Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

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Refuser l’Europe néo- libérale, ouvrir de nouvelles perspectives Catherine Mathieu et Henri Sterdyniak Décembre 2012

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Décembre 2012. Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives . Catherine Mathieu et Henri Sterdyniak. Pourquoi la crise ?. - PowerPoint PPT Presentation

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Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

Catherine Mathieu et Henri Sterdyniak

Décembre 2012

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Pourquoi la crise ? La crise des années 2007-2009 a été une crise bancaire et financière, provoquée

par des innovations hasardeuses, dans un contexte de libéralisation et de globalisation financière non contrôlée. Les marchés financiers se sont révélés avides, aveugles et instables. La globalisation financière autorise le gonflement de déséquilibres qui finissent par éclater.

La crise s’explique ainsi par l’explosion de la masse des capitaux cherchant des placements liquides et rentables. Ces capitaux proviennent des fonds de pension des pays libéraux, des richesses accumulées par les classes riches des pays développés et des pays émergents, des excédents des pays néo-mercantilistes (Chine, Japon, Allemagne, Pays scandinaves) et des pays producteurs de matières premières

La crise provient ainsi des stratégies macroéconomiques insoutenables mises en œuvre d’un côté par les pays néo-mercantilistes, qui brident leurs salaires et fondent leur croissance sur l’accumulation d’excédents extérieurs de l’autre par les pays anglo-saxons, dont les politiques monétaires ont laissé gonfler l’endettement privé et les bulles financières et immobilières, ce qui permettait de soutenir la croissance sans distribuer de salaires ou de revenus sociaux.

La mondialisation rend plus rentable les stratégies de recherche de compétitivité comme celles de concurrence fiscale.

C’est une crise de la mondialisation libérale et de la globalisation financière.

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Pourquoi la crise ?

La crise ne provient pas de la hausse des dettes et des déficits publics. En 2007, le solde public de l’ensemble des pays de l’OCDE ne présentait qu’un déficit de 1,3 % du PIB ; celui de l’ensemble des pays de la zone euro de 0,6 % du PIB, nettement inférieur au niveau requis pour stabiliser la dette publique en % du PIB. La crise a cependant provoqué une dégradation sans précédent des finances publiques.

Pour les marchés financiers et les institutions internationales, la question essentielle est devenue celle des dépenses, des déficits et des dettes publics.

A partir de 2009, les marchés financiers ont prétendu avoir des doutes sur la soutenabilité des finances publique et ont réclamé de fortes réductions des déficits budgétaires même si ceux-ci demeuraient nécessaires pour soutenir l’activité.

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La crise et la zone Euro

La situation est particulièrement préoccupante pour la zone euro dont l’organisation n’est pas satisfaisante.

Le Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC) n’a pas de fondement économique. Les pays membres ne peuvent, ni ne veulent obéir à des règles stupides.

Depuis sa création, les divergences s’étaient creusées entre les pays périphériques (Irlande, Grèce, Espagne) dont la forte croissance s’accompagnait d’un gonflement des déséquilibres (bulles immobilières, déficits extérieurs) et les pays du Nord (Allemagne, Pays-Bas, Autriche) dont la stratégie de recherche de compétitivité par la stagnation des salaires et de la demande interne pesait sur leur croissance et celle de l’ensemble de la zone.

Durant cette période, les instances communautaires n’ont pas été capables d’impulser une stratégie macroéconomique coordonnée : la Commission s’est polarisée sur le respect du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) ; elle a cherché à imposer des « réformes structurelles », d’inspiration libérale (baisse des dépenses publiques et sociales, flexibilisation des marchés), qui n’ont pas donné le coup de fouet attendu à la croissance, sans voir les risques induits par le développement de la finance.

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La crise et la zone Euro. L’indépendance de la BCE, sa non-obligation de financer les dettes

publiques des Etats-membres, l’absence de solidarité financière entre les pays de la zone deviennent problématiques en période de crise.

Durant la crise, le PSC a volé en éclat ; la quasi-totalité des pays membres ont franchi la limite de 3 % de déficit public et de 60 % de dette publique.

Fin 2008, la Commission s’était résignée à préconiser une politique de relance budgétaire discrétionnaire de l’ordre de 1,5 % du PIB, mais, depuis le début 2010, elle multiplie les pressions pour que les pays se donnent des objectifs contraignants de retour à l’équilibre des finances publiques, sans tenir compte de la situation macroéconomique.

Elle veut profiter de la crise pour renforcer son influence sur les politiques budgétaires nationales, pour imposer des baisses des dépenses publiques et sociales.

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La crise et la zone Euro.

À partir de 2010, les marchés financiers ont commencé à s’inquiéter de la situation des finances publiques de la Grèce, du Portugal, de l’Irlande, puis de l’Espagne et de l’Italie.

Ces inquiétudes, accentuées par la spéculation, ont été auto-réalisatrices. Un pays peut avoir des finances publiques soutenables tant qu’il peut s’endetter à 4 % avec une croissance nominale de 4 % (2 % en prix, 2 % en volume) ; elles ne le sont plus s’il doit s’endetter à 6 % avec une croissance nominale réduite à 2 %.

Les instances européennes et les États membres ont été incapables d’affirmer la solidarité financière suffisante ; ils ont laissé les marchés financiers spéculer contre des dettes publiques qu’ils affirment garantir. Compte tenu des déséquilibres accumulés, les pays du Nord ont refusé de faire confiance aux pays périphériques, malgré les efforts que ceux-ci ont engagés.

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La crise et la zone Euro.

En 2012, le bilan apparaît catastrophique. La zone euro devrait connaître une baisse de son PIB en 2012 de l’ordre

de 0,5 %. À la mi-2012, le taux de chômage de la zone dépasse 11 %. La crise s’est traduite par une perte de l’ordre de 9 % du PIB, mais la Commission impose des politiques d’austérité, qui enfoncent l’Europe dans une récession sans fin.

Trois des pays membres ont dû faire appel à l’aide européenne et sont soumis au contrôle de la Troïka (Commission, BCE et FMI). L’Espagne et l’Italie souffrent de taux d’intérêt excessifs.

La Commission et les dirigeants des États membres proposent aujourd’hui de nouveau dispositif : le Pacte budgétaire, le Mécanisme européen de stabilité, l’union bancaire, le Pacte de croissance, qui s’ajoutent à de nombreuses directives. Ceci est-il de nature à sortir la zone euro de l’ornière ?

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Les péchés originels

La monnaie unique souffre de six péchés originels, auxquels il est difficile de remédier :

Selon la théorie économique, il ne peut y avoir de monnaie unique entre des pays qui ont des situations économiques différentes et qui veulent garder des politiques économiques autonomes. La monnaie unique suppose de mettre en place des mécanismes de coordination des politiques économiques ou des mécanismes de solidarité. Sinon comment éviter l’apparition et la persistance de situation de déséquilibres où certains pays sont fortement déficitaires, d’autres fortement excédentaires ? Comment gérer ces situations ?

Ces mécanismes ne peuvent consister en des règles numériques rigides inscrites dans un traité (comme le déficit budgétaire ne doit pas dépasser 3 % ; la dette publique ne doit pas dépasser 60 % ; le solde structurel doit être équilibré à moyen terme). Ils doivent être à la fois souples (les objectifs doivent être négociés entre pays compte tenu de la conjoncture) et contraignants (chacun doit se plier aux décisions prises en commun). Mais comment aboutir à un accord sur la stratégie de politique économique entre des gouvernements dont les intérêts et les analyses diffèrent ?

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Les péchés originels

Il ne peut y avoir de solidarité entre des pays dont les systèmes économiques et sociaux diffèrent. Par exemple, les pays du Nord peuvent refuser d’aider les pays du Sud, leur reprochant de n’avoir pas fait les réformes nécessaires, d’avoir laissé gonfler leurs déséquilibres, d’être incapables de tenir leurs engagements.

La BCE n’a pas le droit de financer directement les États (article 123 du TFUE) ; la solidarité financière entre les États membres est interdite (article 125 du TFUE). Ainsi, chaque État membre doit se financer sur les marchés financiers sans recours garanti à une banque centrale « prêteuse en dernier ressort ». Ceci ouvre la possibilité qu’il ne puisse tenir ses engagements et fasse défaut. Sa dette n’est plus sans risque. Les marchés financiers n’en avaient pas pris conscience jusqu’à la mi- 2009. Aujourd’hui, échaudés par le défaut de la Grèce, ils imposent des taux insoutenables aux pays en difficulté, ce qui augmente encore leurs problèmes.

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Les péchés originels

Les pays de la zone euro sont maintenant soumis à l’arbitrage des marchés financiers et, contrairement aux pays anglo-saxons et au Japon, ne contrôlent plus leur taux d’intérêt. Or les marchés financiers n’ont pas de compétence macroéconomique, sont auto-réalisateurs et savent qu’ils le sont. Pourtant, les pays du Nord refusent que les dettes publiques des pays membres soient collectivement garanties. Ils estiment que la discipline imposée par les marchés financiers est nécessaire. Or, la disparité des taux d’intérêt est d’un coût élevé et arbitraire. À terme, par exemple, un pays comme l’Italie devrait payer aux marchés financiers un tribut de l’ordre de 4,5 % de son PIB pour les garantir contre un présumé risque de défaut.

La crise de 2007-2012 est une crise profonde du capitalisme financier qui aurait demandé une riposte forte de la part des gouvernements pour réduire l’importance de la finance et la dépendance à l’endettement public ou privé, pour élaborer une stratégie macroéconomique de retour au plein emploi. Or les instances européennes se sont refusées à toute remise en cause de leur stratégie..

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Les défis…

En 2012, les pays développés sont confrontés à plusieurs défis :

1) Les pays industrialisés portent encore les séquelles de la crise : la perte de production par rapport à la tendance d’avant la crise est de l’ordre de 9 % ; le taux de chômage atteint 11,6 % dans la zone euro ; 7,9 % au Royaume-Uni, 7,8 % aux Etats-Unis. Ils ne réussissent pas à trouver une nouvelle dynamique de croissance.

2) Les déficits et les dettes publics ont fortement augmenté pendant la crise. Les réduire pèserait fortement sur la croissance.

3) Il faut remettre en cause la globalisation financière et les stratégies de croissance d’avant la crise en particulier ceux des gagnants de la mondialisation (les pays anglo-saxons et les pays néo-mercantilistes).

4) La zone euro est fragilisée par la croissance des disparités d’avant la crise, puis par la crise de la dette publique des pays du Sud. L’éclatement ou la faillite deviennent possibles. Il faut repenser l’organisation économique de la zone. Il faut choisir plus de contrainte/l’éclatement/la solidarité.

5) La crise écologique pose la question du changement du mode de production. Ceci crée une forte incertitude sur l’avenir, mais peut être une chance pour l’Europe.

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2012, les séquelles de la crise

Perte de production

Taux de chômage Solde public Dette au sens de Maastricht

2012 Sep 2012 2011 2007 2011Etats-Unis -9,2 7,8 -10,1 62,5 101Japon -9,8 4,2 -7,8 188 206Royaume-Uni -14,8 7,9 -7,8 44,5 83Zone euro -10,0 11,6 -4,1 66,5 88Allemagne -4,0 5,4 -0,8 65 81France -7,4 10,8 -5,2 64 86Italie -12,8 10,8 -3,9 103,5 120Espagne -16,0 25,8 -9,4 36 69Pays-Bas -10,6 5,4 -4,5 45 65Belgique -7,2 7,4 -3,7 84 98Autriche -7,8 4,4 -3,4 59 72Grèce -31,8 25,1 -9,4 107 171Finlande -14,5 7,9 -0,6 35 49Portugal -17,9 15.7 -7,5 68 108Irlande -20,8 15,1 -13,4 25 106

En % du PIB, sauf taux de chômage, en %

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La construction européenne Deux visions de l’Europe coexistent :

- L’Europe doit défendre un modèle spécifique de société : le Modèle social européen, un compromis entre le capitalisme et le socialisme, un Modèle Keynes/Social-démocrate/Corlberto-Ecologiste

- L’Europe doit faire évoluer les pays européens vers le modèle idéal : le Modèle libéral, le seul adapté à la mondialisation. C’est le TINA : There is not alternative.

L’Europe est actuellement dominée par l’idéologie Fédérale, Libérale, Européenne, Technocratique.

Il faut priver les Etats Démocratiques de pouvoirs et concentrer ceux-ci dans des instances Européennes indépendantes (BCE, Pacte Budgétaire) qui feront évoluer l’Europe vers un modèle libéral.

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Europe : quelles réformes structurelles ?

Les programmes de réformes structurelles consistent principalement à libéraliser les marchés des biens, à déréguler les marchés financiers, à affaiblir le droit du travail, à réduire les dépenses sociales. La Commission fait pression sur les pays membres pour qu’ils introduisent ces réformes, ce qui permet aux gouvernements nationaux d’invoquer cette pression pour imposer des réformes impopulaires.

Le respect des principes de la concurrence ou des quatre libertés fondamentales (droit de circulation des marchandises, des services, des capitaux, des personnes, liberté d’établissement des entreprises et des personnes) est utilisé pour contraindre les Etats à libéraliser les marches des biens et du travail, à réduire leur fiscalité. La Commission est soutenue par les lobbies industriels ou financiers et par la CJUE.

Ainsi, l’Europe souffre d’une contradiction entre le fonctionnement démocratique des Etats-Nations et la volonté des classes dirigeantes d’utiliser la construction européenne pour obliger les peuples à accepter ces réformes libérales.

Selon la Commission, les impôts nuisent à l’activité ; les dépenses publiques sont souvent peu efficaces ; il faut donc réduire les dépenses publiques et transférer ces activités au secteur privé pour augmenter l’efficacité économique et réduire la fiscalité. De même, il faut « moderniser la protection sociale ».

La crise a remis en cause la pertinence de ces programmes de réformes. L’Europe doit-ellle garder l’objectif de la libéralisation des marchés financiers ? de substitution des fonds de pension aux systèmes publics de retraite ? de baisse des impôts ?

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La construction européenne. Ceci s’ajoute à un problème de fond. L’Europe n’est pas un pays ; il n’y a pas de

solidarité européenne comme il y a une solidarité nationale : les allemands ne veulent pas payer pour les grecs. Les spécificités nationales demeurent et les peuples y sont attachés. En même temps, elles ne sont pas toutes respectables (exemple : le bas taux d’activité des femmes dans les pays du Sud).

Il n’y a pas d’accord pour aller vers une Europe sociale, une Europe fiscale,… L’Europe est en pointe dans la lutte pour la gouvernance économique et contre le

réchauffement climatique. Par contre, durant la crise, elle n’a pas réussi à dégager une position commune et résolue sur les réformes du système financier.

L’Europe oscille entre un modèle fédéral, que tend à promouvoir la Commission et le Parlement (qui est plus porteur mais peu démocratique) et un fonctionnement intergouvernemental (qui est peu porteur et lui-aussi peu démocratique).

Il faut plus d’Europe. En même temps, donner plus de pouvoir à la Commission lui permet d’imposer des réformes libérales et ne garantit pas qu’une stratégie de croissance sera mise en œuvre.

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La zone euro : une organisation défaillante La crise de 2007-2012 (?) est le premier choc que doit traverser la zone euro. C’est un

test de la solidité de son organisation. Les résultats en sont clairement négatifs. La zone euro est incapable de mettre en place une stratégie macroéconomique

cohérente pour sortir de la dépression, pour récupérer les 9 points d’activité que la crise a coûtés à la zone.

Pire, depuis le début de l’année 2009, les marchés financiers spéculent sur la faillite et sur la sortie de la zone de plusieurs des Etats membres. Trois Etats membres ont été mis sous tutelle ; deux autres subissent des taux d’intérêt excessifs.

Incapables de mettre en œuvre la solidarité nécessaire, menacés par les agences de notation, les Etats membres en sont réduits à s’engager dans des politiques restrictives, en période d’austérité pour rassurer les marchés financiers.

La zone euro a oublié le triangle d’impossibilité : « Il ne peut y avoir de monnaie commune entre des pays qui ont des situations économiques différentes et qui veulent garder des politiques budgétaires autonomes ».

