peu en matériel,

dans le cas étudié. Enfin cette notion devrait à terme imposer un contrôle

budgétaire plus rigoureux.

La qualité en tant qu’objectif

Dans les services publics, la gestion de la qualité a toujours eu du mal à être

perçue, aussi bien par le grand public que par le centre opérationnel dans

l’organisation. Tout effort qui irait dans ce sens encourt le risque de passer

inaperçu auprès des consommateurs si la communication est déficiente ou

occasionnerait des réserves de la part des salariés. En effet la notion de qualité

n’est pas perçue comme neutre dans une organisation publique et est

considérée comme une ouverture aux logiques de marchés et de concurrence.

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De plus, ce qui sera considéré comme un bon niveau de qualité par les préposés

ne sera pas forcément en adéquation avec la qualité attendue par les clients ou

par les lignes hiérarchiques et leurs référentiels divers (fiches postes, processus,

etc.) La recherche du sur-mesure est de plus en plus importante, avec l’aide d’un

service marketing il faut évaluer les attentes spécifiques de chaque client et

éviter une sur-standardisation, même parfaite techniquement, qui ne répondrait

pas aux besoins des consommateurs. De même, il faut éviter toute sur-qualité

ou initiative des proposés qui ne soit pas prévue dans la normalisation du

service qui doit être rendu. Cet enjeu va s’avérer crucial pour la réorganisation à

venir puisque la satisfaction du client semble désormais essentielle dans la

stratégie de l’entreprise, alors que les manières d’opérer sur le terrain peuvent

largement dépendre de la subjectivité de chaque préposé.

La qualité telle qu’elle est prescrite par la norme ISO 9001

La certification ISO 9001 a d’abord été un domaine réservé au secteur

industriel. Et son appréciation est plus difficile dans le secteur des services. En

effet, la non matérialité de la production, l’impossibilité de stocker ou encore le

fait d’avoir une prise « directe » avec le client qui empêche d’écarter un produit

défectueux du processus, etc. ces éléments rendent la certification ardue à

obtenir pour une entreprise de service. Pour ce qui est des bases de la

certification dans les services, elles sont identiques à celles de l’industrie à

savoir : l’utilisation d’un auditeur externe pour l’obtention de la certification et

authentifié en tant que tel, l’utilisation obligatoire de référentiels qui doit être

validée par l’organisme de contrôle. Généralement le passage en ISO 9001

prend un à deux ans pour une entreprise, il précède des audits blancs et des

diagnostics rigoureux et détaillés de l’organisation qui sont opérés de façon

systémique.

Démarche qualité et les logiques d’actions

Typiquement, dans les organisations mécanistes, le travail est envisagé par

une relation « donnant – donnant ». En d’autres termes, les salariés « donnent »

leur force de travail, leur disponibilité, etc. et en retour l’entreprise « donne » un

salaire et parfois des promotions, médailles, ou toute autre récompense pour le

travail accompli. C’est une vision très classique du rapport au travail, largement

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développée dans les travaux de Taylor. Cette approche est assimilée dans les

structures mécanistes, on ne demande rien d’autre aux salariés que de

respecter une démarcher stricte pour accomplir les activités.

Or, pour tendre vers une considération des attentes des clients de la part des

salariés, il faut entretenir des relations durables entre les salariés et l’entreprise.

La logique doit changer et devenir de type « gagnant – gagnant ». Le salarié doit

pouvoir être capable de s’investir dans l’organisation, pouvoir toujours donner le

meilleur de lui même à l’entreprise. En contrepartie l’entreprise doit se doter

d’outils pour gratifier les efforts des salariés.

II.2) … pour des contraintes particulières

L’acceptation d’un service est souvent une question sujette à polémique en

France. Les partisans d’une participation minimale voire nulle de l’Etat dans les

entreprises publiques dénoncent régulièrement de mauvaises pratiques de

gestion qui rendraient ces organismes moins efficaces pour satisfaire les

consommateurs (en termes de coûts et qualité du service). Tandis qu’à l’inverse

une partie de la gauche française soutient l’idée de service public et universel

qui ne peut être offert que par une organisation publique. Ainsi dans ce

paragraphe nous allons développer les questions de légitimité des organisations

publiques et de La Poste, en particulier. Ces questions font aussi l’objet de

débats internes et nous en étudierons certains éléments.

Les questions de légitimité du changement dans les organisations publiques

Pour ce point, nous pouvons distinguer trois logiques différentes. La première

étant la vision est celle que se font les Français à l’égard du service public qu’est

La Poste, la deuxième est l’idée que les politiques français en ont et enfin

comment les acteurs au sein de l’organisation envisagent leur relation avec la

Poste.

Avec le public

Les Français semblent très attachés aux services publics, comme le montre

une étude menée par l’institut BVA du 17 juin 2005. Ce sondage indique que

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l’objectif de l’amélioration de la qualité des services publics doit progresser (40%

des sondés) avant de chercher à réduire les coûts de ces organismes (32%).

D’après le même sondage, les Français estiment à 69% que l’Etat est « très

clairement compétent » pour gérer le groupe La Poste.

Un second sondage de l’organisme BVA sur le droit de grève et le service

minimum a produit des conclusions intéressantes pour comprendre le point de

vue des usagers Français à l’égard des organismes publics. En effet 66% des

sondés se disent favorables à une limitation du droit de grève et pour

l’instauration d’une garantie de continuité des services publics. Néanmoins, La

Poste arrive la dernière des entreprises ou institutions pour lesquelles un service

minimum doit être instauré.

Nous pouvons en conclure que les Français sont liés à La Poste, c’est une

institution reconnue, mais le second sondage montre que les services de

l’entreprise ne sont pas « vitaux » par rapport à d’autres organismes tels quel

hôpitaux. Cet organisme doit se fixer comme objectif de rendre ses services plus

fiables et de meilleure qualité, la question financière étant relayée au second

plan. De plus, les débats politiques aidant, les Français souhaitent de plus en

plus que l’entreprise reste présente partout sur le territoire et évite de fermer les

bureaux de Poste là où la rentabilité financière est inexistante.

Les volontés politiques

Lors de la campagne présidentielle de 2007, La Poste est devenue

l’emblème d’un service public qui doit rester présent sur tout le territoire Français

pour une majorité de candidats. Les partisans d’une privatisation restent discrets

sur le sujet, surtout si l’on rappelle les conclusions des études BVA. Néanmoins,

malgré des contestations politiques, l’entreprise risque de connaître le même

destin que France Telecom ou EDF qui ont été privatisées par l’intermédiaire

d’un processus européen imposé aux Etats Membres.

La vision en interne

L’attachement des facteurs pour le service public est évident et fait

régulièrement l’objet de revendications lors des grèves et manifestations.

Les statuts des fonctionnaires leur offrent une assurance dans la relation

d’emploi avec l’entreprise. De fait ces préposés connaissent une forme d’inertie

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à tout changement qui ne leur semble pas légitime compte tenu de leurs statuts.

Cette apathie concerne deux dimensions. La première dépend des compétences

éventuelles qu’il faudrait acquérir. La seconde aborde les évolutions

organisationnelles qui peuvent remettre le modèle social auquel les agents sont

habitués.

Par contre les salariés en contrat à durée indéterminée au sein d’un

organisme public peuvent quant à eux être animés par le désir de changement

et répondre favorablement aux prises d’initiatives si elles correspondent à leurs

attentes.

Tandis que l’encadrement ne souhaite pas voir l’entreprise s’enfermer dans

un mode de pensée qui l’empêcherait de lancer toute action en réaction aux

changements de l’environnement.

Synthèse

Il existe donc des perceptions différentes de la légitimité du changement, qui

sont parfois contradictoires les unes par rapport aux autres. Le débat peut avoir

lieu façon interne, qu’au niveau de l’opinion publique et enfin au niveau politique.

Le risque pour l’entreprise est de rester bloqué à cause de tiraillements internes

et externes.

Les rapports de pouvoirs et phénomène bureaucratique

Si l’on considère, en partant des principes du courant des interactionnistes0,

que les individus au sein d’une organisation sont animés par un système

complexe de sentiments qui les guident dans leurs réponses et leurs refus de se

plier aux exigences de la production. Cette théorie s’oppose donc à celles de

Taylor ou Fayol, pour qui les individus sont déterminés par des raisons

pécuniaires et n’ont pour ainsi pas de « sentiments ». La conséquence pour la

compréhension de jeux de pouvoir au sein des organisations, c’est qu’en plus

des liaisons hiérarchiques traditionnelles il existe aussi des mécanismes de

« leadership » informels entre les individus. Pour notre terrain cela va se traduire

par des formes de « désobéissance » envers des responsables hiérarchiques de

la part de membres du centre opérationnel.0 Courant regroupé à Harvard fin des années 1930 avec Mayo, Hawthorne ou encore le

philosophe Whitehead.

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II.3) Les relations de pouvoir et de contrôle

Ainsi la situation de travail est un lieu de conflits entre des logiques d’actions

multiples. Les écrits de Parsons0 s’intéressent à la position de l’acteur faisant

face à des normes avec lesquelles il va devoir combiner ses propres intérêts et

ses propres risques.

Dans cette optique, la déviance se produit lorsque l’individu a de bonnes raisons

de transgresser les règles. Ces bonnes raisons sont liées à des tensions entre

des logiques d’action et/ou à des conflits d’identité et de rôles. Le moteur de la

déviance peut être l’efficacité du travail et l’organisation perçue par l’acteur.

Il existe deux solutions possibles à cette problématique de déviance. Soit on

décide de supprimer le contrôle mais le risque serait « l’anomie »0. Soit on

procède un à renforcement du contrôle et des contraintes mais le risque serait

d’obtenir une « sur-structuration »0. Les dangers de ce phénomène sont une

réduction de l’autonomie et donc la suppression de marges de manœuvre (à

tous les échelons) pour combiner des logiques d’action. Par conséquent, la

menace est une stigmatisation qui bloquerait les interactions donc l’implication et

la socialisation.

C’est le système de contrôle qui définit les règles de la déviance.

Le système de contrôle

Les organisations sont des espaces dans lesquels beaucoup de règles sont

crées. Le contrôle possède des objectifs divers, mais l’essentiel étant de mettre

en évidence un comportement homogène. Le contrôle impose des contraintes

sous différentes formes telles que : les règles ou l’idéologie, la standardisation.

Description et définition du système de contrôle par les règles

0 Sociologue américain né le 13 décembre 1902 à Colorado Springs, décédé à Munich le 8 mai 1979.

0 L’anomie : C’est une perte de sens (du travail) généralisé. Les règles ne résolvent plus les questions d’organisations et d’interactions.

0 La sur-structuration se produit lorsqu’il existe une focalisation (directe ou indirecte) sur le contrôle des comportements. Ce qui peut provoquer : un fonctionnement auto-référant et disciplinaire de l’organisation ; des situations de blocages et de tenions propices à la déviance et l’indiscipline.

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Les règles sont d’ordinaire d’abord officielles, elles sont issues de

management qui cherche à définir un cadre général des comportements au sein

de l’organisation. Il est pratiquement impossible de les appliquer à la lettre sur le

terrain et elles ne peuvent pas décrire de façon détaillée toutes les situations.

Ainsi dans ces zones d’incertitude par rapport à une situation, les acteurs vont

créer leurs propres règles. Les sources à proprement parler sont par exemple :

le règlement intérieur, les contrats de travail ou les affectations (pour les

fonctionnaires) et les fiches de poste.

Dans certaines organisations, les règlements ne sont pas seulement écrits,

les obligations implicites peuvent être nombreuses et non référencées. Mais le

risque serait d’avoir un encadrement trop basé sur les règles écrites et des

opérateurs qui alors refuseraient d’exécuter une quelconque tâche qui soit hors

de ce qui leur a été prescrit initialement.

D’après les constatations initiales et le diagnostic interne du premier chapitre

et le tableau 2, nous sommes en présence d’une formalisation de type

« mécanique ».

