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ORDONNE-MOI!

Volume7

1.Fantômes

Ilest14h47lorsquenotre taxi,àDavidetmoi,piledevantunimmeubledélabrédelaBowery.Sept minutes : c’est le temps qui s’est écoulé depuis que nous avons quitté précipitamment lerestaurantoùnousdéjeunions.

SeptminutesqueJudithnousaappelésenpleinecrisedepanique.SeptminutesquenoussavonsqueGarys’estrenduchezMarcHasting,l’undesancienséducateursdel’orphelinat.Septminutesquenoussavonsquelechauffeuretamid'enfancedeDavidaemportéavecluisoncalibre38.

Cematin encore, nous ignorions l’identité de l’hommequi, durant desmois, a abusé deSacha.MaisjemesuisrendueàBrooklyn,j’aimenémonenquête:celanefaitmaintenantplusaucundoute,MarcHastingestlecoupable.SiSachaestencoreenvie,c’estdesonemprisequ’elleacherchéàselibérerensimulantsonsuicide.

Encombiendetempsuneexistencepeut-ellebasculer?Septminutessont-ellessuffisantes?Garyn’a-t-il d’ailleurs sur nous que ces quelques secondes d’avance ? Combien de temps a-t-il fallu àJudithpourcomprendrelesintentionsdesonami?Combiendetempsluia-t-ilfallupourmettrelamainsursontéléphone,pourchercherlenumérodeDaviddanssonrépertoire,pourl’appeleretluiexpliquerlasituation?

«David,c’estJudith…J’étaischezGaryquandilareçutonSMS.Lorsqu’ilaapprisqueHastingestceluiquiamaltraitéSachailyaquinzeans,ilestdevenucommefou.Ilacherchél’adressedecesalaudsurInternetpuisils’estrendudanssachambrepourrécupérerquelquechoseavantdequitterprécipitamment l’appartement.Jesuisalléevérifier :sonholster trônaitvidesur le lit.Lerevolvermanquait.OhDavidj’aisipeur!Jecroisqu’ils’estmisentêtederendrejusticelui-même.»

Est-iltroptardpourempêcherlefrèredeSachadecommettrel’irréparable?

Il me semble que la course que nous menons, David et moi, pour monter quatre à quatre lesescaliersdel’immeubleafind’attendreleplusrapidementpossiblelecinquièmeétage,sedérouleauralenti.Jamaismespenséesn’ontétéaussinettes.Sept,non,huitminutesmaintenant.C’estpeu,etàlafoisterriblementlong.Noussommessurlepalierdésormais.Laported’entréedel’appartement505estentrouverte. Il s’enéchappeunemusiqueplaintive,quimêleviolonetguitareacoustique.Davidfrappetroispetitscoupssecs.Ilappelle:–Gary?Gary?

Laportes’ouvregrande,dansungrincementquimeglacelesang.Nousentronsdansunepièceoùrègneunchaos sansnom.Despapiers s’empilent surune table.Des tasses,desverresvides etdesassiettess’amoncellent.Àcôtédel’uniquefenêtrequidonnesurlacoursombre,uneplanteagonise.

–Gary?

Davidcontinued’avancerprudemment.Desamaingauche,ilmefaitsignederesterenarrière.Jen’obéis pas. Je suis envoûtée par lamélancolie de lamusique tzigane qui s’échappe d’une vieille

chaînestéréo.Malgrélepressentimentterriblequim’assaille,jen’aipluspeur.

Davidavancejusqu’aufonddelapièce:jeluiemboîtelepas.Ilécartelerideaudeperlesdeboisquiséparelapièceprincipaledelachambre.Unchat,surgidenullepart,frôlemajambe:jeplaqueunemainsurmabouchepourétoufferuncridesurprise.

–Gary?Tueslà?

Davidsefigedansl’encadrementdelaporte.Jepeuxvoirsanuqueseraidir.Jem’approchedeluiàpasdeloup.Monépauletouchesonomoplate.Jemehissesurlapointedespiedspourmieuxvoir.Unhommedégarnietgrassouillet,autee-shirtmouillédesueur,estassissurlerebordd’unlitdéfait.Ildoit avoirunepetitecinquantained’années.Sapeauest luisante, sesyeuxécarquillés. Ilnecessed’ouvriretdefermerlabouche,commeunpoissonhorsdel’eau,dansunegrimacestupéfaite.Ondiraitqu’ilnecomprendpascequiluiarrive,oudumoinsqu’iln’ycroitpasvraiment.

Pourtant,c’estdelaterreurqu’ildevraitressentir.

Pointé sur le visage de l’homme, un énorme pistolet automatique chromé, qui luit dans lapénombre.Et,auboutdupistolet,unbrasmusclé,imposant,tendu,queprolongeuneépaulecarrée,undossolide,unetêtedroitecouvertedecheveuxblondcendré.

Gary.

–Entre,David:tuarrivesàtempspourlespectacle.

Garyrepliesonbrasetcesseuninstantdetenirl’hommeenjoue.

–TutesouviensdeMarcHasting,David?Ils’excusedudésordre:ilnes’attendaitpasàrecevoirdelavisiteaujourd’hui.

Le plus naturellement du monde, David avance vers son ami. Il pose une main ferme sur sonépaule.

–Donne-moicepistolet,Gary.

LechauffeurtournesonvisageversDavid.

–Tuasunefaçonbienautoritairededemanderleschoses,David.Un«s’ilteplaît»ouun«merci»seraientbienvenus.

–C’est toiquimeremercierasquand je t’auraiempêchéde faire laplusgrossebêtisede tavie.Donne-moiceflingue.

Davidestcalme,sûrdelui.Commes’ilcontrôlaitparfaitementlasituation.

Maiss’ilsetrompait?SiGaryétaithorsdecontrôle?

Garyricane.

–Demavie?Demavie?

Sonarme toujoursbraquée surHasting,GarydemandeàDavid :–Tuappellesçaunevie toi ?Toutescesannéesgâchéesparledeuiletlaperte?Toutecettesouffrancequim’accompagnechaquejour,chaqueseconde,depuisquinzeans?

Le bras du chauffeur se met à trembler. Imperceptiblement, son doigt se resserre autour de ladétente.

–Sais-tucequ’illuiafait,David?Àmasœur,àSacha?Ceporcsuantquetuasenfacedetoines’estpascontentédeseservird’ellepourassouvirsesbesoinsdégoûtants,David:ill’atorturée.Ilaéteintsescigarettessurelle.Ill’afrappée.Illuiafaitcroirequ’ilallaits’enprendreàJudithsiellenelui obéissait pas au doigt et à l’œil. Il l’a regardée trembler, il l’a regardée pleurer, il l’a écoutéesupplier.Illuiafaitpromettredefairetoutcequ’ilvoudraitpourvuqu’illaissesesamistranquilles.

Etilyaprisduplaisir.

–JesaistoutçaGary.J’étaislà.

Garyfaitsoudainvolte-face,oubliantuninstantHasting.

– Vraiment ? Tu étais là ? Pardonmais je croyais que durant tout ce temps, tu étais occupé àprendredubontempsdansl’UpperEastSide.

Hasting, sentant que c’est sa chance, se redresse soudain et tente de détaler. Gary braque denouveauson.38danssadirection.

–Doucement,groslard.Tureposestesfessesfissaoujetefaissauterlacervelle.

Hastingobéit,toutenmejetantunregarddésemparé,cequiacommeeffetderendreGaryfouderage.

–Qu’est-cequ’ilya,Marc?Turegardeslajoliedame?Tuescertainqu’ellen’estpasunpeutropâgéeàtongoût?Oh,jecomprends:c’estsonmélangedesex-appealetd’innocencequiterappelleSacha…Ehoui,commetupeuxlevoir,Davidaréussiàallerdel’avant…

Illuiagiteson.38souslenez.

–Alors quemoi, c’est une tout autre histoire. Je ne l’ai pas oubliée,Sacha.Mais queveux-tu ?C’étaitmasœur.Unepetiteamie,çaseremplace,maisunesœurc’estuneautrepairedemanches.

La colère et la douleur de Gary sont palpables. Je vois bien que David est bouleversé par lesproposdesonami:sahaineenversHastingestégalementforte,illuiestdifficiledetrouverlesmotspour raisonnerGary.Maispeut-êtrequemoi, je saurai trouverdesparolesapaisantespourarrêtercettefoliemeurtrière.Jemedoisd’essayerentoutcas:–Gary,tunesaispassiHastingestcoupableounon.

–Ahbon?J’ail’airdedouterselontoi?

Jem’approchedeluietposemamainsursonbras,celuiqu’ilgardetenduendirectiondeHastingetquicommenceàfaiblirsouslepoidsdel’automatique.Davidesquisseungestepours’interposerentrenousmaisjeplantemesyeuxdanslessiens.

Net’inquiètepasmonamour:jesaiscequejefais.

–Tuasdespreuves.Tuasbeaucoupdepreuves,maisaucunecertitude.SeulunjurypeutdéciderdelaculpabilitédeHasting.Seulunjugepeutdéciderdesonchâtiment.Toi,tun’enaspasledroit.

Ilfautabsolumentquejeréussisseàluifaireentendreraison.

– Si tu tires, tu deviendras un meurtrier et Hasting une victime. C’est ce que tu veux ? C’estvraimentcequetuveux?

–LevioleurdeSachaneserajamaisunevictimeàmesyeux.–Jecomprends.Maisencecas,netelaissepasdevenirunevictimedetaproprehaine.Necèdepas

àtespulsions,àtacolère.

Àl’oreille,jeluimurmure.

–Situlefaistaire,tunesaurasjamaislavérité.Est-cequetupourrasvivreaveccedoute?Entedemandantconstammentsilevraicoupablecourtencore?Ennesachantpassituasprislavied’unhommeinnocent?Enn’ayantjamaislefinmotdetoutecettehistoireetennesachantpascequiestréellementarrivéàtasœur?

Jeparled’unevoixcalme,mesurée.JesensqueGarym’écoute.Jesensqu’ilm’entend.Aufonddelui,jelesais,ilmedonneraison.Davidprendlerelais.

– Si tu presses maintenant sur la détente Gary, la balle attendra le cœur de Hasting en deuxmillièmesdeseconde.Ellerentreradanssapoitrineetexploseradanssacagethoracique.Ildécéderad’unehémorragieinterneenmoinsdecinqminutes.Cinqminutes:c’estletempsquetuaurasdevanttoipourtesentirmieux,pourtedirequetuasvengéSacha.Maisdèsqu’ilseradevanttoi,mort,alorslesquestionsreviendront.Qu’estdevenuetasœur?Est-elleencoreenvie?Est-elleensécurité?Etcesquestions,iln’yaurapluspersonnesurterrepouryrépondre.

Unevoixs’élèvederrièrenous.Unevoixdefemme.

–Ça,Davy,jen’enseraispassisûre.

JesenslespoilsdeGarysedressersousmesdoigts.Unfrissonparcourtsoncorps.JemetourneversDavidpourcomprendrecequisepasse.Àsonexpression, ilmesembleque luiaussiavuunfantôme.Lentement,jepivoteendirectiondelaporte.Uneblondeauteintpâleetauxyeuxgris-verttranslucide se tient là. Malgré la couleur artificielle de ses cheveux longs, malgré la frange quidissimulesonregard,jelareconnaistoutdesuite.

Lavoilàdonc,revenued’entrelesmorts.SachaStewart.

Elledoitfairedansles1,70mètre.Sesyeuxsontsoulignésdekhôl.Elleporteunblousonenjeanetunpantalonencuirextrêmementmoulantquimetenvaleursasilhouettegracile.Onlacroiraittoutdroitsortied’unconcertderock.Sonvisagelongetsonportdetêtenobleontquelquechosedefélin.Desurprise,Garymanquedelâcherlerevolver.Maisilseressaisitvite.Anxieuse,jesurveilleDavidducoindel’œil.Ilal’airabasourdimaissesprunellessonthumides.Ilparvientàarticuler:–Sa…Sacha…Mais…Maiscomment…?