Instaurer une monnaie unique suppose de mettre en place des mécanismes de coordination des politiques économiques ou de solidarité. Sinon, comment prévenir l’apparition et la persistance de déséquilibres où certains pays sont fortement déficitaires, d’autres fortement excédentaires ?

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La zone euro : une organisation défaillante La zone euro aurait dû être moins touchée que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni par la

crise financière. Les systèmes financiers y sont plus archaïques. Les ménages sont moins impliqués dans les marchés financiers. La fixité des taux de change entre monnaies européennes a éliminé un facteur majeur d'instabilité. Pourtant, il n'en a rien été : l'Europe est plus durement et plus durablement affectée par la crise que le reste du monde.

En 2011, le déficit public de la zone euro (4,1 % du PIB) est nettement inférieur à celui des Etats-Unis (10,1 %), du Royaume-Uni (7,8 %) ou du Japon (7,8%).

La hiérarchie est la même pour les dettes, celle de la zone euro (88 % du PIB) est équivalente à celle du Royaume-Uni (83 % du PIB), et nettement inférieur à celui des Etats-Unis (101 %), ou du Japon (206 %). Pourtant, l'Europe a été plus affectée par la crise que le reste du monde.

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La zone euro : une organisation défaillante

Pourtant, les marchés continuent de spéculer contre certains pays de la zone, leur imposant des taux d’intérêt insoutenables, malgré la garantie de la BCE et du Fonds européen de stabilité financière (FESF).

La zone euro souffre de dysfonctionnements, qui sont apparues au grand jour pendant la crise, mais qui étaient déjà présentes avant celle-ci.

L’organisation de la politique macroéconomique (indépendance de la BCE ; PSC) est marquée par la méfiance envers les gouvernements nationaux démocratiquement élus.

Les signataires du traité de Maastricht ont voulu insérer les politiques budgétaires nationales dans des contraintes rigoureuses.

En même temps, persuadés que les marchés avaient toujours raison, ils ont refusé de contrôler les institutions financières, les crédits privés et les déséquilibres extérieurs.

La coordination des politiques économiques n’a pas été organisée. Rien ne garantit l’existence même de la Monnaie unique; Que se passe-t-il si certains

pays accumulent des déficits, d’autres des excédents et que les premiers ne peuvent plus se financer ?

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La zone euro : une organisation défaillante Le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) est mal conçu :

1. Ses règles numériques (l’interdiction de dépasser 3 % du PIB pour les déficits publics, 60 % du PIB pour les dettes publiques, équilibre du solde structurel à moyen terme, effort de 0,5 point de PIB par an pour les pays en déficit structurel, interdiction des mesures discrétionnaires) n’ont pas de fondement économique. Il est justifié de financer les investissements publics par le déficit public, ce qui autorise un déficit à moyen terme de l’ordre de 2,5% du PIB.

2. La Commission peut lancer des Procédures de déficit excessif contre les pays qui dépassent ces limites, mais ceux-ci sont généralement des pays en situation de dépression économique.

3. Le PSC ne permet pas à la Commission d’exercer une influence sur les politiques des Etats membres dans les périodes économiques favorables, lorsque des efforts budgétaires pourraient être faits.

4. Le PSC ne permet pas de mettre en œuvre des mesures à l’encontre des pays qui mènent des politiques trop restrictives.

5. Le PSC ne tient pas compte des soldes courants, de la compétitivité, des dettes privées, des bulles financières et réelles. Ainsi, la Commission est restée impuissante devant le gonflement des déséquilibres en Irlande ou en Espagne comme devant la stratégie allemande de recherche effrénée de compétitivité.

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La zone euro : une organisation défaillante Selon le Pacte, les Etats devaient perdre toute possibilité de politique budgétaire

autonome. Ils devaient d’abord faire passer leur solde structurel à l’équilibre, puis, celui-ci atteint, laisser jouer les seuls stabilisateurs automatiques. La BCE devait assurer la stabilisation macroéconomique par la politique monétaire. Mais il est impossible de stabiliser les conjonctures de 17 pays avec un seul taux d’intérêt, comme de stabiliser la conjoncture avec le seul taux d’intérêt quand la dépression est trop profonde.

Le Pacte a généré des tensions récurrentes dans la zone de 1999 à 2007. Durant cette période l’inflation a été faible dans la zone euro. La part des salaires

dans la valeur ajoutée a baissé de 2,6 points. Le solde courant de la zone euro était excédentaire. Au niveau de la zone, les taux d’intérêt réels ont été égaux au taux de croissance du PIB nominal, donc relativement bas. Aucun indicateur ne permet de penser que les politiques budgétaires aient été trop expansionnistes. Les déficits publics étaient nécessaires pour soutenir l’activité.

Le processus de coordination des politiques économiques (prévu par les articles 121 et 136 du TFUE) est resté purement formel. Les instances européennes n’ont pas été capables d’impulser une stratégie macroéconomique cohérente dans la zone. Polarisées sur des objectifs indifférenciés de finances publiques, elles se sont refusées de prendre en compte les différences de situation entre pays, de mettre en place des objectifs en termes de croissance, d’emploi, de solde extérieur.

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Les procédures pour déficit excessif

  2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010

Portugal 24/9 PDE 11/5 22/6 PDE PDE 3/6 07/10 PDEFrance   2/4 PDE PDE PDE 30/1   18/2 PDEAllemagne 19/11 PDE PDE PDE PDE 16/5   07/10 PDEPays-Bas     28/4 7/6       07/10 PDEGrèce     19/5 PDE PDE 16/5   18/2 PDEItalie       16/6 PDE PDE 3/6 07/10 PDEEspagne               18/2 PDEIrlande               18/2 PDEBelgique               07/10 PDEAutriche               07/10 PDEFinlande                12/5

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Les finances publiques dans la zone euro En % du PIB, sauf * en taux de croissance

  PIB*, en % Solde publicCharges d’intérêt

Composante conjoncturelle

Solde primaire structurel

1998 2,8 -2,3 4,2 -0,1 2,0

1999 2,9 -1,4 3,7 0,0 2,3

2000 4,0 -1,1 3,5 0,6 1,8

2001 1,9 -1,9 3,3 0,4 1,0

2002 0,9 -2,6 3,1 0,0 0,5

2003 0,8 -3,1 3,0 -0,7 0,6

2004 1,9 -3,0 2,8 -0,8 0,6

2005 1,8 -2,6 2,7 -1,0 0,6

2006 3,1 -1,3 2,6 -0,5 1,8

2007 2,8 -0,6 2,6 -0,2 2,2

2008 0,3 -2,1 2,6 -1,2 1,8

2009 -4,2 -6,4 2,5 -4,3 0,4

2010 1,8 -6,3 2,4 -4,4 0,5

2011 1,6 -4,0 2,6 -4,6 3,2

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La zone euro : une organisation défaillante

L’UEM a vu, depuis 1999, la persistance d’une croissance relativement médiocre et l’accroissement des divergences entre les États membres en termes de croissance, d’inflation, de chômage et de déséquilibres extérieurs.

Le cadre de politique économique de la zone euro, qui impose des politiques macroéconomiques semblables pour des pays dans des situations différentes, a élargi les disparités de croissance entre les États membres.

Avant la crise, l’UEM avait fait des gagnants (Irlande, Espagne, Grèce) et des perdants (Allemagne, Italie, Portugal).

Dans la plupart des pays, en particulier les plus grands, l'introduction de l'euro n'a pas provoqué l’accélération promise de la croissance.

Pour d’autres, l’accélération de la croissance s’est payée de l’accroissement de déséquilibres difficilement soutenables.

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Croissance totale 2007/1998 2011/1998

Irlande 69,2 53,1

Suède 34,5 40,0

Espagne 37,9 35,9

Finlande 37,0 34,4

Etats-Unis 28,7 29,6

Autriche 25,4 29,0

Royaume-Uni 32,4 28,7

Pays-Bas 24,8 26,1

Belgique 22,7 25,5

Grèce 43,3 24,2

France 21,6 21,9

Allemagne 15,8 18,6

Portugal 17,0 13,4

Italie 14,8 9,6

Japon 12,6 9,1

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La zone euro : une organisation défaillante

Avant même la crise, la zone euro connaissait une augmentation des disparités entre deux groupes de pays conduisant des stratégies macroéconomiques insoutenables :

1. Les stratégies mercantilistes des pays du Nord (Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Finlande) consistaient à brider leurs salaires et les dépenses sociales afin d’engranger des gains de compétitivité et d’accumuler de forts excédents courants. De 2000 à 2007, la part des salaires dans la VA a baissé de 4 points en Allemagne, de 5 points en Autriche. La faiblesse de la demande intérieure de ces pays comme leurs gains de compétitivité ont pesé sur la croissance de l’ensemble de leurs partenaires de la zone euro (les pays du Sud, mais aussi la France ou l’Italie).

2. Les pays du Sud (Espagne, Grèce, Irlande) ont connu une croissance vigoureuse, impulsée par des taux d’intérêt bas relativement au taux de croissance, par des bulles immobilières. S’y ajoute en Irlande une politique de dumping fiscal. Ils ont accumulé d’importants déficits extérieurs.

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Traits saillants de la croissance européenne 2000-2007

Croissance 07/00

PIB DI Dex

Allemagne 1,2 0,2 1,0

Autriche 2,2 1,5 0,7

Pays-Bas 1,9 1,5 0,4

Belgique 2,0 1,8 0,2

Portugal 0,9 0,8 0,1

Italie 1,1 1,3 -0,2

France 1,9 2,3 -0,5

Espagne 3,4 4,4 -1,0

Royaume-Uni 2,6 3,0 -0,4

Etats-Unis 2,3 2,6 -0,3

Japon 1,5 1,1 0,4

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Inflation et taux d’intérêt réels

  

Taux de croissance

Inflation (déflateur du PIB)

Taux d’intérêt réels moins taux de croissance du PIB

1999-2007 1999-2007 1992-1998 1999-2007

Zone euro 2,2 2,0 2,5 0,0Belgique 2,3 1,9 1,6 0,25Allemagne 1,6 0,8 1,6 1,5Grèce 4,1 3,2 6,7 -2,2Espagne 3,7 3,9 2,1 -2,9France 2,2 1,8 2,9 0,2Irlande 6,5 3,5 -3,5 -5,2Italie 1,5 2,4 3,9 0,7Pays-Bas 2,5 2,6 0,9 -1,0Autriche 2,5 1,5 1,3 0,5Portugal 1,8 3,1 1,6 -0,1Finlande 3,5 1,4 1,3 -0,7Royaume-Uni 2,8 2,4 3,7 -0,5Etats-Unis 2,9 2,4 -0,1 -0,55

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28

Part des salaires dans la valeur ajoutée, 1998/2007

  Variation en points de pourcentage, 1998-2007

Zone euro -2,3Belgique -1,9Allemagne -3,9Grèce -2,1Espagne -4,3France -0,2Irlande -2,1Italie -0,5Pays-Bas -2,7Autriche -4,4Portugal -1,6Finlande -0,9Danemark -0,8Suède -0,1Royaume-Uni 0,6Etats-Unis -1,9

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29

La zone euro : une organisation défaillante En 2007, plusieurs pays de la zone euro avaient de larges excédents courants :

Pays-Bas (8,1 % du PIB), Allemagne (7,9 %), Finlande (4,9), Belgique (3,5) et Autriche (3,3), tandis que d’autres avaient de forts déficits : Portugal (-8,5 % du PIB), Espagne (-9,6 %) et Grèce (-12,5 %).

Ainsi, les 230 milliards d’euros d’excédent des pays du Nord créent et financent les 180 milliards de déficit des pays méditerranéens. Le financement se fait sans problème via le secteur bancaire.

La relation Pays du Nord/Pays du Sud est la même au niveau de la zone euro que la relation Chine/Etats-Unis. Elle pose la même question : comment convaincre les pays vertueux de dépenser plus et d’augmenter leurs taux de change réels afin que les pays pécheurs puissent réduire leurs déficits extérieurs sans dépression?

Le cadre de politique économique mis en place par le traité de Maastricht a été incapable d’empêcher le creusement de déséquilibres qui sont devenus insoutenables avec la crise.

De 1999 à 2007, les marchés ne se sont pas inquiétés du gonflement des disparités dans la zone. En juin 2007, les taux d’intérêt à 10 ans n’allaient que de 4,5 % en Allemagne à 4,65 % pour la Grèce et l’Italie.  

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30

Evolution des coûts salariaux unitaires

80

85

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-09

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-10

sept

-10

AllemagneGrèceEspagneFrancePays-BasAutrichePortugalItalie

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Solde courant en 2007

  En % du PIB En milliards d’euros

Luxembourg 10,1 3,8Pays-Bas 8,1 48,6Allemagne 7,9 192,1Finlande 4,9 7,3Belgique 3,5 12,8Autriche 3,3 9,1Danemark 0,7 1,6Italie -1,7 -27,7France -2,2 -43,0Slovénie -4,6 -1,6Slovaquie -4,7 -2,8Irlande -5,3 -10,1Portugal -8,5 -16,0Espagne -9,6 -105,1Grèce -12,5 -33,4Total 0,4 39,4

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32

Taux d’intérêt publics à 10 ans et CDS Juin 2007

Taux à 10 ans CDS

Allemagne 4,5 0,04France 4,55 0,07Italie 4,65 0,18Espagne 4,55 0,07Pays-Bas 4,5 0,02Belgique 4,55 0,03Autriche 4,5 0,06Grèce 4,65 0,20Portugal 4,6 0,08Finlande 4,5 n.d.Irlande 4,45 0,13Danemark 4,45 0,13Royaume-Uni 5,3 n.a.Suède 4,3 0,34Etats-Unis 5,0 0,13Japon 1,85 0,23

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33

Dépenses publiques et dettes Ce ne sont pas les dépenses publiques qui sont responsables de la crise. La part des dépenses publiques dans le PIB a diminué de 2,9 points de 1997 à 2007. La plupart des pays ont mis en œuvre des stratégies de baisses d’impôt dans une

situation de concurrence fiscale, l’UE n’ayant pas adopté de politique d’harmonisation fiscale.

Ce désarmement fiscal a été choisi par les classes dirigeantes afin de tirer prétexte du déficit ainsi créé pour déclarer inéluctable la baisse des dépenses publiques.

Ainsi, la plupart des pays ont supprimé l’impôt sur le patrimoine des ménages ; le taux supérieur de l’impôt sur le revenu est passé en moyenne de 50,5 % en 1995 à 42,1 % en 2008 ; le taux moyen de l’IS de 37,5 % à 26 %.

Les pays en difficulté aujourd’hui sont ceux qui avaient les taux de prélèvements les plus bas de la zone : en 2007, le taux de prélèvement obligatoire était de 40,4 % pour l’ensemble de la zone euro, de 32,3 % pour la Grèce, de 31,4 % pour l’Irlande, de 37,1% pour l’Espagne.  

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34

Evolution des finances publiques, 1997/2007(ajustées des variations conjoncturelles, % du PIB)

Revenus Charge d’intérêt Dépenses primaires Solde public

Zone euro -1,5 -1,6 -1,4 +1,5

Allemagne -2,5 -0,5 -3,7 +1,7

France -1,6 -0,6 -0,8 -0,2

Italie -1,0 -3,9 +2,2 +0,7

Espagne +2,2 -3,1 +0,3 +5,1

Pays-Bas 0,0 -2,6 +0,8 +1,7

Belgique -0,5 -3,4 +2,3 +1,7

Greece +1,0 -3.1 +6,5 -2.4

Autriche -4,6 -1,2 -5,0 +1,5

Portugal +3,8 -1,0 +3,5 +1,2

Finlande -2,4 -2,4 -6,4 +6,4

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35

Des dettes soutenables ?

En 2007, la plupart des pays membres avaient un solde public primaire excédentaire, soit un excédent de 2 % du PIB dans la zone euro.

La France et la Grèce étaient les seuls pays de la zone à avoir un solde primaire légèrement inférieur au niveau requis pour stabiliser le ratio dette publique/PIB.

En fait, certains pays, comme l’Espagne, la Grèce, et l’Irlande, bénéficiaient de taux d’intérêt très bas au regard de leur croissance relativement vive. Leurs dettes publiques étaient stabilisées, mais cet équilibre était fragile, puisqu’il dépendait de l’écart entre les taux d’intérêt et la croissance.

