Remarques sur le servage au Bourbonnais au XVe siécle

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Remarques sur le servage au Bourbonnais au XVe sihle Raquel Hornet The lerrt’er of the lo&hip of Maussat and La Romagtie, drawn up in 1470-1480, is the princi$al source of information for this study of serf&m in western Bourbonnak Conclusions are drawn from this source concerning the proportion of serfs in the population as a whole, the nature of the bona3 of &penake, the ways of becoming a serf, and the obligations and rights of both lord and serf. The possibilities of snfs making socio- economic progress through the concentration of tenures in a small number of servile families and the exercise of minist&ality are con&red. The study &monstrates the dynamism and importance of serfdom in the organisation of the lo&hip. /A condition du servage &ns la seigneurie de Maussat et & La Romagike - ci 1’Ouest du Bourbon& - a ttt ttudite i partir du ttmoignage principal a’u &r&r a%cette seignmie, rtdigt en 1470- 1480. Dons cc travail, on itablit : (I) Lo pop&ion tot& a% la seigneurie et celle a% chacun des groupes afin de connattre l’importance quanti- tative a%sewage: 25% du tatal des dtpenaknts; (2) La nature a? lien de dt~ndance: seIfs person&s ou rtels, 1s premiers &ant beaucoup plus nombreux ; (3) Les voies meaaat au sewage - h&age et auord - tanlcs ahx en pleine vigneur; (4) Les obligations et les droits des serj& et 1s droits du seigneur montrant une nette umtlioration dans la condition du servage. On analvse enfin 1s possibilitts d’t%olution du groupe g&e ci la concentration de tenures par un petit nombre a% families servib et par l’exercice de la ministkria- lik Cette itude permet de constater le dynamisme du servage et son importance dans l’organisation de la seineurie. Le terrier de Maussat et La Romagi&e, copie dont le manuscrit se trouve B la Bibliothtque Nationale (MS. fr. 11505; dkormais, toutes les indications de folio se rapportent & ce manuscrit), est source d’in- formations interessantes sur la condition du servage entre 1470-1480, ptriode dans laquelle il fut rbdig6. La seigneurie appartenait au chevalier Pierre des Aiges, noble seigneur “de Valigny, de Prugnes, des Chappiteaulx, de Maussat et La Romagitre” (f. l), qui, en 1467, fut autorisC par Louis XI B refaire son terrier. Commc ailleurs g cctte epoque-lri, les Cpi- dkmies et les guerres avaient provoqut la dktkrioration socio-tconomique - fuites et mort des tenanciers, pillages - et la perte des registres seigneuriaux. La lettre du terrier tvoque d’emblke des faits sans prtciser de quelles guerres il s’agissait (fos.2-3). Peut- Etre s’agissait-il des campagnes de la Cuerre des Cent Ans, avec des suites de dkprkdation des routiers, ou bien des actions de la Praguerie de 1440 ou de la Ligue du Bien Public, de 1465. Toujours est-il que ses ses effets nkgatifs se font sentir dans la rkgion, montrant le besoin de rborganiser la seigneurie. Ce fait suppose une &ape de cbangements, car la rborganisation va de pair avec le JounUr ofMedieval Hi lO(l984) 195-207. Nor&-Holland 0304-4191/84/13.99 @ IS4 Ihvic~Sciencc Publiien B.V. (North-Holland) 195

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Remarques sur le servage au Bourbonnais au XVe sihle

Raquel Hornet

The lerrt’er of the lo&hip of Maussat and La Romagtie, drawn up in 1470-1480, is the princi$al source of information for this study of serf&m in western Bourbonnak Conclusions are drawn from this source concerning the proportion of serfs in the population as a whole, the nature of the bona3 of &penake, the ways of becoming a serf, and the obligations and rights of both lord and serf. The possibilities of snfs making socio- economic progress through the concentration of tenures in a small number of servile families and the exercise of minist&ality are con&red. The study &monstrates the dynamism and importance of serfdom in the organisation of the lo&hip.

/A condition du servage &ns la seigneurie de Maussat et & La Romagike - ci 1’Ouest du Bourbon& - a ttt ttudite i partir du ttmoignage principal a’u &r&r a% cette seignmie, rtdigt en 1470- 1480. Dons cc travail, on itablit : (I) Lo pop&ion tot& a% la seigneurie et celle a% chacun des groupes afin de connattre l’importance quanti- tative a% sewage: 25% du tatal des dtpenaknts; (2) La nature a? lien de dt~ndance: seIfs person&s ou rtels, 1s premiers &ant beaucoup plus nombreux ; (3) Les voies meaaat au sewage - h&age et auord - tanlcs ahx en pleine vigneur; (4) Les obligations et les droits des serj& et 1s

droits du seigneur montrant une nette umtlioration dans la condition du servage. On analvse enfin 1s possibilitts d’t%olution du groupe g&e ci la concentration de tenures par un petit nombre a% families servib et par l’exercice de la ministkria- lik Cette itude permet de constater le dynamisme du servage et son importance dans l’organisation de la seineurie.

Le terrier de Maussat et La Romagi&e, copie dont le manuscrit se trouve B la Bibliothtque Nationale (MS. fr. 11505; dkormais, toutes les indications de folio se rapportent & ce manuscrit), est source d’in-

formations interessantes sur la condition du servage entre 1470-1480, ptriode dans laquelle il fut rbdig6.

La seigneurie appartenait au chevalier Pierre des Aiges, noble seigneur “de Valigny,

de Prugnes, des Chappiteaulx, de Maussat

et La Romagitre” (f. l), qui, en 1467, fut

autorisC par Louis XI B refaire son terrier. Commc ailleurs g cctte epoque-lri, les Cpi- dkmies et les guerres avaient provoqut la dktkrioration socio-tconomique - fuites et mort des tenanciers, pillages - et la perte des registres seigneuriaux. La lettre du terrier tvoque d’emblke des faits sans prtciser de quelles guerres il s’agissait (fos.2-3). Peut- Etre s’agissait-il des campagnes de la Cuerre des Cent Ans, avec des suites de dkprkdation des routiers, ou bien des actions de la Praguerie de 1440 ou de la Ligue du Bien Public, de 1465. Toujours est-il que ses ses effets nkgatifs se font sentir dans la rkgion, montrant le besoin de rborganiser la seigneurie.