–C’estunetrèslonguehistoire,maisdisonssimplementqu’ilestheureuxquejesoislegenredefillequiespionnesesex.Sinon,jen’auraisjamaiseul’idéedefilerDavidalorsqu’ilserendaitàundéjeuneravecsanouvellecopine,nicelledesuivrecesdeux-làenlesvoyantsauterprécipitammentdansuntaxi.

Onnepeutpasdirequecettefillemanqued’aplomb!

ToutenfixantHasting,Sachareprendlaparole.

–Gary,dansdixminutes,nousallonsquittercetappartement.Toi,moi,Davidetsonamie.Nousallons prendre un taxi et nous rendre dans un endroit tranquille pour causer librement, sans nousinquiéterderien.C’estàdire:sansavoirtoutelapolicedeNewYorkànostrousses,etsansquetutesoisrenducoupabled’unmeurtre.Tum’ascomprise?

Gaysecouelatête.

–Écoute-moi,têtedemule:tuvaslâchercepistolet.

Elleavanceverslui,lamaintendue.Lentement,jemereculepourluicéderlaplace.

–Tuvasmeledonneretmepromettre…

Elles’interrompt:

–Marc,tuneleprendraspasmalsijemeréfèreàtoienutilisantl’expression«grosporc»,pasvrai?

Ellereprend:

–Gary,jeveuxt’entendredirequetuneferaspasdemalàceporc.Niaujourd’hui,nidemain,nijamais.Promets-le-moi.

C’esttropd’émotionsd’uncouppourGary.Savoixsebrise.

–Sacha,jenepeuxpas…Jenepastepromettreunetellecho…

Ellel’interromptsèchement.

–Quinzeans,Gary.Çafaitquinzeansquejeviscachée,quejeraselesmurs,quejemetiensloindetoi.Quinzeansquejenet’aipasprisdansmesbras.Maintenantquenoussommesenfinréunis,j’aimeraisquetuposescerevolveretquetumeserresfortcontretoi.Tupeuxfaireçapourmoi?

Savoixrestecalmemaisdeslarmesdébordentdesesgrandsyeuxclairs.

–Toutcequejeveux,c’estqu’onquitteensemblecetendroitatroce.

Ellesupplie.

– Si tu tires, ils temettront en prison et nous n’aurons jamais l’occasion de rattraper le tempsperdu…Parpitié,écoute-moi!J’aiassezsouffertcommeçaparlafautedecethomme.Ilm’aprivéedemonjumeau,delapartlaplusessentielledemoi,durantlamoitiédemavie!Jeneveuxpasqu’ilnousséparedéfinitivement.S’ilteplaît…

Submergéparl’émotion,Garylaissesoudainretombersonbras.IldétourneleregarddeHastingpourcontemplersasœur.Deslarmesruissellentsursonvisage.IlattrapeSachaetlaserrefortcontresa poitrine. David s’approche subrepticement d’eux pour désarmer son ami. D’un geste délicat, ils’emparedurevolveretcommenceàreculerdequelquespas.

C’estlemomentqueHastingchoisitpourbondiretseprécipiterhorsdelachambre.Ilpasseàcôtédemoiet,enmebousculant,manquedemerenverser.Gary lâcheSachaetsemetàcrier :–Tire,David!TIRE!

David,mecroyantendanger,tendsonbrasetvisemaisavantqu’iln’aiteuletempsdepressersurladétente,jehurle:–NON!

Destupéfaction,monamantretientsongestealorsqueHastingdisparaîtdenotrechampdevision.GaryfaitminedeselanceràsapoursuitemaisSachaluibarrelaroute:–Laisse-les’enfuir.Ilesttroptard.

Derage,Garydonneunviolentcoupdepoingdanslemur.

–Pourquoim’as-tuempêchédelepoursuivre?

Pourquoi?

Ellesejettedanssesbras.

–Lepassén’aplusd’importancetucomprends?Jesuisderetour.Jesuislà,Gary.

Alors,seulement, ilsembleréaliserquecettesœurdisparuequ’ilapleuréesi longtempsse tientdevant lui. Cet homme immense, à la musculature impressionnante, se laisse enfin aller. Il serreencoreunefoisSachacontresapoitrineetparvientàarticuler,entredeuxsanglots:–Tueslà…Tueslà…

2.Leo

Nous sommesassisdans l’appartementdeDavid. Il règneun silencedemort. J’ai appelé Judithpour laprévenirde la«situation».Situationpour lemoinsétrange.LavoixdeJudiths’estvoiléesous le coup de la vive émotion qui s’est emparée d’elle. Ellem’a dit qu’elle semettait en routeimmédiatement.Enattendantsonarrivée,jetentedetenirmonrôled’hôtessecarDavidestbientropabasourdipourfairelemoindregeste.Ilresteassissurlecanapé,àdétaillerSachaquisemblemalàl’aise.

–C’estcommejoueraujeudessepterreurs…C’esttonvisage,maispleindedétailsontchangé:c’eststupéfiant.

Jevoiscequ’ilveutdire.Alorsquejeverselethé,j’observemoiaussilajeunefemme.Sonvisages’estaffinéparrapportauxphotosde l’époque. Ilestdevenu,semble-t-il,plusdur,maiségalementplus racé. La défiance dans son regard s’est renforcée, bien que ses yeux aient conservé leurespièglerie.Lecorpss’estasséchéetmusclé. Ilaperdusesrondeursenfantinespourdevenir finetnerveux.Cettefilleestincroyablementsexy,danslegenreLaraCroft.Uneaventurièreplantureuseetsauvage:voilàlegenredefemmequ’estdevenueSachaStewart.

Enfin,laportedel’ascenseurdupenthouses’ouvreetlaisseapparaîtreJudith,quiseprécipitedanslesalontelleunetornade.Sescheveuxroux,habituellementdisciplinésparunbrushingimpeccable,sontpourunefoisenbataille.Elleporteunesimplerobebleunuitencrochetetunimperméablegris.Ellen’estpasmaquilléeetsesyeuxgrisclairsontcernés,alourdisparl’angoisseetlafatigue.

–Tueslà.Bonsang,tuesvraimentlà…

Elle serre son amied’enfancedans lesbras, si fort que j’ai un instantpeurqu’ellene l’étouffe.Sachaselaisseallercontrel’épauledeJudith.Deslarmesluimontentauxyeux.

–Oh,Joul,tum’astellementmanqué…

Ça m’étonne d’entendre quelqu’un s’adresser à Judith avec un surnom si enfantin. L’agent deDavidesttellementimpressionnante,toujourstiréeàquatreépingles,trèsexecutivewoman…Onadumalàl’imagineraffubléed’undiminutifrégressif.

Soudain,Judithéclatederire.

–NonmaisSacha,qu’est-cequec’estquecescheveux!

Elle joue avec les longuesmèches dorées de son amie, dont la crinière brune n’est plus qu’unlointainsouvenir.Sachaprendl’airgênée.

–Cen’estplusSacha,désormais…C’estEleonoreClark.Maismesamism’appellentLeo.

Garyinterromptbrutalementcesretrouvailles.Ilal’airheurtéparladésinvolturedesasœur.

–Tesamis?Tesamisnet’appellentpasdutout,oui!Etpourcause:ilstecroyaientmorte!Tunecroispasquetunousdoisquelquesexplications?

Sachasetourneverssonfrèreensoupirant.

–Si,jecroisquel’heureestvenuedetoutvousracontereneffet.

ElleattrapelamaindeJudith.

–J’attendaisjustequeJoulnousrejoigne.

Ellese laisse tombersur lecanapé.Comment fait-ellepoursemontrersibadineendepareillescirconstances ? L’expression de David est indéchiffrable. Je n’arrive pas à comprendre s’il estheureux,souslechoc,contrarié,outoutçaàlafois.D’ailleurs,sentantmonregardseposersurlui,ildétournelatête,commes’ilvoulaitcoupertoutecommunicationentreluietmoi.Cegestemeblesse.

–Onpeutparlerdevantelle?

C’estlemomentqueDavidchoisitenfinpourprendrelaparole.

–Jenecroispasquetuaieslechoix,detoutefaçon,Sacha.Pardon…«Leo».Tuasperduledroitdechoisirdevantqui te justifier le jouroù tuasdécidédemettreenscène tamortetde laisser tesamiséplorés,tunepensespas?

SachasepencheversDavid.

– Je comprends ta colère, Davy, et je ne vais pas te tenir rigueur de ton agressivité. Je lacomprends,crois-moi.Maissiseulementtusavaispourquoij’aipriscettedécision…

Ellem’agace, avec ses «Davy » et samanière de parler demoi comme si j’étais la potiche deservice!

–Ehbienjustement,explique-nous:noust’écoutons.

Sachasetourneversmoi.

–Excusez-moi,jeneveuxpasvousoffenser…Legangal’airdevousfaireconfianceetvousetDavidsembleztrèsliés:j’ensuisheureuse,croyez-moi.Maislesrévélationsquej’aiàfairepeuventmettre en danger chacune des personnes dans cette pièce. Je dois donc être certaine que rien nefuitera.

Àmagrandesurprise,Garyqui,ilyaunesemaineencore,doutaitdemoi,prendmadéfense.

–Davidaraison,Sacha:cen’estpasàtoidedéciderquidoitounonconnaîtrelavérité.Tun’asabsolument aucune idée de la manière dont Louisa nous a aidés. Sans elle, nous n’aurionsprobablementjamaismislamainsurHasting!

Davidrenchérit.

–Louisaestdansmavie,maintenant,Sacha.Toutcequimeconcernelaconcerneaussi,etjen’aipaspourhabitudedeluicacherdeschoses.

Enhardieparlamanièredontlesgarçonsmesoutiennent,jem’assiedssurlecanapé.Jeplantemesyeuxémeraudedanslesyeuxvertsd’eaudeSacha.

–JevousassureSachaquevouspouvezavoirconfianceenmoi.JamaisjenetrahiraisDavidnisesamis.

Ellemefaitunfaiblesourire:

– Il semblerait que je n’aie de toute façon pas le choix… Bien. Autant nous tutoyer, Louisa,puisqu’ilsemblemaintenantquenosdestinssontliés.Tunepensespas?

Durantlerécitdessévicesqu’asubisSacha,jedoislutterpournepasvomir.J’essayedenerienlaisser paraître de mon état. Je ne veux pas que Sacha ait l’impression que je m’approprie sonhistoire.Cependant, aucun risquequ’elle se rende comptede l’effet que ses souvenirsme font : lajeunefemmeparleenregardantsespiedsetencherchantsoigneusementsesmots.ElleneremarquemêmepasqueplusieursfoisJudithfondenlarmes,horrifiée.Gary,lui,selèveàintervallesréguliersdesonfauteuil,biendécidéàallerretrouverHastingetàluifairelapeau.Ilnousfautlutterpourleconvaincrederesteravecnousetd’attendrelafindel’histoiredeSacha.Ilesttoujoursaussidifficilede savoir ce que ressent David : il présente son habituel masque d’impassibilité, celui qu’il revêtlorsqu’ilnesaitpluscommentgérersesémotions.

– Vous devez comprendre qu’au bout de dixmois de cette vie, je n’étais plusmoi-même.Mesraisonnementsétaientconfus.J’étaisconstammentminéeparlaterreur.J’avaisenmoiuneviolenceque je contrôlais plus. David…David n’était plus là et même si j’étais soulagée pour lui, c’étaitdevenuencoreplusdifficiledevivretoutesceschoses…

Garynecomprendpas.

–Pourquoin’avoirriendit?Pourquoinepas t’enêtreouverteàmoi?OuàJudith?OuàMrsCarlson,quidirigeaitlefoyer?

Sachasembledésemparée.

–Jenesavaisplusàquimefier!Hastingm’avaitfaitdouterdetoutlemonde.Ilm’avaitassuréquepersonnenemecroiraitetquedetoutefaçon,sijeparlais,ilferaitdumalauxgensquej’aime.J'avais sipeurde lui ! Jeme rendscompteque j’aieu tort,mais sur lemoment, jen’avaispas lesidéesclaires.