En 2007, les marchés financiers ne faisaient pas de distinction parmi les dettes publiques des pays de la zone

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36

Les finances publiques en 2007

  Solde public Solde public primaire Dette nette

Taux d’intérêt réel corrigé de la croissance

du PIB

Ecart à la stabilité**

Allemagne 0,2 2,6 42,9 1,6 1,9France -2,7 -0,2 34,0 0,2 -0,3Italie -1,7 3,0 89,6 0,9 2,2Espagne 1,9 3,0 18,7 -3,2 3,6Pays-Bas 0,2 1,8 28,0 0,3 1,7Belgique -0,2 3,5 73,4 -0,2 3,6Autriche -0,7 1,3 30,7 -0,3 1,4Grèce -6,7 -3,0 80,4 -2,9 -0,7Portugal -2,3 0,6 44,1 0,6 0,3Finlande 5,2 4,6 -71,1 -0,3 4,4Irlande 0,2 0,9 -0,3 -3,4 0,8Zone euro -0,6 2,0 43,3 0,1 2,0Royaume-Uni -2,7 -0,7 28,8 -0,3 -0,6Etats-Unis -2,8 -0,8 47,2 -1,1 -0,3Japon -2,5 -1,9 80,4 0,7 -2,6

Page 37: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

Crise de la Dette37

Taux d’imposition maximal sur les revenus

Pays 1986 2002 2007 2012

France 65 % 57,8 % 45,8 % 46,8%

Allemagne 53 % 51,2 % 47,5 % 47,5 %

Belgique 72 % 56,4 % 53,7% 53,7 %

Espagne 66 % 48 % 43 % 52 %

Italie 62 % 46,1 % 44,9 % 47,3 %

Pays-Bas 72 % 52 % 52 % 52 %

Suède 61,3% 55,5% 56,4% 56,6%

Royaume-Uni 60 % 40 % 40 % 50 %

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Crise de la Dette38

Taux d’imposition sur les sociétés

Pays 1986 2006 2012

France 45 % 34,3% 36,1%

Allemagne 56 % 38,7% 29,8%

Belgique 45 % 34 % 34%

Irlande 50 % 12,5 % 12,5%

Italie 36 % 37,3 % 31,4%

Pays-Bas 42 % 29,6 % 25%

Royaume-Uni 35 % 30 % 24%

Suède 53% 28 % 26,3%

Page 39: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

39

La crise de la zone euro

A partir de la mi-2008, et surtout du début 2010, les marchés se sont rendus compte d’une faille majeure dans l’organisation de la zone euro. Alors que les gouvernements des autres pays développés ne peuvent pas faire faillite car ils peuvent toujours être financés par leur Banque centrale, au besoin par création monétaire, les pays de la zone euro ont renoncé à cette possibilité.

La BCE n’a pas le droit de financer directement les Etats (article 123 du TFUE) ; la solidarité financière entre les Etats membres est interdite (article 125 du TFUE). Ainsi, chaque Etat doit financer sa dette publique sur les marchés financiers. Aussi, son financement n’est-il pas assuré. Les pays membres ont perdu leur souveraineté monétaire.

Depuis 1945, aucun pays développé ayant conservé sa souveraineté monétaire (pouvant recourir à la création monétaire de sa Banque Centrale et s’endettant dans sa monnaie) n’a fait défaut sur sa dette.

Page 40: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

40

Ecart des taux publics à 10 ans vis-à-vis du taux allemandEn points

Sources : Marchés financiers, Datastream.

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12

FranceEspagneItalieIrlandeGrècePortugal

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41

La crise de la zone euro

La spéculation financière actuelle se nourrit des défaillances de la construction européenne.

Hors zone euro, les pays développés, capables de s’endetter dans leur propre monnaie, ne peuvent faire défaut sur leur dette souveraine et les marchés ne peuvent spéculer sur leur faillite. Si un pays souffre d’une demande privée insuffisante, la Banque centrale abaisse son taux directeur et le gouvernement accepte un certain déficit public. Les taux d’intérêt à long terme sont automatiquement faibles, ce qui soutient l’activité et limite la hausse de la dette publique. Si nécessaire, la Banque centrale intervient pour financer le déficit public. En régime de change flexible, ces politiques font baisser le taux de change, ce qui soutient l’activité. Des mécanismes stabilisateurs existent et le risque de défaut est nul. C’est ainsi que fonctionnent, par exemple, les Etats-Unis.

Dans la zone euro, ces mécanismes ont été supprimés puisqu’un pays frappé d’une crise spécifique, ou plus déprimé que ses partenaires, ne peut diminuer son taux d’intérêt ou laisser sa monnaie se déprécier. Ils n’ont pas été remplacés par des mécanismes de solidarité entre pays. Le risque est que demain, un pays de la zone euro ne puisse plus augmenter son déficit, de crainte que les marchés ne provoquent une hausse des taux d’intérêt, sous prétexte de prime de risque. Cette hausse rendrait impuissante la politique budgétaire.

Page 42: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

42

La crise de la zone euro

La spéculation a été facilitée par le jeu des agences de notation, qui ont déclaré risquées les dettes des pays du Sud de la zone alors même que le scénario où un pays de la zone euro ferait défaut n’avait a priori qu’une probabilité très faible.

Ce sont les agences de notation elles-mêmes qui ont renforcé cette probabilité. L’évaluation financière n’est pas neutre : elle affecte l’objet mesuré, elle construit le futur qu’elle imagine. Les notations sont auto-réalisatrices.

Ainsi les agences de notation financières contribuent largement à déterminer les taux d’intérêt sur les marchés obligataires en attribuant des notes empreintes d’une grande subjectivité – voire de la volonté d’alimenter l’instabilité –, source de profits spéculatifs.

Lorsque les agences de notation dégradent la notation d’un Etat, elles obligent un certain nombre d’investisseurs institutionnels à ne plus détenir la dette de cet Etat, ou à se couvrir sur le marché des CDS (credit default swaps) : cela augmente le taux d’intérêt sur les titres de la dette publique de cet Etat, et augmente par là-même le risque de faillite que les agences ont annoncé.

Un pays peut avoir une dette publique soutenable tant que les marchés acceptent de lui prêter à un taux d’intérêt de 3 % ; mais la dette devient insoutenable si les marchés demandent 7 %, car le pays doit dégager un fort excédent primaire, en baissant ses dépenses publiques et en augmentant ses impôts. Les taux d’intérêt demandés aux entreprises augmentent. Tout ceci fait chuter sa croissance, réduit ses rentrées fiscales et peut paradoxalement conduire à une hausse du ratio dette publique / PIB.

Page 43: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

43

La crise de la zone euro Durant la crise, les instances européenne ont été incapables de mettre en place des

réponses vigoureuses. Leurs réactions ont été timorées, hésitantes, contradictoires. Leur (absence de) stratégie n’est pas compatible avec le fonctionnement des marchés financiers ; elles ont nourri la méfiance et la spéculation.

Ils ont proclamé qu’ils voulaient éviter que les pays laxistes, assurés que l’UE viendrait toujours à leur secours, puissent avoir la tentation d’accumuler sans limites les déficits et de retarder les réformes.

L’Allemagne a réclamé que soit mis sur pied un mécanisme de faillite ordonnée d’un Etat membre, prévoyant la mise à contribution des créanciers privés, de sorte que les dettes publiques soient en permanence soumis à l’appréciation des marchés..

Ces réticences ont renforcé la conviction des marchés financiers que les dettes publiques des pays de la zone euro ne sont pas garanties ; qu’il est donc légitime de demander des primes de risque pour les détenir et qu’il peut être rentable de spéculer sur leur faillite.

Certains fonds extra-européens refusent maintenir de détenir des obligations des pays de la zone euro, en raison de la trop grande volatilité de leur valeur et des risques perçus de déclassement par les agences de notations. Les fonds qui ont perdu de l’argent sur les titres grecs sont échaudés ; ils se dépêchent de vendre leurs titres espagnols, portugais,italiens, avant toute menace de crise.

Page 44: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

44

La crise de la zone euro

Le risque est qu’à l’avenir les dettes publiques n’étant plus considérées comme sans risque soient plus coûteuses et que les pays soient en permanence soumis à l’appréciation des marchés financiers.

Les marchés financiers refusent de renoncer à un scénario d’éclatement de la zone euro : les mesures d’austérité entraîneront une faible croissance et des troubles sociaux, de sorte que les pays du Sud finiraient par préférer quitter la zone. Sa crédibilité est renforcée par la faiblesse de la réaction des Etats Membres et des instances européennes, qui sont incapables de dire que leur solidarité est totale et qu’ils mettront en œuvre une stratégie macroéconomique cohérente dans la zone.

La Grèce est coupable d’avoir triché sur ses comptes et de tolérer la fraude fiscale. L’Irlande maintient des taux d’imposition trop bas et, comme l’Espagne, a laissé la bulle immobilière se développer. Les pays du Sud (Grèce, Portugal, Espagne, Italie) souffrent de corruption. Mais il faut quand même les sauver si on veut sauver la zone euro…

Page 45: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

45

La crise de la zone euro

Fin novembre 2012, les taux imposés par les marchés pour les titres à 10 ans sont de 1,35 % pour l’Allemagne, 1,6 % pour la Finlande et les Pays-Bas, 1,75 % pour l’Autriche.

De 2,05 % pour la France, de 2,2 % pour la Belgique.

De 4,55 % pour l’Irlande et pour l’Italie, 5,35 % pour l’Espagne.

7,65  % pour le Portugal, 16,35 % pour la Grèce.

Les taux sont de 0,7 % pour le Japon, de 1,6% pour les Etats-Unis, de 1,8 % pour le Royaume-Uni.

Certes, la zone Euro bénéficie d’une certaine accalmie par rapport à Août, mais celle-ci est fragile.

L’existence de la zone euro reste jugée fragile par les marchés.

Etre dans la zone est pénalisant en terme de taux d’intérêt.

Le spread devient le critère de jugement des gouvernements.

L’Italie devrait payer à terme 3,2 points de PIB aux marchés, l’Espagne 3 points.

Page 46: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

46

Taux à 10 ans

Août 2012

Novembre 2012

Japon 0,8 0,7

Allemagne 1,35 1.35

Finlande 1.5 1,6

Royaume-Uni 1,5 1,8

Etats-Unis 1,7 1,6

Pays-Bas 1,75 1,6

Autriche 2,05 1,75

France 2,05 2,05

Belgique 2,5 2,2

Italie 5,7 4,55

Espagne 6,4 5,35

Irlande 8,2 4,55

Portugal 9,4 7,65

Grèce 24,0 16,3

Page 47: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

47

Taux à 10 ans

Solde extérieur

% du PIB

Solde public% du PIB

Dette publique

% du PIB

Taux de croissance

moyen 2011-12

Note sur 20

Taux à 10 ans2011-

T4Finlande -0.6 -0.9 49 1.9 17.5 2.5

Allemagne 5.7 -1.0 81 2.2 17.5 1.9

Autriche 1.9 -2.6 72 1.9 16.1 3.1

Pays-Bas 9.2 -4.6 65 0.4 15.4 2.4

Belgique -0.8 -3.9 98 1.2 12.5 4.4

France -2.1 -5.2 86 1.2 10.7 3.2

Etats-Unis -3.1 -9.7 103 2.1 9.6 2.0

RU -1.9 -8.4 83 0.6 9.6 2.3

Espagne -3.5 -8.5 69 -0.5 8.6 5.7

Japon 2.6 -9.5 206 0.7 8.2 1.0

Irlande 0.1 -13.0 108 0.7 7.5 8.7

Italie -3.1 -3.8 120 -0.6 7.5 6.6

Portugal -6.4 -4.2 108 -2.4 6.4 12.2

Grèce -9.8 -9.2 165 -6.1 2.9 19.0

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Taux publics à 10 ans En %

Sources : Marchés financiers, Datastream.

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08

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01/0

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12

UK

Allemagne

US

Japon

Italie

Etats-Unis

Espagne4,7

5,7

1,4

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49

Une stratégie déficiente

Face à cette crise, la stratégie actuelle de la Commission et des Etats membres comporte trois éléments :

1. des plans d’austérité budgétaire,

2. la réforme de la gouvernance de la zone euro

3. la mise en place d’un mécanisme de solidarité financière.

Dans ces trois domaines, l’Europe ne tire pas les leçons de la crise, ne prend pas le bon tournant.

Page 50: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

50

Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses…

En 2012, la demande est nettement insuffisante dans la zone. Les pays du Nord de l’Europe, qui ont des marges de manœuvre, auraient dû entreprendre des politiques expansionnistes (budgétaires et salariales) pour compenser les politiques restrictives des pays du Sud. Des programmes européens d’investissements écologiques ou de soutien à la reconversion industrielle auraient dû être lancés.

Tant que l’économie européenne ne se rapproche pas à une vitesse satisfaisante du plein emploi, la politique budgétaire ne devrait pas être globalement restrictive dans la zone euro.

Pourtant, sous la pression de la Troïka, les pays du Sud de l’Europe doivent mettre en œuvre des plans drastiques de réduction des déficits publics. De 2010 à 2013, l’effort représenterait 12% du PIB pour l’Espagne, l’Irlande et le Portugal, 24 % du PIB pour la Grèce.

Les autres pays, pressés par la Commission de rentrer dans les clous du Pacte de stabilité et de croissance, craignant de voir leur dette déclassée par les agences de notation, se résignent à faire des efforts de l’ordre de 1 point de PIB par an, en se fixant un objectif de déficit inférieur à 3 % en 2012 ou 2013, puis d’un objectif de solde équilibré à long terme.

Page 51: Refuser l’Europe néo-libérale, ouvrir de nouvelles perspectives

51

Des perspectives médiocresPerte de production

cumulée en 201211 12 13

Etats-Unis -9,2 1,8 2,1 2,3Japon -9,8 -0,8 2,0 0,8RU -14,8 0,9 -0,3 0,9Zone Euro -10,0 1,4 -0,4 0,1Allemagne -4,0 3,0 0,8 0,8France -7,4 1,7 0,2 0,4Italie -12,8 0,4 -2,3 -0,5Espagne -16,0 0,4 -1,4 -1,4Pays-Bas -10,6 1,0 -0,3 0,3Belgique -7,2 1,8 -0,2 0,7Autriche -7,8 2,7 0,8 0,9Grèce -31,8 -7,1 -6,0 -4,2Finlande -14,5 2,7 0,1 0,8Portugal -17,9 -1,7 -3,0 -1,0Irlande -20,8 1,4 0,4 1,1

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Impulsions budgétaires en 2010-2013

2010 2011 2012 2013 Total

Allemagne 1,3 -1.3 -0.8 -0.4 -1.2France -0,4 -2,4 -2,5 -1,9 -7.2Italie -1,0 -0,9 -3.2 -1,2 -6,3Espagne -2,5 -1,7 -4,2 -4,3 -12,7Pays-Bas -0.4 -1,5 -2,0 -0,6 -4,5Belgique -1.3 -0.1 -2,2 -0,5 -4.1Autriche 0.5 -1,7 -0,5 -1,6 -4,3Portugal 0,5 -6,1 -5,4 -1,7 -11.7Finlande 0.1 -2,1 -0.5 -1,2 -3,7Irlande -3.8 -2.5 -1,9 -2.4 -10.6Grèce -8,9 -5.2 -6,5 -3.9 -24.5Zone euro -0.9 -1.8 -2.0 -1,5 -6,2Royaume-Uni -2,8 -2.0 -1.6 -2,2 -8,6Etats-Unis -0.7 -1.7 -1.8 -1,1 -5,3Japon 0,8 -1,8 -0.6 -0,8 -2,4

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Impact des politiques budgétaires 2010-13

% du PIB PIB Solde public

Dette publique

2010 2011 2012 2013 Total 2013 2013Allemagne 0.4 -1.3 -1.2 -0.9 -3,0 +0.4 +2.4France -1.2 -2,6 -2.4 -2.7 -8.9 +2.6 +1.4Italie -1.0 -1.8 -3.3 -4,0 -10.1 +3,6 +4,2Espagne -3.4 -2,4 -5.0 -4.3 -15.1 +6.5 -3,5PB -0.7 -0,8 -1.5 -1.2 -4.2 +2.6 -2.6Belgique -1.1 -0.5 -1.7 -1.2 -4.5 +2.6 -1.8Autriche 0.3 -0.8 -1.4 -1.2 -3.1 +1,1 +0.9Portugal -1.1 -5,1 -6,1 -3.1 -15.4 +7,8 -0,3Finlande -0,1 -1.7 -1.5 -1.4 -4.7 +2,0 -1.3Irlande -2.8 -2,8 -3.3 -2.4 -11.3 +8.3 -5,6Grèce -8.6 -7.4 -5.5 -4.1 -25.6 +14,3 +3,9Zone Euro -1.1 -2.0 -2.6 -2.4 -8.1 +3.1 -0.1RU -1.5 -3,0 -2.3 -1.9 -8.7 +3.5 -1,5

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Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses…

Au total, les mesures de restrictions budgétaires représenteraient 2 % du PIB de 2011 et 2012, 1,5% en 2013. La croissance en Europe en sera fortement affectée, environ -2% par an. L’effet sur les ratios de dette est très faible.