Ce fait suppose une &ape de cbangements, car la rborganisation va de pair avec le

JounUr ofMedieval Hi lO(l984) 195-207. Nor&-Holland 0304-4191/84/13.99 @ IS4 Ihvic~Sciencc Publiien B.V. (North-Holland) 195

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besoin d’adaptation aux nouvelles circon- stances, avec dcs retombkes dam le domaine social, Cconomique et administratif.

La seigncurie de Maussat et La Romagikrc esc emplacke dam le cc&e de la France, B I’r.xtrkmitt Nord-Oucsr de I’Auvergne. Du pcjint de vue de la division politico-admini- strative actwile, elk comprend le secteur le plus occidental du dkparwment dc I’Allier - ti I’Oucst c’t au Nord de Montlucon, sur la rive occidrntale du Char - avancant g p&r sur la limite Nerd-Esc du dtpartcmcnt dc la Creusc. C’est la prcsque totalitt du canton d’Hurkl avec les cantons voisins dc MontluCon-Ouest B I’Est et dc Boussac (commune de Lcyrat) k 1’Ouest. Ccctr region ktanc bourbonnaisc, elk est voisinr du Berry, cc qui nr va pas manqwr dc porwr ho11 influrncr sur l’kvolution his- toriquc de la region.

Quoi qu’il en soit, les chiffres doivent &rc pris avec prkcaution car il est des fois ob une “confession*’ individuelle cache une “consorterie” don1 nous apprenons l’ex- istcnce grkc k dcs ttmoignagcs occasion- nels, ct dont Ic nombre dcs mcmbres n’est pas toujours connu (Hornet, sous presse).

Xature du hen de dipendance

Dam cew pa& du Bourbonnais ainsi qw dans lc B(*rry, il c.xi.s(c* des tCmoignagc*s dc survic du wrvagr au cows du XV’ sikclc et au dkbut du XVI’ s (Lcguai 1969). Par contra, des ktudvs comma cc~llc dc &urgrs Hubwcht (lU59) pour lc Sud-Ouw dc* la FI imcc n’onl pas ktk cmtwpriscs qui puiasrni faiw connaitrc 1~ mode de vie particulkr & ct. groups social.

Lr lien dr dkprndancc de ccs serfs peut ttrc de deux sortes: personnel ou rkel. Dans 1c premier cas, Ic lien s’&ablil sur la prrsonne; dans lr second, sur la lerrr que ccllr-ci poss&de. La difference cst ncttement ttablie: AndrC et Parquet de Beauges (paroissc de Twignat) “conkssem *’ “~~ulx estrc hommes taillables, c’est Bssavoir, ledit And& es.1 hommc a cause dr SW hcritaiges et ledit Pasquet cst homme de carp saige dudit chwalicr (1r seigneur dr Maussat)” (f. 434).

I,c tcrricr dr Maussat c*t La RomagiPw m nurc* l’cxiwrw d’un groups wrvil im- portant conslit& par plus d’un quwc dc*s

dfipcndmcs dc* la wigtwuric. En c+lk, la popul&~n totalc. dc la wignrurk c*rt dktri- b&c dc la faqr~n suivantc:

L’cxpres\ion “de carp saige” - jc n’ai pas trouvk de rkfkrences dans dcs sources provc- nant d’aulres rkgionsoh on park (out simple- mcnt dr “homme dr corps” - (Boutruche 1971~:55; Lcguai 1969347 n.67; Thaumas dc* la Thaumassikre 1679: Chap. 4, p. 6) a sans douw lc m&me sens que wtte drrnikw mais rcnforck. En &t, d’un ccitk l’acccn~ cst mis sur la d+ndancc personnclk (de carp”); dc l*aufre, “saige” doit sans doutc dkriwr dc “saisir**, cc qui monlrc qw ces hommec “de carp saige** pruvent fiwe pour- suivis par leur seigneur au cas oii ils tente rairnc de fuir.

259 La formulr “de carp s.ligc” est souvcnt

83 utilitir pour prr*sque la moitik des se&

.i Mais Ie wrvage personnel peul Ctre signal6

3 autremcnl : soit par la prkision “ladiw

6 servitude vcnur par son p&c*‘, sooit par “par 3.if-I ‘4 mtre”, wil par “du cousk de scs p&e et

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mCre”.l 11 est signal& a& que la tenure (“pour le tout”): i’inkgalitt des tailles ou existe par le servage - “a cause de son autres obligations personnrlles ne semblent

servitute” (f.218). pas provenir du type de condition. Peut- En somme, le servage personnel & Maussat ttre les serfs “par moitib” ktaient-ils soumis

et i,a RomagiCre est beaucoup plus nom- ?I des stipulations diffikutes lors de la suc- breux que le servage rtel. cession de la tenure.

En second lieu, on devient serfpar accord, lors de la prise en charge d’une tenure

Comment on devient serf et comment on cesse de gravCe par une taille. II existe des ttmoigna-

1 ‘he ges de la remise rkcente de tenures dans ces conditions B des groupes familiers: trois de

A Maussat on trouve des individus devcnus la paroisse de Saint-Sauvier et un de celle serfs par naissance ou par accord. Dans le d’Archignat.P Ceux-ci disent qu’il s’agit premier cas, les enfants de p&e et m&e d’hommes ou de femmes tkemment devenus serfs hkitent la condition de leurs parents; serfs par accord (“neucsment”). “ladicte servitute venue touchant sa per- Lcs serfs peuvent-ils s’affranchir? Oui, sonne du coustC de ses pere et mere”, sous certaines conditions. Par exemplc quand dtclare la confession d’Agn& de la Fay ils resoivent I’autorisation du seigneur pour (f.257). entrer en religion. Le droit canonique I’in-

Mais les serfs peuvent ktablir des alliances terdit B tous ceux qui ne sont pas libres. avec des gens libres, cc qui est tr& frequent. Comme “messire” Jehan de Gourt, pr&re et Or, quel va &re Ic sort de leurs enfants? reccveur de Maussat, est 13s d’un serf (fos. Selon les Coutumes du Bourbonnais, ceux-ci 465-6 et 500) il est bien probable qu’il ait ont la condition la plus dkfavorable, c’est-8- Ct& affranchi car, meme s’il est vrai que dans dire ils sont serfs.*