Cettefois,c’estJudithquiinterrogesonamie.

–Maisalorscommentt’estvenuecetteidée?Celledesimulertamortetdet’enfuir?

L’airgrave,Sacharépond:

–C’estlàquetoutecettehistoiresecorse.J’aifiniparentendredesrumeurs,icietlà…Certainshabitantsduquartier,principalementdespersonnesâgées,parlaientd’untypequipouvaitvousfairedisparaître.L’hommevousfournissaitdenouveauxpapiers,unenouvelleidentité,unenouvellevie…Après ça, vous deviez vous débrouiller par vous-même et surtout ne jamais révéler votre identité,sous peine d’être sur sa liste noire. Cet homme, vous le connaissez : c’est par ailleurs un tueur àgagesqu’onappelleIgorKanaïev…

Jem’exclame:

–LeIgorKanaïev?Celuiquiatentéd’éliminerDavid?Maisc’estàn’yriencomprendre!

Sacharefaitsonfaiblesourire.

–Oui,c’estunehistoirecomplexe…Quandonfrayeaveclesyndicatducrime,toutledevient.Àl’époquej’étaisbientropjeunepourmedouterquejemettaisledoigtdansunengrenagequifiniraitparmenacermesproches.Voyez-vous,Kanaïevestliéàlamafia:c’estpourçaqu’ilnedoitsurtoutpassavoirquejesuisrevenueenville.

–Maispourquois’enprendreàDavid?

Monamantprendlaparole,impassible.

–C’estpourtantsimple:jecommençaisàlegêner,avecmonenquête.Ilnefallaitpasquejemerapprochetropdelavérité.C’étaitplussûrpourluietsesacolytesdesedébarrasserdemoi.

Sachaluilanceunregardcomplice.

–Tun’asrienperdudetavivacité,àcequejevois!C’estçaeneffet.Vouscomprenez,Kanaïevestunvraipro.Ilateintmescheveux,m’afournicepasseportsurlequelj’avaisquatreansdeplusqu’enréalité.Ilm’atrouvéuntravaildansunpetitatelierdecoutureàSanFrancisco…Enthéorie,aveclalettre que j’avais laissée derrière moi, personne n’aurait dû se poser la question de ce qu’étaitdevenueSachaStewart.Maisvoustrois…

Elleal’airprofondémentémue.

–Vousmeconnaissieztropbien.Vousavezrefusédecroireàlaversionofficielleetavezcontinuédemechercher.C’estpourçaqu’auxyeuxdeKanaïev,vousêtesdevenusunemenace.Or, ce typen’estvraimentpasunplaisantin.

Davidluidemande:

–C’estpourçaquetuesrestéecachée,toutcetemps?

Sachaacquiesce.

–Oui,entreautres.Maisilfautquetucomprennes,mêmesicen’estpasfacileàaccepter…Avec

les années, je suis vraiment devenue Eleonore Clark. Je n’étais plus l’orpheline de service ou lavictimed’unpervers:jetravaillais,j’avaismonpropreappartement…J’étaislibre!Jem’entendaisbienaveclesfillesdel’atelier.Ilyenavaitcertainesquiétaientàpeineplusâgéesquemoi.Jesortaisavec elles pour faire la fête. Les plusmûresm’avaient prise sous leur aile. Je les appelais «mespetitesmamans».Etpuislacouture,çam’atoutdesuiteplu.Auboutdedeuxans,jesuispasséechefd’équipe,puisdessinatricedepatrons,puisresponsabledesfournisseurs.J’aimisdel’argentcôté,unpeu, à la hauteur de mes faibles moyens. J’ai commencé à m’intéresser à la mode, à créer mespropres vêtements… Quand j’ai enfin eu assez d’économies, j’ai ouvert ma propre boutique enm’associantavecuneamie.Lemagasinexisteencoreetmarcheplutôtbien.Onyvenddesfringuesdecréateurs,maisaussilesvêtementsdemapropremarque,Clark.

–Sijecomprendsbien,tunousasoubliés…

C’estGaryquiparle,amer.

–Oh,nonGary!Necroispasça!Jepensaistoutletempsàvous.Jevousaisuivis,deloin.J’ailutousleslivresdeDavid,collectionnétouslesarticlesoùilétaitfaitmentiondeJudith…Lejouroùtuasobtenutondiplôme,Gary,jesuisrevenueàNewYorkpourassisterdiscrètementàlacérémoniederemise…Maisjenepouvaisrienfairedeplus.Jedevaisvouslaissertranquilles.

–Alorspourquoireveniraujourd’hui?–Quandj’aivudanslesjournauxqueDavidFultonavaitétévictimed’unattentatàsondomicile,

j’aitoutdesuitefaitlelienavecKanaïev.J’ailaissélesclésdelaboutiqueàmonassociéeetj’aiprislepremieravionpourNewYork.Jevousaisuivispendantplusieursjours.Jecherchaisunmoyendevous mettre en garde sans vous révéler ma véritable identité. C’est comme ça que je me suisretrouvéeàlamêmeterrassequeDavidetLouisacemidietquejevousaientendusparlerdeHasting.

Sachasetourneversmoi.

–DèsquevousavezsautédanscetaxietfiléendirectiondelaBowery,j’aicomprisqu’undrameétaitsurlepointdeseproduire.Jesuisintervenuesansréfléchir.

Garynecomprendtoujourspas.

–Tun’enveuxpasàHasting?Aprèscequecesalaudt’afait,tuesprêteàluipardonner?

Sachas’exclame:

–Jamais!Jamaisjeneluipardonnerai,àceporc!Maisjenepeuxpastelaissergâchertaviejustepourmevenger.CequiestfaitestfaitetlamortdeHastingnechangerapaslepassé.Toutcequejepeuxfaire,c’estprotégertonavenir…

ElleregardeJudith.

–Votreavenir.

Unsilencegênéenvahitlapièce.Sachaasoudainl’airinquiète.

–Attendez…vousêtestoujoursensembletouslesdeux?

Devantl’absencederéactiondesonamie,ellesetourneverssonfrère.

–Gary?

MaisJudithneluilaissepasletempsderépondre.

–Nousparleronsdenosaffairesdecœurplus tard, si tuveuxbien.Pour l’instant, il fautqu’onrèglecettehistoiredeKanaïev.

Sachasupplie.

–Non,surtoutpasnon!LaisseztomberKanaïev,jevousenprie!Ilestbientropdangereuxpourqu’ontentedesemettreentraversdesaroute.

Judiths’écrie:

–Maisalorsquoi?Ilfautquej’acceptedeteperdredenouveau,c’estça?DetelaisserrepartiràSanFranciscoalorsquenousvenonsàpeinedenousretrouver?

Sachaal’airembêtée.

–Cen’estbienentendupascequejeveux…Maisoui,àunmomentdonné,jevaisdevoirrentrerchezmoi.Neserait-cequepourvotrepropresécurité.Kanaïevnedoitsurtoutpasapprendrequejesuisici.

EllesetourneversDavid.

–QuantàtoiDavid,tudoisabsolumentarrêterded’intéresseràKanaïevetaupassé.Tudoisfaireensortequelapolicelâchel’enquêtequ’ilsontouvertesurl’attentat.L’inspecteuravecquituesencontactdoitsedétournerauplusvitedelapistemafieuse.IlyvadetavieetdecelledeLouisa.

– Je comprendsbien les enjeux,Sacha.Mais jenevoisvraimentpas ceque jepeux faire. JusteavantdemerendrechezHasting,j’aieul’inspecteurStinsonautéléphone–c’estluiquiestchargéd’instruire cette enquête. Je lui ai parlé de Hasting et de Kanaïev. Je lui ai dit que j’avais en mapossession tonvieux journal,où tu faisplusieurs foismentionde«I.K.»ou«Kanaïev».Jedoismêmeleluiremettreleplustôtpossible.Jedoutequ’ilabandonnecommeça.

Sachaasoudainl’airhorrifiée.

–Alors nous voilà perdus.Nous tous. JamaisKanaïev ne se laissera prendre. Il préférera nouséliminer,méthodiquement,touslescinq.MonDieu,c’estabominable…

Jesuismoi-mêmeterrifiée.Jenesaispascommentnousallonspouvoirfairepournoustirerdecemauvaispas.Stinsonestloind’êtreunimbécile…Commentleduperetlelancersurunefaussepiste?Ildoitpourtantbienyavoirunesolution!Davidremarquemonexpressiondeterreuretmeserredanssesbras.Ilmemurmure:–Net’enfaispas.Jamaisjenelaisseraiquiquecesoittefairedumal.Encoremoinsparmafaute…

Puis,s’adressantaurestedel’assemblée.

–Lesamis,ilesttardetlajournéeaétéricheenémotions.Jevaistrouverunesolutionmaisriennesertdesetorturercesoir.Judith,ilfautqueSacharestecheztoiletempsqu’ontrouvecommentréglercettehistoiredeKanaïevetdeStinson.Est-cequec’estpossible?

Judithacquiesce

–Oui, pas de souci : je la ferai passer pourma cousine auprès de la gardiennede l’immeuble.Cousine«Leo».

–Parfait.Gary,peux-turaccompagnerlesfilles?–Oui,sansproblème.Jepensemêmequ’ilseraitsansdouteplussagequejepasselanuitlà-bas,

surlecanapédeJudith.Onnesaitjamaiscequipeutsepasser.–Tuasraison.Tuastoujourston.38avectoi?

Garyopine.

–Bien.J’espèrequetun’auraspasàt’enservir.

Sachasejetteaucoudesonfrère.

–OhGary, s’il te plaît : promets-moi encore une fois que tu ne feras rien d’idiot !Que tu netenteraspasdetevengerdeHasting!J’aibesoindet’entendreledire.

–Jetelepromets,sœurette.

3.Doutes

Àpeinelepetitgroupea-t-ilfranchilaportequejemeprécipitedanslesbrasdeDavid.Cederniersembledésarméparmonétreinte.

–Louisa,quesepasse-t-il?–Oh,David…J’aisipeur!–Ilnefautpasquetut’enfasses.Jet’assurequejenelaisseraipersonnetefairedumal.

Il m’enlace et souffle délicatement sur mon front pour dégager quelques-unes de mes mèchesbrunes. Ildéposeensuitedepetitsbaisers surmespaupières.Mesbras remontent le longdes sienspour venir se poser sur ses épaules carrées. David renverse ma tête en arrière et enfonceprofondémentsa languedansmabouche.Sonbassinsecolleaumiendefaçonquejepuissesentirsondésirpourmoi.Oh,jevoudraistantmelaisseraller…Goûtersapeauexquise,oublierledangersoussescaresses…Maisjemesenstellementagitéequej’aidumalàmedétendre.Illeremarque.

–Quelquechosenevapas?

Oui,quelquechosemegêne,maisjen’osepasenparler,pasfrontalement.

CetteSacha.Ellemesembleétrange.

–Ehbien…Lajournéeaétéricheenémotions…

Davidprendl’airgravetoutencaressantmajouepourmeréconforter.

–C’estvrai.D’abordlaconfrontationavecHasting,puissoudain,Sachaquidébarque…Jet’avouequej’aiunpeudemalàréalisercequisepasse.

–Maistuesheureux?D’avoirretrouvéSacha?

David a l’air surpris et amusédemaquestion. Il fautdirequ’il y adequoi : il vientd’avoir laconfirmationquesapluschèreamieestenvie…

Idiote!Ilaattenducemomentdurantquinzeans.Biensûrqu’ilestheureux!Sachaatoujoursétésonabsoluepriorité.

Voyantmonairsoucieux,Davidmesoulèveetmefaittournoyerdanslesairsenriantdesonbeaurirecristallin.

–Terends-tucompte,Louisa?Monamied’enfanceestvivanteetjepartagemavieaveclaplusbellefemmedumonde.Mafamilledecœurestenfinaugrandcomplet.Oui,jesuisheureux,c’estlemoins qu’on puisse dire…Qu’importe ceKanaïev : nous dépasserons cette épreuve comme nousavonsdépassétouteslesautres.Dumomentquenoussommesensemble,toietmoi.