Pourtant, la zone souffre d’un taux de chômage de plus de 11,5%.

Rien ne justifie une telle politique restrictive en situation de sous-emploi, de bas taux d’intérêt, de chômage de masse.

Les pays obligés de mettre en œuvre en même temps des politiques très fortement restrictives, le paieront par une forte chute de l’activité. Dans ces conditions, les objectifs de déficit public ne pourront être tenus, les pays souffriront d’une baisse des recettes fiscales, le ratio de dette s’envolera, ce qui justifiera… la mise en œuvre d’autres mesures restrictives.

Ainsi la Grèce a fait des efforts représentant 25 points de PIB, mais son solde ne s’est amélioré que de 7 points, les charges d’intérêt ont augmenté de 2 points et le PIB a perdu 26 points.

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Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses…

Ces programmes d’austérité mettent en cause le modèle social européen. Dans tous les pays, ils comportent de fortes réductions des investissements publics, du nombre de fonctionnaires, ils nuiront donc à la qualité de l’enseignement, de la santé, des services publics. Partout, les retraites publiques sont diminuées et l’âge de la retraite est repoussé. Souvent, les prestations familiales sont réduites. L’Espagne diminue les prestations chômage, et l’Allemagne son revenu minimum ; tous les pays font pression sur leurs salaires pour gagner de la compétitivité. Dans de nombreux pays (Royaume-Uni, Portugal, Irlande, Espagne et Grèce), la hausse de la TVA va réduire le pouvoir d’achat des ménages.

Des politiques visant à réduire le système de protection sociale sont socialement et économiquement dangereuses. Elles font augmenter les taux d’épargne des ménages.

Il serait paradoxal que la crise provoquée par les marché financiers aboutisse à obliger les ménages à y avoir recours pour leur retraite et leur assurance maladie. .

Il serait catastrophique pour l’Europe que les instances européennes utilisent la crise et la menace des marchés financiers pour imposer aux peuples des politiques économiques restrictives, des réformes libérales et des baisses importantes des dépenses sociales.

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Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses…

Certes, certains économistes ont mis en évidence dans le passé des épisodes où une politique budgétaire restrictive n’a pas eu d’effet défavorable sur l’activité, mais cette politique était accompagnée d’éléments qui manquent aujourd’hui, comme une forte dépréciation du taux de change, une forte baisse des taux d’intérêt, un essor du crédit privé dû à la dérégulation financière, ou un fort essor de la demande privée dû à un bouleversement économique (entrée dans l’UE).

Si le multiplicateur d’une baisse généralisée des dépenses publiques en Europe est de 2, que les pays de l’UE font un effort de 1 point du PIB, la croissance européenne sera réduite de 2 points, les soldes publics ne seront pas améliorés (puisque la baisse d’activité réduira les recettes fiscales), et les ratios de dette augmenteront du fait du ralentissement économique. Cette politique serait indispensable, nous dit la Commission, pour rassurer les marchés, mais une politique qui aboutirait à une longue période de dépression est-elle rassurante ?

Les pays perdent toute autonomie au profit de la Troïka et des marchés. Le dialogue impossible avec la Grèce ou l’Espagne : on ne vous aidera que si vous

respectez strictement le Programme d’ajustement. Mais ce programme conduit à la catastrophe économique et sociale.

Seul espoir :la baisse de l’euro ou la hausse des salaires en Allemagne. La zone euro est devenue le maillon faible de l’économie mondiale.

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Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses…

La politique d’austérité imposée actuellement par la Commission ne s’explique donc que par un triple biais idéologique.

Malgré toutes les preuves empiriques, la Commission refuse de voir que le multiplicateur est de l’ordre de 1,5 dans la zone euro (voir AGS, 2012).

Elle refuse de renoncer à la thèse selon laquelle il faut une consolidation par les dépenses publiques plutôt que par les dépenses.

Elle refuse de renoncer à la thèse selon laquelle seules les stabilisateurs automatiques doivent jouer.

Pire, elle refuse de renoncer à la thèse selon laquelle il est possible d’imposer des normes a priori sur les dettes et les déficits publics.

Si la croissance des dettes et des déficits publiques dans les pays développés a été la réponse au creusement des déséquilibres mondiaux, on ne peut réduire les dettes et les déficits sans s’attaquer aux causes de ces déséquilibres.

Une économie mondiale plus équilibrée nécessiterait que les pays excédentaires basent leur croissance sur leurs demandes intérieures et que leurs capitaux prennent le risque de l’investissement direct. De plus fortes progressions des revenus salariaux et sociaux, la réduction des inégalités de revenus rendraient moins nécessaires le gonflement des bulles financières, des dettes des ménages et des dettes publiques.

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Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses…

Les déficits et les dettes publics sont des conséquences de la situation macroéconomique. En situation d’incertitudes économiques, de pessimisme des entrepreneurs, après un krach financier, la demande privée est insuffisante pour maintenir un niveau satisfaisant d’activité. La politique optimale consiste à faire baisser le taux d'intérêt jusqu'à ce que la demande soit suffisamment relancée ; elle a l’avantage de ne pas augmenter la dette publique, de favoriser l’accumulation du capital et de réduire le taux de profit exigé par les entreprises pour investir. Toutefois, elle peut entraîner une accumulation excessive de dettes de la part des entreprises et des ménages. Elle peut être inefficace, en période de forte dépression, où les agents privés sont réticents à s’endetter. Elle peut se révéler insuffisante, parce qu'il y a un plancher à la baisse des taux d'intérêt nominaux, donc réels. Le gouvernement doit alors accepter un certain déficit budgétaire.

Un tel déficit n’a aucun effet d’éviction des dépenses privées : il ne provoque pas de hausse du taux d'intérêt, puisque par définition le taux d'intérêt est à son plus bas niveau possible. Il ne pose pas a priori de problème de soutenabilité : si les agents augmentent leurs dépenses, l’État doit être prêt à réduire son déficit du montant nécessaire.

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Une réduction brutale des déficits publics passant par une baisse des dépenses… L’État stabilise l’économie en fournissant la dette publique désirée. La dette publique

n’est pas un poids sur les générations futures puisqu’elle a une contrepartie en termes d’actifs détenus par les ménages. Ce n’est qu’un moyen de rendre l’économie plus liquide. L’épargne des ménages a une contrepartie en déficit et dette publics. On peut certes regretter qu’elle n’ait pas une contrepartie « investissement des entreprises », le fait est que les entreprises refusent de s’endetter.

Ce schéma idyllique suppose que le gouvernement réduise effectivement le déficit public quand l’économie se rapprochera du plein emploi des capacités de production. La règle doit être : il faut réduire le déficit public quand la demande a tendance à devenir excessive, donc quand l’inflation accélère ou quand la banque centrale doit augmenter son taux d’intérêt au-dessus du taux de croissance pour ralentir l’inflation.

Ce schéma peut être bloqué si les ménages deviennent Barro-Ricardiens ou si les marchés réclament des primes de risques inappropriés. Imaginons que les ménages augmentent leur taux d’épargne. L’État augmente donc sa dette, mais les ménages anticipent une future hausse des impôts (à tort, en l’espèce) ; ils augmentent de nouveau leur épargne, ce qui oblige l’État à augmenter de nouveau son déficit. Autre cas, de figure, les ménages augmente leur taux d’épargne, l’État augmente son déficit pour stabiliser l’économie, mais les marchés financiers réclament une prime de risque pour compenser la hausse de la dette. Là aussi, l’économie entre dans une spirale infernale : la hausse des taux requis par les marchés oblige l’État à augmenter sa dette pour maintenir le plein emploi, ce qui inquiète les marchés et fait augmenter la dette. Dans les deux cas, l’économie n’est pas stabilisable.

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Le débat sur la croissance à la mi 2012 …

Il n’y a pas d’accord en Europe sur la stratégie à suivre. Point de vue libéral : Allemagne, pays du Nord, Commission, RU :

consolidation budgétaire, Pacte budgétaire, surveillance des marchés, réformes structurelles, recherche de compétitivité.

Point de vue social-démocrate : France : gouvernance économique, relance par de grands travaux et la politique industrielle, fin des politiques d’austérité, dégradation de la compétitivité au Nord. Euro-obligations et garantie de la BCE.

Comment arbitrer ?

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Le Pacte pour la croissance …

Le souhait du nouveau gouvernement français de renégocier le TSCG a abouti le 29 juin 2012 à un Pacte pour la croissance et pour l’emploi.

Celui-ci n’est pas le symétrique du Pacte budgétaire. Il ne comporte aucun objectif précis en termes d’emploi ou de croissance. Pour l’essentiel, il ne fait que reprendre des projets déjà engagés ; la stratégie Europe 2020, la nécessité de garantir la viabilité des systèmes de retraite, d’améliorer la qualité des dépenses publiques, d’augmenter l’emploi des jeunes, de favoriser la mobilité de la main-d’œuvre, d’ouvrir la concurrence en matière de services, d’énergie, de marchés publics.

Le Pacte reconnaît qu’il n’y a pas d’accord général en Europe sur une taxe sur les transactions financières, mais ouvre la porte à une coopération renforcée, c’est-à-dire à un accord entre certains pays, sans le Royaume-Uni et le Luxembourg, ce qui en limitera fortement la portée.

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Le Pacte pour la croissance …

Les mesures de relance à proprement parler sont assez limitées. Il est question d’un montant de 120 milliards soit 1 % du PIB de la zone, mais celles-ci portant sur un laps de temps indéfini, alors que les programmes d’austérité portent sur 240 milliards par an. Ces 120 milliards se décomposent entre une hausse prévue de 60 milliards de la capacité de prêt de la BEI grâce à une hausse de 10 milliards d’euros de son capital ; une émission envisagée de 5 milliards d’obligations de projets destinés à financer des projets d’infrastructures, enfin l’affectation à « des mesures destinées à dynamiser la croissance » de 55 milliards de fonds structurels qui étaient déjà disponibles.

On peut remarquer cruellement que les prévisions de croissance pour la zone euro en 2013 des conjoncturistes publiées par Consensus Forecasts sont passées de 0,7 % début juin à 0,5 % début juillet; 0,3 % début août, 0% en novembre. Ils n’ont guère été convaincus…

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Les trois déséquilibres

Globalement, la zone euro souffre d’un déficit de croissance : la crise lui a coûté 8,6 points de PIB (par rapport à la tendance d’avant la crise).

Par contre, elle ne souffre pas d’un déséquilibre extérieur : sa balance courante est à peu près équilibrée.

En 2011, elle a certes un déficit public de 4,2 % du PIB ; mais ce déficit provient pour 4,4 points  ; pour 2,6 points des charges d’intérêt. Le solde primaire structurel est positif de 2,8 points.

Globalement, il n’y a pas d’effort à réaliser. Il faut récupérer la croissance perdue, il faut maintenir le taux de long terme en dessous du taux de croissance.

A court terme, la politique économique devrait avant tout viser à réduire l’écart de production négatif. La zone euro ne peut considérer que la perte d’activité due à la crise financière est irréversible ; ce serait se résigner à une hausse permanente du chômage et à une baisse permanente des taux d’activité des jeunes et des seniors.

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Les finances publiques de la zone euro

2007 2008 2009 2010 2011

PIB* 2,8 0,4 -4.4 2.0 1,4Solde public -0,7 -2,1 -6.4 -5,4 -4,1Charges d’intérêt nettes 2,6 2,6 2,5 2,5 2,6Evaluation de la DG ECFIN PIB potentiel* 1,8 1,4 0.9 0,8 0,9Ecart de production 2,5 1,4 -3,7 -2,6 -2,0Solde structurel -1,9 -2,8 -4,6 -4,9 -3,2Notre évaluationPIB potentiel* 2,2 2,2 2,1 2,1 2,0Ecart de production 0,0 -1,8 -8,1 -8,0 -8,6Solde conjoncturel 0,0 -0,9 -4,1 -4,0 -4,3Plans de relance -0,2 -1,3 -0,8Sur-réaction des recettes fiscales -0,6 -0,3Solde primaire structurel 1,9 1,6 2,1 1,5 2,8Impulsion budgétaire cumulée 0,0 0,5 0,8 0,7 -0,9

En % du PIB sauf * taux de croissance

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Les trois déséquilibres

Certains pays souffrent certes d’importants déséquilibres, mais la résorption de ces déséquilibres nécessite une stratégie commune. On ne peut demander aux pays déficitaires de faire tout l’effort sans demander aux pays excédentaires de remettre en cause leurs stratégies. Une stratégie borgne creuserait le déséquilibre global de croissance.

Au niveau des soldes publics, imaginons que la zone puisse effectivement augmenter son activité de 6 %, que chaque pays puisse s’endetter à un taux proche de son taux de croissance, que les pays dont la dette nette dépasse 60 % du PIB se donne comment objectif de revenir à ce niveau en 20 ans. Certains pays ont alors des marges de manœuvre : l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie, la Belgique. Doivent faire des efforts ; l’Espagne (4,0 points), la Grèce (2,7 points), l’Irlande (5,8 points). Globalement, il reste une marge disponible.

De même, les déséquilibres de soldes courants demandent une stratégie à deux lames : les pays excédentaires (Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Finlande) doivent envisager une hausse de leurs demandes intérieures et de leurs salaires. De 1999 à 2007, la croissance de l’Allemagne (1,6 % par an en moyenne) a reposé pour 0,65 point sur sa demande interne, pour 0,95 point sur son solde extérieur. Ce n’est pas soutenable. Ce doit être l’inverse pour les pays en déficit (Espagne, Grèce, Portugal).

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Les déséquilibres dans la zone, en 2011

Solde budgétaire

Solde budgétaireStructurel

(CE)

Solde Primaire structurel

(+6%)

Solde Primaire structurel Objectif

Marge ou effort à réaliser

Allemagne -1,0 -0,9 3,0 0,0 3,0France -5,2 -4,3 0,3 0,1 0,2Italie -3,8 -3,0 3,9 1,7 2,2Espagne -8,5 -7,6 -3,5 0,0 -3,5Pays-Bas -4,6 -3,5 -0,2 0,0 -0,2Belgique -3,9 -3,6 2,3 1,0 1,3Autriche -2,6 -2,5 2,5 0,0 2,5Portugal -4,2 -3,2 2,4 1,0 1,4Finlande -0,9 0,3 2,0 0,0 2,0Irlande -9,1 -12,1 -4,1 1,0 -5,1Grèce -9,2 -5,1 0,6 2,7 -2,1Zone euro -4,1 -3,4 1,6 0,1 1,5

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Les déséquilibres courants

2007 2012

Allemagne 7,5 5,5Pays-Bas 6,7 8,9Finlande 4,1 -1,1Autriche 3,5 2,2Belgique 1,7 0,8France -1,0 -1,9Italie -2,4 -1,2Irlande -5,3 2,1Espagne -10,0 -1,9Portugal -10,1 -1,4Grèce -14,6 -6,1Zone euro 0,2 1,2

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Une nouvelle gouvernance dans la zone euro ?