&tte pratiquc SC donnc ici de faGon bicn la scigneurie d’Orval et dans d’autres regions avoisinantcs t&es le Nivernais I’interdiction

particuli&e. En effct, on lit souvent I’cx- canonique n’ttait pas respectke (Leguai pression “hommc (ou femme) par moitit”, 1969:52), ici sa condition de libre est prkcisant lcquel des parents (Ic p&e ou la prouvec non sculement par le traitement de m&e) a don& sa condition servilea B son “messire” mais par I’absence de notation enfant. Vingt et un individus en sont des obligations propres au serf dans un ttmoins. A mon avis, Its origines de ccttr temoignage dont le but est prkcisement de pratique sont berrichonnes, car Thaumas les noter. de la Thaumassi&re, dans son Cdition des II y a d’autres cas d’affranchissement legal C’ou&nes dc Bery signale cette pratique dans autorist par le seigneur: Jehan Tridon, certaincs seigneuries telles Lignitres, Cha- fils d’une serve mariee avec un homme ttran- teauneuf et d’autres (T. de la Thaumassike ger & la seigneurie, devrait ttre serf “par i679: Chap. 9, p. 11). moitik” selon les coutumes de la region,

La source ne permet malheureusement pas mais il ne I’est pas et le tens par un heritage de saisir les diffkences de condition des cst sa seule obligation envers Pierre des serfs “par moitit” et ceux qui sont “entien” Aiges.”

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Obligations des serfs

L’obligation des serfs qui, la premiere, saute aux yeux Ctant donnt le type de source, cst le paiement de la taille, qu’ils doivent wus B Pierre des Aigcs cl qui constitue unc marque ccrtainc de leur condition servile.

La taille peut etrc, de meme que le lien de dkpendancc, pcrsonnelle ou r&k. La pre- mitre est pay& par les serfs ayant un lien dc dtpcndance personnellc; la scconde, par ccux qui posstdent une tenure servile.‘

Comme il exists bon nombre de serfs prrsonnels - “de carp saigc” - posskdant aussi une tenure servile, les taillc- person- nellc ct rkellc sent rkunies en un seul paie- ment. Toutefois, la diffikence entrc I’unc ct I’autre persistc: Guillaume Perrinet “con- fi.sw” qu’il paiera la taille pour son hkritagc .IU cas oti il I’habitrrait; Ie cas Cchkant il nc rrmettra quc la taillc personnellc (216- 17).

L’unification drs tailles he produit aussi cluand plusieurs serfs posskdcnt msemblc un hkritagc. Bicn des tailles ClcvCcs cachcnt, cm fait, dcs consortcries dont Its membres, on l’a dkjk dit, ne sont m&me pas citks.7

.W?mr si ccs rai.sons cmpkchent de savoir Ic montant dcs tailles individwllcs, nc sachant pas Ic plus souvent Ir nombre dc. prrsonnrs parmi lesquelles cllr~ sent distributes, le raz dc* la famillr Monncrat, dont Its huit mcmbrcs partagwt de facon inkgale Ie pairmwt de la taillc* VI du wns, permrt d’afiirmcr quc la taillr cst ici proportion- ncllc aux bicns de chacun dcs membrcs.”

Etant dorm6 que Ies serfs pruvcnt pos- skdcr plusieurs wnurcs dont crrcaine~ nc son1 pas ntcesbairemcnt servilc?i, ils payent la taillc pour cellm qui Ic sont et lc tens pour Irs libres.’ Evidrmmcnt, Iv+ WI% kuniwant pluskurs wnurcs bcrviles paknt la taillc

pour chacune d’elies, comme Jehan Gourt ou Svmon de Grant Vattlx.10

Peut-Etre’les se& de corps ne posstident- ils aucune tenure. C’est lc cas assez frkquent chcz les femmes de cctte condition, mar&s avec des hommes libres ne dtpendant pas de la seigneurie; c’est % elks done de payer la commande.” En fait, ce mot est synonyme de taille, car il dtsigne aussi celle-ci dans son mode de paiement (simple, unian- nuelle).

En effct, la taillc, payte toujours en argent - deux fois seulement le paiement comprcnd aussi un “chief de pullaillc” ou “gkline” (fos.244-5 et 251-6) - peut ttre amortic de plusicurs facons, dont I’unc, la plus courante, cst pay& trois fois par an: Ic Jour de la Viergc - my aotit - B No.3 et k Piques, doublant tow ICY deux ans cclle payee en aotit.

Malgri- la rkpkrition de la formule de taiiic “g la coutumc”, il n’y a pas de r+$z fixe. Des f&is, Ie paicmrnt double biannucl 01 cxigk aux trois dates prkcitkcs (fos.2~- o.i), des biC la SCJmmc n’est pas doubl&.~* La commandr, nous I’avoni dkja signal& cst uniannwlk. Parfois elk est doubkzr, parfois non.13 II y cn a cnfin qui paicnt lcur taillr, tou@rs himpIe, & Nctil et B Paques (487-W), et il y en a d’autrcs qui Ic Tent k Nctil t-1 1.n w~i)t, doublant tous Its deux am celk payfe cn aoitt (fi. 178-9 et 215. 17).

II rst B souligncr que la d&valuation constantc de la monnaic dans cettc pkriode favor&e Ies intiScs dcs serfs, la taille &ant pay& en argcnt, car la signification du paiement r&l par cux r&list! se voit amoindrk.”

Les serf5 .sont obligks aussi g un certain nombre de pwstations et dz travaux annucls gratuits pour Ie seigncwr. 11 s’agit de la

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corvke, recevant dans cette rkgion le nom de “herbaus” ou “arbaus”, voix souvent utiliske au Berry.15

Un commentateur des Coutumes du Bour-

bonnais signalc que la corvCe comprend des travaux ncttement agricoles et d’autres tra- vaux nCcessaires & I’entretien de la seigneu- rie: entretien des fix&s qui entourent 1.c chateau, rkparation des chemins, etc.16 A Maussat et La RomagiCrc, il semble quc cc soit les premiers qui sont exigks de prk&= cncc.