Tableau 2 : typologie des formalisations

Types de règles

Dynamique Coercitive

« Organique » Autocratique

Bureaucratie efficace « Mécanique »

Dans un tel système, les questions de pouvoir sont occultées dans les

organisations de type taylorien comme le remarquait Crozier : « (…) un système

complètement rationnel tel que celui dont rêvaient les théoriciens de l’OST0 et

dont rêvent encore les marxistes dogmatiques exclut forcément les relations de

pouvoir »0. En partant d’un tel postulat, et compte tenu du type de structure que

nous observons, nous pouvons en déduire que les luttes de pouvoir au sein de

l’organisation seront importantes entre un sommet stratégique pour lequel il 0 Organisation Scientifique du Travail – Taylor0 Citation CROZIER M., Le phénomène bureaucratique, Seuil, 1971

Faible

Fort

Degré de

formalisation

Source : LIVIAN Y-F, Organisation, Dunod, 2006

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n’existe qu’une seule façon de faire ou « One best way » et des acteurs dont le

comportement n’est pas totalement prévisible. Dans cette perspective où

l’encadrement fonctionne selon une procédure unique les variables à leur

disposition pour modifier l’attitude des acteurs seraient alors très limitées voire

inutiles.

Ainsi les préposés vont essayer d’adapter les règles à leur convenance et se

mettre dans des situations de déviance auxquelles les responsables n’ont que

peu de moyens de faire face. La déviance y est donc effectivement présente et

dans le cas d’institutions telles que France Telecom ou La Poste, ceci se traduit

par des phénomènes de « sur-qualité », c’est à dire que les agents estiment que

le travail qui est prescrit ne va pas dans le sens de leur perception du service qui

doit être rendu ou encore par des logiques de « on dit », les préposés préfèrent

utiliser des savoirs oraux plutôt que de d’utiliser les référentiels.

Le contrôle par la standardisation

Après la règle, la standardisation est ce qui paraissait, à l’époque de Taylor,

la méthode la plus légitime pour contrôler les acteurs d’une organisation. En effet

la légitimité technique et scientifique est depuis longtemps considérée comme

primordiale dans beaucoup de structures et pour les ingénieurs-managers,

puisque la séparation entre la conception et l’exécution étant le principe de base

de cette logique. On y retrouve les notions du bureau des méthodes avec le

prolongement contemporain de Mintzberg avec la « technostructure ». Les outils

de gestion employés servent à objectiver un management de type

« scientifique », avec par exemple des grilles de classification0 ou le système

« PERT » (voir infra II de ce chapitre).

Cette méthode est un renforcement de la prescription du travail et de la

volonté de rendre prévisibles les comportements des individus de l’organisation.

Le contrôle idéologique

Nous allons reprendre pour ce point les travaux de Weber0, sur les raisons de

l’obéissance et de sa pérennisation.

Pour lui, le principal moteur de la contrainte est le risque de sanction. Deux

éléments se combinent et donnent sa force à la contrainte : la puissance et la 0 Qu’est ce que c’est ? 0 Sociologue allemand (à préciser)

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discipline. Or pour Weber, ce qui va être déterminant ce n’est pas la puissance

mais la croyance des individus en la légitimité de cette puissance.

Ce qui va être déterminant c’est donc l’obéissance des individus à la règle, la

légitimité de la règle et celle de celui qui la définit.

Les dirigeants définissent en amont l’espace d’autonomie de l’individu et

assument les résultats liés à l’exercice de cette autonomie, surtout si elle est

faible.

Mais le contrôle par la croyance peut se caractériser différemment, comme

dans les travaux de W. Ouchi, pour qui il existe des « clans » qui sont fondés sur

une socialisation importante des membres de la structure où le contrôle est alors

internalisé par l’adhésion de chacun, de façon plus ou moins contrainte, aux

valeurs de l’organisation.

Confrontations dans les entreprises

Dans les entreprises publiques, la notion de confrontations est très sensible.

En effet, les conflits entre ces organismes et les acteurs qui la composent sont

assez fréquents et importants et peuvent se traduire sous la forme de grèves. En

effet ces organismes, dont La Poste fait partie, fonctionnent dans une logique

de « donnant – donnant ». Cette vision des entreprises repose sur le fait que

d’une part l’organisation recherche uniquement la performance par rapport à ses

objectifs (rentabilité ou chiffre d’affaire, par exemple) en mettant en place des

méthodes ad hoc d’évaluation et de contrôle. D’autre part nous avons les

préposés auxquels on ne propose que des opportunités financières ou parfois de

carrière. Dans un tel contexte il n’est pas étonnant d’observer une volonté de la

part des deux côtés de toujours en demander davantage.

C’est pourquoi les contraintes liées au partage du pouvoir dans ces

organisations prennent tout leurs sens dans notre étude.

Synthèse - Enjeux de pouvoirs et contrôle

Les relations de pouvoir et de contrôle sont animées par des logiques

antagonistes entre celle du sommet stratégique (associé aux lignes

hiérarchiques) et celle du comportement du centre opérationnel.

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Nous verrons l’importance de mettre en place des possibilités de promotions,

responsabilisation du personnel, d’avancements sur la grille des salaires, prise

en compte du travail, etc. afin de modifier les relations de pouvoir. De plus

l’influence du système de contrôle, d’évaluation et la conception que l’on donne

aux échanges entre l’organisation et ses acteurs ne sont pas à négliger.

Le principal objectif du contrôle est d’obtenir la meilleure efficacité possible

de la part des préposés. Il n’existe pas de contrôle optimal, il doit être fait en

fonction du type d’activité exercé.

La notion de pouvoir renvoie quant à elle davantage aux capacités de

l’organisation à procéder à des évolutions et des changements dans sa

structure, sa manière de travailler, etc.

Dans notre cas, le contrôle est fort, même s’il est davantage de type

idéologique mais basé sur une formalisation importante. Les luttes de pouvoir

sont nombreuses en interne, aussi bien entre les divisions, les fonctions et

l’encadrement avec leurs préposés.

III. Particularités de la gestion par projet

La gestion de projet est un prolongement récent dans l’étude des

organisations. Même si ce procédé est utilisé depuis très longtemps par les

hommes. Par ailleurs, dans l’histoire contemporaine, les auteurs de gestion ont

encore du mal à évaluer l’apport du fonctionnement des organisations par projet.

Mais la gestion de projet revêt encore une conception particulière lorsqu’elle

est appliquée à la sphère publique. Cette démarche apparaît comme la réponse

à la décentralisation progressive de l’Etat et aux mutations de l’environnement,

comme nous l’avons évoqué dans le chapitre 1.

III.1) La structure des projets publics

Depuis que la sphère publique est davantage décentralisée, les organismes

publics ont la possibilité de lancer les projets à volonté. Nous assistons donc à la

création d’une multitude de projets. Selon une enquête réalisée par A. Bartoli et

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G. Trouiller0, 67% des responsables de 120 unités ou établissements publics

avaient amorcé une approche par projets.

Néanmoins l’enquête montre aussi que ces projets ont pour tendance de se

focaliser sur un sujet particulier (qualité, social, performance, communication,

etc.) et ne pas à penser à l’organisation dans sa globalité.

De plus ces projets souffrent d’objectifs qui ne se projettent pas assez vers la

gestion de l’environnement de l’entité, ce n’est le cas que dans 12% d’entre elles

d’après la même enquête.

Par ailleurs, le projet que nous étudions possède un autre attribut, c’est d’être

un projet de type stratégique. Dans ces cas nous n’allons pas retrouver tous les

outils qui font une gestion de projet « classique » employée pour un nouveau

produit ou un service, les tâches et les livrables0 sont plus difficilement

indentifiables. Par exemple, on ne peut pas dire tâche numéro une : « changer

de métier ». Le management stratégique décliné sous forme de projet peut être

considéré comme plus complexe à mettre en place compte tenu de frontières

plus diffuses entre les tâches qui doivent être accomplie.

Cependant que ce soit dans un cadre stratégique ou de lancement de nouveau

produit nous retrouvons des logiques similaires en matière de : structure du

projet, les outils de planification, la nécessité d’avoir une bonne communication,

etc.

Les outils utilisés dans la gestion de projet sont nombreux, nous allons voir

ensemble les plus connus et ceux qui semblent être le mieux adapté pour gérer

un changement organisationnel. Tout d’abord définissons le type de structure de

projet dans lequel nous sommes.

Structure intégrée

La structure adoptée pour le projet de réorganisation est de forme intégrée.

Dans ce type de structure, les projets sont indépendants de l’organisation dans

laquelle ils prennent forme. Le chef de projet assume l’entière responsabilité du

fonctionnement du projet. Il a un rôle de supervision de tout le personnel

0 BARTOLI A., TROUILLER G., Le management dans le secteur public – Résultats d’enquête0 Terme de gestion de projet qui désigne des tâches clés dans un projet.

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travaillant sur le projet. Il est appuyé par des personnels momentanément

transférés des leurs directions initiales.

Concrètement dans notre cas, des experts de la DOTC conseillent et proposent

des scénarios au chef de l’établissement qui est alors un chef de projet. Ce type

de structure peut reprendre les différentes fonctions d’une entreprise mais dans

notre étude, la seule fonction concernée est celle de production.

Importance de la transversalité

La transversalité est un élément de la sphère du privé qui cherche à associer

les processus d’une activité de façon globale. Cette notion s’inscrit dans une

logique contraire à une vision séquentielle des tâches.

La transversalité n’est pas seulement employée pour délimiter les tâches

mais elle est aussi employée pour relier les différentes fonctions de l’activité

entre elle.

Aujourd’hui cette logique anime de plus en plus d’entreprises qui préfèrent

une vision systémique. Etant donné que les organismes publics tentent d’insérer

des procédés issus du privé il n’est pas anormal de voir son application dans

notre cas d’étude.

III.2) Calendrier et planification

Ces deux notions sont cruciales pour l’aboutissement d’un projet d’après tous

les théoriciens et praticiens de projets. Les méthodes sont nombreuses en la

matière. Pour notre étude nous allons traiter de deux outils, même si il en existe

beaucoup d’autres. Nous allons donc voir la méthode du « PDCA0 » qui est très

utilisée pour satisfaire des objectifs de qualité, comme dans le cas qui nous

préoccupe. Puis nous étudierons les outils « PERT0 » et « GANTT ».

Ordonnancement – méthode du « PDCA »

0 Plan Do Check Act0 Program Evaluation Research Task

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Cette méthode, aussi appelée « roue de Deming0 » cherche à structurer la

démarche de l’amélioration continue. Elle est utile pour rappeler aux

gestionnaires les étapes qui précèdent l’action ou encore pour résoudre des

problèmes et des risques organisationnels. Sa nécessité est très importante

dans les projets de changements structurels. En voici un exemple dans l’annexe

X de ce document.

Concrètement, le « P » correspond aux objectifs que l’organisation se fixe, le

« D » appliquer ce qui est fixé, le « C » vérifier que les objectifs correspondent à

ce qui a été fait et le « A » fait le bilan de l’opération.

Méthode « PERT » et « GANTT »

Le principe de ces méthodes est l’utilisation de graphiques qui représentent

les tâches à effectuer pour mener à bien un projet. En outre ils permettent de

déterminer la durée du projet et calcul des dates de chaque tâche, ce qui permet

de contrôler les marges disponibles et identifie un chemin critique pour le projet.

Dans l’annexe 4 vous trouverez un exemple fictif de graphique « PERT ».

Ces procédés sont fréquemment employés, surtout dans des projets

complexes. Mais je ne vais pas développer en détails leurs modalités

d’application puisque le terrain que nous étudions ne semble pas les employer

malgré les avantages qu’ils peuvent apporter.

Par contre les théories sur la direction du changement nous seront très utiles

pour comprendre notre objet d’étude.

III.3) La gestion du changement en projet

La gestion de projet est de plus en plus employée pour permettre aux

structures d’évoluer, mais pour cela il faut des appliquer certains outils, comme

le PDCA, or il faut aussi développer des méthodes traditionnelles et en

particulier : le diagnostic de la situation et la communication.

L’organisation et le modèle des champs de forces

0 Consultant américain qui a introduit la démarche qualité au Japon

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Forces restrictives

Forces motrices

Situation désirée

Situation actuelle

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K. Lewin0 est à l’origine de ce modèle de « champs de forces » avec les

hypothèses que l’état de l’organisation résulte de l’existence forces. Ces

énergies peuvent être égales et de sens contraires et agissent sur la situation

comme l’illustre Figure 5 : modèle des champs de force de Lewin.

Figure 5 : modèle des champs de force de Lewin

L’idée de se modèle est de dire que la situation actuelle de l’organisation

n’est pas quelque chose d’inerte, il faut créer un décalage et transformer les

sources motrices pour aboutir à la situation désirée. L’organisation est un

équilibre entre des forces contradictoires. Le risque en cas de réorganisation

c’est d’avoir une longue période avant de retrouver un équilibre entre les forces

ou au pire ne pas être en mesure de les stabiliser.