Les instances européennes veulent utiliser la crise grecque pour faire oublier la crise financière et la période horrible où elles ont dû accepter de mettre le PSC sous le boisseau. Le risque est que le maintien de la zone euro soit payé par une longue période d’austérité budgétaire qui maintiendra la zone en récession et le renforcement de règles absurdes.

Le 30 juin 2010, la Commission a proposé d’introduire un premier « semestre européen », durant lequel les Etats membres présenteraient leurs politiques budgétaire, ainsi que leurs projets de réformes structurelles, à la Commission et au Conseil européen, qui donneraient leur avis avant le vote des parlements nationaux, au second semestre. Certes, un tel processus pourrait être utile s’il s’agissait de définir une stratégie économique concertée, mais le risque de ce « semestre » est d’augmenter les pressions en faveur de politiques d'austérité budgétaire et de réformes libérales.

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Le deuxième premier semestre En 2012, les axes retenus étaient : 1) la poursuite de la consolidation budgétaire de façon différenciée, les pays

en difficulté devant atteindre leurs objectifs de déficit, quelque soit l’évolution économique, les pays excédentaires pouvant laisser jouer les stabilisateurs automatiques. La Commission persiste à penser qu’il faut réduire les dépenses plutôt qu’augmenter les impôts.

2) la restauration de conditions normales du crédit ; 3) promouvoir la croissance et la compétitivité (toujours par des réformes

libérales) 4) combattre le chômage (en supprimant les indexations des salaires sur les

prix, en favorisant la mobilité des travailleurs, en supprimant les préretraites, toutefois, le texte reconnaît la nécessité de créer des emplois verts et blancs),

5) favoriser l’emploi des jeunes (par la formation et l’apprentissage, mais aussi en allégeant le droit du travail trop protecteur pour les salariés en place), protéger les plus vulnérables ;

6) la modernisation de l’administration. L’ensemble n’est pas à la hauteur de la situation conjoncturelle (la

croissance devrait être légèrement négative en 2012) ou des défis structurels. Les mêmes axes sont retenus pour 2013.

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Vers un renforcement du Pacte de Stabilité ?

Le 29 septembre 2010, la Commission a présenté un ensemble de Six directives visant à renforcer la gouvernance économique (en fait le respect du PSC) :

1. Les pays pourront être sanctionnés si les dépenses publiques augmentent plus vite que le taux de croissance prudent du PIB (sauf si ceci est compensé par des hausses de recettes ou si le pays est en excédent budgétaire). Cela interdirait les mesures de soutien par la hausse des dépenses publiques. En période de dépression économique, avons-nous vraiment besoin de prudence ? Que se passerait-il si, par prudence, les ménages renonçaient à consommer et les entreprises à investir ?

2. Les pays dont la dette dépasse 60 % du PIB seraient soumis à une procédure de déficit excessif si le ratio de dette n’a pas diminué d’au moins un vingtième par an de l’écart avec 60 % Mais il est pratiquement impossible d’éviter la croissance du ratio de dette en période de ralentissement économique. Cette nouvelle règle est pro-cyclique : elle renforce la contrainte sur le déficit en période de faible croissance. Pour un pays ayant une dette de 90 % du PIB et une inflation de 2 % par an, le déficit public ne devra pas dépasser 2 % du PIB si sa croissance est de 2 % : il devra être limité à seulement 1 % si sa croissance ne dépasse pas 1 %.

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Vers un renforcement du Pacte de Stabilité ?

3. Les pays dont les dépenses publiques augmentent trop vite ou ceux soumis à une PDE devront faire un dépôt de 0,2% à 0,5% du PIB, qui pourra être confisqué si les mesures requises ne sont pas mises en œuvre. Ils pourront se voir priver de fonds structurels;

4. Le projet maintient la limite de déficit budgétaire de 3 % du PIB, l’objectif d’équilibre à moyen terme et la contrainte pour les pays ayant un déficit structurel de réduire leur déficit structurel d’au moins 0,5 % par an,

5. La Commission veut imposer aux pays d’intégrer dans leurs cadres budgétaires les règles européennes (les limites de 3 et de 60 %, l’objectif d’équilibre à moyen terme) et de mettre en place un contrôle du respect de ces règles par une « institution budgétaire indépendante ».

6 Il faudra désormais la majorité qualifiée au Conseil pour s’opposer aux mesures et aux sanctions que la Commission préconise, cela devant assurer l’automaticité des sanctions.

Le projet de la Commission met en cause l’autonomie des Etats membres ; les oblige au strict respect de règles sans signification économique et nuit à leur capacité à stabiliser leur économie. Il augmentera encore les tensions entre la Commission et les Etats membres.

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La surveillance des déséquilibres macroéconomiques

La Commission se propose de surveiller les déséquilibres macroéconomiques excessifs en suivant un tableau de bord des variables pertinentes (compétitivité, déficit extérieur, dettes publiques et privées).

Une procédure de déséquilibres excessifs (PDM) sera mise en place. Des recommandations seront envoyées aux pays en situation de déséquilibre. Des amendes pourront être décidées.

Mais rien n’indique que la surveillance sera symétrique, ni que l’on sanctionnera les pays qui pèsent sur les autres par des politiques budgétaire et salariale trop restrictives.

Rien n’indique que la Commission préconisera une stratégie coordonnée pour lutter contre les déséquilibres.

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La gouvernance de l’euro

Le projet (les 6 propositions) ont été voté par le Parlement Européen dans le silence des médias et donc un totale indifférence des peuples.

Le Parlement a aggravé le texte : la Commission peut sanctionner automatiquement un pays qui ne respecte pas la trajectoire prévue de déficit.

Il a cependant fait préciser qu’un pays avec trop d’excédent extérieur pourra être sanctionné.

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Les deux directives

Le 23 novembre 2011, la Commission poursuit avec obstination son travail de mise sous tutelle des politiques nationales. Elle propose deux nouvelles directives.

Selon la première, la Commission pourrait critiquer les budgets des pays de la zone et demander publiquement qu’ils soient revus. Le contrôle sera continu pour les pays soumis à une PDE. Les pays devraient mettre en place des Comités Budgétaires Indépendants ; les budgets devraient être basés sur des prévisions macroéconomiques indépendantes.

Selon la deuxième, la Commission pourrait placer un pays sous surveillance renforcée et le Conseil pourrait imposer à un pays de solliciter une assistance financière.

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Le pacte pour l’euro plus Sous l’impulsion allemande et française, le Conseil de la zone euro du 11 mars 2011 a adopté un

« Pacte pour l’Euro plus ». Les Pays membres devront prendre des engagements précis devant leurs pairs et devant la

Commission, qui veilleront au respect de ces engagements. On reste dans la problématique où chaque pays doit s’engager à renforcer sa compétitivité ou à introduire des réformes libérales ; il n’y a pas de coordination pour la croissance.

Les pays doivent améliorer leur compétitivité en surveillant l’évolution des coûts unitaire de main d’œuvre  ; il leur faut revoir les mécanismes d’indexation des salaires (mais dans le respect de l’autonomie des partenaires sociaux) ; reste que rien n’indique que les salaires devront, au moins, suivre la productivité et qu’un rattrapage devrait être effectué en Allemagne ou en Autriche où les salaires ont moins progressé que la productivité. Les salariés de chaque pays devront se combattre pour être plus compétitifs en acceptant des baisses de salaires et de protection sociale.

Ils doivent améliorer la productivité : libéralisation du commerces et des services ; La promotion de l’emploi passe par des réformes du marché du travail, par le renforcement de

l’attraction du travail, pas par des mesures macroéconomiques ou par la politique industrielle. Il faut améliorer la viabilité des finances publiques par des réformes du système de santé, par la

limitation des régimes de pré-retraites et l’ajustement de l’âge de la retraite sur l’espérance de vie, Il faut renforcer la stabilité financière. Il faut introduire dans la Constitution les règles du PSC. Ce pacte permettrait aux instances européennes d’intervenir directement dans deux domaines qui

étaient jusqu’à présent des prérogatives nationales : la protection sociale et les négociations salariales.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Le 9 décembre 2011, le Conseil Européen adopte un Pacte Budgétaire, qui

a été ratifié le 2 mars 2012. Ce Pacte budgétaire marque une nouvelle étape de deux offensives, celle

des libéraux contre la pratique keynésienne de la politique économique, celle des instances européennes contre l’autonomie des politiques budgétaires nationales.

L’objectif du Traité est bien de réaliser le rêve de toujours des libéraux : paralyser totalement les politiques budgétaires, imposer coûte que coûte l’équilibre budgétaire. Il tourne le dos aux enseignements de 75 ans de Théorie macroéconomique.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Ce Traité ne s’attaque pas aux causes de la crise financière : l’aveuglement

et l’avidité des marchés financiers, l’éclatement des bulles financières et immobilières induites par la financiarisation, le gonflement des inégalités de revenus permis par la concurrence effrénée entre pays favorisée par la mondialisation.

Il ne s’attaque pas aux causes de la crise de la zone Euro : l’absence d’une réelle coordination des politiques économiques ayant l’emploi comme objectif, le déséquilibre induite par la recherche d’excédent des pays du Nord, l’interdiction inscrite dans la Constitution Européenne de financement des Etats par la BCE, ce qui permet à la spéculation de se déclencher alors qu’elle est impuissante contre les Etats-Unis, le Japon, le Royaume-Uni pourtant plus endettés que la zone Euro.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Selon l’article 1 du Traité, les règles seraient « destinées à renforcer la

coordination des politiques économiques ». Mais des contraintes numériques sur les dettes et déficits publics, qui ne tiennent pas compte de la situation économique, ne peuvent être considérés comme une coordination des politiques économiques.

Selon l’article 3.1 du traité : « La situation budgétaire des administrations publiques est en équilibre ou en excédent ; cette règle est considérée comme respectée si le déficit structurel des administrations publiques est inférieur à 0,5 % du PIB. Les pays veillent à assurer une convergence rapide vers cet objectif. Le calendrier de cette convergence sera proposé par la Commission. Les pays ne peuvent s’écarter de leur objectif ou de leur trajectoire d’ajustement qu’en cas de circonstances exceptionnelles. Un mécanisme de correction est déclenché automatiquement si des écarts importants par rapport à la trajectoire d’ajustements sont constatés ; il comporte l’obligation de mettre en œuvre des mesures visant à corriger ces écarts sur une période déterminée ».

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Ainsi, le quasi-équilibre des finances publiques est inscrit dans le traité alors qu’il n’a

aucune justification économique. La vraie « règle d’or des finances publiques », énoncée par Leroy-Baulieu en 1891,

justifie, au contraire que les investissements publics soient financés par l’endettement, dans la mesure où ils sont utilisés pendant de nombreuses années ; dans le cas de la France, ceci autorise un déficit public structurel de l’ordre de 2,4 % du PIB.

Par ailleurs, des ménages, des sociétés d’assurances, des institutions financières désirent détenir de la dette publique. Si la dette désirée est de l’ordre de 60 % du PIB et le taux de croissance tendanciel de l’ordre de 4 % (en valeur, soit 2 % en volume et 2 % en prix), il est légitime d’avoir un déficit public de l’ordre, là-aussi, de 2,4 % du PIB.

Ensuite, un solde public doit être considéré comme nécessaire quand il permet un niveau de demande satisfaisant induisant un niveau de production ne provoquant ni chômage de masse, ni accélération de l’inflation. Rien ne garantit que ce solde public souhaitable corresponde à l’équilibre. Dans la mesure où les pays ne contrôlent plus ni le taux d’intérêt, ni le taux de change, ils ont besoin d’avoir des degrés de liberté quant à leur politique budgétaire.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Le traité impose aux pays une convergence rapide vers cet objectif,

convergence qui serait définie par la Commission, sans tenir compte de la situation conjoncturelle. Les pays perdraient donc toute liberté d’action. Si un pays a, par exemple, un déficit structurel de 3 points de PIB, il devra avoir l’année suivante un déficit structurel limité à 2 points, donc faire des efforts d’1 point de PIB, quelque soit l’évolution économique. Un pays frappé d’un ralentissement économique n’aurait pas le droit de faire une politique spécifique de soutien. Le traité mettrait fin à toute possibilité de politiques budgétaires keynésiennes.

Certes, comme pour le PSC, un écart temporaire serait possible en cas de circonstances exceptionnelles, si « le dépassement de la valeur de référence résulte d'un taux de croissance négatif ou de la baisse cumulative de la production pendant une période prolongée de croissance très faible par rapport au potentiel de croissance », mais des mesures correctrices devront être rapidement prévues. Mais, la Commission se refuse à reconnaître que la plupart des pays de la zone euro sont dans ce cas de figure depuis 2009 et persiste à vouloir leur imposer des politiques de réduction rapide de leur déficit..

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Le Traité est basé sur la notion de solde structurel, c’est-à-dire le « solde

corrigé du solde conjoncturel, déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires ». Mais la mesure de ce déficit est plus que problématique. Il faut séparer le PIB en une partie « production potentielle » et une partie « écart conjoncturel ». Mais cela est délicat, particulièrement dans les périodes de forts chocs macroéconomiques.

En fait, ce sont les chiffres et la méthode de la Commission qui devront obligatoirement être utilisés

Or ceux-ci sont ont deux défauts : : elles sont toujours proches de la production effective, puisque cette méthode considère comme structurelles la baisse du capital due à la chute de l’investissement durant une crise : ceci sous-estime le déficit conjoncturel et obligera à faire des politiques contra-cycliques. Elles varient fortement au cours du temps, ainsi, les estimations de production potentielle faite pour 2006 ont été fortement abaissées en 2008. La Politique économique peut-elle être dépendre de telles estimations ?

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Au printemps 2007, la Commission estimait que l’écart de production pour

la France en 2006 était négatif d’1 % : l’économie française fonctionnait en dessous de son potentiel. La France n’avait pas encore rejoint sa production potentielle après le ralentissement des années 2002-2005. La croissance potentielle estimée pour 2008 était de 2,3 %. À l’automne 2011, la Commission estimait que la France avait en 2006 un écart de production nettement positif de 2,3% ; sa croissance potentielle en 2008 était de 1,6 %. La France était donc à un sommet d’activité. L’estimation de la production potentielle pour 2006 a ainsi diminué de 3,3 %.

Début 2008, la Commission fournit une estimation de la croissance potentielle pour l’Irlande en 2009 : 3,8 % ; aujourd’hui, son estimation est passée à -1,5 %. Pour la Grèce, l’estimation est passée de 3,7 % à 0,1 % ; pour l’Espagne, de 4,7 % à 1,3 %. Peut-on inscrire un concept si flou dans un traité international ?

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Evaluation du solde structurel de la zone euro par la Commission * 2011-T4 ** 2008-T2

2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011

PIB (croissance en %) 1,8 3,2 2,8 0,3 -4,2 1,9 1,5

Solde public -2,5 -1,3 -0,7 -2,1 -6,4 -6,2 -4,1

Croissance potentielle* 1,6 1,8 1,7 1,4 0,9 0,8 1,1

** 1,9 2,0 2,1 2,0 1,9 (1,9) (1,9)

Ecart de production* 0,0 1,4 2,5 1,4 -3,7 -2,6 -2,2

** -0,9 -0,2 0,2 -1,2 -7,3 -7,3 -7,7

Solde structurel* -2,5 -2,0 -1,9 -2,8 -4,6 -5,0 -3,2

** -2,0 -1,2 -0,7 -1,4 -2,6 -2,5 -0,1

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Le paragraphe 3 d précise que l’objectif de déficit structurel pourra être

abaissé à 1 % si la dette est en dessous de 60 % du PIB. Considérons un pays qui a en moyenne une croissance de 2 % l’an et une inflation de 2 %, s’il maintient indéfiniment un déficit de 1 % du PIB, sa dette convergera vers 25 % du PIB. Or rien ne garantit que l’équilibre macroéconomique peut être assuré avec des valeurs posées a priori : dette = 25 % du PIB ; déficit = 1 % du PIB. Inscrire ceci dans la Constitution est aussi fondé que d’écrire : les hommes devront chausser du 42, les femmes du 40.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Selon l’article 3.2, les États membres doivent inscrire la règle d’équilibre

budgétaire et le mécanisme de correction automatique dans leur Constitution, ou si cela est impossible, dans un dispositif contraignant et permanent. Le mécanisme de correction doit être basé sur des principes proposés par la Commission. Ainsi, des dispositifs inapplicables, flous et sans fondement économiques, seraient inscrits dans le Marbre constitutionnel.