Si Ies herbaus ou con&s sont cxigkrs & dcs serfs et & des librcs, il CSL tvidcnt aussi quc pcu sont ceux du deuxi&me groupe ayant g 1c.s rkaliser: sculs huit libres sur soixantc-trois serfs. II y a done unc nctte tendance B cc qu’ellcs devicnncnt un signe caractkistiquc de la condition servilc.17

Quclle cst la portte des hcrbaus? Bicn souvent, clle n’est pas prtcistk par la source, oh I’on nc lit que “a la coustumc de ses aultrcs hommcs et icmmes dc sadictc seigneurie de Maussat” (fos.2 I2 ct 255) “a la coustume du pays” (fos. 359 et 345-50); “a la coustume du pays de Bourbonnois” (f. 181). Ces coutumcs sent-elks identiques? Imposs- ible de Ic Savoir. Cellcs de Bourbonnais prkciscnt quc Ies taillables et Its serfs doivcnt quatrc colvees ou charrois par an.‘” Or, le nombrc de journ& de travail gratuit par an est assez variablr, la realitt &ant bien plus complc*h b quc Its prkcisions dcs Coutumrs. On peut toutcfois affirmer qur Its serfk de Maussat nc sont sans doute pas obligbs & plus de trois ou quatrc jours annucls dc prcstations gratuites pour leur scigneur, car I’unique “confession” indiquant le nombre de co&es db par trois tcnanciws librcs de la paroissc de Saint- Sauvier dit “vng hcrbaut chacun an a faulchcr tous troys conionctrmcnt” (f. 270).

La durke de la journke de co&e est, au Bourbonnais, “du soleil levant au Foleil couchant”, mais il faut entendre par 18 que le dkpendant doit Ctre deja la maison B la tomb& du jour (Leguai 1965:34 n.7).

Un peu moins du quart des serfs de la seigncurie - dix-sept sur quatre-vingt-trois - doivent non seulemrnt le herbaus mais le charrois.ls Au Bourbonnais ainsi qu’au Berry, charrois et arbaus sont synonymes de corvCe.zO Cependant, compte tenu de la diffirence p&i&e par la source, charroi - charrue, d’aprb son ttymologie - est sans doute lc travail gratuit rkalist par le serf% la reserve dominicale avec sa propre charrue, alors que l’arbaus serait rCalisC par lui- meme tout seul.

II n’est pas indispensable de rattacher le’ nombrc de ccux qui doivcnt lc charrois au nombre de charrues qui existent. II est probable que cette prestation ait CtC de plus en plus rbduite par le seigneur, jusqu’8 son annulation definitive contre un paie- mcnt ou, tout simplement, que cette presta- tion n’ait pas et6 exigke lors de la crkation d’unc nouvelle tenure. Vincent Guillot et ses censors, “homme par le tout” de Pierre dcs Aigcs, ayant une vaste tenure sans doute &par& depuis peu de temps dc la rkscrve de La Romagitre, ne doit pas le charrois (fos.279-85).

II y a vingt-neuf serfs personnels et reels - k peu prtts le tiers des se& de la seigneurie - qui sont obligks g assurer le service de guet au chateau de Maussat.*’

I1 n’y a pas de prkisions sur la faGon dont ce service est assurt, ni sur le lieu de residence de ceux qui le doivent - ke ne sont pas tous les serfs ayant des tenures dans les paroisses proches de Maussat,** ni ne sont exempts tous ccux ayant les htritagcs les plus CloignCsSa - ni sur l’importance de leur

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trnure.24 On constate seulement que le greet ne p&e jamais sur ceux qui payent la taille la plus faible (six deniers). Quelle peut Ptre bicn la cause de la distribution anarcbique du gurt? Comme nous Ie pensons des charrois, il se peut que de nombreux serfs aicnt rachctC ce service n&essaire mais d&agrc!able.

En cffet, le service se fait au ch%teau de Wtussat et, blen quc la plupart des guet- tablro habitc aux alentours, il y en a qui doivcnt SC deplacer plusieurs kilometrcs pour r6alisc.r Iwr obligation : Pierre du Mars, dc*mwrant B Bouyon, paroisse de Nocq, c.st oblig6 de faire au moins six kilometres pour arriver au chltcau, perspective peu fla~wuw apres unc journ& de travail.25

Hirn que Ic terrier ne pr&ise pas si Ie scrvicr de guet cst assur6 aussi en temps de paix, il cst B supposer qur, ainsi qur dans la wigneurie voisitw dr La Rochr-Cuillebaud, iI &it rcmplac6 par un pakmrnt (Chmon 191 I : I I7- 18). II rn arrivait dr. rnernc* avec II.\ kmmcs gwttabks, B moins qu’cllcs nc* l’uswnt rcmplacics par un mrmbw dr lrur lilmillt*.26

1.~ droit dc main-mc,rtc test un drs plus con- IIW. S&n 1~s Cutumes du Bourbonnai.s, la populatic~n srrvilc* nc= pcut transmrttre sw hicns qu’& srs “rnfants m&s ou pawnts lignagcrs de mEmr condihn communr c*t

dw~~cwrns awe wx**.27 Ccllc prkogatiw

~cignwrialc et acccpttr c*n twmrs

wmblables par les oukmcs de Berry avec I“ullrc* IlcJm bicn connu, “droit de mortaik”, qui f;lic allusion I sa signification de “taillc pay&* par Ir morr” (T. de la Tbauma&rti* 1679: Chap. 6).

Ida Irttrr du trrricr park drs srrfs dc

main-morte (f. 2), et les confessisns montrent que le seigneur de Maussat a exe& ce droit selon la coutume, offrant Ies hkitages des serfs qui, B leur mort, n’zvaient pas d’htritiers demeurant au mtme feu. Les b6ntficiers en ont Ctt d’autres d&pendants qui ont vouiu les acheter, sans pour autant ttre parents du dtfunt. C’est ainsi que I’htritage de feu Jehan de Mars a db passer aux mains de Symon de Grant Vaulx (E418), &ant don& que Pierre de Mars, sans doute parent du premier, demeurait non pas dans la rkgion de Saint-Christophe oQ habitait Ic dtfunt, mais B Nocq (fos.2S7-94). II se peut qu’il en soit de m&me avec Jehan Hoiriet et l’hkritage de “feue Johawe Ser- raude”, a Jarrasson (f.77), car il existe un Jchan Seraud - la graphic &ant alttrke par la termkaison en “err du fkminin - qu’on pcut supposer parrnt de Johanne, mais vivznt & Archignat (fos. 13-17).

Par contra, si le rcrf a un fils vivant avec lui, ou si I’abscnce du fils ayant droit k I’hkritage est temporaire et n’inrplique pas la formation d’un nouveau feu ailleurs, ce 61s conserve srs droits sur I’htritage paternel. Ckci wplique pourquoi Cuillaume Perrinet, hommc de carp saige de Pierre des Aiges, confessant sa taille annuelle, ajoute qu’il paiera la taille pour I’b&itage seulement quand il voudra retoumw habiter I’hCritage patcmel (fw.216-17j. II en dkoule qu’il paiera seulcmcnt la taille personnelle - commr tout serf sans tenure - parce qu’il n’habite pas I’hkritage. Au cas oit il I’habi- Wait, il paicrait la taille territoriclle ou r&lle.

