René Girard, Mensonge romantique et verité romanesque, 1961 George Luckas, Théorie du roman, 1916...

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La sociocritique

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René Girard, Mensonge romantique et verité romanesque, 1961

George Luckas, Théorie du roman, 1916 Le roman est nécessairement biographie et

chronique sociale – le romancier est donc dans un rapport unique avec l’univers qu’il crée: rapport ironique (Girard) (humoristique pour Luckas). - le romancier doit dépasser la conscience de ses héros : pour Girard, le romancier retrouve la transcendance dans le mouvement de sa création ; pour Luckas la forme littéraire naît du besoin d’exprimer un contenu social essentiel

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Hypothèse de base : 1/ homologie entre la structure romanesque classique et la structure de l’échange dans l’économie libérale – 2/ parallélisme entre leurs évolutions ultérieures

Selon George Lukacs (Théorie du roman, 1916), le roman est l’histoire d’une recherche dégradée (“démoniaque”) de valeurs authentiques dans un monde dégradé lui aussi

Roman caractérisé par la problématique d’un héros en rupture avec le monde. Lukacs analyse les deux dégradations (homme et monde)

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Rappel de René Girard (Mensonge romantique et vérité romanesque) : Roman: histoire d’une recherche dégradée

(idolâtre). Il utilise la dualité catégorielle ontologique/métaphysique pour désigner l’authentique et l’inauthentique : “C’est le renoncement au désir métaphysique (chevalerie, volonté de puissance, mythe du surhomme) qui fait l’unité des conclusions romanesques”, 290)

Girard (295): “Il faut réserver le titre de héros de roman au personnage qui triomphe du désir métaphysique dans une conclusion tragique et devient ainsi capable d’”écrire” le roman

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Triomphe esthétique du romancier se confond avec la joie du héros qui a renoncé au désir (toutes les conclusions romanesques sont des commencements)

Victoire sur l’amour-propre, renoncement à la haine : moment capital de la création romanesque (le romancier se reconnaît coupable du péché dont il accuse son héros)

C’est dans l’orgueil qu’est le mal – le dénouement romanesque est une réconciliation entre l’individu et le monde

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Analyse marxiste de la réification ; il n’apparaît dans le roman qu’après la deuxième guerre mondiale

La forme romanesque semble être la transposition sur le plan littéraire de la vie quotidienne dans la société individualiste née de la production pour le marché. Il existe une homologie rigoureuse entre la forme littéraire du roman et la relation quotidienne des hommes avec les biens et les autres hommes

Relation des hommes et des biens; la production est régie par la consommation à venir

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Relation entre les “oeuvres importantes” et la conscience collective de tel ou tel groupe. La critique marxiste introduit l’idée que la vie sociale ne saurait s’exprimer sur le plan conceptuel et créatif que par le chaînon intermédiaire de la conscience collective

Fétichisme de la marchandise et réification : dans les sociétés produisant pour le marché (sociétés dominées par l’activité économique) la conscience collective perd progressivement toute réalité active et tend à devenir un simple reflet de la vie économique

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1900-1910 : l’individualisme a été amené à disparaître (remplacement de la libre concurrence par l’économie des monopoles), ce qui se traduit dans le roman par la dissolution progressive du personnage individuel, du héros

Avec Kafka : abandon de tout essai de remplacement du héros – absence du sujet, de la non existence

Avant Kafka, l’oeuvre de Balzac serait peut-être la plus grande expression littéraire de l’univers structuré par les valeurs conscientes de la bourgeoisie

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Nouveau Roman et Réalité : société dans laquelle l’individu comme tel et implicitement sa biographie et psychologie, ont perdu toute importance primordiale et sont passées au niveau de l’anecdote et du fait divers

Goldman redéfinit le concept de réification : 1/processus psychologique permanent sans interruption dans les sociétés occidentales productrices pour le marché – 2/ l’économie libérale jusqu’au début du 20ème siècle maintient encore la fonction essentielle de l’individu dans la vie économique et sociale

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3/ le dévelopement du capital financier et des monopoles entraîne un changement qualitatif dans la nature du capitalisme occidental ( à partir de là, suppression de la vie individuelle) 4/ le dévelopement entre les deux guerres et depuis de l’intervention étatique (qui a trait à l’état) dans l’économie : mécanisme d’auto-régulation qui font de la société contemporaine une 3ème phase de l’histoire du capitalisme occidental

Les objets ont acquis une réalité propre, autonome (les sentiments n’existent que dans la mesure où ils peuvent se manifester à travers la réification)

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Jacques Leenhardt : Lecture politique du roman, La Jalousie d’Alain Robbe-Grillet (Editions de Minuit, 1973) – La Jalousie (1957 : fin des colonisations en Afrique et ailleurs)

La problématique de la colonisation est importante pour expliquer ce roman qui se passe en Afrique

Avec « Le Nouveau Roman », la problématique bourgeoise de l’identité cède le pas à une problématique de la localisation (lieux idéologico-sociologiques)

Le NR décentre le sujet en renonçant à construire le monde autour de lui, à partir de lui (# Balzac)

Le NR comme idéologie de la classe technocratique ascendante semblerait engagé dans un combat où le socialisme humaniste et où l’individualisme bourgeois sont du même côté du passé révolu

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Il faut mentionner que Robbe-Grillet était ingénieur, ce qui explique en partie sa représentation du monde. La géométrie est le langage de la raison dans l’univers des signes. Le géométrique obsessionnel prend une signification idéologique très nette, signe de l’affolement cartésien face à une réalité rebelle, l’Afrique, représentée par des formes rondes (signes de l’indigénéité).

Le langage, lui aussi, a perdu son caractère transitif pour n’être plus qu’un rituel hypnotique (Sarraulte) : signes de la décadence du discours et par conséquence de l’idéologie dominante.

L’ordre du monde colonial bourgeois va sauter sous la poussée des mots qui refusent l’ordre social, l’ordre des mots.

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Importance des « objets », en l’occurrence le mille-pattes : mouvant, rampant, serpentiforme : la multitude (des colonisés) en marche, l’hydre aux mille pieds, la « piétaille » indigène qui menace.

Besoin de dominer suggère la manifestation d’une peur primitive

Pour le colon, la tache du mille-pattes est ineffaçable, écrasée « mille » fois, elle ne cesse de réapparaître

La Jalousie est le roman du regard géométrique aux prises avec un réel toujours susceptible de se refuser aux mises en ordre de l’esprit

Dans LJ, deux mondes et deux temps sont représentés simultanément : Franck et le mari (âges différents du mythe de l’Afrique. Ils ont envers les colonisés un avis différent concernant les Noirs et leur rapport envers la mécanique moderne : le mari pense « 1920 » (exploiteur colonial) ; Franck pense « 1950 » (le coopérant colonial)