Les pays membres devront mettre en place des institutions indépendantes chargées de vérifier le respect de la règle d’équilibre budgétaire et de la trajectoire d’ajustement. C’est un pas supplémentaire vers la technocratisation complète de la politique budgétaire. Ces institutions indépendantes auront-elles le droit de remettre en cause la règle ou la trajectoire d’ajustement si celle-ci ne correspond pas aux nécessités de la conjoncture ?

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance).

Les pays ayant une dette supérieure à 60% du PIB devront la faire baisser de 1/20 de l’écart chaque année. Mais est-ce économiquement possible ?

Ceci suppose qu’un ratio de 60% est un chiffre optimal réalisable par tous les pays. Or, en Europe, des pays comme l’Italie ou la Belgique, ont depuis longtemps des dettes publiques de 100% du PIB (sans parler du Japon où elle atteint 200%), sans déséquilibre car ces dettes correspondent à des forts taux d’épargne des ménages.

Ceci oblige les pays à pratiquer des politiques pro-cycliques. Considérons un pays qui a une dette de 100% du PIB ; il devra la faire baisser à 98% l’année suivante. Si ce pays à une croissance nominale de 4%, ceci est compatible avec un déficit de 2% du PIB ; par contre, si sa croissance nominale est de 2 % (soit 0 en volume et 2 en prix), il devra avoir un déficit nul. La contrainte est d’autant plus forte que la croissance est faible.

Les rédacteurs du Traité ne considèrent jamais les effets sur l’activité des politiques envisagées. Considérons un pays dont le PIB vaut 100, le ratio de dette est de 100 %, la croissance est de 4%, le déficit de 4% du PIB. Le ratio de dette est stable. Le pays est obligé pour réduire son ratio de dette de réduire de 2 les dépenses publiques, l’activité baisse à 98 (on suppose un multiplicateur égal à 1), les recettes fiscales baissent de 1, le déficit, donc la dette, est réduit de 1. Ex post, le PIB vaut 98 ; la dette vaut 99 ; le ratio de dette est monté à 101%. La direction du ratio de dette par des politiques d’austérité ne va donc pas de soi.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Selon l’article 5, un pays soumis à une Procédure de Déficit Excessif devra

soumettre son budget et un programme de réformes structurelles à la Commission et au Conseil, qui devront l’approuver et en suivre la mise en place. C’est cet article qui oblige la France, comme beaucoup de pays de l’UE, à tout faire pour atteindre les 3 % de déficit en 2013, quelque soit l’évolution économique, puisque, en cas de PDE, la contrainte porte sur le solde effectif et non sur le solde nominal.

Cet article est une nouvelle arme pour permettre d’imposer aux peuples des réformes libérales. Aujourd’hui, la quasi-totalité des pays de l’UE (23 sur 27) sont soumis à des PDE ; ils n’ont pas besoin de réformes libérales, mais de croissance. A moins que par réforme structurelle, le Traité n’entende des mesures visant à briser la domination des marchés financiers, à augmenter l’imposition sur les plus riches et les grandes entreprises, à financer la transition écologique.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Selon l’article 7, les propositions de la Commission seront automatiquement

adoptés sauf si se dégagent contre elles une majorité qualifiée, le pays en question ne votant pas. Ainsi, en pratique, la Commission aura toujours le dernier mot.

Considérons, par exemple, une résolution concernant l’Italie. Les droits de vote dans la zone euro sont de 213, dont 27 pour l’Italie. La majorité qualifiée est des 3/5. Il suffit donc que la Commission soit soutenue par 74 voix (2/5 *(213-27), le tiers des votants pour imposer sa volonté. Plaisante démocratie…

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Les articles 9 à 11 portent enfin sur la coordination des politiques

économiques. Ils ne comportent aucun engagement chiffré en matière de chômage ou de solde extérieur. Les pays devront débattre de leurs grandes réformes de politique économique. La promotion de la croissance ne doit se faire que grâce « au renforcement de la convergence et de la compétitivité ». Les grands objectifs sont « le renforcement de la compétitivité, la promotion de l’emploi, une meilleur contribution à la soutenabilité des finances publiques et un renforcement de la stabilité financière »

Il n’est nulle part question dans le traité d’une vraie coordination des politiques économiques, c’est-à-dire d’une stratégie économique utilisant la politique monétaire, les politiques budgétaires, fiscales, sociales et salariales pour rapprocher les pays du plein emploi. Il ne se donne pas d’objectifs en termes de croissance ou de chômage et n’organise pas une stratégie économique concertée, impulsant la croissance, corrigeant les déséquilibres entre pays, organisant la mobilisation pour la transition écologique.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance).

L’article 12 porte sur la gouvernance de la zone Euro. C’est un chef d’œuvre de construction technocratique. L’Europe est actuellement dirigée par un Conseil de l’Union Européenne (qui a un président), par une présidence nationale tournante, par des Conseils européens (avec une formation Affaires Economiques et Financières présidée par le Ministre du pays président), par la Commission (qui a un président) et une direction es Affaires Economiques et Financières. La zone Euro est dirigée par la BCE et par l’Eurogroupe (qui regroupe les ministres de l’Economie) et qui a un président.

Le Traité y rajoute des sommets de la zone Euro (entre les chefs d’Etats ou de gouvernements des pays membres (sommets qui auront un président), auxquelles pourront être invités les chefs d’Etats et de gouvernements des pays non membres. Le président de la BCE participera à ces réunions. Celui de l’Eurogroupe pourra être invité (nuance subtile). Le président du Parlement pourra être invité à être entendu (encore plus subtil) Ces sommets seront préparés à la fois par le président du sommet et par l’Eurogroupe. Bref, une construction pléthorique et peu efficace.

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Ce projet impose une règle arbitraire de déficit public et des politiques

budgétaires quasi-automatiques, il interdit toute politique discrétionnaire. Or celles-ci sont indispensables pour permettre une stabilisation complète. Supposons que le taux de prélèvement obligatoire soit de 50 % et la propension à dépenser de 1. Le multiplicateur est alors de 2. Une chute ex ante de 10 des dépenses privées, sans politique budgétaire active, induit une baisse de 20 de l’activité et un déficit public de 10. Une politique expansionniste active, qui augmente de 10 les dépenses publiques, aboutit au même déficit, mais permet d’éviter la baisse de la production. Elle serait interdite selon le traité.

Celui-ci est basé sur une théorie implicite fausse : il faut laisser jouer les stabilisateurs automatiques, mais il faut interdire les politiques budgétaires discrétionnaires de soutien de l’activité.

Fin 2008, le FMI, le G20 et la Commission européenne ont demandé aux pays d’entreprendre de telles politiques discrétionnaires. Faut-il les interdire quatre ans après ?

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Le Pacte Budgétaire (Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance). Selon le Traité, chaque pays doit prendre isolément des mesures restrictives sans

tenir compte de sa situation conjoncturelle et des politiques des partenaires. Le Traité fait l’hypothèse implicite que le multiplicateur keynésien est nul, que les politiques budgétaires restrictives n’ont pas d’impact sur l’activité. A la mi-2012, ceci implique que la plupart des pays pratiquent des politiques d’austérité alors que la cause des déficits publics est globalement un niveau insuffisant de production due à l’éclatement de la bulle financière.

Le Traité n’instaure pas une vraie coordination des politiques économiques, c’est-à-dire une stratégie économique utilisant la politique monétaire, les politiques budgétaires, fiscales, sociales et salariales pour rapprocher les pays du plein emploi.

Les Etats-membres peuvent-ils se résoudre à un Traité qui paralyse, à jamais, leurs politiques budgétaires pour convaincre aujourd’hui les marchés et les pays du Nord de leur future discipline budgétaire ?

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Le Pacte Budgétaire : les articles manquants

Article 0 : le Traité ne se donne pas d’objectifs en termes de croissance ou de

chômage et n’organise pas une stratégie économique concertée, impulsant la croissance et corrigeant les déséquilibres entre pays.

Article 00 : le Traité ne met pas en place de mécanismes permettant de rétablir l’unité et le caractère sans risque des dettes publiques en Europe que ce soit par la garantie de la BCE ou l’émission d’Euro-obligations. Actuellement, l’Italie supporte des taux supérieur de 3,5 points au taux allemands, ce qui peut lui couter à terme 4 % du PIB. Est-ce acceptable ?

Article 000 : Le Traité n’organise pas de d’harmonisation fiscale permettant aux pays de lutter contre les paradis fiscaux, l’évasion et la fraude fiscale, évitant la concurrence fiscale. Aussi, ne permet-il pas aux pays de réduire les déficits en augmentant les impôts sur les riches, sur les 1% qui ont bénéficié de la globalisation (financiers, dirigeants d’entreprises, etc..), sur les entreprises multinationales, sur les rentiers. Il impose donc des politiques restrictives en matière de dépenses publiques et sociales, politiques qui mettent en cause le modèle social européen et la cohésion sociale.

Article 0000 : Il prétend soutenir la croissance par des réformes structurelles, c’est-à-dire la mise en cause du droit du travail, par la compétitivité, c’est-à-dire la baisse des salaires et des dépenses sociales, par la libéralisation des marchés, c’est-à-dire la mise en cause des services publiques. Par contre, les nécessités d’une mobilisation pour la transition écologique sont oubliées.

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Ainsi, quatre mécanismes ont été introduits qui vont dans le même sens mais qui font quadruple emploi : le semestre européen, la surveillance des déséquilibres macroéconomiques, le Pacte pour l’Euro plus, le Pacte budgétaire. Elles s’ajoutent à la stratégie Europe2020, aux lignes directrices intégrées. Ceci génère une intense activité bureaucratique.

La coordination ne visera pas à améliorer la croissance ou l’emploi, mais à réduire les salaires, les dépenses publiques et sociales.

Il n’y a toujours pas de stratégies macroéconomiques, ni de stratégies industrielles.

Quatre mécanismes

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Vers le fédéralisme ? Des économistes européens, et même des ministres, allemands ou néerlandais, ont

réclamé qu’un pays qui ne respecterait pas le PSC puisse être condamné par la CJUE. La politique budgétaire serait soumise au pouvoir judiciaire.

Le président de la BCE avait proposé qu’un Commissaire européen soit responsable des finances des pays de la zone euro et puisse contrôler les budgets des Etats membres.

Nous assistons au renforcement de règles budgétaires, contraignantes et absurdes, incompatibles avec les nécessités de la gouvernance macroéconomique. C’est la faille de la construction européenne actuelle : une meilleure coordination des politiques économiques est indispensable, mais le contrôle tatillon du niveau des déficits publics n’est pas une coordination des politiques économiques et va en sens inverse de ce qui serait nécessaire.

La Commission, la BCE, certains Etats membres poussent à plus de fédéralisme, c’est-à-dire en fait, aujourd’hui, à donner plus de pouvoir à la Commission, mais ce fédéralisme ne respecterait pas la démocratie : le pouvoir passerait aux mains de technocrates non-élus qui imposeraient aux peuples la seule politique possible selon eux. Faut-il payer ce prix pour la survie de la zone euro ? C’est toute l’ambiguïté de la montée du projet de fédéralisme en Europe. Le fédéralisme pour quoi faire ? Imposer des politiques d’austérité et des réformes libérales aux peuples européens ?

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L’union bancaire

La crise de la zone euro a mis en évidence un néfaste effet de résonance entre la situation des finances publiques d’un pays et celle de ces banques. Une dégradation de la notation de la dette publique fragilise les banques nationales, qui en détiennent beaucoup ; elles subissent des pertes et la qualité de leur bilan est détériorée. En retour, les marchés considèrent qu’il y a un risque que l’Etat doive venir au secours de son système bancaire, ce qui justifie une nouvelle dégradation. Les pays en difficulté souffrent de taux élevés ce qui augmentent leurs difficultés.

Les petits pays ont du mal à sauver des systèmes bancaires disproportionnés.

Le sommet européen du 29 juin a lancé un nouveau projet : l’Union bancaire. Est-ce un complément obligé de l’Union monétaire ou est-ce une nouvelle fuite en avant ?

L’Union bancaire reposerait sur trois piliers : une autorité européenne chargée d’une surveillance centralisée des banques (le MSU sous l’égide de la BCE, qui s’ajouterait à l’ABE et au CERS), un fonds européen de garantie des dépôts, un schéma commun de résolution des crises bancaires.

Mais les obstacles sont nombreux, certains liés à la complexité du fonctionnement de l’UE, d’autres liés à des choix structurels à faire quant au fonctionnement du système bancaire européen.

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L’union bancaire

Un contrôle européen comme une garantie européenne supposent une vision commune sur la réglementation du système bancaire. Il faut s’accorder sur des questions cruciales comme : faut-il séparer les banques de dépôts des banques d’affaires ? Faut-il interdire aux banques d’intervenir sur les marchés financiers pour leur compte propre ? Faut-il favoriser le développement de banques publiques, mutualistes ou régionales ou au contraire celui de grandes banques internationales ?

A court terme, la question est : la garantie des dépôts porte-t-elle sur les dépôts en euros des banques grecques ?

Le risque est grand que confier le contrôle des banques à la BCE soit un nouveau pas vers la dépolitisation de l’Europe et la financiarisation des économies. Les gouvernements perdront la capacité à influencer la distribution de crédit par les banques, ce qui, pour certains, est souhaitable (pas d’interférence politique dans le crédit), mais pour nous est dangereux (les gouvernements perdront un outil potentiel de politique industrielle, quid de la Banque Publique d’Investissement ?).

Peut-on contrôler de façon centralisée des systèmes bancaires hétérogènes ?

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L’union bancaire

L’Union bancaire théoriquement permettrait de briser la corrélation entre crise souveraine et crise bancaire. Les banques nationales seraient invité à se diversifier. Ne risque-t-elle pas d’accroître encore la dépendance des Etats envers les marchés financiers ?

L’Union bancaire suppose que soit écarté tout risque de sortie de la zone euro. Peut-on assurer des conditions de financement équivalente entre des pays

différents ? Le MES pourrait intervenir pour recapitaliser les banques européennes en difficulté.

Mais comment gèrerait-il ensuite les banques ? Le schéma proposé de résolution des crises bancaires (les faillites seraient payées

par les actionnaires, puis par les créanciers) risque de fragiliser les banques et d’augmenter le coût du crédit, tout en en réduisant la quantité. La solvabilité des banques dépendra avant tout de leurs fonds propres, donc de l’appréciation des marchés.

On pourrait envisager la stratégie inverse : une restructuration du secteur bancaire, où les banques de dépôts se concentreraient sur leur cœur de métier (le crédit de proximité aux entreprises, ménages et collectivités locales nationales), où leur solvabilité serait garantie par l’interdiction de procéder à certaines opérations risquées ou spéculatives, par la garantie du pays d’origine.

L’Union bancaire poussera-t-elle à la financiarisation ou marquera-t-elle un salutaire retour vers le modèle Rhénan ?

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Vers une véritable union économique et monétaire ?

Le projet présenté par le Président du Conseil comporte :1) l’Union bancaire aboutissant à un cadre financier intégré. Elle ne peut être envisagée

sans « une discipline budgétaire plus efficace ».2) Un cadre budgétaire intégré : vote des « 2-directives », politiques budgétaires saines, renforcement de la surveillance, coordination ex ante (mais après le TSCG, que

reste-t-il à coordonner ?). Doter l’UEM d’une capacité budgétaire pour absorber les chocs asymétriques

(comique après avoir privé les Etats de la capacité d’agir) et soutenir les réformes structurelles, ceci dans le cadre de la règle d’or(?).

Mutualiser la dette de court terme. Créer un fonds d’amortissement de la dette3) Un cadre de politique économique intégré : Aucune autocritique - meilleure visibilité du premier semestre, du pacte pour l’euro plus, de la

surveillance des déséquilibres macroéconomiques - accord entre chaque pays et l’UE sur les réformes structurelles avec récompense

financière - politique macroprudentielle (CERS)

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Pour une véritable économique et monétaire véritable et approfondie (Commission-Novembre 2012)

Pas d’autocritique sur le PCS ; toutefois le manque de coordination des politique économique est signalée ; regret sur l’absence de discipline imposée par les marchés et l’absence d’union bancaire.