N’ayant pas de tils, les serfs peuvent Zwitcr la main-morte en formant des con- sortries. Cclles-ci contribuent B ce que les dmits d’ikritage de leurs membres soicnt assurks (Homrt, sow presse, Chap. 6).

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Droits des serfs

Au cas oti les serfs voudraient se maricr avec quelqu’un &ranger P la s’eigneurie - for- mariage - ils doivent Ctre autorisks par le seigneur. 11 y a sept femmes dam ces con- ditians, tou tes marites avec des hommes de la rCgion.ss

Ces serves n’ont pas le droit de conserver leur h&age, dnvant payer la taille person- nelle ou commande,** similaire k la “chevelage” (= chevage) de Sologne, bien qu’un peu plus tlevke: six deniers, tandis qu’en Sologne n’est que de trois ou quatre (Gukin 1960:222). Au Berry aussi on ap- pelle commande le paiement dh par la serve qui se marie avec un bourgeois (T. de la Thaumassitre 1679: Chap. 8, p. 10).

Cc sont tous des exemples de femmes, mais il en Ctait pour stir de meme avec Its hommes

’ qui abapdonnaient I’htritage paternel et qui se marient avec des femmes n’appartenant pas B la scigneurie. Leur cas n’ktait pas si evident car les “confessions” ne prkisent pas toujours I.&tat civil des hommes; c’est le paicmcnt de la commande qui dtnoncc lcur existence.30

Par contre, si la serve sc marie avec un libre dkpendant de la seigncuric, comme par exemple Anthoine, marite avec Pierre de Mom, drmeurant il Beaumont (Huricl), clle peut conserver son heritage, commc le fait Johanne avec I’htritage de Berthillat (f&384-5).

Le mariage ayant lieu entrc serh de seigncuries diffikentes, il est p’obable qu’un

l accord soit ktabli entre les seigneurs con- cern& - au prktlablc ou non - afin de dtterminrr B qui apparticndront lcs de- sccndants. L’accord du dtbut du XV’ sitcle, copit i IA suite du terrier, entrc les seignrurs

d’Hurie1 et de Maussat afin de s’kchanger quelques serfs en est ttmoin (fos.515- 17).

Les serfs ont droit B posstder tous les biens de leur seigneur ou d’autres seigneurs qu’ils veuillent bien avoir. Guillaume Margnat, “homme de carp saige” de Pierre des Aiges posskde des terres du seigneur de Liat (f. !4), Jehan de Beauges, du seigneur de Reculat (fo!!;. 435 et 254), Jehan Ala- manche, du seigneur d’Hurie1 (f. 182).

Le probltme se pose sur le droit du serf & vendre les parcelles qu’il a de son seigneur. Dans certaines seigneuries cette possibilitt cst acceptke B condition quc I’acheteur soit de la m&me condition que le vendeur, c’est-k-dire qu’il soit serf de la seigneurie.sl Cette restriction est baste sur le droit du seigneur g rtclamcr l’htritage du serf.

Comme nous venons de voir, d’un cBtC, Pierre des Aiges revendique pour lui cette attribution, mais d’un autre c6t& il autorise les serfs & vendrc leurs tenures g des hommes librcs : P lilippe Condourt “bourgeois d’Huriel”, posstde une vigne acquise i Loys Gagnollcs (f. 38), homme taillable “de carp saigc par le tout”.3* II faut Cvidem- ment prendre en compte que le tcrme “bourgeois” ne suppose pas ici la condition juridique du sujct mais son lieu de rksidence du point de vue urbanistique, c’est k dire “l’habitant d’unc ville entouree de murail- les” (Hornet, sous presse, Chap. “Socie- dad”). Quoi qu’il en soit, le fait significatif subsiste qw le serf puke vendre scs parcel- les k un libre.

L’une dcs car.Lctt?ristiques les plus re- marquabler du servage est le manque de libertk de mouvement. Le serf reste uni i la tenure qu’il pos&de, qu’il ne peut pas

quitter mais dont il ne peut pas Ctre separk arbitrairement. Homme et terre ont tous

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Page 8: Remarques sur le servage au Bourbonnais au XVe siécle

les deux la mCme destince: ils sont vendus, donncs on &hang& en un tout indissoluble. I e seigneur de Maussat rcalisa un accord WCC celui d’Huriel et ils tchangtkent des serfs avec leurs heritages (fos.515- 17). Mais, Ies serfs de Pierre des Aiges peuvent partir volontairement de facon temporaire tout en gardant lcurs droits sur la tenure, ainsi que Guillaume Perrinet cite plus loin, ou Johan Pallet. Cc sont tous des indices significatib dc i’Pvo!ution vers la libtrationss

Par contrc, le depart ttant dtfinitif, Ie serf pcrd SC’S droita sur la tenure, d’apr&s Ie temoignagc des mariages entre serfs et gens &rangers a la seigncurie. II cst evident quc ces dcrnicrs, dans cettc situation, doivent continuer a payer la taille personnelle, mais ces conditions provoquent un rekhement du lien. Dune part, Its serfs sans tcnurr kront a contrecoeur lcurs obligations envcrs Ieur seigneur, chez qui ils ne trouvcnt pas de contrepartie Cvidwtc dc protection. D’autre part, lr seignrur court Ie risque de voir SPS wrfs ou lcurs cnfants s’installcr dans une ville oti ils puisscnt drvenir libres, loin de sa port&. Montlucon, proche de Maussat et La Romagitrc a peut-c?tre seduit certains serfs en fuite, dc mtmc qu’Htrisson, cctte

dcrnitw sans douw plus sGrc car plus

t%ign&- : en 1446, Its otlicicrs du due de I3ourbon y decouvrirent de nombreux “faux bourgeois” d’originc servilc.~

Dans ces cas-la, Ic droit du seigncur a la poursuite du serf cn fuiw rst wconnu au

Hourbonnais, ct I’cxpression “de carp saigc”

utilisk a Maussat vst hautcmc-nt signifi-

CiltiVr.