Cette représentation a aussi été développée par Mintzberg, pour qui

l’organisation est un ensemble de contraintes de forces qui la tiraille. Ce qui

nous renvoie à l’enjeu crucial des jeux de pouvoirs.

Les étapes du changement

Lewin a par ailleurs défini trois grandes étapes pour opérer un changement :

la décristallisation qui équivaut à rompre l’équilibre entre les forces, le

mouvement qui modifie les forces motrices et enfin la recristallisation qui

cherche à stabiliser les forces.

0 Psychologue allemand dans les années 1930, ces écrits ont fait l’objet de développements contemporains en gestion.

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Importance du diagnostic d’origine

Avant de commencer à opérer le changement il faut faire une évaluation de la

nature des forces motrices et restrictives qui expliqueraient les sources de la

résistance au changement. Si cette étape n’est pas respectée au mal faite, le

danger est d’agir sur des forces qui n’aboutiraient pas à la situation voulue.

Il faut prendre en compte plusieurs dimensions, la première étant de

considérer les individus au sein de l’organisation comme des acteurs. On

renonce de partir du principe que se sont des robots ce qui introduit la notion

d’incertitude.

Deuxième dimension, un acteur agit toujours de façon justifiée. Le changement

pourrait lui paraître ne pas aller vers ses intérêts alors il ne soutiendrait pas le

projet.

Troisième point, il faut connaître les moyens d’actions et savoir vers quels

acteurs il faut les répartir. En effet pour faciliter le changement il est nécessaire

d’augmenter les moyens à disposition de ceux qui sont favorables au projet et

diminuer ceux des opposants. Comme moyens on retrouve essentiellement : les

postes stratégiques et hiérarchiques, les moyens financiers, les dotations en

ressources humaines, etc. Un projet peut se préparer longtemps à l’avance

compte tenu de ce paramètre.

Tout doit être envisagé de façon systémique, la réussite d’un projet de

changement dépend surtout des interactions entres les acteurs et il n’est pas

uniquement lié à ses qualités intrasec.

Les modes d’intervention

Les approches en la matière sont nombreuses, si l’on reprend les axiomes de

K.D Benne et R. Chin0, la réorganisation que nous suivons se situe dans une

stratégie coercitive où le pouvoir hiérarchique fait pression sur les leviers

financiers et politiques. Nous sommes dans une logique de type « top down0»

qui est souvent liée au « reengeenering0», tout provient du sommet hiérarchique.

Dans notre cas les processus ne sont pas fondamentalement changés mais tout

simplement formalisé d’après l’appréciation de la direction.

0 “The planning of change : Readings in the applied behavioral sciences”0 Du haut vers le bas0 Terme anglo-saxon pour désigner la redéfinition des processus.

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Or la difficulté d’un tel mode est de voir que tous ceux qui n’ont pas pu

participer à l’élaboration du changement risquent de s’y opposer.

Influence de la communication

La communication est primordiale pour l’efficacité et la réussite d’un projet.

Elle permet de créer les conditions de la motivation des acteurs et construire une

dynamique de group. Le but principal étant de générer une adhésion au projet.

C’est investissement très important, on ne communique jamais assez dans les

organisations quitte à se répéter.

Mais la manière dont s’effectue la communication est elle aussi essentielle.

En premier il faut cibler les acteurs auxquels on s’adresse, le message n’étant

pas le même pour un cadre et un préposé. Il faut donc une communication

adaptée aux différentes parties prenantes.

Les dates choisies pour communiquer ont aussi de l’importance. Par exemple,

dans une période de congés le message aura un impact réduit sur les préposés.

L’organisation doit se doter d’un cahier des charges pour prendre en compte

tous ces paramètres et obtenir une communication efficace.

III.4) Les risques et difficultés de la gestion par projets

Ces risques peuvent être nombreux et dépend du type de projet qui est

déployé. Dans notre cas nous sommes sur un projet stratégique c’est pourquoi

nous ne développerons que les limites de ce type de projet.

Les relations avec le centre opérationnel

Les rapports avec les préposés peuvent se détériorer de dans tels projets car

l’on ne prend pas suffisamment en compte les informations qu’ils détiennent, ce

qui se traduit par une forme d’isolement. Le danger est d’avoir un projet

déconnecté avec les réalités et les demandes du terrain. Ce qui va amplifier les

phénomènes de résistance au changement.

Le phénomène des « Groupthink0 »

0 Terme anglo-saxon qui désigne des groupes d’études.

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Cette notion est une autre dérive possible de la gestion par projet, il s’agit

d’une dérive du périmètre du projet qui se traduit par une perte du contrôle de la

dynamique de décision du projet. Le groupe projet développe alors un sentiment

« d’invulnérabilité » et pense faire tous les bons choix. Il n’existe alors pas de

critique possible des actions menées par le groupe projet, qui se repli sur soi

convaincu de ses actes. La rationalisation se fait alors à posteriori et on peut

constater une escalade de l’engagement.

IV. Des enjeux et des défis à relever

Maintenant que nous connaissons d’une façon approfondie le contexte, sous

différents angles de vue, et les logiques qui vont animer les réorganisations

futures du bureau de poste nous allons pouvoir formaliser les enjeux que devront

gérer le directeur d’établissement et son équipe.

L’organisation est elle cohérente avec l’activité, la stratégie, les changements

de l’environnement de l’entreprise, évolue t’elle avec ces paramètres ?

Pour le moment, tout porte à croire que la réorganisation telle qu’elle se

profile est une phase de transition.

IV.1) Fondements de la prochaine organisation ?

Toute nouvelle organisation va t’elle utiliser les bases actuelles ou utilisera

telle des innovations techniques ou de gestion ? Ainsi que des outils et des

systèmes différents ? En d’autres termes, toute nouvelle structure pourra-t-elle

permettre l’apparition de nouveaux changements organisationnels, tels que

l’utilisation de système d’information, de nouvelles technologies, laissera-t-elle

une place à l’innovation managériale et l’utilisation de concepts modernes de

gestion c’est à dire autonomie, initiative du personnel ? Va-t-elle chercher à

réduire des écarts de gestion entre le travail prescrit et le travail réel ? A priori en

ce qui nous concerne, la principale préoccupation de toute réorganisation c’est

de rester le plus compétitif possible face à un marché de plus en plus

concurrentiel. De plus les communications interne et externe jouent un rôle très

important pour amener le changement au sein de l’entreprise. Ainsi la nouvelle

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organisation fait figure d’un instrument à la fois économique (rentabilité,

performance) et politique (pouvoir, négociation) au sein de l’entreprise.

Est ce que la logique taylorienne comme elle est pratiquée actuellement va

être supplantée par logique dite du « gagnant – gagnant » ?

IV.2) Pour quels objectifs ?

La proche réorganisation promet d’être axée en priorité sur les clients (voir

les extraits du document de « sensibilisation à la qualité » en annexes). La

réorganisation va être repensée sous forme de processus, qui se font sur la

base des produits, précisons que nous ne sommes pas dans une logique de

« reegeenering ». Concept selon lequel l’organisation remet à plat toutes ses

façons de faire. Ici ce n’est pas le cas, seulement on tente d’obtenir une vue

d’ensemble de ce que l’on pratique déjà sur le terrain. Ce qui nous renvoie à la

place des préposés dans l’organisation, elle va nécessairement changer puisque

les objectifs sont différents. De manière générale, l’entreprise veut se doter de

nouvelles machines et d’outils de gestion axés sur la performance (aussi bien

qualitatif que quantitatifs). Alors qu’en parallèle les efforts en termes de

budgétisations n’ont jamais été aussi forts. Comme nous venons de l’évoquer,

l’entreprise souhaite placer le client au cœur de son processus de production,

pour ce faire la direction générale s’est fixé des objectifs de qualité en passant

par la certification ISO 9001. Brièvement rappelons que : la certification qualité

implique une augmentation de la normalisation du travail et donc une réduction

des zones d’incertitudes pour le centre opérationnel. Cet élément nous permet

de revenir sur la considération des objectifs de la réorganisation qui est politique

en plus d’être économique. Car les changements dans les relations de auront un

impact sur la structure du bureau de Poste. En effet si les zones

« d’incertitudes » sont moins nombreuses le pouvoir (informel) du centre

opérationnel sera diminué et leur rôle ou leur importance risque d’en pâtir. Par

ailleurs, nous pouvons émettre des réserves aux risques liés à une normalisation

accrue qui peuvent avoir un impact négatif sur une organisation déjà très

standardisée, même si elle n’est pas très formalisée. La rigidité devrait donc être

amplifiée à terme avec une certification qualité alors que le marché va vers une

organisation qui nécessite de savoir d’adapter aux différentes évolutions

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(juridique, client, etc.) ? De tels phénomènes sont assimilés à de la néo-

bureaucratisation ou du néo-taylorisme, qui sont des freins à l’innovation

organisationnelle et sont susceptibles d’apporter des blocages au sein des

processus de l’entreprise. Surtout que la population du bureau de Poste se sent

très concernée par son travail et ne vient pas seulement pour exécuter une

tâche telle une machine. De fait nous allons pouvoir souligner un paradoxe entre

la communication et la représentation que les dirigeants (national et local) se

font des choses et les actes qu’ils engagent sur un terrain bien plus concerné

qu’ils ne peuvent le penser. Nous procéderons à une analyse des ces différents

décalages entre ce qui est voulu (sur les documents officiels) et ce qui sera

appliqué ou applicables sur le terrain.

IV.3) La gestion de contraintes importantes

D’un point de vu purement local les interrogations, que nous venons de lister

de façon non exhaustive, sont fortement liées au contexte plus global de

l’entreprise. Par exemple, la concentration des pouvoirs tend à augmenter dans

les lignes hiérarchiques supérieures et les flux d’informations sont de plus en

plus durs à gérer. Le directeur d’établissement du bureau de Poste que nous

étudions à un rôle de chef de projet dans la réorganisation qui nous occupe, on

lui fixe donc des objectifs qui ne dépendent pas de sa volonté. Il possède

certaines marges de manœuvre et d’un cadre précis d’application de décisions

qui lui sont imposés. Composer avec des formes atypiques de contrat de travail

(avec les accords « Vaugirard ») mais qui peuvent s’avérer être des moyens de

rendre l’organisation plus flexible (cf. diagnostic interne). En outre il devra

constituer avec des fonctions supports du travail de distribution qui seront

modifiés, telles que : une mécanisation du tri plus importante, la concentration de

certains services (commercial, GRH, etc.) à la DOTC. Les outils qui sont à sa

disposition ne semblent pas être légion et toute laisse à penser que les

changements dépendent pour beaucoup de son interprétation personnelle.

Comment l’encadrement du bureau va piloter la restructuration et à terme de

quelle façon le contrôle sur le centre opérationnel va s’opérer ?

De plus le changement organisationnel se fera dans un contexte particulier et les

parties prenantes auront un rôle décisif dans la réussite du projet que le

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directeur doit mettre en place. Ce qui nous conduira à traiter de la façon dont le

changement est amené et s’il est accepté par le centre opérationnel, pour qui les

enjeux sont de l’ordre des ressources humaines et ne répond pas aux logiques

stratégiques et économiques. Comment implanter une organisation dont l’objet

est différent des attentes des préposés ?

Enfin au niveau culturel, le système de valeurs, lors d’une réorganisation,

peut être grandement modifié lors de mutations internes et externes. Le choc

culturel entre les fondements de la sphère publique et privée est source

d’inquiétudes pour les préposés.

Conclusion du chapitre 2

Les difficultés de la restructuration risquent de s’accumuler compte tenus de

trois éléments.

Tout d’abord, l’organisation mécaniste peut à terme d’ajouter des contraintes

sur la structure de l’entreprise et du bureau. Nous l’avons vu ce type schéma

d’organisation correspond de moins en moins à son environnement.

Ensuite, le management public peut être considéré comme une difficulté

supplémentaire pour toute action de changement organisationnel. En effet, ces

systèmes sont accoutumés à des routines et des traditions qui peuvent

empêcher des réformes. Ces organisations sont également en proie à des luttes

de pouvoir au niveau interne mais aussi national.

Enfin, les effets d’une gestion par projet ne sont pour l’instant pas prouvés en

termes de transversalité, de communication et de décloisonnement des

entreprises qui ont utilisé de telles méthodes. Le fait que nous situons dans un

changement stratégique n’arrange pas notre étude puisqu’il s’avère assez

compliqué de mener à bien ce genre de projets.

Beaucoup de facteurs converges dans le sens que la réorganisation

s’annonce délicate à mettre en place.