–…etSacha.

Jememordslalèvre.Jeregrettedéjàmaremarque.Oui,Davidesttoutàsajoie,etjedevraislelaisserenprofiter.Maisc’estplusfortquemoi:leretourdeSachasoulèveplusieursquestions.Eneffet, jusqu’à ilya troismois, il l’aimait encore,malgré le tempset ladistance.Qu’est-cequimeprouvequetoutçaachangé?Qu’est-cequimeditqu’ilnevapasmequitterpourelledésormais?

–Sonretourt’inquiète,Louisa?

Jedétourneleregard.

–David…Jeneveuxpasmemontrerégoïste…–Non,non,ne t’excusepas…Jepréfèreque tupartages tesangoissesavecmoi…Tusais,moi

aussi,sitonpremieramourdébarquaitcommeunefleur,jeseraisloind’êtreenchanté.

Jeluifaisunsouriredébordantdereconnaissance.

–Tusaisquetuesl’hommeidéal?–Entoutcas,Forbes,leNewYorkTimesetGQledisent.

Jerisenluimettantunetapesurl’épaule.

–Espècedevaniteux!

Ilm’attrape etnous fait basculer sur le canapé. Jepousseunpetit cri de surprise et tentedemedébattre.Ilm’immobilise.Jesenstoutsoncorps,incroyable,dense,appuyersurlemien.Ilplaquesescuissescontrelesmiennesetmaintientmespoignetsavecsesbras,tantetsibienquejenepeuxpasbouger.

–Tuesàmoi,Louisa…Maisjesuisàtoiégalement.Jeneveuxpasquetuendoutes.–Oh,pardon,jesais,jesuisstupide.C’estjustequequandSachaarefusédeparlerdevantmoi,j’ai

trouvéçaunpeu…Jenesaispascommentdire,c’estassezconfuscommeimpression…Maisj’aieule sentiment qu’elle n’avait pas conscience que quinze ans avaient passé et que vous n’aviez plusexactementlamêmerelation,elleettoi.

Davidseredresseenpositionassise,puisilm’aideàm’installerconfortablementcontresonflanc.Ilréfléchitàcequejeviensdedire.

– Jecomprends ton sentiment.C’estvraiquec’était assezoffensantde sapart, etpas forcémentbienvenu.

–Tupensesquec’étaitunemanièred’exprimersajalousie?–Hum…Jenepensepas,sincèrement.C’estjustequeSachaavécudeschosesépouvantables.Elle

doitêtretraumatisée.Jepensequeçal’arenduecraintiveetque,spontanément,elleavoulurecréerlecoconrassurantdesonenfance.Maistunedevraispasleprendrecontretoi.Aucontraire,j’aiplutôtl’impressionquevousaveztoutpourvousentendre,non?

D’unairespiègle,ilmelance:

–Jeveuxdire:vousaveztouteslesdeuxunsacrécaractère…

Jeprotesteenriant.JememetsàchatouillerDavid.

–Retirecequetuviensdedire!Retire!

Davids’étouffedanssonrire.Ilestextrêmementchatouilleux.Ilfaitminedemegronder.

–Louisa,enfin!Unpeudesérieux,tun’esplusuneenfant!–Retirecequetuviensdedire,David,oujetechatouillejusqu’àlasyncope.

Hilare,ilserend.

–OK,OK,jeretire…Cen’estabsolumentpasuntraitquevouspartagez,elleettoi…

Ilmarqueunepetitepause.

–…carpersonnen’estaussicaractérielquetoi,monange.

JememetsàpoursuivreDaviddanstoutl’appartementenlemenaçantdemesdoigtsconvulsés.

–DavidFulton,vousallezmepayerça.

Nouscouronsautourde la table àmanger, autourdubar américain,puis autourducanapé.Ceschamailleriesetcesenfantillagesnousfontdubien.Davidfinitparse laisserattraper. Ilmeplaquecontreluietlaissesesmainsdescendrelelongdemondos,jusqu’àmescuisses.Ilrelèveunpeumajupeetmurmuremonprénomavecfièvre.Meslèvresprochesdessiennes,jesusurre:–Ettoi?

–Commentça,«moi»?–Tuescertainquec’estcequetuveux?Êtreavecmoi?MaintenantqueSachaestderetour…

Davidrelâchesonétreinte,bouleversé.

–Commentpeux-tuendouterLouisa?Tuneterendsdoncpascompte?

Ilpassesamaindansmescheveux.

–Cequ’ilyaentrenousestsi rare,sibeau…Commentpeux-tu imaginerunseul instantquejerenonceraisàça?

Davidal’airblessé.Jetentedem’excuser.

–JenevoulaispastevexerDavid.

Ildétourneleregard.

–Louisa,tunecomprendspas…Cen’estpasmonorgueilquiesttouché.C’estjustequecequetuviensdedirem’inquiète.Situpensesquequoiquecesoitpourraitmedétournerdetoi,alorspeut-être n’as-tu pas conscience que ce qui se passe entre nous est extraordinaire ? Je ne peuxpas t’envouloir,biensûr:tuasvingtans,tuignorescommeilestrarederencontrerunepersonnequivient

bouleversertonexistence.Maisçam’attriste…Situn’enaspasconscience,qu’est-cequimeditquecen’estpastoiquifiniraspartelasseretparpartir?

Jemejetteàsoncou.

–Jamais,ohjamaisDavid!Cen’estpascequejevoulaisdire!Toi, tues irremplaçable!Maismoi,jesuis…tellementquelconque.

–Quelconque?

Sesyeuxsontécarquillés.

–Louisa,tupensesvraimentça?

Davidme serre dans ses bras puissants.D’une petite voix timide, je chuchote : – Parfois, je necomprendspascequetumetrouves…

Davidal’airabasourdi.

– Je n’arrive pas à croire quemalgré tout ce que nous avons vécu ces derniers mois, malgrél’assurancedonttufaispreuvejouraprèsjour,malgrélecouragequetudémontres,tudoutesencoreàcepointdetoi.

Ilmurmuremonprénomenembrassantmonfrontavecdouceur.

–Louisa,ohLouisa…

Ses lèvres se pressent contre lesmiennes. Ilm’attire à lui tout en s’asseyant sur l’accoudoir ducanapé. Ilm’installe sur ses genoux et laisse courir surmon dos sesmains viriles. Il pressemoncorpscontrelesienavecuneragedésespérée.

–Jevoudraistantquetutevoiesavecmesyeux…Quetusentescequej’éprouvepourtoi…

Sesbaisersreprennentdeplusbelleetm’étourdissent.Ilsmedisent:«Tuesmameilleureamie,tues mon amante, je suis fou de toi. » Le sentir aussi passionné m’électrise. D’une voix suave quim’emplit de désir, ilme susurre : –Tu ne te rends pas compte de ce qu’étaitma vie avant toi. Jen’étais rien : un homme solitaire, emprisonné dans son propre passé.Mais tu as changé ça. T’enrends-tucompte?Jusque-là,j’étaistellementengluédansmonamertumequejenesavaismêmepasquiétaientvraimentmesparentsetpourquoiilsétaientmorts!

Jem’exclame:

–Oh,David,tun’étaispasamer!Tusouffrais,c’esttout.

Ilmesouriteneffleurantmonbrasd’unedoucecaresse.

–Oui,jesouffrais,c’estvrai.Maisaujourd’hui,jen’aiplusmal.

Ilmarqueuntemps.

–Tusais,c’estétrangemaisj’aitoujourseupeurdubonheur.Jepensaisquelejouroùjeseraiscomblé,celamerendraitfaible.

Ilmecontempleavecuneinfinietendresse.

–Jesaisàprésentquelebonheurrendplusfort.Qu’ilfautsebattrepourleconserver.Depuisquetuesdansmavie, jedécouvrelevéritablecourage.Sansl’énergiequetumetransmets, jen’auraisjamais trouvé laforcedeparleravecmononcle.Jen’auraispasacceptéd’entendre lesraisonsquil’ontpousséàmelaisseraufoyerdurantseptans;jen’auraisjamaissuquel’accidentdevoituredontont été victimes mes parents était sans doute un meurtre. Sais-tu à quel point ces révélations mesoulagent? J’aivécudurantplusdevingtansavec lacertitudequ’unhasardcruelavaitbrisémonfoyeretquelerestedemafamilles’étaitdétournédemoiaumomentoùj’avaisleplusbesoind’eux.Je sais aujourd’hui que cette perte tragique n’avait rien d’un accident, que mon père n’était pasl’hommeirresponsableetaccroàlavitessequej’aitoujoursimaginé.Danslefond,jeluienvoulais:jeleconsidéraiscommeunratéquiavaittuémamère.Désormais,jesaisquec’étaitungrandhommequis’estbattucontrel’injustice,quitteàylaissersavie.Etjesaisquemononclen’estpasunmonstred’indifférencemaisunhommequiatoutfaitpourmeprotéger.

Davidplongesesyeuxnoirsdanslesmiens.Ilsbrillentd’unéclatquimeréchauffe:c’estceluidelatendresse,delapassion.Jecommenceàcroirecequ’ilmedit:oui,sessentimentspourmoisontprofondsetauthentiques.

–Louisa,aujourd’hui,Sachaestderetourdansmavie.Pourcombiendetemps,jel’ignore,maisjesaissurtoutqueçaneseraitpasarrivésanstonsoutienettonaide.Tut’esdémenéepourdécouvrirlavéritéàsonsujet:jetesuisinfinimentreconnaissantdeça.Situs’avaiscommejet’admire!

–Tum’admires?!–Bienentendu!Jen’yseraispasarrivé,sans toi.C’est toiquim’asapprisànepasregretter le

passémaisaucontraireàaccepterl’hommequejesuisetl’histoirequiestlamienne.Ehbienmonhistoire,désormaisLouisa,elles’écritavectoi.Riennipersonnenepourrachangerça.

–Oh,David!Jet’aimetant!

J’enaileslarmesauxyeuxetunsourirebéatauxlèvres!Davidaraison:qu’importeKanaïev.Cen’est qu’une épreuve de plus, que nous traverserons ensemble. Lorsque nous sommes l’un avecl’autre,noussommesinvincibles.Ilsaurameprotégerdudangeret…etsijamaismonamourlerendplusfort,ehbientantmieux,carjamaisjenecesseraid’êtrefolledelui.

–Mapetitefée…Tesyeuxbrillent,commelorsquetuesépuisée.Nousdevrionsallerdormir.J’aitellementhâtedesentirlecontactdetapeaunue,tonodeur,toncorpsensommeillécontrelemien.

Nousnouslevonsducanapéetnousdirigeonsverslasalledebains.J’ôtemesvêtementsetenfileune nuisette en soie. David, lui, se défait de son tee-shirt. Je retiens mon souffle alors que jecontemplesesabdominauxparfaits.Dormir?Commentlepourrais-je,aveccedieudusexeàcôtédemoi?

Histoiredemechangerlesidéesetdepenseràautrechosequ’àça,jecommenceàdémêlermonépaissechevelure.David,àdeminu,s’approchedemoiets’emparedelabrosse.

–Attends,jevaist’aider.

Ilaimejoueraveccettelonguetignassequiluifait,dit-il,penseràcelled’unepoupée.«Entreça,tabouchepulpeusecouleurcerise,tespommettesnaturellementrosesettesyeuxcommedeuxpierresprécieuses,ondiraitque tuasétécrééepoursatisfaire tous lesdésirs lesplus fousdeshommes»,aime-t-ilàmerépéter.Jem’assiedssurlereborddelabaignoirependantqu’ilpasselabrossedansmacrinière.

–Louisa,j’adoreprendresoindetoietdetoncorps.C’estincroyablementérotique.–Ahbon?Commentça?–C’estcommesitutesoumettaisabsolumentàmoi.Commesitudevenaismonjouet.