IA* terrier nc donne aucunr precision sur

163 swfs qui sont cn fuitc, mais il nous pcrmct

d’apprcndrc qu’il rxistc dix-huit srt& pc’r-

sonncls - nomhrr non nCgligcablc tenant

compte du total de serfs de la seigneurie - ne pos&dant aucune tenure de MaussatP

Possibilitb de pvogrh socio-&onomique

Outre les possibilitks d’affranchissement totale ou d’kloignement progressif que nous avons citCes, les voies de mobilitt socialc et Cconomique du groupe servil sent fluides B cause dcs circonstances conjoncturales et tout particulitrement grace a la r&organisa- tion de la seigneurie. Cette tvolution a lieu de dcux man&es principales: la concentra- tion de tenures et I’exercice de la ministcria- lit&

(a) Concentration a% tenures. Grace & dcs circonstancea favorables, certains serfs sont parvenus a reunir de vastes tenures. La plupart des fois, il s’agit de families de serfs dont les possessions dans la seigneurie sont groupkes de la facon indiqute dans le tableau de la page suivante. Le cas Ic plus inttrcssant a rcmarqucr est celui de Jehan du Gourt, qui parvicnt a reunir plus de soixante-dix hectares dans Its paroisses d’Archignat et de Saint- Christophc, comprcnant dcux moulins dont I’un sera partagc avec son f&c Symon de Grant Vaulx.” Cet accaparemcnt est ii& au fait que son fib cst recevcur de Maussat. Evidcmment ccttr concentration n’cst pas individuelle, car Jchan du Court cst “con- sots** de Phelippon Puret (fey, 598-9).

Symon de Grant Vaulx - appelC aussi du Gourt - f&e de Jehan, &unit a son tour six tenures, dont I’une dcpassc trente hec- tarc3, I’autre a quelque dcux hectares et demi, y compris Ic tiers du moulin de Chesal, une part d’une maison avec scs appartmancrx et trois tenure3 - I’unc, partag& - dont la surface totale est incon- nuc.ss

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Page 9: Remarques sur le servage au Bourbonnais au XVe siécle

Surface de l’ensemble de tenures de chaque serf Nombre de familles possedant des )u famille tenures

1

De 5 a 9.99 hectares. 6 De 10 a 19.99 hectares 8 De 20 B 29.9 hectares 8 De 30 a 39.9 hectares 4 De 40 ?I 49.9 hectares 2 De 50 B 59.9 hectares _-

De 60 B 69.9 hectares 1 De 70 B 79.9 hectares 1

Total 30

Pierre au Maistre tend aussi ?I concentrer plutbt dcs possessions: i son heritage servil de dix hectares environ ajoute d”‘heritaige Gaudin” de plus de quinze hectares, deux parcelles de terre et deux p&s, tous dans la paroisse d’Archignat.m Dans cc cas-ci, quel- Ies circonstances favorisent la concentration? C’est peut-&re l’cxistence d’htritages vacantes - la Gaudin - puisqu’il n’y a pas de tenanciers portant cc nom, ct bien stir, la possibilitt d’achat favoriste par le fait d’&re unr communautt familiale nombreuse si, ainsi que l’indique Ic nom du tenancier, Maistre est lc chef d’une consorterie. Des prix reduits? J’en doute, les tens qu’il paie &ant t&s var&kn

Jehan Hoiriet r&unit deux heritages, a Archignat auk, dtpassant la deux en- semble trente-trois hectares, dont une ap- partint a few Johanne Seraude, ce qui montre que Jehan l’acheta.‘O De plus, il partage un quarronC avec un de ses com- personniers4r

La concentration a Ctt sans doute favor&e par le mar&e. Phelippe Mclot @de un heritage entier et une partie d’un autre.‘s

Son mari, Leonard Dumas, possede plus de vingt-huit hectares ertre deux heritages (fos. 193-200 et 335-6). On peut en ajouter un troisieme dont la surface est inconnue (fos. 336-7). La concentration se fait des deux cot&: du cott de la femme et du cott du mari.

L’accroissement des domaines des Melot- Dumas est lit? a celui des f&es du Gourt- Grant-Vaulx cites plus haut, car Phelippe Melot partage avec les deux l’htritage Jehan Bertomier.‘s Malhcureusement, l’instabilite des noms au sein d’une mCme famille aussi bien que les nouvelles fortuites donnees par la source empkhent de savoir s’il s’agit d’un lien simplement famiial ou autre.

Un autre Dumas. Perot, reunit aussi deux tenures B Archignat : l’unc assez vaste, de vingt-cinq hectares (fos. 156-63), et l’autre constitute par deux parcelles de terre d’un peu plus de trois hectares (fos. 333-4).

Dans la paroisse de Treignat, Francois Puret possede trois hectares dans une vaste tenure familiale et un autre heritage dtpas- sant quinze hectares (fos. 1 1 1 - 14).

11 y a d’autres serfs ou familles serviles ayant une settle tenure mais trts &endue:

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Page 10: Remarques sur le servage au Bourbonnais au XVe siécle

Vincent Guillot et ses censors reunissent plus de soixante hectares dam la paroisse de Saint-Sauvier (l&279-85). Dans celle de Nocq, avoisinante, Pierre Loys dit Pageron a plus de quarante-deux hectares (fos.310- 16) et dans celle de Saint-Martinien, la Camille Souppault en a plus de quarante- quatre (fos.238~44), et les Galaix, p&e et fib, plus de trente (fos. 245-50).

Lcs membrcs de ces deux dcrnieres famil- 1~s tkmoignent d’un grand dynamisme: en 1480, plusieurs d’entre cux avec Pierre Auk& prcnnent unc autre tenure dc quelquc sept hectares (f.514).

Tous ccs dcrniers cas peuvent etrc cx- pliquts par une parcellisation recente de la rtscrve - pour Its tenures situtes a Saint- Sauvier ct Saint-Martinien - ou par la pauvrete du sol dans la paroisse de Nocq. En &et, la reserve seigncuriale etait em- plactc autour de trois licux: Maussat, La RomagiCre et la paroisse de Saint-Martinicn, mais il y a des indices bien nets de parcellisa- tion rkcentr dans ces dcux dernieres parties: It* brsoin d’accroltre Ir rendemcn; de la seigneurie et de rckwdre le probltmc du mrmque de main d’oeuvre ont dfi cncourager crttc mrsure, adopt& aussi dans d’autrcs regions (Hornet, sous pressc, Chap. 3).