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Chapitre 3

La réorganisation est elle possible dans ce bureau

de Poste ?

Introduction du chapitre

Malheureusement ce mémoire ne pourra pas suivre le développement final

de la réorganisation de la distribution des ménages du bureau, car le projet a

pris du retard et ne sera abouti avant septembre,  « au mieux » d’après le

directeur de l’établissement. Cependant nous pourrons nous appuyer sur des

résultats intermédiaires et sur des entretiens de suivis du projet. Pour cela j’ai

interrogé plusieurs personnes de tous les échelons hiérarchiques du service.

Nous allons donc nous situer davantage sur des perspectives d’avenir liés à

la façon dont le changement est amené et nous projeter sur la situation finale en

fonction des objectifs, des contraintes actuelles et de ce qui a pour le moment

été réalisé.

Il s’agit de concilier une approche de la gestion telle que la connaît la sphère du

privé sur des bases fortement ancrées dans le management public.

Concrètement cela ce traduit par une volonté de satisfaire les clients alors que la

culture de la performance n’est que faiblement présente dans les esprits de tous

les acteurs de l’organisation.

L’accomplissement des objectifs stratégiques apparaît comme le leitmotiv de

la réorganisation. Or ces objectifs ne sont pas clairs pour tous, le seul élément

qui soit connu est la volonté politique du groupe, tandis que les manières et les

enjeux des nouvelles méthodes sont totalement méconnus.

Au cours de ce chapitre, nous commencerons par nous interroger sur la

forme que la structure va adopter pour accomplir son activité sans perdre de vue

le pourquoi de cette réorganisation.

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Dans un deuxième temps nous étudierons les méthodes et les outils de

management qui seront mis en place pour diriger le changement

organisationnel.

Enfin nous verrons par quels moyens le bureau compte désormais établir le

contrôle et le pilotage du centre opérationnel. Les changements en la matière

sont relativement importants et nous constaterons que les logiques d’actions

pourraient évoluer assez fortement.

Ce chapitre est fondé sur les déclarations de l’encadrement, de préposés et

mis en relief avec les théories que nous avons mis en avant précédemment.

I. Quelle sera la situation par rapport aux enjeux fixés ?

Pour cette première partie nous allons reprendre les points précédemment

développés dans le chapitre II (cf. Figure 3 : triangle de la performance dans une

entreprise de service public).

I.1) Vers une crise structurelle ?

Cette question est légitime pour deux raisons, les mutations de

l’environnement d’une part mais aussi sur le temps important que prendre cette

restructuration.

Une organisation qui ne ressemble plus à son environnement

Une standardisation des processus et des modes opératoires ne fait aucun

doute pour la prochaine réorganisation. La certification qualité sera l’occasion de

rendre plus accessibles les fiches postes déjà existantes qui pourrait y inclure

davantage de détails.

Cependant rester sur une structure de type mécaniste ne semble plus être le

choix le plus pertinent par rapport à un environnement qui n’est plus aussi stable

qu’auparavant. Le bureau semble ainsi être dans une position délicate entre la

volonté de préserver les avantages d’une telle structure, tout en approchant

d’autres formes d’organisations qui apporteraient la flexibilité et la réactivité que

requiert ce nouvel environnement.

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A terme le danger serait d’obtenir une organisation hybride dans son

fonctionnement et ne plus être efficace par rapport à son milieu. Alors que

l’entreprise, de par ses statuts, est déjà particulière puisqu’elle emprunte des

instances des sphères publiques et privées.

En outre, la réorganisation part du principe que le TG 4 est pleinement

opérationnel et source de gains de productivité. Alors que l’on m’a confié que ce

type de tri n’est pas encore parfait et occasionne des pertes de temps pour

retraiter des lots défectueux. Ainsi, certaines prévisions d’activité risquent d’être

mise à mal en cas d’un nombre trop important de mauvais tri.

Cohabitation de systèmes différents

Les exemples de promiscuité entre des logiques contradictoires sont déjà

marquants alors que les scénarios de la restructuration n’ont pas encore été

dévoilés.

En premier lieu, c’est le phénomène de mécanisation s’accroit dans le bureau

de Poste, avec la centralisation de sa dernière fonction support (l’UGRH), ce qui

est en contradiction avec les logiques de transversalité que l’on retrouve dans

tous les échelons hiérarchiques. En effet, lors des entretiens que j’ai pu avoir,

tous les cadres m’ont vanté les mérites et la mise en place prochaine d’une

gestion transversale entre les services par l’intermédiaire d’une gestion des

processus. Or en pratique tout semble être fait pour le bureau ait pour seule

fonction la production de services.

L’ambivalence entre les résolutions d’emprunter des méthodes de gestion

dérivées du privé appliquée dans une entreprise du secteur public cause des

sources d’incompréhensions et de tensions entre les préposés et l’encadrement.

C’est que nous observerons plus précisément dans la partie de résistance aux

changements

Des métiers et des postes qui vont évoluer ?

Compte tenu des transformations que connaît La Poste en interne et en

externe cette question sur les changements possibles sur le contenu des métiers

et des postes est légitime.

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Afin de maximiser le temps de présence des préposés, le bureau à

l’opportunité à terme de remplacer des postes qui ne dépendent que d’un seul

service à l’extension à deux services. Les avantages pour l’organisation sont

multiples. Grâce à la mécanisation accrue la productivité des facteurs devrait

augmenter. En effet, ceci permet une réduction des activités de tri manuels, il est

donc désormais possible soit de faire distribuer plus de courrier à un préposé en

une seule vacation soit un facteur distribue toujours la même quantité de courrier

mais avec du temps de préparation de gagner. Il est donc possible

théoriquement de distribuer le volume de courrier, qui de plus tend à diminuer0,

avec moins de personnes. Ou alors, ce « gain de temps » peut permettre une

répartition des préposés dans d’autres services que celui de la distribution des

ménages. Il existe déjà un dizaine d’emplois de ce type0. Cet exemple illustre

bien la volonté du bureau de rentabiliser l’occupation de ses membres, ce qui

nous amène donc à traiter des notions de budgétisation et d’efficacité dans notre

objet d’étude.

I.2) Budgétisation et efficacité

Le premier changement significatif du bureau se situe logiquement au niveau

l’effectif compte tenu des gains de productivités escomptés par le « TG 4 ». A

l’instar de nombreuses d’entreprises, en particulier dans le service public,

beaucoup de départs à la retraite ne sont pas remplacés. De plus ceci s’explique

par deux objectifs liés : un accroissement de la productivité du travail (hors

amélioration du tri) et la volonté de faire des économies. En effet, il est acquis

que pour l’activité de distribution de courrier le premier poste de dépense est

issu de la masse salariale. Dès le mois d’octobre 2006, le directeur

d’établissement a commencé à anticiper des moyens humains à la baisse en ne

procédant pas au remplacement de 7 facteurs qui partaient à la retraite. Cette

anticipation a été faite indépendamment de toute directive de la DOTC 44/85,

puisque aucun chiffre ne sont encore parvenus au directeur. De fait les moyens

sur le terrain sont de plus calculés au plus juste, pratiquement à flux tendu.

0 Voir le Tableau 1 du chapitre 10 Ces emplois sont récents et issus des accords « Vaugirard » (nom de la rue du siège de La

Poste). Ils ont fait l’objet d’une négociation pour transformer des emplois à temps partiel à temps complet, en contre partie, la vacation peut être divisée en deux.

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Effectivement, le nombre de tournées à découverts augmentent et le manque de

« rouleurs »0 est de plus en plus évident d’après Mr Comte. Et cette tendance ne

va pas en s’améliorant car chaque départ n’est pas remplacé de façon durable,

pour le moment il s’agit de main d’œuvre temporaire en attendant les prochains

circuits de tournées.

La question de l’utilisation du budget est donc essentielle. Or l’objectif est

d’assurer un bon niveau de qualité auprès des clients il semble contradictoire

que les préposés de la distribution soient les « parents pauvres » du service.

Alors qu’en parallèle les lignes hiérarchiques restent nombreuses et les choix

d’investir dans une communication incomprise et dans des outils mal maîtrisés

(informatique en particulier) ne sont peut être pas les meilleurs par rapports aux

desseins de l’organisation.

II. Les méthodes de gestion utilisées concrètement

Nous pouvons distinguer trois axes pour mettre en place la réorganisation du

bureau. Le premier est la gestion par projet, le second est le développement

important de la communication interne et le troisième est la préparation à la

certification ISO 9001.

II.1) Une réorganisation sous forme de projet

« Théoriquement », d’après Mr Terrien, toute la réorganisation est sous la

forme d’un projet. Il est en mesure de solliciter des experts dans ce domaine

auprès de la DOTC.

Experts, scénarios et outils

Les experts dont dispose le directeur de l’établissement ne sont pas issus du

terrain et ne viennent pas observer au plus près le travail des facteurs. Il n’existe

donc pas de retour d’expériences ou de concertation avec les préposés qui

peuvent être parfois les plus à même d’évaluer ce qui est réalisable en pratique.

Pourtant le « knowledge management »0, est un élément important de la gestion

0 Voir définition dans le chapitre 1.0 Voir la définition du chapitre 2

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par projet comme nous avons pu le constater dans le chapitre 2. Le risque est

donc de voir la mise en place d’un système qui ne prenne pas en compte les

réalités du terrain.

Pour le moment, le « projet » n’en ait qu’à une phase intermédiaire et

pourtant il a été amorcé il y a environ un an avec l’arrivée des premiers contrats

issus des accords de « Vaugirard ». Les experts ont seulement procédé à une

évaluation du trafic de courrier pour permettre de préparer le futur découpage

des secteurs et des tournées. Les prochains travaux des experts seront de

procéder à un diagnostic à partir duquel ils vont proposer des scénarios au

directeur d’établissement. Celui aura ensuite à sa charger de les présenter aux

représentants du personnel et au préposés.

Les scénarios devraient comporter la nouvelle division des quartiers lettres et

le niveau de productivité à atteindre par les facteurs. Les premières hypothèses,

faites par Mr Terrien, seraient de passer de 72 quartiers lettres à 66. Ce qui

explique ses anticipations pour le non remplacement de départs à la retraite.

Mais le directeur à tenu à m’assurer qu’il n’y avait pas d’organisation inscrite

dans le marbre et que le scénario retenu serait celui qui fait le plus un

consensus.

Les outils employés ne sont pas formalisés en fonction des experts. Car la

DOTC 44/85 est issue du rapprochement des DOTC 44 et 85. Cette fusion est

plus de principe car les équipes d’experts du 44 et 85 ont gardés leurs propres

méthodes. De fait la gestion du projet à La Poste, dépend fortement de la

sensibilité du groupe d’experts qui le prend en charge. Ceci ne facilite pas le

travail du directeur d’établissement qui doit composer avec des méthodes

différentes à chaque projet.

Dans la restructuration qui nous concerne, un logiciel informatique est chargé de

la refonte des tournées. Ce programme prend en compte beaucoup d’éléments

tels que : le type et le volume de courrier, le type de clients (« PDI »0, « PRE »0),

le type d’habitat (immeubles, maison). Après une phase de calculs, l’outil

informatique permet d’obtenir les parcours et les temps de « haut le pied ».

Néanmoins, les scénarios proposés risquent d’être très mal perçus et ce pour

deux raisons. La première est l’attachement des facteurs à leurs tournées. La

0 Point de distribution : regroupe tout ce qui est boîtes aux lettres0 Point de remise : ce sont les commerces ou tout autre lieu sans boîte aux lettres

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seconde, est le manque de concertation et la présentation de tournées

contestables. En effet ce logiciel a déjà été employé auparavant dans la

réorganisation d’un autre service de ce bureau, celui des collectes. Les tournés

qu’avait calculé le logiciel ont provoqué mécontentement du service tout entier, y

compris chez les chefs d’équipes, qui a eu le sentiment d’être « court-circuité »

lors du procédé de conception itinéraires. Finalement, après plusieurs jours de

grèves, la direction a du revenir sur ses plans initiaux et laisser l’encadrement de

proximité retravailler une partie des scénarios. Par cet exemple, nous pouvons

une analogie à ce que nous étudions et le risque qu’encours le projet en tenant

pas compte du terrain. Il semble que la direction s’enferme sur sa vision du

projet et ne prend aucun avis extérieur.