Lechoixdesesmotsnemelaissepasindifférente.Illeremarqueàlachairdepoulequiparcourtmanuque.Iltirelégèrementsurmescheveux.

–Toiaussi,çat’excite?D’êtremapoupée?

Jeme tortille sur le rebord de la baignoire. Je sens le désirme submergermais je ne sais pascommentréagir.J’aiétésitouchéeparlesmotsd’amourdeDavidquejemesenspresqueintimidée.Pourtant,toutmoncorpsréclamed’êtresubmergéparlesien.

– Je peux sentir que tu as envie demoi, Louisa. Il me semble finalement que le sommeil peutattendre…

Davidtiredeplusbellesurmescheveux,faisantbasculermatêteenarrière.Illâchelabrosse,quitombe sur le carrelage en marbre de la salle de bains. Le bruit résonne dans toute la pièce etm’arracheunsursaut.Monsoufflesefaitcourt.

Touche-moi.Parpitié,touche-moi.

Maprièrenetardepasàêtreexaucée.LamaindroitedeDavidcontournematailleetvientseposersurmacuisse.Elleempoignemanuisetteeten fait remonter le tissuavantdedériver lentementendirection de mon entrejambe. De sa main gauche, David fait tomber ma bretelle. Son souffles’accélère dansmon cou alors qu’il vient passer unemain ferme surma poitrine. Tout en faisantcourir sa langue sur mon épaule, il caresse mes seins.Mes tétons se dressent immédiatement. Jehalète,matêtetoujoursrenversée.Davidcommenceàembrassermoncoudégagé,àlemordiller,tellecomteDraculadisposantàloisirducorpsdesaproie.

Une main toujours immobile entre mes jambes, il se sert de l’autre pour caresser ma lèvreinférieure. Il fait courir lapulpede son index surmabouchecharnue.C’estplus fortquemoi : jelèchesondoigt,jeletitilleduboutdemalangue,jel’avaleetlesucedefaçon…trèssuggestive.

–Tuasenviequejeviennedanstabouche,Louisa?

Ilestinutilepourmoiderépondre«oui,c’estcequejeveux»carillesait:j’aimecesmomentsoùjesucesonmembregonfléetoùj’aitoutpouvoirsurlui.J’aimeavoirlecontrôlesurcethommequimedomine.Mais,d’unecertainefaçon,plusjeprendsconfianceenmoi,plusj’accepteausside

m’abandonner pour lui. Demettre mon corps à disposition pour qu’il en jouisse comme bon luisemble.C’estparcequelaconfianceentrenousgrandit.

–Hum,c’est terriblementexcitant,ceque tu faisavec ta langue…Etpourtant,cen’estquemondoigt…

Iléloignesamaindemabouche, laissantma languefrustrée,mes lèvresentrouvertescherchantencorelecontactduretchauddesondoigthumide,quiseposemaintenantsurlapointedemonseingauche.

Oooh…

Ileffectuedespetitsmouvementscirculairessurlapointedemonsein,quisedresseetdurcitdeplusenplus.Lasensibilitédecettezones’exacerbesoudain. J’aipresque l’impressionque…C’estcommesi…

…commes’ilmemasturbait.

Il alterne cette caresse délicate avec d’autres, plus fermes, où il agrippemon sein avec ardeur,presqueviolemment,aupointdemefairefrémir.

–Tuasunepoitrinefabuleuse…Soupleetfermeàlafois…

Sa main droite reste plaquée sur mon entrejambe, immobile. Pourtant, je me sens proche del’orgasme.Monplaisiraugmenteencored’uncranlorsqu’ilfaitremontersalanguejusqu’aulobedemonoreille,qu’ilmordille.Ilenprofitepourmesusurrerdesmotsd’amouràl’oreille.

–Situsavaisseulementàquelpointtuesbelle.Tuestellementexcitante,Louisa.

Meshalètementssetransformentenlonggémissementdejouissance.CebruitanimalaffoleDavid.

–Tuessiréceptiveauplaisir!Çarendraitn’importequelhommefou.

C’esttoiquimerendsfolle.

Ilembrassemonépaule.

–Toncorpsesttellementsensible…

Jepousseungémissementprofond,presqueplaintif.J’aifaimd’êtreprise,manipulée,contentée.Ilpincelapointedemonsein.Lasensationmesurprendparsaforce.Jelaressensjusque…jusquedansmonsexe…C’estsibon!

–Tulesens,quetupourraisjouir?

Fiévreuse,jeluiréponds:

–Oui,ohoui!C’esttellementbon.

D’undoigtexpert,ilsoulèvelepandetissudemapetiteculotte.Ilfaitentrerunindexdansmonsexesuppliantettrempé.Monexcitationestsifortequetoutmoncorpscommenceàêtresecouéparunspasmeviolent.Mesreinssecreusent,mesabdominauxsetendent.

Bonsang,jesuisdéjàentraindejouir.

Jegémis si fort ! Je sens le torsedeDavid contremondos, sapeau lisse et chaudeet ladoucecaressedesespoils.Oh!monorgasmeestincroyablementintenseetpourtant,Davidnebougepasenmoi.C’estunedéchargequisecouetoutmoncorpsmaisquin’apasdecentre.Chaqueparticuledemonêtremeprocureduplaisir.C’estdesalanguedanslecreuxdemanuquequejejouis,c’estdesamainquiempoignemonsein,c’estdecedoigtenfouidansmonintimité…Jenem’appartiensplus.Jelesupplie:–Encore,encore…

Jesensquej’aiatteintlepointdenon-retour.Jemeretrouveàpousserunultimerâlependantquemonbassin se cabre commeceluid’unanimal sauvage.Les spasmes s’interrompent etme laissentinterdite.Jetentedereprendremonsouffle.

–Tuestoutcedontrêveunhomme,monamour:unefemmesublimefaitepourlesexe.

David neme laisse pas de répit. Il empoigne de nouveaumes cheveux pourme faire basculercontreluietmemurmure:–Jeveuxquetuvoiescommetuesbellequandjetefaisl’amour…

Ilseredresseetmeprendparlamainpourquejelesuive.Quepeut-ilbienmeréserverencore?Ilmeguidejusqu’aulavabodelasalledebains,surplombéparungrandmiroir.

–Regarde-toi.

Ilenlèved’ungesteexpertmanuisette,quiglissecontremoncorpsdansunecaressesoyeuse.Ilagrippemesseinsetlescaresse.

–Regardetapoitrine.

Illaisseglisserunemainversmonventre.

–Regardelafinessedetataille,l’arrondidetalignedehanches.

Ilembrassemoncou,cequimepousseàpencherlatêtedecôté.

–Regardelafinessedetanuque,lagrâcedetesépaules…

Jecontemplemoncorpsetletrouvepourlapremièrefoisdemaviebeau,etmêmeplusencore,puisquec’estcecorpsquirendDavidFultonfoudemoi.Cen’estpasmoiquejeregardemaisuneautreLouisa,sexy,extrêmementfemme.Unemaîtresseardenteetexperte,prêteàtoutpoursatisfairelesdésirsdesonhomme.

– Tu comprends que j’aie toujours envie de te baisermaintenant ? Tu es faite pour donner duplaisir.

D’unmouvementdelacuisse,ilécartemesgenoux.

–Penche-toi,mabelle.

J’agrippe l’évieret reculequelquepeumes jambes.Jecreusemesreinspourfaireremontermacroupe.LabouchedeDaviddescendlelongdemondospourm’embrasser,melécher,memordre.Sesmainsdégagentmescheveuxetlesrangentderrièremonépaule.Ilsdescendentlelongdemonbusteetformentunecascadesouple.Danslemiroir,jechercheleregarddeDavid.J’arriveàattrapersesyeuxnoirsetbrillants.Jem’attardesurletracédélicatdesespommettes,sursabouchepulpeuse.Ilmeregarded’unairmalicieux.

–Tuesfaitepourdonnerduplaisir,oui…Etjevaisprendremonpiedentebaisant.

Je frémis. L’idée d’être prise par derrière mais de pouvoir contempler le corps, le visage, lesexpressionsdemonamantdanslemiroir,mefait instantanémentmouiller.Mesyeuxsefermentuninstant.Jemordillemalèvreinférieuredejoieàcetteperspective.

–Cetteidéeteplaît,Louisa?Celledemefairejouir?

Il vient chercher lui-même la réponse enbaissant d’ungeste fermemaculotte et enplaquant samainsurmonsexeépilé.Sonmajeurvient titillermafentechaudeethumidependantquejegémismonapprobation.

–Tuesinsatiable.

Jelesuiseneffet.Penchéeau-dessusdecelavabo,offerteàl’appétitdeDavid,jemerendscomptedemondegrédesoumissionàmondésirimpérieuxdejouirencoreunefois.

– Il n’y a riendeplus excitant qu’une femmeassoifféede sexe.Surtout lorsque celle-ci sembletellementinnocente.

Sonmembreestsidur…!Jelesenscontremapeau.

–Dèslapremièrefoisquejet’aivue,danscetaéroportàParis, j’aiimaginéfairel’amouravectoi.Jet’aiimaginée,toisifarouche,entraindemesupplierpourquejeteprenne.Etçam’afollementexcité…

Soudain,ils’enfonceenmoi,m’arrachantuncriprofonddesatisfaction.

–…maistuasdépassétoutesmesespérances.

Ilcommenceàalleretvenir,silentementquec’enestunetorture;latorturelaplusdélicieusequisoit.Sesmainsempoignentmeshanchesetguidentlesmouvementsdemonbassin.Ilm’attireàluietmerepoussedélicatementtoutenenfonçantsesdoigtsdansmachair.

–Tapeauestsidélicate…Çadonnepresqueenviedelamarquer…

Mesyeuxs’écarquillentsoudain,dansunmélangedecuriosité,d’envieetdepeur.Jemesouviens

desfoisoùilm’aattachée,merendantàsamerci.Cethommedésire-t-ilparfoismefairedumal?

Est-cequ’ilnem’arrivepas,moiaussi,deledésirer?

Ilsouritavecironie.

–Rassure-toiLouisa,j’aidit«presque».

Samaindroitelâchemahancheets’emparedemescheveux,qu’ilenroulecommeunrubanautourde son poignet afin de s’assurer une prise ferme. Il tire délicatement sur ma crinière.Ma tête seredresse.

–Regarde-toi,Louisa.Regardecommetuesbelle.

Sesmouvementsdereinss’accélèrent.Sonbassinbougedansunmouvementrapideetsouple.Cen’estplusmonsexequivientàlarencontredusien:Daviddécidedetoutalorsquejemetiensfigée,entièrementdédiéeàlerecevoir.Jecontemplesontorse,saboucheentrouvertedansuneexpressiond’abandon,sesyeuxbaissés.Desonregard,ilembrassemondos.

Jesuishypnotiséeparlagrâcedenosdeuxcorps,parlesondesdeplaisirqu’ilsproduisentetseprocurentl’unàl’autre.Jesensdansmonsexelacaressedusien,tellementraide,tellementpuissant.Dans la lumièrecruede la salledebains, jedécouvre la réalitédenotreunionparfaiteetdenotreabsoluefusion.L’amourquenousfaisonsestbeau;cruetgracieuxàlafois.Unfantasmeinéditmevient:celuid’êtrephotographiéeparDavid.Celuidem’offrirtotalementàsonregard,dem’exhiberpourluicommeunevulgairecover-girl.Leplaisirremplitmonventreetjegémis,avide.Ilrelèvelatête et, par l’entremisedumiroir, plonge sesyeuxdans lesmiens. Il y aquelque chosed’à la foissuppliantetimpitoyabledanssonregard.Sespupillesdilatéessemblentfigéesparsadéterminationàjouirquand ses iris tendresmedisent la stupeurqu’il ressent àprendre tantdeplaisir. Iln’enpeutplus.Moiaussi,jemesensprêteàexploser,àmedissoudre.Chaquefragmentdemonêtreestentraindegrimperauseptièmeciel.

–Retourne-toi,Louisa.