« Toutes les grandes mesures économiques et budgétaires prises par un Etat membre devront faire l’objet d’un processus approfondi de coordination, d’approbation et de surveillance à l’échelle de l’UE ». Le problème des divergences de stratégie est oublié.

A court terme, discipline budgétaire, MSU, création d’un « instrument de convergence et de compétitivité, ICC » pour soutenir les réformes structurelles, coordination des réformes d’importance majeure, refus de la vraie règle d’or, siège unique au FMI ( là aussi, comique après l’épisode Plans d’ajustement).

A moyen terme, obligation pour un pays de revoir son budget si l’UE lui demande, de revenir sur certaines décisions, ressources propres à la zone euro, fonds d’amortissement de la dette avec une stricte conditionnalité (qui s’ajouterait à celle du Pacte budgétaire, très compliquée, les pays devraient prendre des engagements impossibles à tenir), Bons du Trésor de court terme (Trésor européen).

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Pour une véritable économique et monétaire véritable et approfondie (Commission-Novembre 2012)

A long terme : Union bancaire complète : selon quelle régulation ? Quelles diversités possibles ?

Quelle intervention publique ? UEM complète : « qui imposerait des décisions budgétaires et économiques à ses

membres », un outil de stabilisation à l’échelle de l’UEM, favorisant les réformes structurelles, avec des ressources autonomes, pouvant emettre de la dette souveraine.

Renforcer le rôle du vice président de la commission chargé des affaires économiques et financières et de l’Euro ; créer une commission Euro au sein du Parlement ; renforcer l’Eurogroupe.

Faut-il renforcer les pouvoirs de l’Europe telle qu’elle fonctionne actuellement ?

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Une solidarité financière limitée

La crise de la zone euro a provoqué un élargissement des taux d’intérêt sur les dettes publiques des différents pays européens. Les pays du Sud de la zone ne peuvent plus se financer à des taux d’intérêt soutenables.

Les pays de la zone euro subissent en tant que tels une pénalité en termes de taux d’intérêt.

L’augmentation des dettes publiques augmente le risque d'un contrôle des finances publiques par les marchés financiers. Mais ce contrôle n'est pas satisfaisant : les marchés financiers n'ont pas de compétence macroéconomique, ils sont pro-cycliques (ils imposeront les efforts dans les mauvais moments) et leurs opinions sont auto-réalisatrices. Ils ont leur propre point de vue sur la politique économique nécessaire, qui n’est pas obligatoirement le bon. Peut-on laisser aux marchés financiers évaluer la soutenabilité de la dette publique et l'utilité des déficits publics ?

.

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Une solidarité financière limitée

Certains ont proposé de créer, sous des formes diverses, une Agence européenne de la dette (AED) qui émettrait une dette commune aux pays de la zone, des euro-obligations. Cette dette serait garantie par tous les pays de la zone. Le Conseil de l’AED contrôlerait les politiques budgétaires nationales et aurait le droit de refuser de financer les pays trop laxistes, qui devraient alors avoir recours au marché.

L’AED poserait les mêmes problèmes que le Pacte actuel. Comment ce Conseil déciderait-il qu’un déficit est trop important quand le pays membre estime que le déficit est nécessaire au soutien de l’activité (comme l’Allemagne et la France en 2002-2005) ou pour sauver ses banques ? Aurait-il des règles rigides (un pays aurait droit à des prêts de l’AED pour 60 % de son PIB ou s’il n’est pas soumis à une procédure pour déficit excessif) ? Dans ce cas, l’AED ne bénéficierait pas aux pays en difficulté qui devraient émettre de la dette nationale, sans aucune garantie européenne, sans aucune possibilité de financement par la BCE, ce qui en ferait un actif risqué, à fort taux d’intérêt. Ces pays seraient à la merci des marchés financiers.

L’AED n’a de sens que si elle accepte de financer toutes les dettes publiques, sans normes a priori, mais beaucoup de pays refusent actuellement un projet qui ne leur donne aucune garantie contre les pays laxistes.

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Une solidarité financière limitée

Actuellement, la solidarité financière passe par Target2, le système de transfert entre Banques Centrales de l’UE.

Les pays déficitaires peuvent se financer automatiquement auprès des pays excédentaires.

Ceci joue pour les déficits courants et surtout aujourd’hui pour les transferts de capitaux. Ainsi, les banques allemandes reversent aux banques grecques, les fonds que les Grecs placent en Allemagne.

Les dépôts ont baissé de 80 milliards d’euros en Grèce, de 20 milliards en Irlande, de 50 milliards en Espagne.

Mais, le système est fragile : que se passera-t-il si une banque fait faillite ? Si un pays sort de la zone euro ? Les allemands sont de plus en plus réticents à ce financement automatique.

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Une solidarité financière limitée

Le Fonds européen de stabilisation financière (FESF) n’a été créé que pour une période de 3 ans.

Il sera prolongé sous le nom de Mécanisme européen de stabilité, MES, doté de la même capacité d’emprunt de 500 milliards.

L’Allemagne a réclamé des conditions drastiques pour accepter sa prolongation, en particulier que les limites de la solidarité entre pays figurent explicitement dans le Traité.

Le Conseil européen a donc proposé une réforme du TFUE qui se ferait a minima et consisterait à rajouter à l’article 136 : « Les Etats membres dont la monnaie est l’euro peuvent instituer un mécanisme de stabilité qui sera activé si cela est indispensable pour préserver la stabilité de la zone euro dans son ensemble. L’octroi, au titre du mécanisme, de toute assistance financière nécessaire, sera subordonné à une stricte conditionnalité. ».

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Une solidarité financière limitée Le Mécanisme Européen de Stabilité introduit certes une certaine solidarité financière

entre les pays membres, mais celle-ci est limitée et très chèrement payée. Pour bénéficier du MES, les pays devront avoir adhéré au Pacte budgétaire et l’avoir

respecté. L’aide sera conditionnelle : un pays pour être aidé devra s’engager à respecter un plan d’ajustement drastique imposé par la Troïka et donc perdre toute autonomie budgétaire, accepter une longue période d’austérité.. L’exemple grec montre bien que ce type de plan ne permet pas de sortir de la crise.

La créance du MES sera prioritaire par rapport aux créances privées. Les émissions d’obligations publiques devraient comporter une clause d’action collective, c’est-à-dire que, en cas d’insolvabilité, proclamé par la Commission et le FMI, le pays pourra négocier avec ses créanciers une modification des conditions de paiement, l’accord s’appliquant à tous si une majorité qualifiée de créanciers l’acceptent.. La dette des pays de la zone euro deviendra spéculative comme l’étaient celles des pays en développement ; elle ne serait plus regardée comme sans risque par les institutions financières. Les taux d’intérêt sur la dette publique seront plus élevés, plus volatils, moins contrôlables.. Fallait-il construire la zone euro pour en arriver là ?

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Une solidarité financière limitée

Le Conseil écrit : « Nous réaffirmons que toute participation du secteur privé sur la base des conditions ci-dessus ne sera pas effective avant la mi-2013 ». Les marchés financiers ont estimé que les pays du Sud de l’Europe auront le plus grand mal à se financer dans les trois ans avec ces règles de fonctionnement du MES. Or le remboursement des dettes actuelles repose sur la capacité des pays à avoir accès aux marchés financiers dans les années à venir. La dette des pays du Sud a donc été fragilisée par ce projet.

Les pays du Nord ont refusé les euro-obligations et la garantie totale de la BCE. Le 29 juin, il a été acté dans le cas de l’aide à l’Espagne que le MES pourra intervenir

pour recapitaliser les Banques, qu’il pourra renoncer à ce statut de créancier privilégié; qu’il pourra aider un pays qui a fait les efforts nécessaires, mais que les marchés continuent d’attaquer, par un simple « mémorandum » d’accord.

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6 septembre 2012, la BCE intervient Le 6 septembre, la BCE annonce un programme d’achat sur le marché secondaire des

bons de court terme, des pays en difficulté, d’une maturité entre 1 et 3 ans (OMT). Elle ne fixe pas de limites quantitatives à ces achats. Elle n’indique pas d’objectif en termes d’écart de taux d’intérêt tolérable. Pour montrer qu’elle prend les mêmes risques que les créditeurs privés, elle renonce à son statut de créancier privilégié pour ces titres.

Par contre, ces interventions seront soumises à une stricte conditionnalité. Les pays devront négocier un programme d’ajustement avec la Commission et le Fonds Européen de Stabilité financière/ le Mécanisme Européen de Stabilité, programme devrait être contrôlé par le FMI. Le MES devra en parallèle aider le pays par des achats sur le marché primaire. Les pays aidés devront prendre des engagements en matière d’ajustement budgétaire et de réformes structurelles. Comme il s’agit de titres à court terme, la BCE pourra arrêter ces achats si les pays aidés ne respectent pas leurs engagements.

L’Espagne (ou l’Italie) acceptera-t-elle d’être mise ainsi sous tutelle ? de perdre sa (leur) souveraineté ? Mais il y aura une forte pression sur eux pour qu’ils acceptent.

La Bundesbank (et Jens Weidmann) s’est opposée au projet car elle craint que les pays aidés n’effectuent pas les efforts demandés.

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6 septembre 2012, la BCE intervient

Début décembre, l’Allemagne s’endette à 1,35% à 10 ans, l’Italie à 4,55 %, l’Espagne à 5,35 %.

La crainte des marchés est auto-réalisatrice : ils craignent que l’Espagne fasse défaut ; aussi, ils refusent de prêter à l’Espagne ou lui imposent des taux élevés, ce qui renforce les risques de faillite. Comme ces taux s’imposent aussi aux entreprises, ceci contribue à enfoncer les pays dans la récession. En ne mettant pas de limite à ces interventions, la BCE peut rassurer les marchés sur les risques de défauts de ces pays, sur les risques d’éclatement de la zone. Elle peut briser les anticipations auto-réalisatrices, de sorte qu’elle n’aura pas besoin d’intervenir massivement. La baisse des taux peut contribuer à relancer l’activité.

En sens inverse, les pays devront maintenir des politiques d’austérité rigoureuses. La BCE impose ses vues quant à la stratégie économique à suivre. Elle réclame des réformes structurelles des marchés du travail et des biens ; le strict respect des objectifs de solde public, malgré la récession ; la mise en application rapide du pacte budgétaire. Le risque est que cette austérité généralisée enfonce durablement toute la zone dans la crise. L’euro sera sauvé mais les Etats membres seront morts. Il aurait fallu baisser le taux d’intérêt directeur ; il faudrait surtout des mesures de soutien à l’activité (car le Pacte de Croissance est nettement insuffisant).

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6 septembre 2012, la BCE intervient

Ainsi, la crise peut permettre à la technocratie européenne de réaliser son rêve : mettre les gouvernements sous tutelle, leur imposer des réformes structurelles libérales, leur imposer des privatisations et la réduction des services publiques, leur imposer la réduction des dépenses publiques et sociales.

Alors, même que ces mesures ne s’attaquent pas aux causes de la crise, ne facilitent pas la sortie de crise.

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Une solidarité financière limitée

Les pays européens ne se donnent pas les moyens de briser la spéculation et d’assurer la pérennité de la zone euro. Ils laissent les marchés financiers imposer des taux d’intérêt insoutenables à des dettes publiques, qu’ils assurent par ailleurs garantir. Une stratégie timorée et floue ne peut permettre de sortir de la crise.

La période d’avant la crise, comme la crise, a bien montré que la zone euro souffre de défauts rédhibitoires. Ceux-ci nourrissent maintenant la spéculation des marchés financiers sur l’éclatement de la zone.

Il est difficile pour des pays qui ont des conjonctures, des évolutions structurelles et des stratégies économiques différentes de partager la même politique monétaire, le même taux d’intérêt, le même taux de change.

Chaque pays souhaite conserver l’autonomie de sa politique budgétaire ; en même temps, les dettes publiques doivent être garanties pour ne pas permettre la spéculation financière.

Le fonctionnement de la zone euro n’a pas été pensé au départ, en particulier l’arbitrage autonomie/solidarité.

Une garantie totale crée un problème d’alea moral puisque chaque pays pourrait augmenter sa dette sans limite ; une absence de garantie laisse le champ libre aux jeux des marchés financiers.

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Une solidarité totale ?

Les pays de la zone euro doivent redevenir des Etats capables d’émettre une dette publique sans risque, dont le taux d’intérêt doit être contrôlé par la BCE.

La garantie mutuelle des dettes publiques par la BCE ou par l’émission d’euro-obligations doit être totale pour les pays qui acceptent de soumettre leur politique budgétaire à un processus de coordination ; cette coordination doit avoir pour but la croissance et le plein emploi ; elle doit examiner l’ensemble des variables macroéconomiques ; le processus doit toujours aboutir à un accord unanime sur une stratégie coordonnée, mais différenciée : la coordination ne peut consister dans le respect de règles automatiques (comme celles du PSC) ; elle doit passer par un processus de négociation entre pays.

Le Traité doit maintenir un dispositif prévoyant le cas où la négociation n’aboutit pas ; dans ce cas, la nouvelle dette des pays hors accord ne serait plus garantie ; mais ce cas ne doit jamais survenir.

C’est la seule issue pour que les pays ne soient pas soumis aux diktats des marchés financiers..

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Que faire face à la hausse des dettes publiques dues à la crise ? Fin 2012, les dettes publiques apparaissent particulièrement élevées dans l’ensemble

des pays de l’OCDE. Les dettes nettes dépassent 80 % du PIB au Portugal (81%), en Belgique (82 %), Etats-Unis (85%), Italie (96 %), Grèce (134 %), Japon (135 %). Elles ont fortement monté en Irlande (+61 % depuis 3 ans).

Il est difficile de déterminer si ces niveaux de dette sont ou non insoutenables : un pays peut maintenir un niveau de dette élevé s’il peut se financer à 3 % ou 4 % avec un taux de croissance nominal de l’ordre de 4 %. Mais la dette devient insoutenable si l’écart grandit entre le taux d’intérêt requis et le taux de croissance.

Les économistes libéraux estiment que le fait que les pays du Sud ne puissent pas se refinancer sur les marchés prouve qu’ils sont insolvables. Ils refusent que les pays vertueux puissent devoir payer pour eux et que la BCE mettent en jeu sa réputation et la stabilité monétaire en leur venant en aide. Selon eux, ceci encouragerait les pays du Sud à continuer à pratiquer des politiques budgétaires irresponsables. En sens inverse, leur faillite montrerait clairement que chaque pays est responsable de sa dette. Elle éviterait de devoir mettre en place des mécanismes déresponsabilisants de solidarité entre les pays d'Europe. Cette faillite montrerait clairement aux marchés financiers que les dettes publiques sont risquées. Ceux-ci seront à l'avenir beaucoup plus vigilants. Les pays soumis en permanence au contrôle des marchés devront pratiquer des politiques saines.

Mais ce point de vue oublie que le passé a montré que les Marchés sont aveugles ; rien ne prouve qu’ils ont une quelconque compétence macroéconomique.

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Que faire face à la hausse des dettes publiques dues à la crise ?

Les dettes publiques doivent continuer à être des actifs sans risques, faiblement rémunérés mais totalement garantis (par la solidarité européenne et par la BCE), de sorte que les dettes d'aucun pays de la zone euro ne doivent pas supporter de primes de risques plus élevées que celles des pays qui ont conservé leur souveraineté monétaire comme le Japon, les Etats-Unis ou le Royaume-Uni. C'est le seul moyen de maintenir l'autonomie des politiques budgétaires. Il faut revenir à une situation où les taux de croissance sont supérieurs au taux d’intérêt supporté.

Faire un défaut partiel sur une partie des dettes publiques est certes une option tentante, que proposent certains économistes de gauche pour faire payer les institutions financières et les classes aisées responsables de la crise. Mais, les dettes publiques deviendront des actifs risqués, ce qui signifie que les Etats membres auront à payer des taux d'intérêt plus élevés, que les fonds de pension refuseront de détenir des dettes publiques, que les banques devront immobiliser du capital pour en détenir, que l'influence des agences de notation sera plus forte, que les marchés financiers spéculeront sur les obligations publiques.