Planification

Dans ce domaine, le directeur est conscient des carences auxquelles il doit

faire face. En effet il aurait souhaité que les experts projets de la DOTC lui

présentent un diagramme de « GANTT » et calendrier sous forme de schéma

« PERT ». Or ce ne fût pas le cas et les contraintes de temps qu’ils lui sont

imposés semble relativement faible voir inexistante compte tenu du nombre de

fois où Mr Terrien a pu reporter l’échéance de la réorganisation qui était

initialement prévue d’appliquer à 100% en mai 2007. Il est désormais confirmé

que la restructuration n’interviendra pas avant septembre ou octobre de cette

année, alors que les premières réunions pour préparer la mise en place ont

commencé dès juin 2006.

Le manque de rigueur dans le respect d’un calendrier à deux conséquences

possibles dans notre cas. Tout d’abord c’est de perdre en crédibilité sur le projet

que l’on mène, sur son bien fondé et sur les compétences de ceux qui sont

chargés de le mettre en place. Ensuite le second risque est de laisser trop

longtemps une organisation en transition qui finirait par être perçue comme finale

par les acteurs. Les comportements vis à vis de leur travail ou de l’organisation

pourraient se dégrader compte tenu d’une incertitude sur le mode opératoire

adopté entre la situation initiale, intermédiaire et finale. La notion d’incertitude est

néfaste pour les structures et pourrait être à l’origine de déviance de la part des

protagonistes.

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62

Une gestion de projet de principe ?

Nous pouvons nous poser cette question compte tenu de l’absence dans le

bureau des outils conventionnels rencontrés habituellement pour ce type de

gestion et sur les compétences à mettre en œuvre.

Certes, la DOTC a désigné un chef de projet, mais celui ci se voit imposer les

scénarios qu’il devra ensuite simplement présenter au service. Ces scénarios

devraient ensuite faire l’objet d’un marchandage interne avec les préposés et

leurs représentants du personnel. Le « chef de projet » n’a pas de rôle actif dans

la conception, il bénéficie de faibles marges de manœuvre sur l’application qui

de plus est soumise à caution. D’autre part, les « allers-retours » ne concernent

que le directeur et les experts et aucunement le terrain et le directeur ou le

terrain et les experts. Le directeur ne peut pas parler au nom de ses préposés

sur la manière de travailler sur le terrain car il ne possède pas la même

perception de l’activité de distribution.

C’est sûrement la DOTC qui possède les outils tels que le PERT, mais elle ne

les communique pas au chef de projet local qui doit se contenter des résultats

pour acquis. Mais nous pouvons douter de l’emploi de ses outils, même au sein

de la direction régionale étant donné que le chef de projet ne semble pas

préoccupé par le suivi strict d’un calendrier.

Or la question des délais dans un projet est considérée comme « aigue » par

les théoriciens et souvent par les commanditaires est ici complètement occultée,

la DOTC et Mr Terrien donnent l’impression que rien ne presse ni sur l’arrivée de

la concurrence ni sur les dangers d’une organisation qui devient un mélange

entre la situation de départ et celle espérée.

Pour toutes ces raisons nous pouvons affirmer que ce bureau ne se

réorganise sous une forme classique d’un projet. Elle en porte effectivement le

nom mais possède que peu de ses attributs. Comme nous l’avons déjà décrit

dans le second chapitre, les organisations publiques osent se lancer dans la

gestion dite « moderne ». Mais pour cela il vaut savoir ce que l’on applique et

s’en donner les moyens. Mon hypothèse est que, les instances craignent une

opposition trop forte en cas de changement trop radicale, mais nous verrons que

réformes qui ne sont pas pleinement abouties sont à l’origine du phénomène

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d’incertitude qui peut s’avérer être un vecteur de résistance au changement bien

plus important qu’une évolution radicale dans les procédés de gestion.

Le marketing interne peut nourrir cette incertitude puisqu’il prône

généralement des projets théoriquement parfait alors que sur notre terrain tout

n’est pas appliqué.

II.2) Importance du marketing interne

Ce phénomène est lui aussi assez récent dans la gestion des entreprises. Il

s’agit d’obtenir l’adhésion des salariés d’une entreprise par l’intermédiaire d’une

communication très travaillé. La Poste a commencé à développer fortement cet

aspect de la gestion. Nous allons voir que les moyens sont nombreux mais

exempt de reproches.

Nombre de médias important

La plupart des médias internes (journaux en particulier) de La Poste vantent

les mérites des nouvelles organisations, des nouvelles machines de tri. Lors des

réunions et des formations éventuelles, le fondement des restructurations ne

sont jamais remis en cause. La récente mise en place de tableaux d’affichages

cherche à montrer la future disposition du bureau et donc du service de

distribution.

Les lettres de félicitations et d’encouragement sont régulières de la part soit

du président du groupe, le directeur général du courrier ou même du directeur de

l’établissement, surtout à la période des vœux de début d’année.

En outre, La Poste développement des enquêtes d’opinions auprès de ses

préposés pour leur montrer que leurs avis sont pris en considération.

Il existe un autre média pour le moins « insolite » qui est de faire cadeau d’un

livre de portraits de facteurs tous plus méritant les uns que les autres et aimant

plus que tout leur travail et leur entreprise.

Pour une partie des préposés que j’ai pu rencontrer ces médias sont

considérés comme une forme propagande facile et qui ne reflètent pas toujours

la réalité du terrain. Encore une fois la vision que propose la direction est

décalée par rapport à celle du centre opérationnel.

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Une communication qui souffre de lacune

Si l’image est très travaillée sur le métier il existe néanmoins des manques

pour projets qui paraissent prometteurs dans les médias officiels, qui n’ont pas la

communication correspondante sur le terrain et encore moins d’actions menées.

Malgré ces efforts sur les moyens mis en place comme : les « points qualité », le

travail de communication risque d’être vain puisque le contenu des informations

peuvent manquer de consistance et être trop évasif sur les projets, les actualités,

etc. du groupe. A titre d’exemple récemment j’ai pu constater que sur le tableau

dédié à la qualité un organigramme de l’organisation y était placé, alors que ce

qui intéresse les facteurs c’est la prochaine division des « quartiers lettre » et

tout ce qui pourrait résulter d’un changement dans leur façon de travailler voir

dans leur métier.

La manière de communiquer ne laisse pas indifférent les facteurs puisque la

tendance serait « d’infantiliser »0 ou faire des « efforts pédagogiques »0 et serait

jugée comme trop simpliste par les facteurs qui de fait ne se reconnaissent pas

dans la communication qui leur est adressée. Pour s’en convaincre nous

pouvons voir les extraits d’un document de formation (annexe n°4) qui est très

caricaturale sur la manière dont la gestion de la qualité fonctionne.

De plus la communication interne s’opère essentiellement dans le sens

sommet stratégique et hiérarchie vers le centre opérationnel. Il n’y que très peu

d’échange sur la vision des facteurs, leurs idées éventuelles. D’autre part nous

avons vu précédemment que les négociations sont difficiles entre les

représentants du personnel et la direction. Pourtant des les entretiens que j’ai pu

passer avec des préposés, peu d’entre eux connaissent les projets qui sont en

cours. S’ils en entendent parler c’est souvent par des rumeurs qui courent dans

les travées des facteurs. De plus les informations semblent être issues pour

l’essentiel des syndicats. Les syndicats ne connaissent eux même pas toutes les

modalités du projet en cours. Il existe un phénomène de « bruits de couloirs »

qui peut mener à une confusion sur l’objectif du projet et produit une défiance à

son égard.

0 Expression utilisée par Mr Comte le 29/03/20070 Expression utilisée par Mr Dumont le XX/XX/XXXX

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II.3) Ajustements des moyens de production Le passage à une certification ISO 9001

La certification qualité est issue d’abord d’une volonté nationale qui déléguée

ensuite aux DOTC. La DOTC 44/85 vient de demander au bureau que nous

étudions de se préparer au passage à l’ISO 9001. Pour cela l’établissement à

commencer à évaluer son niveau de qualité grâce à des audits « blancs ».

Actuellement les conclusions sont très peu encourageantes, surtout en matière

de communication et de transversalité entre les différents services. En effet de

l’aveu même du cadre courrier Serge Dumont0, l’établissement a un taux de

réalisation de 18% de cet objectif alors que pour obtenir la certification il devrait

se situer au dessus des 60%. Malheureusement je ne connais pas dans les

détails les critères qui sont retenus et évalués. Or la procédure de certification

ISO 9001 version 2000 demande une gestion par les processus et l’organisation

doit s’inscrire dans cette logique de transversalité. C’est pourquoi le directeur

d’établissement assisté de son animateur qualité demande à des intervenants

internes de sensibiliser le centre opérationnel à la notion de qualité0 au sens ISO

9001 v.2000 qui comprend la gestion par processus.

Enfin, la certification peut être l’origine d’une standardisation accrue car s’il

ne s’agit que de renforcer des fiches postes déjà contraignantes et que la qualité

se résume essentiellement à ne pas s’attarder plus de temps qu’il n’est prévu

pour la distribution d’un courrier (quel qu’en soit le type). Il conviendrait alors de

dire que sous couvert de la norme ISO 9001 on renforce la structure mécaniste

et le contrôle par standardisation. Alors qu’à la base la satisfaction des clients

est l’objectif essentiel et non pas une augmentation de la productivité.

II.4) Gestion par processus

Le management par les processus s’inscrit donc la certification ISO 9001 par

une obligation. Néanmoins appliquée à notre bureau de Poste, c’est l’occasion

de voir les limites et les premières dissonances importantes entre les volontés

politiques et les réalités du terrain. Comme nous l’avons déjà constaté, la

communication est relativement médiocre. Cependant, même dans le cas d’une 0 Lors de l’entretien accordé le 18/01/20070 Voir l’annexe 6 qui est issu d’une formation interne avec des intervenants

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communication claire et précise sur les intentions de la direction et de

l’encadrement, il existe une segmentation très importante des fonctions de

l’entreprise et la centralisation de pouvoirs discrétionnaires au sein de la DOTC

44/85. Pour une organisation qui dit vouloir tendre vers la transversalité, les

actions menées ne vont pas vers cet objectif.

Logique par produit

Comme nous pouvons le constater dans l’annexe n°5, les processus

s’articulent autour d’une logique par produit. Chaque processus possède un

pilote, représenté par Mr Dumont ou Mr Remond qui sont des cadres de

production0. Les processus sont décomposés en trois étapes, sauf pour la

publicité non adressée. La première étape est la collecte et concentration des

produits, elle dépend du « CTC » d’Orvault qui envoie les produits en fonction de

leur typologie. A charge du bureau de vérifier la conformité du tri qu’ils

récupèrent. La deuxième étape consiste à distribuer le courrier, les façons de

faire ont très peu évolués depuis l’apparition des services postaux et

consisteront toujours à mettre le courrier dans les boîtes aux lettres. Enfin la

dernière étape est « la gestion du service client », elle a pour fonction essentielle

de recueillir les réclamations des clients, qui sont pratiquement le seul outil et

mesure de la satisfaction des clients. Ce qui peut sembler dérisoire lorsque

l’objectif de l’organisation est désormais de contenter ses clients, comment juger

de cela si l’on ne peut pas évaluer de façon préciser leur ressenti ?

Enfin notons que malgré un plan de communication conséquent sur les

nouveaux produits de services développés par le groupe, et comme nous l’avons

constaté dans le premier chapitre avec la gamme Genius, pour le directeur

d’établissement ceci n’est pas à l’ordre du jour. Il considère que la zone urbaine

dans laquelle se situe son bureau n’aura pas de demande suffisante en la

matière et le bureau continuera à ne proposer que de « petits services » tels que

la remise de chèques, la vente de timbres qui sont des activités très marginales

en temps et en valeur. C’est pourquoi ces services ne figurent pas dans la

cartographie des futurs processus.

Une gestion par processus difficile

0 Voir les annexes n° X et X

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Les pilotes produits pour les fonctions de support doivent passer par les deux

autres pilotes, Mr Terrien et Luquet, qui se partagent ces travaux. Ces deux

personnes sont les seules passerelles vers la DOTC qui possède les outils et le

pouvoir en matière de services commerciaux, ressources humaines et

matérielles, méthodes et outils, contrôle de gestion et système d’information. Les

cadres de production n’ont pas les moyens et les incitations traiter directement

avec les fonctions concernées par leur activité auprès de la DOTC. Cette

barrière ne correspond pas à une transversalité organisationnelle effective.