C’estlerefletdeDavidquimedemandeça,là,danslemiroir.Jemetourneversluialorsqu’ilseretire.Jem’arrachebrutalementausortilègedenotreimage.Ilm’attrapeetmesoulèveavantdemereposer sur leborddu lavabo. Il s’immiscedenouveauentremescuissesouverteset s’enfonceenmoienmurmurant:–Monamour,monamour…

Jamais avant ce soir il nem’avait appelée par ce doux nom, « amour ». C’est comme si nousregarderl’unl’autreparleprismedumiroiravaitrenforcélaconnexionentrenous.

–Jesuisàtoi…Jeveuxjouirentoi…

Jemerenverseversl’arrière,prêteàlerecevoirentièrement.Sesmouvementsdereinsdeviennentbrutaux.C’estsibon…Sibondesesentirremplieparlui…

–Oui,c’estbienmabelle…Viens…

Jegémisetmecabre,prised’unorgasmeviolentquiapoureffetdedéclencherlesien.Moncorpsse contracte, refermantmon sexe sur le sien.David gémit lui aussi. Ilme tient fermement tout ens’enfonçantprofondémentenmoi.Nosyeuxsecroisentdenouveau,cettefoissansl’entremisedelaglace.Nosregardspénètrentprofondémentl’undansl’autre.Alorsquejepousseunultimerâle,j’ail’impression de plonger dans les tréfonds de son âme. J’ai l’impression dem’ouvrir absolument.Toutmonpassé,tousmessecrets,tousmesdésirssontdésormaismêlésauxsiens.

Toutmonavenir.Toutmonavenirestdésormaisliéausien.

4.Lesfaussaires

Lalumièredujourfiltreàtraverslesrideauxentrouverts.Davidetmoisommesréveillésdepuisdeuxheuresdéjà.Monamantadécidédereprendredebonmatinlesactivitésdelanuit,laissantmoncorpssecouépardestempêtesdeplaisirqui,àmonavis,n’ontpaséchappéauxvoisins.

Cette nuit, il m’amurmuré : «mon amour,mon amour… » durant nos ébats. Ce surnom d’ «amour»,nouveaudanssabouche,melaissepenserque,loindenouséloigner,leretourinattendudeSachaa renforcé le lienquinousunit.Noussommessiheureux, lorsquenoussommesensemble !Difficiledecroirequetantd’épreuvessemettentsurnotreroute…Etpourtant,entredeuxétreintesetdeuxmomentsdejouissance,j’aiprisletempsd’exposermonidéeàDavid;cellequiviseàmettreStinson hors circuit pour un temps.Nous en avons longuement parlé ensemble afin d’élaborer unplan solide. Nos esprits semblent en symbiose. Je sens que mes capacités et mon intelligences’épanouissentaucontactdessiennes.

IlestdésormaistempsderetrouverSachachezJudithpourluiexpliquercommentsesortirdecemauvaispas.Lorsquenousquittons l’immeuble,Garynousattendavec la limousine. Ilm’ouvre laportièreenmelançantunprotocolaire«Bonjour,mademoiselle»,qu’ildoubled’unclind’œil.Jeluifaisunsourirereconnaissant:avecleretourdeSacha,çamefaitdubiendesentirquemaplaceauseindugroupen’estpasmenacée.

Jem’installesurlabanquetteetdemandeàDavid.

–Est-cequeceneseraitpasl’heureduMimosa?–LouisaMars!Depuisquandbuvez-vousdescocktailsdebonmatin?

Jeluisouris.

–Jecroisquedepuisquelquesmois,oubliertousmesprincipesestdevenumonnouveauprincipe.

Davidsortdumini-frigoduchampagneetunebouteilledejusd’orangespressées.Ilcommenceàmepréparermaboissonaveclesérieuxd’unpape.Jelâcheunpetitrire.

–Qu’est-cequ’ilya?–Oh,cen’estrien…C’estjustequependantuninstant,jemesuisditquetuavaisl’airdeJames

Bond.Agentsecret,gentleman,etbarmanàtesheuresperdues.

Davidmetendmoncocktail.

–Jenesuispourtantpasbritannique.–Maistuenasleflegme.–Etjen’aipasdemissMoneypennyàmescôtés…

Enpouffant,jedésignelacabineduconducteurdumenton.

–OK,tumarquesunpoint:Garyestenquelquesortecebrasdroitdévouédontjenesauraismepasser.Mais qu’en est-il de mes nombreuses conquêtes ? D’épisode en épisode, j’ai l’impressiond’êtreplutôtconstant…

–C’estvrai…«DavidFulton,monogame…etpasspécialementdiscret.»Tuferaisunpiètreagentsecret.

–Ahbon,tumetrouvesdonctapageur?

Jedésigned’ungestevagueleluxequinousentoure.

–Tonstyledeviel’est.–EtceluideJamesBondnel’estpas?

Ilmarqueunpoint.

–EttoiLouisa,quelleJamesBondgirlserais-tu?

Jefroncelessourcils,letempsderéfléchir.

–EhbienjesupposequejeseraiscellejouéeparEvaGreen,VesperLynd.Brune,française…–Ahlàlà,lefossédesgénérations…Iln’existequ’uneseuleVesperLynd,etelleaétéinterprétée

parUrsulaAndress.Vouspartagezilestvraiquelquespointscommuns…–Lesquels?

Ilfaitminedeseconcentrer.

–Ehbien…Vousporteztouteslesdeuxtrèsbienlemaillotdebain,vousl’enlevezplusdivinementencore,etvousbrisezlecœurdecepauvreJames…

Jepousseunpetitrire.Davidenprofitepourmevolerunbaiser.Jemimel’accentbritannique.

–Oh,James…Quandpourrons-nousenfinnouséchapperdeceterribleromand’espionnage?

Davidmeserrecontrelui.

–Bientôt,c’estpromis.Avec leplanquenousavonsmissurpied,nousdevrionsbientôtêtreenmesuredevivreloindetoutecetteagitation.

Davidattrapemamain.

–Louisa,j’aiunechoseàtedemander.Quandtoutçaserafini,est-cequetuseraisd’accordpourque…

LavoixdeGaryretentitàtraverslespeakerdelalimousine:–David,Louisa,nousvoilàarrivés.

Jesoupire:unefoisdeplus,l’amourdevraattendre…

NoussommesinstallésautourdelatableàmangerdeJudith,touslescinq.Notrehôtessenoussertuncafé.

–Sacha,unsucreoudeux?–Deuxs’ilteplaîtJudith…Etunpeudelait…

Sachanousfaitàtousunsouriretimide.

–Écoutez,j’aiunechoseàvousdemander.Unechoseimportante.J’espèrequevousneleprendrezpasmal…

Ellesetourneverssonfrère.

–Surtouttoi,Gary.Jeneveuxpasquel’onsefâche,OK?Etjamaisjenetedemanderaisuntelservicesicen’étaitpasimportant.

Gary,quis’estradoucidepuishier,luiprendlamain.

–Dequois’agit-il?

J’imagine que ces deux-là ont dû parler jusque tard dans la nuit. Ils ont tous les deux les yeuxcernés.Jecommenceàvoiràquelpointilsseressemblent.Ilsontcemêmeairfarouche,cemêmeregarddefauve.Jemesouviensdecequ’Olivier,monex,définissaitcommel’âmeslave:«PleurersesamoursperduesuneKalachnikovàlamain.»

– C’est important que vous renonciez à m’appeler Sacha, tous autant que vous êtes. Que vouspreniezl’habitudedevousréféreràmoicommeEleonoreouLeo.Jesaisquecen’estpasévident;qu’àvosyeuxjenesuispascettefemme.Maispersonnenedoitsedouterquejesuisenvie.

D’unevoixtriste,elleajoute:

–SachaStewartn’estplus.

Judithàl’airémue.

–Çapeutsembleridiot…Maisçamefaitbizarredepenserqueplusjamaisjenem’adresseraiàtoi enutilisant cenom.Durant les quinze annéesqui viennent de s’écouler, parfois, lorsque j’étaisseule, jem’adressais à toi. Je te racontaismes histoires,mes peines etmes joies,mes secrets. Jet’appelais,non:jeteconvoquais,enutilisantcesdeuxsyllabes:Sacha.

Ellesoupire.

–Oh,jesuissentimentale.L’important,c’estquemameilleureamiesoitderetour,non?

GaryetDavidacquiescent.Sachaajoute,àl’attentiondesonfrère.

– Tu as conscience que cela veut dire que toi etmoi ne seront plus frère et sœur aux yeux dumonde?

–Oui,etpourêtrehonnêteçanem’enchantepas,maisjepréfèreuneEleonoreClarkenvieàuneSachaStewartmorte.

Davidseraclelagorgepourlesinterrompre.

–Bon,jeproposequenouspassionsàl’ordredujour.

Judithdemande:

–Quiest?Pardonmaisnousavonsassezpeudormitouslestroiscettenuit:nousavonsétébienoccupésàrattraperletempsperdu.

Oui,etdenotrecôté,nousnenoussommespasbeaucoupreposésnonplus…

Davidsembleliredansmespenséescarilmelanceunsourirecomplice.Celaravivelesouvenirde ses lèvres surma peau, de ses dentsmemordillant délicatement, de sa langue parcourantmoncorps…

Quevoulait-ilmediredanslavoiture?

Davidprécise,pourJudithquisembleperdue:

–L’ordredujour:fairecroireàKanaïevqu’iln’estplussurnotreradarousurceluidelapolice.

Garyajoute:

–Ets’occuperdeHasting,histoirequejusticesoitfaite.

MaisDavidnuance:

–Can’estpas laprioritépour l’instant. Il fautd’aborddétourner l’attentiondeStinson,histoirequ’ilarrêtedechercherdespreuvescontrelamafiarussedansl’histoiredel’attentatetdusuicidedeladésormaisdéfunteSachaStewart.

Garyproteste:

– Pas prioritaire ? Ce type est un violeur et un pédophile, qui depuis quinze ans agit en touteimpunité.Commentpeux-tujugerquec’estaccessoiredes’occuperdesoncas?

Jecomprends tant sa révolte !Néanmoins, il fautbiense rangerà l’avisdeDavid : lapremièrechoseàfaireestdenousassurerdenotrepropresécurité.J’essayedel’expliqueràGary.

–Nousnepourronspasgrand-chosecontreHasting si lamafia russe est ànos trousses et si lapolicesurveillenosmoindresmouvements.Moiaussi,jesuisd’avisqu’ilfautagir,etjesuiscertainequeSach…pardon,Eleonoreestdumêmeavisquenous.Maisnousdevonsnousconcentrersurleplusurgent.

Jet’enprieGary,c’estlemomentdemefaireconfiance.

–Louisaaraison.Etd’ailleurs,jeproposequenousl’écoutionstouscarellem’afaitpartcematind’unplanpournoustirerdecemauvaispas,etjepensequecelapourraitfonctionner.

Troispairesd’yeuxsebraquentsurmoialorsqueGarym’encourage:–EhbienLouisa,vas-y:noust’écoutons.

Je tente de rassembler mes esprits avant de prendre la parole et de leur exposer mon idée. Jedétaillechaqueétape,histoireque rienne soit laisséauhasard. Ilsme fontparfois répétercertainspoints. Patiemment, j’explique.À la fin,Eleonore lance, pleine d’espoir : – Je crois que oui…Çapourraitmarcher…

Jeregardelesautres.

–Jelecroisaussi.J’airetournéçadanstouslessens:c’estnotremeilleurechance.Gary,Judith,vousêtesd'accord?

Quatre heures plus tard, Leo etmoi sommes de retour dans l’appartement de Judith. Nos troiscomparsesnousattendent.

–Vousaveztrouvé?

Leobrandittriomphalementunpetitsacdepapier.

–Çan’apasétéfacile.NousavonsécumétoutesleslibrairiespapeteriesdeChelsea,sanssuccès,maisunedameafiniparnousmettresurlavoie.

Je renverse le contenudu sac enpapier sur la table.Un carnet en tombe, identique à celui danslequelSachaprenaitsesnotesàl’époque:relié,encuir,rougebrique.