Par ailleurs, il est difficile de faire défaut dans la mesure où les créanciers entreprendront des actions judiciaires contre les Etats qui se déclareraient en faillite.

Ce défaut ne pénaliserait pas les plus riches, mais les épargnants qui se contentaient d’une rémunération faible. Il pénaliserait les fonds qui ont fait confiance aux pays menacés et non les spéculateurs qui ont spéculé sur leur défaut.

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Trois scénarios de sortie : le scénario de la Commission Tous les pays mettraient en œuvre des politiques budgétaires restrictives pour réduire

leurs déficits publics et pour rassurer les marchés financiers, les pays du Sud mettant en œuvre les mesures les plus violentes.

Ce programme nuira à la croissance de la zone, mais de plus il sera inefficace pour lutter contre la crise financière de la zone.

Les pays du Sud seront confrontés à la perspective d’une longue récession, de coupes claires dans les dépenses sociales, de hausse du chômage, de restrictions salariales pour rattraper la compétitivité de l’Allemagne (qui elle-même continuera à vouloir améliorer la sienne) ; la faible croissance augmentera le déficit public, ce qui obligera les pays à redoubler de mesures restrictives.

Dans cette situation, les pays du Sud auront toujours la tentation de quitter la zone ; du moins, les marchés leur prêteront en permanence cette intention. De plus, le risque est grand que la mise en place du MES aboutisse à un système bâtard où les marchés auront toujours la crainte que les pays en difficulté répudient ou restructurent leurs dettes. Les marchés continueront donc à spéculer contre les pays du Sud, réclameront toujours des taux d’intérêt élevés pour leur prêter, ce qui obligera ces pays à redoubler de rigueur, au risque de les déstabiliser et d’augmenter les craintes des marchés.

De plus en plus de pouvoir seront donné à des institutions technocratiques qui imposeront des réformes structurelles impopulaires, qui n’impluseront pas le croissance

Ce scénario est donc peu crédible ; il est dangereux pour les pays du Sud et pour la construction européenne.

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Le deuxième scénario est celui de l’éclatement Les pays du Sud pourraient renoncer à rester dans la zone euro, car l’effort à faire

pour y rester est trop important, tant du point de vue des finances publiques que du point de vue de la compétitivité. Ceci les condamne à une longue période de croissance faible et de chômage élevé.

Ces pays peuvent préférer quitter la zone : leurs taux de change baisseraient de 25 % par rapport à l’euro ; ils regagneraient donc la compétitivité qu’ils ont perdue depuis 1997. Ils restructureraient leurs dettes publiques et privées, en les convertissant en monnaie nationale, avec un coefficient de réduction important. Ils pourraient alors repartir sur de nouvelles bases.

En raison de l’inertie des prix, la dévaluation est plus efficace que l’ajustement par baisse des salaires.

L’euro s’apprécierait contre le dollar mais les marchés seraient incités à spéculer contre l’Italie et la France. Ces pays devront choisir entre suivre les pays du Sud ou suivre l’Allemagne et ses satellites. La zone sera fragile en permanence puisque les spéculateurs auront des raisons objectives pour discriminer entre les dettes libellées en euros et demander des primes de risque élevées.

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Le deuxième scénario est celui de l’éclatement

Le défaut de paiement des pays du Sud fragiliserait le système financier des pays européens. Une nouvelle crise financière secouerait l’Europe.

Ce scénario d’éclatement aurait certes une certaine rationalité économique. Il témoignerait de l’impossibilité de maintenir une monnaie unique entre des zones qui ont des taux de croissance et d’inflation différents, et qui pratiquent des politiques économiques différentes. Il mettrait en évidence un « triangle d’impossibilité » : on ne peut avoir à la fois une monnaie unique, une parfaite liberté des capitaux et des politiques économiques autonomes et sans solidarité.

Mais il marquerait aussi un échec grave de la construction de l’Europe ; les peuples européens perdraient toute capacité à influencer l’évolution économique mondiale, à promouvoir leur modèle social. Le risque est grand que l’éclatement de la zone soit le signe de toujours plus de concurrence salariale, sociale et fiscale, auxquelles s’ajouterait la concurrence par les taux de change.

Dans cette optique, cependant, les forces de gauche devraient demander que le sortie des pays du Sud se fasse avec le plus de douceur possible. L’Europe ne devrait pas prendre des mesures punitives ; elle devrait accepter une forte décote des dettes des pays du Sud ; elle devrait accepter que les pays du Sud mettent en œuvre des politiques non-conventionnelles : limitation de certaines importations, contrôle des capitaux.

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Le scénario de la croissance et de la solidarité Faire vivre l’Europe suppose un profond changement de son fonctionnement. L’Europe

ne doit pas viser à imposer la marche forcée vers le modèle neo-libéral mais à faire vivre un modèle spécifique de société, le modèle social européen, qu’il faut faire évoluer vers une croissance soutenable.

Ceci suppose de renoncer aux objectifs de déficits et de dettes publiques, aux politiques d’austérité pour se donner des objectifs d’emplois et des objectifs sociaux. Ceci Il suppose plus de solidarité entre les pays, mais aussi une volonté résolue de réduire l’importance des marchés financiers.

Mesure n°1 : Affranchir les Etats de la tutelle des marchés financiers, en garantissant le rôle de la BCE, comme prêteur en dernier ressort. Tous les pays doivent pouvoir se financer à long terme à des taux inférieurs à 2% aujourd’hui, aux taux de croissance, de façon générale.

Les titres publics étant garantis, les taux d’intérêt excessifs de ces deux dernières années ne se justifient plus.

Mesure n°1 bis : Abaisser les taux d’intérêt exorbitants des titres émis par les pays en difficulté depuis la crise. Ces titres doivent être rémunérés au même taux que les titres émis par les pays jugés sans risque par les marchés.

Une partie importante de la dette de certains pays (Irlande, Espagne) provient de l’aide accordée au secteur bancaire. Les erreurs des banquiers ne doivent pas être payées par les peuples. Il faut remettre en cause le financement par les finances publiques des pertes des banques en difficulté, en particulier en Irlande. Il faut faire payer ceux qui ont bénéficié des bulles financières et immobilières.

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Le scénario de la croissance et de la solidarité Mesure n°2 : Faire assumer les pertes des banques en faillite par leurs actionnaires et

leurs créanciers et si nécessaire par la taxation des banques et des institutions financières (et non plus par les finances publiques). La garantie publique accordée aux créanciers des banques doit être strictement limitée. .

Mesure n°3 : Les agences de notation financière ne doivent pas être autorisées à peser arbitrairement sur les taux d’intérêt des marchés obligataires en dégradant la note d’un État : on doit réglementer leur activité en exigeant que cette note résulte d’un calcul économique transparent : ce calcul ne doit pas incorporer la possibilité d’un éclatement de la zone euro ; il faut créer des agences de notation publiques.

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Il faut briser la domination des marchés financiers

A moyen terme, il faut remettre en cause la domination et l’irresponsabilité du système financier. L’économie mondiale ne peut être gouvernée par les jeux et l’humeur des marchés financiers. La principale question qui se pose pour les stratégies de sortie de crise n’est pas celle des dettes publiques, mais celle de la finance spéculative. Les mesures prises par les sommets du G20 en 2009-2010 ne sont pas allées assez loin. Non seulement la finance internationale doit être réglementée, mais son poids doit être fortement réduit pour éviter que l’économie mondiale soit paralysée ou empêchée de fonctionner par les marchés financiers. il faut faire reculer la globalisation financière, source d’instabilité économique et de prélèvement excessif de la finance. Le poids des marchés financiers doit être réduit au profit d’un secteur bancaire contrôlé et consacré au financement des activités productives. Ceci suppose, en particulier, de développer des circuits financiers publics pour utiliser l’épargne longue des ménages pour financer et orienter les investissements des entreprises dans les secteurs innovants et dans l’économie verte, afin de soutenir l’activité sans faire gonfler les dettes publiques

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Le scénario de la croissance et de la solidarité Mesure n°4 : Cloisonner strictement les marchés financiers et les activités des acteurs

financiers pour éviter la propagation des bulles et des krachs. Interdire aux banques de spéculer pour leur compte propre sur les marchés financiers ; les recentrer sur la distribution du crédit. Séparer le système bancaire des marchés financiers. Interdire aux banques de faire crédit aux fonds spéculatifs et de risquer leurs fonds propres sur les marchés spéculatifs. Séparer les banques de dépôts des banques d’affaires.

Mesure n°5 : Réduire la spéculation déstabilisatrice par des taxes sur les transactions financières.

Mesure n°6 : Limiter les transactions financières à celles répondant aux besoins de l'économie réelle (ex. : CDS uniquement pour les détenteurs des titres assurés, etc.). Vérifier que les innovations financières correspondent bien à un besoin de l’économie.

Mesure n°7  : Réduire fortement la rémunération des traders. pour qu’il corresponde à l’utilité sociale de leur activité. Créer un salaire maximal ou une taxation confiscatoire par l’impôt sur le revenu des rémunérations dépassant un certain seuil.

Mesure n°8 : Recentrer les banques sur leur métier. Leur interdire de spéculer ou de prêter à des spéculateurs. Mettre sur pied un système bancaire et financier public, qui pourra collecter l’épargne des Européens, et l’utiliser pour financer les investissements publics et les investissements privés s’engageant dans la transition écologique à des taux satisfaisants..

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Pour une contre-contre réforme fiscale

Il faut revenir sur la contre-réforme fiscale libérale. Mesure n°9 : Redonner un caractère fortement redistributif à la fiscalité directe sur

les revenus (suppression des niches fiscales, augmentation du taux maximum de l’impôt sur le revenu…) ; créer un taux d’imposition confiscatoire sur les revenus exorbitants.

Mesure n°10 : Augmenter la taxation des revenus financiers, des plus-values, des hauts revenus dont le gonflement est une des causes de la crise. A l’échelle européenne, ceci nécessite une stratégie d’harmonisation fiscale, fixant des taux d’imposition minimale pour les entreprises, les revenus élevés, les patrimoines, garantissant à chaque pays la possibilité de taxer ses entreprises et ses résidents.

Mesure n°11 : Mettre en place en Europe un prélèvement exceptionnel sur les grosses fortunes.

Mesure n°12: Il faut s’attaquer frontalement aux paradis, « trous noirs » de la fiscalité et de la réglementation : il faudrait en établir une liste rigoureuse ; les pays de l’OCDE devraient interdire à leurs banques, à leurs institutions financières et à leurs entreprises d’y localiser leurs opérations et d’y avoir des filiales. Il faut renégocier les conventions fiscales pour les limiter aux pays qui ont des taux minimaux d’imposition.

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Mesure n°13 : Donner explicitement à l’Europe l’objectif de défendre et de développer l’Europe sociale.

Mesure n°14 : Définir des objectifs sociaux minimaux : salaire minimum et revenu minimum (en % du revenu médian de chaque pays), taux de pauvreté global et taux de pauvreté des enfants, taux de remplacement chômage et pension, universalité et niveau minimal de l’assurance-maladie.

Mesure n°15 : Défendre le droit du travail (conditions de travail, droit du licenciement), étendre les négociations collectives ; assurer la présence des salariés dans les conseils d’administrations des entreprises.

Défendre et développer l’Europe sociale

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Mesure n°16 : La transition écologique doit permettre à l’Europe de sortir de la crise. Les politiques européennes doivent soutenir de nouveaux modes de consommation et de production. L’Europe doit réduire son empreinte écologique et sa consommation d’énergie et des ressources naturelles Un vaste programme d’investissement doit favoriser la soutenabilité économique, doit fournir des emplois de qualité, doit développer les possibilités d’actions, dans de nouveaux domaines innovants comme au niveau local, en particulier, en ce qui concerne les biens publics.

Mesure n°17 : Lancer un vaste plan européen, financé par souscription auprès du public à taux d'intérêt modéré mais garanti, pour engager la reconversion écologique de l'économie européenne et pour favoriser la convergence des pays du Sud et de l’Est.

Mesure 18 : construire un véritable budget européen, notamment par une taxe sur les transactions financières et une fiscalité écologique, afin d’organiser les transferts de ressources nécessaires à la convergence des économies réelles.

Mesure 19 : mettre en œuvre une stratégie pour une croissance sociale et écologique comprenant quatre grands volets une revalorisation de la Politique agricole commune (PAC), une forte régulation de la finance, une politique industrielle organisant l’indispensable transition écologique, l’établissement d’une Europe sociale fondée sur un socle solide et partagé.

Impulser la transition écologique

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Le scénario de la croissance et de la solidarité Mesure n° 20 : Elaborer de manière démocratique un véritable Traité pour la

coordination des politiques économiques des pays de l’UE. Celui-ci comporterait des objectifs en matière de convergence réelle des économies, d’emploi et de transition écologique. Il mettrait en place une stratégie économique utilisant la politique monétaire, les politiques budgétaires, fiscales, sociales et salariales, ainsi que la politique de change de la zone euro, pour rapprocher les pays du plein emploi.

« Ces propositions ne sont pas le dernier mot. Elles doivent et devront être complétées. En l’état, elles nous paraissent cependant suffisamment claires et cohérentes pour nourrir l’indispensable débat citoyen, désormais ouvert sur l’avenir de l’Europe et de la zone Euro. Nous, Économistes atterrés, ne pouvons que constater l’aveuglement désespérant et répété des élites européennes, enfermées dans l’autisme néolibéral qui ne conçoit la politique économique que comme une mutilation toujours répétée des compromis sociaux et des choix démocratiques. Notre espoir est dans le sursaut collectif des peuples européens. L’euro, malgré le caractère bancal et insoutenable à terme de son architecture, donne aujourd’hui un intérêt à agir en commun aux peuples européens ; un intérêt commun à se réapproprier les institutions qui tiennent en main leur destin. L’effondrement – fort possible – de l’euro dans les années à venir risque de déboucher sur un chaos économique et politique aux conséquences incalculables. C’est dans une démarche commune de refondation de l’euro sur des bases de solidarité et de démocratie qu’il sera possible d’éviter le pire en Europe. Cette démarche devra reposer sur les mobilisations sociales et citoyennes européennes, tant les dirigeants qui tiennent aujourd’hui les leviers des instances européennes apparaissent rivés à leurs dogmes, à mille lieues des exigences du moment ».

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Le scénario de la croissance et de la solidarité La zone euro a besoin de retrouver les 8 points de PIB perdus du fait de la crise. Le

déficit public de la zone serait soutenable si l’activité perdue était retrouvée. Renoncer à cet objectif signifie accepter le maintien du chômage de masse en Europe. Les instances européennes devraient présenter un scénario cohérent de sortie de crise, basé sur la reprise de la demande, de la consommation comme des dépenses publiques, et sur l’impulsion des investissements porteurs d’avenir, au lieu de se polariser sur les soldes publics.

Globalement, la demande n’est pas excessive en Europe. Il faut donc résorber les déséquilibres de façon coordonnée : les pays excédentaires doivent mener des politiques expansionnistes – hausse des salaires, des dépenses sociales... – pour compenser les politiques restrictives des pays du Sud, qui doivent être allégées. Les pays qui ont des marges de manœuvre en matière budgétaire doivent continuer à soutenir l’activité.

Mesure n°13 : Mettre fin aux politiques d’austérité. Les conditions drastiques imposées aux pays recevant des fonds d’urgence européens doivent être radicalement révisées, afin que les pays membres puissent maintenir leurs dépenses publiques et sociales.

Mesure n°15 :Assurer une véritable coordination des politiques macroéconomiques et une réduction concertée des déséquilibres commerciaux entre pays européens.

Mesure n°14 : Les pays excédentaires doivent financer les pays déficitaires par des Investissements directs ou des prêts à long terme.

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Le scénario de la croissance et de la solidarité La survie de la zone euro suppose que le projet européen redevienne populaire, donc

porteur de croissance, de progrès sociaux et de solidarité. Ce n’est qu’à cette condition que des progrès institutionnels pourraient être réalisés.