Ceci peut s’expliquer par l’utilisation d’un système d’information entre le

centre courrier de Nantes Bretagne, le centre de tri d’Orvault et la DOTC qui est

très rare. D’après Mr Terrien un renvoi d’information est effectué à chaque début

d’année ou d’événements très ponctuels, comme des élections par exemple. Il

n’existe donc pas de réelle marge de manœuvre et le centre courrier ne peut

faire que des anticipations sur la quantité de courrier qu’ils vont recevoir en

fonction de leur expérience quotidienne. Par exemple, du fait de la presse

hebdomadaire le jeudi et le vendredi sont les jours les plus chargés de la

semaine.

D’ailleurs le bon respect des processus serait handicapé, toujours d’après le

directeur, par problèmes avec les lots de « TG3 » issus du centre de tri

d’Orvault. Dans cas là il n’a qu’une possibilité, c’est de remplir une fiche

d’anomalie. Cependant le processus garde malgré tout son cours mais de fait les

contraintes sont plus importantes en termes de délais puisque une partie du tri

est à refaire.

Enfin, la gestion par processus n’est pas encore connue par les préposés.

Pourtant si j’en crois l’animateur qualité ce point est important et les facteurs

doivent à terme être en mesure de savoir où ils se situent dans les processus.

Mais il faudrait commencer par explique ce que peut apporter la gestion par

processus.

Les objectifs

L’intention de la gestion par processus est de permettre une meilleure

évaluation des variations hebdomadaires ou annuelles des volumes de courrier.

Et à terme c’est pouvoir rendre plus flexible l’organisation et optimiser les

facteurs de productions par rapport à la charger de travail.

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Ainsi par ce moyen, le bureau espère répondre à une grande partie des buts

qui lui sont fixés : la certification ISO 9001 et l’amélioration de la qualité perçue

par le consommateur et minimiser ses coûts de production en rendant la

structure plus efficiente.

Cependant les dépenses de la mise en place d’un tel système (en incluant

celui du management de la qualité) ne semblent pas avoir été évaluées. D’autant

plus que l’efficacité de la certification ISO 9001 dans les services n’a pas encore

été totalement prouvée par rapport aux moyens qu’il faut engager et les

contraintes supplémentaires qu’elle puisse amener à une organisation.

III. Contrôle et pilotage de l’organisation

Ce dernier point concerne aussi la résistance au changement, mais pas

seulement. Pour le moment le planning connaît de sérieux retards amplifiés par

une volonté de la direction du centre de ne rien changer avant la période

estivale. En tout cas les premières conséquences se font ressentir sur

l’encadrement, les lignes hiérarchiques ont été les premières touchées.

III.1) Réduction hiérarchique pour une autonomie accrue ?

Alors que tout semble imposer au groupe, et au bureau en particulier, d’opter

pour une structure plus souple. Techniquement le nombre de cadres pour diriger

le service de distribution reste élevé. Comme nous l’avons déjà mis en évidence

lors du premier chapitre, on dénombre un « CAPRO » pour quinze facteurs. Or si

j’en crois Mr Comte, il est tout à fait possible pour une à deux personnes de

s’occuper des tous les préposés avec le niveau de responsabilité et les tâches

qui leurs sont prescrites dans leurs fiches de poste. Par ailleurs il apparaît, dans

ce même entretien, que la fonction de « CAPRO » manque de perspectives

d’évolutions et surtout de profondeur dans l’exécution de leur activité. En effet ils

doivent quotidiennement rendre des comptes au responsable direct et/ou à

l’encadrement supérieur du bureau (Mr Luquet et Terrien). La récente réduction

de cadre, est un simple passage de trois à deux cadres de production et la

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délocalisation du chargé en ressources humaines. Par ailleurs l’effectif comporte

un « CAPRO » supplémentaire pour suppléer l’animateur qualité.

Dans l’ensemble les réductions d’effectifs dans l’encadrement est très

modérée par rapport à celui constaté dans le centre opérationnel.

En matière d’autonomie, rien ne semble présager d’un quelconque gain pour

les « CAPRO » ou même pour le centre opérationnel. Avec la nouvelle

concentration des pouvoirs dans la DOTC et la non sollicitation à aller au delà de

ce qui est prescrit l’autonomie ne va donc pas être augmentée au sein du bureau

de Poste.

J’ai pu remarquer que sur le terrain les mesures accompagnement des

facteurs paraissent faire défaut. Les seuls contacts entre un préposé et son chef

d’équipe s’opèrent lors de problèmes. Le travail des responsables de la

distribution (les 4 « CAPRO » et le cadre courrier) n’est pas évident pour le

centre opérationnel. En effet les préposés ne connaissent pas les missions

exactes et les responsabilités de leurs superviseurs directs.

III.2) Evaluations et contrôle

Les évaluations s’effectuent une fois par an pour les facteurs et tous les

préposés passent à la même période. Il existe des grilles d’évaluation qui

s’articulent à la manière d’un sondage avec des barèmes de type « peu mieux

faire », « satisfaisant », « très satisfaisant », etc. Les grilles font état d’objectifs

individualisés à atteindre pour les préposés au cours de l’année.

Mais les évaluations sont souvent faites rapidement entre quinze et quarante

minutes selon celui qui la fait passer. L’idée n’est pas de réellement d’estimer les

compétences ou le travail d’un préposé. Ceci peut s’expliquer essentiellement

par une culture d’entreprise qui n’est pas habitué à ce type de pratiques. Les

chefs d’équipes, qui sont chargés d’apprécier leurs subordonnés ne sont pas ni

enclins, ni habitués à les effectuer.

Par conséquent les évaluations ne sont guère exploitables, car les notations

sont pratiquement toutes très bonnes et aucun préposé ne peut ressortir du

groupe étant donné l’homogénéité des résultats obtenus.

La principale action concrète de contrôle est faite à partir des réclamations

des clients, qui lorsqu’elles sont trop nombreuses pour un secteur ou une

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tournée en particulier donnent lieu généralement qu’à une réprimande orale du

ou des facteurs concernés. Pourtant on m’a assuré qu’en cas de trop

nombreuses réclamations un facteur peut être passible de sanctions allant du

blâme au cas extrême du licenciement pour les salariés, et pour les

fonctionnaires il s’agit de les limiter ou les rétrograder dans les échelons

inférieurs de la fonction publique.

Même si le contrôle est considéré comme la clé de voute d’une structure

mécaniste, la culture de l’entreprise, qui peut être amplifiée dans notre bureau,

fait que les mécanismes de contrôle sont très peu efficace. Le risque pourrait

s’avérer grave pour la qualité du service rendu. Heureusement, comme nous le

savons il existe une conscience professionnelle assez prononcée dans les

services publics. Donc en pratique il en résulte un décalage entre ce qui est

voulu par la direction et ce qui est exécuté sur le terrain.

En matière de contrôle, les règles ont du mal à être appliquée sur le terrain.

Toutes les règles de sources officielles sont méconnues par les individus de

l’organisation en particulier pour les fiches postes et le règlement intérieur. Ceci

s’explique par des formations tardives voir absentes pour les personnes

nouvellement recrutées. De fait le savoir est beaucoup plus oral et informel.

Heureusement pour la structure, le décalage entre ce qui est normalisé sur le

papier et ce qui est enseigné de facteurs à facteurs n’est pas diamétralement

opposé.

D’autre part nous ne retrouvons pas dans la pratique le contrôle par

standardisation alors que nous sommes dans une structure de type mécaniste.

Ceci s’explique de part la difficulté de mettre des « contres maitres »0 derrière

chaque facteur lors de leurs tournées. Même s’il est pourtant possible de mettre

des systèmes parallèles, par exemple en chronométrant les temps régulièrement

les temps de parcours des préposés. Or pour Taylor si une entreprise un

contrôle qui s’avérerait inefficace le risque est de voir les agents ne pas travailler

au niveau de ce qui est prescrit.

Enfin, nous pouvons présumer que le contrôle se fait davantage de façon

idéologique à La Poste et dans le bureau que nous étudions. Néanmoins pas de

façon « classique » dans le sens de Weber où les préposés ont crainte du

pouvoir de la sanction mais dans une logique de socialisation où les préposés 0 Au sens de Taylor

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partagent des valeurs communes. Quiconque au sein de l’organisation qui ne les

partageraient pas se mettrait de fait à l’écart des ses collègues. Prenons un

exemple simple, un préposé pour qui le travail bien fait n’a pas d’importance

risque avant tout de se faire mal voir de ses collègues plutôt que de son

encadrement.

La question des valeurs des facteurs est donc essentielle vu qu’il semble que

ce soit l’outil de contrôle le plus sensible. Ce qui nous amène à traiter de la

résistance au changement.

III.3) Les causes de la résistance au changement

Pour comprendre le phénomène, complexe, de la résistance au changement

il faut s’appuyer sur les bases de théories de sociologie des organisations et les

façons dont le changement est amené, sa légitimité, etc. Il est essentiel de tenir

compte des interactions sociales présentes.

Des perceptions et des attentes différentes de la réorganisation

Au sein du bureau de Nantes Bretagne il est existe des disparités entre

l’encadrement et les préposés sur les relations entretenues avec le travail.

Du point de vue des préposés

Les facteurs partent du principe qu’ils connaissent leur métier, généralement

appris sur le terrain et de façon orale pour l’essentiel. Tout ce qui est référentiels

et prescription du travail leur semble superflu et préfère se fier à la méthode qui

leur est transmise. Les formations et les sensibilisations à la qualité et la gestion

par processus n’est pas la première préoccupation des facteurs pour qui le sens

du service ne correspond pas à ces prescriptions. En revanche, ce qui leur tient

à cœur c’est le contenu de leur travail, qui est partagé entre la distribution hors

du bureau ou le tri préparatoire. Le découpage des tournées et des secteurs est

essentiel pour les facteurs. C’est leur première préoccupation. En effet, comme

me l’a confié Armand Comte, les facteurs titulaires d’une tournée nouent très vite

des liens avec les usagers de leur tournée. La réorganisation supposant un

nouveau découpage des quartiers lettres peut rendre anxieux une bonne partie

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des facteurs qui n’arrivent pas à ce faire à l’idée de perdre contact avec

personnes auxquelles ils se sont attachés. Cet exemple très pragmatique montre

un certain décalage avec l’idée

Les préposés sont profondément préoccupés par ce qui les concerne

directement. D’autant plus que l’ancienneté d’un préposé augmente, s’il est

titulaire de la même tournée depuis cinq, dix ou vingt ans. Par exemple, un

facteur peut voir une famille avoir des enfants, connaître des malheurs ou

d’heureux événements, ils donc émotionnel attaché à sa tournée et son travail.

Le moindre changement de tournée ou de secteur géographique peut être alors

très mal vécu par des préposés.

De plus, en l’absence de vision et d’objectif clair, l’incertitude est d’autant plus

grande pour les préposés. Les facteurs ne possèdent pas la culture de la gestion

dite « moderne » par processus ou la qualité. C’est pourquoi les théories qui leur

sont énoncées sont à leurs yeux très abstraites en dehors de tout discours clair

et précis sur le but et l’utilité de ces méthodes.

L’encadrement

Le management du bureau de Poste a tendance à davantage considérer

leurs agents comme les « machines » 0 qui ne font répondre qu’à des stimuli0 liés

aux perspectives de promotions ou de rétribution ou pire de simple considération

d’ordre très personnels, liés aux congés ou au temps libre en dehors du travail,

etc. Je suis conscient que cette notion est forte de connotation mais lors des

entretiens avec les facteurs ou l’encadrement c’est l’impression que j’ai eu. On

m’a dit à plusieurs reprises que les dirigeants du bureau ne viennent jamais

parler directement avec les préposés et ne passe que par le relai des chefs

d’équipe pour obtenir des informations sur le service. De plus les décalages

constatés sur la perception du métier est assez significative en entretien.

Cette vision peut être renforcée du fait des liens entretenus avec les

représentants du personnel. C’est pourquoi nous allons observer la position des

syndicats sur cette question.

Le point de vue des syndicats

0 Citation Morgan Gareth0 Vision taylorienne de la force de travail

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Les syndicats incarnent généralement le lien entre le personnel et

l’encadrement. Leur point de vue est pour l’essentiel fondé sur des

revendications traditionnelles comme, les salaires, les cadences de travail ou

encore la défense d’un idéel en matière de service public. Les syndicats ne sont

pas prescripteurs du changement, ils sont de façon historique opposés à la

libéralisation du marché du courrier et encore moins de la privatisation du

groupe. Dans ces conditions il est difficile de négocier sur des sujets dont ils

réfutent la légitimité.