Les tenures de Guillaumc Margnat et dc Mathieu dc la Faie, toutes Ies deux a Archignat, Sent importantes car elks sent tres Ctcndues, depassant vingt-six ct vingt- cinq bcctares.44

J&an Pichon avw sa “menaige” et lcur ncvcu, de Saint Sauvirr, avouent vingt-six hectares environ (fos. 345 -50).

Les frkres Chabridon ont quclque vingt- huit hectares a Archignat et B Saint- Christophe (lips. I 14-22 et 122. 4)1 Cl Ira

freres d’Arlet avec leur neveu, en ont vingt et une (fos.359-65 et 365-8).

Cc dernier, Jehan Seraut, a en outre une autre htritagc d’un peu plus de cinq hectares (fX13-17).

Devant ce groupe qui accumule des tenu- res, il faut signaler l’existence d’un autre groupe constitue par dix-huit serfs ayant de pctits heritages ou parcelles, des fois partages entre plusieurs, dont la surface totale est inferieurc a ces cinq hectares (Hornet, sous presse, Chap. “Sociedad”).

(b) Excrcice de la miniskfriafittt Les pos- sibilites de progres socio-tkonomique ct juridique des serfs par I’cxercicc de la ministCrialite sent ttroitcment liees a I’ac- cumulation des tenures. Le cas le plus rcmarquablc cst celui de Jchan du Gourt fils, deja cite plu:, haut, mcmbrc d’une famillc de set& pcrsonnels parvenu a son affrancbissemcnt grace a I’eglisc; il cst receveur de la seigneuric.

Trois autrcr serfs sont apparamment minis&riaux, car ils font la “confession’* dc la t&ewe de Maussat au moment de la redaction du terrier (fos..iOO-08). Cc qui est encore plus interwant, c’est que drux d’cntre eux apparticnncnt a la famillr de Jehan du GOUT: son onclc Symon de Grant Vaulx et Phelippon Puret, beau-frerr de Jchan et membrc de la consorterie de Jrhan du Court ptkc, Ie wf ayant Ie plus grand nombre de tcrrcr de la seignenrir de Maus- sat. L’autrc ministeriel cst Pierw Gagnolles, qui nc declare aucune tenure proprc mais dont les parents sent tous des set% de carp saigc avcc drs tenures - bicn que plus modeaces: I’unr depwant quatorze hcctarc3 et I’autrc, de cinq hectares a Saint Christophe (tbs.32-5 et 170-4).

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COtUlUSlinI

Le servage apparatt comme une institution en pleine vigueur, B une &tape de renouveau.

11 y a un groupe de serfs personnels sans tenures, traduisant une tendance au rekhe- ment du lien. I1 y a peut-&re aussi des serfs en fuite. En revanche, il existe des hommes libres qui ont accept6 rkemment les charges d’une tenure servile, devenant serfs A cause de I’htritage.

En deuxiime lieu, il faut signaler une tendance g&kale favorable dans la con- dition du servage, provenant des conditions g&&ales de konomie et de la socittt. Ces effets se font sentir de deux faqons: sur tout le groupe - par la dtvalorisation monttaire - et sur chacun de ses membres en particulier, leur fournissant un plus grand nombre d’occasions, au tours de la rkorgani- sation de la seigneurie, leur permettant d’obtenir des amtliorations concr&es parmi lesquelles la diminution des prestations gratuites ou I’acquisition Cautres tenures.

En troisieme lieu, et par tout ce que jc viens de dire, il existc une nette hCt&ogCnCitC dam la condition socio-tconomique du groupe servil : un groupe dc famillcs devenu un Cltmcnt important de I’organisation tco- nomiquc ct administrative de la scigncurie.

II est B remarquer enfin le r&le jot& par le scrvagc au tours de la pkriode dc rkorganisa- tion de la seigneuric, plus important que cclui des libres.

.Noh

I BN MS. fr. 11505, fos. 386,383 et 257 rcspectivc- mmc. 2. Art. CXCIX. Ed, 1732 erck par Leguai 1969: 48 now 72.

* Voir cidcssus note I. 4 De Saint-Sat&r, Jehan Pichon, fos. 345-350; Pierre dcs Chicrs, fos. 352-356, et Dcnis Pichon, fos. 356-359, tous trois avec “tout son mcnaigc”, et d’Archignat Jehan, Phclippe et Agnes d’Arlct avcc lcur nevcu Jchan Scraut, fos. 359-365. 0 “Agnes vcsvc de fcu Dcnis Tridon . . confcssc luy csfrc femme taillahlc par lc tout dudit noble hommc. . . lui payanc commandc”, fos. 43-44, mais Jchan Tridon, “filz de ladite Agnes” nc confcsse quc plusicurs parcclles B ccns, fos. 44-46. s AgnCs Tridon, cittc dam la note prCcCdcntc, paic taille pcrsonncllc. Pour la taillc rCellc, voir ci- dcssus, note 4. , fos. 279-285: consinacionnes dcs tcrrcs du lieu de la Romagitrc appartcnantcs b Vincent Guillot et scs consors. II Item plus, lcsdits Guillaumc Monnerat et Johanne Monneratc et Anthoinc Mcnnerate en nom de sesdits enffans et scmblablcment, cf Marie en nom de sesdits enffans, de lcur plein gre et bonne voulentc ant cogncu et confcssc eulx cstre hommcs et fcmmes taillablcs dudit chevalier a cause de sadite seigneuric de Maussat, luy payant taille trois foiz I’an, c’cst a ssavoir: a Noel, en aoust et a Pasqucs, ce lesdits doublcnt. C’cst a ssavoir, laditc Johannc fille dudic Denis Monncrat, deux solz six deniers tournois en aoust, deux solz six d. t. a Noel et dcux solz six deniers f. a Pasqucs. Et laditc Marie, femme dudif Pierre Mon- ncrat pour scsdics enffans quinze d.t. en aoust, quinzc d.t. a Noel et quinzc deniers t. a Pasqucs. Et ledit Guillaume Monnerat de taillc scpc deniers maillc en aoust, sept d. maillc a Noel et sept d. maillc a Pasqucs. Et laditc Anthoine par lcdit Jehan et Jchan Fit] et Anne, scsdils cnffans, scpt deniers et mallle en aoust, scpr d. maillc a Noel, et scpt deniers maille a Pasques. fos. 424-425. Le tens cst aussi partagt au scin de la famillc: fos. 419-424. 9 Pierre Au Maistrc paie taillc par “lcs hcritaiges de I’avcncugc”, fos. 218-223, cf ccns par I’hcritagc Caudin, Ic prt de Jaulx, lc prt Barllot et quelques parcellcs de rcrrc: fos. 223-232. ‘0 Jehan du Court: fos. 471-476, 477-487, 487- 49Oet490-493;SymondcGran~ Vaulx: fos. 400-411, 4ll-414,415-416,416-417 et 417-418. II Ellcs sow: Marguerite, femme de Pierre Cheminos, fos. 265-266; AgnCs, femme de Pierre Peluchon, f. 257; Johanne Monncratc, veuvc de feu Guillot Borihomicr, fos. l74- 175; AgnCs, vcuvc de fcu Dcnis Tridon, fos. 43-44, ec Simonnc Blancharcc, femme de Jehan Condourt, fos. lO9- 110. I* fos. 369-374,427-430,400-41 I, 77 -81 et 424- 426.