–Lefabriquantacessélaproductiondeceproduitvoilàdesannées.Ilsontremplacélecuirpardelamoleskine,pluséconomique.Maisennousrendantdirectementàl’usine,dontcettelibrairedela34eRuenousaindiquél’adresse,nousavonspuaccéderàleursvieuxstocks.

Garys’exclame:

–C’estunmiraclequeçaaitmarché!

Sacha/Eleonorerétorque:

–Hé, tu sous-estimes la force de persuasion que peuvent avoir deux jolies paires de gambettesauprèsducontremaîtred’unefabriquedepapier!

Judithdemande:

–Bon,etc’estquoidéjà,lasuite?

Jeréexplique:

–Eleonorerecopiesoigneusement le textedesonjournalde l’époque,maisensupprimant toutementionfaitedeKanaïevetdeHasting.

Jeregardeautourdemoi.

–D’ailleurs,Davidn’estpaslà?C’estluiquidevaitapporterl’original…–Ilnedevraitpastarderàarriver…

Montéléphonevibredansmapoche.Cedoitêtrelui.Jesorsl’appareildemapoche.

Mince,c’estunSMSdeMary.

–Ilarrive?

Jesecouelatête.

–Jen’ensaisrien.C’estjusteunecopinedefac.

J’ouvrelemessage.

[Énormerebondissementdansl’affaireAnderson/Koening.IlfautABSOLUMENTquejeteparle.Oùes-tu?XOXO]

DésoléeAnderson,maistesaffairesdecœurdevrontattendre.

Oh, vivement queDavid arrive ! J’ai tellement hâte qu’onmettemonplan à exécution et qu’onreprennechacunlecoursdenosvies.

TuoubliesunpeuviteHasting,Louisa.

Unfrissonmeparcourt.Non,jenel’oubliepas.Maisilfauttraiterunproblèmeàlafois.

Enfin,lasonnetteretentit.C’estDavid,aveclejournaldesonamie.Eleonores’enempare.

–Judith,tuasunstylo?–Oui,biensûr,tiens.

Jelesinterromps.

–Ilvafalloirplusieursstylos.Dubleu,dunoir,dufeutreetdubic,delaplume…Histoirequeçaaitl’airauthentiqueetqueçan’éveillepaslessoupçonsdel’inspecteurStinson.

Davidm’attireàluietm’embrasse.

–Monpetitgénie…Tupensesvraimentàtout!

Est-cequ’Eleonorenousregarde?Est-cequ’ellevoudraitêtreàmaplaceencetinstant?

À20heuresenviron,Eleonoreaterminésontravaildecopiste.Davids’empareducarnet.

–Bien,ilvafalloirluidonnerunepetitepatineàprésent.

Ilfroissequelquepeulespages.Avecunchiffonetducafédilué,iljaunitlesbordsdupapier.Ilsesertd’unmouchoirdétrempépourgondoleretcraquelerlecuirdelacouverture.

–Jecroisquenoussommesprêts.JeretrouveStinsondansquatre-vingt-dixminutesdanslebarenfaceducommissariat.

Nous avons tous les traits tirés et lesmuscles engourdis d’avoir passé presque toute la journéeenfermésdanscetappartement.Judiths’étire.

–Bon, que diriez-vous d’une tournée deDirtyMartini dans un bar prétentieux ?C’estmoi quiinvite.

Garyal’airravidecetteinitiative.

–OnpourraitallerauLittleBranch,non?

Judithprendl’aircatastrophée.

–Aveccettetête?Oh,tun’ypensespas!Iln’yaquedejeunesetjoliesétudianteslà-bas.

Garylachatouilleauniveaudescôtes.

–Tumesemblesbienplusjoliequen’importequellebranchéedevingtetquelquesannées…

Tiens,tiens…Serait-ceduflirtquej’observe,entreGaryetJudith?

–Entoutcas,ilesthorsdequestionquejesortedanscettetenue…Cesoir,j’aienviedemelâcher,dedanser,defêterleretourdenotre«Leo».Qu’est-cequevousendites,lesfilles?Onvapiocherdansmapenderiepourjouerlesfashionvictimsextravagantes?

Garyselaissetombersurlecanapéetsoupire,faussementexaspéré,àl’attentiondeDavid:–Ah,lesfemmes!

5.Envol

–Nonmais quandmême, tu ne vas pas faire comme si ce n’était rien : tonmec a déjà fait lacouverturedeGQ.Deuxfois!

JesuisavecDanetMarychezKimmel, l’undes restaurantsducampus, en trainde tenterdemeremettredemanuitagitée.Hiersoir,noussommessortisdécompresser,Judith,Gary,SachaetmoienattendantqueDavidterminesonrendez-vousavecStinsonet,questionlâcherprise,onpeutdirequ’onatoutdonné!Oh,quec’étaitbondevoirGaryenfinheureux!EtJudith:elleresplendissaitlittéralement de bonheur ! L’atmosphère entre les deux était magnétique : Sacha et moi nous ensommesamusées.Ç’aéténotrepremiermomentdecomplicité.

LavoixdeDanm'arracheàmessouvenirs:

–Louisa,sincèrement:jetueraispouravoirneserait-cequ’unepigedansGQ !Mêmeunpubli-rédactionnel!Etlui,ilaétéprisenphotopourfairelacouverture!

–J’aicompris,Dan…–NonLou,jenepensepasquetuaiescompris.Explique-lui,Mary.–Luiexpliquerquoi?

Danpousseunsoupirexagéré:

–Louisa,tusaisceàquoipensentlesfillesdumondeentierquandellesvoientunephotodetonDavidFulton?Ellessedisent:«Voilàunhomme,unvrai,avecdel’allureetdelaclasse.»Tusaiscequ’ellessedisent,quandellesvoientunephotodemoi?

–NonDan;sincèrement,jenesaispas.–«J’aibienfaitdelevirerdemescontactsFacebook,cegrosnaze.»

Marypouffe.Danjoueleshommesoffensés.

–Çat’amuse,Anderson?–Tunoircisletableau,Koening…Mêmesicettephotodetoiqu’apubliéeGloria,oùtuesdéguisé

enpatineurartistiquepourHalloween,m’alaisséeassezcirconspecte.

Danserengorge.

–Jesuisadorable,danscecostume.Mamèrel’acousuavecamour:jetedéfendsdelejuger.Etpuis,jen’étaisqu’unenfant.

–Unenfantdedix-septans…

Maryajoute,audacieuse:

–Trèssexy,d’ailleurs,moulédanssapetitecombinaison…–Tuesobscène,Anderson.Moncorpsn’estpasqu’unobjetoffertàtonœillubrique!

OK,OK,jevoislegenre…Çaselancedespiques,çasecherche…Jepariequecesdeuxgrandsnigaudsnesaventmêmepasqu’ilsvontfinirdanslemêmelitenmoinsdetempsqu’iln’enfautpourdire«DavidFulton».Jerépondstoutdemêmeàmoncamarade:–J’aiconsciencedetoutça,Dan.LacélébritédeDavid,sonmagnétisme,crois-moi,jem’enrendsbiencompte.Maismoi,jeperçoisbien d’autres choses encore. À mes yeux, il a cessé de n’être qu’une image de magazine. Il estdevenu…l’hommequej’aime.

–«L’hommequej’aime»!Quelledivinesimplicité!

Enriant,jeluilanceunebouledemiedepainauvisage.Touché!J’airéussiàatteindrel’undescarreauxdeseslunettes.

–NetemoquepasdemoiDan!Jesuissérieuse!–Ahmais jenememoquepas!Aucontraire, j’admire tonflegmeet tonassurance.Sortiravec

DavidFultonet fairepreuvedesipeude jalousie,c’estcommetraînerdans leBronxpasséminuitavecunsacHermèsaubras!

–Oh, je t’assureque le cuir deDavid est bienplus chaudque toutes lesmaroquineriesde chezHermès…

Maryrouledesyeuxhorrifiés:

–LouisaMars!Quellangage!

Danrepoussesonassiette.

–Tantdebonheur,çamecoupel’appétit.

Ilselève.

–D’ailleurs,j’aicours,ilfautquejefile.TuviensMary?–Oh,mince,c’estvrai…J’aiunCMsurEisenstein…

EllesetourneversDanetluitendquelquesdollars:

–Tupeuxréglerpourmoi?Jeterejoinsdehors,jedoisd’abordpasserauxtoilettes.

Danrepoussel’argentdeMaryd’ungestedésinvolte.

–Laisse,poupée;c’estpourmoi.

MarygloussealorsqueDansedirigeverslecomptoir.Sitôtqu’ilesthorsdeportéedevoix,Marysepencheversmoietdébiteàtouteallure.

–Toi,tuneperdsrienpourattendre!Jen’aipasputevoirdepuislafêtechezSandroetj’aimillechosesàteraconter…Cesoir?

Mince,cesoirjenepeuxpas.

–Oh,Mary,jesuisdésoléemaisjedîneavecDavid…

Elleal’airunpeudépitée.Jetentedelaréconforter.

–Jemerattraperaibientôt,promis.Onpourraitsefaireunejournéefillesauspaceweek-endoulasemaine prochaine ? Bain de vapeur, massage, soin du visage… J’ai affreusement besoin dedécompresser.

–Oh,quelleexcellenteidée!–Super!Allez,filevite,tuvasêtreenretardencours.Moiaussid’ailleurs,ilnefautpasqueje

traîne.JedoisrepasseràlachambreprendredeslivresavantmonTDsurleromanpostmoderne.

JelaisseMariequitterlacafétériaetvaisréglermasaladeavantdetraverserlecampusjusqu’auxdortoirs.Jesuisdécidémentfatiguéedemasoiréede laveille !D’autantqueDavidafiniparnousrejoindrepourtrinqueravecnousetquej’aiencoredécouché!

J’arrivedanslecouloiroùsetrouvemachambreetaperçoisauloinl’inspecteurStinson.Saisieparlasurpriseetlapanique,jesuisprised’unmouvementderecul.

Qu’est-cequ’ilfichelà?Est-cequ’ilsedoutedequelquechose?

J’essayedemeressaisir.D’enfilerlemêmemasqued’impassibilitéqueDavid.

Gardelatêtebiendroiteetuneexpressionneutre.

C’estpeineperdue:j’ailesmainsquitremblentlorsqu’ilmetendlasienne.

–MademoiselleMars,ravidevousrevoir.Jevousattendaisjustement.Jenesavaispasexactementàquelleheurevoscoursfinissaient…

–InspecteurStinson…Qu…quellesurprisedevoustrouverici!

Jeglissemaclédanslaserrure.

–Jesuisjustepasséerécupérerunlivre.J’aiuncoursdanstrenteminutes.–Nevousenfaitespas,mademoiselle,jen’enaipaspourlongtemps.

J’ouvrelaporte.

–Voussouhaitezentrer?–Jepréféreraisquenousmarchionsunpeu,siçanevousdérangepas.–Trèsbien.Letempsdeprendremesaffaires…

Marcherunpeu.Est-cequeçaveutdirequ’unevoituredeflicm’attendàlasortiedeNYU?QueStinsonadécidédem’arrêterdevanttoutelafac,auxyeuxdetous,etdem’inculperpourobstructionàlajustice?

Je ressors de la chambre, mon ouvrage à la main, et referme la porte. Nous commençons àavancer.Stinsonmedemande:–Leparcestbienparlàsijenem’abuse?

Jerépondstropvite,avecuntonenjouéquisonnefaux.

–Toutàfaitoui!

Ilmeregardel’airsuspicieux:

–Parfait.Jepensequ’unpeud’airvousferadubien.

Nous avançons aumilieu du parc. Stinson sort une cigarette de son paquet puisme le tend. Jedécline.

–Jenefumepas.–Sagedécision.Lapin-upBettyPageavaitcoutumededirequelaseulechosevulgaire,chezune

femme,c’estlacigarette.

Unpeubrusque,jem’enquiers:

–Jesupposequevousnevouliezpasmevoirpourdiscuterdesméfaitsdutabac?