Confrontation des perceptions et blocages

Les facteurs n’ont pas seulement des préoccupations qu’ « aux ras des

pâquerettes »0 et donc uniquement liées à des aspects de leur vie privée.

L’image renvoyée par les cadres est d’être en face de « mercenaires » du travail

qui appliquent à la lettre ce qui leur est demandé. Comme nous l’avons déjà

énoncé avec l’école d’Harvard0 dans les années 1940, « l’homme n’est pas

seulement une main mais c’est aussi un cœur ».

Le manque de corrélation entre le ressenti des préposés peut s’expliquer par

deux éléments. Le premier est cet ancrage de la direction à vouloir rester dans la

vision d’une structure strictement mécaniste, stable où les préposés ne sont

qu’une donnée que l’on peut affecter là où la demande s’en fait ressentir. Ce qui

ressemble à l’idée du fonctionnariat qui est mobilisable au besoin et n’est pas

régit par une logique de métier.

En second, comme nous l’avons déjà évoqué, il existe des difficultés de

communication au sein du bureau (voir le point X.X). Ces problèmes peuvent

être amplifiés par une autorité contestée à l’égard de l’encadrement ce qui en

parallèle nous renvoie aux questions de légitimité du changement. Les facteurs

ne sont donc pas enclins à faire des confidences sur leurs états d’âme et leur

vision des choses, à des personnes qui ne jugent d’une mauvaise écoute.

Le service évolue dans notre cadre théorique

0 Citation : Michel Terrien (directeur d’établissement) lors de l’entretien du XX/XX/XXXX. La question étant : « Comment les facteurs réagissent face à la réorganisation ? »

0 Courant des interactionnistes, déjà mentionné dans les deux premiers chapitres

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Tout ce que nous avons précédemment développé avec l’illustration de la

Figure 5 : modèle des champs de force de Lewin et les limites de la gestion par

projet stratégique du second chapitre se retrouvent dans notre objet d’étude.

Les objectifs et la structure voulue du sommet stratégique ne sont pas

suffisamment clairs pour obtenir l’adhésion de tous les acteurs de l’organisation

et sont des éléments d’incertitudes. Tout porte à croire que l’organisation à une

direction mais pas de point d’arrivée de défini. Dans ces conditions, la

stabilisation de l’ensemble semble compromise et à terme le risque est d’obtenir

une organisation qui n’a plus la constance à laquelle les acteurs était habitués et

ne pas correspondre pour autant à ce qui est fixé. Ainsi, les acteurs

l’organisation se retrouvent dans une position ambiguë entre deux systèmes,

l’ancien qui n’est plus considéré comme référence et le nouveau dont les outils

ne sont pas encore en place.

La conception du projet a été initiée par un « Groupthink » qui ne se soucie

pas des représentations qu’ont le centre opérationnel du terrain, il se satisfait de

sa vision. Et ce malgré des protestations évidentes, lors des précédentes

réorganisations dans ce service ou dans d’autres. Le sommet stratégique

soutient les propositions de la technostructure et aucune remise en cause n’est

possible. Ces oppositions prennent davantage de sens d’autant plus que nous

sommes dans un contexte ou la culture orale et le poids la routine sont

importants. L’acceptation du changement est dès lors difficile quand elle émane

d’individus qui méconnaissent le terrain par rapport à un centre opérationnel qui

ne connaît que cela. En effet, jamais les préposés ou les « CAPRO » n’ont

connu de réunions avec des experts du projet.

Pourtant la ces visites de la part des maîtres du projet sont nécessaire pour

établir un diagnostic des forces en présences et délimiter les « forces

restrictives ». Nous pouvons présumer que l’élaboration des scénarios ne tient

pas compte de façon pertinente des caractéristiques du bureau.

Dans ces conditions la résistance au changement est par conséquent grande

puisque le centre opérationnel à toutes les raisons pour ce sentir écarté du

processus du changement.

III.4) Entre tradition et modernisme

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Le côté traditionnel est symbolisé par les outils employés dans le

management public tandis que ce que nous appelons « modernes » sont des

outils de gestion de la sphère privée qui pour certains d’entre eux n’ont pas

prouvé leur utilité.

Utilisation de tableaux de bords

Les tableaux de bords sont très utilisés dans le cadre du contrôle de gestion.

Dans une organisation aussi importante que La Poste ces outils sont

primordiaux pour constater les coûts de la structure. On pourrait croire que les

organisations qui sont fortement standardisées les utilisent davantage.

Or dans notre étude ce n’est pas tout à fait le cas, les deux principales

mesures sont sur la présence des salariés et le comptage du volume du courrier.

Les données et les tableaux de bords sont centralisés à la DOTC et le

transfert des informations qu’ils contiennent sont très limités. En pratique le

directeur d’établissement obtient juste les conclusions des analystes de la

direction générale.

Tentative d’animation managériale

Tous les cadres m’ont assuré que les facteurs devraient prendre une place

de plus en plus importante des les décisions et que leur avis est toujours pris en

compte. Cependant lorsque je suis allé interroger des préposés ou

l’encadrement de terrain, ils n’ont pas du tout la sensation d’être au cœur des

préoccupations managériales. Ceci s’explique par l’analyse de deux éléments

qui ne permettent pas de placer les individus dans cette démarche, la gestion du

compromis et de l’animation ne sont pas pleinement efficace et mal perçus.

Les méthodes du compromis

La négociation est de plus en plus difficile dans le bureau, les syndicats sont

très méfiants à l’égard de la stratégie du groupe et par conséquent vis à vis des

responsables du service.

Officiellement tout reste très négocié, mais les discussions ressemblent

davantage à des affrontements. Les grèves locales sont fréquentes et illustrent

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bien ce phénomène. Le rapport de force est perçu comme allant toujours dans le

sens de l’entreprise à cause d’institutions qui lui permet d’avoir le mot de la fin.

De plus les négociations ne recouvrent que certains sujets tels que les

salaires, les promotions ou la typologie des emplois comme avec les accords

« Vaugirard » et sont souvent débattues au niveau national. Les projets de

développement sont quant à eux intégralement imposés. A noter que j’ai pu

remarquer que les résultats de négociations peuvent être ignorés par le centre

opérationnel. Par exemple, récemment un plan de promotions a été signé et peu

de personnes de l’établissement semblent être au courant.

Au final ce sont essentiellement les syndicats qui communiquent sur les

négociations en cours, et laissent transparaître leur subjectivité dans les

messages destinés au centre opérationnel, qui ne peut pas faire la part des

choses puisque la direction ne donne pas sa vision de ces concertations.

L’apparition de l’animation

L’animation en gestion se traduit par la volonté de faire adhérer aux projets

toutes les parties de l’entreprise. C’est aujourd’hui la volonté du groupe qui c’est

doté d’un animateur / pilote qualité et le responsable de l’établissement qui à le

titre de pilote de certaines fonctions au sein de l’organisation.

Cette logique doit supplanter à terme celle du management public,

officiellement on doit plus confronter ou imposer les idées mais obtenir

l’approbation du centre opérationnel.

Mais dans la pratique cette volonté d’animation ne s’adresse pas à tous les

préposés. En effet, il existe une ambiguïté avec les contrats « Vaugirard » qui

n’ont pas accès aux espaces communications prévus par l’animateur qualité. Et

même pour ceux qui y participent, les informations et les actions ne leurs

paraissent pas claires.

Pour animer le service il ne suffit pas de faire des réunions, même régulière,

si les sujets ne comprennent pas pourquoi ils sont là. L’animation doit être

capable de montrer que les logiques d’actions au sein du bureau change et que

les rapports à termes seront de type « gagnant – gagnant ».

La culture d’entreprise

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La Poste, au même titre que d’autres entreprises actuelles ou anciennes du

secteur public, possède une importante culture d’entreprise qui a toujours été

perçue comme un bloc homogène fondé autour de valeur communes.

Cependant, aujourd’hui cette culture semble s’effriter à mesure que la population

de l’entreprise et du bureau change. Par exemple, on m’a confié que les

fonctionnaires ont tendance à rester entre eux par rapport aux contractuels.

L’esprit d’entraide et de camaraderie laisse place à celui de l’individualisme ou

repli de petits groupes entre eux (généralement par secteurs). En plus des

mutations de l’environnement et de l’entreprise, le métier à lui aussi changé. La

réduction des travaux préparatoires qui s’effectuaient en groupe n’arrange pas

ce phénomène. Il arrive même que des sentiments de jalousie se développent

entre les facteurs avec des remarques du type « untel à une tournée plus facile

que les autres », « ma tournée est plus dure », etc. Lorsqu’un jour une tournée

n’est pas couverte personne ne se presse pour aider le facteur en difficulté le

lendemain.

La culture de La Poste connaît donc des modifications dont l’encadrement

devrait tenir compte, au même titre que si elle n’avait pas changé. Ici le

management pour y voir l’opportunité de ressouder le centre opérationnel autour

de nouvelles valeurs de groupe et créer une dynamique favorable à l’implication.

Gestion de l’implication

Officiellement, l’implication fait partie des préoccupations du bureau et de son

encadrement. Pour l’encadrement elle passe par les évaluations annuelles, or

nous savons que ces évaluations sont complaisantes et nivèlent les attitudes

des préposés. Dans ce contexte, un préposé qui va donner le maximum et être

très efficace risque d’être noté d’une façon similaire à un agent qui serait moins

productif. Un tel système peut mettre en péril l’implication des meilleurs agents

qui ne verraient pas l’intérêt de travailler plus que les autres, le dépassement de

soi n’étant pas pris en compte.

Malgré des discours de plus en plus moderne nous en restons toujours aux

dispositifs d’une organisation standardisée pour qui l’individu est uniquement là

pour des raisons financière et qu’il serait vain de faire des efforts pour motiver

les acteurs dans leur travail.

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Pourtant l’implication peut être améliorée facilement ne serait ce qu’en

remerciant les plus méritants ou les donner en exemple au reste du service,

utiliser efficacement les évaluations annuelles, etc.

La faible gestion de l’implication est un exemple de plus dans l’idée que le

management n’est pas adapté aux logiques qu’il doit appliquer sur le terrain.

Lors d’un entretien, une factrice m’a confiée que sa seule motivation est

personnelle, elle ne se sent pas poussée par l’encadrement. En effet, jamais de

chefs d’équipe ne viennent féliciter les agents lorsqu’ils n’ont pas ou peu de

réclamations sur leur tournée. Cet exemple n’est pas isolé et peut avoir des

conséquences fâcheuses sur le travail des préposés. Ils ne sont pas encouragés

à donner le meilleur d’eux même et toute initiative d’un collègue pour en aider un

autre ne se fait pas étant le manque de reconnaissance.

Conclusion du chapitre 3

Un manque d’expérience dans la gestion « moderne » ?

Dans le terme de gestion moderne, c’est tout ce qui fait suite à des visions du

travail du type taylorien en particulier. L’entreprise est depuis très longtemps

ancrée dans cette logique. Mais le contexte ayant changé le sommet stratégique

tente de s’adapter en employant des méthodes du secteur du privé. Or ces

procédés sont sources de tension au sein d’organisme publics pour qui ils ne

paraissent pas légitimes.

La difficulté de mise en œuvre est donc importante surtout pour un encadrement

qui lui même n’est pas habitués à ces « nouveaux » raisonnements.

De plus dans ce bureau j’ai pu constater des prises de libertés par rapport au

code du travail. Même si le groupe se défend de vouloir réduire les risques en

matière juridique et la mauvaise publicité que cela peut lui occasionner lors de

prud’hommes à son encontre. Il subsiste de la part des cadres de production des

pratiques non conformes à la légalité pour parer au plus urgent. Je vais un

exemple qui revient régulièrement : une personne se fait embaucher sur un CDD

de plusieurs mois qui est renouvelé, il en résulte ce que l’on appelle un délai de

carence0. Il n’est pas rare que pendant ce délai on rappelle la personne pour

0 Hop modalités du délai de carence

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revenir travailler mais cette fois ci par l’intermédiaire d’une entreprise de travail

temporaire.

Ces comportements résument bien la difficulté pour les cadres de composer

avec les moyens à leur disposition et les changements de statuts qui modifie leur

manière de travailler. En effet, on ne gère pas de la même façon une population

uniquement composée de fonctionnaires dont on connaît le nombre à l’avance,

dans une perspective de long terme.

Nous ne pouvons que faire des hypothèses sur les raisons de ces attitudes

comme : un manque de formation, la non prise en compte des risques ou la

conviction que de telles méthodes peuvent aussi arranger les individus qui le

subisse. Car pour avoir discuté avec des personnes du service qui sont dans

une situation assez précaire, ils demandent à pouvoir faire davantage d’heures

et être présent le plus possible.