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II Commande dot&lee, for. 181-182, 265-266 et 43-44, et eommande non doublet, fm. 109-110, 257 et 174- 175. 1. SW Ies crises monhaircs du XIV* et XV’ si+clcs, voir: Foumial 1970. IS “Arbaw’*, E 41. Mair la forme “hcrbaus” cst la plusutilirCedanrcetcrrier. LesC&amc~&S~di.scnt: “Les Bians, Arbans, Bicnnum, Arbannum, signifient m&me chose que CourvCes & Charroyr, qui sent veritabla Droits et Servitudes personnclles, & qui nc pcuvcnt Ctrc prctenducs sans tit& (Tbaumas de la ~haumassi&re 1679: Chap. 12. p, 14).

Cwtnmer da Boarboamsir. Ed. 1732, 2’ panic, citi.cs par Leguai 1969:33. 11 Hornet, sous presse, chap. “Ingrcsos”. 111 Art. CCCCXCV et CXCI. Ed. 1732 cit. par Leguai 1961, :34, note 6. I. fos. 360,255,352,288,488,359,349 et 469. 10 Pour lc Berry voir ci-dews note 15, pour lc Bourbonnais, les articles CCCCXCV et CXCI dc5 Coafamts. 21 Lcs Arlct-Scraut, fos. 359-365, Pierre Dcmars, fin. 287-294, jchan Gadcix, fw. 189-190, jchan du Court, fos, 471-476, Johanncau de Grant Vaulx, fm. 427-436, Simon de Grant Vaulx, fos. 480-411, Phclippe Melot, for. 200-205, Pbclippon Purct, fin, 456-468, Guillaume P&net, fos. 216-217 rt Picrw Lays, fos, 310-315. 12 Par example, Lays Gagnollrs, scrf“dc carp raigr par le tout*’ de la paroiecf de Saint-Christophc, nc doit pas guet (fos. 32-35). 15 Par cxamplc, Pierre Deman dr Bouyon, P quclqucs six kilomttrcs dc Maussat, doit guet: fos. 287 -294. I‘ Vincent Guillot L’I sch “censors”, possedam I’utw dcs plus vastcs tcnurc~, nc doivrnt pas gurt, foa. 279-285. 1s Voir ci-dews note 23.

;h. Agnes c-t Phelippc d’Arlrt, fos. 359-365,

o dnne dc Margnat, l&s, 57-58 et Phclippc M&t. fos. 208205. 27 Art. CCVII. Ed. 1732, rt art XXV, Fd. 1735, ci& par Lcguai 1969:47 note 66. ** Johannr, fcmmcdc Jehan d’Archignat, dcmcur- ,u,t aux Chiers, fos. 389-390; Simonm Blanchart. kmmc Jr Jehan Condourt d’Hurirl, fo+. 109-110; Agnes, “cmmr dr Frrmynct de la Create, de la paroisw d*Auldl., fos 325326; Marguerite, fcmmc dr Pterrc Chcmirios, probablemrnt dr la Naigc, fw, 265-266; Agtws dr la Fay, femme dc Picrrr Pcluchon, de la Naigr. f 257; Johannc Mounrratc, vcuvc de Guillot Borrhom.cr, dc Ncuveglisr, fos. 174- 175, et Agnes,

veuve de Denis Tridon, de Saint-Cbristophe, for. 43- 44. ?s b femmes e&n dans la note pr&dentc ne eonffzsscnt aucuae tenure. ss Matbll Alande, demeurant I Tiieron, paro- isse de Neuv&glii, paie la eommande, for. 181- 182. II Boutruche 197064; Crvrvnur da Bmtr6wt&, art, CC et CC1 eit& par Leguai 1969:5 note 89. n Sa reeotmaissanee, for. 32-35. ss Jehan Pichon “confcsse*’ pour soi et pour son f&e Jehan Pollct, absent: fos. 345-356. u Lgttai 1969:53, d’apres lu Archives de Mont- lueon AA 4.1446. as Ih sent tomes lcs serves citecr dans la note 28 et Pierre Alafeur, f. 187; Jehan Belot du villaigc de Terrier (Aulde), fos. 233-234; Gilbert Blanchart, d’Hutiel, 1: 107; Pierre dc Courault, de Bartillat (Saint-Martinien); Jehan de Chandyc “I’AynC”‘, f. 3%; Mathieu Chcmynot, de la Naige, fos. 266-267; Lays Galoix de Saint-Martinien. fos. 446-447: Pierre dc,Mont Vcrront. de Lafrosinc INoco). fos. 324-325: Pirrrr Pomycr, dc Saint-Chris;ophii’fos. 49-41 ct &nis dcs Rcvelins, foF. 272-273. y jehan du Court a fait six reconnabsancrs, fos. 471-495. 1, Lea: ,ix confessions dc Symon dc Grant Vaulx .W trouvmt aux fw 400-419. II Se xix confckons UT trouvent aux fos. 218-232. w Sur 11% cem i ccttc seigneuric, voir: Hornet, sous pressc, chap. “Ingrtws”. H) II confcw l’heritagc “qui fut dc Lue Jnhannc Scraude” aux fos. 77-81, ct I’autrc aux fos. 69-76. .I II conbsc lr quarrone dc Jarrasson avcc.Jt*han Magnat, fos, 387-388, (2 Un hc ritagc cnticr, ftn. 200-205 ct unr particdc I’hcritagc & rthomicr. lb. 2( 3 - 208. II tbs. 205-208,416-41 I rt 487490, 4, La tcnurr dc Guill.wnr de Margnat. fos. 20-25 ct la tcnurc clr .Mathieu de ia Faie, fof. l50- 154.

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