Stinsonsembledécontenancé.

–Non…Non,eneffet.Asseyons-nousuninstantsurcebanc,voulez-vous?

Docile, je m’installe à ses côtés. En soupirant, Stinson m’avoue : – Je suis très embêté,mademoiselle.Très, trèsembêté.Voyez-vous,votreamiDavidFultonestpassémevoirhier.Nousnoussommesretrouvés lesoiraprèsmonservice,dansunbar faceaucommissariat. Ilvoulaitmeremettrelejournalintimedesonamiedécédée,lajeuneSachaStewart.Ilvousenaparléjesuppose?

Incertainedecequejesuiscenséeounonsavoir,j’acquiesce.

–Oui,ilenafaitmention.MaisvousconnaissezDavid…Ilestplutôtdugenresecret.

Stinsonsourit.

–Oui,secret.Etdifficileàcerner.Maisj’imaginequecegenred’hommeplaîtauxfemmes…–Quelgenred’homme?–Pleindeself-control.Mystérieux.

J’observeuninstantdesilence.

–Lesouci,mademoiselle,c’estquelapoliceestbeaucoupmoinsféruedecegenredecaractère.Nousapprécionsplusvolontierslafranchiseetl’honnêteté.

Ilsetourneversmoi.

–Cellesdontvousavezfaitpreuvejusqu’àprésentsontadmirables.Ilseraitsouhaitablequecela

continue.

Bonsang,sessous-entendusmemettentmalàl’aise.Est-cequ’ilsaitquelquechose?Est-cequ’ils’apprêteàmepasserlesmenottes?Àmetendreunpiège?

–M.Fultonvoulaitmeremettrececarnetcar,d’aprèscequ’ilm’avaitditautéléphone,cetobjetpermettaitdefaire le lienentreSachaStewartet IgorKanaïev,doncentreIgorKanaïevet l’attentatdont il a été la victime.Une aubaine pour leNYPD : depuis le temps que nous cherchons à fairetomberKanaïev…Aussi,imaginezquelleaétémasurprisequandj’aiconstatéquedanscejournal,iln’étaitfaitnullementiondenotresuspect!Avouezquec’estétonnant.

J’esquivedumieuxquejepeux.

–VousenavezparléàDavid?–Bienentendu.Lapremièrechosequej’aifaite,c’estl’appelerpoursavoirsijamaisiln’yavait

paseuméprise.Était-cebiencecarnetqu’ilvoulaitmeremettre?Ilm’aaffirméqueoui.–Encecas…

Stinsonnemelaissepaspoursuivre.

–Voyez-vous,leplusétonnant,c’estqu’ilm’aaffirméquedurantnotreconversationtéléphonique,il n’avait jamais fait mention d’un lien entre Kanaïev et le carnet. Selon lui, il s’agirait de deuxconversations distinctes que j’ai dûmélanger.Or, j’ai beau être à un an de la retraite, je suis loind’êtresénile.

L’inspecteurs’interromptetsembleréfléchir.

–Oui, jesuis loind’êtresénile…Aussi, j’ai toutenvisagé.Jemesuisdemandé,parexemple,siKanaïevavaittrouvéunmoyendefairepressionsurDavidFulton?S’ilavaitréussiàleconvaincredesubstituerauvéritablejournaldeSachaStewartunfaux?J’aid’ailleursfaitexaminercecarnetàmescollèguesduservicegraphologie:ilsm’enontaffirmél’authenticité.

Jepousseunsoupirdesoulagement.Stinsonnemanquepasde le remarquer. Ilnedit rienmaism’observelentement,attendantquejecraque.Jegardemeslèvresscellées,tantetsibienqu’ilsemblerenonceràmefaireparler.

–Oh, peut-être bien que je perds la tête, après tout…En tout cas, je l’espère.Car je suis assezperspicace,mademoiselle, pour savoir que David Fulton ne craint rien ni personne et que jamaisKanaïevn’auraitpulefairechanter.Àmoinsdevousmenacervous.Jemetrompe?

Oui inspecteur : il existe une autre personne en cemondequeDavid souhaite protéger.Et cettepersonne,c’estSacha.

– Vous ne dites rien, mademoiselle. Peut-être d’ailleurs n’avez-vous rien à me dire. Pour lemoment…

Stinsonsoupireetserelève.

–Mais peut-être que bientôt, vous aurez besoin d’un ami à qui parler.De quelqu’un pour vousprotéger,vous,maiségalementDavid.Jepeuxêtrecettepersonne.Tousmeshommespeuventveilleràcequ’ilnevousarriverien.Ilsuffitdemeledemander.«Protégeretservir»,voilànotredevise,danslesforcesdel’ordre.

Ilessayedetefairepeur.IlsaitqueDavidluicachequelquechoseetilespèretefairecraquerenteterrorisant.

Ilmetendlamain.Jem’enempareetlaserreavecassurancepourluimontrerquesesinsinuationsnem’atteignentpas.

– J’espère avoir bientôt de vos nouvelles, mademoiselle. Vous avez ma carte de toute façon.N’hésitezpasàvousenservir,encasd’urgenceoujustepourbavarder.

Jesuistétaniséemaisfaismonmaximumpourn’enrienlaisserparaître.Sansmedémonter,jelegratified’undemesplusbeauxsourires.

– Votre sollicitude me touche, inspecteur. Je suis vraiment impressionnée par le travailremarquable que fait leNYPDpour protéger les citoyens,mêmes ceuxqui sont étrangers dans cepays.

Nousnousregardonsdanslesyeux.C’estunduel.Jerefusedelâchersamainlapremière.Jeveuxluimontrer qu’il neme fera pas craquer aussi facilement que ça. Stinson jette un coup d’œil à sadroite,puisàsagauche,avantdeprendrecongé.

–Passezunebonnefindejournée,mademoiselle,ettransmettezmesamitiésàM.Fulton.

Aprèsunaprès-midiplacésouslesignedel’inquiétudeetdelafébrilité, jeretrouveDavidchezBouley,àTribeca.Lorsquelemaîtred’hôtelmeguideàtraverslasalle,jesensleregarddesautresclientssurmoi.Davidlui-mêmenemelâchepasdesyeux.JepensequemarobeValentinofaitsonpetiteffet.C’estheureuxqueletissumoirédétournel’attentiondemonvisage,quejesensdéfaitparl’angoisse.D’ailleurs,jesuistellementstresséequ’àpeineassise,jerenverseduchampagnesurmapetitecapenoire.Lemaîtred’hôtels’enempareaussitôtpourlafaireporteraupressing.«Auxfraisdelamaison»,bienentendu.Jemeconfondsenexcusesetenprotestationsvaines:aprèstout,c’estmafaute.Davidmeregarde,intrigué.

–Toutvabien?

Deslarmesdefatiguemepiquentlesyeux.Jesuisàdeuxdoigtsdem’effondrer.

–Louisa,qu’est-cequisepasse?

Davidal’airtrèsinquiet.

–Parle-moi!Jecommenceàm'inquiéter.

Ilattrapemonpoignetetleserre.Cecontactunpeubrutalmeramèneàlaréalité:soncorps,sa

peau,saprésence.

Ilestlà.Riennepeutallermaltantqu’ilestlà.

–Oh,David…

JeluiracontelavisitedeStinson.

– C’était atroce, je t’assure. Je ne savais pas ce que je devais dire et ce que je devais taire. Iln’arrêtaitpasdefairedessous-entendusàproposdesdangersquejecouraisàluimentir.J’avaissipeur!

Davidmedemande:

–Maistun’asriendit,n’est-cepas?–Non,j’aitenubon.Pourtoi…

Davidm’embrassel’intérieurdupoignet.

–Mapauvrechérie…Jesuisdésoléedet’avoirfaitvivretantdestress.Maisc’estpourlabonnecause:Stinsonnepeutrienprouveret,grâceànous,Sachaestmaintenanthorsdedanger.

–Maisqu’enest-ildetoi?

LesyeuxdeDavids’écarquillent.

–Commentça?–Ehbien…SansdouteKanaïevneferaaucunmalàSachas’iln’apprendpassaprésenceàNew

Yorkets’ilcroitqu’ellerespecteencoreleurpacte.Maiscommentva-t-ildevinerquetuasrenoncéàtesrecherches?Aprèstout,s’ilaessayédet’éliminercartuterapprochaistropdelapistemafieuse,sansdouteva-t-ilvouloirterminersontravail.

LessourcilsdeDavidsefroncent.Ilbaisselavoixpourqu’onnenousentendepas.

–Jet’assureLouisaquej’ai…certainesgaranties.Maisjenepeuxrientedirepourl’instant.

Àcesmots,jemedécompose.Serait-celeretourdesnon-ditsetdessecrets?

–Tumecachesencoredeschoses?Aprèstoutcequenousavonstraversé?

Davidcaressemajoue,monbras,pourquejemeradoucisse.

–Louisa,jenetecacherien:jem’assuredetasécurité.Siceladoitpasserparlefaitdetetairecertainesinformations,dumoinspendantuntemps,alorsoui,jen’hésiteraipas.

Jem’écrie,désespérée:

–Alorscelanecesseradoncjamais!–Louisa,machérie, regarde-moi.Absolument toutes lesdécisionsque j’aiprises,cesdernières

semaines,étaientpourtoietlebiendenotrerelation.Tulesais?

J’opine.

–Jetedemandedemefaireconfianceunefoisencorelorsquejetedisquejesuiscertainquetuesensécurité.Riennepeutt’arriver,toutestsouscontrôle.Tumecrois?

Jesuissoudainépuisée,etlavoixdeDavidestsichaude,sidouce…Oui,j’aienviedelecroire.Oui:jelecrois.Biensûrquejelecrois.

–Louisa, toutcequenousavonsvécu jusque-là, toutescesépreuvesquidevaientaboutirà fairetairemesdémons,jenelesaitraverséesquepouruneseuleraison:pouvoirêtreavectoietterendreheureuse.Riend’autrenecompteàmesyeux.Lorsquejetevoisainsi,exsangue…

Ilsecouelatête,visiblementrongéparlaculpabilité.

– Que dirais-tu de partir quelque temps ? Juste toi et moi, loin de toute cette folie ? Je meconsacreraialorsàtoietuniquementàtoi.

Oh,ceseraitsibon…Maisj’aihélasmescoursàNYU!Jeleluidis.

–Peut-êtrequetupourraisraterunesemaineàlafac?Unpeudereposnenuirapasàtontravail.–On…Onpourraitfaireça?

Davidéclatederire.

–Onpeutfairecequetuveux,monange.Absolumenttoutcequetuveux.

D’unepetitevoix,j’admets:

–Çameplairait.QuelquesjoursloindeNewYork,seuleavectoi.–Aussitôtdit,aussitôtfait.Etjesaisdéjàoùjevaist’emmener.

Mesyeuxbrillentsoudaind’impatience.

–Oùça?–Ah,c’estunesurprise…Jepeuxjustetepromettrequelesoleilseraaurendez-vous.

Aumot«surprise»,unsouvenirjaillitsoudain.

– Au fait, tu voulais me dire quelque chose hier, dans la limousine, mais nous avons étéinterrompus.Dequois’agissait-il?

Ilprendunairénigmatique.

– Oh, je pense que finalement, cette chose peut attendre nos vacances. Je préfère que nousdiscutionsdetoutcelaensirotantunDaiquiriaubordd’unepiscineàdébordement.

Mevoilàintriguéeetimpatiente!

–C’estquelquechose…debien?

Ilrit.

–Jel’espère!

D’unairénigmatique,ilajoute:

–C’estquelquechosequiapourbutdetefaireplaisirentoutcas.Etdemefaireplaisir.Unesortederequête.

Deplusenplusmystérieux,ilajoute:

–J’espèreentoutcasquecettedemandenet’effrayerapastrop.

Unedemande?Quelgenrededemande?Monsouffles’accélère.Dansmatête,c’est l’euphorietotale.Jememetssoudainàrêver…

Àsuivre,nemanquezpasleprochainépisode.

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