Attentisme avéré 

Dans cette perspective la logique d’action semble bloquée entre des cadres

qui n’arrivent pas à gérer les conflits, procéder à une communication simple,

efficace et pleine de sens. Qui a tendance à laisser faire plutôt que de s’opposer

à une résistance souvent conséquente. Pour s’en convaincre, il suffit de voir le

temps que met ce projet à aboutir, il est lancé depuis déjà plus d’un an et ne

sera pas probablement pas appliqué avec cinq à six mois alors qu’il ne s’agit que

d’une refonte des tournées.

Une communication défaillante

Malgré certains efforts sur les médias de diffusions, or les absences de clarté

sur le discours et de contenu en matière de communication favorise la résistance

au changement. On pourrait penser que ces manques sont la volonté de la

hiérarchie de laisser dans l’obscurité les préposés. Mais en l’état actuel des

choses, l’encadrement lui même ne connaît pas toutes les modalités

d’application et l’objectif précis de la réorganisation, ils ne disposent pas non

plus de tous les outils et le contenu nécessaires pour communiquer

efficacement.

Un sentiment d’abandon ?

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Au final, les facteurs ne se sentent pas soutenus et entendus par la ligne

hiérarchique. Ils ne se retrouvent pas dans la communication que le groupe veut

leur faire passer que ce soit lors des formations ou des médias officiels qui à leur

yeux est trop simpliste et à tendance à ne pas traiter des sujets qui leur importe

le plus. L’absence d’information sur le projet est manifeste, le centre

opérationnel ne connaît ce qu’est la certification ISO 9001 et la gestion par

processus et ce que ces dispositifs peuvent apporter. Ils ne connaissent pas les

objectifs et les conséquences de la prochaine réorganisation de façon précise et

concrète.

Lors de mes entretiens j’ai clairement senti ce sentiment d’abandon et je l’ai

même posé en question d’après mon ressenti et la réponse vu positive sur ce

point.

Ce sentiment est partagé par le chef d’équipe que j’ai rencontré lors de mon

étude. On demande aux « CAPRO » de faire toujours plus avec moins et c’est à

eux d’en assumer la responsabilité.

Enfin même si on ne me l’a pas avoué chez les plus responsables de la

branche courrier, les directives qui leurs sont imposés. Ils doivent alors

composer avec les moyens à leurs dispositions et pour assurer les objectifs qui

leurs sont fixés ils peuvent agir de façon contraire aux règles du bureau ou

même au code du travail.

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Chapitre

Conclusif

La naissance d’un monstre ? On veut rester mécaniste mais sans les

inconvénients ? On ne veut pas tout chambouler ? « Gagner sur tous les

tableaux » : GP, processus, standardisations ? Mauvaise appréciation du facteur

humain ? On le minore (dans ses réactions, sa place dans la com. °, etc.) ?

Le double discours des entretiens et l’inaction sur le terrain

Une horrible machine organisationnelle ?

Malgré les apparences, l’approche n’est pas systémique

Plutôt en conclu du chapitre et/ou du mémoire ?

Tout concorde vers une opposition du centre opérationnel

Tout est fait pour préparer FA, clairement la transition ? Si finalement ce

n’était pas la préparation du changement façon Lewin ? (cf. propagande annexe)

Réorganisation non aboutie pour « tester » le terrain ? On préfère attendre

les directives pour la prochaine ? (cycle plus court des réorg d’après serge)

Tiraillements multiples, incohérences (attentismes, méthodes, outils) et

décalages.

Je dois avouer ma toute relative déception lors de l’écriture de ce mémoire

sur un point, je pensais pouvoir suivre un projet tel que l’on peut nous

l’apprendre sur les bancs de la faculté. Malheureusement, ce projet n’en avait

que le nom et ne reposait sur aucune base concrète d’un réel management de

projet et ce à tous les niveaux : la planification (et le respect d’un calendrier en

particulier), la structure, les outils quasiment inexistants (immatériels tels que le

PERT ou même matériels avec des systèmes d’information), etc. Néanmoins j’ai

apprécié la possibilité d’étudier une organisation très complexe mais fascinante

et profiter de mes bonnes relations avec cette structure qui m’ont permis

d’obtenir une très grande quantité d’information.

Enfin je tiens à remercier sincèrement les collègues avec qui j’ai pu travailler

quotidiennement pendant quatre ans. Je suis notamment très reconnaissant à :

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Mr Terrien pour m’avoir permis d’étudier son bureau de Poste, messieurs

Comte, Luquet, Dumont et Pellégrini ainsi que Cécile pour leur disponibilité lors

des entretiens. Je suis très heureux des mes années passées dans le service

collecte de ce bureau et je garderais un très bon souvenir d’un grand nombre de

mes collègues et en particulier de : Céline, Gwen, Mélanie, Nancy, Vanessa,

Frédéric, Julien (mon frère) et Nicolas.

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Annexes

Annexe 1 : Matrice de Porter élaborée

STRUCTURE

Intensité concurrentielle :

Pression concurrentielle

en forte hausse.

Pouvoir de négociation des fournisseurs(Leasing véhicules,

matériels de tri)

Menace des nouveaux entrants

Attentes des clients(Entreprises,

publicitaires,

journaux)

Menaces des nouveaux produits et produits de

substitution

POUVOIR PUBLICS-ARCEP

(régulation des prix)

-Etat

(subvention, obligation

de service public,

obligation de résultat ?)

COMPORTEMENTS-Domination par les coûts

-Différenciation

Nouvelles stratégies ?

PERFORMANCE-Domination par les coûts

-Différenciation

Obligations

contractuellesChangement

organisationnel ?

Anticipations

Nouveaux

entrants

Obligations

contractuelles

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http://www.art-telecom.fr/fileadmin/reprise/secteurpostal/pres-etdsofres-0406-eng.ppt

84

L’étude est intégralement consultable à l’adresse suivante :

Annexe 2 : étude sur les attentes des usagers de services postaux (extraits)

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Début FinA

B

C

D

E

F

G H

Chemin critique

85

Annexe 3 : schéma du PDCA ou roue de Deming

Annexe 4 : diagramme de PERT

P DC AC PA D

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86Michel TERRIENDirecteur Centre CourrierStéphane ROUSSEAUDistribution MénagesArmand COMTECAPRO DistriRoger BELINCAPRO DistriAnnie HADETCAPRO DistriChristian RAULTCAPRO DistriDidier REMONDDistribution EntrepriseSylvain PIVETEAUCAPRO CédexLuc GERARDCAPRO C.SSerge DUMONTRelations Entreprises / Carré Pro / CollectesJean-Paul LUQUETQualité PerformancePierre JUGECAPRO Gestion / Logistique / SécuritéAnnexe 5: Organigramme de la structure d’origine (document d’origine interne)

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87Jean-Paul LUQUETQualité PerformanceCatherine GOURCCAPRO Gestion / Logistique / SécuritéAnnexe 6 : Organigramme de la nouvelle structure

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Annexe 7 : Document interne – la cartographie des processus

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Annexe 8 : Document interne – gestion de la qualité (extraits)

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Annexe 9 : exemples d’articles dans les média officiels

Les deux images ci dessus son tirés du

magasine « Facteurs ! » de mars 2007

L’image de gauche de « Forum » de

janvier 2007

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Bibliographie

Ouvrages

ALTER N., L’innovation Ordinaire, Presses universitaires de France, 2005

AUBERT N., DE GAULEJAC V., Le coût de l’excellence, Editions du Seuil, 1999

BARTOLI A., Le management dans les administrations publiques, Dunod, 2005

CORBEL J-C., Management de projet, Editions Organisation, 2006

CROZIER M., Le phénomène bureaucratique, Seuil, 1971

GILBERT P., La gestion prévisionnelle des ressources humaines, La Découverte,

2006

GOGUE J-M., Management de la Qualité, Economica, 2001

GROUPE HEC, Strategor, Dunod, 2006

HELFER J-P, KALIKA M., ORSONI J., Management, stratégie et organisation,

Vuibert, 2006

JOFFRE P., AUREGAN P., CHEDOTEL F., TELLIER A., Le management

stratégique par le projet, Economica, 2006

LARCHER G., La Poste : Le temps de la dernière chance, Rapports du Sénat, 2003

LAUFER R., BURLAUD A., Management public gestion et légitimité, Dalloz Gestion,

1980

LIVIAN Y-F, Organisation, Dunod, 2006

MARCH J.G., SIMON H.A, Les Organisations, Dunod, 1974

MINTZBERG H., Le management, Editions Organisation, 2004

MORGAN G., Images de l’organisation, DeBoeck Université, 1997

NERE J-J, Le Management de Projet, Que sais-je, 2005

Sites Internet

BVA (études et sondages)

http://www.bva.fr/sondages.php?id=469

http://www.bva.fr/sondages.php?id=201

Wikipédia (biographies uniquement)

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Table des illustrations

Figure 1 : schéma général de la distribution du bureau..........................................7

Figure 2 : schéma de la structure mécaniste selon Mintzberg.............................20

Figure 3 : triangle de la performance dans une entreprise de service public.......32

Figure 4 : schéma de la GPEC.............................................................................34

Figure 5 : modèle des champs de force de Lewin................................................48

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Table des matières

CHAPITRE INTRODUCTIF....................................................................................3

CHAPITRE 1 : ANALYSE CONTEXTUELLE DE LA POSTE..............................5

I. DESCRIPTION ET PLACE DU BUREAU DANS LA CHAÎNE DE DISTRIBUTION..............6

II. DES CONTRAINTES EXTERNES QUI ÉVOLUENT RAPIDEMENT............................8

II.1) Au niveau national..............................................................................9

II.2) A l’échelle locale...............................................................................16

III. UNE ORGANISATION QUI ÉVOLUERA ?..........................................................18

III.1) Une stratégie nationale.....................................................................18

III.2) Une organisation standardisée ….....................................................19

III.3) … pour des contraintes locales.........................................................23

CHAPITRE 2 : PROBLÉMATIQUE D’UNE RÉORGANISATION AU SEIN D’UNE ENTREPRISE DE SERVICE PUBLIC...........................................................28

I. CONTRAINTES ET LIMITES DES STRUCTURES « MÉCANISTES »..........................29

I.1) Des fondements dépassés par les événements...................................29

I.2) Les inconvénients d’une structure mécaniste.......................................30

II. SPÉCIFICITÉS DU MANAGEMENT PUBLIC ET RELATIONS DE POUVOIR..............31

II.1) Des leviers d’actions spécifiques à privilégier …..............................31

II.2) … pour des contraintes particulières................................................37

II.3) Les relations de pouvoir et de contrôle.............................................40

III. PARTICULARITÉS DE LA GESTION PAR PROJET.............................................44

III.1) La structure des projets publics........................................................45

III.2) Calendrier et planification.................................................................46

III.3) La gestion du changement en projet.................................................47

III.4) Les risques et difficultés de la gestion par projets............................50

IV. DES ENJEUX ET DES DÉFIS À RELEVER........................................................51

IV.1) Fondements de la prochaine organisation ?.....................................51

IV.2) Pour quels objectifs ?.......................................................................52

IV.3) La gestion de contraintes importantes..............................................53

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CHAPITRE 3 LA RÉORGANISATION EST ELLE POSSIBLE DANS CE BUREAU DE POSTE ?.............................................................................................55

I. QUELLE SERA LA SITUATION PAR RAPPORT AUX ENJEUX FIXÉS ?......................56

I.1) Vers une crise structurelle ?.................................................................56

I.2) Budgétisation et efficacité....................................................................58

II. LES MÉTHODES DE GESTION UTILISÉES CONCRÈTEMENT..............................59

II.1) Une réorganisation sous forme de projet..........................................59

II.2) Importance du marketing interne......................................................63

II.3) Ajustements des moyens de production Le passage à une

certification ISO 9001.........................................................................................65

II.4) Gestion par processus......................................................................65

III. CONTRÔLE ET PILOTAGE DE L’ORGANISATION..............................................68

III.1) Réduction hiérarchique pour une autonomie accrue ?.....................68

III.2) Evaluations et contrôle.....................................................................69

III.3) Les causes de la résistance au changement....................................71

III.4) Entre tradition et modernisme...........................................................75

CHAPITRE CONCLUSIF....................................................................................81

ANNEXES............................................................................................................83

BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................91

TABLE DES ILLUSTRATIONS...........................................................................92